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GIFT OF
'rof. Charles A, Kofold
HISTOIRE ET DESCRIPTION
SUITE ET Fm DE
LA mm 8T PRomis rum en m,
TYPOGRAPHIE DE FIRMIN DIDOT FRtlRES,
BUE JACOB, n* 56.
RUSSIE,
PAR M. CHOPPIIS.
TOME DEUZI£ME
OOimMMT LA n»
DCS ImA, aVSSIE D'SVaOFS
T OOMPRU
LA CRIMEE,
PAR M. G£SAR FAMIN;
>T
CIRCASSIE ET GEORGIE,
PAR M. C£SAR FAMIM.
kntm,
PAR U. BORS, ORIEIITALISTE.
«. '»
*,
PARIS,
FIRMIN DIDOT FRl&RES, EDITEUR8,
IMPRMEOIIS-LIBBAIRES DE L*mSTITUT DB FRANCE ,
■ *t iicoB. a" 56.
M DCCC XLII.
• ••-•-••
♦ • • •/ • • •
RUSSIE.
St5
PAUL !•».
(t796-180t .) Catherine n'arait rien
n^ig^ pour rendre Paul indigne du
ti%e ; oe prince, croyant d^armersa
m^, avait paru se r^igner au rdle
qo'elleUii imposait, et ii semblait vou-
knr justifier, par son genre de vie, son
exclusion totale des anaires. Gependant
ie temps de eette esp^ d'exil n*ayait
pas ^te perdu pour fui : dou6 d*uii es-
prit juste , et capable des resolutions tes
p\tts ^en^reuses , il ayait d*abord affects
roriginatit^ et la brasquerie , comme
pour mettre ces quality sous la sauve-
gnrde de quelques ridicules. Yieilli dans
cette contrainte, il avait tini par se les
approprier, et ils accompagnaient si
naturellement son physique, que Ton
ne doutait point qu'ils ne lui fussent
naturels. Le jeu sineulier des circons-
tanoes avait refoule dans son coeur
les plus doux sentiments de la nature :
an doate qui I'liumiliait planait sur sa
naissaoce; etait-il le tils de Pierre III
oa de Soltikof? II sMndignait contre
oette demiere supposition, et il est
Erobable que ce fuc dans I'intention de
I d^troire qu'il affectait les mani^res
^tranges du feu tsar. Celle quMl poa-
yait nommer sa ih^re le repoussait', et
s'emparait^ d^ leur naissance, des en-
&ntsqae lui donnait la ^nd&duchesse.
Les faroris de Catherine se plais^ient
^ Tabreuver d'hamiliations; dt peine
lui laissait-on des moyens suffisants
pour soutenir une repr^ntation de-
tente. Le peuple qui 1 aimait applaudit
a son ei^yation mattendue; la cour
etudia avec anxi^t^ les premiers actes
de son regne. Ils surpasserent I'attente
g^drale; et tandis que le tr6ne cor-
rompt d*ordinaire les princes, on crut
un instant que le pouvoir avait op^r^
dans le caract^re du nouveau tsar une
revolution favorable. Les mesures qui
ouvrirent son r^ne furent empreintes
de moderation; on remarqua toutefois
qu*elles formaient un contraste calculi
avec les entreprises audacieuses du
gouvemement precedent. Les nobles,
preaque tous complices des rigueurs
de la mere, n'avaient pas eu le temps
de dormer le ressentiinent du fils;
35* Livraison, (Kusste.) t. \u
et , conune etourdis de ce revers subit,
ils n'osaient encore saluer ce nouveau
reene, ni se flatter que Tempereur
oublierait les injures du grand-due.
Paul interrompit TexeoDtion d*une
levee extraordinaire , rompit le traitf
de subsides, oonchi aveerAngleterre,
snspendit les pr^paratifs de la guerre
contre la France, et rappela des fron-
ti^res de Perse , rarm^e que oonunan*
dait Yaierien Zoubof.
La penurie du tr^sor avait foro^ Ca-
therine ^ recourir h des mesures finan^
cieres dont elle comptait r6parer l*effet
d^sastreux par les avantages de ses
armes. Elle avait d^cr^te que les roon-
naies seraient revues pour une valeur
double de celle qu'elles repr^sentaieiit
reelfement, et les assignats s'6taient
multiplies k un point que, dans leur
^change contre du numeraire , on refu-
sait de les recevoir au pair. Paul en fit
brOler pour six millions de roubles , fa
la grande satisfaction du peuple ; en-
fin , pour arr^ter le mal h sa source ,
il prescrivit de grandes Economies
dans les d^penses dc la cour.
A rinstant ou les anctens favoris de
Catherine s'applaudissaient de la cl6-
mence ou de roubli du monarque, un
acte de solennelle reparation vmt leur
apprendre que le passe vivait encore
dans la m^moire de leur maftre. Avant
de rendre ^ Catherine les demiers de^
voirs , il voulut confondre dans une
m^me cer^monie et Texpiation d*un
crime et ce. au'il devait h la m^moire
de sa mere. Il se rendit au monastdre
de Saint- Alexandre-Nevski , oik repo-
saient les restes de Pierre Iir,l^, apr^
avoir consid^re dans un sombre recueil-
lemept ce tombeau dont la simplicity
m^me eveillaittant de douloureux sou-
vepirs , il arrosa le cercueil de larmes
pieuses, et le fit exposer sur une estrade
au milieu de I'eglise ; ensuite on trans-
porta le corps avec celui de Timp^ra-
trice dans Teglise de la forteresse de
Saint-Petersbourg , ^ c6te des sepul-
tures des tsars. Sur la pierre de leur
commun sepulcre , on grava cette ins-
cription : Divis4s pendant leur vie,
riunis apris leur mort. Pour donner
^ cette ceremonie imposante un carao-
1
!v^i.Gi831
• •■
"•• • •
• • •
• • •• • •
886
UUNIVERS.
titrt vfoimenl expiatoire, Paul vou-
kit que fiarifltinsfci «t Alexis Oriof
sttivieaeot le eort^ge.
Les mtni^es de rempereur, ju*-
4u*aIors bnuquee et imp^ueuses , pri-
fen^ tout h coup un carect^ plus
affeetueux; oo edt4it4|ue, t^naoio et
viettoiedei diBseoskms de sa families,
•1 6*6lait inpoB^t ^ T^ard de sou
qNMMe et deaee cofiuits , uneconduite A
ia fois digue et emprewee. Les minisr
.irs8,.k8 aucieDs fooetionuaires furent
oonsenr^, et loin de s^vir oontre les
Davoris de aa m^, il cjouta de nou«-
velles grAoes a la g^n^rosi^ du par*
ilon.
Soit qu'il edt jreoonnu dans J*inip^
ratrice quelque penchant a Taiiibition^
soit phitot pour ^carter les trouble^
dont Je passage d*un rdgne a Tautre
avait 4onue taut d^exeuiples, il d^*
cr^ta que l*ordre de la succession au
trdoe se r^lerait desormais contrai*
rement a Tancien usage , de telle sorte
que les femmes ne seraient habiles k
r4;ner qu*a d^fiaut d'h^ritiers m^es ,
et que la couronne serait transmissible
de jMre en fils et d^atn^ en a2n^.
u aflecta de traiter avec distinction
Poniatovski ; il se plut h eatourer de
pompe cette uiajeste d^ue; jnais en
mdnie temps il mtoit h ces Jayeurs una
intention malicieuse., en lui donnant
nour cbambellan ce mtoe Stackel-
ler^ dont la mission h Varaovie lui
avait €t^ si Xuneste. Le trait le plus
caract^istique de cette premiere pe-
riode de son r^ne, c*est Ja demar-
che qu'il fit aupres de Kosciuszko:
croyant ne pouvoir trop honorcx le
courage malbeureux , iJ alia porter lui-
m^me au g^ni^ral la nouvelle qu'il
^tait libre.
Cepeodant les courtisans, -qui trou-
vent plus commode d*exploiter la fai-
blesse et les vices des princes que de
meriter leurs faveurs par des services ,
dtudiaient avec un som perfide le cdt^
attaquable de I'empereur ; ils ne tar-
d^rent pas k reconnaltre que sa sensi-
bility extreme lejetait, k lamoindre
contrariety, dans des emportements
fougueux. JCe caract^e entier, long-
taajps comprim^, se- d^bordait avec
violence et plenitude dans la carri^re
ouverte dn despotisme , et plus il avait
^t^ froiss6, plus il ^tait pvesse de faire
acte de volont^ absolue. II n*etait que
trop facile de tirer jNirti de ces dis-
positions dont les cons^uences oat
jdes effets si terribles dans ua prinoe
qui |>eut tout II avait confix le com-
mandement d'un raiment des ^ardM
au taardvitch Alexandre; on lui insi-
uua qu'il ^tait dai^gereux de mettre des
•jnoyens de revolte a la disposition de
rberitier pr^mptif , que le vceu biea
connu de son aieule appelait directe-
flient au tr6ne; on mi inspira des
soup^ons sur le devouement de son
ipouse, et Ton profitait des actes ou
Tentralnaient ces avis periides, pour
alarmer Timp^atrice et le grand-due
sur leur propre sdret^. Paul ne pou-
vait supporter Tidee ^ue Ton dout^t
de sa capacite; habitue, des son en-
fance, a improuver la conduite de sa
mere, et les actes politiques ex^tes
par ses favoris , il prit k tdche de tout
refaire , et ses r^forines s'appligu^rent
souvent a des cboses qui ne gagnaient
rien ill £tre remani^es. Cest ainsi qu'il
changea le nom et les limites de plu-
sieurs ^ouvernements ; il ep r^duisit
le nomore d*un cinqui^e, c'est-a-
dire k quarante et un. Ne respectant
pas m^me de3 appellations queia gloire
de Catherine avait droit ae revendi-
quer, il r^unit sous le nom de Mou;-
vellerRussie , les ^ouvernements de
Tauride et d'Ekatennoslaf. Longtenips
r^duit au rdle d*observateur mdcou-
tent, il n'ignorait aucun des abus qui
r6gnaient dans J*administration ; H
avait reconnu qu*il$ tenaient en grande
partie k rjinmoralit^ des hauts fonc-
tionnaires, qui, parodiant le despo-
tisme, s'engraissaieotdela substance de
leurs administr^s; ces vexations, qu*au-
torisait Texemple des chefs, se repro-
duisaient dans.ies emplois subalternes,
pour retomberdefinitivement sur ceyx
qui n'avaient personne au-dessous
d^eux et qui ne s*appartenaient pas k
eux-m^mes. II balan^ Tautorite des
gouvemeurs militaires, en leuradjoi-
gnant un fonctionnaire civil , et il i>ur-
gea les administrations d*une ioule
RUSSIE.
S87
dcHipky^aussi ovides qu'imitiles.Cas
refonnes, quoiqiiesage^, Mulev^rent de
iMMnbreux Bieoonteateinenls , qu'oa ne
manqoait pas de^r6senleraPaul oom*
medes manifestationa MHmaBS.h'ar*
gueil de Tautocrate s^an inrita, M landia
ou'il rayait des listes adflainvtratives
des inilliers de geotiUhQannes pauvrw,
ii refusait au voeii g^o^l la destitu*
tioD du directeur de la police Arakof ,
qui peat-^re avait eu 1 adresse d'eiei-
ter ses craintes ombrageuaes. Paul
s'^tait livi^ d'abord saoa t^rre au
plaisir de former iui^m^me le graad-
due a la science du gouvememeat , et
Farait nomoi^ gouvemeur de Peters-
bourg; a mesure qu^il voyait TaCfection
deson peupleluiechaRper, il devint plus
m^ant; il entoura AiesxandFe d^uoe
etroite surveillance, -et pendant long-
teniips il reduisit aa tdche a eeHe d*un
copiste. Catberine avail d^tr6n6 Pierre
III : c'eaetait assez pour gu'il redoutdt
un sort seniblable; et, s^aadonnant
a la bizarrerie deson «aractere, c^est
par les mesores qui devaient le perdre
qu'il croyait pouvotr conjurer le dan-
ger. Plus d'une fois il traita Timp^*
ratrice avec une rigueur aue rien ne
justifiait, et traduisant muitaireBient
ses grie& de famiUe, il lui imposa
les arrets forc6a.
Paul voulut soumettre a ses caprices
jusqu'a la conOance publique, on decr^
tant que les roubles assignats recouvre-
raient leur valeur nonoioale; ^tonn^de
la r^istance passive des commer^ants
qui refiisaient de recevoir au cours
officiel ces signes repr^ntatifs , il
ordonna que Timp^t d^ douanes serait
pay^ en especes etrangeres, et cela en
les taxantau-dessous du cours. II serait
superflu d*jigouter qu*il fallut bient6t
abaodonner des mesures plus funestes
que ne T^tait le mal.
II avait affects T^nomie pour faire
la censure des prodlgalit^s de Cathe-
rine ; il 8*en tourta ^ur les surpasser.
Les palais quit habitait if avaient pas
one issue qui ne fOi connuedes courti-
sans de sa mere ; il voulut se construire
une demenre moins accessible, etc*est
BUT le plan de la r^idenoe favorite de
Fr6d^cqu*ilfit'^leverle palais deSaint-
MidKl. On y travaillatiiiitet jour; on
edt dit qu'jl dtait pvess^ d'achever son
tombeau.
Rien ne ranr^ail, ni les difficulty
ni ia d^ipense, lorsqu*!! s'agissait de
8«lisia»e une faataine : « il eut oelie^
dit fabU George! , de planter une
double rang^ d'arbves dans une eten-
due d'une demi-lieue environ, a la
proMfniledesanMraut6s. La terve ^tait
eouvene de glace, et gd^e h une .pro-
fondeur de plusieurs j)ieds.... Paul
dit , et oomme h sa voix les t^kes rases
se sont aCfiiblees de queues postiches,
la tecne nue et comme paralysito par
les atteintes de 4*atinospbdre, va se
rev^ir d'une vegtotion adulte. Des
arbres de quinse a vingt-cinq pieds de
bauteur seroot arracbes au moyen de
prtoutions et de d^penses infiqies,
pour toe replants pkis laborieuse-
ooent encore avec la terre du sol d*oii
on les aura tires. Pour creuser les
fosses destinies k les reeevoir, on em-
ploie la hache ; puis , pour ouvrir au
ter une voie plus fiacile, on allumera
de grands feiu ^[ui feront dueler la
terre.... II fallait toute rautorit^ im-
{^driale pour faire executer de pareils
ravaux ; dix miile ouvriers v etaient
journellement emplov^. L*heritier du
trdne ^tait charge d^en hUter Texecu-
tion. Les arbres ont ^t^ dtousin^s et
replantds ; les promenades ont ^ sa-
biees et environn^ de gazons pris
sous la neige; les barricades et les
bancs ont ete poses et peints dans Tes-
pace de trente jours, terme assign^
par Pempereur. »
Nous regrettons de consigner dans
une ceuvre ^rave des details peu di-
fnes de Thistoire; mais le r&ne de
aul n'est gudtre qu*une suite d'actes
aussi bizanres, quoique moins inof-
fensifs; on pent du moins en tirer
une le^n : c est que le gouvernement
qui remet k la disposition d*une seule
vplont6 les destinees de tout un peu-
pie, adopte on subit les chances du
bien et du mal , dans la m6me mesure
que le coniporte rjnfiimit^ de la na-
ture hifmaine.
Cette coivonne, qu*avait port^ Ca-
therine, Paul la trouva trap petite et
1.
88S
L'UNIVERS.
trop Ifig^re poar iui ; il affecta d*ou-
blier tout ce qu*dle jrrnt rattaeh^de
glorieux. La magnifioenoe de oelle
qa*il commanda pour la solennit^ de
son aacre, provoqua des rapproche*
ments qui n'etaient pas ii son avantage,
et les libtolit^ qu'il r^pandit h oette
occasion rappelaient ces paroles de sa
mere : Je suis venue pauTre en Russia,
maisie m*acquitte envers Tempire : la
Grimee et la Pologne sont la dot que
je Iui laisse. Le oouronnement se fit
avec pompe dans Tancienne capitale.
On porte ft i^res de cent mille le nom*
bre de paysans qu'il distribua h quel-
ques seigneurs; il r^pandit avec la
ro^me profosion Tor et les f^veurs de
toot genre, r^compensant comma il
s^vissait, sans discernement ni me-
Mire. Cest h cette ^)oque qu'une pas-
sion , dont nous parlerons plus tard ,
etqui eut des suites funestes pour
lui*m6me, d^veloppa dans le ooeur de
Paul le germe des plus ^tranges in-
cons^enoes.
Cependant ces depenses excessives
Tobligerent h recounr h des mesures
oppressiTCs; il doubia la capitation ,
prelevant ainsi sur la masse m^n-
tente, de quo! faire face h ses largesses
capricieuses. D6jik, pour arr-^ter les
murmores, il avait restreint aux seuls
cas qui n'entrafnaient pas la d^ada-
tion , le droit qu 'avait la noblesse de ne
pouvoir 6tre diAti^ oorporellement.
Dans le but louable de r6primer les
nombreux abus commis en son nom ,
il avait promis d*8ccueillir toutes les
suppliques de ses sujets ; ceux qui Fen-
touraient craignirent les effets d'une
telle correspondance entre les suiets
et le monai^ue ; on fabriqua des let-
tres inconvenantes , et sous pr^texte de
simpliSer cette tlicbe laborieuse, les
reponses. k ces petitions furent impri-
mees dans les gazettes. C'etait d^i-
sner le plslienant a la veneeance de
Paccus^ ; bieotdt les r6clamations
cessment. Nous ' ne rapporterons pas
toutes les anecdotes qu^on a recueiliies
sur ce rdgne, qu'oncroirait ^re celui
d*un despote en dtoence, si tant de
t^molgnages respectables n'attestaient
qu'il inftait h ces actes bizarres et
mkne cruels , une g^n^rosit^ si ^lev^ ,
qu*on reste en suspens entre le blilme
et r^loge. Cependant ce serait man-
ner h notre t^e que de ne pas jus-
tifies parquelqoes exemples, les juge-
roents contradictoires qu'on a port68
sur Iui. Quiconqiie se trouvait sur son
passage devait s*arrlter h IMnstant
m£me, mettre pied k terre, s'il ^tait
en voiture ou a cbeval, ets^exposer,
queloue temps qu'il fit , aux intempd-
ries de la saison. Une dame noble , qui
n'avait pas aper^u la livr6e imixgriaie,
fut arracfa^ de sa voiture et mcarc^
r^e-; les domestiques oui I'accompa-
gnaient furent«faits soldats ; la femme
a*un aubergiste, coupable du m£me
ddit, fut en outre fouett^ pendant
trois jours , attendu qu'elle n'etait pas
noble. Dans ses promenades , Tempe-
reur ^it tr^-attentif It remarquer
les contrevenants h ses oukases sur
l*etiquette; il les d^signait lui-m6me
^ ses gardes, et les faisait arr^ter en
sa presence.... On c616brait, selon le
rit romatn , un service en I'honneurdu
due de Wurtemberg , son beau-p^re.
Paul , croyant ne pouvoir entrer sans
p^h^ dans une ^lise catholique , se
tenait , pendant Toffice , en dehors de
la porte principale, k la t^te de ses
grenadiers. Tout h coup son cbeval ,
excite par le froid extreme , s'emporte,
passe et repasse h travers la foule,
oui se decouvre et s*tncline d^ que
ranimal s*approcbe d'elle. Un ^oupe
qui , oar son eloignement, croyait pou-
voir echapper sans danger k la genu-
flexion de rigueur, attira Tattention
de I'empereur. Paul s'irrite de ce qu'il
appelle une manifestation s6ditieuse.
Tous les d^Iinquants sont conduits h
la maison d*arr£t. lii , on fouette pen-
dant trois jours les roturiers , on d^-
{;rade les nobles , et Ton fait soldaU
es ofQciers. La nitee du vice-presi-
dent de Tacad^mie fiit sur le point
d'encourir un traitement non moins
humiliant ; grdce au credit de son on-
de , elte esquiva la fustigation ; toute-
fois elle et sa tante subirent une deten-
tion de huit jours ^ dans une maison
publique ; la premiere pour avoir man-
que 5 Tempereur, celle-ci pour avoir
Q^,:y^,....^ / f^^4^^.^ o >/.,}..„
RUSSIE.
309
mal iieve sa niece. Quelif iiefois les
cfa^timents qall fiaiisait infliger^taieni
tds qi/oQ ne savait s'il foUait les attri-.
boer k un acc^ de fotie ou a un m^-
pris pour rhumanit^, d^aigneux de
toute pi^cautioo. II fit fustiger en
preaenoe du peujile un cheval qui avail
DTondi6 sons lui , et personne ne se
meprit sur le sens de cette correction.
L*omi8sion dea moindres formality
cfaoquait son orgoell ; il faillit rompre
arec le roi de SuMe , parce que , dans
un message de ce prince « on n'avait
pas observe la fomuile officielle de ses
litres. Voild, s'^ria>^iI en ouvrant
cette lettre, un roi qui ne sait pas
teire ; et , sur-le-champ « il r^igea un
oukase qui rdglait minutieusement
cette puerile matiere. Le baisennain «
haute fareur imp^riale , avait ses dan-
gers : il failait y apporter une atten-
tion respectueuse, comme s'il se fdt
agi d*un acte reiigieux. C'est surtout
dans k militaire que Fempereur se
eomplaisait a etaler tout le luxe de ses
oonnaissances de details. L'uniforme
qu'aTait introduit Potemkin se trou-
vait repondre tout k la foil aux exi-
fences do servioe et h celles du climat.
^aul y substitua Tancien uniforme al-
lemand. Force fut done aux soldats
de prendre, en mdme temps que I'ba-
bit Prussian , le cbapeau h comes ; et,
comme ils portaient les cheveux courts ,
de s*adapter une queue postiche. Sou-
vorof , qui avait tant de fois vaincu
arec Funiforme de Potemkin , se per-
mit sur les queues et la poudre des
plaisanteries qui coururent Farm^e.
Les soldats n^ob^irent qu'avec repu-
gnance; quant aux offiders, tandis
que les uns aimaient mteux quitter le
aenrice que d'endosser le nouvel babit,
les autres trouverent dans leur sou-
mission empress^ un mode facile d'a-
vanoement.
Les manoeuvres ^taient la ^ande
a£Eaire de Paul; tous les matins, il
passait'quatre henres h faire exercer,
OH plutdt a tourmenter sa garde, bra-
vant, sans pdisse et sans qu'il pardt
en souffrir, des froids de quinze h
vingt degr6s. Cdtait sur la place du
palais, et entour^ de troupes, qu'il
donnait 4cs audiences ; les soldats, qui
s'amusaient h voir lea seif^eurs ex-
4K>s^ a totttes les intemperies d*un
biver rigoureux, appelaieot ces ao-
jdiences en plein air la parade d« ooor-
tisans.
Nous ne nous ^endrons pas sur la
proscription burlesoue des chapeaux
ronds, ni sur FouKase imperial qui
firescrivait d'atteler les cbevaux k Fair
emande; mais nous ferons remarquer
le fil cache qui faisait iouer tous ces
ressorts. Les favoris de Paul, erai-
{^nant a touto'beure d'etre eux-mdmes
es victimesde ses emportements. Fen-
tretenaient dans une irritation conti*
nuelle pour achever de le rendre
odieux et ridicule. Tantdt c*etaient le
peuple et Farmee gui lui rqprochaient
son online etrangere ; tantot les bour-
geois etaient convenus de ne pas le
saluer en public; enfin, on Feffrayait
sans cesse d'une conspiration perma-
nente , dont le but etait de le d^trdner^
pour mettre h sa place Alexandre, sous
la tutelle de Fimperatrice. De la tant
de rigueurs sans motifs , tant de me-
sures empreintes d'une sombre ni^-
fiance et (run arbitraire grotesque , qui
devaient finir par changer en dangers
r^els les fantomes d'une imagination
effray^e.
Cdte rebellion qu'on lui montrait
partout, il Fattribuait k la contagion
des id^es fran9aises. L'introductionde
tout journal et de tout 6crit politique
fran^ais fut sev^rement interdite; oeux
qui en recevaient par quelque voie ex-
traordinaire etaient tenus de les por-
ter sur-le-diamp, et sans en avoir pris
lecture , a un comite institue k cet
effet; comme la haine des chosea
n*etait que cdle des personnes, les
Francis venant de Fetranaer furent
repousses des frontieres : oientdt le
cercle de ces precautions s'etendit aux
etrangers des autres nations; les uni-
venites d'AUemagne encoururent la
suspicion de Paul, qui defendit aux
Russes, et specialement aux Gourlan*
dais et aux Livoniens , sous peine de
voir leurs biens confisques , d'envoyer
desormais leurs enfants dans ces
ecoles oorruptrices. Les etablissementa
890
L'UTtlVERS.
d'iiBtraetidii puMiime, fond^ pdf Ca^
tlierines ftireht moarfi^s dans oe sens,
d le d«flpoti6ine ruflseraeula d*un pas
dang la Imrbarie. Une triple oeAsaye
admimatrative, aodifeiasfique el litt&-
raire fot ^tablie a P^tersbourg, h
Moaeoa, k Riga, h Odessa, «C an bu-
reau ceotml de la douane.
GouMne pour protesCer hautement
oontre le nivelletDent des oouditions,
suite logkpie de T^galit^ des droits
civils proclam^epar la rdpoblique Iran-
^ise V II prit h tache de reorganiser le
privil^e ; il orea une noblesse b^al-
dique oomme en Aliemagne , et ecbe*
kmna sa noblesse. Pom* raainfenir k
une plus grande bauteur la noblesse
d^extvaetion^, 11 rMuisit ranobHsse^*
ment par les rbairges, pour elever une
barrim de pr^ges entre le m^rite et
le privilMe.
ti sulGsait d'dtre signal^ k l^empe^
reur eomme entacb^ de lib^ralisroe ,
ou m^e d'avoir impn)uv^ cpiel^pieB-
ulis de ses acles, pour encourir les
peines les plos sdv^res. Les dewt Mres
llasson , attach^ au service russe de-'
puis douze ann^,fnreiitd^port^;el
run. d'eux, auteor des M^inoires se-
crets, s'eslvengi de ceebAtiment arbi-'
traire par de& r^'^Iations passionnto^
S'il avait lu quelques - unes de ses
pages dcrant des aoaiteurs russes , on
oooviendra que la rigueur die Paul ne
fnt pas. excessive; si les M4moires se-
orets ont ^t^ redig^ a6 iruto, on a
le droit de les soup^onner d^erag^a-
tion;
Les agents Grangers n'^taient patf
pins qae les partiouliers a Tabri de
rhuinear fantasque du monarque. li
(It mettre h la mnliere un c^ent dw
roi de Sardajgne, et le ininistite de
r^eeteur de. Baviere , Maximilien de
Deux-Ponts; le premier, parce qu'il
GonsetUait h son maltre de rester en>
paix avep la France; Taotre, paroe^
que set COOT n'avait pas encore re-
oonnu a Paul le titre^de grand maltre
Je Malte. Maximiiien dut se prater h
oette fantaisie; il retablit dans ses-
Etate les commanderies de la langue
anglo^bavaroise ; et , on retour de cettiS
nourtmie, l^i accorda au Ills afn^
de ce prfnee la main d'ane grande-
duchesse. Paul ^tendlt le niveau de
ses pu^riies r^formes jusque sur le Ian-
gage; Defense ^t fatte aur marehands
a*ecrire le mot magoHn sur leurs bou*
tUques, attends que oe terme, affecte
aox approvisfonnements de la con-
fonne, ne devait pas ^tre prostitn^ h
des ^tablissements mercantlles. A itl
fommie a»ec ItbefU fmpiriaiey les
eenseurs snbstlittadrent celle^i : awe
permUsk)^ impMaie: le mot Hberti
ne pu( tpouvet* grdce, malgF6 le <mali-
^catiif. VAvi3 a» peupto du m^ecin
Tissot tut d^flendu sur le motif que k
petq)le n'avaU pas: be9oin StOim.
La oouoe des vdtemenis ne fat pas
\ I'abri de oe9 prohibitions' omlnn*
Reuses; on prosorfvlt la vests, lejpan-
talon, le gtlet crois^, les bottmes,
etc., oomme des signes de jacobl-
nisme; les anberffistes dvrent, sous
peine iPamende, denoneer les centre-
venant& Un tapissier fran^is , occup6
k disposer des tentures de deuil dans
r^ise catholique , oh Ton allait c^le-
brer le service funebre de I'ex-roi de
Pologne, Alt fouettd au milieu mdme
du tempie, paroe que son costume
s'tortMt des erdonnanoes.
Le« ^migr^, qui poussaient Tem-
pereur I Mre la guerre aux Francis,
attribuaient le pr<N^ des id^ r6vo-
lutlcmnaives au relachementdes croyao-
ees religieuses : Paul prit en main les
ittt^r^s du ciel , et^ pr^tendit nx>raH-
ser les strangers qui se trouvaient dans
son empire par des oukases r^glemen-
taires. II iniposn aux catboliques Fobli-
gation de faire leurs pdques, et aux
prdtres oelle de n'aeeorder Tabsolution
3u*aux penitents en totde grdee. Pen^
ant quelque temps, la aiesse fot de
rigueur; et oomme ^ en gln^ral, les
^igr6s eux*mlraes ne prdchaient pas
d*exemp]e, Paul exigea qu'ils allassent
a F^ise, deux k deux, entre une
double baie de soldats;
A IHistsnt mtoe oA ii allait con-
traeter une aUtance avee les Turcs , il
ressuscitait Tordre de Malte , et nom-
mait grand'-croix Anna Lapoukhin , la
oomtesse Litta, et son valet de chaiii-
bre Koutaitzof , Turc de naissanee , et
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RUSSI£.
parvemr oar son adresse aux premieres
dignit^s ae f empire.
K travers tant de ricficnffes'ef d^bri^
gittaVite , on retronrait sonteiA des
sailUcs de grandenr ct de g^n^rosit^ :
to princes de la maison de Bourbon ,
anxqnds il donnait un asfle h Mittau ,
rooevaleitt de lai une pensfon de denx
cent vtnWe nnibies (enrtron sfr cent
miRe francs); et un grand nombre
d'6nigres obtinrent de sa muniflcenoe
des en^lois, des ferret, det paysans
et des secours en argent : mais, si sod
premier mooremetit etaft d'un sottve*
rain magnanime, rarement daiienaft'41
aooompagner le bienfait deoes fornnes
qnf en doublent le prix.
Paoi a^ait mmpu le traits de snb^
sides contracte entre Catherine et PA n«
gleterre , non parce qn'il ^tait phis fa^
vorablement dispose qm sa m^re ik
r^ard de la France , mais unigueraent
pour ne point parattre contmuer le
r^e precedent. L'ann^e suivante
( 1799), sa politique prit un caract^re
pins traucb^.
Poor se rendre oompte de la con-
duite de Pemperenr dans ses rapports
avec les autres puissances , il est mdis-
pensable de ne pas perdre de vue que
ce prince resta oonstamment sous nn-
flaenoe de deilx idto : la premi^,
que trente-dnq ans de pers^utions
lui aTaient inspir^e, c'^H de d^re-
lop|)er les forces de la Russie par Vor-^
Sanisatfon mifitaire, sans s'inqui^er
e ces princi|)e8 ci vilisateurs dent le ja-
oobinisme lui paraissait le dernier ter-
me; etroncon^oiteem^prisdes moyens
mis en onivrea r^poqueod il avait tanf
souffert, qui se confondait avec le res-
sentiment qu'il conserrait oontre ses
opjpi^esseurs; la seconde, c*^ait une r^
soratlon fixe de rendre on nouvel ^lal
aux cboses que la involution fran^aise
s*teit empress^ d*efibcer on d'avilir.
Malgr6 les sujets de plainte que In
donnerent plus tard ses alli^, jamais
il ne se fifH idpproch6 de lliomme qui
8*etait empai^ des destine de la
France, s*!! tt*edt pas pressenti en lut
le restaurateur futur des privities
monarduques. Le mauvais ^tat des
fioanoes Hait un obstade a ses plans;
d'un c6t^, sa nobtessil MiMe par 1^
luxe; de Pa«fre, lev d^penses qn'exi^
g^if rexpdrfHion mti% m^itaft, M
firent prater Toreme aux ofifres de
TAngleterre; avec Pov de la Grande^
Bret^e, ilpouvaitftnderunebanqoe
pour venir an seeour* des seigneurB ,
et donner a I'arai^ exp^dittonnairs
une importance qu-il jogeait d^islvt.
II entra done (ki^ la secodde coalition;
et Ton Tit , par le jeu brniri^ des int^«
rfits les moins compatibles , la Russie,
la Porte, TAntriche, la Saxe, enfin
fresque toute PEuvope, moins la
^nifise, se jetsr, k irinstigation de
FAndeterre, dans ttae^lutte oik r^er-
gie defait tridmpherdu nond)re.
LlimbaflBadear Repnin , apres avoir
6chou6 h Berlin , atait r^ussi h Vienne
eten Saxe; le plan d'invasion ^it
trac^. Sur le point d'toe attaqu6e, la
France prit roffensive; les l^i^ions ri^
nublicaines envahirent THd^tie, dont
la partie nn^ridlonale , qui ferme le Ty-
rol, leur permettait de porlier du se*
CDurs , sekm que Fexigeraient les dr*
Constances , a I'armde du Danube oa a
celle dltaKe. Quekpaes revers reduist*
rent les Francats a la dtfensire, de-
venue phis diflidle pw I'^ndue de la
Ugne d'op^rations.
L'arm^ qui avait US nswimbl^ea
Gallieie, par ordre de Catherine, en-
tra en Allemagne sous les ordres du
g^ntol Rosemberg; rorgueil germa*
nique r^pugnait k passer sous le com-
mandement d^un chef obscmr; Paui
dut se rendre aux rMamattons de sea
alK^, et au voeu g^6ral des Rnsses,
qui d^gnait SouTorof. Ce vieux ca-
pitaine sortit de sa retraite pour ailer
se mettre h la t£tedes finrces russes et
atitrichiemieai Nous avons dejii pari6
du caractire de Souvorof, et du rdle
bizarre qu'il s'toit impost pour s'em-^
parer de la oonfianee au soldat rusae.
Certes, si ces biaarreries n'eussent
point M aocompagn^es d'un m^ito
snp^rieur, elles ne lui eussent ¥810*
qn^nne deplorable c61^rit6^ mais dans
un homme de ce genie , il faut les ^tu-
dier, sinon en ellesi^n^ineS, du moins
dans la part d'influence qu'elles ont
eue sur des faits dignes de toute no*
L*UM1V£AS.
tre attantioD. Pour appuyer ropinion
line nous avous toiise au sujet de la
Kr^tendue originality de ce ^nd
omme de guem, nous poumons,
entre autres t^moignajges, citer oelui
d'un -vieil <»fficier qui fut loogtenips
son chef d*^t*niajor, et qui est rap-
ports dans le voyage du due de Ra-
guse. En efifet, ses actes les plus
bisarres sont empreints du m£me ea-
ract^, et tons paraisseot tendre k
inspirer k ses troupes un devouement
fanatique « en m£me temps au*ils leur
donnaient Texemple des plus dures
privations. « II outrait la sSverite de
la vie militaire, d^^ si dure cbez les
Russes. M^me au tort de Tbiver il se
Citaait arroser d'eau froide. Souvent
on le voyait monter a poil, en 'che-
mise, un cheval de Cosaque. Quelque-
flMs iJ sortait nu de sa tente en con-
trefaisant ie chant do coq; c'Stait,
pour TarmSe , le signal du veveil , de
fa marche ou du combat. Dans ses vi-
sites aux bdpitaqx , il Cusait donner de
ia rhubarbe et du sel aux soldats qu*il
jugeait atteints d*un mal r6el , et la bas-
tonnade^ tons les autres, oubien iimet-
tait tout lemonde k ia. porte, disant qq'il
n'Stait pas permis aux soldats de Sou-
vorof d'etre malades. On se rappel!e
que le marScbal Munich avait em-
ployS avec sucoes un rem^e bien plus
rigooreitx. Personne n*osait se plain-
dre, car le gSnSral Stait aussi dur pour
Iui*ro6me que pour les autres. Sa table
teit si frugale que les ofliciers les plus
sobres s'en Stonnaient. Il se fiaisait
donner k loi-mSme, au noro du mar6-
chal Souvorof , Foidre 'd'interrompre
ses repas ou son sommeil ; il faut qu on
lui obeisse , disait-il t disciplinant jus-
qo'^ latiature physique pour la soumet-
tre k une inflexible volontS ; aussi ja-
mais arm^B n'obSit plus aveuglement ,
comme jamais confianoe ne tut raieux
mSritSe.* Souvorof d^aignait le luxe;
en eampa^ne, sa kibitka (t) lui tenait
lieu d*habitation; quand il s'arrangeait
d'un autre logement, ses officiers
avaient soin d*en faire disparaitre les
glaces. Souvent m^me il no voulait
■ Espcre do chariot.
souffrir ni portes ni fendtres, atteodu
ou'il n'avait ni peur ni froid. Cepen-
oant il niODtraitavec complaisance les
bijoux et les diamants qu*il avait reoua
de Catherine; pourquoi notre mere
me les a-t-elle donn^, demandait-il k
Ses officiers , et il faliait rSpondre sans
bdsiter. II comprit que , pour suppor-
ter avec Constance les fatigues et les
privations de la guerre, le soldat a
besoin d'un stimulant moral ou reli-
Sieux; la gloire, ce puissant mobile
es hommes libres , est une idte que
ne pent comprendre la servitude, et
qui , une fois comprise , la dStruirait
a rinstant m£me ; c'Stait done au sen-
timent religieux que Souvorof devait
s^adresser; il s'agenouillait devant les
Sr^tres, et leur demandait la bSoS-
iction ; c*etait pour donner k sa mis-
sion un caractere de saintetS, qu'il
ne parlait des Francais que comme
d'un peuple d'impies *que Dieu avait
resoiu d*extetminer; mais quand iJ ne
s*adressait plus au fanatisme de ses
troupes, il parlait des qualites militai-
res ae ses ennemis en homme digne
de les appr^ier.
Les Francis, qui s^attendaient k
trouver dans les Russes une race gi-
gailtesque , furent surpris de n^avoir k
combattre que des hommes ordinaires ;
de leur c&U les Russes apprirent a
respecter I'humanite de ceux qu*on
leur avait depeints comme des bri-
gands; les pouvoirs politiques, pour
pousser les hommes a s^entr'^orger,
sont oblige de recourir k la deception
et au mensonge, tant ils reconnaissent
eux-m^mes la faiblesse des motifs qui
les determinent.
Souvorof s'etait reuni , prcs de V^-
rone, a Tarm^ autricliieune, qui ve-
naitde battre Scb^er. L*arm^e austro-
russe cooiposait un effectif de quatre-
vingt mille liommes. Les debris de Tar-
mee frangaise, dont le Directoire avait
conGe ie commanderaent a Moreau ,
ne purest tenir contre des forces si
im|)Osantes. La defaite de Cassano ,
malgre toute Thabilet^ du gi^neral re-
pubticain, fut une consequence ne«
cessaire du desastre de Magnan. 1^
belle rrsistaiicc des Francais a Bassa-
RU$SIE.
gMiio prouva aux Rosaes k qudlea
oondilions num^riques Ua pouvaient
dp^rer la vietoire.
Apres oet afantage, Sottvorof se
)porta rapidement sur Turin, tandis
one Moreau , r6duit h qoelques miJlien
dlKMnnies , ossayait . d'inquieter aa
raardie, sana a'toirter des poailions
af aDtaseuses qu'il oocupait.
Maodonald venait d'eotrer eD Loin-
bardie, li la t^te de trente-cinq mille
bomines ; les suoo^ qu'il avait obte*
BOS Itti inspir^rent una confiance te«
ntaiiTe ; il crat pouroir vaincre arant
d'aToir op^r^aa ionction avec Moreaa.
A la nouvelie de cette marcba victo*
rieuse, Souvorof rassemble ses troupes
arec une rapidite ^onnaote; il eut
bientot rcjoint le g^n^al autrichien
Mdas , sur les rives de la Trebbia.
PiiHis a'entrerons pas dans les details
de oeile joum^ memorable; nous
nous Gpntenterons de dire qu*on se
battit, da part et d*autre, avec une
bravoare ^ale; Tann^e austro-russe
perdii plus de monde que eelle de Mac-
doiiald ; oiais T^lan des troupes r^u-
blieaines ne put vaincre riromuaole
tenacity des ennemis. Durant toute
use joum^, le combat dura avec le
mtoie acharnement; les Busses mon-
tr^nt oette opinidtret^ invincible,
cette discipline et oe mepris de la
iBort qui les avaient d^j^ rendus si
redoutables; serrant leurs rangs k
roesure que le feu les ^aireissait,
ils repiduss^rent deux fois, au del^
du fleuve , les Francais qui ie repas-
serent deux fois. lie lendemain la
batallle recommen^ , et si la retraite
de Macdonald n'eilt appris k Souvorof
qu*il ^tait vainqueur, les succes furent
tenement balanc^ jnsqu*au dernier
moment, que le nombre seul pouvait
fieiife augurer de Tissue d^nitive de
oette lutte. C'est la que fut presuue
enti^ment d^truite la l^ion polo-
naise , command^ par le brave Dom-
brovski. La retraite des r^publicains
fut plus d^sastreuse que ne Vavait €t^
le combat. Souvorof repandit des pro-
clamations pour soulever, contre les
Francais, les Toscans et les Liguriens.
Ce cAampion d*unc religion schisma*
tiqne armait les populations au nom
de la foi ortbodoxe, et tandis que
Moreau se retirait, et oue Macdonald
^tait repouss^ , la Lomoardfie , la Tos-
cane et le Pi^ont, harcelaient sur
tons ks points nos corps d^rganis^.
Au lieu de poursuivre ses avantages ,
Souvorof perdit un temps pr^ieux i
investir quelques places fortes dans le
Pi^mont. Les Francis firent un der-
nier effort pour conserver celles qui
vMstaient encore , et c'est alors que
Joubert s'avan^ au delji de Novt
avec un corps'de trente mille bommes.
L'arm^ austro*russe etait Aijk ras-
semble et pr^te k le recevoir. « Ge
ne fut pas, comme on I'a imprim6
cent fois, en chargeant k la t^te des
grenadiers que fut tu^ Joubert; ceftit
en allant reconnattre Tennemi , et
avant mSme que la batallle fdt en-
aag^e. II p^rit par la balle d'un tirail-
wur... (*). Moreau, rappel6 par le Di-
rectoire k la tdte de Tarmde du Rhin ,
prit le commandement, et perdit cette
sanelante bataille ou les vainqueurs
soufirirent plus que les vaincus. Avant
Taction, Souvorof avait dit, en par-
lant de Joubert: CestunJotwenceaUy
aUons bd donner une lepon. La for-
tune lui vendit cbdrement Taccomplis-
sement de cette propb^tie.
Paul, k la nouvelle de tant de sue-
0^', d6cerDa k Souvorof le surnom
d'ltalique; il ordonna que d6sormais
on rendratt au g6n^ral victorieux les
m^mes honneursqu'^ lui-m^me; et,
rabaissant Tdloge par la bizarrerie de
la forme , il prescrivit par un oukase,
ou'on eiU it reqarder Souvcrof comme
le plus grand capiUUne de tous lea
temps et de Urns Us^pays du monde.
II resolut de eonsommer Tan^ntisse-
ment de la republique: Nous avons
resoluy dit-ildans son manifeste, nous
etnos cUUis , de d^truire le gouverne-
ment impie qui domine en France.
Les pr^paratifs r6pondaient a la dif-
ficult^ de Tentrepnse; les escadres
russes et turques, dirig^s par les
Anglais qui aVaient vaincu k Aooukir,
s'emparaient des ties loniennes, et
(•) Rj^neanx et Cliennrchol.
tt4
LTNIVKKS.
ibodaieiit line r^Hibltqtie k la voix de
deux Bouverains despotes. Une autre
flotte venait jeter des bataHkons mos-
eovites sur le sol de la Hollande. Peox
armees russes traverserent la Pologne,
la Bohdoae , la Moravie et le sua de
TAIlemagne^ pour p^netrer sinaulU-
n^iii^t en France par Test et le
midi. Celfe qui marchait sur le RJun,
forte de plus de quarante miJle hon»*
mes, 6tait oomposee, en grande par-
tie , des soldats qu*avait fbrmds P»*
temkin et des restes de Fannie de
Perse. Cette arro6e, qu'on pouvait r&>
garder oomme T^Iite des troupes
russes^ 6tait sous les ordres de Kor^
sakof , qui devait agir de concert avee
Tarchiduc Charles.
Au moment ou elle venait d^entrer
en Allemagne , Jourdan 6tait battu h
Oztraeh , par les Antricbiens , et Mas*
s^a, recalant devant rarchidue vic-
torieux, ^tait forc6 de repasser l»
Limmat. Les Autricniens, mattces de
Zurich, se trouvaient dejik aa centiv
de THeiv^ie.
Les Russes r^amerent Thonneur
d*occuper les avant-postes. Korsakof
afficha, dans les .contestations qui
s'^leverent k oe sujet , une hauteur qui
devait blesser Tarchiduc ; mais bien*
t6t ce dernier fut oblige de se porter
sur Philisbourff, one menacait une
forte colonne repubticaine.
Les coalis^s avaient r^solu de sni-
vre un nouvean plan d*op^rations ^
d'apris lequd tous les Russes, sous
les ordres de Souvorof, agiraient
en Helv^tie, tandis que les Autri*
chiens, sous le oommandement de
M^las, expulseraient les Fran^ais de
ritalie,etque le corps du prince Char*
les les attaquerait sur leurs frontieres
rb^nanes. L'arcbiduc saisit sans doute
avec empressement Toocasion d'^ap-
per aux exigences hautaines de Korsa-
kof; mais il etait trop bon g^^l
pour eompromeltre^ conune on Fa
avanc^, le succ^ de la caropagne par
un motif d*amour-propre.
Jl n'etait rest^ avec les^ Russes qu'un
corps peu nooibreux d'Autricbiens ,
qui . reuni aux Suisses m^nteots ou
entraln^s , forma , sous le oommande-
ment du^tetal HlHlze» la droHe de
tour amne.
Le 3 vendemiaire (14 septembt^
1799), les Fraofals desoendifent des
hanteurr voisines et eagaekient Tac-
tion. Les Rosses, ^dalias I'abord par
un feu'terribto, oM^rsot a l*imp6tuo-
ait^ d'on premiei ehoc; nais bientdt ,
rallies entre tow camp et 1» fleuve ,
ils tinrent ferme el plvbenl encore ,
pour se rattier de nonveau denri%re
leurs teotes. Uty Ito ^uisi^nent tours
ftiberaes et mouitirent aligniSs. La
irofte I compost en gnande partie de
stipeaaiaires suisses, opposa une r6-
sistanee raoina vive. Toum^ dds to
eommeneement de Paction , eUe fut
bienl6t raise en d^sonirs, et permit
aux vainquenrs de se porter vers le
centre, on les Rosses se dtfendaient
aviec une Constance bdroique. Les ca-
Boniers, fiddes k ieur serment, se fai-
saient tuer sor leurs pieces. Bient6t
Korsakctf n'eut plus d'autre ressource
que de former un batailton carr6 des
quinze mtlle bomnies ^i lui restaient ;
lartillerie togere atlaqua et mit bien-
tdt en ruine ce bastion vi^ant qui pi^
sentait de tou& c6Ub ua front de fer.
Des files enti^res tomba tout , mavquant
le siilon du bonlet; des rangs entiers
^tatottt renvers^ par les itoncs. Con-
verts du sang de tours frires, lev
Russes s'alignaient comme k la ma-
noeuvre, et rempiissatont inoedsam-
ment ces vides pour tomber k tour
tour, Quand les g^B^ranx r^publicains
eurent labour^ de Ieur formidabto ar-
tillerie tout Tespace que couvraient
ces braves Rosses, ils ordonnerent
une aitaqoe gi^n^ale au pas de charge,
et to victoiM, encore disput^e, rat
enfin complete. Zurich , dont Korsakof
avait fait son quartier g^^ral , toa
ma^asins , les pipages , unepartie du
train de rartilterto, tomberent ati
pouvoir des Francis. Le lendemain ,
les Russes, quiavatent re^o^uelques
renforts , riteist^rent encore lusqu'au
milieu du jour. lis furent acneves en
detail , et taiiles en pieces par petite
pelotens. Leor inflexible courage ne
se dtoentit pas un instant; pas
un ne se rendit quMl ne fAt blesse ou
R17S»E.
89ft
(tome ; On Im voyait, avant d*expi-
iw, yrcMcr dfans llBors aHOM on sar
Iw» IHm i'imagli dc loir patMMis
que tmis IflB BtoMes portmit sar la
poitriBe«> <k te SDldatF rtpubKoaiiiB
s'^toMiarait de troam, sar ees ^i^-
s^gfss- mcna^aate, Peipvesiloa d'BM
pieose fierveiir.
GepeiidBiit Soittoraf desocodait avee
U rapidity de I'ai^ des doiea da
Saiiit*Gotfaajrd« JjB dinsiOD Leoourb»«
afEy blie par la ^rieuse eampagne da
rEogadme, aTait M fore^e da se vs>>
pliec 6D deQ^ des moots^; elie oocapait
les d^ocli^ aor Tltaiie et la vaU^ do
Khin,depuis la aouroe de oe fleara
josqu*^ la hauteur de Glaris; elle mat*
DoeuTra poor venir s'appoyer au pied
da moot Rigi. Soovorof preasait aa
mafGhe victorieose; d^Uk maltre dea
troU petits oaatons, il meDa^ait la
droite da rarmee franGaiae , lorsqo'il
apprit q|ua Korsakof venait d*etre
ms^ a Zurich. Le vfeox g^n^al
versa des pieurs de ra^e. Pendant
quelqoes instants, aa voix Mata en
cris raoqoes , et des convulsions vio-
lentfs tordirent ses membres. Rien ne
peut le consoler, car il salt qu*rl ne
peul p!ltt& vaiocre; il ireulqa*on Ten-
seveusse maot devaat ses grenadiers ,
poor gu'j7 ne soft pas dit que Tennenii
aurj vo reculer le genial Soarorof.
Cependant il jette les yeox sur oette
ann^ si d^vouee, plus conatem^e de
glorieuse qu'uoe victoire, et des lors
son parti est pris. II 6crit a Korsakof
qu'il arrive victorieux, lui ordonne,
sous peine de la vie, de n»readre Tof-
fensive, et, h cet ordre , les d^ris de
t'ann^ vaincue, renforc^ du corps
de Conde , se retournent avec fiireur
oontre les Francis. Ce dernier enga-
gement s^rieux entre les Russes et
MS republicains eut lieu pres de Die'
seahoien. Un corpa d'environ trois
mille cavaliers char^ea en plaine deux
demi-brigades d'infanterie, comman-
does par le brave general Lorge , qui ,
apres Tavoir repousse trois fois, le
(letruisit presque entierement. Le
vainqoeur Hr Zorrcb, le sauveor de la
Franee , Mass^mi , mareha contra Sou-
vorof et rarrito; pour cette fois, s*il
n^eut pas la doire de vaincre, il eut
oellede fetre mrograderson rival. En
vain il essaya de rattirer hors des d^-
HI/iA (fni le couvraient, dana Tespoir
d» faire prisonniers le gdn^ral, le
grand-due Constantm qm laisait sous
fiii sea premieres armes^, et I'armte
nisae tout enti^re. Soovorof op^ra sa
retraite dans le plus bel ordre; il dut
abandonner oueiquea bagages, quel-
goes ^toes crartiHerie, ses maladea
et sea Dless^ ; mais le mar6chal Mor-
tier, charge de le poorsuivre dans le
Ifattenthal, ne put entamer que denx
eu trois batalllons qui se d^vooirent
pour sauver le reste derarm6e. II
mut dire, h rhonneur des Russes , que
toua auraient accepts cette mission.
La rotation de Souvorof restait in-
tacte , maia la r6publioue triomphait;
le prestige de rinvineioifitd des Rus-
ses ^it dissip^ , el la premiere re-
traite de Soovorof devait marquer sa
demidre eampagne. II rejoisnit h Lin-
dao, puis k Augsbourg, les debris
de I'armte de Korsakof. D*un autre
c6l^, le due dTYork recueillait sur sa
flotte ceox de la troisi^me ami^e.
lica Anglo^Rosses n*avaient pas ^t6
plus heureux en Hollande. Brune les
defit h Gastricum; le due d'York
venait de signer a Alkmaar la captto-
lation des troupes exp^dltfonnalres.
On s'aooorde h dire que , dana cette
campapne de Hollande , les Anglais
sacrifierent leurs alli^, dont la va-
leur, quelquefois heurense , ne fut que
faiblement second^. C'est ainsi que
tons lea efforts de oette puissante
coalition vinrent se Imser centre le
couragB briUant d*on peuple dont
elle s^ait d^Jli parta^^ les u^pouillea
et le territoire; mais, par la force
mdme des diosea, h meaure que la
nation fran^aise achetait , oar des sa-
crifices inoula, le droit de jouir de
sea nouvellea inatituttons , elle entraif
dana lea conditions du despotisme
nrilitaire, d'aotant plos dangereux
qu'il apparaissait en sauveor et en-
tour^ de tous les prestiges de la gloire.
39e
rUNlVERS.
Si la joie de Paul avait iti grande
en apprenant les victoires de ses ar-
mees, son indignation ne oonnut point
de bornes a la nouyelle de leors d6-
sastres. U cassa et fl^trit en masse
tons les ofBciers qui manouatent k
I'arm^ , et ne daigna pas meme s*oo-
cuper des siqoples soldats rest^ cap-
tifs en France, k la suite du combat
de Castricum. Le tsar, comme 8*il edt
voulu faire peser sur le vainqueur de
Novi la responsabilit^ des d6taites de
Zurich et de Castricum, le dtolara
coupable pour n'avoir pas ex^t^ cer-
taines prescriptions des reglements
militaires; bientdt ii aocusa ce m^me
liomme auquel il avait destine une
entree triomphale et une statue, dV
voir oontribu^ aux revers de Tarm^ ,
en protongeant imprudemment son
sejour en Italic; enfin, apres quarante
ans de suoc^, Souvorof se vit dis-
gracie et sans commandement; le cha-
grin , dit-on, pr^cipita sa fin; les re-
grets de Tarmee et le t^moi^nage
eclatant que*rendirent k son g^nie les
gen^raux qui Favaient combattu ex-
pierentTingratitude du souverain. Nul
mieux que lui ne sut conduire le sol-
dat russe ; dou^ de <st coup d*oeil qui
fait le grand capttaine, tacticien ha-
bile , et ayant devin^ tons les secrets
de la strategic, il ajouta , par Tetude ,
aux qualites qu'il tenait de la nature;
mais a Tinstant ra^me ou il avait tout
pr^vu et tout calculi, il paraissait ne
ceder qu'a un instinct guerrier et k
une inspiration surnaturelle, rooyens
propres k impressionner puissamment
les masses, mais qui, employes par
la.mediocrite, ne conduiraient quau
ridicule. On a dit de lui quMl pouvait
itre d'un tiers plus laconique que Ce-
sar, attendu qu il triomphait toujours
sans y voir/Sa belle retraite devant
Massena repond suCfisamment & ce re-
proclie , et prouve seulement que Sou-
vorof regardait la oonfiance du soldat
comme Fel^ment le plus indispensable
du succes. Des hommes plus avanc^
que les Russes eu civilisation n*ont
pas ^te a Tabri de cette fascination , et
Napoleon lui-m£me fut redevable de
quelqufs-uns de ses triomphes a Fopi-
nion qu*on avait de son anfailKbilit^
Cependant Paul ttooignait baute-
meot son m^oonteotement de la oon-
duite qu'avaient tenue ses allies : il
reprochait aux Autricbieos d'avoir
abandonn^ korsakof k ses propres rea-
flouroes, et aux Anglais cTaToir mol-
lement appuy^ le general Herman k
Castricum. Kobentzel et Wit worthy
ambassadeurs de Vienne et de Lon-
dres, durent essuyer les plus am^rea
rtoiminations. L'envoye de Dane-
mark, qui s'etait permis des reflexions
plaisantes sur les emportements bi-
zarres de Tautocrate, re^ut le premier
Tordre de se retirer. Sans annonoer
encore ses intentions a regard de la
France. Paul rappela en Russie le
reste des troupes exp^itionnaires.
N^nmoins il Mrivait a Dumouriez,
qui demandait a lui souniettre un nou-
veau plan de coalition : « II faut que
vous soyez le Monck de la France. »
L*empereur flottait encore dans Tirr^-
solution, lorsque les empi^tements de
TAutHche en Italic provoqu^rent, de
la part du cabinet de Petersbourg, des
explications qui entratn^ent une rup-
ture; de leur c6te, les Anglais, mal-
gr^ les conventions, refusaient de
restituer Malte»au restaurateur de
Tordre de ce nora, et quoique cette
tie ne fdt pas encore soumise, ils an-
noncaient rintentiondese Tapproprier.
Paul ne tarda pas a reconnaitre que,
dans cette pr^tendue ^erre de prin-
cipes , les coalis^ exploitaient sa bonne
foi chevaleresque, et n'avaient reelle*
ment en vue gue leurs int^r^ts respec-
tifs. II rompit brusquement le traite
qu'il avait conclu avec TAnsleterre par
une mesure significative : i! mit Tem-
ba^o sur fous les vaisseaux de cette
Imissance, et fit prisonniers de guerre
es matelots des equipases.
II ne n^gligea point nmpui des puis-
sances centre lesqueiles if n^avait point
de griefs k all^guer : il resta Tallte du
Portugal et de Naples , se rapprocha de
la Suede et du Danemark; enfin ses
relations avec la Prusse firent presager
une prochaine reconciliation avec la
France. Le. premier consul, soit g6n€-
rosit^f soit politique, renvoya ^ Paul
RUSSIE.
a97
ies prisonnia^ rnases, et oeCte oour-
toisie flatta Torgueil de Paul; on as-
sure qoe la reTue {ournali^ de Bona-
parte lui panit une imitation de sa
wateh-parade, et qu'ii s'^ria : « C'«st
pourtant on homoie! » Aossi prompt
dans ses d^terminatioiis qu*il ^tait ex-
trtoiedaiis ses affections, il envoys au
premier consul line ambassade solen-
nelie, et supprima la pension qu'il
faisait aax Bourbons, leur enjotgnant
en mtae temps Tordre de qaitter
Mittau. II determina le Danemark k
ferroer aux Anglais le Sund, et envoya
une flotte pour appiiver cette mesare.
Le traits de LiUneville, qui sui?it la
▼idoire de Moreau k Uohenlinden,
venait A'assurer la neutrality de I'Au-
tridw; et T^ngleterre, a|H^ des sa-
crifices ^normes, se voyait r^duite k
supporter a elle seuie toot le poids de
la eaerre. H est Evident que I'int^rlt
de rAngleterre portait cette puissance
k d^irer an changement de gouverne-
ment enRussie; mais ii est difficile de
determiner la part qu*elle a prise k
Tatteotat qui a plac6 Alexandre sur le
trdne; a-i-elle profit6 da m^contente-
meat dea seigneurs, ou a-t-elle organist
el\e-intoie le complot? Les documents
qui pounaient resoodre cette grave
guesDoo manquent k Fhistoire; ce qui
n'est point dooteax,c'estguecette puis-
sance f ut au moins complice. « Le r^ul-
tat de la bataille de Marenso , dit M. de
Marcillac (Souvenirs de remigration) ,
avait ajoum^ les esp^rances des roya-
listes; mais Torganisationduttoujoors
se continuer, afin d'agir au premier
moment favorable. OnsavaUaavance ,
PevenefnentqttidevaUasseoirj4lexan^
dre star le tr&ne des tsars : P^poque en
itaU designee; il paraft mime qu'un
des cabinets de I'Europe avait compt^
sur cet 6v6iiement pour ramener la
Russie dans la coalition centre la
France. Ce qui est certain , c'est que la
mort de Paul P' arriva juste a Tepoque
pr^c^emmentannoncee. « Tout 6tait
m(lr pour cette catastrophe; le carac-
t^re de I'empereur, aigri par les revers
de ses armes et par une passion sans
espoir, le poussait k des actes si bi-
zarres et quelquefois si cruels que nul
de cenx qui rapprochaieiit ne pouvait
compter sur le lendemaio. Les faveurs
^taient brusques et inattendues comme
les disgrdces. Les bruits publics qui
lui parvenaient par la police le jetaient
dans de eontinuelles apprehensions;
ces indices secrets, vrais oufaux, Ten-
tralnaient de rigueurs en rigueurs,
et le remplissaient d*une m^ance om-
brageuse. Sa propre famille n'^tait
pas k Tabri de ses soupcons, et la
mime voix oui venait d'eveiller ses
craintes et d^irriter sa sivlriti aver-
tissait son Ipouse et les deux grands-
ducs du piril qui les menacait. Le pu-
blic, qui ignorait les motifs de Tem-
pereur , le croyait en dimence. Toute la
ville ^tait en Itat de suspicion; les
visites domiciliaires k lieure indue, des
individus, des families enttdres arra-
cbls de leur demeure pour la depor-
tation ou Texil, la physionomie des
habitants qui n'osaient pas mime ex*
primer leurs craintes ou leur surprise,
tout semblait annoncer que la perte
d*un seul etait nicessaire au salut com-
mun. L'inflexibiiitl de Paul se roidis-
sait centre ce sentiment de disaffection
presque universel; cependant lorsqu'ii
croyait dimller quelque part le dlvoue-
ment, il le couvrait d*or et de distinc-
tions; mais ses faveurs Itaient plril-
leuses, et rillvation rendait la chute
plus terrible. Pour Ichapper au re-
gard de I'autocrate, quarante mille
habitants abandonnlrent Pltersbourg ;
ceiix que leur emploi ou des interets
implrieux retenaient dans la capitele
ne passaient qu'en tremblant , et la tite
decouverte, aevant le palais de Saint-
M ichel , ou , comme un autre Louis XI,
le sombre Paul, entourl de dllateurs
et de satellites, dressait ses listes de
proscription.
Le despotisme , qui donne le pouvoir
de tout faire, inspire souvent k oeux
qui le subissent la bardlesse de tout
oser. La perte de Paul fut risolue.
On assure que iorsqu'il eut.consenti k
partager avec le premierconsul la tAche
de dieter des lois k TEurope, il se fitap*
porter une carte, etoue, tirant une ligpe
des sources de TOder a remboudiure
de ce fleuve, il s'Icria : « Que teat ce
LTNIVERS.
qui existe depeuplet h TooeideDt scsle
sous riiiQoenoe trsni^ise; oue tout oe
irai se troave it Torient obelase a Tin-
^tHnoe russe. » Suirant la mtoe ver-
sion, le ^D^al OiidiDOt defait se
Kndreea Rassie, nott pour gnider les
Russes daiu les lodes, mais pour les
aider a feice la oonqutte de TAsie Mv-
neuM, et doooer ensaite ia main aox
restes de rarmee d*£gypte : c*^it plus
.qu*il n'eo fiaUait pour engager le cabi-
.net iHritannique a rompre au plus tot,
ot par tons les mojeos posaiUes, une
alliance qui mettait en p^il sa sapr6-
-matie comoierciale, fouree pcincipale
de sa prospN^rit^ et de sa force. Paul
|)^rit assassine; le genre de luort, le
joom .des principaux acteurs do crime
jont eonnua; mais quand on veut soi<-
.vre le fil de eette €on8[Hration, arant
jet apres la catastrophe, on Je trouTe
rattach^ii tant d*interte.priv^ et po*
litiques, qu'on oe p«Jt k d^broniuer
sans le rompre. Les jretatioas les plus
aocr^it^ s'aocordent sur quelques
points et diffevent sur d'autres , pacce
que chaoun a observe d*uo |)oiQl de
vue particttiier, et que les ageots so-
Gpndaires, mAme ceux qui <i>nt mis la
joain a Toouvre, n*etaient.paseniii6re-
ment dans le secret dv cb^, qui lui-
jn^me devait 0M)difier son plan seloQ
le d^velpppement iawrevu des cireons-
tanc»s. Nous nous oornecons done ^
ctter, en ce qui regarde le meurtre de
Paul, les relation^ qui portent i^ uo plus
haut degr^ le.caractere de la bonne
foi et de la vraisemblanoe; et ce n'est
gu*apr^ avoir soumis ces documents
a la sagacity du lecteur, que nous jeious
hasarderons k ^mettre le jugement que
leur examen.consciencieux et pfUsieurs
conCdeuces oicales nous ont port^ a
adopter.
la.^remi^ce des relations que nous
allocs citer ^mane de la lotion fran-
(aise, et se ressent de son origine di-
plomatique; nous Temprunterons k
Eabbe, qui Pa i&um^ avec intelli-
gence et ud^lit^.
« Tout concourait h prouver la par-
ticipation du minist^re anglais a la
mort de Paul I"', et Texp^dition du
Sund venait k Tappuide cette opinion.
De quelle jutilite peur les Anglais itait
roocupation du Sund ea oette cir-
-constanceP quel ami lebut d'une ten-
tative qui pouvaic devenir si fiinesteP
Une flotte nomhreuse-dtfendait ce di^-
troit; pour le franchir, il fallait la d^
-truire, et le sooc^ etait au moins
4outeux; en supposant jn^me la reus-
^te, les Anglais n'avaient-lls pes ii
•craindre de trouver r^onies les forces
des trois puissances, soit pour les com-
battre, soit au moins pour leurfermer
Je passage au retour? Les chances ral-
fionnafoles de oette expMition ^talent
telles t|ue, sans les machinations des
Anglais , la Baltique devait ^tre le torn-
beau de leur flotte; done ceux qui
avaient oonou Tentreprise avaient au
moins Tesporance qo'au moment o^
Ton p^n^trerait dans la Baltique, la
puissance qui y faisait la loi, la Rus-
sia, aurait cess^ d'^re redoutable. La
s^rit^ avec Jaqueile ils s'engag^reat
dans cette mer lodique I'attente d'^ia
^venement qui devait changer pour eux
la face des amiires , et prou v« assez que
Nelson n'eut ordre de forcer le Sund
que lorsque la chute de Paul fut r^-
soiue a Londres. Cest du moins uoe
forte pr^Mimption que cette singuliere
coincidence des faits. Ce fut pendant
le combat mtoe du 3 avril que Ton
appritaCopeobaguelamortde Paul T"",
et le gottvernement danois prit le plus
grano soin pour oe pas laisser ebruiter
la nouvelie avant j^eoti^re conclusion
de rarmistice qui suivit cette joum^.. .
La m^me notice place h la t^e des
mecontents les freres Zoubof , le comte
Pahlen , le colonel Tatarinof , le g^n^
ral Yascbwel, enfin lord Witworth,
ambassadeur d^Angleterre a Peters-
bourg. Us resdurent de porter le der-
nier coup; la mort leur etait r6serv6e
s*ils echouaient; et, malgr^ cette n^-
cessit^ de hdter Tex^cution de leiu*
dessein, tous attendaient, nul n'd£is-
sait. II fallait pour dinger de telles
men^s une t^te froidement organisee ,
et capable tout a la fois de raetivite la
Slus soutenue. Un tel chef se trouva
aos la personne de Pahlen , gouver-
neur mintaire de Pi^tersbourg.
« I^e comte Pahlen avart joui jus-
* • •
• •
• •
• ♦ • »
• ••
•
•
•••.
..•*•
• •
••
• •• •
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«• ••
• •••
m
• • • •
>• •* ••• •
• • • •
• c • •
• •
RUSSIE.
899
qa'alors d'luie r^oatation de nrobit^
sans tacfae. On se louait g^nmleaient
lie son administratioa; on pariait de
ses vertus; il avait kB dehors les plus
respectables; le calme r^pandu aar ses
traHs Insprrait la cooOaaee; flsais il
cachait une profoode diaaiiiiiilatioD , ct
son extdrieur n'etait niiHement en bar-
monie avec son dme.
« Le joug pesatt de pkis en plus sur
Pahlen; soumis k un maltre dont la
voionte etait absolue, sa Istveur d^pen*
dait d'un soupqon ; de jour €n jour elle
devenait plus 'pr^ire; il voulut Taf-
feraiir, et r^olat de mettre Alexandre
sur le trdne. Un nouveau r^ne offirait
un champ plus vaste k Tanibition dont
il etait devor^, de plus fr^guent«s oc-
casions de reodre s(5s talents ntos-
saires, Fassurance d'obtenir un er^it
immense aupres d'un jeune prince de-
pourvu d^exp^ience, enfin respoirde
r^ner sous son nom... Une fois son
plan arr^t^, il s*appliqua a Eloigner de
la /aveur de Paul tous.ceux gu'il n'a-
vait pu eagner. Dans cette vue, il
travailla tongtemps, et r^ussit enfiin k
faire disgracier un bomme dont le
i^vouement k la personne de I'empe**
reuT, et les talents surtout, lui por-
taient ombrage : c'^tait Eostopcnin,
▼ice^:haBcelier des affaires ^ang^res ;
ce ministre dtait parvenu h s'emparer
d'une oorrespondance ^ntre un oomte
Panin, neveo du grand gouverneur de
Paul, et un agent des conjures de P^-
tersbourg. Ge Panin ^tait Je chef du
parti h Mosoou^ et quoique ses lettres
fussenttoites avec une exttdme cir*
oonspection., 0 y r^ait un louche qui
n*^cnappa point a la sagacity de Ros-
topdiin.Lespidoes saisiesfurent mises
sous les yeux de Paul, et celui k qui
elles 6taient adressto fiit mand^ ; mais
oet bomme repoussa avec tant de cba-
leur cette imputation, 11 se d^fendit
avec un tel accent de v^nte, qu'il dis-
suada Paul entierement. Pahlen, peu
de temps apres, obtint le renvoi de
Aostopchin.
« Avant de rien tenter, Pahlen voulut
se mdna^er les moyens de se justifier
aiipr^ dr Alexandre s'H r6u8sissait, et
aaprte de Tcmpereur s*il. venait k
Miouer. II sentait eombien il lui im-
portait d'impli<iuer, d*une mani^re
^droite, Th^ritier du tr6ne dans ses
frojets, et de le placer par la entre
aul et lui. II s*appliqua done a indts-
•poser Tempereor contre les grands*
dues Alexandre et Gonstantin, et ces
demiers contre leur p^re. Citait ieurs
droUs qu'U vaulau iusurer^ Ieurs
wies qu'il wntiaU 4iftmiiir€ : mais , sous
4es apparences do z^e , Pahlen 1^ em-
ployait oomme les pr^testes de sa
naine et les instruments de son ambi*
iion.
« Le suce^ de Pifhlen fat oomplet au**
pr^du vMLi^) empereuret des jeunes
princes: une terreur profonde s'em-
parade r^siedu malheureox monarque
et ne I'abandonna plus... Un jour, sor-
tant de son lit plus 6pouvant6 encore.
qu*a I'ordinah^, il mande subitement
ses deux ills a!n^ , Alexandre et Cons*
tai^n, «t leur fiiit juxer sur un cru«
dfix qu'ils n'attenteront pos ^ «es
jours.
■ Des flls qui avatent le malheur
d'inspirer de telles craintes ne devaient
point eux-mdmes se sentir en sdret^;
cependant Pahlen, n'esp^rant rien du
caract^ r6si^6 et respectiienx d*A-
lexandre , le peignit a Paul , d^ja atteint
d'un incurable soujMon, comme an
dtre dangereux \ il aua plus loin, il oea
racouser aupres de son pte de com-
ploter contre son aolorit^, et d6clara
lormellement k I'empereur ne pouvoir
r^pondre de sa s^ele personneile, s'il
ne lui donnait iur-le-champ Tordre
d'arrdter Alexandre. Paul, indign^
contre son fils, aigne aussitdt ranr^t.
Alors Pahlen va trouver le grandMuc,
et , 4u>res lui avx>ir vainemenftKpr^sent6
la necessity de pr^venir ies intentiona
de Paul en le lorcaoft d'abdiquer, il
oppose au refus optniAtre d' Alexandra
l^irdre qu'il venait de reoevoir codIm
lui. Atterr^ par la Yue de oet ordne
et pvesse par rimminenoe 4iu pM,
Alexandre ne pouvait encore ae r^
soudre k une di^marcbe ausai haslie;
(*) Gette eiymttion »t impfofm; Paid,
ne ea 1754, a iie smwin^ en iSoi : i&
n*avait done qoe 49 ans.
400
UUNIVERS.
mais cctte incertitude fut interpr^tee
par PableD comme une autorisation
tacite et sufQaante. II allait le quitter,
quand Alexandre exigea de lui le ser-
meat qu'il ne serait/ait micune nio-
lence a son p^^, et le rendit respon-
sable de oe qui arriverait.
« Telle fut la duplicity de Pahlen , et
telle fut la oonduite du grand-due.
Cest cette manoeuvreinaidiease qui a pu
donner lieu k cette question : « Alexan-
dre a-t-il particip^ au meurtre de son
pto?»
« Cependant, h cette ^poque, quel^
ques bruits ayant transpire, quelgues
rapports vagues ayant et^ faits h Paul,
soit par le d^vouement, soit par Tin-
discretion des initios, il nianda Pahien
let lui dit : « On en veut ^ ma vie; n*e-
.« pargnez rien pour vous instruire des
« faits... » et il termina par une sortie
violente sur rignoraneeou il le croyait.
Pahlen r^noit : « Sire, je le savais,
« et , pour m*assurer des coupables , je
« suis moi-mdme de la conspiration. »
Ces mots tranquillis^rent Tempereur,
et des lors il s*en rapporta enti^rement
a Pahlen. Deux jours avant T^v^ne-
ment, Tempereur re^ut avis d'Obalia-
nof, proeureurg^n^ral, que Ton cons-
pirait contre sa vie. Cette nouvelle
r^v^lation mit le comble a ses defian-
ces, et, craignant alors que Pahlen
B'edt v^ritablement pris {>art au corn-
plot, il expMiti an courrier h Arakt-
cheief , ancien gouvemeur de Peters-
bourg, qui oommandait alors un
raiment de confiance de Paul, ca-
sern^ k quarante verstes de P^ters-
bourg. II mandait h cet officier qu'il
mettait en lui sa confiance; que sMI
diff^rait un instant a venir, il ^tait
perdu , parce que Pahlen le trahissait.
a Pahien arrSta ce courrier, qui,
tenant ces dep^hes de la main de Tem-
pereur, refiisa de les lui remettre. Le
gouvemeur feignit de soupconner la
v^radtd de son langage, et*, sous ce
pretexte, les lui fit eniever d'autorit^^.
« Instruit de tout, Pahlen sentit le
danger. Un court d^lai pouvait rendre
infructueux des projets si habilement
eoncus. Assure done en quelque sorte
de limpunite du crime, il en pressa
rexecution, et, de concert avec quel*
ques Jiommes sur lesquels il pouvait
oompter plus particulierement, il flioi
le jour fatal au lendemain.
« Dans la mating du jour oonvenu ,
l*empereur se promenant k cheval sur
hi pface Souvorof^ accompagn^ de son
fieivori Koutaitzof, fut accost<^ par un
homme de la classe inferieure qui lat
prdsenta une iettre. Le cheval de I'em-
pereur s'^tant cabr^ dans ce moment,
li ne put la prendre lui-m^me, et elle
fut remise a Koutaitzof. Eile contenait
de grands details sur la conspiration ;
mais Koutaitzof, avant change de v^te-
ment pour diner cnez Tempereur, ou-
blia de la lire (on verra dans la relation
que nous rapportons en dernier lieu
pourquoi Koutaitzof ne montra pas la
Iettre k I'empereur).
« A rheure hx6e^ vers onze heures
de la nuit, du 22 au 28 mars, les con-
jure, au nombre de vingt, se pr6sen-
tent k une poite lat^rale du palais
Saint-Michel donnant sur le iardin.
On leur en refuse Tentree. * L empe-
« reur nous a mand6s , disent-ils ; il y a
« aujourd*hui grand conseil de guerre. >»
La sentinelle, tromp6e par la vue de
t)lusieurs officiers gen^raux, se rend k
eurs instances.
a Tons montent en silence k Tappar-
tement de Paul, et demeurent un mo-
ment dans la salle des gardes. Arga-
makof, aide de camp de service, se
pHisente seul : il dit que le feu est a la
ville, aullvientr^veiller I'empereur, et
le heiauque qui gardait Tanticbambre
le laisse entrer. Il frappe k la porte de
Tappartement, et se nomme. Paul,
reconnaissant sa voix, lui ouvre a
Taide d'un cordon qui r^pondait k son
lit. II ressort aussitot pour introduire
les conjures. Ceux-ci , n^ttendant qu'un
signal pour se pr^enter, entrent en
foule. Le Cosaque s'aper^oit alors,
mais trop tard, qu'on en veut aux
tours de rempereur; il veut r^sister;
a rinstant m^me il tombe perc^ de
coups ; toutefoissond^vouement avertit
son mattre, il s*6crie : « Trahison!... »
M L*empereur effraye veut fiiir dans
un des cabinets qui joi^nent son al-
cove : Tun communiquait k Tetage in-
RUSSIE.
401
£firieiir, Tautre, sans issue, renformait
des drapeaux pris sur rennemi , et les
armes aes omciers detenus k la for-
teresse. Cest dans oe dernier que soth
trouble Fa conduit: saisissant une ^p^,
il cfaerchait It gagner un escalier d^rob^
par Fantre cabinet, quand les oonjur^
piMtr^nt. Us vont droit h son lit;
ne Vy trouvant pas. tons s'toient:
« II ^ sauv^l » b^ja ils se croyaient
trabis, quand Beningsen I'aper^ut
blotti derridre un paravent.
« Paul, trouble, sansYdtemeDtSfpres-
sentit le sort gu^ils lui r^servaient,
mais son ^ereie ne Kabandonna pas.
On lui parte dabdiquer; il s'y refuse
arec enoportement, et, reconnaissant
ceux qu^l a combl6s de bienfaits, il
eclate en reproches si touchants que
leur f6rocite en est ^branl^. Mais
dans le moment ou les conjures se
pressent cbez Tempereur, au moment
nvgmft ou ils comptent le plus sur
Pahlen, celui-d marcbe au palais h la
tite d*un regiment des gardes : si Ten-
treprise reussit, il vient pour la se-
conder; si elle manque, c'est son
maltre qu'il a voulu deiendre.
« Cependant Platon (Zoubof) vint
lire a 1 empereur un acte d*abdication.
Paul cberoie h les toucher de nouveau ;
il s'adresse particuli^rement h Pla^n ,
lui retrace son ingratitude et Texc^
de sa tem^it^. « Tu n'es plus empe-
< reur, r^pondit celui-ci ; c*est Alexan-
« dre qui est notre mattre. » Indfgn^
de son audace, Paul va pour le firap-
per. Ce courage les arr^; il suspend
un moment la voIont6 des conjnr^ ;
Beningsen s'en apercoit, et sa voix
les ranime : « (Test bit de nous s'il
<c ediappe, c'est fait de nous! « Aiors
Nicolas Zoubof, portant le premier la
main sur son souverain, lui casse le
bras droit, et entraine par son audace
la sc6l^ratesse irr^lue de ses com-
pKces.
« Le tumulte ajoute encore h cette
sc^ne d^borreur, e( I'obscurit^ qui Ten-
vironne rend inaccessible h la oiti^ le
cceur de ses assassins. Tons fondent
sur lui ; I*inf6rtun6 Paul tombe acca-
b\L On lui prodigue Tinjure; on lui
crache au visage; on le tratne; on pro-
26* fJvraison, (Kussib.) T. ii.
longe son agonie. Par une d^oi^tante
baibarie, les assassins le frappent dans
les parties les plus secretes de son
corps... Leur cruaute se lasse enfin;
Pun d'eux lui passe au cou une 6duirpe ,
et termine ainsi ses souifrances. II
expire, et ses demi^res paroles sont :
« Constantin! Constantin!... »
« Alexandre, en apprenant la roort
de son p^re, tomba nans un aocable-
ment profond. On lui dit gue la pro*
position d^abdiauer avait si fort Irrit^
l*empereur, qu il avait €t€ soudain
frappe d*apoplexie. II ne pouvait se
m^prendre k un tel rapport. On cher-
cha k temp6rer sa douleur; mais, reje-
tant toute consolation , il refiisa hau-»
tement le trdne. Get etat fiit suivi de
convulsions violentes qui dur^ent plu-
sieurs heures.
« Le bruit de la mort de Paul se r^-
{)andit en peu de temps dans la ville,
e peuple se porta en foule sous les
fen^tres du cnAteau; tous les nrands,
tout ce qui avait des charges a la cour,
toutes les autorit^ de la capitale se
rendirent aussit6t au palais pour saluer
le nouveau souverain.
« Pahlen, en quality de gouvemeur
de P^tersbourg, pr6sidait la d^puta*
tion, et porta la parole; Ton vit Tas-
sassin inftoe du pdre prater au file
serment de fid^Iit^.
« Alexandre cMa alors aux instances
r^it^r^ de sa famille ^plor^ et de ses
plus chers serviteurs, qui lui repr^-
senterent qu^en cette circonstance il se
devait tout entier h Tl^tat. II parut au
balcon du palais, et fut salu6 empe-
reur aux acclamations de tout son
peuple. Mais, parmi ces t^moignages
et ces transports de joie, une am^re et
cruelle pensee lui fit regarder le jour
ou il montait sur le trone comme le
plus p^nible de sa vie. »
Ce qui nous a frapp^ le plus dans
cette 'notice extraite ae la xelation de
la I^ation fran^ise, c*e^ que Ten*
sembie et Texpos^ des faits, qui d'ail*
leurs portent tous les caract^res de la
vraiseipblance, semblent exdure la
fames : tout s*explique, tout se d^uit
par des motife et des int^r^ts ^trangwa
m
L'UWIVERS
h >a politique anglaise; oe qui n^em-
p^e pas que Tambassadeur de oette
putssance ait profite d'un moovement
qui changeait la face de TEurope. Nous
ne dfrons pas que rAngleterren'apoiut
^t^m^l^ au eomidot; nous ferons seu-
lement femarquer que Vexp^dition du
Sund eat 4a seule preuve morale ap-
port^ par les autenrs de la relation
pour a^uyer c^tte inculpation^ et Von
pourrait, ce nous semble, en tirer des
consequences ioutes contraires; par
exemple, Tint^r^t qu^avait cette puis-
sance h op^rer one diversion dans la
Baltique pour emplcher Paul de reunir
toutes ses forces a celles de la France.
Le d^faut de la ptnpart des renseigne-
ments diplomatiques , c'est de tout
rapporter k une td^ principale qui est ,
ppur ainsi dire, la clef d*une mission.
Or, h cette ^poque, Tambassade fran-
caise devait sortout s*attacber h d6-
liruire llnfluence anglaise, et elle a
attribu^ h cette m^me influence la ca-
tastrophe gui la rtohlissait.
La relation suivante, publiee en Ai-
lemagne, et reproduite plustard en
France dans laBiblioth^miehistorique,
difRre, daosqudques details^ de celle
que nous venons de rapporter. Nous
la choisissons, entre plusieurs autras,
comme un document curieux, quoi-
que la source en soit inconnne : on
contort les motifs qui n*ont pas per-
mis aux auteurs de se nommer.
II y arait longtemps qu*on
avait perdu tout espoir de ramener
Tempereur ^ la rajson. M. de Pahlen ,
qui partageait avec hii Texerdce d'un
pouvoir sans bomes, avait eu lieu de
recomiattre la n6cessit6 d'opposer qne
digue atrx ^ans d'une volont^ qui ife
se manifestait que par des actes de vio-
lence ou de cruaut6. '^ '
« Ce chef des affaires ext^eures ,
d^ la police et du gourernement de
Ptftersnouiig, prit enfin la resolution
de conf^rer arec le grand-diic Alexan-
dre sur les moyens d'^n arr^ter les
Suites fiinestes. II iSt connattre II ce
prince tout ce qu*un pareil ordre de
ehoses pouvaft intratner de malheurs,
soit itu d^h&rs', soit a Tinterieur. It
avertit le grand-due de songer h un
changement, contre les dangers duquel
on etait rassure pleinement, par les
moyens d'ex^cution dont on pouvait
disposer.
« M. de Pahlen 6tant, par ses em-
plois, instruit de tout oe qui se pas-
sait, pouvait agir imrnddlatement, et
se proposait de le faire sans deiai. Le
grand-due rdpondit k ces premieres
onverturesquul ne pouvait disconvenir
des torts de I'empereur; mais que ce
{>rince etait son pere, et qu'en sa qua-
\t6 de fils, il ne pourrait jamais se
r^soudre h le priver du pouvoir su*
pr^me, qudque malheur qui pdt ad-
venir s*ii en restalt plus longtemps
revfitu.
« Quelques mois plus tard, le d^
sordre du gouvemement allant tou-
jours croissant, M. dePsdilen parla de
nouveau au graod-duc. II trouva ce
prince moins eioign6 au'auparavant des
id^es qu'il lui soumettait, mais encore
detourn6« par respect pour son pdre,
de toute mesure qui aurait porte at-
teiote au pouvoir ae ce monarque.
« Cependant plus de vingt'Six per-
sonnes ayant disparu dans les premiers
mois de 1801, M. de Pahlen r^it^ra
ses propositions avec plus d'iustances.
Le grand-due, press^ par ces circons-
tances, y adh^ra enfin, mais h regret,
et apres avoir re^u la promesse for-
mdlequ^on n'attenteraitpas aux jours
de Tempereur, qu*on se contenta:Bit
de le faire prisonnier, d*obtenIr de lui
un acte d*abdication , et de le trans-
ferer sous bonne escorte dans la for-
teresse de Petersbourg.
« Un ^vhiement imprivu hdta Fex^-
cution de ce prolet. M. de Pahlen fut
instruit que Paul, qui depuis quelque
temps paraissait avoir con^u des soup-
cons, avait, centre sa couturae, sign^
lui-meme un passe-port (M. de PahJea
etait seul charge de cette signature);
il fit arreter, comme par mq^rise, le
courrier qui en etait porteur, et prit
probablement connalssaoce du con-
teiiu djBs di^peches confiees k cet horome.
On sut , dans la suite, qu'eUes avaient
pour objet de rappeler k Petersbourg
deux personnes que Tempereur s^etait
yu obn j;e d'exiler h cause de la cruaute
Russit:.
403
^Vlles dvaient nppatUe dans TexecQ-
tiim d6 ses ofdres.
«Sek>D tonte afmareAce, tes dent
fndmdcn, notmii^ lindner et Arakt-
di^ef , h premier eouTerneor mflitaire
de Piftarsboatg , et i'autre commandant
d'tme/brteressey devaient ^re rendns
ft leurs fonciiong. L'empereur devait
B'en servir pour ^kngner sa famille,
mettre en prison Timpi^ratrice et ses
deus fils, et se diSbarrasser enfin de
tons oeax oui ioi araient inspire des
soupfODS. M. de Pahlen, muni dn
passe^port saisi snr le courrier, se
;cndtt aupr^ de Paul , et lui repr^-
senta qu'on avait sans doute tente de
le surprendre, en soumettant h sa si-
snature une pito qu*i1 ^tait seul cbargi^
de d^Iivrer sous sa propre responsa^
billt^.
• L'empereur embarrass^ r^pondft
qu*ii avait eu ses raisons pour siener
ie passe-^Knt. « Je m^empresserai done
• ae le rendre au courner, » r^pondit
M. de PSahlen. On pense bien que Pafa-
len , tout en ob^ssant aux ordres de
son muftre, sentit plus que jamais la
n^eessit^de le pr^venir par une prompte
exeeution des mesures pr<^tees«
« Votts Tons ra[^lez oe qui est ar-
«rif6 en 176S?» STalt dit quelques
jours auparavant I'emp^eur h son mi«
nistre. « Oaf, Sire, j^is alors ser-
eent dans la garde. — M. de Pahlen ,
je ne serais pas^<Hgn^ de crof requ'cn
e^t envie de r^ter Its sc^es d'alors.
— O serail possible, 8ire, r^pondft
Pahlen, que qiieluues peraonnes en
enssent oon^u le uessem ; mais il ne
serait pas aussi facile de Tex^euler
aojoum'hiii qu'aiors; Tarm^ n'^it
pas, corame ft present ,«otre lesmains
do prince, la police n'^it pas aussi
lri«B fftffe que malntttiaat ; enfia ▼otre
pinr Btavalt pas M conronn^, et
vous r^les. 9 L'empereur sembia se
reftdra ft ces rtfesions, et finit par ift
on entretien oOi Pahlen montra de la
preseiMe d'esprit , do oalme et de I'm-
saoe.
« Cepeodanl les soup^ous de Tem-
Veraur aoffmentaient ehaque jour. Un
loir, II rep^ta ft piosieurs reprises,
d'un tott de fort maavaise honeur, ft
madame de Gagarin, chez laqoeile i^
se troQvalt : « Je le vois, il est temps
« de frapper un grand coup. » H tint
le m^me propos an grand ^cuyer Kou-
taitzof , en ajoutant : « Apr^cela, nous
« viTTons comme deux firftred. » Qe
grand coun conslstait ft faire en£BniMr
rimp^ratnce ft Rhdmagori, s^Hour
alfreux ft uuatre-vtngts verstes d^Ar-
kfaangel , ou la lamitle infortuiK^ d'TJl"
rkk de Brunswick a?ait M empri-
sonn6e pendant de leagues anneess
Schlussemourg devait servir de prison
au grand-due Alexandre; la forteresse
de P^tersbourg ^tait destine au prime
Gonstantin; Pahlen et quelques autres
auraient p^ri sur I'^ehafeua.
tc Madame de Gagarin, frdpp€e da
ton sinistre de rempeneur, avait ea la
simplicity de dire t « Je ne con^ois pai
« oe qu'il entend par le grand coup
« qu*if vent porter. ^ Ges divers propos
fiirent rapportite ft M. de Pahlen, qui
en instrmsit le grand^doc Alexandre.
tt Ge prince, presi^^ par le <kiiger^
consentit ft tout, sous la scale r^benre
de conserver la vie ft son pftre. Malgr^
la diflloulte de donner ft cet ^ganl ues
garanties positives, Pahlen promit
cependant que les jours de Paul ne ss-
raient nranao^ dans aucan cas.
« Le pro^ devait recevoir son ex^
cution le 32 mars; mais le 8rMHl*duc
insista pour quil fdt difl^rejusqn'au
lendemain > attendu que ce jour-lft la
garde da palais devait ^tre ceaMe au
Eataillon d^mtonoiFski, que le grand-
due Gonstantin oommandait en par-
Sonne, et.qui kii 6tait dtwoui. Pknleh
souscrivit au d^ir du prinoe.
«Le palais Ulchel, b^ par Paul
sur Templacement de raneien palais
d^^t^, c^ un MiGoe massif at mds
godt, entour^ de bastions. Cetait en
vain que l'empereur le fortijQait diaque
jour pour s'y assurer un abri canfare la
vengeance de ceux qu'il avait ofiens^.
Pahlen, ainsi que les autres eonjur^,
en connaissait tous les detours. Quel-
ques henres avant Textoitlon, II* de
Pahlen augmeuta ie aombre des con-
jures, en lei/r atUoignant qualques
jennes gens de fiftmiile qui , ce iour-lft ,
avaient M d^grad^ et fustiges de la
2.
404
L'UMIVERS.
mani^re la plus cnielle pour des fkites
?ui mdritaient k peine une i^primande.
*ahleD ouyrit lui-mtoe la prison k oes
maiheureux, et les mena souper chez
le g^n^ral Talezio, colonel du rai-
ment Preobrajenski , qui, ainsi que le
g^D^ral Deprmdovitcb , colonel du re-
giment S^mtonovski , avail attir^ dans
ta conspiration presque tons les offi-
ciers; on n'osait pas encore se confier
aux soldats ; on comptait d'ailleurs sur
leur ob^issanoe.
« Platon Zoubof , le dernier favori
de Catherine n, et le s^^ral Bening-
sen, 6taient prints a cette f^te. lis
se mirent k la t^te d'une partie des
conjur^, et Pahlen commandait Tau-
tre. Les deux troupes forraaient en-
viron soixante personnes, dont la
ptupart toient prises de vin/Zoubof
et Beningsen se firent ^rMder par
Fadjudant Argamakof , qui.faisait jour-
nellement ties rapporte k I'empereur.
Gelui-ct les oonduisit par un escalier
qui ftienait droit k une antichambre ou
coucbaient deux hussards de la garde
de Teospereur, ainsi que le yalet de
chambre. En passant par le corridor
sur lequel donnait cette porte, ils fu-
rent arr^t^i par un factionnaire qui
leur cria :*« Halte-lik! qui vive? » Be-
jningsen lui r^pondit : « Tais-toi done,
• malheureux; tu sais bien oii nous
iiallons. » Le factionnaire, compre-
nant de quoi il s^agissait, fronga le
sourdl en criant : « Ronde, passez; »
^fin que si Tempereur avait entendu du
bruit, il pOt croire que c'etait celui de
la reoonnalssaaoe d'une ronde. Apr^
cet^vdnement, Tadjudant Argamakof
continua en toute hate, et vint frapper
doucement k la porte du valet de
chambre. Gelui-ci, sans ouvrir, lui de-
manda ce qu'il voujait. « Je viens faire
« mon rapport. — Etes-vous fou? il est
« minait. — Que dis-tu? il est six heu-
«res du matin; ouvre done, ouvre,
« ou sinon tu vas me susciter'une belle
«af{aire aupr^ de rempereur!» Le
valet de chambre ouvrit enfin; mais,
ayant vu entrer dans la chambre sept
ou fauit personnes V€o6e nue a la main,
il courut se oacher dans un coin. Un
des hussards, plus courageux, voulut
opposer de la r^istanoe, rejjat un coup
de sabre sur la t^te, et nit aussitdt
terrass^; I'autre disparut.
« C'est ainsi que Beningsen et Zou-
bof p^n^trerentdans la chambre de
I'empereur. Zoubo^, ne voyant pas le
prince dans son lit, s*ecria : « Grand
« dieu ! il est sauv^ ! » Beningsen plus
calme, ayant fait une recherdie atten-
tive, d^uvrit Tempereur derri^re le
panneau d*un paravent. Alors il s'ap-
proche du prince , le salue de son 6p6e ,
lui d^lare qu'il est prisonnier par
ordre de Fempereur Alexandre; que sa
vie sera respects, mais qu'il importe
k sa sdrete de n'opposer aucune r6si^
tance. Paul ne r^pondait k rien. A la
lueur d'une veilleuse, on pouvait dia-
cemer la confusion et la terreur qui se
peignaient ensemble sur son visage.
Beningsen, sans perdre de temps, fit
la visite de sa chambre : une seule norte
menait dans les appartements de I'im-
p^ratrioe; une seconde, celle de la
garde-robe, 6tait sans issue; deux au-
tres appartenaient k des placards ou
etaient renferm^ les drapeaux et lea
etendards de la gahiison, ainsi qu'un
grand nombre orep^ appartenant k
es ofQciers mis aux arrets. Pendant
que Beningsen fermait oes portes et
«mettait les clefe dans sa poche, Zoubof
r^p^tait en russe k I'empereur : « Sire,
« vous 6tes prisonnier de Tempereur
• Alexandre.— Gomment,jBris6nnier ! »
r6pondit I'empereur. un moment
apres, il ajouta : « Que vous ai-Je fait?
« — Depuis quatre ans vous nous mar-
« tyrisez, » lui dit alors un des con-
jures.
« Le prince ^tait en bonnet de nuit;
il portait seulement sur sa chemise
une camisole de flanelle; il ^it de-
bout, les jambes nues, devant les oon-
jur^s : ceux-ci avaient le chapeau sur
la ate et I'^p^ nue a la main.
« Si Paul eAt conserve quelque pre-
sence d'esprit, il edt pu se sauvo*, ou
par une trappe qui donnait sous son
lit, ou par les appartements de I'im-
p^ratrice; mais la peur Tavait entiere-
mcnt d^concerte , et , au premier bruit ,
il s'etait jete au has de son lit sans
prendre une resolution; peut-^tre
li
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RU.SSIE.
405
tfoaa-t-il jpas se rtfugiar aoprte de
nmp^ratrice, pepsant qo'une conspi-
ntion lie pouvait £tre ourdie contre
liii qa*ayee le consentement et en faveur
d*uiie priDcease qu'il saYait toe aim^
da peuple aotant mi'il en ^tait d^test^.
« Au moment ou Ton s'emparait de
Tempereur, quelqae bruit s'^tant fait
entire, Zoubor oounit tout alann^
chez le grand-due Alexandre : les ap-
partements de ce prince 6taient situ^a
au«des8oa8 de eeux de son p^re. II
n'avait aupres de lui que son fr^re
Constantin , ainsi <]ue les deux grandes-
ducbesses. Tune sa femme^ et Tautre
celle de son Mre. Constantin n'avalt
Hi initio dans le secret que le soir
mime : quoiquMl n'aimdt pas ]*empe«
reur, on craignaitquelque mdiscr^ion
d%SA part. cSs quatre personnages at-
tendaient dans la plus grande anxi^t^
Fissoe de T^v^nement : Tarriv^ de
Zoobof ne oontribua pas peu a aue-
menter lear inquietude. De son cdte,
Beoingsen, rest^ dans la cbambre de
Temper^ir avec un petit nombre de
cooiur^ , se trouvait fort eftibarrass^;
ii redt ^ bien davantage si Paul se
j^t arm^ de son 6p^ pour se d^fendre;
mais ce maibeureux prince ne ^f(§rait
pas une seule parole /et restait entid-
rement inunobile.
« L*empereur fut trouy6 dans cet
etat de snipeur par qnelques oonjur^
qui , dans leur ivresse , s'etant tromp^s
de cbernin, s'introduisirent tumul-
tueusement dans la cbambre de ce
prince.
« Le prince Jaschwill , major gene-
ral d^artiUerie, depuis quelque temps
en retiaite, entra le premier h la tete
de ses compagnons. ll s^ jeta furieux
8ur Tempereur, et, en le renversant
par terre, il fit tomber sur lui le pa«
ravent et la Teilleuse. Le reste de la
scene se passa dans les t^ebres. Be-
ningsen, croyant que Paul voulait fuir
ou se dtfendre, lui bria : « Au nom de
« Dieu, Sire, ne cbercbez pas h vous
« sauTcr, il y va de votre vie; on vous
« tuera si vous faites la moindre r^sis-.
« tance. * Pendant ce temps, le prince
Jaschwill, Gardanof, adjudant de la
garde k dieval , Tatarinof , colonel d*ar-
tillerie, rtforai6 depuis longtrnps, le
Srinoe F&einski et Statin, ofociers
e la garde, Element rtform^,
etaient aux mains avec I'empereur. II
paryint d'abord a se relever de terre;
mais il fiit renvers^ de nouveau, et se
blessa au cdt^ et & la joue en tombant
sur une taUe de marbre. Le gto^ral
Beningsenfut le seal qui ^vita de
prendre part k Taction; il r^ptoit a
Paul de ne pas se d^ndre. A peine
avait-il eu le temps de s'^loianer un
instant pour chercher de la lumi^
dans une pito voisine, qu'il aper^t
en rentrant Paul gisant toangl^ k
I'aide d'une ^diarpe. Paul ne s^^tait
d^atto que faiblement; seulement 11
avait pasM la main entre son cou et
Fecbarpe, et dit en francais : a Mes-
« sieurs, au nom du del, ^pargnez*
« moi; laissez-moi le temps de prier
« Dieu. » Telles fiirent ses demidres
paroles. *
• Beningsen, voyant que Paul ne
donnait aucun signe de vie, fit trans-
porter le cadavre sur un lit, et lui en-
veloppa la t^te d*une couverture. Le
capitaine de carde , Biarkof , ^tant entr^
avec trente nonmies . re^ut Tordre do
s'assurer de toutes les avenues de la
cbambre du feu prince , et de n'y laisser
pN^ntoer personne. Aprte ces disposi-
tions, Beningsen se bata de faire con-
nattre au grand-due k quel prix il etait
rtrvenu au trdne. Ce prince se livra
toutes les demonstrations de la plus
vive douleur. Lorsque Pablen, qui
avait €U cbarg^ de la garde du grand
escalier, et de couper la retraite a Paul
en cas de besoin, apprit que ce prince
avait d€\k subi son sort, il se rendit
aupres ou nouvel empereur. II arriva
au moment ob, celui-ci s'^criait toot
bors de lui : « On dira que je suis Tas-
« sassin de mon p^re ! on m'avait pro-
« mis de ne pas attenter a ses jours.
« Je suis I'bomme le plus malbeureox
«du monde!* Pablen, plus occup6
d'a&surer le tr6ne k Tempereur vivant
que de donner des larmes k Tempereur
mort, dit k Alexandre: « Sire, avant
« toutes choses, veuillez vous sou-
« venir qu'un empereur ne peut sc
K mettre en possession de Pautorite
40$
L'ONiV](;as.
n.qulaif^ bL partMi^lHm du pevple;
• Vtk nomeiit de faibksse poiurrait
« «Y#ir Jes mites ks plus fiunestes; II
•t Q'y « DM HB memMl a perdre pour
« iHHts iaift reooBoaltM par I'ann^
a — ^t ma mto, qa'est-cUedeveaue^
« r^plk)aa TeiBpereur. — Sire, rapoa*
« dit Pahl6D , je vais me rendre auprea
« deSa Majesty » Enefifet, tt aetanla
pas a-se prteatar ohez I'imf^atriee;
A pria la graode maltrcsse die la oour,
la cowtesae de LieTen, d'inslriiifis Sa
Majesty de ce q«i Tenait da se passer.
Ge qtt'il y a de lemarquable, c'est que
Kes sekies d'horreur qai veoaient era*
voir liea si pr^ da cette princesse
n'swmi point iaterrompu son som-
neil. E¥eui^ per la oomtesse de Lie-
veo, elle crut d*abord qu'on Tenait
pour la pr^earer k la nouvelle de la
mort de sa fille, la princesse palatine
de Hongrie. « Nob , madame , lui dit la
«comtesse,yotre Maieste doit svr-
« vivre k un plus grand malheiir; Tern*
« pereur yient de mourir d'nne attaqiie
« d'apeptexle. --* Nob, non, s'^ie
m rimperatriee, ii a €U assassin^. —
« II faat done vous Tavover, » r^pHqua
ki oomtesse de Lieven. Alors Fimp^
latriee, s'^nt habtll^ k la bdte, se
prteipita dans la <^ambre de Paul.
EMe trouva dans le salon qai separait
sea apBaitements de ceux de Terope-
reur, le lieutenant ties gardes Polta-
raCsfci, qui oontmandait les trente
bommes que le g^n^ral Mpr^radovitch
7 avait postis.
« Poltoratski d^lara k rimp^ratriee
qQ*elle ne pouvait passer outre. La
prinoesse insists , en demandant s'il ne
tfi reconoaissait pas, et de qui il tenait
ces ordres. L'olficier r^pondit quMl
avait rhonneur de la connattre, et que
ces ordres .lui avaient ^te donnes par
sen colonel. N^anmoins l*imp6ratrice
voulut avancer malgr^ les gardes :
oeux-cl crofs^rent ia balonnette. Alors
\h prinoesse s*^tant retoarn^ vers Pol^
taratski hit donna un souillet, et
toraba ^vanooie dans un fauteuil.
« Les deux grandes-duchesses , Marie
et Gatberine, avaient suivi leur m^re :
eHes essayerent vainement de la tran-
quilliser. L'imp^ratrice ayant demand^
UB f«m d'eau, hb aoldat arKacba le
vent dea maina de la persoBoe qui
Tavait apport^, et, s'dtairt touro^ vers
Vimp^atrioe, il le kii pr^sesta aprte
en avoir bu quelques ((outtes, ea di*
sent: « Vous pouvezboure sans crainte«
• il n'y a pas de poison ; d'ailleun vous
« n'dtes cause de rien. »
c Enfln rimperatrice reotra dans aes
apparfeements. Pablen vint la dbezcher
pour la oonduune cbez son fila : a peine
avatt-elle eu le temps de reprendiie aes
esprits;.cepeBdant die eut asaez de
force pour elever uoe ooatestalion sur
ses droits. Elle pr^tendit qu*en vertu
de son oouronnemeat elle etait inuM^
ratrice nfgnante, et qu*eD eette quality
on devait lui priier serment de fid^
lit^. I^'empereur avait d^ perdu un
temps pvto'eux a attendre sa no^e; en
la trouvant dans cette rdsobitioB, il se
touma vers Pablen, et lui dit : « Voill^
« sn nouvel embarras aoquel nous ne
« nous attendions pas. » Pablen , ne se
laissant arr^ter par aucune- considera-
tion, obligea rempereor a partir sur-
le-cbamp. La m^me voiture qui ^tait
pr^r^ pour transporter Paul k la
forteresse , servit k conduire Alexaadre
d» palaif Michel au polais d'biver, ou
il devait recevoir le serment de fidelity
des grands dignitaires de I'empirc.
Pahlen et Zoubof roont^enft derriere
la voiture : les bataillons de la ^arde
suivirent. Bentngsen rests aupres de
nmf|eratrice mire , afin de la detoarner
des id^ qui Tooeupaient. Ce ne fut
pas sans peine que Ton amena Marie
F^dorovna a renoncer a ses preten-
tions; et tels sont les cbarmes de Tau-
torite supreme, qu*au milieu de eette
nuit d'horreur lis avaient assezd'em-
pire pour faire oublier a une femme
douce et vertueuse les dangers du pou-
voir, la fin alfreuse d'un ^pom, les
sentiments d'une mere, les conseils
de la prudence et de la raison.
« Enfin Ton fit conseotir rimpera-
trice k prater serment a ferapereur
son fits. D^ ce moment, tout se passa
comma si Paul edt suooombe k one
mort naturelle.
« Un medecin et un cbirorgten firent
Touverture du corps de Paul , et indi*
RI^SSIE.
407
fioeat , tn tcanfls d«' Fart , les eims
itul avaient oeeasienn^ la nait de TeBt-
pereor* U fat eaAmmo^^ eqws^ pen-
itot emiiae jours snriui lit de par^,
et eimn H^uin^ dans le oavettii de ms
peres awoe tovle la pompe aeciNttiiinte
• On eut lieu de reefiarfMf mw
UMites lealfois qfxe ke oMmoniee cro-
sage efeligemni Aleiafldce df approdier
des aaABasde eon ^ere, la dooieuretle
saiaiaaeioeat le peignateot sur tons sm
traits.
« (^GMit aax aaaaasias de Paul, its
ftireat tout ^fcMgii^; phuieun d^tntre
eux totirt eiiKS dam lee r^skDeete
de Sib^rie; M. de Pahlea mane fut
foiod de quitter PMersbowg. »
Ea cxaoiinant eelte noliee, on se*
rait porte i^ennre mi*eUe a M Migie
Sir im des chefs oe la oaBapiration,
Dt ik cause des details gu'oo f troure 2
mie par le m^agenent otrtoe qui
wy fin YOtr partout en oe qui regarde
b imnriit^ des ciieft de oette auda-
.eicBse enlMsrise ; on J ietr«Mi?e mdme ^
a Fegnd d'Alexaodre, un bUbae qui
d^
drautant plus d^eifet, qii*il se
nise aoes des formea remetueuses :
u en est de m^me pour nmptetrice
Marie: en on root, il r^e dans tout
Is recit un caract^re qui accuse un
eonspinteur'dont I'exil ou la disgrdoe
M-pajt h etime* I^un autre cAte , Tor-
tuiigraphe des noois propres , que nous
spooa soBifent rectifi^, annonce une
pteoie Atraof^re; mals peut-^re
D'teit««e qu'on artifice poor d^tourner
les aoupQone du vi^ritable auteur de
rartiele. L*opinion de Napol^n sur la
mort de Pain, et qa'il a consignee dans
les Btteoires de Sainte-Hel^ne , ne pr6-
senfe lien de nou?eau, si ce n'est
qo'elle aaratt trops^^ en ce qui con-
eeme racquieseement d'Aleaandre au
denouement tragique de cette catas*
tivphe. On ne saura Jamais tout sur la
mort de Paul; mate on en saft asses
sar les faitss prtneipaux pour s^en for*
mer one oonne^n h pen prds aussi
oooiplite que pour d*autres ^v^ements
de la mime nature : nous nous borne*
rioBS done k ces deux rteits , si nous
ne crovions pas devoir mettre sous les
yeux oe nos tocleurs une notice qui a
paiti dans le 7iMpe (ft ftvrier MH),
et qui a et^ r^digeeaiir des renseigne-
mente autbentiqvea. Gslte pi^. donne
anr la vie privfede Paul, et sur qnel-
ques personnel^ de sa eour, dea d^
tails qui cxpliqaeBt biea des.chosBS, et
r^v^lent plusimaa eirooBStaneecHiiH>os-
tantes de la vie piivfede cet inHortun^
monarque*
« Pour qnioonque i^a pas suivi I'em-
perev Paul dans sa vie priv^, tout est
myttian et oantradictioa dans sa cob-
dwIeL Sea vertus et sea vices parMseent
egitaMnt inejqdieiMes, lorsqifon ne
les envisafse que sous un seal point de
vue; aassi les toivaine ont port6 sur
ce prince des jagemcntasi divers et si
oppose, que Ton serait tent6 de rc^
garder lea una comnie des d^aeleure
passional, et les aotrea eomme des
Gn^yristes k gages. Cepeadant , dans
ir laexaetitude mdne, ils ont po
errer de bonne foi; car, soit en bieai,
soit en mal, ]e ne saebe rien dont
Paul n'ait M capable*
« Dans une spbdre raoins dievie , son
oridnalitl n'eut dtA que piquante; le
tbditre oik I'appelalt sa naisaance le
transforms en mauvais empereur^ et
leS circonstances contribu^rent sin^*-
lidrement k mettre en sailiie les traits
de ce canraet^ oil les contrastes lat*
taient sans cesse pour dominer tour a
tour.
« Sa tsine ramass^, sa d^mavehe
brusque, ses manidres henrt6es et la
difformitl de ses traits, ^ient eomase
un reprodie a CaHierine II , et lui rap-
pelaient peut-ltre un de ces ^orts qui
apparent la gloire deson r^ne. Comme
eiie ne faisart point un myst^re de sqn
eloignement pour le tsar^itch, ses
favoris , et surtout le prince Potemkin ,
ne lui mluagealent ai fbumviiation , ui
m^me les outrages.
«L*Mu€ation de Paul, confix au
comtePanvn (Nio^taslvanovitcb), avait
eu une double direction, Tune osten*
sible et convenabie h son rang, I'autre
secrete, et dont Teffet tendait h ^ouf*
fer ses bonnes dispositions et h V€-
nerver par les volupt^s. Ses moeors
ne sortirent point intactes de cette
^preuvc, et on lui reproche les faiV
408
'5»
L'UNIVERS.
blWi8iil«<IMd^fic II, dont ii imi-
tait ju^uto costume. Cependant ii
teitnatuteUemeot port6 a la galan-
t6rie, eti6bn.penchant pour lea femmes
avait qudque chose ae dieraleresque
qui contrastait d'uoe maoi^ inzarre
avec les mceurs de I'^poque , ausai bien
qu'avec son propre axtwieur.
«Cattierine, entour^ de favoris
puissant^ ^ amiritieux, avait mari^
aon ills k une princesse de Wurtem-
berg, dont' la ftoodit^ assuratt le
trdne h ^fiaunille. Si une fin prtaa-
tu'n6e D'edt/point d^jou^ les intentions
attribute Flmp^ratrice, il est pro-
bable que* la couronne eOt pa83^ h
Alaiandre, au prejudice de lli^ritier
direct. Cependant Paul, rel^u6 k
^tchina, y^couvait son ressentiment,
et-semblait uniquement occupy de faire
mancenvreir / 9on r^ment, qu'il se
plaisait It foivm.k la discipline prus-
sienne.
« Le vovage qu*il fit depuis en Eu*
rope sous le nom de oomte du Nerd, et
ks honneurs dont il se vit entour^ lui
apprirent k s'observer en public, et
c^est surtout depuis cette ^poque qu*il
affeeta de negli{;er ce a quoi il sentait
ne pouvoir attemdre.
«Ge prince, malgr^ ses defauts,
oagoait beauooup a ^re connu ; il avait
& repartie facile, I'esprit enjou6 et la
mtooire heureuse. II parlait avec ^1^-
gance le francs et lallemand, et il
a^duisait souvent par Tam^nit^ de son
entretien ceux mtoies qu'il vepait d'in-
tisMder par T^trangete de ses formes
et le jeu expressif de sa physipnomie.
Un jour, pour ne oiter qu*un exemple,
Kotzebue, qui avait 6t6 exile par ses
ordres, fut mand^ au palais; il 8*v
rendit en tremblant, et sortit de cettie
entrevue aussi d^vou^ k Tempereur que
ses serviteurs les plus intimes.
« Naturellement geo^reux, il don-
nait avec une grSce parfaite, surtout
lorsqu'il s'qeissait de reparer un tort.
£n butte, oepuis son enfaoce, a des
perstoitions de tout genre, il etait ex-
trtoement mefiant; et ceux qui Ten-
tooraient prenaient a tdche de Tentre-
tenir dans ces dispositions, autant
ppur 9e reodre n^cess^ires que pour
Eloigner ou perdrequiconque leur poi^
tait ombrage. Frapp^ de rid^ qu'on
en voulaitases jours, il prenait nabi-
tuellement du oontre-poison , et con-
chait rarement deux nuits de suitedans
la mtoe diambre. L'^toement n'a
gie trop bien justifi^ ses provisions;
s recoms , les cacbettes , 1^ comdors
et les sonterrains qu'il avait fait pra-
tiquer dans son palais, ne purent le
soustraire au ressentiment de ses fyi-'
voris.
« Les toivains , qni attribuent pres-
que toujours des causes extraordinairea
aux catastrophes des t^tes couronn^ ,
ont essay6 d*expllauer cet assassinat
par des inflnences aiplomatiques, et le
soupoon tomba particuli^rement sur
r Angleterre. A les entendre , cette puis-
sance, redoutant une alliance entre la
France rOpublicaine et la Russie, se
h§ta de frapper Paul au milieu de ses.
nouveaux projets. Je n'h^ite point a
rel^uer cette opinion parmi les calon>>
nies gratuites des faiseurs de mtooi-
res. qui , en g6n^l , connaissent mieux
les livres que less cours. De tels moyens
sont rarement employ^ , |>arce qu'ils
provoqueraient des reprOsailles, et les
{)rinces aiment mieux jouer le sort de
eurs peuples que de compromettre
leur sdrete personne||e.
« II est plus rationnel de supposer
one le caractere soup^nneux de Paul,
dont Temportement se manifestait par
des coups terribles, inspira a ceux
mtoes ^i jouissaient de sa confiance
le dessem de le perdre pour se mettre
k Tabri d*une disgrace eventuelle.
« On salt d'ailleurs que des rensei-
gnements officieux sur ce complot
etaient parvenus au grand veneur Kou*
taitzof, Des circonstances moins con«
nues I'emp^erent de s'en ouvrir k
Feropereur.
« Quoique ie ne cite qa^k regret des
bommes que j'ai connus, la rOritO bis>
torique me fait un devoir iTentrer ici
dans quelques dOveloppements ndces*
saires. Koutaitzof devait t)ut aux bon-
t^ de Paul. II avait etc d^nnO enfant a
ce prince, dont il devlntle barbier et
le valet de cbambre. Plus tard, il sut
lellement s^insinuer daas les bonnes
RUSSIE.
409
grfaet de son miitie, qu*il jMrmt auz
pKonirefl charges. Get homme, qui
trafiquaittiasseaieiit <fe sa faveur, avait
asses d'empire sor Paul poor d^urner
quelqoes-uiia des oukases qa'il fulmi-
nait dans les premiers acote de sa co*
Itte. Pen de temps avant la catastro-
phe, ii etait Darvenii h faire r^voqner
rordre rdatii ^ l*ex-£i¥ori Zoubof . qui
aTait m rd^^ daos Fint^rieur de la
Rossie quelaues mois apr^ la mort de
Catherine. L'empereur avait n^ist^
longtemps pour plus d*un motif; mais
il avait ennn crae dans un de oes mo*
meats d*abandoD ^e les courtisans
tavent si hien saisir; et une somme
considerable fat, dit-on, le prix de oe
senice.
« Un joar, Koutaitzof troava sur
son secretaire un paquet cachets qoi
renfennait des dmifis pr^s sur la
conspiration. En t#te de la liste des
conjures, il lut, non sans terreur, le
Dom de ce mdme Zoubof dont il avait
n^gocie le rappel. Pr^vovant blen qw
le fougueux autocrate renyelopperait
dans sa vengeance, il jeta le paquet au
feu. 11 est permis de croire qu'int^
ress^ comme il T^tait, il tira de
erands avantages de ceux dont il tenait
u vie entre ses mains, -et que ees m^
nagements Fenlac^ent dans le com*
tM. Parmi les coniur^i on remarquait
eoffite Zoubof, le pnnce Jaschv^ell ,
faide de camp general Ouvarof , Tal^
sin, Orlof, et le oomte Pahlen, gou-
vemear militairede Saint-P^tersbourg.
« Je suis porte k croire, sans pou-
voir toutefois I'affirmer, que la r^v^la-
tioo avait M faite par Ouvarof, qui
devait son ti^ation rapide au crttlit
dont joutssait auprte de Paul la fsimille
Lapookhio, ^ont j'aurai bient6t h
parler. N^ayant ancun ressentiment
particalier centre Temperenr qui I'avait
eombie de fatveurs, cet attentat ne
poavait que nuire a sa fortune. Toute-
fois I'avis anonyme donn4 h Koutaitzof
tent conune non avenu, Ouvarof dut
&ire bonne contenance, et m^me fei-
gner par sa participation active les
soupcons qui pouvaient planer sur lui.
• Quoi gu'il en soit, Tempereur re«
fkt bientot ap '
apr^ un message sem*
blable. Sa graadeur d*Anie se r6vM
tout enti^; car c*e8t une diose h si-
gnaler, que les oontrari6t6i et les tra-
ossseries le trouvaient pusillanime et
irritable, tandis que les occasions so-
lennelles et dfoisives le rendaient poor
ainsi dire k sa eto^rosit^ native, en
lui ofifrant un tlmitre digne de lui.
« II fait venir Pahlen, lui remet V^t
crit, et, flxant sur lui ses regards vifii
et pi^n^trants, il lui demande tranguil-
lement ce que cela sienifie. Celui-d,
profondtoent dissimufe et pr^par^ h
tout, afifecte une contenance rerme.
« Je le savais, dit-il k Pempereur, et,
« poar mieui connaftre tons vos enne-
« mis, j'ai dd jouer moi-m£me le rdle
« de conspirateur. » lii-dessns, il s'^
tendit longuement sur le plan et les
moyenades coojor6s , et d^nonqa mAme
rimp^ratrice et les grands-ducs A lexan-
dre et Gonstantin. Paul, stup^fait,
dressa une liste de proscription, el
remit k I'audacieux imposteur Tordre
qui le mettait en mesure d'^ir centre
(es membres de la feimiUe imp6riale.
Pahlen n'eut rien de plus presse que de
communiquer secr^ment ces pidces
aux coupables et k eeux que sa calom^
nie venait de comprometire. D^ lors,
il ne fut plus question que de hAter le
coup. Les drconstances odieuses de la
mort de Paul sont assez connues ; pour
moi, lorsque je mets dans la balance
ses vertus et ses hearts, je ne trouve
plus de voix que pour le plaindre.
« Alexandre n*avait done point cons-
pire, comme on Ta faussement pr^-
lendu , mais , cro}[ant sa perte certame ,
il laissa faire. L*nistoire lui reprodiera
d'avoir anmisti6 sur le trdne les assasr
sins de son pere. Sa jeunesse et la
puissance des conjures expiiquent sa
conduite, sans toutefois la jnstiQer.
Quant h Gonstantin, il Si'eleva avec
Anergic centre les auteurs de cet at-
tentat, et la noblesse ne lui a jamais
Eardonn^ cette manifestation honora-
le. Depuis, il a ^t^ exclu du trdne.
« Nous avons dit que les mauvais
traitements avalent aigri le caract^re
de Paul; il nous reste a indiqoer som-
mairement qoelques circonstances d'in-
t^rieur qui pourront, jusqu*^ on o^?
410
UUNiVfiAS.
taiD point , axyliaiMv te kyBvnreries de
sa Gonduite «t lie ses acte» adninw*
tratifisi.
« Una fois empareur, il sambXa |tff«a*
dre ^ Ucbe d'insulter, par i*^ciat dos
e^r^monies pubiioueB, las saignaur*
Si avaiavt yoni q» sa disgrwe sous
tharine. La praniar acta saiUant da
sanr^oafatrexhufQatioadePiarrein ,
auqual il readit sotomial&amant laa
hoonaurfr funabias, comma poar pro*
tatter hautemant eoatra la passe. II
f ^kit a&suita d'aatourar son couron*
naoiaiit da tottt le fasta d'tma aoar
rieba at somptueusa. las oostumas des
damaa da la ooiir furant offieiellemant
BTCBarita d'apras las niod^aa usilaa k
la aour das damiers rois da Franca.
« S^uita par aas nouTaautila, la m^
Idaasa da Patarsbourg at oelia das villas
las plua considi^rablas da Faminra ac-
CQurut an fcnila k Mosoau. La jour da
la cMmonia* Paul sortit k cheval da
eais de P^trovski, at sa rendit au
emlin ,%acort^ da sas fila, das grands
« Ge flit dana las fites nombrensas
^i sa suca^ereBt qa^il remarqna la
jauna Anna Ptoovna, fiUa du saaateur
iLapoiikhin, ai^*gouv»naur g^naral
d'laroslavl. G*ast dans eette familla
qtt*un si^cle auparavant Pierre leGrand
avail cboiisi sa pramiera Spouse, mars
dayiafortuA^ Alesis.
« Lea cbarmes d*Anna, sas ^r^iees,
aa moda&tia Orant sur Paul una laipres-
sJeneitvaerdinaira. Cependantcagodt,
qui davint una passion violai^^ na fat
point ramarque d*abord, at ii sa con-
tenta d'ang^r an tarmes asacs vaguaa
la s^nataur Lapcmkiiin k venir s'atzdilir
a Patarsbourg.
• Soit qu'il vouMt lutter contra oa
panabant, soit qu*il filt distrait par las
soina at las devoirs nouveaux qua Ini
impoaait la oouronne, il quitta Mos*
cou» at pour la maokent eette pro|K>«
sitiiOA n aut pas da suite. Una cirr
emistanee fortuita vint bientdt apres
r^vaUlar en lui ta souvenir d'Anoa P4-
trovna* La gantilbomme de la abam^
bre, Bamidof (Gr^oira Alexandra^
vitb), recbarcba Gatharina Patrovna,
scour d'itnna, at dcmaiidft^ aaion IV
sage, rautorisatiQH de ramparaur.
Paul crut qu'il a'agisaatt d'Anna, at,
dana un premier mouvamant de d^t,
il intardit k Damidaf la villa da Patars-
bourg , at Taxclut du sarviea aetif, aaos
toi^ois s'opposar k e^ roariaga.
• Un an a|^r^, il flt un vojraga k
Casan , at revipt k Moscottt ou d ravit
Anna , at api^it d'eUe la mariaga da sa
8Q»ur. Aiors il it proraatUra a son p^re
da sa randre k Patersbour^, ou li la
eoiobla d'bonneurs at da difniit^. La
position du s^nalaur Laponkhia ^it
das phia d^ticataa; il n'ignorait pas la
motif de sa nouvalla favaur, ni le dan-
gar da haoitar da firont un nudtre im*
p^rieux et passionne. De son eM^
Anna se d^smait d'lm cboix qui con-
trariait son ineltnation aacrata. Ella
avait eta fiances au prince Gagarin
(Paul Gavril^itcb), et ka obstadas
^e raaaantrait lamr union donnaieot
una nonvalle vivaisit^ h km mutual
attadiemant.
< Paul na pouvait se dissimiiler qu'il
n'avait auenn das avantagas physiques
aapables da touchar una jauna par*
Sonne. II assaya inutilemaak d'excttar
son ambition; il alia mdme jusqtt*^ lui
proposerda r^udiar rimperatricapour
mattre la oouronne sur sa tgta. Das
offraa si briUantaa dpouvant^rent Anna
P6trovna^ et il tenta dasoniiaia da
vaincra una r^istanoa dont il ignoralt
la motif, k ferae de pr^venanoas et da
g^n^osita.
« Dana ce but, il alava la si^nataur
Lapoukhin a la dignite s^r^ussima,
et voyant qu'Anna natenait point a la
eoitr le rang que lui asaignait sa pre-
ference exdostve, il lui ooo^a ka
insignes de I'ordra da Malta , atnsi qn'k
k eomtesse Litta , oa qui leur assuratt
la pas sur las autras dames d'hoonaur.
« L'imparatrica Maria Fdodoiroviia
ne pouvait ^ra jalaose d'une rivale
qui gtoissait la pramiera da sa &vaur,
et eue lui fi6moigna ooBstammant Tin-
t^rdt la plus affeetuaux.
« Paul essayait aussi d'd)lottir Anna
par des innovations dispendiattses qui
ne la randaiant paSi plus atmable.
Dans un caprice de prodigality, il fit
1
'_
flS^'?*^
\
"^^li.
i.^-^
^-J^p^-V_
-^-^^^Wilfcdil; -: -J
^^^E
»t
>^;:i^«,„^v /-*
AUSSIE.
411
fondre la vaiaselle oaatsive des villes
de gottverneiuent pour earichir Tuni*
forme de $es chevalierg-gardes. Uq
jour, il ramassa tin gant dela favorite,
et donna des ordre& pour Dodre peindre
de la m&nfi couleur le palais de Saint-
Michel gui venalt d^£tre achev^.
« Sa ^oasie allait jusqu'5 Fextrava*
gance. Ayant appris que deux jeunes
sei^eurs, Larioeaupiere et Barazdin,
avaient dans^ avec Anna, qui avait
setnbl^ y pjrendre plaisir, il deiendit la
valse dans les bals oarticuUers et pu-
hlies; et, des deux oanseurs pr^^res.
Tun fut mis pour viogt-quatre heures
h la forteresse, I'autre dut quitter Pe^
tersbouTjg. Eofin une circonstance for^
tuiie kii dessiUa les yeux. Le jeune
Ga^rin serTait en Italie sous les or-
dres de Souvorof. tin bulletin Yenait
d'etre adresse a Terapereur sur un
avanta^ remport^ par les Russes. I)
le lut a Anna dont remotion ^tait vi-*
sible; mais lorsqull nomma parmi les
bless^ le prince Gagarin, elle ne fut
plus maitresse de sa douleur. Paul
ex^ea une explication qui lui fut don*
nie. Get homme si entier, dont le bon^
beor Teaait d'etre detruit , montra dans
cette occasion toute sa grandeur d'ilme*^
II lui reprocba avec bont^ d'avoir
manque de confiance a son ^sard, lui
donaa sa parole imp^iale qu^eUe serait
cHue a Gagarin, ^youtant qtril aurait,
soin de son aYaocement et de sa for-
tune; et, par la suite, il remptit di-
gnemeat cette tdcbe difficile et glo-
rieuse.
« Mais, depuis ee BH>meDt« il devint
de plus en plus sombre et ^ntasque.
Les disgraces, les bannissements, les
oidres lies plus arbitraires se succede-
rent avec rapidity, et amenerent les
cboses a un point qui annon^ait aux
moins dairvoyaats une catastrophe
procbaine,
« Quelques ana^s apres sa mort,
une malaoie de poitrine enleva a Pe-
tersbourg Anna Petrovna, princesse
Gagarin, dont j'ai recueilii les derniers
soupirs. Elle ne parlait jamais de son
bienfaitear qu'avec attendrisseoieot;
et je lui ai repete maintes fois que sa
vertu avait fait plus de inal a la Hussie
que n'eussant pu lui ea oceasionoer les
vices et les prodf galit£s d'une favorite
ambitieuse..^
uaxAxaaB i««.
(1801-1026.) Jusqu'ici nous arons vn
la Russie mettre a ^fit le disaccord
de TEurope pour etendre ses Iron-
tieres, en mme temps qu'eUe donnail
plus d'homog^niit^ a ses institutions.
Si Ton suit les progres de cet empire
depuis Pierre le Grand , on reconnaJt
que le caract^ des princes qui se.sont
8ucc^6 a merveilleusement n&U le d^
veloppement de sa puissance militaire :
il n'est pas jusqu^aux r^es voloptueux
d'Anne et d^lisabetn qui n'aient
fourni leur contingent de gloire; les
bizarreries de Pierre III n'en avaient
aas moins la guerre pour objet; Ca«
iherioe, tout en affectantde travailler
uniquement a ramilioration du sort
de ses peuples , avait 6tendtt son sceptre
plus loin qu*aucun de ses pr^eces-
seurs; eafin Paul I'", dans le court
espace de quatre* ann^es, avait mis la
r^publique fran^iise en p^il, et, par
un brusque retour de sa politique, la
coalition s'^tait trouv^e deeouragee,
et FAngleterre r^uite h n'esperer de
salut aue dans le raeurtre de Tauto-
crate uevenu Hallie et Fadmirateur du
premier consul. Telle est Tenergie vi-
tale de la nation russe, que les fautes
m^mes de ses princes lui sont profita-
bles, comme s il fallait a ce corps ro-
buste un exercice violent a tout prix.
Apr^ tous ces regnes si agites et si
dissemblables, a Tambition pi'^s, on
voit moater sur le trone ensangiant^
un jeune nrince dont la douceur, la
justice et les qnalit^s les plus aiuia-
bles inspiraient les plus legitimes
esperances. Par un jeu singulier de la
fortune, il se trouva rantagoaiste d'un
homme a proportions b^roiques , dont
Tepee devait briser toutes les resis-
tances, dont la gloire devait ^lipser
toutes les gloires , et qui tomba du plus
haut de sa puissanee aux pieds d'un
prince sans talentsguerriers, d'ub rival,
qui, par le seul avantage de sa position,
sut mettre^ profit jusqu'^ sesd^faites,
419
L'UNIVERS.
et, dans une derail lutte corps h
corps, renversa sur la neige le vain-
queur de Marengo, d'Austerlitz et de
la Moskva.
Alexandre ne prit qa*k r«gret les
r^nes de I'eropire; il avait eu tout le
loisir d'^tudier les devoirs difficiles da
despotisme, et de mesurer Tabtme sur
lequel sont plac^ les de^r^ du tr6ne
tsarique. Vertueux et plein d^affection
pour les auteurs de ses jours, il s*^tait
vu fbro6, dans Fintmt de T^tat et
dans celui de sa propre conservation,
de consentir au d^tronement de son
p^e; mais, aprte le crime qui avait
couronn^ cet acte de r^volte, il s'aban-
donna h une douleur sincere. La pu-
rely de ses moeurs, la douceur de ses
traits, la droiture de ses intentions,
formaient un contraste singulier avec
la couleur sombre du regne qui venait
de finir; l*amour du peuple, d'autant
plus vif qu'il se confondait avec I'es-
poir, 6carteit du tr6ne les souvenirs
lugubres d'un crime atroce , et h peine ,
en' prince du r^sultat, les plus aus-
teres trouvaient-ils la force ae bldmer
ce qui devait dtre profitable k tous.
Les quality de ce jeune prince
avaient et6 beureusement d^velopp^es
par r^ducation; ses pr^pteurs, et
surtout le colonel la Harpe , lui avaient
Hiculqu^ de bonne heure le respect de
rbumanit^, et le sentiment proiond de
ce qu'un sottverain doit h ses peuples
en ^ange de leur ob^issance et de
leur d^vouement ; mais, en m^me temps
que Fesprit du grand-due se nourns-
salt de ces principes salutaires, il ne
pouvait se dissimuler qu'il est pour le
pouvoir, plus encore que pour Tnomme
priv^, des exigences de position et de
temps auxquelles doivent se plier les
theories morales; en un mot, que celui
qui gouvernerait toujours les bommes
tels Gu'ils devraient £tre, serait inha-
bile a les gouvemer tels qu*ils sont.
Le r^gne de Catberine II, celui de
Paul, lui avaient appris que la gran-
deur, la gloire et fa ^enerosit^, ont
leur c6i6 obscur, tandis que des actes
moralement oondamnables sont quel-
quefois en politique d*une incontestable
\itilit^. Ce fut done entre les limjtes
du bien abstralt et les conditions pra-
tiques d'un r^ne absolu qu'il tra^ sa
ligne de conduite, et ce milieu, dans
son aoception la plus bonorable , il ne
s'en torta jamais; il accepta les avan-
tages comme les inconv6nients de cette
modtotion, de cette temperance po-
litique, qu'il n'a pu suivre comme sys-
f^me que parce qu'elle ^tait dans les
conditions de sa nature. Si nous ajou-
tons k oes considerations que le rdle
au'il eut h remplir 6tait moms un r5le
'initiative que d'observation et de re-
sistance, on oomprendra pourquoi Na-
pol69n vaincu et detrdne a conserve
cette renomm^e prestigieuse qui s'at-
tache aux grandes cboses, tandis
qu' Alexandre, devenu I'arbitre de I'Eu-
rope, a plus de droits k I'estime qu'd
I'admiration.
Le cofonel l^asson a trace en ces
termes le portrait d' Alexandre encore/
grand-due: « Ce jeune prince, par la
purete de son moral et la beaute ae son
physique, inspire une esp^ce d'admira-
tion. On trouve presaue realise en lui
oet ideal qui nous enoiante dans Tele-
maque.
«0n pourrait aussi lui reprocber
les memes defauts que Fenelon laisse
k son eieve: mais ce sont peut-etre
moins des defauts que I'absence de
quelques qualites qui ne se sont point
encore developpees en lui , ou qui ont
ete repoussees dans son coeur par les
alentours meprisables qu'on lui a don-
nes. II a de Catberine une grandeur
de sentiment et une egalite (Thumeur
inalterable, un esprit juste et pene-
trant et une discretion rare, mais une
retenue, une circonspection oui n'est
pas de son dge, et qui serait ae la dis-
simulation, si on ne devait pas Fattri-
buer k la position genee oti il s'est
trouve entre son pdre et sa grand' mere,
plut6t qu'a son coeur naturellement
franc et ingenu. II a de sa m^re la
taille, la beaute, la douceur et la bien-
faisance; noais aucun trait exterieur
ne le rapproche de son pere, et il doit
d'ailleurs le craindre plus que I'aimer.
Paul , devinant les intentions de Catbe-
rine en faveur de ce fils , a toutours eu
de I'eloignement pour lui; il ne lui
RU8SIE.
4ia
trouve ni aon caractto ni ms godts;
car Alexandre paratt se prater par
ob^issanoe plus que par inclination h
ce que son p^e exige de lui. II est
ado?^ dn spidat k cause de sa bont^,
admir^ de Tofficier k cause de sa rai-
aon; il fst le m^iateur entre Tauto-
crate et les matheureux qui , pour quel-
goes riens, ont provoqu^ la colere et
la vengeance imperiale. Get 61^ve de la
Harpe ne serait pas grand-due de Rus*
sie qu'il inspirerait de Famour et de
rinter^; la nature Ta dou^ tres-riche-
meat des |)lu8 aioiabtes qualit^s^ et
ceDe d'h^itier du plus vaste empire du
oioode ne doit pas les rendre indiffi^
i€Qtes k rhumanit^; le cid le destine
peui-^tre k rendre trente millions d*es-
daves plus libres et dignes de Fdtre.
«Au reste, U est d'un caractere
heureux, mais passif. II manque de
hardiesse et de oonfianoe pour recber-
dier rbomme de m^ite, toujours
modeste et retenu : il est ii cramdre
que le plus im|x>rtuD et le plus effront^,
qui est ordinahrement le p»lus ignare et
fe plus m^ant, ne parvienne a Tob-
Muer. Se laissant trop aller aux impul-
sions ^tmnghreSj il ne s*abandonne
pas assez a celles de sa raison et de
■on ooeur. II semble perdre renvie de
a'instmire en perdant ses mattres, et
anrtout le colonel la Harpe. »
On pourrait s'^tonner qu'avec un
prince juste et pacifique la Russie soit
rest^ militaire et conqu^rante. Un
coop d*oeil jet^ sur la carte de cet em-
pire suffira pourqu'on reconnaisse que
ses frontims, ouvertes k Toccident,
le roeftent constamroent en p^il, jus-
qo'a ce que ses forces raantimes lui
aient assure Fempire de la Mdditer-
ranee; un accord possible entre les
gnindes puissances de TEurope pour-
xait lui retirer en deux campagnes tout
ce qu'il a conquis en un sidcle et demi.
It lui importe doocdese mdler k toutes
les goerres eontinentales , et de mettre
k prix son alliance pour aCfaiblir les
nations rtvales , et grandir ainsi jusqu'^
r^poque oil sa population, sans cesse
eroissante, le laissera sans apprehen-
sions sur son territoire et lui per-
mettra de s'etendre encore. Cest en
▼ain que TEurope se llatte que oe eorps
gisantesque se morcellera de lui-
meme ; le d^faot d'adh^on de tant de
pix)Tinces est moins un obstacle qu'un
moven pour le despotisme : qud in-
t^ret prendraient les Finois ^ la r6-
volte des peuples du Caucase? Quand
la Pologne s'est 6oulev6e , les peuplades
asiatiques ont-elles essay^ de ressaisir
leur ind^pendance? Sans doute la Rus>
sie subira le sort commun k tons les
peuples; mais les rivaliti^ i^esquines
des grands £tats de FEurope favorise-
ront loogtemps encore Fextension de
sa puissance, et elle ne p^riclitera que
par sa propre civilisation, k Fepoque
ou la scission du territoire s'operera
par la divergence des interlts.
La condutte du jeune tsar k F^ard
des conjures fut mixte, et resta pour
ainsi dire dans les limites de sa parti-
cipation au complot. Us furent £loi-
§n6s de la cour pour avoir m au ddk
e ses ordres; mais aucun sunplice ne
leur fit expier le meurtre oe Paul;
Alexandre aurait pu les sacrifier k sa
propre renomm6e, et rejeter ainsi sur
eux seuls tout Fodieux du forfeit; sa
conscience rej;)oussa une telle justifica-
tion, et jamais son amour pour la jus-
tice n'^lata plus que dans cette con-,
joncture delicate : il redoubla d'^gards
pour sa m^e, et tout le reste de sa vie
Fabsout du soup^on d'avoir atteot^
sciemment aux jours de son p^e.
En montant sur letrdne, il crut
devoir annoncer par une proclamation
quelle serait la li^ne de son adminis-
tration et de sa politique. Ce manifeste ,
con^u en termes g6n^aux, contenait
la promesse de gouverner conform^-
ment k Fesprit de Fimp^ratrice Cathe-
rine II. En s*abstenant de parler du
r^ne de Paul , on eUt dit qu'il craignait
d'eVoquer un souvenir funeste ; Faoan-
don des plans de ce malheureux empe>
reur n*eut peut-^tre pas d*autre motif.
Les premieres d-marches avec les
cabinets Strangers signal^rent une ten-
dance pacifique : le jeune tsar ecrivit a
George III pour lui t^moigner le d^ir
de terminer les difif^rends qui s'^taient
dev^ entre la Russie et FAngleterre;
pour montrer la franchise de ces ou-
414
L'UNEVEIIS.
▼erhires, tt fit rendre la libertt anx
Equipages tlont les bdtinaentB avatent
ifit6 s^questr^ par ordre de Paul; fl
leva les ]»robmftioDs, eons^enees
ndcessaires des hostiitt^, et fit pr6-
renir de oea dispositions ramiral Parker
qui commandait la flotte anglaise dans
la Baltique. Bonaparte ne vit dans
cette condaite mi'un corollaire de la
mort trasique oe Paul; cependant,
comme Alexandre avait siimiltan^ent
manifesto I'intentiOD de rester en paix
arec la France, le premier consul ne
perdft pas Tespoir de se condlier le
jeune empereur, qui recut avee les
m^mes 6^ards le g^n^ral Duroc et lord
Sainte-Heldne, ambassadeurs des deux
cours ri vales. Toutefois la preponde-
rance britanntqoe ne tarda pas k se
r6v61er; Terabiurgo hit d^nitirement
leT6 dte le 18 niai, et, nn mois apr^s,
une nouveHe conrention maritime,
conclne entre la *Ru8sie et I'Angle-
terre, fi^tipula que la premiere de
ces puissances abandonnerait tous les
points pr6c6demment eontest6s sans
pr6tendre tk aucune indemnity. II ^ait
CTident ou'nne determination si inat-
tendue biessait les int^r^ts de la Suede
et du Danemark , que la Russie avait
pouss^s h la guerre pour les m^mes
motifs 4ont il lui convenaH de fairs
actuellement si bon march6.
Com me compensation , la Su^de ob-
tint la publication d'un trafted*alliance
entre Petersbours etStockholm , traits
3ui avait M ratiQ6 la vellle de ia mort
e Paul.
L'appui du Tford manquait h la
France; la paix de Lun^ville ne parais-
sait qu^une tr^ve, pendant laquelle
cbacun se disposait a rentrer en lice;
le mauvais succte de Texpedition A't-
cf pte avait jete quelque decoura^ement
dans les esprits. Des preiimmaires
furent sign^s k Paris entre la France
et rAneleterre; et hurt jours apres, le
8 octoDre, un autre traits avec la
Russie r^gularisa la situation respec^
tive de Tempire et de la r^publique;
la paix d' Amiens, amenee par Pinter-
vention de la Russie, et surtout par
repuisement des parties belligerantes ,
fiit conclue sur des bases peu solides
(1809). Vers la m^me epoque, llAd6-
pendance de la r6publique desSept-Iles
tut garantie par la Franoe el la Tar-
quie. Cette mesure, dictee par llnt^rlt
anglais et russe, annon^it des Inteo-
tions bostHes contre les possesafOM
fran^ses en Italic.
Bientilt les vues da cabinet 4e
Londres commenoerent ik se dessioer
d^une mani^re plus nette. Aa meprfo
des traites, les vaisseaux aH^lais ne
respectaient plus auean pavilion, et
revacuation da Hanovre etait Tc^et
de reclamations incessantes. Au milieu
de ces tiraillements, qui annoni^aient
one rapture prochaine, Markof, am-
bassadeur russe k Paris, se livrait k
de sourdes intrigues qai compromet*
taient le carad^ de son soaverafn :
11 fut honteosement expuls^de France ;
et le tsar, poar attenuer oe que oe ooup
d^autorite avait de blessantpour sa dt-
gnite, jugea convenable de gratlfier
rimperitie de ce ministre d'une pen*
sion de douze mille roubles.
Tandis que rinfluence russe se r^
veiait de tout cdte dans les affaires de
TEurope, les courtisans cherchaient k
deeouvrir le cdte faible du jeune em-
pereur : la nature Favait cadie dans
un penchant trds-prc«once poar le
sexe, et qu'augmentaient encore les
seductions ^*une cour brillante. Marie
It TAge de seize ans k la prinoesse
Louise-Ameiie, fille du margrave de
Bade , et qui prit , en adoptant la eom-
munion greeque, le nom d'lfelisabetli
Alexeievna, n se contenta, pendant
quelque temps, des affections oonjo-
gales, et oonserva memo jusqu*A aa
mort, pour sa vertueuse epottse« les
sentiments d^une estime merilee : on
assure qu'une inoommodite tres-oom-
mune dans le Nord. en fanant preroa*
torement la beaute d'^lisabeth , eioinia
jd'elle son jeune epoux, el la priva des
douceurs oe la matemlte. Nous ne si-
gnalerons pas les nombreoses infide-
utes d* Alexandre, qui interessent peu
rhistoire : elles <mt toujours ete ooa-
vertes d*un voHe de decenoe , et jamais,
que nous saehions, elles R*ont eieroe
une influence sensible sorsa politiqiie.
Les desordres de radministrotion
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I
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• •'
RUSSIE.
415
appelaient une inroinpte rtforme: fo
tsar sVn oocupa avec sollKitiide; mats
la m^me bienveiilance, qui le por-
tait a entrepreodre cette tlk^be difG-
cile, Veinp6cfaait d*attaquer avec une
fierroet^ emcaca des abos dont tant de
fbnctionnaires profitaient. « 11 corn-
men^ , dit RaUbe , par abolir la ehan-
ceHerie secrete « veritable inquisition
d*£tat, que Catherine avait oonserv^e
depuis Tann^ 1763, sous le nom am-
bigtt de d^parteroent secret. II ^blit
on conseil permanent pour Texamen
pT^able de toutes les ordonnances
3ii*il y aurait h rendre sor ks affaires
e Fempire; il tnTCStit d*une nouvelle
considtf ation le s^nat dirigeant , et fin-
cerposa eomme mMiateur entre le
peuple et le souverain ; » mais il ne
put arr^ter la marche vicieuse que la
T^alit^ avait introdufte dans ce coips
nombreux, ou la capacite administra-
tWe et la probity ^prour^e se trouv«nt
mretnent T^unies. Le pouvoir ^fectrf
da siaat resta par le fait fort pen de
ehose, eomine rextgeaient les condi-
tions d'un gouTernement despotique;
mats on se serrit souvent de sa pr^
tendue influence comme d*un pr^texte
sp^dcttx pour ^luder des demandes
auxquellcs on iUH peu dispose h ob-
tensp^r. « Alexandre r^tablit les re-
lations de commerce , rappHa de Sib^rie
mi grand nonAnre d'exiles, permit la
libre importation des livres, modilla
la 8fr^t6 de la censure, exerapta le
clerg6 des peines corporeUes, restitua
k la noblesse ses anciens droits, ao-
oorda aox fermiers la permission dc
eouper du bois dans les forto dc la
cDuronne, encouragea Ke commerce et
MB manufactures, et s^effor^ d'ara^
Korer la condition des serfe. »
Tandis que M. de Kalitcbrf, envo^
rosse h Paris, prescrivalt h la France,
eomme condition de la paix euro-
B^nne, la r^t^gratfon des J^ts de
aples et de Sardaigne sous leurs
prfncea l^crtimes, Alexandre consom-
mait (1901) la r^nion de la G^origie
a Penmfre Tusse. Do reste, cet empi^
tement, dont les guenres ult^rieures
eoQtre la Turqnie et la Perse ont d^
nootre Pimportance, ^tait justifi^ par
des promesaes «p^cieiMe8. « Nous avons
consenti , d^ara le tsar, dans un ma-
nifeste, h Funion de la G^gieavec la
Russie, non pour augmenter notre
puissance, ni dans des vues nrt^rea-
s^, mais uniipiement pour r^trt>lis-
sement de la justice, et pour la s^-
rit^ 6es personnes eC des propri^l^ ;
toutes les taxes payto par votre pays
seront employ^ h Totre propre usa^
et pour le r^tablissement des villes et
des vfHages d^troits : votre boiiheur
et Yotre prosp6rit6' seront nonr nous
la seule et la plus agr^aMe des r^oom-
penses. » En dffet, (K>urq«e la G^gie
dcvtnt une acquisition utile, il fkllait
la soustraire h Tinfluence des gouver-
neurs voisins, et la pr^arer oar degr^
h une reorganisation complete.
Les tnt^rdls de I'Angleterre ^taienC
^idemment contraires an d^reloppe-
ment de la puissance russe dans rO-
rient, mais il lui importait surtout de
a'assurer une alliance imm^iate dans
le Nord pour neutraliser le progres de
{'influence francaise. Une partie de
I'ann^ 1803 fut consacr^ a des n^
eociations avec Paris, au suiet des in-
demnity en Allemagne; Alexandre,
malgr^ le caract^re pacifique de sea
Tues, penchaK ^videtnment pour le
cabinet de Berlin , et Tentrevue q«rf eut
lieu au mois de juin de cette ami^,
entre le jeune tsar et le roi de Pnisse ,
imprima aux n^gociations une marche
plus rapide et ptus efllcaoe.
A rint^ieur, lasoliicituded*Alexan-
dit se porta sur les abus oui entra-
vaient toutes les brandies de l'*admt-
nistration. L'organisation judiciaire
T^lamait . surtout une prompte i^
forme; mais cette graode tdche exo^
dait le pouvoir de I'autocrate; lea
principaux obstacles contre lesquals
Tinrent ^cbouer les bukases ^ient la .
▼6nalite des fonctionnaires, cette ma-
iadie chronique de Tempire, T^igne-
ment des juridictions secondaires, et
r incapacity des maglstrats; obliges
d'abandonner h des subalternes Tinter-
pr6tation d*une multitude de lols dt-
▼erses et sourent oontradietoirei. Lft
o^ regnent Farbitraire et le bon plaisir,
il n'y a point de code possible; il aufflt
416
L'UNIVERS.
d'un oakase ^r d^truire toute I'^oo-
nomie des lots prtoistantes. Gepen-
dant on essaja de faire revivrd le
comity de l^islation institu^ par Ca-
therine, et il fut enfoint aux gouver-
neurs de s'abstenir de toute interven-
tion dans les affaires judiciaires de
leurs ressorts administratifs. Ges r^-
formes furent rendues plus faciles par
la oration du d^partement de la jus-
tice. Un autre departement fut ^tabli
simultan^ment , celui de Tinstruo-
tion publique. A la mime ^poque eut
lieu la fondation de TuniVersit^ de
Dorpat, dont Tempereur Paul avait
projet^ r^tablissement. La direction
superieure des ecoles s^occupa active-
ment d*une organisation s]^sUmatique
pour lesdiffi^rentsdegr^d'instruction,
depuis .les 6ooles paroissiales et celles
de districts jusqu'aux gymnases et
aux universites.
L'empereur, pour rem^ier, autant
aue possible, aux abus qu'ayait intro-
Quits le luxe sous les deux r^nes pr^
events, donna lui-nilnie rexemple
d'une sage 6conomie; il r^forma dans
sa maison un grand nombred'emplois;
on le voyait souvent h pied et sans es*
corte dans les lieux publics, et cette
oonjQance dans Tamour de ses sujets
ajoutait encore a leur affection. Le
commerce prit une nouvelle activity,
et les relations avec TAngleterre don-
n^rent une nouvelle valeur aux objets
d'exportation; la censure, confix au
gouvernement civil, concurremment
avec la direction superieure des 6ooles ,
devint moins m^ticuleuse; les univer-
sity ^happ^rent k ce contr6le, mais
en assumant la responsabilit^ des ou-
vrasesqu*ellespublieraient.Ilenr^ulta
quelques avantages que contre-balan-
^ient des inconv6nients essentiels,
« entre autres celui de ne point donner
aux ^l^ves une instruction en harmonic
avec les formes du gouvernement au-
tocratique.
II fit revivre les ordres de Saint-
George pour le service militaire, et de
Saint- Vladimir pour la carridre civile,
fond^ tous deux par son aieule , et gue
Paul avait affecte de n^gliger. L'im-
portance du senat fut relevee, et ses
fonctions rappelto h Tesprit de son
institution : malheureusement le per-
sonnel ne pouvait ftre r^orm^ par
un oukase.
Cependant les Iv^ementsqui avaient
6branl^ I'Europe avaient deplac^ trop
d*int^rlts pour qu*on piit compter sur
une paix durable. Les ecoles militaires
furent r6organis6es sur une ^elle plus
vaste, et une levde de deux hommes
sur cinq cents porta Teffectif de I'ar-
m6e k cinq cent mille hommes. Les
fronti^es de Tempire, du c6t^ de la
Perse, furent mises h Tabri d'un coup
de main; car les troupes du schan
avaient contraint les Russes a se re-
plier en G6orgie: enfin, on d^arqua a
Corfou quelaues troupes destin&s a
appuyer ulterieurement les vues de
TAngleterre.
Au printemps suivant, 1803, la
guerre se ralluma entre la France et la
rrande-Bretagne. Le Hanovre ftit oc-
cupy par les armies de la r^publiqua,
et, de leur c6te, les Anglais lermerent
Tembouchure de FElbe et du Veser.
LMqterveotion pacifique de la Russie
entre les deux nations rivales n'avatt
servi qu'a foumir a Tune et a Tautre
une occasion d'exposer leurs griefs a la
face de I'Europe. Depuis le traits d'A-
miens, Topposition parlcmentaire n*a-
vait cesse d'attaquer le principe de
cette transaction , que r^clamait cepen-
dant rinterlt britannique; on repro-
chait h la Franoe de n'avoir accords a
la Lombardie que le titre illusoire de
r^publique, d*exercer une influence
toute-puissante sur la Toscane et sur
le Piemont , et de traiter la HoUande et
Tancienue f^^ration allemande moins
comme des £tats ind^pendants que
comme des annexes de la r^ublique.
« Ce qui etait bien plus inquietant
pour TAngleterre, ajoute Rabbe, c'est
Sue la France s'assimilait, par la voie
es relations commerciales et indus-
trielles, tous les pays sur lesquels elie
avait, dans les dernidres campagnes,
plant^ ses drapeaux victorieux. Elle
transportait partout ses moeurs, ses
habitudes. Le ^^nie de ses habitants,
si souple et si penetrant, servait k mer-
veille a cette sorte de colonisation mo-
rale de TEurope; d'aiiieurs tout favo-
risait cette extension de son activity
h
RUSSIE.
417
Let andennes barrieres tomlMuent; les
andennes liroites sVffacaient sur les
/rontieres oaturelles. C^eit ainsi que
ies routes militaires du Simplon, du
moot Cenis, du moot Gen^vre, enla*
(aient l*Italie, et r^nissaient, par des
trajets courts et fadYes, les bassius du
Rhone et de TEridan. » De leur e6t6^
les Anglais, au m^pris des traits ,
oonsenraient Malte, le cap de Bonne-
Esp^noe et A]exandrie. Leur politi*
que pourait ^trepr^voyante, maisoertes
lis n'sYaient aucun droit de crier i la
mauvaise foi. A ces manifestations
hostjles , le cabinet de Londres joignait
encore une conduite qui temoignait de
sa haine oontre ies conditions politi-
qoes du gouTernement fran^is* II
appuyait, par tous les movens possi-
ble , les intrigues sourdes de reini|ra*
tion , dont les esp^ranoes s'adressaient
tour a tour ou simultan6inent a 1'^
tranger, aux oomplots et a la guerre
civile.
Malgr6 les efforts de Fox, ie parti
de Pitt Temporta, et la guerre fut d^-
daree (16 mai 1803). Lepremier consul
n^etait pas homme k se faisser prendre
au d^pourru; il etait en mesure de
repousser et m^ine de pr^venir une
^resnon; oependant, bien qu'il oomp
tit feibleinent sur le suocds de oette
demaitfae, il envoya en Prusse et en
Russie Duroc et dolbert, pour se m^
oager ralliance ou du moins U neutra-
Ijte de oes deux puissances. Les en-
voy^ francais ecbou^ent dans le
double but de leur mission , et les op^a-
tions militaires reoommencerent dans
le Hanovre.
La Russie ne s'^tait pas montrte
dIiis scrupuleuse que TAngleterre sur
la rigide obserration des traits. La
Wmibliqoe des Sept-Iles 6tait oocup^
iBiiitairement, et lul ofifrait un point
DsToraMe, soit pour contenir la Tur-
qoie, loit pour agir, eoncorremment
avee FAiigleterre, dans la p^ninsule
iCaliqiie.
La soUidtade de Tempereur ne se
bomait pas k faire respecter au dehors
le Dom russe; ce prince s'attachait en
ntme temps k rendre sessuiets plus
dignes du rang politique que leur assi-
57* LivraUon, (Russie.) T. II.
gnaient la force num^rique et le terri-
toire. II enoouragea ragricultore at
plusieurs ^tablisseroents de ookmiates
dans le gouvemement de P^terabonrg
et sur les cdtes de TEuxin.
A la mtoe ^poque eut lieu one
innovation dont les r^ultats seroot
fiteonds dans Tavenir. Le oomte Serge
Roumianzof fit passe/r un oortain nom-
bre de ses paysans de I'^tat de serfo a
celui de francs tenanciers; et le tsar,
par un oukase (4 mars), permit k tout
seigneur de conc^er k titre de rede-
Tanoe, ou de telle autre condition sti-
pule, des terres que leurs naysant
feraient valoir d^ormais k titre de
culti vateurs libres. La perspective d'un
impot*plus considerable, la erainte
d'etre priv^s de toutes ressouroes, en
cas de non suocte dans leurs exploits-^
tions, et la valeur prtoire d*uiie li*'
bert^ dout les avantages leur ^taient si
nou veaux , firent demander k plusieurs,
comme une grdce, la faculty de ne
point chancer d*^tat; mais quelques
essais reussirent, et la iiberte plaida
mieux sa cause par elle-mtee que n'»*
vaient pu le fiiire des ordonnances.
L*industrie manufacturi^re fit det
prqgres proporUonnes au d^elopp^
ment du commerce d'importatKm;
les produits fabriqu^ k Tmanger, no,
s'adressant ^u'aux besoins des dasseti
aiste, servirent en mtoe temps de,
' points de comparaison et de concur-
rence k la fabrication Indigine. Lea>
nomades tribotaires, chassaot devani
eux leurs troupeaux innombnbles,
afOuaient dans les mardKte d'Oren-
bourg; les Bukares, les Boukhaiei.
envoyaient k la frontidre de riches ca-
ravanes, et les Chinois se rendaient
k Riakhta pour y Changer le thA et la
soie eontre les fourrures moseovites. .
Cest en 1804 que ie ^uvememeol
russe, apres avoir inutilement tentft
d'6tablir des relations commerdaleft
avec le Japon, essaya, sans plus de
succ^, d'obtenir i'entrte des £tats
chinois. Nous laisseronsparler rorieo-
taKste Klaproth, qui faisait partie de
Pambassade russe.
«Le projet en fut con^u a Saint*
P^tersbourg, en 1804, et, k eequ*il
4t$
rUKIVERS.
Cratt, ^'^!g¥ to ^^>f nuuiifesl^ par
ooiur de JPoKiog da raoevoir un am-
batndaur du AAm bkmc, Le goaver**
vament niase'ne nMigea rien pour
rendre oette ambassaila Dnllaiite, aigna
du iiioflarqu» qui renvoyait, utile au
aemmaree d profitabia pour lea acieii-
eea. Ella ^tait oorapoate de parsonnes
ajypartananl aux famillea les plus dis-
tillates de Pempire; son cbef , homme
da ttflent , ^tait appall , par son rang et
aa saisaaDoa, k remplir ie^ plus hautea
digniCte : alia amportalt des prteents
ma^Diiquas pour i*empereur de la
Cbma; una soct^ de savants, sous la
diTCCtion de feu M. la comte Jean Po-
talski y fiit adjoipte h la legation. Gette
eapMition nombreuse quitta Saint-
vAersbourg en plusieurs divisions qui
davaiapt se r^nir k Irkoutsli vers la
. fin de aeptambre 1805.
\ « Arrive dans cetta vHle, Fambassa-
daaa anvoya M . Baikof, son premier
aacr^taira, a l^Ourga^ pour prendre,
avac les autorit^ ehinoises et mon-
golaa, les arrangements nteessaires,
BuH sur la roaniere de transporter sa
suite a Peking que sur d*autres points
lel^tifs k ee voyage. Ces premieres
ntexsiaHens presentdrent d^abord des
dmkaultte : les Cbinois refosaient de
reaevotrune ambasaade beauooup plu9
nombreuse que les pr^oMentes , all6-
giiaat qutls n'avaient eompt^ que sur
cent p^onnes , et qu'ils avaient tobli
en eons^enee les stapes dans les d^
aatts de Gobi. Apr^s de longs pour-
parlers, renvav^ se vit oblige ae di-
minuer le nomore de sa suites et de la
bonier k cent trente personnes.
« M. le oomte Golovkin (ambassa-
deor) arrfva le 17 oetobre au fort de
Kiakhta, neram6 Tro!tskosavsk , et
^oign6 de trois verstes de Tentrendt
da <3ommeroe qui est ii la frontiere
mdme. De nouvelles n^gociations Vy
ratinrent pendant deux mois et demi :
las difflcqltte ne ftirent enti^rement
aplanies que vers la fin de raunte, de
a&rte que rambassade ne passa la fron-
tMre que le 1*' Janvier 1806. Le froid
dtait excessif ; les membres de l*exp^
dition en souffraient d*autant plus
qu^ls ferent obKg^ d*employer qua-
tone jours k parcourir les trois eeni
sept verstes (soixante et ouatorze
lieoes) qui s^parentKiakhta et rOurga,
Pendant tout oe voyage, ils ne trou-
v^ent d*autre abri que deajmirtes ou
teiites de feutreC*).
« A rOurga, les discussions sur le
o^r^onial eninois se renouvel^rent ;
Tambassadeur refiisa de s*y soumettre,
en s'appuyant sur rexemple de lord
Maeartn^, qui n^avait fait d^autre
salut k 1 empereur Khtan-loung que
aelui qui est usit^ en Europe dans des
eirconstanees semblables. Des cour-
riers furent exp^ies k Peking; on
ooncevait Tesp^ranoe d'obtenir une re-
ponse favorable du tribunal des rites
du Li-fao-yuan, ou college des affaires
^trang^res , et peut-^tre de Tempereur
lui-meme.
« Sur ces entrefaites , le variQi , ou
vice-roi dela Mongolie septentrionale,
re^ut Tordre de donner au comte Go-
lovkin une r^e, au noro de Tempereur,
devant le trdne imperial. La reception ,
pour ce festin, eut lieu le IS Janvier,
en plein air, et par un froid de vingt-
trois ou vingt-auatre degres. Le vang
exigea que I'amoassadeur fit pr^alable-
ment le kheou-theou , ou les neuf pros-
tarnations, devant un 6cran ou une
petite table couverte d'un damas jauae ,
repr&entant la personne de rempe-
reiir. Cette pretention parut trop nu-
miliante pour que Tenvoy^ d'un grand
monarque pOt 8*y conrormer. M. le
comte Golovkin reftisa done de se
soumettre k ce c6rtoonial , et le festin
n*ent pas lieu.
«Depuis ce moment, les n^goda-
tfons prirent une toumure fddieuse,
et les esprits s'aigrirent. Malgr6 quel-
ques lueurs d'esp^rance de voir ter-
miner ces diffi^nds k Tamiable, Tarn-
(*) Paadanl k Mjovr df TambtiHuleur «o
UoiisoUa, le (md euut toqjoun antie 1 5 d
lo wgtm de Heauinur; la npercnra gels dm\
fois. Let jouites ne pouvaient se ekaoQer
i|u'avac Si charbaa qu'oa sUaiaait aa jni-
heu.Le«Toyageun, couches k terre devant
ee fea , briUaieat d*uo cote et gelaieat do
Tautre. L*amba&iadeur etait dans une jpo&i-
tion fort d^sagreable, et chacun desirait vi-
Tement de voir finir de pareilleA^souflTram
HUSSIE.
419
wmmm^»^ fut oofig^i^ . Ws 10 fevfier,
par une leitre veoue oe PdLiag. Elle
mrittt a Kiaklita dans ks premiers
jdiin d« mars. » II est 1^ refsretter que
des formaUtte pu^rileSt et doot le ri-
dicule ratomberait plutdi sor celui qui
ks impose que sor Teavoy^ qui s'y
ooofornierait, ait pH?^ rewpireruase
de granda avantagea eonuoerciaux, ct
r Europe d'uoe relatioo oeufe et int^*
regsaote.
Ua dea aoina lea plus assidua d*A*
lexaodre fot la propagation dea lu«
mitres dans sea vastea Etats; c'est k
dater de soa ref^e que les toles et lea
university pnrent une importaoce
r6elle, et preparerent au tsar actuel
la voie de nouvellea ameliorations : il
^it seulemeot k craindre qu*eo se
volant sur les universit^s de rAllema-
gne, au][quelle8 on empruntait des
professeurs distingu^, on n'inculqulit
a la jeunesse russe des ideas peu en
narmonie avee les formes et les exi-
geoees du gouYemeroent, et il ^tait
diiBcik d'ecbapper a cet inoonv^ient
dans un pays despotique ou le peuple
est rest^ esQlave, tandis que les classes
privil^ite ont atteint en moins d'an
siecle le n>§me degr^ de civilisation cjue
la viellle Europe. L^acad^miedes scie#i-
ees , foodie par Pierre le Grand , et qui
n'a gu^ nrilk depuis que du reflet
de cpielquea illustrations ^trang^es,
raxnt aotts Alexandre une nouvelle
aaivit^, et ses revenus furent oort^
h cent Tingt mille roubles; elle fut
charg4k d*evoquer a elle toutes les
hautes questions scientifiques et litt6-
raires, non pas, oomme on Ta pr^-
tendu , pour s^ger en arbitre absolu ,
inais pour reviver les etudes par ses
lumi^es, et leur imprimer un mouve-
ment plus fecond et plus rationnel.
Tandis que Temoereur dierchait k
moraiiaer son peuple par les bienfaits
de rioatruction, rimp^atrice-mira
eoeoarageait les^blissements de bien-
faisaaoe « et , dans son zele in^puisable ,
eUe frisait de ses revenus autant de
parts qQ*on pent eompter de classes
dans la graooe famUle des miseres bu-
-nJBfs Lea veuves, les malades^ les
to enfants trotvte trouv^-
rent un asile ft des reutouroes soia Ba
ge»6i^use protection. Toutes ees am^
uorations jetereot un vif 6eiat sur le
r^ne dujeune au tocnite , et ajouterent
k ridee uvorable que les cours d'£u»
rope, intdressto a capler sa btenveil*
lanoe, avaient r^ndue sur ses qua-
lit^ aimables, sa moddratioa ^ aa
justice.
Cependant, toutes les fois qu la
dignite et les interto essentiels de
la Russie se trouverent compromis,
Alexandre montra de La fermet^; c'est
ainsi que la Sudde ayant empietd sur
les frootieres russes en Finlande, et
les representations du cabinet de Saint-
Pdtersbourg etant denieurto sans
effet, la flotte des galeres fut armee,
et des troupes simisantes re^urent
Tordre de niarcber en Finlande : Gus-
tave ci^da , et cette demonstration n'eut
pas d'autres suites. Les Lesgbis deBe-
lakan et de Tehari vinrent faire des
incursions jusque dans le voisinage de
Tiflis; le general Goulakof les r(£)ula
dans leurs repaires. La Kussie ailait
bient^t entrer en lice centre un ennerai
plus dangereux. (1804.) Pitt, toujoura
acharnd contra la France, couvrait sa
haine du prdtexte specieux di^ biea
public et du retabiissement de TordrOt
jouant ainsi le sort de I'Europe, et
forcant son rival k ddvelopper tout sod
genie et toutes ses ressources, en ne
lui laissant que Faltemative d*une gloii^e
immense ou d'une ruine definitive. Ge
ministre ne negligeait rien pour par-
venir k son but. La restauration des
Bourbons donnait une apparenee de
justice a ses vues secretes; peu lui im-
portait au fond qu'une revolution eilt
diange en France la forme du gou- '
vemement; mais il savait que les.
princes de la faiuille dechue ne pour-
raient remonter sur le trone qu'en
abandonnant toutes les conqudtes de^
larepublique.Dans ce but, il negociait.
habilement aupr^s des cabinets jalouz
de I'agrandissement de la Franoa , et
favorisait les intrigues et les conspira-
tions de quelques emigres exaltes. La
fortune de Bonaparte le preserve de
oe danger* George Cadoudal et plu-
sieurs de ses complices perirent sur
3.
49a
L'UNIVERS.
r^Miafaud; Pfcheera <kiuip(ia au sup-
plioe peur un fraicide; Moreau, expiant
aa renommee^ fiit frapp^ d'une sen-
fence d'exil. (laos.) Le premier consul
erut pouToir user de repr^illes, et
ne Toyant jMurmi les pr^ndants a Th^
ritage de Louis XVI que le due d'Enr
ghien qui eAt quelques chancer de
succ^, il osa le faire enlever sur le
territoire de T^lecteur de Bade, et
tacha du sang de oe jeune prince les
lauriers des Pyramides et de Marengo.
(1S04.) Ge crime dessinait nettement
ses vues; il annon^it Tabandon des
principes r^publicains; en frappant le
plus ^and obstacle qui lui fermait le
chemm du tr6ne, Bonaparte marguait
d'une trace de sang le cnemin qui de-
vait Vy conduire. L'electeur de Bade
n'osa reclamer contre cette violation
flagrante du droit des nations, et le
corps germanique, disloque et impuis-
sant, se renferma dans la m^me re-
serve. Plus les organes officiels du
gouvemement francais avaient donn6
'tioges au caractere de I'empereur
Alexandre, plus les representations
^nergiques de la Russie, au sujet de
00 deplorable ^v^nement, durent por-
ter una atteinte sensible k la gloire du
premier consul.
La note du ministre russe k la di^te
de Ratisbonne, bien que oon^ue en
termes mod^res, prouva que le cabinet
de Saint-P^tersbourg oonsid^rait cet
incident comme un motif plausible de
rupture, ou du moins comme le met-
tant en inesure, si la France ^tait
dispose k transiger, d*arracher au
premier consul des concessions impor-
tantes. Une autre note de M. d*Oubrii ,
charge d'affaires de Russie k Paris,
et liu'il adressa k M. de Talleyrand,
teit encore plus pressante et plus
positive. II y etait dit que « I'empe-
reur Alexandre, comme m^iateur et
S Brant de la paix oontinentale, venait
e notiOer aux £tat8 de Tempire quil
consid^it cette action (I'enfevement
d'Ettenheim) comme mettant en dan-
ger leur sArM et leur ind^ndance,
et qu'il ne doutait pas que le premier
consul ne prit de promptes mesures
pour rassurer tous les gouvernements,
en donnant de satisfaisantes explim*
tions sur un evtoement que Ton pou-
vait oonsiddrer comme le sinistre
Iir^sage des dangers qui mena^aient
'independence et le safut communs. »
Mapoieon , btess^ du ton que prenait la
Russie, sans essayer de disculper sa
conduite, repondit par des recnmina-
tions. Se pievalant du silence de I'AI-
lemagne, il temoignalt sa surprise de
voir une cour etrangere prendre en
main une cause abandonn^e par les
parties int^ressees; sans daiener s'ex-
pliguer sur le meurtre du due d'En-
gbien , il se contenta de deroander si ,
lors de I'assassinat de Paul T', la
France, quoique etroitement alli^e a
ce prince, avait exerc^ un droit d'en-
Cjnete k cet e^ard ; « il convenait peu
a la Russie, ajoutait-il, de se montrer
si scrupuleuse sur le droit des nations ,
lorsque, tout r^cemment encore, elle
avait foments, par ses ambassadenrs
k Dresde, a Rome et a Paris, des in-
trigues hostiles k la France, et ro^me
des conspirations. Si la Russie, c6dant
a I'influence anglaise , voulait la guerre,
que ne se declarait-elle ouvertement ? »
Dans une seconde note remise par
M. d'Oubril, le 1*' juillet 1804, le ca-
binet russe repliqua d'une mani^re plus
fonnelle encore. «L'empereur, dejjk
affecte des calamit^s auxquelles une
grande partie de TEurope etait en
f»roie, et des dangers qui menaigaient
'empire germanique, dont il etait de
son devoir de soutenir les inter^ts,
avait invite les ^tats et les princes k
se reunir k lui pour protester contre
la violation du droit des nations com-
mise a Ettenheim , et en demander la
reparation. Le gouvernement fran^is ,
auquel cette reponse avait ete commu-
niquee, devait une reponse categori-
que. Cdle de son ministere etant eva-
sive, elle offensait k la fois laRnsste,
I'Empire et la France elle-meme. On
n'etatt plus dans oes temps de barbarie
01^ cheque l^tat n'avait k oonsiderer
que son interet immediat. La politique
modeme, fondee sur la lot des na-
tions , avait introduit certains principes
applicables k YinUr€t de la cammm-'
naute des Etais. La Rufl^io n'etait
RUSSIE.
421
nomi indueno^ par ieB ennemifl de la
Fianoej mais elie Haii miie par la
triste situation ii kiquelle le goaverne-
ment francais avait rMuit Europe. »
Apr^ avoir 4numM toas lea ^iefs
one foomissait it rexamen Tainbition
ae la France, on appuvait dans oette
note sur le principe de la solidarity
rcipectiTe des titats, d'oi^ sortit de-
puis le traits de la sainte alliance;
oetle pito se terminait par un ultima-
tum par lequel on extgeait :
« 1* Que, conformement h la con-
vention seor^te da 2 octobre 1801,
les troapes fran^ises evacuassent le
royamnede Naples, et que la neutra-
lite tdt respeet^e pendant toute la dur6e
de la guerre;
« S^Qu'on ^tabltt imm^iatement,
de concert avec Fempereur de Russie,
les bases sur lesquelles les affaires
d'ltaKe seraient finalement r^l^s;
« 8» Que le roi de Sardaigne re^dt
sansd&i les indemnitdsqui lui avaient
M promises;
« 4* Qu>n vertu de robligatlon de
carantie mutuelle, le gouyernement
S^n^is s'eneageAt a retirer ses troupes
du nord derAllemagne, et qu'il prtt
Fengagement de respecter la neutrality
du corps germanioue (Rabbe). » M. de
Talleyraid re^it rordre de declarer en
r^ponse : « Que la France ^tait pr^te h
exaoater fidolement les articles du
traitd sur lesquels la Russie appuyait
ses r^amations, aussitdt que cette
puissance remplirait rengacement r^-
eiproque, stipule dans le meme traits,
de ne pas sooffirir que les sujets res-
pecttfii entretinssent aucune corres-
pondance directe ou indirecte avec les
ennemis de Tun des deux ittats, ou
qu'ils propageassent des principes con-
traires aux constitutions ou k fa sdret^
de leurs pays , s'obligeant , dans ce cas ,
a les exporter au del5 des fronti^res,
sans quils possent se couvrir de la
protection du gouvemement. •
La position geograpbique de FAlie-
inagne ne lui permettait pas de tenir
le m^e langage que la Russie : expo-
see la premiere a une invasion, elle
pouvait^tre ^ras^ avant que les ar^
iN^ niss4»s pussent prendre une part
active h la lutte. La note russe, bien
qu'appujr^ par le roi de Suede, ne fut
Kint dncut^ k la di^te de Ratts-
nne : T^lpcteur de Bade t^moigna le
d^ir qifon n'insistAt pas davantage
sur la violation de son territoire, et les
ministres d*Autriche et de Pnisse se
d6clar6rent satisfaits des explications
donnto par la France. M. d'Oubril
s*etait trop avanc^ pour qu'il lui m
possible de revenir sur ses d^mardies;
li quitta Paris et se rendit ill Mayence.
l9apol6on ^tait attendu dans cette ville;
le consul s'^tait fait empereur, et il
essayait sur son front victorieux la cou-
ronne de Charlemagne. Le despotisme
allait si bien k cet bomme extraordinai-
re , que les Francais , ^blouis de sa for-
tune, Miangereot avec empressement
oe qu'il ieur restait de libertecontre une
glotre^ laquelle Ieur chef avait Tartde
lesassocier. Le ministre russe eut en-
core plusieurs conferences, avec M. de
Talleyrand ; il eut leloisir de sender les
dispositions v6rltables des membres de
la aikite , partit pour Francfort au com-
mencement d'octobre, et, apr^ un
s^jour de quelques semaines, il se
rendit en Russie. Le general H^ou-
ville avait quitta P^tersbourg le 8 ^
juin. Malgre ces indices d'une rupture
prochaine, Napol6on conservait quel-
cue espoir de ramener Alexandre a une
determination paciflque; et il.fit mtoe
quelques dtoarches qui tendaient a ce
but : n^nmoins M. de Rayneval re^t
son audience.de cong^leSi septembre,
et M. de Lesseps resta k Sajnt-P^ters-
bourg en quality d'agent commercial.
Cependant la Russie faisait des pr^-
paratifs formidables; elle avait con-
serve vingt miUe hommes dans les ties
loniennes, et elle continuait a exci-
ter les Grecs de I'Albanie et les Mon-
tenegrins : outre la flotte de Corfou,
une escadre de trois •vaisseaux de ligna
et de trois fregates sortIt du port de
Cronstadt; Sevastopol fut declare un
port exclusivement militaire ; les cadres
de I'armee se remplirent, et presents
rent, avec les reserves et les troupes
irreguli^res, un effectif d'environ cmq
cent mille combattants. Les*armees
etaient principalement rassembiees sur
429
L'UNIVEES.
les fronti^es de Toucst • dans \m pr»-
vinees dknembries de raocMnoe Po-
loffDe (Rabbe).
Les soios multipli^ d'une guem
prochaine et aerieuse, les incursions
fre|queutes des Lesghis n'empAcbaient
point Alexandre de s'oocuper d'otiles
r^foroies a rinterieur. Le sort des serfii
fiit un peu jnoins soumis k rarbitraire
des seigneurs; les eooles publioues se
multipuerent; les divisions adminis*
tratives ou gouvernementSf que Paul
avait r^uits a quarante et un, furent
port^ a cinquante et un, en y compre-
nant la G^rgie; enfin le code, cette
oeuvre toujours refaite et toujours k
rehire, dut subir une revision dont on
chargea le prince Lapoukbio et M. de
Novassiltzof. Nous ne parlerons des
mesures prises pour adoucir le sort
des paysans que pour faire ressortir
Phumanit^ du monarque; I'^tendue
des possessions russes, la solidarity
des int^rdts dans la classe des seigneurs
ont presque toujours paralyse I'effet
des oukases; et u'Wy a eu veritable-
ment une amelioration a cet ^gard,
on la doit plutdt k la diffusion des
lumi^res et k Tinfluence bienfaisante
d'une Education morale qu'aux pres-
criptions du souverain. Pour ^teindre
graduellement Tesclavage , le gouver-
nement russe a us^ d*un moyen tran-
sttoire dont on peut appr^cier PefBca*
cite. 11 a ete cr^e une banque qui pr^te
k terme sur les biens seigneuriaux; au
delai fix^ , et k d^faut de rembourse-
ment, les biens engages retournent a
la cooronne, et les paysans n'appar-
tiennent plus ou*^ r£tat, condition
3ui les prepare a un affranchissement
efinitif
L'empereur A lexandre , persuade que
moins les droits sont onereux , plus
le commerce fleurit, r^duisit de vmgt^
oinq pour cent les droits dans les ports'
russes de la mer Noire et de la mer
d'Azof, et bientdt la prosperity d*0-
dessa prit un developpement extraor-
dinaire. 11 resulte d'un compte rendu
par le ministre du commerce, pour
rannee 1802, que, dans les ports de
la Baltiqne seulement, la balance com-
inerdale etart , en faveur de la Russie ,
d'ODfkmi dix-hirit nstfltoos 4le foubics.
Cependant* nnJgreieliberalismeeelfttre
d'Aiezaadre, la ostare ndme de son
poiureir le foi^t k des nenires dont
resprit etait oppose k sea vuas piir-
aoaoelles; c^est ainsi qu'il sanetionna
nil edit de censure qu*on aarait era
emane du oenreau ombrageux de son
ptee; peut-etre aTait-on sorpris son
adhesion, car, pai de temps aprds, il
en tempera la rigoeur par queiques
dispositions attenuaatep. L*augmenta-
tlonde la population, rembellissement
dea Tilles, des eooles fiaodeca dans
toutes les parties de rempire, tout
aanon^it lea bienfsits de la poix et
la sagesse du gouvemcasenl. Odessa
comptait dej^ plus de deux mille mai-
sons et cinquante milie habitants: la
nouvelle Tcnerkask s'eievait k cdte de
Tandenne, et de toua cdtes les etran-
eers et les colons apportaient, en
ecbanse d'une vie aisee , (eur industrie ,
leurs lumidres et leor travail, Les
ecoles militaires rej^urent une nouvelle
organisation; Tuniversite de Kharkof
s*ouvrit, et il lui fut assigne un revenu
de cent trente mille roubles.
A La lenteur de la procedure, dit
Rabbe, avait , depuis lon^temps, ete le
scget de beaucoup de plaintcs en Rus-
sie. En consequence i Tempereur Paul
avait, en 1796, oonunissionne trois
branches du seoat , dont Tunique af-
&ire devait etre de juger le norobre
immense de causes pendantes. Gepen-
dant, dans le cours de buit annees, k
peine avait-on aborde ki diificulte prin-
cipale. II fut en consequence deter-
mme, sur la proposition du prince
Lapoukhin , d'abolir les trois departe-
ments temporaires , et d'augmenter le
senat de deux nouveaux departements,
de maniere qu'il se trouvait alors com-
pose de neuf departements, dont six
siegeaient k Petersbourg et trois h
Moscou. Le corps entier du senat se
trouva porte k neuf cents peraonnes ;
et afin qu'il trouvAt assez de temps
pour Texecutioa de tout ce qui lui etait
attribue, le nombre des jours ferit^
fut reduit de soixante-deux k trente
et un. •
Dans une guerre contie la France
•:•
•• •
' • • • • •
• • • •
• ••
• • •
• •••
• • • •
IVSSlfi.
491
iflipMale,4|ui ertr^iU|ftuii»gKnMie
Mienee mm le ecprpi gMiairiqiiv, le
e6t6 le pioB ^mlbtoble de la Bossie
^tait III Pologoe, telle que Tarait or*
§»ii86e ledemier partage; ainsi Aleian^
Irene n^H^eohMl rieo poor oometrer
ce fiehe h^ntace de la politiqiiedefioa
aieule; d'abora ii rdndit <|ud<|ues ou«
kaaes en iaveur dee paynrna; lea prd*
tre6 greca eoTOUt aoia , dans let heox
06 les eathoKouea ^toient eo nriaonl^^
de rattacber lea idte de nalioaalit^
aux idees religieoaes; lea joifs, qoi|
Mtf leor indoatrie H Usats eorrespen-
oaneea , peli?enC £dre ttnt de bieo ou
laat de mal , obtmreBl quelquea prWI"
Jdgea, et fantit toiA aa nombre dea 90-
jcta rtiaaeB ;et cette tas^ du moraa, la
aaine politique aetroura d'dcoord aved
llmaianit^ Pluaieon cauaes empteb§«
rent la Polo(^e raase d'^apper ao
folic moecoTite; d*abord rhabilet^ de
CaCoariDe qai arait ao iat^reaaer k
eeUe spoliation rAabnolie et la Prosse ;
0t enaoite loa rues particulierea de
BiapoMon qui , ayanf beaotn de la Rua»
tie pour anaiaser TABgleterrey s*atta«
clia plntot k s'asiiirer un jour son al*
lianee, qifa Clever une forte barfiire
entre eette puiasanee et TEnrope.
{XdiWi W^ , depais un ah , la Fraaoe
^tait en guerre oontre FAngleterre;
nais oea deux Atats rivaux ne pou*
vaieat s'etreindre corps a eorpa, la
force de Tone resident surtout dana
sea annees, et la preponderance de
Tautre dans ^eB flottes: ausai, bien
que poursoivant le mime but , cbacune
s'attachait , par des vuea difMrentea,
a frapper aon adversaire dana oe qui
conatittiatt aa puissance ; TAngleterre
aoudovait I'Europe oontinentalecontre
le aoMat-empereur « et celui-ci s^effor*
cait de tarir les sources de la prosperity
de la Grande-Bretagne , en fermant les
portsde rEurope au pavilion anglais. La
BussiOf par sa position geo^aphi^ue ,
o'evait pas on int^rlt directs Tabaisse-
ment de la France telle qu'elle etait avan t
les conqu^tes de la r^publique; mais
rexteoaion du nouYel empire et le moi^
pdlemeot de la vieille Europe devaient
Inquieter mime les princes dont Teloi-
gaemeot n*etait pas un obstacle pour
le gdaie le plua acttf daa leffl|pi tmh
4arnea. line dutle oewidtotfon poa-^
¥aH porier Aleiandra I des meaurea
hostilea ; il Ini feUait opter dntre l($i
deux aHianoea , et les avantagea mat^
rials de aon empire le rapprodialant
imperieusement de la nation la pM
eommer^ante^ D'tin ilutr^ edt6, le
reste de FEarope a*af&ibliasalt dana
eea luttes contindellto; et la Rusale^
qui n'exfoaait qa*ane partie de sea finr
eea, obnaerfait, qiiellea <|ije foasent lea
ahaneeade la guerre, une mitttooadoat
alle ae rteartaitde tirer toot le parti
poasiUe. Moos verroda qbe sea rerertf
ne l*ont presqoe pas araablie y tandfa
mie sea Toisiiu se aont ?ua todt prte
ae leor nrina d^tiiltivei
. Qoaod la politique est int^ress^
k me roptnre, elle est rarement ar^
Utee par le ehoit d'tib motif ou d'mi
pf^tflxte : at d'ailleora Napdeon dea»
aaitassea^e prise k la Jahniaia des nUh'
aarques poor ne laor laisaer oue Tern*
barraa du choix. Le gioMi Hcdoorill*
▼enait de ai^ifler k la eour tsariesMS
Parenenielit do ptemier oonsid k la
dignity inneriale. Alexandre rdbsa
de reeonnakre le nooreau aonverafn ,
et le roi de So^de adtvit eet eaerapte.
L'ambassadeur fran^ais quitta imaoe-
diatement SaintPetersbourgi
Les Dottea de la Baltique avaient
d^jli firanefai le Sand pour raUier Fes*
cadre anglaise dans la Mediterran^e ,
et op^er simultanemeat sur las cdtea
de ritaiie. A la mime Ipoqne, Napo-
lion mlditait une desoente en Angle^
terre; il isolait ainsi son eAnemi de
rEurope, et mena^it les descendanta
de Guillaume le Goncpilrant de tout le
poids de son Iple victorieose. L'An*
{{ieterre alarmee se bdta de dltoHrner
'Orage qui la meuacait. Ii s'agissait da
ditermiiker la Rosne a la guerre ; le
traiti qui liait oette pulssaaoe n'ltail
oue conditionnel; son alliance avec
1< Ansksterre n*ltait offenaive ^^autant
me rAutriohe se dielarerait oontre la
France ; or, TAutricbe, craignant d'ltre
attaqule et vaincue avant qu'oa edt le
tempade la secoorir, aralt prialable-'
ment reeonnu I'empereur, bien diei-
dee d'ailleurs k trouver d*autre8 motiCi
494
L*UMIVUIS.
de ruplttve <Ms ^'ime cMXMion favo*
rable se prtenlerait. II ialfaut done
dtooDtrer a rAutriche qu'eile n'db-
tiendrait rien par la paii , at entamer
dca DteNaations am donnassent le
lonpa d'orgaaiser ies dements d'tine
lutte puissante.
« Four decider I'Autriche, on fet-
Eit , dit Rabbe « d*entrer dans ses d4-
s padfiques; la Ruasie alia m^me
jvsqa'ji proposer, pir rintermediaire
de Berlin , sa mediation entre la France
ft I'Analeterre. Gette mMiation avant
M agrfte k Paris, M.deNofos8iJtzof
liitenvov^ h Berlin avec de pleins pou«
▼oirs. U U derait obtenir des passe-
ports du gou?emement franqais pour
se rendre k Paris. Mais il avait ordre
de n'aocapter les pasMjiKNrts qu*^ la
condition, qu'il traiterait immediate*
ment a? ee le chef du goarernement
firaofais , sans reoonnat^ k nouTeaa
titae qu'U s^^tait donne, et que Bona-
parte assureraitpositivementqu'il 4tait
anini6 du m6me d^ir de pais giin^rale
£i'ii avait paro manifester dans sa
ttre au roi d'Angleterre. Les passe-
ports de M. de Novossiltzof tiirent ei-
p4di^ sans difiBcult^; mais cet agent
re<pit en mime tanps la dtfense d*en
faire usage. »
A rinstant mime o(i la Russie et la
SuMeeontestaient h Napoilon le titre
d'empereur, rblritier de la rl?oiution
Iran^ise, comme pour justifier oette
ambitieuse dinommation, ajootait k
sa oouronne oelle dltaiie, et reunis-
sait k ses £tats la ripublique ligu-
rienne. Ce n*ltait pas le moyen de
faire taire les scmpuies diplomatiques
de Petersbour^ et ae Stocknolm ; aussi
IL de Novossiltzof , en quittant Ber-
lin., remit , le 10 juillet , au ministre
d'Etat, baron de Hardenberg, une
note dans laquelie la reunion de r£tat
de GInes Itait prlsent^ comme une
cause diflnitive de rupture. « II ^tait
impossible, disait Tagent russe, de
eroire que Bonaparte, en exp6diant
les passe-ports oui Itaientaccompagn^
des assurances lee plus pacifiques , edt
sirieusement sougl k sy conformer ,
puisque , dans le temps qui devait s'l-
couler entre Texpedition des passe-
ports et Tarrivle du nigoeiateiir i
Paris , il hAtait des mesures qui, loin
de feciliter le ritablisseroent de la
r'x , Itaient de nature k en dltruire
principe. »
11 est assei curieux de remarquer,
a Tocoasion des repugnances de la Ros-
sie et de la Sumo, que de ces deux
puissances la premi^ ne datait son
existence politique en Europe que d*en-
viron nn sidcle , tandis que la seeonde
allait se donner pour souverain un
lieutenant de N^pollon.
Le cabinet des Tuileries combattait
par des articles officiels les priten*
tions de la Russie k rigler les afEaires
du continent. « Qu'ont de common la
France, et la Russie indlpendantes
Tune de Tautre; elles sont respecti-
vementnulles pourse nuire, et toutes-
{missantes pour se faire du bien. Si
'empereur des Fran^ais exeroe une
grande influence en Italic, Tempereur
de Russie exerce une influence plus
grande encore sur la Porte Ottomaoe
et sur la Perse. L'une a une influence
droonscrite qui ne ^6tend pas au delih
des discussions relatites k ses limites,
et n'augmente pas sa force d'une ma-
nure majeure; I'autre, au contraire,
exeroe son influence sur deux puis-
sances de premier ordre qui fiirent
longtemps au mime rang politimie
que la France et la Russie, et qui do*
minent sur les Arabics , la mer Cas-
Sienne et la mer Noire. Si le cabinet
e Russie pretend avoir le droit de
fixer les limites ou la France doit s'ar-
rltw, il est sans doute aussi disposi k
permettre que Tempereur des Francais
lui prescrive les limites dans lesquelles
il doit se renfermer... On a partagi la
Pologne : il a fallu que la France eOt
la Beigique et la rive du Rhin ; on s^est
enipar^ de la Crimie , du Caucase , de
rembouchure du Phase , etc.: il faut
que la France ait un equivalent en
Europe ; 1 intlrit de sa propre conser-
vation Texige. Veut-on un congrss
genlrai de TEurope? Eh bien! que
chaque puissance mette k la disposi-
tion de ce congr^ ce qu*on a envahi
depuis cinquante ans; qu*on rltablisse
la Pologne, qu*on rende Venise aq
RUSSIR.
495
S^oat^ la Trintte k TEspacne^ Ceylan
a la Hollande, la Cnmee a la Porte;
qu*on renonoe au Phase et au Bos-
phore ; qu'on restitue le Caucase et la
Gtergie; qu'on laisse la Perse respirer
apr^ tant de malbears; que Tetiipire
dea Marattes et de Mysore soit r^-
Miy oa ne soit plus t'exclustve pro-
pria de rAngletenre. La France
alors pourra reotrer dans ses anciennes
limites... II est a la mode d^accuser
rambition de la France. Si cependant
elle avait yoqIu oonserver ses con-
qn^tes, la rooiti^ de TAutriche, lei
Etats de Venise , le royaume de Na-
ples, la Suisse, la Hollande, seraient
encore en son pouroir. Les limites da
la France sont en reality TAdige et le
Rhin: a-t-eile pass6 FAdige? a-t-elle
pass^ le Rhio ? Si elle ne prit pas pour
linutea la Save et la Dra?e , y flit-elle
oontrainte par la force Ties armes , ou
fut-elle d6terroin6e par une noble mo-
deration... La politique des puissances
da Nord fnt toujours d'exciter des
goerres dont elles n^avaient rien k re-
dmiter. C'est ainsi que Catherine fit
battre pendant plusieurs annto la
Prasse et rAutnche, en annon^nt
des secoars qui n'empSch^rent pas les
armto francaises d'arriter aux portes
de Vienoe. Cest ainsi que le dernier
empereur de Russie perp^tua les cala-
mity de la jguerre, en promettant des
secoors out n'arriv^rent qu'an mo-
ment oik rAutricbe afait obtenu des
sneo^ sans eux , qui se retir^rent au
premier refers , et laissdrent , au mi-
lieu d'une campa^e , leurs allies sup-
porter seuls le iardeau. qu*ils avaient
promis de partager. » {MonUeur).
Cependant I'Autriche levait des troo-
pes , fortifiait les passages susoeptibles
de defense , et portait des forces im-
posantes du.cot^ de la Bavtere. Le
gouvernement demanda des explica-
tions; et, apr^ cjuelques temporisa-
tions , le cabinet de Vienna feignit de
Yoaloir iotenrenir comme m^diateur
entre la Russie et la France. La Pnisse ,
quoique moins int^ress^ aue TAu-
triche k la repression immediate des
empi^teinents successifs de Napoleon ,
n*en d^rait pas moins la guerre;
mats , cratgnant de s*avancer trop tdt ,
elle venait de refuser a Alexandre le
passage de ses troupes k travers son
territoire. L*archiduc Jean , le gen^l
Mack et Tarchiduc Ferdinand enmrent
en campagne avec quatre-vin^-dix
mille hommes , et oocup^ent jila fois
la Ravine, les gorges du Tyrol et lea
rires de TAdige (Rabbe). Napolton fot
bientdt en ^tat de faire face k cette
nouvelle coalition. « II a?ait rcQU la
noovelle de Tarrivi^e de Villeneuve
dans un port d'Rspagne; d^ lors ih
avait yu rexp^ition de TAngleterre
aTort^ , les immenses d^penses de la
flotte et de la flottlile perdues pour
longtemps, pour toujours peut-^tre...
Dans Temportement dhme fureur qui
ne permet pas m^me aux autres bom«
mes de conserver leur jugement, 11
avait pris une relation des plus har-
dies, et trac^ un des plans de cam-
pagne les plus admirables qu*aucun
conqu^rant ait pu concevoir k loisir et
de san^ froid ; sans baiter, sans s'ar-
r^ter, il dicta en entier le plan de la
campagne d'Austerlitz , le depart de
tout le corps d*arm^, depuis le Ha-
novre et la Hollande iusqu^aux conOns
de Touest et du sua de la France;
Fordre des marches, leur dur6e, les
lieux de conTcrgence et de reunion des
colonnes ; les surprises et les attaques
de vive force , les mouvements divers
de Tennemi , tout fut pr^vu , la vio>
toire assur6ie dans toutes les bypo-
tb^s. Tdles toient la iustesse et la
vaste pr^Yoyance de ce plan , que , sur
une Iigne de d^art de deux cents
Heues , des lignes d*op^ration de trois
cents lieues de longueur furent suivies
d'apr^ les indications primitives, jour
par jour , et lieue par lieue , jusqu*li
Munich. Au del^ de cette capitale, lee
6poques scales subirent quelque alte-
ration ; mais les lieux furent atteints,
et I'ensemble du plan fut couronne
d'un suoc^ complet (Dam). Apr^
vingt jours de campagne , Vienne ou-
vrit ses portes au vainqueur, dont le
g6nie, puissamment seconde par des
g^n^raux habiles , fut encore servi par
les feute^ de Tennemi ; la marche lente
des Busses, Tiiid^ision de Kouton*
496
L*UNI¥£RS.
mf , rhteitation intempMUve de la
Prusse, etla oonduitede Mack aUlm,
coBtribadrent au suoete de cette m^
inorablejournee.
Alexandre a'^tait rendu k Berlin le
85 octobre (Rabbe). 11 fut refu avee
enthousiasme par la cour et pwr le
peuple. L'unanimit^de oes dispoaitiont
lui rendit plus fadle racoompliase-
oient du dessein qui Pamenait dans la
capitale de Fr6d^ric-Gnillaume III,
II venait , invoquant le pacte jur6 entre
eux en 1809 f le rallier a celui qui unis*
salt de nouveau l*Kurope ocmtre la
France. Sa prince et ses instances
nc fiirent point vaines : il quitta Pots*
dam, apres avoir visits ^ ^ Theure de
niinuit , le tombeau de Fr^ric avee
le roi de Prusse et sa femrae. On dit
que les deux souverains se jur^renl
une inviolable amiti^ sur la tombe de
ce grand homme. De 1^ Alexandre se
rendit a Weimar, puis k Dresde ou il
arriva le 11 novembre^ Trois jours
apn^ il joignit Tempereur Francois k
Olmiitz, au moment m^me ou la
deuxieme arm6e russe , aux ordres du
g^n^al Buxbovden, aprds avoir tra-
verse la Gallicie et la Mora vie, don-
nait la main k la premiere arm^ russe
que oommandait Koutousof. R^nnis
au nombre de soixante et dix mille
hommes sous le commandement de ce
vieux general .jies deux corps d'arm^
combattirent a Austerlitz ; TAutriche
consternee ^talt cependant parvenue
a rassembler encore pr^ de trente
mille bommes.
Malgre les Cnutes de Koutousof, la
victoire fut sanglante et longtemps
disputee. Les pertes de Tarm^e com-
bing furent immenses ; * elle etait de
quatre-vihgt-deux mille bommes, et
le nombre de oeux qui fiirent mis bors
de combat s'^eva a plus de quarante
miHe hommes; en effet, on compta
pr^ de dix mille morts sur le ehamp
de bataille ; dix-neuf mille Russes et
six cents AutrichieDS furent faits pri-
sonniers; et dix mille autres, selon
toutes les apparences, furent disper-
ses ou engloutis sous la glace des lacs.
Trois lieutenants g^ndraux, six g6-
n^raux-roajors , vingt officiers supig-
rieurs, et plus de hull cents aulr«i
offieierS s« tmuv^at parmi les pri*
aooniers; les pertes en materiel ne
liirent pas momdres ; qoarante-cinq
drapeanx , crat quatre-vin^ix pieces
de canon, quatre cents voitutes d*ar*
tiUerie , tons les gros Equipages et une
quantity de chevaux furent les trophte
et le butin des veinqueurs d'Anster*
liti. ,
« ImmMiatenient aprte Tissue' de
cette dtostreuse joorMe (9 ddcemfare
1806), un envoys d^ alli& , le prince
Jean de Licfatenstein , arriva au camp
fran^ais : il venait en touts hlte , au
nom du souverain qui oommandait Tar-
m^e combing, demander un armis^
tioe et proposer une entrevue, afin
d*en r^fer plus promptement les con-
ditions , en attendant qu'on pdt n^o-
cier une paix s^r^. Cette dtoarche
fit connattre la confusion et le d^rdra
extreme des alli^. On se hdtad'en pro-
fiter; et, d^s la pointe du jour, toute
Tarm^ tran^aise fut mise en mouve*
ment pour achever d'teraser Tarm^
vaincue. » (Prteis des ^v^neinettts mi-
litaires.)
Francis II vint lui-m^fime au hi*
vac de NapoMon solliciter la g^n^*
rosite du vainqueur^ MapoMon s^avan^a
k sa rencontre, et lui dit, en rinvi-
tant k entr«* dans la nmsure ou ^tatt
allum^ le feu du bivac : Je rxms re-
foU dans le seul paiaiB guefhabiie
4e/mi$ deux moU^ Un armistice tat
accorde ; et , pour premiere conditiofi ,
les Russes durent ^vacuer le territoire
autrichien et se retirer k travers les
monts Krapaks.
L'empereur Alexandre, observe Rab*
be, ne pouvait reAiser le bienfait de
Tarmistice, dont |il avait besoin pour
operer sa retraite et sauver les d6bri«
de son arm^c} n)ais il manitesta son
^oignement absolu pour toute parti-
cipation au traits quel' Autricbe pour-
rait ult^rieurement conelure avee la
France.
L*aide de camp (de Tempereur, le
general Savary, avait acoompagn^ I'em-
pereur d'Auoriche, apres rentrevue,
pour savoir si Tempereur de Russie
adb^ait a la capitulation. 11 trouvn les
KUSSIB.
497
^Mdft Vwrnte rasM sms artiUerie
nfaieagB, et dans un ^poiivantable
dnorore; U ^tait miaait; le gentol
Ifeerfeld avait^t^ repousse de Godding
j^ It maredial Davoust ; rann^ nisse
elait oern^; paa an homme oe pou?ait
eebappcr. Le prince Czartoriski iutro-
doisit le ^^(fewSaTary prte d' Alexan-
dre; « Bitea li voire mattre, lat cria ce
prinoe, que je m'en vais; qu'it a fait
ker des miraclea , que oette journ^e a
aoeru mon admiranoa pour kihque
e'en un pr^deatiii^ da ctd; qoMl faut
a iDon aime cent ms poor egaler la
sienne. Mais ^a^e loe retirer en sA-
rete?... — Oui^sirOt lui dit le g^o^ral
SaTary , si Yotre Majeit^ ratifie oe qua
les deox empereiurs de France et d'Al-
iemagne ont arrdtd dans leur entre-
voe. ^ Et qu'est-ee? — Qne Tarm^
de Votre Majesty se retirera cbes elle ,
par Ves joum^es d'^tape {pii seront
r^glte par Pemperear, et qu'elle era-
caera P Attemagne et la Pologne autri*
ebicnne. A eette condition , j*ai Pordre
de Pempereor de me rendre h nos
arant^iostes qui voot ont d^a tour-
Bee , et d*j donner les ordres pour pro-
tef^ET Totre retraite, reiDpereur vou-
laml reneeter Pami du premier consul.
— Queue garantie £aat*il pour ceta?
— Sire, YOtrc parole. — Je voos la
• OA aide de can>p partit sur-
DO au grand galop, se rendit
an mar^chal Davoust, aoquel
tl dcMioa Pordre de cesser tout mouve-
mefit et . tonte attaque* Puisse cette
geadrositedePempereor desFran^ais ne
pas toeoubli^een Russieaossi promp-
tement que lefut le beau proc^edu pre-
mier consul , qui rcAvofa h. Pempereur
Paul six mille bommes , avec tant de
grftce et de marques d'estime pour lui.
Le gte^ral Savary avait caus^ une
henre avec Pemperear de'Eussie, et
Parait troure tei qoe doit dtre un
hooime de cteur et de sens , quelques
refers d*aiileurs qa'il sit ^piouv^. Ce
onnarque lui demanda des details sur
la ioumee. «yoas^tiez in^rieurs h moi ,
Iw dit-il , et cepeadant vous 6tiez su-
p^rioirs sut- tous les points d*attaque. . .
-^rtn repondit leg^neral Savary, c'est
tvt de la guerre , et le fruit deqninze
ans degloira ; e^est la quaranliime ba-
taille qoe donne Pempereur. — Cela
dst vrai; c*est an grand homme de
ffoerre. Pour mol, c*est la premiere
fois que je vois le feu. Je n*ai jamais
eu la prmntlon de ui» mesurer avec
loi. ^Sire, quand tous aurez de Pex*.
grricnce, vous le surpasserez peut-
re. — Je m*en rais done dans ma ca-
{»itale. ratals venu au seoours de
'empereur d'AHemagne; il m*a fait
direqu*il est content. Je le suis aussi. »
( Extrait d*un bulletin dat^ d*Auster-
litz , 17 d^oembre 1605.)
Le roi de Pn»se en ^It r^uit k
se f(61ieiter d'avoir laiss^ battre les
deox empereors Alexandre et Fran-
a)is. Le mioistre Haugwitz , parti de
Berlin pour se readre au quartier ge-
nial des alli^ , en apprenant le sort
de leurs armes, se rend h celui de
Napol^n , et le felicite sur sa victoire :
ft Voilli , dit le vainqueur d*Austerlitz ,
« un compliment dont la fortune a
« change Padresse. »
Tandis que Parm^e russe se dirigeatt
sur la Sil^ie , le grand-due Constantin
se rendit k Berlin, declarant, au nom
d' Alexandre , que les troupes ^taient
h la disposition du roi ; cette demande ,
conforme aox traits , pouvait paraltre
une satire de la Conduite de Fr6d^rjc-
Guillaume; ce prince, qui avait craint
d*agir quand les chances de la guerre
pouTaient lui ftre ftvorables, n*eut
garde de proilter de cette offre dans
des circonstances si d^astreuses. Tou-
tes les operations militaires qui se rat-
tachaient au plan des allies manqudrent
par une consequence naturelle de la
joum^e d*Austerlitz : un corps d*An-
glo^Aosses, rassembM dans le nord
de PAIlemagne , ainsi qu*un autre en-
voyd dans le royaume de Naples , four-
nirent k Napol^n des pretextes plau-
sibles pour formoler nettement ses
vues d*agrandissement. « La dynastie
« des Bourbons a cess^ de rpgner, »
s'^cria-t-il dans une proclamation
adress^e au corps d'armee de Joseph ;
et la fortune ratifla cet arr^t.
D'apr^s la convention provisoire
conclue k Vienne le 1 5 d^cembre , la
Prussc c^dait «t la France les tcrri-
438
L'UNIVEES.
toiree d'Anspach et de Bareuth, Cie-
ves , Neufchdtel , et obtenait en d^om-
magemeot la faculU^ d'oocuper la
Flandre, apres eo avoir d^posseae le roi
d'Angleterre.
Le traiU de Preabourg ( 36 decern*
bre) statua aur lea sacrinoes impost
h I'Autriche. Lea anciena tUts de Ve-
il ise, en J comprenant la Dalmatie et
rAlbanie,furent r^uois h I'ltalie. La
principaut^ d'Eichatadt, une partie de
rex-^v^cb^ de Nassau , la ville d'Auga*
bourg , le Tyrol , toutea lea noasesaiona
autricbiennes en Souabe, aans le Bris-
fau et rOrtenau , furent tranaport^ea
r^lecteur de Bavidre, au ouc de
Wurtemberg et au due de Bade. Lea
deux premiers furent cr6^ rois [)ar le
vainqueur. C*e$t ainai que TAutriche,
depouill^ de aa suprtoatie , se vit r^
(iuite h un r61e secondaire et pour
lon^temps inofTensif. Mais, non moina
patiente dans aea refers qu*babile k
profiler de ses avantagea , cette puis-
sance toumait ses esperances vera la
Russie, et attendait ue la fortune dea
chances moins d^avorables. A bien
considerer les 6I^ment8 de la pr^pon*
deranoe francaise, on ne pouvait se
disaimuler qvr^le ne pouvait subsister
que par la victoire; au moindre ^ec ,
les nationality absorbdea par la con*
3u£te devaient se detacher d*un ordre
e cbosea improvise par des trait^a
sans ^tre dans les moeura ; et m^me en
regardant la France comme reprfeent6e
par aon ancien territoire et sea acqui-
sitions recentes , il ^tait ais^ de voir
que les forces oombin^es des nations
rivales pouvaient longtempsoontre-ba-
lancer reffort de ses armes , et mettre
sans cease en question son existence
politique.
Aprb r^change des ratificationa ,
Napoleon eut une entrevue avec Tar-
chiduc Charles au chateau de Stam*
merdorf; il y fut question, dit-on,
dudemembrementde laTuruuie, qu*il
s*agissait de soustraire a rinfluenoe
ambitieuse des Busses. Le moment
n^etait pas bien choisi poiir ^veiller les
craintes de FAutriche sur lea empi^te-
ments successifs de la Russie vers
rOricnt ; aussi If prince Charles evita-
t^il de se prononcer aur une aueatioB
qui ne toudiait point aux interdts du
moment. Cepenaant la sollicitude de
Tempereur n*toit pas aans fonde-
ment : en 1804 , la Rusaie, qui se pr6>
parait h &ire la guerre a la Livonie ,
avait 616 sur le point d*obtenir du di-
van un traits d'allianoe d^fenaive et
offensive; maia une clauae ins^r^
dans les stipulations onvrit les yeox
de S^lim. £ile portait que toua les
musulmana professant la religioD
grea]ue aeraient plac^ sous la pro-
tection imm^iate dea af^nts russes.
S^Iim et son conseil se rtoterent oontre
de telles pretentions. La Turquie n*^-
tait pas en 6tat d^appuyer ses griefs
Sar des forces imposantes ; la revolte
u pacha de Trd)izonde « et tea incur-
sions dea W^abites tenaient en 6chec
les troupes disponibles ; et , en peu de
jours , rarm^ d'Odessa nouvait me-
nacer les c6tes du Bospnore , tandis
que les ties loniennes , la Mor^ , la
Thessalie, I'^pire, et mtoe la Mol-
davia et la Yalachie deviendraient si-
multan^ment autant de centrea d'tn-
surrection. La Russie, dans d'outres
circonatanoes , edt pu tout exiger;
maia, absorbite par lea pr^ratifs
d'une lutte accuse , die se contenta dt
renouveler , pour huit ana, le traits de
1798. A peine ce traits ^tait-il conelu
que la nouvelle de la bataille d'Auater>
litz parvint k Conatantinople. Lea dia-
rtsitions de Tempereur des Fran^^ia
r^ard de la Turguie ^aient moina
favorables ii cette puissance (]u*hostile8
h la Russie ; cependant le divan apprit
avec jole la dtfaite des Russes , dans
I'eapoir que la lutte, en prenant TAl-
lemagne pour th^dtre, d^toumerait
pour longtempa les armes de feropire
moscovite occupy de sa propre con-
servation. Malgr^ les efforts de M.
dltalinski , et ceux du ministre an-
glais, la Porte reconnut Napoleon
comme empereur, et envoya un am-
basaadeur a Paris , avec dea felidta*
tions et de riches pr^ents.
Cependant la Russie songeait a re-
parer T^bec aoe venaient de reoevoir
ses' armes : il lui importait dene point
laisser a Napoleon le temps de con«
k
RUSSIK.
439
solider sa puissance. (1806.) Alexandre
se crat menie assez fort pour roister
snil au g^nie de son radoutable ad-
Tersaire; il signifia k FrM^ric-Guil-
laume III qu*il le degageait de sa pro-
mesae d^agir simiutaiitoent cootre
fa France « mais en lui oilrant, sMI
etait encore dispose k combattre, de
mettre a sa disposition Tarm^ du Ha-
novre , sous les ordres de Tolstoi , et
k» troupes que Benlngsen conduisait
en Sil^ie. Dans la situation pr^nte,
il y avait plus de danger pour la Pnisse
a accueillir ces demidres oflfres qu'k
les d^iner ; cependant le roi , cMant
a rentralnementbelliqueux du parti de
b oour, envoya le due de Brunswick
a Petersbours , pour y arr^ter les bases
d^ane ncnivelie coalition.
On s'^i t flatt6 h Paris que la victoire
d'Austerlitz aratoerait une paix g^n^*
rale; la Russie, ne voyant dans les
menagenients de Napoleon qu'nn sa-
crifice int^esae pour Tenlacer dans
son alliance, resta queique temps
ind^dse; enfin, au mois de juillet,
M. d'Oubril arriva k Paris, et la
paix tat sign^ le 1*' aodt suiTant.
Cependant, qaoique Tagent rosse edt
les pou^oirs n^c^aires, cette paix ne
flit point ratifi^, sous le pr^texte que
le dijiloniate s'^tait tort^ de ses ins-
tructions: les conditions stipulaient:
la cessation immolate des hostility ,
la remise aux troupes fran^ises des
boaches du Cattaro, le retablisse-
meot de la r^blique de Raguse dans
son ancienne md^pendance, la retraite
et ramnistie des Montenegrins, la ga-
rantie mutuelle de Tindependanee des
Sept-Iles, celle des possessions de la
Porte... Uarticle 7 , le seul d*une im-
portance generate, et oui sans doute
avait determine le plenipotentiaire
ruase, etait ainsi conqu : Aussitdt
ten vertu de la presente convention
paix , Fordre aura ete donne pour
re?acoation des bouches du Cattaro ,
les troupes francaises, en foisant ces-
ser toute occasion d'hostilites , se re-
tireront de fAllemagne. S. M. I'empe-
reuf Napoleon declare que toutes ses
tvoupes retourneroot en France au
pins tard dans trois mois , et k dater
de la signature du traHe. Par Tarticle 8 ,
les deux empereurs se promettaient
d'employer leurs bons offices pour ter-
miner la guerre entre ia Prusse et la
Suede. Enfin, par Tarttde 9, I'empe-
renr des Frati^ais acceptait les bons
offices offerts par rcmpereur de Rus-
sie pour le retablissement de la paix
maritime.
M. d'Oubril ayait pressenti , d'aprte
un changement de roinfstere qui avait
eu lieu a Saint-Petersbourg pendant
son absence , que cet arrangement ne
serait pas compietement approuve,
puisqu'en partant de Paris, il dit a
rambassadeur anglais : « Jevais mettre
aux pieds de Penmereur mon ouvrtwe
et ma i6ie. » (Rabbe.) Le parti anglais,
qui prenait un ascendant marque dans
le cabinet russe, aima mieux faire de-
saTouer le negociateur que de subir les
consequences du traite; et la question
de personnes , qui se cacbe si souvent
sous les motifk politiques , ne fut pas,
diVon , etrangere k cmt mesure ultra-
diplonMitique. D'autres ont pretendu
que la surprise de M. d'Ckibnl , apris
le desavea de sa conduite , Mait peu
sincere, et qu'il poussa le zeie et le
devouement jusou & se preter a une
combinaison prqutree d avanoe dana
le but de gagner du temps. Comma
les cabinets se piquent peu de loyaute,
il n'est pas etonnant que , dans I'in-
terpretatton de leurs vuea secretes,
on aille guelguefois au delik de leurs
propres mspirations.
Le maovais vouloir de la Prusse k
regard de la France n*etait plus un
mystere pour Napoleon. II n*ignorait
gas qu^lk 1 instant meme oiii le ministre
[augwitz acceptait les clauses da traite
de Vienne, le cabinet de Berlin se
liait plus etroitement avec les ooun de
Petersbourg et de Saint-James. L'oc-
cupation du Hanorre etait jNnesentee
comme une mesure prorisoire impo-
see par la necessite, et dont le rtoiitat
Iminediat etait d*^oigner les Francis
du nord de rAllemagne. Mais Napo-
leon , qui ne voubit pas k demi , dit
au roi de Prusse : « Je vous ai donne,
« il fiiut roaintenant que vous preniez.
* II faut surtoot que vous fermiez aux
490
L'UNIVERS.
« vaiflseaux de TAn^eterre lea porls et
« remboucbure dea fleuves ou voua
« voil^ mattre d^nnais. » En atten-
dant que la Pniaae ae deciddt, il fit
oGcuper roilitaffiemeot les territoirea
d'Aospacb , de NeiifcbAtel et de Bergt
et la torimsae de Weael re^t garni^
aoD franoaise.
Cepenaant )e g^nie de Napol^oo 1116-
ditait > pour a'aastirer de PAUemagne «
un nouvel ordre de chosea qui « en equi*
Ubrant les pouvoira du corpa geraia-
ni^ue, neutraliserait, au proot de aa po-
Ijtique , llnfluence de T Autriche et de
la Pruaae. En ee d^arant proteeteur
de oette confi^eration , il ae trouvait
en droit d'eiiger en retourune ooop^
ration active k aea vues ult^rieurea ;
ks £tata conf^d^r^ devenaient^ dana
oette oombinaison , autant de barrierea
eontre une attaque, 00 de poates avan«
e^«, a'il jugeait n^cesaaire de decon-
eerter par des marchea rapideaquelque
Douvelie coalition.
Le roi de Prusae , pour contre-baiao-
eer les effets de la nouvelle confedera-
tion , rdsolnt dMtablir une contre*fdd^
ration dans le Nord; u'est alora qu*il
ae rapprocha de la Ruasie et de la
Su^e , taodis qu*il jetait des troupea
aur le ierritoire aaxon.
Les pretentions de Napoleon repoua-
saient cette mesure de reciprocite 2 ae
croyant en droit de tracer avec aon
fflaive la part du Taincu^ il d^clara quo
us villes ana^atiquea resteraient inde-
pendantes, et que lea autres l^^tata du
Nord aeraient libres de n^agir que con-
fermement k leur politique particu-
liere. Prealablement, il ordonna' a la
Prusae d*e?aGuer la Saxe.
De son cdt^, Frederic -Guiliaume
deraandait : !<> que toutes les troupea
fraMaiaesrepassassentleRbin; 2*qu*il
ne rat plus mis de la part de la France
aocun obstacle h la ligue du Nord, la-
quelle embrasaerait, sans nulle except
tioa , tous les Etats dob desigoes dana
I'acte fondamental de la ooankieration
du Rhin , qu'il arait reconnue ; 8« qu'on
ouvrtt aans d^lai une o^oeiation pour
la disGusaion des points eonteatds.
Na(K>ieon recat cet ultimatuni au
qoartier gfomide Bamberg; ilrepon-
dJt par une proclamation dat^e du 6
octobre , dans laquelle il r^la d'avanee
la victoire, coinnie si la fortune n*a-
vait eu aucuns secrets pour ce ^enie
extraordinaire.
Les premieres hostilites eurent lieu
le 9 octobre. L'arraee prussienne oomp-
tait environ deux cent trente mille
hommes bien disciplines etd*une tenue
magnifique. La cavaierie prussienne paa-
aait, a cette epoque, pour la roeilleurede
TEurope. Les champs dlena temoi-
gncrentde la superiorite fran^ise : les
Prussiens essuyerent uoe perte dequa-
rante mille hommes en tues, blesses
et prisonnicrs ; deux cent soixante ca-
nons furent les tropbees du vainqueur.
Vingt-six generaux furent faits pri-
sonniers ; le due de Brunswick fut
grievement blesse , ainsi que le mare-
chal Mollendorf et le lieutenant gene-
ral Scbmettau; enfin le prince Louis de
Prusse tomba sur le cliamp de bataille.
« Jl est prouve, dit RaUbe, qu*une
terreur panique avail saisi cette armee
si fiere de sa discipline ; et les suites
de cette epouvante furent horribles et
bonteuses. Les environs d'l^a pre-
sentaient le spectacle d^ua champ de
bataille abandonne; des soldats de
toutes les armes, maintenant isoies,
sortaient des hois et des bales ou iis
s'etaient caches ; les obemins et ia cam-
pa|:ne etaient semes de fusils, de
baionnetteSy de cuirasses, de sacs
vides et de cartouches repaodues; les
Prussians avaient pilie les bagages des
Saxons, et les Saxons pillaient lea
Prussiens; les eharretiers et les valets
avaient quitte la route ^ eoupe les traits
des dievaux et verse les voitures ; des
caissons et des canons demontes furent
abandonnes par Ips condueteun. On
trouva meme quelques pieces en-
ciouees. » On attribue generalement a
Tindecision du due de Brunswick lea
resultats funestes de oette joumee.
Toutes les places fortes se rendirent
Buceessivement : le marechal Blucber
easaya seul de resistor dans Lubeck ,
mab il fut battH dans les murs mteea
de cette ville. La rodditioa de Maj^de-
bourg oouronna cette rapide et decisave
campagne.
liHtue, !• poys d« Bnmtwick,
kHnavie, tes ducMs d'Oldmbourg
KfcMccUenbourg , en un mot, tontt
thinam mptentrMNule^ «n y &>m-
(rant lea pcnrts anstetiqan, wibU-
Hint h joog ou iteflueoee de h France
impiiute , a VexceptiOB de Konigiben;
tt des foiU.ti.iiw de StralfDDd et ile
bilbers. La SiUaie ttait rar le point
iTfchamr ii la Prutse : te umicot (ait
war k lombUH du grmnd FrMtrJc leai-
blait notr portA malbenr i an oon-
iprfla; il elM &lla, ponr In conserv
«B' ou la repreodFC, tout le grinie qui
la aiait nttaehia 4 line couraDiie
ivceate.
r.'electcur de Sate >igna , k Poten ,
an traits d'oUiance iTce Hapoltoa , et
acc«da a la confediration du Rhin ; il
r ic
1 .■
encore «■!» tamps delis t
noavdledadMatres li l<
taedl, ill mliereot pr>>
lenrt lipiM^<Krriire li ^
oerai la jftignjt bii^ntul .
suGceitimiient der^iils a i
MotiruMiB, a Ptiltiisk.
L^ bata)bir£ylau (7 et
plus din
i: les deii
-iiile; fen-
t in furent
i:irnowo,il
I (iolTinin.
f.iiiw) fet
rlis S'sttri-
- saoglanta
tuitt que le
\ t'ran^i.
buerent la noces de
journrie; raus il est i
diampdebatailla resl.-
Lei opdraticns riiiiii.iiM'> raiviir-
menc^rtot au printeiiips isOT). Les
Ruues furuit encore v^jiik li^ a Fried-
laxidimais its deployerent im grand
courage, et cette victoire lut cnere-
meat aebetee. Xa prise Je Kiinigibwg,
de Nrisi, de Glatz et de Kosel , didon*-
mogea amplement Kapoieon decuBi-
eoes dont il avail pny£ cct nvant^gs :
les dbbria de rarra^ rasae prinnt po-
iiiioD derriere le Ni6nien.
Uo armistice fut convenu intre lea
il«ut empereurs qui, btcntut apria,
anxrt one entrevue dont le risuKat
denit chancer pour qndquet annte
kbttderEon^
A. TUsitt , «t an railieu du NUomo ,
<a dera ua payfUon eii lea dcm mo-
■a^Me K rendirait . suiria de Icni*
Sraolt offieieii- Afnii one conKrenee
asset tongue et qui eut lieu sans t^
moins, ils te s^ntrent avec toutes
les apparences d'une satisfaction niti-
tuelle. • Ce fut , dit Rabbe , un int^
ressant ipectacle dout les deux nrmecs
oui couTralent les denx bords du
(leuve , pleines de I'heureuse esp^rance
d'une pari igalemeot soubait^ des
deui nations.
■ Pendant le courg des conKrences
h Tilsitt , qui commenc^reot le lende-
main , chaoun des deux souterains se
montra ^nlement empress^ de donner
des timoignage* d'estime aiK per-
son n ages distingu6s qui aerompa-
gnaient son fiitur ami. napol^n fut
auBsi bienveillaiit avec les Russes
qu'Alnandre svec les Pran^aia. Dans
cet Change scnipuleusement attentif
de politesses souverainea , il edt Hi
difBcile de distinguer le voinqueur de
eelui dont la fortune avail trahi la
cause. La Sc^nc ne changea de carar'
tere et Napolkin ae reprjt son altitude
dominatrjoe que lorsquc ie roi et la
reinede Prusge arrivgrent an quartier
g^n^al de Ulsitt : noo que Tempereur
iranrals, abusant de sa yictoire , ait
en la moindre pens^ d'ag^raver par
un accueit insultant la position d un
prince que le malheur occablalt; au-
joafd'boi qua tant de fables ealom-
nieuses soot dissipies, on sail qu'il
ne eeasa pas un moment, dans eee
conf^noes, de se montrer mogna-
nime , et qne sa g^n^roeit^ ne p^it
rien de son prii a traTen les paroles
et les maniirea par leequelles die se
maifectait ; maia il eut i se d^fendre
des sollicitatioDB , et I'exBctitude de
I'hiatoire pourralt mttaa dire des se-
duetiens d'une refne belle, sprrituelle
et malheureuse. EUe I'efforca de r^-
parer , Ji force d'art et d'ceprit , le de-
sastre qu'elle a rait pdncipalement
proToque en soufTlant le feu de la
euore ; cependant md suee^ reita de
beaucoiip au-desaous de Ks voes , et
probabiemcnt d« act espfraBoes. Na-
polfon a lui-mAme btom qu'ella edt
et6 plus heureuae ai elle flit atriiie an
oommencement des nrigodationa, et
tsrtout si aoD man ne I'eAt pas ae-
conpagafe. Mais PrMtrffrOulllaume, '
433
L'UNIVERS.
mutant improdemment )es recrimina-
tions aux pridres, et le r6le de roi de
la vieiiie rodie a celui de suppliant et
de vaincu ; parlant de la violation du
territoire (TAnspach, et r^clamant
Magdeboarg, Mta la conclusion de-
finitive du traits qui le depouillait.
Grdce , cependant , a rempereur Alexan-
dre, dont Tentremise rut plus faeu-
reuse que celle de la reine de Prusse
elle-mSme, Fr^d^ric - Guillaume con-
serva la moiti^ de ses £tat8 avec le
titre de roi , h des conditions, il est
vrai, qui rapprochaient sa condition
de celle d*un prince tributaire. »
Le sort des arines offirait k Napo-
leon une occasion unique : celle du r^-
tablissement de la Pologne. Les trois
puissances qui avaient consomm^ le
partage se trouvaient justement sous
le coup des sacriOces, et rien n*etait
Slus ais6 que de tailier un royaume
ans la part des reparations; si la jus-
tice seuie re6t guide , il eAi sans donte
Sris ce parti; mais il n'entrait pas
ans ses vues de r^tablir Tancien eoui-
libre eurapeen, qui Teilt force lui-
lueineadlminenses restitutions ; d'ail-
leurs , en relevant la Pologne , il devait
reiioncer k Talliance de la Russie , saoa
laquelle le systeme continental restait
incomplet : il se boma done k quelques
remamements insignifiants , comme
pour avertir les puissances interessees
de ne pas le pousser k une mesure de-
finitive. Le grand-duch^ deVarsovie,
qu'il donna au roi de Saxe , fiit agrandi
aux depens de la Prusse , et Dantzick
recouvra son independance , quoique
dans un rayon restreint.
La Russie reconnaissait la confe-
d^ation du Rfain , et eedait au roi de
Hollande la seiKneurie de Jever dans
rOst-Frise. La France retablissait dans
leurs possessions respectives les dues
de Saxe-€k)bourg , d*Oldenbourg et de
Mecklenbourg-Scbw^rin. La Russie
reconnaissait les rois de Naples, de
Hollande et de Westphalie. Enfin , par
une clause formelle , les troupes russes
devaient evacuer la Valachie et la Mol-
dayie. On avail ajoute, k la verite,
que les troupes de Sa Hautesse ne pour-
nient oocuper ces provinces avant
'rediange du traite de la paix definitive
entre la Russie et la Porte Otiomane ,
traite pour lequd la mediation de Tem-
pereur Napoleon etait accepts , oe aui
n'empecha pas les Russes de garner
garnisondans les prindpautes jusqu'en
1812.
Par un article secret, la Russie
promettait de s*unir avec la France
centre TAngleterre, si sa mediation
conciliatrice restait sans eifet. EllesVn-
gageait, en attendant, a fermer ses
ports aux navires anelais , k remettre
en vigueur toutes lesTois en faveur des
neutres , et a user de son influence sur
les oours de Suede , de Danemark et
de Portugal, pour determiner ces
puissances k conformer leur politique
aux meines principes.
Le traite de Tilsitt semblait avoir
sincerement attache Alexandre k Na-
poleon , et leur amitie paraissait mtoe
independante de ce rapprochement po-
litique. On a recueila quelques anec-
dotes a ce sujet, qui prouventde la part
du.tsar ou une grande faussete ou one
veritable sympathie; et le caract^
d* Alexandre , quelque capable ou'il &kt
d'ailleurs de sacriner son inciinatioo
aux interets de son empire , ne perniet
pas de douter que son empressemeat
ne fdt sincere. A Erfurt, les deux em-
pereurs assistaient k la representation
d'une tra^edie : Alexandre , saisinant
une allusion, dit, en se penchant k
I'oreilie de Napoleon :
L*anitti<d*«n grand bomme «il an prdMBtdJat Hmuu
Un iour, les deux monarques 8*60-
tretenaient avec une entiere oonfianoe
de rorganisation etde radministration
de leurs Etats : Alexandre expliquait i
Napoleon la nature du gouvemement
russe ; il -lui parlait de son s^at et
de la resistance qu^il eprouvait k hire
le bien. Napoleon , lui serrant la main ,
repondit avec vivaeite : « Qnelque
« grand que paisse Itre un empire , il
« est toujours trop etroit pour deux
ft mattres. » Si Taneodote n'a pas M
controuvee, oertes Nanoieon n'avait
pas saisi la pensee d'Alexandre* Le
tsar ne pouvait se plaindre ^ sa puis-
sance nit entravee; mats, '* '^
KU9SIE.
43t
coome il T^it, il re^tUit que les
ameliorations qu^il meditait nissent
retardees par lea pr6jiig6s ou llncapa-
cite de quelguea-uns de ses fonction-
naires, et romnipotence da pouvoir
ne pouvait rien oontre de teis obs-
tacles.
Ifapol^n s'e&t plamt depuis de la
duplicity d' Alexandre; on pent dire
3ue le tsar n'a pas pouss^ rh^roTsme
e Paniiti^ jusqu*au martyre ; cepen*
dant il est juste de reconnaftre que ,
pendaot qaatre annees, il est rest^
fideSe h une alliance qui ruinait le
commerce de ses fitats , et dont i*issue ,
en admettant qu^elle fdt favorable au
plan de Fempereur franqais , ne pou-
vait ultdrieurement que subordonner
la Russie a un alli^ qui mirait bien su
parler en mattre quand les autres bar-
rieres seraient tombees. Nous citerons
M. de Boutourlin dans les prol^o-
menes de son Histoire de la campagne
de 1613.
« Le traits deTilsitt plon^ea TEu-
rope dans la stupeur et re£troi , et il est
aise de voir que cette paiz ne pr6sen-
tait aucune des garanties que Ton de-
vrait retrouver dans les transactions
de ce genre. U^rection du duch6 de
Varsovie^it une mesure ^videmment
hostile contre la Russie. et I'affecta-
tion que Napoleon mit a en oonfdrer
la souTerainet^ au roi de Saxe, qui
desoendait des anciens rots de Pologne ,
d^otait encore plus le projet d'inspi-
rer aux Polonais des esp^dnces dont
la realisation ne pouvait qu*ltre pr^ju-
diciable h la Russie , qu*elle menacait de
la perte de provinces r^unies depuis plus
de quatorze ans h son empire. jL'empe-
reur Alexandre ne pouvait m^nnaitre
Tesprit de ces dispositions; mais les
circonstances malheureuses oh se trou-
vait FEurope lui prescrivaient d*^Ioi-
gner la guerre k tout prix. II s'agissait
surtout de gagner le temps n^cessaire
pour se preparer k soutenir eonvena-
blement la liitte que I'on savait bien
itre dans le cas de se renouveler un
jour. »
Les rtoriminations de ce genre sont
friquentes dans Tbistoire , it les peu-
ples dont les. intMts sont en lutte
38* UtraUon. (RussiB.) t. ii.
se les renvoient de Tun k Tautre. Si
la force etait le droit, toutes les in-
fractions aux traits seraient immo*
rales; d^une part comma de Fautre,
elles s*expliauent par la ntossii^* mais
elles ne se lesitiment que par le suoc^.
Le manque de foi ne pouvait venir de
celui qui imposait les conditions, ei
qui necessairement ne les formulalt
qu'li son avantage , et le rdle de celui
3ui les eJudaits'anoblissait, pour ainai
ire, par le p^ii qu*il y avait h le
faire. Nous ne partageons pas & cet
^ard le sentiment de Rabbe, qui pre-
tend ^tablir que Fempereur Alexanare,
dans les premieres entrevues avec Na-
poleon, fut compl^tement sous le
' cbarme ; nous croyons que son admi-
ration fut sinc^e, mais qu*elle ne
pouvait aller jusqu'a Fabn^ation des in-
t^rto russes, qu'il avait jur^ de main-
tenir avant d'6ire Falli^ du vainqueur
d*Austerlitz et deFriedland. On pourra
objecter qu*apr^ une campasne mal-
heureuse , Allsxandre quittaTilsittsapa
avoir rien perdu de son influence et de
son territoire ; certes Napol^n Favait
plut^t traits en alli^ nmssaire qu'en
▼aincu ; mais , avec tous ces m^^a^e-
ments , la Russie n'en ^tait pas moins
ouverte k une invasion fran^aise ; et
FAllemagne, le milieu strat^ique 06
s'^taient vid^es les querelles prM-
dentes , avait cess^ d*etre une barrieie
pour le Nord et pour FOrient.
Cependant les cons^ences de tai
{laix de Tiisitt fiirent lorn de rencon-
rer en Russie une approbation g^n^-
rale ; les partisans de FAngleterre , les
n^Ociants menace dansleurprosp^itd
par Finterruption du commerce, et les
i>ropri6taires dont les exploitations al-
aient se trouver sans dmiucb^ , mmv
mur^ent contre les conditions on^
reuses de Falliance fran^aise. On pr^vit
que la guerre allait roomentanemoit
changer de nature et de th^tre , et les
cdtes de la Baltique furent mises en
etat de defense.
De leur cdt^ , les Anglais , voyant
que Falliance russe leur 6diappaitf
sans renoncer k Fespoir de la renouer
procbainement, chercb^rent d'autres
points d'appui dans le NonF; lis par-
434
L17flIV£R&
rhirent k entntliier le Jeane et diera-
leresque roi de SoMe , qui rompait un
amistice cooclu arec Brone « a Tins-
taut oCt lea n^f^iations deTrlsittve-
Inietitde 8*ouvrir. Ce prince osacom-
Boenoer seul lagaerre ; maia il fut feras^
trvant d*toe secouru ^perdit sooeessi-
▼ement Stralaund , rile de Rugen et
toute la Pomtonie suMoise.
Tandis que lea Su^oii s'lmmolaient
aox intMta de la Grande-Bretagne,
tine eacadre anglaise parut tout k coup
devant Gopeobaguei pour flommer le
roi de DanemariL de aouscrire un nou*
Teau et aecret traits d*alliance avec
PAngleterre , et de mettre h la disposi-
tion de cette puissance toute la flotte
danofse hisqu^ la condusfon de la
pmx g^nerale, sur le seul motif que le
Danemark serait prochainement forc^
par Napolton k declarer la guerre.
C^tait justlfier I'dnis de la force par
la phis saurage violence.
Malgr6 les protestations du comte
de Bernsdorn, ministre danois, les
menaoea succM^nt aux injonctions :
aprte ces Inutiles demonstrations , la
▼ille fut bombard^e et incendi^e , et la
flotte danoise tomba au pouvoir des
agresseurs.
Le roi de Danemark s'empressa de
a6questrer dans ses Etats toutes lea
propri^t^s afiglaises, M de oondure
avec Napolton un traits d*alliance.
Cette oondnite de TAngleterre ^tait
de la plus haute incons^uence, et fbur-
nissan ii la Russie un motif l^^time
S9ur observer k la lettre les stipula*
ODS de Tilsitt. En effet, Alexandre
rendit, le 16 octobre 1808, la decla-
ration suivante :
« Plus I'empereur attachait de prix 1^
famitie de I& Majesty britannique,
l^his il a dd voir avec regret que ce
monarque s*en eioignAt tout a &it.
« D^ Ibis Fempereur a pris lea
amies dans une cause oik Tinter^ le
plus direct etalt oeioi de TAngleterre ;
il a soUidte en vain qu*dle coop^rit
an gre de son propre int^r^ ; 11 ne lui
demandait pas de joindre ses troupes
aux siennes , il d^sirait qu*elle ftt une
diversion; fl s'^tonnait de ce que,
dana aa propre cause, die n'agissait
pas de son odt^; mais, froSde specta-
trioe du sanelant thddtre de la ^erre
qui s*6tait ai1um6e k son gr^ , elle en-
voyait des troupes attaquer Buenos-
Ayres. Une partie de ses arm^^ , qui
paraissatt destin^e k faire une diver-
sion en Italic , quitta flnalement la Si-
dle ou die s^etait assembl^e. On avait
lieu de croire que c*6tait pour se por-
ter sur les cdtes de Naples ; Ton apprit
qu'elle etait occup^e 1^ essayer de s ap-
proprier l'£gypte.
c Mais ce qui toucba sensiblement le
ooeur de Sa Majesty lmp6riale , c*etaitde
voir que , contre la parole expresse et
precise des trait^s , rAngleterre tour-
mentait sur mer le commerce de ses
sujets; et k quelle ^poque? lorsque le
sang des Russes se versait dans des
comibats glorieux, qui retenaient et
fixaient contre les armies de Sa Majestd
Imperiale toutes les forces militaires de
Sa Majeste I'e-mpereur des Francis,
avec qui TAngleterre ^tait et est en-
core en guerre.
« Lorsque ces deux empereurs Grent
la paix , Sa Majestd , malgr^ ses Justes
griefs contre 1 Angteterre , ne renon^a
pas encore k lui rendre service : elle sti-
pula dans le traits m^me qu*elle se cons-
tituerait ra6diatrice entre elle et la
France ; ensuite die fit Toffre de sa
mediation au roi de la Grande-Bre-
tagne ; elle le pr6vint aue c'^tait afln
de lui obtenir des conditions honora-
bles. Mais le minist^re britanni(]ue ,
apparemment fiddle a ce plan qui de-
vait reldcher et romore les liens de la
Russie et de rAngleterre, rejeta la
mediation.
« La paix de la Russie avec la France
devait preparer la paix generate ; alora
TAngteterre quitta subitement cette
lethargic apparente k laqudle elle s*6-
tait livree ; mats ce ftit pour jeter dans
le nord de l^urope de nouveaux bran-
dons qui devaient rallumer et alimen*
ter les feux de la guerre qu'dle ne de-
sirait pas voir s'eteindre.
« Ses flottes , ses troupes parurent
aur les cdtes du Danemark pour y exe-
cuter un acte de violence dontThis-
toire, si fertile en exemples, n*en
offre pas un seul de pardl.
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EUSSIE.
m
« Une puioaiiee tnaqoiHe et mod^
- .e, qui, pamoe Jon^ieet ioalt^rabic
sagesse, avatt obtflnu daos le oeicie
d«s mooarciiMf use dignity morale,
we ¥oil saime, traitiB eoamie ai eile
IrainaJt aourdemont daa eonplofts«
comme ai eUe widiUk la mine da
rAogletcrra; ie toat pour jualifiar sa
lotua et pmnpfee apoliatioa.
« L'anpereor, lilaaa^ en aa dignity,
dana riotardl de aea pauplca , daia aaa
ongKgBniwtfa avac loa oaora do Hold »
par eat acte de violeoea coaunia dana
la 0ier Baitiqoe, qui cat one mar far-
m^, doot la traaqoBlit^ avail M da*
puia loogtempt » el au au du eabiBet
da SaioWanea, gaianlia par laa puia-
aaoeea rireraiaes. no diasimiila paa
aaii raaaanliiBaiil a TAaiglatarra, el la
m avartir qo'il n'y reatorait paa inaen-
aa4a.
« 6a Mstey na prMI paa qua lora-
oua rAngletarre. ayant na^ de aaa
wceB a«ee aueeaa, looehail au no*
maot d'enlcTar 9a pnHe, eUe ferait
un uouvei outraee au Duieainrkf at
que Sa Hajeal^ iferail le partager.
• De aouvellaa pn^siliona furenl
laitea, laa uaes pkia iosidieuses que laa
aotrea, qui deraiaot rattacfaer k la
poiaaaaaa britanaiqua le Danamark
aouodia, d^grad^, et oomme applau*
diaMinl i ca qui Tenait de lui arriver .
« L*apijiereiur pr^yit eaeore moiiia
qu*on lui ferail ToSre de garantir
eatle aoomiaaioii, et de r^odre que
celte violeiiea n'aumit aucuoe auile f A-
cbeuae pour TAaielelene. Son aoibaa-
iadeur cmt qu'U etak poasible da pro*
poaer au qiioial^ da Teaipareur que
Sa Majeat^ topt^riate ae ^rgeAt de se
faire Papologiste et ifi apotien de ea
qu'elle avail si bau^eoieiii>ltoi$.
« L*eBiDeieiir ae defwa k celte d--
marche au eabinet de Saiot-Jainea
d*autre aitealioo que ealle qu*eUe b>6-
rilait, el jugaa qu'U ^it tamps 4e
mettre dea bornes k aa moderation.
« he priooe rvjsi de Daoemark*
dou- d*uB Gaiaetdre plejn d'^ergie et
de noUasse. et ayaol le^^ de la Pro-
▼ideooa vm 4Jgoit<i d*ma analogae ^
la dipitd de con lan^, avail fail
«v«r||r f «inpevaipr qwe , jip(»tH»aiii om'-
tr-ooutreeequi venalt de ae paaaer i
Gopenbague, il u^eu avail poiDl ralifid
la eonventiouv el la rcgmail oomme
BOO avemie.
« Uaintenaol, il viaut de Mte in«-
truire Sa Bligast- Imperiale daa noifr>
veUaa propoaitiooa qu on lui a failaa,
et oui imtaieat aa r^stanca au liau
de b calmer, parce qu'elles tendaieot
i imprimer sur ^aa aotioua le cachet
da ravilissameni, dont dle^ oe pocte-
ront jamais rempreinta.
« L'empeffeur, loucb- de la ooifiaaoe
^m |e pHooa royal pla^ait en kii , ayani
eonsider^ sas proprea griefs ooatra
TAoglalanre , ay^ol mOremenl eiamind
k» eogagamaots qu*il avail avec lea
puaaaaneesdu Nord, en^ements pris
par rimp6ratrice Catbenne, et par feu
Sa Majesl- Temjieraur, tous deux de
gtorieuae mtoouna, a'eal d-cid- k lea
ixmplir.
« Sa Miyaat- ImpMale rompt toute
oommunicatioo avec TAnglajterra; alia
tappaile toute la l^tioo qu'elle y
avail, et na vaut paa cooserver prjp
d'ella ceUe de iSa Majesty britaiuiigue.
II n'y aura doninnvaal, en^ las deux
pays, aucuB rapport.
« L'ampereur d-clar0 quUl aonula,
et pour toBJours, jtout acte conclu pr^
CMiemment aoire la Grande-Bretaigne
et ia ilussie, el nomnK^meut b con-
ventiofi ftite aa 1801 « le » d|i mois de
juin.
« II prodame de neuveaw le priopipe
de la ueutralit- armee, ce inoauoienl
de la sagesae de rimp^trice Cathe^
rioe, et s'eogage k ne jamais ddrogar
k ce syst^me.
« II 4emando k rAngleterre de sa-
tisfaire corapietemenl ses su|ets sur
toutes leurs justes r-clamalioos de
vaiaseaux el de marchaodiaes, aaisia
ou retenus coutre la teneur expresae
dea traitea coedua ^ua son propre
regae.
« L'emperaur previent q^e rien ae
aera r-jUmli eutre la Euasif et rAn-
flleteiTe, que calle-ci n'ail satisfait le
Danemark.
« yenyiwreHr a*atteiid k ce que Sa
Majesty britaaoJ<]ue, au iieu de per-
mettre a sea minislres, oomme elie
4.
4KI
UUNIVERS.
tient de le faire, de r^pandre de nou-
Teau les germes de la goerre, n*6ooa-
tint que sa propre sensilrilit^, se j>r^
tera a conclure la paix avec Sa Maiest^
fempereor des Francis; ce qui eten-
ihndt, pour aiosi dire, k toute la terre
lea bienftits inapprMables de la paix.
« Lorsque rempereur sera satis&it
8or tou8 les paints qui pr6oUent, et
fiommtoent sur celui de la paix entre
la Praooe et FAngleterre, sans laquelle
aucune partie de I'Europe ne peut se
promettre une t^ritable tranquillity,
Sa Majesty Imp^ale reprendra alors
Tolontiersavec la Grande-Bretagne des
relations d*amiti6 que, dans Tetat de
juste mifioontentement o& rempereur
devait ^tre, il a peut-^tre oonserrfes
trop longtemps. •
Nous avons cit^ cette pitoe textuel-
lement paroe qu'elle repr^sente d'une'
maniere fiddle, et la nalure des rap-
ports que supposait Texteution des
traits entre la Russie et la Grande-
Bretagne, et les griefo d'Alexandre
eontre une nation qui croyait s'ae-
Suitter enters les coalitions en payant
e son or une partie de leurs sacrifices.
En oons^enoe de cette d^ara*
tion , Tembergo fut mis sur les vais-
seaux anglais dans les ports russes,
et la Prusse suivit oet exemple.
Au milieu de circonstances si irri-
tantes, la mtfiation de la Russie ne
pouvait gu^ 6tre accepts , les Anglais
ne la considerant point comme une
d^mardie spontan^, mais oomme une
oonstoienoe du traits de Tilsitt. Les
n^goeiations durtont encore quelque
temps; le ministre anglais, avant de
rien conclure, demandait la communi-
cation des articles secrets de la paix
de Ttlsitt, pretention qu*avait d^k
toirt6e le baron de Budb^ , et qui rat
formdlement repouss^ par le prince
Soltykof , qui lui avait nuoM€ au mi-
nistere. A la demande que la paix entre
TAngleterre et le Danemark fdt Tou-
rrage de I'empereur, oe prince avait
r^pondu par le manifeste que nous
avons rapports plus baut.
II est probable que Napoltai s'atten-
dait bien h ce gue la m^iation de la
Russie resterait sans effet; mats il
re^rdait ce reftis probable oomme de^
vant unir plus etroitement encore
Alexandre k ses int^hHs.
Quant aux artides secrets du traits
de Tilsitt, ils n'ont jamais ^ bien eon*
nus : «cependant, ditRaMl)e, il paratt
que Tunion des deux empereurs y ftit
baste sur une multitude ae conditions
subversives de toute 4qa\t6 et de toal
^uilibre en Europe, conditions dont
pfusieurs puissances du second ordre
devaient supporter les oons^uences
spoliatrices. Ainsi la prise de posses-^
sion de la Finlande aurait ^t^ conseatie
par Napolten , en retour de la eessjon
d'autres pays dont la Russie disposait
avec tout autant de droit que la mnoe
pouvait en avoir sur les provinces de
la Su^e. Ce qu'il y a de bien remar->
Suable k oet ^rd , c'est que le rteultat
e ces transactions ait subsists aprte le
renversement de'celui avec qui eHes
avaient ^te faites. En 1813, TAngle-
terre, par son traits avee la Russie et
la SuMe, en sanctionnant la conqu^te
de la Finlande, s'est constttuee 1 ex^
cutrice du traits de Tilsitt dirig^contre
elle... Ces spoliations maintenues ont
dd en amener d'autres. II a fallu d^
dommager la SuMe par la Norw^e;
k ce prix d*ailleurs, k ce prix seui , elle
est entrte dans la derniere coalition;
Suis il a M ntessaire de faire cesser,
ans un ordre de cboses tout l^'time ,
les cris du Danemark, et on I'a in*
demnis^ par Pabandon de la PoRM^ranie
so^ise, que Gustave avait jadis ac*
guise comme prix de son assistance en
niveur des protestants d'AUemagne
dans la guerre de trente ans. »
Malgre les formes spteieuses de la
eitique, il est difficile de consider
trait6s autrement que oomme I'ex-
pression des int6r^ du moment, et
dont une nouvelle combinaison d*int6-
rdts bouleverse t6t ou tard toute V^co^
nomie. Si un prince se piquait d*ufie
probity k toute ^preuve en fait de trail*
sactlons politiques , il lutterait k armes
ingles centre des adversaires moins
scrupuleux , et serait dans certains cas
victime de sa bonne foi. Senlemeot il
est de bautes oonvenancss que la di*
plomatie tient k observer dans PintMl
Russie.
4S7
dejM oemncs iphemeres. Si Ton rt-
moote k la source de oette immorality ^
OQ la trouYe dans la conqu^te elle-
mtoe; la diplomatie n'est autre chose
Sue Fart de r^lariser la violence « et
e Cavorifler 1^ int^r^ts d'un people
au pr6|udiee des int^rdts rivauz. Get
intereU sont relatifs; pour les vain-
quears et les £tat8 puissaDts, lis ex-
primeDt l€s termes les plus avanc^
de leurs pr^ifteotions actuelles ; pour les
Tmcos et les faibles, ils consistent h
restrdodre autant que possible la U-
mite des sacrifices, et 1^ leur ra^nacer
des d^oaunagements ^ventuels. Or,
dans les oraods cbangements politi-
ques, le mplacenoont des influences
altdrant la nature des rapports, toutes
les conventions sont k reiaire, paree
que la cause qui les a d^termin^ est
d^tniite.
L*abondance et rencbafnement des
^vtoements militaires, que couronna
la paix de Tilsitt, nous a forc^ de
laisser en arriere les affaires de TO-
rient : nous allons remplir en peu de
ox>t8 oette lacune.
La goerre avec les tribus continuait
sor les fronti^esde la Perse. Le prince
Tzitzianof , commandant en chef, an-
non^, dans son rapport du S Janvier
1806, ipat le Schirvan 6tait incorpor^
a rempire nisse. « L'arm^, dtsait-il ,
avait pris ses quartiers d'hiver dans le
▼oinoaged'^ndan, etmardieraitbien-
tot sor Bakou, pour donner la main
au major g(§n6ral Savalikbin contre
Hussdn-Kouli-khan (Rabbe). » Mais
Tzitzianof trouva la mort dans cet en-
droit par I'effet de la plus noire tra-
bisoD. Kouli-khan denianda que le
g6i^ral nisse vtot en personne jus*
qa'auz portes de Bakou nour en reoe-
voir les de£B. Tzitzianoi y oonsentit,
et, aceompagn^ settlement d^un officier
et d'an Claque, U se bAta de se rendre
a I'endroit convenu. L'assassin ^tait
k cfaeral devant la ports de la ville, et
ii en remit efi&etivement les dffs;
mais, au mAne instant, un Persan,
qui se tenait derri^ le khan , tira un
coop de fusil au g^n^ral rosse. Les
sums Pevsaos tomwreot sur lui avec
leurs fiabres, le massacr^rent, et
tratn^reat son eadavie daas la vills.
Ali-kban de Derfoend avait partieip6
k cet acta bonteux. Un corps de tnMh
pes russes, sous les ordres do lieute*
nant gMral Glasoico, ayant pasa^ la
T^ek et march^ conue Derbend, AJI-
kban se pr^ra k la dtfense; mais les
habitants de Derbend chaas^rent leor
tyran, et apport^rent les deb de lit
ville au general russe, qui y fit son
entrte le 8 juillet, au muieo des plus
vives demonstrations de ioie des habi-
tants. Gependant cette pnse de posses-
sion ne termina nas la eampagne.
Plusieurs chera de tribus du Can-
case se r^nirent de nooveau pour
dinger une attaque dedslTe centre les
troupes russes sur divers points. Abbas
Mirza avait dans ce dessein pass^ TA-
raxe k la tite de vingt mille nommes;
mais il fut attaqu^ par le major g^n^
ral N^boltzin, et repouss^ vers TAraxe
avec une perte de pTusieurs miliiers de
tu^ et de blessds. Les antres priaoes
lurent egalement dd^its , et les Russes
se trouverent les mattres de tout ie
pays; mais leur prise de possession ne
pouvait ^tre considMe comme d^ni*
tive tant que les tribus des montagnes
n*auraient pas €tk subjuguta ou d^
truites.
Pour donner une idee de Tesprit k la
fois ddi^ et belliqueux de ces monta*
gnards, nous allons rapporter sucdno-
tement conunent la derniire rdne de
G^rgie, qui n'avait plus d'aiHeurs
qu'une autorit^ nominate, se vit obli-
g6e de renoncer a ses esp^rances , non
>utefois sans avoir donn^ une preuve
memorable de son courage et de son
Anergic.
Comme nous Tavons vu dans le ooun
de cette histoire, les premiers rapports
eotre la Russia et la Gtoigie nirent
determine par des motift de rdigion*
Tant que Tempire cut k lutter pour son
existence contre ses voislns du Nord et
de rOocident, Fintervention des tsars
moscovites dans les affaires politiqoes
des regions caucasiennes fut nulla on
peu efncace, mais elle servit k fomeD»
ter les di^dons des princes ind^pen-
dants, dont les uns reoouraient k hi
protection de la Porte, tandis que les
OS
LIJIIITEliS.
wBtIMB hnplDfMMl eeito dM Rntaei.
Phii tard, PMrrv le Amnd, qui inrait
(toM^s qm Ik UniM m pomraft a«-
Mtfief M pr^$|N)iiM'ati06 qoe par tin
vaale d^eiopp«medt de ses ressources
fB^mflMrCHil^ , a'4ltait fait cMer par les
ariiiM (17M) to DagfaesCan eit to Cbir-
▼afi ; niais it ht tarda pas & ae oon-
taiiicre que stt projetB etaieot prtoa-
tnr^.
H^rteHoa, r^bti sor to trdne dte
Gto*gf e par Thaitiaa-Koali-khan , Taa-
Ittt secouer to joa(^ d« la Per8e<, aprte
la mort da ce oooqii^ant. £n 1709 , dea
troupes masea appuy^ent sea preten-
tions, mais ee aecoura inaufSsant ne
Kt to souatraire a la domioatioii ma«>
mtone. IMa Tors Catberiiie.^ndit
sQir to G^rgto on proteetorat qvl de*
vait ainener orochainement rincorpcH
ration d^fixiitive de ee ro? aume k Vtm-
g're rucse. Par to traits de 1788,
^radfos oessa d'etre f?aU it to Porte ,
mais, cofiime chr^ien et atli^ de to
Rossto, n prit to titre de tsar ^ to
G^orgle, titre et pooTotr au*il d^ara
temr de to Russie pour lui et seS dea*
cendaots. Tootes tos anciennes depea*
dQooea de la G^gie furent d^tot^es
annexes de eette province, pour ^i«
reprises a Foccasion. Le cathoiioaSf
ou patriarchede to G^f^gie, &t revftu
du titre d'arehev^qoe de Tobolsk.
Mator^ oea stiputotions, la G^orgto
retonma aons to jovg persan en 1795.
A to niort d'H^raciias, son flto,
Georges XI , ne d^ya que de to fal-
blesse. Paul l" lugea qti'il ^tajt temps
de possSder, au lieu de se borner h un
proteetorat rainettx. Pi^ to traits de
Tiflis (1799), Tempereur de tout«s les
Rosses pril pour lui et ses descen-
dants to titre de tsar de to Gtogto; to
tis atb^ de Georges, David, prit to
titre de r^ent , transmisaibto k as pos-
t^tt6. II rat stiputo que tos mines d*or
ct de ouivre seraient exploits par lea
Russes, el qu'un corps de six miito
hmomss oecuperait tejiays.
Cependant les difiterents princes
aivatont ^t^ conserve dans tours pro-
▼fnoes particulitos, et tours rivalibs,
aaiis oesse renalssantes, s'opposaient
a» rtebHHMiient de Toidre et de la
palx, et «Hnpffomettaie>it h lout mo-
ment les interits g^n^nnit; on tos at-
tira dans Pint^cfir de Tempire par
Pappdt des distinctions et des r6com-
penses. David , fito ato6 de Geoif es, et
qui, apr^ la nKurt de son p^, avait
exero6 to r^enee, fiit envoys k P^ters-
bourg en ISes. A partir de cette ^-
que, le pays^ k l*exoe»tion des pen-
plades msobmnes, nit admimstr^
oomme une province russe.
Le g6n^al prince Tzitsianof , alH^
k to f^mrilto royale de G^Onngto, mais
attadi^ depuis tongtemps au service
russe, ftit nomra^ au geuvemement de
oes oontrte, en fnime temps quMl
conservaft to oomroandraient en cb^
de rarm^ qui avait dt6 envoy^ sous
to fl^n^ral Knorring.
Marie, fltto du pntiee Georgea Tsil*
zianof , femme en seoondes neces da
tfA Geoflges Xt , mort en ISOO , restait
encore k Tiflis avee aes sept enfenta,
deux filtos et einq gardens. Soit que le
tfouvemement russe slnqui^t pea
i*une femme et d*enfents aussi jeunes ,
soit qu*il edt tourd au vif d&ir que
eette reine t^motgnatt de pouveir finir
ses jours dans son pays natal , on avait
toier^ jusqu*alors sa r^idenee en
G^rgie. Gependant Marie, pea eon-
tente de cette indolgenee du gouver-
nement, oo craignant qu*ou ne lui
oontittudt pas toujours eette fiiveur,
eherehaft a se soustraire au poovoir
de ses proteeteurs; die prtendalt as^
sorer son s^gour dans sa patrie par ma
projet d'^vasion qa'elto tramait en ai*
knee. Mais Taittianof surveillait de
Mis sa oondvite; il 6piait les moindres
d^maftbes de Marto, et, oonoaissant
son caract^ d6dd^, remuaift, il nV
vait pas manqod de oonsetNer k son
geuveroement d*eiitover to prioceaae
du lieu 4e sa naissanee. En attendaat
que cet ordre lui fillt parvenu , Tzitzift-
Bof ne nMigea aueons moyeiis de s'aa*
surer de la pcvsenne de Marie. H avait
fiftis dans ses iBtiftrto un nomm^ Rato-
tousof, noble gto'gien, qui ^tait de
to suite de to reine et dans ses confl*
denees lea plus secr^tss. Get homme,
flagn^ par le gte^ral, ne fit aueune
ilHieult^ de dtouvrir to»t ce qui
&VSiIE.
le Mttit dang i» wtiMNi d» Marie.
Lw P$chif»i et IcB JoiikMiiI, deux
peuplades du Caucase qui habiteal
ven leg sowroes de 1« lora (Canbyae),
soQt d'autant plus formidables, que
lotttea les vertus guerri^ras aont com-
aacrte jiar leiiffa lois et Jeurseoutuoea
mtoe: li leur esl d^adUf aous peine
de noit* de mtrer dans leur pajm
Ueas^ per deir ite , on de SB raser tanl
qu'ile oat a vesger la Hiort de quelcyue
parenl. Cm mootagDarda avaieot d'a^'
deone date, et jfmqiik la ruioe dn
trdne, oompoe^ la prde dea rola de la
G^ongie, «t ila avaient toujonrt eon*
aerr^ beaueoop d'attacbemeDt poor la
fiHBiiUe royale. SoUicit^ par Marie qui
nMitait sa iiiile, cm avant eonoi
d'eoHBdmea le projet de la reoueilfir
avee aea eniHita a« milien de leora
moDtaKDea, oea iotr^pidea aerrHeura
i^oocopaientdeapti^paratiiiD^eeatalrM
pour mettre ce pnget k eirtoition;
Ifarie, d'aceard avec eux, leoondait
leura demaicbes, et paraiasait n'at-
tendre que le jour fixe pour aoo ^a*
8100. Le dessdn avait transpM par
lea r^^latonB de ILaiaiousot; aussi
^eboua-t*il au momeat mime ed tout
itaaX pr^par^ pour la isite de la prin*
Gadilla , de la peuplade des PichaTet ,
bomme edbrageux et d*nae taille gi-*
nrteaqae, avait M charge de oon-
Mieeetteafbire ; d^^ , plusieDn fote ,
il teit veau k Tiflia poor ae ooncerter
avee ia reine, et Gadilla hii avalt an-
nooe^ que aea oompatriotes Tatten*
daicnt afiec empretsemeDt. Txitziaoof
aaraii toot ; maia Tooiant se convaiDcre
par liiHDtoe, et corieux de connaftre
Gadilla , il le fit arriter et ameoer de-
vant Ini. Le gMral n^avait gard^ prte
de loi que aoa interprgte; car, quoi-
qa*ll adt le stof^, il traitait ainsf
todtea lea anairea. II a?ait eu soin de
faire cadier Kalatouaof sous una dra-
rie. Gadilla , en se pr^sentant devant
gtetol, le salua k la mani^ du
nsjps. « Qu'es-tu vemi foire k Tiflis?
an demanda Txitaiamtf.— AcbeCer du
sil, fi^pondit le Paohare. — I9e me ca-
dtt point la iFMt6. Wy a-t-il point
(Taotrea raiaona qui faieot oondoit
dana eatte mile? — Aen. — FBchavev
ta vie depend de la v^it^ : sache que
si tu ne la d^eouvres pas, je puis k
rinstant mtee Aire tember ta tite.
— Me faire eouper la tdtel et par qui
done? serait-ee par oel Intorprete ar*
m^nlen? » Paia, |K>rtaiit M aniii 4aea
poigiiaid : « N'ai-jeikMK pas mon poi»
para? » Taitiiaiiof , voyant bien que
tes raenaoea ne BOttvaieat riea sur le
maatagnardt se leva ausaitdl, et s*ap-
procbant, afin de le gagner par la do«p
ceur, il lui met la maia aiir I'^paule,
comme pour le caressor, dtsant : « Mod
brave ami, ne te fikfas pas, U ne te
sera fut aueun mal; dis seoleasent la
verity. » Mais toutea les inatanoea ftt*
rent vaines, et,tandis que Gadilla |Nr>
sistait k tout aier au general, oelui-d
it paraltre Kaiatoosof, qui a'a-
dressa bmamiement au Pschave, et loi
dit : « GadiHa, essse cnfin de rauser
I'aveu dea motifs de ton arrivte ii Ti-
(lis; me void pour te oonfondre. Ne te
soavlent>il plus de m'avoir vu prte de
k reiae, lorsque tu es venu loi anaoo*
eer bier que tout HmX prtt pour aa
ftjDte? que des naolets Tattenaaient k
Konki pour la traaaporter dans lea
BDontagnes? » Le moatagaard 6toand
jeta sur Kalatousof no regard de n6-
pris et de oolere, puis il r^pondit que
tout oela toit faux. Aossitdt six oe-
nadiers entrerent dans la aalle, et le
dteirmireBt malgr6 sa r^istanoe.
Comma on allait le eonduire k la for»
teresse, Kalatousof s*^nt basard^ k
le frapper au visage, Gadilla se re-
touma fi^rement, et pretesta que, s*il
avait encore son poi^ard. seul, H se
sentait assez de force pour les immoler
tons k sa vengeance.
Taitalanof ne chercba pas k oonfir-
mar par d'aotres preuvea la r^alit^ du
complot; II comfNTit plus que jamais
eombien riloignement de la reine Ma-
rie ^it Indispensable a la tranquillity
du pays, et, sans d^lai ultMeur, son
depart flat flx^ au leademain (la avril
IfioS). If fot ordonn^, afin de donner
une certaine solennit6 k ce d^art, que
le g^ntol major Lazaref , accompagn6
d'un into^r^te nonrai^ Sorokin, Ar«
mInieD de nalssancet se rendrait de
440
L'UNIVERS.
Sand matin, avec la mnsique mili-
ire, et ^ la iit/d de deux oompagniea
dinfanterie, k rhabitation qu*oocapait
la reine, pour lui signifier I'ordre de
partir. Le lendemain de bonne heure,
le g^n^ral, 8*^tant done prtent^ en
c6remonie devant la denieure de la
reine, entra brus^ement dans son
an|>artement : la reine toit d^)h €veiU
lee et assise k la manfto du pays, les
jambes crois^es k la turque, sur Tes*
trade oh Ton 6tend chaque soir les ma-
telas sur ks^uels on rqx)se pendant
la nuit. Oepuis deux jours, Marie arait
appris secretement qu*un ordre ^tatt
venu de Rossie pour lui faire quitter
la G^reie, et, jusqu*au dernier mo-
meat^ elie 8*toit livr6e k Pespoir d'^
chapper a la surveillance qui Penvfron-
■ait. Ses sept enfants, aont le pins
tg^ avait k peine neuf ans, 6taient
pais:blement endormis autour d*eUe.
Lazaref lui it dire par son inter-
prete de se lever, et qu'ii fallalt partir.
LA reine r^pondit avec calme : « Pour-
quoi done me l^vorais-je k pr^ent? ne
▼oyez-vous pas que mes eimints repo-
sent? si Je les reveillais brusquement,
leur sang pourrait se toumer (pr6jug6
gtergien). Qui vous a donn^ un ordre
si pressant? » Lazaref ayant r^pliqu^
que Tordre venait du general Tzitzia-
nof , la reine s*teria : « TMziano tsofh
fiatU (Tzitzianof, 6cume de notre
race) ! » Cependant la reine avait plac^
, sur ses genoux le coussin qui avait sou-
tenu sa t^te pendant la nuit, et elle
avait cacb6 sous ce coussin le poignant
de son mari. Lazaref, voyant que la
reine persistait dans le dessein de lui
faire attendre aue ses enfants s'^eil-
lassent naturellement, s'approcba de
Testrade ok elle 6tait assise; il apergut
un des pieds de Marie qui sortait de
dessous le coussin , et se pendia comme
C>ur le saisiret la faire lever de force,
a reine, par un mouvement rapide,
tire son poignard, et Tenfonce dans
le flanc du general avec tant de force,
que la pointe sortit de Tautre c6te du
corps. Alors, retirant le fer de la bles-
sure : « Ainsi perisse , s'teria-t-elle ,
?|ui ose ajouter Fopprobre a nion in-
ortune. » Lazarer poussa un cri, et
expira presque iur-le-diamp. L'inter-
prete Sorokin avait tir^ son sabre, eC
le Ulche en avait assen4 plusieurs coupe
sur le bras de la reine, dont Tun porta
assez profond^ment vers I'^ule. H^
l^ne, fa m^re de la reine, qui dormait
dans la m6me salle, s'^it r^veill^ au
bruit; k la vue du ssm, c^e s'^tail
prMpit^ vers sa fllle et la tenait ^troi-
tement embrasste. Toute rhabitation
fot bientdt remplie de soldats. Marie,
arrachte des bras de sa mte, fut jette
avec ses enfants dans la voiture qui
avait M dfstin^e pour son depart.
La reine sortit avec ses enfants de
la ville de Tiflis, escorts jusqu'au deUt
du Cauease par une force aitn^ con-
siderable. L'attacheuient desG^oiigiens
pour oette reine infortunte rendait
oette proration n^cessaire. Cast oe
mtee Tzitzianof qui fut assassin^ de-
vant Bakou en 1806 (*).
Apr^ nous 6tre occupy de la Perse,
nous aliens Jeter un coup d'oeil rapide
sur les aCEsires de la Turquie, en tant
qU'elles se lient k Phlstoire des Rusaes.
La Porte, telair^ par ses d^astrea,
refusa, en 1806, d'entrer dans la qaa-
trieme coalition centre la France. Na-
polton 6tait encore k Berlin lonqu*il
recut un ambassadeur ottoman, et
Pancienne alliance entre Paris et le
divan parut ^troitement renou^. La
Porte commenga par destituer les prin-
ces Ypsilanti et Morousi, hos[VNlars
des deux principaut^, et*tous deux
devout k la Russie. L*ambassadeur
russe r^lanui centre oette violation
flagrante du traits d' Yassi , et il fut
appuy^ par les representations et les
menaces du resident britannique. Le
divan 6tait sur le point de fl^chir, lora-
que le seneral russe Micbelson. entra
en Moldavia k la t^te de trente-einq
mille hommes : des lors on se prepare
a une resistance vigoureuse.
L'amiral Duckworth parut tout k
coup dans les Dardanelles, franohit le
detroit sous le feu des premiers cbd-
(*) Vojrei pour piuf de details Phisloira
de U domiDalioD nuw en oeorgie dont boos
•voaA cite presque textuellemeiit qudqiics
pusagei.
RUSSIE.
441
leauXf et bMa pmqoe tons les vai*-
seam de la flolte torque qui statioB-
nait h Gallipoli. II ae sera pas sans
intMi pour rinteliigenoe des ^r^ne-
meots qui nous ooeupeDt, et lea lier
d^une mani^ plus intioie aox &its
subs^ueots, de oioiitrer sous quel
jour les orgaoes du gouferueoieDt ma-
qaia pi^seotaient la question torque
en 1807.
La Porte d^slrait la paii : ee 6it par
ce sentiment, peut-^tre ezagM, qu'a-
pres avoir destitu^ deux boepodars
rebelles, elle consentit k les retablir.
Bile n*avait pas M€ aux menaces de
la Russie qu^elle savait £tre son impla«
cable ennemie, mais elle c^a aux me*
naces de rAngleterre.
L'Angleterre parut satisfaite , et tout
fiiisait pr^iager h la Porte la durde
d*un repos qu'elle avait si cherement
adiet6, lorsque Michelfion entra ino-
pinement en Moldavie, investit Khoc*
zim , qu*il enleva par surprise, et apr^
avoir tir^ quelques coups de canon
(ceg^^ral, en entrant* dans les prin-
dpautes, avait public une declaration
portant qu*il ne se conduirait en en«
nemi que dans le cas ou la Porte
s*obstinerait k agir sous Tinfluence
francaise). Cependant les armto russes
ne s*^taient pas content^es d'envabir
la Moidavie, d^enlever Kboczim, de
eerner Bender et de marcber sur le
Danube; mais ce qui d^voilait davan-
tage les projets de la cour de Saint-
Petersbourg, c*est aue, dans les pays
qu^elle envahissait, les Turcs, simples
citoyens, recevaient Tordre de vendre
ieurs biens et de quitter le territoire
occupy par Tarm^. L'arm^ de Mi-
dielson, renforc^ par Essen, allait
ritre encore par de nouveaux corps
dirig^ sur le Danube. C'en 6tait fait
de T'empire ottoman; mais I'arm^e
fran^ise parut sur la Yistule; elle oc-
cupa VarsoTie; et la Russie, menaote
sur ses fironti^res, rappela en toute
hSte Essen et les troupes du Don.
Michelson entra h Bouknarest, mais
il ne put passer outre : les armies tur-
Ses se formerent, et leur avant-garde
t suffisante poor arr^ter les Russes
a pea dc distance de cette ville.
Le minisin d'Angletarre isterposa
d'abord see bona ofltees. II ne put rien
r^pondre h la force des raisons qui fu-
rent dono^ par le divan, f^a Porte
venait d*<tre attani4e sur soq terri-
toire sans d^clarafion de gnem; ces
dtoaiches bostiles n'avaient pas mtoe
M prMdte d'une senle note diplo-
matique; aucune Toie d'aooommod^
ment n'avait 6ti onverte. Le ministre
d'Angleterre s'en tint done ^ la d^
mardae qa'il avait £ute; 11 vit partir
le minisfire de Russie et resta traoh
quille.
Mais, pen de semaines aprte, il se
I»rtonta a une oonfiftrenoe qui eut lieu
e 3& Janvier; II y fit une nouvelle pro-
testation; il s'embarqua ensuite sur
une fr^ate, coupa les cables et dis*
parut
£tant k bord de la fr^te VEndy^
miofij il adressa k la Porte une der*
ni^ note.
II 6tait Evident que dans cette arise
on voulait par un coup d'6clat en im-
poser k la Porte; car Tambassadeur
etait a peine arriv^ k Ten^dos. qu'il y
rencontra Tescadre de ramiral Duck-
wortb.
Bientdt aprte , I'amiral anglais parat
devant les Dardanelles avec deux vais-
seaux k trois ponts, trois vaisseaux de
quatre-vingts canons, deux de soixante-
quatorze et quelques bombardes. fa-
voris^ par un vent du sud , Tescadre
arrive le 19 f§vrier ( 1 807), k huit beures
du^natin , devant les batteries des deux
premiers cbAteaux : ceux-ci commen-
c^ent un feu vif et opinidtre auquel
les Anglais ne r6pondirent pas. Par-
venus a la hauteur des deux autres
forts, les vaisseaux ouvrirent le feu de
Ieurs batteries; le vent les poussait,
et les batteries du fort 6taient mal ar-
m^s. A la hauteur de Gallipoli, I'es-
cadre anglaise rencontra un vaisseau
turc de soixante-quatorze et cinq fri-
gates; les ^uipajges ^taient a la mos-
qu^ ; que pouvait d^ailleurs cette divi-
sion contre des forces si superieures?
Les Anglais Pattaqu^rent, et, coromet-
tant un de ces crimes dont cette nation
seule est capable, et dont elle s'^tait
drja souillec par Tincendie de quatre
443
yUHlVERS.
Miate qgpMiMiinBt l*Mntral angiais
brdla lea MX bitimeDts tores ; et oepen*
dant la guerre n'^tait pea d^aree;
dea pourparlers devaient avoir lieu ; lea
ministres de la Porte ^talent encore k
Londres!
Get incendie fiit aper^ de Constan*
tiaople; au Keu d'j porter le dtoura-
geDMBDt t U excita une nouTdie ^nergie.
Le 30, i cinq faeorea du soir, Fescadrs
anclaise parut devaot le atoil. Rien
a'etait pr^u; aucun point n'toit eo
ditfense, raais on conrut aax armes.
Le Grand Seigneur se porta le premier
rar lea positions reconnues les fAus
inTorables poor dtablir des batteries.
Hommes, fenimes, enfants, Tares,
Armteiens, Grees, ultoas, cfa^ks,
derviches , tout le monde prit la piocbe
et la bretelie. Des officiers du genie et
d'artillerie fran^is arriv^rent dans la
nuit de Dalmatie.
En cinq jours, cinq cents pieces de
canon et cent mortiers furent plae^
en batterie, et Tempire ture fut mis k
Tabri, non de la destruction df quel*
ques maisons, de quelques Winces,
inais de la parte de son honneur, de sa
consideration , seuls biens que les na-
tions ne reoouvrent plus lorsqu'elles
les ont perdus.
Gependant le ministre anglais s'em-
barqua sur un esquif , et oemanda k
parlementer ; on consentit k I'entendre ,
et le kiaya^bey se rendit k bord de Ta-
miral, qui fit les propositions suivan-
tes : 1* les didteaux des Dardanelles
seront remis au pouvoir des Anglais;
T quinze yaisseaux de guerre cbarg^
des munitions navales seront conduits
k Malta; 8« la Porte ddclarera la guerre
k la France, et renverra son amoassa-
deur; 4* la Moldavie et la Valacbie
resteront k la Russia; la place d'lsmail
et les autres villas fortes do Danube
seront livrto k cette puissance... Ac-
cepter ces conditions ou des bombes,
tei <^tait le langage de Tamiral anglnis.
Le peuple redoubia d'activit^. Le 35 ,
Tambassadeur d'Angleterre demanda
qo*il lui flQt assign^ un lieu ou il p^t
oftarquer pour confi6rer avec les mi-
nistres de la Porte; le divan r^pondit
qu*il n*etait pas d^sormais an lieu , pas
OB seal ponea de lerre dans tout Pem-
ptre ottoman od nn Anglaf s pdt des-
oendre sans ^tre expoe^ a la fureur du
peuple; qn'au sein du s6rafl m^me le
sultan ne serait pas aases puissant pour
dafendre on Ai^lais contre I'indigna-
tioa des mosulmans.
On s'aper^ alors k bord de Tes-
cadre anj^aise qu'on ne parviendrait
point k £aiire peur a la Porte , et que le
coup tolt manqae. On se rddcha des
conditions qu'on avait impos6es; mais
le Grand Seigneur fit repondre qu*il
ne traiterait pas tant que reseadre an-
glaise serait en dedl des Dardanelles.
Les Anglais eurent alors recours k
Flntrij^e, mais le sultan fut immuable.
II etait nuit et Jour avec les troupes
dans les batteries.
Le 9 mars, il envofa diercher le
g^^ral Sebastian! qui ae trouvait i
cheval au milieu de ses soldattf; il lui
dit : « Les Anglais veulent que ie chasse
Pambassadeur de France, et que J[e
fosse la guerre k mon meilleur ami.
"Acm k Temperenr qu*hier encore fai
re^ u une lettre de lui ; que je persev^-
rerai dans mes desseins; qu*il peut
compter sur moi oomme Je compte sur •
lui. »
Le s^rail et les cdtes d*Europe et
d'Asie ^nt converts de batteries,
tous les efforts se portent sur les
Dardanelles , que Ton h^rissa de canons
et de camps.
Dans ces ciroonstances « Tescadre
anglaise Jugea prudent de battre en
retraite; elle repassa les Dardanelles.
D^ les premiers moments de la de-
claration de euerre, rempereur P^apo-
Iton avait omrt au Grand Seigneur le
secours d*une arm6e pour dafendre les
Dardanelles et le Danube; mais la
Porte n'avait d'abord aocepte que oael-
ques ofBciers d*artillerie et du genie.
Le sultan demanda enfin d*autres se-
cours qui partirent en toute diligence.
La uotte turque osa franchir les
parages ou elle etait II Tabri; mais,
rencontr^e k la hauteur de T^n6dos par
Tescadre de famiral russe Siniavin,
elle fut d^truite dans deux combats
successifiB. Cest ainsi que le gouverne-
ment russe, au milieu de toutes les
i
1 qua lui doanait I'ftat
<e rEimpe, marcltait *t«c peraM-
nau TBS a«» bat pciacipBl , le dteiem-
tmneot et la niiM de bTrnmris.
Le Intvd Minniir nmneat d'ftre
EmnUtii qui MttMttBdre. VixxTpe
de SMhii Mirait pa devenir aerettifs;
d^ ries lanm iinyouDtca aBaient as
mtnir iur lee ri*ai du DaootM, oti les
■MhM de Nan et d« Wiitdia avBient
UUa h> Scrritna, at loni ki Auaan
da lever le bkiont deOiug^ , lonqtn
b rerotaUon da CooilaRliiio^ ret^
vena Seiin du trtoe, et dte Ion I'tn-
amUe maiqiM k la resistance. Le
giaint Hicfaaaoi proOta de cette dr-
roTutaiice pour rentrer en Vjl:ichic.
I.,es victoirei de Napoleon poiiviiient
chaoger la face des afrairrs en Orient ;
maisbeconquirant, toujours sui^nfun
de se mender I'altiaiice russe, ne re-
garda phu la question tiirque que
comtae ud poim secondaire; 11 i>st
mAne probable que, pour mettre Im a
TcBUTe de aon raste sysleme ronti-
nental, Teniperear des Francois ei)t
fait boa aisrehi de I'eiislenee du vieil
empire ottoman. La pnix de Tilsitt
laUiait peu d'etpoir aux Turcs de rnn-
tinuer la cuerre avec avantage; il fiit
done, coada mtre eui et les Russe; un
BrmisUnai'ea peut considererrDiiinie
uiie CQDSequence des orrjngeinents
coodus per les. trois souveralns; on
peut mAne coajecturer que la proleo-
(ioii de IfapcrieoD, si ma^'niliquemimt
promise aa divan , lui fit d^faut <ie!i que
led^iiwer de la coalition st fut evanuui :
ra effet, les troupes russes resterent
daas les principautes, malgre la clause
Jui stipulait pour ce pays one sorle
'iodependance, et le prince Ypsilanti
alia reprendre le gouvernement de la
Valachie au moment oil la Porte nom-
maitte prince Soutzo pour lereni|ilar<T
en qualite de bospodar. La Porle re-
elania;¥psifantii(]t rappelt-.et rida a
la Eussie ses pr^itnduE droits siir le
Koavemement de cetie provini*, dont
Tad ministration frit alors conlii'r a im
iitan compost de Rus&es et de boyars
nm eea aiditerfiiga tinrent aHcx
kwgtaiipi la Hioaie et la Tiuqaie don
no Mat nrixia qui u'Mit ni la paii ni
la gueire; la ranatttttd de la politique
firancaiie opira un rapprocfaemeirt
entn la Porte at I'Angwtore, et la
EUuioD du gitntni SAbaatiani aetrouTa
entravto par rhdluence britennique,
qiuad )e divan eat aap6s la preuve
Sat lo goavamenHM fraofaia aacriBatt
I protcctorat de ["Orieirt k de dou-
Tellea ODntatMNHU.
(ISOS.) Let rfeultati de )a Mix de
Tilaitt veasjent de cbaager la lace de
rEnrope. Le vaiaquear avait traot sa
part avac aoa glaivt; il rigiuit iUkx-
mate joiqu'ao NJteen ; t*Antrid>e Matt
domptAe ; la Pmtae morcrifa n^cilatait
pina que grioa i, uoe lonKaainite non
£dtei; le corpa germanique attwdait
qn'an coorricr de Paria vtnt lai ap-
prcadie ^11 toit en paii oa en guerre;
aeute, ta RaMie avait Ufi de aa posi-
tion gto^ptiiqae I'avantage de garder
aon temtoire intact, et, quoi([Be vain-
oue, elle bataacait encore rinOaenoe
de NapolcDn; ce' o'eit pai qa'elle fdt i
liadre par aet aeules rem
tnaia on pent dire qae iws alte il a'j
avait plua i eette ^foqne de ooalitioa
noasiblB. Capendant eem qoi ne se
HJaaieat pas dUeufr par T^clat pres-
tf rieni ds conqudtee, ne pouvaient s«
dissimoler^lMiflcedela gloire fran-
Site r^onit lur dee baia fragjies.
Dordredecboaatqui dcpla^itviolem-
neot l<iiidMti,enblesiantror^eil
mtioaal des ninetis , ne pouvst ae
touteair que nr dei moyeu eoercitifii
peu GODipatiblas aaec nne ^nqoe da
Kix. Quand la etaiate oraatit aeult
briiaaanee, qoand la renrtte est dsnt -
let ccears, le retour vera nn pattd
u'oB renette n'eat pint qu'niie que^
tKa de tempt et d'opportanit^ Hat-
tresee det men, rAo^eterre comiffe-
nait ooe rappUoatioa do ayitime qui
prahibait son commecoe sur le contl-
neat (Migaerflit lea pcuplet lonf^tempa
arsot que de cooiomniBr aa rmne.
Si rinlemiption du coDimerce an-
gteit porta nn coup aenalUe i la pros-
p^t/ indnstrieOe et manifacturi^
del peoples soamit aux volont^ de
rempercur des Francis, die fut aur-
441
UUlillVERS.
tout jur^Qdieiable a la EuMie, encore
inbabile k mettre en oeuvfe ses pro-
duits , et qui se voyait oUig^ de renon-
cer, faute de d^uch^s , aux avantages
aoiides de son comineroe d*exporta-
tion.
II y eut doDC dans ia determination
• d* Alexandre, ior8<iu*il dut opter entre
Talliance britannique et celle de la
France, plus d'entiratnement et de
bonne fbi, que de justesae et de tact
dans Tappreciation dea v^ritables int^
r^ts de son empire. La Russia avait
aans doute besoin d*uDe paix r^para-
trice; mais, par suite du blocus con-
tinental, les r^ultata de cette paix
devenaient st^iles, puisque rexc6aant
des produits se trouvait entass^ dana
les roagasins, au prejudice des pro-
ducteu'rs et des propri6taires. La con-
duite peu loyale des Anglais dans la
demi^re lutte, le bombardement de
CopenhaguCr et les managements de
M^poleon pour Alexandre peu?ent sans
doute justifier moralement ce prince;
mais, selon les rd^ ^ofstes de la
politique, celui qui [>erd est toajours
eens6 avoir tort* Ainsi , non-seulement
la Russie n'avait point obtenu une paix
avantageuse, mais sa tranquillity etait
prtoiire et subordonnte aux emp^
chements que pouvait renoontrer le
aysteme francais dans ses exi^ntes
applications. L'attitude que prit cou-
rageusement la Suede, tandis que les
autres cours s*humiliaient devant le
genie d*un conqu^ant non moins
pers^v^rant dana ses vues qu*il etait
aupdrieur k ses rivaux dans Tart de
la guerre, entratna Alexandre 1^ se d^
clarer ennemi de cette puissance. La
marine russe consistait alors en trente-
deux vaisseaux de llgne, dix-huit fri-
gates et soixante bdtiments l^ers , sans
compter plus de deux cents galores;
ces forces nayales r^unies pr^sentaient
un effectif de cin^ mille six cents ca-
nons, de trente mille marina, et d'en*
viron huit mille soldats de marine.
Des la fin de I'annte 1807, Tempe-
reurdeRussieavaitexig^quela Surae,
en vertu des traits de 1780 et 1800,
mainttnt le principe que la Baltique
devait iire une mer ferm^, et qu^elle
dtfendlt cette mer et ses cAtes cootre
toate infraction k ce prineipe. Le ro*
de Su^e r^jKHidit qu*il toit impoaaibie
de maintenir la neotralit^de la Baltique
tant que la France diaposerait des ofttea
m^ridionales de ce bassin, et qa'il in-
vitait le tsar k user de son inilaenoe
pour obtenir pr^lablement i'^vacua-
tion de ces contrte.
Tandia que ces n^ociations ae poor-
aulvaient, la cour de Stockbolm o^o-
ciait un traits de subsides avec I'An-
gleterre, ce qui Texposait k tootes les
cons^uences d*une rupture procbaine.
Le r^ultat de cette conduite proave
que ceux qui tiennent en main lea des-
tine d'un peuple doivent sacrifier
leurs ressentiments particuliers k la
necessity des temps, sous peine d'ex-
poser, a leurs d^ens, I'insufBsance du
droit devant la force. Alexandre a fait
une faute en accMant k une coalition
anti-britannique, parce que lea res-
sources de son empire toient lohi
d*^tre ^puis^ , et que la guerre contre
TAnfjleterre lui ^tait encore plus pr^
judiciable que ne redt it6 sa resistance
contre Napolton, parce qu'enfin, en
acoeptant ('alliance fran^ise, ii rcdes-
oendait k un r6le secondaire, tandis
qu'll pouvait balancer, par une r^ia-
tan^ mime passive, la snp^iorit6 de
son rival.
La SuMe commit une faute {oste-
ment pour avoir suivi la ligne qu'aurait
66 auivre la Russie. Trop pauvre pour
se rfeigner ind^niment a la suspen-*
sion de son commerce maritime, rile
invoqua le droit qu'ont les Etats,
comme les individus ,de pourvoir ft IcMr
conservation; mais elle ne pr^vit point
les oons^uences d'une lutte si inegale ,
et elle dut les subir sans aucune com-
pensation.
Le 21 fevrier 1808, le g^^ral Bin-
hovden passa la Kvm^nie, limite com*
mune aes deux Ktata, et entra en
Finlande sur troia pointa diffikents,
Abersfors, Kieslig et Aniala. Les S»^
dois se d^fendirent avec courage, et le
S^n^ral russe, pour assurer le suecds
e son expedition, eut recours aux
prodamationa. La auivante proave
avec quelle dexierite le cabinet de
RUSSIE.
44i
Saiot-Petenbourg maniait cette arme
dangereuse. « Bods voisins, disait-il
aux nabitants de la Finlande suMoise,
mon tr^-gradeux maftre se voit foro^
d'envoyer daos votre pays les troapes
sous iiies ordres; mais Sa Majem le
roi de Su^de, en s^^loignaiit de plus en
plus de rbeureuse alliance des deax
plus grands empires da monde, jre»*
serre ses liaisons avec reonemi com-
mun, dont le systtoe oppressif et la
ooDdoite inonle envers les allies les plus
intimes de la Russie et de la SuMe
m^me , ne peuvent itre vus de sang-
froid par Sa Majesty Imp^riaie. Obs
motifs, ainsi que les soins que Sa Ma-
jesty Imperiale doit a la sAreU de ses
Etats, I obligent i placer votre pays
sous sa protection et h en prendre
possession , afin de se procurer, par ce
moyen, une garantie suffisante, dans
le cas ou Sa Majesty su^oise pers6v^
rerait dans la r&olution de ne pas ac*
colter les ^itables propositions de
paix aui lui ont ^t^ faites par Sa Ma-
jesty rempereur des Francis, sous la
mediation de Sa Majeste Imperiale
russe, dont les efforts ont Hi et sont
encore dirig6s vers le r^tablissement
cfune beitreuse paix.
• Bons Toisins et braves Finois,
restez sans inquietude et sans crainte
dans vos demeures. I^ous ne venons
point Gomme ennemis; nous venons
conmie des amis , des proteeteurs , pour
assurer votre propre nonheur, et dans
Tintention d'migner de votre pays les
maux de la f^erre, dont vous series
devenus les victimes. Ne vous laissez
point eneager h prendre les armes, on
a nuire de qudque mani^ que oe soit
aux troupes que Sa Majesty Imij^ale
ni*a confite. Toute personne qui man*
guera a ces onhres n a qu'^ s'attribuer
a soi-mtee les suites de sa dtob^is-
sanee.
« Conune Gq>endant il ponrrait y
avoir des circonstances qui exiseraient
des resolutions unanimes et aes deli-
berations dirigees par une confiance
redproque, vous etes invites, par la
iraente, h nommer et a envoyer k
Abo vos deputes provinciaux dans
Tordre constitationnel etabli par vos
dietes, afin que ces deputes y deiibe^
rent sur ce qui pourra dans la suite se
faire pour le bien du pays.
« Ainsi, dansce moment et iusqu'a
noQvel ordre, le ffrand-duche de f^in*
lande sera considere comme les autres
provinces oonqulses par la Russie , et
qui, sous le doax gouvemement de Sar
Majeste Imperiale et de ses predeoe»-
seurs, jouissent et ont joui oe la plus
heureuse tranquillite. Le libra exercioe
du culte, et tons les privH^es dont
jouissent les Finois depuis un temps
immemorial, leur seront conserves
avec tout ce qui en depend, etc. »
Une autre proclamation porte an
cachet non moms extraordinaire; nous
la citerons encore pour montrer que,
dans ses envahissements successifs, la
Russie a employe tour a tour ou si*
multanement la force et la ruse : cette
proclamation, datee de Lovisa, etait
adressee a Tarmee finoise. « Soldatsl
c'est avec af&ietion que mon tr^m*
cieux empereur se voit force, mawre
lui , de faire entrer ses troupes ea Fm-
lande : cette demarche n'a d*aatre ofajet
qu*une protection puissante, et la con-
servation de la paix et de la tranquil*
lite, ainsi que le bien-etre des Finois.
« Pour executer cette mesiure equi-
table, Sa Majeste Imperiale a ordcHme
h ses troupes de ne pas tiror les pre-
mieres, a moins qu'oubliant votre li*
berte , et dedaignant les avantages qu'on
vous offre, vous ne preniez une atti-
tude hostile; k notre grand depknsir,
vous I'avez dei^ fait. Nous renouvelons
a la nation fmoise ces ordres dk Sa
Majeste Im]>eriale, en vous assurant
de sa bienveHlanoe sincere, et en vous
donnant de noaveau la garantie que
vous avez part aux bont& de Sa Ma-
jeste Imperiale.
« Bons Finois, que le sort a places
dans les rangs de I'armee suedoisa,
vous etes h plaindre; voos quittez vos
foyers et vos parents poor aller k la
mort pour une cause iiqaste. Soldats!
mon tres-gradeux souverain m'a or*
donne de promettre k tons ceux d^entre
vous qui poseront les armes volontai-
roment, au*ils auront la liberte de re-
tourner chez eux , et qu*0D lenr payera
4M
L'UHIVEES.
de TEurope nooi oot rtenis a Erfurt.
Notre premi^ pena^ est de oMer
aux voeux et aux foesoina de tous les
peupleSj et de chereber, par une
prompte paciGcation avec Votre Ma-
jest6, le remdde le plus eflficaoe aux
fiiailieurs qui ptent sur toutes les na*
tiofis. Nous en fiiisoos oonoattre notre
sino^ d^ir h Votre Majesty par cette
prteute lettre.
« La guenre lon^e et sanglante qui
a dtehir^ le cootinent est termio^e
sans qu'elle puisse se reoeuveler. Beau-
coup de chaDgements, out eu lieu eo
Europe ; beauooup d'Etats out 6t6 bou-
levers^. La cause en est dans T^tat
d*agitatioa et de malheur ou la cessa-
tion du commeroe maritime a piac^
les phis grands peuples. De plus grands
changements peuvent encore avoir
lieu , et tous contraires h la politique
de la nation anglaiae. La paix est done
i la fois dans nntMt des peuples du
oontiuent conime dans Tint^ret des
peu^es de la Grande-Bretagne.
« rfous nous r^unissons pour prier
Votre Mafest^ d'eeouter la voix de
rbumanite , en faisant taire celie des
passions; de diereber, avee Tintention
dV panrenir, h coocilier tous les int^
rets, et , par ih , garantir toutes les puis*
sanoes qui existent , et assurer le ooib'
lienr de rEurope et de cette otedration
a la ate de laqudie te I^ovidence vous
a plac^.
«5<f^:NAP0Li0ir, ALBXANDUi.*
Cette lettre donna lieu k un ^change
de notes diplomatiques ou se develop-
parent infractueusement les pr^en-
tions respectives. Le congr^ d Erfurt
•e s^para te 14 octobre. Retonrner eu
loute bite k Paris^ et se pr^piter sur
TEspagoe poor r^rer ri^ec de Bay-
len par la prise de Madrid , tels fiirent
les premiers soins de Napoleon. Ce*
pendant, a I'instant natoeou le plus
habile et le plus heureux des eonqu^
rants touehait a Tapog^e de sa gloire,
des r^stances s'ovgaQinient sourde-
oMsnt L'Autriehe ne pouvait accepter
a tottjeurs la rMuetion bnmiliante de
SOD territoire. L'ard^iieCbaries pai^
Vint k relever le moral .de f arm^e par
des dispositioBs »ftuaai sages que £6-
oondes. LMastitulion de la laruhoehr
pr^para raffranchissement de I'Alle-
magna. L*empereur des Francis de-
manda des explications sur oes grandes
mesures militaires; mais, soit que
Tadresse de M. de Metternich lui edt
fait prendre le change, soit que Napo-
Itoi esp^iit que son alliance avec
rAutridoie mettrait ces nouveUes res-
sources k sa disposition, II parut se
oontenter des motifs que mettalt en
avant le cabinet de Vienne. Ce cabinet
a^puyait pnnciplement sur la ntoes5it6
ou se trouvait rAutriche d*adopter un
systeme d^ensif capable de contro-
balancer Tintroduction de la conscrip-
tion dans les Etats voisins. Ce qui
Souvait suifisamment , ajoutait M. de
ettemich, que son gouvernement
6tait doisn^detoute vuenostile, c*6tait
le refus du prince Charles d*acc^er k
la proposition d*un parti espagnol qui
lui avait offert la couronne. Uempe-
reur Francis ajouta a toutes ces as-
surances par des protestations solen-
nelle8.d*attacbement et de fiddlit^; et,
gmr nous servir de Texpression de
abbe , Napolton essuya cette ddfaite
diplomatique.
La conduite de FAutriche ne tarda
pas a d^voiler ses v6ritables intentions ;
elle fomentait Tinsurrection espagnole,
retardait la reconnaissance du roi
Joseph , et son ambassadeur k Cons-
tantinople appuyait la r^ncfliation
entre la Porte et TAngleterre.
Napoleon cbercha k d^toumer le
coup dont on le mena^ait , en faisant
ofihr au cabinet de Vienne, par Tentre-
mise de Roumianzof, ambassadeur
russe k Paris, un arrangement qui
aurait uni la France, la Russie et
TAutriche, en mettant Tint^it^ du
territoire de chacune de ces puis-
sances sous une tierce garantie; de
telle sorte ({lue la Russie se serait trou-
v^ la tutrice des int^rdts autrichiens.
Mais cette ofTre fut d^linte comme
n'offirant au*une ^arismtie illusoire, la
position geographique des £tats autri-
chiens ne leur permettant pas de
compter sur un secours efBcace de la
part dela Russie, et en temps opportou.
Bient^t les manifestcs oe la cour d«
RUSSIA.
46t
Yienie vhirent deniaer plus nette-
Dest tes prteotions. On 8*v piaignalt
tferamlritioa insatiable de rempcareor
4m Pranj^^, (pi n'aooordait la pan
a ses allies qu'a des oondltioiis tnto-
IMUes ; on tAchait de riveiller T^ner-
oe naUonale par des idte de liberty
wmt les oons^uenoes logiqnes n*eus-
sntMrien moinsqu'embaiTassantes;
OD J appayalt snr ies projets secr^te^
meBt discut^ h Erfurt , sur le partake
delaTurqoie, ee qui aurait n^cessit^
TaiiBiasion d*une armfe fran^ise dans
ks ^tats aatridiiens.
Appoy^ per les subsides de TAn-
detanre , mais |nri?te des seeours de
Ml Rnssie , rAutriGhe osa prendre rini-
tialiTe; elle attaqua laBayidre, qui se
rait promptement en ^t de dmnse ;
les fois de Saie et de Wurtemberg r6-
poodbreat ^^ement h ses proclama-
tions par la voie des armes. Les forces
franyhes et allito qui oceupaient
les proriooes aliemandes pr6sentaient
tm mecttf d'enTiron deux cent trente
quiie honmies; trois autres corps,
fbrmaBt soixante et dix m'ile homines ,
s^anmcaient sur le T^l. Les Aotri-
dMaa'turent successit ement battns k
Tann , Abensberg , Eckmubi et Rati»-
bonne. Apfbi une campagne de trois
wnines, ykaat fiat oeeupto par les
La fiosrie ^tait Uie a 19apoi^n par
let demiers traits ; d'aiHeurs il en-
tnit dans sa politique de voir la
FlRaaoe et r Antnche 8*idfaibl]r mutnel-
lesoent, sans prendre elle-mlme une
psfft actiTe dans oette lotte. Pour oon-
cyier eeiHe doable engence , le cabinet
de Ftersbourg d6ciara la guerre k
rAotriche ; mais le prince Cralitzin ,
^i detait lisire une poissaiite diver-
sioaeaGallicie, sembn ne s'approcher
4a drfiltns de la gnerre goe pour feire
eete de presence \ d*aiUeurs le corps
^«rm6e qa^il eoramandait exoMait k
pebie qoinze nille faonnMS.
Cspgidant Toeeupatioo de Tienne
sTanm paM termini ia campagne ; la
^nelBiie d'Essling codta t ingt milie
anbhfs d la Prance; les batiiUes de
Raab el de Wagram d^ddirent rem*
pmard^Aotridie a eouso-irelEunepaiK
on^reuse. Vienne fut dtoanteMe, et
les pays oonquis sor fAutoicheseTirent
frappes provisoirement d'une eontri^
butiott de deux cent millions de francs.
« Par le traits de Schonbrnnn (Rabbe) ,
FAutriche e^a , soit k Napoleon , soit
k la oonfi6ddration du Rbin , diverses
villes d'Allemagne et dltalie avec
leurs d^pendances ; elle ftit d^pooill^. ,
en fi^Tcur du duch6 de VarsoTicY de
toote to Galiide ooddentale et de la
▼ilie de Cracorie; enfin die abandonna
k la Russia un territoire dont lapopo^
lation toit ^valu^e a quatre cent mtile
Ames. L*empereor Francois reoonhut,
en outre , les droits que Napoleon ^ar^
rogeait sur les monarchies du midi d^
TEurope , adb^ra k son sjsteme conti-
nental , et renon^ k toutes les coo*
tr^ comprises sous le nom de pre-
▼inces Illyriennes. » C6tait pen de oes
sacrifices; il fallait que Torgueil de la
maison d'Autriche scelldt par one ah
liance les conditions impos6es par le
vaingueur : mais oette ccndescendanee
devait r^parer tous les revers des armes
autricbiennes. M. de Mettemidi com*
prit que le beao-p^ de Napoleon
itaii d^sormais k rabri d'une chute,
et qu^il serait plus commode et moins
p<^nlieux de oonspirer en fiaimiile.
Reportons mamtenant nos regards
en arri^re , et signalons rapidement les
r^ormes et les essais d'am^Orations
?ui se Sttce6d^nt dans rint^rieor de
empire russe, durant les ann6es IB09
et 1810. La di^e d*Um^o r^la Tadmi-
nistration des provinces finoises, aax-
qudles Alexandre concha lenrs an-
ciens privil^es. On ntorpjnisa la
commission charge de la revision du
code rosse; de oonveaux r^glements
adooeirent la condition des serfs ; la
simpiicit^ du monarque rendant k pen
pr^ inutHes quelqoes emplois de cour,
un oukase declare que aor^avant le
titre de cfaambellan ne serait qu'une
distinction, et ne pourrait confi§rer
aucun grade mtlitaire ni civil. Un aolre
eukase ^tablit que tout postulant d'un
emploi civil serait temi de sobir un
examen acadtoique, roulant sur les
langoes, la iorisprudence, l*histoire
et Ks matbmatlqaes. Cependant le
6.
4&2
L'UWIVERS.
commerce souffrait, et Tempereur
Alexandre se voyait contraiot de tole-
rer quelques infiractions aux prohibi-
tions imposes par le systeme continent
tal. Le malaise financier, qui data it
du r^ne de Catlierine, entravait les
mesures les plus utiles. La soliicitude
imp^riale se porta iudicieusement sur
1 amelioration des finances : un mani-
feste , sign^ par ie comte Roumiaozof ,
chancelier de I'empire , annon^ a que ,
par I'effet des mesures qui avaient ^t^
adoptees, les revenus ordiuaires avaient
i^U augment^s de plus de cent millions
de roubles, et que le gouvemement
pouvait nou - seulement faire face a
toutes les d^penses de Tann^e , sans
recourir h de nouvelles taxes, mais
mime reduire quelques - unes des an-
ciennes. Les manufactures nationales
furent encourag6es, et Ton frappa des
droits considerables sur Timportation
de rindustrie etrang^re. Les revenus
des mines s'accrurent; les relations
commerciales avec TAsie prirent une
extension importaifte. Le droit d'acqu^-
rir des pro[)ri6tes territoriales , con-
formdment a foukase de 1801 , avait
eu des r^sultats tr^s-remarquables.
Des terres d*une valeur d'environ six
millions avaient et6 aoquises de cette
maniere ; -enfin le nombre des pajrsans
devenus libres depuis 1808 etait de
treize k quatorze mille. L*instruction
de Tempereur Alexandre avait 6t^ trop
soignee pour qu'il negligent la prospe-
rity des ecoles publioues ; il r^organisa
les etablissements de ce genre d^j^
existants, fonda plusieurs gymnases
et un grand nombre d^^coles de district
et paroissiales. Quoique la litt^rature
russe ait fait de notables progres vers
cette epoque , il est a rem^rquer toute-
fois que les ev^nements imprimerent
aux etudes une direction militaire :
rien ne fut ^pargn^ pour former de
bons ofBciers dans toutes les branches
du service.
Au milieu de ces ameliorations et
das soins qu'exigeait Tattitude de I'Eu-
rope occidentale, Alexandre ne perdait
pas de vue retat de rOrient L'inaueDce
anglaise dominait k Constantinople;
M. de. Latour-Maubourg, qui avait
succede au general Sebastiani , essaya
en vain la menace; la Porte, depuis
letraite de Tilsitt, savait quelle ae
pouvait compter sur la France. Les
negociateurs russes exiseaient la ces-
sion des provinces situees sur la rive
gauche du Danube; le divan repoussa
ces pretentions avec enereie, et les
hostilites commencdrent. A rexception
de Giurgevo, toutes les places rortes
qu*attaquerent les Russes tombdrent
en leur pouvoir. Gependant le grand
vizir attendit I'ennemi dans son canw,
et lui fit essuyer une perte de aix
mille hommes; cet echec obligea le
prince Halation d'evacuer la Bulga-
rie. La paix de Vienne semblait annon-
cer une pacification prochaine ; cepen-
dant , apr^s quelques negociations , La
guerre reoommenca en 1810. Pajar-
tcbik et Silistrie (furent ceder aux ef-
forts des Russes qui march^rent vers
le camp retranche de Schoumla , et le
forcerent apr^s une resistance opi-
nidtre. « La flottille des Tures sur le
Danube, battue en mime temps et
presque entierement detruite, priva
les villes assie^jees des ressouroes qui
leur etaient indispensables. Roust-
chouk, Giurgevo succombdreot, ainsi
que toutes les places qui defendent la
rive droite du Danube , depuis Ismail
jusqu*a Sistova, c'est-li-dire dans une
etendue de cent lieues de pavs, en re-
montant le cours du fleuve. II ne resta
aux Ottomans que Widdin et Varna,
places plus reguuerement fortifiees que
les autres. »
Le grand vizir fit demander une sus-
Eension d*armes au general Kamens-
01 ; mais les pretentions des Russes
s'eievaient en raison de leurs suooes ;
outre la cession des principautes et de
la Ressarabie turque, ils exigeaient
Tindependance de la Servie. La guerre
continua en 1811, mais toujours au
desavantage des Turcs, Geux-ci tentd-
rent un dernier effort, et ils etaient
parvenus h rassembler une armee for-
midable tandis que le congr^s de Rou*
kharest continuait ses conferences.
Enfin la rupture entre la France et la
Russie vint changer la face des afjfoires;
Le ministre russe, M. dltalinski, se
RUSSI£.
453
eontenta de demander oue le Prulh
fSt d^rmais la limite des deux em-
pires. G^est dans ces circonstances
praves qae fut oooclue la paix de Bou-
ibarest, dont nous rapporterons les
dispositions prindpales.
D*apr^ Farticle 4 , le Pruth , depuis
Tendroit oik tl entre en Moldavie , ius-
qu*k son embouchure dans le Danuoe ,
et de Hi , la rive gauche de ce fleuve
jusqa'a Kilia , en descendant jus^u'ik
son embouchure dans la roer Noire ,
seront les limites des deux empires.
Ainsi la Porte c^ait h la Russie le
tiers de la Moldavie, avec les forte-
resses de Khoczim et de Bender , et
toute la Bessarabie, avec Ismail et
Kilja.
D'apr^ le mime article^ la naviga-
tion du Danul)e est commune aux su*
jets de la Russie et de la Turquie. Les
lies de oe fleuve situ^s entre les di-
vers bras ou'il forme depuis Ismail
resteront desertes.
Le reste de la Moldavie et de la Va-
lachie sera remis aux Turcs dans T^tat
ou oes ^s se trouvent. Article 6.
La frontiere d'Asie est r6lablie telle
qu'dle ^tait trac6e avant la guerre.
L'artiele 8 s*oocupe des Serviens,
aux^«A8 la Porte accorde une amnis-
tie avec la concession de quelques pri-
▼ii^es, dont rinterpr(6tation ogvre
un vaste champ aux subtilit^ diplo-
matigues.
Par Particle 18 , la Russie accepte la
nidation de la Porte pour la conclu-
sion de la paix avec la Perse, oQ les
hostility avaient recommence h Tins-
tigation de I'ambassadeur anglais. La
in^nteOigence entre la France et la
Russie avait imprim^ une nouvelle di-
rection a Tactivite des ministres de Sa
Majesty Britannique k Constantinople
et k Ispahan. Mal^r^ toutes les res-
soorces de la Russie, si elle eUt ii6
attaqu^ au midi et au nord , tandi3
que les innombrables legions de la
ooalitton firan^aise envahissaient sur
trois a>lonnes ses provinces centrales,
rhiver mime avec toutes ses rigueurs
edt it6 impuissant h sauver cet em-
pire.
Avant d*esqutsser les ^vdnements
les plus m^morables de la campagne
de 1812, ii est indispensable de dire
en pen de mots quelle ^tait la situa-
tion politique des grands £tats de
TEurope.
L'Angleterre , fiddle k un syst^me
qui etait pour elle une question d'exis-
tence , voyait avec satisfaction les al-
lies de I'empire francais se fatiguer da
blocus continental. L'Espagne lui ser-
vait dj3 point d*appui ; les .ressources
stratlgiques de cette contr^ , le cou-
rage exalte de ses habitants balan^aient
la fortune de Napoleon en absorbant
renergie de ses armees. L'Autriche
respirait a la faveur d'une alliance qui
couvrait sa faiblesse; elle comptait
s'en faire un titre pour r^parer quel-
ques-unes de ses pertes si le sort des
armes restait favorable k Napoleon,
et la sacrifier aux int^rlts de sa poli-
tique dans le cas ou des revecs au-
raient frapp^ T^poux de Marie-Louise.
La Prusse , reduite k une arm^e de
quarante mille hommes, etait forc^e
d*embras8er la cause dont le triomphe
rhumiliait; cette puissance avait a
craindre , si la Russie prenait I'offen-
sive, de voir ses provinces envahies
devenir le theatre d'une lutte mena-
fante ; son rdle d^sormais consistait k
suivre fatalement le parti du vain-
queur. La France, dont le motif avou^
etait Fabaissement de TAngleterre , ne
pouvait arriver li ce r^sultat sans s'ar-
roger en Europe un pouvoir dictato-
rial qni blessait les souverains dans
leur orgueil et les peuples dans leurs
interlts les plus essentiels. L'incorpo-
ration du Hanovre au royaume de
Westphalie; la cession de Francfort
et de son territoire au prinoe-primat
de la confederation du Rhin, et par
substitutiolin Eugene Beauharnais;
la reunion a rempire francais du Bra-
bant bollandais , oe la zeiande et d'une
partie de la Gueldre ; celle des pays
situes sur les cdtes de la mer du Nord ,
avec Bremen et Hambourg, le duche
de Lauenbourg et Lubeck, telles
furent,dans leoours de Tannee 1810,
les acquisitions que Napoleon avait
jugees necessaires , mais qui , par leur
position exoentrique, privaient la
4^
VUniYfiRS.
Ewam de eelte uoiti bomostee qui
t sa force et sa s^curiU. A IHivenir.
rica n*^t k Tabri d*uu remaniement
•u d'unc iocorporation pure et simple
au territoire de la grande nation. iHa-
pol^OB Tavait d^iare au »6nat en
{ermes non aoibigus. « Les arrets pu-
blic par le oonseiJ britannique, en
1806 et 1807 , ont d^liir^ le droit pu-
blic de TEurope. Un nouvel ordre de
dM)MB r^it runivers, De nouveilea
garantiesm'etantdevenuesntoasaires,
la r^nioo des embouchures de VEa-
caut , de la Meuse , du Rhin , de I'Ems ,
du Weser et d^ TEJbe a Tempire , I'^ta-
hlissement d*une navi^^tion int^rieure
avec la Baltique , m'ont paru ^tre les
premieres et les idus importantes, etc. »
Le due d'Olctenbourg , beau-fr^re
d'Alexandre , avait vu ses Etats h^r^-
ditaires englobes dans les provinces
baltiques recemmeot incorpor^es au
territoire fran^ais. L'empereur de Rus-
sie se plaignit d*une mesure qui por-
tait attein^ h ses relations amicales
avec Napoleoa. Ges repr^ntations
fiirent vaines ; et ce fut autour de ce
point d'uoe si faible importance que la
politique russe eut Tart de rattacher
ses autres griefs; dds lors on put
pr^voir une rupture procbaine. Quant
al'attitudeoue ^arderent au commen*
cemeot des nostiliti^ la Turquie et la
Suede, quoiqu*eIle paraisse tout autre
que le prescrivaient les int^rdts g6n^
raux de oes deux nations , il est lacile
cependaot de $*en rendre oompte en
examinant avec soin qudles neoessites
pour les SlM^ois et Uis Turcs ressor-
taient alprs des ciroonstances. La Tur-
guie, menac^e d'ua d^membrement
H^mMiat par Napol^n > pouvait aoce-
l^r sa ruine en entrant dans la coa-
lition frao^ise; cette lutte, dws la-
j[uelle elle restait neutre, ^pulserait
infailUblement et la Russie et la France,
et les mettrait pour longtemps bors
d*^tat de menaoer ses fronti^es; dans
r^^iblissement oi)t eUe se trouvait,
un delai de auelques anaides pouvait
suCQre poqr la determiner a accepter
ks oonditioiis modi^ees de la paix da
Boukharest.
Quant h la Su^e , on peut expli-
qoer d'une mani^re non moins coa-
cluante Faltiance qui la rattacha aux
interlts de la Russie. Si un pays de-
vait sou£frir des rigueurs du nlocus
continental, certes c'^taitla SuMe;
ses fers et ses bois de construction
encombraient sea maaasins, et bientdt
elle se vit oblige 06 renouer clan-
destinement des rdations commer-
dales avec la Grande-Bretagne. L'oc*
oupation de la Pom6ranie par l€«
troupes fran^aises donna bient^t la
mesure des sacrifices que Napoleon
exigeait de ses alli^. A ces considera-
tions locales, il s'en joignait d'autres
qui, pour 6tre personnelles , n*ea
etaient pas moins puissantes : Berna<>
dotte , elu prince royal , avait h cceor
de prouver aux SuMois qu'il aoceptait
dans toute leur ^tendue ses nouveaux
devoirs; et, comme il n'avait dCi son
Section qu'a lui-mSme, il crut faire
an acte de haute politique en abandon-
nant le role d'ancien lieutenant de
Tempire. On lui a reproch^ d'avoir
n^ig^ Toocasion de reprendre la Fin*
lande; mais, en Taocep^ntdes mains
de son ancien chef, il renongait a son
ind^pendance ; il n'ignorait pas d'ail-
leurs que si , plus tard , la reconcilia-
tion de I>{apolwon et d* Alexandre exi-
geait le sacrifioedecettemtoe province,
celui qui la lui aurait donn^ ne se se*
rait point fait scrupule de la reprendre*
La Poiogne, qui avait vers^ tant de
sang pour la France , ne se trouvait-
elle pas elle^nagme dans une posiiioQ
^uivoque? Quel autre motif que oelui
de ne pas s'ali^oer k iamais la Russie
avait emp^e Napoi^n de retablir
sur des bases soliws cette nation d^
vou^ et oourageuse? Ce r^tabliase*
ment pouvait ^re dans ses vues, maie
dans le eas seulement oik ia Russie,
envahieet priv^ de sa capitak, eOt
reftjs^ de traiter avec le vainqueur. Na-
pol^a n*ignorait pas qu' Alexandre ne
redoutait rien tanl que de voir se re-
lever cette barritoe 9^ s'toit tooulte
sous les efiGarts patients de Catherine,
II voulait surtottt parattre ea mesure
de consomaier cet acte r6parateur
pour arracher k Alexandre les conces-
sions les plus viti^ du grand ays-
RUSSIE.
4&6
ttme. AlnanAfe, de son eM^ levalt
te arm^eB, oonooitrait des foroes
imposantes dans les ancieDoes pro-
viBoes polonaises; ct, rassur^ aux
deox eMtxHnitia de son empire par la
paix de Boukharest et par lea disposi-
tions de Bernadotte, it osa faire tits
a Forage * comptant bien que la Prusse
et rAotriche n'agiraient contre lui
qu'avec moliesse et cireonspection.
Oyeodant toute TEarope s'^ran*
lait a la yoix de Napoleon ; les deux
Erincipes qui remuaient le monde al*
lient se trouver en prtence : la cause
des peoples, repr^ent^e par le pre*
mier capitaine du siecle, et oelie des
rois, soutenne et soudoy^ par l^An*
cletenre; mais les roles n'^taient plus
les mimes; par le jeu des ciroons-
tances et rambition d'an sojdat par-
vena, la France n'etait plus qu'uae
monarcbie oonqulrante ; elle ne pou*
vait nromettre aux Itraogers des droits
qu*cfle avait perdos eUe-mlme; la
gloire lui restait encore; on la com-
attit avee ses anciennes armes, et
c'est en invoquant le saint nom de la
liberty qne les princes parvinrent a
rafifermir leurs couronnes.
Lea dernieres esplrances d'arran-
gement veoaieot de s'lvanonir ; la
mission de M. de Nesselrode, qu*on
attendait de Saint-Pltersbour^, avait
iU rlfoquie. La Russia n'avait pu ob-
tenir de Napollon une declaration for*
melle que la Polo(;ne ne serait jamais
retabtie ; elle avait ^galement echoul
dans sa demande que Ton indemnisUl
le due d*01denbourg par la cession de
Dantzick et de son territoire. Dej^la
Prusse, alarmle sor Tissue prol)able
de cette ^erre, demandait k oonclure
on traite offensif et difensif avec Na-
pollon; le lendemain mime de la si*
gnature de ce IraitI, aui augmentait
de vinfft miUe bommes rarmee d' inva-
sion , Fempereur cbaijgea le colonel
TcfaernlcbcSf de porter a Alexandre ses
dernieres propositions. L'agent russe
parUt le 36 tevrier 1812, emportant
un It^ ditailll de F^ectif de l^armle,
quil s'ltait procurl en corrompant un
ODDunis do minist^e de la guerre,
Gflpeodant Davoust se porta, de
Hambourgf sur la ligne de FOder.
L'Autriche, craignant qu*une plus
longue hesitation ne pardt suspecte,
eondut avec Fempereur If apollon un
traiti d'alliance defensive et offensive,
3 m donnait k la coalition un effeclif
e trente miUe bommes. Cinq cent
mille Francis et allils sillonnaient
FEurope dans tons les sens pour aller
se rlunir sur ks bords de la Yistule.
lis formaient treize corps dont les
deux dnquitoes environ se compo*
saient de Francis. Cette proportion
n'offrait rien de rassurant ; le treizieme
corps , qui Hait formi des trente mille
Autrichiens promts par le traiti du
14 mars, If ait tout entier sous les
ordres dii prince de Scbwartzemberg.
D'aprls le timoignage du ginlral
Oourgaud , les cadres de Farmie Itaient
km d*ltre au complet, puisqu'au pas-
sage du Nilmen , elle comptait envi-
ron quatre cent mille bommes, et
que, sur ce nombre, trois cent ving^
cinq mille neuf cents seolement Itaient
inrlsents sous les armes ; savoir : oent
cinquante - cinq mille quatre cents
Francis , et cent soixante et dix mille
cinq cents allies. U y avait environ
milie boucbes a feu.
Le 17 avril , Napollon fit k FAn-
ffleterre quelgues ouvertures conci-
fiatrices qui demeurlrent sans ^et;
le cabinet de Saint -James voulait
gu'avant de traiter, Ferdinand VII
iQt replaci sur le trine d^Espagne;
ce n'ltait pas lorsque Fempereur avait
tant de raisons de compter sur un
succ^ difinitif qu*il oouvait se rl-
soudre a une pareiUe concession.
Quelques iours apres , le prince Kou-
rakin , amnassadeur de Russie k Paris ,
signifia au cabinet des Tuileries la rl-
ponse d' Alexandre aux propositions
que lui avait apportles Tcbernicbef :
elle portait qu*avant toute discussion
sur les interlts en Iltige , Farmie fran-
caise Ivacuerait immldiatement la
Prusse entiire, les places de FOder et
la Pom^anie suldoise ; qu*elle ne con-
serverait de toutes ses positions dans
le Nord que la ville de Dantzick, dont
la garnison devait Itre riduite; qu'a-
lors seulement Alexandre consentirait
45G
L'UNIVfcAS.
h traSiej^ sur les bases snivantes : la
Russie continuerait a exclure les An-
tflais de ses ports , mais elle y admet-
trait Ic;^ neutres ; des licences seraient
accord^ aux bdtiments nationaux
conime en France ; un nouveau tarif
des douanes favoriserait le commerce
fran^is , et Ton r^glerait de cr^ h gr^
les indemnity dues au due d'Olden-
bourg , en ^change de ses £tats enva-
his (Histoire de la campagne de Rus-
sie, par M. Mortonval). Cette r6ponse
annon^it clairement que le cabinet
de Saint-Petersbourg agissait desor*
mais sous Unfluence de TAngleterre.
Tl ^tait ais^ de voir que, de (lart et
d'autre, on jugeait la guerre inevitable;
cependant Lauriston , ambassadeur de
France, 6tait toujours k P^tersbourg;
et Kourakin , qui pr^enta , le 30 avrfl ,
son ultimatum , ne auitta Paris que le
20 septembre. On cnercfaait h pagner
du temps pour aehever Forganisation
de ces armies dont la lutt-e allait dtei-
der du sort de l^urope.
Le 9 mai , Napoleon partit de Saint-
Cloud et arriva a Dresde le 16 du
m^me mois. Ce fut 15 qu*au milieu des
fi§tes et des r6jouissances , il re^ut des
souverains alli^ les t^moignages du
d^vouement le plus absolu. Tous ces
hommages adresses a la puissance
n*etaient que I'expression de la crainte ;
quand I'hiver eut frapp^ cette arm^e
nagu^re si brillante , les haines se ma-
nifesterent avec d'autant plus d'ener-
fie au*elles avaient €U comprim^s
plus longtemps.
D6\h la grande armee d^ployait ses
masses imposantes depuisDantzick jus-
qu'h Lublin , tandis que les Autrichiens,
rormant I extreme droite de cette ligne
d'op^atioQ , occupaient Lemberg.
Alexandre, sorti de sa capitate le
22 avril , s'etait rendu a Wilna. C'est
\k quMI recut le comte de Narbonne ,
dont la m'jssion eclioua devant I'in^-
branlable volont6 du monarque russe ,
3ui refusait toute esp^ d*accommo-
ement avant que Farmee fran^aise
e&t retrograde jus^u'au Rhin.
Napol&n jugea pecessaire de don-
ner quelques esperances aux Polonais ;
n s*agissait d*impriiiierune direction
energique a Tesprit national; M. de
Pradt, archeveque de Malines, fut
charge de cette delicate mission; ie
patriotisme etait loin d'etre eteint dans
ce pays de liberte; mais oomme les
Sromesses de Napoleon etaient subor-
onnees aux evenements, la Pologne
ne put y ajouter une confiance entiere ;
en un mot , si Tempereur des Francis
croyait qn'il lui suffirait d'une cam-
pagne pour imposer la paix k son rival ,
il en fit trop ; si , au contraire , c*etait
Tabaissement de la puissance russe
^uMl meditait , il eut tort de s'arreter
a des demi-mesures.
Napoleon venait de quitter Dresde
lorsqu'il requt un message de Rema-
dotte. Le prince royal , comme pour
prouver aux Suedois qu'il traiterait de-
sormais avec I'emjpereur de puissance a
puissance, exigeait, pour prix de sa co-
operation active, la Norwege et piu-
sieurs millions. Le soldat-empereor
re|eta avec hauteur lesoffres du soldat-
roi ; et, presque en meme temps, ie 28
mai , la paix de Boukharest fut signee.
Ainsi les deux appuis qui, dans les
previsions ordinaires, devaient fixer
aux deux extremites de TEurope sa
ligne d'operations , manquaient a la
fois k Napoleon.
« Au moment oil Alexandre quitta
sa capitate, les forces russes, rassem-
biees sur la frontiere occidentale de
Tempire , etaient divisees en deux ar-
mees : Tune, dite premiere de TOuest,
sous lesordres de Barclay de Tolly, et
forte de cent cinquante mille hommes,
avait son quartier general a Wilna;
Tautre , nommee la seconde de TOuest ,
ne comptait que soixante et dix mille
oombattants; le prince Bagration la
commandait; elle occupait Jitomir.
Le rassemblement des Autrichiens en
Gallicie determina bientdt ce general
5 se rapprocher de la ligne du Bug ; il
re^ut I'ordre de porter son quartier
general k Lutzk.
« Les six corps de la premiere ar-
mee de rOuest s'etendaient derriere
le Niemen , et defendaient cette ligne
depuis les environs de Tilsitt jusqu*a
Grodno. Ceux de la seconde, opposes
aux frontieres d'Autriche et a la partis
RUSSIE.
457
aMUoittle da duch^ de Varsovie,
ohKrraieDt le oours du Bug. Entre
ees deux ann^, Platof, a?ec huit
mille Gosairaes r^guliers, avait pris
positioa a Bialjrstok; en arrive, k
plusdequab^-vingts lieues , unearm^
de reserve se formait sur le Prypet.
«A Textrtoe droite des Russes,
aux bords de la Baltique , la garnison
de Riga , cfaarp^ de convrir une des
routes de Petersbourg, s'^levait k
treote-cinq mille hommes. Ua camp,
fortement retrancb^, dtfendait de ce
o6t^ le oours de la Dvina k Drissa , et
ofifrait an point de retraite k Tarm^e
de Barclay de Tolly. On construisit
aofist one tfte de pont tres-forte k
Bonsaof , sur la Berezina , afin de gar-
der le principal passage de cette ri>
vite, aur la route de Moscou, par
Minsk etSmolensk. Pendantqueoestra-
faux 8*aGfaeTaient, I'empereur Alexan-
dre faisait toblir d^immenses maga«
sins et de nombreux pares d*artiUerie
derriere sa premiere ligne de d^ense;
on y forma, en outre, de nouvelles
diraions , ainsi oue des d^pdts d'infan*
terie et de cavalerie qui devalent ali*
menter les corps en activity (M. Mor-
tottval). »
Hapoleon partaeea ses forces en
trois corps drarmee. La premiere de
ces dhrisions , compost d^environ cent
soixante mille bommes , devait surveil-
JfiT la premiere arm^ de I'Ouest , et
la cooper au milieu .de sa ligne ; tan-
dis qae Napol6on faisait face a Barclay
de ToUy, le second corps alli^, sous
la ordres de J^rdme, derait s'avancer
eootre Bagration, c'est-Mire sur la
^udie des Russes et k la droite de
rempereur.
Le troisi^mecorpks, sous les ordresdu
prince Eugene, avait mission de peo^-
trer entre les deux arm^ russes, |>our
les empdcher d'op^rer leur jonction.
Sdivartzemberg, avec ses Autrichiens,
derait appuyer les mouvements du rot
de Westmialie a Textr^me droite ; et
Macdonald, qui commandait trente
mille hommes de troupes prussiennes
et fraofaises, devait se porter sur
Rjga^ mena^aot la Courlande et la Li-
ronii daps la direction de PMerabourg.
Bagration re^ut Tordre de quitter
sa position et de se rapprocher de la
premiere arm^ , pour couvrir le pays
entre Proujani et Wilkowisk , c'est-a-
dire Tespaoe que laissent k d^uvert
le Bug et le Pli^men. L'arm^ de re-
serve, command6e par Tormassof,
remola^a celle de Bagration. On a re-
procn^ aux Russes de ne pas avoir
concentre leurs forces pour lutter
avec moins de desavantage centre la
masse de troupes que Napol^n |)ortait
vers le bas P^i^men ; c'edt 6t6 faire de-
pendre d*une seule bataille le succ^
de la campagne et les destinies de
Tempire.
Napol^n passa quelque temps k
Kcenigsberg; de la il se porta en
avant t et passa la revue des corps qui
composaient la grande division cen-
trale. A Gumbinem, il lui parvint une
d^che de Lauriston, dans laquelle cet
ambassadeur Tinformait qu'Alexandre
avait refuse de le recevoir k Wilna.
La rupture toit desormais conisom-
m^ ; Napol^n , k deux mardies du
Ni^men, proclama le manifeste qui
d^larait la guerre k la Russie.
Les Russes avaient-ils concu d'a-
vance le projet d^attirer I'enneini dans
le coeur de 1 empire , pour le barceler
jusqu'^ rhiver, et le mettreaux prises
avec la faim et les rigueurs de la sai*
son et du climat? Rien n'est moins
{>robable ; leurs premiers mouvements ,
es magasins quMls ^tablirent a grands
frais sur la frontiere , la crainte qu*ils
devaient avoir que Napol^n ne reta-
bllt s^rieusement la Pologne, tout
semble indiquer Tintention de d^fendre
la ligne du r^i^en, et m^me de faire
irruption dans la Gallicie et le grand-
duchede Varsovie ; on assure mdmeque
Tchitchagof avait propes^ de faire
une diversion en Italic , ou il aurait
p^n^trd par rillyrie , apres avoir tra-
verse la Servie et suivi la vallee du
Danube. II est bien plus rationnel d'ad-
mettre que les Russes , inf^rieurs en
nombre et en organisation militaire,
r^lalent leurs operations sur les chan-
ces qui se prtontaient : ceou'on peut
regarder comme certain , c est ^u'ils
s'attendaient k voir les deux capita|e;s
4bS
L'UniVERS
envahies , puiique les richesiMi du pa-
lais de TErmitage allaient toe traoa*
port^ h Arkbangei.
Le 35 juJD, Kowno ^tait occupy,
file passage du Ni^men effectu^; le
V% Kapoleon se porta sur Wilna,
eaperaot que Barclay de Tolly lui liTre-
rait bataille; inais ce g^n^rai inoendia
aes ma^asina, rompit le pont jet^ sur
la Wiiia , 0t se replia a inarches for-
c6es vers le Nord , dans la directioii
du camp retraocbe de Drissa. Le 28 ,
Tempereur entra h Wilna; deux ponts
furent construits immWatement , et
Murat, k la t^te de la Gavalerie, se
mit h la poursuite de Barclay de
Tolly.
Le prince Eu^tee ne passa le Ni6*
men aue le 29 ; dans les premiers jours
de iuulet, il vint prendre position ^
queloues lieuea au sud de Wilna , pour
einpecher la seoondc arm^ de se rto-
nir a la premiere.
Gependant Bagration^ press^ par le
roi de Westphalie , se retira sur Novo*
Srodek. II se porta ensuitea Mikolaef ,
ans le but de gagner le camp de
Drissa , en passant aevant le front de
Tarm^e firan^aise. « Les Gosaoues de
Platof lui doimerent avis quils ve-
aaient de se heurter contre la cava-
lerie de Grouchy et contre les avant*
postes de Davoust... Alors Bagration
op^ra sa retraite vers Test, en mar-
cnant k Bobrysk sur la B^r^ina.
« Tout avait done r^ssi k la droite
de Napoleon , pendant gue la seconde
armte russe fuyait, laissant le corps
de Dokhtourof derri^ elle, cem6 et
oompromis; les Autrkhiens , comman-
ds par Schwartzemberg , ayant tra-
verse le Bug k Dro^iczin , s'^taient
avancS jusqu'^ Proujani ; ils coupaient
ahisl, desdeux autresarmto ennemies,
oelle de la rServe sous les ordres de
Tormassof.
« A la gaudie des Pran^ais , le sucoes
n'Mait pas moins eomplet; le jour
mtoe OT Tempereur passait le Ni^
noen k Kovno, Macaonald le tra-
versait k Titeitt; et, se portant h
Rosaitea sur la route de Riga , par Mit-
tau, H d^borda en quelques marches
Fextrtee droite des Russes ( M. Mor-
tODval). « OadiDot,aprteqoelqiiflsafift>
tages remportes sur Wlttp^anstBiD ,
s*empara de Wilkomir, dont les Russes
n'eurent pas le teams de dtouire les
matnsina; Ney, detach^ sur le flaac
de Bardav de Tolly, que menafait le
roi de Naples , inralysait ainsi les
mouveroents de la premik« arm^ de
rOuest.
Les c^toux de I'empire qiii ont
6crit rnistoire de oette memorable
campagne ont presque tons regard^
oes premieres operations comme sa-
vamment conques et habilement exe-
cute; babitote k des guerres fiiites
dans des pays de ressourees, et qui se
terminaient par une grande bataille
ou par la prise d'une capitale , ils ont
juff^ que Napolten avait fait tout ce
qiron pouvait attendre d*un grand
tacticien,eD isolant les oorps ennemis
2ui 9 en se retirant dans des directions
ivergentes , se trouvaient de plus en
5Ius&ns I'impossibilitedes'entr'aider.
lais on peut leur objeeler qne, sur
un ^iquier anssi vaste, les chances
de la guerre ^lent en fisveur de I'ar-
m6e qui se retirait en d^truisant der-
ri^ elie les subsistances , et en atti-
rant Tennemi dans des routes k peine
trac^es , que les ptuies devalent rendre
impraticwies. Ce systeme, que les
Russes n'avaient pas' adont^ d abord ,
s'est prSente tout natureueroent, pr6-
cis^ment paroe que les combinaisons
strat^ques de Napolton ne leur per-
mettaient pas d*engager le combat
avec tontes leurs forces. Leur eavale-
rie infatigaUe se prfitait d'allleurs mer-
veilleusement k une retraite dtfensive;
et , de plus , en d^vastant quelques pro-
vinces , ils inspiraient au people , que
son Ignorance disposaH au fsnatisme ,
one luiine profonae qui s*est manifesto
constainment, non-seulement lors de
rinvasion, mais encore k T^poque la
plus d^sastreusede la retraite. Au reste,
on ne peut afOrmer que la retraite , a
tout prix et k tout tenement , ait M
adopife par les Rosses oomme leur
seul espoir de saint; leors moove-
ments etaient une suite de titonne-
ments, et leurs efforts se bomaient
presque toujoors k paralyser les mou«
• *• ft
■ • ••
• • • •
• • • •
^« ••
• ;•
tombU de I'ansfliBi. Le g^ie mili- marche du pari* . „
tiire do Hqxriton ctpUijae cette cir- d'autre rteultat que ndui de prouTcr
eoupectioD; et , en effet, c'etait quelesortdesaroDcsdcdderaJtsauldB
beauGOup gagner ouo it aeutr^iser cette grande querelle.
\m coDca^oDS dun capjtaiDe qui Cependant le haaard, ou plutdt la
anit tant d« foi* Taincu l^urope. vigilance des gto6raux russei, tromin
L'eatpereuT se trouvait k Wiina , et let pr^vUions de Mapoltou Doktouraf
lUji tn troupes manquaient du ntoM- passa devant le front de I'anDfe fran-
WTB, lee convoia nayant pu miivre caige.et, BrAce^cettonuiXEUTre au-
la marcbe nfide de Tarmie : lea sol- aadeuse. au succ^ de laquelle il dut
diU enaiait dans les villaget pour s'y aacriBer sei iquipa^ et une partie de
proeuMC dw vivres; sat la &n de BODarriere-garde, il rejoiniit Barclajr
juia,laterop£rature,debnUantequ'elle de Tolly aiu environa ae Swentziani.
Aait,d«TiDtftoitlei et, pendant trois Bagration, non moins beureui, et
joura , une plnie aboadante et glaciaie poursuivi mollemeat par Jer6nie, ga-
ro!ii{']! ~ . ' ' . " les com* gnadBTitesieleacolonDesdeDavoust,
niuriK iticablei. et s'ouTrit le chemia de Sntoleosk.
Les ni.J.oii.". -.r <K .. r. .' li , les che- Cette roarcbe Labile d^dadu sort de
raui, aourris de seigles I'uriireTerts, la campa^ne.
mouraieot par miUiers. li t.iilut aban- Les dix-huit jours que I'emperaur
danner cent pieces de conoti et cinq pasia a Wilna, pour r^tablir I'organU
cents caiaions. Pres do utate mille aation des corps et mettre de I'ordra
tralnanlserraieatsurl.i rouiequ'avait dam toutes les parties du serTiceou-
suiTierars)6edeK.owno;i Wilna. Lea t^riel, laiss^rent a I'ennemi le tempa
approviskwneitieDts, vt'iius parleNi^ de se rallier et de se reconnaltre. Det
men e( Ja Wilia, raineneri'il bient^t juges sevires ont considere ce retard
rabendance; des servici^s lit toulees- cOQUue use grande Coute; d'autres,
peoc forent oi^nises. La Mile, trans- tout en lui attribuant une influence
lonoia M BH vaste entrejio! . fut tniie que des 6v^ements impr^vui rendi-
a rabri^Vncoupde niuii^ ; i:t I'enipe- rent dteisive. I'ont regard^ comme
renr dmiaa tin gouveriii.-i)irnt provi- n^cessit^ per les circonitances.
soirc dar^ministralioij l:< n^rale de Quoi qu'ou en oit dit, la situation
iaLithawit.Lapopulatioji I'OloaaJse, deTempereuri Wilna, aprte lajooc-
appeMe au arniee, foumit six re^i- tiondes corpeeaoemis.^taitd^jitr^
nutotid'ia&nterieetciDqiliiavalerie; critique. Les fiitiguea et les privations
I'elitc de la noblesse s'utfnt k aervir avaieat d^cimj son aim^ k peine
uuprea dt JNapoleon ronime garde entrfeaurleterriloirenuse: lasaisoD
■d'boaiwur. Alexandre , (lari^^ I'intention lui avait oppose des obatades sur les-
de soader lesprojctsUK ^^i|><ileon, d^ quels il n'arait pes cooipt^, et<[uipou-
p&ha vprs III) k Ei^ner.^l l> ilachef ; le vaient se reproduire avee plus de dan-
iDotit o^luiiMtile iIl: :>d mission etait ser loraqu'il aurait laisse ses troupes
d'offrit une au^Kinsion d'hoetilitte , oaos un pays divast^. S'il eiiuyait un
aooc ta eoodition que rarmee fran- revers, I Autiiche et la Prusae, (}u'jl
^aUe rMr«graderait juaqu'au Ni^ieii. laiasait derriere lui, pouvaient tout k
S),eeanMomradit,reflipereurde coup rompre une afliance on^reuie,
ftoaaie avait votdusenfeaKDtgagBerdu rt leun troupes, jusqu'ators conte-
teniDS, ain de d^gaser les Cosoquei nues, devenues ennemies d'auxiliaires
'latofetleaprpsaeBegratioa, ses qu'ellea Maient, d^niisaient toute
__,.!___ . 1^1 _. jj "eeonoraie des combinaisona ^rat^
liques. Le retabliasement int^al de
a PologDe se pr^aentait comme an
"Amdetwre. Napoltefl ne puissant sppui; mats Aait-ce k I'ins-
e^tir ee que lui ioaposait tant oil ses allite oombattaieM aous ka
eB pleinc r«traite, et la d^ drapeaui de renperenr, qn'il ^tait
dePIatoietleaprpsdeBegratioa, ses qu
pn^otitiona cwseat &4 ptua mod^ reeononne des combinaisona ^rat^
rces,etiJB*cdt pas bit dtoixde Bala- aiques. Le retabliasement int^al de
dMf , sonna par s«a divouetnent auz u Pologne se pr^aentait comme an
iatMIs de I'Amdetwre. Napoltefl ne puissant sppui; mats Aait-ce k I'ins-
460
L'UNIVERS.
pradeot de morceler leur territoire?
line faute qui a ^ remarquee par ceux
qui ont ^tudie T^tat de la Pologne, et
qui 6chappa au g^nie de Napoi^Q,
c'est de n avoir pas tir^ parti des juifs,
3ul auraient pu rendre aux FraoQais
e si crands services pour tout ce qui
regardait le transport du materiel.
ReportODS maiutenant nos regards
sur ce qui se passait au caini> des
Russes, et empruntons le r^cit de
M. Mortonval , qui r^ume avec luci-
dity les meilleures relations de cette
memorable ^poque.
« Barclay, dej^ rejoint par leborps
de Dokhtourof , ^tait reste jusqu'au Z
juillet a Swentziani; il se retira sur la
Dwina, dans la inline direction qu'a-
vait suivie Wittgenstein. Le roi de Na-
8 les, soutenu h droite par le marechal
fey, et a eauche par Oudinot , suivait
pas h pas les Russes avec deux corps
de cavaierie de reserve et trois divi-
sions du corps de Davoust; il eut
d'abord avec Parri^re-garde ennemie
quelques engagemenjts de peu d'impor-
tance. Le 5, a Widzy, une action plus
longue et plus disput^e, dans lagu^lle
la superiority de notre artillerie tui
donna Tavantage, deqida les Russes
a precipiter leur mouvement vers
Drouina, ou ils pass^rent ie fleuve; et
le 10, arrive devant le camp retrancb^
de Drissa, Tarm^e de Barclay s*y en-
ferma tout enti^re, k Texception du
corps de Wittgenstein , destine h ren-
forcer la garnison de Dunabourg, ou
il entra le 13 juillet.
a Le roi de Naples s*arr^ aussit6t
k Opsa , et rappela pr^s de lui Oudinot ,
qui avait suivi les naouvements de
Wittgenstein; 11 r^unit ^alement au-
tour de son quartier general le corps
de Ney, et la cavaierie des gen6raux
Montm*un et Nansout^; observant Fen-
nemi dans cette position, il y attendit
les ordres de Tempereur.
«Alor8 seulement Napol^n put
opanattre Teffet de ses premieres ma-
noeuvres, et former un nouveau plan
d'op^ations d*apr^ leur r^ltat g^-
ndral : k sa droite, Davoust se portait
sur Mobilef, ou il devait pr^ceder
9agration; quant k J^rdme, en rece-
vant la decision de son Mre qui \e
pla^ait sous les ofdres du mar6chal, il
ne prit conseil que de son orgueil
bless^ , et quitta sur-le-champParmee. . .
L'empereur d^tacha les Saxons sous
les ordres deReynier, et les fit r^trogra-
derpour renforcer, k Slonim , le corps
de Schwartzemberg oppose a Tarm^e de
Tormassof. Junot remplaca le roi de
Westphalie dans le reste ae son oom-
mandement; mais il se trouvait alors
trop isol6 de Davoust pour le seconder
efficacement.
a Rien ne retenait plus d^rmais
Napol6on k Wilna, qui avait cess6
d'etre le centre des manoeuvres de son
arm^. Le but de Barclay, en occupant
le camp retranch6 de Drissa , semblait
Stre de couvrir P^tersbourg; mais sa ^
manoeuvre laissait libres toutes les
routes de Moscou, et rendait impos-
sible sa lonction avec la deuxitoe ar-
m6e. L'empereur r^solut de porter d
Polotsk , sur lecbemin de Vitepsk , une
grande masse de forces qui pouvait de
la prendre k revers le camp retrandie,
tandis que Murat, Ney et Oudinot,
I'attaquant de front et sur les flancs ,
contraindraient Barclay k sortir de cette
position : alors il edt ete facile de re-
jeter les Russes dans la Courlande, oik
se trouvait Macdonald , et de les forcer
de livrer bataille adoss^s k la mer, avec
un nouvel ennemi sur les bras.
« Ce plan adopts, le vice-roi d*Ita-
lie, qui avait d^ja pris le chemin d'G^-
miana, fut dirig^ sur Gloubokoi6; la
garde imp^riale s'y rendit par Swent*
ziani. Les Bavarois, sous les ordres de
Gouvion Saint-Cyr, avaient franchi les
derniers le Ni^men ; k peine arrives ^
Wilna , Tempereur les passa en revue ,
et les fit partir imm^iatement poor
alter prendre position aux environs de
la meme ville de Gloubokoi6, rendez-
vous ^^n^ral du corps k la t^te duquel
il allait agir du cdte de Polotsk. »
G'est vers cette ^poque que Napo>
leon re^ut k Wilna la deputation de la
diete du grand-ducb^ de Varsovie. Le
sdnateur Wibeski , s'adressant k Vem-
pereur au nom de la diete confed^r^
qui avait declare, le 28 juin, le r^ta-
biissement de la Pologne, prononfa
RUSSIE.
4«t
oes paroles : DUes, sire, que la Polo-
gne existe, et ce dicret sera pour le
mtmde iqv^aient is la r^aUte, La r^
ponse mesurde de Tempereur refoula
rentbousiasme dans les coeurs polo-
nais; il ^it visible que , tout en comp-
tant sur leur courage, on se r^servait
la faculty de sacriGer leur cause a des
inter^ts g^^raux.
L'assiette du camp de Drissa ayait
ete choisie sans discemeroent; les tra-
Tsux immenses qu'on y avait entass^
devenaient inutiles , parce que la posi-
tion pouYait facilement Itre tourn^;
dans Fhypoth^e d'une attaque g^n^-
rale paries forces dont Napol^n pou-
vait disposer sur ce point, il n'^tait
guere probable que ces ouvrages arrd-
teraient longtemp^ Tennemi.
La seconde arm^ avait op^6 sa
jonction ^ Dicissa; le but principal des
Russes 6tait atteint par la concentra-
tion d*ane ^nde partie de leurs for-
ces. Le 27 juin (9 juiU^t nouveau style) ,
jour anniversaire de la bataille de Pol-
tava, Alexandre rendit le manifeste
saivant :
«Guerrier8 russes!
• Vdus avez enOn atteint le but vera
leqad vos regards ^taient tourn^.
Lorsqoe Vennemi osa franchir les li-
mites de notre empire, vous etiez sur
les finonti'^res disposes h les ddfendre;
mats, josqu'^ ce quel'entiere reunion
de nos troupes pilt ^tre effectu^, il
fallot arr^ter votre courage et se re-
tirer dans cette position. Nous sommes
▼enus ici pour rassembler et concen-
trer nos torces. Nos calculs ont ^t^
hoireux : la totality de la proni^e ar-
mibt est en ce lieu.
« Soldats ! le cbamp est ouvert k votre
valeur, si noblement docile ^ se mod6-
rer, si ardente k soutenir la reputation
qoe votre nom s'est acouise; vous allez
coeillir des lauriers a^nes de vous-
mtees et de vos ancetres. Ce jour,
naguere signal^ par la bataille de Pol-
tava, doit vous rappeler les exploits de
vos p^es; le souvenir de leur valeur,
r^dat de leur renomm^ vous engagent
^surpasser Tune et Tautre par la gloire
de vos actions ! ' Les ennemis de la
de ooonaissent d^j^ votre valeur.
Allez done dans TcSprit de vos ance-
tres, et an^ntissez Tennemi qui ose
attaquer votre religion et votre hon-
neur jusque dans vos foyers, a la vue
de vos femmes et de vos enfants.
« Dieu , temoin de la justice de notre
cause, sanctitiera vos bras par ses b^
n^dictions. »
Tandis que I'empereur Alexandre
appelait la religion au secours de la
politique, tandis que, dans le reste dt
rempire, la noblesse et le clerg6, exci-
tant la baine du peuple centre des
ennemis b^t^rodoxes, transformaient
cette lutte en guerre nationale, on d^
cr^ta une nouvelle lev^ d'un bomme
sur cent. Bientdt on comprit qu*il de-
venait urgent d'evaeuer le camp de
Drissa. L arm^ se porta h marches
forcees sur Vitepsk, dans I'intention
d'arriver h Smolensk avant les Fran-
cis, et de se mettre ainsi en commn-
nication avec les corps de Tormassof ,
de Bagration et de Tchitchagof.
Alexandre courut a Moseou, et,
confiant dans le patriotisme de Tan-
cienoe capitale de la Russie, il publia
le manifeste suivant :
« A notre ancienne ville et capitale
de Moseou.
« L'ennemi , avec une perfidie sans
exemple, et des £(^ces qui r^pondent k
son ambition d^mesur^, a p^n^tr^ dans
les provinces de la Russie. Son dessein
est de ruiner notre pays. Les arrases
russes brQlent du desir de se jeter sur
ces bataillons; mais notre soUicitude
patemelie ne pent accepter un sacrifice
aussi d^esp^re. Nous ne pouvons souf-
frir que nos braves sujets soient sacri-
fi^ sur les autels de ce Moloch.
Pleinement convaincus des perfides in-
tentions de notre ennemi , et des puis-
sants moyens qu'il a pr^par^ pour
Texecutioh de ses projets , nous n'n^i-
tons pas k declarer a notre peuple le
danger ou 'se trouve Tempire. La ne-
cessity oommande la reunion de nou-
veiles forces dans rint^rieur, pour
soutenir celles qui sont en presence de
Fennemi. Pour assembler ces nouvelles
armies, nous nous adressons k Tan-
cienne capitale de nos ancles, k la
ville de Moseou. L'existence de notre
LUlViyERS.
nom dans ie tabftaa des nations est
menaefe. L'cnnemi d^nonoa la destine-
tion de la Russia. La sdret^ de noire
sainte fglise, Ie saint du trdne des
tsars, rind^pendance de I'ancien em-
pire moaeoTite, tout annonoe liaute-
ment que Tobiet de cet appel doit €trt
recu par nos fiddles sujets comme une
lofsaGr^e... Puissent ies coeurs de notre
nolilesse et oeux des autres ordres de
ri^tat propager Tesprit de oette satnte
guerre qui est Mnie du Tr^Haut, et
combattre sons la banni^re de notre
sainte Egiise! »
Dans un second manifeste adress^ d
la grande naUon russe, on remar^e
des passages qui indiquent plus daire-
ment encore que la lutte prendrait Ie
earact^red*uneguerred'ex£em]ination.
Le despotisme ne peut parler de liberty
h des esclates; il craindrait m^me
d'toe Gompris; mats 11 met en jeu lea
haines viTaees dont il a conserve le
{^erme dans Ies prejug^ nationaux; au
leu de lauriers, il montre aux masses
la palme du martyro, et rend faciles
Ies plus grands sacrifices en Ies entou-
rant du prestige religieux.
• LaRussie, prodTamant ce mani-
feste , a inYoqu^ la protection de Dieu ;
elle oppose aux raacbinations de son
ennemi une arm^ forte en courage,
et ardente h chasser de son territoire
oette race de sauterelles qui brOlent la
terre, et que la terre repoussera de
son sein outrage. Nous appelons toutes
nos communaut^s religieuses k coop^
rer aTcc nous I une leT^ gte6rale
contre le tyran uniyersef... Saint
svnode, et vous, membres de notre
Egiise, dans tousles temps voire in-
tercession a appel^ sur notre empire
la protection diyine! Peuple russe, ce
n*est pas la premiM^fois que tu as ar-
rach^ Ies dents de la t^te du lion...
Unissez-vous; portez la cfoix dans vos
eonirs et ie fer dans yos mains, et ja-
mais la force humaine ne ponrra pre*
Taloir contre yous...' »
i Ges proclamations portent leurs
fruits; le derg6 seconda la noblesse,
qoi rimposa des sacrifices de tout
genre; Ies marcbands offirirent de Tar*
gent; dans le seul gouTcmement de
Moscou, on vota une le?^ de quktre-
Tinet mille hommea et un subside d^un
million et demi de roubles. Pensa et
Novogorod sulTlrent oet exemple, et
r^lan se eommunioua Jusou'aux pro*
Tinoes Ies plus reculto de rempire.
Le synode de Moscou et le clerg6
de cette Tilie, au milieu de toutes Ies
rmpes du rit grec, firent hommage
Tempereur o^une relique miracu-
leuse, et le m^tropolitain Platon lui
adressa en oette occasion solennelle un
discours dont Ies images bibliquet
^taient propres h exalter Ies passions
de la multitude.
« La Tille de Moscou, s'^eriait-il, la
{iremiere capitale de Tempire, la nou-
telle J^salem, recoit son Christ,
comme une m^ dans Ies bras de aes
fils xB6b ; et , & trayers le brouillard qui
s*6l^e, preisentant la jgloire brillante
de sa puissance, die cnante dans sea
transports : Hosanna! b^ni soit oelni
qui arrive ! Que Farrogant , Pimpie Go^
liath , des limites de la France , apporte
retfroi aux confins de la Russia, la re-
ligion tut^laire, cette fronde du DavM
russe, brisera soudain sa t^te orgueil-
leuse!»
AJexandre confia la garde de la re-
lique k la milice de Moscou, et, Il la
suite de cette c^r^onie , il partit pour
P^tersbourg. Lk , s^adressant aux mt^
r£ts plus qu'aux sentiments, il d^dara
que fa paix avec TAngletene ^tatt con-
due, et que le commerce allait re-
prendre une nouvelle vie; la paix
de Boukharest, dont Ies dispositions
avaient ^ conseniies dte le 39 juio.
venait d*£tre ddftnitivement sianee. II
s^agissait encore de s^assurer a*un r6-
sultat de la plus haute importance :
nous voulons parler de la cooperation
active de la Suede. Alexandre se rendlit
en touie hdte dans la ville d'Abo, ok
ratiendaii Bemadotte. Ce fut au mnteu
de la Pinlande, dans le sein mtme de
la capitale de cette province, enlev^e
aux SuMois par Ies Russes, que le
prince royal de Suhde acoepta Ies con-
ditions de I'autocrate russe, et s'en-
gagea h porter Ies armes contre ses
anciens compagnons d'armes, ou nlu-
tdt contre leur chef qui s'ofastinait ^
11US8IE.
4es
M voir dans Vikot d^im praple fier et
fanf 6 qa'un de oes rois parrenus ^io6
dte sa fortooe. Soit que Beroadotte
cWt ^ la sMuction des promesses et
dea lonaoges adroiles de I'autoerate,
•oil que, pn6voyaot I'issue de oette
intte, aprte laqoelle taat de fironts res-
t^KDt dtomroan^f il ait era devoir
Iq^tifDor son ^Mvation aux yeox de
Tarbitre fiitiir de rEorope, soit enfin
one les int^r^ts de sa patrie adoptive
Paieot seula guid^ dans une d^termi-
natioD si importante, il promit d*agir
offeDsivement contre Tarmte d'inva*
sion. Si le succ^speut Jastifier un tel
parti, Gbarifls XIv est irr^procbable;
il est rest6 sor le trdne, sans que la
rtaction qni a renvers^ toutes les dj*
nastiCi, on plotdt tons ces vioe-rois mri
relevaient de rcmpire, ait pa I'attein-
dre; s^il n'a point saisi I'oocasion qui
ae prtentait d« r^tablir iaSu^de dans
aea andennes firontidreB , il a dn moins
assort le repos de son pays, en abai»-
dcmoant no territoire que les Russes
lui amaient toujonrs dispute. Ce n'est
point ainsiqtt'e&raiaonn^C^ikslUI;
mais oe dernier a roui^ la SuMe.
AJosi Alemiidre poavait retirer ses
troopes de la Finlande; la peix de
Bowiarest rendait ^leaient dispo-
aiUes les fovoes qui observaient les
firooti^ies tarques; d^rmais c'^it
dans le oonir & rempire que Tattaque
0t \b r6iistanee allaient se conoentrer.
Oo dto^ une nouvelle ler ^ de
deux iMRBmes sur cent pour les terres
que des privileges exemptaient du re-
croteoient, et les domaines de la cou-
lonoe, aussi bien que ceux des sei*
gaears pri vii^i^ , durent foumir leur
oontingeat.
liO 16 juilkt, Barclay ^vacua le camp
de Driaaa; le mtoe jour, IVapol^n
si'^lao^t de Wilna, ignorant le mon*
vcmcnt des Rosses. A cette nouvette,
il cbaogea soudainement sea disposi*
tiooa : Oudiaot, aprds avoir ruin6 les
ottvrages abuidoan^ de Drissa , requt
Fordre de pouraoivre Barclay et de le
devaooer k Vitepak ; ii itait awiy^ par
Marat, Ney* at la cavaknrie de Mont-
hroB et die Nansouty. Le g^n^ral
.Wittgensteitt
eouvralt Pftersbourg et observait Mao*
donald.
Apr^ avoir pass^ la Dvina, Barclay
prit position sur la route de Wilna ,
piur laquetle s'avanfait rarm^ fran-
faise; de \h il envoya Ostermann avee
Suinze mille hommes jusqu'au delft
*OstrowDo. Pendant ce temps, Eugene
refoulait au delft de la riviere une par-
tie du corps deDokhtourof; les Rosses
br(Uftrent le pont derriftre eux ; on tra-
vaillait ft le r6tablir lorsque Napoliton
arriva sur ce point avee toute la garde.
Le pont termini, Pempereur se mit ft
la tete des Bavaroia pour faire une ro*
connaissance. II Jugea que Tarmte
rosse devait ^tre a vitepsk , et fit ses
dispositions pour soivre Tennemi.
A Pexeeptran do corps d'Oudinot,
rest^ en arriftre pour observer Witt*
geostein, et que rempla^ait celui du
vice-roi, la division entire, comman-
ds par I'empereur, marcha sur Vi*
tqiSK par Ostrowno. k^h& quelques en*
Sagements meurtriers, rarriftre^arde
es Russes se retira ft Tabri d*un ri*
deau ^pais de bois auqud s'adossait la
grande route. Lea Franks sond^ent
ct francfairent ces forto, et bientdt,
ft deux lieues de Vitepsk , ils dtouvri-
rent Tarm^e de Barclay. Le 27 an ma*
tin, les Fran9ai8 iorcftrent Favant*
garde de ce g^n^al ft se replier aur le
corps principal. Le soir du 37, les deux
armies toient en presence, s^parta
par la Soutehissa. Les Russes n'avaient
aur ce point que quatre-vingt millc
soldats; les Francais en comptaient
cent vingt mille. Aapolton se croyait
a88ur6 de la victoire... Le lendemain
matin, Tennemi avait disparu, sana
laisser un tralneur, sans qu'on pdt d^
oouvrir aux environs un seul paysan.
Les babitania de Vitepsk apporterent
les elds de la ville ft rempereur; maia
ils ignoraient la direction qu*avait prise
Barclay. II appritbientdtquecederni»
se dirigeait vers le nord, et il rentra
ft Vitepsk poor donner ft son armS
quelques jours de repos , et laisser aux
corps que sa marche rapide avait de-
vances le temps de le rejoindre. Pen-
dant ce temM, Bagration, aprfts avoir
pli^ devant Davoust ft Novoaeiki, fit
464
L'UNIVERS.
un <l6teur, passa le Dniepr le 26, et
arriva le 29 h Mstislaf. Ce fut la nou-
velle de ce mouvement qui determina
Barclay a la retraite. Inf^rieur h Na-
pol^n, ce general ne pouvait n6gliger
Toccasion qui se pr^entait d'op^rer
sa jonctioa avec Bagration. lis se trou-
verent ainsi run et I'autre k quinze
lieues de Smolensk, le premier au
nord, le second au sud de cette vijle;
le 3 aodt, ils r^unirent leurs forces
sous les murs de Smolensk.
Exposons main tenant en peu de
mots quelle ^tait la position des corps
qui formaient les ailes des deux armies
ennemies.
Tormassof commandait plus de qua-
rante milie hommes, ^e sa reunion
avec Tarro^e de Moldavie pouvait por-
ter au double. Napoleon, ignorant la
force rdelle de ces corps, avait donn^
Tordre a Keynier d^observer avec ses
Saxons Tarm^e de Volhy nie , et de rem-
placer Schwartzemberg qui devait
renforcer Davoust. Tormassof prit
aussitot Toffensive, repoussa vivemeot
les Saxons , et , apr^ une resistance de
neuf heures, 11 fit mettre bas les armes
au g^n^ral Klingel , qui se rendit avec
deux mille hommes , et livra aux Russes
quatre drapeaux et huit canons. Rey-
nier r^trograda sur Slonim pour se
rapprocher de Schwartzemberg. Le
pnnce venait d*6tre investi du com-
mandement de toute I'aile droite, avec
la mission d'oocuper le gouvernement
de Grodno. Gependant Tormassof, s'a-
van^ant toujours , s'etait plac6 entre les
Autrichiens et la Vistule, les coupant
du grand -duch^ de Varsovie; mais
bientot, menac6 lui-m^me par les
Saxons et les Autrichiens, if r^tro-
|;rada, et s'arr^ta en arri^re de Prou-
jani , sur la route de Kobrin , dans une
forte position. L'arm^austro-saxonne
vint 1 y attaquer; le combat dura tout
le jour avec des succds varies; la nuit
permit h Tormassof d'effectuer sa re-
traite; vivement poursuivi le lende-
main, il abandonna ses Equipages et
quelques canons; enfin les Russes , re-
tire derri^re le 3tyr, recurent la nou-
velle que Tarmee die Moldavia , sou3 les
ordres de Tchitcbagof , manoeuvrait
pour se joindre k Tarmee de r^rve.
Inform^ de ce mouvement, Schwart-
zemberg s'arr^ta entre Kovel et Wla-
dimir.
Lad^monstration de Tormassof aval t
jete Faiarme dans Varsovie; Maison,
gouvemeur d^ Konigsberg, s^avanqa
avec dix mille hommes jusqu'a Rus-
tembourg; mais bient6t, inform^ de
la retraite des Russes, il retouma sor
ses pas (M . Mortonval). Victor se por-
tait sur le Mi6mtn , et Augereau reoe-
vait Tordre de couvrir Ya ligne de
roder, et de diriger sur la Vistule la
division Durutte.
A Taile gauche, Macdonald s^^blit
k Jacobstadt , tandis que les Prussiens
bloquaient Riga. Le g^^ral Ricard,
detach^ par le uiar^chal pour assizer
Dunabourg, antra sans coup f6rir dans
cette place forte que les Russes ve-
naient d'^vacuer. Blacdonald y ^tablit
son quartier gendral,'et en fit raser
les ouvrages.
Wittgenstein, alarms par les mou-
vements d^ Tennemi , avait api^^ a lui
la gamison de Dunabourg , qui portait
son corps a trente mille hommes. II
apprit que l9^ mar^chal Oudinot mar-
cnait sur S^6je; pour le pr^venir, il
se porta k sa rencontre, en menat^nt
son flanc gauche. Le combat dlagou-
bovo forca les Francis a la retraite;
ils Top^rerent apr^ avoir tenu en res-
pect des forces sup^rieures , malgre le
d^savantage du terrain , et vinrent se
rallier a la division Merle, au gu^ de la
Drissa.
Koulnief , qui commandait Tavant-
garde russe, traversa la Drissa, et
Vint donner au milieu de Tarm^e fran-
caise rang^e en bataille. Cette attaque
rut fetale aux Russes : Koulnief fut tue
avec un millier des siens; quatorze ca-
nons, treize caissons et deux mille
prisonniers rest^rent au pouvoir da
vainqueur. Engage k la poursuite de
Tennemi , le g^uOTal Verdier se trouva
en pr^ence de forces sup^rieures, oaf
le rejeterent avec perte ae Tautre cdt6
de la riviere. Oudinot, k la sujte de
ces engagements, rentra k Polotsk.
Vl^ittgenstein bless^ alia reprendre sea
positions.
ILUSSIB.
466
GoMvion Saint-Cyr se porta sur Po«'
lotsk poor renforcer Oudinot, et le
mouvement des armte fraacalses se
troQTa simttltantoent suspenila.
Le 1*' cor^ , sous les ordres de Da-
Toust, ^ait a Dombrovna; le 3* oocu-
pait Polotsk ; Ney , arec le 8*, ^tait sur
h loate de Vitepsk k Smolensk; le 4*,
aux ordres d'Eu^^ne, se d^^ait aux
enrirons de Vitepsk; Poniatovski,
avec le 5*, rempla^ait Davoust k Mo*
hilef ; GoutIod Saint-Cyr, aveo le 6*,
▼enait de se joindre i Oudinot; le 7*,
reuni aox AutrichieDS, observait Tor-
massof k Vladimir; h Ordia, Junot
reiDpla^ait J^r^me et commaiidait le
8* corns ; le 9*, sous Victor, cou vrait la
ligue de la Vistula; le 10*, avec Mao-
dooakl, dtfeodait celle de la Dwina;
le 11*, qui fonnait la rterve, ^tait r6-
parti dans les places de TOder, sous les
ordres d' Augereao , qui avait sod quar-
ter gtetel a Stettin.
Le roi de Naples, plac^ en avant-
f^arde, au deUi du cofm de 19^, cam-
pait sur le cbemin de Smolensk. « Kn-
nn, dit M. Mortonral, dont nous
abr6g6oos le rteit, I9apol4oo, entour^
de la garde imp^riale a Vitepsk , sor-
iretUait toutes les parties de cette im-
ncnae ann^e , dont le front se develop-
pait met one ligne de trois cents lieues.
SuiTaot partoot et 1^ la foia les mouve-
maata de reoDemi , il tra^t d'arance ,
iTmis ieors mancDUires. le plan de
cedes qu'il a'apprteit a opter... .
A chetil afant le lefer du soleu, on le
▼ovaJt passer des reruea, Tisiter les
bdpitanx oik sa Dr^sence oonaolait et
ranmait lea nuuades et les bless^;
rentr^ dans aon cabinet, il dietait des
oidres pour tous les cha de oorps , et
deacaodait aux OMiindres d4taus de
Padioinistration militaire, en mtoe
taaapa qu'il dirigeait de son eamp Pad-
Bumatratioo de Tempira. »
Lfr marebe r4trocrade des Eusses
las arait rapprochss de leora res-
atMnea; i^ilB afaieot juaque-Ui peidu
phM de raoade dans ms enffagements
OBI s'4CaieBt 8aeotf4, ee dSntantage
Mi plus que oompenaA par lea fl4auz
de toot genre qsi d4cimaieat TamMfie
d^iavaaioa; eUe eomptait alors an pea
moins de deux cent mille honmea, et
plus elle allait avaneer dans les pro*
vinces de Temptre, plus ses communi-
cations et les moyens de pourVbir k sa
subsistanoe deviendraient difficiles.
Les troupes l^g^res de Tennemi assail-
laient les eonvois et les d^tadiementa
isol^, tandis que les paysans massa-
craient les trafneurs : cependant Tas-
pect des aigles et la presence de Napo-
Iton soutenaient ces troupes tant de
fois Tictorieuses, et Pespoir d*une ba-
taille procbaine et decisive leur donnait
la force de lutter coatre toutes les pri-
vations.
Barclay ne sut point tirer parti de
Pavanta^e numMque qui r^ultait de
sa position; le colonel Toll reprtonta
mini fallait tomber avec toute Tarm^
du centre, qu*on pouvait rtenir en
moins de deux iours, sur le principal
noyau de Farmee franqaise^ k laquelle
une semaine toit n^cessaire pour se
rallier; Tennemi , coup4 dans sa ligne
d*q>^tions, se serait vu oblige de-
battre en retraite, ou de se beurter
contre une masse compacte de cent
vingt mille combattants. Get avis, for-
temeot appuy^ par le grand-due Cons-
tantin, fut adopt^; mais les tempori-
sationsdu g^noral russe, qui fatiguait
ses soUats en marches et en con-
tre-marches, firent manquer le r^
sultat probable de cette habile concep-
tion.
Napoltoy arerti de la manoeaTre
de Barclay, modifia sur-le-cbamp le
plan qu'il arait adopts : tandis que lea
Rosses 8*4teDdent sur leur droite et
menaoent Vitepsk, il porte toutes sea
forces sur leur gauche, dana la diree*
tion de Smolensk. Apres quelques en-
gagements meurtriers qui retarddrent
la marche des Fran^ais, ces demlers
arriv^nt derant Smolensk; Bagra^
tion teit aceourn DOur Hhoare cette
eaoe, et Barclay rarait auivi de prte,
B IT Joillet, Fattaque oonuneaa; lea
Basses perdirent quetqoes nUlUan
d'hommea k la dtfnsailes finibourga;
la Doit 4daiia Tioceiidie de la fUie, et
le lendemam au matin lea Fhmfala /
pMtrteent; mats ils n'avaieiit conouia
que des mines ; Barclay avait fait eva*
M* Utraism. (Ruaaii.) t- n
L*UNIV£AS.
p$t^ call* jf^^m fui ue pouvitit
M leodcnmiQ , BaroUy d^ndit la
hfUfft yrlli) pquf interdire »ux Fraosaia
l^jPWase du Pniepr; il dat ooder
f$im% ^ g»awn}Tra par ua circuit
f^Uf nUfir joiPdrp Bagration 4111 «ou-
^lait Ik (iwqiia distance la route de
BloppQM, I(<^, auiYi du >oi de I^aplea,
aa dirigea aatre lea deux routes da
F#epibo!lv^ at de Moacou; il deiogea
IVoneoM du i^iUase de Garbouaova , el
nwrpba awr la positioa de Valontina*
6oxa. lA lea Euwes 9e r^uoirent bieo-
tAt au nombre de trente-cinq mille.
Veqipeieur, amifiQsafit que Ney, qui
d^f^vnjt aiiigyer Juqot , B*aurait h
Mtar qua oontie l*«rritee«arde de
Barclay) e'itait eopteat^ aeatoyer
an aeoQim du oiarMiel la diraiQa
Gudiu, at lui-mte^ ^tsjt leuM k
Sqioleoi^,
LHuactian iacoQcevaUe du due d'A*"
hrant^, et uu contre-ordre doou^ au
gto^al Bforaikd , aauv^ent lea B^usses.
Apri^ p*4tra <yailiaiqinant dtfeudua
dam lawr poejitioQ, ila dureut c^er k
rimD^tuoait^ fran^se; maia le brave
GttOui ^tait tQUEib^ aur le champ de
bataiUa, ^^rird et Vf^ aebev^nt de
vaiDcr&,
A Taile gaoohe de reippereur, Ou-
dioot eTiut soutenq Tattaque du oorpa
de Witt^enateiii « mais en ahaDdonnaat
du terrain jusqu*a Polotsk. Lh Gouvioa
SaiotrQrr le rejoiguit. I^e 17, deyaut
lee mura de b^ m»t la bataille s'fu*
Segea arec u^ cousage tel de part el
^tre. Qudi^ett Ibre^ de pUer, alUut
reasaiajr iVai^t^e^ loEaqu'un bjacalea
Tatteiflii^t e Npaiiie : lea tte^rea in*-
terrov^piiwrt VaiUm^ Ce|teoj4aiit le
nwtr^etol e?2|it ordooQ^ U retraite;
e|ie Cjpwwnea^ait k a*op^er k la faveur
dele 9uit> Imraqiie QouWou SaiuVGjfi
d4fm 4 9#kpai9t abai¥}ooner Pokrt^ »
I mtjii^pait hjibileaaeftt sea awuveipeota^
^ li^mef Im ligpie^ qui <tapent
reiMoi ^ presence de l^eRuemi. Lee
IUiaivia» Tifemeut attaqute k riostaut
ou lie ue doutaient plus d«) auoote , se
d<feodiie«| avec C(^ opuu&trete et
ce 4ivouenei»t qui bouoreut iuaqu.*^
leme<)iJftitea;eufio, dterd^i et eufoo-
061 de toutes parts, ils ae ralliirent,
et retronadmnt josque derriere la
Drissa* Ce beau fait d'armes vaiut a
GouYicm Saint*Gyr la digmte de mof
rdchal.
Gette yictoire, qui dtatsBait la
gauche de If apol^o , fiit proDeolement
la cause de sa ruioe; la olupart des
gte^aui fraud's ^taient o'avis de re-
culer jusqu'^ Smolensk; Tempereur
lui*m£me avait^auinifest^ k plusieurs
reprises rinteation de ne point pouaser
plus loio sea arantages, et de ne ren-
tier en campagne qu'aprte avoir eom-
M les lacunes de son ann^. La
retraite de Barclay hit imposait la n^
oesiit^ de marcher en avant ou de
reculer. Le combat de Polotsk ie dMda
aana doute a marcher sur Mosoou. II
cooiptait sur une affoire desire qui ,
en lui ouvrant la capitale, terminerait
la guerre, ou du moina mettrait a sa
disDosjtion toutes les ressouroea d'une
ville riche et populeuae.
A aa droite , Sch wartzemterg et Key*
nier coptenalent Toirmasaof ou rarmee
de Moldavie; Yietor, avec trente mille
hommea , qui oocupait une poaition in-
termMiaire , ^t a portte de secoiirir
soit Schwartzembei^, soit Goutiob
Saint-€yr; Augereau, k la tHe d'une
nombreuse r&rre^ allait a'ataneer
pour remplaoer le due de Bellune; at
des renforts, aiHennaait FEurope d«M
toutea lee direeliieins, a^^branlaieBt
pour re|oindre rann^ aatite*
Les dem arnii6es rusaea rotmB«>
cbte derriere rOiya, a quelque dia*
tanoe du Doiepr, inqutetees par U
caralerie du roideI9aplea, repousaerenl
une attaqiie, que Davouat mt jugen '
pea k propoa de sotttenir ; elles r^tro^v-
rapent sur la route de Moacou juaqu'ii
Tsar^ao-Zaiodiiehi^. Lk Kouleittof
rem{;Ia^ Barclay. On reprodudt ii oe
dernier la perte de Smolensk et Toi*
caasive cira^nspectioo qui nresidait a
toua aes mouvenftents. Houtouaof ,
battM k AusterUtx., et vainaueur <lea-
Turca k Routcfaouk^ avast ravanta^a
de porter uu nom ruaaa; oa YteiUard
conservait une grande ^peigie, et aa^
vaitajouter k labfajvouure du aoldat par
le atiawlanl des id«a riligiiiiaaa* Le
RUSSIE.
467
Mwreau general en chef Jfigto n^CM-
mt de reculer josqa'a Borodino, a
dm joamees de Mosoou. Le 8 sep*
fionbre, il rangea son arni^ en ordra
de bataille. II oecopaii une aaiictte
irn-loite, qae protmaient dea oa-
trages garma d'nne tonnidable artiK-
lerie. If avait tooa aes ordres cent
trente-tiois mille dnq cents homnies,
ct diapossit de sii cents booehes d feu.
Baid^, en passant sons le commande-
OMnt de Koutoosof , arait tequ ceiai
d*nBe dmslon form^ das corps de
Bi^l^vout et d'Ostermano, qui occu-
paient la droite; Benmgaen, btcc le
ovps deDoklitoarof et la gaide imp6*
rials, ooiirrait la position centrals de
Gorki . que defendaient en outre deuY
fortes batteries ; Bagration s'^tendait k
I'sile ganche, et oommandait les corps
de Raievakoi et de Barazdin. Moscou
venait d'enroyer dix*mill6 bonooes de
milieca, et Milaradoviteh aniena on
fcoiart de dn-sept nnlle anierriers.
Depais Dorogobouje, les Fran^ais
a'avaa^aient aor trcns eolonnes* Napo-
IflMii an centre, siilTait la grande
RHSIe atec la garde et lea corps de
DavQQSt et de Ney; Marat marcnatt k
Ut Ite de f araat-^garde, awnpcyfe de
la eavalerie de rterre et de la dirision
Conapans; is tioe*ro) flnnqoait la gao'
ate, PsBJaletsfei Is d«oite^ tons jwux
jvglaut leor asarche snr le mosTeMient
de la difiaiaii eoritrale^
L*enipereiir, aprto ^^tre i epos^deoic
jflors k Gjata, se porta en ataBt(4 sep^
temfareX* Mant mogea d» Tillage ne
GffidftefO Fjanriere^^rde msie eon-
■wand^ par Ronovnitcin, et^femp^
rear Tint paaser la miit daas eette
Le 5, Konomitzin se Tit eneoiv
foicd d'abandonaer le ooiiTent de Ro-
isMm et de ae repller snr Borodino,
mk Kautoosof le plaqa soas les ordres
de GOTrtdiakof , an centra de Taiie gau«
cha lias Ensses. Aprfe one Mte longne
et opmidtn , la grande rsdoate de Qie-
iawbuo, qoteoiivrait Is front duoaras
ds Ba^BimUr M empovtte par la a»«
niioo CooBpans.
La 41 septefnlMre m BMithi, Napoi^on
aia Ini^nseBAe fwomullfe la position
de Fennemi ; il eon^dt aussitdt ie projet
de tomber avec la plus grande partie
de ses forces sur Taile gaudie des
Busses, prescrfvit toutes les mesures
qui dcTaient faToriser ce plan d'atta-
que, et, pour en d^rober la coanais-
sance k Koutoosoff il attendtt la
nuit.
Le g^n^al russe, apres la prise de
la redoute de Ghevardino, avait ren>
forc^ sa gaucbe en y eovoyant le corps
de Tout&kof : vers le sotr, il passa
une revue gentle, entoure de pr^
tree dans toutela pompe du rit grec,
et offrant a la Tmration de rarnee
una image miraculeuse de la Yierge.
Ge fut un spectacle ^trance que cerni
de tant d'hrnnmes Tcnus oe toutes les
extr^mites de rempire, tout fa^oan^
par TesclaTage a une discipline rigou-
reuse, et jurant jiar les mystdres de la
religion de mourir pour sauver leura
niattres.
Les deux armte ^ient k pen prte
^ales en nonibre; les masses qui al-
Istcnt se heurter pr^ntaient un effeo*
tif d'enriron deux cent soixante et dix
mille eombatt»its; les Rnsses avaient
I'aTantage d'une forte position et d'ane
caralerie exeellente; ieur moral etait
port^ au |)lus bant deflr6 d'^nerpe que
pntsaent inspirer et la baine de r^-
tranger et le sentinieat religieux ; mais
une partie de leurs fereea se eoraposait
de noaTeUas lerte, et aueua de leurs
g^raux ne kmiasait de eette baute
reputation mUitiire qui double la eon*
fiance du soldat.
Les Fran^ais, ^lectrls^s par (a pre-
sence de Tempereur, et commandes
per des ebeili habitat k Tarncre, s'at-
tendaient k one Ti^oitreose resistance,
mais ils ne doutaient pas dm mietkB.
Les corps qui allatent se mesorer aree
I'ennemtetaient reiitede rarni6e; toos
ceox que les latigoes et les privations
avaient mis bora de oombat ^taienl
rest^s en arriere; les cbevaux sevis,
Bsoins robostes due les hommes, ne
ripondaient pas a la belle tenue des
troupes.
Le 7 an aatio, les disposltlentf de
reaspersuv etaAsiit prises, et Keutoo-
aof n'avait eneorS rien dwnge k son
6.
LOJNiyERS.
front, qui oocitpait une li{pie semi-
circulaire d'une lieue et demie de d^ve^
loppement
• Par I'effet de oette manceuvre,
l*aile gaucbe des Rassea ae tronverait
tout a coup aasaillie par I9ey et par
Davoust, charge de oommencer la
bataiile en attaqaant lea deux redana
et la redoute de StotonoT8koi6 qui
oouvraient le front de Bagration; en
mtoie temps , le mouTement de Ponia-
tovaki aur la TieiUe route de Smolensk
tendrait h lea toumer. Kaction ainai
enng^f le Tioe-roi devait s'emparer
de Borodino, menacant alora le centre
des Rusaes et leur oatterie principale
de Gorki; et, pour donner plus de
poids k oette ^nde diversion, Tern*
pereur arait ajout^ aux troupes d'Eu*
gtee le corps de cavalerie de r^rre
command^ par Grouchy, outre deux
diriaions aoua les ordrea de G6rard et
de Morand (Mortonval).** De oette
manitei la droite dea Rosses, qui s*e-
tendait depuis Borodino iuaqu*^ la
Moskra, ne pouvait prenare part k
Taction, et at I'attaque des Francis
rtasaisaait aur la gaucbe des Russes et
k leur centre, Unite la droite de oes
demiers se troutait aocul6e I la Mosk-
ra, aans espoir de retraite.
La mating tett bnimeuse; cepea-
dant le temps se leva, et NapoUon
a'toia : « Voitt le aoleil d' Austerlite ! »
Ga mot d'un heareux augure coumt
daoa les rangs ; aussitdt on hit aux aoi-
daU la prodamation de rempereur.
«SoldatoI
« YoiUi la bataiile que roua arez tant
d^iree. Dtermaia la victoire depend
de voua; die noua est n^oessatre; elle
nous donaera I'abondance, de bona
ouartiera d'hiver et un prompt retour
dans la patrie. Conduisea-vous oomme
a Austerlits, k Friedland, k Vitepsk,
k Smolensk , et^ue la post6rit6 la plua
reoul^ cite avec orgueil votra con-
duite dans oette joumte; que Ton disc
de vous : U teit a cette grande ba-
taiile 80U8 les murs de M oscou ! »
Auasitdt rattaque oomiiiaiea centre
les ounages qui protegeaient la gttidie
de Bagration, tandia que, pour d/6-
toumer I'attention de Routousof , le
corps de Delzons ddogeait I'ennemi
du village de Borodino. Les retrandie-
ments et les points fortifl^ furent
attequ^ et dmndua a^ec une ^ale
▼aleur; Compans est bless^; Dupelain
le remplace, et, bless^ lut-m£me, il
cMe le oommandement an gte^ral Des-
saix. Le mar6chal Davoust a aon cbe-
val travera^ par un boulet; un instant
on le crut mort, mais 11 ae rel^e et
continue de donner aes oidres. Deasaix
est frapp6 k son tour; Rapp qui le
remplace a le m^me sort. Om oertes
suocessives jettent quelque indeciaion
dans le corps de Davoust ; If ey, Murat ,
soutenus par les Westphaliens, font
des ef forte inouls; la division Davoust
redouble d*ardeur; bientdt le redan et
la fldche tombent au pouvoir dea Fran-
cais. II resteit encore la redoute de
ton^novski, que Koutousof recar-
dait comma .la clef de aa position.
Malgre la belle r6sistence de Bagration
qu'appuient de puissanta renforte , mal-
gr6 rintr^pidite et le sang-froid dei
g6n^aux Raievakoi , Barazdin , Dokh-
[>urof , k neuf beures les Franqaia aont
maftres de la redoute.
Cependant le gdn^ral ruaae, vofvant
que sa droite n'^uiit paa inqui^tfe,' fiiit
replier le corpa de Baghavout aur le
tb^tre de la bataiile; Osterraann et la
cavalerie de la gaide ruase sui viraat ce
mouvement et vtnrent renforoer Dokh-
tourof. Alora la hitte devint gMnk;
la grande batterte est enlev&; le gl-
utei Plauzonne y refoit la mort des
braves ; Bonami , reate pendantqualqne
temps mattre de la nosition, est Mesai
pi^ement et frut priaonnier par Ty*
Eatehef, qui, second^ par Ostermano
et Dokbtourof , reprend la poaitiMi et.
force la division Morand k retrograder.
Ce g^n^ral revient k la charge aeoond^
parEug^ne, Gerard, Grouchy et^tMis-
sier. Les Russes reculent, abandon-
nant le plateau k Morand , maia ila rea-
tent mattres de la inrande batterie. La
lutte se prolongeait terrible et ind^
ciae : Napoleon jogea n^ceaaaire deftire
avancer, pour aoutenir Ney et Da*
voust^ toute rarttUerie de la r6aarve;
la division Roguet rempla^ le corps
• • • • • * •
• ■ a • ■
• ft * • •
• • » •
m
• •
KUSSIE.
4119
^ JttDOt, qui se poita k la droite de
Dafoust.
. • II 4tait prts de midi loraqae Fem-
pereur oommanda aux deox mar^ehattx
eC k Morat de ranimer le combat [Kir
on effort ▼igoureux et g^iK^ral, et k
Friant d'enlever les mines du Tillage
de SdniteDOTakoi6 ou renneoii tenait
enoore. A eet ovdre, le feu de nos h^t-
teries Mata anr tonte la lifpse arec un
fracaa ^pouTantafale; oelles des Russes
jriTalie^at d^actiTtt^. Lea ooloones
francaiaea, ioteterie et cavalerie, 8*6-
inraolciit et inondeiit la petite plaine
eo avaot du tillage. Vaiaement la mi-
tiaille et lea boulets ouvreotdaos leun
ranga de laigea aUlons; ellea ae refor-
ment a rioatant, et la maaae avance
toujoura a?ec une oonstance hdroique ,
obiet de radmiration dea fonemis eux-
Bsoaea (le oolooel Boutourlin).
« Bapatioor Iuqb que le sort de la
bataille va ae otader... il ordoone k
ses tronpea 4e charger rennemi qui
menaea de lea toaser ; les Russes s*^
braoleot k tour tour •et coureot au
detaot dea Franfais* De ce choc ter-
ribto entredeux maaaes ^ales en force ,
ea braTOore, r^sulte une m4i6d con-
fuse, aae sorte de lutte corps a corps,
oik la tidoive , aprte quelqaes moments
dlneertilode, semble peacber tour li
tour oour fun et Tautre parti. Mais
bieatot Bafpation tombe biess^ d'nne
bafle qui hu fracasse la Jambe; Saint-
Prieat, un Fran^ais, son chef d'^tat-
aiajor, le rempuce ua moment; il est
frapp6; on Temporte aussi. Plusieurs
antres soat tu^ k la mtoe place. Les
Ruaaes, aana directioa, se d^ooncer-
tant , lis ploieat ; les Francis , au con-
traiie, raniment d'uae nouTcile ar-
deur. »
Le Tillage de Sto^onovskoi^ venait
d*ttre emport^ oar Friant; la cavalerie
de n ansouty, <fe Latour-Maubourg et
de Montbrun, refoulait les ooloones
russes, qui r^ogradaient lentement
et en bon ordre derri^re le Tillage; si
la garde impMale eOt donn^ en ce
moment, les Russes 6taient perdus;
le hasard leur ?int en aide. Une diver-
sion sur la gauche du vice-roi d^tourna
Fattention de Tempereur, qui d^tacha
sur le point qu'on croyait menace la
ditislon ClaparMe; Eugene s*assura
bientdt que cette attaque des Russes
n'^tait qu'un coup de main aans danger
r6el; mais, pendant ces hMtations,
Konovnitzin, gui remplapit Ba^ra-
tion, avait eu le temps de raHier les
troupes. L'armte russe concentrte
Sr^entait un front de milte toises, la
roite appuy^ k la grande route et
la gaudie au Tillage de Psar^o. Riea
n'^tait encore Aim^ k I'extrtoegaucba
des Russes , ouToutchkof , renforo6 de
Ba^atottt , 6tait aux prises avecPonia-
tovski et Junot. Lea mouTcments qu*on
remaiquait dans les lignes des Russes
semblaient annoncer rintention de
prendre roffensiTe; les g^n^raux frian*
cais conseill^rent , dit-on , k I'empereur
e faire donner la garde; il crut pou-
Toir vaincre sans elle : T^^nement
jpiroufB que ce fut une fiiute. Gependant
de bantes considtotions le lutermi-
nteeat : en arri^re des lignes de Kou-
tousof , il aperccTait une masse com-
pacte et immobile que Rootousof
semblalt tenir en rtenre : &^i% la
milice de Mosoou, mal arm^ et inca-
pable de combattre avee des troupes
aguerries; mais I9apol6on ignorait
eette ciroonstanoe; il detait cralndre
aussi que de nouTeaux renforts n'arri-
Tassent k Tennemi; en faisant donner
la garde, il exposaic sa demi^ res-
source, et mettait Tennemi dans le
secret de sa d^tresse. D'ailleurs, pour
dire ici toute notre pens^, la Tictoire
de Borodino, en admettant qu'elle edt
6t6 plus complete, n*aurait point sauv^
rarm^ firancaise; Mosoou n*en edt
pas moins M inoendi^, et les debris
de Tarm^ russe , ayant pour auxiliaires
les rigueurs preeoces de la saison,
eussent toujours suffi pour repousser
Suelques miUiers de soldats ^bapp^
tant de fl^aux et a la fureur des el^
meots.
Cependant la grande batterie des
Russes, prise et reprise, est enlcT^e;
TVgatchet^ qui la defendait avec intr^
ptdit6, est fait prisonnier ; mais Mont-
orun et Caulaincourt tombent frapp6s
mortellement, le premier au commen-
cement de Paction , le secoo'^ au sein
410
L'UMIVEHS.
Bi€ine de ia tictoire; h corps de Dokb-
tourof , assailli et enfonc^ par le vioe-
roi, se repiie eo d^ordre sur la droite
des Eus$es. L*iminioence du peril
semble accroltre I'energie de Koutou-
sof ; i) veut a tout prix reoonqu^rir sa
posilioo; I'drm^ eotiere s'^ranle;
uaais toui^rartillenefraofatseftonnaoit
a la fois, feudroia lea premieres co-
lonnes, I^ Euasea aJtors a'arr^teat, et
leur feu repond a celui deii Fraotais :
lutte terrible, ou , de chaque €^t^« troia
cents bouches a feu siiloBoaient lea
raiiga eooemia, o(i le courage^ rMuit
h un d^vouement passif ^ ae iytruait k
attendre la mort > iauno))ile h fK>o r«ag»
La cavalerie seiilet, engagee sor l«i
Qaocs de Tarm^, chargeair ayec fu<»
reur , maia sana avantage marqu^ £iifiii
Napoleon ordonne a Ney de a'afanoor
sous le fQU des Russes et de d^order
leur flanc gaucbes le niar^cbal eneeute
ce mouTemeot decisif ; lea Eusaes re*
culent, mais ranges en bataille* el
voDt se reformer sur leur derqiere li«
sne. lis avaient perdu ejD tu^ et eu
Dless^ pres de quarante miile horn'*
roes. On assure que Koutousof , igno^
rant encore toute Veteodue de'son
desastre, inanifesta Tintention de re*-
commencer le combat le lendemaia; il
oocupait encore une position f<Nrini-
dable, et avait conserve presque toiiite
son artillerie. L'attitude imposante dea
Russes frappa Mapol^n kii*m4ine; il
repondit h ceux qui lui conseiliaient
d*achever la deroute de Tennemi : £h!
si nous avons une bataiUe demaitif
que nous restercht-U pour didder la
vicMre? S'iredt 6te mieux inform6
de la position deKoutousof , sans doute
son gdnie n'eOt pas b^it^; mais dix
mille metis et qmnze ipille bless^ ve-
naient de laisser dans les rangs de Tar-
m^e fran^ise des lacunas profondes.
Napoleon declara que la bataille ^tait
finie. Ney rej^t le titre de prince de la.
Moskva. L*intr^pide roerecbal devait
vivre asses pour sauver iei debris de
cette arno^ nacu^e si brillante : il
£tait re^erv^ a la haine d*un parti de
r^pandre sur le sol de la patrie le reste
de ce glorieux sang.
Crpendant Koutousof, apres avoir
ordonne quelques dtspasitiona defen-
sives, ordonna la retraite, que pro-
tegea son arridre-airde. Du 9 an 12 ,
Kapoleoa s'arr^te a Hojaisk« lloatoa*
sor« pour prix de sa belle conduite,
fut elev^ k la dignity de feld-marfehal ;
sa r^stanee fut cel^rte a P^tersboorg
eooune une victoire; mais k Mosoo«a
on Qonnut bient^t toute la T^t6. IU»>
topcbin, gooverneur de cette capitale,
^tait entieiremeot divou6 auz An^dais;
habile a manier resprit de la popauoe^
il ne eessait de rependn des bruits
mensongera sur lea pr^teadua revcrs
des arnSea firanqaisei : il publiait que
Mapolten venait renterser les auiBls
et an^ntir le peuple orthodoxe; poor
inspirer aux Eusses le mipris de ren-
nemi , il expoaait k leurs yeox quelques
prisonnicra d^bilea et exwBu^ par les
privatipaa, ProfoMd^ment blesse dans
son orgueil national , il arait con^u un
projet digne des d^vouements entires,
celui d'eoaevelir Tarm^e victorieuse
sous les ruines de la capitale. Comme
il entrait dans ses plans d'attribuer
Tincendie de Moscouaux Fran^ais^ il
se pr^para secretement a oette onivre
de d^livrance et de destruetion. II sou*
niit aux mesurea Jes phis s^eres les
^tranc^rs qui lui ^ent suspects,
exila les una et condamna lea autres
au supplioe ignominieux du knout;
enfin, pour arr^ter Temigration, il fit
defendre de quitter la ville sans sa per^
mission. Les' seigneurs s'eioignweat
malgr^ ses ordres; mais le peuple et
lea bourgeois^ tromp^ ou reteous par
la erainte, ob^irent. Bientdt les con*
vois de bless^ russes , dont une partie
^tait dirig^ sur la ville, ne laisserent
aucun doute sur Tissue de la bataille
de Borodino. Le 14 « rarm6e rusae leva
le camp de*Fili, et ses colonnes tra-
verserent Moscou enee une pr^ipita-
tion ({ui trahissoit la erainte d'etre at-
taquees au milieu de ee saouveoieDt.
koutousof, voyant qu'ii nepourrait
dtfendre la ville » avait pris la r^olu-
tlon de tourner vers le sud » pour main-
tenir ses communications avec les
corps de Tormaasof et de Tchitchagof.
Alors Eostepcfain, press^ d*ex^uter
son dessein donna ordre aux '
• •••
• • ••
•••
• • • •
V.
• • • •
4 ••
• •••
• ••
• •
• •••
...» »•••
- ••• •
• » • * ••• •
• ♦,• • •• •
• »' :
RUSSIA
471
taste A*&fB9$m knnMlatoaMat ImIs
drmevres. Hiea «e MUt domilr mm
id6e (lu trouble et de la ooniusion dont
se iem|»lit k cayitaie* Lm MkMMvilef
duogeaient k la hAte «ir des ekariote
ce q&'ils AvaiflDt do ptai pr^eiciii; let
friua pmiTrat ae detnaadafcnt es pAao-
raol eu ils tniiifevstcnt no asftoi et,
fMur UB inatiMt de eonsertattom^ ihi ae
praaifRtaient ^ la ftaite des aoldats
qvi traferaaient la title en oooratit,
flomne s*f la emsent 6te hdnteux d*dr-
fiter lean reffards sur ces mors qu'ila
n^araient pd sauver. Rosto{»chiti avdit
CMirert leis prisons et distribu^ aux mal-
bitetirs leur tdche fatale; mais d^ji la
t^ des coloimes de Murat pendtrait
dans le fauboui]^ de Doroffpmflof ; Eoa-
t0[)chin prit la fuite, ei Miloradovitdif
qui D'avait pas eooore en le temps de
ae retirer avec rarri^re-gaide^ fit arar^
tir Murat qoe si Ton troiablait ae f^
Iraite, il mettrait le feu ii la eaoitale.
Le roi de riaplea pdn^ra bientdt dana
ie Kremli A , oti quaqoea d^aeap^r^a ea*
aayereotenvaiiidesedtfefidre. Bientdt
If apd^on antra , h la t^ de sa Rartle,
dana le ftetbonrg de Dorogomilof ; ft
8*attendalt ikfecevoi^les defsde fa vllle ;
d*abord il panit p^niblement affects du
ailenee qm r6gnaft dans les rues 66-
series, mais bientdt 11 assigna auxdiffd-
fents corps les positions qu'ils devaient
eonserver autour de Moscou. La nuit
etait d^j^ sombre lorsque Fincendie
eclata sur plusieurs points h la fois ; lea
soldats re^ureat rordre de r^indrey
mads lea p»mpea avaieot M ^igtt^
par lea soina de Rostopchin. La viHe
entiefe olfrait I'aspeet d'un immenae
bAcber ; lea soldats ooBtemplaient dana
no mome stleaee ee spectacle & la fois
impoaant et terrible; les chefs pen*-
aaient h Y am^ nisae plutdt repous*
ate que Tainene, et, end^orant le
aort de cette Tine si cfa^rement con-
qnise, ils fafsaient utf triste retour sur
enx-m^mes : de temps en tem|)s des
bruits sourds, comme le bruit lointain
du canon, dominaient les murmurea
de Tincendie ; e*^tait celui qpe fiiisaient
en tombant les portes de fer des bou-
tiques, et la ebaleur devenait si forte
qu*eile faisait ^clater les litres h une
gtfaade diataoaa dea flannttes. La 1 5 au
natta^ Kempereiir alia oeevper le
Kremlin. Lea Mifloes en pierre brd-
iaieiit pl«a ieatement ; m pot tn aaiiTar
quelaiMa«iin8. On arrtta tM grand
nomnre d'inoendiairea am^ de tor-
ehea et cbarg^ de it^Kard^ (ft de fia*
etea qtf ils Mn^ietit dana rintMen^
des matsoAs t fh dfclar^nt qu*ils rem-
ttlfssaleht l«s ordrea du gouverneui^; on
les fbsilla, mats cet exempie n*arr^ta
pas les autres. te it , la cbaleor devint
si insupportable, oue Tempereur fut
Oblige ae quitter le Kremlin pour aller
S*£tablbr au cUteau de P^trovaki. L'ln-
cendie, qui ayait dur^ aix joiurat e'er*
riU ie 20, il la suite d'one pluie ab«i»
danteC). Napolten, dte ie li, dCaH
(*) ffodtiateiioiiipftaii peddifft qii<9^e
taoipi le rMt d^ Matmmtk militiirea
tiear donAcr IM pSMi^ Itephis femarqua-
Met de rintefeMuile relation de M. le mar-
Mil de CKktfibtay, qui a dkrit aree iotant
de ^kiUi cpie de talent le dtostfe de oette
ttef^dUliyoe eapitale.
«« Toat itaitprftpar^peai^roMiripafiba de
Moieoo ! Mortier derait en Mre le goater-
iMMii , DtifOflMi le comaiaiiuant ^ Lfessepa
teait destine k remplir lea foncfiexu dHnteii-
dint dela protineedeMoMsMi, etQDeprd>
damation aux habitants derail AiyepnoHte
le JMir mtoe. IVipoMon I'arrtta k rentt^
da foaboorg ponr y attendre qii*ane d^-
tatien vtait iaiplofer «a cMmenee; cet acta
da aooaiittion M tatneM lai plaiftif et flat-
tait aon ergiwiL
•Afin d'empMer que les loMati Altarft
M piUflMDt MeaeMi , il Ht ^aUhr par deux
bripdet de esralene Mgire mie dii^ de
Bosiei le bn|; de h Sleak¥« pour ferttier
Fcntr^ de la tille de ee cM, Eitgene et Pu-
■iatottiu reearanf Fordfe de I'arrlier I nne
Keue en de^ de Moiooa. Dana le afeime
tem^ NapolAen eiNfeaeail I Mmkt, qvf
aeitait imiBMiefeaieai Marat, de ie perter
mr le Kienlia et d^en pieadve poiaeirion;
a devait dtplofyet la plna grindcf rig;neer
■oar empteher le pillage. Key, Dareuat er
la tieille garde arrifftrent ittoeeHiveBient»-
et itablirent leera bfivaes de dkaqve eM
at ea anMre da Cwftuarg de Derogomilef.
Gea IgMnsBOL iTattendanl k fnre me enir^
ttiomphanla daai M oteoa , ataieni fait pren-
dre la (praiaiB teame a levrs trenpea.
-Marat n*e«t paaplaiM pMire dana Iffaa*
473
uumyBRs.
r«?flnuliaiNteri*aiidcmierMd0iwedM det
tsara^qiMSon isolemeot afaitprterv^
eon, que b aoUtiidc qui y riguil !• frappa
d*ctoiinaDent ; il !« ful encore deventage de
lie pes voir parattra de depulatioD ; b vkiti
elait fi ioTraiieoiblable qu'il ne pouvak la
Mnip^nner; aiwi, craignantque leiRiiMfli
ne nil euuent dretti qnelque -embtk^he , il
ne marchait qu*avec preraution«et fjooaiait
del reconnaimncci oans let met qui abou-
tiiiaient 4 odles qu*il •uivaiL Parrenu pret
dn Kremlin , oe tuenre et oette solitude qui
avaiant r^gok jnaqa'alQri eetierent tout k
eoop; uH mtiange d1uMnaie> du peuple, de
toloats, de Cocaqnei, an mUieu deM|tteb te
muvaieDt on grand nombre de voitaret
I harp^ei de bteea^ ct de bagages , en obe-
troait let a^procbet; qvelqiiei eoafia de
fbiil ftirait brei mr I'avant-gaide, qoi dia-
pena aunitdt ce rmemhiMMWil Mofal,
s*aperoeTant alon qu*il avait eci tronpi, fit
cbarger sur Ics Coiaquei qui le trouvaient
a rarriere-garde de Koutouiof. Toatefoia^
sci craintes reUtivenent k nne mrpriie
dcf enant plus Tives , il continue k praidn
Ics mftmes precautions; aussi ne fut-ce qn*ii
sept heures dn soir tfuHX cut tnivefti Bioa-
oou; il fit aussttdl btvaquer ses trounes, et,
poor enp^cfacr de se repandredans la ville,
tl la fit enTelopper d*uiie chalne de postct
depnis la route de Riaaan jusqu'i cette de
Mlenbourg.
«Monier fit bivaquer son corps d'armie
dans rinterieur et dans le voisinage dn
ILranUiiy et poussa des reconnaissanoes dans
diflerentes directions. On Ini retira la divi-
sion CUparede pour la mettre sous lea ofdres
deMuraL
•Tandisquelei Fran^ais pdielraient ainsi
dans Bf oscou , en pranant toules les pre-
dutiotts que leur dictait une juste mefiance,
Napoleon, impatient de ne point voir pa*
raitre la deputation des babitants, envoye
succesBivement plusieurs des officiers polo-
naii qui lui servaient dUntcrpretes pour en
biter TarriT^ Il apprit bientdt oe qu'il
n'aurait jamais soup^nni, ce qui semblait
inaroYable, ^ue Moacou, abandonnee par
lous les fonctionnaires publics et par la plus
gnnde partie de ses baoitants , elait presque
d^ierte. H n*en pcnista pas moins a exiger
qu*il lui fit ameni une depulalion telle
quelle. On reuuit done plusieurs marcbands
etranipv qui s'etaieut preseotcs k Murat
pour implorer sa protection , et ils furenf
conduits devant Napoleon. «Les Kuises, lui
Let wMiCt fouilMreot
, et trauftent dam lei eavM
« direofrils, one abandnuii Moaeon, il n'y
• est rasti que qoelqnes toangcrs eomme
• noua qui s'adonnaient an oanuriMree, et
« qoelques individus des daraicKs daases du
• peuple. Nous ferons tout ee qui sen en
« notre pouvoir pour le aarnee de Telie
• Majeste, et nous la sapplions de nous ae-
« corder sa protection. » NapoMoo voyait
s*eTanouir en un instent toutes ks espiraa-
ces qu'il avait fondies sur I'oceupaliott da
Bfoaoou; dans son mionnlenteaMnt, il ne
leur ripondit rien, et entra ausiitdt dsns
le fiiuboar^. n s'arrMa quebnie temps prat
du pontnui avait M ri^wi a la bile, pour
y Toir dtfler les troupes, et Mblit son
ouartier gMnI dam una daamaisons dn
nnbouig.
« Jusqumamntoiimaiiitint rordreparau
les troupes, plus tard oeia devint imposii-
Me. On ne pik caapteher des bonmes eit^
ma^ de booin de se proenrer desseeours
qu*ib avaient aons la main; les oflidcn
mteies doonaient Teiemple de la d^sob^
sance. Une foule de militaires se ripendirent
done dans Moscou pour y diercber des afi-
ments, et , trouTant (es maisons abandonnees,
beaucoup se limrent ao pillage; ib rea-
contraient souvent des traineurs russes que
TappAt des liqueurs et du bntin arait relanas
en grand nombre. Ces rencontres occasion-
naient nuelqvefob des fusillades • mais da
courte aurte, oar ni lea uns ni les autres
a*avaient pour but de combatlre.
« Cependant las incendies se muhipliaienl
avec une si ^tonnante rapidiid, qu*iln'etait
phis possible de les consid^rer comma dfs
accidents ordinaires; leur vMtable esuse
ftit bientdt eonnue. Des incendiaifes fureni
pris cb flagrant debt; plusieurs furent tues
sur la place, d'autres uvr^ k une commis-
sion mililaire que Napol^n crea pour l«s
iuger. Ils dirent qu*ils n'avaieni agi que par
les ordres de Rostopcbin , fiirant eondamncs
k £lre fuaillea et exkniU aur-le-cbamp.
Leurs cadavres, exposes dans les rues on au
tacb^ a des poteaux , ajoutaient aux bor-
rcurs dout rarmee fran^aise ^tait enViroo-
nee. On trouva aussi des matieres inflam-
mables dans beaucoup de maisons , et des
petards dans plusieurs tuyaux de ponies,
entre autres dans ceox de l1i6td de Rostop
cbin.
• Aussit6t que Napol^n eut acquis la
certitude que c'^aient les Russes qoi bril-
RUSSIE.
473
aade wMilit^ 4e denrtet et de
to
', y abui-
doua lei Wn—imH 1 lesr cmm natural.
Dm la nait do i5 an i6, let ineoMliaini
icdoiifalerant d*actmti el d*audace; rinoen-
die fit des propie cffrijants. Le t6 an
iMtia, da vent imp^ne^i le reodit pretque
«&enl. Hoacoo offrit alon le spectade
d'oae aaer de flammo agit6e par lei vents.
Ua baleen tpd domine la TiUe re|nait k la
kanlevr des appartements qii*occupait Na-
poKon. De U d ponTait contempler k loisir
est qNNivanlable spectacle. U Tovait avee
dsalear la deaftiMlion d'nne vilJe sur la
de kqineOe U avait fonde ses es-
;; on FenSendit s'toicr : « Bloseoa
• BlHtnktt;]e pmdk lartompenie one favais
a ma fanve araeel »
lia Ics iBBisMif ae tendient eonune dans les
aatrcs viIbs dlBorope ; un grand nonbra
de rasi le troovvrant inleroepUes par le
fee. If spoleon ne lit expose k toe s^re
sinBimisaementdesonarmee.II iuit (Tail-
kus uMoouBode par la chaleor que r^pan-
^ rinccndie , el one pluie de feu tonbait
wwiiniieUwnemt Mur les bltiments qui se
Uwvueat dsoBS le Kremlin ; n^anmoins il
I'sbrtaaaii k j rester, malgre ki instances
da pBcrsoK qui rentonraient , lorsqu*on
U radii esopte qn*on avail tente d'incen-
diff le pslaia moie qu'il occnpait ; que le
fca edalsit n*la tov de rarsenal, et qu'un
mUsI de poliee qu'on venail d*arrllcr dans
tt bidaienc dcail accuse de Yy avoir mis.
ut aroonstaswes deoderent Napoleon ; n
ft iaimger devant Ini le soldal de police,
<l soniAl apres il partit (le i6 septcmbre
*■ Mir) ponr transporter son quartier ae-
■Oil k reirovskoe, qui eiait situe sur la
nmte de Pelersbouiig, k nne derat-lieue de
la bwriere. II sorlit du Kremlin par la porle
fa ooodoiaait snr le quai , les aulres issues
<<anl devenoes impraticables par suite de
riaeeodie des maisons voisines.
• Ilous avoDs vu que malgre les precau-
tiMs prises par Napoleon pour conserver
Moicpu intacte , les soldats, pousses par la
te, s*etaient ripandos dans la ville la nuit
nte qui suivit son arrivee , et avaient com-
■csee k piller, tant il elait difficile d*em-
ptdttr qu'on ne s'appropriAl ce qui , 6tant
*bttdoane, semblait n*appartenir 4 per-
Ke; mais oe pitta^ n'etaii poidt auto-
, en s'y Itvrail luiiTement ; I'habitant
me
enfuromiaBte foornirent auMi d«8 le-
gltuam , de sorte que rarm^e se trou?a
momeptantoent dana raboodanoe.
n*avail pas M mallraite, el, si la ploparl
dm maisons n'eossenl ms it^ descries, Mos-
eon n*auniil souflert aautre dommage que
celoi qu'entnine nioessairemenl Tarrivee
d'une nombreuse armte enoemie. Les dis-
positions de Napolfon pour obtenir oe rc-
sultat auraient ^i puissamment secondees
par rint^^ que I'armee avail k la conser-
vation de oelte capitale, interftt qui itait
vivemeni senti mkme par les simples sol-
dats. Le disordra suivit d'abord les progres
dieKncendie,etfutjporlAasoBCQmbleloff»- \
an*on sul qne eel mcendie itatt I'onvnga
oea Russea.
« Le soldal disirail aidcnunenl la jpaii ,
non pas poor Muqiper anx dannrs, il lea
bravail gaiemeni , auds 1 cause des blignea
el des privations qui exeidaient ses foroas.
Yoyanl ses espiranoes deques , il ne songea
qu*a jouir du present, ne oonnnt plus de
mn , et se livra aux plus grands exces; le
meurtre exceple , il se permit tout. Uo
enirojable tumulte suooraa bienldt k oelle
solitude inatlendne qui regnait dans Moscen
lonqu'on y pMlra.
• On entendait k la fois le pelillenient des
flanunes , raffaissemenl des bAiimenis , les
eris des animanx qui y aiaient M aimm-
donn&, lesg^missements des habitants, les
imprtetionadn addal ivn, disputant aua
flanunes une parlie de leur proie. Le pillage
et rinoendie mardiaient de front ; tous pd-
bienl on acbelaient k vil priz les mndoits
du pillage, et i*inlMl rtenit plus d'une fois
dans le mime Ken Tbabit brodi do gte^ral
el l*bnmble habit dn soldat Le jour, des
tourbillons de furafe, s*ilevant de toutes
parts , formaieni nn nuaae ipais (|ui obscur-
eissait la Inmiere dn soleil ; la nuit , les fkun-
mes , m£l^ k ces tourbiUons, ripandaient
au loin une sombre clan&
« Le sort des babitants qui itaient restfa
dam Moscou devint aflreux ; oblig^ de fuir
leiirs maisons embrasees, ils erraient au
milieu de cetle ville, courb^ sons le far-
deau de lenrs objets les plus precieux, et
cberchant un asile. Dans cette situation d^
plerable, ils se voyaient eipos^ aux vio«
fences du soldat, qui , apres les avoir ou-
trages et pilles, poussait quelquefois la bar-
baric josqu'4 les forcer de porter eoXHD^mes
au camp leur propre diponille. Lebesoin
de se secourir mutuollement les porta a
476
L^UNIVEKS.
' quitta en toute fadte la position de Ta-
rootino, ft toute Fann^o russe se
porta 8ur Malo-Iarostavetz.Dokhtoarof
en chmwa deux bataillons fran^ais.
Euff^ne le&it attaquer par la diTiaion
Delzons, qui refoule les Russes k
i*autre extremity de cette ?ille ouverte ;
Dokhtourof les rallie, et les Fran9ai8
8ont repouss^ h leur tour Jusque sur
la grande place , iA la lutte recommence
avec adiamement. Delzons est frappd
d*ttne balle; son frhrt s'danoe pour le
secourir: lis tombent tons deux dans
les bras Tun de I'autre. Dej^ les Fran-
^ais pliaient , lorsque (juilleminot vient
r^tamir le combat. La diWsion Brous-
sier seoonde Guilleminot , qui , pendant
quekques instants, reste mattre de la
vitle. Les Russes retoument k la
charge, et ressaisissent encore ravan-
tage. Pendant cette lutte h^roijue,
Mapol6on venait d'arriver, suiti de
prte par la garde et le corps de Da-
Toust : il donne Toidre h G^ard et h
GompaoB de prendre la TiUe h revers;
mais, au mane moment, I'arm^ de
Rontousof , forte de soixante et dix
mille hommes, d^bouche dans la plaine.
L'aitillerie francaise , croisant son feu ,
foudroie leurs tetes de colonnes; mais
la hitte continttait dads la yille; la di-
vision Pino s*dance au secours des
Fran^ais ; EuR^ne , k la iitd de la garde
qui venait de remplacer celui de Dokli-
tourof ; Tartillerie francaise , longtemps
gjMe par les difBcult& du terrain, se
develo^pe alors et silJonne les rangs
ennemis: les Francis, la baionnette
en avant, s'irritent des obstacles que
la bravoure des Russes leur oppose;
lis rejettent enfin hors de la ville Fen-
nemi, qui,' rom{)ant ses colonnes i
abandonne la position pour la septidme
fois. Eugene vatnqueurd^i^oiesa petite
arm^enavantderaalo-Iarosldvetz. Get
Episode , ou les Fran^ais ne recueilli-
rent que de la gloire, puisqu*ils for-
cerent k la retraite des forces qua-
druples, est un des faits d'armes
qui honorent le plus la valeur de nos
troupes; les Italiens s\ montr^rent
nos dignes toiules; et les Russes, qui
jamais ne d^loy^rent plus de Cons-
tance et de courage, ont noblement
rendu justice k leurs adversaires. La
lutte avait duWi douze heures: la ville
n'offrait plus que des d^combres ty-
mants oii gisaient pdle-mlle, etdant
la position oi^ la mort les avait firap-
p^, les corps de huit mille Russes et
de quatre mille Francais, difference
qii'expliquent les effets puissants de
notre artillerie.
Par un jeu bizarre de la fortune ,
le r^ultat de cette bataille fut plas
funeste aux vainqueors qu*aux vaincus.
Napolten supposant, d'apr^ les moa-
vements de iLoutousof , que ce g^n^vi
etait d^d^ k se maintentr dans sa po-
sition i avait consults Murat , Bessiere
et le comte Lobau sur Fopportunite
d*une nouvelle attaque. Tons furent
d*avis que, dans F^tat oi se trourait
Farm^e francaise , II fallait renoncer
k la mardie projet^e sur Ralouga ; le
comte Lobau, interrog^ en dernier
lien , insista sur la ntossit^ desere-
Urer sur le Niimmpar la rtmte la
pku courte et la pHu eomwe, par
Mqfaisk, et lepluepromptementpot'
Hbk. !9apol6on ^tait seul d*un avis
contraire; tandis qu'il hdsitait, Rou-
tousof etait dans une perplexity sem-
blaUe. Persuade que NapoMon manoeo-
vrait sur son flanc pour gagner JUMp «
et couper ainsi ses communications
avec Tchitchagof , il se d^ida k r^ro-
grader. De son edU , et dans Fi^o-
rance de cette nouvelle determination i
Pempereur se resjginant simaltane-
ment k faire volte-mce vers le nord ,
dans la direction de Mojaisk , Rootoo-
sof ne pouvait se persuader que 1 ar-
m^e firan^ise se retirait par une route
d€jk d^vastee et sans ressourcc^; "
manoeuvra pendant plusieurs jours
pour lui former le chemin du sod; et
torsqne ses doutes ftirent lev^s, jj se
contenta de harceler sans relAcbe Feo-
nemi , attendant que Fhiver et les pri-
vations le lui livrassent sans dtfeo^.
Les Fran9ais, vivement attaqu^s pres
de Viazma par Miloradovitcb et Pla-
tof , tandis que Routousof restait im-
mobile a quekiues lieues en arriere,
'.•-.
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E17SSIK.
, 477
curent encore la glotre de faire recoler
les Busses; mais ils perdirent quatre
miUe homines. lis Toyaient k daque
pas augnienter le nombre des tratoeurs
et des blesses ; leur marcbe deyenait
de plus en plus pesante. Ifey, qui avait
moms soonert , rempla^ Davoust k
rarri^-garde. Les oievaux du train
tombaient de fiatigue et d'^paisement :
il fallut atendonner des caissons et
qoelques bagages.
Le 6 DOTembre , des flots de neige «
pounds par un vent nord-ouest , cou-
▼rirent les cbemins ; les ddtachements
chercfaaat un abrt s'dgar^rent; les
sotdats les moins robustes, roidis de
froid, laissaient tomber leurs armes
et se laissaient massacrer par les Go-
saqaes. Les cheraux qu*on n'avait pas
ea la prdvoyanoe de ferrer h siaoe
s'abattaient sur le verglas. Les soldats
affam^ les ddpefaient et en faisaient
rdtir les chairs au feu des bi vacs. A Do-
rogoboaje, Tannde se dirisa ; Engine
et PoniatoTski se dirigerent sur Vi-
apar une route-dcTenue imprati-
pour les cheraux de trait ; Pla-
toC 8u?aif oette colonne, tuant ou
iuiaBt prisonniers tous oeux qui s'^
cait»flatL*emparear, Davoust, et Key
qui formait rarri^-garde , se porte-
rent diraetanent sur Smolensk. Na-
poiooo J entra le 9 arec sa garde: le
10 f Oanmst le rejoignit ; le 1 3 , Eugene
rameoa les ddbns de Tarm^ d'ltalie ;
il afail perdu soixante pites de canon
et la plus ffrande partie de ses bagages.
Ctfiath Smolensk que Napol^n put
appHkaer toute I'dtendue de ses pertes ;
de cette armte si belle il lui restait
sous ta armes enriron qoarante milie
homflses , dont cinq k peine de cavale-
rie mal roontte.
L'armte du nord , aprte des alter-
natires de succte et de rerers, avait
dvacud Polotsk ; Gourion Saint -Cyr,
menao6 par Wittgenstein et Tarmto
de Finlande , manoeuyrait pour se rdu-
nir k Victor, qui se troura bient6t k
la tto de treote-six mille hommes ; k
SmoUani , Wittgenstein Fattaqua sans
poofoir le forcer dans ses demidres
HgBcs; mais le mardchal profita de la
outt poar^se rq;>lier sur Sanno , laissant
ainsr a ddcouvert les routes de Minsk ,
de Vitepsk et de Viina. Vitepsk fut
occupy par les Russes qui Orent pri-
sonniers le gdn^ral Poujet , le comman-
dant Ghevard^ , et une partie de la
Samison. Cependant Tchitchagof ten-
ait k dtabilr ses communications avec
Wittgenstein ; Minsk devenait le point
autour duquel devaient pivoter leurs
operations , dont le but dtait de couper
la retraite de Napoleon sur la ligne de
la Ber^ina. L*amirai , dont Tinaction
deSchwartzemberg favorisait les mou-
rements , laissa vingt-sept mille hom-
mes, sous les ordres ae Sacken, k
Briest-LitoTski , cinq mille k Proujani ,
sous le commandement d^Essen , et ,
contenant ainsi les Autrichiens et le
corps de Reynier , il marcba sur Minsk
k la t^e d environ trente mille sol-
dats ; deux renforts , conduits par Lia-
ders et Herthel , dont la reunion prd-
seutait un corps de ouze mille hommes,
devaient le joindre k Minsk le 13 no-
vembre.
L'arm^ de Routousof s*avan^it
sur Smolensk; les guerriers russes,
habitues au froid , abondamment pour-
vus de munitions et de vivres, ren-
contraient k cheque pas des d^ris de
cette d^sastreuse retraite ; ddfaits dans
toutes lesgraodes batailles , ils avaient
cependant les avantages de la victoire;
et les vainqueurs de Smolensk, de
Borodino, de Polotsk et de Malo-Ia-
roslavetz se retiraient devant eux. Les
funestes symptdmes d*une ddsorcani-
sation comply commen^ient a se
manifester dans les restes de Tarmte
fran^ise.Lesordresderempereur,que
la nottveaut6 des circonstances per-
mettait d'interpr^ter avec plus de la-
titude, n'6taient plus ex6cut^ ponc-
tuellement : c'est ainsi que Baraguay
d'Hilliers n^ligea de faire replier sur
sa division un corps isoM de deux
mille hommes qui , surpris par les par-
tisans Orlof Denissof , Davydof , Ses-
lavin et Figiier, se vit foro6 de mettre
bas les armes.
Routousof, poussant ses avantages ,
embrassait de ses ailes la position de
Peropereur : avant d*arriver iusqu*^
Minsk par Orcha.et Borissof, Parm^
47«
L'URIVERS.
tran^ise afoit soixanle lieues a par-
courir. Yietor re^ut I'ordre d^oocuper
Wittgenstein. Le 14 noTembre^ Na-
polton quitta Smolensk arec ia rieille
garde; Eugene et Davoust devalent
suirre kun four de distance: Ney re-
(ot Tordre de n'^vacoer la ville que le
17 , af>i^s avoir fait sauter les tours de
Tenceinte et d^uit oe qu'il ne pou-
vait transporter. A Krasnoi, la divi*
ston Dojarorovskoi fut repouss^ a?ec
perte. Eugene n'^happa ^e par mi-
racleaMiloradovitch , et rejoignit Tem-
pereur h KrasnoT. Koutousoi semblait
n'avoir plus qu'a oser pour aneantir,
par le choc de son arm^ , les debris des
colonnes fran^ises; le 17 , il fit ses dis»
positions pour attaquer; le lendemain
au point du jour , Fempereur sort de la
ville, h la tite de douze raille hommes
de sa garde, tout pr^t h engager le
combat. Le g^n^ral russe , ^tonn6 de
cette resolution, rappelle h lui les
corps de Tormassof et de Milorado*
vitch , qui laissent ainsi le passage libra
h Davonst et au xice-roi. Cette d^
monstration de Temperenr lui permit
d'accompiir sa retraite sur Oreba:
itiais il laissait en arri^re le mar6cbal
Ney ; et les Russes , maftres de Kras-
noi , annoncaient dans leur bulletin
de cette journ^equ'rls araient fait huit
mille prisonniers et pris plusfeurs
centaines de canons. (Test a Dom-
brovna que Napoleon recnt hx nouvelle
de la pnse de Minsk ; fe 19 , il entra
dans Orcha, ou son arm^ trouTa
quelque artillerie et des approvisiomie-
inents.
Cependant, rest6 seid en arrf^e
avec une poign^e de braves , Ney eicdcu-
tait, sous le feu de Farm^e russe qui
Tentourait de toutes parts, cette re-
traite prodigieuse dont les Rosses eux-
m^mes n*out parl^ qu'avec admiration ;
le 21 » il ramena h Orcha trois mille
hommes » ddhris glorieux de sa petite
armee.
L*empereur, en s*dvan^nt vers la
Rer^na« ne supposait pas que Boris-
fiof fidt dija au pouvoir des Russes;
une &usse manoeuvre de Schwartzem-
ber^ fut la cause de ce dtestre. Le
general autrichien , aprds avoir battu
Sacken h Wolkowisk , et Tavoir i^t^
vers le sod avec one perte coittid^
rable, s'^it engage h sa poursuite, au
lieu de marcher contre Tchitcha^pf
quMl poovait mettre dans une position
critique, en le poussaot sur Tempe-
reur. La condufte de Schwartzemberg
dans cette circonstanoe a fait suppo-
ser quMI agissait d^jd eonformeroent
aux mstructions secretes de sa cour ;
pteut-dtre que , pr^vojrant Tissue poli-
tique de oette campagne d^astreu-
se , il se fit une k>i de meager son
corps, dont Napoleon n'aorait pas mair-
qu6 de se couvrir s'il Tedt eu sous la
main. Quoi qu*il en suit, Tehitchagof
put s*emparer de Minsk , ou ii trouva
des ap(>rovi6ionnements conskl^ables;
de la il se porta sur Borissof, qui
cMa bientdt ii la superiority de ses
forces , mal^r^ la behe resirtanoe de
Dombrowski.
II ^It de la nlus haute importaoce
poor Napolton ue reprendre Borissof,
pour s*assurer les moyens de passer
la B^^ina. Oodinot , second^de Dom-
browski , rentra dans cette vtUe, col-
butant la division Pahlen qui repassa
pr6cipitamment le fleove et rompit le
pont derri^re elle. Sur Tautre rive,
on d^couvrait toute rarmee de Tehit-
chagof occupant les hauteurs.
I/empereur venalt d'arriver h Bohr.
II fut dtoid6 qu'on passerait la B^r^
zina au ^u6 de Stoudzianka } le ddgel
pr^ntait de grands obstacles aux
pontonniers ; mais , le 94 , une fmte
eelee raffermit les terrains , et fadlita
le transport de Partillerie.
L'arm6e , aux environs de Borissof,
offrait encore un efTectif de quarante-
cinq mille hommes et de deux eent
cinquante canons; les non oomliart-
tants qui se trafnaient a la sufte des
corps , formaient une masse d'environ
qurnze mfHe hommes.
Le corps d'Oudinot passa te pre-
mier, et rejeta la division TehapHtz
dans la direction de Borissof. Le 38
au ntatin , ii ne restart plus sur la rive
gaudie du fleuve que fa division 6^
rard et cefle de Parthouneaux , qui de-
vaient proteger les ponts et tftRtoumer
fattentioa deTdntchagof. Ge g^n^ral
HUSSIE.
479
aumt pu faoilement inqaHier la r^
tnfte des Fraofm; il en avait ^t^ em*
pisM par les ordras de Kootousof , qui
pcsta loogtempt persuade que Napo-
leon yoaliiit roavrir un passage vers
Minsk. Cependant ramiral , mieuz in^
truit de la marebe de remjpereur^ se
mit en devoir de reprendre PoflfoMive.
Piatof et Wittgenstein se joignirent
Ibieotot aux fiwees qui occopaJentVio^
tor, qai eut ia gloire de ne pas se lats-
9tf entamer. Paithouaeaux , oern6
afee toute sa division , s'teit vn forc6
de se rendre; entre Bcmssof et le
fleuve s*^tait prcssee la foule des non
oombattants ; fes bagages , les voitures
charf^ de blesste, tout offrait sur
oe point Ftmage do dtordre et de la
ennfosi^Hi. L'artillerie ennemie fou-
droya longtemps cette masse immo-
bile qui n'avaitphismtoeassezd^^Qer-
eie pour fuur ; mais, snr Taotre rivage ,
ISty aoutint gloriensement Thonneur
de rarm^fran^aise; aprte one lutte
loogue et meurtri^e, le mar^chal or-
doBoe ime attaque g^ndrale ; lea Ruases
plienft sous ce dernier ^ortt et lais*
sent aox Fran^ le cbamp de bataiJle
joBdi6 de roorta. Tchitdia^f 6tait
vaiaeu, et taisBait dtennais a I'en-
nemi le cbowi Hbre jusqa'ii Vilna et
an Nitoen.
« Lb mat, qui vea»t de laet^ fin
aux combats wax lea deux lives de ia
BMxioat ittt una des plus cmeUes
denuis le depart de Moseou. Le fivoid
veaoaUait de violence; le vent du
Qord, pliia Apre, fouettait une neige
^paiase sur ies bommea S90$ abris et
Sana fens. Les baga^ea entasaea Brte.
des pants cq obstcwent toivoiirs I'en-
ti^; longtenpa <yng4B sur q» ter*
lain veaaenr^y leseanons daWittgeiH
stein ravaieait labour^ dans tous
las sens » 1ft ioncbant das debris do
plnsiaiirs aoifiiers de mtures et de
ebariola eulbut^i sur des raoneeaux
da eadftvrea. Burant es UmiM eooK
bat, phis 4ti douxe mUe Bcrsonaes,
boiMm HfainiBes^ parsAi Ifisquels on.
rwsjumilit des famiMes enliiret avee
leuit en&nta , s^^taienl.vainemeDt ef«
isnis, en mpliAttnt ies airs de l^qrs
bwMitables^ ds a*ouvrir le pas^
sage des ponts ; mais » depuis que Par-
ttllerie se taisait, tomo^ dane un
morae accablement, ils restaient iin-
mobiles et transis; insensibles a toutes
les affections, on ne les entendait plus
s*appeler rteiproquement ; ehacon , r^
signe k ne plus ae d^fendro oontre la
mort , semblait avoir cess< de prendre
interit k la vie de ses amis, de ses pa-
vents ; un silence affreux 8ooe6dait aux
accents du d^sespoir,
« A neuf heures dn soir, le g^n^ral
£bl6 6tant parvenu k d^encombrer
le passage , les deux divisions de Vic-
tor travers^rent la B^r^ina; il ne
rests qu'une arriere-garde devant ren*
nemi pour masquer ce mouvement.
L*artiuerie suivit; et tout ce corps
ayant attaint la rive droite un pen
apr^ minuit, les deux ^nts dcmeu-
rerent libres et d'un acces £icile. Les
non oombattants pouvaient alors pas*
ser k leur tour; ils furent avertis k
dlverses reprises; on les pressa de
profiter du peu de moments qui leur
restaient encore. Mais le temps et lea
movens manmiaient pour transporter
leaiMgageset&ire suivre les chariots:
la plupart de ces malbeureux avaient
lii toute leur fortune; d*autres> trop
afifatf)lis par la fatigue ou ies makidm ,
s'effravaient a Tidee de se mettre en
route a pied y au nailieu d'une nuit si
froide et si obscure* Tous refuserent
de mareber, attendant le jour, qooi
qu'il pdt arriver.
« En vain , pour les engager a par-
tir, le general £bl^ et le mamhariui-
mtoe, apres avoir employe la priere
et jusqnT^ la menace, mrent br^ler
qnelques-nnes de ces voitures, dont
rabaadon semblait leur codter tant
de regrets ; ils ne s*en ^mureat pas ;
rien ne paraissait pouvoir les tirer de
leur sombre apatbie. Aux approcbes
du jour, rarriere-^rde se retira, et
le bruit se r^pandit parmi eux qu*on
aliait detruire les ponts. Tout k coup
la foule se ranime , elle aocourt et sa
presse comme la veille sur le rivage;
Is d^sordre produit encore Tencom-
brament; tout s'arr^; les cris, les
querelles recomroenceiit avec fureur.
Le genial £bl^ devait mettre le feu
4M
UUNIVERS.
aux pottts k huit heures; il attend
encore; mais le jour est venu, I'en-
nemi va parattre , il s*agit du salut de
rarmte... A hiiit heures et demie,
une ^paisse fum^ obscurcit Fair pr^
de la rive droite; ies cris redouUent;
peu apr^ la flamme s'di^e.... le pas-
sage est ferm^.
« On vit alors un spectacle eflfroya-
Ue : de ces milliers d iofortunds dont
la derni^re esp^rance vient de s'^va-
nouir, Ies uns s'efforcent de se frayer
un chemin a travers Ies flammes ; ils
se cramponnent aux chevalets, aux
planches h demi consumes , et p^ris-
sent d'un supplice horrible ; d'autres
se hasardent sur la glace encore mal
affermie; die s*entr*ouvre sous leurs
pas , ils sont engloutis !... »
La division Lolson, forte de dix
mille hommes de troupes fratches, ve-
nait d'arriver k Yilna; elle re^ut
Tordre de faciliter a Tarm^e Ies ap-
proches de cette ville. G'est de Male*
deczno , ou I'empereur arriva le 3 d^*
oembre, qu*il dicta ce 29' bulletin , ou
la simple v^rit^ ddpassa Ies craintes g6-
n^rales. ASmorgoni, Napolton assem-
bia lea chefe, confia lecommandement
derann^liMurat, et partit imm^iate-
ment pour Paris : entre Ormiana et
Yilna , il faiUit torober entre Ies mains
du partisan Seslavin; il rentra aux
Tuimles le 19 k minuit.
La rigueur du froid acheva la d^
sorganisation de Tarm^ ; le 7 , le ther-
mom^tre descendit k 38 degr^ au-des-
sous de la glace. lies plus robustes
marehaient en avant des groupes , car
toute trace de discipline avait disparu.
Le froid saisissait d'abord Ies extr^
niit^: la chaleur vitale, concentre
dans Ies organes essentiels que la na-
toreapr^munisavectantdeprevoyance,
causait momentan^ment un bien-dtre
trompeur; le soldat se laissait alter k
une torpeur que suivait bient6t la
mort. Les plus jeones mouraient par
milliers: un grand nombre de ecus
dont le corps endurei aux fatigues
pouvait roister plus longtenips , trou-
▼ant plus facile de mourir (pt de vivre ,
se couchaient sur la neige et refu-
saient de se reliever. Le feu des bivacs,
dont ces malheureux B*approchaient
sans precaution , coinmuniqaait la gan-
Srene aux parties gelto ; et Tinflaenoe
'une chaleur extrtoie, comme celle
d'un froid exoessif , avait des r^ltats
non moins funestes. Un reste d'ali-
ment, quelques gouttes d'eau*de-vje
^taient alors des ressources pr^cieuses ;
la loi de conservation avait absorb^
tous les autres sentiments; Tami
fuyait son ami pour d^vorer seal les
mis^ables ressources que lui offrait
le basard : enOn rhorrible supplice de
la faim en poussa quelques -uns k se
nourrir de chair humaine.
Gependant la vuede I'ennemi ranpe-
lait comme instinctivement autour des
aigles les d^plorables debrisdelagraade
arm^. Murat, qui aimait la gloire
sur un grand th^tre , perdit son eoer-
gie; Ney, toujours le m6me, restait
le dernier sur le champ de bataille;
c'6tait la providence de Tarridre-garde;
il £illut6vacuer Yilna, que menafaient
toutes les forces de rarmde russe.
L'arm^ debandde fut obli»^ d'aban-
dooner sur la colline de Ponari les
Equipages de Napoleon, ies caissons
du trdsbr , les fourgons et le peu d*ar-
tillerie qui restait. Les tralneun et les
bless^ , rest^ en grand nombie a Vii*
na , furent cruelleraent traits par las
Cosaques ; les juift , non moins avides
et aussi inhumains , assassioaieot Iss
Francis dans les maisons. et, aprte
les avoir d^pouill^, jetaient leurs corp
par les fenfires. Les malades, entaotf
dans les hdpitaux , moimirait sans
secours. Un grand nomlnre de prison-
niers furent oirig^ dans rinterieur i
mais bien peu parvinrent k leur desti-
nation. Les ofneiers russes essayaleat
en vain de r^mer les effets d*oM
haine que Ton avait inspire an peo^<
Les soidats ne ooncevaient pas qa'oo
pdt ^rgner des hommes ^ les sei*
^eurs et les pr^tres aocusaientd'avoff
incendt^ Moaoou. Quand la premidre
exasp^ation tot pame , le sort des
prisonniers i'ameliora, et dans btfa-
ooup d*endroit8 its trouvte«nt une pro-
tection gtodreuse. ^
Les Cosaques de Platof ayant te«m
Rowno, il fallut encore ^vaeuer cetis
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RUSSIE.
48i
ptott el 88 fvayer ia route i'^p^ i la
main. Tchitdiagof , Wittgenstein, et
Koutcmsof qui les soirait, suspen-
dirent leur maicfae k Vilna; I'hiver
triomphait des Rosses eux-mSmes. Les
difimnts corps de I'amo^e francaise
se distribu^ent sur la ligne de la vis-
tok. Le roi de Nanles esprit que le
corps de Haodonald , auquel il avait
donne Tordre de se replier sur Tilsitt,
diangerait sous peu la face des affaires :
mais la trahison du g^n^ral prussien
Torek Tint oonsommer lesid^stres de
cette campagne. Le marechal, apres
aToir battu ravant^gaorde de Wittgen-
stein, ^it entr6 k Tilsitt, ou il s'ar*
r^ pour donner aux Prussiens le
temps de le rejoindre : aprte avoir
peran plusieurs tours, il se determina
a se porter sur la Pregel. Ce fut alors
qu*il re^t d'Torck la lettre suivante,
que nous rapportons pour montrer
combten les alliances qui ne resultent
point d'int6r#ts conamuns reposent
sur des bases fragiles.
Tanrogen. 1* 3o dinmohn iSts.
« Monseigneur,
• Apr^ des marcbes tres-p^nibles,
il De m'a pas 6t6 possible de les conti-
noer sans ^re entani^ sur mes flancs
et sur mes derrieres; c*est ce qui a
retarde la jonctaon avec Votre Excel-
lence; et, devant opter entre I'alterna-
tive de perdre la plus srande partie de
mes troupes et tout le materiel qui
seal assnrait ma subsistance, ou de
sauver le tout , j*ai cm de mon devoir
de iiaiire one convention par laquelle le
rassemblement des troupes prussiennes
doit avoir lieu dans une partie de la
Prusse orientale qui se trouve, par
la retraite de Tarm^ fraofaise, an
ponvoir de rarm6e russe.
«Les troupes prussiennes forme-
ront on corps neutre et ne se per-
mettront pas d'hostilit^s envers aucun
parti; les ^v^nements k venir, suite
des n^ociations qui doivent avoir lieu
entre les puissances bellig^rantes , d^
cideront sur leur sort futur.
« Je m*empresse d*informer Votre
Excellence d^une d-marche a laquelle
j'ai ^te forc^ par des cireonstances
majeures.
31* Ziyroison. ( Russte.) T. ii.
« Quelque jugement que le moode
portera de ma conduite, j'en suls peu
inquiet. Le devoir envers mes troupes
et la reflexion la plus mAre me la
dictent : les motifis les plus purs, quelles
quesoient les apparences, me guident;
En vous faisant, monseigneur, cettr-
declaration , je m'acquitte des obliga«>
tions envers vous , et vous prie d'agreer
Tassurance du profond respect, etc,
etc.
« Le lieutenant g^n^ral Yobck. •
La defection du g^n^ral Yorck con-
traignit Murat a se replier sur Posen.
Bientdt Maodonald vint se r^ugier k
Dantzick. Schwartzemberg , menag^
par les Russes dont il n'inquietait
plus les mouvements , ^tablit ses can-
tonnements sur la limite du grand-
duebede Varsovie, et Reynier, tou-
jours poursuivi par Sacken, prit
position a Wengrod.
L'arm^ d'invasion ^tait r^uite au
quart; la Russie ^tait sauvee, et le
contre - coup de cette erande ration
allait bientot 6branler l*edifice mal af-
£ermi de la puissance deNapol^n. Les
rois de la vieille Europe mesuraient
leurs esp^rances k T^tenoue du d^sastre
imperial. Cependantlesoldat-ero|)ereur
mena^ait encore ; son g^ie n*avait rien
perdu de sa port6e et de sa vigueur;
mais le prestige de ses armes ^tait
d^truit ; TAngieterre reprenait son
ascendant, et la Russie, comprenant
tons les avantages de sa nouvetle posi-
tion , renouait en silence les fils rom-
pus de la politique de Pierre I*''' et de
Gatberioe II.
Nous avons cm devoir donner quel-
3 lies d^veloppements a cette campagne
e 1812 , dont les r^ultats ont cnang^
la face du monde ; les ev^nements qui
ont suivi cffrent sansdoute une baute
signification historique, mais ils ne
sont plus que Texpression d'une resis-
tance b^roique, et ils manquent de
ce caractere g^n^rateur, de cette force
d*initiative qui marqudrent ia p^iode
que nous venons de francbir.
(1813.) L*ann^ 1813 s'ouvrait pour
la France sous les plus sinistres
auspices. Lord Walpole n^ociait k
Vienne, et ^braniait, sans trop de
482
L'UNIVERS.
peine, la fiMit^ du beau- pdrede Na-
poleon par des promesses magnillques.
Plus TAutriche ^it disposA d profit
ter de ces offres, plus il itii importail
d'endonnir les soupoons du cabinet des
Tuileries; le g^6ra'l Bubna fut exp^*-
dl^ de Vienne a Paris, porteardespro*
testations les motns ^uiTogues. La
mediation de I' Autriche entre la France
et la Russie fut accepts au moment
m^meou Tattitude des Prussieos et de
Schwartzeniberg ne laissait plus au-
can doute sur leur determination ul-
t^rieure. Eugene, que le depart de
Murat pour Naples laissait mattre de
dinger la retraite , ^vacua suecessiTe-
nient Posen et Berlin , vivement press^
par Wintzingerode et Wittgenstein.
La Russie, sans d^liner la mMia-
tion de TAutriche ^ ne iroulait traiter
que du consentement de I'Angleterre,
et demandait des garanties. Dans
toutes les n^ociations de oette epo-
que, M. de Metternich d^plova une
rare habiiet6 , et les ministree francais
ftirent compl^tement sa dupe. 'Au
reste, les preuves authentiques d'une
inteUigence formelle entre liss cabinets
de Vfenne , de Berlin et de P^tenbomrg
sent d^ormais acquSses di I'bistoire;
on les trouve dans nne lettre de Tern-
pereur d* Autriche au roi de Pniase.
Gette pi^e , dat^ du mois de decern-
bre 1 81 a , est rapports dans le Recueii
de pieces cfficieUes^ par Schoeil.
Oependant les oons^quenoes de la
ruction se d^yeloppaient avec rapi-
dity-, M. de Nessenrede ooncluait itn
trait!§ a^ec la Prusse; bientdt FAl-
lemagne entidre se souleva au nom de
oes idees d'ind^pendamee et de ces prin-
cipes de libert6 dont la revolution
fran^aSse etait le sj/inbole. En Alle^
maefte, oomme na^dre en France^
ces mes et ces prinapes trtompherent ;
ainsi tour h lour Taincus et vamqueurs
teroofgn^ntde Tinfaillibilite et de la
puissanoe du systdme regeneratemr.
Par le traits de KalisoE , Alexandre
s'engageail ft ne pas d^postr les annei
fN|u*a oe que la Prosse eAt reoouvre
terntoire qu'eMe posaedait avantla
guerre del 9M;
Au m^a de mars, le traits deStock-
hohn mit les forces de la SuMe, d^
detacb^e de la France, en mesure oe
prendre ft la lutte une coopdration ac-
tive ; r Angleterre c^da aux Su^dois la
Guadeloupe, et la possession de la
Norw^ge devait etre le prix de leors
services fiiturs.
Gependant Bliicher et Wintxinge*
rode vinrent prendre position devant
Dresde; Wittgenstein et Koutousof
s'avan^ient en meme tenips, et me-
na^dent Davoost du poids de leurs
forces combine^. Napol6on , parti de
Saint-Cloud le 16 avnl , etait dans les
plaines de Lutaen le 1" de mat Gette
victoire, que suivireat bient^t les
journees de Bautzen et de Wurtchen ,
semblait avoir r6ooncilie la fortune
avec I'empereiur; rarmistioe de Pless*
witz donna anx allies le tenips de re-
cevoir de nombreux renforts, et ar-
retareian de Tarmde vidorieuse. D*ub
autre cdte, T Autriche, dont TatUtude
hostile n'etait plus un mystftre, orgs-
nisait ses armies et ses ressources,
et n*en autorisait pas moins ses agents
diplomatiques ft garder tous les dehors
de Taiiiance prtoistante. Le oongres
de Prague n^^tait qu*on artifice dila-
toire; il fut bientdt rompu malgre
Napdton , et probaUement ft cause de
son empressement ft traiter; ft cette
occasion, 1' Autriche leva le masque:
« Les alli^ et T Autriche, annon^t-
elle dans sa d^laratioo , ^taieot deja
r6unis de pri&cipes , avant fue les tiai<
t^ eossent d^lar^ leur union. » Gette
rupture permettait aux allies de pren-
dre i'oflensivei et, en cooceatraDt
ieun Ibrces «n Bohtoe, de toumer
la base des op^ations de Tarm^ m^
caise qui s*appuyaift sur ies pl^ J7
rOde? et de rjElbe, L'or de VI^x^'
tare etait le nerf de ces immeps^
mouvaments; eHe paya ft la B**^?^*:
ft la Pniase deux millions de iivres
sterling pour rentiretien de leurs 9^
mto; et, ind^ndamment de era
avanoes , on er& pour cinji ""J!"^
sterling d*un papier-monnaie * dii ^
oent-fiSitottif, et qui fat gajantj P^
les trois piiisaaAoes. Outre ces sUpu-
Jatioiis, ie gouvem^ent ai^Lli^
r^rvaitde fiaposer des forces navaie»
RUSSiE.
4aa
de la Russie; e&in les partus oontrao-
tasteB s'engp^ient ^ ne pas n^ocier
aree rennemi oommun.
AlezandFe, Ff^ddric, Giiiliaiime et
Reroadotte a'^taient rdunis h Trachen^
ber| ea Silvio , oik aa trouTaient ^-
leuMDtlea piidiiipoteBtiaivas d'Autriehe
et d'ADgletem, pour y ooneertor uq
piand*operatioD8 militaires. Les forces
drsponiolaa des alli^ 8*^?aient alors
k huit cent iniUe homraas. La bataille
de Dr«sde , gagnte par Napoleoa , fot
sapglante et complete ; un ooulet fran-
Sls atleignit Moreau , et lui sauva la
ate de p^odtrer, h la suite de T^tran-
^er, josqo'au oceor de son pays natal,
li est diffieile de decider quels furent
les motife qui le datcrmineretit a quit-
ter sa retraite dans le nouveau monde
pour veoir SEicttre au s^viee des alli^
son eaie loogteraps inactive. Se laissa-
t-ii aeduire par respoir d*eclipser la
gloire de son aacien rival , ou n'eut*il
q|ue la faiblesse de c^er aux s^uc-
tions d* Alexandre? 11 tomba roortalle-
ment firapp^ k c6t6 mime de ce prince
qu'il aecompagnait aur le champ de
bataille, et a qui il communiquait en
ce moneiit qy^ues observations.
Transports dans la p^ite vilie de
Laha eABoUnie, ce ^nj^ral siipporta
avee fensetS ramautation de9 deux
jamibea que le boulet lui av^at fracas-
a^es. II eut encore (a force d'ecrire
qnelqitfs ligaesit Tenipereiir Alei;andre,
et niMvut sans pouvoif les achever.
Ce priaee lui avail 6i6 ^us que la vie :
il avait comprooiis sa ^oire ; profon*
d^meat itm 4^ cetie fin providen tielle ,
il e<s»?it h la veuve de Moreau une
lettRe ffkSm d'^ards (^ de sensibility,
et lui asaigna depuis une pension eon-
(QapMda«fc Oodiiiolt avait lais$S au
^rpAse royal le teinps 4e coneentror
ses liDtffies eotre Sp^ndau et Berlin^ II
liiltettu k GDosa-Baereo. « II ^oua ,
dit H^ de B<Hitourli0 (Histoire de la
€Bap?9ne4a isia), paroe que ses dia-
BQsitiim ^eut en oppo9itioa aveip
la nm ffijneipea 4» 1 art. La ^ireo-
tioQ durergepte cpie, de Trebbin, il
dovaa a em trois cot^ sur Biao)m-
jfcMi^Bgaa JPoBtcp et Ahrendorf, ne
pouvait manquer de les faire battre en
detail. *
Un retard semblable occasionna
rSdiec <pe le corps du due de Tarente
essuya sur la Katzbach, et Tardeur
inoonsidSrte de Vandamme eut des
suites encore plus d^astreuses. Em-
pruntons la relation du eolone) Bou-
tourlin.
«A Tapproche de Vandamme, le
•dSpdt du grand quartier ^enSral ajle-
mand et celui du corps diplomatique,
les cabinets des souverains allies et
une foule de grands personnages qui
s*Staient entass^ k Toeplitz, avaient
1>ris la ftiite , les uns du cot^ de Dirtcb ,
es autres du cot^ de Labn. Dej^ Ta-
vant-garde francaise n'Stait plus qu'a
une demi-lieue, forsaue Tepnerai , ces-
sant tout h coup de plier , avait oppose
la plus vigoureuse r^istance.
« Le comte Osterroann , comman-
dant les grenadiers de la garde russe,
s*Stait place k travers le chemin. II
avait ordre d*arr^ter Vandamme k tout
prix. L'arm^edes alli^ descendait alors
sur Tceplitz par tous les ravins de la
montagne. Sa position etait critique.
Si Vandamme arrivait avant elle, le
sort de pjusieurs colonnes etait com-
promis ; mais quelques heures de delai
pouvaient tout sauver.Ostermann etses
grenadiers avaient compris ce que le
salut commun exiaeait d*eux. Ifs s'e-
taient montr^ oignes d'occuper le
poste du p^il , et le vallon de Toeplitz
kalt devenu leurs Thermopyles. L^lite
de la ga^e russe s'y Stait fait tuer :
Ostermann avait eu un bras emportS;
mais Vandamme n*avait pu forcer le
passage.
« dependant Vandamme, une fois
engagi^, avait appele succe^sivemeot
toutes ses forces a son secours. Les
sommets de Petersvald avaient 6t6
d^arnis , et le premier corps avait fini
par se trouver tout entier entre Kulm
et Toeplitz , au pied du Geyersberg. II
itait trop tard. Ostermann avait gagnS
le temps n^essaire ; d^j^ Barclay de
Tolly Stait accouru k son aide avec les
premieres colonnes arrivSes. Schwart-
^omberg n'avait pas tard^ k lui en en-
voyer de nouvelles ; Vaodamme , forc6
7.
464
L'UNIVERS.
de se retirer sur Kutm k 39 au soir,
avait pris position entre lea Tiliagea
de Karwitz et de Pisten.
« Son entreprise sar Toeplitz ^ait
manqu^ ; il pouvait y renoncer et pro-
fiter encore de la nuit pour remonter
avec toates ses troupes a Peters waid.
Le oonseil lui en avait ^t^ donn^;
mais sa malheureuse ^oile Favait em-
port^ : il s'^tait d6cid^ a se maintenir
dans la position ou*il venait de pren- *
dre. Peut-^tre devait-il croire que
Tarm^e ennemie , poursuivie pendant
guatre iours de suite dans les vall^
mhospitali^res de PErtzebiree , ne
pourrait en sortir que dans le plus
grand d^sordre; il devait du moins
s^attendre h voir les oolonnes fran-
^ises, non moins actives que les
vaincus, arriver assez tdt sur leurs
pas pour les emp^er de se rallier
contre lui. H n*en a pas eU. ainsi.
« Le 30 au matin , ce n*est pas sett-
lement Tennemi de la veille , ce sont
les troupes de Sclivartzembere et de
Barclay de Tolly qui sont tomb^es en
bon ordre sur Vandamme. On avait
tourn^ sa gauche; d*autres colonnes
Tavaient d6bord^ pour luicouper toule
retraite; il s'^tait vu environne par
plus de quatre-vingt mille hommes:
pas un de ses quinze miilecompagnons
ne semblait devoir echapper ; mais I'in-
tr^pidit^ supples k tout : nos Francais
avaient lini par triompher du nomore
et des dangers. Vandamme, apres
avoir soutenu , i)endant toute la mati-
ng du 30<mai), les efforts de cette
nu6e d'ennemis , -se retirait sans ^tre
entam^ , ^vacuait Rulm , et se dispo-
sait, vers deux heures, i remonter h
sa premiere position , lorsque tout k
coup un nouvel ennemi , apparaissant
sur la montagne et saisissant tous les
deGl^s en arriere, lui avait barr^le
chemin de Peterswald.
« Ce nouvel ennemi , c'^tait rarm6e
prussienne de Kleist, ^chapjpant au
mar6chal Saint -Cyr, ddi)oucnant par
les bois de Schdnwald , se glissant h
travers le vallon de Telnitz ,lieu reuse
d'avoir ainsi toum^ la position de Pe-
terswald, et se hdtant de descendre
sur la chauss^ de Prague , avec tout
rempressement d'une foule qui
sauve de sa perte par un passage
inesp^r^.
« Si Vandamme se fdt trouv^ a Pe-
terswald , Krleist et tous ses Pnissiens
^taient pris. MaisKJeist mattre de cette
hauteur, au pied de laqueiie 6tait Van-
damme , c*^tait ce dernier qui devait
^re accabl^. Cependant les Prussiens,
h la vue des Franqais qui remontaient
h leur rencontre, s'etaient crus de
nouveau perdus : ils avaient h^i^ un
moment. Les Francais, au contraire,
apercevant les Pnissiens, s'^taient
aussit^t 61anc^s sur eux : Corbineau
etait k leur t^te. Rien n'avait pu sou-
tenir leur choc. Passant sur le corps
de I'avant -garde ennemie , ils avaient
tout culbute, tout entratn^; et,pro-
dige de fureur aussi bien que (Tau*
dace , ils avaient enlev6 aux JPrussiens
jusqu'^ leur artillerie. Cependant les
Pnissiens , refoul^s sur eux - m^es,
s'^taient ralli^ , et la m^lee la plus
6pouvantable avait recommence.
"Qu*on se figure une chauss^
etroite, encaiss^e dans le flanc des
montagnes , et , dans ce creux , deux
colonnes , dont Tune monte et Tautre
descend , qai se rencontrent , s'arr^nt
d'abord par leur masse , se foulent , se
brisent au second choc, et finissent
par se faire un passage Tune k travers
i*autre. La confusion et le tumulte
sont au comble ; chacun combat corps
a corps, maisce n'cst plus pour raincre ,
c'estpour passer. On se culbute plnt6t
qu*on ne se tue : g6n6raux , ofBaers et
soldats, tout est p^le-n^le. Ici Van-
damme est entratn^ par les Pnissiens,
]k c'est EJeist dont les Franqais vten*
nent de se saisir : ils sont pris et re-
pris; KJeist est enfin d^livi^ par lea
siens : on assurait, dans les premiers
moments, que Kleist et Vandamme
^ient resteB morts dans la foule.
« Tous ceux qui ont pu se di^ager
du d^l6 de la route, et se jeter dans
les rochers et les bois voisins, par*
viennent k s'^apper des premiers.
Les Pnissiens courent se rallier a Ta-
vant-garde de Barcla}r de Tolly: les
Francais arrivent k Lid!)enau , ou ils
sont recueillis par les troupes da huk
EUSSIK.
485
TidM Saint-Gifr. BmktAt tos seotien
de la moo^agne se remplissent de sol-
dats disperse, qai, semblabies aux
ooursiers d6inont^ dans uii choc de
cavaterie, n'ont rien de plus press^
Se de retoumer au camp. Le g€aMi
Hrblneau , qui commaiidait la cavale-
rie de Vandamme , arriye jusqa'ik Teiu-
pereor , dont il est aide de camp. Gou-
fert desangennemi et bless^ lui-m^rae ,
il est encore arm^ d*un sabre prussien
qoe , dans la m^lte , il a ^aog^ contre
le sien. Les gtodraux Dumonceaa et
PhOippon soot ^alement sauv^ ; mais
le g^ral Heimrad , oui venait de pas-
ser da service de Bade a celui de France,
est reste parmi les morts. Le general
Gayotj et le g^6ral Haxo que ses
Uessures avaient fore6 de rester a
Kolm , sont prisonniers. Quant au g^
wMt Vandamme , dont Tandace a m
a malheureuse, il n'estjpas tu6; les
alii^ le traf nent en triompne k Prague :
cependant on apprend oue la plus
graade partie du corps a*arm^ des
aiii^ , deseendue par les ra?ins de la
montagne, se raliie h Pvma. Trente
pieces de canon et plus de trois cents
voftures, caissons a*^ipage et d*ar-
titterie , sont perdus pour nous.
« Ainai non-seulement la ^rande ar-
va6e eonemie est sauv^, mats die Test
par one vietoire, et ce sont des tro-
pbte qa'elle rapporte de sa d6faite de
iJresiie*
« Napolten recueille firoidement le
detail de ses pertes. Ce qu'il ne peut
concevoir , c'est que Vandamme se soit
laosse entralner en Bob^me. j4 une ar-
mee qui fiat, repcte-t-il , U/autfidre
unpont dor au une barrUre do/der.
Or, f^andamme ne pouvaUpas 4tre
ceUe barri^e cTacier. Puis se tour-
nant vers le major general : Jurkms-
nout done ecrit quelque chose qui aU
jm bH inspirer cette fatale pensief
BerMer, allez cherchervos minutes;
FaSn, voyons les miennes; virifions
tout ce oue nous avons icrU. Le ma-
jor ^erat apporte aussitdt son Hvre
tf'ordres ; le secretaire du cabinet re-
SRsente ses minutes : on relit toutes
Hslettres, et I'on n'y trouve rien qui
vtpQ autoriser le malheureux g^n^ral
h quitter sa position de Peterswald. »
L'empereur se contenta de dire au
due de Bassano : Eh bien t voUd la
auerre: bien haut le matin, et bien
0€U le soir.
Nous avons cite textuellement le
colonel Boutourlin , dont les m^moires
militaires ofirent le double m^rite du
talent et de Timpartialite , parce que
le d^sastre de Tceplitz a prepare celui
de Leipzig et decide de lacampagne de
1818. La defection du general Wr^de,
et I'ezplosion prematuree d'un pont
sur lequel Tarmee allait franchi'r TElbe,
furent les causes de la defaite de Leipzig
(Memotres ecrits k Sainte-Heiene).
Les places fortes de rAllemagne
tonberent sucoessivement au pouvoir
des allies, qui s'avancerent jusque
sur les bords du Rhin. De\k les Fran-
Siis s'etaient vus forces d'evacuer la
ollande, tandis qu*aa midi Soult,
Eresse par Wellington , repassait la
Eidassoa. *
Cependant, par la declaration de
Francfort , les allies annon^ient quils
ne faisaient ootnt la guerre a la France ,
mais k Napoleon. La paix, tour k tour
demandee , offerte et refusee , variait
tellement dans ses bases, qu*il etait
aise de reconnattre combien les deux
partis etaient peu disposes k Tetablir
sur des elements durables. Les allies
voulaient reduire Napoleon k Timpos-
sibilite de les inquieter k Tavenir;
I'empereur des Fran^ais ne pouvait
envisager la i)alx que comme une treve
qui edt fourni k son genie de nouvelles
ressources pour recommencer la lutte
avec moins de desavantage. Ces con-
siderations determinerent les allies k
s*arreter k un plan dont les conse-
quences extremes trahissaient Tinten-
tion de ne plus traiter.
« II s'agissait desormais de trans-
porter le theatre de la guerre sur la
rive gauche du Rhin, et d'arracher k
la F)*ance les provinces dont la posses-
sion lui permettait sans cesse de trou-
bler rAllemagne ou de menacer I'in-
dependance de la HoUande... Ce fut
alors au*k la place du plan convenu a
Kaliscn , le gouvornement britannique
proposa Texecution de celui que Pitt
4d6
LUWIVERS.
avait trac^ en 1806. On oofttknen^
neanrooins , k oette ^poque , ^ s'aper-
cevoir que oe plan memo, ouvrage
d'un g^e sublime, ^tait inooni|>l«t,
en ce que , sanctionnant Tusurpation ,
jl pr^parait de loin la chute des tr^ne s,
eh mmant la base sur laduelle ils sont
eonstruits; on entrevit la possibilite
d'effacer une tadie , et de donner ainsi
de la solidiU au nouvei Mifioe poli-
tique qu'on se proposait d'^lever. Mon-
sieur, Arere du roi, d^baraua le 37
Janvier en Holt&nde , muni des pteins
Souvoirs du roi de France , et se ren-
it dU quartier g^n^tral des monarques
allies... (Schoell). »
La campagne de 1814 mit de nou-
Teau dans tout son jour le g^nte guer-
rier de Napoleon; les victoires de
Champ -Aubert, de Montmirall, de
Vauchamp , remportto avec les d^ris
d'une anme contie des forees bien
sup<§rieuT6iB , auraient peut-dtre sauv^
la France imp^riale si toute la popula-
tion edt M anim6e du m£me esprit
3ue Farm^. Les troupes allito , r6-
uites h cent vingt mille homines , se
trou vaient couples de la ligne du Rhin ,
oresste entre la capltale et les troupes
franoaises victorieuses : mais, ii raut
le dire, la France ^tait ^is^, et
n*envisageait un triomphe momentan^
iquie eomme le prelude de nouveauz
sacrifices. Dans cet ^tat de choses, les
partisans de la famille des Bourbons ,
qui avaient renou^ toutes ieurs in-
trigues , ne n^ligeaient rien pour r6-
venler d'aneiennes sympathies. La g6-
rf^ation nouvelle se doutait h peine
•u*il existAt une dynastie dont les
titres h^nklitaires pussent ^re mis en
l^lance avec les droits de T^p^; mais
les nobles, que Napoi6on avait cm rat-
tacher h son systeme par des emplois
et d^ favenrs, r^pandaient d^j^ le
bruit que le but des monarques ooali-
s^ 6tait de rendre k la France ses
princes l^times.
Cependant Napolton venai t d'essujrer
im tcbtc k la Rothi^re^ les n^^ocia-
tions de ChdCillon se poursuivireot ,
mais sans qu*on en eaper/lt d'accom-
modement.
Les sotifverains confi6der^s deman-
daient mt Napol^n reboiiott Ji la to-
tality des acquisitions faitas par la
France depuis le oomnencement de
1799 , et k toute influence ooastitu-
tionnelle horii de ses ancieones li-
mites. Le refus derait tee pr^m d'a-
▼ance. Aptitedefr^entes alternatives
de suooes et de revers, la pr^ooe
d*un prince de la maison de Bourbon
sur le sol de la France apprit k I'em-
pereur que ce n*toit pas seulement
centre les armes de 1 stranger qu'il
•avait k lutter , et que les dissentiments
civUs rendraieot sa tkbt plus pteible
encore. U s'^tait vainement flatty d'a-
mener le prince de Schwartsemberg k
one bataiile d^isive; des Ion, pour
couvrir Paris , il se vit forc^ de dias^
miner ses forces. La capitulation de
Soissons assura la communication de
Farmfe dea alii^ , dite du Nord , et de
eelle de Sil^e que oommandait Blu-
cher. Ge general marcha sur la capitale
avec cent mttle hommes. £n m^e
ten»s , par le traits de Chaumont , les
allies s^engageaient k ne d^ser les
armes qu*apr^ TaoCeptation definitive
de leur ultimatum. Peu de jours apr^,
le oongr^ de Ch^tillon fut rompu , et
Ton apprit, a Paris, aue le duGd*An-
Souldme etait k Boroeaux. Le comte
'Artois se trouvait dej^ k Vesoul.
K Aprte le giorieux combat d^Ards-
Sur-Aube , Napoleon manoeuvra encore
avec une grande habilet^ pour attirer
les ennemis loin de Paris, en se portant
BUT la haute Marne, comme s*il tdX
persists dans le projet de couper Ieurs
conmMmications avec le Rhm. Mais
alors il 6tait trop faible, surtout en
eavalerie. L'ennemi ne fut point dupe
dp ce stratag^e tardif ; il savait la
force de Tempereur aussi bien que lui-
m§me , et connaissait mieux que lui
les faibles dispositions de defense qui
avaient 6t6 prises k Paris. Laissant
done les Franfais les attendre sur la
haute Marne, et d^rrasses de Mor-
tier et de Marmont , qui avaient ref u
Tordre de quitter les bords de TAisne
pour se reunir k Tempereur, Bludier
et Bulow marcbent sur la capitale.
«Les marecliaux Mortier et Mar-
mont , rencontres k la Fcrt^-Chanipe-
RUSSiE.
m
iMMK rar dfs 4»rM MHidltrein de cava-
Iflric lie rarm^ de Silifiaie, ae purent
flsrreiiir k joindra reuipereur, et
RireDt an owtnire batlus et i^et^s
aar Fans.
«NapoMoD,|KmniiHri, haicel^ par
da iniAe hoimnes de eavalerie ruaee ,
arriTait k Saint-Dizier, croyant en-
tratoer renaemi fur les tracea, lora-
gu*il appiit qiie toate la maaae des
forees aliite ^tait aous lea mura de
Pane. II aoogea li r^trofprader; mais
cette fiiussB ap<§ealatioa avait d^d^ le
aoTt de la campagne. »
Paria, aprte ooe dtfeose de quel-
ques heures, capitala; lea ouvriera
avaieot demandii dea amies et n'a-
vaieat pa en obteoir. Le due de Vi-
eeoee ooarat k Paris pour aaapendre
cette capitulatkm; il ^tait trop tard*..
Napolmi ae retira h FontaiadMeao.
Nous avoaa dd aoiTre, quoiqoe soia-
mairemeot, lea ^v^nemeats memo-
rables qui prfc^d^nt rabdieatioo de
reropereur ; dans ces annto si pleiaea,
Je role de i'bistorien se borne k celui
d^un compUateur; embarrass^ par
Tabondance des sources, ce nest
qa'avec peine qu*il parvient ^ d^gager
lea materiauz de oette ^poqne de la
passion da moment qu'exaltaiept tant
d'intMts froias^ , tant d'esp^ranoes
reoaissantes, tant de baines long-
temps eomprimto. On trouvera peut-
^tn que nous avons acoord^ trop de
place, dans un cadre aussi born6 que
le ndtre , ^ des faits qui se rattachent
pJoa particolierement k Thistoire de la
France impdriale ou'^ celle de Eussie;
mais , pour pen qu on y r^^hisse ^ on
reeonnaltra que le aceud des affaires
de rEoEope tenait presque exclusive-
raent a la eouronne de N^pol^n ; et
telle est rinflQence qu'a exerc^ sur
son ^poque cet homme extraordinaire ,
que aes alti^ comma ses rivaux n*0Dt ,
poor ainai dire, d'autre bistoire que la
aienoe.
La capitulation de Paris fut sign6e
par lea aoanlchattx Mortier et Mar-
moot Vae dtelaration particuliere de
f aaipQffewr Alexandre confirma les es-
piranoes padfigues d^j^ exprimees
dam la proclamation du g^n^ralissinie
des tfoupes allite, mais en v ajouiaat
que lea souverains oonfiM^ea ne trai-
teraient plus avee Napol^n Bonaparte ,
ni a¥ee aucun membre de sa famille.
La citation suivante, emprunt^e au
manuscrit de 1814 , jette quelfue jour
sur oette determination.
< Le ai k midi , Tempereur Alexan-
dre at le rot de Prusse avaient fait
leur entr^: cette marche militaire,
d^abord paisible, avait fini par deve-
nlr bruyante : dea cris en favenr des
Bourbons s'^taient £ait entendre; des
coGBurdes blanches a?aient ^ arbor6es,
et les Parisiens ^tonnes, cbercbant des
yeox Tempereur d'Autriche, ayaient
appris avec inquietude qu'il 6tait en-
core bien loin.
« G*etait chez M. de Talleyrand que
I'empereur Alexandre etait alie des-
cendre. Cet ancien ministre aurait dd
suivre rimp^ratrice sur la Loire, il
en a?ait reai I'ordre : mais il s*etait
fait arrdter a la barriere, et ramener
dans Paris pour en faiie les honneurs
aux allies.
« A peine le tsar etait-iJ install^ dans
son logement, yfW avait tenu un con-
seil sur le parti politique que les allies
devaient adopter. M. de TaUejrrand et
ses principaux confidents n*avaient pas
manque d'etre appel^s a la delibera-
tion. Vainement le due de Yicenee
s*etait presente pour obtenir Taudience
qu*on lui avait promise : la cause de
son prince etait dej^ perdue auMI n'a-
vait encore pu se niire entenare.
« Au surplus , le public n^avait pas
tarde k etre mis dans la confidence ;
deja M. de Nesselrode avait ecrit au
iNrefet de police de mettre en liberte
jtous les individus detenus pour atta-
chement h leur ligUtme sowerabi;
et, bientAt s^res, les murs de Paris
avaient ete placardes d^une declaration
de rempereur Alexaodre, portant qu'on
ne voulait plus traiter des interdts de
la France avec Napoleon , ni avec au-
cun membre de sa famille.
« Le due de Yicenee avait non-seu'
lement plaide la cause de celui qui Ten-
voyait, mais meme celle de Fimpera-
trice Marie-Louise et de son fils. Les
souverains allies se refuserent h toute
488
L'UNIVERS.
n^ociation , atteDdu que les proposi-
tions ofTertes n'6taient pas celles que
*Ies puissances crovaient devoir en-
tendre , surtout apres la manifestation
ecletante des sentiments de Paris et
*de toute la France. »
Les, convenances ne permettaient
pas k Ml Fain de tenir un autre ian-
gage; nous sommes m^me persuade
que sa conscience pouvait avouer toute
1 expression de ses honorables senti-
ments : mais, sans pr^tendre k redres-
ser un jugement ou'il pouvait mieux
que personne ^tabiir sur des donn^es
positives, nous tirerons des mimes
raits une appr6ciation diff(§rente ; dus-
sions-nous troisser Torgueil national ,
nous dirons avec une conviction pro-
fonde que, dans I'int^rlt de Thumanit^
et de la France elle-mlme , les alli^
ne devaient point traiter avec Tempo-
reur; une rupture edt touiours et6
imminente, et la crainte d hostilit^s
u1t6rieures les eUt rendus plus dilH-
ciles sur les conditions : le genie de
Napoli^on eilt 6t^ un obstacle a Tintro-
duction des formes constitutionnelles
qui replacaient la France dans les li-
mites gouvernementales que le despo-
tlsme militaire avait dQ francbir. line
fois ce grand pas fait, elle devait, en
peu d^pnn^s, trouver dans sa posi-
tion, dans la ricbesse de son sol et
dans le g^nie de ses habitants, un d^-
veloppement de puissance pr6fi6rable ,
selon nous , h des conqultes excentri-
?ues, toujours pr^ de lui ^chapper.
'els furent les bietifaits de ce nouvel
ordre de choses , que, malgre la repu-
gnance naturelle a un grand peuple de
se laisser imposer un roi par des en-
nemis victorieux , le trdne des Bour-
bons se serait consolide , sans les ten-
tatives impolitiques qui tendaient k
ramener la France a la monarchie
pure, qu'ellen*acceptera jamais qu'avec
la gloire; et, d*un autre cdte, tels
furent les elements de force que re^ut
Tesprit publie dans une courtep^riode
de quinze annees , que ce trone an-
tique , si laborieusement restaur^ , s*e-
croula en trois jours, quand le prince
psa decbirer le pacte. •
Nous ne sommes pas non plus de
ceux qui font un crime k M. de Talley-
rand de ne s^ltre pas sacrifi^ k une
cause perdue; on ne peut exiger qu'un
diplomate qui a passe sa vie a ealculer
les chances dans toutes leurs ^ventua-
lit^s , se trottve Itre , au jour du dan-
§er, un homme d*abnegatioa et de
6vouement ; mais si , tout en suivant
la pente irresistible des revolutions , il
plaide encore avec habilete la cause du
pays , si ses efforts , mtoe en chan-
geant de rdle , parviennent k adoueir
les sacrifices, n'a-t-il pas fait plus
pour le pays que s'ii se fdt impost une
perseverance sterile?
Apres etre reste quelque temps k
Paris, ou sa presence excita un en-
thousiasme difficile a decrire , Alexan-
dre se rendit en An^leterre.
Le danger avait etroitement unf les
souverains ; le partage de la oonqu^te
failfit les desunir.
« On peut dire que , dans ce partage
de I'Europe , le droit de conquete mi
consacre ; en sorte que , loin de reta-
blir le droit de propriete, en remon-
tant k repoque qui pr^ceda les inva-
sions de la France, on admit des
points de fait oomme noints de droit ,
et les innovations ne firent que dian-
gerde forme (Considerations sur F^tat
politique et commercial des puissances
europeennes). »
Les principaux obiets qui devaient
faire le sujet des deliberations du con-
gres de Vienne etaient :
1* La disposition des territoires
auxquels la France renon^it, ainsi
que des autres territoires que Fempe-
reur Napoleon avait possedes k autre
titre qu'a celui de chef du gouverne-
ment fran^ais , ou qui etaient possedes
par des membres de sa famille, et aux-
quels il avait renonce pour lui-m^me
et pour eux (cet article comprenait les
inaemnites, restitutions ou acquisi-
tions reclamees par rAutriohe, la
Prusse et la Sardaigne);
2* LsL fixation du sort de la Pologne,
ou celle des acquisitions de laRussie;
Z^ L*organisation de la confederal
tion des £tats de FAllemagne;
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.J..
RUSSIE.
489
4^ La garantie de rorgaiiisation de
b Suisse;
S* Les r^lements relattfs h la na-
vigation du Rhin et de quelques autrea
fleuYes;
G* Uabolitton de la traite.
La Prosse ne d^uisa pas ses pre-
tentions sur la Saxe; de son cot^,
Alexandre d6clara qu'il ne se dessai*
sirait pas du grand-duche de Varsovie ,
et qa'fl faudrait Ten chasser.
M. deTalle^and, qui repr^entait
la France, avait trop cle tact pour es-
sayer d'y prendre le rang que ses ta-
lents Jul auraient assign^ en toute au-
tre drconstance; il ne lui restait qai'h
enrenimer adroitement les dissidences
des autres cabinets , et & les opposer
les nns aux autres avec tous les dehors
de rimpartialite. Dans cette position
delicate, il fit bon march6 de tout ce
(]u']I ne pouTait sauver, et servit les
iot^r^ de la France restaurde avec
d'autant plus d'efBcacit^ que ses ob-
jections etaient presents par des
tiers. Le roi de Naples fut sacrifie h ce
nouvel ordre politique. Les ministres
de Louis XYIII « secretement appuy6s
par r Aotricfae , s'oppos^rent de tout
tear poOToir h la cession de la Saxe au
royaame de Prusse; I'Angleterre, au
co'ntraire, fayorisait les pretentions
de la ooar de Berlin. M. de Metter^
iijcb, dont la preponderance au con-
gr^ ne saurait Itre contestee , parais-
sait voir sans ombrage Faccroissement
de la Prusse; mais il ne cachait point
que rextension du territoire russe jus-
qu'a la Yistule etait inquietant pour
TEurope. Cetait d'autant mieux de-
gniser sa pensee, relativement h la
Prnsse, que ses apprehensions en ce
qui reganlait la Russie , devaient pa-
nltre plus naturelles. Alexandre oon-
sentait a donner h la Prusse la ligne
de la Wartha , et celle de la Nida k
FAiitricbe, mais h condition qu'on le
laisserait imposer h la Pologne telle
forme de constitution qu'il jugerait
convenable ; fatigue de ces lenteurs , il
envoya le grand-due Constantin It Var-
sovie annoncer aux Polonais que leur
existence politique serait conservee,
ft quite aevaient s'appreter h la de-
fendre. Cependant M. de Talleyrand ,
prenant en main la cause de la Saxe ,
representait que Tabandon de ce
ro^aume a la Prusse, outre qu*il por-
tait atteinte au principe de la legiti-
mite , aurait une influence funeste sur
requilibre de I'Europe : 1^ en creant
contre la Boheme une force d'agres-
sion tres-grande, et en mena^ant ainsi
la sdrete de TAutriche entiere; 2* en
creant, au sein du corps germanique
et au profit d'un de ses membres, une
force d'agression hors de proportion
avec la force de resistance de tous les
autres. Le ministre franc^is consen*
tait neanmoins a ce qu'une partie de
la |Saxe fdt cedee a la Prusse; cette
identite de vues avec M. de Metter-
nieh laissait entrevoir Tintention de
trouver dans le cabinet autrichien un
point d'appui ; les interets fran^ais se
trouvant entlerement isoies au mi-
lieu de tant d*interets opposes ou di«
vers. M. de Nesselrode, par voie de
conciliation, communiqua aux pieni-
potentlaires d*Autrtche , de la Grande-
Bretagne et de Prusse un nouveau
projet de partake ; les prindpales oon^
ditions en etaient: 1» la cession du
duche de Varsovie k la Russie; 2" la
liberte du cours de la Vistule; 8* la
cession du royaame de Saxe k la
Prosse , avec la condition que Dresde
ne serait pas fortifiee; 4** la formation
d'un l^tat separe sur la gauche du
Rhin , qui comprendrait le duche de
Luxembourg, les villes de Treves,
Bonn , etc. , pour indemniser le roi de
Saxe. Mayence et Luxembourg deve-
naient places de la confederation:
PAutricne recouvrait en Pologne ce
qu*elle avait perdu par la paix de
Schonbrunn, et une constitution li-
berale etait promise k la Pologne^ tant
pour les provinces dependantes de la
Prusse et de TAutriche , que pour celles
qui relevaient de la Russie. Apres de
longues discussions , on oonvint enfin
de laisser au roi de Saxe une partie de
ses £tat8 , et d'abandonner le reste k
la Prusse. Frederic- Auguste resista
inutilement;dans rimpossibilite de lui
arracher son consentement, il fut der
cide qu^on passerait outre, et ce malt
493
L^UKIVBRS.
« titre qui m'est offert §mi8 m*touter
« de mes principes. » £t comrae on
lui parlait d'^riger un mooumeDt k sa.
m^moire : « C'est a la post^rit^ qu*il
« appartient de T^riger, poursuivit-ti ,
« 81 elle m'en trouve digne. » On avait
fait DOur le recevoir de grands pr^pa-
ratin ; un arc de triompbe avait 6t^
^lev6 en toute h&te pr^s de la bar-
riere; inform^ de ces dispoaitions, il
adressa la lettre suivante au gouver-
neur : « J*ai appris qu'on £iit pour ma
« n^ption divers preparatifs : j^ai tou-
« jours eu de la repugnance pour toutes
« ces choses ; et , aans les circonstances
wprdsentes, je les d^pprouve plus
« que jamais. Les ^v^nements oui ont
« mis fin auxeuerres sanglantesaerEu*
« rope sont roeuvre du seul Tout-Puis-
« sant. C'est devant lui qu'il faut nous
« prostemer tous : faites connaitreoette
« malt^rabie r^oiution , afin qu*il ne
« soit donne aucune suite It des pr^pa-
• ratifs queiconques pour me reoe-
« voir. »
Le premier soin de I'empereur, en
rentrantdans sa capitale, ftit d'aller
rendre des actions ae graces k Dieu
dans la cath^rale de Casan ; quelques
jours aprte, les o6rtoionies reagieuses
se c^ebr^ent avec plus de solennit^;
le peuple se pressa dans les temples;
et comondant les sentiments qui ragi-
taient, il les reportait avec entbou-
siasme sur la personne du souverain.
Aprte avoir donn6 quelques jours
au repos et k des affections qu*une
longue absence avait rendues plus
vives, Alexandre op6ra plusieurs cnan-
gements dans son minist^re. M. de
Loumianzof fiit remplac^ par M. de
I^esselrode.
Quoique Foukase suivant, adress^
au conseil de Fempire, au synode et
au s^nat , soit empreint du m^me ca-
ractdre qu*on a pu remarquer dans les
pi^es que nous venous de citer,
nous croyons devoir le reproduire
oomme exprimant d*une mani^re plus
complete les sentiments d'une devotion
fervente que le mysticisme allait bien-
tdt dominer.
« La demande qui m'a 6U fiaite par
^ saiqt synode , le conseil de Tempire
et le B^nat. dirigeant, ooncernant F^
rection d'un monument k ma personne
dans la capitale, en me soUiciunt d*ao-
oepter le titre de BSni, me < beau-
coup de plaisir , parce me i'y recon-
nais, d'une part, la benraietion de
Dieu qui veille sur nous , et, de I'au-
tre , les sentiments du corps entier du
peuple russe. Tons mes efforts et mes
plus ferventes pri^res n*ont pour bat
que d'obtenir en effet la dur^ de oette
laveur divine, tant pour moi-mtoe
que p(mr mon peuple fiddle, mes su-
jets loyaux et bien-aim^ , et pour le
Senre numain tout entier. G'est la mon
^ir le plus ardent et mon plus grand
bonheur. Mais,' mal^ tous mes rf-
forts pour V parvenir, je ne puis, comme
bomme, lore assez presomptueux |iour
accepter oe titre , et pour mUmaginer
Favoir en effet m^rite. Cela est a*aa-
tant plus incompatible avee mes prin-
cipes , oue , dans tons les temps et dans
toutes les occasions , j*ai exnort^ mes
fiddles sujets k llittmilit^ et k la mo*
destie. Je ne puis donner un exem|de
qui seralt en contradiction avec mes
vdritables sentiments. Ainsi done,
en m^me temps que je leur t^moigne
ici mon entiere gratitude , je prie les
corps constitu^ de Fempire d'aban*
donner tous ces projets. Puisse un
monument m*£tre oev^ dans vos
ooeurs, comme je vous en ^leve un
dans le* mien ! Puissent mes peuples
me b^ir dans leurs ooeurs oomme le
mien les b6nit! Puisse la Russie £tre
heureuse, et puisse la divine Provi-
dence veiller sur elle et sur moi ! »
En examinant cette pidce avec atten-
tion , on Y trouve plus que Fexpression
de Fhumilite cbretienne; s'il edt €t€
donn6 k un regard humain de sonder
FAme de ce prince, peut^tre y edt-on
trouve le souvenir amer et ind^l6bile
de la funeste catastrophe qui avait ou-
vert son r^e , et le regret de ne poo-
voir se reposer de ces iuttes int^enrcs
dans les affections patemelles.
Alexandre s'occupa de Farmee avec
une sollicitude qui proave qu*il n'ou*
bliait pas les services pass^. Un co-
mity rut institu^ pour examiner les
droits des officiers que leurs blesaures
RUSSIE.
49S
on ta msladies- amioit ^loi^^^ de
rim6e ; on aocx>rda une amnistie eom-
pKte atous oem que les ciroonstancefl
poiitiaiies avaient compromis ; enfin ,
daM les gooYernementa qui aTaient ie
Diu lottffert de la guerre, les paysans
nireDt exempUs de Tarri^ oe leura
taies.
Dorant Ie s^oor des troupes nisses
en AlleniagDe , les habitants recevaient
en pavement des assisnats russes ; la
reanisation de ees valeurs ayant pr6-
senti des difficoJt^', on annonqa par
la foie des joumaux qae des bureaux
8p6eiaux raiieot ^tablis a Berlin et k
Koeoigsberg pour Tescompte de ees
billets aa cours du diange.
Les compagnies de commerce n'h^i-
terent pas a avancerdes fonds au goo-
Tcmement russe ; et la parole d*Alexan-
dre lear panit une suffisante garan*
tie. £n nieme temps que la Russie as*
sorait d^finitiTement sa pr^nderance
en Europe par ses envahissements en
Pologne, elle ddx>rdait dans TOrient
par ses acquisitions en Perse. Le traits
qu'dleconclnt avec cettedemi^re puis-
saoee fut confirm^ en septembre 1814.
En vertu de ees nouvelles stipulations,
la Hussle 6tendait sa fronti^e m^ri«
dionale de la Caspienne k TEuxin , et
de FEoxin au Bosphore. Ges noufdles
deifmitations preparaient a la Russie
de faetJes triomphes et lui ouvraient
le cbemin des Indes.
(1815.) Tandis uue les ministres as-
semble en congres morcelaient Tan*
cienne et la nouvelle Europe , plutdt
d'apres 1^ •convenances du moment
que pour ^tablir un ^quilibre imagi-
naire, ^apolten suspendait par sa
ptisenoe toutes ees labotieuses eombi-
naisons: rhomme qu'on avait pr^nt^
oomme us6 et impopulaire avait tra-
verse presque seul oette France encore
^lonnee de sa deiaite. Tons les debris
4e la erande arm6e se groupment an-
tonr du grdtod capitaine; la jeunesse
&e lera avec enthousiasme et salua de
f^^nennses acclamations Tillustre pros-
<nt. Toutes les blessures de la France
indent encore ; les esprits faibles ,
9i font toujours la grande miyorit^ ,
'record cette fois avec les esprits
sages , n'envisageaient qu'avee ^pou-
vante les suites d'une nouvelle inva-
sion; mais, dans ees ciroonstances ,
r^ergie impose ses resolutions au
grand nombre; et tons subirent les
mimes cons^enoes. Nous passerons
rapidement sur les ev^ements rail^
taires de cette campagne, a laquelle
les armto russes ne purent prendre
une part active. «Pres de quatorze
cent mille hommes furent mis sur
1»ied par les souverains aili^. Napo-
6on n'en eut k combattre a Waterloo
qu*un peu plus de deux cent mille ; de
Borte qu*en supposant one victoire, il
lui restait h terrasser plus d'un million
d'ennemis. Les Anglais et les Prus-
siens jparurent seuls sur le champ de
bataille de Mont -Saint -Jean. Les
Russes , qui ^aient destines a former
Tarm^e du moyen Rhin , ne purent ,
malgr^ des marches forc^es , arriver h
temps. lis ^ient au nombre d'environ
cent soixante et dix mille hommes,
command^ par les aen^raux Barclay
de Tolly, Dokhtourot, Raievski , Sa6-
ken , Langeron, Jermolof , Vintzinge-
rode et Pablen... Les empereurs de
de Russie et d'Autriche apprirent k
Heidelberg la nouvelle de la d6£siite
des Francis; leurs g^n^raux n*eurent
plus qu'a recevoir les capitulations de
quelqnes places de ^erre. Dds lors
Alexandre jugea Inutile de faire avan-
cer les trois corps qui composaient la
totality de son armee d'invasion ; celui
de Barclay eut ordre de poursuivre seul
sa route; et, arrive au oceur de la
France , dans la distribution des quar-
tiers d'occupation , les pays d*entre
Seine et Oise , et oeux que baignent la
Meuse et la Moselle, lui furent assi-
gn^... Cette fois, les souverains alli^
entraient plus en ennemis qu'en lib6-
rateurs dans un pays moins toudi6 des
bienfaits de la restauration qu'humili^
de recevoir un roi de rintervention
etrangere. Les ambitions que le pre«-
mier morcellement de la France n*avait
qu'a demi satisfaites, les baines en-
core vivantes de la Prusse et de I'An-
gleterre et qu'avait contenues la mode-
ration d* Alexandre, les rancunes de
Femigration qui rivait Tancien r^
494
LTlilVEAS.
giaie par, en un mot, touteft les pas*
sions de eupidiU ft de ouniTais vouloir
se trouvaieat d*aooonl avecia politique
pour oonaommer rafihiblissement , si*
non la ruine de la France. Les dispo-
sitions d'Aiexandre iai«in£me , h regard
do peuple franqais, n*6taient plus aussi
bienTOulan^; il lui en oodtait, sans
doQte, da voir one la Franoe, qui
avait racu avee enttiousiasme les Bour*
boos et la dhavte, edt renonc^ sponta*
n^ment h oet ordre de oboses pour se
Jeter de nouveau dans une carri^e de
troubles et de p^is : ie tsar avait cm
trop facilement oe qa*il d6sirait et oe
oui n'^tait gudre possible: il s^^it
flatt^ de concilier le bonheur des ▼ain-
ctts avec les pretentions des vainqueurs.
Des manifestations eclatantes Fabo*
s^ent en 1814, oomme la levte de
boudiers de 1816 tebappa a son ap-
pi^iation : k la premim de ces ^po-
ques f la ¥oix d'un parti pouvait seuie
se faire entendre, et il prit eette voix
pour celle de la nation entito, una*
nime dans ses yonn comme dans ses
reprobations ; en 1815, c'dtait encore
un parti qui s'^tait impost momenta*
R6ment, et qoi , dispose k s*ettseTelir
sous les mines du pays, nc pouvait
trouver une r^istance efiOcace dans
one fraction de la population lasse de
sacrifices et avide de repos , ou dans
les hommes de Coblentz , ^urdis d*ua
coup si inattendu et priv4s de Tappai
des ^tran^ers.
II fallait aux alli^ une tndenmitd
et une garantie: ^puiste d'bonunes,
la France devait encore toe d^mem-
bree et eouvdr d*or toutes U» traces
de ses d^sastres.
Le traits de Paris stipiila les exi*
gences de la conqute; K fut 8ign4
le 20 novcnbre; celui de la sainte
alliance Tavait M le 20 septembre . eiv-
▼iron deux mols avant. Pour bien
dire comprendre eette oeuvre de mys-
ticisme et de politique , nous emprunte-
roas lerteit^ rhistorien d' Alexandre.
«Dds 1814, Tempereur Alexandre
avait eu des relations avec madame de
Krudener. Depuis queiques annto,
eette femme e^lebre remplissait le
Nord du bmit de ses suom dans la
mission si sinniliiremeRt dvangttque
qu'elle s'telt cbmite , ou , si Ton vcut ,
qu'eUe avait recue des inspirations
exalt^es d'uae Hoe reli(;ieuae et ar-
dente, et dHin eoeur qui surabondait
de z^le et de tendreaae pour Fbuna**
nit^. On sait que, nte dans une posi-
tion 6]ev^, et au milieu des don«
oeurs de I'opuienee , dott(6e d*une beauts
dont I'attrait toit irr^istibie , madanse
de Krudener renon^ a ees avantages ,
jeune encore , pour aoeomplir , en an«
non^nt aux hommes la parole de
Dieu , un apostolat dont le nit n'^tait
rien moins que la conversion du genre
httmain. Jusque-lli, oomme il arrive
ordinairementauxfondateursdesectes,
die avait trouv^ pins de partisans dans
les cabanes que aans les paiais ; et lea
{irinoes , loin de se feire ses pros^ytes ,
'avaient perstoit^e, jugeant danse-
reuses les pr^ications et mtoe les
aum^nes au moyen desquelles elle en-
tratnait les populations k sa suite.
D'ailleurs eUe pouvait enflammer les
passions des classes souffrantes, et
foumir un pr^texte aux rebellions , en
mllant k ses pri^res des predictions
raena^tes contre les poissonts de la
terre qui s'ecartaient de la droite voie.
Cependant , comma eHe avait annonoe
la chute de Napoleon, sa^ reputation
de propbetesse commeo^a, en 1814,
k s^olir avee une soite d^universa*
lite ; et voyant , dans le grand ehang!^
ment qui s*accomplit en Europe , une
occasion favorable pour tentwla revo*
lotion reUgleuse qu'elle-meme medi-
tait, elle se rendit k Paris en ntee
temps que les souverains allies. Cetait
snr VapfMii d* Alexandre qu'eUe comp*>
tait particuli^rement , non -seolement
parce <pie la Russie semUait desoi^
mats devoir toe la moderatrice des
grands debats qui s'ei^eraientpourla
reconstruction de I'Europe, mais en-
core parce qu*elle savait que quelqoe
chose dans VSme de ce souverain sym-
patMsait avee ses propres idto sor la
neoessite d'une r^olution reKgiease.
« II est , en ellfet , incontestable qu'A-
lexandre etait , par la nature de son
organisation morale et pbvslque , pre-
dispose au mysUdsme, et a subir l^m-
RU88IB.
4§6
pire d« id6ea i«limiM8, ntoeJttB*
qutar UhnioBstft TilluiiiioimDe. Saw
pffter de oeite tradance li gte^aie
tea le Nord , et qui n'eieeple pas lea
esprits die Pordre le plus tieve, on peat
resnder leHnjrstidsme eomme le r^
iflJtat d'nne loi de d^veloppement dca
passions oonunane k tons lea indm*
das ebez qui b sensiMlit^ du eoeur el
PactiTit6 ae Timagination ne sent paa
domiote par one ntiaon dnergiqae et
par un oaract^e Tigoarem. Loraoiie
les organes af^noussent, et que lea
jouissances aensuellea ^happent, 11
faut nteaaaieement que, privMs d'une
activity inteltectaetle snftsante poor
mnplaoer ee qo'elles ont perdu; cea
Jtoes trooipte , maia nobles et ^lo-
fkSy eherdient dans la sphke sana li-
mites des afiectiona religleuses un
Taste dddommagement. En ^levant lea
termes ou lea donnto de oetta propo-
sition h km plus haute ouiasanoe, on
explique madame de Krudener ; et c^eat
a peu prts de la mtoe mani^e qu'il
faodmt raisonner pour rendre rareon
do singQlier ehangement qui , en 1815 ,
t'^tait opM dans les idto et les vues
politiqDes de r^mpereur Alexandre,
s'H m sufBsaft pas, hlstoriqoement
parbtnt, d'en constater le fait.
« Ge nit, c'est la sainte alliance. La
MNirae de oe pacte f ut ^videmment nne
profoode preoccupation niystique de la
part d'Alexandre. Depuis 1814, les
instructions et les exhortations de ma-
dame de Krudener avatent produit leur
cffet. ERe s^^tait empar^ habilemenC
de oe (^^i1 y a toujours de Tivant et de
chatoQiHeux dans le coeur d'un roi....
AlexaDdre , disait-elle , a re^ mission
derMifier ce que Napol6on avait eu
joissioo de d^tmire. j4(exandre est
Vange hkme de F Europe etdu mandey
cmme NapoUon enfutVamge wAr.
«0d attribue k Tinfluenee de ma-
dame de Krudener la moderation que
J^ontra ee sourerain dans les transac-
^ qoi se firent k cette ^poque arec
a Praace(*). Ce qu'il y a de sttr an
n Mane'de Krudener tt'nmit pas cu
"'FBs tor le caractfa^de ce prinee, ii
^^ ■od^ratMA n'eikt pv M dns la ii%.
moins, c*M qu*elle lenait a Paris des
oonfiirences nystiqaes od se rtonit-
saient lea souveraios aUi^.. Son er^
dit dut s*augmenter lorsque le retoor
de nie d*£Qie et la joum^ de Wa-
terloo vinrent oonfirmer tontes 9ieM
prWctions. On a mtoe attribue h
madame de Krudener Tidde de la
aainte alliance; et il est vrai qa>lle
afait r4?e I'onion des rois , maia dans
rintMt uttWersel des peuples. Elle
voukait cbristiamser le monde aelen
les nrincipes de f^glise primitive ; eNe
yoalait la paix universelie , et ne voyait
d*antre moyen d'y parvenir que ral-
lianoe des puissants du sidde amentee
par la religion... Yoici, au surplus,
une particularity digne de remarque
et que nous rapportons oomme cer«
tinne.
« L*empereur Alexandre ayant . au
roois de norembre 1815 , minute de sa
main le projet de la sainte alliance ,
remit son brouillon k M. Gentz, fXNir
le porter au prince de Mettemich,
aGn que oeltii-ci rMigedt, d'apr^ ce
projet, une convention ou un traitd
dans les formes cohsacrto par Pusage.
M.'de Gentz , avaat de remettre ee pa-
pier au pinoe de Mettemidi , le mon-
tra au due de d*A..., en tni disant :
L'empereur m'a charge de remettre a
M. de Mettemich oe cMfifon de papier
qu*il a toit dans une intention tr^-
ehr^enne; vous verrez les consd-
menoes que oela aura dans la politique
oe I'Europe... €e fut pour cet habile
miniflitre un trait de himiere sur le ca-
raet^re de Tempereur Alexandre , que
jusqoe-ldi il n*avait peut-toe pas bien
comprls , et sur lequel it ne connais-
sait pas encore le moyen d'agir avec
efficadte. M. de Mettemich abaissa
modestement ses projets devaat U
sublimits de cette id^, s'exalta de*-
yant la grandeur des r^sultats qu'elle
promettait, et n'oubMa rien penr se
montrer ^baitti du oadme esprit de
mysljcisme. Voil^ done deux faits,
sanfoir : rorigine de la sainte alliaaoe,
et I'origine de rinflnenoe du cabinet
tore conme dans les prinnipet du royal
4idtpte.
496
L'UNIVERS.
autrichien sur edai 6t Saint -P^en*
bourc , qui ont nne sonroe eonunune ,
s'expiiquent run par T autre , oomme la
eause et I'effet. »
Jusqu'lk eette ^poque, AlexaDCbre
avait pani peu faToramemaat dispose
k r^rd de M. de Metternidi, soit h
cause du partage de la Saxe qu'avait
appuy^ la Russie contre le voeu de
rAuoriche , soit pour des causes qui
^chappeatM'appreciationparoequ'elies
tieiuient a des r^pufpnances de pure
organisatioD. Le g^nie du diplomate
avait calculi toute la port6e d un con-
cert parfait entre les grandes puis-
sances parmi lesquelies la Russie te-
nait le premier ran^ ; il n*ignorait pas
que si 1 ambition se joignait k la force,
rAliemagne n*aurait uit que changer
de mattre; ii saisit done avec empres-
sement Toocasion de oontenir le plus
dangereox de ses alii^ par un frein
moral , et de Tenchalner dans les liens
de tout un systeme dont le m^te
semblerait remonter jusqu'd celui qui
en avait con^u la premise idee. Ge
plan avait encore un autre avantage:
il lui donnait les moyens de reoonsti-
tner la vieille^llema^ne, en rafifermi&-
sant les pr^jug^ aristocratiques aux-
3uels les idees nouvelles et le contact
es moeurs firancaises avaient port^ de
rudes atteintes. la solidarity des in-
ter^ts monarchiques , ^tafaJie par la
sainte alliance , ajournait ind^finiment
les esp<§ranoes constitntionnelles dont
on avait flatty les peuples au moment
du danger; dans cette combinaison
de la force mat^rielle et du principe
de l^itimit^ appuy^ au droit divin,
tout»s les r^lstancea devenaient vaines
et immorales; c*^tait Fdee d'or de
Tabsolutisme, qui, pour rnonneur et
la 8^urit6 de son systtoe, travailla
franchement au bienngtre materiel des
peuples : mais les cons6:|uences m^mes
deee bien4trefavorisaient led^velop-
|/ement intellectuel ; et plus les peuples
recevaient, plus ils se trouvaient en
droit de demander. D^ailleurs cet ^i-
fice reposait sur des bases fragiles , sur
une existence individuelle. Les idees
rdvolutionnaires , comprim6es plutot
que vaincues , r^girent h cette ^poque ,
mais sans ensemble et avee toute Tim-
pmdenoe du d^sespoir; les ^dnements
du PitooDt, de Napk», de Portugal
et d'Esnagne ^ offrirent a la sainte al-
Kance 1 occasion de se prouver par des
actes: mais la rigueur quelle deploys
dans ses mesures repress! ves, et le
caractere de sombre religiosite qui les
distinguait , justifldrent les ni^flances ;
et dans un si^e ou la tolerance rem-
place la foi , la sainte alliance dut ap-
paraftre aux peuples oomroe une in-
quisition d*£tat.. A ehaque instant les
cons^uences de ce s^st^me venaient
se heurter contre les interto les plus
vitaux des gouvemements qui s'e0or-
caientdelemaintenir : del^ , lan^oessit^
de tant decongres, ou les difficuttes
du moment n*^taient levto que par des
mesures qui devaient bientot en faire
surgir de nouvelles. « Dans ces reu-
nions, dit Rabbe , M. de Mettemicfa
pouvait d^loyer avec succes toute
t'adresse et toute la puissance des fa-
cult^ oratoires et les ressources d*un
esprit aussi deli^ qu'on puisse Tifflad-
ner. O, le ministre conjurateur des
perils de la royaut^ n'avait besoin,
pour accr^iter son systeme, que de
r^nergique magie de ces tableaux ou
les complots etles crimes du g^nie d6-
mocratique pr^ k rompre ses cbaines,
apparaissaient oomme une vision fan-
tasmagorique.
« Uempereur Alexandre, victime de
cette seduction politique dont le sue-
c^ ^it favorise par des ^v^nements
qui semblaient , en effet , menacer avec
les dynasties r^nantes le fondement
de toute autonte non constitution-
nelle « ^tait cependant ramen^ de temps
en temps par sa droiture naturelle k
des id^ toutes diffi^rentes. II sayait
pr^voir que les circonstances seraient
plus fortes que les principes ; et , tout
en subissanC la direction que 4ui im-
primait le cabinet autrichien , il sem-
nlait attendre avec ime sorte d'impa-
tience le moment ou la force des choses
viendrait le decharger du fardeau de
sa responsabilit^. Plus d*une fois on
lui a entendu prof(§rer ces paroles re-
marquables : Je ne sais pas jusqu'^
quelj^Qimt et jxtsqu'^ quel temps on
RUSSIE.
497
pemrafaife ce que tohfydt dans ce
momentrd. A I'^poque dela r^olution
de Na^es, se trouvani k Varsovie, U
disait a M. de la FerrooBays , ambas-
sadeur de France: Le$ affaires de
liofdet ne nous regardent pas ; puis-
que le peupie na^pmktin respecte la
famiik rignante et n*atiaque pas la
tegUindUy onn*ad se phimo'e que
des formes par lesqueiles s'est mand'
fesU le WJBU public, etje ne pensepas
qu'U soU uUle d'employer la force
conire cette manifestatkm, Gepen-
dant, d^ aull fiit a Troppau, et en-
suite h Laybach , Alexanore consentit
a toutes les mesures jug6es n^cessaires
par r Autriche. »
Par one eons^enoe toute naturelle
d'un systtoe si ombrageux, I'esprit
d*oppositioa surgit de toutes parts;
bfentdt foro6 k se cacher/il fut r^uit
a ooDspirer dans Tombre , et n*en de-
▼int que plus dangereax. D^ Tann^
1616, otieiques jeunes Russes, reve-
nus de r^ranger apr^ les campagnes
de 1613, 1614 et Idl^^et oonnaissant
la toidaiioe politi^e de plusieurs so-
ci^t6s secretes qui existaient alors en
Allemagne.conii^urent Tid^ d'etablir
en Rttssie des associations semblables
( Rapport sur la commission d'enqu^.
Sainl-P^tasbour^, 1626). Quoique le
iNitdeoesassociations rtformatrices ou
r^olotionoaires ne fdt bien connu que
queiqaes ann^ plus tard , n^nmoms
fe gouremement en apprit assez pour
conoevoir de rinqui^tude; et ces in-
dices, trop vagues |x>ur d^erminer
des poorsuites ostensibles , emp^h^
rent Alexandre de sortir du oerae o^
Tavait enferm^ la politique de I'Au-
triebe.
(1617 et 1616.) Nous avons cm de-
voir anttciper sur les temps post^rieurs
poar expliqner les causes de la poli-
tique de la sainte alliance ^ alnsi ^ue
le rdle que M. de Mettemich sat im-
poser k Alexandre, en profitant k la
lois de ses bonnes intentions et de ses
fiitblcnes ; nous allons tracer sommai-
remeot les traits les plus saillants du
regne de ce prince, k partir de T^que
OQ nous avons interrompu notre viai \
Dom suivrons pour Tordre des faits
32* Lwraison. (Russib.) t. it-
son historiei^phe, dont nfNis mser-
rerons Texpos^.
Alexandre , apres avoir pass^ en re-
vue ses troupes dans les plaines de
Champagne, se dirigea sur Rruxellea
rtr y oondure le manage de sa soeur,
grande-duchesse Anne, avee le
prince d*Oran([e. II vouhit visiter le
champ de bataille de Waterioo : le roi
des Pays-Bas, le prince d*Orange et
le prince de Prusse I y accompagn^rent.
Apr^ avoir examine les diverses posi-
tions , lis se rendirent ensemble k la
ferme de la Belle AlUance. Ui,
Alexandre ayant demand^ un verre de
vin, dit, en le prenant, aux deux
princes : « Oui , c est v^ritablement la
belle alliance, aussi bien»celle des
£tats que celle des families. Fasse le
ciel qu elle soit de lon^ue dur^ ! »
L'empereur traversa rapidement \ Id-
lenient , mais 11 s^arr^ta quelque temps
k Berlin , pour y arrSter le mariage au
crand-duc Nicolas avec la fille du roi ,
la princesse Charlotte de Prusse.
L*Autriche ne vit pas cette alliance
sans inquietude ; les Russes devin^rent
que le sacrifice que ferait de sa reli- .
gion cette jeune princesse serait com-
pens^ par la perspective d*ane oou-
ronne, et que les droits du mnd-duc
Constantin seraient sacrifitf. Apr^s
avoir assure , autant qu'U a^rteoait*
de le faire k une provision numaine,
I'avenir de sa famille et cekii de Fem-
pire, il se rendit en Poloane, et fiit regu
a Varsovie avec cet enthousiasme qui
n*est souventque la voix de Tespdrance,
et qui tombe quand cette esp^rance s'6-
vanouit. 11 assura aux habitants qu*ii
voulait faire tout ce qui pouvait fonder
leur repos et combler leurs vceux. L»
actes suivirent de pr^ ces promesses;
il annon^a que bient6t les troupes
russes ^vacueraient le tem'toire j et if
donna k ce peupie, sinon la hbertd
orageuse d'autrefois^ du moins un
eouvernement coostitutionnel , ave^
les restrictions du proteetorat , ^est*
2^-dire de la d^pendance. Les esprits
^claitr^s ne s'abuserent pas sur la por-
t6e d'un tet bienfait ; c*6tait trop de.
liberte pour une annexe de la Russie;
e'en etait trop peu pour les fr^res des
6
499
L^UmVBRS.
fikMnMo^ski €« M K««i«9Kk«. An
mois de d^oembre 181(^, II reotra? dtiw^
an atfitsif^ ob Finlp^fatrlce ^tait ar-
i4v^ la Tetlle.
la ferrenr t^fnittM de rcMipemK'
Stafisait iTaebiPohre avee Fflg^ ; maisf
I fapportt arec lea d^rdta les f\\i§
ejtaHiB du tft romain 6laieni (oift d*a*
voir d^iM6 aes oonWetfettt snr ret<-
oellende dvt fft grec; i*ant)6e pr^c^
dente , las J^ftes avai«At ^t^ ex|m]sdflf
dea detix capftales ; une ardeat ihcoiH
alddr^a deWoUlji^irtit Ie£l ava it port^
^ ecmveftlr phnietirs dames d^tin rang
^ev^, et quelqaea Jjeunes gens doiit
on leur arait confix f^dficfftioD ; parm!
eesderrriers, on remarquaitun neveadU
miriistre dis ctiltes , prince Oalitzm.
Catherine II arait aocaeilli les jiatiltetf
h une ^pogae ah its ^taiefit bantiis ^
totfs les £&t8 catholiqaes de PRorope;
mais , jpaf cela m^me, ils n*6taient pasf
d crauidfe; gnand cat tnterdit fut
Icv^, et qn'ira purent eorrespondre
ent^e enx , ils detinrent suspects , et
le prenrieir grief qu'on ecrt h leur re^
pivchef d^terndina leur rentoi. Ctst
* probabfem^nt a cette cause mi*il £iut
rappoiter la f bunion du nifnnlt^e de«
cuites 6t de rinstrU(itioA ptibUque,qul
a*op^ra en Itussie au commeneemenl
d^ 1817. t^ finances appel^rent touM
b tolllcitade du souverain; la dette
publique , depute 161^ , s'^tait accrutf
oans une proportion innui^nte ; on
prit, SUIT le tf^or impmal et sur lea
retenus de la isoufonne, des fonds qui ,
pt&eyis anbuellenient , detalent ame-<
net dan$ un avenir pen ^ioign^ I'et-^
(inction dt cette d^te et fdquilibr^
entre le papier-ttionnaie et le nume-
raire. Les &benges ocedsionnto par
les guerres qui ^lat^rent dans le r^ne
suivant ont &tt6U la totalisation de
eatte mteure |>rudeate. Alexandre en-
couraged aussi retablissement d^und
banque impMale dU commerce; ce^
te^issements 6t quelques autres fa*'
vorise^ent Ie6 ^mprunts que le gouV6r-
nement jugea util6 de contracter; et
rafBuenoe des capitaut eterca sui^ It
Qommarce la plus heureuse influence.
Cependant la diete polonaise allait
inaugurer le nouvel ^tat politique oc-
troy^ k la Cologne : Alexandit saiw>
dit k Vsfsovle; mala tl pdrall qua, de-
puissofi retour enRuaste , laUboralisme
de sea preaMlras mtentiona avait subi
(foelqiiea nwdtteationB : il m montra
Sins oea«p6 4e rimportanae da bien-
lit polit^a qu'il aecotdait et des
aonditlons qn'il mettait k eette favear,
qoa dea dii^sitloBS r^Ues des Polo-
iivls. II les exhortaft k na pes con-
ftHidre lea principes de oes Knatitotions
Mfee let docMnes s^boerskfts qui
a»aiewt menacS le eysUme sociai
tfune oatA$tnphe ipouvantable. Une
ann^e s'^tait a peine toyal^ que les
Pokmaia se piaigmreiit de oe que la
constitution n'^tait point obserrte
dans sea disposltiofis esaentieUei; de
ee que leur Tioe-roi ZanoiicsEek n'avsil
^ue Fapparence de Tautorit^, taodis
que le pouvoif ^ait r^llement toot
entier entre les mains du grand -duo
Gonstantin qdi eommandait Vartnie
polonaise, et de If^voasiltsof, eom-
mtssaire russe. Le mfoontenteroeat
Mata atee d'autant alin d'amertome
El la joie arait (st^ plus viTe. lie del*
isme russe revint dux conditions de
I essence; la libertd de la presse fut
suspeodoe; et, en 1819, Tarm^ nS'^
tionale fut dissoule. £b 1890, les
^aintes d'Alexatidre, accitte par les
rapports d*une police tracaasiere , m
Manifeslirent plus nettement ^neore.
Malgr6 les entrdyes des MIMrattans.
Fes^d^opposftion se manifestad'ane
mani^fe «;latante; an projet de pro-
(i6dure crimlndle, que le gouTeme*
fflent Toulait ^re passer en ioi, fot
teponss^ h Hue majority de eeot vfaigt
voix contre trois.
Sans doute la tflche d* Alexandre toit
delicate ; les seigneurs msses voyaieot
afec jalousie la Pologne, oette nation
rivale , jonir d^nstitutiima plus lib6-
irales que la Russia vicCorieuse; les
uns s*en irri talent; les autrea Tega^
daient le gouveftiement aM>ide snx
Polottais comrn^ un spddmatt de celui
qu* Alexandre aooorderait i la Rossie;
m plus Jeunes et les plus ardenta se
promettaient de hiteir k tout prbi Is
i^^n^ation politique des jfMrya alaves;
et, s^ns SToirdes ?aes bien arrMaft
RUSSIV.
499
mfef iiio]fetedereali8er leuf iitopie,
ib cherchaimil des eowplioeft oaoa
Pann^, efc ne fecniaiaut pas ro^me
^«»t le ncrifice de la persoaoe d^
rempotwr^ pcmr delruire 1« detpo*
tisme daas 0OB npr^nt/mU
« tar8aitedittrait6dePam(Eabbe) ,
IftFnice se trouvait oWifite fXHi-^eu*
loneot ^ une contribatkn wMilaire de
sept cents bbiUumis de frames, maia ea*
core de iiqoidar tooloa tes dettea da
gemeraeaaant firaoQaia. Off ies puia-*
saoees partaal du priaioipe da restitu^
tioD le pliis g^n^al , avaie«t d*abord
n§u6t oomme cr^ncos actives lea
mJoatioos a^cesaaifement arbitrairea
de tons lea genrea de laeriiices que lea
lonpea goerrea soutenuea contre la
FraooepoovaieQtaToir ioiposea a leuF9
IWDplea. Le rdsitltat de eettc estiroa*
tJon pouvait toe une aomnye ^uiva*
lente aa tiers de touta la valeur ter«
rftoriale de la France, L'^vidente
impossibilite d'obtenir un rembourad-
ment cpii devait ee nombrer par mil-
Itaids, r^duisit Ies eouverains k ae
ooolnler de pluaieurs eentaines de
aii&ioas. Uempereur Alexandre se raiv
gea le fffeoaer dans lea Hmites d*ane
moderation lans laquelle la ruine ou
le demeadireiDent de la France devait
4kre mm k fordre du iour de la eoali-
tion. Noo content de donoer cet exenv
pie^ il iiisiata aupria du cabinet df
Berlin , et it toivit a Wellington M^
mdoie ponr le determiner h la coodiH
sioo iTon trabe suppltoentaire h celui
de Paris. Ge traits ou convention , ooo-
du le 3 avril 1818 , fixa d^finitivement
la aonDme a payer par la France, par
suite d^mie reduction nouve]|e« 9u to-
tal de trois eeot vingt millions , sur
kqoel la Riissie en avait qnarante^buit
a prendre.*
« L*evaeuatioD du territoire de la
France iiit arr^t^ dans Ies m^es
coefirenees. Mais, ind^peodaniment
de ee dooble objet de la nouvelle reu-
nion des souverains, il en existait un
*itre: c'toil le d^veloppement plus
dctailli et Fapplication progressive des
<y«tiaes de goovemement qui otaieot
^ eoroilaires de la sainte aliianoe. »
^te las coos^qoenoes de ce systemc
se d^veloppaient , plus Tesprit des peu-
pies s'^lanqait avee inquietude vers lea
ameliorations sociaies qui lui etaient
interdites; toute racUvite , touteUener-
gie des intelligences se portaient sur
Ies iuterets nolitiques; et souvent le
simple CKpose des theories gouverne*
mentales nrenait aux yeux du nouvoir
un earactere de r^sistapce et de sedi-
tion qui reotraioait h des persecutions
mesquioea. C'est k cette epoque que
germerent tons ces systemes de rege-
neration religleuse, politique et mo-
rale , oill, en exposant & nu Ies vues des
princes et Ies plaies profondes des
societes , on mettait en peril tons Ies
pouvoirs, on d6considerait \e$ institu-
tions elles-memes. Les cabinets alar-
mes voyaient partout des conspirations,
parce que partout il y avait resistance;
en descendant ^ la ruse qui est Tarme
du faible, le pouvoir semblait douter
de lui-meme, et encourageait Ies
partis*
Les universites de TAUemagne, ces
eentres de lumieres et de natriotisme,
donnaient uue vive inquietude ; M. de
Stourdza cut le courage de Les calono-
nier. Cet eerivain attribuait Tagitatioo
qui se manifestait en AUemagne aux
causes suivantes :
r A un deplaeement universel dep
individus et des classes » fruit imme-
diat de la revolution ;
3*^ Au vague et & ta desorgaiiisation
des idees reJigieuses » devenues la pre-
mier bespin oe Tbufnanite souffrante ,
ety par consequent « Tarme principale
de la passion et de Terreur ;
3"* Aux vices toujours croissants de
reducation nqblique , devenus enormes,
et tels que le systeme le plus complet
d*administration et de legislation ne
saurait leur servir de correctlf ;
4° A une tendance des classes eclai-
rees vers Tunite politique de TAlle-
magne;
a $° EnAn, a un mecontentement
prononce des classes in£6rieures, fati-
guees de changer de maltres , et oour-
Eees sous le poids d'une administra-
tion coropliquee, plus onereuse pour
le peuple q/yie lecoiidf en resultats bieo-
faisants. »
8.
500
L'UNIVERS.
II est Evident que de ces griefs les
uns tenaient au d^ccord entre les
anciennes institutions politiques de
l*Allemagne et le progres recent des
tumidres , tandis que les autres accu-
saient Tessence mdme du syst^e de
la sainte alliance : en effet , les souve-
rains n'avaient - ils pas, selon leurs
convenances , conserve ou modifi^Tan-
cien ordre politique de I'Europe, et
Tesprit public pouvait-il trouver des
limites que la politique elle-m^me
n*avait pas respect^es ? Quant au vague
des idees religieuseS) ne naissait-il
pas de la tolerance , et cette tolerance
ne devait-elle pas £tre le trait le plus
saillant d*4ine alliance entre un auto-
crate du rit grec et des princes pro-
testants et catholiques ?
« Ce m^moire , dit I'historien d*A-
iexandre , quelle qu*ait €t6 son ori^ne ,
autrichienhe ou russe , avait suivi )a
mort de Kotzebue ; il fut le prtoge
des mesures qui allaient £tre arr^es
pour raccomplissement du grand oeu-
vre monarchique enEurope, et de la nou-
velle profession de foi que renfermait
la declaration d'Aix-la-Cnapelie. Tbdo-
rie vague et tans limites , dont les in-
tentions exprim^es dans le m^moire
adress^ a tous les ambassadenrs russes ,
relativement aux affaires d*Espagne,
et la r^nse fiaite k Z^ Bermudez ,
furent une application premi^. C'est,
en effet, dans ces actes que le mot
d^intervenUon, consacr(6 par la decla-
ration que nous venons de citer, fut
employe pratiquement, pour la pre-
miere fois, comme le preservatif des
maladies r^volutionnaires.
« Les congr^ de Troppau et de
Lavbach , motives par les troubles du
Piemont et de Naples , existaient vir-
tuellement dans celui d'Aix-la-Clia-
pelle , puisque la declaration, datee de
cette viUe, avait determine au premfer
ran^ de ses prevo^^ances la repetition
proEable et procbaine de ces reunions
gui auraient pour objet de discuter les
interets des souverains (membres de la
sainte alliance) , ou de traiter des ques-
tions dans lesquelles d'autres gouveme-
ments auraient formellement reclame
leur intervention. »
G*e8t vers cette epoque que fempe*
reur Alexandre et le roi de Prusse,
qui devaient passer, en France , une re-
vue de leurs armees , se rendirent k
Parts ) mais sans Caract^re politiqae,
et sous le voile de VincognUo.
Nous ne parlous pas du prtendu
complot donton vouluteffirayer Alexan-
dre, et qui devait eclater contra oe
prince lorsquMI se rendait d*Aix-la-
Cbapelle h Bruxelles. Le but que Voa
pretait aux conjures etait de 8*emparer
de la personne d* Alexandre , et de le
forcer h signer un acte par lequel il se
serait engage k deiivrer le captif de
Sainte -Helene', pour retaUir lui ou
son fits, sous la regence de Marie-
Louise, sur le trdne de France. Quel-
ques arrestations furent faites.8ous ce
pretexte , mais elles n^amenerent aucun
resultat. Quelques personnes jug^rent
que cette conspiration sans conspira-
teurs emanait de la cbancellerie de
Vienne.
(1819 et 1820.) Tandis qo^Alexandre
pretait I'influence de son nom et de
sa puissance au systeme repressif qui
regissait une grande partie de FEu-
rope, il ne n^ligeait aucun moyen
d'eclairer ses sujets pour les rendre
plus dignes des bienHftits de cette oitoe
liberte dont on s'effor^it d*arr^er Fes-
sor dans les nations ooddentttles. Si
Ton cherche la cause de oes contradic-
tions apparentes dans la politique d'un
prince non moins eciaire que philaii-
tbrope, on la trouvera peut4tre dans le
desir a'arriver k un equilibre aussi
Sarfffit que possible dans les besoins
es peuples, non moins dans Foidre
de rmtelligenoe que dans celui des ia-
terets raateriels. Cette ponderation
dans le monde physique ausai bien que
dans le monde moral , devait se pre-
senter k Tflme bi'enveillante da mo-
narque russe comme renpressioD la
plus avanoee du bien-dtre oes peuples ;
et , presse comme it retait de jouur des
resultats de cette noble conception , i\
retenait d'une main la marche aes id^es
partout oik elle lui paraissait trop ra-
pide , tandis que , de Tautre , il poossai t
son peuple dans la voie du progrte.
Conception vraiment humanitaire ,
RUSSIE.
dOi
nm qu'il ii*appartieiit qifau temps de
realiier.
Sii unrrenit^ , oelles de Moscou ,
deyiloa, d*Abo, de P^tersbourg, de
Kharkof et de Kasan, re^urent une
organisatioB complete , mais qu'on a
ju^ atile de modifier dans le r^oe
mvrwoL
Fid^e am priocipea d'ane sage to-
l^ranoe, l^empereur aatorisa T^tablis-
semeot, k Saint -P^tersboui^i;, d'un
si^e Episcopal pour radministration
des confessions evan^diques , et celui
d'un tribanal particiiiier sous la direc-.
tion da oonsistoire ^vang^imie de
remmre. « L'^it imp^al , relatif a
ees deaz ^blissements , porte: que
tes deax £glises 6?ang61iques ne se-
mot prot^^ et maintenues dans le
Ubre exercieede leur eulte cfo'h la con-
dition de rester fidties k (ears sjrm-
bofe et confession ^ pw lesqoels elles
reconnaissent lasainte ccriture oomme
la parole de Dieu. L'empereur eroit
reraplir on devoir sacr^ envers Diea
cC les ^lises ^vang^liques, en prenant
des mesnres pour mettre ces Eglises k
Pabri d'iiuioTations danmsreuses et
B aux principes du christia-
semblient annoncer que ,
d^ oette epaqae , on craignait de voir
ViaOueBce du saint-si^e s'etendre,
sous fa protection et avec ralliance
de la politique, jusque sur les do-
maioes de l*£glise grecque; la d^ter-
minatioD prise k rejgard des j^ites
(1890) , et qui n'^it que le oomp]6-
meot de leor renvoi des deux capitales
en 1815 , fortifie oette conjecture.
«En 1800, dit le ministre, les j6-
suites obtinrent la permission de des-
ficrvir nn des temples de Saint-Peters-
boorg, assign^ au culte de Tfi^lise
nmiaine. Le p^ g^n^al des j^suites,
s*aDiNi]^ant suf* un r^ement promui-
I ii fivrier 1769, forma un col-
oil bientdt ftirent requs des ^Idves
; distinction de culte. A ores avoir
Qvtiepass^ les limites de.ce reglement,
Ib JMites employdrent toutes sortis
^ i^iuctions pour arracher les jeunes
^eva oonfi^ a leurs soins , ainsi que
<r^trc« personnes, h la communion
de ritglise dominante, et ks faire pas-
ser dans la leur.
« Se mettant constamment au - des-
BUS des lois , les jesuites , malgr^ Tou-
kase imperial du 14 mai 1801 , persis-
t^rent k ne rendre aucun compte de
radministration des fbnds de I'figlise
catholique , dispos^rent arbitrairement
des bto6fices du pensionnat; et, loin
d'acmiitter les dettes dont r£glise 6tait
grevee , lis ne se firent aucun scrupule
aen contrader de nouvelles. On ajou-
tera enfin que les jdsuites ne surent
pas mdme se concilier la confianoe
d'un gouvemement patemel , en of-
frant . dans les domaines qu^on leur
avait laiss^ , le module de cette pros-
perity paisible que la charity ronde
m^me ici - bas, Le mauvais etat et le
deiaissement des paysans de leurs
terres etaient peu propres k att^ter
leur foi par leurs oeuvres.
« Tant d'empietements et de viola-
tions des lois sociales et eociesiastiques
determinant Sa Majeste I'emperenr
k ordonner, en 1815, le renvoi des
jesuites de Saint -Petersbourg, avec
defense d'entrer desormais dans les
deux cap]tak».
« Cependant, malgre Turgence ma-
nifeste de ce reklement, Tempereur se
phit k prevenir toute consequence pre-
judiciable au eulte catholique romain.
Les dettes qui grevaient rliglise, et
qui se montaient k deux cent mille
roubles , furent acquittees par le tresor
imperial. II fut pourvu k oe que I'exer^
dee du culte oe soufifrit aucune inter-
ruption.
«Le8 jesuites, quoique suffisam-
ment avertis par ranimadversioo qu'ils
avaient enoourue, ne chanaerent pas
neanmoins de conduite. II tut bient6t
constate, par les raj^rts des autori-
tes civiles, qu*ils contlnuaient k atti-
rer dans leur communion les eieves
du rit orthodoxe , places au college de
Mohilef , et oela au mepris des obliga-
tions qu'imposeii une communion to-
ler^ le bienfait de la protection dont
ello jouit. Alors on defendit aux je-
suites d*admettre dans leurs ecofes
des eieves autres que du rit romain.
Sans egard aux bulles du saint-siege
ao2
L*UMIYKRS.
nt ant loif de VtM ^ interdtscnt
ragregation des Grecs «iiii8 k la jun-
^ioti9« dtt rit romMn t ies j^ites tra-
vaMt^reiit a lea attirer daM lea Uenx
mtoes od ia presefice dcs prtottf^rees
unis rendait cette^isurpetMm inadmis-
sible. A Saratof , et dans auelques pat-
lies de la Sib^'e , sous pretexte d'exer-
eer leim fooctions, ils fi^introdiitsaieiit
dans des contrte oill ne to ajipelait
point leur minisl^ , et leiir e^t de
pros^ljrtisme se manifMa fnoore f>ar
^e nouvelles au^estiooa 4ass 'teigoa-
vamement de vttepsk.
« Le ministto lies eultes oe man-
^a point de signaler ces transgres-
-aioBS an Pte goi^ral de Tordre, d^
Taan^ iai5; ees reclamations furent
IntitHes ; krin ^le s'abstenir , k Tinstar
de i'Eghse dominante^ de tout moyen
-de «mictioB <et de coaction , les id-
suites contittuerent k aemer le troubte
dans des colonies da tit p^teslant., et
«e pennirent mtee jusqu'la la ^iolenfie
Mur aoustraire des enfants JoKs k
Jeurs parents.
« Tel «st le fliif^e expose des faita.
On ae s'arrdle point id k ddtailler les
circonstances qui les aggra^^ent : elles
aeiirtotttent sans effort a tout esprit
droit.
«Peut-^tre, en 1815, leur renvoi
d^finittf iwra des limites de Tempire
«Qt-H cbvii aux graves inconvtoients
^i le iito»8i(ent aiyounl'hui. Mais
«ne n<^le rdpognance k retirer ua
JiienHiit avant que des causes tres-
grsves«n fissent une ntossitd absolue,
et la sollicitude paternelle de Sa Ma*
jeste I'empereur pour que sesayets
da rit <it>maiD ne fussent |>as pnv^
lout k «oup., dans les oolonies et att-
leurs , des pr^tres de leur ixunmunion,
et qu*on>(iat remplaeer les ignites par
des'eoclteiaatiques derate aans les Ian-
giies vulgaires; oes considerations d^
termintont Sa Majesty k mitiger la
peiaequete j^uiles avaient eneourue.
« Maialenaot que leurs oontravea-
tions aux lois de I'empire et aux en-
gagements qu'iis avaient contvaotds
envers le gouvernement^ a T^poque
ott lis furent aocueillis , n'ont Halt que
8*aecroftre par le sursts aoooidd, et
qu'll est anriv6 que les autres oidres
monastiques sont,^ mtoe defoaniir
autant de pidtres gu*il est atossaire,
le lainistm des outes B*est om «b)ig6
de soumettre a r«)jprobation de I'eiti-
pereur une suite dedispoeitioas rela-
tives k leur expulsion. »
Par suite de cette mesure, les j^-
auitesaortirentde r^aapire au aonbre
de s(|it oent cinquanle; quelques-nns
aMrent en Obine; la plupart se ren-
4ireat dans ies limits auti^ichiens et en
Itaiie^ ou ea AUemagne. La oour de
Vieone leur donna ie odll^ de Tar-
•nopoi, en Gallioie.
Nous ne coalestarons pas an goa-
veraemefit russe le droit de protection
sur tout €0 qui tient k r£g1iae domi-
nante ; mais aous croyons que les ie-
auites ont rendu k rinstruction des
■services r6els, aaftoutii une ^pome
lod la Btfssie auuiquatt de mattres ba-
Itilesc d*aiUeurs le tniaist^ ae pon-
^t igaorer fue req;»rit m^Doede ieor
-ordre les porlerait loinours , et ^ kurs
dsques et pdrils, a -miFe des pros^
lytes. Quaait k I'espcir que ces Peres
ae renfermeralent dans les limites
^u'on leur prescrWait^ leur maxime
virtuelle, sifU ut sunt atd non mU,
anaoaqatt saffiaaoimont qu'tl Matt mal
fond^ A Tepoque de leur espulsioii^
ils 'oommeacaiant k dtre -phis dange-
Teux ooe neoesBaires , et le ministrf
des Gultes, bless^ non moins dans ses
Mtributions que dans see liens de fe-
initle, crut roccasiofi favorable pour
&Bpper an eoup d^isif.
Les assodations secretes., organi-
ses daas 4jn but patnotique^ •couti-
nuaient k se propa^er en Pologne,
0ialgff6 les investigations d'une police
ombrogeuse et s^vkre^ Tappui des re-
odvateurs ^tait dans 4e asteontente-
paeat public qui s'aocroiasait bu-m£me
de tout oe qu'ii y avail d'arbitraire
dans les mesures preventives. Le eon-
sell de Varsovie, dit BLabbe , se ren-
dant organe des oraintos g^n^ales,
toivit, avant^rouverture x^ la dicte
de 1822, au ministre de yint^rieur,
pour lui demaader de rasaurantes e&-
nlications. Telle fut la r^ponae de ce
tanctiooaaire :
RUSSIE.
MS
■lonoue i'aufsraar etdwj^ii 4e
reiaUir ji PdoMe» Hi .rairait pas
d'aitse ibut. M iraviilt.ea msiaieie
bonbear d« la Pologne, en f Appdnati
parta^r k deBtioee 4e fioo sBifwne f et
ea I'j attacbent par 4et ikos fmUar-
nala, de ia maniece ipii ]ai .iiaraisamt
la plus propra i iBOOsan er lea avan-
tag^ de aon canctave luteaal. fia
Majesty fie ae disaimala peiot icB dtf-
fiam da -catta 'Caitrapriae, ^'ietle
n'abaadoMkarait qa'avec lieaaieQup de
ohagrio, at ^'aar^ avoir seeonnu
l'ioipo96ibfli(6 et lea dangecs 4e Ya^-
€iilioa.
« Gotte impoasibttitd 4t eea-daogeiis
ne potHPtaiaoC pvaiveBir qoe das tmkh
aaia.
< Le mioiatre de I'lnlMiar at de la
police eat anooiia ahaiig6 d'ajouter que
wmonient actual Mdovble^se danger,
at qaVm ne peut r^carter que par uhb
jaste oaoflance dans ie gouveraemeiit,
par una prudeoee pemrAraote, par
WW moderation aanm, par ua eapvit
d*ordre.et de aouuNsaion «ux av^ri-
t^. £n fiigualant oe danger, Sa Mi^
jeat^ g*est acquitt^ -de •aon premier
devoir; maia if lui en raaterait on non
moins aaop^ h vempKr, al , malnr^cea
afertiaaeinenta que aaa-saiDa pateraela
'lui out flBCBier^ aujooni^ui , un dan-
K^ senblaDle de?ait ae manifeater;
aar, alofB,ce 8erait>aB devoir ni'eai-
P&^r, par les mojem lea plua effir
eaees, toute ento^priae qui tendrait k
troablo- la tranqallUt^ publique , on
ik prodoire du acandate. 11 est aatiafai-
ttflt paur Sa BlMeate de pouvonr ea*
p^fer que l^acneroent dea Polonaia
pour leur patrie triomphera toujoora
' cbea ecK des^mlreprisea a^itieuaes de
fiekpes esprita remuants, ^il devait
jamais a*en trouver pami enx : que
w Polonstia ne voudront poa foumir
Clears ennemis I'oocaaion d^tr^ par
oeox-ei de r^p^ter encore avee quel-
^ traiaemblance -I'aoeuaation que
Routes les tentatives pour faire le bon-
beur de la Pologn^ , poftr lui procurer
^ situation tnmquille et floriaaante
1^ 'le moycn d^me constitution qui
^Qre aon existence nationale, ont
W et sent encore sans succ^. 'IjC mi-
yaraorie mn ooqwutnine d^R^rtirilQpa
aarudflBoaietdbeaaNr^eMrtiainaMia la ai*
toaiwa d« merwine icmaNoda au «si-
4ieM dea .clnaanatanaas okiim <r^uva ,
a*jt doit parvenir ^uiNti^i la J^uiasaiiaa
dea avanta^es que :aa .«o«aStittio» et
ka ;diMiaailiQoa bkiafaiaiMMlea 4« ^a
MajeataramiieifMir \mfm!a^tM^4*Mr
tendaa* Gn oons^ueace^ l^,eoiiaailide
yAraovie(tlahaKa>, aana doika^ in ttixe
aemfMOiiDa a tarn ka MiUwHa ^e
Ja 4ranqiiiliit6iQt la ipalieKoe ^nt fyoi-
3ue«t ladiapeaaaUa moyen poQr.coii-
uiae la nation k un ar«air liaureux .
4andi8 .qu'auHrcnieBt J'ayenir ae kii
4|Bidnerfiit qu'une dtaadutioa M joaa
-ndna toftala. p
Leai^reaeQaenitaiqiii aoocNaipagtt^reBt
.la D6«elotion du ^o ooxenabEe <1880 « et
les jnteokaa des Polonaia leacika, m-
jdiquantdeilamaiii^re la plus pt^ciae
iFiOiBgHM H k .dd?eiopp«nient .d'uae
-laate oonjof ation oontne le gouveana-
jucnt que la Buaaie avait iaaposd k la
£otoj|ne; maia wiaimroenae dispro-
-portion.dana lea aooyenade jMstanoe
aemblerait accuser lea Polonaia , ^ai
,l*.eta(to& ila ae trouvaient; aoMs Ja joug
-vuaae, ae leor edt pam intolMbia.
Suant ^onelibert^iDleineeteomplte,
ina ^laa linMtea de la .oonaMtutioii de
■I8.t6, il 6tait jiasai 4bffioile a aox de
M*y rentenier iqu'ii vAileaandaa de ne
paa ae aonvenir qu^l traaait donnde,
et qu'il avait «la moults de Ja leticer.
-Un yiee-ra daoaractare de Conslan-
(Un dtait tpeq propre a 'pond^rar iiafaa-
ileoMBt m Hoert^ oonatttutionnettea
4le ia nation avac lea >n6oa8Bit6a .qiii
4iaiaaaiant da patronage jakuu .'d*uii
gouYernement ^deapoitique. €e prjnoe
«vait loutea 1^ bixarvariea die son
pk« , at rinoona^enae de sea aetea
tour il tour ampreints d'empovtamant,
4e g^B6roait6 et de mdfianoctaoait
Jea eaprils dana cme appvdhenaion con-
tinuelle ;'aon. manage avae la prlnoaaae
de Lowioe a?ott 'aanaiblemont aaliqd
la fougue de aaa paaaiona, 'mats paa
aeaea cependant pour .que tout le
monde, depuis lea ff^B^rauftJoaqu'au
soMats , ne tremblat en «a praenee.
^love 40 Soiivorof , 11 n*ai^ait bdrHd
S04
L'UMIVEHS.
oue des acaossoires de ton gtoie ; runi-
rorme des troupei , la prMsion mtoh
nique des Evolutions milltaires , tout
rappelait en lut Pierre III et Paul I*^
C^endant les bienfaits de la paix et
d'une administration forte n'avaient
pas 6tE sans r^suitats.
« En moins de dix ans , des routes
que Ton pourralt comparer aux voies
romaineSt sillonn^rent dans tous les
sens h n^aume h tracers les forto,
les martoiges et les sables rebelles ,
depais un temps immtoorial , h tous
-les efforts de rindustrie humaine.
« La capitale , peupl^ de cent quatre-
▼ingt milie flmes, resplendissait de
luxe et d'El^anoe. Architecture , sculp-
ture , g^nie . tout se disputait ie pri-
vil^e d*emoellir Tantique Varsovie.
Les th^fttres , les paiais , les casernes,
les monttments, les promenades, les
places et les rues sortaient comme pw
enchantement du chaos oil les avait
enfouis, sous la republique, un me-
lange bizarre de feste et de mis^...
«.Les provinces se peuplaient et se
oottvraient de villes et ae manufac-
tures...
« Un ministre tonome , industrteux,
remplissait les caisses de TEtat et af-
fermissait Ie cr^it national. Les re-
venus du royaurae s'Elevaient h quatre-
▼ingt-dtx millions de florins polooais;
la banqoe contenait un capital de cent
dnquante niiilions, et Ie tr^or une
r^sorve de trente millions.
« La population s'^tait prodigieuse-
ment accrue dans les huit palatinats
dtt royaume; on v comptait plus de
Suatre millions d^Ames. Une arm^
e trente-ctnq mille braves oomplEtait
sa puissance mat^ielle.
« Le commerce, ce vieii objet d'an-
tipatbie d*un peuple turbulent, guer-
rier et a^ricole, commenqait^ enrichir
les particuliers et les masses (Histoire
de la r^olution de Pologne, par Louis
Mi^roslawski). v II est juste de dire
que r^loquent btstorien que nous ve-
nous de citer compense largement ces
^og^« qui* dans sa bouche, n'ont
jTien de suspect , par les rtoiminations
les plus ameres contre le gouverne-
ment russe; mais les reproches, m^me
fondes, perdent de leur poids lorsque
la passion , edt-elle sa source dans le
patriotisme le plus pur, les dicte et
les exagere.
Cependant nous sommes loin de nier
que ie gouvernement russe n*ait pas,
en Pologne , employ^ des moyens qui
doublaient les dangers du pouvoir en
le d^nsid^rant ; il ^it de son droit
et de son devoir de surveiller ses en-
nemis et de ne pas se laisser prendre
au d^urvu; mais, en voulant com-
primer toute liberty ^ il augmeotait ses
embarras; et ses rigueurs, en torn-
bant souvent h faux, accroissaieot
le nombre de ceux qu'une occasion
favorable ppuvait faire dearer contre
lui. Cest ainsi gue des mesurcs se-
v^res assujettissaient les ^udiants aux
formalit<^ les plus g^nantes. II leur
fallait Tautorisation de I'empereur
pour se rendre dans une university
etrai^^ ; la presse fut enchain^ ; les
delations devinrent un moyen sdr de
parvenir , et une espto dioquisitlon
politique fit d^pendre de rapports de
police la fortune, la silrete et Fhon-
oeur des individus.
Tandis qu' Alexandre immolait ainsi
ses principes aux combinaisoos de la
sainte alliance, ou plut6t, tandis au*il
ae flattait de les voir se r^aliser dans
Tensemble, en les sacrifiant sur quel-
qves points, le congr^ de VErone s*ap-
pr^it h statuer sur le sort de la
Grto. II fallait toute r habiletE de M. de
Metternicb pour persuader ^ Tempereur
deRussie qu'il oonvenait k sa politique
de sacrifier la cause des Grecs , par cela
seul qu'ils osaient recourir a rinsur-
rection. Ainsi les troubles tant de fois
suscit^s en Greoe par la Russia elle-
mtoe; les vues de Pierre le Grand,
cellesdeMunichqu'adopta GatberineU,
toute rexpErieuce du passE ne parent
decider Alexandre h jouer le role que
son influence.en Europe et ses convic-
tions religieuses, d'accord avec le vera
^En^ral des peuples de TOccident et les
mter^ts les plas vitaux de son empire,
lui prescrivaient d*adopter. On sail
qu* Alexandre se trouvait h Lavbach,
lorsque la nouvelle de la lev^ ae bou-
cliers que venait de faire Ypsilanti lui
• •• •
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•• • • ••• •
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RUSSIE.
605
pGorint. avec la lettre par ]aquelle ce
^oce le suppliait de De pas refuser
no appoi h la nation greoque; on salt
qa*il se hftta de faire d^avouer for-
mdlement par ses ministres oette en<
treinise : ne pouvant la consid(6rer,
disait-il, queoomme Teffet de I'exal-
,tation qoi caract^ise T^poque actaelle,
amfli one de rinexp^rience et de la 16-
gerete de oe jeune homme.
U est probable qae le prince Ypsi-
laati avait M encourage par les Russes
enx-no^mes; mais que les id6es de
Tempereur Alexandre s'^nt modi*
flees depuis 1815, on le d^avoua pour
ne point parattre en contradiction avec
le sUUu quo de la sainte alliance : ce
qui vient a I'appui decette bypotbtee,
€eBt que M. uipo-d'Istria, qui ftvori-
sait les mouvements occulted des H6-
tairisl^, fiit disgr^e peu de temps
aprte.
1823. Gqiendantreropereur Alexan-
dre dedara que rarm^e au Pruth obser-
Terait la plus exacte neutrality; M. de
Strogonor recot Fordre de signifler k
la Porte que &a Mdjest^ 6tait d6cid6e
h reiler oompletement ^trang^ aux
meanres inil pourraient troubler la
tranquillite des fitats, et k maintenir
les traites esistaot entre les deux puis-
saoees. L'Autriche appuya diploinati*
ooemeot oette d^uiamie; toutefois le
lunui, pour plus de s6curit6, soumit
k une nsite les vaisseaux qui passaient
le detroit des Dardanelles. Le bon sens
ture ne poavait admettre qu' Alexandre
restit indifii6rent k la cause de ses core-
ligioonatres. Gette determination sou-
k^a plusieurs explications assez vives
entre M. de Strogonof et le reiss-ef-
fimdi. Le mintstre intoguait les traits
ant^rienrs dont les stipulations n'a-
Talent pas pn^TU nettement le cas qui
se pmentait. U appuya avec y^^-
mence sur les cruautes exeroto par les
Turcs pour ^ouffer I'insurrection ,
sans distinction des innocents et des
coopables. II demanda qu'on ne con*
danonAt les Grecs qu'apr^ une en-
qu^te formelle, et qu'on fit cesser les
profanations et les destructions des
f^lises.
« Le rdss-effendi , se fondant sur les
m^mes traits, accusait la Russie de
les enfreindre, en accordant une pro-
tection d^is^ aux rebelles et en re-
fusant leur extradition , quoique ce cas
edt ^ formellement pr6vu par les
transactions qu'elle invoquait. II ajou-
tait que nul traits n'avait pu interdire
au sultan le droit de traiter selon la
mesure de sa s^v^t^ ou da sa cld-
mence, des sujets hivolt^, et que le
patriarcbe de Constantinople arait subi
la peine due k sa trabison, constats
par sa correspondance avec les r6voit^
de la Morto.
« Sur ces entrefaites, Tarrestation
d'un n^ociant grec, accuse d'avoir
fourni des fonds aux insurgds, vint
compiiquer les difficult^ : M. de Stro-
gonof ayant inutilement reclame le
pr6venu comme banquier de la l^a-
tion russe, s'adressa immediatement
au Grand Seigneur, et n'en obtint
qu*un refiis formel.
« D^ lors, ayoute Rabbe^ une rup-
ture entre la Porte et la Russie parut
inevitable, et M. de Strogonof se pr^-
para k partir. Les demi^res notes qu'il
remit au divan (juillet 1821) etaient
encore plus precises et plus fortes.
« Si le gouvemement turc, ecrivait
ce ministre, temoignait, centre toute
attente, que c*est par suite d*un plan
librement arrdte qu'il prend les mesu-
res touchant lesquelles le soussigne
lui a d^j^ expose le sentiment de son
auguste mattre, il ne resteralt k Tem-
pereur qa'^ declarer dk» k present k
la Sublime Porte qu'elle se constitue
en etat d'hostilite ouverte centre le
monde Chretien, qu'elle l^itime la
defense des Grecs, qui d^s lors com-
battraient uniquement pour se sous-
traire k une perte inevitable; et que,
vu le caractere de oette lutte, la Rus«
sie se trouverait dans la stricte obliga*
tion de leur oifirir asile, parce qu ils
seraient persecutes; protection, parce
qu'elle en aurait le droit; assistance avec
toute la chretiente, parce qu'elle ne
pourrait pas consentir a livrer ses frd-
res de religion a la merci d'un aveugle
fanatisme. »
Pour toute reponse k cet ultimatum,
ou vouiut enfermer raoibassadeur russe
506
L'UNl VEILS.
daas le chateau des SepMoura; loette
mesttre, depvislQBgtem^lnusili^f&it
arrfitee par Vlnterveoiion d«s jniaia-
tres .d*AngIeterre <et d'Autriche; Iw
oegociatiojos se pour suivaient, l(vn^pi0
ja note de Tcmpflreur Alexaodrci, aiw
,grandes puifisaocas 4^ TEurop^, I|b
jiioDtra au laende teomroe le «artyr
da 300 propr^ systtoe. Lepriaoe ^w
avait reoveo^ &ip<M^D n'osait abor-
der una ^[uesticA qui touobait de ai
fir^ aux iDt^te de son peuple et k
'hoDoeur oompromis de son -gpuvep-
nement. « Sa Majesty, disait-on daoi
cette note, n'ayant ^riea tant a coeur
Sue ia paoiOcatioa de FEurope, etaii
ispo»6e a faire, pour la conservatiQ*
de la paix, lea plus grands sacrifices,
suppos^ ^e les cabinets europ^eos
.trouvassent daos leur ^agesse de«
inoyeiKs efficaoes pour obteoir de la
Porte ottomane oe met^e les Chre-
tiens de la Tur^uie ^ Tabri d*une r^
petition des scenes violentes dopt ils
avaJent 6i6 victimes; et telles ^tantlea
dispositions de S. M. Imp^riale, les
oours de l!£urctpe .^taieot pri6e» d'ar
vi^r incessamtiient awe juoymis pro*
pres d*atteindre le butd^tr^^iet de la
dispenser ainsi d^obtenir per la force
des armes raccomplissement des oon-
ditions <^e ^'honneurde lacooronne,
le niaiotiendes trait^s, la potection
de lazelieioa cbf ^enne, et l-nuBianite,
lui ont fait ua dewir .d*exiger de la
Porte. «
On ne peut se dissimuler toutefois
QU^il regne dans tootes ces expressions
un sentimemt qui dMIe la lassitude
d-une fausse position, dL le d^sir vif,
quoiqueeombattu, de aortir de cat ein-
barras, jsoit par r«fifort politique de
rallianoe, soit, k defaut aespedient,
par le seul juoyen efiOcaoe, c'est-a-dive,
par riotorvention arinee.
Sans sepffoduire ioi les oole^ qui ia*
rent encore ^ohangees , nous nous bor*
nergns k dire que la Turquie se fefiir
aait k tout Arrangemeirt avant que
rinsufrection fdt ^toufiee. Ce ij/oi
faiaait r^ilement la force du ^raison-
nement turc, c'est qu'au food il
s'aeoordoit avec les prinotpes con*
tie-revofaiiioiinatffes qui faisaient la
basedu A^steme de la«ainte aUiance.
Aiu miueu de eette politique ostea-
Aiblement ;toute de principes , mais que
ia force des choses lanMuait k lout
4noBieot aux n^cessites d'une politique
d*iiKt6r£t8« les cabinets jr edoublaieot de
Joins pour iMtardv la cbute du ^y*-
teme; Bim ^eo ^tavani les piMrties nial
jffarmies de fMioce de r^lliancc^ oo
r^branlait dans son entier. U serait
dtfBeile de s'^sxpliquer Ofupineut des
Jbonunes d'£tat, doAt I'apl^ude ngalaift
l!experience<, avaient pu se Jtracer ^ne
tflUe li^ de conduite, si J'tO^ i^ se
-rappelait qu'ip^a les sacrifices .teor*
•mes de TEurope et les dangers qu V
vaientiXHirus tous lesiibrtoeSi il ^itait
asa^E natwel de beioer ks peupJes de
Tespoir d*un long repos^ifomd^ sur des
pdneipes inflexibles tela que ceux de Ja
religion et de la legftimit^. Si Ton
aioute h ces considerations que Tequi-
liiwe de Ji*£«wetpe, Im d'a«oir M f^-
tabli par le^ngr^de Vienna, se trou*
srait detruit par la puisaanoe enonBe
de 4a Aussie, on -oessena de s'otonaer
^le M. deMettemiob ait soutenu «ne
eombkiaiflon dans laqualie la pi^n*
di6ra«ee de Tempir e orusse ae jteouvait
pour ainai dire neutraUa^ par la oio*
dtottion -tinior^ de aoocbet. hsi i|ues*
tion d'Orient excitai^ k uo haut4iegrtf
la sollicitude du ministre aulrichien;
il voyait .toute la port^ d'uoe interven-
tion ruasedanaJesaffiRiresde laGreee,
et il ne lui fi4 pas diffioile de d^mon*
teerlo^iquemaat k Alexiandre qu« Tin-
sttrraotion des Bell^oes ne poiivait ^tra
appui^^par les mSmes prinoee qui ve-
naient !<r6touffer les r^olutions de
Naples ct du Piknont, et^i prcsori"
vaient k la France, aous :pei«e de aa
voir attequtesur le Rhin,de jeter cent
roille hommea en Espaei^e pour y fpjre
triompher IcfNcinoipe de Fuiviolabilite
des laouferaina. AleModve ^sentit pro-
baUament k pi^e, mais il 6tait trep
eagag^ |iour ceculer; 41 «st d'autont
plus p^nible de.confeJBaer qu'on a ^
tromp^, que la source de rerreur est
as pure et plus jwligieuBe, d'ailleurs
npeneur liJexandre, qui ^tait k la
fois le fondateur et Tappui de rallianoe ,
aoniblait devoir viwre assez loogtampa
RUS8IE.
567
came pour yi'on pAi »<gltt jittniti-
vement ks qamUim ies flui pn»-
futes lie ToKM {AliH^ije «amp6en;
la iiiort pv^matiirte de ccjiriiioe pooQva
^e to loide flMawnent et 4e{Nrogvte
enile, <|aoiqae diffmnte Am «a
aarohe «t ses in, pour let cabnitfti
4»0MK ipoiir ies {«Mlfli. Vratefoii
Tafenira monM queriteitriefae moii-
Ira dan la question greoque an sens
foKtique plus droit, una fvivimm
auesx eotendne, que let eoBemis da
saDelant despotisme des Turoi; et,
apres la aport d'Alcxandie, oe fai le
GoeM^eenvre •de la dfplomatie rvsae
fK da s'appaycr «iir I'entliousiaaiiie
irr^AMiide toua ies petioles poor oon-
lomnier, deoenoert aveeiespuissanoeB
rifales, la mine -de la Turqaie, en la
pmant-d'oo mtoe coup de sa marine
et da aes nusUenres possessions dasM
TArdnpel.
Chaeun des oongrte^qai eurent tiea
dapvis 1M6 peat dtoeeoMUbM-ceinme
an Mile distinct du drame 'politique de
U sainte alliance; mais ie plus rempli
d'ialMtiesty sans oontiedit, eelui de
V^one; c^est lik qve ila cause de la 1^
^^inat^ j'est ddsagiie de la cause reN-
giensa poor Falnorber entidrament.
Le CQoote iletaias dtait debarqa^ k
lAoAna pour parler en &veur dea
Grecs; oa trewfa plus ais^ de lui 1n-
taidne is eongrte inie de lui r^ndre;
eteoaaneiles ooaseqoenees d*un pvin-
eipeftuK m^ent logiqnemeift a ral>-
surde, ks cabinets i^pr^sent^ k Y^-
MM fifsnt innriter le -sultan a nommer
M aadiaasadeur pour y soutenir Ies
droitsde-la Porte. Le Grond Seigneur
decKaa avec iiert^ cette offre bizarre,
sms powoir laaser la longantmite du
ooo^.
Si I'^on ^CMMerrait encore ouelques
iloatM vsor I'h^lsme de r^ignotion
^ sinposait Alenandre, ces doutes
s^nnaDtraient en ilisant le passase
saivaatdanB un diseonrs prononc^ ^Ta
oambre par M. de Chdteaubriand :
" le niisbien aide ,me dit nn jour Vem-
preur Alexandre , quevoos soyez venu
a^erone, afin de rendre t^otgnage
a b T^ii^. AorieK-vous cru . comma
'f disent nos ennemis, que t'alKance
ii*est qu*4Hi not qui ne eart qii*i oou-
^r des anbHiMaf Oela peut^Mre eOt
4U Yxm dsM fanoien Mt de ehoses:
inaia il a'aglt bian aojourdttuj de quel-
^foes mtMts psrtiealiers quand le
flBaade cifilia^ estfn pMI!
« U ne peut plus y avoir de politique
andaise .trance , Tuaae , pfussienne ,
^utnefaianfie; il nV a nkia qu'une po-
litiqneipMrale qdf doit, pour le salut
de tous, Mre admise en eemmun par
•iaa peuples et par las rots. CesI h moi
d^B ne montrer le premter eenvainen
des principes .aur lesquels f ai fond^
j^aAiance. Uneoooasion s^est pr^sent^,
leaoiddfenent de la Grte. Rien sans
doute ne paraissait ^e plus dans mes
snt^rdts, dans oeux de mes peuples,
dans P<^inien de roon pays, qu'une
fneare TCKgieuBe centre la Turquie;
mais i*ai cru aemarguer dans Ies trou*-
bles-auPtfopon^ le 8igner<^lution^
mfine; dds lors ie me sais abstoni.
QaenVt^n pas fait pourrompre Pal-
lianoe? On a eberoh^ tour k tour k me
donner des prdtentions ou k blesser
mm amour-propre; on tii*a outrage
oovertement : on me connaissait bien
mal si on a cm que mes prineipes tie
tenaient qix*k des vanit^s ou pouvaient
e6der k des ressentiments. Pfon , Je ne
me s^parerai jamais des monarques
auxquels je me suis uni. 11 dort Are
permis aux rois d'avoir des alliances
publiques pour se d^fendre oontre leS
socidras secr^es. -Qu'est^ce qui pour-
rait me tenter? qu*ai-]e besoin d'ac-
oroftre mon empire? La Providence
n'a pas mis a mes ordres buit cent
mille soldats pour satisfieiire mon am-
bition, mais pour prot^ger la religion ,
la morale et la justice, et pour faire
r^ner ees prineipes d'ordre sur les-
quels -repose la soci^ humaine. »
Quand la politique d'un cabinet
change tout k coup, non parce que Ies
int^iets out chang^ en m^me tem|)S
que Ies ram>ort8 intemationaux , mais
par suite o^tucs particuUeres du chef
de TEtat , il arrive que mille difficult^s
viennent eiftraver la marche des n^o-
dations , parce que la nouvelle direc-
tion ne se rattachant plus aux pr^^-
dents dtplomatiques , tout est a refaire ,
LUMIVERS.
et« pour atiiai dire, a crter. Dans ce
cas , lea ministres eux-m^mes , quel que
aoit d*ailleur8 leur d^vouement ii la
volenti qui les dirige« opposent h cette
volonU une r^istance qui est celle dea
ehoses , et ne sorteut qu'k regret d'une
vote dont le but leur 6tait conou.
C'est oe qui avait eu lieu sous le regne
de Paul, lorsque ce prince entra brus-
quement dans ralliance fraq^ise; c'est
oe qu'on vit se reproduire dans les
dernieres annto d* Alexandre, k Foe-
casion des affaires de la Gr^ce. La
chancellerie minist^rielle, tout en su*
bissant les oons^uences d*un systtee
va(;ue et de thtories creuses, n'en pre-
nait pas moins ses precautions, pour
ne pas 6tre surprise ouand la politique
positive , celle dfes interdts , reprendrait
Kiveur k I'exclusion de la politique de
{>riocipes. On d^vouait hautement
es chefs de Tinsurrection, mais on
s'appuyait sur des trait^ condus k dea
epo(}ues oil des r^voltes semblables
avaient ^t^ non-seulement encouragto,
mais susdt^es par le gouvemement
russe. L*opinion publique ^tait d*ai|-
leurs peu favorable, en Russie, k cette
religion du statu quo, dont Alexandre
etait k la fois le revdiateur, I'apdtre et
le martyr. Les nobles, apres tant de
sacrifices, trouvaient que le tsar n'a*
vait [las su tirer parti ae la uia^nifique
position que la fortune lui avait faite,
et leur on;ueil souffrait de voir toute
carri^re fermee k leurs inclinations
guerridres , qu*excitaient des triompbes
r^cents. Le clerg6, et avec lui tout le
peuple dont il avait exalte le courage
dans sa lutte contre Mapol^n , ne pou-
vait compreodre que le chef de rilglise
orthodoxy laissAt Jes Turcs niassacrer
des freres en religion. Aussi la politi-
aue du cabinet russe, relativement k
1 Orient , fut^lle plutdt suspendue qu'a-
bandonn^e, et la volonte d'Alexandre
ne fut alors qu*un accident.
Aucune mesure ^nergique et par
consequent efficace ne pouvait surgir
du congres de Verone.
« Lord Strangford avait 6U renvoy^
a Ckinstantinople malgr^ le refus de la
faire repr^senter au congres. 11 avait
mission de demander de iiouveau que
le divan foumtt des preuves de la sin*
eerite de ses dispositions pour la paix ;
3u*il notifiAt k la Russie la nomination
es hOspodars, et fit evacuer les deux
principautds par ses troupes; quMl rt-
tabitt en foveur du commerce russe,
et de toutes les nations cbretiennes,
les roemes avantages de libre naviga-
tion dans la mer Noire, dont on jouis-
salt avant I'insurrection greoque, et
dont on avait 6t6 pri v^ , sous le pretexte
que la Russie avait seoouru les tD-
surges.
« line partre de oes conditions fut
ex^eutee en 1823. Une lettre du reis-
effendi, adress^e, dans le mois de ^
vrier de cette ann^e, au comte de
Nesselrode, par Tentremise de lord
Strangford, en fait foi... De son c&U,
le divan r^clamait rex^cution comply
du traite de Boukharest, et enDD il
demandait le retour d'un ministre
russe k Constantinople, comroe une
garantie des dispositions amicales de
rempereur de Russie pour la sublime
Porte.
« Ges diverses demandes fiirept «u-
d^es dans la demandeque fit le ministre
russe au reis-effendi ; mais lord Strang-
ford fut charee de faireconnaftre verba-
lement cequ\>n ne voulait pas toire.^
La Porte avait extoit^ ce qu'on avart
demand^; mais, ne pouvant nier la
reality des concessions qu*elle veoait
de faire, on en critiquait la forme, on
se rejetait sur des droonstaoces de
di^taif, puis surgissaient de nouveiles
Slaintes sur I'toission r6cente don
rman qui souroettait, disait-on, »
commerce europ^n, dans les mersdu
Levant, k des vexations inouics; eonn
Ton revenait aux (jrecs, au droit de
protection de la Russie : on exiwa»^
que la Porte r^pondtt nettemeot a ce
sujet (Rabbe). » Probablement , on vou;
iait faire entendre a la Porte que, «
elle s'obstinait k rejeter tout arrangej
nient en ce qui regardait les Grecs, on
ne manquerait pas de pP^^^J?5!I«
tirer de Pinterpr^tation des traitttdes
motifs sufBsants de rupture.
Le divan feignit de ne rj*",^'?'
prendre k des exigences qm d«nj^
toient cette moderation de 1 ainance.
RUSSII^.
609
et il r^solut de prendre des roesures
energiques, soit quil se cr^t en ^tat
de les soutenir, soit plut6t qu'il Mt
secr^tement encourage dans sa resis-
tance par le cabinet de Vienne, qui
poussait ainsi Alexandre ju8(]u'aux der-
nieres lioiites de son systeme. D'ait*
leurs, en admettant qu'aucune in-
fluence ^trangere n*edt agi sur la
determination du divan , il ^tait Evident
que la Russie ne pouvait intervenir
efficacement en Turauie qi!i*avec le
concours ou du moins le consentement
de FAngleterre et de TAutriche, et
c*est ce qui arriva plus tard quand les
scrupulesd'Alexanaren'arr^terentplus
le cabinet de Saint-P^tersbourg.
Quoi qu'il en soit, quatre bdtiments
sous pavilion russe furent s6questres
dans le port de Constantinople , comme
appartenant a des Grecs insurg^. Le
caoinet deVienne t^oicna une grande
surprise , et d^lara que le systeme etait
en danger; c^^tait attaquer Alexandre
par son c6te faible. Les deux empe-
rears eurent une conference h Czemo-
witz; M. de Mettemicb tomba malade
pieecis^m^n^au moment de s'y rendre ;
rabsence de ee rooderateur du systeme
laissait h Alexandre les bonneurs ap-
parents d'une resolution non influen-
cee» et tout n'en alia que mieux. Les
deux soaverains se borndrent k con-
veoir de ]*opportunit6 de quelques
mesires de reparation de la part de la
Porte ottoroane. et kurs ministres
furent diarp^s d en determiner la na-
ture et la signification politique.
« Les deux monarques (Rabbe) ne
resterent pas plus de quatre jours en-
semble. Alexandre^ en partant de Czer-
nowitz pour retourner dans ses Etats,
envoya M . de Nesselrode h Lemberg
pour s'y concerter avec M. de Metter-
nidi : M. de Tatistcbef s'y trouva ega^
lement. On y redi^ une note qui
devait etre transmise au divan, tou-
jours par I'entremise die lord Strang-
ford; outre les griefs de la Russie,
deja «t si souvent articuies, M. de
Nesselrode eut Fadresse d'y inserer, au
nora de toutes les puissances chre-
tiennes , une reclamation energique sur
Jes iosultes faites au pavilion russe:
c'etait un acheminement au protooole
du 4 avril , qui fut signe trois ans plus
tard. •
1823-1834. Alexandre voyait avee
mefiance et douleur tous les germes
de mecontentement se developper dans
ses £tats : sa foi dans le systeme Met-
ternich etait dej^ bien ebraniee ; mais
11 y persistait fatalement, en donnant
toutefois h ses ministres plus de lati-
tude, et en laissant k leur sagadte le
soin de sauver les apparences.
Gependant les esprits continuaient
de fermenter en Pologne; Tenthou-
siasme avec lequel on avait salue la
constitution, s'etalt toume en baine
contre le grand-due Constantin et coo-
tre les agents de ses rigueurs; les de-
tentions arbitraires, des ch^timents qui
rappelaient Talliance contre nature du
despotisme avec la liberte, tout indi-
quait qu' Alexandre avait promis plus
qu'il ne pouvait tenir, et gue les Po-
lonais, a la premiere occasion , risque-
raient lepeu qui leur restait d'indepen-
dance , pour arriver a une position plus
franche, fttt-elte meme celle des autnes
provinces de Tempire. Alexandre avait
devant les yeux Texemplede la Greoe;
et quoique la lutte de ses coreligion-
naires epuisftt les ressources de la
Turquie, il redoutait Tefifet que pro-
duisait en Europe I'heroTsme de cette
terre classique de la liberte. Au reste,
il n'est pas douteux que Tentbousiasme
presque general qui se manifesta k
cette epoque, etait plus que de la sym-
patbie pour un peuple cruellement op-
J>rime; c'etait une protestation contre
a politique de Tailiance, qui se trouvait
aux prises avec le principe religieux.
Tandis qu'une police tracassiere
epiait en Pologne tout cequi ressemblait
aupatriotisme, la jeunesserusselaissait
paraltre des germes de fermentation.
Les societes secretes s'or^^isaient
avec ce secret qu'imposent en Russie les
formes expeditives du despotisme; oe
n'etait plus une conspiration de palaiS)
un coup de main , comme les derm'ers
regnes en offrent tant d'exemples : il
s'agissait de changer la forme meme du
gouvernement. Alexandre, sans savoir
jusqu'ou allaient ces tendances , essaya
Sl«
L'UNIVtRS.
#iniBnmer une marehepkis inerf^kfoie
k raamioistratioii. Le prince Aio^an-
dre Galitzin, cbarg^da miDistdre des
cxAtes et de HiMtnietiOD Dubfiqiie* fot
remplac^ par l*amtral Clhichkof ^ otii
portait jusqire dans lea fomwa Hm-
raires sa haine pour tes innoTattons;
toutefois tl s'^it montr^ tout aatre
iorsque le soaverain atait mn sa soK
lieitude h presser r^mancipation mo-
rale de aes peuples; mats il 6tait facile
de reconnartre que son nouvean r61e
allaft mienx h ses conTictions. Dans
son dtscours d'installation, M. Chiehkof
posa en prtneipe, que les classes infe-
rieures de la socim n'ont pas besoin
d'un enseignement ^ndu; que les
lumieres si vant^es, foumies par les
Sciences , sont pintdt funestes qu*a-
vantageuses aux hommes n^ pour
oMir.
Ge n*^it pas seulement dans les
classes elev6es de la society que se r6*
f^lait cette inquietude vague, avant*
coureur dts crises politiques : les sol-
dats avaient apport^ de i'^tranger
guelques notions des formes et aes
institutions de TOoddent : ces peu-
ples, qu*on leur avait d^peints oomroe
un ramas de brigands et d'athto, ils
les iivaient trouves noo moins 8up6-
rf eurs a eux par le lien des iddes mo-
rales, que par les fruits d*une oivilisa-
tton avancee; et comme ti arrive dans
les invasions sur une vaste ^helle, les
mceurs des vaincus r^girent sur les
vainqueurs. II 6tait done urgent de
donner un but h cette effervescence ;
les circonstances rindiquaient : une
guerre nationaie contre les Turcs ser-
vait a la fois les int^rdts g^n^ranx de
I'empire et les exigences <m moment :
mais alors que devenait la sainte al-
liance avec ses th^ries de l^gitimit^
et de statu quo? Si Tinsurrection con-
tre le despotisme des Turcs ^tait ou-
vertement appuy6e par Tautocrate, qui
pouvait pr^voir ce aui adviendrait en
Pologne, dans la crim^ et dans la
Finlande? Ces considerations parais-
sent avoir arr€te Alexandre, qui trou-
vait plus de perils dans sar moderation,
quMI n*en avait renoontreiorsqu*!! avatt
mis sa couronne sous la sauvegarda
de la noblesse, du cknrg6 et de tout
tonpeuple.
« La di^ polonaise ne fut pas con-
¥oqaee en 1834, bien que les assem-
bMes prtmairet se fussent reunies pour
choisnr lemrs dfout^s. Ce retara de
I'appel ordhnire rait aux representants
de la nation ftit bientdt sufBsamment
expfiqne : on avart craint d*exposer b
mesuredontnoosallonsrendreoompte.
It fopposition d*nne assembb^, au sein
de laquelle les elements d'une natio-
nalite renaissante s'^tafent d^ja mani-
festes.
« Dans la repuMique de Pologne, la
2 nalite de ettoyen , dont la dignite itatit
'autant mieux sentie qu'une exclu-
' sion comparable k Hlotisme en privait
la grande masse des habitants, preva-
lait sur tous les titres dont Texercice
de fonctions puMiques ou la naissance
etaient les sources eonununes. L'ega-
lite politique absohie de tons les noem-
bres de la noblesse ^it le principe
fondamental de la constitution... Les
titres de prince, comte, etc., etaient
de veritables anomalies, nees des fa-
veurs dont quelques citojens avaient
ete l*objet de la part des princes etran-
gers, ou introduites dans r£tat par la
naturalisation des families qui les pos-
sedaient; quelle que fdt, au surplus,
leur engine, s'ifs etaient prononces
dans la cnambre des deputes de la na-
tion, ou dans toute autre relation so-
lennelle, c*etait une pure concession
de la seVerite du droil k I'urbanite de
Tusaee.
« Ce orincipe d'egalite avait sunrecu
k tous les malheurs de la Pologne , k
toutes les dislocations quVlle avait su-
bies. Cest pourquoi il y avait encore
en ellequelque chose de resistant k Tac-
tion dissolvante du pouvoir etranger;
c'est pourquoi ses membres rompus et
separes, conservant une vie organique
indestructible, tendaient k se reunir et
k se rajuster. Le danger de ce prin-
dpe, qui avait echappejadis aux cupi-
dites tumuKueuses des rois partaseurs,
frappa le cabinet de Saint-Petersbourg
en 1824. Une commission fat aussitdt
nommee pour aller extirper ee reste de
republicanisme. On imagina avec une
UtTSSIE.
5I(
ngMiC6 ^iMKlle H firatf^iHhPis horn-
nMJpt de iiiettr« aim pn»e» les yivaltM9
▼aiteiise^, $a TeMit^ lea tHtw b^
JMr{Aqo6S Fespectifii'... Lsr oonmnB'
mm aceomi^if son oGOtre : elie ^Mla
IW IMMW#B6 tlMDJAMttat Mstsieiit mh
toriste a fM^ndre le9tflr«i udititedafw
tef hitoraiiei moBareli inKS. En H^
MKaty M 9e tnMvftMwsMMyriflrde
oette nudheareuse r6pablique dei«<»
imiaies &e pHnees , sonant^<]ainze de
oxfltes et vimt de banms. (Rabbe). »
De tttte maaiere, la Rusaie 86 rosier'*
nit le nMmopole des titres, et poa«'
vaif calculer le prix da d^vouemedt*
R^tiompeiner leadociles, a^vircontrf
lei rteistances, telitail le double moyen
sur lequef s'appuyait le syst^me poli*
time; moren £econd et ouissant lors'
mril eat tond^ sur la juatiee, maia
iangereax et pr^caire ioraqu'H n'agit
one sar les passioiis. A cette ^poqne
M soKdarite entre les intMta dea
priaeea, Tactioo des cabinets n*^tail
ploi circonscrite aax frontiires re8pe<y
tNes; leg proscri[>tioii9 comtne lea fa**
f eon) avaient son vent nne sooree ^rai^
ette. Le eboix de nos ambassadeurtf
etait toomia h la cenaore de la sainte
aManee, et, h Ffasoe des ^v^nementa
d'Espagne et do Portugal , des decora-'
tioiis nsm brilldrent sor la poitnne
de nos prinoea et de nos miniatres.
Cette mardte, comme nousTavona
ftmarqo6, bleasait d'aatant pins lea
Rosses qn'elle n'^tait que fexpresaion
<le b volontfi de M. de Metternic^. Pbi-
sienrs dr^nements sinistreSfdans les^
<ipels le people crut reconnaltre la mo-
nife^ation ou courroux o6!este , se auo
c6d^nt coup<sar coup : nous vtHilons
prier de rincenVlfe du palais de Tsars^
Koi^-S^lo, de la maladie s^ieuae de
fempereur, h P^poque mime od se c^^
l^bmitle mariage da grand-due Micbel
ivee la pn'ncesse CharTotte de Wurtem'
Iwg, et de rinondation de la capitate
^ eift lieu au mois de noTembre 1824.
Dte r^poque de la fondatlon de
Si^Pftersbourg, an seindes maraid
fc llngrie et k I'endroit mtote oh les
ttttt de la N6va . qui serYent d*6cou]e^
Jheatau lac Ladoga, se versent dans
KgolfedeFinlaDde,Ie derge,qui voyait
avec fsHve ta supr^butie de Moscou
aacrllRe k une comtnnaison doiit la
baste port^e lai eckappail , a?ai€ re-
paadu vae prMelta, railteura aasea
vraisemblable, sur le sort de la non-
wile cafitafe. F^teraboori;:, AsMt cette
prMMoH, serall eogloatS par les
eatix. Eo ellfet, quafld les vents d'ouest
aoufOint oonstammeflft aitee violenee,
la Mva, refooMe dans son lit, menace
de toatefifahir. « l)n ooragan qui ve«
nait de booleveraer la mer du IVord et
la Baltlqoe, en joncbant leurs plages de
mines, de cadavres d'boromes et de
di6bris de navires , ^leva subitement les
eaux do goife et du fleuve. Les ou-^
vrages de Cronstadt, les ^tabHsse-
ments riverains furent soodainement
endommagds ou emport^; bienVdt la
vMIe elle-mtoe fat envahie par T^t^-
ment ftirieox : les ponts en bois, sub*
mer§[^, diaparurent arracb<§s h Jeoni
pilotis; les quais, lea roagasins, lea
easernea s'^ievaient comroe des flota
au-dessns des vagoea ; lea quartlers les
plus Aleves (urent converts k one hau-^
tear de di% pieda. Tout le d^rdre«
tons les accidents qa*on pent imagi-
ner dans le naufnige d'nne grande
elt^, jetdrent alora Saint-P^ersbourg
dana la consternation et la lerreor }
on nt les sepultures, dana cette mine
oommune, livrer au torrent lea osae'
menta qo'elles renfermaient. Le d^
sastre avait a^vi depuis bail beurea dki
matin jusqn'd trots heures du soir;
les pertes du oommerce farent ^uor*
mes. Les fapports ofBciels, destine
aans doate h detraire Timpresslon qu'a*
vait produite une estimation exager^
des pertes, oonstaterent la mort de
cinq cents hommes , presque tous de la
classe panvre oa appartenant d la fon-
derie imp^aie. Les pertes mat^iel^
les qa*on avait d'abord port^es k cent
millKHts, furent 6valudes k environ un
dnmiidme de cette somme. Gependant
toute la campagne dea environs , aupa*
vant couvero de villaa somptueuses^
^tait comme ras^. La forteresse de
Cronstadt, ses remnarta, ses bastions
etaient d^truits... , la violence de I'ou"
ragan avait disperse I'artillerie qai h^
. rtssait cette forteresse , et des pitees
612
L'UNIVERS.
du poids de cinq^ six tniltiersv defNiis
un sidde immobiies sur leurs lourds
aCTAts, avaient ^t^ emportto au loin
daus la mer eomme de l^ers soli^
veaux.
« A la suite de oe d^astre , une mul-
titude de malbeureux erraieut sur des
dlksombres, sans T^tements, sans res-
source et sans asile. Le souverain ne
fut pas sourd aux cris de leur detresse ;
il assigns d'abord un million de rou-
bles pour venir au secours de ceux dont
les besoins ^taient les plus urgeots;
et, se montrant a son peuple sous un
aspect v^ritablement ^ternel, il par-
courut lui-m^me ia ville, envoya ses
aides de camp sur les points qu*il ne
pouvait visiter, et ne s'arr^ta dans son
activity secourable que lorsque tons
ces iafortun^ eurent un abri et du
pain. » Le zeie des particuliers vint en
aide a la sollicitude de Tempereur : le
prince Alexis Kourakin, fr^re de Tan-
cien ambassadeur pres la cour de
France , fut charge de rassembler et de
reguiariser leB dons volontaires, et
s^acquitta de cette tldie«d la satisfac-
tion g^n^rale.
On remarqua d^ cette 6poque un
changement sensible dans Vbumeur
d'Alexandre, soft que sa constitution
robuste eAt €ti affaiolie par les grandes
^reuves qu'il avait subies, soit que la
cirection religieuse de ses idto edt
triompb^ de ses resolutions politiques,
et que, dans V^i de donte oi^ il flot-
tait, le d^astre de sa capitale eAt pris
a ses yeux le caract^re d un didtiment
providentiel; il parut considerer la
crise de la Grto sous un point de vue
plus national. «Dej^, dit Thistorien
d'Alexandre, on avait r6pandu la nou-
velle que les minlstres ae Londres et
de Vienne k Constantinople venaient
enfin de triompber de Tobstination du
divan, et qu*en vertu des r^olutions
prises a Gzernowitz par les deux eni-
pereurs, de faire la guerre en cas de
persistance de la Pone dans son sys-
teme, les principautes de Valadiie et
de Moldavie allaient dtre ^vacu^, les
entraves mises au commerce et a la
navigation de la mer Noire allaient
disparaltre, enfln que le sort des Grecs
allait <tre assure Pour donfier plus de
credit h ce bruit, M* de Ribeaupierre
fut aussitdt nonun6 en quality d'en-
voy^ extraordinaire et de ministre pl^-
nipotentiaire pr^s de la Porte otto-
mane, dans letpoir, dit Tookasequi
Pappelle k ces fonctions, que: de eon-
cert avee nos aUiUsy nous reussitim
a terminer les malhews qtd dUolesi
fOrient.
« Mais M. de Ribeaupiene n*^t
point parti; les deux provinces nV
vaient pas ^ 6vacu6», ei les armto
russes rest^rent sur le Dauube et le
Prutb : il nV cut de r6el dans tout ce
q|ui avait eteannonc^, que les coooee-
sions faites par la Porte relativenient
h la navigation de I'Euxin. Ce ne fiit
qu'au retour d*un voyage fait dans les
{^ouvernements de Moscou, de Kj-
ouea, de Toula et d'Orembours, et
apres Tinondation de Saint-Peters-
bourg , querem()ereur, enquelque sorte
force par la Toix du ciel et par eelle
des hommes , parut se determiner h des
demarches plus .positives aupres da
divan, et c*est alors v^ue M. Mindaki
fut envoye h Constantinople , en qualite
de simple agent , pour y poursuivre , de
concen avec M. de Stran^ord, un ar-
rangement deflnitif relativement aux
deux provinces et k la Greoe enti^.
« M. de Minciaki fiit parfaitemeot
accueilli par le ministre ottoman ; M. de
Strangford oontinuait egalement k itn
Tobjet des plus flatteuses {Hrevenances ;
cependant on n^avan^ait pas , et la ques*
tion prealable, cdle de revacuation
des deux provinces, etait toujours «i
litige. » Le fil des negodations etait
entre les mains de TAutriche, qui en-
eourageait«sous main la resistance du
divan, et qui prevoyait bien que la
conclusion aes affaires grecques, sous
le protectorat de la Russie, acbeverait
bientdt Tasservissement de i'enipite
turc.
Les propositions de la Russie n*e-
taient point admissibles par le sultan;
car, une fois !es negociations diploina-
tioues entamees, le cabinet de Saints
Petersbourg ne pouvait que renouer la
trame si nabilement ourdie depuis
Pierre le Grand. <i£lles consistaient a
RUSSIE.
61S
noreel^ la Grtee ea fmicipaiit^ dis*
tineteg oui auraient reconnu la suze-
rajnet^ au sultan. * L'analogie de cet
ordre de cboses avec T^tat de la Vala-
cfaie et de la MoMavie ii*^it nen
moinsqa'encooraffeante pour le divan ,
et n^rait guere de nature k coneilier
les tnes des eabinets des grandes puis-
sances. Nous verrons bient6t comment
la France et T Angleterre se troaverent
enlacto dans la politique russe, au
point de lui prater le secours de leurs
Oottes pour racoomjdissement de ses
Toes les plus importantes.
L'abondance des faits politiques, et
reDcbafnement qui seul pent aider h
les (aire bien coraprendre, nous a d6-
toume de la marche administrative et
des r^formes mat^rielies dans Tint^
near de Tempire.
En oe qui regarde les finances , nous
dirons, avec Rabbe, qu^une am^liora*
tion progressive dans oette branche,
snrtout depuis que M. de Gancrin en
avait la direction, avait ^t^ constats
par des rapports pr^sent^ k la fin de
chaqoe ann6e au conseil de surveil-
lance des ^tablissements de credit.
Cepoodant on avait 6U oblig^ de sus-
pendre k systtoe d'op^rations par le-
qud on avait jusqu'en 1822 proc^e
avec trop de rapidity a Textinction de
la dette poUtqiie; c^est-^ndire que Ton
araff reconnu Timpossibilite de retirer
sibitement, et par trop grandes mas-
ses, les assignats en circulation. En
1823, il D*en restait plus que pour une
somme d'environ six cent millions de
roubles , et la loi qui s^opposait a toute
emission nouvelle ^tait maintenueavec
la plus grande rigueur.
Mais I'ann^ suivante, le conseil de
surfdUance d^ara qu'il y avait lieu k
snrseoir k raimination du oapier-
moonaie , operation qui s'^tait faite p^
riodiquement depuis le commencement
do regne d'Alexandre.
■ II avait et6 demontr^, dit h ce
sQJet M. de Gancrin , que la reduction
i^de des assignats n edt pas procure
pia cette fois les avantages qu'on en
pMnraitattendre, puisqu'en accelerant
^ la marcbe de semblables opera-
ws, on risquait quelquefois de se
33* UoraUcn. (Kussie.)t. ii.
mettre en oppositioB avec le princtpe
nitoe. Le n»nps nous appr^idra le
moment ou il sera opportun de reoomr
mencer a retirer graduellement dffJi
circulation lessignes r<^r^entatifs.d«
numeraire. »
• Ce qui r^ulte dvidemment de ce
rapport, ajoute Rabbe, c'est que 1^
gouvememeut russe est bien lorn en-
core de jouir du degr^ d'aisance que le
developpement du commerce et de
I'industrie procure aux nations riches,
dans Tacception v^ritablement ^no-
mique du mot; et, de fait, le com-
merce languissait en Russie. Les ma-
nufactures, faute de capitaux, ne
produisaient pas : dans le cours de Fan-
nie 1822, elles avaient obtenu de la
caisse d'emprunt dix millions et demi
en assienats. L*ann^ suivante, les be-
soins de cette branche languissante
n'avaient 6te guere moins considera-
bles, et la situation du commerce des
matieres premieres laissait beaucoup a
d^sirer; md^pendamment des causes
gen^rales de cette lenteur dans le de-
veloppement de rindustrie russe , cause
qu'il taut chercher dans Textr^me dis-
proportion de la partie libre et labo-
rieuse de la nation k la partie serve et
indolente, dans le defaut de grandes
routes, de canaux et de ddbouchds,
la contrebande, cons^ence naturelle
des prohibitions, est regard6e comme
le plus grand obstacle a la prosperity
financi^re et fiscale de cet empire. »
Les Juifs avaient organist un vaste
systeme de contrebande sur les frontie-
res de la Pologne , et faisaient des bene-
fices considerables, surtout sur la mon-
naie de cuivre qui n*a point subi le dis-
credit des assignats. Les edits les plus
sevdres furent diriges centre eux. Un
oukase de 1824 leur interdit la faculte
de voyager dans Tinterieur, celle de col-
porter des marchandises, et ordonne,
de plus, que ceux qui sont entres en
Russie pour s'y etablir, s*ils n'ont pas
encore ete inscrits dans une dasse
d'habitants, ^eront immediatement
ranges parmi les manoeuvres de dis-
trict, et soumis a la capitation des
bourgeois.
Cest a -cette epoque qu'il faut rap-
9
614
L'UHIVERS.
porter ramngeMwiit qai t^la dttBi*>
tivefliient to puMcntiom de ia Ausne
r<Artiv6S aax irontikw de cet empire
dans rAm^rique du Nord, pretentions
^6 kes Etats-Unis ayaient ^nergiqve-
ment repouss^es.
Si Ton iis^eait des ressources finan-
cidres de la Rossle d'aprds le d^velop-
pement d^ ses forces militaires et de
SB marine, en basanft les d^nses sur
oelles des autres £tat8 de TEurope , on
tomberait dans nne grave erreur. £n
effet, le budget de rempire serait,
dans cette hypoth^, plus qu'absorb^
par oes seu'les branches de service. La
inodicfti^ des traitements dout tons les
grades, le bas prixdes emts d'babille-
ment etd*6qaipement militaires qui se
confectionnenidans les fabriques de la
couronne, Textrdme bon mami^ de la
raain-d'cenvre , les approvisionnements
facility par le systeme qui admet les
impdts en nature, toutes oes causes
r^unies rendent Tarm^e et la ilotte in-
liniment moins on^reuses que partout
aifleurs. l^^nmoins, maigre ces avan-
tages, il ^tffit facile de voir que ia
Hussie serait ruin^e ou grev^ d*une
dette immense avant que le oommerce
de TAsie par les mers du Levant,
objet tie sa constante soHicitude,
pin lui apporter la compensation de
tant d'efforts et de sacrifices. II s*agt8-
salt done de d^ever le tr^or, non-
seulement par des reductions nartielles
et insafBsantes dans reffectii de Far-
m^e, mais par un systeme large , qui
tiendrait toujours h la disposifion du
§ouvemement des moyens puissants
e defense ou d*a^ression. On cnit
avoir trouve la solution de ce probieme
dans Torganisation des colonies mili-
taires ; certes, cette idee, que T Autricbe
a heureusement appliquee, n*est pas
nouvelle. Les populations agricoles que
leur position geographique exposait
aux incursions des tribus nomaaes ou
barbares, impuissantes devant des
masses , t^aient du moins de repous-
ser k main armee les brigandages tsoies
et les attaques partieites. Ainsi les co-
lonies romaines, placees sur la limite
des Ctats qui luttaient encore pour leur
independance, ont teen successive-
iB0DtuneorgMH8alioiiaiiaicigii6,eteilM
se trouvaient ^lenei^ propres a de-
fendre et k envanir.
La premik« application du syst^
des ookHiies miTitaites en Eussie r^
fflonCe a Tannee 1819. Le general
Araktch^ef, autetir du projet, fiit
^duHrg^ de le mettre k execution, et
I'enpereur Aleiandre ne &egligea rien
{KMir assurer le ancc^ de cette grande
mesurec €e lut sans doute poiff ins-
peoter ces nouveaux ^tablissements et
Juger par lui-fneme des avantages et
des inconventents que presentaient les
locaiites, que le tsar eotreprtt de fre-
quents voyages dans les provinces me-
ridionBles de rempire. Ges prenaratift
«larmdrent r£urope, et, maigre le
mj^st^ qui enveloppait les cdonies
naissantes, les investigations des etran-
gers ne tairddrent pas k donnor k cet
j^ard des rense^nements plus ou
moins exacts. Quelques auteurs ont
cru retrouver dans les plans de If onich
I'idee premiere de cette orj^anisatioa h
la fois agricole et mlKtaire. II avait
Imagine , pour defendre I'Ukraine oon-
tre les incursions des Tatares et des
mmuknans , de la ccNivrir par one ligne
de seize retranchements, dont cfaacun
^tait ocoupe par on regiment de dra-
gons.Qnatre regiments demilioeetaient
repaftiB sur toute r^ndoe de cette
ligne, et les homioes ^i la dtfen-
daient, cultivateurs en temps de paix,
se transformaient en soldats en temps
de guerre. Quoi qu*II en soit, void,
d*8pres les observations de M. Lyilli
qui a visite les colonies militaires du
temps d*Alexandre, quelle dtaitalors
leur organisation :
L*empeteur rend nn oukase dans le-
quel sont ddsij^es les vtflages impe-
riaux destines ii reoevoir des otdonies
militaires. Dans les villages ainsi de-
signes, toos habites par des paysans
de la couronne , et par conseqwnt k b
disposition do monarqoe, on ports sur
des registres le nom, Tdge, la pro-
priete et la famille de diaque chef de
maison. Ceux ^iont plus de dnquante
ans sont choisis poor composer ee
qu^on appelle les tneHtres ou les ch^
colons, S*il n'y a pas assez d^hommes
aUHSIE.
6f.^
(ieeet ^e f)our former le nombre re-
guis. on prend ceux dont Tdge se rnp-
proene le pirn de cinqunnte ans.
A la place de leurs eabanes , on leur
construit des matsons alifpn^s en rues.
Ces habitations sont paralleles et s^-
parees Tune de Taatre par one oour.
Chaque mdttre eolon revolt en par-
tage quinze dessiatines (la dessiatine
^uivaut h 109 , 26 d'are) , h la charge
d*entr(^ntr un soldat, sa famille et
«on cheval , si c'est un corps de cava-
ferie qui esrt €tabU dans fe village. En
echange. le soldat doit i'aider dans la
cniture de son terrain et dans tes au-
tres travaux de la campagne, guand il
n'est point occupy h son service mili-
taire.
II depend des chefs miiitaires de de-
signer le soldat attach^ au maltre co-
lon, et d*en placer on avec sa famille
aupr^ de chacun de ceux qui n*ont
point d'en&nts. Le colon chef devient
soldat lui-mtoe, qnoiqu'il ne puisse,
en cas de guerre , marcher en campa-
gne. II pent dioistr dans sa famille un
adjoint pour faider h exploiter sa
ferme; cet adjoint, a la mort du mattre
colon, tui sucoMe, avec ragr6ment
toutefois des autorit^ miiitaires.
Si le mattre colon a plusieurs fits , le
phis dg6 devient son adfjoint; le second
prend les fonctions et la qualification
de r^erve, et on lui donne pour de-
meore uoe maison adjacente; le troi-
si»ne peut 6tre soldat ctdtivateur : les
autres sont classes comme canton-
niers, 3£ves , etc. , ainsi que nous Tex-
pliqnerons ci-apr^.
Le soldat one f on constitue membre
de b famille dn mattre colon, qui
mange a sa table et qui Taide dans ses
travaux, e^ d^signe sous la denomi-
nation de soldat cuUtoateur.
Ces soldats cultivateurs forment la
force effective des nouvelles colonies.
Bans le^ouvernement de Novogorod ,
on ne leur faisait faire que les exercices
de Pinfantarie ; mais dans les trois gou-
vernements du midi de la Russie, on
ks forme h la fois aux exercices de la
cavalerie et de Tinfanterie : ces exerci-
ces sont h la discretion des chefs, et
comme les soldats n^ont, pour coop^-
rer aux travaux de la finraie, que Ic
temps qui n'est pas oonsaer6 aux exer-
cices miiitaires, ii «sl sM de voir que
i'assi'staaoe que peut attendre d*eux le
colon en chei depend presqaetoujours
de la volonte de roffioimr commandant ;
car si celui*ci tient & la s^v^it^ de la
discipliae, surtout pendant la belle
saison , le ookm en cbef ne tirera que
peu de secours du soldat, qu'il a ce-
pendant k sa charge avec son eheval
pendant toute Tannito. Trois jours
d*exercioe par semaine passent pour un
service mod^^, sans compter les gar-
des que le soldat doit montnr r^gmi^-
rement a son tour. En outre, onaque
village RHlitaire est tenu d*envoyer, a
tour de role, un detachement au quar-
tier g^n^ral du regiment pour y faire
le service.
Le soldat eultivateur est soumis au
double service de soldat et de labou-
reur pendant vingt-cinq ans h dater de
son mscription sur le registre, s'il est-
Russe, et pendant vinst ans s^il est
Polonais; apres quoi il est libre de
quitter le service : s'il y reste, il est
dass^ comme v^^ran invalide, et en-
voy^ en garnison. Sa place est remplle
fiar le r^erve dont nous allons par-
er.
Tout pr^s de la maison du colon
dhefj on en construit une exactement
semblable; celle-ci est occup6e par le
reserve, que Fon peut regarder comme
un second soldat cnltivateur; c*est fe
colonel du redment coionisi^ qui le
choisit parmi Tes paysans. Ge reserve
est ordinairement un fils ou un parent
du colon chef. On instruit le reserve
dans tons les devoirs du soldat; il est
destine a remplir en tout point la place
de son prototype, ou 5 faire partie
d'une armee de reserve en cas de dan-
ger. Si le soldat cultivateur est tQ6
dans une bataille , ou vient It mournr
autrement., sa place est occup^e par !c
reserve. Cest par les honimes de cette
classe que Ton remplace encore les
soldats qui ont fait leur temps de ser-
vice. Le reserve, h son tour, est rem-
place par un cantonnier, celui-ci par
un enfant de troupe , etc. Le reserve
doit egalement ooop^rer a la culture .
9.
^16
L'UNIVERS.
aux autres travaux de manage : il est
tailleur, oordonnier, etc.
Le ooloo en chef, le soMat agricul-
teur et le rterve, peuvent se dioisir
une femme; on con^it <iiie, dans ce
systtoe, les nuiriages soient encoura-
ges; ies femmes une fois enMes dans
rencdote des colonies militaires ne
peuvent plus se marier ailleurs.
Les fils du colon en chef, du soldat
cuitirateur, du reserve, de I'dge de
treize h dix-sept ans, sont d^igmte
sous le nom de canionnieri. On les
exerce comme soldats, an les r^nis-
sant dans le village ou r^ide le colonel
et qui sert de quartier au raiment.
lis suivent des ^les pour achever leur
^ucation.
Les gar^ns de huit h treize ans
vont k V6eo\t du village ott demeurent
leurs parents, et, de deux jours Tun,
lis re^oivent une instruction militaire.
Comme les cantonniers, ils portent
Tuniforme et sont regard^s comme
soldats. Les gar^ns au-dessous de huit
ans demeurent avec leurs parents.
L'education des enfants est un des
traits caract^ristiques du systeme.
Tons les enfants rodles sont envoy^s
aux 6coles d'enseignemeot mutuel : 1^
on leur apprend k lire, k ^rire et k
compter; on leur fait aussi apprendre
une espece de cat^chisme sur les de-
voirs du soldat; on les tnstruit a ma-
nier le sabre, aux exercices du ma-
n^e. Quand ils ont atteint TAge de
treize ans, on les rassemble au quar-
tier gdn^ral du raiment, on les forme
en corps, et ceux <]ui se distinguent le
plus par leur aptitude et leur bonne
conduite sont promus au grade d*offi-
cier. J'ai vu (dit M. Lyall) au quartier
g6n6ral du premier raiment du Boue,
au village de Sokolntk, un corps de
deux cents cantonniers marcher, &ire
feu , et ex^uter toutes les Evolutions
avec une prestesse et une precision
Etonnantes. 11 y a parmi eux un esprit
de corps qui ne pent raanquer a'en
faire de bons soldats.
Pour r^ucation des filles, on a
Etabli des Ecoies k la Lancastre dont
on peut esperer de bons r^ultats.
Pour nous r^umer, nous dirons que
les Elements des colonies militaires
sont:
1** Le colon chef ou mattre colon ;
2* L*adjoint ou aide;
3* Le soldat cultivateur qui , ses de-
voirs militaires remplis, seoonde le
colon chef dans ses travaux agricoles;
4** Le reserve aui a les mtoes fonc-
ttons que le precedent, et peut le rem-
placer au besoin ;
5* Le cantonnier, enfant mflle de
treize k dix-sept ans;
6*" Les en&nts de troupe de fault k
treize ans;
T" Les enfants miles au-dessous de
huit ans;
8** Les filles et lea femmes;
9« Les invalides.
On a rejprochE au S]f8ttee des co-
lonies mifitaires plusieurs inconv^-
nients : d^abord ceuii de d^moraliser
les families dans les villages de la
couronne, c*est-a-dire precisdment \k
oil la condition des serfs les rappro-
chait davantage des bien&its d une
Emancipation complete ; ce changement
forcE <retat, et cette agglomeration
fortuite ou arbitraire d'individus, de-
vant nEcessairement reldcher ou rom-
pre le lien des affections qui peuvent
consoler mime des esclaves; on a prE-
dit encore que les soldats seraient de
mauvais cultivateurs, puisqu*ils ne pos-
sEderaient qu*Eventudlement, et que
les paysans rattachEs au r^me nuli-
taire confondraient leur double voca-
tion dans une mlmerEpugnanoe. Quant
ki Finstruction donnEe dans les «x)ies
de ces Etabllssements , on a demandE
k qnoi elle pouvait servir aux jeunes
gens, sinon ill leur fiEure mieux apprE-
cier encore la rigueur des rEglements
qui renferment leur existence dans des
nmites infhinchissables. PTest-il nas k
supposer que le dEsir de la liberte oui
suit toujours les lumidres, ou ramni-
tion d'un dief ne vienne k tourner
contre le gouvernement lui-mlme les
ressources que sa prEvoyance avait
crEees? Quoi qu'il advienne de ces pro-
visions, le systEme des colonies mili-
taires a dEj^'subi d'importantes modi-
fications. On a renoncE k coloniser
rinfanterie; mais la colonisation de la
• • • •
• • •
• • » *
• ••
• « • •
• • ••
• »•• •
• • •* ••••
• •• • •
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• •• •
RUSSIE.
617
oralerie, si babileinent df riff^ par le
conte de Witt, |iaratt avoir aonn^ des
Rsoltats aatisfeisants, oon-seuiement
poor rinstruction des homines, la
btwak et la force des chevaux, mais
encore poar les prodoits de culture qpii
ODt foumi aux besoinB de la oolonie,
et mtee aux approTisioimeineiits ex-
traordioaires qu'ont n^oessit^ les
goerres de Perse et de Turquie et la
derniere Insarrectioii des Polooais.
Nous reoTerrons pour les details les
pins rtents k la relation de M. le doc
oe Ragose, en faisant observer toute-
Ibis que des nioti& fadies k appr^ier
Toot, peut-ltre k son inso, entratn^
hore des limites d'une approbation
impartiale.
Jamais rbistorien ne revtt un Cft*
nctere phis solennel que lorsqne,
debont sur la tombe des princes, il
RKime toot un r^e dans le Jogenieot
qoHl portesur leur mtooire, et se rend
poor amsi dire solidaire des arrto de
la postMt^. Que 8*il a suivi la vie d'un
Snod peuple d^ son apparition sur la
K^ da moode, dans ses transfer*
natjons soocessives, en voyant les
^^aementsr^agir les uns sur les autres
poor i^expliqaer et s'enohatner dans
reuenble, aiors il ne considtoe plus
les mooarques que comme des instm-
BMotsprovidentiels du malheur ou de
^ impute des peuples, de leur
gfn're ou de leur ruine, et, dans Tin-
tait mtoe de la v^t^, il mesure le
Mne ou raoge non-seulement d'apr^
lesaetes en eux-m^roes, mais en rai-
ioo de leor signification bumanitaire.
La mort d'Xlexandre a souleve des
soup^ons que nous ne croyons pas
foodes, non-seulement parce que des
rapports ofBdeis sont la oase de notro
opinion , mais paroe que I'int6r^t mdme
de eeox sur fesquels ont plan6 oes
doates 6tait loin de leur conseiller un
td crime. Ces bruits ont pris trop de
oonsistanoe pour que nous ne re^ar-
dions pas comme utile de les r^ter.
En oe qui r^garde leportfoUo, nous
avooerons iei tout I'emnarras de notre
tkbe; les pr^mptions do Tauteur
anooyme derarticle intitule : Denders
iiiomeiUs de fempereur Alexandre
(n** 84 et 86, page 141 , Mition de Pa*
ris) , reposent sur des donn6es si va-
lues qu*elies nous paraissent tout k fait
madmissibles. Selon cette version , « a
la mort de Paul I", Nicolas Ait destine
Sour 6tre le successeur direct d' Aiexan-
re, m£me an prj^judioe de ses propres
descendants legitimes. D^mentir ce
fait jusqu*^ son accomplissement ^it
le ieu constant de rhvpocrisie et de la
politique. » Ce mode de succession avait
et6 jadis en vicueur, et avait €ik une
source de troubles ; dans quel xntMX les
meurtriers de Paul auraient-ils voulu
faire revivre cette mesure? ^it-ce
K»ur balancer Taotorite de I'autocrate?
ais, en admettant cette supposition,
pourquoi avoir exclu Constantin? Pre-
nons encore quelques citations : « II
avait m 6galement dteid^, a la mort
de Paul, <|u'aprte le regno d' Alexan-
dre, rh^ritage des tsars serait partage
en un empire de Russie proprement
dite, et un autre empire compost des
provinces polonaises et de toutes les
d^pendances de k Russie actuelle. Ni-
colas devait r^ner sur Vun de ces
empires, tandis que Fautre appartien-
drait k Th^ritier legitime d' Alexandre,
ou, k son d^ut, au grand due Cons-
tantin. •
Cette ff^drosit^ des conspirateurs k
r^ard des Polonais, cet abandon des
plans de Catherine II, cet agrandisse-
ment spontan^ d'une nation rivale, d^
passent tellement les bornes de toute
vraisemblance, que nous concevoas
Tembarras de Tauteur a entourer de
telles cboses de quelque apparence de
probability.
«L*em^reur Alexandre, en proie
k des intrigues tellement actives, que
tous ses enorts dtaient impuissants a
leur opposer de certaines bornes , n*eut
point assez d'autorite pour faire ex^
cuter les mesures qui , quaique ^ma^
nant de lui-m^me, s*barmonisaient
n^nmoins avec les engagements doni
ti n^itaU que trop reeuement dilivre,
mais que ses scrupules lui represen*
talent toujours comme existants...
L'empereor se proposait de continuer
son voyage jusqu*aux provinces situ^
sur la roer Caspienne, ou il avait tme
5 IS
L'UMlVfiRS.
sorte d'inteMon de foiuler on ftst in-
dependant ao profit da grand^lric Mi-
cliel. » ^ertes, voitit le chef de la sainta
alliance bien«iiiaocip^; il rendra tout,
iusqB*^ la conqu^te de Jean leTerrUiie;
lea Polonais , ks Snedois et lea Turcs
auroDt bon marcb6 de ce qui restera
a la nourdle ou plutdt a Tancienne
Russie.
« II voulait ensuite se rend re en
VoUiynie, au quartier general dte Yzr*
mbty y jfaire ?enir les grands-dues
Constantin et Michel « et proolamer :
1* JNicolas comme son suooesseur direct
au trdne des Russies; 2* Constantin
comme sotiverain des provinces polo*
naises, avec un territoire qui aurait
embrass^ presque toutes les autres
dependances de Tempire russe en £o*
roM, en mettant en m^me temps ce
frare en possession imm^iate des pro«
vinees polonaises et de quelaues pays
audela, tandis que leresteoes d^^n-
dances ne devait y £tre d^initivement
ajout6 qu*^ ia mort de Tempe-
reur Alexandre. • Comment Tempereur
Alexandre pouvait-il pr^voir que Cons-
tantin, dont rdge diffi^rait si peu du
sien, devait lui survlvre? D'un autre
o6t^, Constantin n*avait point d*heH«
tiers; I'auteur suppose peut-^trequ'il
aurait d^sign6 poor son suooesseur un
prince polonais. . . « Les projets de Tern*
pereur ^ient sinc^es et g6n6reux.
Son erreur consistait sans doute en
oe qu'il ne les expliqua pas franehe'
mentf avant leur mise k execution , k
oeux dont les principes se trouvafent
en opposition n^cessaire, qooique se-
crete, avec les siens; car, si oes adver*
saires les blAmaient, les redoataient,
et nous pou vons dire les d^testaient , ils
p*auraient eependant pas pouss^ Tin*
famie jusqu'a le faire renverser par
des moyens aussi affVeuat que ceux dont
ils se servirent. Mais ^ioign^s de tonte
participation k ses pens^, les enne-
mis cach^ de Pempereur, au sein de
sa famille , ne virent ses projets qu*d
travers une sorte de nuage ^jpais aui ne
leur oermettait mime pas (Ten distin-
guer les ombres, et qui les leur repr^n«
tait sous des Ibrroes trop subversives
de leurs propres pmjets , pour que leurs
conseienees d^a souitt^ eusseot pii
s'arr^ter eneore devant les resolutions
bideuses qu*oa les a vua extoiter...
L'empereur Alexandre mourut de mort
vioiente. L'imp^ratriee devint la vio-
time du m^ne oomplot un peu plus
tatd, mais eependant trop tot pour
Sue les apparenoes mtees nisseat gar-
ies. » Amsi, dans ropinioo de 1 au-
teur, Alexandre aurait sucsombe par
le crime cl*un des membrea de sa fa-
mille; la d^ignation est facile^ si Ton
ae cotitente de^oes indications; mais
comment se fait-il que eeux qui n*ont
pas bimU a saertfier Fimp^triee ^i-
BaMh k leur impatience de r^gncr,
aient permis au doctetir Wilie, au me*
decin d' Alexandre, d*emporter ea An-
gietarre Son terrible secret? Lea res-
sentiments politiques, m^me ceux dont
la source est pure, ne reouleot devaat
aueuns moyens de se satisfairCi
Un historian polonais, oh Ton troQve
d'ailleurs autant de partiality nationale
que de v^itable talent, avanee qu^A-
lexandre a 6te empoisonn^ par le senat.
Cette assertion , que dement la pr^-
dente, n'a pas plus de foodement
( Mi^roslawski , Histoire de la r^volu*
tion de Poloene). Enfin Rabbe, dans
son Histoire d' Alexandre, s'exfMrimeen
ces termes : « £t quelle a m la fin
d' Alexandre? serait-il vrai que Ja puis*
sance qui, depuis 1815, avait exclu-
sivement influe sur ses d^terminatiooB,
k la veille de voir s'^rouler I'^ifice
qii*elle avait bAti sur les pieuses illu-
sions du monarque russe, ait vouhi
a tout prix (sr^venir le scandale de oette
telatante defection : £Eiut-il croire?...
Non , oes sinistres rumeurs ne peuveat
pas toe aooueillies. II n'est du moins
pas permis de dornier une sanction
nistoriqoe ^pieloonque au bruit d*un
attentat qui passerait les homes de
toute perversity politigae. » II est olair
que oette demise insinuation regsrde
rAutriche. Certes, s'il edt fallu payer
d'un grand sacrifice la prolongation des
Jours d* Alexandre, nolle autre puis-
sance n'eOt ^ plus dispose k le taire.
Avec Alexandre, tout ie systeme de
ralliance s^est ^vanoui ; son succesaeur
a saisi d*une main ferme les rtoes -de
mirssifi.
«t9
fcmeire, ei soas Iqi s'tot aocompN ce
oiHs rAutriGhe redoutait le plus, Fin-
(wpemlaDee de taGfi^ S0119 le pro^
Cectorat russe, rabaissement d^finitif
dt hi TUr^uie; enfin, aprds la mort de
ee prmce, les r^roiittioDs de Paris, de
BrBxetles , de VarsoTie , de BniQSwick ,
eo se r^rcutant dans I'Europe, ont
boulevcm toate r^nomie du con-
gresde Yienne,.et rouvert la hitte
entre les yieilles monarchies et les
exigences constitutionnelles.
Cxpendant, ponr qu^nn bruit de oette
nature s'aocr6dite, il faut bien ad-
mettre qn'il y ait eu dans le cours des
^teements des indices assez forts pour
leur prfter un caractere de yraisem-
bhmee : or, nous retrouTons ees indi-
ces dans un concours frappant de cir-
ooastances, les unes poiitiques, les
aiftres pr^entaot mi caractere de vio-
lence qai, h r^poque ou dies eurent
lifil , empMi^rent d'adn^ettre des cau*
ses pnronent accidentelles.
En 1825, on croyait e^ndraiement
(|D'Aiexandre allait prendre une r^o-
Itition ^nergique an sujet de la Gr^;
on ajpprend gu*il voyaee dans les pro-
yineesmeridionales derempire; tandis
que Urns les esprits sont dans Tattente ,
on reooit tout a coup la nouveUe qu'A-
lexanore vient d'expirer a Taganrok,
206 des troubles serieux ont MaU h
^tersfoourg, que Gonstantfn renonce
a la couronne, en s'a?ouant incapable
de Ja porter, et que Nicolas, apr^s
aToir trtomphd d'une insurrection mi-
litaire , est montd sur le tr6ne de toutes
lea Russies. Les revolutions de paiais
si fr^uentes dans cet empire, cette
mort si inattendue, tout, juaqu*^ Td-
loieneroent du lieu de la so^ne, con-
trimiait h rdpandre sur les dernlers
moments d*Alexandre ce merveilleux
tragi^e aui a tant de prise sur Tima-
gination aes hommes.
Apr^ avoir ^tabli que cenx qui ont
prdtendo qu^ Alexandre avait peri de
mort TioJente n'appuyaient leur dire
que sur des conjectures contradictoires
et toutes improbabies, nous allons ex-
poser queiques-uos des documents offi-
ciels que nous adopterons, non paroe
fu'iis ^manent du gouvemement, mais
paroe qu'ils paraiasmt m^rtler une en-
ti^re confianoe.
Au eommeneement de Tautomne,
Alexandre r^lut de faire un voyace
dans les provinces mdridioDales de
I'empire; robjet principal deee voyajge
etait de passer en revue les armees
camp6es dans la Volhynie, dans la Po-
dolie et dans la Bessarabie. L'ernpe-
reur se proposal! atissi de visiter la
Crimde , et spteialement la ville de Ta-
ganrc^, le second port de la mer
Noire. On s'dtait flattd que quelques
semaines de r^idenee dans cette viHe
pourraient ameltorer la santd de l'ffiip6
ratrice Elisabeth, qui, depuis quelque
temps, donnait des inquietudes.
L imp^ratrice partit deSaint-P^terfr-
bourg le 15 septembre, accompagn^
du prince Yolkonski , de son mddeciii
et cPune suite peu nombreuse. Elle
n^arriva h Taganrok que le 6 ectobre:
Alexandre, parti deux jours avant die,
se trouvait dans eette ville depuis le W
septembre.
jL'empereur visits tons les dtaUisse-
ments ; il manifesta fintention de 6ire
construire le lazaret en pierres de
taille, et exdcuter de grands travanx
pour faciliter les aroroches du port.
Apr^ un mois de sejour k Taganrok ,
Alexandre y laissa rimpdratrice, et se
remit en route pour aehever sa toam^
dans la nouvelfe Russie.
Le 24 octobre, arrive h deux verstes
de la viUe de Novo-Tcherkask, il fiit
re^u par le lieutenant gdndral Novafski
et un grand nombre d*officiers supd-
rieurs. 11 desoendit d'abord k la maison
de campagne du comte Platof , ou se
trouvait radjudant gdqdral Tdiemi-
chef. Aprds avoir change d'habits, fil
roonta un cheval cosaque magnifique-
ment hamach6, et alia au-devant de
rhetman, qui, s'dtant s^ard de sa
suite, s*avan^ vers le souverain poor
le complimenter, et lui pr^enter le
rapport de la situation g6ndrale des
corps soumis k ses ordres. Alors Tem-
pereur poussa jusqu'di la suite de Yhet-
man, la salua de la mani^re la plus
affectueuse, et se dirigea avee elle vers
la ca^edrnle. La route ^it bord^
par une fouie nombreuse : Tarr reten-
SS0
L'UNIVBRS.
tissait d*i|Qclainations; des femmes el
de jeunes filles joncbaient de fleurs son
passage; et, lorsquMl arriva k la catbe-
drale, le haut clerg6 vint a sa rencon-
tre pour le eomplimenter et Tintro-
duire. Quand leservice divin fut achevd,
J'emperHur se rendit k la maison de
rhetinan« devant laquelle ^taient dis-
posto. mr deux lignes les marques de
Ai^iqctionei et de faveurs aocordees
afp-Cosaqu^s en recompense de leur
d^vouemeot et de leurs services. Sa
Majesty y re^ut les felicitations des
officiers de la cbancelierie du Don qui
forment le tribunal supreme de cette
province; et, lorsque Alexandre arriva
devant la porte de la maison, les bet-
mans des districts et les chefis des
anciens lui offirirent, selon Tusage, le
pain et le sel... Dans la matinee du
25, Tempereur donna differentes au«
dienoes, et visita les 6tablissements
publics. U retourna a Asof par la route
de Sraro-Tcberkask , et arriva a Ta-
ganrok le 27 octobre.
Le 1 *' no vembre , il partit pour faire
un nouveau vovage dans la Crimee, et
visita MariofK)!, P^r^kop, Sympb^ro-
pol , Bakbtcbisarai et Eupatori. Le 31 ,
li adressa au ministre des finances un
oukase portant : « Que pour adopter
tous les moyens possibles en faveur de
Taganrok, point si important pour le
commerce interieur de la Russie, Sa Ma-
les!^ ordonnait que le dixieme de tous
les droits de douane per^us dans cette
ville, au maximum d'un million par
an, serait mis en reserve pour Tame-
Jioratiop du port et pour la construc-
tion des Edifices necessaires , sur une
edieUe proportionn^ h Tetendue de
son commerce. »
En revenant de la Crim^c, Tempe-
reur fut si frapp^, dans les environs
de S^astopol , de la beaute de la v^
getation meridionale, qu*il dit au ge-
neral Diebitcb et au comte Vosontzof
qui Taccompa^naient : « Si je quittais
un jour les soms du gouvernement, je
voudrais passer le reste de ma vie dans
ce lieu. » Plein de ces idee$, il entra
dans un monastic du voisinage, ou il
demeura plus d'une beure dans une
pieuse contemplation. Quand il rejoi-
Slit son escorte, il se plaignit de ma-
ise et de frisson; la fievre, qui sr
d^lara avec intermittence , devint tout
h coup plus vioiente, et Tempereur se
hdta de revenir h Taganrok , aupr^ de
rimp^ratrice £lisabetb. Comme il etait
done d*iine forte constitution, sa ma-
ladie n'edt point ^t^ dangereuse s*il
avait re^u des secours h temps; mais
il avait jug6 trop legerement de son
mal, et, pendant la premiere quia-
zaine, il refusa de prendre aucun me-
dicament. II ^tait deja trop tard Ion-
Sue enfin il se rendit aux sollicitations
e sa famiiie et aux pieuses remon-
trances de Tarcbimandrite. Sa maladie
empira rapidement; mais il conserva
Tusage de ses sens jusqu'a la derniere
beure, ou il dicta son testament
L'imp^ratrice £lisabetb lui prodigua
les soins les plus tendres; penaantcinq
iours et cinq nuits, elle ne quitta pas
le cbevet de son lit. Les dernieres pa«
roles de Fempereur furent : « Ab! le
beau jour! » Les rideaux des erois^
avaient ^t^ tires, et le soleil d*automiie
dardait ses rayons dans rapparteoieat.
Lorsque Tempereur eut rendu le der-
nier soupir dans les bras de Timp^ra-
trice £lisabetb, elle rassembia ses for-
ces pour lui fermer les yeux et lui
croiser les bras sur la poi trine; apres
cet effort elle s'^vanouit. Les deux let-
tres suivantes Writes par Timp^ratrioe
l^lisabetb, la veille et le jour m^ne
de la raort d'AIexandre, appartiennent
a rbistoire : eiles honorent egalement
Alexandre et celle qui lui a surv^u de
si peu.
Taganrok, i8 novcmbre >8a5.
(3o DO vembre.)
« Ch^re maman ,
« Je n'ai pas ^t^ en ^tat de vous
6crire par le courrier d*hier. Rendons
aujourd*bui mille et mille actions de
graces a TEtre supreme. Decid^roent
la sante de Tempereur, de cet ange de
bonte au milieu de ses souffrances, va
beaucoup mieux. A qui done Dieu re-
serverait-il sa misencorde infinie, si
ce n'etait pour eel ui-ci ? Oh I nion Dieu !
quels moments d'afHiction J'ai pass^^!
Et vous, cbere maman, je puis roe
Ggurer voire inquietude; vous receve;
• • ■ •
• • ••
• • • •
■ •• •
• •• •
• ••
• •
• ■■■
• •••
• •••
• • • »
• • •• ••■ •
• ;•
•• •
•• ••
■• •
nussie*
591
I«s buHetins; votis afez done vu h
Sle extr^mite nous avons ete re-
5 bier, et surtout dans ia soir^;
mais WIlie ( le m^decin anglais) dit lui*
m^me aujourdliut que I'etat de notre
dber malade est satisfaisant; mats il
esX tres-faible. Ch^e maman, je voos
avooe que je ne suis pas h moi , et je
ne puis tous en dire advantage. Priez
avec nous, avec cinquante millions
d'hommes , pour que le Seigneur rende
complete la gu^son de notre malade
bien-aiiii6.
« Notre ange est an del, et moi je
langois encore snr la terre!... Qui au-
rait pa eroire que moi infinne je lui
aurais sanrtoir... Ne m'abandonnez
pas, chere maman , car je suis absoiu*
ment seule dans le monde.
• Notre cher d^fimt a repris son re-
gard de bont^; son sourire me prouve
qu'il est heureux, et qu*il a devant les
jeuz des objets meilleurs que ceuz
d^id^ias. Ma seule consolation dans oe
malbenr irreparable, c*est Tespoir de
ne pas lui sorviTre; j*espdre me bien-
tdl reunie k lui.
« l^LISABBTH. »
lies presMntiments de Timptotrice
oe Favaient pas tromp^; die ne tarda
l»as d rejoinare dans la tombe Tobjet
de ses oonstantes affections.
Cependant P^tersbourg 6tait plough
dans one Tive anxi^t^; les nouvdles
que les oourriers apportaient de Tagan-
rok r^pandalenttantdt i'espoir, tantdt
la consternation. Le 8 d^mbre, on
re^ut des nouvelles plus favorables;
dies ^ient datto du 29 novembre , et
annon^ient, comme nous I'avons vu
phis haut, une amdioration sensible.
Sir James Wilie, dans le bulletin du
mtoe jour, 6crivait qu'au mojen de
v^fulstn on etait parvenu k tirer Sa
Majesty de I'^t iethargique dans le-
qad die i§tait rest^ longtemps, de
sorte qii'on ^it fond^ k en esperer les
r6sultats les plus heureux.
Dans la mating du 9, un courrier
apiiorta la nouvelle que^rempereur
etait expire le 1'' dtosmbre, entre dix
et onze beures du matin. On etait a
cddNrer un Te Deum d'aetions de
^ces, lorsque le crand^duc Nicolas,
instruit le premier de la perte que I'em-
pire venait de £Bire, ordonna de sus-
pendre le service divin, et pria Tar-
chimandrlte de se transporter cbez
riropdvtrice mere pour la preparer k
cette nouvelle douloureuse.
Nous avons cm devoir entrer dans
oes details, qui ne sont pas du domalne
de Thistoire, paroe quil ^tait impor-^
tant de les rppprocber de qudques ¥er*
sions bien dinerentes , et que le lecteur
aurait pu adopter sans examen.
Alexandre lut gen^ralement reg;ret-
t^, quoique sa mort ait ^t^ le signal
d'une r^oltepr^pareede longue main;
c*6tait moins a rbomme que s^adressait
le m^contentement d'une partie de la
jeune noblesse qu'aux institutions elles-
m^roes. Sa pi^te viveet sincere lui con-
diiai t le derg^ ; sa douceur et sa philan-.
tbropie«qu'onretrouvaitpeintessurse8
traits, lui gagnaient Taftection de tous
oeux qui Tapprodiaient; sa Constance
dans Iffi temps difBciles, la gloire des
armes qui se reflete toujours sur le chef,
n*eOt-il d'ailleurs aucune des quality
qui fbnt le guerrier^ tout le rendait
cher k un peuple qui ob^it m^me aux
mauTais princes, et qui professe un
T^ritable culte pour les bons.
La simplicity d* Alexandre avait beu-
reusement reagi sur les mceurs publi*
ques; le godt des arts et de la litt^ra-
ture prit sous son r^e un essor
remaiquable; il combia d'honneurs et
de bieuaits Thistorien Karamzin, dont
la mort interrompit les travaux en
1826. Joukovski, Pouchkin, Krylof,
Dmitrief ont perfectionn^ la langue
po^tique, et un grand nombre d'ecri-
vains distingu^, quoiqu'en general
imitateurs, ont contribu^ a r^pandre
le godt des sciences et des etudes lit*
t^aires. Sous ce regne, dont les quinze
1>remi^res ann^es furent si agitdes,
es connaissances militaires firent de
grands progres, et Tinstruction pu-
bllque re^ut un developpement dont
on a jog6 prudent d*amortir Teffet. La
peinture, rarchitecture, I'art typogra-
phique firent aussi des pas rapides.
Les embeUissements de Saint-Peters^
LiJIII¥B&S.
koait; oiffciit cttle WMe au premicf
nmg des capitoles de J'Ewope , et Vem-
pcreurf a son retoor de r^tranger, put
dire sons^ ciag^ratioa an oarps des
maKhaodB assem W k la Boitrse : « J'ai
visits les dtig lea plus oeMbrea da
rEuvope; je snis heureux de ^ooa dire
3ue Petersbourg est la plus belle vMle
u monde. » •
Par wi eoncoon de circonstaDees
trto-remarquabkiB, le caractte das
prraoes (pri se sont sooeM^ sar le trdne
de Russie depuis Pierre P', a M ain-
gulierement favorable au d^veloppe-*
tnent rapide de la pnissanee et des
ressoarees de oet empire. I^ vie du
r^formateur est une kmgue Intte conbre
les ifKBurs et les pr^juges natioiiaiix;
son g^nie siiflBt h peine k oette tAche ^
la nation , fatigu^ par le travail d'une
civilisation improvise, avait besoin de
repos poor se reoonnaltre, pour ^la-
borer et s'assimiler des changementB
imposes par oukases; les regnes sni*
vants , sous Tadministration de femmea
volttptueuses, ou phit^t sous eelle do
leurs favoris, prennent an caractera
retrograde. Catherine apparatt, me-
lange Rierveilleux de feiblcfise et de
Srandeur, de dissimulation et de force,
e patience et d'orgueil, et portant
jusqu*^ leurs demi^res limites les vices
§riv^ et les vertus des souverains.
ous le sceptre de cette f^e couronn^,
la Russie fait nn pas immense : la Tar>
quie est bumili^e, mais surtout la Po*
logne est partagee ; d^ormais la Russie
est une puissance europ^nne de pre-
mier orare. Comme pour montrer de
quel poids pent ^tre Talliance russe, un
empereur qui porte la bisarrerie jns-
2u*a Textravagance succMe^ la grande
latberine. Un caprice de cet homme
lance une arm^e en Italic; 11 est
vrafi que cette arm^ est command^e
par Souvorof : elle triomphe, c^de
enfln, et se retire; mais la reputation
militaire des Russes est ^tablie. Un
autre caprice de Fautocrate le rap-
proche ae cette r6pubiique fran^ise
qtril voulait an^nttr; TAngleterpe
tremble k son tour, et Tassas^nat de
Paul la d^livre k point nomme de ses
craintes. Mais la vieille Europe a change
de face; toitle r^eifie de la 9^-
blioue, se rteiaiaiit dus la eonq«6e,
se disciplinant sous rtnflutneedu geeic
le plus guerriar dea aiklea medemes,
ae rue sur les trdnea, les renverse, ae
joue de lenrs d^ria, les relive un ins-
taiil pour lea renveraer enoore, et me-
nace tout ce qu'dle n'a pae encore eu
le temps d*atteindre. A cette ^poque et
devant ce p^riK un jeune pniiee 6*est
assissur le trdne dee taera: U ne porte
poittt au front la oiar^iie putssante do
g^nie; ses vertus sont douces, sa mo*
d^ratioii eat ^dairte, mais il n'y a rieo
en 111! de pre^tigieux -comme homine,
eemme aouverain , aurtout eomoie sol-
dat; il s'effiHoe devant lea proportions
gigaatesfiiesdesoQ rival; eteependant
c'eat ce oatoe prince qui Koutient la
rMiftanee impoiasante de sea allies;
ses revers ne I'abatteat point; in^e
vaincQ, il obtient dea oonoitioos booo-
rables; en ehaageant de rd&e dans la
hitte^ il B*en conserve paa rooins la
conacleooe de aa fofoe; enfin il se d^
dare aeul cootre toua, attire rennemi
dans ses deserts, brOle devant le vain-
queur I'antiaue eM que sea aujets ap-
pellent la ville sainte, et, opposant le
nombre au oombre , le courage au cou-
rage, I'eapace et lea ^toents au gMe,
il ne depose I'^p^ que loraque son
noble adveraaire eat hora de combat.
£st-ce done dans le s^ie dea auto-
crates qu'il £Biiit eherdier la cause de
tantde faita extraordinaires? Non sans
doute; la nature n'a pas r^serv^ ses
prMilectioiia pour les latitudes septen-
trionalea : laprepond^ancede laRossie
lient k une multitude de causes, les
unes morales, lea autrea nhysi<{US8;
elletieot a T^tendue de aes mntieres.
k la politique oonatante du gouverve-
ment, a rob^issance passive dea inasp
ses; die tient surtout, il faut le dire*
k d'anciennes rivaiit6a entre les ai^ras
nations de FEiuope , qui , d^suoies d*ftl-
terdts oomme opposees de priocipefi,
tout en vovant le danger qui lea me-
nace, hesitent k se prater aiutudie-
ment une assistance effiQaee,etae eon-
Solent de le6r dependanoe par le spec-
tacle de la dependance des gouverne-
inents rivaiix.
&UMIS*
in
Li moMmtiom ifAiexandfo D*a pac
^ g^n^aUsnieat approuvfe par lea
»; on a trosv^ qu*a r^^vation oit
J'avaient porU lea ^Ttocmenta , de 1 812
i IMS , il aurait pd facitement tirer ud
parti ploa avaotagem de aa pr^od^*
raaoe an Eoiope. Nous orojoas, au
eontiairt, que cettc moderation tint
a tempa poor cahner lea appn&cnaioiia
de l*An^eterre, de FAutrichc et de la
Pruaae. A cette ^poque, soe extension
de fraoli^rM o'etait gu^ praticable
que do oM de I'Orient ; on ne poavait
rattacber une gaerre ooDtre la Turquie
qo^ii la qoestioD greeque; et e'est ce
qui a'eat Kiit plus tard , non-seoleinefit
aree PfnteiitioD d'avanoer vefs les Dar-
danellea et de s'asiurer par des traits
le paaaage Hbn de ee dtooit, mats
pour oeraper raitn^, dent r^meote
de 182S amit dd affecter ie moral. Le
caraetdre pacifique d* Alexandre eon*
trilma done h tranquilliser TEuvope,
et la diroetion politique des eabineta
une fois prise, et leur attention d^
toumde ailleors, il derint utt^eure*
ment bien plus diflSciie d'obtenir I'ae-
eord ndcessaire pour opposer des
obstacles 8(firieox aox empi^tements
ulterieuTS de la Russie. Nous ne pr^
tendons pas ^tablir ici que ee r^uKat
entrait dans les pr^isions d' Alexan-
dre; oette marche ^it dans son ca-
ractere; et la nature mime des ^1-
nements, dans les quinze premieres
anoees de son resne, ry avait fait per*
sister; mais Ferret de eette condoite
mesni^^ , poor Itre naturel , n*en ^tait
que plus ^cace et plus certain. Ausst
cette temperance de rues , quelle qu'en
fdt d*ailleors h source, eut des conse-
quences salutaires pour la Russie, et
sous le rapport de sa politique g^6-
rale, et parce qn'elle lui faissait le
temps de reparer le d^ordre de ses
finances, de fermer les plaies d'une
^ore tongue et d^streuse, et enfin
(Tavancer dans les voles rtentes de
•es institutions. £n un mot, les ver«
tus, et jusqu'aux faiblesses d^Alexan-
dre, apprivois^rent les esprits arec
ridSt de la preponderance nisse, iDs6^
jurable jusqo'alors de prejuges natto-
naux et d'apprehensions legitimes. La
mort ,'qiii enkewa ca priaoe a ^aranto-
buit aas, Ta laitee, pour ainsi dire,
eorapiet pour i'faistoire* en le frappant
a rinstant ou peat-ltre il aUait aban-
donner $ob systeone, sans qu'il i(ki
poasible de prevoir josqu'ou Tentfalne-
rait la pente des eveoeraeots.
Nous avons easay^ de presenter Tein-
pereur Alexandre sous les frfiases {nrin*
eipales de aa vie politique ; nous avons
montre eommeot les taits eux-meroes
cipliquent les contradietions appa*
rentes de sa conduits; parse qu'ii eut
plutdt de bonnes tntentiona que de
grandcs vues, il compromit jusqu'a
sa reputation de droitore et de since-
rite, en deiaisant qudquefois son
propre ouvragp , aon par versatilite oo
absence de principes , mais pour arri*
▼er d*une autre maniere au but qu*il
regardait eomme le plus avantageox.
Les traits aneodotiques que nous
allons rapporter Tiemlront a I'appui
do Jittement que nous avons porte sur
ce prmee : e*est surlout dans la vie
privee , quand , oessant de poser de*
vant rbistoire attentive , les souverains
se montrent tels qu*ils sont, c*est
alors quV>n salsit mieux ieurs traits
earact^stiques , et qu*en les voyant
plus pres de nos vertus et de nos fai*
menes, nous les iogeons avec moins
de raefiance , selon les r^les constantes
de la morale.
« Sa tendresse poor le colonel La*
harpe tenait jplutdt de la piete filiale
que des egards d*on ei^ve; il preferait
sa societe a tous les plaisirs de son
fige. Un jour qu'il se jetait ^ son cou ,
ses habits resterent converts de pou*
dre : Voyez , mon cher prince , lui dit
Laharpe , comme vous etes arrange. -^
Ob! cest egal, repondft Alexandre,
personne ne me btdmera d'emporter
tout ce que je pourrai de mon cher
precepteur. PeOdant son sejour k Pa*
ris,en 1814, il alia visiter madame
Laharpe. Comme elle restait debout ,
II lui dit: Vous etes bien cbangee,
madame. — Sire , repondit-elle , comme
tout le monde; les ciroonstances... --
Vous ne me comprenex pas ; je veux
dire que vous ne vous asseyez |>as,
comme vous avicz coutume de 1c faire,
su
L'UNIVERS.
a ctU d£ TMve de votre mari, en
caiisant famif i^rement avec lui.»
II sut se teoir en garde contre la
(H'odigalit^ ruineuse des r^oes pr^c^
dents; le discernement temp6rait sa
g^n^rosite naturelle; mais, dte qu'il
s'agissait de r^mpenaer les servioea
(Ml le m^rite, il donnait avec grdce,
et s'appliquait surtout k £aire touraer
ses faveura k Tavantege du pays. Quoi-
qu*il godtAt peu la po^sie, feprofes-
sear Haui, ^i dirigeait avec suoo^
i*^tabli8seoMot des aveugles k Saint-
P^tersboorg, lui envoya un jour quel*
ques vers k sa louange ; Fempereur lui
envo^a mille roubles, en lui faisant
savoir qu'il les avatt lus avec plaisir^
ee qui ne r^tonnait pas de la part d*un
homme qui apprenait it lire a des
aveugles.
Sa oienfaisance ^lata surtout lors
de I'inoodation de la capitale: uon
content de prescrire avec la plus ac*
tive sollicitude les mesures r^para-
trices que r6clamaient les ciroons-
tances , il voulut oonnattre par loi-
mime toute T^tendue de oe d^sastre.
Tous les jours , seul ou aocoinpa£n^
du gte^ral Benkendorf , il se rendait
dans les feuboures les plus dcartes,
et consolait les iofortunes plus encore
par ses paroles que par les secours ef-
fectifs de sa munificence.
En 1807, rempereur, dans un de
ses voyages en Pologne, ayant devance
sa suite , vit plusieurs personnes ras-
semblto sur les bords de la Wilia;
et, en approchant de cet endroit, il
reconnut qu*on venait de tirer de cette
riviere un paysan qui ^raissait sans
vie. A rinstant il mit pied a terre , fit
placer le corps sur le bord de Teau ,
et 8*oocupa imm^iatement de lui pro-
diguer les secours que r^clamait son
^tat. L'empereur fut bientot rejoint
par sa suite. Le docteur Wiiie essaya
de saigner le pavsan , mais en vain ;
et, aprds trois neures de tentatives
inutiles pour le rappeler h la vie , il
declara qu'il etait inutile de continuer.
L'empereur supplia le medecin de ne
pas se decoura^er, et de recourir de
nouveau k la saign^e. Cette fois , quoi*
que le docteur d6sesp6r&t du succes ,
le sang panit, et pea a peu le mon-
bond reprit i*u8a||e de ses sens. A cette
vue, et dans Tenifotion de sa joie,
Tempereur s'toia : Mon Dieu ! voiili
le plus beau iour de ma vie! et qud-
2ues larmes s i6chapp^rent de ses yeux.
^n redoubla d'effbrts; Alexandre de-
cbira son nioucboir pour en Her le
bras du malade, et ne le quitta que
loraqu'il le vit hors de danger. Apres
avoir sauve la viedu pauvre Polonais,
il lui fit donner une somme consid^
rable; et , plus tard , il prit soin de lui
et de sa famille.
L'dme d' Alexandre s'ouvrait &cile-
ment aux Motions douces; le beau
dans Tordre physique, aussi bien que
dans i'ordre moral, lui causait de
Tives impressions : mais les seines d*ttn
caractdre simple etaient plus en har-
monic avec ses godts que les beautes
solennelles et s^v^res. L'aspect de
Richmond-HiiUtait, dans son opinioD,
ce qu'on pouvait voir de plus s^ui-
sant. Souvent on lui a entendu dire :
« qu'un propri^taire campagnard an-
glais 6tait un bomme au-aessus de
tous les autres , et que Dieu avait mis
en son pouvoir tous les moyens d'^
heureux. »
L'amour de la justice s'alliait dans
son esprit k l'amour de Tordre. Uo
jour, au moment m^me ou il avait
donn^ le mot d'ordre , et que la garde
k la parade etait sur le point de lui
reodre les honneurs militaires, ua
homme s'approche de lui , couvert de
haillons , les cheveux ea desordre et
I'oeil ^ar^, et le firappe de la main
sur r^paule. Le monarque , qui se te-
nait dans ce moment la face toumee
vers la ligne de front de la garde , se
retourna avec promptitude , et , aper-
cevant cet homme devant lui « il re-
cula d'abord de surprise, et lui de-
manda ensuite d'un air d'^tonnement
ce qu'il voulait. — J'ai quelque chose
k te dire , Alexandre Pavlovitch , re-
gmdit I'inconnu en langue nisse. —
d bien! parle done, r^pliqua Tempe-
reur, en reorenant sou expression ha-
bituelle de oont^. II y eut une lon^ue
pause; la garde militaire restait mi-
mobile, et personne n'osait, ni de la
RUSSIE.
69€
veil ni dii gieste, trouUer cette sin*
goK^ eBtrenifi. Le grand-duc Gons-
tantin, seul , s'avaii^ un peu vers son
frare. Get horoine raoonta alors qu'il
avait M capitaioe an service de la Ra8>
sie , et sVtait trouv^ aux campagnes
de Pnisse et d'ltaJie; mats qu'il avait
^ pers6cttt^ ^r sod chef, et telle-
meot calomnie aupr^ de Souvorof
qu'il avait €t^ cha^ de son corps,
sans amis et sans ressource, dans un
pajs stranger. Plus tard , il avait servi
oomme simple soldat dans Tarro^
russe ; et , a^ant €U gri^vement bless^
il Zdneh (ici il toirta ses haillons et
fit voir piusieurs cicatrices ) , il ^tait
reste , jusqu'^ la fin de la eampagne,
dans one prison francaise. Enfin, il
toit retoum^ a Saint-mersbourg en
mendiant sur les routes , avec le des*
sein de s'adresser k I'eropereur hii-
mime poor obtenir justice, et de lui de-
mander qu'il ordonndt une enqu^te sur
les raisons qui I'avaient fait degrader.
L'empereur Pdcouta avec attention,
et lui demanda eusuite d'un ton s^
vere : I9'y a-t-il pas d'exag^ration dans
le r^cit que vous me faites. — Que je p^
risse sous le knout, dit Tofflcier, si
Ton trouve que j'ai manqu^ a la v^-
rite d'un seul mot. L'empereur fit alors
&igne h son Mre, et le chargea de
Gooduire ce militaire au palais , en at-
(tendaot qu'il pdt lui-meme s'occuper
de cette affaire. Le p^titionnaire ^tant
sorti pur de cette enqu^te , il fut r6in-
t^^ dans son grade, et re^t en
outre une gratification.
Quand il annonca au g^n^ral Rou-
tottsof son 616vation au rang de prince
de Smolensk, en r^mpense de ses
services dans la campape de 1813, il
jo^oit h sa lettre un jovau de grand
prix qui avait fait partie des ornements
de la oouronne imp^iale, comme bom-
mage h la valeur d'un homme par le-
Sef cette couronne avait 6U si habi-
nent d^fendue. II fit remplaoer le
joyau imperial par une plaque en or
sur laquelle ^ait inscrit le nom de
Routousof.
Le grand cbambellan Narychkin , qui
avait plus d'un titre h la faveur de son
maftre, avait re^u de lui une etoile
de I'ordre de Saint-Andr^ , nnnMt en
diamants, et ^vahi^e k trente milie
roubles. Ce seigneur, connu par I'a-
propoa de ses repliques , et plus encore
par le d^sordre faabituel de sa eon*
duite, mit T^ile en gage. Peu de
temps apr^ , la cour donna une grande
f(Ste. Le cbambellan toit dans une ex-
treme perplexity. II ne trouva d'autre
expedient, pour se tirer d'embarras,
oue de s'adresser au valet de cbambre
de I'empereur, qui avait entre ses
mains deux 6toiles du mime module,
mais plus riches , et dont I'une , encore
neuve , codtait soixante mille roubles.
On n'a rien a r^ser k I'^poux d'une
favorite; le valet de chambre, apr^
quelque b^itation, pr^ta I'^toile, et
M. Narychkin parut h la cour avec la
decoration emprunt^. Alexandre , soit
que ie valet de chambre edt tout avon^ ,
soit que la beauts des pierreries lui
edt donn^ qoelques soup^ns , arr^
piusieurs fois ses regards sur cette
etoile , et dit enfin a M. Narycbkin :
«Mon cousin, Je suis etonn^; vous
portez 1^ une etoile qui a infiniment
de ressemblance avec une que je viens
de recevoir des mains du joaillier. »
Pour la premiere fois peut-Stre I'es-
pritde M. Narychkin se trouva en
d^aut. L'empereur, que cet embarras
rendaitplus attentif encore, finit par
lui dire tres-sdchement : « Mon cou-
sin , il faut que je vous dise toute ma
pens6e ; je crois que cette etoile est
la mienne; la ressemblance est par
trop frappante. » II ne restait plus qu'a
faire un aveu p^nible ; le cbambellan ,
en confessant la v^rit^ , se boma k de-
mander la grdea^ valet de chambre.
LVmpereur,')^p§nne par cet aveu,
se contenta def lui dire : « Rassurez-
vous, mon cousin, le d^it n'est pas
assez grand pour que je ne puisse le
Sardonner; cependant je ne [x>urrai
formats porter cette d^oration ; il
faut done que je vous en fasse cadeau ,
h condition qira I'avenir je sois en sd*
rete contre de pareilles appropria-
tions. »
£n 1802, lors du passage de l'em-
pereur, la noblesse de Livonie donna
une f^te brillante, a laquelle, selon
LUKIVKilS.
Tufii^e, Ifls boturgeoit ne purent Itre
adoMfi. AJenndre a'y pavut {hs, «t
doana le leDdeantn un In] ^ la villt
de Biaaf ou il dansa iadistinctemeol
afiee m damBi aobles «t des licmr*
geoiaes.
Pendant la voyage de IIMM, prte
Dorpat , iin postiOoa toarite de ehefai ,
et la Yoitore 4e I'emperear fan paasa
sor ie pied. Alexandre fit arrtor, at-
tendit one faeure ct demie , iusqu'^ ce
Su'on edt fait venir son cnirurgien,
onna cnsnite son moacboir pour sei>
▼ir de lieature, et fit aa Ineaa^ un
present de oinq cents roubles. Le sei*
eneur dn paysan , ie oointe ieelstrom ,
lui aocorda sa liberty. Un inaiTidn lui
offrit cent roubles pour le mouchoir ;
maia l*affranciii dont la Kbert^ avait
sutntement ^v^ les id^es, dMara
qu'il ne s'^n s^parerait pour aucun
prix.
Lors du voyage que fit madame de
Stael h Saint*Petersboure, elle fut pr6-
sentte h Alexandre mA la re^t avec
toute la distinction due h ses talents.
« Voa yeux , (fit le monarqne , se trou-
▼eront id Uess^ de la servitude des
paysans; Fai fait tout ce qui m*etait
permis; fai donn6 la lioert^ aux
paysans 4e flies domaines; mais ie
8UIS dblig^ de respecter les droits it
la noblesse, comme si nous avions
nne constitution qui malheoreusement
nous manmie. » — Sire, r^ndit ma-
dame de stael , Totre caractere est nne
constitution.— En cecas,reprit Alexan-
dre, le ne suisqn^un heureux accident.
Sa bienveillance naturelle n'^it pas
exempte d'une finesse dont le succes
^taft d'autant lAns sCat qu*elle se ca-
chaft sous les formes les phis aimables
et les phis attrayantes. Un jour, on
ini t6moignait la cratnte que les bois
communaux , vendns par OTdre de If a-
pol^n, ne fusseot repris aux acqu6*
reurs. L'empereur, aj;nres !f toerecueilli
un moment, s'expnma k peu pr^ en
oes termes:
« Qu'ils ne craignent pas plus pour
toute espece de domaines d'Etat qu'ils
auront achet^s que pK>ur les biens
ro^mes .dont its auraient h^rit^ de
leurs p^es. La seule bonne foi des ac-
ffrirmn serait one barritee sufil-
saate , quaad mime on n'en aarait pas
d'autret.
«Cenx qaf vous goavemeront ne
toadheroat jamais k oes biens. Et puis
ne troBveroBt*ils pas toujours atec le
temps de boas moyens d'indemniser
pea II peu, subant toiit^ et raison,
les eonnnonaut^s ou les patrticaliers
qal ont de joates droits k r^clamer?
« Imaginez - vous bien que nous ne
venons rien d^foire chez vous*, que
nous n'en voulons ni h la France ni
k ancune olasse de Ftancais , ni i aa-
cun Francis. Tious n'attaquons et ne
poorsaivons que rotre empereur ; noas
n*«n Toulons qu'ii kn.
« Si vous soafirez de notre presence ,
quand nous prenons tant de precau-
tions, songez un peu di ce que nos
peuples ont dd soafnrir de vos troupes.
Je sals tr^s-bien que tons les soldats
ne sont pas aussi r6serv6s que leurs
che£i , malgr^ les plus s^^res exem-
pies de disdpltne. Mais ce que noos
ne iKHivons emp#cher est une suite
inevitable de la ^erre.
« II y avait si longtemps qu^on ne
Favait vue dans vos contrfes! (Test
ce qui vous la fait trouver encore plus
afmuse. Au reste, je sais comDien
sont k plaindre surtout les habitants
de oette vail6e (il 6tait k Bar-sur-Aube) ,
qui est devenue le pivot de nos mou-
vements.
« Dn moins, je puis r^ndredela
conduite de raes Rnsses. Les pr^ten-
dus barbares du Iford sont disaplin^-
lis n'ont pas ^6 gdt6s en faisant la
guerre k l*ecole de Napol6on.
ft Que de mal cet nomme nous a
fait ! II vous parlait sans cesse du g^ie
dn mal; c'est lui qui T^tait... Quede
calamity n^a-t-il pas attir6es sur
vous!... Mais j'espdre que de tous vos
malfoeurs aucun nepourra jamais nous
dtre impute.
« J'aime les Franqals , je les aime
d'mclination. Je me plnis m6me k peib
ser qn'aucun Fran^ais n'est renoemi
ni de moi ni de mon peuple , corome
la Russie est necessairement de la
France ralli6e la plus naturelle et la
plus sdre.
RUfi6iB.
ar
«11 n'y a parmi les Fraa^ais qua
tar cmpereur qoi s^eat £iit moA ea"
« VoQs ne croiriez pas qae je i'ai
aiaa^?.^ Cast pourtant vrai!... De*
anadez h Tolstoi. Ja la croyaia tout
homteiir, tandia qa'il o'^tait qo^orgaail
et perfidie.
«II m'avait sMvit, nsprhs taut da
aaooes, avee aea protestatioBa et sea
diacouTs k TUsitt et k Erfort. TolaM
^tait «acfaaDt6 et tout glorieux du
grand rubaa de son ofdre. Mes n-
aislrea m'ont aomiGent enteodu dire :
Voil^ on souverainl son aHiaaoe ne
peiit qae m'toe honorable autant
qu'otile.
« Oambien ae m*a<t-il pas t^p^
qu'il ae pourait iamats eatrer ni aaas
aea iatmts ni dana son ooear d'etre
une imaute en gaerrea vec moi ! Conune
il mil tromp^! Mais la divine Provi*
denoe m^a seooonk
« Je ne aais yraiment pas bien -en-
core aujocnnflnii pour quel motif il
m'a fait la gnerre. S'il est yenu m*at-
taquer aniquement pour tirer une Ten-
geanee ^Qlataate d'un ancien refos de
nairiage, •oomme en Fa dit, <fdtaiit
one kwigae folte* Si c'«st a oauae d(»
Annals , oh! je ne lui ^tais pent- dtre
qoe trop ffttorable Iti^dessus.
« ie n^aimais neat-dtre ^dre plos
lea Anglais qn'il ne les ainaait lui-
isAne*.. Pourtant jene poisdnoonye-
idr que leurs relictions ne soient utiles
limes peoples...
«I1 ^it si facile que la France,
dans sa position , amenftt insensible-
ment lea Anglais , en entrant d'abord
dans toates leurs tues mercantiles , h
n^ftreplnsun jour que les conducteun ,
courtiers et entrepreneurs de sonoom-
meive maritime!
«L^Europe y aurait gagn6... I^
mauvane politique de votre empereur
a tout perdu... Son insatiable et or-
gueilleuae ambition Ta perdu lui*
m^me... An passage du Kidmen, je
hii fis encore fatre des propositions
pour arriSter la guerre. Je consentais k
tout, n dit It Tolstoi : Cest un verre
plein, Ufaut le vider! Eh bien! H
ravid^jusqa'lilalie.
« Au Baste, s'il veut« aes affaires
ne sent pas encore entidreroent d^s^-
n^te. On vieot de lui faire d'aaaee
bonnes conditions. S*il ▼ aegaiesce,
vous seres bientdt ddMntia^s de
nous. Je suis de bonne foi , nuas je
crains bien qu*avec eat Iiommo4a tout
eela ne tienne pas kmgtaaips. 6*il r»-
luse, ohl akrs, e'en eat £iit; nous
marchons aur Paris , et nous ie detrd-
nons. Cest une afEure ariangte. Et
miels que soient ses demiers efforts,
U faudra ioojours qu'il suoeomhe,
ddt-il rtosir h knar une nonveUe
grande armde. L'Eurape a encore, aa
moment ouje vousparle^plusdequatre
cent mille combattants en France; aix
oent mille lunmnes sont pv^ts k leur
socedder, et nous en l^erons le doable
s'il le isat. »
Gertes, en ae reix>rtaBt>aux enrcons-
tanoes au milien oesquelles eette con-
versation fat tenue, on ne pent qa*ad-
miver toute la finesse du prince dont
Napoleon a dit dupuis ^ue e'>^tait aa
Grec du Bas-Empire.
« Un peu plus tard , dit Rabbe, aa-
qod nous emtyrnntons, en les abr6-
geant , une partiede ces d^ila aaeodo-
tiques , les a\\v^ ayant essuy^ pluaieura
revers, il fut question de repasser le
Rbfn. Le priooe de Schwmtaembei^
insistait sur I'atilit^ de cette retraile.
U d^ira^ qu'on se bomdt k ooeaper
la rive drofte de oe fleuve , et a laisser
la France s'user encore elle-flA^me
pendant quelque temps par faction
des divers partis. II voyalt Napoleon
phis fort et mieux soutenn qwon ne
I'avait nens^. II craignait que les ar-
m^ alli^es, qu*il trouva^d^jd singu-
li^ment affaiblies, ne renoentrasaent
k chaque pas quelque nonveau danger,
et ne finisaent per s'epuiser entiere-
ment en Prance , comme svaient ftiit
les arm^ fran^ises en Espagne.
« Ce fut I'empereur Alexandre qvi
s'y opposa. fl repr^sentait qu'on ne
connaissait gu^ encore I'ennemi au-
quel on avait affaire; que les alliA
perdraient k jamais tons leurs avan<>
ta^ en se retirant; que la France,
visiMenent 6pnis6e par taut d'efforts ,
abandonnait napoleon et mettait en
528
L'UNIVEKS.
eux tout SOD espoir de salut; mais
qu*eo pen de mois, elle pouvait rede-
venir , dans les mains d'un td homme ,
an instrument invincible.
« L'empereur voulut done qu'on re-
doublet aefiforts, qu'on mtt en mou-
vement toutes les rtonres, et qu'on
r^ldt de nouvelles levto; enfin, qu'on
ne laissdt ancun repos aux troupes al-
lito^ aucun relAche k i'ennemi avant
d'avoir atteint Paris. « Ce n'est pas k
Ja France , continue-t-ii, que nous fai-
sons la guerre, c'est k Bonaparte. £f-
for^ns-nous done de lui 6ter prompte-
ment [& France qui lui ^appe. Passons
la Seine a Paris ; voila notre Rhin : et
tout sera termini. »
Dans I'audience qu'il donna, le 2 avril,
au s^nat , il adressa a ce oorp^ i'allocu-
tion suivante : « Un homme qui se di-
sait mon alli^, est entr^ dans mes
£tats comme un injuste agresseur;
c'est & lui que j'ai fait la guerre, et
non pas k la France ; je suis I'ami du
peuple fran9ais... II est juste, il e^t
safe de donner k la France des insti-
tutions fortes et lib^rales qui soient
conformes k ee siecle Claire ; mes al-
lies, tout comme moi , ne sont venus
que pour prot^er la liberty de vos d^
cisions. » •
L'empereur s'arrSta alors un mo-
ment , et reprit avec Amotion : « En
t^moi^age de Talliance durable que
je desire contracter avec votre nation,
je lui rends tous les prisonniers fran-
^ais qui sont actuellement en Russie.
Le gouvernement provisoire m'a de-
mand^ cette faveur. Je Taccorde au
s^nat en cons^ence des r^lutions
qu'il a prises a^ujourd'hui. »
Pendant son &6jour k Paris, Alexan-
dre visita dans le plus grand detail les
^tablissements puolics, les manufac-
tures et les fabriques les plus c^l^res.
II consacra plusieurs beures a la visite
de la typographic de Didot, inventeur
du prdc6de s&reotypique.
II accueillait les corps savants avec
une bienveillanoe qui lui ^tait propre;
etsa conversation prouyait (]u'il n'etait
pas Stranger a ce que les sciences et les
lettres produisaient de remarquable.
II r^pondit k M. Lacretelle qui lui
fut pr^senti k la tite d'une ddputation
de rlnstitut de France : « J'ai toujoun
admir^ les progres que les Francais ont
faits dans les sciences et la Utt^rature.
lis ont beaucoup oontribu^ k r^pandre
les connaissaiices en Europe. Je ne leur
impute pas les malheurs ae leur pays,
et je prends un vif int^rSt au r^tablis-
sementde leur liberty Mon but unique
est d'etre utile k la ]ibert6, et c'est le
seul motif qui m'a conduit en France. •
Dans une visite qu'il fit k I'bdtel des
monnaies, et particuli^ment a celle
des m^ailles , il examina avec int^rlt
les dififerentes collections. Entre autres
m^ailles aui furent frapp^ en sa pre-
sence , on lui en pr6senta une andenne
qui avait 6t^ grav^ k I'oocasion du
voyage de Pierre le Grand en Fiance.
Le directeur offrit aussi k rempereor
une m^aille qui portait d'un o6t^ Tef-
figie de Pierre le Grand, et de I'autre
celle d*AIexandre. C'^tait associer dans
un m^me bommage deux circonstances
bien dififerentes ; mais les arts qui ne
vivent que de faveur et de luxe^ ont
touiours ^t^ courtisans.
De m^me que Pierre P' avait ,voulu
voir madame de Maintenon , survivant
k la splendeur du grand si^le, Alexan-
dre s'empressa de visiter Jos6pbine,
cette femme qui 8'6tait r^ignee a ia
plus sensible des disgraces , mais qui
se trouva faible et inconsolable devant
les revers de Thomme qu'elle n'avait
Sas cess^d'aimer.PIusieursfois Alexan-
re s'etait rendu chez elle , a la Mai-
maison. Inform^ qu'elle etait k toute
extr^mit^, il arriva cbez die ^I'instant
ou le prince Eugene et la reine Hor-
tense recevaient k genoux la hea^ic-
tion maternelle. II assista avec un re-
cueiUement douloureux k eette scene
pleine d'enseignements ; et, lorsque
rimp^ratrice^taitd^jadans le cercueil,
il s'approcha du corps , souleva le lin-
ceul , et , dans unederniere allocution ,
il exprima d'une mani^ aussi simple
que touchante son estioie et ses regrets.
Tel fut Alexandre, daos les diffe-
rentes phases de sa vie politique et pri-
v^e; toujours bumain et bienveillant,
quand le souverain faisait place k
1 homme; mais fondant, pour ainsi
a > • »
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RUSSIE.
62«
dire, tootes ses vertus avec ies vues
les dJos deliees, quand Ies drconstan-
oes le rappdaieot aoz exigences de sa
liaute position. Les qualit&dece prince
furent Fceufre de la nature; sa gran-
deur, oelle de k fortune.
NICOLAS I*'.
(1825.) Plus rbistorien se rapproche
des fails contemporains, plus sa tdche
derient difficile. Quand son regard in^
terroge Ies ^poques lointaines , quand
son jugement ne s'exerce que sur des
dioses oonsonun^s , il a , pour se gui«
der, toute Texp^rience de cenx qui
I ont pree^d^ ; les documents qu'il oon^
suite se depouillent graduellement et ,
poor aiosi dire, par ordre de dates,
de la passion ou des pr^jug^ qui se
mdient aux sources premieres ; il pent
mieux choisir, et ses erreurs memes
oot moins de port^ , car elles soul^-
vent tout ail plus queiques questions
de oritiqae d'un int^r^t purement litt^-
nire: an contraire, torsqu'il essaie
de mettre sons les yeux des homnu^
leoipropre histoire; lorsque, de Tasile
^tdela Tie priv^, il porte ses in-
vestigations sur la marcne politique
des CTteements du jour , et qu*a chaque
^H itooontre des acteurs des scenes
gull dtoit , il lui fiaut faire la part des
int^rlts, et rester en ddfiance devant
les ioterpr^tions les plus formelles ,
resamer oonsdencieusenient toutes
ces Toix diverses pour d^mller le vrai ,
ou, du moins , le probable dont le plus
sonvent Thistoire se contente.
En effet , il arrive que cenx qui ont
ni de pr6s les 6v^nements, ne les con-
siderant que du point oii ils toient
places, sont inhabiles k les coniprendre
dans leur ensemble; r^erivain, dont
laseule mission est de raconter, doit
les examiner a loisir sous toutes leurs
faces oonnues ; et , s'il s'est montr^ ju-
dicieox , les renseignements dont il dis-
pose lui permettent , sinon de pr6sen-
ter un tableau achev^ , du moms d'en
esqoisaer les figures principales.
Cest dans cette position que nous
nous trooYOos; U s'agit de d^rouler les
^rtmitrts annto d*uh r^oe qoi dure
34* Uoraiion. (Russib.) t. ii.
encore , et de lier, enquelque sorte , le
pr^ent a Tavenir ; ici, de bautesoonve*
nances viennent en^aver ies interpr^
tations historiques; favorables au nio-
narque , elles prendraient le caract^re
de la flatterie; severes ou accusatrices,
elles parattraient s^adresser h, des sym-
patbies d*un autre ordre , car I'infor-
tune a aussi ses flatteurs intdresses ;
ainsi, rbistorien , qui se borne au sim-
ple r^it des faits , reste ordinairement
au-dessous de Tattente g^n^ale ; et, si
ses efforts m^ritent quelque estime , ce
n*est qu'aupres d'un petit nombre de
juges, independants , par position et
par caract^re, rie toute i nfluence comme
de tout prejug^.
Nous entrerons dans queiques details
sur la conspiration qui ^lata lorsque
Nicolas monta sur le tr6ne , parce que
cette*s^ition eut un caractere parti-
culier qui la distingue des conspi-
rations de palais, et que le but de
ses chefs rait une rmrme dans les
institutions et le gouvemement. Nous
ne pr^tendons pas. que Tambition , qui
souvent mi^ne Fhomme k son insu , fitt
6trangere au mouTement du 14 (36)
d^embre; mais, pour qu'un grand
nombre de jeunes gens appartenant a
la premise noblesse de FeiDpire, aient
consid^re ces changements oomme n^-
cessaires , il faut que les abus qui nais-
sent du despotisme aient M bien vi-
vement sentis. L'erreur des conjur^
tintsurtout ^ceou'llscrurent possible
et m£me facile d'int^resser les masses
A la r^ussitede leurs plans sp^ulatifs;
r^v^nement leur prouva qu'un peuple
esclave nes'arme point pourconqu^ir
des droits qu'il ignore ; on va voir que,
s'ils obtinrent la cooperation de quei-
ques soldats, ce ne fut qu'en leur per*
suadant qu'ils defendaient oontre Ni-
colas les droits de Ck>nstantin , c'est-
li-dire la forme l^itime de 11i6redit6
an trdne.
Nous avons d^ja dit qWk leur retour
de r^tran^er, en 1818, 1814 et 1815,
auelques jeunes gens con^irent Tid^
a*organiser en Russie des society se-
cretes. En 1817, ces projets prirent
plus de oonsistance. Les statuts de
vUnUm du ndut ou des vrtdt etjid^let
10
sso
UUniVBRS.
enfanU de Id patrie, fwent rMI^^
par le colonel Pestel. Gette sooiM
comprenait trois classes : les frdrcs,
les hommes et les iioyards. Tous a'cu-
gageaient par semoent k se soumettro
aiix dMsions du consefl saprlme dei
boyards. 1Mb Torigine , le bot de oette
associathm ftit le cbangement des ins-
titutioDS existantes dans Tempire*
(GooiBBission d'enou^te.) A la m^ine
ipoque, le general MIcnel Oriof, le
comte MamoDof , et le conieilier d'£tat
aoUicI Touvu^nief , s'occupatent de la
forotttion (rune autre soct^t^ qui de*
Tait porter le titre de SoeUH des ehe^
Miners russei. Le bot de cette asso-
ciation edt ^t^ de mettre un terme aux
ooncussions et autres abus qui s'^taient
gliss^ dans radministration int^rieure
de rempire. Gette mission renfermait
virtuellement la r^forme des institu-
tions dles-Bitees. Toutefois, la so-
ciety dte cheraliors nisses fut bientdt
dissoute; VUnUm ponrsuiyit son or-
ganisation, et changea blent^t son
BOin en oelui d* Union du bienpubUe,
Le r^lemeot subit plusieurs modiO-
cations* Les auteurs de ce r^ement
d^larent, au nom des fondateurs de
rassociation, que le bien de la patrie
est leur seui but, que oe but ne sau-
rait tee oontraire aux vues du gou*
TemeoMnt, et que les travaux ne se*-
raknt poursuiTis ea secret que pour
les soustraire aux interpretations de
la maiveiUanoa et de ki baine. Lea
meoibres ^talent divis^s en quatre see*
tions. Chaoun d'eux devait s'inserire
dens line des sections.
La premi^ avait pour obiet la phi-
lantropie ou les progres de la bienfei*
sanoe publique et |viv^« Bile devait
sunreiiler tous les etaUissemeots de
cbarite, et signaler aux directions de
ees etablissements , ainsi qu*ad gou*
Yemement lui-^m^oM, les abus qui
pourraient 8*y introduire, etlesmoyens
d*y remMier.
L*objet de la seoonde section 6tait
FMucation intellectuelle et morale, la
propagation des lumiires^ retablisse*^
ttient a*6eoles a la Lancaster, et, en
gte^ral , une utile cooperation i Tins-
irutition de la jeunesae, par des cxeoi-
fries de bonnes mceurs, par des entre*
tieus et par des torits eonformes h
ees Tues , ainsi <(u'ao but de la sod^t^,
lequel 6talt politique. Aux roembres
de cette seoonde section Unt coD(Me
la surveillance de toutes les toles.
lis deraient inspirer k la jeunesse
ramour de tout ce qui est national , et
s'opposer autant que possible h ce
qu'on la ftt Clever hors du pays«
La troisieme section surreillait Is
marohe des tribunaux. Ses membni
s'engageaient k ne point se reAiser aus
fonctions judiciaires qui pourraient
leur Mre conler6es pair les ^iectioDs
de la noblesse ou par le gouvenie-
ment; k encoorager les employ^ in-
t^res, ii leur aocorder m^me des se-
cours p^uniaires; a raffermir dans
les bons principes oeux qui trahiraient
quelque raiblesse ; k 6dairer oeox qui
manqueraient de comiaissancs ; k sir
^aler les employ^ pr^varicateurs , et
a instruire le gouvemement de leur
eonduite.
Enfin, les membres de la quatri^e
section devaient s*oocuper de coordon*
ner les ddments pr^par^ par les trois
autres , et se vouer a Tcconomie poli-
tique<
L'activite de Tassociation r6sidait
dans Tuniott oentrale qui se eompo-
sait des plus anciens fondateurs;
son principal objet 6taitde multiplier
le nombre des aSffili^, surtout a Pe*
tersbourg, oik se trouvait la majeure
partie de la direction centrale, (Tui
exeicait le pouvotr k^islatif , tandis
que le pouvoir ex^cutif ^tait confix au
conseil central.
Les membres influents de lUnion
furent kmgtemps avaot de pouvoir
s^acoorder aur la forme de gouveme-
ment qu^il conviendrait de donner k
I'empire; cependant les id^ rcpubli-
eaines triomph^rent; ce qui se oon^oii
facilement dana one reforme essay^
en haine du ponvdr al»olu« La n^
oessite de mettre d mort Tempereur
Alexandre fiit reoonnue par plusieurs;
et , s*il faut en croire la depositioa de
Serge Mouravief, oette proposition
extreme fut adopts en stance k Is
plurality dee voix.
RUS6i£.
sai
Leremords , Th^itation , la cramte ,
» tarderent pas a se manifester dans
une rduaion si Dombreuse; les uns
exjgeaient des inodiOcations aux sta-
tute ;d*aftit res soulevaient des difficult
tes pour se manager la iaculte de rom-
fre des engagements p^Ueux. Pour
ecarter les membres douteux, oo
^gnit d'abandoDoer tous ces projets ,
et Tod declara (|ue rUnion mit dis*
note. Les afOiiations continuerent
dios le midi par les soins de Pestel ;
mais la sodm de P^tersbourg ne par-
viot a se rforganiser que vers la On
de 1822. Elle se partagea en croyatUs
et €0 adhirenU ^ les premiers , qui fop-
majent ia section svperieurCf avaient ,
entreautres prerogatives, celle d'^lire
les membres du Directoire, d'autori-
<er Selection de nouveaux membres ,
€t de se faiire rendre compte des op6-
rations du directoire. Les membres
Doufellement admis ^aient soumis h
diff^^eates ^preuves, comme dans les
loges ma^oxiiques, et passaient par
pkineors degr& d'initiatioD. Vers la
imde 1823, les croyants adjoignirent
a Moiiravief , leur president , le prince
Ser^ Tioobetzkoi et le prince Eu-
gene OU^mski. Vn an apr^, Trou-
Betzkol se rendit ^ Kief, pour sur-
veiUerla eoodaite de Pestel , dont on
a^ffmtioi Yues ambitieuses , et pour
in«t&e en rapport la soci^t^ du riord
it celle da Sua. Les membres les plus
influents da directoire de Toulczyn
etaieat Pestel et Jouscbnevski ; deux
antres comit^ ^talent sutx)rdonnes h
ce directoire , savoir : celui de Ka-
menka, prteid6 par Davydof et par le
prioce Scarge Volkonski , et oelui de
Vassilkof , sous les ordres du colonel
Serge MouraTidT-Apostol et du sous-
lieutenant Beatoujef. Leur but ^taitde
parreoir i renverser le gouvernement
par la r^volte des soldats ; ils recon-
mmnt, apres mAre discussion, que
km projet ^tait inex^table, si Ion
Be sacrifiait Tempereur Alexandre et
Urns les membres de la famille imp6-
rUle.
U sod^ du Sud s*^tait mise en
'spport, quelque temps auparavant,
3iec la soci^ secrae de Pologne,
dont le but ^tait de r^tablir Tind^.
pendance de ce royaume sur le pied oh
elle se trouvait avant le partage. Les
conditions de cet arrangement ne tar-
derent pas k toe arr^t^es par Bestou-
ief-Rumin pour les Russes, etpar
&.rzyzanoTski pour les Polonais. Plus
tard, ces relations entratn^rent de
nouvelles n^ociations , et il fut con-
venu que les pl^nipotentiaires respec-
tifs se r^uniraient a Kief au commen-
cement de Tann^ 1826.
Cependant le comit^ dt Tassilkof ,
c*est-a-dire Moaravief et Bestoivjef-
Rumin pr^paraient un soul^vement
dans la 0* division militaire , qui cam-
pait aux environs de la forteresse de
Bobrouisk, ou elle attendait Tarriv^e
d'Alexandre et du grand-due I9icolas.
A Taide de auelques conjures qui au-
raient pris 1 unltorme des soldats du
regiment command^ par Schv^Ikovski ,
ils devaient s'emparer de la personne
de Tempereur et de celle de son frere ,
soulever les troupes rassembl^es dans
le camp , et , apr^s avoir laiss^ une gar-
nison dans la forteresse, marcher sur
Moscou , entratnant a la r^volte et ral-
liant a eux les autres troupes canton-
n^es sur la route. Cette tentative, ou
{)lut6t ce projet, fut abandonn^; mais
*ann6e suivante, 1824, les conjures
r^solurent d*attenter aux iours d*A-
lexandre lorsquMI viendrait passer la
revue du troisi^me corps, pr^ du
bourg deB^laia-Tserkof. Lorsque Tern-
pereur serait assassin^. Serge Mou-
ravief-Apostol , Schv6ikovski etTiesen-
bausen devaient soulever le camp et
marcher sur Kief et Moscou : de Kief,
Mouravief se serait dirige sur Peters-
bourg pour agir de concert avec ia so-
ci6te du P^ord; mais la revue n*eut pas
lieu , etles conjur^^s ajournerent encore
leurs projets 9 dont iis remirent Tex^-
cution h Tannic 1826. La soci^t^ du
Midi d^couvrit une autre soci^t^ se-
pr^te, celle des Slaves riunisy dont le
but 6tait de r^unlr par un lien fed^-
ratif et sous un m6me regime r^publi-
cain les huit contrees slaves suivantes,
et dont les noms ^taient inscrits sur
un sceau octogone : Russle, Pohgne,
Bohime, Moravie, Dalmatie (Hon-
10.
693
UUNIVERS.
fffie
9avi<
et Transtfivanie)^ (Servie, Mol-
avie et Yalacnie). La soci^t^ des Sla-
ves r^unis comptait environ trente-six
membres, la plupart jeunes ofDciers
d*artillerie. Bestoujef ,membreinflueDt
de la soci^ da Midi, leur repr^enta
3' u'il convenait d'abord. de s'oocujper
e la Russie, et parvint ^ les r^unir k
la soci6t6 primitive. La revue de B^-
laia-Tserkof fut I'^pjoque fixde uour
frapper le coupd^cisif; en attenaant,
ils ne n^gligeaient rien poor mecon-
tenter les soTdats , et pour leur inspirer
le d^ir d*un nouvel ordre de choses.
II n*entre pas dans notre plan de
rapporter tous les details de cette cons-
piration qui dura pendant tant d*an-
n6es, ni m^me de citer les noms de
ceux qui ont ose v prendre une part
active; notre objex est uniquement de
faire comprendre que le gouvernement
despotique ^toit loin de r^pondre auz
id^es de la classe noble : sans vouloir
examiner la question , si le but excusait
les moyens, nous nous oontenterons
de dire qu'un tel projet accusait dans
les conjuri^s une grande ignorance de
resprit des soldats et des masses. Une
revolution de oalais |)Ouvait r^ussir;
une question de principes ne pouvart
avoir de prise sur Tisnmease majority
de la population.
Let conjur^ apprirent tout ensem-
ble la mort d* Alexandre, Texistence
du manifeste par lequel Tempereur
avait design^ Tn^ritier du trdne, et la
prestation du serment de fidelity au
f rand-due Goostantin par tous les ha-
itants de la capitale. En pr^enoe de
cet tenement, on d^lib^ra sur Top-
portunite d'une dissolution de la so-
ciety; Tun des membres, Batenkof,
dit k cette occasion : « L'occasion oui
nous a 6chappe ne se prdsentera plus
dici k cinquante ana. S il y avait eu de
bonnes t^tes an oonseil d'Etat , la Russie
aurait k la fois pr^t^ serment auiour-
d'hui k un nouveau souverain et a des
lois nouvdles... Qu*il est ais^ d'operer
un changement en Russie! il sufnt de
distribuer quelques oukases du s^nat.
Mais la Russie ne comporte point d*au-
tre gouvernement que la monarchie.
Les seulet pri^res pour la famille im-
p^riale y rendent la r^pubtique impos-
sible. iJa monarcbie limits est n^ces-
saire, ne fdt-ce que comme transition. •
Sur Fobservation qu'un monarque con-
qu^rant pourrait toujours convertir
une autorite limits en un pouvoir ab-
solu , il r^pliqua qu'on pouvaft exclure
les hommes du trone, et qu'ils avaient
k cboisir entre deux impi^ratrices el
plusieurs grandes-ducbesses.
Les directeurs de I'association du
Nord, Ryl^ief, le prince Troubetzkoi,
le prince Obolenski et leurs plus in-
times conseillers, ne s'arr^drent pas
lom^mps k Tid^ de la suppression
definitive ni m^me temporaire de leur
society. lis apprirent que Constantin
persistait dans son refus d*accepter la
couronne, et cette nouvelle ranima
leurs esp^rances. lis concurent Fespoir
de soulever une partie des troupes et
du peuple, en leur persuadant que
Constantin u*avait pas renonofi an
tr6ne, et de renverser,.^ la faveur de
cette insurrection , le gouvernement et
Fordre etablis. Ryl^ief, Obolenski,
Alexandre Bestoujef et Rabovski r^so-
lurent, du consentement des sections,
de nommer le prince Troubetzkoi dief
absolu ou dictateur, et on arr^ les
mesures suivantes :
!• Etablir, apr^s avoir aniU Tac-
tion du pouvoir existant, un gouw^
nement provisoire qui aurait oidonn^
dans les provinces U formation de
chambres charg^es d'^lire des deputes ;
y Travailler k retablissement de
deux chambres legislatives , dont Tune ,
la chambre haute, devait itre torn-
pos^e de membres k vie;
3« Faire servir a rex6cution de oes
desseins les troupes qui r^iseraient
de prater serment k Tempereur N ieo-
las, en prevenant tout exo^s de leur
prt, mais en tdchant d*augmenter
leur uombre.
Plus tard, et pour donner des ga-
ranties k la monardiie constitution-
nelle, 11 devait etre proc^de :
A la formation de chambres de
provinces, qui eussent 6t& autant de
legislatures locales;
Au changement des colonies miH-
taires en garde nationale;
V;z.„ y, '//„ ;,v.---: .
• •
• • 4 « 4 w w
RUSSIE.
sri
A la remiae de ia citadelle de P^
tcfsbourg oitre les mains de la muni-
cipality, que Batenkof appelait le
palladhtm des Ubertis russeSy et ou
devaient aussi £tre plac^ le conseil
munidpal et la gard^ dvique;
k la proclamation de Tind^pendanoe
des umversitds de Moscou, de Dorpat
et de Vilna.
Les conjures n*^ient pas d*accord
sar le personnage qu'il conviendrait de
mettre a la t^ du ^ouTernement ; rim-
possibility d'uoe republique leur ^tait
demontr6e ; mais, quel que (Kit le chef de
I'^tat, lis voulaient lui iroposer leur
constitution. Batenkof fit observes i
Troubetskoi que si tous les soldats
pr^alent serment h Constantin, Far*
riv6e de ce prince h P^tersbourg leur
Sterait toute chance de succ^ ; il opina
poor que les conjures se partageassent
oe teUe sorte que les uns proclame-
raient Constantm, tandis que les au-
tres se declareraient pour Nicolas. Si
ie parti de Gonstantin Temportait, on
esperait que son frdre consentirait k
retablissement d*un gouvemement pro-
visoire, ou qu'il ajournerait son av^
nement au tr6ne; nans oe dernier cas ,
on prtenteraitcet ajournement comme
one abdication, et Ton proclamerait
empereor le fils atn^ de Nicolas,
^kxaodre Nicola^vitch. LMncertitude
du suooes et le petit nombre d'offiders
g^Q^raux sur lesqueis on pouvait comp-
ter les emoMgch^ent de s'arr^ter k une
determination d^nitive en ce qui re-
gardait le chef f utur.
C^endant , diez Ryldef , comme au
lieu a^ign6 pour un rendez-TOUs e6«
n^ral, arrivaient de toutea parts des
conjures avec des plans, des proposi-
tions, ou pour prendre les ordres des
direeieurs. Le 1 2 d^cembre , deux jours
avant eelui de Tinsurrection , se rendi-
rent chez Ryl^ief le prince Troubets-
koi, ks trois fr^res Bestoujef, Obo-
leoski, Kahovski, Arbouzof, R^in,
le oomteKonomitzin , leprince Alexan-
dre OdoieYski, Soutfaor, Poustcbin,
Batenkof, Takoubovitch, Stcfa^pin-
RostOTski. Nicolas Bestoujef et Arbou-
sof r^pondaient des marins de la garde ;
d*au^^ offiders promirent Tappui de
3uelques compagBfes des raiments
e Moscou et de Finlande; Odoievski
r^p^it avec enthousiasme : « Nous
mourrons, mais avec quelle gloirel •
Dans la soiree du 13, la r^nion ne
fut ni moins nombreuse ni moins tur-
bulente; on y proposait k Tenvi les
mesures les plus extrtoes, et Texalta-
tion 6tait k son combie. Cependant les
eoniur^ savaient positivement que le
lendemain, 14 dMembre, devait pa-
rattre le manifesto de Tempereur Ni-
colas sur son av^ement au trdne. Le
premier procureur Krasnokoutzki ,
memhre oe rassociation du Sud, les
avait pr^venus que le s^at se i^ftunirait
k sept heures du matin pour la presta-
tion du serment.
Les prindpaux agents avaient dijk
communique leurs intentions aux sim-
ples membres de la soci^tt^. Le prince
Obolenski avait annonc^ k ces demiers
que, par ordre du dictateur et du di-
rectoire, ils devaient s'efforcer, le jour
qui serait fix^ pour la prestation du
serment. de soulever et de conduire
sur la place du S^nat autant de sol-
dats de leurs raiments que faire se
pourrait, et que s'lls n'y r6ussissaient
point, lis devaient au moins se rendre
sur les lieux de leurs personnes. On
devait agir sur I'esprit de la troupe, en
lui persuadant que la renondation de
Gonstantin t&tait suppose. Les conju-
re se flattaient que Tempereur, loin
d'employer la force contre les rebelles,
renoncerait aussitdt k ses droits de
souverainete, et entrerait en n^oda-
tion avec eux. Alors ils auraient dictd
les conditions suivantes : 1"* que des
d^ut^s fussent oonvoqu^ de tous les
gouvemements; T qu^il fdt public a
ce suiet un manifests du s^nat, dans
lequel il serait exprim^ que ces d^put^
auraient ^Hoter de nouveUes lois or-
ganlques pour le gouvemement de
rempire; S* qu'en attendant, un gou-
vemement provisoire fAt ^tabli , et que
des depute du royaume de Pologne
fussent appd^, afin d'adopter les me-
sures n^oessaires pour la conservation
de Tunite de TEtat.
Quelques-uns des oonjur^ oonfidrent
k des lettres le secret de leur entre*
534
L'UNIVERS.
prise. Poustdiin (xri^HSt h Moeoou :
«i ;Nou8 aorions in6rit6 a Juste titre le
nom de Iddies, ri nobs OTions !aiss^
^^chapper roccasion actuelle. Noos
sommes ici soixante, et nous pouvons
compter sor quinze cents soldats...
Adiea; donne-nous une lurme, si... »
Getle lettre, ainsi mi'ane autre ^crite
par Troubetzkoi, devaient itte moti-
Mta k Moscou, kux g^ntonx Yon
Wieseo et Miehel Orlof , soit qu*on
espMt attirer ces deux <»efs dans le
mouTement pre^t6, soit qneces der^
niers , d^l liuorm^s de tout , n^eossent
eonsenti aparattrequ*en caader^ussite.
Malgr6 lea iDcertitadefe qui Tag!*
iaient, le prince TroubetzkoT ne re*
nonqa pas ouvertenaent I Pexeroioe de
son poavoir dictatorial. II fat arr^t^
qu*M se porterait le lendeinain sor la
place do Senat pour se mettre h la t^te
des trotipaa qai refuseraient le ser-
ment. TaRoobo^iteh , et te colonel Bou-
latof qui devait agir sur Tesprit des
grenaaiers du corps, avaient mission
Se comniander sous ses ordres.
Dans la matinee du 14 d^mbre,
Yakovbovitcb, Arbonzof, Alexandre
Bestoajef et plusiears autres officiers,
vinrent troafcr lea matelots. A I'ar-
rri^ du general RMjor Sdiipof , cetix-
d re^iamnt de preter serment. Le
g^niral fit arr^er les oommandants des
eompagnies; moif Nicolas Bestoujef
eagaffea plusieurs de ses complices h
les delivrer. Dans cet instant, un cri
part : Sotdats! entendez^vaus ces di-
chargetf ce sont txxr camar4ide8 que
ton massacre I et le bataillon entier
s*eiance bors des casernes. Les offi-
ciers, qui jusqu'alors n'avaient pris
aucuoe part aa roouvement, march^
rent k la suite du bataillon. Les mate^
lota rencontrtent , pris du manage de
la garde k cheval, le lieutenant Ts6-
brikof dn r^ment de Finlaode, qni
lewr oria : En carr6 eontre ia cava-
kriei
Dans le r6eiinent de Mosoou, la re-
bellion aTBit dej^ commence. Le prince
StohepiB-RostoTski , Miehel et Alexan-
dre Bestoujef, Broke ct Wolkof, par-
ooururent las 3*, 8*, 5* et 6* eompa-
gnies , repetant sans cesse aux soldats :
« On nous trompe en ezigeant de nous
ce serment; le grand-doc Gonstantin
n'a point renonoe k la couronne; il est
dans les fers ainsi que le grand-due
Michel, chef de notre raiment. »
Micbel Bestoajef s*toiait : « L*empc-
reor Gonstantin augmentera Totre
aolde; main basse sur tous ceux qui oe
lui resteront pas fidelesi » Ce Bestoujef
ct le prince StdMpin ordonn^rent aux
eompagnies de prendre des cartouches
il bailes et de charger leurs armes. Ce
dernier ordonna aux soldats iosarg6s
d^enlever le drapean et de repoasser
les grenadiers a coups de crosse; iui-
Intoie se pr6cipite sur le g(&n^ral Fre-
dricks^ qu' Alexandre Bestoujef mena-
cait d^}h do pistolet, le blesse ^ h t^
et le fait tomber sans connafssance; il
aejette ^lement sur Ies6n6ral Scbens-
chm, lui porta nne proronde blessure,
et continue longtem|is k le sabrer; le
colonel Khvostcbinski , un sous-ofGcier
et un grenadier sont bless^ presqu*en
rn^me temps par le mtoe conjure ^
qui crie ami: soldats : « Je vous tuerai
tous!» Mattre do drapeau, il dirige
les eompagnies mutinies vers la place
do S^at.
La revolte s*op€ra par les ro^mes
moyens dans ie r6giment des greaa-
diers du corps. D^k , malgr^ les efforts
du sous-lieutenant Kojevnikof , les sol-
dats araient prM serment, lorsque It
lieutenant Sutbof , el un outre otncier
Domm6 Panof , les rallik^ent au part*
qoi croyait chifendre les droits de
Gonstantin. Plusieurs individus per**
tant rhabit bourgeois, arm^s de poi-
guards, de pistoiets et de sabres, se
ndldrent dans leurs rangs.
Les limites de notre cadre ne
sous permettent pas de retracer les
^vtoements da eette Jouni^e; pres-
que tons les chels de la con^ira-
tion abandonn^rent k finstant du
danger eeox qo'ils avaient mis en
avant. La fermetA de I'empei^ur Ki-
oolas d^joua leurs projets, non sans
qu'il en oodtdt le vie a un grand nom-
bre de victiwes. De tous ceux qui
avaient organist le complot, et qui
comptaient en tirer 4eB a vantages in-
diviuuals, le seuJ Yakoubovitch paya
ftUSME.
4tt
4f f»f«no«Ae i flMMeft mteto pmiuii
4to i» »6vo|tp «t uu as««E grwMi oombre
(l6 soldaU rdsialerei^ iiM^u'ibtt soir.
Kaho?ski blessa mottAWmmi^ d'ua
£oup de pistQlet » le g^eral ooiote Mv
loradovitob) et tua aussi de sa inaia le
colonel Srurler; SLudielbecfcer diricei
son pUtolet contre le grand-due Mi-
4:hel, maia lee matelote euK-mtoes \m
arr^t^rent le brae; Boulatof oe parut
5iir la plaee que eomme speetateur; le
prioce TnHipetslu)! ee deroba k see
oQinpIioee, et vioi k Tetat^^icuor g(^
A^ral prater eernept ^ renipereur
Nicolas; il sy trou^a osal a pluaieum
reiMriaee; eDOn il alia passer la mitt
4aa»la mgieon du mioistre d'Aulriebe,
oa le oomte Ifesselrode le r^ciaina par
ordre de I'einperettr* Eyl^ief, cber*
cbaot partoat le.dictateur et ae le tron-
vaot Das* prit le parti de ae retirers
Bateakor tmt la mtoie oonduite; le
«>loQel Boulatof temoigna uq vif re*
peotir, et son eialtation pr^tant plus
de force k ime maladie oout il etait
attaqing, il suceomba le 19 jan?ier de
Ymn^ suivante, l^uaot le sort de see
eofants au mooar^ue dont il avail
conspire la parte. L'enseigne prince
Odoierski resta loogtempe cadi^ aoua
Varche d'un ppnt; enfin, r^lu de
sortir k tout prix d'une telle situation «
il M reodit ehez son onde , le e^nateur
Dinjtri-Landakoi, aui le conduisit im*
m^iateoMnt ebes 1 empereor...
la tranquillity ne fut troubiee sur
aucun autre point de I'empire, si ce
Q*est il YassilMof et aux eoYirons. Dans
la ▼ille de Moscou^ quelques-uos dee
memfares de la soci^te seer^ essays-
rent vainement de r6veiller quelque
sympatbie pour des honimes aont la
cause etait perdue. Pestel , d^jl^ arr^t^ »
a?ait dit au prinee Serge Volkonski :
« He eraigoes rien; sauvez seulement
mon code rusae; pour ma part, ie ne
ferai aueune r^roation. » uspenaant,
comma I'atteste la eoRunission d*en-
qu^te, il a DonuB^ tous ses compliees »
qui out €U enToyes k P^tersbourg par
les auterit^ locales.
Serge et Matthieu Mouravief avaient
^te arr^t^ par le lieutenant-colonel
Gebel; mais plusieurs officiers appar-
teneRl a la siMiM des fitevea vteiiie
lee deftlfrirait. jUors Serge Mouniyier
in^solut de Boulever le r^ment de
Tebernt^of. Les eeojuff^ eotrSnul
aane r^s tanoa dans VassBkof , oi^ iie
fureot rejekle pmr pinafeun offieien.
Mouravief peueait k se porter, on but
ILief , OD sur Mam-Tserkof , ou enfin
euf Jitouair pour ofittr sa jonelioB
avec les officiers de la sooiM des
Slaves r^nis; il prlt la rtelutton de
Aire un nouveiDent sur Brooasilof ,
4*otk il aurait DO. en un jourde nar*
ehe, j^agner Kj« ou Jitomir, suivaot
les oirooDstanees, Avant de partir,
Taumdoier du tegioaent e^l^ra rofBee
divin , et lut il la troupe un catedibme
oompos6 par BestDUjef-Huniia, dans
lequel Tauteur ^tablissait que la d^*
VBoeratie (§tait la senle fome de cou-
Kernement agr^ble k Dieu. Mais il
falhit employer d'autres aijiumente
pour la convafnore, et Ton invoqua«
comrne k Petersbourg, le nom et lee
droits da grand-due Constantin. Daue
leuf maroie, ils entratn^ent one
povtie de la oompagnie des aoueque-
teires, N*mnt auoune oouveile de
Kief « et inKMrmd que les troupes qu'uo
des leurs eomptait soulever n'raieni
point k B^aia-Tserkof « Mouravief ro«
louroa vers Tilessi^; nuis il rencootn
k quelque distance le dtochement de
bussards du g6n6ral (jeismar, qui aviit
Me envey^ k sa pourauite. 11 veoaitde
donner ordre aux soldats de ae porter
sur les pidees, lorno'il tomba sans con*
naisaauce, bkss^ d un eoup de mitrailiet
revenu k lui, ii voulut raAier les siene «
mais inutilement; ses propves soldats
le livr^ent, ainsi que Bestouief-Ru^
min, au cbef d'escadron du regtraeaft
de Marioupoi qui avait ebMs^ Ice ror
belles. Hippdyte Mouravief fnt tud
dans Faction; le lieutoiant Kouzmin
se brdla la ca*velle en prdsenos dee
deux Mouravief, avec lesqoeis il Malt
enferm^. Les autres fiurent pris imm6»
diatement ou arrMs dans leur fuite.
Les plus compromis furent ignoroi-
nieusementpendus; les autres subirent
la degradation et I'exiL La princease
Troubelilioi ne voulut point quitter
son man , et ne pouvant le sauver, die
L'UNIVERS.
s'asaocia gAi^reusement a sa fortune.
Cette conapiration , dans laquell« trem-
p^rcnt tant de jeunes militaires de ia
plus beUe esp^rance, ^choua par plu-
sieurs motits, d'alM>rd parce qu'iis
manquaientd'anchef, ensuite, oomme
nous I'avons dit , parce quMla avaient
inal jug^ de Teapnt des masses, trop
fa^onnees a robeissance passive pour
ooniprendre et soutenirune r^voiation
de principes; enfin parce au'ilsrencon-
trerent dans le prince qu'ila voalaient
d6trdner un homme complet pour le
despotisme. Patient, telaire , inflexible,
calculant froidement la port^ des fa-
veurs et des supplices, Nicolas est [^ur
la classe immense de ses sujets qui ne
sait que prier, ob^ir et mourir, le vrai
type de rautocrate.
' Cette conspiration explique mieux
^e ne pourraient le taire des vo-
lumes de reroarques et d*observa-
tions , r^tat moral de Fempire russe ,
les dangers et les ressources du
pouvoir, la ligne profonde qui s^
pare les classes inferieures de la no-
blesse; nous avons suivi et sou vent
reproduit textuellement le rapport de
la commission d*en^u6te instituee par
le couvernement lui-m^me; mais I ap-
pr&iation des faits appartient h qui lei
expose, et nous dirons, sans nous
laisser dominer par ce sentiment qui
s'attacbe au malheur dans la lutte in^-
gale entre le puissant et le faible, que
si le chef de T^tat avait le droit de
s^vir, bien des circonstanoes auraient
l^itim^ sa cMmence. Nous ne parlous
pas des soldats ni deoeux qui croyaient
6tre fiddles a Gonstantio , ceux-Ia m^-
ritaient non-seulement una amnistie
entiere, mais une recompense; nous
ne d^fendrons pas Tambition de quel-
ques conjur^ dont le bien public n*6tait
que le pr^texte, mais nous pensons
Sue le plus grand tort de ceux qui
esiraient une r^forme fut de la croire
possible. L*6ducation des jeunes nobles
confiee a des strangers, la direction
ordinaire de leurs etudes, tout sem-
blait les porter a ^tablir dans les ins-
titutions une Emancipation qui se trou-
vaitdans leur intelligence. Apr^ avoir
bris6 ia resistance , le pouvoir reconnut
lui-mtoie oette v^t^, en s'elfHtant
de modifler le systeme de i'instruction
tant publique que particuli^re , de telle
sorte que oe systeme se trouvdt plus
en harmonic avec les conditions ^ou-
▼ernementales de Fempire. Parmi lei
r^ormes administratives essay^ par
Fempereur actual, quelques-unes pa-
rattraient emprunt^s au code russe
(RoDskaia-pravda) de Pestel.
On se rappelle que les Turcs, pro-
fitant de la longanimity d' Alexandre,
et encourage par les suggestions de
FAutriche , s'^taient refusS^aux arran-
gements que le cabinet*de P^rsbourg
avait ju^es convenables pour amener la
pacification de la Grto sans troubler
la paix g^n^rale. A la mort d*Alexan-
dre, les ciroonstances entre la Russie
et la Porte ottomane ^taient done
telles, que la guerre pouvait ^ater au
premier moment^ et avec une grande
apparence de justice. Le nouveau tsar
^tait appelE, non moins par la foree
des cboses que par son caraet^re, a
adopter une politique plus franehe et
moms padfique que celle de son fr^re.
II 8*agissait pour lui de satisfaire aux
exigences nationales, et surtout de
retremper par une guerre Fesprit de
Farro^, ou la r^volte de Saint-P^ers-
bourg avait laisse de nombreux germf s
de m^fiance et de m^ntentement.
De puissants motifs portaient en outre
la Russie a ouvrir la lutte centre FO-
rient, avant que la reforme militaire
qui s'introduisait simultan^roent dans
la Turquie et dans la Perse edt port^
tous ses fruits, et opposE une bar-
ri^re insurmontable aux empi^ments
de Fempire vers Fest et le sud. Toutc
Fattention de F£urope, excite par la
longue lutte que soutenait la Gr^
contre ses oppresseurs , embrassait en
m^me temps, avec un soin curieux,
les rapports de la Porte avec la Russie.
II Etait important pour le cabinet de
Petersbourg d'amener la France et
FAngleterre a faire cause commune
avec lui , et a sacriffer les int^r^ts les
Rlus vitaux de FEurope h une com-
inaison qui devait reduire la puis-
sance de la Turquie dans FArchipe!,
an^antir ses flottes, et preparer ainsi
RUSSIE*
it?
\m foiet k rambicion moaoovfte. On
salt aT6c quelle adresse 1^ agents
diploQDatiques de I'empire amenerent
ee d^oAment. Le temps d'agir contra
la Turquie n'teit done point encore
feou , mais lien n'emplchait d*en finir
<Pabord atec la Perse, ^i plus tard
uottvait operer uoe diversion flSiclieuse«
Let Persans ail^rent eux-mtoes au-
derantd'une rupture. Le prince AU>aa-
Ifirza, impatient de ?oir see troupes
nouvellement organise se mesurer
eoatre les Russes , entra subitemeot en
Gtergie. D*un autre cdU^ Schah-Ali-
Mirza, autre fiis du roi, r^lut de
faire une incursion le lona des riyages
de la Caspienne, a la t6ie d'environ
dmize niiUe hommes. Ge dernier en«
vahit les provinces de Rarabah, de
ChirTan et Chekinsk, avant que les
Rosses aient eu le temps de prendre
des Diesures pour repousser ses atta-
quea. Les Persans prirent Leukiran,
Saiian etbloqu^rent Bakou. Us allaient
assizer Rouban, apres avoir compl6*
tement tounie toute la chalne du Cau-
case. Le g^ntol Jermolof comnian«
dait le corps d'arm^ du Caucase. Ses
troupes, disstointe sur un vaste es-
paoe, ne pouvaient faire £sice k la fois
sur tous les points menace. Le g6-
n^ral Paskevitch viot a son aide; il
partit de Tiflis a la t^te de cinq ou six
iDiJIe bommes , renoontra Abbas-Mirza
k deal lieues de filisavetpol , et le d^l
oompl^tetnent. La nouvelle de cette
▼ictoire d^couragea Ali-Mirza, qui
abandonna subitement son arm^. La
fuite de ce chef eut pour r^sultat la
dissolution imm^iate du corps qu'il
oomniandait. On assure (Journal ma*
qnscritde M. Burgen) qued^ja les ha-
bitants d' Astrakhan se preparaient au .
depart, et que les tribus belliqueuses
du Caucase se mettaient en mouvement
pour se reunir k Tarmac peraane.
Paskevitch passa I'Araxe, et chassa Ten-,
nemi du territoire russe. L*hiver sus-
pendit les hostility. L^annee suivante,
Paskevitch, investi du commandement
en dief , poussa la guerre avec vigueur ;
apres avoir emporte le monastere
Etchmiadzine, il vint mettre le si6ge
deraot la forteresse Abbas-Abud. La
Abbas-Mimvintrittaquer.PaskeTildi
n*dbandonna le si^e que pour aller
battre le prince perAm , qui se d^fendit
avec un grand courage, et qui faillit
torober au pouvoir des vainqueurs.
A la suite oe cette aflbire, la place
eapitula , et bientdt la prise de Sardar-
Abbad ouvrit au general les abords
d'£rivan« Le si^e de cette ville ne
dura que six jours; elle se rendit aux
Rosses au commencement d'octobre.
Tavris, ancienne camtale de la Perse,
les forteresses de Khoi et Alandja
(J. Tolstoy), r^puttes jusqu'alors m*
aceessibles, furent successivement en-
levte, et facilit^ent la conqu^ de
tout I'Aderbidjan. Abbas-Mirza, sans
se laisser d^urager par oes revers,
essaja de gagner du temps, dans Tes-
poir que la guerre 6claterait bientdt
contre la Turquie, et foroeratt lea
Russes k se porter sur les points me-
nacds; il ouvrit done des conferen-.
oes, qui se prolongdrent jusqu*au com-
mencement de Fannie 1828. La nou-
vdle de la batallle de Navarin vint le
confirmer dans ces dispositions. Pas-
kevitch sentait la n^cessit^ d'en finir
promptement avec la Perse; malgr^
rhiver, il rouvrit la campagne, fran-
cfait les monts Kouflankou , et de
nouveaux avantaees si^al^entsa mar*
che precipit^. II §tait k Tourkmant-.
chai, sur le chemin de Tdi^an, re-
sidence du schah, lorsque le vice-roi,
efifraj^ de son approcne, envoys des
pl^nipotentiaires pour traiter de la
paix. Suivant la couturoe des Orien-
taux, ils apportaient avec eux de riches
pr^ents, parmi iesquels se trouvait
le diamant qui passe pour le plus beau
et le plus pr^eux qui soit au monde*
Cette campagne mit en Evidence les
3ualit^ briUantes de Paskevitch ; rapi-
it^ dans les mouvements, impetuosity
dans Fattaaue , coup d'oeii sdr, tela sont
les traits aistinctifs de son g^nie, que
Ton a quelquefois compare a celui de
Souvorof.
La paix sign^e k Tourkmantchal, en
fevrier 1828, assure aux Russes les
provinces d'£rivan et de Nakhitdie-
van ; en leur permettant de prendre k
revers toute la ligne du Caucase, elle les
UUBTIVERS.
mcttalt en Mai 4e m porter, seloo
i*ooeurreiice, soit dans ia Twqme d'A-
sie et ia Perse, toit vert lea oontrte
oooideutaleB de Tlnde. La Perse dut
payer au vainqueor one contrtbutiim
de quatre-vingts millioos de iraDCt. Le
flfotel Paakevitcb fiut 61ev6 k iaitoiiU
de comte d^Jtrivan, et reeot de rem-
pereur une gratification a*un miliion
derooblea.
Pour prourer que la Russie tend k
un agrandiBsement ayst^matique ^rs
I'Orient, nous citerons qaeiqoes-ws
des articles du traits de Towrkmani-
chaT.
Art 9. Gonsidtont que les hosti-
lity sunrenues entre les bantea partial
oontractaotes, et henreoaement termi*
nees aujourd'hui, ont fiiit cesser les
obligations que leur imposalt le trait6
de Gulistan , Sa Majeste I'empereur de
lootes les Russies et Sa Majesty le
achab de Perse ont Jug^ eonveoable de
remplacer ledit traits de Gulistan par
les pr^entes clauses et stipulations,
lesquelles sont destine k r^ler et k
oonsolider de plus en plus les relations
futures de paix et d^aniiti6 entre la
Rnssie et la Perse.
Art. 3. Sa Majesty le schah de Perse ,
tant en son nom qu'en celui de ses h^
ritiers et soocesseurs, Me en toute
propriety, k rempire de Russie, le
khanat d'^rivan et le kbanat de Nak-
hitcb^van. En oons^ence de oette
cession, Sa Majeste le schah s'engage
a faire remettre aux autorit^ russes ,
dans I'espace de six mois au plus, k
pertir de n signature du present traits,
toutes les archiyes et tous les docu*
nsents publics ooncernant Tadminis-
tration des deux khanats ci-dessus
inentionnes.
Art. 4. Les deux haotes parties con-
tractantes convtennent d'etablir pour
frontiires entre les deux £tats la ligne
de demarcation snivante, en partant
du point de la frontiire des £tats ot-
tomans le plus rapproch^ en ligne
droite de la sommite du petit Ararat;
oette ligne se dirigera jusou*^ la som-
mite de oette montagne , d ou elle des-
oendra jusqu^a la source de la Karas-
mu , qui d^ule du versant meridional
da petit Ararat, et eVe suirra sen
eours jusjfu'^ son embouchure dam
r Araxe, Tis-a-Tts de Gh^rour ; parvenue
a ce point, eette liene sniTra le lit de
TAraxe jusqu*^ la lorteresse d' Abbas-
Abbad ; autour deaouvnges ext^riean
de cette plaee, qui sont situte sur la
rive droite du fleuve, il sera trao6 un
rayon de troia verstes et demie (une
lieue de FVanoe), lequd s'^tendra dang
toutes lea directions; tout le tcnraia
Suisera renferm^dans la eiroonftreoee
e oe rayon appartiendra exdosive*
ment k la Russie, et sera maraud afec
la plus grande exactitude dans respaee
de deox mois, k dater de ee jour.
Depuis Tendroit oil rextrtoit^ orien>
tale de ce rayon aura rejoint TAraxe,
la ligne fronti^ continuera k satvre
le lit de ce fleuve, de telle sorts qua
les eaux qui eouleot vers la Gaspienne
appartiendront k la Russie, tanatsqoe
oeues dont le versant regarae la Perse
vesteront k ce royaume. De la crite
des hauteurs de Dj«k^r, la frontiere
soivra , josqu'^ la sommite de Karmar-
koaia et au dela, les crates des mon-
tagnes, toujours en observant le prin-
cipe du versant des eaux. Le district de
Zouvante, k rexception de la partie
sittt6e du odt6 oppose de la cime des
montagnes, tombara de la sorte en
partage k la Russie. A partir de la li*
mite do district de Ydkidjl, la ligne
frontiere entre les deux Ktats suivra la
chalne principale des montagnes, qu*il
traverse jusqu'^ la source septentrio-
nale de rAstara, De lli, la frontiere
suivra le lit de ce fleuve jnsqu'a eon
embouchure dans la mer Gaspienne,
et compietera la ligne de demarcation
qui separera d^sormais les possessions
remectives de la Russie et de la Perse.
Le S* article stipule la cession a la
Russie de toos les pays et de toutes les
ties , de m^me que des populations no-
mades et aotres comprises dans les
limites indiquees. Le 6« fixe le mon*
tant de la contribution pecuoiairedont
iioua avons parte plus naut. Le 7' est
remarquable, en ce qu'il r6veie lei
pretentions de la Russie a 6*immisoer
dans les affaires interieuresde la ^^^^
il est ainsi con^u : Sa Majeste le schah
RUSSIE.
539
lie Perse ayant jog^ h propos de d^-
gner pour son sticcesseur et li^ritier
pr^omptif son auguste fils 1e prince
Abl>as-Mirza, Sa Aajest^ remperear
de totites lea Rasstes renege a recon-
nattre d^ aujourd*hui, dans la per-
fionne de oe prince, le suocesseur et
hdritier pr^omptif de la couronne de
Perse f et a le considerer comme l^i-
time souveram de ee royaume d^ son
ay^nament au tr6ne.
Cette clause 6tait d'aotant plus im*
portante pour laRussie, qu'elle pla^ait
sous sa protection immraiate Abbas-
Mirza, centre lequel d'aotres fits da
scfaah nourrissaient une jalousie qui , h
la mort du roi, aurait pu se traduire
en 'revolte. Par cette raesore, le gou-
vemement russo s'attachait le seul
prince que son courage et ses efforts
poor une prompte r^tbrnie ponvaient
rendreiHi jour dangereux.
Art. S. Les bdtiments roarchands de
ia Rnssie jouiront , comme par le pass6,
du droit de naviguer librement sur la
mer Caspienne, et d*aborder sur ses
cdtes. Le m^me droit est accord^ aux
Mtiments marchands de )a Perse.
Quant aox bdtiments de guerre, ceux
qui portent le pavilion russe conserve-
ront le privil^e exclusff de naviguer
sur cette mer.
L'art. 9 est relatif aux agents et am-
bassadeurs que les deux parties con-
tractantes jngeraient a propos de s'en-
voycr.
Cette stipulation permettait* a la
Russie de surveiller les demarches de
la Perse J et la mettait a Tabri de toute
attaque imprdrue.
Le 10* article traite des privil^es
et des devoirs des agents commer-
cianx.
Le tV est relatif aux affaires et aux
rtelaniations particulieres amen^es par
rextension des fronti^es russes. Le
13* fixe un terme de trois ann^ pour
laisser anx Persans le temps de rendre
ou d*6changer leure propri^tes. Le 13*
stipule r6cnange des prisonniers.
Art. 14. Les hautes parties contrac-
tantes n'exigeront pas rextradition des
transfuges ou deserteurs qui auraient
fdsse sous leur domination respective
avant ou pendant la guerre; toutefbis,
pour pr^venir les cons^ences nm-
tuellenient phyudiciables pouvant r^-
sulter des intellteences que quelques-
uns de ces transfuges diercheraient k
entretenir avec leurs anciens compa-
triotes ou vassaux, le gonvemement
persan s'en^age h ne pas toller dans
ses possessions voisines de la Cas*
pienne la presence des indlvidns qui lui
seront nominalement d^sign^ mainte-
nant, ou qui lui seraient signal^s k
Tavenir. Sa Majeste I'empereur de tou-
tes les Russies promet egalement, de
son c6t^, de tie pas permettre que les
transfoees persans s*etabIissentou res-
tent h demeure dans les kbanats de
Nakhitch^van , ainsi que dans la partie
du khanat d'firivan situ^ sur la rive
droite de I'Araxe. II est entendu tou-
tefois que cette clause n'est et ne sera
obligatoire qu*a regard d*individus re-
vdtns d'un caract^e public ou de cer-
taines dignity , tels ^ue les khans , les
beys, et leschefiB spirituelsou mollabs,
dont rexemple personnel , les instiga*
tions et les men6es dandestines |)our-
niient exercer une influence pernicieuse
sur leurs anciens compatriotes, admi-
nistres ou vassaux. Pour ce (]ui con-
cerne la masse de la population dans
les deux pays, 11 est convenu entre les
deux parties contractantes que les su-
jets respectifscjui auraient passe ou qui
f)asseraient a ravenir d'un fitat dans
*autre seront libres de s*^tablir, ou de
sojourner partout oi!k le trouvera bon
le gouvernement sous la dominatioq
duqud ils seront plac^.
Par Tarticle 16, le schah accorde
une amnistie pletne et entiere a tous
les habitants et fonctionnaires de la
province d'Aderbidjan. Aucun d>ux,
sans exception de cat^one, ne pourra
toe poursuivl pour ses opinions, pour
ses actes, ou pour la conduite qu'il
aurait tenue, soit pendant la guerre,
soit pendant Toccupation temporaire
de ladite province par les troupes rus-
ses. II leur sera accord^ en outre le
terme d'un an , a dater de ce jour, pour
se transporter librement, avec leurs
families, dans les l^tats russes, pour
exporter ou pour vendre leurs bieus
L' UNI VERS.
meubles, sans que les gouvernemeots
ou les autorites locales puisseot y
inettre le moindre obstacle, ni pr^ever
aucun droit ou retribution sur les
biens ou sur les objets vendus par eux;
quant a leurs biens inomeubles, il leur
sera acoorde un ternoe de cinq ans pour
les yendre ou pour en disposer a leur
gr^.
Art. 16. Aussitdt apres la signature
du {>resent traits de paix, les pienipo-
tentiaires respectifs s*enipresseront
d'envoyer en tous lieux les avis et tu-
jonctions ndcessaires pour la oessation
irom^iate des hostilit6s.
Fait au village de Tourkmantchal,
le 22 fevrier 1828, et le 5 de scb^bone
de Tan 1243 de Fb^re.
Presque toutes les stipulations de
ce traite annoncent Tintention de d^
sorganiser les provinces limitrophes
de la Perse, par les mtoes moyens
d^j^ employ^ avec tant desucces con-
tre la Pologneet la Turquie : contrdle
des actes du gouvernement persan;
protecfion accord^ aux habitants pour
les exciter k abjurer leur nationalit6,
et h venir former un noyau de popula-
tion dans les provinces r^mment in-
corporees h 1 empire; ^tude syst^ma*
tique des voies commerciales les plus
avantageuses ; rien n'est oubli^, tout
se combine pour faclliter des euvahis-
sements ulterieurs.
Tandis que la Russie reculait ses
frontieres du c6i6 de FOrient, seM
agents dipiomatiaues suivaient avec
sollicitude tous les ^v^nements qui
s'accomplissaient en Europe; les affai-
res de la P^ninsule, Toccupation de
TEspagne par les troupes fran9aises,
la resolution energique de Canning
Sour soustraire le Portugal k Tin-
uence du parti antioonstitutionnel
de TEspagne, mais surtout F^tat de la
Grece, que la bataille de Navarin ve-
nait de soustraire au joug des Turcs,
toutes ces circonstances , disons-nous ,
etablissaient, soit par des luttes, soit
8ar des triomphes aiplomatiques, Fin-
uence pleine d'exigences du cabinet
de Petersbourg. L'orateur anglais qui
a qualifie de nefaste la victoire de Na-
varin , avait bien mesure toute la portee
de oet evenement. UAotridie, qui
etait rest^e froide au milieu de Fen-
thousiasme general qu'excitait en Eu-
rope la cause des Grecs, avait aussi
prevu, avec sa sagacite ordinaire,
2ue la de£aite des Turcs ne serait pro-
table qu*^ la Russie; non-seulement
oette derniire puissance an^antissait
d*un seul coup la marine des Otto-
mans, mais en agissant de concert
avec FAngleterre et la France, elle
persuadait au divan que tout appui
etranger lui manquerait des qu*il re-
sisterait aux exigences moscovites.
Quoi qu*il en soit, le pavilion russe se
montra avec honneur dans ces mimes
parages t^moins, sous lerigne de
Catherine, des suoces d'Orlbf. Aujour-
d'hui oue la Gihce jouit d'une appa-
rence ae liberty sous un gouvememeot
oonstitutionnel , ce petit royaume, d6-
chire par les factions , endette an delii
de ses ressources, use dans des luttes
mesquines ce oue ses combats pour
Findepsndanoe lui ont laiss^ d'^nergie;
et Finuuence russe p^se encore sur ses
destinies 1
La Turquie allait avoir son tour.
Dans cette guerre, 11 faut reconnaltre
que le droit etait enticement du c6t6
de la Russie; la longaaimite d" Alexan-
dre servit singulierement les int^r^ts
de Fempire; k Fouverture du rdgnede
son suocesseur, FEurope etait encore
sous le prestige de la moderation du
tsar defunt , et Fon aimait k oonfondre
avec la pens^e du cabinet de Peters-
bourg ce qui n'etait qu'un accident, que
Feffet anormal de circonstances parti-
culieres. La guerre fut done deciaree.
Nicolas fit parattre, en avril 1828, ua
manifesto qui annon^ait a ses sujets
que Fheure d'une sanglante reparation
avait Sonne. Nous croyons devoir ex-
traire de la declaration de guerre que
la Russie adressa k la Porte les passa*
ges suivants :
« Seize annees se sont ecouiees de-
puis la paix de Boukharest, et seize
annees ont vu la Porte enfreindre les
stipulations qu*elle venait de conclure,
eiuder ses promesses, ou en subor-
donner Faccomplissement k d^intermi-
nables deiais. Trop de preuves, que le
KUSSIB.
Ml
dbiael. imp^ial dtera, d^montrent
eette taidaiioe aveugl^ment hostile de
la politiqae du divan* Dana plus d'une
occasion, et surtout en 1831, elle pnt
k regard de la Russia un earact^re de
nroTocation et dlnimiti^ ouverte; die
le repreod depois troia mois par des
actea aolennels et des mesures de no-
tori^t^ enropN^nne.
« Ce fat le jour ou , en quittant Cons-
tantinople, ies ministres des trois
puissancea exprimaient le ylf d^ir de
oonaerrer la paix; le lour ou la Porte
protestait ^alenient oe ses intentions
pacifiques, qu^elle a appel6 aux araies
oontre la Russie tous Ies peuples qui
profeaaent le culte de Mahomet, et
qu'avooant sa relation de n^ocier
uniquement pour 8'ap|)r^ter k com-
battre, et de ne jamais remplir Ies
articles essentiels de la conventioB
d'Akermann, elle a declare ne Tavoir
coDdQe que dans Tintention de la
rompre. La Porte n'isnorait pas gue
c'toit rompre aussi tous Ies traits
ant^eurs , dont la conrention d*Aker-
mana a stipule le renouvdlement;
mats elle avait arr^t^ d'avance ses d6-
ddons et sa raardie.
« Anssitdt Ies privil^m du pavilion
niaae soot viol^, Ies batiments qu'ils
couTraient detenus, leurs cargaisons
aaisiea, ieors capitaines contramts de
Jes livrer k dea priz fix^a arfoitraire-
ment, ies valeurs d'un payement tardif
et iocomplet r^uites de moiti^, et Ies
sujeta de Sa Majesty imp^riale forc^
de deaoendre k la condition de rayas,
ou de quitter en masse le territoire de
la doounation ottomane. Gependant
le Bosphore se ferme, le commerce de
la floer Noire est comme enchatn^, la
ruine des villes nisses gui lui doivent
leur existence devient imminente, et
Ies provinces m6ridionales des Etats
de l^mpereur pnerdent le seal ddx>uch^
de leurs produits, la seule communi-
cation qui puisse, en y favorisant Ies
^changes , y fkonder le travail , y por-
ter rindustrie et la ricbesse. Mais Ies
limites de la Turquie ne suffirent pas
aoesmalveillantes dispositions. Quand
elfes ^laterent k Constantinople, le
g^Q^al Paakevitcb, a la suite d'une glo-
rieuse campagne. n^ociait avec la
Perseunepaix dont la eour de Tehten
avait d^ja accepte Ies conditions.
Tout d*an coup 11 iut surpris des obsta*
des apport^ k la signature de cette
convention; Ies suggestions de la Tur-
quie en toient la cause...
« La Russie n'insistera pas sur Ies
motifs qui Taatorisent k ne point to-
l^rer des actes dliostilit^ aussi mani-
festes, et a en empteher le retour...
« La paix de 1812 Halt k peine si-
gn^, que d^jk la Porte crut pouvoir
Srofiter impun^ment des conjonctures
ifficiles oi!^ se trouvait alors la Russie ,
pour multiplier ies infractions aux
engagements qu'elle venait de prendre.
Une amnistie avait ^t^ promise aux
Serviens : elle fut remplac^e par une
invasion et d'afireuz ravages. Des im-
munity ^taient garanties a la Moldavie
et k la Valacbie : un systeme de spolia-
tion acheva la ruine de ces malheu-
reuses provinces. Les incursions des
peuplades qui habitent la rive gauche
du Kouban devaient dtre r6prim^
Ear les soins de la Porte : dttes furent
autement encouragto ; et la Turquie ,
non contente d'dever, au sujet de olu-
sieurs forteresses indispensables a la
sAret^ de nos domaines asiatiques , des
{>r^tentions dont dle-m^me a reconnu
e peu de fondement par la convention
d'Akermann, les rendit doublement
inadmissibles, en favorisant aux bords
de la mer Noire, et jusque dans notre
voisinaee, le commerce des esclaves,
les rapmes, et tous les genres de de-
sordres. II y eut plus : alors, comme k
present, les vaisseaux sur lesquds
flottait le pavilion de Russie furent
arr^Us dans le Bosphore , et toutes les
stipulations du traits de commerce de
1783 ouvertement viol^es. II n*aurait
tenu qu'li Tempereur Alexandre de
tourner sa puissance contre la Porte
ottomane; sa position lui ofifrait d*im-
menses avantages : il renon^ k s*en
pr^valoir. Une si haute moderation ne
fut pas comprise; pendant cinq ana,
le divan se roidit contre les ouvertures
conciliantes de Tempereur Alexandre;
et cependant une guerre avec la Tur-
quie n'entratnait aucune complication
542
rUNIVERS.
des rapports de la Russie avec ses prfiv
cipaux allies. Nut pacte de garantie,
nutle solidarity politique ne rattachait
les destinies de Tempire ottoman aux
stipulations r^ratrices de 1814 et de
1815, a i'ombre desquelles PEurope
civilis6e et chr6tienne respirait de ses
longues discordes, et voyait les gou-
\Trnement8 unis par le souvenir d'une
^loire commune^ et par une henreuse
identity de principes et d'intentions.
« Un soul^ement general de la Mo-
r^e,etrirruptionenMoldavied'unc!)ef
de parti infid^le a ses devoirs , vinrent
r^veiller dans le gouvemement et dans
la nation turque tons les transports
d*une haine aveugle contre les chr^>
tiens ses tributaires, sans distinction
entre Tinnocent et le coupable. La
Russie frappa d*une juste rqprobation
Tentreprise du prince Tpsilanti; elle
autorisa , comme puissance protectrice
des deux nations, les mesures de de-
fense et de repression l^itime adopt^s
par le divan , en insistant toutefois au*
prcs de lui sur la n^cessit^ de ne pas
confondredes populations inoffensives
avec les fauteurs de troubles , qu*ii im*
portait de desarmer et de punir. Ses
conseils fiirent repouss^; le represen*
tant de Sa Majesty imp^riale fut in-
sults dans sa propre demeure; l'6lite
du clergy grec, et le patriarche qui en
etait le chef, subirent, au milieu des
solennit6s de notre sainte religion , un
supplice ignominieux. Tout oe qu*il y
avait d^diev^ parmi les Chretiens fot
saisi, d^pouilie, massacre sans juge*
ment; le reste avait pris la iulte. Ge^
pendant le feu de insurrection, loin
de se ralentir, se propageait de toutes
parts. £n vain le ministre de la Russie
essaya de rendre a la Porte un dernier
service, en vain, par sa note du 16
Juillet 1821 , 11 lui indiqua des voies de
conciliation et de salut.
« Apres avoir protests contre des
crimes et des fureurs sans exemple
dans l*histoire, il se vit oblige de rem*
plir les ordres de son souverain. en
quittant Constantinople. Ce fut dans
ce temps que les puissances amies et
allides de la Russie, toutes int^resste
au maintien de la tranquillity gdn^-
rale, s*empresserent d*oifrir et d^eni-
ployer leurs bons offices, a Teffet de
conjurer Forage qui allait gronder sor
le gouvemement turc, irapp^ d*uii
aveu^lement funeste. La Russie sus-
pendit h son tour le redressement de
ses trop nombrenx griefs, dans Tea*
poir de parvenir ^ concilier oe qu*elle
se devait k elle-m^me, avec les mana-
gements que la situation de TEurope,
et son re|)08, plus d*une fois compro-
mis, paraissaient alors r^clamer.
« D aussi grands sacrifices demeur^
rent st^riles. La Porte poursuivit
Tex^tion d'un plan destrueteur con*
tre les populations dir^tiennes son-
mises h son pouvoir... Tattitude du
divan devint oe jour en jour plus me-
na^ante k T^rd de la Servie, et t'oc-
cupation de la MoMavie et de la
Valacbie se prolonged malgr^ les ef-
forts de la Grande-Breta^ne et les plus
solennelles promesses faites ^ son re-
pr^entant, malgr6 m^me Vempresse-
ment de la Russie a r6tablir, des
qu'elles fiirent articul^s , ses anciennes
relations avec la Porte. Tant de proo6-
d^ bostiles devaient enfin hsser la
patience de Tempereiir Alexandre. 11 fit
remettve au mmistire ottoman, en
octobre 1825, une protestation 6nergi-
que; et quand une roort pr^eooe Ten-
leva k Tamour de ses peuples, il veniit
de d^larer gu'il r^leraft les afftires
de la Turquie selon les droits et les
int^r^ts de son empire.
«Un nouveau r^ne conMSien^.-
D^ son av^nement au trdne, Tempe*
reur Nicolas entama des m^ociations
avec la Porte, dans le but d'ajuster
phisieurs diffi^reDds qui ne regardaient
que la Russie, et posa ensuite, le it
mars (4 avril) 1826, de concert avec
Sa Majesty le roi de la Grande-Bre-
tagne, les bases d'une intervention
hautement r^lam^ par le bien g^n^
ral... D'un cdt6 , Sa Majesty imp^aie,
esperant de Tunion des grandes eours
la cessation plus facile et plus prompte
de la guerre qui ensanglante rOrient,
renon^it k toute influence isol^e, fea^
tait toute id^ de mesures ezelUNves
dans eette question majeure; de Fau*
tre, par ses n^godations imm^ates
h
RUSSIE.
543
iffK le divan, «U€ s*«fibKait de lefer
iDcore on obstacle kh moncitiaiton
fatre les Tures et les Qrea. Sous cos
MfifNoeSf les confidrenees d'Akermonn
s'ouvrirent. EUes afaootirent k la eon-
doaoa d'aneoooTentioD additioiioeile
aa traits de BottkhansL... Uamii
d'uoe missiQD permanente ^ Gonstan-
tiaople Biiivit de prts eet aeconunode-
meot, et inentdt le traits du 6 juillet
1827 vint encore consacrnr, k la face
du iBonde, les maximcs de dMnteres-
semeat dont fait foi le protooole da
29 avril. Les yoies les plus amicales
fareoi tentdes pour faire agrto* a la
Porte les termos de cette transaction
sahitaare. Des comnninications (run-
efaef, oui ddraulaient ii ses yeux les
pbas des troi^ cours, la prMnrent
qie , dans le cas d'an refos , leors flottes
reuoics seraieat obligees d'arrdter .une
liitte devenue incouipatible ayec la sd^
rete des iners, les besoins da ooni*>
meree et la ehrilisation du reste de
TEarope. La Porte ne tint aucon
Qompte de ees aTcrtissements. Un oom-
maadant des troupes ottomanes^ aus<-
dtdt aines avoir condu u& armistice
prmoire, viola sa parole, et finit par
ea amkr & la force. AJors eat lieu to
coaibat de Navarin; mais, rdsaltat
ntosHre d^un manque de foi prouvd
^td'aae afpression flagrante , oe combat
nlmefiMirait k la Russie et ^ Ses al*
lio PoQcaaion d'exprimer au diran to
d^ir de maintenir to paix sur de so^
tides garanties.
« Tel est le syst^me, teto sont les
actes aoxoueto to Porte a repondu par
aoB manimste du 30 ddoemhre, et par
del aiesareB qa\ constituent autant
(PiofiractioDS an traits de la Russie v
aotaat d'insultes Ik ses droits, autant
de graves attemtes k sa prospdritd
nrnmereiato^ autant de tmoimages
da ddsir de lui snsciter des emoarras
et des ennemtok
« Ptocee des lors dans uoe position
OQSon bonneur et ses intdrits en movS-
france ne lui perroetterit plus de na-
^« to Hussie dddare to guerre k to
PoHt Ottbmaoe, nonsans regret, mau
aprto a'amir nen ndgligi, pendant
Hiu anndeseanaecutifes, poiur lui en
dpargoer les fonestes eoosdjfuenoes.
« Provoqude par to Turquie, cette
guerre fera peser k sa charge les frais
^'cHe entraiae et les pertes essuyees
par les sujets de Sa Majestd impdnale;
entrepcise pour remettra ea vi^ewr
des trait^s que la Porte reoardeconiae
non avenus, die tendra a en assurer
Tobservation et Tefficadtd ; amende par
le besoln impdrienx de garantir au
commerce de la mer Noire et li la na*
vigation du Boaphore one libeftd dd-
sormats inviotome, elte sera dirigde
vers oe but 6galement utito k tous les
Etats de TEarope.
« En recourant aux armei, to Rus-
sie, loin de se livrer, comme to divan
Ten aoGttse, a des sentiaoents de baine
contra la puissance ottoroane, oo d'en
rodditer la cbota, croit avoir ibami la
preuve oonvaincante que, s'il entratt
dans ses vues de la oombattre k ou-
trance ou de to renverser, elle aurait
saisi toutf s les occasions de gaerre que
8C8 retotions avec la Porte n'oot oesse
de lui offirir.
« La Russie n'cst pas moins dioignde
de nonrrir des projets ambitieux. Assez
de pays et de peoples reconnalssent
ses lois, assez de soins s'attachent k
Tdt^ndue de ses domaines.
« Pinalement, la Russie, pour dtre
en dtat de auerre avec to Porte par des
motifs ittdependanta du traitd du 6 juil-
let , ne s'est pas dcartde et ne s'dcartera
ri des stipulations de cet acta. II ne
coodamnait point, il ne pouvait la
oondamner k sacrifier des droits antd-
rieurs d'une haute importance , k to*>
Idrer di« provocations directes, et k
napasdemander la rdparation des plus
sansibtos dommages. Mais les devoirs
Jia'il lui impose, et les principes sur
esqoels il se fonde, seront, les una
remplls par die avec une scrupuleuse
fldditd, les autres observds sans devia-
tion. Ses allids la trouveront taujours
prdte k conoerter avee eux sa marche
dans Texdoution du traits de Londres^
toujoars empressdede coocourir d une
QBuvre que sa rdigion et toos les sen*-
tioients dont Thumanitd s'bonore re-
oommandent ii son active soilicituda,
taujours dispose k ne profiter de sa
U4
UUNIVBftS.
•ituation actudle que pour.aoo^Mrer
TaocomplisseineDtaes clauBes du traits
du ejuillet, et non pour en changer
les efifets ou la nature. L'em[>ereur ne
posera les amies qu*aprte avoir obtenu
IM r^sultats indiqu^ dans la preaente
d^aration.
« Donne a Saint-P^tersbourg, le 14
avril 1828. »
Le mar6dial oomte Wittgenstein
oassait le Pruth le mkot iour ou la
kussfe d^arait la guerre a la Porte.
Boukbarest fut imm^iatement oe-
cup^, et Ton mit le si^e devant
Brailof. Un troisi^me corps construisit
une digue de plus d'une lieue, entre
Toultcna et Issatcha, pour passer le
Danube alors d^bord^. Ces travaux de-
mandant plusieurs semaines; enfin
le passage s effectua sous la direction
de I'empereur. «l.e |rfan suivi par
Tarm^B russe ^tait de p^^trer en Bul-
garia et de s'emparer des points prin-
cipaux , dans le but de facibter Tappro-
visionnement des troupes. Varna etait
par consequent la place la plus impor*
tante et la plus propre k servir de base
d'op^ration; mais, pour la r^uire, 11
fallait Fattaquer aussi du cM de la
uieTf et une flotte rasse ne pouvait
^tre employ^ k cet effet avant aue
Poti et Anapa fussent au pouvoir des
Busses. Gette demise place fot em-
port^ par le prince Mencfaikof.* (J.
Tolstoy, HistoireduGomtePaske?itch
d*£rivan).
La prise de Bra3of ooAta cfaer auz
Busses; on pretend qu'ils perdirent
devant cette mMiocre forterssse de
vinfft k vingt-cinq mille hornmes, ce
ou*n serait difficfle d'admettre sans
reffet meurtrier des mines, qui, au
lieu de faire sauter les remparts ,
firent p^r un nombre infini d'assail-
lants. Le grand-due Micbel, qui diri*
geait les travaux du si^e, fit reoom-
mencer Tassaut aprds une tentative
infructueuse, et la ville se rendit le 8
juin. Plusieurs autres places d'une
rooindre importance capitul^rent suc-
cessivement Les forces des Turcs se
Goncentraient k Schoumla ; il ^it im-
portant de les battre dans cette posi*
lion , ou du moins de les bloquer asses
^tioitement pour les empteher de pren-
dre k rerers les corps russes qui se
porteraient sur Varna. L*emperear
etait k la t^ de son arm^. On rencon-
tra les Turcs entre Kiscbla et Boulan-
louk : apr^ une r^istance briUante, ilg
seretirerentdans leur camp retrancM.
Les Busses <, ne pouvant emporter une
position dtfendoe par une arm^ fo^
midable, oero^rent Schoumla du edii
de Test, entre la route de Silistrie et
d^Eski-Stamboul. Dans les combats
fr^uents qui eurent lieu k cette ^po-
que, les troupes musulmanes d^loye-
rent un grand courage, et montr^rent
ce qu'elles pouvaient devenir quand la
rMbrme militaire aurait porte tous
aes fruits. Gmndant le prince Men-
chikof fiiisait le si^ de Varna. L'em-
pereur sV rendit le 31 juillet. Le
petit nombre des troupes russes et
rassiette de cette place lui prouverent
bient6t que les traTaux du si^ trat-
neraient en lonj^ueur. D*un autre cdte^
Silistrie r^lstait , et sur tous les points
Tinsuffisance des moyens d*attaque se
faisait yivement sentir. L'empereur
€U\t r^urn^ k Odessa, et d^^ per-
suade qu'une seconde campanie serait
D^oessaire, il donnait ses orares dans
cette oonviction. Au mois d'aodt, il se
livra plusieurs combats sanglants qui
firent mieuz reconnattre encore com*
bien Tarm^e russe, disMknin^ sur un
espace si considerable, se trouvait
bors d*6tat d'obtenir des a? antages d^
dsifs.
Le 37 aodt , Tempereur rnoignit ton
arm^e devant Varna, et etaolit son
quartier gte^ral k bord d'un Taisseau
de ligne. « La flotte se trourait em-
bossM dans le bassin m^me de Varna,
k deux nulle pas de la citadelle. Le to
septembre, les Turcs firent une vive
sortie; mats , repousses aTCC perte, ib
se virent oontramts d*abandonner tons
1m points qu'ils occupaient sur lea
rives du lac de Demo... Le 30 sep-
tembre, on fit jouer les mines, et Tod
pratiqua une breche qu'un faible deta-
chement escalada dans la nuit du 33
au 34. Gependant U fut oblige de ae
retirer; mats cette tentative ouvrit lea
yeux aux Tures sur hi possibility d un
• • •
• «
• • •
■ • •
• • ••
• • • •
•• •• ••• *
• •• • •
•
•••• ••••
* •• • •• •
• •• !
••-•
&USSIE.
S4B
ttUQt, et Youssouf- Pacha capitola.
Le twt qu^on se proposait dans cette
cunpagne fut atteint; Varna, apr^
Ink mois d'un si^e opinidtre, se
ivodit le 2 octobre.
« La reddition de cette place occa-
skmna quelques mouvements dans les
corps tores. Omer-Vrione, aor^ avoir
inutilement essay^ de s'^tablir sur la
rivt droite du Kamtchick , fut oblie^
de rq>asser le fleuve et de franchirle
Balkan. Dans toutes les guerres que la
Russie lirre k la Porte, elle a soin de
s'assurer de la Valachie. Le general
Gebmar occupait cette province h la
t^e de cinq ou six mille Kusses. Le 1 3
septerobre, le pacha de Vidin, qui
oomniandait vingt^sinq mille hommes,
attaqaa ce general pres de Tchorlou.
Les Russes , formes en petits bataillons
carr^, tinrent ferme pendant toute une
journee; la nuit m^me qui suivit cette
belle defense, ils fbndirent sur I'en-
nemi, qui ne s'attendait pas h cette
brusque attaque , et le mirent dans une
deroute complete. Sous les murs de
Schoumla , les Turcs prirent Toffensive
ea plusieors rencontres. Le g^n^ral
BLoudzevitch parvint cependant a re-
pottsser Veiinemi , non sans ^prouver
Jui-mtoe des pertes assez considera-
bles. La saisoD ^tait d^ia avanc6e; la
neige ooffimen^it a rendre les chemins
impraticables', les troupes russes pri-
reot leurs quartiers d'hiver, et Fempe-
reur retourna h Odessa.
« Maiotenant nous aUons tourner nos
regards sur TAsie, et exposer succincte-
Plenties operations du corated'£rivan,
donees forces occupaient lesTurcs dans
leurs Dossessions m^idionales , et les
eoipraiaient de coneentrer toutes leurs
forces du cot^ du nord. Anapa et Poti
allaient assurer aux Russes les bou-
ches du Phase, et les rendre maltres
du littoral de la Miogrelie et de Tlme-
retie. Paskevitch s'empara de la for-
.teresse de Kars, qui capitula le 23 de
juin. JOeux mille Turcs lurent tues ou
blesses; trois mille, au nombre des-
ijuels etait £mir-Pachd , chef du pacha-
lick de Kars, deposerent les armes,
et Ton trouva dans la place cent cin-
quante pieces de canon avec un nom-
36* Livraison. (Russte.) t. ii.
breux materiel. Le general russe avail
h lutter contre les diflkultes des lieux
queiquefois impraticables pour Tartil-
lerie. Des symptdmes de peste se
declar^rent parmi ses troupes; son
activity et sa pr^voyance triomph^rent
de tons ces obstacles. Le 24 juillet, il
enl^ve la forteresse d*Akhalkalaki. A la
nouvelle de oe succds, Kertvis et Poti
se rendent sans r^istance. Le T' aodt ,
Tarm^ russe se porta a Akhaltzik , ou
les Russes avaient r^uni une arm6e de
trente mille hommes; elle marcha a
travers une droite chatne de monta-
§nes, ^avissant des sentiers coupes
e precipices, et, le 5 aodt, le g^n&al
dispersait un gros corps de cavalerle
turque ({ui venait au secours de la ville
pour lui disputer le passage du Kour.
« Le oomte d'J^rivan n'attendit pas
Tarriv^ du general Papof , qui se trou-
vait encore h deux journto de marche ;
il savait qu*une attaque imp^tueuse,
qiioique avec peu de troupes, le ser*
virait plus efBcacement que s'il avait
recours a des manoeuvres lentes. II
laissa le general Mouravief devant la
place, et partit avec huit bataillons «
toute la cavalerie et vingt-cinq pisses
de canon, pour tourner le flanc droit
de i'ennemi... II tomba sur un corps
de trente mille hommes qui sortit de
ses retranchements pour se d^endre.
On se battit toute la joumde; les
Turcs furent repouss^ dans leurs li-
gnes, et, apres une vive fusillade, le
camp retranche fut emport^, et Ten-
nemi poursuivi au de\h de trente
verstes. On ^valua ses pertes a deux
mille cinq cents hommes, douze ca*
nons, treize drapeaux , sans compter
des approvisionnements considerables.
« Apres cet avantage, le g^n^al en
chef .retourna sur->le«champ sous les
murs d' Akhaltzik, et le si^e fut
pousse avec vipueur. L'assaut fut iivre
le 15, et, apres douze heures de com*-
bat et une defense desesper6e, Akhalt-
zik tomba au pouvoir des Russes. La
citadelle se rendit le lendemain et oh-
tint la libre sortie; sa garnison ^tait
forte de deux mille hommes; eelle de
la forteresse de treize .mille; soixante*
sept canons ,/)inquante-d6ux drapeaux>
11
1
646
L'Ur«IV£llS.
aoq queues de paote tombdrent au
poufoir des yaimiiieiiis. L*eiinemi i'^
tait d^endu avee an courage extraor-
dinaire : sur quatre centi artiijeurs, il
n'eo reata que dnquante ; une oeBtaioe
de janiasairea se firent tuer jusqu'au
dernier ; sur dix-huit centa aoldata d'd-
lite, treize cents tomb^rent; lea habi-
tants, qui eombatttreBt auasi, perdi*
rent trois miile homroes. Vwaait
ruase ^rouva de son e6ts des pertes
seoatbloi, aurtout en officiera; die en
eut neuf de tu^i, dont tin coJonel;
tnnte<ieuxfarentble68^.»(J-Tol8toy).
Atzkhoura, Anrasan, Bajazet, Ta*
pruk-Kale et Diaolne ae soumirent
suooeBsiYement de gr6 ou de force.
Lea Ruaaea en vinrent aux mains k di-
veraearepriaea aveclesKourdes, cava-
liers intrepides, naaispeu propres^com-
battre centre des masses. PaakeTftch ,
aprds avoir aasur^ la (ubsistancedeaes
troupes, suspenditles operations mili-
taires, et ae rendit a Tiflis le4octobra.
Quoigue lliiver edt suspendu les
bostiiita dans la Turquie d*Europe,
ie sultan prouva par quelques d^
monstrations que le syst^me mili*
taire de la Turquie itBXt complement
cbaag^. Le grand Vizir essaya de
surprendre Pfovady, mala I'attitude
des Ruases le for^ Ji la retraite. Le
g^6ral Geiemar eut aussi k repousaer
ouelques attaques dans laValacbie; H
s^empara de Kal^ et de Tarnovo. Sise-
boli, ainsi qu*un petit fort dans le
golfe de Bourgas, furent aurpris par
une e&cadre rune, et la flotle turque
qui statioonait sur le Danube, prte de
Nicopolis, Alt d^truite par mie esca-
driile rasse; de sorte oue les Turca ne
poss^daient plus que Gtourgevo endei^
dn Danube.
Pendant que I'empereur If ieolas or-
donnait de nouvelles lev^ et organi-
sait de puissants nrayens d'attaque pour
la campaene de 18S9, la dimomatie
redoublalt d'efforta pour empfleber lee
Rusaes de poursuivre leurs avantagea.
Le prince de Mettemidi eollidtalt a la
fois les cabinets de Londres, de Paris
et de Berlin , d*empleyei: leor interven-
tion pour sauver la TUrquie d'uoe mine
probable. Le butdee^t-bomnMd'lttat
^talt en outre de laisaer les Rusaes
sous le coup d'unecampMie maoqute
S*il faut en croire lea rev61attoiia du
Port-folio, r Angleterre n*^tait pas dei-
gnee de se prater k cette combinaison;
il a'agissait d'entratner la France, ce
qui aurait mis la Prusie dana la ntea-
site de ae prononcer dans ie mtee
sens. L*habUete du comte Poaco-di-
Borco fit Mxmer ces tentatives; il
^mploya son influence pcraonndle anr
Charles X et sur le baron de Daaaaa
pour d^toumer le coup fat FAutridie
ajlait porter k la Rusaie, et il ooo-
aeilla a aa cour de reprendre le plus
tAt possible les hoatilitte, bien per-
suacf^qu^une victoire aptom'rait mleux
les difficult^ qu'un eongr^ ou des
protocoles. L'Autriehe , ae voyant aba»
donn^, eaaaya de palKer ee qu*il y
avait eu d*hostiie dans sea intentioDS.
et se resigns k aoufifrir ce qu'dle ne
pouvait empMer.
Le sultan, de aoa cdt6, eooottrag^
par qudquea aucces , ne o^ligeait rien
pour opploser k Tennemi une rMatance
vigoureuse. M^med-Texid, qui avait
aucced^ ik Huasdn-Paeha , fot reroplac6
lui-mtoe par Resdiid»*Pacba : ce der-
nier arrive au camp de Schoumla le $
mais. L*arm6e des Tares comptait
environ cent mtile homniee, dant an
tiers de troupes r6guli^res. « Le coNrte
Diebltaefa, nomni6 g^o^ral en chef
des armte ruases, ae trouvait ddil,
depuis le 8 f(6vrier, k son quaraer
e6n^al dnraasl. Vers le mUSeu d*nvnl,
(es Rusaea, partagte ea de«c eokm-
oea, pasadrent le Danube k Wt-
•ova c^ Kalarascb. Le 6 mal, un oorpe
d'arm^ oerna Sillstrie, et fbroa q«el-
n troupes turqoes k se renfennet
la place, abeMonnant aux Rimea
lea ouwages avane^. Le andne JcHir» le
giMral Rotii en viataux mains av<ec le
grand vislr, qui commandait des foroea
quadruplea, et finitpar le flBetlredans
une d^roatecottiplite.Parmi las Messda.
ae trouMiH Ali*Padia lul-mdoMi. Cette
viotoiie, bik sept mille hommea en bal-
tirent trente mille, rendit le gdodral
Roth mattre de la poakioD de Devno. »
(Exfrait de fouvrage d^ dt6, par
M. J. Tolatoy).
Russie.
S4t
Le IT Juin, SiKstrie, aprdt B'€tre
dtfendue pendant six semaines ti avoir
sotttena fingt-Sipt ]oun de tranch^
OQveite, ae renait aa gtetek Kras-
lov^. Tandis oue le grand TiBfr es-
sayait de repr«nare Provadi , Diebitsch
se portait Tera Teni-Baaar, ou le g6-
nml Roth Tappuvait tout eo obaerrant
renmmi. Le cointnt de Yent-Bazar fut
tout ^ I'ayantage des Russes; ceiui de
Koaleftoba oodta pha cAier aa ?ain-
qoeor, niaia il dMida du sort de la
campa^ne (19 mai). II paratt que Tao*
tion avait €t6 kwgteoips dooteuse, et
que sans on corps de rterve qui fit
pencber I'aTantage en fyftur des Rus*
ses, la Tietoire eAt 4i6 au moins in-
ceftasDO.
Le paast^ des Balkans pouvait s'ef-
fectoer sans danger depnis one lea
Russes ^ient mattres de SHSstrle.
Pendant que toute Tattention du vizir
se portaiic sur Seboanilaf des corps
msses qaittaient I'armle d'observation
pendant la nnlt, et 8'6coalaient silen-
deosement sar Is route de Kamtchik.
Le passage du fleave du mAne nom
a*opm amgr^ la inteistance des Itiros :
Rudlg^ pen^tra dans Aidos, et poui^
sn&Yft Fesmeni dans la direction d^
Kamal»t Dans le roCme temps, Roth
e'emporiit de la place de Bourgas; les
diffirents passages da Balkan fureot
anecesaiTenent occop^ II y eut en*
core Has affaire asses cfaauoe pr^ de
Slimo : ectte viHe fot emportee d'as-
seat; el Diebitsch « qui venait de ton*
qa^rur le titre de Ziaoalkanski , s'aran-
cait sor Afldfinople, od ii fit son entn6e
dans les demiers Jours do mois d'aodt*
Tandis que ks Tores Toyaient avec
eloasenMat et d^sespoir Tennemi fran-
cbir eetteceintare de mcmtagaes qu%
araical regard^ juaaa'alors oonune
uiiebarfi^tnsunnontable, les Russes
nmportaient en Asie des avaotages
BOO imHaa dMrift. Salegh-Paehat
tbat^ de dtfendre EnserouflD, avait
rteaf une armte d'enyiron dnquante
aMJIehoiDnMs; nais an Ueii d'amquer
les Rosses en rase campagneet dtpro*
filer de TavantaiQaihi mibre, et de la
emaaiasaaee q«^il avatt des loealitssi
poor haiteler renneini et inteeopler
ses oonvois , il rterfut de repraidre les
places fortes dont Paskevnch s'^lt
empar^. Le comte d'^rivan battit oes
coi|)8 s^parte, inhabiles tncore dans
Fart des, si^s. G'est ainsi qoe tons
les efforts des Turcs yinrent Miooer
oontre Akhaltzik. Le padia de Tr^-
Eonde, Kaia-Oglou, qui avait rinten-
tion d'envahir la partie rasse de la
Gourie, fut d^fait h Limani par le ^^
n^ral Hesse. Paskevitch. oblige de laire
face h une arm^ nombreuse qui es*
sayait de Tenvelopper, fit venir quei-
ques renforts de Bajazet et d'firivao;
toutefois il repiit bientdt roffenstve.
Le g^n^ral Bourtaof remporta un avan-
tage signal^ ^ur le lieotenant du s^ras^
kir, presdu village deTchabori C3juin).
tt Sur ces entrefaites , an oorps de vingt
mille hommes, sous les ordres da
Haki-Pacba, s'avancant d*£rzerouni,
vtnt prendre une forte position dans
les parages bois^ de Mili-Douz^, sur
le versantdesflaontagnesdeSacanlottk.
Un aotra corps de trente mille nonunes
avait qaitt6 EraBroum et suivait ee-
lui-ci«
« Le ooarte d'£rivan, de son edt^,
ayant eonoentr6 ses forces prte du vil-
lage Katanli , se pr^parait aa coodiat..*
Le IS jain, il fit one fausse dteeas*
tratioo do oAt6 da camp de Haki^Pa*'
eba; il ordonaa en meme temps au
g^o^ral Boortzof de se porter dans
oatte direction avec une partie de ses
troupes, et partit lui-mtoe k marches
fiHfcees vers les gorge»des montagnes
de Sagaalouk; il fit eo une miit trente
ventes par des chemias inextricables,
oouverts de neige et sifionnes de pro*
fonds ravins. Le soir, il arriva au bord
de la rtvi^ ingis, sor le flanc de Isi
position de Tennemi... Le IS, le g^
n^rsl en cbrf avait toum^ enti^meBt
la position de Haki-Pacha; roais au
moment mime de Tattaqye, Tavant*
giarde du s^aaktr, qui arnvait d*£rEe-
rouof avec trente mille boBdmes aa
seoours de son lieutenant, d^yxmcha
par une gorge qui, da village de Ja«
visa, va se rmir h la grande vall^.
Legdfitod en chef rtelut aossitdt de
ranaquer, et mansha sar le s^raskiri
q^'U renoootra pres du vtUage de
If.
548
L'UNIVERS.
KainlL La cavalerie du s^raskir en-
tama rafCaire en s'elan^ant, par un
mouvement en cercle, sur Taile droite
de rarm^ russe , que le comte d*£ri van
conduisait lui-m^me h Tattaque. Les
Turcs furent oblige de plier, et Pas-
kevitch r^solut de poursuiTre sa vie-
toire et de battre son principa] ennemi
a fond , avant que Haki-Pacna pOt Hre
inform^ que le s^raskir ^tait si pres de
lui. II donna ordre au g^n^ral Bourtzof
d*inqui^ter le eamp de Haki-Pacba, et
se hata d'en finir avec le s^askir. Les
Russes attaqu^rent en trois colonnes :
une, sous les ordres du g^n^ral Mou-
ravief , tourna le flanc gauche de Ten-
nemi, en s'^levant sur le revers de la
montagne; la seconde, sous le ^^neral
Pankratief, tourna sur la droite; le
g^^al RaieCski commandait la troi-
sieme au centre : ce dernier avait ordre
d*attendre les attaques des deux ailes,
et de saisir le monient pour les sou-
tenir... Assaillis sur les deux flancs par
rinfanterie russe, les Turcs commen-
cdrent a fl^hir... Au8sit6tla cavalerie
et rinfanterie l^ere s'^lanc^rent en
avant sur la cr^te de la montaene, et
la retraite de Tenneroi devint oientdt
une fiiite g^n^rale. Les Turcs, aban-
donnant leur artillerie, se r^gi^rent
en d^ordre sur les roonts Saganlouk.
On trouva un riclie butiu dans lear
camp , et le champ de bataille convert
de morts t^moigna de T^tendue de
leurs pertes.
« Apres cette victoire , Paskevitch
se retouma sans perdre de tem[)8
contre le camp retranch^ de Uaki-
Pacha. U paraft que ce dernier ignorait
encore la ddiaite du s^raskir. On lui
envoya un prisonnier pour Ten ins^
truire. Le pacha voulait capituler;
mais ses troupes s'y oppos^rent pro-
bablement, puisque le reu des batte-
ries turques recommen^ bient^t avec
force. Cette circonstance d^cida le
comte Paskevitch h donner le Signal
de Tattaque , et Tarm^e russe s'^ranla
en cinq colonnes.
xLa colonne prindpale, conduite
Imr le comte d'invan, marcha droit k
*ennemi; la seconde, sous les ordres
de Pankratief , fnt diarg^e de prendre
en flanc la position de Tennemi pour
lui couper la retraite; les trois autres,
sous les ordres des eeneraux &Mcken,
Mouravief et Ltonot, se porterent sur
les routes de Midgingerd, de Zanaah et
de la valine d*Andjar. Les deux pre-
mieres colonnes pen^trerent dans le
camp, qu*elles mirentend^route;elles
s^emparerent des canons encore fu-
mants des Turcs, et les touroerent
aus8it4t contre les fuyards. Le gdndral
Pankratief les atteigmt dans leucftiite,
et fit un grand nombre de prisonniers,
parmi lesquels se trouva Haki-Paoha ,
lieutenant, du s^raskir. Les colonnes
destinies k couper la retraite de l*en-
nemi rencontrerent des ravins pro-
fonds , des for^ts 6paisses , et ne purent
Temp^cher de se Bauver en partie dans
les voies et les gorges du bassin de
TAraxe. II serait difficile d'^valuer la
perte des Turcs en morts et en blesses ;
les prisonniers ^talent au nombre de
douze cents. Dix-neuf canons, des
armes de toute espece, et tout I atti-
rail du camp tomberent au pouvoir du
vainqueur. v (Extraitde FEssai biogra-
phique et historique sur le comte Pas-
kevitch, par J. Tolstoy).
L*armee russe avail k franchir les
monts Saganlouk pour se porter sur
Erzeroum ; la forteresse de Hussdn-
Ral^ se rendit sur une simple somma-
tion. Les Russes y trouverent des
approvisionnements consfd^rables et
vingt-neuf canons. Le 37 juin ,Tarm^
de Paskevitch campait k quelque dis-
tance d*£rzeroum. II commen^ par
s*emparer des hauteurs deTap-Dagb,
qui dominent la ville, et Tartillerie
russe, de ce point culminant, ouvrit
un feu terrible contre la place, qui ca-
pitula le 37 juin. Outre des approvi-
sionnements et des munitions de toute
esp(k$e, on y trouva cent cinqoaote
canons. Le Kraskir et quatre autres
pachas furent faits prisonniers. Paske-
vitch, en recompense de ce britlant
succ^ , fiit nomm^dievalierde Tordre
militaire de Saint -Georges de la pre-
miere dasse.
La prise d'Erzeroam forqa le pacha
de Van, qui assi^eait Bajazet, a r^
trograder pour alter d^fendre son pa-
RUSSIS.
649
(Mk. lie g^n^ral Bonrtzof s^empara
deBaibourt , plaee d'ane haute impor-
tance a cause de sa position dans le
roisinace dea mines de cuirre dont les
Tores tirent un revenu considerable.
Les Rasses continuaient k s'^tendre,
oooapant les points les plus favorables ,
taot pour assurer leur noofelle con-
qnte que poor en faciliter de nou-
reUes. Cependant le genial Boortzof
sortit de Baibourt pour se porter a la
rencontre d^un corps tore qui s*6tait
reoni sur la route de Tr Aisonde ; il
Paltaoua pr^ d*un defile vers le vil-
lage de Kiiart ; mais , envelopp^ par
d^ forces supto'eures , il toniba franp^
d*une balle , et ses troupes furent obli-
gees de se renfermer aaos la place.
lies Tdrcs reprirent Baibourt, mais
Paskevitdi les en chassa apres un as-
saot meurtrier. Le general en chef
marchait d^ia surTr6oisonde,1orsqu*il
apprit que la paix ^tait sign^ a An-
ariDople entre la Russie et la Porte.
n retourna k Tiflis, et organisa une
expedition contre les peuplades au
nord du Caucase, qui ^taient en pleine
insurrection.
La campagne d'Orient venait de
finir d^une mani^re glorieuse pour les
Russes; le trait6 d\Andrinople, con-
du le i (14) septerabre 1829, leur as-
sorait des avantages qui compensaient
amplem^t leurs sacrifices. Et cepen-
dant ces sacrifices furent immenses.
Sdon le rapport du lieutenant-colonel
Cbesney, aans la premiere campagne
qui cut pour rdsultat la prise de Varna
et la Iev6e du si^ge de Silistrie , des
mllliers de Russes p^rirent de la peste ,
et lis perdirent f rente mille chevaux.
D'aprte les m^mes renseignements ,
les Russes traversdrent le Balkan au
nombre de quarante mille seulement ,
dost, quelques jours apres, un quart
se trouvait dans les h6pitaux. Get of-
ikaer ajoute que , sans compter les Bos-
niens qui ne s*avancerent pas au del^
de leors propres frontidres , les Turcs
B*ont jamais eii sur pied , dans cette
guerre , plus de cent mille hommes de
troupes UT^uli^res , et quarante mille
de troupes r^gulieres.
• Les Russes se ressentaient cruelle-
ment de Teffet des maladies qui n^at-
teignatent pas les Turcs , probaolement
h cause de leur pratique religieuse
d*ablutions oontfnuelles. Les Rosses
souffraient aussi beaucoup do manque
de vivres , ou p1ut6t de ce qui en re-
venait au soldat , en vertu des contrats
de foumitures passes avec les ofB-
ciers.
« A Boukharest , en d^embre 1829,
le m^ecin en chef convenait de la
perte de douze mille Russes morts de
la peste. A Varna , les ofBciers russes
estimaient leurs pertes k dix mille
hommes. A Stiistne , la mortality ^tait
terrible. A Andrinople*, six mille ma-
lades moururent tous an bout de trois
mois. La perte totale des Russes , dans
les deux campagnes , fut de cent qua-
rante mille hommes et de cinquante
mille chevaux. » (Port-folio, n* 26.)
Bien que les trait^s n'aient qu*une
existence ^ph^mdre, il est cependant
indispensable de les m6diter, parce
3u*ils expriment la situation respective
es puissances contractantes , ei qu'on
y retrouve , sans un grand effort d'at-
tention , les tendances ult^rieures de
la partie pr^pond^rante. Guid^ par
ces motifs , noiA aliens rapporter les
stipulations principales du traits d*An-
drinople.
Le premier article n*est qu'un pr^am*
bule ae pure forme.
Article 2. Sa Majesty Tempereur et
padischah de toutes les Russies rend
a la Sublime Porte la principaute de
Moldavia, avec toutes les fronti^res
au*elle avait avant le commencement
de la guerre h laquelle le present traits
a mis fin ; Sa Majest6 imp^riale rend
aussi la principaute de Valachie, le
banat de RraTovat , la Bulgarie et le
pays de Dobroutche depuis le Danube
jusqu*i^ la mer, ainsi que Silistrie,
Hirsova , Matcbin , Issaktcha , Toult-
cha , Babadag , Bazardgik , Varna , Pro-
vadi-et autres villes, bourgs et vil-
lages qu*il contient, toute T^tendue
du Balkan, depuis l^min^ - Bournou
jusqu'a Kosan , et tout le pays depuis
e Balkan jusqu*^ la mer, avec Se-
limno, Yamboli, Aidos, Karnabat,
Andrinople, Bourgas, et toutes les
uo
UVItlVEHS.
vJUes, boMifjji «C villagiB, ainsi que
totttcs l«t places ^e let trouDW rusies
fNit oeevpees daas la Rouinelie.
Article 3..Le Proth continvera de
former la limUedee deui emiares, de-
IMiiB la point oik cetta mi&e teudie
an territoira de la MoklaTia josqu'^
sa jonctioD avee la DaooiM. De ce
SoiDt la ligDe fronti^re suivra la eours
u Danube joaqu'^ rembouehure de
Saint-Georaea; de aorte que, laiaaaQt
toutea lea lies form^ea par lea divers
bras da ee fleuve en possessuNi de la
Russia , la rive droita rastei'a, oomaia
par la pasa^»eopo8aessioa de la Porte
ottomase. Cependaot il est oonvenu
oua eetta rive droite restera inhabit6e
aapufs la point oil le bras de Saint-
Georgas se s^pare de celai de Soolini ,
h une distance de deux heures du
fleuve y et qu^aucun ^tablissament n'y
sera form^ , non plus que sor lea ties
qui resteroot au pouvoir de la Russie ;
et , ^ Fexception des ouarantaines qui
pourront y toe ^tabiies, il ne sera
perinisd*y fsure aucun autre ^tablisse^
inent. Les bdtiments marchands des
deux puissances auront la faculty de
paroourir le Danube dans tout son
cours ; et ceux qui p^teront le pavil-
ion ottooian auront libra entr^ dans
les embouchures de Kill et SouUni,
celledeSaiotGeorgearestantcoimnune
aux navires de guerre et b&timents
marchands des deux puissances con-
tractantes* Mais les navires de guerre
fusses « lorsquUIs remonteront le Da-
nube, n'avanceront pas au dela du
point de sa jonction avec la Prqtb.
Cea dispositions mettent h la dispo-
sition des Ruases rembouehure du Da-
nube.
Article 4. I4a Gfor^ie , I'lm^r^tie ,
la Mingrelie » la Gourie , et piusieurs
autres provinces du Caucase, ayant iU
depuis de longues ann^es et h perp^
tuit^ r^unies a Tempire de Russie, et
ret empire ^ant acquis » par le traits
de Tourkmantcha! , les kbanats d'l^n^
van et de Nakbitch^van Jes deux bautes
parties contractantes ont reeonnu la
ndcessit^ d*^tablir entre leurs ^tats
respecti& le long de cette ligne une
fronti^re bion tracee pour pr^venir
twte diseiiaaioB uHMeHve. EUea out
^emcBt pria en eoasid^ralioa les
moyeas oonvenables de'a'opposer anx
Incuraioiis que lea tribua fOMioes ont
faites juaqu^^ et jour, et ffi^i oot si
aouvent oompromia lea relationa d'ami-
tid et da boime inteliigeBce entro les
deux empiras. En consequence, il a
^t^ cOBvemi de consid^er d^sonttais
Gomme fonnant la frontite entre les
territoiree de la cour impMale da Rua-
aie et oeux de la Subume Porte en
Asie, la Knie qui, aaivant la limite ac-
tuellc da la Gourie t depuia la mer
lioire , remoiite juaqu'au bord de rime-
r^tie, et da lli en lime droita jusqu'au
Soint oil les £pontierea des. pachaliks
'Akhaltzik et de Rars renoontrent
celles de la Georgie, laissant de oatte
manidre au nord et au dedana da eette
liffie la viUe d'AkhalUik et le fort de
Knaltnanik h une distance motndre de
deux heures. Tous les pays aituds au
midi et k Touest de oette ugne de d^
marcation , vers lea pacbaiiks de Rars
et de Trebisonda , ainsi que hi miyeure
partie du padialik d'Akhaltaik , reste-
ront a perp^tuit^ sous la domination
de la Sublime Porte, tandis que ceux
qui sont situ6s au nord et k Test de Is
Ugne mentionn^e ct-dessus, vers la
Gargle , llm^etie et la Gourie, aibsi
que le littoral de la mer Noire, de-
puis rembouehure duKoubaajusqu*au
port Saint-Nicolas inchisivement , se-
ront sous la domination de Feoipire
de Russie* En cons^uenoe , la cour
imp^iale de Bussie abandonne et rend
k la Sublime Porte le reste du paeha-
lik d^Akbaltzik , la ville et le pachafik
de Kars , la ville et le pachalik de Ba-
jazet, la ville et le pachalik d*£rze-
roum, ainsi que les places occupto
par les troupes russes, qui peuvent
dtre en dehors de la ligne mdiqu^e.
Les stipulations contenues dans cet
article tendent ^videmment k faciltter
la soumission des peuplades du Cau-
case , en les isolant de tons c6t^.
Article 5. Les prineipaut^ de Mol-
davie et de Yalachie s 6tant plac6es ,
par une capitulation , sous la snzerai*
net^ de la Sublime Porte, elles conser-
veront tons les privileges et immnni*
RVSSIE.
6iit
ikm\ km aaroni 4fU aoeovMs, soft
pr \a trsit^ o(molo» etitre m dcm
eoms nnp6iial«8. soit par les hati*
Aktib pronmlciiM 2^diferM» ^poques.
Elles jobiront da libre ocereice de leinr
idi^ , d'Hoe p«r&ife nkxMS^ d'ana
adminJttratkMi Dationale et ind^pan*
dantf , et d*iiiM entidre liberty de oom-
RNfOC) etc*
L'artide 0 eit rdatif aai daoaas
stipoMea dans la oonveotkm 8^r6e
relative i la Senrie.
Dana I'articfe 7, qui eoneerne tea
tfroits et priYiMgaa eominewaaqx, on
remarque lea paaaagea aoiiraiita : lea
sojets, bitimenta et marchandisea
nuao aaront k Fabri de toute vio*
loiee et de toute vexatfioii. Lea aajeta
, nistts aeront sous la joridictfOQ ex-
' dnsiTe et la pNOlioe dea miniatrea et
coDfloladeRuasaie. Les bdtimenta nissea
m seroat aoumis ^ aucone vidte de la
part dea aotorit^ ottoman^, nf en
mer, ni dana aacnn deaoorts ou radea
dea passeaaions de la Subifme Porte.
Toatea lea mardiandiaea ou denrdea
appartenant k tin aujet rasse, apr^
avoir payd lea drofta ae doaane atipo-
1^ par lea tarifa, seront libremenl
tranaportto, d^poate a terre, dana
les magagina du propri^taire ou de
Bon coosieDataire, ou tranaportto k
bord dea biltinienta de toute autre na-
tion qudconque, aana que les sujeta
mssea aoient tenua d*en donner a^ia
aox aQt(Nit6a locales , et encore moina
de demander leur atxtorisation. Lea
grains prorenant de la Ruaaie jouiront
dea mdioes privildges ; la Sublime Porte
s'engage, en outre, a veiller aoigneu-
sonent a ee one te commerce et la
navigation de la mer Noire aoient d6-
gagra de toute entrave. £]Ie reconnatt
et d^lare le canal de Constantinople
etieddtroit dea Dardanelles libremeot
oaverta am bdtiments russea sous
parillon marchand, pour la sortie
ooimne pour le retour. Le passage du
caaal de Constantinople et du detroit
des Dardanelles est ouvert a tous les
Mttments en paix avec la Sublime
1^. Si ) ce qu*a Dieu ne plaise, quel-
QQ'mie dea stipulations contenues dans
|e present article ^it et demeurait
enlretiite, aoneMaat laa tMamationa
dtt miniatre naaae k ea aitjet^ la Soblbne
Porte reoonnatt d^avanee le droit de la
eour impdriale de Raaaie de eenaidd-
ter una telle tiifraetioo oomnae ua aete
d'hoatilitd.
L'deoulemeot dea rlchea produita
de la Ruaaie iiidrldioBale eat anurd par
oet artiele ; et , ooramercialenieot par-
lant , la mer Roire n*eetpliiaqti*un lae
maae*
L'artfete 9 ddAait lea htdenmitda
duea par la Parte an eommeree ruase ,
depuis la guerre de IS06 , et lea fixe h
on miUioii et demi de dueata.
L*artiete 9 eat felatif ft rindemnitd
pour lea frala de la aaerre; elle eat
lixde dana Tar^le addttionnel h dfx
ffllHiona de ducata de Hollande , indd-
pendamment de la oeaaion dv terri-
iotre aaiatique stfpujde par Tartiele 4.
Artiele 10. La Sublime Porte, en
ddelarant son adhdslon en^^ aux sti-
pulations du traitd (sur lea affaires de
la Gr^) oonclu h Londres le 24 juin
(^ Jutllet 1827) entre la Ruaafe, la
Grande-Bretagne et la France , adb^
Salement h Taete du 10 (24 mars 182^),
[figdd'un consentement mutuel entre
ces mdmes puissances sur lea bases
dudit traltd, et contenant lea meaorea
de detail relatiyes h son exdcution d6fi-
nttire...
Article IS. Les bautes puissances
eontractantes aocordent ira pardon
g^ndral et une amnistie pleine et en-
tiere k tous cent de leurs sujets qui ,
pendant le conrs de la guerre , auront
pris part aox operations militaires , ou
manifestd , soit par leur condutte, soft
par fenrs opinions , leur attacbement
a Tune ou a Fautre des deux parties.
En consequence , aucun de ces indiri-
dus ne sera inquietdni persdcut6, soit
dans sa personne , soit dans sa pro-
prietd, pour sa conduite pass^e; et
chacun aeux , recouvrant les proprid<*
t^s qu*il possddait aupararant , en
jouira paisiblement sous la protection
des lois, et sera libre d'en disposer
dans Tespace de dix-huit mois , connne
de se transporter avec sa famille , ses
biens , etc. , dans le pays qu'il aura
choisi , sans dprouver aucune entrare
$6$
L*UlfIVEE-S.
ou vexation quekooqiie. Les mimiu
privilidges soni assnres aux sujets res-
pectins des deux puissances ^tablis sur
les tevritoires rendqs h la Sublime
Porte , ou G^^ k Ja cour imperiale de
Russie.
Get article d^voile toute la marche
que suit le cabinet russe dans ses ea-
vahissements suocessifs pour atUrer a
lui les populations des provinces con-
quises , et pour jeter au sein des con-
Mes liraitropbes qu'il oonvoite, des
Elements d'opposition qu'il sait exploi-
ter en temps opportun.
Article 15. Tou9 les traits , conven-
tions et stipulationfi, arrlt^ et con-
elus, a diverses ^poques, entre la
^ur imp^iale de Russie et la Porte
ottomane, h Texoeption de ceux qui
sont annules par le pr^ent traits de
paix , sont confirm^ dans toute leur
lorce et eflPet ; et les deux bautes par-
ties ooniractantes s*engagent h les
executer religieuseraent et inviolable-
ment.
L*article additionnel, qui fixe la
Siotite de Tindemnit^ , stipule que la
ussie acoeptera , en d^uction de cette
somme, des ^ivalents qui seront
Gonsentis de part et d*autre.
Quant k la stipulation contenue dans
Tacte $epare concernant les urinci-
paut6s de Moldavie et de Valacriie , et
^ vertu de laquelle les villes turques
situto sur la rive gauche du Danube,
ToumoYO, Giourgevo, Braiioff, etc.,
avec leur territoire , doivent £tre r^u-
nies a la Valacbie , et les fortifications
qui Qht ci-devant exists sur cette rive
ne jamais £tre rdtablies , il a ^t^ r^gle
que Giourg^vo serait remis aux trour
pes russes , et que les fortifications en
^eraient ras^.
V^vacuation des provinces d'Asie
qui doivent ^tre rendues a la Porte
aura lieu cpnform^ent a une con-
vention particuli^re, que le g^n^ral
QomtePaskevitcb a poqvoir de conclure
avec les commandants de la Porte dans
ces contrees.
La Russie venait de sortir d*un
g^-and danger; ies guerres d'Oricnt
avaient retrempe Tesprit de ses sol-
dats, et malgr^ In perte dMiommcs et
les d^pcnaes cooaid^cables qu'avaieiit
en trainees la double campagne de Perse
et de Turquie , Nicolas avait atteint le
but que lui prescrivaient a la fois et la
politique coustante de son cabinet et
la situation particuliere ou il se trou-
vait a la suite de Temeute de 1825.
La Gr^ ^tait d^finitivement s^paree
de la Turquie; for et les intrigues
russes remuaient profondement les par-
tis dans cet J^tat plac^ sous la tutelle
des puissances liberatrices , comme si
Ton avait craint qu'il nepoussiStjusqu'a
leurs consciences naturelles les prin-
cipes de liberty qui Tavaient soustrait
au joug ottoman , et que Tener^ied^un
peuple qui se r^6nere par lui-m&ne
ne parOt un trop dangereux exemple
pour ceux dont la politique avait
r^cemment annihil^ la nationality. La
conformity de culte entre la Russie et
la Grece promettait h la premiere un
point d*appui solide pour tons les res-
sorts qu'il lui importaitdVfairejouer.
Nous avons vu comment radresse des
ambassadeursde Nicolas pres les cours
de France et d'Angleterre etait par-
venue k assoder aux efforts de l^m-
pire centre la Porte les forces mari-
times qui auraient M ^tre la sau vegarde
de ripviolabilite turque. Les Darda-
nelles n*6taient plus un obstacle , et la
M6diterran6e s*ouvrait d6soirmais iibre
et riche de promesses aux dominateurs
de TEuxin. L*Autriche avait ^choue
dans ses tentatives pour opposer un
frein continental k la marche envahis-
sante de sa puissante rivale. La Tur-
quie ^tait d^bord^e du c5t^ de la Perse ,
et le Caucase s'abaissait devant les le-
gions du nord , entralnde$ par un pen-
chant irr^istible vers ces contr^ ierti-
les et heureuses, berceau desplus grands
peuples de Tantiquite. Cependant les
sacrifices dont la Russie avait pay^ ces
avantages ^taient immenses, et elle
^vait besoin de repos pour panser ses
blessures, reviver radministralion in-
t^rieure, retremper Tespritde la jeu-
nesse par un systeme d*instruction plus
national , et coordonner les Elements
de sa force agressive avec les condi-
tions de ses nouvelles conqu^tes. Tout
5 coup la revolution de juillet eclata ;
RUSSIE.
iiRniice , sorUnt d'i» long sommeil,
r^ tfans Teiil les piinoes que lui
avail iiMos^ rinfliwnoe ^trang^e,
etqui, pla<M§8 dans raltemattve de se
fflODtrer bostiles a ceox qui avaient
flit la restaaration « ou de dtfendre
moUement les droits du peuple ^i
Tavait subie , oubiierent que la l^ti*
imt^abdiquedes <]u'eUe renonce h oette
aetloo coDser? atrioe et jalouse gui fait
sa force , et d^chirtreDt eux-memes le
traits de Vienne en portant atteinte a
la constitution qu'ils avaient ' jur^.
Paris eombattit trois jours, et la
Fraace fiit libre. La Belgique suivit
oeteiemple , toute rAllemagne s'agita ,
nais DuHe part Techo des oris de li-
berty ne fut aussi retentissant qu'en
Pologne. Cependant la revolution de
jaillet ne fiit point la cause de Finsur-
reetion de Varaovie; nous avons vu
prMlemmeot qu*une vaste conspira-
tion ^teodait ses racines dans Farm^ ,
dans les university, et que la dispo-
sition g^n^rale des esprits toit favo-
rable au but r^^n^rateur qu*elle se
proposait Le fluide ^ectrique dtait
partoat; il sufQsait d'une ^tincelle
pourqa'il rayonndt puissamment de la
Baltique k i'Euxin. Le fer dont Gons-
tantin afait convert ses legions lui
senritdeoonducteur, etia commotion
fot si Tioloite, que le trdne de Tauto-
crate en fut dbranl^. Quelques ann^s
aoparavant , les Pdlonais avaient 66-
battu la r^lotion de fusilier sur la
plaee du palais Tempereur Nicolas r^-
ceounent arriv^ k Varsovte. Les
Kpr^sentaots recul^rent devaut T^or-
vBUi de rattentat, et le gou{) fut
nanqni. Les plus presses se virent
forces d'attendre, et d^ iors «rar-
■m^ et principalement la ^arni-
* son de Varsovie absorb^rent bientdt
•Urates les associations seoondaires,
* ct toot oe qui brdlait de vengeance
' et de patriotisme se reposa sur Te-
* oereie des ef^atUs du UarivUch. Les
« ^coles ', les ateliers , les provinces et la
*<liete'mtoe qui conspiraient tous,
•jasqo*alors separ^ment a leur ma-
•oiere, leur abandonn^rent, par nii
'inatinct r^llement inexplicable, les
4M
de la Fologne. » ( Mitos-
lawski. )
Durant quatre mois de pr6paratifs
et de tdtonnements, les conspirateurs
mdrirent leur oomplot; Tex^utioh,
selon toute inrobabilite , en edt dt^ re-
mise jusqu^au printemps suivant, si
I'intention non d^iste du tsar, dc
marcher sur la France en poussant
devant lui la Pologne, n*edt pr^ipit^
r^poque de cette tentative h^roique r
k ce motif joignons encore que , parmi
lea nombreuses arrestations faites par
la police , quelques-unes avaient donn^
TOTcil au gouvernement , et qu'il Malt
important de ne pas lui laisser ie temps
de se reconnattre , et de prendre le&
mesures que reclamaiient les drobns-
tances. Dans la soiree du 20 novem-
bre , les principaux points de la capi-
tale furent envahis par les troupes
destinte h agir. On commen^a par
s'assurer de Tarsenal , et Tattaque du
Belvedere devint I'objet de tous les ef-
forts. Les porte-enseignes, comnoan-
d^ par Wysolcfci , et appuy(6s par
quelques oompagnies de chasseurs h
pied et de la ligne , devaient ex^uter
ce bardi coup de main. Les ^l^ves de
I'universite vinrent se joindre a eux
et re^urent des armes; bientdt,dans
le silence de la nutt , ils s'^lancent vers
la demeure de Constantin ; le prince,
ignorant tout se qui se passait, ^tait
sur le point de s'endormir, lorsque
le bruit de Tattaque retentit autour de
lui ; il n'a que le temps de jeter sur
ses epaules una robe de nuit , et il se
glisse inapcTQu dans les jardins du
chateau. Lubowioki , devou6 a Cons-
tantin , tombe perc^ de treize coups de
baionnette. Gendre , favori du grand-
due, subit le m^me sort. Cependant
Wysolcki, s'adressant aux porte-
enseignes, s'^crie : « Frdres polonajs,
lithuaniens, volhyniens, Theure de la
liberty et de la venseance a sonn^ !...
Aux armes ! » Ce lut avec ces faibles
moyens que quelques jeunes enthou-
siastes essay^nt de detruire Toeuvre
de Catherine. Apr^ avoir vainement
lutte contre plusieurs corps russes qui
les refoulaient dans toutes les direc-
tions, les.insurg^ d^esp^rdrent ui^
U4
dc km eaive; mait ie bruit
de la mousqueterie avait ^veill^ la
vilte; de nonlireiix raiaemUiRiiento
•e fonn^entj et le people eul trienlAl
sejoint lee iniurgeB*. La rteiateDee
8*or8aiiiia nir tone ke pointi; et le
jeoneaae, ae metteni a la Mte de la
iDule qiii ae porfait fen raraauil,CB^
lowia rhymne : Poloene , tn n'cs pea
saae dtfenseuvs. Hauke, minisftre de
la gwerre, fnt maBaaer^; le mfyainl
Koivieki fol fosilMf parce miele peu*
pie Tavait prie poor Lewicki cpn M
^ftait odteiix. Trambicki » tombe entre
lea niaina de oette foiile ferieuae da
libevt^ qm le presaait de prendre pert
k la rmltey r^aendH avcc fermeU:
• J'ai nir^ fid^lite ii moo ao vrerain ; » et
it toaaba rictime de aoa d^voueaMot.
La lotte ae prolooge pendant qoelqne
tempadu edt^ de Fanenal : les Runee
pttent 9 et bientdt toutea les armea oe»«
aerWea dana lea d^ta de I'Mfioe de«
vieonent la proie dn people. Lea liniitce
denotre cadre ne noas pemaettent pea
d*entrer dans les dteils de oette m-
morable joum^. On re^tte que tant
^b^rolsme ait M st^ile, et ^e trop
sou? ent une cruaot^ sansbnt ait doniA
auz efiforta dn petriotisme rapporenoe
d^une reaction cnielle. On se bate d*oii-
vrir lea priaonst et tons ceox que lea
Rnaaea n'avaient paa eu le tenuis de
dinger aor Tami^ en retraite furent
inuMdiatement d^'vr^ Le Belvtidre
Halt eoTahi. Le grand -due , aecom*
pagn^ de I'ambaaaadenr de la eour de
Berlin , sort iurtiTenient du tardin oo
U a'^tait each^, et , se rtfngiant dane
une cbaumi^re, il adrease k Nioolaa
et au roi de Prosse un rapport som-
maire de ee qui vient de se passer. Ce
prince ne vayait aloa aotour de lui
que queloues gteeranx et de foibles
reates de Varmee si briliante qu*il s*6-
tait plu il former. Le lendematn on
put mieoi luger de T^tat des cboaea,
et il 6ut dire qoe de part et d'ao-
tre» c*est4-dire ao camp de Conatan-
tin et dane Varaovie, le desonlre et la
cenfoaion ^taient ii leur oomble. Lea
Crda s'^taieot jetds snr les boo-
BBdes jui&, et les d6pouillaient au
Hen de la justice et de la libertd; le
people et lee inaurgaa anient biant4t
r^rim^ lea d^aordres, mais U main
quait encore a la moltitade une direc-
tion» c'cstRMite dee cbefii.
Gependant I'aigle blanc aaparut sur
lea raoaanienta puUica, et la coearde
nationale defint le preooder eigne de
rallienieBt; la eanae da people sem-
bleit gagnte« et dte lore qiielqnes nooM
liliiBtres o'bMtiient pee a s'j latta-
eber. Deux gte^raox, Sierawski et
Pac, furent refus avec transport par
les insurgte. Ce dernier fiit nornm^
cemmandaBt en aitteaMiant one Pon
trourdt Cfaiopieki , vera lequel se tou^
naient toutea les eepdrances. CUopiclLi
jooiasait d'une baute r^potatioa niiUr
taire« et aa popularity ae relevait en-
core par la disgrdee que lui avait ia*
flig^ le grand-due. Gependant ce
ftMral, &» babita^ k calculer les
diancaa d*une gyerre r^lito qm
capable de dnrl^ une tosurrectioa et
d'iaipvo<nser dea resaouroes , se teoait
k I'ecart et d^plorait la tem^t^ de les
eompatriotes k Tinstant mtae oh son
nom ^tait dana toutea les bouches, oo
k renomnate de son courage faisait
naftre la ooofiaooe dans tous les coeurs.
On assure qoe Lubeeki lui avait fait
narvenir ritat de Tarnito acti^re de
rempiie , aign^ de la main de Nicolas.
Le bat de oe renaeiffneme&t^taitsaDS
doute de paralyser d^abord lea mesures
de Cbloptcki , en lui demontrant par
un document ofBciel que la Pologae
serait bora d*tot de lutter centre une
arm^ de deux cent dnquante millo
hommes y deatin^e ii ^touiter les revo-
lutiona de I'Oocident. Ainsi, la poli-
tique ruese s'insinoa d^ le principe
dans Teaprit de ceux que le peuple ap-
pelait k tatter contre elle. Le conseil
s'^tait assemble au palais de la banque ,
soualapr^ideooeducomteSobolewsku
et dea noms v^nMs pr^ti^rent k Tans-
tocratie, piot6t entrain^ que favora-
ble au moovement, Pappui de leur
oonaidtetion. Lubeeki dtolt rinse de
oe eonseil ; on le croyait ennemi de
Gonstantin , et , sooa ce masque > ii put
impun^mentdtei^niserkir^istaDee.
Les actes du eonaeil ne eessereiit dc
parler au nom de Tempereur et roi i ^t
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HUSSIE.
^66
di tniter te rdfolutfioa eomne on
lelespontaii^.jpm^dtoportfe et de si-
gnfficatkm politique. Cependant Teial-
Mom des clal»« eelle de la jeunesae
qui te preesait autoor du pmesseur
Lelewel,etl'iii8tioctdefl masses oontre-
lientla tendanoe aristocratique;.
jmblicaiiis f nststaient sur la b6-
de dteraier le tsarMtcb el ses
troupes , d'organiser la r^Tolution dans
toutes les profinoes du roTaunie , et
d'entourer d^aoe surrefllsBoe ^roite
les fmteurade raoden gouTernement*
Ges demandeSf expriimes dans des
potions doergiqueS) furent ^ndto,
mala tmudement et avec tous les
ddiors de la prudsnoe. Lubeckf avait
oompris qu*fl a'agissait moins de r^ris-
ter aa torrent que de M creoser un
lit; Pancfen oonseil fat dissous, et la
nomiRation de queftjues patriotes^
Sarmi lesquels figurait Leiewel, en-
onnt les 80U|>90ns des r^olutfon-
nalres. Chlopidii fut procfan)^ g4^o^a!
en ebef h runanimit^ , et c6 cboix fut
le cbef-d^oeuTre de Labecki , qui ^tait
sdr de garder , en s'effa^nt , toute son
iofluence. Aujounf bui qu*i] est permia
de peser avec impartiality la valeur
morale des mesures adopts par le
conseil , on est eependant embarrass^
iorsqu'il s*a^it d'apprteier tous les mo^
U& d^temunants qui le guid^nt : la
lotie eatre la Pologne et Tempire russe
pooTait-elle ftre de longue durde? la
disproportion des forces ne conseillait-
eOe pas la prudence « et peut-on taxer
de serrilisme ceux qui inherent que la
oomititutioQ de 1816 etiit tout ce k
qooi la Pologne pouvait raisonnable-
meat pr^tenore ? D'un autre oftt^, apr^
aioir tire le glaive, devait-on se fier
a la d^oieoce nuxscovite? La marcbe
la plus lationnelle ne consistait-elle
pas a ^tendre la revolution aussi loin
cpieDossible,pour'morceler les forces
de rennenit et renip(^er de tomber
de tout son poids sur le centre m^me
de rinsurrecuon ? Le oioment de resis-
tcr ffficaeement n'^it-il pas sufOsam-
meot indiqu^ par les circonstaoces?
Me devait-on pas rcg^rder comme une
proaiesie d'appuyer la Pologne ks
mouvements revolutionuaires die TOc-
eident , et n'Mait-il pas permia d*esp^
nr que r Aotriefae et la Pmsse seraient
moine effrayies de la r^rrectioa po-
loaaise oue dMreoses de voir se rde*
ver one iiarriere jniissaDte ooatre les.
envahisssmeats die la Russia? VM-
aemeat a rtelo le proUeme; mais,
toat en aeoeptaat le nit , il eat permis
de sueposer que si la Pologne, dont
les efforts seind^ et parUels ont tenu
deux ans la Russia en ^cbee, edt de-
plo!y6, d^ le prindpe, toules les rai>
sources de sea provinces leoaies, la
▼Ictofre edt m Impossible, on du
HMios hkn plus cbmoieBt aohetee.
La hitte prit doac , dds rorigiae , un
caracttoe restreint ; et dte lors il teit
facile d'en pr^voir le r^ultat. Chlo-
pidii etail de bonne foi } tf ev^ k Ttoile
de Kosduszko, 11 avait gftoriensement
oombattu ea Italia sous Dombrowski.
»En 1807, II commaadait le premier
raiment de la Vistula; et, deux ans
plus tard , il se trouva k la t^ de
quatre raiments de la mime Ug^oi,
Mais c'est principalement en Espagae,
sous les ordres du due d'Albutera,
qu'il acquit cette reputation de talent
et d*intrepfdite qui lui valut depuis
tant de glofre et de popularity... Bless^
k Mojaisk , CUopicki vint a Paris soi-
gner sa sante , et v rests jusqu'd la pre-
miere et k'h deuxieme entree des
Russes. » (Midroslawski.)
Alexandre le nomma general de di-
vision , et c'est avec ce titre qull re-
touma k Varsovie. II ne fut pas long-
temps sans encourir la disgrice de
Constantin, et cette disgrflce mfyne
ajouta a sa popularity. On tgnorait
encore quelle r&olution prendrait le
grand-due^ les troupes quil avait bu-
lour de lui auraient peut-etre 6ti saf-
fisantes pour le ramener triomphant
dans Varsovie ; mais , soit crainte de
tout compromettre en cas de non suc-
c^s , soit espoir que Faristocratie po-
lonaise ferait mieux ses affaires (pe
lui-m^me, il transporta son quartier
general k Mokotow, et resista a toutes
les sollicitations de ses generaux qui
voulai'ent marcher sur la vifle.
Leeonseil prit quelques mesures, et
s*occupa de Torganisation de la garde
65(1
L'UNIVERS.
mitionale, de odle d*ttiie garde dlion-
near, ei de quelques mesures de police.
Ckrastantin se contenta d*envoyer aux
commandaotsdes corps statioon^ dans
les provinces I'ordre de le rejoindre h
MoKotow. Mais ia nouvelle du mouve*
ment de Varsovi6 s*^tait r^pandue avec
la rapidity de T^clair, et Ton se dis-
peosa d^ob^ir k un prince qpi n^ociait
par oourrier au lieu d*agir. Presoue
sur tons les points les troupes polo-
naises s*eb^anlerent , niais pour alier
partager les dangers de leurs fr^res
tfarmes. Ssembeck , avant de cooduire
dans la capitale sa brigade , se rendit
aupres du grand-due, pour lui rendre
compte des motifs qui le d^liaient de
tonta oblij^ation envers lui. Constantin
iui repondit qu*onle trahissait de toutes
parts; que ceux monies qu'il avait com-
Dl^ de bienfaits le pajraient de f61onie
et d'ingratitude , mais qu*au dela du
fioug deux cent mille nommes n'at-.
toidaient qu^un signal pour envabir le
royaume et punir les rebelles. Une de-
putation du oonseil annon^a au grand-
due que la nation lui laisserait la li-
berte de regagner la frontiere, h
condition que la Russie respecterait
les pro|ness«6 faites par Alexandre , et
qu'eile donoerait des earanties pour
Tavenir. Apres une conference de quel-
ques heure^ , on convint tacitement de
la reb"aite des troupes russes et de la
rentr^e des gardes polonaises dans
Varsovie. Le tsarewitch donna Passu-,
ranee que les corps d'armee places en
Lithuania ne d^passeraient pas la fron-
tiere du royaume , bien qu il fdt per-
suade du contraire. II proposa un
^change des prisonniers, et oromit
d'intervenir aupres de son frere en
faveur des coupables. Les repr^sen-
tants se recrierent contre cette expres-
sion ; et Ostrowski , Tun des deputes>
s*ecria : « II n'y a pas de coupables, il
n*y a que des vainqueurs. » Du reste ,
rien ne fut decide dans cette confe-
rence, quant il ce qui regardait I'ave-
nir de la Polo^ne : toutefois, cette espece
de capitulation eiitratna la defection
des troupes polonaises qui etaient res-
tees fldeles au grand-due. A leur en-
tree, Texasperation du peuple faillit
leur ^tre funeste; mais la joie de re-
trouver des freres lui rendit la cl^-
menoefacile. Le4decerobre, les Russes
e?acuereut Mokotow, et le soir du
m^mejour, le tsarewitchatteignitGora-
Kalwarya. La il rendit- la ' liberty
aux prisonniers d'Etat ; conservant
dans cette circonstance ses habitudes
de parade, il leur recommandait de
garner leurs rangs et de se" tenir
roits , les ^paules effacees.. II remonta
la Vistule jusqu'a Pulawy, et se diri-
gea sur Lubartow. Le 13 decembre,
les troupes russes entr^rent en Litbua-
nie. Cependant le peuple se levait en
masse , et ne deroandait qu*a etre utile
h la cause de la liberty et h mourir.
Chlopicki ne sut ou ne voulut point
mettre h proOt cet enthousiasme ; ce
capitaine, forme h Tdcole de Napo-
leon , evaluait les forces du pays par le
nombre des bataiilons organises; et,
en renvoyant dans leurs rovers pres-
que tous ces hommes dont le devoue-
ment I'enibarrassait, il crut avoir sim-
plifie les elements de la resistance , en
reduisant la lutte nationale aux pro-
portions mesquines d*une guerre stra-
tegique. II laissa le grand-due op^rer
tranquillement sn retraite. Toutefois
les Polonais prirent possession de la
place forte de Modlin , dont la gami-
son rentra en Russie avec armes et
bagages. La reorganisation du con-
seii , dont on venait d'exclure Lubecki ,
en septemvirat provisoire, avait im-
prime au mouvement une direction
plus f ranchement revolutionnaire. Mais
tout a coup Chlopicki se declare dic-
tateur, et assume sur lui seul la
responsabilite des evenements. Les
uns applaudirent , les autres murmu-
rerent faiblement, prevoyant que le
genie des demi>mesures ne serait fort
quedevant les exigences du parti exalt6.
Des lors I'avenir deja Pologne fut de-
cide ; que pouvait la' resistance renfer-
mee dans les huit palatinats:^tait-c6
avec la charte d' Alexandre qu'on pou-
vait reconstituer serieusement une
Pologne? liC peuple, pressentant que
ce premier pas etait une grave faute,
demandait a mardier en Lithuanie.
Les radicaux Tentretenaient dans cette
RUSSIE. :
Mfi
diBO&ition , et toute la Pologne panit
senfiser ea trois camps : daos le pre-
mier figorait raristocratie d^ou6e aux
Rosses Y qui dMrait on arraogement
fieloonque et ii toat prix ; dans le se-
cond se tnravaient les hommes de bonne
foi , les cfaartistes ; en un mot , tous
eeux qui i^vaient les institutions de
tSfS, enfin, le troisi^me renfermait
les patriotes , les m^contents , les
brouilloDS y et le peufde des classes in*
ftrieares , assemblage oonfus d'abn^«
gatioD gdn^use, de foueue et de
passions inquidtes, ou le oien et le
inal dominaient et s'effa^aient tour h
tour. L'influenoe de oes trois partis
resta sensible jusqu'li la chute de la
Polosne. fiiaigre des divergences si d^-
piorables , « I^ arsenaux , les maga*
sins , les bospioes , les caisses de I'^tat
s'emplissaieot sans que le tr^sor public
V coQtribuAt. Les joyaux , Targenterie,
les meuUes precieux, les equipages,
tout ce qui pouvait ^tre de queljue
valeur entre les mains des oraanisa*
teurs de farm^, 6tait sacrifie avec
un empressement que Fonnepourrait
attribuer, qu'^ une religieuse abnega-
tion ou k un enthousiasme fanatique.
Les jeunes gens renonqaient k Theri-
ta^e de lears peres , les femmes cou-
raient jeter dans les troncs leurs
bcmdesd'oreilles et leurs anneaux nup-
tiauz. Les enfants remettaient clan-
destinement aux precepteurs les pro-
duits de leurs epargnes, et jus!)u'5
teun jouets. Les moines chargeaient
sur leurs voitures de quotes les den-
rees ordinairement abondantes dans
les clottres , et livraient jusqu'^ leurs
rations journalidres aux preposes des
greniers publics. On vit ae jeunes en-
thousiastes se pr6ienter arm^s et sul-
▼is de plusieurs soldats ^uip^ a leurs
frais, abandonner toute leor fortune ,
et faire voeu de chastet^ pour ne pas
aroir d'h^ritiers k d^poss^er. Les of-
ficiers offiraiient les deux tiers de leurs
gages , leurs cordons , leurs Epaulettes,
Km aigles, les boutons de leurs ha-
bits , etc' Les riches propri^taires ^ui-
giient et sdldalent des escadrons...
uelques-uns partag^ent leurs vastes
domames entre leurs fenniers , a con-
dition qa'ils se foattraient p6ur I'inde^
pendance. Les cur^ des cam^gnes,
accompagnes de toute la paroisse ar-
m6e , portaient I6s d^pouillesdes^ises
aux reoe?eurs du district... On ne lais-
sait dans les docbers qu'une cloche
pour sooner le tocsin ; on empioyut
les autres dans les fonderies de canon ,
et les prtoes Etaient toujours les pre-
miers k devaster les ^lises pour ar-
mer et nourrir les dofenseurs de la
patrie. » (Mi^oslawski.) Tandis que
vingt mille soldats ^aient campes sous
Praga et Varsovie , vingt mille autres
prot^eaient les palatinats, d*oQ s*Elan-
^aient de nouveaux d^fenseurs. Les
obstacles apport^s k Forganisation de
Tarm^e , et par la nature m£me des
choses et par la direction supreme,
accoutumerent les esprits a Tid^e qu'ii
fallait se borner 5 la r^istance , et re-
noncer a une guerre d*initiative. La
population travailla avec une ardeur*
mcroyable aux fortifications de Varso-
vie. Ouand on vit , dit Mi^oslavski ,
que les faubourgs pouvaient servir
a'abri a Tennemi et entraver les dE-
fenseurs , les propri^taires s'assembld-
rent spontan^ment , et , armes de
torches incendioires , lis coururent
mettre le feu a leurs propres maisons.
Un camp retranche embrassa tous les
faubourgs de Praga, et Tenceinte oc-
cidentale de Varsovie fut prot^^ par
une double ligne de forts detaches.
Pour d^fendce tous ces ouvrages, il
edt fallu une arm^e de cent mille hom-
mes , et les forces r^unies de la Pologne
insurgee ne d^pass^rent jamais quatre-
vingt mille soldats. Ce n'est pas ainsi
que les Russes avaient calculi lorsquMLs
brOl^ent Mosoou en pr^ence m^me
de IVapolEon. Toute I'^ergie de la
nation se d^pensait en tb^ries , et les
clubs r^umaient fidelement les divers
partis. Le g^n^al en chef, impuissant
a ^ilibrer tous ces oontre-poids, de-
mandait Tintervention de la di^e;
mais sa dictature improvise arr^ta
cette mesure; et, dans le besoln qu'it
avait de r^primer tout ce qu'il appe-
lait da d^sordre , il s'attaqua aux
dubs qui jugeaient librement ses actes:
Oilopicki les fit fermer. Une r6volu«
1
UUmTBUff*
timtquf ifterte aHenrfma a'est |>at
twMe ; tai ii^gociaitMM oilainteavee
Vemtitmr NioolMB'aTaieDtd'aiitre tU
gnfficatkNique odleqa'aiinJteiie t'aivini
Cretflimpledela faiblessedesfiMiirg^*
ibeoki nit eharg^deoette missioii ; le-
zfierski lui fut adjoiat, moint sans doute
rrar le seconder que pour ne pas laisser
rintermr^latioii des patriotesdes ^1^
roents deblAme trop patents. On r^
digea une protestation eontre les abm
du tsar^witch, et Ton reeommanda h
I'envoy^ d'exiger de Nicolas qu'il adh^
rdt It pittsieurs demandes relatives k
rfnd6pendanee nationale, k rint^rit4
du territoire , et k rinviolabilit^ de la
charte. Le eonseil et la dictature po-
saient pour bases du traits Texpulsion
des troupes n)oscovitcs du royaume
de Pologne , la reunion des provinces
llthuaniennes et rassiennes aux hurt
palatinats , et des garanties respecta-
bles pour robservation du pacte de
I8t5. II est clair que la Russie ne
pouvait obterop^rer a ces pr^entions;
on ne pouvait tes lui arracher que par
la force; 6bs \ovs il ^talt inutile ^
dangereux de n^ocier. Sur ces entre-
fiiitcs, le colonel Hauke fiit exp6di^
par Tenipereur k Yarsovie. II niena^a
au nom de son mattre, et Taristocra-
tie lui sut gr^ de donner des motifs
plausibtes h la mtSdence et ik la tergi-
versation qu*elie avait prises pour re-
gies de sa oonduite. Cest au milieu de
ces ciroonstances que 8*ouvrit la di^e .
fille du gouvemement oontre lequd
on 6tait en guerre* amalgame de ira-
ditions consntutlonnelles « de d^voue-
ment au pays, et dont les sentiments
g^n^ralemeiit honn^tes n'etaient pas
cependaat k la hauteur des ^v^ements.
Depuis le depart de Lubecki , les aris-
tocratas de toutes les nuances s'^taient
tourn^ vers le prince Czartoryski. Ce
dungement devait ^tre d*autant plus
£stal aux intMts de rinsurrection , que
le prince voulait avec droiture et fer-
net^ oe que Lubecki oonseillait par
mauvais vouloir. II serait ceoendant
ii^uste derendreresponsablMOu man*
vais saoois de riBSurractioa tous oeuex
qui attunirent la tAche diflicile de la
dinger. L'accord le plus parfait entrt
tons lea pirtti* et qui poufait csiiler
en Pok)((iie iBoias que ptrlout aiHcors ,
eal k peme suffi pour conjurer Torai^
qui grondaitdans le Nord. Leshomnifls
plaoei tiers k la t^ des allaircs
easMDt-ils M rtolos k tons les sacri-
fices , ne poavaient ae diasimuler com-
foien le suocte ^ait pea probable. Ih
r6pondaient , noo sans uae ipraode ap>
parenee de raison , k ceux qui anraienc
voulu que toutes les aocieunes pro>
▼inoes oe la Pologne fuasent apjpei^ea
k seoouer le Joug , que les unes etaieot
d^ik fa^nn^ a rob^issance, et que
les autres , d Ton foisait appel ii ieur
ancienne Kbert^, commumqueraient
le mouvement aux provinces Vetoes k
la Pnisse et Ik rAutrfohe , ce qui met-
trait en ^tat d'hostilit^ eontre les io-
surg^s trois puissances dont les int^
rdts se trouveraient alora solidaires,
et dont une seule suffisait pour eontre-
balanoer toutes les forces de Ir r^-
blique. Ce dernier moren etait pent-etre
le seul qui offrtt des chances favorables,
mais dans le cas seulement od la France
edt jet6 son ^p^ dans la balance. Dans
une situation aussi erittque , 11 lallait
6tre ou un hypocrite, ou un patriote
pur, pour prendre en main le timon
des amires.
Avant l*ouTerture de la di^ , une
deputation de quelques nonces se ren-
dit aupres du dictateur, pour hii re^
printer que la nation ne Toyalt de
salut que dans la guerre. GMopicki
re^t assez mat ces representations ,
et soutint que sa mission se bomait i
prot^ger les limites du royaume de
1S15. On neput done s'entendre, paroe
qu'on partait de principes diffmnts ;
et les chambres, des le 18, proced^reot
k la nomination du mar^cbal : toutes
les voix se portirent sur Ostrowski.
On s*occupa d'abord de la sanction de
facte r^volutionnaire et de la coi^-
matlon de la dictature. Le s^fiat, au
milieu de cet entratnement ff^neral,
approuva ce qu'il ne pouvait emp^
ciier. Le dictateur, ;pii se regaruait
toiuoujs comma le Ueuttnaot du rol
de Pologne, desapprouTalt ces me-
sures , et 0 offint sa demiasfon. H cMa
enfin au voeu general, et la dictature
EUfisie.
flit^omnrf^e, mm avacqadqim reft-
trictloQS. Tout ce qa*om put ameber
a Chlopiekat oe fot full oommaade-
rait rannee en quality de dktatear et
an Doai du roi. Utt Id poovoir ae nen-
tntiaait daoa laa aoMequencea oppcK
a6ea d'ttn dooMa prioeipe. « Le pr^
mier acte du dietataor fiiVdea'aaaocier
aae oommiasioB cxtalm It la piaoa
da gpttvenMmaDt pro? iaoire, qua Vou*
vcrture de la diele aTait e£Giio6... Ainai
lea rouagaa da f^vcnameot, dejii
cempiiqncs par la difargence de lean
nieniirea, par rafflttanoe de di&itenU
priaeipea qui a'avaieat aucoa rapport
eatra em , par k subtil ealaocaaent das
id^ r^nmieaioes dans k syst^ma
BQoaavchiqae, ae foreut pltia qu'ua
amas d'iaooQMqaenoes , dds qoa la
Bovralle comaitsaion , compowe ea
oartie d*indi WduB dbxrakB d^ia d*aatres
tonctiona et d'autres dignitai , Tint Je-
ter aea d^isioas dans la foalaaee de
rantorite. Pour eompli^ter le gourer*
nemeat, le dictateor s'empressa da
Doaaaier ies mmiatrea at d'^tablir la
pea d'ordre dont pouvait fltre suaeep*
tiMe aae paraitte machine. » Ainsi la
gtNiTenKiaaBt se oomposait de Chio*
picki, dictateor; d'one d^^gation de
surf «lUuiee coimpoate de quatre mem-
braa, panai leagaels on reraarqaait le
prince Adam Cfzartoryaki, le prince
Miefael Radziwill , la a6natear Loaia
Pae, la marfabal de h diMe, etc. ; de
b coaHDiasion eitetiVe, 06 figuraient
Csartoryski, Radziwill , Bamkowski,
Dembow^i , Oatrowski ; eaDa da nai-
ttiat^ , dont lea d^partamenta etiilcBt
aiaal r^partia : pour la guerre, Kra-
siaAi ; pour tea ealtea at Tinstruetloa
puMique, LeiavaH; poor lea ailiurea
teanMMB, CEartoryaki et GuataTa
MalamwdLi; aox finaaoea, Loafs
Maki; k la Juatiee, Klemoioirski ; k
la polfea et k TinUnear, Thomas Lu-
heaski ; Plater ftit aoami^ aecrMira
dnfctat, et VIneant Niemokyaakf , prM-
dantdeseonmtes.* (Hiatolrede la r6-
volotiandePMOfBCMrllMrosiawski.)
Aprda eatia qafm-OKanlaatioa , la
dietateur a*oocapa daa maeaa, de la
force anaee , et daa reaaoaveaa mate*
iMIea poor tt aaaarer la sabrtataaoe.
L^anto^ aiguliira padaeala biantM on
el&ctif d'enviroa tranle-cinq aaille
hooimea« infiBmtarie el cavalene; laa
noareUea lefto aiaato de faai el de
piquea, h dtfaut d'araiea k fen , et lea
aliments de eavalerie kg^e, ak-
rea sons le aom de Krakus at Ma-
zures, doubl^reat h peu pr^ ce pre-
mier diififre: c'tolt done avee uae
arro^e d'enriron aoizante et dix aitUe
hommes que la Pdogne allait ae nasa-
rer centre Ies forces toutes prdtas de
la Russia. Quant au nombre dea trou-
pes agressives , il est assez dififidle de
le fixer, si ce n'est par approximation.
Lea Polonais lea ont exagerte h des-
aein , tandis que ies Russes , par un
motif semblable, lea ont misea au*
dessous de leur ^tat r^l. Nous pensooa
qu*on peut Ies ^valuer h eeot quarante
mille nommes, en y compreaant lea
renforts envoys sucoessivement. La
ganks nationale, rMuite h quelquaa
milliers de bourgeois , n'toit ^pkre ea
tot d'ofirir une r^istance s^ieuse en
caa d'attaque. On conserva une forte
eamiaon oans Zamoec et dans Mpdlin ,
le temps ae permettant ^u^e d*im-
oroviser de aouveaux pomta de d^
fenae.
Cependant If ieoiaa , k la nourelle de
Tinsurrection polonaise, n'avait vtea'
a^lig6 poor la comprimer dte son ori-
gine , ou poor Fdcraaer dana le cas 06
elle se montrerait mena^ante. Lea auc*
d» des Russes en Perse et en Tnrquie
avaient retren^ le moral de aon ar-
m6d ; lea aoerres de TOrient Pavaient ,
f 1 eat nai , conaid^rablement r6duite ;
maia lea trait^i lui permettant de dta-
poser de toutes sea fotcea, il mcna-
^it la Pologne du poids de aaa armes
et d9 aon indignation. Dana la situa-
tion od il ae trouvait, tranaiger avec
Finsurreetion c'toit consacrar la na-
tionality distiocte d'un pays qoe la po*
litlque rusae ne regaidait que comme
uae province privllMfe, BMia eoaqutae;
c*toH raculer vers r Asia, et eneoanh
gar la dMetion probable de la Lltbua-
afe et des aotree proriaoea ci-devant
palMalaaa. Le dnraet^ du tsar toil
ruae trempe assez forte poor eafiaa-
§ar ff^aolomant la pMl, at aon Jage>
560
L'UNIVERS-.
inent tfop sdr pour ne |M8 calouler
tout de suite le danger encore plus
grand qu'edt entrain^ pour lui une d^
Donnaire condescendance. II avait k
opposer a la fougue des Poionais une
arnri^ aguerrie et devout , comman-
d6e par des chefs habiles. Sa determi-
nation flit bient5t prise; le peuple,
encore 6chauiU par des succes r^ents ,
sentit se reveiller le sentiment de sa
haine contre la Pologne oonstitution-
nelle , et appuya cette guerre de ses
sympathies. Les plans de Tempereur
Nicolas contre les r^volutionnaires de
J*Occident se trouvaient rompus ou
ajourn^s par le fait de Tinsurrection
polonaise. L'avant-garde , pour nous
servir de Texpression de Lafayette,
s*etait tourn^e contre le corps d Vrmee ;
ii ne s'agissait plus de dieter des lois k
I'Europe, mais bien de veitler au salut
de la Russie elle-m^me. Lorsque Ni«
colas fut informe de la mission de
Lubecki et de Jezierski, il leur fit no-
tifier a Narwa la jd^fense de passer
outre, attendu qu*il ne reconnaissait
jas au gout ernement insurrectionnel
e droit de traiter de puissance a puis-
sance avec le roi constitutionnel. Lu-
becki ^luda cette difficult^ en d^ia-
rant qu'il ne'voyageait, ainsi que son
coliegue, que comme sujets de Sa Ma-
jeste. II serait superflu de dire qu*une
negociation ainsi commenc6e n'eut
d'autre r^ultat que Texpression in-
flexible de la volonte du tsar , c'est-i-
dire, le rejet d^aigneux de toutes les
demaodes humblement articuldes par
les ambassadeurs. Tout.eo affectant
de m^priser les fauteurs du mouve-
ment de novembre ,' le gouvefnement
russe.se mit en mesut« avec les cours
•voisines. La Prusse, qui craignait le
soulevement de la Posname , inquiete,
d'autre part , sur Tissue de la revolu-
tion fran^ise, promit de rester neutre ,
se reservant a'appuyer par tous les
moyeos en son pouvoir les int^r^ts de
la Russie. Pendant toute la dur^ de
la campa^ne , cette soi-disant neutra-
lity a ^te interpret^e dans ce sens.
Gependant les Folofiais regaiddrent
comme un point important que la
Prusse ne leur e(it pas of&cieUemeHt
t
d6clar^ la euene. .L*Autriehe 6tait
retenue |)ar ^es craintes d*une nature
h pea pres sembkdile; la Galicie au-
trichienne pouvait lui 6chapper; mail,
'd*an autre cdt^ , elie voyirit avec satis-
faction la puissance de la Russie neu-
tralist par une guerre intestine. Aassi
retrouve-t-on un caractere moinsoa-
vertement hostile dans les mesoies
qu'adopta le cabinet de Yienne k Y&
gard des insurg^ poionais. La France
aurait pu seconder la revolution de
Varsovie ; la crainte d*une guerre g^-
n^rale , celle de voir la royaut^ de juil-
let s'efifacer dans un mouvement pure*
ment d^mocratique, arr^ta ses bommcs
d'etat. Domini par des souvenirs
monarchiques, ils crurent que la France
ne devait pas entrer en lutte, avant d'a-
voir subi une esp<bce de transforma-
tion , qui ne pouvait tout au pkis que
Tassimiler avec les puissances rivafes.
Ils ne voulurent [mint comprendre
que le temps dont ils avaient besoin
pour affermir une oouronne serait mis
a proflt'par des eonemis irr^oonciiia-
bles , et qu'il faudrait fiaure plus taid,
et avec moins de chanoes de suooesi
une guerre que renthousiasme des
neuples edt rendue facile en m6ne
temps que glorieuse. Puisse Tavenir
donner un d(§menti k nos pr^fisionSf
et ne pas confondre trop cruellement
une prudence si courte et si pr^occu-
p^ du pr^nt ! P^rier r^servait ses
rigueurs pour les clubs et les foeutes;
M. S^bastiani d^larait k la tribune
qu'on ne pouvait secouric la Pologne,
parce one c^^tait une puissance m^i*
terranee ; enfin , le cabinet du Palais-
Royal ne n^gligeait aucua moyen poui
capter la bif nveiilance des coqrs ^traa-
geres et pour.se faire pardonner son
ori£ine.,La Pologne etait done reduite
k elie-mtoe; elle interrogea le cou-
ra^ de ses enfants, et ned^sesp^ra
point de son salut. Le parti exalte « qui
murmurait oontre les demi-mesuret
du gouvernement , se rallia autour de
Lelewel, et exhala.ses bUmes par les
organes de la presse. Cfalopicki, dont
le credit commenqait k diancder , es-
saya de firapper un coup d'aatorit^ ; le
12 Janvier, il fit arr^er le ministn
• • • •
• • • •
• »
• • • • •
•»!• ••••
• •• • •
• • ••
• • •
• * • • • I
RUSSIl^
561
Ldewd , Tex - prudent du club Bro-
nikowski et Boleslafi Ostrowski. Yar-
som 8'tout k cette nouvelle ; il failat
reUcfaer les accosts. L'opposttion re-
prodbait au dictateur d'user de m^a-
gement avec les hommes d^vou^s au
parti ruase , et d^avoir emp^e la pu-
Dlication officielle du manifeste qui
saDctionnait rinsurrection. Sareesen-
trefaitea, le colonel Wylezinski , charge
d'instractions pour lea d^put^ Lu-
becki et Jeziertki, revint de Saint-
P^rsbourg avec deux d^p^ches adres*
s/6es par le mioistre diktat Grabovski
au dfctateur et k Sobolewski. La pre-
miere 6tait ainsi conque : « J*ai Tnon-
neur de vous informer, monsieur,
que Sa Majesty a re^u TOtre lettre du
10 de ce mois , et y a vu avec plaiair lea
sentiments dont vous 6tes anime en*
vers son auguste personne. Sa Majesty
y ajoutera une foi entiere si vous lui
en donnez , g^6ral , des preuves ir«
recusables en vous conformant, autant
que possible, k la proclamation que Sa
Majesty a adress^, en date du 18 no«
vembre 18S0, k la nation fiolonaise. »
Dans Fautre d^pdche, leministre fi6li*
citait Sobolewski d'avoir quitt^ les af-
faires-Iiedictateurconvoqualacommis^
sion extaitive pour lui communlquer
ces pieces; il ne lui d^guisa point quMl
fesaraalt la resistance comme Impos-
sime , et que ce au'on avalt de mieux
a £iire , c'etait de recourir k la cl^
nence du souverain. La majority de
U commission rejeta ces propositions ,
et se d^lar»pour la guerre; quel^es
heures apr^ elle avalt aboli fa dicta-
ture.
(16 Janvier.) Le peuple setrouvait
done sans chef a rinstant mtoe oi^ il
venait de jeter le gant k son terrible
adversaire, et il n'avait pour sauve-
eard^que son patriotisme et qaelgues
ei^ents incomplets d'or^qnisation ,
improvise dans la provision d'un ar-
rangement diplomatique.
Dans ces circonstances dIfBciles , le
I^rtnce Czartoryski adressa au peuple
a proclamation suivante : « Polonais ,
notre cause est sacr^; notre avenir
est entre les mains du Tout-Puissant ;
mats il nous rests Tboitneur national
36* UvrcUsan, (RussiB. ) t. ii.
k transmettre k la post^rit^. Union ,
oonfiance, pers^vtonce, telle est la
devise qui doit nous garantir la gloire
de la patrie. Sacrifions toute notre exis-
tence a oonqu^rir notre liberty el
notre nationality. »
L'ultimatum de Nicolas ^tait connu;
I'empereur voulait une ob^issance en-
ti^ et sans conditions; des demons*
trations mena^ntes appuyaient les pa*
roles de I'eutocrate.
Le 19 Janvier, la di^te s'assembia
au chateau royal; le lendematn, les
membres du gouvemement et le corps
des g^neraux prociMteent k I'election
des candidats pour le grade de gdnerft-
lissime. Le prince Radziwill r^unit le
plus grand nombre de suffraees. II
voulut en vain d^liner ce perilleux
bonneur, on lui fit un m^rite de aa
modestie, et force lui fut d'accepter
(21 Janvier). Cblopicki , auqud on avait
inuttlement offert le commandement
en cbef , offrit d*6clairer RadziiHll de
ses conseils , et le fit consdendeuse-
ment et sans la moindre ostentation.
L'^lection du g^n^alissimefutaocudl-
lie avec enthousiasme par la fouie,
avec m^fiance par Parmee. La motion
faite par le nonce Roman-Sotl]^k, qui
{>roclamait Tind^pendance nationaie,
a d^^nce des tsars , et qui relevait
toutes les provinces en de^ et au deUi
du Ni^men de leur serment de fid^it^
k la Russie , en attribuant aux pava
^mancip^ le droit de se donner telle
constitution qu*ils jugeraient c6nve«
nabie , fut accueillie avec crainte par
les uns, avec enthousiasme par lea
autres. Si cette mesure 6tait adopts <
toutespoir der^nciliation s'6vanouis-
sait pour le parti conservateur. Let
d^mocrates purs trouvaient de leur
c6t6 que cet acte etait sans port6e, et
insufnsant k raviver T^nergie natio-
naie. Cependant, par une esp^ d'ao-
cord tacite, toutes les opinions finirent
par se rancer k la motion du nonce,
par oela mane peut-^tre qu*elle n'^tait
exclusive d'aucune Eventuality. Le jour
oik le g^n^ralissime avait M Ehi , les
membres des commissions avaient M
{>rodam^ par le mar6chal de la diete :
6 stoat avait aussi r^le radmlniatra*
13
LtlNIVERS.
inUriMM, la lteisl«tloii et lei
inanoes , en adjoignot phnieun mem-
Inne k ceux qu'avait choisis la diett.
UetaitTisiblefuelaGhambredesnoDoet*
|lu8 nombreuse, et reprtentant plus
nd^leinent riosurreetion « allait-aMOc-
ber pea k peu rinfluence da a^nat ; au
rette , dans IfS cirooostaoces aetudles ,
Fappel ^ nnd^peiidaiice de ia Litbsa*
irie 0t des ptovinoei orientales etait
trop tardif pour porter des fruits i
c^mit tout au plus uu mojen pour
abuser le people sur sa faiblesse, eo
M prtentaat oomoM possible un n^
aultat ou'M n*^tait okis dooo^ k per-
sonne d^ffectuer. La di^ r^a ies
attrflratiODs du g^ndralissime , et lut
assura voix d^'beratiTe daoa le gou<-
nrnemeut en ee qui oonoemalt la
guerre « tent que le permettrait la
proximity du quartiar central. On lut
dans la mtoe s^nce les missives de
Grabovdd k I'ex-dlctateur, et deux
proclamations adresstoyparDiebitachf
rune aux Polonais, Tautre aux troupes
polonaises. La vainquear des BaljKans
s'y rfoandait en mmiaoes, et s'atta-
cbait a fiiire contraster tes bien&its
d'Alexandre, qtd n'tnoaU rien i£t, et
qui a?ait toot donn^ aux Polonais,
aTOc ringratttude de Bonaparte, ^nl
kuravaiiUnUM,etqfdneleuravaii
rim donmi, Ces manifestes eurcnt
pour efbt de rihuir instaotanfoent
tous Iss partis dans une haine com*
mune eontrs la domination de I'^tran*
ger. Le mot de d^^ance fut r(6pet^
Sar toutM les bouches; et, k voir les
ispositicms de tous, on edt cm que
I'insurrectioQ ne datait que de ce jour,
Cependant Ifiemoewicz, secretaire du
araat, Wkligea Tacte qui d^arait la
Fologne iaJMpendante de la Russia (
Mais H donna k la motion deSoltfk
ufleeauleur n>oparcbiqHe»ce qui pre*
Jtgeait la question.
« Le dmet portait en substanoe ^«e
les traits n^^tant obligatoires qu*au-
taol qu'iis (Haient fespect^ par les
doHi parties ceniraotantes , les conti*
•uelm violations de la charts , aous les
d0ux ri^gnes qui araient .prMd^ la r«^
volution, d^pgeaieBt ia nation polo*
naise du aerment de fiMit^ Que.
n'ayant obtenu aucunes gaxanties pout
Fobservation du jpacte qA Halt le loi
au pays, la nation rentralt dans ses
droits, et n'avait plus poor n^onse aux
menaces du tsar que le d^cnx>ir et le
glaive; qu*en cons^uence, le peuple
polooais se dtelarait, par I'orgaoe de
ses rqirtentants , peupie iodependant ,
et Kbre de darner la couronoe k ce^
kii qu'il jugerait capabled*ensupporter
le poids sans violer ses serroents ui
fouler aux pieds les francfaisea natio-
nales.
« La multitude r^pondit a I'acte de
d^^anoe par les oris : En Litfauanie ! »
(Midroslawski.) Les r6publieains cm-
rent avoir trion^ph^ ; et , le lendemain ,
jour anniversaire die Tex^tion des
coospirateui^ russes en ia26,quelqaes*
uns a'entre eux soleonis^rent cette dr-
eonstanoe , en offrant pubiiqnement k
leursmAnes le tributoe leurs aympa*
tbies»On tra^encaracteres russes,sur
desdrapeauxqueron se proposattde Je-
ter au milieu des batalUonsdeDiebitsd):
t>our mire liberU et pour fe vOlre»
C^it asscE mai connattre le moral
des soldats russea , qui avaicnt r^te
aux provocations de leurs ofliciers,
et dont on n^^iait parvenu a entratner
3uelq«iS8-utts qu'eo empruntant le oooa
e Gon8tantin«
Kous ne dirons rien de qodqqes
tentatives partielles fsites dans Je but
de fioulever les provinces polonaises
kiknee k la Prusse et k l^iutridie;
elies restdrent sans r^sultat, et ne pro*
duisirent que des d^vouemeeto inoivi-
dufls. Cependant on crut ndcessaire
de crief trois Idgioos destinees a ess
bardie transfiiges « aous le nom de Pos-
naniennSf de visile- a«ilicienfie» et
de Litbuano-YoUiynienne*
L*acte de dmmoe annocigBi^ un
souverain fiatur ; oik trouver una caaifi
capable de manier le sesptre dans de
tefies ciroonstaoees?!! y eut bien quel-
Sies voix qui 6*6levte0nt m fiiveor da
rtoubliqqe; mais. il faut ie dire , la
]n6pMUique avee ses tiralUemaats,
comma la monarcbie avee see rou-
tines « ^tait impuissante k saover r£tat
La aeule fbrme transitoirequ*indiqpait
la fom 4» fihof9s, o*itiut b dietn-
RUSSIB.
UmveC die venait d'toedAxNiskler^ 9
parot ^pie le dictatemr n'avait pas com-
pris aa miaaioD. « Lea chambrea , r6u-
Bi'ca le 39 Janvier, d6eidmat aae le
roi aerait pnmsoirement reprcaent^
par bh qamtaoiYirat ineaponaaUe...
Le prqjet fut adopU k ane notalile
majoritiiL Las arlidea aniTanta preaeri-
Tirent lea attributioiia de oaCte ewp^
de directetre monarcbiqae , Doming
gottTeraemeDt national :
I* Laa aetea et ordonnanoea pnbliea
seront promulj^n^a au nom du (^ou-
vemenent national ; il aera aotons^ k
Wrapper monnafe k Teoipreinta qu'il
jogera eonvenable ;
T Le eouTemement national pr^i*
dera an reeoarrement daa imp^ta , et
h Pemploi du budget vot^ par la
W* H eondoia lea traits de eoin»
meroe , et aura Ff nitiative des antrea
trai^, qa\ , d'aiilears , auront besoin
de la aanction de la diite pour toe \6»
4* n nommera leaofBders g^n^raux ,
leaeoloneladeParm^, lea miniatrea
et oonaeillers d^Etat, lea i^enta di»
plomatiqaea, et toua leaemploy^ci vila;
6* II a le droit de grlee*poar lea
erines pntinairea; quant aux crimi-
nela d'Etot, U di^ta aeuie pent lea
gracier;
e* II acoordera, anr la pr^aentatioa
du fin^ralistime, la crolx da com*
mandeur^ et la grand^erolx de r<Mtlre
arilitaire;
7* Las mittiatraa somm^ par lui se
partageront lea aix d^rtements : dea
coltce t dea finaneea, de la juatloe, de
rint^ncar, des relationa ext^leures,
etde la gnerre.* (Hiatoire de la r^vo*
IntiOD de Pologne de 18«o.) G'etait«
4 l*exoc|ytton du veto, la royaut^ de
1816, moins Tunit^; e*^taient, disona^
nooa, lea embarraa de eette roniut^
^intopkSa. L*^ection eut lieu le 80
Janvier; Leiewel reprtonta le purti
patriote; les monarchistea portlrent
le prince Cftartoryaki et Barzykofwakl ;
ks oonstltutionnels , Vkieent Nie-
mofDweki et Morawski. Czartoryaki
fat ilev^ ^ la prfeidence. Dhs ce mo*
aienl , on cemprit que le salut de I'fitat
d^ndait de rarm^; et tous eens qui
dMiraient ill tout prix le triomphe na*
tional s'apprit^ent ft y oontribuer de
leurs personnes. Gertes, toutes lea d^
monstrations ne furent pas sincilres ;
plus d'un d^oueraent ae boma k la
tenue militaire; et bien dea ixMiagea
Inutiles, ainon nuisiblea, entravmnt
le jeu de la rMatanee g^nde; toute-
fois n eea exoeptiona appartiennent non
au people polonais en partieulier, maia
Il rhumaine nature: tant il est vrai
que la guerre la plua l^itime, ceile
qui a me votte d'enthousiaamev sup<>
poaeune^ergieoonatanteque le oom<>
muB des hommes poss^ bien rare-
ment. Dana les dasaes aiafes, on ae
r^ne plus volontiera II un sacriflce
nne foia fait qu'ii une auite de priva*
tions ou se retrempent seules Im na-
tijyres pHvilte'te : rhomme de labeqr
aufiit mieuz a eette tiche h laquelle il
est, Bour ainsi dire, tout fa^n^;
et s'n a foi dana oeux qui ae cnargent
de le conduiM , flatty de fiire pour le
triomphe d^une Idte ce que jusque-la
il avait flit pour vivre , II apporte dana
la eauae commune on denouement
Cus eomplet. Mais ce qui caraet6riaa
Monaia en ftninl , e'est une in«
soBciance o6 if se repose de ses pa*
roxismes d^enthoasiaame , et assei
aemblable ft oet ^tat d'affaiaaenientqui
auit la fiftfre; c'est, pour les nobles;
une iuquitode rague qui lea pooase ft
Pintrlffue et ft Tesprit de coterie , fti^
neate n^ritage du veto qui donnait au
Bus mince gentilhomroe de la r^pu-
iqne , non le poovoir de crfter , qui
appartenait ft toua , mais celui d'em-
pmier; tentation ft laquelle rteis*
taient difflcilement dea nullity or-
(^iieuses, Jalouses de sortir de leur
obscurity par un moyen l^al.
Le gouveroement r^oemroent cons-
titu6 avait oeia de boo qu'il offrait
une forme d^finie et qu*il mettait un
terme ft Tinauietbde Qt§ uns et aux
pretentions oes autrea. II fut d^id^
que la monarcble r^idait provisoire-
ment <lBns le qui ntumvirat , et la sou-
verainete dans la di^te : la prestation
du aerment fiit Jug^ nmssaire , et
eUe se fit spontan^ment.
12.
S64
L'.UNIVERS.
Le 6 Umet , on apfurit que plosieura
escadrons de Cosaques avaient pass^
le Bug ; les chambres adopt^ent aussi*
tdt le projet suivant :
« 1* Les communes , villes , districts
et palatinats qui ne seraient pas occu-
py par I'ennemi « mais qui se trouve*
raient menace d*une attaque, seront
declares en ^tat de guerre;
79 Le gouvemement national est
autoris6 k prendre dans ces contr6es
toutes ies mesures urgentes pour d^*
truire les cbemins , les ponts «.te8 gues ,
les masasins et bfltiments qui pour-
raient Tavoriser la marcbe ou couvrir
la retraite de Tennemi. Le gouverne-
ment est de m£me autoris^ h faire en-
lever des provinces menac6es le b^-
tail et ies approvisionnements de toute
espkee;
3« Ceux aui s'opposeraient h ces
mesures , et les fonctionnaires qui res-
teraient dans les districts eavabis,
seront consid^r^s comme trattres a la
patrie et punis comme tds;
4* II sera tenu compte de toutes les
pertes ^prouv^es par les babitants , et
lis seront dddommag^ aux frais de
r£tat
Le present dtoet sera imprim^ et
{>roclam6 du haut de toutes les cfaaires ;
'ez^ution en est confix au gouver-
nement etaupeuple.* (Mi^rosUtwski.)
Ces mesures ^taient sages; mais la
brusque irruption des Russes les ren-
dait presque inex^utables. Tous les
embarras qui s*attacbent aux organi*
sations improvise surgissaient k la
fois. La force r6elle de rarm^e n'ez-
c^ait gu^e quarante mille bommes ;
les nouvelles fev^s, mal armdes, pri-
vies de rinstruction n^cessaire, n'e*
taient pas en 6tat de tenir la campagne ;
les ressources du tr^r ^taient epui-
; Tadministration fooctionoait
sans ensemble, et n*avait pas foi dans
f avenir ; enfin les n^ociations nou^
ftvec les cabinets 6trangerSy nteum^es
en esp^rpnces vagues , sinon en refus
formels, placaient la Pologne dans
ralttrnative ae vaincre un ennemi de
beauooup sup^rieur et qui pouvait fa-
cilement reparer ses pertes t| ou de ci-
menter ind^finiment son esclavage
avec ses d^ris et le plus pur de son
sang. Lerainisterese composaitcomme
il suit : a I'int^rieur, Bonaventore
Niemoiowski , en remplacementde son
frere Yincenjt, nonun^ membre du
gouvemement provisoire ; k la guerre,
Krasinski ; k la justice, Rembidinski,
remplafantBonaventurel^iemoiovski;
aux finances , Biemacki ; a rinstruction
publique , Bninski , k la place de Le-
lewel , Tun des cinq du gouvemement
provisoire; aux afiEaires etrang^res,
Czartoryski et Gustave Malachowski.
Sur le point d*aborder la sdrie des
faits militaires qui ont dteide du sort
de la Pologne , nous essayerons de les
coordonner avec la marcbe du gou-
vemement insurrectionnel , en ela-
gnant les details, et en ne noos
permettant que Ies d^veloppements n^
cessaires pour rintelligmcede ces 6v6-
nements mtoorables.
L'assiette m^me des palatinats qu'il
s*agissait de d^foodre prescrivait de
prendre la Vistule pour base des ope-
rations strat^iques : malbeureuse-
ment ^ soit incurie , soit faute de tem|)8
et de ressources , on n^igea de forti;
fier les confluents de ce fleuve qui
pouvaient en livrer le cours k Teoneini.
Zamosc ^tait la seule place forte eo
6tat de supporter un si^e en regie;
mais ce point trop excentrique ne pou-
vait dtre d*une grande utility dans une
campagne ou tout devait se dicidet
sous les remparts de Varsovie. L'ar-
m6e ^tait r^partie autour de la capi-
tale sur la rive gauche de la Vistule :
de I'autre cdt^ du fleuve se trouvaient
les d^pdts des nouvelles levta, qu'on
avait jueees incapables de se mesurer
contre Ies meilleurs sokJats de rem-
Eire , mais qu'on destinait k completer
» cadres de la vieille arm^e. Douze
mille bommes environ ^taient repartis
dans les forteresses ; on s'empressait
de terminer les ouvrages exwieurs
qui ddfendaient Varsovie; et, dans
lint^rieur de la ville, on 6levaitqucl-
ques barricades. L'artillerie 6tait peu
nombreuse , mais le zdle et rbabifeti
des officiers qui la dirigoaient sup*
pl^aient k son insufll&ance.
L'arm^ russe s*av|intait et embras-
RUSSIE.
S66
cait tout Tcspwe qui s'^tend du rod
an Dord, depuis ka sources du Bug
Jusqu'^ rembouGhure do Ni^en ; elle
proentait un dTectif d'eoTiroQ cent
mille bommet. Ses diff<^ents corps
coDTergeaient , sans 6tre inquidt^,
vers le centre du royoume , pour
etreindre dans un r^eau de fer Var-
sovie et Farm^ insucg^, leur couper
toute communication avec les provm*
ces , et couronner la campagne par une
lNitailledecisive.Quelque8eneagements
ou les avantages furent balance ou-
vrirent les hostility, et n'eurent poor
resaltat que de oonstater la sup^iorit^
nuiBK6rique des Russes. Les habitants
fiiyaient devant leurs coloones, et cou-
raient se mettre sous la protection de
rarmfe nationale. A Dobr^, les Pdo-
nais disput^ent ^ergiquement la vie-
toire, et ne oM^nt au*k des forces
triples. Le combat d'Okuniew ne fut
pas rooins opinlAtre; cependant les
Russes se portaient toujours en avant ,
et les insurg^s achevaient leur mouve-
meot de concentration. La bataille de
Wawer, oil prte de soixante et diz mille
Russes ne purent vaincre quarante-
cinq mille Polonais, iut aussi longoe
que meortriire. On combattit deoz
jours avec un ^1 achameraent ( 19 et
20 feyrier)« et chaque armfe conserva
ses positions. Pendant cette lutte, que
Dienitscb avait iugte devoir 6tre la der-
niere, les repr&entants de la Pologne
se dedarerent en permanence , et ren-
dirent le decret suivant : La est la pa-
trie au trente-trais nonces et on%e
senateurs sUgeront pour deUbirer
sur son sort. On 6tait convenu d'un
armistice de quelques jours pour don*
ner la si^ulture aux victimes de cette
sanipante journ6e ; Diebitsehsut mettre
oe temps k pront, et de nombreux
renforts lui rurent amen^ par Scba-
kfaovskoi , Manderstiern , et per le tsa-
rivttch qui commandait une reserve
imposante. L*aile gauche des Russes ,
loos les ordres des g^n^aux Kreuis
et Geismar, occupait le palatinat de
Loblin. Le g^n^ral Dwernicki, avec
tm eoips peu nomhreux de cavalerie
legke, ioqoi^tait le mouvement des
RusseB, qui , d^ le 9 Urrwr , s'^taient
empartede Lublin. Rreutz et Geismar
araient oon^i le nitjjet de passer les
premiers la Vistule, de descendre la
rive gauche du fleuve, et d'attaquer
brusquement les derri^res de Tarm^e
Solonaise, tandis que le centre et I'aile
roitedu feld-mar^hal Di^bitsch Tatta-
queralent de flanc et de front. Dwer-
nicki profita de la separation des deux
corns ennemis pour les aocabler Tun
apres Taotre. 11 enfon^a d'abord les
escadrons de Geismar h Stoczdr, et
acheva de les mettre en d^route dans
les vallons de Serocz)!!. Dwernicki r6-
Sondit aux acclamations de ses sol-
ats : « Je vous ai promis de vous me-
ner h I'ennemi , vous m'avez promis
de vaincre, nous avons tons tenu pa-
role. » Aux environs de Varsovie , la
fortune etait bien diffi^rente. Diebitsch
s'avan^it mena^ant, k la t^te de toutes
ses forces r^unies; les glaces oouvraient
encore la Vistule/mais, au bout de
quelques jours , le d6gel pouvait rendre
M fleuve praticable. Sdiakhovskoi ^it
Sirvenu a s^emparer de la position de
iaiolenka. Une affaire pius meor-
tri^re allait avoir lieu k Grochow ; le
prince Schakhovskoi avait donn^ le
change aux Polonais par one savante
manoeuvre , dont le but ^it d'attirer
a sa poursuite le ^^n^ralKrukowiecki,
qu'il voulait Eloigner de Praj^a. Les
Polonais donn^nt dans le pi^e , et
diviserent ainsi leurs forces. Le veri-
table danger etait k Grochow. Km-
kowiecki s'obstinait k poursuivre les
grenadiers russes dans la direction de
Nieporent , tandis qulls operaient leor
jonetion avec les corps lithuaniens.
Cependant le feld-marecbal rteolut
d*emporter un hois que les Polonais
avaient defisodu lors de la bataille de
Wawer. Aprte-une defense opiniltre,
la position est emportee et reprise.
De part et d'autre, I'artillerie fit de
grands ravages. Sur les deux henres,
Qilopieki re^it une mve blessure, et
cette nouvelle frappe rarmee polonaise
de stupeur. Le bois si lonctemps dis-
pute retombe au pouvoir des Russes;
deja Diebitsch se flatte d*une vietoire
assuree, et donne ordre an comte de
Witt de poursuivre les fuyards et de
M6
L*UNIVEJIS.
•e piM^itor h leur raits dans Pr«gti«
Une r^istance b^iooet quoiqiM pft-
ralys^e par TabMoee d*aoe sage direo-
tioBf oontint que^pie teoipa I'elan det
guarriers moacovites. Jjia isauea da
Praga oomnien^icBt k B'enoombrari
et dq^ las ciiirassiflra du priaea Albert,
enfoDfant Ics eoloiKiea ea retraite,
meoa^ait la banriire de Grochow.
tit dmrdre augmentait d^une naDiera
efirayaote. Cependant les oavriera a*^
taient ^laoe^ hora de la Tille pour
ddblayer lea paasagea; le prince €zav»
toryaki dpaaait aes ordrea avec calme,
taodis ^e Radziwill , ee g^o^ralisainie
de Dom, se plaigiiait qu*on I'tiU &ef6
nalgr^ lui a ce poate Eminent. Lea
Polonaia, revenua de leur firayeur, ae
retouroent oontre Teiiaeni^ qui plie k
aon (our; Prondzyuaki dirige aur euic
le feu de balteriea i laGougreve* et la
oavalerie polonaiae ach^ve de lea »^
pouaser. C'etait peuMtle le temps de
ceprendre rolfeaaive, pour op^rar une
attaque ^ fond acir rarm^ russe. II
D*en fut pas ainsi; rarmte insunreo-
tionuelle repassa la Vistula. D*on autre
edte» on ne sait eommeat a'exDiiqaer
rimprevoyanee du feld-mar^diai > ^ui «
an lieu de ae porter sur Praga a Tins*
taut de la d^oute de Tennemi, pour
en fiuir d*un seut coup, lui laisaa le
loisir de se reeoimattre et de d^ruire
en detail l^avant-garde Tictorieuse.
Telle fut la batallle de Grochow, une
dea plus meurtrieres de cette campa-
gne » et ottde partet d'autre on d^ploya
plus de eoursge que d'habilet^.
Cependant Dwemicki, d^ vatn-
queur de Geismar, venait de battre
Kreuta sous Nowawies; il con^t le
hardi prejet de renonter vers le nord,
et d'operer sa jonetion avee la vieiUe
amie, en ae frayant un eheroin h
travera les corps de Diebitsch : des or*
dves eonlialres lui Jaiposdyent la mis*
sioB de chasser I'emieini dea paiatinats
de Sandemir et de Lubttn. Le g^a^ral
ob^t et bat I'ennenii en pluaieurs ren-
Gonlrea. IMebitsch a^enwreasa d'en-
veyer un reafort considenMe au se*
oours de son aile gauche, et en confia
le eoninaodement a son cbef d'etat*
Rvyor, le eonte de Toll. Dwemi(^i,
pour donner ouelque sspos k a petita
troupe, ae nougia k Zanosc.
L'lssoe de la bataille de Grodiow
avait dteotttr^ la ntossit^ de donnet
j^ rarmte un chef noins lobalrile que
RadziwilL Ge prinee oonvenait mU
avee tant de candeur de sou in-
capadtd, qu'on trouvait k peine le
eoinrage de le bHbner. Ghlopicki gisait
sur un tit de dooleur; mais incapable
d'un senrioe netif , il crat encore serrir
la patrie de ses ocwseils en d^gnant
Skrzyoecki poor gtotolissime. Le
prince Czartorjrskf mit Element fa-
fOnibleicechoix;SkrEyneckl fotelu I
Pnnanimite.On lui confera, de pios^u'a
Radziwill , le droit de si^er parmi les
uembres du goutemement. Son ad-
mission au eonseil entratnait Pexpal-
sfon de celui des quintumvirs qui aTsit
iteni le noins de svfifrages. Cette me-
anre ezdoait Leiewel, le ami qui re-
priseutdt Kopinion r^publicaine: il ne
si^eait plus qu'en I'aDsence du g^^
raliaaime^ Le nouTcau cbef s'occupa
actiTeflseot de la reorganisation de
I'am^e. La eonfianoe conimencait a
renattre, et Diebitsdi se repliait sur
Minsk. Prondzynski, Thomme leplus
capable de rarm^, remplit les fono
tionade qoartierwHialtre ; et si ramoor-
propre de Skrzynecki e<lt pu se r^-
gner ^ reconnaitre un superieur dans
son subordonn^, on edt pu canceToir
de la reunion de leurs talents les plus
brillantes esp^ances. Rrukowiecki,
qui aapirait au premier rang, dut se
oontenter des fonctions de gonveroetir
de Varaovie; mais 11 se promettait bien
da ne pas nifigliger riniueooe que lui
donnait cette charce pour supphmter
aussitdt que possiUe son rt?al. Ou loi
doit lea barricades qui oliatru^ent les
paasages les plus importants de la ca*
pitale. Cette defense fiit inutile, par
suite de la capitulation; mais Taspeet
de eea ouTrages entretint T^nergie de
la population, en iul mentrant qu'on
coointalt aur elle. Qudquea chanee-
ments dans le ministere el dans les
bauts grades de ramde suirirent 1*^*
lection du g^A^raiissime. On assure
qa'outre-passaat la limfto de sea pou-
voirs, Skrzynedu avait, d^ le com-
EU9SIE.
167
As nmt9t eMmt te n^
foeiatioiw af«e DieUMfr, et mte fe
nM-«ity^«M, ie reafenkMiit dans la
folonM tttffevible de Fempemur, avaft
M le jmmier a fM vompre. Cetta ten-
dance dtpfoinatiqoe ptwmrit que le
g^taliaaime d^sesperalt de la irfe^
toire, et dana ee caa il amrait dd d4»
aKoer I'hoooeur ga'on lui ikiaaft. Atf
fCBto, la BQa$erit6 dd oonaell ^tait en-
(pigifo dans lea vole) conatitutionneHes «
et sea aedrdtee a)isi|Mitfaies n*allaient
MB an defii de ia constitution de 1815.
Le seui Leiewel y 6tait rapjmi du prin-
cipe r^fohitionoaire; mais si $es \i6e$i
naoriea par Feipdrience et r^tude,
dtaient inrariaMenient flx^a, i\ faut
eoarenir que par ramblgnfft^ des for-
nes et le tagne de sea axiomes, if
faiaait du r^publicamsme one science
qsi n'^ait paa S la port^ de toot le
monde. On edt dit qu'il parrlait en
ehiflfrea, etqu'flcraignait, en s'aran-
qantfdeeommettre qaelooe sol6dsme
IMriitiqoe. Son influence dans ses fonc-
tioDS comme nonce, ministre et menfif
bre du gouvemementjmrovisoire, avaft
dd ntoasairement s'enacer detant nne
majority aristocratique ou constitu-
tSonneOe. Les patriotes lui conservaient
toojours la mtoe eatiiAe, et lui sa-
vatent j;r^ de ses efTorts eonrtme fone-
troBoaire opposant; mais son rdle
d'iiomine de fmrti s'6tait rapetiss^ dans
les exigences de sa sphere d'action, et
sa renomm^ pesalt k peine dans la
boianee des partis.
II J arait denx maniires d'enrisager
nosarrection lithuanienne : on pou vait
reidter d^ le commencement de la
lotte, et diriser ainsi les forces de
rarmifie agreasiye; c'^talt Poptnlon de
Leiewel et des repuUicatns ; on pouvait
anssif sans reooneer aux avantages
^enttxelis d'une sf puissante drrersion ,
la rendre plus efBcaoe par des victofres ;
Gs plan paraft atoir m cehit des eona*
tftotioiinels, et fhr iie manquarent paa
d'arniments sp^ieux pour en d^on-
trerl« convenanee. En effet, les corps
liOmaniens , dans les dernienr combats;
t^etalent montr^ diHrou^ h ia cause
de fempefeur; tout semMaft proorer
^ le people, ia^onn^ k Fobeissanoe
Mr le dei^djgrte et par FadmfniatrA-
tion moscoTifi, n*^it pas encore dia-
posd h rfsmier les avantages que lui
prdsentait Fincorporatlon a Fempire,
pour les perils dime r^volte qui atti-
ferait sur Kif tous les maux de II
guerre. II fbilaft de grands sucoes pour
le d6cider, ou du moins des efforts
asse^ prolong^ pour que son rdfe na
te rfduistt pas k celuf dnine abnegation
ateriie.
L'espoir otfe mettaft Czartoryski
dans les cabineta dangers, soilicitea
au nom du pacte de 18i5, ne permet-
tait guere d*a}lleurs au gouvemement
Insurrectionnel d*agir snr one base qua
n'admettaient pas les stipulations de la
ebarte d'Alexandre. Leiewd ne s*^
eflbripit pas moins de soulever lei
provinces au deli du memen , et la
majorite contre laquelle il luttdit, attrf-
boait le pee de succ^s de ses n^o<iia-
iSons k ces menses anticonititution-
nelles. Le pouvoir legislatif s'etait
occupe de questions Importantes, mais
dont Fopportunite pouvait etre con-
testee : ees mesured , qui tendaient k la
reforme de Fordre social, avaient pour
objet le morcellement des grandes pro-
pnetes foncieres et Fameiioration oe la
condition des paysans. Des le 19 {6*
vrier, on avait assigne pour dix mil-
lions de florins de terres aux ofBciera
et aux soldats de Farm^ nationale*
Mais toutes oes discussions ne pou-
vafent 6tre f^condees que par la vlc-
tolre, et le gouvemement ne pouvait,
serieusement donner le territoire oti
campait Fennemi* Cependant la Samo-
gftie se Souleva, et la Lithuania pa-
raissait disposes k suivre son exemple.
Toutefois ces insurrections ne prirent
jamais un caractera bien seHeut, et la
meilleure preuve qu^elles IfUrent insl-
gniflantes, c'est mretles ne se soutin*
rent qu'^ Faide de qoelques partisans
detaches de Farmee de Tarsovie, et
qn'elles tomberent d%s que oe ftible
apptri lenr manqua. An milieu de toua
ces ftraillements, oilt tea partis triom-
pfaaient tour k tour pour donner suc-
cessivement la mesure de leur fair
blesse, toutes les esperances se tour^
naient vers Farmee; 1^ etait vrafment
66»
L'UNIVERS.
le gouveroement, ]k 6U\eai la vie et
U r^istance personnifi^s par la force.
Dwernicki 6tait a Zamosc avec qua-
tre mille hommes; Sidrawski couvrail
a?ec six mille hommes la haute Vis-
tule; de la Piiica au bras septeotrional
de la Yistule, trente-cinq mille fantas-
sins, quatorze mille cavaliers et cent
pieces de canoa voilaient la capitale,
Modlin et Plock. Plus au nord, sur la
Wkra, le Bug et la Narew, trois k
quatre mille guerillas aux ordres do
zaliwki et de Wengrocki eclairaient
Textr^me gauche des Polonais, et iu-
2ui^taieDt le flanc du feld-mardchal.
^id)itsdi r^solut de passer la Vistula
yers I'embouchure du Wieprz,etpour
tenir en respect la garnison de Varso-
vie, il fit avancer un corps d'observa-
tion pour s*emparer de la chauss^ de
Brzesc; II manccuvra dans ce but; et,
apr^ avoir assure sa droite, il s*oocupa
serieusement de Dwernicki. Le paia-
tinat de Lublin n'etait pas en mesure
de resister; les troupes fusses Toc-
cuperent. Dwernicki s'^appa de Za-
mosc, et le g^n^ral de Witt uit charg6
de Tobserver. L'aiie droite des Russes
8*etait concentre sur Ostrolenka. Le
tield-mar^chal , laissant un corps de
trente mille bommes devant Praga,
d^ploya son centre, dont lesdiff^rents
corps se port^rent vers Stenzyca pour
y francbir la Vistule. La debacle du
fleuve eat lieu du 10 au It de mars.
Les glacons emporterent le pont de
Praga; fes eaux du fleuve inonderent
les terres basses, et ajout6r«nt a la
difficult^ des communications. Les
deux armees se trouverent done en
presence et s6par^s par les vagues
de la Vistule; ii s'agissait de se bdter
d*y Jeter un pont sur les deux points
C$1 les uns et les autres voulaient ^ta-
blir leurs communications ; c*est-a-dire,
a Praga pour Tarm^e polonaise, a
Stenzyca |x>ur le passage des Russes.
Skrzynecki disposait de toutes les res-
sources de la capitale; il previut Die-
hitsch, qui avait h lutter conlre tous
les obstacles d*un terrain defono^ et
les embarras de Pencombrement de ses
troupes. Rosen restaitseul, retranciki
dans la for^t de Milolna, exposi^ aux
attaques de Tarm^ p^rionaise, dont
un tiers seulement avait et^ envoys
au-devant de Diebitsch pour lui dispo-
ter le passage de la Vistule. Proadzynski
comprit tout le parti qu*0D pouvait
tirer de Tisolement des Russes. II pro-
posa de tomber k I'improviste sur oe
^^n6ral, et, apres Tavoir ^ras^, de s»
jeter sur le flanc droit de Diebitsch,
dont les corps diss^minds n*auraient
pu opposer une r^istanoe efficace k
une arm^e victorieuse. Skrzynecki he-
sita longtemps avant de se rendre aux
instances du quartiar-m^tre. Une d^
faite pouvait tout perdre; mais, d*un
autre cdt^, il valait mieux comlMttre
une arm^ morcelee que d'avoir k lutter
plus tard contre toutes ses forces reu-
nies. Gette consideration d^ida le
S^n^ral. Le 80 mars, les divisions
'infanterie Malachowski, Gielgud et
Rybinski, la cavalerie de LubiendLi et
de Skarzynski , en tout vingt-sept mille
fantassins , six mille cinq cents chevaux
et soaante et douze pieces d'artillerie,
d^filerent en silence sur le pont de
Praga , et le matin les oolonnes polo-
naises attaqu^rent de front et de flane
la position de Tennemi. Geistnar, sur-
pris par cette brusque attaque, arr£ta
quelque temps la tougue oes legions
polonaises ; bientot ses retrauchements
sont tournes, le d^rdre se met dans
les rangs des Russes , tout ce que la
fuite n*a point soustrait au vainqueur
mord la poussiere ou met has les ar-
mes. A deux heures, la deroute de
Geismar ^tait complete, et il se rifu-
giait avec deux ou irois mille hommes
sous la protection de Rosen, qui, a la
tdte de vingt mille hommes, attendait
de pied ferme le choc de Tennemi. Vers
le soir, les Russes c^ent pas k pas le
terrain, et la cavalerie polonaise, bri-
sant leurs rangs, y promene le ravage
jusqu'a ce que robscurit^ ait arr^te le
vainqueur. Cinq ou six mille prison*
niers , deux mille morts ou blesses , dix
pieces de canon attesterent les pertes
de Fennemi. Rosen profita de la nuit
{>our replier precipitamment ses co-
onnes vers Kaluszyn. Le lendeuiain,
t"^ avril, a neuf heures, Tanu^ po-
lonaise se mit a sa poursuite , renver-
RUSSIB.
Stilt dans sa couifle rapi^ les corps
laiss^ en arri^re pour ittarder sea
progrte. A KaJaszyn, la luUe recom-
mend terrible; mais Rosen, forc^
d^evacoer cette position , se retira au
del^ du Kostrzyn et brQla les ponts.
Les pertes de rarm^i; russe, dans cette
seoonde journ^, doubl^rent celles de
la veille. Cependaot le g^n^alissime^
eofnme s'il rat cm que la victotre lui
tendait un pi^ , arr^ Tessor de Tar-
mte et replia see forces, que I'arriv^
brusque de Dtebitsch pckivait oouper.
Ce dernier, h la nouTeHe*de F^ec de
Denodie, avait renonc^ au projet de
passer la Vistula, et, se repliant sur
son corps d'observation , il se rejetait
dans les lenteurs d'une (perre de po-
sition. La bataiile d'lgani^, oik Prond-
zynski fit essuyer une perte conside-
rable a Rosen et h Pahlen , init en Evi-
dence les hauts talents roilitaires du
quartier-maltre, et si elle n'eut pas de
resultats plus €6conds , il fiut en attri-
buer la faute au gEneralissime qui ar-
riva trop tard , et dont les dispositions
avortto permirent k Tennenii de se
rallier apres la ddaite. L'approdie de
Didiitsoi for^a bientdt les Polonais h
r^troi^ader.
Ainsi les avantages des Polonais ^
9fdtieUs du plus pur de leur sang, n'a-
vaient rien cbangE h leur situation.
SkTzynedii avait concentre ses forces
en face de Diebitsch , et ces deux ri-
vaux, k peu pres ^aux en forces, se
mesoraient de Tceil sans oser en yenir
a une bataiile g^n^rale. Sur la haute
Vistule, Sitewski, avec six mille re-
cmcs, fut teasE par Kreutz. Dwer-
Dicki etait entr^ en Volhvnie k la t^te
de ^eloues milliers d'bommes; on
Tarait ^argE de la mission difficile
de pea^trer au travers des corps de
Kreutz, Rudiger et Roth, qui, mtoe
isol^, auraient suilQ pour toaser sa
faiUe troupe, et de s'emparer de Ra-
nienletz. L'apparilion de Dwernicki
n'exctta qu'un enthousiasme sterile;
les Volhyniens ne demandaient pas
mieux que d'^re d^ivrte, mais ils pa-
roreot peu dispose k prendre une part
active k Tinsurrection. Dwernleki ob-
(im un avaiitagc a Bortoen; mais la,
eornme ailleurs , la plus brillante valeur
s'arr^ta devant des forces toujours re-
naissantes. Rudiger perdait plus d'bom*
mes que son rival , et ses rangs parais-
saient k peine ^lairds. Au lieu de
peroer dans la direction de Karoenietz ,
le partisan polonais s*^it jet^ vers
le mrdi, ayant k sa droite la Iron*
tiere nentre autricbienne. La Podolie
lui offrait d'in^puisables ressourees;
mais les ^toeraux Roth et Kayza-
row pouvaient facilement lecouper du
th^tre de Tinsurrection, et le rejeter
sur la limite de la Galide. Les troupes
russes ne craignirent pas de violer le
territoire neutre; dies toum^ent la
position de Dwernicki, et renveloppe-
rent si ^troitement, que le g6nErai se
vit oblige de se r^fugier en Galicie : la ,
desaroieparlesautoritesautrichiennes,
il remit son sabre dans le fourreau ,
aj^ks avoir &it tout ce qu*il etait hu-
mainement possible de faire.
Cependant, comme si la Volhynie,
veuve de Dwernicki, cAt rougi de ne
prendre aucune part k la lutte de Tin-
dependance, eHe arma quelqucs ci-
toyens, qui combattirent sous les
orares de Rozycki et Kolvsko : ce der-
nier fut oblige de se rabattre sur la
fronti^re autricbienne; quant a Rozyc-
ki , apr^s avoir lutte pendant pres d'un
mois centre les corps dissemin^s des
Russes, il parvint k se jeter dans Za-
mosc.
II est temps de toumer nos regards
vers la Litbuanie. Aux premieres nou-
velles de linsurrectlon varsovienncf
les autorites russes avaient pris toutes
les mesures que redamaient les cir-
constances. Presaue tous les hommes
en etat de porter les armes avaient ete
jetes brusquement sous les drapeaux;
on avait regard^ comme urgent de faire
cette presse d*hommes , pour ne latsser
au pays c(ue les ressourees necessaires
pour abnter et nourrir Tarmee d*in-
vasion. Les corps de Rosen et de
Pahlen occupaient la Lithuanie. Les
ofHciers suspects de patriotisme furent
eeartes ou emptoyEs dans des corps
russes, et si rmsurrection se fQt de-
daree, elle v&i ete immediatement
paralysee par le defaut d'enseiTible et
•?•
L*U!II¥ERS.
4e eoBSioee. Un oukase fkoM^ mnfiii
tM gymmatA aux iiiTestigatioBS de hi
ptriiee; les tUluts lithuamengf oa m
eoDservaieot quelques franchises, fu-
rent modifies; on ^tablit de nouvcaus
impute, et on dMara la province em
tot da giierre« Pour completer ces
naeaures, il fut procM^ a un d^sarmo*
anent g^odraU Lea d^nonciations qui
atteignaient tea patriotea sem^rent la
defiance, et lea rigoeurt de Fadminis^
tratioo firent douter i pluaieura si io
p6ril de la r6volte n'toit pat pr^f6rablo
aux tracasaeries et aax vexations da
Ueutenant du taar. Cependant il exia*
tei 1 41¥ikia uo eomit^ r^volutionnatre »
maia il paraisaait plus dispose k dta*
cuter f^'h agir. Get tot d*atlente et
de d^ance se proiongea jasqu'au naoia
de mars. Lea sooote die raraiite de
la Vistula exalfctont quelques espe«
raneea; les campagnea surtout, apr^
avoir longtemps attendu Tim^laion
de Wihia * senriblaient disposto a pren*
dre roffaoaive. C'toit surtout en Sa*
mogitie que le m^ntentement prenait
un caractire plus d6cid^ : quelques
paysanSy apres avoir elu un chef,
avaient repousse les enrdieora mos*
oovites; mais, poiirsuivis aussitdt par
una oolonna russe, lis s'toient ais«
pers^ dans leurs forto. Staniewicz,
raar^chal de la noUesse de Rosieni^t
courut k Lipawa pour y acheter des
armes et des munitions. On arma de
faux et de hacbea les paysans el les
employ^ des cfatoaux ; les tories des
nartieuliera fureftt ouvertes et noises k
la disposition de ouiooaque savait m»>
nier un cheval. On maBquait d*artil-*
lerie^ mais on improvisa queiquea ca-
nous faita avee dea tronca d'arbrea
creus^, serrte par dea cerclea de fer,
et auxqiiela oft doMia pour aifdts des
trains de carrossea. Des le 26 nuurs,
les premiers attroupements dtormd*
rent lea gardes russes du canal de
Windawa; le lendemaiB, la i^amison
de RositeM^ est ehasste, el les districts
voistna se soul^eat presque simulta*
ntoent. Maia pour que rinsiirraetioa
aamogitienne pdt devenir redoutaUe,
il feUait qu*elle se eoordonnAt avee un
souieveoaent serieux en Litbuaaie. Le
mpaa heoiein; lea P9ians ne parent
tenir eontre deux ariile hommea de
troupes r^li^res^ et se dispers^wmt
bientdt dans toutes les directions « pour
iiire la guerre qu*ila entendaienl le
mieoXf oeile de partinns. lis rteaai-
rent ouelquefoia, el pkia aouvent aoo*
combereiit. Un peu pina tard, Sta-
niewica pressa vivement le colonel
Bartfaolemeua, et le contraignit k ae
rtogier 8«r le territoire prossien. Lea
iaaurg^s parvtnrent mdnie a a'emparer
de Potonaav petite ville au moyen da
bquelle lea Rusaea eorrespondaient
avee lea Prussiens. MaiB oe i>oint ini-
portaot lut repris par le g^eral Ren-
nekanapf. Oo aaaure que quelques
bitimenta chaig^ d'annea et oestinte
aux Polonais devaient aborder dans le
petit port de Polonga, ee qui expliqoa-
rait racfaamement avee lequel on ae
dispolait cette position. Au reatey la
r^utanee de cette province ne fiul
qu*un Msode presque inaper^u au mi*
lieu de la conflagration gffitole. « Les
canons toient si rares^ dit Midros*
lawski, qu*ila inspiraient aux rawrea
oampagaatds una sorte de culte reK-
{;ieux; on raconte qu'un artilleur jkh
onaie ayant ameii6 deux pieces d^r-
tillerieaiiqoartiergtotoldesinsuiges*
tons se pressaient pour les voir et lea
toucber; ils devaient leurs voix mena-
fantes vera rouest, protestant qolla
ne craignaient plus Diebitseb. «
Les dGTorts que faisait la SanMwitie
pour se d^barrasser de ses cfaunes
n'toient pas perdus pour lea Litbaa-
nieoa; Wilna toil sourdenient travail-
Ue par des meneurs sans teergiev ifui
auraient biea voulu que la r^olulion
s'opMt sans fatigues ni perils. Le co-
nilt6 de oette ville soHicitart lea cam-
pagnea de marcber sur la capitale de
la province pour Taider k ae soulever.
De leur c6te> les districts, saoa dtre
toign^ d'op^r oe mouvementt troo-
vaient que le service qu*on attendail
d*eux valail plus ou'iin simple appd,
el que queiquea demonslrationa de ia
part du eonm toient ntossairea* En
attendant, le district de Treki d6eidail
que roo s'emparerait du cheMeUt et
RUSSIE.
57 1
fae Joiiyiw ««l^«i«iipli mtnii trouH
ttwK d'ioiit9lfeur8f on ntrdHfait dt
0QM8ii aurWilMk Ge ^i«Jel« praque
mmMt eskmVk qoe ooofii, mit k la
di^pof ition des iMirK^ qoelqiiea aiv
oMa. Oaamiana ant le mtee aort. Wil«
koaaierzt mmaoht jpn laa baodea, fat
^vacute, al la garoisoo aa raplia aur
WilM, BOB aaaa avoir aaaay^ d'asaes
emidaa partaa. Gepcodant lea aotoriUa
aa IViina dtelarmnt qifau pramiar
aele d^hoatiliU de la part da paoplef
la garBiaon ae retirerait et Ibudraiarait
la ▼ille. Laa plus r^iolua s'^chappalent
da Yflkn^ pour aller groiair lea oandaa.
CeUea-d rMaiest daaa lea diatrieta oa
lournaieBt aatour de la eapitale , ^piaul
lea oonvoia et FoccaaioD do delivrer lea
wyoanaia. Kowno ^ait gard^ par
m, millo Ruaaea. Una forte sortie quo
it la gamlaoB nettoya d'insor^^ lea
ooamnmicatiotta autre eeCte ville et
oelle de Wilna. Une aeole baude, aooa
le eoBunandemeiit de ProsoTt haroelait
oonataiBineDt lea eouvoia dea Rnasea,
et leur Mwppaitd^ qu*elle teit pout*
8iam.GapeDdaftt lagen^ralScfaimaiiDt
aofti do JDunabourg pour aaoottor le
pare da reserve deraamtedeDicbitaGb,
a'ctait retrancW dans Uciany. Una
jenae heroine, £milie Plater, avait
/fh— ffi§ par aa presence et son mys-
tique patriotianM lea habitants de eette
oratree; Cter Plater, son frere, flfen^
pare da Tezierosy; quelquea antrea
chda lea aecondent, et leors foresa
r^uioa menacentbient^t Udany. L'in-
surreetioBs'^lendait , mais eapndeasei
et maaqnaoft de oette UBit6 sans la*
quelle le eonrage et lea aacrifieea do-
mewont sterilea. Uarriv^ de quelquea
jeonea gaaa plus inatmita que les au«
tree dtait ragavdte eomme un Mn^
meat d'one haute importanee. On
s'obaiinait k marehcr arar Wilna. Za<-
luaki passa fai Wflia avec queiqvea
miNieaa d'booMBHS , tandia qu'nn autiB
partiaaD de?ait op^rer sob attaqae aur
le mime point, en dAoocfaant par
OanmiaDa. Le oomit6 n*en resta paa
oMna dans rinaction, aoit faiblesse,
lait qoe lea mesurea dea autorites
nasaa hn euaaent 6U tout moyen d*a-
gk. Dm eoioBnes russes marcfa^ent
k la reacoBtre dea tnsoig6s et les cul-
butireBt. De Wilna, de Polonga, de
Kewno, dea d^tacbements moscovitea
balayaient les routes, eemaient les in-
surges, lea battaient ordinairement
lorsqu'ils s*avisaient de r^sister en
masse; mais ne pouvant les poursuivre
dans leurs ratrartes , lis perdaient beau-
eoop de monde dans lei attaques d*em«
buscade« La fittigue et le ehol^a d^i-
maient lenrs ranss, et la raret^ des
subatstaaees ae lalsait sentir toutes
ka foia qu*on s'doignatt des d^pdts.
Lea renforta pvtis du ^uartier g6n6rat
de Diebftseb renoutelatent sans cesse
lea gamisons, et venaient se croiser
avec les corps qui arrifaient de la
Gourlande. Lea insurg^ oombattaient
pertout et ne tenaient nulla part; Par*
tilierie ennemie sufBsait pour arr^r
leur fougue. Aprhs une attaqae infriio-
tuense contre Polonga, ils se diss^mi-
airent poor recommencer la guerre de
partlaans.
11 a'eittre pas dans notre plan de
conaianer tons les details de cette lutte ,
cik CDaoue village ^tait un centre,
Cbaque aonMne de ooeor on gto^ral;
meia Khistoire doit une mention au
d^uement des Steves de Wilna; cent
d*entre epx ^taient parvenus k s*6cbap-
per pour prendre part aux dangers aa
leurs Mrea. Cette enisration eontinua
malgr^ lea prtarations les plus s^v^res ;
en6n tous ceux oui ftaieni rest^ a Tu-
mverail^ s'^vaderent simultanement,
el, apr^ des fitigoes inouies, se joi-
gmrent au partisan Matusewicz oui
oommandait les insurg^s de Trofci.
Une colonne russe les atteignit bientdt,
et tons ceux qu^^rena le fer de Ten*
nemi alldreat se lolndre aux bandes
samogitienaea et de Wilcomir.
Dans les provinces rusaiennes , c^est*
anllre en Volhynie et Podoiie, et en
Ukraine t qodques efforts partiels s^e-
taient asacna^ k la mission de Dwer-
nicki; mats le mauvais suoc^ du g^-
ntol avait gfoc^ les d^vouements et
firapp^d'impuisaance les mesures d*ane
noign^d'aventttriers patriotes. Toutes
leurs bandes r^unies d^pass^nt ill
peine deux mills hommea. Vainqneurs
dans quelques rencontres, ils lurent
S79
LUNIVERS.
toraste par les masses russes, et leurs
debris se r^fiigierent, le S6 maj, ea
Galicie. Rozicki, plus habile ou plus
heureux , 6*^tait jete dans Zamosc.
Cepeodant racm^e polonaise avail
recompl^te ses ran^s; les prisouniers
lithuaniens se battirei>t pour 1 insur«
rectioa comme ils s'^taient battus
contre elle; c^^taieot d'excellents ins-
truments qui venaient de cban({er de
mattres. Le Kostrzyn s^parait les
Russes des Polonais. Ghacun des deux
g^ndraux semblait attendre que son
adversaire fit une faute; les maladies
et la contagion d^olaient les deux
camps. De part et d*autre, le gt^nie
militaire semblait s'^tre rtfugi^ dans
le cerveau de deux hommes subor-
donnas a Tomnipotence de la hierar-
chic militaire : le g^D^ral Toll pour les
Russes, Prondzynski pour les Polo-
liais. Le 24 afril, I'arm^ russe s*^-
branla dans Tintention de tourner les
sources du fleuve pour accabler la
droite de Skrz^neckj , oouper l*arm6e
polonaise a Minsk ou la refouler sur
Praga. Diebitsch mtt de la lenteur
dans ses mouvements, et lorsque le 37
Tarmac russe se prints devant Minsk ,
Tarriere-ffarde polonaise 6tait rangte
en bataifle pour la reoevoir : la, diz
mille Polonais arr^t^rent pendant une
journee les efforts de I'ennemi. Le fold-
mar^chal abandonna Minsk et reprit
saoremi^e position.
dur ces entrefaites, la droite de
Tarm^e polonaise essuyait de graves
echecs. Sierawski battu s*etait replie
sur la rive gauche de la Vistule; Dwer-
nicki avait disparu du th^tre de Tin-
surrection. Get ev^nement n'^tait pas
encore connu au quartier general ; on
crut qu*il ^tait encore temps d*envoyer
au secours de ce harai partisan.
Glirzanowski , chef d'^tat-major, fut
charge de cette perilleuse mission , que
six mille hommes d'^lite devaient ac-
complir sous ses ordres. De son cdt^,
Diebitsch envoya h Kreutz un renfort
considerable; la petite arra^ ou le
general Ramorino se distin^ua Ait plu-
sieurs fois attaqu^, et parviot, a force
d^hahilete et de courage, h mettre en
dtfaut les corps charges de Tarr^ter
et de la d^truire; enin elle trouva un
abri dans Zamoso.
Vingt mille hommes de la garde hn-
p^riale rusae, sous le oommandement
du erand-duc Michel, se trouvaieot
sur le chemin de Looza, h vingt-eioq
lieues environ du fdd-marMal. Prond-
ztnski proposa de tomher brosquement
sur les gardes, ce qui pouvait Her les
operations h Tinsarrection Itthua-
nienne. Ch]a|x>wski , k la t^te d'une
troupe d'ofiSciers et de sous-offiders
instracteucs, et d'une escorte de six
cents dievaux, devait profiler de la
retraite des gardes pour soutenir et
discipliner la resistance des Lithua"
niens. Skrzynecki, qui ne savait oser
qu'a demi , crut pouvoir conciiier Tat-
taque projetee contre les gardes atec
le maintien de ses positions. Uminski
fut charge d*observer Diebitsch entre
le Bug et la Vistule , tandis que le corps
d*armee s'ecoulerait le plus secrete-
meot possible vers le nora. Pendantce
mouvement , Diebitsch attoquaUmins^
ki , qui se defendit de maniere h iui
[pedition de Louza se oomposait
3uatre divisions d'infanterie, de trois
e cavalerie et d'environ cent boucbes
k feu. Elle marcba sur trois eoloDoes.
Le prince Michel ignorait entierement
la marche de Tennemi. Les Rasses 86
retiraient en ordre ; mais , devant Czer-
win, ils s'arretereut, disposes k accepter
le combat Skrzvnecki avait ravantage
du nombre et oelui de Toffensive; mais ,
preoocupe par Tidee de s'emparer da
Louza et drOstrolenka, pour assurer
sa retraite sur Varsovie, il laissa
echapper I'occasion de vaincre. Saken,
qui occupait Ostrolenka, repwtu
totttes les attaques de Dembinski : u
ne plia que lorsque la division Gielgud ,
eovoyee par le generalissime, vint sp-
na/er les efforts de Dembinski ; tovte-
rois il avait sau ve ses bsgaf^ « et donae
au grand-due Michel le loisir de se re*
oonnattre. Gependant Chbpowski p^
netra en Lithuania, a travers la forit
de Bialowies. Skrzynecki , aprds avoir
laisse aux gardes tout le loisir de so
retirer, s*attacha .inooDsiderement d
RUSSIE.
57S
kv poursuite. Le prince poursuivant
aretraite, que prot^eaient queiques
Qombats d*arriere-garde, oecupait a^j^
lykodn et le pont sur la Narew. Dt-
bu8qa6de cette position, il fut oblige
de ae rejeter k louest de Bialistock,
ce qui le coupait de ses commnnica-
tions avec le feld-niar6clial. Gependant
Diebitscfa , inform^ du danger que oou-
raient les gardes, se bdta de jeter un
poot a Granne. Skrz^ecki se replia
vers Ostrolenka , et mit tant de lenteur
a operer sa retraite concentrique, quMl
laiasa k son adversaire le temps de
Faille les gardes et de prendre s^eu-
sement ronensiTe. Lubienski, obarg^
d*ob6erTer le Bag avec dix roille hom-
ines, oocupait les environs de Nur, et
pouisait aes reconnaissances jusqu'^
Granne et Droghiczyn. Les Russes
renvdoppj^nt dans cette oosition; il
n*^cbappa a une mine totaie qu'aprte
de vigooreux efforts, et il rejoignit
Skrzjnecki a Sniadow.
Gielgud oceopait Louza; le g^^a-
lissime ^tait loin de pr^voir que Die-
bistcb allait Tattaquer. Le 36 mai,
Skrzynecki se transporta avec son
tet-ma^r k Ostrolenka. A huit heures
da matin , I'armee russe se montra sur
les nmtes voisines. Les troupes de
Lofawoski fiirent assaiUies les premid-
ret^Sfazyneckialorsput mesurer toute
feleodue de sa faute; les bataiilons po-
tonats arrivaient un Jinn , et se ruaient
cooragcasement contre les masses de
reonemi, qui avait d^Ioy^ sur les
hautrars une artillerie formidable. Le
gmtel Langerroann eut un cheval tu^
sous lui. Tout Teffort de la cavalerie
pokmaise ^choua oontre les disposi-
tjoiis da terrain; les ehevaux enfon-
eaient dans la vase jusqu'an j^itraiL
Oeoz cbefii, Torgueii de I'armee, Ra-
minski et Kicki , tomb^rent. Vers le
sotr, rartillerie polonaise, dirig^ par
Bern, arrfita la marche des Russes. Le
Csui vant allait d^oiler toute T^ten-
des pertes. Le cto^ralissime polo-
aais convoqua les cnefs et tint an con-
■eil de guerre; il fut r^lu qu'on se
Rplierait sur Yarsovie, et que, pour
tMter le corpe de Gielgud , qui allait
te traiver abandonn^ 5lui-meme, on
lui doanerait.Tordre de se jeter en
Lithuanie , sur les reyers de Diebitsch ,
dans le palatinat d*Augustow. Lu-
bicnski fut charg^ de la retraite, et
Dembinski, avec les escadrons de
Posen, alia rejoindre Gielgud pour
s'associer k son exp^ition. Slrzyn^Jii
entra le lendemain dans Praga, et pen-
dant trois jours les debris des corps
3ui rentrdrent dans la ville purent
onner une idee exacte de la defaite
d'Ostrolenka. L'infanterie de Pahlen
et de Scfaakhovskoi fit tous les frais
de la iournto : les gardes et la cava-
lerie aes Russes ne donn^rent point.
.On ne conceit pas pourquoi Diebitsdi
ne voulut point profiter de sa victoire.
Varsovie, vivement attaqude pendant
la ddsastreuse defaite de ses defeo-
seurs, n*edt pu opposer une longue
r^istance. Mais Skrzynecki venait de
faire une finite; la courtoisie du fekl-
.mardchal ne lui permit pas de rester
en arriere. Le general ToU , aprds avoir
si habilement oonfu le plan d'attaque,
vit avec douleur que le r^^ultat d^
nitif de la campa^ne ^tait compromis
par les lenteurs mexplicables de son
cbef.
La bataille d'Ostrolenka, une des
plusmeurtri^res qui se donna entre les
Russes et les Polonais, eut un effet
moral tr^-fScbeux sur i'arm^ insuiw
rectionnelle. Un des r^uitats les plas
directs de cette iourn^ fut de re*
placer le tb^tre ae la guerre dans les
mtoes limites strat^ques qu'au oom-
mencement de la campagne. Gielgud,
s^par6 de Tarmac en retraite par le
mouveroent en avant des Russes, n'a**
vait plus qu'k remplir sa mission, qui
ddsormais 6tait devenue pour lui une
n^eessit^, celle de se jeter en Lithua-
nie. II re^t I'ordre de s'eniparer de
Kowno, et de marcher sur Polonga,
ou Ton esp^rait trouver les armes ex-
Kite par le comit6 de Paris. Dem*
Bki rejoignit bientdt Gielgud; les
deux g^neraux se mirent en marche,
enlevant atnsi k la d^nse directe de
Varsovie une force d'environ dix mille
ocNnbattants. II s'agissait d'enfonoer la
division de Saeken avai^ i'arrivfe des
renforts dirig6i 8|ir oe point par ie
574
L'UmVERS.
feld*inar6ehal. Sacken, ignorant quil
avait affisiire il une division, a'avanea k
la rencontre de I'ennemi; mais bana ,
derant Raygrod , il n'eut qne le teniiia
de r^trograder aur Angustow. Oiel-
god, vaioqueur, antra le 90 mai dane
oette yiile. Lea partisans, ^lectris^
par ce suoe^ , reiorm^rent leurs ban-
des , et la ditisioncontinua ta mardha.
Chiapowski p^n^tra dans la for^ de
Bialowies , maltipliant ses attaques , et
r^veillant c& et la le eourage et les ea-
p^ances aea habitants. Ca nouvelle
de rentr6e du corns de Gielgud en
LithuaDie blessa, dit-on, son amour-
propre, et ridee de figurer comme su-
Dordonn^dans cette expMMition ^mons-
aa son patriotisme. Bient6t ii reeut
nne d^pecbe de Dembinski, qui lui
eommuniqiialt Tordred'abandonner la
chauss^ de Wiina poar se Joindre k
lui en Samogitie. If rallia toutes ses
ioroes, et reocontra Gielgud k Kief*
dany. Gependant la sollicituda de Die-
bitsdi s'^tait portte sur Wfilna t lea
f^^aux russes Kuruta , Saaken , Frie-
!en et MalinoTskof , Khilkof et Tola-
tot, se dirlgeaient vera la capitale
menace. 11 etait d^i^ trop tard pour
csp^rer d'enlever Wilna, que prot^
geaient tous ces reoforts. Cependant
Kuruta et Tolato! B*^tatant paa en-
eore arrive, et Tattaque offirait des
ehanoas da sueote. Gielgud temporisa,
et dk§ lors la prudence aurait dd dd-
ternniner les Polonais k la retraita^
Dembinski et Chlapow^ enrent k es-
tnytt deux sorties de la garoiaon dt
Wilna. Le mdcontentement gagna lea
insura^s; quelques«uns se proentent
diez le gto^ral , le sommeot de mar-
cher sur la ville on d'abandonnar la
eomnoandament. Gielgud promit tout;
mais, k partir de ee moment, il d^aes*
jpim de sa cause, et saariila le faiea
g^n^ral a ses nroprcs ressentimenta.
Chiapowski refiisa d'aocepter la direo*
tion dc Tarmte, et, ntia£ut de voir
Gielgud humfili^, il pi^fite le rAle d'un
faooune de genie qui murmure, et nil
bllme st^ie au devoir d'un ebef res-
ponaaUe. Cast dans caa diapositioiis
fflie I'armte pokmaiae attaqua Wilna.
6nasfuiiaqueKhrapovicki,gouveniaar
dela plaoe,avait menac^detoutr^duire
en cendrea au moindre indice d'losnr-
Nction iiarmi les habitants. Tous lea
eifforts de Gielgud se briserent centre
la position retrench^ dePonary . Aprte
un combat de douze heuraa, Gielgud
ae vit oontraint d'abandonner I'atta-
que. Dembinski, trop ^k>i|nid pour
prendre part k ractton, ne dtesp^
de rien; et tandis que Chiapowski re-
fosalt pour la saoonde fois de d^iroger
k la discipline, en aoceptant le com-
mandament de rarm6B, Gielgud re^ut
de nouveaux ordres qui lui enjoi-
g latent de se maintenir en Samofitie-
n euince jours , ce malenoontreux g^
ndral se vit eoup^ de la Baltiqoe et de
Pok>nga..On aasure que Gielgud et
Chlapowaki ouvrirent des correspond
danoea avec lea autorit^s prasaiames.
Quoi qu'il en soit , au bout de quelquea
Crs marqn^ par dee combats mal-
raux, tona les d^ris de I'invasioii
lithuanienne ae trouvaient envdopp^
par des fbreea sup^rieores. Dans cette
extrteit^, Oilapowski propoaa le pre-
mier de se rtfugicr sur le territoire
Jirussien. La furaur a'empare dee Pie*
onaia; lis oourent ches Gielcud, qui
lenr nromet en tremblant de livrer
batailk. L'attaqua da Saawle par Dem-
binaki rallia un instant rarmae polo*
naise ; mais elle combattit sans enaera-
ble; personne ne reoevait d'onires;
Gielgud et Chlapowaki ae renvoyaient
de I'un k I'autre les aides de camp« et
la mitraille ruase ravageait les batiul*
ions , qui combattaient avec nn eourage
di^ne de meilleurs chefs. Aprte un der-
nier effort, la fortune samblait ae
d^elarer pour lea assailfanta , lorsqu'ila
re^nrent tout k coop Tordre de bettre
en catraite. Quelquea ofBciers s'dlan-
cnit vers Gidgua , Tsccablent de re*
proehes; mais le genial, aans leur
r^ndre, aagae la route de Kurszaey,
et d^aeria Tarm^ donn^. A la suite
d'un eooaeil de |pierre, on d6cida, ou
plutdt on Mgnit de dMdcr que I'oi^
partagerait les forces polooaiaea en
troia corpa : Chiapowski, avec ie pre*
mier, devait retoumer k Yeraovie;
Rohland* k la tite du second, mar*
aer Polenga; et Dembinaki,
• • •
• • •
• ••
RUfiSlE.
6T$
livamH de i^prtMlier ^nergiqiimiieat
{(Hdsiid son imp^ritie, exmiterait
ivK tt troisitaie w projet qa*i] avait
fbsoiXk de se Jeter en (kmikiida.
•Qooiqae lea projeta 6m troia gia^
nmnetussent paa on myst^, etque
GUapowslu ne ae fHH inme pas donn6
li perae de lea d^iriaer, l*on ae ber^ait
k fespoir que quelquea anoete ram^
neraient les che£B k dea aeBtimenta ploa
^6s... » (Mi^roalawski.) A deux
inifles de Lukniki , Gielgud ae rappro-
cfaa de Chlapowaki; k quelque dia«'
tsDce, quelquea ebefa d'lnsurg^s vin^
rent prendre lea ordrea dea deux
g^iteux, qui lea reuToyerent bvea-
goemeDt. Cependant le oorpa de Roh«'
and, aux prisea arec lea Rusaea^
soRicitait yiyeiiient du aecours. (%!a-
powiki se contenta de r^ndre aux
aides de camp que chacun se batteit
poor son eompte. Aus8it6t il monta k
cfaeral et se rapprocha de la fronti^
prassienne. Ce mouvement vera Teal
poQvait s'expliquer par le rapprocfae*
mcnt des Rusaes. L^amour-propre na-
tional se rtfugiait dans aea doutea
honorables , pour n'avoir paa k enviaa*
ger toutes les oons^eaces d'une triste
T^t^. £afln parut un ordre du Jour
3ui aotorisait les offieiers k se d^taeher
a oorpa (f arm^e pour continufr une
rare de partisans dans I'int^rieur de
Litbuanse. Chlapo.w8ki a*approcha
tout il coup de la fronti^ pruasienne.
et informa tea autorit^ royales qn'ii
demandait k ae r^foeier sur le terri«
toire neutre pour t <wposer les amifs.
Le oorpa de Roniana, hareel^ sans
reJIiche , se repliait sur Twer ; Sla-
niewicz ae smra de Rolilaod k Kul^,
ct 9 rassemblant les debris de sea
acKnennea bandea, il pr6f^a lea dan*
gers da efaef de partisan k rbespitalit^
pmaaienne. Cnendant ie corps de
Rohland apprit la dtfeetion de Gielgud
et de Cblapowaki,
«La fureor ae r^etlle dana lea
eoeors longtemps affalaa^ aoua Tlnfor*
tune; lei ploa entreprmaBls montenl
k cheval et eoureot d^irrer leura M»
res. ArririM en fMe de la plaine, oft
Il rage anraehe dea larmea aux vM*
ruia ddsam^, lis s'entendent appeler ,
par lean ooaaa, inviiquer conume dea
^iea aauyeora. II n'y a plua de fron*
mre; lea langa dea priaooniers et dea
lib^rateura se confondeat; ceux que le
Kint d'homieur ae retient pea dana
I fera allemanda profitent du tumulte
poar reprendre lenrs anneal sautent le
2Dsa6 qui a^pare les deux empires, et«
oondotta par queiqueaofllciera et prea-
9ue toot rtot-major de Gielgud, ae
jettent au niiiieo du corps de Rohlaod.
• Lea aoMata prussiens cfaerefaeot
en vain k a'opposer a eette fiision ; maia
Cblapowaki et Gielgud interposentleur
autorit^, ordoenent aux aoldata de
nster en place, et pendant que lea in-
d^s baiaaeeot entre la aenritude prua-
aienoeetttnemortdeh^roa,les troi^
pea royales ae d^ploient aor le terrain.
Au milieu de cet efifroyable diaoa, on
quelquea grandes dmea , en rdvolte eon*'
ire les trutres, lea meoaoea, Tattente
et la mcnrt , aacriflent un tenms pr^eux
i la d^ivranoe de lenrs fireres, quel-
quea voix d^ignent les dieft a leor
rengeanoe. De rimmenae ooloone qui
ae meut k deux pas de la fronti^e ae
d^tache , le piatofet au poing , le propre
aide de camp de Gidgod, Skalski. II
Tole droit au groupe dea gtetonx,
arr^ aon cheyal k ringt paa d'eux,
lyuflle Gielgud, et I'^tend par terre en
iui jetant one nial^ictioD. Cblapowaki
a'evuit et ae cache au milieu de aes
lanciera; mais ae royant en butte k
toutea les imprtoittons, il demaade
asile aox aiitorit^ prussiennes, qui
Itti formeot ua cortege. A rinstant
mime, Panri^ra-garde aig^nale Tappm*
cfae de Temiemi. Lea oflfciers du corps
de Robland raraaaaent lea pek>tona de-
baad^ et ordonnent la retraite.
«Le oorpa, bria^ par tant da mi*
adras et de dteptions, niarcha eoatl-
nuellemant powrsuivi uuqai'k Nowo*
Miaato t li il fit Toito*&tce, et ae battit
pendaat toate une joom^e. Arrivie k
i>ekilci^, k coloane ai^raod toot k
eaop que la diviaioa Kreuta, d^tach^
de la grande armee, s'avance d^ par
la route de Marioupol, et ra ooouper
la ligae du Niimaa. Jorborg ae trosH
vait dgalenaent au pouvpir de rennemi.
Troia joora auparavant, oo aurpit pa
/
676
L'UNIVERS.
trouver une issue de oe edt^; aiors la
chose devenait impraticable ; le temps ,
perdu en perfidies de la part des g^ii6-
raux, en incertitudes oe la part des
troapeSf en temporisatton de la part
de tons, avait tu6 Tinsurrection. Le
corps de Rohland mit le pied sur le
territoire prussien , a Packen-Mohnen ,
an nombre de quatre miUe hommes,
de deax roille cheyaux et de vingt pieces
d*artillerie. Chlapowski avait Hi de-
sarm^ avec deux mille hommes et douze
cents chevaux. Trois mille iosurg^
^taient rentr^ dans leurs foyers, et
trois mille autres paroouraient encore
les for^ts et les martoges , faisant une
guerre d*extermination k Tennemi. 11
ne restait done sous les armes d'autres
troupes r^lto oue celles de Dem-
binsdl : leur nomore excMait a peine
quatre mille hommes, et ils n'avaient
pour toute artillerie que six pieces de
canon. » (Mi^roslawski.) Nous ne sui-
vrons pas ce general dans sa retraite
p^illeuse. II avait eu I'idee de se jeter
en Gourlande, mais la hardiesse ae ce
projet effra;^a ses compagnons d'ar-
mes; alors il resolut de s'ouYrir un
passage vers le royaume, en tournant
w ilna et Lida , toujours |>oursuivi par
des forces sup6rieures, ^vitant les ren-
contres d^isives, et ranimant qud*
quefois le courage de sa petite troupe
par des suco^ inesp^r^s. Les obstacles
que lui opposaient les locality ajou-
taient h ta aifficulte de sa retraite; mais
ces mtoes obstacles arr^taient la pour*
suite des Russes, dont les mouYements,
coordonn^ k une roarcbe r^uliere^
^taient plus difficiles k ex^cnAer que
ceux d*un chef de partisans , qui n'a vait
d'autre but que d'^apper au r^seau
de baionnettes qui Tenvironnait. I^e 26
iuillet, il entra dans la for^t de Bia-
lowies, solitude presque impraticable^
travers6e par quelques rares sentiers.
Un faible renfort que lui avait envoys
Skrzynecki le rencontra k Rudnia le 3
d'aodt : ces deux corps r6unis rentre-
rent k Praga.
Nous avons cm devoir donner quel-
aoes d^doppements a ces Episodes de
rinsurrection polonaise, pour mon-
Irer quelles ^taient les ressources des
provinces r^voltto, et par quel cou-
cours de circonstances la lutte concen-
tric dans les palatinats du centre per-
dait de son Anergic, k mesure que le
gouvernement essayait d'agrandir le
tb^tre oilk se vidait la querelle de la
liberty. Cette marche etait conforme
au voeu national , qui comprenait ins-
tiuctivement que fa resistance, poor
^tre efficace, oevait s'organiser s^rieu-
pr^voyaient que ces expeditions excen-
triques, loin de pouvoir r^tabiir Tequi-
libre entre les parties bellig^rantes, ae
feraient qn'^nerver les ressources des
palatinats de la Pologne de 1815. Ils
eurent un tort, celui de supposer que
Nicolas consentirait k traiter avec des
rebelles; mais on ne pent leur faire un
crime d'avoir compte sur la coop^;
tion de TOocident, a une ^poque ou
une saine politique conseiUaii a la
France et a TAngleterre dUntervenir
dans ce grand ddfiat. Ces puissances
agissaient alors sous rinfluence des n^-
cessit^ qu'elles s^^taient cMes. Louis-
Philippe voulait r^rganiser fortemeot
la monarchic, avant d*exposer aux
chances de la guerre la jeune royaut^
de 1830; TAngleterre guivait d'un oeil
inquiet toutes les demarches de sa ri-
vale 6mancip^, et se r6signait plutot
a voir la Russie retablir les limites du
traits de Vienne, qu'elle n'^tait dispo-
se a fi^reractivement dans une lutte
a la suite de laquelle la France pouvait
redevenirpr^pond^rante. QuantaTAu-
tricbe et a la Prusse, le rdle au*elles
avaient k jouer ^tait dict^ par les cir-
constances elles-mSmes : la resurrec-
tion de la Pologne devait ruiner t6t ou
tard toute T^nomie des partages,
sans qu*il fQt possible de pr^voir ou
s*arr£terait la fimite des restitutions.
II y avait done pour ces puissances
toute probability d*un moroellemeot
de temtoire, et en outre une question
de principes qui ne leur permettait
guere d*adopter une autre iigne de
oonduite. On peut lyouter k oes consi-
derations que repuiseonent oii la Russie
•e trouvait k k suite des guerres d*0-
RUSSIE.
577
Titttetdes efforts qu*ellefaisait en Po-
kpKt la rnettait pour quelques annto
tored*6tat d'inqai^ter FAlIeinagne.
Rcnortons maintenant nos regards
nr varsovie, et reprenons ie fu des
^T^nemeDts k partir de la d^route
d'Ostroteoka. Le prinoe Czartoryski,
apcte avoir reqa tes deptehes du ^&
oMissime , convoqua les quintumvirs
pour delib^rer sur les mesores k pren-
dre dans les drconstanees pr^ntes.
La majority fiit d'avis que le g^era-
lissime avait l»en m^rit6 de la cause
commune, et qu'on ne devait pas le
rendre responsable des malheurs pu-
blics. Cette g^^rosit^ d^g^n^ra meme
fo affectation; les repr6»entants alld-
reot le troo ver k Praga , et chercherent
daos rbistoire ancienne des analogies
pen applicables a la situation. Skrzy-
necki, pr^ojant peut-toe tous les
embarras qui allaient surgir, choisit
ce moment pour essayer d^tablir une
ooaveUe forme de gouvemement. Les
Qos deroandaient 1 abolition du quin-
tiim?frat en faveur de ladictature; les
autres pensaient que le gouvernement
poufait snfBre aux n^cessit^ du mo-
niait; quelqoes-uns demandaient un
ni; ki m^ntents critiquaient tout;
gaant^rarm^, peu lui importait la
ronne da gouTernement ,pourvu qu*elle
edtoacb^pourlaconduire h Tennemi.
La guestion de la r^forme ^tait d'au-
tant plus intempestive, qu'elle rnettait
a nu tontes les exigences des partis,
en montrant k la nation que runit^
de Tolont§ et d'action n'^it nuUe part.
Les non-r^formistes Temporterent a
one faible majority, et le quintumvi-
rat , ^ise par cette derni^re secousse ,
fat n&nmoins conserve. Mais r^ner|ie
rerolationnaire, r^uite k se replier
sor elle-mtoe, n'attendait qu*une oc-
casion favorable pour formuler nette*
nent ses voeux; il toit facile de pr^-
Toir qu'une fois resum^e dans un chef,
die ne tarderait pas k agir. Les
forces de la Pologne ^taient oonsid^-
rabjement r^doites; raite de Tarm^e
ctait tombee dans les champs de Wa-
ver, de Grochow et d'Ctetrolenka;
dependant elle pr^sentait encore un
euectif d'envirott quarante mille hum-
37* LioraUon. (Kusste.) t. it.
mes sous Varsovie. Les corps exp^-
ditionnaires , les garnisons de Praga,
Modlin et Zamosc , doublaient a peu
pres ce nombre. On voit qu*elle ^tait
encore en ^tat de faire face a Tennemi ,
oioique la d^oralisation , Tabsence
de chefs experiments et TafQuence des
nouvelles lev^ fussent autant de
chances en faveur des Russes. Heu-
reusement pour les Polonais, Diebitscb
ne sut point profiter de ses nvantages;
la marche ae Gielgud en Lithuanie
avait absorb^ toute sou attention.
Graignant de compromettre son cen-
tre, k I'instant ou ses flancs etaient
menace, il d^tacba des renforts pour
couvrir ses ailes, et, au lieu de |K>ur-
suivre une guerre d'initiative, il se
renferma dans les limites d'une guerre
de syst^me. Le cholera exer^t de
grands ravages dans les rangs mosoo*
vites; le feld-mar^hal , d^vor^ de sou-
cis, demanda, dit-on, son rappel, et,
pour s*etourdir sur les suites proba-
bles d'une disgr&ce, il achevait de
ruiner sa sante nar des excS de table.
La mort du fela-marechal a et6 diver-
sement interpr^t^e; on a et^ jusqu*li
dire qu'il p^rit empoisonn^ par le g^-
n^al Orlof , 9ue 1 empereur avait en-
voy^ en mission au quartier g^d^al
de Pultusk. Cette supposition n'est
appuy^ sur aucun indice; d*ailleurs
Tempereur, pour Eloigner un ch^dont
il etait m^ntent, n'avait pas besoin
de recourir a un moyen inflme; il
pouvait purement et simplement le
remplacer ; mais I'esprit de parti adopte
de preference les interpretations les
plus odieuses, et les regarde oomme
demontrees par cela seul qu'elles sont
possibles. INous croyons done, avec le
grand nombre, que Diebitsch d^j^ ma-
lade succomba, apr^s une or{;ie, k une
attaque de cholera. Le 11 juin, Toll
prit provisoirement le commandement
de larmee, et bientot apres Orlof
partit pour Minsk , odi se trouvait le
grand-due Gonstantin. Par un jeu bi-
zarre de la fatalite, le prince mourut
de la m^me mani^re que Diebitsdi, et
la dud^essede Lowicz le suivit de pres.
C^e coincidence de la mort de Gons-
tantin avec la visite d'Orlof acoredita
IS
n
578
L'UNIVERS.
le soupoon que la politique n'avait pas
recul^ aevant un double crime. Si la
contagion edt Arapp^ simultan^meat
des milliers de Tictimes, personne
n'edt imaging d'attribuer oe dtostre
h des causes sornaturelles; mats elle
yeoait d'atteindre un prince et nn feld-
mardcbal Un homme. portant le
m^me nom que lea instruments trop
c^l^res des vengeances Imp^riales, se
pr^sentait aux soupfons, et dds lors
Orlof fut le bourreau , et Nicolas avait
dict6 la sentence.
Les bulletins poropeux de Diebltsch
avaient longterops donn^ le change
aux Russes sur les r68ultats t^tables
de la campagne; mais quand on Tit
que les choses tratnaient en longueur,
quand des rapports plus exacts sur les
pertes de Farmde d^mvasion et sur les
temporisations du feMnnar^al eurent
dtssip^ tous les doutes, le parti russe
murmura hautement, et attribua le
mauvais succ^ h Timp^tie des chefs
presque tous Allemands. L*empereur
n'ignorait pas que les traces du m^
contentement dont la r^volte de di-
cembre 18S5 avait signal^ Texistence
k son iv6iiement au tedne n'^taient
as enti^rement effacto. Un ^ec
d^nsid6rait en Europe et aux
yeux de ses propres eujets; II fellait
vaincre h tout prix; il fallait flatter
ramour>propre national en confiant a
une c^lmite militaire incontestable la
direction de cette guerre opinilitrp;
Paskevitch portait un nom russe; h la
fois homme de t^te et d*ex^cution,
encoredans la vigueur derdge,entour6
du prestige de ses victoires en Perse,
il pouvait mieux que personne r^parer
les fautes du feld-marechal. L'emperear
rinvestit du commandement en chef
de ses armies. Le e^neral Toll , n'osant
assumer sur lui la responsabilit^ de
guelques nknivementsdecisif s, se boma
a completer les cadres de Farm^, k
retabltr la discfpline, el ^ se tenfr sur
une defensive respectable. Le gfotel
Riidiger se trouvait h Lublin , entidre-
ment coup^ du eentrs de rarm^
russe. Skrzynecki r^oiot de Tattaqoer
k rimprovisle. Rudiger fgnorait en-
ti^i^ement ies intBnli6nB de Tennemi;
S
mais les Polonals perdirent an temps
prtefeux, kigfrbneni lears cokmnes
d'attaque , en les diss^minant dans Tes-
pace, et les corps destine k s'appuyer
mutaellement agirent sans cet eflsem-
ble qui seul peut (aire riussir an ooap
de main. Imibs Polonals battirent en
retraite devant ks forces que lesRusses
avaient eu le temps de tear opposer,
et Ton s'estima trop beureax d^ediap-
per II Tennemi qa'on s'^tait flatty de
surprendre. Les chefs se renvmient
de run k Tautre la responsabilite dece
non-suoc^, etce fut le signal des
animosit6s penonnelles qai bientdt
devafent paralyser tous les efforts de
rinsurrection.
Cependant le peuple de Varsovie,
danger aux sobtilites dialectiques de
la presse, entrafne par les m6coDtent8 ,
qui) k dfifiiut d'on suoces national,
voalaient au moins se donner le plaisir
de renverser leurs antagonistes; le
peuple, disons-nous, se croyait trahf ,
paroe qu'il ne comprenait point la
marche d*un goavemement qoi oscil-
lait lai-mteie , obi^issant aux D6oes8it^
que lui tmposaient les ciroonstances.
Au milieu de cette agitation, la qou-
velle se r^nd qoe le gien^ral Jao-
kowski vientde laisser ecfaapper Ro-
diger. La fiireur du peuple s'accrott
du mteontentement de Tarm^e. Jan-
kowski pr6tendait avoir roea I'ordre
positif de recaler, eeqai rendaitSkny-
nocki res^nsable de I'^vt^nement. Le
public 6tait dans Tattente, lorsque ia
rdv^lation d'un oomplot d^tooma Tat-
tentlon g^ndrale. On de? ait distrilnier
des armes aux prisonniers russet, fatre
sauter rarsenal , et ouvrir les portes de
Vartovie k Tennemi , tandisqae Pannde
serait absente; on accasait prindpale*
ment Jankowski etKxukowiedu , ainsi
que quel^Ms agents secondaires. Phi-
sieurs arrestations eurent lien, et dMk
le people, Aisant entendre des cris de
vengeance, s'attrotipait devant les de-
meares des suspects. Le cok»d Hur-
tig, d6ohir6 par oes ftirieox, fut Mir
le point d'toe pendn k ane lantcme.
On demandait ii grands oris •« dtait le
trattre Jankowski; il fattut ptomcttre
au peuple qo'on le hii ansteeratt
RUSSIE.
679
deUi. On n*a jamais su d'une manidre
biao posilive a'il y avait eu reeijement
oomplot ; on acquit seulemeot la preu ve
fue les priaonniera oorrespoodaieDt
avec plasieurs prisooniera du dehors;
qieoastance que leur position expli-
quait aaaez naturallamcDt. On croit
g^D^raleoieiit que Skrzynecki pr^ta h
ces re?^tioiis une importance exa-
g(ir6s , pour eoTelopper Jankowski dans
Qo Dfoete de l^se-nation; ce <]ui I'em-
plcnait de s'expiiquer au sujet de sa
retraite devant kudiger . Le 1*' juiliat,
lur la motion de Szaoiewski, la dtete
adressa au gouveroement exdcutif Tor-
dre de declarer la patrie en danger, at
de prooeder k la lev^ en masse de tous
les bommes eu ^tat de porter ies ar<»
nies. En vertu de cette r^olution, le
^uveraement fit parattre la proclama-
tion suivante : « Au nom de Dieu et de
la liberte, au nom de la nation plac^e
entvtt la vie et la mort, au nom des
rois et des h^ros vos ancJItres qui sont
tomb^ sur les champs de batailie pour
rind^^endanoe de 1 Europe, au nom
dea gei»6ration8 flitures qui demande-
root k vos ombres compte de leur
^rvitude, au nom des peuples qui ¥Oos
contemplent, Polonais, le?ea-vona en
Cette roesure ne prouvait rien autre
chose siaon que linsurrection ^tait
a Fagonie. Les enfants et les vieillards
r^poodirent seuls a Tappel ; la Pologne
tout entiere se lerait pour frapper ua
dernier coup et mourir.
Orlof s*^tajt rendu k Berlin pour
deveiopper les plans de Kicolas et io-
teresser la Prusse, qui ddsirait vive-
naent voir riasunrection ^touf£6e. «I1 fut
oonvenu , dit-on, entre Orlof et Ancil-
Ion, l^^queRcenigsberg et Dantzig se-
raient ouverts aux approvisionnements
et aox troupes que la Russia, ooup6e
du rojraume par Tinsurrection lithua-
nieone, serait obligee d'envoyer par
la Baltique; la Prusse se chargeant de
tbiimir les bdtiments et les escortes
ntoKaires poor leur faire remonter le
tiicmen ellayistulejusqu'alafirontiere
du royaiune; 2* ^e la Prusse s'en-
Tsgesit a conatruire un pont sur la
rjstide, k la limite la plus orieotale
f
de son territoire, aftn de faciliter aoK
troupes tsariennes le passage du fleu ve ,
dans le cas ou ceux que le g^ral russe
ferait oonstruire se trouveraient .4le>
truits ou insufOsants : la Prusse resiiMit
charge de fournirles pontonniers, les
embareations et les equipages n^ces-
saires h toutes ces sortes de travaux;
3"* que la Prusse abaiidonnerait (urovi-
soirement Thorn comme ma^sin et
entrepot a Tarm^ russe. se reservant
d*ailleurs d'v ameoer dans le plus
prompt delaf les provisions de bouche
et de guerre que demaodait Tarmde
alli^ ; 4° quedans lecas d'une d^ite ou
d^une extension de manoeuvres , le ter-
ritoireprussien serait ouvert aux trou-
pes imp^iales, etjusqu*au d^odment
de la campagne pourrait lui servir de
base militaire.
Aux r^lamations que lui adressd-
rent le generalissimo et le comte de
Flahaut, ambassadeur de France, la
Prusse se contenta de rdpondre qu*elle
n'avait jamais ii& neutre, mais seule-
ment inactive ; que ses sympathies pour
la Russia n'ayant pu etre douteuses
durant cette guerre entre la l^jptimite
et la rebellion, i1 n'y avaitpas a elle de
deioyaute a seconder les efforts de I'em-
pereur. (Mi^roslawski).
A la suite de cette conyention.
Tissue de la campagne na pouvait etre
douteuse. Paskevitch arriva au quar-
tier general de Pultusk dans les pre-
miers jours de juillet. Aussitdt il com-
muniqua aux generaux sa resolution
de gagner la basse Vistule h travers le
palattnat de Plock. Uarmee russe etait
refaite de ses fiatigues; elle comptait
encore plus de cent vingt mille hommes
sous les armes, dont quatre- vingt
mille enyiroa se trouvaient h Pultusk.
Le 4, Farmee s'ebrania, decrivant de
flanc une courbe immense, quil edt
peut-etre ete possible h Skrzynecki de
rompre pour se rabattre en force sur les
corps Isoies et en pleine marche. Ainsi
les troupes polonaises, retenoes par la
circonspection de Skrzynecki , attendi-
rent sous Yarsovie que Teonemi edi
concentre toutes ses forces, au lieu de
Tattaquer quand il etait vulnerable. Le
5, le generalissime trans£6ra son quar-
ts.
580
UONIVERS.
tier g^n^ral k Modlin. II 6tait encore
temps de se jeter h travers les corps rus-
ses : cette pens6e de salut avait irapp^
tous les gen^raux^ Skrzvhecki seui la
rejeta , atl6guant que s'ii perdait une
bataille rang6e, cen ^tait fait de la
Pologne. II est juste de reconnattre
que ce raisonnement ^tait fond^; mais
SI un d^lai servait seulement a rendre
d^sormais la lutte impossible, la pru-
dence du chef ^tait une faute et pres-
qu*un crime. Le 8 , toute I'armee russe
afHua sur Plock, et fit mine deyouloir
traverser la Vistule ; trois jours apr^ ,
elle d^passa Lipno , et s'^oula sur la
route o'Obrzvn, le long de la Vistule.
Ceux qui ont voulu expliquer Tobsti-
nation de Skrzynecki lui ont pr^t^ I'in-
tention d'attirer I'armde russe sur la
rive gauche de la Vistule pour lui
couper toute voie de retraite, et la
combattre au centre m£me des pro-
vinces insurg^s, avec les forces r^u-
nies de la Pologne; mais on a r^pondu
que la Prusse s*ouvrait h Paskevitsch
en cas d'une d^faite, et quMl n'^tait
pas n^cessaire de sacrifier les incidents
qui surgissaient de la marche de flanc
aes Russes , pour attirer le comte d*£-
rivan sur un point otlt il se portait de
son plein gr^.
Gependant Paskevitsch avait laiss^
plusieurs corps d'observation en face
de Tarm^e polonaise; celui que com-
mandait Golovin fiit surpris , et, apres
une perte assez considerable, ^chappa
k une destruction totale. Pendant ces
operations excentriques, on apprend
?|ue Paskevitsch a pass^ la Vistule; il
allut se replier en hdte sur ies pre-
mieres positions, et Rozvcki profita
du desordre que Tattaque des Polonais
avait jet6 dans les corps d'observation
de Tennemi pour avancer en Lithuanie ,
k la rencontre de Dembinski , qui ache-
vait alors sa perilleuse retraite.
Les Russes avaient jete sur la Vis-
tule un pont en face du village d'O-
sieck. Le corps de Pahlen le franchit
le premier; enfin, le 19 au ^oir, les
quatre corps de I'armee imperiale se
trouv^rent transport's sur la rive gau-
che du fleuve. Le feld-marechal attira
siiccessivement k lui les different!
corps qui n*avatent point suivi le moo*
vement general , et son activite se oom-
muniquant aux chefs, ses differentes
marches s'opererent avec autant d'ba-
biiete que de promptitude.
Penaant que la manoeuvre bardie
de Paskevitsch changeait brusquement
toutes les combinaisons de cette cam-
gagne, le generalissime re^it de Se-
astiani des communications rassu-
rantes. Le ministre franqais parlait
de negociations entamees, annon^ait
une issue prochaine et heureuse aux
efforts de la diplomatic, et conseillait
de se tenir sur la defensive. Le parti
des conservateurs aocueillit avidement
ces nouvelles, mais le plus grand nom-
bre n'y ajoutait aucune foi. L'inoer-
titude, si crudle quand on a devant
les yeux la mine et le desbonneur, fit
place aux murmures. Les chefs ioter-
pretent en sens divers la conduite du
generalissime, et, le 24 juillet, ladiite
ecrete k Funanimite que Skrzynecki
comparattra devant un conseil com-
pose des membres do gouvemement
national , d'un depute pour chau^e pa-
latinat , et d'ofiBciers de Tarmee active,
choisis par le gouvemement d'une part,
et le generalissime de Tautre. Le ge-
neralissime lui-meme comparut non
comme accuse, mais comme membre
du gouvemement, devant ce conseil,
compose des plus grandes illustrations
du pays. D*abord Skrzynedu pretendit
avoir le droit d'imposer silence aux
generaux places soas ses ordres, sdoo
la bierarcnie militaire. Get avis, qui
presupposait un poovoir inattaquable,
tandis qu'il s'agissait de le contrdler,
ecarta raccusation que Prondzynski
avait T6difie contre les operations du
seneralissime. II ne s'agissait plus que
de s'entendre sur les mesures k prenore
k Tavenir. Dans cette discussion, ou
les orateurs ceddrent la parole aux ge-
neraux, le parti energigue TemporU,
et il fut decide, mal^re les represen-
tations de Skrzynecki et de ses adhe-
rents, qu*on marcherait k J*ennemi.
« Eh bien , messieurs , tear dit-il , puis*
que ni mes prieres , ni mes repugnances
n*ont pu ebranler vos r^mtions,
puisque representants et sendraux dt-
RUSSIE.
Ml
BOBdent one bataille daos ta^uelle w
rMDent ou p^rissent h jamais toutes
lesesp^ranoes de salute soit : la bataille
sen liTite. L'annte et son cbef ont
eoeore du sfflog k verser pour Tind^-
pmdancft nationale, et ce sang, ils le
r^pandroiit jiisqu'^ la dernidregoutte;
dabs trois jours tout sera fini... mais
je declare, k la iiaoa du del et de la
terre, qae j'agis oontre ma oonvictioo.
ReprMDtants ! oue les bto^ctions ou
Tanatfatoe, que le triomphe ou les d^
sastres retombent sur vos t^tes, car,
pour moi , fen rente toute la respon-
8aliiiit6!»
On enit prudent de ne point laisser
traospirer dans le public ropinion du
eeo^ralissime sur Tissue de fa guerre;
la d^l^ation se oontenta d^assurer k la
ifiete que tout aliait aussi bien que le
pometlait Vistat des cfaoses, et les re-
pr^sentants s'endormirent de nouveau
dans una insoudante confiance. Skrzy-
necki ooneentra Tarm^ , et la fit avan-
eer sur la Bzura. U 6tait visible qu*il
n'exfoitait que mollementdes mcsures
qo'ti arait condamnto. Le 3 aodt, il
anriTa au camp de Sochaczew. Les
Eusses avan^ient toujours, et, du 3
an S , ils tra?crs^rent la Bzura. Centre
Fattcnte gto^rale, le 5, Tarmte polo-
naise se replia vers Varsovie; on crut
que Citte disposition ^tait Tavant-cou-
rnir de la bataille que le g^n^ralissime
avait solennellement promise. Skrzy-
' necki ftit, dtt-on, sur le point de se
dteettre de ses fonctions; mais, en-
courage par ceux qui esp^raient que
toot se terminerait sans effusion de
sang, il cooserva son poste, et mit
Boe esptee d'h^roisme k braver la cla-
meor gj^n^rale. Le m^ntentement
des habitants de Varsovie puisait une
oooydle ^ereie dans celui de Tarm^e :
OD disait toutnaut que les cbefs trabis-
saicot, qu'ils entretenaient de coupa-
Ues correspondances avec Vennemi;
et oes propos r^p^t^s enflammaient les
patriotes. De cet ^t k une r^volte
oQverte, il n'y avait qu^unpas. Cepen-
iant Dembinski rentrait dans la capi-
taJe, qui saliiait son retour comme un
triomphe. On crut voir en lui Thomme
(fts orconstances, le successeur de
Skrzynecki. Le prince Gzartoryski hil
Sr^enta, dit-on, un tableau sombre
e la situation de la Poloene; il attri-
bua k la malveillance et ^ I'intrigue la
haine que I'on portait au g^ndralissime ;
et oe nit sous rinfluenoe de pareils dis-
oours que Dembinski, trop gto^ux
pour profiter d'un caprice, se dirigea
vers le camp de Bolimow, oQ toute l%r-
m6e polonaise s'indignait du repos
qu*on lui imposait. L'entrevue auMl
eut avec Skrzynecki le confirma aans
sa r^olution de roister au voeu g^-
n^al, oui le dteignait k rhetmanat;
et, d^s lors, il se It un point d'hon-
neur de d^fendre contre tous la con-
duite et les talents de Skrzjmecki.
Dans son emportement cfaevaleresque,
il ne m^nagea personne. A Tentenare,
toute la Pologne ^tait coupable de ne
pas appr^cier un homme tel que le g^
n^ridissime; enfin il d^ara hautement
qu*il mareberait sur ses traces : il fut
nomm^ divisionnaire et gouvemeur de
Varsovie. Dans ces hautes fonctions ,
il crut faire aete de bon citoyen en at-
taquant violemment dans »ea discours
Lelewel, Pulawski et leurs nombreux
partisans.
Sur ces entrefaites, Rudiger passait
la Vistule; ce mouvement, en iso-
lant I'insurrection des provinces du
sud, lui portait un con^ mortel; tou-
tefois Rozycki parvint a se jeter sur
les derri^res des Russes pour les in-
qui^ter, et paralyser les resultats de
leur cooperation. II combattit coura-
Heusement dans plusieurs rencontres;
mais, press^ par des forces sup^rieu-
res, il se vit oblige de s'enfoneer vers
le sud. Rudiffer, d^arrass^ de toute
surrdllance de ce cdt6, s'^tablit soli-
dement sur la Radomka, et, joignant
I'aile droite de Paskevitch, complete
rinvestissemept de Varsovie et de Tar-
m^ polonaise, tonjours inactive dans
les champs de Bolimow.
L'opposition parlementaire repre-
nait une pr^pona^rance factice au mi-
lieu des Qoutes et de Tagitation g^n4-
rale. Les partis de Lelewel et de
Bonaventure Mtemoiowski , qui repr^
sentaient les d^ocrates et les consti-
tutionnels modifi^, se fondirent et
682
UtJfNiVERS
8*oi]^attMr«iit en clvte ; ils rtolurent
de taire nommer une nouvelle com-
iiiisn(in d'enqu^, k Peffet d'examiner
la conduite de Sknynecki , et au besoin
de lui dter te eomitiaddemeDt. La di^e
adopta oette mesure ^ et la d616gation
charg6e de aes ordres fut mume de
sim pcuvoirB. Dans le cas ou die
rait la destitution du g^n^ralissime
ssaire, elle devait proceder a la
nomination d*un nouveau chef mili-
taire. Le parti de C2artoryski ?it avec
frayeur qne les cboses s'acbeminaient
Ten un d6no()ment energiaue. Dans
Unapuiaaance de r^sister de front 2i une
mesure adopts ^ il essaya, du moina^i
d'en paralyser le r^oltat , en faisant
tomber le cboix sur Dembinski , ce qui
aroenait un cbangenient nominal , et
non undiangeuRntde systeme. Skrzy-
necki , dans son tnterrogatoire , mon-
tra beauoonp de jgrandeur et d'abnega-
tion; mais, soit pour expliquer sa
condaite, aoit oonyiction r^Ie, il
avoua que la disproportion de la lutte ne
loi laisaaitaocnneesptence, et il con-
■eilla Itti-m^me d'^lire a sa place Dem-
binski , se r6servant de oombattre pour
la patrie, fQt-oe dans le rangdes simples
grenadiers. II serait difficile de dtoire
w trouble etles agitations qui , de fas*
aembl^ delib^rante, se communique-
rent alorsi rarm^. Eniln, il fut d^cid^
oue Dembinski prendrait le comman«
dement |Kmr trois jours , et soumet-
trait cette Election a la di^te, qui , au
bottt de oe lerme, Tannulerait ou la
ratifierait d^finitivement. A rinstant
de perdre son chef^ Tarmee, si exi*
geante oagute , s'^mut , et ne se sou-
vint phis que du m6rite qtt*il avait
inontr6. « A la vue des deux g^n^aux
out, suivis de l*^tat-major , venaient
du ouartier g^n^ral , nne rumeur d*at-
tenorissaraent ^lato dans les rangs.
Le oort^e, arrM devant la premiere
brieade , ouvrit un passage a Skrzy-
newi, et un long Tivat i'accueillit sur
toute la ligne... «Gonipagnons, s'toria-
t-il , je votts prtente ce fameux ^kk6-
ral Dembinski, qui, seol panni les
Gbefii de rarm^e lithuanienne , fidele h
la cause nationale , a sauv^ vos frdres
de la servitude , et les a ramenes cou-
▼erts dtf gloire dans les rours de notre
capltale. Fort de la reconnaissance de
ses compatriotes , ^aiement puissant
par sa popularity et ses vertus, ad-
mire de mes g^ntoux et de moi-m^e ,
hii seul peut encore vous oonduire h la
victoire. Dodies au cboix de tob re-
pr^sentants, 6alues4e Totre chef« et
reportes sur lui Tamonr et le d^voue-
ment que yous m*avez prodigues. Vive
notre g6a€ta\ Dembinski ! » Les aol-
dats r^ondirent par des exclamations
que dominait ie cri g6n6ral : « Yire ii ja-
mais Skrzynei^i. • Mais rex-gteeraiis-
sime r^prima cet 61an , et , mtiarnt la
priere au reprocbe , ii se diSroba aux
regrets et k I'admiration de aes frdres
d'armes. Dembinski hii tendtt la main ,
promit d'imiter un homme qui empor-
tait de si ^datants ttooignages d*es-
time ; et cette marque de syomatfaie et
d'abn^ation excita des appUudiase-
ments unanimes. Skrzvnecki prit oio-
destement ie oommattuementdu corns
de reserve; Ramorino et Uminski
furent plac^ k la t€t6 des deux'0c»rps
d*ann^. Lubienski conserra la chait^e
de chef d*^tat-major, et Prondzynski ,
quoiqu*^ regret, reprit la charge de
ouartier- mattre. La diete connrma
1 oeuvre de la dd6gation : tout annon-
^it une crise decisive. Mais les Varso-
viens , m^ntents de ce qoe rhomme
qu'iis avaient cboisi edt annooc^ bau-
tement Tintention de marcher sur les
traces de son pr^tosseur, resolurent
de surveiller les deux geo^raux. La
diete, tant pour calmer 1^ inquietudes
des dimocrates qui redoutaient un
coup d'Etat militaire, oue pour tenir
en bride les pretentions de Dembinski ,
rendit le d^cret suivant : « 1* La nomi-
nation et la revocation du ^dneralis-
sime appartiennent desormais au ^ou-
venMAnent national ; S« le generalissime
cesse de faire partie du gouvemeraent ;
3" toutes les attributions accordees au
g6neralissime par le dtoet du 34 Jan-
vier, lui sont conservees, sauf les
modifications que dans la suite la re-
presentation nationale jugerait neces-
saires.
On etait au 14 d^aoAt , et dej^ Tar-
mee dePaskevitcl) s^avanqait , ct forfait
RUSSIE.
&83
ies Polooais k la retraite , efaerchant
k Mbordtr leor gauche oomuiandte
par Ramorino. Bans TintMeur de fa
TtUe, le moorement des esprit sem-
Uait aussi annoncer one erise. Le dab
ie la Redoote, dont Leiewel 6tait
rime, reprfoentait aisez fid^lement
Ies girondios de la r^volation fran-
^aise; Ies bommea de oe parti dM-
raient one rtforme prompte et radi-
cale; inais, s'eDTeloppant de theories
tnaaiBiasables pour la multitude, ils se
pivatent ainsi de tous Ies ^l^ments
eoergkiDes qui auraient pu assurer le
triomphe de leurs idto. D'un autre
06I6, Ies membrea Ies plus influents
de ee club, ^crivains, journalistes ,
avocata, n'avaient aueune prise sur
lea iTiiipathies de Parm^. Ainsi le
r^e ie phia important , celui gui pou-
▼ait rallier Ies m^ntentements popu-
burea , restaitli prendre : Knikowiecki
a^en empara. Sa haine contre Faristo-
cratie , son habilet^ k manier Ies pas-
stona du penple , Ies perstoitions qu'on
ne hit avait pas mdnagto , toutes ees
caiiaes rtonies lui permettaient de se
poser comme Thomme des masses.
Aa reste , il est assez difVcile de di-
dder si sa participation aux d^rdres
dv 15 fut la suite d*un plan raisonn^ ,
ou afinpfement roeuyre d*un homme,
qui , pour satisfsure son ambition , se
prKatt k toutes lea ciroonstanoes.
Sous le manteau du patriotisme, il
traTaiila k son ^I^Tation particuli^re;
et , comrae il oe pouvait r^ussir sans
fuiBer le parti anstocratiqoe, suspect
a la nniltitude, le quintumYirat qui
8*^tait laias^ d^order par sa Ulche,
et par oontre^soup tous ceox qui , dans
rarmte, d^siraient une capitulation
^ueleonque avec rempereur, il raliia
a sa cause Ies resolutions ^rgiques,
qui ne reculaient devant aucun mojren
pour rendre tout rapprochement im-
posaible. Panni Ies bommes k systtoe,
Ies mis I'aooeptdrent comme instru-
ment et comme ntossrU transitoire ,
tandis mie lea autres voyaient en lui
le dictateur indispensable. Les officiers
m^eontentS'Ct sans service actif, qui
pollolaient dans Yarsovie , et les clu-
bhsUs qui entretenaient de secretes in-
telligences avec Tarmee. ^tendaien)
I'influence de Knikowiecki jusque dans'
les camps , de sorte qu'il tenait k h
fois dans aa main et le peuple de Var-
sovie et la majority des soldats. La
garde nationale, kmctemps efface,
avait repris une sorte de Civeur dcpois
les dtestres militaires ; die reprwen-
tait la bourgeoisie , et son appui n'toit
pas a d^daigner. Ostrowski, qui la
commandait , fut facilement entrain^
dans le parti do gouvemeur. 11 ne rea-
tait plus a Knikowiecki qu*^ s'dever
au - dessus de tous ses adherents , et
k Ies dominer par quelque acte de vi-
gueur ertraoroinaire. Tel ^tait F^tat
des esprits, lorsque le quintumvirat
s'assembla pour donner defiuitiTement
un chef k I'arm^. Le prince Czarto-
ryski essaya d'aboird de fkire toraber
le choix sdr Dembinski ; mais, royant
I'doignement que oa g^n^ral inspurait
aux hommes influents et aux masses ,
il appuya Tdection de Prondzynski.
Un roesaager fut imm^diatement en-
voy^ Il oe dernier poor Tinformer de
son dection. Mais Prondzynski refusa,
aliquant ^r motif Toppoaition con-
tinudle qui avait r^n^ entre lui et le
Sto^lissime. « II ne pouvait , disait-
, accepter une charge que aon rival
avait remplie sans parattre Tavoir dd-
poss^d, et s^attirer la haine et Ten-
vie de ses collies plus aneiens et
mieux connua que ku , jeune ofiicier
de la revolution. » En vain lui fut-il
objects que le salut de la patrie 4evait
remporter sur des considerations par-
ticuli^res , il refusa obstinement , soit
qu'il se senttt bors d*etat de maltrtser
toutes les intrigues de parti, soit
qu'initie a tous les secrets de Torgani-
sation de rarmde, H jogeflt impossible
de rdsister longtemps au fdd-mar6chil.
S'il faut ajouter foi aux r^vdations de
Dembinski , le jour mime oil il refu-
aait rbetmanat, il proposait k ce ge-
neral de transiger avec Paskevitch.
]Noue avons vu que Krukowieeki
n'attendait qu*un moment favorable
pour amener une crise, et formuler
nettement ses pretentions. Pour en-
tretenlr rirritaiion populaire , on rd-
pandait Ic bruit que Taristocratic
S84
L'UNIVERS.
reculait h dessein lejugement des pri-
sonniers , qu'elle affectait une iodul*
gence strange h I'e^ard des agents
russes. Le IS, 1^ midi > on r^pete dans
Its group^ que Dembinski marche
sar Varsovie pour soumettre le peuple.
Sudcjues jeunes gens d^l^{^^ par le
suple s'adressent au quintumvirat
pom lui fatre part de ses appr^n-
sions ; on leur repond que leurs craintes
sont Taines ou pr^matur^es , et ils re-
tournent au milieu de la multitude,
r^tant que les hommes d'etat recu-
laient devant le contrdle de leurs actes ,
et eherchaient h les entourer de mys-
t^e.
Gependant le canon grondait du c6t^
des-'barri^res de Woia et'de Jerusa-
lem. :Skrzynecki et Ramorino battaient
en retraite devant les colonnes de Ten-
nemi, qu'ils arr^tereot enOo apres
une Yigoureuse r^istanoe; Varsovie
^tait dans les tourments de Pattente.
Le pouvoir semblait s'^tre abdiqu6 lui-
m^me; la fermentation des esprits se
trahissait par de sourdes rumeurs ; il
restait toujours k nommer un g^n^ra-
lissime ; trois brevets conC6rant cette
charge furent remis au depute Swier-
kowski , avec ordre de s'adresser suc-
eessivement h Malachowski , a Prond-
Z3mski et k Lubienski. Lorsque le
depute montait en voiture, remeute
bouillonnait d^j^ dans la ville. Le
peuple, ne sacnant ta qui s'adresser,
courut aux clubs. L'abD<6 Pulawski y
prononca un disoours empreint de
toute Teneraie r^volutionnaire. Apr^
avoir aceuse Skrzynecki , Dembinski,
le quintumvirat et la di^te , « il de-
manda pourquoi le d^et contre Jan-
kowski et ses complices n*6tait pas
promulgu^; pourquoi Skrzynecki com*
mandait encore sous le nom de son
lieutenant; pourquoi le gouvernement
ne rendait pas au peuple compte de
sa conduite. £t il concluait en s'^ant
que le peuple , tromp6 par les hauts
ronctionnaires , devait aller e» masse
les interroger, mais avec la s^v^rit^
d'unsouverain m^ntentdeses agents.
On lui r^pondit par des oris : Marcbons
au palais! et, sur la proposition du
president Czynski, on lui adjoignit
trois oommissaires chargi^s de dtoon-
cer aux quintumvirs les ^riefe du peu-
ple. » (Extrait de Fhistoire de la revo-
lution de Pologne.) Tandis que les
commissaires rempUssent leur mes-
sage , et parent le temps en explica-
tions , la foule , press^e de son oeu vre ,
se ralliait autour de Krukowiecki ,' en
d6pit des mesures que Wengierski ,
gouvernenr de Varsovie , et Ostrowski ,
dief de la garde nationale , venaient
d*adopter en toute hdte. La foule as-
si^eait le ch&teau ou etaient enfer-
m£ les prisonniers ; quelques officiers
sans emploi se jettent au milieu des
masses , en s'dcriant : Mort aux tral-
tres ! les aristocrates a la potence ! La
garde nationale, apres avoir r^siste
quelque temps, et la ligne elle-m6me,
se joignirent au peuple, aux cris de:
Mort aux traltres, vive la liberty.'
« Le premier cachot qu*on enfonqa
fut ceiui de Jankowski : on le tratna
dans la cour, ou on lui fit subir un
court interrogatoire ; apres quoi on
lui enfon^-a plusieurs baionnettes dans
la poitrine , et on le pendit a TS d'un
r^verb^re. En expirant, le malheureux
protesta de son innocence , et r^peta
tout ce (|u'il avait declare lors de son
arrestation. 6on dernier soupir fut
une malediction contre Skrzynecki,
qu*il accusait d^avoir sacrifi^ ses pro-
pres amis. La corde s'etant rompue
sous le poids de son corps , on Tacheva
k coups de sabre. Son gendre, Bou-
kowski , fijt atteint et massacre a Tins-
tant oi!t , apres avoir saute par une fe-
netre, il cherchait k se giisser dans
les fosses du chdteau. Hurtig et Sa-
lacki furent tues dans leurs cachots ,
et leurs corps livres aux outrages du
peuple. Le cnambellan russe Fenshave
pent d*un coup de baionnette. Les
cadavres , depouilies de vltements et
baignes dans le sang, furent accroches
aux reverberes, et flotterent lourde-
ment sur les tetes des vivants comma
des drapeaux de terreur. »
Pour que cette scene de carnage (At
complete , madame Bazanow fut mas*
sacree dans son lit , malgre les larmes
de sa jeune fille. La foule, furieuse de
ses propres exces , se porta vers la pri*
RUSSIE.
M&
soo des espions. GepeDdant Rrako*
wiecki s*^tait rendu ati chateau ; 1^ »
ioform^ quMI se tramait quelque chose
de sinistrecoiitreDlusiearsparticuliers,
parmi lesquels ngurait fe confiseur
Lessel , dont la fille avait 6pous^ Vaide
de camp du g6n6ral , il courut h la mai-
son de son prot^^ , dijh assaillie par
les ^or^ears , et trouvant qoatre sa-
pons qui s'^taient introdaits l^s pre-
miers , il prit les quatre bouts de son
moochoir dans une main , et leur fit
tirer au sort h aui pa^erait la t^m^-
rit^ de tons. II nt fusilier immMiate-
meDt le malheureux qui avait amen6
lenceud fatal. Le peuple c6da devant
une dnergie qui defiait la sienne, et
coDtinua sa roate vers . les prisons.
Quelques-uns des meneurs , qui comp-
taient sur une journ6e complete ,
essayerent A porter le peuple au mas-
sacre des airistocrates ; mais les dis-
positions dies Yarsoviens qui se tra-
oaisaient en demonstrations positives ,
recolaient devant des crimes qui te-
naient k la combinaison d*un syst^e.
!^ous eroprunterons encore a riiistoire
de Mieroslawski le trait suivant, qui
proove oombien les masses r6volution-
naires passent subitement d*un ex-
trte I I'autre.
< doe des t^tes de la colonne qui ,
partie da centre de la ville , se r^pan-
dait deja vers Touest en quatre nou-
Tdles ramifications , enveloppa Photel
Lobienski. Un oflficier de quatorzeans,
qui manifestait une inconcevable f^ro-
Qte, la oondulsait. Un bomme en che-
mise et k demi mort de frayeur, que
Ton prit pour Henri Lubienski , s'em-
barrassa dans les ranes du peuple.
On le traf nait d^j^ au reverbere , lors-
qnt des femmes en larmes parurent
aa balcon , implorant la cl^mence des
menrtriers. Quelqu'un s'to'ia qu*il y
3vait erreur, et que le malheureux
n'^it pas le trattre Henri , mais bien
fionfrore Jean. On reldcha Jean, et
une autre voix demanda alors qu'on
^Mt dans la maison pour chercher
le Trai coupable; mais la multitude
s^ccrta que jamais le people ne violait
I*asile prot^^ par la samte pr^ence
des femmes polonaises ; et . lorsqu'on
▼it i la lugnbre dart^ d^ flambeaux
des pleurs sillonoer les joues des sup-
pliantes, et leurs mains s'^lever en
si^ne de gratitude « les t^tes se d6cou-
vnrent, et s*inclinerent dans un reli-
gieux et grave recueillement. b
Le peuple avait £ait mine de p^n^
trer de fierce dans la Banque; on lui
repr^senta que la propriety nationale
mit placie sous la sauvegarde de son
honneur y et il abandonna cette proie
pour aller s'enivrer de sang aux bar«
ri^res. Sur ces entrefaites, le gouver-
nement abdiqoa de fait. Leiewel d^-
daigna de se justifier devant ses
coliegues, qui attribuaient tons ces
^v^nements k Finfluence de ses doc-
trines. Leiewel n*6tait cependant au*un
r^volutionnaire logicien , incapable de
sanctionner la violence , mais la rap-
portant , par des raisonnements irr^
iutables, k un veritable principe.
Czartoryski chercha un asile dans le
camp; on assure qu*en traversant au
galop la barri^re de Wola, il entendit
une balle sifOer k ses oreilles. IJn seul
gouverneur, Vincent NiemoTowski,
affronta le danger, et resta a son
poste. Le minist^re se d^sorganisa,
et les r€nes de I'autorit^ flottaient sur
les ^paules robustes du peuple. Kru-
kowiecki saisit cet instant favorable ,
et se rend k Thdtel de ville , otk ses
adherents le proclament gouverneur
de la ville. De 1^ il court aux barrieres;
d^ja r^meute avait p^n^trd dans les
maisons qui servaient de prison li quel-
ques-uns des agents de la police de
Gonstantin. On les massacra sans mi-
sericorde; Krukowiecki, apr^ avoir
inutilement essay^ d'arrdter cette san^
glante bouchene, laissa tranqnille-
ment i'oeuvre s*accompiir, et courut
laire sanctionner son nonveau titre dtf
gouverneur de la ville par le quintum-
virat, affirmant gue, lorsqu'il aurait
Tautorit^ n^cessaire, il aurait bien^t
musel^r^meute. Vincent Niemoiowski
n*h^sita pas , k cette condition , de se
rendffe au voeu de Tambitieux vieil-
lard. Aussit6t Krukowiecki langa son
cheval au milieu des attroupements ,
et k sa voix tout rentra dans Pordre.
Pendant que ce simulacre de terreur
586
L'U«1VERS.
^UTantait VarsOTie , Zwieri&owaki ,
awec ses trois brevets en portefenille ,
esauyait soooessitement troia refoa.
Malachowaki a'excusa aur aon dge;
Prondzynski se renferma dans aea
premiers motifs, et Lubienski, qui
eisait siir un matelas jet^ dans un coin
de sa diambre, r^pondit qu'it ^tait
souffrant et bors d'etat d'assumer ia
responsabiiit^ de I'betmanat. II ter-
milla en denaandant poor toute gHloe
qa'on le laiaaflt tranquille. Le lenda-
main , les details de la nuit arrivirent
an qaartier g^n^rat. Skrzynecki, qui
redoutait plus les dangers d one 6nieute
que toute autre chose, abandonna Tar-
m^, resta cadi6 k Varsoyie jusqu*^
la prise de cette vflle , et plus tara se
i«ugia en Autriche. Le caract^ de
oet homme offre un melange extraor-
dinaire de fermet^ et d*h66itation , de
bravoure devant Feooemi, et d'ap-
pr^eosions mesquines devant tout ca
qui contrariait la marche politique
3u*il avait adopts. On Toit q|ii*il ^it
omin^ par I'ld^ ixe de Finf^riorit^
nuRi^rique de rarm6e polonaise, et
qu*il mettait toute son esp^nce dans
les n^^ociations ayec T^anger. S'il
se trompa dans ses pr^isions , la pos-
t^rit^ peut Tabsoudre , car l*int^r£t des
cabinets de Paris et de Londres rendait
probable une a^rieuse intervention.
On a dit de lui qu*il depensa , pour
perdre Tavenir de la Pologne, bean-
coup phis d'^nergie qu'ii ne lui en edt
faliu poor le sauver. L'histoire iron-
vera sans doute oe jugement trop se-
vere ; quand de nobles esp^ranoes
sont d^es , le regret se change trop
soovent en aecusation , et le malheur
est asshnil^ h ia trahison ou k la iai-
Messe.
Le lendemain de Tteeute il jf eut
eocore quelques massacres; raais la
CTlae ^tait pass^e, et quelaues nggi-
ments de oavalerie imposerent auz
torboieDls. Le dub s'assembla en tu*
molta, et ses prateurs, apr^ avoir
dMini toute responsabilite dans les
maasacres, parlerent tr^ an long sur
ce qu*il j avait h feire , et ne d&id^-
rent rien. Les quintumvirs tinrent une
conduite sembiable , et se disculperent
par une proclamation ; ils resohirent
ensuite de tenter un nouvel effort an-
pr^ de Prondzynski. Gegentolcon-
sentit k se cfaaiiger de Tbetmanat jos*
qu*au lendemain. Apr^s ce dernier et
st^le enfiintement, le quintumvint
proelama le jour mtae son abdica-
tion , dans les termes suivants :
« V^n^rable s^nat ,
« Illustre cbambre des rqpr^Mntants,
« Les soussi^^s , membresda gou-
vernement national , appel^ par vous
k cette haute magistrature, ont la pro-
fonde conviction d*avoir rempli leur
devoir. Ayant pour but unique le bieo
g6n^ral et la prosp^t6 de la sainte
patrie , ils se pr^ntent devant vous
a?ec une conscience pure et des noros
sans tache; mais, convaincus par les
derniers ^v^nements de la necessite
d'un cfaangement dans le personnel du
gouvernement , ils d^posent leur au-
torit^ entre les mains de ceux qui re-
pr^sentent la souverainet^ du peupte
et la majesty nationale. Afin , cepen-
dant , que la marche des affaires ne
soit pas interrompue , ils continueront
leurs fonctions jusqu'l^ ce que vous les
avez remplao^s. Son altesse le pr^i-
dent Adam , prince Gzartoryski ,
adhere k tout ce que nous avoos re-
solu k cet ^gard , par une iettre ^te
k Tun des membres.
« Signi : Vincent Niemoiowski,
Tbdophile Morawski , Stanislas Bar-
zykowski , Joachim Leievel. »
D^ormais la Intte n'extstait plus
qu*entre Dembinski, chef de ranMCi
puisque Facceptation de Prondsynski
ne lui donnait Thetmanat que pour un
jour, et Kiukowiecki, maftre de la
capitale. Dembinski usa bientdt son
autorit^ par des rigueurs intempes-
tives centre les dubisteset les meneure
de rteeute; il ne s'apercevait pas qu'il
afitrancbissait aon rival des seules en-
traves qui pouvaient eneore Tarrlter.
La di^te , k bout d*exp6dients , adopts ,
seance tenante , le projet suivant :
Artide i •'. Le gouvernement , cons-
titu^ par le decret du 28 Janvier, Btr^
a ravenir dirig^ par un pr^ent du
coHseil des ministres . k 1 Election do*
RUS6I£.
M7
S!i.
to ebambres prooMcront sam
Aitidt 8. Le prudent Domme leg
iRiaistres d«s six d^parteaitiits adtni-
aistratift. LeB mininNB B'aoront que
Yoa eoMUltatiTe dam le oonseil; la
pc^iidaot OQ aon remplafant aura aaul
fotz dtiiMrative. Toate ordonnance
dv prdsidoat sera rendua au nom da
gooTeraement national, conseil te*
ant, et darra dtre contre^ifnee au
noJBi Mr un des inittiatreB pnteents.
Artiae 3. En outre des attribatioas
sffedte au q^uintonBTirat, le prtei-
deat jOBira du droit de nommer le ^^
nm ca clief , et de oelui de faire
Artide 4» Ijm attributiona qui d^-
rireat de la cliarte constitutionnelle ,
conune la ddelaratioa de guerre et la
eoodonao dee traitda* reateut a la
diitc
Aitide 5. lies ebambres d^b^re-
nmt reonies jaaqn'a la d^livraaoe de
ia capitale , ^ oe pourront §tre proro-
66es 00 di&aoutes foe de leur propre
9^
Aiticia 6. L'eztoition du present
dtectesteonfi^au pr^ident du 86*
utetaamar^chal de la di^e.
Inkawiacki fut ^o pr^ideot k une
anode najorit^^ dte lors Dembinski
aMoaiia Bobtement toutea ees pr^
IcatioBS ', maia d^A aea mesures de ri*
gaeoronvera lea meoibres ioflueots du
dab iittriotique , qu'il avait fkit arra-
ter et meltre en ji^emeot , iui avaient
aliM praaque toutes leg sympathies.
Le prdsidoit plaida la cause des accu-
se, et obtiot aaus peioe lear ^iargis^
KBUot. Un de ses premiers actes fut
bdestitatioD de Dembinski , qu'il rem-
P^a par Malachowski. II donna le gou-
▼emcment de la capitale h Chrzanows-
JH , an des chels qu'on croyalt dispose
a Mter aveo Tempereur. Apres a?oir
BOBMBelesmini^es, il contera k Za-
iiwski le ooramandement de la garde
aHiaiiie; cette nouveile organisation
de tous les|>rol^taires ea ^tat de por*
^, ks anaes nernait d'utiliser les of-
fidensafisempioif et elle poovait garnir
les barricades de robustes d^fenseurs.
Nais Cfarzanowski, redoutant les con-
s^aeneea de oatte nieauM, pariFint li
persuader au prdsktent que la garde
urbaineserait phia dangereuse qunutile,
el elle fat dinoute.
Cependant Farmto palonaiae a*^tait
retireeeur Wola : d^ un dtochement
command^ par le colonel Legailois
avait M mas^; les Rosses envelop*
paient leurs adversaires, et leur sutm-
riorit^ aam^que, appuvte de Thabi-
let^ et de Pei^ieDce do feld*mar6dial ,
ne permettait guk« de ae faire Illusion
sur Tissue d*une bataille d^isive.
« Krukowi(M±i convoqua , le 19
aodt, on 0i;and oonseil de gnerre.
Troia avis diffferants fbrent ouverts.
Kmkowiecki propose d'acoepter la ba-
taiUe dana les plaines de Wola. Uminski
d^reloppa le plan de Prondsyoski. II
voulait q«*OB d^tachlt la moiti^ de
Tarrade , afia de battra Rosen et d'ap*
proviaionner Varaovie , avant de rece-
▼oir Fattaqae derri^re les lignes forti-
fides, d*o& i'on pouvait, meme aprte
un dcbec , se jeter dans les rues , et ,
h Taide du peuple, ddfendre pied k
pied les barricades. Dembinski enfin^
toujours dooHfld par son g^ie de par-
tisan, proposait d'dvacoer une ville
qu'il faudrait t6t ou taid cdder k la
torce et & la famine , et de transporter
la guerre en Lithuanie, en passant
sur le ventre h Rosen et k Golowin. v
(Midroslawski.)
Le plan d'Umioski fiit adopte. Ra^
morino, k la t£te de vinst miUe horn-
mes, recut Tordre de degager la rive
droite et d'aporovisionner Yarsovie.
Le corps expeaitionnaire obtint quel-
ques avantages sur I'ennemit et no*
tamroent k Rogoznica ; mats , pendant
?u*il s'dloignait de la position centrale r
'askevitch,qui venaitde rallier k Iui
ie corps de Kreotz , reaolut de porter
toutes ses forces, disponibles centre
Yarsovie avant que Ramorrno edt eu
le temps de ramener dans la capitale
les forces dont il avait le commando*
ment It jugea qu'une ibis maltre de
la ville , H Iui serait facile de porter lea
derniers cou|»8 a rinsurrection.
On a judicieusemeot observd que le
systtoe de ddfense adopts pour Yarso-
vie ^tait vicieox , a cause du trop grand
i»88
L'UNIVERS.
d^Telappciiieiit donn^ aux Ugnes lorti-
fito: en effetyCesysttee, pour avoir
dts r^oltats utiles 9 supposait une ar-
m^ double de celle aont pouvaient
disposer les iosurg^ ; et , dans le
cas ou la Polo^e aurait pu mettre
sur pied une force aussi imposante,
elle n'avait pas besoin de s^abriter der-
ri^re des remparts. D'un autre odt6,
si tous les points fortifi^ ne pouvaient'
^tre d^fenaus par une artillerie nom-
breuse et par des corps redoutables ,
il fallait neoessairement abandonner la
premiere enceinte k Tennemi, qui sy
^tablirait pour dd)usquer les Polonais
des ouvrages plus rapproch^ de la
ville. Ce systeme aurait pu £tre Juge
convenabiedans le cas seulenoentou des
corps, manoeuvrantrapidementautour
de la ville , auraient constamment tenu
les Russes en alerte, et les edt, en
cas d*attaque , exposes aux baionnettes
d^un cdt^, et au feu des remparts de
Tautre. II faut ajouter k ces conside-
rations qu*a d^velopp^s avec sagacity
I'auteur de la Revolution de Pologne,
que plusieurs points d'une baute im-
portance avaient ete negliges , ou for-
tifies d'une manidre incomplete. Mais,
quand on pense que tout, dans cette
fuerre, etait improvise, et que les
^clonals avaient h lutter contre des
forces bien superieures, on ne peut
aue s*etonner de la longueur et de
1 acbarnement de la resistance. Le feld-
marechal, pour eviter Teffusion du
sang, envoya, le 4 septembre, le ge-
neral Danenberg aux avant-postes pour
garantir aux Polonais , dc la part de
son maftre, I'oubli du passe, des assu-
rances pour Tavenir, le redressement
des griefs oui avaient donne lieu k la
guerre , et rexamen des exigences rela-
tives aux provinces transniemiennes.
« Prondzyinski , aui etait revenu k
Varsovie, et le colonel Wyrocki, en-
voye pour recevoirles communications,
repondirent qu'ils n*avaient pas de pou-
voirs pour traiter. Le lendemain , la
majorite du conseil des ministres con-
voques par Rrukowiecki , d'aocord
avec la diete , decida que Ton ne trai-
terait que sur les bases du manifeste,
fe qai equivalait k une rupture ou-
verte. » (Mteroslawski.) il n'entre pas
dans notre plan de decrire cette bataiHe
qui efifo^ oe la carte le noble royaume
de Pologne. Nous nous contenterons
d*indiquer sommairement les prindpa-
les phases de cette joumee meoiorabie.
Le 6 septembre , k clno heures du ma-
tin , un feu terrible edata sur toute la
ligne des Russes; mats c'est contre
Wola que se dirigea Tattaque princi-
pale. Tandis que raile droite ocoipait
Uminski , Rreutz se preeipitait sur le
centre. Une redoute , que les Russes
venaient d'emporter, saute avec un
fracas epouvantable : un ofBcier polo-
nais avait mis le feu k la poudfrtdre
pour ensevelir les vainqueurs sous les
ruines. J>^]k les Russes prenaient a
revers les faces de Wola ; Rrukowiecki
courait de lunette en lunette , et , ju-
geant sans doute que tout etait perd u ,
u touma bride et disparut. L'ennemi ,
mattre de Wola , oouronnait dejb les
hauteurs qui dominent Gzyste. L*ar-
tillerie polonaise, dirigee par Bern,
ouvrit un feu terrible, et porta le ra-
vage dans les colonnes russes. Deux
bataillons d'infanterie ach^vent de ba-
layer cet espace, lorsque la cavalerie
les arrete et les force de reculer. Les
Russes etaient maltres de la premiere
ligne ; ils suspendirent Tattague pour
la recommencer le lendemam. Rru-
kowiecki eut alors recours aux nego-
ciations. Le feld-marechal n*epargna
point les promesses, sans toutefois
s'ecarter de ses premieres offres ; et ,
sur les instances du president , il ac-
corda un armistice de huit heures,
pour lui laisser le temps de ramener
les esprits k une capitulation devenue
necessaire.
A la nouvelle que le president trai-
tait avec Paskevitsch, tous les mi-
nistres donnerent leur demission. Le 7,
k dix heures du matin , la diete ouvrit
sa seance. Prondzynski , de retour du
camp russe, demontra que toute re-
sistance etait desormais impossible.
Plusieurs nonces , parmi lesquels se dis-
tinguaientBonaventure Niemolowski et
le marechal Ostrowski, s*eievent ener-
giquement contre toute transaction;
et Leiewel appuyait leur genereux re*
MOSCOU, MOSCOU
';,^^.^ ,^^ >*;;.„, ,-^ .'^l<'r^..,,.',.r
• * * • •
RUSSIE.
5S9
fus de son Eloquence , lorsqu'un aide
de camp de Rrukowiecki vientannon-
cer que rarmistioe allait expirer. La
diMe continua ses deliberations ; mais
dej^ lepr^ident avait pris ses mesures,
et Tagitation |)opiilaire, ezcit^e encore
par rindignation des repr^sentants ,
etait frapp^e d'impuissance. L'armee
polonaise rdsista quelque temps avee
un courage d^sesp^re ; Tartillerie , de
part et d^utre , exerca de grands ra-
vages. L'attaque de 1 aile droite russe
absorba pendant quelques heures tous
les efforts de la resistance ; les artil-
lears polonais epuis^rent leurs mu-
nitions ; malgre la superiority de
leur feu , ils voyaient Tennemi reparer
sans cesse ses pertes, et emprunter h
sa reserve des ressources toujours
nouvelles. Des le matin , Paskevitsch
ayait eu un cheval tue sous lui ; il con-
fia le commandement k Toll, ayant
real une forte contusion qui robligea
a s^eioigner du cbamp de bataille. Vers
cinq beures , toute la ligne des Russes
8*6Ian^ en ayant , et les redoutes po-
lonaises tomberent une k une au pou-
Toir de I'ennemi. Vers cinq heures du .
soir, Tincendie se d^clara aans les de-
oombres de Czyste , et , gagnant la li-
si&re des faubourgs , deiogea les Polo-
nais du dmetiere et des jardins ou ils
s'etaieot retrancbes. Les insurges,
refouies par une dernito attaque de
Schakhovskof , sur Taliee de Wola , se
defcndaient toujours , et leur artillerie
rompait les colonnes des assaillants.
C*est h ce moment que des aides de
camp yiennent annoncer que le presi-
dent avait capituie. A cette nouvelle ,
les uns s'eioignent, les aotres refusent
d'interrompre la lutte , et Bem ordonne
aux p\hces de campagne de se retirer
sur Praga. cetait ragodic de la Po-
lo^e; Kukrowiecki avait envoye sa
demission au marechal de la aiete;
mais tant qu*elle n'etait pas acceptee ,
il rcstait investi du pouvoir de traiter.
La diete, apr^ d'orageux debats, re-
fusa la demission du president , et I'au-
torisa h capituler. Apres ce dernier
acte, qui epargnait h Varsovie les
horreurs de rassaut , elle vota sa pro-
rogation et se separa. Krukowiecki
essaya en vain , dans Tentrevue qu*il
eut avec Fenvoye de Paskevitsch , <rob-
tenir des conditions favorables; le
vaincpieur pouvait dieter des lois ; il
exigeait une soumission sans reserve.
La guerre venait de rompre le pacte de
1816; les rapports avec Tempire etaient
desormais changes : la force 8*autori-
sait de la victoire , et Tavenir n'etait
plus douteux. Krukowiecki ecrivit au
tsar la lettre suivante : « Sire, charge
dans ce moment meme du pouvoir de
parler a Votre Majeste imperiale et
royaie au nom de la nation polonaise,
je m'adresse, par son excellence noon-
seigneur le comte Paskevitsch d'Eri-
van , k votre coeur paternel.
tt En sesoumettant sans aucunes con-
ditions k Votre Majeste notre roi , la
nation polonaise sait qu'elle seule est
k meme de faire oublier le passe, et de
guerir les plaies profondes qui ontde-
chire ma patrie. »
La liberte eut encore un beau
moment; la minorite de la diete,
assumant un pouvoir que la pro*
rogation avait suspendu, eiectrisee
{)ar le chaleureux desespoir de Mo-
achowski, yeut rompre toute n^o-
ciatlon. Le marechal de la diete va
trouver le president, le somme d'ab-
diquer, et revient avec sa demission
au milieu de Tassembie^ qui nonune
par acclamation BwPenture Nie-
rooiowski, president du gonveme-
ment. Dans la nuit du 7 au 8, Berg
et Prondzynski cherchent Kruko-
wiecki, pour lui demander au nom du
marechal la ratification du traite. Mais
la demission de ce dernier rendait cette
formalite impossible. La reflexion avait
succede k Tentbousiame. Molacbowski
se rend enfin aux instances de ceux-1^
memes qui avaient applaudi i sa re-
sistance, et si^ne la capitulation. Il
cede k Paskevitsch le pont et la tete
de pont de Praga. De son c6te , le feld-
marechal s'engage a ne pas troubler
la retraite de l^mee polonaise , et lui
laisse quarante-huit heures pour em-
porter les armes, les munitions, les
effets militaires et ceux des particu-
liers qui voudront suivre Tarriere*
garde. » (Mieroslawski.)
£90
UUlflYRRS.
L'^dfoement de Ramorioo aeo^l^a
la chute de Yarsom ; on a diversement
ioterpret^ sa conduite; les uns Fexpli-
quent par dee ordres pr^is , aoxquels
il ae pouvait d^b^r, et par Vlgiio*
ranee oik pb Tavait laiss^ de oe qui se
passait aoz portos de la capitale ; d'au-
tres le blAoaent de ne pas £tre rentr^
au camp apria s'^tre acfpiitt^ de sa
mission , qui consistait a netto^rer la
rive droite du (leave et k approvision*
ner YaraoTie. Lorsqu*il oonnut le v^
ritable ^tat des choees, il ^tait trop
tard. Le 0, apres avoir oonvoou^ un
coQseil de guerre, il fut dicw que
son corps d armte s'^uierait vers le
sud , et qu'il se r^fo^perait sur le ter*
ritoire autricbien; cette r^olution
4^tait prise, lorsquMl requt Tordre de se
pester sur le Bug et de rejoindre Tar*
m6e polonaise k Modlin. Toute con-
fiance ^tart d^truite ; Eamorino se crut
dispense d'ob^ir; il cx^ta ce que
son conseil de guerre avait decide ;
press^ de tous cot& par les masses
russes,accul^ii laGallicieautrichienne,
il |)a88a la fronti^re k Roscin , dans la
nuit du 1$ au 17 ; quelque temps apr^ ,
le partisan Rozycki traversa la Yistule
a Bobrek , el mit sa petite troupe h
Tabri des Russes sur le territoire au-
tricbien.
Cependant rarm^.principale, sortie
de Praga le 8 septembre , se porta vers
Modlin ; le g^n^ralissime Malaobovrski
demauda lui4ntae qu'on le rempla^lt;
il s'accusait avec amertume d'avoir si-
gn^ la capitulation.Lecercledesgrandes
reputations miiitaires^taitbienr^tr^:
Krukowiecki , Prondzynski et Ghrza-
nowski ^taient rest^ dans la capi-
tale; il ne restait plus que Dembioski ,
Uminski ,RybinsKi , BemetSierawski.
Rybinsk! fut ^u ; cette petite arm^
ne comptait plus que vingt mille bom-
mes presque tous d^oraiis^ , nom-
iMre que la desertion diminuait encore
tous les jours. Paskevitsch n'eut pas
de peine a envek)pper ces d€bm. Pro-
fitantdeleur disorganisation, il en-
voys aux Polonais son ultimatum. 11
^tait atnsi con^u :
' « V L'arm6e rentrera dans ses de-
voirs envers son roi; 2* elle lai en-
verra une deputation pour lui deman-
der Toubli du pass^; S'' en attendant
la r^nse de Sa Majesty imp^riale,
elle prendra ses cantonnements dang
le palatinat de Plock ; 4'' Modlin sera
remis ificessamment aux troupes iro*
p^iales.
« Au lieu d'ob^ir k cette Injonction ,
les Polonais jettentun pont sur la Yistu-
le ; bientdt oependant le d^uragement
reprit le dessus , les cbefs, m^coDteots
de Rvbinski, transport^rent le com*
mandement a Uminski , roais riofan-
terie refusa de lui obSr. Les nooces
d^coora^^ avalent pris le chemin de
la frontiere prussienne; et Tarm^,
gagnant toujours vers Touest, ^tabiit
son quartier gto^ral k Szpital. Pablen
^tait toujours sur les traces des fiiyards;
Tarriere-^arde, command^ parDem-
binski , tira les demiers coups de ca-
non. Le 6 octobre , Tinfentene d^posa
les armes k Jastrzembie, rartijlerie
et la cavalerie pres de Brodnioa.>
(Mi6rosIawski.) L'insurrection etait
tointe, la Pologne n'^tait plus qu'uoe
province russe.
Aujourd'bui que guelques ann^
ont pass^i sur ces ^venemenis m^mo-
rabies , il est permis de porter un ju-
gement plus impartial sur les^ vam-
queurs et les vaincus ; depart et d'aatrej
les deux peuples rivaux ont conserve
leur caractere historique. Les Russes
se soot montr^s tels qu*on les a vus
dans lesgrandes luttes quails ont eues a
soutenir, c'est-lt-dire, braves, r^goes,
patients , et oompensant , par upe dis-
cipline severe, T^Ian qui manquea leun
masses. Diebitscb n a montre d^hdhi-
\eti que dans ses mouvements strate-
£iques , mais il n'a pas su profiter de
ja victoire; Paskevitsch a pousse la
bardiesse jusqu*^ la t^m^t^ ; sonmou-
vement sur la basse Yistule est une
conception neuve qui changeait toute
Teconomie de la campagne : le succes
Va justifi^. Les Polonais , dans le hm
comma dans le mal , n*ont pas de-
menti leur ancienne renommeie : bra-
vourechevaleresque . d^vouement com*
plet, mais, k cdte de ces vertus,
amour-propre excessif, jalousie de
parti a oarti , d^bomme h nomme ^ n
RUSSIE.
&91
n mot , anardiie dans les idtes, votl^
ce qu'on retrouTe dans rhistoire de
leur deroidre guerre, voil^ ce qui a
£ut leur gloure et leur faiblesse dans
Urates ks luUes do pass^. Sous le
point de Tue politique , Tiosurrection
dePologne mit, pour les Russes
oomme pour les Volonais , une ques-
tion de vie ou de mort. Si la PoR)gne
edt triomph^, Texenaple de son ind6-
Mttdaoce eCt n^cessairement souler^
les provinces prussiennes et autrl-
chiennes des anciens partages ; la Rus-
m perdait ses bases politiques et com-
merciales sur la Baltique et sur TEuxin ;
la Turquie et la Suede la pressaient du
sod aa nord ; la r^^n^ation de I'O-
rient pouvait se developj)er en 86cu-
riti; en on mot, Tempire des tsars
n'^tait plus qu'une puissance asiatique ,
et la iace oe FEurope ^tait changee.
L'Eorope n'a pas voulu voirces rSul-
tats; die sobit aujourd'bui les conse-
quences de aa conduite ; toutefois eile
a acquis la conviction que la Russie a
dd employer toutes ses forces et
presqu'una ann^ nour souaiettre quel-
i|ue8 palatinats; eliesait que, sans laoon-
mvenoe de la Prusseet de I'Autriche ,
Vissusdeoette guerre entre le despo-
tisms €t la liberty eAt dt^, sinon dou-
teose, do moins marqu^ par des sa^
crtfiocg encore plus arands.
La Bossie ^it dennitivement mal-
treec de la Pologne ; presque tous ceux
QUI avaient oonioattu pour Tindepen-
dance ^taient disseniin& en Allemagne,
en France et en Angleterre, ou ils
^taient Tobjet de la sympathie des peu-
ple6,apres avoir ^te abandonnds pr
ics gottvememeuts ; les restes de 1 ar-
DKe polonaise furent bientdt ittcorpo-
res oaas I'arai^ russe. Pour leur oter
toQt espoir de r^volte , on les empioya
dcpuis en assez grand nombre contre
Itt peoplades du Caucase.
Da oot6 de TOrient , des Emigrations
f^id^rables avaient eu lieu sur le ter-
ritoire nouveUement conc6d6 aux
Russes. Le'g^n^al Lazaref, charge
fit le comte d'^rlvan d*agir sur Tes-
prit des populations arm^iennes, fa-
f(Hisa le depart et r^tablissemenA de
plus de dix milk families. Le patriar-
die de r^gitee arndnieane, dont le
sito) oecnintoique dtait le monast^re
d'Etchmiazdin , ftit attirE h £rivan , et
eette ville, sous I'administratiott des
Russcs, ne pent manquer d'amener
avec le temps la deoadaioe d'Erze-
roum.
Itious avons vu que les eomra^tes
des Russes dans la Turquie cTAsie
leur permettaient d'a^ ir d*une manidre
Krempte et presque irresistible, dans
» cas d*une guerre en Orient, soit
centre la Perse, soit contre la Porte
ottomane; niais un des plus grands
avantages de la position que leur as-
surent les traites d'Andnnople et de
Tourkraantchai , c'est d'entourer par
meret par terre les peuplades guer-
ridres du Caucase qui luttent encore
aujourd*hui contre les armes du tsar.
La r&istanoe de ces belliqueux mon-
tagnards, les relations reoentes des
Anfilais sur ces contrdes peu connues ,
et dont les retraites inacecssibles sem-
blent ddfier les efforts de la tactique
militaire non moins que les bienfaits
de la civilisation , tout apoelle sur la
Gircassie un intdr^ renmi plus vif
encore par la situation aetuelie de TO-
rient. IJous croyons done utile de ras-
sembler ici quelques details sur les re-
gions caucasiennes.
La cession de la Gdorgie ouvrait
aux Russes le versaht mdridional du
Caucase ; de Tiflis , ils peuvent facile**
ment se porter le long de TArarat ; et
les forts qu'ils possMent dans les kba-
nats d'^ivan et de fiakbitcbevan les
mettent k I'abri de touteentreprise s^
rieuse de la part de la Perse et des
Turcs. Les Circassians s'^taient places
sous la suserainetd des sultans, ^i les
ont abandonnds k la Russia. Mais ces
montagnards ne se regardent point
comme lids j^r des traitds eondus
sans leur participation ; ils ont ddclard
qu*ils reconnattraient volontalrement
rautoritd de la Porte, mais que nulle
puissance au monde n'avait le droit de
m souaiettre aux Russes , contre les-
quels ils nourrissent une haine pro-
londe. Les montjsignards du Caucase
prdsentent une divovitd presque infi-
nie de races, de sectes, didiomes ^
S92
LUNIVERS.
d'instituttonB. II est difficile d*^aluer
d*ane oianito exacte le cbififre de
toutes ces popolafions. Rdnegg* se^
ion le Port-folicr; paratt 6tre la meil-
leure autorit^; Klaproth T^yalue trop
bas par syst^me ; lea rapports rosses
officials le repr^ntent par un million
cent cinquaote mille Ames ; les autori-
tes locales le portent h quatre mil-
lions; nous pouvons, sans craindre
de nous tromper, Testimer a plus de
trois millions... Ia population enti^re
est arm^. II n*y a pas de petite ferme
ou Ton ne tronve un yatagan, un
sabre , un fusil , ou un arc et des Ar-
ches. Beaucoup d*babitants possedent
un armement riche et pittoresqne;
vers Touest et le sud, on rencontre
un nombre considerable de cavaliers ,
et diaque ferme entretient un cheval
de guerre. Lcs Gircassiens et les Ga-
bardiens sont tons cavaliers, et ils
ont fh^emment k la bouche la me-
nace de marcber sur Moscou.
Dans rintervalle qui s^pare les lignes
du Terek de celles du Kouban, la
Russie ne possdde que ses stations
milttaires. Les Gircassiens ont pouss^
k plusieurs reprises des corps de cinq
«&dix mille hommes h travers cette
■mnti^re militaire; ils ont p^n^tri
. &rt loin dans Tint^ieur de la Russie,
et , baiayant tout devant eux , lis en
ont emmen6 de nombreux troupeaux
de b^tes k comes et a laine , faisant en
outre des prisonniers qu*ils rendaient
plus tard, soit par 6change, soit
moyennant une rancon. Leurs sabres
sont de fabrique indigene; ils pr^pa-
rent eux-m^mes leur sellerie et leur
buffleterie: quant au plomb et h la
poudre , ils ^taient dans Thabitude de
les importer deNtranger; mais, de-
puis Tinterruption que la Russie im-
pose h leur commerce , ils s'en four-
nissent par eux-m^mes , quoique avec
assez de difficult^.
Le nays abonde en premieres n^ces-
sites de la vie; le seul luxe des habi-
tants, c'est d'avoir de belles armes.
Le costume des Gircassiens est simple
et parfaitement adapts h leurs habi-
tudes guerrieres : c'est un bonnet de
peau de mouton , et un habit en forme
de redingote d'une sorte de flanelle
^paisse, de couleur grise, avec dea
poches destinto aux cartouches sur le
devant, et serr^ par une celnture au-
tour dea reins. Leurs pantalons sont
fails de la mtoie 6toffe; une seule
pito de rhabillement admet quelque
recherche: ce sont des bottines en
maroquin rouge ou noir, que les chefii
portent om6es de broderies. A peine
y a-t-il quelque autre diff<6rence dans
le costume des personnes de rangs
diffl&rents ; malgre cela , le peuple ob-
serve un grand respect pour les an-
ciens , les anciens k regard des m^les ,
et les nobles pour les princes.
Dans les guerres in&rieures et dans
les guerres defensives , il paraltrait que
oe sont les princes qui d^ctdoit et
font executor les mesures n^cessaires.
Mais , lorsquMl est question d'une ex-
p^ition au dehors , la troupe entiere
se rassemble, et procMe k I'^lection
d'un chef, qui a un pouvoir despotique
et irresponsable tant que dure rexp6-
dition.
Pour les affaires int^ieures, Tau-
torite supreme est b^r^itaire en quel-
ques enoroits; allleurs, elle n'existe
que sous des formes entiirement re-
publicaines, et se trouve entre les
mains d'un oonseil €\u parmi les ch^s
de municipality qui repr^entent dia-
que village. Dans beaucoup de lieux ,
radministration de la justice est con-
fide k des assemble r^li^es , ou
tons les intdr^ts sontd^battus , oomme
jadis , en Grece , dans les assemble
du peuple. (Port-folio.)
Les rivalites de peuplades k peupla-
des, les haines vivaces entre les fa<
milles et les individus , empMient les
Gircassiens de lutter avec ensemble
centre les corps russes qui l4» har-
c^lent. Gependant la communaut6 du
danger les a rdunis souvent dans une
m^me pens^ de salut et de haine
centre leurs oppresseurs. Peut-^tre
leurs subdivisions et leur mani^re de
guerroyer que favorisent les localites ,
sont-dles plus efficaces pour la d^nse,
que si , en adoptant une organisation
militaire plus savante, ils se hasar-
daient plus souvent k oombattre par
RUSSIE.
593
masses contre un ennemi qui ajirait
toujours I'avantage du nombre. v
La principale triba du Caucase
oriental est celle des Leseuis ; le pays
qu^elle occupe regarde la mer Cas-
pieime, et oomprend les districts du
Daghestan, de Jar et Belikhan. Les
L.esguis de ce dernier district ont des
troupes russes cantonn^ cbez enx.
L.eur pays est plus accessible que
le reste de cette diafne du Caucase.
Avec le printemps et le feuillage ils
reprcnnent leurs armes , tandis qu'eu
hiver les arbres d6pouilI^ ne leur
ofFrant plus d*abri , la rigueur de
la saison les fait descendre des hau-
teurs , et les oblige a une soumission
appareote devaut leurs ennemis qui
occupeut la plaine. Plusieurs de leurs
che£s se sont r^fugi^ en Perse et
en Tnrquie. Le blocus de douanes,
2ui les etreint comme le reste de la
ircassie t les afTaiblit par degrds , et
ils sont plutdt maintenus que soumis.
Derbent et Bakou sont les deux places
raaritimes r^uliirement fortifiees que
la Russie possMe sur cette rive. Pen-
dant la derniere guerre avec la Perse,
trente mille Lesguis sont venus bio-
quer ces deux viiles , mais leurs efforts
ont €it sans r^sultat, la mer 6tant au
pouvoir des Russes. Rlaproth dit
qu'un de leurs chefs, Nutscnam, peut
rassembler douze mille hommes.
Les tribus qui occupent la chatne du
Caucase, depuis le Vladi-Caucase, sont
sou?ent en ^tat d'faostilit^ avec les
Russes , et la proximity de leurs ro-
chers inabordabtes impose h ces der-
niers Tobligation d'^re constamment
sur leurs gardes. Les plus roioutables
d>otre ces tribus sont celles des
Tdietchenetz et des Soans. Cependant
une partie de leurs habitants est fix^e
dansles plaines des deux Rabarda et sur
les autres plateaux soumis aux Russes.
Les villages des Lesguis et des Tcbet-
ciienetz,qui reconnaissent Tautorit^ du
i;ouvemement russe, ont Iivr6 des
otages et payent un imp6t; on les ap-
peile zamirnie (pacifies): mais sou-
vent leurs habitants sont plus dange-
reux que ceux qui veufent rester
ind^pendants. Ayant libre aoc^ dans
38* lAvraUon. (Russie.) t. n.
les vilies et les camps russes, lis ser-
vent toujours d'espions li leurs fr^res
insoumis , et les appuient en cas d*at<
taque. La plupart sont inusulmans;
lorsque la forteresse d'Anapa toit en-
core au pouvoir de la Porte, cette
puissance leur faisait passer des armes
en Change de jeunes garcons et de
jeunes femmes.
Leur costume oonsiste en une courte
tunigue , un large pantalon , des bottes
h pointdi longues et recourb^es, un
bonnet rond surmont^ d'un capuchon
termini en pointe. Leurs maisons
sont petites et couvertes de terre; une
peau de mouton leur sert de lit , une
selie d*oreiller. Leur nourriture con-
siste en pain de mais, qu'ils font cuire
sur une pierre ^haunSe, avec un
morceau de viande sai^nant et des
oignons. Ils aiment passionn6ment les
liqueurs fortes. Lorsqu'ils ne sont pas
en guerre , la chasse et le pillage les
entrstnent hors de leurs foyers. Les
femmes m^ent Pexistence la plus mi-
s^able ; elles sont moins estimto que
les chevaux et les armes. Ils manient
leurs poignards avec la plus grande
dexterity : la lame, longue d*envi-
ron dix-huit pouces, en est d'une
trempe excellente; on assure que les
habitants plongent ces armes dans une
substance v^n^neuse qui en rend les at-
teintes mortelies. Lorsqu'un Tchetche-
netz est vivement poursuivi , il lance
son poignard contre son adversai-
re, et rarement h une distance de
dix pas il manque son hut; s*il est
serre de trop prte, il Tenfonce dans
son propre sein. Ils ont des esclaves
quMls emploient aux plus rudes tra-
vaux ; ce sont pour la plupart des pri-
sonniers. Un ofBcier superieur russe
resta captif au milieu d*eux jusqu'^ ce
au*on etft pav6 la ran^n quails avaient
fixde. Pour remp^her de fuir, on lui
avait fait une incision k la plante des
pieds , et on la laissa ctcatriser aprte
L avoir introduit du crin de cheval.
eurs attaques subites tiennent les
troupes russes dans une alerte oonti-
nuelle; la nuit les postes sont dou*
bl^, et des patrouilles nombreoses
surveillf nt la oandi^ de^ toUisse-
14
594
L'UNIVERS.
meats, lis do6(ienitent par milliers de
feurs montagnes; eoldvent bommes,
femmes , tcpuDeaux ; et , defiant toute
poursuite par la ragidite de leur mar-
che et la dissemination de feurs forces,
its regagnent leurs repaires inexpu-
enables. Nousempruntons h M. Tolstoy
ie r^it suivant , rapports par an om-
cier qui s'est trouve sur les lieux.
ft Pendant une nuit obscnre , une ring-
taine de Lesguis descendent des mon-
tagnes , traversent I'Alazan , franchis-
sent k pied le cordon des factionnaires
qui entouraient un camp de dragons
etabli pr^s de Tiflis, s^^Iancent , le poi-
gnard i la main , ters une caserne ,
massacrent la sentinelle qui gardaiC
l*entr^ , et p^ndtrent en silence dans
les salles int^rieures ou dormaient les
soldats. Tout ce qui s'ofTre a eux est
d'abord dgorg^; quelques dragons s*6-
veillent et courent aux armes ; les Les-
guis avaient 6teint les lumidres , et se
reconnalssaient entre eux pai* Tattou-
chement de leurs barbes. Le carnage
continua jusqu*^ rarriv^e des pa-
trouilles. Alors lis voulurent se faire
jour, mais ils furent tons enveloppes :
les uns , an lieu de se rendre , se poi-
enard^ent; et ceux qui n*eurent pas
Ie tem|>8 de se frapper t^moignaient
leur joie de se voir entour^ de ca-
davres russes. «
Au mois de fierier 1830 , Kozi-Moul-
lah riunit plus de six mille bommes
dans le Dagbestan , et parcourut tout
le pays , dans le but ou sous Ie pr6texte
de r«ablir Tautorite du tribunal spiri-
tuel : battu en plusieurs rencontres ,
il se refugia parmi les tribus sauvages
de la cote orientale, ou il attaqua
sans succes les Tillages oocup^ par les
Russes. Apres avoir r^uni quatre mille
de ses mouHds, ou fiddles, a Gherment-
diouk , principal village des Tchetcbe-
netz , il opposa aux troupes russes
la r^istanoe la plus opiniatre. Pen*
dant Taction , soixante et dix monta-
^rds, sous la conduite d'Abdoul-
Rhaman, Tun des partisans les pliv
d^vou^ de Kozi-Moullab, se virent
s^ar^ du reste des leurs, et cernes
dans uM graode maison. Lorsqu*on
leur proposa de se rendre, ils enton-
nerent des versets du Coran, selon
leur usage lorsqu'ils se d^vouent k la
mort ; puis , creusant des meurtri^es
dans les morailles, ils fusillerent tout
ce qui se pr^ntait k la port^ de
leurs coups. Quelques grenades lancte
dans la cneminee ^laterent dans Tin-
t^rieur, mais ils refusaient toujours de
se rendre. L*ordre fut donn^ de mettre
le feu a la maison. Senlement alors
douze d'entre eux, suffoau^ par la
fum6e, firent une sortie le poi^ard
et le sabre a la main , et se prdcipit^
rent sur les baionnettes russes ; tout
le reste, avec Abdoul-Rbaman, p^t
dans les flammes.
Cbass^ de Gbermentcbouk, Kozi-
Moullah se retira dans le Dagbestan ,
et se fortifia k Gboumrl. Le chemin
de Ghouinri , qui , depuis fe pays des
Tchetcbenetz,pr^nteles plusgrandes
diflQcult6s, monte, k partir delCaranai,
Jusqu*au sommet neigeux d'une monta-
gne baute et escarp^e; ensuite il descend
Sendant quatorze verstes, en ddcrivant
es sinuositds, et comme suspendu.au
milieu des prdclpices; au dela il passe
sur des sailiies ^troltes de rochers sans
communication entre eux : plus loin ,
enfin, il se r^tr^it toujours davantage
entre deux raneto de rocs perpenai-
culaires, jusqu^ oe qu'il soit coap^
par trois murallles en avant du village
deGhoumri.Ce defile ^tait repute inac-
cessible ; et lei montagnards disaient :
Les Russes n*jr pourront arriver que
comme la pluie , en tombant du ciel.
Les Russes s'empar^rent de tons ces
passages , mais avec des peines inouies.
Une tour fortiG6e , ou se trouvait Kazi-
Moullab et les plus determines d'entre
les siens , fut prise d'assaut, et tons, j*
com|)ris oe cbef intr^pide , tomberent
perces de coups de baionnettes. Le
comte d*]£rivan fit des excursions fr^-
Suentes dans les lieux les plus retires
eces oontr^es sauvages, et il s*em*
para d'une forte position sur le bord
de b mer Noire , au moven de laquelle
communiquaient les vibus Traus-
koubanes et les Abazes. 11 se porta
ensuite sur la rive gauebedu Kouban,
ou ii detruisit pbis oe trois cents aoules
(habitations de Tatars}. Aprei ces
RUSSIE.
^k
dfedliioas, il retoarna aTiflis, lais-
saot au gto^ral V^iaminof le som (to
eoQtmuer oette guerre interminable.
Les plaines fertlies, aitu^ eotre U
Caacase, PArarat, h met Noire et h
mer Caspieooe « sont pour la ph]|»art
abaodonnte k une y^^tatioQ raxa-
riante^ maia Inutile. Les productiona
de DOS Tersera et de nos jardina y cou-
Trent les plaines et les montagnes , et
dia<|oe aitre est festonD^j)ar la vigne.
Iklais, au milieu de cet Eden, ce qui
manque, c^est fhomme. l^es champs
de ble et de mals se trouvent h de races
intenralles , parmi des for^s d'abrico*
tiers et de Wgnes. Le laboureur offtre
Taspect de la mis^re au milieu de ces
ndiesses naturelles. Dans cet ^tat de
choses, la Ruasie ne tronve point au
(tela du Caucase lea subsistances n^-
cessalrea pour lea arm6es qu'elle est
obfa'gee d'y entretenir , mtoe au milieu
delapaix. n lui faut tirer sea appro-
Wsionnements de Fint^eur de I em-
pire h grands fraia d'argent , de temps,
it trani^rts et d'avaries. En temps
de guerre , cea transporta deviepnent
presqne Impossibles, s'il s*agit de lea
proportlooner aux besoins de troupes
considMiiea.
Cest I ees difflcult^s, encore plus
oa'ao ocNirage des montagnards^ qu'il
rant attribuer la prolongation d una
lutte a inegale. Maintenant nous aN
ions exposer en pen de mots et d'une
mani^re g^n^le la position relative
des Rusaes et des Circassiena ^U$ le
rapport des forces milltaires , en aver-
tissant nos lecteura que nous emprun-
tons la |rfus grande partie des oetaila
^i solTent au Port-folio.
Les Tatars et les Cosaques, organic
1^ eotre la mer d*Azof et la mer Cas-
pieane, aont au nombre d'environ
oaqoante mille, dont un tjers reste
<a service permanent et effectif. Un
■ombre k pen prte dsal de troupes
nvsea statfonne dana Tes forteresses,
Ob doit Y ajouter lea Kabardiens et lea
Oai^iniena, d^^ organist en grande
pntie par les llusses ; mais , comma
BOOS I'avona dit , il serait dangereux
^/es opposer h leurs compatriotes.
Les op^rationa majeures contre le
Caueaae ^ appoyeaa par les corps armda
({ue nous venons dlndiquer, ont tou-
jours M conduites pardea troupea ti-
roes de rint^rieur de Temptre, et par
dea d^tacbeooieota de Cosacuea et de
Tatars emplo^^ bora de leu r tour d*acti>
vit6 de service. La Russie a mis en
campagne , dana ce cas , dea corps d^
tacb^ de vingt k trente mille hommes.
Dans les demidres ann^s , la |lu&-
sie occupait , sur les odtes de la Cir^
cassie, les postea suivanta: Anapa,
Gh^Iendgik,Zagra« Pitsunda^ Bam-
por, Soukoum - Kal^ ; \k finissent les
montagnes. Danstouteacesfortereasea»
on comptait environ treiae mille hom-
mes. Tout r6cemment les Russes ae
sont empar^ de Soudjouk ^ Kal^ , un
des points sur lesquels les Gircassiena
Msalent un commerce d*armes, de
poudre et de sel, avec les barques an-
glaisea ou turques qui panrenaient k'
tromper la vi^Iance des croiai^rea moa-
covitea.
On a toujoura conaid^r^ Anapa
comcue le boulevard et la clef de tout
le pays : oette Tille garde le passage
maritime vers la ligne du Kouban,
ainsi que le passage septentrional qui
touobe a une cbatne de montagnes
presque inaccessibles , de mapi^ k
isoler Ie$ populations du sud du Cau-
case de cellea du nord.
Anapa 6tait le ddboudi^ par lequel
le$ produita du pays parvenaient a la
mer I>9oire, et le point central des
Ranges que les naturals feisaient
avec lea commerqants strangers. Par
la conqu^te d* Anapa , la Ruasie a tourne
toutes ces reaaourcea qontre la Ciroas-
sie elle-mtoe, et Toocupation de
Soudjouk -Kale oon^pldte, pour ainai
dire, Tinvestissement de la odte.
Cependant Tautorit^ des Ruases de-
vient plus pr^caire k mesure que Ton
avance dans les terres , et principale-
ment dans (ea r^iona montagneqses.
Hors de la portee du canon dea forts,
on n*ose s'aventqrer lana eaeorte;
quelquefois m&ne les Russea ne font
pattre leurs troupeaux que aous la pro^
^ tection de rartillerie, uont les monta-
gnards redoutent surtout les effets,
&ndis qua le b^tail des peuplades in-
14.
596
L'UNIVERS;
soumises erre paiiiblament ilans les
gorges et sur les coteaux, sous la con-
duife d'un jeune gar^n ou d'une jeune
fille.
Au sud du Caucase , oh les Circas-
siens sont peu h craindre , Tattitude
de la Rossie cesse d'etre hostile , si ce
n^est du c6U de la mer Caspieone. L^ ,
die d^ploie quelque activity, mais
mollis en prenant 1 offensive gu*en sui-
vant une marche svsttoatique, ap-
puyee d'ailleurs sur les secours et les
moyeos de transport de sa marine.
Dans les t)rovinces plus au midi , les
troupes de I empire, employes h main-
tenir la soumission generate , sont dis-
B^min^B sur une vaste 6tendue de
territoire. Les populations, moins bel-
liqueuses, y sont contenues par de
faibles d^tachements ; tandis que, sur
quelques points oili les habitants mon-
trent plus de nidesse et de dispositions
a la revolte , la Russie les isole sans
les oombattre, et se contente de leur
imposer oertaines formes de soumis-
sion , telles que Tobligation de livrer
des otages et de payer un tribut. Ainsi
Taction de la Russie, agressive au
nord, est conservatrice au midi. Le
nombre des troupes qu*elle maintient
sur le versant meridional du Caucase ,
dans les circonstances ordinaires , ne
d^passe gu^re quarante mille hommes.
Dans Tes districts encore plus avan-
c^s vers le sud , on pent dire que le
pouvoir des Russes est si compl^te-
ment 6tabli , que leurs soldats m^me
isol6s peuvent voyager partout sans
^tre inquiet^s.
Quoique Tautorit^ du tsar soit ^ta-
blie de rait dans les districts plus mon-
tagneux vers la Perse et la Turquie
d*Asie , Tadministration russe y fonc-
tionne difBcilement , et les troupes
n'y apparaissent que par detacne-
ments.
Le centre de toutes ces possessions
est h Tiflis. Les sacriflces immenses
qu*a faits la Russie pour ^tablir son
pouvoir sur ces contr^s , prouvent
suflBsamment toute rimportance qu*elle
attache h la pacification definitive des
regions caucasiennes ; et les inquie-
tudes de r Anglcterre en presence aune
puissance rivale, pour laqudle la paix
n'est qu'une preparation a des agran-
dissements ulterieurs , indiquent Hn-
fluence qu'exercera prochainemcnt FO-
rient sur les destinees de TEurope.
S'il est dangereux de lutter de front
et a euerre ouverte contra la Russie,
il ne rest pas moins de se Her avec cet
empire par des traites ou les avantages
definiti& de TaUiance sont tous pour le
vainqueur qui les a dictes. Cest ainsi
que rabaissement de la Pologne date
de la protection de Pierre le Grand ,
comme la mine de cette republique
date reellement de la protection de
Catherine n : c'est ainsi que les trai-
tes ont arrache a la Turquie toute in-
fluence de fait sur les principautes de
Moldavie et de Valacbic , dont I'entree
permet aux Russes de penetrer prcsquc
sans obstacle jusqu*au centre de la puis-
sance ottomane ; c'est ainsi cn6n oue
le patronage moscovite , d'autant plus
exigeant qu'il est plus efScacc, vient
d*arracher au sultan le traite d*Unkwr
Skeiessi , qui couronne les stipulations
d'Andrinople. La Porte etait en oicrrc
contre le pacha d'lfegypte. Apris la ba-
taille de Koniab , la Russie jugea of;
portun de prouver ^ Mahmoud qu »
n*avait de secours ^ attendre que d elic
seule ; tandis que les agents franfais
et anglais luttaient d'inllueoce aupres
du vice-roi , le cabinet de Petersboorg
fit avancer des forces de terrc et de
mer , et le pacha rebelle fut contraint
de suspendre sa marche victoneuse.
Le traite d'Unkiar Skeiessi fut le sa-
laire de ce service. 11 est ainsi con^u :
Art. 1*. II y aura h jamais pw.
amitie et alliance entre Sa Majest*
Tempereur de toutes les Russies et ba
Ilautesse I'empereur des Ottomans,
leurs empires et leurs sujets , tant sur
terre que sur mer. Cette alliance ayani
uniquement pour objet la defense com-
mune de leurs fetats contre tout em-
pictement , Leurs Majestes promctteni
de s'entendre sans reserve sur tous les
objets qui concernent leur tranquiU'i^
et leur sOrete respectives , et de se
pretcr , a cet effet , mutuellcmcnt , des
secours materiels et Fassistance la plus
efficace.
RUSSIE.
407
Art. 3. Le trai(6 de paii ioondu a
Andrinople le a septembre 1829, ainsi
Qoe tons les autres traits qui v sont
imms , de mtoe aussi la o^nventioo
signte h Saint-Petenbourg le 14 avrtl
1830, et rammgementcoDclu 1^ Cbnso
taatioople les 9, 31 juillet 1889, rela*
tHk la Grto, sont confirm^ dane
totite leur teaoir par le present traits
d'allianoe dtfensive, comme si lesdites
tiansactioDS y araieDt €16 ins^rte
mot poor mot
Art 8. En ooDS^ence du principe
deoooser?atioo etdedtfense rautuelfe«
S'sert de base au present traits d'aK*
ice, et par suite du plus sincere
desir d'assarer la stabilite et Tentiere
independaoee de la Sublime Porte , Sa
Majot^ Pempereur de toutes les Rus-
&«, dans le cas ou les circonstanoes
fii pourraient determiner de nouveau
laSablime Porte k reamer Tassis-
tance navale et noilitaire de la Russie
Tieodraient ii Se presenter, quoiquece
cas DC goit nuUement k prevoir, pro-
Bwtdefoomir, par mer et parterre,
aotat de troupes et de forces que les
deubaotes parties contractantes le
JQ|eniat n^oessaire. Ce cas ^cbitont,
il est OQQTcnu que les forces de terre
et de mer dont la Sublime Porte r^-
™Krat le seoours seront tenues k
ttdi^pontion.
^rt, 4. SeloD ce qui a €t6 ^nonc^
pnu haot, dans le cas ou Tune des
<™ poissances aura r^a'm^ Fassis-
^ de f autre , les frais seuls d'ap-
pvnsioDoement pour les forces de
^^n et de mer qui seraient foumies
^<io>beront a la charge de la puissance
9^ aura demand^ le seoeurs.
^ 5. Quoique les deux bautes
parties contractantes aient lintention
siaoere de maiotenir oet engagement
jj"qa*ao terme le plus recule , oomme
it ae pourrait que, dans la suite, les
onxmstances exigeassent qu'il fidt ap«
PiMt^quelques diangements k ce traits ,
2. est Gonyenu d'en fixer la dur^ k
i^t ans , ^ dater du jour de T^chan-
S^des ratifications imp^iales. Les
<|^ ptftiee , avant Texpiration de
^ terme, se conceiteront , sdon Tetat
^ seront les choses k cette 6poque,
sur le renouTellement dii dit traits
Art. 6. Le pr^Mnt traits d*alliance
dtfensi ve sera ratifi^ par les deux bautes
parties contractantes, et les ratifica-
tions en seront ^chang^ a Gonstan*
tinople dans le terme de deux mois , ou
plus tdt , si faire se pent.
L*ai:ticle s^par^, qui n*a ^t^ com-
munique que trois ans plus tard , sur
la demande de la ebambre des com-
munes d'Angleterre, est de la teneur
suivante :
En vertu d*une des clauses de Tar-
tide V du traits patent d*allianced^
fensive conclu entre la cour imp^riaie
de Russie et la Sublime Porte, les
deux bautes parties contractantes sont
tenues de se prater mutuellement des
seoours mat^riels et Tassistance la plus
efficaoe pour la s^lret^ de leurs ^tats
respecttflB. N^anmoins , comme Sa Ma-
jeste Fempereur de Russie, vouiant
^pargner a la Sublime Porte ottomane
la cbarge et les embarras qui r^ulte-
raient pour elle de la prestation d'un
secours materiel, ne demandera pas
ce secours si les ciroonstances met-
taient la Sublime Porte dans l*obliga-
tion de le foumir; la Sublime Porte
ottomane, k laplaoedu secours qu'elle
doit prater au oesoin , d'apr^ le prin-
cipe de rMprocite du traits patent,
devra bomer son ac^on en fayeur de
la cour imp^riale de Russie a fermer
le d^troit des Dardanelles, c'est-^-dire,
k ne permettre k aucun bAtiment de
guerre stranger d'y entrer sous un pr6-
texte quelconque.
Le prtent article , s^par^ et secret ,
aura fa mtoe force et yaleur que s'il
etait ins^ mot a mot dans le traits
d'allianoe de ce jour.
Fait k Constantinople le SO juin (8
juillet) 1888. Sulvent les signatures.
. Toute la portded'uneoonyention di-
plomatique, qui met les destin^de la
Turquie entre les mains d*un tuteor
int^ress^ k la priver de tout moyen
efficace de rteistanee, se pr^aente ici
d'une maniere si nette et si frappante ,
que nous ne nous attacberons pas 2i di-
montrer ce qui r^unit tons les carae-
t^res de T^vidence , mais nous eroyons
utile d'ajouter, k propos do traits
L'lFNIVEltS.
iwlickQt qui loudmrt aux 4otMls Ics
ffkm graves de rEntope.
L«d«nL|misaaBoe8i,4oiit It AMlriiN
it ie «6iiniiem oot M depuis km^
leniMiprMoaimaDts daat la VMitBr*-
raoee , sont en premier lieu T Ansle*
lerre, tftensuite la Franoe. La malit^
de cet deux nations a josqu'id fDer^
veiUeusemeBt lehFi* lb ^KtMue de ia
Rttssie. Le rftle des agents AiBtome^
ttques de cet empire est d*eqiiniln%rH
pouh* tinm ^re^ ees detx fnfiuedlses
ri^ales^ de manl^re k empteher que
Tune ne derienn^ ln>p prdpondteate,
at saiiout de pr^enir un aooord oue
la divernnoe to intMts rend si dif*
floile. Iroa autre cdt6. ioole tentative
de la France on ds I* Anglelem aor
r^pte on la ta!M affeetant nte»-
saifement Vdttti de la Turquie , ia Ri»
sie pent aosstUH if)ter?enir dans oes
queaticnM , oomffle tirtrlce de la Porte
oitomane, et ratCaeker atnsi k ses
propres ooBfrenanoes tons les acta,
Ions les rappoi*ts sossibles de rOrient,
Si r£gwte Toolait eonsoanmer Fcenvre
de son emaociptilioii seva le proteoto*
rat de TAngleterre, le saltan Mah«
mood rMaraerait aosaitAt rappn do
tear; et, si PAngletenre passait outre,
una unerw gendrale s^BUSoivrait. II
n*y a pas Jusqu'ii la question d'Aiger
qui ne tienne au traits da 8 juillet,
pufsque les r^ences barbaraaques
etaient, noininalenient du moins, sous
la suserainete du Grand Seigneur.
A cbaque instant « et k propos des
qaestionn en apparenee les plus secon*
datres, la Rnssiepeot mettreaux prises
les nationa de la vieille Europe^ dont
quelques-unes sont fatalemeirt enlrat-
nta dans sa sphere d*aetion>i tandis
que -les aiitres^, ooaume ^tonn6es de
leor allianoe, n^osent agir de' concert ,
et aemblent se oonaoler des maux pr6-
aents et k ^nir par la certitede qu'eileft
ne aeront pasneules atteiiltes. Bien des
gens , en enviaageaDt la question d'<K
rieht, n^ troavent gu^ que Tabais-
aetaent proebaili de FAngleterre et la
rainede son oomneree &m les Indes
orientaiea. Qe serait , nous en conye-
tons , IViffet le plus inim^diat des con-
nottea des Busses en Asie. Hals inie
foil TAsf^elerre efibofe, od sera la
digue qui arritefa le torrent? Quaiid
tous lea morcMsde la BaHraneet da
la M^iterrante, qnand osox du gnmd
Oo^a altmenteront le trter des tsan^
le dernier obstacle oni les arrfte , Ptet
pfftaiire.de leors nnanees aura dis-
paim; et Tor, ce moyen I la fois U*
eond et cornipteifr des dvtlisations
avanota , acbdvera de leur somsiettre
ce que leurs armes n'aoeont pas con*
quis. UnealliaoeefiBnne et sans aiini^
peM^ entre la Franoe ot T Angieterre
pent seule ooi^|iHer oe danger; rint^-
v^t des peoples, eomme oelni des dy*
nasties, la conadlle; tontes les aotna
eonsid^ratiotts ne sont qu'aooeaaoires ,
car ifest folic de fonloir fonder le bien-
itxe mat^el des masses et le triomplie
de I'lndnstHe sn^ mie base quetemoio-
drie cboc peut irenTcrser. A oeux qui
troQvnrafent que nous tirons des foits
enstants des consequences foiota,
nous deaftanderoos pourqnoi TAngle-
terre « qui ne reconnait point le Uocus
oe^ cotes de ia Gitoassie , a laisse cap*
tarer le Vixen; pourqooi elle trahit,
par deft deaai-mesures , les inquidtudes
que hii cause son eonameroe menace
sor le golfe Persique; pourqooi les
Russes , derenus anxHiaires dea Verses,
poussent ces demiers corame avant*
garde dans les solttudes qui les s^-
pat«ent de llade. Trois c«mts lienes de
pays ne sorit pas un obstacle infiran-
ehissable pour des -nonades qni peu-
vent aller partout oh lenrs ehevaox
trottwont de Teau et des plteia^ea, et
qui n'exigedt povr leurfiroplv anbais-
tance quece que la nature ne refuse
nulie part. *Les Turcomans et les Bou-
ktMns peuvent ats^ment sjvnpatliiser
avec les Tatarsi, les BaofaiLifns et les
nombreuses tribus BM»goles. Mon-
trez k la foule Teapoir du pillage , aux
ebefs la perspectivede queqaear6com-
pisnses et de la protection impMale,
et, en peu d^ann^ea, le dtert aura
abaiss^ ses barri^rca derant leoourage,
la pers^^rance et rhabild^ de «eox
qui marcbent et marcbent sans oissse
pour aoBomplir les totinees de la
Russie.
R17S15I£.
La qnettkm greoque a ▼ivemeiit
pr6occap^ TEafope, qui 4Mt lofn de
8e4ooter eombien le triompbe appa-
rent de la MbertiS senrait les intmta
ks plus titaux 4u dc^potisme. U ^tait
nataret que le principe ^'une guerre
d^ind^eodaiiee |>ardt stranger au but
de la Russie ; mais rerreur await 4Q
cesser dds que Ton vit le cabinet de
Mersbouig se declarer protecteur de
k r6voite des Hefl^nes , et il ne fallaft
pasune grande 8a^it6 pour dtouvrir
que la Russie allait directement k son
but constant , rasservissement de la
Turqoie , en encbidnant k sa politiflue
les ueux pays dont Talliance intern-
gente pouvait paralyser tous ses efforta.
Kotre sujet ne oomporte pas un r^dt
detarN^ des ^T^nements qui ont ameni§
f^reetion de la Grece en royaume;
mais fl n'est pas sans importance de
rapporter en peu de mots quelle a ^
ia part d*influence de la Russie sur un
mnement qui a prepare les faits tels
mi*OQ les a vus raocomj^lir en Orient
dans OQ but qui ne sauraitplus €ixt un
mystere.
'(Test apr^ la paste de 1756 , qui d6-
sola la (jrrhcie^ et lorsqu'elle avait h
peine r^par^ ce desastre , qu'eut Ifen ,
en tTTO, rexpMition des Russes en
Morfo. En se conformant au plan de
Montcfa, Catherine II Toulait op^rer
one sdssion religieuse entre les Turcs
et les proirinoes chr6tiennes qui leur
^ient soumises. Gette exp^ition at-
tira de grandes calamity sur lesGrecs,
que la Porte regarda toujours depuis
comme disposes h devenir les auxi-
liaires des Russes. Des hordes d*Alba-
nais envahirent la peninsule, occupy
rent les districts les plus fertiles; et
bientdt furent abolis les droits stipules
du peuple^ee, ses institutions natio-
nales , fes immunltes de son £glise , et
les caract^es prindpaux de son admi-
mstratton interieure.
Gependant la Russie, mii\€e k toutes
les grandes luttes de TEurope, depuis
la revolution de 69 jusqu'll la chute de
Hapalfon , n'avaitpas le loisir de pour-
nifre ses projets sur la Turqiiie. Pen-
^'aat cet intervalle , la Grto Jouit de
<foeiqne rtpos; <A les Turcs n'tyant
rien ft eraindr9 de oefM, its la lais-
adrent oiganiaer denoiiveau lesmoyens
de se gouvemer et d'^glr plus tard
avae nne oertaine ind^ndaiioe.
« En 18S0, nne organisation munl-
cipale existalt sur tous les points de la
Of^. Un oonseil nounicipal centra! «
reprtentant les communes de toute fai
Grke , si^eaH , comme assesseur, au-
pr^ de r8utorit6 d^l^u^ par le sul-
tan. Son intervention toit l^alement
indispensable dans radministration de
la province ; et non-seulement ce con-
seil grec avalt des moyens d'anpel h
Constantinople, mais ses dele^u^
dans cette capitale y repr^sentaient
les int^rto de hi province. » (Port-
folio , n<» )S ert 93.) ifous sommes loin
d'avancer que le gouvernement turc ,
avec 1es exactions de ses pachas , et sa
iiaine forutale pour tout ce qui ^tait
<sbr6tien , pdt contenter les Grecs ;
-nous Toulons seulement Indiquer que
TEurope, en prenant la-Gr^e sous sa
tutelle, devait €tre plus soigneuse de
lui assurer un meilleur avenir. ^ous
Savons que, sous le resne d*Alexan-
dre, en f814, une sodm (H^tserie)
6*<^tait organis^e efvGr^dans un but
d'tnd^pendance. Malgr^ la repugnance
que rempereur t^moigna depuis le
congr^deVieonepour tous les mou-
vements qui avaient un caract^re in-
aurrectionnel , la Russie ne laissa pa$
6chapper l^occasion de dinger les voeux
des H^Uenstes dans un sens favorable
k ses int^rdts. L'ecrit pubKe en 1819,
par le comte Capo-d^Istria , indique
suffisamment cette tendance. D^ Tan-
n^ suivante, Tassociation s'aocrut
sensiblement , et les primats des lies
grecqaes entrerent en communaut^ de
principes avec les H^tnristes. En 1821 ,
la tentative du prince Ipsilanti fut
hautement d6savou6e par Alexandre,
soit que, tout en approuvant le but de
^association, il juge^ que oettelev^e de
boucliers ne pouvalt avoir I'appui du
chef de la sainte alliance, soit que
I'exaltation d'Ipsilanti eAt devanc^ le
temps opportun. Quoi qu*il en soit,
les preuves de la coop^ation indivi-
dueile d*un grand nombre de Russes
ouvrirent les yeux du Sultan sur |e|i
600
rUNIVERS.
dmger^ qui le menaqaieDt. II prit aut-
fiitdt des mesures de repression dont la
violence irrita lea Greea et rtodit tout
rapprochement impossible. II impor-
tait'i la Russie que cette rupture fAt
profonde: si la Grdce parvenaiticon-
2[u6rir son ind^pendaoce, la Turquie
tait affaiblie et perdait une position
maritime de la plus haute importance
.dans la Mediterran6e; si la lutte se
*prplongeait ind6cise , les Turcs s'^pui-
saient en efforts st^riles , et les voies
dipiomatiques s'ouvraient k Tinfluenoe
russe ^ travers les pr^textes les plus
sp^ieux. G*est dans ce but que le ca«
binet de Petersbour^ d^non^a a I'Eu-
rope cette insurrection dont il avait
fi^nd^ les germes. II proposa , dans
un m^moire communique a toutes les
cours europ^ennes , r^rection en Grece
de trois principaut^s qui seraient gou^
vemees par des princes grecs, sous
une certaine d6pendance de la Porte ,
et avec des institutions analoffues k
celles de la Moldavia et de la Vatachie,
que garantiraient les cours alliees ou
celles d'entre elles qui voudraient con-
tracter cet engagement. Ce rapproche-
ment etait trop siguificatif pour que
TAngleterre ne s\>pposdt pas a une
telle mesure, que la Porte declina d*ail-
leurs forroellement.
La loi organique d'£pidaure , r^di-
£;ee en 18^1 par Maurocordato, sous
rinfluence anglaise, etablissait Tind^-
{)endance de la Gr«ce sur l^s bases les
plus larges de la liberty civile et reli-
gieuse. Ce li-beralisme de vues de la
part du cabinet de Londres etait tout
simplement une affaire de |)osition , et
le resultat de la crainte qu*iospirait la
Russie, plutot que Texpression d*uu
zeie sympathique en faveur des Grecs,
comme la prouve depuis la conduite
des agents anglais. Cette loi (Port-fo-
lio) tendait a attirer en Grece la popu-
lation des pays voisins , a y offnr un
refuge a toutes les victimes des perse-
cutions politiques; et, quand l^irdre
serait retabli , a assurer le bonheur de
tous les habitants de la Grece par un
systeme de tolerance universelle, d'e-
plite devant la loi , d'independance de
la magistrature, et d*uue forme de
Eouvemement representatif^ devant
(quel Tautorite executive elte serait
responsable de Texercice de son pou-
voir.
La Russie ne pouvait voir d^un ceil
indifferent les maftres de Malte et des
ties loniennes afBdier des pretentions
sur une province essentlellement ma-
ritime. EUe avait h lutter en Grece
centre le parti anglais et le parU fran-
cais. Ce denrier ne lui inspirait que de
taibles craintes, le gouvemement de la
restauration appuyant d*c»dlnair6 la
politique eenerale de Talliance; quanC
a rAutricne , eUe ne pouvait que s^ei"
iacer entierement dans cette question ,
apres avoir offert h la Turquie de Fai-
der h etouffer Tinsurrection. II y avait
done en Grdce une lutte diplomatique
qui dominait la lutte de fait, et dont
les efforts tendaient a desorganiser les
elements d'ordre et de force qu'une
intervention iranche et desinteressee
aurait nu feconder sur cette terre clas-
sique de patriotisme , de genie et de
civrfisation. La sympathie des peuples
de TEurope chretienne , de ceux sur-
tout qui , dans la cause des Hellenes ,
appuj^aient un principe oppose aux
pnncipes du congres die Verone , avait
accoutume les Grecs k Y'ldie oue la so-
lution de leurs debats ne viendrait que
du dehors ; et , comme leur resistance
s^appuvait principalemetit sur leur ma-
rine, il etait naturel qu*ils tournassent
leurs vocux du c6te de I'Angleterre.
En 1825, les primats de la Moree et
des ties, le prince de Malna et les
membres les plus distingues du clerge
se reunirent pour placer rexistence po-
litique de la Grece sous la protection
exclusive de la Grande-Bretagne , et its
envoyerent, a cet effet, une deputa-
tion en Anjgleterre , avec une dedara-
tion appelee Acte de protection , et la
demande du prince Leopold de Saxe-
Coboure comme souveram de la Grece.
On declina cette offre, qui etait plus
hostile au sultan que rerection des
trois principautes proposee par la Rus-
sie , et parce que cette derniere puis-
sance , appuyee de la France , n^aurait
pas manque de s'y opposer.
Le desir exprime par les primats do
• • •
• • a
• • ••
••• •••
• • • • • •
• -•
• a. • •
• - »
• • • • •
•• • • *•• *
• •• •
* • • •
RUSSI£.
601
Yok la Grte fourero^ par un prince
losiais proavait Ji la Russie que son
iQiIuenoe 6tait pr^ de suocomber ; elle
eot reooars, pour parer ce coup, aux
ressoaroes de sa diplomatie si habile
et si d^i^. Le protocole sign^ a Saint*
P^tersbour^ en fivher 1826 amena le
traits de juiiiet 1827 , entre la Russie «
la France et FAngleterre. Pour moo-
trer oombien les suites de ce traits
tromperent les provisions du cabinet
britaonique y nous citerons le Port-
folio.
« Le fameux traits du 6 juillet ac-
oorda k la Russie de si formes avan-
Uges, gu'on pent dire qu'il a presque
aooompTi tons ses projets h T^ard de
la Grm. II fonna une serie de coni-
binaisons pour en ouvrir une toute
nottTelle. Jusqu*^ oette Opoque , quel-
que habtles, beureuses et etendues
^'eossent 6t6 les intrigues de la Rus-
sie, oette puissance n*agissait cepen-
dant que dans son caractere individuel ,
et arait coustaminent a se premunir
contre les chances qui , d'un moment
i Taatre , pouvaient faire dchouer tous
ses jrians, savoir : I'union de la France
et ne TAngleterre contre elle , ou , ce
qui ^it encore plus h craindre , le
rapproeheooent de TAngleterre et de
la Turqirie. Par le traite du 6 juillet,
la Rossje se vit delivr^ de ses dan-
gers, la Turquie fut priv^ de tout se-
cours possible de la part des puissances
europeennes ; TEurope (ut mise en op-
position, pour ainsi dire, avec la Tur-
quie, et hi dir6tient0 avec Tislamisme;
enCnTinfluence morale, et, par suite,
les armes de TAngleterre et de la
France furent mises a la disposition
^ la Russie... Cette puissance, en
montrant qu*elle avait un moyen de
^^oercition a r^ard de la Turguie , et
^annoncant qu*elle Texercerait m^me
^te seafe , amena T An^leterre a pren-
dre port h ce traite, et a donner ainsi
j sa politique un point d^appui assez
Krme pour prendre a loisir tous ses
'vantages. •
I^ catastrophe de Navarin , la mort
l^rematuree de Canning , et les embar-
fu qai assaillirent le cabinet britan-
Dfque, embrouilldreot les n6gociations
au jirofit de la Bmak » qui se hkia de
vider ses griefs partieuhers contre la
Porte, tandis que le traits de juillet
liait et TAngleterre et la France.
G'est sous Tempire de Tinfluenoe
russe qu*eut lieu , en Gr^ , la nomi-
nation de Capo-d'Istria k la prteidence.
Get homme d'Etat quitta Geneve en
1827 poor se rendre k Saint-POters-
bourg,ou, apr^ s'Otre affranchi du
service russe , il se rendit k Londres
et k Paris ; ce qui 8enri)lait annoncer
qu*il prendrait plutot conseil des exi-
gences politiques des puissances signa-
taires que de I'Otat du nays qu'il etait
anj)el6 a administrer. IJ ddbarqua en
Grece au commencement de 1828.
« Le pays Otait tombe dans un Otat
oomplet d anarchie. Le peuple mourait
de faim ; la ^erre civile desolait Nau-
plie; rinterieur Otait infests par des
brigands , et les eaux de la Gr^e ^taient
couvertes de pirates. Les %yptiens
6taient en possession des forteresses,
et le president n*avait aucune force re-
guliere sous son commandement. »
A Tarriv^ de Gapo-d'Istria , Tordre
s'^tablit comme par enchantement ;
mais cet accord et cette soumission
n^etaient aue Texpression de Tespoir
qui accueiilepartout inauguration des
pouvoirs, et qui fait place k la m^-
nance et k la haine, non par Tincons-
tance des ^ouvem^s , mais parce que
la reality dement trop souvent tout ce
qu'on avait esp^r^.
On ne fut pas longtemps sans recon-.
naftre dans quel esprit il comptait
agir. « II dit a la premiere deputation
qui le saluait a bord du Warspite :
Sayez sur vos gardes vis-d-vis des
maltres de la maison, Lorsqu'il visita
Tamiral Miaulis k bord de sa fregate
Hellas, il lui dit, en le prenant a part :
fai merveiUeusemerU Hri parti des
simpletons de Londres et de Paris.
Cest vers le Nord que nous devons
tourner nos regards; nos amis ne
sont que Id, Cest de la part dujetine
homme ( and too vsoO ) que nous pouvons .
et devons attendre tout ce qtd peut
nous enrichir et nous fionorer, Bien-
tot apres, le conseil l^gislatif fut rem-
plac^ par le Panhellenium , conseil
L*UNIVERS.
fiompos^ de vingt^sept membrM
sis par le president, -et asaooi^ k la res-
poosabfliw de son administratkni Jut-
qu'k la v6union d'un oangrte national.
Pour^kniner les liberty munidpales,
il aboHt le aysttoe des Elections po-
-puiaires, et nomma des fitMeU pro-
Tinciaux , des juges de pais «t des d^
mogerontes.
L'arriv^ d'on ocnrps francs en
Moree pour presser r^?acaation du
pays par les fifg^ptiens , et les conH^-
rences des amoassadeurs des trois
ours protectrioes, r^mis k Poros en
1 8S8 , d^toumi^eiit I'attention pufoli-
que des affoires d'organisation int^
rieure. Le r^ultat de ces eoof^renees
fiit de combiner en Gr^ les ti6ments
du ponvoir repr^ntatif , qui ressor-
tait des aneiennes institntions, avec le
princrpe d*un pouvoir supreme hM-
ditaire. Capo-dlstria essaya de para-
lyser line mesure qui , en subordon-
nant son autorit^, devaft porter un
coup fetal k I'influence russe. Le oomte
Bulgari toivit un mtooire sur I'tot
de la Grtee, et ce document, en?(w6
k P^ersbourg par le pr^ident, tut
fmm^diatement transmis an prince de
Lieren pour servir d'annexe au pro-
tocole de la conf(^rence. Ce m^moire ,
toit avec une grande babilet^ , pr^
sente les primats comme ne poss6aant
ni les vertus ni les talents sur lesqueh
des soci^t^ bien organist puissent
reposer. « Ce serait une illusion bien
strange , y esMl dit , de penser serieu-
sement k organiser en Grece un gou-
▼ernement quelconoue sur des prin-
cipes constitutionneis.
« Les sacrifices d^^ faits par les
puissances leur donnent le droit in-
oontestable d'exercer une interTention
active sur la forme du gouvernement
en Gr^e , et d*en exclure tout principe
qui parattrait incompatible avec la
r6elle tendance sociale des Grecs et
avec le repos de I'Europe.
« II est nnportant que les trois cours
s'aocordent, sans d6iai, sur la forme
du jgouvememcnt et le mode d'organi-
sation k introdnire en Grece. Toutes
les autres questions , mtoe celles de
Itmites, de tribut, etc., ne peuvent
1101
<0ti6 coMkMries ^e ooBSine oompl^
lement seoondaires, et sobordona^
k la forme du gouvernement.
« £a tairtant de la Grtoles^Mments
peuvent trouUer la sddM, les
rois oowrs ne sauraient ne pas reodre
farrangement ^ul va rteulter du traits
de jumet partie intrants des ades
de 1614 , 1815 et 1818, qui ont a68ur6
la IranciuiHit^ de TEurope. Ce a^st
^'ainsi que les puiasanees vont frap-
|>er au occur les dtoagogues de toQs
les pays , en prouvant qu^ucune r6?o-
iotionne saurait avoir lieu, sans 6tre
aussit6t 6cr3s6e par les forces r^enies
des souverains alli^ ; et que , lors<|fie
m^me certaines r^volntioBS seraient
rafsonnables et possibles , elles trou-
veraient toujours une barri^re insar-
montable dans Tactton combing des
eouronnes , et dans leur volenti d^-
d^ ou de les d^truire on de les faire
toumer k Tavantage de fordre social. »
Le r6sultat des efforts deCapo-d'Is-
Ina fut d'annuler le voeu du parti an*
glais , en emp^chant indirectement le
prince L^opoul d'accepter la souvcral-
net6 de la Gr^ : il eut Tadresse de
prtedter oomme des anardiistes les
primats qui invognaieirt les premiers
la forme monarcnique. Tout ^it eo
Grhct confusion et servilisme, lors-
2u*6clata la revolution de juillet. Capo*
'Istria , k cette nouvelle , s'toia ini-
m^me que son beure 6tait venue. La
Russie, appuy^ par la France k la
conference de Londres, se trouva a
son tour isol6e; mais , toujours babile
k tirer parti des circoustances en ap-
parence les plus d^avorables , elle oom-
prit que I^uiion moroentanee des deux
cours netiendraitquefaiblcment centre
la rivalite des int^rto; et, tand^
qu'elle contenait la jenne royaut^^ re-
volutionnaire par la menace d'une
coalition europ^enne, elle alamiait
TAngleterre sur les r^ultats probaWes
de remancipation fran^ise. L^avene-
ment de lord Grey au ministirei la
question de rdforme , cdle du cathoii-
dsme en Irlande , la taxe des pauvrcs
et le poids de la dctte nationale , teis
sont , k rteard de la Grande-Bretagne,
les auxiliaircs de la politique russe.
mvssiE.
Qvant i te FffBOM^ les tondinoes oMh
Danii^aes4eaoa eouverneaient, prt*
wets du fffinotpe it ia I^timit6, le
d^ir du ipopos dans les masses en op*
positJoa avec ks esigeiioes logiqoes
des parli8,«n ub mot, tous Ics am*
barras inseparables d'te g^nd cIimh
genM^t dans un ^t aussi puissant.,
tels sent les gagts sinaii de1)on voih
loir, da moitis da netftraljt6 fbro^
qu'eye prtenta ii la petitiqiie. Nous
alkma voir au*en d^t de m sagadtd
dii prinoe de TsU^and, la Russia
n^en poursuivit pas nioins an Grtoa
roMivra qa^Ue avak si bian eonn
Le prdsidanA , dans son projet a?oo6
de rendn la Gireoe d^pendante de la
Rnasie, 6tafatit un systtoe rigoureux
de donanes , at ^tendit si loin les droite
da fiac, qu'ti leiiait^ poor ainsi dire,
dans sa main la fortune des particu*
Hers. Pour lier ensemble les diTerses
branches de son admtaistration, il
er6a an agrst^sse de l^islation si oom-
pti^u^ et si oontraire aax id^es qui
avaieat oours dans le psys, que ses
lois , loia de pr^venir les abus , aem-
blaient faites pour rendre insolobles
ks questbos les plus simples , oa plo-
tfit pour awttre a la discretion da poa«
voir eidcatif la liberty des indivHlus
at I'excKioe du droit de propriety
CooMne totttes les mesures de rarbi-
tiaire s'sppellent et s'eachatnent, il
lui &]lut entraver la presse et jpm6-
vaAa k la fois les patriotes et las par-
tisans de rAngleserre. II n^est pas
doutaoK quek rerolte de Maina , d'Hy-
dra at des CycMes !ut excite oar les
agmts anglais. Us bidmaient naolo-
mant radministration du pr^ident , at
sendrialant devoir amyer toute oia-
nifestation conlre Tintloenee i^ussa.
En prdmee de oe eonflit , le pays de-
noaada la r^anion d'oae assenbKena-
tionale: Opo-d'istria la convoqua
pear le 16 oetobre; an mdme temps il
travailta h s'assorer la roa^orit^ par de
Booiralles Sections ; et , appuy^ d'ail-
leors par las forses de la eonf^renee^
il envo^a 4es ovdRS seersts a Paros
poor abe aroier la marine natioaale ,
dans le iat d*afttaqaer las iles. Lors*
que les insovcds as ioittit eaqaorte da
la fr^te fielbs , du reite de la onurina
at de Pares , Taroiral nisse, qui eom-
mandait par anciemiele la flone aliite,
ae rendit k Paros avec soa esoadte et
une fr^figate anglaise pour renforcer
raotoril^ da president. On fit ooorir
le brutt ott'oB o'emploierait que das
moyens oe persuasion; mais, pen-
dant que les commandants anglais el
fran^tt ^taient alks k Nauplie pour
r^ler leur conduite ult^eure sur dit
nouveiies iostmetions, les Russes at*
taqu^rent les iarecs. Miaulis, k Tap*
nrodM des ebaloupes russes, fit sau-
ter sa frigate. Le pr^ident annoa^
par des proclamations uue les oom-
maodaats des trois escadres s'^taieut
mis k la poursuite des vaissaaux dea
insar(|6s ; ainsi, tandis que le r^ident
anglais avait encoorag^ la revolte, il
aj^issait coalarm^meBt aux instioic-
tions de la conf(6renoe, c'est-^-dire,
bostilement contre ses propres pcin-
cipes. II est difficile de pen^trer le mo-
til d-une telle conduite. Le but da
TAngleterre dtak-ii untquement d*em-
p^er rorganisation de ia Gr^ sous
un pr^idaiA russa, ou , dans la crainta
d^une attianee entre la Franoe ^ la
Russie, se trouvait-elle . forcee d'ap*
payer des mesures que la communaut^
d§ vues de ces deux puissdmoes ne lui
permettait pas de repousser saas ae-
tomber dans le m^me isolement ou
etie se trouvatt avaat la r^olution da
juillet? Le professeur Thiersch est
d'avis que le repr^entant de TAn-
Sletarre avait n^lig^ les int^dta
e sa nation pour servir eeux d*un
parti , qu'il ^tait enfin un reprtentant
des torys sous un ministers whig*
Quoi qu il en soit^ il en resultait pour
la Graade-Bratagne una deeonaia^sa*
lion r^lle.
LeS'Garecs, voyant quails 6taientca-
lomaies auprds de la conference, et
que Gapo^'Istria , en denaturaot leurs
rMamatioBS at leurs griefs , a^ai t Tart
de printer aux oours protaotriees et
au public eorop^n son administratioa
oomme r^poodant aux cRiganees das
temps , et comoie n^^tant eembattue
que par des artisans de d^rdre, r^
«04
L'UmiVERS.
solurent d*^rter a tout prix Tobstacle
qui 6'opposait h leur r^^n^ration. II
paratt qu*un article in8^r6 dans la
Courrier de Londres , et dans leguel
on censurait ^ergiquement le sjstema
arbitraire et antinational du pr^ideot,
irrita les esprits au point de leur mon*
trer le meurtre de Capo-d*l8tria eomme
le seul rero^e a une position deses-
p^r6e. Quelques enthousiastes , k la
wte desquels ^it Mauro*Micball,
tu^rent le pr^ident au milieu de ses
gardes ; et , d^daignant de fair, ils pa*
rurent satisfaits d'avoir firapp^ la ty«
rannie au coeur. Dans les temps an-
tiques, on leur eAt ^lev6 des statues,
et les femines eussent honors leur
d^vouementcomme celui d'Harmodius
et d'Aristogiton ; mais la diplomatie
moderne redoute et condamne les actes
d'energie individuelle ; elle a besoin,
pour vivre elle-mtoe, de discipliner
)usqu*an m^pris de la mort.
« George Mauro-Michali , ouoiqu'il
ne pdt me coropte parrai les nomroes
les plus influents de la Gr6oe, se trou-
▼ait n^nmoins au premier rang parmi
les Grecs , eomme le repr^entant d'une
de leurs families indigenes les plus dis-
tioguto. II ne s*etait jamais m^l^ d*in-
Irigues politiques , mais il 6tait oonnu
par sa bravoure sur les champs de ba-
taille , par FamabiJit^ de ses disposi-
tions personnelles et par une ^l^anoe
remarquable d'esprit et de corps. Ce
fbt son d^vouement patriotiaue qui le
poussa h son action; ce fut (a simpli-
city de son esprit qui Tempteha d*uti-
liser la chute de Capo-d*Istria et d*or-
ganiser un parti.
ftApr^ qu'on se fut empar^ de
Mauro-Michali , et qu'Augustin Capo-
d'Istria cut sacc^6 k son fr^, le
sort du premier parut fix6. Enferm6
dans un des forts de Nauplie , sous la
garde de toutes les forces militaires du
gouvernement Capo-d^Istria et du ca-
non des flottes alliees , il ne serablait
▼ avoir aucune chance pour que Mauro-
Michali pdt ^tre d^livT^ par des mou-
vements politiques quelconques, ou
prot^6 par les sympathies du peuple
grec. Gependant le gouvernement crai-
gnit de conGer son proces k des tribu-
naux ordinaires* On oonfoqua une
cour marttale: un Anglais, M. Mas-
son, se pr^Dta devant elle eomme
ddfenseur de Taccuse ; et oe ne fbt pas
sans de grandes difficult^ qu'pn y ob-
tint une oondamnation capitale. Le
jour de I'extoition vivra longtemps
dans le souvenir de toute la Gr^ce.
Mauro-Michali fut fusiil^ devant les
reroparts de Nauplie, odi il parla il la
foule assemble, II ne Tentretint ni de
lui-mdme ni de son sort , mais de son
pays, de ses gric»&, de ses p(6rils; et
ses expressions si vraies touchaient
tellement le eoeur m^me de ses enne-
mis, que, lorsgu*il tomba, ramiral
Ricord , qui dirigeait i'extoition , ou-
bliant son rdle de Russe pour son ca-
ractdre d^homme, se prtopita vees le
cadavre pour le prot^er contre les
insultes de la troupe servile , et s^^cria :
Jamais un homme ne maunU joius
giorieusemeni! y»
On serait tent^ de eroire que Tin*
fluence russe dedina en Grrae apres
la chute de Capo-d'Istria : il n'en ftit
rien ; oe n'^tait pas vainement one le
comte Nesselrode avait annonoe , par
I'organe du prince de Lieven , k la con-
fiirence de Londres , que la foime du
gouvernement ^rec ^tait pour Fempe-
reur une question vitale. Le premier
protocole, sous le minist^e ae la re-
forme et de Talliance anglo-fran^aiae ,
en £iit foi : il y est d^are, entre au-
tres stipulations :
a Que le principe de la coiifi6reiice
sera de continuer k prater apmii au
gouvernement provisoire 6taoli en
Grece, jusqu'li ce qu'une ^poque,
oomme celle de T^lection d'un aou^re-
rain, dans un temps fort lapprocb^,
eermette de fonder un gouvetaemeot
fixe dans ce pays. Ce principe ne
pourra que porter kus pesidents des
trois cours , les commandants de hmus
forces navales dans rArcfaipd , et Le
commandant des troupes tranguns
en Moree , a employer toute leur in-
fluence pour d^oourager les fauteurs
des tentatives de troubles et de r^
voltes. II est done indispensable :
>' t*" Que les rteidentsoes trois oours
en Gr^, et les commandants des
RUSSIE.
605
forees navales , se concertent avec le
gouvernement grec sur les meilleurs
rooycns d^employer leur iDfluence pour
hvtt cesser 1 6tat d*insurrection dans
Tile d'Hydra , et de pr^venir Textension
des troubles aux autres ties de la mer
tgfe;
« T Qu'en exi^cutioD de eette tdche ,
Hs tirent parti de tous les moyens de
coneiliatioD , et fassent valoir toute
rinfluence morale de leur autorit^
r^nie;
« Z^ Qu'ils conviennent des mesares
Deeessaires pour pr^venir le renouvel-
lement de la piraterie... Ge que la
oonfi^oce ne peut trop recommander
aux r6sidents des trois cours , et k
leurs ofBders de terre et de mer, c'est
de maiatenir invariablement une par-
faite unit^ dans leur langage et aans
leurs decisions. Nulle separation de
raliiance n*est admissible dans led af-
Cures qui int^ressent toutes les par-
ties. Elle ne doit , en aucun cas , £tre
^Doee ni avoir lieu.
« Le principe fondamental d^coule
de ruDioQ existant entre les trois cours.
L^obsorration en est done essentielle ;
et la conference de Londres ne peut
ft*empCdier de rappeler encore une
fois aux r<^idents de France , d' Angle-
tern et de Russie en Grdce, ainsi
qu'ata commandants de leurs forces
navaka et militaires , la n^ssit^ ab-
soloe de s'abstenir de toute action s^-
par^, et de faire r^gner une unani-
miteparfaite dans toutes leurs decisions
et toutes leurs mesures. Sign6 : Tal-
leyrand, Palmerston, Lieven, Ma-
tuszevics
On Toit que ni la revolution de juil-
|et ni la r^lorme n*avaient rien change
a (attitude de la Russie dans la Gr6ce ;
et, comme le cabinet de P^tersbourg
avait iadis exploit^ T^tat d'bostilit6
eatre FAngleterre et la France jusqu'^
ia chute de Napolton; comme depuis*
li avait affaibli Tinfluence anglaise
eo encfaatnant k ses vues le gouverne-
oient de la restauration , de m^me en-
core, et dans des circonstances toutes
difiia*entes, il trouvait de nouvelles
itssouroes pour 6veiller les appr^hen-
sioos et les susceptibilit^s aes deux
cours etonn6es de leur alliance rtonte ,
et presque entratn^es par la seule force
de leur pass6 5 n*agir que. dans la
provision que les rapports de leur
mutuelle btenveillance pourralent chan-
ger d'un instant k Tautre.
Or, dans une provision de cette na^
ture , c'etait k qui irait au-devant des
pretentions de la Russie, moins en-
core pour se manager Tappui de Tem-
pereur que pour emp^cher un rappro-
chement exdusif entre la Russie et le
cabinet rival.
C'est ce qui expligue pourquoi Au-
gustin Capo - d'lstria osa op^rer en
Gr^ce des changementsdevant lesquels
son fr^re avait recuie. Au lieu de reu-
nir Tassembiee nationale qui n'avait
6t6 que prorogue, le s^nat assuma une
antorite supreme, et cboisit une com-
mission administnitiveVcompos(6ed'Au-
gustin Capo-d1stria,!de Colocotroni et
e Coletti : Hydra i^esta bloqu^e, et ie
resident anslais fut encore une fois
force d*agir hostilement contre le parti
aui roettait en Jui ses esperances. II
etait aise de piievoir les consequences
d'un pareil etat de cboses. Augustio
fut eiu president, et les opposants,
dont la resistance fut bientdt compri-
mee par la force, ne parent distinguer
leurs amis de leurs ennemis.
Malgre les mesures oonciliatrioes
proposees par sir Stratford Canning,
ambassadeur britannique pr^ la Porte
ottomane, et qui etait veiiu passer
quelque temps k Nauplie, Augustin
Capo-d'Istria pnblia un decret decla-
rant Coletti et les deputes rouraeiiotes,
c'est-^-dire, les chefe du parti anti-
russe, coupables de haute trahison,
et les proscrivit comme rebelles , trat-
tres et gens mis bors la loi.
Peu de temps apres, les escadres
des puissances allieessaluerentlecomte
Augustin Capo-dlstria president de la
Grece. Les protocoles continuerent k
regenter la Gr^ce , sans s'occap^ de
detruire la racine du mal. On apprit
bientdt la nomination du prince Otbon
de Bavtere, choisi par la oonferenee
pour essayer la couronne de la Grto
re^eneree. Les partis etaient sur le
pomt d'en venir aux mains ^ lorsqu'une
too
LTTNITKHS.
p ■
fi4nte aa^ise anrivs or^ 4e8 d^-
praes de ConstantiQople ; eUe appor-
tait HO QOttveau protocokqui prescri-
vait ao gouvemement UQ ^steine
d'aocommpdeiQeiil et de toioci. A cette
neurelle, Auffostin Capo-dlstria, i^
doutant peut-etre le sort de son frire ,
s'emtenjiia da nuit siur un brick ruase ,
et M setira a^eci sea partiaaas lea jdiM
oompromis dans llle de Gorfou.
Le protoeole dont uoiis veoons de
oerler aviut ^ dresa^ en dehors dea
laits accomplis , c'est^-dire , dans la
supposition que les partis en Gr^
ae troiivaient (Jans la m^me situation
respective : les r^idents 8^ virent
done dans l*obligatioa de SMivre leurs
instructions h la lettre^ et de trayaiU
ler h emp&^her le parti national qui
trionphdit li ne pouvoir proiUer de
aes avantagea; c'etait reorganiser le
d^rdre. On confia done au s6nat la
ticbe dlnstituer un nouveau gouver*
nement de eupq membres ^ dont quatre
furent eboisis dans le parti ruase;
oette eombiiiaison ayant ^cbou^, on
easaya du norabre sept, niaia aana
plus de auccte : alora lea residents con*
aentirent k laisser pr^domioer )e parti
Qonatitutiono^ ; mais oe r^ltat fut
de nouveau aniiihile Mi moyen d*una
disposition rtelam^ par la minorite
rusae, M qui rendait n^oeasaire, pour
la validity de cbaque dtoet, one vm^^
iorit^ de cinq voui< Pendant ces tirail*
lementSi rien ne a'aohevajt; Tabsenee
d*iin gQMvememeHt reooonu ouyrait
un champ ilbre k toutes les intrigues;
le service public ^tait ep spufjTraiBU^;
on e(H dit que les cours protectric^
preoaient a ttehe de d^montrer^ par
le spectacle de ce qui se paasait en
Grece , au'il oe pouvait r^ter d'une
insurrection populaire que nis^ et
anarchic.
Cokwotroni m6oontent guitta Nau-
pUe« mena^t de revenir avec lea
Klephtea, pour tirer vengeance du
parti eoBStitutionn^ , et aoutenant
au'il en avait le droit , puisque la coi»>
nrenoe e« avait nua nors la loi lea
raembres les plus influents. Un de sea
<»u8ins, Zavellas, a'cmpara de la ci^
tadeUe de Patraa.
«Le gouvemement provisoire en
appela au protoeole de mars, et de-
manda aux r^idents de faire oocuper
par lea tronpes de ralliance les forte-
resses de Patras , Ck)rinthe et NaapHe,
Jusqu^i Varriv^ du roi Ofton, ^ la
disposition duquel elles avaient d^i
6Ce plaetai par le traits du 7 mai. Ja-
inafs lintervention de la diplomatie
ne fiitplus compl^tement derisoire:
le g^n^l Gu^^neuc, commandant des
troupes fran^ises, marcha, en con-
sequence, sur Patras, dont les habi-
tants avaient invoqu^ la protection du
ministre hritannique.
« A Tarrivte du g^n^ral firan^, ii
ae trouva que les residents avaient
toit ^ leurs consuls h Patras de som*
mer Zavellas d*evacuer la fbrteresse,
maia de rinformer en mtoe temps
que, s*U s*y refusait, il n'y serait pas
contraint de vive force. » ( V<)ycz
Thiersch, tome I, page ISO.) Zavel-
las f sans s'inqui^ter de la solution de
cette exigence, commit toutes sortes
de violences et d^exactions contra les
habitants de Patraa.
Cependant rasseoibl^ natlonale al-
iait se r^unir; die avait ^d^Iib^er.
1° sur la ratification ducboixdn prince
Othoo ; 20 sur la reconnaissance da
({ouvernement provisoire , form^ pr
es r^idents , et constitu^ par le stot ,
Eoais d^pourvu encore de sanction 1^
sale; 3<» sur la garantie des emprunis
faits en Angleterre avant qne Vind^
pendanoe de laGrdceettt^t^reconnnei
4* aur la proclamation d'un aeted'ani*
piatie pour tous les d^lits politiques.
Les r^idents entravdrent de toot leur
Souvoir cette mesure: elleaorait frapp^
'impuissance les partis qui se seraient
trouves oppose ^ la manifestation du
voeu national, Cependant I'assemblee
se r^nit h Pronia ; elle reconnut par
acclamation le prince Othon poursou-
verain , et d^igna M. Thiersch pour
porter la ratification de ce diois a>
Bavi^. Le prince de MaTna , oubliant
tous aes gnefs, proposa le premier
une amnistie ri^e qu'on aaopta a
Tunanimite. L'assembm proo^ en-
suite ^ retablissement d*une constitu-
tion definitive , selon le vcru de la con-
! \
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RCSSIE.
607 ^
iieDoe, etr pcm qte les di^MMitions
^ipays fusMQt bicB eoDiMCS dii nou*
vnu sonveraiB. La Rnnie, en ce qur
^itgviadt la qncitioii fisand^e, avaft
iomt a oe qse l» Grto ne s'engage^l
a KKiiiie raatitutiow covers la Grande-
BRtij^; noas empnnitima la cita-
tknsuivaBte aa pronSBsem' Thieraeh ,
poor moalnsr oocile fbt Taction de la
poTitifBt da cairiiiet imperial dans cea
em^onctiires si d^cates; et si eette
^e de Botre wMt pandl se ratta-
dier fhu partieoti^enieDt I rhistoirB
deb Grdee, ette n'en est pas moins
id a sa place, eoniine cxpliquant k
*|Efpnid6r»ce de ka Russie dans un
fKjfB ^'elle avait pepar^ de longue
■aiQ a nne separation Tiolente d'aveo
k Tuimie , et qu'elle a'efforce encore
at^ottra'hai de ramener aoos son pro*
toefiorat inuqidiat, en emp^ant \e
diteio^pemeiit de aes institutions, de
SM atbanees et de'sa (nroep^it^ , sous
toutees^eoe degouTemement qui V^
loigDeraitd'ane d^pendance absolue.
« Panni les <qiposants dans Fassem*
Me, en voyait au premier rang Pami*
ral Stranger (Rieord). U avuit, au so
de toot le moode , pns trop de part
aux afUrss d'Argoe , et ^ait trop Hd
aYee le conte Aogustin poor ne pas
louder eomme personnels les dan-
CI qui mena^aient la reputation et
intMts de son ann. £n n^gocia-
tear habile , il oommen^i par cherdier
jes partisans dans les rangs de ses ad-
veraaires. Les Malnotes , et parmi euz
la ^miUe des Mauro-Michahs , forent
Tobjet de aes pr^enances empress^.
L'amiral leor avait t^nsoigne k diffi6-
raatca reprises, au temps de leur ad*
veraite , an int^rft et une bieoTeillance
qoi oertes lui faisaieot bonneur. Comp*
taot aor leur reconnaissance, il essays
de gagner Elie Itfauro-Michslis, sans
i^ laisser ddcourager par radmiration
que mani&stait oe jeone homme pour
40O oBcie Constantin et son cousin
George, qui afaient tu^ le president.
I^ trouvant peo accessible h ses a?an«-
068,11 euToya son aide de camp vers
le dbti de u famille, Pierre, ^ale-
ment v^n^r^ par ses vertus et par ses
souffiranees, et qui, avec les d^ut^s
mainotes , r^i«feit aiors h Argos . parmi
les autres membres de rassembiee na-
tkmale qui s'j rendaient en grand nom-
bre de tons cot6s. Le projet deramiraf
etait de detacher les Mauro-Midialis
dn reste de i'assemblee, et de leur
persuader de s'en retonrner ehez ecrx ,
ee qui aurait port^ les repr^sentants
de leur proTince h Its suivre. Sf oela
edt en Reo, la confiance des autres
depots se serait ^branlee ; et , en per-
snadant aux uns de s'en alter et aur
aulares de ne pas venir, on esp^rait
pouvoir reduire Passembl^ aux deux
tiers da nombre vouki par la loi pour
qu'eHe pnisse se constituer. Depais le
temps de Catherine la Grande , dit le
messager^ Pierre Mauro-Mfcbalis , nos
seuTcrains ont pris beaucoop d'int^r^t
k Totre femille ,^n appr^iant les ser-
vices qifelle a rendus k la cause qui
noDS est conraiane , et les vertus que
voos n'avez cess6 de d^ployer pour la
d^ense et le gouremement de votre
pays. L*eropereor actnel est prit k te-
moicner qu il en garde ie souvenir par
des dons et des bienfaits proportionn^
k Tos besoins et k votre dignity, si
▼ous oonsentez II suivre ses conseils.
Ni fall ni le pdre de votre roi ne sont
d'avis que rassembiee se r^unisse k
present. lis constderent cette d-mar-
che eomme nuisible aa bien de la Gr^
et hostile envers son souverain , puis-
qa*ils voient que Fassembl^ est com-
poS(6e de brouilions, et qu'elle nMnter-
viendra dans les affaires de la Grdce
que pour y fomenter I'esprit r-volu^
nonnatre et pour y rend re impossible
I'dtabUssement du principe nnonarcbi*
que. Les amis du bon ordre et de
notre souverain sont d^des k ne pas
tolerer cette r^nion de dtoagoguea
et de brigands. Vous devez k votra
dignity , il votre pays et k votre famille
de seconder nos efforts , et soyez as-
sure aa*en le faisant vous aurez bien
m-rite du gouvemement qui va s'-ta-
blir en Grace , et que vous y occoperez
une des positions les plos ^ev^. U
pria ensuite le prince de se retiiier
dans son pavs, et lui oifrit. k oet ef-
fet , un brkk ou mtoe la mgate de
Tamiral. Le vieoz pt'inee r^poudit qn'fl
608
L'UWIVERS.
ii*avait jamais douU des sentimeiits
de I'empereur enYers sa fomille ; que
si Sa Majesty avail rtommeot permis
qu*on la per86cuytt, la faute en etait
enti^ment h ses agents en Grace,
qui, 6*^tant tromp& eux-mtoes,
avaient dA induire aussi en erreur leur
souverain par rapoort aux sentiOMHits
d*bonimes n^ et elev^ dans Fattache*
ment h son auguste famille. £n ce
moment m^me, ajouta-t-il, je suis
dispos^g h me conformer aux vues et
aox oonseils de Sa Majesty imp^ale;
mais ii faut d'abord que je les appranne
d*une maniere positive. Certes , si telles
sont les intentions de TempNereur et du
roi de Bavidre , ils les exprimeroot di-
rectement et oliicielleraent au gouver-
nement grec qu'iis ont reoonnu. Mais,
avant que cette conjmunication ait
lieu , nous devons croire h une com-
munication qui nous vient d*autre part,
^ qui nous repr^sente le roi de Ba-
vi^ra comme ne d^irant aucunement
de nous imposer son lils , mais, au con-
traire , comme souhaitant que ce choix •
obtienne Tassentiment de notre pays.
Get assentiment ne serait ni complet.
ni valable, sll n'^tait donn^ dans les'
formes voulues par la loi ; et oes formes
l^ales n'existent en Gr^ oue dans
Tassembl^ qui va se r^nir. Nous ne
poQvons done pas autrement recon-
naltre notre souverain, et nous nous
sommes promis de faire de cette re-
connaissance le premier c^jet de nos
travaux l^slatin... Le jour suivant,
le messa£er ayant it6 introduit dans
une de Teurs r^nions, il y d^clara
qu*il avait €t6 dans Perreur h leur
egard , et quil ne pouvait plus douter
que tant de citoyens recommandables
ne fussent intmss^ au maintien du
bon ordre. On lui donna I'assurance
que les lois et les institutions pr^pa-
reesseraient d^cidtoent monarchiques,
et qu^elles ne contiendraient rien de r&
volutionnaire et de dangereux. »
Cette tentative de Y*amiral russe
ayant manau^, les r^idents parvin-
rent a introduire des dissensions entre
les d^put^ constitutionndset les mem-
bres tes plus influents du parti anglais.
Cette scission ne flt qu*augmenter la
coofusion et multiplier les eBibarras
qu'on pr^parait k la regenee. II fiit d6-
cide oue la reconnaissaDoe des somaMi
dues a FAiigleterre restenit endehon
des arrangements finaneiers de la ooo-
fi^rence , et le rte'deut britamiique de-
vint ainsi complice d'une ummt qui
imposait a son pays un saorifioe d'en-
viron soixante et quinze millioos. L'ai-
sembl^ nattonale essaya en vain d*ar-
r^ter le s^nat dans reiercice illegal
d'utt pouToir reoonnu par les ooun
protectrioes ; die fut disperse violem-
ment par la force armee, et Colooih
troni, I'ex^teur du parti nu8e,s'a<
vanqa a la t^te de ses bandes. l^e Mf
k la nouvelle de. la procbaine arriTM
du prince Othon , se hita de noffloier
un gouvasiement militaire, compote
deColoootroni, Zavellas, etdecinq au-
tres capitanis. Cest ^leioue temvi
apr^ qu'un r^meicii de a brigade
fran^ise , aprte avdir'6ehapp^aiu en-
buscades qu on lui avait tenduei Ion-
qu'il traversait la Mor^ poor ooaper
ArgoSt fut ddoyalement attaqu^dans
cette villcOn peut dire que les intrigoes
desj)artis^u8se et anglais, en frappaot
la Gr^^dans son existence intiow,
c^est-Miradans ses institutions, d*(Hh
pas fait moins de mal k ce pays f^
ne lui en a cause rhostilit6d6darfedes
Turcs. Cest au milieu des violcnott
excrete par les soldats de Coloootrott
que le pnnce Othon arriva en Gre»
tine flotte de cinquante-cinq Ultiniena
de transport, escorts par '* TJ*"
seaux de guerre des puissances aliKtf)
amenait le jeune souverain, une^
gence d'hommes d'fetat hautcment ^
timds en AUemagne , trois mUle sokja^
bavarois , et des ressources P^"'*!'?
sufQsantes pour les premiers bwoios-
Le spectade sur le rivage P»«^
un contraste frappant avec eette uoidf
d'installation, C^tait «?«>"15J!
paysans aocourus sur le lieu da ^^
quement, b6ros obscurs de tani «
luttes ^trang^res et intestioes, dom
Text^ieur miserable semblait aooon-
cer k V6\u des cours protectncci wuw
r^tendue de la tflcbe qji'il nVait ^
craint d'aocepter (f(6vner ^W»)- .
La r^elrtS, composA? du coffW
RUSSIE.
600
d'Annansperc, du g^eral Heydeck,
etdeHM. Maurer et d'Abei, devait
tntoorar le prince Othon de ses con-
seiis, et j^ouverner en son nom jusqu*li
sa majority. On proclama une amnis-
tie g^erale pour tous les ddlits politi-
ques. La nation reoonnut Tautorit^ de
la regence et prto serment de fid^it^
aa rot Othon. Trois coura de justice
furent instituees k Nauplie , h Misso-
longhi et h Thebes. On restreignit
Tusage des armes k feu ; on cr^ une
administration , une arm^ et une ma-
rine; descomit^ furent institu^ pour
aamioer les a£faires de I'fglise et les
besoins de Tinstruction pnblique; et,
pour appuyer les mesures de police,
on cr^ un corps de ^endarmene. Les
g retentions des anciens partis sem-
iaient efface ; il n'^it plus ques-
tion dq s^oat; et, pendant qnelques
iDois, r^tablissement de I'ordre amena
ies plus heureux rdsultats. Mais cette
harmonic ne fut pas de longue dur^ :
ie d^raiement des palicares et le
refus inopportun d'aroir 6gard aox pre-
tentions exa^erees des capitants , exci*
terent parmi eux un vif m^ntente-
ment. Le g^n^al Church se fit Tavocat
des reclamants ; et , n'^outant que ses
sympathies militaires, 11 ne cacna pas
que ces mesures ^taient dtopprouv^es
par le comte d'Armansperg, qui avait
M Met sur ce point a la determina-
tion de ses colleges. C'6tait pubiier
^'il I avait scission dans le conseil ,
et raviver les lattes intestines. Le sys-
ttme introduit dans la perception des
impdts oar Maurocordato, nomm^ mi-
nistre des finances , et (]uelques autres
reglements sur rexploitation par des
particuliers desterres appartenant a la
oonronne , blessaient le droit local et
entravaient sensiblement Industrie et
I'agriculture : cependant les bienfaits
de la nouvelle administration compen-
saient largement ses fautes ; et , ^ tout
prendre, la Gr^ ^tait dans un ^tat
prospcre.
Ce d^eloppement de ressources,
oas^surungouvemementind^pendant,
oe pouvait aue contrarier les voes de
H Russie. L empereur Nicolas nomnoa
poor son envoye aupres du roi Othon
39* Lh^aison. CRussis.^ t. ii.
M. Catacazi. Get agent eut ordre de
se rendre d'abord k Munich , afin de
ne parattre sur le th^tre de sa mis-
sion qu*arme de la double influence de
la Russie et de la Bavi^e. II s*agissait
d'alarmer le roi aHemand sur la ten-
dance revolutionnaire de la r6genoe ,
tdche qui n*etait que trop facile. M. Ca-
tacazi , k son arrive en Grece , sus-
cita tant d'embarras aux quatre con-
seillers bavarois, qu'ils ^crivirent k
P^tersbourg pour demands son rappel.
C'est sur ces entrefaites qu^eut lieu
une mesure d*une grande portee poli-
tique. M. Maurer convoqua le baut
derg6 a Nauplie , institua de son plein
assentiment un synode independant,
et placa le roi Othop k la t^te de T^-
glise de son royaume (4 aodt) (23 juil-
let 1833).
Les Grecs approuv^rent formelle-
ment un acte d*autorit6 en vertu duquel
le pays devenait le seul en Europe (font
r£ghse portait le m^me nom que r£tat.
Ce n'^tait pas sans raison que M. Ca-
tacazi ne voiilut point assister k la so-
lennite qui accompagna Tacte d'ind^-
pendance de r£giise grecque. Nous
rapporterons ici quelques-uns des ar-
ticles de la d^laration , pour indiquer
combien elle g^ait les projets de la
Russie k regard de la Grece.
Othon , par la grdce de Dieu , roi
de la Grece ;
D'apres le vceu unanime des metro-
politams, archcT^ques et ^vtoies de
notre royaume , de nous voir declarer
rind^pendanoe de T^lise grecque , et
instituer un synode permanent, nous
avons dto^, de I'avis et avec I'ap-
probation de nos ministres , et d^re-
tons ce qui suit.:
Art. 1*'. L'Eglise orientale, apos-
tolique , orthodoxe , dans le royaume
de Grece, en ne reconnaissant pour
son chef spirituel que Notre-Seigneur
et Sauveur J^us - Christ , et en n'en-
visageant pour son sup^rieur, concer-
nant la direction et Tadministration de
r£glise , qpe le roi de la Gr^ce , est libre
et independonte de tout autre pouvoir,
satis prejudice de I'unite du dogroe , tel
qu*il a toujours ete reconnu par toutes
les ^glisesorthodoxes orientales.
• 16
6f0
LTNIVERS.
Art. 3. Le supreme pouvoir spiri-
tuel repose , sous la suprematie da roi ,
entre le^ mains d*un saint synode per-
manent... (Suivent plusieurs articles
purement r^glementalres.)
Art. 8. Lesermentsuivantserapr^t^
par le president , les oonseillers et les
assesseurs du synode :
Je jure d'etre fidele au roi , d*ob^ir
aux fois du royaame , de m'acquitter
consciencieusement des fonctions qui
me sont confi^s; de makitenir reli-
gieusement les droits et les liberty de
l*£glise orthodoxe orientale, aposto-
lique, du royaume de la Grice ; de ?eit-
ler h son ind^pendance de tout pouvoir
etraneer, k son bien-^re et i sa pros-
p6rite , etc. , etc.
A ores une eonspiration ourdiecontre
la regence , ou plutdt eontre MM. Mau-
rer et d^Abel , par Goloeotroni et les
chefs les plus influents pormi les
Klepfates, on acquit la certitude que
M. catacazi , soutenu par M. Dawkins ,
resident anglais , avait rtosi k oppo-
ser le comte d'Armansperg k ses ool-
t^ues ; d^ lots le pr^ident de la re-
gence, eoropromis par son mauvais
vouloir , ou , du moins , par une oondes-
cendance Inoualifiable , se vit foro6 de
rediercher rappui de la Russie. La
dtouverte de toutes ces intrigues
amena un changement de ministere
dans le sens constitutionnel; mais, par
un sentiment outr^ de d^licatesse, on
laissa des fonctions importantes entre
les mains d'hommes connus par leur
hostility auxnouvelles institutions. On
d^ida n^nmoins, sans plus de d^lai,
de procMer a la cr^tion r^uli^re et
syst^mati^ d*un code de lois et d'une
organisation municipsde. Cette deter-
mination ?alut au nouveau ministere,
de la part de M. Catacazi et du r^l-
dent anglais , la qualification de r6vo-
lutionnaire et de r6publicain.
M. de Gasser avait ^t^ envoy^ de
Munich en Grdce avec Tordre de s'en-
tendre avec M. Catacazi ; mats , ^and
it eut vu r^t i^i des choses , li in-
' forma son cabinet de toutes les intri-
'^ues de Tenvoy^ russe; il toivit m^me
'*n sa oour que la comtessed*Arman8perg
ne n^igeait rien pour faire du jeune
roi, ou du moms de son oaele, le
prince de Saxe-Alteidwurg^ un de ses
Sendres. Quel que filt reioignement
u roi de Bavi^re pour une m^aUiance,
ses craintes, devant tout oe qui 'avait
une couieur libtole, etaient eocora
plus vives , et il ne pouvait se r^oudfe
a voir ^blir en Grdce un syst^e
hr^l^ et appropri^ aux monirs et aux
habitudes nationales^ sans se croire
complice de jacobinisme. L'oppositien
du comte d'Armanspere aux vues de
ses oollegues fut probabiement ce qui
le matntmt ; tandis aue , oomme poiir
pr^ipiter leur disgrace pr^n^e avee
tant d'faabitete par le parti russe , sou-
tenu par te resident britannique ,
MM. de Maurer et d*Abel travaiitaieot
k la redaction de quatre codes basfe
sur la loi commune et sur^les an-
ciennes institutions municipales. Dans
le mime temps, on jugea le proofs das
oonspirateurs dont oous avons dgi
parle, et parmi lesqueis fi^praient en
premi^ ligne Colocotrom et Golio-
pulo ; malgr^ les efforts du {>arti nisse ,
et la sympathie non dissinul^e do
comte d'Armansperg, le sentence fiit
un arr£t de mort que commua le roi
en vingt annto de prison. Qudques
troubles ^lat^rent h Maina , oi^ la i^
volte prit un caract^re idneux. En pf^
sence de toutes oes diAcult^s , le g^
n^ral Heideck et MM. de Maurer e(
d'Abel deraand^rent lear dtoission;
mais on la refiisa pour les congidier
bientdt avec plus d (6clat.
M. de Robell fut envoy6 deMuniA
avec des kttres pour le comte d*Ar^
manspere et M. Catacaan , ce dernier
avant d^k re^ Tofdre de sa cour de
placer des baionnettes russes k la dis-
position deM. Robell etdu comted'A^
mansperg , si MM. de Maarerci d'Abel
voulaient 8*en tenir aux stipulations
du qiiadmple traits , et par cons^^
ne pas quitter leur poste. M. Robell
fut nomme k la [riace de M. de Mau*
rer , et M. Greiner a celle de M. d'Abel ,
comme membre snppk^eBtaife.
« On vit alors , dit M. de Maurer, le
singuUer spectacle que le suoeesseur
d'un bomme d^nooo6 au gouveraement
brftannique cevime un partisan irop
RUSSIE.
611
ardent de la Russia , arri va lui - va&me
a rhotel du ministre russe en Grece ,
pour chasser , s1l ^tait n^^saire , par
Tusage des armes russes, rhoinme
deooDceoomroe partisan de la Russie. . .
Les consequences de notre rappei pou-
vaient dtre facilement entrevues , au
moiDS par ceux qui connaissaient les
relations, le pays, le peuple et nos
successeurs.
« Si nous eussions 6ie rap^^ quel-
ques mois plus tard , la Grece aurait
01 deja alors ses tribunaux , ses ^les ,
son uni versite , son academie des scien-
ces, et, en g^n^al, des foodements
plus solides pour son aTenir. »
Quant au gem^ral Heideck , il atten-
^t que son engagement fdt expire
pour fitter la Grece, ou son zele et
son devouement ^taient d^orroais inu-
tiles. La guerre civile ^ata ; un neveu
de Plapontas se declara lieutenant ge-
neral da royaume, et arbora les cou-
ieors nisses, pr^tendant que son parti
Q'a?ait d^autre but que d'assister le
jeune roi dans Foeuvre constitution-
oelle. Tous ces moyens avaient €t€
prepares pour d^rganiser ia r^ence ;
niais il se trouva qu'ils ^aterent
ootttre le comte d'Armansperg lui-
m^me, I Finstant ou 11 ^tait disbar*
rasse de ses coUegues. Cependant les
rebelJes furent d^sarmes; et le comte,
^ptatum doute ^gard h Tintention
primitive des coupables , se garda de
sevir centre les cnefs du complot , et
se coQteota de faire ex6cuter quel-
qoes malheureux paysans qui n'6taient
coupables que d'ignorance. La veille
de sa majority, le roi Othon nomma
ie oomte d'Armansperg vice-diancelier
da royamne : le bat de la Russie ^tait
atteint; et, oequ'ily a de pkisdigne
d^atteotioo, e'est que le cabinet bri-
tannique donna lui-m^me les mains k
toQtes kss mesures des agents russes,
coQtrairement k resprit des protocoles,
et dans la crainte pwrile que I'^tablis-
Kment d*on goavernement populaire
n Grto ne p6t toe attarU>ii6 au
thompte 4e la revolution de jiiillet.
^ importait k ia Russie que , pkts
M, M. d'Annanspere M rappele;
il lui importait d^empecher la Grdce
de s'organiser d'une maniere stable,
de faire triompher son influence a tout
prix, et de pouvoir compter la Gr^
comnie une annexe de ses provinces
maritimes quand Tbeure de Constanti-
nople aura sonn^.
Pendant que la Russie ^tudiait a
fond toutes les difficult^s qui entira*
vaient Taction des gouvemements
Strangers, soit pour les forcer h adop-
ter ses vues, soit du moins pour para-
lyser leurs intentions hostiles, Topmion
aes meilleurs publicistes de r£urope
prenait au serieux un systeme qui s'^-
tablissait non plus sur des theories,
mais sur des faits. Pendant longtemps ,
on s'^tait contents de r^pondre a ceux
qui si^nalaient les envabissements de
1 empire du Nord , que son etendue de-
mesurde ^tait un indice de faiblesse,
3ue le d^faut de centralisation y ren-
ait impossible Texercice intelligent
du despotisme , que les embarras finan-
ciers ne permettaient pas d*entretenir
une force arm6e suffisante pour assurer
la s6curit^ des frontieces , enfin que la
reunion b^t^rogene de tant de popula-
tions dont les int^Sts 6taient evidem-
ment difif<6rents, amenerait sOus peu
une scission , et que Tunit^ eouveroe"
mentals serait dStruite. Si la Russie
avangait vers TOrient, c*etait pour
rem[)lir, dans un but humanitaire, une
mission civilisatrice; si elle ^tablissait
des colonies militaires, elle retardalt
par cette mesure I'emancipation des
serfs, en changeant maladroitement
Tesprit d'ob^issance passive de ses ar*
mees; elle n*avait pris les provinces
baltiques que pour assurer un debou-
ch^ a son commerce ; c*^tait pour un
motif semblable qu'elle s'^tait m^nase
quelques points sur le littoral de la
mer Noire et de la Caspienne : quant a
la Pologne , on prouvait victorieose-
ment que ce dernier boulevard devait
ionher. Cest ainsi que, par Ferreur
ou la n^ligence des cabinets, la Russie
s'emparait suooessivement de toutes
les positions qui la rendent aujourd'hui
inattaqiuJble ; et ^e , cessant d^sor-
mais de nier ce qui est manifeste, elle
marche k son but avec toute la force
d*uiie organisation politique longtemps
15.
612
L'UNIVERS.
mdne, et dedaigne de Jeter nn voile
sur sea projets ult^rieurs. Quand la
diplomatie ne fut plus en mesure de
hier Tevidence, on essaya de Bonder
lea r^lutions de la Russie par-des
manifestations sans port6e, dont le but
se reduisit a faire voir que Timpnis-
sance ^tait k cdt^ de la x;rainte : e'est
ainsi qu*en Franoe un ministre declara
h la tribune, que la nationality polo-
naise existait en droit. L'empereur Ni-
colas r^pondit h ce defi en pressant
les travaux de la citadelle d'Alexandre
^ Varsovie, et le discours qu'il tint ^
la deputation de cette ville, en octobre
1835, annonce iiue s*il n^est pas encore
en mesure d'agir directement sur FEu-
rope comroe il Fentend, il regarde
du moins les traites comme chose mo-
difiable, et ne reconnatt aucune espeoe
d*interventlon pour oe qui le regarde
personnellement. Nous donnerons ici
le texte de ce discours d'apr^ la ver-
sion de Yarsovie.
« Je sais, messieurs, que vous avez
voulu me parler; je connais mSme le
contenu de votre discours , et c*est pour
vous 6()argner un mensonge que je ne
d^ire pas qu'il me soit prononc^. Qui ,
messieurs, c*est pour vous ^pargner
un mensonge, car je sais que vos sen-
timents ne sont pas tds que vous voulez
me le faire accroire.
« Et comment pourrai-je y ajouter
foi , quand vous nravez tenu ce m6me
lang^e la veille de la revolution !
« N^est-ce pas vous-m^mes qui me
parliez , il y a cinq ans , il y a huit ans ,
de fiddite, de d^vouement, et qui me
faisiez les plus belles protestations d'at-
tachement? Quelques jours apr^ , vous
avez brise vos serments, vous avez
commis des actions horribles.
« L'empereur Alexandre, qui avalt
foit pour vous plus qu'un empereur de
Russie n'aurait dd faire, qui vous a
combl6s de bienfaits, qui vous a favo-
rises plus que ses propres sujets, et
vous a rendus la nation la plus floris-
sante et la plus heureuse, r empereur
Alexandre a ete paye de la plus noire
ingratitude.
« Vous n'avez jamais pn vous con-
tenter de la position la plus avanta-
geose, et vous tfvez fini par detroire
vous-memes votre bonheur. Je vow
dis ici la verite pour eciairer notre po-
sition mutuelle, et pour que vous sa-
chiez bien h guoi vous en tenir; car je
vous vols et je vous parle pour la pre-
miere fois depuis les troubles.
« Messieurs, il faut des actions et
non des paroles ; il fant que le repentir
vienne du coeur. Je vous parle sans
m'ecbauffer; vous voyez que je suis
calme; je n'ai pas de rancone, et ie
vous ferai du bien malgre voas. Le
marechal que voici remplit mes inten-
tions, me seconde dans mes vues, et
pense aussi h votre bien-etre {i ces
mots, les membres de la deputation
saluent le marechal). Eh bien, mes-
sieurs , que signifient ces saluts? A^ant
tout il faut remplir vos devoirs, il faut
se conduire en honnetes gens. Voas
avez, messieurs, k choisir eotredeui
partis : ou persister dans vos illusions
d*une Pologne independante, ou vivre
tranquillement et en sujets fldeies sous
mon ^oovernement.
« Si vous vous obstinez h conserver
vos reves de nationalite distincte, de
Polosne independante, et de toutesces
chimeres, vous ne pouvez qu*attim
sur vous de ^ands malheurs. J*ai fait
eiever ici la citadelle, et je vous declare
qu'^ la moindre emeute je ferai fou-
aroyer la vilie, je detruirai Varsovie,
et certes ce ne sera pas moi qui la re-
bdtirai !
n II m'est bien penible de vous parler
ainsi ; il est bien penible k un souve-
rain de traiter ainsi ses sujets ; roais je
vous le dis pour votre propre bicn.
C'est k vous, messieurs, de songcr a
meriter Foubli du passe : oe n'est que
rur votre oonduite ct votre devouement
mon gouvemement que vous poovei
y parvenir.
« Je sais qu*ll y a des correspon-
dances avec retranger, qu*on envoie la
de mauvais ecrits, et qu*on tkbe de
peryertir les esprits; mais la meilleore
police du monde, avec une fiEtrntien
conune vous en avez, ne peut emp^
cher les relationa clandestines. (Test a
votts-memes a faire la police , k ecarter
lemal.
n
ei4
L'UBilYEES.
G^engik, ou ii est arrive le leade*
mttin 28.
« lii , le oontFe-amiral Eamant , com-
mandant notre statioo, a tobli sur-le*
diamp une commisaioii d'enqu^te,
diarg6e de procMer formeUement k
rinterrogatoire de I'^ipage et a I'eza*
men Je toutes les arconstances qui
avaient aroen^ la capture du bdtiment.
« II r^ulte de I'enqu^te :
«'Que )e schooner Fixen, eapitaine
Tbomas Childs , etc. , etc. , a 4m frM
Gr la maison Bell , etc. , etc. , h Bouk*
rest, fM>ur ^tre employe par elle ^
Constantinople, dans le Danube, dans
les ports de la mer Noire, de la mer
d*Azof ou de Marmara , et qu*en vertu
de ce contrat, le yixen a A^ mis a la
disposition de Bell , lequel a fait pren-
dre au bdtiment, a Constantinople, un
ebargemeot de sel ;
« Que ce dernier a laiss^ entierement
ignorer au capitaine le but de leur
voyage , iusqu*au moment ou le navire
a quitt^ le Bosphore, le 19 novembre:
« Que le sieur Bell, apres avoir
pris un piiote turc h Samsoun , a donne
au capitaine Tordre de cingler vers
Toughs, Pschad ou Soudjouk-Kal^,
ces trois points ^tant sans douane ni
quarantaine;
« Que le navire est reste dans ce
dernier endroit pendant trente-six
heures ^ Tancre, avant d'avoir et6
joint par VAjtix;
« Que , durant cet intervalle , le sieur
Bell s'est mis en rapport avec les-habi-
tants de la cote, dans le but avoue de
trafiquer avec eux ;
« Qu*il existe un fait (jui, dans
la oonjoncture actuelle, acqutert le ca-
ractdre d'une preemption tr^grave :
c'est que sur quatre canons dont Par-
mement du navire devait se composer,
ainsi que ses documents Tattestent , il
ne s*en est trouv6 h bord que deux...
Ces considerations reunies ont ^t^ ju-
g6es d^isives par la commission ; elle
a reconnu que le Fixen et la cargaison
devaient me soumis a la confiscation.
« D'apr^ cet arr^t^, ledit bdtiment
a M conduit a SebastopoK ou il est
arrive le 89 novembre ( 1 1 decern-
brc).
« Toutes ces earconstanees ayant i^k
port^ea a la connatssaoce du gouver*
nement imperial, il vfent de trans-
mettre ^ ramiraute de la mer Noire
Tordre de oonfisquer le schooner le
P^ixen et sa cargaison, et de lei d^
darer de bonne prise.
« Quant h I'^quipage de ce bAtimeot,
bien qu'il ait eneoitru, d'apres les lois
sanitaires dtablies dans tous les pays
del'Europe, les peines les plus graves,
Sa Majesu Tempereur a daign^ prendre
en consideration let eiroonstanoea at*
tenuantes qui tendent h etablir que le
capitaine Childs a et^, des Torigine,
etranger a one entreprisa dont la res-
ponsaDilite et la honte ne doivent re-
tomber que sur les armateurs qui ToDt
tentee. En oonaequenoe, I'empereur a
donne ordre de suspendre toute pour«
suite ulterieure contre le capitaine
ChiMs , etde le mettre en liberie, ainsi
que les gens de requipoge. De plus,
ayant appris par les rapports de rami-
raute que ces indiridus se trouvaient
dans nn complet d^niknaent , Sa Maieste
a charge le gouverneur general ae la
Nouvelie-Russie, comte Voronzof, de
leur foumir les moyens de retourner
k Constantinople...
«Le gouvernement imperial croit
devoir donner la plus grande publicit<i
k cet acte de s^verite et de justice,
pour prevenir ddsormais le renonvelle-
ment d*une tentative que proserit la
legislation de tous les pa^s.
« Afin d'eclairer completemeot Topi*
nion du public, il importe de rappeler
encore ici les circonetances snivantes :
« Le littoral de la mer Noire, depuis
Tembouchure du Kouban jusqu'au port
Saint*Nicolas indusivement , avant ete
place sous la domination de rempire
russe, en vertu de Tartrcle 4 du traite
d^Andrinople, une des premieres me-
sures arretees par le gouvernement
imperial a ete de fonder d(» ^blisse-
ments de douane et de quarantaine
dans les ports d' Anapa et de Redout-
Kaie. L'un et Tautre ont 4^ ouverts
d^ lors au commerGe reguiier de
toutes les nations, a Texclusion ex-
presse des antres endrofts, bates ei
navres du littoral, oil ii n*existe au-
KUSSIE.
.615
cun ^tablissement sanitaire et aucune
douane.
« En portant oette disposition h la
connaissance du gouvernement otto-
man et des repr^entants de toutes lea
i puissances r^sidant h Constantinople,
a lotion imp^riale a ea ordre de lenr
aononcer que toote tentative des na-
▼igateavs ebangers oour se mettre en
Gommanication atec les c6tes ci-dessus
mentionnto, h Texception des ports
d'Anapa et de Redout-Kal^ , serait con-
siddrfe comme constituant un d^lit de
contrebande, et soamettrait les indi-
vidus coupabies d'un pareil aete h la
resDonsabilit^ l^le qu'entrafne tout
trafic illtcite et clandestin.
« Cest au mois d'octobre 1831 que
la disposition qui vient d*£tre 6nonc6e
a et^ nonununiqu^ tant h la Porte
oUomane qu*aux legations 6trangires ;
et c*est depuis oette 6poque que la croi-
siere ^tablie par le gouyemement im-
perial sur le littoral de la mer Noire
exeroe dans ces parages la surveillanoe
dont elle est l^galement inrestie.
« Bfalgr6 ces mesures formcllement
annoncnes, des navires strangers ont
essaje, dans le courant des ann^ 1834
et 1835 . d*entretenir avec les habitants
de la cote des relations dandestines.
Mes ont mis le commandant de notre
croisiere dans la n^cessit6 de redou-
I>i6r dds lors de sanreillance et de ri-
gooir.
« M. de Boat^nief a isti appel^ de
son cdU a renouveler aupr^ des l^a-
tioos ^trang^res h Constantinople les
oonmiunications qu'il leur avait faites
en 1831. En cons^ence, il leur a
adress^ la circulaire que nous Tenons
derapporter.
■ Far cette note, le ministre russe
a ioTlt^ tous les repr^sentants stran-
gers a vouloir bien faire parvenir les
arertissements nScessaires aux bdti-
roents naviguant sous le pavilion de
M gouvernement dans les parages
pr^Gitgs de la nier Noire, afin de prS-
venir les cons^uences qui pourraient
Y^uiter d'une contravention aux r^
elements Stablis contre le commerce
ue contrebande.
« Cette circulaire porte la date du
13 septembre 1836; et c*est en dSpit
des avertissements H\Ur6s dont nous
venons de rappeler la teneur, que te
f^ixen , ainsi que le Morning-Chronicle
I'annonce, a etS exp^iS de Constan-
tinople dans le but avoue de braver et
d^nfrdndre nos regiements.
« Le simple expose des £aits sulBra
pour placer dans son vrai jour la oon-
duite des armateurs anglais, qui , wS-
connaissaut le respect qu'ils devaient
au pavilion national, n'ont point h^ite
k en abuser pour prot^er un honteiix
trafic, oa pour couvrir de perfides des-
seins, que le jueement impartial de
tous les nommes Dien pensants ne sau-
rait manquar de condamner et de fl^
trir.
« La publicity que le gouvernement
impMal a cm devoir donner aux de-
tails de cette afZisure servira en m^nie
temps k faire eonnattre la l^lite,
aussi bien que la rigueur des mesures
adoptto par la Russie pour faire res-
pecter ses r^lements, et les mettre
dSsormais k rabri de toote nouvelle
atteinte. »
Les consequences de oe manifeste
sont rigoureusement justes, si Ton
admet le prindpe d'oij dies d^ulent ;
c*estp|k-dire , la possession par la Russie
du littoral Circassian , en vertu de Tar-
ticle 4 du traits d'Andrlno|rie. Oans
tous les cas , le gouvernement britan-
nique a manquS a sa dignity dans ce
diiterend : s'll reconnaissait le droit
exclusif des Russes sur cette cdte^ il
devait faire signifier k son commerce
par les voles officielles que le blocus
etait consenti; s'il avait juge que la
Porte n'avait pas le droit de c^er au
gouvernement imperial un pays ind^-
pendant, et avec qui les Russes trai-
tent journellement de puissance armee
k puissance ennemie par T^ange des
,prisonniers, on ne pent que le bldmer
d^avoir reculS devani la demande aussi
juste qu'Snergique d'une satisfaction
^latante et compile. II en est result *
que la preponderance russe s'est affer-
mie dans 1 Orient , au grand detriment
de rinfluence anglaise; et, lorsqu'on
voudra reoourir a des moyen$ st^Tieux ,
on aura laissS echapper cc point d'op-
616
L'UNIVEHS.
portunit^ ou le droit et les int^^ts se
Sr^tant une force mutuelle , la dignity
es gouTernements re^it un Douveau
lustre du d^ploiement spontan^ de
leurs mo^ens de coercition.
L*annee 1886 s*e8t ouverte par ua
chaogement dans radministration des
Cosaques du Don.L'empereur Nicolas
Jugea eonvenable de leur imposer ane
nouvelle constitution, qui , en effacant
leurs anciensprivildges , rattachHtd^une
roani^ plus intlme cette population
remuante et guerridre au systtoe de
d^ndance aosolue qui r^it toutes
ks parties de Tempire. Le jour de
I'introduction de ces nou?eaux sta-
tuts , qui r^ent d'une mani^re fixe les
rapports mutuels des Cosaques de
rangs diffi^rents, a €t^ c^i^br^ avec
uiie sorte de solennit^. Les picheries,
des secours en sel, et une somme au-
nuelle de cinquante roille roubles, ont
^te accord^ dans le but de soulager
les malades, les bless^, les veuves et
les orphelins, et pour subvenir h Tin-
sufBsance des rdcoltes dans les mau-
vaises anndes.
On ne pent qu'admirer avee quelle
habilet^ le gouvemement russe em-
ploie les moyens les plus opposes pour
aroener k Tunite despotique les nom-
breuses peuplades qui entourent le
noyau des provinces* slaves. Si la r^is-
tance se manifeste par des r^voltes, il
toase du poids de sa puissance mili-
taire ceux qui essayent de prouver qu*il
existe une di£f(6rence entre la protec-
tion du tsar et une soumission com-
plete. Quand la resistance n'est que
dans les mccurs , c*e8t dans cette source
mime qu'on la combat : les faveurs ac-
cord^s aux plus dociles, le contact
frequent, en temps de service, de ces
soloats irreguiiers avec lesautres trou-
pes, suffisent pour alt^rer en eux les
traits distinctils de leur caractere mo-
ral. Quand ce travail de modification
se trouve suffisamment avance , le pou-
voir laisse alors tomber son deniier
mot, et Tarrlt suprclme est interpret^
comme une faveur. Les Cosaques du
Don, par leur situation plus rappro-
ch^ du centre de Tempire, devaient
^re aussi les premiers a voir s'effacer
les traces de leur ancfenne ind^pen-
dance. Elle fut s^rieuseraent roenacee
du jour (A lis confererent rhetmanat
k des seigneurs russes. Bientdt, sans
doute, viendra le tour des autres tri-
bas de la race cosaque. L'agriculture
et rindustrie les ameneront gradoelie-
ment a des id6es d*ordre etde sourois*
sion ; en attendant , ils portent assez
impatiemment le joug , et Ton a vu les
Tatars NogaTs et ceux du Kouban exer-
cer sur le sol russe des violences et des
brigandages dignes des monta^rds
du Caucase. N^nmoins Tinaction oii
les retient la paix ne pent que reajir
favorablement sur leurs moeurs, et Tid-
fluence de ce cbangement s'etendra
graduellement vers TAsie, surtout
quand les Russes auront accompli la
pacification des r(6gions caucasiennes.
Pour bien faire comprendre Tinter^
qu'avait la Russie k imposer aux Cosa-
ques du Don une constitution nouvelle,
11 suftira de rappeler que , bien qu*or-
ffanis^ par regiments, leurs officiers
etaient elus par toute la communaute.
Le service acheve, les distinctions dis-
paraissaient , et chacun rentrait dans
I'^alit^ la plus parfaite, sous le rap-
port des devoirs et des droits. La vue
de leurs steppes, leurs chants natio-
naux , ou vivent leurs traditions d'in*
depeoMiance, les ^loignaient de toute
idee d'esclavage; aiassi ne trouvait-op
chez eux ni serfs ni propriltaires de
serfs. L'oblieation du service militaire
n^etait pour les Cosaques que rapplica-
tion de leur principe eiectif h tous les
emplois. D<^j^ leur organisation eo
troupes regulieres et soldte les avait
en quelque sorte assujettis au pouvoir;
il s agissait de d^truire rinfluence de
la communaute et du foyer. La nou-
velle mesure atteignait ce but, en fai-
sant dependre tous les grades de la
faveur imp^riale. II fallait que Tofficier
une fois nomme conservdt son grade.
On a donne des proprietes et des seris
aux officiers cosaques; et, comme la
matiere esclave manquait, on a envoyo
dans le pays des paysans russes pour
les distribuer entre les elus de cette
nouvelle aristocratic. C'est ainsi que,
par une espece de fhtalisme, ou plul^t
RUSSIE.
617
en raisoD de Ja foree des cboses, la
Russie, au lieu d'atiliser les Elements
de fiberte ^rs c^ et \k sur ie sol,
teod k les assimiier aui institutions
S derates, oomme si elle 6tait jalouse.
e r^er par oukases la marcfae de la
drilintion , pour lui donnef Pensenible
et la precision d'une Evolution mili-
taire.
Noos av<His d^j^ remarqu^, et par-
ticoli^rement dans rintroduction de
cet oarrage, ouelles sont les ressour-
oes actueiles au commerce russe, et
comment la situation g6oj^apfoique de
rempire met h sa disposition un sys-
teme complet de communications k
rinterieur, et des dAouch^ aussi com-
modes que nombreux pour ses rela-
tions ayee les quatre narties du monde.
Dans rhypothese meme oh ses flottes
rencontreralent des obstacles dans la
Mediterrante , la Russie , par rinfluenoe
qu'eUe exeroe sur TAllemagne, pour-
rait, au moyen du Danube, dont elle
occupe les embouchures praticaMes
en yerto du traits d*Andrinople, s'ou-
▼rir les grands march^ europ6ens
pour ses produits et pour ceux de rAsie
centrale. On peut dire que la question
finaneiire, c*est^^-dire , commerciale,
M oelle qui prtoocupe le plus vive-
meot le gouvemcment de Tempire.
Cdle de )a domination russe en Orient
t^j rattache par des consequences n^
eessaires, et c*est ce qui mspire aux
Aoglais une inquietude qui n'a jamais
ete fflieux fondee.
Le tarif russe a €U con^ dans un
esprit presoue exdusivement prohibi-
tir : il tend evidemment k entraver Tin-
dustrie manufacturiere des £tats de
TEurope et particuli^rement de la
Orande-Bretagne. Les importations to-
ler6es ne sont que Texpression d'un
besoin imperieux , comme celle du eo-
ton file, ou les droits dont elles sont
(nppees equivalent k pen de chose pres
2 ooe [HTohibitioD. Ces prohibitions, la
Itossie les l^vera sans doute en temps
opportun, Jorsqu'elle aura ecarte les
oostacles de la ligue prussienne, et
Qu'elle ouyrira aux Allemands I'acces
de son vaste territoife, en leur permet-
lant (Texporter leurs marchandises en
Turquie, en Perse, et jusqu'au eentre
de TAsie, k I'exclusion des produits de
I'industrie anglaise. Elle y gagnera
d'toe maftresse des conditions, et
d'etablir sur des motifs spedeux sa
marche envahissante en Asie.
dependant la situation commerdale
de la Russie vis-ik-yis de TAngletarre
pourrait devenir precaire , si cette der-
nidre puissance s'ecartait du syst^me
pacifique et conservateur que lui impo-
sent les necessites presentes. Les con-
siderations suivantes, que nous em-
pruntons au Port-folio , sur le contrdie
commercial que TAngleterre poss^de
k regard de la Russie, pourront,
abstraction faite de ouelques exagera-
tions, donner une idee assez exacte de
Tinfluence des relations britanniques
sur la posperite de Tempire russe.
« Independamment de la barridre
que TAngleterre peut opposer aux en-
vafaissements ulterieurs de la Russie,
par Ja reorganisation de Pempire otto-
man; independamment de ses moyens
de detruire les forces agressives de la
Russie en faisant flotter son pavilion
dans la mer Noire, TAngleterre pos-
skle encore un moyen de contr61er et
d'arreter les progr^s de la politique
russe sans choc, sans violence, mais
par Teffet seul de son tarif.
« Cest pour laisser les choses dans
cet etat d*incertitude, que la Russie a
sans doute refuse de participer k des
stipulations qui lui lieraient les mains
relativement k son commerce avec la
Grande-Bretagne. II n'y a aucun traite
de commerce entre les deux pays;
rAngleterre n'est done engagee, vis-
2i-vis de la Russie, par aucun contrat,
si ce n^est par la clause du traite de
1815, qui accopde k la Russie les pri-
vileges de la nation la plus favorisee.
Le temps semble venu pour les deux
parties contractantes de reexaminer la
valeur et la tendance du texte de ce
traite.
«La production territoriale de la
Russie et sa circulation commerciale
ont recu leur premiere impulsion , et
dependent actuellement des demandes
de produits bruts que lui fait TAngle-
tcrre; ses ressources financidres, son
•IS
L'UNIVERS.
Iioiivoir politique, et jijsqu*li sa oolii^
sioD interieure, soot li^ a son com-
mcfoe avec la Grande-Bretagne, baus-
seni qnaod oe commeroe augiucDte, et
aoui&snft 6H qu'il dedine.
« Certains prodaits tent presque
eidifsi?eiD0Dt tir^ de la Russie, il en
est t6salt6 partout la oonviction que
TAngleterre d^pendait de cet empire
sous certains rapports. La puissance
rostes'estaocnUe en proportion du peu
de sef^t^ que niontrait TAngleterre
h peser les projets d*un gouvemement
doiit etie croyait avoir a dependre.
« Mais ii n7 a que la i^isiation com-
mereiale de FAngleterre qui soit en
grande partie la eause de ce qu*on s'ap-
provisionnede curtains articles presque
ezdusivement. en Rassie : la d6pen-
dance de TAogleterre k ce sujet n^eat
done que la consequence de son propre
tarif pendant une s^ie d'annees.
« La Turquiepourrait, avec ses ar-
ticles d'exportation , rrvaliser avanta*
geusement avec la Russie; de la, une
nouve^e ntossit^ ^our la Russie de
s'approprier en definitive Tempire otto*
man, et de le desorganiser en atten-
dant. Depuis bien longtemps, oe sont
les trait^s, les guerres, et surtout les
conseils de la Russie , qui ont poursui vi
avec systems et intelligence Tintrodnc-
tion ou le maintien de tous lea abus,
et de toutes les mesures qui non-seu-
lement ont empdch^ jusqu'ici laTurquie
de jamais entrer en concurrence avec les
Russes, mais qui ont mSme cacb^ a ses
yeux , oororoe aux ndtres , que ceia pou>
vait avoir lieu*
« L'An^eterre peut, au moyen de la
modification de son tarif, priver la
Russie d*une partie consid^able de ses
ressources aetuelles, et, par la seule
menace de ce changement, elle peut
alarmer les intMts a^coles, ou, en
d^autres termes, Tanstocratie, seul
corps qui exeree de Tinfluence sur le
gouvemement russe.
« L'Angleterre, eo accordant k la
Turquie des facility qui tondront
beaucoop la production sur son terri-
toire, obtiendrait en compensation
Tabrogation totale de toutes les res*
trictions qu*il a tant coilt^ a la Russio
d'y ^tablir, et qui forment aujouid'hui
les ressources de production de oes
mtoes objets, au moyen desquels la
Turquie rivaliserait jivantageusemeDl
avec la puissance dont elle subit le
joug. Or, ii est k remarquer que les
principaux objets d*exportation de la
Russie, k savoir : le chanvre , le bl6 Je
fer, le cuivre, lacire, le suif et le boisde
construction, sontprofatb^ en Turquie.
a Les deux mesures dont nous ve-
nous de parler, adopts simultane-
ment comme parties ms^^rablas d*un
svsttoe g6nttal , am^neraient un grand
changement dans I'^tat relatif de la
Turquie et de la Russie, ^tendraient
Botre march^ pour les produits brutSt
les feraient paisser d'un pays qui pro-
hibe nos marcbandises k un pays qui
ne leur fait subir aucune restnctioo,
d*un pays (A s'^ve une marine rivale
k un autre ou tout le commerce se fait
sur des navires anglais, d'un pays
enfin contra Finfluence duquel il nous
laut lutter, a une oontrte que nous de-
vons dtfendre.
a La richesse des nobles russes pro-
vient presque exclusivement de la vente
de leurs produits bruts aux Anglais.
II suffit de dire, pour entralner les
convictions , que 1 Angleterre, en di-
minuant son march^ , en y appelant les
{)rodutts rivaux, ou m^me en d^uil-
ant les Russes de leuis privileges,
aceord^s inconsid^^menl et cootre les
principes d*une saine politique, pos-
sede les moyens d*exercer uoepuis-
sante influence sur le corps de Ij
noblesse russe, de la ranger aux inte-
r^ts anglais, en d^pit de rbostilit^ du
gouvemement , et de la faire aeir centre
oe gouvemement, s*il pers^verait daos
son hostilite. L'Angleterre, rneoon-
naissant son pouvoir, a jusqu'ici res-
serr^ doublement les liens de rasi&to-
cratie russe avec la couronne; d'un
c6te, par les continuelles concessions
faites au commeroe pendant que la
Russie suivait une marcbe opposee, et
de Tautre, par Pindifif^rence avec ia-
quelle on laissa cette derniere puissaace
avancer dans Faccomplissement de ses
vufs pour Toccupation du Bosphore.
« Et pourtaiit rexp^rience du pas*c
f
M
. nniiiillljiiiir iiiiiii
• ••
••*
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AUSSIK.
610
depose de ce pouvoir de i'AngJeterre
daos deux m&oorebkM oocasions.
tOn sait qae Fhostilit^ de Paul a
r^aid de TAiigleterre lui co^lta la vk.
Aloaodre fut foro^ d'abaudODner le
oootinental dirig^ eootre TAn-
srre. Les mtoes inter^te, qui ont
biess^ alors par le fait du gouver-
oement rasse, foroeraient aajourd*bui
encore Nicolas k abandooner sea pro-
jets sur la Turquie et TOrieot , si r An-
gleterre, pendant au*il en est temps,
pvtait, pour resouare la question , des
mfaies bases qui la soutenaient autrer
fois, et qui renvers^nt non-seule-
mat les (Mrqiets russes, mais les deux
oofflbiDaisons europtomes qu'eUe a?ai t
h oombattre.
« Depuis la demi^re des epoques
doQt nous YenoQS de parler, la Aussie
estdevenue plus vulnerable encore, et
TAugleterre peut ratteindreavecmoins
d'iDooflviteiettts que jamais. Les ex-
Ertatioas de la Russie se sont accrues,
i exportations de TAngleterre ont
diminue, et de nouvelles sources sont
ouvenes au commerce anglais |>our
compenser les pertes qui rdsulteraient
de oe Douveau syst^me.
«Cc8 suggestions, quoique propo-
se oomme nooyen d'atteindre un
grsod bat politique, n'oiit pas m^me
besoifl d'etre «outenues par des consi-
dtetioos poiiti^ues : les int^r^ts du
oommeroe anglais sufifiraient pour les
justifier.
« Tandis que le commerce britanni-
que augmentait plus on moins rapide-
laent avec les autres £tats europeens ,
celoi fait avec la Russie demeurait
stationnaire ou diminuait diropor-
tance; il a subi d'ailleurs un diange-
meot fort d^vantageux.
• II J a vingt-cinq ans, Timportation
en Russie, par le fait de TAngleterre,
consistait enti^rement en ^toffes an-
glaises de laine et de coton , et en auin-
caiJierie; aujourd'bui, la demancie de
oes articles a diminu^ , et , ii leur place ,
la Russie ne prend plus que des ma-
ti^res colorantes et autres produits
bruts, ou bien des denr^es coloniales,
qu'on ne fait venir d*Angleterre que
par suite du bas prix des frais de trans-
port sur les navires qui arrivent de ce
pays.
« La Russie consommait a F^poque
ant^rieure dont ii s'agit pour 2 ou 3
millions sterling de marchandises an-
glalses. En 1S31 , elle n'importa que
pour 1,906,099 livres sterhng, dont
1,251,887 livres en coton S.U pour la
fabrication des ^offes, employees en
partie k supplanter les Anglais sur les
marcb^ asiatiques; de facon que leurs
produits manufacture n^entrent plus
en Russie que pour un cinquieme de
leur andenne auantit^, et eependant la
population de I'empire s'est accrue pen-
dant cette p^riode de plus de dix mil-
lions d'dmes.
« L'extension toujours croissante
des domaines de la Russie commence
done h ne plus ^tre d'aucun profit pour
la Grande-Bretagne. La Russie a com-
mence par lui retirer ses privities
exclusifis; aisuite elle a augmente les
restrictions, introduit des prohibi-
tions, et soumis le commerce et la
navigation k des mesures s^v^res, avec
le but avou^ de nuire aux exportations
des Anglais et d^^tabiir des manufac-
tures nvales; tandis que TAngleterre
continuait k r^uire les droits sur les
produits de la Russie, non pas, a la
verity, pour augmenter les n^n^fices
de cet txaty mais aussi sans op^rer
cette reduction de mani^re k lui sus-
citer des marches nouveaux. Le rdsul-
tat fut done le m^me que si les in-
tentions de TAngleterre eussent ^te
Gonstamment amicales pour la Russie ,
tandis que celles de Tempire auraient
eU constamment hostiles a la Grande-
Bretagne.
« IraiHeurs ces r^ultats, tout im-
portants qu'ils sont, paraissent encore
plus avantageux a la Russie comme
moyens d*arriver k un autre but. La
cr^tion d'int^r^ts industriels en Rus-
sie pent devenir, selon les vues ac-
tueifes de ce gouvernement, d'une
tres-grande importance pour contre-
balancer la preponderance des int^r^ts
territoriaux, aui se trouvent de fait
sous la depenaande de TAngleterre.
« Si TAngleterre tarde plus long-
temps a faire usage du pouvoir qu'ell^
620
UUNIYEES.
potsdde pour arr^ter tous ces projets
avant qu'ils mdrissent, die perdra
ce-que la Russie se propose de gagner,
et sacrifiera tous lea jours, en atten-
dant, des avantaces minimes, compa-
rativement aux objeta que la Russie a
en vue, mais importants si Ton ne
prend plus ce terme de comparaison.
« La Russie a exclu presque tous les
produits anglais par ses tarifs les plus
rtonts; eile a ^tendu ce systdme a la
Pologne, vers laauelle s'^ulait-une
partie consid6rabie des importations
oritanniques iaites en Allemagne et
dans les villes ans^tiques^ La Bessa-
rabia se trouve r^unie aux domaines
pusses, et ^chappe ainsi aux marches
anglais; les pnncipaut^ de la Mol-
da¥ie et de la Yalachie sont entour^
de eordons sanitaires russes, qui neu-
tralisent consid^rablement leur an*
cienne liberty de commerce; les c6tes
de la Circassie recevaient autrefois, a
travers TAllema^e , des envois de mar-
ehandises anglaises, aujourd'hui elles
subissent un blocus permanent. La
G^rgie 6tait le grand chemin de la
Perse et de I'Asie centrale pour les pro-
duits anglais venant des marches d Al-
lemaj^e; la Russie a coup^ cette com-
mumcation; seulement elle n'a pu
empfeher TAn^leterre de s*ouvrir une
route d^tournee h travers la Turquie
d'Asie. La mer Caspienne^ qui appar-
tenait anciennement h un Etat dont le
commerce ^tait libre, est d^ormais
perdue pour les produits des manufac-
tures anglaises depuis qu'elle a pass^
sous la oomi nation russe. Cette puis-
sance vient d'arracber encore h la Tur-
quie* UM territoire situe a quelques
lienes de distance de notre route de
communication avec la Perse, et son
influence' en Turauie a 6U et est diri-
g^ avec'succ^, dans le but de rendre
les ressources de ce pays presque inu-
ttles, et de Tempdcher ie nous fournir
toutes soFtes de produits bruts h meil-
leur compte que la Russie, plus pr^
des narcn^ europ6ens, et avec plus
de facilit6s pour les. Changes du com-
merce.
«Tels sont les actes r^nts de la
Russie, au m^pris des forces que TAn-
fleterre possdde sans les otUisur...
/Angleterre est-elle sufflsamiaent p^
n6ts^ de la n^cessit6 d'avoir reeoan
mtoe k la guerre pour 6carter des
daneers plus erands q^e tous ceox
qu*elle aurait a redouter de la force
ouverte? Si c'est la le cas, elle ponede
un moyen prompt, paei^e et iH boa
marcbe, de pr^venir k la fois et la
Suerre et oe que ia guerre serait hon
*^tat de pr^venir.
« L'Angleterre n'a qu'^ dtor^
une augmentation saoement propor-
tionnte des droits sur le suif , le cnaa-
vre, le Un et les autres exportations
de la Russie, et la noblesse de oe pays
arrangera bien vite les affaires db oe
pays avec Tempereur. »
Ces rtoiminations indiqnent mieox
mie ne pourraient le faire des volumes
d'argumentations jpolitiques k quelles
faibies attaches tient encore la paix
entre la Russie et I'Angleterre, c*est-
k-dire la paix de TEurope. L'Angle-
terre se trouve dans i'alteniattve ou
de voir s'effacer enti^meot son in-
fluence, ou de risquer une guerre rui-
neuse. Au milieu mtoe de ses mena-
ces , il est ais^ de voir qu'elle craint de
s'avancer trop loin; quoi qu'elle en
disc, une modiCcation dans son tarif
d'importation, k I'^ard de la Russie,
ne la mettrait pas dans une situation
commerciale et politique moins pr^
caire. Les produits indispensables a sa
marine militaire et mardiande ne peu-
vent lui £tre fournis que par la Russie
et la Turquie; or nous avons vu que le
traits dllnkiar-Skelessi met cette se-
conde puissance enti^rement k ia dis-
cretion de la premiere; de sorte qu'un
tarif prohibitif a I'egard de la Russie
laisserait les int^r^ts britanniques en
souffrance, sans que la Turquie leur
pdt venir en aide. Quant k la classe
des grands propri^taires en Russie ou
des nobles, leurs vues se sont bien
modifl^es depuis le r^ne de Paul.
L'issue de la grande lutte qui a com-
mence en 1812 , a I'instigation de TAn-
gleterre, a beaucoup agrnndi la sphere
de leur ambition ; ils comprennent par-
faitement que la Question de prepon-
derance russe se aenouera k Constan*
RUSSIE.
631
tinople. tU savent que les dol^ances et
le»iiieiiaoes de TAugleteiTe, tant ^ue
eette puissance restera \i6e h la politi-
que ^oite qu^elle a adopts , ne seront
qu*autant de cris de d^tresse. lis s'iro-
poseraieat aa besoin tous les sacrifices
pour se soustraire UDe fois pour toutea
aux exigences de la politi<;|[ue auglaise,
et ils aspirent k la possession de Cons-
tantinople antant par esprit national
que par des considerations d'int^r^t
pri?^. Certes, il n^est pas difficile de
cooipreDdre que. les accusations por-
tees par Tfiurope centre Tambition du
cabinet imperial retentissent en Russie
eofflme des hymnes en Thonneur du
tsar; tout ce que les Russes lui deman-
dent c'est de r^ussir; et la profonde
habilete des hommes d'£tat oui diri-
gent la politique de la Russie, la cons-
tenoe oe leurs vues, au milieu de la
confusion qui regne en Europe, sont
bien de nature h se concilier la con-
fiance nationale,en m^me temps qu'elles
jettentralarme dans les int^rets rivaux.
D'un autre c6te, si la Russie ne s'em-
pare pas encore des Dardanelles, ce
n'est point par moderation; Thistoire
terooigne que la moderation des Russes
n^est qu*une affaire d'opportunite.
UAllemagne a encore des scrupules;
eJie besite entre le protectorat declare
de Ja Rossie et TinTasion du liberalisme
applique a une reforme administrative.
Qaandces scrupules seront leves, ou par
Taojuiescement unanime de la grande
fanulle allemande, ou en neutralisant
par une opposition habile les forces
centrales de l^Europe, alors les temps
seront veous , et la politique des caoi-
nets oonstitutionnel^ n'aura plus que
la ressource de proclamer inevitable
oeqaVUe n'aura pas su prevenir.
Ce qui demontre que, dans retat
actael des choses, le systeme pacifique
n'est qu*un pretote specieux dont se
couYreot des intertts mesquins ou des.
malites mal deguisees, c'est que la
goerre est au fond de toutes les ques-
tions : qu*dle ressemble h une royale
partie <rectec8, comme a An vers;
qa'elle se dennse sous le nom d'inter-
ventioa particuliere, comme dans la
pteinsule iberique; qu*elle eclate en
dissensions et en emeutes a main ar-
mee, au mot d'ordre des hautes puis-
sances interessees^ comme en Grdce«
cen'en est pas moms la guerre : et ee
fleau, pour ne frapper que quelques
points isoies , existe comme une protes-
tation irrecusable oontre les mensonges
dores de la diplomatic. Les guerres
franches qui sont comme un duel entre
des interits irreconciliables, quelques
malheurs qu'elles entratnent, ont du
moins I'avantage de trancher les ques-
tions que la divergence de ces inter^ts
rendrait insolubles de toute autre ma-
niere; elles eclatent et finisseut; mais
un danger toujours imminent, et dont
la cause subsiste et grandit sans cesse,
est un poids au-dessus des forces de
rhumanite; h la longue, renergie, qui
ne demande qu'a entrer en lutte, se
consume ou se tourne centre elle-mtoe ,
et les bases de Tedifice social sont
ebraniees.
Si nous jetons un coup d*oeil sur
l*£urope, nous deduirons aussitdt la
conclusion que tous les interets sra-
vitent autour de quelques centres frac-
tion oti dominentdes buts,des princi-
pes ou des interets rarement analogues,
souvent difterents et mdme contraires.
La Prusse s'occupe k etablir son in-
fluence sur les £tats secondaires et sur
les petites seigneuries de TAlleroagne;
elle aspire a regner sur la confeoera-
tion par la representation intelligente
du principe protestant, par un certain
liberalisme oppose au systeme station-
naire de TAutriche, par renlacement
de sa ligne conunerciale, enfin par un
syst^e bien regie d'administration ;
mais si reiement democratique se re-
trouve dans ses institutions , Yon^itm
de sa puissance condamne sa politique
au despotisme le plus riffoureux ; elle
s'est agrandie h Fombre ae la Russie,
et elle n'agit sur TAllemagne que sous
le patronage et dans Tinteret de sa ppo-
tectrice. Ainsi, par un bizarre elfet
des combinaisons qu'elle a subies, la
population la plus edairee de I'Alle-
magne appuie Tabsolutisme dans les
grandes pnases de son action. II est
impossible que la Prusse s'abuse sur
lerdle qu'elle joue en Europe, qui
62a
L'UNIVERS.
se reduit h l^itimer en AUemagne les
pretentions ult^ieures de la Russie,
et h preparer doueemeut la conf(6d6ra-
tion a V\d6e d'une dependance plus di-
recte.
L'Autriche est enti^ment sous la
main de la Russie; son influence sur
FAllemagne est neutralist par la
Prusse; et, si elle y jouit de quelaue
consideration, c'est moins par les
avantages qu*elle pourrait aooorder par
elle-meme, que parce que la grande
famiile altemande voit en elle un en-
nemi naturel de la puissance russe.
L'Autriche a plut6t recouvr^ qu'elle
n*a gagne au partage du congr^s de
Vienne; elle est encore plus que la
Prusse un gouTcmeroent et non un
l^tat : elle offre le spectacle singuiier
d*une agglomeration de pennies slaves ,
germains et itaiiens, dont la cohesion
a besoin d*un lien despotique, et que
plus de liberty politique grouperait
immediatement en nationalitds dis-
tinctes , pour aller se confondre bient6t
avec les grandes nations d*une origine
coniimine. La marche de rAutricne,..
aussi bien que oelle de la Prusse, est
done compfexe; et, tandis que son
hostility centre la Russie la rapproche
de rAngleterre, elle se voit contrainte
d'appuyer les int^r^ts les plus vitaux
de sa puissante rivale dans la question
hoUando-belge et dans la question es-
pagnole. L'Autriche, depuis la chute
de Napol6on, n'a fait que changer de
mattre; vainement elle a essaj^e d*en*
traver les desseins de la Russie h T^-
poque de Tinsurrection grecque et pen-
dant la guerre de Turquie ; erfe a trouv^
la France et TAngieterre si insou-
oiantes de leur propre conservation,
qu*elle s'est vue obligee de d^savouer
ses velieites d^ind^pendance, et le ca-
binet Metternich a pris le parti d^^viter
soi^eusement tout ce qui pourrait
exciter pr6maturenient le mecontente-
roent de la Russie; cependant, en cas
d'unecombinaison serieusementagres-
sive contre la Russie, I'Autriche ne
pourrait qu*appuyer cette coalition, k
moins qu*elle ne sacrifldt son existence
k ses pnncipes. Elle gagnerait h Tabais-
dement de la Russie de s*as6urer ses
possessions d'ltalie par le fait de son
alliance avec la France , et de reprendre
h la di^te gerroaniipie le r61e que lui
dispute aujourd'bni la Prusse, dont la
fortune suivrait celle de la Russie.
L'Angleterre est denude de grands
Rioyens militaires; die est absorbee
par les soins d*un vaste systeme com-
mercial; ses alliances se traduisent en
chiffres; coton, suif, soie, fer, sent
des mots qui r6sonnent plus haut a
Londres que ceux de dignity Rationale
et progres humanitaire. L'Angleterre
est done peu propre k une srande ac-
tion dMnitiative; mais Tinfiuence de
son commerce, de ses flottes est uni-
verselle; si elle figurait dans une lutte
europeenne sans, arriere-pensee, et
uniquement dans le grand lut^^r^ de
Taihance, nul doute que son interven-
tion ne fdt decisive.
La situation politique de la France
est si compliquee, et les influences qui
s*y trouvent en lutte ont un caractere[
si safUant, que cet £tat represente a
lui seul, quoique sur une echelle re-
duite, tons les pnncipes, tous les in-
terets qui reunissent ou gui divisent le
monde. Riche des produits de son sol ,
forte de Thomogeneite de ses popula-
tions, adossee aux Pyrenees et aux
Alpes, et baignee par les deux mers,
la France a pu vivre d'elle-meme, et^
sans inquietude sur ses besoins, elle a
traverse toutes les phases de la vie des
peoples, experimente toutes les insti-
tutions. Elle a eu ses luttes d*etablis-
sement; elle a grandi sous la double
influence des pnncipes religieux et
feodaux, pour se constituer definiti-
vement en monarchic ; en peu de sie-
cies , elle a use la forme monarchique,
elie s'est deharrassee de raristocratie;
mais chez elie reiement democratique
a grandi trop vite; il en est resulte une
monarchic sans racines, une liberte
qui est dans les moeurs sans ^tre dans
les institutions , des alliances equivo-
ques commte Tessence elle-meme du
gouvernement. Mais ce caractere en-
treprenant des Fran^ais, ce besoin
d'appliquer les theories gouveroemen-
tales pour y cbercher de suite ce qu'il
y a au fond, est jostement ce qui fait
RUSSIE.
OSS
ren^ranee des peu|rfes ^isoaffrent,
et rappT^bensimi oes rsns qui oppri-
ment'tn peoples. La syropathie d«s
nasstt pour Tesprit fran^ais n'estaatre
diott qoe del'espoir ; elle est raisonn^
d poisBante, et tient k la fois au per-
fecRonoement moral el aui intei^^U
nat^ds. Gependant la France i avec
100 yatak moDarchique et ses i^formes
jaoompi^tes, ne peiit, dana I'^t ac-
ttul de son oraniisation , offrir un
point d'appui soTide ni k TAngleterre,
nii est ^ la feitte d'une r^olutton ra*
dicale, ni h I'Autriche l^gitiariste. Le
^on?ema(nent de jnillet restera done
isoJ^ ju8(}a*ii oe qu'il ait pris one atti*
tode moins equivoque; de til les efforts
des cabioets absolatiBtes pour Ten-
tnlner dans une marche retrograde.
Dans la question d'Orient, les tnt^r^ts
aetuels oe la France yiennent se oon-
fondre arec eesx de la Rossie ; car 1*6-
tablisseraeDt d'one oolonte en Afrique
est un non sens, s'il reste r6duit aux
proportions mesquines d*nn pied<4-
terre di^ndieax ; si la pens^e du pou*
roir va an dellk, elle conspire le d^-
memlMremeiit de t'empire ottoman et
rapprodie f^poque de la conqu^ de
Constantinople. On Toit done que Tin-
flueooe de la France , nous voolons dire
eelle de son goaTemement, est neu*
traKsdepar T Aotriche, et que la Prusse
n'est qa one annexe de la Russie. 11 ne
reste plus qoe deux pnissanoes ind^
fwadantes et entralnant les autres
Etats dans leur sphere d*action : ces
deux puissances sont la Russie et I'An-
£;erre. Or ii est Tisible que, de ces
X forces rifales, la premiere a toutes
les chances en sa faveur : pr^nd^*
rmoe nimiMque, organisation mili-
taire, uirit6 de Tolonw sans oontrdle
pessHile dans rex6cution , altianoes non
dovteuses : tons ces arantages se tron-
vent da cdt^ do nord.
la Russie trouve dans la simplicity
<le SOD gooyemement une large com-
pensation ao vice de son administra-
tion intMenre; nn secret profond
<*oinrre sea fsnites; elle sait agir en
temps opporton, mais die sait atten-
<b«. QamM PEurope a le loisir de s'oc-
<»P«r sMeusement dn danger pr^nt ,
la Russie ne p&ratt plus poursuiitre
que des plans d*amelioration mt^neure,
mais ce repos n'est qn'une preparation
a d'autres oonau^es; et, grdce au peu
d'accord qui r^ne entre les cabinets
rivaux, il surgit bientdt quelque ques-
tion nouveile oii sed^penseractirftede
la diplomatic rivale ; alors la Russie fait
aueioues pas en avant, mais de ces pas
e geant qui 6crasent des empires, et
dont Tempreinte est oomme une prise
de possession. Chacun de ses succ^
ajoute k ses ressources en diminuant
<rautant les ressources des puissances
rivales. Gependant, eu d^pit de cette
marche constamo^t envanissante, la
position de la BtnSie devient plus dif-
tieile que par le pass^, a mesure que
son but capital , 1 occupation des Dar-
danelles, est plus dairement d6fini;
et c^est un spectacle plein d'ensdgne-
ments politiques que celui de tous les
ressorts ou'elle fait jouer pour amener
ce grand a^nodment. Tantot elle eouvre
la Turquie de sa protection; h Tenten-
dre , c*eet r Angleterre et la France qui
mmtent la mine de Tempire ottoman ;
ne Toit-on pas ces puissances encou-
rager la r^voite de TEgypte? la France
ne conyoite*t-ellepBS toute la cdte sep-
tentrionale de TAirique? mais, grdce
an traits d*Unkiar-Skeiessi, la Turquie,
si elle est fidele aux stipulations que la
pr^ojance mosoovite lui a imposes,
n*aura rien h craindre d*une agression
etrangere.... En attendant, la Russie
habitue lefatalisme des Turcs ^ la rue de
son pavilion etde ses livrees militaires;
le z^le de son alliance va si loin , qu'elle
fait distribuer ses decorations aux sot-
dats de Mahmoud; et le suHan, place
entre la resistance des Mnsolmans et
rimperieuse bienveillanoe du tsar, n*a
d'autre ressource que d'ensevdir dans
les vagues du Bospbore quelques Turcs
assez amis de son trdne pour rejeter
des distinctions humiliantes. Cest tou-
jours le meme systeme de corruption
dissolvanted'une Dart etd'intimidation
de Fautre; c'est rhistoire de la Polo-
gne, de la Georgie, de la Finlande,
des provinces baltiques , de la Grimee,
de la Moldavie, de la Yalachie, de la
Grece, de la Perse; et la Russie, do
634
L'UNIVERS.
milieu de tous ces £tat8 conquis, d^
membr^ ou h la veiile de Itoe, la
Russie declare h TEurope qu'elle n'a
que des ?ues d^ordre, de justice et de
modi^ration ; TEurope n'eii croit rien ,
mais FEurope est dependante, ^oiste
et divi»6e, et elie repete a aon tour,
dans ies disoours officiels des princes,
que la paix g^n^ale n'est pas menacte,
tandis que cette paix si pr^cieuse n'est
que le r^ultat d une coupable condes-
oendance.
La Russie met h profit tons ces ^1^
ments de faiblesse et de division; elle
• poursuit babilement et rdsoiument son
ceuvre; organisee. jiour la conqu6te,
elie ne s'arrltera gjk lorsque le prin-
cipe d'activit^, qui est la condition de
son existence, r^ira, faute d'aii*
ments, sur elle-meme, c*est-^-dire,
lorsque TEurope et TAsie seront russes
de fait.
M. de Talleyrand, qui avait profon-
d^ment ^tudi^ Ies ressources et resprit
de la politique russe dans Ies ^andes
phases de Talliance et de Thostilit^ de
cet itaX avec la France imp^iale,
M. de Talleyrand, disons-nous, avait
r^uit le probldme de la lutte centre
1 influence moscovite k sa plus simple
expression, en concluant le traits de
la quadruple alliance. Dans Ies vues
de ce diplomate, la question espagnole
n'etait qu*un tb^me qui renfermait le
principe fi6cond de ralliance anglo-
fran^aise. Le p^l ^tait grand }X)ur la
Russie; elle se bdta, au premier cri
d*alarme de ses diplomates, de raviver
des susceptibilites nationales de pays h
pajs, et d'opposer partis k partis au
sein m£me des deux £tats rivaux : in-
t^r^ts dynastiques, opposition consti-
tutionnelle, pnncipes radicaux et l^gi-
timistes, elle emjploya tous ces leviers,
6pnisa tontes ies combinaisons du
oalcul et de la politique, et arriva enfin
au r^ultat ^'elle se proposait : la
France et TAngleterre, au lieu de ter-
miner promptement le conflit espa-
Snol , oe qui aurait entraine la solution
e la question boliando-belge, pour
tourner ensuite toute leur attention
vers rOrient, avoudrent qu'elles nV
saient intervenir en Espagne dans la
crainte de la Russie; et ces deux cou-
ronnes ies plus riches, Ies plus puis-
santes du fflobe, dont Ies populations
r^unies s'elevent au cbiffredesoixante
milUons d'dmes, ces deux couronDcs
qui peuvent disposer, Tune des foioes
militaires qui ont asservi TEurope,
Tautre d'une marine sans rivale dans
le monde, ont accepts rafiroat et la
responsabilit^ d'une condesoeodaooe
plus perilleuse que la guerre elle-mloie.
De bonne foi, peut-on faire un crime
h la Russie de son habilet^ a profiter
et des dianees que lui ouvre la for-
tune et des fautes des cabinets rivaux?
chez elie, FambiUon ne se confond-
elle pas avec la loi supreme de sa pro-
Sre conservation? Sans Tempire oe la
[^iterrande, qui la rend mattresse
des trdsors de TAsie et des principaux
march^ de TEurope, 11 faut qu'elle
renonce k entretenir une arm^ dfe buit
cent miile hommes: et unefois desar-
m^, une fois le prestige deson om-
nipotence detruit , ses alliances forcees
lui ^cbapperont, et en pen d'ann^
elle aura rdtro^radd de deux sidles-
Mais si la Russie obdit a la ndoessi^^
en accomplissant sa marche envabis-
aante et progressive, I'Angleterre et
la France, qui possddent Ies nioyens
d*arr£ter la puissance russe, out un
tort encore plus Evident, celai de coo-
rir sciemment h leur d^nsideration
et finalement k leur mine.
G'est une tdche s^rieose et triste que
de tirer de I'examen des foits des con-
s^ences oontraires aux int6r^s de
rbumanitd; e'en est une non moiitf
difficile de rdveiller de leur sommeil
Ies socidt^ amoUies et ^oistes; ell^
consentiraient presque k Pabandon de
tous Ies droits que leur a faits Ttoergie
de nos p^res, pourvu que le trarail
de leur transformation ne fAt pas trop
pdnible. C'est surtout dans Ies maladies
de langueur que Ton s'^int saosoon-
vulsions. ^
Sans doute, il est plus facile dMrnN-
quer le mal que de montrer le remede;
mais si Tdtude du passd n'a pas pour
but unique de satisfaire une curiosite
sterile, il est du devoir de rbistorien
de porter qudquefbis ses regards sur
• •• • a •
•••• ••••
••• •••
• -•
• • • •
• • • •
• ••
• • •
• • ••
• • • • •
•• • •
•• •* ••• •
• •_ • • •
• ••*
\
RUSSIE,
6So
Tavenir, de pr^ro* les eBprits h une
appreciation oonsdeneieuse des chan-
ces probables, pour que les d^voue*
ments ^air^ ne'fassent pas defaut au
joiir da danger. Semblables h ces chefs
qui oot rieiUi dans les fatigues, les
deuples de TEurope aspirent a jouir de
ieors travaux, et cependant I'heure de
la s6cxxril6 n'est pas fenue. A I'ini^
rteur, les questions les plus vitales de
eofin, tout est k refkire ou k modifier;
il V a done lutte et ^ril dans la paix
meme; toutefbis le bon sens puolic
est sur la voie des am^orations;
les priTil^ges et les abus de toute es-
IwcC) jo^& par Topinlon , vont tomber
avec les institutions qui les oonsacrent ;
mais de quoi serriraient Texp^^rience
des siecles et le long travail des dvilisa-
tioDs, si une force agressive menace k
chaque instant de d^truire I'oeuvre du
temps et du g^ie, et de jeter un nou-
veau jottg de fer sur TEurope r^6*
neree. II y a done aussi p^ril au dehors.
£t c'est an milieu de tant de grafes
i{uestioDS ind^ses que i'on s'oocupe-
rait k dorer les bases chanodantes de
la sod^ , qu'on oserait prodamer que
Jer^sultat de tant de r^Tolutions san-
glaotes est definitivement acquis! Un
caEe de salut s'ofifre au monde, c'est
falliance franche, intell^ente« c'est-
i-dire, efficace de la France et de
TAngleterre ; tons les int^r^ de dynas-
ties, de fronti^resy de d^Tcloppement
iDoral et Industrie], sont pr6caires
saos die. Si cette alliance est lavorable
aax droits des nations, si die n'use de
ta force que pour prot^er et non pour
soumettre , pour creuser un lit profond
au torrent qui grossit tous les jours au
Dord eilirorient, et non pour changer
bmtajenient des nationality rebelles,
olors, et peat^tre mtoie sans efifiision
desanff, tous oeoxqui ontpouvoir et
gMe devront se livrer k la tflche d^-
somiais possible de rendre les hommes
phis hoireux et plus digues de T^tre.
On a po foir oaiis I'actioA oonstante
de la Rttssie sur la politique toang^
et dans rcspritdeses traits, que toute
40* Uvraisan. (Kussii.) t. ii.
son organisatloii r^ad k un plan
immense de d^vdoppements et de cod-
qultes; il nous reste k montrer que
ses provisions pour TaTenir, dans Is
systeme de Tinstruction pubilque, d^
cdent la mtoe tendance ; que tout s'y
enchatne, en un mot que le gouvem^
ment ne consid^re le progr^ intellee-
tuel que comme un moyen, tandis
qu'il trace au progres moral deslimites
2u*il renferme dans les exigences du
espotisme. L'ouvrage publie rOcem-
ment parM. Rrusenstern, nous ser-
▼ira de guide pour les details et les
chiffres , mais nous tirerons qudque-
fois des mOmes dements des conclu-
sions contraires , non parce que Pau-
teur ne les a pas sainement appr^^,
mais parce que son but Otait evidem-
ment apologOtique tandis que le ndtre
se renferme dans Tetude impartiale de
la v^tO.
La mOme cause qui a dd faire fiiire
des progr^ rapides aux connaissan-
ces OlOmentaires dans Tempire rus*
se , s'est opposee k leur dOveloppement
transcendant, et cette cause c est Tae-
tion ^ouvemementaie agissant oomme
principe unique sur Tinstruction de la
jeunesse russe. Nous avoujerons que le
systeme adopts ne manque ni d'harmo-
nie ni de grandeur , mais il pdche par
la cause mime qui le constitue. II im-
pose une barriere k rintdligjence, il
iui prepare des mat^aux ineomplets
et rejette tous ceux qui ne pourraieoC
entrer dans I'Mifice du despotisme.
L'expOrienoedessiMes et des dvilisa-
tioqs n'est pr^nt^ auxd^ves qu'avee
les restrictions timides d'une oensare
ombrag^se ; en un mot, si le voeu goo-
vernemental est rempli, rinstruction
est tronqu^ et au^dessous des lumidrss
du sitele; si die s'd^e , mdcrO les en-
traves qu'elle renoontre k cbaqoe pas,
die se trouve comme deplao^e dans le
cadre qu'on Iui destine.
L'invasion des Mongols ddtraisit
le germe des connaissanees que. les
relations avec le Bas-Empire avulest
port(6es en Russie : aprte TexpulsioD
des hordes asiatiques, le long tr^dl
de la rtoivanisation des apanages
sooiB un mme sceptre, et ks M-
1«
616
LTJNIVERS.
tes indedsatttes !(▼«: la ^POtogne , la
CrimeeetlaSuMis/^nip^hMiit que
les arte etles sctendte ne fis^ent m
progres tensiblesen Moseovie. Lahaine
contre les i^trangers , motive par tailt
d^invasions isanglantes, se reporta iin-
que sur leilrs moeurs ^t tours institu-
tidns : aussi les efifbrs de quelqoes tsars
pour introduire dans tears Tastes Etalis
les oounai^sanGes europ6ennes , rest^
vent longtemps vains et fnfruetueux.
La discipline militaire elle-m^me fiit
. repoussee par les Russes comme enta-
eh6e d'un caract^re antinationai. On ^
▼u afec queHe peine Pierre ie Gi^nd par-
viiit' k introduire ses r^formes. Avant
foi Tacadtoie eod^asti^e de Mos*
eou , foQd^ en 1679 par le tsar F^odor
Aiex^i^vitch , et ^lev6e au rang d^aea-
dteie en 1669 , ftit le premier ^tablis-
aemeat destln^ k r^guiariser rinstruc-
tion en Russie. Une de ses attributions
'^it d*6xaminer les Strangers qui se
vouaient k Tenseignenient dans les
liaisons particuli^res : on pense bien
mi*k cette ^poque ce oontrole toitau-
flessos de sa port^. Pierre le Grand,
avec leqnel tout oommenoe en Russie,
liuivit une mardie phis rationnelle , il
envoya un-^rand nombre de jennes
•Russes ^tudier k T^tranger, et fit venir
d'AHeniasne, de France, d'An'gleterre
«fcde Holiande, des homines capables
de 4e seconder dans la tAche hnmense
^iis'^tait cr6te.L' tobHssement d'6oo-
les ^toentaires et gratirites dans ^lu-
•ieurs Tilles, tet laivouveUe organisa-
•tiott du cl^g^, suivhrent ces mesures.
*La yittgtitoe' partie des' rerenus des
ODorents , et4a trentl^me de celui des
^ises , fiirent afleetto k Fentretien
deoes^odes.
Dans la derni^re annte de son
vdgiie, Pierre le Grand tra^a le plan
deaott aoadtaie des sciences de Saint-
P^nbouvg. Une nouveile imprime-
rie fut ^tablie a Moscou , et en 1716
la prMi^re gazMte russe pamt dans
oette TiUe; n^annoins telle ^tait la
i^gnanee des parents k envoyer
leura enfants aux to>les , qu*il faflut
user de rfguear pour les Tcontraindre.
Limp^vatriee Anne tobUt des toiles
de gamison pour les eo&nts des mili-
tairesde'tout grade. Ellecr^aen 1731,
le premier corps des cadets k Saint-
P6tersbours. Sa sollicitude s'^tendit
jusque sur les peuplades les plus ^loi-
gnteSi et elle oomprit qu'elle les atta*
cherait k I'empire par les bienfaits de
Piiistniction bien plus que par la con>
trainte.
« Tousltis eiifants appartenant a la
dasse du clei^^ , et qui vivaient sans
^tat'Ct dans Toisivet^, ajant €tk assu-
jettis au service militaire, Timpera-
trice Anne en libera cenx qui avaient
fr^queiit^ les ^coles , et \es admit au
service civil lor9qu*ils ne se sentaient
pas de vocation pour r^ise. Cette
sottversine fut la premti^e qui soumit
au eontrdle dn gouvemement le nom-
bre des ^l^es , en ordonnant de lui
rendre tons les ans un compte exact
desjeunes gens qui fr^entaient les
^ooles et de ceux qui les avaient quit-
tto, avec rindicationderemploiqu'ils
pouvaient avoir obteno. «
L'imp^ratrioe Elisabeth fixa k'4ix
roubles pour la noblesse et a deux rou-
bles pour les autres classes, les amen-
des aaxqnelles^taieiitsouniis lesp^rcs
de famine qui ne donnaient pas une
MHoation • convenable ^ Ieurs enfents.
£He'fonda,en 1744, rBniversit6 de
Moscou ; ainsi que deux gymnases ; on
lui doit aussi la fondation d'^ne aca-
dtoie des beafux-<arts k P^tersbouiig,
et quek^es dooles inf^riMres.
Depuisoette^oquejusqu'd Tinp^ra-
trice Gathttine, lesmcBdrsnisses sem-
blent avoir repris4edessus,et Tinstrvo-
tian publi^fu^ fait un pas r6trogr«de.
Cette grandesauveraineforida la nui-
son dea enfants trou v4s : la preaMere fat
^tablie k Moscow en 1763 ; un an aprls
elto ordonna d'^blir dans toas ies
goavemements des ^les k deneure
pour les deux sexes ; teHe fot rorigioe
de rinstiiut des demoiselles tiobles au
convent de la R^urtection k 4Sakit-
P6tersbeQrg. « En ]775i parut Tor^-
nisatkm desgouvernements, par la-
quelle les bineaux de curaldle reou-
rent Vordre de veiller k ce que des
deoies dtoentaires foasent Mabltes
dans totttes les viiles et dans tous l«s
bonrgs popolaux Quelques aaii6es
RUSSIE.
627
tard (t7d2) , une commission spe-
iaalefut charge de lafondationd*ecoIes
qui farent placees sous leur direction.
u nombre des universites fut fixe
proTisoirement dtf ois, savojr : ltP$kof«
a Tchernigof et a Penza. En 1786 ,
toutes les ^coles pObliqiies furent di-
Tiseesensup^rieures eteusubalternes;
les premjeres devaient se trouver dans
ks cbefs-iieux des provinces, et les se-
cofldes dans eeux des districts , et dans
cfaaque paroisse des grandes yilles. On
ne lit pas sans ^tonnement que daps
ks unes comme dans les aptr es on en-
seignait les devoirs. de Tbomme et du
dtoyen. Tous ces .^tablissements fai-
saient vivement seatir le besoin de
maitres; on cr^ k cet effet k Saint-
Peterd)ourg iin gymnase normal qui
devint plus tard finstitut p^agogi-
que,
- Catberine perfectionna et 6t^ndit
r^ocation m)f|taire, imprima un nou-
vel ^lan a Tacad^mie des beaux-arts ,
et cr6a pour Jes Qls des employ^ su*
balternesde la marine, des ecoles des-
tinies h former des chefs d'ateliers
^r les travaqx de lamirauti. Des
ecoles pour ia .niarine marchande,
pour les mines et pour le commerce
s'or^iserent a Samt-P^tersbourg. A
cette epoque la famille Demidof consa-
cra un capital de deux cent cino mille
rooMes a Tentretien de cent Aleves a
Tecole de commerce. »
Paul V introduisit aussi quelques
ameliorations dans le syst^me de 1 ins-
truction publique : elles regardaient
prindpalement r^ucation des enfants
et des orphelins des militaires. On pent
dire que, Jusqu^au r^ne d' Alexandre ,
rinstroction publique en Russie ne fut
qa'un t<ltbnnement , ti que les ecoles
publiques' n'etaient pas moins defec-
tueoses sou» le rapport de I'adminis-
tiation que sous cetui des etudes.
L'esprit eclaire de ce mbnarque, le
^d^rqiiil manifesta, surtout dans
les premieres ann^s de son r^gne,
d*amdiorer T^tat n^oral et intellectiiel
de ses peuples, contribuerent puissam-
menta repandre dans toutes les classes
autant de lumieres que le comportait
I'etat peu avanc6 de la civilisation russe.
II cr^a le minist^e de ^instruction
publique et la direction superieure
aes ecples ( 1802 ) ; des lors toutes les
ecoles de Tempire fiirent divisees en
quatre cathodes, savoir : 1** ^ples
paroissiales ; 2** 6coles ^e district ;
3* gymnases; 4"^ universites.'Le hpm*
bre des universites'fut.&xe.provisojre-
inent ^.Vix, k PorpaV, h ,ViW, a
Saint-P^tersbourg,^ Kasan eta Khar-
kof ; celle de Moscou etait conserve,
inais elle fut r^organis^ en l|Bp4 sur
le pl£)n general'; les universites de
Yi^na et de Qorpat, centres de popu-
lations plus avanc^es, eurent leurs
statuts h part ; c^est a cette ^poqua que
le gymnase de Saint-P^tersboufg.fut
transform^ en institutpedagoglqfie.lie
discredit ou 6tajt tomb^ Ie,papier-mon-
baie obligea le gouvernemerjt a aug-
menter le traitement des professeurs.
En .1804 rentretien de quatre univer-
sites, quarante-deux gymnases et quatre
cent Cinq^colesde district, co^itait en-
vironunmHlion'troispentmilleroubles.
Dans un pays comme la Russie , pu la
population lihre est divisee en classes,
netiaitndcessairededonneraux person-
nes qui se voualent a Tenseigneineqt,
des grades en raison de leurs services ,
etqui les assimilajentpour le rang aux
autres employ^ de 1 £tat. Une anie-
lioration r^lie eut lieu sous le m^me
riene: le rang d'assesseur decollete et
cemi de conseiller d*£tat ne furent ac-
cord^ qu'a la suite d'un examen. Les
Aleves eux-m^mes avaient droit 5 un
grade h leur eotr^ au service lorsqu*ils
avaient achev6 Jeurs cours dans les 6ta-
blissementsde r£tat. Les ^oles mili-
taires suivirent ce mouven;ient; le corps
des pages, et les ecoles de Tartillerie,
du genie et des porte - enseignes de la
garde, furent institu^s^ Saiiit-P^ters-
bourg.
« Les Ecoles ecclisiastiques,]usque-15
compos^es de quatre academies' et de
trente-sept' $6minaires , recurent ' en
1868 uiie plus grande extension , et
obtinrent divecses prerogatives-, elles
furent divisees, comme les ecoles civi-
les, en quatre categories, et organisees
d^apres un plan unifortne qui leiir sert
encore de Mglement ' 1814). »
16.
n
638
L'UNIVERS.
Un erand iiombre d*^les sp6ciales
oot Ht fondees sous ie r^ne de rem-
pereur Alexandre. A oes demises ap-
partiennent rinstitot des Yoies de com*
imiDication , les teoles de pilotes et de
coDStructeim de vaisseaux, les 6cole8
de oommerce h Odessa et Taganrok ,
deux toles foresti^res et une pour
ragronomie; des instituts de iii6decioe
furent attaches k chacvne des univer-
sity, et ceux qui existaient d€}k k
Saint-F6tersbourg et k Moscou pnrent
un accroissement considerable. Le pa*
triotisnie dont la nation russe donna
sous ce r^ne des t^moignages si 6cla-
tantS', se manifesta de la mani^re la
plus honorable par des fondations
p^rticuli^res en fiiveur des ^coles pu-
olioues. Le oonseiller d'l^tat Paul De-
midof leur consacra environ un million
et demi de roubles dont les deux tiers
pour r^ablissement d*une ^le sup6-
rieure li Jarosiavl; le prince Besborooko
suivit eet exemple, ainsi que plusieurs
autres seigneurs et riches n^ociants.
La noblesse de quelques gouverne-
roents se montra 6galement empress^
a doter, soit des universit^s, soft
des dcoles. Malheureusement ni les
oukases d*un prince bienveillant, ni
les sacrifices des particuliers ne peu-
vent changer Fesprlt des masses ; les
institutions qui ne sont pas encore
dans les moeurs peuvent bien imposer
par un certain ^clatext^rieur, maislerd-
sultat en est loin de r^pondre k Tinten-
tion cr^trice. Dans les deux capitales
la surveillance imm^ate de Tautorit^
comp^tente, le m^rite des professeurs,
et le oontrdle d'une population plus
avanc^e , offrent des garanties k peu
ores sufBsantes; mais k mesure que
les chefs d^^tablissement s'^loi^nent
de oes centres de pou voir et d'activit^ ,
ils ex6catent les reglements avec moins
de ponctualite, et ne songentpour la
plupart qvi^k tirer le parti le plus avan*
tageux dfe leurs places. La preuve la
plus incontestable de Tinaptitude du
corps enseignant en Russie, c'est Tab-
sence de productions remaiquables : k
fexception de quelques nationaux,
les professeurs les plus instruits sont
des etrangers , et si un concours euro-
pten etait ouvert aux ^tudiants des
classes supi^rieures, soit pour la pbiio-
Sophie , soit pour les sciences ou poor
les langues savantes , le pays le plus
vaste de l*Europe aurait sans doute la
moindre part aux recompenses. On se
tromperait tputefois en concloant de
ces remarques , que les Russes oot peu
d'aptitude aux sciences et aux lettres,
ils sont sous ce rapport heureasonent
organises, et s*il r^ussissent moins
bien que dans d'autres pays, la faute
en est aux institutions qui p^sent sur
tout ce qu*eiles touchent. Le r^ne de
Fempereur actud a ete f6cond en chau-
eements plus ou moins judicieux;toute-
fois on ne saurait nier qu'il a syste-
matise avec ensemble toutes les parties
de rinstruction publique : il a pour
ainsi dire obtenu le mieux possible
dans le mediocre, et oomme rien ne
g^ne autant le despotisme que tout oe
qui est transcendant, il pent se flatter
d'avoir atteint son but. Sous les regnes
precedents, la direction de rinstruc-
tion publique, tout imparfiaite ^u'elle
etait, laissait au moins entrevoirrin-
tention de s*eiever, dans un avenir phis
ou moins rapproche, auxconoaissaoces
2ui conviennent k des hommes libres.
I'empereur Nicolas , menace d^ son
avenement au trdne par une conspin-
tion liberale, a cru tarir la source de
ce danger en disciplinant jusqu'a »
science y la litterature et la philosophte.
II a decrete que reducation serait na-
tionale, c'est-a-dire, ^u'elle n'irait
que jusqu'ou le despotisme n'aurait
point k s*en alarmer. Gette marcbe est
lo^ique, mais la Russie a recuie d'un
Steele dans la vote de la liberte, et
FEurope qui suit d'un ocil inquiet m
envahissements de cet empire , saitde-
sormais que c'est k un pays organise
pour Tesclava^e qu'eUe est menaoee de
se voir soumise.
« Puissent les ptos de hmilk , a dit
Tempereur dans un manifests (juiilet
1826), porter toute leur attention sur
reducation morale de leurs enfants.
Ce n'est , certes , [mint aux i^rogres de
la civilisation , mais a la vanite qui oe
produit que le desoeuvrement et le
vide de Tesprit . mais au defaut d'uoe
RUSSIE.
iwUuetuNi rMIe, qu*ii fiaiut attribmer
cette Koeooe de la f&oa^y cette fougue
det paaaioos, oea demi-ooonaissancei
n ooQfoaes et si funestes, ce penchant
am tileries extrtoes et aux visions
politiqoes qui commencent par dtoo^
raJiser et finisstnt par jperdre.
« (^e la crainte de Dieu et une so-
lide et ratriotiqae instruetion soient
la base de toutes les esptonces d'am^
liorationy la premier aeroir de toutes
Id daases. « M. de Rrusenstern eon-
chit de cet avertissement impdrial que
r^ocation de la jeunesse russe serait
2 la fois religieuse, raonarcbique et
aationale. Pour qui connaft la Russie ,
eei paroles signifient seulement que
d^sormais rinstruction publique, en
Rustle, ne sera plus oonsider6s par
fegooremement mie comme un rooyen
de pcrfeetionner les ressorts de Tau-
tocratie; qioant k la religion et ^ la
morale, dies pjeuvent adoocir lei
noeurs des propri^taires d'flmes et la
aonditioa des serfs, mais il est oon-
trajre a leur essence de consacrer la
dmte illimit^ d'un td 6tat de choses.
L'instroction publique , en Russie ,
peat tee dnris^ oomme fl suit : 1* les
toks piibiiques de toutes les classes ,
qui ooostitnent le minist^ de Tins*
traction publique proprement dit;
^ les 6oom militaires; 8* les 6ooles
eecloiastiques; 4* les ^coles spdciales
ctdivenes rele?ant des autres bran-
ches de radministration.
Le mioistdre de rinstruction publi-
que se compose : l^ de la chanoellerie
■mitstMelle; 2* du d^partement de
rinstruetion publique; 8"* de la direc-
tion sup6rieure des toles.
Le d^partement de I'instruction pu-
^icpiedirige, sous les ordres du mi-
nitre, les ^tablissements scienttfiques
2^ les 6oolts de rempire, exception
Bite de eenz qui relevent imm^iate-
Bcat des autres branches de Tadmi-
^btration. La competence du de[)ar-
tsneat s'^teod ainsi sur les obiets
^vants : 1« sur I'^blissement, Por-
paisation et Fadmintstration de toutes
Ki teles publiques entretenues par le
fiouTprnement ; 2« sur le personnel de
^ teles ; 3^ sur le mode d*enseigne-
ment; 4* sur les institutioiis privte;
&* sur les 9od€Us savantes et pacth»«
li^es; 6* sur les bibHotfidques, mu-
ste, etc.; 7* eofin, sur la reaction
du journal du minist^e de rinstrue-
tion publique.
La direction supdrieure forme le
conseil du ministre. Elle s'oocupe:
i« des modifications ou diangements
ntessaires soit dans I'orgamsation ,
soit dans les r^lements; 2* de la for*
mation de nouvelles teles particu-
litres; 8* des affaires pteniaires et
contentieuses ; 4* de Pexamen des rap-
ports des fonetionnaires envoyds pour
rinspection des teles; 5"* ou cnoix
des livres d^enseignement. La distri-
bution des arrondissements a subi des
modifications judideuses, et qui r6-
pendent d*une manite plus satisfoi-
sante aux exigences des locality. 'M-
sormais la suireillanoe des teles dans
lesprpTinoes doignte de Tempire par
les curateurs ou inspecteurs, offrira
moins de difficult^.
Les attributions du ministere de
rinstruction publique embrassent, ou-
tre les objets ci-dessus indiqu^ , tout
ee qui oonoerne la censure. Des modi-
fications ntessitte par la situation
partieulito des provinces, out M in-
trodnites sur le rapoort d*un ootnit^
dont le r^lement tut confirm^ en
1838. Les dispositions en ^talent appli-
cables aux arrondissements de Samt-
P^rsbourg, de Moscou, de Rharkof et
de Casan. Ce r^lement dififtre de celui
de 1 804 en eeque la liaison qui existait
entre les teles des diff(^rents dtgr^
fot rompue. Alexandre avait touIu que
I'd^ve aune tele primaire ou parois-
siale pdt continuer ses ^des k Ptele
du district, puis success! vement au
gymnase et a runiverdt^ : c*dtait le
moyen d'ouyrir k Taptitude et au g^nie ,
dans qudque rang que la nature les
efit caches , toutesles ressources crete
parlegouvemement. Cette disposition
qui honore la pbilanthropie de ce
prince, toit, il laut le dire, en con-
tradiction flagrante a?ec les institu-
tions du pays. Quelle utility pouvait
tirer d*une education d^nteoes jeu-
nes gens que le privilege repoussait
•»
L'UNIVERS.
vorstt^ de Saint -Menbourg, a la
somme de 973,950 roablea ; pour oelle
de Moaoou , k 454,200 roubles; pour
oellesdeRbarkofetdeCaaan ,11370,000
loobies chacune.
En 18S5, l*uniTffrsit6 de SaintpP6*
tersbours comptait 385 ^tudiants.
L'anomussement qui en depend ren*
fennait h la mtoe ^poque 580 tooles,
ayant 11,911 ^lifes.
Uuniversit^ de Moaoou oomptait
419 6l^?es: rarrondissement a?ait
015 teles , renfermant 16,359 ^^es.
A runifersit^ de Kbarkof , on comp-
tait 343 ^l^es, et dans t'arrondisse-
ment, 11,446 ^tudiants, r^partis dans
317 teles.
A runi?ersit6 de Rasan, 353 to-
diants; dans rarrondissement, 198
teles , et 8,459 6l^?es. *
II ne pouvait 6cfaapper k Tattention
dtt gourernement, que le svst^me de
rinstruetion publique, dans rarrondis-
sement de Kasan , doit ntessairement
<tre adapts aux inter^ts des tribus asia-
tjqoes qui rhabitent en partie , et de
veiller a ce que I'universit^ de oette
fflle dertnt le t^atnon qui rattachflt
ces demieres k la population russe;
c'est dans ce but que des soins parti*
culiers ont it& vou^ k I'enseignement
de Tarabe, du persan, du tatare et
du mogole.
Cette demi&re langue n'aTait point
jus(|u*a prtent de grammaire ni de
lexique; Tacadteieten ^midt a rem*
pli cette lacune.
L*universit^ de Dorpat, dont la des-
tination sp^tale est de repondre aux
besolns intellectuels des trois provinces
baltiques, jouit de privil^es assez
etendus; le culte des habitants nYtant
pas eekii du reste de Tempire , eile a
une fecttlt^ de th^iogie. A cette uni-
versity sont attaches un seminaire
normal , et un seminaire thtelogique
destine k foumir des predicateurs
pour les paroisses protestantes dans
toutes les parties de rempire. En 1835,
runfverstte de Dorpat comptait 567
etudiants ; et les 253 teles de son ^ta-
blissement offraient un total de 8,826
€i^es.
L*arrondi8sement de la Russie blan-
che, sur 319 teles , a ll«590deves.
L'uDiTenit^ de Sahit -Vladimir k
Rief ne paratt pas toe dans un 6tat
florissant , ce qu*H faut sans doute at-
tribuer aux mesures rtoressives prises
par le gouvemement a la suite de la
demi^re insurrection de Pologne. I^a-
Srteleschiffres de M.deRnisenatera,
1 professeurs et mattres n'oocupeot
Se 130 ^l^Tes ; rarrondissement a 90
!>les et 6,790 ^^ves.
L'universit^ de Yilna, jadis si c^
Idbre, est diskxpi^ Dans cette ville,
1^ Grodno , k Blalystok , k Vitepsk, a
Bfinsk et k Mobilef , le goufemement
imp^ial paralt moins oocup^d'etendre
la sphere de rinstruetion qu'ii ranorner
k an systdme uniforme les idte pa-
triotiques des populations.
Le \vc6t d'Odessa , fond^ par le doc
de Ricnelieu , diffbre pen aujouid*hin
des autres teles superieures de Tem-
pire. On remaroue dans oet arrondis-
sement une tele destine aux jeuncs
Tatars, et une classe de langue mal-
dave prte du gymnase de Ricbtef.
L'arrondissement d'Odessa compte
4,647 61^ves.
Les teles des provinces trans-
caucasiennes ont subi ditT^rents chaui-
gements en rapport avec T^tat poli-
tique de ces oontrte. D^ fann^
1819, et sur la demande du g^^ral
lermolof , Tenseignement du latin et
de Tallemand y fut remplao^ par eelni
du tatar dans les gymnases, et Ton
ajouta au cours d'etudes p^usieurs
branches des sciences militaires, la
jeunesse du pays 6tant destine au ser-
vice du corps d*armee du Caucase.
En 1829, un nouveau regleroent viot
oomplter oes dispositions que ren*
daient insuCBsantes les acquisitions de
Tempire apres la campagne de Perse.
Des modiOcations rtentes ont ^t^
faitesdepuis dans ces ^blissements.
En general , les (lis des fonctionnaires
russes doivent apprendre soit le tatar
soil un des idiomes usit^ dans ces
provinces. Des ^coles de district ont
6te fondees k Tifli^ , Gori , Elisabeth
pol, Routars, Nakhitch^van , Akbalt
zykh, Bakou, Derbent, Erivan, el
dans pittsteurs autres villes. Ges ^coles
RUSSIE.
9U
ogttfois classes; dans les dfiui{ire-
■iint, rmstriictiOD se doone dans la
laagve du pays , ft en russe seulement
dans la deniiere. Le nombre dee eieres
qui fr^quanteDtlfls 6ooka transcauca*
neones est d^ de IMS: oelui de
toutettes fo>lesde la Siberia ne s'dl^e
poiot au-dessus de 2,000.
MaJgr^ tons les soins et les sacrifi-
ces du goorenieiiient poor cr6er des
ecoles naUonales, les Rosses, prin-
dplemeot les seigoeors de la pre-
miere distinetioa , prtf§raieot, oomine
ooQs ra?ons dit, les toles particu-
ttes, presaoe toates4ingte par des
Hnoienj le oombre de oes toies
eCait, eo 18S4 , de 99 dans les deux
capitaJes; d*uii aotre c6t6, c'6tait pres-
aoe exdosifemeot k des ^an^ers que
rooeoofiait redocatioo partieoli&e.
L'amoar-propre national « ou plotAt
cduidopouToir, soumitatoutessortes
de restnctioiis F^t de prtopteur et
d'instituteur. Sous le pr6texte d'une
onntie morale » qoe n'offre pas d'ail-
tears a no 6egti tainent la majorit6
des naHonaux , on a aigfi des institu-
tean etranoers derenonoerd leur pays
et de se fiire Rosses; c'est-Wire,
S*(m Veop a impost un acte immoral, en
\ pla^ant entre leurs int^rto et leur
deroir. Aa reste, ces mesures aoront
use halite portto ^litique ; mais nous
dootoos qoe oe soit en fiiveur de Tern-
pirenisw.
n suAt de Jeter les yeux sur le re-
caeil des actes de I'acaifemie des scien-
ces de Saint-P^rsbourg , pour s'ssso-
rer que les Rosses n'y soot pas en
nujonl^ , et que la gloire de ce oorfis
iHuirtre appartient presqoe exclusi-
▼eiaent a rAllemagne. Le statut qui
determine toutes les attributions de
TaiaHUmie, porta le budget annuel de
ttt etabKssement a 239,400 roubles.
Le d^£Mit d'eqiaee ne nous permet
pvd'dnmii^rer tous les ^tablissements
iftema qni se trouvrat sous la direc-
tion et le contrdle Maire de Tacad^-
niie; mais nous emprunterons a M. de
Kruaeosteni le passage suivont, qui
honore la munilicence de reinpereur
HUfl.
• Par son ordre , un nouvel obser-
vatoire a M fond^ i^ Helsii«fos;.la
position de cet ^tablissement en fait
un des plus importants de TEorope.
D'autres ont dte ^lev^ h Moscou , k
Rief et k Casan ; enfin Sa Majesty a or-
donn^ qu'un obserratoire central fidt
dev6 k Saint-P^tersbourg sous la di-
rection de I'acad^mie des sciences.
«Cet dtablissement va devenir le
Cus Taste de l^urope ; il se trouve sur
montagne de Pulkovo, pres de
Saint-P^rsbourg. La premim pieire
en a ^t(§ poste au printemps de 1834...
Une somme de 2S1,438 roubles a Hi
assign^ pour la seule acquisition des
> instruments qui tous ont eU comoian-
dds dans les ateliers les pins c^ebres
de l^urope. Le devis ^6ieral de cons-
truction s*^l(^ve k nres d*uu million
huit cent mille roubles. «
Le nombre des joumaux et autres
publications p^riddiques dans tout
rempire, en rosse, aHemand, fran-
fais,etc., est de68.
II est superflu de dire que la cen-
sure sur^eiUe stcc le plus grand soin
toutes ces publications , de m^me que
les ouYrages imprim^ dans le pays
ou venus de T^tranger. Au reste , les
r^ements relatifs k la censure sont
remanids k chaque regne, et plutdt
deux fois qu'une. Cest oue dans un
pays 01^ le pouvoir supreme fait les
lois , Hen n'est d^ni , rien n'est stable;
et 1m dtoets rendus dans des circons-
tances eiceptionnelles n*y sontabrogte
que lorsqu'ils ont produit un mal irr^
parable.
£n 1835, le nombre des volumes
Imports de Ttoan^er ^tait de 300,000;
celui des ouvrages imprim^ en Russie
deTOS.
En examinant la marche progressive
des toles d^pendantes du mmistere
de rinstruction publique, on trouve
au*elle a ^ plus rapide sous le regne
* Alexandre, avec moins de moyens et
une population moindre; en euet , en
1804, le nombre des el^ves 6tait de
33,481; et, en 1824, il s'^levait a
09,629. En 1835, il ^tait de 85,707.
Les ecoles militaires en Russie peu-
vent ^re rangto en trois categories
distinctes : 1* les toles militaires.
634
L'UNIVERS.
sous la direction du grand^docliffdiel ;
T* le corps des cadets , et les ^les
releYant de fetat-major de la mame;
3* les 6coIes militaires qui d^pcDdent
du ministere de la guerre, et mii sont
reservees sp^iatement aux enniDts de
soldats.
Le noinbre des ^les militaires pfa*
c^s sous la direction du grand -due
Micher, tant ^ns les deux capitales
que dans plosieurs cbefs*lieux de gou-
vemement , est de 87 , en y conSpre-
nant plusieurs corps de cadets, dont
Tori^anisation n'^ait pas achev^ en
f 837 , mais oni Test probablement au«
jourd'hui ; efles renferment 8,733 61^
ves, dont renseignement est gradu^
selon les destinations spto'ates, de
sorte qu'en entrant au service, les
jeunes gens ont toutes«les connnais-
sances de leur arme et de leur grade.
L*entretien de ces 6coIes codte annuel-
lement 6,355,000 roubles. En g^n^*
ral, Tetude des langues et celle du
dessin y est faible; mais celle des
sciences math^matiques y est poitde k
un-degre satisfaisant.
Les eeoles qui rel^Tcnt de I'^t*
major de la marine ont 2,394 el^es ,
dont le budget annuel est de 633,194
roubles.
En 1824, les ^les design to sous
le nom de section d^orphelins militaires,
etqui renferraaient an grand nombre
d'mves, fbrent placto sous la direc-
tion de I'^tat-major de Tempereur poor
les colonies milttaires. Deux ans plus
tard , dies fiirent organisto en batatl-
lons, demi batatlkms et oompagnies de
cantonistes, formant ensemUe sept
brigades, et quatre r^ments de ea-
rabmiers d'instruction.
Le direeteor do departemont des
colonies militaires est le chef de tons
lescantonistes; les differentes brigades
sont distribute dans vingt-six gouver*
nements qui forment pour ainsi dire
la ceiature de Tempire. Les brigades
des cantonistes militaires se oompoifent
principalement d'enfants de soldats.
On y recoit eependaat aussi les orphe-
lins de toutes les conditions, des fils
de nobles dont les titres ne sont pes
CR regie, ou d'employ^s qui n'ont pas
le grade reqois poui dlvB admts au
corps des cadets. V^ d'admissios
dims les brigades est depuis six ans.
jasmi'^ dix-buit; mais la phis (pninde
partiedes^l^vesenbas dgeresteot jus-
gu'a leur mi^orit^ aupr^ des parents.
L'enseignement dans tous les batail-
Ions, demi^balaillons et oorapagnies
des cantonistes*, le bataiMon de Saint-
P^rsboorg excepts, se compose de
ooMiaissances timentairas, db I'exev-
cice militaire, et d'ua travail mteni-
que qui fome les ^^es h uaT ro4tier
utile. Ainsi ebaque dasse est divisee
en deux sections, qui se trouvent al-
• temativement en elasse, h rexercioeet
dans les ateliers. Un certain nombre
de cantonistes dans chaque bataillon
apprenoent en outre la mnsique mili-
taire et le cbant d*^ise.
Lorsqoe les cantonistes ont acbev^
leoffs ^des, les plus capables devien-
nent mattres, 6cnvain8 de bureaux ou
mosiciens; les autres sont inoorpor^
dans les regiments d'instruction de
carabiniers, et dans ceux de la ligne.
Apvds leur incorporation dans les r^-
gonents d'instmction de carabiniers,
les cantonistes , tout en s^ooenpant phis
spfcMlemcnt dies exereiees militaires,
continaent k se perfectionaer dans les
sciences et dans les metiers qui leur
ont iU enseign^. Les plus a?anocs
R assent cnsuite comma sous-officiers,
» autres comme simples soldats, dans
les regiments de ligne. Le bataillon des
cantonistes deSaint-P^rsbourg a una
organisation h part : il est compost de
quatre compagnies, dont la premiere
est divis^ en deux sections; rune est
une ^le normale, Pautre une ^oole
de topographic.
La deuxitae eompaenie est une
6cole dl^mentaire d'arttlmie. Les el^
ves de oette tele paasent dans la bri-
gade d'instruction de Fartillerie.
La troiaitee compagnie est une tele
^Iteentalre du g6nie; die fournit <te
conducteurs k radmioistration de eette
arme.
La quatritee compmiie ou ceUe de
ligne est rtervee spdaalaroent pour
completer les regiments dinstruction
de carabiniers. Kile fournit aussi des
RUSSIE.
636
litiiograplies powr I'tot-iiMfor, (jtes em-
ployes poilr le service des tel^raphes ,
d^ maftres de gymiMstiqoe, detf Am-
mdtos et des tonvatae debiflpeatft.
L'eoole des aaditaiw appartieDt
aussi h oette oompagnie: eUe eat oon^
posee de cent Aleves, dont aoUante
cantoiiDsteB etqaarafnte iis d'officiers.
On les idmet au aetfviee arec le rang
de soiM-dfficiers dans lea d^iartementa
de Faodftorial des miiristeriBs do la
gaerre el de la mavme. PHis tard , A0
sont envoys connie audketffs a Tar-
rnee. Le HOVDbre des cantometea ac-
toels est de 38,44^ pr^aenta, et de
127,761 ptm deleurs piireflHa. Cet^ta-
blissement important, qui suf&ait
poor r6T^er la tendance BMKlaire du
gouYeraanent raase, poaa^de un ca^
pita) qui s'aecrott joumellemeiit , et que
M. de Kroaettstern porte k ayOOO,000
roubles. En r^capitulant en utie
somme totale lea chifEi^ qtte noas Te-
nons d'^noncer, on trou vera que lea-
^les nrihtaif es de toi»tes lea eiaasea
renferment 180,000 eleves, dent le
budget annuel est de 8^687,194 rou«
bles.
11 ssiste en Russie d wx esp^cea d'6-
ooleseooiesiastiques ; les prenEii^ras lOnt
ceiles do rit grec orihodoxey soumiaes
au ssiat aynode et dtrig^ par une
commission spteiale ; les secondes sont
les 6Goles edcl^iastiques des cultes
etrangers relevant du d^partement de
oes eultes, leqael fait ^rtie lui-mdme
du ministdre de Tinterieur.
L'empereur Alexandre, apres atvoir
rdorganise les ^coles seculieres, voua
la m^e attention a oelles du der^L
En 1808, il fot cr{s^ une commission
sp^ale obargife de la direction sope-
neiire des to>les eod^iastiques; et,
eo 1814, ces ^coles re^urent un r^le-
naent qui , aauf quel^ues modifications ,
sert encore de Mse a leur organisation.
En vertti de oe r^lement, toutes les
eooles ecdesiastiques sont divis^es en
^ois arrondissements : ceux de Saint*
^ftenbottrg, de Moscou et de Kief,
^nqne drrondissement est compose
deooles aup^rieures, d*^coles moyen-
»wi et d'ecoles inferieures. Les ^les
>U|)erieiire6 sont les acadtoies^ on en
compte troji : ^SMnt-P^ersbourg, a
MoaeoQ et ^Kief. Lefr semiaairea fer-
ment les doolea moyennes; elles se
tpouveot pour la phipart dans les cbefs-
lienx des fOuveraemeBts. Dans les
deeles iafeviearea sont comprises ceiles
de distrietset de [Xiroisses , qui se troit-
veiit darn les petites vUlea et dans les
bourga. Lea ^eles paroissiales sont
soboraonnto a eeUes de district, et
oellea-ci aux stoinaires, qui eux-
mdoMS reinvent des academies.
L'administration locale des ecoles
de eliaque arrondissement appartient
a Fatchevd^ue dioctoin. Bien que cha-
citne de ces qaatre categories d'^coles
ait an riglemeat special, tous les
toblissements d'education du clerg^
sont diriges d'apres des principes uni-
formes, aous le rapport de TMucation
morale et de Teducation scientiiique
des ^ves, aussi bien que sous celui
de radministration ^nomique.
Lebttt special des ^les paroissiales
est de fournir des Aleves suffisamment
prepare aux ecoles de districts.
Tous les enfants Hges de sept h huit
ans, appartenant au clergd (Tun cer-
tain Aombre de paroisses , sont tenus
de fr^uenter les ^les paroissiales, a
Texeeption de ceux dout les parents
s'engagent h leur faire ac^uerir, cbez
eux ou ailleurs, les oonnaissances n^-
cessaires pour leur admission a une
^le de district. Cbaque ^ole parois^
stale est dirie^ par un inspecteur qui ,
selon le noniore des ^l^es, a sous ses
ordres un ou deux maftres. Les fonc-
tions d*inspecteur sont (Nrdinairement
confix au cur6 du lieu , ou a des per-
sonnes gradnees en thtologie. Les
d^ves des ^les paroissiales, et de
preference ceux dont les parents sont
pauvres, sont log^ soit dans Tccole
mtoe, soit dans un des convents voi-
sins. Ceux que les locality ne permet-
tent point de |>lacer de cette maniere .
doivent pourvoir eux-m^mes a leur lo-
gement, et ne viennent h Tecole que
pour aasister aux lecons.
La destination des ^oles de district
est de dinger les ecoles paroissiales oui
leur sont soumises, et de fournir oes
^.leves aux seminoires. Elles sont diri-
636
LUNIVERS.
iS^M par un recteur assists de plusiears
mattres. Le rectear, qui est ordinaire*
ment i'archimaodrite ou le auo^riear
du oouvent le plus Toisin , doit joindre
a cette quality un grade thtologique.
Las d^Tes des stoinaires, suivant
leurs progrte , passent les uns aux aca*
demies, les autres oomme curte dans
les paroisses de second ordre, comme
mattres dans des ^coles inf^rieures,
oomme ^diants dans les acadtoies
de medeeine , ou enfin comme employes
au senrice civil. Ges ^biissements ont
six classes oik Ton enseigne la tbeolo-
gie, la rh^orique, la philosophies
rhistoire de r£glise« Thistoire nnlve^'
sella, et cdie de la Russie en particu-
lier, IVbrcu, le grec, le latin et Tal-
lemand.
Les acadtoies eoci^siastiques ont
une triple destination : 1* celfe de for-
^ mer des jeunes gens pous les fonctions
sup^-ieures de llKglise ; 3* celle d^^n-
dre ies limites desconnaissances th6o-
logitfues, oomme corjps scientiflque, et
3* celle enfin d*admmistrer les ^1^
qui ieur sont soumises.
Le cours d'^tudes se compose de
deux classes, Tune de thmogie et
Tatttre de philosopbie.
L'^de des sciences qui forment le
cours d'^tudes des academies est ou
obligatoire pour tous les 6l^ves ou fa-
cultative. Aux premieres appartien-
nent : !• un cours oomplet de tneolo^e ,
3* un cours de philosophic th^or^ique
et de morale, 3"^ un cours de litt^a-
ture. 4* rhistoire sainte et Thistoire
de I'Eglise, 5* le latin, le grec et rh6-
breu.
Les objets dont T^tude est al)an-
donn^ au choix des 6l^ves sont la
physique, les hautes math^matiques,
les lan^ues fran^ise et allemande,
les antiquit^s grecaues et romaines,
etc. Le nombre des el^ves des Bootes eo-
clesiastiques ^tait, en 1886, de 68,580,
celui des ^tablissements pour les cultes
^nineers de 8,803. Cette difference r6*
pond a celle qu'exprime le chiffre des
populations russes qui ne professent
pas la religion de FCtat.
Parmi les ^oles spfeiales on distin-
gue celles des mines, qui sont divis^es
en siibalternes, moyennes el aup^
rieures. Les premieres ont 4,0S4 de-
ves. Les prindpales sont ^tiabiics a
Nertchinsk et k BamaouL Les 6collm
sup^eures sont : f Tinstitut des in-
g6nieurs des mines k Saint-P6t»s-
oours.
Getetablissementffond^eQ 177Spar
Catherine, snr la demande du Bachkir
Ismail Nasimof , a requ en 1884 son
organisation actuelle. II se divise en
deux sections. Tune pr^ratoire, ou
le cours d*^udes est le meme que oelui
des gymnases, I'autre mteial, qui re-
pona a la destination oes ^eves. L.e
cours oomplet des 6tudes est flx6 1^ neuf
ann^es.
Ce qui rend I'institot des ingteieurs
des mines un des toblissements les
{)lus remarquaUes de TEurope, d'est
a ricbesse des mosses et des collections
qu*il renferme.
2^ L*to>le technique des mines*
8* La section des m^ailies k rbdtel
de la monnaie de Saint-P^tersbourg.
4* La section pratique des naines et
celle des usines oe I'^oole de Bamaoal.
Le nombre des Aleves qui suivent
oes to>les, en y comprenant quelques
etablissements fond^ par des particu-
liers, est d'environ 5,000. Nous eite-
rons encore Tinstitut pratique de tech-
nologic, r^coie de marine marchaade
^Saint-P^tersbourget^ Kherson, Tins-
titut fotestier, Ttole des eaides fores-
tiers , etc. , etc. Les 6coles oe m6dedne ,
les to>les rurales, celles destinies aux
fils des employ^ snbaltemes de bu-
reaux, sont des institutions dont les
reglements m^ritent d'etre 6tuditedans
Fouvrage de H. Krusenstem.
Les hospices d*orphelins et les ^coles
de pauvres renferment environ 10,600
ei^ves.
L'acadtoie des beaux-arts, orpni-
s^ par Catherine II, a subi plusiears
modifications; elle a form^ plnaieurs
sujets distingu^, mais, il fout le dire,
oe sont d'assez rares exceptions.
Un des ^tabiissements qui honorent
le plus la mtooire d*Alexandre, c'esi
rinstitut des voies de communication;
on y compte 365 jeunes gens; il a ^
fond^ en 1810, sous la direction de
RUSSIE.
687
piasieuTS &kves sortis de Tccole polj-
technique. Nous citerons eacore i'^le
des ingteieurs dyils, et cdle des con-
ducteun des Toies de eommonication,
organis^es scms ie r^e de Temperear
acbiel : la premito renferme 100 €\h-
Tes, et la seoonde 800.
L'eoole de jorlsprudence m^iite
aossi ane4nention particuli^re.
L'institut oriental du minist^re des
a£faires ^trangdres forme une section
da d^partement asiatiqoe de ce minis-
tore; ii doit son origine au Tioe-cban-
celier comte de Nesselrode, qui le
foods en 1838, dans le but d*6tablir
une eoole Aejeunes lie langues, pro*
pras a serrir T^tat oomme interpr^
tes diplomatiques dans les missions
russes k Constantinople, en Perse, et
dans les ^dles de I Orient.
Panni les institutions de bien&i-
saoce, it faut dter en premiere ligne
les maisons des enfants trouT^ de
Mosoou et de Saint-P6tersbous^. Elles
furent plac6es sous la direction de
rimporatrice Marie, qui ne n^ligea
tienpour les faire prosp^rer. Aujour-
dlmi rimp^ratrice Alexandra 8*en oc-
cope avec une tendre sollicitude. Nul
n*est Tefus6 ; tout en&nt d^pos^ ou
nedans la maison est inscrit sous un
nomero qui lui reste, et qui pent ser-
▼ir il oonstater son identi^; II est bap-
tist SQiTant le rit grec, et remis k
une noorrtce , k sa mere , de pr^f^rence ,
sTeiie veut le gard^ jusqu'li i'dge de
septans, moyennant une pension men-
suelle. Tous les Aleves des maisons des
enfants trouv^ sont divis^ en trois
cat^ories prindpales : oeux qui se
troavent dans les hospices memes;
eeox que Ton met en nourrice dans des
nlbf^, enfln ceux dont r6ducation
premi^ est confine k des habitants
des villes. La destination des premiers
se r^ d'aprds les dispositions natn-
relles des enfants. Les ^^es de la se-
conde eattonrie restent dans la condi-
tion iilaqueUeappKartiennent les fiamilles
qui ont pris soin d'eux; ceux de la
voisieme entrent, aprte avoir attaint
rige de sept ans , soit aux hospices
manes, sort aux ^iSablissements qui en
dependent.
Le gouvernement ne se borne pas k
{>rocurer k ces enfants les blenfaits de
'Education ; 11 veilie a leur avenir ; et
ceux qui montrent Taptitude necessaire
Seuvent terminer ieurs etudes soit
ans les 6coles sup6rieures , soit dans
les academies.
Le defaut d'espace ne nous permet
pas d'entrer dans les details de ces*
londations interessantes, ou le blen-
Dait enrichit sans cesse et fi§conde sa
source; nous nous bornerons k dire
que les deux maisons des enfants trou-
T^s , a Saint-P6terSbourg et k Mosoou ,
renferment environ cinquante mille
^l^ves de Pun et Tautre sexe.
Saint-P^tersbourg a en outre une
to>le de commerce, un institut des
sourds-muets. L'hospice des aveugles
est situ^ k Gatchina. Moscon a aussi
une 6cQle de commerce, fond^ par les
habitants de cette ville, et une maison
de bienfaisance , qui porte le nom
d'institut des orphelins d' Alexandre.
L'irop^atrice Marie a voue une sol-
licitude particuliere k Tdducation des
filles ; les ^tablissements fondes ant^-
rieurement ont €t6 am^lior^s par ses
soins, et un grand nombve a'autres
lui doivent leur existence : il nous suf-
fira de nommer I'institut des dcniai*
selles nobles k P6tersbourg; eeluf de
Sainte-Catherine dans la m^me ville,
^galement destini^ k la noblesse; la
section pour les demoisdies prds le
corps de Paul , ouverte aux orpbdines
de militaires; I'institut de Sainte-Ca-
therine k Moscou , pour la petite no-
blesse ; et les to>le8 pour les fiHes de
soldats et de mateiots. Ces ^tablisse-
ments et plusieurs autres sont aujour-
d*hui placds sous la protection de
rimp^ratrice r^ante, k laqudle la
bien£aisante Mane les a l^u^ en mou-
rant.
Parmi les 6col6s allemandes, les
prindpales sont cdles de Saint-Pierre
a Saint-P6tersbourff , celles de Satnte-
Anne et de Sainte-Catherine, et I'^oole
pr^ ri^ise r^form^ k Saint-P^ers-
bourg.
II existe en outre un grand nombre
d'6ooles dans les colonies allemandes
qui se trouvent particulidrement dans
e9»
rUNlVERS.
les gouvernements de Kherson, de
lekaterkioslaf vdeToherni^of , de Saint*
P^ersbourg , en Bessarabieet eh Geor-
gie. Ces 6coles, qui sont eatretenue$
par les communes, r^ndent aux
^ooles devillage3 (Dorf-sohulen) de
TAllemagne.
Les colonies ^ang^es en Rassie
sont au nombre de 410, y com|Hris les
colonies grecquea, bulgaves et juives;,
ct renferroent ensemble une population
de 250,000 dmes, dont les quatre cin-
quidmes d'AUeoiands: or, comme le
nombre d*el^ves qui fr^uentent les
^les des AUemands colonist est de
plus de 35,000, on Yerra, d'apres le
chiflfre total des ^l^ves de tout Tern-
pire, que si Ton reprtente par Tunit^
la civilisation des Allemaods colonist ,
• celle des Russes ne sera exprim^ que
gar un Tingtieroe. Mais les Allemands
x6s en Russie sont mokis avanc^s
aae lenrseoropatriotes nationaux ; c*est
done une mesure au moias inten^p^-
tiveque d'avoir mis obstacle ^ reqsei-
gnement par des Strangers , au lieu de
se contenter de prendre h leur ^aid
de l^itimes mesures de prtouitipp.
Les Tatars, a Texception d.e oeiix
qui existent enoore a r^tat nomade,
savent preaque tous lire et ^crire.ll
y a ordinaireraent une ecole pr^ de
chaque mosqu^e. Le mollah exeroe en
intoie temps les fonetions de maltre
d*^le. Du reste , ces ^tablissemeats
ne ressemblent en rien wix autres
ecoles ^roentaires. La maison e$t or-
djnairement achet^e par an riche Ta-
tar; on autre se charge 4e l*entretien
Boit pour un an , soit pour plus long-
temps, selon sa fortune ou sa devo-
tion. La maison se compose <l'<un petit
vestibule et d'une grande salle dout le
plancher est dispose en ji^nte. Sur
oette elevation, chaque ^leve oecupe
un espaee d'enviran deux pas de long ,
oik il place son matelas •» ses ef/ets , et
mdme ses ustenailes jde cuisine que
«haQun doit apporter avec soi. Cette
salle sert en meme temps de. classe ,
de dortoir et de r<^fectoire pour 1^
Aleves, et de logement pour le mattre.
Les enfants tatars sont envoj^s a 1>-
cole a r^ge de sept a huit ans , et ils y
restent pendant cmq aqnees , a Texeep-
tion de «eux qui se vouent h Tetat ec-
clesiaslique , et dont les Etudes durent
beaucoup plus longtemps. Les objets
il'ejiseii;neme»t sont : les dogroes de
la religion nMhom^tane, la lecture ^
.r^rituie arabes , et quelquefois , selon
les besoins looaux , le persan et le bou-
kbare. Les Tatars n'apprennent point
aux Ecoles leur langue matemeile, at-
tendu , disent*ils , qu*il serait superflu
de faire des d^penses pour un ensei-
gnement qu'on pent reoevoir cbez ses
parents. Le mattre n*est point r^tribue
en argent , mais en nature , c'est-lhdire ,
en vetements ou en denrees qu*on lui
envoie en forme de pn^nts.
La population protessant Tislamisme
fi*ei^e, dans la Russie d^Europe, a
I,2»7v4a7dmes, et habite particulie-
rernent les goavernemeots d'Oren-
bourg, Rasan, Yiatka, Nijni-Novgo-
rrod , Astrakhan , Saratof , Peoza , Perm
et la Tauride.
ill existe dans ces divers gourerne-
tinents 561 to^les.mahoin^tanes, ren-
) fermant environ • 14,000 ^eves.
La population iuive, groupte dans
les provinces polonaises suecessive-
ment locorporMs a Tempire , dq>as$e
:un million d'imes. ,Les ecoles israe-
. lites sont au. nombre de 3,52)3 , toutes
independantes de Taction du gouverne-
meat ; cependant plusieurs ecoles qu'on
pourrait appeler mixtes Qui €X^ fon-
dto dans ie bat de perfectiouner Todu-
cation scientinque de quelques jeunes
Isra^ites; le r^glemeut de l«a5 oe
peut manquer d*exercer une heureuse
influence sur Tetat moral et la civili-
sation de cette olasse industrieuse, si
longteipps et si injustemeat oppri-
mee.
Le total des ^Ics sp^aies et di-
verses d^ins tout i*e9ipirej»t de. jeX2,
r renfermant. l^y964 eldves.
Lelableiiu suivant preseoite T^tat de
' Vriostruetion puUique en Russie.
RUSS1£.
639
NOMBKE
toUldc*
BOURSfBRS.
SOIIMES FODRNIKS
par le
OOUTBRIIBMSHT.
l^colet dn minuteratte rinltnie-
tion miMiDiie ...t**.*
65,707 I
67,014
1879864
9r5,MO
17j9,5oo
.91,896 :
.7^50,000 Tonblfli.
8,687.194
3,000,000
9i496,947
Am ecolfift mililaim* ........
Am iooies ecdeuastiqaes. ....
Am MQleft fp^eialet et divcnes*
Total feaeral
460,576
95a,3ix
.«8,734fi4i roubles.
Sor oe ncmilnre' d*^^«6 , 44,000 en-
TitoD raooifeDt aae inttniction 8up6-
rieure; ks autres MConteDtent de
coonaissaaoes HSmentaAres oa prati-
qaes. Atnsi le nombre das 6l%ves (|ui
stthrnt les ^coles est a la population
totale de I'empire dans le rapport ap-
proximatif de vn ^ eent quarante.
Le gouvemcment poursait avec per^
s^^nce la tikdie d6cl«rer le peaple
rme; mais s'il neut d^cr^ter Fetablis-
semcntd'tti ootl^oon d'une aead^
nrie, il est uMpuisaant h donner la vie
sdeotjiqneet morale. End^tde ton-
tes Jesfmantions , les moyens dont M
lert la Russia poor distribuer les In-
mieres daos les diferses classes desa
faitoxfaiesociale^^tantie produitd'une
driliiatiott plus complete j oonserrent
i'espritdeleurorigine; et iiapousse-
roat les inteUigenoes ii Ja liberty ^i
est ias^pafable de la science , ou au
jl^Bcspoir^'Entre ces deur alternatives
il 06 peat y avoir qu'im ^t mixte «t
apatbiqae , w toaitoit {[oelquelbis
1» peijiles qoi out pass^ par tootes les
phases politiques, nuisiqui ne pent
eoQvoiir lottgtenips a one'natkmiqui
at dans la pdriode laplosaicitivede
son d^etoppemeat.
Les derniers voyages de Fenperenr
ilicolas , ia visite inattendue k fiecna*
<lotte , ses excursions en Allemagne ,
qot rappellent raetlvit^ inqntte de
Pierre le Grand, ont sans doute on
but politique ; mais le d^aut de ren-
aeignements positifs ne nouspermet
Kis de oarac^riser ces dtoarches.
ous nous oontenterons de r^p^ter
•qae le but da cabinet russe est de
rompre, ou tout au moins de nentra-
liser ralliance anglo -francaise : il
manie habilement a cet effet tous les
ineidents qui naissent de la question
imllando-belge , de celles d*Afrique et
d^Espagne, et des embarras ou's'est
Jet^e la France en rompant ses reto-
trons amioales avec la Suisse et le
Mextoue. Pendant que la Russie em-
brouiile tooseesfils, die prot^e k sa
maoi^ la Porte ottom^ie, la Grece
et la Perse; etd^j^ les contrees limi-
tropbes de Finde s'^nmivent sous son
influence. Toutefois , plus elle apprpclie
da b«t, plus rAngleterre sUnquike;
et lo dernier pas sera phis difOcile que
itoas les antres.
Les racmrs risses, sons le regne
actuel, ont repris une aUure plus
nationale; encore un quart de si^le
de cette 'Sequestration 4e Tempire en
£urof« y et le earactere asiatiqueaura
envabi les pins hautes classes de la
' soci^ ^ qui ,* sous Temperear Alexan-
dre , • se ' taisaient • remaiquer : par une
SoKtesse et une -Elegance de ^ Jangage
ont y^tonnteent souvent les Gours
•^tran^es* Onpeutdirequelessctences
militaires ont ^ senits en progrea;
( les arts et les lettres , qui ont^besoin
pour flenrir du soldi de4a "liberte , se
courbent sous le niveau des institu-
640
L*UN1VERS.
tions. Depuis la mort du poete Poucli-
kin , les toivaios russes out ouelque-
fois fait preuve de talent ;iDaisle genie
et la T^ritabie inspiration ont disparu.
Aprte tout, qu*importe? La oivilisa*
tion , en Russie , n'a pour mission que
de perfectionner robeissance ; tout ce
qui sortirait de oette limite, le pou-
voir le regarderait moins comme un
avantage que comme an obstacle.
Quant au caract^ personnd de
Tempereur Nicolas , 11 est toit tout
entier dans Tallocution qa*il a adress^
a la deputation de Varsovie en octobre
1835: nous le r^umerons en deux
mots : inflexibility et perseverance. Ses
actes les plus absolus ont uneempreinte
de granoeur; il poss^de rartdlfDcile
d*as60cier son peuple aux mesures qui
afferroissent 1 absolutisme ; etrange
sjpectade que celui de tant de millions
ijrbommes qui applaudisseat a leur
propre assujettissement, paroe que le
reflet de la gloire militaire dore leuis
chalnes!
Nicolas ne s'est point signal^ per-
sonnellement par de hauts laits mili-
taires ; mais il salt donner Timpulston ,
demeier et reoompenser le m^nte ; dans
une guerre europeenne, il ferait mar-
cher jusqu'au dernier homme, et de-
Senserait le dernier rouble, plut6t que
e ceder sur un point qui engagerait
I'honneur de sa oouronne. II a montre
un grand sang-froid dans des drcons-
tances difficileiB : son attitude, lors de
la revolution militaire de Saint-Peters*
bourg, en 1834, a donne la mesure de
sa fermete. Quand le cholera edata
dans sa capitale, on I'a vu 8*avaneer,
le front severe , aii milieu d*une popu-
lace furieuse, lui reprocber en termes
brefiB et indsifr son egarement , et la
faire tomber k genoux d'un geste.
En 1838, les Russes reprirent, k
Varna, plusieuffs canons conquis sur les
Polonais en 1444, lorsque Ladislas Ja-
gellon pent au siege de oette viUe. Nico-
las, ^ la vuedece trophee, ordonna de
transporter oes pieces k Varsovie pour
en faire an monument national.
G'est par Tautorite de I'exemple, non
moins que par ses avertissements su-
premes,qu*il exeroe une influence irre-
sistible sur les masses ; il a le dhtiit de
recommander I'ordre, reconomie et let
vertus de la famille, lui dont les moeon
sont rigides , et qui ne deploie de ma-
gnificence que pour recompenser d*e-
datants services, ou pour retablisse-
ment de fondations utiles. Gertes, sa
severite a frequemment depasse 1m bor-
nes; mais, pour bien juger un prince,
il faut lui tenir oompte de certainrs
exigences de position : la plus inmerieu-
se , peut-etre , a ete cette sorte de reao
tion qui , dans les ifetats despotiques,
imprime sou vent k la politique du nou-
veau souverain une marche oontraire
k celle de son predecesseur ; soit que les
abus du regne qui vient de finir, s'at*
tribuent aux trnts caracteristiqiies les
plus saiflantsdu dernier autocrate,soit
que le nouveau maitre, presse de £lire
acte depuissance, entre instincti vemcat
dans le despotisme en s^eioignant des
limites ou, comme les autres, il a dd
marcher le front courbe. Or, nous avoos
vu quelesqualitesdominantesd'Alexan-
dre etaient la demence, et une doa-
ceur de formes qui n'excluait point une
grande finesse de vues : e'en eftait asset
pour prepsrer la Russie et le moode
au gouvemementdur, franc et entier de
I'empereur Nicolas : d^ailleurs, quand
un homme d'un caractere fort est mif-
treabsolude soixante millions d'^UMi,
comment ne serait-il pas tente de briser
violemment les redstanoes; d, quaad
son agrandlssement personnd n*est que
I'expression de la puissance collective
de tout un peuple, peut-on nier-qae
ses efforts revetentun caractere impo-
sant? Ge prince pent qudquefois errer
dans les moyens; mais, aux yeux de
son peuple , le but Tabsout; rautocrate
fait son devoir, pourqooi I'Eorope ne
fait-dlepaslesien?
Les anoetres de Nicolas out dit aox
Russes : Abjurez vos ooutumes, vos
moeurs , pour adopter les nxsmrs et ks
ooutumes etrangeres : Nicolas, jpre-
maturement , sdon noos^a dit aox Ros-
ses : Votrs dvilisation mdraa d'elle-
meme; desormais vooi marchercs
seuls...
FIN DE LA RUSSIE.
I»*««»*««*1
TABLE DES MATlfiRES
CONTENUES DANS LA RUSSIE.
^ t ^
Abo, TiUe devastee par un inceodie en
iSa7, 33 b, regardee eocore comme la plus
giaiide ville de la Finhmde , 45 b.
Admiuistratioii munidpale des viiies , a8
a, b; etat ioterieur vers Taa iaa4t loo a.
Aimant , mines a Perm , S-j a,
Albatre, belles carrieres a Koungour,
57 a.
Aleoiiles, iles qui renfenuent quelques
cnleres tantot fuioants , tautot lau^ant des
flammes, 60 b ; les Russes y ont forme quel-
ques eiablissements , 61 a ; epoque de leur
deoovTerte, commerce qui s'y fait, 309 a.
Alexandre I^ (xSox-xSaS) impUque par
Pahlen dans la conspiration contre Paul I"!*,
et sotttenn par loi pour son a? dement au
trone (V. les relations , 398 a — 4x1a'); idee
de ta position, de ses qualiles, de son ca-
ractere, 41X b — 4i3 a; abandonne les
phns de Rml I*' ; live Tembargo mis sur les
Mtinents anglais; Markof, ambassadeur
tusie , est expulse de France ; le tsar s'oc-
tupc d'aoeUorationsadmiuistratives, reunit
li Georgie a Tempire, a une entrevue avec
k roi de Pmase, declare la guerre k la
France, 4x3 b— - 4x7 a; envoie une ambas-
iade poor obtenir I'entree dans les ^tats
ehioQis, reprime les empietements de la
Sqede et les incursions des Lesghis; aprea
Feolevement d'Ettenheim, fait remettre une
aote terminee par un ultimatum, sur la-
jaelle M. de Talleyrand est charge de noti-
ner la reponse ; enectif auquel est portee
I'annee nisse, 4x7 a— >4ax b; utiles re-
fen&es a rinterienr ; la Russia refuse de re-
connaitre IVapol^on empereur; campagne
d'Aosierlitz ; traite de Presbourg ; entrevue
de Napaleon et de Tarcbiduc Charles; la
toatie renouvelle avec la Porte le trait^ de
1799 , signc nn traiti de paix avec la France,
4>i b — 4^9 b ; debate entre la France et
la Pmaae, hostilites, lena; Telecteur de
Saxe , allie de Napoleon ; Eyiau ; campagne
41* Livrakfm, (Russib.) t. ii.
de 1807 contre la Kussie, Friediand; en-
Irevue de Tikitt a laquelie prend part la
reine de Prusse ; le grand-ducbe de Tar-
sovie est donne au roi de Saxe; traite de
Tilaitt ; I'An^leterre determiae la Suede a
la guerre, fait bombarder Gopenbague et
s'empare de la flotte danoise; declaration
rendue a ce sujet par Alexandre , embargo
mis siu* les vaisseaux anglais ; sur les arti-
cles secrets du traite de Tilsilt, 429 b —
437 a ; la Russie continue la guerre sur les
frontieres de la Perse ; trait Je courage de
la derniere reine de Georgie; expedition
des Anglais dans les Dardanelles , resistance
des Turcs , renversement de Selim ; la Ta-
lachie est gouvemee par un divan de Russes
et de boyars du pays; expedition en 1808
de la Russie contre la Suede, occupation de
la Finlande suedoise; deposition de Gus-
tave IV, 437 a — 447 b; guerre d'Espagne*
echec de Baylen ; conference d'Erfurl ; lettre
adressee par Napoleon et Alexandre au roi
d'Angleterre ; rAutricbe atiaque la Baviere;
Vienne est occupee par les Fran^ais ; Essling^
Raab , Wagram ; traite de Schdobriixm ,
mariage de Marie-Louise; nouveaux soins
donnes par Alexandre a Tadministration in-
terieure; succes des Russes sur les Turcs,
paix de Boukharest , ib. 447 b — 453 a; si-
tuation de FEurope en 18 13; AJexandre
leve des armees; Napoleon arrive a Dresde,
donne quelques esp^ances aux Polonais, est
Erive de Vappui ae la Suede et de oelui de
I Turquie; dispositions et marches des deux
armees, Napoleon declare la guerre; sa si-
tuation deja critique a Wilna, 453 a — 459
b;. mouvements et engagements entre les
deux arm^ ; Napoleon revolt a Wilna la
deputation de la diete du grand-duchc de
Varsovie; manifestes d*Alexandre qui se
rend a Moscou, puis a Abo, oil il decide
Bernadotte a comnattre pour la Russie , 459
b — 463 a; mouvements des deux armees
41
642
TABlE PES MATItRES
juiqu*& Vilepik; deux corps de'l^rm^e
nisie te reunineiit sons les miirs de Smo-
lensk; poMtioQs detcorpa fofnuuH im ftilcs
des deux armto; nriie de Smoleiiik; le
combat de Pololsk aecide Napoleon h mar-
gW sur Mosoou; uno dtviaiou fran^aise
prend la grande redoute de Qierardino,
463 a — 467 a ; victoire des nvn^is k
Borodino , entrte a Moaoou , ineeodie de la
viile; Napol^n fiiit des propositions de
paix ; brusque attaque par les Russes k Vin-
lovo , combat sanglant k Malo-Iaroslavetz ,
les Fran^ repoussent, encore les Russes k
Viazma ; Napoleon et plusieurs corps ren-
irent ii Smolensk ; combats sontenus par les
Francis dans leur relratle w milieQ de
souffranees inouies ; passage de la B^reeioa ;
Napoleon confie ik Mqrat le commandement
derarmeeetrentrei Paris, 407 a — 4^s;
1« Fran^ eY«coent TViina ; d^feetioo d'lra
corps prussien , Posen et Beriin sonf ^a-
cnes j^r les Frennis; en i9i3, Napoleon
est vamqueur k ijitzea , Bautzen et Wort-
cben; rupture dq coogr^ die Prague, efllorti
de PAnglelerre; netoire de Napolteti k
Dresde , tehees essuy^ par OqdiQOt et Tan-
damme ; Monsieur se rend an quartier ^
neral des puissances alli^es , 480 a — 486 a;
x8i4, Cnamp-Aubert , Hontnurail, Tau-
champ, Arcis-sur-Aube , capitulation de
Paris et ses consequences; Alexandre se
rend en Angfeeterre ; congr^* de Vienoe ;
retour de Napol^n en France ; Alexandre
retoume k Petersboorg par la Hollande et
Carlsrube ; sea acles de piete apres son re-
tour, 486 a — 49a a ; traitid avec la Per9e
par lequel la Russie dtend ses flhmtierei
m^dionales ; Napolton combat k Waterloo i
traite de I^uris; Alexandre a des relations
wee madame de KrudcQer ; odgine pr&u-
m^ de la iainte alliance; resisiances dans
plusieun pays , id^ d^iswdatious secretes
en Russie, 499 a — 497 a; Alexapdre ar-
rete le mariage du grand-doc Nicolas avec
la princesse Charlotte de Prusse ; il est recu
a Yarsox-ie avec rentbausiasme de Tespe-
ranee; renvoi des jesuiJLes^; difficult^ dians
radnioistration de la Pologne; mod^tioa
d* Alexandre dans lies conditions impesf^ k
la FYanoe ; causes pr^um^ de Tagitation
qui se manifestait en Allenuigiie ; Atexandre
et le roi de Prusse se rendeat k Paris inc^
gnito ; grieb qui ont oocasionni FexDuhioQ
des l^uites, leur nomln«, leors diverses
retraites, 497 a — 5oa b; assoi:iations se-
cretes en Pologne en i8a9;'Xlexaiulre di-
savone TpsiUnti , $99 b ; jnibstient de sou-
tenir les Grecs, ses |iaroles a M. de
CbiteanbriaDd sur oe sujel ; eongrk de Ve-
lone , debats avec la Turquie ; aBodaiions
seeriles en Russie, 5o9 b^ 5xi a; nslidie
sMense d' Alexandre , inondalkm de Sskii-
Petenboafg ; eiat des negociatioos sycc Is
Porte; riduotioD de b masse des anigmts,
malaise du oommeroe , contrebande aeroee
par les juifs; colonies militaires, 5ti a—
317 a; mort d* Alexandre; discussion de
Tautear sur les assertions avaocees a ce sojet ;
peu de temps apres , mort de rimperatrice ;
rtom^ sur le caractere des princes qui oat
suoced^ k Pierre I<r; portrait d'Alexandre,
traits anecdotiques , 5 17 a. Sag a.
Alexandre Mikha^ioviteh (i3i9-tM).
nonuni grand priftee par Usbeck, €st aasii
chef de Novgorod; Scherkal , eoesiD #0h
beck, el ses Talm sent tallies en pmai i
Tver par fcs Rassea,* Uabeck dAfaile|da;
sieurs villet et dratte h grande prinofsate
k Jean, prinoo de Meseov; Gonrtanln,
flrare d'Alexandre, raooit dUsbeck la Rn>-
cipaotft de Tver; AieiaiidM, samaii de
Gomparallre devnnl Usbeek, fiMt an Liwia-
nie, el dix aiM plue tard se presenlei Vt-
beck qui lui read son ^enge, oais qui
ensnite, d^pres lea acewatioBfl deJasa, b
fait moorir ainst que sen fib, ro^ k-
na a.
Alexandre Ptewsky (i«47-»>^) ^
do chef taUr Kief et loute la Rbmc "^
ridionale; somMf lea Nevgoridiamr^
vohes contre lui, s*oppose k lean «■»•
cottire les TMara, vent excaser •"P'^*'
khan dea aetes de r^beBkNS dte .p"^
provinoes russes ; meurf awis awroir w»»
tonsure monacale; a re^ V nam de MMf^
ses reeftes transpofils mt Pierre I" Mf >*
bordk de It Nfva , io5 a -^ aetf •*
Alexis Mikhaflo^tch (s64^i^^)^
sans suce^ le trAae de> MogMt ^T^*
fille d^m sHnplegeatflbomme^sa sseuriiv
k Boris^Moroeof qui avail M^ aen ffo«i«f
near et qui abuse de son pouvoir; It ni»
Christine obtient un d6lomBMigeaM><^
rdnigration en Ruaie d^» gnwi n^
de ses sujets;r4vehe caosfe i Novforod ptf
k diiette; vn nowvel impoHeur est hn««i
Holsteitt an gouveniement r«*^> J^ ^
l4Sd« a Bf oscoo ; tea Coeaf|uea <fe l'Okf>«||
sie soumeHent I la domination '*""*J|
gueiTe est dedarfe 4 la Pdegae, «« » »^
prend Smolensk et phnwurf antK* wiVf
ti^ve de treize ans; bostililfii v^« >^
SQedoit, puis avec em une pain ddrniH^i
epuisement du trisor, nudadies IpidteKI^
^.
CONTEIIUES Dxm LA RtlSSIE.
64Z
iMit ripfiB^ par hi force ; morf ^ llf»-
raiof, tS7 a — 189 b; fe patnarehe Nikon
96 b'fiv k d'ioifMirtaiils tnrvaiiM eeel^siBfti-
qMs; mh nie va jusqo^i la femkntkm e€
la cfvaetl; il OMupaae la |>rani^ histoire
que Ton ait sar la Ruasie; Stenko-Rariii,
Gosai|in dn Don , eil^bre pttr a« brigaada-
£es, cstfiiecat^&lf6aeoa,ib. 189 b — tgi
•; le Mr ipMMa ea fleoonlBB ooces Natluh
lie, fine d« ealoMl flaridikfit qvi devienC
soo miotstrey et qui ae cKsUa^ne par la Mh'
§eaat 4» sea adiaiiiislnitiaa ; piiblieaCioii du
Code Ooiaienie, cfuelqiies disMtitiotie dea
pRauer9CBa|iilMa$ ffwatages da son le^ttc;
tl est le pcre de Pierre le Onrnd, ign a -«•
19} b.
AliM, chalne de nwntegnes assee tiet^,
Bisis saaa gbeiera eomparables i eeux des
Alpes, 5 b ; quela tcirains sqpare uoe de
sgraaifieatKwa, so^a.
Asslffie jaine , se reeaeifle sar les bords
dekMl^oe, 8a.
AmeriquerasBe, 61 a;iafcnBitedufroid,
itid.
— ffpiaafttaiadey sadeeewerteaMnDute
par Fonter aox Honaands; depuis qaeRe
cfie^, 7« b; iMaifes d« Ytmkit nwe
dan ertia r^gian ; ^aergie das EMs-Ais
centre lenr cxieasion , 37 a , 5i3 b , S14 a.
AaMar, flc«n«de TAiie septeatrionala, an
prcnd saa aoai qn'a la preaoiere jonetion
de dcBx I'itiucj , ^lendne de son eoart ,
9 ^f '• a.
Aaara (Ss ifc Ooorges) ^ samoBHBe Bo^
geboahfiiy on la Piam (1 r57- 1 xSg), pfrnee
de Hadiaw; iT dame A cette xi&tt un ae-
awuweat ceosidteble, 9a a; (11^
it^), fl rfmMloane fe systiuM d'apaaage,
nile Msiislaf (Tassilko, Miebel et onelques
boyan; il encre daas leaays des Paigarea et
War MIe plasieuffa nUea. (zi07-i]^) II
*«at soamettre la ville de Novgorad ; A»-
■aa, fib de Mstislaf , ^ la goBTeraait , at-
la^ue l» aiii^ d^Andi^; oouM s'eamare
<le Kief, ef fait daThdimir bi C8pitale«e lis
Rasne, 9* a*, k la ville de Hovgorod , as-
siesee «r AaM , r£sis«& avee nguear, pais
^ ahaiaetf airec Mr, et K^it enfin poor
pnace sna tti Geo^gev, aa Ken de Rorik.
Aadre Biemr assassine par sea IlKorn, 9) a
Aadra AlesaBAro«ilch(r 394-1 3o4), pand
priMe, cBlre ea dnHftread avee Unuel de
XosBOB ef Jean die Mr^ashFrfe oai v^afent
coa^Qcnr' Wiir aiaepeaiwyiee* AadBTc sereaa
%prci da |;racMl Uiaa, qnr impose hr pafai
Kn primea dtranis; il s'eMpare de k ^le
de landskran; il meHft reir<^ti de rhid>t(
menasiimie , 1 08 a , b.
Andre Yaroslaviwh (ia47-fa63>, priifete
de Hadioiir, donne lieir an pilfeige de aa
DTOYince par Its Tatars et ftnten SuM<e ; esf
rorcer de coaipardf re der aaf an des ebefs
tatars, to5 a.
Andrinopfe (trah^ d^ sign^ par la Tor-
qnie en r8a9, 549 b— ^ £f5a a.
Angara , rmere qnr se jette umM le lae
Baikal, 10 b; se rinnit a Pllim et feiaienne
des trois rivieres Tmingnnska ^ttn.
AngieieiTe y ses nar^gatenn s avanceai
dans rOcean 'sepfenirional et eoudtoeut fnt
traiti de cpmmerc^ avec la Rassio, 137 b;
eBe re^t la permissiott <Py exploiter les
mines de fer, x4x b; i^lisabeu obtient
adroilemenr des sdret^ et des privileges
ponr son eomaaeree, f 58 a^ b-; TAngletem
retire de sa mediatioii eaCre ii Sucxle et m
Rasaied^lm|ioruatsffrBn(agea, 1 86 b; aehete
le priTil^e de dkebiter du tabac c» Raaaie ,
204 b ; ramirid aaalais Noris ae pent s^op*
poser aux suecea de la fletfe nisse dans la
Bdtiqne, a38 a; le r^laUisseflaent da prfr-
tendant entrait dans les projets de Goerta ,
224 b» et inqaietait VAiiglelenv, a5o b;
elle pread des mesores m>portUBes ; Toit sa
politiqne benrt^ par €atberiBe II , 370 b ,
a laouelle elfe onvre ses fresors, 98x b;
traite de sobsidesrompn par Paul I*', 591 a;
TAngleterre fe dMde i efltrer dans fe se-
conde eoaiitiott, ib.; eAs parall afoir faftle*
ment seeoarife ses alli^ daaa fe campagne de
Holfende , 396^ b ; Bnl !<* rompt brasqne-
ment avee e8e, 396 b; PAagfeterre a p«
n'tere pas Mnmgere k fe mort de Paal I**
(T. fes refeiions, 398 a — 4" 1); eoada-
siOR d^ane novreUe eonteatioa aatfitiaMi ,
414 a; Alieiamirel^ I^feyeariferga aiisaiir
lea Yatsaeanx anglais, 4x3 b^, 4i4 *; aptaa
le traits de lUsitf , PAn^tcnvdMermine k
fe gaerre centre fe Franee fe Snede <pi»
earaiephisieurs partes, 433 b, 434 »> bom-
barde Gopeabagne ef ^empare de fe flaila
danoiae, ib.; eipMiCian aes IfeHaaelfe»,
441 b et soiT.; traiti de sabsidea avoe fe
Sonde, 444 b; flotta msse priae par I'aaaMl
Golton, rendae k Alexandre, 447 'f ^\
aotemes payees et eajgagemeats pna par
TAnglelerre arrec plnaieurs pmssMioes ear
i8i3, 483 b; elle a autnqnj k aa dignilA
dans raflkire de son navire fe rimm aoofis-
qai par feRuasfe; dtodfe sar oelte caplarat
6x3 a — 616 a; eomment TAngleMne |Mal,
rsoa Urif , ooMNbafeMar fo pourair de
Husufe, 6*7 a--#ao fe; was dTapvaa
41.
644
TABLE DES MATlfeRES
lesquolles Tauteur regai'de comuie un gage
de salut ralliance de t'Angleterre et de la
Pranoe , 6ao b — 6a4 a.
Anna Petrovna iiupire une vive passion
a Paul I**" qui la surmoDle, 410 a, in b.
Aime (la grande-duchesse) regeute avec le
prince de Brunswich ( 1 74 1) • Munich, nomme
premier miniatre , indispose le prince ; plti-
sieurs attributions lui soot otees ; il demande
et obtient sa demission; le prince iHric est
declare co-regent; la Suede declare la
guerre, la Finlande en est le theAtre; am-
aasade et demande de Thamas-Kouli-Khan ;
Anne veut se faire declarer imperatrice;
Elisabeth , GlLe de Pierre I*'', la fait enlever
et enfermer avec le regent et leur fils , a6a
b — a65 a.
Anne Ivanovna (1730-1740), designee
imperatrice par le conseil, signe les articles
secrets dont on lui fait une condition; se
fait uu parti ; fait venir, au mepris de ses
engagements , son favori Biren , aneantit
I'autoritedu conseil, et declare voulotr re-
gner par droit d'heritage , a54b — a57 a;
nomme Biren son chambellan, etablit un
nouveau conseil ; Biren fait perir d*une mort
cruelle toute la famiUe Dolgorouki; sacre.
de rimperatrice ; Biren est nomme grand
chambellan, avec la dignitc de comte; il
fait rompre un mariage projete entre rim-
peratrice et rinfant de Portugal, et obtieut
qu'elle se designe un suocesseur; vues di-
verses de Biren ; la cour quitte Moscou pour
se rendre a Petersbourg ; les conqu^les sur
la Perse sont abandonnees a Thamas-Kouli-
Khan ; hostilites en Pologoe sous la conduite
de Munich qui roeti pri\ la t^te de Stanis-
las ; sie^e d'Oczakof jiar Munich , rigueur
de sa discipline militaire ; conditions de la
paix, de Belgrade , aS? a — aSg b ; Biren
o))lient rinvesliture du duch^ de Gourlande,
fait enlever ceux qui se plaignent de son
administration ; Anne traite d'une maniere
iujurieuse un prince Galitzin, pour quelle
cause, aSg b — a6o a ; enlevement et as-
sassinat du general Sinclair par des officiers
nisses et dans quel but ; paix entre la Russie
et la Porte; nombre presume des victimes
de Biren ; Anne adopte et d&i^ne comme
son suocesseur Ivan , fils de sa niece Anne ;
par son testament, elle confere la r^ence a
Biren, aOoa — a6i a.
Apanages particuliers donaea anx enfants
des aouveraim ; Sviatosiaf introduit cct usage
fufiestev 79 a.
Aral (lac d'), auist nomme par les Russes
ner d'Aral et mar Bkue; sinw ii Teat de la.
mer Gaspienne , a prubableoieot la bi4im
origine que cette mer, re^it plusieurs ri*
vieres parmi lesquelles trois mentent une
attention particuUere, comme pouvant ou<
wir d'importantes voies de navigatiuu,
J a a.
Architecture , peu analogue au cUiual a
Petersbourg et a Moscou, 36 a.
Argile (F) et les malieres terreuses propres
aux arts se trouvenl en de^ et au dels det
monts Ourals, 19 b.
Argounn, riviere qui, avec la CliilLa,
forme le fleuve Amour, u> a.
Arithm^tique chiflree substituee a la ue-
ihode tatare, ao4 b.
Arkhangel, chef-lieu du gouvemeoieni
de ce nom ; commerce favorise par plusieiff^
fleuves et deux mers ; oonstruction de bsi>-
ments pour T^tat et pour le commerce;
peche dans les mers polaireSf 5o a; ^rauil
empl(n'e pour la mouture du gnin, ib.;
superucie , population , 49 b , eomparee i
ceUe de la Siberie , 58 b.
Armee , ctat eslimatif des diverses anuei;
reserve, gamisons, colonies militaires, re*
crutement, temps du service, 39 h — 4i *i
trouve tes remontes dans les haras de l^ai,
5 1 b, ses eclaireurs parmi les Kir§au«s^
les Cosaques, 61 a; un reglement toiliisire
est publi6 \iar le tsar Vassili Schouulii.
178 b ; Pierre I**" eu compose un pour Tin-
fanterie , aa3 b ; instilue une noblesse mi-
litaire, a38 b; Munich s*occupe de rorgapi-
sation de Tarmee, et y et^bUt une diicipliiK
rigoureuse, a58 a, a59 a; fondation «le
Tordre de Saint-Georges par Catherine II.
35a a; ecoles militaires, leur division eo
trois categories, 633 b — 635 a (V. colonies
mil. 5i4 b — 517 a).
Armenie , montagoes separees de oelies du
Caucase; Thabitant adonne au commerce;
population, 63 a.
Arts et manufactures, font des progns
rapides, mais la vente des produits est n*
rement avantageuae ; estimation du nombre
des fabriques et des ouvriers il yauue diiaine
d*ann^ ; opinion de Vauteur sur la direc-
tion convenable au comnoieroe de la Rusud
35 a *- 36 a ; cette puissance tend a entraver
rindustrie manufacturi^ du reste de IXu-
rope, 617 a, et & elablir des manufKiare*
rivales de celles de I'Angleterre, 619 b.
Aspect general de la Russie , assez mooo-
tone, k Pexoeption de oelui de la Tauiide el
du Cauoaae ,5b; plusieurs points pittora^
ques sur les c6tes ae la Finlande, ^ h.
Assif nau, a*etaient muHipli^ sous O^
CONTENUES DANS LA RUSSIE.
G45
ime U; MUb en partie par Panl I*', 385
b; iapostibiliti reconnae dc les retirer, par
trob gpandes masses, de la circulation » 5x3
Assodalions secretes : en Pologne, en
tSaa, Sm b et suiv.; en Russie, 509 b ;
organisition de plusieura societes secretes
dans rempire; elies lentent, apres la mort
d'AkxaDdre I*', de meltre leun plans k exe-
catioa presqae tons les chefs aiMmdonnent
cenx qu*ib avaient mis en avant ; siipplioe
ou exU des coDJnrcs pris dans Paction ou
anr^t^ dans leiff fuite, Sag b^— 536 b.
- Astrakhan, Title et gouTernement qui
offre anx naturatisles des faits g^logiques a
obserrer; population de races europeennes
et asiatiques; delits, fait digne de remarque
sur ce point, 58 a.
Avars, leurs expeditions , et oelles dts
Ogors sous leur nom , 68 a , b.
B
Baikal (lac), nomine aussi mer de Baikal
00 mer Sainle : ses bords retraoent les sites
et les soeues de rAmM|ue septentrionale,
3 b; recueille les eaux d'un grand nombre
de rivieres; d'nne profondeor considerable,
Hi^me k pea de distance du rtvage, xo
1, b.
BriaM&a, csp^ de guitare k trots cordes
dont le peuple s'accomnagne, 36 a.
BargoQsine (la) , riviere qui se jette dans
le lac Baikal, 10 b.
Baschkirs, habitent la droite du fieuve
Oonl, la b.
Batory, roi de Pologne^ obtient de grands
tfuitages sur la Roasie, 145 b — 148 b;
a mort, partis qni montrent leurs preten-
tioBs, tSJ b.
6eaQi;4uts; ont deji rendu quekjues nonis
eelefares, mais sont encore sans ^ole, 36 a.
V. Architectnre , Danse, Musique , Peinture.
^ Bemadolte adresse un message a Napo-
leon, 456 b; accepte les conditions d A-
lesuidre et s'engage k combatire Tarniee
dmrasion, 46a b , 463 a; re^it une visite
inatteodue de rficolas I'% 639 a.
fiessarabie, Kichiuief, capitale; Bender,
qui appartient aux Russes depuis x8ia,
55 a.
Bestoujef, diplomate, vice-chancelier. Y.
Klisahetfa Petrovna, a65 et suiv.; sa dis-
pice, 271 a.
Biaiystok, capitale d*un cercle peu con-
nderable; exporle eaux-de-vie de grain et
niirstannes, 56 b.
Bibliotheque imp^iale de Saint-Peters-
boorg, ooroposee en grande partie de ceNes
^i oat ete enlevees k la Pologoe, 68 a.
Bireo, favori d*Anne Ivanovna , devait ne
pas Hre amene en Russie avec elle, 355 a;
m elevation sous Anne et Ivan YI; il est
an^te par Munich, 255 a — 363 a; exile
m Sibarie, 363 a; reparait a- la coiir avec
Munich, 37a b; rentre a Mittau comme due
de Courlande, 391 b, 393 a.
Bogolioubsky ou le Pieux (V. Andre, fib
de Georges), 93 a et suiv.
Boleslas, roi de Pologne, engage Sviato-
polk, son gendre, k se soustraire a la do-
mination de la Russie, 83 a; Sviatopolk,
mis en fiiite par un de ses freres , s^tant
refugie Vers lui, Boleslas bat les Russes et
retablitson gendre dans Kief; mats ce m6qie
Sviatopolk veut se soustraire k la tutelle de
son beau-pere, et les Russes poursuivent
Boleslas, qui les bat et sort ensuite de la
Russie, 83 a — 84 a.
Boris Godounof (1598-1604), nommo
tsar par une grande assemblee nationale,
160 a , marche a la t6te d'une arinee de cinq
cent mille hommes, repand des Kberaliles et
promet de ne plus appliquer la peine de
mort; la domination russe s'^tablit dans
TAsie septentrionale; Boris condut avec Si-
gismond une tr^e de vingt ans , fait deter-
miner les limites entre les deux Lapotiies;
promet des secours arremiiereur d^Autriche ;
protege avec succ^ Hberie, mais ne pent
retenir la Georgie qOi est enlevee k Tin-
flbence russe; le prince du Carthuel se de-
clare tributaire an tsar; les Russes sont
chasses du Dogheslan; Boris fait exiler les
cousins germains du tsar F^odor; delation
encouragfe; cruelle famine; des serviteurs
coiigedi^ ferment des bandes qui 4ivrent
bataiile sous les murs de Moscou, x6o b —
x63 b ; loori Otrepief , dian'e et secretaire
du patriarche Job, se dit Dmitri, reqoit
I'appui de Sigisroond et des Polonais, est
sal lie comme souverain par plusieurs villes
impoHantes , combat avec gloire , m^me dans
la dcfaite ; mort de Boris qui avait fait bcnir
son fils Feodor comme tsar, i63 b — 167 a.
Boug (le), un des affluenls du Dniepr,
traverse des pays fertiles , x 5 b.
' Boutourlin (M. de). Histoice de la campa
gne de x8i3, cite p. 433 a, b et suiv.;
canipagne de i8x3, p. 483 a, b et suiv.
Bruce , extrait de ses mcnioires , rclatif a
64K
TiMlK' DES MATllJlES
, jfibdePjenwI*', a35 a,
b mort d*
a3Cb.
Budgel, myitiMeuxi dU&ple 4*Bil]fuii
a ^valuer et Mr (|uclles causes, 38 b, $9 a.
Bul^iras, leur origioe, migrations, 68 a,
b, 69 a; aoUiciient Yladimir d'adopter )e
mabftffnFri<ma, 81 b 9 lei^r in^on aaos Ws
teiTtt de MeuroiD » 86 b^karjuys est ra-
vage piar le grand iirince-Aiidii^, 9» b; cent
d*OrieBt Kgagoeot kur ftyt pout s'oppoier
a uoe arm^ riisse; acbelent la dux, 98b;
iontieoiMat aue guarre wn\n Us Tatars,
x«7 b.
€affa , d^gnee souvent par l*aocieD uoni
Tbeodoaia , fandfe par les Ginois , 107 a.
Canalisation. — Des canauz pourraient
ioindiie rirtiiGh at cpialquea fkwrf» de l*Eu-
rope ,13a; qudqnoHUtf joiguent la Bfeva
an Volga , rOn^ k b Dvina ; on acbeirf le
canal entre le Volgii et k Don; d'autres
vandent i la capilale » x3 b ; eonsidcratioua
&ur reosemblc de ca a^st&me, x3 b , i4 a ;
un canal doit &ijna eviler Its ^cueiU du
Dniepr, i5 b; oalui d^Oginaki linnit la
pniepr et le Niamen.
Catacombes aopa h lit d*un fleuve , 53 a.
Catbcrine I", AJeiieienia, occupe le
troue apres la mort de Pierre I*''; continue
son QBUvre avec Tappni de Mentchikof ; ma-
riage de la prinoesse Anne avec le due
d'lioUiein ; Mentchikof aoGeple les dons de
plusienrs aoureraina et fait avec TAutricbe
uo traite dosawautageux k la Kusaie, Cathe-
rine persecute Euooxia; metures fu'iaes k
propos par TAngleterre dans la craiute du
pretendant ; Mentchikof doit la liberty an
due d'Uolslein qu*anauite il travaitle k per*
dre; Catherine sent dodiner sa sani^^ elJe
elablit par son testament Pierre n pour
tsar, at juac|u*i sa muonta an conseil de
rcgence; regie T^at oaa prinoea et prin^
cessea ; aon caractere , 349 b — aSa b.
Calberiue 11 (x 76a- 1796) : execution' du
Gomplol qui la place aur le trdne, Y.
Pierre III , 37$ -^ a8a b ; situation de VEu-
rope et de TAsie, 28a b -^ 386 b ; elle aur-
weille radministration , encourage le 00m-
meroe, va se faire sacrer k Moscout adoucit
la rifueur de la confiscation des bieos du
derge, reprime et punit.une nevolte ; emeute
des soMats aui gardes qui veulent proclamer
emjpereur le jenne Paul, fils de Pieme in,
386 b «— 390 4 ; double projet : agrandisaco
ment vera TOrient, demembrement de la
Pologne; Catherine s*empare de hi Cour-
lande ou rentre Biren; nromet k Ponia-
towaki de bire roi de Pologne lui ou aon
couain ; force Auguste k rappeler de Mitteu
le due Charles aon fils; retire les troupes
niaaes de la Pologne; inott d" Auguste; le
primat Lnbienaki gouveme en Pologne;
Catherine ^puiae aes finanoca pour arriTcr
an oouronnement de Poniatowski; die
cooipteaurla corrupti«n;Repaiat'Miai-
voye , decide ILeyaerling a eioplofcr la m-
nace J traite d'alfianoe enire U Praiie et li
Kuasie en 1764 ; Eadawil» dief da iode-
pendantf ^ casse diy ^lectiona laites en sob
{tbsenoei Poniatowski appelle uw annee
rusae ; manifeate de pluaieurs a^teun el
noncaa oontre la pr^Maced'noe ana^slnn-
g^ ; tunuikueuae ouverture de la dicte,
&adxiwil so r^lii^ cfaea^ les Tunes; la Rufiie
et la Prusse designent Poniatowski cooioie
le candidat do leuri ooura, Ic divaa dadare
son opposition , 390 a — 399 a ; le prince
Ivan t dernier obstacle k k politiqua de Ca-
therine • est aaaaasine^ 399 a -* 3oo b; ea*
trevue a Si^a* ditMUi, do Catherine a de
Poniatowski, Poniatowski est prodameroi;
axtenaion dcg frontierai de Tempirci Ponii-
towdLi a'attiiv rinimitio de Fi^deric n et 1
rocours a la protection de Catherine; em-
barraa de «a iMmtipn , niananivris da Hep-
nin; 4tat de TEurope', 3oo b -^ 3o6 a; Ca-
therine convoque k Moacon ies deputes de
tputfis les provinces et peuptodes ; Moet w
nombre de aea denMiacUea d'hoanMir U fiUe
de Tcheglokof , of&aer qui anit ^wk h
poignarder; ae fail inoculer; violence! exer-
c^ par Kepnin, resistance des palatiiu^
meridionaux ; quatre gnuida d^ Pdogoe toai
enleves et transportea en Sib^t 3b6 a—
3x3 a; les miniatrea turcs deioaodeDt qoe
lea troupes ruaaea aortenl 4» la Pdogne;
basea du traite qui davait etra iopos^i ^^^
a , b ; premierea meaurea priaes par les coo-
f^ires polonaia; iia obtieonent de ^i^
avantages; Catherine lea dodare wwoide
aon empire; die favoriaa lea aaoglantes m-
curaiona dea Coaaques laporc^iMf; ^l f^
mettre k ISuaUpha loutea les aatisiactJon<
poaaibles; cependant les Tnixa oowaeoceut
les hostility; Poniatowski irrile Calbeno«
par son refua de marcher a la tiie des Po-
lonaia centre lea Xwca; oampagae dea Turcs
contre lea Russes, qui, d'abord iolerieiu^i
GOMTBimES DAMS LA AUSSIE.
647
nftaaeni fo Dnieslr; 9$ pfay>tnt ensoiM
dins h MoUavie et h Vaiachte; Catherine
prase 4 la eonqu^e de la Grimee; die ct^
sue banque, 3i3 b — 3%3 a; un brAlot
rose mcendie la flofle tunpie, Efphinston
i^mnce leal dam lea Dardancllea; vicloir«
de Rouoiianzof nor lea Turca; prbe de
Sender; efforts del cotdMrit poloiiiis;
cDtretue da jeone empereur Joseph n et
de ftidkit ; |ireBiires ouvertnres entre lea
pttissaiioet allito sar le partage de la Polo-
gne, Mosoou dho\^ ptf la peste; conifi-
tMBsdeia.paaatecle saltan, 3a3 a-^33S
a; tentative malhenreiise de Tenlefenient de
PittUtowBkl par les confiddrts; premier
pvtage (en 1773); mariage suppose d'Or-
>of, molle coadahe par Ponpitchef , son
aippiiee, 335 a — 341 b", Catherine marie
k graixMtte Paul son fils, 341 a — 343 a;
Konkl mariage de ce prince, 347 a; Po-
tenkin eomraencse k toe en fateur; dispo-
tiiioDs idministratives et judiciaiivs ; banqiie
er^ i Tobolsk ; snr le pen de succk des
pKBueres colonies d*toangers, 343 a —
346 b; Repnin, ambassadeur ^r^ la Porte ,
Qdortles TWcs iur leur position; guerre
<l'aa an entre la Prosse et I'Autriche; les
^caifeKsdes 1^tat»-ITnB d'Am^ique donnent
ilea au syst^me de la neutrality armee; oc-
cu(«tioodelaCrim^;346b — 35ob; Po-
teuia eo est nonmi^ gouvemenr ; voyage
^ CaiWiiie dans la Tauride et dans la
Ofmit\ {oerre contre la Turquie; diete de
^7^^; aele de ooEifedtetton ; paraUele entre
b rerolation de France et celle de Polo-
Si; noiDs de pitisieurs Polonais vendus i
iberiDe, 35o b — 363 a ; actes de la dJMe
^ '79' ; noms de plusieurs nobles Polonais
<Sin ont signe Tacte de Targowicz; les trou-
E^ rtatet entreat en Pologne, Catherine
rorise la coalition centre la France; Su-
nistas-Aopisle ae prdAe au nouTeau partage;
"^ioiTCction de Cracovief sous Kosciusko,
rt de Tanone ; les Prussiens se reunissent
»x Rosses ; priae de Praga par Souvorof ,
caiMtDlatioa de Tarsovie, 363 a — 378 b;
iroiiieBie diatembrement; sennent exige
dcs Pran^2^ ea ftussie; incursion dans la
'^^'^t Gathcnne envoie Souvorof oonire la
ffon ; ia morl presque subite ; son por-
*nti, un caractere, 378 b— -384 b,
Caocase (gouvefn^Rient du): siege trans-
ne 4 Staropol; forteresses encore neoes-
*^ a caoae des insurrections frequentes
de diTerses peuplades et du brigandage des
>toDta|Qards , 6a b — 63 b. — Proviuces
(aacisiennes, leur importance pour la Rus-#
sie; ftMnniront d'exodteuts soMais, in mtt-
leriaux potHr la marine : afTriroM au voya-
rr des mines antiques el toiit^ les bcaiiles
la nature, 61 a -*- 6a b; insitrreclions
Irftquentes des montagBards , 69 a « ^at po-
litique de ces proriuees, leur population
pr^un^, armes, costume, Action d'liii
chef pour une ezpUitiou , transmission df.
Tautorit^ supreme Y rivalitib de peuplade k
peuplade ; bostiKta exercto par pfusieUH
de oes tribus; qnelles peupladea y parai^ni
soumises anx Ruases;jpostiions occupies par
la tlussie, 591 a*— ^ b; Mia dans les
provinces transcaucasieunes, 63^ b.
Censure, confi^ au miuiitre de Pins-
truction publique, 27 b, 639 b; les uni-
versity out leur propre censure, 63 1 b. ,
Chambray (M. de). Extrait de sa refa-
lion sur Fincendie de Moscou (T. la note p.
471 et suiv.).
Oiameau : se platt dans hi Russie meri-
dionale, 54 b; transporte k Orenbourg les
marchandises de TAsie, 56 a.
Chants ttationaux ; les peuples qui habi-
lent les bords du lac Baikal en ont conserve
qui retracent le g^e tatare et les traditions
sur la mer Sainte , 11 a ; la musique en est
quelquefois vive et graciense, surtoutdans
la Petite Russie , 36 a , 53 a ; chants des
Staves, 71 a; le Cosaque lermak est otiebre
dans des chants nationaux, i5o a.
Charbon de terre , pen abondant ; quel-
ques mines reconnues en Eid^pe et en Asie ,
19 b, dans k chaine des monts Yaldai, 49
a ; annonci nar quelques indices dans le gou-
vemement oe Toula , 5a b.
Charlemagne traite avec les Slaves, 71b.
Charics-Quint entre en relation avec Tas-
sili Ivanovitch, x3i b.
Chevaliers porte-glaive, ou luerriers du
Christ, fond^ par Albert, troisieme iv6que
livonien , 97 a.
Chilka, riviere qui, avec 1'Argodnn,
forme le fleuve Amour, to a.
Chine. — H reste peu d*espoir d*y arriver
par une route ooverte dans les eaux polai-
res , 9 a ; obstacles que presenterait Cette
navigation, ib.; Alexandre P' y envoie une
ambassade qui n*obtient point Fentr^ dans
ce pays, 417 b, 418 a.
Cholera, a exerc^ ses ravages daus les
armeesde la Russie, 577 b; & ses attaques
siiccombeot le feld-mari^chal Dicbttsch et le
grand-due Constantin , ib. ; a ^lat^ il y a
pen d'auoees k Saint-Petersbourg, 640 a.
Christine, reine de Suede, re^oit du tsar
une indemnite pour les stijets iniigr^s dc ses
i^
TABLE DBS MATIERES.
Ei«U en Rusftie, 187 a; G^let-GusUve
devient roi par sou abdicaiion, 189 a.
rjerge, son organisation; |KMiUon pre-
caire des ministres du cuke, 29 a, b; jouit
de quelques-unes des franchises de la no-
blesse; du reste nuUe influence, 36 b;
FieiTe l'*" lui pte le droit de vie et de mort,
937 b; Pierre IIT reunit a la couronne les
riciiesses du clerg^ , 274 a.
Climat, generalement salubre, sauf les
eihalaisons produites par plusieurs roarais;
temperature comparativeoient plus froide
que la ndtre a mesure que Ton avance veri-
J'esI, x6 a — 17 a.
Gloch(e de Tver, d'un poids enOrme i
iia a.
Code Oulajenie; cxposi de (|uelque$-unes
de.ses dis|i^silions; pen de duree de Taocien
jCode, en ou^% freauemment modifie ou
meconnu ; ioHnence au clerge et des nobles
dans la reaction de ce dernier, 191 a —
191 b; Codes projetes ou publics par
Pierre I", 24.7 a , b.
<k)M^e de prevoyiince forme dans chaque^
gouveniement , aS b«
Coloiiies grecques sur les cdles de la
roer Noire, 67 a
. Colonies militaim, leur organisation,
5x4 b — 5i7 a..
Commerce , la balance en est en faveur
oe la Russia, 37 b. Y. Arts et Manuiao^
tures.
Conseil de Tempire : ses i^ttribulions 16
a . »\ .
Constanlin grand prince de Vladimir et
<fe Souzdal (i a 16-1219); vainqneur de son
(frere Georges, il le rappelle aupres de lui,
le declare heriiier dc la grande principaute
et lui donne Souzdal; meurt a tren(e-trois
>ps, apres avoir donne une principaute a
pbacun deses deux fils, 97 b, 98 a.
Constantin, second ilis du gr«nd-duc
Paul; conjecture d'apresson nom , 35i a; ce
qu*il manifesto sur la mort de son pere , 409
b ; fail ses premieres armes sous le general
Souvorof , 395 b ; il appuie forlemeni , dans
la campagne de Russie, uu avis dont le
succes etait probable, 466 b; a le coihman-
<^em«nt de rfirmec polonaise, 498 b; a Ic
tilte de vice roi, son caractcrc, 5o3 b, 5o4
a; la nou\elle se repand, aprcs la mort
d*Alexandre, qu^il renonce a la couronne,
519 a; plusieurs conjures venlent qu*une
jiariie des soldats proclame Constantin em-
pereur, sur Tassurance que cctte renonria-
lion est supposee , 533 a — 535 b ; il echappe
^ Tiusurreciion dc Varsovic, 553 b; abau-
.donne |iar les trounes polonaises, il opin
neanmoins tranquiHement sa retraite, 553
b — 556 b ; sa mort , d*une atlaque de cho-
lira, 577 b.
. Constantin Palcologne donne sa niece en
mariage au grand prince Jean m, xaa b.
Constantinople urise par les Turos , X9 1 b.
Gonlrebande : die est le plus grand obsta-
cle a la prosperite de la Russie, 5i3 b.
Cosaques du Don , leur genre de vie ; dans
ces regions Tbomme surtuut merite d'etre
etudi^, 54 a; Cosaques de la mer ^'oire,
font partie du gouvemement de Tauridc,
53 b, 54 a; leur service dans rarmce,
6x b; les Cosaques s'organisent en Russie,
xax b; ceux de rUkraine se soumettenl a la
domination rusae, 188 a, b; les Cosaques
du Don re^ivent en i836 une oouvelle
constitution de Tempereur Nicolas, 6 16 a
— 6x7 a.
Croyances religieuses, nems de celle$(Uii
sont admises par les divers peoples, 24 b;
surveillance des religions dissidenteseieroee
par le ministre de finstmction publique,
27 b; a Gatcbina sont conservees quelques
reliques et une image miraculeuse de b
sainte Vierge , 44 a ; la religion domioaate
dans TEsthonie n'est pas celle de Tempire,
44 b; a Pskof ont ete reunis des objeif
d'une pieuse veneration, 48 b, a Koliaxin**
les rebqufu de saint Macaire, ib.; idoles je-
tecs dans les eaux a Novgorod lori de Pela-
Idisscment du cluristianisme, 49 ^i reliques
(ieposces a laroslavi , 5o b; Kief, bcrceau de
la religion cbi'etienne ; image miraculeuse de
la Vierge k Otkirka ; etudes theologiques.
5a a ; religions rapprochees sans se confon-
dre/ 54 a; mahomelans, peuplcnt presqwe
toute la partie ancienne de Simphiropoli
55 a ; la religion catbolique domine dans la
Russie occidcntale, ou se trouvenl aussi le
culte grec el le judaisroe, 55 b; i Vilna,
.ine mosquee et des eglises de toutes !«
communions chretieuue."* , ib. ; a KamcneU-
Podolski , grande devotion k une image dc
la sainte "Vierge, 56 b; libre excrace dc
lous ies cultes, ib. ; religion el pratiques sn-
perstitieuses des Kirguizes, 61 b; <yllcsdes
Slaves, 7a b — 73 b; en 866, qudquesRusr
ses deniandent le bapteme, 75 a; Coastan-
.1 iuople , assiegee par les Variegues , est sauiee
par un miracle, ib. ; Peroun el Volosse,
dieux par lesquels jure Oleg, 76 a, 8a 1; k
rhrislianisme commence a se repandre daiis
les provinces nisses, ib. ; vers 941 » i' / *y***
un asseK grand nombrc de dirctiens a Kiej,
77 b; en ^55, la regente Olga embrasse le
GOMTEMUES DANS LJL RUSSIE.
649
Araftjammne , 78 a; premicn et dcmiert
■uiijrs chr^ens k Kief» 81 a; bapldme
oHoone au peuple par Viadimir, oependant
^oriqnes provinces patent paiennes, 8a »;
fivres sacres Iraduits do gree en slavon, 85
a; la LiTooie septentrionale renonce au
chriftiaiiisme, pg b; des pr^res font en-
mis en CariUie poor convertir les habi«
Unts an christianisme , 10 c b; le prince
Uichel et le boyar F^odor refbient ae fl^-
cbir le gcoou decant les idoles des Tatars
ct-TC^oirent la mort, 104 a, b; publication
des canoas cedesiastiques, 107 a; ecdettas-
ti^ms eaemples d*un tribut impost par let
Titars, io5 b; Berga» khan des Tatars, te
bit mahoiBitan, xq6 b; ITsbeck propage
eel(e religion, 109 a; interdit lance par le
metrnpolitain sur les Pfekoviens, xii b;
dnix bis d'on khan des Tatars sont eonvertis
le , 1x4b; Tabbe Serge b^it
les troupes msces qui vont combattre le
Titar Maoai, xx6 b; la lithuanie, qui a
adople la eomnmniofi laline, est hostile
coBtre lea Rosses attach^ au rit grec, x tj
b, ia6 b; les Permiens sont convertis a la
ndipoa cfar^enne, ib.; Jean in, k la
mUe d*ane expedition, ordoune des prims
pobKoues, ia3 b', fait brdler lea fauteurs
de rberesie jodaiqne, 127 b; des legats ro-
MiDs teaient d*operer la reunion des deux
tiglUei, x3t b; Jean rv sefait sacrer, i34
a; fait b4tir une igKae en memoire de la
pnse delazan; il designe dans cette viUe
des oaplaoements pour des temples, 137 a;
Gr^goire XIFI tcnte la reunion de» deux
Eglises, 147 b; Clement Tm ecboue dans
la mtoe tentative, x58 a; hymne chantee a
Tavenement du tsar, x6o b; le faux Dmitri
favorise les jesuites et leur |)cnnet de chanter
hi messe latine, 170 a; Philarete, pere du
tsar Biichel Romanof, est eki ]Hitriarche,
186 b; Casimir met son royaume sous la
protection de hi Yierge , 1 89 a ; le patriarche
Nikon introduit le chaut grec, engage le
tsar k assembler un ooncile qui reconnait
pour la seule fidile rancianne Bible sla-
vonne, 189 b ; introduction du plain-diant,
X94 b; oertaines parties du eulte r^ormees
par Pierre I*', 907 a; hi Sorbonne lui pre-
sents un memoire tendant a la leunion dee
deux iglises ; il r^pond ^une maniere ^a^
sive, et plus tard il execute en penonne
une boufibnnerie burietque en derision du
5 ape, aa6 b; il dte anx eodesiastiques le
roit de vie et de mort, 937 b, abolit la di-
gnite de patriarche, a38 b; Elisabeth Pe«
trovna fait instruire dans la religion greeque
son neven qu'dle designe pour son sucoas-
seur, 367 a ; Cut embrasser la mtoe religion
a la prinoesse qu'il Spouse, a68 b; Cathe-
rine n se conforme k toutes les pratiques du
eulte grec, 974 a ; Alexandre I"' re^it du
synode de Mosoou une relique dont il confie
la garde a la milice de cette ville, 46a b;
Koutousof offre a la veneration de Tarmee
une image miraculeuse de la Yierge, 467 b.
Culte (V. Croyances religiensei).
D
Dagbo, lie principale de rEsthonie,
Ub.
Daniel, prince de Galitch , se soumet a la
protection du khan des Tatars, 104 b; est
couroime roi de Galicie par le legat du
pipe, ib.; sa mort, son eloge, 106 b.
Danse, celle des Russes offre une panto-
BiiiDe variee , mais pour les ballets iis nous
Mot ioferieurs , 36 a , b.
Daru, sur le plan de la campagne d*Au8-
teriiu, 4i5 b.
Ditmar, historien allemand contemporain
de Srialopolk (eoi5), Si a.
Dmitri, fits du grand prince Michel
(t3(9-i3a8) et prince de Tver, venge la
nart de son pere en perqanl de son epee le
Snad prince Geo^es Dauielovi(cli : dix
nois apres, Usbeck le fail mourir, (09b,
110 a.
Doiitri Alexaodrov itch ( i a 7f>- 1 a9<V ) ,
grand prince, se rend k Novgorod pendant
que les autres princes accompagnent les
I'atars conire les A tains; soumet les Care-
liens rebelles; est oblige de fiiir deux fois
devaot son frere Andre qui ' s'etait fait
Domnier grand prince par le khan des Ta-
tars; re9oit de nouveau la couronne du khan
Nogai; entraine par Andre et Feodor d'Ta-
rcslavle , le khan met en marche une arm^
nombreuse; Dmitri prend la fuite, et les
Tatars mettent Novgorod a feu et a sang; se
reconcilieavec Andre, apres avoir abandonne
le titre de grand prince, 107 a — 108 a.
Dmitri Gonstantinovitch de Souzdal (i 359*
x36a), designe grhnd prince par le khan
Naurous, est force, par son coinpetitear
Dmitri Ivanovitdi de Moscou , de compa-
raitre avec lui devant le khan de Sarai, ^m
prononce en favour du prince de Moscou :
Constant inovilch s^euluit a Souzdal, et Ivav
TABLE DES MATllmES
Mmtch* Age de douat ana, Ini tuooede,
Hi b, iiS au
Dmktn Ifanovilelt, furaoiMii DoMkoi
(i363.i3«9), OMnDe gnod prian par le
khan da Sani, lui fWtta qiuand cmn«ci
veut la dApoiaidar; ivanpoite aur la Tatars
des avaotaget |»articU; Olgtfd, prince da
Lithuania, jpmknn ^ Rmiia, bat las
iroupet du grand prinea at davaHa hs an*
rirant da Maaeou; Doritri afttaoae Bikbd ,
prinaa da Tver, qni appeUe Otgead k aao
•eooitiB, nak Unilri ae rend k la horde, od
U cft eonfimft dana k frande piincipatili;
kr khan Manai fnt nvager las environs da
N^; Michel, sans nttendva Ohntl et Bla*
nai las aVi^, aniaaa les ho^lites; k
grand prince r^siife ei s'cDpare da Mikon-
lin «t de Tfer; eanbat de noureau ks Ta-
tars, rapiend snr ks lirtinaniani ipsdqnas
pravinces; rkiila vkterienseniant k ana
armia innomhrabk oandnite par M anm ;
n*a Idas k nAoe rteluiion oonim Tokhta-
■Muisch , ^ , guide par Okg , mat Moaoou
4 kn et a san^, et devnt lei|nal il anvok
son fik slnoiilier en son Boai; il fame HAnr-
gerod k raoannallin aa suaeninale, mak
craint de ae ckdaicr eontra ka litfauamena ;
Tassli, son'fik, s'^ftut de k honk pour
venir reeneiHir ses demisn soupirs et aa
suoaassion, ixS t*^ 117 b.
Ihnkri (k fans), i6o5-x6o6, impend k
bruit de aapretendne jnalltd dans un eon-
vent de moinesdont il kissit partk ayant k
nam de louri Otrepief ; soutient ses preten-
tions par les armes contra k tsar Boris Go-
dounof, x63 b — 166 b; bit ^traogkr par
des assassins k tsarina sa veuve et son fib
eouviTUt
nng et
nMita« k nHMt k diak
nan aprts sen eanwmnenwnt canne lisr;
nil son enlr^ aolennelk ii lloscoe; sei pro-
digalitcs, aa dissolution; eansmnliaB de
Vassili Sehnnialu, aon cul et eclai de look
sa baulk; k bum Dnutri, rcEonna psrii
mm, aon onek et son bare, ks bit eefer*
mar ou eiikr; se eamposa una ^ank ^t-
trangen; pawlonna am Schoniski, qai re-
leur lanjt et lenr brtone; &i(
Oisippf qui Tsvait
ii^inriii, t66b-^i7a b; epoosa suleaDclk-
mant IfatinB, filk dn voiifoda da Sss-
doosir ; diz joun aprea dckle k eonspinlioD
tnunie par Schoniski; k bus Dmiln sspirc
frappi de denx coaps de foe, Mariae est
ranuse k aon pte; maurtra par k peii|>h
d*un mad noatn d'ctmngers; Scbouiski
assemide k eenseil, il y est saki tar, 17*
h — 176 a. -*Un second buDaulrijpoW'
suit k gnsrre, spouse Marine, eit las pir
unprineeNogau, 17ft a — i85a.
Dnkpr, toive mpsde, coura moUe par
de namteeuses eatameles; a servi aux in-
eonions des fikvaa dans k BaaAapiR.
i5a.
Dniflrtr (k), Xyms das aatriens; nanga-
taon bcik et abne, i5 h.
Don, Xmaia des aneiens; can ianlafare;
des bancs de aable eodiainssaat hvqacn*
aaent son ceavs; nn canal b jcindia aa
Volga, x4b,i5a.
Droit ruaae, nom donni au nka aaoea
eode de Ion civaka, attribne a Tarodaf,
as a. Y. Code.
Dvina (k) ooddentak conduit jinqo'*
Riga des bob de constnictioa, 14 > i ^
£
^dncelion partienliirs. Les tevngera qui
ae daatinent a oelte earrike doivent aubir
un eaamen de capadie, 34 a.
^katMnoakf , ehcMieo.du gouvemeraant
de oa nom, sitni aopras des cataracles du
Dnkpr; fohriquas de drap, 64 b.
I^hsabeth Ftovma (f74x-x76x): gra-
cicuseet bonne, dk laiase eondamner ecus
rTon veut perdre, acoonk.k d'autres
rieompenses sans mesure; recommence
k guerre centre k Suede; renvok au s^t
k oannaissauce das afbires; d^aigne aon
naven k doc de Hoktein pour aon sooces-
aanr, 96S a — 967 a; k Finknde tombe au
penvok des Rosses; ^sabeth bit ponir
crndknient madame Lapoukbin ; bii epoii-
sar i son neveu la princesse Sophie-Augusta
d*Anhalt-ZeriMt , depm Gathcrina H; tnite
de b quadrupk aHianoa; k Ruawe, i'Aa-
gkterre et k Holknde, sootienncBi lom-
tMts de Marie-ThMae; Galheriae, de
coAteedu grand^ueaon mari, mat kusp*
a profit; elk a icrit des mteoiret; m
Kaisons avec Ponktowaki; vidoirei no*
portees sur Frederic; ezil de Bas(sojf>;
prise, de BcHin; moit de I'SmpMn^
avanoee par ses ezob; progrcs da k p««'
sanee russe sons son regne, 3678— a?-**-
l&nancipation das serft : qvelipMi aMM -
les prises i ce snjet par Catberiaa U, 307 1)
— 3o8 b; 344 b— 145 b; un odMie « A-
lexandre l^ change k oonditioB <l«^'
si lea scigneura y conaenteoty en ctHa ac
Cranca tcnandera, 4x7 b; unamcaurainiB'
Goiminns daw la. ebbsie.
•Jit
dot tend k raAmdutiemeiit dcfinitif d^mw
Mrtifl sacoeaife dei lerfs, 4Aa a; uomhre
OM pajmv deYenus libra de i8o3 a 1810,
45iia.
Empensiir. Ordre de soooenion riM ul-
ttrieurement par les empereurs Paul I*' et
Nkolat r' (as. V. la note). Titre de r«m-
pcrair jtf ies ainoiriei ; est chef supreme du
aint sjDodei a5 b, a6 a; nomme les i^iia'
t«iiD, 96 b; epoque et oocaaion 4 lanuelle
k tilre df peiar on tsar leur est ^ontere, 87
b; armes impMdes et leur legende, 199 a.
Enfants trouv^ : itabliwemeot de la pre-
miere maison oui leur est destinee, 6a6 a;
leur noiubre dans leurs deux maisons k
Samt-P^ersbourg et i Mosoou; leur diri-
sion en trou categories, 637 a, b.
Alats-Unis. ▼. Am^ipie septentriomde.
Ex^rtalion (comniepoe.cf) , quels en soot'
les pnncipaux objets, 36 b; qnds peuTent
itre les riwaux des Ruases pour ce commerce ,
ib. (T. Arts et Bfano&ctures).
F
rcnpire maae, 75 a.
Kate Aks^Ml (<696-i58a) Mnt la
Alois MikhtMmUthi mm»9 da eounge
el de la knutink «ratrt les Tatars et kt
I^ imwa; d*«|ini 1Mb du pnaot G%-
EtziD, Mie fiirnnflltmfitf In resiilns da
TMMiana BoUaiM* 00 Hulitiie dm oidres
qai doiviiit reoamiaftvB la superiorite daa
empleis efleetifs; on lui attriwe pkisieurs
Ngkasenls et ctaUisacmenU irtilei; a laisse
k plan d*une aeademie : il desigM Pierre
poor son snecsiirig, 4 Ymdwmm de son
mreTfan, 193 b — 195 a,
Fcodor Bonssevilcli (i6ftS) , beoi comme
bar afiBt la mort de son pere Boris, ne
^foA rcsisler an laux Dmitri qui le fut
ctooficr, lid et la tsarine sa n4re» i^^ a —
168 b. y. Dmitri (le fiiux).
FiMv lYWMvitch («5^-iS98)« jeune
tiar asriste de cinq consaiUers; Tun aeux,
Godoonof, beau-frere du tear, praod le
tHre de regent, gomreme gkorieiisflnent,
acbefe la oonqn^e de la liberie; dejoue
aw conspiration et assure par la force son
autoril^ ; mart de Batory, roi de Pokgne ;
Feodor est un des pretendanti k oe Irtee; il
edone et fisit avec le stoat tnw trive de
^aae ans; hostility oontre 1& Suede; la
loMc s'empare de h Gar^; le regent,
poor s^aasorer le ponvoir, fait mourir Dmi-
tii, fils de Jean IV; defend Taillameient
Moseou oontre les Tatars; bostiltles contra
b Finlande; paix de Tiavsio avec la Snede;
villcs bAties et ooonp^ par des gamisons
pear eontenir les Tatars; paix enCre la
ftoaie et la Crimee, sdretes et privileges
aocord^.4 TAngleterre pour aon commerce;
beondition du serf rosse deviant plus dure;
mott da Isar, qui, par un testament ecrit,
le sceptre a sa veuve Irene : la taanne
le tcAmo : nae grande assemblee nationale
oonlere la Goumnna de Riissie k Boris Go-
dounof, i5i b — 160.
Far : ciftui des pninBom du nord est Ires
cstime; il abonde ausfd et est d'une excel*
lenlc quaUledaas la Cancase, 19 b; pbisieurs
mines dans le (Boarcmement de Riasaa, 5&
b; dens oahii de Tenia, S% a; abendantcs
dans eeux de KLaloo^ el d'Orel, ib.
Ferrand , dtk phiaieers fois dans I'bisioire
des demembremenls de la Pologne (V. Polo*
gneet Caiberine U).
Feu (peine du), dans qnds eas elle aui«it
ete appliouee, suiveat le plan laisie par
Feodor Alesiiimtob, 194 b.
Feu grigcois, dctniit les barques nisses ,
77 a , 85 a.
Fievre de CSrimee : a cause, suivaat Topi*
nion laphisaocreditee, le mort de I'empe-
raiir Alexendrr, 16 a , b ; Sao a , b.
Finlande, la plus vesle des provinces
balliques; ^lendee, culture, population,
canctira dn Finlandais ou Finois, 45 b —
46 a } peuples anaicnsqni se ratlachent k h
soucbe finoise J ^ b , 'jotL
Foires : idee du tabkau <|u*elles presen-
lent, 37 «, b; eelle de Nijei-Novgorod, 5c
a; une st tient k Onrioupmskaia, 55 a ; iine
4 Orenbowf , 58 1; 4 Irbil , 60 a.
Fortifications (art des), ausai avanoe que
diea lea autras nuissaaaas; cependant places
fioirtes pen noanliraiBes , 41 a.
Fndint H, roi de Prusse, battu 4 Ku-
nendorf, 271 b; est Tobjet die radmiralion
de Pierre HI, 974 a et suiv.; il Tavertit du
danger de sa position, 976 b, a77 a; pro-
jels de FrWnc ; opinion de Tauteur sur le
r4sttllatde8apottiique,e86a,a87 aC^-Ce-
tberieell).
Freres lieravci, ont un etablissement a
Sarepta, 57 b.
M3
TABLE DES MATI&RES
Gardie (Jac^es de la) , general suedois ,
FraD^is d^ori^e , sert tant6t conlre, tantdt
^UT la Riissie, 148 a, i5o a, x8o b;
promet aux Polouals de ne plus servir le
tsar, 18 X b; prend possession de Ladoga et
de Kexhulm, z83a; s'empare de Novgo-
rod, x84 b; poursoit ses conqu^tes dans
les provinces septentriooales , 186 a.
Gediniin, prince de lithuanie, apres pla
sieurs victoires, s'empare de la Russie m^-
ridionale, et prend le titre de grand prince
de Lithuanie et de Russie , x xo b , 1 1 x a.
Genghis-Khan et les Mongols, letirin^-a-
sion, leur marche, leur retraite, too b —
lox a. V. Oktai.
Georges , sourerain de Tladinir, f9nda-
teur de Moscou , 90 b — 10 x b.
Georges ou Touri, sumomme Dolgo-
rouky (xi55-xx57), assigne d'abord des
apanages h ses fils; ne peut rMUire Mstis-
laf, qui avait chasse Tladimir, son oncle,
de la ville de Tladimir; un de ses fils, cbasse
par les NoTgorodieos, cede sa place k Ros-
tislaf ; sa mori lorsoue sa puissance etait de}a
menac^ dans Kiel, 91 b , 9a a.
Georges , fils de VsJvoIod III (xa xa-x 9 16),
design^ par son pere cooime grand prince,
s'unit au prince de Pereiaslavl^Zaiesky et k
oelui de Yourief-Polsky pour marcher contre
son frere Constantin; paix simul^; bataille
apres laquelle Georges vaincu est contraint ,
amsi que son allie, d*abandonner ses apa-
nages, 97 a, b (iai9-x!ia4, sous le nom
de Georges II) ; son frere Sviatoslaf conduit
uiie arinee russe contre les Rulgares d*0-
rient; Georges fonde la ville de Nijui"*
Novgorod; la ville de Galitdi, apres une
bataille sauglante , ouvre ses nortes au pnnce
russe Mstislaf ; le jeune fils du grand prince
Georges s'ochappe de Novgorod et retoume
aupres de son pere; il est replace de nou-
veau dans ceite ville , 98 a — 100 a.
Georges Y sevolodovitch ( x a 24-1 a38) : etat
de Tadministration, trails caracteristiques
desRusses; invasion de Genghis-Khan; I ar-
mee russe eprouve un cruel echec; Georges
envoie son neveu Yassiiko qui arrive trop
tard; nouvelles gtierres civiles; les Lithiia-
niens sont repousses des provinces du nord ;
Taroslaf abandonue la ville de Novgorod ;
Georges reconcilie Michel et Taroslaf;
Mstislaf donuc sa fille et le tr6ne de Ga-
litch au fils du roi des Hongrois, qui plus
tard le perd et le recouvre; invasion du Tatar
\4Hi, neveu du fils atne de Genghis-Khan,
Okiai'; inoendie de Moscou, villes et pajs
ravan; mort de GeorgM et de Yassiiko
sous les coups de rennenu ; retraite de Biti
dans le pays des Polovtsi , xoo a — xo3 a.
Georges Danielovitch ( 1 3 1 9-K 3a8) , grand
prince apres la mort de son onde Michel ,
envoie son frere Athanase gouveraer Nov-
gorod en son aom : Dmitri, fils ainide Mi-
chel, est prince de Tver; bientot il obtieot
du khan fa dignity de grand priooe; Geor-
ges, apr^ s*to« rifugi^ k Novgorod, se
rend aupres d'Usbeck ; 1& se trouve aiusi
Dmitri qui lui plonge son ispike dans le ctear,
X09 b, zxo a.
Gtorgie , contr^ jadis illustre, fait partie
des proTinoes caucasiennes; brigandage des
■lontagnards ; rigie par dm lois particulieits,
63 a, b; precis des evteements dn dernier
sii^le et trait de courage de hi derail reioe
de oe pays , 4^7 b — > 440 b (Y. Caucase).
Gouvemeroents et provinces non encore
organist (Y. aussi Territoire, a 7 b, 98 a).
Arkhangel , 49 b ;
Arnieiiie , 63 a ;
Astrakhan , 58 a ;
Augustow (voievodio d'), 65 a ;
Caucase , 6a b ;
Cosaques du Don , 55 a ;
Courlande, 45 a, b;
Daghestan , 63 a ;
Ekaterinoslaf, 54 b;
Esthouie, 44 b;
Fiulande (grand-ducbe de) , 45 h, 46 1;
Georgie , 63 a , b ;
Grodno, 56 a;
laroslavi , 5o a , b ;
Im^'ete , 63 a ;
Irkoulsk , 60 a ;
Kalisch (voievodie de) , 65 a ;
Kalouga , 5a a ;
Kamtcnatka , 60 b ;
Kazan , 57 b ;
Kharkof, 53 b;
Kherson, 54 b;
Kief, 53 a;
Kosf roma , 5o b ;
Koorsk , 5a a , b ;
Livonie, 45 a;
* Mazovie (voievodie de). Y. Yarsovia*
65 b;
Mixisk , 56.a ;
Moliilef, 56 a; *
Nijni'Novgorod , 5i a;
Novgorod ,49a;
Okhotsk, 60 b;
GCnfTENUES DANS LA RUSSIE.
M>
Olooetx ,49b;
Omsk, 60 b;
OreobooTg, 58 a;
Puiaa, 57 b ;
Penn, 5^ s;
Pbhk (ToicTodie de) , 65 a ;
Podolie. ▼. Kameiieti-PodobLi , 56 a , b ;
Poltava, 53 a;
Akof, 48 a, b;
Riasao, 5x b;
Saiiii.Pielanlioiirg, 4^ •—44 b;
Simbirsk ,57b;
Skibodes (TUkraiiie. V. Kharkof ;
Snofensk , 47 b , 48 a ;
Tambef, 5x b;
Tiuride. Y. Simpbcropol.
Tcfaernigof, 53 d;
Tobolsk, 59 b;
Tmila, 5i b;
Tver, 48 b;
Viatka, 57 a;
yibonrg, 45 b;
Titeptk, 56 a;
Vbdimir, 5i a;
^oUkynie. Y . Jkomir, 56 a ;
Tolo^ , 5o a ;
yorooeje, 5a b;
Takootok , 60 b.
Graniis de la Finlande; briUent des plus
riches coulean ; peuvent fournir dei mono-
lithes gigantesquef, 19 b; Id granit forme
les trottoirs de PiHersbourg et de Moseou ,
ib. ; abondant a Perm ,57 a.
Gr^ (affaires de la) : le oongris de Ye-
rone s'apprMe k statner sur le sort de oe
Sajs; Alexandre l*** fait desavouer la levee
e bondiers faite par le prinee Tpsilaali,
5o4 b , 5o5 a ; marche habile de la Ruasie
dans oette affaire , qui se termine par le pro-
tocole du 4 avril x8s3, signe en fevrier
i8a6, 5o5 a — 509 b; sea suites, 6of a;
Alexandre parait dispose k faire tenniaer
lesneKociations,5j3 a — 5i3 a; resume de
tons les ev^nements, installation du roi
Othon, independance du synode, serment
pr6te par tous ses membres, influence de la
Russie mtoe sur les mesures prises tout r^
cemment, 599 a — 6zz a.
Grodno, dief-lieu du gouvemement de ee
nom, a conserve, mais en les poyant cherc'
ment, quelques usages de ranoienne admi-
nistration, 56 a.
Gustavo Yasa c«aclut une tr^e de
soizante ann^ avec Yassili Ivanovitch,'
i3i b.
H
Hm de l*l^tat, leur destination, 5i b.
UdsiagifiDrs, chef-lieu du gouvemement
de finiande, pays tre&>foriifie, coupe par
dcs foriiMt des rocberSt des marais et des
ho, 45 b, 46 a.
Henri I*', roi de France , epouse une sceur
^ Taroalaf , 85 a.
Henri, doc d'Anjou , tiu roi dc Pologne ,
retoume en France, x45 a.
Histoire de la Ruasie : la premiere a ett
composee par le patriarcfae Nikon, 190 a.
Histoire natnrelle. — Precieuses acquisi-
liom faites k rembouchiire do I>na, sur
ui bonds el sur ceux de quelques^ns de ses
afBaents, 10 b; flore en dc^a de rOoral,
h m^oie que celle de l^Europe; boisson
tine de la canneberge ; arbres et plantes
<|W nous poorrions y recueillir, 17 a, b;
inimaox utiles , inconnus en Europe ; Etudes
tt aperiences k frire sur divers points de la
^oce; ricfaesses minerales, 17 b — 19 b{
Pfrlci trouvees dans quelques lacs on ri-
^'icres, 46 a; eanx minerales k Kadiin, 49
3; a Litepsk, 5x b; cristaox de roche
dans le gouvemement d*01onetz, 49 b; ar-,-
bres fnuliers riussissent dans le gouveme-
ment de Yladimir, 5x a; pommes presque
tran^Mirentes, ib. ; beaux vergers a Koursk ,
5a a; |e miHer parait s'aodimater dans la
Petite Russie; la vigne y donne des espe*
ranees ,53b; plusieurs productions de I'^sie
riurraient ^tre naturalisees en Europe , 54
; mirage, comme en l^pte, 57 a; aimant
a. Perm y ib.; lacs salins sur la rive gauche
du Yolga , 58 a ; fails geologiques a observer
k Astrakhan, ib.; arbres recueillis par
l*Europe du gouvemement d*Orenbourg , 58
b; dans la Sib^e: oerisier nain semblabie
k la vari^e qui emit en France sur le Mont-
d*Or, 59 a , riri^ d'eau thermale et veg^
tation sur ses bords, volcan en Option,
volcnns ^teints, crateres, tantdt fumants,
tantdt ignivomes, 60 b; intensity du froid
dans le nouvean monde, 61 a; for^ts da
pins et de bouleaax dans le pays des Kir-
guizes, 61 b; oatoralisles et savants qui
ont parcoura les prorincos de Tempire ,
309 b.
iS4
TABLE BIS MATIKRES
I
Mr l« ¥ol|ft,. dMC-KM a*aa
MMMnienMDt dr oe non; etendoB, P^P*^
tolioo; agriculturt pcu iifpriiAi nv k aol;
pobili , aeiraie » inhNtm lie tat h^Ntaou ;
snatifet pbyafUM fui le» dMagiml,
hcHHDCi d ItMHs; obfBli de loun IMb"
mm , So a , b.
iMLale (ditewt #>, I'raeieik Botf^hoM
aiMi«rMD,i4b.
lteiM4i(le)»fleif««le phn oomidcvdble
(!• 1»Sibci4e,» jtlle dln» un giUe dc b
!, iia, b.
I^ (9<»-945>, dkonptt ht DmAeoi
cimient te PMdi '
l^iMM tm OTI miMiiifiwiy trailA db pu
€oacl» ■Mb' iin» M»ade oipbBlioHf m
mort ; erfet de tes ttuctbn* nr b* Dm9»
]^ Olj^oivitcfa (ti4*«ii5i); bt liali»*
tiBls de Kbf , nrionleBte dci boyan, «b-
tiennent de Ini qu'i raTcnir ib rsadvonC to
natiee'; ib pixaiKMMBt fcriibmcnt k Taias-
bf die a'eaifMrer de b aowreraiiMlft : cttoi ct
marche contre Igor, qui, abandoaad das
sieos , est ▼aincu et jeti dans un oadiot k
Per^iasbvb, 89b, 90a; il se bit moioe,
90 b; est massacre par les babitants de
Kbf, ib.
lbs. Les plus septentrionales n'atteigiieiit
pasba»* <bgr6,r,5ft;ibidiB'baMrM-
tique doot b Runie » jugi ulib de- I'biipa*-
rer, 7 b.
Il^ft, Gosaqve, seduanV Pbn«, fib de
P^odor, est peon i Btoeov, 178 », bb
IRn, nnin (pi, rlone k fAngan,
ronne one cms votf « iioBgoiiBUi , i s a*
Indigairba , fieuve qui eonb d« and i«
nord, et se jette diaa b
10 a.
Industne, ^t de aa prospttild dans le
gouvememeni dr Saiaft-Vtadbeu^t 44 1>.
logeda.,. iiMb« qns^ aM» TOtam, fanM
b Gbilka, xoa.
Inocubtion. Catberioe II s'j looanl, ct
avec elb beaueonp de perMttics dewodar,
3ioa; dm hnspiaci som eauMla pear sate
optetioQ, 35 1 a.
InstmetieB pabfiqiML Neitbne dis m-
venit^, des difets ^abliaaenaali» ^-
nases r^ndiu daiis bs gauvtraaamati,
ecobs dn servieas puUbs, 3kb«^20l);
univeraite ctiebre k Dovpat , 44 b, 416 a;
des phu fMouenlees k Vibiay S5b; cdie
de Moseou, rond^ par l^Iisabelh, i7»b;
detaib sur lous les ^blissemeau curtsats,
b nombre des tieres, bs faDBllci,tasMes
des services publics, ele^, ete.r8t5a—
639 a.
Incemperanoe , b go6t ea eat ooaMim au
noble et au scff; par qvale oauie, Sa B^b.
louri Otr^ef. V. Dutri (b ftn)»
i63b — 176 a.
Irfcouitsk, cbef-lieo du guuiiiaw— rtde
oe noon , en Siberb, lien de paatige irb-
friquent^ , brilb du loie europte ; sitaa-
lion sur TAngara , pres du be Baikal ^60*.
Kan V (voy. Pierre T').
PvanTleiff^gBBoe de Birav (i74<^i740 ■
Ifcnbb, qui avait eook#iue i rsttvalioo
deBiran, etsub de kn anreAis; i sanaial
avec b prineesas dvchaaai da Bniaaaij*
qu*il s'emparera de Biren ; il mtt ce M^
ieafantion; b pfinoeMe Ame sa dadare
grande-dncbesse et regenle, et rs^ Ib la^
nent de fidtiM, s6i • — a6a b
Jean Danielovitcb , samonmi Kalita
(i3a8-B34o), nonun4 grand prince reai-
dani ik Moscaupar Usbeek, ix»b; bit bn->
car Pintcfdit par b BB^ImoUtain sur les
Pftkoviens,. rabelbs cnveia b kban ;, se ri*
oondlae stac No«gqrod„ mais (ait cbassea
de Pak^tl b prince Abaandrajil tramiib i
■Atablir runiiA de poovair^ et, awant ra-
prfaantaAbaandrftconuneannfiidUikhan,
d ditaanin* aiaai Udbeski b biBanaouric,
III a — lu b
Jaann I«0ioiiteb(i353> i358),.desi|na
pand prince par bkban des Tatars, a dV
boni pour ennemi Obg , prince de Kiazan ,
contre leqnel il ^ite la guerre; Olgcrd,
prince de litbuanb , inqai^ bs proviaca
russes; b vilb de Briansk se aousast k la
Liihuaub; diasenainna el troubles eatie ks
princes , et mbne dans b dene; b nclrs-
poUtain Abiift gnarit V^pMse du khan Tcb^
uibck , et desarme b oousnNU de aoa fib
Bardibck , xa4arb.
Jean UL Tasailievitob (i4fo-xSo5),
grand prince a Moaoou » est iaroDae par Ml
qHaatles aunrenues enttn deoK kbaBs;ajisai
plusieurs^ campagnaa aoumet Xaian; frait^
eruelbBant Noveueod^qpoiquelui biaMBt
b fiDRna de republique ;, bit aoaii b ^
qnke de b Pennie; les Tatars de b kords
Doreeprconent Abiin; il epoaaebnicea
1
GONTBHinES DAUB LA R1I8S1E.
eM
de Coulttitin Pid^logne ; fiiyoriM les arts,
defend Moscou par uoe forteresse, aliire k
lui le klian de Cnaa^ » depouille enfin Nov-
gorod detoateind^pendanoe^xai b — X34a;
foodoit aoe annee nombreiiw centre k khan
Aklunel; lea deux anncea r6lrog;radeiit ;
Akhmet est to£ pea de temp apres: ]k
cmt Tmfifunrm m la grande norde (horde
Dm] ; Jean exerce de cnielles represaillea
eoBire Tordre de livonie et les oievaliers
tcntonkpies; ton fiU aioe epouse la fiUe
d'ftienne 111, hofpodar de Mbldavie; U
poumiit la destruction des apanages » ib.
~»5a; le tsar d^ Kazan« detr^ne, est
«Deoc captif a Moscou; Jean commenoe lei
imtjfites contre lea prorinoes Uthuaoiennes ;
Alnandre, pand-dvc de lithuaniei obtient
de lai la paix et la main de sa Bile ; le kban
de Crim^ loi reproche oette alliance; Jean
excne k Norgorod dea acteS' de violence
eoatre les maiclunnfc dea Tilles anseatiqaes»
is6a;enToie nne ainbassade k Gonitanti-
oople ; declare Vassili mod prinee de Not-
forod et de Fskof ; nit la guerre i son
Seodre Akundre ; les Rnaaea scat battua
par les dicvaliers de Liyooie ;. le khan de
Crimee dtaiiit ks deroien restes du royaooM
(aoAk par B4ti; sort de U princessei He-
lene et (flfoienne ; tr^e de six ans aveo lea
<^efalicrs liTomena; le liar de Kazan se-
cove le ieog des Ruases ;. ce que Jean ni a.
Cut poor la grandeur de k Eu4sie,^ih. —
iiSa.
Jean IT, snmoittmfl le Tarrihle([i533-
X S$i) I Hieicne , veuve d» Jean m % regenle«
et qnefaqes- una d» tea oonseillecB , se por-
tent a dss actea de cruaole ; Sigismond d^-
nste les provinoes meridionales , falf une
trbc de dnq^ ans ; mort subite dUelene ;
leneuz prince Scboiuaki le declare chef du
goovcnement , se montre cruel sekn son
cipnee» mua oeurt poi de temps apres ;
son fr^ Jean lui suoiwde ; malhearettx ^f
de la Bjnaie « aani quelques actea utiles et
rinfiaeoce keumise du parti de Jean Belzki ,
7D peril hicnldl sous ks coups de Jean
Sdwaiski,. x3a a— i3d h; Jean IT* Age
de treize ans , fait d^vorer par des chiens
Andre Sc b^maki ; annonce d^jk sa cruaule;
piHsges eurob tour k tour par les habi«
K&U de Kaiam tk les ]lf osoovites ; Jean
|*nd k titre de taar ; son sacre , son ma-
nage; ineendie fortuity mais violent, k
Mttcou , qui donoe lieu k des cruaut^ aveu-
k|h et k rinfpitatiiHi d*ua moine dont la
^ve renrinMide adoucit pendant quekiuea
aaoees k caradkee de Jean; il prend Kaaan
iprcsuneloDguierenstance, i3ib — i37a ;
H ki naft vn fils quHl disi^ pour lui suc-
cMer ; Ykdimir, son oousin , sera regent ,
et» si k jisttne taar menrt, sera souverain ;
prise d'Astrakhan , iraiti de commerce avec
rAngkterre ; tr^ve avec k Su^de; erapiete-
ments sur les posseaions de Tordre de Li-
vonie; mort de k tsarine; Jean retombe
dans k dissolution at ks cruaut^ ; il epousa
k fille d'liA priooe taeberkasse» 137 a —
139 b; combats et di§¥astations en Lithua-
nie; Jean se cree une garde et confie Tait
ministration aux bovars;nouvelks cniaut^
mtiees d'exercices oe piele; il souBict kun
oonaeU general ks clauses d%in traiti; il
fait k k reine l^lisabeth une demande qui
atteste sa crainle habituelk ; k mort de la
seoonde tsarine donne tieii k de nouvelka
cruautes , sortout dans Novgorod » xSq b —
143 a ; Magnus , souveraiu de Tile d'OEsd ,
se soumet aux vues politiques de Jean; in-
vasion dea Tatars devant ksquda Jean prwd
la fuile ; il& incendient Moscou et redemau-
dent Kazan et Astrakhan; nouveaux raa-
riages de Jean , oouvelks cruautks ; k Uma
essuie une dcfaite; Henri, due dTAnjoUy
kin 1:01 de Pologne ; Baioiv lui sueoede et
remporte suz Itt Ruaaes ds g^knds avan-
tages»i43& — x48a;sur unsoup9on,vrai
ou simule, Jean firappe son fib aun coup-
mortely ib.; ks Husses oommencent knrs
etabCssements duix k Sibetie* 148 b —
iSo a ; sa. mort, nredite par ks devins ; il
avait dfkigjoe Feodor pour son suocesseur^
oe qu'il a fait d'utik dans radminisfralion»
i5oh — iSxba
Jean Palkokgue epouae une des fillea du
grand prince Yaasili Dmiirievitdb, ii^h.
Jeamtea, sont tenvoyka de. k Russk,
grieis avances conire eiix, kur nombrey
lieux di kur retraite, 498 a, 5oi a-^
5o» b.
Ji^on (ou Oxus), fleuve qui versait au-
trefois une partk de ses eaux dans k mer
Caspienne; il se jette dans k kc d'Aral,
la a.
Jitomir, chef-lieu du gQuvemement de
Ydbyme, vilk indiutriensc et commer-
^ante, 56 a«
Juili, aunient pu kire utiles k Tarmee
fran^aise en x8ia, 460 a; dea edils sont
donnes contre eux en i8a4 au suiet de k
contrebande, 5x3 b; montant de la popu-
ktion juive, nombre des ecoks Israelites,
638 b.
Jures assanuantes, devest lesqaels parait
le deaandeur avec raacusa : eoutume pre-
bablement venue dea Variegucs, 85 b. V.
k note.
6M
TABLE BES MAHERES
K
Kalouga , sur I'Oka , cheMieu da gouver-
nement de oe nom; pays fertile; foists,
mines de fer, industrie et commerce tres-
actifs; etendue, population, 5a a.
Kalmouiks , six cent mille sortent volon-
tairement de I'empire , 335 a , 338 a.
Kamenetz-Podolski , chef-lieu du gouver-
nement de Podolie ; forteresse devenue inu-
tile , 56 a , b.
Kamlchalka , rigueur du climat , pheno-
menes , 6o b.
Karamzin, historien qui a fourni le fond
ou le texte de plusieurs articles , 67 a , 69
bt7oa,b,7ia,74b,76b,ii7b, i5o
b, x68 b; comble de bienfails par Alexan-
dre !•', 5a I b.
Kazan (royaume de), ses commencements,
xao a.
Kazan, sur la Kazanka, chef-lieu du gou-
vernement de ce nom; sol fertile, beaux
bois'de construction, 57 b; fondee par
Sain, fils de BAti, ou par B4ti lui-m^e,
116 a.
Kharkof , chef-lieu du gouvernement de
ce nom, appele aussi gouTemement des
slobodes d'Ukraine, 53 0; terme moyen de
la population , 5a b.
Kherson, chef-lieu du gouyemement de
ce nom; Odessa, qui en fait partie, est la
troisieme ville de Teropire, 54 b, 55 a;
note sur les antiquites de celte contr^,
353 a , b.
Khozars, depuis quelle ^poque connus
en Europe; fondent un vastei^tat, la Kho-
zarie ; spumetteni quelques populations sla-
ves, 70 a, b; leur puissance est an^ntie
par Oleg dans deux gouvemements , 75 b,
d^truite aussi dans la Tauride , 84 b.
Kicliinief , capitale de la Bessarabie, 55 a.
Kief, sur le Dniepr, chef-lieu du gouver-
nement de ce nom , berceau de la toi chrc-
tieune; catacombes sous le lit du fleuve,
53 a ; terme moyen de la population , 5a
b ; jusquVjti 1 169 le s^jour du grand prince ;
prise aassaut et pili^ par les alli^ et les
troupes d*Andre, sa puissance ne fait plus
que decroitre , 93 b ; saccagee par les Mon-
gols, io3 b.
Kirguises, parcoureiit avec leurs trou-
peaux toute la rive gauche de I'Oaral, ii
b ; Kirguises KaVssaks presque tous souinu a
la Ru&sie, leur principale richesse, leor
service k Tarmee, 61 n; divis^ eo trois
hordes, ib.
Kizin-Daria , riviere qui se jette dans ie
lac d*Aral , xa a.
Klaproth, orientaliste, fait partie d'ooe
ambassade russe, envoyee poorobtenirreD-
tl^ dans les l^taLs chioois, extrait den
relation, 417 b — 418 a.
Knout, etait, dans un certain cas, infli^
a Qir delaieur, 193 a (dans un autre, Taurait
cte k un professeur, 194 h, selon le plan
laisse par F^odor Alexeicvitch).
Kobentzel, ambassadeur d^Autnche pra
Jean IV, 145 b.
Kolyma , fleuve qui coule du sud au nord.
et se jette dans la nier Glaeiale, 10 a.
Koriaks, peuples dont le pays, (ilu^
entre le golfe d'Okhotsk et la mer Glacials,
est traverse par dcs fleuves presque toujours
charges de gla^ons , to a.
KoscinszKO, coounande un des corps de
Tarmee polonaise, ses succes, ses reven,
368 b — 377 b ; est rendu k la liberie par
Paul I***, 386 a.
Kostroma, sur le Volga, chef-lieu du
gouvemement de ce nom : agriculture in-
suffisaixte, supply par le commerce et Tio-
dustrie ; Etendue , population , 5o b.
Kouban , fleuve forme par les eaux du
Caucase et des alQuents nombreox; ^'
sonneux , mais pea profond , x4 b.
Koutchkovo, ancien nom de Hokou.
Koursk, chef-lieu du eouvemement oe
ce nom; beaux vergers; eteodue et popu-
lation , 5a a , b.
Kronstadt, sa population a iti eugeree;
port bicn fortifie , 44 a.
Kru^ener (madame de) veut aocomplir a
conversion du genre humain; avaitaononcf
la chute de Napoleon; s'etait cmparfe de
Tesprit d*Alexandre ; a pii faire nailre Tidce
de la sainte alliance, 494 a — 496 a.
Krusenstem (M.) sert de guide pour w
details et les cliif!res sur les diven ctabh^-
sements d'instrnction pnblique, 6a 5 b.
L
* Lacs salins , sur la rive gauche du Volga,
dans le gouvemement de Saratof, 58 a;
dans le pays des Kirguises . 6x b.
La Harpe , instituteur d*Alexandre T,
4t3 a; reponse affectueuse qu'il revolt dc
son eleve devenu tsar, 5a3 b.
COJSTENUES DANS LA RUSSIE.
667
Liine estimce pour sa fiaeue, dans Tile
Lapti, chaussure faite avec T^eoroe du
blkttl, 5o b.
lioa (le), un d«s plus grands fleofcs da
oord de (Aiie, d*uoe navigation difiUale ,
charrie preaqoe continueUement des glaces :
a foo einbouchare , sor ses bords et sur ceux
de queUnies-oos de tes affluents « ont et^
trouves des amas d'ossenents fossileSf pres-
qiK tons de mammouthi , lo b.
Lithuanien9,attdquent les princes russes,
leurs ancieiis maltres, gS a, reuporteot snr
eux de grands avanlages, 99 b, loo a; sont
repousses des provinces du nord, 10 1 b.
Litt^ture. — Auteurs qui ont fleuri sous
l^isabetb, 173 b.
Loupi (\ts) infeslent la rive droite seule-
ment de la Kama , xa b.
Luie de la conr, diminue par Catherine II
et par Alexandre I*, 38 b.
M
Bfahomel II, mis en fnite par'Genghis-
Kliao, 10 1 a.
Mahdies : oeHes qui attaquent le principe
de b generation sont tres-iuncstcs dans fes
reeioDs septentrionales , a3 b , 59 a ; maisons
ipedales etablies poor leur traitement,
J5i b.
Malo-Iaroslavetz, les Fhm^ y essuye-
mt un revers en 1813 . 5a a.
Blammootb, le squcHelte entier d'un de
m SDimaBX se Toit a Petersbourg; lieu 011
il a ete recnnlli , 10 a.
Mansietn, aide de camp de Munich, a
ham plusieurs extraits, 954 b, a55 a, a56
b,a59 1>« '^< ^* '^^ ^> ^^^ b, 371 a.
Mane-llierese condot un traite avec l^ti-
Mheth PetroToa, 269 b; m^ntente de
ravencnieQt de Catherine II, 387 a.
Marine rnsse. Probabilite de sa puissance
future, r b, 349 a; marine marchaude
niase pra considerable dans la Ba!ti(|ue, par
OTjetfs causes , 8 a , b ; marine nulitaire ,
airisee en trois escadres; bAtiments; armee
oarale, 4t a, b; chantiers de construction
pour les diverses mers , ib. ; une parlie de la
flotte stationne k Revel, 44 b; chantiers,
aftnai et amiraute h Kherson, 55 a ;
Pierre I* fonde une academie de marine ,
ai3b.
Marine, fille de Mnidiek, voievode de
Sandomir, epouse le iaux Dmitri, 164 b,
i;i b et suiv. ; s'attache k la fortune d*un
fecoad imposteur, qui est tue par un prince
liopj; les boyars la livrent au conseil de
Mqscou qui la fait garder ii vue, 178 a --
iS3 a ; eile promet sa main a Zaroutzki ,
^faef de Cosaques, qui est pris et empale ;
die meurt en prison, 184 b, i85 a.
Maroquin, fabriques renommees a Tor-
jok, 48 b.
Mazovie(voievodiede]. V. Varsovie, 65 b.
Medecins cantoonaux, leur nomination
est aoumise k un conseil de medecine , 39 a ;
lensetgnement de Tart de guerir mcrite
paiticaliereaient des eloges , 33 b.
4y Uvraison^ (Rcssib.) t. 11
Mcndicite, se montre a peine en Rus&ie,
39 a, rarement a Petersbomfg, 43 b.
Mentchikof, fait penelrer un renfort
dans Poltava , 3 1 3 a ; condamne a des retti-
tutions , 340 a ; il serl Catherine au momcat
de la mort de Pierre I**", a44 a; est tout*
puissant sous Catherine I"*, disgracie sons
Pierre U, meurt exile en Siberie, 249 a— ^
354 a.
Mer d'Aral. Norn donne par lea Rnises an
lac de oe nom. V. Aral.
Mer Baltiqne; frontiere natnrelle de la
Russie ; la navigation en est perilleoae ; dan-
ger auquel pent donner lieu le vent d'ouett
soufiQant longtcmps avee videaee sur eelte
mer, 7 b, 8 a. Set aetsuiv.; set eaiixpett
salee»; foumit rambre jann^; la aoarine
marchaude rnsse y est pen cotisidcrahle,
8 a ; littoral , sur plusaeors points, pittores-
que, 8 b. >
Mer Blanche, le pins grand des goHes
formes |>ar la raer Gladale , 9 a.
Mer Bleoe on mer d'Aral. T. Aral.
Mer Caspienne : eiroite , gen^lemenl
pen profonde et d*une navigation perilleuse;
est abondaroment people de poissons, de
phoques, d'oiseaux aquatiques, de san-
pliers ; les terrains sal^ qui Tentoorent et
les lacs sales qui y sont en tres-grand nombre
Sortent a croire pen ancienne T^poque du
essechement de ce snl , 6 a — 7b; junction
projetee de la Caspienne a la mer Noire, ib,
6a b; possibilite presume d*etablir une
voie navigable entre cette mer et le golfe
Persique , 63 b.
Mer Glaciale, son etendue; U mer
Blanche est un de ses golfes , 9 a.
Mer Noire, sujette a des temp^tes fre-
auentes, mais preseute un grand uomlire
e ports sAra ; Quelle etendue de ses cAtea
possede la Russie ,7b; projet de sa jonc-
tion avec la mer Caspienne , 63 b.
Mer dOkhotsk, golfe 06 so trouve la
petite ville de ce nom , 9 b.
4a
658
TABLE DES MATlEftES
Mer d'OiuidjT (oq golfe d') , ptu dn €9cle
poTafre, lo A.
Mer Saint«. V. Baikal (lac).
M^idien terrtttre : un de^ en a ele am-
sure sur les bords du iTorneo par des aca-
d^midens frau^iiis, 14 b, 45 b.
Messagete*, de quels peuplet modeniei
lis occupaient le territoire , 67 h.
Michel (XI74-CI76) afTemiit la puis*
4aAce de la Ville de Vladimir, 94 a» b,
Micbel Paleologue fait aTUanoe avec No-
l^i , chef de Tatars , xo6 a.
Michel Romanof (i6i3-i645), nommo
tsar par les etats , est sacre par le anitiopo-
lile de Katan ; ritablissement de I'ordre dans
radministratian ; il signe avec la Suede on
tniti de pallt (m^ux k la Rustie, aTanta-
fftmM, an comnieree dc F Angleterre ; si^^e de
Motooii par lea Poloaais qui sont fonxs de
aa rMlrer; le tsar acfa^e par des sacrifices
k liberti deson p^ qui est notnine patriar-
«ha»; aimvcAes boslilil^ cotilre la Pologne,
paix coDclue aux oondiiious de la tr^
nrMdaMei Mkhel ouvre atec la Perse e|
fa Chine des relations eoaunerelales; hustt
letn&neAaanfilaaliii, i85 b'-^ilt7 a.
Miobel Yaroslayitoh ( 1 3o4^i 3(9) obtieat ,
par I'auloiisalioB dn khan, le filre dm
^•nd prinoe niiqoel prtaMliiC ion neven
Oeoifes qui fut nomaM pnmoe de MoiaMi?
Michel aa rend anpris iPOsbeek; la Rnssle
aoolfre de son ahseoDe; Geesfea a^Mant d^
dare contse Michel a la 1^ des NoTgofo*
diens , Michel obtient oontre eux des avan^
tagea, nais ne« dufahlaa; Oaargna ^pmiae
la sceur du khan etBHvahe eontra Machel;
il est Mincu» U soeur du khan BMint , et tea
ennemis de Michel repandent le bruit qn'il
Ta empoisonnee : le khan permet aon sap»
plice, 10$ a — 109 b.
Mi^ostawski , auteur de THiatoire de k
revolution de Pologne, cite 5o3 a^ 5o4 b,
5t8 b, 553 a, b, 555 b, 559 a, 575 at
579 a, 584 a»b, 585 a, b, 58? b, 588 a,
b, 589 b, 590 b.
Mikhatiovitch (T. Alexandre Mik, 109
et Miv., et Alexis Mik, 187 et suiv.).
Mines des aonts Ourals, espace qu^eUes
oecttp<ait, Oo b; ben^ces rebdEs des ex*
Sloitations de m^taux divers, ib. ; residence
b Fadninistratlon gto^rala des mines de
rAthu, 60 a; quelqnes-unes dija exploit^es
daw les [troTinces caucasiennes , 63 b,
Miflislere^ divisi en sept dipaitemenu ;
de plus, deux ministeres pour la maison
impkriaie et lea apanages, un contr61dur
general , 27 a.
htitukf chcf4ieu du gouvemenient de ce
aomi agrieoltiins florisaaolei etploitstiou
des forto entravee par la diffieulli dei tnis-
porla , 56 a.
Mittau» chef-lieu du gouvernemeiri de
Gooriailde » date anei reoenife de Fineorpo-
ratka de I'ancien ducbi i hi Rusaie; sopo^
fidw, populalion, tet de TinduMrie, 45
Mohilef , s«r la Dnepr, ehef-Hea du gon-
venieiBettl de «e nan ; agriotthure florin*
sante , bois.de constnidion et de ebarpenie,
56 a.
Monnale d*argent et de cuivre, i quelle
i|p(M|ue «n usage dana k grand? pniaapaaie,
117 b.
Montagnes; eeBas du lud, auisi eleiees
que les Alpes, soilt remar^uables par da
ghiciers et k beauie de k vegelaLionj.lei
mbnts Alki et les monts Ourals n'atieigD»l
pas une tr^s-grande hauteur, 5 a, b; ill
torment , avec le numtCauoase, trok ofaaiaes
bien caracterlsees , 6 a«
BAomimeoU anli^^, ruined dans UTiA-
ride , 54 a.
Moreau , atteint d'un boolet frao^ais a l«
bataille da Dmde , 483 a.
Mortottval (fA,) , UUtoire de k caopifx
de Russie, cite 456 a , 460 a.
Moacou, chef-lieu du gouvcsveoieDl de
ce nom ; ancieo nom de oette ville, epoque
et origine de sa fondation, 90 b, 9a a; plus
grande et plus peuplee que Petersbouif i
46 b ; ^tendue de son commcroc, in«w-
menis, quartiers qui k coropo««*f ejaWtfj
sements; est devenue plus riche qua«»
I'incendie de i8x& ; etendue de ce (oaver-
nement, popuktion, 46 a — 47^* *f^
di^ par BAU , petil-fils de Genghis-KbaD .
lot b; saccagee par Tokhtamouia*, i}1
a ; construction de sa forteresse, la^a; »•
cendie fortuit, propaga par uo w««* JJj
ngan, i34 b; abandonnee par Jew ^
eUe est briklee en enticr, sauf le KreoiiB .
par les TVitars , i34 b-, incendiee aa m^
d^in combat entre ks Polonais el l» *"
sea, 184 a; d^lee par k P«^«»J*V'
335 a ; inoendife en i8ia , 470 • «* !f V„.
Moulons : k Russie d'Aaie en w«f *\ JT
sieurs races encore inconnues en fturor •
Mouture dtt grain, au moyen de we***
dej^^nit, 5o a. _ ..^i..«. teis
bottis do Dnkpr, meurl sans ^^'-^^
kisse ainsi Taroikf maitre de tput rempif.
84 b.
CONTENUES DANS hk RUSSIR.
G59
MstUaf (if 95- 1 ill), fib de Vladimir
Mouooiaque, prend le tilre de gra/id prioce*
se$ frcns aj^JUit cliaci(n leure apaoageA ; i}
repousst Itt Pobvtu au dela du Vo^a;
doone i son fils deux principaut^ enlev^ef
« des princes independaikU; (ail uoe expe*
dition en Lidmanie; a requ le nom de
Graaii f 88 a, b.
Mstislaf de Yolh^e (i 167-1 169) (fit ap>
pHe au ti'dne k Kief; de concert a?ec sea
lilies, it taiUe en pieces les Polovtsi, et
roiivre aux bitiments russes la navigatioo
du Doiepr; il donne pour gouvemeur auji
NoTgorodieos son fils Aoman, f|ui aitaque
les aHi^ d^Aodre , prince de Yiadimir ; oelui*
d anaque la Title de Kief, la prend, et,
apres Ta^olr Urr^ au pillage, fa donne a
100 frere Oleb; Ustislaf recouvre Kiefy
k pcnl da nOHvaau, «l weiirt a.Vladiaaiir,
g3 a, b,
IduaicL (le a^areabal), eite aSo b, ueiii*
bra du cooieil aoua Am IvanovBa, %S^ b
et sttiv.; arratii lora de la d/kb^ance d'Ana^
g^enie , 965 a ; p<Htrait qu*il fiidt dUiioabetb
troTna^ ib.; eondwrn k ^re ieartatt,
QB lui fait grAoe 4e la ^ie, %G6 « { pcfianil
k la cour aveQ Siren aous Pierre IR, %7%
b ; ve«t soiitenir Pierre oonliw Calbarina U,
a79b — aSx ai r«(Qit do Catbfrhie le cooh
mandemenl de d^vx provinoes t ^3 b*
Musiqua; le^ cbauia nati^oanx* suvtout
dans la Petite Ruaaie, aoiU atrraUes, et iea
Rusiea aoot beureuMUViat organiaea pour
oet art, 36 a, 43 a; troubaiUrars, tfoiH
ireres , inalrumaiiU de muai^iue at ebMMona
obec ks Skvett 7' ^9 7> ••
N
Narva « ^ia villa aaa^atiqua; balaiUa
9fBee |Mir dbarlea XU, 44 a; fondea par
phttieuri Daliooa 4i4 mtrd da rEiiropa,
loSb.
Nestor; aes anoalea out lourm diTeawi
dutioDa,69 a» b» 7oa> 7$ a* 77 b; d*upa
Tcradic douteuse^ 79 a, bi 4on ail^ace fiir
dti-icpt annees du ragna de Yladiour, S» b;
fio de la auaalea (1093) , 87 b.
Neva da), fleuve 4|ui joint le lac Oiwga
au golfe ^ Finlande, m pas#aQt k Piterfrn
boorg, 13 a.
New4j (Y. Alexandre Nawakv).
Nicolas I" (iSaS) Cait suapeadra Hn aer*
rife dirin ail re^ de la nouvelja de la morl
d^Alexaodre, at prie FarcbiaMmdiiii^ d*y
preparer rimperatrioe merot 5a 1 b; est di*
tipe beritier du tir6ne |par im manifeak
d'Alexaadre, $3a a; repnine uyaa eqi^uni-
tioo Uea^eodue* orgaoisee par daa assofi»<
tlons secreies, 5^9 b — 53o ^\ canpagM
briOaate oontre les PertaiUf acquisition par
b aotfie de deui provinoes; qlauias 4»
^te de Tourkmantcbait 536 b — 54a a ;
b pierre est declares a la Porte; ciution da
pliHieurs passages de cette declaraMoBt 540
a — 544 a; preaaiere caippagne; Yaroa se
1^ aai Knsaes ; ep 1 8a8 , nquvaaux suceea
^ Pittkevitdi, qui emporte Akbaluik de
^ve farce et se rend maitre de pUiaiaura
>«tres yilles ; U Qotte torque est delruile par
liBe escadrille rusae; VAulncbe <eute imiti-
leneot d'engager d*autres pgissanfes contna
b Rquie, 544 a — S48 b; en 1839, avan-
^ renportes svr les Turcs par pi^itscb;
^ Roases passeot ks monU Balkans , en-
^it dana Andrinqplei nouvellca vicloirea
^ Pa^eritch, prise d*£rzerouni, puis da
1; la aaarebe sur *Mb<zonde est ar-
iMe jaar k sigaataire da k pais d'Andrino-
pk; u orgamaa ene expMition eontre ks
peupkdea au aord dv Gavcase, 548 b —
S49 a ; paples eensid^raMea des Ruses dans
eette ea^peyie; eonditiona dv trait^ d*An-
drinopk; reavliaca de tonlea ees vktoires
pour k Ruaak, S49 a — 55' a ; r^Yoturion
de juilkt ea France; «'est point k cause de
VinamreolMNi de Yanone; rintentkii dn
tsar de maicber aur k n^nee en pr^lpite
k pKiater ^oavaoieBt ; Constanlin eebappe
aax aisaillaalSy parrient a adresser sHr ces
avenemeBla mi npport k Nicolas et au rot
de Hwe; CbkpicKi eat prockroi ^n^l
e« iAmC ; difikantes dimarabes de Gonatan*
lio , auqHal Chkpidu kisse effeeluer sa re-
U«ile, 653 a --- 556 b; il fail fenaaer ks
4obs; Lobecki eat ehargi des n^odatiena
avoe Nioeka; Cblopioki ae borne a k qna-
lile de diotateur; il eal aaaisli dHuie delega-
tion de anrveillanoe et d*wie oeamiasien
eaiiciitive; effeetif des troiipca rtenies par
ka Polonais; BOBibre probabk des troupes
ruasea ; Nicolaa rcjette toutc prppovtion dea
ambasaadeura: anotils divan qui lienaenl
dans riaaction trok des prineipaks p«i»-
sanees dfi TEucope; prockasation da prioee
Caartoryabi an peupk poloaaist k prince
Radaiwil est noaame general en ebaf » r4gle-
inuita iaterietira par k aeoat; meaaces du
general ];ii^H|acb; tioU legions sent oriees
pour les traMiugea dea proikoaa devekes k
k PvuMe et i rAutnabe, i56b — 563 b;
ks Polouaia etabUaMnt iia quintuaaTirai ;
cspinbats Uvras a Dobi^, a Okunicw; ba-
tailk de Waerer; Cblopicki est bksse; be-
UiUe de GrgcUow} q^M4qiic8 nvasilagea ika
42.
660
TABLE DES MATltRES
Volonais sous Dwernicki ; Sknynecki oomrae
generaliasime; avantages des Polooais; ba-
taille dlganti, dans laquelle Prondzynaki
deploie aes talents miUtaires; insurrection
partielle de la Samogitie, puis des Lithua-
niensi rkluite k hi guerre de partisans,
56a b— 57t b; effotts partiels et inutiles
des habitants de la Tolbvnie, de h Podoiie
<t de rUkrmine; combat devant Minsk, son-
tenn par rarriere-garde polonaise; ^hecs
essuyes par la droite des Polonais; bataille
d*Ostrolenka; le eineral Gielgud, apres des
Severs et son retus de donner des ordres,
est tne pat son aide de camp; Chlapowski
se rtfugie au milieu des autorites prassien-
nes; Dembinski ne ramene k Praga que des
debris ; position de la France , de T Angle-
, terre» de la Prusse et de TAulriche, $71 b
— 577 a ; mort de Diebitsch etpeu apres du
crand-duc Gonstantin; Paskevitscb est mis
a la t^te de Tarmfe nisse ; le people de Var-
aovie se crolt trahi » d'anres Tevasion d*un
corps d'amiee russe et la revelation d^un
complot dans Varsovie; la dtete fait paniitre
line prodamalioB qm orJonne aux Poloiiais
la levfe en masse, 577 a— > 579 a; la Prusae
aeconde la Rua&ie; Sknynecki , somm^ par
la diete de oomparaitre dans un conseil de
guerre, renie toute responsabiUte des ev^
Dements, oependatit il conserve son poste;
incertitude ^armi les Polonais sur le cbotx
de leur general; decret rendu par la diete
sur la nomination et les attributions du ge-
neraliasime; menrtre de plusieurs prisou-
niers dans une emeule populaire; Kniko-
wiedci la fait cesser; il est nomm^ gouver-
neur de Varsovie; Skrzynecki abandonne
Tarmee et phis tard se r^fugie en Autriche ,
579 a — 5S6 a ; abdication des membivs du
quintumvirat; Krukowiecki est nomra6 pre-
sident du conseit des ministrss; Paskevitsch
propose un aooommedemeBt; refiis par le
conseil dea ministres et par la diete; ba-
taille et capitulation de Tarsovie ; le reste
des troupes polonaises depose les armes;
considerations aur les suites de ces evene-
ments, 5S6 a — 591 a; efforts de la Russie
pour soiunettre les peuplades du Gaucese ;
d^ails sur ces eontrees et ieurs habitants ,
591 a — 596 b; marche du pacha d*£^ie
aiT^l^ par les troupes nisses; conditions
du traite d'Unkiar Skelesai aocorde en re-
compense par la Turquie; reOexions de-
s rauteur sur les mesures k opposer au dan-
ger, 596 b— 698 b; ^venements en Grece
denuis 1770 jusqu*& rinstaHaiion du roi
Ouion; mesures administratives, syoode
Jndepeodant, inAucnce de b Russie dans
tons ces niouvement« , 599 a — 611 b , rs-
pOBse de Tempereur Nicolas a la dedarttion
d'un ministre en France sur h natioBalite
polonaise; son discours en x835 a la depu-
tation de Varsovie, 6xs a — 6i3 a; lawi-
feste public CB x836 sur la confiscalioD, jpsr
la Russie, du navire anglais le FixeH, oi3
a — 616 a ; les Cosaques du Don n^veat
une nouvelle constitution; quelle eiait leor
organisation anteneure, 616 a — 6x7 a; Mir
le tarif commercial de la Russie et aes rap-
ports avec celui de TAn^leterre; oamco
du d^veloppement successif de la pnissaaoe
russe; quelle baniere on peut lui opposer,
617 a — 6a5 a ; renseignements sur U ten-
dance de renseignement public^ les uuifer-
sites, les ecoles, les facultes, la ceosore,
Tobservatoire central a Saint-Petenboifff ,
les ecoles diverses nour les services publics,
les institutions de bienfaisance, lesmaiiou
des enfants tronves, les colonies etitugeres,
Teducation des jeunes Tatars, la popniatioti
qui professe Pislamisme, la popalatioa
juive; nombre totd des fleves, somma
foumies par le gouvemement, 6a5 a ^6)9
a; but tnoertain dea vovages de rempereor
Nicolas, de sa visite iBemadotte; sa po-
sition , son caractere , 639 a , 640 a , b.
Nijni-Novgorod , ciief-lieu du gouveroe-
ment de oe nom , au confluent du Volga H
de roka ; foire considerable en ete ; mano-
fectures, commerce aclif ; pomiaes estimefs,
dont quelques especes encore infonow^
dans le reste de TEurope ; ^tendoe , popu'
hrtion , 5i a ; son fondateur, 9S b.
Nikon, metropolitain de Novgorod et^*
triarcfae, cabne les Novgorodieos levoiiai
187 a ; a compost la premiere histoire que
Ton ait de la Russie; austerity de la vie, s«
travaux eccl^astiques , sa cniaute coiitre les
noa-confbrmistes , 189 a — x9da.
Noblesse, a perdn une graiide psrlie de
son influence ; divis^ en qnatotre classtf •
parmi lesqueQes il y a distinction, 29 "'
3o a ; le noble a an fond les memes de&ots
et les m^mes quality que le serf, 33 a, b.
— Plusieurs maisons d'Muoation oat ete
fondees par les tsars et les iraperatrices pouj
des filles nobles, 34 a; a Moscou, un fraud
nombre de gentilsbommes cedent a Tattnit
do jen, de la table, ou k la manie des d>^
vaux, 47 a; a (pelte cpoque comment*
iHisage des armoiries , 192 b.
Nogai, clief latar, donne son noai i une
partie de ces peoples , xo6 a; rend k Dmi-
tri sa couronne pour prix de sa soomissiont
107 b; accompapo^ de Telebouga et d^
princes de Galiae, il marche eootre k>
CONTraUES DANS LA WJBSSE.
66t
HHiyras; la faim et la maladie aocableat
Panaee «les Tatars; deux ans plus tard, la
dtMiiSo»deccsd«ix dialii sanfe la Mogne,
loaik
Novgorod , cbeMien do gouvcmemeiit de
oe BOB, aqieet jnttoresqna; baigiwe par le
Yolckliof , qui joini les lacs Ilmen .et La-
daga; svpcricie, popnlatioB ; aiiues de fer,
decoivre, deploaibetde<liarboDdfttienre,
49 a; par qui folidte, vers quelle ^poque,
69 b ; secoue le joag* des aottverams de
ILief, 89. a; ravaeee par la feoiine, 97 b;
oi proie k TaDarcbie et & des ileaui de toute
espeee , io( b ; Buse i fen et i sang par let
Mongols, Z08 a.
o
Ob, fleuve de FAsie septentrionale , oours
da sad au nord, irers un golfe de la mer
6lactale» est forme par la jonction de la
Kia et de la Katounia , x i b.
Obdisque de Poltava, sorti des fonderies
de Petrozavodak , 49 b.
Ocean oriental : une partie en est com-
prise dans Tempire niase, 9 b.
Odessa, situee entre le Dniepr et le
Dniestr, i5 b; sa prosperity, sa population,
4u a , b.
OEsd, lie qpii, avec pluaieurs autres,
forme on district separ^ , 45 a.
Oginski (le comte) ae rend sans sncees
aupres de Catherine 11, dont il esp^ait
fappai pour arriver an tr6ne de Pologne,
Oka, grande riviere dlBorope; se jetle
dans le Tolga , i? b ; i sa jonction est Mtie
Ni)ni-Novgorod , 5i a, 98 b.
Okhotsk , province de la Sib^e ; orga-
nisalioD pss encore arrit^e , 60 b.
Okkvate, lac traverse par la Dvina occi-
deatale, 14 a.
Okfai, fils ain4 de Genghb-Khan, envoie
son oeveu Biti ravager une partie de la
Rnssie, xoi a — to3 a ; ses conquites de-
vastatrioes, sa domination et celle de »e$
niceeasears, ib. — 124 b.
Olbiopolls , vMle aocienne , reconnue par
(les medailles et quelques mines , x5 b.
Oleg, regent de I'empire russe en 879,
i'enpare & Kief par Tassassinat de sea
princes; diminue la puissance des Khozars,
ctcod sa domination , et va attaquer Cons-
taDtiaopde : Tempereur Leon le Philosophe
Tebigne an mojen d*an traite; ces avantages
iai ibnt donner par le peuple de Kief le
Bom de magicieo ,75 a — 76 b.
Oleoek, flenve oui coule du and au nord
ven la mer Glaeiale ; le coura u'en est pas
coticrement connu , i o a , b.
Olga, veuve dlgor, venge cruellement la
nort de oet empereur. Voy. Sviatoslaf ,
77 b.
Oloneix (gouvemement d'\ V, Petroza-
vodsk. — (ville d'), situ^ sur las deux ri-
vieres Olonka, M^^ga, 49 b.
Omsk, province la plus m^ridionale de
la Sib^ie, est propre k la culture, 60 b.
Onadyr, le plus oriental des courants qui
traversent le pays des Koriaks, vers la mer
Glaeiale , lo a.
Onffres (aujourd*bui Hongrois) ; leur ori-r
gina, leurs migrations, 6H a ; traversent les
Etats d'Olcc et s*emparent de plusieors pro-
vinces, 7& 0; s'etabuasent dans la Pannunia^
76 b; font alliance avec Vladimirko, 89 b»
Onone, riviere qui, avec Flngoda, forme
la Chilka, xo a.
Or, sur le versant oriental des monta Ou-
rals, 57 a; dans les mines de Kolivyi, 60 a;
un peu dans le Caucase, 6a b,
Ordres, distinctions individuellea, deoo*
rations temporaires; quelques ordres ilablia
pour les dames, 37 b, 38 a,
Orel , sur TOka , chef-lieu du gouveme-
ment de ce nom; sol tres-fertile , for£ta,
mines de fer, etendue , population , 5a a. .
Orlof , tresorier de I'artiilerie , sert puis*
saroment k re:iecution du complot qui placa
Catherine II sur le tr6ne, a76 a et suiv«
(V. Catherine II, jusqu'a la p. 35 x a).
Orphelins (les), les aveugles, les sourda
et muets sont recueillis dans des etablisse*
ments bien ordonn^s, 34 a, b.
Oufa , chef-lieu du gouvernement d*Oren*
bourg, qui a conserve le nom de cette der-
niere ville, sa premiere capitate, et remar-
qnable par la £oire qui sV lient; terrains
sales ; arbres recueillis par l*Europe; ptebe*
ries de TOural tr^-productives, 58 a, b*
Oural , fleuve qui se jette dans la mer
Caspienne; les Bascbkirs et lea Kirgniaea
habitent ses deux rives ; poisson et amai*
eslimes, xa b, x3 a.
Ourals (moots), situ^ entre I'Europe el
FAsie (V. Montagues) ; terminent a l^uest
le bassin de rob, xx b; pourquoi a et»
cbang^ leur auden nom Poias, 341 b.
Ovide , a point fidilement le lieu de sou
cxil, 16 b.
W2
TttU£ MS KATIfiae
PadM i'ia^ (k) eii f/mn cootre k
Porte , est airki per U &iiMie> ^ b.
Balttko (le oomte) dirige la tompintHNi
,Miu laqucUe suoooinbe 1^ I*', 39i b —
409 b.
Puuu , |»asM en Suede plusieim eiuite
comme miDistre niase , 276 a ; il accede au
fomplot pour TeleTation de»CatheriDe II|
ib. ; vonlait attendre au lendeoiaiB, 377 b;
8*emploie neanuioius daqs rexeeuCion,
178 D ; eftt kiutDin& ministre de Catherine II,
9S9 b; se nresenle tremblant devant elle au
moment i*uut revoke, aS8 b (V. easuite
Oitherfne It, juaqti'i la p. 35 1 a.).
PatSieVitch , tail contre lei Fenans una
ttttipagne Mflante ; mis en parallele avec
Souvorof, 537 a,b; commande en chef
datts la demiefe caunpague contre Vaitovie,
$78 a — 590 b.
^Ul t*^ (k 796- X 80 1) , regie par uo ouLa«e
fordre de sticcession au tr6Be, a5 (Y. hi
ttote); pfend plusieurs mesurei contrairel
4 timn de Citnerine H; fait transporter so-
fennellement le corps de son pere avec celui
4}^ VhltpiSratiice k c6t£ de k sepulture des
tktt; se fatt couronner k Moscou, ses hi-
zarreries souvent cruelles , prohibitions om-
bra^uses, saillies de generosile; il entre
datais la sei^nde coalition ; accorde k Seuvo-
rof de hautes distinctions pour ses premiers
snctf^ ; eatnpagnes de ce capitaine en Suisse
et en iralie , 385 a — 3^6 b ; Paul roropt
viol<Mini^t avec TAngleterre, envoie une
ambassade au premier consul ; consentait k
partager avec iiri la souverainet^ de TEu-
rope; les soup^ns, les rigueurs de Paul,
raganhSs comoie une des causes de sa mort
violente ; exposi de trois relations sur cet
^vftnement; §inour violent de Paul pour
Anna Petrovna ; il le surmonte et lui fait
^t^ser le prince auquel elle se destinait ,
396 b — 410 a.
Pbcbe: tris-diondante dans k Kama et
VOkn ; bien moindre sur k Baltiqiie, xa b,
t3 a ; Ires- productive dans le lac Peipous ,
48 a ; pdcheurk d'Afkhangel , vont dans les
merk fiolaires , 56 a; pteheries de TOural,
Im plus productives de tootes ceUes de la
&dSsie,t3B, 58 b.
Peine de mort remplac^ par des amendes
|l£ciiiiiaires, sons le regne aTsiaslaf , 86 b.
Peiuture , Peintres. An chitean de Mon-
Maisir est tine belle collection de tableaux ,
41 b.
Peinom , kc cpii communique litec celui
de PsLof i p^e tres -productive, 48 a.
. Vmmt Jirf lian 4m gamwwimwl <k ee
Dom , Yilk de eommeree et de kbsaqjdes ;
«gri€ullive floriasaHto* S^ Ik
PenB« cbe(-lieii dn gouniBewnit «k «e
aora; fiehesaei aHnMes^ aaliiMi d*uii
mad prodnift; «iM voie naTiyhk pona
itre ouTerte k travers let montagnes ; cette
▼ilk est sur k route de P^enbourg a k
Chine par k Sibkie , S7 a , b.
Perse (k) Mye k k Ruanev«a x6a8,
une forte coatribtttion apres une oaropagne
desastreuse , et signe le traite de Tourkmaat-
cbai ; articles principalUL de oe traite « 53? a
— 640 a f V. les regnes precedents, et anr-
tout Pierre I*' , Cathcriae II » Alcxaiidre P',
Nicolas I*'.)
Peste , fait eprou ver aux Russes de grandcs
pertes dana k campagne d^Orient en 1899,
540 a, h.
Peste nohe (la) detok TAsk et rEurope,
xi4a.
guerres , kar extermination presque toCak
|iar Taroi^f , 77 a — 85 a; repousses en*
core par 'Vladuair Mouomaque « 87 b.
Petile-Kussk , etendue , moeurs , dialccle ,
miLsique et chants nationaux; natundisatiaa
possible de certains arbres fruitiers, phi-
sienrs vilks remarqaables, 5a a — S3 b.
Petrole : abonde dans quelqaes iles de la
mer Caspienne ; sO trouve en Sibcrie daus
les regions mantagneuseat to a.
Petrozavodsk, poit et ch^-hen du gou-
veroement d'CAonetz; usines eiablies par
Pierre le Grand pour Tartillerie et k ma-
rine, 1 3 b, 49b; miaeralogia variee, ib.;
etendue, population ; pen de grains; Ixelafl,
poisson , gibier aboudauls, ib.
Peuples dndens qui a*^ient point Scy-
thes; leurs demeures dans diverses parties
de la Kussie, 67 a, b, 68 a; 6yb, 70 a;
leurs migrations 9 etabUssements, ib. V.
Skves.
Pierre 1**" et Ivan V Aleitieievitch (i68a-
1^27). L*election de Pierre k fexcluaioa
divan est confirmee park couaeil des boy an
et le clerge; sur un faux bruit ks Streieli
se portent a de crueb exces, et deckrent
tsars Ivan et Pierre, sous la tutelle de So-
phk; le nouveau dhef des streletz est mis a
mort avec son fils par k eour; les strelelz,
sdr k point de se r^olter, se soumetteai ,
et les plus mutias sont mis a mort; Sophie
conQe Tadministration a Galitzin; traili*
CONTEEIUBS DAM tA ROSSIE.
I*4lliiiiee eatre k* tarn de JMowmi, do
Tieiiae^ de YanorM «C Ycbim; le Pnin9Bis
Lefort ioipira k Fierre k deiir de refoniMr
rngaaitatiMi militaire ; etudes , eierciees ,
dnrwliaMBc&tt da jenne ts«r; Galitfiti
Domme Mazeppa hetman dee GoMM^oee,
onoie en Fkwne use aaabetsade qui est
ant eflct; Pierre s'empere du pcmoir,
oile OaiatEia el pout le ehef des etieielE
«t Mi coopliees; il ipvM Eiuiefw La*
pMkiiiii, «t CB a « ok, AJeziB;qualMi
phyiMfmi el OMfelef de«'Pieire, 196 a<^
199 b; M Uit ndoofaer sne vieille chakaye
dt eoMtmetieo auglaiae, poii eoiistrowe
deoK fre^alet ffufii sonie rnnawnff pMote;
kit dcAenniaer eiee Fenperedr de k Gkiae
ki liaiiles dci deu emnnit ; il eeiMme daw
le aege d'Aaef ; eiort olvaa; priae d^Acof^
199 b — eoi a; r^adiation (rEadoxie La^
feokbiii, ac8 a, as^ b; punitioD rifDU*
ittue d*un voievode eeafpirafeur; d^MOt
pour ton preauer ▼oyage , aejonr k AoMtefs^
nai, pttii en ^tikgede Sardam , eotoie utt
Moran de troupes k rcbeteor de fiaaei
piSK en AfigkieffrB , s'y attache Peni el
ttrfjumif retoanw en HeBande d*OB il eife
voie aae celonie k Arklian^; passe k
Ticnoe; leioanie a Moseou pour puiur ka
strdeu levolUs ; rebeUi ons egaleasent pu*
Bits daui ffuelqitts provinces eloignees;
Vmn ammemet dlverses refonnes , entra
Maai|a^fioiitreChaiitsXH, eatbatta,
cavoie des troupes en Pologne, obtieot
Vwlquesaiantages, aoi a — 209 a; prise
"f Usrkoboavg; Catherine, jeane livo«
lunas, se irouTe panai ks prisonniers;
*«nicesftte rend k ilolle russe; le Isar
paise da rang de lieatenanl a oelui de capi-
■'iae, pttk re^t fordre de Saint-Andre ;
Cbariies a toujoan I'avantage en Pologne ;
feadatka de P^ersbourg; a k prise de
])orpat, Pierre r^prime nokmoMBt k fu*
nvrdusoldat TaiiH|ueur; decbeanre d'Aii-
goik, ^kclion de Slanisks Leoendu, se-
ditioQ dans Astrakhan , punicion das plus
Gsopables; Auguate eenchit up traiti^ bon-
teu aree Ghacka ^ se revise k rouver^
hve d^un aceoBBmodement arec Pierre;
(^ktfks s'enfonoe dans TUkraine , Pierre bal
«a nalort ^m lui arrivail , Tattaque k IM-
ia«a, el vempone k vidoire , 209 a — %ii a ;
le trone de Pologne eat dde k Auguste ,
fMmpe irionflMik k Moseou; soumission
<k k livonie; k Turquie lui dMare la
Ifaene ; Pieere organise an senat'de regenoe ^
•hnreCathiyineau rang detsarine; enfenne
(w Tanaie turque , il eede aux conseik de
CailieriM el sigae aa iraite awe Meh^
met; rand eniti A»f ; recrate sen annte;
fait ^poaaor k tpm fik nne bcAe-soeaf de
rempeffetarClhaflaayi; etiebre aokanelle-
ncut k Pftlanhewg son union avec Cathe-
rine ; y preaaa le$ Irtivaux; poiirauk ka hos^
tililes eenire k SaMe, enf«ie un renfoit k
aes allies; sa telle mt^rt I'expedilion de
171$; one loi assnjeltil tons k$ boyara a la
i^larite du recratement, ax4 a — eao b;
"nclaire navale d^Angoat, Pierre se jette
dans ime chaloapaet aauve aa Hotte par son
sBisepiditi ; son dlsooars aprk k eeranonk
de Teairee Irioa^ialddea vainqaeora ; Cher-
ka Xn revkrai en Mide el transperte k
theAlM de k guenv en Nonrftge ; an fib
nak k Akxkf eao b ie4 -^ ai seeoad ^yaee.
de Pierre par k Pruiae , k IVaHande el 11'
Fhuiee oft il est nonuae meaAre de i*Aea^
demk; son esckmalion au tombeau de Ri-
chelieu ; H enire dans lea pNi^ls de Goeriz,
revknt dans aes l^ls pnnr reprimer ks in-«
earrions des Tatars el lea exactions de qua)-
qufa>uaa de ses bnotu ; Moeation de son
ms Akxk , eaaacs dlainiilie enire k tsnr et
hit, ^eaaiaa d*Akxk ; rameaft 4 Aleacou , il
f est jagi et condamne k merl; tibnoignage
de Bruce sur ses demien momeiils ; ex^-
lions uorobreuses pendant Tinstraolien du
pm^,£ttdoKie iageH^, aHa— a36a;
Pierre ordonne qn'on inforae conlre
Bienlchikof el plosiears grands nour aiono*
pok des fouroitnres de reut ; il k defend et
obtieiil sa gr&oe ; il continue de kire des
MaUissemenls miles, et suit spn pkn de
rtforme, faaalisnie des raskoli^ qui sV
opposeni; Pierre expliqm d'une Aanieni
iranhk k mirack d^nne image qoi fleure
sur ks naax futon de Pifttenbourg , te anx
aerlesiasliques le droit de vk et de merl ,
a36 a — a37 b ; mai^ les dkpoaitioos hos-
tiles de plnsieurs pniasanoes , la flotle russa
deaesle les cAtes de k 8uMe, et k reduil k
•signer k paix deHeustadt; k tilre d'eaipe*
reur lui est decern^ par teules ka puis*
sanoes; il aboKl k digniii de patriarche,
son d^aespoir de k Aorl da xkniier fiU de
Catherine , 9)9 b — a38 b ; il institue one
nobleaae aaililnm; il profile dca dissensions
de la Penie , et, pour ven^k men de plu-
aieafs marcbuids msaes, il entre dans Der-
hent, KvieatpromptemeBti Moacou; pins ,
en vertu d*un Inite , rtenit k aes titals Bakfao ,
Derbent el Irou pravinoes; il prot^ le
jeune due de Hoktein aaqnel il destine sa
fitte Anne , a38 b *^ a4iO a; afkiblissenienC
de sasante, courooneroent de Cailierine;
il deoouvte son intrigue avec Hoeos qui ,
sous une autre accusation , est condamne a
6IM
TABLB 0ES MATI^RES
fienlre la iHet Mn exiciition 60 pr^Miioe
dc Catherine ; Piore echappe avec peine a
nne maladie boiileuie atlnmi^e k la fougiie
de Mi passions; il reprend sa vie active,
a*elanoe k la mer et sauve plusieors bommes
«*B danger de perir , renouveUement de ses
iouleurs , la paralysie lui permet seulement
de treoer auelqueB mots a peine lisibles , il
expire apres une cnielle agonte , a4o a —
a43 b ; dascussion sur ces moia du testament
en ce qui pouvait interesser Catberine et
Mentchikot; Yioes et verius de Pierre; ju-
gemenls divers sur ses tilres au nom de
Grand i expose de qiielques articles du plan
qu'il avail eon^u pour ragrandissement de
Tempire; ses travaux comoK: legislateur;
'quelc|ues-unes de ses reponses ou de ses ac-
tions dans diverses circonstances, a43 b —
Pierre n , Alexei^vilcfa , succMe k Catbe-
rine I'* » rappelle de Texil Eudoxie , sa mere ;
Mfentchikoi fait celebrer les fian^ailles de
sa fille oadetle avec le jeune tsar; deux ac-
tions tero^raires caiisent sa disgrlce , sa con-
damnation, son exil; le tsar est couronne k
Mosoou ; la Eamille Dolgorouki devient toute>
puissante; Pierre meurt k seize ans , aSa b
--a54b; le conseil proclame imperatrice
une des filles d*Tvan , la duchesse de C<our-
hinde, veuve; et deminde qn*elle signe
pluiieurs articles secrets; elle signe et se
rend a Moscou , a54 b -— a55 b ( V. Anne
Ivanovna).
Pierre III { t762), au moment ni^nn* de
la mort d*^isabelb se fait saluer fsar par les
gardes; rappel de Munich et de Btren;
Pierre indispose les esprils par sou admira-
tion outrce pour le roi de Pnisse, Frede-
ric II , et par la reunion a la couronne de
toules les richesses du clerge ; il se tivre a
des orgies ; laisse ciKuler le bruit de la ri-
pudialioii de Catherine , fait dans ce sens
quelques demarches ; Catberine et ses par-
tisaus gagneni les troupes et Tobligent a si-
|;uer une renonciation au tr6ne ; pen apres
il est eirangle, a7a a -~ a8a b. (T. Cathe-
rine II.)
Pierres k moellous , et , en general , pieires
pour la biitisse, sent rares , 19 a , b.
Pin (le) , cembro, rroit sur la rive gaurlie
seulement de la Kama, fab; serait pour
qous une ac^isilion importante ,17b.
Plan Carpin , moine (ranciscain, son am-
faassade vers le khan des Tatars; son
voyage contient des renseignements interes-
sanls , 104 b.
Platine , sur le versant oriental desmonis
Ouials , 67 a.
Podolie. Y. Kamenelx Podnlski , 56 a , b.
Po^sie : poeme remarqoable par le sujet
et parson andennete, tai b.
Police , se fait avec une prodigiense ac-
tivite, 19 a; sa vigilaaoe a Saint - Peiers-
boorg, 43 a.
Pologne (royaume de) , d*apres sa consti-
tution en grand-duefae par Napoleon; su-
perfide que la conqoMe de oe pays ajoiite
a Tempire russe; erreurs de son adnaijus-
tration; sa constitution avant i83i, ooa-
cession de Tempereur Alexandre ; aiatnt or-
ganique donne apres les evenements de z83i
par Pempereur Nicolas, 63 a — 65 a ; nons
des voi^odies qui correspondent anx gou-
vememenis dans le resle de rcmpire, 65
a, b; engine do mot PtUaniems qui a forme
oelui de Pelonais , 69 a , b ; ont ravage Totv
eidentde la Russie, 9a b ; la Pologne a ele
bien affiiibUe par la defection des Gosaqoes
de rukraine, r88 a, b; histoire des trois
demembrements, depuis 1773(337, b)jus>
qu'i 1 796(V. Catherine II, 984 b— 378 b.),
position de la Pologne. lors de rinvasion de
Napo16on dans la Russie , 454 b — 455 a ,
il donne aux Polonais quelques esperanoes;
456 a ; Alexandre I" se renid k Varsovie el
donne a la Pologne un gouvemement cons-
titutionnel , 497 b — 499 a ; les assodatioos
secretes s*y propagent , 5oa b — 5o4 b ; eve-
iiemenls de i83i (Y. Nicolas I"); discours
de Nicolas V^ a la deputation de Vanovie
en i835, 6iaa — 6i3a.
Polovtsi, peiiples qui s*emparent d'oee
partic des cotes de la mer Noire, et fondeiit
sur la Russie, 85 b, 86 a; massacrent Ro-
man Sviatoslavich qui les avait pris a sa
solde , ib. ; prufitent d'une famine et d*iine
peste pour exercer leurs brigandages; lail-
lent en pieces une armee nisse, 86 b , 87 a :
soiit appeles par des pnnces russes romme
auxiliaires, S7 a; sont vaioeus par les
Russes, ib. ; re|M>usses par les tils de Tb-
dimir Monomaque, 87 b, et iiar Mstislof
au dela du Volga, 88 a; leurs knaos, oockt
de Sviatoslaf, se joignent k lui, 90 b;ausi-
liaires du prince de Tchernigof, 91 b; rhas-
ses au dela des frontieres par Rostislaf , ils
reparaissent avec Ysiaslaf, 9a b; les Russes
p^netrent dans leurs terres, 93 a ; sont tall-
ies en nieces par le prince de Kief el ses
allies , ib.; joints a Ysevolod III, ils entreol
avec lui danif le pays des Bulgares , 95 a ;
sont repousses de la Tbrace, dnasteot
Kief,ib. ,b; gardent pendant Irois ans le
prmcc Dmitri, leiir prisonnter, 97s; se
joignent a Mstislaf et a Daniel centre lei
Hongroi^ et les Polonais , 99 a ; pounutvii
CONTENUES DANS LA RUSSIE.
865
ftr les Moogob, le refugient duu Kief,
pfaat de Douveiu deraot eux, lox a; BAli,
ebef des Talart , tennine tes Mogkuites ex-
conioiis eo se retirant daus leiir pays, f o3 a ;
il la soumet , il>.
Boliava , chef-lieu da ^oaveroeiQent de ce
iioiB» mooumeat elere a Pierre I'', 53
a, b; population mojenne, 5% b ; victoire
de Pierre I'', ai3 a.
PMnme de terre. Elle a deja franchi It
6o* depe de latitude , 4 a , b ; So a.
PDBiatowski, favori de la grande«dn«
cbese qui fut Galberine 11 , 170 b ; clu roi
de Folo^ , 3oi a (Y. Catlierine II • jusqu a
b p. 37$ b.>
Pooti ft cbauiieeB, administration icpa-
we, a7 b.
Popalatioa. Treize nations composent
eeife de la partie coniiiientale ; noms et
priadpam traits de lous ces peuples, cva-
iution du total , classes diverses; affrancbis-
icoent dcs serfs , ao a — aS b ; quel nom-
bre die peut atteindre ,4b; tableau drs
quatre principales classes , 29 b — Sab;
pourauoi elle est motndre dans la Russia
meriaionale one dans le nord , 53 b , 54 a;
celle de la Siberie , 58 b , Sg a; population
professant Tislanisme dans la Russie d'Eu-
rope, 638 b; population juiTe, ib.
Polemkin (V. Catberme II, 343 a —
356 b.).
Poiidre a canon, sou introduction en
Aussie , 117b.
Pougaldief, sous le nom de Pierre III,
ifounc <iu fit a rttordrt a Catherine II ,
339 b-- 341 b.
pKkof, chef -lieu du gouvememcnl de
ce nom, bdtie au confluent de drux n-,
tieres , dont Tune , au nioyen des lars de
PsLof, Pei|)ou5, et d'uue scconde n\icre,
communique avcc le golfe de Finlande ,48a;
Liendne et population ; richesse principalc ;
bois de coustnicljon , iJ).
R
labbe, Ifistoire d'Alexandre, dte p. S98
sctniv,, 4i6b,4ai a,4aaa, 4^4 •• 4«5
b»4«6b, 43o b,43x b, 436 b, 45i b,
496 b, 499 a, 5o9 b, 5i3 a, b, 5c8b.
Hano (Stenko-) , Cosaque du Don , oe-
ieb« par ses brigandages, est eaecule a
Monott, 190 a — 191 a.
iteotti/ dt fikcu officUUes , {Mr Schoefl,
veofcnw k preuve (Tune intdligeace for-
aiefle eolie njasieun cabinets en i8i3 , 48a
a; die sou p. 485 b, 486 a.
Reuie (le) fdt fta richesse des Konaks ,
t3 b.
Repdn (le prince) arrive a Varsovie pour
presier Tdection de Poniatowski, agS n.
Revd, chef-lieu de TEsthenie; elat actud
da commerce et de I'agricultore; popula-
tion, 44 b ; fondee par Vaidemar II, roi de
Dineaurk , 99 b.
Rhiooceroa (osseoienis de) trouyes sur lea
bards du Tiloui , 10 b.
Riasan , sur I'Oka , ehef-lieu du gouver-
•ement de ce nom; prosperile de la eul*
lure; nooibreux marais; fbr^, mines de
frr; etendoe, population, donl le« Talan
forment le tiers; andenne residence de
ieun sonverains , mines , 5z b.
Richelieu (le due de) a procure au gou-
vQnemcnt de Kherson I^ fruits d*une ad-
Binistraiion edairee, 54 b.
Riga, chef-lieu de la Livonie ; exposee a
des iaondations; Miperficic, population de
K gotiveriiement , 45 a; aitidcs ae son codi-
Pwce, ib.
Roman , prince de Kief, entre sur le Icr*
riloire de Oalitch, se joint aux Orecs,. et
ddivre la Tltraoe des ravages des Polomi;
oependant ces peoples, conduits par les OU
govilchs et Rurik, dievastcnt Kief: Roman
porte ses arraes dans la Pologne; il y est lue
daus une balailie , 94 a , 95 b , 96 a.
Rostislaf (1 1 54-1 15 5) re^ut la couronne
de 'Viatcheslaf, onde d*TsiasUf; s'etaut ap-
nrodie de Tchemigof avec des forces iusuf-
lisantes, il est force d'abandonner Kief et
de se refugier a Smolensk ; son fils est aussi
depossede de Novgorod, et Georges entre
en triomphe a Kief, 91 b. (11 59- 1167)*,
Rostislaf, qui s'clait refugic a Bielgorod, 7
est rejomt par ses allies; Tsiaslaf, qui avait
eu recours aux Polovtsi, perd la vie dans sa
fuite, Rostislaf reulre dans Kief; il meurt
dans nn 4ge avance , oa b , 93 a.
Roture, classe subdivisce en corporations
Ekis ou moinsprivilegiees; tendance parmi
is Russes a former di verses corporations 9
3o b, 3f a.
Roumianznf, son genie, moyens qui kii
procuraient ses triomphes, 339 a (Y. Collie-
rine II).
Ruines, a Kassimof, ou residaient les
sonverains tatars, 5i b; restes de la mu-
raille caueasUnne, 70 a.
Rdhiere, cite 373 b, 375 a\ aS5 a, 29$
a, 3oa a,3tia,3iaa,b,3i5a, 33a a,
b , 337 b. .
Rurik cl srs deux frcres, Vancpiics
(SOa-879), rv^oivtui k souvcrain pouvoir
666
TABLE DES MATll&fiS
lies Slavei, qui occupaicDt qiielc|iies pro-
Vlxioet tu sud du golfe de Klnbnde : oe )iavt-
prend le Dom de Russie. Apr^ la moit m
ses freres, Rurik funde U mo&archie; il
taiue un fiU, Igor, en bai Ige, et Oleg «m
tuteur, 74 a, 7 5 b.
Kuuie, origiiMs diverMi do mot nutet
70 b; queDe ptrtie du pays re^ut d'abord
oe noiD,ib., 74 b; considerations g6iteles
sur Texistenoe et la dastination politiques de
la Aussie, 66 b, 67 a; traits Tarics de la
pbysionumie de ses habitants , 3 a; ses li-
niites, sa superfide, divenite du sol de sea
diverses r^ons, 3 b — 6 b; men, princi-
pBux fleuves et canaux , 6 b -^ 16 b ; climat,
•16 a — X7; histoire naturelle, 17 a — aOa;
nulatiou ; quel nombre elle peut atteindre,
; |MNjples qui la composent, rapporti
ftumdriques entre les divenes classes, total
presmne, 90 a — a5 b ; gouveniement, ad*
ministration ; conlrees et villes principales,
a5 — 67 ; histoure, k dater d'euviron dnq
cents ans avant J. C. jusc|U*en i835, p. 67
jusqn'a la fin. — Souveratn* tueeessifi : an-
nfes 861-879, Rurik, Sintes ct l>oun>r,
14.75; 879-911, negencetfOleg, 75, 76;
911-945, Igor, 76,77; 945-971, SvialOi*
bf, 77-80; ^7«-98e, Taropotk, 6n; 98|»-
1014, Ylediflur, 80-8S; ioi5-toi9, SWa*
topolk, 8S-85; 1057-1077, Taiasbf, 86,
86; 1078M09S, VacfofcNi, 86; t«93-<iily
flviatopolk, 86, 87; ttiS-iiiS, Vladimir
Monomaqna , 87, 88 ; xiiS-iiSa, Mstirfaf,
88; IXS1-X139, Yaropolk, 88, 89; KS9-
1146, VsevalDdOlgOTilch,89; xK8-xi54v
Igor Olgovitch At Tsiaslaf Mstislaviteh , 89-
9x ; »xS4-ifS5 , Roitislaf , 91 ; ixiS-ixfiT,
Ceorges ou T01H7, sumemmi Do^arouk?,
9X, 91; ii57-t»69, Tsiaslaf, et Andre,
somemnie Rogottoidsskr ou le Pisux , 9i>,
93;ii67-xi69,M9tirfaffllAndri,93; XX69-
XI 74, .Andre, 93,94; 1x74-1176, Micku^
94; 1 176-1111, Ts^valod III, 94-97; Ilia-
11x6 , Georges et GemtantMi , 97 ; xic6-
tix9, Canstantin, 97* 9*6; xii^hiM,
C^eorgea II, fits de Ts^akd, fS-tooi
xai4-xi38, le grand prince Gaoi^cs W$^
voiodoTitch, too-xoS; ti38-ta47Y le
grand prinea Tareriaf U Ts^dlodenteh ,
io3-to5; 1147-x^, %^mtQM Tsfttota*
dovitcfa, Andri Tarorfavileh «4 Alcundra
Newsky, xd5, 106; x 163-1171, Taradid
Taroslatitch , 106, 107; 1171-1176, Is
G. P. Yassilt Taroslavitcb , 107; xi76-
X194 , le G. P. Dmitri Aletandrantek, 107,
108; X194-X304, leG. P. Akxandrovitdi,
X08; x394-i3x9, leG. P. Michei Tarosls-
iritch, X09; i3io-x3i8,lesGG.PP. Gear
ges Banitiontdi, Dmitri el Alcin^
Mikhaelowitd) , lop-t c i ; x3i8-x34o, le G.
P. Jean Danl^kmtch, amnommt KsNti,
txi, ixi; k34o-x353, le G. P. SMm
Ivanoriich, smnommi le Saperba, lu-
1x4; i353-i368, \e G. P. Jean 11 Ivaao-
vilab, 1x4; i959't56i, le G. P. Dmith
Constautinoviicb, X14, xx5; x363-i3S9,fe
G. P. Dmitri Iranovitdi, suraomai^ Dons-
koi, X15-XX7; x389-x4i5,leG. P.TiMfi
Dmilriivildi , x x 7-1 19 ; x4iS-x46a , k G.
P. Vassili Taasili^vitdi faveugle, X19-111;
1461- J 5o5 , le G. P. lean m TasiiiiMtab,
XIX-118; x5o5-x553 , le G. P. Vaiiili In-
novitch, ii8-x3i; i533-i584, le G. P.
Jean IV, aumoane le Terrible, x3s-iSi:
s584*k598, Fiodor Iranontdi, i5x-i67;
x6o5,Fc!odar Roriasorilcb* X67-176; 1606^
t6ia, Tasiili Sebouiski, x7G>x85i i6i3-
§6\S, Micbel EooMBof, xI4ki87i i^^i-
1676, Aieiia JMIkbaelovilch, xJt^-H)};
1676-1681, Feodor Aleaaiavilcb, X9^i9^i
i68a*i7iS, Piem !« at iwn V AleKoe-
vildb, 195^49; x7i^i7af,€atkaiBeP*,
Akaeioffna, aii^Sa; 1 787-1 73o,PieneU,
Alexei^itcb, fSa-ftSy; x73a-x74o» Aane
XvaMnna, aS^^i; i74p-i74x,I^^'^
r^genoe de Biren, i6x, 16a; 174^1 regeoce
dak grandfr-dttDbeMe Asne-ctdu ipriacede
Bninswiek, i6a*a65; I74xrt76i, |!Im>^'^
fteovna, a65-i7a( PieiM IQ fM^
ritcb, a73-i6n; i76i-x996, GalbcnBeli,
iii-S64; 1796-X80X, Paul I'', S8^4i'i
x8oi-x8i5, Alexandre !•'. 4ii-5a9; '*•**
Nicolas JT, Sa944«.— Grande Rasiie, 40
a— 5i b; Petite-Rusaie, Si b-53i>; Kitf-
sic meridionale, 53 b — 55a; Riunaacn-
dentala, 55 a^S6 b; Rnmie oricntsle, 56
b— 6x a; AaiMDraenMia,^! a;fmTina*
aaacasieoaeSf 6t b-^ 63 b»
8aint-P(tersboarg'(gouvememem et ville
de); yue magnifique de la Neva; six palaii
imperianx; sur sa rire gandie est la plus
belle paftie de la ville; irois lies comprises
dans son enceinte; grand nomlwe de beaux
ol vastes edifices; statue c(|ucstre de
Pierre r'; vigilance de sa police, 41 a — 44
1; snperfide et popnlBtion de ce gMYtfo^-
nent, 44 a, b; inondation en i824t 5ri ••
a
ment,
b ry. Pierre P^.
Salines, anex prodnciive i *|!!"u
Roussa, piris du lac Ilmen, 4^ a; dans i'
gmivemement de Vologda, 5o a; iresfw-
ductivet a Perm, 57 a.
COfffBmiES DAM LA EUSSiE.
€6T
dim I'MMKblM MOfoqiiM 4 if ticmi f»
Ciilieniie 11% J«7 k
SMgHini» iMobrewi talr kt b«r^ de la
fiMyiwme, 9 a.
Sualdft ehef-liM dn gouvvrseoMM dt ^
MB que trsMTw le YoUmi <t'un eAt6 <U
fleu¥c, pwidc lartilMt da rinilM, 4aadat
Scttlptarti Mica itaittgi da Marios,
iUM» 44 a; aMNHMieiiC dA k T<ir«aUaett«
d d«iW ik la maaiatre ik pmea tfonia*
lewki (dtovt par let R«aMl) , 66 a.
Scychat, doBt f iM^iniiM am klHMiraiilni;
kun migrations, 67 a.
Sqrlliie, « ^udlat eauirees aa booft ctait
dooae ipar las Gradi , 67 k»
Setioga (la), riviere qui sa jatta dans la
Ik Buu1» i« li; ^diaienteia par iia )ae tie
M«|olae, ic a.
S^ar (k. d«) a feumi qaalqiies astKiils,
ai3b;ax9b; a4o b — »4< b| a44b{a46
*►♦ «47 «•
Seoat, sa composition, ses altribulions,
rfpreseotation du couverain dans cbacun da
Ml boit departemaots, a6 b — 27 a; siege,
pvtie a PeterdNMUf, parlss 4 Ataeoa^
374,
Serb, daiaa qui eon^pose au moiiis les
Qcsf diiiemas de la populalioa, rcnferaM
Itt elements d*uDe orgaaiaatian ▼igounaae;
jaaqa'a (rbeat g^e aeulement dimitalion ,
3 1 b, 3i a: defiiuts attaches k sa aaodi^
UoQ| ik; bar eaoaucipation seide (poar fa-
qneOe fiea n^cst prepare) pourra procairer
i li Aosse on rai^ elev^ parmi les<BatioBa«
i^M3a b.
Siberia. EUe pent a'ciever ua jour k one
gmide paistancy » 9 a ; fourail das our*
l^» 19 a ; aouffe at pcHrole dans ses r»«
poai aonlagnrnaps , ao a ; etendua, popu-
blioa , Buaes , eukure , vkles prioctpaus »
pbeoooicnas, 58 b — 6< a; gouverneiDenl
priaitif de cette conlree, comment las
llttttcs J iiraiit lenrs premiers etablisie-
iBCDls, x48 b — j5o a{ de.noaveUes villas
sycleTem, x6o a, b.
Simbink , aur la nve droile da Volga et
^ la Sviaga, ckef-lieada aeuvemement du
i^^Be Bom ; sol assez fertile ; prodtiit prin*
<>fal : les beitiaux et la pdche, Sfj b,
Sioieon Ivanovilobt sumeoune le ^u*
/^^ (i34o-i353), achate du lUaan des Ta-
^ riovestitore de Ja grande principauti ;
^ HIT Novgorod des impositions arbi-
^ro; les viAes de Pskof et de Novgorod
s nniisent contre les AUemands , qui essuient
aae dc£9ita saaglautej Olgerd, prince de
■liUiiMAiia I aacrifie a son nssenlilBciit Eiiiia-
die, un des BDagialrala «ia Nov^DPod ; Ala-
JBua, roi da SnodOt vent imposar k eboix
'nae religion aux Novgoradtens, oni bat*
4ant las Suedois et penetrant dans Ja Nor*
wc(ga; k khan livn a Simeon le frara d'OI*
genl et las anbaasadeurs lithnaniens, qui
aa«t auanite lenvoyes moy^Mnal nn^an;
aavagas da k pasta ttoiM^ qui cnkve, k ca
que Ton oroii , k grand prfawe, ses deax fils
et son firere Andre : Simean atait pris le pnh*
aUar k liti« da grand pHaoe do ftanlea les
RUBsks, ixa b— 1x4 a.
Simpberopol, chaf4iea da gouvamement
da Tanride , 54 a , b , 55 lu
SirT'Daria des Bookbares (kxartc <des an-
cians) , rvrikn ifai sa Jetladaiisk kc d'Aral ,
za a.
Skves, om souvent inqaiM kfiaa«Em«
ri en deaefUftdaail le Dmapr, x5 a; etendiie
leur a^onr primitif , epoqoa de kura
pmnieres incursions coalre Tempire ro-
main; migrations et tribus diverges, ib. ;
traits principaux de leur physionomie; qiiet-
que culture des arts ; nature du gouverne*
mant, tilres da dignites, cer^raank du
sacra, inOuence do chrislianisme aur ia
transmission do powveir, formes et objrts
du Gulte; langue et'ses dialectes, de qui
ppobablemaBt ils out re^u rccriiure, 6i a
— 74 hs livras aacras traduils du grac en
slavon, S5a»
Skv»-Ruasea, a queUe ^poqna ils exialaot
comma nation , 69 a.
Smolensk , eheAku du gouvtBuement de
ce nom ; a sootenu des sieges celebres^ 47
b.) atandna* popukiiaa, exportation de
grains, bois de vonslruotion , in. et 48 a.
Soufre, foumi par les firovinoes do midi^
AO a ; sa treuve auasi dans ks ragkns nson-
tagneuses de k Siberie , ib.
Sottvorof, idee de son geme at de ses
moyans, 339 a , b; ses campagaes an Suisse
el en ItaUe, 391 b et suiv.
Stanislas, roi de Pologne, ranonce a ses
pretentiona , at gouvcsme les ducbes de Bar
et de XoiTaina , a58 h,
Suisse rusM; nom donna «u Voldai a
causa des montkuka., qai en rendent I'aspect
moiiu uaiConaa que aelni de la pkipart dea
autres contrees, 5 b« 49 a.
SupentitioB , regne« et est anfrelenne par
un grand nombra da sectcs t 34 b ; suite du
defaut de lumieres , 100 b ; on croit k fin
du monde imminenta>, laa -a; exorcismea
employas par les Rnssas dans-un ai^« i36
b; Jean IV cat effraye de Tapparilion d'ona
coaaiote, ib., x5ob.
TABLE DES UATliRES
SviaMipoHi (lotS-toig), aevca de Vla-
dimir, M Alt pracbniMr loinraniii apres la
moat de son oode; fait aatasstner Uois de
Mi freras; Yarotlaf , ua de act frovs, prinoa
de NoYgorod , narohe oontre lui et le foree
h la fttite ; Sviatopoik , leooara par Bolea-
las , ion beau-pere , rentre Taiuqueor dans
Kief; mais bientdt, dereau enneati de Bo-
leslas, par qui il est battu, il est de nouvean
defait par Taroslaf , et neurt dans les d^
serfs de la BoMne, 83 a — 84 a.
Sviaiopolk (1093) re^it le Ir6ne de Via*
diinir, aui part pour Tchemigof ; il Aut
arrftter In anUMMsadetira des Polovisi ; ba-
taille contre oes peuples, qui taiJlent en
pieces rarmee nisse, et font, poar Oleg, le
siege de Tchemigof; nalheors de ce regne ;
les PoloTtsi sont battus par les Russes rea-
ms, 86 b — 87 a.
Sviatoslaf (94^^979), fib d'Igor, s'^leve
sous la regence d*Olga, sa mere : elle tire
des Urevlieus une vengeance cruelle; elle
embrasse le dnistiaBisnie ; eiploits d eon-
qn^es de Sviatoslaf; il asugne k ebaea de
ses trois fils des apanages particnlien; par->
fient, apres une bataiUe hwgteBips doolettie
oonire les Petchenegves, k s'enparer de la
Itolgarie ; anr^ une lutte adiame eontre
les Grecs , il sobit les conditions dn tivie
ioMKW^ par Zimisces; ilperitdans une bn>
taille contre les Petchinflgiies , 77 b, 80 a.
Sviatoslaf Ys^dodoviteh (ia47-t«63)
sucoide i son ftere, dont les fils ic^>ftm
des apanages particniiers : le khan dies IV
tars donne a ran Kief, k rantre Vlndioiir;
Sviatoslaf ridame inutilement; meort dena
ans apres, io5a.
Svir, rivi^ qui joint I^Onega et le La-
doga , i3 b ; ckantiers de constmction aur
ses bords, ibid.
Syaode (le saint), a loi seal ■riiiortiiiml
les affairesecd^iastiqoes ; nominatioiia fiotes
rir le tsar : siege dans les deux capitales, a€
, 27 a. V. Clerg^
Taganrok , ville ou est mort rempereur
Alexandre , 54 b.
Tilleyrand (M. de)*: une note hii est adres-
s^ sur reolevrment d'Etfeoheim, 410 a;
r^ponse qu^il est charge d*y faire, 4ix a;
represente la France au oongres de Yienne ,
489 a ; viies de ce diplomate daus sa con-
clusion du traits de la quadruple alliance ,
6a4a.
Taman, ile formee par deux bras du
Kouban, 14 b.
Tambof, chef-lieu du gouvemement de
ce nom ; pays surtout agricole ; eaux ndn^
rales, eCendne, population, 5i b.
Tamerlan, son invasion, sa marche, sa
relraite, 1x7 b, 118 a.
Tatars, forment le tiers de la population
du gouvemement de Riasan , y font le com-
merce avec I'Asie, 5i b; andenne residence
de leurs souverains, ib. ; deux de leurs ca-
pitales et un grand nombre de leurs peu-
tilades font parlic de la Russia orientde, 56
»; Tatarie mdependante, sera bient6t lout
euttcre soomise a la Russie; nation des Kir*
guiles, se compose de trois hordes; princi-
pale richesse de ces peuples, 61 a, b;
ravages et domination des Mongols sous
Oeoehis-Khan et ses suoeesseurs, 100 b —
ia4 o.
Tatan-Nogais , de qui ils prirent re nom ,
io6a; expedition malheureuse de deux chefs
talars centre les Hon^rois, 1 08 b; horde de
Ci'imce fidelc aux Lithuanicns, redoutaMe
aux Russes , xax b; le tsar de Kasan est de-
tr6ni et amene captif i Mosoou, xaS a; ies
Tatars du Kouban sont sooniis k In domi-
nation msse, s59 b; details sur reducalim
des enfints tatars sous rempereur nctnel
(Nieoks 1*), 638 a, b.
Tdicglokof forme le projet d'asanaaiMr
Catherine 11 , 109 a.
Tcherkask (le nouvean et le vieox), den
capitales du gouvemement des Cosaques du
Don; vers le nord se tient une foire an-
nudle, 55 a.
Tchemigof, chef-lieu du goovemaiMni
de ce nom ; theAire de luttes et de calami-
ty, 53 b ; population moyenne , 5* b.
Tchouktchi , peuples dont le pays , sitae
entre le golfe d*Okhotsk et la mer Gteriale,
est iravers^ par des fleuves presqoe toujoon
charges de gla^ons , xo a.
Territoire, sa division ; quatorze gonvpr-
nements gen^ux subdivises en dnqaanle
goovernements reguliers, 27 b, a8 a.
Thamas-Kouli-Khan fiut dennnder h
main de la grandedncbesse Anne, rigente,
963 a; la Russie lui abandonne les eonqa^es
qu'cUe a faites sur la Pene, 358 b.
Tobolsk, ville et gouvemement en Sibe-
rte, chef-lieu ecarti de la prindpale ligne
des communications, 59 b, 60 a, b.
Tolstoy, histoire du comte Paskevitdi
d*^rivan, dte p. 544 a, 545 a — 546 a,
546 b, 547 b— 548 b.
T<»m5k , sur le Tom , chefJieu dn gosTcr*
CONTENimS DANS LA RtJSSIE.
609
netnent de oe iU>m ; grattdet nchetses min^
rales , 60 a , b.
Tomeo (le), fleuve <|iii lert de limttc
mtre la Russie et la Suede; utile pour 1e
rommeroe enire les lapons et Ves Fi&ois,
14 b.
Tonreo, petite viUe ntuee sor ce flenve,
cplebre par les operations qui B*y sent faitei
poiir la mesure d*nD meridien lerrestre,
45 b.
Toola, sur I'Oupa, chef-Keu do gouver-
nement de oe nom; pays fertile » manufac-
lure d'armes, Industrie variee, surtoul dans
la capitate; mines de fer; indices de char-
bon de terre; ^tendue, population, 5x b,
5a a.
Toungouska, peuplade mdigtoe dont le
Horn a el^ donne par les Russes a trois
fleuves doot elle parcourt les bords avec sea
troupeaux , et qui se jettent dans le li6nissei ,
f I a, b.
TVtbunaux, leur ornnisation , 98 a.
Turquie. Elle attend le joag de la Russie,
I b; Turcs, dans leurs premiers temps,
68 a, b (V. prindpalement Pierre I*, Ca-
therine II , Alexandre I* et Nicolas IT).
Tver, eheMieu du gouvememeut de oa
nom ; baign^ par le Tolga et deux rivieres;
mention particuliere de plusieurs villes de
ce gouvemement; grande route de Moscou
k Petersbourg; etendoe, population; eaux
minerales, 48 b; bois de construction eC
leur mise en ceuvre; navigation anim^ , ib.
Tyras (le) des annens. V. Dniestr.
u
Usbeck , grand khan, permet le soppliee vention , 109 b; refle en souverain I'^tat dei
do grand pnnoe Midid stir une simple pr6- princes nisaes; sa mort, ib. '— i la b.
Vabdue, se constitua en principauti^ ,
114 b.
Vari^oes, peoples sortis de la Baltique :
iroia fireres Yariegues re^ivent le souverain
pouvoir de plmieurs peuplea slaves et don-
nent k nom de Russie au pays qui reoon-
niiit leur domiaatiop , 70 b ; qnelqueMins
vonl assizer Constantinople, 75 a.
▼anovie , sur la rive droite de la Viitule ,
chef-lieu de la voievodie de Maiovie; un
de sea fniboiirp sor la rive droite, les hiiii
antres sw la nve opposee ; population; fau-
bourg de Praga pris d'assaut et rase en
1794 ; aspect genial ; palais et monuments
(dont Tun tieve k la gloira de Copemic);
bibliotheques aneiennemeot existantes, la-
zaret digne d*admiration; promenades^ pliF
sieurs ^gtises remarouables ; monument des-
tine k la m^moire au prinee Poniatowski ;
faiblesse de I'assiette de hi ville , 65 b — 66
b ; bataille et capitulation de Yarsovie en
x8Si , 588 b; Nieohu I* y fnt dever un
notinment des pieces de canon reprises en
1896 k Varna par les Kusaea, et qui avaient
ete prises sur les Polonais en 1444 , an siege
de cetle -ville , 640 b.
Yassili Dmitri^itch (1389- 14a 5) ^ ^^'
Tounk grand pnnce par Tambassadeur de la
hoi^e, et obtient au khan b reunion de
quelques provinces k la grande principaht^;
par quel motif; reunit k Tapmiage de Mos"
eou la principaute de Sooxdal ; impose sea
volont^ ii Novgorod; Tamerlan pMftre
dans lea provinces sud-est; Vasaili a^apprlte
a la r^istance ; Tamerlan change de diree-
tion , prend Azof, ruine Astrakhan et re»
toume vers ses frontieres : YasstU fixe avee
Yitovte, prince des Lidinaniens, dont il
avait ipous^ hi fille, les limites des deux
empires, et s'oceupe avee lui des moyens
de s*opp08er aux Mongols: ne prend point
part aux vastes projets de Yitovte, qui en
vieut aux mains avee Tarmte de Tamerlan;
defaite de Tarmee lithuanienne; inimili^
entre Yassili et Yitovte qui fixent la limile
de leurs ^tats ; ^ig^, general de Tamer-
lan, marche sur Moscou, et, apres Tavoir
rUuite k la demiere extremite, se retire;
mort de Yassili k PAge de cinquante-lfois
ans, 1x7 b — 119 b.
Yassili Ivanovitch (x5o5-z553), grand
prince , fiiit enfermer son neveu qui meurt
quelciues aimees apres; Makhmet-Amin ,
tsar ae Kazan, obtient d*abord un avantage
oonire les Rosses, puis se reoonaait vassal
de la Russie; par suite de ses pr^entaona anr
la Pologne, le grand prince engage oontre
Sigismond une guerre dont I'issoe fut en
favenr de oe dernier, laS a, b; il eonelul
un traite de palx avee la Livonie ; obbge la
viHe de MLof a renoncer k son oonseir na-
tional et a ses antres institutions; Sigismond
d^tache deTalliance do grand prfinoe la khan
de Grimte; s*ensiiit une goerie dans la*
qtielle les Russes sont di&laitB; Yassili re^
couvre eniin Smolensk, taS b— fa9 b(
670
TABLE DES MATitHES
▼ictaire edataBte des TJthtianifnt, mm ^
ne |)«uveat recotiyrer SinQl«ii3k; In IUmm
MaJ^iuuet le j«Ue sur la ^gjAie meridio^alii
av«c Eastache Dacbkovitch, Litbuaiiieii,
Eais freod les ioter^ts de VaasUi «( devaste
^ Lithuania; contiaiiaiian 4a la giiarre;
les circoiistaoces redaTieoaant fav^tablas %
la Lilhuanie; la Kiusie est altaqoee par laa
Taiirieas, le» Talan» let Gxsaques, le> Ka-
zanais ; le erand prince se reronnait tribu-
taire du iLoaii « 129 b — x3o b ; U^ve d^
ctQq aus avec Sigixmond , traita da paisi pour
dix aB9 avec Tordre de Livonie; lAJiutice
criaote contre Yassili Cheinyakia; eKP^i-
tiou joalheureuBe cQotre Kaian racwtee;
tr^e tuiiie d-une prohihiUoa miiaibie an
commeFoe rii^e; relatioos oavcrtat avec
Charle»<2uiut; trevede soixante ans aVec Gu9-
lave Vasa; iucursion desaslreuse du khan da
Crimee; Vatsili deaigne pour auooesaeur son
fjUs Jean, k^ da trois aaa, x3u h< — i3a «•
TassiU Saiouiski (i6o6-x6iay, sahw U^r
par le conseil, prononce un serment pen
agreable aux grands; est couronne sans
pompe; fait exnumer at exposer publique-
nent ks rcates du jaime Dniari; garda
Goiniiie otagaa Maiiaa, son pm et qnabinea
autraa digoitairas; n'aecuaiHa qu'avec i»-
serve les oflres de la Suade; una aoinraUo
iasurrection, at cnoare soiia la nan da
Daaitrit repr^senla par le aasaqiia Ileilw,
aniena les raballea sous leaauua de Masoadi
kilte prdongaa avec des suaces divers; la
tsar fait faire qiiakfuas exacvlions; la parti
du fuix Dmitri ae ranima, ranfotce fMir les
Pokoais , par fiapieha et par Marine; haUa
de£eBse du inonaatera da SainliSerge pour
le tsar; Sigianand raeemaenoa la gnatra;
le prinoB Pqjaraki etbtiaal fnekfttti suceaa
paur le parii nalional ; Je liua Dmitri vaiit
sVnftarcr de Moaeoa; il ast battu; Sokopia
Schouiski, liberateur da Moscau, meiirt
anpoisqaai; uu parti uational aaut alire un
souvarain^anaoBoa k TassiU Scbouiski aa
dachcanea* 47^ a — i8a ai caCra {ilusiawrt
prataudaQls, YladiiJas., fila da Sigisnend,
est salii6 Isart coaibat saagUat k Moaeoii
aotoa lea Ruaaes at las PoloMis, qui inoen-
dient la vilie; Yasstli manrt pnsomiiar de
Sigisaoad « 4(ui a'anpara da Smolaaak; Po-
Janki ec Miniii» a la tMa du parti national,
fiareant Sigiaaaond 4 la retraita at las Mo*
nais a una «apitolalioB; las teta eUsant
liiokMl , fila da Pbilarcta, 18a a^ 186 k
Tasaili TasaiUMtoh I'avaagia ( «4n^
146a)': la horda dMdean sa favanr contra
son onalaYaun^ qui* apraa a'tea anpar^
deux ftia de Moacott, wmrt at laitaapat-
aiWe pQiaasaanr aoa aei^ti aaoav^ ti^*jiwncj,
niais cruel neanmoins contre pn de •e^coii*
sips : ralnsa an asila a m khin exile qui
s^en^pare da I'ainidaeQipant da k'anaeane
viHa 4i^ %umt y etUve <hi w^mbrevx Mu-
tants, et marche contre Moscou; Tissili
pvead la foite ; ea khan s'emivwe enmiie de
Nijni No^jforod at marclMS mr Movrom;
TassiU le toroa k «e raiirer ; Taon^e sqi-
vante , combat ineeal dans lequel TassiU eft
frit prisonnieF ; Ctonyaka lut, avec la kban,
un lrait4 paar dapoasader TassUi , il le fait
m^e ealaver oar auiprua et lui (Wt crever
les jreiu ; forea cependant de hit lendre la
liberte , il lui doone la viUe de Vologda;
Tassili aveugle renlre souveram dans Mot*
oan, danoa la tiira de grand prinaa k too
jeune fils ; Chemyaka recommence les hos-
tilitea, est baRii et tnenrt empoisonne i
Novgorod; Tassili soumet a son poirroir
totts IcaapioaM » excapli Tvar ; |1 M§m
son fils i»k beritier de la gnnde priad-
paute, 119 b — laca.
Tassili Taroshiviteh (1372-1376), gread
prince et souveratn de Novgorod ; se joist
ans Bf ogob prto a nMHahcr contre ka li-
thnanieos; meurt regrette des princes «t du
pa«^e,u>9,a.
Tegteion : aa pcodigiewsa rapidile daai
ksrrgioBaaaptflBtrianalQi. ab^admiraUB
sat las bards de la nMr GaspiaMa, ya,
at anr ka flanc* et au paod daa vaatagno
du sud, 6 a*
Taivie, eat 4 k liana da W9»fMa9 pok/b^
cinqadii-bnit»6a.
Tiatka t abef-liaw du faovwnamant de m
ao«»;jnuMa» £o)r|«i, hafU Iret lakaodinti
Tibourg I coummevieot ranai 4H ff9a^
dncbe da f inUnda. i$ b.
TilM» dbof-Jiflii da goavcfiianMat de »
nom » rianarqwahla aar aoa wmanit^ 1 1^
£ar«ia aaa aMsqaaa at 4as eglue* ^
loutea laa ooviaMiaiQna chr^Aieaaes, 55 b;
fioadee par Qadiaiia ^i 7 fixasa laad^w*'
ma.
Tiatnla (la) , qoeto pcMB^faieil en ^n
lea oown«aiaati«aa» 14 a.
Titepaky anr k Dwiaa . abr^4iaa da goa-
vetnaaicnt de oa aoaii agFicithvie ^^^^
sante ; bois de eonstmctioa ed 4efll>Myeat* «
56a.
Tkdiaiir, dbaf4ieu dn fouveroMeat de
ae noMitwl fertile* biea aaltivi; »k**
Mtiers, surtout pomipiers at pnaiani
^taqdua et popuktion; fasiges trts-ooo«ids-
lablc*, ^i a; a qiwtte apoqaa k villa daviol
k eapiftiik da k ftuasia, ^3 b.
COHTEHUES DANS LA EUSUE.
67»
VJidiMr<98**«aU>, m Un% m eulli
da idold d ]b TaMOur det leaumt; ftmiA
phuHun vfllcs ffML Slaves Bolootta, Boa»e
M cooqu^tet Juaqu'au gm cU Finlnde;
ii iowofe k MS dieu deuk YarMgiMs; nu-
Mt tes Radinitches rabdks, d^itit les
Baigsres orienlaox, el les peoples i|«i per*
teat des U»iL Apres t^Hn atoporide kW
MB, it embrasse la christianiaaae, oondiliaii
fMi lafudle ies enpereors BasUe et Gaos*
Uatia Itti dooneiit en nariage k prkicesae
Aaae, leur soetir; hit eooMruire pliiaiettra
cfliset, efdoone an peiiple de se taire bapli-
Kr; foode des ecc^; parlage ses ^taia
caire pluriears desas fils ; aoiivelles gunTas
coolie las Crovates ct les Peicbei^guas;
revolte d'vtt de sas fils ; mort de Tladioiir
iiis SBcoesseur desifii^; jusqu'ii quel pouil
it s aoite le •Dmom die Gtrama, 9oh —
13 a.
\Iadiaiir Monomaque (itiS-iiaS^ ae-
eqte le tr4«e que lui ommi ka XlevMOs ;
se fib sa signaieBt, ainsi que lui, par daa
es(ieditions ecmtie des peuples enaonis ; il
porie ica amea ceniie Audriooplei Aleiua
Cosueoe, par ton eftvaye Neophjrte, k pr»
duaeeesar oQ tsar deRiissie;feniieleuiii«
dwi ki a U doooeiir; son neven Taroskf^
H« vsat Kpr«adre k viUe de Vkdiaair, pe-
ril daos Qoe eoabuacade; piM» sa^asse d«
V. UkasMaque, S7a, «$a.
^•Im cMdiie de sou eoura; can inaai*
bdn daai sa parlie sup^rieure; M^oit par
k JUns les produiU de k Sibcrie, la b(
KaMiie k att irane doot ks branehes oaot*
■wmiqeciit k tnh ntn^ 14 a; vomtBeiMa
«teiiavi9dblaiiRjer,48b.
Viikgfkv chtf-lieu du fouvcraemaal de
oe Dom; sdl couTert en grande partie par
^ lass, daa forils et d^ asarecaglw; bois
^ coBstradiaii, goudfOA* oiielqiiaf four*
>wtt; miaas de feri satinea, 2k> a.
Vabaire, m n^ daa dpowieilk d*£liifr-
betb Pelrovna, 279 b.
Vorooeje , chef-lieu du gotnremenient de
ce nom; itendue; popuktion qui ue repond
pit ak fertility du sol, 5a b.
VsAfkdy uii des fib de Yanidaf, est
baita per Mai, prioea dea Poloytsi qui,
apres s*4lra eapam d'une pasiie des <j^lca
de k flier Moira, avaicBt foodu sur k Ri»-
sie, 85b, 85 a; de X078 k logS suocede 4
soa Mn Tsiariaf; isivasiea das Bulgtfea
dans les terres de Slouroiii; pesle et kasiae
qui farorisent les brigaadago des Pelovtsi ,
86 b.
Ts£vDlod«Ol9o^riteh (cid^-si^^), aVns-
pare k maia amea de la soavendnei^ k
Kief; fail k paix avee ks fik de Mononaque
■u*il emit voalu depouiHer; ks No«goro«
dieas soat en preie k ranarehie; il profile
des dissensions de la Potogne pour k devas*
ter; persuade a idusktirs princes de s*unir
k Itti eoBire YkJiniirko, souvarata de Ga*
litcb ; il k Hsduit k ane nosilion critkpie tt
hii acoeide k pais; il rennit ks princes et
kur d^igne Iger poor sea snccesscur; Igor
ealra ea Pelegae poor soutenir Ykdiska
SOB bean-frere, qui y seaovtre qiiatre
viUes: Ytsna est eraee a la Russia; vsevo>
kd est obligis de kwr le viege da Zeinigo^
■od defrndue par k vdkoreux voievode
Jean; sa aort an milieu de aaaveaax pra-
paradlide guerre, S^a, h.
Vsevold in (ic76*iBia), irioainlie de
sea Heveu listiskf, quibiealot aprcs pent
airee k ptUMse de RiasBaa : ftvkteskf , reoon-
eflie avee Vs^olod» regoe k Kief; Yserokd
eatra daas le pays dai Rulgaies; revolle
des liihuaniens , guerre centre les Polovlsl ;
sa poUHque nour trrvrer k Vuake monar-
cbique; il rMutt les Novgoiadiens 4 acoep*
ter pour piinte son jeune fib ; puis k rem-
pkoB par acai fik Ceastantia, ]dus Igc;
marche veta Mosoeu, i^eatpare des bieae
des prinses de Riasan; declare libres les
Novgorodiens, puis kur impose de nousreaa
soa jeuae fik Svktoskf ; designe pour soft
suooasaeur son fik QoastaatiB qui bii d^ae*
beit; pour le punir, il laisse aa couronne k
aa autre de aes fik, aoataae Geoiges; fi)u-
datiaade Feidrodaaehaialian pQrte*gliuve ,
94 b — 9*7 a.
Taik, aacwB nom du fleuve Oural , cause
de ee cbangement de d^omination , xa b ,
34xK
Tak (F) on bceuf grognanl, manque en-
core k I'Europe, 17 b.
Takoutsk, province de k Siberie; ror-
pnaation n*en est pas arrfttfe, 60 b.
Taropoik (972-980) , r&gne k Kkf ; son
frere Oleg, qui r^gnait sur les Drevliens,
lui declare k guerre et pdit dans une de-
route; son second frere TIadirair, qui re-
gnait k Novgorod , se rtfugie chei les ¥a-
riagues} puk revanaat at ec un grand nombre
de Mormands il assiege , dans Kief, Taro-
poik qui se rend k sa merd : il k fait assas-
siner, 80 a, b.
S DAHS LA KUSHiE.
' fBBlra )s> chcvalwn livoBieai, pswedi
Mailua ., I''"'' ' ' (n bordide I* N«rT«i TMvtbloiit ippi
■>« F ' ' ji .''i"' ■ ',',.;■■/ , , lr» Moogolii ion lidc, io6 ■ — loit
pDJif "52 '"^B'''"i~"--Ln-"i Tirojtavilch (V. AaM T«r., loSi.).
i5I*^'*P'j£i>* W'e l» hiritia du triiMS p*r Ywtnlif, KM
-<fss5^
la pranierel tanto Mat occupm pir ue
>'^ii^'f!L^irf*''*''*^' btenlol (uem ciiile enlie RoitiiUr ct Glefaipiial
'***i'*'?Si»*''^Uihf ; Yani- duui de Ml £|«U: lepronia-, »pr« •'•»
/^^^^Sw-^'jC^ «"!"■ '«* '''^ *™^ remporte qticlqun »»inl»™, ol
^i^f'^'^ "f!** "^ f"'" • '"'"'" e'opo'"'^* Pf ■" Gma. YiUilaf. n\»-
Zit •''^i*''' '' ""(fliiswndsiils il.- queurdew* freres, at niocu pir Ih Po-
KtsT' '%,-■ n"'"T, -,ifiT« longu.'S !■[ lovl»i, se retugie enPologne, puii,i«:l(
ff^^'^-'^'^l^it Sovgorod (1019- Uii;cbnai uno leconde toil ptria f™n».
>j' '^ichMlif' ion Dcrmi, qui il ■'■dreue bu imiw Gregoin Til, lon^
^ No»P>"^S '''™'"=" I*' I""' S»i«lo«l»f eUnt mort, Tierolod tai
; , : qui lui cede nuiuDoiru attn 1> paii et lui cede Kief. II bi tut
',,>:' '' J. iiile dii Dniepr; il MumM d'un coup de lance duu ub coobil, lib
"^r*"* ^ (I , rwini h ion frira, il pe- — 96 b.
.i^^'i^'la nJleide la Ruuie Rouge; TiiuUf MslUaTiich (1146-1 (Si). >^
u"* I'^Lturt u°< enfant*: Tiresbf de- noDca par de* ictea de justice: fleorga,
■lit''' In^de loul I'enipire; il bal lea louienin de Tladimir, ntil •'einptRr i'
n'^it^et deliTie k Ruaaie de lei« trAae de Kief; mai* H cM Miff! it f
enfaEBi
a combat dtfendre eonire Boiliriif , allii d'Tni^i
'"^riei Ona , le feu gregeoii et la Wi»- Sriatoilaf , (rere dlgor , aidi dea Pel**"
^giiaintot » ftotit : tiUi»aea fermea «ldeiBn>dDilLa,a'a)lieauipriDCe>tlcTite-
^ Yjroilafavee pluaieon phoca de I'Eu- nigof eonire Tsuulaf; Igoretl iDMaavpK
Cpe; il bit ilire on melnipaliuiii niMe; le people de Kief; guerre iiecda wa^
^^Bt Taiaataf pour Nm iaoc«aaeur , le diten ; Georges ct fivbloilaf la ndNnl «
^edudroitrunelui eM attribai,<4a — MUTeH en umpagne; Tsiailaf nmn '
gi b. Mire k Vladimir, el Geurn enlw i Kwi
Taioilaf n Tiimladonlch (is38-ia47); Yuaitaf, force alon d'abdiquer, rede*)'*'
}Utt, chef dea Mon^li, coatinue tet riTa- auuile mallre de Kief; 'Vladimiilo wxtt
ta, a'empare de KieT et la mine; lea Sue- aufaitement , el son Sb Tanubf bn* aM
doupeaetrenlatec one flotle dans b Neva, bataille dantlesiMeesre>ledoataii;T>'^
ill lont defaib pn- Ic prince de Novgorod, UfiiieurtjeoiM,elaniTCraeUemeBtRC>«»E,
Alexandre Taiwbiilcb , qui repousie ansii yoa — 91b.
leaAJIenamlsetdeliTreNtoriTanubfll, TuMUf(iiS7-iiS9),nnKiD«lfl<>>'tf<
•ecompagnadetonflbConilanlin.Tarendro Tillei deson apaaagc;b plupart ^f^^^
honnuage k (^ilai, el meurt k Mn rMour, le foal indtpmidants ; il cat fota '^^
io3 ■ _ 104 a. donner tMtfui outre lei portai i 8»*
Tiroalif TarMlanlcb.(i>61-ia79), lea bf , ga a.
Mo^gorodieni ae loumetlait k too pomoir ;
a Dia naniait at ia atiiau.
AVIS
FOUB IiB PLACBHBNT DBS 6BAVUBBS DB LA BUS81B.
Pages.
Carte et littoral de la mer Caapimne. 5
littoral de la mcr Noire 7
Littoral ile la Baltiqne 9
Partie Mptentrionale de U Roatied'A-
sie avec rAm^riqne rone. i4
(S Pedmxrs do Volf ft 16
I Caimeberre (Tftcdniom oxicoocns).. 18
II Bartre sibeline et hermine ao
S TcbeiiTachca sa
M Lapoaa a4
i4 Coatiune de femmea mordTiennaa a6
4i Arcfaioiandritca 19
7 Paysans roaaes 3i
9 Daasea rasaaa 36
<7 Mooament de Pierre I*' et aifaut. ... 4a
5i Tee de U foiteresae de la N^a en
kiver 44
I Tlieltre de reraitage i P^eraboorg . . 46
l« Palais de Strelna 48
9 HoTgorod. 5q
44 Astrakhan. 58
la Kirndsea 6t
iS Oitiaka 69
i3 Sfiatorid. diende la focrre. 73
19 Cbefalicr porte-glaiTe 97
21 Bardie de BAti sor le Don 104
99lmilia iiS
i3 Dautri Doaakoi 177
43 laMricar dn monaat^ de Troitsa. 119
iS luu (iS laf
Platan (a) i»i
«9 lean le Terrible x3»
>7CMM|aea. i36
iiUni 143
i7KTC7aagrec i45
33 Cvte de Sibdrie. 147
10 Tiiovtsk i5d
3<Tobobk. iSa
40 La Parte aaiote et scs eimrons s55
I QMfal de Sib4rie avec son poil d'hi>
. »« i57
39 Egijse de I'Aaaomption k la'Pokrovka. z6o
4( Booastdra de rAaaomption. i6a
7> Vae ant4neara da monastlre de I'As-
, «»»i«i t64
^7 Otripieft premier faox Dmitri 167
38 Strdds, garde polonaise 169
i> SiBoleBSlL (1611).. 180
^ Vne g4o4rale da monastAre de Troitu. t83
4i Micbd Romanor. 18S
45 Alexis MikbaAoTitdi 187
49 Pierre I*' 19S
77 Are de triomphe de Peterhoff aoi
it Barcband rosae ealcniant aamoyen de
grains cnfil^ ao3
'I Obfliaqoe k PoilftTa aoS
54 Catbenoe l" aof
^ P^tcfsbooii; , fortercsae et ^lise de
SnintrPiCTre et de Saint*Paul an
fo Catherine propose k Pierre de capita-
Niun^oB. Pages.
ler arec les Tares ax6
58' Maison de Pierre I*' an jardin d'M . . a 1 8
53 P^rhoff aa3
6a Moacoo, murs de la vieilie rille. .... a 54
3 1 Anden et noaveaa palaia des tsars
(Moseou) a57
3a Caraliera tatars a59
60 lilisabeth a65
55 Oranieobaum 870
57 Tsarskoi^^Stio 871
6z Catherine II a8a
s8 Magidcna tatars 3a i
10 Tombeaa d'nn khan de Bassimof. ... 3i8
a4 Village rosse 33i:
4 Habitation de Kalmoaiks 33^
59 Bglise de Basan 34o
3o Tver 345
47 Toar d'lvan Vdikoi 35i
78 Tonr de I'^glise Saint-Nicolas 37 a
16 Batna msses 384
76 Interienr de I'^lise de Kasan 388
75 £giise et r4fectoire da monastdre de
Troitxa 391
5a La Boorse 399
69 S^at 4o5
84 Alexandre I'' 4ix
70 Perapective de Ncrski. 4iS
68 Vne da qnai anglais 4a3
79 Palais imperial de P^troTsky 43 c
8 1 Vne de I'eut major da c6li da canal de
la Molka en hiTer 43S
83 Vae de la Boarse et d'une partie de la
forteresse 443
88 Place des boatiqaes 453
87 Mooast^e de Smolna 459
85 Place de I'amiraatA 469
100 Vue de Moscoa prise de I'esplanade da
Bremlin . . .^ 471
aa Le Kremlin tu du pent de pierre. . . . 477
95 Vue da pent de pierre. 480
90 Vne da pont Rooge. 489
89 Vue da grand thMtre impMal ( Mos-
coa)* 5o4
98 Vue dn chktean des ingfeienrs &16
94 Vae da pont k trois arches et da champ
de Mars Sat
91 Nicolas et Alexandre 5x9
9a Colonne d'Alexandre 533
96 Scboamla 545
73 Droachki 555
74 Montagnes roues 56z
86 Pattneurs et traincaa 574
93 l^lise de Vassili Blagennoi 588
63 Moajicka aa marche aux grains. 6o«
64 Nait fetee k Pergola le jour de la Saint-
Jean 607
7 1 Place de Krasno'i et porte de Saint-
Vladimir 6ia
97 Maison dea enfants trouT4s fli8
66 bglise et pont de Troilski/I. , 6a4
^
L'UNIVERS
ou
HISTOIRE ET DESCRIPTION
DE TOUS LES PEUPLES,
DE LEURS REUGIONS, MOEURS, COUTUMES, mc.
CRIMEE,
PAR M. Cesar FAMIN.
^^ jdaat les yeux sar une carte de
l*einpirerQsse , on voit la Crim^ for-
mer UD qoadrilat^e qui paraft sus-
peoda dans la mer Noire par sa pointe
septentnonale, de telle sorte que cba-
<^ de MS autres angles correspond
nun & on des points cardinaux. La
sopofide de oette figure est d'environ
13,900 verstes carr^ ; sa plus grande
n>nguear,de Test h Touest, est de 300
vostes, et, du sud au nord, de 180
seuleincnt (*).
L'istfame ^troit ^ui r^unit ainsi la
Crimee a la Russie m^ridionale est
ahii de Piricop, Tancien T(0vs. Ces
<KQx mots, dont Fun est russe et I'au-
^ grec, signifient ^alement foss^.
n^tnaturel,enefret, guccenom,
]Qi indique un systeme d'lsolement et
V defense, fKH donn^ au seul point
^continental par leqnel la pdninsule pdt
(*)La vertts ou wertt est de 104 ^ an
^^; eile le divise en 5oo lag^es. La lieue
ftuamane de a5 an de^ correspond k 4
*^a^90sa|;faiM.
P Uorahon. (CxudEi)
itre envahie. Tout le o6te qui 8*^nd
de P^r6cop au d^troit de JeidkaXi est
d^ir6 par les envahissements I du
Palus-Mceotide. Ces eaux stagnantes,
qui ne oommuniquent ^ la roer que
Sar le passage de YenUski, s'infiltrent
ans llnt^neur des terres, et devien-
nent des marais infects, UnuU sapra,
ou mer Putride de Strabon ( XtjAwi
oavpa ) , lac Bias de Ptol6m^, Swasch
des modemes. L'angle oriental pr^
sente un d^vdoppement qui denature
la regularity du quadrilat^ , et forme
lui-mtoe une seoonde p^ninsule, s6-
pante jadis de la Crimee par un voir
hmj ou foss^ , que d^fendaient un
mur et des toureiles. C'est la presqu'Ue
Trach^, ou fiit le royaume du Bos-
pore, que Mithra- dates Eopator a
illnstr^ de son grand nom; Panticap^
en toit la capirale (*). La pointe ooci-
(*) Bospore et non pas Bo^thort; UUhra-'
dates et non Mithriaatt, Si l*usage donne
quelque antoriti aux erreurs les pins cho-
qiianles, elle ne les sanctionne pas ii tel point
1
L'UNIVERS.
dentale est une steppe qui n'offre d'ii^
t6ressant que les rubes de randenne
Eupatoria* aujourd'hui Koslow. La
o6te, en aesoeDdant vers le sud-est,
est entrecoupde de marais salants et de
Setits ruisseaux, souvent k sec pen-
ant ks phis fortes chaleurs de I'm.
La partie m^ridionale de la ^in*
sule est riche en souvenirs bistonques.
Pr^ de I'ancien golfe Ctenus^ les
Russes ont €iey6 SdlMisto^l , aujour-
d'hui Tun des ports militaires les plus
importants de tout Tempire. Non loin
de 1^, on retrouve ranti(](ue Cherso-
nesus dans la petite pdnmsule h(to-
dtetique, le cap Parthenkan, oCh,
selon une tradition fabuleuse, Iphi-
e^ie fut sur le point dimmoler son
ircre, le port des Stpnbales, enfin less
colonies mil^iennes, asiatiques et
g^noises , dont la rive est bordde de-
f)uis le A riod-m^^^pon ( front de b^
ier) jusqu*^ Thdoaosie, aujourd'bui
Caffa.
Get aper^ topographique serait in-
oomplet'si nous omettions de men-
tionner Ttle Toman, G*est un promon-
toire situ^ en face de la pointe orientale
de la Crim6e, qui parait d*abord tenir
au continent de la r^sion caucasienne.
mais qui , en r^ite , en est s^oare
par deux bras du fleuve Kouban, aont
le plus considerable se jette dans la
mer Moire, et le moins important dans
la mer d'Azow. L'lle Taman , la Pian-
UU des Ar^onautes (noun6iO, nom-
m^ par Pline Eione, et par Strabon
qu*il nc soil toujoars temps d'en Mcouer le
joiif . Bosphore est an baniarisme qui pariit
•▼Mr M subslitue, par amour de I'eupho-
nie, au B^mropoc des Grees et au Bosporus
des Latins. Bospore Tient de BoSc-irop^^* trajet
du b«Bttf. C*est ainsi que les anciens nom-
maient on detroit que, selon eu&, on boenf
poovait oasser k la nage. Nous avons, poor
adopter la veritable ddnominaiion , entre
autres autorites, oeUe da nvant Millin (ilfo-
nwntnu inidiu, 1 1 , page 17, note ai).
Mithra»dates tsi le nom que portent ton-
tes les medajlles de oes rois du Pont, et on
n'igoore pas que c'est un hoounage rendu k
rancien culte du dieu Mithra. (Voy. If^
ihri^si, par M. de Hammer.)
Corocondamay est eomjjoaie de ma-
tiires volcaniques, ainsi que de Hts
de sable et de mame converts d'eaox
stagnantcs, de joncs et de roseaux.
Elle fut jadis visit^e par tons les peu-
ples que nous verrons figurer dans
rhlstoire de la Tanride, et fit paitic
suecessivement de la Saimatie d^^sie,
du pays des SindeSy de rempire da
Bospore, de oelui du Kaptcbai et da
khanat de Crim^. Les Grees y ^le^
virent plusieurs villes ^i durent a
leurs relations oommerciales use im-
portance btstorique.
Le bras de mer compris entre Tfle
Taman, k Test, et la presqulle Tra-
chde, k Touest, est Tanden Bospore
Cimm^rien, appel^, depuis, d^troit de
Zabaclie, ou Swasch, de JeiukaM et
de Taman. Sa longueur est de 45
verstes ; sa largeur varie de 5 i SO.
L'int^eur de la Crim^ n*est qu^une
immense steppe. Le regard n*y troure,
pour se reposer,que les ^^vationspy-
ramidales oOi d'anciennes g^ndratioos
dorment ensevelies; ce sont les ttpnu'
kUf appel^ hourgans par les Tfttares.
Aujoimi'hui , ainsi qu'au temps de
Mithra^tes, de longues caravanesde
chameaux, ces navires du desert, se-
lon Texpression pittoresque des en-
fants de TArabie , sillonnent cette
Elaine infitonde, portant sur ieurdos
; sei et les mardiandises de transit
Sfuelques rares tribus de Tatares et
e Boh^miens nomades dressent leuis
tentes sur les bords du Salghir* le
TapsU des anciens. Ici , comme dans
les autres parties de la graode plaine
tatare , les preaves irr^cusaUes de b
retraite des eatn sont toites sur le
sol. Les fossiles en oouvrent la soper-
ficie ; et il en est plusieurs , le ^
nummuknius, entre autres. Qui se
rapportent a des animaux dont Fes-
pece a enti^rement disparu. Les itag*
ments coquiliiers entrem^es a des
coucbes de matidres calcaires defo^
mation rtonte, ajoutent, par ieur
presence, k la certitude de ce pheoo-
m^ne. Dans la belle saison, cetteplaine
est couverte de gazon ; on y voit pal-
luler des uu6es de sautei«lles» des
troupes de sourouk ( gHs marmotta)i
GRIM^E.
eC des taupes-souslik ( mm cUelku ).
La gerboise , bizarre mammiiere one
I'on ne sait s'il feut classer panni les
quadrupMes ou les bip^des, tant les
appendices ant^ears sont peu pro-
Dortionn^Y chez lui, aux pattes de
rarri^re-train , habite les mimes loca*
\ii6s. De nombretises bantdes d'ou-
tardes, d'oks , de grues et de cigognes
s'y montrent fr^quemment. Le cha-
ineau a double bosse , dit de la Tan-
ride J ik'est pas inferieur a cdui des
plaines africaines ; il a la mime doci-
lity et le mime divoaement pour le
seirice de Tbomme, cet ingrat des-
pote « qui toe son esclave et se nour-
rit de 88 chair guand il n'a plus rien
a espiacet de lui. Les loups , les re-
naraa, let Maireaux, les cherrenils
et ks li^yres sont communs dans les
montages du sud. Les di^vres , dont
la peau eert h feire un maroqutn fort
I estim6 des Orientaux, abondent dans
I les m^fDes localitis; mais ce sont les
moutoos qui forment la veritable ri-
chesse des Tatares de la Grim^e , ^i
tons en possddent un plus on moms
grand nombre. H n'est pas rare de
Tcnoontrer des troupeaux de 20 ^
30,000 de ces animanx , et mime da-
vantage, qoi appartiennent h un seal
propnteire. 11 y en a de deux espdces,
IB frht et la noire. Le mouton de la
plaine est plus gros et plus robuste
que celoi ae la montagne, mais sa
laine est moins longue et morns
sojeuse. Quant aux chevaux tatares ,
ils scmt loin de pouvofr 6tre compares
a oeox de la Circassie ; ginlralement
petits , ils sont nianmoins vife et ro-
buites.
Vers le sod, la steppe s'6l^?e sen-
siblement , et Ton trouve enfin la r^
(don des montagnes, dont la chalne
horde le littoral de la mer Noire ,
depuis la presoulle biracllotique et le
port des Bymocto jusqu'au Bospore
Cimm^rien. L'aspect de ces ti^vations,
dans la majeure partie de leur d^Te-
loppement, ne pent €tre compart
qu'a cdui des colonnes basaltiques de
la grotte de Fingal , aux ties Hwrides.
lei de grandes masses calcaires, m^l6es
de marores rouge et blanc, de jaspe,
d'ardoise et de grte , sans aucun ves-
tijB» de granit primitif , forment des
pfliers perpendicalaires , serr6s les uns
centre les autres oomme des tuyaux
d'orgue , et couronn^ par des couches
superieures pos^ horizontalement.On
y trouve des agates , du plomb , du
cuirre, du fer, du crista! de roche,
du cfaarbon de terre , et , sor le riva^e,
un sable entierement compost de mica
coior6 d^or. C'est aux envntms de Ba-
laclava aue les Tatares recueillent le
kaff-himy ou ^ume min^rale, sorte
de terre ^ foulon , dont on fait de
belles noix de pipes.
Le mont Trap^, aujourd'hui Tcha-
tW'daqh^ est le point culminant des
alpes de la Crinm; il s'ddve ^ one
hauteur de 4,700 pieds (vo?. pi. 4).
Gette partie de la presmilfe en est
^ la fois la plus fertile , la plus tem-
p6r6e et la plus pittoresque. La valine
de Bandar, h quelques verstes de Ba-
IsMdava , m^ite une mention spedale :
c^est une niaine bien cultiv^, de 16
verstes de longueur, sur 4 de largeor,
entourde de nautes montagnes d*ou
s'^obappent de minces filets d*eau qui
ooulent, silencieux et inaper^s, dims
les interstices des rocs, et entretiennent
ineessamment la verdure et la firat-
dieur de la vall^ Des champs de bl^
entourte de haies vivas, des jardins
d^Kcieux, des villages d*une grande
propret^, des prairies ^mailltode fleurs
briliantes , des rideaux de saules et de
Seupliers, des bonnets de lauriers,
es bois de grenadiers et de dattiers
r^lament de tout cdt^ Fadmiration du
voyageur.
bans les autres parties de la region
montagneuse , les plantes les plus re-
marquables sont , ind^pendamment de
celles que nous venous de nommer,
I'olivier, le fiffuier, le fr^ne h manne,
le ch6ne a un, le micocoulier , le
poirier, le pommier et le cerisier
sauvages, et quelques plantes alpines,
telles que les sauges et les centaury.
Les pains de la Crim^ formaient
autrefois une importante branche de
commerce que les guerres d*invasion
ODtruin^esensiblement. Toute la plaine
qui se trouve comprise dans la pres-
1.
L*UNIV£RS.
fi1le Trachee , sur la route de Cafifa
Kertch , aujourd'hui incuite , ^tait,
dans un temps, oouverte de o^r^es,
dont la r^lte donnait de 1 5 a 20 pour
La culture de la vigne paralt d*ail-
leurs devoir remplacer aujourd'hui en
Crim^ oelle des cdreales ; nous aurons
I'occasion d*en reparler.
Le dimat de la p^ninsule est sain
et agr^able dans la partie montagneuse
du sud-est; il Tesi moins dans rint^-
rie-ur, et surtout aux environs de la
mer Putride. lA r^nent quelques
fi^vres endemiques qui atteignent sur-
tout les strangers. Gendralement le ciel
est pur et l^ir mod^r^ent diaud ;
mais dans les plaines « le firoid et la
chaleur sont plus sensibles et devien-
nent souvent fort incommodes.
La population permanente de la
Crim^ n'appartient pas k moins de
sept &miUes : la turque, odt sont com-
pris les pennies faussement appel^
Tatares par les Russes ( nous oonti-
nuerons nous - mtoe h les nommer
(*} « On ne cease de rep^ter que le pro«
«• gr^ de ragricultnre dam les pays dont la
« mer Noire oorde le littoral , et Teitensioa
« qu*a prise depuis qnelqiies ann^ le oom-
•* meroe des grains duLevant, sont les vMta-
« bles causes qniont fait baiaser teur prix en
«i Europe : c*est oneerrenrqu'it est facile de
• refoter. La valeur des grains n*est point di-
<• minu^ ; elle a subi , an eontraire, laoons^
« qnence de la depreciation du nuoieFaire . . .
<• En effet, une mesure de ble se paie quatre
• fois pluscher quedans le i6* siecle;maisle
« marc d'argeiit codle egalement quatre fois
« plus qu'il ne valait alors ; oe qui nrouve
.t que le prix de cette denize n*a point Daissi,
« et qu^elle a, au contraire, conserve la pro-
M pri6te <^ue la plupart des iconomistes lui
M reconnaissent , d'etre oonstamment en rap-
Mport avec la valeur do numeraire.. . . Le
« commerce des grains de la mer Noire est
• d'ailleors beaucoup plus ancien qu'on ne
• le croit gineraleraenL Les Genou s*y U-
•I vraient avec aideor et suoces dans les dou-
« zi^DM, treiziteie et quatonieme siedes,
« et, d^ttis oette ipoque, les nations com-
« mergantes en ont conslamment fait venir
•« dans les annees de disette. » (C Fandn ,
Im SicUe eo/uulcrec sous le rapport de fagri'
cuUure. Paris, iS3i.)
ainsi pour eviler loute confusioa) , Iti
Ttircs proprement dits, les Anato-
liens et les Nogais; lamongo^e, com-
pos^e des Kabnouks; la MauknU,
des Boh^miens; la simi^quBy a la-
quelle appartiennent les juifs karaites;
la slave f souche des Russes; la ^ec-
que^ et enfin Varmenienne.
L^histoire de ces divers peoples, en
oe qui concerne la Crimee, embrasse
quatre 6poques parfaitement caract^-
risees : celie des Tauro-Scytbes , jus-
qu*au cinquieme si^le avant J.-C.;
celle des rois du Bospore, jusqu^u
milieu du quatrieme siede a];>res Ten
chr^tienne; T^poque des invasions, qui
nous conduit autreiziemesiede; eonn
celle du khanat de Crim^e, jusqu'a
Tannic 1783, dans laquelle cette p
ninsule fut annex^e au vaste empire
de Catherine IL
PasMiEEB BPOQUB. — Le* Tattfo^
Scythes. Les Cimm^iens, KunmerUy
qui sont; a n'en pouvoirdouter,Iepeu-
ple que les Hd)reux ajqiielaient Jtfa^i
et les Grecs Mcsoies (voir la notice sur
la Region Cauctuienne) , apparaissoit
les premiers sur Thorizon lointaiode
Thistoire qui nous occupe : c*est eut
qui ont donn^ Jeur nom k la Cn-
mde. lis habitaient d*abord les plaioes
de rint^eur; mais rinvasioo o^s
Skolotes , nation barbare qui apparte-
nait k la grande famille des ScyttiOi
les a\yant refoul^s dans les montagoes,
ils furent appel^ Taures, oe qui cor-
respond k Montagnards (*). Leurj^ys
prit dte lors le nom de Tauride. D^
venu bientdt commun k toute la ocm-
tr6e, remplac^de nouveau , pIos>^^
si^es apres, par oelui de Cnm^i ce
nom a pr^vaJu une seconde fois, et
s'applique aujourd*hui k une province
etkuhe , dont la presqulle n'est qu ud
d^membrement.
(•) Le Taurus de r Arie-Mineore n'a p"
d*atttre itymologie. Tm^ est le nomqui»y
les langues de cette oontrte, oorrapooi! *
Alpes. rirw en chakteen.ronn^ en jyT««
et Toira dans la langue des andens ^V
rieosy signilient cgament montagne* (j^T
PetrooTliHguanim totius orhU voeaM*'
rittm^
CRIMJ^E.
Les Taurcs , a r^troit dans leurs
moDtagnes , et peu dispose k s'adon-
ner aiu arts de ragricutture , v6cureiit
Qoeique temps de vol et de pillage,
pabord ils enlevaient les bestiaux des
habitants de la plaine; mais, plus tard,
loraqu'i la suite des voyages de Phri-
xos, d'Hell6 et de Jason, les naviga-
tearegpccs se montrtrent sur les eaux
de Ja mer Noire , les Taures abattirent
les grands chtees de leurs forlts jpour
construire des barques monoxjtones
et coorir sur les Taisseaux marcnsmds.
yil arriTait que le r^niltat d'une croi-
were flit heureux, les pirates, satis-
nusant au premier besoin de toutes
les sod^t^ naissantes , ofifraient une
partic du butin h leurs divinity, parmi
lesquelles les astres , et la Inne notam-
■cnt, jouaient un grand r61e. Lorsque
a tonp^te jetait un navire stranger
jur leurs cdtcs, les sauvages h&i-
tants de la Tauride ne croyaient pou-
voir roonnattre dignement cette fa-
▼eurdcleur providence qu'enlui oflfrant
« bolocauste quelques-uns des mal-
neareux naufrag^s. Dans ces ciKon-
^J^nces, apres les c6r6monies d'usage,
ns asaommaient la victime d'un coup
?? «»ww» puis ils lui coupaient la
'etc, rattacbaient h un poteau, et
enterraicnt le corps honorablement.
C est un usage que suivent quelquefois
encore, k T^ard de leurs prisonniers,
«rtaines peuplades du Caucase, les
Ingoacbcs et les Tchetdienses.
A Pepo^ue oH Hercule et Th^-
sa oitrepnrent contre les Amazones
w rAsie une exp6dition sans but
fommc sans gloire ( quatortitec si^le
avant Tere dir^ticnne ) , un vaisseau
fu portait guelques-unes des plus il-
wstres captives fchoua sur les c6tes
« Wpresqu'flc Trach^e, dans le Bos-
pore mime. Echappant a la vigilance
ys SCTthes, ces femmes s'empar^rent
j» an haras de chevaux et c6toy*rent
» Httoral de la mer Putride pour sor-
«r (te la Crim^ par risthme dit au-
pntThui de Pcrtop. U , elles trou-
»erent les Hippomolj^ues , qui sc nour-
n^^ient du lait aigri de leurs juments :
s etant alli^es avec eux , elles furent
««aWir au-dela du Tanais, ou elles
donnerent naissanoe h 1» natio» dei
Saoromates.
Les Grecs, toojours anis de la
po^e et du merveilleux, raoontaient
avec exag(6ration ce qu'ils savaient des
moears de ces peuples. Une vaniW
bien oonnue dans Thistoire leur ftisait
dire que les dieux honohte en Tauride
avaient une orijgine grecque, oubltanl
ainsi quecesdivinit^ avaient tapper
t6e8 k eux-mlmesenGrdce par des co-
lons strangers. Yoyaient^ilsuiie peopla-
de sauvage adorer le soleil , la lune, le
feu, ou un glaive, comme le fiiisaient
les Scythes , ils publiaient que les bar-
bares rendaient nommage a Apollon,
h Diane, k Vesta et k Mars. Avant de
partir pour les ri vages de Troie , Aga-
memnon avait offert un sacrifice a une
divinity irrit^; la populace crMule
allait jusqu'^ dire qu il avait immol^
sa propre fille , son I|>hig6nie, la fian<^
d'Adiille, mais que Diane (la kme) avail
enlev^ la victime; et oik aurait-elle pu
la conduire, si ce n*est dans le pays
ou les Taures se prostemaient devant
la lune, comme on a vu depuis les
P^ruviens le faire k I'eeard du soleil?
La elle avait oonti^ k ui jeune prin-
cesse les terribles fonctions du saoer-
docequi Tobligeaient^ forger les maJ-
faeureuxqai venaient ^chouer sur oes ri-
vages inliospitaliers. Ccpendant Texii
de la rc^le pr^tresse eut un terme
prochain; son Mre Oreste la reoon-
nut au moment oik lui-m^roe allait
itre immol^ par elle, & la suite d'un
naufrage, et reussit^larameneraupa-
lais de ses peres. Toutefois Hom to ait,
en termes bien pr6cis , qu'Iphiff^nie
n'avait pas quitte le toit patcnuu (*);
mais, quo! qu'il en soit, it naratt cer-
tain qu'^ Tepoque ou les Grecs , de-
venus plus entreprenants , commen-
c^rent a 6tablir quelques colonies sur
les c6tes de la Tauride , ils cherchtont
k se rendre les peuples indigenes fa-
vorables en leur prouvant qu'ib avaient
les mimes dieux ; et e'en k eux, en
cons^uenoe , et non pas aux Tauro-
Scythes , qu'il faut attribuer la fbnda-
tion dfc oes temples de Diane , dont on.
f*^ Ili«i«, chant ix,v. 144, *
L'UNIVEES.
retrouve encore qualques vestiges. Le
promoDtoire sor fequel , sekm m tra-
ditions KoGoles , Ipbig^oie avait cou-
tame d'immoler les Mansers , fut ap-
pel6 cap Parth^nium , ou ae la Vierge ;
mm les archtologues varient sur sa
veritable position , ou peutngtre y en
avait-il pilusieiirs. Nous en meationoe-
rons trois. Le premier, dont il est
question dans atrabon, est situ6 au-
of^ de la modeme Sebastopol : c'est
le cap le plus saillant du sud-ouest ;
on y troiive des lacs sal^ et des ruines.
(Voir h pL 1.) Le second est place
entre fialadava et le monastere Saint-
George. Le troisidme, enfin, appel^
oujourd'hui ParthenU , se voit a peu
de distance de Lamlmt.
Le eolfe ou les pirates avaient oou-
tume de rassembler leurs bateaux, soit
pour combiner de nouvelles exp^i-
tions, soit pour parta(;er le butin,
^tait admirablement choisi. Les Grecs
lui donn^rent le nom de port de la
Rencontre (2ufA^o<), d*ou les Latins
Orent porim S^mbolorum. Gette bale
est situ^e sur la cdte du sud , entre le
monastdre Saint-George et Balaclava.
Vers Tann^ 63S avant J.-C., les
ScjrtbesSkolotes, toujoursen ^tatd*bos-
tilit^ avec les Cimmeriens, r^solurent
de rejeter leurs ennemis hors des li-
mites de Tfiurope. lis s(Nrtirent dmic
de la pteinsule, sous la oonduite de
Mady«i, ne laissant diez eux que leurs
femmes et leurs esclaves. Aprte une
longue marehe et des combats dont le
souvenir nous a ^ transrois par H^-
rodote , ils travers^rent le Caucase 1^
la poursuite des fuyiurds , ravaaerent
la M^die<, et arriv^rent enfin oevant
Ninive. au moment ou Cyaxare en
faisait w si^. Ayant vaincu oe mo-
narque , its se disposaient a passer en
Egypte, ou r^ait Psanmi^tique, lon-
que oe prince obtint, a force de pre-
sents, qu'ils rebrousseraient chemin ,
et se oontenteraient de gouverner le
pays des M^des. Mais apr^ y avoir
vtoi, endeapotes,respacedea8ans,
ils en furent cfaass^ par ce m^me
Cyaxare. lis r^lurent alors, eux et
les enfants qu'ils avaient eus dans leur
Emigration , de retourner sur le sol
natal : or , oendant cette longue ab-
sence , leurs lemmes les croyant morts
s*Etaient unies , faute de mieux, \ ieurs
propres esdaves ; et de ces alliances
il Etait r^ultE une nouvelle ate^tion
de guerriers, dispose ^ diSDuter le
pays ^ ses anciens maltres. Lorsque
ces jeunes^ens ap^rirentque lesScvtbes
6*approchaient , ils se retrancbereDt
dans la presquHe Trach^ , et en for-
tifierent Tentr^e par un fosse qui pee-
nait toute la longueur du passage dans
sa parUe la plus Etroite depuis les
monts Tauriques jusqu'^ la mer (IK-
20W ; on en voit encore aiyourdlHU
les vestiges , qui s'Etendent des eovh
rons de Th^osie, ou Kaffa, jasqaa
Arabat. II y cut , entre les deux par-
tis , des rencontres sanglantes sans
r^sultat : alors, selon Herodote, lun
des anciens oonqu^rants de la Medie,
s'adressant ^ ses compagnons, lear
dit : a Que faisons-nous? quaad ces
« gens-la nous tuent nos firoes, notre
« nombre diminue; et si nous toons
« quelqu'un d*entre eux, nous dimi-
« nuons le nombre de nos esdaves:
« laissons 1^, croyez-moi , nos arcs et
« nos Javelots, et marcbons 3i eux »•
« m^ du fouet dont nous nous ser-
a vons pour mener nos chevaux. Tani
« ou'il nous ont vus avec nos armes,
a us se sunt persuade que leur god-
« dition et oelle de leurs p^res dtaiat
« semhlables I la ndtre ; mais quain
* ils nous tverront le fouet i la mam
« au lieu d*armes , ils appreodroDi
a qu'ils sont nos esdaves, et Doee-
« ront plus nous raster. » Cc pofflji
fut approuvE , et le succes en jusuna
la sagesse. Les esdaves, suipnsae
cette mani^re de combattre , ne ^
gerent nullement Ik se dtfcndre ; "S
s'enfuirent pr6cipitamment et IcsfvaJD-
queurs rentr^ent chez eux sans owwj
de. Le souvenir de cette aventure s esi
transmis d'^een ^e ^ plus d'unepett-
pladeaujourd'bui rSiigi&danslcsnaoD-
tagnes du Caucase. La, on voit, oi eneij
aux cdrtoonies d'un mariage, le ^
prendre un fouet et en raenacer h
femme, comme pour rappeler le sou-
venir de cet antique afBront et perpe-
tuer celui de la vengeance. Les des*
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eendants de oes esdaves, MoBOta d'o-
rigine, forent kmg-temps oonniu sons
le nom de Sindes; ils nabitaient aux
environs de la mer d^Azow.
En sai , les S<7the8 de la Crim6e
prirent une grande part dam lea guer-
res oontre Darius.
ScTTHBs. — - Les Scythes avaient la
barbe tongue; ilstoientg^n^ralement
courerts de peaux de mouton; les
cheft seuls se rer^taient de la d^-
g^uille des Mtes fauves. Ils oombat-
ient h chevaH, et se serraient de
Qiassues, dejavelots, d*arcs faits avec
to comes aantilope, et d^une sorte
de glaiye semblable h oelai quite ado-
raient. Ils ^ient bona cavaliers et
excellents archers. A la gjuerre, ik
godtaicnt du sang du premier ennemi
ga'ils avalent tu^ , et ooupaient la t^te
a tons les autres. On trouvait parmi
eux nn ^nd nombre de devins qui
se serraient de baguettes de saule
pour leurs joneleries; c'^taient eux
qui exercaient la m^decine. Vivant
en nomanes, les Scythes dressaient,
surdes chariots, des tentes k compar-
timents int^rieurs; c^^tait I^ que vi-
vaieat leurs femmes et leurs enfants.
lUposs^daient de nonibreux troupeaux
de boBofs et de moutons, nmis ils
prtfoaient la chair de cheval. Quand
ie nM venait a mourir , ses amis en-
doisaient son corps de cire, lui fen-
daieat le ventre et le Bemplissaient de
psriuais et d*berbes aromatiques. lis
le reeousaient ensulte et Tenterraient
arec nne de ses concubines qu*ils
araient ^ran^l^, ainsi qu'un Mnan-
soD, un cuismier et un palefirenier.
Cela fadt, Us ^tranglaient encore une
dnqoantaine de ses serviteurs avec
un jttrdl nombre de ses chevaux, leur
dtaient les entrailles et les bourraient
d'berfoes s^es et de foin. Puis, ils
mettaient les hommes, ainsi empail-
1^, k cheval sur les animaux, les
assnjettissant k I'aide d'un pieu qui
leur traversait T^ine dorsale, et les
pla|pieiit autour du tombeaa pour
d^fendre leur maltre et veiller h ses
besoins.
Tels 6taient ces baibares qui oppo-
serent une tongue et impuissante re-
sistance aux envabissements de la
Grdee«
Dans le courant du VII* sikAe avant
J.-C. , on Voit arrive en Tauride les
ootonies greoques, appartenant, pour
la plupaii, ^lapuissante Milet. Les
Hmcndes de Megare et ceux du Pont
fondent, dans la p^ninsule du sud-
ouest, la vitte de Cherson [Cherio-
nesus), long-temps souvem^ en r^
publique sous la tutelle de la m^tro-
pole , et devenue si cfl^re, qu'il fut
un temps ou la Crim^ n'ent pas d'au-
tre nom que celui de Chersontee.
Dans la presqu'tle Trach^, les Mtl^-
siens jettent les fonderoents de Pati-
Hcapee, destine h devenir un jour
la capitale d*un empire florissant.
Gette ville peul ^tre consid^r^e oomme
la m^ des colonies mil^iennes du
Bospore Cimm^rien ; elle a 6t6 arae-
1^ depuis Bosporus et f^ospro : cmt
la modeme Kertch.
Parmi les autres ^tablissements que
les Grecs form^rent dans la Tauride,
nous mentionnerons , sur I'autorit^
des gtographes de cette nation et de
ceuxde Byzance, TfUodode^ Cytee,
Nympfuaon , aujourd'hui Apouk ;
MymUdon, PcUakUm et Lampas; et
dans le pays des Sindes , au-deUi du
d^troit, Pkanaqorie, Hermonassa,
KimmerUm , cme ( actudlement
C»pil 00 Sinai?) : COfwimdama, dont
on croit reconnaltre Templaoement et
le nom mtoe dans la petite ville de
Taman, que Gonstantm Porphyro-
e6n^ appelle Tamaiarea; AchUr
Jmon, ao d6bouchement du Palos, k
Fendroit o6 le Bospore est le plus
dtroit; plus loin, sur le littorai du
Pont-Euxin. Portus SMUnUy main-
tenant S(mdffoukkale ; Sinda et Tori-
cus, Selon Eustatbe , Phanagorie et
Hermonassa furent ainsi appelto du
nom de leurs fondateurs Pbanagoras
et Hermon , cheft des colonies voM-
siennes : mais Arrien rapporte qu'un
TSien , du nom de Pbanagoras , fu^t
la domination des Perses , vint jeter
les fondements d'une ville k laquelle
il imposa son nom, pendant qu'un
citoyen de Mityl^, k la t^te o'une
colonie d'^^oliens, fondait, k pen de
8
L'UNIVERS.
distance , une autre viUe dont lee ooo-
atructione furent acherto par sa yeuve
Uermonoisa.
Ce soot 1^ les faits les phis saillants
que Dous puissions recueillir dans la
piemi^ periode de cette histoire jus-
qu'au V* sitele avant I'dre chr^enne,
epoque ^ laquelle f ut fond^ le royaume
dfi Bospore Cimmerien.
Deuxibmb epoqub. — Le$ roU
du Bospore. — ( De Tan 480 avant
J.-C. a Tan 350 de 1*^ chr^tienne.)
— Les cdonies greoaues , s'etant ren-
dues assez respectables pour mattriser
les bari)ares, commenoerent k ^tendre
leur domination dans Tint^eur des
terres. A Cherson elles ^tabiirent des
archontes , ou proterofty appei^ quel-
quefois du nom de h>is, mais qui
n'^taient en n^alit^ que les premiers
magistrats d'une republique vassale de
la m^tropole. II n^enfut pas de m^me
a Panticap^e. De Tunion des Mil^-
siens et des Scythes il ^tait r^ult6 une
population inmistrieuse qui , s'ag^k)-
merant dans les murs de cette viUe
et dans ceux de Phanagorie, ^prouya
bientdt le besoin de se soumettre k
une volenti unique et puissante , ca-
pable de prendre les mesures qu*exi-
geait la position des colonies sur les
confins du monde civilis^ , en prince
d^unenu^ debarbarescontinuellemeut
en ^tat d^agression. Les premiers cbefii,
connus sous le nom irjirchsanacU'
des J on anciens princes, regn^rent
d'abord en Asie, au-ddli du Bospore.
L'un d*eux , Spartacus I*', r^unit k ses
domaines la majeure partte de la pres-
qu'tle Trach^ , et f ut salu^ du nom de
roi du Bospore Cimmerien; jusque-
1^ , ses pr^dcesseurs s'^taient intitu-
le archontes de Bosporos et de Th^
do»e, rois des Sindes^ des Torites
et aes Dandariens (tribus masotes).
Cet^vtoement eut lieu Tan 439 avant
notre ^re. Le royaume du Bospore
fut d6finitivement oonstitu6 sous le
regne de Leucon ; ce qui a fait donner
k sa dynastic le nom de Leuconienne-
Cette forme de gouyemement ne dura
pas moins de 800 ans; car les Ro-
mains, qui succ^d^ent aux Grecs
dans le droit de suzerainete sur cette
oounmne, sentirent, oomme oux,
qu'il ^tait plus convenable k leurs ve-
ntaUes inCMts de prot^ger les rois
de ce pays , dernier boulevard de la
civilisation sur les fronti^res de la
bairibarie, oue de vouloir y gDuvemer
par eux-memes. Les rois de Pont pos-
sMirent long-temps, ainsi qu^on va
le voir, la couronne du Bospore. lis
^taient plus riches qu*on ne pourrait
le supposer d*abord , ayant k eux seuls,
en qnelque sorte, le monopole du
commerce du Pont-Euxin. La valeur
et rimportance de leurs m6dailles d'or,
les frakments de leur histoire 6dhap-
p^ k roubli, et les inscriptions de
quekpies monuments de cette Epoque
nous font regretter vivement rigno-
rance ou nous sommes encore sur des
6v6nements qui jetteraient certaine-
ment un grand jour sur toute Tanti-
quit^. Nous allons signaler ce au'il^
a de plus authentique dans oes aAris
de I'histoire C).
(*) Panni let savants qui se sodI oocupcs
de rhistoire des rois du Bospore, fl taut
citer Yaillant , Hardouin , Souaet , de Buk,
le numismate maneillais Gary, Visconti ,
MM. Saint-Martin, IUoul-RocfaeUe,Koehlcr
et Rommel dans I*EneycIopidie d*Er9ch et
Gruber. Malheureusement les materianx que
rareh^ogie a mis a leur dispositkm oat cte
jusqu*ici d'une iniuflisanoe deseqi^raDle ;
des mMailles rongies par le temps, des fng-
ments lapidaireamutilei , des Ubummu dlii^
toire epars dans Diodore, Strabon, Dioo-
Cassius, Appien , Gomtantin Porphyroce-
nete et quelques autres, iroil4 Ics aeiiues
sources ou ils ont puise pour elevcr une
trovene plus iogenieuse oue satislaiM
Jusqu'id m^e on n*a pu etablird*une
niere precise la Uste de oes souverains. Chn-
3ue jour , la dioouTerte d'une mMailie ou
'une inscription necessite la rectificntkm
d^in fait que ron jugeait prioedemmeBt bien
itabli. J*aipens6, touterois, qu'il neaeraic
pas inutile de dresser une t^le dironolofi*
que de oes rois, telle qu'cJle rtedte de vAt
adud de nos connaissanoes lur cette '
che de lliistoire ancienne.
EOU DU BOSPORB OMMfalBf.
4§t (imlM &«■lte^ MideM prii
avmt aoiR tri.
crim£e.
' 8parteei]sl*'et8ndeiix8ttOoe88eiin
imm^diats, Sfleucus et Spartacus II,
ae figoieDt dans tliifltoire que oonune
les aOi^ de la Grtee , ainsi qu'on peut
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iiS-63). II awxlc aa tvtea
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bnuian dm Tmntqon. JUtoob bbs LsBcoviaBa.
I, vm If RMMBMccBMBt dc r«r« c (D«>
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G4p*pjrla.
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da J.-C. db da PttMBMB lew.
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da Mltb. lapalDr.
49 r fr4ra da prirddaBt.
in r— M (DoBiUaadlaataBiparea
-.II t4— lad CTr^laB Id.
9«I>IU. lad— il>(4drlrii id.
.iSa— Id4 (Antaala Id.
164—171 ■PP'U aoMl Lupator.
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coaBBaa.
IV. . . au— sag pen cobbb.
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rioda aaa fnada ooafa*
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Ka prtciaa a laqaellr bb
oca aBaTeraiBi a auf
cM« * I'aatrc.
daniier amntnin cobbb.
le voir dans Dtaostli^ne et Isocrate.
A Spartacus II suoc^da un prince
connu sous le nom honorifi^e de
Saii(rus, II aooorda aux Ath^niens le
privil^e de faire le commerce des
grains dans ses 6tats , et p^rit au si^
deTh^odosie. Leuoon,son ftls, monta
sur le trdne Tan 893 avant J.-C.
Les Ath^iens appelaient assez to-
lontiers tyrans les rois des oontrte
^oi^6es I mais Leucon fut exempt de
cette qualification; il fui mtoe honors
du titre de citqyen d' AtMnes , et ce-
pendant I'histoire nous le montre en-
▼ironn^ d'espions et d*adulateurs. L'un
d'eux lui avant un jour d^nonc^ un
homme ^viaemment innocent : « Mi-
serable, lui dit Leucon, je te tuerais
de mes propres mains, si les rois
pouvaient se passer de tes semblables ! »
Ge prince soumit Th^odosie, y porta
le grand entrep6t des grains de la
Grim^e, r^gna glorieusement pendant
quarante ann^, et m^rita de donner
son nom k sa dynastie. Strabon nous
apprend qu'U envoya aux Ath^niens
1,100,000 m6dimnes de bl^ ( 570,000
hectolitres). Spartacus III, ills afn^ de
Leucon , gouvema pendant quatre an-
nto seulement. Apr^ lui , ses trois
fibres, Paerisades r% Satyrus II et
Gorgippus I*', r^gn^rent simultan^-
ment sur diverses parties du royaume
(349 a 811). Ges monarques ayant en-
voy^ du bl6 aux Ath^niens en un temps
de disette, ceux-d , sur la proposition
de D^mosthene, leur ^ng^rent des
statues d'airain; Paerisades m^me,
apr^ sa mort, tai mis au rang des
dieux.
(811-809) >- Sahrrus III, Prytanis
et Eumilus, tons trois fils de Paerisa-
des r% furent appel6s h recueillir la
succession de leur p^e et de leurs on-
cles; mais Eumilus, las de partaser
le trdne , fit la guerre h ses freres , les
tua , et conserva trois ans le pouvoir
supreme. II eut le sort du fils de Tile-
s' : ses chevaux s'emport^ent et il
fut toas^ sous les roues de son char.
Son fils Spartacus, quatritoedu nom,
lui succ^aa (307-288). Ici, il exista
dans Diodore une lacune que Ton peut
combler en partie h Taide de la nu*
10
L'UIilVERS.
niisouitique et de quelques paaiam de
LucieB et de PolyeD, sans ^'u soit
possible de ditsipar robscunt^ cfaro*
nolo^ique de cene p6riode. De Fan
388 a 118, six monarques se sueci^
dent 8ur le tr6ne du Boepore, Leoca-
nor, que I'on suppose fits de Sparta-
cus Iy, EobiotuSf fr^ natorel du
pr^c^ent, Satyrus lY, Gorgippus II,
qui fonda une vilie non loin de Pha-
nagoria, et lui donna son nom , Spar-
tacus V, dont les Scythes enyahissent
les ^tatSf et qui adidte la pau par
une concession de territoire, et enfin
Paerisades II qui.erivironn^d^ennemis
redoutables, et crai^nant de tomber
lui-m£me au pouvoir des barbares,
abdiqua la couronne en faveur du
grand Mithra-dates , Firopiacable en-
nemi des Romains , le roi du Pont ,
Tarbitre des destinies de TAsie-Mi-
neure.
( 118 a 61). -- Mithra-dates , qu'il
suffit de nommer pour r<6veiller le
Slorieux souvenir de ses victoires et
e ses yertus , de ses rerers et de ses
fautes, apporta aux Bosporiens I'^e
pontique , aont la premiere ann6e cor-
respond k Fan 469 de Rome, 997 avant
J.-C. De son temps, les Sarmates
Jaziees avaient enyahi la Crim^e, sou-
mis les colonies greoques k leur payer
tribut, et menaqaient m^me a*une
destruction prodiaine la r^puUique de
Cherson et le royaume du Bospore.
Mithra<lates les biattit compl^tement,
les refoula au-deld du Borystbtoe, et
saisit cette occasion pour soumettre
les Gbersonites eux-memes k sa domi-
nation. Un de ses g^^aux fonda
EupcUarium, que Ton croit ^re la
modeme Koslow, sur la cdte occi-
dentale de la presqutle.
L'histoire ae Mitiira-dates se rat-
tadie , par la gloire , k ceile de T A-
sie-Mineure , par les revers aux fastes
romains , et par la mort aux annales
du Bospore. Son fils Macharte , qu*il
avait associ^ k sa couronne, l^re 1*^
tendard de la rdiellion ; mais Icsucods
ne justifia pas cette coupable entre-
prise ; pouss^ dans ses demiers retran-
chements et d^sesp6rant d*obtenir le
pardon de son pere , Machar^ ne vou-
lot pas attendre sa justios et se doua
la mort. Yen I'amiee 80 a? ant Jtes-
Christ, d^KMsW luinnlme de set
6tats de I'Asie, yaincn et abandoDn6,
Mitiira-dates se retire k Panticap^,
oil, alli^ avec les Scythes, U r^e en-
core la destruction de Fempire ro-
main. La tnftiison seule fit ee fue la
fbrce n*ayait pu op6rer; elle brisa le
glaive de ce heros. On vit, ^ Pbanago-
rie, un homme d'une naissance iUos*
tre. Castor , combl^ des bieofaits de
son mattre, suivre Fexemple de i*in-
grat Macharte, et chasser da Bo8«
pore asiatique la famiUe du roi.
Cherson , qui ne snpportait qu'en fr^
missant le joug ae cette royaot^
^trangto; liiMdosieet Nymphaioo,
^uvant^ss du voisinage d une arm^e
romaine, et d'autres villes enooie»
r6pondirent k &t appd de la liberte.
Cependant Mithra-^tes ne se laissait
pomt abattre : il envoya ses filles,
sous la garde de quelques eunuques
et d*une troupe de guerriers, cfaerm^
des ^poux et des alli^ parmi les Scy-
thes; mais, k peine cette caravaoe
^tait-elle sortie de Pantica])^, QU^
les soldats se r^volt^rent, mireat les
eunuques k mort et livrtont les jeanes
princesses aux Romains. Enfin, le se-
cond fils de Mithra-dates , Pharnaoe,
se mit k la t^te des r^yoit^ pour as-
sizer son pire dans son propie yfr
iais , esp^rant livrer cet iilustre w:
lard k ses ennemis et se rendre amsj
agr^able au peuple romain. Le gr^n
homme sut mourir comme il aw
y6cu, enh^ros ! HabiledansFartdepr^
parer les poisons et trop robuste poor
ne pas roister long-temps k leur ac-
tion, il ordonnaau Gaulois Bituitusde
Faider du seoours de son Me et de
lui ^argner ainsi la honte de tooao^
yivant entre les mains de ses ennfr
mis; il ftit ob6i, et d^ ce moment
Rome put respirer plus k False. Alois
on vit un spectacle digne d'une txa-
nelle reprobation ; Fodieux Pharnaoe
envoya le corps deson pirc k ^^^
lui demandant pour salaire de sen
crime , les royaumes de Pont et oii
Bospore. Le gdn^ral remain tersa ,
dit-on, des larmes d'attendrissemeot
€RIM££.
U
et d'admiratum ea voyant le cadavre
de too Uhistre advenaire.
MHlira-^tes fut enseveli a Sinope
dans letombeau de sea an^Hres; aiosi
c'est sansrfondflment qu'une tradition
locate fidt dire aux habitants actuela
debpr^a'lie Tracb^e, qae ce prince
a sa sepulture aux eoTirons de Kertch.
Ges lieux, k la Terite, sont pleins de
SOD soavenir : le promontoife le plus
Toisin de Jenika]^ se nomme phare de
Mithra-dates; c'est le phcmar des
Rosses. Les vieilles colonnes, les rui-
oes impoeantes, les d^ris poudreux
et jDsqu'aux montagnes elles-m^mes,
toot id est par6 du nom de oet illus*
tre rival de la grandeur romaine.
Pomp^e^ oependant, n'avaitpas nnigi
d'aooonler k Phamaoe le titre d'ami et
aili6 du pcuple romain. II lui refusa
rinvestitiijre du royaume de Pont;
mais il lui coninna celledu Bospore,
a Ttxceptioa de Phanagorie , qui fut
declare TiUe libre en recompense de
ce qu'eile avait donn^ Texemple de la
revolte. Pen satisfait de oes conces-
sioDs , Phamaoe ne vit pas pliis tdt les
Romains partis de ses etats, qu'il vint
OMttn le si^e devant Phanagorie et
la pnt par femine. II soumit ensuite
b Golehide , rentra dans I'Asie-Bii-
Miiit»teata de reconqu^rir leroyaume
dePont, et battit mane les Romains
CD divecses rencontres. Toutefois, cet
iodigae fiJs de Tun des plus grands
rois qui aient jamais exists ne jouit
Ptt long-temps du fruit de son for-
rait Les quereUes de C^ar et de Pom-
p^ avaient seules retard^ I'explosion
de la Tengeanoe. Libre d^rmais et
Taiaqoeur, C^sar quitte TEgypte, ren-
tit dans le Pont , voit Pharnace et le
■net dans uned^route complete : f^etUj^
<^*y vid ( je suis venu, j'ai vu, j'ai
uinoi), toivit-il k cette occasion.
Phaniaee obtint la permission de
s'onbaiquer pour le Bospore, ou , a
peine arrive, h fut tu^ dans une bataille
^e lui livra Asander , son lieutenant
et son gendre, qui, pendant son ab-
sence , s'etait empare de la couronne.
Cet Asander r^giui paisiblement, sou-
mis a la domination de Rome; mais,
parvenu a un Ige avane6, on ne sait
quels motifs le jport^rent a se laisser
mourir de faim. Un aventurier, nomm^
Scribonius , monta sur le trdne et fut
bientdt apies mis k mort par le peu-
ple, quand on sut que Pol^mon I*',
roi de Pont, s'avan^t k la t^te d*une
arm^e nombreuse, sur Tordre que lui
en avait donn^ A^rippa , proconsul de
Syrie. Ce Pol^mon, reconnu roi du
Bospore, fit la guerre aux Aspurgi-
tains, peuple de la Sarmatie asiatique,
et fut tue aupr^s d'une ville nomm6e
Cesia. Comme il ne laissait que des
en£ants en has dse , sous la tuielle de
leur mke Ihrthoaoris , une revolution
appda sur le trdne bosporien les re-
jetons de Tantique dynastic des Leu-
coniens , et on voit, k cette 6poque
(premieres ann^es de I'ere chretienne),
ngurer sqccessivement quatre souve-
rains de cette £imille, Rheskoupo-
ris r% Cotys r\ dit VAs^qien ,
Sauromates I*', contemporain de Ti-
bere , et son fils Rheskouporis II, qui
r^gne sous la tutelle de Oepepyris
sa mere. Toutefois , les Romains ne
soufi^irent pas long-temps cette usur-
pation de la descendance des Leuoh
fdem; Tempereur Caligula rendit la
couronne k Foiemon II , fils du der-
nier roi pontique ( de 38 11 42 de Fere
chretienne }. A partir de ce point
nous aurons peu de chose a dire d'une
serie de 22 souverains, dont les noms
seuls a peu pr^nousontetetransmis
par la numismatique et les lambeaux
ahistoire. Ces princes, qui sMntitu-
laient amis de cesar et du peuple
romain ( ^iXvcaioaps^ et ^tXopwfuitoi),
promptement ch^ties par leurs suze-
rains chaque fois qu'ils tentaient d'en
secouer le joue , ne brillerent de quel-
que eclat que dans leurs contestations
avec les Scythes ou leurs voisins les
Chersonites. Plus d'une fois raeme ,
battus par les proteron ou magistrats
de Cherson, iis virent leurs posses-
sions resserrees dans les plus etroites
limites. La vie de ces rois est d*au-
tant moins susceptible de recevoir ici
Suelque developpement que leurs me-
ailles contribuent elles-memes a y
Jeter la confusion, en demontrantque
plusieurs souverains ont regne simul
la
L' UNI VERS*
tan^ment dans cet empire si 6troit.
On est port^ a croire ^e les princes
legitimes durent maintes fois associer
klenr royaut^ des chefs barbares ,
tels que Inintbimfyus , Ar6ans^ »
T^iranes et Rhadani6adis , qui flrent
frapper des m^daUles d*or k leur ef-
figie, en ro^me temps que les Sauro-
mates et les Rheskouporis ( voyez la
table chronologize ). Sans doute de
nouveaux mat&iaux 6clairciront un
jour nos doutes k ce sujet, le gouver-
nement russe mettant un grand soin
a conserver dans les mus^s d'Odessa,
de Nikolaieff , de Caffa et de Kertch,
les precieuses antiquity dont chaque
jour amene la d^couverte.
Les querelles des Cbersonites et des
Bosporiens amenerent la chute du
royaume dont nous venous- de tracer
une si rapide esquisse. Dans les premi^
res annees du V* siecle, unproieron de
Chersonese, nomm^ Pharnace , fait la
gu^re^ Sauromates Vni, letue en
combat singulier, ravage tout le pays,
ne prevoyant pas que c 6tait favoriser
rinvasion de ces nouvelles l^ions de
barbares qui, sorties des r^ions hy-
perboreennes, venaienta leur tour ra-
vager le midi de I'Europe.
Troisiemb epoque. — Les tnoo-
sions. Deux peuples qui joaent dans
rhistoire un role fort important, rdle
de sang et de larmes , vont d'abord
se montrer k nous. Ge sont les Goths
et les Huns. Mais k T^poque oh nous
sommes parvenus ( 400 k 420 de J6-
sus-Christ ), si nous n^avons pas men-
tionn^ encore le nom des premiers,
c'est que nous avons craint de jeter
quelque confusion dansle r6cit des 6v^
nements relatifs aux rois du Bospore.
Les Goths, que plusieurs auteurs
supposent onginaires des pays que
baigne la Baltique et qu'arrosent la
Vistule et rOder , tandis que d'autres
les font venir de TAsie , commenc^-
rent a deborder sur le midi de TEu-
rope, vers la fin du ir si^le de
r^re chr^tienne. Plusieurs de leurs
tribus s*^tendirent durant les premi^
res annees du si^le suivant , jusqu'au
TanaTs ou elles se confondirent avec
les Sarmates et les Alains. Ces der-
niers avaient alors suocade aux Tauro-
Scvtbes dans la domination de la Cri*'
mee, et ils ne cessaient dUoqui^ter
leurs voisins les rois du Bospore.
Vers 376, Tempereur Tacite reaoontre
dans la Cappadoce , une division de
ces bjurbares , la pousse devanil lui, et
la refoule sur le Bospore Cimm^eD.
On est fond^ k croure que les Goths
ne sont pas un autre peuple que celui
que Ton voit ^tabli , au IV* si^e ,
entre le Danube et le Borysthtee,
sous le nom de G^tes. Nous parta-
geons enti^ment, k oe sujet, une
opinion de M. de Saint-Martin , d'a-
pr^ laquelle oes peuples seralent eux-
m^mes les anciens Scythes, dont le
nom n*est qu'alt^ par une prosfli^.
Cependant la troupe hideuse des
Huns. d*origine finno-ouraiieime,
vient a son tour pousser devant elle
les Goths et les Alains. Ceux-den
fiiyant , se iettent dans la Crim^, le
Caucase et rAsie-Mineure. Quelques-
uns passent le Danube , entreat dans
la Pannonie, inondent les Gaokset
Tempire romain , et d6placent sobite-
ment des nations enti^res. C*est un
curieux ^>ectacle que de voir ces hom«
mes qui , vaincus, abandonnent leur
propre territoire et se prtentent en
vainqueurs sur celui des autres. Une
de leurs plus puissantes tribus se fixe
sur le littoral de la mer Noire, dans
le royaume du Bospore mtoe ; c^est
celle des Goths T^d-axites.
Ammien-Marcellin , Sidoine-A[K)l-
linaire , et plusieurs autres toiyains
contemporains nous ont laisse on
portrait des Huns , digne d'etre con-
serve. Leurs traits ^ient horribles
k voir tant ils prenaient de soin dV
jouter, par des usages terribles et bi-
zarres, a leur difformit6 naturdle. lis
etaient forts et trapus, avaient la
t^te grosse , les yeux petits et ooifoo-
0^ , la bouche Isuree et le teint livide.
Par un raffinement de ce qu'on poor-
rait appeler la coquetterie de la law
deur , lis aplatissaient le nez k leors
enf^nts, et leur oouvraient le front
et les Joues de cicatrices taiiladto ^-
m^triquement V^tus depeaux oud|-
toffes grossidres , la t^te envetoppM
CRIMEE.
13
d'une ealotte de cuir , et montes sur
des cfaevaux de petite tailtef mais
1*006 grande ygeret^, ils oombat-
taient avee Tare et le sabre, et por-
taient, en outre, une sorte de filet
dont iJs se aerraient habilemeDt pour
envdopper leurs ennemis. Lea femines
et les emanta lea suivaient k la guerre ;
nMis les vieillards restaient en ar-
li^, ou se donnaient la mort, ear
diez oe peuple, la vieillesse iitaii un
objet de mepris et de honte. lis n'a-
noent pour aemeures que des chariots
trains par des boeofs, et pour nour-
ritme que les radnes crues et la
diair de cheval mortifi^ sous la selle.
lis bayaient ayec passion le koitmiss,
fareuwe d'eau et de lait de jument
aigri. Enfin la difformit^ et rabrutis-
sement des Huns ^talent tela qu'on
les rcgvda en Europe, dit Jomand^,
oomme des monstres issus du com-
merce des femines scythes ayec les
demons.
Nous ne suiyrons pas ces £Eurouches
oonqutents dans leurs expMitions;
tes gnerres que Tempire romain eut
i aoQtenir contre les Goths et les
Buds, ks yictoires et la roort d'At-
tila,le)l^tf de Dieu, appartiennent
a uneaatre histoire. Nous nous borne-
foos idire que la Crim^ partagea tons
k» dtestres que oes barbares firent
peser snr les nations qu'ils enyahirent.
. D'autres conqu^ants arrivdrent
^ientdt sur les traces des premiers.
Ltt Ougres j ou Jgaun, penetrant en
Ohokit^ ou ils demeurent pendant
deux Slides, en d^pit de tous les ef»
forts des Goths T^teaxites. La p6nin-
sole est bouleyersfe par les guenres
intestines de oes nations, parmi les-
qaelles la politique des empereurs grecs
s'efforee d'entretenir la niune et la ja-
loosie. Apr^ elles, diyerses trflms ,
veaoes de Tint^rieur de TAsie, les
^Iffares et les Giour^en, appartenant
a la raee turque, bien que de nos
gars encore on s'obstine k les appeler
Titares, se heurtent tour k tour sur
« loi 4e la Tauride, ne laissant au-
tiarepos aux andens peuplesde cette
Wide. Les Chersonites invoquent en
uia le secours des empereurs de By-
xance ; ceux-ci ont assez de peine k se
dtfendre eux-mfimes, et rarement lis
peuyent satisfaire aux yoeux de leurs
yaasaux.
Les Khaxari entrent dans la Cher-
son^ •Taurique yers le milieu du
septieme sitele, y refoulent les Goths
dnis les montagnes, et fondent un
empire puissani; la Crim^e prend
mane le nom de Khazaria, Les yilles
crecques, quoique rdeyant toujours
ae la cour de fiyzance, se soumettent
k payer aux Kbaiars un tribut annuel.
Partout, dans cette p^riode, nous
yoTons r^gner, sur le sol de la pres-
qirlle, la delation, Tanarchie et la
misere , rdsultat inevitable d'une suite
non interrompue de conqu^tes et d'u-
surpations. I/^tat de Uierson ^tait
r^put^ , en narticulier, un s^jour si
fUcheux, ou*u devint , oomme aujour-
d'hui la Sib^e, un lieu d*exil pour
plus d'un iUustre proscrit; nous dte-
rons, entre autres, le pape Martin I*'
et Justinien II.
Martin ^tait un pontife respectable
et sayant; il fut cMri et YtoM de
ses ouailles, mais il eut le malbeur de
d^plaire k Tempereur Constant II,
petit-fils d*H^racliu8 , qui le fit traiter
ayec une barbaric inouie. L'infortun^
pontife, charge de chaines, fut traln^,
mal«le et pauyre , dans la Calabre, k
Messine, a Constantinople, et edSn
k Cherson, oCi il sucoomba k la fa-
tigue et au diagrin , le 16 septembre
ess. ( Voir ItaHe , pag. 43. )
Justinien II, monstre alt^r^ de
sang, sumomm^ le Rhynotm^ de-
Kis qu*^ la suite d'une r^volte ^i
yait jet^ a has du trdne, le patnce
L^ontius lui ayait fait couper fe nez,
firt exil^ ^i^ement k Cherson, ou
quelques railleries , que les habitants
ae permirent sur sa mutilation , le
jet&ent dans de violents acc^ de fii-
reur. Pr6occup^ par des id^es de
yen(»ance, il se retire auprtedukhan
des AJiazars, qui I'accueillit d'abord
avec bienveiUance , et lui donna
mdme sa soeur 11i6odora en mariaffs;
mais, plus tard, gagn^ par Tor des
ennemis de oe prince, ie khan allait
le faire p^rir si Theodora ne s'y flAt
M
L'UNITERS.
opposte. Le Rbynotm^ s'enfuit cliei
un peiq>le pousaat qui, fix6 auprdt
du P'olga, ou Bolga, ayait reqa le
Dom de Boulgare. Lc chef de oette
nation aooorda au fii^itif une protec-
tion int^esg^, et Taida m^me , sons
de duns conditions, k reconquer
son trdne. Justinien, rentn^ k Con-
stantinople , n'oublia pas d'envelopper
les Gh^'sonites dans sa vengeance
(692 de rdre chretienne). II voulait
d^ruire leurs TiUes de fond en com-
Me, mais le seoours des Khazars d^
joua cet odieux prcjet £n 731 , la
puissance de ce dernier peuple avait
acquis un td lustre , que rempereur
lion ni, sumomm^ Tlsaurien, qpousa
la fille de leur khan. Gette princesse ,
oonvertie k la religion clur6tienne ,
^ifia ses sujets par ses vertus et sa
pi^t^. En 840 , rempereur Th^ophile
▼isita la Crim^, et re^t, de la part
des Khazars , des marques de respect
et d'attacbement. II leur foumit, sur
leur demande , des ouvriers pour con-
struire , sar le Tanais , une vifle nom-
m^ Sarkelf ou la Station bianche.
Vers la fin du neuvi^me sidcle , de
nouyelles cohortes , imigries de I'A-
sie , les Patzinaces , appelds encore
PeUMnigues f de race turque^ par-
▼iennent, apm des sucote yanes, k
s'emparer d une partie de la Crim6e,
ou IChazarie proprement dite.
Les Petch^n^es toient aussi un
peuple sauvage et nomade, v^ de
peaux de b^tes Csiuves, yi?ant sous
des tentes, se nourrissant de chair
mortifi^ sous la seile, de quetooes
racines et de lait de jument. lis tni-
flquaient ct^endant avec les Grecs,
les Byzantins et mtoe les Russes,
fbumissant k ces peuples du miel,
des ouirs, des besnanx et une sorte
de cochenille. En retour , la ooor de
Byzanoe leur enycyait des bijoux, des
oouromies d'or, et autres nches pre-
sents : elle adressait k leurs chefe des
lettres traeto en caractdres dor^, et
leor donnait, on ne sait trop pour-
quoi, le titre d'archonte. Leur his-
tetre ult^rieore est toute oontenue
dans oelle des Russes.
Aox Peteh^n^es suoeMe un autre
peuple de mtoe orieine et parlant \
peu pr^ la m#me uiBgoe. Les Co-
mans, ou Kiptehak, que les Rosses
appellent PoloutaeSy se font oomutltR
en Eurqie vers Tan 1000 de J.-C.
Conf ondus bieotdt ayec les pr^c^dents,
ils paraissent dtee les ymtaUes so-
ctoes des NogtOs. Ce fut sous lev
donunation que la Grim6e derint en-
titoment ind^pendante des soaverains
de Byzance.
Depuis long-temra le ztie des mii-
sionnaires du christianisme et les re-
lations ayec les Grecs avaient intro-
duit, dans la pres^'tle, la relifioD
chr6tienne, mais rinfluenoe des eo-
pcreufs d'Orient j amit prop>g^J|
schisme de Pbotius. Cepoidant, 10
diyerses nations que nous veooos de
nonuner se soumirent maintes fois k Ja
religion de Mahomet, conseryant d'aii-
leurs , dans Tune et I'autre croynee,
les pratioues superstitieuseB et bar-
bares de leur premier culte.
La fin de oette fi^ode csteanctt-
ris6e par le premier d^yelo|feneai
d'un empure qui devait embcaster on
jour la moiti^ de rEnrope et le tien
de TAsie. Les grands princes noes
pouss^rent leurs conqu^tes josqaratt
pied du Caucase et dans les steppes
de la Tanride. Vladimir-le-Giandt jni
yenait d'abiurer ses faux dieux et wt-
tsat Gonyerti k la rdigion catbobqo^
grecque, mardia sur Cherson, etsoj
empara en 988, sous le pr6tei(e<|oii
y trouyerait les pitoes et les rclifW
dont 11 ayait besoin. On rapporte que,
pendant le si6ge de cette yille, uo ei-
pion, nomm^ Anastase, lanfa daDS»
camp des assi^geants une fl^cfae , « i*'
quelle toit attach^ un biUet ooofu en
ces termes : « Cberdiez denritoyjWS;
« vers rOrient, vous y trooyews w
« canaux qui foumissent I'eau ai'
« yille. » Ce fiit par-Ui , en eftj,
que Vladimir r^isit les Cberto-
nites It se rendre k ^ser€tk»yj^
oe prince ayant, peu aprte^ 4|!^
la soeur de rempereur grec f^^^J^
ville k son premier mattre. m »^»
Mtislay, passa dans Hie de Tanian^
oil , depttis la cbote de TeoipirfJ^
porien , s'^il Ibm^ on 4M
CRIM^E.
foitt le Dom de nqranme de T^nou-
tarak^. II y tromra un peuple ala-
nicroe, ies lasses, dont le chef Tap-
pdh eo combat aingulier. Mtislav sor-
tit ?ain(jiieur de ce duel, et entra
dans la ville de Tainan , capitate de ce
Douf d apanage de I'einpire des grands
iiincea.
Enfin, noua toiichons au tenne de
cette triste ^poque, oii tant de peaples
birbares se aont ra^s lea una 8ur lea an-
tics, ne laisaant d'autres traces de leor
BKsage qne la destruction et la mort.
L*historien trouve peu k daner sur oe
damp 6iBo\6, ou les inonoations n'ont
iifOB6 aucun germe de ftoondit^;
mais il n'en aera paa de mtoie de la
Mo&e suivante , qui s'ouvre derant
le mnd nom de Tdiinghis*Kban.
QUATBIBMB BPOQUB. — LeS khOMS
de CrtnUe. La premi^ inrasion de
TduncMs-Khan date de Fan 1391 de
notre ore. Ge serait sortir des limites
d'une notice narticuli^re a la Crim^,
et enfahir le aomaine de Thistoire unt-
verseUe, aue d'entrer dans de trap
longs details sur Torigine de son pea-
pie et sur les succ^ ou les revers de
M ooorses en Europe. Cependant il
^ oeitaiiis points g6n^raux sur les-
qoeb aotre attention doit se (lorter
^p^nJement pour la comply intel-
^eooe de cette ^poque, bien qu'ils
MNent peut-toe plus directement n^
cesBsires aillears.
Tdunshis-KJian commandait k des
nations d'origihe roongole , les Tatares
ci les Mongw proprement dits, pas-
teios noauHJes et barfaares , dont les
triins oommient ie vaste plateau gui,
desconfins de la Stb^rie, s'^tendjus-
qo'aox fironti^res de la Cbine. La
perre seute pourait tenir ces hordes
nroudies r^ies sous rob^issance
d^ dief ; aussi , lorsque la yoix puis-
ttote de Tchingbis-Rnan les edt con-
roqute dans les solitudes de I'Asie ,
ce grand capitaine ne leur laissa plus
de repos; u leur fit entretoir, oans
le lointain, les ridiesses de Byzanoe
ct de Kicnr, mit k profit Fenthou-
ttne d'un instant, et les entndna
< dea cooiftMilB qui ne devaient avoir
■I terme qua poor qnelques cbefs
15
i. Les lieutenants de TdiiB-
obis seuls p^n^tr^ent en Russie et
dans la Cnm^. En 1337, Toucbi-
Khan , son fils, acbera la conqu^te
des possessions russes en Europe, et
Batbou-Kban, son petit*fils, fonda
peu apr^, au nord de la mer Cas-
pienne, Tempire du Kaptehak, qui
s^^tendait jusqu'au Dni^r. Les princes
du Kaptcbak s*intitulaient khans de la
horde dor6e. Ce pays ^tait alors oc-
cupy par des nations turques , qui se
soumirent aux chefs tatares. Or, Far-
ni6e de ceux-ci ne tarda pas ^ se reti*
rer ; elie se disperse mime si compl^-
tement, qp'au Dout de quelques an-
nte leur langue ^tait ouolile dans le
Kaptchak ; et lorsque eut lieu le dd-
membrement de cet empire et sa r^
partition entre plusieurs princes d*o-
rigine mongole , on oontinua k donner
mal k propos a leurs sujets le nom
de Tatares, que , de nos jours encore,
on applique aux descenoants des Co-
mans ou des Petehin^gues qui babe*
tent la Crimde, Kazan ou Astrakan.
Ges pdtendus Tatares sont posttive-
ment de race turque , difffarant essen-
tiellement nar lelangage et les traita
physiques aes Tatares-Mongols , aux-
quels lis furent souniis Jadis. Ce point
une fois bien dtaUi, nous pouTons
continuer li nailer des fNrdtendns Ta-
tares de la Cnmde , sans craindre au-
cune mdprise.
Le cheTde la horde dorde dirisa ses
conqudtes en plusieurs gouvemements,
k la tdte desquels tl mit les phis farates
de ses lieutenants^ ou les phis chdris
de ses parents. Ajouter ainsi k Fau-
toritd de ces ambitieux dtait intro-
duire, dans les constitutions du nou-
yel empire, un germe de dissohition
que nous allons yoir , arec te temps ,
mdrir et se ddvetopper. En 1340,
Batou-Kban soumit ia Grimde enti^,
Fincorpora k Fempire du Kaptchak «
et cboisit pour sa rdsidence une ville
connue aujourd'hui sous le nom de
EsU-Krimy Fandenne Crimde. Lois-
Su'on y a vu se sucodder arec tant
'achamement les invasions des Bar-
bares ,et tous lea ddsastresquidevaieBt
en dtre la oonadqaence, on con^ b
16
L'UNIVERS.
difBcult^de reoonnattre remplaoement
de quelquesHinesdes villes les plus c6-
Idbres de la presqu'tle. Th6odo6ie elle-
mliiie, emport^dans oe tourbillon des
guerres intestines , avait disparu enti^
reroent, ou laissant si pen de vestiges
deson existence, que, des Tann^ 1370,
lorsque les G^nois eurent fond^sur son
emplaoement une nouvelle ville, nom-
m^ C^ffa. leurs bistoriens -^r^ten-
dirent qu'iu avaient cboisi pour oela
Hit Iku dUert
Les Gteois et les Vtoitiens avaient
•commence, dds la fin du XI* sitele
de r^re chr^enne , Ik tenter quelques
operations oommerciales ayec les (mi-
pies de la mer Noire ; les premiers
s'^taient particuli^rement ding^ vers
la Tauride. D*abord lis y Miangeaient
les marchandises manu^BM^turaes de
I'Europe oontre les Wa que oette
p^ninsule produisait en si gnmde abon-
danoe; mais, k la suite des invasions,
la decadence de ragrioilture , tout en
-diminuant les exportations des c6-
r^es , ne fit qu'inspirer aux Gteois
un plus vif d^ir de prendre un pied
h terre sur le littoral de la Crimte ,
afln de mieux ^tendre leurs relations
dans rint^ieur et de oonnattre tes
ressources ou'ils pouvaient en esp6rer
soit en pdleteries , soit en sel, en
vins et autres denr6es. Uarriv6e des
Tatares-Monsols leur semUa fiivorable
pour rex6cution de ce projet. Une
colonic gtooise, sous la conduite de
d*Auria (ou peut-^tre d'un Doria) , vint
d^barquer sur Templacement de Tan*
denne Th6odosie, et obtint du kban
des Tatares , moyennant un ridie pre-
sent, la permission d'y Clever quel-
ques ma^sins pour servir d'entropdt
aOx marchandises ( 1270 aprte J.-(!.).
Cela fait , les colons s*^ndirent un
peu au-deU du terrain qui leur avait
^ oonc^e ; puis ils firent entendre
au khan que la prudence voulait qu'on
ne laissAt pas ainsi de riches dep6ts
exposal ^ un coup de main dans un
pays encore infeste par des vagabonds
et des pillards. Ils creusi^nt done un
foss^; devant ce foss^ ils jet^nt
quelques pierres, qui finirent par se
transformer en bastions; enfln , ils
dev^rent, a la grande mortification du
khan, une redoutable oeinture de rem-
rarts, et, dans le centre, ils bfttirent
Cafifo. Le Tatare s'aperQut ^op tard
de son imprudence ; il se pUignit for-
tement, mais, du haut de leors rem-
parts, les G^oois se prirent i rire en
voyant passer cette colore impuissante.
Cam devint bientdt une vilfe riche et
florissante; vinflft annto lui suffirent
( 1289) pour s'elever ii un td degr^
de puissance , qu'elle put envoyer des
galnres au secours de Tripoli de Syrie,
alors senr6e de pres par les enoemis
de la chr^tiente. Non contents de oela,
les Gtoois formkent des ^tabltsse-
ments, plus ou moins importants, sur
tout le littoral de la (Mmte. C'est
ainsi qu'on vit parattre Soldqfa^ pr^
de Soudak , k 45 verstes au sod-ouest
de Caffo. En cet endroit , la forteresse
g^noise s'elevait sur une tour carrie
gui J de nos jours encore , domiDe les
rortificattons que les Russes f <^
i^outte an commencement do wmier
si^de. Du haut de oette tour, tes sen-
tinelles gteoises d^uvraient unevaste
etendue de pays , etobservaient, sans
lesredouter, fes mouvementsderen-
nemi. La hauteur de ce colosse sem-
ble prodi^euse par la di^iiositioDdes
narois qui forment, avec le rocher,
des lignes perpeadiculaires. De tout
c6t^ se imente un abtme ^^^
oeil exero6 pent aeul sonder la ptw^-
deur sans redouter ni ^blouissefflent,
ni vertige. .
On volt tolement des raintf <k
forteresses genoises auprte de S^
topol, de Balaclava, de Panticapee a
dans I1le Taman.
La Crimde, depuis sa r6umoDdans
les mains d*un pouvoir bomogeoe
commencait h reprendre cette impor
tance politique qui lui avait w. en-
lev^ par son d6membrement ^^^'"^
k r^poque des invasions. DM 1^«
Mangou-Khan Tavait M6d a lOO oe-
▼eu, Oran,iititrcdefiefrelefiDt«^
la suzerainet^ du Kaptchak ^nii
payanttribttt Cette intempestite tfj»;
dpation ne !ut pas le premier oo^
port^ ji to puissance du nouvel eopiiC'
Les lieutenants de Tchinghis n'enter
CRIMfiE.
17
dant plus la voix redoutaUe dti inattre,
cheroiaient h se rendre ind^pendants.
Nogai, le plus o^Iebre d'entre eux,
y rdutfit, srace h la protection de
rempereur Michel Paltologue, et fut
le premier chef de ces fameux Tatares-
NosaTs qai passdrent dans la steppe
du Kouban et dans laTauride au com-
mencement du XVir sidde.
G^nes, heureuse et fi^re d'avoir
acquis une colonic aussi importante ,
pourvot a son gouvemement par des
tois qui temoignaient tout fe prix
qu'elle y attadiait. Chaque ann^ eile
y envoyait un consul choisi dans Tune
ilcs families gtooises les plus consi-
d^r^. Ce haut fonctionnaire emme-
oait avec lul un proconsul charg6 de
le remplaoer en cas de d6o^. Le consul
s'entouraitde magistrats et d'emj^ov^
qui tons devaient dtre G^nois. Ennn,
la m^tropole institua I'ofQce de Kha-
zaria et oelui de Campagna, Le pre-
mier r^dait h^ GiSnes : c*^it un ve-
ritable ministdre des colonies, dont
le nom seul rappelait la plus impor-
tante des possessions de la r^ublique.
Le leoond etait ^bli k Caffa : if ju-
pit les contestations survenues entre
Ks Gteis et les Tatares; souvent
nkat oes demiers , pleins de confiance
dans SOD ^quit^, en appelaient k ses
d^'oos pour les diffi^ends qui s'61e-
raient en£re eux.
Cependant les V^nitiens n*avaient
pas VQ d'on ceil d'indifiference le d^-
vetoppement de la nouvelie colonic g^-
noise. Le moment vint ou leur jalou-
sie dut 6clater, ne pou?ant endurer
une plus longue ^preuYc. lis enyoy^-
rentdonc, en Tannde 1396, vingt-
cinq galores qui mirent la colonic a
sic, et ddtniisirent en quelques jours
I'ouTrad^ de piusieurs annto. Cen
etait £ut de cet dtablissement si les
clients ne fiissent Tcnus au secours
des vaincas. L'hiver, c^tte ann^l^ ^
^ d'une rigaeur excessive ; une hor-
rible femine d^la la presqulle en-
tiere, a tel point que les Vdnitiens,
Jii avalent cm prendre possession
on paradis terrestre , se virent con-
tfaints d'abandonner leur nouvelie
cooqu^te, apres y avoir perdu le tiers
2* UvraUon, ( Cbimbs. \
de leurs soldats. lis aTaient Jet6 les
bases de piusieurs ^tabiissements sur
la cdte septentrionale de la presqutle
Trach^, dans la mer d'Azow; on
croit y reconnaltre , de nos jours, les
ruines d'une ville qu'ils y avaient fon-
dee.
Les Gdnois , rentr^ chez eux , s*ap-
pliquerent si bien k rdpawr les d^s-
tres de cette ann^ fatale, que la ville
de Caffa se vit, en peu de temps , plus
florissante que jamais. EUe avait ac-
quis, en 1318, une telle importance,
que le (lape Jean XXII la choisit
pour r^idence d'un dv^ue mdtropo-
titain, dont la juridiction s'^toioait
du Pont-Euxin jusqu'au pays des
Russes.
Depuis un si^e le royaume du
Bospore n'existait plus. Lardpublique
de cherson, abandonn^ h elie-m^me
par rimpuissance des empereurs ^-
zantins, avait 6galement subi le joug
des Tatares. Ceux-ei et les Gdnois do-
minaient seuls alors dans la Crim^.
Mais les fiers Liguriens toitaient les
descendants des compagnons de Tchin-
ghis avec le mdpris que les peuples
civilis^ tdmoignent aux barfoares, et
ces derniers , a leur tour, ne suppor-
taient qu'avec impatience le voismage
de oe peuple maraiand qui s'dtait in-
troduit chez eux h I'aide d*un vil stra-
ta^dme. La paix , on le voit , ne pou-
vait^trede longue dur^; la guerre
dclata, en 1342, a la suite d'un meurtre
oommis par un Gdnois sur un Ta-
tare. Le khan qui regnait alors dans
la presqu'tle r^olut de tirer une ven>
geance ^latante de cet assassinat ,
mais il cut Torgueil de croire que sn
volenti suffirait pour chasser des voi-
sins aussi incommodes; il leur signifin
doncd'avoir^dvacuer immddiatement
tous leurs dtablissements sur une terre
qui n'dtait point h eux. On devine la
reponse des Gdnois ; elle fut telle que
le khan ne crut pas devoir user d'une
plus grande longanimite. II s'avanca
a la tete d'une puissante arm^, et
vint mettre le si^e devant Cafifa. Son
espoir de s'emparer de cette ville fut
dequ comp^^ment; il ne put ni I'en-
lever de vive force , ni la prendre par
18
L'UNIVERS.
fiamiae ; bien plus , la lonnieuT du si^
r^uisit ses propres soMats k un 6tat
de dendment tef , quMl vit le moment
ou lui-mdme seraif forc^ de se livrer
k discretion aux assieg6s. Alors, il
accepta la mutation que G^nes lui
offrait en faveur de sa colonie. Une
paix hnxxrite fut jur^ entre les par-
ties bellig^rjjintes : les Tatares recon-
nurent Texistence de droit des colonies
liguriennes ; les colons , k leur tour ,
Sermirent k un pr^fet tatare de rosi-
er k Caila , pour y r^ler les affaires
de police et de commerce qui concer-
naient uniquement les hommes de cette
nation ; ce magistrat devait 6tre choisi
par le khan et confirm^ par les G^
nois. Ces conditions furent ex^uti^es
durant plusieurs ann^, quoique sou-
vent aft^to par des contestations
fri voles en apparence, crueUes par les
r^ultats.
Le temps arriva oik Tempire du
Kaptchak , d^ja affaibli par la defec-
tion de Nogai , allait tomber sous les
coups d'un ennemi formidable. Tok-
tamisch regnait en 1406, lorsque Ta-
merlan vint le renverser du trone. La
defection ^daircit aussitdt les rangs
des vaincus , et Ton vit surgir de ce
d^membrement du Kaptchak trois
nouveaux etats ind^pendants : le kha-
nat de Kasan , celui d' Astrakan et ce*
lui de Crimee. Les troubles qui fu-
rent la consequence immediate de cette
dissolution , se manifesterent avec une
grande violence parmi les Tatares de
la peninsule. L'anarchie etait k son
comble; plusieurs pr^tendants k la
souverainete s^etaient pr^sentes si-
muitanement , et chacun avait ses
creatures. Le sang allait couler, tandis
que le peuple flottait encore indecis et
consteme. En ce moment critiqjue,
un berger, nomme Gherai, vient
trouver les chefs assembles , eondui-
sant avec lui un jeune homme de dix-
huit ans, Hadjy, qu'il leur presente
oomme le descendant de Batou-khan
et de Toktamisch. Persecute par ses
parents , ce jeune rejeton d'une race
ilhistre avait dQ sa conservation k la
pitie de Gherai. Les chefs hesitaient
sur )e parti qu'ils avaient k prendre^
iorsque le people s'ecria qu'il ne vou-
lait pas d'autre souverain que le jeuoe
Hadjy. Celui-ci, par reconnaissanoe
Sour son bienfaiteur , prit alor^e nom
e Gherai, et fut le chef d'une dy-
nastic souveraine qui , depuis Tanme
1440 jusqu'en 1783 , donna des khans
a la Crimee. La famille des Gb^rai,
auoique dechue du trdne, n'est point
eteinte; c*est elle qui foumiraitdes
sultans a Constantinople, si la race
de ces derniers venait It manquer.
S^uant au berger, ii fiit anobli , et sa
esoendance est connue dans Ffaii^e
sous le nom de Tschaban-Gbefai.
L Hadjy -Gherai re£na glorieus^
ment iusqu'en 1467. iTeut plusieuK
demeies serieux avec les colons; ii
s'en tira toujours heureusemeot. Son
fils a!ne , Nour-Eddaulah , devait lui
suoceder , mais il fut chasse par son
frere Menghely.
II. Men^eiy- Gherai r est le
plus illustre des khans de Crimee. U
Sartage avec Mithra-dates rhoDoeur
'attacher k cette oontree de |Nc»«
souvenirs historiques. AppreDantaue
^n frere s'etait r^ie auprto deCa-
simir IV, loi de Pofogne, etquMlen
avait ete accueilii CavoraUen»nt , u
craignit que ce monarque , dont il con*
naissait les liaisons avec le khan da
Kaptchak , ne tentdt de replacer sur
le tr6ne le legitime successeur de
Hadjy. II crut , en oonsequence , de-
voir rechercher I'assistance des Rus-
ses , qui obeissaient alors au jcraod
prince Iwan III. Pendant qu'il ne-
gociait pour se roenager ce puissant
auxiliaire, il eprouva de la parJJ*
son plus jeune frdre, Hayder, letnu-
tement qu'il avait lui-meme 6it siuiir
k Nour-Eddaulah. Renverse du trone
et ne voyant de salut que dans la ^
tection des Genois , il s'enfait a Cm.
dont le consul raccueillit avec bien-
veillanoe, et l^i assigna MankoiipjP|>°''
residence. Cetait une forteresseaniee
a douze verstes de Balaclava, rew-
ire Mengheiy-Gherai erlt-fl termm*
dans cet exil son obscure existeaoe sans
un evenement qui , portant a la »oi|
un coup terrible k ses P.«>^j^!:
oomme k ses ennemis , lui rendit i'
CRIMI^E.
19
sceptre Miapp^ de ses mains. Nous
avoos dit que les Tatares ayaient le
privil^e de nommer h Caffa un pla-
net que rfntoiit6 g^noise refusait ou
oonfljrmait : mais en 1474, le prtfet
Mainak ^tant mort, le khan choisit,
pour ie remplacer, un de ses lieute-
nants nomme Eminek. Celui-ci ar-
rire h Caffa, et, selon Tusage, de-
mande Pinvestiture au consul g^ois ;
il en ^prouve un refus , car la veuye
de Mainak avait obtenu , k l*aide
d'une forte sooime d'argent, que les
d^positaires du pouvoir refuseraient
de reconnattre pour pr^fet tout autre
qoe le tils atne du d^funt. Eminek
revint auprte du kban; et celui-ci,
Gboqa^ avec raison de cette conduite
des G^nois, le renvoya une seconde
fois. Tlouveau refiis de la part des co-
lons , et , de till , une discussion qui
allait amener des hostility, lorsque
les deux partis adopt^nt un terme
mojen pour pr^venir Teffusion du
sang : oe tilt de rejeter h la fois les
deux candidats et de dioisir un autre
prefet Eminek, indign^ de la fai-
nesse de son mattre, autant gue de
Hnjostioe des G^nois, se rendit aus-
sHot a Constantinople, certain d'y
tronver on venseur. Ce poste avanoe
de h ehr^ente ^it tomb6 , depuis
/rfos de vingt annto (1451), au pou-
foir des CNmmans. Mohammed It ap-
penant les qu^relles qui divisaient
ies Tatar^s et les G6nois, con^ le
profet de les faire servir h la gloire
da croissaiit.
Le 1" juin, une flotte de quatre
cents cal^res torques se pr^senta de-
vant (S^ , pendant qu*£minek s*ap-
prochait do <^te de terre k la iSte
d'one arm^ de Tatares et de Turcs.
Les G^nois jusque-lii n'avaient r6-
ponda que par le m^prls et les raille-
ries aux ennemis qui avaient eu Tin-
loience de se montrer au pied de
leuTs remparts, mais cette fois ils
eommenoerent a ^rouTcrdes craintes
serieiises, que r^enementjustifiabien-
Mt Ames cinq jours d'un feu ^gale-
ment bien nourri de part et d'autre ,
les assi^g^ perdirent tout espoir de
roister lon^-temps. Une deputation
des notables g^nots se rendit aupr^
d'Achmet , le chef de Parm^ otho-
mane, et lui jpr^enta bumblement les
clefs de la Tiile, se recommandant h
sa generosity. Le pacha refusa d'ri)ord
de les recevoir; mais enfin, touchy
par les larmes et les supplications des
vaincus, il envoya un de ses lieutenants
(prendre [X)ssession du palais consu-
aire. Lui-m^me fit, le lendemain,
une entr^ solennelle h Caffa , o£t son
premier soin fut de dresser une liste
exacte des biens et des en&nts des
habitants. Quinze milie colons furent
envoy^ h Constantinople pour y ^tre
incorpor^ k la milice des janlssaires.
Lereste des habitants fut dirig6 vers
la m^me capitale , pour ^tre colonist
aux environs de Pera.
Les autres ^tablissements g^ois
tomb^nt suooessivement au pouvoir
du vatnqueur, et entre autres la for-
teresse de Mankoup, ou se trouTait
Mengh^ly-Gh^rai. Ce prince, envoys
k Constantinople, d'a))ord conune es-
clave, y fiit recu oomme roi. I! fit
avec Mohanmiea un trait^ par lequel
il admettait, pour lui et ses suooes-
seurs, la suzerainet6 du Grand -Sei-
gneur, et le droit de celui-ci de nom-
mer et ded^poser les khans de Oim6e.
II jurait de lui ^tre ftl^le, et de lui
foumir, en cas de guerre, des sub-
sides en hommes et en argent. De son
c6U, remjpereur othoman reconnnt
Men^hely-Gh^rai pour l^time sou-
veram de la Crimee , s'engageait k le
replacer sur son tr6ne , lui aooordait
le droit d'arborer cinq queues pour
etendard, et d'etre nomm^ aprte lui
dans les pn^respubliques. Depuis cette
^poque, les Grands-Seigneurs d^la-
rent , a leur avenement au trdne, que
si leur race vient k s'^teindre, celle
des Gh^rai doit 6tre appel^e a la rem-
placer.
Leregne de Mengh^ly-Gh^rai nc
dura pas moins de 36 ans. II fiit une
suite continuelle de guerres glorieu-
ses contre le roi de Poloffne, et son
alli6 le khan du Kaptchi&, qu'il par-
vint m^me k renverser du trone.
Fiddle k ses traitfe avec Iwan-le-
Grand , on le vit devenir le principal
2.
20
L'UNIVERS.
instrument de la puissance des Russes
et de la dtodenoe des Tatares-Mon-
gols. Quand la force des amies ne
sufiSsai! pas k raccomnlissement de
ses projeu, il appelait k son aide la
ruse et la politique ; c*est ainsi que ,
^us d'une lois, 11 panrint k soulever les
Mogais du Kaptchak contre leur souve-
raiUf etdut^cette puissante diversion
d'^ckitants suoc^. Deux fois il ra-
vaga la Yolhinie et la Podolie; mattre
de ICiew, il fit 6prouver aux Polonais
Jes plus grands d^sastres, et leur en-
leva jusqu'^ cent miUe captifs. Ce fiat
dans Tune de ces expraitions qu'il
fonda OtchaJunv , au confluent du
Bog et du Dnif^per, sur les mines
d'Alktros, petite ville qui avait ap-
partenu k une reine des Sauromates,
et que les G^tes d^tmisirent en m^me
temps gu*01bia, un si^le avant J^
sus-Gbnst. Mengh^Iy toivit k oe sujet
k Iwan III : « Je suis toujours le
« mtoe bomme pour mon Ure le
« grand prince, et je constmis k pr6-
• sent, a la bouche du Dnieper , sur
« la vieille ville , une nouvelie forte-
« resse , afin de nuire aux Polonais. »
La guerre ne fut pas, toutefois, Tu-
nique occupation de cet illustre mo-
narque. II prot^ea les arts, encou-
rages Fa^iculture, et ne nd^lisea rien
de ce qui pouvait hUter la civilisation
de ses peuples. Sous son r^ne, on
vit les Tatarespratiquer, pour la pre-
miere fois, Tusage des silos, ou fosses
destinto a la conservation des grains.
Elles ^taient creusdes dans une terre
areileuse et soumises pr6alablement
k raction du feu.
Mengh^ly releva les mines d'Eski-
Rrim et de quelques autres villes que
la ^erre n'avait pas 6pargn^. II fit
bdtir plusieurs forteresses, des mos-
quto sans nombre et des palais d'une
Srande magnificence. BaRktchirSirai
evint en particulier Tobjet de ses
soins, et acquit une telle splendour
que depuis oe moment elle ne cessa
r\ d'etre la r^idence des kbans de
Crim^ , jusqu'ik la chute de leur
domination. On y voit encore leurs
mausol^ et les restes de ce ricbe
palais dd a la munificence du fonda-
teur d*Otcbakow. Deux inKriptioos
lapldaires attestant les titres de oe
Srince k la reconnaissance des amis
e la bdle ardiitecture. Lejmlais da
khans k Bakhtchi-S(6ra!, successive-
ment embelli par les suooesseurs de
Mengbdy , paratt encore une de oes
fiamtastiques conceptions dont les poe-
tes de rOrient emoellissent lean oon-
tes. lA , on voyait de larges rosaces
d^up6es ^Jour, comme une pre-
cieuse dentelte, des ddmes et des ai-
ffuilles de la plus ^^ante l^erete ,
des portes en ogives, de petites oo-
lonnes nannies en faisceau, de riches
inscmstations , des murs tapisses de
mosaiques.' converts d'or ou d'^-
tantes oouJeurs , de larges p6risfyles
pav6s en maifore, des bosquets de
myrtes et de roses, et mille toataioes
2ui versaient, en murmurant, une eau
ralcbe et limpide. Tout , dans cette r^
sidence des andens khans, nppeile
I'Alhambra de Grenade. Ce palais de
faerie fait k juste titre rorgoetl des
habitants de Bakhtchi-S^rai. Coocfae
sous un feuillage sombre, anpHs
d'une limpide cascade , le Tatare se
ra^peile ces g^ntotions de goerriers
qui, dans les loisirs de la paix, v^
naient ici prodiguer les tr^rs edev^
aux vaincus. II contemple ces mar-
bres, ces tables de porphyre, ces ara-
besques en stuc, ces peintuies , ces
bi^ro^lyphes , ces domres, et ces in-
scriptions sacr6es, et se demande ce
que sont devenus les mattres de cette
somptueuse demeure; il voudraitsa-
voir oik sont all^ leurs s^millaDtes
odalisques et leurs troupeaux d'es-
claves. Les mines repondent : lb
ont disparu avec I'onde du ruisseao
qui coulait a leurs pio^, avec la fo-
m^ du parfiwi aont ils aimaieot
k s'enivrer.
Dans les derni^res annto de sa n^
Men^h^ly eut la faiblesse de o6der aox
soUicitations de Sigismond I'',n)ide
Pologne : il rompit ses vieui traittt
avec les Russes , et d^clara la gac^
k leur grand prince Vassili V* Les
hostilites durmnt mdme plosicnn
annto avec des suoo^ vari&. ^^^
la paix fat renouvel^, et, deux an-
ciiim£e.
ai
( 1514 de J^sufrChrist),
tenniiia tine Tie gloriease,
laqaelle iJ arait monM les
▼ertm qui font les bons rois , et les
qualiUs qui constituent les grands
Bomnies. Son fils atn^, Mohammed-
GMrai, loi SQOo6da.
III. Mohammed-Gb^rai I*', prince
d*liomear belliqueuse, employa les buit
annto de son r^ne k latter oontre
les Hoscovites et les Circassiens. On
croit qa*]l p^rit dans une exp^ition
oontre les Dadians ou princes de la
Mingr^ie (1532-8).
Pendant plus de deux siecles, I'bis-
toire des khans de la famiile de
Gb^rai ofifre nne triste monotonie de
goerres sans Mat Gomme sans r^iul-
tat d^nitif avec les Polonais, les
Russes ou les Tatares du Kaptchak.
A cbaoroe av^nement , le nouveau
khan aUait h Constantinople recevoir
I'lnYestitare de ses fonctions. Quel-
quefois le Grand-Sei(^eur d^posait le
prince regnant et lui substituait un
autre souverain, pris 6galement dans
la dynastie des Gh^rai. II paralt, d'ail-
lean, que le droit de primogeniture
eUdt fort mal observe parmi ces prin-
en, car on vit souvent plusieurs freres
se disinter le pouvoir, et, en cesoo-
casiooSy le saltan choisissait selon ses
eonrenanceSfet non selon le droit d'al-
oesse. A cette mtoe ^poque figurent
les pnnoes de Mangoup, sorte de sei*
gnears suzerains, tributaires k la fois
ies Tatares et de la PortoOthomane;
noais ce qui caract^rise phis particu-
lierement cette p^riode, c'est Tim-
portamce que commence h aequMr
rblstaire d^un nouveau peuple, forra^
de la lie de diverses nations errantes
ft baii>ares ; nous voulons parler des
Cosaques. Leurs traits rappellent ceux
des Mongols , et leurs moeurs se rap-
prodient incontestablement de celles
des andens Scythes.
IV. Sadet-Ghtoi V rtoia douze
ans. En montant sur le trone il avait
envoys son fr^re Sahed k Constanti-
nople pour lui servir d*otage. Battu
hiHn^me aux environs d'Azow par
an autre de ses Mres , du noni dls-
lam , il d^^posa la couronne, que le
Grand-Seigneur donna li Sahed (15SS).
V. Sahed-Ghtel P', s*U but en
croire les toivains orientaux , fiit un
prince cruel et sanguinaire. II lut de-
pose en 1551 , et assassin^ holt an
apr^, par Dewlet, son cousin et son
comp^titeur.
VI. Dewlet-Ghdrai I*'. On sait peu
de chose de ce monarque , bien qu'il
ait r^gn^ vingt-six ans (1551-1577).
Sous le r^e prMdent, il avatt, oon-
form^ment ik I'usage, r^id6 k Constan-
tinople, pour V servir d'otage.
VII et VIIi: Mohammed-Gh^ai II
Si lui suoo^, avant refuse de mar-
er oontre les Persans, fiat d^pos^
en 1584, apr^ six ann^ de r^ne.
II se retira cfaez les Cosaques , qui
embrass^nt sa cause et lui foumi-
rent une armte pour I'aider k recon-
quer la couronne. Mohammed ftit
vaincu et tu^ par les Tures; mais son
successeur, Islam-Gb^rai I*', p^t
dans cette mime rencontre (1587).
IX et X. Ghazy-Gh^rai I*% fils de
Dewlet, montra de grandes quality
et une plus grande cruaut6. Le sultan
Texila en 1596; mais au lieu d'ob^ir ,
ce prince oourageux se rendit k Con-
stantinople mtoe, oik il plaida sa
cause et obtant son pardon. Pendant
son absence, son (rare, F^tah-Ghi^
rai I**, s*^tait arrog^ le pouvoir su-
preme ; en expiation de cette audaoe,
Ghazy le fit p^rir. II mourut lui-
mtoe Tan 1608-9.
Xi. Sonfr^,S^laniet-Ghte!I*%
qui lui suoo^da, €ta\t hydropique. II
suooomba Fan 1610.
XII. On ne oonnatt pas les motifs
Sii port^rent le sultan k d^poser
jan-Beyg-Gh^ral, frkre et successeur
des pr6c«aents. Ce prince avait r6gn<
glorieusement de 1610 k 1638, et
avait fait preuve d'une rare Inravoure
et de beaucoup de talent dans la
guerre qu*il avait soutenue contre les
Persans , au sein mdme de leur em-
pire.
XIII. Mohammed-Gh^rai III, oin-
qui^e fils de Dewlet, portait la plus
tendre amiti^ k sonfrereChahyn. Mais
celui-d, abusant des bont^ de sonsou-
verain, leva T^ndard de la r^bellion^
22
L'UIIIVERS.
et marcha, a la t^te d*uiie troape nom-
breuse de Tatares , contre son bien-
faiteur et son fr^re. Mobamined sue-
comba les annes k la main ; mais le
fratricide n'osa pas ceindre sod front
de oette oouronne qu*il venait d'en-
sangianter. Redoutant avec raison la
colore du sultan , il chercha un re-
fuge a la cour de Perse, aupr^d'Ab-
bas-le-Grand (1627). Djan-Beyg fut
alors r^tabli sur le trdne de Grim^ ,
au*il occupa jusqu'en 1638. A oette
epoque il rut a^pos^ de nouveau.
XIV. La fiicilit^ avec laquelle la oour
de Constantinople accueillait ks d^non-
ciations dirig^ oontre les khans, et
la promptitude qu'elle mettait k 66-
poser ces fiintdmes de rois, sont des
t^moignages irrtoisables de la vtoa-
lit^ de oette cour , autant que de Tes-
prit d'intriffue qui animaii les mem-
Dres de la ramllle de Ghim. Enaiet,
qui 8uco6da k Djan-Beyg, fat d^pos^
aprte deux ans seulement de r^gne.
( 16S6— 7. )
XV. II eut pour suocesseur B^ha-
der , protecteur de la scienoe et de la
po^ie, savant et po^ lui-mdme , qui
mourut en 1640.
XVI. Son jeune frere, Mohammed-
Gh^rai, quatri^me du nom, monta
sur le trdne. Inhabile a tenir les r^nes
du gouvemement , ce prince fiit exM
apra trois ans de regne ; il reviendra
sur la sc^ne politique.
XVII. Isiam-Gherai II , qui oeignit
la couronne pendant 18 ans ( 1648 ii
1655 ) , a laiss^ de lui une mtooire
glorieuse. Ses suoote contre les Mos-
eovites, sa bravoure, sa gto^rosit^ et sa
justice font encore Tobjet d'une v^n^-
mtion traditionnelle parmi les Tatares.
Afirte lui, Mohammed-Ghdrai IV, son
preddoesseur , revint au pouvoir.
En I'ann^ 1647 , Vladislas VII , roi
de Pologne , ayant refuse de payer au
khan de Crina^ le mime tribut de
pieces d'or et de peaux de moutons que
son pr^^cesseur, Sigismond III, lui
av^t accord^ , le khan joignit ses ar-
mes k celles du oelebre Kmielnitski ,
hettman des Cosaques - Zaporogues ,
^aloiten guerre avec la Pologne. I^4i
resiiltnts de cette glorieuse campagne
Talurent aux Tatares de riches de-
pouilles et des monceaux d*or enleves
aux vaincus. Leur puissance paraii,
k cette Ipoque, avoir atteint sa plus
brillante phase. En efifet, les bos-
tilit^ ayant recommeno^, en 1649, eo-
tre le roi de Polosne, Jean Gasimir,
et Kmielnitski, le khan de Crim^e
conduisit k ce dernier un seooors de
100,000 Tatares. L*bettman, de son
odi€ , avait reuni 200,000 oombattants.
Cette armte formidable, qui rai^ait
les anciennes incursions aes Softbes,
d'Attila et de Tchin^is-Khan, iDOoda
ks provinces polonaises, semUaMea
ces flots de sable poussite par le fu-
neste steoum, qui d^astent et rai-
versent tout, les villes et les Gam-
pagnes ; qui comblent les vallto, en-
sevelissent les ruisseaux, et ne laissent
derri^re eux que le dtert et la moit.
La Ixavoure et la prudence de Jean
Casimir furent insuffisantes poor ar-
riter ce torrent d^astateur; il con-
dut foro^ment k Zborow (17 aodt
1640 } un traits on^reux, par tequd
il s'engagea notamment k payer an
khan de Crim^ la pension annoeUe
que lui avait accord^ Sigismond III.
aes conditions avec Thetfinan ne soot
pas du domaine de cette histoire.
Quelques intrigues, auxqueDes les
seigneurs polonais ne furent pas stran-
gers, ayant amen^, d^ TannSe sui-
vante, une rupto« entre Jeai^Casi-
mir et Kmielnitski , le khan, avide
de gioire et de butin, aooourut a la
premiere invitation de son ancieo
alli^; mais la victoire, infideie oette
fois , passa du cdt^ des Potonais (bo-
taille de B^resteko, 29 juin 1651 ) :
on dit m6me que les Tatares , saisis
d'une terreur panique, caus^reat Ja
d^uie complete de rarmee des allies.
Le khan perdit ses Equipages, sa tente,
son ^tendard, ainsi que le petit tani-
bour d*arffent dore , au moyen du^
il appelait les personnes de sa suite.
La retraite des Tatares fut si prect*
pit^ , qu'au m^ris des prtont^ re
ligieux ilsabandonnereotauxcnretiei^
leurs morts et leurs blesses. L'annee
suivante , le khan fit la paix avec iean
Casimir : il 8*engagea a entrcr sur les
CRIM^E.
i3
termdes Cosaques , ses ancieos alli^
ii d^Taster leurs colonies, et k lui re-
mettre tous les prisooDiers qui tom-
beiaient en son pouToir. A son tour,
le roi de Pologne promit de ne point
quitter les armes qu'H n*edt mis son
alli^ en possession du kbanat d^As-
trakan. De leur odt6 , les Cosaques se
fldrent sous la protection de la Russie ;
ct on pent dire que , de oe moment,
^tent v^taUement les pretentions
des Russes sur la Crim^.
Instruit a F^aole du malbeur, Mo-
hammed r^gna dorieusement pendant
huit annte. Ii sootint des guerres
heureuses contre les chr^iens et les
Cosaques; ce qui ne Temp^Scha pas
d'etre d^pos^ une seoonde fois (1663).
L'usage ^it alors, pour les khans
disgrad^ , de se rendre k Constanti-
nople; mats Mohammed jucea plus
prudent de se r^fiigier chez les A.al-
moocks.
XVm. Adil-Gh^rai, dix-huititoe
khan, ^tait fils d'un prince que des
malbearsdomestiques ayaient forc^ k se
faire gardien de tronpeaux, et qui avait,
acause de cela, requ le nom de tchaban
(ber^er.)
Loin d'apporter sur le trdne la sim-
plidt^ et la droiture de la vie des
cfaainps, Adil se montra f(6roce , astu-
deax et d^bauch^; son regno ne ftit
oa'ane s^rie de crimes. Ce monstre fut
dAos^ en 1673.
XIX. Seiym-Gh^rai I", qui lui suo-
eeda, aurait pu se faire, k peu de
frais, une reputation de bonte et de
sagesse, tant le souvenir du r^gne
precedent rendait les Tatares fadles ill
contenter ; mais ayant voulu soumettre
ses sujets li de noureaux impdts, il
soaleva de vives reclamations, et four-
nit ainsi un pr^texte k la Porte pour
le deposer (1678). Nous le verrons re-
paranre plusieurs fois.
XX. L'histoire ne dit rien de son
soccesseur Mourad , si ce n*est qu'il
perit en 1682—8.
XXI. Hadiy-Ghera!,Tingt«tmnitoe
khan, noontra, en diverses ciroon-
stances , une rare intr^dite; il paralt
m4me que la Porte s*efiraya de ses qua-
lity guerrieres , puisqn'elle le d^posa
apres huit mois settlement de regne ,
donnant pour motif la pretendue ava-
rice de ee prince.
Seiym fut alors rappeie k la t^te du
gouvemement. Pendant sa oourte ab-
sence, ses sujets avaient iq;>pris k le
regretter; aussi levirent-ils reparaltre
avec une grande joie, et il justifia leurs
esperances en regnant avec douceur,
avec bonte , et surtout avec justice.
En 1689, le bonheur dont les Ta-
tares jouissaient sous le gouvemement
de Seiym fut trouble par une invasion
des Moscovites. Le czar parut subite-
ment au eceur de la Crimee, tratnant
k sa suite une formidable artillerie,
ou figuraient quelques obusiers, que
les habitants du pays envahi vovaient
alors pour la premiere fois. uedat
des bombes porta Tefifroi et le d^r-
dre dans les rangs des Tatares : c*en
etait fait de ce peuple si le sang-froid
de Seiym n*edt pas ete plus grand que
le peril. Sa bravoure ranima Tardeut
de ses sokiats; ils revinrent a la
charge , forc&rent leurs ennemis k Ui-
cher le pied, les poursuivirent sans
relAche Pepee dans les reins, et les
foroerent enfin k sortir de la penin-
sule. Seiyni ne recueillit pas les fruits
de sa victotre : la jalousie de la Porte,
et les intrigues de quelques ambitieux ,
le contraignirent li ceder une seconde
fois un pouvoir qu'il exerqait si bien.
XXII et XXIII. Deux suoeesseurs
pass^rent rapidement sur le tr6ne
vacant, Sadet-Gheral II et Safah-
Gherai.
En 1693, Seiym fut rappeie de nou-.
veau ; faveur qu'il dut a k gravite
des ctroonstances. La guerre avalt
eclate entre les Turcs et les Imperiaux ,
et oeux-ci , k la suite d'une campagne
heureuse , s'etaient empares de quel-
ques places importantes. Seiym se mit
k la tete des armees otfaomanes, bat-
tit les Russes en plusieurs rencontres,
leur reprit les vtlles oonquises, et
rentra dans ses etats pour y jouir en
paix de sa gloire, de la reconnaisaanoe
de la Porte , et de Tamour de ses su-
jets. Eniin , en 1698 , il demands
et obtint la permission de reftiellKa la.
couronne a son 61s atne.
u
LUmVfiRS.
XXIV. Dewlet-Gh^ai II ne fut
oocup6 (m*k &ire la guerre aux chr^
tiens ; il leur enlevade riches depouilles,
dont il enrichit sea sujets. On ignore
Um motifs , si toutefois il en existe ,
aui port^rent le Grand-Seigneur a le
6poser vers Fann^ 1703. Ge prince
remonta sur le trdne.
A cette ^poque , S^lvm reparalt une
quatri^me rois a la tete des affaires;
mais alors il ^tait vieux et accabl^
d*infirmit6s : aussi les deux annees
de son nouveau regne sont-elles dd-
pourvues de tout eclat.
Selym , diene contemporain de
luouis XIV et a'Abbas-le-Grand, mou-
rut en 1704.
XXV. Ghazy-Gh^rai II, second fils
de ce prince , fit jouir ses peuples de tout
le bonheur que peuvent procurer la
paix et la confiance sous un gouver-
nement patemel. II mourut en 1707.
XXVI. Kaplan -Gb^rai, troisieme
fils de S^lym , ne fiit pas heureux dans
les guerres au'il entreprit; et la Porte
crut devoir le d^poser apres un an de
regne. Rhodes fut le lieu d^igne a
son exil.
Dewlet-Gh^rai II est rappel6. A
Texemple de son fr^ , il attaque les
Moscovites; mais, plus heureux que
lui , il les bat en diverses rencontres,
ravage leur territoire , enleve du bu-
tin et des prisonniers, et force Pierre*
le-Grand, qui r^gnait alors, k venir
lui-m6me defendre ses domaines a la
t^te d'une puissante arm^. De leur
cdt6, les Turcs se joignent aux soldats
de Dewlet, et leurs forces reunies
vont affronter le czar sur les bords
du Prutb. La bataille dura un jour et
demi : le suooes en fiat douteux; mais
]es Kusses manquant de vivres, et
M^uits k Textremit^, 6taieot peutngtre
perdus sans ressource, si Catherine,
?iii n'^tait encore que la maltresse de
ierre I*"*^, ne se lilt devout pour
eux. Elle tenia de negocier elle-m^me
directement avec les Turcs, et le sue-
0^ cotpronna son entreprise. La Rus-
sie abandonna la ville d'Azow , et la
paix fut signee imm6diatement (1711).
Ce. Itat r dit-on , le souvenir de cet
evenement qui, plusieurs ann^ apres,
engagea Pierre-le-Grand a faire cou*
ronner sa maltresse.
La Porte reconnut nial lea services
^minents que Dewlet lui avait reodus
dans cette glorieuse campagne; elle le
d^posa, en 1713, pour rappder Ka-
plan-Gberai. Dans cette seconde pi^
riode de son regne, Kaplan fut investi
du oommandement d*one arm6e otiio-
mane destine k agir centre les Polo*
nais. II entrait sur leur teiritoire au
mois de decembre 1716, lorsqu*il recut
la nouvelle de sa deposition; il fut fe-
Idgu^ k Brousse, d*ou nous le ver-
rons revenir au pouvoir une troisieme
fois.
XXVII. Kara-Dewlet, fils d'Adil-
Gh^rai , fut cboisi pour le remplacer.
Ce prince, dg^ alors de 50 ans, n'e-
tait nullement agr^able aux Tatares,
qui refuserent de le reconnaltre pour
souverain. lis envoy^nt m^me, a cet
effet, des ambassadeurs k Constanti-
nople.
A.XVIII. Sadet-Gh^rai, troisieme
du nqm , ^tait , disent les ecrivains
orientaux, un prince lascif et avare.
II fut d^pos^ apr^ sept annees de
regne ( 1724—6. )
XXIX. Mengh^ly-Gb^rai II , son
successeur, ^tait unbon prince, qui
reno^ aux conqu^tes pour s'oocuper
des anatres int^rieures de son peuple.
La Crim^ ^tait alors infest^e par des
bandes de voleurs et d'assassins qui
se pr^sentaient audacieuscment aux
portes m^mes des villes. A ces mal-
faiteurs se joignaient souvent les me-
contents et les rebelles. Mengh^ly prit,
k V^prd de ces bandes , des mesures
si vigoureuses, qu'en peu d'ann^es
elles furent d^truites et le pays en-
tierement pacifie. Le sultan Atuued ,
satisfait de cette conduite de Men-
gh^ly , Tappela a Constantinople , ou
il lui fit faire une entr^ triomphale.
La faveur du khan ^tait k son apogi6e
lorsqu'une revolution 6clata soudaine-
ment dans la capitale de rempire des
Othomans. Ahmed, prteipit<^ diu tr6nf ,
entralna son favori dans sa chute.
Kaplan-Gberai fut rappele de nou-
veau. Ce monarque aooomplit I'oeuvre
commeno^e par son pi^Messeur, en
crih£e.
n
Khe?aiit d'exteminer les voleinrs et
la rebelles. II n'eut fns le mdme
racoadanssacampagnede 1736ooiitre
leg Russes : oeox-ci ayaient viol6 les
ooDditioDS de leur dernier traits avec
tes Tmrcs , et lepris notaniment la yille
d'Azow. Clisabe^, alors czarine, en*
voya ses troupes en Crim^. L'irrup-
tioD des Moscovites fut si instantanee
que les Tataies, k peine revenus de
fair malheoreuse exmdition , se trou-
Tereot hors d'^t d^oDposer une r«^
sistaoce s^euse ; Ba^tcbi-S^i fat
pris et inoendi^ par les vainqueurs,
qui demear^rent maftres absolus de la
presqalle pendant trois mois. Kadan
deso^it au trdne, la paix fut n^o-
dee , et les Russes se retir^rent ; mats
il fiit ais^ de pr^voir d^ tors que la
Tauride finirait, tot ou tard, par de-
venir une de leurs provinces. A partir
de cette 6pociue , la politique des czars
epia toutes ies occasions de fomenter
les troubles interieurs de la p^ninsule;
eUe s'attacfaa surtout k brouiiler les
khans avec le Grand-Seigneur; elle
aocueiiiit, a bras ouyerts, les mecon-
tents , les transfuges , les rebelles de
toate espeoe, et ne cessa de leur four^
nir des seeours, soit ouvertement ,
Boit en sous main, jusqu'au moment
00 eOejMit enfin n^liser ses ambitieux
projats.
aXX. Sous le r^e de Fetah-
Gherai n ( 1787—8) , les Russes font
uoe DouYelie irruption en Crim^ ; ils
brdlent Kara'SOU-JBazary et emm^-
ncDt avec eux un erand nombre de
prisonniers. F^tah fut d6^08/^ Tannic
0!^ de son av6nement au trdne.
Mengbely^h^i II reparaft sur le
trone : tous ses efforts se toument
vers les Russes, dont il envahit le
territoire y portant de tous odt^ le fer
et la flanune , sans piti^ pour I'd^ ni
le sae des habitants. Mais Thiyer ,
ce formidable auxiliaire de la puis-
sance russe , vint au seoours des vain-
cus, et les Tatares, d6cim^ par le
froid, songorent bientdt k rentrer chez
^, ne 8a|>eTcevant pas, dans cette
Ktraite prrapit^, que leurs eunemis
Iffi suivaient depres. Geux-ci, en effet,
cotrcrent avec eux sur le sol de la
Crim^; mais vaincus dans une ren-
contre (1738— 9) , I'une des plus lon-
gues et des plus sanglantes dont £m-
sent mention leurs annales , ils aban-
donndrent, pour cette fois, F^temel
objet de leur convoitise. Menghdv
mourut peu de mois apr^ oet te-
nement.
XXXI. S^lamet-Gb^raT II , prince
pacifique et ami des arts, r6gna quatre
anuses (1780—1743) , qu*il employa ik
relever Baghtchi-Siria; il y fit con-
struire de nouvelles mosquto, des
bains, desfontaines et divers Edifices
d'utilit^ pubiique. Une intrigue de coor
amena sa deposition.
XXXII. SJ^lym-Gh^rai II, fils de
Kaplan, appel^ k i^gner. eut d'abord
a combattre la r^Uion de son lieute-
nant, (]ui, battu dans plusieurs affaires,
se retira en Pologne. Peu apres , S^lym
eut occasion de rendre k son sei^eur
suzerain un service signal^. La disette
la plus comply d^lait Constanti-
nople : SiAym y envoya spontan^ment
plusieurs navires charsds de bl^ , sau-
vant ainsi cette ville crune perte cer-
taine.
On rapporte de ce prince un trait
bizarre qui peint assez oien les mceurs
de cette ^poque dans la Tauride. La
Circassie etaii alors soumise aux khans ;
mais son vasselage se limitait k un
tribnt de 300 jeunes esdaves des deux
sexes offert a chaque nouveau regne,
tribut- aussi honteux pour le peuple
qui le recevait que pour celui qui le
pr6sentait. S^lvm resolut de se fiiire
payer 700 esdaves au lieu de 800;
aussi, lonque les d^put^ teherkesses
vinrent, a son av^nement au trdne,
lui offrir leurs hommages, il les re^ut
avec une extreme bienveillance, les
traita splendideraent, et ne les ren-
voya pas sans leur avoir fait a^^r
quelques 16gers pr^ents , que ces mon •
tabards reourent avec une grande
joie. Mais, Vann^ suivante, S^ym
feignant d*avoir k d^attre , dans son
oonseil , une question d'une haute im-
Eortance, convoqua les nobles tcher-
esses; et ceux-ci,se souvenantde ses
bons prooMes, aocoururent en foule
a sa cour. S^lym, jetant alors le mas»
26
L'UNIVERS.
que, les retiot prisonnien, et ne ies
reldcba qu'arar^ avoir reqa les 700
esdaves qu'ii d6sirait. Cette tnsigne
mauTaise foi servit, plus tard, de
pr^texte k la Porte pour le d^poser.
XXXIII. Arslan , fits de Dewlet-
Gh6rai, fiit tir6 de I'exii pour moDter
sur le trdne en 1 748. La Crim6e compte
peu d'aussi bons souverains. Son gou-
vernement peut dtre cit^ comme un
module de sagesse et de fermete. Au
dehors il repoussa les ennemis, au
dedans il contint les factieux ; il aida
le sultan, son seigneur suzerain, de
ses triors et de ses soldats; mais
ayant voulu y joindre quelques salu-
taires avis sur uk conduite de la Porte
k r^ard de ses amis et de ses enne-
mis, cette liberty fut prise en mauvaise
part, et sa deposition ne se fit pas
long-temps attendre ( 12 aotlt 1765);
aXXIV. Alym-Gb^rai, cousin et
lieutenant du pr^oMent, fut appel^li
lui suoc^er. Son passage au pouvoir
est signal^ par une r^volte aes No*
gais. Ces Tatares bdliqueux et no*
mades 6taient ordinairement com*
mandds par un prince de la maison de
GhdraT, dlu par eux et confirm^ par
le khan. Les r^llions n'dtaient pas
rares parmi eux; mais, cette fois,
leur lev^ de boudiers avait un carac*
t^e plus s^ieux, puisqu*elle avait lieu
a rinstigation de leur ^n6ral , Grym-
Ghdrai, ambitieux qui convoitait le
tedne.
XXXV. Alym ayant dtd ddposd le
21 octobre 1758, la Porte rappela, pour
lui succ^er, A.rslan, qui languissait
dans Texil h Chios; mais, dans I'inter-
valle qui s'6ooula edtre son rappel et
son arriv^ aux Dardanelles, les Ta-
tares 61urent Crym-Gh^aT. Arslan
partit aussitdt pour la Romdiie. Cr3rm
etait un politique habile, un brave
guerrier, un ron tacticien; il avait,
it le baron de Tott, des oonnais-
sanoes en gdograpbie , en astronomie,
en musique et en chimie. Doud de
toutes les quaHtes qui peuvent faire
aimer un souverain , il ne sut que se
faire hair; mais les circonstanoes , il
faut en convenir, eurent une iSicheiise
mfluenre sur les relations de ce prince
avec ses sujets. Son r^gne fiit troiibk
par deux grands fldaux qui foodirait
presque simultandmeot sur ses ^tats ,
les Cosaques et la peste. Enfin, apr^
six annm de guerres, de travanx, de
dtestres de toute nature, il fut d^poi^
( 6 octobre 1764). Le motif all^6 en
cette circonstance fiit qu'il s'dtait aUi6
aux Prussiens sans I'aveu de la Porte.
XXXVI. La politique d'Azymet
Gberai , son sucoesseur, le rapprocha
des Russes , qui dtaient devenus alon
trop redoutables pour ne pas £tre
mdnag^. II fut oeposd au mois de
mars 1767. Arslan , rappeld poor b
troisi^e fois , mourut peu ae mois
apres.
XXXVU. Maksoud-Gb^ra! ne oon-
nut que les d^Ots de la loyaat^. Trois
Kuissances qu il lui fallait ^rgiier,la
LUS8ie,laP(HogneetlaTurqpie,anleDt
alors entre dies de vives discussioDS.
Enfin, en 1768, la Porte ayant dtfoi-
tivement d^clar6 la guerre h la Bos-
sie, le Grand-Seigneur saciifiaMak-
souda la Dolitique; il le d^pou^
rappeler Crym-Gfadrai , qui re^t en
meme teoqis le commandement d*une
arm^ formidable, compost decent
vinst miUe Tares et de cinquante
mille Tatares. Crym ne justifia pas
I'espoir que la Porte avait mis en lui;
il fut battu compl^tement Au mon
de fierier 1770, oe monarque fut
empoisonn^ par un m^ectn grec.
XXXVIIL S^lym-Ghtei III eat
un regne aussi oourt que malbeoreux*
II n'arriva au trdne que pour voir les
Russes s'emparer de la presque tota-
lity de la Crim^. II fut (fipoi^ Tann^
m^me de son av^nement au trdne, c»
courut diercher un refuge sur le ter-
ritoire de ses ennemis. Ceuz-df d^
jugeant pas que le moment fiit vena
de r^liser leurs desseins ambitieox ,
voulurent oependant faire un pas de
plus vers la domination de cette coo-
me en s'arrogeant la pr^rogatiTe df
nommer les ktians. On vit, en coo-
stouenoe , pour la premito fois (1771 K
la Russie , usant de son droit de con-
qu^te , appeler au tr6ne de Cn^
un prince de la famille Gh^rai; ^«
jeta les yeux, k cet eflfet, sur le jc«i*
GRIM££.
27
Sabeb, aupres s'^tre assure prudem-
meot de rassentiiiieDt des Tataies.
XXXIX. Gette Section ne wHiTait
inanqaer d'etre contests par la Tor-
qvie. Cette puissance refusa Tinves*
uture k Sabdl). Backty, fib de Crym,
et Maksoud, Favant-dernier khan,
Jvigu^rent alors le trdne vacant. Cha*
con d'eux avail des droits k taire va-
loir,.de8 intrigues a mettre en jeu,
dtf partisans h pousser en avant.
Haksoud Temporta sur son comp^ti-
teor ; mais les Russes , maltres ae la
majeure partie de la Crim^ et de
tottte nie de Taman , influenc^rent si
bien lei Tatares, que oeux-d refus^rent
mtme de le recevoir. lis confirm^nt
r^ection de Sabed, lui donnant pour
lieutenant (keUgah) son frere Chanyn.
Cest ce dcornier qui aura la triste oe-
l^brit^ d'etre le aemier khan, et qui
livra son pays k la Russie.
La Porte ne se contentaitinsdu droit
d*investitare que hii conoedait sa ri-
Tale; elle Toulait conserver cdui de
nomination , et , s*obstinant a repous-
MT le prot6g^ des Russes , elle nonuna
un noureau khan, Dewlet-Gh^raT.
Mais les ev^nements de la guerre d^-
oonoertereut son opiniAtret^. Un traits
de paix fiit sign^ a Kukudk-Kenard^t/j
ao mois d'aodt 1774. Par ce traite,
la Porte o^e k la Russie Kertch,
Jeittittli et KUbomou; elle lui aban-
donne le droit de navi^er dans toutes
les eanx de la dkMuination otbomane ;
aoooide aux Tatares leur ind^pendance
nationale et la liberty de se cnoisir un
khan parnii les descendants de Tchin-
xh», le Grand-Seigneur se reservant
wQtefois la supr^matie spirituelle et
le droit d^inrestiture; ennn , elle con-
sent ^ reoonnattre T^lection de Saheb.
lionqu'elle envova k ce prince les attri-
bots de I'investiture, elle en excepta le
nbre, oe qui indiquait, dans le langage
^bolique de TOrient , nne r^rve ,
^ne sorte de protestation contre Tin-
<lcpendance a&olue du nouveau khan.
Ao commencement de Tann^ 1775,
ivtt r^olution subite delate dans
Ba|ijhtchi-S6rai; Saheb s*enfuit pr6ci-
Aitamment et se jette dans les bras
de la Turquif . Le Grand-Seigneur lui
assigne une pension de trois mille
piasms , et Tenvoie raider k Rodosto,
oans la Romaic.
XL. Dewlet-Ghdra'i III fut nomme
en remplacement de Saheb ; mais
Tambitieux Chahyn, frere et lieute-
nant de ce dernier, soul^ve les Plogais
du Kouban et s^avance k la t£te d'une
arm^ de quarante mille Tatares,
Nogais et Circassiens , dans Tintention
de revendiquer le tr6ne pour son pro-
pre compte. Dewlet rassemble ses for-
ces , passe dans Tfle Taman et vient
presenter la bataille k ce rebelle. Ici,
il est curieux d'observer Tattitude de
la Porte et celle de la Russie : ces
deux {luissances. alors ennemies ir-
r^oonciliables , a^iraient ^galement
un pr^texte pour violer le traite de
Kenardlf^y mais , par un reste de pu-
deur politique , aucune ne voulait pren-
dre 1 initiative. La Russie, en cons^
quence, fit passer, en sous main, des
secours de toute nature k Chabyn,
tandis que la Turquie en faisait au-
tant k r^ard de Dewlet. Ce dernier
venait d'etre abandonn6 par lesm^aa,
ou nobles* qui s*^ient d^lar^ ou-
vertement en faveur de son rival. La
victoire seule pouvait le tirer de ce
mauvais pas , mais le sort des armes
lui fut oontraire. Vaincu au mois de
novembre 1776 , dans une affaire g6-
n^rale, il rentra nr^cipitammentdans
ses etats , suivi des debris de son ar-
mee. Les Russes , a cette nouvelle ,
i'ug^rent inutile de dissimuler plus
ong-temps , et , se declarant ouver-
tement les protecteurs de Ghahyn , ils
6*emparent de P^^p et envahissent
de nouveau la ptoinsiue. De son o6t6,
Chahyn passe le detroit , marche sur
Caf& , d^oi^ il se dirige sur Baghtchi-
S^rai. £n vain Dewlet veut lutter
centre cette double invasion; Torage
Tenveloppe de tons c6t^, et le force
bientdt a cMer. II se retire alors a
Constantinople, abandonnant k son
rival ce trdne diancdant, qui ne sub-
siste plus que sous le bon {rfaisur des
Russes (11 mail777).
XLI. Chahyn, dernier khan. A
peine install^, ce prince entra dans la
voie p^rilleuse des reformes, et tenta
28
L'UNIVERS.
de civiliser son peuple. II soumit les
troupes i une nouvelle organisation ,
ieur assigna une solde r^lidre, ieur
donna des myrza (nobles) pouroffi-
ciers; il organisaun corps d^artiilerie,
et songea mtoe h 6tablir une manu-
facture d*armes ; il diminua les rede-
vances gue les myrza peroevaient sur
les cultivateurs , et pnt d'autres me-
sures portant ^galement Tempreinte
de la sagesse et du g^nie; mais, nial-
beureusement , il s'adressait h un peu-
ple que sa religion et ses habitudes
rendaient ennemi de toute innovation.
Au m6contentement des Tatares, pre-
mier obstacle que rencontra Chahyn ,
se joignit bientot le manoue d^argent.
II n*y avait plus moyen a'en emprun-
ter h la Turauie ; la Russie n'offrait
?ue des solaats, et la Crim^e ^tait
puisne. Chahyn fit battre monnaie h
un titre dont la gravity des circon-
stances pouvait seule excuser Tim-
posture, mais cette ressource precaire
ne {)ut le tirer d'embarras. La Porte
intriguait sourdement pour exciter
les Tatares h la r^volte , et ceux-ci ne
tarderent pas h r^pondre h son appel.
Chahyn ne put que se jeter enti^rement
dans les bras de la Russie. Cette puis-
sance , heureuse de trouver sit6t une
occasion qu*elle n'avait pas ose esp^-
rer encore , fit entrer des troupes en
Crim^ , sous pr^texte de secourir le
khan. La Turquie, h cette nouvelle,
s'^cria qu'il y avait violation des trai-
tes, et elle envoya dans la p^ninsule
uu corps d'arm^e qui se cantonna aux
environs de GuslevL petit bourg ta-
tare , situ^ non loin ae Tantique Cher-
son. On en vint bient6t aux mains ;
les Russes ^prouverent d'abord quel-
ques ^hecs ; Chahyn recut deux gra-
ves blessures et fiit force de se retirer
au quaKier-g^n^ral deses protecteurs,
tanais qu*un nomm^ S^lym , son oom-
p^titeur, s'avand^it vers Ackmetched,
Les Russes prirent bientdt Ieur re-
vanche : huit mille d^entre eux, sous
le commandement de Cliahvn, batti-
rent oompl^tement Tarmee turco-
tatare et contraignirent Selym a s'em-
barquer en toute hdte. Chahyn n*^tait
plus, a cette ^poqne, qu^un fantdme
de souverain ; la Russie gouvemait de
Ml dans les pbunes de la Tauride,
comme dans oelles de Kazan. La po-
litique de oette puissance lui 8ugg6n,
vers ce temps-la, une mesure atroce,
qu'eile a quelquefois renouvel^ de-
{wis, mue par le d^ir de peopler
es solitudes de ses vastes poss^ons.
Les Nogais venaient d'abandonner un
canton dans le voisinage d'Aiow; les
Russes y transport^rent de force les
families grecques et armdniennes qui,
depuis piusieurs ann^, s*^taient eta-
blies en Crim^. Le nombre des emi-
gre s'^leva, dit un grave historien
anglais, h 75,000 individus de toot
dge et de tout sexe. Tous ces malbeo*
reux parent de froid, de fiiim et de
nostaleie (*). La Crim^, qui jadis avait
pu mettre sur pied des araH^ de qua-
rante mille combattants, ne ^ossedait
plus qu'une population de cioquaate
mille ames; man on y traosporta piu-
sieurs families russes en remplaoefDeDt
des dmigr^ d'Azow. Les rerenus du
khan peuvent £tre ^valu6s,|iour oette
^poque, k environ trois millions de
francs.
Enfin , le cabinet de Versailles in*
tervint entre les parties belligerantes^
et grace a son intervention , uoe nou-
velle paix fut sign^e h Amahly-G^
vack , pr^ Constantinople, le 31 nui
1770. Les Russes s'engaserent^^
cuer ia Crim^ et abuiaomi^reot ,*o
Grand-Seigneur le droit illusoire d'io-
vestiture et de suzerainet^ spirituelle
sur les khans de Crim^e.
Un an s'^tait a peine km\i depus
les ratifications de ce dernier traits,
que les Turcs cherchdrent de oouveau
a soulever les Nogais, et trouveraDt
de puissants auxilialres dans la faonll^
mime du khan , dont les deux freres,
Behader-Ghdrai et Arslan-Backtgr, se
mirent a la tite des revoltisuCctte
lev^e de boucliers fut oomprim^f »
est vrai , mais elle le fut par w^'
vention des baionnettes russes.AK^t
le malheureux Chabyn , triste jooetoe
la politique et du fanatisme , abreove
ded^oQts de toute nature, nayani
(*) Eton's iwvey ttf the turkisk tt^-
• * 4
•> • •
i_
crimi*:e.
29
que du m^iiris pour les Tiircs , de la
mine pour les Russes, de la piti^
pour ses ooin|Kitriotes , trop MaM
poor ne pas voir sa ratable position,
aasez sage pour en oonnattre les re-
m^dcSy mais inhabile h les appliquer,
ae nfoiffoa aux dtoets de la Provi-
deiHse. Irois fois il prostema son front
dans la poussitee, trois fois il semeur-
trit le sein; puis ayant ainsi pay6 a
V rhunoanlt^ le tribut qa'elle r^damait,
il prit n<ri>lement son parti etdxtiqua
franchement et sans restriction pour
hii et sa postdrit^.
La. CanOBE DBFUIS SA UUHION
A t.*EacpiRB RussB. — La poj^ation
de la presquile se compose, amsi que
nous rayons dit^ d'^lements b^ro-
stoes ; mats la nation des pr^tendus
Tatares {oend seule id nne pbysio-
Domie locale.
ILia religion des Tatares est un ma-
honn^tiMie m^l^ de pratiques supersti-
et souTent mtoe d'idoUtrie.
II y a parmi eux des nobles et des
seim. Ces demiers n'ont h donner h
leur nudtre que deux jours de la se-
maooe; ks montagnards sont traits,
pour la phipart, conune les paysans
de la oouronne. Us placent de pr^e-
renoe Inurs cabanes dans la partie la
ens sombre et la plus toufiiie des
is ; c'est 1^ qu*ils aiment k aocueiU
lir on stranger et k lui prodiguer les
aoios de Thospitalit^, avec une fran-
chise et une cordiality que Ton
cberdieraityainement chez les Grecs
du m^nie pays. Dans les maisons des
ricbes on prtente au nouTeau venu
une longue pipe k tube de cerisier ,
termini par un morceau d'ambre ou
d^iTOire; puis, on lui offre lemiel,
si exqais dans toute la Crim^, les
fruits de la saison et le lait caill6.
Lies Tatares mangent avec leurs
doiffts ; mais ils n'omettent jamais de
se laver les mains avant et apr^ U
repas. Les murs de leurs salles a man-
ger sont gamis de serviettes d'une
Sande propret6, om^es mtoie de
ntelles. Les femmes ont un appar-
tement, et qu^uefois une maison a
part. L'ameublement de ces demeures
est d'une grande simplicity : un sopba
pour les dieux p^nates , un tapis ou
des nattes pour les maltres de la mai-
son , une petite table k peine 4Aef6t
d'un pied et quelques vases en bois.
L*habillement de ce peuple oQre un
m^ange du costume des Arm^iens
et de oelui des Turcs ( voy. p/. 8).
Cest assez g^nteilement auprte
de Baghtchi-S^rai qu*on rencontre
des troupes de Bob^miens , malheu-
reux cosmopolites qui , aux extr6mit^
de TAsie, comme k oelles de I'Eu-
rope. ne viventque du tribut prtoiire
que leur paie la crMulit^ du peuple.*^
Les Grecs et les Tatares avaient
bdti ou agrandi plusieurs villes , mais
les Russes reoommeno^nt I'oeuvre
de destruction des Huns et des Mon-
gols, lis achev^nt de renverser les
mines de Cherson pour y cbercber les
mat^aux n^oessaires k la construc-
tion de SdNustopol, qo'ils ^lev^rent
aupres d'un ancien village tatare,
nomme Aktiar, dans la p^ninsuie
b^racltotique.
S^bastopol est une petite viUe bdtie
en amphith^tre, sur la dtelivit^ d'une
coUine. Ses murs de pierres et de
briques, entrem^l^ de trontjons de
colonnes , de chapiteaux et d'lnscrip-
tions lapidaires, nobles d^ris de I'an-
tique Cherson, se r6fl^issent dans
les eaux d*une bale que Ton consid^re
k iuste titre comme Tune des plus
belles du monde; c'est la station or-
dinaire de la flotte imp^riale de la
mer Noire. Douze ou quinze vaisseaux
de ligne et un nombre proportionn^
de Mtiments 1^^ assurent k la
Russie la dominaSon du Pont-Euxin
(vov. pi. 2).
II existe a Sdbastopol des cliantiers
de radoub, mais il n'y en a aucun
pour la construction ; I'entr^ du port
est interdite aux navires du com-
merce. La population 6trang^re k la
marine n'excede pas 3000 habitants ;
ce sont pour la plupart des Grecs
marchanos. Leurs femmes sont d'une
beauts remarquable.
La baie de S^bastopol est infests
par des myriades de vers de mer
phospborescents ( teredo naoaUi ou
caiamiiasnavktm^Limii)^ qui s*at-
30
L'UNIVERS.
tacfaent aux navires et les mettent en
peu d'ano^es hors d'etat de servir.
On ne pent pr68erver un bdtiment des
ravages de ces dangereux animaux
qu'en le renversant sur le flanc pour
lui faire subir Fop^ration du feu, tous
les deux ou trois ans. Cette rade est
le Cienos deStrabon.U Tad^crite avec
une admirable pr^ision : on retrouve
ais^ment dans les trois baies qui
touohent a celle de la quarantaine,
les trois ports qu'il a mentionnes.
£n suivant le littoral on <q>er^it
le cap Parthenium^ qui se termine
par un pr^ipice d*une grande hau-
teur; au-deUi. un golfe entour^ de ro-
chers escarpes et sauvages, au milieu
desquels s'el^e le monast^ Saint-
George, jadis opulent, aujourdliui
habite seulement par quelques nao-
vres moines dteeuvr^, qui m^itent
sur les temp6tes de la vie>, en voyant
ies flots 6cumer et bondir au pied
de ce tranquiUe sejour. Le promon-
toire 8acr6, Ajaboumim^ se trouTe
entre le monastto Saint-Geor^ et
Tancien port des Symboles , aujour-
d*hui Balaclava , ville remaiquable
par ses rues pavte en marbres rouge
et blanc.
A trente verstes a Test de S^bas-
to(M>l , et a Tembouchure de la petite
riviere Ouzen, on d^couvre Inker-
man J la ville des Cavemes. C'estune
montagne dont la d6divit6 est toute
perc6e de grottes oue Ton suppose
avoir i^ creus^es dans le IV* sikle
de notre ^ par les Ariens. Une co»
lonie de oes schismatiques, fiiyant la
persecution des empereurs byzantins,
vint demander rhospitalit^ aux habi-
tants de Cherson. Ceux-ci lui ^ermi-
rent de s'^tablir dans les environs,
sanstoutefois Tautoriser ^ y bitir une
ville; les Ariens creus^rent alors les
cavemes dont 11 est ici question. On
a rstrouv^ dans qoelque^nes de oes
grottes dns vestiges d'autel et de figu-
res peintes repr&entant des saints et
des apdtres (voy. p/. 6).
Mon loin de la, en se dirigeant vers
le sud, on voit le diflteau des Tcber-
kesses, Tcherkeshemumy qui rap-
pelle Torigine des princes circassiens
de la Kabardah; la ferteiene Mso-
goup , ancienne propriety des G^aois,
et la belle vall^ de Baidar. Aintes-
sus de S^bastopol , en remontant vers
Koslow, on trouve sbcoessivcacBt
cinq petites rivieres, dont deax, la
Concha et le Belhehy entourent me
plaine oonnue sous le nom de K<A»'
dah et de plaine des Tcherkesia.
Ak-Metcnedf la roosqu^e bbadie,
d'origine tatare, sur lesboidsduSal-
ghir, est la capitale actuelle de la Tao-
ride ; les Russes lui ont donn6 le doo
bizarre de Symph^ropol, d^riT^ de
&fAf tD», je suis utile. Cette ville n'a
rien de curieux qu'un gymnase et ime
belle ^ise.
BagMM-S^aHy Tandenne M-
dence des khans, situ^ ^ S4 ventes
d'Ak-Metcbed , sur la route de Ste-
topol , est la ville la plus oontidMife
de la Crim6e. Sa po^ilatioD, coouoe
oelle de la pr^o^dente, se oompoaede
Tatares, de Juifa, d^Arm^niena ^de
Russes. Saocag^ et inoenditemaiotes
fois, die est encore remarquaUe air
ses mosqute aux ^l^ganta mioami,
ses nombreuses fontaines , sea cantox,
ses Jardins , ses bains , quelques befles
maisons, le palais des kluns , et , eni&i
par une |)OSition des phis pittoreaqoes.
On y voit de nombreuses w»xssS»
tures de maroquins, de tapis de fto-
tre et d^artides de ooutellarie.
A quelques verstes seolemeDt de
Baghtcbi-Sto! se trouve rintdressante
colonic de Caraitesde Tchoufimt-Kak.
Les Cardites sont des Jui6 diasideati
qui rejettent kss superstitioDs et jg
mepties du Talmud. On en reooooDC
en £gypte,en Syrie, dans leCaoc*^
et, ennn, depws plusieura sidckSi >
Caffa, et surtout k Tchoufout-Rale. Ce
villa^ est situ^ sur le sommet (Toae
montagne en apparence inacoeanw;
les maisons y sont bdtiessurleaflaocs
*des sommit^ les phis escarpdea.
Les Garaltes se font remarquer^
leurs moeurs patriarcales, leur doo-
oeur et leur probity : Tchoufoot es^
pourtant un terme injurieux ^^
fut donn^ par les G^nois; leslMai^
le conserverent sans le oomfirmr^-
«t y joignirent la terminaison kairt'
• • • «
• •• •
» • • •
• • •
a ■
•••
• • ■
• "•
» > • • •
■••• •••*
» *• • •
• - *••
•• •• ••• •
* • - • • • •
• • •
• • •
• ♦
ckim£e.
31
qui corfopond a forterene. C'est au-
presdeTchoufout-Kai^, h iinedistanoe
d'en?iioii seise verstes, que s'deve
le moot Trapse de Strabon, aujoar^
d'hui TchatjnNlaefa, on mont de laTente.
Les enTUfons ae Baghtcfai-S^ai sont
oSkftts par le s^joor de Pallas. Aussi
doux et tiniide qu'il 6tait savant , Pal-
bs ^t TCDU en Taiiride a la fin du
XYIir Steele, avec les preventions
que les Russes de cciUe ^poqoe nour-
rissaient contre on pa}/! mal connu ,
et habits par leurs andens ennemis;
mais ayaot trouv^ le oontraire de ce
qu'il avait siajppos6j ses preventions se
ooDvertirent en une admiration exa-
ger^, si bien que Catherine II ne
cnit pouToir mieux payer ses travaux
qu'en loi donnant one terre dans la
preaqa^tte, avee une assifliation an-
nueUe de deux milie roubles. Pallas,
qai tremblait an seul nom de sa sou-
veraine, prit cette faveur pour une
disgrace. II vint s'^tablir en Crimee
oommeenun lieu d'exil, y vecutplu-
siearaannees, 6ou£frant d^esprit et de
corps, et n'osant exhaler ses plaintes,
w ses Merits, que sous un double
voile de reticences et d'alluaions. La
oBort de oet bomme de bien fut un
Bujelde deuil pour tous ceux qui Ta-
vaientoonnu.
La m^moire de Pallas n'est pas la
Mole qui reveille ici une vieille sym-
paftie. Le due de Richelieu, oe
Dienfiiitear d'Odessa, qui devint, de-
pois, pnnnier ministre en France,
sous Louis XYIII , fiit quelque temps
gouTemeur de la Tauride. Iiavaitfixe
sa r^idenceaupr^s de Gouesouf (voy.
pi* 3).Voici ce qu'6crivait, dii^ s^jet, en
1S20, le comte Mourawiefif Apostol ,
dans son voyagede la Tauride : « Je ne
« oonnais personne qui ait laiss^ une
'■ m^oireplus venme hors de sa pa-
« trie. Les lataresprononoenttoujours
« son nom avec emotion et tendresse.
< — Nous le regrettons sans cesse,
■ me dit le podestat de Goursouf.— Je
* lui repondis quejeconnaissais beau-
' coup le due de Richelieu; et cela
* seul fut pour moi , aupr^s des habi-
* tants, une meilleure recommanda-
* tion que n'aurait pu T^tre un fir-
« man. Jje ne saurais vous exprinier
R avec quelle curiosite ils m'eooute-
« rent (juand je leur dis : — II est le
« premier apres le roi ; il jouit de Ta-
« mour et de la oonfiance bien med-
« tee de ses compatriotes ; et cepen-
« dant 11 se rappelle toujours avec
R plaisir ces lieux, iju'il reviendra
« peut-etre visiter un jour. — A ces
« mots , mes auditeurs versdrent des
« larmes de joie et s'ecrierent : Que
« Dieu le fasse ! »
Koslow, I'ancienne Eupatoria , est
une ville importante par son port uranc
et le voisinage des grands lacs sales
qui fournissent annuellement, h Vex-
portation, quarante a soixante miUe
powis de sel ( 650 ^ 980,000 kilog. ).
Les autres extractions de cette sub-
stance out lieu aux environs de Peie-
cop, de Caffa, de Kertch, et dans le
lac Sivasch. L'exportation totale s'est
eievee, dans les bonnes annees, h
3,600,000 jpotMif (41 millions de kil.).
A^arojotf-^ozar^place commer^nte,
ainsi appdee parce qu'elle est situee
entre deux bras de la riviere aux eaux
noires, jfiTaro-Mw, est une ville mal
betie, insalubre et triste.
Sur la cote sud-est , depuis Merdven^
ou les Degres, passage romantique
par lequel on descend sur le bord de
la mer, jusqu'ikTheodosie, on rencon-
tre des villages d'origine grecque ou
{;enoise, dont les environs sont au-
jourd'hui peupl^, en grande partie,
par des colons allemands qui selivrent
avec ardeur a la culture de la vigne.
Nous citerons Alot/gpka , MachareSch,
Nikita^ Gourstntfy LampaSf Alousta ,
et particuli^rement Souaak, oh le gou-
vemement a etabli une ecole de viti-
culture et un jardin botanique. Les
prindpaux vignobles appartiennent au
comte Woronzoff , k I'amiral Mordwi-
noff, aux princes Galitzin , Borozdine,
Myryschkme et plusieurs autres. On
y trouve les ceps de vime les plus
choisis du Rhin, de la Bourgogne,
dela France meridionale,de TEspagne,
de Chypre et de Madere. Cette cul-
ture est dans un etat de prosperite
auquel chaque ann6e ajoute un nou-
veau developpement.
32
UUNIVERS.
En travenant la steppe depnis Ak-
Metcbed jusqu'^ P^r^p , on ne voit
que quelques relais de poste tatares,
et un bazar, situ6 a trois verstes seu-
lement de cette demise place, fre-
auent^ par des Grecs , des Arm^niens ,
es Juirs et des Russes. Piricop^ la
clef de la presqu'tle, n'est pour ainsi
dire qu*uiie ^ande route oord^ de
maisons; mais k une certaine ^poque
de I'ann^, c'est un lieu plein de vie
et d*int^r6t par le passage continuel
des caravanes de chameaux, des trou-
peaux de moutons, des chevaux, des
chariots de poste et des patrouilles
de la douane (vo^. pL 7).
II nous reste a mentionner quel-
ques villes de Tancien Bospore ciin-
m^rien. Caff a y\A^t par les G^nois
sur remplacement, ou du moins dans
le Toisinage de Tancienne Th^odosie,
poss^e un musde, une bibliotiii^e
publi^ue et un iardin botanique. Son
port jouit de la franchise comme celui
de Koslow.
Kertchy raneiennePanticap6e(j9/. &),
n'est remarquable que par son mus^,
riche d^pdt des antiquit^s srecques
trouv^s dans la Tauride. C est aux
environs de cette viUe ^'on voit
VAUyrif^xho, grande ^l^vation que le
vulgaire croit dtre le tombeau de
Mitihra-dates. JenikaU est une forto-
resse qui commande le d^troit et loi
donne son nom.
Les Tumuli J les mines deJIfyrma^
dum et celles de Nymphaewny le sou-
venir de vingt villes greoques ou pon-
tiques disparues k jamais, le mona-
ment de Saiyrusj les vases antiques,
les bijoux et les m^ailies que Ton
trouve diss^min^ sur le sol, tout donoe
un ^and int^r^t historique a cette
partie de la Crim6e. La superstition
populaire ne pouvait manquer de s'em-
barer d*un sujet si fertile en contes
fantastiques. « Chaque soir , dit one
l^ende locale, une vierge ^lor^B,
une blanche sylphide, vient s^sseoir
sur Yj4liyn^abOy et la elle pousse de
longs g^missements que le vent de la
nuit emporte k travers la bnif^e. >
Cette neureusecr^ulit^, qui people
les d^rts, qui anime les mines et
oouvre la froiae v^rit6 du manteao de
la po^ie, est pr6f6rable peut-^tre k la
science qui ne trouve ici que des sou-
venirs confus, ailleurs que des osse-
ments blanchis oudes pierres Ivisies,
plus loin qu'une vaine poussicbne, et
partout qu^un silence de mort qui op-
presse le coeur et glace rimaginatioo.
FIN.
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L'UNIVERS,
on
HISTOIRE ET DESCRIPTION
DE TOHS LES PEUPLES.
DE LEURS REUGIONS, MOEURS, COUTUMES, bic.
»••
REGION CAUCASIENIVE ^\
PAR M. CteAR FAMIN
etoGEAPHIB PHTSIQUB.
^I V(m trouTejpartont , sur le globe ,
les traces ind^oiiles des accidents qui
en ont change la sur&ce h des 6poques
oO toQte chronoloeie denent imponi-
Ue, nolle parWeUes ne portent un
caract^e de certitude plus prononc6
que dans la r^g^on caacasienne.
PrOBABILITBS ciOGRAPHIQUSS.—
Le Gancase . cette majestueuse forte-
resse qui separe TEurope de FAsie ,
^teod son dotdilerempan des rires du
Pont-Eoxia h celles de la mer Cas-
pienne. Vers la partie septentrionalef
sabase rnose sur despiaines saUon-
neuses Jadis coovertes par les eam de
la mer. Le plus simple examen de la
%>graphie suflBrait pour attester ce
(*) !• region ctncnieiiiie ett phii oom-
"wnihnfnt appeUe en EurmM du nom da
*^ principaiei pnmnoes : Gdarrm et Cir-
^if. Nous aTont dA adopter la denonii*
i^KioD rtnende qui lei embrasse egikment
tOBtci dieiiz, eo y oomprenanl leun annexei,
» WngrdUe, VJhatte, le Daghutan, etc
£But quand 11 ne serait pas confirm^
encore par la tradition , par les r6dts
des historiens de Tantiquit^ , et enfin
par les observations modemes des Pal-
tas , des Saussure , des Dolomieu , des
Delisle de Salles et des Cuvier. Cest
un fait que la philosophie et la physi-
que s'aocordent ^alement h. avouer «
u mer Gaspienne est im d^membre-
ment de la mer Noire, les ph^nomd-
nes qui ont boulevers^ la terre ont
foit surgir, certainement, des terrains
qui, autrefois, ^taient cacb^ dans
rablme des mers, et ont enseveli ceux
qui 8*dle¥aient au-dessus des eaux,
converts d'une fbrte v6gdtation, et sans
doute aussi habits par des g^ntotions
qui ont disparu subitement dans la
templte. « On ne pent le nier, a dit
« Cuvier; les eaux ont recouvert les
« masses qui forment aujourdliui nos
« plus hautes montagnes. »
IL n*entre pas dans notre plan de
disselrter sur la grande catastrophe
prodam6e d'abord par un livre qui se
trouve en dehors de toute discussion ,
oorrobon^ ensuite par le t6moignage
r* Uvraison. (GiftOASsiB bt Georgib.)
L'UNIVBRS.
de tous les peuples > et confirm^ en*
fin par Finspection gtologique de notre
plandte ; mais il ^tait du moins n6oes-
saire pour nous de rappeler cet ^vtoe-
ment, parce qu*il selie 6troitement It
la contr^ que nous entreprenons de
dtoiie, soil qu'on Tappelle dtiuse de
No^ dans Tbistoire sMne, de Xixur
thrus chez les GiaM^ens, de Peymn
dans la Chine , de Deucalion et tPO-
gyg^s chez les Grecs, de BocMca
Karmi les Muyscas de la GolomftMe, etc.
ious ajoutmms que c*est encore un
fait avm que les eaux se retirent de
certaines locality pour faire ailleurs
de nouvelles conqu^tes : le golfe de
PouzzoUes , h quelques milles de Na-
ples, couvre des villas qui furent ha-
bit^ par des contemporains de Qo^-
ron ; la mer baigne le pied d*un an-
cien temple de Diane dont les Mar-
seillais ont foit leur cath^dnJe, et qui,
jadis 2 6tait avanc6 dans Tint^rieur de
la ville. Par oontre , les anciensports
de Brindes , de Ravennes et de Frojus
n'existent plus; Memphis, qui servait
de retraite h dies floites nombreuses,
est maintenant a vin^ lieues du goife
de Suez ; les fkAs batbient , il y a peu
d'ann^ . les murs de Caatx , qu'ils
ont abandonnds aujourd'hut. £t^ pour
revenir k notre suiet, le tnangle
compris entre la chame du Caucase ,
le Bon et le Volga, n'est ou^une vaste
lande, ou steppe, de nature saNne,
entreiml^e de sable et de terre giaise,
de marais salants, de sel cristaHis^,
etde coquiflages qui n'ont aucun rap-
port avecceux des £[euyes ; indices cer-
tains de Tancienne union de la m«r Cas-
Sienne et du Pont-Euxin par la mer
'Azow. Le lac d'Aral hii-m^me n*est
qu^une fraction de la premi^: ce
que d^montre incontestablement rin-
spection du sol intermddtaire. Buf-
fon a fait observer, conune preuve
de cette jonction , que la Canrienne
ne recoit aucun fleuve du oot6 de
Torient, ni TAral du c6t€ de Focci-
dent. It ne servirait k rien de deman-
der ce que sont deyenues ies eaux
ainsi d^pfac^, car nous pourrions
r^pondre qu'ellcs ont vers^ leur trop
plein dans le sein du vaste Oc^an, sott
par des passages droits semblables h
ceux de J6ukai^ , de Constantinople ,
des Dardanelles et de Gibraltar, soil
par des canaux souterrains. En effet ,
des voyageurs assurent que tous les
ans , k Pentr^e de I'hiver , on voit sur-
nager, dans la partle sunirieore du
golfe Persiqae, dee fenules et des
orandia^ appartenant k des ?^
taux ^1 ne ae trovrent que dans ks
provinces voisines de la mer Camicn-
ne, et nous afifirmons, sur le temoi-
gna^t de M. Gamba, a qui on doit
plusieurs travaux utiles sur oetteoon-
tr6e, et notamment une carte hydro-
grapnigue , r^uite sur oelle de iLou-
>uzo£r, que cette mer est sujette ^des
variations de profondeur, et qu'en
1822, par exempk, elle admettait
des vaisseaux tirant dix-huit pieds
d'eau , tandis qu'en 1826 elle n <^it
plus navigable ^ue pour des navires
lirant au plus qumze pieds. Ctftte baisse
ne s*est point op^ree sans kusser h
dtouvert des edifices qui attract
qu'autrefois il y a eu des mouvements
al tematifs de hausse et de dtooissanoe.
Qui nous dira ce que devienncnt les
eaux dans la p6rioded*abai8sc»ieQt?
Maintenant, si nous r^unissons par
la pens^ ce aue le temps a s^par^,
nous verrons le Caucase, le Taurus,
la Tauride, le D^mavend et oueiques
autres sommit^s former des Ties bai-
{(nto par les eaux de TOo^an. Vers
e nora, la mer Baltique et la mer
Blanche ^taient unies k ces nappes
d*eaa que Ton a appeldes depuis Pont-
Euxin , mer Caqjuenne et mer d'Aral;
et , en effet , on ne trouve entre Riga
et Azow, entre Archangel et Astra-
kan , qu'un petit non^nre d'di^Tations
de formation r6cente.
Versle sud, les lacs d'^rivan, d*Or-
miah etde Van ne sont que les restes
des eaux qui convraient autrefois ia
Perse, et se r6unissaient au gooe
Penimie par le terrain qui farme an-
jouidliui le Naaubemkuif oo mad
66seTt sal6. Cette observaooo , w^
sur des preuves gtologiqoes, expHqoe
la presence, dans la mer Caspmiieet
dans celle d'Aral . de certaines esptes
de coquillages et ae poissons analogues
i» ii
H • «
w w « >. -,
• • • -w •
W *
CIRGASSIE £T Gl^ORGIE.
h celles de i'Oo6an. Mais qii'oii ne
s'imagine pas que les seuls ecrivains
profanes ont pu Clever oette bypa-
th^. nVeipritdeDieu^taUportisur
« les eaux y » dit la Gente. — « M
« poslirUi de Japhet se ditpersa
« doHs les iies des naUons. — Au
* commencement du mondey Peau
« cowraU toute la terre, » ajoutent
<> saint Jean-Damaso^ , saint Am-
« broise, saint AugustinetsaintBasile.
Les peupies les plus anciens s'enor-
cueillissent d'une engine insulaire :
fe r^it de Platon sur TAtlantide est
assez oonnu sans que nous le rappelions
ici. Un philosophe de notre siede s'en
est empar^ poor une ing^ieuse et
savante dissmation sur Tori^ine des
Atlantes , de ce peuple primitif qu*il
place dans le Caucase. II hii pauralt
certain, par la concordance des plus
vieilles fraditions, que les anoetres
de ees gyrations qui couvrent le
grand plateau de la Tatarie , la vaste
acythie des anciens , la Perse et T Asie*
Mmeore^ ^talent descendus des hau-
teurs caucasiennes ; aussi doit-on peu
s'^ner de Toir que oe mont ^it un
oljet de onlte pour les plus anciens
peoples de rOrient. Et , en effet , une
tradition de FAsie, rapports dans la
B/bfiothdgne orientale de d*Herbelot,
Porte qu^ I'^wque oili la terre fut
donn^ h Adam , le peuple ant^eur
fot reKgu^ dans les montagnes du
Caucase.
Les t^itiiires qui enyeloppent le
berceau de Thistoire oonunencent k
{Kine k s'^daircir, que nous Toyons
s'derer, sur cet horizon n^buleux,
une ^nde finire, Fram-theut, qui,
an dire de Pelloutier, Phtstorien des
Celtes, simifie dans la langue des an-
ciens Scvftes dwMU bienfaiiante ;
dans cede des Grecs, c'est le dieu
pr^oyant ( npo(&)i6iuc ) , Prom6th6e ,
^i, ayant rayi le feu du del pour
animer les statues d'argile que ses
mains ayaient paries, les organisa en
Mci^ dans ceue mtoe contree ; mais
j[«piter, irrit^ de Taudaoe de cet
bomme, usurpateur de ses propres
'^^^ , le fit her ayec des chalnes de
sur un rocher que la tradition
dit £tre le Mqimvari, ou Kasbeck,
et il youlut, en outre, qu'un insatisdble
yautour lui d^chirftt 1^ entrailles. Ce
supplice ^pouyantaMe ne finit que
lorsqu'un n^ros yint d^liyrer le pere
des hommes, et tuer le monstre k
coups de fl^hes : myst^rieux et res-
pectable sonyenir d'un grand homme ,
d'un bienfaiteur de rhumanit^, qui
anime des 6tres stupides et abrutis du
feu sacr^ de lapens6e, mais que Fin-
gratitude et I'enyie abreuyent de d^-
espoir jusqu'au jour oik le bras d*un
yengeur se l^e pour sa d^iiyrance.
Les annales mythologiques de TO-
rient nous montrent les rodiers du
Caucase peupl^ de divet^ sorte de
grants qui r^nent sur toute la partie
habitable du globe. L*un d'eux , Ar-
genhy iXtit sur ce mont un palais od
sont consery to les statues des rois de
cette 6poque. Un danger, noramd
Huschenky yient attaquer les dhes^
mont^ sur un dieyal k aouze pieds, ou
phit6t sur un nayire k douse rames ;
un rocher, lanc^ par un de ses ad-
yersaires, Ttoase dans les monta-
gnes du Damayend. Or, il est impor-
fimt de remarquer que ofres, dans les
anciennes langues de TAsie. d^signe
une tie, et il est la racine des mots
MaldiveSyLaouedlve8ySerandk>e{Qey'
Ian ), et de plusieurs autres.
Les m^mes traditions orientales rap-
portent que des colonies sortirent du
Caucase pour se r^pandre sur les ties
yoisines; d'oik il faudrait oondureque,
de procfae en prodie, elles peuplerent
les sonamit^ du Taurus, ou Liban,
de I'Atlas , des Pyr^nto , des Alpes ,
des monts Ourab, de T Altai et dn
plateau de la Tatarie.
Nous pouyons ajouter enfin que les
Tcfaerkesses, que nous ndmmons im-
proprement circeusiensy se donnent
a eux-m^mes le nom ^Adtghiy A€riv€
de Ada^ qui, dans le langage tatare-
turc, correspond a ^. Mais il est
tempiB de sortir aussi de cette tie du
Caucase, oCi Tenfance de Fhistoire se
trouye empisonn^e dans des lan^
^troits. L'efmis rideau qui nous yoife
les temps primiti& est tomb^ pour de
longs siteies , et quand il se leyera de
L'UNIYERS.
t
nouveau, Taspect de la terre ne sera
plus to mdme; tea eaux se sont d^la-
oto, et lea ties ont fornix des conti-
nents. Si le Caucase est encore bai-
g^6k Test et k I'ouest par une double
mer, au nord il toudie h PEurope, et
▼era le sud il dtend ses ramificationa
dans la plus vaate partie de I'anden
monde.
HisTOiBB DU Caucjlsb. — TVcmA-
tkmt. La cfaatne caucasienne, situ^
entre les 40* et 45* degr^ de biti-
tude N., et les 35* et 47* de longitude
orientale, a enyiron 350 iieues com-
munes dans sa plus inrande longueur,
depuis Anapa iusqu'a Bakou. VEl-
bfina, la plus Ae?ee de ses sommit^s,
a 16,700 pieds, le Mqimvari, ou rocher
de Prometh^ en a 14,400, et le Choi-
^Ibrauz sur lesconflns du Daghestan,
environ 13,000. La steppe que la re-
traite des eaux a mise a d^uvert du
cdt^ de la Russie, est, ainsi que nous
Tavons dit, une vaste plaine de sable
et de sel cristaHis^^ formant un triam-
e scalane, eompns entre le Don et
a mer d'Azow h I'ouest, le Volga et
la mer Caspienne k Test. Vers le sud,
plusieuis cnatnons descendent en toas
sens, et vont se r^nir, les uns au
mont Taurus dans la Turquie d*Asie,
les autres au pic de D«nayend et
aux mmitasnes du Tab^stan, dans le
royaume ae Perse. Au centre se
trouTerAnn6nie,que dominele mont
Ararat J diii, selon la tradition locale,
8*arr6ta I'arcbe de No^.
Le Caucase forme deux rangto de
montagnes paralldles, dont la plus 61e-
vde se trouye au sud. et la plus basse
au nord. Gette demiere, connue sous
ie nom de Montagnei Noire$, se
perd dans une vaste plaine qu'arro-
sent de grands courants d*eau. EUe
iustifle son nom par son aspect sau-
vage et Tobscurite babitueile qu'entre-
tiennent dans ses valkes le rapnroche-
ment^des grandes sommit^, r^pais-
seur des fdr^ts, la fr^uencedes pluies,
la firoideur des vents, et la densite
des brouillards qui descendent des
montagnes neigeuses; obscurity que
rendent plus sensible encore la douceur
du climat et la puret^ de Fair dans
la steppe voisine. Chaoune des hau-
teurs prindpaies des montagnes Noi-
res est d^sign6e dans le pays par une
d^omination caraot^ristique: tels soot
la motUagne ChauDtj k mimtdet
f^oieurs, odai d& la Forit BoHitf le
Bolt Sombre, le Poignard file mtmi
des TempStet*
Derri^ cette premite dtatne 8'6-
l^ent les montagnes Neigeuses oii Ton
remarque FEIbrouz et le M^wari,
dont nous avons d^a parl6. Xa tra-
dition afiOrme que nul n^a grar i la dme
de TElbrouz , et (fu'il faudrait poor
cela une permission particuli^ de
Dieu. Le Mqinwari est appd^ par to
Russes, Kasbeck, paroe que le vil-
lage de St^phan-Tzminda , situ< au
pied de oe mont, ^tait autrefois la i^
sidence du Kasi-beck, offider charfje
de la garde du d^fil6. Ces sonunites
gigantesques sont flanquto par d*au-
Ires pics, dont les t6&s sont ^gale-
ment couvertesde neiges^temelles, et
dont la base se cache sous des marais
pestilentiels qu'y entretient la foate
des avalanches.
Ge rempart nature! , jet^ k Yem-
mit^ de TEurope sur les oonfins de T A-
sie, laisse pourtant deux passages par
Oik les conqudrants ont qnelquefois
pte6tr^ de rune k I'autre nartie alter-
nativement ; ce sont les d^nMs de Der-
bent et ceux du T6rek. Mais mm,
de temps immemorial, les peoples
voisins se sont attach^ k dtfendre oes
passages par des fortifications mie b
disposition des locality rendait for-
mid{d)les li pen de firais. Ces d^bna
detours, de murs, de bastions, de
foss^ et de f&rteresaes ont donn6 lieu
2i la fable si aocrWt^ pmni les (>uca;
siensde la filmeuse muraiDe gui bordait
la crite du Caucase, depuis le Poot-
Euxin Jusqu*^ la mar Cainnenne. En-
tre les mille r^dts extraoroinaires dus
k rimagination des peuples orientaox,
il en est un qui a m adopts par ouel-
ques toivains de TOocident, cw ce-
lui qui attribue a Alexandre-le-Gwd
la construction de ce rempart, ben
qu'il soit dtoontr6 que ce conquoaDt
n'a Jamais visits le Caucase. Mais
id la tradition fait honneur k Alezan-
CIRCASSIE £T G^ORGIE.
dtt de toii8 les grands soayenin, de
mliiie qa*en imVd eUe lea oonaacre
d^ja k adp(A6on. Mabomet lui-mtoe,
dans ses mystiques allocutioiis, foit
allusion au conqu^rant mao6donien,
en pariaat de oe mur , car il en al»
triixie la fondation k Zoul-Camalln
( le bioome ), ayant probablement en
vue ies deux comes d'Ammon, figu-
rte sur Ies m^dailles d* Alexandre (*).
Cest au-deU de ce rempart que le
proriidte place Ies descendants maudits
de Gog et de Biagog. pr^destin^ k
raTager la ttoe peu de temps a^ant
la fin du monde. Ges peuples cruds
( Ies YaeffaiuOes et Ies Mc^foueffes),
sans doute Ies Scythes-MoBotes des
Grecs, ^talent, selon Ies toivains
orieotaux, contenus dans Ies r^ons
sqytenMonales par le rempart du Cau-
case. Vaici ce qu'en dit le Koran :
Zoul-Gamain, arrive au pied dedeux
montagneSf y trouva des peuples qui
De coDoprenaient qu'k peine le lan-
caffB oral. Ges hommes s'adress^rent
a lui : — 0 Zoul-Camain, Ies Yad-
eougs et Ies Mad^ougs raTa^rent la
terre; nous te paierons un tnbut si
to veux 61e?er un mur entre eux
et nous. U r^pondit : -* Les dons
de Dieu sont nr6f<6rables It tos tri-
ints y je satisrerai k tos d^sirs. Ap-
portez-moi du fer, et entassez-le
myn^k la hauteur de vos montagnes.
Pais il leur dit : SoufDez pour
embraser le fer ; et il ajouta : Ap-
portez-moi de I'airain fondu, ana
que Je Fv verse.
« Les xad^ougs et Ies Madgoum
ne purent m firanchir ce mur, ni le
peroer.
« Cela a M £ait par la grace de
Dieu. Mais quand T^oque qu'il a
d^ign^e sera venue, il renversera
ce mur , et Dieu n'annonce rien en
vain. »
PIqsieurs bistoriens de TOrient qui
ecrivaient dans les premiers sidcles de
ll)6giR, sont entresa ce sujet dans
de curieux details : les Yadjoujes et
les Madgougs, sont, disent-ils, des
(*) M. a d'Ohsaon ( Moundjt ). Dei
peoples dtt Caucaw , di. vix et note 37.
grants , dont la taille s'^l^ve k une
bauteur pxodicieuse ; ils ont des fprif-
fes et des denti indsives , comme les
animaux camassiers , dont ils parta-
gent les godts et 1^ babitudes. Le
mur dev6 contre eux est ooostruk en
briqnes de for et de cuivre, soudto
ensemble et reoouvertes d'une ooucfae
d*airain fondu; nuds qudque sottde
que soit ce rempart, iL tombna coomK
un pabnier que la cogn^ a firaippi§,
quand le temps sera venu oik les en-
fants de Macog devront se r^pandre
sur la terre et y porter la destruction,
Pincendie et la mort, jusqu'au Jour so-
lennd oii la mati^ sera anmitist et
lliumanit^ tout enti^ jette, trem-
blante et dtermte, aux pieds de son
Crdateur. En attendant, les gudiens
de ce mur viennent, de temps en temps,
firaii^;)erli grands coups de marteau sur
ses portes d*airain , et ce retentisse*
ment sonore foit savoir aux Madgougs
que le pays est bien gard^.
Les peuples caucasiens aocueiUent
avidement ces r^cits prodigieia, et il
ne £Btut pas s*«n ^nner, leinr g^nie
offirant im mdange de Pimagination
ftonde des pontes de POrient et des
reveries ossianiques des montagnards
^cossais.
D^Ja, dans unebaute antiquity, les
Grecs, frapp^s de Paspect k la fois im-
posantet bizarre de ces montagnes , y
avaient laiss^ tomber les germes de
plusieurs traditions mytbologiquesre-
cueillies avec entbousiasme par les
peuples de TAsie. Rien de si fimtas-
tique, en effet, que cette cfaalne cau*
casienne, lorsque au jour tombant,
le v<^ageur merveilie peut voir la
gigantesque silbouette d'une crdte b6-
risMc de dents et d^ir^e par les
convulsions volcaniques. Les rayons
du soldi , rdlMiis par les prismes de
la glace, prennent Us plus bviliantes
coiueurs de Paro-en-dei. l^es monta-
gnes Noires, tapissta de bois de pins,
de ffen^vriers, de boukeaux, de sapins
et ae chtoes, jettent dans les inter-
stices deces sombresfor^ts leurs anti-
ques rocbes calcdres que recouvrent
ies cristaux de fdd-spath vitrein, le
quartz et Parophibole. Des torrents ,
L'UNIVERS.
descenditt de ces hauteurs colossales,
bondissent avec fracas et roulent dans
le fond des vallto, tandis que le si-
knce du tombeau rtgne plus loin, au-
tour des sonmit^s basauiques. Pen-
dant la miit,ce silence des neiges6ter-
nelles est interrompa par les oris du
chacal. On dirait on signal du depart
qoe se donnent les dmons pour les
regions tevto. o& de temps inun6-
morial la crMulit^ populaire a ^taMi
leurs assemblto nocnimes. SouTent
im montagnard t^m^raire, m^prisant
les avis de la vieillesse , ose franchir
le seuil de sa cabsnepour jeter un re-
gard profane sur la nature qui Ten-
vironne; et quand arrive Pheure so-
teoneUe, ou la lune balance ses rayons
bleultres sur les pics neigeux du Cau-
case, Tenfant du desert voit une file
degigsntesques fantdmes qui seoouent
dans les airs leur cbevelure blanche ;
au mOieu d*eux, quelquefois, est une
jeune fiUe, en longs habits de lin : c'est
la Tidime dont le sang va servir aux
esprits infemaux pour la oonsomma-
tlon de leurs nudefioes.
lA , Zoroastre placait le mauvais
fE^nle Aritman : i\ s'^iance, disait-il ,
on sonunet de FElbrouz , et son corps
^tendu sur Tabtme semble un pont
fet6 entre les mondes.
Plos has, vers une r^on culttv6e,
se troa?e la caTeme du prcphdte Elie.
Un rocfaer, en forme d^autel , y sup-
porte un gobdet d'argent, rempli de
bite. GbMue ann^, quand la mois-
soo doit titre abondante, la liqueur
d^borde et Ta fertiliser les champs
voisins. Jadis un montagnard , fidele
adorateur d'^lie, ayant 6& fait prison-
nier, parvint & s'^chapper; mais il
ignonft son chemin et se trouvait en
daiigar de retomber entre les mains
deaes ennemis, lorsqu'un aigle Ten*
leva dans les airs et le d^posa, sain
et sauf f sur les bords de la caveme;
cfaague ann^e , ses descendants vien-
nent prooessionnellement remercier le
et lui offrir de la bite et des
aux.
Sur Tun de ces pics neigeux , ha-
bite encore le nfin-paduchah, le
prince des demons , et ,6ur un autre
I'oiseau Anka , que toute Tantiquitc
orientale a c6l^re. Plus loin , c'est le
rocher od le pte des hommes fut ex-
pos^ ^ la voracity d*un rautour. Enfin,
U n'est conte si extraordinaire ^1 ne
trouve cr^ance parmi les superstitieux
habitants du Caucase. Le christia-
nisme lui-m(6me y a laiss^ , comme
traces de son passage, des souvenirs
empreints d'une credulity remarqua-
ble : au pied du Mqinwari, se trouvait
quelques grottes taillto dans le roc ,
peut-^tre par des bri^^ands k qui an-
ciennement elies servaient de reiiaires.
Plus tard, de pieux ctoobites vinrent
s*y retirer: aujourd'hui elles sont ap-
pelees, en langue g6orgienne, GroUes
de BethUem, Les montagnaitls disent
que dans Tune de ces prorondes retrai-
tes on voit voltiger une colombe d'or;
dans une autre, est suspendue une
chalne de fer, ^ i'aide de laqudle ou
pent grimper par un soupirail jus-
qu*au tombeau de J^us-Christ, et se
promener sous les palais de cristal ,
qui, ^ev6s sur la cime des monta-
gnes, absorbent les rayons de la lu-
mite, et ne refldtent que les cou-
leurs de rarc-en-del.
Laissons de c6t4§ maintenant les re-
cite fabuleux, au risque de perdre la
trace de quelques rares v6rit6s ense-
velies sous les mines de Thistoire, et
voyons ce que nous offrent de plus
certain les traditions locales.
£lev6 entre des peuples qui difiF<§-
raient essentiellement ae moeurs et de
langage, le Caucase 6tait une barrite
naturelle que Ton songea k fortifier ^
dte hi plus haute antiquity. La tradi-
tion a conserve le nom de MarpisU k
un rocher du d^fil6 de Oariel, ou
r^v^ue Jomandis assure que cette
reine des Amazones fit construire des
fortifications. Yirgile a chants ce mont
Marp^ien.
ati'on ne s^^tonne pas de nous cu-
re parler des Amazones aprds avoir
annonoe que nous allions quitter le
domaine oe la Fable. Les redts que
le vdn^rable Herodote, ce pte de
rhistoire, nous a transmis sur ces
femmes mierridres ; ceux que nous en
ont fails Diodorc dc Sicile, £tiennede
GIRGASSIE ET Gl&ORGIE.
Ijnaiioe, Pliiieet viast Mitves, sont
•onrofacNPfo oar des tnmioiis trap im-
foeantoB, oiesiaoiiiinieiitsti^imca-
Milks y pour que nous bMtioiu ^ adop-
ter oommevrailefoiiddBcettefaigtone
que rimagiiiatkm des potos fgncs a
eavdoppoe d^ornements , et, duona le
mot, de mensongea. II aeraitj abaurde
de suppoaer gue lea Amaaones aient
vtai en rdpuDiique aana honunea; il
restaanadoute auaaide croiiequ^^ea
ae motilaient le aein pour ^trej^
proiNrea^iiiaiiier lea armea. Ceafamea,
rtailtat inMtabled'ime ^poque att Ti-
gnorance^ dea proodd^ typo^nmhimiea
kiasait toute (atitode aux exageratiooa
da r6Gii CHral, oomme k Feaaor d*iiiie
imaguiatioii po^ique, ont ^ aigiia-
l^es avec affectation par dea eaprita
pesaeux qui ont trouy^ plua racile
nier que d'approfondk. t^oor d'ao-
8 il n^est pais difOcile d*y d^m^ler
In ydrite aur rexistenoe de oette co*
lonie de Scytfaea beUiqueux , qui tei*
gra du jpafs dea Mceotea , traversa le
Cancaae, et a'^taUit dana lea plainea
de Th^miacyre. Lea principaux goer*
rieis de cene arm6e furent taill& en
pieoes par les peuplea voiains . ou r(6*
Oiuts k readavage, et lours femmea ,
oooaerrant dans le malheur le souve-
nir dea flXBura nataks, prirent lea ar-
mea pour d^endne leura en£Eints et
Jeurs propri^tda; car toute I'antiquit^
a'acooide, dana aea Merits et dans aea
moDiuneata, 1^ noua rq[)r^enter les
femmea des Scythes comme habitute
a combattre journellement k o6t6 de
leurs 6poux, et aussi habiles qu'eux k
roanier Tarc^ la hache et la lance. Elles
nTentareprirentpas les guerreslointaines
mi*on a misessur leur compte; mais, ai*
a6es par des honunesdebasaeconditi<Mi,
OQ dea eaclaves , et allito k des dtran-
sers, ellea firent qnelques exp^itiona
dana Tune desqoelles Marp6Bie tiera
sur le Caucaae des fortificationa qui
nimel^rent long-temps son nom a la
Les deux passages dont nous avons
tut mention plus haut, les seuls indi-
qu65 par la nature, sont ceux qui, depuis
une naute antiquity , sont connus sous
k nom de Port^s Cancasiennes , Sar-
Portet, et autres dteonunatfona.
Le premier, appall eoamunteent
aaioaid'hui d^m de Bariel (Pfhe
Caucasim de Pline) , ae tnnive aur la
lOuGte de Moadok k Tfflia, et diviae
riattuae cancaaien en deux partiea a
Mu arte ^galea. L'encaiaaenient d'une
aouue didae de moatagnes eacarp^
qui court du aud an mm fnrme une
gorge ^troite, ailloon^ par le fleu%e
Tmk et par aea a£Suenu. Gette pn-
sition est natureUement ai redODtable,
one lea plua aim^ea fbrtifiGationa aul^
nraient a ime poignte de combattantt
pour J arr6ter une armte formidable.
La distance ^i s^iiare Moadok de
Tiflis eat d'enTtron 240 werstes ( ee
lieues }. A moiti^ diemin , et ^ 30
werstea du Mqinwari , on voit sur les
borda du Tdrek lea ruinea de Taaden
chateau de Dari6la. On ae sait- rien
de bien poaitif sur F^moiogie de oe
mot. Selon une traditicm montagnaide,
une prinoesae du aom de Daria flt
Clever cette fbrfeereaae, k une 6poqae
absokunent inoonnue. Elleyftui sa leai*
deuce pour y dtoouascr les passants; et
lorsqirun Toyageur avait le malheur de
lui plaire,eliete gardait aupads d*eUe,
le oomblait de dona et de careaaea,
s'abandonnait a lui , et le feisait en*
auitepr^piter danaieaeauxdnTdrek.
Mala M. Kk^rotfa, qui a'est liTr6 af«e
tant de suooda a d'importaotea reaber-
ches sur rhistoire du Caucaae, penae
que Darida doit ae lire DarM^ et
quece mot vient du tatare, et signHle
ddOl^ (de dar^ ^troit, et ^ route). Le
fort aurait M ocmstruit par un roi
de Gtoigie, du nomde Mirwan,qui
r^^oa de Taa 167 k 1S8 avant notre
ire. Ik toit ausai la fortoesae Oih
numSa des andens.
Pluaieurs historiens d' Alexandre ont
6ait que oe conqu^rant avait &it ftr-
mer ce paaaaee par uneporte de ler«
If ous avons deja dit qu'if ne riaita Ja*
mais le Caucase , et il ne paralt pas
que, de son vivant du moins, ses
lieutenants aient fortifi^ la porte cau-
casienne.
Dans le moyea 3ge, lorsaue le paya
etait occupy par les Huns, les inonar*
8
L'UNIVERS.
ques byzantinspqrAieiita cesbaitMyres
un fort tribut pour la jgarde de cette
. poffte. L'histoire gfergieiiiie dit aussi
que Cabadet , roi de Perse , oontem-
porain de rempereur Justinien, s*em-
para da paasagey et qu'il y fit dl^er
un mur a Teffet d*y arrdter lea incur-
sions des Si^&es dans les domaines
de la Perse et de Tentpire romain. On
}r voit, en efifet, des debris de murail-
es et des fortifications roin^es qui
attestent les precautions prises anden-
nement oontire les populations turbu-
ientes qui habitaient vers le nord de
la contree. Aujourd'hui les Russes ont
eter^ unefortmue h pea de distance
de I'ancien Dari^. EUe est encaiss^
entre des rodiers granitiques, tene-
ment ^v^ et rapprocfa^ les uns des
autres, qu*on s*y oroirait dans un puits.
De Laars k Dariel , la vallde , dont la
km^ueur est de 7 werstes, est si
^troite que le soleil y p^ntoe k peine
quelques heures pendant les plus tongs
jours de I'^t^. Vers les mois de juillet
et d'aodt, la chute des avalandies y
cause sodrent de grands d^to par la
nipture des ponts du T^rek et le d^
bordement du fleure. A quelques wers-
tes du T6rek, on trouve FAragwi, qui
coule en sens inverse dans ce m^me
passage.
Le second dM€ est oelui qui doit
son nom h la ville de Deri)ent , sur les
bords de la mer Caspienne, dans le
Daghestan. La fondation de cette ville
est encore attribu^ h Alexandre-le-
Grand ; supposition que rien ne Justi-
^ , mais que pent expliquer une ya-
nite oomRmne h tant de yilles. Une
forte muraiOe qui s'^tendait de la cit^
h la mer, dtfemlait la Perse centre les
agressions des Scytties. Des portes
de fer de quinze pieds de largeur don-
naient panage aux voyageurs inoffen-
sift; on pretend qu'elfes ont 6t6 d^po-
ste au monastdre de Gelaeth, pr^
Kboutaissi (*). Des yestiges de Fanti-
('^ Le n* I de la planche premiere est im
denu du monast^ de Gelaeth , situ^ a
deux Ueacs de KhoatttMi, tnr la dMiTite
d'lnie montapM oouverte d'arbres. Getle
maiMNi, babitee par des moines imMtliieiis
du rite grecicst placie sous I'inTOcation de
one rempart se voient encore aiuite
de la yilfe, et mtoie sur la cr6te de la
montagne yoisine. II 6tait constniit
en srandes pierres coquiHifares super-
posees h la mani^ des Romains, sans
ciment et sans fer. S'il fisiut en croiTe
une version fort aocr6dit^, oelte
muraOle se prolongeait sur toutela
cfaafne des monts du Ibabasseran, et
elle 6tait due k Kosroes-Ifourdiivan ,
9tti avait voulu par-1^ se preserver des
mcursions des Khazars.
Le passage de Derbent est sans oon-
tredit le plus important pour la sdrett
de la Perse, car il ofifre, dans toute
sa longueur, une steppe C) sans ao-
cune elevation, et press^ d'un oSt6
par les eaux de la mer Caspieone, ^
de I'autre par des monta^nes ^levte
et des rochers coupes k pic. Une par-
tie de I'ancien mur se trouve aujoar-
d'hui plongde dans la mer. Le gragra-
phe Abd-ocnr-Raschid to'ivait,au com-
mencement du XV*sidcle. que Bakoo,
sa ville natale, ^tait d^a en partie
submerg^e par les eaux qui mena^aient
d'atteindre la grande mosqu6e.
Derbend signifie , en persan , bar-
ri^e ; et cette ville est aussi appdeei
rar figure, la Porte des portes , oti b
Porte de fer.
L^ ^taient v^taUement les portes
caspietmei, ainsi nommto du voisi*
nage de cette mer; mais Ferreur de
Strabon, qui les place dans le d^6 de
Dari^la, n'est pas aussi grave ^*on a
voulu le supposer, s'il est vrai, ainsi
jne plusieurscriti^es Fontpens^, que
les deux denominations de fa monta-
saint Grigoire ; son arehiieotnre est a la
fob reonarquable par sa simplidti et sa
puret^. On croit que oe monumeDt dale
du XI' siede de Vin chritieniie. Le
n« 3 est la reprtentatioo d'un antioue bat-
Bur sept k peu prcs de largear, et tout barda
de fer. Selon la tradition , oe seraient lit les
restes de la porte caucasienne, Fantre bat-
tant ayant M enlevi par les Turcs : oa y
voit la vestiges d*one loscriplion arabe, gn-
▼ee sans doute par les oonquerants k una
^poque d^invasion.
(*) On peut dire aussi un sttp.
CIRCASSIE £T G1&0RGI£.
9
gne el de la mer ont une ^tymologie
commune.
Le mot Caucase oa Kaukas est
peu usit^ parmi les habitants de oette
region; il y est m^me a peine oonnu
du volgaire. Selon une tradition g6or-
gienne, Tantique nom de Caoeas est
oelui de Tun aes huit fits du patrlar-
che TkargamoSf ^ qui les Armniens,
et g^ntolement tous les peuples de
)a mteeoontr^, attribuent leur m- .
gine. Les Arabes donnent k oette
chatne de montagnes, le nom de Co-
bokh; les anciens Perses disaient
Cnc/b-ed/y et les Persans de notre ^-
que K^kAfy ou mont Kdf , ce qui
paratt ^quivaloir k mont des monts,
mofltagne par ezcellenoe. Dans une
haute antiquity , les honunes croyaient
qoe le Caucase fiiisait le tour du monde;
aoasi appelaient - lis ainsi toutes les
grandes chatnes de montages. II est
rest^ k Pistfame seal qui fait Tobjet de
oette notice. Nous allons maintenant
entrer dans quelques details d'histoire
natoitUe, dont nous croyons devoir
faire pi^oMer la partie politique. ^
HnrcoiES katurbllb. — La dme
det montagnes de ndge est form^e de
porpfape oasaltiqae, de granit et de
vimvt. Parmi les porphyres on en
oJstiDflie de belles espeoes, bleu ta-
cbettde jaune, ou de rouge et de blanc,
nmge oriental et vert. Dans les gra-
nits, on trouve le rose, le gris, le
noir et le bleu.
Les montagnes Noires sont entre-
m^lto decalcaire, de or^ mameux,
et de scbtste tabulaire sfllonn^ par des
veines de spath et de quartz.
On disait autrefois que le Caucase,
et Dotanunent la Colchide, renfer-
maient des mines d'or. Gependant, la
oonqoto de la toison d'or , ou , en
d'aatres termes, une speculation mer-
cantile, ne fut pas le seul but de Fex-
Stion de Jason; nous verrons plus
que ce voyage eut encore un but
politique. Strabon parte avec oomplai-
ttaoe des mines de ce pays , et il ajoute
que dans la partie occup6e ^ les
sooanes (Minsr6lie ), les ruisseaux
diarriaient de I'or et de I'argent que
ces barbares recueillaient dans des al-
vMeset surdespeaux gamiesde polls;
oe qui donna lieu k la £aMe de la fiih
mease toison.
Ces mines ont-elles exists? Cest oe
qu'il serait peut-^tre tbanknxtt de nier
positivement; mais il est du moins
certain que les traces en ont et6 per-
dues, et que toutes les tentatives
qu*on a pu fiaire jusquMd pour les d^
couvrir n'ont amene aucun r^ultat.
Ce n'est pas que les mdtaux manquent
dans La region caucasienne; mals il ne
paratt pas que leur abondanoe puisse
offrir un large d6donunagement aux
frais de Texploitation. Une inscription
en langue gtorgienne qu'on lit encore
sur r^lise de Nmaala^ dans rOss6-
thi , parte de mdtaux pr^cieux abon-
dants comme la poussi^ dans cette
region (*)
Le haut territoire du bassin de
rOuroula et toute TAbasie sont fort
riches en mines. On dit qu'il en existe
une d'or et plusieurs d'argent ores du
village de Soouksou,li peu de distance
de Soukoum-kaie , sur les bords de la
mer Noire. Ce qui est plus authenti-
que, c'est que les Mingreliens pr6ten-
dent que le Phase et la TzkhSnit-
^oA diarriaient encore, il y a ^ peine
un demi-sidde, des paillettes et m^me
des morceaux d'or, dont le lavage for-
mait un des principaux revenus des
rols de Mingiielie.
L'ignorance des Im^r^iens est , k
cet ^gard, un double obstade a la oon-
naissance de la v^it6; ils prennent
les substances brillantes pour des m^
taux pr^eut, et sans doute aussi les
m6taux pr6cieux pour de viles produc-
tions, car il est fort k pr^umer que
leurs montagnes possddent une partie
des richesses que la tradition leur at-
tribue. II est positif du moins qu'on y
trouve en diverses locality des mines
de fer , de plomb, de cuivre , d'aimant ,
de sel gemme et d'alun.
Apr& les min^raux , il nous reste k
parler de la substance bitumineuse con-
nue sous le nom de naphte ; et comme
die se rattadie k Thistoire des Guibres
(•) Journal Jsiatique, oclobre i83o,
pag. 3io.
JO
L'UNIVERS.
ou PoTfis^ nous lui ooosacrerons qiid-
ques details.
La naphte est une huile de pierre
(pHrole), U^gtire^ transparente et io-
liammable. On peut 8*en servir pour
r^dairage , pour le chaufiage meme ,
la cuiason des aliments, et divers au-
tres objets d'^nomie domestique, ou
elle remplace Phuiie et le bois. Gette
oombiistion oe se fait paa , ^ la vdrit^ ,
sans r^pandre une odeur fort dto^a-
Ue et une fiun^e ^paisse , oe qui ne
rend son usage Traiment utile que
pour les peuples qui n'ont jamais oonnu
lea ressouroes que se procure notre
civilisation. On s'en sert encore pour
graisser les roues des chariots , pour
enduire les outres qui servent k trans-
porter le vin, et, eniln, elle entre
duns la preparation d'un ciment fort
estim^ dans le pays. On croit qu'elle
avait ^U employ^ dans la|ponstnio-
tion de Babylone et de Ninive.
Gette substance paratt ^tre le r^sul-
tat de la d^mposition des bitumes
fiotides, op^r^ par les feux souter-
rains dans le sein de la terre. Elle se
r^doolte sur plusieurs points du globe;
mais I'espto la plus pure abonde sur
la cdte ouest de la mer Gaspienne ,
depuis Derbent jusqu'^ Bakou , dans
leDaghestan et le Cnirvan, prorinces
qui appartiennent h Tisthme caucasien.
A peu de distance de la mer , aux en-
virons de Bakou, on a creus6 des
puits dont la profondeur varie de dix
a soixante pieds , sur un terrain de
mame argileuse imbibe de naphte.
On en compte plus de cent pour la
naphte noire , et quinze seulement
pour la blanche. Gelle-ci n*est qu'une
purification de la premise , op6T6e par
rinfiltration naturdle au travers d'une
couche de grte. Ge bitume se rassem-
hie peu a ^u dans les puits, qu'on vide
au rur et a mesurc des besoins. U s'en
exporte annuellement, de Bakou , de
soixante a quatre-vingt mille quintaux
m^triques , la plus grande partie pour
la Perse, le reste pour Astrakan. Le
produit en est d*environ doux cent
cinquante mille francs.
Cest aupres de Bakou quese trouvc
Ic sanctuairc du feu, jirfechrgah ^
Tun des plus o6lebres sectateurs dr
Zoroastre.
Arteck-gah est siM dans un pays
aride et infects par I'odeur de la na-
phte. Un Edifice carr6, oik sont com-
prises une vingtaine de oeUules, seit
de monastic aux adeptes du Zend-
Avesta. Dans la oour du milieu s'e-
l^e un autel flanqu^ de quatre cbe-
minto quadrangulains; au centre est
un foyer que la pi6t6 des Par^ ali-
mente perp^udlement au moyen de
la naphte. En vain les annm ont
siiooM(6 aux amides; eo vain les ooo-
qudrants ont portd la perstotion
au sein de la patrie des Mages; ie
culte de Mithra , sanctionnd par Zo-
roastre , a rdsiste k toutes les atU-
ques, et les descendants des (jU^
6rei ont entietenu le feu Bacr6 dans
hi longue sdrie des slides. Fuvant
devant lenrs perstoiteurs, ils font
emportd ^ns rexil , et se sont ^taUis
k »irate, k Bombay, sur les bords
du Gange , dans ie midi de la Pose
et sur les rives de la mer Gaspienne.
Un de leurs prindnaux articles de foil
est de croire que le feu au'ils oonser
vent avec tant de soin est le mtoie que
celui qui hrdlait du temps de Zoroastie.
Les moBurs douces et honni^tes des
ParsUy auxquels se sont r^nts qod-
ques Hindous, les rendent dignes de
la tolerance qu'on leur aooorde an-
jourd'hui. Geux d*Jrtech^ah paiaisr
sent satisfaits de leur sort. Bans
chacune des cellules de leur monas-
tkre , les reclus ont pratique plusienis
tuyaui d'oii s'exhale le gaz inflannna-
ble ; k certaines heures du jour et de
la nuit lis en approchent une lumi^
et la flamme se manifeste aussitot.
Le matin , ils ^ient le lever da sdetl
avec un sentiment d'impatienoe ni^l^
d'anxidtd, et it peine aper(oiveDt-ils,
sur les homes de Thonzon, ce (KHot
lumineux qui, le premier, ^€met
dans Tespaoe, qu'ils le saluent par des
cris; ils s'embrassent en se fdicitant
mutuellement sur le retour du ^^
Le soir, ils s'afOigent en le voyant dis-
parattre, et rien ne pent les ooosoler
de son absenoe que respoir de le re*
voir bientdt.
GIRCASSIE £T G^ORGIK.
11
La directioo des chatnes de monta-
gnes et ieur ^tendue, le nombre et la
profondeur des vallto y I'd^vation des
plateaux et la nature des bas-fbnds,
soDt autant de droonstanoes qui font
Tarier id les dimats physiqpies, ex-
cepts 8ur le sonunetdes grandes imm-
tagnes ou r^e un ^ternel hiver.
A Tiflis , le del est eonstamment se-
ran; a pdney nleut-il trente ou oua-
raiate jours de rannte. L'hiTer, qui ne
oommeDoe qn*en dtembre, y finit en f(^
vricr, et les strangers peuTent s'y pr6-
senreraiatoent, avee de laaobrim, des
ttrres intennittentes qui se manifes-
teat h r^poque des fortes chaleurs. Le
thenuonietre s'y soutient habituelle-
ment , en ^ , entre 34 et 28 degr6i , et,
sur les hauteurs environnantes, ou les
nciiea Tout se retirer dans leurs mai-
aona de eampagne , 11 ne yarie qu'entre
18 et 23 d^riB.
A Ananour et dans le pays oocup^
par les Lesshis, I'air est extremement
sain; maisaans les autres locality , et
Dotamuicnt dans Tancienne Ck)ldiide
et le pays des Abases sur la mer Noire,
le dimat est diaud et pluvieux outre
menae. Les pluies forment des lacs
ou Tiennent pourrir les y^^taux que
leor %e ou ks aoddents ont renyer^.
Derenoes alors des marais pestilen-
tkky ces navies d'eau r6pandent au
lotn kurs miasmes morbinques. Les
fiirres y rdgnent ordinairement du
15 juillet au IS octobre, et on y yoit
UD grand nombre d'hydiopiques.
Le yoisinage de Tempire ottoman
ajoate souyent anssi lefl^u de la peste
a odui du dimat, et pour que rien ne
nuBiqiie k oes gnnres causes de d^po-
pplanoa, le cbol^ra-morbus y est ar-
riri {dttsieurs fois de Flndfe par la
Enrteni6, la temperature des pro-
^noces ocddentales et de la majeure
PVtiede Tisthme caucasien est qud-
?Kfoi8gladale, souyent tres-cbaude ,
^Nours exoessiyement humide.
Lesnelges et les giaders inoessam-
OKot entretenus sur les sommit^s do
cctte r^on montagneuse donnent
^aittanoe h une innombrabie quantity
<K oourants d*eau qui desccndent en
minces filets , se grossissent par leui
reunion, deyiennent torrents sur les
narois de la montagne, ruisseaux danB
la yall^, et fleuves dans la plame. II
serait 6galement difBdIe et superflu
de les ^um^rer tons : beaucoup n'oni
qu'une foible importance locale, et
qudques-uns m^me disparaissent mo-
mentan^ment dans la saison des cha-
leurs; aussi nous bomerons-nous h
dter Id le petit nombre de ceux qui
offient quelque intMt historique.
Le Kouban et le T^k forment la
limite septentrionale de Fistiime cau-
casien. Au sud , le Qfms et VAraxt
rempiissent le mtoe objet.
Le Kouban prend sa source sur Ic
yersant de I'Emrouz , trayerse la pe-
tite Abasie , embrasse toute la Gircas-
sie, et se jette dans la mer Noire au-
dessous de l*tle de Taman. H^rodote et
Strabon font mention de ce fleuye et
lui donnent le nom d'Hypanis ; Pto-
i^m^e Tappelle yardanusy d'autres
f^ographes Font d^ign6 sous le nom
e MmoUsy et en font la limite de
TAsie et de I'Europe. Les Tatares ,
qui , dans le treizi^me si^le de notre
ere, enyahirent la S^tbie,rappel^rent
Kouban, ou Koumafiy et les Russes
ont adopts oette denomination dont
retymologie est encore un probl^e.
Le Terek sort d'une 6troite yallde,
au pied du mont Khokhi et du Moin-
wari ; il coule dans le fameux defile de
Dariel, trayerse le pajs des Tcher-
kesses, baigne successiyement Vladi-
kaukas , Mosdok et Kislar , et se jette
dans la mer Gaspienne. De tous les
oourants d'eau de Tisthme, il n'en est
point de plus rapide que le T^rek , et
il en est peu d'aussi turbulent. Pen-
dant I'biyer, il charrie des glaccs,
obstrue son passage , brise les ponts
et bouleyerse la route; pendant Vete,
il se grossit de la fonte des ndses,
inonde la yall^e jusou'^ une hauteur
quelquefois consiaerafble , entasse dans
son anden lit le sable, les pierres
et les arbres , et ya porter ailleurs ses
flots capricieux. Au nord du T^rek, la
Kouma traverse la steppe duGaucasc,
baigne Georgiewsk , et se rend ^galo-
raent dans la Caspicnnc.
12
UUNIVERS.
En suivant le littoral de la mer Noire,
du iDord au sud-^st, depais rembou-
diare du Kouban , on trouve on pa^
bienbois^et montagneux, oii milleniu-
aeaux, desoendus du rersant occidental
de la grande chatnedu Gaucase.portent
a la mer Tbumble tribut de flots qui
n*ont pas de noms. Enfifk, on en ren-
contre quelques-uns qui ont ^chapp^
h rob8curite;'de ce nombre sont la
Khopi, Qranus des anciens, et le
Phoie^ devenu si c^l^re par Fexp6-
dition des Argonautes.
La Kkopi serpente dans un nays
fertile, se cache derridre des oolnnes
boisto, reparalt aufond d'une vall^
pittoresque, et offire partout, sur ses
riyes , les plus riants paysages. Des
cayouques. cfaarg^es de nriques , et
des trains de bois de charpente, la sil-
lonnent k de lonss intervalles. Le
passage de ces embarcations, en d6-
celanT la presence de quelques hommes
industrieux et sociables, est un €v&
nement heureux pour TEurop^n, au
milieu de ces solitudes oii se cadie une
rare population adonn6e au brigandage
et ennemie de toute civilisation.
Le Phase, aujourd'hui Rion , des-
cend du mont Elbrouz, traverse
Khoutaissi, Tancienne Kyia^ oii na-
attit la magicienne M6d6e , et se jette
ans la mer Noire ^ peu de distance de
Poti. U viennent se presser en foule
les souvenirs de la Grdce , et nous
aurons bientdt a les rappeler avec
guelques d^ils. Les pnncipaux af-
fluents du Phase sont la Qwhila et la
TthhMi'UqaU. Cette demi^re ri-
viere ^tait appelde Hipfnuyst les an-
ciens , tant les barres qui 1 obstruent ,
et sa rapidity, lui donnent I'allure d'un
cheval qui court et bondit dans la
plaine (*).
Le CifruSy connu de nos Jours sous
le nom de Kour {JUtcwari^ y prend sa
source dans les montagnes de TArm^-
nie, passe k Tiflis, re^it VAraguH^
I' yon, ou Cambysus des anciens , et
TAlazan, et verse ses eaux dans la
mer Caspienne. VArcu, qui sert, sur
(*) La planche ii« 3 represento une vue
du Phase , prise dam la Miogrelie.
plusieurs points, de ligne de d6na^
cation k Tempire msse et an rovaame
de Perse , est , sans oontredit, le plos
grand t^uent du Gyrus, puisqu'il le
surpasse par le volume de ses eaux.
D'autres rivieres, que nous ooyons
inutile de d^gner iMurticulitameot ,
Srennent, pour la piupart, leur nom
e la contr^ qu'elles arrosent, en j
joignant la particule don, Gette tenoi-
naison.^tait. dans les andennes Ian-
gues du Nora , le nom gMrique d'eaa
ou de riviere. On reoouiattraseseoiih
pos^ Dan et Tim, si on anal^les
mots Danube, Danatter ou Dniester,
Danaper, ou Dnieper, TanOs, au-
jourd'nui le Don; la mtoe radne se
rencontie dans la langue g6orgienne,
et dansoelle des Ossms.
Les eaux min^rales ne maoquent
Ss dans cette r^on. Cellcs du Beck-
to ( les cinq montagnes ) sont iesfrtus
renomm^. On y a^lev^unemaisonde
bains, assez grossidrement coDStniitf
en bois , sur une hauteur form^ park
d^t odcaire des eaux. Les sources
min^r^des do Bech-taw r^nandent one
forte odeur de soufre, et leor tem-
perature ordinaire s'dleve au-dessui de
50 d^gr^s de R^umur.
La flore caucaaienne est Tune des
moins connues du globe. La difficnlti
de parcourir des montagnes infiBStto
de Drigands, les privations de toute
nature , et les obstades physiques aoDt
des drconstances qui ont , jusqvici ,
refroidi I'aideur des botanimiks*
Les plaines qui bordent le versant
septentrional du Caucase offirent one
triste uniformity de plantes raboa-
gries, ch^tives, rougeditres et de na-
ture saline pour la piupart II n(^
pas rare de voir briUer les benes
de ces steppes, soit par acddent,
soit par la vokmt^ des tribus no-
mades. Dans ce dernier cas, rin-
cendie a pour but de preparer le tfl^
rain k la culture, ou mtee pour on
simple campement La s^dieNsse de
ces plantes et leur agglomtotion don-
nent bientdt k I'inoendie le phtf v^^
d^veloppement, surtout quand u^
fiivorise par la violence des vents, ws
voyageurs Taper^oivent assez a temps
• •
• • •
1» • • •• • •
• « • • • 4
_ • ••• '
•- -•
GIRGASSIE ET G£0RGIE.
13
pour se mettre k I'afari du fM\ , en
rebroussant diemin; mais si le sang-
froid et la prudence n'^galent pas diez
eux Ta^it^, ils oourent le danger de
s'^prer dans la plaine. Surpris par la
nut, ils peuYent I'dtre aussi par les
flammes qui s'avanoent en grondant
oomine les flots de la mar^ montante.
Le oarti le plus convenable est alors
de diercher son salut dans le p^ril iui-
m^me , en se rejetant, par le premier
interstice , au-ael^ de nncendie. Mais
ooiiibien de dan^rs k redouter dans
ce moment critique ! La terreur des
cherauz , les ondulations des flammes
Jul fouettent Tair k une hauteur pro*
iffleuse, T^paisseur de cette fiimde
sofibcante, les tourbiUons de oendres
et de sable, la yoix des oonducteurs et
les cris des animaux forment unde ces
graves Episodes de la yie humaine,
dont lapius longue carri^e ne sanrait
effaoer le souvenir.
Nousavons dit que ces accidents
aTaient quelquefois pour but de pr^
parer le terram k la culture. En eset,
us Tatares et les Turcomans cultirent ,
daos les steppes, d'excellentes espdces
de potirons, de oonoombres, de me-
lons , de past^^s et de melong^es.
En atanqant vers la partie monta-
9>cose, on trouve enfin des arbris-
seaux dont la vue fait oublier la fati-
gante monotonie de la (lore des step-
pes : Tanb^ine , le n^flier, les fusains ;
les types de nos principaux arbres firui-
^^1 le oerisier, le poirier, le pom-
inier, Fabriootier; la r^lisse et le
<^Of>N» sangutnea, Sur le bord des
Ijiusseaux croissent le saule blanc,
[vbousier, ToliTier de Bohtoe^ le
|i^nd)le, rosier, la yiome, le troene,
'^ groseillier , la cl^matite et les ro-
sters. Sur les hauteurs moyennes
^onunenoent les for^ts, qui abondent
dans risthme oitier. La dominent
I aane et le h^tre ; mais on y voit en-
^ le di^ne, le tilleul aux gif^an-
l^iWs proportions, quelques Indi-
ans de cette espece n'avant pas
ff^ps de vingt-cinq pieds de droon-
'^fence; le chUtaignier et I'oliyier
^▼aee. Les parties plus ^ev^es de la
contree ofifrent diverses esptos alpi-
nes phis int^ressantes pour le natura-
liste : le rhododendron ponUcum et
Vazalea pontica m^tent bi premi^
mention par la propri6t^ remarquable
que oes mantes oommuniquent au miel
iorsque les abeUles ont y tot de leurs
sues. Cette propriety est d'eniyrer aussi
complement que la liqueur la plus
ferments. Dans les memes locality
croissent les germandrto, les sauees,
les ydroniques, Ytutrantia majors
le verafyrum aunan, le swerUa pe-
remUs^ le Umicera cwruleay le col-
chioue, deux esptos d'absinthe, et
quelques liliao6es. Puis, yient la re-
gion ^y^e des pins , des sapins , des
mousses et des lichens. Dans les bois ,
la vispe entrelaoe ses sarments aox
brancnes des grands arbres, comme
les lianes des fiorfits am^ricaines.
Nous terminerons oe qui a trait k
la botanique en disant quelques mots
de Vabsmthe ponUque des pflturages
du Ghiryan. Cette plante, que les
cheyaux mansent ayec une faude s^-
curit^, a la nmeste propri6t^ de les
£aire mourir dans une sorte de oon-
yulsion. U psuratt oependant que les
boeuft et les moutons peuyent en
manger impun^ment : les Tatares as-
surent mime qu'une bouteille de sang
de mouton , ayal6e k temps , est un
puissant spedfique pour les cheyaux
oontre ce poison. Eii Tann^ 1723 ,
Iorsque Tarm^e de Pierre-le-Grand
marchait contre Chamacky, elle per-
dit dans ce passage tons les cheyaux
de son artillerie; et, un sidde sq>r^,
un ^y^nement semuable forca le g6-
n^al Tzitzianofif k remettre a la cam-
pagne suiyante le si^e de Bakou.
L'isthme caucasien , r^ion de mon-
taffnes, de bois et de steppes, est peu-
ple d'une multitude d*animaux diyers,
dont plusieurs appartiennent aux gen-
res camassiers.
Le tigre y arriye jusqu'aux enyirons
de Tiflis , ruyant de la Perse deyani
les grandes chasses des princes de la
maison r^nante. L'ours etle l^pard
sont assez oonmiuns dans les stqipes
du nord et dans les montagnes de la
Gtogie; ils sont plus rares dans la
Minnie. Les montagnards, qui leur
14
L'UNIVERS.
font la chasse pour le oomiile des
n^ociants arm^niens. ^?iteiit , au-
tant que possible, oe faire k ces
animaux des blessures qui pourraient
endommager leur foumire. lis ne se
serrent des fldches ou des armes h feu
que lorsqu'il y a ntossit^ de dtfeudre
leur propre existenoe. Le chasseur qui
aper^oit un leopard , suit ses traces
avec un instinct merveilleux pour les
reoonnattre sur le sable , oomme sur
le sol humide des bois , et par mille
circonstances qui ^chapperaient h des
yeux moins exero^s; et quand il a
dtoniyert sa retraite, il tend , h une
oertaine distance , un pi^e oii la b^te
feroce manque rarement de se laisser
prendre , attir^e par la pdture que le
chasseur y a d^poMe. Lorsqu'il se sent
pris , le feopard ne pousse pas un cri ,
pas une plamte, car il derme oue ce
serait le signal de sa mort ; il rait si-
lencieusement mille efforts pour se
d^li?rerdes entrayes qui le captiyent;
quelquefois il y r^ussit, et abandon-
nant alors ses fordts et sa tanidre,
il 6migre d'un pa]^ oik Thomme lui
fait une guerre si d^loyale. Mais le
plus Bouyent il reste emprisonn^ jus-
qu'au moment cii le chasseur, qui
8 est ayano^ ayec la plus grande cur-
conspectioD, Taperooit et F^trangle
au moyen d'un noeua coulant.
L'ours au poil roux n*est pas rare
dans le pavs montagneux. Les san-
gliers, les cnats sauyages, les martres,
fes litres, les loups, les renards et
les chacals abondent dans toutes les
parties de Tisthme.
Les chacals s'attaquent rarement h
une proie yivante ; leur timidity est
m^me si excessiye, que le b^lement
d'un mouton suffit pour les mettre en
fuite; mais lis recherdbent ayidement
les corps morts, et surtout les cada-
yres humains. Us r6dent, la nuit,
autour des dmetidres en poussant des
hurlements plaintife assez semblables
aux yagissonents des enfants. 01^-
rius , qui florissait dans le XVIP sid-
de, rapporte qu'ayant ^ enyoy^ au-
pr^ du schah de Perse par le due de
Holsteitt, le yaisseau qui le transpor-
tait flt naufrage sur les odtes du Da-
ghestan ; son secretaire , homme ^ve
et instruit , s'^ara daiis les bou et
passa la nuit sur un arbre. Le lend«-
main, lorsqu'on ramena oe malheo-
reux, 11 ayait perdu la raison , et ja-
mais depuis 11 ne Ta reoouyra; seuie-
ment oncomprit (Kar ses r^ponscs, que
cet ^y^ement 6tait la suite de Tefiioi
que lui ayaient &it ^prouyer les cha-
cals. II afiirmait s^rieusementqueplu-
sieurs de ces animaux s'^ieat las-
sembl^ sous son arbre et ayaient long-
temps conyers^ entre eux coimnedes
cr^tures raisonnables.
Les Alpes caucasiennes noorrissent
des troupeaux de diamois, de dit-
yreuiis, de dieyres sauyages et de
bouquetins. On yoit fir^uemment ces
allies animaux grimper sur les asj)^
nt^ les plus saillantes des localites
rocallleuses, s'^lanoer ayec aadaoesor
d'affreux priteipices, tomber surleun
grandes comes sans en ^prouTcr le
moindre mal, ou s'arr^ter d'^-plomb
sur le pic le plus aigu de la mon-
tagne.
Le bouquetin du Caucase, aussi ap-
peie tourty est un peu moins graod
Sue le cerf ; ses comes atteignentun
egre de force et de d^ydoppement
prodigieux.
La gazelle , si syelte et si l^g^i ^
le saT^ yiyent par bandes nombreu-
ses dans les steppes du nord et dans
les plaines de la G^orgie. Le $(W^
(antilope scythica) paralt itte le kotos
de Strabon. Ses comes sont creusB)
semi-transparentes, affile , toornees
en forme ae lyre, ct d'unc loDguciff
remarquable. Sa llyre supArieure sa-
yanoe comme une trompe , de sorte
Sue, pour brouter , Tanimal est oWiff
c marcher k recutons. Ses jambcs de
derri^ sont plus grandes que celles
de deyant ; son poiI est blanc et iai-
neux, et la forme de sa t^te mouton-
n^. Les Scythes se serraicnt de ses
comes pour faire des arcs.
Les gazelles portent la yicilanoe »
Tagilitd i un UA degrt, qi?a scrait
impossible de les atteJndre, si la rm
ne yenait id , comme en tant d autres
circonstances , au seoours de J*""FJ[!'
sance humaine. Les chasseurs arme-
CIRCASSIE £T G^ORGIE:.
15
Diens s'afTubleiit d'une peau dt banf,
pr^par^ pour cet osage , et porvien-
oent ainsi a les approcner.
Cest aussi dans la stqppe immense
oomprise entre le Caucase, la mer
d*Azow et la mer Caspienne , que se
trouveot des troupeaux de chevaux
pm^ et saui^es. Ges demiers doi-
Yesnt leur origine aux chevaux domes-
tiques qui se sont ^ar^ dans le pajrs.
lis sont de petite tailte; leur t^te est
fjosse , leurs oreilles pointues, la cri-
niere coorte et h^riss^ , et la queue
moins longue que cdle des cheraux
privds. II en est plusieurs dont le
manteau est gris argents, ou brun
fonc^; mats commun^ment ils sont
d'un brun fauve , et jamais noirs. lis
vivent par petits troupeaux de einq h
m^ indiviaus, compost d*nn ^lon,
dejuments et de poulains. D^ que
oes derniers commencent k grandir ,
r^talon les chasse de la society oiH ,
scul, il a la Dr6tention de Tivre en
sultan, an miliea de ses corapagnes,
OQ plut6t de ses esdaves. Sourent il
amve qo'un jeune poulain, expuls^
trop t6t par vtiakin despote, suit de
loin le troupeau , Tobserve d'un oeil
de regret, et re^oit furtiveoDent quel-
gues visites de celle qui lui donna le
iour et le nourrit de sonlait. On en voit
aussiquirddentautourdelasod^dans
nn autre but : Tinstinct de la femille
s'est deja manifesto en eux. Cbacun
de ces maraudeurs ^ple le nooment oti
rpbjet de sa poursuite restera en ar-
ri^ du troupeau ; il ose alors s'en
^tpprocfaer, au risque d'etre apereu
(^ le Tteox dief . La jeune cavaie re-
siste d'abord et s'eniuit, puis elle re-
cent, et ce man^ dure souvent
ptusieors jours. Enfin , quand les Toeux
de Famant ont fi^it place aux droits
de r^ponx , le nouvel 6talon s'^loigne,
suivi de sa oompagne , et va cacher
Ks saoTages amours dans les solitudes
oe la plaine.
Cescbevaux sont g^n^ralement forts
^ agiles , raais feroucbes et indomp-
^^. lis ont un instinct merveilleux
poor deriner lesapproches de Thomme,
doQt ils fuient la pr^ence avec plus
de pr^pitation qu*ils if en mment
decant le tigre, Tours et le loup. Ce-
pendant , les Cosaques et les Tatares,
qui leur font fr^uemment la diasse ,
parriennent k s'en approcher k Paide
d'une jument dressee k cet exerdoe.
lis les tuent k coups de fusil et les
^rchent sur place. La peau leur sert
k divers objets d'tonomie domestic
que , et la oiair est pour eux un roets
mand qu'ils pr^rent k la viande de
boeuf.
On trouTe encore dans les stoipes
une espdce de marmotte qui y est ires-
commune, des taupes et des musa-
raignes. Vonagre ( dne sauvage ) vit
dans la region des montagnes ou ,
sans cesse occupy k fuir devant les
loups, les ours et les l^pards , son
existence n'est gu^ plus douce que
dans r^t de domesticity.
Les insectes caucasiens sont pen
oonnus ; roais il en est un qui a une
certaine renommte locale, c'est la
phalanae.
La nnalange, ou araignte-soorpion
( phatangium araneoides ), est com-
mune dans les plaines de la G^orgie
et dans la partie moyenne des monta-
gnes. Sa grossenr est k pen prte celle
du scorpion. Son corps est mont^ sur
des pattes courtes , sa bouche est ar-
m6e de dents, son caractdre est irw-
cible, sa furenr et son agility incon-
cevables. Elle vit dans des trous en
terre. La morsure de ce hideux insecte
est mortelle , si on la neglige ; mais il
est heureusement plusieurs remddcs
fENnles k la port^ de rhomme, et,
entre autres , celui de frotter la plaie
avec de Thuile, ou tout autre corps
gras.
Les sauterelles, amente par les
Tents du midi comme des nute qui
iribscurcissent les radons do soleil , en-
vahissent par mynades les champs
ensemenc^ de bfe et de mats , et y
causent d'inrem^iables dommages;
mais ici , comme en l^gypte, ces trou-
pes malfaisantes sont ordinairement
suivies par des oiseaux libteteors qui
▼ienntnt alder Thomme k dompier
ce redoutable fl^u. L'oiseau que
les G6orgiens nomment Tarbv (po-
raditea trMU) arrive par bandes
16
L'UNIVERS.
nombreuses a la suite des sauterdles,
et leur fait une guerre k mort; aussi
devient-il , dans le pays , Fc^jet d*une
v^n^ration si ferande, au'elk ra|q[ieUe
le culte de Vibis cbez les Egyptiens.
Parmi les reptiles , nous nous bor-
nerons a mentionner les serpents et
les lizards. Les premiers sont tene-
ment nombreux dans la steppe du
Moghan , comprise entre la mer Gas-
pierine ct Tembrandiement de I'Aras
et du Kour, que la terre en est toute
jonch^. L'arm^ de Pompde, au dire
de Plutarque , ayant tent^ de traverser
cette plaine , tut contrainte de s*en re-
tourimr , tant les hommes et les che-
vaux furent effirayds par la multitude
de ces reptiles. Le s^n^ral Zuboff 6tant
venu attaquer Salian, en 1800, et
ayant voulu passer Thiver dans le d^
sertde Moghan, ses soldats, obliges
de creuser la terre pour y planter leurs
tentes, trouvdrent une prodigieuse
guantit6 de serpents engourdis par le
troid de la saison.
Les oiseaux sont peu nombreux
dans risthme. Les cailles seules sont
tr^-communes en G^rgie . dans les
diamps de millet et les bruy^res,
oik Ton voit aussi la perdrix du Cau-
case. Les bois de la region moyenne
sont habits par des jgrives, des mer-
les, des pigeons ramiers. La Mingre-
lle nourrit une grande vari^t^ (Toi-
seaux de proie et plusieurs esp^ces de
faisans , ce gui rappelle la tradition
de rimportation en Europe de cet oi-
seau par les Argonautes. Les parties
aqueuses donnent asile k des troupes
de gnies, de pies, de fireux et de
choucas. Dans les nautes montagnes
du nord , on ne Toit que des oiseaux
de proie, I'aigle, le milan et le vau-
tour. Seulement on y rencontre assez
fr^uemment un oisiUon chanteur qui
rappelle de plus douces contrto : c'est
le serin d'Europe, oelui qui anime nos
bosouets de son aimable ^ouiUement.
On le retrouve ici dans la chalne des
montsqui boident la steppe, etonle voit
sautiller de rocher en rocher, toujours
gai , toujours chanteur. La vue de oe
petit animal dans les solitudes sauva-
ges du Gaucase a foit battre plus
d'une fois le coeur d'un vovaReur , en
lui rappelant le pap natal ci les jeux
de la premiere enfimoe.
Les courants d'eau de risthme cau-
casien ne sont pas tous ^gakmentpois-
sonneux ; quelques-uns oat trap de
fraldieur et de rapidity , ou sent char-
ges d*une surabondanoe de parties mi*
n^rales. Dans les autres, on p^cheune
exoellente quality de saomon, I'^^tur-
geon, le stmet , la carpe, le baibillon,
le sewronga, le sUuruSy le brocbet,
le bareng de Kislar, lespetites tanches,
les corassines et les poissonsd'arg^t.
La pdcbe des phoques dans la mer
Caspienne est une importante bran-
che dindustrie. Sur les bords de la
mer Noire , les Mingrdliens pficheot le
tiion.
Tdks sont k peu pr^ les ressouiees
naturelles qui appaniennent k FistbiDe
caucasien. De nouvelles explorations
ne peuvent qu'en accrottre beauooup
la nomenclature; mais nous croyoos
avoir signal^ , dans le domaine ooonu,
tout ce qui 6tait digne de quelque at-
tention. Pious passons mamtaunta
Tbistoire de Tbomme.
PAETIB USTORIQUX-
On parviendrait plus aistoent a re-
trouver dans les stepjpes du Cauc^
les grains de sable prunitifs qui y n*
rent suooessivement d^pos^ par les
vents du desert, qu'on ne jMurnit
d^irouiller le chaos gdn^alogique des
anciens habitants de la region cauca-
sienne. H^rodote, Thucydide, Bio-
dore, Pline etStrabon foumisswcer-
tainement k cet ^rd les plus prtoeui
reaseisnements; mais k F^poque ou
toivaient oes v^n^bles bistonens,
ils manquaient de toutes les ressqurces
que le oeveloppement des connaissaD-
ces humaines a mises , aprte plusioiTS
siddes , au pouvoir des g^ograpbes et
des historiens. ^^
Dans le principe, les Grecs doane-
rent un nom oouectif k tous les p«»-
ples qui occupant suocessiveinent w
r^ons inconnues qu'anrosaient je
Danube, le Borysthtee et le Tanais
et qui s^^tendaient, en Asie, en de(a
I
CIRCASSIE ET GlfeORGIE.
17
et au dela des monts Imaiis, soli oue
oes peuples, de race japh^ique, nis-
sent deacoidus des hauteurs du Cau-
case , soit qu*ils appartinssent h T^mi-
rioD d*une fiuDifle asiatique. Comme
pramiers d'entre eui, qui furent
reiia}iitr68 par les Orecs , oombattaient
h cberal et montraieot une adresse
extreme a seservir de Tare, ils furent
appeles Scffthes , v^taUe onomatup^
pour dMgner le jet de la fldche. Les
Grecs apinrirent aussi que ces peuples
fie donnaient entre eux ]e nom de
Skoloies , c'est-i^-dire cavaliers. Dans
]a langue finnoise modeme, ]es mots
SMittia, Kitta et KU d^stgnent encore
un archer. Nous ferons remarquer , en
outre J qu'fl y a une ^vidente analogic
CBtre le nom de CeUes^ KeUes^ ou
KSHe$ (Karot • KOtTCu) , oomme di-
saient les Grecs y etoelui de Skolotes.
Les g^ographes de la Grdoe, et,
aprte eux, oeux de Ronie et de By-
zaoee, voulant classer m^thodique-
meot les direrses peuplades conion-
dues k tort sous un nooi identique ,
oominiKent la £uite non moins grande
de d^aijper, par di verses denomina-
tions, des peuples qui appartenaient
Mdeinment k une m^me nation. De
lii Get niextricaUe rdseau qui enveloppe
la gfognudue ancienne , et que la cri-
tufue modeme pent bien trancher har-
dimeat sans gruid ihoonvtoient , mais
qu^elie nesaurait d^rouiller. Nousne
neodrons aucun oompte des Sq^thes
HamaaeoiHens, ainsi nomm^s paroe
qu'ils Tivaientsur descbaffiots, comme
le font encore de nos jours les Tatares
Kondures; des Hippomolques ^ out
buvaieDt le lait de leurs juments ; des
SkinUes, qui reposaient sous des ten-
tes; des Trogtbdutes ^ qui vivaient
dans des grottes ; dbs Aorses^ ou peu-
esiteadeux,. paroe qu*au lieu de
/ants chariots , ils employaient des
cfaaraeaux au transport de leurs ba-
eages; ni de Tinct nations dont les
iMes ne se rattaoient k Thistoire de
eette oootr^e que par un fil trop d^i^
pour nous servir de {^uide. Les Cim-
mMens m^ritent de nous occuper plus
s^neuseroent. Peut-^tre descendaient-
ils d*une colonic voyageuse qui , dans
les temps primitifs, avait franchi l«
Caucase pour chercher vers le nord
une patrie moins ingratf que les de-
serts de la Bactriane . et des rives plus
hospitalidres que celles de TOxus. Ils
s'^taient arr^tes sur les bords du Koii-
ban, sur ceux de la mer Moire, et
dans les grandes steppes oui offrent
tant d^attrait h I'indolenoe des peuples
nomades.
Une autre nation , dont nous avons
d^ja eu Toocasion de parler, habttait
alors sur les bords du TanaTs et du
Palus-Masotis ; c'est cellc des Magogiy
ainsi nomm6s par les H6breux, Sevmes
MsBOtes des Grecs, Oalaciopnoffes
d*Hom^, Massagite* d'H^rodote,
et , depuis , les Sarmates des K^ogra-
phes. Chez les Maeotes, les femmes
apprenaient le metier des armes; elles
montaient h cheval , tiraient de Tare ,
allaient k la chasse et li la guerre avec
leurs maris. Gontrari^ peut-^tre par
rarriv6edes Cimm^riens, cette nation
envoya au dehors une colonic sous la
conduite de deux jeunes princes, Ilinos
et Scolopitus , pour d^couvrir , s'il se
pouvait, une terre plus tranquille.
Les Emigrants traverserant les gorges
du Caucase, sans 6tre arr^t^ ni par
les asp^rit^ de ces montagnes, ni
par les mille torrents qui content de
leurs summits neigeuses, et se fix^-
rent dans le pays de Th6miscyre , sur
les bords du Thermodon. C^est la colo-
nic qui donna naissance aux Amazones.
A peu pr^ vers la mdme ^poque
( 1680 avant J.-C. ? ) , les Maeotes se
ru^rent sur les Cimm^riens, et les re-
foul^nt vers le sud. Les vaincus
traversdrent le Caucase; quelques-uus
y fix^nt leur demeure , fe plus grand
nombre dmigra en Arm^nie, et, depuis,
ravagea une partie de TAsie.
Trois sidles apr^ ( 1S88 av. J.-C),
nq»B voyons, sur la lol des traditions
^gyptienncs , S^sostris faire sa fa-
meuse expedition dans le pays des
Scythes. Ce conqu^rant revient par
le nord de la mer Caspienne, passe
dans Tisthme et v etabnt une oolonie
sur les bords du Phase. Get evenement
fit dire par la suite aux Golcheens qu'ils
etaient issus des Egyptiens.
T Uvraisan. (Giegassie et Georgie. )
18
L'UNIVERS.
Les poiHilatioos sauva^es qui habi-
taknt alon les boids de ui mer Noire,
vivaient moins de leur lAdustrie sur
uo sol ingrat, que des ressources
5 'dies se fNrocuraient par le brigan-
ge etia piraterie. Get usage imme-
morial des peoples caucasiens de ecu-
rir sur les vaisseaux marchands a
traverse les sidcles et s'est perp^tu^
jusqii'a Dotre epoque. Lorsqu'un na-
vire faisait naufrage sur oes c6tes in-
ho^itatidres, les gens de re^ipage
devenaient esdaves, s'ils n'^taient pas
offeits en holocauste aux monstrueu-
sesdivinites du lieu. Ges drconstances
furent cause que les Grecs donndreut
i la mer Noire le nom de Pont-Jxin ,
^1 vautdire mer inkoipUaU^e; mais
lis k Gbang^rent plus lard en celui de
Ptmi'Euxin ou mer hospUaMre,
at oe lut loTsqu^ils en eureut euz-
m^mes peupie le littoral {*), Us com-
prirent, en effet, la necessity de vi-
sitor ces peuples £Bffoucfaes et de for-
mer des mmissements stables parmi
eux, tant pour Clever une barri^e
oontre leor d^bordement que pour leur
apport^. au moj^en du commerce, le
bienftit de la dvilisation.
Les plus aaciens souvenirs des pre-
mieres emigrations de la Grdce se
rattacfaent aux voyages de Phrixus et
d'HeOe; oette epoque se perd dans les
tenebres de la mytholo^ie, et nous
nous bomons h la mentionner. Mais
il n'en est pas de meme de Texpedi-
tionde Jason, sur Fauthenticite de ia-
queUe il n'est plus permis, au point
ouen est arrivee la science, de con-
oevoirdes doutes. Un savant archeo-
k^e^ M. Raoul-Rochette , a dit avec
raison que les £3Mes m^mes qui defi-
gurent oette tradition ne paraissent
qu'un garant de plus de la verite des
evenementB qu'elle retrace. .
Le desir de purger la mer des pi-
rates qui I'intetaient, Joint h I'espoir
de trouver dans la Golchide des ri-
ehesses dont sans doute les premiers
nawgateurs avaient exagere Timpor-
(*) idiivoc ou A{tv6< et Ev^cvGc. (Tovei
PUne , TcrtuUien , Aristote , etc ; d'AnviJle,
Xardi«r, Millin, Kaoul-RochcUe , etc.)
tanoe, attirii sous les ordres de Jason
reiite des heros de la Greoe. Plus de
quarante cheft se rMgerent sous aes
ordres, et chacun montait uu vaineau
que manoeovraient les hommes de la
nation. Quant k Jason, U fit eonstniire,
au pied du raont Peiion, unvaisseau
long, sembiaUe k e&a dont se ser-
vaient les Phenidens , et qu'on apfw-
lait j4fyo ou j4reo, II y monta, suivi
d'une route de jeunes guerricrs. dont
les noms appaitienBent wdl traditions
herolques de la Hdlade. Parmi eux ob
remarque Castor et PoHux, zetk et
Calais, Hercule, Orphee, Teiamon et
Tiphys. Jason partit du port dloldios,
et apres diverses aventuces dk il eut
It lutter contre la perverslte des hom-
mes et la furie des elements, ildeoou-
vrit le mont Caucase et entra dans les
touches du Phase. L'eatnpriaedesA^
gonautes eut peu de suooes. Leur dicf
enleva la fille d* Aetes , roi de CMtMas,
la fiuneuse Medee, et se retira apnte
avoir inutilement guerroye contre des
peuples barbares. Cependant son ex-
pedition servit , en qiwlqoe sorts , d*i-
tineraire k oelles que la Greoe entie-
{>rit successivement. Alors on vit s'e-
ever, sur cette partie du littoral du
Pont-Euxin , des villes et des peoples
qui revendiquerent I'homiear d*une
origine argonaotiquoC)- iMotemiaSj
aujourd'hui Iskowriah. presde Sou-
koum-kaie, liit fondM, dit-on, par
les compagnons de Castor et Pollttx,
oonnus sous le nom de Diosoures.
PhasU , qui devait 6tre situee sur la
gauche du Phase, en feoe d'OEa , mais
ont il ne reste plus de traces ; FUj/m,
devenue Pitzunda, et B^aoUe^ au-
jourd'hui Afuupij remontent a la
meme source. Les Parrhasiens, sur
les bords de la mer Caspienne, sedi-
saient issus des ParrhasieBs d'Axca:
diej les Alboniens, les Iberieos, la
nation des Henioques, les lyndirides
et vingt autres redamaient ^galemeat
(*) Kaoul-Rochette, itaSHssemat des
lonies grec^ues, ( Dcnyt-le-Ptri^te , "9^^
bon, Arrien, Ammicn Marcellin, RiiMbCi
Pomponius Mela, Pline, TMtle, Sotiat
^iennc do Byunce, etc.)
GIRCASSIE ET Gl^ORGIE.
19
ia rodnM origuie , et leur fur^leDtioii 1^
oet ^rd ff^ajMNiyali, non aeolemeiil
sur des traditions bistoriqufis^ mais
encore sur des rapports physiques,
dont plusieurs oaturiuis^ oal cm re-
connaitre les traces chez les desoen*
dants de ces peuples. Les tdmoignages
mat^riels du voyage de Jason exis-
taient oioore du tonpsde Strabon,et
U &ut peu s'^nuer de ne plus les
retrouver dans oe pays, o& se sent
heurtto tant de populations ignoran-
tes, fanatiques et superstitieuses.
L*^tablissement'des colonies foumit
aux Grecs les moyens de connattre les
peoples du Caucase; mais leur g^e
po^tioue a rev^tu les faitshistonques
de oette 6poque d'un voile qui rend
la v^rit^ bien difficile a discemer , et
il faut convenir que les ^vtoements
dont oette contr^ a ^t^ le th^tre ont
singulidnement eontribu^ h embrouil-
ler la question. Cent tribus diverses ,
auxqueUes il serait ridicule de vouloir
assigner des limites territorialeB, se
montrent tour k tour sur la sc^ne po-
litique, dans un flux et reflux de guerre
et d^^migration. Enfin la grande ir-
ruption des Mongols et des Tatares
arrive au moment ou les t^^bres de
rhistoire commenfaient h se dissiper
devant les lumi^res du christianisme.
Ge n*e8t qu'au moyen de I'analyse
que nous pouvons esp^rer de porter
quelque dart^ dans ics ^v^ements
qu*il nous reste h raconter ; nous al-
Ions le tenter.
L'isthme Caucasian comprcnd au-
jourd'hui environ vin^ nations qae
nous rattacherons h trois groupes prm-
cipaux, savoir : 1* la Giorgie : nous y
ferons figurer les G^rgieDS propre-
nient dits , les peupjes ae rancienue
Colchide, ceux de Tiflbanie, les Souanes
et les Lazes; T le p<M9 des monta-
ffnes. X*histoire des Tcherkesses ou
Circassiens, et celle des Abases entrent
dans oette cat^orie, odi il sera parl6
^galemeDt des Lesghis, des Ossdtes et
des Tchetohenses; 8° la rigian de la
fteppe, Nous y comprendrons les Ta-
tares, les NogaTs, les Turcomans, etc.
•
La Georgia embrassait jadis trois
tots, que 1^ anciens nommaient M-
rie, ColcMde et Albarde.
L'Albahis, dont le nomse trouva
aocidentellement le m^me qua celui
d*une province de la Tor^uie d'£u-
rope, dans le flolfie Adriatique « 6tait
habits par les Derbies. Elle s6ten-
dait le long de la mer Caspienne , de-
puis remplacement oOs*est ^ev^ Der»
oefU, jusqu'au conflumit du Gjrrus et
de FAraxe. Elle a fornK6,de nos Jours,
le Daghestan m^ridioiuil et le Chir-
van.
La CoLGHiDS , s^panfe de Tibbie
par une diatne de montasii^^ 8*^ten-
oait sur les boids du Pont-Euxin ,
jusqu'au pays des Abkazes , au nord ,
et jusqu'au fleuve Apsarus au sud.
^ie s*est diviste, dans les temps mo*
demes , en trois provinces : la Mingri-
^^r/m^^/AiouImirette,etle Qowria.
LcA principales villes 6taient, sur la
c6te J en descendant du nord au sud ,
Tancienne LazUa. PUyusa, DatuUtri,
DioscuriaSf jircniopoUs, OEa^ Pha-
sis; dans rint^rieur , Kuta, MechleS'
sus. Madia J Surktm^ etc. On est peu
fixe sur I'dpoque h laquelle le nom de
Colchide a cc^ d'etre eu usage.
Le t^moignage des historiens place
dans cette province les Colcb^ens, les
Melanklgnes , les Goraxites ou habi-
tants de la montagne du .Corbeau , les
Apsiliens , les Missimaniens et diver-
ses autres tribus dont les noms npus
paraissent aujourd'lmi arbitraires e,t
capricieux. Mais le peuple le plus in-
tcressant est cdui des Soano-Ciol'
dies de Ptolem^, ou Souarm de
Strabon et de Pline. II ^tait origi-
naire de Tlb^rie et se trouvait m-
bli , du temps des Argonaute^,, dans
les monta|;nes de la Colchide, au-des-
sus de Dioscurias. Ce neuple , d'une
grande bravoure, 6tait a*une malpro-
Sret6 si excessive , aue les Grecs lui
onn^rent le nom de Phtyrophage.
( roangeur de poux ). Strabon assure
que les Souanes avaient un roi et un
conseil compost dc 300 mcmbres, et
3.
20
L'UNIVERS.
qu'Ut pouyaient mettre sur pied des
arnito fonnidaMles, attenda <{ae chez
eux tous les homines portaient les
armes sans distinctioii d'age. Pers6cii-
Ug par ton voisinst et toujoun en
^tat d*bo6tilit6 arec eox « lea Souanes
ont M tour k tour aoumis aux Bv-
zantins, aux Perses, aux princes de
la Mingrflie et aux rois de la Gtor-
g;ie. Fuyant enfin devant une civilisa*
tion gui ne s'ofifrait h eux qu'^ la
condition de perdre la liberty, iis se
sont retfr^ dans les Alpes caucasien-
nes, et Tivent actudUement dans ies
parties habitiddes les plus 6levto de
la province ^Odichi: on en rencontre
cependant aussi sur les bords de Tln-
gour, o£k ils ont mtoe quel<iue8 villa-
ges; d'autres, mais en petit nombre,
nabitent les rives du Tzkh^nis-ts^i,
et ceux-Uk ont conserve la religion
cbr^tienne , tandis one les autres en
ont enti^rement perau le souvenir. Les
Souanes , qui se donnent k eux-mtoes
le nom de Chnaou, forment la na-
tion la plus pauvre du Gaucase. Elle
n*a pour se procurer des toiles , des
draps , des ustensUes de mtoage et du
sel , que la ressource de vendre des
femmes et des enfiints. On dit pour-
tant que les homines font eux-mtoes
leurs fusils et leur poudre. lis sont
g^^ralement braves, robustes, grands,
oienfaits, mais d*une malpropret^ b^
r6ditaire; vivant sous des nangars, ils
donnent p61e-mdle sur une couche
commune, sans distinction de sexe, et
mtoie avec leurs bestiaux. Les femmes
de cette nation sont fort belles , et de
moeurs tr^dissolues. Le costume des
bommes est assez difficile k caract^ri-
ser, n'^tant le plus souvent qu*une
reunion de haillons , attach^ autour
des jambes et des bras et recouverts
d'une sorte de tablier qui leur tient
lieu de culottes. Les femmes mariees
.portent des robes et des moudioirs
ecariate, leur oouleur depr^ilection;
elles se coiifent avec une pi6ce d*^
toffe, de mani^re h ne montrer qu'un
oeil , tandis que les fittes nubiles vont
ate nue.
Les Lazes sorit ^alonent d'origine
l^forgienne. lis ont impost leur nom
h toute la o6te qui s'^tend depuis la
Mingr^ie et le Gouria, jusques et
y eompris Tr^zonde. Ge pieuple sau*
vage et adonn^ k la piratene a doming
quelque temps dans la Mingr^ie sous
la tutelle des rois de Perse*, mais, ^
I'exception de ce fiiit, son histoire ne
mMte pasde nous arr^ter plus long-
temps; elle n'est ni phis noble, ni
plus int^ressante que ceHe de tous les
voleurs de grand chemin.
Les CoUMens. qui se donnent one
illustre origine due a rezpMitioa de
S^stris , n'ont aucune ressemblanoe
avec la race ^gyptienne. II est I pr^
sumer que les descendants des cod-
temporams de S^ostris ont ^t^daois
long-temps remplao^s, sur le sol de la
Golchide, par une population compo86e
d'^^ments hdt^rog^nes que dominait
le type g6orgicn.
L^bistoire de la Golchide se confood
tantdt avec celle des Remains , tantot
avec celle des Persans , etpresqae too-
jours avec celle des G6orgfens. On voit
les Golcb^ens servir dans les annees
de Gyrus, de Xerx^, de MithrkUte,
de Gorbulon et de Chosroes. Toujours
tributaires, ils ofifraient annueilement
k leurs suzerains cent jcuiics filles rt
cent jeunes gar^ns. Mithrldate fit la
isonqu^te de la Golchide enti^ et
Tannexa k son royaume de Pont ; nuus
la fortune des Romains lui enleva cette
province, qui fut gouvem^ par des
rois tributaares de la race de Pol^mon.
Pomp6e traversa la Golchide et eut a
oombattre les j4kU$u , peuple soer*
rier qui babitait au nord du Caocase;
sous le r^gne de If^ron, die fiit mise
au rang des colonies romalnes , et sob-
jugu6e pen aprds par les- Lazes, qiUi
en d^it des empereurs romains , en
firent hommage aux rois de Porse-
Vers lafin duIV sidde de Tto dw«-
tienne , les Hum (*} dominent dans
(*) Left peiipleft oompris mmi eene din»-
miiiaUoik aoQl encore Vobjet dVme •nf'
fiort oomoiune. Let hims prapfMBcnt diti
soQt d'origine onralo-finnoiie ( do noits
Owait k la FinUndi: ). Geux doni il at Ka
question ne soot pai autres que cAU aaUM
de Turks d^Hgncs dans les jiMMki e^
noise* sous le nom de Hiotrng-nou,
CIRGASSIE ET GitORGIE.
ai
h Miogr^e , comme dans le reste de
risthine caucasien, pendant que lea
Homains degdndr^s et lea Peraana ae
dispiitent la possession de FAsie a?ec
des alternatives de bona et de mauYaia
suoo^. Dans le V* aidcle, un roi de
CoIchide« nomm^ Zathua, 6d)appe k
rob6curit6 historique, en 6pousant une
EriDoesse chr^enne et en reoevant
: bapt^roe. Alora a'^l^ve oe fameuz
rerapart qui avait environ vine^ lieucai
de longueur, et qui s^pnrait Tes pro-
viooes romaines ou persanea des pays
0CGup6s par les Scythes; on en voit
encore 1^ restes aupr^ de Soukoumr
Kali. La faiblesse des empereurs sem-
Uait licber le frein h la licence de la
soidatesque et auz d^pr^ationa des
e^ndraux. Geux-d, voulant s*as8urer
rimpunit^ dans les provinces lazes,
bAtirent, sur les borda de r^dnosif ,
la forteiesse de Petra^ qui devait lea
Diettre h fabri du ressentiment popu-
bire; mais, k oette m^me ^poque, la
Proiddenoe envoie h la Golchide un
souveraln qui avait aasez de qualit^s
pour devenir un Piene^le-Grand, ai
elle TeiH plac6 sur un trdne moins
etroit : Gunaze fiut aervir tour k tour
les Persans et lea Romaina h la d^li-
vraaoe de aon ]^s , jusqu'^ ce qu'en-
''~ il tombe lui-m^me aasassine trat-
treuaement par des officiers bvzantins.
Soii88onregne,le grand roi de Perse,
Chosro^ Nouchirvan, oonunen^i Foeu-
m de oonqu^te que aes suooesseurs
devaient aoocmiplir. Aprte Gubaze , la
Golchide fiit obscur^ment soumise aux
Byzantins et aux Grecs, avec le titre
de royaume du Phase. La province su-
perieure, d^i^n^ sous le nom d*/]n^-
rithij en avait ^t^ d^tachdc a une
ifoqae recul^, pour faire partie d'un
royaame dit des Abkhars , aont le sou-
▼eratn de droit ^taittouj<Nirs I'h^ritier
pr^somptif du trdne de G6orgie ; mais
vers l*ann6e 1343 , les Mongols , ayant
divis^ rh^tage du roi George Lascha
entre les deux David ses fite, Flm^
i^hi devint principaut^inddpendante,
et , depola lors. fl fut tantdt s^par^ de
la G^rgie , tantot r^uni sous le m6me
sceptre, juaqu'li Salomon II, mort h
Trebizondc en 1819.
Dana lea prani^res amtedb XIV*
sidcle , on vit un autre dtoemlMreDMDt
de la Goldiide et du royaume des
Abkhars , la M^igr^, ae oonstituer
en royaume indoendant. Ce nouvel
tot, que baigne 16 Phase i^ aon em-
bouchure, fin akNTS gouTern^ par des
souverains quiiprirent le titre de D€h
(Mans. Ces princes forment une sMe
de bri^nds qui disparaiasent toua,
aucoesai vement, aasassin^s, mutii^ ou
aveugl^ par ceuz qui ambitkHinent
de leur suco6der«
Vera le milieu du XV* sihde , Ma-
homet II rtoiit les provinces cauca-
siennes k sea possessions, et leur im-
pose le double joug de sa suzerainet^ et
dosa religion. Pen apr^,^la psortie m^
ridionale de la Min^^ie opoe sa revo-
lution et ae constitue, a son tour ,
Srovince ind^pendante , aoua le nom
e Gottfio. Le dernier Gcwridj ou
prince de ce pays, v^6tait, il y a
quelques anndes, k Constantinople.
L'histoire civile de ces tots se com-
pose k pen prte uniquement de guetr
res intestines et de querelles de fa-
mille. Cest une p^noae san^lante pen-
dant laauelle lea lorfaits les plus atroces
se suooSdent avec un acbamenient qui
tonne Timagination. La l^lslation,
plus ou moins empreinte de f(6rocit6,
scion les capricea du Dadian ou.du
Gouriel^ y etait g^ntolement bas^
aur les ^reuves dit JuffetnaU de Dieu.
Enfin , la Russie , mettant L profit
les levto de boudiers des souverains
de la Pase, franchit le Caucase.
Alexandre F' fait de la Mingrdie , du
Goiirla et de I'lm^r^thi , de nouvelles
annexes k ses vastes domaines.
Le commerce des esclaves avait
form^, de tout temps, la principale
ressouroe de L'ancienne Golchide; les
Russes , en occupant la contr^ , ont
&it cesser ce trade infame. La religion
qui domine aujourd'hui dans les vems
i provinces est le christianisme selon
e rite grec, mais entrem^le do pra-
tiques superstitieuses, ou jpint h une
grande iiidiffi6rence. La Russie entre-
tient un souvemeur qui r^ide k Khou-
taissi , et dont la juridiction s'^tend
sur une nartie de rAbasie,.
22
UUNIVERS.
Kho/uk^H est la ville la plas im-
portohte deft trois provinces de Tan-
d^me Goldkide ; elle en est la capitale,
et sert de residence aux autorifes ci-
vfteir et ihilitaim. Gonune la yXwpsti
d^ antitones cft^ , die se divise en
tflle tieille et tlUe nenve. La premi^,
dontonvoitenooteles mutsd'enceinte,
et 06 Pcm retrouve les vestiges de pla-
^ents 6iffloes remarquables , est situde
SUf une ^Inenoe h la diroite du Pbase
( MM), mmis^rrotts dit plus haut que
cette ville, Pancienne Kyta {Cotatvs)^
ifitait i^ardde oomme la patrie de nf6-
d^; il Serait difficile de presenter
des tftto d'une noblesse plus illustre.
Attjourd'hui, on j va oiercher des
souvenirs on y donner quelques in-
stants il rexamen des mines d'une
andenne et belle cath6drale. Un as-
semblage de maisons en bois, d6cor^
du nom d'ardievdch^, un magasin h
poudte , qudqiles cabanes de cultiva-
teurs, et un admirable point de vue,
fbrment, avec les debris de la cath6-
dfale, tout ce qui mdrite. Inattention
des toyageuts.
La ville neuve est bfttle dans une
plaine , sur la caucbe du fleuve. On y
voit un vaste bazar, dont toutes les
boutiques, h peu prte, sont tenues
par des Arm^niens ou des Im^r^thiens.
Tiflis , Akhaltzikbe et Constantinople
approvisionnent oe march6, oCh les
achats se font soit au comptant , soit
{)ar Mianse. lA viennent sVntasser
es soies, lea foumires, le mid, la
dre, les ootons, le bl^, le mais et le
vin. Les artides de n6cessit^ premie
J sont k trte-bes prix , puisgu'en temi»
ordinaire la bouteille ae vm revient a
moins d'un sou , la livre de viande k
8 ou 4, le tchetveri de bl6 & 13 ou 15
francs {4nrancs environ les 100 livres),
et cdui de ma!s k la moitl^.
Les maisons de Khoutaissi sont en
bcris pour les plus ridies habitants, et
pour les autres en clayonna^ entre-
m^Ms d'wgile. Manchie ext6neurenaent
au moyen de la chaux. Les rues et ks
places pttbUques sont om6es d'arbres ;
aiissf Pensenible de la viHe, quoique ir-
nfi^lier , est des plus pittoresques. Le
pnnocGortscbakoffra d'ailkurs beau-
coup embellie et agrandie depuis qud-
ques ann6es, et c'est k lui que Ton
dolt , notamment , les nouveauz corps
de caserne , les hdpitaux et le jardin
public. Les Russes y entretiennent une
gamison nombreuse. La population
permanente ne d^passe pas dix-huit
cents ames , dont une moiti^ se com-
pose d*AnnMens, dlm^rdthiens et
d*6tran£ers de divers pays , et Kautre
de Juifi seulement. Ces demiers ont
un quartier k part; lis s'oocupcnt , a
8eu prte exdnsfvement, de la vente
es odr^ales et autres productions de
la terre (*).
Aedem^iTa^ est le port le pins im-
Sortant detoute la c6te. So noommeroe
*totrepdt a pris , depuis quelques an-
uses, un grand d^eloppenient Les
artides d'exportation consistent eo
dre, tabac,cuirsdeboeufetdebuflle,
fourrures, bois de noyer, mats, etc.
La population de Redkme-KaU est de
neuf cents ames seulement , y oompris
une gamison de quatre cents honunes
au moins. PoU et AnaAHa m^ritent
d'etre mentionn6s comme ayant fait
le principal objet de plus d*une guerre
de la Russie avec la Porte. La pre-
mih^e de ces deux puissances avait
commis la faute ^norme de les laisser
entre les mains de la seconde , lors de
la paix de Bouckarest (1812).
OfU est un village assez considerable
du canton de Raisdui. au nord de
Khoutaissi. Ce canton abonde, dit-on,
en mines d'argent, de cuivre et de
fer. Les mines de tours et de forte-
resses, diss^inte sur le sol de cette
int^ressante partie de la Colcbide, at-
testent les ravages que la guerre v fit
autrefois. On trouve, d*ailleurs, dans
toute Tandenne Colchide un
(*) Noi» donnont dans U plandie ■* >
que^uei fragments de b oathraralfldeKliMH
UuMi. Cette biitfre architecture, dont ks
omements represenlent det anipuuix « (let
fleurs, del candelabres et Tingt mjds ca-
prideux , atteste une epoque de decadcnee.
n n*en retlera bientM plus de totisiei. car
c*est maintenant, dans le Toisint^, 1 qui
enletera une pieite on nn fitl de coloDne
|ionr les joindre anx m&tfriwx de conslmc-
tion.
"^^.M^'^t^^ -/^^ '^-^r^V^.
H<j^tktrcbe cu Cotiya .
A
CIRCASSIE ET G^ORGIE.
grand noiiibre de forteresses dont
Slusieurs sont encore en bon ^t de
6fense (*). ZougdUU est un petit
bourg int^ressant , parce qu*0 est la
r^idence du Dadian^ ou prince de la
Mingr^lie. Ce souTerain d6chu> et
ponrtant toojours h^ri^taire, voyage
avec sa coor pour se procurer des
mqyens d^existenoe; il visite ainsi,
sucoessivement, la demeure de chsMnxn
de ses rassaux, passant de Tune h
I'autre, lorsqu'll en a ^puis6 les pro-
visions de vm et de volailles. Gette
condition du prince peut £adre apprd-
cier le degr^ de pauvret^ de ses sujets,
Les seigneurs mingr^iieos ou im^-
thiens et les dames de la cour du Dctr
(Uan ont pourtant des v^tements re-
marquablefli, sinonparleur propr^t^,
du moina par une pretention au luxe.
Les dames portent des manteaux tor-
late et des chapeaux de feutre de
cette couleur, garnis de galons d'or et
de petite plaques ou monnaies de
mtoe nddtai. lies nobles voyagent a
cfaeval , et leurs vassaux les accompa-
ment k pied , par respect ^ur le droit
ae suzerainete. La condition du jpeu-
pie est des plus malheureuses , et ce-
pendant elle s*est bien am^ior^ de-
puis rincorporation de ce pays a la
Russie*^ Les gentilshommes n'ont plus
le droit de vie et de raort sur leurs
vassaux; mais ils conservent encore
sur leurs biens et leurs personnes des
privileges qui doivent c^er tot ou
tard au progr^ de la civilisation.
Les nobles mingr^liens sont pas-
sionnds pour la diasse; et oomme
leur p^ abonde en oiseaux de proie
de toute espto , ils passent la plus
crande partie de leur temps ^ les
dresser a cet exercice.
Dans la Mingr^lie, les iiommes de
basse condition , encore moins favo-
ris^ que leurs voisins de rim^r^tlii ,
(*) La planch a* 6 renreaeiite une forte-
cfise du canton de Hadsc/ta, h Vextrhaile
du Tillage de Karagone, au confluent du
Phase et de la Longonne. Nous avona pcnsc
(lu'elle pouvait dounei* une idee suflisaiitc
tics rcssottrccs que ce pays uiontagneiix a
fournies h Tesprit helliqucux des Inicic-
thicns; elle se nommc Tmindos-Tzike.
23
deo^ent un^ extiftme mis^e sur leur
personne oomme dans leurs habi-
tations, lis se rasent ordinairement
la t^, n*y laissaot qu'une oou-
ronne de cbeveux k la fa^n des moi-
nes. lis vont les jambes nues ea touted
saisons, et jettent sur leurs ^ules
un bourka. netlt manteau de feutre
assez sembiaole par la forme k bos
grands collets de cavalerie. Leur cbaus-
sure consiste quelquefois en un sim-
ple moroeau de peau appr^tte, nou^
autour de la cheviUe, mais, plus or-
dinairement, en une sorte de sandales
beauooup plus larges que le pied, et
tress6e comme une daie d^osier. Les
plus ais^ ajoutent k oe costume une
calotte de feutre. Selon Tusage oom-
mun k tons les peuples du &iicase,
ils ne sortent pas de diez eux sans ^tre
arm^ , et cette prtoution ne leur est
pas inutile, tant ils ont k redouter les
attaques de leurs redoutables voisins,
les Abates, qui sont sans cesse occu-
ek leur tendre des embdcfaes pour
emmener en esclavage ; mais elle
favorise singulidrement aussi leur
penchant au vol et aux actes de vio-
lence.
Les Mingrdliens se souviennent d'a-
voir iU Chretiens. lis ont encore un
patriarchequ'ils appellent CcUhoUcos,
des ^v^ues et des pr^tres, onpofHu.
Le CathoUcos A les ^v^ques sont
assez riches, parce quMls vivent aux
d^pens du peuple, vendant les abso-
lutions, les amulettes, les gu^risons
et toutes les jongleries des prdtres du
paganisme. Les papas, au contraire,
sont g^n^ralement fort pauvres; aussi
ne sont-ils ^uere moins adonn^ au
vol et au brigandage que le reste des
Mingr^liens. La plupart de ixs papas
sont mari^ , et plusieurs ont jusqu*a
six ou liuit femmes. L'entr^e des egli-
ses n^est permise qu*aux hommes.
Lorsqu'un noble se marie, 11 est
assiste a*un parrain qui , tandis que le
prltre r^ite les pri^res d'usage , s'oc-
cupe k coudre les epoux ensemble
par leurs habits; il prend ensuite deux
couronnes de fleurs naturelles et les
pose altcrnati?ement sur leur t^te les
changeant de Tun k Tautre, d'apres
24
L'UNIVERS.
I'ordre doiine paur rofficidnt. Puis il
!cur ofTre du pain et du vin, manse
et boit avec eux, et annonoe que la
c^r^monie est aooomplie.
Le Toyageur Chardin , qui dcrivait h
la fin du XVIP si^le , a donn^ , sur
son s^jour en Mingi^lie , des dtoils
curieux, mais qui offrent bien peu
dMn^r^t aujoura*hui , paroe quits se
rattachent k des mccurs que le temps
et le contact de la nation russe ont mo-
^ifl6es. La princesse de Mingr6lie qui
re^ut Charain ^tait une espto de
courtisane effiront^e qui ranconna no-
ire Toyageur, dont les malfes furent
encore pill6es par les princes ou nobles
du pays. Geux-d Fauraient pjeut-^re
m£me fait p6rir , s'ils ne Tavaient pris
pour un capucin.
Les Orientaux donnent II la Min^r^-
lie le nom ^Odichi; les Arm^iens
appellent les habitants de ce pays
Eg^qtM, ou descendants d'Egros,
que la tradition fait regarder comroe
le foqdateur de la nation (*).
Quant au mot MinariUe, le voya-
geur Reineffgs I'a derive de Ming-
raoui, miiie ruisseaux, paroe que
oette contr^ est arros^ par des oou-
rants d'eau sans nombre. Suivant une
autre opinion , il viendrait de Migrel-
fdy qm correspond k EgiraMhy sui-
vant les procMite sp^iaux des langues
arm^nlenne et g^rgienne.
L'extr^me bumidit^ de la terre,
^chauflite en €U par Tardeur du so-
leii, fait de la Mingr^lie un s^Jour des
plus malsains. Les strangers y con-
tractent de ^ves malacues , et les
uaturels atteignent rarement h une
grande vieillesse. L'hydropisie est tr^
commune chez eux; mais g^n^ralc-
inent toutes leurs infirmity ne doi-
vent nas £tre attributo au climat
seal , les mccurs du pays y contribuent
beaucoup aussi. Les Mmgreliens ne
maneent, pendant la plus grande par-
tie de Tann^, que leurs ^normes
choux , auxquels ils aioutent quelques
poissons safi^s ou de fa diair de pore ;
lis boivcnt une sorte de vinaigre fait
(*) Voy. Chronique gcorg'unne , Uadtiitt:
par M. Brossct. Tari^, i83o.
avec le bouillon dc ces ni^mes choux.
Des racines fu'ils oouvrent de sel et
quelques firuits sauvaees oompl^teni
leur nourrlture habitueile. Ils patient
leur vie k dieval , ne s'arrltent que
pour dormir sur an terrain mouill^,
et sont oonstamment, enfin, d^or^
par la vermine. Ce peuple fidt une
grande consommation de gomi ( pani-
cum italicum ), espdce de millet I9oos
allons d*ailleurs retrouver, en pariant
de rib^rie et de la Gircassie , les au-
tres traits caract^ristiques des habi-
tants de Tancienne Colcbide.
LIBERIE, dont r6tymolo{^e est in-
certaine, a form^ la utorgie propre-
ment dite , ou le Kartfali, borne au
nord par la chafne des montagnes iid-
guses du Caucase , k Touest par la
^Ichide , k Test par TAlbanie, au sud
par TArm^e, dans une limite varia-
ble et Ions-temps ind^termin6e. Tout
ce pays , lors de la colonisation rive-
raine des Grecs , ^tait oocup^ |»ar les
Masques, dont faisaient partie les
tribus des Tibarrh^niens , des Ma-
croses , des Amardes et autres. Quel-
ques auteurs supposent que les Grecs
appelerent ces peuples Giorgiens, du
mot GiorgoSyldltmreixT; mais cette
.etymologic est peu soutenable, quand
on consid^re que Tagrlculture de cette
contrte ne pouvait oertainement pas
£tre un objet d*admiration pour la
Grto. II n'est pas plus raisonnable
de penser que ce nom leur fiit donn^,
apras rintroduction du christianisme,
en rhonneur de saint George, dont
la memoire est tenement v^nme parmi
eux, que la mmeure partie de ^rs
^lises lui sont d^ito, et gulls
n^ont pas eu moins de treise souve-
ratns au nom de George. L^^tymolo-
cie la plus vraisemblabie est odie qui
lire le mot G^oraie de LfforzoH , le
plus andennemeni donn^ a cette con-
Ir^ par les auteurs arabes , ou de
Gawftffistanf sous lequel die futcon-
nue au XII* si^e, aprte Toccupation
du pays par les Gourtfjei.
La Geor^ie fiit, depuis le XIII* Ste-
ele, subdivis6e en plusieurs provinces,
dont les tioms, pour la piupart imposes
par les conquerants venusde la Perse,
CIRCASSIE ET GfiORGIE.
35
ont traverse les siedes et bc retroa-
Teot dans oertaines localiUs auxquel-
les il serait impossible d'assigner des
limites. Panni oes dtoiembrements ,
le KakMM, le KharthH et le Swn-
khit/U ont form^, h diverses ^po«
ipics. des royauines ind^pendants. Au-
joura*bai le CanM-baa. entre le Kour
etTAras, et le TaUdfy qui boide la
mer Caifnemie , sont les provinoes les
plus mmdioDales de Tempire nisse,
sur les frontidres de la Perse.
Les Gtoglens appellent leur pays
Karthli, et toates lean tribos Thar-
gamoiilani, nomg quails ont adopts
depais Tintrodaction du christianisme
pour se donner nne origine bibllque.
Thargamos , natriarche de 1' Arm-
oie et de toute oette partie de TA-
sie septentrionale, ^tait le petit-ills de
Jc^ihei. II eut huit flls, dent le se-
oood, noaim6 KharthiaSf vint s'^ta-
Mir sur le yersant meridional du Can-
case , et f ut le fondateur de la nation
g^orgienne. ^tienneOrp^lian, arche-
ttoue de Siounie, qui vivait dans le
Xul* siMe , rapporte que ce fils du
patriarche bAtit, an pied du mont
Annaz, une forteresse k laquelle il
doona le nom d'Orveth. Cette ciroon-
staaoe est digne d*£tre not^e , car elle
nous senrira de point de depart pour
riiiitoire de la race des Orpdians,
v^taMes maires du palais des rois
g^rgiens.
Mhketkosy Faln^ des fils de Kartk-
lot, fonda auprtedu confluent de TA-
ragwi et du Kour une ville h laq|uelle
ii donna son nom, et ^ui servit de
capitale k aes sucoesseurs jusqu'en 470.
Plusieurs d'entre eux y furent inhu-
me. II faiit rejeter parmi les contes
penans la tradition gtorgienne selon
laquelle un roi des Knazars , qui avait
fait une irruption en G^rgie et en
Ann6nie « Fan du monde 3300 , aurait
donn^ h son fils Ouobos tens les pri-
Bonniers ramass^ dans la contr^
comprise entre le Kour et i'Araxe,
ft raurait MkAi roi du pays situ^ a
i'est du T^rek.
Des fragments de la chronologic
des rois georgiens se trouvent diss6-
mia^ dans les bistoriens persans et
b^ntins ; Constantin Porphyrog^-
nete dit que tons ces rois se pr6-
tendaient issus de la femme d*Urie ,
enlevte par David. Deguignes, Gnl-
denstsedt et KlafNroth en ont donn6 des
listes incompletes, et qui , cependant,
ne comprennent pas moins de 120
monarques; mais nous ne tenterons
pas de tirer leurs noms obacurs de
roubli ^i les menace. II iraporte pen
de savoir que des Artakj des Datchi^
des Bakour, des Minoan, des Lontar-
sab , des ytManfj ont administre sans
gloire un peuple inciTilise , sous la tu-
telle des empereurs d'Oocident on des
rois de la Perse ; Tattention ne doit se
porter que sur quelques rares sommi-
Us qui apparaissent de loin en loin ,
dans le domainede Thistolre, comme
des oasis dans un desert de sable.
LPS chroniques g6orgiennes dtent
Phamaoaz ou Phamabace comme le
premier qui ait pris le titre de roi de
G^rgie. II vivait environ 800 ans
avant Fere chr^tienne. Mais il n*est
pas question de lul , sous ce nom du
moins, dans la chronologie de Degui-
gnes. Un de ses sucoesseurs , du nom
S'Aderki, divisa ses ^tats en deux
royaumes , celui ^Armazel et celui
de Mtsket. qu'il laissa en mourant h
ses deux flu ; mais h la sixi^me g^n6-
ration, le souverain d'Armazel les
r^unit de nouveau. Un roi, nomm^
Mirvan , fit bdtir la forteresse de Da-
riel, et dever un rempart pour servir
de boulevard k la Gtorgie , contre les
invasions des Alains et des Khaza
res (*) ; cela n*empdcha pas les Alains
(*) Le« Mains. L'antiauil^ confondait
sous 06 nom g^eriqiie pWieun natiou
▼oiiines du Caucase et de U mer Caspienne.
Selon Eustathe, ce mot, dans la langue Jes
Sarmates, signifie montagnanls. Ceux doni
il est id question ont ete la souche des
Oss^tes, dont il sen parle plus bas.
Les Khazares. D'apres M. Lesur, et ge-
neralement d*apris les ecrivains modernes,
ks Khazares seraient d'origine turqiie.
M. Khproth a dtoontr6 victoriensement ,
selon nous , quec'est la une erreur, et que ce
peuple est plut6t d*origine finnoH>uralienne.
Il en est question dans Herodpte et Strabon
sous 1c nom dc Katiars; daus Procope, so«
96
L*UNIV£RS.
daiis le stdde suivaat ( tOO ans arant
J.-C. ) de traverser deux fois le Cau-
case du nord au sud pour se porter
vers rAnn^ie et la M^ie.
A la fin du III* si^e de I'dre chr^
tienne , nous voyons un roi , JtpO'
gour, abolir la couturoe d'immoler des
enfants aux idoles. Get ^vdnemmt fut
le presage d'un grand diangement qui
allait s*op^rer parmi les peuples cau-
casiens , par i'lntroduction du chris-
tianisme. Diocl^tien tenait les r^nes
de rempire, Tiridate r^ait en Ar-
m^nie, et Mirian en Georgie ( 965 k
818 ), lorsqu'une esdave que les cliro-
niques arro^niennes appeuent Ninaf
maiB que les martyroloses ne ddsi*
gnent que par les mots oe saitUe ser-
vante chretienncy vint en G^rgie et
y porta , avec Texemple de toutes lea
vertus , la foi de J6sus-Christ. Le roi
Mirian fit oonstruire h Mtsketha une
chapelle en bois oil fiirent d^os^es de
pr^ieuses reliques. Mirdat , son ]^it>
nls , rempiafa par une ^lise en pierre
la baraoue due h la pi^t^ paramo*
nieuse de son aleul. En 469 , le roi
Waktang-Goureaslan abandonna sa ca*
pitale de Mtsketha pour une nouvelle
villequMi avait fait txltir sur Templa-
cement d'un ancien village, nomm^
Tphilissi ou TpfMskalaky la ville
cnaude, k cause de ses sources d'eau
thermale. Gette ville n'a pas oess^
d'etre la capitale du royaume ; elle se
nomme aujourd*hui Tiilis.
Le Yir sidcle de notre dre vit nat*
tre rislamisme. Gette nouvelle reli*
gion ne fut pas ^trang^re aux roaux
qui vinrent assaillir pendant plusieurs
sidcles les nations caucasiennes. En
684, le kalife Valid envoie dans le
Gaucase une arm^e de 8000 hommes,
sous le commandement de son fr^re
Muslimeh. Gelui-ci s*empare de Der-
bent apr^ une bataille memorable, oik
fut tue un h^ros, dont la m^moire
est chdre aux musulmans : son nom
est Kriklar, On voit encore son mau-
sol^ aux environs de Derbent ; les
Lesghis y viennent en pdierinage.
cclui de Khazires ; dans Moisc de Kliorenp,
el les crrivains posl^rieurs .H !*erc cbrclienne,
soils oelui de Khazart ou Kozars.
De cette ^poque jusqu'^ la fin da
IX*siMe, les Arabea eontinueDtleiin
incursions dans la Gtogk, le Ghir-
van et leDaj^hestan, dont lis fottent
ceux des habitants qui tombent en tear
K»uvoir k embrasser la religloa de
aluRnet En 861 , ils s'emparent de
Tifiis, mats aprtecet Exploit, loir do-
mination commence sa periode de de-
cadence. Ils.avaient cepeocbint envoy-e
Slusieurs colonies dans le CaucMC^ ft,
e nos jours encore « on troove, au
nord de Derbent , une peuplade arabe,
dont Torigine remonte jusqu*^ cette
cokHiisation. Nous arrivons eofin, en
laissant de c6t^ une longoe sMe de
petits souverains sur les noros et Tor-
ore desquels les chroniqueuri et les
historiens ne sont pas meme d'aocord,
k quelques6v6nementsqtti oonoeroest
la race si int^ressante des Orp^iaos.
Les G^rgiens g^missaient d^is
long^temps sous le Jouc des infickles.
Leurs souverains , forc& de suivre les
inspirations d*un commissaire ^tran-
ger, n'avaient plus qu'une ombre d'au*
mti . et n'osaient mtoe prendre fe
tih*e de rois; ils se faisaient appder
Patricks (patriciens), ou mamasa-
TUUiH ( p^res de maison). La nmiuvaise
administration, aui ^tait la cons^-
auence inevitable oe cet ^tat de choses,
onnait naissance a une foule d*abu$,
et , par suite , h la corruption et aux
d^sordres de toute nature. Sur oes
entrefaites, une grande revolution
s*op6n dans un pays de I'Orient,
voisin des Tatares, et qui s'einDd,
dit rarchev^que de Siounie, J^tienne
Orpeiian {*) , jusqn*anx monts Imaos.
A la suite de cette revolution , une
rirtie de la famille r^gnante se voua
^emigration , et, de oontr^s en oon*
tree , eile arriva au pied du Gauease.
Le chef de ces nobles voyageurs ^it
un prince de bonne mine, brave et
courageux. Apprenant la triste posi-
tion des Georgiens, de plus en plus
onprimes par les Persans, il leur fit
omrir ses services , et se mit inoon*
tinent en devoir de les deiivrer de
leurs tyrans. La fortune secondant
(*) Yoyez Ic li^re curicux ct saTanl (k
M. Saint-Martin, Meffioires sur CArfwnit
CIRGASSIE £T 0KOR6IE.
27
son courage, il put tenir tout ce qu^il
a?aitproini8 aux peuples de la Geor-
gie. Cenx-ci , leoonnaissants d'un pa-
reil bienfiiit, d^oon^nt de grands
bonneiirs h ces strangers, et surtout
a leur brave chef. Le roi lui donna ,
entre autres domaines , la forteresse
i'Orpeth, d'o^ lui iot acauis, pour
loi et ses. descendants, le sumom
^Orp^Uan, Cette famille ne cessa de
rendre h la G^rgie des services si-
gnal^; elle fut en possession de four-
nir I la couronne ses plus fermes sou-
tiens, et au peuple ses plus braves
d^eoseurs. Convertis k la foi chr6-
tienoe, les Orp^lians la servirent
toujours avec zele contre les entre-
prises des infld^les, et ^cquirent tant
de gloire , qu'il n'edt tenu mfh eux
deremplaoer sur le trdne les fant6mes
de rois qui s'y sncoMaient obscur6-
ment sous leur protection. Le chef
des Orpelians 6tait de droit sbcUasar,
ou g^D^alissime des armto g6or-
siennes ; il avait en propre , oun% la
forteressf d'Orpeth et autres apana-
ges, douze ^tendards, sous cnacun
aesquds se rangeaient mille combat-
tants. Dans les solennit^ publiques,
il marchait devant le roi , portant une
baguette surmont^ d'une wte de lion.
Son drapeau ^tait rouge , pour le dis-
tio^er de celui du souverain , qui
^tait blanc. A la table royale , il avait
seul le privil^e de manner couch^
sar un lit , et d'etre servi avec des
plats d'areent ; enfin , c*6tait lui qui
couronnait le roi. On con<^it que tant
d'honneurs aient pu exciter Tenvie de
la noblesse g^orgienne et du souve-
rain lui-mdme : il n'y aura plus lieu
d'en douter apr^ les 6v6nements que
oous allons raconter.
En Tannte 1049 de notre ere , sous
le r^e d'un roi nomm^ David , les
Tares Seldioukides flrent une irrup-
tion dans rAsie-Mlneure et les pro-
Wnces caucasiennes. Le roi Davia cut
{)eur et se sauva dans les montagnes;
<nais le sbalasary Libarid Orpelian ,
s'avan^ bravement ^ la rencontre des
inGdMes, suivi seulement d'une poi-
Rn^ de guerriers auxquels se foigni-
rmtquelqucs cxirps am)6niens cf grecs.
II pr^enta la batadle h un ennemi
dont rarn)6e ^it vingt fois plus nom-
breuse que la sienne, se comporta
vaillamment et fbta la victoire sous ses
drapeaux. Get ^v^nement lui acquit tant
de gloire , que les nobles g^rgiens en
conqurent une violente jalousie. Ges
ingnits ne rougirent pas de se liguer
contre leur chef, qu'ils assassin^rent
trattreusement. Geforfaitn'atiendit pas
long-temps son chAtiment : I'arm^ des
Turcs s'etait d6bandde , mais eile n*^-
tait pas d^ruite, et quand elle revint
h la charge, les Chretiens, priv^
d*Orp^lian, n'os^rent lui tenir t^te;
lis furent, pour la plupart, taill^ en
pieces , et la G^orgie tbmba au pou-
voir d^ Seldjoukioes. Tiflis ne fiit pas
plus 6pargn^ que les autres villes , et
les vainqueurs v mirent une garnison,
pendant aue les debris de Tarrode
vaincue allaient cbercher un refuge
dans les hautes roontagnes.
Gependant Libarid avait laisse un
fils , Ivan6 1*'. Get h^ritier de la gfoire
patemelle fut rappel^ par le roi David-
te-Fort , deuxi^me du nom , et rentra
non-seulement en possession de son
patrimoine, mais r^t encore le don
de la forteresse de Lorhi. L'an 1160,
David III , qui avait r^gn6 avec sa-
gesse et moderation , mourut et laissa
un fils en bas dge nomm6 Temna. La
veille de sa mort , il avait appel6 au-
pr^s de lui le conn6table Ivan^ Orpe-
lian III, petit-fils du pr6cMent, et,
en pr^ence de toute sa cour , lui avait
tenu le langaee suivant : « Quand je
« ne serai plus, mon fr^re George
« gouvernera T^tat au nom de son
« neveu , comme un bon et loyal re-
« gent ayant la crainte du Seigneur.
« Quant a vous, Orpelian, je vous
« laisse la tutelle de mon fits ; veitlez
« sur ses jours et son ^ucation , je
< le confie a votre loyaut6 : quand 11
« aura atteint Tdge de majority, vous
ft le ferez reconnattre pour mon I^gi-
« time successeur. » Gela dit , il avait
mis I'enfant entre les bras du shiUa-
sar; et celui-ci avait jure, sur son
6p6e , de remplir fid^lement les inten-
tions du monarquc expirant. II tint
parole; et le jennc Temna apprit, sous
28
L'UI41VERS.
ses ordres, conment W lauait gou^
verner un peuple guerrier dans tin
temps de troubles et de discordes. A
r^pooue de la majority du prince , les
granas du royaume, mm^ntents de
I administration de George ^ vinrent
trouver Orp^lian, le pressant de faire
reconnattre le veritable roi. Ivan^ se
rendit k leurs d^irs ; mais oorome il
arriva que le regent ne voulut pas
rendre la oouronne , il fallut reoourir
aux armes. George se retira k Tiflis,
or* Ivan^ vint I'assi^er; roalbeureu-
s«ment ce g^n^ral, esp^rant que la
reflexion ramenerait Fusurpateur k de
meilleures dispositions ^ laissa trainer
le si^e en longueur. Son adversaire
profita si bien de ce d^i, qu'en peu de
temps Ivan6 se vit abandonn^ par la
majeure partie des seigneurs , que les
promesses fallacieuses du premier atti-
raient aupr^ de lui .Oblige alors de fuir
kscn touTy il se retira^ avec son pupille,
dans la forteresse de Lorhi, et envova
son frere Libarid et ses deux fils ae-
mander du secours aux Atabeks de
Perse et d'Arm^nie. Le r^ent ne
tarda pas k venir mettre le si6ge de-
vant Lorhi , qui! r^uisit k la derni^re
cxtr^mit^. La presence seule du jeune
roi donnait encore quelque force au
parti de ses d^fenseurs , lorsque ce
prince, saisi d'une terreur panique,
d^rta lui-m^me sa propre cause ; et
s'^tant laiss^ couier au pied des rem-
parts, vint se jeter aux ^enoux de
son onde, implorant sa piti^, et ne
demandant que la vie. Le vainqueur,
que nousjpouvons appeler maintenant
George In, la lui accorda, dans Tef-
fusion de sa surprise et de sa ioie j
mais mieux edt valu mille fois la lui
dter ! Le monstre fit crever les yeux
k ce faible enfant , et le r^duisit a cet
6tat abject od Thomme ne peut |)lu8
esp^rer les douceurs de la paterniti§.
La guerre d^rmais devenait sans
objet. Orp^lian consentit done a se
rendre. sous la condition qu'ii ne lui
serait rait aucun mal. George en avait
donn^ sa parole ; et cependant, quand
il eut en son pouvoir celui qui avait
voulu TempMier de r^gner, il ne
craignit plus de se parjurer : il traita
en tout son prisonnier comme il avait
traits son neveu , lui laissant la vie
par derision. Non content de oela, il
attira auprds de lui les parents di-
van^ et les fit tous massacrer^ sans
^ard pour les enfants, les vieiUards
ni les remmes. Enfia, voulant an^an-
tir , s'il 6tait possible, jus^u'an sou*
venir de la race des Orp^bans , il fit
ef&cer leurs noma de toutes les in-
scriptions des ^gUses , ainsi que des
livres historiques.
Sur ces entrefaites, Libarid , frere
du malheureux Ivan^, ignorant oetle
catastrophe , arrivait avec une arm^
de 60,000 hommes. Mais quand il eut
appris ce qui s*6tait pass^ : « Les chr6-
« tiens, dit-il, n'ont psui &it oela,
« pourquoi irais-je les punird^uncnme
« qu'ils n*ont pas oommis? » II se re-
tira done , et oong61ia son arro6e. Ses
deux neveux le suivirent dans Teiil ,
et se rtfuffi^rent. Tun dies TAtabek
Ildigouz, Fautre auords de Vhoit de
Kondsag. Ce ne fut que long-teniDS
aprds, sous le r^e de Tliamar, fiUe
et h^nti^ de Georee III « que Tun
d^eux , du nom de Lmarid , consentit
k rentrer en G6orgie , oili on lui res-
titua la forteresse d'Orpeth. II fut la
source des nouveaux Orp^lians.
Le rdgne de Iliamar forme la j^
riode la plus glorieuse de Tbistoire
g^orgienne. Gette princesse, que
ses peuples reconnaissants appeUiroDt
Mep*hif nom qui ne convieni qu'aox
souverams de 1 autre sexe, efii acquis
une MihriU historique sur un diamp
plus vaste; die edt ^t^ Stouramis a
Babylone, Elisabeth* k Londres, Ca-
therine k St-P^tersbourg. EOe rappela
k son service , ainsi que nous venons
de le dire , les illustres rejetons de la
race des Orp^lians, chassa les Persans
qui avaient envahi ses ^ts , conqutt
tout le pays situ^ entre le Rour et
FAraxe, rendit tributaires plusieurs
{ princes voisins, et ^tendit sa domina-
ion de la mer Caspienne k la mcr
Noire. Son fils, George IV, sumommc
le Lippu (Z/KcAa), second^ par Ivan^
Orp^lian, entreprit plusieurs guerres
heureuses contre les tribus situ^es
hors de la limite m^ridtonale dc la
CIRCASSIE £T G^ORGIE.
219
ti^gie, et les contraignit h embras-
ter le christianisme. Mais, en rann^
1330, les MoBgote. que conduisaient
les gMnm de Teoio^is-KJiaii. en-
imkkt dans T Arm^nie et se porterent
<ie 1^ Ten le Caocase, cpi'ib traver-
s^rent en eotier, aemant paitout, sur
leor paaaage , la d^aatation et la mort.
La Tiefllesse de George IV ftit abreu-
T6e d'amertumes par one suite de mal-
iieon oui ofiBrent neu dlnt^r^ histo-
riqiie. ll iaissa on Ills en has Age, qui
f^ depuis sous le nom de Dayid IV ,
et oonfia sa tute&e k sa soeur Rou-
Mudas. Gette prinoesse s'empara de
la eoonmne en 1234, au dement de
SOD nereu. Sons son rtoie, les Mon-
gols rentrdrent dans listimie cauca-
sieQ , et y cans^rent encore une fois
d^mufantabies ravages. A dater de
cette^poque, jusqu*^ la fondation du
JMwreao rojraume de Perse ( 1600 de
^•-C), rhistoire atorgienne se oon-
lond avec cdle aes oonqu^tes de
Tchinghis-Kban et de Hmour-Lang
(Tamerlan). Seulement on Toit briller,
<i« temps en temps , quelques beaux
^ d*anne8 inspire par le ddsespoir
da vaincus. Des suoote naomentan^
uinent aux peuijles opprim^ le temps
de renirer; mats les oonqutents ne
twdeoi pas h revenir , grossis et mur*
flKmnt comme les vagues de la tem-
K. De 1805 k 1846 , plusieurs com-
m^tent k George VI le sumom
de Dris-ilkutre. £n 1888, Tamerlan
KTage de noaveau la Gto-gie, dont
u enuntee le roi, Bagrat, prisonnier.
Geiui-d feint de se conyerbr k la reli-
. (poa de Mahomet : il gagne ainsi la
<:oDiiance du vainqueur, lui demmde
one anii^s pour rentrer dans ses ^tats
^ 60 appder les habitants au musul-
nanisme : le guerrier mongol donne
{uns Je p^e , et envoie ses soldats k
u mort Furieux ensuite et rugissant
comme un lion , 11 rentre en Georgie ,
% dans trots era^ditions suocessives ,
u d^vaste les villes, les campagnes et
Ks monastdres ; fait oouler des flots
de sang et ne d^tniit pas moins de sept
ojnts Tillages, tandis que George VII,
5*8 ct suocesseur de Bagrat, se cache
dans les gorges les plus reculto du
Caucase. En 1404, Tamerlan aban-
donne enfin oe malheureux pays ;
Georee descend de ses montagnes, re-
prena successivement Tiflis et les prin-
cipales forteresses occupies par les
Persans, et vit encore quelques an-
n6e9 tranquille et heureux, autant
qu'il Douvait T^tre au milieu des rui>
nes de sa patrie, encore fumantes du
sang g^orgien. Dix ann6es aprte,
Alexandre, de la maison de Bagration,
r^nit sous sa domination tons les
pa^ gtorgiens.
De 1500 k 1708. c'est4-dire Jus-
qu'au' n^e de Vakhtang VI ^ le der-
nier roi de la branche principale des
Bagratides, on yoit se suco6der douze
monaraues du nom de David j Louar-
iaby Simon ou George^ tons tribu-
taires de la Perse ^ quelquefois en tot
de rebellion , mais toujours victimes
des dissensions intestines. En 1618,
Cbah- Abbas emm^ne dnq cent mille
G6orgiens des deux sexes, et les dis-
stoine sur le sol de la Perse. Les
royaumes de Kakheth et de Karthli
se forment des debris de oelui de
G6orgie; puis ilsse fondent Tun dans
Tautre , se s^arent de nouveau et se
r^unissent encore. Les jHrovinces, k
oette 6poque, ^taient administrtopar
des gouyemeurs qui prenaient le titre
de Khans, Enfin , ^htang VI , qui
attacha son nom k un code long-temps
v€u€T6y et Tun des plus belli^ueux
souverains du Caucase , vient mter-
rompre, par d*^atantes vertus, cette
longue m)6curit6 , jusqu'^ ce que ,
vaincu lui-m^me et ayant ^puis^ ton-
tes ses ressouroes, il se jette dans les
bras de la Russie, et se retire k Astra-
kan, pour y mourir en paix (*).
DqMiis long-temps le zde religieux
des u^orgiens et rhorreur que leur
insjfirait le joug des mahometans les
avaient oort^ a recherdier secrdte-
ment Tahiance de la Russie. Gette
Suissanoe s'toit d6Ja , depuis le r^gne
'Ivan-Vassilievitdi, ^ndue iusqu au
pied du Caucase , et, dte I'annee 155&,
plusieurs tribus tdierkesses ayaient
(*) Pour quelques Orientalislet, oe prince
u*esl que le cinqui^e dc son nom.
30
L'UMIVERS.
reconnu son vasselMe.' En 1S86, un
roi de Kak^thi se mit sous la protec-
tion du czar Fodor, ettroisans aprte,
unc ambassade g^orgienne vint implo-
rer son secours oontre les Turcs. Get
^v^nement se renou?ela souvent et
inspira aux Russes oette convoitise
des provinces caucasiennes ou'iis ont,
depuis, si largement aatisiaite. En
1722,Fierre-l(^Grand traverse le d^-
fll^ de Derbent , et vient assi^r le
vieux Chamacki« ou des sijyets de son
empire avaient 6t^ Idchement assassi-
ns par les Parsaas. Un traits lui as-
sure la possession des provinces qui
bordent la mer Caspienne; mais auel-
ques anodes aprl^.elles sontrendues
a Nadir-Schah. Ennn, arrive le re^e
d'H^radius , deuxilme du nom. Si la
dignity de Thistoire nous perraettait
de reproduire ici une expression de-
venue proverbiale, nous dirions oue
ce fut le coaimencement de la fin.
H^radius , voulant se soustraire k la
domination des Persans , se constitua
vassal de Catherine II , par le traits
de Gheorgiewsk (24 juiUet 1783).
Douze aimto apres, une arm^ per-
sane vient ravager ses 6tats pour pu-
nir cette desertion; Aga-Mohamed-
Khan s'empare de Tiflis , Tabandonne .
au pillage, met tout ^ £eu et 5 sang ,
et emm^ne vingt mille prisonniers.
Il^radius ne re^oit de la Russie que
d'impuissants secours ; il meurt (1798)
accaol^ de chagrins et de regrets. Son
Gls George n'a pas un regne plus tran-
quille. Constamment- occupy h guer-
royer oontre les montagnards lesghis
et les Persans , il implora la protec-
tion de Ten^iereur Paul F', et mou-
rut avec la certitude qu'il 6tait le
dernier roi de G^orgie. La reine Ma-
rie, sa veuve, voulut d'abord s^opposer
aux pretention's des Russes; on dit
m^me qu'eUe fi tpoiffnarder un olllcier
gup^ieur que le genial TzitzianofT
avail charge de la oooduire k Moscou.
Enfin die se reudit, et son fils David,
ayant peu apr^ ( 1800 ) fait une en-
ti^re cession k TemiKveur Alexandre
de rh^ritage de ses b^res , tous deux
se retir^nt h St-P^iersbourg. A da-
ter de cctte 6poque, la G^rgic de-
vient une province russe; elle n'est
plus du domaine de llustoire.
Les G togiens piofessent k religion
chr^tieiiDe, et affwrtiAPoeDt, pour la
njupart, ^ T^lise graoque orthodoxe.
bans celte natuWf les lioniaies soot
grands et robustes; ils ont rhuneur
guerriere et qoelquefois faroucfae; ik
soot intelligents , hosBitatiers, mais
ignorants et peu afiGmes. Lean fem>
mes ont des traits ddicats et rtoiUen,
le remrd doux , la CaiUe ^anoee et la
peau Uanche. Leur beauts leur a de
tout temps valu une grande eiiSantit.
A r^poque oik les provinces du Ciu-
case n'mjent pas soiwla protection
de la Russie, les G^ori^iennes peu-
piaient les harems de I'Cmeiil , et par-
tageaient avec lesCiraassiennesrhoa-
neur de donner des souroaiaes ii
TAjBie.
Les bdles-lettres ont ^t^ ooltivte
avec quelque succ^ par les G^r-
giens. La traduction de la Bible, qui
remonte au VIII' sidele , est rest^ le
premier et le plus beau monument du
pur idiome de oe peuple. Les rois de
ce pays envoyaient ordinairement quel*
Sues jeunes gens choisis s'instniiR
ans les Bootes d'Ath^nes; aussi les
mythograjphes srecs , les ouvrages de
leurs anciens pnilosophes et ceox des
P^res de I'Eghse , ont-ils €ie traduits
en g6orgien. Pius tard , des rapports
suivis avec les musulmans de TArabie
et de la Perse amenerent dans la litte-
ratureduGaucase une invasion dugoilt
de oes peuples. An XVin* siede, ks
d3masties royales des Moukraniens et
du Kakheth produisirent les littera-
teurs les plus distinguds. La traduc-
tion de la Bible, revue et oompl^t^e par
les soins de trois rois , (iit imprim^
h MosGOU , et plusieurs des roeil-
leurs ouvrages francais du si^e de
Louis XIV obtinrent le mtoe boo-
neur.
La langue g^orgienne, dont la plus
belle ^poque date du regne de Tha-
mar, tient,par la resseroblance d'uae
grande partie de ses mots , aux idio-
mes nersan et arm^nien. Sans ^tre
rude a la prononciation , elle est so-
*:•
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• •'
GIRCASSIE £T GI^ORGIE.
31
note ft abondante en articulations
fortes (*).
La population de la G^orsie , dans
ses limites actuelles, s'^l^e a 400.000
indiridus enTiron, et se compose a'in-
dig^nes , d*Ann6nien8 qui rayent de-
vant la persecution manommne , de
Juifis, oie Rourdes, de Tatares, de
Persans et de quelques Turcomans ,
dans le district de Bortdialo. Les Ar-
m^iens ont, en quelque sorte, le mo-
nopole du commerce , les Gforgiens se
llTrant de pr6f6rence k la culture des
tcrres.
Outre les vignoUes du Kakethi qui
fourntssent h la Gtorgie tout le vin
n^cessaire h la consommation, on cul-
tive , dans les trois provinces de Tan-
den royaume, la garance, le mdrier,
les c6reales et surtout le riz. Le Ra-
rabagh est renomm^ pour sa belle race
de cheraux persans. Les moutons sont
fort nombreux dans toute la contr6e;
les boeufe , les eochons, et g^n^rale-
ment les animaux domestiques de TEu-
rope font partie de ses ricnesses agri-
ooles.
TyUSj que traverse le Rour, ou
C^ntf 9 est encore ia ville la plus im-
portante de la Giorgio modernc. ( Voy.
hpl, 4. ) Prise et saccag^ pJusieurs
fois, notamment en 1796, elle a ^t^
recoostruite avec eodt. Elle se divise
eu ville vieille , sale et tortueuse , et
en ville neuve , dont les rues n*ont
pas moins de 60 pieds de largeur; les
roaisoDS y sont construites en oriques,
et sunnontto par de grandes terrasses
sur lesquelles les femmes aiment h se
rassembier dans les belles soirees d*6te.
On y Yoit les dames dgto causer entre
elles et prendre des rafrafchissements,
tandis que les jeunes filles dansent au
son de la guitare ou du tambour de
basque. (Yoy. pi. 11.)
On remarque k Xiflis de belles places,
(*) Nqus ckvpns h Tobligeance de M. Bros-
«t, tiiteur de flusiciin ornngu At philo-
logie gtergienfie, la eomoiuiuoBlioii de quel-
(pM» «•!« int^wtiwanlaB aur k tauigue et U
UlteraUire de la G^rgie.
Vorez aiuii les divers fragments inseres
dais le Journal asiatique, et surtout les
»«anis iaiu de M. KTaproth.
de vastes caravans^rails , des h6pi-
taux, une cathMrale et un jmrain
botanimie. 6a population, oompos^
dlndimies , d'Arm^iens, de Russes ,
de Juin et de Persans, peuts'dever a
90,000 ames. Le diof^raniiorbus y a
fait plusieurs fOis d'assez grands ra-
vages.
L'abondanee des marchandises de
tottte nature et de tout pays, la va-
ri^ des costumes orientaux , le pas-
sage des chameaux et des cnevaux,
donnent k Tiflis uu aspect pittoresque
et anim^, que 4es dangers ne peu-
vent se lasser d'admirer.
Mtsketha^ dont I'origine se perd
dans les faraditionsbibliques,e6taujour-
d'hui presque enti^rement niinee , k
I'exception de la cathMrale et de la
forteresse; sa population ne d^passe
pas 1000 k laoo ames.
Gori est sitn6kW werstes N.-O. de
Tiflis, sur la Pchimd^ k peu de dis-
tance du oonfiuent'de cette rivi^ et
du Rour ; cet emplacement rappelle
fancienne Gor9€nna, Cest la seconde
ville du royaume , sous le rapport de
la population et du commerce ; on y
voit huit ^ises , dont une appartient
au rit catlwlique.
Souramy dans le Rarthli, est re-
marquaUe par la beauts du pays en-
vironnant. Le diftteau est situ^ sur
une montagne ^evte , d*pik la vue pent
plonger dans les ^troites vall^ qui
conduisent en Im^r^thi. (Voy pi, 10. )
A une werste de Souram , un« groupe
de cabanes , entour^es de peupliers ,
sert k la quarantaine des voyageurs
qui viennent ^^AkaUxike.
Rmdssp est im petit village de Rar-
tbli , que nous mentionnons ^ur si-
gnaler une ^ise d'une ardutecture
elegante, dont Torigine remoRte au
moyen Age. (Voy. le n" J de la pi, 1.)
EUsabetpoly capitate du kbanat de
Gandjab , est d^ue de son ancienne
prosperity, bien qu'elle compte encore
12,000 habitants ; les vastes solitudes
aui rentourent sont remarquables par
es ruines immenses etdMnt^ressantes
antiquit^s. De ce nombre est la oolonne
de ChamhhoTy dont on ipore k la
fois Torigine et Tusage primitif. EHe
3!l
L*UNIVERS.
est construite en briques rouges, po-
w6e» par assises r^li^res; sa nau-
teur est d^environ 200 pieds. On y
remarque une galerie exterieure, k la-
quelle conduit un escaiier en spirale.
La G^orgie ottomane a M enlevte
demidrement k la Turquie ; nous men-
tionnerons , dans oette proyinoe, ^A-
kaUMM, ville iniportante et trds-peu-
pl^, oi!^ Ton trouve une biblioth^e,
un coll<^e, et la belle mosqute d'Ab-
med, construite sur le mod^e de
Sainte-Sopbie de Constantinople.
Dans l^cienne Albanie, qui forme
aujourd'hui le Daghestan meridional,
on remarque Derbent, dont nous
avons d6ia parl6 : sa populajtion est de
8000 hwitants; Tancienne Kouba ^
que I'insalubrite de son climat fait
abandonner peu h peu par tous ses ba-
bitants; la nouveue Aouba, situ^ h
peu de distance ; Koura. oik reside le
Khamoutai-Khanf sorte de prince
brigand, qui rea>it un tribut de la
Russie ; Yarti, (m demeure le kadi du
Tabass^ran , autre chef d*une popula-
tion f<§roce, qui n'est soumise k la
Russie que nominalement . et dont le
cbef est m^me oensionne par oette
S'ssance ; Barcniifet Tarkou servent
lement de repaires 1^ des Khaau
ou TchamkaU^q^t la Russie est obli-
gee de stipendier pour prtenrer ses
sujets de leur brigandage. Gbacun de
ces petits souyerains pent mettre de
6 k 8000 bommes sur pied. Voil^, k
notre ayis , la v^table position so-
ciale qui sert de transition entre le
yoleur de grand chemin et le conqu^-
rant k la mani^re d* Alexandre. Ces
nations appartiennent, par la naissance
et la lawie, aux Tatares, aux Kal-
mouks et aux Cosaques.
Dans le Chiryan, proyinoe situ6e
au Slid du J>aghe8tan , les usages se
rapprocbent beauooup des moeurs per-
sanes. Les harems musulmans y sont
aliments par des esdayescircassiennes
etde jeunes et belles bayaderes tatares.
Les yilles les plus remarquables sont
le yieux et le nouyeau CkamackL Bc^
kou et SaUan. Le yieux ChamacKi est
une yille o6ldi>re dans la m^moire des
peuples Caucasians ; elle fut jadis Ten-
trep6t du commerce de TOrient. Ses
mines Imposantes , ses yastes can-
vans^rails, ses palais, et rheureox
choix de sa position , attestent son an-
cienne opulence , ainsi que Findustrie
2ui distinguait ses 100,000 liabitanti.
^^truite et d^peupl6e par les Turcs,
les Mongols et les Russes, die fixa,
en 1830, Tattention du f;te6ralTer-
moloff , qui s^oocupa s^neusement ^
relever jes mines. Cette kMiable en-
treprise a 616 couronn^ d'un pidn
suocte , et tout pr^sajze au yieux Cha-
macki une tre nouyelle de prospdrite.
Nous ayons d^a parl6 de Rasou au
sujet des fiiuneux puits de naphte. Son
port est le plus tr6quent6 de la mer
Caspienne. La pdche des nboques se
fait sur une He situ6e k quelques lieues
seulement; elle donne chaque annee
de 5 ^ 6000 indiyidus. La soie, le
safran, le fiz, lagaranceet le sesame
constituent les ressouroes agricoles
des environs de Rakou, et gaa^nk-
ment du Chinran.
Salian est une petite yille qui tire
de la p^e toute sa richesse : die est
situ6e dans un angle que forment deux
bras du Kour. Au-ddlt de ce fleuve ,
en allant au S.-E., commence le d^
sert de Moghan.
Sur la route militaire , qui de Tiflis
mene k Mosdok, on trouye, ao-dela
de Mtsketha , Jnanour, petit bomig
de 3 li 800 habitants , ou les yoya-
geurs font quarantaine avant d*entrer
en Gtoraie: Kasbeky ou r^ide le
chef des Ossetes (*); Z>arte[.forteresw
oui donne son nom au d^^; VlaS*
kawhasy d'origine moderae, r^-
dence du gouveraeur de la province
du Caucase ; Mosdok, ville conuner-
(ante, et forte station militaire; et,
enfin, plusieurs villages et quelques
stanUza de Cosaques.
PATS DBS MOHTAOHBS.
Nous comprendrons d*abord, dans
oette section , deux peuples qui ont
entre eux les ptas gnods rapports,
(*) La plandie sepii^me est ime ^^^
moot Kasoeek, ou Mqlnwari, ' '^
rodier de ProDiiihfo
• •• •
• «
• • •
• • • • *
• • • •
.!. .*•••
• •• •
» • '
CIRCASSI£ ET G^ORGIE.
33
ies Abates et les Teherkesses. Ghacun
d'eax , vivant en aristocratie mUitaire,
oa platdt diastotn^ en r^publiques
fi^odales , pr^sente le curieux spectacle
d*une nation qui a brav^ les oonqu6'
rants et traverse les siMes, en con-
servant la physionomie de T^tat social
prinnitif, les moeurs beUiqueuses, le
ro^pris de la propri6t6 , le penchant
au vol , les relations du maltre avec
ses esdaves, et, sur toutes choses,
le respect le plus piofond pour les
droits de rhospitalife.
ABAS£S.-<LV6(Miesediv]se en deux
r^ons, la grande et la petite. La
Grande- Ahasie forme le liuoral de la
mer Iloire, en remontant vers le nord-
ouest, depuis la limite de la Mingr^lie
josqu*^ la ville d* Anapa , enlev^ der-
ni^rement aux Turcs. La Petite- Abasie
est comprise dans les r^ons sup^
rieures entre la rivi^e Malka et leKou-
ban , ^ Tendroit oh ces deux courants
d^eau prennent leur source. La pre-
miere nit fr^ent^e , d^ la plus haute
antiquity, par les navigateurs ^ecs, et,
eus tard , par les Romains. La ^taient
s Zykhes ( Zux<><) ) les AchxenSj les
Ker&tes, les Sanniges, et ouelques
autres qui se sont fondus dans les
deia groupes oui font I'objet de cet
article. Peut-^tre les Gran^-Abases
soDt-ils les descendants des Egyptiens
oui vinrent en Golchide sous la con-
dulte de S^sostris : c*est du moins ce
qu*on pourrait arguer de leur consti-
tution physique. lis ont la t^te oom-
prim6e , le bas du visage court et le
nez saiUant.
Les G6orffiens donnent aux Abases
le nom dl*Joka$si; plusieurs c^ogra-
phes appellent leur pays AMMme^
et m&ne AvogaH: eux-m^mes, enfin,
prennent le nom o^Ahzni.
Ge peuple est fort anden dans le
Caucase. ll fiit autrefois soumis tour
i tour aux Lazes, aux G6orgiens, aux
Romains, aux Mongols et aux Per-
sans, ou plutdt il fit altemativement,
aTec cbacune de ces nations, ces traits
hvpocrites que le plus &ible reqoit du
mus fort , avec la condition tacite de
Ks fouler aux pieds ^ la premiere occa-
sion. L'an 560 , sous I'empereur Jus-
tinien, les Abases furent oonvertis au
christianisme. Les Turcs ont essay^
maintesfois depuis de les amener k leur
culte. II en est r^ult^ qu'ils ne sont
ni Chretiens, ni mahom^s, leur re-
ligion se bomant k qudques pratiques
superstitieuses , au milieu desquelles
on retrouTC les traces imp^aites qu*y
ont laiss^es les missionnaires de r£-
vangile et ceux du Koran. Du temps
du Bas-£mpire , le z^e pieux des che-
valiers de la chr6tiente et I'ardeur
entreprenante des peuples commer-
cants attirerent \ la fois chez eux des
Francs et des G6nois , dont ils ont
conserve le souvenir. lis montrent
encore de vieilles ^ises 6levto par
les premiers , et meme des ^pto et
autres armes qui appartiennent k \&-
poque des croisades. II est possible
aussi que ces objets aient it/k apport^
chez eux par les Arabes, qui les avaient
enlev^ aux prisonniers Chretiens.
Quant aux G6nois, leur nom, l^^re-
ment alt^r^. s'est conserve dans cette
contree , ou les habitants aiment ^
parler des B^enaoiSy mot qui se rap-
proche trop de Titalien genooese pour
qu'on pulsse sy m^prendre.
Les Abases viventdans un ^tat per-
p6tuel d'hostilit^ avec leurs voisins
les Russes de Soufffauk-Kali et les
Min^liens; mais its n'ont pas d'en-
nemis plus redoutables que le peuple
avec lequel pr^cisdment ils sembie-
raient devoir le plus sympathiser , les
Teherkesses. Ceux-ci , qui les traquent
dans les for^ts comme des b^tes fauves,
ont pris sur eux un si grand ascen-
dant moral , que TAbase se consid^
gresque comme I'esclave n^ du Tcher-
esse.
La Russie entretient une croisite
sur les cdtes abasiennes; ce qui n'em-
p^e pas ces incorrigibles forbans
de se iisauer en mer sur des bateaux
longs etptats , semblables aux camerm
des anciens Goths , et de courir sur
les navires marchands que le cabne a
surpris dans les parages de cette mer
tomours inhospitali^re.
Les femmes abases sont fort belles;
elles allaient autrefois alimenter les
march^ d* Anapa et de Tiflis , 06 .let
3* Uvraison, ( Circassib et Georgib. )
8
31
L'UNIVEHS.
Turcs ct les Persaiis vcnaient appro-
visionner leurs s6rails. On se fait a&
ih^ralement en Europe une fausse ia6e
sur cette rente des femmes de TOrient.
La philosophic s'en indigne, sans doute,
inais rhumanit6 pent s'en consoler.
En effet , les Jeunes Abases, comme
les Tcberkesses et les Mingr^liennes,
mdnent dans leurs montagnes une vie
fort triste et fort pr^caire; aussi,
toute leur ambition se borne-t-elle h
^tre^ vendues et conduites dans un
harem, oH elles auront un 6poux,
des esclaves et des bijoux , ot elles
godteront enfin mille douceurs qu'elles
ne pcuvent esp^r dans leur sauvage
patrie. Nous n*en dirons pas autant
pour ce oui conceme la vente des per-
sonnes ae Tautre sexe : ici Fexcuse
serait d'autant nioins admissible, que
ce commerce abominable fut long-
temps acoompagn^ de la mutilation,
Ceux des jeunes Abases que Ton ne
soumettait pas k une atroce opera-
tion, passaientguelquefois en £^pte,
01^ ils etaient mcorpor^ dans la re^
doutable milice des Mamelucks. L'un
d*eux, nomm^ Barkok, est devenu
sultan en 1382.
Ici, un p^re a le droit de vendre
ses enfants ; le fils aln^ a la mtoe
prerogative sur ses fr^res et soeurs
quana le p^re n'existe plus. Les Tcber-
kesses et les Abases oontinuent k faire
ce trafic de chair humaine quand ils
en trouvent Foocasion ; mais les Russes
y mettent des obstacles qui ont fait
singuli^rement rench6rir le prhc des
esclaves. Autrefois, un enfanf se ven-
dait de 8 ^ 4 6cu8, une femme 12 ecus,
un homme d'un age mdr 15 ecus, et
une jeune fille de treize k dix-huit ans
20 &m.
Les hommes de cette nation sont
extreraement paresseux , et par conse-
quent trds-pauvres ; ils pref&rent la
vie de brigands h ceile d'agriculteurs.
Ils eievent; pourtant des chevaux d'une
race tres-estimee , des moutons cham-
(ouky doiit les grosses queues sont
pour eux un mcts friand , des ch^vres
ct aurtout des abeilles.
L'Abasie sunerieure, qui confine a
«l*cmbourhure clu Kouban , faisait par-
tie de Tancienne Sindique, ou region
des Sindes. On croit memereoonnattre
Templacemcnt du partus sindicitt de
Scylax, dans la modeme Soudjouk-
kali J k 50 werstes d' Anapa, en re-
descendant la cdte du nord au sad-est.
Jnapa , jadis residence d'un padia ,
ville de 3000 ames , Saueffouk-kaie ,
que nous venons de nommer, Che-
Ufijihy PcMa, FouXariy PUzunda (Pan
cien PytMus)^ Sokoum-Kalah, H
quelques autres villages dont les rades
servent d'asile aux croiseurs russes sur
une cdte infestee par la piraterie, sont
les seuls points du littoral qui meritent
d'etre siguaies.
TcHEaKESSfis.— Les Tcherkeues^
ainsi nommes de deux mots tataresqui,
litteralement, equivalent ^ coi97e«rs(fe
chemin, c'est-k-dire brigands , se don-
nent k eux-m^mes le nom &Jdi^M*
Nous les appelons k tort Gircassiens.
Leurs voisins, les Ossetes, les nomment
KhascLkhs ; et il est a remarquer gue la
Kasakhia des historiens bjzantins se
trouve sur leur territoire : ce sont les
Ktusoghi des chroniques russes du
Xl'siecle. D'un autre cdte, plosieurs
tribus cosaques , au-del5 du Kouban ,
portent le nom de Tcberkesses ; et il
existe en Crimee, a peu de distance
de Sebastopol , dans la peninsule heia-
cieotique, des mines oonnues sous ce-
lui de Tcherkesskerman J ou forte-
resse des Tcberkesses. Sur la droite
de la bale de sebastopol , on trouve
egalement, entre les rivieres Ratcba
et Belbek , une plaine des Tcberkesses
( Tcherkess'touz)^ dont la partie su-
perieure est appeiee Kabardah. Or,
les princes circassiens, qui se disent
issus d'une famille arabe, s*intituleat
princes de la Kabardahy et c'est le
nom qu'ils donnent k la oontree sou-
mise a leur autorite. Toutes ces cir-
constances indiquent clairementla part
que les Tcberkesses peuvent s'attri-
buer dans Torigine oe la nation des
Cosaques, dont la physionomie est
aujoiml*hui, k la verite , parfaitement
caracterisee , mais qui n*etait, dans le
principe, qu*un melange confus de di-
vers peuples.
Les Tcberkesses appartiennent aui
GIRGASSI£ £T GM;0RG1R.
8S
Zykhes des auteurs grecs. lU vivent
dans Jes hautei> montagnes d'oii s'^
chappent le Tdrek , la Malka et le Kou-
ban , et s^^teodent jusqu'au rivage de
la mer Noire, en se confondant a?ec
les Abases. Le T^ek forme dans leur
|Kiy]5 deux divisioDS : la grande et la
petite Kabardah; et, d*apr^ oe que
Dous venons de dire, ce nom a ^t^ ap-
port^ par les priiiGes dont il est , de
nos jours, le titre edn^ique.
On sait peu de cnose sur Thistoire
de cette nation. Soumise d*abord aux
G togiens , eUe s'en s^para au XVI*
siecle • pour passer sous la domination
des khans ae Crini6e, et plus tard
sous celle de la Russie. Le czar Iwan
Vassilievitch^pousa, en 1560, Marie,
princesse tcberkesse, fille de Tern-
rcuk.
En 1700, le khan de Grim^voulut
tenter de faire rentrer les Tcherkesses
sous sa domination. II se mit done en
marche ^ la t^te d*une arm^e formi-
dable, passa le Kouban, d^t les re-
belles en plusieurs rencontres , et les
oontraignit k se retirer dans les soli-
tudes les plus ^vto de leurs roonta-
gnes. Retranch^ denize des rem-
narts de glaoe , et des pics inaccessi-
Ues aux Tainqueurs, les Tcberkesses
espdr^rent d*abord que cdte arm^
abandonnerait unpays ou elle ne trou*
vait plus d^ennemis a oombattre; mais
il n'en fut pas ainsi , et le kban s*ob-
stina h les tenir bloqu^, certain de
les r^duire par la famine. En eCfet ,
apr^ avoir epuis^ leurs provisions de
toute nature, les assises furent con-
traints ^ abandonner leur retraite. On
les vit alors descendre , d'un air sup-
f pliant, et conduire aux Tatares , dans
*espoir d'obtenir un pardon peu m^-
rite, plusieurs jeunes et belies filles
qu'ils livrdrent k la brutality de la
sokiatesque^ Ini ofi&ant, en outre,
tout ce qui leur rest^t de liqueurs
fortes et enivrantes. I^ soidats tata-
res ne s'^taient jamais trouv^ k pa-
reille ffite ; la voix de leurs chefs tut
tmpuissante k les contenir, et leur
canopdevint, en quelques heures, un
th^re de d^rdre et d'ivresse. La
Quitseule mit un terme k cette orgie,
dont les auteui^ s*endormirent gorges
de vin et de debouche. C'^tait Xt mo-
ment que les vaincus attendatent pour
prendre une ^datante revandie : un
corps nombreux qui s'^tait embusqu^
a peu de distance, vint inopin^ment
fondre sur les Tatares, portant de
tons cot^ I'inoendie et le fer,^or-
geant , sans piti^, tout ee qui s'offrait
a lui. Le lendemain, Vmxubb assi^-
geante n'existait plus , et son chef se
sauvait dans la st(»pe, de touie la
Vitesse de son chevaf.
Les Tcberkesses se divisent en trois
classes : les princes , ou Pcheh^ les
nobles, ou Ousdetij et les vassaux,
ou paysans.
Les princes sont de v^ritables pala-
dins , bujours bard^ de fer depuis
le lever du soleil jusqu*^ son coucher ,
mont^ sur de magnlfiques cbevaux ,
et vivant dans up ^tat porp^tuel d^hos-
tilit^ avec leurs voistns, soit pour
leur faire une guerre ouverte , soit
pour les voler ei les j^lkar. lis se di-
sent descendus d'une famille arabe ,
qui devait elle-m^me son origine a
Sem, Gls de Mo6. Leur §6n^logie se
retrouve assez dairement depuis la
fln du XTV* si^ede F^re chr6tienne.
Les Ouauien, panni lesquels on
compte des vassaux afifranchis , ser-
vent d^toyers aux premiers. Quoique
nobles, ils ne peuvent s*allier k la
dasse pr^c^dente ; et quand Fun d*eux .
a eu l^udace de squire la fille d'un
I)rinoe, une prompte fuite peut seule
e soustraire k la vengeance r^serv^
k un pareil affront : la mort ! Mais il
est inutile d*ajouter que, dans le cas
contraire , (fest-^-dire iorsqu*un Pcheh
a daisn^ jeter les yeux sur la fille d'un
Ouz£n, cdui-d s'en tient fort ho-
nor^, mtoe quand fl n'en r6nilte pos
une alliance l^itime; et, a son tour,
il en agit de mtoe avec les filles de
son vassal. Ge dernier n'a rien qui lui
appartienne : sa femme, sa fille, ses
bestiaux, ses provisions, tout jusqu'j^
sa vie est a la disposition des princes
et des nobles. Lui-mdme il fait partie
de leur patrimoine, et peut Itre trans-
mis par heritage. Hamtudlement les
vassaux foumissent k leurt seigneurs
36
L'UNIVERS.
un tribut qui considte en une oeriaine
quantity de foin, de ctMks , en tdtes
ae bestiauxt et en plusiean journ^es
de traTail. Mais il est oonaolant de
pouToir ajouter que si les Tassaux
n'ont rien, absolument rien qui ne
soit la propria des nobles , en re-
vanche us ont le droit de demander k
ceiix-ci les T^tements et les meubles
tfui sont It leur oonvenanoe. Les re-
niser serait une chose , sinon odiease,
du moins ridicule ; aussi Toit-on quel-
quefois un Quzden rentrer chez lui
Convert de haillons , apr^ en 6tre sorti
ridbement v^\ c'est qu'alors il a
renoontr^ un paysan auquel il a plu
de lui proposer un 6diange d'babits.
Nous croyons d'ailleurs devoir en-
trer dans quelques details plus eten-
dus sur la physionomie et les mceurs
de oe peuple.
Religioh. — Le duristianisme fot
imports jadis dans les montagnes de
la Circassie. Des crois^s , prisonniers
de guerre ) vendus sans doute k des
princes de la Gtorgie et enlev6s k
oeux-ci par les Tcherkesses, jet^nt
chez eux les premiers germes de la
foi dir^tienne, second^s en cela par
les colonies ^^oises qui, dans le
moyen ^e, vinrent s'^tablir sur les
odtes de la mer Noire. Plus tard. les
relations commerciales des Tcherkes-
ses avec les Turcs favoriserent Tintro-
duction de Tislamisme. II est rdsult^
de oe melange de deux cultes avec
Tancienne idcHAtrie de cette nation ,
des croyances religieuses qui ofifrent
la rtonion de tous Yes c({ract^res sans
en avoir aucunqui lui soit particulier:
les Tcherkesses sont Chretiens en ce
qu'ils conservent le symbole de la
croix , qu'ils oonnaissent une mbre de
Dieu, qu'ils invoquent des ap6tres,
et qu'ils cdldlirent un sacrifice assez
seinblable 1^ celui de la messe ; lis sont
mahom^ns paroe qu'ils avouent la
mission du faux proph^te, mi'ils di-
sent leurs pridres en arabe, le visage
toum6 du cdt6 de la Meoque, qu'ils
ont horreur de la chair de pore et sui-
vent d'autres prtontes de nslamisme ;
enfin, lis sont uiolfltres, puisquMls
odorent une d^esse des abeines , Me-
riisay un dieu Seoi$Mi, qui oom-
mande aux vagues et aux temndtes ,
un protecteur des forgerons, TW^se,
et autres divinit^s auxmielles ils of-
frent des animaux en boiocauste.
On retrouve encore chez eux quel-
ques-unes des croix qu'y avaient plan-
tees les missionnaires cfar^ens. Ils
ne savent plus, il est vrai, oe que
veut dire oe signe de la r^deniption,
mais les Turcs leur ont donne, k oe
smet, une version qu'ils aiment k r€-
p^ter sans avoir I'air d'y ajouter une
entidre anoyance. Sdon cette fousse
interprtotion, le pn^h^ des dura-
tions ^tait sur le point de p^rir dans
un bain , victime d^un lAche assassinat,
lor^'un anse vint se montrer k la
f entire, et rinvita k se sauver par
cette ouverture; mais le prophete
porta sa main au front pour inmquer
que sa t^ ^tait trop grosse etne pas-
serait jamais par la. L'ange ayantr^
pliqu^ qu'il se trompait, le prophete
porta suooessivement la mam a son
ventre et k sestpaules, afin de con-
vaincre I'envoy^ celeste de I'impossi-
bilit^ oili il ^tait de passer par une ou-
verture aussi ttroite.
Les rites du sacrifice tdierikesse
sont todement un m^nge des usa-
ges de Tantiquit^ paienne et des mys-
teres du chnstiamsme. Au sein d'une
sombre fortt, dans une vaste solitude,
une croix plants sur un tronc d'ai^
bre G0up6 mdique I'autel o& le sacri-
fice va se consommer. Les voisins se
rassemblent k I'heure indiqu6e, trat-
nant la victime avec eux : c'est une
eh^vre , un mouton ou un bocuf , se-
lon la solenni^ du jour. Le plus an-
cien de I'assembl^ se d6couvte la tdte,
rev6t un manteau de feutre, prononce
quelques paroles mystiques, puis 0
approche un flambeau du com de Ta-
nimal pour lui brAler les noils a Ten-
droit oil il faut frapper. Un esdave
s'avanoe alors, arme d'un couteau, et
le sacrifice s'accomplit. La t#te de la
victime est suspendue It un arfore
voisin , c'est la part r^serv6e k Dieu.
La peau ajppartient k I'oflldant, el
la chair est destinte k un festin au-
quel tDus les assistants peuvent pren*
CIRCASSIE ET G^ORGIE.
37
dre part. Le prftre re^t emuite des
mains de son esdaye une coupe de
boitsta et un moroeau de pain. II les
4^e vers le del, en adrasant une
pri^ k Dieu, pour qu'il daigne b^nir
cette offrande. Gela fait, il passe la
coupe et le pain au plus ancien des
assistants, et ripkte cette ofo^monie
autant de fois qu'il y a de Tieillards
dans rassembl6e.
Lbgiblatioh. — Ge peuple ne fait
pas de lois; des usages oonsacrte par
te temps lui tiennent lieu de code.
Ln nobles se r^unissent k dlTcrses
6poques pour d^battre les afGures d'un
intmt gtotol; ces assemble, pr6-
sidte par le membre le plus ancien ,
se nomment Pok.
Dans cfaaoue tribu , les andens for-
ment un trmunal devant leqnel Tien-
nent comparaftre tons les individus
mmpqomA d'un d^it quelconque. La
pdne de mort tfest pas en usage; les
d^timents graves sont Famende, Texil
et Tesdavage. Le crime r^put6 le plus
atrooe aux yenx des Tcherkesses est
le parjure. Cdui oni a engag6 sa foi ,
s'ilTient k la Tioler, est rendu aux
TurcB. Le meurtrier est condamn^ k
payer, k titre d'amende, neuf t£tes
de gros b^tail , et k compter aux pa-
rent de la victime une forte indem-
nity. Le Toleur pris en flagrant ddit
est condamn^ , en punition de sa mal-
adresse* k une forte amende et & la
restitution de sept fois la Taleur de
robiet d^b6.
Mgburs nationalxs. — Les Tcher-
kesses ont^ de singuli^res idte sur
la propria. Le toI et le brigandage
sont diez eux des titres de gloire
dont le sonrenir se transmet comme
an pr^eux d^t aux gdntotions les
plus recolto. S'il natt un fils li un
prince on noble, Ten&nt est secr^te-
ment enlev^ par un voisin qui, le len-
demain , se nit connattre et se con-
stitue j4takk, c'est-^-dire ptee nour-
ricier. II donne tons ses soins au jeune
enfont, lui apprend, quand I'lige le
permet, le metier des armes, les exer-
ciees dievaleresattes , et surtout Tart
de voler arec adresse. Enfb, torsque
r^i^e a donn^ des prenres manifostes
t
de sa boime SducaUon, on, en d'au-
tres termes, quand il a void son ata-
lik, cdui-d le rend au pte, et con-
serve dans la famille les droits de pa-
rents. Quand un prince va a la guerre,
il est sum de tous ses vassaux; mais
lorsqu'il va voler, il n'est accompagn^
que de ses procbes et de ses intimes
amis.
Les Tcherkesses ne s(mt soumis
'en apparenoe k la Russie; ils sont,
e fiedt, ind^pendants ; plusieurs de
leurs princes sont m^me salari^i par
cette puissance, sous la condition
gu'ils renonoeront k leurs incursions
ostiles. Du reste, il existe parmi eux,
comme chez les Abases , et gto^rale-
ment chez toutes les nations belli-
queuses du Gaucase, un usi^e qui
rappeUe les moeurs patriarcales; c'est
celui de Phospitalite des Konak. H
suffit k un stranger de savoir le nom
d'un prince, d'un noUe , d'un person-
nage queksonque, etde declarer qu'il se
met sous sa protection , pour £tre res-
pect^etbien traits. Le protecteur prend
aiors le titre de Konak; il est oblige,
sous peined'infamie, etmdmede dilti-
ments coipords, de d^endre sonprot^
o^deradmettreaufoverderhospitaliti^,
de le nourrir, de le raire accompagner
dans ses voyages, de le chMr ennn,
et de te trailer comme son enfont.
Cette admirable institution sufiOrait
seule pour r^ncilier ces peuples bar-
bares avec rhumanit^. Il est vrai
qu'ils y ajoutent quelques formes qui
ne sont pas d^anm de tout ridicule ;
c'est ainsi qu'un ^trang^er aoquiert
forc6ment le droit de famille lorsqu'il
a pu presser de sa bouche le sdn nu
de la matteesse de la maison. II est
alors cens^ avoir suc^ son lait , et il
acquiert un pere, une m^ et des
frares^ tous obliges de le dtfendre et
de le bien traiter.
Avant que la Russie eAt entidre-
ment r6uni la r^on caucasienne k
ses possessions, les jeunes filles tcher-
kesses ^taient fort recherdito par
les pourvqyeuQB de harems. Les pnn-
oes avaient plus particuli^rement le
privU^ de ee commerce ; ils cakni-
hient Teur fortune sur le nombre des
L'UNIVERS.
?assales dont ils pou?aient disposer.
Les unes tolent oondaites h Anapa
et h Poti, d'oili on les ftisait passer h
Constantinople ou en tmie\ les au-
tres toient vendues sur divers marches
de la Georgia et de rArmteie, et em*
barqu6es, assez commnnteent sur
te merCuplenne oosur TAraze, pour
^tre transportdes dans la Perse. H. A.
Jaubert, qui voyaseait en Arm^ie
en f 806, dit avoir renconM trois
jfunes filles tcfaerkesses, que Ton con-
duisait h un march^ d'esdaves. Elles
etaient oouvertes de haillons k peine
sufllsants pour les garantir de rtnd^
mence de m salson, avaient I'air souf*
frant, et paraissaientimpatientesd'ar-
river k leur destination. Quand dies
voulaient se reposer Tune d'elles se
r^ignait, h tour de rdle, h servir d*o-
reiuer h ses eompagnes. Nous ne sau-
rions trop rMter , d'ailleurs ce que
nous avons oit d^a, qn'il seralt ab-
surde de s'apitover sur le sort de ces
{eunes filles, pufaque le bonheor ^tant
relatif, le leur oonsiste principalement
dans ce qui nous paraft digne de notre
piti6. Peu oonsider6es dans leur pays,
mal noorries et mal v^tues, tout leur
espoir <tait d*6tre un jour vendues et
inarito, pour godter les ddiees du
86rail.
Gependant , 11 est juste d'ljouter
que fes femmes tdieriiesses ne sont
point aussi jalousement survdllto que
celles de la plupart des peuples cauca-
siens. Les jeunes gens aes deux sexes
dansent et jouent ensemble; les fem-
mes marines re^ivent mtoe les 6tran-
gers. Mais fl est un homme, un seul
omme dont la prince est pour une
Circasdenne un objetde scancule, c*est
son maril
lIlAaiAGBS. — Lorsqu^un Tcher-
kesse a jet^ les yeux sur unejeune fille
pour en faire sa femme, il dierche.
roccasion de lui d^larer son amour,
et il est rare qu'il n'j parvienne pas
en peu de temps , attendu que les deux
sexes, dnsi que nous ravons dit,
ont la fadlit6 de communiquer entre
eux. Les pr^liminaires sont Id les
m^mes ^e dans FEurope dvlliste,
c'es^^•dire qiie si les voeux du sou-
pirant sont agrM , on lui rtoood avec
modestie de s'adr^ser a lafamille, oe
3ui ^ivaut, dans toutes les lau^es
u monde, k Taveu positif d'une Hd-
procit6 de sentiments. Un ami se
charge alors de porter la demande
aux parents, et quand ceux-d oot
donne leur consentement, les diefii
des deux families s'aboudMot pour
stipulef le montant de la dot. luiis ,
tandis que obex nous c'est la future
qui apporte un douaire, en Gircassie
^est r^poux qui est grev^ de cettc
charge. S'll amurtient h la premise
dasse de sa tribu , 11 ofifire a sou
beau-pte une cotte de mailles . ricbe
present de 2 ^ 3000 piastres; dans le
cas oontraire, il donne des obevaux,
des esdaves, des annes, des ^toffes
OQ des troupeaux.
Une fois les conventions aoo^tto,
le fiitur ^ux, ud6 de ses amis, en-
Idve sa flane6e, autre o6rtoonietd-
lement oppose jk nos id^es, qu*dle
semble en toe la critique. La jenne
fille est oonduite chei un voisin , ou
ses parents, arm^ de bAtons, vien-
nenc bientdt la r^damer. Une seoonde
troupe, ^gdement pourvue de bitons,
fiut mine de vouloir dtfendre cette
pr^deuse conqu^te , et les deux partis
se livrent un smiubicre de combat qui
cease aussitdt qu'on voit parattre V&
poux tenant sa fianete par la main.
Son pfliii crie vietdre, rautre pardt
se r&igner; tons se rendent k la de-
meure du man , et les r^ouissances
commenoent aussitdt; mds ce peuple
bizarre , mdange incomprehensible de
bonnes et de mauvaises audita , porte
^ un td deitr^ le scrupme de la chas-
tet^, que , dnez bii , ce serait uoe bonte
pour deux ^ux de se montrer en-
semble en public. Cest le mari qui ,
en chevalier galant, abandonne la
place, et pendant que tons les convi^s
se livrent aux plaisirs de la danse et a
ceux de la tabic, il se cache dans les
bois jusqu'^ la nuit dose. Ses amis
viennent alora le diercher pour le con-
duire kh chambre nuptide. II en sort
au point du jour, regagne sa retraitr
et continue ce man^ pendant deux
tnois. Au bout de ce temps il ^vitc
GIRGASSIE ET GlfcORGIE.
onoore , autant que possible , de se ren*
oontrer publiquement avec sa femme,
et souvent, plut6t que de se laisser
sarprendre avec elle , il lui arriTe de
sauter nar la fen^tre. Loraqu'il lui
oaftun nls , il manifeste le moiie sen-
timeut de honte et va de nouTeau se
cacher dans les bois : « Chague fois,
• dit M. Thaitbout de Manguy (^} ,
« oue je demandals k mon Gircassien
« acs nouvellesde sa femme ou de ses
« enfants, il me r^pondait d'un air
« oonfus et embarrass^. » Si Tenfant
est du sexe €6niinin , la m^ lui domie
un nom et se cbarge de son Education ;
81 c*e8t un gar^n , la nation Tadopte,
et un voisin ou un parent vient le r^
damer. Cest VAtalik, dont nous
avoDs d^ja parM.
Rbpas.— Les Tcherkessesobservent
ri^oareusemant Tusage sineulier de
boire toujours trois verres de Ta liqueur
qoi leur est ofTerte, et oela quelle que
soit la dimension du Tase et la qua-
lit^ du liquide.
Quand un stranger s'assied h la ta-
ble deFbospitalft^, sous la hutte d'un
Tcherkesse, le chef de la famille se
tient req^ectueusement aupr^ de lui
et De ^iteDd place que quand il a fini.
Les ftaimes mangent h part dans une
cbambre s^par^. A^rte le repas des
membres de la famiUe, les amis et
les Tassaux Tiennent ^ leur tour se
noorrir des d^ris du festin , les ser-
▼itears leur sucoMent, et lorsqu'il
s'agit d'un repas extraordinaire, il
n'est pas rare de voir tout un yillage
y prendre part.
Les plats sent servis h Tusage turc
sur one petite table ronde : ils consis-
tent en viandes rdties • en venaisons ,
en poissons sal^ , miel, racines, fruits
saovages, et suilout en gomi, ou
millet bouilli avec du sel , qu'ils ap-
pellant plus comrauntoerttjMssto, mot
qui sans doute leur a €t^ apporu par
fes G6nois. Les convives se servent
de leurs doigts en guise de fonrchette ,
mais Ils connaissent I'usage des cuil-
lers en bois. Leur boisson habituelle
est le bovza; c'est une eau dans la-
quelle on a fait fermenter de la fa-
(•) Voyage PI! CircasMC. iSi8.
rine de millet, lis aiment le vin et
Teau-de-vie. Lorsqae les convives d'un
rang Bm6 veulent donner k un des
assistants des preuves d'attachemenl
et de complaisance, ils cholsissent un
bon moroeau et le lui iettent| comme
on ferait h un cbien ; il est rare que
I'homme ainsi favoris6 ne receive pas
cette offrande avec antant a'adr^se
et de recomutoanoe que le fidtte qua-
druple.
lis aiment passionntoent le tabac«
qu'ils fument dans des pipes de 4 a
i pieds de longueur.
MAIiADIBS, nSDECXHS. — La so-
bri^t^ est une des vertus du Tcher-
kesse. Quand il va en expWtion , il
porteun petit sac pleindefMBstoy sua-
pendu k m selle ae sa monture, et ,
pendant plusieurs jours , eette seule
nourriture peut lui suffire.
Une grandelong^vit^ n'est pas chose
rare dans les montagnes de la Circas-
sie; peu de maladies y sont connues,
mais deux fl^ux y exeroent fr^em-
ment d'^uvantables ravages : la
p^te et la petite v6role. Le premier
est la consequence des relations de ce
At avec les Turcs, et quoique ne
..ageant ins les idte de fatalisme
__ ces demiers, les Tcherkesses n'op-
posent aucun obstacle k I'envahisse-
ment de la fatale contagion, leur igno-
rance les portant k juger inutiles tour
tes precautions et tous rem^des. Quant
k la petite v6role , lis ont commence ,
d<^pui8 quelques annte , Il prendre de
sages mesures pcmr s'en preserver.
Lorsque les premiers svmptdmes de
cette maladie viennent a se manifes-
ter chez un Tchwkesse, on se hAte
de le transporter dans une diambre
s^par^, o(k ne sont admises, pour le
soigner, que les seules personnes qui
d^ja ont tU atteintes du mime mal.
Les parents du malade cesseni, en
signe de deuil, de vaquer k leurs tra-
vaux habituels; ils laissent crottre
leurs ongles , ne changent plus de vl-
tements et ne font ancune ablution.
Get 6tat de privation dure autant que
le danger, mais quand il est j^ass^, le
deuil se termine par des rejouissances
et un sacrifice solennel
40
L*UMIVERS.
Parmi les m^dedns , queiqiies-uns
•ont TUrcs, les autres Gternens ou
TdMrkesses; mais tous, indUtiDCte-
ment, donnentdaiis Texevcioe de leur
profession des preuves inoontestables
d'une e»M8sive ignorance ou d'une
impartinente fouroerie: les Tores font
usage prindpalement d*amulettes et
de prims; leurs confreres emploient
la saignfe , quelques simples , du miel ,
de la cire ou du beurre. On ne sera
pas surpris d'aiUeurs d'apnrendre que
le traitement des plates oiez ce peu-
ple euerrier se pratique avec suoc^ ;
id l^exp^enoe a su|^e^ k la sdenoe.
Les mededns se servent uniquement,
dans ces droonstanoes , de substances
v^tales; mais ils s'unissent aux pa-
rents et aux amis du bless^ pour se
livrerau plus bizarre cdr6momal. D*a-
bord ils lont enlever soi^eusement
tootes les armes qui tapissaient les
mors de sa chambre; puis ils d^po-
sent au pied de son lit un soc , un
marteau et un bassin plein d'eau avec
un oeuf dedans. Cbacun des visiteurs
prend le marteau en entrant et frappe
trois coups sur le soc ; il trempe en-
suite ses doigts dans Teau , et en as-
perse le patient, en priant Dieu delui
rendre la sante : c^est encore ]k un
souYenir bien caract^ris^ d'une c^6-
monie chr^enne. Les assistants pas-
sent la soir^ h iouer de divers instru-
ments et k r^p^ter des chansons guer-
ri^res composes en I'honneur du ma-
lade , afin , peut-^tre , de soutenir son
courage et ae ranimer ses forces. Les
jeunes filles dansent des rondes, et les
▼idllards r^tent des fables jusqu'au
moment oik le souper est servi. Apnte
le rroas, les jeuxoruyants, les aan-
ses et les chansons reoonmiencent de
plus belle et se prolongent pendant
tonte la nuit.
Si le Uou^ gu^rit , on offre un sa-
crifice k Dieu ; s'il meurt « les femmes
oommenoent k pousser des oris aflreux
qui attirent tout le yoisinage.
FuifSRAii«LBS. — Le corp0 du d^-
fimt, lav^ avec soin, ras^ et rev^tu
d*habitsneu£s9 est plac6 sur une natte.
Aupr^ de lui sont d^poA^ ses habits
les plus riches; ses armes ferment
un trophte au seuil de la porte. Les
femmes ne cessentde crier, tandis que
leshommessefra(^Mentsilendeusenient
la poitrine. Le sacrifice expiatoire oom*
mence, et , sdon la qualm et les res-
sources de la veuve ou de la mto du
d^font, 11 consiste k immder unboeof,
un mouton ou une ch^vre; les chairs
de la victime servent ensuite au repas
des funtoilles. Yingt-quatre heures
apr^ ledMs, le corps est tranfflDort^
k sa demito demeure. Les vieiuards
marchenten t^du cortege, lesieu-
nes gens portent la bi^re ou marcneot
k ses cdt6s , les feounes suivent et
font paraltre une grande douleur, en
s'arrachant les cheveux ou se d^i*
rant les chairs. Quand la tombe a
re(u son d^pdt , les parents y d^
sent du oomi et du Soma : c'est un
repas ofuert aux passants pour hono-
rer la m^moire du d^funt. La c^
monie se termine par un tir di la dble,
ets enfin , par le r^t d*un jpoeme ,
sorte d'oraison fun^re en rhonseur
du mort; apr^ quoi , les assistants
se retirent en silence. Mais, rano^e
suivante, k pareil jour, les parents et
les amis de la personne dmd^e vien-
nent c^l^rer sur son tombeau Tan-
niversaire de ce triste 6v^ement. Les
sacrifices expiatoires, les festins, les
courses , les luttes et tons les jeux
chevaleresques, pratique dans cette
ciroonstance, rappellent les mfleun
de hi Grtoe, et on croit, quand on
en 6coute le r6dt, lire un passage
d'Homte ou de Virgile. Si la £iniille
est riche, die ofi&« aux vainqueurs
des ^ffes , des armes , des cbmux
des esdaves, et qadquefds wim
une cotte de mailles.
GOSTUMB BI PHTSIOKOIIIS. —x
Le Tcberkesse ceint habitueUonentt
Susieurs brasses de cordes autour
) ses reins, pour ^tre touioors pret
k attacber les bestiaux ou les stran-
gers qui pourraient lui tomber sous Ja
mam. hes nobles, dans leur costume
de guerre, portent un casque siur-
montS d'une pointe, une cotte de
maiUes , des ^antdets et des brassaras,
le tout en acier poli. L'arc et le car-
quois , le fusil et les pistolets , le sa-
CIRCASSIE £T GEORGIE.
4i
bre, le poi^nard et le pito, sorte de
fouet termini par une plaque de cuir,
oompUtoitleiiraceoutKineiit, aor le-
quel ila jettent qoel^efoia iiii man-
teau h lonffs poila (voir p/. 8, n* 8).
Ha tirent lecora oottea de maiUes da
pays des Abases, ou de la tribu des
KoMtchi, dans le Dagbestan. Lear
habit dyfl oonsiste en on petit bonnet
cHiat^ ayant la forme d'une cooronne
fenoMfe, en on sartoot trds-oourt, sar
la poitrine duquel 11 y a, de chaqae
cdte , une ran^ de petites poches k
cartooches, et en boues rouges k ta-
lon haut. Les princes et les Ouzden
seuis out le privilege de combattre k
cheral.
Gbez cette nation , les hommes ont
Fair martial et fler, la taiUe ^anode
et s?dte, les dieveux et les yeux noirs,
et le teint bran. On connatt la repu-
tation de beauts des Circassiennes ;
die est peut-^tre un pen exagdr^e,
mais ce n^estpas la fiiuie de la nature,
qui leur a donn6 des yeux lai^es
et briilants, des traits gen^ralement
beaux et rt^liers, et un profil grec,
Se couronnent les lignes suaves d*un
mt gradeux: id encore, ce sont
les moeurs qu'il &ut en accuser. On
neut dire, en efifet, que les jeunes
circassiennes font tons leurs efforts
pour s'enlaidir. D*abord, dies por-
tent, dte Tflge de la puberty, des ca-
misoles de peau tenement serr6e8, que
leur respiration en est gto^. Ce v£-
tement moommode leurcou?re la poi-
trine et le buste jusqu'aux hancbes,
et il a pour but d^empflcber le d^TC-
Iqipement de la gorge . car il serait
bonteux k une jeune fille de ressem-
bler k une femme marite. C'est k 1*6-
poux seul qu'il est rdserv^ d'enlever
ces fScbeuses entraTes : arm^ du
quMHal (*), son premier soin, dans
fa nuit des noces , est de couper la
camisole de sa fiancee, non sans dan-
ger de la blesser.
Une taille mince et droite 6tant,
dans les idte de ce peuple, une des
plus indispensables conditions de la
beauts, les jeunes filles mangent f<Ht
(*) Poignard a fil tnmchant.
peu, de crainte d'engraisser. Elles se
lei^oent les ongies en rouge , et cher-
cbent enfinii eomcer leurs mrmes sous
un amas de voiles et de bijoux, la
plupart d'assez mauvais goAt Elles se
coiffent de ce ridicule bonnet, en
forme de mdon, dont se servent les
bommes dans le costume dvil; dies
portent aussi des culottes, et font
usage de souliers mont^ sur de peti-
tes planchettes carries, de bi bauteur
d*un demi-pied.
Les Tcherkesses font surtout con-
sister leur luxe dans le nombre et la
propret^ de leurs armes. A peine le-
v^, lis les examinent, les nettoient,
renouvellent les amorces des armes a
feu , et les suspendent sy m^triquement
aux murs de la pito principale de
l^u* cabane. Quant au poignard , ils ne
s'en dessaisissent jamais , et mtoe ils
s*doi^ent rarement de cbez eux , pour
une simple promenade, sans avoir une
paire de pistolets k la ceinture, un
sabre au c6t6 , et un fusil sur T^paule.
Ihdustrib. — L'industrie de cette
nation est des plus limitdes ; die pos-
sklepourtant de nombreux haras d'une
tr^-bdle race de chevaux dont die
trouve un abondant ddx>ucb6 sur le
march^ de Tiflis. On lvalue k 20,000 le
nombre des dievaux circassiens qui se
vendent annuellement sur cette place.
La g^n^ogie des meilleures races est
oonnue dans toute la contr6e ; die
influe singuli^ement sur le nrix des
individus. La noblesse d'un cneval est
indiqu^ par une marque particuliere
jk sa race ; il porte sur une cuisse cette
honorable cicatrice- Mais on a constats,
depuis qudques ann^es , plus d*un
exemple de supercberie k cet ^ard ;
inconvenient qui etait jadis inconnu ,
car alors les Tcherkesses y mettaient
la plus grande bonne foi, et Pallas
assure m^me ^*une fraude de ce
genre etait punie de mort. lis ddvent
encore des abeilles , des moutons , des
chdvres, des bulBQes et des bceufs.
Jtuelques cabanes en dales d'osier,
uites d*argile , recouvertes en paille,
et dispos^es quadrangulairement avec
une cour commune dans le centre ,
forment leurs villages.
42
L'UNIVERS.
Langoe8."-Nous placerons lei une
observation qui, bien qu'elle ooncerne
plus particulierement lesTcherkesses^
peut s*appliquer a la |)lupartde8 nations
caucasiennes. Leurs idiomes, aussi va-
ri^ que leurs noms, ont un trait carac-
t^ristique oommun, c*e8t qu'ils sont
plus difficiles h prononoer qu*aucune
autre langue du monde (*). lis offrent
a la fois des syllabes fortes et guttura-
les, desdiphtnonguesmodifito a Tin-
fini , des ciaquements et un gazoniUe-
ment que I'^iture ne saurait traduire
et que la pens^ ne peut comparer k
rien. Et ce{|endant Tart de la mdlodie
n'y est pas inoonnu. Les Tcherkesses
ont notamment plusieurs airs natio-
naux qui portent Tenipreinte de leur
caractere oelliqueux. II en est un
quMls affectionnent surtout et dont
lis entonnent le refrain, Orirachay
dans toutes les ciroonstances un pen
importantes.
Priv^s des moindres notions de
r^riture, ils conservent leurs tra-
ditions historiques dans des chansons
que le temps a tellementd^atur^es,
qu'on ne saurait plus y reconnaltre les
v^ritables traditions 'auxquelles elles
doivent leur origine.
Les tribus tcherkesses sont tr^-
nombreuses. La plus importante est
celle des Abazeks, chez laqudle on
trouve quelques esdares etoeserteurs
russes. Ind^pendamment de leurs pro-
Sres sujets , les princes de la Kaoar*
ah tiennent sous leur domination
plusieurs peuplades d*origine tatare,
mais dont la race s'est embellie par
le m^ange avec le sang gdorgien et
tcherkesse. Ces tribus sont stabiles k
la source du Kouban et des rividres les
plus voisines de ce fleuve; ce sont les
Bassians et les Karaich<a j ou Tcher-
kesses noirs. Gette demiere nation a
des moeurs infiniment plus douoes que
celles des peuplades voisines; elle pro>
fesse rislamisme , se livre h Tagricul*
ture et 5 T^ucation des chevaux;
die cultive le tabac , Torge et le bl^ ,
fait de rexcellentebiere, et commerce
{•) Voy. Pallas , OnldeiKtacdt , Rt*iiiPfg«,
Potnolii, Haliii, T. Kla|»i*ot)i. rir.
avantageusement avec les Nogaia, 1<«
Souanes et les Abases.
Les autres peuples montacnards doot
il nous reste k parler sont les Lughi,
les Ossite* et les Tchetchetues ; vm
se divisent en une infinite de tribus
qai, pour la plupart, prennentleor
nom oe la montagne ou de la rivi^
la plus Toisine.
Lbbghi. — Le pays comfHris entre
le KoT-sou , r AJazan et la mer Gas-
pienne , ordinairement appd^, sur nos
cartes, Daghestan septentrional, est
oonnu 6«Jement des Tatares sous le
nom de Lesghistan. Strabon et Plu-
tarque ont parl6 des Lughiy qu'ils
appellent L^hes. On aurait tort de
Toir une senle nation sous cette
dtoomination, qui n*estque le mot
g^nMque par lequel on d^igne di-
Terses peupladts, voisines Tune de
I'autre, gut se ressemblent par des
mcenrs roroces «t des habitudes de
tnigandage, mais qui d'aiUeursne par-
lent pas la mtoe langue et ne formeat
nuUement un corps nomogene.
Ces peuples paraissent etre un ro^
lange de diverses nations europ^eoaes
et asiatiques ; ils sontcruels, pillards
et audacieux. On les Toit quelquefois
se basarderjusqu'aux environs de Ti-
flis pour y enlever les bestiaux et les
paysans : ils descendent de leurs moo-
tagnes ordinairement vers le pnn-
temps, et se r^pandent dans les cam-
pagnes , oi^ leur prince est un fl^au
)lus danffereux que les ravages des
oups et aes ti^pres. Embusques dans
es mines des vieilles chapelles,ou der-
riere dVpais taillis , ils attendent leur
Eroie avec une pm^vtonce que la
lira, la soif, ni rinterop6rie de lair
ne sauraient dompter . Quand ils ontfait
un priaonnier, lis le garrottent avec
les cordes qui leur servent de cem*
ture, le tratnent pr^cipitamment a leur
suite , trayersent les locality les plus
dpres, les buissons ^ineux, les n-
vii^reseties pr^pices, jusqu'^ oequ Us
raient mis en sOret^. Ld, ib font
pr^venir sa famille et lui demaodent
une ranoon souvent exorbitante : a de*
faut de paiement , le malheurcux pn-
sonnier est soumis, pendant du an-
CIRGASSIE ET Gl^ORGIE.
43
nte , a toutes les peines du plus dur
esdavage. Cest ainsi que, depuis plu-
sieurs mdea , oes brigands se Jouent
de la Tie et de la libera des hommes.
Les Rosses ont Mt contre eux quel-
ques expMitioiis heureuses; mais con-
traries par la nature du pays, oD leurs
ennemis trouvent des retraites inac-
oessibles , ils ont dd capituler avec eux,
et accorder des subsides annuels a leurs
princes. Le khan des Avars y la plus
odliqueuse des tribus lesghines , revolt
un traitement de 40,0(M) francs. Ge
prince reside d Khoim-DzeM; il pent
armer de 8 li 10,000 hommes. Les
Ktui-koumouks n'en peuvent mettre
sar pied que 6000 environ , mais ce
sent les ennemis les plus adiam^ des
Russes. Les Lesghi du bourg de Kau-
bUcki sont renomm^ pour la fabrica-
tion des cottes de roailles en acier : on
les connaft dans tout le Caucase sous
le nom persan de dbereb-kerdn ( fa-
bricants de cuirasses). A BarcMu^x^"
side un khan qui prend le titre d oug-
mei : sa tribu esf celle des KaUaM;
elle anne de 7 & 8000 hommes. A
j4kxmchaj les habitants sont plus in-
dustrieux et moins fi^roces que leurs
▼oisins; ils sont pasteurs, et fabri-
2uent un drap assez estfm^ dans le
laucase.
OssBTES. — L'an 633 ayant J.-C,
lesScythestraverserentleCaucase sous
les ordres de Mady^; ilsconduisirent,
ainsi que nous Tapprend Diodore de
Sidle, une colonic ae M^es en Sarma-
tie. Gstte colonic, stabile dans la par-
tie centrale du Caucase, au nord de
la Gtorgie, a donn^ naissance aux
peuples appel^s Alaln$ et Azes dans le
moyen dge; aujourd'hui, c*est la na-
tion qui prend elle-mdme le nom dV-
roUy que les Gtorgiens connaissent
sous ceiui d^Ossi, et nous sous celui
d* Ostites. Leurs mceurs se rappro-
chent trop de celles des montagnards
lesghi pour que nous puissions nous
^tendre davantage h leur sujet. Nous
ajouterons tout^ois quMls sont d'une
taille ^ev6e, qu'ils ont Fair martial
et imposant, et que leur costume,
d^eag^ du pesant accoutrement des
Tcnerkesscs , est cciui qui convient le
(dus a un peuple montagnard : de
grands bas oe cuir h jarretidres , un
surtout court et d^age, un bonnet a
bourrelet , une ceinture garnie de pis-
tolets et de poignards, un fusil en
bandoulidre , et un bAton fourchu pour
poser le fusil et tirer plus juste , en
sont les principales panics.
TcHBTCHBifSES. — Lcstribus appe-
Ito MUzefjeghi par les Gaucasiens , et
TchetchenseswiT les Russes , sont ^ta-
blies dans le (jaucase depuis une anti-
quite fort recul^. Parmi elles , la na-
tion des Inffouches se fait remarquer
par quelques coutumes bizarres , celle ,
par exemple, de marier les morts , as-
sociant ainsi les jeunes gens des deux
sexes quMls supposent devoir se conve-
nir dans le ciei. lis stipulent une dot,
que paie, en cette curconstance , le
p^ du fianc^; car c^est un usage
g^n^ral dans ces oont^^s que le mari
apporte une dot h son beau-pere.
Les In^onches sont paiens et fort
superstitieux ; ils attriouent a leurs
actions la plus grande influence sur
la destine des morts de leur famille.
Lorsqu^un creancier veut ^tre pay^ de
son ddi)iteur, il le menace d'aller tuer
un chien sur le tombeau de ses morts,
ce qui r^duirait ceux-ci h un affreux
d^sespoir. Voleurs comme tons leurs
voisins, ils portent h un plus haut
degr^ que ceux-ci Tavidit^ et la sc^l^-
ratesse. On en a vu s'^fforcer de plaire
a de jeunes filles, les s^duire et les
enlever ensuite pour les vendre h des
strangers ; des fds d^natur^ ont porte
J)lus a*une fois une main sacrilege sur
curs vieux peres, et, entratnant de
vive force oes vieillards d^rm^, ils
les ont vendus pour quelques mesures
de sel ou quelques aunes de drap.
Ce peuple se distingue encore ae ses
voisins par Temploi du bouclier.
Les Tchetchenses ont ^t^ tour a
tour Chretiens et musulmans. Aujour-
d'hui, leur religion paratt n'^tre plus
qu'un th^isme entremSle d'abus gros-
siers et de superstition. Ce sont des
brigands plus Jraroces et plus d^termi-
n^ encore que les Lesghi eux m^mes.
Quand lis ne peuvent gardcr un pri-
sonnier, ils nc le renvoient pas sans>
44
L'UNIVERS.
lui avoir coup6 le nez ou les oreittes.
II y a peu d^annte qu'ils entevaieiit
fir^quemment des smets ruases ; maia
oea aocidenta aont devenoa beauooup
plua iar€8 depuis que le gouTemement
a oern^ lea retraites de oea d6termin^
voleura par dea poetea de Gosaquea.
E^GION DES 8TBPPB8.
Les TurctmoMj lea NogtOSy lea
Kmanauks et lea Kalmauks d<mt il
va £tre id question n'habitent pas ex*
cluaivement les steppea de la r^on
caucasienne ; et oependant noua ayona
eu des motifs suffisants pour les com-
prendre dans cette catdgorie, puisque
ces nations ^talent toutes , dans Tori-
gine , nomades et habitantes dea plai-
nes, qu*elles le sont encore pour la
plupart , et que les autres v aont dia-
a^mindes en partie, de aorte ou'il ae-
rait impossiUe de les rattadber aux
groupes des peuples monta^rda.
Les Turcomans sont d'ongine tur-
que (*) ; leur langue a mdme oonsenr^
une puret§ remarquable. Ua descen-
dent de ces Turcomans qui. soumia
jadis aux Kalmouka sur les bords du
Jaik , refus^nt d'en suivreles hordes.
Devenus sujets de la Russia , ilsfurent
transportds dans la steppe du Kislar.
lis errent avec leurs troupeaux dana
cette immense plaine sablonneuse qui
s'^tend depuis le T^rek et la Kouroa
jusqu^a la mer Caspienne. A Tiraitation
dea anciens Scathes Hamaxobiens,
lis portent leurs tentes sur des cha-
riots, et se font suivre par leurs
grands troupeaux de cheyaux, de cha-
meaux et de bestiaux de toute espto.
Leur nourriture consiste en ^lande
de monton, en lait aigri, et en une
petite quantity de farine de gruau ou'ils
ach^tentdes Russes. Le manque d*eau
potable est un fl6au dont lis ^prou-
vent souvent toute la rigueur. A cela
pr^, leur sort est assez heureux; ila
ne paient aucune imposition et ne sont
tenus qu'au aervice militaire et k une
(*) Ne confondez pat, ainii oa'on le hit
habitiieneiiieiit, les Tores a^ec let Tatares
dont Torigine est mongole.
contribution de chevaux de cbatse.
Les Turcomans aont bien fiits, vifs,
brayea, courageux, maia paresseuii
comme toua lea peuplea nomades. H y
a dans leur manim de se y^tir un
luxe qui ne manque paa d^^oner les
voyageurs qui descendant des monta-
gnes du Caucase. Us portent des sur-
touts en ^tofifes cramoisies ou diver-
sement bariolto, et galonnds d'or,
nou^ autour des reins par une ricfae
oeinture, des bonnets ronds gamis
de peaux d'agneaux noirs . et des hot-
tines jaunes a*une forme ASfantt. Les
caiquoia et les area dont us se ser-
yent sont particuli^rement om& (voy.
pi. 8, n"" 5)C*). Enfin, ila montent
de beaux dieyaux qu*ils manient ayee
une sraoe remarquable. Le costume
dea femmes est aussi riche, nudsil est
moinspittoresque; un bonnetsemblable
i^celui dea Tcherkeaaes, unechaussure
exhauss^ sur deux plandiettes, et,
le plus souyent, un anneau plao6 dans
les narines, aont des omements qui
nous senddent de mauyaia aodt.
Kislar f viUe de neuf mule ames »
aur la riye gauche du T6rek , est la re-
sidence de plusieurs riches n^godants
arm^iens qui y ootfedt bAtir demi^
rement une assez bdle ^ise.
(**) Nous avons rinni dans les troit phn-
ches numiros 8 , 9 et xa , les cosUupes lei
plus remmrquables de la region cancasienDe;
en Toid Texplication :
Planche S. — N^ x. Gircassienne de condi-
tion noble , coifTi^e dn bonnet k oootodiw ,
et mont^ sur une diaussiire qd tient le
milieu entre le sooqne et rfebMse. N<» «•
Noble drcassien, en habit dyil; hom^
ouati ea forme de mdon, justaucorps de
drap, portant des podies k cartooches sur
U poitrine. N* 3. Noble drcassien en babit
de guerre. N" 4« Circassien k dieral, oou-
vert du hourka. Son fusil est envdoppe
d'une foumire. N*^ 5. Turcoman.
Planche 9. — N* 1. Jeune fiUe ciitsj-
sienne. N« a. Abase. N» 3. Jeune Mingre-
Uenne. No 4. Prince im^rediien. N* 5.
gioraen.
chariot d'osier.
Plameke la. — N« i. DM»e g«»^J-
N* a. Bayadere tatare du Chirvan. N» 3.
Lesgbi en habit de guerre. N« 4. Ingousdw.
N« 5. Princesse nungrelienne.
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CIRGASSIE ET GEORGIE.
45
GioraiewMk sur le Podkoumok est
le ohef-iieu de la proTinoe du Caucase ;
(fesi une petite Tille fortifi^ , rtoi-
H^ et agreable. Constantino^^sk et
Stawropol offrent peu d'lDt^rdt.
Le Bech'Taw, ou les Onq numta-
gne$f donne son Dom k la partie la
iilufl septentrionale da Caucase dans
e bassin de la Kouma. Le Metchoukaj
qui fiiit partie des montagnes adjacen-
tes , a auelque ofl^brit^ par le voisi-
oage d une source d'eau thermale.
Cest aux environs du Bech-Taw
qu'on ^l^e les meilleurs chevaux
tdierkesses et abases.
A soixante werstes au nord de G^r-
dewsk, on voit, sur les bords de la
Kouma , les mines de Madjari. Gette
viUe, d'origine tatare, paralt avoir
eu de rimportance au &IV* si^e,
sous les pnnces de la horde dorie;
elle servit long-temps de lieu de pas-
sage et d*entrep6t aux marchanoises
que, de la mer Caspienne, on trans-
Sortait h celle d'Azow. Sa destruction
ate du XV* siMe. Au temps oi!k
Gmdin , Guldenstaedt et Pallas visitd-
rent oes ruines • elles offiraient encore
an grand intmt; mais les Tatares et
les rfogais, qui demeurent aux envi-
rons, y sont venus depuis cfaercber
les mmriaux ntossaires \ la con-
struction de leurs villages. Au mo-
ment ojli nous toivons , elles ont sans
doute entidrensent disparu (voir le
fond de la pL 6 ).
Les l^€as habitent dans la steppe
aux environs de Stawropol, mais on
les retrouve dans le Dagnestan, dans
la steppe du Volga , dans la Tauride
et en Orim^.
Le nom de ce peuple est cdui de son
Jiremief chef. Peu d'ann6es aprte la
ondation de I'einpire du Kaptcfaak ,
les lieutenants de Tchinghis-khan , n'6-
tant plus contenus par la prince de
ce grand homme, pensdrent que le
moment ^it venu de seoouer la do-
minaUon de son successeur, et ils
commMmc^rent, en cons^ence, cette
(Euvre impolitigue de d^membrement
qui flnit par Iivrer I'empire entier k
fa merci oe ses ennemts. Un de ces
lieuteiuaits, nomm6 Nogta, avait re^u
Tordre de soumettre h la domination
tatare les peuples qui habitaient au
nord-est de la mer Caspienne entre
le Jaik et le Tobol ; mais, ayant ac-
compli heurensement cette mission . 11
devint ambitieux. et cr^ un ^tat m-
d^pendant dont il se oonstitua le chef
(1259-1371 de J.-C). La politique de
Tempereur Michel PaI6ologue seconda
Suissamment cette dtfection ; ce prince
onna m^me une de ses filles a No-
r". Les Tatares qui avaient suivi
fortune de ce rebdle ^pous^ent
des fenunes de race turmie et furent
la soucbe du peuple dont il est ici ques-
tion. Les iMogais passant en Eu-
rope au commencement du XVIir
siecle.
Le teint basan^, les yeux brid^ et
le nez ^pat6 des NogtOs attestent en-
core la part qu'ils ont h r^clamer de la
soudie monsole, bien qu'on s*aooorde
assez g6n6ralement k les dasser parmi
les peuples turcs.
C^est une nation essentieUement no-
made, voyageant, h la mani^ des
Scythes-Hamaxobiens , sur des cha-
riots converts de tentes en feutre et
tratn^ par des boeufs. Cest une veri-
table hutte portative que les Russes
appellent KwUka, les Tatares Karat-
cnouj et les Kalmouks Gkbr. Lorsque
la caravane se met en mardie, les
hommes se tiennent k cheval auprte
des chariots ; ils poussent devant eux
de grands troupeaux de chevaux et
de boeufs, se servant, pour ramener
les individus ^chapp^ , d'une sorte de
lance fort longue, termin^e par un
noeud coolant quMls jettent adroite-
ment autour du oou ae Tanimal. Les
femmes et les enfants vivent sur les
chariots et en descendent rarement.
Ind^pendamment du MbUka, les
Nogais ont de grandes huttes , ^gale-
ment en treillis et recouvertes en feu-
tre, qu*ils ploient et chargentsur des
chameaux ou des boeufe. Arrive au
lieu d^ign^ pour le campement,
quelques heures leur sufBsent pour
G^ployer tout ce bagage et former un
oMf mot que Ton pourrait traduire
par village provisoire. La calotte du
mbUka s*ouvre h volenti pour don*
40
L'UiNlVERS.
ner du jour et de Fair h rint^rieur.
Ces iioinades sc servcnt encore, pour
le transport des marchandises, de
grands cnariots a quatre roues, tir^
par des boeufe, et connus sous le
noni d'arba ou de maggiari( Toy.
la pi, 5 ).
On assure qu'on trouve chez les TSo-
ga'is cette infirmity qu*H6rodote dit
avoir pbserv6e parmi les Scythes : les
^nareens ou ejf Amines sont des hom-
ines que rdge et les fatigues de la vie
nomade seniblent pr6cipiter dans la
classc des individus de Tautrd sexe.
lis en prennent alors les liabits et les
occupations, et ressemblent en tout
^ de vieilles femmes iiuberbes et trem-
blotantes. Les Nogais leur donnent le
nom de Kos,
L'habillement de ces Tatares res-
semble h cdui des Turcomans, mais
il est moins ricbe. Les hommes se
rasent la tite , et les femmes mar-
chent sur deux planchettes adapt^es ^
ieurs souliers , en guise d'dchasses.
Les Tatares-Koumouhs habitent au-
del^ du T^rek , entrc les rivieres Aksai
et Koi-sou; its se iivrent avec succ^
aux arts de Tagriculture , et vivent en
paix avec les Russes. Leurs princes,
ou khans, r^ident a Endin, ville de
10,000 araes, k KosUahy Aksaiy Bra-
goun, etc. Le chamkal, le plus puis-
sant d^entre eux, vit k Tarkou, sur
les bords de la mer Caspienne, village k
peupr^ aussi considerable {\\\'Ena€ri,
Les cdr^monies fund[)res usit^ cliez
oe peuple m^ritent une mention parti-
culiere. Toutes les femmes de la fa-
mille du d^fimt s'assemblent pendant
plusieurs jours , se d^couvrent la poi-
trine et se d6chirentia chair avec leurs
ongles. Autrefois , quand il mourait
un prince de cette nation , son pr^p-
teur se coupait la moitie des oreilles ,
et sa nourrice s^enterrait ?i vante ; mais,
dansce dernier cas, onlui iaissaitordi-
nairement la tite hors de terre et re-
couverte d'un pot cass^ , 'par I'ouver-
ture duquel on lui donnait k manger.
Si elle existait encore apr^ un noimire
de jours determine , on mettait fin a
son supplice en la retirant de son
tombeau.
Les KtUmouhi d^origiae mongole
sont diss^min^ sur touie la surface de
la steppe , depuis le Kouban jusqu^au
Volga. Le nom qu'ils se donnent k eux-
m^mes est celui d^Eleuths, ou OleUy
tandis que la denomination de Kai-
mouks n*est qu*un terme injurieux que
leur idoliitrie leur a fait appliquer par
les Tatares mahom^tans d'abord , par
les Russes ensuite, et, enfin, par
FEurope entiere. La Tatarie indepen-
dante etant la region propre aux kal-
mouks , leur histoire ne serait pas ici
k sa place, et nous ne pouvons don-
ner sur les hordes qui passent dans
les steppes de la Russie ^e quelques
considerations caractdristiques.
Les honunes de cette nation ont la
taille moyenne , bien prise et robuste.
lis ont la t^te grosse et large, le vi-
sage plat , le temt oliv&tre , les yeux
bien fendus, mais peu ouverts et fort
6cartes Tun de I'autre , le nez plat, la
bouche petite et la barbe rare. Pour
costume , ils portent des hauts-de-
chausses d'une largeur extraordinaire,
une veste en peau de mouton sans
manche et, par dessus, une espece
de surtout diont les manches, d une
excessive longueur, peuvent se re-
trousser sur Tepaule, afin de laisser
les bras nus et Imres d'agir. De gran-
des bottes fort inoommodes, une
ceinture de cuir et un petit bonnet
rond completent leur toilette, ou la
couleur rouge domine habituellement.
Les traits et le costume des femmes
sont k peu pr^s les m^mes.
Les fcalmouks possddent des trou-
peaux de chevaux , de bceufs , de mou-
tons et de chameaux qui fomoent toute
leur richesse. lis en tirent k la fois la
subsistance, les vStements et les ar-
ticles d'ediange. La chair de cbeval est
la nourriture qu*ils pr^f^rent ; le kott-
miss • ou lait de jument aigri, fcmne
leur boisson favorite. Ils sont aussi
braves et moins pillards que les Ta-
tares mahometans, et, oonune eux,
ils sont polygames.
Ge peuple superstitieux a un grand
respect pour les diiens, qu'il nour-
rit souvent avec des cadavres ho-
mains. Quant k lui , le lait aigri forme
» _ •
• ••• a .
• • • • • »••
• •
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« » • •
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• •, • • « •
y
CIRCASSIE ET G^ORGIE.
47
la base de scs rcpas. Quelques-unes
de leiirs hordes ont embrass6 le chris-
tiaiiisme; elles ont des pr^tres, dent
la principale occopation est de leur
apprendre a lire et d 6crire. Les aii-
tres sont encore plongto dans les t^-
n^res de ridolAoie.
La fatigante monotonie des steppes
parcourues par ces di verses nations est
interrompue, sur leborddes rivieres,
par une multitude de tumukts ou ^16-
vations tombales , surmont^ par des
statues d'une pierre grisdtre , grossie-
rement travail!^. Ces figures, assises
pour la i^u|)art, et tenant ddns leurs
mains un objet gu'on pourrait prendre
pour une ta^ , appartiennent 6videm-
ment k une nation mongole. La face
plate et large, les cheveux divis^ en
trois tresses, les colliers de coraux
pour les femmes et les petits bonnets
roods sont des indices que Ton ne
saurait m6connattre. Ces antiquit^s
sont communes prte du Kouma, du
Kouban et du Volga ( voir la p/. i ,
n» 4.)
On voit sur les bords du Je-
toka , aox environs de Gtorgiewsk ,
une statue 6galement int^ressante , et
cependant non moins grossi^rement
travail!^. Elle repr^sente un homme
habiil^ et arm6 h la tcherkesse, les
jftmbes embott^es dans une gatne h la
mani^ des anciens Hermtt. Ge pi^-
destal auadrangulaire offre sur la pre-
roite nee une inscription en carac-
t^res grecs et ^davons m^l6s. Au
bas, atnsi que sur les autres faces , on
voHfdiverses figures d'honmies et d*a-
nimaux sculpt^ sans art.
On a pu remarquer que nous nous
sommes attach^, dans cette notice,
aux ^Doques de rbistoire ancienne et
aux fraditions locales plutdt qu'aux
^v^nements de l*histoire modeme. La
raison en est simple : Tancienne p^-
riode rentrait essentiellement dans
notre domaine, la nouvelle appartient
aux annales de la Russie d*une part et
a cdies du royaume de Perse de Fau-
tre.
L*isthme caucasien 6tait , depuis
long-temps, un objet de cx)nvoitise
pour les czars , non-seulement parcc
qu'il sert de fronti^re h leurs posses-
sions du cdt6 de I'Asie m^ridionale,
mais encore paroe qu'il ofire en lui-
m^me une importance que de bonnes
institutions pourraient accrottre ra-
{Hdement. Entrain^ tour h tour par
es missionnaires du Christ et ceux
de Mahomet, places entre deux enne-
mis acham^s, les peuples du Caucase
ont 6t6 long-temps foul^^ aux pieds
des combatants; enfin , ils sont ecbus
en partage au plus vaste empire du
monde.Par ie traits de TourmafUchai
(10 [f(6vrier 1828), les Persans ont
cMi k leurs rivaux les provinces d'tr
rivan et de Nakhitchevan , et par celui
d'Andrinople ( 14 septembre 1839) la
Porte a a^nitivement abandonn^ h
la m^me puissance Anapa y PoH^
Akhaltzik^ Atzhaur et AhalkalalU.
La population actuelle de la region
caucasienne est d'environ 2,400,000
ames; elle serait susceptible d'un |)ro-
digieux accroissement , mais, ainsi
qu'on devait s'y attendre, elle a ^prou-
v^, depuis quelques ann^es, une di-
minution sensible par suite des moyens
violents que la Russie a dd employer
pour s'mblir avec stoirite dans une
oontr6e o^ des nations entidres ne
sont compost que de brieands. Pour
compenser cette perte, les Russes
cherchent k coloniser leur nouvelle
possession. Ils y appellent des cultiva-
teurs allemands, race laborieuse, pa-
tiente et sobre. Ses ^missairea se H-
pandent aussi dans les campagnes des
provinces m6ridionales pour embau-
cher les populations chr^tiennes de
TArm^nie. La religion, en ceci , vient
au secours de la politique: et c'est
surtout aux pWStres que s adressent
les agents russes ,< car I'exp^rienoe a
fait voir que ceux-d , en Emigrant ,
sont suivis ordinairement par plusieurs
families chr^tiennes et souvent par
toute la population d'un village. Ar-
rive sur le sol russe , le colon reQoit
Tassignation d'une pito de terre,
quelquefois m^me celle d'une petite
habitation. Avec du travail et de la
perseverance, son sort pourrait ^re
48
L'UNIVERS.
« nii'Xdr*
assez beureux , sans le voisinage des
forbans indompt^s aui infestent le
Caucase. Lea tchetcnenaes sont, de
oe odt^ , lea ennemia lea plus redou-
tabieadea oolona arm^iens. Si la haine
hdr6ditaire de cea hardis moatagnarda
ae porte , en principe , sur la nation
moaoovite, elle embraase, dana aes
r^ultats, lea strangers qui vivent
soua sa protection.
On a vu , par ce qui precede , qu
la Ruasie , en cherohant h augment
la population de son vaste territoi*
aux oepens de aes alli^, prend quelqu
foia des moyens peu compatibles^ay
les proo6d^ de bon voisinage. La PeitiK
en a fait le sujet de plus d'une plainte« ^
si la guerre ^atait de nouveau ent
ces deux puissances , rembauchagec
Arm^niena en serait le motif ou U
au moina le pr^texte. Le prince ro\
Abbas -M3arza, aujourd'nui d6c»
ecrivait au moia de juiUet 1828 aul I f
lonel Lazarefif, commandant milit ^ %^^
de Tauria. lors de Toocupation d*..^^^
province d'Azerdeidscban par le «^* iK "^^
n^ral Pask^witscb : « Nous n'ignor IB[ |
« pas que vous avez rautorisatioid|
« votre gouvemement pour favop'
« la transmigration des Arm^ie
mais quana nous remarquons q
dana tous les lieux oii vos sok
se sont arr^tds, la population
m^nienne a ^mi^, voumtairef^
ditea-vous, la raison et laconsciiM
« nous dictent de vous demandei
« est possible queplusieurs millici
« families aient pu abandonner s|
n tandment une patrie de mille at
" laisaerla leura propri^tds, leurs
« dins, leurs maiaons, pour se tr?
k votre suite, sans savoir oh
des passqports aux Armdniens qui
ont quitti Tauria , et ie sais qae
leur emigration eat causee par celle
de leura pr^trea ; or , ai toui les
ecd^iastiques de ce paya viennent
de Tabandonner, nul doute que la
faute en est au primat d*'^' ^-
II
(I
«
«i
« pourraient se reposer.
« J*ai d^livr6, de mea pi
propresnr
FIN.
i
L'UNIVERS
on
HISTOIRE ET DESCRIPTION
DE TOUS LES PEUPLES,
DE LEUBS REUGIONS, MOEURS, COUTUMES, nc.
ARMENIE,
PAR M. EUGENE BORE,
DK l'aGADBMIB ARKBirxmVS Dl aAIHT-LAZAIll DB TBlTrSB BT O0 OOimiL
DS LA SOGirrd ASIATXQUB DE PABIS.
INTRODUCTION
JbiRTBB FEuphrate et Ja mer Cas-
pienne se trouve un pays k peu pr^
anssi ^tendu que le royaume actum de
France, lorsqu*on fixe ses limites sep-
tentrionales a la Gtergie et au mont
Caucase , et que Pon descend au midi
jusqu'au Diarbekre. Ge pays est I'Ar-
m^ie, dont le nom nous est connu
par nos premieres lectures des livres
saints , et par les souvenirs qui nous
restent de quelques auteurs dassiques
de coU^e. En effet, on se souvient
qu'il est dit, dans la Gen^, que les
Kandes eaui du deluge s'^nt retirto,
Tdaerqoosa surlesmoniaanescrj4'
raraf; et, d*un autre cdt6, les noms
de Tigrane et de Mithridate (*) , le r6-
(*) Mithridate le Grand ilait roi de Pont
et noD pas d'Ann^nie ; mais comme oes
daux rats se touchaient , et qu'il cherdia
a k COOT de Tirana oo asila!, son nom se
titniTe m^l^ aux evenements du peuple que
nous vottlons faire connaitre. De plus, quel-
ques icrivains latins lui ont donn^ le titre
oe roi des Armeniens, sans doute paroe
que les limitesde la premiere Arm^e n'etant
I'* JAvra4son. (Abhbntk.
dt de leurs guerres et de leur lutte
oontre la puissance romaine ^ demeu-
rent grav^ dans notre m^moire. A la
y^rite , pour plusieurs personnes , la
oonnaissance de ce qui conoeme I'Ar-
m^ie ne s'^tend pas aude^ de oes
premiss notions ; et Ton ignore que ,
dans cette partie de i'Asie , subsisw un
peuple formant, plus de quinze slides
avant notre dre , une des monaidiies
les plus puissantes de TOrient, ayant
ses iois et sa constitution propre, ses
moeurs , ses dynasties de rois , son Ian-
gage , sa littarature, et sa liturgie ec-
cl&iastigue, iorsqu'il entre dans la
famille aes peuples Chretiens. On ^tu-
die dans tons ses details Thistoire des
empires primitifs de I'Assyrie et de la
Perse, et Ton ne daigne pas arr^ter
ses regards sur ce royaume adjacent,
moins vaste , moins peupl^ , et qui
trouva n^anmoins, dans Fene^ie et la
fiert^ natives de ses habitants , assei
pas neCtement tracees , il pouvait dominer
effectivement sur des populations de race
annenienne.
L*UIIIV£RS.
de ressouroes poiur lulter oonire ses
foisins, et reoooqa^rir Piiid^pen-
danoe qu*il pouvait perdre momenta-
nteent.
Cette sorte d'oobli ou de ddaisse-
ment dd la natloa armtoieaiM, q^'on
pourrait aa premier abord i^prouyer
comme injune, tient k deux causes
SrindpaleB. La premi^ se troupe
ans a nature mime de notre esprit ,
Gontraint de se bomer dans I'immense
besoin de s^yoir qui ie tourmente , et
ne pouvant donner plaee en lui qu'aux
oonnaissanoes les plus saillantel, en
sorte qu*ll plane toujours sur les hau-
teurs des g6n^ralit& ou des princi-
Sauz fiuts • h moins qu*il ne s'abalsse
ans les rqp'ons seoondaires de This-
toire , soit pour en mieux saisir Ten-
semble, ou seulement pour satisfiiire
sa propore curiosity. La seoonde cause
est le manque de moyens ou de docu-
ments sumsants pour arriver k Tintel-
ligenoe de Tbistoure et de la vie de ce
peuple i s^par6 de nous plus encore par
sa langue que par les mers et par ies
montagnes. La langue est ce qui nous
r^vtte les penste, les habitudes, en
un mot, Texistenee nidividuelle d'une
nation , comme la jparole est ie moyen
gte^rai qui nous rait entrer en com-
munioation aveo les autres hommes.
Cest ce qui fait que les andens nous
ont donne fort peu de rensevipcments
sur r^tat dn peuple armenien. Les
Grecs , les Penes et les Romains , qui
suooessifementdomintevntrArmtoie,
ont toujoors dMaign^ d'apprendre la
langue de ce pays, et it peine reoon-
nalKon les T^ntables noms des rois,
des tillee on des fleuyes dtes par leurs
historiens. A la tM(4, on nomme
qudques andens auteors cbald6ens ou
syriaques , et mime grecs , qui auraient
ims soin andennement de consigner
es faits de leur histoire nationale , at-
tendu que Tiynoranee Itait trop grande
dans la nation pour qu'dle pdt elle-
mlme s'aoquitter de cette tfldie. Mais,
eomme tous ees premiers monuments
historiques ont piri , les Armlniens
durent refaire ce travail, lorsque le
cbristianisme les eut civilisis ; ce fu-
rent eux qui purent se faire oonnattre
k nous, et leun premiers historient
ont travailll sous Pinmiration de cette
id^ commune. Gependant ils sont res-
tls dans Toubli pendant des siMes,
jusqu'ii ce que quelques misrionnaires
00 savants europlens, initio k tear
langue, nous aient transmis le rliol-
tat de leurs dloouvertes.
Gelui qui , le premier, nous fit soup-
^nner tout ce que l*Armlnie renfer-
mait de richesses littlraires et histo-
riques, fnt un missionnaire de la
Propagande , Galanus , homme de zMe
et de savoir, mais thdologien aoerfoe.
Intolerant, et souvent fautif dans les
juf ements qu*il porte sur plusienra
EMnts de la sdence ecd^iasbque. Ga-
nus vivait au dix-septitee sidcle; il
avait €i6 trouver les Armlniens ; el le
dipdt de oonnaissanoes qu'll avait rap-
porti de ce voyage , se serait probable-
ment fiort peu aocru , si les Armlniens
n*ltaientvenus aussi nous trouver, lors
de la fondation du dUtore couvent des
MIchitaristes de Yenise, dont nous
nous proposons de norler assez lon-
fuement dans la suhe de oet foit.
'^tablissement de ces religieux , dont
les presses , si remarquables par le luxe
et la correction typographiquea, onl
rendu aussi oommuns, dans le com-
meroede la librairie, les aneiens ma-
nuscrits de leurs Icrivains , que le aont
actudlementt cfaei nous, les cfaeft-
d'oeuvre de la littlrature allemande on
italienne , a done spldalement oontri-
bul k oropager I'ltode de la langue et
de la litteniture armlnienne. Sons oe
rapport , la France m^rite les jmne-
miers honneurs: c'est elle, en enet,
qui nous a donni les savants Villolte«
veysi^, plus eonnu sous le nom de
Lacroze, ie docte abbi Yillefroi. Mais
tous les travaux de ces hommes ont
It^ surpasses par rillustre Saint-Martin,
dont les orientalistes ont k diplorer la
perte rioente. Nous croyons devoir
pr^venir nos lecteurs que nous avoas
eu souvent occasion de profiter de ses
recherdies . en ce qui tient sartout k
la partie geographique de oe travail.
Etymolooib dv hot AnviRni. —
Un fait assez singulier, c'est que le nom
^Armenie^ usite ginlralemeot par
arm£nie.
tolls tes taHraiM aneiiniit ou modemes
de rOficnt etik I'Ooddeiit, poor d^
sign^ le |»ays qae fioas nous propo-
fldnt de deerire , n*est point ceiui qae
les Arm^nJeDS donnent h lear patrie.
lis fappellent HaXasdany on pays des
HdiMhs, da nom d'un oertam Haig,
lear pranier roi , qui vtnt de Baby-
lone 9'^hlir en Arm^nie , avee touts
sa famine, environ vingt-deux siftcies
avant notre ire. Its ont encore phi-
sieurs autarss noms tir^s de quelqnes
anciens patriarches mentiomies aans
la Bible, et qui , par cons^^ent, ne
doiTent pas dtre ant^ricars a I'^tablis-
sement ao cbristiantsine en Arm^nie.
Tel est le nom fAsk'hanaz^an^ d^-
riv6 de celai dn patriarcbe Askenez ,
filsatn^deGomer, flis de Japhet. On
trou?e aussi fr^quemment, dans les aa-
teors, le royaume d'Arm^ie d^lgn^
sous Is nom de Maison de Tkorgomj
dont ils ont form^ Tautre nom g^n6-
rique de ThorhomatHf dans lequef
cmains orientalistes ont h tort vooltt
retrouver le mot Turcoman. lis pr6-
tendent qae le patriarehe Thorgom
etait , comme Askenez , fills de Thiras ,
fils de Gomer , oaoiqae ntcritore nous
dise qu'il ^tait oirectemefrt Ms de Go-
mer. selon ces histof ions , ee Tborgom
aurait 6t6 le p^ de Haig , premier
chef de leur nation. Les traditions
fftorgiennes sont patfritement con-
formes a cette opinion : les Arm^niens ,
les G^rgiens , et tons les peuples da
Gaacase , sont d^slgn^ par la oenomf-
nation g^rale de TMrqamofianif
OQ descendants dn patriarcbe Tharga-
mos. dont le fils atn^, appel^ ffaos,
est evidemment le mime que Halg.
Uorigine praise du nom d'Arm^*
iiie est euTelopp^ d'obscurit^s. Les
historiens nationaux le bai d6river
d^Aram , un de leurs plus aneiens rois ,
qui se rendit fi^ e^lebre par ses
grandes conqo^tes. « On raoonto d'A**
ram, dit Molse de Kbetenf Fhisto*
ricn le phis e^libre de la nation , beau-
coup de traits de courage et de belfes
actknis CRiT ^tefkHreift dans tous les
sens les limltes de FArm^ie. Cest de
son nom que tous les peoples tirenf
celui de notre pays. Les Grecs le nom-
ment Armen; les Syriens et les Per-
sans le nomment Arm^nig » Plusieurs
autres 6crivains soutiennent la m^me
opinion. Quo! qu*il en soit de rorigpe
de ce nom , ii est certain qu'il est fort
anclen.
On pourrait peut-ltre le rapporter
^ celui d'Aram, donn^ dans la Bible a
la Syrie et It la M^potamie. H ^tait
connu des Grecs dti le cioouiime
si^e avant liotre ^, et ils rappli-
qaaient au pays que nous appelons Ar-
m^nie , et meme qudquefois h la j^ar-
tie oTientale de la Cappadoce. La Bible
mentionne trois fois le pays d* Ararat,
sans le designer sous le nom d'Arm^
nie (*). Les udorsiens n*appellent leurs
Yoisins , les Armeniens , que Somekhi,
a cause de la province de Somkhe^ ,
situ^ pres de leurs firontiires.
HVAtUBfi DU PAYS. — TXHPBBATUBB
Dt CLtif AT. — Les anciens pla^ient
commun6ment le paradis terrestre vers
les sources de rEuphrate, dans les
piaines de FArm^ie; et rimmortel
Milton s*est conform^, dans son poeme^
^ cette tradition^ Si la nature du sol
n*avait en quelque sorte iustifi^ cetto
opinlod, il est vraisemblable qu'elle
n etit jamais eu cours , mtoe parmi les
poetes. L'aspect du pays est extr^nie-
ment t ari^ : coup^ par de Iiautes et
(*) Le psiaage dc iMamt, dwjf. 5i , r.
99, o^ il eM dit : A/m^ncez muer^w d^Ai^
rat, dt Henni o» Mini ei JtAtketWL, eie,n
a beauooup embairaM^ les eomneiAateiift.
Le mot Mefuii place prii de deu amie*
aui eonTiennent au pan de VAnnenie, a
iaiC croire quil designait I'Annenie mime;
aiusc U irersioo des Sepfante et les textes
aitD^nien et syriaque (raduisent ce mot
par celui & Armenia. NeanmoiAS, ji flpoque
de Jerknie, ce nom fv'etait point encore
usiti. Le savant Saiut-Martiu a cru recoit*
mtftre daaa ce nom , cehri de Maoiataz, fils
da Krilf , ^t fbt le pSre d^uiie post^if eifoito'
breuM , efablSe dans la provinee de Rark'h,
0& la vflle de Manaiiperd ftit ftmdie. Csite
partie de binatumetaitdSrisateaons lenotti
Meeial itManataptlans. II paiail aun que
IxMi appelait Minjras on« certaiae contreS
de rAimenie oeutrale, j^icolas de Dimas,
hiitorien conteroporain d^Augnste , en bit
roeotlon.
I.
UUI^IVERS.
loDgues diatnes de montaisnes qui cou-
rent et se croisent dans toutes les di-
rections, il offire les sites les plus di-
vers. Tel cdt<^ d*une monta{;ne est nu ,
d^cham^ et st^ile , tandis que , sur
rautreversant , s*ouvrent de profondes
et rarissantes vaiite , oik la f6condit6
du sol ne le c^e point a la beauts du
paysage. Si la culture avait atteint,
dans ces lieux , le degr^ de perfection
oJk certains peuples de FEurope Font
port^ J et si , d*un autre cdt^ , Tadmi-
nisteation capricieuse et exigeante des
Turcs, ou les incursions des Kurdes qui
infestent toute la partie m^ridionale, ne
d^urageaient les agriculteurs, nul
doute que ce pays ne devtnt une mine
in^puisable de toutes les productions
agricoles.
La triste situation politique dans
laqudie lan^it oe malheureux nays
depois des si^es, a chang6 et d^te-
rior6 la surfece du sol. Les anciens
nous parlent de fordts et de lieux plan-
ts d*arbres, dont on ne trouve plus au-
cun vestige. La culture et Tart n'ont
point i^r^ les perp^tuelles devasta-
tions des guerres et des incendies. Les
agriculteurs manquaient pour replan-
ter ce que la hache ou le feu avait
d^truit; et les flancs des montagnes,
en se d^uillant de leurs bois , n*ont
gtts retenu dans leurs ravins les eaux
indues des neiges qui y entretenaient
unesalutaire frudieur pendant les ar-
deurs de VM , de sorte au^un solell
d^orant caJcine, durant filusieurs
mois 9 le oKSme sol oue les frimas re-
eouvrent le reste de rann^e. Plusieurs
vaU6es sont devenues totalement inf^
condes,et de longs plateaux, d€nu6a
de toute verdure et ae toute vegeta-
tion , rappdlent h Toeil attriste qui les
onbrasse les steppes d^solds de la Tar-
taric.
« Lesjpins , disait Tournefort , lors-
mi*il visnait ces contr^es , commeuoent
a devenir fort dair-semes; et Ton en
deoouvre peu qui Invent de graine. Je
ne sais comment ils feront quand on
aura coop6 tous les grands arores, car
ils ne sauraient bAtir sans ce secours ;
je ne dis pas les malsons oi^ Ton n*em-
ploie les poutres que pour soutenir les
converts ; je parle des chaumi^ies qni
sont les maisons les plus oommuoes ,
dont les quatre murailles soot ftbri-
fi^es avecdes pins ranges par la poinle,
angles droits , les uns sur les aatres
ju8qu*au convert, et arr^tes dans let
coins avec des chevilles de bois. » Les
Armeniens, an Ueu d*user d'one sage
prevision et de menager pour leurs diSh
cendants des bois de construction , cot
abattu sans planter; aussi sont-ils re-
duitsactuellement k habiter de simples
huttes d'argile, qui , disseminees dans
ces immenses plaines, se oonfondent
de loin, pour Tccil, avec les herbes
jaunies que le soleil dessdche et briUe
pendant les ardeurs de rete.
La viene y vient h merveille ; et la
qualite diBS vins serait superieure avec
un autre mode de preparation. Les Ar-
meniens , en se fondant sur la tradition
biblique, qui donne le mont Ararat
comme le ueu oi^ 8*arreta Tarcbe, ure-
tendent que Noe s*etabiit d'abora en
ces lieux , et que la vilie de Nakbdja-
van, qui signine Ueu de la premiere
descerUe, conflrme oe fait [lar Tanden-
nete de son nom (*), Ils ajoutent que
e'est dans le mdme endroit que le pa-
triarche planta la vigne. Aussi men-
tra-t-on a Cbardin, h une lieue d*£ri-
van , un petit dos que Ton assure ilre
(*) Plusieon aatret nomt de lieu fbit an-
tiques lembleiit perpetuer le Boavenir tni-
ditionnel de r^tabliffeoient primitif de U
fomille Muiree du deluge. Ainii Toa fut dcri-
▼er le nom de b petite proWnoe d'Arhmiode,
sttuee k I'orient da moot Anuvt , de troie
mots signifiant at^ris Jupied de No€, ptrce
que Noe m lertit airete dans ee canton en
soitant de Tarche. La ville de Marant sitiiee
dans I'Aderbaidjan, vers le lac d*Ounniah,
tirerait son nom des mots mair ant, c'ett-
i-dire, /s iM^ ef/ i(i « paroe que Noeouan^
la prkendue femme de Noe , anrait ete cn-
teR^e dans oet endroit. L*ori^ne de ees
noms est anterieue an christianisma, puit-
qn'ib sont dies par Ptoiemee et lliistoriett
Josephe , et le seal moycn d*expliqner oelte
coincidence asses remnqoable, c'est de les
attribuer aux Juifii tenus antcriaureBMnt
en Annenie , et qui avaient etabli leurs od>
lodes sur les bords de VAitue , dans les
environs de cette proTincc
ARM£NIE.
edui de Noe. Ge fait serait attests par
le nom d^Agorhiy qae porte oette pe-
tite bourgade, et qui viendrait des
deux mots org ouriy signifiant UplarUa
lavigne.
On cnltiTe avec suoods le froment,
Forge, I'avoine, le seigle, et tous les
autres grains. Colunieile, Pline, et
Diodore de Sicile, ont parl^ de I'excel-
lence et de Tabondance des firuits de
TArm^nie, qu*on transportait h Baby-
lone par la voie du Tigre. Ces fruits,
^alement renoram^ aiijourd'bui ,
tout Folive, i'orange, Je citron, la
p^cbe, Tabricot, le brugnon, la m()re,
la prune, la poire, la pomme, la noix,
la figue , et les melons. Le miel que
Ton tire des montagnes est plein de
saveur; et la cire est une des princi-
Siles ressources pour le commerce,
n Fexporte en Russle et h Ck)nstan-
tinople, ainsi que le chanvre et le co-
lon. La soiey aoonde, mais on ne salt
pas la filer, ni en tisser des dtoffes.
Les montagnes du nord rec^lent
d'abondantes mines d'argent et de cui-
▼re exploits dte une haute antiquity;
et Ton trouve aussi de Taimant , du
salp^tre, du soufre et du bitume.
La rbubarbe le cddepeu en quality k
celle de Tlnde, et il est a croire qued'ha-
biles botanistes feraient oertamement
de nombreuses d^uvertes dans ce
pays. Pline cite le kuer^ tant estim^ des
Remains, et que I'on tirait de la M6dit
et de I'Arm^nie. II serait aussi assez
important de constater ce que le m^me
naturaliste appelle ctdamarUide, plante
dont la vertu serait telle, que les lions
les plus sauvages perdraient, en la
mangeant, leur f<^cit6. II rappelle le
nourrisson de PJrmSrUe etdela Cap-
padoce. On vantebeaucoup la r^isse,
ghfCffrrhiza, des bords de TAraxe;
elie atteint une grosseur prodigieuse,
et elle surpasse celle d*Espagne, d*Al-
lemagne et de Russie, au rapport de
plusieurs voyageurs.
La flore d*Arm^nie, explore h la
hUte, et seulement dans quelques par-
ties , par Toumefort , est fort riche.
On y remarque une tres-belle espeoe
de pavot appel^ apkUnij et dont on
mange en assaisonnement les t^tes en-
core vertes ; la mortn^^ plus grosse que
le pouce, longue d'un pied, partag^e
en grosses fibres brunes, geroees, pen
cheyeiues, et avant le parfiimducb^yre-
feuille; la cachrysorientaUs auxfeuil-
les aromatiques, mais Acres et am^res;
la biMne crientaley PiiSphaSy que les
botanistes appellent la plus belle plante
d'Orient; Taconit tuenlofup; la cassida
aux feuilles d^coupto comme la ger-
mandrde; le lepwum k feuilles de
cresson fris^; le carduus oriefUaHs,
dont les fleurs n*ont point d'odeur
sensible, mais dont les feuilles sont
tr^-amdres; le cusctde, qui abonde
sur le coursdeTAraxe; lepofygorUdeSy
arbuste de trois i^quatre pieds de long,
dont les fleurs rappellent par leur odeur
celles du tilleul ; le lychms et le geum ;
enfin , la campanula et Idi/eruia orien-
taHs.
La temperature de T Arm^nie est va-
riable comme dans les pays de mon-
tagnes, et le dimat du nord est tr^-
rude;tandis que, dans les provinces
du sud , on eprouve les fortes chaleurs
de la Syrie. Anciennement, les rois
d*Ann6nie avaient leurs habitations
d'hiver dans les plaines m^ridionales ;
et pour se pnfeserver des ardeurs de
Nte, ils remontaient au nord, ou se
trouvaient leurs paiais de plaisance.
« L'air est bon , dit Chardin , mais fort
froid; il neige encore au mois d'avril,
ce qui oblige les paysans k enterrer
leurs vignes, qu'ils ne ddoouvrent qu'au
printemps. »
M. Am6d^ Jaubert, dans sa Rela-
tion du voyage int^ressant qu'il fit en
Arm^nie et en Perse Tan 1806 , et qui
nous a fourni plusieurs renseignements
pr^cteux , remarque que le climat d'Er-
zeroum est extranement rigoureux.
On a vu tomber de la ndge dans cette
ville le 27 juin ; et dans tout le nord,
elle ne quitte la terre que du 10 an 15
avril. Quelquefois I'hiver y commence
au mois d'aodt.
En 1808, lorsque le g^n^raF msse
Godowitch feisait le blocus d'l^rivan ,
ayant €U repouss^ avec perte, il se
retira k Tiflis. Mais comme il fut sur-
pris dans cett^ retraite par Thiver, il
perdit la moiti^ de son arm^.
L'UIKIVERS.
Toutefois « on doit dire que le cUroat
eo %6a€nl est sain. La constitution
robuste et Fair de santt^ oommuns au
peuple, en sont une preuve visible.
L*air est vif et diastique, ^tant renou-
▼eL6 oontinuellement par les vents qui
descendent des montagnes.
MoNTASRBS. -^ Le nord de TAr-
mtoie est ferme par une barriere d^
hautes montagnes qui la Apparent de
la Georgie, et s'l^tcodent par le pays
des Lazes jusqu'i la mer Noire (*). lies
Turcs leur donnent le nom d'Eikezi ; le«
Arm^niensles apptllentilf^/Ainou/^ii4^
hrewesy probablement a cause des nua^
ges et des brouillards qui enveloppent
presque perp^tuellement leurs ames.
La chatne qui court vers le sud-est a
re^u Le nom de Bin-ffueul, qui veut
dire en turc les miUe lacs, sans doute a
causedes innombrablestorrentsetrivid-
ressans oesse aliments par les neigeset
les glaciers, et oui forment de vastes
reservoirs d'oti s ^appent les fleuves
dont nous parierons. Les Anndniens
n'ont point de nom gdn^rique pour
d^igner ces montagnes , qu'ils appel-
kntvaguement Afon^ des Chaldeens;
tandis qu'ils nomment montagnes de
Carin eelles qui vont d*£rzeroum k
fr^bizonde. Strabon, Pline ^ Pto-
lemhb connaissaient cette chatne sep*
tentrionale, dans iaquelle ils ont plac^
les moots Polyarres^ Paryadres et
Moschiciy dont plusieurs etaient re-
Qommes par les mines receives dans
leursflancs, etdontquelques-uues sont
encore en exploitation.
All sud-ouest se trouve une autre
chatne de montagnes trds^Iev^ nonv
mto ArtskadZj lesguelle^ vont se
r^nir vers Tonent a la chafne des
nyontagnes de Tancienne province de
Siounui'h*
De I'Araxe aux borda du Tigre et
jusau'aux rives de I'Euphrate et du lac
de Van, s'^tendent de longs chatnons
(*) Le defile qui doone passage de I'Ar-
Vitfiie dans la Oeoifie sp nomme la porte
de Daritl oa TaritU. Gel endroit est Kniar*
quable mt la bauteiir des rocbere lailles a
i»c et lomiant des gorges sombres et pro-
bndes. Les Russes y ont ^tabli une redoute
pour en garder rentrce.
dont la partie la plus 6levee est le o^-
li^yre mont Ararat des saintes Ventu-
res, lies anciens rappelaient Masis^
nom qu*il conserve encore yulgaire-
ment dans le pays; mais les Turcs lui
donnent aujourd'hui oelui d^jigri-
Dagh (*).
Le mont Ararat se compose de deux
immenses pics dont Tun est beaucoup
plus elev6 que Tautre (**). L'escarpe-
ment des rocbers tallies a pic, et la cou-
che des glaces qui les recouvre ^rnel-
lemeot, avaient toujours avant ce siede
fiut re^arder son ascension comme
impraticable. Aux obstacles sans nom-
bre et aux perils certains qui arr£-
taient les plus ooura^eux, se joignait,
chez les anciens babitants de I'Arm^
nie, la pieuse tradition que le sommet
de cette moot^^ne ayant ^te le port de
salut de Tarcne, Dieu y conservait
miraculeusement ses d&)ns , et qu*au-
cun pied mortel ne pouvait le profaner
depuis que Noe y Mait aborde avec sa
£amille.
On raconte mtee que du temps du
premier patriarebe de TArm^nie, un
rooine nomm6 Jacques, qui elevait des
doutes sur Tauthenticite des livres
saints, voulut verifier par lui-mtoe le
bit cru g^n^raJement du d^pot des
restes de rarche sur la cime cfu mont
Ararat. II partit done ; mais apres
avoir gravi pendant lon^jtemps la mon-
tagne, ils'endormit^puisedefiitigues,
et le iendemain ii se trouva transports
au lieu d*oii ii Stait parti. U voulut
tenter de nouveau le m^me voyage,
et 9 le nrodige se renouvelant . il coni-
f^rit qu^un pouvoir sumaturel ddiBndait
'acc& de ces lieux. Cette opinion,
transform^ en eroyance diez les Ar-
mdnieiis, empdcba dans les Ages sui-
vants qu'aucun habitant dupays n*osdt
se hasarder au del^ des glaces Sternd-
les. C'^taient les homes inlrancfaissa-
bles de cet autre Sina! : en outre, la
science de Tastronomie et de b mi-
ttorologie n'^tait point assez avancee
pour engager ceux qui en avaient quel*
que notion a gravir cette montagoe ,
C) Voy. la plancbe »• i.
(♦♦) Voy. la planclic n^ i8.
■ • •
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AR1|£NI£.
aOtk it# Uat de nou^dles exp^ences.
Ud ToyagBur boUandais ▼wita oetta
moiitagDa au oommeooenient du dix-
A^itae si^e; c*est Jean Struys.
▼oici oe qu*il dit de son excursion :
« Nous parttmes le matin pour aller
Tislter rermite qui Ti?ait sur la mon-
tagne. Son ermitage ^tait si ^loign^ Je
tern 9 qa^ I'ous n'y fillmes qu'au bout
de tiffi jours, cbacuo desquels nous
fimes cinq lieues. Nous trouvions tous
les soirs une halte pour reposer^ et
Termite qui Thabitait nous donnait le
lendemain un paysaa et un &ae« le
premier, pour nous coriduire, et cttui-
d, pour porter des vivres et du bois.
Gette derail provision est si utile.
Sie, sans oela, la montagne est inba-
table, et le froid y est tel , qu'un ca-
valier peut courir sans risque sur la
glace de trois beures.
« De plus, on ne se cbauffe que du
cbauffage qu on y porte , car il n'y crott
ni arbres, ni balliers, ni rooces, et
dans toute la montagne il n'y a pas
m&ne un pouoe de terre. Les premiers
nuages que nouspasslmes dtaientobs-
curs et epais. Les autres 6taient extrd«
mementfiroids et pleius de neise, quoi*
queunjMuplusbaslachaleurfdtgrande*
et le*' ^aisins et autres fruits dans une
profonde maturity. Dans le troisitoe
nuage, nous pensdmes mourir de froid ;
nous avions beau courir, rien ne pou-
vait nous ^chaufiTer, et si oet espace
fflac6 avait dure encore un quart
a*beure, je croif que nous y fussions
morts. »
Toumefort, pendant son voyage
scientiflque d'Arm^iie, explora le
jDont Ararat , sans s'^lever i une hau-
teur consid^able. « Nous assurtoes
nos guides, dit-il. que nous ne pas-
serions pas au dels a*un taa de neige
que nous leur montrHroes, et qui ne
paraissait gudre plus grand qu*nn Rft<
teau; mats quand nous flilimes arrives,
nous y en trouvdmes plus qu*il n*en
fallait oour nous rafratcfair; car le tas
avait puis de trente pieds de diamtoe.
Chacun en mangea tant et si peu qn'il
vouhit, et, d'un commun consente-
ment, il fiuit r^solu qu'on n'irait pas
phis loin. Nous desoendtmes done avec
one viniear admirable, ravis d'avoir
accompli notre vobu , et de n'avoir plu9
rien h faire que de nous retirer au mo-
nast^. » Toumdbrt veotsans donte
parler id du monastte de Saint-Jac-
Sues, situ6 sur le versant noid-ouest
e la montagne ; puis il ^oote : « Nous
nous laissdmes ^sser sur le dos pen-
dant plus d'une beure sur ce tapis vert ;
nous avandons chemin fort atorfeble-
ment , et nous aDions plus vite de oette
fefon-lft que si nous allions sur nos
jambes. On continua h jdlsser aotanl
que le terrain le^ermit; <^, qoand
nous renoontriodF des calHoux qui
meurtrissaient nos dpenles, noos sus-
sions sur le ventre , ou noos marduons
i^ reculons a quatre pattes. »
Ltfkre et le pred^oesseur de M^
b^meci-Behahil, pacha de Bayazid,
voulut faire rasoendon de la monta-
gne; mais il t^vnita k deux mille qna-
&e cents pieds des Bdges,tant il etait
efifray^ des dangers et des fatigues qui
i'attanddent. La doire de I'asoension
^tdt r^serv^ au aoctemr Fr. Parrot,
professeur de physique h Dorpat L'an
1880, il partit, commeun autre Saus-
sure, pour escalader oette montagne
plus haute que le Mont-Blanc. Aprte
pinsieurs jours de maiche et des rati-
gues inooies, il parvint h la hauteur
e quinze nille cent trente-huit pieds
au-dessus du niveau de la mer, c*est^-
dire trois cent dnquante pieds environ
plus baut que le Mont-Blanc. IJl il
planta dans la glace une longue croix
noire avec cette inscription :
r AUTOGAATOBS
BOG A8TI.UM SACBOSAITCTUII
A&MATA MAW ▼nn»fCATrr
VIDBI CBEUTtAa^
MAVVBS niK»«iioi Fnim
PAJKSWfTtCB AM BEIVAlf
Amo BOMon imoocnvi.
Aprte avoir dnsi prodam^ dans les
nues la puissance de Nicolas, empe-
reur des Rusdes, et la victoire de son.
gdi^rd Pask^witiKh, Fr. Parrot s'ap-
prdtdt k s'dever encore, loisqu'une
tourmeote souddne obscurdt I air ei
L'UMIVERS.
ie for^ de rodesoendFe pr^pitamment
pour 6cfaapper k une mort certaine. II
revint au monastdre de Saint-Jaoques;
mais , ne r^ardaDt point sa Uiche com-
me aooompiie, il se pi^para h une se-
oonde ascension; et, le 23 septembre,
il se mettait en route a?ec un jeune
diacre du couvent d'Eczmiazin , deux
soldats du 41* regiment de chasseurs et
deux paysans arm^niens. II sui vit la m^
me route que la premi^ fois. et profita
desescaliersqu'us aYaienttaill^dansla
Slaoe. Le 27 septcao^re k trois heures,
^tait sur le poilt culminant de la
montagne. Il trouva 1^ une plate-forme
unie de deux cents pas de diam^tre, la-
quelle pouTait par consequents comme
le remarque notre voyageur, fort bien
servir de point d'appui a Tarcbe lors-
qu*elle s*y arr£ta, puisque le r^citde
la Gen^ ne donne h ce vaisseau de
Noe que trois cents coudees de lon-
gueur sur dnquante de lai^eur (*}.
De cette ^fevation, qu'il lvalue a
16,200 pieds, Toeil embrassait un ho-
rizon immense : toute la valine de I'A-
raxe avec les ▼illesdi&rivan et de Sar-
darabad, qui semblaient comme deux
tacbes noires, se d^roulait majestueu-
sement au pied de la montagne; au
sud apparaissaient les montagnes sur
lesquelfes Bayazid est pos^ comme
Taire de Faigle; au nord-ouest, le
mont Alaghes ^levait sa t^te resplen-
dissante comme de Targent poll lors-
que le soleil dardait sur ses glaciers.
Puis k (hroite et k gauche, les divers
lacs apparaissaient comme des oasis
scintiliantes au milieu de Tuniforme
desert de la plaine
Au sud-ouest du mont Ararat, vers
les sources de TEuphrate meridional ,
est le Niphates (**) des anciens ou le
mont Nebad , Justement cei^bre dans
rhistoire arnienienne, parce que c'est
dans son voisinage que le premier roi
Chretien de FArmenie, Tiridate, fut
baptise par le premier patriarche, saint
Gregoire I'llluminateur.
O ^^7- 1* planche n<> ai.
(**) Et potius Dova
Cantemus Anpusti trophaBa
Oesans; et rigidiim Niphaten,
llor. Carm. lib. i> , cnI. vi.
Au sud de FAraxe, en se dirigeaot
vers Torient, on trouvait les monta-
•gnes Oaspiennes qui separaient les fwo-
vinces de cette partie de FAnnenie,
de la mer Gaspienne , du Ghilan et de
rAderbaidjan.
Toutes les montagnes qui separaient
au midi les provinces armeniennes de
FAssyrie ne portaient auciin nom par-
ticuher. Les Turcsleur en ont ass^ne
plusieurs, parmi lesquels on remarque
celui de Rarab-Dagh ou montagnes
noires, lesquelles servent au pays de
limites du cdte de la Perse.
Flsuves bt biyi^rbs. — Plusieurs
savants, qui ont cm voir dans le pays
d'Armenie Fancienne position du pa-
radis terrestre , ont apporte, a Fapi>ui
de leur assertion , la preuve de Yeiis-
tence des quatre grands fleuves men-
tionnes dans la Genese. lis ont retrouve
le Pichon, le Guichon et le HideiLel
dans le Gour, FAraxe et le Tigre.
Quant k FEuphrate , specialement de-
signe, il n'y avait pas lien k contesta-
tion , puisqu'il prend effectivement sa
source dans le nord, et qu'il sert de
limite k FArmenie meme, du cdte de
Foccident. En efifet, il a son origine
pr^s de la ville actuelle d'Erzeroum
oil il sort des monts Bin-gueul, c'est-
a-dire, les mille lacs. H se forme de la
reunion de plusieurs autres rivieres
plus ou moins considerables, parmi
lesquelles on remarque le Kail, qui est
eviaenment le Lycus de Pline , puis-
que ce mot, dans la langue armenien-
ne, a la signification de loupi comme
Xuxoc en grec. Depuis le lieu ou toutes
les rivieres qui contribuent a former
FEuphrate se reunissent, ce flenve
coule, vers le midi , entre la petite et
la grande Armeoie; il separe la Meso-
potamie de la Syrie, et il entre en^n
dans FIrak araoe, ou il se joint au
Tigre. Ces deux fleuves se jettenteo-
semble dans le solfo Persique au-des-
sous de la ville de Basrah.
Aujourd'hui que FAngleterre chcr-
che avec tant de perseverance k ouvnr
une nouvelle communication plus di*-
rectc avec FInde, jwup la voie de 1 Eu*
phrate, il n'est pas inutile derapp^^
qu'au rapport d'lierodote , FArmo"^
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ARMENIE.
envoyait autnlois par ceHeuve k Ba-
bjlone la plupart de ses approvision-
nemeDta. Les bAtiments de transport
^taieot dt difij^rentes especes. Les una,
nomm^ corades, oonsistaient en une
sorte debateau prehear deformerondet
d*un diamdtre d'environ diz pieds; ila
^taient feits d*osier ou de roseauz , en-
duits de bitume et dirig^ a?ec une seole
rame. Lea autres n'^ient qae des ra-
deaox , que Ton mettait h flot au moyen
d*oatare8 remplies d'air ; oomme ils ne
Souvaient remonter le fleuve k cause
e k force du oourant, le bois dont
ils 6taient construits ^tait vendu sur
les mardi^ de Babylone , et les outres
^talent reuToyte en Arm^le sur des
dnes anient k cet effet. Ge qui rend
la navigation de I'Eupbrate aussi jp^
rilleuse, c*est qae sa profondeur n^t
jamais proportionn^ k sa laxi^enr.
Dans la saison des basses eauz , il y a
une multitude d'endroits oik Ton ne
troq?e fii'un ou deux pieds d*eau, tan-
dis qu'il se rencontre plus loin des
Sounres et des toumants n^ides, ou
es bas-fonds ^e les bateaux les plus
lagers ne sauraient franchir. L'empe-
reur Trajan descendit ce fleuve depuis
Kerkisie ou Circesium jus^'au golfe
Persique. Ammien Marcellin nous ap-
prend que Julien, k la t^ d'une flot-
tille de onze cents bateaux, fit lem^me
trajet. Dtoleseizi^mesitele, des n6eo-
ciants anglais, imitant Texemple aes
raarchands v^nitiens, allaient par la
Mediterran6e k Latakia sur la cote de
Syrie , et de 11^ ils gaenaient, en passant
par Alep, Bir; ils transportaient en-
suite k dos de chameaux leurs mar-
chandises , puis ils descendaient jusqu*^
Bagdad; et les marchandises que ron
d^arquait k Orpba, arrivaient par
terre a Carahemit , sur le Tigre , qui
^tait alors un des grands entrepots de
commerce. De 1^ on les envoyait , par
le golfe Persique, dans Toc^n indien.
Le Tigre prend sa source dans Tan-
cienne provwce de Haschdean, et il
«ort des montagnes appdto monts des
Kurdes. En armenien on Tappelait
Tegghath. II coule parallMement a
rEuphrate, et le pays renferm^ entre
ces deux fleuves forme la M^sopota-
mie. Apres avoir recu surson passage
le tribut d*une infinitude petites rivie-
res, il va se Jeter dans le golfe Per-
sique.
Au nord d'Erzeroum et k Touest de
Baibourt est le fleuve Horokh nonun^
Tchorok'hi par les G^r^iens , et que
Ton crolt ^tre TAcampsis des Grecs.
II coule dans les vallees profondes et
presque inabordables deFancienne pro-
vince de Daik*b; il fait la limite du
territoire de Trdbizonde et de celui de
G^rsie. Son embouchure, dans la
mer iNoire, est pr^ de la ville deGou-
niab.
Le Gour (*), ou Cyrus des anciens , a
sa source dans la mtoe province de
Daik'h. 11 sort du mont Barkhar, puis,
apr^ avoir coup^ les provinces les plus
septentrionales de TArm^nie, il entre
dans la G^rgie, passe a Gori et k
Tiflis , capitale de ce royaume , descend
ensuite vers le sud-ouest, rentre en
Arm^nie ou il reooit TAraxe, avec
iMTuel il se confona, jusqu'^ ce qu'ils
aiOent tons les deux se perdre dans la
mer Gaspienne. On compte parmi les
prindpales rivieres qu'il revolt, celies de
Jori, Aragvi, Alazan, sans parler des
nombreux torrents qui descendent du
Schirwan et de la Georgie.
L'Araxe(**),dans]equeltous les voya-
geurs reconnaissent le Pontem Mug-
naku Arcuces des anciens, k cause de
la rapidity de ses eaux qu*il roule au
fond d^^troites gorges et de valines si-
nueuses avec un fracas ef&ayant, est
I'Abos des anciens, le Ras ou Aras
des Arabes , des Turcs et des Persans.
II est aliments par les rivieres et tor-
rents sortis des provinces de Siounik'h
et de Khapan. Apr^ s'dtre r6uni au
Gour, et avant de se jeter dans la mer
Gaspienne , les marais de FAderbaidjan
et les montajgnes du Ghilan leur ap-
portent plusieurs cours d*eau conside-
rables.
On voit, par cette ^norme ouantite
de fleuves , de rivieres navigaoles r^-
pandues sur la surface deTArm^nie,
et qui circulent dans son sein comme
des veines bienlaisantes pour porter
(•) Toy. U planche «• lo. (*•) ttkm.
10
UUniVERS.
daos tool ee Taste eorps I'aiioiidaiioe
eC la fieondit^, <(uel parti an peuple
civilian poarrait tirer de oette r^on
oh lea moyena de tranaport poor le
eommeroe aoni ai maitipiiday et oi^ il
eat ai £M:ile de rem^dier a la a^cherease
dea 6t^, la principale cauae de ateri-
Ut^ dea pays orientaux. Lea Turca iii
lea ArmeDieiis neaavent point profiter
de cea ricfaeaaea natorelfes. Ainai ila
laisaent en en moment Thonneur et les
b6n^fices de i'entrepriae de la naviga-
tion de rEuphrate h une compagnie
ioduatrielle d Anglaia.
Lags. — L'Arm^nie renferme en
outre plusienra laca dont quelquee-wis
ressemUent h de petitea mera m6diter-
ran^nea. Tel eat le lac de Van, au*
quel le g^graphe ture Hadjy*KJialfa
aasigne environ aofxante lieuea d'^n*
due. Lea Arm^niena lui donnent cent
milles de longueur et aoixante millea
de largeur. Ses eaux aont salte, ce qui
fait qu'on le d^gne sous le nom de
mer sal4e. II est auasi connu sous la
denomination de lac d'Agbthamar, k
cau.se d'unefle qui a'y trouve, et qui
est la residence d*un patriarche arm6-
nien.
« La tranquillity de ce lac, dit
M. Jaubert dana fouvrage prMte, et
ses eaux bleudtres le feraient prendre
de loin pour une mer sans orages. £n-
vironn6 de bauteura oouvertea de peu-
{)tiers, de tamarina, de myrtoa et de
auriers-roses , il eontient pfusieurs lies
verdoyantes qu'babitent de paisibles
anacborMes. La pdcbe du lac donne
un revenu de aoixante mille piastrea;
elle commence au 20 mars et finit au
80 avril. EUe est tr^s-abondante, et
eonsiste en un seul poisson nomm^
tarikb, lequel ressemble aasez k la
sardine (*). *
Un fait aasez singuliery consign^ par
le m^me voyageur, c^est mie lei eaux
du lac empi^nt oontinuellement aur
les terres,et, par cette cause, les fm-
bourgs de la ville de Van, aitu^ sur
ses bords, deviennent de plus en pkis
(*) Ea 1 8o6 , il B'eiifltit que scpc •« luiit
bateaux a voik sur ee lac, pour le oommerce
dt U petite viOe dt Biddltt.
inbabitables. Les andens auteun ar-
m^ens parlent tf one dictie immense
Su'aurait constmite Stoiramis, sent
oute pour prot^ger la ville oontre les
inondations. Les vestiges de oe travail
gigantesque subeistent encore, et le
nom persan de Bend-ma , i%tte, on'ii
S9rte, Concorde k prouversa destina-
on primitive.
A rorient du lac de Van se troove
un autre lac auquel le g^ographe aiabe
Abou*lfi6da donne cent trente miUes de
long, sur la moiti6 environ de large*
n porta plusieurs noms; d'abord il
est connn sous celui de lac saM, ce qui
fieiit qu'on Ta confondu quelquefois avec
le lac de Van. Les Persans et les Tuna
Tappellent indifif(§remmeDt lac de T^
bru ou lac d'Ourmieh. Souvent il est
d^gn6 oomrae lac de T^, k cause
d'une petite tie de cenom situ^ au mi*
lieu de ses eaux , et oh Tempereur mo^l
Houlakouavait&itcoostruire une for*
terease pour y mettre en d^t aea
triaon. Le sumom de Khabodau,qa*il
porte encore, est une ^itiite arm^
nienne qui signifie bleu, et qui lui a
probablement ^t^ appliqu^ k cause de
razurdeses eaux.
Dans les oontrto septentrionalea et
sur la rive gauche de TAraxe est situ^
le troisidme grand lac de rArm^nie. I!
porte le nom de lac de S^an, k cause
de nie appel^ ainsi qu*il renlferme et
oik se trottvait un monast^ de oe
m^me nom, fort c61^bre par la aaintet^
et le savoir de ses religieux. Les Turcs
et les Persans Fappellent Kouktduik-
Daria ou Tengiz , ce qui veut dire p^iie
mer. II se distingue des deux autres
grands lacs par la quality de aes eaux
qui sont douces. Outre oes trois lacs,
remarquables par leur ^tendue, il e'en
trouve encore dans lesdififtentes pro-
vinces une tr^-^rande quantity. On
dte celui qui avoisine la ville de Kan.
nomm^ B)Edagatsis, et teas ceuz qui
entourent Erzeroum, dont le grand
nombre a fait donner anx mootacnea
au milieu deaquelles ils sont aenes le
nom de Bin-gueul ou les mlUe htcs,
ainsi que nous I'avons dit.
GiooBAPmB DB ii'AxiiiHn; sa
]>m8iON AiiciBiiif B, — II est ateolu-
ARK^NIE.
11
meat DfoMaire de imn ooimahre
randemia lihrisioo de rAnnemc, telle
que nous la dooneot lee toivaine srecs
et latiiw* £Ue 6tait partag^ en deux :
k Forient de rEuphrate 6tait la cranSe
Arm^nie, qui s'^tendaitjuaqa'ji u mer
Caspienoe; k roccident, la petite Ar-
nuftoie, qui ae aubdiviaait en troia au-
tres d^partementa oomm^ premite,
aeooode et troisiteie Arm^nie.
Soiyant le patriarche Jean VI, hia*
torien fort remarquable, nn anden roi
de I'Arratoie, nomme Armaniagy
ayant soomis apr^ de rudea com*
bats lea Cappadociens, appela de son
Qom, premiere Arm^ie, cette prok
finoe; depuis le Pont juaqu'au terri*
toire de Mtiitene, il nomma ce pays
leoonde Arm^nie; la troisitee Armie*
nie a'<^tendit depuis M^itdne jusqu'aui
ffontieres de la Sophtoe; le pays com-
Iiria en^e la Sophooe, Martyrdpolis et
*occident de la proTince d' Aghdsnik'h ,
filt oomm^ quatri^me Armenie.
Toutelbis ees subdivisions ne ftirent
Ktee adoptte que par les ^riTaiaa
Kantina, et lea autres g^ographea
ae contentaient d*admettre les deux
orandes divisions de grande et de pe*
fite Armenie, ce que font aussi lea
naodernes.
Au dnquitoe siede, la partie qui
nasaa sous la domination des Perses,
lors de Textinction de la race des Ar-
saddes, prit le nom de Persarm^nie.
L'empereur Justinien divisa le pays en
dnq provinces distinctes : la grande
Armenie, dont les sources de l*Eu-
phrate dtaient k peu pr^ le centre , et
qui portait ausai le nom d*Anm^ie in-
t^eure ; au midi , restait la partie que
les Remains nommaient quatriraie
Arm^ie , et oui oontenait les cantons
d'Anxitine, dTIneilene, de Belabitdne
et de Sophdne; a Tooeident de I'Eu-
phrate, on trouvait la premiere, la se-
ooode et la troisidme Armenie, ou le
PontIV>ldmoniaqueavecTrdi>izonde(*).
(*) L*ardi0v^utdeTli«Malomque,Eiitta-
tka , npporte daas ion GonunenUire sur
Dnw \t P^iegale, que Justinien op^ni une
mysnon nn pen diiereale. u pirlaset fAr-
menifi en quatie parlies : de It premiere ,
La division proprement nationale de
rArm^nie, et cdie que anivent ordi-
naireaieat les autenra armdnlens, par-
tageait le pays en quinze provinces, oik
dtaient enciavdes ae petitea prindpau-
t^ aeooadaires. Les noms de oes pro-
vinces ^taient :
\^ La haute Armenia,
2«Daik*h,
9« Koukark'h,
4*0udi,
S« Quatritaie Armenie,
6* Dooroup6ran,
7* Ararad,
8* Vasbouragan,
0* Siounik'h,
10* Artsakh,
ll^Phaldagaran,
13»Aghdsnik'h,
13'Mogkb,
14*Gordjaikh,
15* Persarm^nie.
II serait assez diUBcile de designer
avec precision les limites de cette der-
ni^re province, qui changeaient k cha*
que nouvelle guerre engage entre les
Perses et les Arro6niens.
Les conqu^tes ult^rieures des Grecs
d^une part, des Persans de Tautre, les
invasions successives des Arabes et des
Turcs seldJQukides, chaneerent k plu-
sieurs reprises cet ordre de choses.
La totality du royaume est actuelle-
ment partag^ entre Fempire turc, le
royaume de Perse et Fempire de Rus-
sie, sans compter les districts dont se
sont empar6s qudques princes kurdes
il foma une itliisiie bepUpole, dont le
dief^iea iuit Baianis, wnBomhe anl^riea-
renient liCOBtopoUs ; Th^odosiopolis Golo-
i|ia« Trebiionae et Cerasus du Pont Poli^-
moniaque y etaient comprises. Justinien
forma easute la deuxiime Armenie , et en
fit une pentapole ou se trouvait S^baste. La
troisieme Arm^e , appelee ausisi quelque-
foisseconde, fut constitu^ enhexapole; sa
capitale itait M^litene. On trouyait encore
dans cette province Comaaa, Chryse ei
Cucosus. Enfin la quatri^e Arm^ie, gou-
vemee per des satrapes, fiit formee de
diYorses pro^inoes qui jporlaient les noms
de TZopkane , de Baibitene el d'autres sem-
blaUes denemiiiatioBS barbares.
12
UUNIVERS.
oui savcnt y maintenir leur ind^peii-
oance.
POBIIOH DB L'AbMBNIB AFPABTB-
HANT A LA TuBQUiB. — Les Turcs
possMent h Touest de TEuphrate toiite
rArmtoie mineure, et h Torieiit le ter-
ritoire qui leor est soumiB 8*6teiid dei
montagnes de la Gtorgie k eelles de la
M^potamie, en a'avan^ant da cdU
de Torient, jusqu'au delli da mont Mih
sis. Six paebas sont diarg^ de Tadmi-
nistration de oe pays, et leor gouver-
iien]ent8*appelle|ENicAalU(. Les aoms de
oes pachahks sont Eneroum, Akiska,
Khars Y Bayazid, Moasdi, Diarbekr.
lis renferment ane grande quantity de
sandUakaU oa districts Mininistr^^
par des esptos de vaivodes, dont plu-
siears se sont aifranchis du tnbut
qa*ils doivent payer k la Porte Otto-
mane.
POSSBSSIONS DB LA RUSSIB. — La
Russia marche cbaque jour k la oon-
qu6te de TAnn^ie, et il est blen cer-
tain qu'elle occupera prochainement
tout cet ancien royaume. ^Ir^li-Khan
lui a d^jli fiiit enti^ment l^andon
de ses domaines, comprenant et la
G^rgie et FArm^nie mmeure. Depuis
ce temps, elle a conquis tout Tespace
oompris entre le Kur ou ancien Gyrus
et TAraxe, jusqu'au confluent de ces
deux fleu?es, prte de la ville de Berd^
et de Djavad. Cette presqu'tle contient
trois lacs : le Paravan , le Palat et le
S^van. Les deux villes les plus consi-
derables sont Tiflis sur le Rur, et
l^rivan prte de FAraxe, qui ^tait la
residence du khan persan. On remar-
que aussi plusieurs autres Tilles, telles
queCbaki, Ghirvan, Ghamakhi, Nact*
diavan, Asdabad, Lori, Berd6. Qe
pays est d^fendu par la place forte d'E-
riyan, et I'imprenable forteresse de
Chouchi , oik les princes arm^niens al-
laient autrefois aierdier un asile cen-
tre les incursions des Perses et des
Arabes. Les montagnes qui I'entou-
rent forment par leur encemte une se-
conde citaddle, que la nature semble
avoir fortifiee sans le secours de Tart.
Gette presgulle comprenait autre-
fois les proYtnoes de rAnnteie ma-
jeure, de Daik, de Koukark, d*Ara-
rat, et une partie du Vasbouragan sur
TAraxe. Au confluent du Kur ct de
TAraxe se trouve la province d*Oudi ,
appel^ Ottoe par Pline, et Mottee par
Comme Eczmiaxin , iMdenoa do pa-
triarche universel, est enclave dans
oes possessions, il ne &ut pas s'^ton-
ner si la Russie, pour consolider ses
conqultes, tient beauooup a maintenir
sous sa puissance le si^e du chef spi-
rituei, sur Section duqud le cabinet
de Saint-P^tersbourg influe dirocte-
ment aujourd*hui. Les Russes ont cm
que la scission existante entre I'^glise
d'Arm^e et oelle de Rome rapmo-
cherait d'eux ks Arm^niens. Mais
oeux-d ont une profonde antipathie
pour leurs nouveflix mattres, en qui
us retrouvent toutes les erreurs et les
pratiques des Grecs, avee lesquels ils
se sont dispute des sidcles, sans pou-
voir jamais s*accorder. En outre, les
pretentions du czar, qui veut coneen-
trer dans sa personne toute Tautorite
q)iiftueile de son empire, et qui, par
consequent, tend toujours h afraiblir
oelle oil patriardie armenien, ne fait
qu'accrottre le roeoontentement des
fideles de cette l^slise.
Les conquetes aes Russes ne se sont
pas bomees k cette presqulle d^jik asses
vaste; elles s'etendent au mkli au Mk
de TAraxe , et pendtrent fort avant dans
r Ararat et le vasboun^an, qui appar-
tenaient au khan d*]£rivan. La^irtie
situee au del^ du conflumt du Rur et
de FAraxe, en allant jusqu'ii la oier
Caspienne , a cede depuis peu aux amies
de ui mdme puissance.
POSSBSSIONS DB LA PBBSB. — U ^
a encore peu de temps que la partie
montagneuse de FArmenie, situee i
Toccident de Gandjah et de Berde , etait
soumise a plusieurs petits princes, trf-
butaires des Persans, qui prenaient le
titre de mMk. nom arabe synoimne
du mot roi. Mais, dans lesdemieres
guerres oontre la Russia, la Perse a
perdu ce territoire, et il ne lul reste
plus que la portion comprise entre la
partie soumise aux Turcs, les monta-
gnes des Kurdes et le lac d'Ounnieb.
Quant aux cantons situ^s au sud du
• •
• •• ■
■ • • *
arm£nie.
13
lac de Van, en allant vers le Kurdistan
et le Tigre, Us sont sooinis a divers
{irinoes kurdes r^idant k Betlis , Djou-
amerk et Amadiah.
Poor que le lecteur saisisse d'une
mani^ daire et succincte les demiers
Ghaii{;eaients survenus dans la division
politique de TArni^nie, nous les r^-
merons dans le tableau suivant :
novniGu Ajrcnmrig.
Taabouragaii
Siounie.
Phaidigareti
Outfi.
Koukar.
Gordjaik et Persarmenie.
Dourouperan.
Annenie siip^ieure.
Dttk'li.
DITttlOV MODSmVB.
PKniiepe
Seoonde { Arminie
Troiiiinie
ie. I
iSrivan, Van et une paitie
de I'Aderbaidjan.
Nakdchivin el une partie
du Karabagh.
Karabagh.
ScMiiekheti oa Armenie
georgieime.
Aderbaidjan.
PachaKluT^e Kan, de
Bayaiid , f Kurdistan.
Akbiaka.
Diarbekre.
ktiuiwim Mnriumi.
Kesarieh, QhuMid,
Siwas, sibasle.
Province nuM de I'ilmeme
ou gouvernement dl^van.
) Province nuse de Karabagh ou
) gouTernement de Ckondia.
I Gouvernement nuse de
I Tiflis.
I Chefs kurdes et gou^mement
i persan de Tauriz.
Pachaliks turcs.
Padudiks turcs.
Pachaliks turcs.
I
VILU8 BBKABQUABLBS DB L'AB-
GmfKB Abmbnib; NOMS DB GBLLBS
QUI ONT GONSBBVB QUBLQUB IMPOB-
TANGB«— j&rserottfii(*). La viile prind-
pale de la hante Ann&ie est Gaarinj
qui prit le nom de ThMosiopolis,
paroe qu*elie fut fond^ vers Tan 415,
par Anatolios, gdn^ral des arm^s de
rempereur Th^odose. Gomme elle itait
plus particnlidrement sous la domi-
nation des enopereurs grecs, on Pap-
pela, vers le nnlieu du onzi^me sikle,
Arzroum ou Erzeroum , corruption de
la denomination aiabe j4rzel roum ou
lys des Homains, c'est-^-dire des
la continuation de Tenroire remain.
AukMird'hni die est la plus peu|d^
des vules d'Arm^e; on y oompte cent
mille habitants, que quelqucs voya-
geurs dvaluent. mime h cent dnqoante
miUe. Toutefois des rensdgnements
(*) Toy. la planche n* a.
post^rieurs k la demito guerre des
Russes montrent que hi pcste des an-
nto pr6o6dentes avait be»icoup r^uit
la population: on ne revalue qu'ik
dbatre^ingt mule flmes. Le nombre des
ramilles turques est porti k onze mllle
sept cent trente-trois, et oehii des fa-
milies chr^ennes k quatre mille six
cent quarante-dnq; on y trouve dn-
quante ftunilles du rit grec, et six cent
quarante<9nq du rit catholique. La po-
puUtion n'est pas toute armenienne; il
s'y trouve beancoup de Turcs, de
Grecs et de Gtorgiens; on y voit une
grande cbapeUe annlnienne. Les mai-
sons, construites en bois, sont assez
basses. Le froid y est trds-vif , et hi
neige oouvre la terre la moiti^ de
I'ann^. Dans le voisinage de la ville
coulent des eaox min^rales fort c6-
ld>res^ Le gouvemenr qui y r^ide est
un pacha k trois queues.
La dtadeUe seuie (*), qui occupe le
centre de la ville, est prtentement
(*) Toy. la planchen* 3
H
rUNlVEES.
fortMMe; die ett sitii^ sur une petite
toitienee et entour^ (fun fos^ assez
Dfofond; une double enceinte de murs
renvironne, mais le second mur seu-
lement est en bon tot; il est bdti de
pierres carrto et solides avec assez de
rtoilarit^ ,«cfao8e fort rare dans les for-
tincations desTurcs. Les maisons n'ont
ou'un toffe, et leor cb^ve apparence
aonne h rint^rieur de la ville un air
de d^nAment et d'abandon qui attriste
le voyageur^ Les toits plats des mai-
sons forment une esp^ de terrasse
enduite de terre glaise que tapisse une
petite mousse verdAtre, et cette im-
mense mosaTgue de verdure , form^e
par Tagglomeration des toits, donoe
de loin, a Erzeroum, |>lut6t Taspect
d*une prairie que d'ane ville. Da r^te ,
les environs sont nus et arides, et k
peine Toeil rencontre-t-il quelques jar-
dins dans la plaine. Les Arm^niens
dissidents sont r^gis spirituellement
par un 6vtoue , qui a sous sa juridiction
tout le i>adialik. Un s^minaire assee
Dial administr^ ne peut sufifire h Tins-
truction du clerg6, qui est ignorant et
pen nombreux. Aueune tole n'est to-
blie pour la jeonesse^ et il est trte-
difBcile de renccmtrer oms femme qui
sacbe lire* C'est cbez les Armteiens
catboliques ^e Ton tvou^ ieulcment
une civilisation grogrestive et dee eon-
naiasanccs ^tenducs. Leor noinbre ^kt-
croft chaqae jour, et lea fruita qu*ils
recueilleni senient eoeore plus abon-
dants, i^ils tolent ^ergiqaemeiit se-
condte par I'tgliae d'Oaadent. L'^ta-
blisaeraent des mtasMmnaires catboli-
ques remonte a VmmSt 1688. Ge furent
les j^suites qui, aooi la protectioD de
rambassadeurfranfais 4 vuirent lea|V«-
roiers eieroer Icur £^le qxntolique
dans cea cobMu. Us omt en pleaieors
perateutions violentes li endurerf dont
le oontre<<oapretomba]t avec violence
aur leur nrtlt troopcau; mais rien n'a
pu ^ranler la Constance de ees fiddles,
oui trouvaient dans Fint^rit^ de lear
m un adoucissemeni cflicaoe k tous
leora mam.
• Le climat d*£rzeroum , dit Tour-
nefdft dans son voyage dn Levant , est
extrtoiement froid. Je ne suis pas
6tonn6 de ce one Lucalhu troote
strange que les oiamps fussent encore
tout nus au milieu de P^t^, hii oui
venait dltalie, oh la moisson est faita
dans ce temps-lli. n fnt encore bien
{)lus surpris de voir de^la glace dans
'equinoze d*automne , d'apprendre qoe
les eaux par leur fifoideur faisaient
mourir les chevaux de son arm^ , qu'il
fiedlait cesser la glace poor passer les
rividres, et que les soldats ^talent for-
c^ de camper parmi la neige qui ne
cessait de tomber. Alexandre S^y^
ne fut pas plus satis&it de ce pays.
Zonare remarque que son arm^e, re-
Sassant par l'Arm6nie , fut si maltait^e
a froid excessif qui s'y feisait eenfeir,
qu*on fut oblige de couper les mains et
MS pieds h plusieurs soldats aue Poa
trouvait k demi-gel6s sur les diemnis.
Cette ville est le passage et le repoaoir
de toutes les marebandisea des Indes.
Ces marcbandises, dont les prindpales
sont la soie de Perse, le coton, les
drogues, les toiles jpeintes, ne font
que passer en Arm^nie. On y vend tr^
pen en detail, et on laisserait mourir
un malade foute d*nn groade rfaiifatfbe,
quoiqu'il y en eAt plusieurs ballet tent
entims. On n'y d^ite que dn caviar,
qui est un ragotlt d^testiMe. Ceat un
C'overbe dans le pays^ que si I'on vou-
it doimer a dejeuner an diaide, il In-
drait le r6galer avec do cal(6 Sana aocre ,
du caviar et du tabac; je voodraisy
igouter le vin d*£r2eroum. Hern flf-
mes surpris de voir arriver iiEneroum
une si grande quantity de gafMiee,
qo'ila appdlent 6oia; die vient de
Perse, d aert pour la teinture des
Guirs et des toim. »
J^re%f on Erzenga, Tune des vBies
principales du mtoe pachaiik dlMe-
roum, teit cA^bre dies les amiedo
par aes temples dev^s k la ddasse
Anabid, qui est la Vtois dei Orett.
Les antiquaires pomrndeot MM de
pri6cien8eB d^eouvertca pafioi lis r«-
nes que phisienrs trsmManiHits de
tsrre ont aocnnroUes dais sss eaeeMe.
EUe fut longltmiii g/smsiiide pas das
6mirs mogols ou tartares, qui en
conservirent la souverainet^ jveqte
sous les fils de Tamerlan.
ARMeiflE.
15
)
AfUf boofg d^ndant aujourd'hui
d'Encroum, et, ancienDement, forte-
resse cfl^re que d^end la rive ooci-
dentale de TEuphrate. A I'^tablisse-
ment du christiaoiame, aa biblioth^ue,
Sr^deuae pour les traditiona antiques
e la Perse, fot d^truite. Elle fut Iod^-
temps le d6p6t des tr^sors et des n-
cfaesaes des rois arm^eDS.
Berdi, ou Berdaah, petite ville qui
aoquiert chaquejour de IMmportaDce
depuis la conquete de oette province
par la Russia. EUe 6tait, au nuiti^me
sitele, la r^idence dea rois des Agho-
vans.
Aniy qu'il ne &ut pas confondre
avec ie bourg de ee mema nom. Elle
faX longtemps la capitale de TArm^nie
enti^ Situte au confluent de I'Ak-
liour^ et dtt Rhab, qui se iettent
dans TAraxe^ elle oontenait, dit-on,
au onzitoe si^e, cent mille maisons
et mille ^lises. En 1064, aprte avoir
^t^ iivrde par trahison auz Grecs, die
iut prise d^assaut par le sultan Seld jou-
kide Alp-Arslan. IjCs Armtoiens ren-
trkent en possession de cette ville,
mais pour peu de temps, ^tant toa-
jours diasses par les hordes toan-
Sires. En 1319, elle fut boulevers^ et
dtruite de fond en comble par un
tremUement de terre. line partie des
habitants se r^fiigia dans bi Grim^,
ou leurs descendants existent encore
prtentement.
M. Ker-Porter, qui a visits ses mi-
nes, nous en fait une description bien
propre ^ 6veiller Tattention des autres
voyeurs. D^fendue d*un odt^ par la
rivim Aipatcfaai, elle est femwe au
nord et ^ rest par un double rang de
hautes muraillei et de tours dont la
construction 6tonne. Toute la surface
du terrain ne pr^sente que des debris
de colonnes, de statuea, dont Teztoi-
tion est parCadte. Ce qui reste de qud-
guea ^ses nous donne une haute
Kite de leur andenoe magnificence.
Mais ce qu*il y a de plus fmKligieux,
€esi Panaen palais des rois d' Anmnie ;
on le prendrait pour une ville, k son
itendue. H est si magnifiquement d^
cor6 au dedans et au dehors, qu'au-
cune description ne saurait donner une
id^ de la variM et de la ricbease des
sculptures qui en couvrent toutes lea
parties, ni des dessins en mosafqne
qui oment le sol de ces salles innom-
brables. Toua les restes d'Mifice que
renferme cette ville exdtent Tadmira-
tion par la solidity de la bAtisse et
rexceUence do travail.
f^agharsehabad, bAtie six sikles
avant notre ire , par le roi £rovant I*',
et qui fut le siege du royaume. Aujour-
d'bui elle est entiirement niin^, et il
n*en reste que I'^ise d'Ecsmiazin,
dont nous donnerons la description
dan\un futre lieu.
Ardoichadj bfltie d'apr^ les avis
d'Annibal, sdon Strabon et Phitarque:
elle fht, vers la fin du auatri^e siede
de notre ktt^ bi r^ioienoe des rois,
gui la quittmnt, k cause de Tinsalu-
rit^ de Fair, pour aller a'^tablir k
Tovin. Les Armtoiens donnent ao-
tuellement k ses mines le nom d'Ar-
dascbar. Cbardin les a viait^es, et il
parle avec admiration des d^ris d'un
magnifique palais nomin^, par les ba-
bitanta du pavs, TaJM Terdat, c'est-
Mire, le trone de Tiridate, nom qui
lui vient probablement du premier roi
chr^en de I'AnnMe.
Tcvin ou Tevin^ ainsi nommte par
les Persana, selon rhistorien Bioise de
Khoren^ k cause de sa podtion sor
une colline, bien que ce mot ne se
trouve point, comme il le pretend,
avec cette signification , dans la langue
persane ; elle fut qudque temps la ca-
pitale des rois, et les patriarehes y
tranafl^drent leur si^e k pludeurs
reprises. Elle fut conquise par les Gter-
giens , puis par les Atabeks de T Ader-
baHyan , et enfin par les Mogols. De-
puis cette ^poque . die est condd^a-
blement draiue : les voyagenrs m^me
nous la d^pdgnent comme une ch^tive
bouigade.
L'ao 894 de notre to, la vUle, oui
^tait alors florissante et bien peapm ,
fut rain^e par un treroblementde terre.
Nous emprunterona k la plume riche-
ment descriptive de Jean VI, rhisto-
rien et le patriarche , le r^t de ce
dtostre dont il avdt H/i en qudque
sorte le t^moin oculaire. « vers ce
16
UUNIYERS.
temps « lUHiB dit-il , un borribie trem-
blement do tern arriva aubitement la
nuit k ToYin. Le trouble, la atupeur ,
Ta^itation et la ruine pestont h la
fois sur les habitanti de la Tille cnii
fut boulevers^ de fond en oomble.
Car lea murailles d'enoeinte , lea palais
dea eranda et les bumbles maisons du
peuple, forent ^alement renvers^s;
et, en un clin d'oeil, cea lieux devin-
rent comme la plaine sterile d'un
d^rt. L*^difice sacf^ de T^lise m6tro-
Solitaine et les autres chapellea soU-
ement bdties, furent &ranl^, d^-
molis et ruin^a , et offrirent la Crista
similitude de cavemes encombr^es de
roca arides. A la yue des monoeaux
decadayrea 6toufif<68 sous lesd^mbres
dea toits , ensevelis sous terre ou rou-
lant sur la pouasi^re, le coeur le plus
insensible et ausai dur que le roimer ,
^it saisi dedouloureuzg^missementa,
et se fondait en larmes. Je ne parlerai
point dea membres de la meme fa-
mine , dea amis ou des personnes unies
par dea liens de parente , inconsolables
dana leur douleur , leur deuil et leura
lamentations ; je tairai les pleurs , les
Stoissements et les ebants fun^res
ea jeunes filles , dea bommes et dea
femmea se d^lant sur leurs pertes ,
et Levant leurs eria juaqu*au del.
Quant k la multitude des morts , elle
ebit telle , que les tombeaux n'j pou-
▼aient sufnre , et beauooup 6taient ie-
t6s dans de larges foss^ ou dans lea
erevasaea des robbers. »
Ani se releva de ses mines, et Ka-
kig n , dernier roi des Pagratides , la
oAsL aux Grecs ^i ^tablirent un gou-
vemeur avec le titre de due. En 1064 ,
le edl^re sultan des Seldjoukides ,
Alp-Arslan, assidgea la ville, et s'en
empara. II rasa les murailles et laissa
un (;ou?emeur persan , qui cMa ses
droits k V6mir de Tovin, pour une
somme d*argent. Get 6mir, nomm6
Fhadloun , aborigine kurde , en donna
le gouvemement k son petit -fils Ma-
noutch^, qui rebAtit les murs de la
ville , et y ap^la an grand nombre de
nobles armoiiens.
fTm, situ^, au sud-est , sur la nve
du lac qui porte le mtoe nom ; cette
ville est fort ancienne. D*apr^ les an-
ciennes traditions , elle fut fondle par
S^miramis, quirappela^^m^anocarfe.
Plusieurs bistoriens ont d6crit majgni-
fiquement les antiques constmctiona
qu'elle renfermait , et qu*on attribuait
aux aouverains de rAssyne. Lorsmie
Timour envabit cea pays , il vooiut a6-
truire ces vieux monuments ; mais leur
solidity ofifrit un obstacle msurmon-
table II aon vandaliame. On voit encore
dea travaux semblables aux constrac-
tiona dites miopdennes, entr^ris
dlans le but de servir de digue aux
eaux envahissantes du lac; et nul
doute que oe monument ne remonte
aux ft^es les plus recul^.
L'historien Molse de Kboren parle
aussi d'une montagne artificielle que
Steiramis ^eva au nord de la ville
actuelle, sur laquelle elle avait place
aon palais. M. Sdralz , qui , par ordre
du gouvemement fran^is , visitait, en
1837, cette contr^, et qui a trouv6
une fin malbeureuse cbez lea tribua
aauvages des Kuides , a reoonnu la oof-
line form^ d'dnormes quartiers de ro-
diers , et qui porte la dtadelle actuelle.
Cette oollme s*^teod de Touest k Pest
Peapace d'une beure de chemin. A Tin-
t6neur, aont d'immenaea cavemes et
des sallea voAt6es oik Ton trouve beau-
ooup de d^ris de statues. Ge qu'il y a
de plus remarquable, ce sont les ins-
criptions cun^formes, ou en fimne
de clous, qui couvrent I'entree et les
flancB de la montagne, et que H. Schulz
a copito pour la premiere fois. Toute
la contr^e est converte de mines qui
semblent £tre de la mtoie nature que
eelles de la ville.
Le aouvenir de S^miramis s'est con-
serve dans ces contrto, car Tune des
petites rividres qui descendent des
montagnes des Kurdes dana le lac,
porte encore le nom de Torrent de
S^miranUs.
II convient de donner ici la traduc-
tion du chapitre ou Moise de Kboren
rrle des andennes constructions de
grande rdne de T Aasyrie. On verra
que le r^t des voyageurs moderoes
Concorde avec le sien.
' •S6miramis, apres a'ltre repos^t
arm£nie.
17
quelques jours dans la plaine d' Ararad ,
aiDsi nonuD^ du roi Ara, s'avan^a
vers uDe region montaeuse , situ^ au
nord(car c^^it la saison de V6t6).
pour se rto6er dans ces riantes cam-
pagnes et oes champs en fleur. La
beautd du pays, la puret^ de Tair, la
limpidity des sources et le murmure
de rivieres majestueuses dans leur
cours, frapp^nt sa vue: «I1 faot,
dit«lle, batir une ville et un palais
propre a habiter , dans ce lieu , ou Tair,
reau et la terre sont si salubres , afin
de passer agr^ablement , en Arm^nie,
la quatridme partie de Tann^, V€U^
et de rester k jNinive pendant les trois
autres saisons plus fit>ides. »
« Ayant traverse une certaine ^ten-
due de pavs, elle arrive au bord d*un
lac sal6. Elle aperfoit sur ses rives une
oolline allongee, s'^ndant de I'ouest
a Torient , et l^^ement incline vers
le nord ; tandis qu*au midi ^tait une
caveme profonde, ouverte vers laciel.
II y avait aussi , an pea plus au sud ,
une vall^ longue et Diane qui , en tour-
nant du e6U oriental de la montagne ,
redescendait vers le bord du lac,
comme un torrent lone et sinueux.
De grands ooors d'eau cTune agr^le
saveur, sortant de la montagne^ apr^
s'^tre infiltr^s h travers les ravins , et
s'^tre r6onis dans la partie inf(6ri«ure,
s'^pandaienten larges rivieres. A droite
et a gaudie s'^levaient de nombreux
Edifices; et, k Torient de cette mon-
taene enchants, on voyait une autre
ooTline plus petite.
« S^miramis, ayant fix6 son choix
sur oes lieux , fit venir sur-le-champ,
dans 1 endroit qui la charmait , vingt-
deux mille manoeuvres de I'Assyrie et
des autres parties de ses £tat8 , puis six
cents de ses plus babiles ouvriers exer-
c^ k travaiaer le bois et la pierre,
Tairain et le fer; ce qui fut ex^ut^
conform^ment h ses ordres. On lui
amena done promptement une multi-
tude d'ouvriers apprentis, sous la oon-
duite d'architectes et de maltres ins-
truits dans leur art. EUe commenca
par faire oonstruire une digue pour la
rivi^e avec des quartiers de rocher
d^ane ^norme grandeur, cimentds avec
^ Uvraison, rARMENiE)
de la eliaux et du sable , dans des pro-
portions prodigieuses de longueur et
de largeur ; construction qui subsiste,
dit-on , dans toute sa solidity, jusqu'i
ce jour. On nous a racont^ que , dans
les crevasses et les souterrains de cette
di(nie, les brigands et lea gens pros-
cnts cherchent une retraite aussi sdre
que sar les sonunets des rocbers et
des montagnes. Que si quelqu'un vou-
lait en faire I'expdrience , if ne pour-
rait , malgre tons ses efforts, d^tadier
de cette aigue une petite pierre ^rosse
oomme celie d'une fronde. L'ajuste-
ment des blocs est si parfait, que
celui qui les considdre croirait que Ic
tout est le jet d'un liquide fondu. La
digue se prolonge Tespace de plusieurs
parasanges, jusqu'ji Templacement de-
sign6 de la ville.
« La reine divlsa en plusieurs ordres
la troupe des ouvriers, et pr6posa a
chacun de ces ordres des mattnes ba-
biles dans leur art. Ayant press^ de
cette mani^ Touvrage, au bout de
quelques anndes elle termlna ce mo-
nument admirable par ses murs indes-
tructibles, et dont les portes ^iept
d*airain. Au milieu de la ville , elle fit
bAtir en f^ande quantity des maisons
dont les pierres etaient de dififi^rentes
couleurs, et h deux et trois stages,
toutes convenablement expose au
soleil ; die divisa les quartiers de la
Vflle en un certain nombre de rues
spacieuses et r^lidres , et elle y cons-
truisit des bains somptueux. Une bran-
che du fleuve d^toum^ fut distribu^
au milieu de la ville pour les divers
besoins des habitants , et pour I'arro-
sement des vergers , des jardins, et des
f>arties environnantes de la ville , sur
a rfve droite et la rive gauche du lac.
Tous les lieux exposes au nord , au
midi et au levant , furent embellis de
chAteaux, d'arbres touffiis aux fraits
et aux feuillages varies. Elle planta la
vigne dans beaucoup de fertiles vallons,
et, lorsque la ville fiit ceinte d^une
muraille remarquable par sa structure ,
elle y fit habiter une colonic d'hommes
innombrable.
. « Comme pen de personnes ont po
connattre Traifice qu*el1e construisit ^
2
18
L'UNIVERS.
la pointe de la ville, et'les admirables
travaux qu'elle y extota, nous n'en
parlerons pas. Apr^ avoir environn^
ces hauteurs d*un mur dont les entrees
etaient aussi difBciies que les issues ,
elle y bdtit des palais pour sa r^i-
dence, et des retraites terribles.
N'ayant aucun renseignement positif
sur ces constructions, nous nosons
pas les d^rire. Nous nous contente-
rons de rapporter au*on s'aocortte g^
u^ralementa regaraerce travail comme
le premier et le plus imposant^e toutes
les constructions royaies. En face de
la caverne expose au sole!! , dans ce
roc si dur que le poin^on d'acier ne
peut y tracer une seule ligne , elle avait
pratique, de distance en distance, des
temples , des salles , des lieux de d^
p6t pour ses tr^sors, et de longs sou-
terrains , sans que personne puisse sa-
voir exactement la destination de ces
travaux surprenants. Sur toutes les
parois du rocher , elle a grav6 de nom-'
breuses inscriptions, comme celled
que le stylet empreint sur la cire , chose
dont la vue seule frappe tout le monde
d*^tonnement. En outre, die 61eva,
dans le pays des Arm^niens , beaucoap
de colonnes qu*elle couvrit d'inscrip-
tions pour perp^tuer sa memoire.
Dans beaucoup de lieux , elle posa des
limites charg^^ de la m6me toiture.*
Ces details, donn6s par un auteur
du cinqui^me si^e de notre ^re , sur
des monuments encore existants, et vi-
sit6s r^cemment par des voyageurs,
font vivement d^irer que quelque sa-
vant puisse un jour d^chinrer cette
6criture qui paralt 6tre ctmHforme^
et nous expliquer ces inscriptions, a
Taide desquelles on suppl^rait vrai-
semblablement a d'importantes lacu-
nes de rhistoireancienne de rAssvrie.
Le P. Luc Indjidjan, membre tr6s-
distiiijgu^ de la congregation des
M^hltaristes arm^iens de Venise,
nous donne, dans sa G^grapbie de
TArm^nie , les details suivants sur les
antiquit^s de la ville de Van , traduits
par M. Saint-Martin.
« Au nord de la ville, dit-il, en ligne
droite , est une tr^-haute montagne
•de pierre ; on ne pourrait en atteindre
le sommet avec une balle de fusil:
c'est la que fut fond^ et taill^ le cha-
teau impenetrable de Van, oavnge
de Semiramis (*). Cette montagne est
d*ane pierre dure d'on genre particu-
lier; elle s'etend de Touest a Test,
Tespace d*une heure de chemin: le
pied de la montagne du cdte du midi ,
est oontigu aux murailles de la ville ;
c'est III qu^est le faubourg. Cette mu-
raille et le chateau sont a une demi-
heure de distance du lac. Le cdte ex^
terteur de cette montagne , c^esMniire,
celui qui est an nord du cdte de la
plaine , est une hauteur tr^s-escarp^ ,
remplie d'enormes rochers; les mu-
railles ont et6 souvent detruites et re-
construites.
• On trouve dans rinterieur de ce
rocher, en cinq ou six endrolts, d'im-
menses cavemes creus^es dans le roc
par les anciens ; les portes en sont tour-
nees du c6te de la ville ou du midi.
On voit d'autres cavemes de I'autre
cAte de la montagne, c*est-^Hlire au
nord. Elles sont toutes abandonnto
maintenant. Ce sont les excavations,
les cavemes, les souterrains dont
parle Molse de Khoren.
« Du cdte du midi , on voit une ou-
verture tailiee avec la plus grande
peine dans le roarbre le plus dur, qui
conduit h une tres-belle pi^ dont le
plafond est en forme de vodte; sur
toute la longueur de Touverture, se
trouvent des inscriptions dont les
lettres sont inconuues aux habitants.
Cette porte conduit jusqu'ao centre ou
au coeur de la montagne. II est fort
difficile aux habitants d> parvenhr
avec des dchelles , soit qtt*iis viennent
par en haut de la citadelle , ou par en has
de la ville. On trouve egalement, du
c6te du nord , vers le bas de la mon-
tagne , trois ouvertures qui conduisent
aussi h des pieces dont les plafonds
sont en forme de vodte : on voit ega-
lement sur ces portes des inscriptions
en caract^res inconnus aux habitants ;
ce sont probablement les inscriptioiis
en lettres anciennes, tracto par rordre
de la reine Semiramis, et dont parle
(•) Voy. la planefae a« 4.
AKMl&NIE.
19
Mofse de Rhoren. Sur lea cdUs nord
et Slid de oette montagna de ^erre,
on a scolpU, en divers endroits, de
petites croix et des figures d'bommes.
II n'y a pas longtemps gu'en creasant
dans rint^rieurde la vilie, on a trour^
una statue en pierre, reprdsentant un
bomme h cheval.
•Cettemontagneetla forteresse n*ont
pas d'eau; mais, en temps de paix, il
existe un chemin faeile par lequel on
monte du pied de la montagne k I'oc-
ddent, pr& la porte I*keld Kapmui;
c'estpar la que Von porte I'eau n^ces-
saire aux habitants du chfltean. On y
trouve une source d'eau excellente qui
s'^coule dans le lac ; on voit , aupr^ de
ce ruisseau, de tr^- grands blocs de
marbre qui sont abandonn^, et une
tour ruin^e dans le yoisinage. »
II n*e8t pas inutile de faire observer
id que les lones d^ils favBsmis par
Diodore de Sicue, sur les fpgantesques
travaux de la reine S^miraniis dans
rArmtoie, pourraient fort bien ^re
ceux qu'on lui attribue k Van ; et cela
avee d'autant plus de raison , que la
partie de I'Arm^ie qui comprmi la
▼ille de Van, a souvent 6ti confondue
avec la Medie dont elle est d'ailJeurs
voisine , et dont die a m6me port6 le
nom h qudqnes ^poques.
Une colonte oonsid^able de jutfs, a
Tepoque de leur dispersion , vint s'^«
bliroanscetteville; et, des le qua*
tri^me sitele, ils 6taient derenus si
nombreux, que le roi de Perse, Sa-
por III, s'^tant empar^de Van, j d^
truisit dix-buit milfe maisont de juift.
A Vwtmie des Turcs sddjoukides , elle
tomba en leur pouvoir. limonr la prlt
en 1 393 , et y fit un cama(;e efifroyaole.
En 1638, les Turcs la prirent auxPer-
sans; et, depuis cette ^poque, ils en
oni conserve la jouissanoe. Elle est la
capitale d'un pachalik qui a dans sa
doiendance unp grande partie de I'Ar-
menie turque, et qui est subdivis^ en
treize sanaiakats.
Prte de van, r^de un archevtoue
aoi tient sous sa juridiction tons les
er^qius r^sidaut autour du lac. II ba-
l»te le monastte de yarah, situ^ a
six milles de la vlUe , sur uiie muutagne
du n^me nom , et qui est fort c^lebre
Chez les Arm^iens, k cause d'une
croix plants sur ce lieu m^me par
sainte Ripsimte, jeune vierge marbre
de la fot dunttienne sous le roi Tiri*
date(*).
La ville est encore d^endue par one
dtadelle assise sur un roc isM qui
passe pourtmprenable. EUer^sistapiu-
sieurs ann6es aux armte du roi de
Perse Abbas II , qui s*en empara en
1636. On y oompte aujourdiitti de
quinze k vingt mille habitants.
- idesse, appelee en syriague et en
arabe Owrha ou Rouhaf bAne, selon
M.Buckinffham, sur les ruinesd'Ur (**),
ville chaldeenne que le patriarcbe Abra-
ham quitta pour aller habiter Haran.
Ce savant voyageur, qui I'a visits
demitoment, Ta trouv^ bien bAtie,
indastriease et oonuperfante, et porte
jusni'ik dnqnante mille le nombre de
ses nabitann. Elle fiit, au tamps-d'Ab*
gare, connn par lacorrespondanoaque
la tradition lui attribue avec Notre-
Seigneur Jtai»Ohrist, la capitate de
I'Arm^ie. Elle passa tour k urarsous
la domination desRomains etdes Ara-
bos, et dloretomba ensuite au pouvoir
des empereutv de Constantinople.
En 1099, Baodouin, fr^ de Godc-
froy de Bouillon, en fit la oonquAte,
et elle rests entre les mains des Francs
jusqu'en U44, qu'elle leurfiit enlev6e
par l^ad-eddin-ZoDghy, sultan des
Atabeks de Syrie. Ners^s, Tuu des
toivains les plus remarquables de I'Ar-
m^e, a chants dans un poeme d^a-
que justement renomm^, la prise de
cette ville infortun^s.
Elle est maintenant soumise k I'em-
pire ottoman et gouvemte par un
pacha. La plus grande partie de sa po-
pulation est encore compost d'Arme-
niens.
(*) Nous avoDs rintention de reproduire
dans un autre lieu, comme inudele de
l^^de armimeiine, le nartjre de eetle
sainte , td qu^il est rapport^ par Agathange,
historien oontemporain.
(**) Gen^, ck. XI, v. aS. Tajis k ee
sujist BtfdMrt lu Mialag: , I. x , di. ai ; Cel-
larius in Geogr. ant. p. xi , p. 729-760; Mi-
chael is Bibl. oriest. p. stie , p. 76.
9.
10
L'UNIVEaS.
NMbCy en armtoien Medapin. viJle
ancienne qui fut quelque temps la re-
sidence des souverains, et connuepar
le si^e que Tigrane y soutint contre
les Romains. Amrte la mort de rem-
pereur Jttlien , eflepassa sous la domi-
oatkm des Perses , qui ia oonserv^nt
loDgtemps, malgr6 tous ies efforts des
Romains pour la reoouvrer. li n*en
reste que oes muraiiies et autres mines
remarquables par leur construction.
Elie mi situ6e a oueique distance de la
ville actueUe de Nissibin , d'une medio-
cre ^tendue.
Bayazid (*), ville pittoresquement
situteau fond d'unevalKe tooite, en*
touree de montagnes nues et escarpto.
Les maisons sont ^prses entre les ro-
chers qui des deux c6t^ bordent ie
d<6fil^. A gauche, sur un pic pres^oe
inacoessibiiB, s'^dve une vieiUe cita-
ddle, dont on attribue la construction
au sultan Ba;fazid ou Bajazet r', sur-
aomm^ Ild^m la Foudre. Cest dans
oechfltean que M. knMib^ Jaubert,
dont nous avons mentionn^ Ie Toya^e
en Anotoie , fut ddtenu plusieurs mois
par ie perfide jpacfaa Mabmoud, lors-
qu*il aUait en Perse diarg6 d'une mis-
sion secrete par Na|x>16on.
La ville de Bayazid a acquis demi^-
rement quelque importance par son
commerce. Sa population pent 8*^ever
a quinze mille flmes.
On en exportele tabacet lamanne,
que les Persans appdlent ma, et qui
se trouve en grande quantity dans le
Louristan et dans le district de Rhou-
sar en Irak. L'aibre que cette roanne
semble-affectionner {nrticuli^rement,
et sur lequel on la reoueiMe en plus
grande quantity, est le chtoe nain. On
ramasse les feuilles qu'on laisse s^cher,
puis ensuite on les essuie soigneuse-
ment. On Tapporte dans cet ^tat sur
les march^, et c'est en la faisant bouil-
lir qu*on parvient li la purifier de toutes
ses ordures et autres parties li6tdro-
g^nes qui y sont toKiibk. On recueille
aussi sur les rochers et les pierres une
autre espdce de manne blanche -beau-
coup plus pure et plus estim^qiie ceile
(*) Toy. la planchs n*^ 7
des arbres et des plantes. La saison
oil commence cette rtoolte est la fin
de juin; et lorsqu'li cette ^poque de
Tannte la nuit est plus froioe que de
coutume, les habitants du pays diaent
qu'il pleut de la manne. En effet, eile
est toujours plus abondante le matin
au lever du soleil.
5is. Dans la Cilicie, qui faisait par-
tie de TArmtoie Mineure, on remar-
que la ville de Sis, situte dans una
plaine ji vingt^uatre milles d' Anazarbe,
au nord, sur les bords d*une petite ri-
vi^e oui se joint au Djihan. Elle exis-
tait ^ik au dizitee sirae de notre ktt.
En 1186, le roi Uon II rapandritet
I'orna de quelques beaux raifioes. En
1394, k la suite des guerres qui afiU-
geaient le pays, on transports lesi^
patriarcal dans cette ville, oik ilam
maintenu depuis cette ^poque , quoioue
le titulaire reside k Alqi. Au^nrd'nul
Sis est presque totalement ruinte.
Anm ou HamW^ est la ville que les
Turcs appellent Karm-AnUdf k cause
de Tenceinte de rocs de basalte qui
renvironne. Sa position sur le Tigre
a change avec les Ages. Ammien Mar-
oellin nous apprend qu'elle etait situ^e
sur la rive orientate, et auiourd'hui
elles^eidvesur lebordopposedu fleuve.
Avant le quatridme sime de notre dre,
son nom n*est mentionne jMur aucun
historian. La chronique syriaque d*E-
desse, que nous trouvons dans Ass6-
mani, fixe k Tan 849 de notre hit I'^po-
que oik rempereur Gonstance ajsrandit
consideraUement cette ville,qm acquit
par la suite une nouveUe importince
au temps des guerres des emperenrs de
ConstantinopTe et des rois de Perse. H
est probable qu'elle oocupe k pmi prte
Femplaoement de I'ancienne vilte de
Tigranoeerte, ainsi nommde k cause
de I'illustre Tigrane, son fondatear.
Elle fut longtemps florissante et trte-
peopl^ Pendant les guerres des Grecs
et dies Perses, elle passa plusieurs fois
k chacune de ces deux puissanees, qui
la prenaient etla perdaient tour li tour.
Elle a «t^ te dief-lieu d*un pachalik
puissant qui oomprenait treize sandya-
kats ottomans et nuit saniyakats tuns,
depuis que les villes de MerdiB«
•• • • ••
• • ■ • • •
• -•
• • •
• • •
• • « •
• •• •
••4.
• •
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• • •
• • *
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• t
ARMENIE.
91
Nesibin, Djezireh et Sindjarfont par-
tie du padudik da Bagdail , sod terri-
toire est moins dtendu.
irk>an(^). On suppose que lefonda-
teur de cette ville est £roTant 11 , qui,
pour oonsenrer le trtfne jgu'il avait
usurps, c6da aux Roinains fiiesseaYec
toute la Mesopotamia, et transporta
sa rteidence k Armavir, ancienne ca-
pitate de TArm^ie. Peu de temps
apres, fatigue du s^Jour de cette viile,
11 en fit oonstruire une autre au con-
fluent de rAraxeaTeciefleuveAkbou-
r6an, qui fut appel^e de son nom £ro-
vantaschad. Moise de Khoren nous la
reprtente comme situ^ au milieu
d'une plaine riche et verdovante dont
elle semble ^tre Toeil, tanais que les
lisi^res de bois et de vignobles qui se
dessinent a Tentour de ses murailles
en sont, pour ainsi dire, les cils. De-
Duis les oonquttes de Nadir-Schar, elle
taisait partie de la Perse: mais depuis
les demi^res conqu^tes de la Russia,
elle a €U ajout^ h rimmense territoire
de oet empire. Le fond de la popula-
tion est tout arm^nien. M. Ker-Por-
ter , aui I'a visits dernidrement , fiiit
une nelle description du paysage pit-
toresque qui Fentoure. Elle est arros^
par la rivito Zengag,, qui ya se per-
dre dans TAraxe. Une autre petite
riyidre, leQuerk-Boulak, est distribute
^ dans la yiUe par une infinite de petits
canaux. Cbardin nous a dterit la for-
teresse, qui est sans doute F^van-
tagerd, fond^ ^alement par £royant
en fftce de la capltale. et qui signifie
cluUeauoQ forteresse d'£roTant. Cette
forteresse pent encore passer pour une
petite ville. EUe est ovale et a quatre
mille pas de circuit, avec buit cents
boutiques environ. Les Arm^niens y
ont des boutiques oh ils travaillent et
trafiquent le Ions du jour. Le soir, ils
les ferment et ren retoument 1^ leur
maison. La forteresse a trois murailles
de terre ou de briques d*argile k ct&
neaux, flanqutes de tours et munies
de remparts fort droits, selon Tan-
cienne mani^re de fortifier, sans rtoi-
larite, k la ^n de FOrient. II edUt^
(•) Toy. It plandie no 8.
mime difficile de faire un ouvrage r^
guiier, parte que la forteresse s*elend,
au nontouest , sur le bord d'un 6pou-
vantable prteipice large et escarp^,
de plus de cent toises de profondeur,
au tond duquel passe le fleuve. La ville
est eioignte de la forteresse d'une por-
t6e de canon. II y a deux dglises dans
la ville, blties du temps des demiors
rois d'Armteie* Les autres sont peti-
tes et enfoncte dans la terre , ressem-
blant plutdt h des catacombes.
« Procbe de F^vteh^, dit Cbardin (*) ,
il y a une vieiile tour, bltie de pierres
de taille. Je n'ai pu savoir ni le tero|»
auquel elle a 6U construite , ni par qui,
ni a quel usage. II y a au dehors des
inscriptions gui ressemblent h de Far-
m^ien, mais que les Arm^niens ne
sauraient lire. Cette tour est un ou-
vrage antique et tout h fait singulier
pour Farcnitecture. Elle est vide et
nue par dedans. On voit au debors
plusieurs mines disposes de fagon
qu'on dirait qu'il y a eu lit un clottre,
et que cette tour ^tait au milieu. »
M. Rer-Porter a chercb^ cette tour,
et ne Fa pas retrouvte. On lui a dit
que le tonnerre Favait d^truite , et que
ses mines avaient servi a r^parer les
murailles de la ville. Une multitude
de monuments couvrent cette plaine,
qui est au pied de FArarat. C*est bien
la qu'on pent, k Faide des mines , re-
monter aux premiers Hges du nionde.
Les prindpates mines sont Ardashir,
Kara-Kala, Artaxate, Armavir.
Kars, Cette ville, situte au paya
de Vanant, est arroste par FAknou-
rten. ConstantinPorphyrogenite, qui
la n^arde comme la capitale de FAr-
m^nie , est le premier out substitue le
nom de Kara k ceiui de uarouts qu*elle
Sortait anciennement. Elle fut la r^i-
ence des rois de la race des Pagratides
depuis Fan 928 jusqu'en 961. Elle fut
prise tour k tour par les Turcs sekijou-
kides, par les Mongols, les Persans et les
Ottomans. EUe est encore auiourd'hui
assez consid^ble, puisqu'elle est la
residence d'un pacha qui a dans sa d^
pendance six sandjakats.
(•) Voy. la pUnche n? fl.
22
L'UNIVERS.
/ti{f«eu Dfvtfa, ville assez oomi-
d6raoleqiie Vtm r«g»i«copiine un des
faubourgs d'Ispahan. Eileen est separ^
par les jardins do roi^qui ontunelieue
d'^tendue, etqiu bordentlesdcox cdtes
du chemja. Au miliea de ce efaemui
eat un canal oikde distance en diatanee
on a m^nag^ de grands rterfoini. Des
arbras fon iHevin q[u'oB appdie chi-
narsy fonneot k droite et a gauche on
onibriige agr^ble. Entre ces arbres
sont <m esp^oes de parterres, mais
sans compartiments. Au bout de ce
chemin on trouve un pont de pierre de
dix-huit ou vingt arches, fort beau et
fort long. De oe pont jusqu'ii JuUb, il
n*y a plus qu'un quart de lieoe. La
population armteienne est ^^alu^ h
dix mille habitants. La rille se divise
en trois parties dqnt la principale est
Julfa, la seeonde ISriran, et la troisi^
me Tauris. On y confute enTiron vingt-
deux ^lises.
Gette ville, que Ton appdie aussi
nouoe&u Julfa, recut son nom du Jul&,
faisant partie de* Tancienne {nroTince
de Vasbourwan, situ6 sur la rive seu-
tentrionale de I'Araxe, au sud-est ae
Nakhdjewan. Cette andenne ville, qui
servait de passage direct pour aller en
Perse, toit devenue I'entrepdl du
commerce : aussi s'aocrut^lle consi-
d^rablement. En 1006, le roi de Perse
Shah Abbas V fit d^ruire cette ville,
et il en transports one partie de la po-
polation h bnmban, cit il lui permit
de s'dtablir oans lea environs de cette
capitale.
noQs nous dearterions de notre but
en nommant Urates lea colonies par-
tielkss de la mdme nation stabiles sor
divers points de TAsie, particuliere-
ment dans I'lndc et dans plusieurs con-
trte de TEurope.
FAMII.LB8 00 TmiBUS ANCnilNBS
BT VODBBlfBS DB LA NATION ABMB-
nibnnb; colonib allbmandb. — La
race armtoienne, malgr^ son unite
d'origine, se divisait en plusieurs tri-
bos seoondairea fixto en divers can-
tons cA elles conaervaient one oertaine
indipendance fWrale, tout en restant
unies au corps de la nation. La plus
puissante de ces tribus €in% celle qui
Sretendait femonter h SIsag, fils de
Legham, ^uatritoe deaesMant de
Haig. Elle etendtt aes poaaessrons au
dda du Koor, et die donna naiasnoce
BOX Agbovans^ dont le pays est le
mtoe qot odui ^0 les Grecs appdaieiit
autrefois Alfaanie. « Ge pays « dit Mo^
de KJMMn , fiit appeK Aghomm d^un
motqui exprime la oouoeur des moeurs,
paroe due Sisas toit ausd nonune
j4gkou a cause de la bont6 de son ea-
ractte (*). »
Cette oommunaut^ d'origine attri-
buteaox Aghovansestfort contestable,
vu qo'ils parlaient une autre lan§|ue ,
laqiwlle, suivant le m€me histonen,
mit ffutturale, tr^-dure et trea-ac-
oentoee. Aussi Mesrob, Tinventeur de
Talpbabet arm^nien, fot-il Mif^ d*en
former un autre adapts au gtoie de la
langue d'Albanie, oonune il Tavait fait
pour les Gdorgiens. H est done plus
Srobable que les Aghovans ^taient une
e oes tnbus nombreuses r^ndues
dans le Gaucase, et qui ^ient venues
andennement, sous la protection des
rois arm^niens, s*teblir sur les bords
du Kour. Au temps de Vagharacfaag,
ils ^ient soumis, et apr^ lui ils con-
tinuant k (aire partie de la nation
arm^nienne, jusqu'aux temp» de Ti-
Srane. Mais , proutant des troubles qui
^rganiserent le royaume lorsqoe les
Romains Tenvahirent, ils seoou^reot
le joug et conquirent leur independence.
Entreprenants et courageux, ils osd-
rent tenir t^te avec suoaes aux legions
romaines. Quand les Arsacides iment
renvers^ , la monarcbie des Aghovans
agraadit son territoire aox d^pens des
(*) Ea effet Jghtm tignifie en armiiiicc
douceur, omtniie, Les persoones qui ne oon-
aaiuent pas la Taleiir de certaines lettres
de I'alphaDct armenieD , pourroot s'etonoer
que le mot j4ghovan sott le mtoie que fe
mol grec Alhania, Mab la lettre annenienoe
tt>anscrite par les deux lettrei gh coirci-
pond aussi 4 I, puisque tons les mots greo,
par exemple, oi oelte lettre se retroore,
s'^crifent en annenien avec nnrhad: ainsi
Paului se pronoDoe Bogbos. Noui aroos
done Aloran on Aloban, les Graes sobititiiant
k cheque instant le ^ au v; d*oii enfin
Aiban, Alhati;
«
• •• •
• • ••
•••
■ * • •
• • • •
*
• •• •
• _ •
■ •• •
• • • •
• • • •
*• f • ••• •
• • • •
• * • •
» #
ARM^NIE.
23
liens , paisqu'elle envahit les pro-
d*audi, d\Ajrt8akh et de Phai-
Arm^niens >
vincesd*
dagaran. Sa puissance se maintint pin-
siears sidles arec le m^me ^lat, et
elle r^slsta avec avantage aux Arabes.
Les invasions des Turcs seidjoukides,
vers la fin du onzidme sitele, d6trui-
sirent cette monarchie. Le nom seul
des Af^ovans est rest^, et les peoples
habitant les provinces de Gandjah,
d'Eiivan et de Nakdjewan, soumises
aujourd'hui k la Russie, se glorifient
encore da titre di Aghofuanlih.
OoDiBNS. — Sur les rives du Kour
et pr^ Aei frontidres de la Gtorgie»
^tait situto la province d*Oudi , entre-
coup^e de hautes montasnes et de
vallto sauvages dont les tor^ts et les
torrents donnent k Taspect du pays ,
comme au caractdre de ses habitants ,
quelque chose de rude et de severe.
Les Oudiens n'^taient point le m^me
peuple que les Aghovans ; on les a faus-
sement confondus dParce que ceux-ci
les r6dai8irent k differentes reprises et
les Incorpor^ent dans leur petit rojau-
me. Au commencement du troisitoe
siecle de notre ^re, les rois d*Arm6nie
^talent encore les mattres de cette con-
tr6e, etils v passaient I'hiver, au rap-
port d'Agathange. R6unis aux Agho-
vans h I'epoque de la chute des Arsa-
cides, les Oudiens leur rest^rent assez
fiddlement attach^. La haine qu'ils
portaient aux Arm^niens, leurs an-
ciens mattres, les aveugia au point de
prater du seoours aux Arabes. lis fai-
saient aussi de fr^uentes incursions
oik ils commettaient beaucoup de d6-
gflts. Le roi Achod I*' marcha centre
eux dt les r^prima. Le gouvemeur
qu'il laissa dans cette province sou-
mfse se r^volta bient^^t eontre son au-
torit^ et se rallia aux Aghovans, dont
la puissance infirieare k celle des Ar-
meniens ofErait des garanties plus sdres
k leur ind6pendance. A dater de cette
dpoque, le nom des Oudiens reparatt
a peme dans Thistoire d'Arm^nie, et
il est a pr^omer qu'ils suivirent la
bonne et mauvaise tortune des Agho-
vans.
Kabtmaniens. — Les Kartmaniens
^taientune petite tribude TOudi , niats
vivant 8^r6eetind^ndante au fond
de ses vailte fnacoessibles, dont plu-
sieurs forteresses en d^fendaient ren-
tr6e. Les Aghovans en firent ()lusieurs
fois la conqu^te, sans r^ussir jamais a
soumettre entidrement ces monta-
fnards courageux. Ce pa]^s contimia
'6tre r6gi par ses souverains particu-
tiers jusque vers le dixi^me siecle.
DZANABIBlfS BT DZOTBBIVS. — CeS
deux tribus, r^es chacune par un
chef particulier a qui la cour de Cons-
tantinople donnait dans ses actes le
titre d'archonte occupaient les mon-
tagnes que Ton appelle Fortes du Cau-
case. Suivant lea Arm^niens, cette
petite souverainete aurait 6t^ fondle
par quelques pr^tres de la Chald^
tuyant les persecutions des califes de
Bagdad, ce qui expliquerait le titre ec-
cl^siastique de chirreoique que portait
le prince, quoiqu'il fdt simple laique.
Les Arabes, d*apr^ Massoudy, reven-
dionent de leur c6t^ I'honneur d*avoir
colonist le jiays de Dzanar. La cause
de r^mij^ation aurait 6t^ Tattacheinent
a la foi chr^tienne de ces cheiks.
Kabkabibns. — Les Karkariens,
rel^u6s k I'extr^mit^ du pays des
Aghovans dans les fforges du Caucase,
^taientunetribupanantune lansuepar-
ticuli^re. Strabon rapporte qu'elle etait
venue avec la tribu des Amazones du
ays de Tli^myscire sur les bords du
ont-Euxin , et qu'ensuite elle s'^tait
avanc^ dans Tinterieur des monta-
gnes.
Nous ne parlerons pas des Kogh-
thMens 9 des Touschdouniens et dc
quelques autres tribus trop peu im-
portantes pour £tre mentionn^es ici.
Nous ferons remarquer seulement ce
fait assez singulier, que la Chine a
envoys dans rArm6nie plusieurs colo-
nies.
^HIOBATIONS DB LA CHINB BN AB-
MBNiB. — « Pendant les dernieres an-
n6es de la vie d'Ardeschir, dit I'his-
torien MoTse de Rhoren, un certain
Arpog itait <jienpagour, c*est-lkiire,
roi des Chinois ; car c*est ainsi que dans
leur langue les peuples du Dfenasdan
(de la uiine) appellent le titre royal.
II avait deux neveux, Peghtokh et
E
P
34
L'UMIVERS.
Mamkon. qui ^taient des prinoes dis-
tineu^. Peghtokh calonmia Mamkon,
et le roi Arpoc ordonna de le faire
mourir. Quana Mamkon en fut in-
form^, il ne se rendit pas k rinvitation
du roi , qai I'appelait auprte de iui , et se
sauva avec \ei sieos, A se rtfugia au*
pr^ d'Ardeschirj roi de Perse. Arpog
envoya des ambassadeurs pour le re-
demander; mais comme Ardeschir ne
St pas atteDtion k sa demande, ie roi
du Djdoasdan se pn^ra k Iui faire ia
guerre. Ardeschir mourut alors, et
Schabouh Iui suco6da.
« Ge prince ne livra pas Mamkon
entre ses mains, parce oue son pdre
avait jur^ par la lomi^re du soleil ae le
proti^er. « Je pause avoir assez fait
pour vous, ajoutait-il; je l*ai cbass^ de
roes £tats, je Tai envoT^ I Textrdmit^
de la terre, au lieu ou le soleil se cou-
che, ce qui est comme une mort cer-
taine; qu*il n*y ait done pas de guerre
entre vous et moi. » Comme les habi-
tants du Dj^nasdan sont,'a ce que Ton
dit, les plus pacifiques des habitants de
la terre, on se contenta de cette expli-
cation pour fiiire la paix. »
MamKon arrlva done en Armdnie a
r^poque oCi Tiridate, ce roi vraiment
Chretien , remontait sur le tr6ne de ses
p^res. Ce prince accueillit Tillustre
etranger et sa nombreuse suite avec
la ^db^rosit^ la plus oordiale, et il leur
assigna la provmce de Daron comme
lieu d'^tablissementpour cette colonic.
Les annales de la Chine font foi
Su'au troisitoe si^e de notre hrt la
ynastle des Han fut renvers^ par la
dynastie des We), revolution qui oc-
casionna de jprofondes seoousses dans
Tordre sodai de la Chine, en sorte que
le prince Mamkon pent fort bien &n
un des roembres de la dynastie d^
trdn^; proscrit ou exil^ volontaire, il
serait venu cbercher un asile dans le
pays d'Oocident. De Mamkon descend
riflustre maison des Mamigon^ns , qui
ioua un r61e brillant dans rhistoire des
ages uit^ieurs.
Les n^ociations entre la Chine et
la Perse, mentionnto par Thistorien
que nous avons cit^, relativement ^
1 extradition de Mamkon, prouventqu*il
y arait des relations ancienneDDcnt
existantes entre les oours des deux em-
pires. Un autre historien du quatrtcme
siede, Z^ob, nous apprend que le roi
du Dj^nasdan ofifrit sa m^iation pour
r^tablir la paix entre Ardeschir, roi de
Perse, et Khosrov T', roi d'Arm^oie.
Outre les Mami^on^ns, nous voyons
encore les Orp6hans, qui vinrent en
Arm^nie par la G^rne, lonetemfn
avaut eux. lis ont recu le nom crOrpe-
lians de la forteresse ao Schamchouilde,
dans la
pelait
teur fut ceuee par les (jeorgiens.
les appelle aussi, en gtorgien, Djeo^
voul , et ,• en arm^nien , Dj&atsi , c*es^
a-dire Chinois.
Les invasions successives des Tuns
seldjoukides, des Mongols et d^autres
tribus errantes de la Tartaric, ont al-
Xir€ la puret^ de oes diverses faimiUes.
Outre les Kurdes, qui depuis plusieors
si^es occupent rArmenie roeridio-
nale, on trouve ailleurs, ^parses sur son
sol , des hordes ^trang^res appartenant
^ la grande famille des peuples tartares ;
tela sont oes nouveaux Troglodytes
camp^ sur les rives du Rour, habitant
i'hiver dans des maisons souterraines,
et conduisant , au retour du printemps ,
leurs troupeaux dans les plames ou sur
les plateaux verdoyants des monta-
gnes. La langue qu*ils parlent est celle
des habitants des provinces russes au
deUi du Caucase, et des gouvemements
du nord-ouest de la Perse. Ce dialecte
du turc n'a ni la douceur ni F^l^anoe
de la lansue parlte ^ Constantinople.
Fort enclins au vol et an pillage, ils
sont contenus par la s^v^it^ des lots
du gouvemement russe, et vivent dans
un etat de vie douce et pastorale, qui
serait plus digne d'envie, si Tignorance
dans laauelle ils croupissent n'^tail
aussi degradante. La religion qu*ils
pratiquent est le musulmanisme m^l^
a d'absurdes superstitions , et ils sont
divis^ entre les deux sectes des sun-
nites et des scbutes.
Pr^ des mines de Fancienne ville
de ShamkOr se trouve la colonic alle-
mande d*Anenfeld, eroup^e en un vil-
lage sem^ au milieu de vergers touftus,
% > • '
ARM^NIE.
35
et ceint de plaines bien caltivto. U est
assez important d'expliquer la cause
3ui a amen^ d'aassi loin cette troupe
€migpis. U y a quelques annees, des
pr6dicateurs protestants parcoururent
le Wurtemberg, en annon^ant au peu-
pie que vers ran 1836 ^laterait un
sdiisme sui?i d'ardentes persecutions,
lis avaient lu dans I'Apocalypse ^ue les
▼rais fid^es devaient, eomme les Chre-
tiens, k rapproche de la ruine de Je-
rusalem, cberdier un asile dans les
pays lointains, et une revelation leur
apprenait que ce lieu de refuge avoisi-
nait la mer Caspienne. Aussitdt une
foule de paysans, entratnes par les
predictions ae leurs ministres, se dis-
posent h aller a la recherche de la nou-
velle terre promise. A leur nombre
sans cesse croissant se joignent tons
les aventuriers desireux du change-
ment, et quinze cents families aban-
donn^rent spontanement le Wurtem-
ber^. Les deux tiers de cette nouvelle
emigration, cpii rappelait celles du
temps des croisades, avaient succombe
aux fatigues de la route, avant d'avoir
atteint Odessa. £n 1817, ils arrivdrent
dans la Georgie, et se partagerent \k
en sept colonies. L'une d elles , repartie
en deux villages appeies Marienteld et
Petersdorf, est dans le Kakbeti; deux
autres, la Nouveile-Tiflis et Alexan-
dersdorf, sont etablies sur la rive
faucbe du Kour, non loin de Tiflis;
Jizabethtbal et Catherinenfeld sont
dAis la Somkheti , et enfin Anenfeld et
Helenendorf situees dans le voisinage
de Ganjeh. L'empereur deRussie, qui
avait un puissant interet k favoriser
retablissement de ces colons, qui ap-
portaient dans ces pays i'industrie eu-
ropeenne, leur accorda beaucoup de
privileges, et leur conceda une im-
mense etendue de terrain exempt de
tout impdt. Dans les commencements,
les colons ont eu beaucoup de peine a
s'acclimater, et les maladies en ont
emporte un grand nombre. Dans les
demieres guerres, les Persans en ont
emmene captifs une partie, et la co-
lonic d^Helenendorf a ete decimee par
les byenes qui descendaient en troupes
des montagnes voisines. Aujourd'nui
leur situation est plus prosp^, et, a
mesure que la puissance msse se con-
6olidej*a dans ces contrees, leur si-
tuation deviendra plus avantageuse.
Toutefois le nombre des colons nes'e-
leve encore qu'^ deux mille.
DBS &UBDB8. — Nous cTOVons ne-
cessaire de parler id des Kuraes (*) , et
de fiiire oonnaltre un peu les mceurs
et le caractere de ce peuple aui occupe
le sttd-est de TArmenie, nien qu^il
difG^re essentiellement des Armeniens
sous le double rapport moral et physi-
que. Le Kurdistan, ou la provmce
qu*ils habitent, est ainsi appeiee de
leur nom de Kurdes, lequel signifle , en
persan, belliqueux et brave, soit que
leur bravoure naturelle ait donne ce
sens a leur propre denomination, ou
bien soit encore qu'ils I'aient re^de
comme un titre decerne k leur valeur.
Les limites du Kurdistan, du cdte de
la Perse, sont les monts Sourkeou et
le lac de zeribar. II n^est point tout
entter renferme dans I'empire persan;
la partie nord-ouest depend de la Tur-
quie. La ligne de demarcation entre la
partie turque et persane est posee par
la chafne de montagnes qui separe les
deux lacs de Van et d*Ormiah ; elle suit
la chatne des monts Rhelessin jusqu^a
celle des monts Tcbil-Tchecmeh , puis
elle longe la riviere de Mebrivan , et va
se rattacber au Djebel-Tak.
Le Kurdistan turc renferme de cette
maniere huit sandjakats ou provinces ,
dont les goavemeurs prennent et s'ar-
rogent le titre de pacha. Ces sandja-
kats sont ceux de Bayazid , de Moudi,
de Van, deDjulamerk, d'Amadia, de
Suleimanieb, de Cara-Tcholan et de
Zahou. II ne faut pas croire que le
Grand Seigneur £9isse reoonnattre son
autorite parmi ces peuplades comme
dans les autres parties de son empire;
il n*y a gu^re que le pachalik de Van oti
son nom soit connu et respecte , k cause
des troupes qu'il y entretient. Du reste ,
ils se considerent si peu comme sujets
de la Porte Ottomane, qu'ils refusent
d'adopter le costume distingue surtout
par le caouc ou turban. Les pachas et
(*) VoY. la planchc n^ 5.
26
L'UNIVERS.
les twvs qui les r^isseot se tiennent re-
trancn^ dans lears montagnes , comme
dans des dtadelieSf et, assur^ qu'ils
sont que les collecteurs d*imp6t8 ne
viendront pas les inqui^ter^ refusent
le tribut. Lorsqu'on emploie la force
pour obtenir d*eux oe droit, lis ne c^
dent qu'aprte la plus vive nbistance.
Ces cnefs sont ^tectifsvmais choisis
dans la mtoe famiUe. On les propose
au gouTernement turc, qui, par sa r&>
oonnaissanoe, leur donne une espto
dinvestitore. U est rare qu'une elec-
tion, en stimulant rambition des divers
membres de la m^me famille, ne soit
ensanglant^ par quelque combat.
« Les Kurdes, ait M. Jaubert dans
son Voyage en Arm^e, se subdivisent
en un giand nombre de hordes ou de
tribus, dont les cbefs recoivent Tin*
vestiture du pacha oa du oe^. Le mo-
naniue persan n'exeroe aussi que Tau*
torit^ de suzerain dans la partie du
Kurdistan q[ui est comprise dans son
empire; mais la fennet6 de Feth-Aly-
Ghah, sou?erain actuel de la Perse,
emp^e les nomades de sesl^tats d'etre
aussi turbulents que le sont oeux de la
Turquie. Le chef-lieu des Kurdes per-
sans est Sineh.
«Ces peuples, soit qu'ils m^nent
une vie sedentaire ou qu'ils errent dans
Us campagnes, se pr^tendent issus des
Mongols et des Uzbeks, dont les ir-
ruptions soudaines ont si souvent
trouble I'Asie; mais la grandeur et la
beauts de leurs veux , leur nez aquilin ,
la blancheur de leur teint et I'^leVation
de leur taille, d^mentent oette origine
tartare. lis profteent I'islamisme, et
tous, sans m6me excepter oeux qui re-
Gonnaissent les lois du chah de Perse,
sont de la secte d'Omar. Leur mani^
de se T^r dififere de cdle des Turcs,
en ce que leurs habits sont plus l^ers ,
quoiqu'a peu prte de la meme forme,
qu'ils les reoouvrent d'un grand man-
teau de poll de cb^re noir, et qu'au
lieu d'un turban. Us portent un long
bonnet de drap rouse, entour^ d'un
chflle de soie ray^ de couleurs tran-
diantes; une infinite de glands de soie
sont attach^ k Fun des bouts du bon-
net, qui retombe fort has sur les 6pau-
les. Gette ooiffare leur sied trte-bien.
Us se rasent la tto et nortent des mous-
taches; les vieillards seuls laissent
erottre leur barbe.
« Les Kurdes excellent k manler la
lance et k monter k cberal (*)• La prind-
rle occupation des nomades consiste
Clever aes bceufii, des di^rres, des
moutins et des abeilles; aussi dans la
langue kurde, langue form^ de i'arabe
et du persan, et divis^e en plusieors
dialectes, le mot tndlj qui signifie
biens, fortune, richesses, sert-il plus
sp^cialement k d^igner des trou-
peaux.
« Les exercices militaires sont poor
les Kurdes le principal amusement. Us
airoent beaucoup les contes , et lis com-
posent des chansons (jui ont pour sojet
ou des amours lioencieux ou des com-
bats, ou des ^T^nements m^morables
et tragiques.
« Quoique simple, la musique des
Kurdes n'est pas entiirement wpoar-
vue d'art; elle est expi^essive et nwlan-
colique. Le cbanteur prolonge, en les
mooulant, des sons monotones; il ar-
ticule quelques mots qu*il entreooupe
de soupirs, de sangloCs; il verse des
pleurs et finit par pousser des cris la-
mentables. On estime la jiistesse et la
douceur de la toIx beaucoup rooins
Sue son 6tendue, et, pour ftiire I'^ge
'un chanteur, les Kurdes disent ao'on
I'entend d'une parasange. A la Terit^,
le chant est pour eux , lorsqu'ils errent
dans les montagnes , un moyen de £rfre
reconnattre le point oOl its se trouyent
plac^.
« lis sont tr^endins au vol. Peat-
tee ce penchant est-il une des causes
qui les portent li errer sans oesse. Les
autres motift de leur go^t pour la vi«
vagabonde sont ou le voisinage d'une
horde ennemie, ou le manque de pAtu-
rages, ou la rieueur de la saison.
L'niver ils vont oiercher on asile sous
le toit du laboureur, k qui, pendant
r^t^, ils ont enlev^ une partie de ses
r6coltes. Press^ par le besoin , d'ind^
pendants et de farottches qa'tls teieot
auparavant, ils se mootrent alors scm-
(*) Voy. li pUndie n* 7.
ARM^T^IE.
27
pies et soumis, et ils Tiyent d'assez
bon acooid avee leurs hotes.
«A Tapproche du printempa, les
Kurdes repreonent le seore dni vie aai
leur eat propre. Oraiiiairemeat lea
lieux qu'ib aK>i8issent pour aaaeoir
leur camp aont dea prairiea agr^ablea,
aitu^ea au bord de quel^ue ruiaseau.
Leura tentea, qu'ila prtferent aux ha*
bitationa lea plua fastueuaea dea villes,
aont compost d*un tiaaa de laioe
noire et grosaidre, et ont tres-peu d'e-
l^vation. Ua lea entourent d'une dale
de roseauz, en dedana de laquelle ils
placent leurs bagages, et souvent ce
qu'ils ont pris aux caravanea. Cette
sorte de ddture est tr^l^^re et tr^
fadle a tranaporter. On I'emploie aussi
a s6parer rhabitation des bonimea de
celle des femmes, et k faire des parca
pour les troupeaux. Un trou de quel-
aues pieds de diam^tre et de profon-
eur, servant de four et de cuisine , est
creus^ au milieu de chaque tente, qui ,
au moindre vent , est remplie de fum^ ;
inconvenient assez grave, mais auquel
les hommes , les femmes et les enfants ,
aont accoutum^. Les cbevaux sont at-
taches a dea piqueta plant^s hors de
Fenceiute, et on les tient presque tou-
jours selies; en g^n^ral, tout est dis-
pose pour qu'on puisse plier bagase et
prtir en quelques instants. Tout I'eta-
Dlfssement coute k peine un jour de
travail.
« Lea peuples qui se livrent le plus
au vol et au brigandage sont souvent
aussi ceux qui remplissent le plus ri-
£Oureusement les devoirs de Tnospita-
Hte « et c'est ce qui &it que dans I'Orient
un vojageur experimente redoute aur-
tout les contr^ea oi!^ cette vertu est le
plus en honneur; les Kurdes en four-
niasent la preuve. Un etranger de quel-
que apparence arrive-t-il pr^s d'une de
leura hordes, des cavaliers s'empres*
sent d'ailer h sa rencontre. « Soyez le
bien venu, lui disent-ils; c'est chez
voua-mtoe que nous allons vous rece-
voir. Cette heure nous est agreable,
puiase-t-elle vous Itre propice. » On le
conduit a la tente du vieillard le plus
riche et le plus consider^ de la tribu ,
et les femmes s'empressent h preparer
un repas. Tandis que les unes petris-
aent a la hAte une rarlne groaaiere, lea
autres vont chercher du roiel et des
laitages, ou etendent sur la terre des
tapis, oavragea de leurs mains. Dans
ie mtoe temps, les jeunea gens on^le
soin d'dter aux betes de aomme leurs
facdeaux, de laver les pieds aux die-
vaux, et en hiver, pour empecher que
le froid ne les aaiaiase, de lea conduire
autour du camp, d'abord avec vitesse,
puis insensiblement avec lenteur. « En-
fants, dit le vieillard, ayez soin de
notre hdte : retranger est un present
de Dieu. Que rien ne lui manque ni k
aes gens. Sonj^ez aussi aux montures.
ce sont les vaisseaux du desert : et toi ,
voya^eur, sois le bien venu; tu es id
parmi les tiens; que le contentement
que tu eprouveras soit pour nous le
gage dea benedictions du del. Si tu
passes avec noua quelques heures agrea-
bles , nous serons plus heureux que toi-
meme. » En pareiUe occasion ce Ian-
gage est sincere; mais lorsque les
Kurdes sont eioignes de leurs foyers ,
qu'ils vont chercher fortune sur les
chemins, dans les moniagnes et au fond
des deserts, ils considerent oomme
leur appartenant en propre tout ce qui
passe sur leurs terres, et ne se font
aucun scrupule d'employer les discours
les plus flatteurs, les promesses lea
Slus mensongdres, pour venir k bout
e leurs desseins. »
Plusieurs tribus kurdes m^nent une
vie compietement nomade, et ne tirent
leurs moyens de subaistance que du
pillage : telles sont celles qui errent
dans le desert de Syrie, uniquement
occupees k surprendre les voyageurs
et les caravanea. Leur usage est de se
partager en petitea bandes de douze a
vingt cavaliers, d'epier tons les mou-
vements de la caravane, d'attaquer les
tratneurs ou m^me la troupe enti^re ,
si celle-ci paratt les craindre, ou si,
determinee a se defendre, die n*est pas
en nombre tres-superieur k celui de
leur bande. Bien dinerents des Arabes,
qui se font un scrupule de massacrer
le voyageur tombe dans leurs mains,
les Kurdes repandent volontiers le
sang. Le voyageur qui est tondi)e en
38
L'UNIVERS.
leur puissance est trop heureux 8*il est
seulement d^poaill^. lis sont mal dis*
ciplin^, et ne paraissent aroir poor
leurs diefs que peu de subordination.
Us poussent quelquefois la hardiesse
jusqu'^ venir attaquer an nldn jour les
habitants de Djraaid6, run des fau-
bourss d'Alep.
Le Toyageur qui veut traverser le
desert et ies autres lieux infests par
ces bagdes n*a d*autre moyen, pour se
pr^er?er de leurs attaques, que de
tormer des liaisons avec les principaux
chefs des tribus. Ces liaisons sont sou-
vent trts-dispendieuses h cause de
I'exigence des che& , qui requi^rent de
riches cadeaux qu*on doit consider
comme une v^table ran^n. Mais il
est tr^-difflcile k un Europ^en d'en-
trer en relation avec eux, et, h Focca-
sion , its se montreraient peu scrupuleux
d*oubIier leurs premiers engagements.
LorsquMIs sont supdrieurs en force, il
n'v a guere de titres aupr^ d*eux pour
ecnapper h leur avidit^X*).
Toutefois il ne faut pas attribuer a
la race enti^re des Kurdes ce caractere
sauvage et sanguinaire qui distingue
certaines tribus. Les Clans qui vivent
dans les montagnes menent la vie des
anciens peuples pasteurs; quelquefois
(*^ Un Toyageur raconte uue anecdote
qui indique asses la diflerence qu*il faut
ctablir entre les Kurdes et les Turcomans
qui exercent dans ces lieux le mftme m^ier,
mais avec plus de loyaute.
Pres du khan El-Assel , deux caivliera.
Tun kurde , Tautre turcoman , furent abor«
des par on pajsan 4 cheral, qui vinf se
mettre sous leur protection, et leur deoianda
de les suin« jusqu*i la Tille , afin d'eriter
sons leur esoorte, toute mauvaise rencontre.
Sa demande lul fut genereiisement accord^
par le Turcoman : le Kurde parut ^re
d*abord du mteie avis ; mais il ent k peine
marche quelques pas , que se repentant de
oette protection eraiuite , il prit a part son
camarade, et lui demanda son agrement pour
^rcer I'itranger et s'emparer de ses de-
pouules , qn'il oflrit de partaker atcc lui.
Alors le Turcoman indi^ne lui defendit de
toucher k odni qn*il avait pris sous sa pro-
tecdon , et ce ne fut qu*apres une auerellc
asset ^Te qu*il panrint a le sauver.
lis manifestent le plus enticr d^voue-
ment pour leurs dieft. Lorsque le frere
d'Abourrahman Pacha mourut k Baa-
dad, un de ses serviteurs, Kurde die
nation , qui se tenait pr^ du lit od gi-
Bait le cadavre de son mattre, 8*6cria :
« Quoi! le be^ est mort! je ne veux
plus vivre un seul instant; » et ao mo-
ment mtee il s'tianfa dans la rae du
haut de la maison, et le sang de sa
cervelle telgnit le pav^.
lis supportent la pauvret^ et la pri-
vation sans le moindre murmure;
cependant ils redoutent beaucoup le
trajet des solitudes embraste du de-
sert.
Les demi^res observations des voya-
geurs tendent k d^roontrer qu*il y a
parmi les Kurdes deux races bien ais-
tinctes, ce qui sert a expliquer la dif-
ference de go<lts et d'inclinations chez
les membres de la m€me tribu. Les
uns, en effet, ne pensent qu*ii guer-
royer; les chevaux, les armes, le com-
bat et le butin , voila ce quails cheris-
sent, et ce qui fait le sujet continue!
de leurs conversations et de leurs
chants. lis ont besoin d'avoir des
ennemis pour ^puiser Tardeur guer-
ridre qui les d^vore; et, lorsque ies
peuples voisins ne leur foumissent pas
roocasionde satisfairecette passion, ils
toument contre eux-m£mes leurs ar-
mes, et se d6chirent dans les querelles
de leurs factions intestines. L'autre
partie de la population , qu*ils appellent
Rayahs ou KeugUes dans certaines
oontrto, repr^ente les paysans. lis
cultivent la terre et prennent soin des
troupeaux. Les Sipahs ou Kurdes mi-
litaires se regardent comme leurs sei-
fneurs, et quelques-uns d'eux pr^ten-
ent que les paysans ob^issent parce
qu*ils sont crees pour leur usage ; aussi
la condition de oes serfs est-eile plus
miserable souvent que celle des n^res
de TAm^rique. HaDitn6s k servir, ils
ont dans leurs maniires et leur langage
quelque chose de timide et de rampant ;
k peine osent-ils lever les yeux sur leurs
chefs, et jamais ils n*oseraient prendre
le costume ou la contniance d*un
Kurde de noble race.
Quand un clief devient possesseur
ARM^NIE*
29
par conqu^te ou par hdrita^e d'une
nouvelle ^teodue de terrain , il en as-
signe une portion k cbacun de sea aerfr,
et il leur fait en outre des diatribu-
tiona d'armea et de cbevaux. Lm en-
fanta aont ^lev^ dana la haine com-
mune des Turca et dea Peraana, et ila
parviendraient, aana aucun doute, k
asaurer Jeur ind^pendance contre cea
deux puisaanoea, ai lea rivalitte dea
dieft ne d^truiaaient la force qu*il8
peuvent retirer de leur union. La po-
litique de la Porte et d'lapahan tire
habilement parti dea disaensiona que
rint^r^t ou la vanite fiait nattre parmi
lea cfaefa de tribua. Elle donne aux una
des secours d'argent, et leur promet
oertaina privil^ea dans le caa oik ila
r^uaairont k reduire lea chefa inaou-
mia; aux autrea, elle promet de lea
reoonnattre oomme paoiaa ou beys,
recompenae qui est le dernier terme de
leur ambition y et dont Teapoir leur
fait oublier les liens sacr^ du aang on
de Tamiti^. En outre , cea cfaefa, re-
eonnus par la puissance ottomane ou
par la cour de Perse, ont une existence
tr^-prtoiire; ila peuvent 6tre r^fo-
quds, et leurs irequentes mutations
contribuent ap^alement k entretcnir
dans la nation oes divisions qui lui sont
si fatales.
Au milieu de leur barbaric , les
KLurdes conservent certains usages qui
montrent en eux un penchant pour la
civilisation. Ainsi lis aiment beaucoup
la soci^te , et entre tons les autrea peu-
pies orientaux ce sont peut-^re lea
seuls qui se plaisent k prolonger la
veill4e dans les visites et la conversa-
tion, lis se Invent fort tard, font des
paris considerables pour des combats
de cbiens ou de percirix , et dans leurs
rapports ils ont de rafijabilit^ et de la
bienveillance, sans garder Tetiquette
d*une froide c^monie.
Dana les temps de guerre, ou lors-
?{u'ii8 ont une vengeance k satis-
aire, rien ne les arr^te. Ila se livrent
aux actea les plus r^voltants; ils con-
servent en meme temps un air de re-
ligion. Ainsi. apris avoir tu^un bomme
aana acropale, on les voit se mettre
it geaoux et s'acquitter des pri^res
preserites par la loi. Pleinsde rancune,
ila viennent demander satisfaction
d*une injure quelquefoia trois ou quatre
ana aprea I'avoir easuy^ ; pendant oet
intervalle ila ^piaient aoigneusement
Toccasion. On cite oomme exemple de
leur irascibility, le trait d'un cbef
qu'un moucberon importunait en se
pla^ant toujoura sur son ceil, et qui
ne pouvant le cbasser, prit son poi-
Snard, pour mettre un terme k sa
ouleur, et se I'enfon^ dana Foeil , au
riaque de padre la vie avec la vue.
Les femmes kurdes prennent moins
de soin de se d^rober aux regards des
bommes dans rint^rieur de leur roaison
que les femmes turques ou arabes.
Queiquefois elles paraissent recher-
cner rattention des etrangers. Lors-
S 'elles sortent, un voile bleu couvre
ir t6te; rarement elles I'abatssent
sur la face, excepts les femmes d'un
haut rang qui ne veulent pas ^tre re-
connuea. Quelques-unes ne sont pas
voilto et ne craienent point de se
m^ler aux assemnlees des bommes.
Malgr^ cette liberty ext^rieure, leur
vertu est , di(*on , plus severe que cel-
le des femmes turques toujours gar-
d^es k vue, et dana tous leurs actes,
ellea conservent la pudeur et la dtonoe,
qui sont le premier omement de leur
sexe.
Elles prennentpart aux r^ouissances
publiques , et M. Rich dana son Voyage
au Kurdistan , qui vient de parattre
tout nouvellement, raoonte qu'il a^t^
ttooin d'une dense nationale appel^e
tehopi (*). II trouva r^unta dans une
vaste cour un nombre consid^able de
spectateurs dont le cercle entouralt un
CDOEOT de danseuses. Elles se tenaient
par la main sans former un rond par-
tait. Leurs exercices consistaient en
des balancements de corps et de t£te
dont la mesure ^tait marqu^ simul-
tantoeut par le pied. De temps k autre
elles poussaient des cris moduli uni-
formement, mais qui exprimatent assez
leurjoie. Les assistants, mont^ sur
une esp^ de hangar, prenaient un
vif mtirit k ce spectacle, surtouf les
(') Voy. la plancoe n^ 6.
30
L'UNIVERS.
jeuaes ^ens. Les homines restaient
aocroupu ou couchtet fumant avec im-
passibility leurs pipes. EUes danstont
prds d'une heure, apres quo! la mu-
sique cessa,et d'autres femmes leur
succ^ereni, sans apporter k la danse
beaucoupde vari^t^ ae pas et de mou-
vement. Le spectacle se termina par
Tarrivee d*UQ boufTon arai^ d*une
^orme canne, et qui fit les sauts et
les cabrioles les plus grotesaues. Daop
leur danse, les fenunes n'etaient pas
voiles, et quelques-uoes semblaieat
par6es a?ec beaueoup d'l^l^ance et de
recherche. Leur robe parsem^de pail-
lettes ^tait de soie ae diverses cou-
leurs. La daose teimin^, cbacune
d*eUes reprit son voile et s^achemina
trauquillement vers sa demeure.
En g^n^ral la condition des femmes
kurdes est bien preferable a celie des
autres femmes des peuples mahom^
tans de I'Orient. Elles sont traitto
par leurs ^poux avec ^ard et respect
et non pointen esclares. Quelques-
unes donnent des preuves de courage
jnconnues mtoe parmi nous. On cite
une jeune filie de la tribu kurde de
Bulbassi qui ^tait le meilleur cavalier
de son clan. D'une conduite irr^ro*
chable, elle suivait les troupes dans
les expeditions guerrieres, et combat*
tait m^me a leur t^te. Elle portait un
v^tement d'homme, un large mou-
choir de soie enveloppait sa t^te, et
un poignard garni de diamants pen-
dait a sa ceinture ; elle etait grandie
et svelte, de vingt-dnq ans environ,
d*un bruu fonc^ , et une fois elle tua
de sa main un Ture qui avait voulu
attenter a son honneur. Dans plusieurs
autres occasions on la vit marcher la
lance en arr^t et aller tuer les artil-
leurs ennemis k la bouche de leur oa«
non.
Le costume des femmes ressemble
a celui de la Turquie. Elles portent de
larges pantalons et une longue chemise
qu'elles serrent k la taille avee una
ceinture* om^ede deux outrois agrafes
d*or et d*argent. Elles mettent par-
dessus, leur robe couple comme ceile
des hommes , boutonn^e sous le men-
ton , mais entr'ouverte sur le devaiit
et laissant voir la ceinture et ka che-
mise. Leurs etofifes viennent de Go-
zeratou de (Constantinople, et varieot
suivant la saison. La robe est reooa-
verte d'un l^ger manteau, gtedraie-
ment de satin, mais avee des manches
plus larges qui ne d^pissent point le
conde. En hiver, cet ajustement est de
ooton, et elles y ajoutent aussi scmvent
un teharokfUa de tartan , sans nsan-
ches, s'agrafant sur la poitrine, et re-
tombant par derriere jusqu'^ nai-iam-
bes. Leur coiffe consiste en des crates
ou foulards roul^s avec art autour de
la tete, et attaches sur le front avec
une epin{;lette , oe qui ressemble asscz
k une mitre ou aux tongues ooiffes de
nos femmes de la Normandie. Les
coins de ce chAle pendent sur tes
epautes, et quelques elegantes ▼ akMi-
tent des giurlandes de conii. Les
femmes marines ajoutent un moroeau
de mousseline qui leur couvre le front
en bandeau. Les cheveux sont ooa-
verts, il n'en parattou'unetwade torn-
bante pris des oreiltes. Gette coifi^
est tres-pesante, et il faut un art par-
ticulier pour savoir la porter. Ge qu*il
y a d'extraordinaire, c est qu'eUes la
conservent la unit pour dormir, et a
cet eCfet elles portent avec dies de
petits oreillers.
Le costume des hommes est fort
simple. Le vStement ext^rieur ressem-
ble a celui qu'il reoouvre, si oe n*est
qu'it est tioutonne k la gorge. Les reins
sont serr^s par une laree ceinture en-
ricbie de Iwodes et d'agrafes d'or,
d'argent ou de pierres precieoses. Ce
Si lesdistinguespedalement, c'estteur
rban forme d*un tartan de soie tmr-
riol6e, dont les nuances sont'roqges,
jaunes , bleues et eroisto par des fits
d'or et d'argent. Le foont reste tou-
jours k d6couvert, et sur les ^paules
pendent des franges et des dands de
m^me couleur , ce qni teur domie uu
air sauvage, surtout lorsqu'ils mettent
leurs chevaux au galop.
Les tiabits de la dasse pauvre soot
sembtables , si ce n*est quoits sont d6-
pourvus de tous ces omemeiits. Aind
leur ceinture est conunimteent uim
nmpte corde, et te torfaau est d'un
ARM^NIE.
II
rottse fonc^. Le poignard ou kan^jar
est Teur arme indispeiiBable qo'ils ne
quittent jamais.
On trouye des Tieniards d'un ^e
fort avano^ oonserrant encore une ?i-
Sueurremarquable, malgr^les rigueurs
u climat et les fatigues de leur vie
aventureose. La taille des homines et
des femmes est g^n^alement aranta-
geuse , et tout annonce en eux une
satne et robuste constitution. Les en-
fants ont la peau tres-bianche , et les
joues ros^. Ge qui confirme les ob-
servations des voyageurs distinguant
parmi ce peuple deux races diverses,
c*est qu'en effet la phjrsionomie et la
taille des pavsans diffi^rent de Fair
martial et de fa stiture de leurs chefs.
Us sont moins bienfaits, et leurs traits
n*ont pas la beauts des nobles ou sei-
gneurs qui rapptillent les beaux types
grecs. A la premiere vue on peut ais^-
ment assurer que ceux-ci sont les maf-
tres du pays.
Tels sont les dtoils que nous avons
jug^ utiles et int^ressants pour roet-
tre le lecteur & port^ de connattre oe
peuple, pen connu jusqu'^ present,
et qui , occupant toute Textr^mit^ m^
ridionale de TArmenie, doit naturel-
iement faire partie de Thistoire de oe
pays , quoiqu il soit d*une autre race
que le reste de sa population. Les
Kurdes sont des hdtes incommodes
que les Armtoiens ont 6t6 contraints
de recevoir, et il est fort possible qu'un
)our , si un lien f<6d^ral unissait leurs
tribns, lis poussassent plus avantvers
le Nord leurs incursions.
Le sultan ferme les yeux snr leurs
depredations , soit par une ooupable
insouciance , soit par la conscience de
rimpuissance de ses troupes regimes
pour soumettre oes ennemis vagabonds
qui sont k la fois nulle part et par-
tout, puisque, avee chaqae saison, ou
sor la plus lek^re esperanoe d'un gain
queloonque, lis emportent leurs tentes
mdiiles et dian^nt le lieu de leurs
camfMemants. Aujourd'bui, moins que
jamais, la Porte est en jnesure de
r6primer ces ennemis eioign^s; lorsque
dans le grand corps de eet empire , la
iDort et le froid gagoent le coeur, com-
ment rappeler la vie et le mouvement
aux exti^mltes?
HISTOIRB BBUGIEUSB DU PBUPLS ▲BMBNIBN.
l^rire Tbistoire religjieuse d*un peu«
pie, c'est chercher ^ faire connattre la
pens6e morale et intime qui a inspire
lous ses differents actes et a dd les re-
Sler. Ce travail prepare celui qui n'a
'autre but que d'exposer les ev^ne-
ments varies et confus qui se pressent
sur la scene politique. Sans la connais-
sanoe de la loi spirituelle ou religieuse,
les faits seraient de muets hieroglypbes
dont on ne pourrait trouver rexplica-
tion, faute d'en posseder la clef; ou
bien si, par hasard, quelqu'un avait la
pretention de nous les expliquer, tl est
tres-probable quMI se tromperait lui et
ses lecteurs, parce qu'il deroulerait
seulement h leurs regards une serie
d'acddents ranges peut-etre dans I'or-
dre de leur succession chronologi-
3ue , Gomme les medailles ou les statues
'un rausee, mais il ne pourrait rendre
raison de la loi secrete et providen-
tielle qui a preside h leur enchatne-
ment, ni saisir le lien harmoniqtie qui
les unit, en etablissant entre deux
evenementa rapproches le rapport ne-
oessaire de cause & efifet L*ecrivain,
en suivant cette methode, ressemble-
rait assez k I'anatomiste qui croirait
nous donner une idee exacte de la na-
ture propre et du caractere d'un
homme, en decrivant avec soin tous
ses organes et leurs fonctions determi-
nees par les lois physiologiques de son
temperament. Oui , s'attacher exclusi-
vement k Tordre esrterieur des faita po-
litiques, (fest ne wbore que la lekre
qui tugy et se priver des hunineux et
feconds developpementa qui naissent
du prindpe superieur one nous nom-
mons reliffieux ou intellectuel.
S'il est Don, suivant nous, de poser
cette regie bistoriqne avant de parler
d'un peuple quelconque, son observa-
tion devient rigoureusement neces
saire lorsqu'il s'agit d'une nation dont
le caractere essentlel et distinct est
I'esprit religieux, comme chez les Ar-
meniens.
£n effet . si nous exceptons la race
33
L'UNIVERS.
juive, plus particuMrement fiivoris^
du ciel, et signal^ dans le monde an-
cieo par un r^me austere et une dis-
cipline r^ementaire, comme ^tant
destine h donner au monde le Dieu-
homme, son R^emptear, nous ne
trouvons point parmi les autres peu-
ples de r Asie une nation aussi directe-
ment soumise k Tinfluenoe de la loi
religieuse que la nation arm^ienne.
D^ les temps les plus recul^, que
I'on asstgne commundment oomme re-
poque de la formation des diflf^rentes
nationality de TOrient , nous la voyons
se d6?elopper k part et se oonstituer.
Bien qu'elle soit oontrainte plusieurs
fois de Met aux attagues des grandes
monarchies de TAssyne ou de la Perse,
eile ne perd jamais avec son ind6pen-
dance sa foi m son culte; elle courbe
un instant la t^, et, lorsqu'on la
croyait efifacte de la liste des peuples
asiatiques, on la voit avec ^tonnement
reparattre plus forte et plus jalouse de
Gonserver ses traditions, puand I'apd-
tre Thadd^ et le patriarche samt
Gr^oire eurent oonverti h la loi de
r£vanffile ce pays, les esprits demeu-
r^rent fermement attach^B au nouveau
symbole qu'ils avaient accepts, et le
cnristianisme s'est conserve Yivant et
fort, malgr^ les perstoitions qu'U eut
k soutenir contre la Perse, adonn^e au
culte du feu et du magisme, et plus
tard contre les Arabes et les Turcs,
z6i6s propaj^ateurs du mahom^sme.
Aujourd*nui les Arm^niens sont dis-
perse dans toute I'Asie Mineure; on
les trouve au fond de la Russia, k
Constantinople, en Perse, dans les
vilies les plus oommercantes de Tlnde,
et jusque sor les frontieres de la Chine ,
et partout lis sont in^ranlablement
attach^ k leur foi,^ la liturde et aux
pratiques de leur Eglise, teOe qu'elle
etait constitu^ au quatriime avtele;
ils se r^lgnent Tolontiers k toe pri?^
de certains droits politiques, et ik se
soumettre aux mdmes avanies que les
juift; ils soufirent le m^pris, les ca-
prices et les ill^alit^s de leurs domi-
nateurs; tout leur 6gal, pourvu qu*ils
conservent le libre exercice de leur re-
ligion.
Conune le people armenien a rare-
ment €t6 consider^ sous oe point de
Tue, et que son histoire rdigieiise oc-
cupe n6anmoins une place impoitante
dans rhistoire plus gentole du chris-
tianisme en Onent, nous donneroDs a
nos- considerations quelques d^eiop-
pements. Mais, avant de passer a Te-
poque chr^tienne, nous voulons exa-
miner quelle ^tait la croyance des
Arm^niens dans les Ages qai pr6o6de-
rent la renue de J^sus-Christ.
On salt commun^ment que r Arm^cue
est d^ign^B par la tradition bibliqoe
comme le lieu o^ Noe et ses en£ants
descendirent de I'arche : « Dieu, est-il
« dit au chap, viii, v. 1 , se soayint de
« Noe , de tons les animaux et de toutes
« les b^tes qui ^talent avec lui dans
« i'arche; il fit passer un vent sor la
« terre, et les eaux s'arrdtereot; les
« sources de Tabtme et des cataractes
« du del se referm^nt, et la {duie ne
« tomba plus du ciel; les eaux se reti-
« rtent de dessns la terre, ailant et
«re?enant, et aprte cent dnouante
c jours elles dimmu&rcnt, et larcfae
« reposa sur les montagnes d' Ararat,
«le septi^me mois, au dix-septitee
«jourdu mois. »
Sans examiner id de nouveau si Ic
mont Masis est r^dlement la montagne
dont le nom nous est conserve dans les
saintes lettres, nous rappellerons que
les antiques traditions des peuples
flxent unanimement la premito patrie
du ^enre humain dans ce plat^u de
TAsie. La plaine de Senoaar, ou se
fondent les premieres vilies, et ou
Nemrod, ce puissant chasseur devant
le Sei^eur, etablit le sidge de sa do-
mination, n'est pas fort distante de
TArmdnie; Ton pent done affirmer que
ce pays ftit ooeup6 d^ la plus haute
antiquity. En examinant I'histoire po-
litique de ce peuple, nous verrons que
son premier oiefou roi , nommd Haig ,
trouva, lorsqu'il vint prendre posses-
sion du pays , une race p<» nombreuse ,
il est vrai, mais toute difii§rente de la
sienne, etddj^ mattresse du sol.qu'dle
cultivait. Qudle est cette race primi-
tive? Les andens documents histori-
ques ne jettent aucune lumidre sur oe
AllMKNIE.
33
fall, Qu'ils ir.'ii(|noitv frt passant; et, si
nous fe remarquons , c'est qu'ils offrcnt
une andlogie frappante avec les annates
de la Chine, de llnde et de la Gr^e,
ou Ton rencontre ^galement, avant
Farriv^e des P^lasges et des Hellenes ,
des autochthones ou aborigines. Ces
premiers habitants ne peuvent ^tre
consid^r^s comme faisant partie de la
nation arm^nienne, dont le nom ne
convient proprement qu'a la race con-
auerante amende de Babylone par Haig,
uls dupatriarcheThorgom, ran 2107
avant Ji^sus*Christ.
La religion primitive de TArm^nie,
comme celle des autres peuples, fut
pure et exempte des mensonges que
rignorance ou la corruption du cceur
y apport^rent par la suite. Fondle sur
la tradition que Thorgom tenait des
premiers patriarches, elle consistait
dans Tadoration du vrai Dieu , dans le
repentir de la dech^ance primordiale,
et dans Tattente d'un supreme r^para-
tnir. Le culte ^tait simple, reposant
sur la pri^re et le sacrifice san^lant.
Le p^re de famille , k la fois pontife et
roi, en regissait lesmembres avec une
sage equity ; il offrait au Tres-Haut,
comme le m^iateur cboisi , les prieres
et ies victimes, il terminait les diff(6-
rends, et, sous ce r^^ime patriarcal,
tous jouissaient d'une paix profonde.
Mais les enfants de fa race maudite
de Cham, qui perp^tua la race mau-
vaise et antedihivienne de Cain , trou-
bidrent bientdt Tharmonie qui regnait
parmi les descendants de Sem et de
Japhet. Ayant rejete de bonne heure la
tradition de leurs peres, ils suivirent
la voie perverse de Torgueil et de la
concupiscence; ils substituerent au
culte du vrai Dieu des honneurs rendus
aux ^tres secondaires de la creation,
tels que les astres et les forces sup^-
rieures de la nature. L'adoration du
soleil, des plandtes et des constella-
tions, donna naissance au sab^isme,
qui prit lui-m^me son origine dans les
plaines de la Chald^, dont le peuple
ifianifesta toujours un goCit irr^sistiole
a lire dans Fecriture myst^ieuse des
astres les secrets du ciel et ses pro-
pres destines terrestres. Ce culte avait
8* lAvraison, (Armrnie.)
en lui-nidrne quelque chose d^^leve «t'
de grand; il est possible que dans le
principe une pensee coupable n*en al-
t^rdt pas la majesty, et que Fid^e du
Dieu unique, inondant de ses clart^
tous ces piles miroirs de sa puissance,
sem^s avec profusion dans Fespace,
domindt Fensemble de ces conceptions ,
fruit d'un noble effort de FinteUigence.
Maiheureusement Forgueil , cette pre-
miere pierre d'achoppement pour la
raison d'Adam, est toujours vivace au
fond du cceur humain, et il corrompt
les plus pures pens^s. Aussi Fessor
qu*avait pris soudainement la science ,
en se livrant aux recherches astrono-
miques, porta les esprits a pr^umer
d'eux-m^mes. En scrutant trop pro-
fond6ment les oeuvres de la cr&tion>
on oublia le Cr^teur, et peu h pen on
lui substitua la cr^ture. C'est alors
que commence proprement Fidoldtrie.
Babylone est le lieu que la tradition
nous d^signe comme le foyer de cette
grande erreur, et c*est \h e£fectivement
qu'on ^leva le premier temple et la
premiere statue au dieu Belus.
Remarquons aussi cc fait impor-
tant, que le berceau de Fidolitrie voit
en m^me temps nattre et grandir le
principe de la force brute ou du despo-
tisme. Le premier trdne est dresse
dans la ville ou Fon commence k renier
Dieu; les horomes qui avaient refuse
de soumettre leur raison aux v^rit^s
traditionnelles de la foi, tombent sous
Fasservissement de Nemrod; Fescla-
vage et Foppression de Fbomme par
Fhomme suivent le refus d'ob^ir a la
Divinity.
La colonic amen^ de Babylone par
Haig ne tarda pas a ressentir les eftets
de la revolution religieuse et politique
op^r^ dans la m^tropole. L'amour des
conqu^tes, suite inevitable du nouveau
gouvcrnement despotique, poussa au
el^ des limites de la Chaloee les ar-
m6es des Assyriens , et ils vinrent por-
ter la guerre en Arm^nie, Fan 1725
avant notre ere. Le roi Anouscbavan
fut vaincu, et son royaume demeur»
soumis a Fempire assyrien jusqu'au
temps de Baroir, son trente-auatrieme
snccesseur, c'est-a-dire , penaant prds
34
L*UNIVERJI>.
de dix siteles. Ge fiit pendant ce long
cycle d'ann^es, qu'enveloppent d*e-
paisses t^nMires, que la religion et le
cuhe de la Chald^ se propagmnt dans
rArm^ie. Motse de Khoren, le plus
ancien historien , et qu'on pent appeler
^ juste titre rH^rodote ann^ien, paroe
^u*il nous rappelle et T^rudition et la
simplicity maiestueuse, oomme aussi
la crddulit^ die I'ecrivain grec, nous
apprend que ce m^me Anouschavan
offirait des sacriGces sous les platanes
de rantique Armavir^ sa capitale, et
que le mmissement des feuilles, agi-
tees |)ar un vent i^er on impj^tueux,
serrait ensuite aux pr^tres h tirer des
tronostics heureux ou d^vorables.
ien qu^il ne soit pas dit qu' Anouscha-
van lui-m^me soit tomb^ dans ces su-
perstitions, n^ninoins, comme ces
m^mes arbres oonserv^rent dans les
Siftes suivants un caractte sacr^ et |>ro-
pnetique , il est probable que la relis ion
primitive avait d6j^ perdu queique
chose de sa pureU.
On pent done 6xer cette ^poque
comme le temps dk le sab^isme se r6-
pandit dans I Arm^nie. La conqu^te
d'un peuple par un autre ne s'effeduait
jamais » dans les Ages psimitifs, sans
que le vainqueur nImposAt au vaincu
sa eroyance, et c'est ce qui nous fait
nrdsumer que la religion officidle de
la cour des rois d*ArmMe dut 6tre
celle des monarques de Babjrlone , quoi-
que dans d'antres parties au pays ran-
cienne tradition pdt se oonserver avec
plus ou ODoins d*mt^^. Le sab^isme
enfanta ntessairement les erreurs
grossi^es de I'idolAtrie ; le roi avait ses
temples et ses dieux , et lorsque Nabu-
chodonoflor, aprte avoir men^ les Juifs
h Babvione, en contraignit quelques-
uns d^6migrer en Arroenie, nous sa-
vons que Sempad, chef de I'ancienne
faroille des Pagratides, ^nt venu se
presenter devant le roi £rovant P%
celui-ci le perstoita cruellement , paroe
qu'il refosait d*ador«r ses idoles.
La chute de Tempire assyrien rendit
au peuple arm^nien son ind^pendanoe
politique; mais, sous le rapport reli-
gieux, il fut entratn^ dans le nnouve-
ment de TA^yrie et de la MMie, con-
quises pari Cyrus. Le sabi^isme on
I idoldtrie pure c^^rent aux attaques
nuissantes du magisme ou du culte dti
feu , reg^n^r^ par Zoroastre. L'Arm^-
nie, qui touchiBiit aux frontidres de la
nouvelle monarchic, 6tait sous la main
des missionnaires de la nouvelle doe^
trine. lis y p^n6tr^nt et firent de
nombreuses conversions. Conune le
zend 6tait la langue sacr6e des mages
et de leur liturgie, ils n'ont pu imposer
leur foi au peuple arm^nien, sans im-
porter dans sa langue un certain noiiv
ore de mots. Si ces mots sont relatifs
aux objets du culte et de la croyanoe ,
la langue arm^nienne litt^rale, bien
au'elle alt change depuis cette ^que,
oit cependantenconserver des traces,
qui sont autant de t^moins irr^usa-
Dies de la domination religieuse des
Perses. Or, c^est ce que la philologie
orientale dtoontre; et, si oe ^enre de
recherches n'^tait d^plac^ ici, nous
donnerions une liste comparde de mots
absolument identiques dans les deux
langues, tels que ceux qui expriment
le nom m^me de cUeu, cdui de sabi"
teUj 6^ feu , de bUcher^ de cuUe, etc. ,
etc Les monum^ts historiques vien-
nent a Tappui de la preuve que nous
citons. Tigrane I", contemporain des
Grecs, secourut Cyrus, au rapport
des bistoriens, dans sa guerre oontre
Astyages, roi de Mddie, et c'est lui qui
contrinua, avec le nionarque persan,
k di^truire la puissance du Dragon, si-
gnification du mot Astvages.
Tigrane avait un tfls nomm^ Va-
bakn , c6l^re par sa valeur ; des chants
populaires, conserve par les noonta-
guards, et qui remontent peut-dtre a
son ^poque, vantent ses hauts feits , et
II est tres-remarquable que \efeu appa-
raisse d^a dans ces vers, voil^ sous
les id6es du magisme. Void oe qu*ils
disent : « Le del en&ntait, la terre en-
« fantait, ainsi que la mer, oouieur de
« pourpre. Les douleurs de renfaute-
« ment tourmentaient aussi le roseaii
« rouge. De son extrtoit^ 8*6chappait
« une fum^, et bientot la fieinme
« parut , et de cette flamme s (^lan^ait
« unjeunehommealachevdurebloncie.
c La flamme entourasesboudes et roi-
ARM£NI£
Zb
« tigeait autour de sa barbe; ses yeux
«et ses paupitea ^taient deux so-
« leils. »
Gette sorte de chant insgM montre
que dte le prindpe la doetrine de Zo-
roastre avait ^ accepts en Armtoie ,
et oe qoi le prouve encore , c'est que ce
mtee Yahakn reoit aussi le nom d' Ar-
mazd, qui eat ^videmment le mtoe
Sue celui d'OnnuaEd, nom du principe
u bien dans le magisme.
Lor8q[ue Alexandre le Grand se jeta
sur I'Asie et qu'il y ^tablit la domina-
tion grecque, la religion sensuelle et
proprement paiennedes conqu^rants,
entour^ du s^duisant cortege des di-
vinity de roiympe, livra une lutte
assez faible au culte plus sMeux et
plus intellectuel de la Perse. L*Arm^nie
resta presque totalement attach^ k la
doctrine du magisme; seulement les
parties de TArm^ie Mineure avoisi-
nant la Gappadoce ou les autres pro-
vinces greoques, r&ist^nt moins au
contact imuMdiat et habitue! des idees
paTennes,et, lorsque la puissance ro-
maine, qui avait adopte le culte des
Grecs , 6tendit ses armes sur ces mfimes
regions, la rtforme oj^He dans les
idSes reliijieuses des Arm6niens devint
plus sensible, bien qu'elle ne tdi ja-
mais complete ni radicale, parce quuls
pr^il^raient allier les ^Itoents h^t^ro-
genes du polyth^isme et du dualisme.
lis o6daient sans doute en cela aux exi-
gences de la politique romaine, qui
voulait imposer aux vaincus ses divi-
nity comme ses lois. De \h vient que
le nom d'Armazd ou d^Ormuzd, le
bon principe, sert aussi h dteisner Ju-
piter. Reste a savoir si au fonode leur
conscience les Arm^iens entendaient
par ce nom celui du Jupiter Capitolin
et Tonnant , ou bien sMls ne v^neraient
pas plutdt en lui I'implacable et ^eta^
nel ennemi d'Ahriman, principe du
mal. De mdme, ils laissaient traduire
le nom de Zerwan, signifiant le temps
sans homes y magnifique id^ de I'm-
fini, oongu sous sa notion d'StemiHj
par le mot Saturne. Satume est, ^ la
▼erit^ , le ytre des dieux chez les Grecs ;
il apparaft h Torigine des choses comme
primmi Jupiter et les autres divi-
nity; mais il n'a poinl le caractere
imposant de Zerwan, qui fcbappe , dans
les mysterieuses proiondeurs. de son
essence, au regard de Tesprit humain.
Un culte cel^re diez les Arm^
niens, et dont parle Strabon , est celui
de la d^esse Anahidy qu'il nomme
AmaUs, EUe avait plusieurs temples
dans la provmce que les G6orgiens
nomment aujourd'hui Ek^hUtsUh.Tan-
t^t les Grecs interpr^nt oe nom par
celui de f^hiuSy et tant6t par celui de
Diane. Gette confusion tb6ologique
vientdecequececulte^tait^tranger a la
Grtee, et que la d^esse Anahid ^it
proprement la Mylitta ou I'Astart^ des
ChaMtois, ce oui jetait du vague sur
ses attributs. L admiration du peuple
avait aussi consacr^ quelques noms de
h^ros correspondants a ceux d*Hercule ,
de TbMe et autres, qui portent en
G rtee le nom de deminiieux ; tels teient
Sbaniarad, yahtUsn et Tiani.
Ghaque peuple a toujours eu dans
son territoire un lien choisi et v6aM,
auquel se rattachaient ses anciennes
traditions religieuses, et oft il fixait le
si^ de son culte, de ses pilerinaees
et de ses premiers pontifes. Ge lieu
dtait ordinairement regard^ comme le
point central de la terre. Nous retrou-
vons cette Id^ cbez les Indlens, les
Persans , les Grecs, et mime en ^grpte.
L*Armlnie avait ^ement sa terre
sacrte ; c'^it le pays de Daron, district
du canton de Dourouperan. Lorsque
la religion chr^ienne envahit TArm^-
nie, cette province fut le dernier asile
oil se retranchdrent les sectateurs du
magisme , et les arguments qu'Us oppo-
s^nt aux ap6tres de T^vangile n'^
taient pas ceux de la dialecti^e, comme
nous le dirons aiUeurs, mais une r6sis-
tance Ik main arra^ et par la force.
II paratt que I'lnde avait aussi exerc^
une influence religiease sur oe pa^;
s^nt Gr^oire riliuminateur, premier
patriarcbe de TArmdnie, trouva dans
ces lieux des statues et des temples con-
sacr^ k Thnidre et k Gisane* divini-
ty que les prMres lui dirent etre ve-
nues de rinde, sans pouvoir pr6ciser
r^poque.
Ainst, apr^ ralt^ration de la croyance
36
L'UNIVERS.
primitive , la Chald^e et ia Perse^vaient
successivement Cait pr^valoir leur sym-
bole religieux dans I'Armdiiie. La
Greoe, post^ieurement la puissance
romaine , qui adopta son culte, et d'une
autre part Tlnde, essa^^nt aussi d*y
dominer, mais leur action fut beaucoup
Rlus restreinte et moins durable. Quand
i diristianisme parut, TAnn^nic,
comme les autres nations de TAsie,
etait travaill^e de la corruption g^n6-
rale; ddmembr^ par les Romains et
par la puissance croissante des Par-
tbes , sa dissolution politijpie iitait ine-
vitable, si la foi chr^tienne n'^tait
venue vivifier et r6g6n6rer cette race
appel^ encore k de glorieuses desti-
nes.
En effet, T^vangile, en changeant
r^tat des croyances , modifia heureuse-
ment la position sociale de ce peuple;
il opera une scission morale, profonde
et perp^tuelle, entre TArmeuie de-
venue chn^tienne et la Perse soumise
au culte de Zoroastre. La ntossit^ ou
elle dtait de defendre sa foi contre Tin*
tolerance j^rsane la porta a revendi-
quer son md^pendance politioue, de
sorte que la foi enfanta cnez eile la li-
berty; de plus, sous le rapport de la
civilisation , la revolution oper^e par le
christianisme fiit encore plus sensible.
Car nous ne voyons pas que TAi^
menie eut participe anterieurement au
mouvement intellectuel des Grecs et
des Syriens qui Tavoisinaient. L'igno-
rance etait telle, que les anciens rois
n'avaient pas d'historiens nationaux
capables de transmettre dans leur lan-
gue les annales de leiirs r^gnes, et ils
ne nous sont oonnus que par les chro-
niques compos^es en grec et en syriaque
que oonsulta Moise de Kboren, qui
tait lui-meme cette remarque. D^s que
i'idee chretienne a subjugue les esprits ,
lis perdent leur ancienne rudesse, Ta-
mour de la science et le godt des let-
tres se developpent , et la face du nays
se couvre d*ecoles , comme nous auons
le dire, en suivant Phistoire religieuse
de ce peuple.
Suivant la tradition , Abgare (*) , roi
(*) Nous pensons que nos lecteurs noiii
d'£desse, instruit par la reiiommeedes
miracles eclatants du Christ, qui ac-
tturont gri de mettre tout lean jeia la oor-
respondanoe attribaee 4 Abgare eta Noti«<
Seigneur jesos-Christ. EUe eat extnite de
Molae de Khoren et elle oonoorde aveeoeUe
que rapportent plusieun hiftarieus grecs.
ttDet envoyes d* Abgare lui raoonterenf, a
leur retour de Jenualem , ce qu*ils avaieot
entendn dire du Messie qui parcourait alors
les villes de Judee. Ce r6cit etouna le roi
d'^esse , qui crut auuitdt reoonnaitre le
fits de Dieu. « Ces prodiget, disait-il, n«
sont point ceux d'un homme ; la puissance
de ressusciter les morts n'appartient qu*i la
DiTiniie.
» Or, le roi ilait trsvaille eo ce moment
d*une maladie cruelle. Tous les medecint
avaient en vain epuis^ les aecrels de leur
art , ils n*afaient ootoBU aucun heureox re*
sultat Abgare espera que le Messie pour-
rait le guerir de son mal ; en consequence
il lui ecrivii une letire con^iie en ces ter-
mes :
•Abgare, fits d'Arscham, prince d*]&leste,
i Jesus, sauTenr et bienfaiteur, nouveUe-
ment apparu au pays de jenisalem, salul:
« Nous avons entendu parler de tous et
des guirisons operees par vos mains , sans
aucun remede, car, comme on le dit, tous
donnes I'ouie aux sourds , ia vue aux aveu-
gles , vous failes marcher les boiteux , tous
purifies les lipreux , vous cbassex les esprits
impurs , vous rendex la tante a ceux qu'af-
6ige une longue maladie, et vous reasuscitez
les morts. En apprenant oeci , j'ai &it cette
double supposition : que vous %les ou Dieu
mime descendu du ciel , ou le fils de Dieu.
C*est |x>urquoi ie vous ai ecrit de prendre
la peine de venir chez moi , et de me guerir
de la maladie que j*ai depuis longtemps.
J'ai aussi appris que let Juifs miirmurent
contre vous et qn*ils veulent vous persecu-
ter. Ma ville , quoique petite, est assez agrea-
ble, et elle sumrait poor nous deux. •
« Les porteurs de la lettre trouverent Notre-
Seigneur a Jerusalem , et c'est ce qu'indi-
quent les ^vangiles par oe passage qiu quel-
ques idoldtres ittdent venus U trouvtr.
« Jesus re^ut cette lettre, mais il n'alla
point k Edesae , il fit ik Abgare la repoiise
suivante :
« Heureux celui qui croit en moi , sao«
m'avoir vu , car c*est de moi qu'il est ecrit
que ceux qui me voient , ne croieut pas en
moi, et que ceux qui ne me voient pas.
ARMftNIE.
37
complissait alors sa mission en Jud6e,
envoya vers lui le prier de le gu^rir
croient et reqoivant la vie. Yous m'ecriTez
d*aller Toas trouver, mais il faut que j'ac-
compUflseidtouies lochosespour Icsquelles
j'ai ete envo^i. Apres leur aocomplisseineiit,
jt m'eleverai vers celui qui in'a envoyi , et
je irous envemi Tun de mes disciples pour
gu^rir votre maladie, tous doniier la vie et
k tous oeux qui sont avec vous. »
« Abgare le^ut oetia letlre d'Anao, qui lui
remit ea Divine temps Timage du Sauveur (*)
que Ton conserve jusqu*a ce jour daos la
ville d*tdeBae,
•Apres I'ascensioa de Jesus, Thomas, Tun
des douze apotres , envoya Thaddee > Tun
des soixante-dix disciples, dans la ville
d*^e&8e pour guerir Abgare et revao§|e-
liser. II descendit daos la maison de Tobie,
prince juif , que Ton dit £tre de la famille
des Pagradites, et quin*ayantpas abandonni
le jodaisme au milieu des gentils, se con-
vertit ensuite au christianisroe. La oouveUe
s*en r^ndit aussitdt dans la ville, et lots-
que Abgare Teut apprise, il dit : • (Test oelui
au soiet duquel Jesus a ecrii.* Il le manda
prisdie lui, et lorsque Thaddee entradans la
salle , son visage parut resplendissant a Ab-
gare, qui , se levant de son tr6ne , se pros-
tema sur sa face et lui rendit cet hommage ,
au grand ^tonnement des seigneurs qui Ten-
touraient. Abgare lui dit : m Si tu es par
hasard le disciple du bienbeureux Jesus,
qn'il m*a dit envoyer ici , ne peux-tu pas
gu^ir mon mal ? » Thaddee lui r^pondit :
« %Si tu crois en J^us , le fits de Dieu , ta
tlemaode sera exauoee. »
•(Abgare lui dit : « Je crois en lui et en
son pere , et c'est pour cela que ie vouiais
prendre mes troupes et aller detruire la
nation juive qui Ta crudfii , si je n'en avais
i*(e empdche par les Romains. »
-Alon Thadd^ Tevangelisa lui et toute la
\ille ; puis lui imposant les mains, il le gueril,
ainsi qu*Abdia , prince aussi consider^ de
la cour que du peuple. Tous les malades et
les infirmes de la ville recouvrerent egale-
ment la sanl6. Abgare et toute la ville re^ut
le baptdme, on ferma les portes des temples,
H les statues fnrent oouvertes de roseaux.
l^rsonne n'etait amene violemment a la foi,
«*t cependant chaque jour le nombre des
lideles aogmeotait.*
Abgare ecrivit«»ncore a Tempereur Tibere
\a lettrc Miivante :
n V07. li Fl.nch« n« 11.
de la maladie cruelle gui l*affligeait.
Comme sa demande ^tait faite dans un
« Abgare, roi des Armeniens, a mon sei-
gneur Tibere , empereur des Romains , salut :
« Quoique convaincu que tout oe qui se
passe dans votre empire n*est point cacbi 4
Y. M. , je vousavertis cependant par cette
lettre, comme votre fidtie ami , que les Juifs
de Palestine ont crucifix le Christ, qui n'etait
ancunemeut coupable, k cause desesgren-
des et bonnes oeuvres , de ses prodiges et de
set miracles qui allaient jusqu'A ressusdter
les morta. Sachez qnecette puissance n*est pas
celle d*un homme, mats bien celle d*unDieu.
Aussi, au moment ou ils le crudfierent, le
del s'obscurdt et la teire trembla. Apres
trois jours il ressusdta , et presentement il
acGomplit dans tous les lieux des choses ad-
mirables par la main de srs disciples. Yotre
Majesty sait ce qu'il convieot a*ordonner
touchant les Juifs qui ont agi de la sorte. II
faut ordonner qu*en Ions lieux on adore Ic
Christ , comme le vrai Dieu.
Repoaie, « Tibere, empereur des Ro-
mains, a Abgare, roi des Armeniens, salut :
« On a lu devant moi la lettre dictfe
par votre amitie , et pour laquelle je vous
rends des actions de grAoes. Pilate nous a
donne des details sur les miracles dont nous
avious entendu parler pr6cedemment, et il
nous a dit comment, apres sa resurrection,
il avait ete recomiu comme Dieu par beau-
coup de gens. CVsl pourquoi j'ai pense a
faire ce que vous me oooseillez. Mais comme
la coutume des Romains veut qu*une divi-
nite ne soit reconnue que par ordre du steat,
j*ai consuite sur ce point cette assemblee
qui a rejeti ma proposition. Toutefois, nous
avons permis k quiconque le voudra , de re-
connaitre Jesus pour Dieu , en mena^nt
de la mort ceux qui le caloroaieront. Quant
aux Juifs qui ont ose le crudfier, bien qu*il
meritAt des bonneurs et des r^mpenses ,
au lieu de la croix et de la mort , lorsque
Taurai rMuit les Espagnols r^olt^, je leur
infligerai le chAtiment qu*ils mMtent. »
L*authenticite de ces lettres a beaucoup
exerce la sagacite des critiques. Tillemont ,
Pari ct d'autres ont rifuti longuement ceux
qui la revoquent en douie. D'aulres, comme
J. Damascene , de Fide orlhod., liv. 4 , ch. 1 7;
S. Ephrem, sur le Testament; Nicephore,
liv. 9 , ch. 7 ; Procope , de Bello Persico ,
I, ts , ch. 18 , se sont contentes de respecter
i'antiquite de ces leltres , et de croire a la
poMibilile de la correspondance , «ans pre-
as
L'UNIVERS.
esprit de foi et d'humilit^, le Saaveur
Tezauga, et il envoya Thadd^, Tun
des soixante-douze disciples, qui le
gu^rit , et jeta dans oette ville les pre-
mieres semenoes du christianisme.
L'apdtre Barth^lemi , que les peuples
de rlnde, de I'Arabie et de la Perse,
yr€n<tceat comme leur illustre mission-
naire, porta aussi ses pas ^ Edesse, et
de Ui il traversa, avec Thadd^, TAr-
m^ie, la Cappadoce et 1' Albania. Les
germes pr^eux de la foi iiirent done
d^pos^.en Arm6iie dte le commence-
ment de la mission des apdtres; mais
ils ne prirent leur aocrotssement et ne
fiructin^nt que lorsque saint Gr^oire
Tint les fdconder de ses sueurs et de
son sang.
Saint Gr6goire (*) , tel est le nom du
vrai civilisateur de TArm^nie ; aussi lui
a-t-on donn^ le titre d*iUuminateurf
comme ayaot 6clair^ de la lumi^re de
r£vangile ce peuple encore assis aux
ombres de Tidolfttrie.
Issu de rillustre maison des Arsaci-
des, il naquit vers Tan 240 de notre
dre, k r^poque oh la dynastie de Sas-
san montait sur le tr6ne de la Perse.
Son p^ Anag re^t la triste mission ,
de la part du monarque persan. d'aller
en Armdnie assassiner le roi Rnosro?,
de la famine des Arsaddes , dont les
droits k la couronne qu'il avait usur-
p6e ^talent l^times. Ana^; rdussit
dans rex6cution de soa dessem ; il sur-
prit et tua Khosrov ; lui-m^me porta la
peine de son crime, et il expira sous
tendre que le$ lettrea soient exactement les
mtoies. Dans un concile tenu sous le pape
Gelase , Tan 4g4 , ou rangea oeUe oorres-
pondance panni les apocr^phes. Mais la
sentence de l^lise ne d^tnut en rien Tauto-
rit^ du temoignage des historiens de VAr-
m^e Ott de la Syrie, et n*erige point en
article de foi leur faUificBtion, conune quel-
ques-uns pourraient Tima^ner. Le jugeraent
que des ecrits n*ont pas eie transmis direc-
lement par les ap6tjres, et n*ont point le
degre d*authenticite des ivangiles, n'em-
Slique point en soi la faussete de ces rnhna
ocuments. Cette decision les dasse seule-
ment dans la categorie des aiilres sourreii
historiqnes de Tanliquiie.
(•) Toy. la plnnrhr n« la.
le fer des gardes du roi. II laissait tm
jeune enfant h la mamdle, qu'on sauva
avec peine, en I'emmenant dans le ter-
ritoire de Tempire romain, ou il fiit
^ev^ dans la religion chr^'enne. D'un
autre cdtd, le fils de Khosrov, Ele-
ment en bas dge, avait 4A6 conduit a
Rome pour dcnapper aux trames per-
fides du roi persan. II grandit dans
oette viUe, au milieu des camps et des
exercices militaires, puis, avec les se-
cours de Temperrar Dioddtien, il re-
vint en Armdnie reveodiquer le trdne
de ses p^res. A peine avait-il oonsolid^
sa puissance, que Grdgoire venait k sa
oour lui ot&ir ses services, toutefois
sans se faire connattre. Le roi lui £aJt
un accueil favorable; au bout de qud-
que temps, il ddcouvre que Grdgoire
est durdtien, il le persecute borrible-
ment pour sa foi , le torture , et le jette
au fond d^une dterne, oil il lan^t
quatorze ans. Dieu lui conserve mira-
culeusement la vie ; il sort de ce goufEre
infect et revient prdcher la foi a la
cour de Tiridate, nom du roi ann^
men. Ce prince, gu^ri par lespri^res
du saint cie la maladie qui Tafuigeait,
se convertit k Tfivangile, et acoepte le
baptSme avec toute sa cour.
Lorsque le christianisme devint la
religion de ll^tat, il prit un rapide
aocroissement, et cette revolution re-
ligieuse fiit secondde par celle qu'op^-
rait siroultan^ment, dans Tcmpire ro-
main, la conversion de Gonstantin le
Grand. L'^pte de Tiridate et Telo-
quence de Gr^oire, unies par une ten-
dre charity, ^tendirent le royaume du
Christ dans tons les lieux encore sou-
mis au magisme. Le roi mourut dans
un dge avanc^, b^ni de ses sujets, et
plac6 par r£^lise arm^nienneau nombre
de ses premiers saints. Gr6goire pa^
toute sa vie a organiser son Eglisenais-
sante, et il r^di^ea des r^lements qui
sont encore suivis par elle avec une
ponctualite scrupuleuse. Sur la fin de
ses jours, il se retira dans la solitude,
ou il re^ut la couronne du martyre ,
ayant ^te tu^ par Tordre d*un prince
infidele (*).
(*) Les auteiirs arinenien» parleni d'uo
\
• • • »
• • • .
• • • •
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9 •
Saint Gi^oire avait et6 le premier mence oette sdrie d*Antra patriarcbes
patriarche de la nation , et en lui com- qui se suiveDt d'une maniere non in-
voyage que saint Grcgoire fil a Rome avec Tiridale, el Gr^goire , ce martyr mtoA , le
le roi Tiridate, pour allcr deposer au pied couragcux confeneordu Christ, lillamina*
du pape Sylvcstre Tbommage de IT^glise leur de rorient et da Septentricm , noas
naissanle d*Ann^e. l\i citent mtoe un faisoni sairoir, disoot-noiu, qu'etix, nos
actesoleniielleinenteoncluefiireGoiifttaiitiD, tres^ers frirea en J. C, les prindpanx
empereur de ConsUotinopIe , Sylvesire, su- amis de notre trea^tiguate ioaverainele, cei
prime pontile de Rome , Tiridate , roi d'iir- chefii illustros , admia k not deliberations ,
m^eet saint Grigoirelllluminateur. Nous Mnl venus pres de nous pour voir le lieu
pensons qu*on a confondn le voyage que le <le notre siege , dont la puissance s'^tcnd
m^sae saint fit avec le roteie roi k Cisar^ de TOrient a TOocident, Fhcritage des sainU
ville de Pempire remain . et dont TevAqne et premiers apdtres , et le pape qui est leur
confera longtemps rinvesUtureaux patnar- auccesseup; qu*en outre ils sont venua viti-
ches d'Armenie. Nous doonons un extrait tcrleglorieux empereur r^oemmentoonverti
dc ce traitc qui a une haute anliquiteel qui i !■ foi chr^tienne, et la tres-exoeilente et
est fort connu dans Thisloire ecd^siasUque trea-puissante imptetrice Hfline.
de oette l^lise. ^est pour oela que le si%e de notre au-
torit^, ddegufo par Dieu, en a ressenti une
Acte d'aliiance et de eomeorde da grand g,^de jubilation, et que nous sommet aor-
empereur ConsUmtm etdu pape Sjhestre, tU avec un cortege impoMOit k la rencontre
.avec Ttridate, nu ^Jrmime, et samt ^^ <^ Ulusties penonnagea; puis, api^
Gregoire, CiUimunaUitr de CArmMe, nous itre salu^ r^proquement, et nous
Par Teffet de la volontd et de la puissance to« rendu les honneura conveuablei , nous
de la sainte Trinity coosobstanlielle , du sommes entris dans I'^lise des Saints apA-
Pere incomprdiensible dans son to« , de tres; nous y avona adora le Dieu, maitre de
son Fib unique, notra seigneur et notre r^ lenra saintes reliquci , et le Christ qoi ecu-
dempleur, du Saint-Espnt qui donnela vie ronne les saints
et la d^vrance, ce present Initi impMal ,
ratifii et rendu irrevocable par Dieu, a et ^
ecrit par Tordre de nous Constantin, su-
prtene empereur, toujours victorieux, tris- Par TefTet de la volonti divine et de
auguste, roi des rois, possesseor de Tem- rinteroession de la mirede Dieu, des saints
pire romain, qui embnsse tout TumverB, ap6tres et de tons] les saints, nous, roi et
et qui subsiste depuis des sidles; nous qui, pontife suprteie det deux nations, ro-
en vertn du secours du vrai Dieu, ^tendons maine et arminienne , nous conduons le
notre antoriti des borda du vaste Ooian traite et noua Jurons le serment d'une Ater-
jusqa*aux Ueux o& se leve le soleil, sans nelle alliance entre le pcuplebeUiquenxdes
que jamais la victoire nous abandonne, gri- Remains et le peuple invincible d'Armfoie,
ce a I'assistance de la croix de J. C en presence de la croix giorieuse de J. C. ;
D'une autre |)art, cet acte a die egal^ et, pour donner 4 cet acte un caraetere in-
nent dresse par Tordre de nous Syhreslre , dtiebile, nous I'avons sodld du sang prddeox
souverain pontife romain , sucoasseur du et redoutable du Christ ; nous y avons hcnX
siege des princes des ap6lres, Pierre et le nomde frftre, qui doit dtrecommnn aux
Paul , nous qui , tenant en noi mains , les deux nations de TOrient et de TOoddent.
defs du royaume des deux , avons le pou- En vertu de qnoi nooa nous engaieons i
voir de lier et de ddier sur la terre et au un amour et a une foi aemblables i ramoor
del, chez toutes les nations de la diretienti et 4 la foi jur^ au Christ qui a'est fait notre
eparses de TOricnt a rOcddent, et qui regis- firfare, nous promettant de nooa dtfendre les
sons Vtj^&nt universelle du ChrisL uns les autres jnsqu*4 la mart, mteie de
Par ee present acte nous fiiisons connal- nous saorifier mntuellement avec joie, et
tre k tous, ^u*appd^ par TEsprit saint, le d*a¥oir les mimrs amis et leS mteies cnne-
puissant roi d'Annenie Jean (^ , qui est mis. Aucune des deux nations n'osera tirer
*.* - , , ^ .u_^ . . X »--sj ^ . le glaive oontre rautrc. Que le fer perpe le
MM dtmt* le nvorwa so* qn'il ncvt Ion <k wmi ^^^Bur de oeux qm auraient cette audacr !
baptrair. quc Icur WK sc brisc daus leurs mains 1
40
i;UMVERS.
tcrrompuc jusqu'a nos jours. 11 eut
pour successeur Arisdages (*), son tils ,
qu'il avait eu d'un manage contracte
uvant son ordination. Le nom de ce
vertueux pr^lat , qui fut aussi une des
lumieres de i'^glise armenienne, est
insere parmi les noms des ^v^ues
mentionn^ dans les actes du concile
de Nicee ; il y assista et en rapporta
les d^isions en Arm^nie. On Ta quel-
quefois confondu avecun autre 6v^ue,
parce que les Grecs ont totalement d^-
figure la prononciation de son nom ,
Cc traile subsi^tera CDtre les deux nations
jiiaqu'a la fin des temps, ct quiconque ose-
rail Tenfreindre , qu*u soit nstranche de la
sainte foi chrelienoe; que les maledictions
de Cain , de Judas et des pritres deicides
ftesent sur lui , el que dans le ciel les anges
repetent : Ainsi-soit>il ! ainsi-soit-il I
Au Dom de la tres-«ainte Trioite , nous
benissons Gregoire , en plaoant sur sa tite
venerable la main droite clu divin apotre
Pierre, et le linoeul sacre de J. C; nous le
constituons, lui et ses successeurs, suprteie
patriarche de tous les Armeniens ; nous vou-
loos que dorenavant le pontife d'Armenie
ordonne le natriarche dt Georgie , et qu'il
ait le pouvoir d'instituer des ^v^ues parmi
les Armenieus disperses chez les antres na»
tions de la chretiente; que le pays de TAl-
banie soit soumis particuliereroent a son
ohcissanoe, et que celui qui aura ete
choisi par le roi du pays soit consacre par
le pontife d*Armenie ; quen outre, lorsque
les trois patriarches d'Alexandrie, d'Antio-
che et c|e Jerusalem ordonneront un nou*
▼eau patriarche , que cela se fasse avec le
concours de la volonte du patriarche de
TArmenie , car nous Telablissous notre vi-
catre dans TAsie Mineure.
Done, d'apres notre autorite supreme,
nous conferons au pontife des Anneniens
le pouvoir de lier et de delier sur la terre et
au ciel tout ce qu'il voudra, en se confor-
mant aux canons apostoliques; que ceux
qu'il aura benis, soieni benis par le Christ ,
les saints apdtres, les autres saints et nous-
mime; que oeux qu*il excommunicra de-
meurent sous le poids de la m&ne excom-
munication, jusqu'a ce qu'ils reviennent k
Dieu |>ar une sincere penitence. Aimi-soit-il.
(•) V«y. ligure n* i».
quails invent tant^t Arostane ou Ros-
tane.
La d ignite patriarcale resta lon^-
temps dans la maison de saint Gre-
goire. Le o^libat n'etait point impose
aux pr^tres armeniens , pouryu qu'ils
contractassent leur mariage avant
d'etre promus aux dignites ecclesiasti-
ques. Vertban^C*) , mre d'Arisdages,
lui succ^a; et, en mourant, il laissa
son siege a son fils Housig, lequel
mourut martyr de son zele, en reAi-
sant d'adorer'ies statues des dieux que
Julien I'Apostat voulait faire honorer
dans tout rempire. Ses deux 01$, Pap
et Athakines , etant morts , et IVerses ,
Ills d* Athakin^ , ^t'lnt troj) jeune pour
dtre sacr^ , la dignity patriarcale sortit
de la maison de saint Gregoire, et on
la oonf<6ra a un certain Pharnhersefa
qui ne si^gea que trois ans.
LorsquMl fut mort, Nerses alia dans
la ville de C^sar^ , dont Tev^ue saint
Lton avait autrefois sacr6 samt Gre-
Soire ; et , depuis cette ^poque, le chef
el'l^glise arm^nienne etait toujours
rest^ sous la dependence du si^e de
C^sar^, observation qui n*est pas
sans importance dans Thistoire eccl6-
siastique. Ners^ fut 6lu patriarche,
et il etait digne d'oocuper cette place
eminente, puisque ses vertus et ses
utiles r^formes dans I'^glise et dans
la soci6te lui ont m^rite le titre de
grand. Quel plus bel ^loge que celui
de Thistorien taisant cette r^ilexion sur
son administration : « Alors, dit- il,
Tancienne barbaric disparut, et on ne
vit plus dans le pays que des citoyens
bonn^tes (**). » Nerses attaquait avec
trop de courage les vices du roi Pap ,
aui , ennuy^ de ses remontrances , hii
nt servir un breuvage empotsonne. Le
saint nK>urut apres un si^e de trente-
quatre ans.
Apr^ lui vient Sahag, qui , trop ia-
loux de sa propre dignity , ne voulut
plus aller k Cesar^ recevoir Tinvesti-
ture. Cette disposition fdcheu&e brisaiC
dftjh quelques-uns des liens de Tunite ,
(*) Voy. figure n» 1 3.
(••) Jean Vf, dit I'hislorien. Histeire (TAr.
mvnie , mamiscrii 91 ilcU r>ibliutlitH|uc roy.
ARMENIE.
41
et faisait presager la rupture qui eclnta
plus tard.
La nation avanqait a grands pas dans
la civilisation. Saint Mesrop'fixait la
langue en lui donnant un alphabet et
un systeme graphique. Cette invention
paraissait si belle et si merveilleuse h
ses compatriotes , que le bruit se r^-
pandit dans le pays que ie Saint-lfeprit
loi avait r^vel6 cette pr^cieuse d^cou-
verte. Mais, comme il est inutiledefaire
intervenir le del dans des actes depen-
dants de la nature et des facult^s Ira-
maines , surtout lorsque Fexemple des
autres peuples confirme cette observa<
tion , it est plus probable que le saint
r^igea un alphabet d'apres la double
conuaissance qu*il avait des alphabets
syriaque et zend , comme le fait pr^-
siimer leur mutuelle comparaison. Les
livres $aints furent traduits en lan^e
arm^nienne; etce travail fut si habile-
ment ex^ut^ , que la traduction devint
le type et la pierre angulaire de T^i-
fice litt^raire eleve dans les dges sui-
vants. Nous ne nous arr^terons point
ici k citer la lon^ue serie des ^crivaim:
remarquables qui honorent cette na-
tion : cette partie de notre travail
trouvera sa place dans I'histoire litte-
raire de I'Armenie.
Zaven , Asbourages occup^rent peu
de temps le trdne patriarcai ; ils Grent
place a Sahag , surnomm^ le Grand , h
cause de sa saintet^ et de ses lumieres.
II vit , par la mort d'Ardashir, s'^tein-
dre entiereroent la race des Arsacides ,
qui avait oocup^ le trone d*Armenie
ans. L'Arm6nie tomba done sous la
dependance de la Perse ; et ses rois fu-
rent remplaces par des merzbans {*) ou
satrapes qui accablerent le pays d'exac-
tions et de tyrannies. Comme les vain-
ciis n'ob^issaient qu*^ la force, et se-
(*) Le mot merzban est persan; il derive
de la double racine merz, ou mewz, eXban,
Marz signifie iimite on/rontiere, et Ban,
gardien, Cette racine se relrouve dans mar-
ifuis et margrave, noms qui avaient le m^e
aens a Torigine , puisqiie ceux qui les por-
taient etaient charges de la defense des
marciit4.
couaient le jou^ qui leur 6tait impose
des que Toccasion s'en pr^sentait , les
rois de Perse penserent que la cause
de rinsubordination r^sidait dans la
difference du symbole religieux , parce
que les Arm^niens, comme Chretiens,
combattaient en eux, et les ennerois de
leur nation et les idolStres contraires a
leur foi. En consequence, ils suscit^rent
dans ce pays une persecution gen^rale,
pour y retablir le culte deZoroastre, et
le sang des martyrs ruissela abondam-
ment. Mais c*est en cette occasion
ou'eclaterent surtout pour la premiere
rois la fidelite inviolable et la foi ro-
buste de ce peuple, qui depuis s'est
toujours montrc aussi sincerement
Chretien. Non-seulement il resista aux
tortures et aux seductions de tout
^enre employees par la politique, mais
il sortit de cette lutte terrible plus
fortement attache a ses croyances.
L'opposition politique de la Perse eut
li^n effet salutaire ; elle fit comprendre
aux Armeniens aue la foi chretienne
etait leur plus solide rempart , et qu'ils
ne pouvaient rien esperer de ceux qui
pretendaient etendre leurs droits jus-
que sur le doraaine sacre de la cons-
cience (*).
L'ennemi le plus dani^ereux de I'Ar-
menie n'etait point la Perse, dont elle
brisait toujours les fers a force de resis-
tance ; c*etait bien plut6t le fam esprit
rationaliste des Grecs qui la travaillait
et qui decomposa sa foi religieuse jus-
gu'alors si pure. Le lecteur comprendra
tacilement que 1^ reside la cause la-
tente de tons les maux qui accablerent
ulterieurement cette nation infortu-
nee ; et , pour lui mettre a nu revi-
dence de cette conclusion , nous aliens
rappeier succinctement Toridne et Foe-
caston du schisme de Tl^glise arme-
nienne.
La foi du christianisrae identique,
des sa naissance , a celle qui fait pre-
sentement le fond du symbole , n*etait
cependant pas, au commencement,
(*) Dans la troisieme partie de oe travail
3ui a pour but de trailer rhisloire politique
e TArmenie, nous decrirons cette guerre
meniorable.
42
UUNIVERS.
auari d^eloppee qu*auJouni*hui sur
certains poina ; sans doute paroe qu'ijs
n'avaient pas M attaqu^ et qiM I'E-
fflise n'avait point juge ntossaire dt
fatre oonnattre ses decisions. Les h^
r^ies sans nomlire , qui pullulent avec
le premier siMe, n«»s8itant des ex*
plications et des Maircissements sur
les points contests « on pent, par ce
motif, les regttrder oomme providen-
tielles : on dirait des ombres jette et
dispers^es avec ordre par le doigt do
Dieu dans le tableau de son Eglise,
pour en mieux faire ressorttr les par^
ties lumineuses.
Le grand condle de liic^, en con-
damnant Tarianisme. ^laira toute In
chretient^ sur la queistion fondamen-
tale, mais difficile, des deux natures en
Notrfr^gneur J^s-Christ. Le sjm-
bole qu*ir formula, adopts par les
£glises d*Orient, et rapports en Ar-
mtoie par le fils de saint Gr^oire,
y fut attaqu^ sur le m6me point, malgr6
sa precision et sa clarte. Nestorius,
qui reconnaissait avec I'^glisedeux na-
tures en J6sus-Girist , s'tioigna de Tor^
thodoxie, en concluant de la duality
des natures , la duality de personnes.
Son h6r^ie renouvelait toutes les er-
reursd*Ariusauquel il ^tait contraire.
L'£glise sedtelara pareillement contre
lui, et il fiit anathematise Eutychds,
Tadversaire le plus zeU du nestoria*
nisme , fUt conduit k I'erreur diame-
tralement oppos^e a celle qu'ii com-
battait si araemment. En effet, en
fioutenant Tunit^ de personne , il en
Vint h proclamer Tunit^ de nature.
Cette nouvelle hMsie, plus subtile et
plus dangereuse que rautre, parce
qu*en paraissant glorifier la divinity de
J^us-Christ, elle aboutit k la negation
de son hiunanit^, se propagea avec
une effrayante rapidity dans tout 1*0-
rient. Les d^fenseurs ou partisans de
Tunite de nature, furent gen^alement
dtei^i^ sous le nom grec de mono-
physUes. A la v^rit^, tous ceux qui ad-
roettaient lanaturetmede J^s-Cbrist,
n*^taient pas hMtiques par le fait
mtoe, car nous voyons plusieurs
Pseres, fort orthodoxes, entendre par
le^not nattire cclui d'hypostase ou dfi
substance; et il est trto-oertain que la
substance du fils de Dieu est ratucale*
roent et essentiellement im^. Cette dis-
tinction convient surtout a TArm^ie ,
et die pent servir a absoudre d'injustes
accusations, beaucoup de tbtologiens
qu*on a dass^ parmi les monopby-
sites.
Le quatritoe condle cecum^ique
de Cbaic^doine avait attaqu^ la doc-
trine d*Eutychds. Ses partisans , reunis
Il ceux de Diosoore, se r^pandirent
dans TAsie, r^p^tant que, dans cette
assemblde , on avait allmis la dualite
de personnes, et renouvel6 les erreurs
de Nestorius. L*esprit de la nation ar-
m^enne etait peu favorablement dis-
pose h regard des Grecs qui etaicnt
mtervenus dda plusieurs fois h main
armde dans les affaires du pays, et
dont la politique astudeuse ^tait sou-
vent aussi detestable que celle des Per-
sans. On aoeueillit done avidement les
faux bruits semds par les 6missaires
des b^r^tiques; et le pape L6on, qui
avait convoqu6 le conciie de Cbalce-
doine , fut depeint sous les plus noires
couleurs. Vers Tan 596, le patnarcfae
Abraham I*' , rassemble k Tovin , alors
capitale du royaume, les ^^es de
TArm^nie au norobre de dix; et, li,
il s'ddve hautement contre le condle
de Cbalc6doine. « On anath^matisa ,
« dit Jean Phistorien, tous les fauteara
« de I'h^r^e, et les imprtoitions fu-
« rent terribles. On d^fendit de com-
« muniquer en aucune mani^ avec
« les Grecs , de n'avoir aveo eux ni
• rapport, ni rdation commerdale,
«de ne contracter aucune aUianoe,
« dans la crainte que, par ces rappro-
« chements, ils se moassent k nous,
« ce qui pouvait alt^rer la puret^ de
« notre orthodoxie , et d^truire la bar-
« ri^re apostolique qui nous prot^. •
Cest ainsi que la nation arm^enne
fut poussee dans les voies du schisme.
Depuis quatorze sidles ce schisme sub-
siste ; et , bien que les Arm^iens soieot
aussi opposes que r£glise oatboUque
h la peraonne d*Eu^aik, qu*ils re-
jettent comme b^r^tique, n^moins,
par une contradiction d^orable. ils
condamncnt avec la m€me cbaleur le
ARM^NIE.
43
pape lAon et le concile de Chalo^dolne
qui condamntont Eutych^.
Cette scission eat les coDsdquenoes
les plus ftcheuses poor la prosp^t^
de fa nation. Sdpar^ des Syrians h
qui ils Youaient une vieille haine de-
puis leur tentati?e de mettre le si^e
patriarcal de I'Armenie sous la d^pen-
dance de Fl^lise de Syrie , retranch^
de la communion des Grecs et de
toute r£glise d'Ooddent par la posi-
tion nouvelle qu*ils prenaient , les Ar-
meniens se trouvaient ainsi d^iaissds
et comme oonfin^ dans leur propre
individuality lis perdirent les auxi-
liaires qui nouyaient seuls les d^endre
contre la lorce encore paienne de la
Perse. N6anmoins, telle est la force
de Tantipathie qui a son principe dans
les querelles religieuses suscitto au
sein d'une communion pr^c^emment
unCf que, dans la suite, on vit plu-
sieurs fois les Arm^ens appeler h
leur secours les Perses contre les
Grecs, ou favoriser leurs tentatives
contre I'empire, quoiqu'ils compris-
sent hmpossibilite d*^tablir avec euz
une alliance durable , et qu'ils pr^vis-
sent les malheurs d*une condition en-
core plus dure. Dans lesi^e suivant,
iorsque les Arabes inonderent I'Arme-
nie , les Grecs et les Syriens abandon-
n^rent les Arm^niens, tandis que les
Perses , convertis h la foi musuimane,
aidaient les ennemis h renverser ce
royaume chr^tien.
Sempad , qui , {pendant son adminis-
tration , chercba a r^tablir la paix re-
ligieuse, 6choua dans son entreprise,
et r£glise d'lb^rie se s^fMura alors pour
toujours de la communion de r£glise
d'Arm^nie.
Une preuve nouvelle de I'esprit d*ln-
dividuaiisme et de T^loignement de
r£glise arm^nienne pour tout ce qui
la rattacfaait a la communion des au-
tres £glises, c^est qu*en reformant sa
liturgie, elle voulut avoir son hre pro-
pre; pretention bl^able, puiscjue
toutes les nations chr^tiennes avaient
celle de la venue de Jdsus-Christ. Le
patriarche Moise II fixa Touverture de
cette ^poque a Tan 551. Cest T^re ar*
m^nienne proprement dite, et cctt£
mani^re particuli^ de compter n*a
eu d'autre eifet que de jeter plus de
confusion et d'obscurit^ dans la chro-
nologic.
Un autre r^ltat du schisme, et
qu*il n'est pas moins important de re-
marquer, c est que r£glise arm^sienne,
en se s^parant de I'Eglise d'Ooddent,
le vrai centre de J'unit^, ^prouva le
mdme sort que les Edises d' Allemagne
et d'An^leterre , h i'^poque de la r^
forme; jeveux dire qu'elle perdit la
majeure partie de son ind^pendanoe
spirituelle, et qu'elle tomba sous la
juridiction directe des princes tempo-
rels. En ^et, ils commencent a exer-
cer une influence sur la nomination
des patriarcbes. dont la di^nit^ se
transmettait d'abord b^r^itaire dans
la maison de saint Gr^goire, sans que
le chef de r£tat fflt consults. Cette
influence va toujours croissant; et , un
siede plus tard . nous lisons dans les
histonens que le prince et les grands
de sa cour placent sur le si6ge supreme
le pontife a gui ils semblent oonf^rer
une sorte d'mvestiture : en un mot ,
dans I'Armenie, comme dans toutes
les autres Eglises dissidentes de I'O-
rient. la liberty religieuse diminue
dans les m6mes rapports que Tortho-
doxie.
On a confondu quelquefois le second
synode deTovin, tenu par Abraham 1*%
avecceluiqu'assembla Moise II envi-
ron quarante-cinq ann^s auparavant.
Cette erreur est grave ; Moise , dans le
premier synode , se contenta de refor-
mer le calendrier ; et , bien que ce chan-
gement pdt £tre dej^ un indice de se-
paration prochaine, et m^me pr^pardt
cette separation, neanmoins rien ne
prouve au'elle s'elfectua dans ce temps.
La foi de Moise pourrait etre difiQcile-
mentsu8pectee,puisque c'est lui ^ui
nomma patriardie de la GeorgieCyrion
ou Cyrus , connu par son attachement
h la doctrine de Chalcedoine , et qui
travailla surtout a Tetablir dans ce
pays. Lorsque MoTse II mourut ,
Abraham I^, son successeur, ^and
ennemi des Grecs, inrite de voir Cyrus
adh<^rer h leurs decisions , et persister
dans le refus dc suivre ses proprcs
44
UUNIVERS.
principes , prend ia resolution d'assem-
bler les ^v£ques pour le frapper d*ana-
th^me. Telle fiit roocaston au second
concile de ToTin, qui eut pour la na-
tion les effets funestes que nous avons
decrits.
Parmi les autres mesures bldmables
que prirent les membres de ce concile,
nous distinguons la scission ofQcielle
oper^e entre TEglise armdnienne et
celle de Gtorgie , dont le peuple lui
avait toujours et^ un fidele alli^. On
d^fendit en outre les pelerinages a Je-
rusalem ; defense que Ton reearderait
comme un incroyable m^pris dies saints
lieux chez ce peuple Chretien , si nous
ne savions que son motif provenait de
la crainte qu*inspiraient aux schisma-
tiques des che£s de monast^res, c^le-
bres par leur savoir et leur attache-
ment aux doctrines de Chalc^oine,
tels qu'Eutyme, Saba et Th^odose.
La liturgie subit alors une addition
importante, laquelle estdevenue un des
I)rincipaux chefs d'accusation contre
es dissidents. U s'agit du Trisagiony
hymne sacr^ oil le nom de Dieu saM
est r^pete trois fois, et a la suite du-
quel on ajouta ^<fui<isiti cruqfie pour
notts. Pourquoi, disaient les Grecs,
ne substituez-vous pas au nom de Dieu
celui du Chrfst, qui n'a souffert que
comme homme , et non comme Dieu P
Vous absorbez Thumanit^ dans la di
vinite, vous n'admettez qu'une seule
nature, et cons^uemment vous retom-
bez dans Terreur d'Eutyches.
Quelque oppos6 que'fQt h T^glise
grecque le concile de Tovin , la separa-
tion des deux communions n*etait pas
encore complete. Les Arm^niens
avaient quelque veil^it^ de r^oncilia-
tion ; iis le prouverent au synode de
Garin ou d*Erzeroum, assemble par
Tordre de Tempereur Heraclius^ vain-
queur de Khosrov II, roi de Perse.
Cest au retour de son exp^ition que
ce prince engagea le patriarche Ezr ou
Esaras a convoquer les 6vdques. Plu*
sieurs prelats de TEglise grecque et les
grands de TArra^ie assisterent a cette
reunion ; on revisa les questions trai-
ts dans le synode precedent; on r^-
tracta la nouvelle formuledu Trisagion ;
on convint de suivre le rite grec rela»
tif a Tusage du pain fermente , et ati
melange ae Teau et du vin dans le ca-
lice; et il fut en outre ddcid^ qu'^ I'a-
venir on ne cel^brerait plus la fSte de
la Nativite conjointement h oeile de
r^piphanie. Toutefois, ces concessions,
propres a effectuer une reunion defini-
tive entre les deux figlises, n'^taient
Sas faites dbns un esprit sinoerement
^sireux de la paix. Car, h peine dix
ans s*etaient 6coul^,que le sooces-
seur d*Esdras, Ners^s in, d^larait,
avec ses ^v^es, qu'on devait s*en te-
nir aux d^isions des trois premiers
conciies oecumeni<|ues, sans ajouter
cellos de Chalc6dome. II faut avouer
aussi que Tesprit turbulent et domi-
nateur des Grecs reussissait meryetl-
leusement par son faux zele h eloigner
les Arm^niens de Funite dogmatique.
Des ordres de Tempereur et des Curo-
palates obligeaient les fiddles k se
soumettre aux pratiques de Tfglise
grec<^ue; ce n*etaient plus les sages
avertissements de la charity cbr^-
tienne, inais bien les injonctions shdbes
d*un mattre h son esclave, tellement
que la susceptibility politique de la na>
tion s'^veiila ; elle craisnit pour la perte
totale de son independance. Elle tou-
lait ^tre cbr^tienne , mais a la condi-
tion de demeurer arm6nienne.
Un nouveau concile fiit done forme
dans la ville de Manazcerte vers Fan
660. On condamna ce que Ton avait
approuv6 dans le synode d'Erzeroum ,
et la m^moire d'^ras fut attaquee.
Sur la question de la nature de Jesus-
Christ, on s*en tint k la declaration
qu*elle 6tait une et sans melange ; dis-
tmction qui , en paraissant eviter l*er-
reur d*Eutych^, y rentrait neanmoins,
puisque la dualite des natures etait re-
jetee (*). La liturgie primitive fut con-
(*) Certaioement let dissideoU ne auivent
nas les erreurs d'Eutyches. lis disent m^iiie
hautement anatbemei oet heresiarque pour
avoir soutenu que les deiu natural ajvei
runion se sont confondues ensemble pour
n*eQ faire |ilus ^u'une , on que la dhnnite
absorbe rhuroamte. En quoi errent-ils done
relativeinent a I'incarnation ? c'cst qne ,
ARMKNIE.
45
servee; etle pain azvnie, avec le vin
pur , sans aucun melange d'eau , fut
seul employe dans le saint sacrifice de
la messe. La rigidite des jednes et de
Tabstinence a de tout temps caract6-
ris^ la discipline ecclesiastique du pea-
pie armdnien naturellement sobre , sa-
chant viyre de peu et se livrant avec
amour aux plus austeres mortifications.
Dans leur car^me, beaucoop plus long
que le ndtre, ils s'abstiennent de chair
et de poisson, d'cea£s, de beurre, de
lait et de fromage » en ne faisant qu'un
repas par jour, au coucher du soleil.
Le Tin est ^alement interdit dans ces
jours par lesanciens canons. Les Grecs,
dont la discipline n'^tait point aussi
severe, les avaient engage, ao ooncile
d*£rzeroum , k rtformer cette partie
reglementaire, qui, ne touchant point
au fond immuaole des dogmes, pent
^tre modifiee suivant les temps et les
cireonstances. Les ^v^ues y avaient
oonsenti; mais le peuple, invariable-
roent attach^ h la tradition de ses peres ,
8*imagina qu'on changeait toute la re-
ligion; et, k cette occasion, il mani-
festa Topposition la plus violente , d^-
clarantqu'il voulai t suivre les pratiques
de son Eglise, qnelque rigoureuses que
fdt leur observance.
La voie dans laquelle le patriarche
Nerses III avait engage T^lise d*Ar-
m^nie la s^parait totalement de Tltglise
grecque et du reste de la chr^tient^.
uependant il ne faut pas croire que le
monophysisme pr^dominflt exclusive-
comme, saivaot raocienne philosophie, par
Tunioix physique de notre corps et de notre
Ame, il se forme une seule nature, ensorte
que ces deux parlies de nous-memes con-
courent ensemble a toutes nos actions, VAme
aux mouvements du corps , le corps aux
mouvements de Vkme , ainsi ib pretendent
que, par Funion hypostatique, ladiviuite et
I bnmanite en J. C. sont devenues un seul
principe actif de toutes nos operations , de
maniere que ses actions , je Teux dire celles
qui repondent aux nolres , ne sont pas seu-
Icment divines par rexcelleaQce qu'elles tirent
de la divinity , mais encore parce qu^elles
en emanent. Cette obsenration pent conre-
nir ausfti auxCophtes et aux ]£l£iojpiens , et
a la plus grande partie des Jacobites.
ment; la masse des fiddles suivait ses
pasteurs, sans entrer dans les que-
relies th^logiques qui les divisaient,
et, m^me dans le clerg^, la majorite,
amie de Funion et de la paix, g^missait
sans doute en secret des divisions que
Tesprit sophistique des Grecs semait
dans leur sein. Les plus ardents entraf-
naient les autres, et ceux-ci, au bout
de quelque temps, effrayes de Tabtme
ou on les conduisait, fevenaient sur
leurs pas; en sorte qu*il y eut dans
leur £^lise, pendant plus d'un siecle,
des fluctuations oontinuelles , sem-
blables a I'aeitation d'une roer tour-
mentee par des vents contraires. C*est
ce que nous d^montre Tavenement
du patriarche Jean IV, dit Imasda-
ser ou le Philoscphe. bomme d*une
capacite rare, et protond^ment vers^
dans la science theologique. Lorsqu'il
fut monte sur le siege patriarcal, il
frappa un coup violent sur les mono-
physites, et nous poss^dons le beau
discomrs qu'il pronon^a dans cette cir-
Constance, vrai chef-d'oeuvre de logi-
Sue et d'eloquence. Ainsi , puisque Tor-
lodoxie revenait de temps a autre a la
t^te des affaires eccl^iastiques , on ne
peut douter que le parti de Tunion ne
m considerable et puissant parmi le
peuple. Jean IV pr^sente dans son re-
gne le dernier terme nettement distinct
de cette s^rie de pjatriarches orthodoxes
ou dissidents qui se succedent depuis
saint Gr^goire rilluminateur. Entre
ces deux ^poques, il s*^tait ecoul^ 416
ans, et environ trente-cinq patriarches
avaient occupy successivement le si^e.
Les vingt-deux premiers, jusqu*a Ner-
ses II a*Aschdarag, ont une foi ^vi-
demment a Tabri de tout soup^on. On
ne peut en dire autant des six patriar-
ches qui suivirent Nerses III; il est
beaucoup plus probable qu*ils partag^-
rent les ia^s de rupture ou aopposi-
tion. Mais les sue autres, qui precede-
rent Jean le Philosophe, appartiennent
h la liste des patriarches orthodoxes.
A mesure que nous avan^ons dans
rhistoire religieusc de TArm^nie, il
devient toujours plus difficile d'appr^-
cier la puret^ de la foi des pasteurs.
Les ims , emportes par un zele national
4G
rUNIVEBS.
trop ardent, se ddciiatoent contre le
coneile de ChaloMoine, paroe qu'ils
voient dans ses d^isions on acte artn*
traire de r£glise greoque. toujoun
trop exigeante pour eux. lis ressem-
blent beauooup a nps f^llicans moder-
nes, Jalouz de rEgfase romaine, et
voulant conserver, au prix m6me de
Porthodoxie, ce qu'iis appellent leura
liberty. Les aatres se reitterment dans
tin silence absoiu , lequel ne permet pas
d'interpr^ter leurs actes en aocone fa-
Son. Plusieurs, en attaqoant le parti
lissident eten dtfendant la dualite des
natures, ont peine h d^gager leur foi
des obscurites propres a la rendre sus-
pecte k Tortbodoxie romaine, et c'est
ainsi que le discoursO du patriardie
Jean iV, dont nous avons ^arl6 pr^c^
demment, a M mis demi^rement k
rindex par la censure eecl^iastique de
Rome.
Les invasions et les guerres cruelles
des Arabes qui avaient subjugu^ le
pays, oh ils etablirent un{gouYemeur
sous le nom d'osdigan, mirent un
terme aux discussions religieuses. hea
alarmes continuelles qui tenaient en
^veil la nation, ne permettaient point
aux ^y^es et aux princes de s'assem-
bier pour traiter des questions th^oJo-
gijues. En outre, les vainqueurs tou-
laient imposer aux vaincus la foi
musulmane, et les pers^utions susci-
t6es au christianisme port^ent les
esprits a d^fendre leur roi plutdt avec
la r^ignation du martyre qu'avec les
armes de la dialectique.
Lorsque Thabilete de la famaille des
Pagratiaes eut d6jou^ les projets des
inusulmans, et que le valeureux Acbod
eut relev^ le trdne d'Arm^nie, la paix
renaissante ouvrit un libre cours aux
controverses religieuses. Le trop c^l^-
bre Photius, a?ant de consommer le
schisme des Grecs avec r£glise latine,
nvait travail!^ h la reunion de I'^glise
arm6nienne. A cet effet, il avait ecrit
au patriarche Zacharie I**", pour lui
donner certaines explications relatives
(*^ II a ete public par les Armeniens de
Venue en r8i6; le texte est accompagnl
d*une traduction latine.
au Goncilede ChaloMoine : elte avaient
pour but de dissiper les pr^ju^ et de
d^truire rantipatbie de la nation pour
les Grecs. Le roi Acbod dMgna pour
repondre k ces lettres on certaia Isaac
Meroud, boname violent et emporti,
qui, loin d'aoo6der anz conditions de
paix, se r^pandit eo invectives oontre
r£glise foreoque. N^nmoina Tentie-
mise de vaban, archev^e de Nicfe,
parvint k r^tablir pourquelque temps
la Concorde, et ron reunit un con-
eile dans lequel les decisions de rasseni-
blee de ChalcMoine furentaocept^es,
tandis qu'on anatbtoatisa oelles qui
avaient 6%^ prises k Manaoerte et au
dernier synode de Tovin.
Peo de temps aprte Zacharie I**, le
si6ge patriarcal fut illu^r6 par deux
hommes d'un rare talent : le premier
est Maschdots, abb^ du monast^ de
S^van. Son savoir 6tait vaste; on hii
attribue la reaction du rituel et du re-
cueil d'hymnes ^i portent son nom.
II eut pour disciple et suooesseur
Jean VI, samomme VhUtorien par ex-
cellence, a cause de T^clat et de Tori-
Sinalit^ de son style. Jean 6tait un zde
tfenseur du parti des dissidents, et
la passion avec laouelle il attaque !'£-
glise grecque d^ngure malheureuse-
ment son histoire d'Arm^nie, ai re-
marquable sous d^autres rapports. Pour
prouver au lecteur la justesse de notre
observation , nous citerons un pas-
sage extrait de cet ouvrage in^it
« A oette 6poque, dit-il, mourut le
bienheureux empereur Z^non , si aar^
ble k Dieu par ses moeurs et par I'in-
t^it^ de sa foi. Sous son regne, il
avait dissip^ Tombre et les nuages du
detestable et turbulent coneile de Chal-
c6doine, pour ramener dans r£glise
de Dieu la liuniere resplendissante et
glorieuse de la foi apostolique. Ensuite
le grand patriarche Papgen oonvoqpa
un coneile des ^vdques Sd TArm^e,
de la Gtorgie et de TAlbanie; car on
n'avait pas encore accepts des tradi-
tions destructives du monde, et on se
tenait fermement sur le mime fonde-
ment que saint Gr^goire; aussi, dans
ce temps , la foi et la pi6te florissaient*
elles universellement dans le pays de&
• •
ajim£nie.
Grecs, des Armeniens, des G^rgiens
et des Albaoiens. Mais, apres trente-
cinq ans d*ortlK)doxie constante, lors-
que, Anastase ^tant mort, Fimpie
Justinien, cet eropereur plein de ma-
lice, abolissant et renversant ces dtoi-
sions, r^tabUt la pernicieuse doctrine
Je GfaalcMoine, alors il pers^uta par
des supplices atroces et intoldrables les
saints oommes qui persistaient dans
Tortbodoxie, et il inonda de sang ie
pav^ de ri^lise de Dieu« •
£n lisant oes lignes, on doit se de-
mander si Tauteur a reellement voulu
parler des hommes et des ^v^emeots
que nous connaissons d'apr^ d'autres
sources; et, en sonceant aux malbeu*
reuses preventions de Tesprit de parti
qui enveniment les quereiles rellgieu-
ses, on ne reconnatt gue trop la pos-
sibility de semblables jugements.
L*etat int^eur de I'Eglise depend
toajours de ses chefe. Atnsi d^ gue la
puissance patriarcale etait remise au
pouroir d'un pr^lat a^itateor et turbu-
lent, toutes les questions dangereases
que la prudence tenait assoupies, se ra*
nimaient comme la flamme d'un foyer
mal ^int, et Tincendie ^odait de-
rechef ses ravages au loin. La pacifi-
cation opMe par ie conciie de Zacba-
rie I'% tenu k Schiragvan, ne fnt pas
de longue dur^: Ie parti national, qui
etait leplus oppose aux Grecs, travail-
lait toujours a d^truire les bons n^l-
tats obtenus par les efforts des amis de
Tunion.
Au commencement du douzitoe si^
cle, la division allait croissant, et il
fallait chercher de nouveau des moyens
de conciliation. Le siege patriarcal etait
dignement occup^ : Gr^oire III, sur-
nomm^ Bahlavouni, paree qu'il ^tfiit
Ksu de la race des Arsacides, admi-
nistrait I'^lise d'Arm^nie. II avait
pour fr^re le gradeux Ners(b(*), ainsi
norom^ h cause de la douceur et de la
Iiurete de son stjrle, qui le dassent a
a t^te des toivains armeniens. Lors-
qu^il eut suoc^e k Gn^ire III, il
concut le g^^reux desseui de porter
un dernier coup k I'esprit de discorde
(•0 Voy, figure ii« i3.
47
qui d^cbirart r£gltse, et il r^nit le
grand synode de Romcla, plus connu
dans I'nistoire eocl^tastique sous le
nom de sjnode de Tarse, paree que
I'arcbeT^que de Tarse , Ners^ dit Lam-
pronensisy y prononca k I'ouverturt
son disooui;^, qui est 'demeur^ un des
premiers monuments de r^loquencear-
m^nienne. Les propositions raites aux
dissidents ^taient celles-ci : Nous vous
demandons , l« d'anatb^matiser les pai^
tisans de Tunit^ de nature, comme
Eutycb^, Dioscore, Timothy, £lurus
et leurs autres adherents; T nous de-
mandons que vous confessiez Notre-
Sei^neur Jesus-Christ , fils unique , seul
Christ, seul Dieu, hypostase une, sans
division, sans chan^ement, sans alte-
ration , sans confusion ; que vous con-
fessiez que le fils de Dieu n'est point
autre que le fils de la Yierge, m^ de
Dieu , et fils de Tbomme; que vous re-
connaissiez dans ses deux natures Tu-
nite de sa divinity, et son unite dans la
duality des natures, le m^me Christ
ayant deux operations oonfbrmes k
sa nature. Tune divine et I'autre hu-
maine, sans qu'elles soient contrai-
res, puisque en effet I'operation hu-
maine Concorde avec Toperatiott di-
vine; 3* nous demandons que tous
recitiez le Tritagion sans raddltion de
oes mots : Qui enictfianu et pro fto-
bis,Qaie8 crucifix pour nous.
Tefles etaient les prineifwles propo-
sitions auxouelles la majority des pre-
lats assembles repondirent qu'ils les ao-
ceptaient avec soumission et bumiiite.
Nerses foudroya des traits de son elo-
quence tous les fauteurs du desordre
3ui ne chercbaient qa'k troubler la paix
e I'Eglise. On crut quelque temps k
un accommodement definitif ; maw la
mort de remperenr Manuel, celle de
Nerses Lampronensis et du patriarche
Degba, suocesseur de Ners& le Gra-
deux J iirent evanouir ces heureuses
esperances. Les actes arbitraires de
mielques ftuuitiques grecs en furent
roocasion; de raversion on pas^a k la
haine, et la separation desdeux Eglises
fut complete. Le schisme effectue pre-
cedemment par Photias , et ensuite par
Michel cerulaire, legitimaiti sousunrap-
48
L'UJNIVERS.
port , les appr^hen^ons des Ami^niens.
S6par^ enticement des Grecs et du
reste de la cbr^tient^ , les Armeniens
se trouvCent r^duits k leur propre in-
dividuality, et cet isolement, cause par
un motif religieux, ne leur fiit pas
inoins nuisible sous le rapport intel-
lectuel que politique. Lorsque les der-
nieres lumiCes de r£glise arm^nienne ,
representees par les deux Netses , eu-
rent disparu , une nuit longue et triste
se fit cnez oe peuple. La civilisation
diminua a inesure que I'ignorance allait
croissant; conune si le g^nie intelleq-
tuel de la nation, dess^cne tout a coup
en ses racine^, n'eut plus eu la force
de rien produire, ii se touma a Timi-
tation froide et servile des autres peu-
ples, notamment des Grecs et des La-
tins. Ce fut le temps des traductions ,
et pendant quelques siecles les Arme-
niens ne firent que reproduire des
oeuvres etrangeres , au moyen de leur
langue, qui, par sa nature, se pr^-
tait merveilleusement a cette sorte de
travail. Deux 6coles litteraires se for-
merent dans ce but, ecoles ennemies
et diametralement oppos^es, qui per-
petuerent la hitte vive et soutenue que
nous avons vue diviser les croyances
des fideles , selon la double disposition
qui se manifestait depuis longtemps,
ou de se rattacher au centre de la chr^
tiente ou de s'en s^parer definitive-
ment. II faut avouer que le parti ve-
ritablement national etait pK>ur le
schisme, parce qu'on lui faisait envi-
sager ce moyen comme le seul compa-
tible avec la conservation de Tinde-
pendance et de Thonneur de la nation.
Dans la fondation des deux ecoles dont
nous parlous, la mdme chose arriva.
La premiere, veritable association,
designee sous le nom des Fr^res UniSy
fut etablie par Jean de Kemi,,dans
Tespoir de travailler a reunir I'Eglise
armenienneetrEglised*Occident. Cette
societe avait des ramifications chez les
Latins, parmi les dominicains, et leur
but, non publiquement avoue, etait
d'eclairer le peuple, et de combattre
les erreurs qui tenaient toujours les
esprits divises. £lle traduisit plusieurs
ouvrsges, organisa desmissionnaires.
et s'etendit sur la face du pajs. Comnie
un faux zele en^agea les freres dans
des voles d'opposition a Tesprit public ,
en tant qu'ils faisaient cause oonimune
avec les Latins, Tatteotion et la de-
fiance furent eveiliees parmi les che6
du parti contraire, et recole rivale sc
forma. Elle avait son centre dans le
eeiebre convent de Datev, Tun des phis
considerables de TArmenie. Celui qui
la fonda etait un moine violent et su-
perbe nomme Gregoire, et, comnne il
etait superieur de ce monastere , il est
connu sous le nom de Gregoire dr
Datev (*}. II engagea une polemique
acerbe et passionnee contre les freres
unis, attaquant les Eglises srecque ei
latine, et, non content de s opposer a
toute espebe d^accommodement , il mit
en oeuvre tons les moyens prc^res a
fomenter la division. L'arguroent prio-
cipal qu*il faisait valoir oontre ses
adversaires, etait leur attadieroait a
une l^lise etrangere, qui cherdiait,
assuraiMl , a ravir h TEguse d' Armenie
et son independance et ses vieiUes
constitutions. Ses paroles trouverent
un accueil trop facile dans Tesprit de
la multitude, et les fir^res unis ne pa-
rent realiser leurs intentions louables.
Eugene lY, en montant sur le trone
pontifical , resolut d*operer la ngunioo
des Eglises d'Orient a la grande com-
munion chretienne. Vers la moitie du
quinzieme siecle, il fit un appel aui
chefs du clerge, et le lieu de I assem-
biee fut fixe a Florence. L'Armenie
envoya plusieurs representants a ce
concile, ^Sce au zele de son patriar-
che, qui etait alors Constantin V. Les
le^ats se montrerent empresses de sous-
cnre h tons les actes tendant a renou-
veler Tunion des £glises d'Orient et
d'Occident. Le pape, plein d'un oon-
{*) ll est Tautetir du livre des Demandes
etreponses, oil il traite des erreurs d»
Juifs, des Manicheens, des MahomeUiis
et d'aatres heresiarques. Gregoire avait de&
vues philosopliiqncs ctendues, et ii traite
dans cet ouvrage des questions dilficites ,
lelles que relies relatives a la creation , a b
iin du monde , etc. , etc. Ses oni^tcs oot cffe
publiees dans un volume in-folio, a CoRstAn-
tinople, en 17'iy.
ARMltNIE.
49
tentenient inexprimable, salua Taurore
d*une paix universelle dans TEglise.
Les Grecs, de ieur cdt^, avaient te-
motgn^ le d^ir d'un accommodement,
et tout faisait esp^rer que la Concorde
serait durable. Mais, lorsque les l^gats
arm^niens furent retourn^ dans Ieur
Says, la revolution qui s*opera au sein
e Ieur propre Eglise, d^truisit les r6-
sultat^ heureux du concile de Florence.
L*occasion des troubles survenus
dans r£glise fut le changement du
siege patriarcal. A Torigine, les pa-
triarchfs r^sidaient dans la ville de
ya<^arschabad , que les anciens rois
nv^ent choisie pour Ieur capitale. Cest
la que si^geait saint Gr^oire rillumi-
nateur. Ses successeurs rest^rent dans
la m^me ville pendant un sihcle et demi ,
*iisqu*a ce qu'ils en fussent chass^ par
'epee des conquerants. lis se r^^ie-
rent, en 452, dans la ville de Tovin,
qui devint la capitale du royaume, et,
jusqu'^ la fin du dixidme siecle, ils
continuerent d'y fixer Ieur r^idence.
£tant tomb^e au pouvoir des Turcs
Seld joucides , le roi Aschod III, qui
avait transfere sa cour a Ani , ville qui
contenait au onzi^me siecle cent iniile
maisons et mille ^lises , ii apijela les
patriarches, qui y deineur^rent jusqu'li
ran 1118. Alors les n^cessites des
temps obligerent les patriarches de
changer plusieurs fois de s^jour et
d'errer dans les villes situ^ sur les
bords de TEuphrate. Le concile tenu h
Romcia prouve qu'li cette ^poque cette
cit^ ^tait devenue le si^ge patriarcal.
Lorsque le sultan d'^gypte se fut em-
par6 de cette place, en 1294, les pa-
triarches suivirent a Sis le roi L^n II,
qui y fixa sa residence, et ils n'eurent
pas d'autre siege jusau'li la mort de
Joseph III. Gregoire IX, son succes-
seur, ayant fait quelques innovations
dans son £glise, quatre ^v^ques de la
Cilicie r^dig^rent une lettre adress^ k
toat le clerg^ arm^nien, dans laquelle
lis se plaisnaient et de sa conduite et
de r^tat deplorable ou ^tait reduit le
si^e de Sis. On r^olut de transferer
h Eczmiazin le si6ee patriarcal , et dans
ce but une assemblee fort nombreuse,
<!ompos^ d'^v^ues, de 8up(6rieur8 de
4' IJvraison. (Abmenik.)
monasteres, d'erniites et de simples
pr^tres , fut reunie a Eczmiazin mtoie ;
et comme Gr^oire persistait a rester
h Sis, on {NToceda k Idection d*un pa-
triarche nouveau et universel. Le sort
tomba sur Syriaque, abb^ du monas-
tdre de Virap. Ayant r6uni les voix
des quatre premieres l^glises particu-
lieres de TArm^nie, dont I'assentiment
^tait ntossaire pour l^itimer son
Election, on le regarda comme le ve-
ritable et supreme patriarche, d^ore
du titrede CathoUcos, A partir de cette
^poque, les patriarches d'Eczmiazin
exemrent une pleine juridiction spiri-
tuelle, et ceux cle Sis ne furent places
qu'au second rang. D'un autre c6te,
en Ills, David, archev^ue d*Agtbai»
mar, petite ville situee au milieu du
lac de Van , dans une tie du m^me nom,
se rendit ind6pendant du patriarche
universel, et s'arrogea la mime di-
gnity. Ainsi r^glise ^Armenie se trou-
vait divis^e en troisEglisesdistinctes,
ayant chacune ses rivaiit^s, ses int^-
rets et son rite, fiineste source de
troubles et de disputes interminables.
Chacune de ces £glises a conserve ses
patriarchs. Sis en compte environ tren-
te-quatre depuis I'^rection de son si^ge^
La juridiction de son patriarche est
assez vaste; elie s'^tend, hors de TAr-
m^nie, sur les l^lises de la CiUcie, de
la Svrie , de I'j^pte et de la Palestine i
r^veque arm^nien , r^idant h Jerusa-
lem, lui est aussi soumis. L'^lection
du patriarche est un droit reserve aux
douze premiers evdques les plus rap-
proch^s; Tinfluence du peuple et au
gouvemeur politique du pays deter-
mine souvent leurs suffrages.
Le patriarche d'Eczmiazin a tou-
jours ele generalement consider^ , ainsi
que nous ravons dit, comme leCatlio-
licos ou primat universel. On a pre-
tendu que ce qui avart donne h cette
Eglise sa preeminence, c*etait la trans-
lation d'un bras de saint Gregoire dans
le reliquaure de la cathedrale. Cette
opinion est denuee de fondement , vu
que r^glise de Sis est touiours restee
en pos&ession de cette relique, et ou
doit plutdt attribuer cet avantage a Te-
tablissement primitif du m^me siege
L'UNIVERS.
dans oe lieu , et a la oomferatioii qu'en
flt , pour ainsi dire , la presence de saint
Giigoire riilumiDateur.
Qaoi qn'il en soft, la suprtoatie du
si^e d'Eczmiazin ne peat ftre contes-
ts, et nous pouvons regarder ses pa-
triarches comnie les seuuTraissacoes-
seurs de saint Gr^oire. Le Catholicos
est nomm^ par tous les Stales et pr6>
lats dependants de sa juriaiction, et,
8*ils nepeuvent yenir^ la reunion oik il
est choisi , ils envoient leurs Mgats. Ge
mode d*eiection a vari^ dans les temps
modernes, et la nomination est aetuel-
lement r^servS k an nombre deter-
mine des premiers pasteurs da llq^ise.
(Test lui qui a le pouToir ezclusif de
%onsaerer le saint chrftne poor toutes
les ^lises d^pendantes de sa puissance.
II est propose h la garde de la foi, au
maintien de la discipline et des insti-
tutions; en un mot, il est le pape de
I'Armenie, et cette denomination ne
lui convient que trop , depuis qu*ii s'est
soustrait h Tautorite du aeul chef vi-
sible etabli par jesus-Cbrist.
La conquete de Constantinonle par
les Tares apporta un nouveau change-
mant dans retat de I'^ise arme-
nienne. Mahomet II, pour repeupler
la ville qu*il avait derastee, donna
Tordre h Joachim, arcbeveque arme-
nfen de Boursa , de se transporter avec
un grand nombredefiBimilles armenien-
nes dans la nouyelle eapitalede son em-
fnre. II leor conoeda dans Galata un
ieu vaste et commode pour babiter.
Le chef de cette ^glise mpit le nom de
patriarcbe, et il etendit sa juridiction
sur tous Ks autres Armeniens etablis
dans la Grdoe et dans TAnatolie. Tel
fut Torigine de ce nooreau patriar-
cat n, qui a acquis une grande impor>
(*) L'electioa du pitriirche de ConsUn-
tinople cit oonuDunemeot dans lltglise ar-
meDieone roecasion d*Un grand leandale.
La cupidlte des vizin tire habilement profit
des ambitioDS secretes du derge , en meltant
k Teneao oette premiere dipite eeri^iasti-
qoe. Le gouvemement preieve sur oeUe no-
minatMni mi fort impdt nomfltie mukatta,
veritable iribiit amrady oui doit eire payi
au stthw I des ^o^aes detcrmiiiees. Ob a
taoee avec raccroissement de la po-
pulation armenienne. La tolerance
musulmane lui a toujours laisae le pteia
exercice de ses droits, a condition sett-
lement que lui et son troupeau spri-
tuel respecteraient les lois da Tain-
queur. La liberte du derge armenico
ae Constantinople repose sur an firman
que lui octroja Mahomet II. Nous ver-
rons comment, k certaines epoqoes,
la partie catholique du derge eot k se
plaindre de la violation de oette ^o-
messe solennelle.
L'institution du patriareat de Cons-
tantinople signale la derniere ere de
decadence de TEglise armenienne. De-
puis la conquete des Turn, le iia
d'unite qui rattachait encore une oer-
taine masse de fiddes h im s^mboie
commun se brisa, et Tanarcfaie spi-
ritudle n'a fait qu'au^menter. Ge n*est
pas que le musulmamsme ait fait des
proselytes dans la nation; la loi de
ralcoran, placiat inoomplet du ju-
daisme et au diristianisme, n'a jamais
prevalu parmi tout un peu^e deja
converti a T^vangile, et il nous soffit,
pour se convaincre de la justesse de
cette remarque, de jeter les yeax sur
les divers pays oi^ penetra la reiigioa
de Mahomet. Les Arabes, les Persans,
les Tartares, etaient adonnes k Tidoll-
trie, au magisme ou au feticbisme, et
c'est pour oda qu'ils entrireat oonune
naturellement dans les nouvelles voies
vu le gouvememeDt ture sprier avideneBl
sur le droit d'instaUstion. Ainsi, doraiit b
deniicre moitie du dix-septieme siede« qua-
torse patriarches se sucoedereot, et qud-
ques-ons d'eux fureot elus et deposes suc-
cessiTement neuf fois. Le siege etait lim
au plus offrant, et le mukatta iCi^^m^ dc
100,000 i 400,000 aktdie ou aspres. Le
droit que paye actuellement le pairiardic
est de 10,000 piastres, sommequ'il prclevc
sur les diverses £glises de sa juriaiction.
Angora foumit loeo piastres, IsQikinid
xooo , Cesarie 800, Moush 5oo, Tekirdagb
5oo, Smyme 5oo, Sivas 5oo, 8ia Soo,
Adreneh 5oo, Eraeroom 4S0, Diatbeii*
45o , Orfdi 400, AraUur 400 , Tokat Soo,
Ktttaya 3oo, Biiboiat aSo, Anasta soo,
Karm-Hisar aoo, IVebisoDde x5o , Ti
i5o, GuHHsb-Uaneb roo, etc., de.
▲rm£nie.
$t
religieufles ouTertes derant eiu , et oui
les oondaisaient k an 6tat social et in-
tellectael T^itablement supdrieor. II
n*en fiit ^ de mtee des petioles chf^
tiens qui conscrf^rant jsmralement
leur foi , suiYant eette lot premiere de
rhumanit^ oui ne pennet Jamais de r6-
trograder. Sons ce rapport, les Grecs
peuTent dtre assimii^ aux Ann^niens ,
et oomme eax i\s ont ea le courage de
d^fendre et deconserver leur religion.
Ainsi f tout en rendant hommage h la
Constance et i la giniaamii du peuple
arm^nien, qui, depuis quatre siddes,
soumis aux musulmans, pr^fi^ la
croyance de ses p^es k la liberty et
court joyeusement au-devant delalmort
et des perstoitions pour la maintenir,
nous ne pouvons iMiunoinsnouseDipd-
cber de remarqoer an £iit oomman k
d*aatres peapies, et qui a , en partie, son
explication dans la natare de Fesprit
humain. La domination musulmane,
queloae toltente gu'on la suppose, fdt
nnisiDle au cbristianisme, qa*elle tint
dans une suj^on assez humiliante.
Les Armtoiens commenc^ent k com-
prendre que les Grecs , avec leur esprit
disputeur et jaloux, avaient du moins
une foi commune sur les prjncipaux
dogmes, et en outre, la rivaiite exis-
tante entre les deux Eclises, qui se
trouvaient oomme en praence, contri-
buait k entretenir une oertaine activity
religieuse. Si ces nombreax oondles et
toaies ces discussions thfologiqaes
dont nous avons parl^ n'amenaient pas
d'heareux rteltats, on Toyait ntiin-
moins en cela an signe de mouvement
et de Tie. Apr^ la conqo^, les Ar-
m6niens se rapprochmnt politique-
ment des Grecs sans se reunir; les
trois patriarcbes d'Eczmiazin, de Sis
et d'Aghtamar, se renferm^nt plus
strictement dans le cercle de leur juri-
diction respective. Le jpatriardie de
Constantinople, plus nivorablemsnt
plac6 pour sujrarendre les favours du
poavoir, usa ae son cr^it, souvent
dans le but uni^e d'empi^ter sur les
droits et les attnbats de ses rivaux.
Les 6migratioii8, les guerres, les
persecutions et les malbeurs de tout
genre auxqueh la nation armenienne a
M en butte, Tont fait comparer nlu-
sieors fois a la nation juive. En eiSfet,
nous retrouvons quelques*ans de ses
enfents disperse dans toutes les r6-
flons, oomme oeux du peuple lifi)reu.
Is s'occupent ^galement de oanque , de
trafk: et dMndostrie, et, s'ils ont Tba-
bilete des juifs, ils ont de plus la re-
putation d^une loyautA parfaite. Ge trait
de ressemblance, frappant au premier
abord , s'explique bistoriquement, lors-
qu'on considdre les nombreuses colo-
nies qui vinrent k diverses r^rises de
ia Palestine s'^tablir en Armtoie.
A r^poque des deux transmigrations k
Babylone, sous Alexandre le Grand et
lors de la grande dispersion , apres la
mine do temple de Jerusalem, des
bandea de eolons vinrent fonder deti
villages dans les provinces du sud et de
Test Ge £iit expliqae aussi la ressem-
blance qui existe dans le type de la
physionomie entre les t^tes juives et
armtoiettnes, si ee n*est que celles-ei
ont g^ninlement plus de noblesse et
de boiote. Ce melange de sangisra^lite
an sane de I'andenne race de Tborgom
nous nit oomprendre comment, au
sein de cette nation oui semble d'abord
exdnsivement atta<me au sol de son
pajs par ses godts agrieoles et s^den-
tairea, il se trouve one autre partie de
la population entrain^ par des godts
aventureox k aller cbercber fortane
dans des terres lointaines , et i se livrer
aux op^tions mercantUes et flnan-
ci^res. Ainsi les Armtoiens sont dis-
semin^ dans tootes les villes eoronier«
cantes de TAsie, jusqu'au fond de
rlnde et pres des irontidres de la
Chine; partout ils parviennent en peu
de temps a tenir dans lenrs mains tout
Pari^i des fortnnes publiqnes. Comme
In jui6, ils demeurent invariable-
ment attacbes a leur foi hMditaire,
et, k Yienne oomme k Madras, ils ce-
I^rent rolBce divin selon la lituigie
primitive de leur Eglise.
En Perse, il existe une colonic im-
portante d'Armeniens. Elle r^ide a
Julfa, faubourg d'Ispaban, s^par^ de
la ville par les jardins du roit qui ont
one lieue d'^tendue. EUe y 6it trans-
feree par Abbas I*% qui , lors des co»
52
L*UNIVERS.
quotes qu'il fit en Armenie, ramena
avec lui vingt-troismilie families arm^*
niennes dans le Guilaa. L*£||;lise qu'ila
ont form^ est r^e par un patriaf che
particulier. ij^troitenient attach^ aux
principes de lear ji^iise nationale, its
rejettent le ooncilede GhaloMoiDe, la
distinction des natures, et conservent
pour les Grees une antipatbie insur-
montable. Leur aversion pour lea La-
tins n'est pas moins grande; les mis«
sionnaires envo^^ par la Propaganda
ont presque toujours ?u ^cbouer leurs
tentatives, h cause des intrigues du
clerg^ ann6nien qui redoute leur pre-
sence. Chardin et Tavernier les accu*
sent de simonie et d'avarice, et Tigno-
rance qu'ils leur reprochent serait
encore plus grande que oelle du clerg6
de TArm^nie m£me.
Au milieu des disputes thdologigues,
et inalgr^ les efforts du parti national
pour rompre entidrement avec rf^llse
romaine d'Occident, dont les anciens
ecrivains ont toujours reoonnu pkis
ou moins expressem^nt la suprdmatie
spirituelle, if s'6tait conserve un autre
plarti plus fiiible a la v^t^, mais non
moins tenaoe k ses idto; et oe parti ,
proprement catholique, correspondratt
asaez bien k ce que nous appelons cbez
nous les nttramontains. Leur ^glise
8*etait perp^^ au sein de I'autre ^
ayant son clerg^, ses thtologiens qui
se mettaient en rapport avec T^glise
d'Occident aussi souvent qu'ils le pou-
vaient. On pent dire que oette portion
desfiddes repr^ntait la partie la plus
intelligente et la plus avanc^ de la na-
tion , puisqu'elle comprenait mieux le
principe de charite et d'union, et
qu'elle ne se staiestrait pas dans un
noid et sec isolemeat. C/^tatt oesca-
tholiques qui recevaient les mission-
naires latins (*), et qui travaillaient
(*) Depois qnelaues anaees U societe des
Metbodistes am^caim 8*est eprise d*une
tendre solUcitiMie pour les l^glises orientales
d'Ann^e , de Georgie et de Perse , et elle
a cn?oyi dans oes oontito des missiounat-
rek En iSao, MM. Fisk et Panons firent
un iMirdaiis TAsie Mineure; en 18*7, M.
■Madlej peneUii dans la Gappadoce. Der-
toujours a- la reunion des fegliaesdis-
sidentes. 11 leur fiiUait du courage poor
nierement MM. Smith, Dwight, Dituich
ont visile TAnnenie. Nous louons le but el
les efforts de ces hoonaes , qui abandooBent
oourageusement leur patrie , et se deTouent
aux fatigues et aux perils de oes lointaines
excursions. Si leur propagande religieuse
est completement denuee de suoces, du
moins ili nous foumissent d*exeellentes ob-
servations geographlques , et des details
locaux de mceurs et de coutumes propres
k completer oertaines parties des voyages
de Chardin ou de Tavernier. Apres avoir
fait ainsi la part aux ^oges qu'ils mcriteut,
nous leurs soumettrons ici qudques respec-
tneuses oonsiderations. D'abord nous n'ap-
prouvons pas leur ton de suffisanoe a Tegard
des Anneniens papisles(*), dont ils plai-
gneot a chaque instant le servile attadbe-
ment au siegie romain, bien qn'ils reeon-
naiaseot dans certains panagei de lear jour-
nal , que les catholiques sont la seule portion
vMtablement eelairee de ce people, et sui-
Vant le mouvement progressifde la ctTilisa-
lion. lis laissent mime echapper k regret
cet aveu trap favorable a la cause qa*ils
attaquent partout ailleurs avec un zele digne
des rtformes oontemporains d*Henri Tm.
(Ibid. , pag. x4). En second lieu, oe qne
nous neleur pardonnons pas, c'est leur oook-
plete ignorance des premiers dogmcs de la
religion chretienne qu*iis pretendent aller
prfoher aux Orienlaox. Comment pouvaieot-
ils s'attendre k kirt accuciUis bvorableuMBt
par ees hommes dont Hb plaigneiit Tigno-
ranee , lorMue oeux-d leur ontendaioot nier
la divinity de J. C. , retablissement hi^m^
chique de la primitive l^lise, el quib les
voyaient rester tout stupefaits de oe qee
dans ce pays on baptisAt encore les cofanta,
paroe que la pratique de oe sacreoieDt de>
note, suivant eux, la superstitieuse croyanoe
au pische originel. (Ibid., p. 22a.)
En quoi consistait done leur mission? Ils
nous le disent eux-m^es. Arrives dans
une ville, ils allaient dans les bazars et sur
les places publiques, mettre d*abord en
vente, et ensuite, fiiute d*achetettn, sini-
Slement y diposer quelqnes exemplaim
es traductions des saints iftvangiles » fai-
tes k grands frais par la woctkk bibUque.
lis s'imaginaient que des Turoi ou des Kur-
des aHaioit se oonvertir k leur foi en
O Miisionary r«Mareh« in Armenia, 1^ F«
Smith ef G. O. Dwigkt. l^oirfMi. il34.
ARMRNIE.
68
s*^leverau-des6U8des jalousies et des
haines des opposants qui leur repro-
chaient amerement d'eutretenir des
intelligenoes avec un chef ^raoffer,
et de vouloir absorber leur Eglise dans
une £ffiise plus universelle. lis M-
saient dMnutiles efforts pour leur d^
montrer que rind^peDdanoe de leur
Slise ne serait point d^truite par sa
tnion au centre de la catliolicit6 ;
ceux-ld trou?aient leur intir^t a ne
pas les comprendre; et, comme les
Galileans , ils vantaient hautement leur
soumission au pouvoir temj^rel dont
ils ^veillaient u'ailleurs injustement
les soupcons sur la oonduite des catbo-
liques. II teit curieux de voir des Ar-
m^niens se constituant d^fenseurs de
la puissance turque qui les ^rasait, et
la poussant k pers6cuter ces monies
catnoliques qui, dans leur g6n6reux
d^ouement h FEelise latlne , mettaient
r6ellement plus de patriotisme que les
porlaot oes livres Inspirateun dont ils ne
poturaiait oomprendre la Utidocfion faii-
tivtt et inoorreole, ff'ib Mvaient lire. Mais
quel ^it lenr d^ppointement , hnrsqiie le
lendemain ils retrouvaicDt par les rues les
hunbetiix ipars de I'Anden et du Nouveau
Testament. (Ibid. , p. 73). Gertes les mis-
sionnaires romains aont ib envient les tra-
vaux prosperes,agi9sentaotmnent. lis eom-
menoent par se oaluiiliier, pour ainst dire,
chez le people qu*ils vetilent erang^liser, et
cela en adoptant sa langue , ses wages. lis
cbeoiinent a pied , portent le poids du jour,
& travers les lieax sausages et deserts, et
non pas sur le dos des mnles « et en trafnant
a leur suite un aitirail de bagages, de tentes
et de matelas , semblable k la cararane d*un
pacha allant prendre possession de son gou-
vemement. lis ne comptent point avec in-
quidtnde les pulsations de leur pouls, pour
connaitre l*influence variable de ratmos*
phere sur leur temperament. Us ne prennent
pas la peine , dans leurs relations, de nous
dire Pheure k laquelle ils se sont leves ou
conches , les mets qu*i!s ont trouves chez
leurs hdtes , el ils ne se plaignent pas que
le thi ou le cafS6 leur aient manque. (Ibid.,
P* 79 f 83, 173). En un mot, avant d'oser
attaquerles missions catholi^ues, il faudrait
que ces messieurs missionnaurs touriste* et
gentiemen reforroassent Icurs proprcs mis-
sions.
autres, puisqu'ils esf^aieot trouver,
dans la ronton religieuse, un moyen
de reoouvrer leor ind^pendaDce poli-
tique, en se ralliant 51a oommunion
d(» peoples d'Oocident. Ge qu*0Q pent
reprocber au parti cathoUque, est un
exc^ de z^e, et I'air de sop^orite
qu'il prenait naturellement pour deux
raisons; la premise, paroe que ses
oommunications avec FOocident lefai-
saient partidper davantage aux lu-
mieres de la citilisation ; et la seoonde,
parce qu'il ^tait fier de d^endre contre
un plus grand nombre des principes
appuy^ sur la tradition des dges pasMS
et sur la science ecd^iastique. lis af-
fectaient aussi 5 tort de rejeter oer-
taines pratiques de leur litui^e, pour
adopter d'autres ceremonies de la li-
turgie romaine, preference que les
dissidents regardaient comme une in-
sulte. De \k Teioignement qu'ils leur
tdmoiperent , et qui fut pousM jusqu'^
la baine(*). Les deux partis etaient
sans cesse en presence, comme deux
camps ennemis obserrant leurs moin-
dres mouvements , et toujours dispo-
ses 5 Tattaque. Nulle relation n'exis-
tait entre les deux £glises ; jamais le
membre d*une de oes deux aodetes
n*edt oonsenti 5 s'allier par le manage
a Taatre; une ligne de demarcation
infrancbissable les diTisait, et ils ma-
nifestaient moins d'antipathie pour un
Turc ou un Grec, qu*ils savent etre
(*) Au rapport d*un missionnaire , les
dissidents de la Perse anathematisentsolen-
nellement le concile de Chalcedoine, saint
Leon et l*]^lise romaine, quatre fots Tan-
nic , k savoir : a la Quinquagesime, la veille
de I'Assomplion, la veille de la Transfigura-
tion et la veille de Noel. Void ce que Tonr-
nefort pensait de leur aversion pour les ca-
tholiques. « La reunion des religions, dit-il,
est un mirade que le Seigneur operera,
lorsqu*il le jugera k propos. C'est du del
qu*il faut attendre la veritable conversion
des schismatiques , donl le nombre est infi-
niment plus grand que cdui des Armeniens
romains. Ces malheureux schismatiques, par
leur credit et leur argent, feraient deposer
nn patriarche ciui donnerait les mains a la
reunion. La haine au*ils ont pour les Latins
parait irrecondliable. »
64
UUNlVfiES.
\mn mumauM naturels , que coatK an
deteiirittMBMtriotetd'uoeooiimiiuuon
diff(&reBt6. Ijoatez k eet eaoMs rdi-
gieuMf l«s nvaiilte naisMotes de la
ooDOiurrenoe et d€8 intMls eommer-
ciain, Yous awes une i<Me k peu prti
oomplke des principam motifs de
guerre et de diaeorde eziatant parmi
eui , ^ , de plus . TOUB trouveres b one
des caoieB de la deroito crise de 1SS8 ,
qui a ^t6 si fatale aux catholiques.
Parmi les ^ises cathoUques qui
ont pers^M avec ie plus oe cons-
tanee, on peut citer les trois ^lises
du rite ariMniea ^taUies daos Ie Li-
ban. Elks oe sont point autoristo per
un firman du Grand Seigneur; la po-
sition inaccessible des montagnes qui
les prot^ent leur en tiennent lieu.
Elles ont ^t^ formto par les refugi^
qui , fuyant une patriecontinueUement
raTag^ par les ennemis » et en proie
k one anarchie religteuse et politique,
vinrent chercher dans ces montagnes
un asile assure. La concorde et la cha-
rity rtenent dans cette petite soci^t6.
Dans Ie si^e dernier, la direction de
r£«dise a M confix h un natriarche.
une autre ^'se ind^ndante , bien
qu'elie soit renfermee dans une des
provinces de I'empire , est celie de Mer-
din. Soumise k rautorit^ d'un gnind
pacha, d6coT^ da titre de vice-roi de
babvlooe, elle joniasait au dernier
si^le d*uoe liberty complete , en vertu
du priyil^e accord^ par Ie sultan k oe
prefet, lequel TafSranchit, sous Ie rap-
port religieux , de toute juridiction ,
en sorte que les fiddles arm^iens ne
reinvent pas du patriarehe de Cons-
tantinople. Partisans des opinions er-
ronto de I'Eglise armtoienne, ils se
sont coDTertis aux prindpes de la foi
catbolique au commencement du dix-
huitime sidde.
Aoette ^poque, il y eat, parmi les
Arm^uens , un mouvement visible vers
Tunit^ catbolique. MMitar, ce o61^re
fbodateor de rordre savant de Saint-
Lazare , dont nous nous proposons de
parler, toocb^ du d^Iorable Hai de
sa nation , ooncevait Ie projet d*appor-
ter un remMe efBcace a ses maux, en
extirpant les germes de division. Les
misaionnalres europeens, eavoy^ par
la Propi^sande, et qui ^ent aae
norabreux k Constantinople, lecon-
dirant d'abord heoreaaemoit lei pro-
jets. Mais cnsoite ils ne proo6dirait
got avec toote la prodcnce rejoiie
IS les moyens qu'ils employvat
poor ramener les dissidents. lis dw-
qodrent oovertement ce parti bem- I
coop plos nombreox, en interdisant
aux catholiques Tentrte de leors egilMs
qu'ils representaient comme Ie saoc*
fiiaire de Satan (*}, et en attaqiuntia
liturgie et les pratiques de raadeime
£glise arm^nienne. On refuse Talso-
lution il qukonque contrevenait i oet
ordre. Les catholiques, trop diqioies
a s'dloigner de leiiurs fr^res, prire&t
tellemeni en borreur leurs t^istt,
qu'en passant devant la porta, ils (K-
toumaient la t€te par mqiris, conuiK
si c'edt ^ une pagode d'idoliitres. Od
renouvela toutes les disputes assoopies
depuis plusienrs siMes, touchant k
pape LcIni et Ie amdle de Cbalo6doine.
De leur odt6 , Ifs partisansdu patriardie
itttriguaient vivement contre lei mii-
sioonaires, qu'ils d^peignirent ^ r«i-
torit6 civile oomme dea conspirateon
O De leur cAte, lei diMidents Bettaiat
iioe flsirteie puaoD k vexer Im citboii-
3uei Qui aeinblftieiit let fiiir oomme do ib«
out Ie contact toit impur. A JiiUa» ^
dependaate difpahan , leur jakmiie eoaln
lei citholiquei liftit grande au demiw m-
de, etiia lofcilereal ouvertement ime loop*
pcnkutioii, Todaiit let hin chanar ^ ^
vaOe. Ik etaient toui aoulev^ eoafire cix.
femmet, eafaati. C*ert alon qpfmM^
fiuBiille k qui Ton diiait que «ieiid il n'j
am«it plus de pcrca ni d« mimioimaimci'
iboUquei, U leraU bien fofcA d'aOer a tctf
egliae, fit cette reponse remarquable : • ^
ne connaia qii*une ^tgUaey c'cit I'tgliM f-
maine daaa laqueUe je raia ne, et awe b-
quelle je auia en communion. 8*U ne rtfi*
plus k Julfii de miinonnairai et de prAtrtf
catkioliqiies, je auia venf, par ooDaeqvoi
Bbra; j'irai me faire ordooner pritre, afio
de pou¥oir satisfiiire ma devotion , et fff*"
rmea enfimta trouvent dans leur bm>*^
quoi remplir les devoirs de cbretieBi.
sans ^tre obliges d'aliej- aux eglises KbisnM-
tiqurs. •■
AKMElilE.
bk
■oodoj^ par te cour d'Ooeident. Ges
fimx rapports ^ient trap fadleineDt
aocoeillis par les vizirs et les grands ,
toujours oppose aux catbolique8,qu'ils
savaient reconnattre an chef spintuel
Granger. lis dtfendirent, sous peine
de mort, ft qui que ce iflAt, da donner
asile k ces pritres latins; et il fut
prohiM en outre aux catholiques de
s^assembler dans d*autres ^lises que
celies d^ndantes du patriarche ar-
m^nien. On ne voulait pas les laisser
communiquer avec les Francs catholi-
ques, toujours d'aprte les principes de
la politimie si ombrageuse de la Porte.
Les cattiolioues armteiens se trou-
v^rentdonc dans une grande perplexity,
et le plus affreux d^rdre ooulerersa
les deux ^giises. Lesang ooula; et si
les catholiques n*avaient trouY^ un
appui politique dans les ambassadeors,
et principalement dans eelui de France,
leprotecteur ofSdel de la religion des
Latins , ils n'auraient pu roister h la
pers^ution. Get ^tat anarehique a dur6
tout le dernier siMe, et de Tioientes
secousses se sont fait encore sentir
dans celui-ci.
Enfin, a la demi^re guerre qui a
consacr^ Find^pendance de la Grhce ,
rinfluence europ^enne ayant pris un
iiouvel ascendant sur la politique
ottomane , les cabinets strangers de-
manddrent que les catholioues arni6-
niens rentrassent dans le droit com-
mun , et qu*on leur accorddt le libre
exercice de leur culte. IjtgkiMi Guil-
leminot, ambassadeur irancais, les
servit puissamment dans oette con-
foncture ; aussi les eathoKques lui at-
tribuent-ils tout Tbonneur du succte.
Avant d'obteiiir la reconnaiManoe
d'un droit auni naturel que sacr6,
FEglise catholique amitoienne derait
passer par I'^preure des perstoitions,
comroe I'^glise chr^enne aux pre-
miers sidles de sa naissanoe. Elle coro-
menca en 1837, alors que la Gr^ bri-
sait les demiers liens du joug ottoman.
L*oocasion fut la dtfaite de Navarin ,
3ui bumilia si profond^ment Torgueil
e la Porte qu'elle voulait h tout prix
trouver une raison de ce revers, ailkwrs
^^e dans son impuissance. Les dissi-
dents poiiss^rent la haine contre les
catholiques ik un tel excte, qu'ils par-
vinrent k persuader au Sultan que
ceux-ci , unis de communion aux La-
tins , entretenaient avec eux des intd-
ligenoes secretes, et qn'ils avaient
trahi le goavemement. tine calomnia
aussi perfide trouva quelque cr^nce
dans les esprits. Galio- Pacha, grand
vizir, et Seld-Effendi , mlnistre des
affaires 6trang^res, qui soutenaient
les catholiques de tout leur pouvoir,
furent dis^ci^ ; le 8 Janvier 1828 ,
huit bancjuiers des principales maisons
sont exiles a Angora, et le soeU6 est
mis sur leur comptoir. Tons les habi-
tants de la mtoe ville d* Angora , re-
sident a Constantinople, re^oivent
I'ordre de partir, abandonnant tout
ce quMls poss6daient. Cette mesure
s'^tend bient6t a tons les autres ca-
tholiques, qui, d'apres un nouveau
firman dont la promulgation avait 6te
remise au patriarche schismatique,
furent oondamn^ k quitter Constanti-
nople dans Tespace de quinze jours,
pour aller habiter d'autres villages
voisins, occupy par les dissidents.
Contraints de vendre leurs maisons et
leurs meubles, ils furent r^uits a la
derniere mis^re (*).
Le 31 mars, on dtfendait, sous les
peines les plus s^v^res, de cacher un
catholique ou de lui donner asile. En
mtoe temps, on annonoiit que le sul-
tan ne reconnaissant quSine seule na-
tion et une seule secte arm^jaienne,
les catholiques devaient se eonformer
Il la loi et abjurer leur erreur ; c'est k
(*) Od vit des iemnet et des vieilUrds
brouier I'herbe des champs- an milieu des-
quels ils eiraient. La passioo des dissideott
allait jusqu*a la barbaria, oomme od le Tern
par Teiemple saivant. Uoe pauvre femme
catholique r^giee dans un grenier avec sa
famille, manquaitdenourriture. Presseepar
la Cum , elle envoie un de ses petits enfanis
prier le cuisinier d*nn banquier schismati-
que de lui. donner les restes qn*il jetait aux
chiens. J*aime mieux les donner aux chiens,
ripoodit le cuisinier qu*a toiis autres, chiens
de catholiques; ft f enfant All chasse de la
maison Ans pouvair soulager sa faim et
cdle de sa mere. •
&G
L'UNIVERS
cette condition qu'on poavaifc leur par-
donner. Mais nous dirons k la gloire des
eatholiques arm^niens, que pas un seul
n'apostasia. Cest dans cette circons-
tance aue Tambassadeur francnis,
M. Guilieminot, protectear legal de
tous les eatholiques de Tempire turc ,
op^ une reaction heiireuse au moyen
de ses ^nergimies repr^entations. La
ruine momentan^'du commerce , les
pertes incalculables qui r^ultaient de
la proscription de tant de riches ban-
auiers, acheverent de produire, sur
r^me du sultan , Timpression qui de-
vaitnaltre du moindre sentiment d*hu-
manit^. Le calme revint, olusieurs
eatholiques furent r^ntegr^ aans leur
place , et auiourd'hui leur inOuence est
anssi grandfe qu'autrefois. La liberty
des cuRes ayant ^t^ proclam^ , Rome
envova aux eatholiques un patriarche
que r^tat reoonnatt.
Puissent desormais ces deux com-
munions vivre dans un esprit de paix
et de cbarit^ , et ne plus donner aux
musulmans le triste exemple des divi-
sions et des hatnes que defend la loi
du Christ , laquelle est une loi d'amour!
LA PAMILLB DVUOGUOV,
Nous raconterons ici, corame une
espece d*^pisode dans I'histoire politi-
que et religieuse des Armeniens, ia
suite des intrigues et des 6v^ements
qui ont prepare ia chute de la puissante
maison catholique des Duzzoglou, ri-
ches Arrodniens qui s^^taient Aleves a
Constantinople, vers le commencement
de ce si^cle , a un tel d^pre de puissance
et de cr^it , que le contre-coup de leur
disgrdce s*est fait ressentir dans une
grande partie de la nation.
Cette famille 6tait originaire d'Alle-
magne et remontait h un orf^vre, qui ,
deux sidles auparavant, ^tait venu s'e-
tablir ^ Pera. Son habilet^ lui acquit
promptement une grande reputation,
et il devint le joaillier du sultan. S'^tant
oiarie a la fille d'un Arm^nien , il voulut
definitivement se Oxer a Constantino-
pie, et il prit rang parmi les ralas (*).
(*) On doiine ce Qom a iou& lei sujets
Son fiis, probe etdroitcomme lui, cban-
gea son nom europeen en celui de Du^
zoglou, lequel exprime cette qualite(*).
Pendant plusieurs generations, cette
famille grandit en silence et amassa
des richesses considerables. A Tavene-
ment de Mahmoud, sultan reforma-
teur qui r^siste aujourd'hui a Tintol^-
ranee des ulemas, avec la m^me vic^ueur
qu*autrefois il lutta contre le despo-
tisme capricieux des janissaires, les
Duzzoglou eta lent dans le plus brillant
etat de prosperite.
Jean Tchelebi remplissait les fouc-
tions de directeur de la Monnaie,
charge que le sultan lui avait conferee ,
a cause de ia conOance quMnspirait
cette maison patriarcale oil les vertus
se transmettaient hereditaires comaie
la fortune. II mourut en 1813 , laissant
une famille nombreuse, composee de
six garcons et de six filles. Les deux
aines, Gregoire et Serkis, succedereot
a Temploi de leur pere.
Leur fortune s'accrut encore beau-
coup, gF&ce aux renseignements qu'uD
religieux de Tordre des Mecbitaristes
de Saint-Lazare de Venise leur apporta
d'Europe sur la fabrication de la mon-
naie.
Le sultan fut teilement satis&it dii
suoces de cette innovation dans la fa-
brication des pieces d'or, qu*il prodigua
ses faveurs k fa tamiile des Duzzoglou ,
et lui aocorda le privilege du pent-
che(**), Ce privilege, qui soustrait
celui qui en jouit aux vexations arbi-
traires des vizirs, en le placant sous
Tautorite dlrecte du sultan, n^avait ete
accorde qu'a deux autres £auniiles,
chretient de Tempire , rait ArmenieiM ea-
tholiques ou dittideats , soit Gf«Gs, el leun
droita politiquea ne soot jamais auasi com-
plets que ceui des autres sujets mahome-
lans.
(*) Duz en tare signifie droit et iniegre,
et oglou jUs,
(**) On appelleainsi rempreinle des canf
doiris de la main {pentchd en persan) que
Mahomet, qui ne savait ni lire , ni ecrire .
apposait comme sa signature. Dans la suite
on a donne ce nom par extension au chiffrc
ou toghrd du sultan.
ARM£lfIE.
57
Gr^ire rarcbitecte^ et Jean Dadien,
inspecteur des poudres, tous ks deox
^atemeDt Arm^niens.
La prosp^rit^ est d'ordinaire plus
nuisible k rhomrne que rinfortuue; car
celle-ci eicite et met en jeu ses vertus,
elte le contraint k lutter, tandis que
Tautre I'^nerre et T^tourdit. * Lors
in^e que I'dme conserve son calme et
son ^galit6 au milieu de Fatmosph^
enivrante des grandeurs, il est difficile
d'echapper aux traits des envieux, et
rare de ne pas rencontrer dans le reste
de la societe une multitude de gens qui
travaillent secr^tement h votre ruine.
C'est ce qui arriva pour la famille des
Ouzzoglou.
Le faste qu'elle ^talait, inconnu jus*
qu'alors dans la classe des raias, d^
plaisait aux Turcs, dont la morgue
nationale ne pouvait souffrir la rue de
tant de grandeur et de fortune chez
des Chretiens. La magniGcence des mai*
sons de ville et de campagne, la re-
cherche des chevaux de pur sang arabe ,
le nombre des domestiques attach^ au
service de ces nobles Arm^niens , tout
contribuait a attirer sur eux Tattention
malvdilante des musuhnans. II ne
manquait qu'un bomme qui osit atta-
quer leur cr^it dans Tesprit du sultan ,
et renverser ainsi par sa base tout Te-
chafaudage de leur prosp^rit^. Get
homme se rencontra : c*6tait Haled.
Fourbe, rus^ et dissimule a Texces, il
^tait venu perfectionner en Europe,
durant son ambassade k la cour de Na-
poleon, ces premises quality d'un
habile diplomate. De retour k Cons-
tantinople, il s'etait doucementinsinue
dans les bonnes grdces de Mahmoud,
si bien qu*il ^tait devenu le conseiller
de tous ses actes. Mahmoud ne cachait
point Tascendant qu'fiUiled exer^it sur
son esprit, et Ton se souvient que,
dans une sMition des janissaires, il
repondit k quelques-uns des plus hardis
(lui lui demandaient Texil et la disgrace
de son favori : « Quoi ! vous vouariez
me couper le brasy et me priver de
celui dont la sagesse m'assiste dans
toutes mes entreprises? »
Haled etait jaloux de la puissance
des Duzzoglou ; il avait jure leur ruine
au fond de son ooeur, et, pour parve-
nir k ses fins, il se cacha demere le
voile de la plus noire hypocrisie. II sa-
vait que Mahmoud aocordait toute sa
conflance aux f^res arm^niens, qu*il
^tait convaincu de leur bonne foi , que
mdme il ^tait li^ envers eux par une
tacite reconnaissance. Comment done
s'insinuer dans I'fime du sultan? par
auel moyen lui persuader que ses plus
^vou^ serviteurs sont au contiaire
des ennemis dangereux? Ne risoue-t-il
pas lui-mdme de se perdre dans rabtme
qu'il veut creuser sous leurs pas?
Profond connaisseur du coeur hu-
main et de tous les ressorts secrets qui
mettent en mouvement ses passions,
il avait observe que celle qui dominait
au-dessus de toutes les autres i'dme
du sultan, ^tait une insatiable avarice;
il 8*^tait convaincu qu'en flattant ce
vice, et qu^en faisant briller aux yeux
du despote cupide Tespoir d'accumuler
de nouveaux tresors, on pouvait Ta-
mener sdrement a ses propres d^irs.
II p^n^tre done par cette voie dans la
confiance de Mahmoud , et c'est en lui
jetant cet appflt qu*il le dispose en sa
favear.
II commence par lui manifester son
^tonnement de Texcessive prosp^rit^
des Duzzoglou; il laisse deviner ses
doutes sur ViniignU des moyens par
lesquels ils se sont dev^ a cet ^tat; il
fait entrevoir aussi tous les dangers
qui peuvent r^sulter, pour lui et pour
sa nation , de cette immense sup^riorite
de fortime dans une maison de dbr^-
tiens naturellement ennemis desTurcs;
il sugg^re enfin au prince Tid^e de
s'emparer de ces tresors et de les ajou-
ter au sien , moyen court et facile de
se cr6er de nouvelles ressources finan-
cidres.
Ses discours perfides persuaderent
Mahmoud. D'un autre cot^, pour ne
pas ^veiller les soupqons des Duzzo-
glou, il se lie a eux par une feinte
amitie, et cherche toutes les occasions
de les convaincre de son d^ouement
mir quelque service apparent ou reel.
Gr^oire, le plus capable des deux fre*
res, etait principalem«it I'objet de ses
provenances. C'etait un esprit calme et
58
L'UmVERS.
s^vto, p^n^trant avec une sagacity
merreilleuae le ncBud de toulea lea in-
trigaes, et jpoasMant 2i un deflT6 re-
marquable rintdtigence dea uifairea.
A la finease propre aux Annteiena, H
joigoait la grayit^ et la solennit^ dea
maniirea ottomanea. Ghaque matin
Gr^tre allait viaiter Haled, qai le
retenait longtempa dana son palaia pour
ddib^r ayec lui dea affalrea de TElat.
Le yizir 6tait h son tour souTent inTit^
diez lea frerea armtoiens, qui 1*6*
gayaient par dea ffites aplendides, dea
Illuminations et des featins, luxe d'^
ttquette inconnu pr^cMemment.
Peraonne, et les Duzzoglou bien
moins encore que tous les autres, ne
pouvai'ent penser qu'Haled nourrissait
dans le fond de son ooeur des projeta
sinistres. Cependant ii allait porter le
premier coup k ses pr^tendus amis.
Voici Gomme il s*y prit.
Aucun rala ne pent en droit rem«
plir une fonction publique; il taut €txt
musulman fiddle. Les deux Mrea ar*
m^niens , bien qu'oocupant dans la r6a*
lit^ la charge iroportante de directeora
de la Monnaie, etaient repr^ent^ nsr
un Turc , esp^ de fonctionnaire flctif ,
au nom duquel ae dressaient tous les
actes. Ge Turc, nomm^ Abd Arrha-
man, ^it un bon et simple Tieillanl,
enti^ment d^Tou^ aux Duzzoglou et
tr^SHCOndliant. Haled voulut I'dcarter,
et lui aubatituer une de aes cr^tures,
oppose aux int^r£ts des Duzzoglou.
II repr^aente done au sultan qu'Abd
Arrfaaman est trop vieox, qu'ii n'est
plus capable d'aucune aunreillanoe,
qu*il est gorg^ de richesses et enti^re*
roent gagn^ par oeux qu'il doit repre-
sentor avec impartiality. II met en
avant un autre personnage, le mermar-
bachiy ou grand architecte de TEtat,
IxHnme parvemi, et conserrant oontre
les Duzzoglou une implacable ranoune ,
parce qu'autreftus il 8*6tait adresse a
eux dana une aflEsire, sans obtenir ce
qu*il sollidtait.
Abd Arrbaman est renroy^ et con-
fine dans un village foisin de Goostan-
tinople, et une partie de Targentqull
avail auiasa^ pendant son emploi paaae
dans les coffires du sultan. Les n'^res
armfoiena , itonnte de oe ohaa^BBicBt .
en demandent la raiaon a EbM, et k
prient de s'oj^poaer k la somiDalion du
melmar-bachi, attenda qa'ila redou-
talent sea mauvaises intentloni a lenr
^gard. Mala Haled lea rasaure, et leur
oonaeille de bannir toutes ees vaines
inquidtodea^ promettant que son au-
torite aplanirait toutes ces difiBciilt^
efifravailtea k la premito viie, et il
ajooie qo*au boutde pea de temps ils
trouveront en Idi un aecood Abd
Arrbaman.
La kM exige qa'k la nomination d'un
nouveaa zerpaiU^mMf ou iDtendant
de la Monnaie , on pr^sente on oompte
net de T^t financier. Lonque le met-
mar-bachi entra dans sea fonctiona, la
premi^ chose qu'il dit aux Duzzoglou
ht de les avertir de ae oonforrner am
r^ementa, c'e8t-^-dire,delui dresser
I'etat de ieurs oomptes. II suffisait ordi-
nairement de £eure aur le papier le
relev6 das sommes contenues dans le
tr^or de la Monnaie. Les ft^res ar-
mdniens penstont d^abord qu'ils n'^
taient astrdnts (fa'k oette q^^ation,
aussi ne furent-ils pas trop efifray6s.
Mais quelle surprise fut la leur, lors-
qu'en remettant I'^tat dea oomptes au
meimar-bacbi , oelui-ci leur dit : « Le
sultan ne se contentera pas d'un sim-
ple papier; il veut en argent oooaptant
et aana ddai le capital qui aMdtpoBk
anciennement entre vos mains. »
II font savoir qu'en Turquie la mon-
naie se Abriaue an profit do saltan,
de m^me qu'etleestfipapp^e en son nom
et ^ son effigie. C'est loi qui r^^ et
determine la quantity d'aliiage qifon
doit mettre dana For, et qui foornit les
linflots. Outre ces ^normes valears d'or
et d*argent brut, Mabmoud kiasait en
d^pdt (£ez lea frfirea amkiniena, oomme
joailliera de la oouronne^ beaoooap de
Dijooz et de pierres prMeoaea. Le ca-
pital des foncb oonfi^ aox Dossc^loo
pouvait ^tre ^alu6 environ k vingt-
dnq millions. Comma ils faiaaient la
banque, cea foods ae trouvaient dis-
perses et r^partis dans plusieors autres
maisons et dans diversea places de
I'Europe, notaroment en Angletwre et
en France. Comment rappeler i Tins-
ARMEINIE.
69
tant et de si loin toutes oes sommes
^parses? comment fermer les cMits
tmnrtB et eiiger des pavements dont
recMaace toit fort recall? Ces con-
siddrattons jet^rent les deux fr^res dans
des pei^exit^ etranges; lis tAefaaioit
inutilement de remonter k la cause
d'un ordre aussi inconcevaUe; ils se
perdaieot dans leors conjectures. Gr6-
gtnre ne voit d'autre issue , pour sortir
de son embarras, que de courir chez
Haled ioi demander des explications.
Haled simule de la surprise, et dit
qu'il arrangera i'affaire pr^ du sultan ;
mais qu'il faut saisir le moment j&vo-
rable de lui parler, et que, pour cela,
le d^ai d'une semaioe est necessaire.
Gr^oire revient cbez lui plus rassur6,
mettant toute sa confiance dans le
cr^it du vizir, son ami.
Le melmar-bachi , en quality d'in-
tendant de la Monnaie, allait cbaque
jour a rhdtel ou elle se fabrique, et
rusage voulait que les deux agents res-
ponsables, les deux fibres Duzzoglou,
ne pussent sortir de la maison ni s'ab-
senter avant le moment du d^rt du
zerpan^mini, lequel avait lieu ordi-
nairemeot vers les quatre beures du
soir. Or, un vendredi que le meimar-
bachi ^tait venu, suivant sa coutume,
inspector les ateliers et les bureaux, il
demeura plus lonctemps dans son ca-
binet, si bien qu*a huit beures du soir
ii n'^tait pas encore sorti, au grand
etonnement de toute la maison. Enfln,
vers les neuf beures, il descend, et
troove les deux fr^s qui I'attendaient
au bas de Tescalier pour lui printer
ieurs bommages, irapres Tetiquette.
L'intendant les regarae avec fiert^,
re^it silencieusement Ieurs civility,
ct se Gontente de leur dire, lorsqu'il
est mont^ k cheval : « Le sultan or-
donne que vous ne quittiez pas rb6tel
des Monnaies. »
Ces paroles, qu'il laisse tomber
comme une sentence, en poussant son
cheval en avant, plon^ent les deux
fr^res dans la stupefaction. lis se re-
gardent, s'interrogent, et trouvent
nioins que jamais une solution a 1*6-
nigme terriole qui pese sur eux de tout
son iwids. Ils envoieni Ieurs serviteurs
k la maison chercber quelques provi-
sions. Toute la famille, surprise du
retard iDacooutum^ de Gr^oire et de
Serkis, commen^t k ooncevoir des
inquietudes. EUes redoublirent, quand
les serviteurs rapport^rent que Ieurs
mattres ^ient oblige de rester dans
rbdtel des Monnaies par un ordre ex-
pr^ du sultan. La nuit se passe en
allies et venues , et ils ne voient d'autre
moyen de sortir de leur incertitude
que de s'adresser k Haled, qu'ils croient
toujours dans Ieurs int^rets.
Micbel Duzzoglou, leur fr^re, va le
lendemain matin trouver le vizir; il
vient. dit-il, de la part de ses freres,
chercber des folaircissements sur un
ordre extraordinaire du sultan, en
vertu duquel ils sont retenus prison-
niers k I'notel des Monnaies; ilagoute
que Gr^oire et Serkis esperent que
ieur ami Haled les tirera d'embarras
des que leur position lui sera connue.
Micbel allait continuer son discours,
lorsque Haled I'interrompit froidement
et lui dit : « Je sals tout ce que vous
pouvez me raconter; mais le sultan est
Juste, et II absoudra vos fr^res, s'ils
sont innocents, c*est-a-dire, s'ils peu-
vent rendre leur compte. » II accom-
pagna ces demises paroles d'un sou-
rire ironique et d^un air de satisfaction
mal d^guis^. Micbel comprit toute la
malice d'Haled, et ce trait lui d^voila
le myst^re. II retoume vers ms freres ,
qui ,'en entendant la r^ponse du vizir,
sentent clairement, mais trop tard ,
mie le coup part de sa main. Au lieu
des consolations et de I'assistance qu'ils
attendaient, ils se voient abandonn^,
trabis et pr^ipit^ dans un abtme dont
le fond dispsuralt a Ieurs reeards.
Le samedi matin, les aeux freres
attendent Tarriv^e du zerpan^-^mini ,
et lui repr^ntent qu'il n'est pas pos-
sible d'acquitter une somme aussi con-
siderable k I'instant m^me, et qu'on
devrait leur aocorder un deiai. L'in-
tendant, sans fixer le terme, r^pond
qu'ils auront quelques jours pour se
pourvoir contre Tarr^t du sultan. Son
astuce |)erfide ^vitait de ne pas de-
terminer le jour des comptes, afin
de pouvoir les prevonir, dans le cas
60
L'DNIVERS.
ou lis seraient en 6tat de s'acquitter.
La r^ponse Evasive du zerpan^
^ini est interpr^t^ favorablement
par les freres , qui esp^rent , en s*adres-
sant a la generosity et k ramiti^ des
autres Armeniens , pouvoir se tirer bo
norablement de ce pas difficile. lis font
un appel aux banquiers de Constanti-
nople, d^p^hent des courriers a An-
gora (*) , et prient tons ceux qui pour-
ront venir sur le champ, de se trouver
au rendez-vous , pourd^liberer sur leur
{M>sition et les aider dans cette neces-
sity. La moiti^ de leurs amis pr^ents
a Constantinople vient le lendemain a
Tassemblee; Teffroi, la preoccupation
3ui les agitent, rendent impossible une
6cision; et cependant les Duzzoglou
auraient r^ssi h r^unir le capital n^-
cessaire, sans I'indigne Idcbete du plus
riche de leurs parents, Aznavour Duz-
zodou , honime qui leur devait tout son
credit et toute sa fortune* Au lieu de se
sacriGer pour ceux qui dtaient le prin-
cipe et la cause de sa prosperity, il
craint de se compromettre aux veux du
pouvoir, et, sans mot dire, il s esquive
de rassembiec pour courir chez le zcn
pane-emmi, a qui il compte Taffaire
dans tous ses details. « Void, dit-il,
qu*on reclame de moi telle somme pour
payer le sultan; suis-je oblige de la
fournir? » LMntendant, qui voit dans
son reftis un moyen plas sdr de perdre
ses ennemis, iui r6pond que non-seu-
lement il n*est point oblige a se m^ler
des affaires de ses parents , mais qu*il
Iui defend nieme, sous peine de la vie,
d'y intervenir en rien. La frayeur d' Az-
navour redouble, et il ne songe plus
(*) Angora est rancienne ville d'Ancyre.
Le grand noinbre d* Armeniens qui Phabi-
leiu , parmi lesquels se trouveot les capila-
lisies les plus riches et les plus influents de la
nation , la rangent en quelque sorte dans
la categorie des villes armeniennes. C'est en
l*ouvlsageant sous oe point de vue , que nous
nuuA sommes permis de reproduire dans nos
figure^i Iti cdebre momiment d*Auguste,
qtif. k's del uicrt^s observations des voyageurs
IiorlenI a fairccqnsidei-ercomnieun temple,
rle^e petit-iftiw sous les siuspices de cet em-
pweur. Voy. 1*« fig«in!8 , 33 , 34 , 35 , 36.
qu'^ se renfermer chez Iui pour saucer
ses tresorsC*).
L'assembiee se separe, apr^ avmr
arrM qu*on demandera un deiad de
huit jours. On s'adresse impnidem-
ment au zerjpane-emini , pour le char-
ger de solliciter cette gdkx pres da sol-
tan; et Ton aurait dA penser que sa
liaison avec Haled , I'unicjue cause de
tous ces maux, ne poavait permettre
d*esperer qu'il plaiderait mvorable-
ment leur cause. Bien au contraire, il
devait de tout son pouvoir hdter le
moment de leur mine , ce qu*il fit effee-
tivement.
L'ingratitude d^Haled envers les
Duzzoglou etait d'autant plus noire et
{)lus inexplicable, qu*il avait reap de
eur part des services de toat genrr.
Lui qui les accusait de dilapidation,
avait contribue par ses emprants r«i-
teres et nullement inscrits sur le cahier
Jes charges , parce qu*ils etaient oon-
sideres comme les avances d*un ami a
son ami, k rendre leur position phis
critique et plus gdnante. En effet, il
etait leur debiteur de fortes sommes,
et il esperait par ses basses intrigues
eteindre sa dette dans le sang de ses
creanciers. Lors^ue Michel se pr^nta
derechef chez lui pour Tengager k ren-
dre ce qu*il devait k ses fibres. Baled
lui repondit avec une impassibilite ap-
parente, qu'il etait tout prSt ^s'acquit-
ter, et qu*il ferait promptement re-
mettre la somme k Thotel des Monnaies.
Michel se contenta de cette reponse,
et retourna la notifier k ses frdres.
Pendant ce temps, Haled, stimule
par la crainte de rembourser les som-
mes empruntees, s*il n'acceiere la con-
damnation des Duzzoglou, court in-
continent pres de Mahmoud. II le trouve
(*) An moment ou il y avait du oourage a
temoigner quelque iuteret a la famiUe Duz-
zoglou , certains honimes parmi les Francs
lui donnaicnt des sigiies non equivoques de
leur attachement. TVous nous plaisous a citer
id le nom de M. Jouaonio, attache a ram-
bassade fran^ise, et aujourd*hui premier
secrelairc-interprele du roi. II ful pour les
Duzzoglou di^gracies, un ami aussi MUt
que durant leur prospcrilc.
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arm£nie.
G1
dans la salle de son conseU , et , comme
s*il avait des revelations importantes a
lui communiauer, il le prie de cong^-
dier Tassembfi^e. Lorsqulis sont seuls,
Haled ^leve la voix, et, feignant tou-
jours que le z^Ie qu'il diploic contre les
Duzzoglou est un effet de son attache-
ment a la personne de Sa Majeste, et
non un mouvement de son interSt pro*
pre, puisqu'il a ete contraint de briser
tous les liens d'amitie qui les unis-
saient , il dit qu'il est temps de prendre
une decision , parce que tous les Arni^
niens s*entendent entre eux, et que les
coupables pourront echapper a sa jus-
tice, en lui pr^entaut I'argent de leurs
parents et de leurs amis; qu*ils doivent
porter la peine de leur luxe effren^, eux
qui b&tissent des chiiteaux plus ma^ni-
fiques que son serail; que temponser
annoncerait de la faiblesse et indispo-
serait la masse des iideles musulmans,
lesquels attendent une mesure digne
de son courage et de sa justice.
Mahmoud, excite par les paroles de
son ministre, entre en fureur, et lui
repond qu'il est r^olu de s^vir contre
les coupables, mais qu'il ignore les
movens propres a les atteindre tous.
Haled avait un plan de proscription
arr^te, et il I'expose au sultan. II con-
sistait k faire main basse sur toute It
famille des Duzzoglou, en y compre-
nant les parents et les amis compromis
dans cette demiere affaire; ils devaient
£tre saisis au milieu de la nuit mdme,
et conduits^ les bonunes a Tbotel de la
Monnaie, pour 6tre r^unis aux trois
frdres prisonniers, et les fenimes au
palais du patriarcbe armenien. Mah-
moud approuve le conseil d'Haled, et
lui laisse plein pouvoir pour Tex^cu-
tion.
Vers les onze heures du soir, le bos-
tandji-bacbi , ou dief de la police,
marche avec une nombreuse brigade a
la r^idence de la famille Duzzoglou ,
et p^netre dans la maison. On con^it
aisement quelle frayeur agita toutes
ces feaimes et ces enfants eveilles en
sursaut au milieu de la nuit, et se
voyant environn6s de gens arm^, sur
le visage desquels on dtscernait des in-
tentions hostiles, qui leur r^vddrent
trop clairement que leurs tristes pres-
sentiments allaient se rfoliser. Le bos-
tandji-bacbi les rassure, et. afln que
personne ne lui ^appe, il leur dit
qu'ils n'ont rien h craindre, qu'il yeut
seulement leur oommuniquer un ordre
du sultan, et qu'il les prie de se r^unir
tous, sans en exoepter un seul, dans
Fappartement principal de la maison ,
aiin ou'ils en entendent la lecture. On
lui oo^it, et, lorsque tous sont ras-
sembl^ dans la srande salle , il fait lire
le mandat d'arret. A cette lecture, les
femmes qui se voient arracb^s h leurs
maris poussent des sanglots, auxquels
les petits en&nts m6lent leurs ens et
leurs larmes. II faut cider k la force,
malgr6 le sentiment de son innocence,
et suivre ces soldats, qui les condui-
sent a la iner et les entassent dans une
grande barque ou caique, destine au
transport des briques et des pierres de
construction. Pendant le m^me temps ,
d'autres agents fouillaient les domiciles
des autres victimes de PinfiSme cupi-
dity d'Haled. Le nombre des families
amStees s'^leva k dix-buit.
Toutes les femmes ftirent transfe-
rees cbez le patriarcbe armenien:
qu'on se figure oes dames, ^levees dans
le luxe et la moUesse , r^uites , avec
leurs filles ou leurs jeunes enfants, a
eoudier sur quelques mis^rables lits de
paille, pdle-m^le avec les autres femmes
attacbees k leur service, n'ayant pour
nourriture que du pain noir , privies
de lumiere et d'air , suffoqu^es par une
odeur infecte, et Ton n^aura encore
qu'une bien faible id^ des douleurs et
aes amertumes dont elles ^taient abreu-
vto. Gar, k cela, se joignaient les
pNunes morales causees par la separa-
tion de leurs maris, et Tineertitude
ou on les laissait toucbant leur propre
avenir. Les satellites qui les gardaient
a vue avaient la barbaric d'emplcber
les communications avec le dehors, et
de ne laisser introduire aucune des
choses capaJ}les d'adoucir les ri^eurs
de la detention. La patience cbretienne
avec laquelle elles supportaient ces
jnaux etait Tunique consolation qui
pdt les temperer. Les souffrances du
corps impriment d'ordinaire aux Snies
62
L*UNIVERS.
gfo^uses une teergie nouYelle qai
r^agit heoreuaenient sur rorganisme ;
c'est ce qui arriva pour plmiean de
ces jeunes femmes li d^iicatea, toa-
joun languissantes et inaladives sur
leurs ricMs sofas et tapis de Perse ,
et recourant journellement anx ordon-
nances de la onMecine. Alors qu'elles
n'avaient que les aliments les plus
grossiers et la oouche la plus dure,
elles recouTi^reot la saot^ et la force
suflBsaiite pour supporter nobiement
leur infortune.
Les hommes, de leur cM , avaient
^t^eDfermte, ainsi que nous Tavons
dit, dans Fbdtel de la Monnaie. lis
^taient encore traits avec plus de ri-
gueur. Les trois finhvs, et quelques-
uns de leurs plus procbes parents , fu-
rent wtpax^ et s6questrte dans une
chambre basse et obscure qui avait
toute I'apparenoe d'un cacnot. Les
autres Armtoiens, au nombre de
soixante et dix personnes environ,
^taient rtenis dans un mtoe apparte-
ment Quel triste spectacle pour eux,
Sue la Tue des misires qui m frappent
'une mani^ si soodaine ! De ropu-
lenoe , des douceurs de la vie int^rieure
de famille , ils passent k Textrtoe d^
ndment et aux dures priTatlons des
prisonniers d'£tat en Turquie. A pnne
resolvent -ils les aliments ntossaires
pour apaiser les premiers besoins de la
faim ; et plusieurs d*entre eox , habi-
tue k se dteltdrer dans de riches
coupes d*or on dans les cristaux les
plus brillants d'Europe, presaent avi-
dement de leurs Imea une erucbe
d'arsile, qui ne oontient qu'une eau
troimle et jaunAtre. Ce qui enfonee le
dernier trait dans leurs Ames, cfest
la prince du banquier Axnavoor,
qui n*avait pu adieur son salut au
prix de la trabison et de la basaesse.
Haled, qui eonvoitait ses trters,
Tavait port^ sur ses tables de proscrip-
tions, et le malheureux partageait h
captivity de ceux qu*il aurait peuUtoe
delivT^ , en oflfrant avec d^ouement
une jpartie de ses capltaux poor rem-
plir la somme tMuukt par le sultan.
Apres quelques jours, on fiiit sortir
du Zerpeneb les fir^res Duxaogio« , et
on les tratne au s^rail , ou ils soot je-
t^ dans une autre prison secr^ et
plus intoltoble. Le cruel Haled se
platt k torturer ses Tictimes par les
privations de tout genre qu*il leur im-
pose , et par les craintes coDtinuetta
S|u'il leur mspire, soit en r^pandant de
ausses nouvelles, oomme le bruit de
la mort de leurs femmes et de lom
enfants , soit en leur faisant envisager
leur propre perte oomme prochaine et
assuree. Ce qui oontribua k les jeter
dans les plus vives inquietudes, fot
le supplioe de Finfortune Abd-Anba-
man, qu'Haled avait r^ussi ^ enyo^
k la potenoe vpour oonfisquer ses biens.
Sa ftte, port6e au bout d'une pique.
Alt exposee k la porte du strait , et on
acoorda aux firms arm^niens le triste
privil^e de oontempler les restes sae-
glants d'un ami , innocent oonune eox,
et dont la bouche bdante semblait kor
Jeter de loin une propb^tie sinisCre.
Deux serviteurs, qui avaicnt la per-
mission de p^n^tKr dans le cacbot.
rapportaient chaque jour k leurs msl*
tres les rumeurs publiques qo*ite n-
cneillaient sur leur passage; et too^
ees bruits vagues et discordants res-
sembiaient au roulement confiis e(
lointain des flots et du vent, sigv
prtoirseur de la temp^te. Elle ne tsnb
pas k Plater : Mahmoud , pooss^ psr
Haled qui le harcelait sans cesse , dans
la crainte qu'il ne vlnt k recoDnaflre
la trame seer^te de ses foniiieries,
institua une commission de trois mem-
bres , charge de faire rinveotairs de
toos les meubles et immeublestantdes
Duzzoglou que des autres AnnMeos
arrft^ avec eux. Ces trois membres
teient Haled lui - mime , le serpan^
6mini, et le directeur des dooanes.
Par leur ordre , on fouille tootes la
maisons sur lesquelles on avait appose
les scell^s, et on transporte an Zer-
paneb meubles, bijoux, tr^sors, et
autres efifets pnKieux au'on vdteMivre.
Ce mii ne pouvait etre d^plao^ iiit
laissesnr les lieux et vends plus tard
k I'encan. On ne saurait ^valuer la ri-
cbesse de toos les objets de luxe trou-
v^ dans les palais de ces riches ban*
quiers, et que plusieurs g6n6ratioDS
ARM£NI£.
es
ivaient iuocessivement aocrus > en y
accumulant les produits ks plus pre-
cieux de Tindustrie eoroptaKiieetasia-
tique. Dans la crainte que quelque d^-
pot seeret n'^chappAt k leurt perquisi-
tions , les inspecteurs tures usdrent de
toutes les ruses de leur maligne et in-
satiable cupidity. lis allaient trouver
toutes oes nobles dames d^tenues dans
le palais du patriarche, et ils leur di-
saient que la vente de leurs propri^t^
ne sufnrait point pour payer la dette
du tr^r public; que sans doute elles
avaient d&nMh leurs recfaerches d'aa-
tret valours en argent ou en bijoux ;
que« dans leur intmt, ils lespnaient
alndiquer exacteioent les lieux de oes
d6pdts , afin de sauver leur vie et cdle
fie leurs maris. Ges questions insi-
dleuses arraeb^rent beaucoup d'aveox
par lesquels Fezistence de tr&ors ines-
timables fut r^vel^ ; car le despotisme
des souverains habitue les sujets , en
Orient, k enfouir dans les profon-
deurs de la tcrre les richesses qu'ils
veulent soustraire k son avidite. Au-
tirte des hoBimes , on mit en oeuvre
es mdmes supercheries, et avee un
sucote 6gal.
Haled , qui cberchait soi^eusement
tous les moyens de noireir aux yeux
du sultan les pr^veuus, et de multi-
plier les chefs die leur accusation , trou-
vait joumellement dans I'inventairede
nouveaux sujets de grie&. Un jour,
on d^oouvrait dans Tint^ieur de quel-
que maison Texistence d*une chapelle;
crime ^lorme, puisque la loi defend
de s'assembler dans les ^lises qui ne
sent pas autoristo et recoonues. Ainsi,
Ton paria beaucoup d'un Mifiee trou?^
dans le jardin d'un n^godant, et qui,
sous I'apparence trompeuse d*un ma-
gasin, cachait une ridie chapelle. Le
lendemain, c'^tait des granores ou
des tableaux aecus^ d'obsodnit^ et
d'attentat a la aM>rale publique, at-
tendu que I'Alcoran drand la nq^-
sentation de toote figure humame.
Enfin les jMpiera de oertainfi pr^enus
renfermaient une oonrespondanoe se-
crete avec les puissances toanfs&res
et ennemies. Toutes ces accusations,
fausses ou pu^iles, sem^ra parmi le
peuple, rindisposaient centre les ac-
cuses; et, en s'^eyant jusqu'li Mah-
moud , prenaient un caractto nouvcau
de gravity. Haled profltait de la pr^-
cupation gdn^rale pour se livrer, avec
I'impudeur la plus r^TOitante, k ses
rapacity. Dans la liste de Tinventaire
il n'inscrivait que ce qui lui conve-
nait , sp^oiant sur la yaleur de chaque
objet que lui-mtoe fixait, et d^tour-
nant k son prodt des valeurs conside-
rables. Comme les ^missaires d'Haled
demandaient avac une insuitante iro-
nic k Tun des fr^res Duzzoglou s'il
n'avait point en r^svre quel<^ue trter
pour aequitter sa dette, eelui -d leur
repondit courageusement, que le pr6-
tendu deficit dont on Taocusait pr^ du
sultan, serait di^ combl^, si Haled,
leur mattre, restituait les sommes
qu'il lui avait pr^tte sur la garantie
de sa parole. Haled copQut un td d^
Eit de cet aveu, qu'il jura d'acod^rer
I mine de ces giaours; et, transfor-
mant ce repiocfae en un dief nouvcau
d'accnsation, il dla dire k Mahmoud
qu'on osait , sans respect pour son ca-
raetire, suspecter son int^rit^ et le
d^int^ressement de son administra-
tion. Ensuite il d^fia solennellement
qui que ce fdt de £ournir une seule
preuve positive contra lui. Un si haut
rrsonnage a toujours raison , surtout
Constantinople; et, comme bien
Ton pense, personne n'deva la voix.
A en croire Haled , entre les mains
de qui s'arr^taient des sommes formes
soustraites au premier inventaire, les
biens menbles et immeubles de tous
les aocus^ ne pouvaient restituer au
sultan le capital qu'il avait depose
Chez eux. Les giaours trouvaient mille
moyens de detourner une partie de
leurs fonds, et il fallait n^cessaire-
ment les intimider pour les oontramdc^
k rendre gorge. En cons^enoe , on
dto^te un firman i»ar lequd on donne
le ddai de trois jours seuleroent k
quicooque poss^ ou recde des effets
ou valeurs appartenant aux £imilles
des pr^enns, pour venir en fidre la
dedaration et les d^poser chez le pa-
triaiehe armtoien. Le ddinquant de-
vait 6tre poni de mort. Aussitdt que
64
L'UNIVERS.
cet ordre fut promulgue , T^avante
saisit tous les Arm^nieos de F^a. Les
parents et les amis apportaient scru-
puleusement cbez le patriarcbe tout
ce qui pouvait appartenir aux pros-
crits. Un tailleur avait-il un cafetan
ou des robes commandos par Tune
de ces families , Thorloger reparait-il
une montre , tous , croyant leurs jours
en danger, s'empressaient de porter
ces objets a Tendroit d^ign^. L'af-
fluence fut telle au palais patriarcal ,
que, durant trois jours, trois ^cri-
vains , uniquement employ^ k inscrire
Tetat et la nature des restitutions , ne
purent y sufGre , et le patriarcbe de-
manda un sursis au sultan , qui Tac-
corda.
Pour tirer le plus d'arjcent possible
de cet immense d^t d'efifets mobi-
tiers de toute esnhce , on d^cida quils
seraient vendus a Tencan. Un encan h
la turque est un singulier spectacle ; il
offre le tableau r^sum^ de toutes les
injustices et vexations possibles dans
un pays oii la loi est le caprice du sou-
verain , et oh ceux charges de I'appli-
quer ne connaissent d'autre r^le de
oonduite oue I'int^r^. Haled avait re-
commande aux banquiers et aux riches
n^ociants d'entre les Chretiens d'as-
sister a la vente , et surtout de ne pas
baiter d'acheter les objets mis k
Fencbere. Aucun d'eux ne manqua k
I'invitation , car ii y allait de leur t^te.
Qu*on ne croie pas les assistants libres,
comme en Europe , de surench^r et
de n*accepter que ce qui leur oonvient.
Non, ils doivent se tenir muets et
impassibles ttooins et acteurs de
ce drame inique. Un geste d*improba-
tion , un clignement de Toeil pent les
perdre. Malbeur k oelui qui n^aocepte
pas de bonne grdce oe que lui adjuge
I'huissier-priseur, apres sa cri^e, ou
il fixe lui seul le prix , sp^lant sur
la valeur de chaque objet et sur les ter-
reurs de celui a qui il le livre; en ce
sens que , s*il ne re^oit pas secrete-
ment guelque don .pour adoucir sa
mauvaise humeur et le d^ommager
de sa peine , il pent miner le capita-
iiste le plus riche , en lui d^cemant le
privilege de ses adjudications. I/^uis-
sier-priseur, dans cette circoastan^,
6tait un homme vendu k Haled , et qui
lui avait jur^ d*extraire des du^cns
jusqu'au dernier para (*), pour assou-
vir sa soif du lucre. II d^ploya une ha-
bilet6 ^tonnante pour elever a un taux
excessif les choses d*une minoe valeur.
sauf les actes de complaisance qu'il
faisait, en passant, aux grands sei-
gneurs turcs, etque les raias payaieat
en revanche. 11 prolonged Tencan au
de\k de deux mois. Le produit de la
vente fut si oonsid^able, qu'il egalait
presque k lui seul la somme exigee da
saltan. On put solder aux sujets des
diverses puissances europ^nnes les
cr^ances qu'ils r6clamaient ; et m^
Ton se montra si facile a leur ^ard ,
3ue plusieurs en abus^rent , en denoan-
ant au del^ de ce qui leur 6tait redk^
ment dd. Quant aux raias , on ne fit
aucunementdroit k leurs rMamations ;
et , bien loin de reconnattre leurs crean-
ces, tout Targent qu'ils avaient verse
dans ces dimrentes maisons fut ra-
glouti et absorb^ dans la confiscation
g^n^raie. Aussi voit-on encore aujour-
'hui, a Constantinople, une multi'
tude de families r6duites au dernier
d^dment par suite de cette lanien>
table catastrophe.
Pendant tout ce temps , les detenus
g^missaient au fond de leur cadiot;
et les fir^res Duzzoglou , toajours iso-
1^ dans les oubliettes du s^ail , s'aban-
donnaient aux sombres pressentiments
du d^espoir. Excite par la veille et
le jedne , la penste du prisonnier ac-
quiert une force inconnue ; les chafnes
et Tetroite enceinte du cadiot , au lieu
de oomprimer sa liberty, factivent et
auadruplent son ^nei^ie. Elle se rit
es gediiers, et emporte Tdme au loin
dans rimmensit^ de I'espace , ou Teai-
p^rance construit mille Offices ima-
ffinaires que la crainte renverse sou-
dain. La tonsueurde la captivity m^me
relevait parfois leur courage , en eloi-
gnant les terreurs de T^chaiaud. Car,
se disaient-ils, si nous devions ^tre
(*) Peiite monnaie ttirqoed*une m^diorre
valcnr ct usitee ici dans Ic sens prowrbial
d oholf*.
armi!:nie.
65
condamn^ a perdre la t^te , notre sen-
tence serai't dej^ prononc^ ; tout d^lai
est un adoucissement h la s^v^rit^ mu-
sulmane. Ah ! oui , s'toiait Serkis, ce-
lui des quatre fibres dont rimainnation
^tait la plus vive, et qui soumrait le
moins patiemment les angoisses de la
prison , nous serons exiles sur quelque
terre sauvage et lointaine ; mais , du
moins , nous pourrons encore resnirer
librement et contempler la douce clart^
du jour. Peut-^re nous laissera-t-on
emmener nos femmes et nos en&nts !
Alors, serait-ce un sacrifice que d'a-
bandonner a la convoitise des Turcs
ces richesses , source de nos infortunes.
Non, nous retremperons au moins
dans la dis^ce nos flmes amollies par
la prosp^nt^. — Taisez-vous , Serkis ,
reprenait un jeune bomme, leur cou-
sin, gisant sur la paille dans Tangle
du cachot, et perp^tuellement enfono^
dans une morne* m^itation ; ne vous
livrez pas k tos folles imaginations,
vons n (6cbapperez pas ^ la vengeance
d*Haled , qui ne vous a iaisse de vie ,
jusqu'k cette heure , que pour multi-
piier vcs soufCrances, en les proion-
geant. Rappelez-vous les deux princes
Vahabites que I'ann^ derniere vous
vttes , a pareille ^poque , trainer sur
un cheval maiere a la porte du s^rail ,
pour y dtre decapites. Le m^me sort
nous attend !
La plupart des prisonniers repro-
chaieoi k ce jeune nomme ses predic-
tions sioistres , qu'ils attribuaient h un
^t de langueur et de m^lancolie. Un
soir, ayant prolong^ plus que de cou-
tume leur entretien , iis ne Vinterrom-
pirent que lorsque le sommeil vint fer*
mer leurs paupi^res et leurs levres
fatigue, m reposaient tranquille-
ment, et leur Ame ^tait sans doute
rafratchie par les illusions du r^ve
plus attrayantes que les imposantes
r^alit^s de la prison , lorsqu'ils furent
r^veill^ en sursaut par le bruit des ver-
rous et les voix des ge61iers. C^tait le
24 aodt. Les premieres lueurs du cr^
puscule dissipaient avec peine les t^-
nebres d*une nuit sombre et humide ;
et les yeux des prisonniers, efifray^
de cette visite inaccouturo^e , recbn-
5* Uvraisan, (Abmrnie.)
nurent diiUcilement le bostandji-bachi.
Us attendaient silencieusement leur
sentence. Quelle est leur surprise,
lorsque le oostandji-bachi leur dit:
«R^jouissez-vous, mes amis, voici le
terme de vos soui&ances ; je vous ap»
porte les ordres du sultan. Gr^goire
et Serkis , vous serez releguds dans une
tie de I'Archipel ; et vos deux firdres ,
Michel et Jean , iront dans TAsie Mi-
neure. Quant au reste des prison-
niers, lecsoltan n*a pas encore statue
sur leur sort; ils attendront. Ainsi,
que les quatre freres Duzzoglou me
suivent. »
A ces mots , les quatre freres , pleins
de joie , se jettent au cou de leurs^eom-
pagnons , les couvrent de baisers et de
tarmes , en disant que la douleur de
les quitter ne sera compens^ que par la
nouvelle de la grto qu'ils obtiendront
certainement, puisqu'eux, les seuls
coupabies, ne sont condamn^ qu'au
bannissement. lis sortent done et s'a-
cfaeminent a travers les all^ du jar-
din. Quand ils ont march6 quelques
centaines de pas, le bostandji-bacbi
les arr6te, en leur disant qu*ils doivent
se s^parer , puisque Gr^oire et Serkis
n*ont pas la m^me destination que leurs
deux aubres freres. En m^me temps ,
il dit k quelques-uns des gardes de con-
duire au Bospbore Michel et Jean. La
scene touchante des adieux de la pri-
son se renouvelle , et les quatre freres
s*embrassent sans pouvoir se dire une
parole , k cause de leur Amotion. Les
fardes les s^parent; Gr^oire et Ser-
is prennent la direction de la porte
du serail. Serkis marcbait avec precipi-
tation en avant , sautant et poussant
des cris de joie , sans prendre garde k
la pluie qui , tombant avec abondance,
p^^trait ses v^tements. lis francbis-
sent rapidement le portail; et, lors-
qu'ils sont en face de I'hdtel des Mon-
naies, ou les autres detenus etaient
renferm^s , Serkis ^l^ve sa voix robuste,
et fait retentir ces paroles : « Courage ,
nos freres, nous sommes libres, et
riieure de votre d^ivrance est pro-
chaine. » Les prisonniers, qui ont re-
connu la voix de Serkis , se pr^ipitent
aux fen^tres pour le voir, mais les
rUNlVERS.
gardet kt repoostent et Jes oontien-
nent dans laur (nrisoo. Us prftent al-
teotivement Toreille poor recueillir les
autres paroles des Duzzosioo; mais
tout k coup les cria d'aUegresae ae
cbangent en fl'autrea cria per^anta,
entreooapte, diminuant gradueHemeDt,
jiuqa'li oe aue le pins morne ailenoe
auoMde k ragitation du dehors. Les
d^tenoa du Zerpaneh fr6inirent et
eurentoommeun vague pressentiment
dea ebosea horribles qui TenaieDt de
8*aocomplir.
Serkis mardiait done joyeusement
vers la porte du Zerpaneb, et d^Jli il
eft soulevait le marteau , lorsau'il aper-
9]t dans le massif Toisin de cmtks
quatre bourreaux cachtte et en emoua-
cade. Gette Yue lui r^vtie incontinent
les atroces machinations d*Haied et les
mensonges du bostandji-bachi, qui lea
menait a la mort en leur promettant le
salut; il comprend que sa demidre
heure approche. Les bourreaux s'^lan-
cent sur les deux Mrea et les garrbt-
tent. Gr^oire les oonsid^e avec fiert^ ,
et , comme oes martyrs de la primiti?e
£j^Iise qui faisaient g^n^reusement a
Dieu le sacrifice de leur vie, il se laisse
Her et trainer au supplice sans perdre
son calme. L*tet de Serkis toit tout
autre. D*une nature boulllante, em-
port^, il ne peut supporter la Yue de
tant d'injustice, et il se sent le besoin ,
avant de mourir, de dMiarger tout le
|)oids de sa colore et de ses malMic-
tions sur les auteurs de sa mine. Son
exaltation et sa fiireur ooncentr^e ajou-
tent k sa force musculaire; les liour-
reaux ne peuTent le contenir, et ils
appellent les gardes k leur aide. Pen-
dant le trajet du Zerpaneh au lieu de
rex6cution, Serkis, d'une voix ton-
nante et formidable, appelie la yen*
geanoe du del sur la tete d*Haled,
o^umdre les iniquity de son vizirat,
fiiit ses adieux II sa famille, plaint le
sort de ses compatriotes envelopp^
dans la proscription , et, maudissant la
coupable condescendance de Mahmoud
ciroonvenu par son ministre, il ter-
mine en s'teriant : « Que sa barbe soit
teldte de notre sang ! » Gr^oire se tai-
sait, et il n*ouvrit1a boucne que pour
lappeler II aon frire que M otre-Seiaieur
JMus-Christ avait autrefois panunn^
k ses bourreaux en expirant, qa'il de-
▼ait aonger au salut de son ime ^ k
reoommander k Dieu. Les deux genoux
k terra et les yeux le?te au dd, fl piie
avecunesainte fenreur, tenant serrte
entre ses mains la relique qu"!!! avait
ooutume de porter. II pronon^ quel-
qnes paroles en ami6nien, inlnteUi-
giblea aux bourreaux et aux autres
assistanta. CT^tait vraisemblabiement
quelque pril^ de son fglise. So'kis,
tout en donnant des marques de pi^
et de fi>i , refuse de pioyer le eeiiou.
Tandis que les deux nreies se disaient
du regard un dernier adieu « la babhe
dea bourreaux abattit leur tdte.
Lorsque le bostandji-bachi voit a
nieds leurs cadavres sanglants , il
a aocompiir Fautre partie de m
sion , et il va retrouver les deox firires,
Miehel et Jean, qu*il avait envuyes ao
Bosphore. Ils Fattendaient dans one
lar^ caique, ignorant le triste sort de
leurs frms , et ne pr6Toyant paa cdoi
qu*on leur rtenrait; ils diaoouiaicat
sur leur exil et se consolaient de la s^
TMt6 de cet ordre, oar I'espoir de re-
▼enir un jour dans leur niere patrie.
lis TOient le bostandyi-bacht aooourir
avec empressement, et, k un signal de
sa main , des hommes caehte a la poope
se Invent et viennent sur le pont. C^
tait aussi des bourreaux. lis saisis-
sent les deux fr^res, tandia que les
rameurs oonduisent phis loin la caique,
en face de VMtA Duzzoglou , aitud sor
la rive du Bosphore. lis abovdeiit, et
lee bourreaux de chereher un liea oa
ils pourront pendre les deux Irdrea, et
de le trouTer aussitdt, grte h Thabi-
let^ qu'ils out d'improviser des polen-
oes. On voulut, par un rafBnement
inoui de cruaut^, r6TeiUer dans Time
des victimes toutes les dmotioos que
le souvenir et le spectade de oes lienx
pouvaient leur apporter, oOBiniie un
auppl^ent aux douleurs du sapplioe.
1^ mort des quatre Mres ajpaisa b
colore du sultan, au fprand cleplaisii
d*Haled, qui le poussait au massnore
g^eral de tous les detenus. On pto-
nonca oontre eux un arr^ de '
ARMtfNIE.
fi7
senneiit perp^tuel, toutefois en eieep-
tant U» femmes, qui eurent la faculty
de rester a Constantinople. Les oon-
trte les plus sauTSges de la Turquie
d'£arope et d'Asie fiurent assignto
pour la r^idence des proscrits. Plu-
sieurs y p^rirent d'ennui et de mis^re.
D'autres eurent le courage et le talent
d'y trainer leur ch^tive existence, jus-
3u'au moment oi!l le sultan , oonvaincu
es fonrberies d*Haled, rappela les
exil^. De ce nombre ^tait Jacques
Duzzoglou, qui avait ecbapp^ k la cod-
damnanon de ses fr^res comme mira-
culeusement Au moment ou Forage
eclata sur sa famille, Jacques, qui
avait la mission d'inspecter les mines
et les places fortifi^ de TArcbipel,
^tait ^ign^ de Constantino[>le. Haled
envoie un b&timent de FEtat a sa pour-
suite, avec ordre de le ramener pri-
sonnier. Lorsqoe ce vaisseau le ren-
contre, Jacques, qui montait un brick
fin voilier, aurait pu se sauver, s'il
avait suivi les conseils du capitalne
espagnol , plein de t^ et de r^tution .
Mais comme on lui faisait entendre
^erfidement que le refus de se sou-
«nettre entralnerait la perte de ses fre-
res , et ^ue d'ailleurs if ^tait fort de ia
conviction de sa propre innocence, il
prefera aller partager courageusement
les fers et les maux des autres Arm6-
niens. Haled, qui avait intdr^ h le
perdre, osa dire au sultan qu'il n'avait
c^ qu'li la force, et apr^ avoir £ait
oouler le sang de T^uipage. Jacques
allait ^tre condamn^ sans le courage
du capitaine du vaisseau y qui , consulte
par le sultan sur ce point, r^(K>ndit
qu'au oontraire le prevenu avait te*
moign^ le plus proiond respect pour
Tautoht^ de Sa Majesty, en portant a
sa boucbe I'arr^t de sa condamnation
et en s'indinant devant sa volont6 su*
prtoe. Jacques ne fut pas ex^cut^;
Haled le m exiler; et, lorsque des
lettres de grflce furent envoyra a ces
malheureux diss^min^ dans toutes les
provinces de Tempire, il revint h Cons-
tantinople, ou le sultao lui rendit plus
tard I'andenne diarge h^rMitaire de
HB femille, la direction de la Moanaie,
oflice qu'il remplit encore actuellement
avec une rare int§grit6. Cest lui qui a
reeueilli les d^ris de sa famillft^ et Ta
tir^ de Tabjection oili Tavait roduite
cette catastrophe, en les assodant a sa
nouvelle fortune. De ses guatre frhres ,
un seul, Serkis, avait laiS8(6 un fils en
bas Age. Ses autres [Mirents en prirent
soin; ils ont voulu lui donner les avan-
tages de T^ducation europdenne, et,
en ce moment , il puise dans nos ^les
de Paris toutes les lumieres de la
science et de la civilisation modernes.
La famille Duzzoglou , sans s'dever an
m^me. de^6 d*opulence et de cr6dit,
oocnpe aujourd'hui un rang important
dans la soci^ amenienne. Elle a re-
couvr^ son ancien hdtel , qu'un juif
nomm6Eskel et banquierd*Haled avait
achet^ ^vil prix, lors de la confiscaticHi
S6n^le. Eskel perdit la vie par ordre
u sultan, peu de temps apr^ la fin
tragique du vizir inique dont il diri-
geait les affaires; car, pour le d^od-
ment de ce drame, il taut savoir que
la fortune d'Haled fut inconstante
comme celle de tons les coupables heu-
reux. Ses ennemis, c'est4i-aire, tout le
peuple de Constantinople et les grands
seigneurs, parvinrent a d^truire les
prmntions favorables du Grand Sei-
gneur, et h ouvrir ses yeux sur la s^e
de crimes dont il avait souilK son mi-
nistere. On trouva des preuves mani-
festes de sa oom|>licit^ dans la r^volte
du pacha de Djanina , et les janissaires
^leverent si fortement la voix contre
lui , que Mahmond seniit la ntossite
d*immoler a son int^r^t celui qui , du
reste, avait toujours tout sacrifl6 au
sien propre. II lui dit done qu'il se s^-
parait h contre-coeur de sa personne,
mais que la tranquillity de I'Etat I'exi-
Seait; qu*il ^tait quelquefois n^cessafre
'obtemp^rer aux injustes exigences
d*un public ingrat et passionn^; qu'au
reste il consewerait a jamais la m^
moire de ses services et de son d^one-
ment pour le trdne. Haled ^it trop
fin pour ne pas comprendre que ces
remercfments 6taient au fond une ve-
ritable disgrace. II tremble pour sa
vie, en pensant ^ue ses ennenns, et il
savait ^'ils ^taient nombreux, tra-
vailleraient h sa mine dte qu'il serait
5.
68
L'UNIVERS.
^loigne de la cour. Le sultan se sou-
viendrait-il alors de sa promesse? Pour
avoir au moins une garantie, il prie
Mahmoud de lui donner par 6crit ras-
surance qu'il ne reviendra plus sur les
actes de son administration apres sa
retraite.
Mahmoud consent a cette condition ,
et Haled part avec ses triors pour
aller jouir au fond d'une province de ia
s^urite gull ne pouvait esperer k Cons-
tantinople. A peine a-t-il fait quelques
journ^ de marche, qu'il voit arriver
un agent du eouvernement avec des
lettres. C^taitle kaboudji-bachi. Haled
maudit dans son coeur I'mconstance de
Mahmoud et sa faciJite a se parjurer.
n MaiSf lui dit le kaboudji-hachi , c'est
que Sa Majeste a connu enfin la verite,
elle sait tons vos forfaits; le sans in-
nocent que vous avez vers^ comme Teau
de nos tontaines a crie et obtenu ven-
geance. Tendez le cou a mes janissai-
res. » Haled eut la t£te tranchee, tons
ses biens entrerent dans le tr^r pu
blic, et son cadavre fut expose sur les
fourches patibulaires , comme celui des
criminels.
Ainsi finit ce vizir, dont le nom est
reste, ^ iuste titre, un objet d'horreur
et de malediction parmi les Arro^niens.
Sa disgrace Tempecha de r^liser com-
pletement le plan machiav^lique qu'il
avait concu. if avait abattu du premier
coup les hautes t^tes du parti catholi-
3ue, en ddcimant la famille et les amis
es Duzzbglou ; mais il convoitait en-
core les fortunes de plusieurs autres
maisons opulentes. Quel moyen nou*
yait-il prendre pour parvenir a sesuns?
II songeait k profiter des dissensions
religieuses qui s^parent les catholiques
d'avec les scnismatiques, en faisant en-
tendre au sultan que les deux partis,
formant une m^me nation, devaient
avoir un mdme chef spirituel. II savait
que les catholiques, en refusant de se
soumettre au patriarcbe, lui foumi-
raient Toccasion de d^ployer contre eux
la s^v^rit^ et Tintoleranoe des lois;
puis, la persecution entratnaot la con-
fiscation, il pourrait se livrer impun^
meat k de nouvelles d^pr^ationsv La
mort ne lui permit pas aaooomplir ses
d^testables desseins, et cepeodaot il
r^ussit a semer au sein des Ann^niens
oes germes de divisiODs qui , en se de-
▼eloppant, amenerent la d^sastreuse
reaction de 1828 contre les catholiques.
SIMON HTRA.PIBT.
Le sort des Armeniens de la Perse
est encore plus pr6caire et plus dur que
pour les sujets de la Turquie. Gonrune
lis sont moins nombreiix, et qu*ils ne
disposent pas par leurs immenses ca-
pitaux du credit public, ainsi que oeb
se passe cbez les banquiers de doostan-
tinople et d' Angora, leur influenoe
dans r£tat est i ncomparablement moins
grande , et ils sont par consequent beau-
coup, plus expose aux vexations et aoi
avanies, que leur attire dej^ la qua-
lite de Chretien, de la part des musul*
mans z^l^s. £n second lieu, TactioD
de la civilisation eiiropeenne, qui presse
et cerne de toute part la Torquie, ea
arrachant cbaque jour a sa vieiUe bar-
baric quelque heureuse concession,
n'est point aussi puissante dans le
centre de la Perse, et rintervention
des ambassadeurs Chretiens n*o£fre
point aux raias un rempart oontre les
iniques exigences du despotisme orien-
tal.
Jusqu'a nos jours le peuple de la
Perse n'a guere cesse de traiter les
Armeniens avec le mfyne m^pns que
le schah Abas, qui ne voyait en eoi
^u'un troupeau ahommes enleves par
jalousie a la domination turque, et
tratne dans Tinterieur de son royauaie
pour le peupler et v importer une in-
dustrie qui pouvait lui ^tre utile. Le
coeur se souleve d'horreur, et la pensce
cherche en vain dans la langue oes ex-
pressions assez fortes et assez fl^is-
santes pour vouer a Fexecration de la
postal te ce conquerant, quand le recit
des historiens du temps vient etaler a
vos regards le ricbe tableau de ses cri*
mes et de ses brigandages. Qu*on se
figure en efifet douze milie families ar
rachte a leur patrie, deposs^^ de
leurs biens, chassees, comme on vii
b^tail, par des soldats grossien, et
dieminant attrist^ vers des terres in-
ARMliNIE.
69
connues, sans entreToir aucun terme
aux maux de tout genre qui les aeca-
blent. L*£urope, dans ses jours n^fas-
tes , n*a rfen a opposer k ces grandes
scenes d'iniquit^.
La faim et la fatigue ayant constd^-
rablement r^duit le nombre des exil^,
mille autres fomliles furent enlev^es h
la populeuse Aniienie, et, en 1606,
Abas lancait de nouveau ses bandes
8ur les districts de Ganzak , d'Artavil
et d'£rlvan, avec ordre de lui ramener
dix mille families. Rel^gu^ dans les
cantons de Gaurapat et de Yahrapat,
elles furent entidrement an^anties en
3uelques ann6es, comme ces plantes
elicates qui, transplantees dans un
sol malfaisant, se dess^ent et p^ris-
sent de langueur.
II n'y eut que la colonie de Julfa a
prosiM^rer, et encore le nombre de ses
families ne s'est-il jamais gu^re 6lev6
au-dessus de deux mille cinq cents,
roalgre les flots de population qu'on
versait, pour ainsi dire, dans son sein,
a cette ^poque qu^on pourrait avec jus-
tesse appeler le temps de la traite des
ArmMens. Julfa, comme nous Ta-
vous dit, est en quelque sorte un fau-
bourg d'Ispahan , et cette petite ville
est exclusivement arm6nienne. Les ha-
bitants sont soumis a Pautorit^ d*un
chef choisi dans leur sein et nomm^
Kalantbar, lequel releve du magistrat
persan sup^rieur. Ce mode de consti-
tution s'est conserve juscju'a ce si^cle.
Lorsque la cour r^idait h Ispahan ,
la presence du roi , qui avait toujours
quelque int^r^t h d^fendre cette indus-
trieuse colonie, arr^tait les gouver-
neurs et les emp^hait d^^tre aussi en-
treprenants k pers^cuter les Chretiens.
Mais depuis que les sourerains ont fix6
le siege de leur royaume k T^h^ran , la
distance rendant la surveillance plus
difficile et moins directe, la cupidite
et les autres basses passions des gou-
vemeurs, excit^es et encourages par
Tespoir de I'impunit^, ont suscit^ aux
Arm^niens des pers^tions nouvelles
^appesanti leur joug.
Ivous relaterons ici, en preuve de
oette observation, T^v^nement tragiquc
gut a jet^ dans le deuil, voici seule-
ment quelques anndes, tous les liabi-
tants de Julfa. Simon Hyrflpiet, fits
du pr^cMent kalantbar, avait ^,du-
rant plusieurs ann^, attach^ au ser-
vice d*£mini Daoulah, gouvemeur
d'Ispahan, pres de qui 11 remplissait
les tonctions de secretaire. Son z^le,
son <ictivit^ et sa rare intelligence des
affaires , Favaient fait appr^cier du gou-
vemeur, qui, pour le recompenser, lui
donna le commandement du village de
Pheriah, habits par des Arm6niens et
des Persans.
Simon Hyrapiet accepta cette di-
gnity, nouvelie pour un Arm^nien,
afin d'user de Tautorit^ qu*elle lui con-
f6rerait k Tavantage des chr^ttens de
sa nation. La droiture de sa conduite,
la franchise de tous ses actes, lui atti-
rerent aussi la confiance des Persans;
il 6tait Tarbitre universel de tous les
diffirends , et son eloquence populaire ,
second^e par une connaissance pro-
fonde de la legislation du pays, gagnait
chaque cause qu'il plaidait. De cette
mani^re, il avait ac(]uis un lari^e as-
cendant sur les esprits de son district
et des cantons voisins, tellement que
Tetat general des Arm^iens s*etait
considerablement am^lior^, et un Per-
san ne se serait pas permis, comme
anciennement, la moindreavanie, re-
tenu qu'il 6tait par la crainte que lui
inspirait Simon Hyrapiet.
Cependant le khan de Lombun.
beau-frere du gouvemeur d'Ispahan,
vovait avec un oeil de m^contentement
rel^vation de ce magistrat arm^nien ,
qui, en consolidant par son adminis-
tration habile la position des raias, les
mettait k Tabri de ses concussions, et
opposait a sa rapacity une barriere in-
franchissable. Ce khan s'appelait Hadii
Hacbim; issu de la tribu de Lore, celle
a la t^ de laquelle il 6tait plac6 est
connue sous le nom de Chirouni, La
puissance d'£mini Daoulah avait con-
tribue k accroftre la sienne, et il avait
discipline les hommes de sa tribu de
maniere k en former un petit corps
d'arm^e dont il se servait contre les
propres sujets du royaume, et surtout
contre les Chretiens pour les spoiler.
II portait I'audace jtisqu'li pousser sen
70
L'UMIV£RS
iDcursioos dans le ooeur d'lspahan, en
plein jour, sans que peraonne os^ lui
resister, dans la orainte d'toe diteign^
k sea parliaaiia et de a'aUirer la mort.
II aavait dooc que Simoii H]rrapiet
a'^tait 4^v6 oontre aes ezote , et ii crai*
gnait que le peuple, aoolev^ k sa voix ,
oe lepoussdt |Nir la force aa Yioleoee,
ou ne se soumtt moina oomplaiaam-
ment h aea exigences. Alors, Yers le
eommenoement de novembre de Tan-
n^ 1824, il vientli Julfa, ayant aoua
ses ordres une troupe assez nombreuse,
et il p^n^tre dans le couvent arm^nien.
II entre irr^ligieusement dans I'^lise
a?ec pluateurainusiciensY a qui il fai-
sait ex^ter par d^ision des chants et
des airs de dense. II prend possession
de ce lieu , comroe de tout autre en-
droit profane, et il annonce qu'il veut
parler k Simon Hyrapiet. Ce resoec-
table magistrat, averti que le klian
Ha^ji Hadiim le mande, vient sur-le-
cbamp le trouver, sans s'inqui^ter des
pt^rils qu*il court, avec le y^n^rable
pr^lat Carapiet et le moioe Gr^oire.
En entrant dans le temple, Simon voit
avec indignation ces musiciens ivres
profaner le sanctuaire, et Hadii Ha*
chim effront^ment assis sur rautel
oomme sur un simple si^e. II veut
sortir, mais le khan le rappelle. Simon
s*approcbe de lui , et lui repr^sente res-
pectueusement qu*il est dans la maison
de Dieu; qu'un chr^tien n*oserait ja-
mais se permettre d'entrer avec un
semblable cort^e dans une mosquee,
lors m^me qu'ifpoUrrait le faire im-
pun^ment, et qu'il le prie de renvojrer
ses gens dont fa conduite est aussi in-
d^c^te.
Le khan, furieux d*entendre ces re-
montrances, ordonne, pour toute r^-
ponse, a ses soldats de se saisir de
Simon , de lui lier les mains et de Fem-
mener. Le pr^lat Carapiet et le moine
Gr^oire tombent aux genoux de Hadji
Hacnim, et le prient d^cuser le saint
zele de leur frere, qui dd&nd la cause
du Tres-Haut sans vouloir offenser
Sa Hautesse. Toutes leurs prieres sont
inutiles. Kn vain ils lui donnent a en-
tendre qu'iis auront recours a son
beaufrerc, le gouverneur dJspahan ;
oette demi-meoaoe ne fait qu'aocroitre
sa colere, et il leur d6dare bautemeot
que, bien loin d*6tre retenu par le res>
pect dd k son autoriti, il s'est port^ a
cette mesure pour se venger des pre-
tendues injures qu'il liii reprochait, et
pour lui donner une prcuve manifote
de son m^ris pour sa jnridictioo.
Puis, se tournant vers Simony il dit:
«Tu esperes fiaiussement qu*£miju
Daoulah te d^livrera de mes mains, il
n'en a pas la puissance, et moi je le
reduirai au dernier d^ndment. » n se
debarrasse des mains suppliantes qui
le retenaient, et ajoute avec un accent
mogueur : « Braves Chretiens, je ne
crois pas jamais revenir k votre cou-
vent, recevez done mes adieux. » Le
malheureux ignorait au'il proph6tisait
vrai , comme Tavenir le prouva.
Les soldats ayant done garrotte Si-
mon, Tavaient attacli^ au pied d*ua
arbre hors de la porte du couvent.
8uand le prelat Carapiet et le moioe
r^oire , qui aocompagnaient le khan ,
eurent apergu ce respectable vieillard
dans cet 6tat, la persuasion ou ils
^taient que sa demiere heure ^it
venue, leur arrach^rent de nouveaux
cris de supplication et de d^sespoir;
ils s'approchent des bourreaux et les
oonjurent d*^pargner Tinnocente vic-
time quMIs s'appretent k immoler. I^ais
ces brigands toument leurs armes sur
les deux religieux et font une d^charge.
Les balles les ^pargnent comme par
miracle, et ils rentrent dans le eouvent
sans pouvoir assister aux demiers mo-
ments de Simon.
Hadji Hachim, pour relever le cou-
rage des assassins , qu*il ne cro3rait ps
aussi sanguinaires que lui-m^me, les
mene a une taveme voisine, et ils y
nassent la nuit a boire, entrem^lant
leur orgie de chants f6roces et disocnr-
dants. Simon, oonune un autre Sdbas-
tien, demeurait li^ k son arbre, et il
recommandait pieusement son dme a
Dieu, en lui demandant, oomme autre-
fois son fils sur la croix , le pardon <lc
ses bourreaux. La fatigue caus^ par
sa position violente, la stupeur ou
le pion^eait cet evenemait imprevu,
robscunt^ ^paissf dr la nuit, toutes
ARM&N1£.
71
tm Giuses r^unitt avalent abattn ses
forces, et sa tto assoupia retombait
■ur sa poitrine, lorsqa'un aoldat la
meurtrit d*ua coup du mancbe de son
poicnard , et le reveille eo lui annoo*
^ntqu*il n'a qu*i se preparer h la
roort. Simon ouvre les yeox , et il Toit
les autres bourreaax acoourir vers lai ,
chancelants dans leor iyresse, et armer
leurs mousquets h quelques pas. lis le
percent de bailes, et« de peur qu'il ne
lui r^t^t encore un soufue de viCy Us
ouvrent sa cervdle et sa poitrine avec
leurs kangiars. Ensuite Ton d^taehe
son cadavre, et, apr^ lui avoir coup^
la t^ et mutil^ tous ses membres, ils.
les iettent dans une excavation pro-
fonde. Lorsoue, vers le milieu du jour,
les moines ou oouvent vinrent prooes-
sionnellement vers le lieu de rex^cu-
tion, afin de recueillir les restes de co
v^table martvr, ils trouv^rent seulo-
ment la terre oai^nte de son sang, et
ils cfaerchftrent inutilement son ca-
davre.
La terreur r^ait k Julia, et eette
nouvelle sinistre s'itait propag^ avec
rapidity dans Ispaban. D^ que le goo*
verneur fiit inform^ de ce qui se pas-
sait , il envole un de ses officiers avec
un d^chement de cavalerie poor ame-
ner le sup^rieur du monastdre. n vou-
lalt le preserver des nouvelles tenta-
tives de pillage oud'assassinat d'Hadji
HacbimSJuin, en m^me temps canl
d^irait connaltre F^v^ment oans
tous ses details. II reoit avec bont6
etpr^enanoes le r^. F. Carapiet, le
pnant de raconler les diverses dr-
constanoes de la roort de Simon Hvra-
piet , et le eonsolant dans sa douieur
par Tespoir qu*il lui donnait d'une ven-
geance prompte et certaine.
£mim Daoulab pr^oyait avec rai-
son oue le khan ne se contenteraii
pas o^une seule vietime, et que la
vie du supdrieur du oouvent n'toit
point en sQret^ k Julfa. Effective-
ment Hadji Hachim revenait dte le
soir Jeter la consternation parmi les
habitants de la vilJe. II s^amta k la
m^me taverne, et Uk il s'informa si le
r^er. P, Carapiet ^tait au coavent
On lui dit qu*il 6tait a Ispahan avec
Voskhan, bea»4rtede Simon. Lekhan
voolait aussi immoler k sa ftireur oe
dernier, et de d^it de voir qu'il lui
avait dchapp6, il nt incendier sa mai-
son ; puis u envoya ses soldats d^truire
les habitations de quelques autres ri-
ches arm^niens. Sor leadix heures du
soir, il part et prend la route dlspa-
han. Arrive aux portes de la viUe, il
lencontre un troupeau de chameaux
n*jl &ii toirger; ses sens se r^n-
dent dans les rues, mlient les bouti*
ques et se retirent charge de butin ,
sans que la garde du gouvcmeur osAt
r^primer son insolence.
Gependant Emini Daoulab promit
au i«v. F. Carapiet de prendre des
mesures pour threr vengeance des cri*
mes de cet audacieux. Plusieurs per*
sonnes soop^nnto d*avoir favoriw sa
f^volte furent arr^t^; on envova
une gamison k Julfa dont les baoi*
tants ^taient oomme atterr^ sous le
coup de la terreur que leur inspirait
ibMiyi Hacbim. On retrouve le 13 du
mime mois le corps de Simon Hyra-
plet dans la fosse de Gharazar ; on put
compter ses nombreuses blessures , et
lui rendre les honneurs fim^res. Les
Armlniens et les Persans assisterent
rdigleosement k la translation de ses
restes dans le cimeti^ de Meidan.
Si la vengeance divine suit en boi-
tant le coupable, selon Texpression
des anclens, elle finit n^nmoms tou-
jours par I'atteindre; ses d^lais ne font
qu*a((graver la peine mi'elle lui infiige.
Hadji Hacbim en orare un exemple
firappant dans sa personne. II s*^tait
Mge en petit tyran de la province,
et cheque jour il devenait plus redou-
table par les renforts qu'il recevait de
tous les d torteurs et autres gens sans
aveu qui venaient grossir ses bandes.
Son ambition le poussait mtoe secr^
tement, sans douta, k aspirer au gou-
vemement d'Ispaban. Heureusement
I'arrivte impr^vue du foi d^ncerta
ses projets. Feth M Schab vint vi-
siter la capitale dorancienoe dynastic.
Le gouvemeur I'informa de la conduits
du Khan, et illni eiposa Taffirire da
mani^ k ri6veiller son amour ombra*
geuxdu ^ouvoir, en lui psdsentant
ra
L'UNIVERS.
Hadji Hachim oomme un e^rit torim-
lent et aadacieux qui pourrait procbal-
nement causer des maux s^rieux au
royaume, ai sa seigoeurie ne s^viasait
contre lui. £mini Daoulah iui prouva
en outre qa'il dtait de ses int^^ts de
prendre ouTertement la d^ense de la
odonie armenienne , si utile au com-
merce et ^ I'industrie, ajoutant que
8*il se montrait leur protecteur, cet
exempleauraitdu retentissement dana
les provinces de TArmdnie persane,
et aervirait ainsi k prot^er ses firon-
tidres contre les invasions de la Rus-
sie.
Feth Alt, d'un esprit naturellement
droit et aagace , comprit la port^ de
ces observations, et, quelques jours
apr^ , il se rendit a Julfa. II entre
dans te convent du Saint-Sauveur , et
interroge le reverend pto sur I'^vd-
nement relatif k la mort de Simon Hy-
rapiet. II lui demanda aussi quelques
details sur la position politique de ses
compatriotes, Fassnrant que son uni-
que d^ir dtait de rendre heureux tons
ses sujets, et qu*il voulait tirer un did-
timent exemplaire du khan Hadji Ha-
chim.
Gette menace ^it r^lle : le khan
fut arr^td, charge de chalnes et con-
duit devant le roi , qui proceda lui-
mtoie k son jugement. Avant reconnu
sa culpabilite, il le condamna a ^tre
ras6 sans eau avec un rasoirdmoussd;
on lui per^ le nez, et dans le trou
on passa une corde , puis on le placa
sur un dne, le visage tournd vers la
queue qu'il tenait entre ses mains, et
It fat promend dans cet dtat au milieu
des bazars et de^ marches dlspahan.
LepeupIe,accouru^ce spectaclecomme
k une tSSte , Taccabiait de ses hu6es et
de ses sarcasmes. Arrive sur le Met-
dan , en face du palais, on luiappliqua
la bastonnade, apr^ quoi on lui ar-
radia les jeux et les oreilles , et il alia
expirer tristementau fond d'un cachet.
Tons ses biens fui^nt confisqu^: ceux
qu'il avait pris par violence furent
restitues k leors legitimes possesseurs ;
la tribu des Chirmmi fiit decimee, et
£mtni Daonlah fut remplaae dans sa
charge par Youssouf-klianl comme
coupable de Mbkeam durant son ad-
ministration.
Non-seulement le roi confirma les
droits conc^ds anciennement am Ar-
mdniens, mais il leur en aooorda de
nouveaux, et depuis ce moment iis
jouissent d'une plus haute considera-
tion dans l'£tat. C'est ainsi ^ue le sanf;
innocent injustement verse servit a
racbeter le reste de la nation , et le
noQvel Aman, au lieu de la perdre,
contribua par sa sodldratesse k assurer
son existence politique, en T^evant
dans la consideration et la feiveur du
roi.
HHTOIRB POUTIQUE DB L'ABMENIE.
La philosophic de Thistoire nous re-
pr^^sente chaoue peuple comme un #tre
collectif se adveloppant selon des lois
particulitos et passant par diverses
phases correspondantes, chez I'indi-
vidu , k r^tat d^enfance , d'adolesoeooe ,
de virility et de vieillesse. Sans exami-
ner maintenant si cette maniere d'en-
visager la vie d*un peuple est partarte-
ment vraie et justifi^ par Pexp^ence,
pour ce qui tient k ces quatre divisions
si tranche et si distinctes dans la vie
individudle, nous croyons du moins
en reconnattre la justesse pour oe qui
concerne la premiere pdriode, celle ou
la nation nait et commence k se {nto-
duire sur la sc^ne historique.
En efifet, elle a la petitesse et la fai-
blesse du has dge; ses premiers pas
sont lents et mal assures; la langue
n'est point formee, et elle ne fait que
b^ayer; tout est mystere et prodige
pour die comme pour Tenfant, et les
gdnies aux formes gigantesques et fan-
tastiques environnent son berceau. Tels
nous apparaissent, du moins k leur
origine, les peuples de la Chine, de
llnde et de la Qrkce.
Mais c*est surtout pour ce qui re-
garde les souvenirs et les documents
historiques que la convenance de cette
remarque est sensible. L'enfant, dans
le has d^e, n*a pas conscience des
choses qui le frappent et des accidents
?ui se pressent autour de lui ; du moins
impression de tons ces faits sur son
ARM£I<IE.
73
iiitelli|^ce est si jtassag^re et si su-
perficielle, qu*il D'en garde qu'un sou-
venir vasue et oonfus.
Consunez toutes les premieres tra-
ditions des peoples, celles de la nation
juiye excepts, vous y retrouverez
cette incertitude et ces obscurit^s.
C'est qu'ordinairement un peuple ^tait
d^ja fort avanc^ dans sa vie nolitique,
lorsqu'il pensait h consigner aans Tnis-
toire les actes ou les ^veneroents ant6-
rieurs de son enfanoe. Comment h
vingt ans, par exemple, pourrait-on se
rappeler tous les premiers accidents de
la vie, et raconter de quelle mani^re
notre intelligence s'est form^, ou
comment nous avons commence a nous
mouvoir et a agir?
L'histoire primUwey generalement
si iocertaine, comme nous venous de
le dire, pent I'dtre encore davantage
pour certain peuple, et nous alions in-
diquer pour quelles raisons les origines
de la nation arm^nienne sont envelop-
pees de grandes obscurity.
Tant que la langue d'un peuple n*est
point fix6e par Tecriture, le mouve-
ment intellectuel est presque nul chez
lui ; il se borne a quelques chants tra-
ditionnels plus ou moins no6tiques,
oonservant d'anciennes traaitions de
faits politiques ou sociaux. C'est ce
que les voyageurs modernes ont pu
reconnaftre cnez les peu^lades de TA-
ro^Tique et de la Polynesie. II en ^tait
ainsi de TArmenie, ou , d^apr^ les an-
ciens auteurs , les montagnards de quel-
ques cantons avaient seuls conserve la
m^moire de plusieurs ^v^nements j^s-
s6s, dans des chansons populaires
qu'ils r^p^taient au son des instru-
ments, en formant des chceursdedanse.
On reprocbe en outre aux rois et aux
{>rinces une aversion d^aigneuse pour
es lettres, et une insouciance extreme
qui ne leur faisait prendre aucun des
movens propres h perpetuer le souvenir
de leur r^ne. De cette mani^re, nous
serious rest^ k jamais dans Pigno-
rance la plus complete sur tout ce qui
se passa dans ce pays Jusqu'au regno
du ^nd Vagharsbag I , lequel est Bx^
environ un si^e et demi avant J6sus-
Christ, si nous n'avions a consulter
que les auteurs nationaux. Heureuse-
ment TArm^nie etait entouree de peu-
ples d'une culture et d'une activity
mteJIectuelie superieures; ces peuples
avaient des ^rivains dont la ouriosite
scientifique ^tait eveiJl^ sur leurs voi-
sins, et ils ont pris la peine de nous
transmettre (|uelques-uns de leurs ^v^-
nements politiques, surtout lorsqu'ils
se liaient a ceux de leur propre his-
toire. Par ce moyen, on peut remplir
quelques lacunes,bien qu'ilreste ^tendu
sur plusieurs faits un voile que la cri-
tique ne pourra jamais soulever.
Ces auteurs etrangers etaient Chal-
d^ns, Syriens ou Grecs de nation. Le
premier historian de TArmenie, soit
pour I'anciennet^ de son siecle, soit
pour la sup^riorite de son talent,
Moise de Knoren, nous en cite plu-
sieurs qu'il a consults, et oil il a puise
de riches documents malheureusement
incomplets. Ces historiens sont fib-
rose, Abydene, C^phalion , Mar-Abbas-
Catina, et plusieurs autres dont nous
ne connaissons pas m^me les noms.
Eusebe, dans sa chronique, avait cer-
tainement fait usage des monies auto-
rites , et les fragments historiques qu*il
nous transmet sont bien propres a
faire regretter la perte de leurs an-
nales.
Les auteurs armeniens qui ont tra-
vaiil^ sur ces documents sont poste-
rieurs k Fere chretlenne. Ils font re-
monter les origines de leur nation a
Tepoque qui suivit immediatement le
deluge, et h laquelle on assigne la for-
mation des principaies monarchies de
rOrient. Vinct-deux siecles avant notre
^re, Haig, fils de Tbaglath, qui est le
m^me que Thorgom, fils de Japhet,
sortit de la Babylonie, et vint k la t^te
d'une colonic nombreuse se Oxer dans
les plaines qui avoisinent le mont Ara-
rat. II prit possession de ce territoire
et voulut en €tre le maltre indepen-
dant; mais Belus, roi d'Assyrie, dont
il avait fui la domination arbitraire,
et qui voyait avec peine ce chef de tribu
6cliapper a son autorite, voulut le sou-
mettre, et il vint lui presenter bataille
pres du lac de Van. La cause juste
triompha; B^lus fut tue de la main
74
L'UNIVERS.
d*HaTg, et la noavdle oolonie resta
inattresse du pays. Mais batons Phts-
torien Jean nous raconter oes mdmes
ev6nements, qu*il resume, avec le nit-
rite <]ui le distingue, dans la premito
partie de son travail.
« Le troisi^me patriarche, aprte Ja-
phet, engendra trois fiis, Askanaz,
Riphad et Thorgom; et, oomme il pos-
s^ait en propre et personneliement le
pays des Thraces, ii jugea convenable
de partager en trois lots oe royaume et
ses autres possessions, pour les donner
en h^'tage h ses trois flls; testament
qui re9ut son execution. Ainsi il donna
la SSu'matie k Askanaz, qui d'aboid
avait impost son nom h notre nation;
Riphad reoit le pays des Saramades:
et quant a Thorgom, s*^tant aoproprie
par la suite I'Arm^nie et en etant de-
venu le souverain, il conserva le nom
le sa dynastle k ce rovaume, qui por-
tait jusqu'alors celui 0* Askanaz.
« Ainsi retenez bien que nous des-
cendons a la fois d' Askanaz et de la
maison de Thorgom ; c'est le moyen de
croire h Tauthenticit^ des traditions
concernant les premiers chefs de notre
nation, bien que quelques-uns adop-
tent sur ce point une opinion difite-
rente.
« Les saintes lettres gardent un si-
lence absolu jusqu'aux temps ant^
rieurs h Thorgom, et, pour la suite,
elles n'ont pas jug^ convenable de faire
Gonnattre rorigine, la succession et
r^at de ses descendants, ni de nous
6num^rer tous les rois d*Arm^nie, ou
de nous dire comment elle fut r^ie
ult^rieurement par des satrapes.
« Mais nn certain homme, Syrien de
nation, nomm^ Maribas Catina, fiit,
par Tordre de notre roi Vagarschag,
visiter les archives des rois de Perse,
l^tant plein dMntelligence et de saga-
city, et vers^ dans les lettres chal*
deennes et grecques, il y ddoouvrit,
apres de iongues recherdies, un livre
authentique , qu' Alexandre , fils de Neo-
tan^be , avait fait traduire du chald^n
en grec. Bien qu'il renfermflt beaucoup
de renseignements sur Thistoire de
f)lusieurs autres peuples, Mar-Abbas les
aissa de c6t^ , commc toangers h son
travail, et, recueillant aniqafimeit ee
qui concernait notre natioii, il nntle
presenter k Vagarscbag.
c Grdce k lui , notre histoire a M
oonnue et a acquis une autlienticit6 in-
dubiteble. Ainsi nous apprenoos que
le beau et vaillant b^ros Ha^, h k
stature gieantesoue, 6tait fils aeTho^
gom, qu*u fut le premier chef et le
p^re de notre nation. L'bistoire nous
enseigne encore que, de concert avec
la race primitive des gtoits, il tra-
vailla k la construction de la tour, mo-
nument ocrtossal de Torgueil, qae ks
bommeSj dans lears penste extrava-
gantes, imaginatent pouvoir adiever;
mais, sulvant le r^t des saintes £m
tures^ un vent terrible soufila, par la
permission de Dieu , contre oette tour
et la renversa , mettant ainsi k na Tim-
puissance de leur travail.
< Peu apr^, Nembrod, qsi est le
mtoe personnage que Bel , bomme fier
et entreprenant, veut, en 8*6levaotde>
mesur^ment , dominer sur toute la race
des grants.
« Mais notre robuste Haig ne coorbe
pas la t^te, et se soustrait h son ob^
sance. II marche rapideroent vers notre
pays avec Armenag , son fils , qa'il avait
eu a Babylone, dL suivi de ses filles,
de ses petits-fils, deses domestiqaes et
des autres dangers attach^ k sa per-
Sonne. Or Nembrod , ou antreroent Bd
le suivaif avec ses soMats, hommes
habiles k tirer Tare et k manier T^iee
et la lanoe. lis se reneontr^reot dans
une vail6e vaste et unie, comme deox
torrents furieux qui se prMpitent avec
fracas; aussi leur duel jetait-il dans
toutes les dmes le tremblement et une
terreur profonde. Mais du long arc de
notre Haig part un trait au fer trian-
gulaire, qui transperee la cairasse
d'airain de Nembrod aa d^at de Fe-
paule et va s'enfoncer ensuite dans la
terre. Haig, ayant done tu6 Bel, r^na
sur le pays que lui avaient I^d^ ses
f^res , et , de son nom, il rappela ffaik.
1 8*occupa de r^gler ses Etaits, et,
apr^ avoir v6cu encore plasieurs an-
nees, il mounit, transmettant son
royaume k son fils Armenag.
«0r Armenag, unique et paisible
AilM£MIE.
75
possessair de rArm^oie, fixa sa r^i-
dence dans une plaine, d*un aspect
agreable, laquelle ^it enTironnde
d une muraille de hautes raootagnes
a la cime neigeuse, et qui etait ar-
ro8^ par des rivieres dont les eaux
murmurantes la coupaient en aMofil*
trant dans les terres, et la traver*
saient dans toute sa loneueur. S'^tant
ensuite bAti une ville pr& de la mon-
tagne situ^ au nord , il l^appela de
son nom Arakadj ; et la plaine qui s'6-
tend a ses pieds prit celui d'Arakad-
zoden. II eut pour fils Armais ; et, apr^
avoir encore v^u quelques annto , il
mourut.
« Cest dans cette mtoe plaine, oik
se trouve une petite coUine pr^ des
t)ords de rAraxe^qu'Armais batit une
ville et un palais , ouvrage qui fiit ad^
mirablement ex^nt^ avec des pierres
d'unegrande solidity. II appela la ville
Armavir. Les autres anciens histo-
rieos ont sufBsamment raoont^ tous
les exploits de sa bravoure. II ^tait
d6ik assez avano6 en Ace lorsqull en-
gendra Amasia; et apres il vecut en-
core quelque temps, et mourut.
« Amasia s'^tablit dans cette mtoe
ville d* Armavir, et fit des construc-
tions au pied de la montagne situ^
au midi , qu'il appela de son nom Ma-
sis ; toute la plame qui s'etend alen-
tour prit celui de Masisoden. Apres
quelques annto , il engendra Kegham ,
puis il termina ses iours.
« Kegbam vint s etablir sur le cdt^
nord-est d*un petit lac; et, y ayant
bdti des villages et des fermes , il ap-
pela de son nom la montagne Ke^m ;
et le bord du lac ou il avait fait ces
^tablisseroents prit le nom de Kerar-
kouni. II eut deux fils , Harma etSisag.
II assigna Armavir pour r^idence a
son fils Harma, lequel fut cbarg6 de
Tadministration du royaume de son
p^re. Quant a Sisae, il eut pour sa
{»art le pays qui s*etend du nord du
ac au sud-est, jusqu'^ la plaine que
traverse I'Araxe, dont les eaux rapides
et toumoyantes se pn^dpitent avec
fracas par l\>uverture ^troite et res-
serr^e d*une caverne ; d*oii vient que
plusieurs ont nomme ce lieu Kara-
vagb. Kc^bam bitit ensuite un bel et
vaste ^ifloe, qui, d*abord nomm^
Kegbami, fiit appele ensuite Quami
par le prince Quarnig , puis il mourut.
Son fils Harma engendra Aram, et
mourut aussi.
« On raoonte d'Aram un grand nom-
bre de faits glorieux. Sa valeur guer-
ri^re recula les frontieresde i'Arm^ie
dans toutes les directions ; et c'est h
cause des actions illustres de ce beros
3ue les nations voisines nous aj)pellent
e son nom Arro^niens. Ce prince ne
s*empara pas seulement des [)ays dont
la conqu^te 6tait facile , mais encore
de la Cappadoce , qu'il soumit de vive
force (*;. s
Les Assyriens ne renonc^nt pas a
leurs pretentions; et la oonquminte
Stoiramis vint plus tard faire valoir
ses droits. L'historien MoIsedeKboren,
dont nous avons ddja parl^ , nous a
transmis, sur cette expedition et aur
lestravaux exi^euUs oar cette reine,
des renseignements fort curieux que
nous cbercberions vainement cbez tout
autre auteur ancien. Bien que le r^it
romanesque semble un fragment d^ta-
ch^ de quelque ancien poeme, nous
avons cm qu*il pourrait int^resser le
lecteur, ^ qui il donnera en m^me
temps une iu^ de Texposition bistori-
~ue et du style des meiUeurs toivains
e TArm^nie.
a
AKA. SA MORT DANS Ull COMBAT COMTIIK
SiMIRAMIS C*).
«Pea d'annte avant la mort de
Minus , Ara r^t en mattre sa patrie,
ayant obtenu de oe prince la rotoe
favour quil avait accord^ k son p^
Aram. Mais rimpadiqueetvolnptueuse
Steiramis, qui depuis tongues anotoi
avait entendu parler de sa teaute , brd-
lait de s'emparer de sa personne • sans
f*} Jean YI. Hist. d*Arm. , manusc. arm.
de la Bibl. roy., n« 91 , pages 1 1 , la, i5,
17, ao.
{**) Moisc de Khoren , liv. i , ck. 1 5.
76
L'UNIVERS.
toutefois rien oser entrq>reiidre ou-
vertement. Or, apr^ la mort ou pla-
tdt apr^s la ftiite ae Ninus dans Hie de
Cr^te , comme je le crois (*), S^mira-
rois, donnant un libre coars h sa pas-
sion y envoya pr^ du bel Ara des mes-
* sagers char^^s de dons et de prints ,
et qui devaient employer la pri^re et
la menace pour Tengager h venir h Ni-
nive , soit pour T^pouser et r^er sur
tout le pays qu*administrait Ninus,
soit seuiement pour satisfaire son
amour, et retourner ensuite paisible-
ment dans ses ifetats, avec de nches ca-
deaux.
« Comme les messages se r^p^taient
sans qu*Ara donndt son consentement ,
S^miramis entre en fureur, met fin
aux n^ffociations , et , a la t^tede forces
considerables, elle atteint, par ses
marches forc6es , le prince en Arm^-
nie. A en juger par les apparences ,
son intention n*6tait point de tuer ou
de poursuivre Ara, mais bien de le
soumettre et de Tamener par la force
a consentir h ses impurs aesirs. L*ar-
deur de sa passion ^tait telle, que, lors-
qu'on parlait de lui , elle tombait dans
le d^lire , comme si eile le voyait. Elle
arrive done prteipitamment dans la
plaine nommee Ararad , du nom d^Ara ;
et i apres avoir range ses troupes en
bataille , die reoommande a ses gen6-
raux de prendre tous les moyens pos-
sibles pour conserver la vie au prince.
Mais, lorsque le combat fut engas6,
I'arm^ d'Ara fut battue , et il perit
dans la m^lee de la main d*un des en-
fants de S6miramis. Dans sa victoire,
elle envoie sur le champ de bataille
des hommes charge de d^pouiller les
morts , pour cherdier , au milieu des
autres cadavres, oelui de son cher
amant. lis trouv^rent Ara parmi les
braves qui avaient suocomb^, et elle
(*) L'bistorien parie a deux reprises dif-
fereotes de oe pr^tendu exil volontaire de
Nintu dans Tile de Crete , pour ne pas ^re
\kao\n des exces de la reioe , son epouse.
II ne dit pas sur quelle autoritc il appuie
cette opinion, dont on ne reirouve aucune
trace cnei les autres ecrivains.
fit porter son corps dans son pa-
lais.
« Comme les troupes des Arm^iens^
d^sireuses de venger la mort d*Ara,
6taient venues attaguer dans un se-
cond combat la reme, elle dit : Pai
command^ aux dieux de IMier ses
blessures et de le ressusciter. Pliisieur!
fois Texc^ de sa passion la porta a
recourir aux enchantements de la sor-
oellerie pour le rappder h la vie. Lors-
que le cadavre tomoa en putrtfaction,
elle le fit jeter et cacher dans une
grande fosse. Puis, tenant en secret
un de ses favoris par^ comme Ara , elle
r6pandit ce bruit : Les dieux ont le-
ch^ les plaies d*Ara ; il est ressusdte.
et ils ont mis le comble a mes desxrs.
C'est pourquoi ils meritent desormais
de recevoirde plus grands honnetffs,
puisqulls se sont montr6s si propios
a nos voeux. Elle ^leva une nouvdie
statue aux dieux, et I'honora en lai
offrant beaucoup de victimes , voulant
fairecroire h tous que les dieux avaient
ressuscit^ Ara. C*est en r^pandant re
bruit dans FArm^nie, et en Faccr^i-
tant parmi le peuple, qu*elle apaisa
la guerre. »
La victoire de S^miramis consolida
la domination assyrienne ; et, jusqu^an
renversement de cette grande monar-
chie . FArmenie resta tributaire et de-
pendante. Lorsque Varbag, gouver-
neur de M^ie , lequel n*est que
FArbaces des Grecs , se souleva contre
Sardanapale, BaroTr, souverain de
FArm6nie , entra dans cette conspira-
tion , et le fruit qu'il en retira fut de
rendre a son pays sa premiere inde-
pendance. Ti$[rane I*', contemporain
de Cyrus, ^tait un prince puissant; et
X^nophon nous dit que Fassistanoe
qu'il pr^ta au fondateur de la nouvdle
monarchic des Perses, contribua di-
rectement a sa victoire sur Astyages ,
roi des M^es. Son fils Yahakn iut tel-
lement renomm^ par sa force et ses
exploits , qii'il occupe , dans les anciens
chants nationaux, la place de FHer-
cule des Grecs. Ses successeurs , jus-
qu'h Vahe , continuerent d^administrer
le pays , en reconnaissant la suzerai-
ARM£NIE.
77
net^ des rois de Per8e(*). Mais les con-
3u^tes d'Alexandre changerent oet ^tat
e choses.
En effet, le jeane roi mac^donien,
en d^trutsant la dynastie persane y ne
laissa point, dans les ifetats environ-
nants, de traces de la royaut^. II tou-
lait ^tre I'unique souverain , et il se
contenta de placer dans TAnn^nie un
simple goiiverneur. A la mortd'Aiexan-
dre, ses g^^raux se partagerent Tem-
pire ; et celui qui s'empara de la Syrie
r^lama TArm^nie. Mais quelgues sei-
gneurs , qui souffraient impatiemment
<;ette domination etrangere, chasserent
les oonqu6rants; et la fondation de la
nouvelle dynastie des Arsacides porta
le coup mortel aux Grecs.
Celui qui op^ra cette revolution
etait , nous dit Jean VI , le valeureux
Arschag ou Arsace, de la race d*A-
brahatn par Kedourgha , qu*il prit
pour sa fenime apres la mort de Sara ;
il regna a la fois sur les Medes, les
Perses et les Babylonlens. Aussi sa
grande puissance lui merita-t-elle le
nom de Parthe. 11 soutint plusieurs
combats contre les chefs les plus aguer-
ris, et demeura toujours vainqueur.
Les conqultes le rendirent entrepre-
nantf et 11 pla^a sur le trdne d*Arm^-
nie son frere Vagharschag , prince qui ,
h la bonte du caractere, unissait la
prudence et la bravoure. Apres de
nombreuses victoires remportees sur
ses ennemis , il fit, avec un ordre con-
venable, beauooup de r^glements ci-
vils d'une grande utility pour la vie
publique. 11 commen^ par donner h
la royaut^ le lustre et T^clat de ses
moeurs personnelles ; puis, lorsqu'il
eut affermi le pouvoir aans ses mains ,
il pla^a dans son palais et dans tout
son royaume des nommes distingu^
et capables , de la race d'Hai^ ou des
autres premieres families , variant pour
chacun les attributions de sa digniti^.
Ainsi , Pakarad , juif d'origine, dont
on fait remonter la maison a David ,
fut specialement charg<^ de oouronner
le roi , et oela pour le r^compenser
d'etre venu le premier offrir ses ser-
vices h Vagharschag. En outre, il fut
nomme sbarabied, et il command(ait
un corps de onze mille hommes , outre
qu*il avait le gouvernement du pont et
de la ville de C^aree , nomroee Mids-
hag, ainsi que de toutes ses d^pen-
dances.
Le roi s'avan^a ensuite du c6t^ de
lamer, vers le mont Caucase; et il
commanda h la peu|)Iade sauvage des
Chourdapars de quitter ses moeurs
bnrbares et de renoiicer a sa vie de
brigandages et de meurtres, pour en-
trer dans son obeissance, et de lui
pa^er tribut; moyennant quoi ils pour-
raient devenir dignes d*^tre €\ey& aux
dignites et au rang de la noblesse ar-
menienne.
(*) Yoici la litte des princes de la race haiganienne qui se sonl succede pendant
dix-huit siecles enTiron.
At. J. C.
2t07 Haig.
aaa6 Armteag, son fiU.
19S0 AramaU, son fits.
: 940 Amaria , soii fils.
190a Keg ham , aon flls.
s8S8 Harma* son fils.
18x7 Aram , son fils.
■ 769 Ara, son fits.
1743 Gaatos , son fils.
1735 AnonscbaTan , son flls.
166a Bared.
ffita Arpag.
t568 ZaTan.
1 53 1 Phamaca l«^
1478 Soaz.
>433 Havanag.
■4o3 Vaachdag.
i38f Haifag I"',
f 363 Ampag V'.
■ 349 Arlinaf.
At. J. C
i33a
i3a6
i3oa
1189
>a8S
1367
ia4a
««97
1194
ii8a
itSo
it37
iioa
1075
io3S
98S
941
4)10
1183
Scbavarscb l*^
Korair.
Vesdam.
Gar.
Korbag.
Orootes.
Endsag.
Kelag.
Horoi.
Zarmalr.
Interrigne.
SehaTarsch II.
Benlj 1".
Arpoun.
Berdj W.
Pazoag.
Roi.
Hooaag.
Ampsg n.
Oaibag.
Ay. J. C.
838 Pfaamabace !•'.
8o5 Pfaarnag l\.
765 Sgaiorti.
748 Baroir.
700 Ilrateh4a , son fils.
678 Phamabacv II.
665 Bfldjoidj , son fils.
63o Gurnhag , son fils.
6 ja Pharos , son fils.
6o5 iliigag II. son fib.
569 Krovant 1*"* son fils.
565 Tigraiie 1*', son fils.
5ao Vahakn* son fils.
493 ArbavaB. son fite.
475 Nerseb, son fils.
440 Zarrh , son fils.
394 Armok , son fils
385 Paikam, son fils
371 Van, son fits.
35i Vahe , son fiU
L'UNIVERS.
78
Apra avoir aiosi port^
dans kes parties eitMrieuies de son
royaume , il songea k r^ler rint^rieur
de son palais, et ^ y ^tablir toutes les
institutions utiles ijai sont do ressort
de la royaut^. Ainsi , outre Ja dignity
consenrte k Pakarad , il cr^ des cham-
bellans, des gardes du corps, des
gardes-ohasses charge de prendre sotn
du gibier destine a la table royale, des
valets, des serviteurs, et des cbiliar-
ques pour les sacriflces. II ^tablit en
outre des ^chansons , des Cnuconniers ,
et des hommes specialement oharg^
d'appr^ter la neige pour la boisson
d*ete, et d*autres pour les provisions
d'hiver. II avait une Itejon k qui la
porte du paiais 6tait eonnee ; puis un
grand nombre d'eunuques. La seconde
ignite du royaume rut donn^ k un
personnage de la iamille d*Astyages ,
roi des Medes, laquelle porte aujour-
d'hui le nom de Mouratsant.
L'administration de son patlais une
fois organist , il nomma des chefis de
province, des satrapes, des gouver-
neurs et des pr^ets, dont Tun r^idait
au nord, dans le pays de Roukar, et
Tautre au nord-ouest, dans le canton
d'Ardscbk'n. II regla les heures d'au-
dience et les jours d'assembl^ de
conseil, et de ietes. 11 attacha aussi k
sa personne deux bommes dont Tun
devait Tavertir des bonnes actions
qu'il faisait, et lui rappeler les senti-
ments de justice et d*numanit^ lors*
qu'il s*en uoi^ait. L'autre devait Ten-
gaeer k punir les m^cbants, et Ik les
chatier selon leurs crimes.
II voulut que Ton traitAt avec plus
de distinction les habitants des villes
que ceux descampagnes ; mais en m^me
temps il d^fendit a ceux-1^ de s'^iever
avec orgueil et m6pris au-dessus des
paysans, cberchant a toblir entre ces
deux classes une union patemelle et
d^pourvue de jalousie; fondement de
la stability et de la paix publique. Aprks
toutes ces belles et sages institutions,
qui lui ont m^t^ le nom de bon et de
glorieux, il mourut k Nisibe, ayant oc-
cupy le tr6ne vingt-deux ans (*).
(*) J»n YI. Manus. aim. , n* 9t. p. ^5.
Les armes vietorieoies de ses des-
cendants repouss^rent les Grecs jus-
qu*au dela de TEuphrate. Un des mem-
fires de cette maison , Vagliarschad ,
repit comme domdine TArm^nie; et ,
dans sa personne , commence one nou-
velle dynastie de rois qui subeista jus-
qu'a rusurpation du tr6ne de Pme
par les Sassanides.
Quelques-uns de ces rois jouerent an
rAle brulant; tel fut Tigrane n, qm
s'afifranchit totalement de la puissance
des Parlhes , et oonquit la Syrie et plu-
sleurs provinoes de FAsie Minenre.
Les historiens romaina ont d6crit le
faste dece fid^e allii de Blithridate C).
Sui balan^a quelque temps la fortune
e leurs armes. Mais oe roi des rois,
k la tMe de trois cent soixante mille
hommes, tons bardes de fer, ne pot
tenir devant les legions de LocoUas et
de Pompee. Artavasde, Ills et sueces-
seur de Tigrane , surpris par le peifide
Marc-Antolne, est eminent captif a
Alexandrie, ou il fut dtoipite par Yd-
fet d*un caprice de GMopAtre.
Rome tendait k s'assimiler tons les
peuples conquis par ses armes, et a
e£racer ches eux les traits distinetift
de leur nationality. Elle laissa k TAr-
mteie ses princes, mais en linntaat
leur pouvoir comme cehii de see pro-
consuls. Les Arm^iens se troaYaieet
sous le coup de deux puissaDoes qui
cherchaient simultanment k les doni-
ner: c*6taient les Remains et les Par-
thes. Trouvant en ces deux peoples
des ennemis dMar^s de leur propre
liberty, ils n'ob^issaient qu*icontrc>
cceur; et c'est ce qui fiiisait dire a Ta-
cite (**) : «La nation arm^nienne, doot
le caract^e de ses habitants nous est
aussi peu connu que remplaoenciit de
son territoire, s*etend jusgue ches les
M^es, en bordant au lorn nos pro-
(*) Les huloriens annenicns en s*appiiyaat
•ur une autorit^ qui nous est incomwe.
prelcndent que Mithridate ne s'ewpoiaopna
pas lai-mArae; que ce /ut IH>mpee qui hii
presenta le breuTage oiortd, apies %*^tn
empare de sa personne par kt aitificrs d«
Pilate.
(••) Tacil. Aon. , lit. ii , J 56.
ARM^NIE.
79
f inctt. JMe au milieu de deux grandg
empires, eiie est le plus souvent ea
disGorde par haine ooutre les Romains,
et par riaaHU oontre les Parthes. »
La distinction de rbistorien romain
etait juste. La mtoe religion, le ma-
gisme, rapprocbait les Arm^iens des
Perses, avec lesquels ils ayaient aussi
decommun des mt^rdts de dynastie,
les mceurs et les lois. lis ^ient dooc
plus port^ k faire alliance avec ces
voisins qui resjpectaient encore mieux
leur libert6 politique que les conqu^
rants de I'ltalie, dont Je despotisme
inflexible et uniforme ramenait T^t
social de chaque peupie nouvelleroent
conquis k celui de la cit^ mto.
IMais, lorsque le christianisme eut
p^n6tr^ dans ce pays «t soumis les in*
telligences parlaj[>ersuasion, iesliien-
faits de oette religion sainte et civili-
satrioe , imports chez eux de I'empire ,
diang^nt les dispositions du peupie
et le reconcili^nt avec les Romains.
II oomprenait qu'il trouverait parmi
eux ses protecteurs natoels oontre la
Perse, adonn^ aux prineipes de Zo-
roastre et ennemiedu nom oir^ien (*}•
Abgare occupait la partie m^ri-
(*) Les princes gui occuperent le tr6iie
d^Annenie depuis Ardayazt, et qui nous
sont prindpaleroent conovs par les hislo-
riens grecs el latins sent :
At. J. C 3o. — Artax^ II qui chasse les
troupes romaines laisste par Antoine.
20. — Tigrane II , son frere.
1 5. — Tierane lU , son fils , detr6ne et
retabK par les Romains.
6. — Artavasde IL
a. — Erato « veuve de Tigrane HI. Apres
an regne de courie duree , elle est forc^
d'abdiqaer.
Ap. J. C 9."— Ariobenane, prince mede
que lea Romains declarent roi.
4. — Artavasde HI , ou Artabase, son fils,
detr6D^ peu aprea.
5. — Erato remonte snr le tr6ne. Sa roort
est suivie d'un interre^.
16. — Yonones, roi des Panbes, ills de
Phrahates IV. Cbaase par Artaban lU, 11
vint clierdier un asile cbez les Armeniens
qui le plaoerent sur le trine , on il nc put
sc maintenir.
17. — Interregne.
djonale de FArm^ie; il r^dait h
Edesse. Sa magnanimity , la droiture
de ses actes et ses vertus avaient r^-
pandu au loin sa reputation. Aussi
nit-il choisi pour arbitre entre les en-
fants du roi de Perse, qui se dispu-
taientla couronne. II donna Ic sceptre
a Ardacb^ , et sipara les autres freres
avec leur soeur en trois branches nom-
mte Gar^i, Bahla, et Sour^ni. De
ces trois families sont sortis ses prin-
ces et d*autres personnages celebres
dans les annales de la nation. Ainsi
le premier patriaMie, saint Gr^goire,
descendait des deux maisons Sour^ni
etBabla.
Cest sous le regne d* Abgare , comroe
nous t*avons dit dans la partie reli-
^euse de cette bistoire, que le chris-
tianisme jeta dans les dmes ses pre-
mieres semences. A sa mort, le
royaume fut partag^ entre son fils
Anan6 et Sanadroue, son neveu. Mais
oe dernier, d^vor^ crambition , mardie
sur Edesse, la livre au pillage, d^truit
la fiimille et la posterity d' Abgare, et
transfto le si^e de son royaume k
Nisibe , qu'il orna d*^ifices splendides.
Aprte un r^gne de trente ans,dans
lequel il se livra a toutes les perversi-
18. — Zinon, fils de Polemon, roi de
Pont. II fut Gouronn^ par Germanicus, et
il prit le nom d*Artaxias.
a3.— Tigrane nr, fils d*Alexandre, fils
d'Hirode , roi des Juifs. On le fit mourir
par Tordre de Tibere.
35. — Arsace n, fils d*Ariaban m, roi
dei Parthes.
45. — BAitbridale, p^ de Phartsmane,
roi d'lb^e. Il fut pbisieurs fois depossM^
par les Parthes et retabli par ksa Romains ,
jusqa*a oe qu'il fut assaasine par son neveu
Hhadamiate.
5x. — Rhadamiste, fils de Pharasoiane.
5a. — Tiridate l*"" , pere de Yologese I**,
roi des Parthes. Il fut plu&ieurs fois chasse
par les Romains.
60. — Trigane T, fi1sd*un certain Alexan-
dre , de la race dllerode, et neveu de Ti-
grane IV. Les Parthes le detrdnerent.
6a. — Tiridate est retabli sur le trone
par I'ordre de Neron. Il uarait qu'il renia
encore onze ans. Yoy. Saint-Martin , Mem.
sur I'Armenie, 1. 1, p. 410.
HO
L'UNIVERS.
t6s de son coeur deprave, et oa*il souille
du •sang des saints mar^rs Thadd^ et
Barthelemi, tl p^rit nais^ablement k
ia chasse.
A la cour des rois d*Orient, se trou-
vait un personnage qui avail pour at-
tribution le droit de poser la couronne
sur la t^te du roi , a son avenement au
trdne. Ge droit, h^Mitaire dans la
mtoe famille , lui donnait une grande
influence , puisqu'elie remplissait , en
quelque sorte, 1 office d^voiu au pou-
▼oir religieux en certaines autres con-
tr6es, et puisque sa sanction ^tait 1^-
^aiement ntossaire pour rendre apte
a regner. Cette institution remontait
h Vagharschag, et la noble famille des
Pa^ratides ^tait investie de cette di-
gnity. Lors^ue plusieurs oorop^iteurs
revendiquaient la royaute, oelui qui
n'avait point re^u I'mvestiture de la
l^itimit^ etait re^arde oomme usur-
pateur. G*est ce qui arriva pour £ro-
vant II, de la famille des Arsacides,
qui , profitant des troubles que la mort
de Sanadroug avait jetes dans le pays,
se constitua son suocesseur, au detri-
ment de sa posterity. U voulut aussi
aneantir sa race, comme Sanadroug
avait eteint celle d'Abgare; et il aurait
r^ussi dans son sinistre dessein, si un
jeune enfant , nomm^ Ardasches , n'eilt
eU sauve miraculeusement, et conduit
a la cour du roi de Perse.
Ardascb^ ^tait un vengeur futur
qui grandissait dans sa retraite, et
m^ditait en silence les projets d'une
terrible vengeance. Lorsqu'il se sentit
la force d*agir, 11 demanda a son royal
hdte des secours; et, k I'aide des m-
telligences qu'il entretenait parrai les
princes de sa nation , il se trouva bien-
tdt k la t^ de forces considerables. II
vient presenter bataille h £rovant sou-
tenu par les Remains et le roi de G^or-
eie , et demeura mattre du cbamp de
bataille. £rovant perit dans sa capi-
tate de la main d*un soldat ; et Ardas-
ches devint le paisible possesseur du
trdne qu'il avait reconquis. Son r^gne
Art p/ospere; il administra sagement
ses £tats , et arr^ta les invasions des
Alains et de plusieurs autres peuples
du Caucase qui menacaient TArmenie.
Dans une des bataiUes qa*il Kvn h
oes barbares , le fils do roi tomba entre
ses mains. Comme il se disposait k le
mettre a mort, la fiile do roi barbare,
nommee Sathinik, remaiqoable'par
sa beaute, lui adressa ces paroles:
« O puissant et brave Arsaoe , qui as
soumis les belliqueox Alains, eooute
les prieres de la nlle infortun^ du roi
de ce peuple , et rendsnnoi mon jeune
fr^re. Il ne convient pas de conserrer
de la rancune contre un ennemi tombe,
et de lui ravir la vie. Conduons plut^t
un traite de paix entre nos deux grandes
nations. » Les paroles de la jeune fille,
ses larmes, et Texpression touchante
de sa beaute, firent une telle impres-
sion sur le cceurd* Ardasches , q|u*il de-
livra le jeune prince, et promit de
conclure un traite, a condition que
son pere consentirait a lui donner en
manage Sathinik. Le pere la lui ac-
corda, et Ardasches revint dans son
royaume avec sa nouvelle epouse , qu'ii
decora du titre de reine , entre ses ao-
tres femmes.
Les tentatives qu'il fit pour sesous-
traire a la domination roraaine, ne
furent pas couronnees de succes. Tra-
jan envoya contre lui une forte armee
?|ui le battit en deux rencontres ; et ce
ut a cette occasion ^ue rempereur
romain ajouta h son titre de Partki-
cus celui d'Jrmenicus.
Les bistoriens nous reveient, a Fck-
casion de la mort de ce roi , on fait
tres-important dans Thistoire des reli-
gions paiennes de Tantiquite. II parail
qu*en Armenie la coutume exigeait que
les funerailies du prince fiissent oele-
brees par un bolocauste de victioies bu-
maines , et que mime , durant sa ma-
ladie , on versait d€jk le sang humaio,
pour que les dieox , devenos propioes.
detournassent la mort de sa tlte
royale.
On raconte done que le fils putor
d' Ardasches, nomme Artavazd, revottr
k la vue du sang que Ton r^pandait.
fit ^ ce sujet des representations a son
pere, et lui dit : « Tandis que to suis
cette voie, et que tu emportes toute la
population, comment, apres toi, con-
sentirais-j€ a ne regner que sur des
iRM^niE.
81
ruioes? » Le p^e irrit^ le oiaudit, en
disant : « Si tu sors a la diasse sur le
inont Ararat, iesjfarts te aaisiront, tu
y resteras, sans jamais revoir la iu-
ini^redujour. »
En effet, ce prince, en poursuiyant
a la cbasse des cerfs et des onagres,
fut emport^ par son cheral dans un
abtme, ou il disparut^ Les chants po-
pulaires r^petent qii'il demeure en-
chatn^ dans une caverne, que deux de
ses chiens mordent ses fers pour le
delivrer, et que le prince fait tous ses
efforts pour sortir de cette prison et
venir desoler le pays. .« Mais, ajoute-
t-ott , le bruit des marteaux des artisans
rive ses cbafnes et les oonsolide, et
voila pourquoi les forgerons continue
rent longtemps de frapper le dimanche
quelques coups sur leurs enclumes,
de peur, disaient-ils , qu^Jrtavasd ne
brUdt ses chaines, »
Ti^rane III, fr^e d'Artavazd, se
r6umt aux Perses et comment les
hostility centre les Remains. S^v^-
rien , gouvemeur de la Cappadoce , vint
lui presenter bataille, apres avoir con-
suite I'oracle, qui lui repondit : « Le
fil de ton 6p6e atteindra les Perses et
les Arm^niens; tu retoumeras a Rome
avec les lauriers de la victoire; les rives
du Tibre te recevront avec joie, cou-
ronn6 de palmes triomphales. » Gepen-
dant S^v6rien fut battu , et Alexandre ,
le prStre du dieu, pour sauver Tinfail-
libiiit^ de Toracle, substttua au premier
ordre cet autre : « Ne marche point
centre TArmtoie; il s'ourdit centre toi
des complots, et tu pdriras de la bles-
sure d'une fl^e. » Un trait vint effec-
tivement percer S^v^rien au milieu de
la bataille et lui dta la vie. V^rus, en-
voy^ par Marc-Aurdle, vengea sa d^-
faite.
Une revolution importante cban-
feait Tancienne dynastie des Arsacides
e la Perse; Artashir commen^ait la
dynastie nouveUe des Sassanides, Tan
226 de notre ^. Khosrov, roi d'Ar-
menie et Arsacide, comprit quelle
importance avait pour TArmenie ce
diangement politique qui le mena^iit
personnellement. II declara done la
guerre i Artashir, et Tobligea k quitter
e," JJvraism, (Armbnte*^
la Perse pour s^enfuir dans I'lnde.
L'usurpateurprevitau'il ne peurrait
jamais assurer sur sa tete la couronne ,
tant*qu'il aurait un adversaire aussi
redoutable que Khosrov ; il voulait s*ea
d^faire II ouelque prix que ce fdt. II c;ut
recours k la perfldie d*un certain Anag ,
chef de la maisen des Sur^iens Pan-
lavi, alli^ aux Arsacides, il est vrai,
mais devoue k la nouvelle dynastie per-
sane. II fut convenu qu'Ana^ se reti-
rerait en Arm^nie avec sa famiUe, pr^
du roi Khosrov, comme proserit poli-
tique, qu'il prendrait les apparences
d*un sincere d^vouement, pour trouver
plus ais^ment le meyen de le surprenr
are et de le tuer avec tous les siens.
Pendant cette fuite simulee, sa femnie
mit au monde un fits, qui convertira
ce pays au christianisme. Le nem de
cet enfant est saint Or^goire, sur-
nomm^ rilluminateur. Admirable con-
duite de la Providence, qui fait du fils
de Tassassin de Khosrov rap6tre de
rArmenie^ Tami et le guide spirituel
du fils du roi assassin^!
Car, pour reprendre le fil des ^v6-
nements, nous dirons au*Anag, hono-
rablement re^ par Knosrov, captiva
facilement sa cenfiance et fut ^lev^,
en peu de temps, aux premieres digni-
ty. Le trattre saisit la premiere occa-
sion de frapper son bienfaiteur; il le
poignarda done, et cherdia son salut
dans la ftiite. II ne put echapper k la
poursuite des gardes du roi , qui le mas-
sacrerent. Toute sa famille fiit enve-
lopp^ dans une commune proscrip-
tion, a Texception du jeuneGr^oire,
mie sa nournce, pieuse femme chr^
tienne nomm^ Sophie, emmena k Ce-
sar^. Ul il fut baptist et ^lev^ dans la
foi chr^tienne. D*un autre c6te, le
jeune Tiridate, fils de Khosrov, fut
conduit a Rome, dans la crainte que
quelque criminelle tentative n'^teignlt
dans sa personne la race arm^enne
des Arsacides. Tiridate jnrandit et se
forma dans la ville, au milieu des exer-
cices militalres; il fit mdme parmi les
legions romaines plusieurs campasnes
centre les barbares , dont les premieres
invasions mena^aient Tempire.
Diocl^tien, pour r^mpenser sa va-
6
82
L'UIflVERS.
leor, voikhit lui reodre le royaume
dentil avait €U d^poss^^, ei^ant,
avec raison , que oe prince, devena le
ild^e alli^ des Romains, ferait de la
puissance arm^nienne le plus aolide
fempart de rempire centre la puis-
sance persane. Tiridate, arri^r^ en Ar-
m^nie h la t^te de quelques troupes
rorAaines, fut re^ avec entbousiasme
par les principaux chefs du pays, et,
en peu de temps, il recouvra tout le
territoire occupy par I'ancienne mo*
narchie arm^nienne. Alors Gr^oire
vient de G^ar^ h la cour du roi; sea
pr^ications ^vang^liques alarment Ti-
rklate encore idolAtre, gui, tenant en
outre a ddcouvrir son online , ordonne
qae le saint soit |>r6cipite dans une d-
terne, od il langult quatorze ans.
Le roi, frapp^ d'une maladie que
Ton juge incurable, est miraculeuse-
ment gu^ri par le saint retir6 de la ci-
teme. II se convertit h la foi de J6sus-
Christ, et le christianisme s'^tend ra*
ptdement par tout le royaume.
Apr^s la mort de Tiridate, Sana-
droug II, prdfet de la viile de Phafda-
garan, se revolta, et appela plusieurs
tribus barbares campees au nord de
TArnY^nie, qui se jeterent sur les pro-
vinces limitrophes. Alors le patriarche
Verthan^ alia tronver lempereur
Constance, pour le supplier de fairo
mooter sur le tr6ne d'Arm^ie Rhos-
rov, fils de Tiridate et son l^itime
successeur. « Ainsi , hii dit-il , nous
serons soumis ^ votre puissance, qui
vtent directement de Dieu , et non pas
a oelle des Perses, cette nation sans
Dieu. » Conform6ment k sa demande,
Rhosrov ful reconnu roi.
Diran, son successeur, apostasia la
foi du Christ, h Texempfe de Julien,
dont il osa placer I'effigie dans T^glise
patriarcale, pour que les fidties lui
rendissent un culte public. Ce scandaie
foumitau patriarche Housig Toccasion
de d^ployer son courage. II entra dans
le temple, saisit Timage et la foula aux
pieds. Le saint tronva la recompense
de son E^le dans le martyre.
Aradiag, successeur oe Diran, ex-
ctta par sa dtfecKon la colore de Va-
ienfinien, qui tua Tiridate, son frere.
qu'il tenait en otage. Neraea, rittwlic
patriarche de ce temps, vfnt i Omw-
tantinople, et, par sa mMialfon pni-
dente , op^ une rdcondliatiott qm an-
rait €U durable, si Valens ii*avait
mopin^ment suooM^ k VateotiDien,
dont la mort laissait le trdne vacmt,
et s*il n^avait ouvert sod r^gne far an
acte d'hostilite, en envoyant des trou-
pes contre FArmenie.
Th^odose, ^iu peu de temps apres,
devient plus favorable aux Amteiens;
il ^tablit Pap h la p^aee de sob pere
Arscha^, que le roi de Petse taoait
prisonnier dans ia forteresse de VOu-
ofiC)- Comme oe prince s'6tait rebelK,
il fut strangle par ordre de Tempe-
reur.
Varazdat , fils de Pan , toit en otag«
a Constantinople. Sa rorce inoonipara-
ble le foisait nommer par les Grecs
THercule arm^nien; son courage n*e-
tait pas moins grand, et il en anlt
fourni des preuves en plusieurs occa-
sions. Th^ose Tenvoya r^gner a b
place de son p^e; mais, par une juste
d^Gance que 16gitimait la conduite des
rois pass^, trop prompts a otdifier
leurs devoirs d'ob6issanoe dans h
bonne fortune, il garda sea deux ffis
Arschag et Vagharsdiag. Theodosr
agissait prudemment , car Varazdat r-
fiisa bientdt de reoonnattre son suze-
rain. L'exil fut la punition de ce ddit,
et ses deux fils forent en mtee temps
pr^posfe au gouvemement de PAr-
mraie.
La cour de Constantinople esperait
que la rivalitg et Topposition d*int6rto
tiendraient respectivement les deux
princes en bride, et affaibliraient pro-
portionnellement leur puissance. La
politique de Th^odose ^ft savante; il
cherchait a d^truire d^un seul coup b
Suissance de rArm^nie, perp6tuel foyer
e guerres et d'hostilit^; car le peupte
arm6nien ob^issait toujours k regret
au peuple grec, dont il n*admettait
plus le symbole religieux, et d^ qu'il
(*) On la nommait ainsi paroe que ks
detenus qui y 6uueDt enfermo ne sortaicnt
jamaii de ces cachots , oe mii rappelle kt
oablicttet des chlteaiu ttodenifs.
arm£nie.
en
se sentait la force de secouer le joug it
\e faisait.
La roort de Vagharsdiag et la fai-
blesse d'Arsace permirent aa roi de
Perse d'entrer en Arm^nie et de s'em-
pirer de plusieurs provinces. Ensoite
il fit avec Fempereur Th6odose un
traits qui partageait le royaume entre
les Romaios et les Persans. Toutefois
on laissa encore quelaue temps one
forme d'independance a ce pays con-
quis; aiosi Schabpour et Vrham-Scba-
bouh ooDserv^nt le titre de roi.
Aprte eux , le sceptre passa aaz mains
du jeane fils de Vrham-Schabouh, le-
3 net opprima tellemeot ses sujets pen-
ant un r^gne de six ans, oue le roi
de Perse Tenferma dans la torteresse
de rOubli, et ainsi s'^teignit en Arme-
nie la race des Arsacides (*).
(*) Nous donnons ici le tabieaa de U
seconde bnnche de U maison dei Anacides.
Let auteun arminieDs ne peavent a eax
seuls fournir sur cetle quetdon dei reosei-
gnements sufBsanU. II &11ait consalter,
comme M. Saint-Martin Ta fait, les faisto-
riens des autres peoples.
At.J.C. 38. Ancham, Mre deTigra-
ne I*', r^ne h t/Aeaat par I'ordre d'Oro-
des I*r, roi des Parthes. H est encore ap-
pele , par Josephe et par Moise de Kboren,
Monobaxe et Manovsz. Dans la dironique
syriaque de Denys de Tel-Mahar , il est
nomme Maanoa Sapheloul.
xo. Abaanou, fils de Sapheloul.
Dep. J. C. 5. Abgare, fils d'Ancham,
sumomme par les Sjriens Oucbama (le
Noir) , et appdi Monobaze , par Josephe ,
comme les antres princes de sa fiimille.
3a. Anane on Ananoim,fib d'Abcare,
regno a Adesse, et Sanadroag, fils d*une
HEur d' Abgare , ^^ne sur una partie d«
VAnnenie et de rAdiabeae.
36. Sanadrong fut perir le fils d*Abgare,
et r^e seuL Ce prince eat appeli late
par Josephe. Des descendants d' Abgare eon-
tinuerent de regner i ^dcsse sous son an-
toritd.
58. levant, ism par sa mere de la race
des Arsacides , s*empare , apres Sanadrong ,
de la portion de TAfmenie qui lui apparte-
nait Des descendants d'Abgare et d'Izate oii
Sanadroug continuireot de regner a tdtmt
«t dans VAdiabene. tirovant etendit aon^em-
pir«^ MIT toute IWrmenie , sans doitle spros
Alors le partage d^finitif du royaunie
s*op6ra, et la partie orientale la plus
la mort de Tiridatel<% frera de Yologte I«%
roi des Parthes.
78. Ardaches HI , fils de Sanadroug, eal
retabli sur le trdiie de son pere par YolO'
gese I*', et r^e sur toute I Armenie. II est
appel^ par les Grecs Ezedares on Axidves.
if tut plusieon fols retabli et chan^ par his
Romams. II eut pour oomp^titeur n prince
parthe, nomme Parthamasiris, qni fvt plu-
sieurs fois plaoi snr le tr6ae par les rois
parthes et chasse par Tnyan.
ISO. Ardafut lY, fib d*Aidaehes Ili,
qui ne re^ que quelques jours.
xai. Dwaa I*', son frere.
14a. Tigrane IT, son frere. Ce roi fut
chasse par Lucius Verus , qui met sur le
tr6ne eu sa place, vers Fan i6x, un cer-
tain Soheme, qui itui issud'une autre bran-
che de la fiuniUe des Arsacides.
178. Yagharsch on Yologese.fils de Ti-
grane YI,
xpS. CboflPo^ooKbosrov I*', sumomme
Medz (le Grand), son fils, assassin^ par
Anag, prince Anacide de Perse.
a 33. Ardeschir, premier roi de Pane,
de la race des Sasaanides, se rend maitre de
TArmenie, qui reate soumise wax Persans'
pendant vingt-sent ans, sous ii» regno et
sous cdni de son nls Scbahpoor I*'.
^Sg. Dertad ou Tkidaie n , sumomme
Medz (le Grand), fils de Chevoea. II fut
retabli par les Romains aur le trdne de son
pere. Le gboenA Ardavact Mantagouni , qui
ravait eleve et tir^ des mains des Persans ,
fut eM sbarabied, et eut sous son regne la
phis grasde part au gonvcmement. II est
sans doute le m^me qu'nn certain Artabas-
des, que Tribeilkis PoHion (in Yrier. )
appelle roi des Armeniens.
314. InlerrA^aprwlamartdeTiridate.
Sanadroug , pnnce Anaeide , usnrpa alors
le titre de roi dans le nopd de rAmMe ,
et ftigour, de b raee das ArdarounieosY eu
fit autant dans le midi. Mais leur usurpation
fut deoouitedmifo.
3x6. Chosroes ou Khosrov 11, uxmrnuwui
P*bok'hr ( le Petit) , Os de Tiridale.
3a5. Dinm U, aan file.
S4t. Arsace ou Anefaag Ul^aon fils.
370. Pap, son fils, appelle nm, par
Ammien MarisalliB.
377. Yanurtad, fils d'Anob, hmd'Ar-
sace in.
383. Anace lY, et YaiarMceon Yaghsr
schag If , fils de Pap.
6.
84
L'UiMVERS
ricfae et la plus vaste resta li la Perae.
Le gouYeraeur charge de son adminis-
tration prit le titre de marzban, ou
garde oeiafronHire, La condition du
peupl6 armenien devint fort triste : il
etaii sous le joug de deux puissances
rivales et ennemies, qui n^avaient
d^autre int^rSt commun que celui d^af-
faiblir et de pressurer le malheureux
royaume dont dies se disputaient les
lambeaux. Aux horreurs de Tanarchie
et de la ^erre civile se m^I^rent les
persecutions du fanatisme religieux.
La partie persane de rArm^nie ^it
attirte vers le magisme, soit de vive
force, soit par tons ies autres genres
de seductions possibles: la partis greo-
que, tout en restant diritienne, n*d*
tait pas cependant en unit6 de conunu-
3SI. Anace IT, seuL
3S7. Le royaume d^Armenie eit pulagi
entre les Romains et les P^nani. Anaoe
ooDtioue de souvemer k portion oeciden-
tale , comme vasial de rempereor de Cons-
taatinqple; Le roi de Bene , Schahpour m,
donna la partie qui hu ^it echue k Kbot-
rov ni , isio d*one autreliranche de la race
det Anaddes.
389. Apret la mort d*Arsaoe IT, I'empe-
reur grec donna le fouTeraement de TAi^
menie greoque an general XLaiavon, fiU de
Sbantarad, de h iamille des Gamiaragant,
issue de la noe des Anaddes de Perw. Ce
S^eralsesoumitbient6t apresiUosrov m.
Si se reconnut alon tributaire de Fempire.
tte oonduite mtontenta le roi de Perse,
Babram IT ; Kbosrov fut alon detrdne et
enfermi dans la forteresse de rOobli dans
Susiane.
39ft. TrbanKSrfwbouh on Bahfam-Sdudi-
penr, frere de Uosrov m , place siir le
tr6ne par Bahram IT.
4x4* Kbosrov m, retabli apres la mort
de son firere par leroi de Pene tadedjerd I«r.
41 5. Sdiaboub ou Schabpour, fib du roi
Jetdedjerd I«r.
4x9. Interrtgne. Le patriarohe Sabag II,
et son neveu le g^eral Tartan, de la race
des Mamigon^ans, prince de Diunon , gou-
▼enwrent T Armenie.
4aa. Aidadies TT, nommi ensuile Ar-
daschir, fils de Trbam-Sdiaboub , est placi
sor le tr6ne par le roi de Perse Babram T.
41S. II est ditrdni par le mAme prince ,
et le rojranme des Arsacides est detruit.
nion avec I'^glise de Constantinonle.
Ainsi les Ann%niens 6taient diTiaes I
la fois par la oonqu^te et par la doc-
trine (•).
(*) MABIBASS ou OOUTKUrXUmS SOMMBS PAS
I.BS aOM DE PKBSK.
4a8. Teb Mibir Scbabpour, nommi per
Bahram T. Le prince Taban, de la race des
Amadounicns, fut charge de radministn-
tion inlerieure dn pays , et Tartan Mami-
goq^n , prinoe de Daron , sumommi Bfedi
( le Grand^ , fat pendant dix-nenf ans sban-
bied ou gen^ralissime.
44a. Tasag , prinoe des SiounieDB, Domme
martban par Jesdedjerd II, roi de Pene.
45a. Adronnizt-Aracfaagan, Penan, BOB-
BIN aossi par Jesdedjerd II.
464. Aderveschnasb-IoanentbtiifBBRan,
nomm^ per Fyrouz.
481. Sabag, asbied on chevalier, de k
raoe des Pagratides. U se revolta oontre la
Penans, et momul en eombattant oontre eui,
apres un goureniement d'un an et sept mois.
483. Schahpour - Mihran^am , Persan,
nonuni par Fyrouz, gouverne pcn<iantsix
mois. Nikbor>Teschnasb-Tad, Pwsnn,
me ausii par Fyrouz, gouveme
quatremois.
484. Ant^n, Persan, nonime par Fj>
rouz , pendant sept mois.
485. Tabam,8urnommeMedz(leGnBd)»
de la race des Mamigoneans, prince de
Daron, fils de Hmaieag, fr^ de Tartan le
Grand. II s*etait revolte contre les Persan,
et il contraignit le roi Balasch de le nommer
manban. u fut ensuite confirme dans aa
digoite par Kobad, fi«re de Balasch -et fib
de Fyrouz.
5i z. Tart , frere de Tahan. Tl se revolu
oontre Kobad , qui le destitua et renuncna
prisonnier k Gtesipbon,
5x5. Poarzan,Persan,nooune par Kobad
5iS. Mejcj , prinoe de la race des Kenou-
niens, nomme par Kobad, et confirme par
son fils Chosroes le Grand, ou Koarou-
Anouschrewan.
548. TenscbabouhouTenschahpour, Per>
san, place aussi par le m^e roL
55a. Tetchnasrahnn , Penan, plac« aussi
par le mteie roi.
558. Taraztad , Persan, nonuneaoasi par
Chosroes.
564. Souran-Djihrveschnasbouhen, Per>
san, eouverneur plao^ par le mdme roi. 11
lot tue par Tartan, prince des Blanugoacaiis
qui s*elait r^olte.
ARM^^MIfi.
8&
Les Perses exer^ient une propa-
gande active pour arr^ter Ite progr^
u diristianisme, et pour ^ndre les
£rincipes du magisme. En Fan 441,
Mihir Nerseh, g6n6ral persan, fiit en-
voy^ avec beaucoup de prtoes et de
soJdats pour remplir une mission relf-
gieuse. Menaces, orients et proroes-
ses, tout fut ein{Hoy6 pour gagner ou
epouYanter les princes. II leur adressa
une proclamation qui contient un expo-
se curieux de la doctrine de Zoroastre,
et de la manidre dont on concevait h
cette ^poque le christianisme. En voici
le contenu :
« Mihir Nerseh aux Arm^niens, salut.
« Sachez que tout bomme habitant
sous le cid, qui ne suit pas les pr^-
ceptes de la religion de nos p^res, est
sourd, aveugle et s^uit par les g^nies
d^Ahriman. £n effet, avant Texistence
des cieux et de la terre, ie grand dieu
Zervan, ou le temps som homes , of-
frit un sacrifice pendant mille ann^s,
en disant : « Peut-£tre aurai-je un fils
nomm^ Ormuzd, qui fera le ciel et la
terre. « Or il conqut dans son ventre
deux fiis. Fun parce qu'ii offrait des
sacrifices, et I'autre en prof^rant le
mot petd-^tre. Lorsqu'il oonnut qu*ils
^taient dans son ventre, il dit: « Celni
qui viendra le premier, je lui donnerai
la royaut^. * Mais celui qui avait €t6
con9udans ledoute, lui fendit le ventre
et sortit par cette ouverture. Zervan
lui dit : « Qui es-tu? ~ Je suis, t6-
pondit-il, ton fils Ormuzd. » Zervan
571. Tartan, surnomme Pliok*hr (le
Petit ) prince de Daron , de la race des Ma-
m^neans, fils de Yasag, fils de Yart,
prince independant , soutenu par les Grecs :
ibais & h fin il fat dliassi par les Persans.
578. Mihran-Djihnreghon, Persan, nom-
tak par Chosroes le Grand.
5o3. Sempad, surnomme Pazmaiagfath
( le Yictorieox) , de la race des Pagratides ,
marzban d'Ann^nie et da pays de Tcrgan,
nomm^ par Chosroes n , ou Khosroo-Perwiz.
601. Darid, prince de la race des Sahap-
bouuens, nonuni par le mteie roi.
6«5. Yarazdirots, de la race des Pagra^
fides, fils de Sempad, nomme aussi par
lUiosrou Perwig, gouveme pendant sept
ans.
lui dit: « Mon fils est lumiuctix et ex-
hale une affr^le odenr; toi tu es t6-
ndl)reux ex ami du mat. » Gomme il
pleura am^rement, il hii donna la
royaut6 pour mille ans.
« Ayant engendr6 un second fils, il
le nomma Ormuzd , etenleva la royaut^
Ik Abriman pour la lui ddnner, en di-
sant : « Puisque j'ai offert des sacrifices
pour toi, c'est a toi maintenant d'en
ofirir pour moi.
« Et Ormuzd fit le ciel et la terre , et
Abriman cr^ centre lui lemal ,divisaQt
ainsi en deux les cr^tures : les anges ,
2ui viennent d'Ormuzd , et les dewsC).
!'est ainsi que tons les biens existants
aux cieux etJci-bas viennentd'Ormuzd ;
tandis que Abriman est I'auteur de
tout le mal qui arrive dans les deux
mondes. De m^me Ormuzd a fait tout
ce qui est bon sur la terre , et ce qui
n'est pas bon, c'est Abriman qui ra
fait. Ainsi Ormuzd a cr^ I'homme ,
et Abriman les maux , les maladies et
la mort. Toutes les inimiti^ et les ^v^
nements fAcheux , les guerres pleines
d^amertumes sent les ceuvres du mau-
vais principe; et les choses beureuses,
la puissance , la gloire , les bonneurs ,
les avantages du corps, la beauts du
visage, I'^loquence, la long6vit6, tout
cela est le produit du bon principe.
A tout ce qui est diffi6rent, il s*y
trouve m^M un ^l^ment mauvais.
« Tous ceux qui disent que Dieu a
ct66 la mort, et que le mai et le bien
proc^ent de lui , sont dans Terreur.
cette ptmition , parce qu'il avait mang^
une figue. Cependant si Thomme ne
porte pas d'ordinairc cette haine k un
autre nomme, encore moins Dieu aux
autres bommes ; celui qui dit cela est
aveugle et sourd; il a ^t6 seduit par
les dews d* Abriman.
« II est encore une autre erreur que
oommeUent ceux qui disent que Dieu ,
le crdateur des cieux et de la terre , est
(*) Norn des mauvais genies, dont- on
croit relrouver le radical dans les mots i/ia-
foAsn, devil, etc.
#«
L*UniV£RS.
desoeodu et est ne d'une femme nom-
ine Marie , dont le aiari s'appeUe Jo-
seph. Beaucoup sa soot ^ar^ a la
auite de c^ homme. Si le pays des Ro-
maiDS est enseveli dans la plus profonde
ignorance, et 8*il s*est s^par^ de notre
religion par£ute, c'est qu*il ne s'in-
quiete pas du mal qui peat en rdsulter.
Pourquoiy vousautreSfVOOs linez-voas
aux m^mes ^arements? La religion
que suit yotre mattre est aussi la vfftre ,
et nous cberchons k vous convertir ,
etant obliges de rendre oompte un jour
a Dieu de vous.
« Ne Yous fiez pas a vos chefs que
vous noromez Nazar6ens, car ils sont
tr^s-fourbes ; et ce qu'ils vous ensei-
J^neot pr leurs paroles , ils ne peuvent
e r^liser par leurs oeuvres. Manger
de la viande, disent-ils, n'est pas un
p^he, et eux- monies refusent d'en
manger. II est i>erniis de prendre une
femme, disent-ils encore, et cepen-
dant ils refusent de regarder les rem-
mes. C'est un ^rand p6ch6, selon eux,
d*amass€r des nchesses ; et ils estiment
plus la pauvret^ que I'opulence. lis
respectent la misere et ils condamnent
les riches. Ils se rient de la fortune,
et m^prisent la gloire. lis aiment les
v^tements grossiers, et ils pr6f&rent
ce qui est vfl aux choses honorables ;
ils louent la mort et m^prisent la vie ;
ils d^aignent d'avoir une post^rit6,
et ils honorent le c^libat. Si vous les
ecoutiez, et si vous vous ^loigniez de
vos femmes, la fin du monde viendrait
promptement.
« Mais je n'ai pas I'intention de vous
mettre par ecrit toutes leurs erreurs ,
car il y a encore beaucoup de choses
qu'ils disent. Le pire de tout ce que
nous vous avons 6crit, c'est de pr6-
cher aux hommes que Dieu a ^t^ mis
en croix, qu*il est mort, qu'il a ^t6
enseveli , qu'ensuite il est re8suscit6 ,
et qu'il est mont^ aux cieux. N*^tait-il
pas digne de vous de jueer ici des doc-
trines aussi d6testables f Les dews ne
sont pas m^hants ; ils ne peuVent ^re
ni pris, ni tourment^s par les bommes ;
bien moins encore le Dieu cr^teur de
tous les ^tres ; choses absurdes , que
nous rougissons de r^p^ter. »
Les ^v^ues , assemble par fe pa-
triarche Joseph I**, protest^nt centre
oet 6dit , et demeur^rent , avefc la masse
de la nation, in6branlablement atta-
ches k la foi chretienne. Quelques
princes apostasi^rent Get exemple
produisit d'heureux r^ultats, chose
assez extraordinaire , car le people , in-
dign^decette Idchet^ , courtaux armes ;
le patriotisme est exalte par le zele re-
ligieux, et les ^trancers idolfttres sont
repouss^. Les nomnreusesforteresses
dont les Persans avaient courert le
pays, sont d^truites; et tout ce qui
tombe sous la main des Arm^niens est
emmene en captivite , hommes , femmes
etenfants. Les temples des mages sont
renvers^, et les omements qni les
d^corent servent h embellir les 6glises
du vrai Dieu. De cette maniere, dit
I'historien £lis6e, a la place des idoles
on vit briller la croix du Christ re-
dempteur, et tous les cosurs s^onvri-
rent k Tesp^rance.
Comme la puissance des Perses etait
trop formidable pour que les Arme-
niens esp6rassent pouvoir r6sister seids
h de nouvelles attaques, et commc,
d*un autre c6t6, ils savaient que llin-
miliation des demi^res d^faites avait
allum6 diez leurs ennemis la soif de
la vengeance, ils songerent a chercher
un appui et des ddfenseurs parmi les
Grecs. lis en voydrent done une ambas-
sade k Constantinople. L'empereur
Th^odose expirait, et Maroien, son
successeur, partisan troo zele du con-
cilede Cbalo6doine, renisa de prater
son assistance ii des schismatiques.
D*apr^ les conseils de quelques pa-
triciensmal intentiono6s, il enroya un
ambassadeur a la cour de Perse , en lai
recommandant de traiter sacretement
avec le roi. II promettait en outre de
s*opposer k toutes tentatives d'insur-
rection des Arm6niens. Ceux-ci ne lii-
rent point d^courag^ par cette defec-
tion; reunis sous le commandemeot
deVartan, ils alldreot presenter ba-
taille a Tennemi sur les frontieres de
la Gtorgie, et remport^nt une tic*
toire conflate. Le roi de Pme aooourt
venger la dtfaite de Tapostat Vasag ,
son general , et trouve Vartan dans lea
ARMANI E.
plaines d'Artaxate. Vartao avait eavi-
roo 8oiiuint(B-six mille bommes soqs
ses ordres, tous dispos(68 a Ycrser la
derniere ^outte de leur sang pour la
oonsenration de leur foi et de leur pa-
trie. Les ^vdques, les pr^tres et les
docteurs de la nation ^taient venus se
roller aux troupes, non pour prendre
une part active au combat ,.mais oour
releTer le courage 46S soldats par leurs
exhortations.
Le 2 juin de Tann^ 451, les deux
arroees en vinrent 9ux mains. « La ba-
taiile, dit le m^me faistorien £lis^,
56 livra a la fin du printemps; et les
prairies verdoyantes furent d^vast^
par la foule. Le coeur saignait a la vue
des monceaux de cadavres ; ajoutez a
ce spectacle , les lamentations des bles*
ses , le rdle des mourants , la fiiite pr^
cipit^e des Idcbes, des feromes; les
gemissements des enfants, les plaintes
des parents et des amis , et tous aures
encore une faible id6e de cette scene
d^hirante. « Le brave g6n^ral Vartan
cueillit , dans oette joum^ , la palme •
du martyre ; il p6rit au fort de la m^
tee « et sa mort ne fit c[u*exciter les
adorateurs du feu, qui firent main
basse sur tous ceux qui r^sistaient.
Les d6bris de Farm^ arm^ienne se
r^fugierent dans une forteresse , que
le manque de vivres et les assauts rei-
t^r^ des Persans les forewent bientdt
d'abandonner. Sept cents hommes se
frayerent un passase autraversdePar*
in& ennemie, et opererent leur retraite;
le reste fut massacre.
L'apostat Vasag fut investi du gou-
vernement du pays ; mais ses compa-
triotes rouffirent de $e soumettre a
son autorite. Aussi les voyait-on de-
serter en foule les villes et les bour-
gades ; T^pouse quittait sa coucbe , et
le nouveau mari^ la chambre nuntiale;
les vieillards ^taient arracbds a leur
demeure , et les petits enfbnts au sein
de leurs m^res. Les jeunes bonunes
et les jeunes filles fuyaient dans les re-
traites inaccessibles des montagnes.
Yivre a la maniere des b^tes sauvages
au fond des antres, leur paraissait pr^
ferable k une vie tranquille dans leurs
demeures , achetee au priz de Tapos-
87
tasie. lis se nourrissaient , sons mur-
murer, d'berbes et de racines, ou-
bliant leurs mets aoooutura^ ; et les
vodtes de leurs souterrains leur sem-
blaient aussi douces a babiter que de
riches appartements lambriss^. Les
chants quils fiaiisaient entendre ^taient
les psaumes, et IXcriture sainte ^tait
leur lecture. Ghacun se tenait lieu a
soi-m^me de temple et de pontife;
leur corps 6tait le saint autel , et Tlime
la victime de I'holocauste. lis suppor-
taient avec calme la perte de leurs
biens; et jamais il ne revenait a leur
m^moire qu'autrefois ils les avaient
possed^. Toutes leurs esp^rances
etaient en Dieu ; et la seule demande
qu*il8 lui faisaient, c'6tait qu'il ne les
exposdt pas h devenir les temoins de
la ruine de sa sainte £glise.
Telle est la peinture touchante que
les historiens contemporains nous font
des malheurs de TArm^nie; et cepen*
dant ils n'^taient en quelque sorte que
le prdlode de plus effroyaoles d^stres
qui ne cesserent de Taocabler.
La famille des Vahan fournit de
nombreux chefs distinguds par leur
valeur, et qui organiserent contre la
Perse une guerre sanglante de par-
tisans. Ils reussirent k confirer la di-
gnity de marzban k Sabag , de la fa-
mille des Pagratides ; mais TArmenie
resta toujours soumise k la Perse ; et
le schisme religieux , alors croissant ,
favorisa les vues des Chosro^, enje-
tant de nouvelles semences de division
entre les Grecs et les Arm^niens.
«£n ces jours, dit Jean Thistorien,
parut Mahomet , audacieux novateur ,
qui pretendait ^tre envoys de Dieu
Eour pr^cher les verites de la foi d*A-
rahara et de la loi de Molse. Injuste
dans sa justice , d^honore dans ses
honneurs, parjure dans ses serments,
ses offrandes ne pouvaient £tre agr^^es
de Dieu , et sa piti6 6tait cruelle. Cela
devait ^tre; jamais le filji de Tesclave
n*a pu ^tre Tn^ritier <^ Tenfant libre ;
et le fiddle n'a jamais pu ceder ses
droits a Tincroyant. «
Les forces d^ Tlsma^lite etaient
Srandes, et il d^fit toutes les troupes
c Tempefeur Heraclius. Bient6t la
Of?
L'UNIVEaS.
plaine de T Ararat fut envahie; Tovin
nit emport^ d*assaut. Un norobre
considerable d'habitants perdit*la vie.
Trente-cinq mille furent yendus et em-
men^ dans la Syrie.
La force de fa nation ^tait totale-
ment ^teinte, quand le voile sombre
du Sud fut dMiir^, et qu'il s'^lera
contre nous un ventmortef et brdlant,
qui , dess^ant toutes lesjeunes plan-
tea du jardin denotre£glise , ies fi^trit
de son souffle: alors, au bout de peu
d*annto , la race des Isma^iites , apr^
avoir mis la confusion et le d^rdre
dans le Nord , s'empara de tout le pays.
A cette Tue, Theodore et d^antres
grands, saisis d*6pouvante, se sou-
mtrent a oes brigands , faisant un pacte
avec la mort et une alliance avec Ten-
fer. Us avaient abandonn^ le parti de
Tempereur , qui , aprte avoir rassem-
bie one armM nombreuse , vint en di-
ligence en Arm6nie pour ies soumettre.
li ne trouva d*ob^ssants que Ies G^r-
giens, ce qui redoubia la colere de
Constantin , en sorte qo*il pensait il
exterminer notre nays. Beureusement
Ies supplications du patriarche Ners^
changerent la resolution du roi, qui
vint avec des sentiments pacifiques
dans la ville de Tovin , et pnt son lo-
gement dans le palais patnarcal (*).
Apr^s un ou deux engagements , Ies
Arabes rest^rent mattres de TArm^-
nie , et prirent pour otages Ies femmes ,
Ies fils et Ies nlles de tous Ies princes
du pays. Theodore accompagna Ies
Arabes en Syrie avec toute sa maison ,
et il V raourut. Son corps fut rapports
et depose dans le tombeau de ses an-
otftres. Lorsque le patriarche Nerses
cut appris sa mort, et qu'il ne vit plus
le pays inquiete par Ies Arabes, il re-
touma a son siege, et , de concert avec
Ies grands , il nomma prince de I'Ar-
menie Hamazasb,Mamigonean,homme
qui , outre son amour pipur Ies lettres ,
et son instruction variee, s*effor^.ait
encore de computer la gloire de la va-
leur de ses anc^tres.
Aflranchis du joug onereux et dur
des Arabes, Ies Anneniens se sou-
O Jean, pair., pag. 147, r«a.
mirent a Tempereur, a oni Nerses de-
manda qu'Hamazasb fut cree cmo-
palate et gouvemeur de rArmenie.
informe de cela, remir fit massacrer
tous Ies otages des Armeniens, au
nombre de plusieurs mille. A partir
de oe jour, i'esprit de disoorae fut
soscite par Dieu, et jete au mllico du
camp des Arabes, qui se leverent Ies
uns contre Ies autres; et, tirant leor
glaive, firent entre eux un bornble
carnage. L'emtr lui-m#me fut toe, et
on lui en substitua un autre (*).
Les troupes arabes d^gypte , en fai-
sant leur paix avec Pemperenr, em-
brasserent la foi chretienne ; et seize
mille environ recurent le bapt^me.
Mava, eiu generaf, apres le meurtre
de I'autre emir, eut la domination uni-
verselle des Arabes, et il fit regner la
paix dans tout son empire.
Hamazasb, apres avoir e^ rtr&a
trois annees de la dignite de curopa
late, arriva au terme de sa carriere,
mourot, et fut reuni a ses peres.
Sempad le Pagratide pnt en maio
le commandemeni. Alors Merwan faX
envoye dans TArmenie comme o»fi-
gan (**), et il livra defrequents ooiriiats
a la nation. Tous ceux qull prenait,
il les tuait et les mettait en pieces sur-
le-champ. Vt\e de Sevan , situee dans
le lac de Khegham , ne fut pas empor-
tee des la premiere attaque , roais un
ou deux ans pins tard. Elle leur fht li
vree, et tous ceux qui se trouvaient
dans la forteresse furent emmenes cap-
ti£s; et, apres avoir pris tout le butin,
ils la detruisirent de fond en comble.
L'an 85 de Tdre des Arabes , Abd-el-
Melek etait calife. Ses troupes gui
etaient en Armenie mirent tout a fai
et a sang, comme si le demon avait
souffle en eux sa rage. Au moyen de
promesses trompeuses, de fausses es-
perances et d^autres seductions, on
par vint a reunir dans un meme lieu les
corps formes de la noblesse a cheval .
et lis inscrivirent leurs noms dans Ic
(*) Jean, patr., pag. i63, 174.
(**) T/osdigan etait un prefet ou prooonsuK
charge de regir Ic pays dont il recevaii Ic
gouvemement au nom du calife.
arm£nie.
89
tribunal, comme si Ton devait leur
distribuer ia solde annuelle. Enstnte ,
lorsqu'iis furent d^sarmes, on les
renferma dans l*^lise de la ville de
r^akhdchivan; puis, ayant mure les
portes avec des briques , on leur bou-
cha aiDSi toutes les issues. Ces infbr-
luB^s , se Toyant surpris , cbant^rent
le cantique des enfants de la foumaise,
tandis que leurs impitoyables bour*
reaux , apr^ avoir enlevd le toit de
r^lise, la remplirent de feu , dont les
flammes s'^lev^rent avec plus de fiirie
que celles de Babylone, au moyen des
inati^res inflammables , du toit en bois
de r^glise, et des briques ardentes que
Ton versait sur eux; et cqiendant leur
cantique d'actions de grdces ne cessa
qu'avec le dernier soupir. Ces bar-
bares, pour se d^livrer de la crainte
que leur inspirait des soldats aussi
braves, firent prisoaniers ceux que le
feu avait^pargn^, et les conduisirent
li Tovin , a'ou ils les envoy^rent sous
bonne escorte h Damas {*).
Abd-el-Melek eut pour successeur
au califat son fils Velid, qui, 6tant
mort au bout de peu de temps , fut
remplac^ par son ir^re. Puis vint Omar,
qui nt tourmenter cruellement Vahan ,
lequel , apr^ avoir fait les plus belles
actions pour le nom du Christ , re^ut
a Houroudjaph , vilje de Syrie , la cou-
ronne du martyre.
Les fonestes effets de Tesprit de
parti, qui, dans les matidres reli-
gjieuses, d^ff6n^re toujours en fana-
tisme , sont oien sensibles dans ce fait
rapports par Je m6me historien, avec
un air d'aporobation tacite , bien qu*on
voie des chr^tiens recourir a I'inter-
vention des musulmans pour s^vir
centre d*autres ebr^tiens. « Pendant
qu'£lie ^it patriarche, dit Jean , un
certain Nerses, archev^que d*Alba-
nie , ^gar^ par un orgueil impie , se
d^clara le partisan de la secte ae Chal-
cedoine; et, ayant gagn^ la princesse
qui etait aiors charg^ du gouverne-
ment de cette province , ils travaillaient
de concert h precipiter le pays dans la
scandaleuse ner^sie de Leon , qui fait
(•) Jean , pair. , pag. 1 6? , 17',.
de J6sus -Christ un homme. Ce fait
6tantvenu^ la connaissancedes grands,
lis en avertirent le grand patriarche
Nerses, qui, malsr^-le zele qu'il d^*
ploya , et les nomoreuses lettres qu'il
leur envoya a deux reprises diverses ,
pour leur expiiquer la vraie foi, ne
put les ramener de leur funeste er-
reur. Alors le patriarche, mettant a
execution les conseils de sa sagesse
et de sa longanimity, ^rit une lettre
au calife Omar, dont voici la teneur :
« Nous avons dans notre pays un pre-
lat et une princesse qui, sortis des
yoies de la sonmission qu*ils doivent
a Votre Majeste, refusent aussi de
nous ob^ir, a nous qui mentionnons
toujours votre nom dans nos prices ,
tandis qu*eux cherchent a soumettre
notre pays au roi de la ville de Rome;
et, si vous ne vous empressez de les
enlever d'ici, ils s'entendront avec les
Romains pour ce qui regarde les tri-
buts et les autres reglements. » En
recevant cette lettre, le calife traita
avec la plus haute distinction Tenvoye
du patriarche; et lui-m^rae lui d^p^-
cha le chef de ses eunuques, avec
Fordre de lui amener sur -le- champ
les deux coupables. Lorsqu'il fiit venu
en Arm^nie , il s'empara de leurs per-
sonnes , les chargea de fers , et , les
faisant mooter sur des chameaux y il
revint vers le calife. Ainsi la pru-
dence du patriarche ^loigna de son
troupeau la mort spirituelle, en fai-
sant punir Ners^ et la princesse. En-
suite il consacra un autre arcbev^que,
et le mit h la place de Th^r^tique. »
Vers ce temps, le calife envoya
comme osdigan de TArm^nie un cer-
tain l£chid , qui , arrive dans la ville de
Nakhdchivan, nomma dans chaque pro-
vince des commandants et des gouver-
neurs. Lorsqu*il eut soumis la province
de Pakrevan, il y 6tablit pour prefet
un de ses favoris, lequel ^tant venu
dans le convent de Saint-Gr^oire,
situd en ce canton , y fixa sa r^dence.
II avait €t6 frappe de la beauts et de la
magnificence ae tous les objets d'or et
d'argent servant au culte des autels^
des couleurs vives et varices du rideati
du sanctuarre et des v^tements sacer-
92
L'UNIVERS.
en son pouvoir, avec toute sa famille,
par renet d'une ruse. Les aatres sei-
gneurs du pays subissent le m6me
sort , ce qui ne put se faire sans effu-
sion de sang. Captifs et encbatn^s,
ils sent conduits a la cour de rtoira-
bied par Sempad, qui esp^rait qu*on lui
donnerait h regir une grande partie de
rArmenie,ouqu'onlecongedieraitaTec
beaucoup d*honneurs et de pr^ents.
Mais , lorsqu'il ivt en presence de 1*6-
mirabied, on lui fait partager les
mtoes chatnes , et ii est jet^ en prison ,
sans ^ard pour les bons precede de
son ancienne alliance. Aprts queloue
temps , les princes arm^niens et altn*
niens, qui 6taient prisonniers, sont
soumis a T^preuve d embrasser ie mu-
sulmanismeven reniant la foi du Christy
de recevoir des presents et des bon*
neurs, et deretourner dans leur patrie,
au sein de leur fkmille, ou bien de ter-
miner leur vie dans les supplices et
des tortures inouTes. Comme on les
effrayaitchaque jour par des menaces,
et qu'on prolongeait leur detention ,
3uefques-uns , sur la foi des promesses
e Temirabied, abjurent, et d^autres,
sans se soumettre h la circoncision ,
faisaient cependant esp^rer que , dans
un temps opportun, its condescen-
draient aussi a ses d^sirs.
Le sbarabied Sempad oppose coura-
{^eusement au mensonge un amour de
a vianU digne de ses aieveux blancs.
D*une foi parfaite , et confiant dans les
promesses de la vie ^temelle , il ne
pr^te Toreilie a aucune de leurs pro-
positions, aimant mieux mourir pour
le Christ, aue de jouir de la vie dans
le p^^. A se contenta de cette r^
ponse : Je ne puis abandonner la reli-
gion chr^tienne, don que la grdce du
apt^me m'a accord^, pour me sou-
mettre a votre culte impie. Lorsqu'on
comiut sa volont^ inebranlable , on
songea k le faire p^r dans les tour-
ments. La grAce celeste lui permit de
se racheter, par la mort du corps , de
la mort ^ternelle de TAme ; et, en evi-
tantde tomber dans J'apostaste, il s'as-
sura rhonneur du martyre. Tous les
ordres des dir^tiens enleverent son
corps en recitant des psaumes , au mi-
lieu des btoMictioiis et du d&ants spi*
rituels ; et ils le transfirdrent dans la
cbapelle de Saint-Daniel le prophcte, i
rendroit m^me 06 il avait A6 pr6cipite
dans la fosse aux lion&.
En 850, Acbod lePagrattdereeerait
le titre de prinee des princeM, et,
par son babilet^, il sut n bien se eoo-
cilier les bonnes grices de Fenipereor
grecet ducalifearabe,qu'il fotreoooDo
plus tard ro<par Tun etpar Fantre. U
ville qu*il a vait pour capitate 6tait Gan,
Kars ou Garouts, situte sor le fleuve
Akhour^n, dans lepays deyanant(%
Sempad, ills d'Acbod^ fat moins ben-
reux; pris dans Tovin, otk il s'^tjit
enferm^ avec ses tr^sors, il resta a U
merci du g6n6ral arabe Alisdiin. La
fortune lui devint ensuite (tos iswon-
ble, et sans la jalousie des grands, qui
craignaient tOujours r616vation de qwd-
qu'un d'entre eux, il aurait pu d^vnr
son pays du jow des ^ransers. Mail
I'esprit d'indivtdualisme et de rivalite
qui a toujours perdu la nation arme-
nienne, se r^veilla plus forteroentdaos
les esprits; les seigneurs pr^t^reot kor
assistance au genial Toussouf, d
Sempad fut vaincu. Apr^ un an de
captivity, il mourut mis^rablenieiit a
Tovin. Son fils Acbod, i^€» defir^
essaya de le venger. A la Me de braves
determine, il oourait le pays, surpre-
nant les bandes arabes, qu^il tatill^
toujours en pidoes. Les seoours qu'il
reQut de Constantinople lui pennireDl
de livrer une bataille rang^ dans b-
quelle Youssoufeutle dessous^etA-
chod se vit paisible souverain du royan-
me; il re^ut mime le titre ftstueux de
rol des roiSy ce qui, dans la rialite,
d^ignait simplenient sa pr^mineooi
ou sa suzerainet^ sur les autres petits
princes ses vassaux.
Sous le r^ne d'Apas, son frte, lei
^mirs arabes et kuraes du Diarbekre
se revoltdrent pour conqu^rir une in-
d^pendance que quelques-uns n'ont pas
perdue depuis oette epoqae. Adiod 111 ,
fils d* Apas , commit la faute impardon-
nable de diviser son pouvoir, en noin-
mant son frere roi de Kars. Cetu
(*) ^oy* 1^ figures a 4 et 29.
• • •«.
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ARM^NIE.
9S
nouvelie dynastie, ainsi que oelledes
Corigdans dans rAlbanie araiteieniie,
et Ja^naison des Ardzrouniens dans le
Vasbouragan, ne fireat que d^truire le
lien d'unm form^ par la restauration
de la monarchie. Les princes musul-
mans profltaient habilement des riva-
iit^ (voduites par la diversity des in-
t^rto de tons oes rois. Toutefois
Sempad II, ifils d'Acbod II, eut un
regne liriUant, et ayant fix6 sa r^i-
dence, il y bfttit, suivant la tradition,
miUe et une e^lises, par lesquelles le
peuple arm^nien jurait proverbiale-
ment dans ses serments (*}.
Au commencement du onzieme si^-
cle, lesTurcs seldjoukides se montrent
sur les fi-onti^res d'Armto'e, s*enhar-
dissent k passer TAraze, et ne se reti-
rent que devant le sbarabied Vasag,
qui ies ddfait beureusement. La terreur
causee par rirruption de ces barbares
(*) BTNASTIE DIS PAOBATIDU.
Dep. J. C 748. Achod , fils dc Tasa^ oree
patrice et gouvemeur de rArmeDie par Mer-
wan n , dernier calife de la race des Om-
iiiades.
758. Sempad , fils d* Achod , tue en com-
battant contre les Arabes.
781. Achod, sumommi Mesager carni-
vore , son fils.
830. Sempad, sumoomi^ le Confesseur,
son fils. II souffrit le martyre k Bagdad.
859. Achod, samomme le Grand.
890. Sempad I*', dit le Martyr, son
fils.
914. Achod 11 , Bras de fer, son fils.
9a X . Achod , frere de Sempad I*', se foil,
avec Tappni des Arabes, d^darer roi k
Tovin.
9«8. Apas siiocede a son frere Achod 11.
95a. Achod HI , dit le Misirioordieux.
977. Sempad U, dit le Oominateur.
989. Kakig ]«, smrnonmi Roi des rois ,
frere de Sempad II.
zoao. Jean , nomme aussi Sempad , fiU
de Kakig I<^
Z040. Interrigne.
zo4a. lUkig n, fils d'Achod lY.
X079. II ttt assassine par les Grecs dans
ta forteresse de Cybistra, et la monarchie
des Pagratides en Armenie fut entieremeot
cteinte.
inspira au roi du Vasbouragan I'id^
de e6der ses £tats a Tempereur des
Grees, Basile, k condition qu'il lui
donnerait en ^change la ville de S^
baste.
Gette concession fut fatale aux Ar-
m^iens , parce qu*elle attira pr^ d'eux
des voisins dont rambition tendait sans
cesse k accrottre leur domaine; aussi
d^tachaient-ils chaque jour du royaume
des Pagratides une portion de leur do-
maine. Le roi de Georgie, se coalisant
avec le roi Jean , ess^a de roister aux
tentatives de Basile II , mais sans aucun
succ^; car Tempereur grec ne lui par-
donna qvL^k condition qu^il se recon-
nattrait son Yassal. A la mort de Jean ,
les princes arm^niens voulurent se-
couer |e jou^ , et ils fiirent assez heu-
reux pour raire lever le sidge d'Ani,
bloquee par les Grecs. Constantin Mo-
nomaque soutint les droits de son pr^-
decesseur Basile, et, apr^ avoir pris
de vive force Tovin et Ani, il se vit
possesseur tranquille de toute TArm^-
nie. Gette oonqu^te ^it mal assuree,
et die obligeait les Grecs k entretenir
dans le pays un corps de troupes con-
siderable, pour la prot^er contre les
attaques continuelles des Seldjoukides.
Tant qu'ils eurent affaire k Thosril-
Begh ou k ses g^6raux, ils se defen-
dirent avec avantage: mais quand vint
le belliqueiu Alp-Arslan ou le IMm, les
Seldjoukides chasserent devant eux les
Grecs et les Arm^niens , et m6me s'em-
par^rent de la majeure partie de la
Gtorgie. Ainsi les empereurs de Cons-
tantinople perdirent a jamais leur au-
torite sur rArm^nie.
La plus grande difficult^ qu'^prou-
vent les conqutonts, c'est de conser-
ver leurs conqu£tes : les princes seld-
joukides en sont un nouvel exemple.
D^ qu'ils furent maltres de FArm^-
nie, il s'deva parmi eux des rivalit^
et des querelles interminables. L'il-
lustre maison des Orp61ians , originaire
de la Chine et occupant le Mne de
Georgie, profita de I'occasion pour
chasser du pays les Turcs, et pour d6-
livrer en m6me temps les Arm^niens.
David II, d qui ses victoires ont valu
le nom de ReparcUeur, commenqa le
04
LTJNIVERS.
premier oette tiehe. La tranqQillit^ ftit
r^tabiie jotqu'ii rapparition dcs Mon-
gols, qui, 80U8 Djinghis-Klian et son
sttcceeseur Oktay, flrent des imiptioiiB
dans les diffi^rentes parties de TAr-
m6nw et de la Q^rgie. Les Orpdians ,
s'^nt Kttach^ k leur fi>rtune, ftirent
m^nag^ et consenerent ane uertaine
paissance.
Les Arm^niens ^ient moins hen-
reux que leurs voisms les G^rgiens.
Les invasions des barlxires avaient
efface les derniers vestiges de i*an-
cienne puissance nationale, h l*excep-
tion de la petite pnncipaut^ qu^un cer-
tain Rhoupen, lors de Pextinction de
la race des Pagtatides, s'^tait con-
serve dans les gorges da mont Taurus.
Vers I'an 1100, ji r<6poque oii les Grot-
s' afOuaient d'Europe en Aste pour la
defense des saints lieux, les princes de
cette maison s'alK^ent aux chefs la-
tins, et les seooorurent autant qu*il
etait en leur purssanoe. La maison des
Rhoup6niens subsista quatre siecles
environ. Econtons to savant Saint-
Martin nous raconter comment s^^tei-
gnit Icur royatit6(*).
« Le r^ne de L6on IV fut court; ce
prince p^it en 1808 avec son oncle
H^thoum, par la perfidie d'un g^^ral
mongol, nommi6 Bilarghou, qui les
fit assassiner. Le irere d^H^tnoum,
Oschin, conn^table et prince de Gant-
choT, se mit aussit6t a la t^te des
troupes poor venger la mort de son
neveu, vainquit Bilarghou, le chassa
de la Cilicie et fut proclamd roi. II
mourut en 1820, apr6s un rdgne de
douze ans et quelcfues raois , ne laissant
qu'un ieune enfant &g6 die dix ans,
nomme L^on, qn'il avait en d^unefille
du roi de Chypre, de la maison de Lu-
signan. Les aisoordes civiles, les in-
vasions des Mamelouks, des Tartares
et des Turkomans, aohev^rent de r6-
duire I la derni^eextr^nit^ leroyaume
d'Arm6nie d^ja consid^ahlemen t affai-
bli; c*^taient des devastations et des
ravages perp^tuels. »
« A la mort de Leon V, les grands
(*) Memoires siir VArmt'nie, lom. I,
d'Annteie choisirent alors pour lav
roi on certain Jean4eLaBigDm,neven
du roi de Cbypre et allie de la ran
royale; ils lui donnireot le nom de
Gonstantin III , et le cooroon^reDt dam
la ville de Sis. Ce prince ne r^gna qa^on
an : il se conduisit si mal eC se fit tri-
lement m^riser par sa iftchet^, que
les nobles se r^voit^eBt contre lui, le
tu^rent, et appelerent au tr6ne sm
fr^re Guy, o^leiire dans rempire gra
par son courage. En 1846, ils cbos-
rent un autre prince de la maison de
Lusignan, qui r^a sons le nom de
Gonstantin IV.
«A sa mort, on diotat, d'apres
Tavis du pane Urbain Y, an prince de
la maison oe Lusignan, qui porta k
nom de L6on VI et fdt le demier roi
d'Arm^nie. A peine dtait-il snr le trdoe
que les ^gyptiens entrant en Olicie.
Pour s'opposer h leur marclie, il es-
vova k leur rencontre son conn6table
LitMirid, qui fut vaincu et ta6 apra
des prodiges de valeur. Lfon alors de-
manda en suppliant la paix au sultaa
des Mamelouks, qui la lui aooorda, m
exigeant de lui de fortes sommes iTir-
§ent. Mais ensuite, inform^ que le rm
'Arm^nie avait envoye des amba^a-
denrs en Europe pour exciter les pria-
ces chr6tiens contre lui, le soitaa
d'Egypte r^olut d*an6antir le royamoe
d*Arm^ie; il donna en consequence a
son g^n^ral Schahar Oghli Torared'eii-
trer dans la Gilicie avec une nombieiBe
armde, et lui enjoignit de poorsaiTre
le roi k toute outrance. Les £gyptieos
p6n^tr^eot sans difficulte dans la D-
licie, prirent et brdlerent, en Tan
lv371 , la ville de Sis , vainquirent le rot
L6on et son gin^ral Schahan, fniaoe
de Gorigos, qui teient veniis les ooo^
battre. Le roi fiit blesa^ dans cett?
bataiUe, et oontraint da se r6f«^kf
dans des montagnes inaoeesaibles oq 0
se tint longtemps cach^, et on le out
mort; mais, en 1878, il revint daos b
ville de Tarse, dans le temps que sa
femme Marie allait ^pooser Otiboc.
due de Brunswidk , (|ui devait 6tre coo-
ronn^ roi d'Arm^nie. L6on cfaercha a
entamer encore des n^gociations avec
le sultan , qui , sdr du resultat de cetu
AEMlftl^tE.
»5
iutte, ne voulut entendre h aucune
proposition. Les Egyptiens reRommen-
cerent U guerre avec une nou?elle fu-
reHT) en 1874, d^vast^rent le pays,
prirent tootes les viUes et les chateaux ,
et enfln contraignirent le roi de se ren-
fermer dans la forteresse de Gaban,
avec sa femme, sa filte et le prince
Scbaban, ok its soatinrent un si^e de
neuf mois, et furent oblige, par le
manque de vivres, de se rendre pri-
sonmers. Ge triste ^v^nement arriva
en Tan 1875. L^on VI fut conduit avec
sa famille k Jtosalem, et de )^ au
Cairo, oili it resta eaptif pendant six
ans. En 1381 , il obtint sa d^livrance
par la mediation de Jean I*', roi de
Castille. II passa ators en Europe, alia
d'alxird ft Rome, puis en Espagne, a
la Gourde son lit)^ratear; il vintensuite
en France, ou il fixa son s^jour. »
Le r^e de ce prince, issu de Til-
lustre maison des Lusignans et le der-
nier monarque de I'Arm^nie, n'a €t6
qu'une suite de revers et d'infortunes.
L'ineertitude et les obscurity, triste
fruit de la l>arbarie de ces dges, qui
noi^s cacbent les premidres ann6es de
son av^nement autrdne, n^ont pu ftre
dissip6es par les recbercbes de rhisto-
rien Micbel Tcbamtcfaian , ni par la cri-
tiqae 6clair^ de M. Saint-Btartin. Nous
savons seulement que, fait prisonnier
dans une bataille , il languit au Cairo
dans une longue captivity. B^vr^ de
sa prison par le roi de Castille, son
parent, H passa en Espagne, oh il de-
vint successivement seigneur de Ma-
drid et d'Andujar; de tli il vint en
France, ou nos rois Ini accorderent
le chdteau de Satnt-Ouen; et, apr^s
avoir attir^ sur sa personne Ves bonnes
graces du souverain pontife et des rois
d*Angleterre, il mourut h Paris, le 19
novembre 1391 , et fut enterr^ dans la
cbapelle du convent des C^lestins. Son
tombeau, depose dorant quelques an-
nto dans le mus^ des Petits-Augus-
tins, a €U r6uni aux tombes royales
des cataoombes de Saint-Denis. On -lit
sur son ^itaphe le titre de dnqui^me
roi latfn ae VArmirde , ce qui veut dire
Qu'il ^tait le cinquieme aes rois de
1 Arm^nie , apres rextinction de la ligne
masculine de la dynastie des Kboup^
niens (*).
(*) DTHASTIK BSS RBOUPUIIBirt.
Dep. J.C loSo. Rhoiipeii P^, mimomme
Medt, le Gfand , pu«Dt de Kakig II , deroier
roipagratide.
1095. Goadantin ou Onutantin !■« , mq
fils.
I zoo. Thoros ou Theodore I**, ton fils.
z ia3. Leron ou Leon 1% sou frere» eoi-
men^ prisonnier a Constantinople oil il
meurt dans la captivite.
1x38. Interregne.
1144. Thoros ou ThMore n, ills de
Leon I*'.
I x68. Thomas , prince laiin , beau-pere
de llioros U , gouveme avec le titre de haUe
ott regent
iiOg. Heleh, frerede Thoros II.
ix^4> RhottpenH, fils dl^lienne, frere
de Tlioroi n et de M elefa.
I X 85. Leon n , surnommi le Grand, frere
de Rhoupea II.
XX 98. II est cooronni ivi par Cotttid,
arche^ue de Maycace.
iai9» Zabel on Isabelle, sa ille.
xaao. Philippe, son man, fib de Bohi-
mond lY, priooe d'Aotioche.
xaaa. Interrj^gne.
iaa4. Heihouu ou Haython I'', fib de
Constantin , seigneur de Pardserpert , issu
de la famille rotate.
1967. Leon ni, son fib.
1189. Haython 11, son fib , abdique.
xa93. Theodore II, son fr^
X 295. Haython II , iikabli, abdique encore.
1396. Scsnpad, son {tktt,
xa98. €onftantin II, son frere.
x3oo. Haython n, encore r^tabli, abdi
que pour la troisieme et derniere fois.
x3o5. L^n lY, fiJs de Theodore III.
x3o8. Oschin, frere de Haython II.
i3ao. Leon Y, son fib.
z34a. Constantin III, de Lusignan,ttom-
me auparavant Jean (en arm^ien Bjivaa),
fib d*Amauri de Lusignan , prince de Tyr,
frere de Henri H , roi de Cliypre , et d'une
fiUe de Lkm m, roi d'Armenieu
1 3 4 3. Guy (en armenien Koridon ou Gid),
son fir^re.
x343. Constantin lY, aussi de la maisoxi
de Lusignan.
x363. Interregne.
X 365. Leon Vl , parent de ConsUmtin I Y.
x375. nest eminent prisonnier en ^{«-
90
L'UNIVERS.
A peine le royaume d'Arintoie ve-
nait-ii de finir dans la personne de
Leon VI , que Timour leng, ou le Boi-
teux, apres avoir conquis la Perse et
la Syrie , accourait ddsoler ce pays par
ses rava^ et ses massacres. Sa mort ,
arrivee a Samarcande (*) en 1406, d^-
iivra rOrient de ce terrible fl^u de
Dieu. En 1008, Shah Abbas renouvela
toutes ces horreurs , lorsqu'il prit d'as-
saut la ville de Julfa et qu^il la depeu-
pia , pour tratner sa population a tra-
vers les montagnes et les d^erts jusque
dans les faubourgs de sa capitale, ou
ces exiles fonderent une autre ville du
nom de Julfa.
La Perse retint sous sa domination
les parties orientales de rArmenie^qui
continent a ses fronti^res, et de petits
^mirs kurdes, proteges par les monta-
gnes qui couvrent ce pays au sud , eri-
gdrent en principautes ind^pendantes
le territoire qu'iis devaient d'abord
administrer au nom du sultan, tear le-
gitime suzerain.
Le reste de Tancien royaume d'Ar-
m^e fiit compl^tement soumis k la
Porte Ottomane, qui le divisa en plu-
sieurs pachalicks r^s par des prefets
ou pachas. Au commencement de ce
siteie, la Russie, qui pousse toujours
ses conqu^tes vers rint^rieur de TAsie,
apr^ s'^tre empar^ de la G6orgie, a
pen^tr^ dans les provinces armenien-
ties, et depuis quelques ann^ Tim-
portante place d*£rivan {**) est tomb^
en son pouvoir. Nul doute que, dims
un avenir assez rapproch^, die ne de-
te , et soa royaume est entierement conqub
^ar les in^deles.
tSgS. Leon meurt k Paris.
(*) Un fait assez curieux eC qui merite-
rait &Hn ¥erifi£ par les voyageurs , c*est
Sue sulvant la tradition Tamerlan eroporta
ans Samarcande tons les Kvres qu*il trouva
soit dans la Perse ou TArm^e , et ils furent
entass^ Hans une large tour ou personne
ne pouvait entrer. Si la chose est vraie , on
pourrait encore troinrer la de predeox tre-
son lilleraires.
(**) fovan G^ vers le mois d*OGtobre
1S27 aux attaqnes de Paskewitsch, qui , en
rhonneur de ce triomphe , a requ le litre
de prince dltrivan.
vienne maltresse de tout le pajrs. I^
majeure partie des Armdoieos suhrant .
coinme nous Tavons dit, un rit ood-
forme en plusieurs points h ceini de
FEglise russe, est naturellement fdoi
portde a se rapprocher d'une natkn
cbr^tienne que des Turcs , avec lesquds
eile n*a aucune communaut^ de godts
ni d*idte. Aussi le parti annteien fa-
vorise-t-il sous main la cause des Ros-
ses, et depuis un demi-siMe, on les
voit ^mijgrer par masses et refluer ven
les provinces centrales de reoipire roos-
covite, oH ils trouvent securite et pro-
tection. La plus considerable des emi-
grations qui aient eu lieu rfoemment
est celle qu'op^ra le oomte Latzarew,
apres les conqu^tes du g^^ral Faskr-
witsch. Plus de huit mule fianiiUes le
suivirent de TAderbaidjan en Russie,
et trois mois sufifirent k ce depUo^
ment Les frais de voyage ne s*eiere-
rent qu'l^ quatorze mille ducats et qia-
tre cents roubles d'argeat. Moyennaat
cette somme assez modique, la Russie
gagna quarante mille sujets laboricoi
et pleins d'industrie. La perle quV
prouva la Turquie par suite de cettr
emigration fut incalculable; la pfas
^rande partie de rAderbaidjandemeiira
inculte et deserte, et le tresor fotdi-
minu6 d*un million six cent miUe roo-
bles, somme que le oommeroe et rin-
dustrie des Armdniens y appoftaicot
chaque ann^ (*).
mus termineroDS ici nos conside-
rations politiques sur Tbistoire des
Arm^iens, en citant Fadmirable fiae-
ment el^iaque qui cl6t le trofsieme
et dernier livre de Molse de Khoreo.
L*ecrivBin se lamente sur le triste sott
de sa nation , qui , d^ir^ int^rieo-
rement par le scbisme , avait perdu sa
dehors son ind6pendance. Ce noroeao,
inspire par un elan de douleur proph^-
tique, peut, sous certains rapports.
convenir Element aux siecm ulte
rieurs, surtout lorsque le roymaof
d*Arm^nie fut completement d^tniit.
Les Arm^niens le sentent bien ; aussi
ne peuvent-ils rfciter, sans avoir la
yeux baign^ de larmes, ces pages
(*) Voy. la planchc n* 17.
■ • • •
•
• • • • •
• •• « ■
• • • •
• •• •
ARM^NIE.
9f
qu*on dirait avoir M arrach^ aux
Lamentations de J^r6mie :
a Je pleare sur toi , r^ion de TAr-
in^nie ; je pleure sur toi , la plus il-
lustre des contrto du Nord ! car ia
royaut^, le saoerdoce et Fenseigne-
ment des doctenrs ont dispani de ton
sein. La paix s'est chanjg^ en trouble,
et le d^sOrdre a pris racine parmi nous ;
Torthodoxie 8*en est ali^ , et Tigno-
ranee a install^ le schisme a sa place.
« Je gi^mls sur toi , 6 Eglise des
Arm^iens! F^lat resplendissant de
ton sanctuaire s*est obscurci; tu es
priv^ de ton troiipeau et de son vigi-
lant pasteur. Je ne vois plus ce m£me
troupeau spirituel errant dans de verts
pdturages, ou reposant pr^ des sources
d'eau vive, puis reuni dans un mtoe
liercail <, a Tabri des loups d^vorants ;
mais il est disperse par les deserts et
dans les lieux st^riles.
« J'envie tes deux premieres migra-
tions, puisque, tandis que T^pbux
etait s^par^ de sa fianc^ , tu as sup-
ports ce veuva^e en conservant intacte
ta cliastete , amsi que Fa dit avec sa-
gesse un de nos anciens. Lorsqu'un
adult^e cut Taudaoe d'attenter a la
puret6 de ton lit , tu n'as point violS
ta foi , bien que la violence eAtexpulsS
Tepoux , etque des fils orgueilleux m^
pnsassent leur p^re , tanois <iue les bA-
tards avaient le m^me d^ain pour ce
pere inconnu et Stranger. Cependant
tu ne fes pas montree aux nommes
comme d^sesperSe ; tu attendais le re-
tour de ton epoux et de son coadju-
teur, et tu as cbSri tes enfants, non
pas comme une marAtre , mais oomme
line mere tendre.
« Dans ta troisieme Emigration , il
n'est pas d*es|>oir da retour; tu es se-
parSe de celui qui facoompagnait en
portageant tes travaux. II vaudrait
mieux ^ pour tes enfants , qu*ils habi-
tassent avec le Christ , et que , se re-
posant dans le sein d' Abraham, ils
oontemplassent les cfaoeurs des ar-
changes.
• Tu es dSlaissSe dans ton veuva^e,
et nous, malheureux, nous sommes
prives du chef qui etait a la fois notre
pto. Nous ne ressemblons pas , Sci-
7* UmraUon, (Arhbntr.)
gneur, a votre ancien peuple : notre
condition est pire. En effet, aprSs que
MoTse nous a etS enlevS , nous n*avons
plus un JosuS pour nous introduire
dans la terre promise. Roboam a StS
dSpouillSde son heritage, et son flls
l^abad lui a succedS; ce n'est pas le
lion , mais I'anciennetS des temps aiii
a dSvorS Phomme de Dieu (*). Elie
nous a etS enlevS , et ifclisSe , double-
ment inspirS, ne nous est pas rests
pour oinare JShu. Azael a StS suscite
pour la perte d'Israel ; SSdScias a Ste
tratnS en captivitS, et il ne s'est pas
rencontrS de Zorobabel qui rStabItt le
royaume. Antiochus nous contraint
de violer les lois de nos pSres, et nn
Matathias ne lui rSsiste pas ; la guerre
nous presse de toutes parts, et un
MachabSe n'est point notre libSra-
teur. Au dedans , nous avons le com-
bat, au dehors, la terreur; oui, la
terreur des palens et les combats des
hSrStiques ; et cependant il ne se prS-
sente pas de cher pour nous conseiller
et nous preparer a la lutte.
« O deshonneur ! 6 lamentables ca-
tamites ! Comment trouverai-je la force
de supporter oes maux ? Par quel moyen
ralTermirai-je mes esprits et ma langue ,
de mani^re k pouvoir remercier mes
peres de m'avoir engendrS et SlevS?
En dffet, ils m'ont nourri de leur en-
seignement , et ils m'ont envoyS ail-
leurs le completer. lis espSraient qu'a
notre retour, il leur reviendrait quel-
que gloire de notre talent perfectionne
et de nos compositions plus parfaites.
De notre cdtS , nous esperions , en cou-
rant k Constantinople , revenir assister
aux danses joyeuses des noces , et chan-
ter des Spitnalames, nous qui sommes
exercSs dans ces chants; mais voila
gu*au lieu de cette allegresse espSrSe ,
le me lamente et me desole sur le tom-
neau qui les renferme, sans que j*aie
eu le temps de leur fermer les yeux ,
d'entendre leurs demiSres paroles , et
de recevoir leurs bSnSdictions !
« En pensant a oes choses, l^s sou-
(*) Toy. I rois , ch. xm , v. 34.
m
L'UNIVERS.
pirs et les g^nisseroents s^emparent
ue mon coeur, et m'excitent a pronoo-
cer des paroles tristes et lugubres.
Mats je ne sais oomroent formuler mon
el^ie, et sur quel su|et arr^ter ma
douleur. Ainsi ^eurerai-je mon jeuoe
et infortuD^ roi cbasse par les corn-
plots des mechants , et pr^ipit^ igno-
roinieusement du trdne avanl le terme
de la mort , ou bien , moi-m^me, dont
la t^ a ^te d^pouill^ de sa couronne
glorieuse? Pleurerai-je le patriarche,
cet autre pere d'une sagesse superieure,
et toujours ^air^ par une saine rai*
son; qui dispose toutes choses dans
leur ofdre , et qui , tenant, pour ainsi
(iiie, les r^nes des ^venements, sait
f^ncore refr6nerles langues medisantes;
ou plaindrai-je mon sort, moi ch^tif ,
abandonn^ de TEsprit saint et reduit
u la derniere extr^nit^? Pleurerai-|e
sur odui qui ra*a ei^endr^, source vi-
vante d'enseignement, qui versa sur
nous des flots de justice , dans lesquels
rimpi^t^ a ete suomergee ; ou bien re-
uandrai-je des larmes sur moi, ^tre
languissant et fl^tri , parce que je n*ai
pu me d^salt^rer h la fontaine de la
doctrine? Plut6t, mes pleurs ne se-
ront-ils pas pour les malheurs actuels
de ma patrie , et pour les infortunes
qui lui sont r^servees ?
« Qui s'associera a mon affliction ,
en compatissant k ma peine; et qui
ni*aidera a inscrire oes eboses dans tes
unnalesdel^istoire?
«Leve-toi, J^remie, l^ve-toi, et
que ta voix proph^ique fasse entendre
ses plaintes sur toug les maux que
nous avoos soufferts, et sur ceux qui
nous afflieeront. RappeOenaous, conune
le Gt Zaoiarie jadis en Israel , q^ue de
taux pasteurs se sont lev^ dans la na-
tion.
« Les vartableds ou docteurs sont
ignorants , ^pris d*eux-mtoies, et rap-
portant tout bonneur a leurs per^
sonnes. Us ne sont point appeles par
Dieu ; c'est Fargent et non le Samt-
fsprit qui les fait dire; ils aiment
For, ils sont envieux, s*^loignent de
la mansu^tude dans laquelle Dieu ba-
bite; et, transform^ en loups , ils d^
^irent leur troupeMj.
ft Les religieux sont bypocrites .
pleins d'ostentation , desireux des va-
nity , et plus epris de la passion de ia
gloire que de Tamour d* Dieu.
« Les dignitaires sont orgoeilleux ,
oisifs, paresseux, et discourant vai-
nement; ils d^testent les eoseigne-
ments des docteurs , et se iiTrent au
trafic ou au jeu.
« I^s disriples sont lents pour ap-
prendre , et prompts a enseigner ,
avant d'avoir la vue de la science di>
vine.
« Les orateurs sont sunerbes , tur-
bulents; ils ont des paroles sonores:
ils sont infatu;ables , acerbes, nii^
chants, et ils frustrent Torphelin de
son patrimoine.
• Les soldats sont sans lovaute ,
avides d^un faux bonneur, denstaut
les armes , paresseux , aimaot la vo-
lupt^, intemp^rants , pillards, et li-
vres au brigandage.
o Les princes sont rebelles, volaot
ceux qui volent ; rapaoes , d'une afa-
rice sordide ; ils ravagent les proviaors,
se plaisent dans le mal , et , avec eda,
ils ont le eceur de vils esclaves.
« Lesjuges sont iniques, meoteors.
faux et faciles a squire ; ils ne saveot
pas distin^uerle droit; ils sont inoons-
tants et disputeurs , et sans commise-
ration, comme sans pudear aiacune.
« Et quel sera le chdtiment de ee^
crimes , sinon que Dieu detoame sfs
regards et cbange pour nous la saturr
des dements? Le printemps devient
sec t ret6 est pluvieux , Fautonuie res^
semble k Phi ver, et Fbi ver estrigoureux.
rempli de temp^tes ^ ddmesurtiiieiit
long. Les vents, terribles par leur vrofeo-
oe, sont charg^ de maladies ; les nuees
recdent la foudre et la gr£le ; ks ploiei
tombent sans utilite hors de loir sai-
son. L'air est dor et brumeux ; kf
eaux ddbordent inutilement , sansou'oii
puisse les retenir. La terre est simk :
ses races dto'oissent, et elle est bou-
levers^ par les tremblements. Ajou-
tez a tous ces maux la discorde uni-
verselle , suivant qu'il a 6t^ dit : * Les
impies ne ^o^teront pas la paix. *>
« Les rois dominent avec despotisnie
et cruaute; ils aggravent lea impets.
ARM£NI£.
et promalguent des lois intolerables.
Les pr^fets sont exacteurs et sans pi-
ti^. Les amis sont trattres, et les en-
nemis puissants. La bonne foi, dans
eette vie trompeuse, est derenue v6-
nale; de tous c6t^, les bandes des
ennemis nous attaquent ; les maisons
sont renyers^es, les propri^^ spo-
ilt ; les chefs sont charg& de chatnes
et jet6s en prison ; les hommes libres
sont tratn^ en exil , et les soufirances
du peuple ne peuvent se compter. Les
▼illes sont incendito; la famine, les
maladies et la mort , sous toutes ses
faces , nous enviroiinent. La piM est
oubli^ , et cependant Tenfer nous me-
nace.
n Que le Christ Dieu nous en pr^
serve , ainsi que tous ceux qui Fadorent
en v^it^. Gloire h lui, dans T^r-
nit^ (*) ! »
DE LA UTT^RATURB DE I.'ARM^IE.
La litt^rature d'un peuple est , h pro-
prement parler, I'expression de sa so-
dM'y c*est elle qui nous r^ydle ses
pens^ intimes, ses moeurs, ses lia^
bitudes , la force native de son g^nie.
Elle est la forme mobile que rev^t au
dehors leprincipe intellectuel qui Ta-
nime et la vivifie; et, de m^me que
les traits de la physionomie , les gestes ,
les poses , et tous les actes exterieurs
devoilent ordinairement Ttot habltiiel
de r^me dans la personne, ainsi la
forme du style , son ton et sa oouleor,
le genre des sujets traits avee prtf(6«
rence , tout oet ensemble, en un mot,
nous fournit des donnto certaines et
suffisantes sur le caract^re et la nar
ture d'une soci6t^.
Maintenant , si le peuple armeniea
est n^ a la vie intellectuelle en rece-
vant la lumi^re de r^van^ple , s*il doit
au diristianitme sa civilisation , son
progres dans les sciences et dans les
arts, nul doute que sa litt^ature ne
reproduise Tappiication de cette loi
invariable de Tesprit humain. Or, e'est
ce (ni*il nous est ^ile de ddmontrer.
En effet, parmi toutes les litt^ra-
(*} MoiM de Khoren, liv. xii , cb. 6S.
tures de POrient, el Imus peoirloM
dire du monde civliis^ , aoonne ne nr6-
sente un caract^ aussi trancba et
aussj exdusif que la lit^ture arm^-
nienne; c*est cpi'elle ne common^
qu'avec le cbristianisme. Car, lee
anciens monuments historiques et
po^ques, conserves smt dans les li vres
ecrits, soit dans les chants populairee
dont parlent ses premiers nistonens
de Vhre cbr^tienne, furent d^tevitt
par Tefifet d'un zde top ardent qui
voulait preserver les nouveaux conver-
tis des prindpes et des errears du ma-
gisme.
La culture inteUeetuelle de TArm^-
nie paienne devait 6tre pea developp^e ;
car si elle avait eu quelques produc-
tions d'un m^rlte superieur , elle les au-
rait probablement conaervte , oomme
Pont foit les Grecs ct lea Latins. Ses
historiens ne nous apprenoeBt-ils pas
efifectivemaQt que saint Afesrob com^
posa I'alphabet vers le milieu du tkh
quitoesiMe? Et le nora dV/Amtina^
teur donn^ au premier patriardie saint
Gr^oire,dit sufBsamment qu'aTant
lui, ce pays maoqnait des lumi^ret de
la foi et de la sdence.
Une autre preuve qui vient a Tap-
pui de oette considtetion , est ia oi-
rection exduaivement chr^tienne qu'a
conserves Tesprit litt^raire de ce peo-
ple ; et certaiaement , 8*il avait eu one
autre litt^rature palenne, des traces
en resteraicnftempreiDteadanaleBliyres
de quelques-ttns de sea toivains, qui
n'auraient pas tous rencno^ spontan^
ment et simultaatoeat k un ptss^
qui vivait eneore dans leur souvenir.
Nous crovons done que Tesprit litt^
raire de l\Arm^nie est propremeot
sorti des entrailles du christiaiusme;
et nous avouons ouf , si , en se tenant
aussi fermement dans la foi ou Tordie '
divin , il s*toit hasarde dans les pre-
miers slides k entrer qudquefois oaiis
Tordre humain , per lequd nous en-
tendons la philosophie speculative, la
po^sie ^pique ou dramatique, et les
sdenoes, sesproductions auraient beau*
coup gagnft en variety et en origina-
lite; et, de plus, cette coneentration
perp^elle de toutes les fnoultto in-
L'UmVERS.
UXMnfUm sur des roati^res purement
religieoses et thMogiaues, n'aarait
pas Dait naftre autant ae querelles et
dedisDutes,que nous avons reoonnu
dans rhistoire religieuse de ce pays,
^tre la cause des maux politiques qui
affligerent ce royaume, at de la deca-
dence intellectuelle qui s'y manifests
pkis tard.
Le caractere de I'esprit arm^nien
ainsi d^6ni . nous dessinerons k larges
traits ie tableau de sa iitt^rature , dont
rhistoire prteente surtout trois ^po*
ques plus remarquables, s^par^es les
unes aes autres par un tntervalle a peu
prte ^al. Ces epoques fuvent le cin-
quiefne , le douzitoe et le dix-huiti^nie
sidcles.
Les premiers essais litt^aires du
peuple arm^nien « semUaUes a oeux de
tons les autres peuples enfants , fnrent
de simples bynanes ou des cbants lyri-
ques en Tbonneur des h^ros. Lonc-
tesps ils se sont conserve dans la
mMoire du peuple, et surtout des
mentagnards^ toujours plus fid^es a
ganfer les traditions^ comma si les
masses tmposantes et immobiles de la
nature qui les environnent les habi*
tuaient euz-m^mes k ne rien changer
dans leurs moeurs , leurs crojrances et
leurs souTenirs. Ges poemes primitifs
etaieat plut6t le jet orut et spontan^
de la nature, que I'oBuvre de Part. La
cttHxire intellectuelle du peuple 6tait
nolle comme sa ciTilisation. Les lu-
mieres de la science grecque s'^tent
arr^tto h ses frontieres , et il fallait
n^cessairement les franchir pour pren-
dre qudque teinture des lettres. Aussi ,
de tous les points de cette partie de
TAsie, les jeunes sens afllnaient aux
ecoles de Cesarte . de Constantinople ,
d'Alexandrie et d^Ath^nes.
Saint Gr^ire, emport^ miraculeu-
sement loin de son pays , comme nous
Tavons racon^, ^it rest^ k Ctor^;
et 1^ , il avait puls^ les principes de
la science en meme temps que ceux de
la foi. Se regardant comme suscit^ de
Dieu pour annoncer a T Arm^ie la pa-
role ae rifevaneile , il 6tait venu la con-
vertir. Son eloquence bouleversa la
face de ce royaume, et Tignoranee du
fKBganisme dtsparut ayec ses supersti-
tions. I^es ^les qu*il fonda devmrent
un foyer radieux de toutes lesconnais-
sances humaines. Agathange 6crit la
vie du saint lUumi$uUewr. et oelle du
roi Tiridate, dont il est fe secretaire.
Z^nobe, disciple de saint Gregoire,
raoonte ses missions apostoliques au
pays de Daron.
fliais la langue arm^nienne ^tait en-
core si rude ct si peu fa^nn^ aux
lois du style f que les toivains em-
l^yaient oe pr^i^renoe les langues ^-
riaque ou grecque. Les caracteres
propres a la transcription etaient sy-
riaques. II fallait que saint Mesrob
hiventdt le nouvel alphabet qui sert
encore presentement aux Arm^ieos ,
et qu'il empninta partiellement a qud-
que alphabet d*un idiome inconnu ou
perdu de TAsie Sup^rieure.
Nous jetterons ici en passant quel-
ques observations siir la nature et le
caractere de la langue arm^nienne.
Certains auteurs, pr^oocupes d^une
vanite nationale trop ridicule , ont pre*
tendu que la langue parlee par Noe, a
sa descente de Tarche , etait la Uu^ue
arm^nienne. C^it dire en m£ne
temps que leur idiome ^tait Tidiome
primitir, puisque le patriarche devait
avoir traditionnellement conserve la
langue de ses premiers p^res. Adam,
dans le paradis terrestre , aurait done
parl6 arm^nien ? 11 est inutile de s^ar-
r^r id k demontrer oombien cette
pretention estpeusoutenable. D'abord
tl est pbilosophiquement impossible
de eonstater aujourd^bui quelle etait la
langue du premier homme, surtout
lorsqu'on s'l^puie, comme nous, snr
la tradition qui suppose Thomme . pere
du genre humain non d^u, dev^ a
un si haut de^re d*intdligence , et td-
lement sup6rieur dans sa conoais-
sance de Dieu et de Tunivers, qu'il
n'aurait pu , apr^ sa chute , balbutier
la langue qu*il parlait pr6:61emment.
Mais, sans entrer dans cet ordre de
consideration , que le lecteor pourrait
avee raison oonsiderer comme mys-
tique ou stwematuraUste , ainsi que
disent les Ailemands, nous nous con-
tenterons de dire ^ue , d'apres nos re-
ARM#.N1E.
lot
eherches propres , nous sonimes arri-
y^ a reconnattre :
Premidrement , que la grammaire
arnn^ienne repose sur les menies bases
que la grammaire greoque, et a des
rapports frappants surtout ayec la
grammaire sanskrite, ou le tableau
desdtelinaisons, con^ues commecelles
de Tarm^nien , dous prtonte la ooin-
cidenoe remarquable aucas instrumen-
tal, et oili nous trouvons encore le
m^me systime numerique des noms
de nombre, dont plusieurs sont iden-
tiques pour le son et pour T^riture.
Secondement, que Tarm^nien pro-
ekie comme le Sanskrit et le grec aans
la composition des mots, mettant tou-
jours le nom de d^pendance devant
oelui de qui il depend , et donnant sett-
lement au dernier la d^inenoe gram*
maticale.
Troisi^mement, enfin, et cette troi-
sieme observation est un fait materiel
constats par les nombreux travaux de
la science modeme, que chacun pent
veriGer, que, dans Tarm^nien, se
trouve un certain nombre de mots
communs au Sanskrit, au persan etau
gree , qui ne sont point des mots eoi'
prunt^ post^rieurement, parce qu*ils
expriment des objets de premiere ne-
cessite , en ce qui tient a la vie reli-
gieuse ou sociale du peuple. L'on peut
ajouter encore que ronfre et la cons-
truction de la piirase arm^nienne res-
semblent parfaitement k la marcbe de
Ja proposition grecque, qa*elle peut
imiter dans ses tours et m^me ses ir-
r^ularites avec une fld^lit^ si heu-
reuse , que les traductions arm^niennes
sont un caique exact des originaux
grecs , et nulle autre langue ne pos-
shde k un plus haut degre cet avan-
tage.
jNous ne pr^tendons pas dire , pour
cela , que rarmenien soit une langue
moins ancienne qu'aucune de celles de
la famille indo-germanique , h laqudle
nous le rattachons, ni qu'il aii ^t^
form6 comme un patois avec les debris
de Tune d'elles ou de toutes ensemble.
Non : rarmenien est une langue pro-
pre, Gommc le saiiskrit , \p, persan et
le gree. Seulenieot nous crovous qtril
ne formt pas , parmi les idionus de
rOrient, une classe k part, et ijae la
race du peuple qui le parte dbit ttre
toujours soi^neusement distingu6e de
la race s^mitique, avec laquelle die
n'a aucun rapport de langage. I^a com-
munaut^ d'ongine d*une langue avec
une autre ne detruit en rien son m^-
rite et sa perfection relatives. Per-
sQnne ne doute que le latin ne soit
fr^re du grec; et cependant a-t-oo
moins d'admiration pour la langue du
peuple remain ?
Que si nous appr^ions k present
le merite intrinsic de la langue ar-
m^nienne, nous reconnaltrons , avec
les savants Yillefcoi et Saint - Martin ,
qu*elle a tous les avantages d*une lan*
cue port^ k un haut degr^ de d^ve-
loppement par une culture inteilec-
tuelle vari^ et ancienne. Sans- avoir la
douceur du grec, k cause de ses aspi-
r6es et de ses sifflantes dont elle est
plus prodigue, elle n'est pourtant pas
dure a Toreille dans la bouche d'un Ar-
m^nien.
On demande ordinairement si telle
langue est plus ricbe que telle autre ,
et peut-^tre k tort; car ce qui fait pro-
prement la richesse d*une lan§[ue est
le g^nie de rhomme qui Temploie; et,
sous ce rapport, toutes les langues
sont ^alement riches, c*est-^- aire,
susceptibles d*exprimer toutes les pen-
sees ae la raison et les sentiments du
coeur. Que si Ton entend par richesse
le materiel des mots, nous dirons
qu*en ce sens , Tarm^nien est inf(6rieur
au chinots et k I'arabe. Cependant,
comme la comparaison de son diction-
naire avec un lexique grec prouve qu*il
a pour chaque mol un sjrnonyme cor-
respondant qui le traduit avec exacti-
tude , on-ne peut Taocuser d*indigence ,
ou , du moins , cette pauvret^ est bien
supportable.
I/alphabet armenien se compose de
trente-huit lettres. Les trente-six pre-
miers caract^res furent formes au qua-
trieme sitele; les deux demiers no
furent ajout^ aux autres que vers le
douzldme siecle.
102
L'UNIVERS.
ALPHABET ARM^VIEN.
MAJOKUUS.
h
St
X
IT
8
•u
A
ft-
s
♦
O
BOITDU. IT4LIQUI.
J-
A
A-
♦
f.
a'
,r
./
1
I'
5
A-
O
r
t
c
f
■
p
L
r
to
i
ar
n
p
9
nOMK.
raoifovciATKMr.
aip
A.
pieii
kim
P iaible.
K(aible,C,Q
ta
T faible.
yetcli
t bref, it.
za
Z.
d
£: long.
yet ou ei
E muet.
toue
T fort, TH.
je ou ge
J.
in ou mi
I.
Hun
L.
\he
KH du gosier.
dza ou (Isa
DZ ou DS.
guien
noue
G ou GU.
H aspire.
tsa
TZ.
ghad
dje
GH du gosier, {• anbe
DJ "^
mien
M.
hi ou y
H faible ou Y, I.
nou
N.
cha
CH.
oue
0 bref.
tcha
TCH.
be
B.
tche
TCH faible.
ra
R fort.
se
S comnie double.
vicv
V fort
diun
D.
re
R faible.
tzouc
TZ ou TS fort.
yunou hieun
Y,U, V.
piour
ke
P.
K fort.
o
0 long AU.
FottPH.
fe
U est eitrtoemeot difficile pour on
European d*aoqu^ri.r una prononciation
nacte et barmonieuse do I'ann^ien ,
paroe ^e oette langae renfenne non-
seulonenl oertaines aspirdes et (^uttu-
rales propres aux langues s^mitiques,
ARM£ME.
t«3
Idles que Tiiebreu et Tarabe, et man-
quant tatalement aux notres , mats elle
possMe encore certaines lettres parti-
cuK^res dont Taccent et I'intonation
sitllantc, en off rant entre elles quelaue
analogic, sont n^anmoins ais^ment ais-
tingues par una oreille habile, et ne
font qnVmbarrasser T^tranger qui
eooute ou qui parte. D'un autre cote,
cette riche vari^t^ de tons et d*accents
semble avoir assoupli d'une maniere
exceptionnelle les oi^anes de la voix
ehez ce peuple, et lui donne une apti-
tude et une pr^isposition ^tonnante h
Sarler les autres idiomes, surtout ceux
e TEurope. Get avantage est m^me
plug inarqu^ chez les Arm^niens que
chez les peuples europ^ens de race
slave, et tuusieurs fdis nous avons ad-
mire quelques-uns des savants reli-
gieux au convent arm^nien de Yenise
parlant avec une ^ale faciiite le fran-
cais, ritalien, Tanglais, rallemand et
le russe. Aussi , dans la diplomatie de
Constantinople et dans plusfeurs ^cliei-
les du Levant, les Armeniens font-ils
d*excellents interpretes ou drogmans.
La grammaire est simple, et nous
ne pouvions mieux la comparer, quant
h sa marche et h sea procides , qu*au
grec, langue qui lui est fa plus analo-
gue, entre celles que oonnaft probable-
ment la maiorite de nos lecteurs. Elle
a, comme la langue d*Homere et de
Platon^ le m6rite incontestable d'avoir
des themes ou radicaux servant de
fond et de support a tous les autres
mots qui en sortent, soit en les com-
btnant entre eux suivant certaines lois
regulieres d'apposition ou de composi-
tion , soit en les allongeant par diverses
terminaisons, dont le caractere nette-
ment determine lesclasse aussitdtdans
la categoric des substantifs, des quali-
Ocatifs ou des verbes.
Le verbe, premier mot essentiel de
toute langue , puisque c'est lui qui sert
a exprimer Texistence du sujet et sa
relation h Tattribut, pr^sente ici le ca-
ractere g^n^ral des langues indo-euro-
p^ennes, et, pour la terminaison radi-
cate de rinfinitif , il offre le singulier
rapprodiementd'avoir comme le mdnt-
cliou qoatre desinences sp<^iales. Ses
temps sent |>kis varies que dans les
lances semitiques; il a un present,
un imparfait , deux imp^ratifs , des sulh
jonctifs et plusieurs participes. L'^vo-
lut*on du thdme dans la conjugaison
est logique et r^guli^re, pui8au*on re-
trouve dans la desinence des oifTerents
modes les temps correspondants du
verbe substantit, qui , en 8*unissant au
radical, lui communique ainsi r^lle-
ment la substance ou r6tre.
Le nom ou substantif , dont les pre-
miers ^l^ments radicaux se confonaent
souvent avec ceux du verbe, recoit dif-
ferentes desinences , lesquelles /orment
les cas des declinaisons. Ces cas sont
d*abord ceux du grec et du latin, puis
nous en retrouvons quatre autres , deux
pnrticuliers au Sanskrit, Finstrumen-
tai et le locatif , et deux autres propres
seulement a farm^nien, le circohf^-
reiitiel ou cas exprimant Faction de
tourner autour d une chose, de Fem-
brasser dans le double sens Intel lectucl
et physique, et le narratif , qui expriine
la quaiite de F^tre ou de la chose sur
laquelle on discourt. Les grammairiens
sont divises sur le nombre des decli-
naisons; cependant on en admet i^^ne-
ralement neuf n^guli^res et plusieurs
autres irr^^ulieres,
L'adjectif , facile h distinguer par ses
terminaisons propres, n^oocupe pas,
comme dans d*autres langues de F Asie ,
une place iixedansla proposition. Ainsi
il peut prec^er ou suivre le substantif
auquel il se rapporte, il peut concorder
ou non avec lui en cas et en nombre.
La syntaxe, en principe fort simple ,
devient confuse et compliqu^ dans
Fapplication, par la faculteque F^ri-
vam a de s*6carter de certaines regies
fondamentales. Le verbe n*est point
rejete regulierement, comme chez les
Grecs et les Latins, k la fin de la
f>hrase, et cependant la p^ode offre
es mdmes analogies dans son develop-
pement majestueux et cadence. Ce qui
nous explique ce rapport de ressem-
blance, c'est F^ucation litteraire que
FArmenie recent de la Gr^e. Lorsquc
son peuple secoua, au groiid jour du
christianisme , les langes de sa tene-
breusc ignorance, tous ceux qui etaient
104
L*l]MV£RS.
floUicit^ par le desir de oonnaltre et
d*apprendre allaient puiser la science
aux eooles d'Ath^es et de Constanti-
nople. Les premiers toivains s'etaient
done forni& sur les beaux modeles de
I'antiquit^, et ils chercherent h mouler
leur langue sur ce type.
En second lieu, par I'effet d*un at-
trait particulier, Fesprit arro^nien se
U?ra avec predilection a F^tude du
style, en cultivant soigneusement la
grammairey dont la connaissance fut
elevee au rang d'une science v^itaMe.
Cette etude ne se bornait point chez
ce peuple, comme parmi les Grecs,
surtout a r^poque de la decadence du
bon ^odt litteraire, k des speculations
{meriles et infructueuses sur le cboix,
a disposition ou Tetymologie des mots.
On ne se proposait pas seulement de
parvenir k rendre sa pensee avec eie-
Sance et en observant toutes les lois
u code de la grammaire, on etendait
ses vues plus loin, dans la persuasion
ou Ton etait ()ue le style, sans la rai-
son pbilosophitfue qui Tinforme, pour
ainsi dire, n'etait qu^un corps denu^
d'dme. La logique et la haute metaphy-
sique, qui doivent presider h Pensem-
ble de ses lois , se liaient done cons^-
quemment h retude de la grammaire,
et voici Dourquoi dans ces temps le titre
de kerthogh , ou de grammairien , etait
la qualification la plus recherchee^
comme la plus honorable. Ainsi MoTse
de Khoren est ddcore de ce nom, qui
implique encore la signification de
poete. II nous a legue sur cette science
un traite qui nous prouve jusqu'li quel
haut degre de perfection elle avait €\/t
portee.
La langue litteraire a ete fixee en
Armenie , comme les langues allemande
et anglaise, dans les temps modernes,
par la traduction des livres saints. Ce
rait ne doit pes nous surprendre :
quelles oeuvres en eifet seraient plus
capables de fa^nner un idiome nais-
sant a toutes les formes de la pensee,
et de le doter richement d'expressions
simples et sublimes, que ce livre, ^ue
celui qui n'y voit pas un reflet de Tins-
piration divine, juge neanmoins le plus
parfait des proauctions de rintelligencc
humaioe? Dans TAncien et dans Ir
Nouveau Testament on ittrouve tons
les tons et toutes les nuances de st? le,
la pastorale, le genre descriiitif, rae-
§ie, la dissertation philosopnique et Ic
ithyrambe. Une traduction correote
et fidele conservera Fempreinte de oes
formes, surtout si la langae, jeune
encore, pent se prater a la naivete du
style primitif , et Fon peut mtoe ajou-
ter que la condition d*etre jeune est
indispensable pour la langue. Ainsi
voila pourquoi nous autres nous o'au-
rons jamais une traduction vraiment
nationale des livres saints; e*etait a
Amyot ou a Montaigne de la faire.
Les traducteurs armeniens etaieot
les hommes les plus capables du temps .
et les {>lus ceiebres par leur sagesse H
leur saintete; ils ont eieve un monu-
ment durable, et qui serait k lui aeol
une raison suffisanted'etudier la lansue
anuenienne , vu Futilite que peat o£ir
dans la science de Fexeg^se une ver-
sion qui remonte au quatrieme siede
de notre ere. Ils n*ont pas traduit sur
le texte hebreu, mais sur les Septante;
cependant, oomme la langue de la Svrie
etait fort repandue chez les Arhie-
niens , qui s*en servaient dans la litur*
gie, on a dA consulter les versions
syriaques, comme ie prouve aisemeni
une comparaison un pen serieuse des
textes. L*£glise d' Armenie a adopte
cette version dans sa liturgie, et les
ecrivains des d^es posterieurs empnin-
tent a chaque instant des expressions
et des passages qu'ils intercalent dans
leurs compositions, sans avertir le lec
teur ^ue c*est une citation biblique .
c'est a lui de la reconnaltre, oomme
lorsqu'il lit les rabbins. Les auteuis
musulmans agissent de m^me a Fegard
de Falcoran.
Des que le premier elan intellectuei
fut communique aux esprits, il s'opera
un grand mouvement litteraire, ef
Fere des ecrivains superieurs com-
men^a. A leur tgte, nous remarquons
MoTse de Khoren (*), le plus ancien,
le plus enidit, le plus concis, comme
(*) ^t. 10-4°, a Londres, par lesfrerca
Whis(oti , 1736. Id. in-i8 , a Venise, 1827.
ARM^JNIE.
105
aussi ie plus obscur des historiens de
rArioenie; puis viennent Jesnig (*),
auteur de dissertations subtiles et dS-
series sur les cultes paiens, £lisee (**),
historiograpiie des guerres religieuses
de la Perse et de rArm^nie, La-
zare (***) de Parbe, autre historien
reoommandable par la nettete et P^le-
ganoe de son style.
Ce cinquieme siecle est, a propre-
ment |)arler, I'dge d'or de la litterature
arm^nienne. Avant cette epoque, la
laneue syriaque predominait, et 11 est
probable que sans Mesrob, qui dota
son pays de la pr^ieuse decouverte de
ralphaoet, la langue armenienne edt
totalement dispani. Aussi Gorioun,
Tun des disciples de Mesrob, nous dit-
il qu'il n'a pas assez de reconnaissance
pour ce saint homine, qui etait tou-
jours dans la plus grande tristesse, en
voyant les penibles travaux aue les
jeunes Arm^niens etaient obliges d*en-
treprendre pour acquerir la connais-
sance de la langue et des livres syriens.
lis faisaient beaucoup de depenses, et
consumaient leur vie dans des voyages
lointalns, paroe que le culte divin et la
lecture des saintes Ventures ne pou-
vaient se faire qu*en langue syriaque
dans les ^lises et les monasteres de
TArm^nie; aussi ne pouvait-on ins-
truire le peuple.
Les deux siecles suivants sont pres-
3ue st^riles; les guerres continuelles,
'une part , qui ensanglanterent le pays,
et, de Tautre, les disputes oiseuses et
sophistiaues des th^olojgiens, arr^t^-
rent la seve du g^nie national. La ques-
tion relative «^ la duality des natures
du Christ et h VuniU de sa persoune
divisa tous les esprits en deux classes
contraires et ennemies, suivant qu'ils
admettaient ou rejetaient le concile de
Cbalo6doine. On discutait bien moins
par amour de la v^rit^ et pour s'eclairer
nintuellement, que par une passion se-
crete contre le parti oppose, et avec
des sentiments d*aigreur auxquels se
(*) Smyrne , 1 76a. YeiUM , 1 8a6 , in-x8.
(••) Constantinople 1764 et 1823. A Ve-
nue, i8a8, in- 1 8.
r')Veiiisc, 179?.
m^laient des ressentiments politiques.
Nous avons essay^ de d^montrer ce
fait dans la partie religieuse de This-
toire de ce peuple, et ilest inutile d'y
revenir en ce moment. Nous voulons
seulement rappeler que la vaine dia-
lectiquede Tesprit disputeur des Grecs,
dont les Arm^niens avaient malheu*
reusement herit6, emp^ha que Tim-
pulsion donn^ aux lettres par les pre-
miers ^rivains obtlnt son complet
r^sultat. Ce serait s'torter de notre
but que d'^num^rer la longue liste des
auteurs secondaires qui, dans ce si^le
ou dans les Ages suivants, ont enrid^i
la litterature de leurs travaux plus ou
moins importants. 11 en est surtout un
grand nombre qui, par leurs traduc-
lions des anciens auteurs de la Gr^ce,
profanes ou sacres , peuvent offrir au
philologue un utile moyen de verifica-
tion, pour s*assurer si les modeles qu'ils
onttraduits nous sont parvenus entiers
et sans alteration, et, sous ce rapport,
ils sont un precieux supplement pour
la sdence.
Au huitieme siecle , nous ne vovons
que Jean IV, dit le Philosophe ou Oz-
nien, attirer les regards au critique
par ses ceuvres theologiques, que dls-
tin^uent reievation des idees et la lu-
cidite de sa logique. Les Mechitaristes
ont publie un de ses discours ou il
traite la question du dogme de I'Incar-
nation. La censure romaine y a d^cou-
vert quelques propositions contraires
h rorthodoxie et Ta mis a Tindex.
Au neuvieme siecle, deux historiens
egalement remarquables se produisent
sur la scene litteraire. Le premier est
le patriarche Jean VI , surnomme THis-
torien. Son style vif, concis et anime
damages k la couleur orientate, fait
oublier les petits defauts de detail que
Fon rencontre dans le cours de son
histoire, laquelle resume rapidement
toutes les anciennes traditions, pour
s'arreter particulierement aux nom-
breuz evenements politiques qui rem-
plissent Tdge otj il vivait« Le oefaut de
Jean est sa partialite cboquante a re-
gard des catholiques, et le faux zeie
u*il deploie pour defendre les maximes
u concile de Chalccdoine. Le second
3
106
UUNIVERS.
est Thomas Ardzerouni , d'un vastc sa-
voir, et fort vers^ dans la connaissance
de differentes lances orientales. Son
histoire traite specialement de la fa-
in ille des Ardzerouni , et tous les au-
tres ^v^nements rentrent dans le sujet
principal.
Au milieu de la nuit du dixieme
siecle, le genie de saint Gregoire de
Nareg jette la plus vive lumi^re , et fait
revivre les beaux temps de la littera-
ture arm^nienne. £minemment poete,
la suavite de son style et Televation de
ses pens^es le mettent, aux yeux des
Arm^niens, au rang des lyriaues les
plus estim6s des autres peupfes; ses
eldgies sacr^es ont une onction tou-
chante, et il excelle h ^eindre les gran-
des v^rites de la religion. II fernie la
liste des hommes remarquables de cette
premiere periode de la litt^rature ar-
m^nienne.
Vers le onzi^me si^e, la science et
les luniidres s'^taient r^fugi^s dans
les ecu vents , en Arm^nie , comme dans
TEurope occidentale. Les plus c^lebres
rtaient ceux de Sanahin, de Halbat et
(le S^van, qui fbrent une p^piniere
tr^crivains plus ou moins distingu^.
A leur t^te doit 6tre rang^ saint Ner-
s^, qui n*appartient cependant qu'au
douzieme siecle, vrai Fenelon pour le
style, et qui a m^rit^ le surnom bono-
rinque de Gracieux. La capacite de son
esprit s*appliquait a tout, et il est aussi
distingu6 comme poete et historien que
comme orateur, thdologien et pbilolo-
gue. Un autre 6crivain non moins re-
marquable, et qui porte aussi le nom
de Nerses, est Tdoquent ev^ue de
Tarse, auteur du long et touchant dis-
cours prononc^ dans le synode de
Romcia, assemble pour operer la reu-
nion des dissidents, en 1179, et qui
malbeureusement n'atteignit pas le but
qu'il s^etait propose. L'bomme qui avait
puissamment contribue a la restaura-
tion des lettres est Gregoire Machis-
truos , auteur de plusieurs traites re-
commandables et dont le GIsGregoire,
surnomnie Veghajaser, est aussi une
des lumi^res de Tl^glise d'Arm^nie (*).
(*) Voy. la ptaiirlie n* a5.
Pendant toute cette nouvelle pf-
riode , le nombre des ecrivains ra crois-
sant, mais un petit nombre d'entreeux
seulement se distingue par un mMe
reel. Nous citerons vartan de Parzer-
{)erh en Cilicie. auteur d*une histoire
ongue et detailfee, commen^nt a To-
rigine du monde et s'arrltant h Tao
1267. Les extraits que Tcbamtcbean
cite dans son histoire universelle nous
fonfcomprendre toute rimportancede
cet ouvrage, que les Mechitaristes de
Venise, pour des raisons a nous inooD-
nues , n'ont point encore voalu poblier.
Le livre des Fables publie en 1825 a
Paris , par M. Saint-Martin , et attribue
h cet ecrivain , ne nous donnerait pas
une haute idee de son roerite, car le
style en est aussi vul^aire que les peo-
sees sont triviales et meiegaotes.
L'eveque de Siounie, ^tienne Or{)e-
lian , composa sur sa province une his-
toire pleine de documents curieux, que
le savant Saint-Martin , trompe par on
renseignement inexact de la Croze, a
confondu avec Thistoire de la mm
des Orpeiians, ecrite beaucoup p
tard par un autre ecrivain inoonnu.
A partir de cette epoque, le bw
godt deperit, et la langue vulgaiif.
qu'il faut toujours soigneusement diV
tmguer de Tarmenien dassique ou lit*
teral, gagna dans le peuple au detrimeot
de Tautre. Dans les dges precedents, i^
litterature avait et6 enricnie parlestra*
ductions des meilleurs auteurs grecs,
ce qui contribuait k perfectiooner la
lan^e et k nourrir le g^t des lettres-
Mais vers ce temps un autre systeme
de traduction fut iroporte par deus
associations litteraires, connues sot^
le nom de Fr^rcs Unis et de Date-
viens, associations opposees Tune >
Tautre, et n*ayant pour point de con-
tact que leur'mauvais goAt, qui ^
portait a traduire des ouvrages latins
extremement mediocres et encore d^
figures par leur style incorrect, quek
public neanmoins accueillit avideaienti
en mettant de cdte, par un dedain io-
juste, plusieurs ouvrages d*aateurs luv
tionaux et certaines traductions an;
ciennes plus importantes, qui ont fim
par se perdre entierement.
ARMliNIE.
107
La conqu^te definitive de Tempire
§rec par les Turcs avait acliev^ d*etein-
re en Arm^nie les dernteres lueurs de
la civilisation. Heoreasement, dans
toutes les ehoses humaines, la Provi*
dence place le remMe pr^ du mal.
Ainsi , en m^me temps que la barbaric
etendait sur FAsie son lugubre lin-
ceul , au sein de TEurope la science
proserite de TOrient renaissait avec un
nouvel 6clat, grdce h I'lnvention de
rimprimerie.
Le contre-ooop de cette revolution
intdlectuelle se nt promptement res*
sentir en Asie , et prindpalcnient dans
TArmenie, <^ Abgar de Tokat vint,
en 1563, popnlariser cette invention.
Avec kBS livres , le got)t de Tinstruction
se r^ndit parnii lepeuple; et la nation
armenienne participa bient6t au mon^
vement scientifique qui reg^nerait
I'Europe. Au commencement du dix-
septieme sidcle , des presses armenien-
nes etaient etablies k Milan, Paris, Ams-
terdam, Constantinople et Leipsick.
La propagande romame attlsait le feu
sacre par ses missionnaires qui ap-
portaient dans TOrient des ouvrages
inoonnus , h cause du peu de commu-
nications existantes entre oette partie
du monde et le pays des Latins. Gala-
ous m^rite surtout d'etre cite par son
zeie et son erudition, bien qu*elle soit
faative dans certains passages.
Mais ce fut le ceiebre Mechitar,
fondateur du couvent de Saint-Lazare
de Yenise , dont nous parlerons dans
la dnquieme partie de cet ecrit , qui
fiit rinstrument du changement litte-
raire opere au commencement du dix-
huitieme siecle , et qui ouvre la troi-
sieme grande epoque. D^s qu'il cut
fonde sa societe, son premier soin ftit
de retablir la langue armenienne dans
son andenne purete des temps classi-
3 IMS, etde la purger du grand nombre
e mots barbares que rignorance ou
le mauvais godt y avait introduits. Le
moyen de parvenir k cette fin etait de
faire une refonte generate de tous les
roots, et meme des locutions usitees
par les autears eorrects, et de donner
ainsi une esp^ce de r^e et de crite-
riuro decisifdans les difncultes du Ian-
gage. II composa done le grand dic-
tioonaire qui porte son nom , et qui ,
pour la langue armenienne , rempiace
celui de TAcademie.
Le developpement que prit, dans le
couvent des Mechitaristes , retude de
la langue armenienne , reveia k quel-
3ues savants de I'Europe Texistence
'un nouvel horizon ouvert k la saga-
cite de leur erudition. La France tut
le premier centre ou I'on s'occupa de
cette etude. Jacques Villotte publia
plasieurs travaux recommandables ;
apres lui , viennent le savant Veyssiere ,
autrement dit la Croze, Yillefroi, Lour-
det, et enfin Saini*Martin , qui, pent*
etre moins verse dans la connaissance
materielle de la langue que audques-
uns de ses devanders , les a neanmoins
surpasses par la critioue et I'impor-
tance des resultats qu'il a obtenus. En
An^leterre, les freres Whiston pu-
bliaient la traduction de Moise de Kno-
ren, travail surprenant, eu e^ard k
I'epoque k laqudle il a etc termme , et
au peu de ressources qu*avaient oes
hommes laborieux. L'Ailemagne, sui*
vant son habitude , ne resta point en
arriere des autres pavs; et Schroder
composa son Trisor de la langue ar-
miniewne. ouvrage grammatical le
plus compiet que nous avons sur cette
matiere. Aujourd'hui, I'universite de
Munich possede le docteur Neumann ,
qui vient de terminer une serie deja
Tongue de beaux et utiles travaux sur
I'histoire et la langue armenienne, par
un tableau de sa litterature (*) , plus
compiet que cdui du reverend P. 8u-
kias Somal. La congregation de Saint-
Lazare n'a pas cesse, depuis sa fon-
dation, de produire aes hommes
recommandables par leur science et
paries travaux qu'ilsontexecutes. Nous
(lesignerons de preference le P. Tcham*
tcbean , auteur d'une histoire univer-
selle de sa nation , ouvrage rerapii de
documents rares et importants pour
I'histoire de certains autres peuples de
I'Asie. Nous ayouterons les noma d'In-
gigiean et des deux frdres Aucher,
(*) Veroick einer Geschichte der armen.
Utter, Leipsick, tS36.
108
L'UNIVERS.
dont Tatn^ sortout se fait remarquer
par une solide Erudition. La congrega-
tion perdit, au oominenoenient de oe
slecle, un homme d'un ?aste sayoir et
d*une critique sOre , le docteur Zoh-
rab, traducteur de la chronique d'Eo-
sMm , et qui sortit de Tordre de Saint-
Lazare&causedefdcheuses eiplications
provoqu6e8 par la publication de oette
oeuvre scientifique.
Saint-Martin, dans sea Memodret
9wr rArm^fUe , porte oe jugement sur
la litttoture arnmienne : « Cette litt^*
rature, dit-il, sans avoir I'int^r^t et la
richesse de la litttoture des Arabes,
des Persans, des Hindous et des Ghi-
nois, ne m^rite oependant pas Toubli
dans lequel elle est rest^ jusau'a pre-
sent; le grand nombre d'ecrirains
qu'elle a produits la rendent recom-
mandable a tous ^rds. On doit sur-
tout distinguer parmi eux les histo-
rtens qui , sans compter qu'ils nous
fontconnattre Thistoire de feur patrie,
moins fertile, il est rrai, en grands
^v^ements que ceile des autres pays
de rOrient, peuvent encore servir k
remplir une lacune assez considerable
dans les annales de TAsie, et nous
fournissent en outre de grandes lu-
mi^res et des renseignements tres-im-
portants pour Thistoire des Grecs de
Constantinople, des rois de Perse de la
dynastic des Sassanides, des Arabes
musulmans, des Turcs seldjoukides ,
des croisades, des Mongols, et, en ge-
neral, de tout rOrient, depuis le com-
mencement du quatri^me sidcle jus-
qu'aux temps les plus modemes.
a II est bien certain
que les historiens ont ordinairement
le m^rite de mettre beaucoup plus de
soin dans le choix des ^T^nements
Su'ils racontent, de rapporter moins
e faits peu importants, et de soigner
plus g^tolement le stj^le de leurs ou-
trages, que les historiens arabes et
persans; on pent m^me assurer qu'ils
8ont bien supdrieurs k la plupart des
6crivains du Bas-Empire. Par rapport
aux beauts de la diction et aux asr6-
ments du style, ce n'est pas ce delire
d*imaf[ination qui emporte les autres
6crivams orientaux, lorsqu'ils veulent
itre ^loquents. Sans quitter toot a bUt
ce gui constitue le style oriental, !«
ecrivains armtoiens savent o^anmoias
s'abstenirdeces comparaiaoos bizami,
de ces m^taphores ambitiemes qui fbii
asaez gen^alement le caractere dis-
tinctif ae Teloquence arabe et persaae:
on peut mtoe assurer, sans etaigaa-
tion, qu'il en est pluaieurs, tds qat
Molse de Khoren, Elisee, Lazan
Fharbatsi, le patriarcbe Jean YI, a
Suelques autres, qui ne seiaient pas ia-
ignes de rattention d'un lecteur ea-
rop^n, par leur Eloquence, la poicte
sootenue de leur style, et la oonla-
turesayantede leurs periodesoratoires,
et qui pourraient encore se laire lire
avec inw^t, apr^ les grands modds
que nous poss^dons, pt a|«e8 cein
mme que Rome et la Greoe ont pro-
duits.
» I^ litterature sr-
riaque neut encore tirer de granfe se-
eours de celle des Armeniens, taot
pour rhistoire politique que pour fbts-
toire eoclesiasttque et la PoMctifK.
Lors de Tintroduction du dvwa-
nisme en Arm^ie , il s'y dtablit bem-
coup de Syriens qui vinrent j prMxr
la doctrine ^ai^^ique , y fooder do
monast^res , et y eriger des si^es cpi»-
copaux. Toute la partie du sud-ouest
de rArm^nie, entre le Tigre et TEa-
Shrate, les environs d'Aroid el de
liafarekin, la proyinoe de Sopbeae
et les autres contr^es yoisines aevia*
rent, pour ainsi dire, des dependanoet
de la Syne , au moins sous les rapports
religieuxet litt^aires. Tons les Mqiits
de ces proyinces ^ient Syriens, et de>
pendants du patriarcbe d'Antiocfae;
tous les moines et les 6criyains ne se
servaient , dans TofBce dirin ou daos
leurs ouyrages , que de la langue sr-
riaque. Les pr^tres syriens etaicot a
puissants, qu'ils tent^rent, ao coai*
mencement du dn^ikne siede. de
s*emparer de la dignity patriarcale.
« C'est dans les Kyres
arm^niens que Ton peutesp^rerdetrou-
ver le plus de renseignements positii$
propres k ^laircir lliistoire des rois
de Perse de la dynastic des Sassanides.
et a nous faire connattre les opiniem
ARMltNIE.
109
reltgieuses des anciens Persans, secta-
teurs de Zoroastre. Apr^ la destruc-
tion de la monarchie arm^nienne , les
mages dierchh'ent a profiter de la
Suissance et de la protection des rois
e Peree , pour ^tablir leur religion en
Arm^te ; et les thMo^iens de oe pays
forent tr^B-soavent obliges de d6fendre
oontre eux. par 6crit , la relipon chr6-
tienne , pour empteher les princes ar-
m^niens d'embrasser la croyance des
strangers , qui fit , malgr^ cela , parmi
eux , un griind nombre de proselytes.
(Test dans oes Merits poltoiques qu'il
faut recherdier une foule de traits et
de traditions d'autant plus importants ,
qu*ils se trouvent dans des livres com-
posite par des hommes qui vivaient au
inilien des peuples dont ils combat-
taient la doctrine. Les Arm^niens pos-
sddent encore plusieurs traits de tn^
logic destine a combattre les erreurs
de divers h^r^tiques ou fiectaires , qui
ne sont peut^6tre que les successeurs
des disciples de Bardesanes , de Mar-
cion <, de Valentin et de Man^ , qui ,
Cendant longtemps , furent tres- nom-
reux et tr& - puissants h £desse, h
Harran , et dans le reste de la Meso-
potamie. QuoiquMls aient<, h diverses
^poques, ^rouv^ de sanglantes per-
secutions , il paratt qu'il en existe en-
core en Armenie , du c6te de la ville
de Knous, et dans la M^potamie,
ou on les nomme Jezidt.
«Malffr^ les nombreux avantages
que je viens d'^num^rer, la litt^rature
amoenienne est restee enti^rement in-
connue en Europe jusau*i^ nos jours.
II est bien difficile de determiner pr6-
cis^ment les raisons de Tindifference
que Ton a montr^e pour elle : le defaut
de dictionnaires , de livres ^l^mentai-
oes, et le tr^-petit nombre de manus-
crits oue nous possMons dans nos bi-
bliotMques, en sont sans doute les
Erincipales causes ; mats elles ne sem-
lent pas suffisantes pour Texpliquer
d*une maniere satisfaisante , parce que
ces m^mes causes auraient dd 6gale-
ment nous d^toumer de I'^tude des
autres litt^ratures de TOrient. Ce qui
me paratt avoir contribu^ le plus puis-
samment h perp^uer jusqu*^ nous cette
indilf(^ence , c'est I'^t oomplet d'.-js-
servissement oi^ se trouvait T Armenie,
lorsqu'au milieu du dix-septi^me si^le,
la literature biblique cessa d'etre Fob-
jet prescfue exclusif des travaux des
orientalistes, et que Ton comraen^a k
se livrer a F^tude des langues de TAsie,
dans des vues purement titt^raires. De-
puis longtemps les Arm^niens avaient
perdu , avec leur ind^pendance , le rang
politique que I'^tendue et Timportance
de leur pays leur donnaient droit de
tenir parmi les autres nations de
TAsie. II etait difBcile de penser qu'un
peuple , dont la plus grande partie ^tait
soumise au joug des rousulmans, et
Tautre errante et dispers^e dans toutes
les parties de I'ancien monde , s'occu-
pAt de belles - lettres et au'il poss6dAt
une langue savante , fixeie depuis fort
longtemps, et polie par un grand
nombre d'ouvrages de tout genre. Par-
tout le godt des Arm^niens pour le
commerce les faisait confondfre avec
les juifs; et leur langago vulgaire,
rempli de mots et de famous de parler ,
arabes , persans ou turcs , emp^hait
delesdistinguer de leurs dominateurs.
Ainsi une premiere injustice, qu'on
iivait faite aux Arm^iens eux-m^mes,
est devenue la source d'une injustice
plus grave , que Ton continuera peut-
etre longtemps encore de faire a leur
litt^rature. »
Nous ne croyons pouvoir mieux ter-
miner ce tableau rapide de la litt^ra-
ture arm^nienne que par queiques de-
tails sur le couvent de Saint-Lazare de
Venise, d'ou sont sortis tous les tra-
vaux propres a nous faire connattre la
langue et la triple histoire religieuse,
politique et litt^raire des Armeniens.
Ces renseignements sont extraits de
rhistoire de la society religieuse de
ce convent, que nous y avons pu-
blide en 1835 , pendant notre s^jour k
Venise.
SOCI^lt REUGIEDSB AH^IANIENNB DES H6-
CHrTARISTES DB L'lLB DB SAINT-LAZARE
PRto VEMISR.
Parmi les ties semees dans les lagu-
nes de Venise et toutes occupees an-
• • • • « •
•••• •...•
• • • •
.:.: •••
•
• ••
• • •* ••• •
• •• •
>••••
• •
• •••
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• • • •
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• • • -
• ••• •
•••>• ••••
• •••
• • •* ••• •
• m^ • •• •
• •••
'• •'
arm£nie.
Ill
doute qu*on voulait porter atteinte k
868 oncienoes traditions , a is memoire
de ses saints pontifes et de ses doc-
teiurs, ou du moiiis qu'on ne les respee-
tait pas assez.
La premiere condition exigte pour
6tre re^u dans la soci^t^ est d^tre
Annenien d*origine; et, afin de se
mieux pdn^trer de son esprit et de
i'objet ae ses institutions, on preftre
les sujets encore ieunes, ^levds dans la
maison , sans qu il soit fait la plus 1^-
gere distinction entre le riche et le
gaavre. Lorsque ces jeunes gens ont
lit preuve de leur capacity et de lears
dispositions, ils revftent la robe, cos-
tunhe de Toidre; ils habitent un corfw
de bitiment s^par6, nomm6 le Novi-
ciat, od ils ont des mattres capables de
les diriger dans lenrs etudes, qui cor-
respondent alors a oelles de nos gym-
oases ou collies. Lorsqu*elles sont ter-
mini, et qu'^ une bonne sant^
capable de supporter les travaux de la
▼ie de savant ou de missionnaire se
joint une capacity intellectuelle sufB-
sante, on les laisse iibres d'entrer dans
la society. S'ils manifestent le d^ir
d'etre admis, on les prtente k la so-
ciety, dont la majorite des nsembres
doit opter pour leur admission. Alors
lis passent dans T^le appel^ Profes-
sorat, ou ils se livrent k I'tode de la
th^logie et de la philosophic, en y joi-
gnant cdle des Peres.
Lorsou'ils ont ache?^ ce nouveau
cours, lis refoi?ent le sacerdoce, et on
leur assigne pour chambres celles qui
sont occupto par les docteurs. S'ils en
sont dignes, et s'ils soutiennent avec
avantage les examensrequis, ils resol-
vent aussi le titre de Tartabied, et,
suivant leur vocation ou les disposi-
tions quMls montrent, on les envoie
dans les missions d*Orient, ou ils res-
tent dans le convent pour Taquer aux
travaux Utttoires.
Th>is fdis par Jour les religieux s'as-
semblent dans r^lise poor r^ter en
oommun lenrs prieres; les jeunes en-
ftnts seulement sont dispense de la
pri^re du matin faite aans T^lise.
Outre tous les exercioes qui occupent
les religimix durant ta journ^, il leur
reste sept heures completes de travail.
Une imprimerie a €U ^tablie dans
le monastere, et la beauts de ses types ,
la correction et I'd^ance de tous les
ouvrages qui en sortent, non-seulement
la mettent a la t^ des autres presses
arm^niennes que Ton trouve a Cons-
tantinople, a Smyme, k Madtos, a
Yienne, a Saint-P^tersbourg, k Lon-
dres ou k Paris, mais encore ces qua-
lit^ lui valent Thonneur d'etre dassee
parmi les premises imprimeries orien-
tales de Tfiurope.
Les travaux de la soci^t^ peuvent se
diviser en deux classes : la premiere
Gomprend ceux execute dans le but de
servir k T^ducation spirituelle et mo-
rale, ou a rinstruction de la jeunesse;
il £aiut ranger dans la seconde ceux qui
ont un caract^ proprement sdeutifi-
que , et qui , s'adressant k tout ie public
htt^ralre, ont un int6*dt tout particu-
lier pour les orientalistes.
A notre premiere classification se
rapportent les oeuvres aso^tiques des-
tinees a diri^er la conduite des fiddles
en tout ce qui tient a la relision : telles
sont la Vie des Saints du calendrier ar-
m^nien, les Commentaires de TCcri-
ture sainte, le Br^viaire, le Missel et
le Rituel de r£glise armenienne, une
Doctrine chr^tienne, et une multitude
d*autres livres dont Tdnum^ration fati-
guerait le lecteur. Dans le domaine de
la litt^rature profane, nous trouvons
des traductions d'ouvrages europ^ens ,
et particulidrement francais, corres-
pondants aux diverses nranches de
rinstruction , conune THistoire de Rol-
lin, Tel^maque, la Vie des bommes
illustres de Plutarque, la Mort d*Abel
de Gessner, leParadis perdu de Milton ,
les Pensto de Young, les Caracteres
de Th^ophraste, des Traits d'arithm^
tique, de gtom^trie, de trigooomtoie,
de perspective , une Geographic univer-
selle, un Traits de m^ecioe pratique,
et plusieurs autres ouvrages.
La seconde dasse des travaux plus
importants, et directement utiles J
la science europeeiinc, cooiprend ia
Grande Histoire tuuverseile de I'Ar-
minie du P. Tchamtcbean, les JnU-
quUis d'Jrminip. et sa G^ocnraphie , pai
112
L'UNIVERS.
le P. Incigean , la Chronique d'Eusebe ,
par le P. Jean*Bapti8te Aucher.
Une riche collection de manuscrits
armeniens oroe la bibliotheque du cou-
▼ent; chaque jour de nouvelles acqui-
sitions Yiennent enrichir ce tr^r iit-
teraire , et , sans la dissidence religieuse
3ui ferme aux M^itaristes Fentr^
es monast^res de TAmi^nie, il est a
§ roomer qu'ils seraient en possession
*un certain nombre d*atitres tents pr^
cieux que Ton croit perdus. Esperons
qu*un jour un Toya^eur europten
pourra oonstater la v^it^ de ce fait. II
ne trouverait pas les monies obstacles
qu'un Arm^nien, et il pourrait s*ae-
qu^rir quelque gloire scientiflque.
La partie la plus riche de Tancienne
litt^ratiire est celie qui traite des ori-
gines du christianisme en Arm^ie, et
qui comprend les vies et les actes des
saints. Nous empruntons ici k un teri-
vain du cinquieme sitele, A^athange,
le rteit du martyre de la sainte dont
le nom est aussi populaire dans cette
contrte que celui de Genevieve en
France, et d'£lisabeth en Hongrie; elle
s'appelait Ripsymte. Nous retrouvons
ici tons les caract^res de la legende.
SAINTE RIPSYMKB.
En ce temps-la, il se passa dans
TArm^nie un fait merveilieux qui fit
briller d'un nourel telat la vertu chr^
tleniie, en montrant les prodiges qu*elle
pouvait op^rer dans le coeur de sim-
ples femmes.
Suivant la tradition, Diocl^tien,
Tempereur remain, voulant ^pouser
la femme la plus belle de son empire ,
euToya dans les diverses provinces des
peintres habiles, pour rechercher les
jeunes filles dont on vantait la beauts ;
et its devaient prendre leurs portraits,
afin qu'il pOt se decider et cboisir celle
que son coeur d^irait. Longtemps les
perquisitions des toissaires iurent in-
tructueuses; toutes les femmes qu*ils
avaient trouvto et dont ils avaient en-
voy6 le portrait h Tempereur, man-
quaient oe certains avantages , oe qui
les emptehait de r^liser le beau ideal
qu'il at ait con<^u. Un jour, iis arri-
v^rent k la porte d*une vaste maisoa,
situte solitairement <bns la gmrn d'une
montagne , et dont la constnictMMi sia-
guli^re, avec le silence et Tordre a^
parent qui y regnaient, les frappa ex-
traordinairement. Ils demandereot
3uels 6taient les paisibles hafoftanti
e cette retraite, et quelles poavaint
6tre leurs occupations. Lorsqu*on lor
eut r^ndu que , dans ces lieux , do-
quante jeunes vierges , de la religion
chr^ienne , vivaient sous la condoite
d'une autre vierge, leur m^re com-
mune, qu'elles passaient les jours et
les nuits en pneres, se livrant aax
Clusdures aust^rites, et n'aj^ant poor
)ute noorriture que les berbes sau-
vages des montagnes, leur admlratioB
s'accrut avec leur curiosity ; et , comme
pousses par une inspiration secrete,
lis voulurent voir ces femmes si dignes
d'^tonnement, et ils forcerent i*cntr«e
de la maison, dans Tespoir d'y trouvcr
peut-^tre la beauts quMIs cfaerchaioit
ailleurs inutilement.
A peine avaient-ils franchi le seuil,
3u'une jeune vierge, au maintien mo-
este et ^ la figure suave et ang^iqite,
s of&e k leurs regards. C^tait Ripsr-
mee , issue d'une maison de princes (k
rOrient, et Tdeve ch^ie de Caiaaa,
charg^ de la conduite du monasters.
Jamais ces Romains n'avaient vu dans
une femme Fair de candeur et Texprei-
sion de quietude s^rapbioue eropreinte
sur le front de la jeune can^enoe ; iis
iurent frapp^ d^admiration , et s^e-
cri^nt de concert : Certes, voil^ bioi
la femme que Diod^tien nous £iit cbcr-
cber ! Un peintre tire aussit5t scs pin-
ceaux, et esquisse son portrait qu*oo
envoie k Vwnperear.
Dte que Diocktien eut vu la figure
de la vierge chr^ienne j il tomba en ex-
tase devant ce mod^ de perfectioo,
et il sentit s'allumer en son coeur Ta-
mour le plus ardent, en sorte qu'il
ne soupirait plus qu*apr^ rinstaot ou
il s'unirait a oelle qu*il cboisiasait par
Feffet d'un attrait irr^istible. II en-
voya done sur-le-champ des ofliden
de son palais au convent des vienes
chr^iennes, en leur donnant rormv
d'amenerRipsym^B. Lorsquecettenou-
ARM^NIE.
lis
vette parvint dans la solitude des saintes
finnroes , elle y jeta la constenuition.
Caiana fit venir Ripsyroee et ses autres
oompagnes; elle leirr exposa le motif
de rarriT^ des officiers romains, la
volont^ de Tempereur; elle le»r nriOD-
tra tons les artifices du dimon qui
cherehait k troubler leur foi et le
calme de leur retraite ; puis elles torn-
b^reot toutes a (;enoux , et adress^ent
au ciel cette priere :
« Seigneur des Setfjneurs, Dieu sou-
verain et ^temel , Dieu du ciel , pro*
cr^teur de I'ineffable lumi^re ; toi qui
as affermi toutes choses par ta paroijp,
toi qui as fait le ciel et la terre et tous
leurs omements; toi qui as cr66
rhomme du limon et Tas ^bli dans
oe inonde ; toi qui secours dans leurs
miseres tous les aflliges esperant en
ton nom , secours - nous , 6 Seigneur!
au milieu du combat qui nous presse,
afin que nous triomphlons des em-
bAches de Satan. Ton nom sera glo-
rifie, et la crainte sera bannie du sein
de ton ^lise. Fais que nous puissions
arriver auz demeures celestes r^ser-
v^s k tes ^lus. Que Thuile ne manque
point dans nos lampes , et que le flam-
beau de la foi ne s'^teigne pas ; que
nos pieds ne chancellent jamais dans
tes sehtiers lumineux ; que les ^upilles
de nos yeux ne se ferment pomt aux
rayons resplendissants de ta v^it^,
etque Toiseau de la mort n'enleve pas
la semence de vie ^'a jetee au milieu
de nous ton fils unioue Jesus - Christ ,
Notre-Sdgneur. Ne livre point la sain-
tet^ de ton troupeau a la dent de la
b^ f(6roce; que le -loup destructeur
ne triomphe point de tes orebis , et que
Tennemi de notre foi ne disperse pas
tes agneaux de ta sainte ^lise.
« Jette du haut du ciel un regard de
compassion sur nous, de peur aue
nous ne ressemblions a celui qui batit
sur le sable, et dont I'^ifice croule
sous les coups de la premite pers^cu*
tion. Afifermis-notts dans la v^rit^ de
ton ^vangile, et d^salt^re-nous k la
eoape do martyre , afin que nous rece*
vions pour prix , au jour du jugement ,
la oouronne de rimmortalite. »
Aprte avoir achev^ cette pri^e,
8* Uvraisan. (Armenib.)
Caiana et Ripsym^, miraculeusement
inspire de Dieu , song^nt k quitter
leur retraite <, et li se pr^errer par la
fuite des atteintes des paiens envoys
a leur recherche. £lles voulurent se
rendre dignes de la r^mpense que
J^us-Christ promet a celui qui aban-
donne en son nom ses parents et sa
demeure. Elles se r^gierent done au
pays des Arm^niens^ dans la plaine
d* Ararat, pres de la ville de Vaghars-
chag. La, retirees dans quelques che-
tives masures, qui servaient, a I'^poque
de la r6oolte , de pressoir pour les rai-
sins et les olives, elles vivaiant du
travail de leurs mains, au moyen des
colliers de perles qu'elles iaisaient
chaque jour.
Cependant, comme les envoys de
I'empereur remain n'avaient point
trouve les saintes viwges dans leur
retraite , ils ^talent passes aussi dans
la grande Arm^nie , et ^tendaient de
tous cdt^ leurs perquisitions, ce qui
jetait le trouble nans le pays. Arriv^^
a Va^harschag, ils all^nt trouver le
roi Tiridate , et lui remirent une iettre
ecrite de la main de Diocl^tien, dans
laqudle cet empereur, commen^ant par
se plaindre des troubles continuels ex-
cites en son empire par les Chretiens ,
et de leur refus obstin^ de reconnattre
les divinity de r£tat, pour adorer de
pr^(6rence un juif crucifix, il lui an-
noncait ensuite qu*ils avaient ^are
par leurs artifices et leurs dangereuses-
suggestions une ieune vieree de leur
secte , remarquable par sa beaote , et
qu'il s'^tait choisie pour Spouse. II Ta-
vertissait qu'on Tavait emmen^ fugi-
tive dans ses £tats, et il le conjurait
d^user de tout son z^e et de son auto-
rit^ pour deoouvrir le lieu ou elle ^tait
tenue cach^ (*).
Lorsque Tiridate cut lu cetti Iettre ,
(*) Le roi Tiridate eUit eflecti vement con*
temporain de Diocletien. A^thancdos de
qiri nous aYons extrait oette leeeAde , s'ac-
corde eu ce point avec Moise de Khoren ,
qui nous dit, chap. 8a, liv. a, p. 333, que
Tiridate moAta sur le trdne de rAroienie la
seconde annee du regne de IVmpereur ro-
main.
8
114
L'UNlfERS.
il doima I'ordre sor-te-chadnp de re-
dierd^ aree la plus grande exactitude,
dans toutes lea provinces de son
royaume , la .retraite de la vierge que
Iqi demandait Diocl6tien , promettant
de riches presents k celui qui rameoe-
rait dans son palais. Ses envoys se
r^ndirent au loin dans le pays, et
fouill^nt chaque village et diaque
hameau, mais sans sucote, puisque
la saiote toit toujours dans la ville
mtoie*
Cependant Ripsymte fut trahie par
quelgue infid^e , qui , avide de recevoir
la recompense promise, alia dearer
au roi que la sainte toit cadi^ aux
portes ae la ville, dans un pressoir a
demi ruin^. On envoya un corps de
troupes pour investir toute la maison
t't en garder toutes les issues, et les
soldats prolong^nt oette espdoe de
si^e trois jours durant. lis eurent oc-
casion d'entrevoir la sainte, et tons,
en voyant sa beauts , demeurerent stu-
p^its. Le bruit de oette merveille se
r^andit promptement dans la ville,
et les habitants accbururent en foule
pour voir Rtpsymte. Les seigneurs et
les dtoyens les plus riches , ainsi que
lespauvres,se pressaient^ Teovi pour
admirer la servante de Dieu. Les con-
fidents du roi, en rentrant au palais «
Itti flrent une peinture si gracieuse et
si attrayante de la jeune vierge , que
Tiridate con^ut un violent dfeir de la
consid^rer de pr^ et de Tentretenir.
11 donna done rordre de la transpor-
ter dans son palais , au lever du jour,
elle et ses oompagnes. Bien plus , Tiri-
date avait d^\k torm^ dans son ooeur
le dessein de r^user, et il avait d6-
p^ch^ quelques-uns de ses officiers,
avec de riches v^tements et des ra-
deaux d'un grand prix , afin qu'ils ra-
menassent en triomphe Ripsymte dans
la ville.
Mais la sainte, voyant aux por-
tes de sa retraite ce ooncours pro-
digieux d^hommes arm^dont tons les
regards s'attachaient avidement sur sa
personne , se troubia ; une rongeur pu-
dique couvrit ses joues , et die se r6-
fugia dans les bras de Caiana, qui lui
<lit : «Souvien8-toi, d mon enfant,
que tu as meprise et quitt^ tous les
vains honneurs de la pourpre vovak,
dans ta patrie, et que tu as prnM,
aux avantages de la terre, le titre du-
rable et milie fois plus glorieux d'^pouse
de J^ufr€hrist; que si, aujounrhul,
un prince paien et perstoteur de h
foi au vrai Dieu te fait chercher pour
t'elever h la dignite de reine , dMaigne
ses ofifres , et pr^fere au trdoe la croix
du Sauveur. »
Ripsymee r^ndit a ees paroles
par des torrents de larmes et des oris
de donleur; puis , devant ses yem au
cieJ , et plafiuit ses bras sur sa poi-
trine en forme de croix , elle fit en-
tendre ces mots : « Seigneur tout-pnis-
saoC, qui avez ftit passer du nant a
Pexistence tous les dtres, et qui aves
peupl^ les deux d*6toiIes, les mcrs et
la terre de mille 6tres vari^ , jetei sur
nous un regard de compassion; sao*
vez-nous du p^ril qui nous menace,
comme vous avez epa^sn^ autrefois k
juste I9o^ dans le deluge , conune vous
avez ddivr^ Abraham des mains des
Canan^ens, et Moise, avec tout n
penple, de la servitude d*£m>fe. Le
tivre de votre loi nous present ae sane-
tifier votre nom dans nos cocnrs;et
void qu*une troupe d'idolAtres le blas-
pheme h mes ordlles, et se prepare
a porter une main crimineile sur rotn
servante. Doux Seigneur, amant des
hommes, si vous nous avez expos6es a
eette ^yreuve, donnez-nous la vietoire
fiar voire puissance, et assurex -nous
a WkxHnpense promise a eeax qui per-
sistent dans la crainte de votre nom
et dans Tobservanoe de vos aunman-
dements. Si vous preoez soin des oi-
seaux des champs, comment meprise-
riez-vous les pneres de oeux que voos
nommez le temple et le vase de votre
dection ? »
Les officiers , les soldats et toni k
peuple, attir^ par la curiosity, on
envoy^par le roi au lieu de la retraite
des sainus vierges, attendaicnt impa-
tiemment aux portes , dans respoir de
les voir sortir , et d'admirer oelie dont
on parlait dans k royaume. La fnyeur
des timides reduses augmontait avce
k tamulte et la conliision du dehors ,
ARMENIE*
II4»
dies poussftieot des cris entreeoup^
de sanf^ots , et , les bras ^lev^ au ciel ,
eiles disaieDt : « Malheur a doiui , si les
hooneurs ou la grandeur peuvent nous
s6duire, si la erainte de la persdcation
nous ebranle , et si noftre courage Cai*
Uit devant la mort ! Malheur k nous ,
si nous pref^rions une vie passagere a
r^meile imidtSl Non, ni les digni-
tds ou les tortures, ni les piaisirs ou
les chalnes , ni Teau , ni le feu , ni le
glaive, ni la pauvrete, ni ce nionde
entier, ni la vie , ni la mort , non , rien
ne pourra nous s^parer de I'amour de
Jesus • Christ : nous lui avons offert
notre virginity, afin de nous conserver
pures dans sa sainte union , et nous
demeurous attach^ a lui par un in-
violable amour, afin de paraftre un
jour a ses yeux sans honte et sans
erainte. »
Dieu eut piti^ de ses fiddles servan-
tes , et il permit qu'au commencement
de la premiere veille de la nuit, un
orage violent obseurdt le ciel , et que
le bruit de la foudre et de la pluie
tombant par torrents , jetAt le desordre
parmi toute la foule rasseroblee aux
portesdu pressoir. Les soldats, saisis
d'une frayeur inconnue, cberchaient
a s'enfuir ; et comme ils se g^naient
mutuellement, les uns tirdrent leurs
^p6es et s'^rgdrent, d^autres tom-
berent foul^ aux pieds des chevaui.
Quelques officiers de la cour arrivdrent
predpitamment au palais, et racon-
terent k Tiridate I'^v^nement qui s'^*
tait pass^ sous leurs veux*
Le roi se mit en colere , etdit : « Puis*
que ces femmes n'ont pas voula venir
pr^ de moi librement et entourto
alK>nneur, on les trafnera de force k
mon palaiset jusquedans naacfaambre. »
On ex^cnta ses ordres. D'antres sol-
dats partirent, et, arrive ores de
Ripsy ro6e , ils la saisirent brutalement ;
et comme eUe les repoussait de la
main , ils la tratn^ent a terre , en pro-
t?h'ant les plus noires impr^tions.
Ripsym^ s ecriait : « Seigneur Jesus-
Christ , seoourek-moi ! 6 mon Sauveur,
venez kmon aide!»
De temps en temps , les soldats , fati-
gue de la tratner .s*arr#taient ^ re*
gardaient avec stupeur oette innooeote
vierge, qui continuait sa priere en
disant: « Dieu supreme! toi qui ouvris
le sein de la mer Rouge p<Mir laisser
Sasser ton peuple , toi qui fis descen-
re ton serviteur Jonas dans le ventre
de la baleine pour Ten tirer ensuite
avec ^clat et puissance, toi qui as
change la ferocit4§ des lions excite
contre Daniel en une douceur ^^ale
a celle des agneaux , toi , le vrai , Tuni-
que Dieu , abandonneras-tu ta pauvre
servante, qui n*aimeque toi et n'es-
perequ*en toi?»
Tandis que ces ardentes prieres s*^-
chappaient des levres meurtries et
eles de Ripsym^, elleentrait, avec
cortege de ces ferooes satellites,
dans la cour du palais de Tiridate. Le
peuple, qui connaissaitd^ja Tintention
du roi d'en faire son epouse, la regar-
dait comme une fiancee que Ton con-
duit a la c6n^onie nuptiale; et, comme
il s*imaginait que la r^istance de la
jeune fiile ^tait Teffet de la timidite et
de la frayeiir, il voulait I'encourager
par des signes de joie et d'approbation.
En consequence , il se livra k une joie
bruyante , faisant retentir Tair de ses
chants et du son des instruments qui
dirigeaient les choeurs de danse.
Enfin les efforts de la jeune vierge
sont inutiles; elle est introduite dans
le palais et dans la chambre mdme du
roi. Tiridate, en voyant ses traits an-
g^iques et T^lat de ses yeux, que la
sainte indignation de la vertu alar-
mke animait d'un feu nouveau, sentit
s'allumer dans son ooBur la passion
dont des rapports asseas vagues avaient
fait naltre les premiers germes.Ne com-
prenant point Topposition de la vierge
chr^tienne et I'air oourrouce avec le-
qael elle ae presentait devant lui, il
empkne d'abord les promesses et les
sollidtations les plus pressantes pour
gagner sa volonte; il lui montre les
onneurs et la aloire qui I'attendent a:
die veut oonsenur jidevenirsoni^poiise.
Ripsymee le refuse avec un m^pns in-
suftant, et le roi, rugissant de fiireur,
vent obtenir de la force oe que la per-
suasion n'avait pu lui.conoilier. Mais
Dieu n'abandonna point cdle qui lut-
8.
lt«
L'UNIVERS.
tait aussi gto^reuaement pour son
nom , et le fiint-Esprit I'investit d'une
force inoonnue, qui lui permit de r^
sister h }a brutality de Tiridate, bien
qu'il fat c^ldsre dans toute I'Asie
pour la vigueur extraordinaire de son
bras.
Le roi esp^a qu'il parviendrait k ses
fins en faisant intervenir Tautorit^ de
Caiana, a laquelle Ripsvm^ ^tait com-
()i^tement soumise. II fa fit appeler, et
orsque cette seoonde mere en J^us-
Christ de la sainte fut en sa presence,
il la somma d'user de tons ses movens
de persuasion pour ?ainere Tent^te-
ment de son eleve. Mais Caiana n'ou-
vrit la bouche que pour enoourager
Ripsym^ , et elle lui criait d*une ?otx
forte : « O mon enfant! persiste dans
ta courageusedtfense; Dieu te sauvera
des mains criminelles du roi. Malheur
a toi, 6 mon enfant, si tu prtf^rais
h r^ternelle couronne quelques fleurs
de oette terre, aujourd'hui belles et
domain fletries! >> Elleallaitcontinoer,
lorsgue les gardes, par ordre du roi,
lui frapp^rent la t6te et les mAchoires
du pommeau de leurs 6pees, en sorte
quells lui briserent les dents. Mais la
sainte, que Tamour de Dieu ^levait
au-dessus d*elle-m^roe, puisait aussi
dans Fassistance divine une force mi-
raculeuse, et die poursuivait avec un
accent plus p^n^trant : « Courage, 6
mon enfant! vois le Christ qui t'ap*
porte d^jd sa couronne. Rappelle-toi
les instructions spirituelles que je t*ai
donnto et les commandements divins
que je t'ai enseign^; soutiens coura-
geusement la pers^ution que je par-
tage avee toi, et mourons ensemnle.
Que le d6oouragement ne nous abatte
pas : ie Sauveur des hommes saura bieo
nous assfster, lui qui, pour Famour
de nous, n'a pas craint de verser son
sang sur la croix et de se livrer k
la mort, afin de nous introduire h la
vie ^temelle. •
Ces paroles, r6p6t6es avec Texpres*
sion d'un saint zele et d'un courage
pr^t a tout endurer, inspiraient h Ri^
spnoe une nouveUe ardeur de se sacn*
tfer pour Dieu, et Fauraient affennie
dans oe dessein , si.sa volont^ avait et^
un seul instant chanoetante. Elle d^
concerto tous les efforts du rot, et,
ouvrant les portes, die s'daoee au mi-
lieu des ganles, qu*dle traverse ainsi
que la foule, sans qu'aucune main ose
rarr^ter, comme si die avail M pre-
e6l6e d'un ange invinble qui Ini edt
firay^ le chemin.
Elle retouma h son andenne re-
traite, et comme die craignait d*tee
deoouverte dans ce lieu , elle se rdlugia
dans une solitude voisine, ou, pour
consacrer en qndque sorte son arrivee ,
die commen^a par adiesser k Dieu
cette priere :
« Seigneur des bommes, cooiment
reconnaftre dignement les bienftits si-
fnal^ de votra grAce, en me ddiviant
es mains impures d*un roi perven?
Soyez lou^ de nfavoir considme com-
me attach^ il votre service, en me fai-
sant soufifrir. Hors de vous, Seigneor,
mon coeur languit, et milie Ibis vao-
drait mieux mourir que d^adorer d*an-
tres dieux qui ne sont que o^nt. II
me tarde de sortir de ce corps de booe,
pour m'unir k votre divin Fils, moii
unique ^poux. »
La nuit, tandis que la sainte ^tait
encore en privies, les emissaires de
Tiridate, envoys k sa poursuite, gui-
d^ par les denondations des trattres,
arriv^rent dans sa solitude et la sur-
prirent. lis commenc^rent par lui lier
les mains, et ils essay^rent de lui arra-
cher la langue. Ripsym^, de son |ilda
gr^, ouvre la bouche ^ ieur ivrttente
sa langue, qu'ils coup^rent jiuqu*^ la
radne; puts ils mettent en lambewa
les v^temeots qui couvraient son oons ,
et , prenant quatre dous , ils en enron-
cent deux dans ses pieds et deux dans
ses mains, en sorte qu'eile resta cru-
cifix sur le sol, a rexemple de soo
divin maltre , auqud die s'offirit jq3fai>
sement en bolocauste. Les soldats eii-
rent Tatrocit^ de mettre ie feu ii ses
chairs palpitantes a mesure qu*ils les
dtonpaient, et ils lui chargerent le
sdn de pierres ^normes, tdlement que
son ventre se fendit et ses entraiUes
sortirent. Chaque fois quails eolevaient
avec Ieur sabre un de ses membres,
ils r^p^taient atrocement : « Qu'aiosi
armi9;ni£.
11
meure quioonque osera enfreindre et
m^priser les ordres du roi! »
De saints homines et de pteuses fern-
mes Ghr^tiennes, apr^ avoir oonou la
mort de Ripsymde, aocoanireat au liea
de son supplioe* demandant k recueillir
ses pr^ieux restes pour les inhumer.
Les soldata leur demanderent s'tis pro-
fessaient la raimt religion; et oomme
tons oonfessaient hautement au'ils
etaient Chretiens, Us tir^rent leurs
ep6es et les massacr^ent tous impi-
to^ablement. Pendant cette barbare
execution , on les entendait chanter lea
louanges de Dieu et dire : « Oui, Sei-
gneur, nous mourons pour la glorifi-
cation de votre nom, et nous vouJons
avoir part a la oouronne que vous
venez de d^cerner h votre servante
Ripsjm^. »
Rips^rm^ et les autres saints mar-
tyrs qui partagdrent son sort furent
les premiers a arroser de leur sang 1e
sol de la haute Arm^nie, pour la con-
fession de la foi chr^tienne; aussi leur
memoire est-elle en ^rande v^n^ration
dans r£glise arm^nienne, et la litur-
gie c^I^bre leur Ute arec une pompe
particuliere.
P0£S1K SPIBITUBLLB.
De toutes les £giises d'Orient, rH;-
glise d*Armtoie est, sans contredit,
celle ou la poesie chr^ienne a produit
les plus ricnes compositions d'un asce-
tisme tendre et |)ur, a la gloire de la
religion et des saints qui ont travaill^
activement a la propagation de la foi.
Le g^nie poetique de fa nation, exclu-
sivement porte sur les cboses de I'ordre
spirituel, exhalait dans des hymnes re-
ligieuses et de saints cantiques ses
amoureuses aspirations, et ses senti-
ments de reconnaissance et d*all^
gresse. Tous ces chants , qui font partie
de la Kturgie arm^nienne, ont et^
recueillis et reunis dans un ouvrage
connu sous le nom de Charagan , lequel
signifie un colUer de perles, denomi-
nation familiere aux Arabes et aux
Persans pour designer un recueil de
poesies, ou d'autres compositions cboi-
sies et pr^cieuses comme les perles. Lc
style du Charagan est Apire et rhythmi-
que; la pensee, en se devetoppant avec
hardiesse, s^^l^vesouventvers les hau-
teurs d*une mysticite m6taphysique :
une attention soutenue est nmssaire
pour la suivre et la reconnattre sous
le v#tement spiendide des mtophores
orientates qui la parent. On rencontre
aussi h chaqoe instant des expressiona
qui ne sont que des allusions froertains
passages des saintes Lettres, et c*est
dans la oonnaissance approfondie des
textes sacrds qu'on en peut trouver
rintelligence. Nous avons traduit les
h}rmnes composte h Thonneur du pa-
triarahe saint Gr^oire , et qui se chan-
tent le jour de sa £§te, afin de comply
ter les documents relatifs h sa vie,
et pour donner en m^me temps h nos
lecteurs une id6e de ce livre justement
c^tebre dans I'Ejglise d^Armenien.
« Aujourd'hui brille d'Un vif eclat
r£gltse, arbre plants par Dieu et cou-
ronni^. d^ fleurs, d'ou nous vient Gr^-
goire, rejeton. d'immortalit^ qui rem-
plit tous les lieux de ses fruits. Rameau
convert de grappes de la veritable vi-
gne, il a 6te cultiv^ par les mains pa-
ternelles de Dieu ; c'est par lui que s est
eniplie la coupe qui a rejoui les nations
attristdes, et qui , en nous d^altdrant,
nous anitned'uneall^esse spirituelle.
Le souffle printanier du vent du Midi,
echauff(6 par le feu de l^Esprit saint, a
chasse les glaces de ridol&trie des na-
tions du Nord, et celles-ci ont vu fleu-
rir au milieu d'eiles toutes les sciences
divines. L'arbre glorieux que Grdgoire
a plants au pays des Arm^niens, au
prix de ses efforts et de ses sueurs,
apres avoir €t6 arrose des flots de la
parole divine versus par la pr^ication ,
s^t convert de fleurs et a pouss^ d'ad-
mirables rejetons. La lumiere celeste a
hii sur la terre; elle jaillissait du soleil
de vie, et sa splendeur a chass^ les
epaisses tenures r^pandues sur la na-
tion arm^nienne, en sorte qu'dle a vu
clairement les graces de TEsprit saint.
« Les choeurs incorporels des armees
celestes se r^jouissent de concert avec
n Charagan, Consiantiooplf, i8[5. in-H*,
p. a)2-236 et 448-457.
118
L'UNIVERS.
uou», el ieiiciteut uotre nature ter-
restre de ce qu'elie a donn^ h Dieu
saint Gregoire, aui a enfante tant de
ills h l*honneiir de la vraie foi. Gr6goire ,
dont les bienfaits sont Timage du bien
suprtoie. est un berger compatissant :
«a voix pieine de douceur a ranien^ les
brebis &ar^ et les a r^unies dans
le bercaii du vrai pasteur. Patriarche
tr^-pur 6Iu de Dieu, pr^icateur de
la parole de v^rite, il presente au Sei-
gneur un peuple nouveau et purifi^, en
le conviant h la gloire de la Si^n ce-
leste. Omement de la brillantt cou-
ronne des Arsacides, 6 Gr^oire!
homoie aux vertus apostoliques , tu Pas
encore embellle des pierres pr^cieuses
du martyre, et tu as ainsi form^ un
nouveau diademe digne de la sainte
iglise. Tu as re^u comtne un heritage
le troupeau d'Armenie, vicaire du saint
apdtre Tbaddde , germe vivant fecond^
par ses reliques , ravon de la grice
dard6 par refucacit^ de la pri^; rose
pourpree et 6panouie d*une tige epi-
neuse, Gr^oire, ap6tre de la grdce,
ton suave parfum a rempli le pays
d'Armenie 6t nous a apport6 Todeur
de la science; fleur lumineuse sortie de
la terre, m^ecin des Smes, tu es le
palmier agreable au. goAt plante dans
le jardin du Seigneur, et nourrissant
ses enfants des fruits de la foi.
« Martyr, oonfesseur du vrai Dieu
et cruel lement torture, 6 Gregoire! tu
as souffert sur ton corps des supplices
3ui font la joie de T^glise et la gloire
^s enfants du ciel.
« Pere spirituel , brdlant d^un amour
divin, pere compatissant, tu nous as
purifl^s partes tourmentsdessouillures
du pech6, et ta parole lumineuse a en-
fante des enfants de Dieu.
« Image de la gloire du Fils unique
deDieu, martyr victorieux, les plantes
de tes pieds n'ont re^u des clous de fer
3ue pour nous raieux ciouer a PEglise
e Dieu.
M Pere de la foi armeniennc, apotre
elu , aux mocurs de cenobite , les iam-
bes de ton corps sanctlGe n'ont 6te en-
chatnees dans des etaux de bois que
pour nous after mi r sur Ic rocher dr la
t'oi.
V D'unc voix suppliante, nous o^-
brons ta memoire, p^re iiluminateur
de nos dmes, toi dont on a charge de
poids dnormes les genoux sans oesse
attach^ a la terre par lears g^u-
flexions, pendant que tu ^taissuspendu
a la potence.
" Avec le gouvernail de la foi tu as
traverse la mer du moode, et les
cuisses de ton corps souflfrant n'ont
€t€ 6cartelte que pour raffermir le^
membres spirituels de ton £g)ise.
« 0 Gr6goire! fontaine inepuisabic
de grdces, toi que remplit rintelligenre
de rEsprit saint, Teau n'a €i& introduite
dans ton ventre, en lui causant une
douloureuse enflure, pendant que tu
6tais suspendu en Tair, la t^e renver-
s^, que pour nous laver de la souil-
lure du pech^.
« Sel purifiant et savoureax de PAr-
meiiie, pere vigilant et courageux ob-
servateur des lois divines , tu iras souf-
fert le poids d'^normes blocs de sd
Sue pour nous decliarger du fairdeau
u peche. ,
" En enum^rant tons tes supplioes.
nous te tressons une couronne a or et
de pierres pr^ieuses, 6 Gregoire! toi
dont la bouche, organe du Verbe d^
Dieu, a re^u le frein et le bdillon.
« Vaillant martyr, soldat elu dit
Cbrist-roi , tu as supports rexhalatsoij
de fi^tides odeurs, en ayant la t^ Ten-
vers6e et les pieds elev6s en Pair, pour
diriger nos pas vers le ciel.
CI Rayon lumineux du diemin de Ki
vie, toi qui cours h la poursuite de>
promesses celestes, en respirant par 1<*
nez de la cendre imbibe de vioaigre,
tu nous as rdjouis par ta bonne odeur.
« Chef auguste et respectable, i-
Gr^oire dont IMme est notre mod^ '
ta ^te, nieurtrie de coups et placrr
sous un pressoir, a relev^ nos t^tr-N
abaiss^.
« Omement de notre nature tem^
tre, 6 Gregoire le supplicie! la pointr
des chardons et la dent de la sae ont
labourd tes chairs, le plomb fondu :i
coule sur tes os consumes.
« Compagnon des choeurs et des ar-
mces du ciel, Gregoire a Paur^le rest-
picndisiiantc, tu es desccndu dans Ic
ARMBNIE.
!!•'
iond d*uii puiti hamide et boueux, au
nyieade reptUet TeDiiiieaz,pour nous
d^vrer du inauvais dragon.
• Par I'efiBcacit^ de tea pridres brQ-
lantia et de ton amour, 6 Gr^oire dont
TAme toit travaill^e par Tesp^ance!
retire oeux qui sur cette terre gisent
au fondde i'abtme, bless^ par la mor-
sure du jpkb6 , et ^ve-les avec toi aux
demeurea otiestea.
« La manue des consolations cdlestes
desoendalt sur toi, pendant les quinze
ans de pifinitence psusn^s dans ton puits ;
et , apres avoir joui de la me de Dieu ,
tu as gn^ri les victimes de la fureur de
Satan, et Tefibision de ta iumineuse
parole les a confirm^ dans la foi.
« Ttooin d*une vision surnatorelle,
•ifrayante , ton esprit proph^ique a vu
s'entr'ouvrir les cieax inond^ de dar-
t^, et lu as m^l^ ton corps aux ar-
n^ des anges.
«Le sang ponrpr^ des martyrs a
purifi^ de la souillure du p^^ cette
terre ou tu as jet^ les fondements du
temfde saint d^otl jaillit la source de
propitiation (*).
« Sage administrateur de la maison
de Dieu et jug6 digne de ses grdoes,
destructeur des idoles « d^mdisseur des
temples jpaiens avec Tarme de la croix ,
patriairebe ^u par I'^iection divine, tu
as €U appel^ par la voix du del sur le
si^ apostolique; par too ^loquente
parole, tu as lUumiM TArm^ie r^^
n^r^ spirituellement, en oouvrant la
(ace du pays d*^ifiees ^lev^ k la gloire
de Dieu.
• Gr^oire an corps lumineux, objet
d*envie pour les smphins, pures es»
sences sans corps, tu as habits dans
le desert, a Texemple de Jean et d*Eli*
ste, et de Molse, oe l^islateur divin.
« Intercede pr^s du Pere celeste p6ur
les enlants tourment^ et amaigris par
le p^ch6, et prie-le poor que nous ter-
minions notre course dans la voie de
TorthodDxie.
« Martyr vivant, conjure le Fils, v6-
(*) Let martyn dcmt il esl ici question
MBt les saintes rierges Guana et Ripsymee,
et Fegliie batit* |)ar saint Gregoire esl la ce-
metropok' d'Ecsmiiiziji.
ritable lumi^ venue du Pte , d'Mai-
rer nos ooeurs par sa divine sagesse.
«Lyre m^lodieuse de Tesprit de
Dieu, 6 Gr^oirel pure intelligence
unie k un corps, prie TEsprit saint,
proc^nt du Pere et coassoci^ a la
gloire du Fils, de purifler nos dmes du
« Montagnea, r^jouissex-vous toutes
de la gloire ^clatante r^serv^ au mont
Sdi)oiiin(*), qui a servi de retraite a
saint Gr^ire, colonne Iumineuse de
la sainte £glise d'Arm^ie, lui. au
sijget duquel elle se r^jouit, k la gloire
de la Slon celeste.
(*) Sehouh tigniSe en arminien m>bU,
tRsttngue, Ce nom fnt sans doule donn^ k
oette montagnt paroe qa*elle serrit de re-
traite i^ saint Gr^oire. Elle portait prM-
demment le nom £t wool Manit paroe que
la sainte iUustre, ainsi nonunee, amit
habits dans nne des groites oiivertes sur
le flanc de la montasne. On la connaii
aussi sous la denomination de montagne de
Taraoagb , du nom du district ou eUe etait
situee , et qui faisait partie de la proTinoe
ancienne de I'Arm&iie superieure. Yoyex
Moise de Khoren, liv. ii, cfa. 88; G^gr
du pere Indgigean, Venise, x8aa,p. 4;
Saint • Martin, Mte. sur rArm^e, t. z,
p. 37, et (. II, p. k^i. Dans la giographie
attribuee k Moise de Kiioren on IrouTe oe
passage : «Le mont Sibonh , visits de Dieu .
el oik repose saint Gr^ire, poss^ Tep^
que Teropereur Gooatantin donna au roi
Tiridate. Quand le roiTiridatevoulut visiter
le saint illumiaateor, il vint le trouver an
moot S^booh, et le eonsdta sur T^poque
de la chute des Arsacidei. Le saint prit r^pee,
la benit oomme one croix, la pla^i en Tair
par Tefficaoit^ de la parole de Dieu et dit :
« II Tiendra une Taleureuse nation , oelle des
Fhincs ; ce signe paraitra alore, on le prendre
et tout le monde se r^uuira k euz. » Le saint
ensuite s*^Ieva vers Dieu. Ik se trouve aussi
le raonastere des Scrapfains, ainsi nomme
paroe que Dien y cnvoya des s^pliins vers
le cberubin terrestre , retiri dans une pro-
fonde vall^, et qui avait rtelu d'aller a
Jerusalem , snr ses genoux ; ce dont 11 fut
emptehe par les briUanls seraphins. » Cette
m^e montagne reniennait une fontaine
salutaire, dont les eaux salees avaient ete
changto en eaux donoea par saint Gr^rc;
et .dans la suite , elle fut disign^ sous la
nom dc^ fontalpe a IVaii savoureusc.
120
L'UWIVERS.
2
« Qui a plus de 8ujet de se rejouir
que le moot Ararat (*) aux cimes es-
carp^es? car dans ses flancs repose
saint Gr^oire, arelie r^emptrioedu
deluge de p<6ch^ qui coutrait rArm^
nie, et.qui nous met pour toujours a
I'abri de la fureur de ses flots.
• Que le mont Sebouh, oouronn^
d'une auntole lumineuse, se i^jouisse
a Texemple du mont Sinai : c'est 1^
qu^appafut rarc-en-ciel de I'esp^noe,
saint Gr^oire, au front Matant de
lumi^re, comme oelui de Mofse, et
ui a fiiit briller nos faces par la grace
u Saint-Esprit.
« jGr^oire a joui du m^me privil^e
ou*Esaie, fils d'Amos, le propbdte,
(lont un cfaarbon ardent purifia les le-
vres, et qui vit en esprit les ch^ru-
bins aux six ailes brAlant de Famour de
Dieu; pour lui aussi la profonde voAte
des cieux a M ouverte.
« La droite rois^ricordieuse de J6-
sus^Christ a honors Sebouh , k Texem-
ple des montsSaniretHermon(**) : de
ses flancs jaillit une source d*eau excel-
lente, qui s'ecoule en ruiteeaux abon-
dants et r^jouit la terre fertilise.
«La sainte Vierge, en enfantant
dans ratable de BethTeem , a appris aux
lilies d'Eve a devenir m^res au Christ
en restant vier^es. Ge prodige eciatant
s*est renouvele dans la caverne de
Man^f et c^^t par la puret^ des
momrs de ces vier^es que nous avons
et^puri6^sde la souilluredupdch^ (*"*).
« Uesprit inspire des propnetes avait
pr^it la gloire r^rm au mont S^
Douh , lorsquMIs demandaient oik serait
le tabernade de Dieu et le lieu ou il
habiterait; nous avons vu saint Gr6-
goire r^oudre cette question.
« C'est pour ce meme Gr^oire de
moeurs si pures, d'une si grande jus-
(•) Voy. U egare n" rS.
(**) Cis deax montagnes situees dans la
Paiestine sont celebres chez les Armeaiens,
comroe formant des eaux de leurs lorrenls
les deax principales sources du Jourdain.
Voy. Saint-Martin, Mem. sur TAnn. , t. rr,
pag. 400.
(***) n est ici question de sainte Caiana qui
sejourna loii^temps dans la caverne du mont
Sebouh.
tree de c^ur et si ▼^idiaue dans ses
paroles , que les troupes oes di^mbias
se sont abaissees du ciel sur la tern,
aiin de cootempler les mortifications
de son corps, miracle qui a consacre
lenomde celieuH.
« De simoles bergers ont d^ooavart
les restes de oe pasteur vigilant, 1*1-
luage du v^table et divin Pasteur, et
ils les ont enaevelis prte de la caverne
Mane; precieux remede dans nos ma-
ladies, pures reliques qui nous preser-
veot du poison du dragon tnfiernai!
« O toi , soleil de justice, e&vof6 da
P^re. et qui as r^pandu ta lumiere ea
tons lieux par le minist^ des apdtres,
Dieu de nos peres, nous te glorifions!
« C'est toi qui as envoys en Annate
saint Gregojre, oomme vicaire des
a|»dtres etle i^r^icateur de ta parole;
Dieu de nos peres, nous te glorifions!
« Toi qui as dissipi6 les tenibres de
rignorance des peuples du Nord, par
Tedat de la parole de saint Gr^oire,
Dieu de nos p^res, nous te ^loriuons!
Et vous tons , discipltt du samt Illumi-
nateur, glorifiez la lumiere dinuit
d'ombres.
« Aujoord'hui, peuples de TAime-
nie, instruits de la verity par renSi«-
mise de saint Gr^oire, b^issex la
lumiire qui n*a pas cle commencement ,
gi(Mrifiez--la ^terndlement.
« Aujourd*bui que vous avez M r^
g^n^te par le bapttoe, et illamincs
de la sagesse par le minist^ de saint
Gregoire, louez la lumiere venne da
P^e, ^lorifiez-ia ^ternellement.
« Aojourd'hui que le prftre acoom-
plit cfacE nous le celeste sacrifice, en
vertu du pouvoir que lui a transmis le
saint patriarche unegoire, glorifio
le distributeur des grdces, o^^bres
le Seigneur.
«0 toi qui as convi^ les nations
doignte aux fianqailles de ton Fils
unique, par Tentremise de saint Gr^
•
(*) Nous avont dit pr^cedernment que la
montagne de Seboidi renfennail un monas-
lere appele le couvent des Stephint , Ibrt
oonnuaans rhistoircrcligieQaederAmienir.
II devait oe nom au miracle op^ en faveur
dc saint Gregoire.
V o • «■
ARMfiNIE.
121
§oire, afln de les desalterer h la coope
e la sagesse, grdce h son interoes-
sion , aie piti^ de nous.
« Toi qui , poor prix des souffranoet
sarhumaines de ton ^lu, a ramene les
peoples ^ar^ k la connaissance de la
v^rite, grdce k son intercession, aie
piti^ de nous.
« Toi qui, au fond de son puits, as
6cras^ la t^ du dragon, et qui, en
i'abaissant dans cette fosse, nous as
elev^ josqu'aux cieux, grdce a son in-
tercession, aie piti^ de nous.
« Venez aujourd'huf glorifier le saint
patriarcbe Gr^oire, qui a Mam de
la lumi^re inteliiffible eeux qui ^ient
assis dans les t^nebres.
« Venez glorifier le distributeur des
dons de Fesprit incorruptible, chez les
tils de Tborsom, lui qui toos a pro-
er^ fils de la lumidre.
« Venez louer Tinterprto de la pa*
role difine chez les Arm^niens, vous
ses enfants et ses disciples.
• Aujourd'hui Tl^lise, rtonie aux
anges, cbante avec tons ses enfiants
la m^moire de rillominateur, glorifi^
dans les hauteurs des cieux.
« Aujourd'hui r£glise c^ebre avec
ioie la m^moire de saint Gn^oire, qui
ra illumin^e de son ^clatante lumi^re.
• Enfants orn^ de tuniques bro-
ch^ d*or et couronn6i de fleurs, b^
nissez leChrist-roi!
« Aujourd'hui les nouTeaux enfants
de lumiere se r^jouissent, au souvenir
du saint Illuminateur qui les convie au
banquet tr6s-pur et les introduit chez
r^ux c^este, dans son palais lumi-
neox.
• Enfants om^ de tunioues bro-
chte d'or et oouronnes de fleurs, b^-
nissez le Christ roi!
« Aujourd'hui les pr^tres, ministres
du sacrifice spirituel , honorent le saint
patriarche Gr^oire qui les a associ^
a I'ordre des pontifes celestes, lors-
qu'en s'^levant au ciel il est entr^ dans
le Saint des saints pour intero6der per-
petuellement en notre faveur aupres de
Dieu.
« Enfants orn^ de tuniques bro-
clito d'or et oouronnes dc fleurs, be-
nissez le Christ-roi! »
M<BURS BT CODTCMES DO PCPPLB ARME-
NIBN. CAiUCTteS DB LA MATIOll.
On pent dire en g^n^al que le peu-
pie arm^ien est beureusement oou^
par la nature. En eff<^, on retrouve
dans son caractere et ses habitudes les
deux traits distinctifs des deux grandes
races auxquelles il rattache son origine.
Suivant ses annales historigues, le
jDJbrt de la nation fut un fietit-fils de
Japhet, Thorgom. Ce t^moignage, qui
claase d'une maniere nette et tranchee
la race armenienne paraii les peuples
de race japb^tique, est yMM par rex-
pMeoee que foumissent T^tude com-
par6tf des nations de I' Asie et la science
de la linguistique. Gomme les Persans
et les Grecs, les Arm^niens ont I'es-
prit mobile et p^n^trant, une activity
inquiete cbercnant toujours a epuiser
dans Faction I'exc^dant de son Anergic ,
naturellement belliqueux, on les voit
engages dans des guerres continuelles
ou ils font face k des enneoiis supe-
rieurs : quoique forc^ de ceder au
nombre , ils ne se rebutent point , et ils
reviennent plus ardents a rattaque.
Sous le cOt^ intellectuel, les Arme-
niens ont la conception facile et vive
des Grecs , et , lorsque nous avons parl^
de leur langue et de leur lltt^rature,
nous avons indiqu^ auels rapports
^troits unissent les proouctions ae leur
esprit aux chefs-d'oeuvre de la litt^ra-
ture greoque, quant k la fonne et k la
nature du style; nous avons fait obser-
ver aussi que leur langue appartient k
la classe des Ungues indo-germani*
ques, nouvellement ^tablie par les phi-
lologues. Ce &it seul prouve qu'il y a
communaut^ de race entre elfe et les
peuples venus de I'lnde, ou, post^-
rieurement, du Caucase.
Nous avons parl^ pr^cedenunent des
nombreuses colonies juives qui, trans-
plants k diverses reprises dans le ter-
ritoire de I'Ann^nie, ont dd n^cessai-
reoaent modifier le type et le caractere
de la race primitive. Ce fait nous ex-
plique comment, avec tous oes points
de ressemblance qui nous font regar-
der la race armenienne .comme mnt
de la mtoc famille que les races de la
\'22
L'UNIVERS.
Grece, de la Perse et de I'lnde, nout
voyons eependant dans aa phyaionomie
des traits totalement divers et qui Fas-
similent au contraire k la raee sdniti-
que. Effectivement, nous avons dia-
tin^^ chez elle oet amour dea chosea
religieuses et ce tenace attachement k
ses traditions, qu*on ne retrouve aa
m^me d^r^ que chez la race atn^e et
privii^^e de Sem. De plus, oomme
elle, les Armteiens se sont toajoors
tenus h Ftort des autres peuples, M-
tant de se m^er h eux , et se montrant
partout extr^mement Jaloux de oon->
server leur nationality, tellement que,
dans tous les pays oi^ ils sont actnelle*
ment dispers&, on les reconnatt k la
particularite de leurs usages, k l'orsa«
nisation domestique de la familJe,
comme k la forme des v^tements et k
Fexpression de la physionomie. L*a-
mour et le goQt du commerce, trait
distinctif de leur caractdre, leur sont
encore communs avec les enfieints d'ls-
mael ; comme eux ils sont disperse , el
dans toutes les villes d'Asie et d'Eu*
rope oH on les rencontre, ils aocapa*
rent , au bout de peu de temps, tout le
n6goce et Targent du i)ays; mdme les
juiTs ne peuvent soutenir centre eux la
concurrence, parce que les Arm^niens ,
en apportant le m£me ordre dans leurs
affaires, agtssent plus srandement et
avec loyaut^. Aujourd*nui encore les
finances de I'empire turc sont entre les
mains de quelques riches families arm6-
niennes. Voici le jugement de Toume*
fort sur le genie commercial des Arm6-
niens : « Ces n^ociants, dit-il, sont
infalieables dans les voyages et ra6pri*
sent les rigueurs des saisons. Nous
en avons vu plusieurs , des plus riches ,
passer de grandes rivieres a pied ayant
reau jusqu*au oou, pour reiever les
chevaux oui s*^taient abattus et sauver
leurs balies de sole. On les accuse mal
a propos d'aimer trop le via ; ii ne nous
a jamais paru qu'ils en abusassent; au
contraire, il faut eonvenirque de tous
les voyageurs les Arm^iens sont les
plus sobres, les plus economes, les
moins glorienx. »
Leurs relations oommerciales ne se
bornent plus aujmird*hui a rOrient . el-
leaa'^tecdent jusqu'a 11
tale. En 1824, six n^odants'arm^eu
sont venus pour la premik« fois k la
foire de Leinsick, y ont achet6 pour
six cent milie francs de prodoits des
manufactures d'Europe, les ont exp6-
di^ en transit par la Galide et la
Russie m^ridionale jusqu'a Odessa, ou
lis ont 6t^ embarqu^ pour Redoute-
Kale , en suivant la route que leur avait
indiqu^e le n^odant SaratgefT de Ti-
(iis. £n 1836, les marchanoises aefae-
tees a Leipsick se sont devte ik la
valeur d'un million deux cent mille
francs , et suivant un artide du jdamal
de Francfort , en date du 20 juin 1826,
on porte k la somme de sept cent miUe
thalers, ou deux millions huit cent
mille finincs, la valeur des achats fiuts
a la demi^ foire (*}.
Le sane de ce peuple est beau; les
traits des bomoMs sont fortement pro-
noncds; iis ont de grands yeox noirs
fins et luisants qui , tout en exprimant
leur activity interne et remuante, sa-
vent n^nmoins voiler habilement le
fond de leurs pensto. Leur taiUe n^est
point aussi 6lev^ que odie de plusieurs
autres peup[c» caucasiens; neanmolDS
il faut aistrngujer parmi eux la popula-
tion des montagnes, otli I'on trouve des
moddes de force et de stature athl^-
ques. Extrdmement bruns, la barbe
que portent leurs prtoes et vartabieds
est remarquable par sa couleur noire
comme le jaspe, et die tooibe, k la
maniere des Persans, sur la poitrine.
Rien n*est plus propre k inspirer au
peuple le respect et la veneration pour
ses dieflB spirituels, que Fair de dignity
des pr^tres armtoiens, et la gravite
avec laqudle ils ofBdent dans les cM-
monies religieuses.
(*) On porte a vingt rotlle Ames le nombre
des Armcaiens r^paodus dans lea ▼illes de
Bombay , de Madras et de Calcutta. Leon
courtiers et lears agents passent le Gauge cf
penetrant jus^u'i Barma , Siam et les pos-
sessions anglaises qui avoisinent la dune.
Les plus riches negociants de k ville de S»-
gapour sont Armeniens. On les retroaw a
Java , Bomfo , Siimaira, et dana qudques
autres lies de oet archipd, et ils ont
reussi a s*introduire a Canton.
ARMCNIE.
123
M. le chevalier Gantba, dans son
Voyage au dela du Caucase, nous de-
peint ainsi les Arineniens, dont il a
trouTe de nombreases colonies, soit a
Tiflis, soit dans les environs : « L'Ar-
in6nien , dit-il , est un peu moius ^and ,
inais plus ^ros que le Gtorgien; il a les
traits aussi r^guliers , le nez plus droit ,
le regard s^ieux , I'air reflechi et sou-
mis; il r^unit deux choses qui seniblent
opposees, les mceurs des patriaiches et
les d^uts attach^ au long ^tat de d6-
pendanoe sous lemiel il a vto. Gomme
au temps d' Abraham et de Jacob, le
premier n^ est, apres le pere, le inal-
tre, le chef bMditaire de la maison;
ses frdres putn^ lui sent soumis; ses
soeurs sent presque ses servantes. Les
uns et les autres sont plein» de respect
pour ieur pto; rarement ils s'asseyent
devant lui et se mettent a table. lis
sont ses serviteurs les plus d^ou^;
et c'est Tatn^ des Ills, cnez ce peupie
hospitaller, qui sert les etrangers ad-
mis a la table de son pere , ou qui offire
la collation dans le cas oii une visile
arriverait a Theure du repas. J*avais
et^ reoommand^ a un negociant arm^
nien de Nackchivan. A mon arriv^,
il vint m'embrasser oomme une an*
ctenneconnaissance, meoonduisitdans
la cfaambre qui m*^tait destine, me Ot
preparer le bain, fit tuer un mouton,
et mvita tous ses amis au festin. Je
me rappelais alors les usages des peu-
pies pastenrs, oeux de cette ^poque
voisine du beroeau du monde, ou on
s'aocueillait d*autant plus au*on se
croyait plus rapprocb^ a*une tige com-
mune. Et peut-#tre ii*y aurait-il nul
oontraste h Ieur opposer, si, nation
ind^pendante, ils avatent vecu dans
une situation tranquille et n'avaient eu
a ob^ir qu*a leurs lois. »
l«s femmes arm^niennes sont cele-
bres en Orient par Ieur beaute; dies
ont h la fois quelaue chose do type grec
At juif. T^eur taille svelte et elancee, la
vivacity de icurs lar«es yeux noirs cou-
ronn^ de longs cils arqu^, I'^pais-
scur de Ieur chevelure d'db^ne, que
releve un teint pdle et mat, en font
Hes modeles de gr^e et de perfection
qtii rappellent les statues antiques.
A cette beauts ext^rieure se m^ent les
cbarmes et les aer^ents de Tesprit
que Ieur donne F^ucation de fainiile,
bien superieure k celle des femmes ttir-
Sues ou persanes au milieu desquelles
[les vivent. On reconnatt en eiles la
v^rit^ de ce principe, que le cbristia-
nisme seul a eleve la ferome au rang de
dignite et d'honneur qu*eUe occupe
dans les societes modernes. Vovez a
leurs cot^ les femmes de musufmans
sequestrbes et ajgglom^r^es dans un
harem, iojer d*intri^ues, de corrup-
tion et de jalousie , ou elles sont con-
siderees comme un simple meuble de
luxe ou d*agr^ment. Quelle difr(6rencc
entre Tesclavage et Tabjection morale
ou elles languissent et la liberty des
femmes chretiennes ! Cest que dans le
christianisine le dogme divmise pour
ainsi dire la femme, en la regardant
comme mere de Thomme-Dieu, notre
R^empteur. Tous les peuples qui ne
font point partie de la grande ramille
chretienne la tiennent encore dans un
^tat de sujetion humiliante. LejudaTsme
en est une preuve visible; cette reli-
gion qui n*est que le christianisme,
rooins les di^veloppements apportes par
oehii qui est venu accompUr la loi et
nan pas la delruire, considere tou-
jours ia femme comme un £tre mora-
lement inferieur k Thomme, et Tas-
treint k milla pratiques gtoantes.
Toutefois la liberte des femmes ar-
m^niennes est plutot interieure et do-
mestique qu'ext^rieure et publique.
La legislation et la coutume des Turcs
les obligent, k Constantinople et dans
le reste de Tempire ottoman, de se
soumettre aux regies de bieiiseance
dtablies pour Ieur sexe. Ainsi elles sor-
tent voilees et couvertes; mais dans la
maison elles ne sont point rel^gu6es
dans un harem, et eUes se tiennent
ordinairement dans la m^me salle oue
les hommes(*).Elles reqoivent etfont les
honneurs de la maison aux dangers.
Dans plusieurs families riches de Cons-
tantinople, les jeunes iilles commen-
oent a adopter certaines modes euro-
p^ennes , et actuellement plusieurs mo-
«
{*^ Toy. la figure n" '*a.
12^
UUMIVERS.
distes de Paris ont a P6ra (*) , fiuibourg
habits par les Arm^iens et les Francs,
d*^l^ntes boutiques. Les jeunes filles
se permettent une gaiett simple et in*
nocente qu'elles peraent Mant martte.
Alors elles ne cnercbent plus h plaire
S'k celui qu'elles ont choisi |XHir
[>ux; elles se renferment eiclusive-
ment dans les soins minutieux de la
famille et du roteage, sans songer k
attirer les regards des Strangers. LMn-
t^rieur d*une famille armenienne a
quelque chose de Forganisation patnar*
cale : I'^pouse ose a peine lerer les yeux
sur son epoux; dlerougiraitd'adresser
la parole k tout autre qu*a lui , et la
fille ne s'assied jamais en presence de
son p^re. Leur devotion et leur fid^Iite
coniugale ne peuTent donner prise aux
amertu censures de la m^sanoe. Elles
parleiit, ou plutdt chantent avec une
douce harmonic la langue turque, si
flexible et si m^lodieuse.
A Constantinople, les femmes ar-
meniennes se distinguent des femmes
turques k la couieur des brodequins ,
lorsqu*eIles sortent dans les roes. Leur
v^tement est semblable k oelui des
hommes en beaucoup de choses. Ellas
portent un cale^on tombant sur la che*
ville du pied : et, oomme elles ne font
pas usage de has , elles ont les jambes
moins fines que les Europeennes. Leur
chemise ouverte sur le devant laisse
a deoouvert la gorge qu'elles oment
de fleurs et deriches colliers (**). Sur les
epaules , pend une espeoe de long man-
teau flottant jusqu'aux talons. Quand
elles veulent se o^rober k la yue d*un
stranger, elles se oouyrent d'un voile
qui enveloppe les Epaules et le sein ;
et si elles sortent , elles ajoutent un
grand voile blanc qui les couvre de la
t^ aux pieds. A Julfa, les femmes
portent quatre voiles, deux qu'elles
mettent au logis , et deux autres qu'elles
rtorvent pour leors sorties. A la mai-
son , elles ont le has du visage voile ;
et , si elles sont martte , elles se ca-
chent m6me le nez , afin que leurs pa-
rents ou les prdtres qui les visitent ne
n ^oy- 1* plaiwhc ii« 1 6.
(**) Voy. la figure n* 3i.
puissant disttnguer les traits de leur
visage. Les Jeunes filles ne portest e&
voile que jusou'lt la boucbe , afin qa'oe
{misse juger de leur beauts , et en 6ire
e r6cit aux ieunes gens.
Les Armeniennes de la Pwae ont
aussi emprnnt^ dans leors ooatumes
la riehe variM de la mode pereine.
Les habits des femmes riches sont ea
^ffes de soie d'or. Le corps de Fba-
bits'attachepar-devantjusqa'ii la eon-
ture, avec des rubans ao boutdesqneb
on suspend un gland d*or on one perle;
il se retr6cit vers le contoiir, et il est
pliss^ pour relever la Aiiesse de la
taille. La jupe qui desosnd jaaqn'sox
talons n'est point s^par6e du omsde
I'habit. Elles se servent de soiuicn
plats, converts d*torlate, avec quel-
ques fleurs d'or en broderie. Elles les
quittent ais^ent et toujoors, lon-
qu'elles entrent dans leors apparte-
ments qui sont couverts de beaux tapis.
EUes sont coifKes en cheveox d'une
maniere fbrt vari6e, tantdt en pjn-
mide, tantdt en triangle ou en crois-
sant ; d'autres fois , en roses, en tulipes,
ou autres figures de fleurs au^dles
imitenten assujettissant leors cneveox
au moyen de boucles d'or gamies de
diamants. Plus commun^nwnt, elles
divisent leurs cheveux en tresses pen-
dantes sur les Epaules, et y atta-
ehent de petites plaques d*or et des
pierreries. (Test un des secnsts de Is
ooquetterie que de savoir laire alois
certains mouvements de t^te piopres
k faire paraltre la beauts et le briUant
de leur chevelure.
Dans leurs chambres, il n*y a d'ao-
tre tapisserie que celle sur laqaeile on
niarche. Elles sont om6es de grands
miroirs , de canap^ , d'enfonoements
dans les murailles en forme de nidies,
ou elles rangent des vases de cristal ,
d'or et d'argent, pour oonserver leun
parfums, leurs confitures, et les petite
meubles de leur toilette. L'usage des
chaises v est inconnu. II y a de petits
tabourets sur lesquels dies peuveol
s'asseoir; mais dies en font rarcment
usage: dies pr^ftrent s'asseoir sor
leurs riches tapis, les jambes croisees.
Derriere dies est un grand coossia
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ARMENIE.
13S
de hrocart, sur lequel elles s'appuient,
et qo'elles ramteent et chaocent h vo-
lonte.
Leur ooeupation se borne d de pe-
iits ouTnges k raiguHle. SouTcnt eUes
i^anisseot lean amies; et, pendant
1'^ t on apporte de la limonade pour
se rafrakbir; on mange des fraits,
des confitmres, et une espto de gA-
teaa foit avec la ferine de froment,
d^ay^e dans do hiade canne k aucre,
auquel on m^e mi lait et de Teau de
Toae (*).
(*) M. LamartiiiedaiitMn Tojage d'Orimt
fait une peinture nYisunte des femmei
armeoieiiiies de Damai , de leur habitation
et de leur Tie donoe et paiiiUe. « Nom
nvoos, dit-0 , eireuli d'abera nendant aiaes
ioogtwnps dant les luei tombrei, sales et
tortttemcs da qnartier amienMn. On dirait
un des plus miserables villages de nos pro-
vines. Les maiaons sent constniites de bone ;
elles sont pereto, sur la me, de auelques
petites et raras fentoet frilUcs dont les
voletsBont peints en rouge. EUes sont bastes,
et les portes sarbaisste ressemblent k des
portes d*itablcs. Un tas d'immondioes et
une mare d'eau et de fiinge rcgnent presque
pariout aniour des portes. Nous sommes en-
tr& eependant dans qnelques-unes de ces
maisons des urindpaux u^godants arme-
niens , et j*ai mk frmk de la ricbcsse el de
r^Mganee de ces habitations k rinlMeur.
« Apras avoir passi la porte et frnaehi
un eotridor obseur, on se trouve dans une
oour onee de snperbes Ibntaines jaillissantes
en marbre, et ombragees d*un oo deux sy-
comores on de'saules de Perse. Cette cour
est pavee en Utget dalles de pierre polie ou
de marbre ; des vignes tapissent les murs.
Ces mnrs sont ravMus de marbre blanc et
noir; dnq ou six portea, dont les montants
sont de marbre aussi , et sculpt^ en ara-
bcscnies , introduisettt dans antant de salles
ou de salens oik se tiennent les hommet et
les fammes de la fsmiUe. Ces sakms sont
vaitcs et vo6tis. Us sont perois d'un grand
nombre de petites fenltres ^levte, poor
laissar sans oene jouer Ufarament Pair exte-
rieur. Plresque tous sont composes de deux
plans : un premier plan infMeur 06 se tien-
nent let servilenrs et les esdaves ; un second
plan ikffk de quelcpies marehae, et sipare
du premier par une balustrade en marbre
ou en hois de ocdre marveilleuiaMnt de-
Qaand une femme perd son mart ,
elle rev^t sur-le«hamp les habits de
coup^ En gteiral , une ou deux Ibntaines
en jet d'eao , murmurent dans le milieu ou
dans les angles du salon. Les bords sont
gamis de vases de fleurs; des hirondelles ou
des oolorabes privees viennent librement y
boire et se noser sur les bords des bassins.
Les pamb ue la piece sont en marbre jus-
qn'a une oertaine hauteur. Plus haut elles
sont reviAtues de stuc et peintes en arabes-
rde mille couleurs, et souvent avec
mouluras d'or extrimement chargees.
L'amenfalement oonsiste en de magnifi^ues
lapis de Perse ou de Bagdad qui couvrent
partout le plancher de marbre ou de cedre,
et une grande quantite de ooustins et de
matehtt de soie epars au milieu de Tappar-
lemcnt, et qui serveni de sieee ou de do»-
sien aux penoniies de la iamille. Un divan
recouvert d'etoffcs prMeuses et de tapis
infiniment plus fins, regne au Ibnd et sur
les contours de la chambre.
« Les femmes et les enfants y sont ordi-
nairement accroupis ou etaidus, occupes
des diffifaients travaux du menage. Les uer-
ceaux des petits enfants sont sur w plancher,
parmi ces lapis et ces coossins; le mailre
de la maison a toujours im de cm salons pour
lui seul ; c*est la qu'il revolt les ilrangen:
on le trouve ordioairemeut assis sur son
divan, son ecritoire k long mauche pos^ a
terre k c6tk de lui; une feuille de papier
appuyee sur son genou ou sur sa main gau
eke, et em van! ou calculant tout le jour,
car le commerce est Toccupation et le gtoie
unique des habitants de Damas. Fartoul oii
nous sommes alles rendre des visiles qu*ou
nous avait faites la veille , le proprietaire de
la maison nous a re^ avec p'Ace et cordia-
lite ; il nous a Cut apporter les pipes , fc
cafe, les sorbets, et nous a conduits dans le
salon ou se tiennent les femmes.
« Quelque idkt que j'eusse de la beautc
des Sjriennes , quelque imwe que m*ait lais-
ait dans respnt la beaule des femmes d«
Rome etd'Atnenes, la vue des femmes el
des jeunes filles armeniennes de Damas a
tout surpasse. Presque partout nous avons
trouvi des figures que le pinceau europtoi
n*a jamais tracees, des yeux ok la lumiere
sereine de Vkme prend une couleur de som-
bre aiur , el jelte des rayons de velours hu-
mides que je n*avais jaoiais vu briller dans
des veux de femme -, des traits d'une finesse
et d*une purele si exquises , que la main
IM
L'UNIVERS.
deiiil , et die ne sort qu*au bout de
(|uanaite jours. Quelques-unes mtoe
la plus Icgere et la plus «mire ne pourrait
Ics iBulcr, et uoe peaa u irauspirente et en
mine temps si colorie de leiales vivaiites,
3tte leslei&lcs les plus d^lkales de la feiiille
erase ne poumient en rendre la pHe frai-
dieur; les denU, le sourire, le nalmvl
moelleux des formes et des noii?eroenU, le
timbre dair, sonore, argentin de la voix,
tout est en haniionie a?ee om admirables
apparitions ; eUes oaosent aveo grice et uoe
modest* ratenue, mais sans embams et
comme neeout— Aes a I'admiration qu'elles
inspirent; elles paraissent conserver long-
lemps leur beaura dans ee dimat , et dans
nne vie d'interieor et de loisir paisible, ou
les Mf^tflm* foctives de la soaete n'usent
ribne, ni le corps. Dans presque loutes
ni
les maisons ou j'ai ete admis , j*ai trouvA la
mere aussi belle que ses fittes , quoiquc les
filles parass^t avoir d^ quinie a seiie
ans ; elles se marient k dome on tieiae ans.
Ija costumes de oes femmes sont les plus
el^ants et les plus nobles que nous ayons
euoore admires en Orient : la tMe nue et
cbarg^ de dieveox dont les tresses, mIMn
de teirs, font plusieors tours sur le front,
et retombent en tongues nattes des deux
c6t^ du cou et sur les epaules nues ; des
festonsde payees d'or et de rang^ de peries
mBkm dans la chevelure ; une petite Mloite
d*or cisde au sommet des cbevfux; une
petite vesle k mancbes larges et oouvcrtes
d*une ^ofle de soiebrocb^ d'argent ou d*or ;
im large pantalon blanc descendant k plis
jusqii^li lacbevilledopied;le^4nu cbansse
d'uue pantoufle de maroqnin jaone; une
tongue robe de soie d*une cooleur Ma-
tante , descendant des ^panics , ouverte sur
le sein et sur le derant dn pantalon, et
retenue settlement autour des bandies par
une oeinture dont les bouts loticbant a terre.
Je ne pouvais detacher mes yeas, de ces ra-
vissantes femmes ; nos visites et nos con-
versations se sont proloog^i partout, et je
les ai trouT^ aussi aimables que lielles ;
les usages de I'Europe , les costumes et les
babiindes des famnes d'Ooddent, ont M
en general le sujet des edtretiens; elles ne
semblent rien envier a la vie de nos femmes ;
et quand on cause avec oes chaimantes crttf
tures , qnand on trouve dans leurs conver-
nltirns et dans leurs maniires cetle grAce ,
cenatiitTl parfiiit , cette bienveillanoe , oette
•Mrite , cvtte pais de Tesprit et du oorar
ne sortent qu'au bout d'uo an; et,
pendant tout cet intervalle de tenips ,
elles n'entendent pas la messa.
Elles se font un devoir de nourrir
elles -mtees lean eolaDts, qo^dles
^^▼ent soigneusement dans la crainte
de Dieu , et dans la ooDnaissanoe de
tous les prindpauz devoirs de la reli-
gion. De 1^ Tient cet attachement sen-
ptileux k la tiaditioo de lenrs peres,
et oet amour penM^vdrant de la religion ,
qui les distingue* A nMsure que le
peuple armdnien se civilise « il attache
toujours un soin nouveau a TMucation
de la jeunesse ; outre le college epis-
copal de Calcutta, et celui que les Me-
chitaristes ont fond^ a Venise et a Pa-
jdoue , on cite Tinstitut de Moscou .
tobli , en 1816 , par le conseiller d'Etat
Lazarew. Son double but 6tait <le for-
mer une ^le d'interprites des iangues
orientales, propres k servir la eoar
de Russie dans ses relations diptoma-
tiques avec TAsie; et il yonlait en
meme temps que cette matson derfnt
le s^minaire des eccl^astiques du rite
arm^nien, pour les 6glises de Kossie.
Vingt-deux professeurs environ soot
attaches h cet 6tablissement, dont b
direction fi^n^rale reste a Tun des
membres de la fomille Lazarew , noai
de son illustre fondateur , qui a laisse
un legs consideraUe nour reotretien
et ravancement des ^eves C).
qui se conservent si bien dans la vie d^*
famille , on ne sait ce qudles aoraieDi a
envier it nos femmes du monde, qui saveat
tout , excepte ce qui rend heureuz dans Tia-
terieur d'one fiuniile, et qui dilapidsai
en peu d^annies, dans le mouvement tu-
muttueux de nos soci^tes , leur 4me, lair
beaoti et leur via. Ces femmes se voicat
quelquefois eatra elles ; elles ne sont mdM
pas entiercmenl aeparees de la sodete de$
hommas ; mais oelle sodete se borae a
quelques jeunes parents ou amis de la nsi-
son , parmi lesquels, en consultant leur in-
clination et les rapporti de CamiUe, on leur
dkoisit de tres-bonne beure nn Banoe. O
fianoe vieot alors de temps en temps . «
mttar , comma un fils , aui pUisirs de U
(•) Toy. la figure n« »6.
• k •
♦. . • '
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V • * »
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ARMltNIE.
127
C^KMONIES DU MARIAGE.
Apres avoir parl^ des femmes , nous
passons, par une transition naturelle ,
an manage, Tacte le plus important
et fe plus solennel de leur vie. La ma-
niere de le contracter nous fera con-
nattre aussi une autre face de leur exis-
tence.
Les Arm6niens ne connaissent point
Tart des entremetteurs; ce sont d*or*
dinaire les parents qui traitent cette
affaire. La mire du jeune homme va
visiter la personne sur laquelle eile
porte ses rues; elle rient plusieurs
(bis examiner attentivement son ca-
ractere, surprendre ses dtfauts, et
elle s*enquiert de son dge , de P^tat
habitue] de sa sant^ , ce dont elle feit
au retour un rapi)ort toujours exact.
Si la jeune fille lui convient , elle pro*
Sose aussit^t son fils anx parents ; et
es que sa demande est agre^e, on
Tapprend h la future , qui , persuad^e
que ses p^e et mire ne cherchent que
son bien , accepte leur volonti, comme
une decision du ciel. Alors les parents
du Jeune homme lui font connattre le
consentement de la jeune fille , qui de-
vient ainsi sa fiancie, bien que souvent
il ne Fait jamais entrevue. Toutefois
ceci arrive aujourd'hui fort rak^ment;
et la civilisation europ^enne,en pin6-
trant chez les Arminiens, tend h abolir
cet usage , reste de la barbaric musul-
mane , qui isole les fenmies de la so-
ciety et leur interdit les relations les
plus innocentes avec les hommes.
Lorsque le consentement des deux
partis est obtenu , on s'enquiert soi-
gneusementsi oudque cause dirimante
n'empicbe pas le manage. Les lois re-
ligieuses sont fort s&fkres k cet d^ard ;
les liens de parents jusqu'au septiime
degri, ou la parents spirituelle que
confere le titre de panrain et de filleul ,
sont autant d'emp6cbements. Si rien
ne gdne leur liberty, le fianci fixe le
douaire ou'il apportera h sa femme,
suivant lusase oriental, diamitrale-
ment oppose au ndtre. En effet,
Tepquse n'apporte a la maison de son
mari que ses v^tements , ses joyaux ,
son or , et I'ameublement de la cham-
bre nuptiale , lequel consiste en un lit ,
un sora, des chaises, des tables, des
chandeliers, et tout ce qui sert a la
toilette. Durant tout le temps que se
traite Taffaire du mariage, le jeune
homme ne peut voir sa fianc^ ; Jamais
on ne d^roee k cette rdgle, sur I'ob-
servation de laquelle les Arm^niens
sont inexorables.
Au jour de la calibration du ma-
riage, un prtoe, acoompagni de son
diacre , se rend a la maison de la flan-
c6e ; il binit son habit nuptial , et il
ricite diffirentes priires , en conjurant
le Seigneur de sanctifier leur union ,
et de ripandre sur les jeunes maries
le tresor de ses fiiveors. Alors arrive
I'ipoux, en grande pompe, accompagne
de ses parents et amis , revitu de ses
plus magnifiques habits etportant un d-
raeterre k sa ceinture. II trou?e sa fian-
cie couverte de voiles, sans qu*il puisse
encore distinguer ses traits. Celle-ci
fait en avant quelques pas, oomnse
pour lui rendre hommage, et le pritre
recite le psaume commen^ant par ces
paroles : « Je chanterai les misiricordes
divines dans Titemite ; » il prend la
main droite de I'ipouse , et, en la met-
tant dans la droite de Tipoux , il dit :
« Dieu prit la droite d'£?e, et il la
prisenta h la droite d'Adam, et Adam
s'ieria : « Ceci est vraiment les os de
mes OS, la chair de ma chair; eile
s'appellera .^mm€^ comme itant tiree
de rbomme (*). Acause d'elle , Thomme
dilaissera son pire et sa mire , il s*at-
tachera a son ipouse, et ils seront
deox en une seule chair. Que Thomme
ne sipare done pas ce que Dieu a uni. »
Le pritre rapprodie ensuite leurs ^tes
de maniire qu'elles se touchent , puis ,
en y faisant le signe de lacroix , il dit :
"Seigneur, Dieu iternel, qui unis
ceux qui sont siparis et disunis , en
(*) Notre Uuigue ne peut conserver ni
reproduire le jeu de mots existant dans The-
breu, 06 il est dit : elle s*appeUera Lscha,
parce qu^elle a ite prise de isch, rhomme.
En latin ou dirait voca6itur virago ^uia ex
viro sumpta est, bien que le sens de virago
ne corrcsponde pas avec juste sse a Vidre lit
feminc.
128
L'UNIVERS.
les liant du lien indissoluble de ta loi,
toi qui b6nis Isaac et Rebecca, son Spou-
se, toi qui roultiplias leur g^^ration,
en aooomplissant pour eux tes pro-
messes , b^nis aussi tes serviteurs , en
les dirigeant dans la voie du bien, en
vertu de la crdce et de Tamour pour
les hommes de Notre-Seigneur et Sau-
veur J^us- Christ, h qui appartien-
nent la ^ire, la puissance et Thon-
neur, maintenant et dans les si^es
des sidles. »
Ces pri^res termin^es, les ^pouz
s'achemment vers T^lise, oik se con*
somme la b^n^iction nuptiale , aor^
laquelle on dit la messe. L'un et rau-
tre communient ordinairement. Le
pr^tre , en mettant une seoonde fois la
droitede I'epousedanscelledeT^ux,
dit : aSuivant le pr^oeptedivin queDieu
a transmis aux chefs de son ^lise , je
vous donne cette Spouse qui vous sera
soumUe} voulez-vousltre son patron ?»
Le man r^pond , en tenant sa main :
« Avec la voUmU de DieUf je veux
Ore ion patron. » Le pr^tre leur piaoe
sur la tete deux couronnes; et , lors-
que la certoonie est achevte, i'epouse
est conduite a la maison de T^ux ,
SHI milieu des hymnes et des chants
d'allegresse. lis portent leurs cou-
ronnes pendant huit jours ou trois
jours au moins; et, pendant cet espace
de temps, ils vivent s^par^ Tun de
Tautre , dans une continence parfaite.
A la fin de ces iours d^ign^ , le pr^tre
revient avec le diacre reprendre les
couronnes , et fait de nouveaux voebx
pour la prosp^rit^ de leur mariage.
OBSBaVAHCBS BT PRATIQUES DIVERSBS
DBS AKMJSNIENS.
Lbubs jbunbs. — Nul autre peuple
ne pousse aussi loin Taust^rite et la
mortification dans les jednes de r£glise ;
et nous avons vu qu'une des causes
de leur aversion pour les Grecs, pro-
venait des tentatives faites par cenx-ci
de reformer la loi de leurs abstinences.
Les jednes sont aussi fn^uents que
rigoureux. Durant tous ces jours, ils
s^abstiennent de viande, de poisson,
d'oeufs , de beurre , de lait et de fro-
mage, ne faisant qu'un repas, aprii
le coucher du soleil. Le vin et rbuik
sont aussi interdits par les andens ca-
nons.
lis jeAnent tous les mercredis et fea-
dredis de Tannde, excepts depuis Pil-
ques d I'Ascension, qui est le temps
oik ils ont le plus de r^jouissanoes ea
mtooire de la resurrection de Notre-
Seigneur. Ils font ensuite les dix jednes
suivants, chacun d^une semaine : !• o^
lui d'apr^ le premier dimancfae de b
Trinite, qu'ils appellept jeOne de pe-
nitence ; 3« le jedne de la Transfigura-
tion; 3* le jedne de TAssomptioD;
4« le jedne de la Croix en septembre;
&* un jedne de p6nitence apres le trei-
zi^me dimanche de la Trmit^ ; 6* un
autresemblableapr^ le vingt et uni^e
dimanche ; 7« le jedne de TA vent ; 8*" ce-
lui de Noel, dont ils ne commenoent
pas la f(Ste h minuit , mais le matin ,
comme pour les autres f(gtes, jednant
la Vigile du soir ; ^ un jeAne de peni-
tence a vant le carnaval , gui dure quinze
jours; 10* le grand careme qui com-
mence des le Tundi , oik Ton redouble
d*austdrite. On voit que les jedoes
d*obligation emportent la moiti^ de
Tannee. II y a encore trois jednes de
devotion pour les plus fervents , chacun
de cinquante jours. Le premier est de
Piques h la Pentecdte ; le second , de la
Trinity k la Transfiguration ; le troi-
si^me commence cinquante jours avaDt
Noel. U y a en outre un petit jedne
surerogatoire de TAscension a la Pen-
tecdte.
Les Arm^niens distinguent trois ^
gr^ dans le jedne. Bachj qui consiste
a s'abstenir non - seulement de chair,
mais encore de poisson , d*an]& et de
laitage. Dzuom, aui est propreoaeot
le jeime dans leguel on ne boit ni Ton
ne mange jusquau coucher du soleil.
Le navagatih est simplement oe que
nous appelons Tabstinence ou la priva-
tion de viandes.
Cette discipline austto de nsglise
arm^nienne remonte a rorigine de soo
etaUissement. Saint Gr^soire TIllu-
minateur , son premier patriarcbe , et
qui , au milieu de ses missions , mens
toujours la vie d'un anacborete, fit
ARMJ^NIE.
129
passer dans les institutions de ce peu-
t)le ler^ime s^v^re adopts par lui , vou-
ant r^mer dans ces pratiques toute
]a pens^ du christianismev qui n'^tait
k ses yeux qu'une grande el conti-
nuelle expiation sur (sette terre. Que
ceux qui attaquent rEelise catholique
oonune imposant a ses fiddles des mor-
tifications trop rigoureuses, aillenten
Armdnie, fls se convaincront que la
privation et Fabstinence ne sont pas
aussi nuisibles a Thygidne publique
que rintemp^rance ou Texo^s dans le
Doire et le manger. La beauts du sang,
r^lat du teint des femmes, la force des
hommes, prouveront suflSsamment h
Tobservateur que le r^me le plus dur
peut Stre aussi le plus sain , lorsqu'il
est simple, calme et r^gulier. £n outre ,
il ne faut jamais oublier que les Orien-
taux sont infiniment plus sobres que
nous, et qu'ilsneconnaissent pas tous
les raffinements d'un luxe oomipteur.
l^OLiSBS. — Dans Tint^rienr de I'Ar^
m6nie, oh la pauvret^ du peuple est
grande h cause des exactions aes pa-
chas, les ^ises sont petites et sim-
ples , n'^tant distinguto des maisons
ordinaires que par une croix trac^
sur la porte d'entr^e. L'autel , suivant
Tantique usage , regarde I'Orient; du
reste , tout <st fort simple ^alement
ik I'int^rieurf et elles n'ont pour orne-
mentquequelquespeinturesgrossidres.
Les fiddles n'y entrent que nu-pieds ;
et , lorsqu'ils passent devant la porte,
lis vont en baiser le seuil.
A Constantinople , et dans les autres
villes otH habitent de riches banquiers
et des ndgociants, la maison de Dieu
est oonvenablement ornde. La facade ,
comme la partie intdrieure , rappellent
les dglises des Grecs. Le grand autel ,
correspondant k leur bema , est vof Id
par deux rideaux , dont le plus grand
cache le sanctuaire au peuple, ainsi
que le prdtre cdldbrant , les diacres et
ceux qui les assistent, pendant cer-
taines parties de la messe ; usage orien-
tal qui ajoute , du reste , k la cerdmonie
un caractdre mvstdrieux , plus impo-
sant. Il rappelle ces temps de la pri-
mitive l^lise , ou le diacre ordonnait
aux profanes de sortir avant la con-
W Uvraison. (Armsnie.)
sommation du. sacrifice. Le second ri-
deau cache seulement le cdldbrant au
moment de la communion , comme s'il
devait alors dtre sdpard du reste des
humains, et n'avoir pour spectateur
que Dieu et les anges.
Toutes les dglises sont sous la dddi-
cace du Seigneur, de la Vierge, de la
croix , des apdtres , de saint Grdgoire
rUluminateur, et de guelques autres
saints des premiers siecles. •
Le dimanche et les iours de f(!tes, les
fiddles accourent a T^ise arant I'au-
rore. Us y restent dans le plus grand
recueillement, ne se permettant ja-
mais d'y parler, ou de cracher sur le
pavd. Les hommes tiennent ordinaire-
ment un diapelet k la main , et sont
sdpards des remmes. Les offices sont
fort longs ; lis durent cina ou six
heures. Suivant le rite de rSglise ar-
menienne, on ne cdldbre la messe
ou'une fois par jour dans la mdme
^lise; et, aux solennitds, oette favour
est rdservde aux dignitaires du clergd.
Eglisb patriabcalb d'Eczmia-
xiN. — Nous empruntons au cdldbre
voyageur Ghardin , qui visita ces lieux a
la fin du dix-septidme sidde, la des-
cription qu'il en donne , et qui , si nous
en excepCons les remarques inconve-
nantes qui lui sont suggdrdes par son
esprit reformiste et intoldranl, s'ac-
oorde exactement avec celle du savant
professeur Parrot , dans la relation de
son Yoyaee au mont Ararat. « A deux
lieues a'Erivan , dit-|l , est le cdldbre
monastdre desTroisEglises (*}, le sanc-
tuaire des chrdtiens armdniens, s:
j'ose ainsi parler, et le lieu pour lequel
lis ont le plus de ddvotion. Les Armd-
niens rappellent Eezmiazin^ c*est-d-
dire , ia descenU du FU$ unique en-
gendri; et ce nom, disentails, a dtd
donne k ce lieu, parce que Jdsus-
Christ s'y fit voir clairement a saint
Grdgoire*^ qui en fut le premier pa-
triarche. Les Mahomdtans la nom-
ment UtchicUss€y c*est-d-dire, les trais
igUses, a cause qu'outre'l'dglise du
couvent , il y en a deux autres assez
proches , et qu'en tout elles sont an
r*\
Toy. figure n" tgr.
J
tao
LUNIVERS.
nombre de trois. La premiere , la prin-
cipale aui s'appelle Eczmiazin , comme
Ton a ait , est un bAtiment fort massif
et fort vaste, et qui est tout de grosses
pierresde taille. Les piiastres, qui ont
septante pieds de hauteur, sout de
lourdes masses de pierre. Le dome et
les vodtes en sont aussi. Le dedans de
r^lise n'a aucunornementdesculpture
Didepeinture. Les chapelles sont du
cdte ae.rOrient. II y en a trois au
fond de I'^lise. Gelle du milieu est
firande et a un autel de pierre , k la
faqon des chr6tiens orientaux, assez
bien orn^. Cdles des c6t6s n'ont point
d*autel ; mais une sert de sacristie , et
fautre de tr^or. La raison pour la-
quelle on n'y trouve point d'autel,
c'est que , dans la cr^nce des Arm^
niens, de mime qu'en celle de tous
les autres Chretiens d'Orient , Ton ue
c6i^bre les saints myst^res de la com-
munion eucharistique qu*une fois le
jour, en une ^lise, et Jors seulement
quil s'y trouve quelque fidde pour y
narticiper. Ainsi il n*est pas n^ssaire
d'y avoir plus d*un autel en chaque
^lise.
« Les moines du lieu font voir dans
la sacristie plusieurs parements fort
beaux et fort riches , des croix et des
calices d'or, des laropes et des chande-
liers d'argent d*une extraordinaire
grandeur. On y voit, dans le tr^sor,
plusieurs chftsses d'argent et de ver-
meil dorl. Les principales relives du
lieu sont, au rapport des moines qui
en ont la garde, le haut du corps de
sainte Eipsymde , un bras et une jambe
de sainte Caiane, un bras de saint
Gr^goire, suraonun^ Tllluminateur,
a cause qu*il convertit TArm^ie.
« Au centre de I'^glise , il y a une
grande pierre de taille carrde , de trois
pieds de diamdtre, et de cinq pieds
d*^pais8eur. Les Arm^niens disent que
c'est Tendroit ou saint Gr^oire, leur
ap6tre , vit Jdsus-Christ. 1& assurent
que J^nis • Christ 'fit , autour de ce
saint, avec un rayon de lumiere, le
dessin de VMise d Eczmiazin , et qu'ii
lui commanda de faire bdtir I'^lise
sur la flffure qu*il avait trac6e. Us aiou-
tent q|rau mtoe temos la terre s ou-
vrit a Teudroit ou est cette pierre ; que
Notre-Seigneur ieta la, dans Fabtme,
les diables qui etaient dans les tem-
ples d* Armdnie , et y rendaient des ora-
cles; et que saint Gr^oire fit aussitdt
couvrir cette ouverture d'un marbre.
« lis ajoutent qu' Abbas le Grand ,
rol de Perse , enleva ce marbre, le mit
autr6sor royal de Perse, et fit mettre en
la place la pierre dont nous avons parie.
« Le grand clocher a 6ti^ nonvelle-
ment reb&ti. II y a six cloches ; la plus
Srosse est de douze cents pesant. Un
es petits dochers fiit abattu il y a
guarante ans : et depuis on ne Fa pas
rait relever , faute d'argent , disent les
moines. Le premier monast^ de cette
^lise fut bati par Nerses, vingt^neu-
vieme patriarche d*Armenie. Les Tar-
tares le ruinerent; et, si Ton en veut
croire la chronologic du lieu, il a ^te
cinq fois abattu k rez-de*chauss6e. II
est a pr^ent hdti de briques. II y a ,
dans le convent , des logements pour
tous les strangers qui le viennent vi-
siter, et pour quatro-vingts moines.
lis ne sont d'oniinaure que douze a
quinze. Les patriarches d'Arm^iie sont
oblig^ de resider h ce couvent. Le pa-
triarche d'Eczmiazin a quelque vingt
6v£ch^ sous lui.
« Les deux autres ^ises qui sont
proches d'Eczmiazin s appelient Tune
Sainte -Ripsym^, et Tautre Saiote-
Caiane, du nom de deux vierges ro-
maines, qui, dit-on, s'enfiiirent en
Arm^nie durant la neuvitoe perstai-
tion, et qui furent martyriste au
mtoe lieu oiii ces ^lises sont bAUes.
Sainte-Gaiane est k la droite du mooas-
tere , k sept cents pas seulement. Sainte-
Ripsymee est a la gauche, lideux miUe
pas. Ces deux ^lises sont a demi mi-
nxes ; il y a longtemps qu'on n*y fait
plus le service. »
Les revenus du couvent d'Eczmia-
zin Etaient autrefois beauooup plus
consid^ables. Trente-trois villages en
d^pendaient; et, aujourd'hui, trois
sont restes seulement au patriarche. II
permit un ducat d*impdt personnel par
individu , et vingt pour cent des diffe-
rents produits. Les pelerinages et les
aumones sont aussi une des ressources
ARMENIE.
131
(Ju couvent, qui comptait encore , en
1833 , dans les cloltres , ^uatorze ev^-
ques, quarante-cinq on cinquante var-
cabieds , sept ou buit diacres.
En 1822, comoie les Kurdes pous-
saient leurs incursions jusqu'a la porte
du convent d'Eczmiazin, pour lever
des contributions, et que deux reli-
gieux avaient succombe a leurs roau-
vais traitements , le patriarche, avec
tout son clerg^, se retira dans les into-
vinces russes. Le comroandant de la
province accueiUit tous ces illustres
fugitifs avec les plus grandes marques
Ue distinction , et leur donna pour do-
micile le couvent de Sanain en Som-
kethie. Dans le dernier traite de paix
que la Russie a oonclu avec la Perse,
eWe a obtenu la cession du couvent
d'Eczmiazin , et le patriarche a pu ren-
trer en possession de son siege. Le
CdtJioUcos actuel se nomme l^phrem ,
et en 1833 il entrait dans sa ^uatre-
vingt et uni^e ann^. 11 avait pay^
dix mille francs au schah de Perse pour
le droit de son installation.
Get impdt, prdev^ par les rois mu-
sulmans sur les patriarcbes d'Eczmia-
zin ou de Constantinople, a aouvent
forc^ ceux-ci , comme nous Tavons re-
marqu6 plus haut, de se livrer h une
coupable simonie, afin de s*acquitter
des dettes qu'ils contractaient pour
leur nomination. Aussi les voyait-on
vend re au poids de Tor le myron ou
rhuile sacree, et exiger d'un ^v^ue,
pour son ordination , des sommes con-
siderables.
LiTUBGiE. — La liturgie arm^-
ntenne, telle qu'elle est encore suivie
dans les eglises, est fort ancienne. On
la fait remonter a Mesrob, ce m^me
saint qui inventa les lettres de Falpha-
bet , vers le commencement du cinqui^*
raesi^le, et ()ui presida a la traduction
des livres samts. Mesrob ^tait vers^
dans la connaissance des lettres paien-
nes et de la littcrature classique de la
Grece; en outre, c'etait un homme
d'oraison et fort avanc^ dans les voies
de la vie spirituelle : son style et ses
comnositions porCent le cachet de cc
double caractere. La partie de la li-
turgie concernant le saint sacriGce de
Va messe est la plus parfaite. Les livres
qui servent a la lituiqgie et au cultesont
le Jamaklrky ou breviaire r^lant les
exercioes spirituels de cbaque jour, et
contenant les prikres que ron doit r^
citer aux divers moments de la joum^ ,
lesquels sont le milieu de la nuit ou
i*heure de la r^urrection de Jesus-
Christ; i'aurore, ou Theure h laquelle
Jesus-Christ apparut aux deux Marie,
f)res du s^ulcre; le lever du soleil , ou
e moment de son apparition k ses dis-
ciples; neuf heures, ou I'instant du
crucifiement; midi, ou le moment de
Tobscurcissement de la tenre couverte
de tenures; trois heures, seconde
heure canonique a laguelle le Fils de
rhomme rendit resprit; le sour, alors
qu'il est descendu de la croix et ense-
veli; le couvre-feu, ou I'heure a la-
((uelle il descendit aux limbes pour d^-
livrer les flmes des justes; et enfin
rheure du coucher. Le Charagan, ou
Collier deperlesy recueild'hjrmnes etde
proses k la louanoe de Dieu et des
principaux saints de r£glise d*Arm6-
nie, est un ouvrage d'un asc^tisme
tendre et elev^. On pent ajouter le
Scufhmosy ou livre des psaumes de
David , avec les lemons choisies des
prophetes, des j^vangiles et des ifept-
tres; le Dja^hots ou Missel; le Khor-
/lertadeTf ^alement pour la messe;
et le MiichaoUj liturgie attribute 5
un savant et pieux moine du neuvidme
siecle de notre ere, et qui sert aux
differentes c^r6monies du culte.
L'ordre des ceremonies et des prie-
res du supreme sacrifice badarak ne
resseinble aucunement a notre rit
romain. La messe n'^tant dite qu'une
fois chaque jour, se o^lebre toujours
avec une certaine solennite. L'ofiiciant,
les diacres et les acolytes, ont des v^
tements sacerdotaux d'une forme par-
ticuliere qui u*est pas sans maiest^.
La tiarc oes patriarcbes et leur chasu-
ble rappellent la mitre pontificale et le
pectoral des grands pretres h^reux.
Lc pain mystique est prepare par un
diacre la veiDe du sacrifice. lis ne siii-
vent point dans sa preparation Le rit
des autres Orientaux , puisqu'il lc font
snns levain, ainsi que les maronitcs.
133
L'UNIVERS.
L'iH>stie est ronde ; elle est aussi grande
que celle des Latins, mais plus ^aisse.
Outre les hosties de la communion , ils
f*n b^nissent simplement qudques au-
tres plus grandes et plus minces pour
ies Hlistribuer aux fideles ii la fin de la
inesse. Leur distribution remplaoechez
eux celle du paiu b^ni.
I^ corps de la messe est rempli de
(>rieres pieines d'onction et de subli-
mite. Apres avoir mis le vin dans le
ralice , le pr^tre dit : « Seigneur, notre
DIeu , dont la puissance est inscrutable
et la gloire incomprehensible, toi dont
la mis^ricorde est immense et la pi^t^
infinie, jette les yeux de ton inenar-
rable amour sur ce peuple et sur ce
saint temple , verse sur nous et sur nos
coassoci^ dans la priere ta misericorde
et la piete. w
Pendant qu*on chante le c^lebre TW-
sagion dont nous avons parl6, le c^l^
brant r^itecette autre oraison : « Dieu
clement, aui habites au milieu des saints,
les ch<^ruDins te louent et te glorifient
avec le TYisagion; toute la milice ce-
leste t*adore, toi qui as fait passer
toute creature du non-^tre k I'^tre, qui
as forme Thomme a ton image et ik ta
ressemblance, qui Tas orne de toutes
tes grdoes et lui as appris h rechercher
la sagess^ et TinteUigence; toi gui n'as
pas m^prise le pecheup^et qui lui as
impose seulement la penitence; toi qui
nous as permis, serviteurs indignes que
nous sommes, de nous tenir en ce mo-
ment devantia gloire de ton saint autel
pour t'offrir cette priere de glorifica-
tion. Seigneur, recois de la bouche des
p<^cheurs la benediction trois fois
sainte, et conserve-nous par reflfet de
tn ciemence; remets-nous nos peches
volontaires ou involontaires; purifie
notre Ame , notre esprit et nos corps ;
accorde-nous de te servir dans la sain-
tete tous les jours de notre vie, par
rintercession de la sainte Vierge et de
tous les saints qui font ete agrdables
uendant ce sieclc, parce que tu es
HotrC'Scigiieur saint, ct qu*a toi appar-
ticnnent la gloire, la principaute et
riionneur, dans tous les siecles des
si<'cles. »
\a's premiers missionnaircs catholi-
ques qui vinrent en Armenie, totale-
ment etrangers aux moeurs et au lap-
gage du pays, port^rent contre ses
habitants cette accusation grave qu'ils
etaient encore livres aux superstition^
de Tidoldtrie. Ils alieguaient, oomme
preuve, les offrandes a*animaux quMIs
raisaient ^ certaines solennit^, et anx-
quelles ils donnaient le nom de bada-
rak^ nom qui designe egalement le
sacrifice mystique de la messe; mais
ils ne savaient pas que ces dons volon-
taires, faits par aumdne ou oomme
accomplissement d'un vohi , pour Hrt
repartis entre les pauvres, etaient
une institution eminemment chre-
tienne, puisqu'elle astreignait le ncbe
a donner aux indigents, k certains
jours de Fannee, une part de son su-
perflu. II faudrait aussi bien regarder,
comme une tradition du paganisme,
I'offrande du pain beni qui se pratique
encore dans les eglises catnoliques.
Jean VI THistorien raconte qu'un mar-
tyr du buitieme si^e s'ecriait du baut
ae la croix ou Favaient suspendu les
Musulmans : « Seigneur, en ee jour,
fete annueiie de samt Georges, Tavais
coutume de vous offrir un beiier:
eh bien, aujourd'hui, je m'offremoi-
meme, pour la gloire de votre nom, a
la place de cette victime. « Est-ce la te
langage d*un paien?
Nerses le Gracieux , dans son traitf
appeie Enthanragan , donne au sujetde
cette offrande les details suivants, qui
ne sont pas sans interlt : « La victime
pent etre un boeuf ou une brebis, ou
quelque autre animal pur, sans en
exdure les volatiles. Les pretres appo^
tent roffrande k la porte de I'^lise,
{>1acent le sel devant Tautel, et lisent
e passage des saintes l^icritures adapte
k la circonstance , mentionnant le nom
de la personne qui fSit ce don , etpriant
Dieu de' lui accorder la remission de
ses -peches. On presente alors le sel a
I'animal , puis on regorge. Une portion
appartient au prdtre, Tautre est distri-
buee aux pauvres, et le reste est re-
parti entre les amis ou les parents.
Tout doit etre man^c avant le knde-
main matin. Ce sacrifice n'est pas con-
sidere comme propitiatoire, k la ma-
ARM£lfI£.
133
nicrc des anciens sacriGccs du rit
judaiaue, mais seulement comme un
acte de charity m^ritoire et faTorabie
aux indigents. Ses m^rites sont aussi
applicables aux morts, surtout lorsque
le m6nie jour la messe a ^t^ o^l6br6e
en leur m^moire. Les autres cirooos-
tances ou Ton pratique la m^me cdr^
monie sont les principales f(Stes de
I'ann^e et les anniversaires des plus
grands saints. A Piques surtout, on
off re dans chaque localite une ou plu-
sieurs victimes, au nom de toute la
communaute des fideles aui contri-
buent tous h la d^pense, cnacun sui-
vant ses facult6s. Ce jour est, h pro-
prement parler, la Ute des pauvres,
puisque ce sont eux qui ont tous les
proOts du sacrifice. iHers^, en s*ap-
puyant sur Fautorite du patriarche
Iscuic le Grandy fait remonter I'insti-
tution de cette ci^r^monie a saint Gre-
goire niluminateur, qui, apres avoir
converti la nation armenienneau chris-
tianisme, voulut assurer aux pr^tres
des idoles devenus chr^iens une sub-
sistance honorable. A cet effet, il leur
accorda le droit de pr^lever la dime
sur les Gdeles de leur troupeau , et leur
permit la continuation des sacrifices
sanglants, mais toutefois en changeant
le but de cette pratique et en la trans-
formant en une oblation meritoire
pour les tr^passes, preuve irrefragable
de Tantique foi de ritglise arm6nienne
a un lieu d'expiation , qui o'est que le
purgatoire.
La ^rande diffi6rence existante entre
Koblation du sacrifice de la messe,
selon le rit arm^nien, et celle prescrite
par le rit romain , c*est que dans le ca->
lice ils mettent seulement du vin sans
aucun melange d'eau. Les premiers
chefs de Tfiglise annenienne avaient
introduit cet usage dans la liturgic,
afin de d^jouer les supercheries d'une
ancienne secte tenant aux manicheens,
ct qui employaient le vin et Teau
comme repr^ntant les deux principes
du bien et du ma I. Lorsque dans la
suite la cause qui avait necessite ct
chan^ement cut disparu, les chefs de
la meine Kglise devaicnt rentrer dans
la pratique commune dc la clirrticnlc,
surtout lorsqu'oti leur en faisait la do-
mandeexpresse. Dans la vingtdeuxieme
session ou concile de Trente, il ^tait
dit express^ment : « Le saint concile
TOUS avertit que le prtopte des pr£-
tres de I'l^glise est ae m€ler Teau au
vin dans le calice, d'abord parce qu'on
croit que Notre-Seigneur Jesus-Cnrist
en fit autant; en second lieu, parce
qu*il sortit de son flanc de Teau et du
sang, ce que le m^lan^e sacramentel
rappelle; en troisieme heu, parce que
samt Jean dit dans son Apocalypse
que ce melange reprdsente I'union du
peuple fid^e avec son chef, qui est le
Christ (*). .
Les controversites repr^nterent en
outre aux Arm^niens que toutes les li-
turgies de rOrient se conformaient sur
ce point a celle de Tl^lise d'Occident.
On leur citait les deux liturgies adop-
tees par r^lise d'Alexandrie et attri-
butes. Tune a saint Marc, Tautrc a
saint Cyrille, celle des Copthes, des
£gyptiens et des Arabes ; puis on leur
montrait Tuniformite imposante des
Eglises d'Occident sur cet article. Le
refus obstine des patriarches de faire
la moiodre concession rendit la reu<
nion impossible.
Calbndribr litubgique. — Nous
avons eu occasion deja de parler dc
Fere arm^nienne fix^e a Ton 552 de
Fere chr^tienne, dans les temps ou les
premiers sympt6mes de scission reli-
gieuse sc manifesterent. L'£glisc fixa
aussi son annee eoclesiastique, laquelle
est totalement dififerente de la ntitrc;
elle commence le 11 du mois d'aodt et
se termine le 7 de juillet. Le premier
mois se nomme navasardi et com-
mence le.U d'aoQt; le second mois,
horri. commence le 10 septembrc ; Ic
troisieme, scJimiy le 10 octobre; Ic
quatrt^me, thri. le 9 novembre; le
cinquieme, kaghot4y le 9 d^cembre;
(*) Les dissidents rcprochonl aiix rnllin.
liqiies romains dc incUr« de IVmi daiis k
ralicc , parce que J. C. , disentails , en ron*
sacranl, ne se servit que de vin, ct quo U
roesse ctant le renouvellement dc la One ,
on doit praliquer de point en {loinf re rpn
J. C. lui-mcme a pratique.
lai
i;uisivKus.
le sixiemc , arats. le 8 Janvier ; le sef)-
ti^me, mehekiy le 7 fiftvrier; le hul-
tiemc, arekiy le 9 mars; le neuvi^me^
ahkiy le 8 avril; le dixieme, mareri,
le 8 mai; le onzieme, mar gats y le 7
iuin; le douzieme, hirroUUy le 7 juil-
iet. Comme oe roots, ainsi qae les au-
tres, n*a que trente jours, il teste
quelques jours superflus oa aveUk pour
aller jusqu'au 11, premier jour de
Tann^e.
Les figtes sont distribuees dans un
ordre particulier qui ne coincide pas
avcc celui de I'^lise latine; il y en a
inline plusieurs aui nous sont incbn-
nues, comme celles que Ton c^lebre
en rhonneur de saint Gr^oire I'lllu-
minateur. La fiSte de Pdques tombe a
Pepoque fiz^ anciennement par les
lilglises d*Orient.
Une o^r^onie particuli^re a r£glise
d*Annenie est la benediction des ri-
vieres, aui se c6iebre communement le
jour de r^pipbanie. Voici ce que rap-
porte a ce sujet le voyageur Jean
Struys : « L'^v^que commence par
chanter la messe plus matin que de
ooutume, puis II fait un sermon sur le
texte pris de r^vangile du jour, h la
Hn du^uel il annonce la benediction de
la riviere qu'on appelle Chatscke Schu-
ran{*). Pendant le sermon de rev^-
que, tous les Armeniens du pays se
rendent autour du lieu oik Ton doit ce-
lebrer la fSte, avec la croix et la ban-
nierc. Ceux-ci 6tant tous rassembles,
le khan, h qui ils firent un present de
niille ducats, leur envpya des soldats
pour emp^cher le peuple He les insulter ;
ensuite il s*y rendit en personne avec
son fils, notre ambassadeur, et un Ar-
inenien envoye de la part du rol de
Perse vers ie czar. Sitot que Ic khan
fut entre dans une belle tente qu'on
avait dress^e expr^s, il envoya dire a
i*ev^ue qu'il |)ouvait bardiment com-
mencer la ceremonie.
ft Celui-ci fit un signe auquel des
Armeniens tout nus sautereiit sur la
(*) Nous croyons que ce mot devrail sc
UWMcriiY plus ciaclement khatche tchrouin,
7ui vetit dire croiz tie teau , o» faite sur
eau, iiigiie distiiidif dc ctHte ceremouif .
glace ct la ronipircnt en plusieurs en-
droits , pendant que rev^que s'amusait
a lire et le peuple a chanter des hym-
nes, des psaumes et des cantiques.
Lorsque la glace fut rompue, le peuple
se tut et Ton entendit ie son des clo-
ches , des cymbales et des trompettes .
durant lequel Fev^ue avan^ vers Ten-
droit ou I'eau paraissait, et, apres
avoir r^pandu de Fhuile benite, il In
benit avec une croix enrichie de pier-
rerics , et , pour confirmer la benedrr-
tion, il la plongea par trois fois d«'<r)s
Teau , fit la m^me chose avec la crosse ,
et dit plusieurs pheres qui ne durerent
pas longtemps. A peine les eut-il fiuies,
que le peuple accourut en foule, les
uns pour boire de cette eau et les au-
tres pour s'en laver les pieds, les mains
et Ie visage. Comme 11 y en a partout
d*une devotion singuliere, plusieurs se
depouillerent et sauterent tout nds
dans Teau. Le zele et la ferveur les
empecbaient de sentir le froid qui et;iit
intense. »
Du BAPriMK. — T>es que fenfant
est ne , le parrain design^ et les parents
viennent se presenter a la porte de IV-
gltse. lis s'arretent sur le seuil, ou le
pr^tre recite differentes priercs. li
tresse une cordelette a trois fils, et
pendant ce temps il invoque la tre.s-
sainte Trinite et la vertu puissante de
la croix. Ija femme qui tient Tenfant
entre ensuite dans Teglise avec le par-
rain et les autres parents, faisant an-
tant de genuflexions que Tenfant conipte
de jours, apres quoi on le depose stir
le seuil. Pendant ce temps, le [Kir-
rain se confesse, afin d*accomplir o*
sacrement en etat de grto. On lui
fait ensuite une multitude de questions
auxquelles il repond au nom de Ten-
fan t qu'jl represente.
L'eau benite est versee dans le bap-
tistere , et le pretre recite ectte priere :
« 1 oi , Seigneur, qui par ta puissance
supreme as fait la mer, les continents
et toutes les cireaturcs de la terre; (oi
qui as separe et resserre les eaux sut>e-
rieures au firmament au milieu aes
armees brillantes du ciei, cliantant per-
petuellement tes louan^es; tot. Sei-
gneur Jesus-Christ, qui as envoye tes
ARM£NIR.
13.>
saints apotres en leur ordonnant de
prdcher, de baptiser, au nom du Pto,
du FUs et du Saint-Esprit, tootes les
nations, et en dtelarant par ta parole
T^ridique gue les fimes r^^Mes dans
i'eau et resprit entreront seulement
dans le royaome de Dieu, parole qui
efiraye ton serriteur et qui fait que,
d^ireux de la Tie ^temelle, il vient
volontairement au iiapttee de oette
eau spiritadle; nous le prions done
d'envoyer ton Esprit saint dans cette
eau , de la benir et de la purifier comme
oelle du Jourdain , afin qu'elle serve a
la remission des p^^ , a la reception
de TEsprit saint, a Fadoption du Pere
celeste et a I'b^'tage du royaume
etemel. »
Aprds cette pri^, le pr^tre d^-
pouille I'enfant de ses lanees, et, le
pr^sentant aux assistants , ildit : « Sei-
gneur, d^pouille-le de la v^tust^ du
p6cb^, renouvelle-le par une vie nou-
veUe, remplis-le de la vertu de TEsprit
saint; » et il ajoute : « Que demande
oet enfant? » Le parrain n^pond : « II
demande la foi , Tesp^rance , la charity
et le bapt^me; il demande k dtre jus-
tifi^ et [Kirifi^ du pdch^ originel et a
tervir Dieu. •
On lui impose ensuite le nom qu*il
portera, et alors on le plonge dans le
oaptist^re en lui tenant la t^te toum^
vers Foccident, les pieds vers Torient
et la face vers le ciet. L'immersion se
r^pdte par trois fois , afin de rappeler,
dit la rubrique, la sepulture de J. C.
qui dura trois jours.
Ueau seule n'est pas la mati^re du
sacrement de bapttoe ; le saint chrome,
myrcny est aussi employ^. II faut sa-
voir que le patriarche d'Eczmiazin
avait seul le pouvoir de le oonsacrer, et
c'^it un des principaux attnbuts de
sa puissance, comme aussi la premiere
source de ses revenus , parce qu'il le
distribuait aux autres Eglises a6pen-
dantes de lui , moyennant une certaine
somme d'argent. Dq>uis la separation
des patriarcats de Sis et d'Agntamar,
chaque chef de ces ^lises particulieres
s*est arro§6 la m^me puissance.
On fait sur la t£te et sur les mem-
bres de Tcnfant plusieors onctions, ct
on le revdt d'une robe blanche ^^e lin ;
on Tapprodie du tabernacle poor lui
faire adorer la croix, et ensuite le pr€-
tre , prenant une paroelle de I'hostie
consacrte, le oonununie, en disant:
« Que le corps de Notre-Seimeur J^-
sus-Christ te sauve et te oonduise h la
vie etemelle. » A la fin de toute cette
c^r^monie, on reoonduit en grande
pompe Tenfant k la maison.
On voit dequeues e^rtoonies lesAr-
m^iens environnentoe premier sacre-
ment qui initio proprement le chr^en
h la grande sodm religieuse. Le sa-
crement d'extr^meonction , qui man-
3ue k ri^lise arm^enne, est remplace
ans cette droonstance par le saint
chrome. On leur a beauooup reproche
de ne pas admettre ce dernier sacre-
ment, et k cela ils r^ndent oue Tu-
sage frequent du saint chrtoe le rem-
place, et de plus, ils oignent k Farticle
de la mort les membrea des prtoes et
des religieux. Toatefois , ils n^attachent
pas k cette c^rtoonie la m4me id^
que les autres catholiques , puisqu'ils
attendent qoe le malade ait rendu le
dernier aoupir.
Si un malade ne pent, k cause de
quelque indisposition, recevoir la com-
munion, rt qu'il y ait danser de mort,
ils lui mettent n&nmoins Fhostie oon-
sacr^ dans la bouche, lors mdme qu'il
n'aurait pu confesser ses fautes.
CiBEMONiBS nmiBBSS. — Lorsque
le mort a ^ expose un certain temps
sur son litde pSsurade, le pr^tre vient
avec les autres ministres faire la levee
du corps, et apr^ avoir r^cit^ les
psaumes et les bymnes, et brAI6 Fen«
cens, il rq[>rend'le chemin de Fdglise.
Durant le trajet, tout le convoi pousse
des g^missements et verse des pleurs;
on couvre la bi^re de vdtements pr^-
cieux , et on Fome de fleurs. Puis il
s'^tablit, par les prieres, un dialogue
d^irant entre le ddfunt et les assis-
tants ; ceux-ci lui expriment leurs re-
grets, leur d^oCit pour cette vie si
passag^e et si incertaine , la terreur
2ue leur inspirent les juj^ements de
Meu. De son c6t^, le denint fait ses
derniers adieux a Feglise et au sanc-
tuairc qu'il avait tant de fois visit^s ,
136
LUNIVERS
au pr^rc qui lui annon^ait la parole
Bainte^ k sea parents, a ses amis et k
tons les assistants , pois , tout en mani-
festant sa frayeur pour ies redoutables
jugements du Trds-Haut , il montre oue
son esp^rance dans rinflnie miseri-
corde ne peut et ne doit pas dtfail-
lir.
Au sortir de T^ise, on s'acbemine
vers le cimetiere, ordinairement sttu6
a une certaine distance dans les fau-
bourgs de la Tille ou dans la campagne.
Arrive prds de la fosse, le pr^e,
apr^ de nouvdles pri^res, repand,
comroe chez nous, quelques poignees
de terre b6nite sur le cercueil que Ton
descend en prononcant ces toucbantes
paroles : « Que la ben^iction divine se
r^pandie sur la terre de ce mort , et que
sa poussito gemae et refleurisse au
jour supreme de T^ternit^ ! »
Pendant toute I'octave qui suit le
iour du convoi, le pr^tre va r^li^-
rement visiter les parents du deiunt;
il prie pour lui en commun avec tons
les membres de la famille , II les exborte
k la patience et les console. Le premier
samedi de cette semaine de deuil , les
parents et les amis se r^unissent pour
un simple et modeste banquet, dont
on distribue les restes aux pauvres,
Mifiantes agapes ^i rappellent celles
des premiers chr6tiens.
Lorsqu'un pH^tre menrt, la c^r6roo-
nie funebre est plus solennelle : r^v6-
3ue ou quelque autre personnage ^iev^
ans la himrrchie vient b^nir le lieu
de sa sepulture ou'il fixe en traqant une
croix sur le sable, dont Uss extr^mites
regardent lesquatre points cardinauxdu
del. Les autres pretres ses colldgues
lavent soncadavre, puis ils Foment de
bandelettes et d*un long manteau blanc
de lin. On lui met k la main un petit
rouleau de parcbemin, renfermant le
premier et le dernier verset des saints
Evangiles. II est tourn^ vers Forient,
et sa face regarde le ciel. Pendant Toe-
tave , au bout de quarante joucs , et
au jour de ranniversaire , les autres
pretres et moines viennen(IA>rier sur
sa tombe. •
On a pr6tendu que le peupic arme-
nien ne croyait pas h 1 existence du
pursatoire , et on a range cette pre-
tendue erreur parmi toutes les autres
au'on lui impute. Gette assertion est
evidemment faosse : les longues prie-
res r^serrees pour les morts, la cele-
bration de la messe, les aumdnes faites
en expiation de leurs p^^, sont au-
tant de preuves de la ferme croyaDce
des fiddes et de leur foi a un lieu ou
I'Ame, non r^serv^ a de plus mods
chUtiments, doit se purifier ae aes
souillures et mdriter d £tre introduite
au sejour celeste.
Du GLRAGB. — Le derg^ der£|glise
arm^nienne se subdivise en plusieurs
ordres hierarchiques , domines par un
chef spirituel nomm6 patriarche. Son
election repose sur le suffrage univer-
sei. En effet, lorsque le si6ge est va-
cant , le corps du clerg^ cboisit trois
repr^sentants, charge du rdleque rem-
plissent les cardinaux dans T^ise
romaine. Ces trois pr^lats, pris ordi-
nairement parmi les hommes ks plus
distingu^ par leur science et leur vertu,
examinent attentivement quels sont
les titres des personnages propose,
quelle a ^ leur conduite anttoeure ,
et si la r^ularitede leur vie r^iond a
leur savoir. Au jour de Fdection « tout
le der§^<6 se r^nit dans la m^tropole,
et il doit y avoir au moins douse ^r^-
ques prints. A la face de Tassembl^ ,
on fait comparattre le prdat elu ; il est
interrog^ et examine de nouveau. Si
ses r^ponses sont satisfaisantes , le
m^tropolitain prononce a haute wix
ces paroles : « La grdce divine, qui
suj>pite touiours aux besoins de 1*6-
glise apostolique, ^l^e N. au patriar-
cat, pour la dirisction de la maison
de Thorgom , pour le minist^re de la
sainte Eglise et pour la pr^lature,
conformement a son ttooienage et a
celui de tout le peuple. G est pour-
quoi Je lui impose les mains , et vous
tons priez afin qu'il soit digne d'admi-
nistrer purement le saint-siege aposto-
lique. » En prononcant cette formuk ,
il tient les mains etendues sur la t^
du prdat choisi, et il fait une tongue
priere a TEsprit saint, afift qu'il lui
aocordc la grdce de remplir dignement
le si^ge de saint Barthelemi . de saint
¥-^m^
.«V.V".....
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ARM^NIE.
137
Tbadd^ et de saint Gr^oire riUu-
minateur (*).
Lorsqa'une Eglise particuliere man-
3ue d*^v^e, son derg^ envoie une
6|mtation pr^ da Datriarcbe k qui
elle pi^sente la liste oes candidats , et
les ttres qu'ils peuvent avoir k VAeo
tion. J>ts que le patriarche a fix6 son
choix sur run d*eux , celui-ci vient le
trouver, subit un rigoureux examen,
et, 8*il est jue^ capable de oette dignity,
on proc^e a sa nomination, en sui-
▼ant Tordre des ceremonies indiqu^
dans le rituel.
Les ^v^ues ordonnent les simples
pr^tres (**), dont Tordre compreno la
corporation des varttibieds ou doc-
teurs. Us sedivisentendeux classes , les
grands et les petUs vartabieds, Les
premiers portent, comme marque dis-
tinctive de leur caract^re, un b&ton
autour duquel sont entrelac^s deux
serpents, tandis que ceux de la seconde
dasse ne portent a leur espece de ca-
duc^e qu'un seul serpent. G^ bdtons
sont orainairement uuts de bois pr^-
cieux, enrichi de perles et travaille
avec beauooup d'art.
La f>remim classe des majeurs se
subdivise en dix degr^, et la second*
de minewrs en quatre, oe qui donne
en tout quatorze rangs par lesquels
chaque docteur passe successivement.
Pour ^tre adnus au simple titre de
vartabied, il faut dtre dans les ordres
et rev^tu du caract^re sacerdotal.
L*eievation aux premiers degr^ du
doctorat est tres-solennelle; lecandi-
dat est conduit processionnellement
par ses coUegues en pr^ence de T^v^-
que qui Tinterroge sur sa foi et sur
ses doctrines. La formule de Tinstai-
iation diange suivant le degr^ qui iui
est confi^r^. £n donnant le b&ton du
dernier d€^ , le pr^lat dit : « Re^ois
ce degr6 du nombre parfait dix, et
apres avoir €t^ rempli de TEsprit saint,
exerce dans r£glise ces cinq devoirs,
d*apr^ le pr^cepte de Tdrotre, les-
3uels sont de psalmodier, d'enseigner,
e r^v^ler la parole de Dieu , de pnr-
(*) Voy. figure n<» 3o.
(•*) Voy. figure n" aS
ler les langues, et dinterpreter les
textes pour l^^ification de nos fibres
et Taocroissement de r£glise de Dieu.
Que notre Seigneur J. C, assez puis-
sant pour te fortifier et confirroer dans
oe degr^ , te conserve, te soutienne
par sa force, et fasse fleurir par la
recondite de ses grdces , ton Ame , tes
sentiments, ton ooeur, tes pens6es,
tes paroles, tes ceuvres, ton entr^
et ta sortie (le conunencement et la fin
de tes actes) ; qu'il te prSte assistance
avec sa main forte et son bras ^lev^ ,
en r^pandant sur toi la clart6 de TEs-
{)rit aux sept dons, qu'il a vers^ sur
a tdte de ses disciples, sous la forme
de langues de feu , afin qu'^alement
consume de la flamme de la grdce di-
vine, tu tressailles dans la possession
de Dieu , de joies inepuisabies, et afin
que tu t'abreuves au torrent des d^-
lices divines par I'effet de oette bene-
diction. Au nom du P^re , du Fils etdu
Saint-Esprit. Ainsi soit-il. »
Les convents etaient fort nombreux
autrefois en Armenie, et plusieurs sub-
sistentaujourd'hui, quoique avec moins
d'edat. Les moines sont encore la par-
tie la plus eclairee du clerge, et cela
provient du temps qu*ils passent au con-
vent k se preparer aux ordres. 11 en
est qui y restent huit ans avant de re-
cevoir m^me Tbabit. Le jour qu*ils le
prennent , on leur fait une croix h la
tete , en coupant une touffe de cheveux
sur le front et sur I'occiput ; puis ils
passent quarante jours dans la solitude,
dans le jeOne et dans la pri^re. Pour
mieux sanctifier ce temps preparatoire,
ils sont astreints h ne parler h per-
sonne , ils sont prives de la clarte du
soleil, et ils ne mangentqu'une fois par
jour. Apres cettequarantaine, ils s'abs-
tiennent de viandes pendant deux ans.
Lorsque leurs cheveux sont repousses,
on leur fait une couronne en merooire
de la couronne d'epines du Sauveur.
Le clerge armenien n>st oblige k
la loi du oeiibat qu'aux conditions sui-
vantes : celui qui a contracte un ma-
riage legitime et qui veut etre promti
aux ordres, n*est point ecarte du sane-
tuaire , et lors m^mc qu'il est revetu
de la dignite sacerdotalc , il peut en-
138
L'UMVKRS.
core user des droits d'tipoux. Le ma-
riage contracte apres les ordres mi-
neurs est ^galement valide et l^itime;
mais des qu'on a re^u les ordres ma-
jeurs , ie o§libat est scrupuleusemeat
ordonn^ , on ne peut plus se marier,
et toute union nouveile serait consi-
deree comma un adultere. Les ordres
inonastiques sont aussi sev^rement
astreints k la loi de c^libat. De m^me
un pr^tre marie ne peut devenir ^v^-
que , sauf le cas de veuvage.Il est inu-
tile de dire que la partie proprement
catholique du clerge, et reconnaissant
la suprematie du pape , n*a pas d'au-
tres reglements que ceux du derge
romain.
Le mariage des prtoes cathoiiques,
r£ve par quelques esprits comme une
importante rw>rme, ne serait pas un
f>rogres , conune ils le croient , puiscjue
a cause latente de la d^r^nisation
et des vices du clerg6 arm^nien r^ide
dans ce pretendu privilege. En effet,
les charges que leur imposent F^ta-
blissement et la conservation de la fa-
mille, font que la simonie entrepresque
toujours dans rezercice de leur minis-
tere. Charge guelquefois de la sub-
sistance d*une tamiUe nombreuse, ils
n'administrent lessacrements qu*apres
etre oonvenus de la somme qui sera
donnee pour leur houoraire. Ils font
^alement leurs conditions, quand ils
s^gitd*enterrement8, surtout pour les
gens du peuple. Us ne composent pas
avec les riches et les grands, parce
qu'ils sont sArs d*un salaire consid^-
rablclls sont dfectivement bien paves,
et les enterrements content fort cner,
|)arce au*ils se font avec un certain
appareii, ce qui flatte la vanity des par-
ticuliers.
« Les ev^ues , les vartabieds^ dit
un missionnaire qui r6sida longtemps
a Julfa, sont tous religieux. lis de-
meurent dans leurs monasteres et sont
tous habill^ de la m^me fa^on. lis
n'ont pour unique distinction que le
bliton pastoral qu'ils tiennent en main
lorsqu'ils pr^ent. Le suj>erieur du
inonastere est toujours evique , et
quand il sort, un novice porte de-
v.mt lui le bAton pastoral, ("xs mo-
nasteres ont de grands jardios qui pro-
duisent beaucoup, et ils recoivent des
aum6nes considerables. Le'patriarche
a seul le droit deconsacrer les ev^ques,
et il les ooQsacre pour de Targent.
n Pour son election , il faut le con-
sentement des Armeniens de Julfa et
de ceux de Constantinople, parce que
sa juridiction s'^tend sur la Perse et
sur la Turquie. Ce chef des Armeniens
demeure ordinairement dans le mo-
nast^re. II n'en sort que pour aller dis-
tribuer le saint chreme ^ diff^rentes
eglises , et ce n'est qu*a prixd*argent.»
La simonie est la plaie du clerg^ ar-
m^nien, parmi les dissidents. Tout
s*achete; les dignity eod^siastiques
appartiennent au plus offrant, surtout
la dignite patriarcale. Les Turcs spe-
culent sur Tambition de ces hommes,
qui ach^tent a un taux si elev6 cet
cinploi suprtoie , qu'ils sont contraints
de se livrer le reste de leur vie aux
exactions les plus revoltantes pour s*ac-
quitter des dettes qu*ils ont oontrac-
tees (*).
CONSID^ATIONS SCR L'ANCIKNNB CONSTI-
TUTION SOCIALB ET POUTIQUK DE L'AB-
MfiNlR.
Notre travail serait n^cessairement
incomplet, si nos considerations s'ar-
r^taient a T^tat actuel de la society
arm^nienne , dont le caract^re le plus
frappant est d'ofTrir un element d*ordre
et de permanence au milieu de son
desordre et de son instability , et de
pouvoir subsister r^gulierement, en
recelant dans son sein plusieurs causes
sufiisantes de dissolution pour d'au-
tres societ6s. En outre , cet ^tit anor-
mai, bien qu*il soit ext^rieurement
calme , et trouble moins fr^uemment
par de violentes secousses , qu'aux
temps ou la nation ^tait constitu^ en
royaume, est neanmoins, dans son
essence , un ^tat violent et transitoire.
(*) Deroidrement le paU-iarche de» sclii>>
maliqucft a acheie du viiir pour deux mille
bourws le droit d'emp^her un membre dc
son Kglisc de so faire calholique. Chaque
l»oursc vaiit crnt %ingt-rinq francs environ.
ARiMKlNlK.
13»
Taiitqu'uii peuplcconMrvcscs iiHriirs^
son langage et son caractere, il tend
invinciblement a reunir sfs menibres
disperses et h reconqu^rir son exis-
tence personnelle et individuelte parmi
les autres peuples de I'humanit^. Nous
ne voulons pas dire , pour cela , que
ravenirverslequel il aspire inipatiem-
ment*, ne sera que la copie fideie de
son pass6; le mouvement progressif
qui cmporte les societes ne leur per-
met ni de fa ire haite dans le temps ,
ni de revenir a reculons sur des voies
deja fray^es. Elles croissent et se de-
veloppeiit corame Thomme; et, si, h
son exemple , elles ne peuvent retour-
ner aux premiers dges du berceau et
de Fadolescence , elles ont de plus que
lui rheureux privilege de ne pas des-
rendre dans la tonme, car ce qu'on
appelle iraproorement 'eur mort, n'est
qu une transformation providentielle.
La soci^t^ arm^nienne , errante et
eparse aujourd*hui dans les diverses
eontrees de TOrient, a subsists a Fetat
de nation plus ou moins independante ,
suivant les temps et les circonstances,
jusqu'a la fin du quatorzieme siecle.
Comme toutes les autres soci^t^ de
TAsie, die a en sa constitution propre,
qui, tout en reroptehant de se con-
rondre avec les peuples environnants ,
determinait specialement la nature et
le mode de son d^veloppement. Dans
Tetude particuliere d'un peuple , il nous
semble d*une haute importance de re-
rhercher cet ^l^ment d ordre et de vie
qui fait quece peuple subsiste par soi ,
element que nous pourrions appeler
r^me de son organisme. Nous ajoute-
rons m^me que le premier devoir de
rhistorien est de p^n^trer par Tanalyse
res causes internes qui expliquent les
mouvements et les actes ou corps
social.
Pour ne pas nous ^arer dans les
recherclies d'une antiquity confuse et
t^nebrduse , nous ne depasserons point
les Irmites de I'epoque cbr^tienne qui
iicheva de determiner d'une inaniere
definitive la nature de la constitution
sociale de TAnn^nic. I)*ailleurs il sera
assez curieux de montrcr qu*un peuple,
prcsse ct gcn<^ par les deux puissances
du Bas-Enipire et de la Perse, qui
cherchaient simultan^ment ill labsor-
ber dans leur individualite , ait long-
temps continue de vivre et de se d^-
velopper en vertu de certaines lois qui
faisaient pr6cisement la base des so-
cietes franques et germaines, que nous
voyons s'etablir h la m^me epoque
dans le nord de T Europe.
Toutefois une difference important c
distingue les Arm^niens , antiques pos-
sesseurs du sol , et ces tribus de la Ger-
manie aui viennent avec la violence ct
r6p^ de la conqu6te d^pouiller les
premiers colons. Les annates de la na-
tion representent a la v^rite le fonda-
teur de la monarchic arm6nienne
Emigrant de TAssyrie pour aller se
fixer au pied da mont Masis; mais
I Vloignement des iges, que la tradition
fait remonter presquejusqu*au deluge ,
ne nous permet pas de savoir si cette
oocopation fut sanglante et injuste;
et , d'un autre c6i6 ,"ron ne peut nier
qu'a Torigine du christianisme que
nous prenons ici pour point de depart .
la prescription pr^tendue de plus dc
vingt si^cles n'ait legitime et oonsacre
ce qui pouvait toe primitivement une
usurpation.
Des leprincipe, les colons ^taient
devenus propri^taires uniques du soi
qu'ils cultivaient; et cette propriety
se transmettait integralement ae ge-
neration en generation , h la faveur du
regime patriarcai qui subsista plus
longtemps chez ce peuple que che/.
tout autre. Ld, le fils atne beritait seul
des droits du pere; et ce privilege , que
toutes les legislations modernes ten-
dent a abolir, ctait un nouveau moven
d'empecher la division de la propriety ,
et, par suite, son alienation. Chaque
chef de famille, en ooncentrant dans
sa personne tout droit de propriete ,
devenait naturellement mattre et sou-
verain, suivant cette remarque bien
vraie de Montesquieu , que « celui qui
a les biens a toujours aussi la puis-
sance, o Les autres membres de la fa-
mille restaient simples possesseurs ou
usufruitiers *, ce qui les pla<;.ait , a re-
gard du chef, dans une situation ana-
logue a cello des Leudes chcz les Gcr-
140
LUNIVERS.
mains. Les terres qu'ils pouvaient
reoevoir etaient comme allodialea , sans
qu'il existAt |>armi eux des serfo sou-
mis k la servitude de la gl^, pr6ci-
s^ment h cause de Fantiquit^ de l*oc-
cupation qui ue s'^tait pomt effectu^
1^ , comme ailleurs , au oetrimeDt d'une
race primitiye, nombreuse, et d^j^
propnetaire.
Ges premiers che£i de famiUe for-
merent les dif!i6rentes souches des fo-
milies puissantes des grands oonnus
sous le oom de nakhararkf vdrita-
bles patriciens, et les colonnes de oette
aristocratic dont il reste encore d'im-
posantes et de yivaces ruines. lis pos-
s^aient en quelque sorte h eux seuls
tout le pays; et le chef de r£tat ^tait
ntossairement et de droit celui qui
avait les plus vastes propri^t^. C^tait
ra6me k la propri^t^ qu^il devait direc-
tement sa puissance, puisque nous
voyons plusieurs maisons renversto ,
et Met le sceptre h des dynasties nou-
velles qui, aussi illustres d6j& pour
Tanciennet^ de la noblesse, avaient
obtenu la preponderance, comme con-
sequence de Taccroissement de leur
fortune et de leurs biens. Voici com-
ment: chaque nakharar, qui portait
encore le titre d*itchkany prince, et
de der, seigneur, ou danouderj sei-
cneur de maison , etait oblige de veil-
ler h la defense et a la conservation
de ses terres, surtout aux epoques on
les ennemis du dehors et toutes les
hordes conquerantes accourues soit de
r Arable, soit du nord de TAsieorien-
tale, mena^aient oontinuellement de
devaster et d'envahir le pays. Gette
surveillance Pobligeait d*entretenir k
ses frais des gens d'armes et des ar-
chers choisis parmi ses vassaux, ainsi
oue le pratiquaient , durant le moyen
age, les dues et les comtes des pro-
vinces.
II n'y avait pas d'armee soldee par
le roi seul ou par r£tat; seulement il
dcvait entretenir un corps de troupes
plus considerables aue celles des autres
nakharark , pris inaividuellement , afin
de pouvoir les mettrc c^ la raison , en
cas de revolte , et pour les empecher
d'aspircr h la souveraine puissance,
en les intimidant. Lorsque les enne-
mis ou etrangers, comme les Perses
et les Grecs, dedaraient la guerre k la
nation, le roi faisait un appd aux
nakharark, il convoquait le ban et
I'arriere-ban, et chaque seigneur ve-
nait au temps et au lieu indiqu^, avee
le nomhre de fantassins ou de cava-
liers qu^il devait foumir proport*on-
nellement k I'etendue de ses domaines ,
mais plutot benevolement que oomme
dette obligee.
Nous irexaminerons pohit ici les
avantages ou les inoonvenients de oette
constitution politique; Thistoire des
Armeniens et celle des autres peoples
regis par un gouvernement analogue,
montrent assez visiblement que les
£tats administres par une aristocratic
puissante, dont chaque tete repre-
sente un souverain, sent livres fre-
quemment k Tanarchie et a des dechi-
rements interieurs, resultat en quelque
sorte necessaire des rivalites jalouses
et des interets opposes qui s*agitent
confusement au sein de la societe.
Nous nous proposons seulement de
mettre ici ce fait en lumiere , que la
propriete etait en Armenie Tunique
tbndement de la puissance , et qu*elle
avait un caractere sacre d'inviolabilite
que nous cherchons inutilement chez
les peuples voisins.
Ainsi , en Perse , outre que les terres
des particuliers pouvaient etre assez
faciiement confisquees, elles n*appar-
tenaient a leurs proprietaires que pour
quatre-vingt-dix-neuf ans; durant ce
temps , lis les vendaient et en dispo-
spient k leur gre, a moins toutefois
qu'ils ne commissent quelque crime
qui emportflt la privation de leurs
biens. Quand les quatre-vingt-dix-neuf
ans etaient echus , ils pouvaient pren-
dre un nouveau bail pour un pareil
terme, mais en payant le revenu d'un
an. II n*y avait quune esp^ce de pro-
priete r&IIement inviolable ; c'etait le
oien ecciesiastique. Le roi iii les do-
nateurs n'avaient aucun droit reserve
dessus, et il n*etait pas sujet a confis-
cation, Les sujets, pour assurer a leurs
heritiers la possession dc leurs biens ,
devaient soiivent rccoiirir au moyen
arm!!;nie.
141
qui se (iratique actuellement en Tur-
quie. lid , les biens en fonds de terre
ou maisons, annei^ k Tfi^Hse, soit en
reversion, soit en possession actueile,
^tant regard^s par le prince et par la
nation oomme sacr^ et inviolables , il
arrive joumeUement qu'un piopri^-
taire , quel que soit le mode de son ac-
quisition, donne la reversion de ses
biens a queique fondation religieuse,
aGn de les transmettre sans trouble et
sans contestation k son h6ritier. II en
est quitte pour paver annuellement un
cens de peu de vaieur, Jusqu*^ oe que,
par Textmction des boirs mdles, Fob-
\et substitu^ soit d^volu a la fondation
a laqueile il est reversible. La propriety
mise ainsi sous T^ide de la religion ,
devientjinviolable , St le souverain n'ose-
rait d6roger k oette loi.
En Arm^nie, rinviolabilit^ 6tait g^
n^rale et rigoureusement observe. Les
biens ecdesiastiques jouissaient k plus
forte raison du m^me privilege , aans
un nays oik toute la soci^t^ ^tait pro-
fondment p^n^tr^ de Tesprit et de la
morale du christianisme , bien que I'o-
riffine de ces biens fOt diffi^rente de
ceUe des propriety appartenant aux
seigneurs. En effet, ils consistaient en
donations et legs pieux faits par les sei-
gneurs ou les rois, le cler^^ n'ayant
point eu primitivement de biens en son
pouvoir, oomme on le voit par ce pas-
sage de la vie de saint Gr^oire Tlllumi-
nateur, oili il est dit : « qu apr^ la con-
au£te du pays de Daron, plusieurs des
niux pr^m%s, pr^edenunent attach^
au service des idoles, furent sacr^
pontifes du vrai Dieu. Alors, comme
les paiens ne leur foumissaient plus les
petites retributions servant a leur sub-
sistance, et que les Chretiens etaient
encore trop pauvres ou trop peu nom-
breux pour subvenir k leurs besoins,
ils vinrent trouver Gr^goire et lui ex-
poser leur situation. « Mes enfants,
leur r^pondit le saint, continuez de
servir avec amour le Dieu vivant et
veritable, et placez en lui toute votre
confiance; ne pensez qu'au royaumc
celeste, 1^ oii le Christ est alle a la
droite du P^rc, et demandez au Sei-
gneur qu'il vous y prepare une place ,
pis tout le reste vous sera donn^ 16
oas par surcrott. Au lieu des victimes
impures qui vous faisaient oommuni-
quer avec les esprits de ten^bres , vous
recevrez les pures oflrandes du saint
sacriGoe, et elles vous feront partici-
per aux benedictions que Dieu aocorde
a ses anges. En outre, les fiddles vous
donneront les premices des troupeaux
et des fruits de la terre, vous prel^ve-
rez la dtme sur les vignes, vous jpren-
drez aussi votre part des offrandes de
boeufs et d'agneaux faites aux pauvres ;
surtout vivez dans Tamour de la pau-
vrete et de la privation : c'est ainsi que
vous trouverez votre sort doux et mu-
reux. »
Le clerge re$ta dans la suite fiddle
k Tenseignement et aux conseils de
son premier patriarche. 11 etait gd-
neralement pauvre, et son influence
etait toute spirituelle. Le pouvoir re-
ligieux, repr&entant reidment intellec-
tuel de la society, exer^t une juridic-
tion salutaire sur le pouvoir des princes,
qui U, aussi souvent qu'en Europe,
degenerait en force brute et arbitraire.
Les patriarches avaient continuelle-
ment a lutter centre la nature rude et
indomptee de ces princes travailies par
des passions violentes, et sollicites au
mal pfflr Texemple des souverains qui
les avoisinaient. Plusieurs d'entre eux ,
comme saint Housig* trouvdrent la
mort pour recompense de leur zeie , et
neanmoins leors successeurs, aucune-
ment efifrayes des dangers de leur mis-
sion apostolique , intervenaient encore ,
comme mediateurs , soit dans les diffe-
rends qui s*eievaient entre les sei-
gneurs , soit k la cour des rois de Cons-
tantinople, pour obtenir leur protection
ou pour d&armer leur courroux. Le
roi reconnaissait touiours, du moin.v
tadtement, cette espece de suprema-
tie, soit en ne prenant la couronni
qu*apres avoir ie(u Tonction sainte,
soit en consultant le patriarche dans
toutes les affaires importantes. Une
ancienne loi armenienne, conservee
dans le code georgien du roi Wakh-
tang , etait ainsi con<}ue : « Que per-
sonne ne prenne pour siege un trdne
ou un souzan sans autorisation du sou
f 12
L'UNIVERS.
verain : encore n'y a-t-il que \e patrrar-
che qui puisse si^er sur un souzan;
que fe sou^erain ne 8*asseye pas dans
la maison du patriarche h la premiere
invitation ; que le prince des Chretiens
ne le soit pas seulement par son luxe,
Gomme cetui des infid^les. »
Les sou verains comprenaient si bien
la n^oessit^ d'avoir 1 approbation du
{)OUVoir spirituel pour regner, qu'a la
fttort d*un patriarche ils mettaient en
jeu toutes les intrigues et tous les
moyens pour faire nonuner un succes-
seur favorable a leurs inter^ts. Dans
cette circonstance, on edt dit qu'ils
voulaient contre-balancer par leur in-
lluence celle quMIs subissaient forc^-
ment pendant la vie du patriarche, et
en tirer guelaues repr^^illes; car un
autre article du code armenien decla-
rait: «^u'un homme ne peutdevenir
souveram sans rautorisation ou Itaveu
ilu patriarche. »
La dignity royale^ b^reditaire en
principe, ne devait pas n^nmoins se
transmettre rigoureusement de fils
atn6 en fils atn6. La loi modiliait sage-
ment, comma chez nous durant la
premiere race, ce que Id constitution
pouvait offrir de dan^ereux, en ne de-
terminant pas le vrai caractere de la
l^gitimite. £lle ajoutait : « Le roi doit
tenir la place de Dieu sur la terre, et
si parmi les enfants qu'il laisse en
mourant il y en avait un plus digne,
plus habile et plus sage, ce sera celui-
la que Ton plaoera sur le tr6ne de son
pere. — Le prince, ^tait-il dit ailleurs ,
est etabli par Dieu pour conserver et
proteger le pays, «t non pas pour Top-
primer. C'est a cette condition quil
regne. »
Aussi vit-on k diverses reprises les
§ rands et les simples sujets , indignes
e la tyrannic de leur souverain, venir
s'adresser au patriarche, qui usait de
son autorite pour le ramener, par ses
avertissements, a des idees d'ordre et
de justice. S'il s'obstinait a r^er des-
potii^uement, le patriarche, comme le
pontife de Rome, lan^ait contre lui
une excommunication, et deliait les
sujets du devoir d'ob^issance.
Outre son domaine priv6, le roi
troiivait une autre source de richesses
dans la perception des imp6ts. La terre
ensemeno^ payait le sixieme h titre de
r^colte; les autres terres et la vigne
n'etaient pas soumises a un im^.
Tout sujet non ehr^tien ^it astreint
a fournir le droit de capitation.
Si , dans la guerre, le roi s'emparait
d'un pays , et s^il le livrait k la merci
du soldat, tout Tor lui appartenait.
Quant au reste du butin , y oompris les
captifis, le souverain en avait la moitie
et rama^ I'autre, mais on devait sor
les deux parts pr^lever le dixitee poor
rfiglisc.
Le code de Wakhtang a consent
cet autre article, que la Illation
du sang , ou rappiieation oe la loi
qui conceme la peme capitate, est re-
servee exdusivement au prince. Voas
ne pensons pas qn'il faille, entendre ici
par prince le chef de I'Etat, qui, a
certaines epoques, fut decor^ du titre
de prince aes princes. U d^igne sioi-
plement le nakharar, dont le pouroir
etait triple : ii s'^endait d*abord k la
terre ou a la propri6t^ fonciere, ainsi
que nous Tavons dit; mais il atteigpait
aussi en second lieu les personoes, et
rhistoire nous prouve a chaque page
Sue le seigneur avait le droit de vie et
e mort sur ses vassaux, sans que le
roi pOt l^alement sV opposer; et, s'il
intervenait quelquefois, c*6tait plotot
au nom de I humanity et pour arr^r
une iniustioe trop r^vol^te, qu*efi
vertu de sa quality de souverain. Le
seigneur avait encore un droit, celui
de ne f]5urnir son oontinffent de trou|)es
qu'autant qu'il jugeait la chose favo-
rable a Tint^t public et au sien |»t>-
pre; ce qui rendait impossible a}
Armdnie le pouvoir despotiqueet arbi*
traire, parce que les nakharark pou-
vaient ou se reunir contre le souverain ,
ou abattre d'un seul coup sa puissance,
en retirant les troupes qu'ils lui avaient
fournies. Le seul point qui montrait
leur d6pendanoe du chef de r£tat-
etait robligatioQ contractee envers ce
m^me chef de lui payer annuellement
une certaine somme comme iropot. C/ft
ardent, en entrant dans le tresor ou
roi , servail a couvrir toutes ses depew-
arm£nie.
H3
868, si ses revenus ne suffisaient jms,
ik payer sa maison, les fonctionnaires
^tablis dans le roTaume, k solder les
troupes, h bfttir les Edifices publics, k
entretenir les routes, et enfin k subve-
nir aux firais extraordinaires de la
guerre. Le droit d'impdt coustituait
one uniquement la pr6eminencedu roi
sur les autres seigneurs , qui , en le re-
fusant. se pla^ient dans un ^at ma-
nifeste de r^volte.
II derait, pour se les eoncilier,
user h la fois d'adresse et de pru-
dence. Comnie nos rois, ceux d Ar-
m^nte cfaercbaient k attirer la haute
noblesse k leur oonr par Fappdt des
honneurs et des ricfaesses. On insti-
tuait des charges et des dignity pour
satisfaire leur ambition , pour occuper
leur activity inquidte, et tous oes grands,
si indodles dans leurs terres, deye-
naient k la cour des serriteurs com-
plaisants du pouvoir; ils liaient leur
propre cause k la sietine, et contri-
ouaient k le faire triompher des obsta-
cles Qu^il renoontrait dans I'amour de
rindependance et dans Finsubordina-
tion oes autres nakharark. Le souve-
rain devait hdiilement manager leur
susceptibilite orgueilleuse, parce qu'il
s'adressait k des pairs plutot gu'^ dts
sujets. La noblesse de la Perse n'toit
ni aussi ancienne ni aussi puissante,
comme nous le voyons dans un dis-
oours que le roi Chapour tint aux pands
d'Arm^nie et aux seigneurs oe son
royaume assemble dans un mtoe con-
sell. «Nous connaissons, dit-il, tous
les ordres de la noblesse persane, mais
il n'en est pas ainsi de la noblesse ar-
m^ienne, que les rois, nos prdd^ces-
seurs, et les autres historiens, n'ont
iamais pu oonnattre. »
ittienne Orp^lian .^alue k auatre
mille le nombre des nakharark, et
d'dutres6criTains Font fait monter jus-
qu'a neuf mille, sans doute paroe ou'ils
y comprenaient tons ceux qui, a'une
noblesse secondaire, s*6taient ^lev^s
successivement au rang de riches pro-
pri^taires. Cette dasse de gentilshom-
mes portait le nom de sebom . Gompris
dans la grande cat^orie des azaa ou
nobles, nom dont il n'est peut-^tre pas
inutile de faire remarquer ici T^tymo-
logic persane, ils ^ient sup^rieurs a
Tordre des simples bourgeois et arti-
sans, sans pouvoir pr^tendre n^n-
moins k la dignity des nakharark. lis
n'^ient par con^quent ni der ni da-
noudery <rest-^-dire, ni seigneurs, ni
chefs de famille, et ils manquaient du
droit r^erv6 aux propri^taires.
La classe des nakharark se subdiyi-
sait en trois degr^ hi^rarchiques :
f* les simples seigneurs vivant libres
et retire dans leurs terres; 2« les
grands qui remplissaient des charges
publiques, et 8' les families qui ont ete
port^ alternativement sur le tr6ne,
oomme les Pagratides, les Ardzerou-
niens, la maison de Siounie etquelques
autres.
Plusieurs de ces families subsistent
pr^sentement , telles que les Bagrations
ou andens Pap^tides, qui habitent la
G^rgie et Samt-P^tersbourg; les Or-
p6lions ou Orp^lians, oue Ton trouve
aussi en G^rgie ou dans la Russie.
Le gouyernement russe a grand soiu
de les attirer k la cour, de peur qu'en
viyant dans leur patrie ils ne regret-
tassent un jour la noble ind^pendance
de leurs ani»tres. Dans les montagnes
gui avoisinent Mouch domine encore la
rave maison de Sasoun, qui n'a ja*
mais ^t^ soumise par aucun des nom-
breux oonou^rants dont F^pee a en-
sanglant^ ie sol de FArmenie. Nous
pourrions citer aussi les roaisons du
nom d'Aghnak , de Sli vantsik, de Roch-
guetsik , de Malakhovski et de Sa-
begha.
On ne peut croire, d*apres ce que
nous venons de dire, que le gouyerne-
ment arm6nien ait m une monarchic
pure; il s'y m^lait un ^6ment aristo-
cratique qui le temp^rait, en Femp^-
chant de d^6n^rer en despotisme,
comme dans les autres contrdes de
FOrient. Son organisation ^tait forte
et compacte; sans les causes internes
de dissolution qui le travaillaient, sur-
tout sous le rapport religieux , ii aurait
pu r^sister plus longtemps aux enneniis
du dehors.
Malgr^ Finfluence de la classe aris-
tocratique , In loi protegeait ^galenieut
144
L'UNIVERS.
ies citoyens , et elle punissait quiconqae
venaitle sang innocent, par oette raison
que « la yaleur et le pnx de rhomme
ne peuvent 6tre fixes, puisqu'il est
Touvn^e de Dieu et son image, et que
lui seulpeat ressusciter un mort. » U
fallait seulement que le suiet fQt Chre-
tien. La loi etait moins severe sor le
coinpte des infid^les dans le cas d'ho-
inicide, et. d'un autre cdt^, elle s^vis-
sajt plus lortement contre eux lors-
qu'ils se rendaient coupablesde gudque
taute; c'est oe que prouve Particle sni-
vant : ft Si un homme se livre avec son
patron au brigandage , qu*il soit pris et
oonvaincu : infidele, on lui cr^vera Ies
yeux et on lui coupera la main; sa
femme, son fils et ses biens, seront
confisqu^ au profit du trdne, et lui-
m6me sera exn^ en terre ^trangdre :
Chretien , on lui fera restituer Ies objets
vol^; sa maison et tout ce qui lui ap-
partient seront vendus au profit de
r£tat; mais sa femme et ses enfants
seront libres ; on nepeut rien sur euv.»
Auiourd*hui la nation arm^ienne
est rqgie par toutes Ies l^islations di-
verses des pays dont ies souverains ont
envabi ouelque portion de son terri-
toure; elle n a conserve, m&ne dans sa
patrie, aucune de ses anciennes fran-
chises. Les peuplesconquis par laforce
restent toujours sous la loi dure et in-
flexible de la force, Jusqu'a oe que ces
dominateurs violents suooombent, us^
par leur violenoe mteie; alors les op-
prim^s reinvent la t^te et travaillent
avec confianoe k aooomplir les destinte
nouvelles que leur roerve la l^roYi-
denoe dans sa mis^ricoide et dans sa
justice.
£n terminant, nous prions le lec-
teur de ne j>oint iuger trop s^v^rement
notre travail. If a &llu nous renfer-
mer dans les limites qui nous avaient
6t6 prescrites , et voici premierement
pourquoi certaines parties sont plus
longuement d^velofip^es , tandis que
d*autre8 restent moins completes. En
second lieu , nous ^ions retenus par la
double crainte ou d'etre trop superficiel
en n'explorant que les points gdneraux
etculmmants des choses, ou de tomber
dans la s^eresse d*une Erudition lo-
cale et technique. Celui qui nous lit et
nous juge sera peut-^tre plus indulgent
s*il oonsidere gue Fhistoire et la litt6-
rature arm^ieimes sont connues de
la France , seulement depuis un petit
nombre d*annto. Nous croirons avoir
atteint en {uurtie notre but , si nous
avons r(6ttS8i k inspirer quelque senti-
ment de curiosite ou d*inter€t pour
une nation' qui a droit d^occuper une
8 lace parmt les peuples anciens et nio>
ernes de I'Orient.
FIN
/
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