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Full text of "Anecdotes, illustrative of a select passage in each chapter of the Old Testament"

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GIFT   OF 
'rof.  Charles  A,  Kofold 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 


SUITE  ET  Fm  DE 


LA  mm  8T  PRomis  rum  en  m, 


TYPOGRAPHIE  DE  FIRMIN  DIDOT  FRtlRES, 

BUE   JACOB,  n*   56. 


RUSSIE, 

PAR  M.  CHOPPIIS. 
TOME  DEUZI£ME 

OOimMMT   LA  n» 

DCS    ImA,   aVSSIE    D'SVaOFS 

T  OOMPRU 

LA  CRIMEE, 

PAR  M.  G£SAR  FAMIN; 


>T 


CIRCASSIE  ET  GEORGIE, 

PAR    M.  C£SAR    FAMIM. 

kntm, 

PAR   U.  BORS,  ORIEIITALISTE. 


«.    '» 


*, 


PARIS, 


FIRMIN  DIDOT  FRl&RES,  EDITEUR8, 

IMPRMEOIIS-LIBBAIRES  DE  L*mSTITUT  DB  FRANCE  , 
■  *t  iicoB.  a"  56. 


M  DCCC  XLII. 


•      ••-•-•• 


♦  •     •   •/  •  •     • 


RUSSIE. 


St5 


PAUL   !•». 


(t796-180t .)  Catherine  n'arait  rien 
n^ig^  pour  rendre  Paul  indigne  du 
ti%e  ;  oe  prince,  croyant  d^armersa 
m^,  avait  paru  se  r^igner  au  rdle 
qo'elleUii  imposait,  et  ii  semblait  vou- 
knr  justifier,  par  son  genre  de  vie,  son 
exclusion  totale  des  anaires.  Gependant 
ie  temps  de  eette  esp^  d'exil  n*ayait 
pas  ^te  perdu  pour  fui :  dou6  d*uii  es- 
prit juste  ,  et  capable  des  resolutions  tes 
p\tts  ^en^reuses ,  il  ayait  d*abord  affects 
roriginatit^  et  la  brasquerie ,  comme 
pour  mettre  ces  quality  sous  la  sauve- 
gnrde  de  quelques  ridicules.  Yieilli  dans 
cette  contrainte,  il  avait  tini  par  se  les 
approprier,  et  ils  accompagnaient  si 
naturellement  son  physique,  que  Ton 
ne  doutait  point  qu'ils  ne  lui  fussent 
naturels.  Le  jeu  sineulier  des  circons- 
tanoes  avait  refoule  dans  son  coeur 
les  plus  doux  sentiments  de  la  nature : 
an  doate  qui  I'liumiliait  planait  sur  sa 
naissaoce;  etait-il  le  tils  de  Pierre  III 
oa  de  Soltikof?  II  sMndignait  contre 
oette  demiere  supposition,  et  il  est 

Erobable  que  ce  fuc  dans  I'intention  de 
I  d^troire  qu'il  affectait  les  mani^res 
^tranges  du  feu  tsar.  Celle  quMl  poa- 
yait  nommer  sa  ih^re  le  repoussait',  et 
s'emparait^  d^  leur  naissance,  des  en- 
&ntsqae  lui  donnait  la  ^nd&duchesse. 
Les  faroris  de  Catherine  se  plais^ient 
^  Tabreuver  d'hamiliations;  dt  peine 
lui  laissait-on  des  moyens  suffisants 
pour  soutenir  une  repr^ntation  de- 
tente. Le  peuple  qui  1  aimait  applaudit 
a  son  ei^yation  mattendue;  la  cour 
etudia  avec  anxi^t^  les  premiers  actes 
de  son  regne.  Ils  surpasserent  I'attente 
g^drale;  et  tandis  que  le  tr6ne  cor- 
rompt  d*ordinaire  les  princes,  on  crut 
un  instant  que  le  pouvoir  avait  op^r^ 
dans  le  caract^re  du  nouveau  tsar  une 
revolution  favorable.  Les  mesures  qui 
ouvrirent  son  r^ne  furent  empreintes 
de  moderation; on  remarqua  toutefois 
qu*elles  formaient  un  contraste  calculi 
avec   les  entreprises  audacieuses  du 
gouvemement  precedent.  Les  nobles, 
preaque  tous  complices  des  rigueurs 
de  la  mere,  n'avaient  pas  eu  le  temps 
de  dormer  le  ressentiinent  du  fils; 

35*  Livraison,  (Kusste.)  t.  \u 


et ,  conune  etourdis  de  ce  revers  subit, 
ils  n'osaient  encore  saluer  ce  nouveau 
reene,  ni  se  flatter  que  Tempereur 
oublierait  les  injures  du  grand-due. 

Paul  interrompit  TexeoDtion  d*une 
levee  extraordinaire ,  rompit  le  traitf 
de  subsides,  oonchi  aveerAngleterre, 
snspendit  les  pr^paratifs  de  la  guerre 
contre  la  France,  et  rappela  des  fron- 
ti^res  de  Perse ,  rarm^e  que  oonunan* 
dait  Yaierien  Zoubof. 

La  penurie  du  tr^sor  avait  foro^  Ca- 
therine ^  recourir  h  des  mesures  finan^ 
cieres  dont  elle  comptait  r6parer  l*effet 
d^sastreux  par  les  avantages  de  ses 
armes.  Elle  avait  d^cr^te  que  les  roon- 
naies  seraient  revues  pour  une  valeur 
double  de  celle  qu'elles  repr^sentaieiit 
reelfement,  et  les  assignats  s'6taient 
multiplies  k  un  point  que,  dans  leur 
^change  contre  du  numeraire ,  on  refu- 
sait  de  les  recevoir  au  pair.  Paul  en  fit 
brOler  pour  six  millions  de  roubles ,  fa 
la  grande  satisfaction  du  peuple ;  en- 
fin  ,  pour  arr^ter  le  mal  h  sa  source , 
il  prescrivit  de  grandes  Economies 
dans  les  d^penses  dc  la  cour. 

A  rinstant  ou  les  anctens  favoris  de 
Catherine  s'applaudissaient  de  la  cl6- 
mence  ou  de  roubli  du  monarque,  un 
acte  de  solennelle  reparation  vmt  leur 
apprendre  que  le  passe  vivait  encore 
dans  la  m^moire  de  leur  maftre.  Avant 
de  rendre  ^  Catherine  les  demiers  de^ 
voirs ,  il  voulut  confondre  dans  une 
m^me  cer^monie  et  Texpiation  d*un 
crime  et  ce.  au'il  devait  h  la  m^moire 
de  sa  mere.  Il  se  rendit  au  monastdre 
de  Saint- Alexandre-Nevski ,  oik  repo- 
saient  les  restes  de  Pierre  Iir,l^,  apr^ 
avoir  consid^re  dans  un  sombre  recueil- 
lemept  ce  tombeau  dont  la  simplicity 
m^me  eveillaittant  de  douloureux  sou- 
vepirs ,  il  arrosa  le  cercueil  de  larmes 
pieuses,  et  le  fit  exposer  sur  une  estrade 
au  milieu  de  I'eglise ;  ensuite  on  trans- 
porta  le  corps  avec  celui  de  Timp^ra- 
trice  dans  Teglise  de  la  forteresse  de 
Saint-Petersbourg ,  ^  c6te  des  sepul- 
tures des  tsars.  Sur  la  pierre  de  leur 
commun  sepulcre ,  on  grava  cette  ins- 
cription :  Divis4s  pendant  leur  vie, 
riunis  apris  leur  mort.  Pour  donner 
^  cette  ceremonie  imposante  un  carao- 

1 


!v^i.Gi831 


•   •■ 


"••  •      • 

•     •  • 
•  •  ••  •  • 


886 


UUNIVERS. 


titrt  vfoimenl  expiatoire,  Paul  vou- 
kit  que  fiarifltinsfci  «t  Alexis  Oriof 
sttivieaeot  le  eort^ge. 

Les  mtni^es  de  rempereur,  ju*- 
4u*aIors  bnuquee  et  imp^ueuses ,  pri- 
fen^  tout  h  coup  un  carect^  plus 
affeetueux;  oo  edt4it4|ue,  t^naoio  et 
viettoiedei  diBseoskms  de  sa  families, 
•1  6*6lait  inpoB^t  ^  T^ard  de  sou 
qNMMe  et  deaee  cofiuits ,  uneconduite  A 
ia  fois  digue  et  emprewee.  Les  minisr 
.irs8,.k8  aucieDs  fooetionuaires  furent 
oonsenr^,  et  loin  de  s^vir  oontre  les 
Davoris  de  aa  m^,  il  cjouta  de  nou«- 
velles  grAoes  a  la  g^n^rosi^  du  par* 
ilon. 

Soit  qu'il  edt  jreoonnu  dans  J*inip^ 
ratrice  quelque  penchant  a  Taiiibition^ 
soit  phitot  pour  ^carter  les  trouble^ 
dont  Je  passage  d*un  rdgne  a  Tautre 
avait  4onue  taut  d^exeuiples,  il  d^* 
cr^ta  que  l*ordre  de  la  succession  au 
trdoe  se  r^lerait  desormais  contrai* 
rement  a  Tancien  usage ,  de  telle  sorte 
que  les  femmes  ne  seraient  habiles  k 
r4;ner  qu*a  d^fiaut  d'h^ritiers  m^es , 
et  que  la  couronne  serait  transmissible 
de jMre  en  fils  et  d^atn^  en  a2n^. 

u  aflecta  de  traiter  avec  distinction 
Poniatovski ;  il  se  plut  h  eatourer  de 
pompe  cette  uiajeste  d^ue;  jnais  en 
mdnie  temps  il  mtoit  h  ces  Jayeurs  una 
intention  malicieuse.,  en  lui  donnant 
nour  cbambellan  ce  mtoe  Stackel- 
ler^  dont  la  mission  h  Varaovie  lui 
avait  €t^  si  Xuneste.  Le  trait  le  plus 
caract^istique  de  cette  premiere  pe- 
riode  de  son  r^ne,  c*est  Ja  demar- 
che qu'il  fit  aupres  de  Kosciuszko: 
croyant  ne  pouvoir  trop  honorcx  le 
courage  malbeureux ,  iJ  alia  porter  lui- 
m^me  au  g^ni^ral  la  nouvelle  qu'il 
^tait  libre. 

Cepeodant  les  courtisans,  -qui  trou- 
vent  plus  commode  d*exploiter  la  fai- 
blesse  et  les  vices  des  princes  que  de 
meriter  leurs  faveurs  par  des  services , 
dtudiaient  avec  un  som  perfide  le  cdt^ 
attaquable  de  I'empereur ;  ils  ne  tar- 
d^rent  pas  k  reconnaltre  que  sa  sensi- 
bility extreme  lejetait,  k  lamoindre 
contrariety,  dans  des  emportements 
fougueux.  JCe  caract^e  entier,  long- 
taajps  comprim^,  se- d^bordait  avec 


violence  et  plenitude  dans  la  carri^re 
ouverte  dn  despotisme ,  et  plus  il  avait 
^t^  froiss6,  plus  il  ^tait  pvesse  de  faire 
acte  de  volont^  absolue.  II  n*etait  que 
trop  facile  de  tirer  jNirti  de  ces  dis- 
positions dont  les  cons^uences  oat 
jdes  effets  si  terribles  dans  ua  prinoe 
qui  |>eut  tout  II  avait  confix  le  com- 
mandement  d'un  raiment  des  ^ardM 
au  taardvitch  Alexandre;  on  lui  insi- 
uua  qu'il  ^tait  dai^gereux  de  mettre  des 
•jnoyens  de  revolte  a  la  disposition  de 
rberitier  pr^mptif ,  que  le  vceu  biea 
connu  de  son  aieule  appelait  directe- 
flient  au  tr6ne;  on  mi  inspira  des 
soup^ons  sur  le  devouement  de  son 
ipouse,  et  Ton  profitait  des  actes  ou 
Tentralnaient  ces  avis  periides,  pour 
alarmer  Timp^atrice  et  le  grand-due 
sur  leur  propre  sdret^.  Paul  ne  pou- 
vait  supporter  Tidee  ^ue  Ton  dout^t 
de  sa  capacite;  habitue,  des  son  en- 
fance,  a  improuver  la  conduite  de  sa 
mere,  et  les  actes  politiques  ex^tes 
par  ses  favoris ,  il  prit  k  tdche  de  tout 
refaire ,  et  ses  r^forines  s'appligu^rent 
souvent  a  des  cboses  qui  ne  gagnaient 
rien  ill  £tre  remani^es.  Cest  ainsi  qu'il 
changea  le  nom  et  les  limites  de  plu- 
sieurs  ^ouvernements ;  il  ep  r^duisit 
le  nomore  d*un  cinqui^e,  c'est-a- 
dire  k  quarante  et  un.  Ne  respectant 
pas  m^me  de3  appellations  queia  gloire 
de  Catherine  avait  droit  ae  revendi- 
quer,  il  r^unit  sous  le  nom  de  Mou;- 
vellerRussie ,  les  ^ouvernements  de 
Tauride  et  d'Ekatennoslaf.  Longtenips 
r^duit  au  rdle  d*observateur  mdcou- 
tent,  il  n'ignorait  aucun  des  abus  qui 
r6gnaient  dans  J*administration ;  H 
avait  reconnu  qu*il$  tenaient  en  grande 
partie  k  rjinmoralit^  des  hauts  fonc- 
tionnaires,  qui,  parodiant  le  despo- 
tisme, s'engraissaieotdela  substance  de 
leurs  administr^s;  ces  vexations,  qu*au- 
torisait  Texemple  des  chefs,  se  repro- 
duisaient  dans.ies  emplois  subalternes, 
pour  retomberdefinitivement  sur  ceyx 
qui  n'avaient  personne  au-dessous 
d^eux  et  qui  ne  s*appartenaient  pas  k 
eux-m^mes.  II  balan^  Tautorite  des 
gouvemeurs  militaires,  en  leuradjoi- 
gnant  un  fonctionnaire  civil ,  et  il  i>ur- 
gea  les  administrations  d*une  ioule 


RUSSIE. 


S87 


dcHipky^aussi  ovides  qu'imitiles.Cas 
refonnes,  quoiqiiesage^,  Mulev^rent  de 
iMMnbreux  Bieoonteateinenls ,  qu'oa  ne 
manqoait  pas  de^r6senleraPaul  oom* 
medes  manifestationa  MHmaBS.h'ar* 
gueil  de  Tautocrate  s^an  inrita,  M  landia 
ou'il  rayait  des  listes  adflainvtratives 
des  inilliers  de  geotiUhQannes  pauvrw, 
ii  refusait  au  voeii  g^o^l  la  destitu* 
tioD  du  directeur  de  la  police  Arakof , 
qui  peat-^re  avait  eu  1  adresse  d'eiei- 
ter  ses  craintes  ombrageuaes.  Paul 
s'^tait  livi^  d'abord  saoa  t^rre  au 
plaisir  de  former  iui^m^me  le  graad- 
due  a  la  science  du  gouvememeat ,  et 
Farait  nomoi^  gouvemeur  de  Peters- 
bourg;  a  mesure  qu^il  voyait  TaCfection 
deson  peupleluiechaRper,  il  devint  plus 
m^ant;  il  entoura  AiesxandFe  d^uoe 
etroite surveillance,  -et  pendant  long- 
teniips  il  reduisit  aa  tdche  a  eeHe  d*un 
copiste.  Catberine  avail  d^tr6n6  Pierre 
III :  c'eaetait  assez  pour  gu'il  redoutdt 
un  sort  seniblable;  et,  s^aadonnant 
a  la  bizarrerie  deson  «aractere,  c^est 
par  les  mesores  qui  devaient  le  perdre 
qu'il  croyait  pouvotr  conjurer  le  dan- 
ger. Plus  d'une  fois  il  traita  Timp^* 
ratrice  avec  une  rigueur  aue  rien  ne 
justifiait,  et  traduisant  muitaireBient 
ses  grie&  de  famiUe,  il  lui  imposa 
les  arrets  forc6a. 

Paul  voulut  soumettre  a  ses  caprices 
jusqu'a  la  conOance  publique,  on  decr^ 
tant  que  les  roubles  assignats  recouvre- 
raient  leur  valeur  nonoioale;  ^tonn^de 
la  r^istance  passive  des  commer^ants 
qui  refiisaient  de  recevoir  au  cours 
officiel  ces  signes  repr^ntatifs ,  il 
ordonna  que  Timp^t  d^  douanes  serait 
pay^  en  especes  etrangeres,  et  cela  en 
les  taxantau-dessous  du  cours.  II  serait 
superflu  d*jigouter  qu*il  fallut  bient6t 
abaodonner  des  mesures  plus  funestes 
que  ne  T^tait  le  mal. 

II  avait  affects  T^nomie  pour  faire 
la  censure  des  prodlgalit^s  de  Cathe- 
rine ;  il  8*en  tourta  ^ur  les  surpasser. 
Les  palais  quit  habitait  if avaient  pas 
one  issue  qui  ne  fOi  connuedes  courti- 
sans  de  sa  mere ;  il  voulut  se  construire 
une  demenre  moins  accessible,  etc*est 
BUT  le  plan  de  la  r^idenoe  favorite  de 
Fr6d^cqu*ilfit'^leverle  palais  deSaint- 


MidKl.  On  y  travaillatiiiitet  jour;  on 
edt  dit  qu'jl  dtait  pvess^  d'achever  son 
tombeau. 

Rien  ne  ranr^ail,  ni  les  difficulty 
ni  ia  d^ipense,  lorsqu*!!  s'agissait  de 
8«lisia»e  une  faataine : «  il  eut  oelie^ 
dit  fabU  George! ,  de  planter  une 
double  rang^  d'arbves  dans  une  eten- 
due  d'une  demi-lieue  environ,  a  la 
proMfniledesanMraut6s.  La  terve  ^tait 
eouvene  de  glace,  et  gd^e  h  une  .pro- 
fondeur  de  plusieurs  j)ieds....  Paul 
dit ,  et  oomme  h  sa  voix  les  t^kes  rases 
se  sont  aCfiiblees  de  queues  postiches, 
la  tecne  nue  et  comme  paralysito  par 
les  atteintes  de  4*atinospbdre,  va  se 
rev^ir  d'une  vegtotion  adulte.  Des 
arbres  de  quinse  a  vingt-cinq  pieds  de 
bauteur  seroot  arracbes  au  moyen  de 
prtoutions  et  de  d^penses  infiqies, 
pour  toe  replants  pkis  laborieuse- 
ooent  encore  avec  la  terre  du  sol  d*oii 
on  les  aura  tires.  Pour  creuser  les 
fosses  destinies  k  les  reeevoir,  on  em- 
ploie  la  hache ;  puis ,  pour  ouvrir  au 
ter  une  voie  plus  fiacile,  on  allumera 
de  grands  feiu  ^[ui  feront  dueler  la 
terre....  II  fallait  toute  rautorit^  im- 

{^driale  pour  faire  executer  de  pareils 
ravaux ;  dix  miile  ouvriers  v  etaient 
journellement  emplov^.  L*heritier  du 
trdne  ^tait  charge  d^en  hUter  Texecu- 
tion.  Les  arbres  ont  ^t^  dtousin^s  et 
replantds ;  les  promenades  ont  ^  sa- 
biees  et  environn^  de  gazons  pris 
sous  la  neige;  les  barricades  et  les 
bancs  ont  ete  poses  et  peints  dans  Tes- 
pace  de  trente  jours,  terme  assign^ 
par  Pempereur.  » 

Nous  regrettons  de  consigner  dans 
une  ceuvre  ^rave  des  details  peu  di- 

fnes  de  Thistoire;  mais  le  r&ne  de 
aul  n'est  gudtre  qu*une  suite  d'actes 
aussi  bizanres,  quoique  moins  inof- 
fensifs;  on  pent  du  moins  en  tirer 
une  le^n :  c  est  que  le  gouvernement 
qui  remet  k  la  disposition  d*une  seule 
vplont6  les  destinees  de  tout  un  peu- 
pie,  adopte  on  subit  les  chances  du 
bien  et  du  mal ,  dans  la  m6me  mesure 
que  le  coniporte  rjnfiimit^  de  la  na- 
ture hifmaine. 

Cette  coivonne,  qu*avait  port^  Ca- 
therine, Paul  la  trouva  trap  petite  et 

1. 


88S 


L'UNIVERS. 


trop  Ifig^re  poar  iui ;  il  affecta  d*ou- 
blier  tout  ce  qu*dle  jrrnt  rattaeh^de 
glorieux.  La  magnifioenoe  de  oelle 
qa*il  commanda  pour  la  solennit^  de 
son  aacre,  provoqua  des  rapproche* 
ments  qui  n'etaient  pas  ii  son  avantage, 
et  les  libtolit^  qu'il  r^pandit  h  oette 
occasion  rappelaient  ces  paroles  de  sa 
mere :  Je  suis  venue  pauTre  en  Russia, 
maisie  m*acquitte  envers  Tempire :  la 
Grimee  et  la  Pologne  sont  la  dot  que 
je  Iui  laisse.  Le  oouronnement  se  fit 
avec  pompe  dans  Tancienne  capitale. 
On  porte  ft  i^res  de  cent  mille  le  nom* 
bre  de  paysans  qu'il  distribua  h  quel- 
ques  seigneurs;  il  r^pandit  avec  la 
ro^me  profosion  Tor  et  les  f^veurs  de 
toot  genre,  r^compensant  comma  il 
s^vissait,  sans  discernement  ni  me- 
Mire.  Cest  h  cette  ^)oque  qu'une  pas- 
sion ,  dont  nous  parlerons  plus  tard , 
etqui  eut  des  suites  funestes  pour 
lui*m6me,  d^veloppa  dans  le  ooeur  de 
Paul  le  germe  des  plus  ^tranges  in- 
cons^enoes. 

Cependant  ces  depenses  excessives 
Tobligerent  h  recounr  h  des  mesures 
oppressiTCs;  il  doubia  la  capitation , 
prelevant  ainsi  sur  la  masse  m^n- 
tente,  de  quo!  faire  face  h  ses  largesses 
capricieuses.  D6jik,  pour  arr-^ter  les 
murmores,  il  avait  restreint  aux  seuls 
cas  qui  n'entrafnaient  pas  la  d^ada- 
tion ,  le  droit  qu 'avait  la  noblesse  de  ne 
pouvoir  6tre  diAti^  oorporellement. 
Dans  le  but  louable  de  r6primer  les 
nombreux  abus  commis  en  son  nom , 
il  avait  promis  d*8ccueillir  toutes  les 
suppliques  de  ses  sujets ;  ceux  qui  Fen- 
touraient  craignirent  les  effets  d'une 
telle  correspondance  entre  les  suiets 
et  le  monai^ue ;  on  fabriqua  des  let- 
tres  inconvenantes ,  et  sous  pr^texte  de 
simpliSer  cette  tlicbe  laborieuse,  les 
reponses.  k  ces  petitions  furent  impri- 
mees  dans  les  gazettes.  C'etait  d^i- 
sner  le  plslienant  a  la  veneeance  de 
Paccus^ ;  bieotdt  les  r6clamations 
cessment.  Nous '  ne  rapporterons  pas 
toutes  les  anecdotes  qu^on  a  recueiliies 
sur  ce  rdgne,  qu'oncroirait  ^re  celui 
d*un  despote  en  dtoence,  si  tant  de 
t^molgnages  respectables  n'attestaient 
qu'il  inftait  h  ces  actes  bizarres  et 


mkne  cruels ,  une  g^n^rosit^  si  ^lev^ , 
qu*on  reste  en  suspens  entre  le  blilme 
et  r^loge.  Cependant  ce  serait  man- 
ner h  notre  t^e  que  de  ne  pas  jus- 
tifies parquelqoes  exemples,  les  juge- 
roents  contradictoires  qu'on  a  port68 
sur  Iui.  Quiconqiie  se  trouvait  sur  son 
passage  devait  s*arrlter  h  IMnstant 
m£me, mettre  pied  k  terre,  s'il  ^tait 
en  voiture  ou  a  cbeval,  ets^exposer, 
queloue  temps  qu'il  fit ,  aux  intempd- 
ries  de  la  saison.  Une  dame  noble ,  qui 
n'avait  pas  aper^u  la  livr6e  imixgriaie, 
fut  arracfa^  de  sa  voiture  et  mcarc^ 
r^e-;  les  domestiques  oui  I'accompa- 
gnaient  furent«faits  soldats ;  la  femme 
a*un  aubergiste,  coupable  du  m£me 
ddit,  fut  en  outre  fouett^  pendant 
trois  jours ,  attendu  qu'elle  n'etait  pas 
noble.  Dans  ses  promenades ,  Tempe- 
reur  ^it  tr^-attentif  It  remarquer 
les  contrevenants  h  ses  oukases  sur 
l*etiquette;  il  les  d^signait  lui-m6me 
^  ses  gardes,  et  les  faisait  arr^ter  en 
sa  presence....  On  c616brait,  selon  le 
rit  romatn ,  un  service  en  I'honneurdu 
due  de  Wurtemberg ,  son  beau-p^re. 
Paul ,  croyant  ne  pouvoir  entrer  sans 
p^h^  dans  une  ^lise  catholique ,  se 
tenait ,  pendant  Toffice ,  en  dehors  de 
la  porte  principale,  k  la  t^te  de  ses 
grenadiers.  Tout  h  coup  son  cbeval , 
excite  par  le  froid  extreme ,  s'emporte, 
passe  et  repasse  h  travers  la  foule, 
oui  se  decouvre  et  s*tncline  d^  que 
ranimal  s*approcbe  d'elle.  Un  ^oupe 
qui ,  oar  son  eloignement,  croyait  pou- 
voir echapper  sans  danger  k  la  genu- 
flexion de  rigueur,  attira  Tattention 
de  I'empereur.  Paul  s'irrite  de  ce  qu'il 
appelle  une  manifestation  s6ditieuse. 
Tous  les  d^Iinquants  sont  conduits  h 
la  maison  d*arr£t.  lii ,  on  fouette  pen- 
dant trois  jours  les  roturiers ,  on  d^- 
{;rade  les  nobles ,  et  Ton  fait  soldaU 
es  ofQciers.  La  nitee  du  vice-presi- 
dent de  Tacad^mie  fiit  sur  le  point 
d'encourir  un  traitement  non  moins 
humiliant ;  grdce  au  credit  de  son  on- 
de ,  elte  esquiva  la  fustigation ;  toute- 
fois  elle  et  sa  tante  subirent  une  deten- 
tion de  huit  jours  ^  dans  une  maison 
publique ;  la  premiere  pour  avoir  man- 
que 5  Tempereur,  celle-ci  pour  avoir 


Q^,:y^,....^  /  f^^4^^.^  o >/.,}..„ 


RUSSIE. 


309 


mal  iieve  sa  niece.  Quelif  iiefois  les 
cfa^timents  qall  fiaiisait  infliger^taieni 
tds  qi/oQ  ne  savait  s'il  foUait  les  attri-. 
boer  k  un  acc^  de  fotie  ou  a  un  m^- 
pris  pour  rhumanit^,  d^aigneux  de 
toute  pi^cautioo.  II  fit  fustiger    en 
preaenoe  du  peujile  un  cheval  qui  avail 
DTondi6  sons  lui ,  et  personne  ne  se 
meprit  sur  le  sens  de  cette  correction. 
L*omi8sion  dea  moindres  formality 
cfaoquait  son  orgoell ;  il  faillit  rompre 
arec  le  roi  de  SuMe ,  parce  que ,  dans 
un  message  de  ce  prince «  on  n'avait 
pas  observe  la  fomuile  officielle  de  ses 
litres.  Voild,  s'^ria>^iI  en  ouvrant 
cette  lettre,  un  roi  qui  ne  sait  pas 
teire ;  et ,  sur-le-champ « il  r^igea  un 
oukase  qui   rdglait  minutieusement 
cette  puerile  matiere.  Le  baisennain « 
haute  fareur  imp^riale ,  avait  ses  dan- 
gers :  il  failait  y  apporter  une  atten- 
tion respectueuse,  comme  s'il  se  fdt 
agi  d*un  acte  reiigieux.  C'est  surtout 
dans  k  militaire  que  Fempereur  se 
eomplaisait  a  etaler  tout  le  luxe  de  ses 
oonnaissances  de  details.  L'uniforme 
qu'aTait  introduit  Potemkin  se  trou- 
vait  repondre  tout  k  la  foil  aux  exi- 

fences  do  servioe  et  h  celles  du  climat. 
^aul  y  substitua  Tancien  uniforme  al- 
lemand.  Force  fut  done  aux  soldats 
de  prendre,  en  mdme  temps  que  I'ba- 
bit  Prussian ,  le  cbapeau  h  comes ;  et, 
comme  ils  portaient  les  cheveux  courts , 
de  s*adapter  une  queue  postiche.  Sou- 
vorof ,  qui  avait  tant  de  fois  vaincu 
arec  Funiforme  de  Potemkin ,  se  per- 
mit sur  les  queues  et  la  poudre  des 
plaisanteries  qui  coururent  Farm^e. 
Les  soldats  n^ob^irent  qu'avec  repu- 
gnance; quant  aux  offiders,  tandis 
que  les  uns  aimaient  mteux  quitter  le 
aenrice  que  d'endosser  le  nouvel  babit, 
les  autres  trouverent  dans  leur  sou- 
mission  empress^  un  mode  facile  d'a- 
vanoement. 

Les  manoeuvres  ^taient  la  ^ande 
a£Eaire  de  Paul;  tous  les  matins,  il 
passait'quatre  henres  h  faire  exercer, 
OH  plutdt  a  tourmenter  sa  garde,  bra- 
vant,  sans  pdisse  et  sans  qu'il  pardt 
en  souffrir,  des  froids  de  quinze  h 
vingt  degr6s.  Cdtait  sur  la  place  du 
palais,  et  entour^  de  troupes,  qu'il 


donnait  4cs  audiences ;  les  soldats,  qui 
s'amusaient  h  voir  lea  seif^eurs  ex- 
4K>s^  a  totttes  les  intemperies  d*un 
biver  rigoureux,  appelaieot  ces  ao- 
jdiences  en  plein  air  la  parade  d«  ooor- 
tisans. 

Nous  ne  nous  ^endrons  pas  sur  la 
proscription  burlesoue  des  chapeaux 
ronds,  ni  sur  FouKase  imperial  qui 

firescrivait  d'atteler  les  cbevaux  k  Fair 
emande;  mais  nous  ferons  remarquer 
le  fil  cache  qui  faisait  iouer  tous  ces 
ressorts.  Les  favoris  de  Paul,  erai- 

{^nant  a  touto'beure  d'etre  eux-mdmes 
es  victimesde  ses  emportements.  Fen- 
tretenaient  dans  une  irritation  conti* 
nuelle  pour  achever  de  le  rendre 
odieux  et  ridicule.  Tantdt  c*etaient  le 
peuple  et  Farmee  gui  lui  rqprochaient 
son  online  etrangere ;  tantot  les  bour- 
geois etaient  convenus  de  ne  pas  le 
saluer  en  public;  enfin,  on  Feffrayait 
sans  cesse  d'une  conspiration  perma- 
nente ,  dont  le  but  etait  de  le  d^trdner^ 
pour  mettre  h sa  place  Alexandre,  sous 
la  tutelle  de  Fimperatrice.  De  la  tant 
de  rigueurs  sans  motifs ,  tant  de  me- 
sures  empreintes  d'une  sombre  ni^- 
fiance  et  (run  arbitraire  grotesque ,  qui 
devaient  finir  par  changer  en  dangers 
r^els  les  fantomes  d'une  imagination 
effray^e. 

Cdte  rebellion  qu'on  lui  montrait 
partout,  il  Fattribuait  k  la  contagion 
des  id^es  fran9aises.  L'introductionde 
tout  journal  et  de  tout  6crit  politique 
fran^ais  fut  sev^rement  interdite;  oeux 
qui  en  recevaient  par  quelque  voie  ex- 
traordinaire etaient  tenus  de  les  por- 
ter sur-le-diamp,  et  sans  en  avoir  pris 
lecture ,  a  un  comite  institue  k  cet 
effet;  comme  la  haine  des  chosea 
n*etait  que  cdle  des  personnes,  les 
Francis  venant  de  Fetranaer  furent 
repousses  des  frontieres  :  oientdt  le 
cercle  de  ces  precautions  s'etendit  aux 
etrangers  des  autres  nations;  les  uni- 
venites  d'AUemagne  encoururent  la 
suspicion  de  Paul,  qui  defendit  aux 
Russes,  et  specialement  aux  Gourlan* 
dais  et  aux  Livoniens ,  sous  peine  de 
voir  leurs  biens  confisques ,  d'envoyer 
desormais  leurs  enfants  dans  ces 
ecoles  oorruptrices.  Les  etablissementa 


890 


L'UTtlVERS. 


d'iiBtraetidii  puMiime,  fond^  pdf  Ca^ 
tlierines  ftireht  moarfi^s  dans  oe  sens, 
d  le  d«flpoti6ine  ruflseraeula  d*un  pas 
dang  la  Imrbarie.  Une  triple  oeAsaye 
admimatrative,  aodifeiasfique  el  litt&- 
raire  fot  ^tablie  a  P^tersbourg,  h 
Moaeoa,  k  Riga,  h  Odessa, «C  an  bu- 
reau ceotml  de  la  douane. 

GouMne  pour  protesCer  hautement 
oontre  le  nivelletDent  des  oouditions, 
suite  logkpie  de  T^galit^  des  droits 
civils  proclam^epar  la  rdpoblique  Iran- 
^ise  V II  prit  h  tache  de  reorganiser  le 
privil^e ;  il  orea  une  noblesse  b^al- 
dique  oomme  en  Aliemagne ,  et  ecbe* 
kmna  sa  noblesse.  Pom*  raainfenir  k 
une  plus  grande  bauteur  la  noblesse 
d^extvaetion^,  11  rMuisit  ranobHsse^* 
ment  par  les  rbairges,  pour  elever  une 
barrim  de  pr^ges  entre  le  m^rite  et 
le  privilMe. 

ti  sulGsait  d'dtre  signal^  k  l^empe^ 
reur  eomme  entacb^  de  lib^ralisroe , 
ou  m^e  d'avoir  impn)uv^  cpiel^pieB- 
ulis  de  ses  acles,  pour  encourir  les 
peines  les  plos  sdv^res.  Les  dewt  Mres 
llasson ,  attach^  au  service  russe  de-' 
puis  douze  ann^,fnreiitd^port^;el 
run.  d'eux,  auteor  des  M^inoires  se- 
crets, s'eslvengi  de  ceebAtiment  arbi-' 
traire  par  de&  r^'^Iations  passionnto^ 
S'il  avait  lu  quelques  -  unes  de  ses 
pages  dcrant  des  aoaiteurs  russes ,  on 
oooviendra  que  la  rigueur  die  Paul  ne 
fnt  pas. excessive;  si  les  M4moires  se- 
orets  ont  ^t^  redig^  a6  iruto,  on  a 
le  droit  de  les  soup^onner  d^erag^a- 
tion; 

Les  agents  Grangers  n'^taient  patf 
pins  qae  les  partiouliers  a  Tabri  de 
rhuinear  fantasque  du  monarque.  li 
(It  mettre  h  la  mnliere  un  c^ent  dw 
roi  de  Sardajgne,  et  le  ininistite  de 
r^eeteur  de.  Baviere ,  Maximilien  de 
Deux-Ponts;  le  premier,  parce  qu'il 
GonsetUait  h  son  maltre  de  rester  en> 
paix  avep  la  France;  Taotre,  paroe^ 
que  set  COOT  n'avait  pas  encore  re- 
oonnu  a  Paul  le  titre^de  grand  maltre 
Je  Malte.  Maximiiien  dut  se  prater  h 
oette  fantaisie;  il  retablit  dans  ses- 
Etate  les  commanderies  de  la  langue 
anglo^bavaroise ;  et ,  on  retour  de  cettiS 
nourtmie,  l^i  accorda  au  Ills  afn^ 


de  ce  prfnee  la  main  d'ane  grande- 
duchesse.  Paul  ^tendlt  le  niveau  de 
ses  pu^riies  r^formes  jusque  sur  le  Ian- 
gage;  Defense  ^t  fatte  aur  marehands 
a*ecrire  le  mot  magoHn  sur  leurs  bou* 
tUques,  attends  que  oe  terme,  affecte 
aox  approvisfonnements  de  la  con- 
fonne,  ne  devait  pas  ^tre  prostitn^  h 
des  ^tablissements  mercantlles.  A  itl 
fommie  a»ec  ItbefU  fmpiriaiey  les 
eenseurs  snbstlittadrent  celle^i :  awe 
permUsk)^  impMaie:  le  mot  Hberti 
ne  pu(  tpouvet*  grdce,  malgF6  le  <mali- 
^catiif.  VAvi3  a»  peupto  du  m^ecin 
Tissot  tut  d^flendu  sur  le  motif  que  k 
petq)le  n'avaU  pas:  be9oin  StOim. 

La  oouoe  des  vdtemenis  ne  fat  pas 
\  I'abri  de  oe9  prohibitions'  omlnn* 
Reuses;  on  prosorfvlt  la  vests,  lejpan- 
talon,  le  gtlet  crois^,  les  bottmes, 
etc.,  oomme  des  signes  de  jacobl- 
nisme;  les  anberffistes  dvrent,  sous 
peine iPamende,  denoneer  les  centre- 
venant&  Un  tapissier  fran^is ,  occup6 
k  disposer  des  tentures  de  deuil  dans 
r^ise  catholique ,  oh  Ton  allait  c^le- 
brer  le  service  funebre  de  I'ex-roi  de 
Pologne,  Alt  fouettd  au  milieu  mdme 
du  tempie,  paroe  que  son  costume 
s'tortMt  des  erdonnanoes. 

Le«  ^migr^,  qui  poussaient  Tem- 
pereur  I  Mre  la  guerre  aux  Francis, 
attribuaient  le  pr<N^  des  id^  r6vo- 
lutlcmnaives  au  relachementdes  croyao- 
ees  religieuses :  Paul  prit  en  main  les 
ittt^r^s  du  ciel ,  et^  pr^tendit  nx>raH- 
ser  les  strangers  qui  se  trouvaient  dans 
son  empire  par  des  oukases  r^glemen- 
taires.  II  iniposn  aux  catboliques  Fobli- 
gation  de  faire  leurs  pdques,  et  aux 
prdtres  oelle  de  n'aeeorder  Tabsolution 

3u*aux  penitents  en  totde  grdee.  Pen^ 
ant  quelque  temps,  la  aiesse  fot  de 
rigueur;  et  oomme ^  en  gln^ral,  les 
^igr6s  eux*mlraes  ne  prdchaient  pas 
d*exemp]e,  Paul  exigea  qu'ils  allassent 
a  F^ise,  deux  k  deux,  entre  une 
double  baie  de  soldats; 

A  IHistsnt  mtoe  oA  ii  allait  con- 
traeter  une  aUtance  avee  les  Turcs ,  il 
ressuscitait  Tordre  de  Malte ,  et  nom- 
mait  grand'-croix  Anna  Lapoukhin ,  la 
oomtesse  Litta,  et  son  valet  de  chaiii- 
bre  Koutaitzof ,  Turc  de  naissanee ,  et 


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RUSSI£. 


parvemr  oar  son  adresse  aux  premieres 
dignit^s  ae  f  empire. 

K  travers  tant  de  ricficnffes'ef  d^bri^ 
gittaVite ,  on  retronrait  sonteiA  des 
sailUcs  de  grandenr  ct  de  g^n^rosit^ : 
to  princes  de  la  maison  de  Bourbon , 
anxqnds  il  donnait  un  asfle  h  Mittau , 
rooevaleitt  de  lai  une  pensfon  de  denx 
cent  vtnWe  nnibies  (enrtron  sfr  cent 
miRe  francs);  et  un  grand  nombre 
d'6nigres  obtinrent  de  sa  muniflcenoe 
des  en^lois,  des  ferret,  det  paysans 
et  des  secours  en  argent :  mais,  si  sod 
premier  mooremetit  etaft  d'un  sottve* 
rain  magnanime,  rarement  daiienaft'41 
aooompagner  le  bienfait  deoes  fornnes 
qnf  en  doublent  le  prix. 

Paoi  a^ait  mmpu  le  traits  de  snb^ 
sides  contracte  entre  Catherine  et  PA  n« 
gleterre ,  non  parce  qn'il  ^tait  phis  fa^ 
vorablement  dispose  qm  sa  m^re  ik 
r^ard  de  la  France ,  mais  unigueraent 
pour  ne  point  parattre  contmuer  le 
r^e  precedent.  L'ann^e  suivante 
( 1799),  sa  politique  prit  un  caract^re 
pins  traucb^. 

Poor  se  rendre  oompte  de  la  con- 
duite  de  Pemperenr  dans  ses  rapports 
avec  les  autres  puissances ,  il  est  mdis- 
pensable  de  ne  pas  perdre  de  vue  que 
ce  prince  resta  oonstamment  sous  nn- 
flaenoe  de  deilx  idto  :  la  premi^, 
que  trente-dnq  ans  de  pers^utions 
lui  aTaient  inspir^e,  c'^H  de  d^re- 
lop|)er  les  forces  de  la  Russie  par  Vor-^ 

Sanisatfon  mifitaire,  sans  s'inqui^er 
e  ces  princi|)e8  ci vilisateurs  dent  le  ja- 
oobinisme  lui  paraissait  le  dernier  ter- 
me;  etroncon^oiteem^prisdes  moyens 
mis  en  onivrea  r^poqueod  il  avait  tanf 
souffert,  qui  se  confondait  avec  le  res- 
sentiment  qu'il  conserrait  oontre  ses 
opjpi^esseurs;  la  seconde,  c*^ait  une  r^ 
soratlon  fixe  de  rendre  on  nouvel  ^lal 
aux  cboses  que  la  involution  fran^aise 
s*teit  empress^  d*efibcer  on  d'avilir. 
Malgr6  les  sujets  de  plainte  que  In 
donnerent  plus  tard  ses  alli^,  jamais 
il  ne  se  fifH  idpproch6  de  lliomme  qui 
8*etait  empai^  des  destine  de  la 
France,  s*!!  tt*edt  pas  pressenti  en  lut 
le  restaurateur  futur  des  privities 
monarduques.  Le  mauvais  ^tat  des 
fioanoes  Hait  un  obstade  a  ses  plans; 


d'un  c6t^,  sa  nobtessil  MiMe  par  1^ 
luxe;  de  Pa«fre,  lev  d^penses  qn'exi^ 
g^if  rexpdrfHion  mti%  m^itaft,  M 
firent  prater  Toreme  aux  ofifres  de 
TAngleterre;  avec  Pov  de  la  Grande^ 
Bret^e,  ilpouvaitftnderunebanqoe 
pour  venir  an  seeour*  des  seigneurB , 
et  donner  a  I'arai^  exp^dittonnairs 
une  importance  qu-il  jogeait  d^islvt. 
II  entra  done  (ki^  la  secodde  coalition; 
et  Ton  Tit ,  par  le  jeu  brniri^  des  int^« 
rfits  les  moins compatibles ,  la  Russie, 
la  Porte,  TAntriche,  la  Saxe,  enfin 

fresque  toute  PEuvope,  moins  la 
^nifise,  se  jetsr,  k  irinstigation  de 
FAndeterre,  dans  ttae^lutte  oik  r^er- 
gie  defait  tridmpherdu  nond)re. 

LlimbaflBadear  Repnin ,  apres  avoir 
6chou6  h  Berlin ,  atait  r^ussi  h  Vienne 
eten  Saxe;  le  plan  d'invasion  ^it 
trac^.  Sur  le  point  d'toe  attaqu6e,  la 
France  prit  roffensive;  les  l^i^ions  ri^ 
nublicaines  envahirent  THd^tie,  dont 
la  partie  nn^ridlonale ,  qui  ferme  le  Ty- 
rol,  leur  permettait  de  porlier  du  se* 
CDurs ,  sekm  que  Fexigeraient  les  dr* 
Constances ,  a  I'armde  du  Danube  oa  a 
celle  dltaKe.  Quekpaes  revers  reduist* 
rent  les  Francats  a  la  dtfensire,  de- 
venue  phis  diflidle  pw  I'^ndue  de  la 
Ugne  d'op^rations. 

L'arm^  qui  avait  US  nswimbl^ea 
Gallieie,  par  ordre  de  Catherine,  en- 
tra  en  Allemagne  sous  les  ordres  du 
g^ntol  Rosemberg;  rorgueil  germa* 
nique  r^pugnait  k  passer  sous  le  com- 
mandement  d^un  chef  obscmr;  Paui 
dut  se  rendre  aux  rMamattons  de  sea 
alK^,  et  au  voeu  g^6ral  des  Rnsses, 
qui  d^gnait  SouTorof.  Ce  vieux  ca- 
pitaine  sortit  de  sa  retraite  pour  ailer 
se  mettre  h  la  t£tedes  finrces  russes  et 
atitrichiemieai  Nous  avons  dejii  pari6 
du  caractire  de  Souvorof,  et  du  rdle 
bizarre  qu'il  s'toit  impost  pour  s'em-^ 
parer  de  la  oonfianee  au  soldat  rusae. 
Certes,  si  ces  biaarreries  n'eussent 
point  M  aocompagn^es  d'un  m^ito 
snp^rieur,  elles  ne  lui  eussent  ¥810* 
qn^nne  deplorable  c61^rit6^  mais  dans 
un  homme  de  ce  genie ,  il  faut  les  ^tu- 
dier,  sinon  en  ellesi^n^ineS,  du  moins 
dans  la  part  d'influence  qu'elles  ont 
eue  sur  des  faits  dignes  de  toute  no* 


L*UM1V£AS. 


tre  attantioD.  Pour  appuyer  ropinion 
line  nous  avous  toiise  au  sujet  de  la 

Kr^tendue  originality  de  ce  ^nd 
omme  de  guem,  nous  poumons, 
entre  autres  t^moignajges,  citer  oelui 
d'un  -vieil  <»fficier  qui  fut  loogtenips 
son  chef  d*^t*niajor,  et  qui  est  rap- 
ports dans  le  voyage  du  due  de  Ra- 
guse.  En  efifet,  ses  actes  les  plus 
bisarres  sont  empreints  du  m£me  ea- 
ract^,  et  tons  paraisseot  tendre  k 
inspirer  k  ses  troupes  un  devouement 
fanatique «  en  m£me  temps  au*ils  leur 
donnaient  Texemple  des  plus  dures 
privations.  « II  outrait  la  sSverite  de 
la  vie  militaire,  d^^  si  dure  cbez  les 
Russes.  M^me  au  tort  de  Tbiver  il  se 
Citaait  arroser  d'eau  froide.  Souvent 
on  le  voyait  monter  a  poil,  en 'che- 
mise, un  cheval  de  Cosaque.  Quelque- 
flMs  iJ  sortait  nu  de  sa  tente  en  con- 
trefaisant  ie  chant  do  coq;  c'Stait, 
pour  TarmSe ,  le  signal  du  veveil ,  de 
fa  marche  ou  du  combat.  Dans  ses  vi- 
sites  aux  bdpitaqx ,  il  Cusait  donner  de 
ia  rhubarbe  et  du  sel  aux  soldats  qu*il 
jugeait  atteints  d*un  mal  r6el ,  et  la  bas- 
tonnade^  tons  les  autres,  oubien  iimet- 
tait  tout  lemonde  k  ia.  porte,  disant  qq'il 
n'Stait  pas  permis  aux  soldats  de  Sou- 
vorof  d'etre  malades.  On  se  rappel!e 
que  le  marScbal  Munich  avait  em- 
ployS  avec  sucoes  un  rem^e  bien  plus 
rigooreitx.  Personne  n*osait  se  plain- 
dre,  car  le  gSnSral  Stait  aussi  dur  pour 
Iui*ro6me  que  pour  les  autres.  Sa  table 
teit  si  frugale  que  les  ofliciers  les  plus 
sobres  s'en  Stonnaient.  Il  se  fiaisait 
donner  k  loi-mSme,  au  noro  du  mar6- 
chal  Souvorof ,  Foidre  'd'interrompre 
ses  repas  ou  son  sommeil ;  il  faut  qu  on 
lui  obeisse ,  disait-il  t  disciplinant  jus- 
qo'^  latiature  physique  pour  la  soumet- 
tre  k  une  inflexible  volontS ;  aussi  ja- 
mais arm^B  n'obSit  plus  aveuglement , 
comme  jamais  confianoe  ne  tut  raieux 
mSritSe.* Souvorof  d^aignait  le  luxe; 
en  eampa^ne,  sa  kibitka  (t)  lui  tenait 
lieu  d*habitation;  quand  il  s'arrangeait 
d'un  autre  logement,  ses  officiers 
avaient  soin  d*en  faire  disparaitre  les 
glaces.  Souvent  m^me  il  no  voulait 

■   Espcre  do  chariot. 


souffrir  ni  portes  ni  fendtres,  atteodu 
ou'il  n'avait  ni  peur  ni  froid.  Cepen- 
oant  il  niODtraitavec  complaisance  les 
bijoux  et  les  diamants  qu*il  avait  reoua 
de  Catherine;  pourquoi  notre  mere 
me  les  a-t-elle  donn^,  demandait-il  k 
Ses  officiers ,  et  il  faliait  rSpondre  sans 
bdsiter.  II  comprit  que ,  pour  suppor- 
ter avec  Constance  les  fatigues  et  les 
privations  de  la  guerre,  le  soldat  a 
besoin  d'un  stimulant  moral  ou  reli- 

Sieux;  la  gloire,  ce  puissant  mobile 
es  hommes  libres ,  est  une  idte  que 
ne  pent  comprendre  la  servitude,  et 
qui ,  une  fois  comprise ,  la  dStruirait 
a  rinstant  m£me ;  c'Stait  done  au  sen- 
timent religieux  que  Souvorof  devait 
s^adresser;  il  s'agenouillait  devant  les 

Sr^tres,  et  leur  demandait  la  bSoS- 
iction ;  c*etait  pour  donner  k  sa  mis- 
sion un  caractere  de  saintetS,  qu'il 
ne  parlait  des  Francais  que  comme 
d'un  peuple  d'impies  *que  Dieu  avait 
resoiu  d*extetminer;  mais  quand  iJ  ne 
s*adressait  plus  au  fanatisme  de  ses 
troupes,  il  parlait  des  qualites  militai- 
res  ae  ses  ennemis  en  homme  digne 
de  les  appr^ier. 

Les  Francis,  qui  s^attendaient  k 
trouver  dans  les  Russes  une  race  gi- 
gailtesque ,  furent  surpris  de  n^avoir  k 
combattre  que  des  hommes  ordinaires ; 
de  leur  c&U  les  Russes  apprirent  a 
respecter  I'humanite  de  ceux  qu*on 
leur  avait  depeints  comme  des  bri- 
gands; les  pouvoirs  politiques,  pour 
pousser  les  hommes  a  s^entr'^orger, 
sont  oblige  de  recourir  k  la  deception 
et  au  mensonge,  tant  ils  reconnaissent 
eux-m^mes  la  faiblesse  des  motifs  qui 
les  determinent. 

Souvorof  s'etait  reuni ,  prcs  de  V^- 
rone,  a  Tarm^  autricliieune,  qui  ve- 
naitde  battre  Scb^er.  L*arm^e  austro- 
russe  cooiposait  un  effectif  de  quatre- 
vingt  mille  liommes.  Les  debris  de  Tar- 
mee  frangaise,  dont  le  Directoire  avait 
conGe  ie  commanderaent  a  Moreau , 
ne  purest  tenir  contre  des  forces  si 
im|)Osantes.  La  defaite  de  Cassano , 
malgre  toute  Thabilet^  du  gi^neral  re- 
pubticain,  fut  une  consequence  ne« 
cessaire  du  desastre  de  Magnan.  1^ 
belle  rrsistaiicc  des  Francais  a  Bassa- 


RU$SIE. 


gMiio  prouva  aux  Rosaes  k  qudlea 
oondilions  num^riques  Ua  pouvaient 
dp^rer  la  vietoire. 

Apres  oet  afantage,  Sottvorof  se 
)porta  rapidement  sur  Turin,  tandis 
one  Moreau ,  r6duit  h  qoelques  miJlien 
dlKMnnies  ,  ossayait .  d'inquieter  aa 
raardie,  sana  a'toirter  des  poailions 
af aDtaseuses  qu'il  oocupait. 

Maodonald  venait  d'eotrer  eD  Loin- 
bardie,  li  la  t^te  de  trente-cinq  mille 
bomines  ;  les  suoo^  qu'il  avait  obte* 
BOS  Itti  inspir^rent  una  confiance  te« 
ntaiiTe  ;  il  crat  pouroir  vaincre  arant 
d'aToir  op^r^aa  ionction  avec  Moreaa. 
A  la  nouvelie  de  cette  marcba  victo* 
rieuse,  Souvorof  rassemble  ses  troupes 
arec  une  rapidite  ^onnaote;  il  eut 
bientot    rcjoint  le  g^n^al  autrichien 
Mdas ,   sur  les  rives  de  la  Trebbia. 
PiiHis  a'entrerons  pas  dans  les  details 
de  oeile  joum^  memorable;  nous 
nous  Gpntenterons  de  dire  qu*on  se 
battit,  da  part  et  d*autre,  avec  une 
bravoare  ^ale;  Tann^e  austro-russe 
perdii  plus  de  monde  que  eelle  de  Mac- 
doiiald ;  oiais  T^lan  des  troupes  r^u- 
blieaines  ne  put  vaincre  riromuaole 
tenacity  des  ennemis.  Durant  toute 
use  joum^,  le  combat  dura  avec  le 
mtoie  acharnement;  les  Busses  mon- 
tr^nt  oette  opinidtret^  invincible, 
cette  discipline  et  oe  mepris  de  la 
iBort  qui   les  avaient  d^j^  rendus  si 
redoutables;  serrant  leurs   rangs  k 
roesure  que  le  feu  les  ^aireissait, 
ils  repiduss^rent  deux  fois,  au  del^ 
du  fleuve ,  les  Francais  qui  ie  repas- 
serent  deux  fois.   lie  lendemain  la 
batallle  recommen^ ,  et  si  la  retraite 
de  Macdonald  n'eilt  appris  k  Souvorof 
qu*il  ^tait  vainqueur,  les  succes  furent 
tenement  balanc^  jnsqu*au  dernier 
moment,  que  le  nombre  seul  pouvait 
fieiife  augurer  de  Tissue  d^nitive  de 
oette  lutte.  C'est  la  que  fut  presuue 
enti^ment  d^truite  la  l^ion  polo- 
naise ,  command^  par  le  brave  Dom- 
brovski.  La  retraite  des  r^publicains 
fut  plus  d^sastreuse  que  ne  Vavait  €t^ 
le  combat.  Souvorof  repandit  des  pro- 
clamations pour  soulever,  contre  les 
Francais,  les  Toscans  et  les  Liguriens. 
Ce  cAampion  d*unc  religion  schisma* 


tiqne  armait  les  populations  au  nom 
de  la  foi  ortbodoxe,  et  tandis  que 
Moreau  se  retirait,  et  oue  Macdonald 
^tait  repouss^ ,  la  Lomoardfie ,  la  Tos- 
cane  et  le  Pi^ont,  harcelaient  sur 
tons  ks  points  nos  corps  d^rganis^. 
Au  lieu  de  poursuivre  ses  avantages , 
Souvorof  perdit  un  temps  pr^ieux  i 
investir  quelques  places  fortes  dans  le 
Pi^mont.  Les  Francis  firent  un  der- 
nier effort  pour  conserver  celles  qui 
vMstaient  encore ,  et  c'est  alors  que 
Joubert  s'avan^  au  delji  de  Novt 
avec  un  corps'de  trente  mille  bommes. 
L'arm^  austro*russe  etait  Aijk  ras- 
semble et  pr^te  k  le  recevoir.  «  Ge 
ne  fut  pas,  comme  on  I'a  imprim6 
cent  fois,  en  chargeant  k  la  t^te  des 
grenadiers  que  fut  tu^  Joubert;  ceftit 
en  allant  reconnattre  Tennemi ,  et 
avant  mSme  que  la  batallle  fdt  en- 
aag^e.  II  p^rit  par  la  balle  d'un  tirail- 
wur...  (*).  Moreau,  rappel6  par  le  Di- 
rectoire  k  la  tdte  de  Tarmde  du  Rhin , 
prit  le  commandement,  et  perdit  cette 
sanelante  bataille  ou  les  vainqueurs 
soufirirent  plus  que  les  vaincus.  Avant 
Taction,  Souvorof  avait  dit,  en  par- 
lant  de  Joubert:  CestunJotwenceaUy 
aUons  bd  donner  une  lepon.  La  for- 
tune lui  vendit  cbdrement  Taccomplis- 
sement  de  cette  propb^tie. 

Paul,  k  la  nouvelle  de  tant  de  sue- 
0^',  d6cerDa  k  Souvorof  le  surnom 
d'ltalique;  il  ordonna  que  d6sormais 
on  rendratt  au  g6n^ral  victorieux  les 
m^mes  honneursqu'^  lui-m^me;  et, 
rabaissant  Tdloge  par  la  bizarrerie  de 
la  forme ,  il  prescrivit  par  un  oukase, 
ou'on  eiU  it  reqarder  Souvcrof  comme 
le  plus  grand  capiUUne  de  tous  lea 
temps  et  de  Urns  Us^pays  du  monde. 
II  resolut  de  eonsommer  Tan^ntisse- 
ment  de  la  republique:  Nous  avons 
resoluy  dit-ildans  son  manifeste,  nous 
etnos  cUUis ,  de  d^truire  le  gouverne- 
ment  impie  qui  domine  en  France. 

Les  pr^paratifs  r6pondaient  a  la  dif- 
ficult^  de  Tentrepnse;  les  escadres 
russes  et  turques,  dirig^s  par  les 
Anglais  qui  aVaient  vaincu  k  Aooukir, 
s'emparaient  des  ties  loniennes,  et 

(•)  Rj^neanx  et  Cliennrchol. 


tt4 


LTNIVKKS. 


ibodaieiit  line  r^Hibltqtie  k  la  voix  de 
deux  Bouverains  despotes.  Une  autre 
flotte  venait  jeter  des  bataHkons  mos- 
eovites  sur  le  sol  de  la  Hollande.  Peox 
armees  russes  traverserent  la  Pologne, 
la  Bohdoae ,  la  Moravie  et  le  sua  de 
TAIlemagne^  pour  p^netrer  sinaulU- 
n^iii^t  en  France  par  Test  et  le 
midi.  Celfe  qui  marchait  sur  le  RJun, 
forte  de  plus  de  quarante  miJle  hon»* 
mes,  6tait  oomposee,  en  grande  par- 
tie  ,  des  soldats  qu*avait  fbrmds  P»* 
temkin  et  des  restes  de  Fannie  de 
Perse.  Cette  arro6e,  qu'on  pouvait  r&> 
garder  oomme  T^Iite  des  troupes 
russes^  6tait  sous  les  ordres  de  Kor^ 
sakof ,  qui  devait  agir  de  concert  avee 
Tarchiduc  Charles. 

Au  moment  ou  elle  venait  d^entrer 
en  Allemagne ,  Jourdan  6tait  battu  h 
Oztraeh ,  par  les  Antricbiens ,  et  Mas* 
s^a,  recalant  devant  rarchidue  vic- 
torieux,  ^tait  forc6  de  repasser  l» 
Limmat.  Les  Autricniens,  mattces  de 
Zurich,  se  trouvaient  dejik  aa  centiv 
de  THeiv^ie. 

Les  Russes  r^amerent  Thonneur 
d*occuper  les  avant-postes.  Korsakof 
afficha,  dans  les  .contestations  qui 
s'^leverent  k  oe  sujet ,  une  hauteur  qui 
devait  blesser  Tarchiduc ;  mais  bien* 
t6t  ce  dernier  fut  oblige  de  se  porter 
sur  Philisbourff,  one  menacait  une 
forte  colonne  repubticaine. 

Les  coalis^s  avaient  r^solu  de  sni- 
vre  un  nouvean  plan  d*op^rations  ^ 
d'apris  lequd  tous  les  Russes,  sous 
les  ordres  de  Souvorof,  agiraient 
en  Helv^tie,  tandis  que  les  Autri* 
chiens,  sous  le  oommandement  de 
M^las,  expulseraient  les  Fran^ais  de 
ritalie,etque  le  corps  du  prince  Char* 
les  les  attaquerait  sur  leurs  frontieres 
rb^nanes.  L'arcbiduc  saisit  sans  doute 
avec  empressement  Toocasion  d'^ap- 
per  aux  exigences  hautaines  de  Korsa- 
kof;  mais  il  etait  trop  bon  g^^l 
pour  eompromeltre^  conune  on  Fa 
avanc^,  le  succ^  de  la  caropagne  par 
un  motif  d*amour-propre. 

Jl  n'etait  rest^  avec  les^  Russes  qu'un 
corps  peu  nooibreux  d'Autricbiens , 
qui .  reuni  aux  Suisses  m^nteots  ou 
entraln^s ,  forma ,  sous  le  oommande- 


ment du^tetal  HlHlze»  la  droHe  de 
tour  amne. 

Le  3  vendemiaire  (14  septembt^ 
1799),  les  Fraofals  desoendifent  des 
hanteurr  voisines  et  eagaekient  Tac- 
tion. Les  Rosses,  ^dalias  I'abord  par 
un  feu'terribto,  oM^rsot  a  l*imp6tuo- 
ait^  d'on  premiei  ehoc;  nais  bientdt , 
rallies  entre  tow  camp  et  1»  fleuve , 
ils  tinrent  ferme  el  plvbenl  encore , 
pour  se  rattier  de  nonveau  denri%re 
leurs  teotes.  Uty  Ito  ^uisi^nent  tours 
ftiberaes  et  mouitirent  aligniSs.  La 
irofte  I  compost  en  gnande  partie  de 
stipeaaiaires  suisses,  opposa  une  r6- 
sistanee  raoina  vive.  Toum^  dds  to 
eommeneement  de  Paction ,  eUe  fut 
bienl6t  raise  en  d^sonirs,  et  permit 
aux  vainquenrs  de  se  porter  vers  le 
centre,  on  les  Rosses  se  dtfendaient 
aviec  une  Constance  bdroique.  Les  ca- 
Boniers,  fiddes  k  ieur  serment,  se  fai- 
saient  tuer  sor  leurs  pieces.  Bient6t 
Korsakctf  n'eut  plus  d'autre  ressource 
que  de  former  un  batailton  carr6  des 
quinze  mtlle  bomnies  ^i  lui  restaient ; 
lartillerie  togere  atlaqua  et  mit  bien- 
tdt  en  ruine  ce  bastion  vi^ant  qui  pi^ 
sentait  de  tou&  c6Ub  ua  front  de  fer. 
Des  files  enti^res  tomba tout ,  mavquant 
le  siilon  du  bonlet;  des  rangs  entiers 
^tatottt  renvers^  par  les  itoncs.  Con- 
verts du  sang  de  tours  frires,  lev 
Russes  s'alignaient  comme  k  la  ma- 
noeuvre, et  rempiissatont  inoedsam- 
ment  ces  vides  pour  tomber  k  tour 
tour,  Quand  les  g^B^ranx  r^publicains 
eurent  labour^  de  Ieur  formidabto  ar- 
tillerie  tout  Tespace  que  couvraient 
ces  braves  Rosses,  ils  ordonnerent 
une  aitaqoe  gi^n^ale  au  pas  de  charge, 
et  to  victoiM,  encore  disput^e,  rat 
enfin  complete.  Zurich ,  dont  Korsakof 
avait  fait  son  quartier  g^^ral ,  toa 
ma^asins ,  les  pipages ,  unepartie  du 
train  de  rartilterto,  tomberent  ati 
pouvoir  des  Francis.  Le  lendemain , 
les  Russes,  quiavatent  re^o^uelques 
renforts ,  riteist^rent  encore  lusqu'au 
milieu  du  jour.  lis  furent  acneves  en 
detail ,  et  taiiles  en  pieces  par  petite 
pelotens.  Leor  inflexible  courage  ne 
se  dtoentit  pas  un  instant;  pas 
un  ne  se  rendit  quMl  ne  fAt  blesse  ou 


R17S»E. 


89ft 


(tome ;  On  Im  voyait,  avant  d*expi- 
iw,  yrcMcr  dfans  llBors  aHOM  on  sar 
Iw»  IHm  i'imagli  dc  loir  patMMis 
que  tmis  IflB  BtoMes  portmit  sar  la 
poitriBe«>  <k  te  SDldatF  rtpubKoaiiiB 
s'^toMiarait  de  troam,  sar  ees  ^i^- 
s^gfss- mcna^aate,  Peipvesiloa  d'BM 
pieose  fierveiir. 

GepeiidBiit  Soittoraf  desocodait  avee 

U   rapidity  de  I'ai^  des  doiea  da 

Saiiit*Gotfaajrd«  JjB  dinsiOD  Leoourb»« 

afEy  blie  par  la  ^rieuse  eampagne  da 

rEogadme,  aTait  M  fore^e  da  se  vs>> 

pliec  6D  deQ^  des  moots^;  elie  oocapait 

les  d^ocli^  aor  Tltaiie  et  la  vaU^  do 

Khin,depuis  la  aouroe  de  oe  fleara 

josqu*^  la  hauteur  de  Glaris;  elle  mat* 

DoeuTra  poor  venir  s'appoyer  au  pied 

da  moot  Rigi.  Soovorof  preasait  aa 

mafGhe  victorieose;  d^Uk  maltre  dea 

troU  petits  oaatons,  il  meDa^ait  la 

droite  da  rarmee  franGaiae ,  lorsqo'il 

apprit  q|ua    Korsakof  venait  d*etre 

ms^  a  Zurich.  Le  vfeox  g^n^al 

versa  des  pieurs  de  ra^e.  Pendant 

quelqoes  instants,  aa  voix  Mata  en 

cris  raoqoes ,  et  des  convulsions  vio- 

lentfs  tordirent  ses  membres.  Rien  ne 

peut  le  consoler,  car  il  salt  qu*rl  ne 

peul  p!ltt&  vaiocre;  il  ireulqa*on  Ten- 

seveusse  maot  devaat  ses  grenadiers , 
poor  gu'j7  ne  soft  pas  dit  que  Tennenii 
aurj  vo  reculer  le  genial  Soarorof. 
Cependant  il  jette  les  yeox  sur  oette 
ann^  si  d^vouee,  plus  conatem^e  de 


glorieuse  qu'uoe  victoire,  et  des  lors 
son  parti  est  pris.  II  6crit  a  Korsakof 
qu'il  arrive  victorieux,  lui  ordonne, 
sous  peine  de  la  vie,  de  n»readre  Tof- 
fensive,  et,  h  cet  ordre ,  les  d^ris  de 
t'ann^  vaincue,  renforc^  du  corps 
de  Conde ,  se  retournent  avec  fiireur 
oontre  les  Francis.  Ce  dernier  enga- 
gement s^rieux  entre  les  Russes  et 
MS  republicains  eut  lieu  pres  de  Die' 
seahoien.  Un  corpa  d'environ  trois 
mille  cavaliers  char^ea  en  plaine  deux 
demi-brigades  d'infanterie,  comman- 
does par  le  brave  general  Lorge ,  qui , 
apres  Tavoir  repousse  trois  fois,  le 
(letruisit    presque    entierement.    Le 


vainqoeur  Hr  Zorrcb,  le  sauveor  de  la 
Franee ,  Mass^mi ,  mareha  contra  Sou- 
vorof  et  rarrito;  pour  cette  fois,  s*il 
n^eut  pas  la  doire  de  vaincre,  il  eut 
oellede  fetre  mrograderson  rival.  En 
vain  il  essaya  de  rattirer  hors  des  d^- 
HI/iA  (fni  le  couvraient,  dana  Tespoir 
d»  faire  prisonniers  le  gdn^ral,  le 
grand-due  Constantm  qm  laisait  sous 
fiii  sea  premieres  armes^,  et  I'armte 
nisae  tout  enti^re.  Soovorof  op^ra  sa 
retraite  dans  le  plus  bel  ordre;  il  dut 
abandonner  oueiquea  bagages,  quel- 
goes  ^toes  crartiHerie,  ses  maladea 
et  sea  Dless^ ;  mais  le  mar6chal  Mor- 
tier,  charge  de  le  poorsuivre  dans  le 
Ifattenthal,  ne  put  entamer  que  denx 
eu  trois  batalllons  qui  se  d^vooirent 
pour  sauver  le  reste  derarm6e.  II 
mut  dire,  h  rhonneur  des  Russes ,  que 
toua  auraient  accepts  cette  mission. 
La  rotation  de  Souvorof  restait  in- 
tacte ,  maia  la  r6publioue  triomphait; 
le  prestige  de  rinvineioifitd  des  Rus- 
ses ^it  dissip^ ,  el  la  premiere  re- 
traite de  Soovorof  devait  marquer  sa 
demidre  eampagne.  II  rejoisnit  h  Lin- 
dao,  puis  k  Augsbourg,  les  debris 
de  I'armte  de  Korsakof.  D*un  autre 
c6l^,  le  due  dTYork  recueillait  sur  sa 
flotte  ceox  de  la  troisi^me  ami^e. 
lica  Anglo^Rosses  n*avaient  pas  ^t6 
plus  heureux  en  Hollande.  Brune  les 
defit  h  Gastricum;  le  due  d'York 
venait  de  signer  a  Alkmaar  la  captto- 
lation  des  troupes  exp^dltfonnalres. 
On  s'aooorde  h  dire  que ,  dana  cette 
campapne  de  Hollande ,  les  Anglais 
sacrifierent  leurs  alli^,  dont  la  va- 
leur,  quelquefois  heurense ,  ne  fut  que 
faiblement  second^.  C'est  ainsi  que 
tons  lea  efforts  de  oette  puissante 
coalition  vinrent  se  Imser  centre  le 
couragB  briUant  d*on  peuple  dont 
elle  s^ait  d^Jli  parta^^  les  u^pouillea 
et  le  territoire;  mais,  par  la  force 
mdme  des  diosea,  h  meaure  que  la 
nation  fran^aise  achetait ,  oar  des  sa- 
crifices inoula,  le  droit  de  jouir  de 
sea  nouvellea  inatituttons ,  elle  entraif 
dana  lea  conditions  du  despotisme 
nrilitaire,  d'aotant  plos  dangereux 
qu'il  apparaissait  en  sauveor  et  en- 
tour^  de  tous  les  prestiges  de  la  gloire. 


39e 


rUNlVERS. 


Si  la  joie  de  Paul  avait  iti  grande 
en  apprenant  les  victoires  de  ses  ar- 
mees,  son  indignation  ne  oonnut  point 
de  bornes  a  la  nouyelle  de  leors  d6- 
sastres.  U  cassa  et  fl^trit  en  masse 
tons  les  ofBciers  qui  manouatent  k 
I'arm^ ,  et  ne  daigna  pas  meme  s*oo- 
cuper  des  siqoples  soldats  rest^  cap- 
tifs  en  France,  k  la  suite  du  combat 
de  Castricum.  Le  tsar,  comme  8*il  edt 
voulu  faire  peser  sur  le  vainqueur  de 
Novi  la  responsabilit^  des  d6taites  de 
Zurich  et  de  Castricum,  le  dtolara 
coupable  pour  n'avoir  pas  ex^t^  cer- 
taines  prescriptions  des  reglements 
militaires;  bientdt  ii  aocusa  ce  m^me 
liomme  auquel  il  avait  destine  une 
entree  triomphale  et  une  statue,  dV 
voir  oontribu^  aux  revers  de  Tarm^ , 
en  protongeant  imprudemment  son 
sejour  en  Italic;  enfin,  apres  quarante 
ans  de  suoc^,  Souvorof  se  vit  dis- 
gracie  et  sans  commandement;  le  cha- 
grin ,  dit-on,  pr^cipita  sa  fin;  les  re- 
grets de  Tarmee  et  le  t^moi^nage 
eclatant  que*rendirent  k  son  g^nie  les 
gen^raux  qui  Favaient  combattu  ex- 
pierentTingratitude  du  souverain.  Nul 
mieux  que  lui  ne  sut  conduire  le  sol- 
dat  russe ;  dou^  de  <st  coup  d*oeil  qui 
fait  le  grand  capttaine,  tacticien  ha- 
bile ,  et  ayant  devin^  tons  les  secrets 
de  la  strategic,  il  ajouta ,  par  Tetude , 
aux  qualites  qu'il  tenait  de  la  nature; 
mais  a  Tinstant  ra^me  ou  il  avait  tout 
pr^vu  et  tout  calculi,  il  paraissait  ne 
ceder  qu'a  un  instinct  guerrier  et  k 
une  inspiration  surnaturelle,  rooyens 
propres  k  impressionner  puissamment 
les  masses,  mais  qui,  employes  par 
la.mediocrite,  ne  conduiraient  quau 
ridicule.  On  a  dit  de  lui  quMl  pouvait 
itre  d'un  tiers  plus  laconique  que  Ce- 
sar, attendu  qu  il  triomphait  toujours 
sans  y  voir/Sa  belle  retraite  devant 
Massena  repond  suCfisamment  &  ce  re- 
proclie ,  et  prouve  seulement  que  Sou- 
vorof regardait  la  oonfiance  du  soldat 
comme  Fel^ment  le  plus  indispensable 
du  succes.  Des  hommes  plus  avanc^ 
que  les  Russes  eu  civilisation  n*ont 
pas  ^te  a  Tabri  de  cette  fascination ,  et 
Napoleon  lui-m£me  fut  redevable  de 
quelqufs-uns  de  ses  triomphes  a  Fopi- 


nion  qu*on  avait  de  son  anfailKbilit^ 
Cependant  Paul  ttooignait  baute- 
meot  son  m^oonteotement  de  la  oon- 
duite  qu'avaient  tenue  ses  allies  :  il 
reprochait  aux  Autricbieos  d'avoir 
abandonn^  korsakof  k  ses  propres  rea- 
flouroes,  et  aux  Anglais  cTaToir  mol- 
lement  appuy^  le  general  Herman  k 
Castricum.  Kobentzel  et  Wit  worthy 
ambassadeurs  de  Vienne  et  de  Lon- 
dres,  durent  essuyer  les  plus  am^rea 
rtoiminations.  L'envoye  de  Dane- 
mark,  qui  s'etait  permis  des  reflexions 
plaisantes  sur  les  emportements  bi- 
zarres  de  Tautocrate,  re^ut  le  premier 
Tordre  de  se  retirer.  Sans  annonoer 
encore  ses  intentions  a  regard  de  la 
France.  Paul  rappela  en  Russie  le 
reste  des  troupes  exp^itionnaires. 
N^nmoins  il  Mrivait  a  Dumouriez, 
qui  demandait  a  lui  souniettre  un  nou- 
veau  plan  de  coalition  :  « II  faut  que 
vous  soyez  le  Monck  de  la  France.  » 
L*empereur  flottait  encore  dans  Tirr^- 
solution,  lorsque  les  empi^tements  de 
TAutHche  en  Italic  provoqu^rent,  de 
la  part  du  cabinet  de  Petersbourg,  des 
explications  qui  entratn^ent  une  rup- 
ture; de  leur  c6te,  les  Anglais,  mal- 
gr^  les  conventions,  refusaient  de 
restituer  Malte»au  restaurateur  de 
Tordre  de  ce  nora,  et  quoique  cette 
tie  ne  fdt  pas  encore  soumise,  ils  an- 
noncaient  rintentiondese  Tapproprier. 
Paul  ne  tarda  pas  a  reconnaitre  que, 
dans  cette  pr^tendue  ^erre  de  prin- 
cipes ,  les  coalis^  exploitaient  sa  bonne 
foi  chevaleresque,  et  n'avaient  reelle* 
ment  en  vue  gue  leurs  int^r^ts  respec- 
tifs.  II  rompit  brusquement  le  traite 
qu'il  avait  conclu  avec  TAnsleterre  par 
une  mesure  significative :  i!  mit  Tem- 
ba^o  sur  fous  les  vaisseaux  de  cette 

Imissance,  et  fit  prisonniers  de  guerre 
es  matelots  des  equipases. 

II  ne  n^gligea  point  nmpui  des  puis- 
sances centre  lesqueiles  if  n^avait  point 
de  griefs  k  all^guer :  il  resta  Tallte  du 
Portugal  et  de  Naples ,  se  rapprocha  de 
la  Suede  et  du  Danemark;  enfin  ses 
relations  avec  la  Prusse  firent  presager 
une  prochaine  reconciliation  avec  la 
France.  Le. premier  consul,  soit  g6n€- 
rosit^f  soit  politique,  renvoya  ^  Paul 


RUSSIE. 


a97 


ies  prisonnia^  rnases,  et  oeCte  oour- 
toisie  flatta  Torgueil  de  Paul;  on  as- 
sure qoe  la  reTue  {ournali^  de  Bona- 
parte lui  panit  une  imitation  de  sa 
wateh-parade,  et  qu'ii  s'^ria :  «  C'«st 
pourtant  on  homoie!  »  Aossi  prompt 
dans  ses  d^terminatioiis  qu*il  ^tait  ex- 
trtoiedaiis  ses  affections,  il  envoys  au 
premier  consul  line  ambassade  solen- 
nelie,  et  supprima  la  pension  qu'il 
faisait  aax  Bourbons,  leur  enjotgnant 
en  mtae  temps  Tordre  de  qaitter 
Mittau.  II  determina  le  Danemark  k 
ferroer  aux  Anglais  le  Sund,  et  envoya 
une  flotte  pour  appiiver  cette  mesare. 
Le  traits  de  LiUneville,  qui  sui?it  la 
▼idoire  de  Moreau  k  Uohenlinden, 
venait  A'assurer  la  neutrality  de  I'Au- 
tridw;  et  T^ngleterre,  a|H^  des  sa- 
crifices ^normes,  se  voyait  r^duite  k 
supporter  a  elle  seuie  toot  le  poids  de 
la  eaerre.  H  est  Evident  que  I'int^rlt 
de  rAngleterre  portait  cette  puissance 
k  d^irer  an  changement  de  gouverne- 
ment  enRussie;  mais  ii  est  difficile  de 
determiner  la  part  qu*elle  a  prise  k 
Tatteotat  qui  a  plac6  Alexandre  sur  le 
trdne;  a-i-elle  profit6  da  m^contente- 
meat  dea  seigneurs,  ou  a-t-elle  organist 
el\e-intoie  le  complot?  Les  documents 
qui  pounaient  resoodre  cette  grave 
guesDoo  manquent  k  Fhistoire;  ce  qui 
n'est  point  dooteax,c'estguecette  puis- 
sance f ut  au  moins  complice. «  Le  r^ul- 
tat  de  la  bataille  de  Marenso ,  dit  M.  de 
Marcillac  (Souvenirs  de  remigration) , 
avait  ajoum^  les  esp^rances  des  roya- 
listes;  mais  Torganisationduttoujoors 
se  continuer,  afin  d'agir  au  premier 
moment  favorable.  OnsavaUaavance , 
PevenefnentqttidevaUasseoirj4lexan^ 
dre  star  le  tr&ne  des  tsars :  P^poque  en 
itaU  designee;  il  paraft  mime  qu'un 
des  cabinets  de  I'Europe  avait  compt^ 
sur  cet  6v6iiement  pour  ramener  la 
Russie  dans  la  coalition  centre  la 
France.  Ce  qui  est  certain ,  c'est  que  la 
mort  de  Paul  P'  arriva  juste  a  Tepoque 
pr^c^emmentannoncee. «  Tout  6tait 
m(lr  pour  cette  catastrophe;  le  carac- 
t^re  de  I'empereur,  aigri  par  les  revers 
de  ses  armes  et  par  une  passion  sans 
espoir,  le  poussait  k  des  actes  si  bi- 
zarres  et  quelquefois  si  cruels  que  nul 


de  cenx  qui  rapprochaieiit  ne  pouvait 
compter  sur  le  lendemaio.  Les  faveurs 
^taient  brusques  et  inattendues  comme 
les  disgrdces.  Les  bruits  publics  qui 
lui  parvenaient  par  la  police  le  jetaient 
dans  de  eontinuelles  apprehensions; 
ces  indices  secrets,  vrais  oufaux,  Ten- 
tralnaient  de  rigueurs  en  rigueurs, 
et  le  remplissaient  d*une  m^ance  om- 
brageuse.  Sa  propre  famille  n'^tait 
pas  k  Tabri  de  ses  soupcons,  et  la 
mime  voix  oui  venait  d'eveiller  ses 
craintes  et  d^irriter  sa  sivlriti  aver- 
tissait  son  Ipouse  et  les  deux  grands- 
ducs  du  piril  qui  les  menacait.  Le  pu- 
blic, qui  ignorait  les  motifs  de  Tem- 
pereur ,  le  croyait  en  dimence.  Toute  la 
ville  ^tait  en  Itat  de  suspicion;  les 
visites  domiciliaires  k  lieure  indue,  des 
individus,  des  families  enttdres  arra- 
cbls  de  leur  demeure  pour  la  depor- 
tation ou  Texil,  la  physionomie  des 
habitants  qui  n'osaient  pas  mime  ex* 
primer  leurs  craintes  ou  leur  surprise, 
tout  semblait  annoncer  que  la  perte 
d*un  seul  etait  nicessaire  au  salut  com- 
mun.  L'inflexibiiitl  de  Paul  se  roidis- 
sait  centre  ce  sentiment  de  disaffection 
presque  universel;  cependant  lorsqu'ii 
croyait  dimller  quelque  part  le  dlvoue- 
ment,  il  le  couvrait  d*or  et  de  distinc- 
tions; mais  ses  faveurs  Itaient  plril- 
leuses,  et  rillvation  rendait  la  chute 
plus  terrible.  Pour  Ichapper  au  re- 
gard de  I'autocrate,  quarante  mille 
habitants  abandonnlrent  Pltersbourg ; 
ceiix  que  leur  emploi  ou  des  interets 
implrieux  retenaient  dans  la  capitele 
ne  passaient  qu'en  tremblant ,  et  la  tite 
decouverte,  aevant  le  palais  de  Saint- 
M  ichel ,  ou ,  comme  un  autre  Louis  XI, 
le  sombre  Paul,  entourl  de  dllateurs 
et  de  satellites,  dressait  ses  listes  de 
proscription. 

Le  despotisme ,  qui  donne  le  pouvoir 
de  tout  faire,  inspire  souvent  k  oeux 
qui  le  subissent  la  bardlesse  de  tout 
oser.  La  perte  de  Paul  fut  risolue. 
On  assure  que  iorsqu'il  eut.consenti  k 
partager  avec  le  premierconsul  la  tAche 
de  dieter  des  lois  k  TEurope,  il  se  fitap* 
porter  une  carte,  etoue,  tirant  une  ligpe 
des  sources  de  TOder  a  remboudiure 
de  ce  fleuve,  il  s'Icria  :  « Que  teat  ce 


LTNIVERS. 


qui  existe  depeuplet  h  TooeideDt  scsle 
sous  riiiQoenoe  trsni^ise;  oue  tout  oe 
irai  se  troave  it  Torient  obelase  a  Tin- 
^tHnoe  russe. »  Suirant  la  mtoe  ver- 
sion, le  ^D^al  OiidiDOt  defait  se 
Kndreea  Rassie,  nott  pour  gnider  les 
Russes  daiu  les  lodes,  mais  pour  les 
aider  a  feice  la  oonqutte  de  TAsie  Mv- 
neuM,  et  doooer  ensaite  ia  main  aox 
restes  de  rarmee  d*£gypte :  c*^it  plus 
.qu*il  n'eo  fiaUait  pour  engager  le  cabi- 
.net  iHritannique  a  rompre  au  plus  tot, 
ot  par  tons  les  mojeos  posaiUes,  une 
alliance  qui  mettait  en  p^il  sa  sapr6- 
-matie  comoierciale,  fouree  pcincipale 
de  sa  prospN^rit^  et  de  sa  force.  Paul 
|)^rit  assassine;  le  genre  de  luort,  le 
joom  .des  principaux  acteurs  do  crime 
jont  eonnua;  mais  quand  on  veut  soi<- 
.vre  le  fil  de  eette  €on8[Hration,  arant 
jet  apres  la  catastrophe,  on  Je  trouTe 
rattach^ii  tant  d*interte.priv^  et  po* 
litiques,  qu'on  oe  p«Jt  k  d^broniuer 
sans  le  rompre.  Les  jretatioas  les  plus 
aocr^it^  s'aocordent  sur  quelques 
points  et  diffevent  sur  d'autres ,  pacce 
que  chaoun  a  observe  d*uo  |)oiQl  de 
vue  particttiier,  et  que  les  ageots  so- 
Gpndaires,  mAme  ceux  qui  <i>nt  mis  la 
joain  a  Toouvre,  n*etaient.paseniii6re- 
ment  dans  le  secret  dv  cb^,  qui  lui- 
jn^me  devait  0M)difier  son  plan  seloQ 
le  d^velpppement  iawrevu  des  cireons- 
tanc»s.  Nous  nous  oornecons  done  ^ 
ctter,  en  ce  qui  regarde  le  meurtre  de 
Paul,  les  relation^  qui  portent  i^  uo  plus 
haut  degr^  le.caractere  de  la  bonne 
foi  et  de  la  vraisemblanoe;  et  ce  n'est 
gu*apr^  avoir  soumis  ces  documents 
a  la  sagacity  du  lecteur,  que  nous  jeious 
hasarderons  k  ^mettre  le  jugement  que 
leur  examen.consciencieux  et  pfUsieurs 
conCdeuces  oicales  nous  ont  port^  a 
adopter. 

la.^remi^ce  des  relations  que  nous 
allocs  citer  ^mane  de  la  lotion  fran- 
(aise,  et  se  ressent  de  son  origine  di- 
plomatique; nous  Temprunterons  k 
Eabbe,  qui  Pa  i&um^  avec  intelli- 
gence et  ud^lit^. 

«  Tout  concourait  h  prouver  la  par- 
ticipation du  minist^re  anglais  a  la 
mort  de  Paul  I"',  et  Texp^dition  du 
Sund  venait  k  Tappuide  cette  opinion. 


De  quelle jutilite  peur  les  Anglais  itait 
roocupation  du  Sund  ea  oette  cir- 
-constanceP quel  ami lebut d'une  ten- 
tative qui  pouvaic  devenir  si  fiinesteP 
Une  flotte  nomhreuse-dtfendait  ce  di^- 
troit;  pour  le  franchir,  il  fallait  la  d^ 
-truire,  et  le  sooc^  etait  au  moins 
4outeux;  en  supposant  jn^me  la  reus- 
^te,  les  Anglais  n'avaient-lls  pes  ii 
•craindre  de  trouver  r^onies  les  forces 
des  trois  puissances,  soit  pour  les  com- 
battre,  soit  au  moins  pour  leurfermer 
Je  passage  au  retour?  Les  chances  ral- 
fionnafoles  de  oette  expMition  ^talent 
telles  t|ue,  sans  les  machinations  des 
Anglais ,  la  Baltique  devait  ^tre  le  torn- 
beau  de  leur  flotte;  done  ceux  qui 
avaient  oonou  Tentreprise  avaient  au 
moins  Tesporance  qo'au  moment  o^ 
Ton  p^n^trerait  dans  la  Baltique,  la 
puissance  qui  y  faisait  la  loi,  la  Rus- 
sia, aurait  cess^  d'^re  redoutable.  La 
s^rit^  avec  Jaqueile  ils  s'engag^reat 
dans  cette  mer  lodique  I'attente  d'^ia 
^venement  qui  devait  changer  pour  eux 
la  face  des  amiires ,  et  prou  v«  assez  que 
Nelson  n'eut  ordre  de  forcer  le  Sund 
que  lorsque  la  chute  de  Paul  fut  r^- 
soiue  a  Londres.  Cest  du  moins  uoe 
forte  pr^Mimption  que  cette  singuliere 
coincidence  des  faits.  Ce  fut  pendant 
le  combat  mtoe  du  3  avril  que  Ton 
appritaCopeobaguelamortde  Paul  T"", 
et  le  gottvernement  danois  prit  le  plus 
grano  soin  pour  oe  pas  laisser  ebruiter 
la  nouvelie  avant  j^eoti^re  conclusion 
de  rarmistice  qui  suivit  cette  joum^.. . 
La  m^me  notice  place  h  la  t^e  des 
mecontents  les  freres  Zoubof ,  le  comte 
Pahlen ,  le  colonel  Tatarinof ,  le  g^n^ 
ral  Yascbwel,  enfin  lord  Witworth, 
ambassadeur  d^Angleterre  a  Peters- 
bourg.  Us  resdurent  de  porter  le  der- 
nier coup;  la  mort  leur  etait  r6serv6e 
s*ils  echouaient;  et,  malgr^  cette  n^- 
cessit^  de  hdter  Tex^cution  de  leiu* 
dessein,  tous  attendaient,  nul  n'd£is- 
sait.  II  fallait  pour  dinger  de  telles 
men^s  une  t^te  froidement  organisee , 
et  capable  tout  a  la  fois  de  raetivite  la 

Slus  soutenue.  Un  tel  chef  se  trouva 
aos  la  personne  de  Pahlen ,  gouver- 
neur  mintaire  de  Pi^tersbourg. 
« I^e  comte  Pahlen  avart  joui  jus- 


*     •  • 


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•  • 


RUSSIE. 


899 


qa'alors  d'luie  r^oatation  de  nrobit^ 
sans  tacfae.  On  se  louait  g^nmleaient 
lie  son  administratioa;  on  pariait  de 
ses  vertus;  il  avait  kB  dehors  les  plus 
respectables;  le  calme  r^pandu  aar  ses 
traHs  Insprrait  la  cooOaaee;  flsais  il 
cachait  une  profoode  diaaiiiiiilatioD ,  ct 
son  extdrieur  n'etait  niiHement  en  bar- 
monie  avec  son  dme. 

«  Le  joug  pesatt  de  pkis  en  plus  sur 
Pahlen;  soumis  k  un  maltre  dont  la 
voionte  etait  absolue,  sa  Istveur  d^pen* 
dait  d'un  soupqon ;  de  jour  €n  jour  elle 
devenait  plus  'pr^ire;  il  voulut  Taf- 
feraiir,  et  r^olat  de  mettre  Alexandre 
sur  le  trdne.  Un  nouveau  r^ne  offirait 
un  champ  plus  vaste  k  Tanibition  dont 
il  etait  devor^,  de  plus  fr^guent«s  oc- 
casions de  reodre  s(5s  talents  ntos- 
saires,  Fassurance  d'obtenir  un  er^it 
immense  aupres  d'un  jeune  prince  de- 
pourvu  d^exp^ience,  enfin  respoirde 
r^ner  sous  son  nom...  Une  fois  son 
plan  arr^t^,  il  s*appliqua  a  Eloigner  de 
la  /aveur  de  Paul  tous.ceux  gu'il  n'a- 
vait  pu  eagner.  Dans  cette  vue,  il 
travailla  tongtemps,  et  r^ussit  enfiin  k 
faire  disgracier  un  bomme  dont  le 
i^vouement  k  la  personne  de  I'empe** 
reuT,  et  les  talents  surtout,  lui  por- 
taient  ombrage  :  c'^tait  Eostopcnin, 
▼ice^:haBcelier  des  affaires  ^ang^res ; 
ce  ministre  dtait  parvenu  h  s'emparer 
d'une  oorrespondance  ^ntre  un  oomte 
Panin,  neveo  du  grand  gouverneur  de 
Paul,  et  un  agent  des  conjures  de  P^- 
tersbourg.  Ge  Panin  ^tait  Je  chef  du 
parti  h  Mosoou^  et  quoique  ses  lettres 
fussenttoites  avec  une  exttdme  cir* 
oonspection.,  0  y  r^ait  un  louche  qui 
n*^cnappa  point  a  la  sagacity  de  Ros- 
topdiin.Lespidoes  saisiesfurent  mises 
sous  les  yeux  de  Paul,  et  celui  k  qui 
elles  6taient  adressto  fiit  mand^ ;  mais 
oet  bomme  repoussa  avec  tant  de  cba- 
leur  cette  imputation,  11  se  d^fendit 
avec  un  tel  accent  de  v^nte,  qu'il  dis- 
suada  Paul  entierement.  Pahlen,  peu 
de  temps  apres,  obtint  le  renvoi  de 
Aostopchin. 

«  Avant de  rien  tenter,  Pahlen  voulut 
se  mdna^er  les  moyens  de  se  justifier 
aiipr^  dr Alexandre  s'H  r6u8sissait,  et 
aaprte  de  Tcmpereur  s*il.  venait  k 


Miouer.  II  sentait  eombien  il  lui  im- 
portait  d'impli<iuer,  d*une  mani^re 
^droite,  Th^ritier  du  tr6ne  dans  ses 

frojets,  et  de  le  placer  par  la  entre 
aul  et  lui.  II  s*appliqua  done  a  indts- 
•poser  Tempereor  contre  les  grands* 
dues  Alexandre  et  Gonstantin,  et  ces 
demiers  contre  leur  p^re.  Citait  ieurs 
droUs  qu'U  vaulau  iusurer^  Ieurs 
wies  qu'il  wntiaU  4iftmiiir€ :  mais ,  sous 
4es  apparences  do  z^e ,  Pahlen  1^  em- 
ployait  oomme  les  pr^testes  de  sa 
naine  et  les  instruments  de  son  ambi* 
iion. 

«  Le  suce^  de  Pifhlen  fat  oomplet  au** 
pr^du  vMLi^)  empereuret  des  jeunes 
princes:  une  terreur  profonde  s'em- 
parade  r^siedu  malheureox  monarque 
et  ne  I'abandonna  plus...  Un  jour,  sor- 
tant  de  son  lit  plus  6pouvant6  encore. 
qu*a  I'ordinah^,  il  mande  subitement 
ses  deux  ills  a!n^ ,  Alexandre  et  Cons* 
tai^n,  «t  leur  fiiit  juxer  sur  un  cru« 
dfix  qu'ils  n'attenteront  pos  ^  «es 
jours. 

■  Des  flls  qui  avatent  le  malheur 
d'inspirer  de  telles  craintes  ne  devaient 
point  eux-mdmes  se  sentir  en  sdret^; 
cependant  Pahlen,  n'esp^rant  rien  du 
caract^  r6si^6  et  respectiienx  d*A- 
lexandre ,  le  peignit  a  Paul ,  d^ja  atteint 
d'un  incurable  soujMon,  comme  an 
dtre dangereux \  il  aua  plus  loin,  il  oea 
racouser  aupres  de  son  pte  de  com- 
ploter  contre  son  aolorit^,  et  d6clara 
lormellement  k  I'empereur  ne  pouvoir 
r^pondre  de  sa  s^ele  personneile,  s'il 
ne  lui  donnait  iur-le-champ  Tordre 
d'arrdter  Alexandre.  Paul,  indign^ 
contre  son  fils,  aigne  aussitdt  ranr^t. 
Alors  Pahlen  va  trouver  le  grandMuc, 
et ,  4u>res  lui  avx>ir  vainemenftKpr^sent6 
la  necessity  de  pr^venir  ies  intentiona 
de  Paul  en  le  lorcaoft  d'abdiquer,  il 
oppose  au  refus  optniAtre  d' Alexandra 
l^irdre  qu'il  venait  de  reoevoir  codIm 
lui.  Atterr^  par  la  Yue  de  oet  ordne 
et  pvesse  par  rimminenoe  4iu  pM, 
Alexandre  ne  pouvait  encore  ae  r^ 
soudre  k  une  di^marcbe  ausai  haslie; 

(*)  Gette  eiymttion  »t  impfofm;  Paid, 
ne  ea  1754,  a  iie  smwin^  en  iSoi  :  i& 
n*avait  done  qoe  49  ans. 


400 


UUNIVERS. 


mais  cctte  incertitude  fut  interpr^tee 
par  PableD  comme  une  autorisation 
tacite  et  sufQaante.  II  allait  le  quitter, 
quand  Alexandre  exigea  de  lui  le  ser- 
meat  qu'il  ne  serait/ait  micune  nio- 
lence  a  son  p^^,  et  le  rendit  respon- 
sable  de  oe  qui  arriverait. 

«  Telle  fut  la  duplicity  de  Pahlen ,  et 
telle  fut  la  oonduite  du  grand-due. 
Cest  cette  manoeuvreinaidiease  qui  a  pu 
donner  lieu  k  cette  question :  «  Alexan- 
dre a-t-il  particip^  au  meurtre  de  son 
pto?» 

«  Cependant,  h  cette  ^poque,  quel^ 
ques  bruits  ayant  transpire,  quelgues 
rapports  vagues  ayant  et^  faits  h  Paul, 
soit  par  le  d^vouement,  soit  par  Tin- 
discretion  des  initios,  il  nianda Pahien 
let  lui  dit :  «  On  en  veut  ^  ma  vie;  n*e- 
.«  pargnez  rien  pour  vous  instruire  des 
«  faits...  »  et  il  termina  par  une  sortie 
violente  sur  rignoraneeou  il  le  croyait. 
Pahlen  r^noit :  «  Sire,  je  le  savais, 
«  et ,  pour  m*assurer  des  coupables ,  je 
«  suis  moi-mdme  de  la  conspiration.  » 
Ces  mots  tranquillis^rent  Tempereur, 
et  des  lors  il  s*en  rapporta  enti^rement 
a  Pahlen.  Deux  jours  avant  T^v^ne- 
ment,  Tempereur  re^ut  avis  d'Obalia- 
nof,  proeureurg^n^ral,  que  Ton  cons- 
pirait  contre  sa  vie.  Cette  nouvelle 
r^v^lation  mit  le  comble  a  ses  defian- 
ces, et,  craignant  alors  que  Pahlen 
B'edt  v^ritablement  pris  {>art  au  corn- 
plot,  il  expMiti  an  courrier  h  Arakt- 
cheief ,  ancien  gouvemeur  de  Peters- 
bourg,  qui  oommandait  alors  un 
raiment  de  confiance  de  Paul,  ca- 
sern^  k  quarante  verstes  de  P^ters- 
bourg.  II  mandait  h  cet  officier  qu'il 
mettait  en  lui  sa  confiance;  que  sMI 
diff^rait  un  instant  a  venir,  il  ^tait 
perdu ,  parce  que  Pahlen  le  trahissait. 

a  Pahien  arrSta  ce  courrier,  qui, 
tenant  ces  dep^hes  de  la  main  de  Tem- 
pereur,  refiisa  de  les  lui  remettre.  Le 
gouvemeur  feignit  de  soupconner  la 
v^radtd  de  son  langage,  et*,  sous  ce 
pretexte,  les  lui  fit  eniever  d'autorit^^. 

« Instruit  de  tout,  Pahlen  sentit  le 
danger.  Un  court  d^lai  pouvait  rendre 
infructueux  des  projets  si  habilement 
eoncus.  Assure  done  en  quelque  sorte 
de  limpunite  du  crime,  il  en  pressa 


rexecution,  et,  de  concert  avec  quel* 
ques  Jiommes  sur  lesquels  il  pouvait 
oompter  plus  particulierement,  il  flioi 
le  jour  fatal  au  lendemain. 

«  Dans  la  mating  du  jour  oonvenu , 
l*empereur  se  promenant  k  cheval  sur 
hi  pface  Souvorof^  accompagn^  de  son 
fieivori  Koutaitzof,  fut  accost<^  par  un 
homme  de  la  classe  inferieure  qui  lat 
prdsenta  une  iettre.  Le  cheval  de  I'em- 
pereur  s'^tant  cabr^  dans  ce  moment, 
li  ne  put  la  prendre  lui-m^me,  et  elle 
fut  remise  a  Koutaitzof.  Eile  contenait 
de  grands  details  sur  la  conspiration ; 
mais  Koutaitzof,  avant  change  de  v^te- 
ment  pour  diner  cnez  Tempereur,  ou- 
blia  de  la  lire  (on  verra  dans  la  relation 
que  nous  rapportons  en  dernier  lieu 
pourquoi  Koutaitzof  ne  montra  pas  la 
Iettre  k  I'empereur). 

«  A  rheure  hx6e^  vers  onze  heures 
de  la  nuit,  du  22  au  28  mars,  les  con- 
jure, au  nombre  de  vingt,  se  pr6sen- 
tent  k  une  poite  lat^rale  du  palais 
Saint-Michel  donnant  sur  le  iardin. 
On  leur  en  refuse  Tentree.  *  L  empe- 
«  reur  nous  a  mand6s ,  disent-ils ;  il  y  a 
«  aujourd*hui  grand  conseil  de  guerre.  >» 
La  sentinelle,  tromp6e  par  la  vue  de 

t)lusieurs  officiers  gen^raux,  se  rend  k 
eurs  instances. 

a  Tons  montent  en  silence  k  Tappar- 
tement  de  Paul,  et  demeurent  un  mo- 
ment dans  la  salle  des  gardes.  Arga- 
makof,  aide  de  camp  de  service,  se 
pHisente  seul :  il  dit  que  le  feu  est  a  la 
ville,  aullvientr^veiller  I'empereur,  et 
le  heiauque  qui  gardait  Tanticbambre 
le  laisse  entrer.  Il  frappe  k  la  porte  de 
Tappartement,  et  se  nomme.  Paul, 
reconnaissant  sa  voix,  lui  ouvre  a 
Taide  d'un  cordon  qui  r^pondait  k  son 
lit.  II  ressort  aussitot  pour  introduire 
les  conjures.  Ceux-ci ,  n^ttendant  qu'un 
signal  pour  se  pr^enter,  entrent  en 
foule.  Le  Cosaque  s'aper^oit  alors, 
mais  trop  tard,  qu'on  en  veut  aux 
tours  de  rempereur;  il  veut  r^sister; 
a  rinstant  m^me  il  tombe  perc^  de 
coups ;  toutefoissond^vouement  avertit 
son  mattre,  il  s*6crie :  «  Trahison!... » 
M  L*empereur  effraye  veut  fiiir  dans 
un  des  cabinets  qui  joi^nent  son  al- 
cove :  Tun  communiquait  k  Tetage  in- 


RUSSIE. 


401 


£firieiir,  Tautre,  sans  issue,  renformait 
des  drapeaux  pris  sur  rennemi ,  et  les 
armes  aes  omciers  detenus  k  la  for- 
teresse.  Cest  dans  oe  dernier  que  soth 
trouble  Fa  conduit:  saisissant  une  ^p^, 
il  cfaerchait  It  gagner  un  escalier  d^rob^ 
par Fantre  cabinet,  quand  les oonjur^ 
piMtr^nt.  Us  vont  droit  h  son  lit; 
ne  Vy  trouvant  pas.  tons  s'toient: 
« II  ^  sauv^l  »  b^ja  ils  se  croyaient 
trabis,  quand  Beningsen  I'aper^ut 
blotti  derridre  un  paravent. 

«  Paul,  trouble,  sansYdtemeDtSfpres- 
sentit  le  sort  gu^ils  lui  r^servaient, 
mais  son  ^ereie  ne  Kabandonna  pas. 
On  lui  parte  dabdiquer;  il  s'y  refuse 
arec  enoportement,  et,  reconnaissant 
ceux  qu^l  a  combl6s  de  bienfaits,  il 
eclate  en  reproches  si  touchants  que 
leur  f6rocite  en  est  ^branl^.  Mais 
dans  le  moment  ou  les  conjures  se 
pressent  cbez  Tempereur,  au  moment 
nvgmft  ou  ils  comptent  le  plus  sur 
Pahlen,  celui-d  marcbe  au  palais  h  la 
tite  d*un  regiment  des  gardes :  si  Ten- 
treprise  reussit,  il  vient  pour  la  se- 
conder;  si  elle  manque,  c'est  son 
maltre  qu'il  a  voulu  deiendre. 

«  Cependant  Platon  (Zoubof)  vint 
lire  a  1  empereur  un  acte  d*abdication. 
Paul  cberoie  h  les  toucher  de  nouveau ; 
il  s'adresse  particuli^rement  h  Pla^n , 
lui  retrace  son  ingratitude  et  Texc^ 
de  sa  tem^it^.  «  Tu  n'es  plus  empe- 
<  reur,  r^pondit  celui-ci ;  c*est  Alexan- 
«  dre  qui  est  notre  mattre.  »  Indfgn^ 
de  son  audace,  Paul  va  pour  le  firap- 
per.  Ce  courage  les  arr^;  il  suspend 
un  moment  la  voIont6  des  conjnr^ ; 
Beningsen  s'en  apercoit,  et  sa  voix 
les  ranime :  «  (Test  bit  de  nous  s'il 
<c  ediappe,  c'est  fait  de  nous!  «  Aiors 
Nicolas  Zoubof,  portant  le  premier  la 
main  sur  son  souverain,  lui  casse  le 
bras  droit,  et  entraine  par  son  audace 
la  sc6l^ratesse  irr^lue  de  ses  com- 
pKces. 

«  Le  tumulte  ajoute  encore  h  cette 
sc^ne  d^borreur,  e(  I'obscurit^  qui  Ten- 
vironne  rend  inaccessible  h  la  oiti^  le 
cceur  de  ses  assassins.  Tons  fondent 
sur  lui ;  I*inf6rtun6  Paul  tombe  acca- 
b\L  On  lui  prodigue  Tinjure;  on  lui 
crache  au  visage;  on  le  tratne;  on  pro- 

26*  fJvraison,  (Kussib.)  T.  ii. 


longe  son  agonie.  Par  une  d^oi^tante 
baibarie,  les  assassins  le  frappent  dans 
les  parties  les  plus  secretes  de  son 
corps...  Leur  cruaute  se  lasse  enfin; 
Pun  d'eux  lui  passe  au  cou  une  6duirpe , 
et  termine  ainsi  ses  souifrances.  II 
expire,  et  ses  demi^res  paroles  sont : 
«  Constantin!  Constantin!... » 

«  Alexandre,  en  apprenant  la  roort 
de  son  p^re,  tomba  nans  un  aocable- 
ment  profond.  On  lui  dit  gue  la  pro* 
position  d^abdiauer  avait  si  fort  Irrit^ 
l*empereur,  qu  il  avait  €t€  soudain 
frappe  d*apoplexie.  II  ne  pouvait  se 
m^prendre  k  un  tel  rapport.  On  cher- 
cha  k  temp6rer  sa  douleur;  mais,  reje- 
tant  toute  consolation ,  il  refiisa  hau-» 
tement  le  trdne.  Get  etat  fiit  suivi  de 
convulsions  violentes  qui  dur^ent  plu- 
sieurs  heures. 

«  Le  bruit  de  la  mort  de  Paul  se  r^- 

{)andit  en  peu  de  temps  dans  la  ville, 
e  peuple  se  porta  en  foule  sous  les 
fen^tres  du  cnAteau;  tous  les  nrands, 
tout  ce  qui  avait  des  charges  a  la  cour, 
toutes  les  autorit^  de  la  capitale  se 
rendirent  aussit6t  au  palais  pour  saluer 
le  nouveau  souverain. 

«  Pahlen,  en  quality  de  gouvemeur 
de  P^tersbourg,  pr6sidait  la  d^puta* 
tion,  et  porta  la  parole;  Ton  vit  Tas- 
sassin  inftoe  du  pdre  prater  au  file 
serment  de  fid^Iit^. 

«  Alexandre  cMa  alors  aux  instances 
r^it^r^  de  sa  famille  ^plor^  et  de  ses 
plus  chers  serviteurs,  qui  lui  repr^- 
senterent  qu^en  cette  circonstance  il  se 
devait  tout  entier  h  Tl^tat.  II  parut  au 
balcon  du  palais,  et  fut  salu6  empe- 
reur aux  acclamations  de  tout  son 
peuple.  Mais,  parmi  ces  t^moignages 
et  ces  transports  de  joie,  une  am^re  et 
cruelle  pensee  lui  fit  regarder  le  jour 
ou  il  montait  sur  le  trone  comme  le 
plus  p^nible  de  sa  vie.  » 

Ce  qui  nous  a  frapp^  le  plus  dans 
cette  'notice  extraite  ae  la  xelation  de 
la  I^ation  fran^ise,  c*e^  que  Ten* 
sembie  et  Texpos^  des  faits,  qui  d'ail* 
leurs  portent  tous  les  caract^res  de  la 
vraiseipblance,  semblent  exdure   la 


fames :  tout  s*explique,  tout  se  d^uit 
par  des  motife  et  des  int^r^ts  ^trangwa 


m 


L'UWIVERS 


h  >a  politique  anglaise;  oe  qui  n^em- 
p^e  pas  que  Tambassadeur  de  oette 
putssance  ait  profite  d'un  moovement 
qui  changeait  la  face  de  TEurope.  Nous 
ne  dfrons  pas  que  rAngleterren'apoiut 
^t^m^l^  au  eomidot;  nous  ferons  seu- 
lement  femarquer  que  Vexp^dition  du 
Sund  eat  4a  seule  preuve  morale  ap- 
port^  par  les  autenrs  de  la  relation 
pour  a^uyer  c^tte  inculpation^  et  Von 
pourrait,  ce  nous  semble,  en  tirer  des 
consequences  ioutes  contraires;  par 
exemple,  Tint^r^t  qu^avait  cette  puis- 
sance h  op^rer  one  diversion  dans  la 
Baltique  pour  emplcher  Paul  de  reunir 
toutes  ses  forces  a  celles  de  la  France. 
Le  d^faut  de  la  ptnpart  des  renseigne- 
ments  diplomatiques ,  c'est  de  tout 
rapporter  k  une  td^  principale  qui  est , 
ppur  ainsi  dire,  la  clef  d*une  mission. 
Or,  h  cette  ^poque,  Tambassade  fran- 
caise  devait  sortout  s*attacber  h  d6- 
liruire  llnfluence  anglaise,  et  elle  a 
attribu^  h  cette  m^me  influence  la  ca- 
tastrophe gui  la  rtohlissait. 

La  relation  suivante,  publiee  en  Ai- 
lemagne,  et  reproduite  plustard  en 
France  dans  laBiblioth^miehistorique, 
difRre,  daosqudques  details^  de  celle 
que  nous  venons  de  rapporter.  Nous 
la  choisissons,  entre  plusieurs  autras, 
comme  un  document  curieux,  quoi- 
que  la  source  en  soit  inconnne  :  on 
contort  les  motifs  qui  n*ont  pas  per- 
mis  aux  auteurs  de  se  nommer. 

II  y  arait  longtemps  qu*on 

avait  perdu  tout  espoir  de  ramener 
Tempereur  ^  la  rajson.  M.  de  Pahlen , 
qui  partageait  avec  hii  Texerdce  d'un 
pouvoir  sans  bomes,  avait  eu  lieu  de 
recomiattre  la  n6cessit6  d'opposer  qne 
digue  atrx  ^ans  d'une  volont^  qui  ife 
se  manifestait  que  par  des  actes  de  vio- 
lence ou  de  cruaut6.  '^ ' 

«  Ce  chef  des  affaires  ext^eures , 
d^  la  police  et  du  gourernement  de 
Ptftersnouiig,  prit  enfin  la  resolution 
de  conf^rer  arec  le  grand-diic  Alexan- 
dre sur  les  moyens  d'^n  arr^ter  les 
Suites  fiinestes.  II  iSt  connattre  II  ce 
prince  tout  ce  qu*un  pareil  ordre  de 
ehoses  pouvaft  intratner  de  malheurs, 
soit  itu  d^h&rs',  soit  a  Tinterieur.  It 
avertit  le  grand-due  de  songer  h  un 


changement,  contre  les  dangers  duquel 
on  etait  rassure  pleinement,  par  les 
moyens  d'ex^cution  dont  on  pouvait 
disposer. 

«  M.  de  Pahlen  6tant,  par  ses  em- 
plois,  instruit  de  tout  oe  qui  se  pas- 
sait,  pouvait  agir  imrnddlatement,  et 
se  proposait  de  le  faire  sans  deiai.  Le 
grand-due  rdpondit  k  ces  premieres 
onverturesquul  ne  pouvait  disconvenir 
des  torts  de  I'empereur;  mais  que  ce 

{>rince  etait  son  pere,  et  qu'en  sa  qua- 
\t6  de  fils,  il  ne  pourrait  jamais  se 
r^soudre  h  le  priver  du  pouvoir  su* 
pr^me,  qudque  malheur  qui  pdt  ad- 
venir  s*ii  en  restalt  plus  longtemps 
revfitu. 

« Quelques  mois  plus  tard,  le  d^ 
sordre  du  gouvemement  allant  tou- 
jours  croissant,  M.  dePsdilen  parla  de 
nouveau  au  graod-duc.  II  trouva  ce 
prince  moins  eioign6  au'auparavant  des 
id^es  qu'il  lui  soumettait,  mais  encore 
detourn6«  par  respect  pour  son  pdre, 
de  toute  mesure  qui  aurait  porte  at- 
teiote  au  pouvoir  ae  ce  monarque. 

«  Cependant  plus  de  vingt'Six  per- 
sonnes  ayant  disparu  dans  les  premiers 
mois  de  1801,  M.  de  Pahlen  r^it^ra 
ses  propositions  avec  plus  d'iustances. 
Le  grand-due,  press^  par  ces  circons- 
tances,  y  adh^ra  enfin,  mais  h regret, 
et  apres  avoir  re^u  la  promesse  for- 
mdlequ^on  n'attenteraitpas  aux  jours 
de  Tempereur,  qu*on  se  contenta:Bit 
de  le  faire  prisonnier,  d*obtenIr  de  lui 
un  acte  d*abdication ,  et  de  le  trans- 
ferer sous  bonne  escorte  dans  la  for- 
teresse  de  Petersbourg. 

«  Un  ^vhiement  imprivu  hdta  Fex^- 
cution  de  ce  prolet.  M.  de  Pahlen  fut 
instruit  que  Paul,  qui  depuis  quelque 
temps  paraissait  avoir  con^u  des  soup- 
cons,  avait,  centre  sa  couturae,  sign^ 
lui-meme  un  passe-port  (M.  de  PahJea 
etait  seul  charge  de  cette  signature); 
il  fit  arreter,  comme  par  mq^rise,  le 
courrier  qui  en  etait  porteur,  et  prit 
probablement  connalssaoce  du  con- 
teiiu  djBs  di^peches  confiees  k  cet  horome. 
On  sut ,  dans  la  suite,  qu'eUes  avaient 
pour  objet  de  rappeler  k  Petersbourg 
deux  personnes  que  Tempereur  s^etait 
yu  obn  j;e  d'exiler  h  cause  de  la  cruaute 


Russit:. 


403 


^Vlles  dvaient  nppatUe  dans  TexecQ- 
tiim  d6  ses  ofdres. 

«Sek>D  tonte  afmareAce,  tes  dent 
fndmdcn,  notmii^  lindner  et  Arakt- 
di^ef ,  h  premier  eouTerneor  mflitaire 
de  Piftarsboatg ,  et  i'autre  commandant 
d'tme/brteressey  devaient  ^re  rendns 
ft  leurs  fonciiong.  L'empereur  devait 
B'en  servir  pour  ^kngner  sa  famille, 
mettre  en  prison  Timpi^ratrice  et  ses 
deus  fils,  et  se  diSbarrasser  enfin  de 
tons  oeax  oui  ioi  araient  inspire  des 
soupfODS.  M.  de  Pahlen,  muni  dn 
passe^port  saisi  snr  le  courrier,  se 
;cndtt  aupr^  de  Paul ,  et  lui  repr^- 
senta  qu'on  avait  sans  doute  tente  de 
le  surprendre,  en  soumettant  h  sa  si- 
snature  une  pito  qu*i1  ^tait  seul  cbargi^ 
de  d^Iivrer  sous  sa  propre  responsa^ 
billt^. 

•  L'empereur  embarrass^  r^pondft 
qu*ii  avait  eu  ses  raisons  pour  siener 
ie  passe-^Knt.  «  Je  m^empresserai  done 
•  ae  le  rendre  au  courner,  »  r^pondit 
M.  de  PSahlen.  On  pense  bien  que  Pafa- 
len ,  tout  en  ob^ssant  aux  ordres  de 
son  muftre,  sentit  plus  que  jamais  la 
n^eessit^de  le  pr^venir  par  une  prompte 
exeeution  des  mesures  pr<^tees« 

«  Votts  Tons  ra[^lez  oe  qui  est  ar- 
«rif6  en  176S?»  STalt  dit  quelques 
jours  auparavant  I'emp^eur  h  son  mi« 
nistre.  «  Oaf,  Sire,  j^is  alors  ser- 
eent  dans  la  garde. — M.  de  Pahlen , 
je  ne  serais  pas^<Hgn^  de  crof  requ'cn 
e^t  envie  de  r^ter  Its  sc^es  d'alors. 
—  O  serail  possible,  8ire,  r^pondft 
Pahlen,  que  qiieluues  peraonnes  en 
enssent  oon^u  le  uessem ;  mais  il  ne 
serait  pas  aussi  facile  de  Tex^euler 
aojoum'hiii  qu'aiors;  Tarm^  n'^it 
pas,  corame  ft  present  ,«otre  lesmains 
do  prince,  la  police  n'^it  pas  aussi 
lri«B  fftffe  que  malntttiaat ;  enfia  ▼otre 
pinr  Btavalt  pas  M  conronn^,  et 
vous  r^les.  9  L'empereur  sembia  se 
reftdra  ft  ces  rtfesions,  et  finit  par  ift 
on  entretien  oOi  Pahlen  montra  de  la 
preseiMe  d'esprit ,  do  oalme  et  de  I'm- 
saoe. 

«  Cepeodanl  les  soup^ous  de  Tem- 
Veraur  aoffmentaient  ehaque  jour.  Un 
loir,  II  rep^ta  ft  piosieurs  reprises, 
d'un  tott  de  fort  maavaise  honeur,  ft 


madame  de  Gagarin,  chez  laqoeile  i^ 
se  troQvalt :  «  Je  le  vois,  il  est  temps 
«  de  frapper  un  grand  coup. »  H  tint 
le  m^me  propos  an  grand  ^cuyer  Kou- 
taitzof ,  en  ajoutant : «  Apr^cela,  nous 
«  viTTons  comme  deux  firftred. »  Qe 
grand  coun  conslstait  ft  faire  en£BniMr 
rimp^ratnce  ft  Rhdmagori,  s^Hour 
alfreux  ft  uuatre-vtngts  verstes  d^Ar- 
kfaangel ,  ou  la  lamitle  infortuiK^  d'TJl" 
rkk  de  Brunswick  a?ait  M  empri- 
sonn6e  pendant  de  leagues  anneess 
Schlussemourg  devait  servir  de  prison 
au  grand-due  Alexandre;  la  forteresse 
de  P^tersbourg  ^tait  destine  au  prime 
Gonstantin;  Pahlen  et  quelques  autres 
auraient  p^ri  sur  I'^ehafeua. 

tc  Madame  de  Gagarin,  frdpp€e  da 
ton  sinistre  de  rempeneur,  avait  ea  la 
simplicity  de  dire  t  «  Je  ne  con^ois  pai 
«  oe  qu'il  entend  par  le  grand  coup 
«  qu*if  vent  porter.  ^  Ges  divers  propos 
fiirent  rapportite  ft  M.  de  Pahlen,  qui 
en  instrmsit  le  grand^doc  Alexandre. 

tt  Ge  prince,  presi^^  par  le  <kiiger^ 
consentit  ft  tout,  sous  la  scale  r^benre 
de  conserver  la  vie  ft  son  pftre.  Malgr^ 
la  diflloulte  de  donner  ft  cet  ^ganl  ues 
garanties  positives,  Pahlen  promit 
cependant  que  les  jours  de  Paul  ne  ss- 
raient  nranao^  dans  aucan  cas. 

«  Le  pro^  devait  recevoir  son  ex^ 
cution  le  32  mars;  mais  le  8rMHl*duc 
insista  pour  quil  fdt  difl^rejusqn'au 
lendemain  >  attendu  que  ce  jour-lft  la 
garde  da  palais  devait  ^tre  ceaMe  au 
Eataillon  d^mtonoiFski,  que  le  grand- 
due  Gonstantin  oommandait  en  par- 
Sonne,  et.qui  kii  6tait  dtwoui.  Pknleh 
souscrivit  au  d^ir  du  prinoe. 

«Le  palais  Ulchel,  b^  par  Paul 
sur  Templacement  de  raneien  palais 
d^^t^,  c^  un  MiGoe  massif  at  mds 
godt,  entour^  de  bastions.  Cetait  en 
vain  que  l'empereur  le  fortijQait  diaque 
jour  pour  s'y  assurer  un  abri  canfare  la 
vengeance  de  ceux  qu'il  avait  ofiens^. 
Pahlen,  ainsi  que  les  autres  eonjur^, 
en  connaissait  tous  les  detours.  Quel- 
ques henres  avant  Textoitlon,  II*  de 
Pahlen  augmeuta  ie  aombre  des  con- 
jures, en  lei/r  atUoignant  qualques 
jennes  gens  de  fiftmiile  qui ,  ce  iour-lft , 
avaient  M  d^grad^  et  fustiges  de  la 

2. 


404 


L'UMIVERS. 


mani^re  la  plus  cnielle  pour  des  fkites 

?ui  mdritaient  k  peine  une  i^primande. 
*ahleD  ouyrit  lui-mtoe  la  prison  k  oes 
maiheureux,  et  les  mena  souper  chez 
le  g^n^ral  Talezio,  colonel  du  rai- 
ment Preobrajenski ,  qui,  ainsi  que  le 
g^D^ral  Deprmdovitcb ,  colonel  du  re- 
giment S^mtonovski ,  avail  attir^  dans 
ta  conspiration  presque  tons  les  offi- 
ciers;  on  n'osait  pas  encore  se  confier 
aux  soldats ;  on  comptait  d'ailleurs  sur 
leur  ob^issanoe. 

«  Platon  Zoubof ,  le  dernier  favori 
de  Catherine  n,  et  le  s^^ral  Bening- 
sen,  6taient  prints  a  cette  f^te.  lis 
se  mirent  k  la  t^te  d'une  partie  des 
conjur^,  et  Pahlen  commandait  Tau- 
tre.  Les  deux  troupes  forraaient  en- 
viron soixante  personnes,  dont  la 
ptupart  toient  prises  de  vin/Zoubof 
et  Beningsen  se  firent  ^rMder  par 
Fadjudant  Argamakof ,  qui.faisait  jour- 
nellement  ties  rapporte  k  I'empereur. 
Gelui-ct  les  oonduisit  par  un  escalier 
qui  ftienait  droit  k  une  antichambre  ou 
coucbaient  deux  hussards  de  la  garde 
de  Teospereur,  ainsi  que  le  yalet  de 
chambre.  En  passant  par  le  corridor 
sur  lequel  donnait  cette  porte,  ils  fu- 
rent  arr^t^i  par  un  factionnaire  qui 
leur  cria  :*«  Halte-lik!  qui  vive?  »  Be- 
jningsen  lui  r^pondit :  «  Tais-toi  done, 
•  malheureux;  tu  sais  bien  oii  nous 
iiallons.  »  Le  factionnaire,  compre- 
nant  de  quoi  il  s^agissait,  fronga  le 
sourdl  en  criant :  «  Ronde,  passez; » 
^fin  que  si  Tempereur  avait  entendu  du 
bruit,  il  pOt  croire  que  c'etait  celui  de 
la  reoonnalssaaoe  d'une  ronde.  Apr^ 
cet^vdnement,  Tadjudant  Argamakof 
continua  en  toute  hate,  et  vint  frapper 
doucement  k  la  porte  du  valet  de 
chambre.  Gelui-ci,  sans  ouvrir,  lui  de- 
manda  ce  qu'il  voujait.  «  Je  viens  faire 
«  mon  rapport.  —  Etes-vous  fou?  il  est 
«  minait.  —  Que  dis-tu?  il  est  six  heu- 
«res  du  matin;  ouvre  done,  ouvre, 
«  ou  sinon  tu  vas  me  susciter'une  belle 
«af{aire  aupr^  de  rempereur!»  Le 
valet  de  chambre  ouvrit  enfin;  mais, 
ayant  vu  entrer  dans  la  chambre  sept 
ou  fauit  personnes  V€o6e  nue  a  la  main, 
il  courut  se  oacher  dans  un  coin.  Un 
des  hussards,  plus  courageux,  voulut 


opposer  de  la  r^istanoe,  rejjat  un  coup 
de  sabre  sur  la  t^te,  et  nit  aussitdt 
terrass^;  I'autre  disparut. 

«  C'est  ainsi  que  Beningsen  et  Zou- 
bof  p^n^trerentdans  la  chambre  de 
I'empereur.  Zoubo^,  ne  voyant  pas  le 
prince  dans  son  lit,  s*ecria  :  «  Grand 
«  dieu !  il  est  sauv^ !  »  Beningsen  plus 
calme,  ayant  fait  une  recherdie  atten- 
tive, d^uvrit  Tempereur  derri^re  le 
panneau  d*un  paravent.  Alors  il  s'ap- 
proche  du  prince ,  le  salue  de  son  6p6e , 
lui  d^lare  qu'il  est  prisonnier  par 
ordre  de  Fempereur  Alexandre;  que  sa 
vie  sera  respects,  mais  qu'il  importe 
k  sa  sdrete  de  n'opposer  aucune  r6si^ 
tance.  Paul  ne  r^pondait  k  rien.  A  la 
lueur  d'une  veilleuse,  on  pouvait  dia- 
cemer  la  confusion  et  la  terreur  qui  se 
peignaient  ensemble  sur  son  visage. 
Beningsen,  sans  perdre  de  temps,  fit 
la  visite  de  sa  chambre :  une  seule  norte 
menait  dans  les  appartements  de  I'im- 
p^ratrioe;  une  seconde,  celle  de  la 
garde-robe,  6tait  sans  issue;  deux  au- 
tres  appartenaient  k  des  placards  ou 
etaient  renferm^  les  drapeaux  et  lea 
etendards  de  la  gahiison,  ainsi  qu'un 

grand  nombre  orep^  appartenant  k 
es  ofQciers  mis  aux  arrets.  Pendant 
que  Beningsen  fermait  oes  portes  et 
«mettait  les  clefe  dans  sa  poche,  Zoubof 
r^p^tait  en  russe  k  I'empereur : «  Sire, 
«  vous  6tes  prisonnier  de  Tempereur 
•  Alexandre.— Gomment,jBris6nnier ! » 
r6pondit  I'empereur.  un  moment 
apres,  il  ajouta :  «  Que  vous  ai-Je  fait? 
«  —  Depuis  quatre  ans  vous  nous  mar- 
«  tyrisez, »  lui  dit  alors  un  des  con- 
jures. 

«  Le  prince  ^tait  en  bonnet  de  nuit; 
il  portait  seulement  sur  sa  chemise 
une  camisole  de  flanelle;  il  ^it  de- 
bout,  les  jambes  nues,  devant  les  oon- 
jur^s  :  ceux-ci  avaient  le  chapeau  sur 
la  ate  et  I'^p^  nue  a  la  main. 

«  Si  Paul  eAt  conserve  quelque  pre- 
sence d'esprit,  il  edt  pu  se  sauvo*,  ou 
par  une  trappe  qui  donnait  sous  son 
lit,  ou  par  les  appartements  de  I'im- 
p^ratrice;  mais  la  peur  Tavait  entiere- 
mcnt  d^concerte ,  et ,  au  premier  bruit , 
il  s'etait  jete  au  has  de  son  lit  sans 
prendre   une   resolution;   peut-^tre 


li 

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RU.SSIE. 


405 


tfoaa-t-il  jpas  se  rtfugiar  aoprte  de 
nmp^ratrice,  pepsant  qo'une  conspi- 
ntion  lie  pouvait  £tre  ourdie  contre 
liii  qa*ayee  le  consentement  et  en  faveur 
d*uiie  priDcease  qu'il  saYait  toe  aim^ 
da  peuple  aotant  mi'il  en  ^tait  d^test^. 

«  Au  moment  ou  Ton  s'emparait  de 
Tempereur,  quelqae  bruit  s'^tant  fait 
entire,  Zoubor  oounit  tout  alann^ 
chez  le  grand-due  Alexandre :  les  ap- 
partements  de  ce  prince  6taient  situ^a 
au«des8oa8  de  eeux  de  son  p^re.  II 
n'avait  aupres  de  lui  que  son  fr^re 
Constantin ,  ainsi  <]ue  les  deux  grandes- 
ducbesses.  Tune  sa  femme^  et  Tautre 
celle  de  son  Mre.  Constantin  n'avalt 
Hi  initio  dans  le  secret  que  le  soir 
mime  :  quoiquMl  n'aimdt  pas  ]*empe« 
reur,  on  craignaitquelque  mdiscr^ion 
d%SA  part.  cSs  quatre  personnages  at- 
tendaient  dans  la  plus  grande  anxi^t^ 
Fissoe  de  T^v^nement :  Tarriv^  de 
Zoobof  ne  oontribua  pas  peu  a  aue- 
menter  lear  inquietude.  De  son  cdte, 
Beoingsen,  rest^  dans  la  cbambre  de 
Temper^ir  avec  un  petit  nombre  de 
cooiur^ ,  se  trouvait  fort  eftibarrass^; 
ii  redt  ^  bien  davantage  si  Paul  se 
j^t  arm^  de  son  6p^  pour  se  d^fendre; 
mais  ce  maibeureux  prince  ne  ^f(§rait 
pas  une  seule  parole /et  restait  entid- 
rement  inunobile. 

«  L*empereur  fut  trouy6  dans  cet 
etat  de  snipeur  par  qnelques  oonjur^ 
qui ,  dans  leur  ivresse ,  s'etant  tromp^s 
de  cbernin,  s'introduisirent  tumul- 
tueusement  dans  la  cbambre  de  ce 
prince. 

«  Le  prince  Jaschwill ,  major  gene- 
ral d^artiUerie,  depuis  quelque  temps 
en  retiaite,  entra  le  premier  h  la  tete 
de  ses  compagnons.  ll  s^  jeta  furieux 
8ur  Tempereur,  et,  en  le  renversant 
par  terre,  il  fit  tomber  sur  lui  le  pa« 
ravent  et  la  Teilleuse.  Le  reste  de  la 
scene  se  passa  dans  les  t^ebres.  Be- 
ningsen,  croyant  que  Paul  voulait  fuir 
ou  se  dtfendre,  lui  bria :  «  Au  nom  de 
«  Dieu,  Sire,  ne  cbercbez  pas  h  vous 
«  sauTcr,  il  y  va  de  votre  vie;  on  vous 
«  tuera  si  vous  faites  la  moindre  r^sis-. 
«  tance.  *  Pendant  ce  temps,  le  prince 
Jaschwill,  Gardanof,  adjudant  de  la 
garde  k  dieval ,  Tatarinof ,  colonel  d*ar- 


tillerie,  rtforai6  depuis  longtrnps,  le 

Srinoe  F&einski  et  Statin,  ofociers 
e  la  garde,  Element  rtform^, 
etaient  aux  mains  avec  I'empereur.  II 
paryint  d'abord  a  se  relever  de  terre; 
mais  il  fiit  renvers^  de  nouveau,  et  se 
blessa  au  cdt^  et  &  la  joue  en  tombant 
sur  une  taUe  de  marbre.  Le  gto^ral 
Beningsenfut  le  seal  qui  ^vita  de 
prendre  part  k  Taction;  il  r^ptoit  a 
Paul  de  ne  pas  se  d^ndre.  A  peine 
avait-il  eu  le  temps  de  s'^loianer  un 
instant  pour  chercher  de  la  lumi^ 
dans  une  pito  voisine,  qu'il  aper^t 
en  rentrant  Paul  gisant  toangl^  k 
I'aide  d'une  ^diarpe.  Paul  ne  s^^tait 
d^atto  que  faiblement;  seulement  11 
avait  pasM  la  main  entre  son  cou  et 
Fecbarpe,  et  dit  en  francais :  a  Mes- 
«  sieurs,  au  nom  du  del,  ^pargnez* 
«  moi;  laissez-moi  le  temps  de  prier 
«  Dieu. »  Telles  fiirent  ses  demidres 
paroles.  * 

•  Beningsen,  voyant  que  Paul  ne 
donnait  aucun  signe  de  vie,  fit  trans- 
porter le  cadavre  sur  un  lit,  et  lui  en- 
veloppa  la  t^te  d*une  couverture.  Le 
capitaine  de  carde ,  Biarkof ,  ^tant  entr^ 
avec  trente  nonmies .  re^ut  Tordre  do 
s'assurer  de  toutes  les  avenues  de  la 
cbambre  du  feu  prince ,  et  de  n'y  laisser 
pN^ntoer  personne.  Aprte  ces  disposi- 
tions, Beningsen  se  bata  de  faire  con- 
nattre  au  grand-due  k  quel  prix  il  etait 

rtrvenu  au  trdne.  Ce  prince  se  livra 
toutes  les  demonstrations  de  la  plus 
vive  douleur.  Lorsque  Pablen,  qui 
avait  €U  cbarg^  de  la  garde  du  grand 
escalier,  et  de  couper  la  retraite  a  Paul 
en  cas  de  besoin,  apprit  que  ce  prince 
avait  d€\k  subi  son  sort,  il  se  rendit 
aupres  ou  nouvel  empereur.  II  arriva 
au  moment  ob,  celui-ci  s'^criait  toot 
bors  de  lui :  «  On  dira  que  je  suis  Tas- 
«  sassin  de  mon  p^re !  on  m'avait  pro- 
«  mis  de  ne  pas  attenter  a  ses  jours. 
«  Je  suis  I'bomme  le  plus  malbeureox 
«du  monde!*  Pablen,  plus  occup6 
d'a&surer  le  tr6ne  k  Tempereur  vivant 
que  de  donner  des  larmes  k  Tempereur 
mort,  dit  k  Alexandre:  «  Sire,  avant 
« toutes  choses,  veuillez  vous  sou- 
«  venir  qu'un  empereur  ne  peut  sc 
K  mettre  en  possession  de  Pautorite 


40$ 


L'ONiV](;as. 


n.qulaif^  bL  partMi^lHm  du  pevple; 
•  Vtk  nomeiit  de  faibksse  poiurrait 
«  «Y#ir  Jes  mites  ks  plus  fiunestes;  II 
•t  Q'y  «  DM  HB  memMl  a  perdre  pour 
« iHHts  iaift  reooBoaltM  par  I'ann^ 
a  —  ^t  ma  mto,  qa'est-cUedeveaue^ 
«  r^plk)aa  TeiBpereur.  —  Sire,  rapoa* 
«  dit  Pahl6D ,  je  vais  me  rendre  auprea 
«  deSa  Majesty  »  Enefifet,  tt  aetanla 
pas  a-se  prteatar  ohez  I'imf^atriee; 
A  pria  la  graode  maltrcsse  die  la  oour, 
la  cowtesae  de  LieTen,  d'inslriiifis  Sa 
Majesty  de  ce  q«i  Tenait  da  se  passer. 
Ge  qtt'il  y  a  de  lemarquable,  c'est  que 
Kes  sekies  d'horreur  qai  veoaient  era* 
voir  liea  si  pr^  da  cette  princesse 
n'swmi  point  iaterrompu  son  som- 
neil.  E¥eui^  per  la  oomtesse  de  Lie- 
veo,  elle  crut  d*abord  qu'on  Tenait 
pour  la  pr^earer  k  la  nouvelle  de  la 
mort  de  sa  fille,  la  princesse  palatine 
de  Hongrie. «  Nob  ,  madame ,  lui  dit  la 
«comtesse,yotre  Maieste  doit  svr- 
«  vivre  k  un  plus  grand  malheiir;  Tern* 
«  pereur  yient  de  mourir  d'nne  attaqiie 
«  d'apeptexle.  --*  Nob,  non,  s'^ie 
m  rimperatriee,  ii  a  €U  assassin^.  — 
« II  faat  done  vous  Tavover, » r^pHqua 
ki  oomtesse  de  Lieven.  Alors  Fimp^ 
latriee,  s'^nt  habtll^  k  la  bdte,  se 
prteipita  dans  la  <^ambre  de  Paul. 
EMe  trouva  dans  le  salon  qai  separait 
sea  apBaitements  de  ceux  de  Terope- 
reur,  le  lieutenant  ties  gardes  Polta- 
raCsfci,  qui  oontmandait  les  trente 
bommes  que  le  g^n^ral  Mpr^radovitch 
7  avait  postis. 

«  Poltoratski  d^lara  k  rimp^ratriee 
qQ*elle  ne  pouvait  passer  outre.  La 
prinoesse  insists ,  en  demandant  s'il  ne 
tfi  reconoaissait  pas,  et  de  qui  il  tenait 
ces  ordres.  L'olficier  r^pondit  quMl 
avait  rhonneur  de  la  connattre,  et  que 
ces  ordres  .lui  avaient  ^te  donnes  par 
sen  colonel.  N^anmoins  l*imp6ratrice 
voulut  avancer  malgr^  les  gardes : 
oeux-cl  crofs^rent  ia  balonnette.  Alors 
\h  prinoesse  s*^tant  retoarn^  vers  Pol^ 
taratski  hit  donna  un  souillet,  et 
toraba  ^vanooie  dans  un  fauteuil. 

«  Les  deux  grandes-duchesses ,  Marie 
et  Gatberine,  avaient  suivi  leur  m^re : 
eHes  essayerent  vainement  de  la  tran- 
quilliser. L'imp^ratrice  ayant  demand^ 


UB  f«m  d'eau,  hb  aoldat  arKacba  le 
vent  dea  maina  de  la  persoBoe  qui 
Tavait  apport^,  et,  s'dtairt  touro^  vers 
Vimp^atrioe,  il  le  kii  pr^sesta  aprte 
en  avoir  bu  quelques  ((outtes,  ea  di* 
sent:  «  Vous pouvezboure sans crainte« 
•  il  n'y  a  pas  de  poison ;  d'ailleun  vous 
«  n'dtes  cause  de  rien.  » 

c  Enfln  rimperatrice  reotra  dans  aes 
apparfeements.  Pablen  vint  la  dbezcher 
pour  la  oonduune  cbez  son  fila :  a  peine 
avatt-elle  eu  le  temps  de  reprendiie  aes 
esprits;.cepeBdant  die  eut  asaez  de 
force  pour  elever  uoe  ooatestalion  sur 
ses  droits.  Elle  pr^tendit  qu*en  vertu 
de  son  oouronnemeat  elle  etait  inuM^ 
ratrice  nfgnante,  et  qu*eD  eette  quality 
on  devait  lui  priier  serment  de  fid^ 
lit^.  I^'empereur  avait  d^  perdu  un 
temps  pvto'eux  a  attendre  sa  no^e;  en 
la  trouvant  dans  cette  rdsobitioB,  il  se 
touma  vers  Pablen,  et  lui  dit :  «  Voill^ 
«  sn  nouvel  embarras  aoquel  nous  ne 
«  nous  attendions  pas. »  Pablen ,  ne  se 
laissant  arr^ter  par  aucune- considera- 
tion, obligea  rempereor  a  partir  sur- 
le-cbamp.  La  m^me  voiture  qui  ^tait 
pr^r^  pour  transporter  Paul  k  la 
forteresse ,  servit  k  conduire  Alexaadre 
d»  palaif  Michel  au  polais  d'biver,  ou 
il  devait  recevoir  le  serment  de  fidelity 
des  grands  dignitaires  de  I'empirc. 
Pahlen  et  Zoubof  roont^enft  derriere 
la  voiture :  les  bataillons  de  la  ^arde 
suivirent.  Bentngsen  rests  aupres  de 
nmf|eratrice  mire ,  afin  de  la  detoarner 
des  id^  qui  Tooeupaient.  Ce  ne  fut 
pas  sans  peine  que  Ton  amena  Marie 
F^dorovna  a  renoncer  a  ses  preten- 
tions; et  tels  sont  les  cbarmes  de  Tau- 
torite  supreme,  qu*au  milieu  de  eette 
nuit  d'horreur  lis  avaient  assezd'em- 
pire  pour  faire  oublier  a  une  femme 
douce  et  vertueuse  les  dangers  du  pou- 
voir,  la  fin  alfreuse  d'un  ^pom,  les 
sentiments  d'une  mere,  les  conseils 
de  la  prudence  et  de  la  raison. 

«  Enfin  Ton  fit  conseotir  rimpera- 
trice k  prater  serment  a  ferapereur 
son  fits.  D^  ce  moment,  tout  se  passa 
comma  si  Paul  edt  suooombe  k  one 
mort  naturelle. 

«  Un  medecin  et  un  cbirorgten  firent 
Touverture  du  corps  de  Paul ,  et  indi* 


RI^SSIE. 


407 


fioeat ,  tn  tcanfls  d«'  Fart ,  les  eims 
itul  avaient  oeeasienn^  la  nait  de  TeBt- 
pereor*  U  fat  eaAmmo^^  eqws^  pen- 
itot  emiiae  jours  snriui  lit  de  par^, 
et  eimn  H^uin^  dans  le  oavettii  de  ms 
peres  awoe  tovle  la  pompe  aeciNttiiinte 

•  On  eut  lieu  de  reefiarfMf  mw 
UMites  lealfois  qfxe  ke  oMmoniee  cro- 
sage  efeligemni  Aleiafldce  df  approdier 
des  aaABasde  eon  ^ere,  la  dooieuretle 
saiaiaaeioeat  le  peignateot  sur  tons  sm 
traits. 

« (^GMit  aax  aaaaasias  de  Paul,  its 
ftireat  tout  ^fcMgii^;  phuieun  d^tntre 
eux  totirt  eiiKS  dam  lee  r^skDeete 
de  Sib^rie;  M.  de  Pahlea  mane  fut 
foiod  de  quitter  PMersbowg.  » 

Ea  cxaoiinant  eelte  noliee,  on  se* 
rait  porte  i^ennre  mi*eUe  a  M  Migie 

Sir  im  des  chefs  oe  la  oaBapiration, 
Dt  ik  cause  des  details  gu'oo  f  troure  2 
mie  par  le  m^agenent  otrtoe  qui 
wy  fin  YOtr  partout  en  oe  qui  regarde 
b  imnriit^  des  ciieft  de  oette  auda- 
.eicBse  enlMsrise ;  on  J  ietr«Mi?e  mdme  ^ 
a  Fegnd  d'Alexaodre,  un  bUbae  qui 

d^ 


drautant  plus  d^eifet,  qii*il  se 
nise  aoes  des  formea  remetueuses : 
u  en  est  de  m^me  pour  nmptetrice 
Marie:  en  on  root,  il  r^e  dans  tout 
Is  recit  un  caract^re  qui  accuse  un 
eonspinteur'dont  I'exil  ou  la  disgrdoe 
M-pajt  h  etime*  I^un  autre  cAte ,  Tor- 
tuiigraphe  des  noois  propres ,  que  nous 
spooa  soBifent  rectifi^,  annonce  une 
pteoie  Atraof^re;  mals  peut-^re 
D'teit««e  qu'on  artifice  poor  d^tourner 
les  aoupQone  du  vi^ritable  auteur  de 
rartiele.  L*opinion  de  Napol^n  sur  la 
mort  de  Pain,  et  qa'il  a  consignee  dans 
les  Btteoires  de  Sainte-Hel^ne ,  ne  pr6- 
senfe  lien  de  nou?eau,  si  ce  n'est 
qo'elle  aaratt  trops^^  en  ce  qui  con- 
eeme  racquieseement  d'Aleaandre  au 
denouement  tragique  de  cette  catas* 
tivphe.  On  ne  saura  Jamais  tout  sur  la 
mort  de  Paul;  mate  on  en  saft  asses 
sar  les  faitss  prtneipaux  pour  s^en  for* 
mer  one  oonne^n  h  pen  prds  aussi 
oooiplite  que  pour  d*autres  ^v^ements 
de  la  mime  nature :  nous  nous  borne* 
rioBS  done  k  ces  deux  rteits ,  si  nous 
ne  crovions  pas  devoir  mettre  sous  les 
yeux  oe  nos  tocleurs  une  notice  qui  a 


paiti  dans  le  7iMpe  (ft  ftvrier  MH), 
et  qui  a  et^  r^digeeaiir  des  renseigne- 
mente  autbentiqvea.  Gslte  pi^.  donne 
anr  la  vie  privfede  Paul,  et  sur  qnel- 
ques  personnel^  de  sa  eour,  dea  d^ 
tails  qui  cxpliqaeBt  biea  des.chosBS,  et 
r^v^lent  plusimaa  eirooBStaneecHiiH>os- 
tantes  de  la  vie  piivfede  cet  inHortun^ 
monarque* 

«  Pour  qnioonque  i^a  pas  suivi  I'em- 
perev  Paul  dans  sa  vie  priv^,  tout  est 
myttian  et  oantradictioa  dans  sa  cob- 
dwIeL  Sea  vertus  et  sea  vices  parMseent 
egitaMnt  inejqdieiMes,  lorsqifon  ne 
les  envisafse  que  sous  un  seal  point  de 
vue;  aassi  les  toivaine  ont  port6  sur 
ce  prince  des  jagemcntasi  divers  et  si 
oppose,  que  Ton  serait  tent6  de  rc^ 
garder  lea  una  comnie  des  d^aeleure 
passional,  et  les  aotrea  eomme  des 

Gn^yristes  k  gages.  Cepeadant ,  dans 
ir  laexaetitude  mdne,  ils  ont  po 
errer  de  bonne  foi;  car,  soit  en  bieai, 
soit  en  mal,  ]e  ne  saebe  rien  dont 
Paul  n'ait  M  capable* 

«  Dans  une  spbdre  raoins  dievie ,  son 
oridnalitl  n'eut  dtA  que  piquante;  le 
tbditre  oik  I'appelalt  sa  naisaance  le 
transforms  en  mauvais  empereur^  et 
leS  circonstances  contribu^rent  sin^*- 
lidrement  k  mettre  en  sailiie  les  traits 
de  ce  canraet^  oil  les  contrastes  lat* 
taient  sans  cesse  pour  dominer  tour  a 
tour. 

«  Sa  tsine  ramass^,  sa  d^mavehe 
brusque,  ses  manidres  henrt6es  et  la 
difformitl  de  ses  traits,  ^ient  eomase 
un  reprodie  a  CaHierine  II ,  et  lui  rap- 
pelaient  peut-ltre  un  de  ces  ^orts  qui 
apparent  la  gloire  deson  r^ne.  Comme 
eiie  ne  faisart  point  un  myst^re  de  sqn 
eloignement  pour  le  tsar^itch,  ses 
favoris ,  et  surtout  le  prince  Potemkin , 
ne  lui  mluagealent  ai  fbumviiation ,  ui 
m^me  les  outrages. 

«L*Mu€ation  de  Paul,  confix  au 
comtePanvn  (Nio^taslvanovitcb),  avait 
eu  une  double  direction,  Tune  osten* 
sible  et  convenabie  h  son  rang,  I'autre 
secrete,  et  dont  Teffet  tendait  h  ^ouf* 
fer  ses  bonnes  dispositions  et  h  V€- 
nerver  par  les  volupt^s.  Ses  moeors 
ne  sortirent  point  intactes  de  cette 
^preuvc,  et  on  lui  reproche  les  faiV 


408 


'5» 


L'UNIVERS. 


blWi8iil«<IMd^fic  II,  dont  ii  imi- 
tait  ju^uto  costume.  Cependant  ii 
teitnatuteUemeot  port6  a  la  galan- 
t6rie,  eti6bn.penchant pour  lea  femmes 
avait  qudque  chose  ae  dieraleresque 
qui  contrastait  d'uoe  maoi^  inzarre 
avec  les  mceurs  de  I'^poque ,  ausai  bien 
qu'avec  son  propre  axtwieur. 

«Cattierine,  entour^  de  favoris 
puissant^  ^  amiritieux,  avait  mari^ 
aon  ills  k  une  princesse  de  Wurtem- 
berg,  dont'  la  ftoodit^  assuratt  le 
trdne  h  ^fiaunille.  Si  une  fin  prtaa- 
tu'n6e  D'edt/point  d^jou^  les  intentions 
attribute  Flmp^ratrice,  il  est  pro- 
bable que*  la  couronne  eOt  pa83^  h 
Alaiandre,  au  prejudice  de  lli^ritier 
direct.  Cependant  Paul,  rel^u6  k 
^tchina,  y^couvait  son  ressentiment, 
et-semblait  uniquement  occupy  de  faire 
mancenvreir  /  9on  r^ment,  qu'il  se 
plaisait  It  foivm.k  la  discipline  prus- 
sienne. 

«  Le  vovage  qu*il  fit  depuis  en  Eu* 
rope  sous  le  nom  de  oomte  du  Nerd,  et 
ks  honneurs  dont  il  se  vit  entour^  lui 
apprirent  k  s'observer  en  public,  et 
c^est  surtout  depuis  cette  ^poque  qu*il 
affeeta  de  negli{;er  ce  a  quoi  il  sentait 
ne  pouvoir  attemdre. 

«Ge  prince,  malgr^  ses  defauts, 
oagoait  beauooup  a  ^re  connu ;  il  avait 
&  repartie  facile,  I'esprit  enjou6  et  la 
mtooire  heureuse.  II  parlait  avec  ^1^- 
gance  le  francs  et  lallemand,  et  il 
a^duisait  souvent  par  Tam^nit^  de  son 
entretien  ceux  mtoies  qu'il  vepait  d'in- 
tisMder  par  T^trangete  de  ses  formes 
et  le  jeu  expressif  de  sa  physipnomie. 
Un  jour,  pour  ne  oiter  qu*un  exemple, 
Kotzebue,  qui  avait  6t6  exile  par  ses 
ordres,  fut  mand^  au  palais;  il  8*v 
rendit  en  tremblant,  et  sortit  de  cettie 
entrevue  aussi  d^vou^  k  Tempereur  que 
ses  serviteurs  les  plus  intimes. 

«  Naturellement  geo^reux,  il  don- 
nait  avec  une  grSce  parfaite,  surtout 
lorsqu'il  s'qeissait  de  reparer  un  tort. 
£n  butte,  oepuis  son  enfaoce,  a  des 
perstoitions  de  tout  genre,  il  etait  ex- 
trtoement  mefiant;  et  ceux  qui  Ten- 
tooraient  prenaient  a  tdche  de  Tentre- 
tenir  dans  ces  dispositions,  autant 
ppur  9e  reodre  n^cess^ires  que  pour 


Eloigner  ou  perdrequiconque  leur  poi^ 
tait  ombrage.  Frapp^  de  rid^  qu'on 
en  voulaitases  jours,  il  prenait  nabi- 
tuellement  du  oontre-poison ,  et  con- 
chait  rarement  deux  nuits  de  suitedans 
la  mtoe  diambre.  L'^toement  n'a 

gie  trop  bien  justifi^  ses  provisions; 
s  recoms ,  les  cacbettes ,  1^  comdors 
et  les  sonterrains  qu'il  avait  fait  pra- 
tiquer  dans  son  palais,  ne  purent  le 
soustraire  au  ressentiment  de  ses  fyi-' 
voris. 

«  Les  toivains ,  qni  attribuent  pres- 
que  toujours  des  causes  extraordinairea 
aux  catastrophes  des  t^tes  couronn^ , 
ont  essay6  d*expllauer  cet  assassinat 
par  des  inflnences  aiplomatiques,  et  le 
soupoon  tomba  particuli^rement  sur 
r Angleterre.  A  les  entendre ,  cette  puis- 
sance, redoutant  une  alliance  entre  la 
France  rOpublicaine  et  la  Russie,  se 
h§ta  de  frapper  Paul  au  milieu  de  ses. 
nouveaux  projets.  Je  n'h^ite  point  a 
rel^uer  cette  opinion  parmi  les  calon>> 
nies  gratuites  des  faiseurs  de  mtooi- 
res.  qui ,  en  g6n^l ,  connaissent  mieux 
les  livres  que  less  cours.  De  tels  moyens 
sont  rarement  employ^ ,  |>arce  qu'ils 
provoqueraient  des  reprOsailles,  et  les 

{)rinces  aiment  mieux  jouer  le  sort  de 
eurs  peuples  que  de  compromettre 
leur  sdrete  personne||e. 

« II  est  plus  rationnel  de  supposer 
one  le  caractere  soup^nneux  de  Paul, 
dont  Temportement  se  manifestait  par 
des  coups  terribles,  inspira  a  ceux 
mtoes  ^i  jouissaient  de  sa  confiance 
le  dessem  de  le  perdre  pour  se  mettre 
k  Tabri  d*une  disgrace  eventuelle. 

«  On  salt  d'ailleurs  que  des  rensei- 
gnements  officieux  sur  ce  complot 
etaient  parvenus  au  grand  veneur  Kou* 
taitzof,  Des  circonstances  moins  con« 
nues  I'emp^erent  de  s'en  ouvrir  k 
Feropereur. 

«  Quoique  ie  ne  cite  qa^k  regret  des 
bommes  que  j'ai  connus,  la  rOritO  bis> 
torique  me  fait  un  devoir  iTentrer  ici 
dans  quelques  dOveloppements  ndces* 
saires.  Koutaitzof  devait  t)ut  aux  bon- 
t^  de  Paul.  II  avait  etc  d^nnO  enfant  a 
ce  prince,  dont  il  devlntle  barbier  et 
le  valet  de  cbambre.  Plus  tard,  il  sut 
lellement  s^insinuer  daas  les  bonnes 


RUSSIE. 


409 


grfaet  de  son  miitie,  qu*il  jMrmt  auz 
pKonirefl  charges.  Get  homme,  qui 
trafiquaittiasseaieiit  <fe  sa  faveur,  avait 
asses  d'empire  sor  Paul  poor  d^urner 
quelqoes-uiia  des  oukases  qa'il  fulmi- 
nait  dans  les  premiers  acote  de  sa  co* 
Itte.  Pen  de  temps  avant  la  catastro- 
phe, ii  etait  Darvenii  h  faire  r^voqner 
rordre  rdatii  ^  l*ex-£i¥ori  Zoubof .  qui 
aTait  m  rd^^  daos  Fint^rieur  de  la 
Rossie  quelaues  mois  apr^  la  mort  de 
Catherine.  L'empereur  avait  n^ist^ 
longtemps  pour  plus  d*un  motif;  mais 
il  avait  ennn  crae  dans  un  de  oes  mo* 
meats  d*abandoD  ^e  les  courtisans 
tavent  si  hien  saisir;  et  une  somme 
considerable  fat,  dit-on,  le  prix  de  oe 
senice. 

«  Un  joar,  Koutaitzof  troava  sur 
son  secretaire  un  paquet  cachets  qoi 
renfennait  des  dmifis  pr^s  sur  la 
conspiration.  En  t#te  de  la  liste  des 
conjures,  il  lut,  non  sans  terreur,  le 
Dom  de  ce  mdme  Zoubof  dont  il  avait 
n^gocie  le  rappel.  Pr^vovant  blen  qw 
le  fougueux  autocrate  renyelopperait 
dans  sa  vengeance,  il  jeta  le  paquet  au 
feu.  11  est  permis  de  croire  qu'int^ 
ress^  comme  il  T^tait,  il  tira  de 
erands  avantages  de  ceux  dont  il  tenait 
u  vie  entre  ses  mains, -et  que  ees  m^ 
nagements  Fenlac^ent  dans  le  com* 

tM.  Parmi  les  coniur^i  on  remarquait 
eoffite  Zoubof,  le  pnnce  Jaschv^ell , 
faide  de  camp  general  Ouvarof ,  Tal^ 
sin,  Orlof,  et  le  oomte  Pahlen,  gou- 
vemear  militairede  Saint-P^tersbourg. 
«  Je  suis  porte  k  croire,  sans  pou- 
voir  toutefois  I'affirmer,  que  la  r^v^la- 
tioo  avait  M  faite  par  Ouvarof,  qui 
devait  son  ti^ation  rapide  au  crttlit 
dont  joutssait  auprte  de  Paul  la  fsimille 
Lapookhio,  ^ont  j'aurai  bient6t  h 
parler.  N^ayant  ancun  ressentiment 
particalier  centre  Temperenr  qui  I'avait 
eombie  de  fatveurs,  cet  attentat  ne 
poavait  que  nuire  a  sa  fortune.  Toute- 
fois I'avis  anonyme  donn4  h  Koutaitzof 
tent  conune  non  avenu,  Ouvarof  dut 
&ire  bonne  contenance,  et  m^me  fei- 
gner par  sa  participation  active  les 
soupcons  qui  pouvaient  planer  sur  lui. 


•  Quoi  gu'il  en  soit,  Tempereur  re« 
fkt  bientot  ap  ' 


apr^  un  message  sem* 


blable.  Sa  graadeur  d*Anie  se  r6vM 
tout  enti^;  car  c*e8t  une  diose  h  si- 
gnaler, que  les  oontrari6t6i  et  les  tra- 
ossseries  le  trouvaient  pusillanime  et 
irritable,  tandis  que  les  occasions  so- 
lennelles  et  dfoisives  le  rendaient  poor 
ainsi  dire  k  sa  eto^rosit^  native,  en 
lui  ofifrant  un  tlmitre  digne  de  lui. 

« II  fait  venir  Pahlen,  lui  remet  V^t 
crit,  et,  flxant  sur  lui  ses  regards  vifii 
et  pi^n^trants,  il  lui  demande  tranguil- 
lement  ce  que  cela  sienifie.  Celui-d, 
profondtoent  dissimufe  et  pr^par^  h 
tout,  afifecte  une  contenance  rerme. 
«  Je  le  savais,  dit-il  k  Pempereur,  et, 
«  poar  mieui  connaftre  tons  vos  enne- 
«  mis,  j'ai  dd  jouer  moi-m£me  le  rdle 
«  de  conspirateur.  »  lii-dessns,  il  s'^ 
tendit  longuement  sur  le  plan  et  les 
moyenades  coojor6s ,  et  d^nonqa  mAme 
rimp^ratrice  et  les  grands-ducs  A  lexan- 
dre  et  Gonstantin.  Paul,  stup^fait, 
dressa  une  liste  de  proscription,  el 
remit  k  I'audacieux  imposteur  Tordre 
qui  le  mettait  en  mesure  d'^ir  centre 
(es  membres  de  la  feimiUe  imp6riale. 
Pahlen  n'eut  rien  de  plus  presse  que  de 
communiquer  secr^ment  ces  pidces 
aux  coupables  et  k  eeux  que  sa  calom^ 
nie  venait  de  comprometire.  D^  lors, 
il  ne  fut  plus  question  que  de  hAter  le 
coup.  Les  drconstances  odieuses  de  la 
mort  de  Paul  sont  assez  connues ;  pour 
moi,  lorsque  je  mets  dans  la  balance 
ses  vertus  et  ses  hearts,  je  ne  trouve 
plus  de  voix  que  pour  le  plaindre. 

«  Alexandre  n*avait  done  point  cons- 
pire, comme  on  Ta  faussement  pr^- 
lendu ,  mais ,  cro}[ant  sa  perte  certame , 
il  laissa  faire.  L*nistoire  lui  reprodiera 
d'avoir  anmisti6  sur  le  trdne  les  assasr 
sins  de  son  pere.  Sa  jeunesse  et  la 
puissance  des  conjures  expiiquent  sa 
conduite,  sans  toutefois  la  jnstiQer. 
Quant  h  Gonstantin,  il  Si'eleva  avec 
Anergic  centre  les  auteurs  de  cet  at- 
tentat, et  la  noblesse  ne  lui  a  jamais 
Eardonn^  cette  manifestation  honora- 
le.  Depuis,  il  a  ^t^  exclu  du  trdne. 
«  Nous  avons  dit  que  les  mauvais 
traitements  avalent  aigri  le  caract^re 
de  Paul;  il  nous  reste  a  indiqoer  som- 
mairement  qoelques  circonstances  d'in- 
t^rieur  qui  pourront,  jusqu*^  on  o^? 


410 


UUNiVfiAS. 


taiD  point ,  axyliaiMv  te  kyBvnreries  de 
sa  Gonduite  «t  lie  ses  acte»  adninw* 
tratifisi. 

«  Una  fois  empareur,  il  sambXa  |tff«a* 
dre  ^  Ucbe  d'insulter,  par  i*^ciat  dos 
e^r^monies  pubiioueB,  las  saignaur* 

Si  avaiavt  yoni  q»  sa  disgrwe  sous 
tharine.  La  praniar  acta  saiUant  da 
sanr^oafatrexhufQatioadePiarrein , 
auqual  il  readit  sotomial&amant  laa 
hoonaurfr  funabias,  comma  poar  pro* 
tatter  hautemant  eoatra  la  passe.  II 
f ^kit  a&suita  d'aatourar  son  couron* 
naoiaiit  da  tottt  le  fasta  d'tma  aoar 
rieba  at  somptueusa.  las  oostumas  des 
damaa  da  la  ooiir  furant  offieiellemant 
BTCBarita  d'apras  las  niod^aa  usilaa  k 
la  aour  das  damiers  rois  da  Franca. 

«  S^uita  par  aas  nouTaautila,  la  m^ 
Idaasa  da  Patarsbourg  at  oelia  das  villas 
las  plua  considi^rablas  da  Faminra  ac- 
CQurut  an  fcnila  k  Mosoau.  La  jour  da 
la  cMmonia*  Paul  sortit  k  cheval  da 

eais  de  P^trovski,  at  sa  rendit  au 
emlin  ,%acort^  da  sas  fila,  das  grands 


«  Ge  flit  dana  las  fites  nombrensas 
^i  sa  suca^ereBt  qa^il  remarqna  la 
jauna  Anna  Ptoovna,  fiUa  du  saaateur 
iLapoiikhin,  ai^*gouv»naur  g^naral 
d'laroslavl.  G*ast  dans  eette  familla 
qtt*un  si^cle  auparavant  Pierre  leGrand 
avail  cboiisi  sa  pramiera  Spouse,  mars 
dayiafortuA^  Alesis. 

«  Lea  cbarmes  d*Anna,  sas  ^r^iees, 
aa  moda&tia  Orant  sur  Paul  una  laipres- 
sJeneitvaerdinaira.  Cependantcagodt, 
qui  davint  una  passion  violai^^  na  fat 
point  ramarque  d*abord,  at  ii  sa  con- 
tenta  d'ang^r  an  tarmes  asacs  vaguaa 
la  s^nataur  Lapcmkiiin  k  venir  s'atzdilir 
a  Patarsbourg. 

•  Soit  qu'il  vouMt  lutter  contra  oa 
panabant,  soit  qu*il  filt  distrait  par  las 
soina  at  las  devoirs  nouveaux  qua  Ini 
impoaait  la  oouronne,  il  quitta  Mos* 
cou»  at  pour  la  maokent  eette  pro|K>« 
sitiiOA  n  aut  pas  da  suite.  Una  cirr 
emistanee  fortuita  vint  bientdt  apres 
r^vaUlar  en  lui  ta  souvenir  d'Anoa  P4- 
trovna*  La  gantilbomme  de  la  abam^ 
bre,  Bamidof  (Gr^oira  Alexandra^ 
vitb),  recbarcba  Gatharina  Patrovna, 


scour  d'itnna,  at  dcmaiidft^  aaion  IV 
sage,  rautorisatiQH  de  ramparaur. 
Paul  crut  qu'il  a'agisaatt  d'Anna,  at, 
dana  un  premier  mouvamant  de  d^t, 
il  intardit  k  Damidaf  la  villa  da  Patars- 
bourg ,  at  Taxclut  du  sarviea  aetif,  aaos 
toi^ois  s'opposar  k  e^  roariaga. 

•  Un  an  a|^r^,  il  flt  un  vojraga  k 
Casan ,  at  revipt  k  Moscottt  ou  d  ravit 
Anna ,  at  api^it  d'eUe  la  mariaga  da  sa 
8Q»ur.  Aiors  il  it  proraatUra  a  son  p^re 
da  sa  randre  k  Patersbour^,  ou  li  la 
eoiobla  d'bonneurs  at  da  difniit^.  La 
position  du  s^nalaur  Laponkhia  ^it 
das  phia  d^ticataa;  il  n'ignorait  pas  la 
motif  de  sa  nouvalla  favaur,  ni  le  dan- 
gar  da  haoitar  da  firont  un  nudtre  im* 
p^rieux  et  passionne.  De  son  eM^ 
Anna  se  d^smait  d'lm  cboix  qui  con- 
trariait  son  ineltnation  aacrata.  Ella 
avait  eta  fiances  au  prince  Gagarin 
(Paul  Gavril^itcb),  et  ka  obstadas 
^e  raaaantrait  lamr  union  donnaieot 
una  nonvalle  vivaisit^  h  km  mutual 
attadiemant. 

<  Paul  na  pouvait  se  dissimiiler  qu'il 
n'avait  auenn  das  avantagas  physiques 
aapables  da  touchar  una  jauna  par* 
Sonne.  II  assaya  inutilemaak  d'excttar 
son  ambition;  il  alia  mdme  jusqtt*^  lui 
proposerda  r^udiar  rimperatricapour 
mattre  la  oouronne  sur  sa  tgta.  Das 
offraa  si  briUantaa  dpouvant^rent  Anna 
P6trovna^  et  il  tenta  dasoniiaia  da 
vaincra  una  r^istanoa  dont  il  ignoralt 
la  motif,  k  ferae  de  pr^venanoas  et  da 
g^n^osita. 

«  Dana  ce  but,  il  alava  la  si^nataur 
Lapoukhin  a  la  dignite  s^r^ussima, 
et  voyant  qu'Anna  natenait  point  a  la 
eoitr  le  rang  que  lui  asaignait  sa  pre- 
ference exdostve,  il  lui  ooo^a  ka 
insignes  de  I'ordra  da  Malta ,  atnsi  qn'k 
k  eomtesse  Litta ,  oa  qui  leur  assuratt 
la  pas  sur  las  autras  dames  d'hoonaur. 

«  L'imparatrica  Maria  Fdodoiroviia 
ne  pouvait  ^ra  jalaose  d'une  rivale 
qui  gtoissait  la  pramiera  da  sa  &vaur, 
et  eue  lui  fi6moigna  ooBstammant  Tin- 
t^rdt  la  plus  affeetuaux. 

«  Paul  essayait  aussi  d'd)lottir  Anna 
par  des  innovations  dispendiattses  qui 
ne  la  randaiant  paSi  plus  atmable. 
Dans  un  caprice  de  prodigality,  il  fit 


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AUSSIE. 


411 


fondre  la  vaiaselle  oaatsive  des  villes 
de  gottverneiuent  pour  earichir  Tuni* 
forme  de  $es  chevalierg-gardes.  Uq 
jour,  il  ramassa  tin  gant  dela  favorite, 
et  donna  des  ordre&  pour  Dodre  peindre 
de  la  m&nfi  couleur  le  palais  de  Saint- 
Michel  gui  venalt  d^£tre  achev^. 

«  Sa  ^oasie  allait  jusqu'5  Fextrava* 
gance.  Ayant  appris  que  deux  jeunes 
sei^eurs,  Larioeaupiere  et  Barazdin, 
avaient  dans^  avec  Anna,  qui  avait 
setnbl^  y  pjrendre  plaisir,  il  deiendit  la 
valse  dans  les  bals  oarticuUers  et  pu- 
hlies;  et,  des  deux  oanseurs  pr^^res. 
Tun  fut  mis  pour  viogt-quatre  heures 
h  la  forteresse,  I'autre  dut  quitter  Pe^ 
tersbouTjg.  Eofin  une  circonstance  for^ 
tuiie  kii  dessiUa  les  yeux.  Le  jeune 
Ga^rin  serTait  en  Italie  sous  les  or- 
dres  de  Souvorof.  tin  bulletin  Yenait 
d'etre  adresse  a  Terapereur  sur  un 
avanta^  remport^  par  les  Russes.  I) 
le  lut  a  Anna  dont  remotion  ^tait  vi-* 
sible;  mais  lorsqull  nomma  parmi  les 
bless^  le  prince  Gagarin,  elle  ne  fut 
plus  maitresse  de  sa  douleur.  Paul 
ex^ea  une  explication  qui  lui  fut  don* 
nie.  Get  homme  si  entier,  dont  le  bon^ 
beor  Teaait  d'etre  detruit ,  montra  dans 
cette  occasion  toute  sa  grandeur  d'ilme*^ 
II  lui  reprocba  avec  bont^  d'avoir 
manque  de  confiance  a  son  ^sard,  lui 
donaa  sa  parole  imp^iale  qu^eUe  serait 
cHue  a  Gagarin,  ^youtant  qtril  aurait, 
soin  de  son  aYaocement  et  de  sa  for- 
tune; et,  par  la  suite,  il  remptit  di- 
gnemeat  cette  tdcbe  difficile  et  glo- 
rieuse. 

«  Mais,  depuis  ee  BH>meDt«  il  devint 
de  plus  en  plus  sombre  et  ^ntasque. 
Les  disgraces,  les  bannissements,  les 
oidres  lies  plus  arbitraires  se  succede- 
rent  avec  rapidity,  et  amenerent  les 
cboses  a  un  point  qui  annon^ait  aux 
moins  dairvoyaats  une  catastrophe 
procbaine, 

«  Quelques  ana^s  apres  sa  mort, 
une  malaoie  de  poitrine  enleva  a  Pe- 
tersbourg  Anna  Petrovna,  princesse 
Gagarin,  dont  j'ai  recueilii  les  derniers 
soupirs.  Elle  ne  parlait  jamais  de  son 
bienfaitear  qu'avec  attendrisseoieot; 
et  je  lui  ai  repete  maintes  fois  que  sa 
vertu  avait  fait  plus  de  inal  a  la  Hussie 


que  n'eussant  pu  lui  ea  oceasionoer  les 
vices  et  les  prodf  galit£s  d'une  favorite 
ambitieuse..^ 

uaxAxaaB  i««. 

(1801-1026.)  Jusqu'ici  nous  arons  vn 
la  Russie  mettre  a  ^fit  le  disaccord 
de  TEurope  pour  etendre  ses  Iron- 
tieres,  en  mme  temps  qu'eUe  donnail 
plus  d'homog^niit^  a  ses  institutions. 
Si  Ton  suit  les  progres  de  cet  empire 
depuis  Pierre  le  Grand ,  on  reconnaJt 
que  le  caract^  des  princes  qui  se.sont 
8ucc^6  a  merveilleusement  n&U  le  d^ 
veloppement  de  sa  puissance  militaire : 
il  n'est  pas  jusqu^aux  r^es  voloptueux 
d'Anne  et  d^lisabetn  qui  n'aient 
fourni  leur  contingent  de  gloire;  les 
bizarreries  de  Pierre  III  n'en  avaient 
aas  moins  la  guerre  pour  objet;  Ca« 
iherioe,  tout  en  affectantde  travailler 
uniquement  a  ramilioration  du  sort 
de  ses  peuples ,  avait  6tendtt  son  sceptre 
plus  loin  qu*aucun  de  ses  pr^eces- 
seurs;  eafin  Paul  I'",  dans  le  court 
espace  de  quatre*  ann^es,  avait  mis  la 
r^publique  fran^iise  en  p^il,  et,  par 
un  brusque retour  de  sa  politique,  la 
coalition  s'^tait  trouv^e  deeouragee, 
et  FAngleterre  r^uite  h  n'esperer  de 
salut  aue  dans  le  raeurtre  de  Tauto- 
crate  uevenu  Hallie  et  Fadmirateur  du 
premier  consul.  Telle  est  Tenergie  vi- 
tale  de  la  nation  russe,  que  les  fautes 
m^mes  de  ses  princes  lui  sont  profita- 
bles,  comme  s  il  fallait  a  ce  corps  ro- 
buste  un  exercice  violent  a  tout  prix. 

Apr^  tous  ces  regnes  si  agites  et  si 
dissemblables,  a  Tambition  pi'^s,  on 
voit  moater  sur  le  trone  ensangiant^ 
un  jeune  nrince  dont  la  douceur,  la 
justice  et  les  qnalit^s  les  plus  aiuia- 
bles  inspiraient  les  plus  legitimes 
esperances.  Par  un  jeu  singulier  de  la 
fortune,  il  se  trouva  rantagoaiste  d'un 
homme  a  proportions  b^roiques ,  dont 
Tepee  devait  briser  toutes  les  resis- 
tances, dont  la  gloire  devait  ^lipser 
toutes  les  gloires ,  et  qui  tomba  du  plus 
haut  de  sa  puissanee  aux  pieds  d'un 
prince  sans  talentsguerriers,  d'ub  rival, 
qui,  par  le  seul  avantage  de  sa  position, 
sut  mettre^  profit  jusqu'^  sesd^faites, 


419 


L'UNIVERS. 


et,  dans  une  derail  lutte  corps  h 
corps,  renversa  sur  la  neige  le  vain- 
queur  de  Marengo,  d'Austerlitz  et  de 
la  Moskva. 

Alexandre  ne  prit  qa*k  r«gret  les 
r^nes  de  I'eropire;  il  avait  eu  tout  le 
loisir  d'^tudier  les  devoirs  difficiles  da 
despotisme,  et  de  mesurer  Tabtme  sur 
lequel  sont  plac^  les  de^r^  du  tr6ne 
tsarique.  Vertueux  et  plein  d^affection 
pour  les  auteurs  de  ses  jours,  il  s*^tait 
vu  fbro6,  dans  Fintmt  de  T^tat  et 
dans  celui  de  sa  propre  conservation, 
de  consentir  au  d^tronement  de  son 
p^e;  mais,  aprte  le  crime  qui  avait 
couronn^  cet  acte  de  r^volte,  il  s'aban- 
donna  h  une  douleur  sincere.  La  pu- 
rely de  ses  moeurs,  la  douceur  de  ses 
traits,  la  droiture  de  ses  intentions, 
formaient  un  contraste  singulier  avec 
la  couleur  sombre  du  regne  qui  venait 
de  finir;  l*amour  du  peuple,  d'autant 
plus  vif  qu'il  se  confondait  avec  I'es- 
poir,  6carteit  du  tr6ne  les  souvenirs 
lugubres  d'un  crime  atroce ,  et  h  peine , 
en' prince  du  r^sultat,  les  plus  aus- 
teres  trouvaient-ils  la  force  ae  bldmer 
ce  qui  devait  dtre  profitable  k  tous. 

Les  quality  de  ce  jeune  prince 
avaient  et6  beureusement  d^velopp^es 
par  r^ducation;  ses  pr^pteurs,  et 
surtout  le  colonel  la  Harpe ,  lui  avaient 
Hiculqu^  de  bonne  heure  le  respect  de 
rbumanit^,  et  le  sentiment  proiond  de 
ce  qu'un  sottverain  doit  h  ses  peuples 
en  ^ange  de  leur  ob^issance  et  de 
leur  d^vouement ;  mais,  en  m^me  temps 
que  Fesprit  du  grand-due  se  nourns- 
salt  de  ces  principes  salutaires,  il  ne 
pouvait  se  dissimuler  qu'il  est  pour  le 
pouvoir,  plus  encore  que  pour  Tnomme 
priv^,  des  exigences  de  position  et  de 
temps  auxquelles  doivent  se  plier  les 
theories  morales;  en  un  mot,  que  celui 
qui  gouvernerait  toujours  les  bommes 
tels  Gu'ils  devraient  £tre,  serait  inha- 
bile  a  les  gouvemer  tels  qu*ils  sont. 
Le  r^gne  de  Catberine  II,  celui  de 
Paul,  lui  avaient  appris  que  la  gran- 
deur, la  gloire  et  fa  ^enerosit^,  ont 
leur  c6i6  obscur,  tandis  que  des  actes 
moralement  oondamnables  sont  quel- 
quefois  en  politique  d*une  incontestable 
\itilit^.  Ce  fut  done  entre  les  limjtes 


du  bien  abstralt  et  les  conditions  pra- 
tiques d'un  r^ne  absolu  qu'il  tra^  sa 
ligne  de  conduite,  et  ce  milieu,  dans 
son  aoception  la  plus  bonorable ,  il  ne 
s'en  torta  jamais;  il  accepta  les  avan- 
tages  comme  les  inconv6nients  de  cette 
modtotion,  de  cette  temperance  po- 
litique, qu'il  n'a  pu  suivre  comme  sys- 
f^me  que  parce  qu'elle  ^tait  dans  les 
conditions  de  sa  nature.  Si  nous  ajou- 
tons  k  oes  considerations  que  le  rdle 

au'il  eut  h  remplir  6tait  moms  un  r5le 
'initiative  que  d'observation  et  de  re- 
sistance, on  oomprendra  pourquoi  Na- 
pol69n  vaincu  et  detrdne  a  conserve 
cette  renomm^e  prestigieuse  qui  s'at- 
tache  aux  grandes  cboses,  tandis 
qu' Alexandre,  devenu  I'arbitre  de  I'Eu- 
rope,  a  plus  de  droits  k  I'estime  qu'd 
I'admiration. 

Le  cofonel  l^asson  a  trace  en  ces 
termes  le  portrait  d' Alexandre  encore/ 
grand-due:  «  Ce  jeune  prince,  par  la 
purete  de  son  moral  et  la  beaute  ae  son 
physique,  inspire  une  esp^ce  d'admira- 
tion.  On  trouve  presaue  realise  en  lui 
oet  ideal  qui  nous  enoiante  dans  Tele- 
maque. 

«0n  pourrait  aussi  lui  reprocber 
les  memes  defauts  que  Fenelon  laisse 
k  son  eieve:  mais  ce  sont  peut-etre 
moins  des  defauts  que  I'absence  de 
quelques  qualites  qui  ne  se  sont  point 
encore  developpees  en  lui ,  ou  qui  ont 
ete  repoussees  dans  son  coeur  par  les 
alentours  meprisables  qu'on  lui  a  don- 
nes.  II  a  de  Catberine  une  grandeur 
de  sentiment  et  une  egalite  (Thumeur 
inalterable,  un  esprit  juste  et  pene- 
trant et  une  discretion  rare,  mais  une 
retenue,  une  circonspection  oui  n'est 
pas  de  son  dge,  et  qui  serait  ae  la  dis- 
simulation, si  on  ne  devait  pas  Fattri- 
buer  k  la  position  genee  oti  il  s'est 
trouve  entre  son  pdre  et  sa  grand'  mere, 
plut6t  qu'a  son  coeur  naturellement 
franc  et  ingenu.  II  a  de  sa  m^re  la 
taille,  la  beaute,  la  douceur  et  la  bien- 
faisance;  noais  aucun  trait  exterieur 
ne  le  rapproche  de  son  pere,  et  il  doit 
d'ailleurs  le  craindre  plus  que  I'aimer. 
Paul ,  devinant  les  intentions  de  Catbe- 
rine en  faveur  de  ce  fils ,  a  toutours  eu 
de  I'eloignement  pour  lui;  il  ne  lui 


RU8SIE. 


4ia 


trouve  ni  aon  caractto  ni  ms  godts; 
car  Alexandre  paratt  se  prater  par 
ob^issanoe  plus  que  par  inclination  h 
ce  que  son  p^e  exige  de  lui.  II  est 
ado?^  dn  spidat  k  cause  de  sa  bont^, 
admir^  de  Tofficier  k  cause  de  sa  rai- 
aon;  il  fst  le  m^iateur  entre  Tauto- 
crate  et  les  matheureux  qui ,  pour  quel- 
goes  riens,  ont  provoqu^  la  colere  et 
la  vengeance  imperiale.  Get  61^ve  de  la 
Harpe  ne  serait  pas  grand-due  de  Rus* 
sie  qu'il  inspirerait  de  Famour  et  de 
rinter^;  la  nature  Ta  dou^  tres-riche- 
meat  des  |)lu8  aioiabtes  qualit^s^  et 
ceDe  d'h^itier  du  plus  vaste  empire  du 
oioode  ne  doit  pas  les  rendre  indiffi^ 
i€Qtes  k  rhumanit^;  le  cid  le  destine 
peui-^tre  k  rendre  trente  millions  d*es- 
daves  plus  libres  et  dignes  de  Fdtre. 

«Au  reste,  U  est  d'un  caractere 
heureux,  mais  passif.  II  manque  de 
hardiesse  et  de  oonfianoe  pour  recber- 
dier  rbomme  de  m^ite,  toujours 
modeste  et  retenu :  il  est  ii  cramdre 
que  le  plus  im|x>rtuD  et  le  plus  effront^, 
qui  est  ordinahrement  le  p»lus  ignare  et 
fe  plus  m^ant,  ne  parvienne  a  Tob- 
Muer.  Se  laissant  trop  aller  aux  impul- 
sions ^tmnghreSj  il  ne  s*abandonne 
pas  assez  a  celles  de  sa  raison  et  de 
■on  ooeur.  II  semble  perdre  renvie  de 
a'instmire  en  perdant  ses  mattres,  et 
anrtout  le  colonel  la  Harpe.  » 

On  pourrait  s'^tonner  qu'avec  un 
prince  juste  et  pacifique  la  Russie  soit 
rest^  militaire  et  conqu^rante.  Un 
coop  d*oeil  jet^  sur  la  carte  de  cet  em- 
pire suffira  pourqu'on  reconnaisse  que 
ses  frontims,  ouvertes  k  Toccident, 
le  roeftent  constamroent  en  p^il,  jus- 
qo'a  ce  que  ses  forces  raantimes  lui 
aient  assure  Fempire  de  la  Mdditer- 
ranee;  un  accord  possible  entre  les 
gnindes  puissances  de  TEurope  pour- 
xait  lui  retirer  en  deux  campagnes  tout 
ce  qu'il  a  conquis  en  un  sidcle  et  demi. 
It  lui  importe  doocdese  mdler  k  toutes 
les  goerres  eontinentales ,  et  de  mettre 
k  prix  son  alliance  pour  aCfaiblir  les 
nations  rtvales ,  et  grandir  ainsi  jusqu'^ 
r^poque  oil  sa  population,  sans  cesse 
eroissante,  le  laissera  sans  apprehen- 
sions sur  son  territoire  et  lui  per- 
mettra  de  s'etendre  encore.  Cest  en 


▼ain  que  TEurope  se  llatte  que  oe  eorps 
gisantesque  se  morcellera  de  lui- 
meme ;  le  d^faot  d'adh^on  de  tant  de 
pix)Tinces  est  moins  un  obstacle  qu'un 
moven  pour  le  despotisme :  qud  in- 
t^ret  prendraient  les  Finois  ^  la  r6- 
volte  des  peuples  du  Caucase?  Quand 
la  Pologne  s'est  6oulev6e ,  les  peuplades 
asiatiques  ont-elles  essay^  de  ressaisir 
leur  ind^pendance?  Sans  doute  la  Rus> 
sie  subira  le  sort  commun  k  tons  les 
peuples;  mais  les  rivaliti^  i^esquines 
des  grands  £tats  de  FEurope  favorise- 
ront  loogtemps  encore  Fextension  de 
sa  puissance,  et  elle  ne  p^riclitera  que 
par  sa  propre  civilisation,  k  Fepoque 
ou  la  scission  du  territoire  s'operera 
par  la  divergence  des  interlts. 

La  condutte  du  jeune  tsar  k  F^ard 
des  conjures  fut  mixte,  et  resta  pour 
ainsi  dire  dans  les  limites  de  sa  parti- 
cipation au  complot.  Us  furent  £loi- 
§n6s  de  la  cour  pour  avoir  m  au  ddk 
e  ses  ordres;  mais  aucun  sunplice  ne 
leur  fit  expier  le  meurtre  oe  Paul; 
Alexandre  aurait  pu  les  sacrifier  k  sa 
propre  renomm6e,  et  rejeter  ainsi  sur 
eux  seuls  tout  Fodieux  du  forfeit;  sa 
conscience  rej;)oussa  une  telle  justifica- 
tion, et  jamais  son  amour  pour  la  jus- 
tice n'^lata  plus  que  dans  cette  con-, 
joncture  delicate :  il  redoubla  d'^gards 
pour  sa  m^e,  et  tout  le  reste  de  sa  vie 
Fabsout  du  soup^on  d'avoir  atteot^ 
sciemment  aux  jours  de  son  p^e. 

En  montant  sur  letrdne,  il  crut 
devoir  annoncer  par  une  proclamation 
quelle  serait  la  li^ne  de  son  adminis- 
tration et  de  sa  politique.  Ce  manifeste , 
con^u  en  termes  g6n^aux,  contenait 
la  promesse  de  gouverner  conform^- 
ment  k  Fesprit  de  Fimp^ratrice  Cathe- 
rine II.  En  s*abstenant  de  parler  du 
r^ne  de  Paul ,  on  eUt  dit  qu'il  craignait 
d'eVoquer  un  souvenir  funeste ;  Faoan- 
don  des  plans  de  ce  malheureux  empe> 
reur  n*eut  peut-^tre  pas  d*autre  motif. 
Les  premieres  d-marches  avec  les 
cabinets  Strangers  signal^rent  une  ten- 
dance pacifique :  le  jeune  tsar  ecrivit  a 
George  III  pour  lui  t^moigner  le  d^ir 
de  terminer  les  difif^rends  qui  s'^taient 
dev^  entre  la  Russie  et  FAngleterre; 
pour  montrer  la  franchise  de  ces  ou- 


414 


L'UNEVEIIS. 


▼erhires,  tt  fit  rendre  la  libertt  anx 
Equipages  tlont  les  bdtinaentB  avatent 
ifit6  s^questr^  par  ordre  de  Paul;  fl 
leva  les  ]»robmftioDs,  eons^enees 
ndcessaires  des  hostiitt^,  et  fit  pr6- 
renir  de  oea  dispositions  ramiral  Parker 
qui  commandait  la  flotte  anglaise  dans 
la  Baltique.  Bonaparte  ne  vit  dans 
cette  condaite  mi'un  corollaire  de  la 
mort  trasique  oe  Paul;  cependant, 
comme  Alexandre  avait  siimiltan^ent 
manifesto  I'intentiOD  de  rester  en  paix 
arec  la  France,  le  premier  consul  ne 
perdft  pas  Tespoir  de  se  condlier  le 
jeune  empereur,  qui  recut  avee  les 
m^mes  6^ards  le  g^n^ral  Duroc  et  lord 
Sainte-Heldne,  ambassadeurs  des  deux 
cours  ri vales.  Toutefois  la  preponde- 
rance britanntqoe  ne  tarda  pas  k  se 
r6v61er;  Terabiurgo  hit  d^nitirement 
leT6  dte  le  18  niai,  et,  nn  mois  apr^s, 
une  nouveHe  conrention  maritime, 
conclne  entre  la  *Ru8sie  et  I'Angle- 
terre,  fi^tipula  que  la  premiere  de 
ces  puissances  abandonnerait  tous  les 
points  pr6c6demment  eontest6s  sans 
pr6tendre  tk  aucune  indemnity.  II  ^ait 
CTident  ou'nne  determination  si  inat- 
tendue  biessait  les  int^r^ts  de  la  Suede 
et  du  Danemark ,  que  la  Russie  avait 
pouss^s  h  la  guerre  pour  les  m^mes 
motifs  4ont  il  lui  convenaH  de  fairs 
actuellement  si  bon  march6. 

Com  me  compensation ,  la  Su^de  ob- 
tint  la  publication  d'un  trafted*alliance 
entre  Petersbours  etStockholm ,  traits 

3ui  avait  M  ratiQ6  la  vellle  de  ia  mort 
e  Paul. 

L'appui  du  Tford  manquait  h  la 
France;  la  paix de  Lun^ville  ne  parais- 
sait  qu^une  tr^ve,  pendant  laquelle 
cbacun  se  disposait  a  rentrer  en  lice; 
le  mauvais  succte  de  Texpedition  A't- 
cf  pte  avait  jete  quelque  decoura^ement 
dans  les  esprits.  Des  preiimmaires 
furent  sign^s  k  Paris  entre  la  France 
et  rAneleterre;  et  hurt  jours  apres,  le 
8  octoDre,  un  autre  traits  avec  la 
Russie  r^gularisa  la  situation  respec^ 
tive  de  Tempire  et  de  la  r^publique; 
la  paix  d' Amiens,  amenee  par  Pinter- 
vention  de  la  Russie,  et  surtout  par 
repuisement  des  parties  belligerantes , 
fiit  conclue  sur  des  bases  peu  solides 


(1809).  Vers  la  m^me  epoque,  llAd6- 
pendance  de  la  r6publique  desSept-Iles 
tut  garantie  par  la  Franoe  el  la  Tar- 
quie.  Cette  mesure,  dictee  par  llnt^rlt 
anglais  et  russe,  annon^it  des  Inteo- 
tions  bostHes  contre  les  possesafOM 
fran^ses  en  Italic. 

Bientilt  les  vues  da  cabinet  4e 
Londres  commenoerent  ik  se  dessioer 
d^une  mani^re  plus  nette.  Aa  meprfo 
des  traites,  les  vaisseaux  aH^lais  ne 
respectaient  plus  auean  pavilion,  et 
revacuation  da  Hanovre  etait  Tc^et 
de  reclamations  incessantes.  Au  milieu 
de  ces  tiraillements,  qui  annoni^aient 
one  rapture  prochaine,  Markof,  am- 
bassadeur  russe  k  Paris,  se  livrait  k 
de  sourdes  intrigues  qai  compromet* 
taient  le  carad^  de  son  soaverafn  : 
11  fut  honteosement  expuls^de  France ; 
et  le  tsar,  poar  attenuer  oe  que  oe  ooup 
d^autorite  avait  de  blessantpour  sa  dt- 
gnite,  jugea  convenable  de  gratlfier 
rimperitie  de  ce  ministre  d'une  pen* 
sion  de  douze  mille  roubles. 

Tandis  que  rinfluence  russe  se  r^ 
veiait  de  tout  cdte  dans  les  affaires  de 
TEurope,  les  courtisans  cherchaient  k 
deeouvrir  le  cdte  faible  du  jeune  em- 
pereur  :  la  nature  Favait  cadie  dans 
un  penchant  trds-prc«once  poar  le 
sexe,  et  qu'augmentaient  encore  les 
seductions  ^*une  cour  brillante.  Marie 
It  TAge  de  seize  ans  k  la  prinoesse 
Louise-Ameiie,  fille  du  margrave  de 
Bade ,  et  qui  prit ,  en  adoptant  la  eom- 
munion  greeque,  le  nom  d'lfelisabetli 
Alexeievna,  n  se  contenta,  pendant 
quelque  temps,  des  affections  oonjo- 
gales,  et  oonserva  memo  jusqu*A  aa 
mort,  pour  sa  vertueuse  epottse«  les 
sentiments  d^une  estime  merilee :  on 
assure  qu'une  inoommodite  tres-oom- 
mune  dans  le  Nord.  en  fanant  preroa* 
torement  la  beaute  d'^lisabeth ,  eioinia 
jd'elle  son  jeune  epoux,  el  la  priva  des 
douceurs  oe  la  matemlte.  Nous  ne  si- 
gnalerons  pas  les  nombreoses  infide- 
utes  d* Alexandre,  qui  interessent  peu 
rhistoire :  elles  <mt  toujours  ete  ooa- 
vertes  d*un  voHe  de  decenoe ,  et  jamais, 
que  nous  saehions,  elles  R*ont  eieroe 
une  influence  sensible  sorsa  politiqiie. 

Les  desordres  de  radministrotion 


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I 


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RUSSIE. 


415 


appelaient  une  inroinpte  rtforme:  fo 
tsar  sVn  oocupa  avec  sollKitiide;  mats 
la  m^me  bienveiilance,  qui  le  por- 
tait  a  entrepreodre  cette  tlk^be  difG- 
cile,  Veinp6cfaait  d*attaquer  avec  une 
fierroet^  emcaca  des  abos  dont  tant  de 
fbnctionnaires  profitaient.  « 11  corn- 
men^  ,  dit  RaUbe ,  par  abolir  la  ehan- 
ceHerie  secrete «  veritable  inquisition 
d*£tat,  que  Catherine  avait  oonserv^e 
depuis  Tann^  1763,  sous  le  nom  am- 
bigtt  de  d^parteroent  secret.  II  ^blit 
on  conseil  permanent  pour  Texamen 
pT^able  de  toutes  les  ordonnances 

3ii*il  y  aurait  h  rendre  sor  ks  affaires 
e  Fempire;  il  tnTCStit  d*une  nouvelle 
considtf ation  le  s^nat  dirigeant ,  et  fin- 
cerposa  eomme  mMiateur  entre  le 
peuple  et  le  souverain ; »  mais  il  ne 
put  arr^ter  la  marche  vicieuse  que  la 
T^alit^  avait  introdufte  dans  ce  coips 
nombreux,  ou  la  capacite  administra- 
tWe  et  la  probity  ^prour^e  se  trouv«nt 
mretnent  T^unies.  Le  pouvoir  ^fectrf 
da  siaat  resta  par  le  fait  fort  pen  de 
ehose,  eomine  rextgeaient  les  condi- 
tions d'un  gouTernement  despotique; 
mats  on  se  serrit  souvent  de  sa  pr^ 
tendue  influence  comme  d*un  pr^texte 
sp^dcttx  pour  ^luder  des  demandes 
auxquellcs  on  iUH  peu  dispose  h  ob- 
tensp^r.  «  Alexandre  r^tablit  les  re- 
lations de  commerce ,  rappHa  de  Sib^rie 
mi  grand  nonAnre  d'exiles,  permit  la 
libre  importation  des  livres,  modilla 
la  8fr^t6  de  la  censure,  exerapta  le 
clerg6  des  peines  corporeUes,  restitua 
k  la  noblesse  ses  anciens  droits,  ao- 
oorda  aox  fermiers  la  permission  dc 
eouper  du  bois  dans  les  forto  dc  la 
cDuronne,  encouragea  Ke  commerce  et 
MB  manufactures,  et  s^effor^  d'ara^ 
Korer  la  condition  des  serfe. » 

Tandis  que  M.  de  Kalitcbrf,  envo^ 
rosse  h  Paris,  prescrivalt  h  la  France, 
eomme  condition  de  la  paix  euro- 

B^nne,  la  r^t^gratfon  des  J^ts  de 
aples  et  de  Sardaigne  sous  leurs 
prfncea  l^crtimes,  Alexandre  consom- 
mait  (1901)  la  r^nion  de  la  G^origie 
a  Penmfre Tusse.  Do  reste,  cet  empi^ 
tement,  dont  les  guenres  ult^rieures 
eoQtre  la  Turqnie  et  la  Perse  ont  d^ 
nootre  Pimportance,  ^tait  justifi^  par 


des  promesaes  «p^cieiMe8. «  Nous  avons 
consenti ,  d^ara  le  tsar,  dans  un  ma- 
nifeste,  h  Funion  de  la  G^gieavec  la 
Russie,  non  pour  augmenter  notre 
puissance,  ni  dans  des  vues  nrt^rea- 
s^,  mais  uniipiement  pour  r^trt>lis- 
sement  de  la  justice,  et  pour  la  s^- 
rit^  6es  personnes  eC  des  propri^l^ ; 
toutes  les  taxes  payto  par  votre  pays 
seront  employ^  h  Totre  propre  usa^ 
et  pour  le  r^tablissement  des  villes  et 
des  vfHages  d^troits :  votre  boiiheur 
et  Yotre  prosp6rit6'  seront  nonr  nous 
la  seule  et  la  plus  agr^aMe  des  r^oom- 
penses. »  En  dffet,  (K>urq«e  la  G^gie 
dcvtnt  une  acquisition  utile,  il  fkllait 
la  soustraire  h  Tinfluence  des  gouver- 
neurs  voisins,  et  la  pr^arer  oar  degr^ 
h  une  reorganisation  complete. 

Les  tnt^rdls  de  I'Angleterre  ^taienC 
^idemment  contraires  an  d^reloppe- 
ment  de  la  puissance  russe  dans  rO- 
rient,  mais  il  lui  importait  surtout  de 
a'assurer  une  alliance  imm^iate  dans 
le  Nord  pour  neutraliser  le  progres  de 
{'influence  francaise.  Une  partie  de 
I'ann^  1803  fut  consacr^  a  des  n^ 
eociations  avec  Paris,  au  suiet  des  in- 
demnity en  Allemagne;  Alexandre, 
malgr^  le  caract^re  pacifique  de  sea 
Tues,  penchaK  ^videtnment  pour  le 
cabinet  de  Berlin ,  et  Tentrevue  q«rf  eut 
lieu  au  mois  de  juin  de  cette  ami^, 
entre  le  jeune  tsar  et  le  roi  de  Pnisse , 
imprima  aux  n^gociations  une  marche 
plus  rapide  et  ptus  efllcaoe. 

A  rint^ieur,  lasoliicituded*Alexan- 
dit  se  porta  sur  les  abus  oui  entra- 
vaient  toutes  les  brandies  de  l'*admt- 
nistration.  L'organisation  judiciaire 
T^lamait .  surtout  une  prompte  i^ 
forme;  mais  cette  graode  tdche  exo^ 
dait  le  pouvoir  de  I'autocrate;  lea 
principaux  obstacles  contre  lesquals 
Tinrent  ^cbouer  les  bukases  ^ient  la  . 
▼6nalite  des  fonctionnaires,  cette  ma- 
iadie  chronique  de  Tempire,  T^igne- 
ment  des  juridictions  secondaires,  et 
r incapacity  des  maglstrats;  obliges 
d'abandonner  h  des  subalternes  Tinter- 
pr6tation  d*une  multitude  de  lols  dt- 
▼erses  et  sourent  oontradietoirei.  Lft 
o^  regnent  Farbitraire  et  le  bon  plaisir, 
il  n'y  a  point  de  code  possible;  il  aufflt 


416 


L'UNIVERS. 


d'un  oakase  ^r  d^truire  toute  I'^oo- 
nomie  des  lots  prtoistantes.  Gepen- 
dant  on  essaja  de  faire  revivrd  le 
comity  de  l^islation  institu^  par  Ca- 
therine, et  il  fut  enfoint  aux  gouver- 
neurs  de  s'abstenir  de  toute  interven- 
tion dans  les  affaires  judiciaires  de 
leurs  ressorts  administratifs.  Ges  r^- 
formes  furent  rendues  plus  faciles  par 
la  oration  du  d^partement  de  la  jus- 
tice. Un  autre  departement  fut  ^tabli 
simultan^ment ,  celui  de  Tinstruo- 
tion  publique.  A  la  mime  ^poque  eut 
lieu  la  fondation  de  TuniVersit^  de 
Dorpat,  dont  Tempereur  Paul  avait 
projet^  r^tablissement.  La  direction 
superieure  des  ecoles  s^occupa  active- 
ment  d*une  organisation  s]^sUmatique 
pour  lesdiffi^rentsdegr^d'instruction, 
depuis  .les  6ooles  paroissiales  et  celles 
de  districts  jusqu'aux  gymnases  et 
aux  universites. 

L'empereur,  pour  rem^ier,  autant 
aue  possible,  aux  abus  qu'ayait  intro- 
Quits  le  luxe  sous  les  deux  r^nes  pr^ 
events,  donna  lui-nilnie  rexemple 
d'une  sage  6conomie;  il  r^forma  dans 
sa  maison  un  grand  nombred'emplois; 
on  le  voyait  souvent  h  pied  et  sans  es* 
corte  dans  les  lieux  publics,  et  cette 
oonjQance  dans  Tamour  de  ses  sujets 
ajoutait  encore  a  leur  affection.  Le 
commerce  prit  une  nouvelle  activity, 
et  les  relations  avec  TAngleterre  don- 
n^rent  une  nouvelle  valeur  aux  objets 
d'exportation;  la  censure,  confix  au 
gouvernement  civil,  concurremment 
avec  la  direction  superieure  des  6ooles , 
devint  moins  m^ticuleuse;  les  univer- 
sity ^happ^rent  k  ce  contr6le,  mais 
en  assumant  la  responsabilit^  des  ou- 
vrasesqu*ellespublieraient.Ilenr^ulta 
quelques  avantages  que  contre-balan- 
^ient  des  inconv6nients  essentiels, 
«  entre  autres  celui  de  ne  point  donner 
aux  ^l^ves  une  instruction  en  harmonic 
avec  les  formes  du  gouvernement  au- 
tocratique. 

II  fit  revivre  les  ordres  de  Saint- 
George  pour  le  service  militaire,  et  de 
Saint- Vladimir  pour  la  carridre  civile, 
fond^  tous  deux  par  son  aieule ,  et  gue 
Paul  avait  affecte  de  n^gliger.  L'im- 
portance  du  senat  fut  relevee,  et  ses 
fonctions  rappelto  h  Tesprit  de  son 


institution :  malheureusement  le  per- 
sonnel ne  pouvait  ftre  r^orm^  par 
un  oukase. 

Cependant  les  Iv^ementsqui  avaient 
6branl^  I'Europe  avaient  deplac^  trop 
d*int^rlts  pour  qu*on  piit  compter  sur 
une  paix  durable.  Les  ecoles  militaires 
furent  r6organis6es  sur  une  ^elle  plus 
vaste,  et  une  levde  de  deux  hommes 
sur  cinq  cents  porta  Teffectif  de  I'ar- 
m6e  k  cinq  cent  mille  hommes.  Les 
fronti^es  de  Tempire,  du  c6t^  de  la 
Perse,  furent  mises  h  Tabri  d'un  coup 
de  main;  car  les  troupes  du  schan 
avaient  contraint  les  Russes  a  se  re- 
plier  en  G6orgie:  enfin,  on  d^arqua  a 
Corfou  quelaues  troupes  destin&s  a 
appuyer  ulterieurement  les  vues  de 
TAngleterre. 

Au  printemps  suivant,    1803,   la 

guerre  se  ralluma  entre  la  France  et  la 
rrande-Bretagne.  Le  Hanovre  ftit  oc- 
cupy par  les  armies  de  la  r^publiqua, 
et,  de  leur  c6te,  les  Anglais  lermerent 
Tembouchure  de  FElbe  et  du  Veser. 
LMqterveotion  pacifique  de  la  Russie 
entre  les  deux  nations  rivales  n'avatt 
servi  qu'a  foumir  a  Tune  et  a  Tautre 
une  occasion  d'exposer  leurs  griefs  a  la 
face  de  I'Europe.  Depuis  le  traits  d'A- 
miens,  Topposition  parlcmentaire  n*a- 
vait  cesse  d'attaquer  le  principe  de 
cette  transaction ,  que  r^clamait  cepen- 
dant rinterlt  britannique;  on  repro- 
chait  h  la  Franoe  de  n'avoir  accords  a 
la  Lombardie  que  le  titre  illusoire  de 
r^publique,  d*exercer  une  influence 
toute-puissante  sur  la  Toscane  et  sur 
le  Piemont ,  et  de  traiter  la  HoUande  et 
Tancienue  f^^ration  allemande  moins 
comme  des  £tats  ind^pendants  que 
comme  des  annexes  de  la  r^ublique. 
«  Ce  qui  etait  bien  plus  inquietant 
pour  TAngleterre,  ajoute  Rabbe,  c'est 

Sue  la  France  s'assimilait,  par  la  voie 
es  relations  commerciales  et  indus- 
trielles,  tous  les  pays  sur  lesquels  elie 
avait,  dans  les  dernidres  campagnes, 
plant^  ses  drapeaux  victorieux.  Elle 
transportait  partout  ses  moeurs,  ses 
habitudes.  Le  ^^nie  de  ses  habitants, 
si  souple  et  si  penetrant,  servait  k  mer- 
veille  a  cette  sorte  de  colonisation  mo- 
rale de  TEurope;  d'aiiieurs  tout  favo- 
risait  cette  extension  de  son  activity 


h 


RUSSIE. 


417 


Let  andennes  barrieres  tomlMuent;  les 
andennes  liroites  sVffacaient  sur  les 
/rontieres  oaturelles.  C^eit  ainsi  que 
ies  routes  militaires  du  Simplon,  du 
moot  Cenis,  du  moot  Gen^vre,  enla* 
(aient  l*Italie,  et  r^nissaient,  par  des 
trajets  courts  et  fadYes,  les  bassius  du 
Rhone  et  de  TEridan.  »  De  leur  e6t6^ 
les  Anglais,  au  m^pris  des  traits , 
oonsenraient  Malte,  le  cap  de  Bonne- 
Esp^noe  et  A]exandrie.  Leur  politi* 
que  pourait  ^trepr^voyante,  maisoertes 
lis  n'sYaient  aucun  droit  de  crier  i  la 
mauvaise  foi.  A  ces  manifestations 
hostjles ,  le  cabinet  de  Londres  joignait 
encore  une  conduite  qui  temoignait  de 
sa  haine  oontre  ies  conditions  politi- 
qoes  du  gouTernement  fran^is*  II 
appuyait,  par  tous  les  movens  possi- 
ble ,  les  intrigues  sourdes  de  reini|ra* 
tion ,  dont  les  esp^ranoes  s'adressaient 
tour  a  tour  ou  simultan6inent  a  1'^ 
tranger,  aux  oomplots  et  a  la  guerre 
civile. 

Malgr6  les  efforts  de  Fox,  ie  parti 
de  Pitt  Temporta,  et  la  guerre  fut  d^- 
daree  (16  mai  1803).  Lepremier  consul 
n^etait  pas  homme  k  se  faisser  prendre 
au  d^pourru;  il  etait  en  mesure  de 
repousser  et  m^ine  de  pr^venir  une 
^resnon;  oependant,  bien  qu'il  oomp 
tit  feibleinent  sur  le  suocds  de  oette 
demaitfae,  il  envoya  en  Prusse  et  en 
Russie  Duroc  et  dolbert,  pour  se  m^ 
oager  ralliance  ou  du  moins  U  neutra- 
Ijte  de  oes  deux  puissances.  Les  en- 
voy^ francais  ecbou^ent  dans  le 
double  but  de  leur  mission ,  et  les  op^a- 
tions  militaires  reoommencerent  dans 
le  Hanovre. 

La  Russie  ne  s'^tait  pas  montrte 
dIiis  scrupuleuse  que  TAngleterre  sur 
la  rigide  obserration  des  traits.  La 
Wmibliqoe  des  Sept-Iles  6tait  oocup^ 
iBiiitairement,  et  lul  ofifrait  un  point 
DsToraMe,  soit  pour  contenir  la  Tur- 
qoie,  loit  pour  agir,  eoncorremment 
avee  FAiigleterre,  dans  la  p^ninsule 
iCaliqiie. 

La  soUidtade  de  Tempereur  ne  se 
bomait  pas  k  faire  respecter  au  dehors 
le  Dom  russe;  ce  prince  s'attachait  en 
ntme  temps  k  rendre  sessuiets  plus 
dignes  du  rang  politique  que  leur  assi- 

57*  LivraUon,  (Russie.)  T.  II. 


gnaient  la  force  num^rique  et  le  terri- 
toire.  II  enoouragea  ragricultore  at 
plusieurs  ^tablisseroents  de  ookmiates 
dans  le  gouvemement  de  P^terabonrg 
et  sur  les  cdtes  de  TEuxin. 

A  la  mtoe  ^poque  eut  lieu  one 
innovation  dont  les  r^ultats  seroot 
fiteonds  dans  Tavenir.  Le  oomte  Serge 
Roumianzof  fit  passe/r  un  oortain  nom- 
bre  de  ses  paysans  de  I'^tat  de  serfo  a 
celui  de  francs  tenanciers;  et  le  tsar, 
par  un  oukase  (4  mars),  permit  k  tout 
seigneur  de  conc^er  k  titre  de  rede- 
Tanoe,  ou  de  telle  autre  condition  sti- 
pule, des  terres  que  leurs  naysant 
feraient  valoir  d^ormais  k  titre  de 
culti vateurs  libres.  La  perspective  d'un 
impot*plus  considerable,  la  erainte 
d'etre  priv^s  de  toutes  ressouroes,  en 
cas  de  non  suocte  dans  leurs  exploits-^ 
tions,  et  la  valeur  prtoire  d*uiie  li*' 
bert^  dout  les  avantages  leur  ^taient  si 
nou  veaux ,  firent  demander  k  plusieurs, 
comme  une  grdce,  la  faculty  de  ne 
point  chancer  d*^tat;  mais  quelques 
essais  reussirent,  et  la  iiberte  plaida 
mieux  sa  cause  par  elle-mtee  que  n'»* 
vaient  pu  le  fiiire  des  ordonnances. 

L*industrie  manufacturi^re  fit  det 
prqgres  proporUonnes  au  d^elopp^ 
ment  du  commerce  d'importatKm; 
les  produits  fabriqu^  k  Tmanger,  no, 
s'adressant  ^u'aux  besoins  des  dasseti 
aiste,  servirent  en  mtoe  temps  de, 
'  points  de  comparaison  et  de  concur- 
rence k  la  fabrication  Indigine.  Lea> 
nomades  tribotaires,  chassaot  devani 
eux  leurs  troupeaux  innombnbles, 
afOuaient  dans  les  mardKte  d'Oren- 
bourg;  les  Bukares,  les  Boukhaiei. 
envoyaient  k  la  frontidre  de  riches  ca- 
ravanes,  et  les  Chinois  se  rendaient 
k  Riakhta  pour  y  Changer  le  thA  et  la 
soie  eontre  les  fourrures  moseovites.  . 

Cest  en  1804  que  ie  ^uvememeol 
russe,  apres  avoir  inutilement  tentft 
d'6tablir  des  relations  commerdaleft 
avec  le  Japon,  essaya,  sans  plus  de 
succ^,  d'obtenir  i'entrte  des  £tats 
chinois.  Nous  laisseronsparler  rorieo- 
taKste  Klaproth,  qui  faisait  partie  de 
Pambassade  russe. 

«Le  projet  en  fut  con^u  a  Saint* 
P^tersbourg,  en  1804,  et,  k  eequ*il 


4t$ 


rUKIVERS. 


Cratt,  ^'^!g¥  to  ^^>f  nuuiifesl^  par 
ooiur  de  JPoKiog  da  raoevoir  un  am- 
batndaur  du  AAm  bkmc,  Le  goaver** 
vament  niase'ne  nMigea  rien  pour 
rendre  oette  ambassaila  Dnllaiite,  aigna 
du  iiioflarqu»  qui  renvoyait,  utile  au 
aemmaree  d  profitabia  pour  lea  acieii- 
eea.  Ella  ^tait  oorapoate  de  parsonnes 
ajypartananl  aux  famillea  les  plus  dis- 
tillates de  Pempire;  son  cbef ,  homme 
da  ttflent ,  ^tait  appall ,  par  son  rang  et 
aa  saisaaDoa,  k  remplir  ie^  plus  hautea 
digniCte  :  alia  amportalt  des  prteents 
ma^Diiquas  pour  i*empereur  de  la 
Cbma;  una  soct^  de  savants,  sous  la 
diTCCtion  de  feu  M.  la  comte  Jean  Po- 
talski  y  fiit  adjoipte  h  la  legation.  Gette 
eapMition  nombreuse  quitta  Saint- 
vAersbourg  en  plusieurs  divisions  qui 
davaiapt  se  r^nir  k  Irkoutsli  vers  la 

.  fin  de  aeptambre  1805. 

\  «  Arrive  dans  cetta  vHle,  Fambassa- 
daaa  anvoya  M .  Baikof,  son  premier 
aacr^taira,  a  l^Ourga^  pour  prendre, 
avac  les  autorit^  ehinoises  et  mon- 
golaa,  les  arrangements  nteessaires, 
BuH  sur  la  roaniere  de  transporter  sa 
suite  a  Peking  que  sur  d*autres  points 
lel^tifs  k  ee  voyage.  Ces  premieres 
ntexsiaHens  presentdrent  d^abord  des 
dmkaultte :  les  Cbinois  refosaient  de 
reaevotrune  ambasaade  beauooup  plu9 
nombreuse  que  les  pr^oMentes ,  all6- 
giiaat  qutls  n'avaient  eompt^  que  sur 
cent  p^onnes ,  et  qu'ils  avaient  tobli 
en  eons^enee  les  stapes  dans  les  d^ 
aatts  de  Gobi.  Apr^s  de  longs  pour- 
parlers, renvav^  se  vit  oblige  ae  di- 
minuer  le  nomore  de  sa  suites  et  de  la 
bonier  k  cent  trente  personnes. 

«  M.  le  oomte  Golovkin  (ambassa- 
deor)  arrfva  le  17  oetobre  au  fort  de 
Kiakhta,  neram6  Tro!tskosavsk ,  et 
^oign6  de  trois  verstes  de  Tentrendt 
da  <3ommeroe  qui  est  ii  la  frontiere 
mdme.  De  nouvelles  n^gociations  Vy 
ratinrent  pendant  deux  mois  et  demi : 
las  difflcqltte  ne  ftirent  enti^rement 
aplanies  que  vers  la  fin  de  raunte,  de 
a&rte  que  rambassade  ne  passa  la  fron- 
tMre  que  le  1*'  Janvier  1806.  Le  froid 
dtait  excessif ;  les  membres  de  l*exp^ 
dition  en  souffraient  d*autant  plus 
qu^ls  ferent  obKg^  d*employer  qua- 


tone  jours  k  parcourir  les  trois  eeni 
sept  verstes  (soixante  et  ouatorze 
lieoes)  qui  s^parentKiakhta  et  rOurga, 
Pendant  tout  oe  voyage,  ils  ne  trou- 
v^ent  d*autre  abri  que  deajmirtes  ou 
teiites  de  feutreC*). 

«  A  rOurga,  les  discussions  sur  le 
o^r^onial  eninois  se  renouvel^rent ; 
Tambassadeur  refiisa  de  s*y  soumettre, 
en  s'appuyant  sur  rexemple  de  lord 
Maeartn^,  qui  n^avait  fait  d^autre 
salut  k  1  empereur  Khtan-loung  que 
aelui  qui  est  usit^  en  Europe  dans  des 
eirconstanees  semblables.  Des  cour- 
riers  furent  exp^ies  k  Peking;  on 
ooncevait  Tesp^ranoe  d'obtenir  une  re- 
ponse  favorable  du  tribunal  des  rites 
du  Li-fao-yuan,  ou  college  des  affaires 
^trang^res ,  et  peut-^tre  de  Tempereur 
lui-meme. 

«  Sur  ces  entrefaites ,  le  variQi ,  ou 
vice-roi  dela  Mongolie  septentrionale, 
re^ut  Tordre  de  donner  au  comte  Go- 
lovkin une  r^e,  au  noro  de  Tempereur, 
devant  le  trdne  imperial.  La  reception , 
pour  ce  festin,  eut  lieu  le  IS  Janvier, 
en  plein  air,  et  par  un  froid  de  vingt- 
trois  ou  vingt-auatre  degres.  Le  vang 
exigea  que  I'amoassadeur  fit  pr^alable- 
ment  le  kheou-theou ,  ou  les  neuf  pros- 
tarnations,  devant  un  6cran  ou  une 
petite  table  couverte  d'un  damas  jauae , 
repr&entant  la  personne  de  rempe- 
reiir.  Cette  pretention  parut  trop  nu- 
miliante  pour  que  Tenvoy^  d'un  grand 
monarque  pOt  8*y  conrormer.  M.  le 
comte  Golovkin  reftisa  done  de  se 
soumettre  k  ce  c6rtoonial ,  et  le  festin 
n*ent  pas  lieu. 

«Depuis  ce  moment,  les  n^goda- 
tfons  prirent  une  toumure  fddieuse, 
et  les  esprits  s'aigrirent.  Malgr6  quel- 
ques  lueurs  d'esp^rance  de  voir  ter- 
miner ces  diffi^nds  k  Tamiable,  Tarn- 

(*)  Paadanl  k  Mjovr  df  TambtiHuleur  «o 
UoiisoUa,  le  (md  euut  toqjoun  antie  1 5  d 
lo  wgtm  de  Heauinur;  la  npercnra  gels  dm\ 
fois.  Let  jouites  ne  pouvaient  se  ekaoQer 
i|u'avac  Si  charbaa  qu'oa  sUaiaait  aa  jni- 
heu.Le«Toyageun,  couches  k  terre  devant 
ee  fea ,  briUaieat  d*uo  cote  et  gelaieat  do 
Tautre.  L*amba&iadeur  etait  dans  une  jpo&i- 
tion  fort  d^sagreable,  et  chacun  desirait  vi- 
Tement  de  voir  finir  de  pareilleA^souflTram 


HUSSIE. 


419 


wmmm^»^  fut  oofig^i^ .  Ws  10  fevfier, 
par  une  leitre  veoue  oe  PdLiag.  Elle 
mrittt  a  Kiaklita  dans  ks  premiers 
jdiin  d«  mars.  »  II  est  1^  refsretter  que 
des  formaUtte  pu^rileSt  et  doot  le  ri- 
dicule ratomberait  plutdi  sor  celui  qui 
ks  impose  que  sor  Teavoy^  qui  s'y 
ooofornierait,  ait  pH?^  rewpireruase 
de  granda  avantagea  eonuoerciaux,  ct 
r  Europe  d'uoe  relatioo  oeufe  et  int^* 
regsaote. 

Ua  dea  aoina  lea  plus  assidua  d*A* 
lexaodre  fot  la  propagation  dea  lu« 
mitres  dans  sea  vastea  Etats;  c'est  k 
dater  de  soa  ref^e  que  les  toles  et  lea 
university  pnrent  une  importaoce 
r6elle,  et  preparerent  au  tsar  actuel 
la  voie  de  nouvellea  ameliorations :  il 
^it  seulemeot  k  craindre  qu*eo  se 
volant  sur  les  universit^s  de  rAllema- 
gne,  au][quelle8  on  empruntait  des 
professeurs  distingu^,  on  n'inculqulit 
a  la  jeunesse  russe  des  ideas  peu  en 
narmonie  avee  les  formes  et  les  exi- 
geoees  du  gouYemeroent,  et  il  ^tait 
diiBcik  d'ecbapper  a  cet  inoonv^ient 
dans  un  pays  despotique  ou  le  peuple 
est  rest^  esQlave,  tandis  que  les  classes 
privil^ite  ont  atteint  en  moins  d'an 
siecle  le  n>§me  degr^  de  civilisation  cjue 
la  viellle  Europe.  L^acad^miedes  scie#i- 
ees ,  foodie  par  Pierre  le  Grand ,  et  qui 
n'a  gu^  nrilk  depuis  que  du  reflet 
de  cpielquea  illustrations  ^trang^es, 
raxnt  aotts  Alexandre  une  nouvelle 
aaivit^,  et  ses  revenus  furent  oort^ 
h  cent  Tingt  mille  roubles;  elle  fut 
charg4k  d*evoquer  a  elle  toutes  les 
hautes  questions  scientifiques  et  litt6- 
raires,  non  pas,  oomme  on  Ta  pr^- 
tendu ,  pour  s^ger  en  arbitre  absolu , 
inais  pour  reviver  les  etudes  par  ses 
lumi^es,  et  leur  imprimer  un  mouve- 
ment  plus  fecond  et  plus  rationnel. 

Tandis  que  Temoereur  dierchait  k 
moraiiaer  son  peuple  par  les  bienfaits 
de  rioatruction,  rimp^atrice-mira 
eoeoarageait  les^blissements  de  bien- 
faisaaoe « et ,  dans  son  zele  in^puisable , 
eUe  frisait  de  ses  revenus  autant  de 
parts  qQ*on  pent  eompter  de  classes 
dans  la  graooe  famUle  des  miseres  bu- 
-nJBfs  Lea  veuves,  les  malades^  les 
to  enfants  trotvte  trouv^- 


rent  un  asile  ft  des  reutouroes  soia  Ba 
ge»6i^use  protection.  Toutes  ees  am^ 
uorations  jetereot  un  vif  6eiat  sur  le 
r^ne  dujeune  au  tocnite ,  et  ajouterent 
k  ridee  uvorable  que  les  cours  d'£u» 
rope,  intdressto  a  capler  sa  btenveil* 
lanoe,  avaient  r^ndue  sur  ses  qua- 
lit^  aimables,  sa  moddratioa  ^  aa 
justice. 

Cependant,  toutes  les  fois  qu  la 
dignite  et  les  interto  essentiels  de 
la  Russie  se  trouverent  compromis, 
Alexandre  montra  de  La  fermet^;  c'est 
ainsi  que  la  Sudde  ayant  empietd  sur 
les  frootieres  russes  en  Finlande,  et 
les  representations  du  cabinet  de  Saint- 
Pdtersbourg  etant  denieurto  sans 
effet,  la  flotte  des  galeres  fut  armee, 
et  des  troupes  simisantes  re^urent 
Tordre  de  niarcber  en  Finlande :  Gus- 
tave  ci^da ,  et  cette  demonstration  n'eut 
pas  d'autres  suites.  Les  Lesgbis  deBe- 
lakan  et  de  Tehari  vinrent  faire  des 
incursions  jusque  dans  le  voisinage  de 
Tiflis;  le  general  Goulakof  les  r(£)ula 
dans  leurs  repaires.  La  Kussie  ailait 
bient^t  entrer  en  lice  centre  un  ennerai 
plus  dangereux.  (1804.)  Pitt,  toujoura 
acharnd  contra  la  France,  couvrait  sa 
haine  du  prdtexte  specieux  di^  biea 
public  et  du  retabiissement  de  TordrOt 
jouant  ainsi  le  sort  de  I'Europe,  et 
forcant  son  rival  k  ddvelopper  tout  sod 
genie  et  toutes  ses  ressources,  en  ne 
lui  laissant  que  Faltemative  d*une  gloii^e 
immense  ou  d'une  ruine  definitive.  Ge 
ministre  ne  negligeait  rien  pour  par- 
venir  k  son  but.  La  restauration  des 
Bourbons  donnait  une  apparenee  de 
justice  a  ses  vues  secretes;  peu  lui  im- 
portait  au  fond  qu'une  revolution  eilt 
diange  en  France  la  forme  du  gou- ' 
vemement;  mais  il  savait  que  les. 
princes  de  la  faiuille  dechue  ne  pour- 
raient  remonter  sur  le  trone  qu'en 
abandonnant  toutes  les  conqudtes  de^ 
larepublique.Dans  ce  but,  il  negociait. 
habilement  aupr^s  des  cabinets  jalouz 
de  I'agrandissement  de  la  Franoa ,  et 
favorisait  les  intrigues  et  les  conspira- 
tions de  quelques  emigres  exaltes.  La 
fortune  de  Bonaparte  le  preserve  de 
oe  danger*  George  Cadoudal  et  plu- 
sieurs  de  ses  complices  perirent  sur 

3. 


49a 


L'UNIVERS. 


r^Miafaud;  Pfcheera  <kiuip(ia  au  sup- 
plioe  peur  un  fraicide;  Moreau,  expiant 
aa  renommee^  fiit  frapp^  d'une  sen- 
fence  d'exil.  (laos.)  Le  premier  consul 
erut  pouToir  user  de  repr^illes,  et 
ne  Toyant  jMurmi  les  pr^ndants  a  Th^ 
ritage  de  Louis  XVI  que  le  due  d'Enr 
ghien  qui  eAt  quelques  chancer  de 
succ^,  il  osa  le  faire  enlever  sur  le 
territoire  de  T^lecteur  de  Bade,  et 
tacha  du  sang  de  oe  jeune  prince  les 
lauriers  des  Pyramides  et  de  Marengo. 
(1S04.)  Ge  crime  dessinait  nettement 
ses  vues;  il  annon^it  Tabandon  des 
principes  r^publicains;  en  frappant  le 
plus  ^and  obstacle  qui  lui  fermait  le 
chemm  du  tr6ne,  Bonaparte  marguait 
d'une  trace  de  sang  le  cnemin  qui  de- 
vait  Vy  conduire.  L'electeur  de  Bade 
n'osa  reclamer  contre  cette  violation 
flagrante  du  droit  des  nations,  et  le 
corps  germanique,  disloque  et  impuis- 
sant,  se  renferma  dans  la  m^me  re- 
serve. Plus  les  organes  officiels  du 
gouvemement  francais  avaient  donn6 
'tioges  au  caractere  de  I'empereur 
Alexandre,  plus  les  representations 
^nergiques  de  la  Russie,  au  sujet  de 
00  deplorable  ^v^nement,  durent  por- 
ter una  atteinte  sensible  k  la  gloire  du 
premier  consul. 

La  note  du  ministre  russe  k  la  di^te 
de  Ratisbonne,  bien  que  oon^ue  en 
termes  mod^res,  prouva  que  le  cabinet 
de  Saint-P^tersbourg  oonsid^rait  cet 
incident  comme  un  motif  plausible  de 
rupture,  ou  du  moins  comme  le  met- 
tant  en  inesure,  si  la  France  ^tait 
dispose  k  transiger,  d*arracher  au 
premier  consul  des  concessions  impor- 
tantes.  Une  autre  note  de  M.  d*Oubrii , 
charge  d'affaires  de  Russie  k  Paris, 
et  liu'il  adressa  k  M.  de  Talleyrand, 
teit  encore  plus  pressante  et  plus 
positive.  II  y  etait  dit  que  « I'empe- 
reur Alexandre,  comme  m^iateur  et 
S Brant  de  la  paix  oontinentale,  venait 
e  notiOer  aux  £tat8  de  Tempire  quil 
consid^it  cette  action  (I'enfevement 
d'Ettenheim)  comme  mettant  en  dan- 
ger leur  sArM  et  leur  ind^ndance, 
et  qu'il  ne  doutait  pas  que  le  premier 
consul  ne  prit  de  promptes  mesures 
pour  rassurer  tous  les  gouvernements, 


en  donnant  de  satisfaisantes  explim* 
tions  sur  un  evtoement  que  Ton  pou- 
vait  oonsiddrer  comme    le   sinistre 

Iir^sage  des  dangers  qui  mena^aient 
'independence  et  le  safut  communs.  » 
Mapoieon ,  btess^  du  ton  que  prenait  la 
Russie,  sans  essayer  de  disculper  sa 
conduite,  repondit  par  des  recnmina- 
tions.  Se  pievalant  du  silence  de  I'AI- 
lemagne,  il  temoignalt  sa  surprise  de 
voir  une  cour  etrangere  prendre  en 
main  une  cause  abandonn^e  par  les 
parties  int^ressees;  sans  daiener  s'ex- 
pliguer  sur  le  meurtre  du  due  d'En- 
gbien ,  il  se  contenta  de  deroander  si , 
lors  de  I'assassinat  de  Paul  T',  la 
France,  quoique  etroitement  alli^e  a 
ce  prince,  avait  exerc^  un  droit  d'en- 
Cjnete  k  cet  e^ard ;  « il  convenait  peu 
a  la  Russie,  ajoutait-il,  de  se  montrer 
si  scrupuleuse  sur  le  droit  des  nations , 
lorsque,  tout  r^cemment  encore,  elle 
avait  foments,  par  ses  ambassadenrs 
k  Dresde,  a  Rome  et  a  Paris,  des  in- 
trigues hostiles  k  la  France,  et  ro^me 
des  conspirations.  Si  la  Russie,  c6dant 
a  I'influence  anglaise ,  voulait  la  guerre, 
que  ne  se  declarait-elle  ouvertement  ?  » 
Dans  une  seconde  note  remise  par 
M.  d'Oubril,  le  1*' juillet  1804,  le  ca- 
binet russe  repliqua  d'une  mani^re  plus 
fonnelle  encore.  «L'empereur,  dejjk 
affecte  des  calamit^s  auxquelles  une 
grande  partie  de  TEurope  etait  en 

f»roie,  et  des  dangers  qui  menaigaient 
'empire  germanique,  dont  il  etait  de 
son  devoir  de  soutenir  les  inter^ts, 
avait  invite  les  ^tats  et  les  princes  k 
se  reunir  k  lui  pour  protester  contre 
la  violation  du  droit  des  nations  com- 
mise  a  Ettenheim ,  et  en  demander  la 
reparation.  Le  gouvernement  fran^is , 
auquel  cette  reponse  avait  ete  commu- 
niquee,  devait  une  reponse  categori- 
que.  Cdle  de  son  ministere  etant  eva- 
sive, elle  offensait  k  la  fois  laRnsste, 
I'Empire  et  la  France  elle-meme.  On 
n'etatt  plus  dans  oes  temps  de  barbarie 
01^  cheque  l^tat  n'avait  k  oonsiderer 
que  son  interet  immediat.  La  politique 
modeme,  fondee  sur  la  lot  des  na- 
tions ,  avait  introduit  certains  principes 
applicables  k  YinUr€t  de  la  cammm-' 
naute  des  Etais.  La  Rufl^io  n'etait 


RUSSIE. 


421 


nomi  indueno^  par  ieB  ennemifl  de  la 
Fianoej  mais  elie  Haii  miie  par  la 
triste  situation  ii  kiquelle  le  goaverne- 
ment  francais  avait  rMuit  Europe.  » 
Apr^  avoir  4numM  toas  lea  ^iefs 
one  foomissait  it  rexamen  Tainbition 
ae  la  France,  on  appuvait  dans  oette 
note  sur  le  principe  de  la  solidarity 
rcipectiTe  des  titats,  d'oi^  sortit  de- 
puis  le  traits  de  la  sainte  alliance; 
oetle  pito  se  terminait  par  un  ultima- 
tum par  lequel  on  extgeait : 

«  1*  Que,  conformement  h  la  con- 
vention seor^te  da  2  octobre  1801, 
les  troapes  fran^ises  evacuassent  le 
royamnede  Naples,  et  que  la  neutra- 
lite  tdt  respeet^e  pendant  toute  la  dur6e 
de  la  guerre; 

«  S^Qu'on  ^tabltt  imm^iatement, 
de  concert  avec  Fempereur  de  Russie, 
les  bases  sur  lesquelles  les  affaires 
d'ltaKe  seraient  finalement  r^l^s; 

«  8»  Que  le  roi  de  Sardaigne  re^dt 
sansd&i  les  indemnitdsqui  lui  avaient 
M  promises; 

«  4*  Qu>n  vertu  de  robligatlon  de 
carantie  mutuelle,  le  gouyernement 
S^n^is  s'eneageAt  a  retirer  ses  troupes 
du  nord  derAllemagne,  et  qu'il  prtt 
Fengagement  de  respecter  la  neutrality 
du  corps  germanioue  (Rabbe). »  M.  de 
Talleyraid  re^it  rordre  de  declarer  en 
r^ponse :  «  Que  la  France  ^tait  pr^te  h 
exaoater  fidolement  les  articles  du 
traitd  sur  lesquels  la  Russie  appuyait 
ses  r^amations,  aussitdt  que  cette 
puissance  remplirait  rengacement  r^- 
eiproque,  stipule  dans  le  meme  traits, 
de  ne  pas  sooffirir  que  les  sujets  res- 
pecttfii  entretinssent  aucune  corres- 
pondance  directe  ou  indirecte  avec  les 
ennemis  de  Tun  des  deux  ittats,  ou 
qu'ils  propageassent  des  principes  con- 
traires  aux  constitutions  ou  k  fa  sdret^ 
de  leurs  pays ,  s'obligeant ,  dans  ce  cas , 
a  les  exporter  au  del5  des  fronti^res, 
sans  quils  possent  se  couvrir  de  la 
protection  du  gouvemement.  • 

La  position  geograpbique  de  FAlie- 
inagne  ne  lui  permettait  pas  de  tenir 
le  m^e  langage  que  la  Russie :  expo- 
see  la  premiere  a  une  invasion,  elle 
pouvait^tre  ^ras^  avant  que  les  ar^ 
iN^  niss4»s  pussent  prendre  une  part 


active  h  la  lutte.  La  note  russe,  bien 
qu'appujr^  par  le  roi  de  Suede,  ne  fut 

Kint  dncut^  k  la  di^te  de  Ratts- 
nne :  T^lpcteur  de  Bade  t^moigna  le 
d^ir  qifon  n'insistAt  pas  davantage 
sur  la  violation  de  son  territoire,  et  les 
ministres  d*Autriche  et  de  Pnisse  se 
d6clar6rent  satisfaits  des  explications 
donnto  par  la  France.  M.  d'Oubril 
s*etait  trop  avanc^  pour  qu'il  lui  m 
possible  de  revenir  sur  ses  d^mardies; 
li  quitta  Paris  et  se  rendit  ill  Mayence. 
l9apol6on  ^tait  attendu  dans  cette  ville; 
le  consul  s'^tait  fait  empereur,  et  il 
essayait  sur  son  front  victorieux  la  cou- 
ronne  de  Charlemagne.  Le  despotisme 
allait  si  bien  k  cet  bomme  extraordinai- 
re ,  que  les  Francais ,  ^blouis  de  sa  for- 
tune, Miangereot  avec  empressement 
oe  qu'il  ieur  restait  de  libertecontre  une 
glotre^  laquelle  Ieur  chef  avait  Tartde 
lesassocier.  Le  ministre  russe  eut  en- 
core plusieurs  conferences,  avec  M.  de 
Talleyrand ;  il  eut  leloisir  de  sender  les 
dispositions  v6rltables  des  membres  de 
la  aikite ,  partit  pour  Francfort  au  com- 
mencement d'octobre,  et,  apr^  un 
s^jour  de  quelques  semaines,  il  se 
rendit  en  Russie.  Le  general  H^ou- 
ville  avait  quitta  P^tersbourg  le  8  ^ 
juin.  Malgre  ces  indices  d'une  rupture 
prochaine,  Napol6on  conservait  quel- 
cue  espoir  de  ramener  Alexandre  a  une 
determination  paciflque;  et  il.fit  mtoe 
quelques  dtoarches  qui  tendaient  a  ce 
but :  n^nmoins  M.  de  Rayneval  re^t 
son  audience.de  cong^leSi  septembre, 
et  M.  de  Lesseps  resta  k  Sajnt-P^ters- 
bourg  en  quality  d'agent  commercial. 
Cependant  la  Russie  faisait  des  pr^- 
paratifs  formidables;  elle  avait  con- 
serve vingt  miUe  hommes  dans  les  ties 
loniennes,  et  elle  continuait  a  exci- 
ter les  Grecs  de  I'Albanie  et  les  Mon- 
tenegrins :  outre  la  flotte  de  Corfou, 
une  escadre  de  trois  •vaisseaux  de  ligna 
et  de  trois  fregates  sortIt  du  port  de 
Cronstadt;  Sevastopol  fut  declare  un 
port  exclusivement  militaire ;  les  cadres 
de  I'armee  se  remplirent,  et  presents 
rent,  avec  les  reserves  et  les  troupes 
irreguli^res,  un  effectif  d'environ  cmq 
cent  mille  combattants.  Les*armees 
etaient  principalement  rassembiees  sur 


429 


L'UNIVEES. 


les  fronti^es  de  Toucst  •  dans  \m  pr»- 
vinees  dknembries  de  raocMnoe  Po- 
loffDe  (Rabbe). 

Les  soios  multipli^  d'une  guem 
prochaine  et  aerieuse,  les  incursions 
fre|queutes  des  Lesghis  n'empAcbaient 
point  Alexandre  de  s'oocuper  d'otiles 
r^foroies  a  rinterieur.  Le  sort  des  serfii 
fiit  un  peu  jnoins  soumis  k  rarbitraire 
des  seigneurs;  les  eooles  publioues  se 
multipuerent;  les  divisions  adminis* 
tratives  ou  gouvernementSf  que  Paul 
avait  r^uits  a  quarante  et  un,  furent 
port^  a  cinquante  et  un,  en  y  compre- 
nant  la  G^rgie;  enfin  le  code,  cette 
oeuvre  toujours  refaite  et  toujours  k 
rehire,  dut  subir  une  revision  dont  on 
chargea  le  prince  Lapoukbio  et  M.  de 
Novassiltzof.  Nous  ne  parlerons  des 
mesures  prises  pour  adoucir  le  sort 
des  paysans  que  pour  faire  ressortir 
Phumanit^  du  monarque;  I'^tendue 
des  possessions  russes,  la  solidarity 
des  int^rdts  dans  la  classe  des  seigneurs 
ont  presque  toujours  paralyse  I'effet 
des  oukases;  et  u'Wy  a  eu  veritable- 
ment  une  amelioration  a  cet  ^gard, 
on  la  doit  plutdt  k  la  diffusion  des 
lumi^res  et  k  Tinfluence  bienfaisante 
d'une  Education  morale  qu'aux  pres- 
criptions du  souverain.  Pour  ^teindre 
graduellement  Tesclavage ,  le  gouver- 
nement  russe  a  us^  d*un  moyen  tran- 
sttoire  dont  on  peut  appr^cier  PefBca* 
cite.  11  a  ete  cr^e  une  banque  qui  pr^te 
k  terme  sur  les  biens  seigneuriaux;  au 
delai  fix^ ,  et  k  d^faut  de  rembourse- 
ment,  les  biens  engages  retournent  a 
la  cooronne,  et  les  paysans  n'appar- 
tiennent  plus  ou*^  r£tat,  condition 

3ui  les  prepare  a  un  affranchissement 
efinitif 

L'empereur  A  lexandre ,  persuade  que 
moins  les  droits  sont  onereux ,  plus 
le  commerce  fleurit,  r^duisit  de  vmgt^ 
oinq  pour  cent  les  droits  dans  les  ports' 
russes  de  la  mer  Noire  et  de  la  mer 
d'Azof,  et  bientdt  la  prosperity  d*0- 
dessa  prit  un  developpement  extraor- 
dinaire. 11  resulte  d'un  compte  rendu 
par  le  ministre  du  commerce,  pour 
rannee  1802,  que,  dans  les  ports  de 
la  Baltiqne  seulement,  la  balance  com- 
inerdale  etart ,  en  faveur  de  la  Russie , 


d'ODfkmi  dix-hirit  nstfltoos  4le  foubics. 
Cependant*  nnJgreieliberalismeeelfttre 
d'Aiezaadre,  la  ostare  ndme  de  son 
poiureir  le  foi^t  k  des  nenires  dont 
resprit  etait  oppose  k  sea  vuas  piir- 
aoaoelles;  c^est  ainsi  qu'il  sanetionna 
nil  edit  de  censure  qu*on  aarait  era 
emane  du  oenreau  ombrageux  de  son 
ptee;  peut-etre  aTait-on  sorpris  son 
adhesion,  car,  pai  de  temps  aprds,  il 
en  tempera  la  rigoeur  par  queiques 
dispositions  attenuaatep.  L*augmenta- 
tlonde  la  population,  rembellissement 
dea  Tilles,  des  eooles  fiaodeca  dans 
toutes  les  parties  de  rempire,  tout 
aanon^it  lea  bienfsits  de  la  poix  et 
la  sagesse  du  gouvemcasenl.  Odessa 
comptait  dej^  plus  de  deux  mille  mai- 
sons  et  cinquante  milie  habitants:  la 
nouvelle  Tcnerkask  s'eievait  k  cdte  de 
Tandenne,  et  de  toua  cdtes  les  etran- 
eers  et  les  colons  apportaient,  en 
ecbanse  d'une  vie  aisee ,  (eur  industrie , 
leurs  lumidres  et  leor  travail,  Les 
ecoles  militaires  rej^urent  une  nouvelle 
organisation;  Tuniversite  de  Kharkof 
s*ouvrit,  et  il  lui  fut  assigne  un  revenu 
de  cent  trente  mille  roubles. 

A  La  lenteur  de  la  procedure,  dit 
Rabbe,  avait ,  depuis  lon^temps,  ete  le 
scget  de  beaucoup  de  plaintcs  en  Rus- 
sie. En  consequence  i  Tempereur  Paul 
avait,  en  1796,  oonunissionne  trois 
branches  du  seoat ,  dont  Tunique  af- 
&ire  devait  etre  de  juger  le  norobre 
immense  de  causes  pendantes.  Gepen- 
dant,  dans  le  cours  de  buit  annees,  k 
peine  avait-on  aborde  ki  diificulte  prin- 
cipale.  II  fut  en  consequence  deter- 
mme,  sur  la  proposition  du  prince 
Lapoukhin ,  d'abolir  les  trois  departe- 
ments  temporaires ,  et  d'augmenter  le 
senat  de  deux  nouveaux  departements, 
de  maniere  qu'il  se  trouvait  alors  com- 
pose de  neuf  departements,  dont  six 
siegeaient  k  Petersbourg  et  trois  h 
Moscou.  Le  corps  entier  du  senat  se 
trouva  porte  k  neuf  cents  peraonnes ; 
et  afin  qu'il  trouvAt  assez  de  temps 
pour  Texecutioa  de  tout  ce  qui  lui  etait 
attribue,  le  nombre  des  jours  ferit^ 
fut  reduit  de  soixante-deux  k  trente 
et  un.  • 

Dans  une  guerre  contie  la  France 


•:• 


••  • 


'  •  •  •  •  • 


•  •  •  • 

•  •• 

•  •  • 

•   ••• 

•  •  •  • 


IVSSlfi. 


491 


iflipMale,4|ui  ertr^iU|ftuii»gKnMie 
Mienee  mm  le  ecprpi  gMiairiqiiv,  le 
e6t6  le  pioB  ^mlbtoble  de  la  Bossie 
^tait  III  Pologoe,  telle  que  Tarait  or* 

§»ii86e  ledemier  partage;  ainsi  Aleian^ 
Irene  n^H^eohMl  rieo  poor  oometrer 
ce  fiehe  h^ntace  de  la  politiqiiedefioa 
aieule;  d'abora  ii  rdndit  <|ud<|ues  ou« 
kaaes  en  iaveur  dee  paynrna;  lea  prd* 
tre6  greca  eoTOUt  aoia ,  dans  let  heox 
06  les  eathoKouea  ^toient  eo  nriaonl^^ 
de  rattacber  lea  idte  de  nalioaalit^ 
aux  idees  religieoaes;  lea  joifs,  qoi| 
Mtf  leor  indoatrie  H  Usats  eorrespen- 
oaneea ,  peli?enC  £dre  ttnt  de  bieo  ou 
laat  de  mal ,  obtmreBl  quelquea  prWI" 
Jdgea,  et  fantit  toiA  aa  nombre  dea  90- 
jcta  rtiaaeB ;et  cette  tas^  du moraa,  la 
aaine  politique  aetroura  d'dcoord  aved 
llmaianit^  Pluaieon  cauaes  empteb§« 
rent  la  Polo(^e  raase  d'^apper  ao 
folic  moecoTite;  d*abord  rhabilet^  de 
CaCoariDe  qai  arait  ao  iat^reaaer  k 
eeUe  spoliation  rAabnolie  et  la  Prosse ; 
0t  enaoite  loa  rues  particulierea  de 
BiapoMon  qui ,  ayanf  beaotn  de  la  Rua» 
tie  pour  anaiaser  TABgleterrey  s*atta« 
clia  plntot  k  s'asiiirer  un  jour  son  al* 
lianee,  qifa  Clever  une  forte  barfiire 
entre  eette  puiasanee  et  TEnrope. 
{XdiWi  W^ ,  depais  un  ah ,  la  Fraaoe 
^tait  en  guerre  oontre  FAngleterre; 
nais  oea  deux  Atats  rivaux  ne  pou* 
vaieat  s'etreindre  corps  a  eorpa,  la 
force  de  Tone  resident  surtout  dana 
sea  annees,  et  la  preponderance  de 
Tautre  dans  ^eB  flottes:  ausai,  bien 
que  poursoivant  le  mime  but ,  cbacune 
s'attachait ,  par  des  vuea  difMrentea, 
a  frapper  aon  adversaire  dana  oe  qui 
conatittiatt  aa  puissance ;  TAngleterre 
aoudovait  I'Europe  oontinentalecontre 
le  aoMat-empereur « et  celui-ci  s^effor* 
cait  de  tarir  les  sources  de  la  prosperity 
de  la  Grande-Bretagne ,  en  fermant  les 
portsde  rEurope  au  pavilion  anglais.  La 
BussiOf  par  sa  position  geo^aphi^ue , 
o'evait  pas  on  int^rlt  directs  Tabaisse- 
ment  de  la  France  telle  qu'elle  etait  avan  t 
les  conqu^tes  de  la  r^publique;  mais 
rexteoaion  du  nouYel  empire  et  le  moi^ 
pdlemeot  de  la  vieille  Europe  devaient 
Inquieter  mime  les  princes  dont  Teloi- 
gaemeot  n*etait  pas  un  obstacle  pour 


le  gdaie  le  plua  acttf  daa  leffl|pi  tmh 
4arnea.  line  dutle  oewidtotfon  poa-^ 
¥aH  porier  Aleiandra  I  des  meaurea 
hostilea ;  il  Ini  feUait  opter  dntre  l($i 
deux  aHianoea ,  et  les  avantagea  mat^ 
rials  de  aon  empire  le  rapprodialant 
imperieusement  de  la  nation  la  pM 
eommer^ante^  D'tin  ilutr^  edt6,  le 
reste  de  FEarope  a*af&ibliasalt  dana 
eea  luttes  contindellto;  et  la  Rusale^ 
qui  n'exfoaait  qa*ane  partie  de  sea  finr 
eea,  obnaerfait,  qiiellea  <|ije  foasent  lea 
ahaneeade  la  guerre,  une  mitttooadoat 
alle  ae  rteartaitde  tirer  toot  le  parti 
poasiUe.  Moos  verroda  qbe  sea  rerertf 
ne  l*ont  presqoe  pas  araablie  y  tandfa 
mie  sea  Toisiiu  se  aont  ?ua  todt  prte 
ae  leor  nrina  d^tiiltivei 
.  Qoaod  la  politique  est  int^ress^ 
k  me  roptnre,  elle  est  rarement  ar^ 
Utee  par  le  ehoit  d'tib  motif  ou  d'mi 
pf^tflxte :  at  d'ailleora  Napdeon  dea» 
aaitassea^e  prise  k  la  Jahniaia  des  nUh' 
aarques  poor  ne  laor  laisaer  oue  Tern* 
barraa  du  choix.  Le  gioMi  Hcdoorill* 
▼enait  de  ai^ifler  k  la  eour  tsariesMS 
Parenenielit  do  ptemier  oonsid  k  la 
dignity  inneriale.  Alexandre  rdbsa 
de  reeonnakre  le  nooreau  aonverafn , 
et  le  roi  de  So^de  adtvit  eet  eaerapte. 
L'ambassadeur  fran^ais  quitta  imaoe- 
diatement  SaintPetersbourgi 

Les  Dottea  de  la  Baltique  avaient 
d^jli  firanefai  le  Sand  pour  raUier  Fes* 
cadre  anglaise  dans  la  Mediterran^e , 
et  op^er  simultanemeat  sur  las  cdtea 
de  ritaiie.  A  la  mime  Ipoqne,  Napo- 
lion  mlditait  une  desoente  en  Angle^ 
terre;  il  isolait  ainsi  son  eAnemi  de 
rEurope,  et  mena^it  les  descendanta 
de  Guillaume  le  Goncpilrant  de  tout  le 
poids  de  son  Iple  victorieose.  L'An* 

{{ieterre  alarmee  se  bdta  de  dltoHrner 
'Orage  qui  la  meuacait.  Ii  s'agissait  da 
ditermiiker  la  Rosne  a  la  guerre ;  le 
traiti  qui  liait  oette  pulssaaoe  n'ltail 
oue  conditionnel;  son  alliance  avec 
1<  Ansksterre  n*ltait  offenaive  ^^autant 
me  rAutriohe  se  dielarerait  oontre  la 
France ;  or,  TAutricbe,  craignant  d'ltre 
attaqule  et  vaincue  avant  qu'oa  edt  le 
tempade  la  secoorir,  aralt  prialable-' 
ment  reeonnu  I'empereur,  bien  diei- 
dee  d'ailleurs  k  trouver  d*autre8  motiCi 


494 


L*UMIVUIS. 


de  ruplttve  <Ms  ^'ime  cMXMion  favo* 
rable  se  prtenlerait.  II  ialfaut  done 
dtooDtrer  a  rAutriche  qu'eile  n'db- 
tiendrait  rien  par  la  paii ,  at  entamer 
dca  DteNaations  am  donnassent  le 
lonpa  d'orgaaiser  ies  dements  d'tine 
lutte  puissante. 
«  Four  decider  I'Autriche,  on  fet- 

Eit ,  dit  Rabbe « d*entrer  dans  ses  d4- 
s  padfiques;  la  Ruasie  alia  m^me 
jvsqa'ji  proposer,  pir  rintermediaire 
de  Berlin ,  sa  mediation  entre  la  France 
ft  I'Analeterre.  Gette  mMiation  avant 
M  agrfte  k  Paris,  M.deNofos8iJtzof 
liitenvov^  h  Berlin  avec  de  pleins  pou« 
▼oirs.  U  U  derait  obtenir  des  passe- 
ports  du  gou?emement  franqais  pour 
se  rendre  k  Paris.  Mais  il  avait  ordre 
de  n'aocapter  les  pasMjiKNrts  qu*^  la 
condition,  qu'il  traiterait  immediate* 
ment  a? ee  le  chef  du  goarernement 
firaofais ,  sans  reoonnat^  k  nouTeaa 
titae  qu'U  s^^tait  donne,  et  que  Bona- 
parte assureraitpositivementqu'il  4tait 
anini6  du  m6me  d^ir  de  pais  giin^rale 

£i'ii  avait  paro  manifester  dans  sa 
ttre  au  roi  d'Angleterre.  Les  passe- 
ports  de  M.  de  Novossiltzof  tiirent  ei- 
p4di^  sans  difiBcult^;  mais  cet  agent 
re<pit  en  mime  tanps  la  dtfense  d*en 
faire  usage. » 

A  rinstant  mime  o(i  la  Russie  et  la 
SuMeeontestaient  h  Napoilon  le  titre 
d'empereur,  rblritier  de  la  rl?oiution 
Iran^ise,  comme  pour  justifier  oette 
ambitieuse  dinommation,  ajootait  k 
sa  oouronne  oelle  dltaiie,  et  reunis- 
sait  k  ses  £tats  la  ripublique  ligu- 
rienne.  Ce  n*ltait  pas  le  moyen  de 
faire  taire  les  scmpuies  diplomatiques 
de  Petersbour^  et  ae  Stocknolm ;  aussi 
IL  de  Novossiltzof ,  en  quittant  Ber- 
lin., remit ,  le  10  juillet ,  au  ministre 
d'Etat,  baron  de  Hardenberg,  une 
note  dans  laquelie  la  reunion  de  r£tat 
de  GInes  Itait  prlsent^  comme  une 
cause  diflnitive  de  rupture.  «  II  ^tait 
impossible,  disait  Tagent  russe,  de 
eroire  que  Bonaparte,  en  exp6diant 
les  passe-ports  oui  Itaientaccompagn^ 
des  assurances  lee  plus  pacifiques ,  edt 
sirieusement  sougl  k  sy  conformer , 
puisque ,  dans  le  temps  qui  devait  s'l- 
couler  entre  Texpedition  des  passe- 


ports  et  Tarrivle  du  nigoeiateiir  i 
Paris ,  il  hAtait  des  mesures  qui,  loin 
de  feciliter  le  ritablisseroent  de  la 

r'x ,  Itaient  de  nature  k  en  dltruire 
principe. » 

11  est  assei  curieux  de  remarquer, 
a  Tocoasion  des  repugnances  de  la  Ros- 
sie  et  de  la  Sumo,  que  de  ces  deux 
puissances  la  premi^  ne  datait  son 
existence  politique  en  Europe  que  d*en- 
viron  nn  sidcle ,  tandis  que  la  seeonde 
allait  se  donner  pour  souverain  un 
lieutenant  de  N^pollon. 

Le  cabinet  des  Tuileries  combattait 
par  des  articles  officiels  les  priten* 
tions  de  la  Russie  k  rigler  les  afEaires 
du  continent.  «  Qu'ont  de  common  la 
France,  et  la  Russie  indlpendantes 
Tune  de  Tautre;  elles  sont  respecti- 
vementnulles  pourse  nuire,  et  toutes- 

{missantes  pour  se  faire  du  bien.  Si 
'empereur  des  Fran^ais  exeroe  une 
grande  influence  en  Italic,  Tempereur 
de  Russie  exerce  une  influence  plus 
grande  encore  sur  la  Porte  Ottomaoe 
et  sur  la  Perse.  L'une  a  une  influence 
droonscrite  qui  ne  ^6tend  pas  au  delih 
des  discussions  relatites  k  ses  limites, 
et  n'augmente  pas  sa  force  d'une  ma- 
nure majeure;  I'autre,  au  contraire, 
exeroe  son  influence  sur  deux  puis- 
sances de  premier  ordre  qui  fiirent 
longtemps  au  mime  rang  politimie 
que  la  France  et  la  Russie,  et  qui  do* 
minent  sur  les  Arabics ,  la  mer  Cas- 

Sienne  et  la  mer  Noire.  Si  le  cabinet 
e  Russie  pretend  avoir  le  droit  de 
fixer  les  limites  ou  la  France  doit  s'ar- 
rltw,  il  est  sans  doute  aussi  disposi  k 
permettre  que  Tempereur  des  Francais 
lui  prescrive  les  limites  dans  lesquelles 
il  doit  se  renfermer...  On  a  partagi  la 
Pologne :  il  a  fallu  que  la  France  eOt 
la  Beigique  et  la  rive  du  Rhin ;  on  s^est 
enipar^  de  la  Crimie ,  du  Caucase ,  de 
rembouchure  du  Phase ,  etc.:  il  faut 
que  la  France  ait  un  equivalent  en 
Europe ;  1  intlrit  de  sa  propre  conser- 
vation Texige.  Veut-on  un  congrss 
genlrai  de  TEurope?  Eh  bien!  que 
chaque  puissance  mette  k  la  disposi- 
tion de  ce  congr^  ce  qu*on  a  envahi 
depuis  cinquante  ans;  qu*on  rltablisse 
la  Pologne,  qu*on  rende  Venise  aq 


RUSSIR. 


495 


S^oat^  la  Trintte  k  TEspacne^  Ceylan 
a  la  Hollande,  la  Cnmee  a  la  Porte; 
qu*on  renonoe  au  Phase  et  au  Bos- 
phore  ;  qu'on  restitue  le  Caucase  et  la 
Gtergie;  qu'on  laisse  la  Perse  respirer 
apr^  tant  de  malbears;  que  Tetiipire 
dea  Marattes  et  de  Mysore  soit  r^- 
Miy  oa  ne  soit  plus  t'exclustve  pro- 
pria de  rAngletenre.  La  France 
alors  pourra  reotrer  dans  ses  anciennes 
limites...  II  est  a  la  mode  d^accuser 
rambition  de  la  France.  Si  cependant 
elle  avait  yoqIu  oonserver  ses  con- 
qn^tes,  la  rooiti^  de  TAutriche,  lei 
Etats  de  Venise ,  le  royaume  de  Na- 
ples, la  Suisse,  la  Hollande,  seraient 
encore  en  son  pouroir.  Les  limites  da 
la  France  sont  en  reality  TAdige  et  le 
Rhin:  a-t-eile  pass6  FAdige?  a-t-elle 
pass^  le  Rhio  ?  Si  elle  ne  prit  pas  pour 
linutea  la  Save  et  la  Dra?e ,  y  flit-elle 
oontrainte  par  la  force  Ties  armes ,  ou 
fut-elle  d6terroin6e  par  une  noble  mo- 
deration... La  politique  des  puissances 
da  Nord  fnt  toujours  d'exciter  des 
goerres  dont  elles  n^avaient  rien  k  re- 
dmiter.  C'est  ainsi  que  Catherine  fit 
battre  pendant  plusieurs  annto  la 
Prasse  et  rAutnche,  en  annon^nt 
des  secoars  qui  n'empSch^rent  pas  les 
armto  francaises  d'arriter  aux  portes 
de  Vienoe.  Cest  ainsi  que  le  dernier 
empereur  de  Russie  perp^tua  les  cala- 
mity de  la  jguerre,  en  promettant  des 
secoors  out  n'arriv^rent  qu'an  mo- 
ment oik  rAutricbe  afait  obtenu  des 
sneo^  sans  eux ,  qui  se  retir^rent  au 
premier  refers ,  et  laissdrent ,  au  mi- 
lieu d'une  campa^e ,  leurs  allies  sup- 
porter seuls  le  iardeau.  qu*ils  avaient 
promis  de  partager.  »  {MonUeur). 

Cependant  I'Autriche  levait  des  troo- 
pes ,  fortifiait  les  passages  susoeptibles 
de  defense ,  et  portait  des  forces  im- 
posantes  du.cot^  de  la  Bavtere.  Le 
gouvernement  demanda  des  explica- 
tions; et,  apr^  cjuelques  temporisa- 
tions ,  le  cabinet  de  Vienna  feignit  de 
Yoaloir  iotenrenir  comme  m^diateur 
entre  la  Russie  et  la  France.  La  Pnisse , 
quoique  moins  int^ress^  aue  TAu- 
triche  k  la  repression  immediate  des 
empi^teinents  successifs  de  Napoleon , 
n*en  d^rait  pas  moins  la  guerre; 


mats ,  cratgnant  de  s*avancer  trop  tdt , 
elle  venait  de  refuser  a  Alexandre  le 
passage  de  ses  troupes  k  travers  son 
territoire.  L*archiduc  Jean ,  le  gen^l 
Mack  et  Tarchiduc  Ferdinand  enmrent 
en  campagne  avec  quatre-vin^-dix 
mille  hommes ,  et  oocup^ent  jila  fois 
la  Ravine,  les  gorges  du  Tyrol  et  lea 
rires  de  TAdige  (Rabbe).  Napolton  fot 
bientdt  en  ^tat  de  faire  face  k  cette 
nouvelle  coalition.  « II  a?ait  rcQU  la 
noovelle  de  Tarrivi^e  de  Villeneuve 
dans  un  port  d'Rspagne;  d^  lors  ih 
avait  yu  rexp^ition  de  TAngleterre 
aTort^ ,  les  immenses  d^penses  de  la 
flotte  et  de  la  flottlile  perdues  pour 
longtemps,  pour  toujours  peut-^tre... 
Dans  Temportement  dhme  fureur  qui 
ne  permet  pas  m^me  aux  autres  bom« 
mes  de  conserver  leur  jugement,  11 
avait  pris  une  relation  des  plus  har- 
dies, et  trac^  un  des  plans  de  cam- 
pagne les  plus  admirables  qu*aucun 
conqu^rant  ait  pu  concevoir  k  loisir  et 
de  san^  froid ;  sans  baiter,  sans  s'ar- 
r^ter,  il  dicta  en  entier  le  plan  de  la 
campagne  d'Austerlitz ,  le  depart  de 
tout  le  corps  d*arm^,  depuis  le  Ha- 
novre  et  la  Hollande  iusqu^aux  conOns 
de  Touest  et  du  sua  de  la  France; 
Fordre  des  marches,  leur  dur6e,  les 
lieux  de  conTcrgence  et  de  reunion  des 
colonnes ;  les  surprises  et  les  attaques 
de  vive  force ,  les  mouvements  divers 
de  Tennemi ,  tout  fut  pr^vu ,  la  vio> 
toire  assur6ie  dans  toutes  les  bypo- 
tb^s.  Tdles  toient  la  iustesse  et  la 
vaste  pr^Yoyance  de  ce  plan ,  que ,  sur 
une  Iigne  de  d^art  de  deux  cents 
Heues ,  des  lignes  d*op^ration  de  trois 
cents  lieues  de  longueur  furent  suivies 
d'apr^  les  indications  primitives,  jour 
par  jour ,  et  lieue  par  lieue ,  jusqu*li 
Munich.  Au  del^  de  cette  capitale,  lee 
6poques  scales  subirent  quelque  alte- 
ration ;  mais  les  lieux  furent  atteints, 
et  I'ensemble  du  plan  fut  couronne 
d'un  suoc^  complet  (Dam).  Apr^ 
vingt  jours  de  campagne ,  Vienne  ou- 
vrit  ses  portes  au  vainqueur,  dont  le 
g6nie,  puissamment  seconde  par  des 
g^n^raux  habiles ,  fut  encore  servi  par 
les  feute^  de  Tennemi ;  la  marche  lente 
des  Busses,  Tiiid^ision  de  Kouton* 


496 


L*UNI¥£RS. 


mf ,  rhteitation  intempMUve  de  la 
Prusse,  etla  oonduitede  Mack  aUlm, 
coBtribadrent  au  suoete  de  cette  m^ 
inorablejournee. 

Alexandre  a'^tait  rendu  k  Berlin  le 
85  octobre  (Rabbe).  11  fut  refu  avee 
enthousiasme  par  la  cour  et  pwr  le 
peuple.  L'unanimit^de  oes  dispoaitiont 
lui  rendit  plus  fadle  racoompliase- 
oient  du  dessein  qui  Pamenait  dans  la 
capitale  de  Fr6d^ric-Gnillaume  III, 
II  venait ,  invoquant  le  pacte  jur6  entre 
eux  en  1809  f  le  rallier  a  celui  qui  unis* 
salt  de  nouveau  l*Kurope  ocmtre  la 
France.  Sa  prince  et  ses  instances 
nc  fiirent  point  vaines :  il  quitta  Pots* 
dam,  apres  avoir  visits ^  ^  Theure  de 
niinuit ,  le  tombeau  de  Fr^ric  avee 
le  roi  de  Prusse  et  sa  femrae.  On  dit 
que  les  deux  souverains  se  jur^renl 
une  inviolable  amiti^  sur  la  tombe  de 
ce  grand  homme.  De  1^  Alexandre  se 
rendit  a  Weimar,  puis  k  Dresde  ou  il 
arriva  le  11  novembre^  Trois  jours 
apn^  il  joignit  Tempereur  Francois  k 
Olmiitz,  au  moment  m^me  ou  la 
deuxieme  arm6e  russe ,  aux  ordres  du 
g^n^al  Buxbovden,  aprds  avoir  tra- 
verse la  Gallicie  et  la  Mora  vie,  don- 
nait  la  main  k  la  premiere  arm^  russe 
que  oommandait  Koutousof.  R^nnis 
au  nombre  de  soixante  et  dix  mille 
hommes  sous  le  commandement  de  ce 
vieux  general  .jies  deux  corps  d'arm^ 
combattirent  a  Austerlitz ;  TAutriche 
consternee  ^talt  cependant  parvenue 
a  rassembler  encore  pr^  de  trente 
mille  bommes. 

Malgre  les  Cnutes  de  Koutousof,  la 
victoire  fut  sanglante  et  longtemps 
disputee.  Les  pertes  de  Tarm^e  com- 
bing furent  immenses ;  *  elle  etait  de 
quatre-vihgt-deux  mille  bommes,  et 
le  nombre  de  oeux  qui  fiirent  mis  bors 
de  combat  s'^eva  a  plus  de  quarante 
miHe  hommes;  en  effet,  on  compta 
pr^  de  dix  mille  morts  sur  le  ehamp 
de  bataille ;  dix-neuf  mille  Russes  et 
six  cents  AutrichieDS  furent  faits  pri- 
sonniers;  et  dix  mille  autres,  selon 
toutes  les  apparences,  furent  disper- 
ses ou  engloutis  sous  la  glace  des  lacs. 
Trois  lieutenants  g^ndraux,  six  g6- 
n^raux-roajors ,  vingt  officiers  supig- 


rieurs,  et  plus  de  hull  cents  aulr«i 
offieierS  s«  tmuv^at  parmi  les  pri* 
aooniers;  les  pertes  en  materiel  ne 
liirent  pas  momdres ;  qoarante-cinq 
drapeanx ,  crat  quatre-vin^ix  pieces 
de  canon,  quatre  cents  voitutes  d*ar* 
tiUerie ,  tons  les  gros  Equipages  et  une 
quantity  de  chevaux  furent  les  trophte 
et  le  butin  des  veinqueurs  d'Anster* 
liti.  , 

« ImmMiatenient  aprte  Tissue'  de 
cette  dtostreuse  joorMe  (9  ddcemfare 
1806),  un  envoys  d^  alli& ,  le  prince 
Jean  de  Licfatenstein ,  arriva  au  camp 
fran^ais :  il  venait  en  touts  hlte ,  au 
nom  du  souverain  qui  oommandait  Tar- 
m^e  combing,  demander  un  armis^ 
tioe  et  proposer  une  entrevue,  afin 
d*en  r^fer  plus  promptement  les  con- 
ditions ,  en  attendant  qu'on  pdt  n^o- 
cier  une  paix  s^r^.  Cette  dtoarche 
fit  connattre  la  confusion  et  le  d^rdra 
extreme  des  alli^.  On  se  hdtad'en  pro- 
fiter;  et,  d^s  la  pointe  du  jour,  toute 
Tarm^  tran^aise  fut  mise  en  mouve* 
ment  pour  achever  d'teraser  Tarm^ 
vaincue. »  (Prteis  des  ^v^neinettts  mi- 
litaires.) 

Francis  II  vint  lui-m^fime  au  hi* 
vac  de  NapoMon  solliciter  la  g^n^* 
rosite  du  vainqueur^  MapoMon  s^avan^a 
k  sa  rencontre,  et  lui  dit,  en  rinvi- 
tant  k  entr«*  dans  la  nmsure  ou  ^tatt 
allum^  le  feu  du  bivac  :  Je  rxms  re- 
foU  dans  le  seul  paiaiB  guefhabiie 
4e/mi$  deux  moU^  Un  armistice  tat 
accorde ;  et ,  pour  premiere  conditiofi , 
les  Russes  durent  ^vacuer  le  territoire 
autrichien  et  se  retirer  k  travers  les 
monts  Krapaks. 

L'empereur  Alexandre,  observe  Rab* 
be,  ne  pouvait  reAiser  le  bienfait  de 
Tarmistice,  dont  |il  avait  besoin  pour 
operer  sa  retraite  et  sauver  les  d6bri« 
de  son  arm^c}  n)ais  il  manitesta  son 
^oignement  absolu  pour  toute  parti- 
cipation au  traits  quel' Autricbe  pour- 
rait  ult^rieurement  conelure  avee  la 
France. 

L*aide  de  camp  (de  Tempereur,  le 
general  Savary,  avait  acoompagn^  I'em- 
pereur  d'Auoriche,  apres  rentrevue, 
pour  savoir  si  Tempereur  de  Russie 
adb^ait  a  la  capitulation.  11  trouvn  les 


KUSSIB. 


497 


^Mdft  Vwrnte  rasM  sms  artiUerie 
nfaieagB,  et  dans  un  ^poiivantable 
dnorore;  U  ^tait  miaait;  le  gentol 
Ifeerfeld  avait^t^  repousse  de  Godding 
j^  It  maredial  Davoust ;  rann^  nisse 
elait  oern^;  paa  an  homme  oe  pou?ait 
eebappcr.  Le  prince  Czartoriski  iutro- 
doisit  le  ^^(fewSaTary  prte  d' Alexan- 
dre; « Bitea li  voire  mattre,  lat cria  ce 
prinoe,  que  je  m'en  vais;  qu'it  a  fait 
ker  des  miraclea  ,  que  oette  journ^e  a 
aoeru  mon  admiranoa  pour  kihque 
e'en  un  pr^deatiii^  da  ctd;  qoMl  faut 
a  iDon  aime  cent  ms  poor  egaler  la 
sienne.  Mais  ^a^e  loe  retirer  en  sA- 
rete?...  — Oui^sirOt  lui  dit  le g^o^ral 
SaTary ,  si  Yotre  Majeit^  ratifie  oe  qua 
les  deox  empereiurs  de  France  et  d'Al- 
iemagne  ont  arrdtd  dans  leur  entre- 
voe.  ^ Et  qu'est-ee?  —  Qne  Tarm^ 
de  Votre  Majesty  se  retirera  cbes  elle , 
par  Ves  joum^es  d'^tape  {pii  seront 
r^glte  par  Pemperear,  et  qu'elle  era- 
caera  P  Attemagne  et  la  Pologne  autri* 
ebicnne.  A  eette  condition ,  j*ai  Pordre 
de   Pempereor  de  me  rendre  h  nos 
arant^iostes  qui  voot  ont  d^a  tour- 
Bee ,  et  d*j  donner  les  ordres  pour  pro- 
tef^ET  Totre  retraite,  reiDpereur  vou- 
laml  reneeter  Pami  du  premier  consul. 

—  Queue  garantie  £aat*il  pour  ceta? 

—  Sire,  YOtrc  parole.  —  Je  voos  la 
•  OA  aide  de  can>p  partit  sur- 

DO  au  grand  galop,  se  rendit 
an  mar^chal  Davoust,  aoquel 
tl  dcMioa  Pordre  de  cesser  tout  mouve- 
mefit  et .  tonte  attaque*  Puisse  cette 
geadrositedePempereor  desFran^ais  ne 
pas  toeoubli^een  Russieaossi  promp- 
tement  que  lefut  le  beau  proc^edu  pre- 
mier consul  ,  qui  rcAvofa  h.  Pempereur 
Paul  six  mille  bommes ,  avec  tant  de 
grftce  et  de  marques  d'estime  pour  lui. 
Le  gte^ral  Savary  avait  caus^  une 
henre  avec  Pemperear  de'Eussie,  et 
Parait  troure  tei  qoe  doit  dtre  un 
hooime  de  cteur  et  de  sens ,  quelques 
refers  d*aiileurs  qa'il  sit  ^piouv^.  Ce 
onnarque  lui  demanda  des  details  sur 
la  ioumee.  «yoas^tiez  in^rieurs  h  moi , 
Iw  dit-il ,  et  cepeadant  vous  6tiez  su- 
p^rioirs  sut-  tous  les  points  d*attaque. . . 
-^rtn  repondit  leg^neral  Savary,  c'est 
tvt  de  la  guerre ,  et  le  fruit  deqninze 


ans  degloira ;  e^est  la  quaranliime  ba- 
taille  qoe  donne  Pempereur.  —  Cela 
dst  vrai;  c*est  an  grand  homme  de 
ffoerre.  Pour  mol,  c*est  la  premiere 
fois  que  je  vois  le  feu.  Je  n*ai  jamais 
eu  la  prmntlon  de  ui»  mesurer  avec 
loi.  ^Sire,  quand  tous  aurez  de  Pex*. 

grricnce,  vous  le  surpasserez  peut- 
re.  —  Je  m*en  rais  done  dans  ma  ca- 
{»itale.  ratals  venu  au  seoours  de 
'empereur  d'AHemagne;  il  m*a  fait 
direqu*il  est  content.  Je  le  suis  aussi.  » 
( Extrait  d*un  bulletin  dat^  d*Auster- 
litz ,  17  d^oembre  1605.) 

Le  roi  de  Pn»se  en  ^It  r^uit  k 
se  f(61ieiter  d'avoir  laiss^  battre  les 
deox  empereors  Alexandre  et  Fran- 
a)is.  Le  mioistre  Haugwitz ,  parti  de 
Berlin  pour  se  readre  au  quartier  ge- 
nial des  alli^ ,  en  apprenant  le  sort 
de  leurs  armes,  se  rend  h  celui  de 
Napol^n ,  et  le  felicite  sur  sa  victoire : 
ft  Voilli ,  dit  le  vainqueur  d*Austerlitz , 
«  un  compliment  dont  la  fortune  a 
«  change  Padresse. » 

Tandis  que  Parm^e  russe  se  dirigeatt 
sur  la  Sil^ie ,  le  grand-due  Constantin 
se  rendit  k  Berlin,  declarant,  au  nom 
d' Alexandre ,  que  les  troupes  ^taient 
h  la  disposition  du  roi ;  cette  demande , 
conforme  aox  traits ,  pouvait  paraltre 
une  satire  de  la  Conduite  de  Fr6d^rjc- 
Guillaume;  ce  prince,  qui  avait  craint 
d*agir  quand  les  chances  de  la  guerre 
pouTaient  lui  ftre  ftvorables,  n*eut 
garde  de  proilter  de  cette  offre  dans 
des  circonstances  si  d^astreuses.  Tou- 
tes  les  operations  militaires  qui  se  rat- 
tachaient  au  plan  des  allies  manqudrent 
par  une  consequence  naturelle  de  la 
joum^e  d*Austerlitz :  un  corps  d*An- 
glo^Aosses,  rassembM  dans  le  nord 
de  PAIlemagne ,  ainsi  qu*un  autre  en- 
voyd  dans  le  royaume  de  Naples ,  four- 
nirent  k  Napol^n  des  pretextes  plau- 
sibles  pour  formoler  nettement  ses 
vues  d*agrandissement.  «  La  dynastie 
«  des  Bourbons  a  cess^  de  rpgner,  » 
s'^cria-t-il  dans  une  proclamation 
adress^e  au  corps  d'armee  de  Joseph ; 
et  la  fortune  ratifla  cet  arr^t. 

D'apr^s  la  convention  provisoire 
conclue  k  Vienne  le  1 5  d^cembre ,  la 
Prussc  c^dait  «t  la  France  les  tcrri- 


438 


L'UNIVEES. 


toiree  d'Anspach  et  de  Bareuth,  Cie- 
ves ,  Neufchdtel ,  et  obtenait  en  d^om- 
magemeot  la  faculU^  d'oocuper  la 
Flandre,  apres  eo  avoir  d^posseae  le  roi 
d'Angleterre. 

Le  traiU  de  Preabourg  ( 36  decern* 
bre)  statua  aur  lea  sacrinoes  impost 
h  I'Autriche.  Lea  anciena  tUts  de  Ve- 
il ise,  en  J  comprenant  la  Dalmatie  et 
rAlbanie,furent  r^uois  h  I'ltalie.  La 
principaut^  d'Eichatadt,  une  partie  de 
rex-^v^cb^  de  Nassau ,  la  ville  d'Auga* 
bourg ,  le  Tyrol ,  toutea  lea  noasesaiona 
autricbiennes  en  Souabe,  aans  le  Bris- 

fau  et  rOrtenau ,  furent  tranaport^ea 
r^lecteur  de  Bavidre,  au  ouc  de 
Wurtemberg  et  au  due  de  Bade.  Lea 
deux  premiers  furent  cr6^  rois  [)ar  le 
vainqueur.  C*e$t  ainai  que  TAutriche, 
depouill^  de  aa  suprtoatie ,  se  vit  r^ 
(iuite  h  un  r61e  secondaire  et  pour 
lon^temps  inofTensif.  Mais,  non  moina 
patiente  dans  aea  refers  qu*babile  k 
profiler  de  ses  avantagea ,  cette  puis- 
sance toumait  ses  esperances  vera  la 
Russie,  et  attendait  ue  la  fortune  dea 
chances  moins  d^avorables.  A  bien 
considerer  les  6I^ment8  de  la  pr^pon* 
deranoe  francaise,  on  ne  pouvait  se 
disaimuler  qvr^le  ne  pouvait  subsister 
que  par  la  victoire;  au  moindre  ^ec , 
les  nationality  absorbdea  par  la  con* 

3u£te  devaient  se  detacher  d*un  ordre 
e  cbosea  improvise  par  des  trait^a 
sans  ^tre  dans  les  moeura ;  et  m^me  en 
regardant  la  France  comme  reprfeent6e 
par  aon  ancien  territoire  et  sea  acqui- 
sitions recentes ,  il  ^tait  ais^  de  voir 
que  les  forces  oombin^es  des  nations 
rivales  pouvaient  longtempsoontre-ba- 
lancer  reffort  de  ses  armes ,  et  mettre 
sans  cease  en  question  son  existence 
politique. 

Aprb  r^change  des  ratificationa , 
Napoleon  eut  une  entrevue  avec  Tar- 
chiduc  Charles  au  chateau  de  Stam* 
merdorf;  il  y  fut  question,  dit-on, 
dudemembrementde  laTuruuie,  qu*il 
s*agissait  de  soustraire  a  rinfluenoe 
ambitieuse  des  Busses.  Le  moment 
n^etait  pas  bien  choisi  poiir  ^veiller  les 
craintes  de  FAutriche  sur  lea  empi^te- 
ments  successifs  de  la  Russie  vers 
rOricnt ;  aussi  If  prince  Charles  evita- 


t^il  de  se  prononcer  aur  une  aueatioB 
qui  ne  toudiait  point  aux  interdts  du 
moment.  Cepenaant  la  sollicitude  de 
Tempereur  n*toit  pas  aans  fonde- 
ment :  en  1804 ,  la  Rusaie,  qui  se  pr6> 
parait  h  &ire  la  guerre  a  la  Livonie , 
avait  616  sur  le  point  d*obtenir  du  di- 
van un  traits  d'allianoe  d^fenaive  et 
offensive;  maia  une  clauae  ins^r^ 
dans  les  stipulations  onvrit  les  yeox 
de  S^lim.  £ile  portait  que  toua  les 
musulmana  professant  la  religioD 
grea]ue  aeraient  plac^  sous  la  pro- 
tection imm^iate  dea  af^nts  russes. 
S^Iim  et  son  conseil  se  rtoterent  oontre 
de  telles  pretentions.  La  Turquie  n*^- 
tait  pas  en  6tat  d^appuyer  ses  griefs 

Sar  des  forces  imposantes ;  la  revolte 
u  pacha  de  Trd)izonde « et  tea  incur- 
sions dea  W^abites  tenaient  en  6chec 
les  troupes  disponibles ;  et ,  en  peu  de 
jours ,  rarm^  d'Odessa  nouvait  me- 
nacer  les  c6tes  du  Bospnore ,  tandis 
que  les  ties  loniennes ,  la  Mor^ ,  la 
Thessalie,  I'^pire,  et  mtoe  la  Mol- 
davia et  la  Yalachie  deviendraient  si- 
multan^ment  autant  de  centrea  d'tn- 
surrection.  La  Russie,  dans  d'outres 
circonatanoes ,  edt  pu  tout  exiger; 
maia,  absorbite  par  lea  pr^ratifs 
d'une  lutte  accuse ,  die  se  contenta  dt 
renouveler ,  pour  huit  ana,  le  traits  de 
1798.  A  peine  ce  traits  ^tait-il  conelu 
que  la  nouvelle  de  la  bataille  d'Auater> 
litz  parvint  k  Conatantinople.  Lea  dia- 

rtsitions  de  Tempereur  des  Fran^^ia 
r^ard  de  la  Turguie  ^aient  moina 
favorables  ii  cette  puissance  (]u*hostile8 
h  la  Russie ;  cependant  le  divan  apprit 
avec  jole  la  dtfaite  des  Russes ,  dans 
I'eapoir  que  la  lutte,  en  prenant  TAl- 
lemagne  pour  th^dtre,  d^toumerait 
pour  longtempa  les  armes  de  feropire 
moscovite  occupy  de  sa  propre  con- 
servation. Malgr^  les  efforts  de  M. 
dltalinski ,  et  ceux  du  ministre  an- 
glais, la  Porte  reconnut  Napoleon 
comme  empereur,  et  envoya  un  am- 
basaadeur  a  Paris ,  avec  dea  felidta* 
tions  et  de  riches  pr^ents. 

Cependant  la  Russie  songeait  a  re- 
parer  T^bec  aoe  venaient  de  reoevoir 
ses' armes  :  il  lui  importait  dene  point 
laisser  a  Napoleon  le  temps  de  con« 


k 


RUSSIK. 


439 


solider  sa  puissance.  (1806.)  Alexandre 
se  crat  menie  assez  fort  pour  roister 
snil  au  g^nie  de  son  radoutable  ad- 
Tersaire;  il  signifia  k  FrM^ric-Guil- 
laume  III  qu*il  le  degageait  de  sa  pro- 
mesae  d^agir  simiutaiitoent  cootre 
fa  France «  mais  en  lui  oilrant,  sMI 
etait  encore  dispose  k  combattre,  de 
mettre  a  sa  disposition  Tarm^  du  Ha- 
novre ,  sous  les  ordres  de  Tolstoi ,  et 
k»  troupes  que  Benlngsen  conduisait 
en  Sil^ie.  Dans  la  situation  pr^nte, 
il  y  avait  plus  de  danger  pour  la  Pnisse 
a  accueillir  ces  demidres  oflfres  qu'k 
les  d^iner ;  cependant  le  roi ,  cMant 
a  rentralnementbelliqueux  du  parti  de 
b  oour,  envoya  le  due  de  Brunswick 
a  Petersbours ,  pour  y  arr^ter  les  bases 
d^ane  ncnivelie  coalition. 

On  s'^i  t  flatt6  h  Paris  que  la  victoire 
d'Austerlitz  aratoerait  une  paix  g^n^* 
rale;  la  Russie,  ne  voyant  dans  les 
menagenients  de  Napoleon  qu'nn  sa- 
crifice int^esae  pour  Tenlacer  dans 
son  alliance,  resta  queique  temps 
ind^dse;  enfin,  au  mois  de  juillet, 
M.  d'Oubril  arriva  k  Paris,  et  la 
paix  tat  sign^  le  1*'  aodt  suiTant. 
Cependant,  qaoique  Tagent  rosse  edt 
les  pou^oirs  n^c^aires,  cette  paix  ne 
flit  point  ratifi^,  sous  le  pr^texte  que 
le  dijiloniate  s'^tait  tort^  de  ses  ins- 
tructions: les  conditions  stipulaient: 
la  cessation  immolate  des  hostility , 
la  remise  aux  troupes  fran^ises  des 
boaches  du  Cattaro,  le  retablisse- 
meot  de  la  r^blique  de  Raguse  dans 
son  ancienne  md^pendance,  la  retraite 
et  ramnistie  des  Montenegrins,  la  ga- 
rantie  mutuelle  de  Tindependanee  des 
Sept-Iles,  celle  des  possessions  de  la 
Porte...  Uarticle  7 ,  le  seul  d*une  im- 
portance generate,  et  oui  sans  doute 
avait  determine  le  plenipotentiaire 
ruase,  etait  ainsi  conqu  :  Aussitdt 

ten  vertu  de  la  presente  convention 
paix ,  Fordre  aura  ete  donne  pour 
re?acoation  des  bouches  du  Cattaro , 
les  troupes  francaises,  en  foisant  ces- 
ser toute  occasion  d'hostilites ,  se  re- 
tireront  de  fAllemagne.  S.  M.  I'empe- 
reuf  Napoleon  declare  que  toutes  ses 
tvoupes  retourneroot  en  France  au 
pins  tard  dans  trois  mois ,  et  k  dater 


de  la  signature  du  traHe.  Par  Tarticle  8 , 
les  deux  empereurs  se  promettaient 
d'employer  leurs  bons  offices  pour  ter- 
miner la  guerre  entre  ia  Prusse  et  la 
Suede.  Enfin,  par  Tarttde  9,  I'empe- 
renr  des  Frati^ais  acceptait  les  bons 
offices  offerts  par  rcmpereur  de  Rus- 
sie  pour  le  retablissement  de  la  paix 
maritime. 

M.  d'Oubril  ayait  pressenti ,  d'aprte 
un  changement  de  roinfstere  qui  avait 
eu  lieu  a  Saint-Petersbourg  pendant 
son  absence ,  que  cet  arrangement  ne 
serait  pas  compietement  approuve, 
puisqu'en  partant  de  Paris,  il  dit  a 
rambassadeur  anglais : «  Jevais  mettre 
aux  pieds  de  Penmereur  mon  ouvrtwe 
et  ma  i6ie. » (Rabbe.)  Le  parti  anglais, 
qui  prenait  un  ascendant  marque  dans 
le  cabinet  russe,  aima  mieux  faire  de- 
saTouer  le  negociateur  que  de  subir  les 
consequences  du  traite;  et  la  question 
de  personnes ,  qui  se  cacbe  si  souvent 
sous  les  motifk  politiques ,  ne  fut  pas, 
diVon ,  etrangere  k  cmt  mesure  ultra- 
diplonMitique.  D'autres  ont  pretendu 
que  la  surprise  de  M.  d'Ckibnl ,  apris 
le  desavea  de  sa  conduite ,  Mait  peu 
sincere,  et  qu'il  poussa  le  zeie  et  le 
devouement  jusou  &  se  preter  a  une 
combinaison  prqutree  d  avanoe  dana 
le  but  de  gagner  du  temps.  Comma 
les  cabinets  se  piquent  peu  de  loyaute, 
il  n'est  pas  etonnant  que ,  dans  I'in- 
terpretatton  de  leurs  vuea  secretes, 
on  aille  guelguefois  au  delik  de  leurs 
propres  mspirations. 

Le  maovais  vouloir  de  la  Prusse  k 
regard  de  la  France  n*etait  plus  un 
mystere  pour  Napoleon.  II  n*ignorait 

gas  qu^lk  1  instant  meme  oiii  le  ministre 
[augwitz  acceptait  les  clauses  da  traite 
de  Vienne,  le  cabinet  de  Berlin  se 
liait  plus  etroitement  avec  les  ooun  de 
Petersbourg  et  de  Saint-James.  L'oc- 
cupation  du  Hanorre  etait  jNnesentee 
comme  une  mesure  prorisoire  impo- 
see  par  la  necessite,  et  dont  le  rtoiitat 
Iminediat  etait  d*^oigner  les  Francis 
du  nord  de  rAllemagne.  Mais  Napo- 
leon ,  qui  ne  voubit  pas  k  demi ,  dit 
au  roi  de  Prusse :  «  Je  vous  ai  donne, 
«  il  fiiut  roaintenant  que  vous  preniez. 
*  II  faut  surtoot  que  vous  fermiez  aux 


490 


L'UNIVERS. 


«  vaiflseaux  de  TAn^eterre  lea  porls  et 
« remboucbure  dea  fleuves  ou  voua 
«  voil^  mattre  d^nnais. »  En  atten- 
dant que  la  Pniaae  ae  deciddt,  il  fit 
oGcuper  roilitaffiemeot  les  territoirea 
d'Aospacb ,  de  NeiifcbAtel  et  de  Bergt 
et  la  torimsae  de  Weael  re^t  garni^ 
aoD  franoaise. 

Cepenaant  )e  g^nie  de  Napol^oo  1116- 
ditait  >  pour  a'aastirer  de  PAUemagne « 
un  nouvel  ordre  de  chosea  qui « en  equi* 
Ubrant  les  pouvoira  du  corpa  geraia- 
ni^ue,  neutraliserait,  au  proot  de  aa  po- 
Ijtique ,  llnfluence  de  T Autriche  et  de 
la  Pruaae.  En  ee  d^arant  proteeteur 
de  oette  confi^eration ,  il  ae  trouvait 
en  droit  d'eiiger  en  retourune  ooop^ 
ration  active  k  aea  vues  ult^rieurea ; 
ks  £tata  conf^d^r^  devenaient^  dana 
oette  oombinaison ,  autant  de  barrierea 
eontre  une  attaque,  00  de  poates  avan« 
e^«,  a'il  jugeait  n^cesaaire  de  decon- 
eerter  par  des  marchea  rapideaquelque 
Douvelie  coalition. 

Le  roi  de  Prusae ,  pour  contre-baiao- 
eer  les  effets  de  la  nouvelle  confedera- 
tion ,  rdsolnt  dMtablir  une  contre*fdd^ 
ration  dans  le  Nord;  u'est  alora  qu*il 
ae  rapprocha  de  la  Ruasie  et  de  la 
Su^e ,  taodis  qu*il  jetait  des  troupea 
aur  le  ierritoire  aaxon. 

Les  pretentions  de  Napoleon  repoua- 
saient  cette  mesure  de  reciprocite  2  ae 
croyant  en  droit  de  tracer  avec  aon 
fflaive  la  part  du  Taincu^  il  d^clara  quo 
us  villes  ana^atiquea  resteraient  inde- 
pendantes,  et  que  lea  autres  l^^tata  du 
Nord  aeraient  libres  de  n^agir  que  con- 
fermement  k  leur  politique  particu- 
liere.  Prealablement,  il  ordonna'  a  la 
Prusae  d*e?aGuer  la  Saxe. 

De  son  cdt^,  Frederic -Guiliaume 
deraandait :  !<>  que  toutes  les  troupea 
fraMaiaesrepassassentleRbin;  2*qu*il 
ne  rat  plus  mis  de  la  part  de  la  France 
aocun  obstacle  h  la  ligue  du  Nord,  la- 
quelle  embrasaerait,  sans  nulle  except 
tioa ,  tous  les  Etats  dob  desigoes  dana 
I'acte  fondamental  de  la  ooankieration 
du  Rhin ,  qu'il  arait  reconnue ;  8«  qu'on 
ouvrtt  aans  d^lai  une  o^oeiation  pour 
la  disGusaion  des  points  eonteatds. 

Na(K>ieon  recat  cet  ultimatuni  au 
qoartier  gfomide Bamberg;  ilrepon- 


dJt  par  une  proclamation  dat^e  du  6 
octobre ,  dans  laquelle  il  r^la  d'avanee 
la  victoire,  coinnie  si  la  fortune  n*a- 
vait  eu  aucuns  secrets  pour  ce  ^enie 
extraordinaire. 

Les  premieres  hostilites  eurent  lieu 
le  9  octobre.  L'arraee  prussienne  oomp- 
tait  environ  deux  cent  trente  mille 
hommes  bien  disciplines  etd*une  tenue 
magnifique.  La  cavaierie  prussienne  paa- 
aait,  a  cette  epoque,  pour  la  roeilleurede 
TEurope.  Les  champs  dlena  temoi- 
gncrentde  la  superiorite  fran^ise :  les 
Prussiens  essuyerent  uoe  perte  dequa- 
rante  mille  hommes  en  tues,  blesses 
et  prisonnicrs ;  deux  cent  soixante  ca- 
nons furent  les  tropbees  du  vainqueur. 
Vingt-six  generaux  furent  faits  pri- 
sonniers ;  le  due  de  Brunswick  fut 
grievement  blesse ,  ainsi  que  le  mare- 
chal  Mollendorf  et  le  lieutenant  gene- 
ral Scbmettau;  enfin  le  prince  Louis  de 
Prusse  tomba  sur  le  cliamp  de  bataille. 

«  Jl  est  prouve,  dit  RaUbe,  qu*une 
terreur  panique  avail  saisi  cette  armee 
si  fiere  de  sa  discipline ;  et  les  suites 
de  cette  epouvante  furent  horribles  et 
bonteuses.  Les  environs  d'l^a  pre- 
sentaient  le  spectacle  d^ua  champ  de 
bataille  abandonne;  des  soldats  de 
toutes  les  armes,  maintenant  isoies, 
sortaient  des  hois  et  des  bales  ou  iis 
s'etaient  caches ;  les  obemins  et  ia  cam- 
pa|:ne  etaient  semes  de  fusils,  de 
baionnetteSy  de  cuirasses,  de  sacs 
vides  et  de  cartouches  repaodues;  les 
Prussians  avaient  pilie  les  bagages  des 
Saxons,  et  les  Saxons  pillaient  lea 
Prussiens;  les  eharretiers  et  les  valets 
avaient  quitte  la  route  ^  eoupe  les  traits 
des  dievaux  et  verse  les  voitures ;  des 
caissons  et  des  canons  demontes  furent 
abandonnes  par  Ips  condueteun.  On 
trouva  meme  quelques  pieces  en- 
ciouees.  »  On  attribue  generalement  a 
Tindecision  du  due  de  Brunswick  lea 
resultats  funestes  de  oette  joumee. 
Toutes  les  places  fortes  se  rendirent 
Buceessivement :  le  marechal  Blucber 
easaya  seul  de  resistor  dans  Lubeck , 
mab  il  fut  battH  dans  les  murs  mteea 
de  cette  ville.  La  rodditioa  de  Maj^de- 
bourg  oouronna  cette  rapide  et  decisave 
campagne. 


liHtue,  !•  poys  d«  Bnmtwick, 
kHnavie,  tes  ducMs  d'Oldmbourg 
KfcMccUenbourg ,  en  un  mot,  tontt 
thinam  mptentrMNule^  «n  y  &>m- 
(rant  lea  pcnrts  anstetiqan,  wibU- 
Hint  h  joog  ou  iteflueoee  de  h  France 
impiiute ,  a  VexceptiOB  de  Konigiben; 
tt  des  foiU.ti.iiw  de  StralfDDd  et  ile 
bilbers.  La  SiUaie  ttait  rar  le  point 
iTfchamr  ii  la  Prutse  :  te  umicot  (ait 
war  k  lombUH  du  grmnd  FrMtrJc  leai- 
blait  notr  portA  malbenr  i  an  oon- 
iprfla;  il  elM  &lla,  ponr  In  conserv 
«B'  ou  la  repreodFC,  tout  le  grinie  qui 
la  aiait  nttaehia  4  line  couraDiie 
ivceate. 

r.'electcur  de  Sate  >igna ,  k  Poten , 
an  traits  d'oUiance  iTce  Hapoltoa ,  et 
acc«da  a  la  confediration  du  Rhin ;  il 


r  ic 


1   .■ 


encore  «■!»  tamps  delis  t 
noavdledadMatres  li  l< 
taedl,  ill  mliereot  pr>> 
lenrt  lipiM^<Krriire  li  ^ 
oerai  la  jftignjt  bii^ntul . 
suGceitimiient  der^iils  a  i 
MotiruMiB,  a  Ptiltiisk. 
L^  bata)bir£ylau  (7  et 


plus  din 


i:  les  deii 


-iiile;  fen- 
t  in  furent 
i:irnowo,il 
I  (iolTinin. 
f.iiiw)  fet 
rlis  S'sttri- 
-  saoglanta 
tuitt  que  le 
\  t'ran^i. 


buerent  la  noces  de 
journrie;  raus  il  est  i 
diampdebatailla  resl.- 

Lei  opdraticns  riiiiii.iiM'>  raiviir- 
menc^rtot  au  printeiiips  isOT).  Les 
Ruues  furuit  encore  v^jiik  li^  a  Fried- 
laxidimais  its  deployerent  im  grand 
courage,  et  cette  victoire  lut  cnere- 
meat  aebetee. Xa  prise  Je  Kiinigibwg, 
de  Nrisi,  de  Glatz  et  de  Kosel ,  didon*- 
mogea  amplement  Kapoieon  decuBi- 
eoes  dont  il  avail  pny£  cct  nvant^gs : 
les  dbbria  de  rarra^  rasae  prinnt  po- 
iiiioD  derriere  le  Ni6nien. 

Uo  armistice  fut  convenu  intre  lea 
il«ut  empereurs  qui,  btcntut  apria, 
anxrt  one  entrevue  dont  le  risuKat 
denit  chancer  pour  qndquet  annte 
kbttderEon^ 

A.  TUsitt ,  «t  an  railieu  du  NUomo  , 
<a  dera  ua  payfUon  eii  lea  dcm  mo- 
■a^Me  K  rendirait .  suiria  de  Icni* 
Sraolt  offieieii-  Afnii  one  conKrenee 


asset  tongue  et  qui  eut  lieu  sans  t^ 
moins,  ils  te  s^ntrent  avec  toutes 
les  apparences  d'une  satisfaction  niti- 
tuelle.  •  Ce  fut ,  dit  Rabbe ,  un  int^ 
ressant  ipectacle  dout  les  deux  nrmecs 
oui  couTralent  les  denx  bords  du 
(leuve ,  pleines  de  I'heureuse  esp^rance 
d'une  pari  igalemeot  soubait^  des 
deui  nations. 

■  Pendant  le  courg  des  conKrences 
h  Tilsitt ,  qui  commenc^reot  le  lende- 
main  ,  chaoun  des  deux  souterains  se 
montra  ^nlement  empress^  de  donner 
des  timoignage*  d'estime  aiK  per- 
son n  ages  distingu6s  qui  aerompa- 
gnaient  son  fiitur  ami.  napol^n  fut 
auBsi  bienveillaiit  avec  les  Russes 
qu'Alnandre  svec  les  Pran^aia.  Dans 
cet  Change  scnipuleusement  attentif 
de  politesses  souverainea ,  il  edt  Hi 
difBcile  de  distinguer  le  voinqueur  de 
eelui  dont  la  fortune  avail  trahi  la 
cause.  La  Sc^nc  ne  changea  de  carar' 
tere  et  Napolkin  ae  reprjt  son  altitude 
dominatrjoe  que  lorsquc  ie  roi  et  la 
reinede  Prusge  arrivgrent  an  quartier 
g^n^al  de  Ulsitt :  noo  que  Tempereur 
iranrals,  abusant  de  sa  yictoire  ,  ait 
en  la  moindre  pens^  d'ag^raver  par 
un  accueit  insultant  la  position  d  un 
prince  que  le  malheur  occablalt;  au- 
joafd'boi  qua  tant  de  fables  ealom- 
nieuses  soot  dissipies,  on  sail  qu'il 
ne  eeasa  pas  un  moment,  dans  eee 
conf^noes,  de  se  montrer  mogna- 
nime ,  et  qne  sa  g^n^roeit^  ne  p^it 
rien  de  son  prii  a  traTen  les  paroles 
et  les  maniirea  par  leequelles  die  se 
maifectait ;  maia  il  eut  i  se  d^fendre 
des  sollicitatioDB ,  et  I'exBctitude  de 
I'hiatoire  pourralt  mttaa  dire  des  se- 
duetiens  d'une  refne  belle,  sprrituelle 
et  malheureuse.  EUe  I'efforca  de  r^- 
parer ,  Ji  force  d'art  et  d'ceprit ,  le  de- 
sastre  qu'elle  a  rait  pdncipalement 
proToque  en  soufTlant  le  feu  de  la 
euore ;  cependant  md  suee^  reita  de 
beaucoiip  au-desaous  de  Ks  voes ,  et 
probabiemcnt  d«  act  espfraBoes.  Na- 
polfon  a  lui-mAme  btom  qu'ella  edt 
et6  plus  heureuae  ai  elle  flit  atriiie  an 
oommencement  des  nrigodationa,  et 
tsrtout  si  aoD  man  ne  I'eAt  pas  ae- 
conpagafe.  Mais  PrMtrffrOulllaume, ' 


433 


L'UNIVERS. 


mutant  improdemment  )es  recrimina- 
tions aux  pridres,  et  le  r6le  de  roi  de 
la  vieiiie  rodie  a  celui  de  suppliant  et 
de  vaincu ;  parlant  de  la  violation  du 
territoire  (TAnspach,  et  r^clamant 
Magdeboarg,  Mta  la  conclusion  de- 
finitive du  traits  qui  le  depouillait. 
Grdce ,  cependant ,  a  rempereur  Alexan- 
dre, dont  Tentremise  rut  plus  faeu- 
reuse  que  celle  de  la  reine  de  Prusse 
elle-mSme,  Fr^d^ric  -  Guillaume  con- 
serva  la  moiti^  de  ses  £tat8  avec  le 
titre  de  roi ,  h  des  conditions,  il  est 
vrai,  qui  rapprochaient  sa  condition 
de  celle  d*un  prince  tributaire. » 

Le  sort  des  arines  offirait  k  Napo- 
leon une  occasion  unique :  celle  du  r^- 
tablissement  de  la  Pologne.  Les  trois 
puissances  qui  avaient  consomm^  le 
partage  se  trouvaient  justement  sous 
le  coup  des  sacriOces,  et  rien  n*etait 

Slus  ais6  que  de  tailier  un  royaume 
ans  la  part  des  reparations;  si  la  jus- 
tice seuie  re6t  guide ,  il  eAi  sans  donte 
Sris  ce  parti;  mais  il  n'entrait  pas 
ans  ses  vues  de  r^tablir  Tancien  eoui- 
libre  eurapeen,  qui  Teilt  force  lui- 
lueineadlminenses  restitutions ;  d'ail- 
leurs ,  en  relevant  la  Pologne ,  il  devait 
reiioncer  k  Talliance  de  la  Russie ,  saoa 
laquelle  le  systeme  continental  restait 
incomplet :  il  se  boma  done  k  quelques 
remamements  insignifiants ,  comme 
pour  avertir  les  puissances  interessees 
de  ne  pas  le  pousser  k  une  mesure  de- 
finitive. Le  grand-duch^  deVarsovie, 
qu'il  donna  au  roi  de  Saxe ,  fiit  agrandi 
aux  depens  de  la  Prusse ,  et  Dantzick 
recouvra  son  independance ,  quoique 
dans  un  rayon  restreint. 

La  Russie  reconnaissait  la  confe- 
d^ation  du  Rfain ,  et  eedait  au  roi  de 
Hollande  la  seiKneurie  de  Jever  dans 
rOst-Frise.  La  France  retablissait  dans 
leurs  possessions  respectives  les  dues 
de  Saxe-€k)bourg ,  d*Oldenbourg  et  de 
Mecklenbourg-Scbw^rin.  La  Russie 
reconnaissait  les  rois  de  Naples,  de 
Hollande  et  de  Westphalie.  Enfin ,  par 
une  clause  formelle ,  les  troupes  russes 
devaient  evacuer  la  Valachie  et  la  Mol- 
dayie.  On  avail  ajoute,  k  la  verite, 
que  les  troupes  de  Sa  Hautesse  ne  pour- 
nient  oocuper  ces  provinces  avant 


'rediange  du  traite  de  la  paix  definitive 
entre  la  Russie  et  la  Porte  Otiomane , 
traite  pour  lequd  la  mediation  de  Tem- 
pereur  Napoleon  etait  accepts ,  oe  aui 
n'empecha  pas  les  Russes  de  garner 
garnisondans  les  prindpautes  jusqu'en 
1812. 

Par  un  article  secret,  la  Russie 
promettait  de  s*unir  avec  la  France 
centre  TAngleterre,  si  sa  mediation 
conciliatrice restait  sans  eifet.  EllesVn- 
gageait,  en  attendant,  a  fermer  ses 
ports  aux  navires  anelais ,  k  remettre 
en  vigueur  toutes  lesTois  en  faveur  des 
neutres ,  et  a  user  de  son  influence  sur 
les  oours  de  Suede ,  de  Danemark  et 
de  Portugal,  pour  determiner  ces 
puissances  k  conformer  leur  politique 
aux  meines  principes. 

Le  traite  de  Tilsitt  semblait  avoir 
sincerement  attache  Alexandre  k  Na- 
poleon ,  et  leur  amitie  paraissait  mtoe 
independante  de  ce  rapprochement  po- 
litique. On  a  recueila  quelques  anec- 
dotes a  ce  sujet,  qui  prouventde  la  part 
du.tsar  ou  une  grande  faussete  ou  one 
veritable  sympathie;  et  le  caract^ 
d* Alexandre ,  quelque  capable  ou'il  &kt 
d'ailleurs  de  sacriner  son  inciinatioo 
aux  interets  de  son  empire ,  ne  perniet 
pas  de  douter  que  son  empressemeat 
ne  fdt  sincere.  A  Erfurt,  les  deux  em- 
pereurs  assistaient  k  la  representation 
d'une  tra^edie :  Alexandre ,  saisinant 
une  allusion,  dit,  en  se  penchant  k 
I'oreilie  de  Napoleon : 

L*anitti<d*«n  grand  bomme  «il  an  prdMBtdJat  Hmuu 

Un  iour,  les  deux  monarques  8*60- 
tretenaient  avec  une  entiere  oonfianoe 
de  rorganisation  etde  radministration 
de  leurs  Etats :  Alexandre  expliquait  i 
Napoleon  la  nature  du  gouvemement 
russe ;  il  -lui  parlait  de  son  s^at  et 
de  la  resistance  qu^il  eprouvait  k  hire 
le  bien.  Napoleon ,  lui  serrant  la  main , 
repondit  avec  vivaeite :  «  Qnelque 
«  grand  que  paisse  Itre  un  empire ,  il 
«  est  toujours  trop  etroit  pour  deux 
ft  mattres. »  Si  Taneodote  n'a  pas  M 
controuvee,  oertes  Nanoieon  n'avait 
pas  saisi  la  pensee  d'Alexandre*  Le 
tsar  ne  pouvait  se  plaindre  ^  sa  puis- 
sance nit   entravee;   mats,    '*  '^ 


KU9SIE. 


43t 


coome  il  T^it,  il  re^tUit  que  les 
ameliorations  qu^il  meditait  nissent 
retardees  par  lea  pr6jiig6s  ou  llncapa- 
cite  de  quelguea-uns  de  ses  fonction- 
naires,  et  romnipotence  da  pouvoir 
ne  pouvait  rien  oontre  de  teis  obs- 
tacles. 

Ifapol^n  s'e&t  plamt  depuis  de  la 
duplicity  d' Alexandre;  on  pent  dire 

3ue  le  tsar  n'a  pas  pouss^  rh^roTsme 
e  Paniiti^  jusqu*au  martyre ;  cepen* 
dant  il  est  juste  de  reconnaftre  que , 
pendaot  qaatre  annees,  il  est  rest^ 
fideSe  h  une  alliance  qui  ruinait  le 
commerce  de  ses  fitats ,  et  dont  i*issue , 
en  admettant  qu^elle  fdt  favorable  au 
plan  de  Fempereur  franqais ,  ne  pou- 
vait ultdrieurement  que  subordonner 
la  Russie  a  un  alli^  qui  mirait  bien  su 
parler  en  mattre  quand  les  autres  bar- 
rieres  seraient  tombees.  Nous  citerons 
M.  de  Boutourlin  dans  les  prol^o- 
menes  de  son  Histoire  de  la  campagne 
de  1613. 

«  Le  traits  deTilsitt  plon^ea  TEu- 
rope  dans  la  stupeur  et  re£troi ,  et  il  est 
aise  de  voir  que  cette  paiz  ne  pr6sen- 
tait  aucune  des  garanties  que  Ton  de- 
vrait  retrouver  dans  les  transactions 
de  ce  genre.  U^rection  du  duch6  de 
Varsovie^it  une  mesure  ^videmment 
hostile  contre  la  Russie.  et  I'affecta- 
tion  que  Napoleon  mit  a  en  oonfdrer 
la  souTerainet^  au  roi  de  Saxe,  qui 
desoendait  des  anciens  rots  de  Pologne , 
d^otait  encore  plus  le  projet  d'inspi- 
rer  aux  Polonais  des  esp^dnces  dont 
la  realisation  ne  pouvait  qu*ltre  pr^ju- 
diciable  h  la  Russie ,  qu*elle  menacait  de 
la  perte  de  provinces  r^unies  depuis  plus 
de  quatorze  ans  h  son  empire.  jL'empe- 
reur  Alexandre  ne  pouvait  m^nnaitre 
Tesprit  de  ces  dispositions;  mais  les 
circonstances  malheureuses  oh  se  trou- 
vait  FEurope  lui  prescrivaient  d*^Ioi- 
gner  la  guerre  k  tout  prix.  II  s'agissait 
surtout  de  gagner  le  temps  n^cessaire 
pour  se  preparer  k  soutenir  eonvena- 
blement  la  liitte  que  I'on  savait  bien 
itre  dans  le  cas  de  se  renouveler  un 
jour. » 

Les  rtoriminations  de  ce  genre  sont 
friquentes  dans  Tbistoire ,  it  les  peu- 
ples  dont  les.  intMts  sont  en  lutte 

38*  UtraUon.  (RussiB.)  t.  ii. 


se  les  renvoient  de  Tun  k  Tautre.  Si 
la  force  etait  le  droit,  toutes  les  in- 
fractions aux  traits  seraient  immo* 
rales;  d^une  part  comma  de  Fautre, 
elles  s*expliauent  par  la  ntossii^*  mais 
elles  ne  se  lesitiment  que  par  le  suoc^. 
Le  manque  de  foi  ne  pouvait  venir  de 
celui  qui  imposait  les  conditions,  ei 
qui  necessairement  ne  les  formulalt 
qu'li  son  avantage ,  et  le  rdle  de  celui 

3ui  les eJudaits'anoblissait, pour  ainai 
ire,  par  le  p^ii  qu*il  y  avait  h  le 
faire.  Nous  ne  partageons  pas  &  cet 
^ard  le  sentiment  de  Rabbe,  qui  pre- 
tend ^tablir  que  Fempereur  Alexanare, 
dans  les  premieres  entrevues  avec  Na- 
poleon, fut  compl^tement  sous  le 
'  cbarme ;  nous  croyons  que  son  admi- 
ration fut  sinc^e,  mais  qu*elle  ne 
pouvait  aller jusqu'a  Fabn^ation  des  in- 
t^rto  russes,  qu'il  avait  jur^  de  main- 
tenir  avant  d'6ire  Falli^  du  vainqueur 
d*Austerlitz  et  deFriedland.  On  pourra 
objecter  qu*apr^  une  campasne  mal- 
heureuse ,  Allsxandre  quittaTilsittsapa 
avoir  rien  perdu  de  son  influence  et  de 
son  territoire ;  certes  Napol^n  Favait 
plut^t  traits  en  alli^  nmssaire  qu'en 
▼aincu ;  mais ,  avec  tous  ces  m^^a^e- 
ments ,  la  Russie  n'en  ^tait  pas  moins 
ouverte  k  une  invasion  fran^aise ;  et 
FAllemagne,  le  milieu  strat^ique  06 
s'^taient  vid^es  les  querelles  prM- 
dentes ,  avait  cess^  d*etre  une  barrieie 
pour  le  Nord  et  pour  FOrient. 
Cependant  les  cons^ences  de  tai 

{laix  de  Tiisitt  fiirent  lorn  de  rencon- 
rer  en  Russie  une  approbation  g^n^- 
rale ;  les  partisans  de  FAngleterre ,  les 
n^Ociants  menace  dansleurprosp^itd 
par  Finterruption  du  commerce, et  les 

i>ropri6taires  dont  les  exploitations  al- 
aient  se  trouver  sans  dmiucb^ ,  mmv 
mur^ent  contre  les  conditions  on^ 
reuses  de  Falliance  fran^aise.  On  pr^vit 
que  la  guerre  allait  roomentanemoit 
changer  de  nature  et  de  th^tre ,  et  les 
cdtes  de  la  Baltique  furent  mises  en 
etat  de  defense. 

De  leur  cdt^ ,  les  Anglais ,  voyant 
que  Falliance  russe  leur  6diappaitf 
sans  renoncer  k  Fespoir  de  la  renouer 
procbainement,  chercb^rent  d'autres 
points  d'appui  dans  le  NonF;  lis  par- 


434 


L17flIV£R& 


rhirent  k  entntliier  le  Jeane  et  diera- 
leresque  roi  de  SoMe ,  qui  rompait  un 
amistice  cooclu  arec  Brone «  a  Tins- 
taut  oCt  lea  n^f^iations  deTrlsittve- 
Inietitde  8*ouvrir.  Ce  prince  osacom- 
Boenoer  seul  lagaerre ;  maia  il  fut  feras^ 
trvant  d*toe  secouru  ^perdit  sooeessi- 
▼ement  Stralaund ,  rile  de  Rugen  et 
toute  la  Pomtonie  suMoise. 

Tandis  que  lea  Su^oii  s'lmmolaient 
aox  intMta  de  la  Grande-Bretagne, 
tine  eacadre  anglaise  parut  tout  k  coup 
devant  Gopeobaguei  pour  flommer  le 
roi  de  DanemariL  de  aouscrire  un  nou* 
Teau  et  aecret  traits  d*alliance  avec 
PAngleterre ,  et  de  mettre  h  la  disposi- 
tion de  cette  puissance  toute  la  flotte 
danofse  hisqu^  la  condusfon  de  la 
pmx  g^nerale,  sur  le  seul  motif  que  le 
Danemark  serait  prochainement  forc^ 
par  Napolton  k  declarer  la  guerre. 
C^tait  justlfier  I'dnis  de  la  force  par 
la  phis  saurage  violence. 

Malgr6  les  protestations  du  comte 
de  Bernsdorn,  ministre  danois,  les 
menaoea  succM^nt  aux  injonctions : 
aprte  ces  Inutiles  demonstrations ,  la 
▼ille  fut  bombard^e  et  incendi^e ,  et  la 
flotte  danoise  tomba  au  pouvoir  des 
agresseurs. 

Le  roi  de  Danemark  s'empressa  de 
a6questrer  dans  ses  Etats  toutes  lea 
propri^t^s  afiglaises,  M  de  oondure 
avec  Napolton  un  traits  d*alliance. 
Cette  oondnite  de  TAngleterre  ^tait 
de  la  plus  haute  incons^uence,  et  fbur- 
nissan  ii  la  Russie  un  motif  l^^time 

S9ur  observer  k  la  lettre  les  stipula* 
ODS  de  Tilsitt.  En  effet,  Alexandre 
rendit,  le  16  octobre  1808,  la  decla- 
ration suivante : 

«  Plus  I'empereur  attachait  de  prix  1^ 
famitie  de  I&  Majesty  britannique, 
l^his  il  a  dd  voir  avec  regret  que  ce 
monarque  s*en  eioignAt  tout  a  &it. 

«  D^  Ibis  Fempereur  a  pris  lea 
amies  dans  une  cause  oik  Tinter^  le 
plus  direct  etalt  oeioi  de  TAngleterre ; 
il  a  soUidte  en  vain  qu*dle  coop^rit 
an  gre  de  son  propre  int^r^ ;  11  ne  lui 
demandait  pas  de  joindre  ses  troupes 
aux  siennes ,  il  d^sirait  qu*elle  ftt  une 
diversion;  fl  s'^tonnait  de  ce  que, 
dana  aa  propre  cause,  die  n'agissait 


pas  de  son  odt^;  mais,  froSde  specta- 
trioe  du  sanelant  thddtre  de  la  ^erre 
qui  s*6tait  ai1um6e  k  son  gr^ ,  elle  en- 
voyait  des  troupes  attaquer  Buenos- 
Ayres.  Une  partie  de  ses  arm^^ ,  qui 
paraissatt  destin^e  k  faire  une  diver- 
sion en  Italic ,  quitta  flnalement  la  Si- 
dle ou  die  s^etait  assembl^e.  On  avait 
lieu  de  croire  que  c*6tait  pour  se  por- 
ter sur  les  cdtes  de  Naples ;  Ton  apprit 
qu'elle  etait  occup^e  1^  essayer  de  s  ap- 
proprier  l'£gypte. 

c  Mais  ce  qui  toucba  sensiblement  le 
ooeur  de  Sa  Majesty  lmp6riale ,  c*etaitde 
voir  que ,  contre  la  parole  expresse  et 
precise  des  trait^s ,  rAngleterre  tour- 
mentait  sur  mer  le  commerce  de  ses 
sujets;  et  k  quelle  ^poque?  lorsque  le 
sang  des  Russes  se  versait  dans  des 
comibats  glorieux,  qui  retenaient  et 
fixaient  contre  les  armies  de  Sa  Majestd 
Imperiale  toutes  les  forces  militaires  de 
Sa  Majeste  I'e-mpereur  des  Francis, 
avec  qui  TAngleterre  ^tait  et  est  en- 
core en  guerre. 

«  Lorsque  ces  deux  empereurs  Grent 
la  paix ,  Sa  Majestd ,  malgr^  ses  Justes 
griefs  contre  1  Angteterre ,  ne  renon^a 
pas  encore  k  lui  rendre  service :  elle  sti- 
pula  dans  le  traits  m^me  qu*elle  se  cons- 
tituerait  ra6diatrice  entre  elle  et  la 
France ;  ensuite  die  fit  Toffre  de  sa 
mediation  au  roi  de  la  Grande-Bre- 
tagne ;  elle  le  pr6vint  aue  c'^tait  afln 
de  lui  obtenir  des  conditions  honora- 
bles.  Mais  le  minist^re  britanni(]ue , 
apparemment  fiddle  a  ce  plan  qui  de- 
vait  reldcher  et  romore  les  liens  de  la 
Russie  et  de  rAngleterre,  rejeta  la 
mediation. 

«  La  paix  de  la  Russie  avec  la  France 
devait  preparer  la  paix  generate ;  alora 
TAngteterre  quitta  subitement  cette 
lethargic  apparente  k  laqudle  elle  s*6- 
tait  livree ;  mats  ce  ftit  pour  jeter  dans 
le  nord  de  l^urope  de  nouveaux  bran- 
dons  qui  devaient  rallumer  et  alimen* 
ter  les  feux  de  la  guerre  qu'dle  ne  de- 
sirait  pas  voir  s'eteindre. 

«  Ses  flottes ,  ses  troupes  parurent 
aur  les  cdtes  du  Danemark  pour  y  exe- 
cuter  un  acte  de  violence  dontThis- 
toire,  si  fertile  en  exemples,  n*en 
offre  pas  un  seul  de  pardl. 


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EUSSIE. 


m 


«  Une  puioaiiee  tnaqoiHe  et  mod^ 
-  .e,  qui,  pamoe  Jon^ieet  ioalt^rabic 
sagesse,  avatt  obtflnu  daos  le  oeicie 
d«s  mooarciiMf  use  dignity  morale, 
we  ¥oil  saime,  traitiB  eoamie  ai  eile 
IrainaJt  aourdemont  daa  eonplofts« 
comme  ai  eUe  widiUk  la  mine  da 
rAogletcrra;  ie  toat  pour  jualifiar  sa 
lotua  et  pmnpfee  apoliatioa. 

«  L'anpereor,  lilaaa^  en  aa  dignity, 
dana  riotardl  de  aea  pauplca ,  daia  aaa 
ongKgBniwtfa  avac  loa  oaora  do  Hold » 
par  eat  acte  de  violeoea  coaunia  dana 
la  0ier  Baitiqoe,  qui  cat  one  mar  far- 
m^,  doot  la  traaqoBlit^  avail  M  da* 
puia  loogtempt »  el  au  au  du  eabiBet 
da  SaioWanea,  gaianlia  par  laa  puia- 
aaoeea  rireraiaes.  no  diasimiila  paa 
aaii  raaaanliiBaiil  a  TAaiglatarra,  el  la 
m  avartir  qo'il  n'y  reatorait  paa  inaen- 
aa4a. 

«  6a  Mstey  na  prMI  paa  qua  lora- 
oua  rAngletarre.  ayant  na^  de  aaa 
wceB  a«ee  aueeaa,  looehail  au  no* 
maot  d'enlcTar  9a  pnHe,  eUe  ferait 
un  uouvei  outraee  au  Duieainrkf  at 
que  Sa  Hajeal^  iferail  le  partager. 

•  De  aouvellaa  pn^siliona  furenl 
laitea,  laa  uaes  pkia  iosidieuses  que  laa 
aotrea,  qui  deraiaot  rattacfaer  k  la 
poiaaaaaa  britanaiqua  le  Danamark 
aouodia,  d^grad^,  et  oomme  applau* 
diaMinl  i  ca  qui  Tenait  de  lui  arriver . 

«  L*apijiereiur  pr^yit  eaeore  moiiia 
qu*on  lui  ferail  ToSre  de  garantir 
eatle  aoomiaaioii,  et  de  r^odre  que 
celte  violeiiea  n'aumit  aucuoe  auile  f A- 
cbeuae  pour  TAaielelene.  Son  aoibaa- 
iadeur  cmt  qu'U  etak  poasible  da  pro* 
poaer  au  qiioial^  da  Teaipareur  que 
Sa  Majeat^  topt^riate  ae  ^rgeAt  de  se 
faire  Papologiste  et  ifi  apotien  de  ea 
qu'elle  avail  si  bau^eoieiii>ltoi$. 

«  L*eBiDeieiir  ae  defwa  k  celte  d-- 
marche au  eabinet  de  Saiot-Jainea 
d*autre  aitealioo  que  ealle  qu*eUe  b>6- 
rilait,  el  jugaa  qu'U  ^it  tamps  4e 
mettre  dea  bornes  k  aa  moderation. 

« he  priooe  rvjsi  de  Daoemark* 
dou-  d*uB  Gaiaetdre  plejn  d'^ergie  et 
de  noUasse.  et  ayaol  le^^  de  la  Pro- 
▼ideooa  vm  4Jgoit<i  d*ma  analogae  ^ 
la  dipitd  de  con  lan^,  avail  fail 
«v«r||r  f  «inpevaipr  qwe ,  jip(»tH»aiii  om'- 


tr-ooutreeequi  venalt  de  ae  paaaer  i 
Gopenbague,  il  u^eu  avail  poiDl  ralifid 
la  eonventiouv  el  la  rcgmail  oomme 
BOO  avemie. 

«  Uaintenaol,  il  viaut  de  Mte  in«- 
truire  Sa  Bligast-  Imperiale  daa  noifr> 
veUaa  propoaitiooa  qu  on  lui  a  failaa, 
et  oui  imtaieat  aa  r^stanca  au  liau 
de  b  calmer,  parce  qu'elles  tendaieot 
i  imprimer  sur  ^aa  aotioua  le  cachet 
da  ravilissameni,  dont  dle^  oe  pocte- 
ront  jamais  rempreinta. 

«  L'empeffeur,  loucb- de  la  ooifiaaoe 
^m  |e  pHooa  royal  pla^ait  en  kii ,  ayani 
eonsider^  sas  proprea  griefs  ooatra 
TAoglalanre ,  ay^ol  mOremenl  eiamind 
k»  eogagamaots  qu*il  avail  avec  lea 
puaaaaneesdu  Nord,  en^ements  pris 
par  rimp6ratrice  Catbenne,  et  par  feu 
Sa  Majesl-  Temjieraur,  tous  deux  de 
gtorieuae  mtoouna,  a'eal  d-cid-  k  lea 
ixmplir. 

«  Sa  Miyaat-  ImpMale  rompt  toute 
oommunicatioo  avec  TAnglajterra;  alia 
tappaile  toute  la  l^tioo  qu'elle  y 
avail,  et  na  vaut  paa  cooserver  prjp 
d'ella  ceUe  de  iSa  Majesty  britaiuiigue. 
II  n'y  aura  doninnvaal,  en^  las  deux 
pays,  aucuB  rapport. 

«  L'ampereur  d-clar0  quUl  aonula, 
et  pour  toBJours,  jtout  acte  conclu  pr^ 
CMiemment  aoire  la  Grande-Bretaigne 
et  ia  ilussie,  el  nomnK^meut  b  con- 
ventiofi  ftite  aa  1801 « le  »  d|i  mois  de 
juin. 

« II  prodame  de  neuveaw  le  priopipe 
de  la  ueutralit-  armee,  ce  inoauoienl 
de  la  sagesae  de  rimp^trice  Cathe^ 
rioe,  et  s'eogage  k  ne  jamais  ddrogar 
k  ce  syst^me. 

« II  4emando  k  rAngleterre  de  sa- 
tisfaire  corapietemenl  ses  su|ets  sur 
toutes  leurs  justes  r-clamalioos  de 
vaiaseaux  el  de  marchaodiaes,  aaisia 
ou  retenus  coutre  la  teneur  expresae 
dea  traitea  coedua  ^ua  son  propre 
regae. 

«  L'emperaur  previent  q^e  rien  ae 
aera  r-jUmli  eutre  la  Euasif  et  rAn- 
flleteiTe,  que  calle-ci  n'ail  satisfait  le 
Danemark. 

«  yenyiwreHr  a*atteiid  k  ce  que  Sa 
Majesty  britaaoJ<]ue,  au  iieu  de  per- 
mettre  a  sea  minislres,  oomme  elie 

4. 


4KI 


UUNIVERS. 


tient  de  le  faire,  de  r^pandre  de  nou- 
Teau  les  germes  de  la  goerre,  n*6ooa- 
tint  que  sa  propre  sensilrilit^,  se  j>r^ 
tera  a  conclure  la  paix  avec  Sa  Maiest^ 
fempereor  des  Francis;  ce  qui  eten- 
ihndt,  pour  aiosi  dire,  k  toute  la  terre 
lea  bienftits  inapprMables  de  la  paix. 

«  Lorsque  rempereur  sera  satis&it 
8or  tou8  les  paints  qui  pr6oUent,  et 
fiommtoent  sur  celui  de  la  paix  entre 
la  Praooe  et  FAngleterre,  sans  laquelle 
aucune  partie  de  I'Europe  ne  peut  se 
promettre  une  t^ritable  tranquillity, 
Sa  Majesty  Imp^ale  reprendra  alors 
Tolontiersavec  la  Grande-Bretagne  des 
relations  d*amiti6  que,  dans  Tetat  de 
juste  mifioontentement  o&  rempereur 
devait  ^tre,  il  a  peut-^tre  oonserrfes 
trop  longtemps.  • 

Nous  avons  cit^  cette  pitoe  textuel- 
lement  paroe  qu'elle  repr^sente  d'une' 
maniere  fiddle,  et  la  nalure  des  rap- 
ports que  supposait  Texteution  des 
traits  entre  la  Russie  et  la  Grande- 
Bretagne,  et  les  griefo  d'Alexandre 
eontre  une  nation  qui  croyait  s'ae- 

Suitter  enters  les  coalitions  en  payant 
e  son  or  une  partie  de  leurs  sacrifices. 

En  oons^enoe  de  cette  d^ara* 
tion ,  Tembergo  fut  mis  sur  les  vais- 
seaux  anglais  dans  les  ports  russes, 
et  la  Prusse  suivit  oet  exemple. 

Au  milieu  de  circonstances  si  irri- 
tantes,  la  mtfiation  de  la  Russie  ne 
pouvait  gu^  6tre  accepts ,  les  Anglais 
ne  la  considerant  point  comme  une 
d^mardie  spontan^,  mais  oomme  une 
oonstoienoe  du  traits  de  Tilsitt.  Les 
n^goeiations  durtont  encore  quelque 
temps;  le  ministre  anglais,  avant  de 
rien  conclure,  demandait  la  communi- 
cation des  articles  secrets  de  la  paix 
de  Ttlsitt,  pretention  qu*avait  d^k 
toirt6e  le  baron  de  Budb^ ,  et  qui  rat 
formdlement  repouss^  par  le  prince 
Soltykof ,  qui  lui  avait  nuoM€  au  mi- 
nistere.  A  la  demande  que  la  paix  entre 
TAngleterre  et  le  Danemark  fdt  Tou- 
rrage  de  I'empereur,  oe  prince  avait 
r^pondu  par  le  manifeste  que  nous 
avons  rapports  plus  baut. 

II  est  probable  que  Napoltai  s'atten- 
dait  bien  h  ce  gue  la  m^iation  de  la 
Russie  resterait  sans  effet;  mats  il 


re^rdait  ce  reftis  probable  oomme  de^ 
vant  unir  plus  etroitement  encore 
Alexandre  k  ses  int^hHs. 

Quant  aux  artides  secrets  du  traits 
de  Tilsitt,  ils  n'ont  jamais  ^  bien  eon* 
nus :  «cependant,  ditRaMl)e,  il  paratt 
que  Tunion  des  deux  empereurs  y  ftit 
baste  sur  une  multitude  ae  conditions 
subversives  de  toute  4qa\t6  et  de  toal 
^uilibre  en  Europe,  conditions  dont 
pfusieurs  puissances  du  second  ordre 
devaient  supporter  les  oons^uences 
spoliatrices.  Ainsi  la  prise  de  posses-^ 
sion  de  la  Finlande  aurait  ^t^  conseatie 
par  Napolten ,  en  retour  de  la  eessjon 
d'autres  pays  dont  la  Russie  disposait 
avec  tout  autant  de  droit  que  la  mnoe 
pouvait  en  avoir  sur  les  provinces  de 
la  Su^e.  Ce  qu'il  y  a  de  bien  remar-> 

Suable  k  oet  ^rd ,  c'est  que  le  rteultat 
e  ces  transactions  ait  subsists  aprte  le 
renversement  de'celui  avec  qui  eHes 
avaient  ^te  faites.  En  1813,  TAngle- 
terre,  par  son  traits  avee  la  Russie  et 
la  SuMe,  en  sanctionnant  la  conqu^te 
de  la  Finlande,  s'est  constttuee  1  ex^ 
cutrice  du  traits  de  Tilsitt  dirig^contre 
elle...  Ces  spoliations  maintenues  ont 
dd  en  amener  d'autres.  II  a  fallu  d^ 
dommager  la  SuMe  par  la  Norw^e; 
k  ce  prix  d*ailleurs,  k  ce  prix  seui ,  elle 
est  entrte  dans  la  derniere  coalition; 

Suis  il  a  M  ntessaire  de  faire  cesser, 
ans  un  ordre  de  cboses  tout  l^'time , 
les  cris  du  Danemark,  et  on  I'a  in* 
demnis^  par  Pabandon  de  la  PoRM^ranie 
so^ise,  que  Gustave  avait  jadis  ac* 
guise  comme  prix  de  son  assistance  en 
niveur  des  protestants  d'AUemagne 
dans  la  guerre  de  trente  ans.  » 
Malgre  les  formes  spteieuses  de  la 

eitique,  il  est  difficile  de  consider 
trait6s  autrement  que  oomme  I'ex- 
pression  des  int6r^  du  moment,  et 
dont  une  nouvelle  combinaison  d*int6- 
rdts  bouleverse  t6t  ou  tard  toute  V^co^ 
nomie.  Si  un  prince  se  piquait  d*ufie 
probity  k  toute  ^preuve  en  fait  de  trail* 
sactlons  politiques ,  il  lutterait  k  armes 
ingles  centre  des  adversaires  moins 
scrupuleux ,  et  serait  dans  certains  cas 
victime  de  sa  bonne  foi.  Senlemeot  il 
est  de  bautes  oonvenancss  que  la  di* 
plomatie  tient  k  observer  dans  PintMl 


Russie. 


4S7 


dejM  oemncs  iphemeres.  Si  Ton  rt- 
moote  k  la  source  de  oette  immorality  ^ 
OQ  la  trouYe  dans  la  conqu^te  elle- 
mtoe;  la  diplomatie  n'est  autre  chose 

Sue  Fart  de  r^lariser  la  violence «  et 
e  Cavorifler  1^  int^r^ts  d'un  people 
au  pr6|udiee  des  int^rdts  rivauz.  Get 
intereU  sont  relatifs;  pour  les  vain- 
quears  et  les  £tat8  puissaDts,  lis  ex- 
primeDt  l€s  termes  les  plus  avanc^ 
de  leurs  pr^ifteotions  actuelles ;  pour  les 
Tmcos  et  les  faibles,  ils  consistent  h 
restrdodre  autant  que  possible  la  U- 
mite  des  sacrifices,  et  1^  leur  ra^nacer 
des  d^oaunagements  ^ventuels.  Or, 
dans  les  oraods  cbangements  politi- 
ques,  le  mplacenoont  des  influences 
altdrant  la  nature  des  rapports,  toutes 
les  conventions  sont  k  reiaire,  paree 
que  la  cause  qui  les  a  d^termin^  est 
d^tniite. 

L*abondance  et  rencbafnement  des 
^vtoements  militaires,  que  couronna 
la  paix  de  Tilsitt,  nous  a  forc^  de 
laisser  en  arriere  les  affaires  de  TO- 
rient :  nous  allons  remplir  en  peu  de 
ox>t8  oette  lacune. 

La  goerre  avec  les  tribus  continuait 
sor  les  fronti^esde  la  Perse.  Le  prince 
Tzitzianof ,  commandant  en  chef,  an- 
non^,  dans  son  rapport  du  S  Janvier 
1806,  ipat  le  Schirvan  6tait  incorpor^ 
a  rempire  nisse.  «  L'arm^,  dtsait-il , 
avait  pris  ses  quartiers  d'hiver  dans  le 
▼oinoaged'^ndan,  etmardieraitbien- 
tot  sor  Bakou,  pour  donner  la  main 
au  major  g(§n6ral  Savalikbin  contre 
Hussdn-Kouli-khan  (Rabbe). »  Mais 
Tzitzianof  trouva  la  mort  dans  cet  en- 
droit  par  I'effet  de  la  plus  noire  tra- 
bisoD.  Kouli-khan  denianda  que  le 
g6i^ral  nisse  vtot  en  personne  jus* 
qa'auz  portes  de  Bakou  nour  en  reoe- 
voir  les  de£B.  Tzitzianoi  y  oonsentit, 
et,  aceompagn^  settlement  d^un  officier 
et  d'an  Claque,  U  se  bAta  de  se  rendre 
a  I'endroit  convenu.  L'assassin  ^tait 
k  cfaeral  devant  la  ports  de  la  ville,  et 
ii  en  remit  efi&etivement  les  dffs; 
mais,  au  mAne  instant,  un  Persan, 
qui  se  tenait  derri^  le  khan ,  tira  un 
coop  de  fusil  au  g^n^ral  rosse.  Les 
sums  Pevsaos  tomwreot  sur  lui  avec 
leurs  fiabres,    le  massacr^rent,   et 


tratn^reat  son  eadavie  daas  la  vills. 

Ali-kban  de  Derfoend  avait  partieip6 
k  cet  acta  bonteux.  Un  corps  de  tnMh 
pes  russes,  sous  les  ordres  do  lieute* 
nant  gMral  Glasoico,  ayant  pasa^  la 
T^ek  et  march^  conue  Derbend,  AJI- 
kban  se  pr^ra  k  la  dtfense;  mais  les 
habitants  de  Derbend  chaas^rent  leor 
tyran,  et  apport^rent  les  deb  de  lit 
ville  au  general  russe,  qui  y  fit  son 
entrte  le  8  juillet,  au  muieo  des  plus 
vives  demonstrations  de  ioie  des  habi- 
tants. Gependant  cette  pnse  de  posses- 
sion ne  termina  nas  la  eampagne. 

Plusieurs  chera  de  tribus  du  Can- 
case  se  r^nirent  de  nooveau  pour 
dinger  une  attaque  dedslTe  centre  les 
troupes  russes  sur  divers  points.  Abbas 
Mirza  avait  dans  ce  dessein  pass^  TA- 
raxe  k  la  tite  de  vingt  mille  nommes; 
mais  il  fut  attaqu^  par  le  major  g^n^ 
ral  N^boltzin,  et  repouss^  vers  TAraxe 
avec  une  perte  de  pTusieurs  miliiers  de 
tu^  et  de  blessds.  Les  antres  priaoes 
lurent  egalement  dd^its ,  et  les  Russes 
se  trouverent  les  mattres  de  tout  ie 
pays;  mais  leur  prise  de  possession  ne 
pouvait  ^tre  considMe  comme  d^ni* 
tive  tant  que  les  tribus  des  montagnes 
n*auraient  pas  €tk  subjuguta  ou  d^ 
truites. 

Pour  donner  une  idee  de  Tesprit  k  la 
fois  ddi^  et  belliqueux  de  ces  monta* 
gnards,  nous  allons  rapporter  sucdno- 
tement  conunent  la  derniire  rdne  de 
G^rgie,  qui  n'avait  plus  d'aiHeurs 
qu'une  autorit^  nominate,  se  vit  obli- 

g6e  de  renoncer  a  ses  esp^rances ,  non 
>utefois  sans  avoir  donn^  une  preuve 
memorable  de  son  courage  et  de  son 
Anergic. 

Comme  nous  Tavons  vu  dans  le  ooun 
de  cette  histoire,  les  premiers  rapports 
eotre  la  Russia  et  la  Gtoigie  nirent 
determine  par  des  motift  de  rdigion* 
Tant  que  Tempire  cut  k  lutter  pour  son 
existence  contre  ses  voislns  du  Nord  et 
de  rOocident,  Fintervention  des  tsars 
moscovites  dans  les  affaires  politiqoes 
des  regions  caucasiennes  fut  nulla  on 
peu  efncace,  mais  elle  servit  k  fomeD» 
ter  les  di^dons  des  princes  ind^pen- 
dants,  dont  les  uns  reoouraient  k  hi 
protection  de  la  Porte,  tandis  que  les 


OS 


LIJIIITEliS. 


wBtIMB  hnplDfMMl  eeito  dM  Rntaei. 
Phii  tard,  PMrrv  le  Amnd,  qui  inrait 
(toM^s  qm  Ik  UniM  m  pomraft  a«- 
Mtfief  M  pr^$|N)iiM'ati06  qoe  par  tin 
vaale  d^eiopp«medt  de  ses  ressources 
fB^mflMrCHil^ ,  a'4ltait  fait  cMer  par  les 
ariiiM  (17M)  to  DagfaesCan  eit  to  Cbir- 
▼afi ;  niais  it  ht  tarda  pas  &  ae  oon- 
taiiicre  que  stt  projetB  etaieot  prtoa- 
tnr^. 

H^rteHoa,  r^bti  sor  to  trdne  dte 
Gto*gf  e  par  Thaitiaa-Koali-khan ,  Taa- 
Ittt  secouer  to  joa(^  d«  la  Per8e<,  aprte 
la  mort  da  ce  oooqii^ant.  £n  1709 ,  dea 
troupes  masea  appuy^ent  sea  preten- 
tions, mais  ee  aecoura  inaufSsant  ne 
Kt  to  souatraire  a  la  domioatioii  ma«> 
mtone.  IMa  Tors  Catberiiie.^ndit 
sQir  to  G^rgto  on  proteetorat  qvl  de* 
vait  ainener  orochainement  rincorpcH 
ration  d^fixiitive  de  ee  ro?  aume  k  Vtm- 

g're  rucse.  Par  to  traits  de  1788, 
^radfos  oessa  d'etre  f?aU  it  to  Porte , 
mais,  cofiime  chr^ien  et  atli^  de  to 
Rossto,  n  prit  to  titre  de  tsar  ^  to 
G^orgle,  titre  et  pooTotr  au*il  d^ara 
temr  de  to  Russie  pour  lui  et  seS  dea* 
cendaots.  Tootes  tos  anciennes  depea* 
dQooea  de  la  G^gie  furent  d^tot^es 
annexes  de  eette  province,  pour  ^i« 
reprises  a  Foccasion.  Le  cathoiioaSf 
ou  patriarchede  to  G^f^gie,  &t  revftu 
du  titre  d'arehev^qoe  de  Tobolsk. 

Mator^  oea  stiputotions,  la  G^orgto 
retonma  aons  to  jovg  persan  en  1795. 

A  to  niort  d'H^raciias,  son  flto, 
Georges  XI ,  ne  d^ya  que  de  to  fal- 
blesse.  Paul  l"  lugea  qti'il  ^tajt  temps 
de  possSder,  au  lieu  de  se  borner  h  un 
proteetorat  rainettx.  Pi^  to  traits  de 
Tiflis  (1799),  Tempereur  de  tout«s  les 
Rosses  pril  pour  lui  et  ses  descen- 
dants to  titre  de  tsar  de  to  Gtogto;  to 
tis  atb^  de  Georges,  David,  prit  to 
titre  de  r^ent ,  transmisaibto  k  as  pos- 
t^tt6.  II  rat  stiputo  que  tos  mines  d*or 
ct  de  ouivre  seraient  exploits  par  lea 
Russes,  el  qu'un  corps  de  six  miito 
hmomss  oecuperait  tejiays. 

Cependant  les  difiterents  princes 
aivatont  ^t^  conserve  dans  tours  pro- 
▼fnoes  particulitos,  et  tours  rivalibs, 
aaiis  oesse  renalssantes,  s'opposaient 
a»  rtebHHMiient  de  Toidre  et  de  la 


palx,  et  «Hnpffomettaie>it  h  lout  mo- 
ment les  interits  g^n^nnit;  on  tos  at- 
tira  dans  Pint^cfir  de  Tempire  par 
Pappdt  des  distinctions  et  des  r6com- 
penses.  David ,  fito  ato6  de  Geoif  es,  et 
qui,  apr^  la  nKurt  de  son  p^,  avait 
exero6  to  r^enee,  fiit  envoys  k  P^ters- 
bourg  en  ISes.  A  partir  de  cette  ^- 
que,  le  pays^  k  l*exoe»tion  des  pen- 
plades  msobmnes,  nit  admimstr^ 
oomme  une  province  russe. 

Le  g6n^al  prince  Tzitsianof ,  alH^ 
k  to  f^mrilto  royale  de  G^Onngto,  mais 
attadi^  depuis  tongtemps  au  service 
russe,  ftit  nomra^  au  geuvemement  de 
oes  oontrte,  en  fnime  temps  quMl 
conservaft  to  oomroandraient  en  cb^ 
de  rarm^  qui  avait  dt6  envoy^  sous 
to  fl^n^ral  Knorring. 

Marie,  fltto  du  pntiee  Georgea  Tsil* 
zianof ,  femme  en  seoondes  neces  da 
tfA  Geoflges  Xt ,  mort  en  ISOO ,  restait 
encore  k  Tiflis  avee  aes  sept  enfenta, 
deux  filtos  et  einq  gardens.  Soit  que  le 
tfouvemement  russe  slnqui^t  pea 
i*une  femme  et  d*enfents  aussi  jeunes , 
soit  qu*il  edt  tourd  au  vif  d&ir  que 
eette  reine  t^motgnatt  de  pouveir  finir 
ses  jours  dans  son  pays  natal ,  on  avait 
toier^  jusqu*alors  sa  r^idenee  en 
G^rgie.  Gependant  Marie,  pea  eon- 
tente  de  cette  indolgenee  du  gouver- 
nement,  oo  craignant  qu*ou  ne  lui 
oontittudt  pas  toujours  eette  fiiveur, 
eherehaft  a  se  soustraire  au  poovoir 
de  ses  proteeteurs;  die  prtendalt  as^ 
sorer  son  s^gour  dans  sa  patrie  par  ma 
projet  d'^vasion  qa'elto  tramait  en  ai* 
knee.  Mais  Taittianof  surveillait  de 
Mis  sa  oondvite;  il  6piait  les  moindres 
d^maftbes  de  Marto,  et,  oonoaissant 
son  caract^  d6dd^,  remuaift,  il  nV 
vait  pas  manqod  de  oonsetNer  k  son 
geuveroement  d*eiitover  to  prioceaae 
du  lieu  4e  sa  naissanee.  En  attendaat 
que  cet  ordre  lui  fillt  parvenu ,  Tzitzift- 
Bof  ne  nMigea  aueons  moyeiis  de  s'aa* 
surer  de  la  pcvsenne  de  Marie.  H  avait 
fiftis  dans  ses  iBtiftrto  un  nomm^  Rato- 
tousof,  noble  gto'gien,  qui  ^tait  de 
to  suite  de  to  reine  et  dans  ses  confl* 
denees  lea  plus  secr^tss.  Get  homme, 
flagn^  par  le  gte^ral,  ne  fit  aueune 
ilHieult^  de  dtouvrir  to»t  ce  qui 


&VSiIE. 


le  Mttit  dang  i»  wtiMNi  d»  Marie. 
Lw  P$chif»i  et  IcB  JoiikMiiI,  deux 
peuplades  du  Caucase  qui  habiteal 
ven  leg  sowroes  de  1«  lora  (Canbyae), 
soQt  d'autant  plus  formidables,  que 
lotttea  les  vertus  guerri^ras  aont  com- 
aacrte  jiar  leiiffa  lois  et  Jeurseoutuoea 
mtoe:  li leur  esl  d^adUf  aous  peine 
de  noit*  de  mtrer  dans  leur  pajm 
Ueas^  per  deir ite ,  on  de  SB  raser  tanl 
qu'ile  oat  a  vesger  la  Hiort  de  quelcyue 
parenl.  Cm  mootagDarda  avaieot  d'a^' 
deone  date,  et  jfmqiik  la  ruioe  dn 
trdne,  oompoe^  la  prde  dea  rola  de  la 
G^ongie,  «t  ila  avaient  toujonrt  eon* 
aerr^  beaueoop  d'attacbemeDt  poor  la 
fiHBiiUe  royale.  SoUicit^  par  Marie  qui 
nMitait  sa  iiiile,  cm  avant  eonoi 
d'eoHBdmea  le  projet  de  la  reoueilfir 
avee  aea  eniHita  a«  milien  de  leora 
moDtaKDea,  oea  iotr^pidea  aerrHeura 
i^oocopaientdeapti^paratiiiD^eeatalrM 
pour  mettre  ce  pnget  k  eirtoition; 
Ifarie,  d'aceard  avec  eux,  leoondait 
leura  demaicbes,  et  paraiasait  n'at- 
tendre  que  le  jour  fixe  pour  aoo  ^a* 
8100.  Le  dessdn  avait  transpM  par 
lea  r^^latonB  de  ILaiaiousot;  aussi 
^eboua-t*il  au  momeat  mime  ed  tout 
itaaX  pr^par^  pour  la  isite  de  la  prin* 


Gadilla ,  de  la  peuplade  des  PichaTet , 
bomme  edbrageux  et  d*nae  taille  gi-* 
nrteaqae,  avait  M  charge  de  oon- 
Mieeetteafbire ;  d^^ ,  plusieDn  fote , 
il  teit  veau  k  Tiflia  poor  ae  ooncerter 
avee  ia  reine,  et  Gadilla  hii  avalt  an- 
nooe^  que  aea  oompatriotes  Tatten* 
daicnt  afiec  empretsemeDt.  Txitziaoof 
aaraii  toot ;  maia  Tooiant  se  convaiDcre 
par  liiHDtoe,  et  corieux  de  connaftre 
Gadilla ,  il  le  fit  arriter  et  ameoer  de- 
vant  Ini.  Le  gMral  n^avait  gard^  prte 
de  loi  que  aoa  interprgte;  car,  quoi- 
qa*ll  adt  le  stof^,  il  traitait  ainsf 
todtea  lea  anairea.  II  a?ait  eu  soin  de 
faire  cadier  Kalatouaof  sous  una  dra- 

rie.  Gadilla ,  en  se  pr^sentant  devant 
gtetol,  le  salua  k  la  mani^  du 
nsjps.  «  Qu'es-tu  vemi  foire  k  Tiflis? 
an  demanda  Txitaiamtf.— AcbeCer  du 
sil,  fi^pondit  le  Paohare.  —  I9e  me  ca- 
dtt  point  la  iFMt6.  Wy  a-t-il  point 
(Taotrea  raiaona  qui  faieot  oondoit 


dana  eatte  mile?  —  Aen.  —  FBchavev 
ta  vie  depend  de  la  v^it^ :  sache  que 
si  tu  ne  la  d^eouvres  pas,  je  puis  k 
rinstant  mtee  Aire  tember  ta  tite. 
—  Me  faire  eouper  la  tdtel  et  par  qui 
done?  serait-ee  par  oel  Intorprete  ar* 
m^nlen?  »  Paia,  |K>rtaiit  M  aniii  4aea 
poigiiaid :  «  N'ai-jeikMK  pas  mon  poi» 
para?  »  Taitiiaiiof ,  voyant  bien  que 
tes  raenaoea  ne  BOttvaieat  riea  sur  le 
maatagnardt  se  leva  ausaitdl,  et  s*ap- 
procbant,  afin  de  le  gagner  par  la  do«p 
ceur,  il  lui  met  la  maia  aiir  I'^paule, 
comme  pour  le  caressor,  dtsant : «  Mod 
brave  ami,  ne  te  fikfas  pas,  U  ne  te 
sera  fut  aueun  mal;  dis  seoleasent  la 
verity.  »  Mais  toutea  les  inatanoea  ftt* 
rent  vaines,  et,tandis  que  Gadilla  |Nr> 
sistait  k  tout  aier  au  general,  oelui-d 
it  paraltre  Kaiatoosof,  qui  a'a- 
dressa  bmamiement  au  Pschave,  et  loi 
dit :  «  GadiHa,  essse  cnfin  de  rauser 
I'aveu  dea  motifs  de  ton  arrivte  ii  Ti- 
(lis;  me  void  pour  te  oonfondre.  Ne  te 
soavlent>il  plus  de  m'avoir  vu  prte  de 
k  reiae,  lorsque  tu  es  venu  loi  anaoo* 
eer  bier  que  tout  HmX  prtt  pour  aa 
ftjDte?  que  des  naolets  Tattenaaient  k 
Konki  pour  la  traaaporter  dans  lea 
BDontagnes?  »  Le  moatagaard  6toand 
jeta  sur  Kalatousof  no  regard  de  n6- 
pris  et  de  oolere,  puis  il  r^pondit  que 
tout  oela  toit  faux.  Aossitdt  six  oe- 
nadiers  entrerent  dans  la  aalle,  et  le 
dteirmireBt  malgr6  sa  r^istanoe. 
Comma  on  allait  le  eonduire  k  la  for» 
teresse,  Kalatousof  s*^nt  basard^  k 
le  frapper  au  visage,  Gadilla  se  re- 
touma  fi^rement,  et  pretesta  que,  s*il 
avait  encore  son  poi^ard.  seul,  H  se 
sentait  assez  de  force  pour  les  immoler 
tons  k  sa  vengeance. 

Taitalanof  ne  chercba  pas  k  oonfir- 
mar  par  d'aotres  preuvea  la  r^alit^  du 
complot;  II  comfNTit  plus  que  jamais 
eombien  riloignement  de  la  reine  Ma- 
rie ^it  Indispensable  a  la  tranquillity 
du  pays,  et,  sans  d^lai  ultMeur,  son 
depart  flat  flx^  au  leademain  (la  avril 
IfioS).  If  fot  ordonn^,  afin  de  donner 
une  certaine  solennit6  k  ce  d^art,  que 
le  g^ntol  major  Lazaref ,  accompagn6 
d'un  into^r^te  nonrai^  Sorokin,  Ar« 
mInieD  de  nalssancet  se  rendrait  de 


440 


L'UNIVERS. 


Sand  matin,  avec  la  mnsique  mili- 
ire,  et  ^  la  iit/d  de  deux  oompagniea 
dinfanterie,  k  rhabitation  qu*oocapait 
la  reine,  pour  lui  signifier  I'ordre  de 
partir.  Le  lendemain  de  bonne  heure, 
le  g^n^ral,  8*^tant  done  prtent^  en 
c6remonie  devant  la  denieure  de  la 
reine,  entra  brus^ement  dans  son 
an|>artement :  la  reine  toit  d^)h  €veiU 
lee  et  assise  k  la  manfto  du  pays,  les 
jambes  crois^es  k  la  turque,  sur  Tes* 
trade  oh  Ton  6tend  chaque  soir  les  ma- 
telas  sur  ks^uels  on  rqx)se  pendant 
la  nuit.  Oepuis  deux  jours,  Marie  arait 
appris  secretement  qu*un  ordre  ^tatt 
venu  de  Rossie  pour  lui  faire  quitter 
la  G^reie,  et,  jusqu*au  dernier  mo- 
meat^  elie  8*toit  livr6e  k  Pespoir  d'^ 
chapper  a  la  surveillance  qui  Penvfron- 
■ait.  Ses  sept  enfants,  aont  le  pins 
tg^  avait  k  peine  neuf  ans,  6taient 
pais:blement  endormis  autour  d*eUe. 
Lazaref  lui  it  dire  par  son  inter- 
prete  de  se  lever,  et  qu'ii  fallalt  partir. 
LA  reine  r^pondit  avec  calme :  «  Pour- 
quoi  done  me  l^vorais-je  k  pr^ent?  ne 
▼oyez-vous  pas  que  mes  eimints  repo- 
sent?  si  Je  les  reveillais  brusquement, 
leur  sang  pourrait  se  toumer  (pr6jug6 
gtergien).  Qui  vous  a  donn^  un  ordre 
si  pressant?  »  Lazaref  ayant  r^pliqu^ 
que  Tordre  venait  du  general  Tzitzia- 
nof ,  la  reine  s*teria :  «  TMziano  tsofh 
fiatU  (Tzitzianof,  6cume  de  notre 
race) !  »  Cependant  la  reine  avait  plac^ 
,  sur  ses  genoux  le  coussin  qui  avait  sou- 
tenu  sa  t^te  pendant  la  nuit,  et  elle 
avait  cacb6  sous  ce  coussin  le  poignant 
de  son  mari.  Lazaref,  voyant  que  la 
reine  persistait  dans  le  dessein  de  lui 
faire  attendre  aue  ses  enfants  s'^eil- 
lassent  naturellement,  s'approcba  de 
Testrade  ok  elle  6tait  assise;  il  apergut 
un  des  pieds  de  Marie  qui  sortait  de 
dessous  le  coussin ,  et  se  pendia  comme 

C>ur  le  saisiret  la  faire  lever  de  force, 
a  reine,  par  un  mouvement  rapide, 
tire  son  poignard,  et  Tenfonce  dans 
le  flanc  du  general  avec  tant  de  force, 
que  la  pointe  sortit  de  Tautre  c6te  du 
corps.  Alors,  retirant  le  fer  de  la  bles- 
sure  :  «  Ainsi  perisse ,  s'teria-t-elle , 

?|ui  ose  ajouter  Fopprobre  a  nion  in- 
ortune.  »  Lazarer  poussa  un  cri,  et 


expira  presque  iur-le-diamp.  L'inter- 
prete  Sorokin  avait  tir^  son  sabre,  eC 
le  Ulche  en  avait  assen4  plusieurs  coupe 
sur  le  bras  de  la  reine,  dont  Tun  porta 
assez  profond^ment  vers  I'^ule.  H^ 
l^ne,  fa  m^re  de  la  reine,  qui  dormait 
dans  la  m6me  salle,  s'^it  r^veill^  au 
bruit;  k  la  vue  du  ssm,  c^e  s'^tail 
prMpit^  vers  sa  fllle  et  la  tenait  ^troi- 
tement  embrasste.  Toute  rhabitation 
fot  bientdt  remplie  de  soldats.  Marie, 
arrachte  des  bras  de  sa  mte,  fut  jette 
avec  ses  enfants  dans  la  voiture  qui 
avait  M  dfstin^e  pour  son  depart. 

La  reine  sortit  avec  ses  enfants  de 
la  ville  de  Tiflis,  escorts  jusqu'au  deUt 
du  Cauease  par  une  force  aitn^  con- 
siderable. L'attacheuient  desG^oiigiens 
pour  oette  reine  infortunte  rendait 
oette  proration  n^cessaire.  Cast  oe 
mtee  Tzitzianof  qui  fut  assassin^  de- 
vant  Bakou  en  1806  (*). 

Apr^  nous  6tre  occupy  de  la  Perse, 
nous  aliens  Jeter  un  coup  d'oeil  rapide 
sur  les  aCEsires  de  la  Turquie,  en  tant 
qU'elles  se  lient  k  Phlstoire  des  Rusaes. 

La  Porte,  telair^  par  ses  d^astrea, 
refusa,  en  1806,  d'entrer  dans  la  qaa- 
trieme  coalition  centre  la  France.  Na- 
polton  6tait  encore  k  Berlin  lonqu*il 
recut  un  ambassadeur  ottoman,  et 
Pancienne  alliance  entre  Paris  et  le 
divan  parut  ^troitement  renou^.  La 
Porte  commenga  par  destituer  les  prin- 
ces Ypsilanti  et  Morousi,  hos[VNlars 
des  deux  principaut^,  et*tous  deux 
devout  k  la  Russie.  L*ambassadeur 
russe  r^lanui  centre  oette  violation 
flagrante  du  traits  d' Yassi ,  et  il  fut 
appuy^  par  les  representations  et  les 
menaces  du  resident  britannique.  Le 
divan  6tait  sur  le  point  de  fl^chir,  lora- 
que  le  seneral  russe  Micbelson. entra 
en  Moldavia  k  la  t^te  de  trente-einq 
mille  hommes :  des  lors  on  se  prepare 
a  une  resistance  vigoureuse. 

L'amiral  Duckworth  parut  tout  k 
coup  dans  les  Dardanelles,  franohit  le 
detroit  sous  le  feu  des  premiers  cbd- 

(*)  Vojrei  pour  piuf  de  details  Phisloira 
de  U  domiDalioD  nuw  en  oeorgie  dont  boos 
•voaA  cite  presque  textuellemeiit  qudqiics 
pusagei. 


RUSSIE. 


441 


leauXf  et  bMa  pmqoe  tons  les  vai*- 
seam  de  la  flolte  torque  qui  statioB- 
nait  h  Gallipoli.  II  ae  sera  pas  sans 
intMi  pour  rinteliigenoe  des  ^r^ne- 
meots  qui  nous  ooeupeDt,  et  lea  lier 
d^une  mani^  plus  intioie  aox  &its 
subs^ueots,  de  oioiitrer  sous  quel 
jour  les  orgaoes  du  gouferueoieDt  ma- 
qaia  pi^seotaient  la  question  torque 
en  1807. 

La  Porte  d^slrait  la  paii :  ee  6it  par 
ce  sentiment,  peut-^tre  ezagM,  qu'a- 
pres  avoir  destitu^  deux  boepodars 
rebelles,  elle  consentit  k  les  retablir. 
Bile  n*avait  pas  M€  aux  menaces  de 
la  Russie  qu^elle  savait  £tre  son  impla« 
cable  ennemie,  mais  elle  c^a  aux  me* 
naces  de  rAngleterre. 

L'Angleterre  parut  satisfaite ,  et  tout 
fiiisait  pr^iager  h  la  Porte  la  durde 
d*un  repos  qu'elle  avait  si  cherement 
adiet6,  lorsque  Michelfion  entra  ino- 
pinement  en  Moldavie,  investit  Khoc* 
zim ,  qu*il  enleva  par  surprise,  et  apr^ 
avoir  tir^  quelques  coups  de  canon 
(ceg^^ral,  en  entrant*  dans  les  prin- 
dpautes,  avait  public  une  declaration 
portant  qu*il  ne  se  conduirait  en  en« 
nemi  que  dans  le  cas  ou  la  Porte 
s*obstinerait  k  agir  sous  Tinfluence 
francaise).  Cependant  les  armto  russes 
ne  s*^taient  pas  content^es  d'envabir 
la  Moidavie,  d^enlever  Kboczim,  de 
eerner  Bender  et  de  marcber  sur  le 
Danube;  mais  ce  qui  d^voilait  davan- 
tage  les  projets  de  la  cour  de  Saint- 
Petersbourg,  c*est  aue,  dans  les  pays 
qu^elle  envahissait,  les  Turcs,  simples 
citoyens,  recevaient  Tordre  de  vendre 
ieurs  biens  et  de  quitter  le  territoire 
occupy  par  Tarm^.  L'arm^  de  Mi- 
dielson,  renforc^  par  Essen,  allait 
ritre  encore  par  de  nouveaux  corps 
dirig^  sur  le  Danube.  C'en  6tait  fait 
de  T'empire  ottoman;  mais  I'arm^e 
fran^ise  parut  sur  la  Yistule;  elle  oc- 
cupa  VarsoTie;  et  la  Russie,  menaote 
sur  ses  fironti^res,  rappela  en  toute 
hSte  Essen  et  les  troupes  du  Don. 
Michelson  entra  h  Bouknarest,  mais 
il  ne  put  passer  outre :  les  armies  tur- 

Ses  se  formerent,  et  leur  avant-garde 
t  suffisante  poor  arr^ter  les  Russes 
a  pea  dc  distance  de  cette  ville. 


Le  minisin  d'Angletarre  isterposa 
d'abord  see  bona  ofltees.  II  ne  put  rien 
r^pondre  h  la  force  des  raisons  qui  fu- 
rent  dono^  par  le  divan,  f^a  Porte 
venait  d*<tre  attani4e  sur  soq  terri- 
toire sans  d^clarafion  de  gnem;  ces 
dtoaiches  bostiles  n'avaient  pas  mtoe 
M  prMdte  d'une  senle  note  diplo- 
matique; aucune  Toie  d'aooommod^ 
ment  n'avait  6ti  onverte.  Le  ministre 
d'Angleterre  s'en  tint  done  ^  la  d^ 
mardae  qa'il  avait  £ute;  11  vit  partir 
le  minisfire  de  Russie  et  resta  traoh 
quille. 

Mais,  pen  de  semaines  aprte,  il  se 

I»rtonta  a  une  oonfiftrenoe  qui  eut  lieu 
e  3&  Janvier;  II  y  fit  une  nouvelle  pro- 
testation; il  s'embarqua  ensuite  sur 
une  fr^ate,  coupa  les  cables  et  dis* 
parut 

£tant  k  bord  de  la  fr^te  VEndy^ 
miofij  il  adressa  k  la  Porte  une  der* 
ni^  note. 

II  6tait  Evident  que  dans  cette  arise 
on  voulait  par  un  coup  d'6clat  en  im- 
poser  k  la  Porte;  car  Tambassadeur 
etait  a  peine  arriv^  k  Ten^dos.  qu'il  y 
rencontra  Tescadre  de  ramiral  Duck- 
wortb. 

Bientdt  aprte ,  I'amiral  anglais  parat 
devant  les  Dardanelles  avec  deux  vais- 
seaux  k  trois  ponts,  trois  vaisseaux  de 
quatre-vingts  canons,  deux  de  soixante- 
quatorze  et  quelques  bombardes.  fa- 
voris^  par  un  vent  du  sud ,  Tescadre 
arrive  le  19  f§vrier  ( 1 807),  k  huit  beures 
du^natin ,  devant  les  batteries  des  deux 
premiers  cbAteaux  :  ceux-ci  commen- 
c^ent  un  feu  vif  et  opinidtre  auquel 
les  Anglais  ne  r6pondirent  pas.  Par- 
venus a  la  hauteur  des  deux  autres 
forts,  les  vaisseaux  ouvrirent  le  feu  de 
Ieurs  batteries;  le  vent  les  poussait, 
et  les  batteries  du  fort  6taient  mal  ar- 
m^s.  A  la  hauteur  de  Gallipoli,  I'es- 
cadre  anglaise  rencontra  un  vaisseau 
turc  de  soixante-quatorze  et  cinq  fri- 
gates; les  ^uipajges  ^taient  a  la  mos- 
qu^ ;  que  pouvait  d^ailleurs  cette  divi- 
sion contre  des  forces  si  superieures? 
Les  Anglais  Pattaqu^rent,  et,  coromet- 
tant  un  de  ces  crimes  dont  cette  nation 
seule  est  capable,  et  dont  elle  s'^tait 
drja  souillec  par  Tincendie  de  quatre 


443 


yUHlVERS. 


Miate  qgpMiMiinBt  l*Mntral  angiais 
brdla  lea  MX  bitimeDts  tores ;  et  oepen* 
dant  la  guerre  n'^tait  pea  d^aree; 
dea  pourparlers  devaient  avoir  lieu ;  lea 
ministres  de  la  Porte  ^talent  encore  k 
Londres! 

Get  incendie  fiit  aper^  de  Constan* 
tiaople;  au  Keu  d'j  porter  le  dtoura- 
geDMBDt  t  U  excita  une  nouTdie  ^nergie. 
Le 30,  i  cinq  faeorea  du  soir,  Fescadrs 
anclaise  parut  devaot  le  atoil.  Rien 
a'etait  pr^u;  aucun  point  n'toit  eo 
ditfense,  raais  on  conrut  aax  armes. 
Le  Grand  Seigneur  se  porta  le  premier 
rar  lea  positions  reconnues  les  fAus 
inTorables  poor  dtablir  des  batteries. 
Hommes,  fenimes,  enfants,  Tares, 
Armteiens,  Grees,  ultoas,  cfa^ks, 
derviches ,  tout  le  monde  prit  la  piocbe 
et  la  bretelie.  Des  officiers  du  genie  et 
d'artillerie  fran^is  arriv^rent  dans  la 
nuit  de  Dalmatie. 

En  cinq  jours,  cinq  cents  pieces  de 
canon  et  cent  mortiers  furent  plae^ 
en  batterie,  et  Tempire  ture  fut  mis  k 
Tabri,  non  de  la  destruction  df  quel* 
ques  maisons,  de  quelques  Winces, 
inais  de  la  parte  de  son  honneur,  de  sa 
consideration ,  seuls  biens  que  les  na- 
tions ne  reoouvrent  plus  lorsqu'elles 
les  ont  perdus. 

Gependant  le  ministre  anglais  s'em- 
barqua  sur  un  esquif ,  et  oemanda  k 
parlementer ;  on  consentit  k  I'entendre , 
et  le  kiaya^bey  se  rendit  k  bord  de  Ta- 
miral,  qui  fit  les  propositions  suivan- 
tes  :  1*  les  didteaux  des  Dardanelles 
seront  remis  au  pouvoir  des  Anglais; 
T  quinze  yaisseaux  de  guerre  cbarg^ 
des  munitions  navales  seront  conduits 
k  Malta;  8«  la  Porte  ddclarera  la  guerre 
k  la  France,  et  renverra  son  amoassa- 
deur;  4*  la  Moldavie  et  la  Valacbie 
resteront  k  la  Russia;  la  place  d'lsmail 
et  les  autres  villas  fortes  do  Danube 
seront  livrto  k  cette  puissance...  Ac- 
cepter ces  conditions  ou  des  bombes, 
tei  <^tait  le  langage  de  Tamiral  anglnis. 
Le  peuple  redoubia  d'activit^.  Le  35 , 
Tambassadeur  d'Angleterre  demanda 
qo*il  lui  flQt  assign^  un  lieu  ou  il  p^t 
oftarquer  pour  confi6rer  avec  les  mi- 
nistres de  la  Porte;  le  divan  r^pondit 
qu*il  n*etait  pas  d^sormais  an  lieu ,  pas 


OB  seal  ponea  de  lerre  dans  tout  Pem- 
ptre  ottoman  od  nn  Anglaf s  pdt  des- 
oendre  sans  ^tre  expoe^  a  la  fureur  du 
peuple;  qn'au  sein  du  s6rafl  m^me  le 
sultan  ne  serait  pas  aases  puissant  pour 
dafendre  on  Ai^lais  contre  I'indigna- 
tioa  des  mosulmans. 

On  s'aper^  alors  k  bord  de  Tes- 
cadre  anj^aise  qu'on  ne  parviendrait 
point  k  £aiire  peur  a  la  Porte ,  et  que  le 
coup  tolt  manqae.  On  se  rddcha  des 
conditions  qu'on  avait  impos6es;  mais 
le  Grand  Seigneur  fit  repondre  qu*il 
ne  traiterait  pas  tant  que  reseadre  an- 
glaise  serait  en  dedl  des  Dardanelles. 
Les  Anglais  eurent  alors  recours  k 
Flntrij^e,  mais  le  sultan  fut  immuable. 
II  etait  nuit  et  Jour  avec  les  troupes 
dans  les  batteries. 

Le  9  mars,  il  envofa  diercher  le 
g^^ral  Sebastian!  qui  ae  trouvait  i 
cheval  au  milieu  de  ses  soldattf;  il  lui 
dit :  «  Les  Anglais  veulent  que  ie  chasse 
Pambassadeur  de  France,  et  que  J[e 
fosse  la  guerre  k  mon  meilleur  ami. 
"Acm  k  Temperenr  qu*hier  encore  fai 
re^ u  une  lettre  de  lui ;  que  je  persev^- 
rerai  dans  mes  desseins;  qu*il  peut 
compter  sur  moi  oomme  Je  compte  sur  • 
lui. » 

Le  s^rail  et  les  cdtes  d*Europe  et 
d'Asie  ^nt  converts  de  batteries, 
tous  les  efforts  se  portent  sur  les 
Dardanelles ,  que  Ton  h^rissa  de  canons 
et  de  camps. 

Dans  ces  ciroonstances «  Tescadre 
anglaise  Jugea  prudent  de  battre  en 
retraite;  elle  repassa  les  Dardanelles. 

D^  les  premiers  moments  de  la  de- 
claration de  euerre,  rempereur  P^apo- 
Iton  avait  omrt  au  Grand  Seigneur  le 
secours  d*une  arm6e  pour  dafendre  les 
Dardanelles  et  le  Danube;  mais  la 
Porte  n'avait  d'abord  aocepte  que  oael- 
ques  ofBciers  d*artillerie  et  du  genie. 
Le  sultan  demanda  enfin  d*autres  se- 
cours qui  partirent  en  toute  diligence. 

La  uotte  turque  osa  franchir  les 
parages  ou  elle  etait  II  Tabri;  mais, 
rencontr^e  k  la  hauteur  de  T^n6dos  par 
Tescadre  de  famiral  russe  Siniavin, 
elle  fut  d^truite  dans  deux  combats 
successifiB.  Cest  ainsi  que  le  gouverne- 
ment  russe,  au  milieu  de  toutes  les 


i 


1  qua  lui  doanait  I'ftat 
<e  rEimpe,  marcltait  *t«c  peraM- 
nau  TBS  a«»  bat  pciacipBl ,  le  dteiem- 
tmneot  et  la  niiM  de  bTrnmris. 

Le  Intvd  Minniir  nmneat  d'ftre 
EmnUtii  qui  MttMttBdre.  VixxTpe 
de  SMhii  Mirait  pa  devenir  aerettifs; 
d^  ries  lanm  iinyouDtca  aBaient  as 
mtnir  iur  lee  ri*ai  du  DaootM,  oti  les 
■MhM  de  Nan  et  d«  Wiitdia  avBient 
UUa  h>  Scrritna,  at  loni  ki  Auaan 
da  lever  le  bkiont  deOiug^ ,  lonqtn 
b  rerotaUon  da  CooilaRliiio^  ret^ 
vena  Seiin  du  trtoe,  et  dte  Ion  I'tn- 
amUe  maiqiM  k  la  resistance.  Le 
giaint  Hicfaaaoi  proOta  de  cette  dr- 
roTutaiice  pour  rentrer  en  Vjl:ichic. 
I.,es  victoirei  de  Napoleon  poiiviiient 
chaoger  la  face  des  afrairrs  en  Orient ; 
maisbeconquirant,  toujours  sui^nfun 
de  se  mender  I'altiaiice  russe,  ne  re- 
garda  phu  la  question  tiirque  que 
comtae  ud  poim  secondaire;  11  i>st 
mAne  probable  que,  pour  mettre  Im  a 
TcBUTe  de  aon  raste  sysleme  ronti- 
nental,  Teniperear  des  Francois  ei)t 
fait  boa  aisrehi  de  I'eiislenee  du  vieil 
empire  ottoman.  La  pnix  de  Tilsitt 
laUiait  peu  d'etpoir  aux  Turcs  de  rnn- 
tinuer  la  cuerre  avec  avantage;  il  fiit 
done,  coada  mtre  eui  et  les  Russe;  un 
BrmisUnai'ea  peut  considererrDiiinie 
uiie  CQDSequence  des  orrjngeinents 
coodus  per  les.  trois  souveralns;  on 
peut  mAne  coajecturer  que  la  proleo- 
(ioii  de  IfapcrieoD,  si  ma^'niliquemimt 
promise  aa  divan ,  lui  fit  d^faut  <ie!i  que 
led^iiwer  de  la  coalition  st  fut  evanuui : 
ra  effet,  les  troupes  russes  resterent 
daas  les  principautes,  malgre  la  clause 

Jui  stipulait  pour  ce  pays  one  sorle 
'iodependance,  et  le  prince  Ypsilanti 
alia  reprendre  le  gouvernement  de  la 
Valachie  au  moment  oil  la  Porte  nom- 
maitte  prince  Soutzo  pour  lereni|ilar<T 
en  qualite  de  bospodar.  La  Porle  re- 
elania;¥psifantii(]t  rappelt-.et  rida  a 
la  Eussie  ses  pr^itnduE  droits  siir  le 
Koavemement  de  cetie  provini*,  dont 
Tad  ministration  frit  alors  conlii'r  a  im 
iitan  compost  de  Rus&es  et  de  boyars 

nm  eea  aiditerfiiga  tinrent  aHcx 
kwgtaiipi  la  Hioaie  et  la  Tiuqaie  don 


no  Mat  nrixia  qui  u'Mit  ni  la  paii  ni 
la  gueire;  la  ranatttttd  de  la  politique 
firancaiie  opira  un  rapprocfaemeirt 
entn  la  Porte  at  I'Angwtore,  et  la 
EUuioD  du  gitntni  SAbaatiani  aetrouTa 
entravto  par  rhdluence  britennique, 
qiuad  )e  divan  eat  aap6s  la  preuve 

Sat  lo  goavamenHM  fraofaia  aacriBatt 
I  protcctorat  de  ["Orieirt  k  de  dou- 
Tellea  ODntatMNHU. 

(ISOS.)  Let  rfeultati  de  )a  Mix  de 
Tilaitt  veasjent  de  cbaager  la  lace  de 
rEnrope.  Le  vaiaquear  avait  traot  sa 
part  avac  aoa  glaivt;  il  rigiuit  iUkx- 
mate  joiqu'ao  NJteen ;  t*Antrid>e  Matt 
domptAe ;  la  Pmtae  morcrifa  n^cilatait 
pina  que  grioa  i,  uoe  lonKaainite  non 


£dtei;  le  corpa  germanique  attwdait 
qn'an  coorricr  de  Paria  vtnt  lai  ap- 
prcadie  ^11  toit  en  paii  oa  en  guerre; 
aeute,  ta  RaMie  avait  Ufi  de  aa  posi- 
tion gto^ptiiqae  I'avantage  de  garder 
aon  temtoire  intact,  et,  quoi([Be  vain- 
oue,  elle  bataacait  encore  rinOaenoe 
de  NapolcDn;  ce'  o'eit  pai  qa'elle  fdt  i 
liadre  par  aet  aeules  rem 


tnaia  on  pent  dire  qae  iws  alte  il  a'j 
avait  plua  i  eette  ^foqne  de  ooalitioa 
noasiblB.  Capendant  eem  qoi  ne  se 
HJaaieat  pas  dUeufr  par  T^clat  pres- 
tf rieni  ds  conqudtee,  ne  pouvaient  s« 
dissimoler^lMiflcedela  gloire  fran- 

Site  r^onit  lur  dee  baia  fragjies. 
Dordredecboaatqui  dcpla^itviolem- 
neot  l<iiidMti,enblesiantror^eil 
mtioaal  des  ninetis ,  ne  pouvst  ae 
touteair  que  nr  dei  moyeu  eoercitifii 
peu  GODipatiblas  aaec  nne  ^nqoe  da 

Kix.  Quand  la  etaiate  oraatit  aeult 
briiaaanee,  qoand  la  renrtte  est  dsnt  - 
let  ccears,  le  retour  vera  nn  pattd 
u'oB  renette  n'eat  pint  qu'niie  que^ 
tKa  de  tempt  et  d'opportanit^  Hat- 
tresee  det  men,  rAo^eterre  comiffe- 
nait  ooe  rappUoatioa  do  ayitime  qui 
prahibait  son  commecoe  sur  le  contl- 
neat  (Migaerflit  lea  pcuplet  lonf^tempa 
arsot  que  de  cooiomniBr  aa  rmne. 

Si  rinlemiption  du  coDimerce  an- 
gteit  porta  nn  coup  aenalUe  i  la  pros- 
p^t/  indnstrieOe  et  manifacturi^ 
del  peoples  soamit  aux  volont^  de 
rempercur  des  Francis,  die  fut  aur- 


441 


UUlillVERS. 


tout  jur^Qdieiable  a  la  EuMie,  encore 
inbabile  k  mettre  en  oeuvfe  ses  pro- 
duits ,  et  qui  se  voyait  oUig^  de  renon- 
cer,  faute  de  d^uch^s ,  aux  avantages 
aoiides  de  son  comineroe  d*exporta- 
tion. 
II  y  eut  doDC  dans  ia  determination 
•  d* Alexandre,  ior8<iu*il  dut  opter  entre 
Talliance  britannique  et  celle  de  la 
France,  plus  d'entiratnement  et  de 
bonne  fbi,  que  de  justesae  et  de  tact 
dans  Tappreciation  dea  v^ritables  int^ 
r^ts  de  son  empire.  La  Russia  avait 
aans  doute  besoin  d*uDe  paix  r^para- 
trice;  mais,  par  suite  du  blocus  con- 
tinental, les  r^ultata  de  cette  paix 
devenaient  st^iles,  puisque  rexc6aant 
des  produits  se  trouvait  entass^  dana 
les  roagasins,  au  prejudice  des  pro- 
ducteu'rs  et  des  propri6taires.  La  con- 
duite  peu  loyale  des  Anglais  dans  la 
demi^re  lutte,  le  bombardement  de 
CopenhaguCr  et  les  managements  de 
M^poleon  pour  Alexandre  peu?ent  sans 
doute  justifier  moralement  ce  prince; 
mais,  selon  les  rd^  ^ofstes  de  la 
politique,  celui  qui  [>erd  est  toajours 
eens6  avoir  tort*  Ainsi ,  non-seulement 
la  Russie  n'avait  point  obtenu  une  paix 
avantageuse,  mais  sa  tranquillity  etait 
prtoiire  et  subordonnte  aux  emp^ 
chements  que  pouvait  renoontrer  le 
aysteme  francais  dans  ses  exi^ntes 
applications.  L'attitude  que  prit  cou- 
rageusement  la  Suede,  tandis  que  les 
autres  cours  s*humiliaient  devant  le 
genie  d*un  conqu^ant  non  moins 
pers^v^rant  dana  ses  vues  qu*il  etait 
aupdrieur  k  ses  rivaux  dans  Tart  de 
la  guerre,  entratna  Alexandre  1^  se  d^ 
clarer  ennemi  de  cette  puissance.  La 
marine  russe  consistait  alors  en  trente- 
deux  vaisseaux  de  llgne,  dix-huit  fri- 
gates et  soixante  bdtiments  l^ers ,  sans 
compter  plus  de  deux  cents  galores; 
ces  forces  nayales  r^unies  pr^sentaient 
un  effectif  de  cin^  mille  six  cents  ca- 
nons, de  trente  mille  marina,  et  d'en* 
viron  huit  mille  soldats  de  marine. 

Des  la  fin  de  I'annte  1807,  Tempe- 
reurdeRussieavaitexig^quela  Surae, 
en  vertu  des  traits  de  1780  et  1800, 
mainttnt  le  principe  que  la  Baltique 
devait  iire  une  mer  ferm^,  et  qu^elle 


dtfendlt  cette  mer  et  ses  cAtes  cootre 
toate  infraction  k  ce  prineipe.  Le  ro* 
de  Su^e  r^jKHidit  qu*il  toit  impoaaibie 
de  maintenir  la  neotralit^de  la  Baltique 
tant  que  la  France  diaposerait  des  ofttea 
m^ridionales  de  ce  bassin,  et  qa'il  in- 
vitait  le  tsar  k  user  de  son  inilaenoe 
pour  obtenir  pr^lablement  i'^vacua- 
tion  de  ces  contrte. 

Tandia  que  ces  n^ociations  ae  poor- 
aulvaient,  la  cour  de  Stockbolm  o^o- 
ciait  un  traits  de  subsides  avec  I'An- 
gleterre,  ce  qui  Texposait  k  tootes  les 
cons^uences  d*une  rupture  procbaine. 
Le  r^ultat  de  cette  conduite  proave 
que  ceux  qui  tiennent  en  main  lea  des- 
tine d'un  peuple  doivent  sacrifier 
leurs  ressentiments  particuliers  k  la 
necessity  des  temps,  sous  peine  d'ex- 
poser,  a  leurs  d^ens,  I'insufBsance  du 
droit  devant  la  force.  Alexandre  a  fait 
une  faute  en  accMant  k  une  coalition 
anti-britannique,  parce  que  lea  res- 
sources  de  son  empire  toient  lohi 
d*^tre  ^puis^ ,  et  que  la  guerre  contre 
TAnfjleterre  lui  ^tait  encore  plus  pr^ 
judiciable  que  ne  redt  it6  sa  resistance 
contre  Napolton,  parce  qu'enfin,  en 
acoeptant  ('alliance  fran^ise,  ii  rcdes- 
oendait  k  un  r6le  secondaire,  tandis 
qu'll  pouvait  balancer,  par  une  r^ia- 
tan^  mime  passive,  la  snp^iorit6  de 
son  rival. 

La  SuMe  commit  une  faute  {oste- 
ment  pour  avoir  suivi  la  ligne  qu'aurait 
66  auivre  la  Russie.  Trop  pauvre  pour 
se  rfeigner  ind^niment  a  la  suspen-* 
sion  de  son  commerce  maritime,  rile 
invoqua  le  droit  qu'ont  les  Etats, 
comme  les  individus  ,de  pourvoir  ft  IcMr 
conservation;  mais  elle  ne  pr^vit  point 
les  oons^uences  d'une  lutte  si  inegale , 
et  elle  dut  les  subir  sans  aucune  com- 
pensation. 

Le  21  fevrier  1808,  le  g^^ral  Bin- 
hovden  passa  la  Kvm^nie,  limite  com* 
mune  aes  deux  Ktata,  et  entra  en 
Finlande  sur  troia  pointa  diffikents, 
Abersfors,  Kieslig  et  Aniala.  Les  S»^ 
dois  se  d^fendirent  avec  courage,  et  le 

S^n^ral  russe,  pour  assurer  le  suecds 
e  son  expedition,  eut  recours  aux 
prodamationa.  La  auivante  proave 
avec  quelle  dexierite  le  cabinet  de 


RUSSIE. 


44i 


Saiot-Petenbourg  maniait  cette  arme 
dangereuse.  «  Bods  voisins,  disait-il 
aux  nabitants  de  la  Finlande  suMoise, 
mon  tr^-gradeux  maftre  se  voit  foro^ 
d'envoyer  daos  votre  pays  les  troapes 
sous  iiies  ordres;  mais  Sa  Majem  le 
roi  de  Su^de,  en  s^^loignaiit  de  plus  en 
plus  de  rbeureuse  alliance  des  deax 
plus  grands  empires  da  monde,  jre»* 
serre  ses  liaisons  avec  reonemi  com- 
mun,  dont  le  systtoe  oppressif  et  la 
ooDdoite  inonle  envers  les  allies  les  plus 
intimes  de  la  Russie  et  de  la  SuMe 
m^me ,  ne  peuvent  itre  vus  de  sang- 
froid par  Sa  Majesty  Imp^riaie.  Obs 
motifs,  ainsi  que  les  soins  que  Sa  Ma- 
jesty Imperiale  doit  a  la  sAreU  de  ses 
Etats,  I  obligent  i  placer  votre  pays 
sous  sa  protection  et  h  en  prendre 
possession ,  afin  de  se  procurer,  par  ce 
moyen,  une  garantie  suffisante,  dans 
le  cas  ou  Sa  Majesty  su^oise  pers6v^ 
rerait  dans  la  r&olution  de  ne  pas  ac* 
colter  les  ^itables  propositions  de 
paix  aui  lui  ont  ^t^  faites  par  Sa  Ma- 
jesty rempereur  des  Francis,  sous  la 
mediation  de  Sa  Majeste  Imperiale 
russe,  dont  les  efforts  ont  Hi  et  sont 
encore  dirig6s  vers  le  r^tablissement 
cfune  beitreuse  paix. 

•  Bons  Toisins  et  braves  Finois, 
restez  sans  inquietude  et  sans  crainte 
dans  vos  demeures.  I^ous  ne  venons 
point  Gomme  ennemis;  nous  venons 
conmie  des  amis ,  des  proteeteurs ,  pour 
assurer  votre  propre  nonheur,  et  dans 
Tintention  d'migner  de  votre  pays  les 
maux  de  la  f^erre,  dont  vous  series 
devenus  les  victimes.  Ne  vous  laissez 
point  eneager  h  prendre  les  armes,  on 
a  nuire  de  qudque  mani^  que  oe  soit 
aux  troupes  que  Sa  Majesty  Imij^ale 
ni*a  confite.  Toute  personne  qui  man* 
guera  a  ces  onhres  n  a  qu'^  s'attribuer 
a  soi-mtee  les  suites  de  sa  dtob^is- 
sanee. 

«  Conune  Gq>endant  il  ponrrait  y 
avoir  des  circonstances  qui  exiseraient 
des  resolutions  unanimes  et  aes  deli- 
berations dirigees  par  une  confiance 
redproque,  vous  etes  invites,  par  la 
iraente,  h  nommer  et  a  envoyer  k 
Abo  vos  deputes  provinciaux  dans 
Tordre  constitationnel  etabli  par  vos 


dietes,  afin  que  ces  deputes  y  deiibe^ 
rent  sur  ce  qui  pourra  dans  la  suite  se 
faire  pour  le  bien  du  pays. 

«  Ainsi,  dansce  moment  et  iusqu'a 
noQvel  ordre,  le  ffrand-duche  de  f^in* 
lande  sera  considere  comme  les  autres 
provinces  oonqulses  par  la  Russie ,  et 
qui,  sous  le  doax  gouvemement  de  Sar 
Majeste  Imperiale  et  de  ses  predeoe»- 
seurs,  jouissent  et  ont  joui  oe  la  plus 
heureuse  tranquillite.  Le  libra  exercioe 
du  culte,  et  tons  les  privH^es  dont 
jouissent  les  Finois  depuis  un  temps 
immemorial,  leur  seront  conserves 
avec  tout  ce  qui  en  depend,  etc.  » 

Une  autre  proclamation  porte  an 
cachet  non  moms  extraordinaire;  nous 
la  citerons  encore  pour  montrer  que, 
dans  ses  envahissements  successifs,  la 
Russie  a  employe  tour  a  tour  ou  si* 
multanement  la  force  et  la  ruse :  cette 
proclamation,  datee  de  Lovisa,  etait 
adressee  a  Tarmee  finoise.  « Soldatsl 
c'est  avec  af&ietion  que  mon  tr^m* 
cieux  empereur  se  voit  force,  mawre 
lui ,  de  faire  entrer  ses  troupes  ea  Fm- 
lande :  cette  demarche  n'a  d*aatre  ofajet 
qu*une  protection  puissante,  et  la  con- 
servation de  la  paix  et  de  la  tranquil* 
lite,  ainsi  que  le  bien-etre  des  Finois. 

«  Pour  executer  cette  mesiure  equi- 
table, Sa  Majeste  Imperiale  a  ordcHme 
h  ses  troupes  de  ne  pas  tiror  les  pre- 
mieres, a  moins  qu'oubliant  votre  li* 
berte ,  et  dedaignant  les  avantages  qu'on 
vous  offre,  vous  ne  preniez  une  atti- 
tude hostile;  k  notre  grand  depknsir, 
vous  I'avez  dei^  fait.  Nous  renouvelons 
a  la  nation  fmoise  ces  ordres  dk  Sa 
Majeste  Im]>eriale,  en  vous  assurant 
de  sa  bienveHlanoe  sincere,  et  en  vous 
donnant  de  noaveau  la  garantie  que 
vous  avez  part  aux  bont&  de  Sa  Ma- 
jeste Imperiale. 

«  Bons  Finois,  que  le  sort  a  places 
dans  les  rangs  de  I'armee  suedoisa, 
vous  etes  h  plaindre;  voos  quittez  vos 
foyers  et  vos  parents  poor  aller  k  la 
mort  pour  une  cause  iiqaste.  Soldats! 
mon  tres-gradeux  souverain  m'a  or* 
donne  de  promettre  k  tons  ceux  d^entre 
vous  qui  poseront  les  armes  volontai- 
roment,  au*ils  auront  la  liberte  de  re- 
tourner  chez  eux ,  et  qu*0D  lenr  payera 


4M 


L'UHIVEES. 


de  TEurope  nooi  oot  rtenis  a  Erfurt. 
Notre  premi^  pena^  est  de  oMer 
aux  voeux  et  aux  foesoina  de  tous  les 
peupleSj  et  de  chereber,  par  une 
prompte  paciGcation  avec  Votre  Ma- 
jest6,  le  remdde  le  plus  eflficaoe  aux 
fiiailieurs  qui  ptent  sur  toutes  les  na* 
tiofis.  Nous  en  fiiisoos  oonoattre  notre 
sino^  d^ir  h  Votre  Majesty  par  cette 
prteute  lettre. 

«  La  guenre  lon^e  et  sanglante  qui 
a  dtehir^  le  cootinent  est  termio^e 
sans  qu'elle  puisse  se  reoeuveler.  Beau- 
coup  de  chaDgements,  out  eu  lieu  eo 
Europe ;  beauooup  d'Etats  out  6t6  bou- 
levers^.  La  cause  en  est  dans  T^tat 
d*agitatioa  et  de  malheur  ou  la  cessa- 
tion du  commeroe  maritime  a  piac^ 
les  phis  grands  peuples.  De  plus  grands 
changements  peuvent  encore  avoir 
lieu ,  et  tous  contraires  h  la  politique 
de  la  nation  anglaiae.  La  paix  est  done 
i  la  fois  dans  nntMt  des  peuples  du 
oontiuent  conime  dans  Tint^ret  des 
peu^es  de  la  Grande-Bretagne. 

«  rfous  nous  r^unissons  pour  prier 
Votre  Mafest^  d'eeouter  la  voix  de 
rbumanite ,  en  faisant  taire  celie  des 
passions;  de  diereber,  avee  Tintention 
dV  panrenir,  h  coocilier  tous  les  int^ 
rets,  et ,  par  ih ,  garantir  toutes  les  puis* 
sanoes  qui  existent ,  et  assurer  le  ooib' 
lienr  de  rEurope  et  de  cette  otedration 
a  la  ate  de  laqudie  te  I^ovidence  vous 
a  plac^. 

«5<f^:NAP0Li0ir,  ALBXANDUi.* 

Cette  lettre  donna  lieu  k  un  ^change 
de  notes  diplomatiques  ou  se  develop- 
parent  infractueusement  les  pr^en- 
tions  respectives.  Le  congr^  d  Erfurt 
•e  s^para  te  14  octobre.  Retonrner  eu 
loute  bite  k  Paris^  et  se  pr^piter  sur 
TEspagoe  poor  r^rer  ri^ec  de  Bay- 
len  par  la  prise  de  Madrid ,  tels  fiirent 
les  premiers  soins  de  Napoleon.  Ce* 
pendant,  a  I'instant  natoeou  le  plus 
habile  et  le  plus  heureux  des  eonqu^ 
rants  touehait  a  Tapog^e  de  sa  gloire, 
des  r^stances  s'ovgaQinient  sourde- 
oMsnt  L'Autriehe  ne  pouvait  accepter 
a  tottjeurs  la  rMuetion  bnmiliante  de 
SOD  territoire.  L'ard^iieCbaries  pai^ 
Vint  k  relever  le  moral  .de  f  arm^e  par 
des  dispositioBs  »ftuaai  sages  que  £6- 


oondes.  LMastitulion  de  la  laruhoehr 
pr^para  raffranchissement  de  I'Alle- 
magna.  L*empereur  des  Francis  de- 
manda  des  explications  sur  oes  grandes 
mesures  militaires;  mais,  soit  que 
Tadresse  de  M.  de  Metternich  lui  edt 
fait  prendre  le  change,  soit  que  Napo- 
Itoi  esp^iit  que  son  alliance  avec 
rAutridoie  mettrait  ces  nouveUes  res- 
sources  k  sa  disposition,  II  parut  se 
oontenter  des  motifs  que  mettalt  en 
avant  le  cabinet  de  Vienne.  Ce  cabinet 
a^puyait  pnnciplement  sur  la  ntoes5it6 
ou  se  trouvait  rAutriche  d*adopter  un 
systeme  d^ensif  capable  de  contro- 
balancer  Tintroduction  de  la  conscrip- 
tion dans  les  Etats  voisins.  Ce  qui 
Souvait  suifisamment ,  ajoutait  M.  de 
ettemich,  que  son  gouvernement 
6tait  doisn^detoute  vuenostile,  c*6tait 
le  refus  du  prince  Charles  d*acc^er  k 
la  proposition  d*un  parti  espagnol  qui 
lui  avait  offert  la  couronne.  Uempe- 
reur  Francis  ajouta  a  toutes  ces  as- 
surances par  des  protestations  solen- 
nelle8.d*attacbement  et  de  fiddlit^;  et, 

gmr  nous  servir  de  Texpression  de 
abbe ,  Napolton  essuya  cette  ddfaite 
diplomatique. 

La  conduite  de  FAutriche  ne  tarda 
pas  a  d^voiler  ses  v6ritables  intentions ; 
elle  fomentait  Tinsurrection  espagnole, 
retardait  la  reconnaissance  du  roi 
Joseph ,  et  son  ambassadeur  k  Cons- 
tantinople appuyait  la  r^ncfliation 
entre  la  Porte  et  TAngleterre. 

Napoleon  cbercha  k  d^toumer  le 
coup  dont  on  le  mena^ait ,  en  faisant 
ofihr  au  cabinet  de  Vienne,  par  Tentre- 
mise  de  Roumianzof,  ambassadeur 
russe  k  Paris,  un  arrangement  qui 
aurait  uni  la  France,  la  Russie  et 
TAutriche,  en  mettant  Tint^it^  du 
territoire  de  chacune  de  ces  puis- 
sances sous  une  tierce  garantie;  de 
telle  sorte  ({lue  la  Russie  se  serait  trou- 
v^  la  tutrice  des  int^rdts  autrichiens. 
Mais  cette  ofTre  fut  d^linte  comme 
n'offirant  au*une  ^arismtie  illusoire,  la 
position  geographique  des  £tats  autri- 
chiens ne  leur  permettant  pas  de 
compter  sur  un  secours  efBcace  de  la 
part  dela  Russie,  et  en  temps  opportou. 

Bient^t  les  manifestcs  oe  la  cour  d« 


RUSSIA. 


46t 


Yienie  vhirent  deniaer  plus  nette- 
Dest  tes  prteotions.  On  8*v  piaignalt 
tferamlritioa  insatiable  de  rempcareor 
4m  Pranj^^,  (pi  n'aooordait  la  pan 
a  ses  allies  qu'a  des  oondltioiis  tnto- 
IMUes ;  on  tAchait  de  riveiller  T^ner- 
oe  naUonale  par  des  idte  de  liberty 
wmt  les  oons^uenoes  logiqnes  n*eus- 
sntMrien  moinsqu'embaiTassantes; 
OD  J  appayalt  snr  ies  projets  secr^te^ 
meBt  discut^  h  Erfurt ,  sur  le  partake 
delaTurqoie,  ee  qui  aurait  n^cessit^ 
TaiiBiasion  d*une  armfe  fran^ise  dans 
ks  ^tats  aatridiiens. 

Appoy^  per  les  subsides  de  TAn- 
detanre ,  mais  |nri?te  des  seeours  de 
Ml  Rnssie ,  rAutriGhe  osa  prendre  rini- 
tialiTe;  elle  attaqua  laBayidre,  qui  se 
rait  promptement  en  ^t  de  dmnse ; 
les  fois  de  Saie  et  de  Wurtemberg  r6- 
poodbreat  ^^ement  h  ses  proclama- 
tions par  la  voie  des  armes.  Les  forces 
franyhes  et  allito  qui  oceupaient 
les  proriooes  aliemandes  pr6sentaient 
tm  mecttf  d'enTiron  deux  cent  trente 
quiie  honmies;  trois  autres  corps, 
fbrmaBt  soixante  et  dix  m'ile  homines , 
s^anmcaient  sur  le  T^l.  Les  Aotri- 
dMaa'turent  successit  ement  battns  k 
Tann ,  Abensberg ,  Eckmubi  et  Rati»- 
bonne.  Apfbi  une  campagne  de  trois 
wnines,  ykaat  fiat  oeeupto  par  les 


La  fiosrie  ^tait  Uie  a  19apoi^n  par 
let  demiers  traits ;  d'aiHeurs  il  en- 
tnit  dans  sa  politique  de  voir  la 
FlRaaoe  et  r Antnche  8*idfaibl]r  mutnel- 
lesoent,  sans  prendre  elle-mlme  une 
psfft  actiTe  dans  oette  lotte.  Pour  oon- 
cyier  eeiHe  doable  engence ,  le  cabinet 
de  Ftersbourg  d6ciara  la  guerre  k 
rAotriche ;  mais  le  prince  Cralitzin , 
^i  detait  lisire  une  poissaiite  diver- 
sioaeaGallicie,  sembn  ne  s'approcher 
4a  drfiltns  de  la  gnerre  goe  pour  feire 
eete  de  presence  \  d*aiUeurs  le  corps 
^«rm6e  qa^il  eoramandait  exoMait  k 
pebie  qoinze  nille  faonnMS. 

Cspgidant  Toeeupatioo  de  Tienne 
sTanm  paM  termini  ia  campagne ;  la 
^nelBiie  d'Essling  codta  t ingt  milie 
anbhfs  d  la  Prance;  les  batiiUes  de 
Raab  el  de  Wagram  d^ddirent  rem* 
pmard^Aotridie  a  eouso-irelEunepaiK 


on^reuse.  Vienne  fut  dtoanteMe,  et 
les  pays  oonquis  sor  fAutoicheseTirent 
frappes  provisoirement  d'une  eontri^ 
butiott  de  deux  cent  millions  de  francs. 
«  Par  le  traits  de  Schonbrnnn  (Rabbe) , 
FAutriche  e^a ,  soit  k  Napoleon ,  soit 
k  la  oonfi6ddration  du  Rbin ,  diverses 
villes  d'Allemagne  et  dltalie  avec 
leurs  d^pendances ;  elle  ftit  d^pooill^. , 
en  fi^Tcur  du  duch6  de  VarsoTicY  de 
toote  to  Galiide  ooddentale  et  de  la 
▼ilie  de  Cracorie;  enfin  die  abandonna 
k  la  Russia  un  territoire  dont  lapopo^ 
lation  toit  ^valu^e  a  quatre  cent  mtile 
Ames.  L*empereor  Francois  reoonhut, 
en  outre ,  les  droits  que  Napoleon  ^ar^ 
rogeait  sur  les  monarchies  du  midi  d^ 
TEurope ,  adb^ra  k  son  sjsteme  conti- 
nental ,  et  renon^  k  toutes  les  coo* 
tr^  comprises  sous  le  nom  de  pre- 
▼inces  Illyriennes. »  C6tait  pen  de  oes 
sacrifices;  il  fallait  que  Torgueil  de  la 
maison  d'Autriche  scelldt  par  one  ah 
liance  les  conditions  impos6es  par  le 
vaingueur :  mais  oette  ccndescendanee 
devait  r^parer  tous  les  revers  des  armes 
autricbiennes.  M.  de  Mettemidi  com* 
prit  que  le  beao-p^  de  Napoleon 
itaii  d^sormais  k  rabri  d'une  chute, 
et  qu^il  serait  plus  commode  et  moins 
p<^nlieux  de  oonspirer  en  fiaimiile. 

Reportons  mamtenant  nos  regards 
en  arri^re ,  et  signalons  rapidement  les 
r^ormes  et  les  essais  d'am^Orations 

?ui  se  Sttce6d^nt  dans  rint^rieor  de 
empire  russe,  durant  les  ann6es  IB09 
et  1810.  La  di^e  d*Um^o  r^la  Tadmi- 
nistration  des  provinces  finoises,  aax- 
qudles  Alexandre  concha  lenrs  an- 
ciens  privil^es.  On  ntorpjnisa  la 
commission  charge  de  la  revision  du 
code  rosse;  de  oonveaux  r^glements 
adooeirent  la  condition  des  serfs ;  la 
simpiicit^  du  monarque  rendant  k  pen 
pr^  inutHes  quelqoes  emplois  de  cour, 
un  oukase  declare  que  aor^avant  le 
titre  de  cfaambellan  ne  serait  qu'une 
distinction,  et  ne  pourrait  confi§rer 
aucun  grade  mtlitaire  ni  civil.  Un  aolre 
eukase  ^tablit  que  tout  postulant  d'un 
emploi  civil  serait  temi  de  sobir  un 
examen  acadtoique,  roulant  sur  les 
langoes,  la  iorisprudence,  l*histoire 
et  Ks  matbmatlqaes.  Cependant  le 

6. 


4&2 


L'UWIVERS. 


commerce  souffrait,  et  Tempereur 
Alexandre  se  voyait  contraiot  de  tole- 
rer  quelques  infiractions  aux  prohibi- 
tions imposes  par  le  systeme  continent 
tal.  Le  malaise  financier,  qui  data  it 
du  r^ne  de  Catlierine,  entravait  les 
mesures  les  plus  utiles.  La  soliicitude 
imp^riale  se  porta  iudicieusement  sur 
1  amelioration  des  finances :  un  mani- 
feste ,  sign^  par  ie  comte  Roumiaozof , 
chancelier  de  I'empire ,  annon^ a  que , 
par  I'effet  des  mesures  qui  avaient  ^t^ 
adoptees,  les  revenus  ordiuaires  avaient 
i^U  augment^s  de  plus  de  cent  millions 
de  roubles,  et  que  le  gouvemement 
pouvait  nou  -  seulement  faire  face  a 
toutes  les  d^penses  de  Tann^e ,  sans 
recourir  h  de  nouvelles  taxes,  mais 
mime  reduire  quelques  -  unes  des  an- 
ciennes.  Les  manufactures  nationales 
furent  encourag6es,  et  Ton  frappa  des 
droits  considerables  sur  Timportation 
de  rindustrie  etrang^re.  Les  revenus 
des  mines  s'accrurent;  les  relations 
commerciales  avec  TAsie  prirent  une 
extension  importaifte.  Le  droit  d'acqu^- 
rir  des  pro[)ri6tes  territoriales ,  con- 
formdment  a  foukase  de  1801 ,  avait 
eu  des  r^sultats  tr^s-remarquables. 
Des  terres  d*une  valeur  d'environ  six 
millions  avaient  et6  aoquises  de  cette 
maniere ;  -enfin  le  nombre  des  pajrsans 
devenus  libres  depuis  1808  etait  de 
treize  k  quatorze  mille.  L*instruction 
de  Tempereur  Alexandre  avait  6t^  trop 
soignee  pour  qu'il  negligent  la  prospe- 
rity des  ecoles  publioues ;  il  r^organisa 
les  etablissements  de  ce  genre  d^j^ 
existants,  fonda  plusieurs  gymnases 
et  un  grand  nombre  d^^coles  de  district 
et  paroissiales.  Quoique  la  litt^rature 
russe  ait  fait  de  notables  progres  vers 
cette  epoque ,  il  est  a  rem^rquer  toute- 
fois  que  les  ev^nements  imprimerent 
aux  etudes  une  direction  militaire : 
rien  ne  fut  ^pargn^  pour  former  de 
bons  ofBciers  dans  toutes  les  branches 
du  service. 

Au  milieu  de  ces  ameliorations  et 
das  soins  qu'exigeait  Tattitude  de  I'Eu- 
rope  occidentale,  Alexandre  ne  perdait 
pas  de  vue  retat  de  rOrient  L'inaueDce 
anglaise  dominait  k  Constantinople; 
M.  de.  Latour-Maubourg,  qui  avait 


succede  au  general  Sebastiani ,  essaya 
en  vain  la  menace;  la  Porte,  depuis 
letraite  de  Tilsitt,  savait  quelle  ae 
pouvait  compter  sur  la  France.  Les 
negociateurs  russes  exiseaient  la  ces- 
sion des  provinces  situees  sur  la  rive 
gauche  du  Danube;  le  divan  repoussa 
ces  pretentions  avec  enereie,  et  les 
hostilites  commencdrent.  A  rexception 
de  Giurgevo,  toutes  les  places  rortes 
qu*attaquerent  les  Russes  tombdrent 
en  leur  pouvoir.  Gependant  le  grand 
vizir  attendit  I'ennemi  dans  son  canw, 
et  lui  fit  essuyer  une  perte  de  aix 
mille  hommes;  cet  echec  obligea  le 
prince  Halation  d'evacuer  la  Bulga- 
rie.  La  paix  de  Vienne  semblait  annon- 
cer  une  pacification  prochaine ;  cepen- 
dant ,  apr^s  quelques  negociations ,  La 
guerre  reoommenca  en  1810.  Pajar- 
tcbik  et  Silistrie  (furent  ceder  aux  ef- 
forts des  Russes  qui  march^rent  vers 
le  camp  retranche  de  Schoumla ,  et  le 
forcerent  apr^s  une  resistance  opi- 
nidtre. «  La  flottille  des  Tures  sur  le 
Danube,  battue  en  mime  temps  et 
presque  entierement  detruite,  priva 
les  villes  assie^jees  des  ressouroes  qui 
leur  etaient  indispensables.  Roust- 
chouk,  Giurgevo  succombdreot,  ainsi 
que  toutes  les  places  qui  defendent  la 
rive  droite  du  Danube ,  depuis  Ismail 
jusqu*a  Sistova,  c'est-li-dire  dans  une 
etendue  de  cent  lieues  de  pavs,  en  re- 
montant le  cours  du  fleuve.  II  ne  resta 
aux  Ottomans  que  Widdin  et  Varna, 
places  plus  reguuerement  fortifiees  que 
les  autres.  » 
Le  grand  vizir  fit  demander  une  sus- 

Eension  d*armes  au  general  Kamens- 
01 ;  mais  les  pretentions  des  Russes 
s'eievaient  en  raison  de  leurs  suooes ; 
outre  la  cession  des  principautes  et  de 
la  Ressarabie  turque,  ils  exigeaient 
Tindependance  de  la  Servie.  La  guerre 
continua  en  1811,  mais  toujours  au 
desavantage  des  Turcs,  Geux-ci  tentd- 
rent  un  dernier  effort,  et  ils  etaient 
parvenus  h  rassembler  une  armee  for- 
midable tandis  que  le  congr^s  de  Rou* 
kharest  continuait  ses  conferences. 
Enfin  la  rupture  entre  la  France  et  la 
Russie  vint  changer  la  face  des  afjfoires; 
Le  ministre  russe,  M.  dltalinski,  se 


RUSSI£. 


453 


eontenta  de  demander  oue  le  Prulh 
fSt  d^rmais  la  limite  des  deux  em- 
pires. G^est  dans  ces  circonstances 
praves  qae  fut  oooclue  la  paix  de  Bou- 
ibarest,  dont  nous  rapporterons  les 
dispositions  prindpales. 

D*apr^  Farticle  4 ,  le  Pruth ,  depuis 
Tendroit  oik  tl  entre  en  Moldavie ,  ius- 
qu*k  son  embouchure  dans  le  Danuoe , 
et  de  Hi  ,  la  rive  gauche  de  ce  fleuve 
jusqa'a  Kilia ,  en  descendant  jus^u'ik 
son  embouchure  dans  la  roer  Noire , 
seront  les  limites  des  deux  empires. 

Ainsi  la  Porte  c^ait  h  la  Russie  le 
tiers  de  la  Moldavie,  avec  les  forte- 
resses  de  Khoczim  et  de  Bender ,  et 
toute  la  Bessarabie,  avec  Ismail  et 
Kilja. 

D'apr^  le  mime  article^  la  naviga- 
tion du  Danul)e  est  commune  aux  su* 
jets  de  la  Russie  et  de  la  Turquie.  Les 
lies  de  oe  fleuve  situ^s  entre  les  di- 
vers bras  ou'il  forme  depuis  Ismail 
resteront  desertes. 

Le  reste  de  la  Moldavie  et  de  la  Va- 
lachie  sera  remis  aux  Turcs  dans  T^tat 
ou  oes  ^s  se  trouvent.  Article  6. 
La  frontiere  d'Asie  est  r6lablie  telle 
qu'dle  ^tait  trac6e  avant  la  guerre. 

L'artiele  8  s*oocupe  des  Serviens, 
aux^«A8  la  Porte  accorde  une  amnis- 
tie  avec  la  concession  de  quelques  pri- 
▼ii^es,  dont  rinterpr(6tation  ogvre 
un  vaste  champ  aux  subtilit^  diplo- 
matigues. 

Par  Particle  18 ,  la  Russie  accepte  la 
nidation  de  la  Porte  pour  la  conclu- 
sion de  la  paix  avec  la  Perse,  oQ  les 
hostility  avaient  recommence  h  Tins- 
tigation  de  I'ambassadeur  anglais.  La 
in^nteOigence  entre  la  France  et  la 
Russie  avait  imprim^  une  nouvelle  di- 
rection a  Tactivite  des  ministres  de  Sa 
Majesty  Britannique  k  Constantinople 
et  k  Ispahan.  Mal^r^  toutes  les  res- 
soorces  de  la  Russie,  si  elle  eUt  ii6 
attaqu^  au  midi  et  au  nord ,  tandi3 
que  les  innombrables  legions  de  la 
ooalitton  firan^aise  envahissaient  sur 
trois a>lonnes  ses  provinces  centrales, 
rhiver  mime  avec  toutes  ses  rigueurs 
edt  it6  impuissant  h  sauver  cet  em- 
pire. 
Avant  d*esqutsser  les  ^vdnements 


les  plus  m^morables  de  la  campagne 
de  1812,  ii  est  indispensable  de  dire 
en  pen  de  mots  quelle  ^tait  la  situa- 
tion politique  des  grands  £tats  de 
TEurope. 

L'Angleterre ,  fiddle  k  un  syst^me 
qui  etait  pour  elle  une  question  d'exis- 
tence ,  voyait  avec  satisfaction  les  al- 
lies de  I'empire  francais  se  fatiguer  da 
blocus  continental.  L'Espagne  lui  ser- 
vait  dj3  point  d*appui ;  les  .ressources 
stratlgiques  de  cette  contr^ ,  le  cou- 
rage exalte  de  ses  habitants  balan^aient 
la  fortune  de  Napoleon  en  absorbant 
renergie  de  ses  armees.  L'Autriche 
respirait  a  la  faveur  d'une  alliance  qui 
couvrait  sa  faiblesse;  elle  comptait 
s'en  faire  un  titre  pour  r^parer  quel- 
ques-unes  de  ses  pertes  si  le  sort  des 
armes  restait  favorable  k  Napoleon, 
et  la  sacrifier  aux  int^rlts  de  sa  poli- 
tique dans  le  cas  ou  des  revecs  au- 
raient  frapp^  T^poux  de  Marie-Louise. 

La  Prusse ,  reduite  k  une  arm^e  de 
quarante  mille  hommes,  etait  forc^e 
d*embras8er  la  cause  dont  le  triomphe 
rhumiliait;  cette  puissance  avait  a 
craindre ,  si  la  Russie  prenait  I'offen- 
sive,  de  voir  ses  provinces  envahies 
devenir  le  theatre  d'une  lutte  mena- 
fante ;  son  rdle  d^sormais  consistait  k 
suivre  fatalement  le  parti  du  vain- 
queur.  La  France,  dont  le  motif  avou^ 
etait  Fabaissement  de  TAngleterre ,  ne 
pouvait  arriver  li  ce  r^sultat  sans  s'ar- 
roger  en  Europe  un  pouvoir  dictato- 
rial qni  blessait  les  souverains  dans 
leur  orgueil  et  les  peuples  dans  leurs 
interlts  les  plus  essentiels.  L'incorpo- 
ration  du  Hanovre  au  royaume  de 
Westphalie;  la  cession  de  Francfort 
et  de  son  territoire  au  prinoe-primat 
de  la  confederation  du  Rhin,  et  par 
substitutiolin  Eugene  Beauharnais; 
la  reunion  a  rempire  francais  du  Bra- 
bant  bollandais ,  oe  la  zeiande  et  d'une 
partie  de  la  Gueldre ;  celle  des  pays 
situes  sur  les  cdtes  de  la  mer  du  Nord , 
avec  Bremen  et  Hambourg,  le  duche 
de  Lauenbourg  et  Lubeck,  telles 
furent,dans  leoours  de  Tannee  1810, 
les  acquisitions  que  Napoleon  avait 
jugees  necessaires ,  mais  qui ,  par  leur 
position    exoentrique,    privaient   la 


4^ 


VUniYfiRS. 


Ewam  de  eelte  uoiti  bomostee  qui 
t  sa  force  et  sa  s^curiU.  A  IHivenir. 
rica  n*^t  k  Tabri  d*uu  remaniement 
•u  d'unc  iocorporation  pure  et  simple 
au  territoire  de  la  grande  nation.  iHa- 
pol^OB  Tavait  d^iare  au  »6nat  en 
{ermes  non  aoibigus.  «  Les  arrets  pu- 
blic par  le  oonseiJ  britannique,  en 
1806  et  1807 ,  ont  d^liir^  le  droit  pu- 
blic de  TEurope.  Un  nouvel  ordre  de 
dM)MB  r^it  runivers,  De  nouveilea 
garantiesm'etantdevenuesntoasaires, 
la  r^nioo  des  embouchures  de  VEa- 
caut ,  de  la  Meuse ,  du  Rhin ,  de  I'Ems , 
du  Weser  et  d^  TEJbe  a  Tempire ,  I'^ta- 
hlissement  d*une  navi^^tion  int^rieure 
avec  la  Baltique ,  m'ont  paru  ^tre  les 
premieres  et  les  idus  importantes,  etc. » 

Le  due  d'Olctenbourg ,  beau-fr^re 
d'Alexandre ,  avait  vu  ses  Etats  h^r^- 
ditaires  englobes  dans  les  provinces 
baltiques  recemmeot  incorpor^es  au 
territoire  fran^ais.  L'empereur  de  Rus- 
sie  se  plaignit  d*une  mesure  qui  por- 
tait  attein^  h  ses  relations  amicales 
avec  Napoleoa.  Ges  repr^ntations 
fiirent  vaines ;  et  ce  fut  autour  de  ce 
point  d'uoe  si  faible  importance  que  la 
politique  russe  eut  Tart  de  rattacher 
ses  autres  griefs;  dds  lors  on  put 
pr^voir  une  rupture  procbaine.  Quant 
al'attitudeoue  ^arderent  au  commen* 
cemeot  des  nostiliti^  la  Turquie  et  la 
Suede,  quoiqu*eIle  paraisse  tout  autre 
que  le  prescrivaient  les  int^rdts  g6n^ 
raux  de  oes  deux  nations ,  il  est  lacile 
cependaot  de  $*en  rendre  oompte  en 
examinant  avec  soin  qudles  neoessites 
pour  les  SlM^ois  et  Uis  Turcs  ressor- 
taient  alprs  des  ciroonstances.  La  Tur- 
guie,  menac^e  d'ua  d^membrement 
H^mMiat  par  Napol^n  >  pouvait  aoce- 
l^r  sa  ruine  en  entrant  dans  la  coa- 
lition frao^ise;  cette  lutte,  dws  la- 
j[uelle  elle  restait  neutre,  ^pulserait 
infailUblement  et  la  Russie  et  la  France, 
et  les  mettrait  pour  longtemps  bors 
d*^tat  de  menaoer  ses  fronti^es;  dans 
r^^iblissement  oi)t  eUe  se  trouvait, 
un  delai  de  auelques  anaides  pouvait 
suCQre  poqr  la  determiner  a  accepter 
ks  oonditioiis  modi^ees  de  la  paix  da 
Boukharest. 

Quant  h  la  Su^e ,  on  peut  expli- 


qoer  d'une  mani^re  non  moins  coa- 
cluante  Faltiance  qui  la  rattacha  aux 
interlts  de  la  Russie.  Si  un  pays  de- 
vait  sou£frir  des  rigueurs  du  nlocus 
continental,  certes  c'^taitla  SuMe; 
ses  fers  et  ses  bois  de  construction 
encombraient  sea  maaasins,  et  bientdt 
elle  se  vit  oblige  06  renouer  clan- 
destinement  des  rdations  commer- 
dales  avec  la  Grande-Bretagne.  L'oc* 
oupation  de  la  Pom6ranie  par  l€« 
troupes  fran^aises  donna  bient^t  la 
mesure  des  sacrifices  que  Napoleon 
exigeait  de  ses  alli^.  A  ces  considera- 
tions locales,  il  s'en  joignait  d'autres 
qui,  pour  6tre  personnelles ,  n*ea 
etaient  pas  moins  puissantes :  Berna<> 
dotte ,  elu  prince  royal ,  avait  h  cceor 
de  prouver  aux  SuMois  qu'il  aoceptait 
dans  toute  leur  ^tendue  ses  nouveaux 
devoirs;  et,  comme  il  n'avait  dCi  son 
Section  qu'a  lui-mSme,  il  crut  faire 
an  acte  de  haute  politique  en  abandon- 
nant  le  role  d'ancien  lieutenant  de 
Tempire.  On  lui  a  reproch^  d'avoir 
n^ig^  Toocasion  de  reprendre  la  Fin* 
lande;  mais,  en  Taocep^ntdes  mains 
de  son  ancien  chef,  il  renongait  a  son 
ind^pendance ;  il  n'ignorait  pas  d'ail- 
leurs  que  si ,  plus  tard ,  la  reconcilia- 
tion de  I>{apolwon  et  d* Alexandre  exi- 
geait le  sacrifioedecettemtoe  province, 
celui  qui  la  lui  aurait  donn^  ne  se  se* 
rait  point  fait  scrupule  de  la  reprendre* 
La  Poiogne,  qui  avait  vers^  tant  de 
sang  pour  la  France ,  ne  se  trouvait- 
elle  pas  elle^nagme  dans  une  posiiioQ 
^uivoque?  Quel  autre  motif  que  oelui 
de  ne  pas  s'ali^oer  k  iamais  la  Russie 
avait  emp^e  Napoi^n  de  retablir 
sur  des  bases  soliws  cette  nation  d^ 
vou^  et  oourageuse?  Ce  r^tabliase* 
ment  pouvait  ^re  dans  ses  vues,  maie 
dans  le  eas  seulement  oik  ia  Russie, 
envahieet  priv^  de  sa  capitak,  eOt 
reftjs^  de  traiter  avec  le  vainqueur.  Na- 
pol^a  n*ignorait  pas  qu' Alexandre  ne 
redoutait  rien  tanl  que  de  voir  se  re- 
lever  cette  barritoe  9^  s'toit  tooulte 
sous  les  efiGarts  patients  de  Catherine, 
II  voulait  surtottt  parattre  ea  mesure 
de  consomaier  cet  acte  r6parateur 
pour  arracher  k  Alexandre  les  conces- 
sions les  plus  viti^  du  grand  ays- 


RUSSIE. 


4&6 


ttme.  AlnanAfe,  de  son  eM^  levalt 
te  arm^eB,  oonooitrait  des  foroes 
imposantes  dans  les  ancieDoes  pro- 
viBoes  polonaises;  ct,  rassur^  aux 
deox  eMtxHnitia  de  son  empire  par  la 
paix  de  Boukharest  et  par  lea  disposi- 
tions de  Bernadotte,  it  osa  faire  tits 
a  Forage  *  comptant  bien  que  la  Prusse 
et  rAotriche  n'agiraient  contre  lui 
qu'avec  moliesse  et  cireonspection. 

Oyeodant  toute  TEarope  s'^ran* 
lait  a  la  yoix  de  Napoleon ;  les  deux 

Erincipes  qui  remuaient  le  monde  al* 
lient  se  trouver  en  prtence :  la  cause 
des  peoples,  repr^ent^e  par  le  pre* 
mier  capitaine  du  siecle,  et  oelie  des 
rois,  soutenne  et  soudoy^  par  l^An* 
cletenre;  mais  les  roles  n'^taient  plus 
les  mimes;  par  le  jeu  des  ciroons- 
tances  et  rambition  d'an  sojdat  par- 
vena,  la  France  n'etait  plus  qu'uae 
monarcbie  oonqulrante ;  elle  ne  pou* 
vait  nromettre  aux  Itraogers  des  droits 
qu*cfle  avait  perdos  eUe-mlme;  la 

gloire  lui  restait  encore;  on  la  com- 
attit  avee  ses  anciennes  armes,  et 
c'est  en  invoquant  le  saint  nom  de  la 
liberty  qne  les  princes  parvinrent  a 
rafifermir  leurs  couronnes. 

Lea  dernieres  esplrances  d'arran- 
gement  veoaieot  de  s'lvanonir ;  la 
mission  de  M.  de  Nesselrode,  qu*on 
attendait  de  Saint-Pltersbour^,  avait 
iU  rlfoquie.  La  Russia  n'avait  pu  ob- 
tenir  de  Napollon  une  declaration  for* 
melle  que  la  Polo(;ne  ne  serait  jamais 
retabtie ;  elle  avait  ^galement  echoul 
dans  sa  demande  que  Ton  indemnisUl 
le  due  d*01denbourg  par  la  cession  de 
Dantzick  et  de  son  territoire.  Dej^la 
Prusse,  alarmle  sor  Tissue  prol)able 
de  cette  ^erre,  demandait  k  oonclure 
on  traite  offensif  et  difensif  avec  Na- 
pollon;  le  lendemain  mime  de  la  si* 
gnature  de  ce  IraitI,  aui  augmentait 
de  vinfft  miUe  bommes  rarmee  d' inva- 
sion ,  Fempereur  cbaijgea  le  colonel 
TcfaernlcbcSf  de  porter  a  Alexandre  ses 
dernieres  propositions.  L'agent  russe 
parUt  le  36  tevrier  1812,  emportant 
un  It^  ditailll  de  F^ectif  de  l^armle, 
quil  s'ltait  procurl  en  corrompant  un 
ODDunis  do  minist^e  de  la  guerre, 
Gflpeodant  Davoust  se  porta,  de 


Hambourgf  sur  la  ligne  de  FOder. 
L'Autriche,  craignant  qu*une  plus 
longue  hesitation  ne  pardt  suspecte, 
eondut  avec  Fempereur  If  apollon  un 
traiti  d'alliance  defensive  et  offensive, 

3  m  donnait  k  la  coalition  un  effeclif 
e  trente  miUe  bommes.  Cinq  cent 
mille  Francis  et  allils  sillonnaient 
FEurope  dans  tons  les  sens  pour  aller 
se  rlunir  sur  ks  bords  de  la  Yistule. 
lis  formaient  treize  corps  dont  les 
deux  dnquitoes  environ  se  compo* 
saient  de  Francis.  Cette  proportion 
n'offrait  rien  de  rassurant ;  le  treizieme 
corps ,  qui  Hait  formi  des  trente  mille 
Autrichiens  promts  par  le  traiti  du 
14  mars,  If  ait  tout  entier  sous  les 
ordres  dii  prince  de  Scbwartzemberg. 
D'aprls  le  timoignage  du  ginlral 
Oourgaud ,  les  cadres  de  Farmie  Itaient 
km  d*ltre  au  complet,  puisqu'au  pas- 
sage du  Nilmen ,  elle  comptait  envi- 
ron quatre  cent  mille  bommes,  et 
que,  sur  ce  nombre,  trois  cent  ving^ 
cinq  mille  neuf  cents  seolement  Itaient 
inrlsents  sous  les  armes ;  savoir  :  oent 
cinquante  -  cinq  mille  quatre  cents 
Francis ,  et  cent  soixante  et  dix  mille 
cinq  cents  allies.  U  y  avait  environ 
milie  boucbes  a  feu. 

Le  17  avril ,  Napollon  fit  k  FAn- 
ffleterre  quelgues  ouvertures  conci- 
fiatrices  qui  demeurlrent  sans  ^et; 
le  cabinet  de  Saint -James  voulait 
gu'avant  de  traiter,  Ferdinand  VII 
iQt  replaci  sur  le  trine  d^Espagne; 
ce  n'ltait  pas  lorsque  Fempereur  avait 
tant  de  raisons  de  compter  sur  un 
succ^  difinitif  qu*il  oouvait  se  rl- 
soudre  a  une  pareiUe  concession. 
Quelques  iours  apres ,  le  prince  Kou- 
rakin ,  amnassadeur  de  Russie  k  Paris , 
signifia  au  cabinet  des  Tuileries  la  rl- 
ponse  d' Alexandre  aux  propositions 
que  lui  avait  apportles  Tcbernicbef : 
elle  portait  qu*avant  toute  discussion 
sur  les  interlts  en  Iltige ,  Farmie  fran- 
caise  Ivacuerait  immldiatement  la 
Prusse  entiire,  les  places  de  FOder  et 
la  Pom^anie  suldoise ;  qu*elle  ne  con- 
serverait  de  toutes  ses  positions  dans 
le  Nord  que  la  ville  de  Dantzick,  dont 
la  garnison  devait  Itre  riduite;  qu'a- 
lors  seulement  Alexandre  consentirait 


45G 


L'UNIVfcAS. 


h  traSiej^  sur  les  bases  snivantes :  la 
Russie  continuerait  a  exclure  les  An- 
tflais  de  ses  ports ,  mais  elle  y  admet- 
trait  Ic;^  neutres ;  des  licences  seraient 
accord^  aux  bdtiments  nationaux 
conime  en  France ;  un  nouveau  tarif 
des  douanes  favoriserait  le  commerce 
fran^is ,  et  Ton  r^glerait  de  cr^  h  gr^ 
les  indemnity  dues  au  due  d'Olden- 
bourg ,  en  ^change  de  ses  £tats  enva- 
his  (Histoire  de  la  campagne  de  Rus- 
sie,  par  M.  Mortonval).  Cette  r6ponse 
annon^it  clairement  que  le  cabinet 
de  Saint-Petersbourg  agissait  desor* 
mais  sous  Unfluence  de  TAngleterre. 
Tl  ^tait  ais^  de  voir  que,  de  (lart  et 
d'autre,  on  jugeait  la  guerre  inevitable; 
cependant  Lauriston ,  ambassadeur  de 
France,  6tait  toujours  k  P^tersbourg; 
et  Kourakin ,  qui  pr^enta ,  le  30  avrfl , 
son  ultimatum ,  ne  auitta  Paris  que  le 
20  septembre.  On  cnercfaait  h  pagner 
du  temps  pour  aehever  Forganisation 
de  ces  armies  dont  la  lutt-e  allait  dtei- 
der  du  sort  de  l^urope. 

Le  9  mai ,  Napoleon  partit  de  Saint- 
Cloud  et  arriva  a  Dresde  le  16  du 
m^me  mois.  Ce  fut  15  qu*au  milieu  des 
fi§tes  et  des  r6jouissances ,  il  re^ut  des 
souverains  alli^  les  t^moignages  du 
d^vouement  le  plus  absolu.  Tous  ces 
hommages  adresses  a  la  puissance 
n*etaient  que  I'expression  de  la  crainte ; 
quand  I'hiver  eut  frapp^  cette  arm^e 
nagu^re  si  brillante ,  les  haines  se  ma- 
nifesterent  avec  d'autant  plus  d'ener- 
fie  au*elles  avaient  €U  comprim^s 
plus  longtemps. 

D6\h  la  grande  armee  d^ployait  ses 
masses  imposantes  depuisDantzick  jus- 
qu'h  Lublin ,  tandis  que  les  Autrichiens, 
rormant  I  extreme  droite  de  cette  ligne 
d'op^atioQ ,  occupaient  Lemberg. 

Alexandre,  sorti  de  sa  capitate  le 
22  avril ,  s'etait  rendu  a  Wilna.  C'est 
\k  quMI  recut  le  comte  de  Narbonne , 
dont  la  m'jssion  eclioua  devant  I'in^- 
branlable  volont6  du  monarque  russe , 

3ui  refusait  toute  esp^  d*accommo- 
ement  avant  que  Farmee  fran^aise 
e&t  retrograde  jus^u'au  Rhin. 

Napol&n  jugea  pecessaire  de  don- 
ner  quelques  esperances  aux  Polonais ; 
n  s*agissait  d*impriiiierune  direction 


energique  a  Tesprit  national;  M.  de 
Pradt,  archeveque  de  Malines,  fut 
charge  de  cette  delicate  mission;  ie 
patriotisme  etait  loin  d'etre  eteint  dans 
ce  pays  de  liberte;  mais  oomme  les 

Sromesses  de  Napoleon  etaient  subor- 
onnees  aux  evenements,  la  Pologne 
ne  put  y  ajouter  une  confiance  entiere ; 
en  un  mot ,  si  Tempereur  des  Francis 
croyait  qn'il  lui  suffirait  d'une  cam- 
pagne pour  imposer  la  paix  k  son  rival , 
il  en  fit  trop ;  si ,  au  contraire ,  c*etait 
Tabaissement  de  la  puissance  russe 
^uMl  meditait ,  il  eut  tort  de  s'arreter 
a  des  demi-mesures. 

Napoleon  venait  de  quitter  Dresde 
lorsqu'il  requt  un  message  de  Rema- 
dotte.  Le  prince  royal ,  comme  pour 
prouver  aux  Suedois  qu'il  traiterait  de- 
sormais  avec  I'emjpereur  de  puissance  a 
puissance,  exigeait,  pour  prix  de  sa  co- 
operation active,  la  Norwege  et  piu- 
sieurs  millions.  Le  soldat-empereor 
re|eta  avec  hauteur  lesoffres  du  soldat- 
roi ;  et,  presque  en  meme  temps,  ie  28 
mai ,  la  paix  de  Boukharest  fut  signee. 
Ainsi  les  deux  appuis  qui,  dans  les 
previsions  ordinaires,  devaient  fixer 
aux  deux  extremites  de  TEurope  sa 
ligne  d'operations ,  manquaient  a  la 
fois  k  Napoleon. 

«  Au  moment  oil  Alexandre  quitta 
sa  capitate,  les  forces  russes,  rassem- 
biees  sur  la  frontiere  occidentale  de 
Tempire ,  etaient  divisees  en  deux  ar- 
mees :  Tune,  dite  premiere  de  TOuest, 
sous  lesordres  de  Barclay  de  Tolly,  et 
forte  de  cent  cinquante  mille  hommes, 
avait  son  quartier  general  a  Wilna; 
Tautre ,  nommee  la  seconde  de  TOuest , 
ne  comptait  que  soixante  et  dix  mille 
oombattants;  le  prince  Bagration  la 
commandait;  elle  occupait  Jitomir. 
Le  rassemblement  des  Autrichiens  en 
Gallicie  determina  bientdt  ce  general 
5  se  rapprocher  de  la  ligne  du  Bug ;  il 
re^ut  I'ordre  de  porter  son  quartier 
general  k  Lutzk. 

«  Les  six  corps  de  la  premiere  ar- 
mee de  rOuest  s'etendaient  derriere 
le  Niemen ,  et  defendaient  cette  ligne 
depuis  les  environs  de  Tilsitt  jusqu*a 
Grodno.  Ceux  de  la  seconde,  opposes 
aux  frontieres  d'Autriche  et  a  la  partis 


RUSSIE. 


457 


aMUoittle  da  duch^  de  Varsovie, 
ohKrraieDt  le  oours  du  Bug.  Entre 
ees  deux  ann^,  Platof,  a?ec  huit 
mille  Gosairaes  r^guliers,  avait  pris 
positioa  a  Bialjrstok;  en  arrive,  k 
plusdequab^-vingts  lieues ,  unearm^ 
de  reserve  se  formait  sur  le  Prypet. 

«A  Textrtoe  droite  des  Russes, 
aux  bords  de  la  Baltique ,  la  garnison 
de  Riga ,  cfaarp^  de  convrir  une  des 
routes  de  Petersbourg,  s'^levait  k 
treote-cinq  mille  hommes.  Ua  camp, 
fortement  retrancb^,  dtfendait  de  ce 
o6t^  le  oours  de  la  Dvina  k  Drissa ,  et 
ofifrait  an  point  de  retraite  k  Tarm^e 
de  Barclay  de  Tolly.  On  construisit 
aofist  one  tfte  de  pont  tres-forte  k 
Bonsaof ,  sur  la  Berezina ,  afin  de  gar- 
der  le  principal  passage  de  cette  ri> 
vite,  aur  la  route  de  Moscou,  par 
Minsk  etSmolensk.  Pendantqueoestra- 
faux  8*aGfaeTaient,  I'empereur  Alexan- 
dre faisait  toblir  d^immenses  maga« 
sins  et  de  nombreux  pares  d*artiUerie 
derriere  sa  premiere  ligne  de  d^ense; 
on  y  forma,  en  outre,  de  nouvelles 
diraions ,  ainsi  oue  des  d^pdts  d'infan* 
terie  et  de  cavalerie  qui  devalent  ali* 
menter  les  corps  en  activity  (M.  Mor- 
tottval). » 

Hapoleon  partaeea  ses  forces  en 
trois  corps  drarmee.  La  premiere  de 
ces  dhrisions ,  compost  d^environ  cent 
soixante  mille  bommes ,  devait  surveil- 
JfiT  la  premiere  arm^  de  I'Ouest ,  et 
la  cooper  au  milieu  .de  sa  ligne ;  tan- 
dis  qae  Napol6on  faisait  face  a  Barclay 
de  ToUy,  le  second  corps  alli^,  sous 
la  ordres  de  J^rdme,  derait  s'avancer 
eootre  Bagration,  c'est-Mire  sur  la 
^udie  des  Russes  et  k  la  droite  de 
rempereur. 

Le  troisi^mecorpks,  sous  les  ordresdu 
prince  Eugene,  avait  mission  de  peo^- 
trer  entre  les  deux  arm^  russes,  |>our 
les  empdcher  d'op^rer  leur  jonction. 
Sdivartzemberg,  avec  ses  Autrichiens, 
derait  appuyer  les  mouvements  du  rot 
de  Westmialie  a  Textr^me  droite ;  et 
Macdonald,  qui  commandait  trente 
mille  hommes  de  troupes  prussiennes 
et  fraofaises,  devait  se  porter  sur 
Rjga^  mena^aot  la  Courlande  et  la  Li- 
ronii  daps  la  direction  de  PMerabourg. 


Bagration  re^ut  Tordre  de  quitter 
sa  position  et  de  se  rapprocher  de  la 
premiere  arm^ ,  pour  couvrir  le  pays 
entre  Proujani  et  Wilkowisk ,  c'est-a- 
dire  Tespaoe  que  laissent  k  d^uvert 
le  Bug  et  le  Pli^men.  L'arm^  de  re- 
serve, command6e  par  Tormassof, 
remola^a  celle  de  Bagration.  On  a  re- 
procn^  aux  Russes  de  ne  pas  avoir 
concentre  leurs  forces  pour  lutter 
avec  moins  de  desavantage  centre  la 
masse  de  troupes  que  Napol^n  |)ortait 
vers  le  bas  P^i^men ;  c'edt  6t6  faire  de- 
pendre  d*une  seule  bataille  le  succ^ 
de  la  campagne  et  les  destinies  de 
Tempire. 

Napol^n  passa  quelque  temps  k 
Kcenigsberg;  de  la  il  se  porta  en 
avant  t  et  passa  la  revue  des  corps  qui 
composaient  la  grande  division  cen- 
trale.  A  Gumbinem,  il  lui  parvint  une 
d^che  de  Lauriston,  dans  laquelle  cet 
ambassadeur  Tinformait  qu'Alexandre 
avait  refuse  de  le  recevoir  k  Wilna. 
La  rupture  toit  desormais  conisom- 
m^ ;  Napol^n ,  k  deux  mardies  du 
Ni^men,  proclama  le  manifeste  qui 
d^larait  la  guerre  k  la  Russie. 

Les  Russes  avaient-ils  concu  d'a- 
vance  le  projet  d^attirer  I'enneini  dans 
le  coeur  de  1  empire ,  pour  le  barceler 
jusqu'^  rhiver,  et  le  mettreaux  prises 
avec  la  faim  et  les  rigueurs  de  la  sai* 
son  et  du  climat?  Rien  n'est  moins 

{>robable ;  leurs  premiers  mouvements , 
es  magasins  quMls  ^tablirent  a  grands 
frais  sur  la  frontiere ,  la  crainte  qu*ils 
devaient  avoir  que  Napol^n  ne  reta- 
bllt  s^rieusement  la  Pologne,  tout 
semble  indiquer  Tintention  de  d^fendre 
la  ligne  du  r^i^en,  et  m^me  de  faire 
irruption  dans  la  Gallicie  et  le  grand- 
duchede  Varsovie ;  on  assure  mdmeque 
Tchitchagof  avait  propes^  de  faire 
une  diversion  en  Italic ,  ou  il  aurait 
p^n^trd  par  rillyrie ,  apres  avoir  tra- 
verse la  Servie  et  suivi  la  vallee  du 
Danube.  II  est  bien  plus  rationnel  d'ad- 
mettre  que  les  Russes ,  inf^rieurs  en 
nombre  et  en  organisation  militaire, 
r^lalent  leurs  operations  sur  les  chan- 
ces qui  se  prtontaient :  ceou'on  peut 
regarder  comme  certain ,  c  est  ^u'ils 
s'attendaient  k  voir  les  deux  capita|e;s 


4bS 


L'UniVERS 


envahies ,  puiique  les  richesiMi  du  pa- 
lais  de  TErmitage  allaient  toe  traoa* 
port^  h  Arkbangei. 

Le  35  juJD,  Kowno  ^tait  occupy, 
file  passage  du  Ni^men  effectu^;  le 
V%  Kapoleon  se  porta  sur  Wilna, 
eaperaot  que  Barclay  de  Tolly  lui  liTre- 
rait  bataille;  inais  ce  g^n^rai  inoendia 
aes  ma^asina,  rompit  le  pont  jet^  sur 
la  Wiiia ,  0t  se  replia  a  inarches  for- 
c6es  vers  le  Nord ,  dans  la  directioii 
du  camp  retraocbe  de  Drissa.  Le  28 , 
Tempereur  entra  h  Wilna;  deux  ponts 
furent  construits  immWatement ,  et 
Murat,  k  la  t^te  de  la  Gavalerie,  se 
mit  h  la  poursuite  de  Barclay  de 
Tolly. 

Le  prince  Eu^tee  ne  passa  le  Ni6* 
men  aue  le  29 ;  dans  les  premiers  jours 
de  iuulet,  il  vint  prendre  position  ^ 
queloues  lieuea  au  sud  de  Wilna ,  pour 
einpecher  la  seoondc  arm^  de  se  rto- 
nir  a  la  premiere. 

Gependant  Bagration^  press^  par  le 
roi  de  Westphalie ,  se  retira  sur  Novo* 

Srodek.  II  se  porta  ensuitea  Mikolaef , 
ans  le  but  de  gagner  le  camp  de 
Drissa ,  en  passant  aevant  le  front  de 
Tarm^e  firan^aise.  «  Les  Gosaoues  de 
Platof  lui  doimerent  avis  quils  ve- 
aaient  de  se  heurter  contre  la  cava- 
lerie  de  Grouchy  et  contre  les  avant* 
postes  de  Davoust...  Alors  Bagration 
op^ra  sa  retraite  vers  Test,  en  mar- 
cnant  k  Bobrysk  sur  la  B^r^ina. 

«  Tout  avait  done  r^ssi  k  la  droite 
de  Napoleon ,  pendant  gue  la  seconde 
armte  russe  fuyait,  laissant  le  corps 
de  Dokhtourof  derri^  elle,  cem6  et 
oompromis;  les  Autrkhiens ,  comman- 
ds par  Schwartzemberg ,  ayant  tra- 
verse le  Bug  k  Dro^iczin ,  s'^taient 
avancS  jusqu'^  Proujani ;  ils  coupaient 
ahisl,  desdeux  autresarmto  ennemies, 
oelle  de  la  rServe  sous  les  ordres  de 
Tormassof. 

«  A  la  gaudie  des  Pran^ais ,  le  sucoes 
n'Mait  pas  moins  eomplet;  le  jour 
mtoe  OT  Tempereur  passait  le  Ni^ 
noen  k  Kovno,  Macaonald  le  tra- 
versait  k  Titeitt;  et,  se  portant  h 
Rosaitea  sur  la  route  de  Riga ,  par  Mit- 
tau,  H  d^borda  en  quelques  marches 
Fextrtee  droite  des  Russes  ( M.  Mor- 


tODval). «  OadiDot,aprteqoelqiiflsafift> 
tages  remportes  sur  Wlttp^anstBiD , 
s*empara  de  Wilkomir,  dont  les  Russes 
n'eurent  pas  le  teams  de  dtouire  les 
matnsina;  Ney,  detach^  sur  le  flaac 
de  Bardav  de  Tolly,  que  menafait  le 
roi  de  Naples ,  inralysait  ainsi  les 
mouveroents  de  la  premik«  arm^  de 
rOuest. 

Les  c^toux  de  I'empire  qiii  ont 
6crit  rnistoire  de  oette  memorable 
campagne  ont  presque  tons  regard^ 
oes  premieres  operations  comme  sa- 
vamment  conques  et  habilement  exe- 
cute;  babitote  k  des  guerres  fiiites 
dans  des  pays  de  ressourees,  et  qui  se 
terminaient  par  une  grande  bataille 
ou  par  la  prise  d'une  capitale ,  ils  ont 
juff^  que  Napolten  avait  fait  tout  ce 
qiron  pouvait  attendre  d*un  grand 
tacticien,eD  isolant  les  oorps  ennemis 

2ui  9  en  se  retirant  dans  des  directions 
ivergentes ,  se  trouvaient  de  plus  en 
5Ius&ns  I'impossibilitedes'entr'aider. 
lais  on  peut  leur  objeeler  qne,  sur 
un  ^iquier  anssi  vaste,  les  chances 
de  la  guerre  ^lent  en  fisveur  de  I'ar- 
m6e  qui  se  retirait  en  d^truisant  der- 
ri^  elie  les  subsistances ,  et  en  atti- 
rant  Tennemi  dans  des  routes  k  peine 
trac^es ,  que  les  ptuies  devalent  rendre 
impraticwies.  Ce  systeme,  que  les 
Russes  n'avaient  pas'  adont^  d  abord , 
s'est  prSente  tout  natureueroent,  pr6- 
cis^ment  paroe  que  les  combinaisons 
strat^ques  de  Napolton  ne  leur  per- 
mettaient  pas  d*engager  le  combat 
avec  tontes  leurs  forces.  Leur  eavale- 
rie  infatigaUe  se  prfitait  d'allleurs  mer- 
veilleusement  k  une  retraite  dtfensive; 
et ,  de  plus ,  en  d^vastant  quelques  pro- 
vinces ,  ils  inspiraient  au  people ,  que 
son  Ignorance  disposaH  au  fsnatisme , 
one  luiine  profonae  qui  s*est  manifesto 
constainment,  non-seulement  lors  de 
rinvasion,  mais  encore  k  T^poque  la 
plus  d^sastreusede  la  retraite.  Au  reste, 
on  ne  peut  afOrmer  que  la  retraite ,  a 
tout  prix  et  k  tout  tenement ,  ait  M 
adopife  par  les  Rosses  oomme  leur 
seul  espoir  de  saint;  leors  moove- 
ments  etaient  une  suite  de  titonne- 
ments,  et  leurs  efforts  se  bomaient 
presque  toujoors  k  paralyser  les  mou« 


•  *•  ft 

■  •  •• 

•  •  •  • 


•  •  •  • 


^«  •• 


•  ;• 


tombU  de  I'ansfliBi.  Le  g^ie  mili-     marche  du  pari* .     „ 

tiire  do  Hqxriton  ctpUijae  cette  cir-  d'autre  rteultat  que  ndui  de  prouTcr 
eoupectioD;  et ,  en  effet,  c'etait  quelesortdesaroDcsdcdderaJtsauldB 
beauGOup  gagner  ouo  it  aeutr^iser  cette  grande  querelle. 
\m  coDca^oDS  dun  capjtaiDe  qui  Cependant  le  haaard,  ou  plutdt  la 
anit  tant  d«  foi*  Taincu  l^urope.  vigilance  des  gto6raux  russei,  tromin 
L'eatpereuT  se  trouvait  k  Wiina ,  et  let  pr^vUions  de  Mapoltou  Doktouraf 
lUji  tn  troupes  manquaient  du  ntoM-  passa  devant  le  front  de  I'anDfe  fran- 
WTB,  lee  convoia  nayant  pu  miivre  caige.et,  BrAce^cettonuiXEUTre  au- 
la marcbe  nfide  de  Tarmie  :  lea  sol-  aadeuse.  au  succ^  de  laquelle  il  dut 
diU  enaiait  dans  les  villaget  pour  s'y  aacriBer  sei  iquipa^  et  une  partie  de 
proeuMC  dw  vivres;  sat  la  &n  de  BODarriere-garde,  il  rejoiniit  Barclajr 
juia,laterop£rature,debnUantequ'elle  de  Tolly  aiu  environa  ae  Swentziani. 
Aait,d«TiDtftoitlei  et,  pendant  trois  Bagration,  non  moins  beureui,  et 
joura ,  une  plnie  aboadante  et  glaciaie  poursuivi  mollemeat  par  Jer6nie,  ga- 
ro!ii{']!  ~  .  '  '  .  "  les  com*  gnadBTitesieleacolonDesdeDavoust, 
niuriK  iticablei.  et  s'ouTrit  le  chemia  de  Sntoleosk. 
Les  ni.J.oii.".  -.r  <K  ..  r. .'  li ,  les  che-  Cette  roarcbe  Labile  d^dadu  sort  de 
raui,  aourris  de  seigles  I'uriireTerts,  la  campa^ne. 
mouraieot  par  miUiers.  li  t.iilut  aban-  Les  dix-huit  jours  que  I'emperaur 
danner  cent  pieces  de  conoti  et  cinq  pasia  a  Wilna,  pour  r^tablir  I'organU 
cents  caiaions.  Pres  do  utate  mille  aation  des  corps  et  mettre  de  I'ordra 
tralnanlserraieatsurl.i  rouiequ'avait  dam  toutes  les  parties  du  serTiceou- 
suiTierars)6edeK.owno;i  Wilna.  Lea  t^riel,  laiss^rent  a  I'ennemi  le  tempa 
approviskwneitieDts,  vt'iius  parleNi^  de  se  rallier  et  de  se  reconnaltre.  Det 
men  e(  Ja  Wilia,  raineneri'il  bient^t  juges  sevires  ont  considere  ce  retard 
rabendance;  des  servici^s  lit  toulees-  cOQUue  use  grande  Coute;  d'autres, 
peoc forent  oi^nises. La  Mile,  trans-  tout  en  lui  attribuant  une  influence 
lonoia  M  BH  vaste  entrejio! .  fut  tniie  que  des  6v^ements  impr^vui  rendi- 
a  rabri^Vncoupde  niuii^ ;  i:t  I'enipe-  rent  dteisive.  I'ont  regard^  comme 
renr  dmiaa  tin  gouveriii.-i)irnt  provi-  n^cessit^  per  les  circonitances. 
soirc  dar^ministralioij  l:< n^rale  de  Quoi  qu'ou  en  oit  dit,  la  situation 
iaLithawit.Lapopulatioji  I'OloaaJse,  deTempereuri  Wilna,  aprte  lajooc- 
appeMe  au  arniee,  foumit  six  re^i-  tiondes  corpeeaoemis.^taitd^jitr^ 
nutotid'ia&nterieetciDqiliiavalerie;  critique.  Les  fiitiguea  et  les  privations 
I'elitc  de  la  noblesse  s'utfnt  k  aervir  avaieat  d^cimj  son  aim^  k  peine 
uuprea  dt  JNapoleon  ronime  garde  entrfeaurleterriloirenuse:  lasaisoD 
■d'boaiwur.  Alexandre ,  (lari^^  I'intention  lui  avait  oppose  des  obatades  sur  les- 
de  soader  lesprojctsUK  ^^i|><ileon,  d^  quels  il  n'arait  pes  cooipt^,  et<[uipou- 
p&ha  vprs  III)  k  Ei^ner.^l  l>  ilachef ;  le  vaient  se  reproduire  avee  plus  de  dan- 
iDotit  o^luiiMtile  iIl:  :>d  mission  etait  ser  loraqu'il  aurait  laisse  ses  troupes 
d'offrit  une  au^Kinsion  d'hoetilitte ,  oaos  un  pays  divast^.  S'il  eiiuyait  un 
aooc  ta  eoodition  que  rarmee  fran-  revers,  I  Autiiche  et  la  Prusae,  (}u'jl 
^aUe  rMr«graderait  juaqu'au  Ni^ieii.  laiasait  derriere  lui,  pouvaient  tout  k 
S),eeanMomradit,reflipereurde  coup  rompre  une  afliance  on^reuie, 
ftoaaie avait votdusenfeaKDtgagBerdu  rt  leun  troupes,  jusqu'ators  conte- 
teniDS,  ain  de  d^gaser  les  Cosoquei  nues,  devenues  ennemies  d'auxiliaires 
'latofetleaprpsaeBegratioa,  ses  qu'ellea   Maient,    d^niisaient    toute 

__,.!___ .  1^1  _. jj  "eeonoraie  des  combinaisona  ^rat^ 

liques.  Le  retabliasement  int^al  de 

a  PologDe  se  pr^aentait  comme  an 

"Amdetwre.  Napoltefl  ne  puissant  sppui;  mats  Aait-ce  k  I'ins- 

e^tir  ee  que  lui  ioaposait  tant  oil  ses  allite  oombattaieM  aous  ka 

eB  pleinc  r«traite,  et  la  d^  drapeaui  de  renperenr,  qn'il  ^tait 


dePIatoietleaprpsdeBegratioa,  ses  qu 

pn^otitiona  cwseat  &4  ptua  mod^  reeononne  des  combinaisona  ^rat^ 

rces,etiJB*cdt  pas  bit  dtoixde  Bala-  aiques.  Le  retabliasement  int^al  de 

dMf ,  sonna  par  s«a  divouetnent  auz  u  Pologne  se  pr^aentait  comme  an 

iatMIs  de  I'Amdetwre.  Napoltefl  ne  puissant  sppui;  mats  Aait-ce  k  I'ins- 


460 


L'UNIVERS. 


pradeot  de  morceler  leur  territoire? 
line  faute  qui  a  ^  remarquee  par  ceux 
qui  ont  ^tudie  T^tat  de  la  Pologne,  et 
qui  6chappa  au  g^nie  de  Napoi^Q, 
c'est  de  n  avoir  pas  tir^  parti  des  juifs, 

3ul  auraient  pu  rendre  aux  FraoQais 
e  si  crands  services  pour  tout  ce  qui 
regardait  le  transport  du  materiel. 

ReportODS  maiutenant  nos  regards 
sur  ce  qui  se  passait  au  caini>  des 
Russes,  et  empruntons  le  r^cit  de 
M.  Mortonval ,  qui  r^ume  avec  luci- 
dity les  meilleures  relations  de  cette 
memorable  ^poque. 

«  Barclay,  dej^  rejoint  par  leborps 
de  Dokhtourof ,  ^tait  reste  jusqu'au  Z 
juillet  a  Swentziani;  il  se  retira  sur  la 
Dwina,  dans  la  inline  direction  qu'a- 
vait  suivie  Wittgenstein.  Le  roi  de  Na- 

8 les,  soutenu  h  droite  par  le  marechal 
fey,  et  a  eauche  par  Oudinot ,  suivait 
pas  h  pas  les  Russes  avec  deux  corps 
de  cavaierie  de  reserve  et  trois  divi- 
sions du  corps  de  Davoust;  il  eut 
d'abord  avec  Parri^re-garde  ennemie 
quelques  engagemenjts  de  peu  d'impor- 
tance.  Le  5,  a  Widzy,  une  action  plus 
longue  et  plus  disput^e,  dans  lagu^lle 
la  superiority  de  notre  artillerie  tui 
donna  Tavantage,  deqida  les  Russes 
a  precipiter  leur  mouvement  vers 
Drouina,  ou  ils  pass^rent  ie  fleuve;  et 
le  10,  arrive  devant  le  camp  retrancb^ 
de  Drissa,  Tarm^e  de  Barclay  s*y  en- 
ferma  tout  enti^re,  k  Texception  du 
corps  de  Wittgenstein ,  destine  h  ren- 
forcer  la  garnison  de  Dunabourg,  ou 
il  entra  le  13  juillet. 

a  Le  roi  de  Naples  s*arr^  aussit6t 
k  Opsa ,  et  rappela  pr^s  de  lui  Oudinot , 
qui  avait  suivi  les  naouvements  de 
Wittgenstein;  11  r^unit  ^alement  au- 
tour  de  son  quartier  general  le  corps 
de  Ney,  et  la  cavaierie  des  gen6raux 
Montm*un  et  Nansout^;  observant  Fen- 
nemi  dans  cette  position,  il  y  attendit 
les  ordres  de  Tempereur. 

«Alor8  seulement  Napol^n  put 
opanattre  Teffet  de  ses  premieres  ma- 
noeuvres, et  former  un  nouveau  plan 
d'op^ations  d*apr^  leur  r^ltat  g^- 
ndral :  k  sa  droite,  Davoust  se  portait 
sur  Mobilef,  ou  il  devait  pr^ceder 
9agration;  quant  k  J^rdme,  en  rece- 


vant  la  decision  de  son  Mre  qui  \e 
pla^ait  sous  les  ofdres  du  mar6chal,  il 
ne  prit  conseil  que  de  son  orgueil 
bless^ ,  et  quitta  sur-le-champParmee. . . 
L'empereur  d^tacha  les  Saxons  sous 
les  ordres  deReynier,  et  les  fit  r^trogra- 
derpour  renforcer,  k  Slonim ,  le  corps 
de  Schwartzemberg  oppose  a  Tarm^e  de 
Tormassof.  Junot  remplaca  le  roi  de 
Westphalie  dans  le  reste  ae  son  oom- 
mandement;  mais  il  se  trouvait  alors 
trop  isol6  de  Davoust  pour  le  seconder 
efficacement. 

a  Rien  ne  retenait  plus  d^rmais 
Napol6on  k  Wilna,  qui  avait  cess6 
d'etre  le  centre  des  manoeuvres  de  son 
arm^.  Le  but  de  Barclay,  en  occupant 
le  camp  retranch6  de  Drissa ,  semblait 
Stre  de  couvrir  P^tersbourg;  mais  sa  ^ 
manoeuvre  laissait  libres  toutes  les 
routes  de  Moscou,  et  rendait  impos- 
sible sa  lonction  avec  la  deuxitoe  ar- 
m6e.  L'empereur  r^solut  de  porter  d 
Polotsk ,  sur  lecbemin  de  Vitepsk ,  une 
grande  masse  de  forces  qui  pouvait  de 
la  prendre  k  revers  le  camp  retrandie, 
tandis  que  Murat,  Ney  et  Oudinot, 
I'attaquant  de  front  et  sur  les  flancs , 
contraindraient  Barclay  k  sortir  de  cette 
position :  alors  il  edt  ete  facile  de  re- 
jeter  les  Russes  dans  la  Courlande,  oik 
se  trouvait  Macdonald ,  et  de  les  forcer 
de  livrer  bataille  adoss^s  k  la  mer,  avec 
un  nouvel  ennemi  sur  les  bras. 

«  Ce  plan  adopts,  le  vice-roi  d*Ita- 
lie,  qui  avait  d^ja  pris  le  chemin  d'G^- 
miana,  fut  dirig^  sur  Gloubokoi6;  la 
garde  imp^riale  s'y  rendit  par  Swent* 
ziani.  Les  Bavarois,  sous  les  ordres  de 
Gouvion  Saint-Cyr,  avaient  franchi  les 
derniers  le  Ni^men ;  k  peine  arrives  ^ 
Wilna ,  Tempereur  les  passa  en  revue , 
et  les  fit  partir  imm^iatement  poor 
alter  prendre  position  aux  environs  de 
la  meme  ville  de  Gloubokoi6,  rendez- 
vous ^^n^ral  du  corps  k  la  t^te  duquel 
il  allait  agir  du  cdte  de  Polotsk.  » 

G'est  vers  cette  ^poque  que  Napo> 
leon  re^ut  k  Wilna  la  deputation  de  la 
diete  du  grand-ducb^  de  Varsovie.  Le 
sdnateur  Wibeski ,  s'adressant  k  Vem- 
pereur  au  nom  de  la  diete  confed^r^ 
qui  avait  declare,  le  28  juin,  le  r^ta- 
biissement  de  la  Pologne,  prononfa 


RUSSIE. 


4«t 


oes paroles  :  DUes,  sire,  que  la  Polo- 
gne  existe,  et  ce  dicret  sera  pour  le 
mtmde  iqv^aient  is  la  r^aUte,  La  r^ 
ponse  mesurde  de  Tempereur  refoula 
rentbousiasme  dans  les  coeurs  polo- 
nais;  il  ^it  visible  que ,  tout  en  comp- 
tant  sur  leur  courage,  on  se  r^servait 
la  faculty  de  sacriGer  leur  cause  a  des 
inter^ts  g^^raux. 

L'assiette  du  camp  de  Drissa  ayait 
ete  choisie  sans  discemeroent;  les  tra- 
Tsux  immenses  qu'on  y  avait  entass^ 
devenaient  inutiles ,  parce  que  la  posi- 
tion pouYait  facilement  Itre  tourn^; 
dans  Fhypoth^e  d'une  attaque  g^n^- 
rale  paries  forces  dont  Napol^n  pou- 
vait  disposer  sur  ce  point,  il  n'^tait 
guere  probable  que  ces  ouvrages  arrd- 
teraient  longtemp^  Tennemi. 

La  seconde  arm^  avait  op^6  sa 
jonction  ^  Dicissa;  le  but  principal  des 
Russes  6tait  atteint  par  la  concentra- 
tion d*ane  ^nde  partie  de  leurs  for- 
ces. Le  27  juin  (9  juiU^t  nouveau  style) , 
jour  anniversaire  de  la  bataille  de  Pol- 
tava, Alexandre  rendit  le  manifeste 
saivant : 

«Guerrier8  russes! 

•  Vdus  avez  enOn  atteint  le  but  vera 
leqad  vos  regards  ^taient  tourn^. 
Lorsqoe  Vennemi  osa  franchir  les  li- 
mites  de  notre  empire,  vous  etiez  sur 
les  finonti'^res  disposes  h  les  ddfendre; 
mats,  josqu'^  ce  quel'entiere  reunion 
de  nos  troupes  pilt  ^tre  effectu^,  il 
fallot  arr^ter  votre  courage  et  se  re- 
tirer  dans  cette  position.  Nous  sommes 
▼enus  ici  pour  rassembler  et  concen- 
trer  nos  torces.  Nos  calculs  ont  ^t^ 
hoireux :  la  totality  de  la  proni^e  ar- 
mibt  est  en  ce  lieu. 

«  Soldats !  le  cbamp  est  ouvert  k  votre 
valeur,  si  noblement  docile  ^  se  mod6- 
rer,  si  ardente  k  soutenir  la  reputation 
qoe  votre  nom  s'est  acouise;  vous  allez 
coeillir  des  lauriers  a^nes  de  vous- 
mtees  et  de  vos  ancetres.  Ce  jour, 
naguere  signal^  par  la  bataille  de  Pol- 
tava, doit  vous  rappeler  les  exploits  de 
vos  p^es;  le  souvenir  de  leur  valeur, 
r^dat  de  leur  renomm^  vous  engagent 
^surpasser  Tune  et  Tautre  par  la  gloire 
de  vos  actions ! '  Les  ennemis  de  la 
de  ooonaissent  d^j^  votre  valeur. 


Allez  done  dans  TcSprit  de  vos  ance- 
tres, et  an^ntissez  Tennemi  qui  ose 
attaquer  votre  religion  et  votre  hon- 
neur  jusque  dans  vos  foyers,  a  la  vue 
de  vos  femmes  et  de  vos  enfants. 

«  Dieu ,  temoin  de  la  justice  de  notre 
cause,  sanctitiera  vos  bras  par  ses  b^ 
n^dictions. » 

Tandis  que  I'empereur  Alexandre 
appelait  la  religion  au  secours  de  la 
politique,  tandis  que,  dans  le  reste  dt 
rempire,  la  noblesse  et  le  clerg6,  exci- 
tant la  baine  du  peuple  centre  des 
ennemis  b^t^rodoxes,  transformaient 
cette  lutte  en  guerre  nationale,  on  d^ 
cr^ta  une  nouvelle  lev^  d'un  bomme 
sur  cent.  Bientdt  on  comprit  qu*il  de- 
venait  urgent  d'evaeuer  le  camp  de 
Drissa.  L  arm^  se  porta  h  marches 
forcees  sur  Vitepsk,  dans  I'intention 
d'arriver  h  Smolensk  avant  les  Fran- 
cis, et  de  se  mettre  ainsi  en  commn- 
nication  avec  les  corps  de  Tormassof , 
de  Bagration  et  de  Tchitchagof. 

Alexandre  courut  a  Moseou,  et, 
confiant  dans  le  patriotisme  de  Tan- 
cienoe  capitale  de  la  Russie,  il  publia 
le  manifeste  suivant : 

«  A  notre  ancienne  ville  et  capitale 
de  Moseou. 

«  L'ennemi ,  avec  une  perfidie  sans 
exemple,  et  des  £(^ces  qui  r^pondent  k 
son  ambition  d^mesur^,  a  p^n^tr^  dans 
les  provinces  de  la  Russie.  Son  dessein 
est  de  ruiner  notre  pays.  Les  arrases 
russes  brQlent  du  desir  de  se  jeter  sur 
ces  bataillons;  mais  notre  soUicitude 
patemelie  ne  pent  accepter  un  sacrifice 
aussi  d^esp^re.  Nous  ne  pouvons  souf- 
frir  que  nos  braves  sujets  soient  sacri- 
fi^  sur  les  autels  de  ce  Moloch. 
Pleinement  convaincus  des  perfides  in- 
tentions de  notre  ennemi ,  et  des  puis- 
sants  moyens  qu'il  a  pr^par^  pour 
Texecutioh  de  ses  projets ,  nous  n'n^i- 
tons  pas  k  declarer  a  notre  peuple  le 
danger  ou  'se  trouve  Tempire.  La  ne- 
cessity oommande  la  reunion  de  nou- 
veiles  forces  dans  rint^rieur,  pour 
soutenir  celles  qui  sont  en  presence  de 
Fennemi.  Pour  assembler  ces  nouvelles 
armies,  nous  nous  adressons  k  Tan- 
cienne  capitale  de  nos  ancles,  k  la 
ville  de  Moseou.  L'existence  de  notre 


LUlViyERS. 


nom  dans  ie  tabftaa  des  nations  est 
menaefe.  L'cnnemi  d^nonoa  la  destine- 
tion  de  la  Russia.  La  sdret^  de  noire 
sainte  fglise,  Ie  saint  du  trdne  des 
tsars,  rind^pendance  de  I'ancien  em- 
pire moaeoTite,  tout  annonoe  liaute- 
ment  que  Tobiet  de  cet  appel  doit  €trt 
recu  par  nos  fiddles  sujets  comme  une 
lofsaGr^e...  Puissent  ies  coeurs  de  notre 
nolilesse  et  oeux  des  autres  ordres  de 
ri^tat  propager  Tesprit  de  oette  satnte 
guerre  qui  est  Mnie  du  Tr^Haut,  et 
combattre  sons  la  banni^re  de  notre 
sainte  Egiise! » 

Dans  un  second  manifeste  adress^  d 
la  grande  naUon  russe,  on  remar^e 
des  passages  qui  indiquent  plus  daire- 
ment  encore  que  la  lutte  prendrait  Ie 
earact^red*uneguerred'ex£em]ination. 
Le  despotisme  ne  peut  parler  de  liberty 
h  des  esclates;  il  craindrait  m^me 
d'toe  Gompris;  mats  11  met  en  jeu  lea 
haines  viTaees  dont  il  a  conserve  le 

{^erme  dans  Ies  prejug^  nationaux;  au 
leu  de  lauriers,  il  montre  aux  masses 
la  palme  du  martyro,  et  rend  faciles 
Ies  plus  grands  sacrifices  en  Ies  entou- 
rant  du  prestige  religieux. 

•  LaRussie,  prodTamant  ce  mani- 
feste ,  a  inYoqu^  la  protection  de  Dieu ; 
elle  oppose  aux  raacbinations  de  son 
ennemi  une  arm^  forte  en  courage, 
et  ardente  h  chasser  de  son  territoire 
oette  race  de  sauterelles  qui  brOlent  la 
terre,  et  que  la  terre  repoussera  de 
son  sein  outrage.  Nous  appelons  toutes 
nos  communaut^s  religieuses  k  coop^ 
rer  aTcc  nous  I  une  leT^  gte6rale 
contre  le  tyran  uniyersef...  Saint 
svnode,  et  vous,  membres  de  notre 
Egiise,  dans  tousles  temps  voire  in- 
tercession a  appel^  sur  notre  empire 
la  protection  diyine!  Peuple  russe,  ce 
n*est  pas  la  premiM^fois  que  tu  as  ar- 
rach^  Ies  dents  de  la  t^te  du  lion... 
Unissez-vous;  portez  la  cfoix  dans  vos 
eonirs  et  ie  fer  dans  yos  mains,  et  ja- 
mais la  force  humaine  ne  ponrra  pre* 
Taloir  contre  yous...'  » 
i  Ges  proclamations  portent  leurs 
fruits;  le  derg6  seconda  la  noblesse, 
qoi  rimposa  des  sacrifices  de  tout 
genre;  Ies  marcbands  offirirent  de  Tar* 
gent;  dans  le  seul  gouTcmement  de 


Moscou,  on  vota  une  le?^  de  quktre- 
Tinet  mille  hommea  et  un  subside  d^un 
million  et  demi  de  roubles.  Pensa  et 
Novogorod  sulTlrent  oet  exemple,  et 
r^lan  se  eommunioua  Jusou'aux  pro* 
Tinoes  Ies  plus  reculto  de  rempire. 

Le  synode  de  Moscou  et  le  clerg6 
de  cette  Tilie,  au  milieu  de  toutes  Ies 

rmpes  du  rit  grec,  firent  hommage 
Tempereur  o^une  relique  miracu- 
leuse,  et  le  m^tropolitain  Platon  lui 
adressa  en  oette  occasion  solennelle  un 
discours  dont  Ies  images  bibliquet 
^taient  propres  h  exalter  Ies  passions 
de  la  multitude. 

«  La  Tille  de  Moscou,  s'^eriait-il,  la 
{iremiere  capitale  de  Tempire,  la  nou- 
telle  J^salem,  recoit  son  Christ, 
comme  une  m^  dans  Ies  bras  de  aes 
fils  xB6b  ;  et ,  &  trayers  le  brouillard  qui 
s*6l^e,  preisentant  la  jgloire  brillante 
de  sa  puissance,  die  cnante  dans  sea 
transports :  Hosanna!  b^ni  soit  oelni 
qui  arrive !  Que  Farrogant ,  Pimpie  Go^ 
liath ,  des  limites  de  la  France ,  apporte 
retfroi  aux  confins  de  la  Russia,  la  re- 
ligion tut^laire,  cette  fronde  du  DavM 
russe,  brisera  soudain  sa  t^te  orgueil- 
leuse!» 

AJexandre  confia  la  garde  de  la  re- 
lique k  la  milice  de  Moscou,  et,  Il  la 
suite  de  cette  c^r^onie ,  il  partit  pour 
P^tersbourg.  Lk ,  s^adressant  aux  mt^ 
r£ts plus  qu'aux  sentiments,  il  d^dara 
que  fa  paix  avec  TAngletene  ^tatt  con- 
due,  et  que  le  commerce  allait  re- 
prendre  une  nouvelle  vie;  la  paix 
de  Boukharest,  dont  Ies  dispositions 
avaient  ^  conseniies  dte  le  39  juio. 
venait  d*£tre  ddftnitivement  sianee.  II 
s^agissait  encore  de  s^assurer  a*un  r6- 
sultat  de  la  plus  haute  importance : 
nous  voulons  parler  de  la  cooperation 
active  de  la  Suede.  Alexandre  se  rendlit 
en  touie  hdte  dans  la  ville  d'Abo,  ok 
ratiendaii  Bemadotte.  Ce  fut  au  mnteu 
de  la  Pinlande,  dans  le  sein  mtme  de 
la  capitale  de  cette  province,  enlev^e 
aux  SuMois  par  Ies  Russes,  que  le 
prince  royal  de  Suhde  acoepta  Ies  con- 
ditions de  I'autocrate  russe,  et  s'en- 
gagea  h  porter  Ies  armes  contre  ses 
anciens  compagnons  d'armes,  ou  nlu- 
tdt  contre  leur  chef  qui  s'ofastinait  ^ 


11US8IE. 


4es 


M  voir  dans  Vikot  d^im  praple  fier  et 
fanf 6  qa'un  de  oes  rois  parrenus  ^io6 
dte  sa  fortooe.  Soit  que  Beroadotte 
cWt  ^  la  sMuction  des  promesses  et 
dea  lonaoges  adroiles  de  I'autoerate, 
•oil  que,  pn6voyaot  I'issue  de  oette 
intte,  aprte  laqoelle  taat  de  fironts  res- 
t^KDt  dtomroan^f  il  ait  era  devoir 
Iq^tifDor  son  ^Mvation  aux  yeox  de 
Tarbitre  fiitiir  de  rEorope,  soit  enfin 
one  les  int^r^ts  de  sa  patrie  adoptive 
Paieot  seula  guid^  dans  une  d^termi- 
natioD  si  importante,  il  promit  d*agir 
offeDsivement  contre  Tarmte  d'inva* 
sion.  Si  le  succ^speut  Jastifier  un  tel 
parti,  Gbarifls  XIv  est  irr^procbable; 
il  est  rest6  sor  le  trdne,  sans  que  la 
rtaction  qni  a  renvers^  toutes  les  dj* 
nastiCi,  on  plotdt  tons  ces  vioe-rois  mri 
relevaient  de  rcmpire,  ait  pa  I'attein- 
dre;  s^il  n'a  point  saisi  I'oocasion  qui 
ae  prtentait  d«  r^tablir  iaSu^de  dans 
aea  andennes  firontidreB ,  il  a  dn  moins 
assort  le  repos  de  son  pays,  en  abai»- 
dcmoant  no  territoire  que  les  Russes 
lui  amaient  toujonrs  dispute.  Ce  n'est 
point  ainsiqtt'e&raiaonn^C^ikslUI; 
mais  oe  dernier  a  roui^  la  SuMe. 

AJosi  Alemiidre  poavait  retirer  ses 
troopes  de  la  Finlande;  la  peix  de 
Bowiarest  rendait  ^leaient  dispo- 
aiUes  les  fovoes  qui  observaient  les 
firooti^ies  tarques;  d^rmais  c'^it 
dans  le  oonir  &  rempire  que  Tattaque 
0t  \b  r6iistanee  allaient  se  conoentrer. 

Oo  dto^  une  nouvelle  ler ^  de 
deux  iMRBmes  sur  cent  pour  les  terres 
que  des  privileges  exemptaient  du  re- 
croteoient,  et  les  domaines  de  la  cou- 
lonoe,  aussi  bien  que  ceux  des  sei* 
gaears  pri  vii^i^ ,  durent  foumir  leur 
oontingeat. 

liO  16  juilkt,  Barclay  ^vacua  le  camp 
de  Driaaa;  le  mtoe  jour,  IVapol^n 
si'^lao^t  de  Wilna,  ignorant  le  mon* 
vcmcnt  des  Rosses.  A  cette  nouvette, 
il  cbaogea  soudainement  sea  disposi* 
tiooa :  Oudiaot,  aprds  avoir  ruin6  les 
ottvrages  abuidoan^  de  Drissa ,  requt 
Fordre  de  pouraoivre  Barclay  et  de  le 
devaooer  k  Vitepak ;  ii  itait  awiy^  par 
Marat,  Ney*  at  la  cavaknrie  de  Mont- 
hroB  et  die  Nansouty.    Le  g^n^ral 

.Wittgensteitt 


eouvralt  Pftersbourg  et  observait  Mao* 
donald. 

Apr^  avoir  pass^  la  Dvina,  Barclay 
prit  position  sur  la  route  de  Wilna , 
piur  laquetle  s'avanfait  rarm^  fran- 
faise;  de  \h  il  envoya  Ostermann  avee 

Suinze  mille  hommes  jusqu'au  delft 
*OstrowDo.  Pendant  ce  temps,  Eugene 
refoulait  au  delft  de  la  riviere  une  par- 
tie  du  corps  deDokhtourof;  les  Rosses 
br(Uftrent  le  pont  derriftre  eux ;  on  tra- 
vaillait  ft  le  r6tablir  lorsque  Napoliton 
arriva  sur  ce  point  avee  toute  la  garde. 
Le  pont  termini,  Pempereur  se  mit  ft 
la  tete  des  Bavaroia  pour  faire  une  ro* 
connaissance.  II  Jugea  que  Tarmte 
rosse  devait  ^tre  a  vitepsk ,  et  fit  ses 
dispositions  pour  soivre  Tennemi. 

A  Pexeeptran  do  corps  d'Oudinot, 
rest^  en  arriftre  pour  observer  Witt* 
geostein,  et  que  rempla^ait  celui  du 
vice-roi,  la  division  entire,  comman- 
ds par  I'empereur,  marcha  sur  Vi* 
tqiSK  par  Ostrowno.  k^h&  quelques  en* 

Sagements  meurtriers,  rarriftre^arde 
es  Russes  se  retira  ft  Tabri  d*un  ri* 
deau  ^pais  de  bois  auqud  s'adossait  la 
grande  route.  Lea  Franks  sond^ent 
ct  francfairent  ces  forto,  et  bientdt, 
ft  deux  lieues  de  Vitepsk ,  ils  dtouvri- 
rent  Tarm^e  de  Barclay.  Le  27  an  ma* 
tin,  les  Fran9ai8  iorcftrent  Favant* 
garde  de  ce  g^n^al  ft  se  replier  aur  le 
corps  principal.  Le  soir  du  37,  les  deux 
armies  toient  en  presence,  s^parta 
par  la  Soutehissa.  Les  Russes  n'avaient 
aur  ce  point  que  quatre-vingt  millc 
soldats;  les  Francais  en  comptaient 
cent  vingt  mille.  Aapolton  se  croyait 
a88ur6  de  la  victoire...  Le  lendemain 
matin,  Tennemi  avait  disparu,  sana 
laisser  un  tralneur,  sans  qu'on  pdt  d^ 
oouvrir  aux  environs  un  seul  paysan. 
Les  babitania  de  Vitepsk  apporterent 
les  elds  de  la  ville  ft  rempereur;  maia 
ils  ignoraient  la  direction  qu*avait  prise 
Barclay.  II  appritbientdtquecederni» 
se  dirigeait  vers  le  nord,  et  il  rentra 
ft  Vitepsk  poor  donner  ft  son  armS 
quelques  jours  de  repos ,  et  laisser  aux 
corps  que  sa  marche  rapide  avait  de- 
vances  le  temps  de  le  rejoindre.  Pen- 
dant ce  temM,  Bagration,  aprfts  avoir 
pli^  devant  Davoust  ft  Novoaeiki,  fit 


464 


L'UNIVERS. 


un  <l6teur,  passa  le  Dniepr  le  26,  et 
arriva  le  29  h  Mstislaf.  Ce  fut  la  nou- 
velle  de  ce  mouvement  qui  determina 
Barclay  a  la  retraite.  Inf^rieur  h  Na- 
pol^n,  ce  general  ne  pouvait  n6gliger 
Toccasion  qui  se  pr^entait  d'op^rer 
sa  jonctioa  avec  Bagration.  lis  se  trou- 
verent  ainsi  run  et  I'autre  k  quinze 
lieues  de  Smolensk,  le  premier  au 
nord,  le  second  au  sud  de  cette  vijle; 
le  3  aodt,  ils  r^unirent  leurs  forces 
sous  les  murs  de  Smolensk. 

Exposons  main  tenant  en  peu  de 
mots  quelle  ^tait  la  position  des  corps 
qui  formaient  les  ailes  des  deux  armies 
ennemies. 

Tormassof  commandait  plus  de  qua- 
rante  milie  hommes,  ^e  sa  reunion 
avec  Tarro^e  de  Moldavie  pouvait  por- 
ter au  double.  Napoleon,  ignorant  la 
force  rdelle  de  ces  corps,  avait  donn^ 
Tordre  a  Keynier  d^observer  avec  ses 
Saxons  Tarm^e  de  Volhy  nie ,  et  de  rem- 
placer  Schwartzemberg  qui  devait 
renforcer  Davoust.  Tormassof  prit 
aussitot  Toffensive,  repoussa  vivemeot 
les  Saxons ,  et ,  apr^  une  resistance  de 
neuf  heures,  11  fit  mettre  bas  les  armes 
au  g^n^ral  Klingel ,  qui  se  rendit  avec 
deux  mille  hommes ,  et  livra  aux  Russes 
quatre  drapeaux  et  huit  canons.  Rey- 
nier  r^trograda  sur  Slonim  pour  se 
rapprocher  de  Schwartzemberg.  Le 
pnnce  venait  d*6tre  investi  du  com- 
mandement  de  toute  I'aile  droite,  avec 
la  mission  d'oocuper  le  gouvernement 
de  Grodno.  Gependant  Tormassof,  s'a- 
van^ant  toujours ,  s'etait  plac6  entre  les 
Autrichiens  et  la  Vistule,  les  coupant 
du  grand -duch^  de  Varsovie;  mais 
bientot,  menac6  lui-m^me  par  les 
Saxons  et  les  Autrichiens,  if  r^tro- 
|;rada,  et  s'arr^ta  en  arri^re  de  Prou- 
jani ,  sur  la  route  de  Kobrin ,  dans  une 
forte  position.  L'arm^austro-saxonne 
vint  1  y  attaquer;  le  combat  dura  tout 
le  jour  avec  des  succds  varies;  la  nuit 
permit  h  Tormassof  d'effectuer  sa  re- 
traite; vivement  poursuivi  le  lende- 
main,  il  abandonna  ses  Equipages  et 
quelques  canons;  enfin  les  Russes ,  re- 
tire derri^re  le  3tyr,  recurent  la  nou- 
velle  que  Tarmee  die  Moldavia ,  sou3  les 
ordres  de  Tchitcbagof ,  manoeuvrait 


pour  se  joindre  k  Tarmee  de  r^rve. 
Inform^  de  ce  mouvement,  Schwart- 
zemberg s'arr^ta  entre  Kovel  et  Wla- 
dimir. 

Lad^monstration  de  Tormassof  aval  t 
jete  Faiarme  dans  Varsovie;  Maison, 
gouvemeur  d^  Konigsberg,  s^avanqa 
avec  dix  mille  hommes  jusqu'a  Rus- 
tembourg;  mais  bient6t,  inform^  de 
la  retraite  des  Russes,  il  retouma  sor 
ses  pas  (M .  Mortonval).  Victor  se  por- 
tait  sur  le  Mi6mtn ,  et  Augereau  reoe- 
vait  Tordre  de  couvrir  Ya  ligne  de 
roder,  et  de  diriger  sur  la  Vistule  la 
division  Durutte. 

A  Taile  gauche,  Macdonald  s^^blit 
k  Jacobstadt ,  tandis  que  les  Prussiens 
bloquaient  Riga.  Le  g^^ral  Ricard, 
detach^  par  le  uiar^chal  pour  assizer 
Dunabourg,  antra  sans  coup  f6rir  dans 
cette  place  forte  que  les  Russes  ve- 
naient  d'^vacuer.  Blacdonald  y  ^tablit 
son  quartier  gendral,'et  en  fit  raser 
les  ouvrages. 

Wittgenstein,  alarms  par  les  mou- 
vements  d^  Tennemi ,  avait  api^^  a  lui 
la  gamison  de  Dunabourg ,  qui  portait 
son  corps  a  trente  mille  hommes.  II 
apprit  que  l9^  mar^chal  Oudinot  mar- 
cnait  sur  S^6je;  pour  le  pr^venir,  il 
se  porta  k  sa  rencontre,  en  menat^nt 
son  flanc  gauche.  Le  combat  dlagou- 
bovo  forca  les  Francis  a  la  retraite; 
ils  Top^rerent  apr^  avoir  tenu  en  res- 
pect des  forces  sup^rieures ,  malgre  le 
d^savantage  du  terrain ,  et  vinrent  se 
rallier  a  la  division  Merle,  au  gu^  de  la 
Drissa. 

Koulnief ,  qui  commandait  Tavant- 
garde  russe,  traversa  la  Drissa,  et 
Vint  donner  au  milieu  de  Tarm^e  fran- 
caise  rang^e  en  bataille.  Cette  attaque 
rut  fetale  aux  Russes :  Koulnief  fut  tue 
avec  un  millier  des  siens;  quatorze  ca- 
nons, treize  caissons  et  deux  mille 
prisonniers  rest^rent  au  pouvoir  da 
vainqueur.  Engage  k  la  poursuite  de 
Tennemi ,  le  g^uOTal  Verdier  se  trouva 
en  pr^ence  de  forces  sup^rieures,  oaf 
le  rejeterent  avec  perte  ae  Tautre  cdt6 
de  la  riviere.  Oudinot,  k  la  sujte  de 
ces  engagements,  rentra  k  Polotsk. 
Vl^ittgenstein  bless^  alia  reprendre  sea 
positions. 


ILUSSIB. 


466 


GoMvion  Saint-Cyr  se  porta  sur  Po«' 
lotsk  poor  renforcer  Oudinot,  et  le 
mouvement  des  armte  fraacalses  se 
troQTa  simttltantoent  suspenila. 

Le  1*'  cor^ ,  sous  les  ordres  de  Da- 
Toust,  ^ait  a  Dombrovna;  le  3*  oocu- 
pait  Polotsk ;  Ney ,  arec  le  8*,  ^tait  sur 
h  loate  de  Vitepsk  k  Smolensk;  le  4*, 
aux  ordres  d'Eu^^ne,  se  d^^ait  aux 
enrirons  de  Vitepsk;  Poniatovski, 
avec  le  5*,  rempla^ait  Davoust  k  Mo* 
hilef ;  GoutIod  Saint-Cyr,  aveo  le  6*, 
▼enait  de  se  joindre  i  Oudinot;  le  7*, 
reuni  aox  AutrichieDS,  observait  Tor- 
massof  k  Vladimir;  h  Ordia,  Junot 
reiDpla^ait  J^r^me  et  commaiidait  le 
8*  corns ;  le  9*,  sous  Victor,  cou  vrait  la 
ligue  de  la  Vistula;  le  10*,  avec  Mao- 
dooakl,  dtfeodait  celle  de  la  Dwina; 
le  11*,  qui  fonnait  la  rterve,  ^tait  r6- 
parti  dans  les  places  de  TOder,  sous  les 
ordres  d' Augereao ,  qui  avait  sod  quar- 
ter gtetel  a  Stettin. 

Le  roi  de  Naples,  plac^  en  avant- 
f^arde,  au  deUi  du  cofm  de  19^,  cam- 
pait  sur  le  cbemin  de  Smolensk.  «  Kn- 
nn,  dit  M.  Mortonral,  dont  nous 
abr6g6oos  le  rteit,  I9apol4oo,  entour^ 
de  la  garde  imp^riale  a  Vitepsk ,  sor- 
iretUait  toutes  les  parties  de  cette  im- 
ncnae  ann^e ,  dont  le  front  se  develop- 
pait  met  one  ligne  de  trois  cents  lieues. 
SuiTaot  partoot  et  1^  la  foia  les  mouve- 
maata  de  reoDemi ,  il  tra^t  d'arance , 
iTmis  ieors  mancDUires.  le  plan  de 
cedes  qu'il  a'apprteit  a  opter... . 
A  chetil  afant  le  lefer  du  soleu,  on  le 
▼ovaJt  passer  des  reruea,  Tisiter  les 
bdpitanx  oik  sa  Dr^sence  oonaolait  et 
ranmait  lea  nuuades  et  les  bless^; 
rentr^  dans  aon  cabinet,  il  dietait  des 
oidres  pour  tous  les  cha  de  oorps ,  et 
deacaodait  aux  OMiindres  d4taus  de 
Padioinistration  militaire,  en  mtoe 
taaapa  qu'il  dirigeait  de  son  eamp  Pad- 
Bumatratioo  de  Tempira. » 

Lfr  marebe  r4trocrade  des  Eusses 
las  arait  rapprochss  de  leora  res- 
atMnea;  i^ilB  afaieot  juaque-Ui  peidu 
phM  de  raoade  dans  ms  enffagements 
OBI  s'4CaieBt  8aeotf4,  ee  dSntantage 
Mi  plus  que  oompenaA  par  lea  fl4auz 
de  toot  genre  qsi  d4cimaieat  TamMfie 
d^iavaaioa;  eUe  eomptait  alors  an  pea 


moins  de  deux  cent  mille  honmea,  et 
plus  elle  allait  avaneer  dans  les  pro* 
vinces  de  Temptre,  plus  ses  communi- 
cations et  les  moyens  de  pourVbir  k  sa 
subsistanoe  deviendraient  difficiles. 
Les  troupes  l^g^res  de  Tennemi  assail- 
laient  les  eonvois  et  les  d^tadiementa 
isol^,  tandis  que  les  paysans  massa- 
craient  les  trafneurs :  cependant  Tas- 
pect  des  aigles  et  la  presence  de  Napo- 
Iton  soutenaient  ces  troupes  tant  de 
fois  Tictorieuses,  et  Pespoir  d*une  ba- 
taille  procbaine et  decisive  leur  donnait 
la  force  de  lutter  coatre  toutes  les  pri- 
vations. 

Barclay  ne  sut  point  tirer  parti  de 
Pavanta^e  numMque  qui  r^ultait  de 
sa  position;  le  colonel  Toll  reprtonta 
mini  fallait  tomber  avec  toute  Tarm^ 
du  centre,  qu*on  pouvait  rtenir  en 
moins  de  deux  iours,  sur  le  principal 
noyau  de  Farmee  franqaise^  k  laquelle 
une  semaine  toit  n^cessaire  pour  se 
rallier;  Tennemi ,  coup4  dans  sa  ligne 
d*q>^tions,  se  serait  vu  oblige  de- 
battre  en  retraite,  ou  de  se  beurter 
contre  une  masse  compacte  de  cent 
vingt  mille combattants.  Get  avis,  for- 
temeot  appuy^  par  le  grand-due  Cons- 
tantin,  fut  adopt^;  mais  les  tempori- 
sationsdu  g^noral  russe,  qui  fatiguait 
ses  soUats  en  marches  et  en  con- 
tre-marches,  firent  manquer  le  r^ 
sultat  probable  de  cette  habile  concep- 
tion. 

Napoltoy  arerti  de  la  manoeaTre 
de  Barclay,  modifia  sur-le-cbamp  le 
plan  qu'il  arait  adopts :  tandis  que  lea 
Rosses  8*4teDdent  sur  leur  droite  et 
menaoent  Vitepsk,  il  porte  toutes  sea 
forces  sur  leur  gauche,  dana  la  diree* 
tion  de  Smolensk.  Apres  quelques  en- 
gagements meurtriers  qui  retarddrent 
la  marche  des  Fran^ais,  ces  demlers 
arriv^nt  derant  Smolensk;  Bagra^ 
tion  teit  aceourn  DOur  Hhoare  cette 

eaoe,  et  Barclay  rarait  auivi  de  prte, 
B  IT  Joillet,  Fattaque  oonuneaa;  lea 
Basses  perdirent  quetqoes  nUlUan 
d'hommea  k  la  dtfnsailes  finibourga; 
la  Doit  4daiia  Tioceiidie  de  la  fUie,  et 
le  lendemam  au  matin  lea  Fhmfala  / 
pMtrteent;  mats  ils  n'avaieiit  conouia 
que  des  mines ;  Barclay  avait  fait  eva* 


M*  Utraism.  (Ruaaii.)  t-  n 


L*UNIV£AS. 


p$t^  call*  jf^^m  fui  ue  pouvitit 

M  leodcnmiQ ,  BaroUy  d^ndit  la 
hfUfft  yrlli)  pquf  interdire  »ux  Fraosaia 
l^jPWase  du  Pniepr;  il  dat  ooder 
f$im%  ^  g»awn}Tra  par  ua  circuit 
f^Uf  nUfir  joiPdrp  Bagration  4111  «ou- 
^lait  Ik  (iwqiia  distance  la  route  de 
BloppQM,  I(<^,  auiYi  du  >oi  de  I^aplea, 
aa  dirigea  aatre  lea  deux  routes  da 
F#epibo!lv^  at  de  Moacou;  il  deiogea 
IVoneoM  du  i^iUase  de  Garbouaova ,  el 
nwrpba  awr  la  positioa  de  Valontina* 
6oxa.  lA  lea  Euwes  9e  r^uoirent  bieo- 
tAt  au  nombre  de  trente-cinq  mille. 
Veqipeieur,  amifiQsafit  que  Ney,  qui 
d^f^vnjt  aiiigyer  Juqot ,  B*aurait  h 
Mtar  qua  oontie  l*«rritee«arde  de 
Barclay)  e'itait  eopteat^  aeatoyer 
an  aeoQim  du  oiarMiel  la  diraiQa 
Gudiu,  at  lui-mte^  ^tsjt  leuM  k 
Sqioleoi^, 

LHuactian  iacoQcevaUe  du  due  d'A*" 
hrant^,  et  uu  contre-ordre  doou^  au 
gto^al  Bforaikd ,  aauv^ent  lea  B^usses. 
Apri^  p*4tra  <yailiaiqinant  dtfeudua 
dam  lawr  poejitioQ,  ila  dureut  c^er  k 
rimD^tuoait^  fran^se;  maia  le  brave 
GttOui  ^tait  tQUEib^  aur  le  champ  de 
bataiUa,  ^^rird  et  Vf^  aebev^nt  de 
vaiDcr&, 

A  Taile  gaoohe  de  reippereur,  Ou- 
dioot  eTiut  soutenq  Tattaque  du  oorpa 
de  Witt^enateiii « mais  en  ahaDdonnaat 
du  terrain  jusqu*a  Polotsk.  Lh  Gouvioa 
SaiotrQrr  le  rejoiguit.  I^e  17,  deyaut 
lee  mura  de  b^  m»t  la  bataille  s'fu* 

Segea  arec  u^  cousage  tel  de  part  el 
^tre.  Qudi^ett  Ibre^  de  pUer,  alUut 
reasaiajr  iVai^t^e^  loEaqu'un  bjacalea 
Tatteiflii^t  e  Npaiiie :  lea  tte^rea  in*- 
terrov^piiwrt  VaiUm^  Ce|teoj4aiit  le 
nwtr^etol  e?2|it  ordooQ^  U  retraite; 
e|ie  Cjpwwnea^ait  k  a*op^er  k  la  faveur 
dele  9uit>  Imraqiie  QouWou  SaiuVGjfi 
d4fm  4  9#kpai9t  abai¥}ooner  Pokrt^ » 
I  mtjii^pait  hjibileaaeftt  sea  awuveipeota^ 
^  li^mef  Im  ligpie^  qui  <tapent 
reiMoi  ^  presence  de  l^eRuemi.  Lee 
IUiaivia»  Tifemeut  attaqute  k  riostaut 
ou  lie  ue  doutaient  plus  d«)  auoote ,  se 
d<feodiie«|  avec  C(^  opuu&trete  et 
ce  4ivouenei»t  qui  bouoreut  iuaqu.*^ 
leme<)iJftitea;eufio,  dterd^i  et  eufoo- 


061  de  toutes  parts,  ils  ae  ralliirent, 
et  retronadmnt  josque  derriere  la 
Drissa*  Ce  beau  fait  d'armes  vaiut  a 
GouYicm  Saint*Gyr  la  digmte  de  mof 
rdchal. 

Gette  yictoire,  qui  dtatsBait  la 
gauche  de  If  apol^o ,  fiit  proDeolement 
la  cause  de  sa  ruioe;  la  olupart  des 
gte^aui  fraud's  ^taient  o'avis  de  re- 
culer  jusqu'^  Smolensk;  Tempereur 
lui*m£me  avait^auinifest^  k  plusieurs 
reprises  rinteation  de  ne  point  pouaser 
plus  loio  sea  arantages,  et  de  ne  ren- 
tier en  campagne  qu'aprte  avoir  eom- 
M  les  lacunes  de  son  ann^.  La 
retraite  de  Barclay  hit  imposait  la  n^ 
oesiit^  de  marcher  en  avant  ou  de 
reculer.  Le  combat  de  Polotsk  ie  dMda 
aana  doute  a  marcher  sur  Mosoou.  II 
cooiptait  sur  une  affoire  desire  qui , 
en  lui  ouvrant  la  capitale,  terminerait 
la  guerre,  ou  du  moina  mettrait  a  sa 
disDosjtion  toutes  les  ressouroea  d'une 
ville  riche  et  populeuae. 

A  aa  droite ,  Sch  wartzemterg  et  Key* 
nier  coptenalent  Toirmasaof  ou  rarmee 
de  Moldavie;  Yietor,  avec  trente  mille 
hommea ,  qui  oocupait  une  poaition  in- 
termMiaire ,  ^t  a  portte  de  secoiirir 
soit  Schwartzembei^,  soit  Goutiob 
Saint-€yr;  Augereau,  k  la  tHe  d'une 
nombreuse  r&rre^  allait  a'ataneer 
pour  remplaoer  le  due  de  Bellune;  at 
des  renforts,  aiHennaait  FEurope  d«M 
toutea  lee  direeliieins,  a^^branlaieBt 
pour  re|oindre  rann^  aatite* 

Les  dem  arnii6es  rusaea  rotmB«> 
cbte  derriere  rOiya,  a  quelque  dia* 
tanoe  du  Doiepr,  inqutetees  par  U 
caralerie  du  roideI9aplea,  repousaerenl 
une  attaqiie,  que  Davouat  mt  jugen ' 
pea  k  propoa  de  sotttenir ;  elles  r^tro^v- 
rapent  sur  la  route  de  Moacou  juaqu'ii 
Tsar^ao-Zaiodiiehi^.  Lk  Kouleittof 
rem{;Ia^  Barclay.  On  reprodudt  ii  oe 
dernier  la  perte  de  Smolensk  et  Toi* 
caasive  cira^nspectioo  qui  nresidait  a 
toua  aes  mouvenftents.  Houtouaof , 
battM  k  AusterUtx.,  et  vainaueur  <lea- 
Turca  k  Routcfaouk^  avast  ravanta^a 
de  porter  uu  nom  ruaaa;  oa  YteiUard 
conservait  une  grande  ^peigie,  et  aa^ 
vaitajouter  k  labfajvouure  du  aoldat  par 
le  atiawlanl  des  id«a  riligiiiiaaa*  Le 


RUSSIE. 


467 


Mwreau  general  en  chef  Jfigto  n^CM- 
mt  de  reculer  josqa'a  Borodino,  a 
dm  joamees  de  Mosoou.  Le  8  sep* 
fionbre,  il  rangea  son  arni^  en  ordra 
de  bataille.  II  oecopaii  une  aaiictte 
irn-loite,  qae  protmaient  dea  oa- 
trages  garma  d'nne  tonnidable  artiK- 
lerie.  If  avait  tooa  aes  ordres  cent 
trente-tiois  mille  dnq  cents  homnies, 
ct  diapossit  de  sii  cents  booehes  d  feu. 
Baid^,  en  passant  sons  le  commande- 
OMnt  de  Koutoosof ,  arait  tequ  ceiai 
d*nBe  dmslon  form^  das  corps  de 
Bi^l^vout  et  d'Ostermano,  qui  occu- 
paient  la  droite;  Benmgaen,  btcc  le 
ovps  deDoklitoarof  et  la  gaide  imp6* 
rials,  ooiirrait  la  position  centrals  de 
Gorki .  que  defendaient  en  outre  deuY 
fortes  batteries ;  Bagration  s'^tendait  k 
I'sile  ganche,  et  oommandait  les  corps 
de  Raievakoi  et  de  Barazdin.  Moscou 
venait  d'enroyer  dix*mill6  bonooes  de 
milieca,  et  Milaradoviteh  aniena  on 
fcoiart  de  dn-sept  nnlle  anierriers. 

Depais  Dorogobouje,  les  Fran^ais 
a'avaa^aient  aor  trcns  eolonnes*  Napo- 
IflMii  an  centre,  siilTait  la  grande 
RHSIe  atec  la  garde  et  lea  corps  de 
DavQQSt  et  de  Ney;  Marat  marcnatt  k 
Ut  Ite  de  f  araat-^garde,  awnpcyfe  de 
la  eavalerie de  rterre  et  de  la  dirision 
Conapans;  is  tioe*ro)  flnnqoait  la  gao' 
ate,  PsBJaletsfei  Is  d«oite^  tons  jwux 
jvglaut  leor  asarche  snr  le  mosTeMient 
de  la  difiaiaii  eoritrale^ 

L*enipereiir,  aprto  ^^tre  i  epos^deoic 
jflors  k  Gjata,  se porta  en  ataBt(4  sep^ 
temfareX*  Mant  mogea  d»  Tillage  ne 
GffidftefO  Fjanriere^^rde  msie  eon- 
■wand^  par  Ronovnitcin,  et^femp^ 
rear  Tint  paaser  la  miit  daas  eette 


Le  5,  Konomitzin  se  Tit  eneoiv 
foicd  d'abandonaer  le  ooiiTent  de  Ro- 
isMm  et  de  ae  repller  snr  Borodino, 
mk  Kautoosof  le  plaqa  soas  les  ordres 
de  GOTrtdiakof ,  an  centra  de  Taiie  gau« 
cha  lias  Ensses.  Aprfe  one  Mte  longne 
et  opmidtn ,  la  grande  rsdoate  de  Qie- 
iawbuo,  qoteoiivrait  Is  front  duoaras 
ds  Ba^BimUr  M  empovtte  par  la  a»« 
niioo  CooBpans. 

La  41  septefnlMre  m  BMithi,  Napoi^on 
aia  Ini^nseBAe  fwomullfe  la  position 


de  Fennemi ;  il  eon^dt  aussitdt  ie  projet 
de  tomber  avec  la  plus  grande  partie 
de  ses  forces  sur  Taile  gaudie  des 
Busses,  prescrfvit  toutes  les  mesures 
qui  dcTaient  faToriser  ce  plan  d'atta- 
que,  et,  pour  en  d^rober  la  coanais- 
sance  k  Koutoosoff  il  attendtt  la 
nuit. 

Le  g^n^al  russe,  apres  la  prise  de 
la  redoute  de  Ghevardino,  avait  ren> 
forc^  sa  gaucbe  en  y  eovoyant  le  corps 
de  Tout&kof :  vers  le  sotr,  il  passa 
une  revue  gentle,  entoure  de  pr^ 
tree  dans  toutela  pompe  du  rit  grec, 
et  offrant  a  la  Tmration  de  rarnee 
una  image  miraculeuse  de  la  Yierge. 
Ge  fut  un  spectacle  ^trance  que  cerni 
de  tant  d'hrnnmes  Tcnus  oe  toutes  les 
extr^mites  de  rempire,  tout  fa^oan^ 
par  TesclaTage  a  une  discipline  rigou- 
reuse,  et  jurant  jiar  les mystdres  de  la 
religion  de  mourir  pour  sauver  leura 
niattres. 

Les  deux  armte  ^ient  k  pen  prte 
^ales  en  nonibre;  les  masses  qui  al- 
Istcnt  se  heurter  pr^ntaient  un  effeo* 
tif  d'enriron  deux  cent  soixante  et  dix 
mille  eombatt»its;  les  Rnsses  avaient 
I'aTantage  d'une  forte  position  et  d'ane 
caralerie  exeellente;  ieur  moral  etait 
port^  au  |)lus  bant  deflr6  d'^nerpe  que 
pntsaent  inspirer  et  la  baine  de  r^- 
tranger  et  le  sentinieat  religieux ;  mais 
une  partie  de  leurs  fereea  se  eoraposait 
de  noaTeUas  lerte,  et  aueua  de  leurs 
g^raux  ne  kmiasait  de  eette  baute 
reputation  mUitiire  qui  double  la  eon* 
fiance  du  soldat. 

Les  Fran^ais,  ^lectrls^s  par  (a  pre- 
sence de  Tempereur,  et  commandes 
per  des  ebeili  habitat  k  Tarncre,  s'at- 
tendaient  k  one  Ti^oitreose  resistance, 
mais  ils  ne  doutaient  pas  dm  mietkB. 
Les  corps  qui  allatent  se  mesorer  aree 
I'ennemtetaient  reiitede  rarni6e;  toos 
ceox  que  les  latigoes  et  les  privations 
avaient  mis  bora  de  oombat  ^taienl 
rest^s  en  arriere;  les  cbevaux  sevis, 
Bsoins  robostes  due  les  hommes,  ne 
ripondaient  pas  a  la  belle  tenue  des 
troupes. 

Le  7  an  aatio,  les  disposltlentf  de 
reaspersuv  etaAsiit  prises,  et  Keutoo- 
aof  n'avait  eneorS  rien  dwnge  k  son 

6. 


LOJNiyERS. 


front,  qui  oocitpait  une  li{pie  semi- 
circulaire  d'une  lieue  et  demie  de  d^ve^ 
loppement 

•  Par  I'effet  de  oette  manceuvre, 
l*aile  gaucbe  des  Rassea  ae  tronverait 
tout  a  coup  aasaillie  par  I9ey  et  par 
Davoust,  charge  de  oommencer  la 
bataiile  en  attaqaant  lea  deux  redana 
et  la  redoute  de  StotonoT8koi6  qui 
oouvraient  le  front  de  Bagration;  en 
mtoie  temps ,  le  mouTement  de  Ponia- 
tovaki  aur  la  TieiUe  route  de  Smolensk 
tendrait  h  lea  toumer.  Kaction  ainai 
enng^f  le  Tioe-roi  devait  s'emparer 
de  Borodino,  menacant  alora  le  centre 
des  Rusaes  et  leur  oatterie  principale 
de  Gorki;  et,  pour  donner  plus  de 
poids  k  oette  ^nde  diversion,  Tern* 
pereur  arait  ajout^  aux  troupes  d'Eu* 
gtee  le  corps  de  cavalerie  de  r^rre 
command^  par  Grouchy,  outre  deux 
diriaions  aoua  les  ordrea  de  G6rard  et 
de  Morand  (Mortonval).**  De  oette 
manitei  la  droite  dea  Rosses,  qui  s*e- 
tendait  depuis  Borodino  iuaqu*^  la 
Moskra,  ne  pouvait  prenare  part  k 
Taction,  et  at  I'attaque  des  Francis 
rtasaisaait  aur  la  gaucbe  des  Russes  et 
k  leur  centre,  Unite  la  droite  de  oes 
demiers  se  troutait  aocul6e  I  la  Mosk- 
ra, aans  espoir  de  retraite. 

La  mating  tett  bnimeuse;  cepea- 
dant  le  temps  se  leva,  et  NapoUon 
a'toia :  «  Voitt  le  aoleil  d' Austerlite ! » 
Ga  mot  d'un  heareux  augure  coumt 
daoa  les  rangs ;  aussitdt  on  hit  aux  aoi- 
daU  la  prodamation  de  rempereur. 

«SoldatoI 

«  YoiUi  la  bataiile  que  roua  arez  tant 
d^iree.  Dtermaia  la  victoire  depend 
de  voua;  die  noua  est  n^oessatre;  elle 
nous  donaera  I'abondance,  de  bona 
ouartiera  d'hiver  et  un  prompt  retour 
dans  la  patrie.  Conduisea-vous  oomme 
a  Austerlits,  k  Friedland,  k  Vitepsk, 
k  Smolensk ,  et^ue  la  post6rit6  la  plua 
reoul^  cite  avec  orgueil  votra  con- 
duite  dans  oette  joumte;  que  Ton  disc 
de  vous :  U  teit  a  cette  grande  ba- 
taiile 80U8  les  murs  de  M oscou ! » 

Auasitdt  rattaque  oomiiiaiea  centre 
les  ounages  qui  protegeaient  la  gttidie 
de  Bagration,  tandia  que,  pour  d/6- 


toumer  I'attention  de  Routousof ,  le 
corps  de  Delzons  ddogeait  I'ennemi 
du  village  de  Borodino.  Les  retrandie- 
ments  et  les  points  fortifl^  furent 
attequ^  et  dmndua  a^ec  une  ^ale 
▼aleur;  Compans  est  bless^;  Dupelain 
le  remplace,  et,  bless^  lut-m£me,  il 
cMe  le  oommandement  an  gte^ral  Des- 
saix.  Le  mar6chal  Davoust  a  aon  cbe- 
val  travera^  par  un  boulet;  un  instant 
on  le  crut  mort,  mais  11  ae  rel^e  et 
continue  de  donner  aes  oidres.  Deasaix 
est  frapp6  k  son  tour;  Rapp  qui  le 
remplace  a  le  m^me  sort.  Om  oertes 
suocessives  jettent  quelque  indeciaion 
dans  le  corps  de  Davoust ;  If  ey,  Murat , 
soutenus  par  les  Westphaliens,  font 
des  ef forte  inouls;  la  division  Davoust 
redouble  d*ardeur;  bientdt  le  redan  et 
la  fldche  tombent  au  pouvoir  dea  Fran- 
cais.  II  resteit  encore  la  redoute  de 
ton^novski,  que  Koutousof  recar- 
dait  comma  .la  clef  de  aa  position. 
Malgre  la  belle  r6sistence  de  Bagration 
qu'appuient  de  puissanta  renforte ,  mal- 
gr6  rintr^pidite  et  le  sang-froid  dei 

g6n^aux  Raievakoi ,  Barazdin ,  Dokh- 
[>urof ,  k  neuf  beures  les  Franqaia  aont 
maftres  de  la  redoute. 

Cependant  le  gdn^ral  ruaae,  vofvant 
que  sa  droite  n'^uiit  paa  inqui^tfe,'  fiiit 
replier  le  corpa  de  Baghavout  aur  le 
tb^tre  de  la  bataiile;  Osterraann  et  la 
cavalerie  de  la  gaide  ruase  sui viraat  ce 
mouvement  et  vtnrent  renforoer  Dokh- 
tourof.  Alora  la  hitte  devint  gMnk; 
la  grande  batterte  est  enlev&;  le  gl- 
utei Plauzonne  y  refoit  la  mort  des 
braves ;  Bonami ,  reate  pendantqualqne 
temps  mattre  de  la  nosition,  est  Mesai 
pi^ement  et  frut  priaonnier  par  Ty* 
Eatehef,  qui,  second^  par  Ostermano 
et  Dokbtourof ,  reprend  la  poaitiMi  et. 
force  la  division  Morand  k  retrograder. 
Ce  g^n^ral  revient  k  la  charge  aeoond^ 
parEug^ne, Gerard, Grouchy  et^tMis- 
sier.  Les  Russes  reculent,  abandon- 
nant  le  plateau  k  Morand ,  maia  ila  rea- 
tent  mattres  de  la  inrande  batterie.  La 
lutte  se  prolongeait  terrible  et  ind^ 
ciae :  Napoleon  jogea  n^ceaaaire  deftire 
avancer,  pour  aoutenir  Ney  et  Da* 
voust^  toute  rarttUerie  de  la  r6aarve; 
la  division  Roguet  rempla^  le  corps 


•  •  •  •        •  *  • 

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KUSSIE. 


4119 


^  JttDOt,  qui  se  poita  k  la  droite  de 
Dafoust. 

.  •  II  4tait  prts  de  midi  loraqae  Fem- 
pereur  oommanda  aux  deox  mar^ehattx 
eC  k  Morat  de  ranimer  le  combat  [Kir 
on  effort  ▼igoureux  et  g^iK^ral,  et  k 
Friant  d'enlever  les  mines  du  Tillage 
de  SdniteDOTakoi6  ou  renneoii  tenait 
enoore.  A  eet  ovdre,  le  feu  de  nos  h^t- 
teries  Mata  anr  tonte  la  lifpse  arec  un 
fracaa  ^pouTantafale;  oelles  des  Russes 
jriTalie^at  d^actiTtt^.  Lea  ooloones 
francaiaea,  ioteterie  et  cavalerie,  8*6- 
inraolciit  et  inondeiit  la  petite  plaine 
eo  avaot  du  tillage.  Vaiaement  la  mi- 
tiaille  et  lea  boulets  ouvreotdaos  leun 
ranga  de  laigea  aUlons;  ellea  ae  refor- 
ment  a  rioatant,  et  la  maaae  avance 
toujoura  a?ec  une  oonstance  hdroique , 
obiet  de  radmiration  dea  fonemis  eux- 
Bsoaea  (le  oolooel  Boutourlin). 

«  Bapatioor  Iuqb  que  le  sort  de  la 
bataille  va  ae  otader...  il  ordoone  k 
ses  tronpea  4e  charger  rennemi  qui 
menaea  de  lea  toaser ;  les  Russes  s*^ 
braoleot  k  tour  tour  •et  coureot  au 
detaot  dea  Franfais*  De  ce  choc  ter- 
ribto  entredeux  maaaes  ^ales  en  force , 
ea  braTOore,  r^sulte  une  m4i6d  con- 
fuse, aae  sorte  de  lutte  corps  a  corps, 
oik  la  tidoive ,  aprte  quelqaes  moments 
dlneertilode,  semble  peacber  tour  li 
tour  oour  fun  et  Tautre  parti.  Mais 
bieatot  Bafpation  tombe  biess^  d'nne 
bafle  qui  hu  fracasse  la  Jambe;  Saint- 
Prieat,  un  Fran^ais,  son  chef  d'^tat- 
aiajor,  le  rempuce  ua  moment;  il  est 
frapp6;  on  Temporte  aussi.  Plusieurs 
antres  soat  tu^  k  la  mtoe  place.  Les 
Ruaaes,  aana  directioa,  se  d^ooncer- 
tant ,  lis  ploieat ;  les  Francis ,  au  con- 
traiie,  raniment  d'uae  nouTcile  ar- 
deur. » 

Le  Tillage  de  Sto^onovskoi^  venait 
d*ttre  emport^  oar  Friant;  la  cavalerie 
de  n ansouty,  <fe  Latour-Maubourg  et 
de  Montbrun,  refoulait  les  ooloones 
russes,  qui  r^ogradaient  lentement 
et  en  bon  ordre  derri^re  le  Tillage;  si 
la  garde  impMale  eOt  donn^  en  ce 
moment,  les  Russes  6taient  perdus; 
le  hasard  leur  ?int  en  aide.  Une  diver- 
sion sur  la  gauche  du  vice-roi  d^tourna 
Fattention  de  Tempereur,  qui  d^tacha 


sur  le  point  qu'on  croyait  menace  la 
ditislon  ClaparMe;  Eugene  s*assura 
bientdt  que  cette  attaque  des  Russes 
n'^tait  qu'un  coup  de  main  aans  danger 
r6el;  mais,  pendant  ces  hMtations, 
Konovnitzin,  gui  remplapit  Ba^ra- 
tion,  avait  eu  le  temps  de  raHier  les 
troupes.   L'armte  russe  concentrte 

Sr^entait  un  front  de  milte  toises,  la 
roite  appuy^  k  la  grande  route  et 
la  gaudie  au  Tillage  de  Psar^o.  Riea 
n'^tait  encore  Aim^  k  I'extrtoegaucba 
des  Russes ,  ouToutchkof ,  renforo6  de 
Ba^atottt ,  6tait  aux  prises  avecPonia- 
tovski  et  Junot.  Lea  mouTcments  qu*on 
remaiquait  dans  les  lignes  des  Russes 
semblaient  annoncer  rintention   de 


prendre  roffensiTe;  les  g^n^raux  frian* 

cais  conseill^rent ,  dit-on ,  k  I'empereur 

e  faire  donner  la  garde;  il  crut  pou- 


Toir  vaincre  sans  elle :  T^^nement 
jpiroufB  que  ce  fut  une  fiiute.  Gependant 
de  bantes  considtotions  le  lutermi- 
nteeat :  en  arri^re  des  lignes  de  Kou- 
tousof ,  il  aperccTait  une  masse  com- 
pacte  et  immobile  que  Rootousof 
semblalt  tenir  en  rtenre :  &^i%  la 
milice  de  Mosoou,  mal  arm^  et  inca- 
pable de  combattre  avee  des  troupes 
aguerries;  mais  I9apol6on  ignorait 
eette  ciroonstanoe;  il  detait  cralndre 
aussi  que  de  nouTeaux  renforts  n'arri- 
Tassent  k  Tennemi;  en  faisant  donner 
la  garde,  il  exposaic  sa  demi^  res- 
source,  et  mettait  Tennemi  dans  le 
secret  de  sa  d^tresse.  D'ailleurs,  pour 
dire  ici  toute  notre  pens^,  la  Tictoire 
de  Borodino,  en  admettant  qu'elle  edt 
6t6  plus  complete,  n*aurait  point  sauv^ 
rarm^  firancaise;  Mosoou  n*en  edt 
pas  moins  M  inoendi^,  et  les  debris 
de  Tarm^  russe ,  ayant  pour  auxiliaires 
les  rigueurs  preeoces  de  la  saison, 
eussent  toujours  suffi  pour  repousser 

Suelques  miUiers  de  soldats  ^bapp^ 
tant  de  fl^aux  et  a  la  fureur  des  el^ 
meots. 

Cependant  la  grande  batterie  des 
Russes,  prise  et  reprise,  est  enlcT^e; 
TVgatchet^  qui  la  defendait  avec  intr^ 
ptdit6,  est  fait  prisonnier ;  mais  Mont- 
orun  et  Caulaincourt  tombent  frapp6s 
mortellement,  le  premier  au  commen- 
cement de  Paction ,  le  secoo'^  au  sein 


410 


L'UMIVEHS. 


Bi€ine  de  ia  tictoire;  h  corps  de  Dokb- 
tourof ,  assailli  et  enfonc^  par  le  vioe- 
roi,  se  repiie  eo  d^ordre  sur  la  droite 
des  Eus$es.  L*iminioence  du  peril 
semble  accroltre  I'energie  de  Koutou- 
sof ;  i)  veut  a  tout  prix  reoonqu^rir  sa 
posilioo;  I'drm^  eotiere  s'^ranle; 
uaais  toui^rartillenefraofatseftonnaoit 
a  la  fois,  feudroia  lea  premieres  co- 
lonnes,  I^  Euasea  aJtors  a'arr^teat,  et 
leur  feu  repond  a  celui  deii  Fraotais : 
lutte  terrible,  ou ,  de  chaque  €^t^«  troia 
cents  bouches  a  feu  siiloBoaient  lea 
raiiga  eooemia,  o(i  le  courage^  rMuit 
h  un  d^vouement  passif  ^  ae  iytruait  k 
attendre  la  mort  >  iauno))ile  h  fK>o  r«ag» 
La  cavalerie  seiilet,  engagee  sor  l«i 
Qaocs  de  Tarm^,  chargeair  ayec  fu<» 
reur ,  maia  sana  avantage  marqu^  £iifiii 
Napoleon  ordonne  a  Ney  de  a'afanoor 
sous  le  fQU  des  Russes  et  de  d^order 
leur  flanc  gaucbes  le  niar^cbal  eneeute 
ce  mouTemeot  decisif ;  lea  Eusaes  re* 
culent,  mais  ranges  en  bataille*  el 
voDt  se  reformer  sur  leur  derqiere  li« 
sne.  lis  avaient  perdu  ejD  tu^  et  eu 
Dless^  pres  de  quarante  miile  horn'* 
roes.  On  assure  que  Koutousof ,  igno^ 
rant  encore  toute  Veteodue  de'son 
desastre,  inanifesta  Tintention  de  re*- 
commencer  le  combat  le  lendemaia;  il 
oocupait  encore  une  position  f<Nrini- 
dable,  et  avait  conserve  presque  toiiite 
son  artillerie.  L'attitude  imposante  dea 
Russes  frappa  Mapol^n  kii*m4ine;  il 
repondit  h  ceux  qui  lui  conseiliaient 
d*achever  la  deroute  de  Tennemi :  £h! 
si  nous  avons  une  bataiUe  demaitif 
que  nous  restercht-U  pour  didder  la 
vicMre?  S'iredt  6te  mieux  inform6 
de  la  position  deKoutousof ,  sans  doute 
son  gdnie  n'eOt  pas  b^it^;  mais  dix 
mille  metis  et  qmnze  ipille  bless^  ve- 
naient  de  laisser  dans  les  rangs  de  Tar- 
m^e  fran^ise  des  lacunas  profondes. 
Napoleon  declara  que  la  bataille  ^tait 
finie.  Ney  rej^t  le  titre  de  prince  de  la. 
Moskva.  L*intr^pide  roerecbal  devait 
vivre  asses  pour  sauver  iei  debris  de 
cette  arno^  nacu^e  si  brillante :  il 
£tait  re^erv^  a  la  haine  d*un  parti  de 
r^pandre  sur  le  sol  de  la  patrie  le  reste 
de  ce  glorieux  sang. 
Crpendant  Koutousof,  apres  avoir 


ordonne  quelques  dtspasitiona  defen- 
sives,  ordonna  la  retraite,  que  pro- 
tegea  son  arridre-airde.  Du  9  an  12 , 
Kapoleoa  s'arr^te  a  Hojaisk«  lloatoa* 
sor«  pour  prix  de  sa  belle  conduite, 
fut  elev^  k  la  dignity  de  feld-marfehal ; 
sa  r^stanee  fut  cel^rte  a  P^tersboorg 
eooune  une  victoire;  mais  k  Mosoo«a 
on  Qonnut  bient^t  toute  la  T^t6.  IU»> 
topcbin,  gooverneur  de  cette  capitale, 
^tait  entieiremeot  divou6  auz  An^dais; 
habile  a  manier  resprit  de  la  popauoe^ 
il  ne  eessait  de  rependn  des  bruits 
mensongera  sur  lea  pr^teadua  revcrs 
des  arnSea  firanqaisei :  il  publiait  que 
Mapolten  venait  renterser  les  auiBls 
et  an^ntir  le  peuple  orthodoxe;  poor 
inspirer  aux  Eusses  le  mipris  de  ren- 
nemi ,  il  expoaait  k  leurs  yeox  quelques 
prisonnicra  d^bilea  et  exwBu^  par  les 
privatipaa,  ProfoMd^ment  blesse  dans 
son  orgueil  national ,  il  arait  con^u  un 
projet  digne  des  d^vouements  entires, 
celui  d'eoaevelir  Tarm^e  victorieuse 
sous  les  ruines  de  la  capitale.  Comme 
il  entrait  dans  ses  plans  d'attribuer 
Tincendie  de  Moscouaux  Fran^ais^  il 
se  pr^para  secretement  a  oette  onivre 
de  d^livrance  et  de  destruetion.  II  sou* 
niit  aux  mesurea  Jes  phis  s^eres  les 
^tranc^rs  qui  lui  ^ent  suspects, 
exila  les  una  et  condamna  lea  autres 
au  supplioe  ignominieux  du  knout; 
enfin,  pour  arr^ter  Temigration,  il  fit 
defendre  de  quitter  la  ville  sans  sa  per^ 
mission.  Les'  seigneurs  s'eioignweat 
malgr^  ses  ordres;  mais  le  peuple  et 
lea  bourgeois^  tromp^  ou  reteous  par 
la  erainte,  ob^irent.  Bientdt  les  con* 
vois  de  bless^  russes ,  dont  une  partie 
^tait  dirig^ sur  la  ville,  ne  laisserent 
aucun  doute  sur  Tissue  de  la  bataille 
de  Borodino.  Le  14 « rarm6e  rusae  leva 
le  camp  de*Fili,  et  ses  colonnes  tra- 
verserent  Moscou  enee  une  pr^ipita- 
tion  ({ui  trahissoit  la  erainte  d'etre  at- 
taquees  au  milieu  de  ee  saouveoieDt. 
koutousof,  voyant  qu'ii  nepourrait 
dtfendre  la  ville »  avait  pris  la  r^olu- 
tlon  de  tourner  vers  le  sud » pour  main- 
tenir  ses  communications  avec  les 
corps  de  Tormaasof  et  de  Tchitchagof. 
Alors  Eostepcfain,  press^  d*ex^uter 
son  dessein    donna  ordre  aux  ' 


•  ••• 

•  •  •• 

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V. 

•  •  •  • 
4  •• 


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...»  »••• 

-  •••  • 

•  » • *  •••  • 

•  ♦,•        •  ••  • 

• »'  : 


RUSSIA 


471 


taste  A*&fB9$m  knnMlatoaMat  ImIs 
drmevres.  Hiea  «e  MUt  domilr  mm 
id6e  (lu  trouble  et  de  la  ooniusion  dont 
se  iem|»lit  k  cayitaie*  Lm  MkMMvilef 
duogeaient  k  la  hAte  «ir  des  ekariote 
ce  q&'ils  AvaiflDt  do  ptai  pr^eiciii;  let 
friua  pmiTrat  ae  detnaadafcnt  es  pAao- 
raol  eu  ils  tniiifevstcnt  no  asftoi  et, 
fMur  UB  inatiMt  de  eonsertattom^  ihi  ae 
praaifRtaient  ^  la  ftaite  des  aoldats 
qvi  traferaaient  la  title  en  oooratit, 
flomne  s*f  la  emsent  6te  hdnteux  d*dr- 
fiter  lean  reffards  sur  ces  mors  qu'ila 
n^araient  pd  sauver.  Rosto{»chiti  avdit 
CMirert  leis  prisons  et  distribu^  aux  mal- 
bitetirs  leur  tdche  fatale;  mais  d^ji  la 
t^  des  coloimes  de  Murat  pendtrait 
dans  le  fauboui]^  de  Doroffpmflof ;  Eoa- 
t0[)chin  prit  la  fuite,  ei  Miloradovitdif 
qui  D'avait  pas  eooore  en  le  temps  de 
ae  retirer  avec  rarri^re-gaide^  fit  arar^ 
tir  Murat  qoe  si  Ton  troiablait  ae  f^ 
Iraite,  il  mettrait  le  feu  ii  la  eaoitale. 
Le  roi  de  riaplea  pdn^ra  bientdt  dana 
ie  Kremli  A ,  oti  quaqoea  d^aeap^r^a  ea* 
aayereotenvaiiidesedtfefidre.  Bientdt 
If apd^on  antra ,  h  la  t^ de  sa  Rartle, 
dana  le  ftetbonrg  de  Dorogomilof ;  ft 
8*attendalt  ikfecevoi^les  defsde  fa  vllle ; 
d*abord  il  panit  p^niblement  affects  du 
ailenee  qm  r6gnaft  dans  les  rues  66- 
series,  mais  bientdt  11  assigna  auxdiffd- 
fents  corps  les  positions  qu'ils  devaient 
eonserver  autour  de  Moscou.  La  nuit 
etait  d^j^  sombre  lorsque  Fincendie 
eclata  sur  plusieurs  points  h  la  fois ;  lea 
soldats  re^ureat  rordre  de  r^indrey 
mads  lea  p»mpea  avaieot  M  ^igtt^ 
par  lea  soina  de  Rostopchin.  La  viHe 
entiefe  olfrait  I'aspeet  d'un  immenae 
bAcber ;  lea  soldats  ooBtemplaient  dana 
no  mome  stleaee  ee  spectacle  &  la  fois 
impoaant  et  terrible;  les  chefs  pen*- 
aaient  h  Y  am^  nisae  plutdt  repous* 
ate  que  Tainene,  et,  end^orant  le 
aort  de  cette  Tine  si  cfa^rement  con- 
qnise,  ils  fafsaient  utf  triste  retour  sur 
enx-m^mes  :  de  temps  en  tem|)s  des 
bruits  sourds,  comme  le  bruit  lointain 
du  canon,  dominaient  les  murmurea 
de  Tincendie ;  e*^tait  celui  qpe  fiiisaient 
en  tombant  les  portes  de  fer  des  bou- 
tiques, et  la  ebaleur  devenait  si  forte 
qu*eile  faisait  ^clater  les  litres  h  une 


gtfaade  diataoaa  dea  flannttes.  La  1 5  au 
natta^  Kempereiir  alia  oeevper  le 
Kremlin.  Lea  Mifloes  en  pierre  brd- 
iaieiit  pl«a  ieatement ;  m  pot  tn  aaiiTar 
quelaiMa«iin8.  On  arrtta  tM  grand 
nomnre  d'inoendiairea  am^  de  tor- 
ehea  et  cbarg^  de  it^Kard^  (ft  de  fia* 
etea  qtf  ils  Mn^ietit  dana  rintMen^ 
des  matsoAs  t  fh  dfclar^nt  qu*ils  rem- 
ttlfssaleht  l«s  ordrea  du  gouverneui^;  on 
les  fbsilla,  mats  cet  exempie  n*arr^ta 
pas  les  autres.  te  it ,  la  cbaleor  devint 
si  insupportable,  oue  Tempereur  fut 
Oblige  ae  quitter  le  Kremlin  pour  aller 
S*£tablbr  au  cUteau  de  P^trovaki.  L'ln- 
cendie,  qui  ayait  dur^  aix  joiurat  e'er* 
riU  ie  20,  il  la  suite  d'one  pluie ab«i» 
danteC).  Napolten,  dte  ie  li,  dCaH 

(*)  ffodtiateiioiiipftaii  peddifft  qii<9^e 
taoipi  le  rMt  d^  Matmmtk  militiirea 
tiear  donAcr  IM  pSMi^  Itephis  femarqua- 
Met  de  rintefeMuile  relation  de  M.  le  mar- 
Mil  de  CKktfibtay,  qui  a  dkrit  aree  iotant 
de  ^kiUi  cpie  de  talent  le  dtostfe  de  oette 
ttef^dUliyoe  eapitale. 

«« Toat  itaitprftpar^peai^roMiripafiba  de 
Moieoo !  Mortier  derait  en  Mre  le  goater- 
iMMii ,  DtifOflMi  le  comaiaiiuant  ^  Lfessepa 
teait  destine  k  remplir  lea  foncfiexu  dHnteii- 
dint  dela  protineedeMoMsMi,  etQDeprd> 
damation  aux  habitants  derail  AiyepnoHte 
le  JMir  mtoe.  IVipoMon  I'arrtta  k  rentt^ 
da  foaboorg  ponr  y  attendre  qii*ane  d^- 
tatien  vtait  iaiplofer  «a  cMmenee;  cet  acta 
da  aooaiittion  M  tatneM  lai  plaiftif  et  flat- 
tait  aon  ergiwiL 

•Afin  d'empMer  que  les  loMati  Altarft 
M  piUflMDt  MeaeMi ,  il  Ht  ^aUhr  par  deux 
bripdet  de  esralene  Mgire  mie  dii^  de 
Bosiei  le  bn|;  de  h  Sleak¥«  pour  ferttier 
Fcntr^  de  la  tille  de  ee  cM,  Eitgene  et  Pu- 
■iatottiu  reearanf  Fordfe  de  I'arrlier  I  nne 
Keue  en  de^  de  Moiooa.  Dana  le  afeime 
tem^  NapolAen  eiNfeaeail  I  Mmkt,  qvf 
aeitait  imiBMiefeaieai  Marat,  de  ie  perter 
mr  le  Kienlia  et  d^en  pieadve  poiaeirion; 
a  devait  dtplofyet  la  plna  grindcf  rig;neer 
■oar  empteher  le  pillage.  Key,  Dareuat  er 
la  tieille  garde  arrifftrent  ittoeeHiveBient»- 
et  itablirent  leera  bfivaes  de  dkaqve  eM 
at  ea  anMre  da  Cwftuarg  de  Derogomilef. 
Gea  IgMnsBOL  iTattendanl  k  fnre  me  enir^ 
ttiomphanla  daai  M  oteoa ,  ataieni  fait  pren- 
dre  la  (praiaiB  teame  a  levrs  trenpea. 

-Marat  n*e«t  paaplaiM  pMire  dana  Iffaa* 


473 


uumyBRs. 


r«?flnuliaiNteri*aiidcmierMd0iwedM    det 
tsara^qiMSon  isolemeot  afaitprterv^ 


eon,  que  b  aoUtiidc  qui  y  riguil  !•  frappa 
d*ctoiinaDent ;  il !«  ful  encore  deventage  de 
lie  pes  voir  parattra  de  depulatioD ;  b  vkiti 
elait  fi  ioTraiieoiblable  qu'il  ne  pouvak  la 
Mnip^nner;  aiwi,  craignantque  leiRiiMfli 
ne  nil  euuent  dretti  qnelque  -embtk^he ,  il 
ne  marchait  qu*avec  preraution«et  fjooaiait 
del  reconnaimncci  oans  let  met  qui  abou- 
tiiiaient  4  odles  qu*il  •uivaiL  Parrenu  pret 
dn  Kremlin ,  oe  tuenre  et  oette  solitude  qui 
avaiant  r^gok  jnaqa'alQri  eetierent  tout  k 
eoop;  uH  mtiange  d1uMnaie>  du  peuple,  de 
toloats,  de  Cocaqnei,  an  mUieu  deM|tteb  te 
muvaieDt  on  grand  nombre  de  voitaret 
I  harp^ei  de  bteea^  ct  de  bagages ,  en  obe- 
troait  let  a^procbet;  qvelqiiei  eoafia  de 
fbiil  ftirait  brei  mr  I'avant-gaide,  qoi  dia- 
pena  aunitdt  ce  rmemhiMMWil  Mofal, 
s*aperoeTant  alon  qu*il  avait  eci  tronpi,  fit 
cbarger  sur  Ics  Coiaquei  qui  le  trouvaient 
a  rarriere-garde  de  Koutouiof.  Toatefoia^ 
sci  craintes  reUtivenent  k  nne  mrpriie 
dcf  enant  plus  Tives ,  il  continue  k  praidn 
Ics  mftmes  precautions;  aussi  ne  fut-ce  qn*ii 
sept  heures  dn  soir  tfuHX  cut  tnivefti  Bioa- 
oou;  il  fit  aussttdl btvaquer  ses  trounes,  et, 
poor  enp^cfacr  de  se  repandredans  la  ville, 
tl  la  fit  enTelopper  d*uiie  chalne  de  postct 
depnis  la  route  de  Riaaan  jusqu'i  cette  de 
Mlenbourg. 

«Monier  fit  bivaquer  son  corps  d'armie 
dans  rinterieur  et  dans  le  voisinage  dn 
ILranUiiy  et  poussa  des  reconnaissanoes  dans 
diflerentes  directions.  On  Ini  retira  la  divi- 
sion CUparede  pour  la  mettre  sous  lea  ofdres 
deMuraL 

•Tandisquelei  Fran^ais  pdielraient  ainsi 
dans  Bf  oscou ,  en  pranant  toules  les  pre- 
dutiotts  que  leur  dictait  une  juste  mefiance, 
Napoleon,  impatient  de  ne  point  voir  pa* 
raitre  la  deputation  des  babitants,  envoye 
succesBivement  plusieurs  des  officiers  polo- 
naii  qui  lui  servaient  dUntcrpretes  pour  en 
biter  TarriT^  Il  apprit  bientdt  oe  qu'il 
n'aurait  jamais  soup^nni,  ce  qui  semblait 
inaroYable,  ^ue  Moacou,  abandonnee  par 
lous  les  fonctionnaires  publics  et  par  la  plus 
gnnde  partie  de  ses  baoitants ,  elait  presque 
d^ierte.  H  n*en  pcnista  pas  moins  a  exiger 
qu*il  lui  fit  ameni  une  depulalion  telle 
quelle.  On  reuuit  done  plusieurs  marcbands 
etranipv  qui  s'etaieut  preseotcs  k  Murat 
pour  implorer  sa  protection ,  et  ils  furenf 
conduits  devant  Napoleon.  «Les  Kuises,  lui 


Let  wMiCt  fouilMreot 
,  et  trauftent  dam  lei  eavM 


«  direofrils,  one  abandnuii  Moaeon,  il  n'y 

•  est  rasti  que  qoelqnes  toangcrs  eomme 

•  noua  qui  s'adonnaient  an  oanuriMree,  et 
«  qoelques  individus  des  daraicKs  daases  du 

•  peuple.  Nous  ferons  tout  ee  qui  sen  en 
«  notre  pouvoir  pour  le  aarnee  de  Telie 

•  Majeste,  et  nous  la  sapplions  de  nous  ae- 
«  corder  sa  protection. »  NapoMoo  voyait 
s*eTanouir  en  un  instent  toutes  ks  espiraa- 
ces  qu'il  avait  fondies  sur  I'oceupaliott  da 
Bfoaoou;  dans  son  mionnlenteaMnt,  il  ne 
leur  ripondit  rien,  et  entra  ausiitdt  dsns 
le  fiiuboar^.  n  s'arrMa  quebnie  temps  prat 
du  pontnui  avait  M  ri^wi  a  la  bile,  pour 
y  Toir  dtfler  les  troupes,  et  Mblit  son 
ouartier  gMnI  dam  una  daamaisons  dn 
nnbouig. 

«  Jusqumamntoiimaiiitint  rordreparau 
les  troupes,  plus  tard  oeia  devint  imposii- 
Me.  On  ne  pik  caapteher  des  bonmes  eit^ 
ma^  de  booin  de  se  proenrer  desseeours 
qu*ib  avaient  aons  la  main;  les  oflidcn 
mteies  doonaient  Teiemple  de  la  d^sob^ 
sance.  Une  foule  de  militaires  se  ripendirent 
done  dans  Moscou  pour  y  diercber  des  afi- 
ments,  et ,  trouTant  (es  maisons  abandonnees, 
beaucoup  se  limrent  ao  pillage;  ib  rea- 
contraient  souvent  des  traineurs  russes  que 
TappAt  des  liqueurs  et  du  bntin  arait  relanas 
en  grand  nombre.  Ces  rencontres  occasion- 
naient  nuelqvefob  des  fusillades  •  mais  da 
courte  aurte,  oar  ni  lea  uns  ni  les  autres 
a*avaient  pour  but  de  combatlre. 

«  Cependant  las  incendies  se  muhipliaienl 
avec  une  si  ^tonnante  rapidiid,  qu*iln'etait 
phis  possible  de  les  consid^rer  comma  dfs 
accidents  ordinaires;  leur  vMtable  esuse 
ftit  bientdt  eonnue.  Des  incendiaifes  fureni 
pris  cb  flagrant  debt;  plusieurs  furent  tues 
sur  la  place,  d'autres  uvr^  k  une  commis- 
sion mililaire  que  Napol^n  crea  pour  l«s 
iuger.  Ils  dirent  qu*ils  n'avaieni  agi  que  par 
les  ordres  de  Rostopcbin ,  fiirant  eondamncs 
k  £lre  fuaillea  et  exkniU  aur-le-cbamp. 
Leurs  cadavres,  exposes  dans  les  rues  on  au 
tacb^  a  des  poteaux ,  ajoutaient  aux  bor- 
rcurs  dout  rarmee  fran^aise  ^tait  enViroo- 
nee.  On  trouva  aussi  des  matieres  inflam- 
mables  dans  beaucoup  de  maisons ,  et  des 
petards  dans  plusieurs  tuyaux  de  ponies, 
entre  autres  dans  ceox  de  l1i6td  de  Rostop 
cbin. 

•  Aussit6t  que  Napol^n  eut  acquis  la 
certitude  que  c'^aient  les  Russes  qoi  bril- 


RUSSIE. 


473 


aade  wMilit^  4e  denrtet  et  de 

to 


',  y  abui- 
doua  lei  Wn—imH  1  lesr  cmm  natural. 
Dm  la  nait  do  i5  an  i6,  let  ineoMliaini 
icdoiifalerant  d*actmti  el  d*audace;  rinoen- 
die  fit  des  propie  cffrijants.  Le  t6  an 
iMtia,  da  vent  imp^ne^i  le  reodit  pretque 
«&enl.  Hoacoo  offrit  alon  le  spectade 
d'oae  aaer  de  flammo  agit6e  par  lei  vents. 
Ua  baleen  tpd  domine  la  TiUe  re|nait  k  la 
kanlevr  des  appartements  qii*occupait  Na- 
poKon.  De  U  d  ponTait  contempler  k  loisir 
est  qNNivanlable  spectacle.  U  Tovait  avee 
dsalear  la  deaftiMlion  d'nne  vilJe  sur  la 
de  kqineOe  U  avait  fonde  ses  es- 
;;  on  FenSendit  s'toicr  :  «  Bloseoa 
•  BlHtnktt;]e  pmdk  lartompenie  one  favais 
a  ma  fanve  araeel » 


lia  Ics  iBBisMif  ae  tendient  eonune  dans  les 

aatrcs  viIbs  dlBorope ;  un  grand  nonbra 

de  rasi  le  troovvrant  inleroepUes  par  le 

fee.  If  spoleon  ne  lit  expose  k  toe  s^re 

sinBimisaementdesonarmee.II  iuit  (Tail- 

kus  uMoouBode  par  la  chaleor  que  r^pan- 

^  rinccndie ,  el  one  pluie  de  feu  tonbait 

wwiiniieUwnemt  Mur  les  bltiments  qui  se 

Uwvueat  dsoBS  le  Kremlin ;  n^anmoins  il 

I'sbrtaaaii  k  j  rester,  malgre  ki  instances 

da  pBcrsoK  qui  rentonraient ,  lorsqu*on 

U  radii  esopte  qn*on  avail  tente  d'incen- 

diff  le  pslaia  moie  qu'il  occnpait ;  que  le 

fca  edalsit  n*la  tov  de  rarsenal,  et  qu'un 

mUsI  de  poliee  qu'on  venail  d*arrllcr  dans 

tt  bidaienc  dcail  accuse  de  Yy  avoir  mis. 

ut  aroonstaswes  deoderent  Napoleon ;  n 

ft  iaimger  devant  Ini  le  soldal  de  police, 

<l  soniAl  apres  il  partit  (le  i6  septcmbre 

*■  Mir)  ponr  transporter  son  quartier  ae- 

■Oil  k  reirovskoe,  qui  eiait  situe  sur  la 

nmte  de  Pelersbouiig,  k  nne  derat-lieue  de 

la  bwriere.  II  sorlit  du  Kremlin  par  la  porle 

fa  ooodoiaait  snr  le  quai ,  les  aulres  issues 

<<anl  devenoes  impraticables  par  suite  de 

riaeeodie  des  maisons  voisines. 

•  Ilous  avoDs  vu  que  malgre  les  precau- 
tiMs  prises  par  Napoleon  pour  conserver 
Moicpu  intacte ,  les  soldats,  pousses  par  la 
te,  s*etaient  ripandos  dans  la  ville  la  nuit 
nte  qui  suivit  son  arrivee ,  et  avaient  com- 
■csee  k  piller,  tant  il  elait  difficile  d*em- 
ptdttr  qu'on  ne  s'appropriAl  ce  qui ,  6tant 
*bttdoane,  semblait  n*appartenir  4  per- 
Ke;  mais  oe  pitta^  n'etaii  poidt  auto- 
,  en  s'y  Itvrail  luiiTement ;  I'habitant 


me 


enfuromiaBte  foornirent  auMi  d«8  le- 
gltuam ,  de  sorte  que  rarm^e  se  trou?a 
momeptantoent  dana  raboodanoe. 

n*avail  pas  M  mallraite,  el,  si  la  ploparl 
dm  maisons  n'eossenl  ms  it^ descries,  Mos- 
eon  n*auniil  souflert  aautre  dommage  que 
celoi  qu'entnine  nioessairemenl  Tarrivee 
d'une  nombreuse  armte  enoemie.  Les  dis- 
positions de  Napolfon  pour  obtenir  oe  rc- 
sultat  auraient  ^i  puissamment  secondees 
par  rint^^  que  I'armee  avail  k  la  conser- 
vation de  oelte  capitale,  interftt  qui  itait 
vivemeni  senti  mkme  par  les  simples  sol- 
dats. Le  disordra  suivit  d'abord  les  progres 
dieKncendie,etfutjporlAasoBCQmbleloff»-  \ 
an*on  sul  qne  eel  mcendie  itatt  I'onvnga 
oea  Russea. 

«  Le  soldal  disirail  aidcnunenl  la  jpaii , 
non  pas  poor  Muqiper  anx  dannrs,  il  lea 
bravail  gaiemeni ,  auds  1  cause  des  blignea 
el  des  privations  qui  exeidaient  ses  foroas. 
Yoyanl  ses  espiranoes  deques ,  il  ne  songea 
qu*a  jouir  du  present,  ne  oonnnt  plus  de 
mn ,  et  se  livra  aux  plus  grands  exces;  le 
meurtre  exceple ,  il  se  permit  tout.  Uo 
enirojable  tumulte  suooraa  bienldt  k  oelle 
solitude  inatlendne  qui  regnait  dans  Moscen 
lonqu'on  y  pMlra. 

•  On  entendait  k  la  fois  le  pelillenient  des 
flanunes ,  raffaissemenl  des  bAiimenis ,  les 
eris  des  animanx  qui  y  aiaient  M  aimm- 
donn&,  lesg^missements  des  habitants,  les 
imprtetionadn  addal  ivn,  disputant  aua 
flanunes  une  parlie  de  leur  proie.  Le  pillage 
et  rinoendie  mardiaient  de  front ;  tous  pd- 
bienl  on  acbelaient  k  vil  priz  les  mndoits 
du  pillage,  et  i*inlMl  rtenit  plus  d'une  fois 
dans  le  mime  Ken  Tbabit  brodi  do  gte^ral 
el  l*bnmble  habit  dn  soldat  Le  jour,  des 
tourbillons  de  furafe,  s*ilevant  de  toutes 
parts ,  formaieni  nn  nuaae  ipais  (|ui  obscur- 
eissait  la  Inmiere  dn  soleil ;  la  nuit ,  les  fkun- 
mes ,  m£l^  k  ces  tourbiUons,  ripandaient 
au  loin  une  sombre  clan& 

«  Le  sort  des  babitants  qui  itaient  restfa 
dam  Moscou  devint  aflreux ;  oblig^  de  fuir 
leiirs  maisons  embrasees,  ils  erraient  au 
milieu  de  cetle  ville,  courb^  sons  le  far- 
deau  de  lenrs  objets  les  plus  precieux,  et 
cberchant  un  asile.  Dans  cette  situation  d^ 
plerable,  ils  se  voyaient  eipos^  aux  vio« 
fences  du  soldat,  qui ,  apres  les  avoir  ou- 
trages et  pilles,  poussait  quelquefois  la  bar- 
baric josqu'4  les  forcer  de  porter  eoXHD^mes 
au  camp  leur  propre  diponille.  Lebesoin 
de  se  secourir   mutuollement  les  porta  a 


476 


L^UNIVEKS. 


'  quitta  en  toute  fadte  la  position  de  Ta- 
rootino,  ft  toute  Fann^o  russe  se 
porta  8ur  Malo-Iarostavetz.Dokhtoarof 
en  chmwa  deux  bataillons  fran^ais. 
Euff^ne  le&it  attaquer  par  la  diTiaion 
Delzons,  qui  refoule  les  Russes  k 
i*autre  extremity  de  cette  ?ille  ouverte ; 
Dokhtourof  les  rallie,  et  les  Fran9ai8 
8ont  repouss^  h  leur  tour  Jusque  sur 
la  grande  place ,  iA  la  lutte  recommence 
avec  adiamement.  Delzons  est  frappd 
d*ttne  balle;  son  frhrt  s'danoe  pour  le 
secourir:  lis  tombent  tons  deux  dans 
les  bras  Tun  de  I'autre.  Dej^  les  Fran- 
^ais  pliaient ,  lorsque  (juilleminot  vient 
r^tamir  le  combat.  La  diWsion  Brous- 
sier  seoonde  Guilleminot ,  qui ,  pendant 
quekques  instants,  reste  mattre  de  la 
vitle.  Les  Russes  retoument  k  la 
charge,  et  ressaisissent  encore  ravan- 
tage.  Pendant  cette  lutte  h^roijue, 
Mapol6on  venait  d'arriver,  suiti  de 
prte  par  la  garde  et  le  corps  de  Da- 
Toust :  il  donne  Toidre  h  G^ard  et  h 
GompaoB  de  prendre  la  TiUe  h  revers; 
mais,  au  mane  moment,  I'arm^  de 
Rontousof ,  forte  de  soixante  et  dix 
mille  hommes,  d^bouche  dans  la  plaine. 
L'aitillerie  francaise ,  croisant  son  feu , 
foudroie  leurs  tetes  de  colonnes;  mais 
la  hitte  continttait  dads  la  yille;  la  di- 
vision Pino  s*dance  au  secours  des 
Fran^ais ;  EuR^ne ,  k  la  iitd  de  la  garde 


qui  venait  de  remplacer  celui  de  Dokli- 
tourof ;  Tartillerie  francaise ,  longtemps 
gjMe  par  les  difBcult&  du  terrain,  se 
develo^pe  alors  et  silJonne  les  rangs 
ennemis:  les  Francis,  la  baionnette 
en  avant,  s'irritent  des  obstacles  que 
la  bravoure  des  Russes  leur  oppose; 
lis  rejettent  enfin  hors  de  la  ville  Fen- 
nemi,  qui,'  rom{)ant  ses  colonnes i 
abandonne  la  position  pour  la  septidme 
fois.  Eugene  vatnqueurd^i^oiesa  petite 
arm^enavantderaalo-Iarosldvetz.  Get 
Episode ,  ou  les  Fran^ais  ne  recueilli- 
rent  que  de  la  gloire,  puisqu*ils  for- 
cerent  k  la  retraite  des  forces  qua- 
druples, est  un  des  faits  d'armes 
qui  honorent  le  plus  la  valeur  de  nos 
troupes;  les  Italiens  s\  montr^rent 


nos  dignes  toiules;  et  les  Russes,  qui 
jamais  ne  d^loy^rent  plus  de  Cons- 
tance et  de  courage,  ont  noblement 
rendu  justice  k  leurs  adversaires.  La 
lutte  avait  duWi  douze  heures:  la  ville 
n'offrait  plus  que  des  d^combres  ty- 
mants  oii  gisaient  pdle-mlle,  etdant 
la  position  oi^  la  mort  les  avait  firap- 
p^,  les  corps  de  huit  mille  Russes  et 
de  quatre  mille  Francais,  difference 
qii'expliquent  les  effets  puissants  de 
notre  artillerie. 

Par  un  jeu  bizarre  de  la  fortune , 
le  r^ultat  de  cette  bataille  fut  plas 
funeste  aux  vainqueors  qu*aux  vaincus. 
Napolten  supposant,  d'apr^  les  moa- 
vements  de  iLoutousof ,  que  ce  g^n^vi 
etait  d^d^  k  se  maintentr  dans  sa  po- 
sition i  avait  consults  Murat ,  Bessiere 
et  le  comte  Lobau  sur  Fopportunite 
d*une  nouvelle  attaque.  Tons  furent 
d*avis  que,  dans  F^tat  oi  se  trourait 
Farm^e  francaise ,  II  fallait  renoncer 
k  la  mardie  projet^e  sur  Ralouga ;  le 
comte  Lobau,  interrog^  en  dernier 
lien ,  insista  sur  la  ntossit^  desere- 
Urer  sur  le  Niimmpar  la  rtmte  la 
pku  courte  et  la  pHu  eomwe,  par 
Mqfaisk,  et  lepluepromptementpot' 
Hbk.  !9apol6on  ^tait  seul  d*un  avis 
contraire;  tandis  qu'il  hdsitait,  Rou- 
tousof  etait  dans  une  perplexity  sem- 
blaUe.  Persuade  que  NapoMon  manoeo- 
vrait  sur  son  flanc  pour  gagner  JUMp « 
et  couper  ainsi  ses  communications 
avec  Tchitchagof ,  il  se  d^ida  k  r^ro- 
grader.  De  son  edU ,  et  dans  Fi^o- 
rance  de  cette  nouvelle  determination  i 
Pempereur  se  resjginant  simaltane- 
ment  k  faire  volte-mce  vers  le  nord , 
dans  la  direction  de  Mojaisk ,  Rootoo- 
sof  ne  pouvait  se  persuader  que  1  ar- 
m^e  firan^ise  se  retirait  par  une  route 
d€jk  d^vastee  et  sans  ressourcc^;  " 
manoeuvra  pendant  plusieurs  jours 
pour  lui  former  le  chemin  du  sod;  et 
torsqne  ses  doutes  ftirent  lev^s,  jj  se 
contenta  de  harceler  sans  relAcbe  Feo- 
nemi ,  attendant  que  Fhiver  et  les  pri- 
vations le  lui  livrassent  sans  dtfeo^. 
Les  Fran9ais,  vivement  attaqu^s  pres 
de  Viazma  par  Miloradovitcb  et  Pla- 
tof ,  tandis  que  Routousof  restait  im- 
mobile a  quekiues  lieues  en  arriere, 


'.•-. 


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E17SSIK. 


,    477 


curent  encore  la  glotre  de  faire  recoler 
les  Busses;  mais  ils  perdirent  quatre 
miUe  homines.  lis  Toyaient  k  daque 
pas  augnienter  le  nombre  des  tratoeurs 
et  des  blesses ;  leur  marcbe  deyenait 
de  plus  en  plus  pesante.  Ifey,  qui  avait 
moms  soonert ,  rempla^  Davoust  k 
rarri^-garde.  Les  oievaux  du  train 
tombaient  de  fiatigue  et  d'^paisement : 
il  fallut  atendonner  des  caissons  et 
qoelques  bagages. 

Le  6  DOTembre ,  des  flots  de  neige « 
pounds  par  un  vent  nord-ouest ,  cou- 
▼rirent  les  cbemins ;  les  ddtachements 
chercfaaat  un  abrt  s'dgar^rent;  les 
sotdats  les  moins  robustes,  roidis  de 
froid,  laissaient  tomber  leurs  armes 
et  se  laissaient  massacrer  par  les  Go- 
saqaes.  Les  cheraux  qu*on  n'avait  pas 
ea  la  prdvoyanoe  de  ferrer  h  siaoe 
s'abattaient  sur  le  verglas.  Les  soldats 
affam^  les  ddpefaient  et  en  faisaient 
rdtir  les  chairs  au  feu  des  bi  vacs.  A  Do- 
rogoboaje,  Tannde  se  dirisa ;  Engine 
et  PoniatoTski  se  dirigerent  sur  Vi- 

apar  une  route-dcTenue  imprati- 
pour  les  cheraux  de  trait ;  Pla- 
toC  8u?aif  oette  colonne,  tuant  ou 
iuiaBt  prisonniers  tous  oeux  qui  s'^ 
cait»flatL*emparear,  Davoust,  et  Key 
qui  formait  rarri^-garde ,  se  porte- 
rent  diraetanent  sur  Smolensk.  Na- 
poiooo  J  entra  le  9  arec  sa  garde:  le 
10  f  Oanmst  le  rejoignit ;  le  1 3 ,  Eugene 
rameoa  les  ddbns  de  Tarm^  d'ltalie ; 
il  afail  perdu  soixante  pites  de  canon 
et  la  plus  ffrande  partie  de  ses  bagages. 
Ctfiath  Smolensk  que  Napol^n  put 
appHkaer  toute  I'dtendue  de  ses  pertes ; 
de  cette  armte  si  belle  il  lui  restait 
sous  ta  armes  enriron  qoarante  milie 
homflses ,  dont  cinq  k  peine  de  cavale- 
rie  mal  roontte. 

L'armte  du  nord ,  aprte  des  alter- 
natires  de  succte  et  de  rerers,  avait 
dvacud  Polotsk ;  Gourion  Saint -Cyr, 
menao6  par  Wittgenstein  et  Tarmto 
de  Finlande ,  manoeuyrait  pour  se  rdu- 
nir  k  Victor,  qui  se  troura  bient6t  k 
la  tto  de  treote-six  mille  hommes ;  k 
SmoUani ,  Wittgenstein  Fattaqua  sans 
poofoir  le  forcer  dans  ses  demidres 
HgBcs;  mais  le  mardchal  profita  de  la 
outt  poar^se  rq;>lier  sur  Sanno ,  laissant 


ainsr  a  ddcouvert  les  routes  de  Minsk , 
de  Vitepsk  et  de  Viina.  Vitepsk  fut 
occupy  par  les  Russes  qui  Orent  pri- 
sonniers le  gdn^ral  Poujet ,  le  comman- 
dant Ghevard^ ,  et  une  partie  de  la 
Samison.  Cependant  Tchitchagof  ten- 
ait  k  dtabilr  ses  communications  avec 
Wittgenstein ;  Minsk  devenait  le  point 
autour  duquel  devaient  pivoter  leurs 
operations ,  dont  le  but  dtait  de  couper 
la  retraite  de  Napoleon  sur  la  ligne  de 
la  Ber^ina.  L*amirai ,  dont  Tinaction 
deSchwartzemberg  favorisait  les  mou- 
rements ,  laissa  vingt-sept  mille  hom- 
mes, sous  les  ordres  ae  Sacken,  k 
Briest-LitoTski ,  cinq  mille  k  Proujani , 
sous  le  commandement  d^Essen ,  et , 
contenant  ainsi  les  Autrichiens  et  le 
corps  de  Reynier ,  il  marcba  sur  Minsk 
k  la  t^e  d  environ  trente  mille  sol- 
dats ;  deux  renforts ,  conduits  par  Lia- 
ders  et  Herthel ,  dont  la  reunion  prd- 
seutait  un  corps  de  ouze  mille  hommes, 
devaient  le  joindre  k  Minsk  le  13  no- 
vembre. 

L'arm^  de  Routousof  s*avan^it 
sur  Smolensk;  les  guerriers  russes, 
habitues  au  froid ,  abondamment  pour- 
vus  de  munitions  et  de  vivres,  ren- 
contraient  k  cheque  pas  des  d^ris  de 
cette  d^sastreuse  retraite ;  ddfaits  dans 
toutes  lesgraodes  batailles ,  ils  avaient 
cependant  les  avantages  de  la  victoire; 
et  les  vainqueurs  de  Smolensk,  de 
Borodino,  de  Polotsk  et  de  Malo-Ia- 
roslavetz  se  retiraient  devant  eux.  Les 
funestes  symptdmes  d*une  ddsorcani- 
sation  comply  commen^ient  a  se 
manifester  dans  les  restes  de  Tarmte 
fran^ise.Lesordresderempereur,que 
la  nottveaut6  des  circonstances  per- 
mettait  d'interpr^ter  avec  plus  de  la- 
titude, n'6taient  plus  ex6cut^  ponc- 
tuellement :  c'est  ainsi  que  Baraguay 
d'Hilliers  n^ligea  de  faire  replier  sur 
sa  division  un  corps  isoM  de  deux 
mille  hommes  qui ,  surpris  par  les  par- 
tisans Orlof  Denissof ,  Davydof ,  Ses- 
lavin  et  Figiier,  se  vit  foro6  de  mettre 
bas  les  armes. 

Routousof,  poussant  ses  avantages , 
embrassait  de  ses  ailes  la  position  de 
Peropereur  :  avant  d*arriver  iusqu*^ 
Minsk  par  Orcha.et  Borissof,  Parm^ 


47« 


L'URIVERS. 


tran^ise  afoit  soixanle  lieues  a  par- 
courir.  Yietor  re^ut  I'ordre  d^oocuper 
Wittgenstein.  Le  14  noTembre^  Na- 
polton  quitta  Smolensk  arec  ia  rieille 
garde;  Eugene  et  Davoust  devalent 
suirre kun  four  de  distance:  Ney  re- 
(ot  Tordre  de  n'^vacoer  la  ville  que  le 
17 ,  af>i^s  avoir  fait  sauter  les  tours  de 
Tenceinte  et  d^uit  oe  qu'il  ne  pou- 
vait  transporter.  A  Krasnoi,  la  divi* 
ston  Dojarorovskoi  fut  repouss^  a?ec 
perte.  Eugene  n'^happa  ^e  par  mi- 
racleaMiloradovitch ,  et  rejoignit  Tem- 
pereur  h  KrasnoT.  Koutousoi  semblait 
n'avoir  plus  qu'a  oser  pour  aneantir, 
par  le  choc  de  son  arm^ ,  les  debris  des 
colonnes  fran^ises;  le  17 ,  il  fit  ses  dis» 
positions  pour  attaquer;  le  lendemain 
au  point  du  jour ,  Fempereur  sort  de  la 
ville,  h  la  tite  de  douze  raille  hommes 
de  sa  garde,  tout  pr^t  h  engager  le 
combat.  Le  g^n^ral  russe ,  ^tonn6  de 
cette  resolution,  rappelle  h  lui  les 
corps  de  Tormassof  et  de  Milorado* 
vitch ,  qui  laissent  ainsi  le  passage  libra 
h  Davonst  et  au  xice-roi.  Cette  d^ 
monstration  de  Temperenr  lui  permit 
d'accompiir  sa  retraite  sur  Oreba: 
itiais  il  laissait  en  arri^re  le  mar6cbal 
Ney ;  et  les  Russes ,  maftres  de  Kras- 
noi ,  annoncaient  dans  leur  bulletin 
de  cette  journ^equ'rls  araient  fait  huit 
mille  prisonniers  et  pris  plusfeurs 
centaines  de  canons.  (Test  a  Dom- 
brovna  que  Napoleon  recnt  hx  nouvelle 
de  la  pnse  de  Minsk ;  fe  19 ,  il  entra 
dans  Orcha,  ou  son  arm^  trouTa 
quelque  artillerie  et  des  approvisiomie- 
inents. 

Cependant,  rest6  seid  en  arrf^e 
avec  une  poign^e  de  braves ,  Ney  eicdcu- 
tait,  sous  le  feu  de  Farm^e  russe  qui 
Tentourait  de  toutes  parts,  cette  re- 
traite prodigieuse  dont  les  Rosses  eux- 
m^mes  n*out  parl^  qu'avec  admiration ; 
le  21 » il  ramena  h  Orcha  trois  mille 
hommes » ddhris  glorieux  de  sa  petite 
armee. 

L*empereur,  en  s*dvan^nt  vers  la 
Rer^na«  ne  supposait  pas  que  Boris- 
fiof  fidt  dija  au  pouvoir  des  Russes; 
une  &usse  manoeuvre  de  Schwartzem- 
ber^  fut  la  cause  de  ce  dtestre.  Le 
general  autrichien ,  aprds  avoir  battu 


Sacken  h  Wolkowisk ,  et  Tavoir  i^t^ 
vers  le  sod  avec  one  perte  coittid^ 
rable,  s'^it  engage  h  sa  poursuite,  au 
lieu  de  marcher  contre  Tchitcha^pf 
quMl  poovait  mettre  dans  une  position 
critique,  en  le  poussaot  sur  Tempe- 
reur.  La  condufte  de  Schwartzemberg 
dans  cette  circonstanoe  a  fait  suppo- 
ser  quMI  agissait  d^jd  eonformeroent 
aux  mstructions  secretes  de  sa  cour ; 
pteut-dtre  que ,  pr^vojrant  Tissue  poli- 
tique de  oette  campagne  d^astreu- 
se ,  il  se  fit  une  k>i  de  meager  son 
corps,  dont  Napoleon  n'aorait  pas  mair- 
qu6  de  se  couvrir  s'il  Tedt  eu  sous  la 
main.  Quoi  qu*il  en  suit,  Tehitchagof 
put  s*emparer  de  Minsk ,  ou  ii  trouva 
des  ap(>rovi6ionnements  conskl^ables; 
de  la  il  se  porta  sur  Borissof,  qui 
cMa  bientdt  ii  la  superiority  de  ses 
forces ,  mal^r^  la  behe  resirtanoe  de 
Dombrowski. 

II  ^It  de  la  nlus  haute  importaoce 
poor  Napolton  ue  reprendre  Borissof, 
pour  s*assurer  les  moyens  de  passer 
la  B^^ina.  Oodinot ,  second^de  Dom- 
browski ,  rentra  dans  cette  vtUe,  col- 
butant  la  division  Pahlen  qui  repassa 
pr6cipitamment  le  fleove  et  rompit  le 
pont  derri^re  elle.  Sur  Tautre  rive, 
on  d^couvrait  toute  rarmee  de  Tehit- 
chagof occupant  les  hauteurs. 

I/empereur  venalt  d'arriver  h  Bohr. 
II  fut  dtoid6  qu'on  passerait  la  B^r^ 
zina  au  ^u6  de  Stoudzianka }  le  ddgel 
pr^ntait  de  grands  obstacles  aux 
pontonniers ;  mais ,  le  94 ,  une  fmte 
eelee  raffermit  les  terrains ,  et  fadlita 
le  transport  de  Partillerie. 

L'arm6e ,  aux  environs  de  Borissof, 
offrait  encore  un  efTectif  de  quarante- 
cinq  mille  hommes  et  de  deux  eent 
cinquante  canons;  les  non  oomliart- 
tants  qui  se  trafnaient  a  la  sufte  des 
corps ,  formaient  une  masse  d'environ 
qurnze  mfHe  hommes. 

Le  corps  d'Oudinot  passa  te  pre- 
mier, et  rejeta  la  division  TehapHtz 
dans  la  direction  de  Borissof.  Le  38 
au  ntatin ,  ii  ne  restart  plus  sur  la  rive 
gaudie  du  fleuve  que  fa  division  6^ 
rard  et  cefle  de  Parthouneaux ,  qui  de- 
vaient  proteger  les  ponts  et  tftRtoumer 
fattentioa  deTdntchagof.  Ge  g^n^ral 


HUSSIE. 


479 


aumt  pu  faoilement  inqaHier  la  r^ 
tnfte  des  Fraofm;  il  en  avait ^t^  em* 
pisM  par  les  ordras  de  Kootousof ,  qui 
pcsta  loogtempt  persuade  que  Napo- 
leon yoaliiit  roavrir  un  passage  vers 
Minsk.  Cependant  ramiral ,  mieuz  in^ 
truit  de  la  marebe  de  remjpereur^  se 
mit  en  devoir  de  reprendre  PoflfoMive. 
Piatof  et  Wittgenstein  se  joignirent 
Ibieotot  aux  fiwees  qui  occopaJentVio^ 
tor,  qai  eut  ia  gloire  de  ne  pas  se  lats- 
9tf  entamer.  Paithouaeaux ,  oern6 
afee  toute  sa  division ,  s'teit  vn  forc6 
de  se  rendre;  entre  Bcmssof  et  le 
fleuve  s*^tait  prcssee  la  foule  des  non 
oombattants ;  fes  bagages ,  les  voitures 
charf^  de  blesste,  tout  offrait  sur 
oe  point  Ftmage  do  dtordre  et  de  la 
ennfosi^Hi.  L'artillerie  ennemie  fou- 
droya  longtemps  cette  masse  immo- 
bile  qui  n'avaitphismtoeassezd^^Qer- 
eie  pour  fuur ;  mais,  snr  Taotre  rivage , 
ISty  aoutint  gloriensement  Thonneur 
de  rarm^fran^aise;  aprte  one  lutte 
loogue  et  meurtri^e,  le  mar^chal  or- 
doBoe  ime  attaque  g^ndrale ;  lea  Ruases 
plienft  sous  ce  dernier  ^ortt  et  lais* 
sent  aox  Fran^  le  cbamp  de  bataiJle 
joBdi6  de  roorta.  Tchitdia^f  6tait 
vaiaeu,  et  taisBait  dtennais  a  I'en- 
nemi  le  cbowi  Hbre  jusqa'ii  Vilna  et 
an  Nitoen. 

«  Lb  mat,  qui  vea»t  de  laet^  fin 
aux  combats  wax  lea  deux  lives  de  ia 
BMxioat  ittt  una  des  plus  cmeUes 
denuis  le  depart  de  Moseou.  Le  fivoid 
veaoaUait  de  violence;  le  vent  du 
Qord,  pliia  Apre,  fouettait  une  neige 
^paiase  sur  ies  bommea  S90$  abris  et 
Sana  fens.  Les  baga^ea  entasaea  Brte. 
des  pants  cq  obstcwent  toivoiirs  I'en- 
ti^;  longtenpa  <yng4B  sur  q»  ter* 
lain  veaaenr^y  leseanons  daWittgeiH 
stein  ravaieait  labour^  dans  tous 
las  sens »  1ft  ioncbant  das  debris  do 
plnsiaiirs  aoifiiers  de  mtures  et  de 
ebariola  eulbut^i  sur  des  raoneeaux 
da  eadftvrea.  Burant  es  UmiM  eooK 
bat,  phis  4ti  douxe  mUe  Bcrsonaes, 
boiMm  HfainiBes^  parsAi  Ifisquels  on. 
rwsjumilit  des  famiMes  enliiret  avee 
leuit  en&nta ,  s^^taienl.vainemeDt  ef« 
isnis,  en  mpliAttnt  ies  airs  de  l^qrs 
bwMitables^  ds  a*ouvrir  le  pas^ 


sage  des  ponts ;  mais » depuis  que  Par- 
ttllerie  se  taisait,  tomo^  dane  un 
morae  accablement,  ils  restaient  iin- 
mobiles  et  transis;  insensibles  a  toutes 
les  affections,  on  ne  les  entendait  plus 
s*appeler  rteiproquement ;  ehacon ,  r^ 
signe  k  ne  plus  ae  d^fendro  oontre  la 
mort ,  semblait  avoir  cess<  de  prendre 
interit  k  la  vie  de  ses  amis,  de  ses  pa- 
vents  ;  un  silence  affreux  8ooe6dait  aux 
accents  du  d^sespoir, 

«  A  neuf  heures  dn  soir,  le  g^n^ral 
£bl6  6tant  parvenu  k  d^encombrer 
le  passage ,  les  deux  divisions  de  Vic- 
tor travers^rent  la  B^r^ina;  il  ne 
rests  qu'une  arriere-garde  devant  ren* 
nemi  pour  masquer  ce  mouvement. 
L*artiuerie  suivit;  et  tout  ce  corps 
ayant  attaint  la  rive  droite  un  pen 
apr^  minuit,  les  deux  ^nts  dcmeu- 
rerent  libres  et  d'un  acces  £icile.  Les 
non  oombattants  pouvaient  alors  pas* 
ser  k  leur  tour;  ils  furent  avertis  k 
dlverses  reprises;  on  les  pressa  de 
profiter  du  peu  de  moments  qui  leur 
restaient  encore.  Mais  le  temps  et  lea 
movens  manmiaient  pour  transporter 
leaiMgageset&ire  suivre  les  chariots: 
la  plupart  de  ces  malbeureux  avaient 
lii  toute  leur  fortune;  d*autres>  trop 
afifatf)lis  par  la  fatigue  ou  ies  makidm , 
s'effravaient  a  Tidee  de  se  mettre  en 
route  a  pied  y  au  nailieu  d'une  nuit  si 
froide  et  si  obscure*  Tous  refuserent 
de  mareber,  attendant  le  jour,  qooi 
qu'il  pdt  arriver. 

«  En  vain ,  pour  les  engager  a  par- 
tir,  le  general  £bl^  et  le  mamhariui- 
mtoe,  apres  avoir  employe  la  priere 
et  jusqnT^  la  menace,  mrent  br^ler 
qnelques-nnes  de  ces  voitures,  dont 
rabaadon  semblait  leur  codter  tant 
de  regrets ;  ils  ne  s*en  ^mureat  pas ; 
rien  ne  paraissait  pouvoir  les  tirer  de 
leur  sombre  apatbie.  Aux  approcbes 
du  jour,  rarriere-^rde  se  retira,  et 
le  bruit  se  r^pandit  parmi  eux  qu*on 
aliait  detruire  les  ponts.  Tout  k  coup 
la  foule  se  ranime ,  elle  aocourt  et  sa 
presse  comme  la  veille  sur  le  rivage; 
Is  d^sordre  produit  encore  Tencom- 
brament;  tout  s'arr^;  les  cris,  les 
querelles  recomroenceiit  avec  fureur. 
Le  genial  £bl^  devait  mettre  le  feu 


4M 


UUNIVERS. 


aux  pottts  k  huit  heures;  il  attend 
encore;  mais  le  jour  est  venu,  I'en- 
nemi  va  parattre ,  il  s*agit  du  salut  de 
rarmte...  A  hiiit  heures  et  demie, 
une  ^paisse  fum^  obscurcit  Fair  pr^ 
de  la  rive  droite;  ies  cris  redouUent; 
peu  apr^  la  flamme  s'di^e....  le  pas- 
sage est  ferm^. 

«  On  vit  alors  un  spectacle  eflfroya- 
Ue :  de  ces  milliers  d  iofortunds  dont 
la  derni^re  esp^rance  vient  de  s'^va- 
nouir,  Ies  uns  s'efforcent  de  se  frayer 
un  chemin  a  travers  Ies  flammes ;  ils 
se  cramponnent  aux  chevalets,  aux 
planches  h  demi  consumes ,  et  p^ris- 
sent  d'un  supplice  horrible ;  d'autres 
se  hasardent  sur  la  glace  encore  mal 
affermie;  die  s*entr*ouvre  sous  leurs 
pas ,  ils  sont  engloutis !... » 

La  division  Lolson,  forte  de  dix 
mille  hommes  de  troupes  fratches,  ve- 
nait  d'arriver  k  Yilna;  elle  re^ut 
Tordre  de  faciliter  a  Tarm^e  Ies  ap- 
proches  de  cette  ville.  G'est  de  Male* 
deczno ,  ou  I'empereur  arriva  le  3  d^* 
oembre,  qu*il  dicta  ce  29'  bulletin ,  ou 
la  simple  v^rit^  ddpassa  Ies  craintes  g6- 
n^rales.  ASmorgoni,  Napolton  assem- 
bia  lea  chefe,  confia  lecommandement 
derann^liMurat,  et  partit  imm^iate- 
ment  pour  Paris :  entre  Ormiana  et 
Yilna ,  il  faiUit  torober  entre  Ies  mains 
du  partisan  Seslavin;  il  rentra  aux 
Tuimles  le  19  k  minuit. 

La  rigueur  du  froid  acheva  la  d^ 
sorganisation  de  Tarm^ ;  le  7 ,  le  ther- 
mom^tre  descendit  k  38  degr^  au-des- 
sous  de  la  glace.  lies  plus  robustes 
marehaient  en  avant  des  groupes ,  car 
toute  trace  de  discipline  avait  disparu. 
Le  froid  saisissait  d'abord  Ies  extr^ 
niit^:  la  chaleur  vitale,  concentre 
dans  Ies  organes  essentiels  que  la  na- 
toreapr^munisavectantdeprevoyance, 
causait  momentan^ment  un  bien-dtre 
trompeur;  le  soldat  se  laissait  alter  k 
une  torpeur  que  suivait  bient6t  la 
mort.  Les  plus  jeones  mouraient  par 
milliers:  un  grand  nombre  de  ecus 
dont  le  corps  endurei  aux  fatigues 
pouvait  roister  plus  longtenips ,  trou- 
▼ant  plus  facile  de  mourir  (pt  de  vivre , 
se  couchaient  sur  la  neige  et  refu- 
saient  de  se  reliever.  Le  feu  des  bivacs, 


dont  ces  malheureux  B*approchaient 
sans  precaution ,  coinmuniqaait  la  gan- 

Srene  aux  parties  gelto ;  et  Tinflaenoe 
'une  chaleur  extrtoie,  comme  celle 
d'un  froid  exoessif ,  avait  des  r^ltats 
non  moins  funestes.  Un  reste  d'ali- 
ment,  quelques  gouttes  d'eau*de-vje 
^taient  alors  des  ressources  pr^cieuses ; 
la  loi  de  conservation  avait  absorb^ 
tous  les  autres  sentiments;  Tami 
fuyait  son  ami  pour  d^vorer  seal  les 
mis^ables  ressources  que  lui  offrait 
le  basard :  enOn  rhorrible  supplice  de 
la  faim  en  poussa  quelques -uns  k  se 
nourrir  de  chair  humaine. 

Gependant  la  vuede  I'ennemi  ranpe- 
lait  comme  instinctivement  autour  des 
aigles  les  d^plorables  debrisdelagraade 
arm^.  Murat,  qui  aimait  la  gloire 
sur  un  grand  th^tre ,  perdit  son  eoer- 
gie;  Ney,  toujours  le  m6me,  restait 
le  dernier  sur  le  champ  de  bataille; 
c'6tait  la  providence  de  Tarridre-garde; 
il  £illut6vacuer  Yilna,  que  menafaient 
toutes  les  forces  de  rarmde  russe. 
L'arm^  debandde  fut  obli»^  d'aban- 
dooner  sur  la  colline  de  Ponari  les 
Equipages  de  Napoleon,  ies  caissons 
du  trdsbr ,  les  fourgons  et  le  peu  d*ar- 
tillerie  qui  restait.  Les  tralneun  et  les 
bless^ ,  rest^  en  grand  nombie  a  Vii* 
na ,  furent  cruelleraent  traits  par  las 
Cosaques ;  les  juift ,  non  moins  avides 
et  aussi  inhumains ,  assassioaieot  Iss 
Francis  dans  les  maisons.  et,  aprte 
les  avoir  d^pouill^,  jetaient  leurs  corp 
par  les  fenfires.  Les  malades,  entaotf 
dans  les  hdpitaux ,  moimirait  sans 
secours.  Un  grand  nomlnre  de  prison- 
niers  furent  oirig^  dans  rinterieur  i 
mais  bien  peu  parvinrent  k  leur  desti- 
nation. Les  ofneiers  russes  essayaleat 
en  vain  de  r^mer  les  effets  d*oM 
haine  que  Ton  avait  inspire  an  peo^< 
Les  soidats  ne  ooncevaient  pas  qa'oo 
pdt  ^rgner  des  hommes  ^  les  sei* 
^eurs  et  les  pr^tres  aocusaientd'avoff 
incendt^  Moaoou.  Quand  la  premidre 
exasp^ation  tot  pame ,  le  sort  des 
prisonniers  i'ameliora,  et  dans  btfa- 
ooup  d*endroit8  its  trouvte«nt  une  pro- 
tection gtodreuse.  ^ 
Les  Cosaques  de  Platof  ayant  te«m 
Rowno,  il  fallut  encore  ^vaeuer  cetis 


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RUSSIE. 


48i 


ptott  el  88  fvayer  ia  route  i'^p^  i  la 
main.  Tchitdiagof ,  Wittgenstein,  et 
Koutcmsof  qui   les  soirait,  suspen- 
dirent  leur  maicfae  k  Vilna;  I'hiver 
triomphait  des  Rosses  eux-mSmes.  Les 
difimnts  corps  de  I'amo^e  francaise 
se  distribu^ent  sur  la  ligne  de  la  vis- 
tok.  Le  roi  de  Nanles  esprit  que  le 
corps  de  Haodonald ,  auquel  il  avait 
donne  Tordre  de  se  replier  sur  Tilsitt, 
diangerait  sous  peu  la  face  des  affaires : 
mais  la  trahison  du  g^n^ral  prussien 
Torek  Tint  oonsommer  lesid^stres  de 
cette  campagne.  Le  marechal,  apres 
aToir  battu  ravant^gaorde  de  Wittgen- 
stein, ^it  entr6  k  Tilsitt,  ou  il  s'ar* 
r^  pour  donner  aux  Prussiens  le 
temps  de  le  rejoindre :  aprte  avoir 
peran  plusieurs  tours,  il  se  determina 
a  se  porter  sur  la  Pregel.  Ce  fut  alors 
qu*il  re^t  d'Torck  la  lettre  suivante, 
que  nous  rapportons  pour  montrer 
combten  les  alliances  qui  ne  resultent 
point  d'int6r#ts  conamuns  reposent 
sur  des  bases  fragiles. 

Tanrogen.  1*  3o  dinmohn  iSts. 

«  Monseigneur, 
•  Apr^  des  marcbes  tres-p^nibles, 
il  De  m'a  pas  6t6  possible  de  les  conti- 
noer  sans  ^re  entani^  sur  mes  flancs 
et  sur  mes  derrieres;  c*est  ce  qui  a 
retarde  la  jonctaon  avec  Votre  Excel- 
lence; et,  devant  opter  entre  I'alterna- 
tive  de  perdre  la  plus  srande  partie  de 
mes  troupes  et  tout  le  materiel  qui 
seal  assnrait  ma  subsistance,  ou  de 
sauver  le  tout ,  j*ai  cm  de  mon  devoir 
de  iiaiire  one  convention  par  laquelle  le 
rassemblement  des  troupes  prussiennes 
doit  avoir  lieu  dans  une  partie  de  la 
Prusse  orientale  qui  se  trouve,  par 
la  retraite  de  Tarm^  fraofaise,  an 
ponvoir  de  rarm6e  russe. 

«Les  troupes  prussiennes  forme- 
ront  on  corps  neutre  et  ne  se  per- 
mettront  pas  d'hostilit^s  envers  aucun 
parti;  les  ^v^nements  k  venir,  suite 
des  n^ociations  qui  doivent  avoir  lieu 
entre  les  puissances  bellig^rantes ,  d^ 
cideront  sur  leur  sort  futur. 

«  Je  m*empresse  d*informer  Votre 
Excellence  d^une  d-marche  a  laquelle 
j'ai  ^te  forc^  par  des  cireonstances 
majeures. 

31*  Ziyroison.  (  Russte.)  T.  ii. 


«  Quelque  jugement  que  le  moode 
portera  de  ma  conduite,  j'en  suls  peu 
inquiet.  Le  devoir  envers  mes  troupes 
et  la  reflexion  la  plus  mAre  me  la 
dictent :  les  motifis  les  plus  purs,  quelles 
quesoient  les  apparences,  me  guident; 
En  vous  faisant,  monseigneur,  cettr- 
declaration ,  je  m'acquitte  des  obliga«> 
tions  envers  vous ,  et  vous  prie  d'agreer 
Tassurance  du  profond  respect,  etc, 
etc. 

«  Le  lieutenant  g^n^ral  Yobck.  • 

La  defection  du  g^n^ral  Yorck  con- 
traignit  Murat  a  se  replier  sur  Posen. 
Bientdt  Maodonald  vint  se  r^ugier  k 
Dantzick.  Schwartzemberg ,  menag^ 
par  les  Russes  dont  il  n'inquietait 
plus  les  mouvements ,  ^tablit  ses  can- 
tonnements  sur  la  limite  du  grand- 
duebede  Varsovie,  et  Reynier,  tou- 
jours  poursuivi  par  Sacken,  prit 
position  a  Wengrod. 

L'arm^  d'invasion  ^tait  r^uite  au 
quart;  la  Russie  ^tait  sauvee,  et  le 
contre  -  coup  de  cette  erande  ration 
allait  bientot  6branler  l*edifice  mal  af- 
£ermi  de  la  puissance  deNapol^n.  Les 
rois  de  la  vieille  Europe  mesuraient 
leurs  esp^rances  k  T^tenoue  du  d^sastre 
imperial.  Cependantlesoldat-ero|)ereur 
mena^ait  encore ;  son  g^ie  n*avait  rien 
perdu  de  sa  port6e  et  de  sa  vigueur; 
mais  le  prestige  de  ses  armes  ^tait 
d^truit ;  TAngieterre  reprenait  son 
ascendant,  et  la  Russie,  comprenant 
tons  les  avantages  de  sa  nouvetle  posi- 
tion ,  renouait  en  silence  les  fils  rom- 
pus  de  la  politique  de  Pierre  I*'''  et  de 
Gatberioe  II. 

Nous  avons  cm  devoir  donner  quel- 

3 lies  d^veloppements  a  cette  campagne 
e  1812 ,  dont  les  r^ultats  ont  cnang^ 
la  face  du  monde ;  les  ev^nements  qui 
ont  suivi  cffrent  sansdoute  une  baute 
signification  historique,  mais  ils  ne 
sont  plus  que  Texpression  d'une  resis- 
tance b^roique,  et  ils  manquent  de 
ce  caractere  g^n^rateur,  de  cette  force 
d*initiative  qui  marqudrent  ia  p^iode 
que  nous  venons  de  francbir. 

(1813.)  L*ann^  1813  s'ouvrait  pour 
la  France  sous  les  plus  sinistres 
auspices.  Lord  Walpole  n^ociait  k 
Vienne,   et  ^braniait,  sans  trop  de 


482 


L'UNIVERS. 


peine,  la fiMit^  du  beau- pdrede Na- 
poleon par  des  promesses  magnillques. 
Plus  TAutriche  ^it  disposA  d  profit 
ter  de  ces  offres,  plus  il  itii  importail 
d'endonnir  les  soupoons  du  cabinet  des 
Tuileries;  le  g^6ra'l  Bubna  fut  exp^*- 
dl^  de  Vienne  a  Paris,  porteardespro* 
testations  les  motns  ^uiTogues.  La 
mediation  de  I' Autriche  entre  la  France 
et  la  Russie  fut  accepts  au  moment 
m^meou  Tattitude  des  Prussieos  et  de 
Schwartzeniberg  ne  laissait  plus  au- 
can  doute  sur  leur  determination  ul- 
t^rieure.  Eugene,  que  le  depart  de 
Murat  pour  Naples  laissait  mattre  de 
dinger  la  retraite ,  ^vacua  suecessiTe- 
nient  Posen  et  Berlin ,  vivement  press^ 
par  Wintzingerode  et  Wittgenstein. 

La  Russie,  sans  d^liner  la  mMia- 
tion  de  TAutriche  ^  ne  iroulait  traiter 
que  du  consentement  de  I'Angleterre, 
et  demandait  des  garanties.  Dans 
toutes  les  n^ociations  de  oette  epo- 
que,  M.  de  Metternich  d^plova  une 
rare  habiiet6 ,  et  les  ministree  francais 
ftirent  compl^tement  sa  dupe.  'Au 
reste,  les  preuves  authentiques  d'une 
inteUigence  formelle  entre  liss  cabinets 
de  Vfenne ,  de  Berlin  et  de  P^tenbomrg 
sent  d^ormais  acquSses  di  I'bistoire; 
on  les  trouve  dans  nne  lettre  de  Tern- 
pereur  d* Autriche  au  roi  de  Pniase. 
Gette  pi^e ,  dat^  du  mois  de  decern- 
bre  1 81  a ,  est  rapports  dans  le  Recueii 
de  pieces  cfficieUes^  par  Schoeil. 

Oependant  les  oons^quenoes  de  la 
ruction  se  d^yeloppaient  avec  rapi- 
dity-, M.  de  Nessenrede  ooncluait  itn 
trait!§  a^ec  la  Prusse;  bientdt  FAl- 
lemagne  entidre  se  souleva  au  nom  de 
oes  idees  d'ind^pendamee  et  de  ces  prin- 
cipes  de  libert6  dont  la  revolution 
fran^aSse  etait  le  sj/inbole.  En  Alle^ 
maefte,  oomme  na^dre  en  France^ 
ces  mes  et  ces  prinapes  trtompherent ; 
ainsi  tour  h  lour  Taincus  et  vamqueurs 
teroofgn^ntde  Tinfaillibilite  et  de  la 
puissanoe  du  systdme  regeneratemr. 

Par  le  traits  de  KalisoE ,  Alexandre 
s'engageail  ft  ne  pas  d^postr  les  annei 

fN|u*a  oe  que  la  Prosse  eAt  reoouvre 
terntoire  qu'eMe  posaedait  avantla 
guerre  del 9M; 
Au  m^a  de  mars,  le  traits  deStock- 


hohn  mit  les  forces  de  la  SuMe,  d^ 
detacb^e  de  la  France,  en  mesure  oe 
prendre  ft  la  lutte  une  coopdration  ac- 
tive ;  r Angleterre  c^da  aux  Su^dois  la 
Guadeloupe,  et  la  possession  de  la 
Norw^ge  devait  etre  le  prix  de  leors 
services  fiiturs. 

Gependant  Bliicher  et  Wintxinge* 
rode  vinrent  prendre  position  devant 
Dresde;  Wittgenstein  et  Koutousof 
s'avan^ient  en  meme  tenips,  et  me- 
na^dent  Davoost  du  poids  de  leurs 
forces  combine^.  Napol6on ,  parti  de 
Saint-Cloud  le  16  avnl ,  etait  dans  les 
plaines  de  Lutaen  le  1"  de  mat  Gette 
victoire,  que  suivireat  bient^t  les 
journees  de  Bautzen  et  de  Wurtchen , 
semblait  avoir  r6ooncilie  la  fortune 
avec  I'empereiur;  rarmistioe  de  Pless* 
witz  donna  anx  allies  le  tenips  de  re- 
cevoir  de  nombreux  renforts,  et  ar- 
retareian  de  Tarmde  vidorieuse.  D*ub 
autre  cdte,  T Autriche,  dont  TatUtude 
hostile  n'etait  plus  un  mystftre,  orgs- 
nisait  ses  armies  et  ses  ressources, 
et  n*en  autorisait  pas  moins  ses  agents 
diplomatiques  ft  garder  tous  les  dehors 
de  Taiiiance  prtoistante.  Le  oongres 
de  Prague  n^^tait  qu*on  artifice  dila- 
toire;  il  fut  bientdt  rompu  malgre 
Napdton ,  et  probaUement  ft  cause  de 
son  empressement  ft  traiter;  ft  cette 
occasion,  1' Autriche  leva  le  masque: 
«  Les  alli^  et  T Autriche,  annon^t- 
elle  dans  sa  d^laratioo ,  ^taieot  deja 
r6unis  de  pri&cipes ,  avant  fue  les  tiai< 
t^  eossent  d^lar^  leur  union. »  Gette 
rupture  permettait  aux  allies  de  pren- 
dre i'oflensivei  et,  en  cooceatraDt 
ieun  Ibrces  «n  Bohtoe,  de  toumer 
la  base  des  op^ations  de  Tarm^  m^ 
caise  qui  s*appuyaift  sur  ies  pl^ J7 
rOde?  et  de  rjElbe,  L'or  de  VI^x^' 
tare  etait  le  nerf  de  ces  immeps^ 
mouvaments;  eHe paya  ft  la  B**^?^*: 
ft  la  Pniase  deux  millions  de  iivres 
sterling  pour  rentiretien  de  leurs  9^ 
mto;  et,  ind^ndamment  de  era 
avanoes ,  on  er&  pour  cinji  ""J!"^ 
sterling  d*un  papier-monnaie  *  dii  ^ 
oent-fiSitottif,  et  qui  fat  gajantj  P^ 
les  trois  piiisaaAoes.  Outre  ces  sUpu- 
Jatioiis,  ie  gouvem^ent  ai^Lli^ 
r^rvaitde  fiaposer  des  forces  navaie» 


RUSSiE. 


4aa 


de  la  Russie;  e&in  les  partus  oontrao- 
tasteB  s'engp^ient  ^  ne  pas  n^ocier 
aree  rennemi  oommun. 

AlezandFe,  Ff^ddric,  Giiiliaiime  et 
Reroadotte  a'^taient  rdunis  h  Trachen^ 
ber|  ea  Silvio ,  oik  aa  trouTaient  ^- 
leuMDtlea  piidiiipoteBtiaivas  d'Autriehe 
et  d'ADgletem,  pour  y  ooneertor  uq 
piand*operatioD8  militaires.  Les  forces 
drsponiolaa  des  alli^  8*^?aient  alors 
k  huit  cent  iniUe  homraas.  La  bataille 
de  Dr«sde ,  gagnte  par  Napoleoa ,  fot 
sapglante  et  complete ;  un  ooulet  fran- 

Sls  atleignit  Moreau ,  et  lui  sauva  la 
ate  de  p^odtrer,  h  la  suite  de  T^tran- 
^er,  josqo'au  oceor  de  son  pays  natal, 
li  est  diffieile  de  decider  quels  furent 
les  motife  qui  le  datcrmineretit  a  quit- 
ter sa  retraite  dans  le  nouveau  monde 
pour  veoir  SEicttre  au  s^viee  des  alli^ 
son  eaie  loogteraps  inactive.  Se  laissa- 
t-ii  aeduire  par  respoir  d*eclipser  la 
gloire  de  son  aacien  rival ,  ou  n'eut*il 
q|ue  la  faiblesse  de  c^er  aux  s^uc- 
tions  d* Alexandre?  11  tomba  roortalle- 
ment  firapp^  k  c6t6  mime  de  ce  prince 
qu'il  aecompagnait  aur  le  champ  de 
bataille,  et  a  qui  il  communiquait  en 
ce  moneiit  qy^ues  observations. 
Transports  dans  la  p^ite  vilie  de 
Laha  eABoUnie,  ce  ^nj^ral  siipporta 
avee  fensetS  ramautation  de9  deux 
jamibea  que  le  boulet  lui  av^at  fracas- 
a^es.  II  eut  encore  (a  force  d'ecrire 
qnelqitfs  ligaesit  Tenipereiir  Alei;andre, 
et  niMvut  sans  pouvoif  les  achever. 
Ce  priaee  lui  avail  6i6  ^us  que  la  vie : 
il  avait  comprooiis  sa  ^oire ;  profon* 
d^meat  itm  4^  cetie  fin  providen  tielle , 
il  e<s»?it  h  la  veuve  de  Moreau  une 
lettRe  ffkSm  d'^ards  (^  de  sensibility, 
et  lui  asaigna  depuis  une  pension  eon- 

(QapMda«fc  Oodiiiolt  avait  lais$S  au 
^rpAse  royal  le  teinps  4e  coneentror 
ses  liDtffies  eotre  Sp^ndau  et  Berlin^  II 
liiltettu  k  GDosa-Baereo.  « II  ^oua , 
dit  H^  de  B<Hitourli0  (Histoire  de  la 
€Bap?9ne4a  isia),  paroe  que  ses  dia- 
BQsitiim  ^eut  en  oppo9itioa  aveip 
la  nm  ffijneipea  4»  1  art.  La  ^ireo- 
tioQ  durergepte  cpie,  de  Trebbin,  il 
dovaa  a  em  trois  cot^  sur  Biao)m- 
jfcMi^Bgaa  JPoBtcp  et  Ahrendorf,  ne 


pouvait  manquer  de  les  faire  battre  en 
detail.  * 

Un  retard  semblable  occasionna 
rSdiec  <pe  le  corps  du  due  de  Tarente 
essuya  sur  la  Katzbach,  et  Tardeur 
inoonsidSrte  de  Vandamme  eut  des 
suites  encore  plus  d^astreuses.  Em- 
pruntons  la  relation  du  eolone)  Bou- 
tourlin. 

«A  Tapproche  de  Vandamme,  le 
•dSpdt  du  grand  quartier  ^enSral  ajle- 
mand  et  celui  du  corps  diplomatique, 
les  cabinets  des  souverains  allies  et 
une  foule  de  grands  personnages  qui 
s*Staient  entass^  k  Toeplitz,  avaient 

1>ris  la  ftiite ,  les  uns  du  cot^  de  Dirtcb , 
es  autres  du  cot^  de  Labn.  Dej^  Ta- 
vant-garde  francaise  n'Stait  plus  qu'a 
une  demi-lieue,  forsaue  Tepnerai ,  ces- 
sant  tout  h  coup  de  plier ,  avait  oppose 
la  plus  vigoureuse  r^istance. 

«  Le  comte  Osterroann ,  comman- 
dant les  grenadiers  de  la  garde  russe, 
s*Stait  place  k  travers  le  chemin.  II 
avait  ordre  d*arr^ter  Vandamme  k  tout 
prix.  L'arm^edes  alli^  descendait  alors 
sur  Tceplitz  par  tous  les  ravins  de  la 
montagne.  Sa  position  etait  critique. 
Si  Vandamme  arrivait  avant  elle,  le 
sort  de  pjusieurs  colonnes  etait  com- 
promis ;  mais  quelques  heures  de  delai 
pouvaient  tout  sauver.Ostermann  etses 
grenadiers  avaient  compris  ce  que  le 
salut  commun  exiaeait  d*eux.  Ifs  s'e- 
taient  montr^  oignes  d'occuper  le 
poste  du  p^il ,  et  le  vallon  de  Toeplitz 
kalt  devenu  leurs  Thermopyles.  L^lite 
de  la  ga^e  russe  s'y  Stait  fait  tuer : 
Ostermann  avait  eu  un  bras  emportS; 
mais  Vandamme  n*avait  pu  forcer  le 
passage. 

«  dependant  Vandamme,  une  fois 
engagi^,  avait  appele  succe^sivemeot 
toutes  ses  forces  a  son  secours.  Les 
sommets  de  Petersvald  avaient  6t6 
d^arnis ,  et  le  premier  corps  avait  fini 
par  se  trouver  tout  entier  entre  Kulm 
et  Toeplitz ,  au  pied  du  Geyersberg.  II 
itait  trop  tard.  Ostermann  avait  gagnS 
le  temps  n^essaire ;  d^j^  Barclay  de 
Tolly  Stait  accouru  k  son  aide  avec  les 
premieres  colonnes  arrivSes.  Schwart- 
^omberg  n'avait  pas  tard^  k  lui  en  en- 
voyer  de  nouvelles ;  Vaodamme ,  forc6 

7. 


464 


L'UNIVERS. 


de  se  retirer  sur  Kutm  k  39  au  soir, 
avait  pris  position  entre  lea  Tiliagea 
de  Karwitz  et  de  Pisten. 

«  Son  entreprise  sar  Toeplitz  ^ait 
manqu^ ;  il  pouvait  y  renoncer  et  pro- 
fiter  encore  de  la  nuit  pour  remonter 
avec  toates  ses  troupes  a  Peters waid. 
Le  oonseil  lui  en  avait  ^t^  donn^; 
mais  sa  malheureuse  ^oile  Favait  em- 
port^  :  il  s'^tait  d6cid^  a  se  maintenir 
dans  la  position  ou*il  venait  de  pren-  * 
dre.  Peut-^tre  devait-il  croire  que 
Tarm^e  ennemie ,  poursuivie  pendant 
guatre  iours  de  suite  dans  les  vall^ 
mhospitali^res  de  PErtzebiree ,  ne 
pourrait  en  sortir  que  dans  le  plus 
grand  d^sordre;  il  devait  du  moins 
s^attendre  h  voir  les  oolonnes  fran- 
^ises,  non  moins  actives  que  les 
vaincus,  arriver  assez  tdt  sur  leurs 
pas  pour  les  emp^er  de  se  rallier 
contre  lui.  H  n*en  a  pas  eU.  ainsi. 

«  Le  30  au  matin ,  ce  n*est  pas  sett- 
lement Tennemi  de  la  veille ,  ce  sont 
les  troupes  de  Sclivartzembere  et  de 
Barclay  de  Tolly  qui  sont  tomb^es  en 
bon  ordre  sur  Vandamme.  On  avait 
tourn^  sa  gauche;  d*autres  colonnes 
Tavaient  d6bord^  pour  luicouper  toule 
retraite;  il  s'^tait  vu  environne  par 
plus  de  quatre-vingt  mille  hommes: 
pas  un  de  ses  quinze  miilecompagnons 
ne  semblait  devoir  echapper ;  mais  I'in- 
tr^pidit^  supples  k  tout :  nos  Francais 
avaient  lini  par  triompher  du  nomore 
et  des  dangers.  Vandamme,  apres 
avoir  soutenu ,  i)endant  toute  la  mati- 
ng du  30<mai),  les  efforts  de  cette 
nu6e  d'ennemis , -se  retirait  sans  ^tre 
entam^ ,  ^vacuait  Rulm ,  et  se  dispo- 
sait,  vers  deux  heures,  i  remonter  h 
sa  premiere  position ,  lorsque  tout  k 
coup  un  nouvel  ennemi ,  apparaissant 
sur  la  montagne  et  saisissant  tous  les 
deGl^s  en  arriere,  lui  avait  barr^le 
chemin  de  Peterswald. 

«  Ce  nouvel  ennemi ,  c'^tait  rarm6e 
prussienne  de  Kleist,  ^chapjpant  au 
mar6chal  Saint -Cyr,  ddi)oucnant  par 
les  bois  de  Schdnwald ,  se  glissant  h 
travers  le  vallon  de  Telnitz  ,lieu  reuse 
d'avoir  ainsi  toum^  la  position  de  Pe- 
terswald, et  se  hdtant  de  descendre 
sur  la  chauss^  de  Prague ,  avec  tout 


rempressement  d'une  foule  qui 
sauve  de  sa  perte  par  un  passage 
inesp^r^. 

«  Si  Vandamme  se  fdt  trouv^  a  Pe- 
terswald ,  Krleist  et  tous  ses  Pnissiens 
^taient  pris.  MaisKJeist  mattre  de  cette 
hauteur,  au  pied  de  laqueiie  6tait  Van- 
damme ,  c*^tait  ce  dernier  qui  devait 
^re  accabl^.  Cependant  les  Prussiens, 
h  la  vue  des  Franqais  qui  remontaient 
h  leur  rencontre,  s'etaient  crus  de 
nouveau  perdus :  ils  avaient  h^i^  un 
moment.  Les  Francais,  au  contraire, 
apercevant  les  Pnissiens,  s'^taient 
aussit^t  61anc^s  sur  eux  :  Corbineau 
etait  k  leur  t^te.  Rien  n'avait  pu  sou- 
tenir  leur  choc.  Passant  sur  le  corps 
de  I'avant -garde  ennemie ,  ils  avaient 
tout  culbute,  tout  entratn^;  et,pro- 
dige  de  fureur  aussi  bien  que  (Tau* 
dace ,  ils  avaient  enlev6  aux  JPrussiens 
jusqu'^  leur  artillerie.  Cependant  les 
Pnissiens ,  refoul^s  sur  eux  -  m^es, 
s'^taient  ralli^ ,  et  la  m^lee  la  plus 
6pouvantable  avait  recommence. 

"Qu*on  se  figure  une  chauss^ 
etroite,  encaiss^e  dans  le  flanc  des 
montagnes ,  et ,  dans  ce  creux ,  deux 
colonnes ,  dont  Tune  monte  et  Tautre 
descend ,  qai  se  rencontrent ,  s'arr^nt 
d'abord  par  leur  masse ,  se  foulent ,  se 
brisent  au  second  choc,  et  finissent 
par  se  faire  un  passage  Tune  k  travers 
i*autre.  La  confusion  et  le  tumulte 
sont  au  comble ;  chacun  combat  corps 
a  corps,  maisce  n'cst  plus  pour  raincre , 
c'estpour  passer.  On  se  culbute  plnt6t 
qu*on  ne  se  tue :  g6n6raux ,  ofBaers  et 
soldats,  tout  est  p^le-n^le.  Ici  Van- 
damme est  entratn^  par  les  Pnissiens, 
]k  c'est  EJeist  dont  les  Franqais  vten* 
nent  de  se  saisir :  ils  sont  pris  et  re- 
pris;  KJeist  est  enfin  d^livi^  par  lea 
siens :  on  assurait,  dans  les  premiers 
moments,  que  Kleist  et  Vandamme 
^ient  resteB  morts  dans  la  foule. 

«  Tous  ceux  qui  ont  pu  se  di^ager 
du  d^l6  de  la  route,  et  se  jeter  dans 
les  rochers  et  les  bois  voisins,  par* 
viennent  k  s'^apper  des  premiers. 
Les  Pnissiens  courent  se  rallier  a  Ta- 
vant-garde  de  Barcla}r  de  Tolly:  les 
Francais  arrivent  k  Lid!)enau ,  ou  ils 
sont  recueillis  par  les  troupes  da  huk 


EUSSIK. 


485 


TidM  Saint-Gifr.  BmktAt  tos  seotien 
de  la  moo^agne  se  remplissent  de  sol- 
dats  disperse,  qai,  semblabies  aux 
ooursiers  d6inont^  dans  uii  choc  de 
cavaterie,  n'ont  rien  de  plus  press^ 

Se  de  retoumer  au  camp.  Le  g€aMi 
Hrblneau ,  qui  commaiidait  la  cavale- 
rie  de  Vandamme ,  arriye  jusqa'ik  Teiu- 
pereor ,  dont  il  est  aide  de  camp.  Gou- 
fert  desangennemi  et  bless^  lui-m^rae , 
il  est  encore  arm^  d*un  sabre  prussien 
qoe ,  dans  la  m^lte ,  il  a  ^aog^  contre 
le  sien.  Les  gtodraux  Dumonceaa  et 
PhOippon  soot  ^alement  sauv^ ;  mais 
le  g^ral  Heimrad ,  oui  venait  de  pas- 
ser da  service  de  Bade  a  celui  de  France, 
est  reste  parmi  les  morts.  Le  general 
Gayotj  et  le  g^6ral  Haxo  que  ses 
Uessures  avaient  fore6  de  rester  a 
Kolm ,  sont  prisonniers.  Quant  au  g^ 
wMt  Vandamme ,  dont  Tandace  a  m 
a  malheureuse,  il  n'estjpas  tu6;  les 
alii^  le  traf  nent  en  triompne  k  Prague : 
cependant  on  apprend  oue  la  plus 
graade  partie  du  corps  a*arm^  des 
aiii^ ,  deseendue  par  les  ra?ins  de  la 
montagne,  se  raliie  h  Pvma.  Trente 
pieces  de  canon  et  plus  de  trois  cents 
voftures,  caissons  a*^ipage  et  d*ar- 
titterie ,  sont  perdus  pour  nous. 

«  Ainai  non-seulement  la  ^rande  ar- 
va6e  eonemie  est  sauv^,  mats  die  Test 
par  one  vietoire,  et  ce  sont  des  tro- 
pbte  qa'elle  rapporte  de  sa  d6faite  de 
iJresiie* 

«  Napolten  recueille  firoidement  le 
detail  de  ses  pertes.  Ce  qu'il  ne  peut 
concevoir ,  c'est  que  Vandamme  se  soit 
laosse  entralner  en  Bob^me.  j4  une  ar- 
mee  qui  fiat,  repcte-t-il ,  U/autfidre 
unpont  dor  au  une  barrUre  do/der. 
Or,  f^andamme  ne  pouvaUpas  4tre 
ceUe  barri^e  cTacier.  Puis  se  tour- 
nant  vers  le  major  general :  Jurkms- 
nout  done  ecrit  quelque  chose  qui  aU 
jm  bH  inspirer  cette  fatale  pensief 
BerMer,  allez  cherchervos  minutes; 
FaSn,  voyons  les  miennes;  virifions 
tout  ce  oue  nous  avons  icrU.  Le  ma- 
jor ^erat  apporte  aussitdt  son  Hvre 
tf'ordres ;  le  secretaire  du  cabinet  re- 
SRsente  ses  minutes :  on  relit  toutes 
Hslettres,  et  I'on  n'y  trouve  rien  qui 
vtpQ  autoriser  le  malheureux  g^n^ral 


h  quitter  sa  position  de  Peterswald. » 
L'empereur  se  contenta  de  dire  au 
due  de  Bassano :  Eh  bien  t  voUd  la 
auerre:  bien  haut  le  matin,  et  bien 
0€U  le  soir. 

Nous  avons  cite  textuellement  le 
colonel  Boutourlin ,  dont  les  m^moires 
militaires  ofirent  le  double  m^rite  du 
talent  et  de  Timpartialite ,  parce  que 
le  d^sastre  de  Tceplitz  a  prepare  celui 
de  Leipzig  et  decide  de  lacampagne  de 
1818.  La  defection  du  general  Wr^de, 
et  I'ezplosion  prematuree  d'un  pont 
sur  lequel  Tarmee  allait  franchi'r  TElbe, 
furent  les  causes  de  la  defaite  de  Leipzig 
(Memotres  ecrits  k  Sainte-Heiene). 

Les  places  fortes  de  rAllemagne 
tonberent  sucoessivement  au  pouvoir 
des  allies,  qui  s'avancerent  jusque 
sur  les  bords  du  Rhin.  De\k  les  Fran- 

Siis  s'etaient  vus  forces  d'evacuer  la 
ollande,  tandis  qu*aa  midi  Soult, 
Eresse  par  Wellington ,  repassait  la 
Eidassoa.      * 

Cependant,  par  la  declaration  de 
Francfort ,  les  allies  annon^ient  quils 
ne  faisaient  ootnt  la  guerre  a  la  France , 
mais  k  Napoleon.  La  paix,  tour  k  tour 
demandee ,  offerte  et  refusee ,  variait 
tellement  dans  ses  bases,  qu*il  etait 
aise  de  reconnattre  combien  les  deux 
partis  etaient  peu  disposes  k  Tetablir 
sur  des  elements  durables.  Les  allies 
voulaient  reduire  Napoleon  k  Timpos- 
sibilite  de  les  inquieter  k  Tavenir; 
I'empereur  des  Fran^ais  ne  pouvait 
envisager  la  i)alx  que  comme  une  treve 
qui  edt  fourni  k  son  genie  de  nouvelles 
ressources  pour  recommencer  la  lutte 
avec  moins  de  desavantage.  Ces  con- 
siderations determinerent  les  allies  k 
s*arreter  k  un  plan  dont  les  conse- 
quences extremes  trahissaient  Tinten- 
tion  de  ne  plus  traiter. 

« II  s'agissait  desormais  de  trans- 
porter le  theatre  de  la  guerre  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin,  et  d'arracher  k 
la  F)*ance  les  provinces  dont  la  posses- 
sion lui  permettait  sans  cesse  de  trou- 
bler  rAllemagne  ou  de  menacer  I'in- 
dependance  de  la  HoUande...  Ce  fut 
alors  au*k  la  place  du  plan  convenu  a 
Kaliscn ,  le  gouvornement  britannique 
proposa  Texecution  de  celui  que  Pitt 


4d6 


LUWIVERS. 


avait  trac^  en  1806.  On  oofttknen^ 
neanrooins ,  k  oette  ^poque ,  ^  s'aper- 
cevoir  que  oe  plan  memo,  ouvrage 
d'un  g^e  sublime,  ^tait  inooni|>l«t, 
en  ce  que ,  sanctionnant  Tusurpation , 
jl  pr^parait  de  loin  la  chute  des  tr^ne s, 
eh  mmant  la  base  sur  laduelle  ils  sont 
eonstruits;  on  entrevit  la  possibilite 
d'effacer  une  tadie ,  et  de  donner  ainsi 
de  la  solidiU  au  nouvei  Mifioe  poli- 
tique qu'on  se  proposait  d'^lever.  Mon- 
sieur, Arere  du  roi,  d^baraua  le  37 
Janvier  en  Holt&nde ,  muni  des  pteins 

Souvoirs  du  roi  de  France ,  et  se  ren- 
it  dU  quartier  g^n^tral  des  monarques 
allies...  (Schoell). » 

La  campagne  de  1814  mit  de  nou- 
Teau  dans  tout  son  jour  le  g^nte  guer- 
rier  de  Napoleon;  les  victoires  de 
Champ -Aubert,  de  Montmirall,  de 
Vauchamp ,  remportto  avec  les  d^ris 
d'une  anme  contie  des  forees  bien 
sup<§rieuT6iB ,  auraient  peut-dtre  sauv^ 
la  France  imp^riale  si  toute  la  popula- 
tion edt  M  anim6e  du  m£me  esprit 
3ue  Farm^.  Les  troupes  allito ,  r6- 
uites  h  cent  vingt  mille  homines ,  se 
trou  vaient  couples  de  la  ligne  du  Rhin , 
oresste  entre  la  capltale  et  les  troupes 
franoaises  victorieuses :  mais,  ii  raut 
le  dire,  la  France  ^tait  ^is^,  et 
n*envisageait  un  triomphe  momentan^ 
iquie  eomme  le  prelude  de  nouveauz 
sacrifices.  Dans  cet  ^tat  de  choses,  les 
partisans  de  la  famille  des  Bourbons , 
qui  avaient  renou^  toutes  ieurs  in- 
trigues ,  ne  n^ligeaient  rien  pour  r6- 
venler  d'aneiennes  sympathies.  La  g6- 
rf^ation  nouvelle  se  doutait  h  peine 
•u*il  existAt  une  dynastie  dont  les 
titres  h^nklitaires  pussent  ^re  mis  en 
l^lance  avec  les  droits  de  T^p^;  mais 
les  nobles,  que  Napoi6on  avait  cm  rat- 
tacher  h  son  systeme  par  des  emplois 
et  d^  favenrs,  r^pandaient  d^j^  le 
bruit  que  le  but  des  monarques  ooali- 
s^  6tait  de  rendre  k  la  France  ses 
princes  l^times. 

Cependant  Napolton  venai  t  d'essujrer 
im  tcbtc  k  la  Rothi^re^  les  n^^ocia- 
tions  de  ChdCillon  se  poursuivireot , 
mais  sans  qu*on  en  eaper/lt  d'accom- 
modement. 
Les  sotifverains  confi6der^s  deman- 


daient  mt  Napol^n  reboiiott  Ji  la  to- 
tality des  acquisitions  faitas  par  la 
France  depuis  le  oomnencement  de 
1799 ,  et  k  toute  influence  ooastitu- 
tionnelle  horii  de  ses  ancieones  li- 
mites.  Le  refus  derait  tee  pr^m  d'a- 
▼ance.  Aptitedefr^entes  alternatives 
de  suooes  et  de  revers,  la  pr^ooe 
d*un  prince  de  la  maison  de  Bourbon 
sur  le  sol  de  la  France  apprit  k  I'em- 
pereur  que  ce  n*toit  pas  seulement 
centre  les  armes  de  1  stranger  qu'il 
•avait  k  lutter ,  et  que  les  dissentiments 
civUs  rendraieot  sa  tkbt  plus  pteible 
encore.  U  s'^tait  vainement  flatty  d'a- 
mener  le  prince  de  Schwartsemberg  k 
one  bataiile  d^isive;  des  Ion,  pour 
couvrir  Paris ,  il  se  vit  forc^  de  dias^ 
miner  ses  forces.  La  capitulation  de 
Soissons  assura  la  communication  de 
Farmfe  dea  alii^ ,  dite  du  Nord ,  et  de 
eelle  de  Sil^e  que  oommandait  Blu- 
cher.  Ge  general  marcha  sur  la  capitale 
avec  cent  mttle  hommes.  £n  m^e 
ten»s ,  par  le  traits  de  Chaumont ,  les 
allies  s^engageaient  k  ne  d^ser  les 
armes  qu*apr^  TaoCeptation  definitive 
de  leur  ultimatum.  Peu  de  jours  apr^, 
le  oongr^  de  Ch^tillon  fut  rompu ,  et 
Ton  apprit,  a  Paris,  aue  le  duGd*An- 

Souldme  etait  k  Boroeaux.  Le  comte 
'Artois  se  trouvait  dej^  k  Vesoul. 
K  Aprte  le  giorieux  combat  d^Ards- 
Sur-Aube ,  Napoleon  manoeuvra  encore 
avec  une  grande  habilet^  pour  attirer 
les  ennemis  loin  de  Paris,  en  se  portant 
BUT  la  haute  Marne,  comme  s*il  tdX 
persists  dans  le  projet  de  couper  Ieurs 
conmMmications  avec  le  Rhm.  Mais 
alors  il  6tait  trop  faible,  surtout  en 
eavalerie.  L'ennemi  ne  fut  point  dupe 
dp  ce  stratag^e  tardif ;  il  savait  la 
force  de  Tempereur  aussi  bien  que  lui- 
m§me ,  et  connaissait  mieux  que  lui 
les  faibles  dispositions  de  defense  qui 
avaient  6t6  prises  k  Paris.  Laissant 
done  les  Franfais  les  attendre  sur  la 
haute  Marne,  et  d^rrasses  de  Mor- 
tier  et  de  Marmont ,  qui  avaient  ref  u 
Tordre  de  quitter  les  bords  de  TAisne 
pour  se  reunir  k  Tempereur,  Bludier 
et  Bulow  marcbent  sur  la  capitale. 
«Les  marecliaux  Mortier  et  Mar- 
mont ,  rencontres  k  la  Fcrt^-Chanipe- 


RUSSiE. 


m 


iMMK  rar  dfs  4»rM  MHidltrein  de  cava- 
Iflric  lie  rarm^  de  Silifiaie,  ae purent 
flsrreiiir  k  joindra  reuipereur,  et 
RireDt  an  owtnire  batlus  et  i^et^s 
aar  Fans. 

«NapoMoD,|KmniiHri,  haicel^  par 
da  iniAe  hoimnes  de  eavalerie  ruaee , 
arriTait  k  Saint-Dizier,  croyant  en- 
tratoer  renaemi  fur  les  tracea,  lora- 
gu*il  appiit  qiie  toate  la  maaae  des 
forees  aliite  ^tait  aous  lea  mura  de 
Pane.  II  aoogea  li  r^trofprader;  mais 
cette  fiiussB  ap<§ealatioa  avait  d^d^  le 
aoTt  de  la  campagne. » 

Paria,  aprte  ooe  dtfeose  de  quel- 
ques  heures,  capitala;  lea  ouvriera 
avaieot  demandii  dea  amies  et  n'a- 
vaieat  pa  en  obteoir.  Le  due  de  Vi- 
eeoee  ooarat  k  Paris  pour  aaapendre 
cette  capitulatkm;  il  ^tait  trop  tard*.. 
Napolmi  ae  retira  h  FontaiadMeao. 

Nous  avoaa  dd  aoiTre,  quoiqoe  soia- 
mairemeot,  lea  ^v^nemeats  memo- 
rables  qui  prfc^d^nt  rabdieatioo  de 
reropereur ;  dans  ces  annto  si  pleiaea, 
Je  role  de  i'bistorien  se  borne  k  celui 
d^un  compUateur;  embarrass^  par 
Tabondance  des  sources,  ce  nest 
qa'avec  peine  qu*il  parvient  ^  d^gager 
lea  materiauz  de  oette  ^poqne  de  la 
passion  da  moment  qu'exaltaiept  tant 
d'intMts  froias^ ,  tant  d'esp^ranoes 
reoaissantes,  tant  de  baines  long- 
temps  eomprimto.  On  trouvera  peut- 
^tn  que  nous  avons  acoord^  trop  de 
place,  dans  un  cadre  aussi  born6  que 
le  ndtre ,  ^  des  faits  qui  se  rattachent 
pJoa  particolierement  k  Thistoire  de  la 
France  impdriale  ou'^  celle  de  Eussie; 
mais ,  pour  pen  qu  on  y  r^^hisse  ^  on 
reeonnaltra  que  le  aceud  des  affaires 
de  rEoEope  tenait  presque  exclusive- 
raent  a  la  eouronne  de  N^pol^n ;  et 
telle  est  rinflQence  qu'a  exerc^  sur 
son  ^poque  cet  homme  extraordinaire , 
que  aes  alti^  comma  ses  rivaux  n*0Dt , 
poor  ainai  dire,  d'autre  bistoire  que  la 
aienoe. 

La  capitulation  de  Paris  fut  sign6e 
par  lea  aoanlchattx  Mortier  et  Mar- 
moot  Vae  dtelaration  particuliere  de 
f  aaipQffewr  Alexandre  confirma  les  es- 
piranoes  padfigues  d^j^  exprimees 
dam  la  proclamation  du  g^n^ralissinie 


des  tfoupes  allite,  mais  en  v  ajouiaat 
que  lea  souverains  oonfiM^ea  ne  trai- 
teraient  plus  avee  Napol^n  Bonaparte , 
ni  a¥ee  aucun  membre  de  sa  famille. 
La  citation  suivante,  emprunt^e  au 
manuscrit  de  1814 ,  jette  quelfue  jour 
sur  oette  determination. 

<  Le  ai  k  midi ,  Tempereur  Alexan- 
dre at  le  rot  de  Prusse  avaient  fait 
leur  entr^:  cette  marche  militaire, 
d^abord  paisible,  avait  fini  par  deve- 
nlr  bruyante :  dea  cris  en  favenr  des 
Bourbons  s'^taient  £ait  entendre;  des 
coGBurdes  blanches  a?aient  ^  arbor6es, 
et  les  Parisiens ^tonnes,  cbercbant  des 
yeox  Tempereur  d'Autriche,  ayaient 
appris  avec  inquietude  qu'il  6tait  en- 
core bien  loin. 

«  G*etait  chez  M.  de  Talleyrand  que 
I'empereur  Alexandre  etait  alie  des- 
cendre.  Cet  ancien  ministre  aurait  dd 
suivre  rimp^ratrice  sur  la  Loire,  il 
en  a?ait  reai  I'ordre :  mais  il  s*etait 
fait  arrdter  a  la  barriere,  et  ramener 
dans  Paris  pour  en  faiie  les  honneurs 
aux  allies. 

«  A  peine  le  tsar  etait-iJ  install^  dans 
son  logement,  yfW  avait  tenu  un  con- 
seil  sur  le  parti  politique  que  les  allies 
devaient  adopter.  M.  de  TaUejrrand  et 
ses  principaux  confidents  n*avaient  pas 
manque  d'etre  appel^s  a  la  delibera- 
tion. Vainement  le  due  de  Yicenee 
s*etait  presente  pour  obtenir  Taudience 
qu*on  lui  avait  promise :  la  cause  de 
son  prince  etait  dej^  perdue  auMI  n'a- 
vait  encore  pu  se  niire  entenare. 

«  Au  surplus ,  le  public  n^avait  pas 
tarde  k  etre  mis  dans  la  confidence ; 
deja  M.  de  Nesselrode  avait  ecrit  au 
iNrefet  de  police  de  mettre  en  liberte 
jtous  les  individus  detenus  pour  atta- 
chement  h  leur  ligUtme  sowerabi; 
et,  bientAt  s^res,  les  murs  de  Paris 
avaient  ete  placardes  d^une  declaration 
de  rempereur  Alexaodre,  portant  qu'on 
ne  voulait  plus  traiter  des  interdts  de 
la  France  avec  Napoleon ,  ni  avec  au- 
cun membre  de  sa  famille. 

«  Le  due  de  Yicenee  avait  non-seu' 
lement  plaide  la  cause  de  celui  qui  Ten- 
voyait,  mais  meme  celle  de  Fimpera- 
trice  Marie-Louise  et  de  son  fils.  Les 
souverains  allies  se  refuserent  h  toute 


488 


L'UNIVERS. 


n^ociation ,  atteDdu  que  les  proposi- 
tions ofTertes  n'6taient  pas  celles  que 
*Ies  puissances  crovaient  devoir  en- 
tendre ,  surtout  apres  la  manifestation 
ecletante  des  sentiments  de  Paris  et 
*de  toute  la  France. » 

Les,  convenances  ne  permettaient 
pas  k  Ml  Fain  de  tenir  un  autre  ian- 
gage;  nous  sommes  m^me  persuade 
que  sa  conscience  pouvait  avouer  toute 
1  expression  de  ses  honorables  senti- 
ments :  mais,  sans  pr^tendre  k  redres- 
ser  un  jugement  ou'il  pouvait  mieux 
que  personne  ^tabiir  sur  des  donn^es 
positives,  nous  tirerons  des  mimes 
raits  une  appr6ciation  diff(§rente ;  dus- 
sions-nous  troisser  Torgueil  national , 
nous  dirons  avec  une  conviction  pro- 
fonde  que,  dans  I'int^rlt  de  Thumanit^ 
et  de  la  France  elle-mlme ,  les  alli^ 
ne  devaient  point  traiter  avec  Tempo- 
reur;  une  rupture  edt  touiours  et6 
imminente,  et  la  crainte  d  hostilit^s 
u1t6rieures  les  eUt  rendus  plus  dilH- 
ciles  sur  les  conditions :  le  genie  de 
Napoli^on  eilt  6t^  un  obstacle  a  Tintro- 
duction  des  formes  constitutionnelles 
qui  replacaient  la  France  dans  les  li- 
mites  gouvernementales  que  le  despo- 
tlsme  militaire  avait  dQ  francbir.  line 
fois  ce  grand  pas  fait,  elle  devait,  en 
peu  d^pnn^s,  trouver  dans  sa  posi- 
tion, dans  la  ricbesse  de  son  sol  et 
dans  le  g^nie  de  ses  habitants,  un  d^- 
veloppement  de  puissance  pr6fi6rable , 
selon  nous ,  h  des  conqultes  excentri- 

?ues,  toujours  pr^  de  lui  ^chapper. 
'els  furent  les  bietifaits  de  ce  nouvel 
ordre  de  choses ,  que,  malgre  la  repu- 
gnance naturelle  a  un  grand  peuple  de 
se  laisser  imposer  un  roi  par  des  en- 
nemis  victorieux ,  le  trdne  des  Bour- 
bons se  serait  consolide ,  sans  les  ten- 
tatives  impolitiques  qui  tendaient  k 
ramener  la  France  a  la  monarchie 
pure, qu'ellen*acceptera  jamais  qu'avec 
la  gloire;  et,  d*un  autre  cdte,  tels 
furent  les  elements  de  force  que  re^ut 
Tesprit  publie  dans  une  courtep^riode 
de  quinze  annees ,  que  ce  trone  an- 
tique ,  si  laborieusement  restaur^ ,  s*e- 
croula  en  trois  jours,  quand  le  prince 
psa  decbirer  le  pacte.  • 


Nous  ne  sommes  pas  non  plus  de 
ceux  qui  font  un  crime  k  M.  de  Talley- 
rand de  ne  s^ltre  pas  sacrifi^  k  une 
cause  perdue;  on  ne  peut  exiger  qu'un 
diplomate  qui  a  passe  sa  vie  a  ealculer 
les  chances  dans  toutes  leurs  ^ventua- 
lit^s ,  se  trottve  Itre ,  au  jour  du  dan- 

§er,  un  homme  d*abnegatioa  et  de 
6vouement ;  mais  si ,  tout  en  suivant 
la  pente  irresistible  des  revolutions ,  il 
plaide  encore  avec  habilete  la  cause  du 
pays ,  si  ses  efforts ,  mtoe  en  chan- 
geant  de  rdle ,  parviennent  k  adoueir 
les  sacrifices,  n'a-t-il  pas  fait  plus 
pour  le  pays  que  s'ii  se  fdt  impost  une 
perseverance  sterile? 

Apres  etre  reste  quelque  temps  k 
Paris,  ou  sa  presence  excita  un  en- 
thousiasme  difficile  a  decrire ,  Alexan- 
dre se  rendit  en  An^leterre. 

Le  danger  avait  etroitement  unf  les 
souverains ;  le  partage  de  la  oonqu^te 
failfit  les  desunir. 

« On  peut  dire  que ,  dans  ce  partage 
de  I'Europe ,  le  droit  de  conquete  mi 
consacre ;  en  sorte  que ,  loin  de  reta- 
blir  le  droit  de  propriete,  en  remon- 
tant k  repoque  qui  pr^ceda  les  inva- 
sions de  la  France,  on  admit  des 
points  de  fait  oomme  noints  de  droit , 
et  les  innovations  ne  firent  que  dian- 
gerde  forme  (Considerations  sur  F^tat 
politique  et  commercial  des  puissances 
europeennes). » 

Les  principaux  obiets  qui  devaient 
faire  le  sujet  des  deliberations  du  con- 
gres  de  Vienne  etaient : 

1*  La  disposition  des  territoires 
auxquels  la  France  renon^it,  ainsi 
que  des  autres  territoires  que  Fempe- 
reur  Napoleon  avait  possedes  k  autre 
titre  qu'a  celui  de  chef  du  gouverne- 
ment  fran^ais ,  ou  qui  etaient  possedes 
par  des  membres  de  sa  famille,  et  aux- 
quels il  avait  renonce  pour  lui-m^me 
et  pour  eux  (cet  article  comprenait  les 
inaemnites,  restitutions  ou  acquisi- 
tions reclamees  par  rAutriohe,  la 
Prusse  et  la  Sardaigne); 

2*  LsL  fixation  du  sort  de  la  Pologne, 
ou  celle  des  acquisitions  de  laRussie; 

Z^  L*organisation  de  la  confederal 
tion  des  £tats  de  FAllemagne; 


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RUSSIE. 


489 


4^  La  garantie  de  rorgaiiisation  de 
b  Suisse; 

S*  Les  r^lements  relattfs  h  la  na- 
vigation du  Rhin  et  de  quelques  autrea 
fleuYes; 

G*  Uabolitton  de  la  traite. 

La  Prosse  ne  d^uisa  pas  ses  pre- 
tentions sur  la  Saxe;  de  son  cot^, 
Alexandre  d6clara  qu'il  ne  se  dessai* 
sirait  pas  du  grand-duche  de  Varsovie , 
et  qa'fl  faudrait  Ten  chasser. 

M.  deTalle^and,  qui  repr^entait 
la  France,  avait  trop  cle  tact  pour  es- 
sayer  d'y  prendre  le  rang  que  ses  ta- 
lents Jul  auraient  assign^  en  toute  au- 
tre drconstance;  il  ne  lui  restait  qai'h 
enrenimer  adroitement  les  dissidences 
des  autres  cabinets ,  et  &  les  opposer 
les  nns  aux  autres  avec  tous  les  dehors 
de  rimpartialite.  Dans  cette  position 
delicate,  il  fit  bon  march6  de  tout  ce 
(]u']I  ne  pouTait  sauver,  et  servit  les 
iot^r^  de  la  France  restaurde  avec 
d'autant  plus  d'efBcacit^  que  ses  ob- 
jections etaient  presents   par  des 
tiers.  Le  roi  de  Naples  fut  sacrifie  h  ce 
nouvel  ordre  politique.  Les  ministres 
de  Louis  XYIII «  secretement  appuy6s 
par  r  Aotricfae ,  s'oppos^rent  de  tout 
tear  poOToir  h  la  cession  de  la  Saxe  au 
royaame  de  Prusse;  I'Angleterre,  au 
co'ntraire,  fayorisait  les  pretentions 
de  la  ooar  de  Berlin.  M.  de  Metter^ 
iijcb,  dont  la  preponderance  au  con- 
gr^  ne  saurait  Itre  contestee ,  parais- 
sait  voir  sans  ombrage  Faccroissement 
de  la  Prusse;  mais  il  ne  cachait  point 
que  rextension  du  territoire  russe  jus- 
qu'a  la  Yistule  etait  inquietant  pour 
TEurope.  Cetait  d'autant  mieux  de- 
gniser  sa  pensee,  relativement  h  la 
Prnsse,  que  ses  apprehensions  en  ce 
qui  reganlait  la  Russie ,  devaient  pa- 
nltre  plus  naturelles.  Alexandre  oon- 
sentait  a  donner  h  la  Prusse  la  ligne 
de  la  Wartha ,  et  celle  de  la  Nida  k 
FAiitricbe,  mais  h  condition  qu'on  le 
laisserait  imposer  h  la  Pologne  telle 
forme  de  constitution  qu'il  jugerait 
convenable ;  fatigue  de  ces  lenteurs ,  il 
envoya  le  grand-due  Constantin  It  Var- 
sovie annoncer  aux  Polonais  que  leur 
existence  politique  serait  conservee, 
ft  quite  aevaient  s'appreter  h  la  de- 


fendre.  Cependant  M.  de  Talleyrand , 
prenant  en  main  la  cause  de  la  Saxe , 
representait  que  Tabandon  de  ce 
ro^aume  a  la  Prusse,  outre  qu*il  por- 
tait  atteinte  au  principe  de  la  legiti- 
mite ,  aurait  une  influence  funeste  sur 
requilibre  de  I'Europe :  1^  en  creant 
contre  la  Boheme  une  force  d'agres- 
sion  tres-grande,  et  en  mena^ant  ainsi 
la  sdrete  de  TAutriche  entiere;  2*  en 
creant,  au  sein  du  corps  germanique 
et  au  profit  d'un  de  ses  membres,  une 
force  d'agression  hors  de  proportion 
avec  la  force  de  resistance  de  tous  les 
autres.  Le  ministre  franc^is  consen* 
tait  neanmoins  a  ce  qu'une  partie  de 
la  |Saxe  fdt  cedee  a  la  Prusse;  cette 
identite  de  vues  avec  M.  de  Metter- 
nieh  laissait  entrevoir  Tintention  de 
trouver  dans  le  cabinet  autrichien  un 
point  d'appui ;  les  interets  fran^ais  se 
trouvant  entlerement  isoies  au  mi- 
lieu de  tant  d*interets  opposes  ou  di« 
vers.  M.  de  Nesselrode,  par  voie  de 
conciliation,  communiqua  aux  pieni- 
potentlaires  d*Autrtche ,  de  la  Grande- 
Bretagne  et  de  Prusse  un  nouveau 
projet  de  partake ;  les  prindpales  oon^ 
ditions  en  etaient:  1»  la  cession  du 
duche  de  Varsovie  k  la  Russie;  2"  la 
liberte  du  cours  de  la  Vistule;  8*  la 
cession  du  royaame  de  Saxe  k  la 
Prosse ,  avec  la  condition  que  Dresde 
ne  serait  pas  fortifiee;  4**  la  formation 
d'un  l^tat  separe  sur  la  gauche  du 
Rhin ,  qui  comprendrait  le  duche  de 
Luxembourg,  les  villes  de  Treves, 
Bonn ,  etc. ,  pour  indemniser  le  roi  de 
Saxe.  Mayence  et  Luxembourg  deve- 
naient  places  de  la  confederation: 
PAutricne  recouvrait  en  Pologne  ce 
qu*elle  avait  perdu  par  la  paix  de 
Schonbrunn,  et  une  constitution  li- 
berale  etait  promise  k  la  Pologne^  tant 
pour  les  provinces  dependantes  de  la 
Prusse  et  de  TAutriche ,  que  pour  celles 
qui  relevaient  de  la  Russie.  Apres  de 
longues  discussions ,  on  oonvint  enfin 
de  laisser  au  roi  de  Saxe  une  partie  de 
ses  £tat8 ,  et  d'abandonner  le  reste  k 
la  Prusse.  Frederic- Auguste  resista 
inutilement;dans  rimpossibilite  de  lui 
arracher  son  consentement,  il  fut  der 
cide  qu^on  passerait  outre,  et  ce  malt 


493 


L^UKIVBRS. 


« titre  qui  m'est  offert  §mi8  m*touter 
«  de  mes  principes.  »  £t  comrae  on 
lui  parlait  d'^riger  un  mooumeDt  k  sa. 
m^moire :  «  C'est  a  la  post^rit^  qu*il 
«  appartient  de  T^riger,  poursuivit-ti , 
«  81  elle  m'en  trouve  digne. »  On  avait 
fait  DOur  le  recevoir  de  grands  pr^pa- 
ratin ;  un  arc  de  triompbe  avait  6t^ 
^lev6  en  toute  h&te  pr^s  de  la  bar- 
riere;  inform^  de  ces  dispoaitions,  il 
adressa  la  lettre  suivante  au  gouver- 
neur :  «  J*ai  appris  qu'on  £iit  pour  ma 
«  n^ption  divers  preparatifs :  j^ai  tou- 
« jours  eu  de  la  repugnance  pour  toutes 
«  ces  choses ;  et ,  aans  les  circonstances 
wprdsentes,  je  les  d^pprouve  plus 
«  que  jamais.  Les  ^v^nements  oui  ont 
«  mis  fin  auxeuerres  sanglantesaerEu* 
«  rope  sont  roeuvre  du  seul  Tout-Puis- 
«  sant.  C'est  devant  lui  qu'il  faut  nous 
«  prostemer  tous :  faites  connaitreoette 
«  malt^rabie  r^oiution ,  afin  qu*il  ne 
«  soit  donne  aucune  suite  It  des  pr^pa- 
•  ratifs  queiconques  pour  me  reoe- 
«  voir. » 

Le  premier  soin  de  I'empereur,  en 
rentrantdans  sa  capitale,  ftit  d'aller 
rendre  des  actions  ae  graces  k  Dieu 
dans  la  cath^rale  de  Casan ;  quelques 
jours  aprte,  les  o6rtoionies  reagieuses 
se  c^ebr^ent  avec  plus  de  solennit^; 
le  peuple  se  pressa  dans  les  temples; 
et  comondant  les  sentiments  qui  ragi- 
taient,  il  les  reportait  avec  entbou- 
siasme  sur  la  personne  du  souverain. 

Aprte  avoir  donn6  quelques  jours 
au  repos  et  k  des  affections  qu*une 
longue  absence  avait  rendues  plus 
vives,  Alexandre  op6ra  plusieurs  cnan- 

gements  dans  son  minist^re.  M.  de 
Loumianzof  fiit  remplac^  par  M.  de 
I^esselrode. 

Quoique  Foukase  suivant,  adress^ 
au  conseil  de  Fempire,  au  synode  et 
au  s^nat ,  soit  empreint  du  m^me  ca- 
ractdre  qu*on  a  pu  remarquer  dans  les 
pi^es  que  nous  venous  de  citer, 
nous  croyons  devoir  le  reproduire 
oomme  exprimant  d*une  mani^re  plus 
complete  les  sentiments  d'une  devotion 
fervente  que  le  mysticisme  allait  bien- 
tdt  dominer. 

«  La  demande  qui  m'a  6U  fiaite  par 
^  saiqt  synode ,  le  conseil  de  Tempire 


et  le  B^nat.  dirigeant,  ooncernant  F^ 
rection  d'un  monument  k  ma  personne 
dans  la  capitale,  en  me  soUiciunt  d*ao- 
oepter  le  titre  de  BSni,  me  &lt  beau- 
coup  de  plaisir ,  parce  me  i'y  recon- 
nais,  d'une  part,  la  benraietion  de 
Dieu  qui  veille  sur  nous ,  et,  de  I'au- 
tre ,  les  sentiments  du  corps  entier  du 
peuple  russe.  Tons  mes  efforts  et  mes 
plus  ferventes  pri^res  n*ont  pour  bat 
que  d'obtenir  en  effet  la  dur^  de  oette 
laveur  divine,  tant  pour  moi-mtoe 
que  p(mr  mon  peuple  fiddle,  mes  su- 
jets  loyaux  et  bien-aim^ ,  et  pour  le 

Senre  numain  tout  entier.  G'est  la  mon 
^ir  le  plus  ardent  et  mon  plus  grand 
bonheur.  Mais,'  mal^  tous  mes  rf- 
forts  pour  V  parvenir,  je  ne  puis,  comme 
bomme,  lore  assez  presomptueux  |iour 
accepter  oe  titre ,  et  pour  mUmaginer 
Favoir  en  effet  m^rite.  Cela  est  a*aa- 
tant  plus  incompatible  avee  mes  prin- 
cipes ,  oue ,  dans  tons  les  temps  et  dans 
toutes  les  occasions ,  j*ai  exnort^  mes 
fiddles  sujets  k  llittmilit^  et  k  la  mo* 
destie.  Je  ne  puis  donner  un  exem|de 
qui  seralt  en  contradiction  avec  mes 
vdritables  sentiments.  Ainsi  done, 
en  m^me  temps  que  je  leur  t^moigne 
ici  mon  entiere  gratitude ,  je  prie  les 
corps  constitu^  de  Fempire  d'aban* 
donner  tous  ces  projets.  Puisse  un 
monument  m*£tre  oev^  dans  vos 
ooeurs,  comme  je  vous  en  ^leve  un 
dans  le*  mien !  Puissent  mes  peuples 
me  b^ir  dans  leurs  ooeurs  oomme  le 
mien  les  b6nit!  Puisse  la  Russie  £tre 
heureuse,  et  puisse  la  divine  Provi- 
dence  veiller  sur  elle  et  sur  moi !  » 

En  examinant  cette  pidce  avec  atten- 
tion ,  on  Y  trouve  plus  que  Fexpression 
de  Fhumilite  cbretienne;  s'il  edt  €t€ 
donn6  k  un  regard  humain  de  sonder 
FAme  de  ce  prince,  peut^tre  y  edt-on 
trouve  le  souvenir  amer  et  ind^l6bile 
de  la  funeste  catastrophe  qui  avait  ou- 
vert  son  r^e ,  et  le  regret  de  ne  poo- 
voir  se  reposer  de  ces  iuttes  int^enrcs 
dans  les  affections  patemelles. 

Alexandre  s'occupa  de  Farmee  avec 
une  sollicitude  qui  proave  qu*il  n'ou* 
bliait  pas  les  services  pass^.  Un  co- 
mity rut  institu^  pour  examiner  les 
droits  des  officiers  que  leurs  blesaures 


RUSSIE. 


49S 


on  ta  msladies-  amioit  ^loi^^^  de 
rim6e ;  on  aocx>rda  une  amnistie  eom- 
pKte  atous  oem  que  les  ciroonstancefl 
poiitiaiies  avaient  compromis ;  enfin , 
daM  les  gooYernementa  qui  aTaient  ie 
Diu  lottffert  de  la  guerre,  les  paysans 
nireDt  exempUs  de  Tarri^  oe  leura 
taies. 

Dorant  Ie  s^oor  des  troupes  nisses 
en  AlleniagDe ,  les  habitants  recevaient 
en  pavement  des  assisnats  russes ;  la 
reanisation  de  ees  valeurs  ayant  pr6- 
senti  des  difficoJt^',  on  annonqa  par 
la  foie  des  joumaux  qae  des  bureaux 
8p6eiaux  raiieot  ^tablis  a  Berlin  et  k 
Koeoigsberg  pour  Tescompte  de  ees 
billets  aa  cours  du  diange. 

Les  compagnies  de  commerce  n'h^i- 
terent  pas  a  avancerdes  fonds  au  goo- 
Tcmement  russe ;  et  la  parole  d*Alexan- 
dre  lear  panit  une  suffisante  garan* 
tie.  £n  nieme  temps  que  la  Russie  as* 
sorait  d^finitiTement  sa  pr^nderance 
en  Europe  par  ses  envahissements  en 
Pologne,  elle  ddx>rdait  dans  TOrient 
par  ses  acquisitions  en  Perse.  Le  traits 
qu'dleconclnt  avec  cettedemi^re  puis- 
saoee  fut  confirm^  en  septembre  1814. 
En  vertu  de  ees  nouvelles  stipulations, 
la  Hussle  6tendait  sa  fronti^e  m^ri« 
dionale  de  la  Caspienne  k  TEuxin ,  et 
de  FEoxin  au  Bosphore.  Ges  noufdles 
deifmitations  preparaient  a  la  Russie 
de  faetJes  triomphes  et  lui  ouvraient 
le  cbemin  des  Indes. 

(1815.)  Tandis  uue  les  ministres  as- 
semble en  congres  morcelaient  Tan* 
cienne  et  la  nouvelle  Europe ,  plutdt 
d'apres  1^  •convenances  du  moment 
que  pour  ^tablir  un  ^quilibre  imagi- 
naire,  ^apolten  suspendait  par  sa 
ptisenoe  toutes  ees  labotieuses  eombi- 
naisons:  rhomme  qu'on  avait  pr^nt^ 
oomme  us6  et  impopulaire  avait  tra- 
verse presque  seul  oette  France  encore 
^lonnee  de  sa  deiaite.  Tons  les  debris 
4e  la  erande  arm6e  se  groupment  an- 
tonr  du  grdtod  capitaine;  la  jeunesse 
&e  lera  avec  enthousiasme  et  salua  de 
f^^nennses  acclamations  Tillustre  pros- 
<nt.  Toutes  les  blessures  de  la  France 
indent  encore ;  les  esprits  faibles , 
9i  font  toujours  la  grande  miyorit^ , 
'record  cette  fois  avec  les  esprits 


sages ,  n'envisageaient  qu'avee  ^pou- 
vante  les  suites  d'une  nouvelle  inva- 
sion; mais,  dans  ees  ciroonstances , 
r^ergie  impose  ses  resolutions  au 
grand  nombre;  et  tons  subirent  les 
mimes  cons^enoes.  Nous  passerons 
rapidement  sur  les  ev^ements  rail^ 
taires  de  cette  campagne,  a  laquelle 
les  armto  russes  ne  purent  prendre 
une  part  active.  «Pres  de  quatorze 
cent  mille  hommes  furent  mis  sur 

1»ied  par  les  souverains  aili^.  Napo- 
6on  n'en  eut  k  combattre  a  Waterloo 
qu*un  peu  plus  de  deux  cent  mille ;  de 
Borte  qu*en  supposant  one  victoire,  il 
lui  restait  h  terrasser  plus  d'un  million 
d'ennemis.  Les  Anglais  et  les  Prus- 
siens  jparurent  seuls  sur  le  champ  de 
bataille  de  Mont -Saint -Jean.  Les 
Russes ,  qui  ^aient  destines  a  former 
Tarm^e  du  moyen  Rhin ,  ne  purent , 
malgr^  des  marches  forc^es ,  arriver  h 
temps.  lis  ^ient  au  nombre  d'environ 
cent  soixante  et  dix  mille  hommes, 
command^  par  les  aen^raux  Barclay 
de  Tolly,  Dokhtourot,  Raievski ,  Sa6- 
ken ,  Langeron,  Jermolof ,  Vintzinge- 
rode  et  Pablen...  Les  empereurs  de 
de  Russie  et  d'Autriche  apprirent  k 
Heidelberg  la  nouvelle  de  la  d6£siite 
des  Francis;  leurs  g^n^raux  n*eurent 
plus  qu'a  recevoir  les  capitulations  de 
quelqnes  places  de  ^erre.  Dds  lors 
Alexandre  jugea  Inutile  de  faire  avan- 
cer  les  trois  corps  qui  composaient  la 
totality  de  son  armee  d'invasion ;  celui 
de  Barclay  eut  ordre  de  poursuivre  seul 
sa  route;  et,  arrive  au  oceur  de  la 
France ,  dans  la  distribution  des  quar- 
tiers  d'occupation ,  les  pays  d*entre 
Seine  et  Oise ,  et  oeux  que  baignent  la 
Meuse  et  la  Moselle,  lui  furent  assi- 
gn^...  Cette  fois,  les  souverains  alli^ 
entraient  plus  en  ennemis  qu'en  lib6- 
rateurs  dans  un  pays  moins  toudi6  des 
bienfaits  de  la  restauration  qu'humili^ 
de  recevoir  un  roi  de  rintervention 
etrangere.  Les  ambitions  que  le  pre«- 
mier  morcellement  de  la  France  n*avait 
qu'a  demi  satisfaites,  les  baines  en- 
core vivantes  de  la  Prusse  et  de  I'An- 
gleterre  et  qu'avait  contenues  la  mode- 
ration d* Alexandre,  les  rancunes  de 
Femigration  qui  rivait   Tancien  r^ 


494 


LTlilVEAS. 


giaie  par,  en  un  mot,  touteft  les  pas* 
sions  de  eupidiU  ft  de  ouniTais  vouloir 
se  trouvaieat  d*aooonl  avecia  politique 
pour  oonaommer  rafihiblissement ,  si* 
non  la  ruine  de  la  France.  Les  dispo- 
sitions d'Aiexandre  iai«in£me ,  h  regard 
do  peuple  franqais,  n*6taient  plus  aussi 
bienTOulan^;  il  lui  en  oodtait,  sans 
doQte,  da  voir  one  la  Franoe,  qui 
avait  racu  avee  enttiousiasme  les  Bour* 
boos  et  la  dhavte,  edt  renonc^  sponta* 
n^ment  h  oet  ordre  de  oboses  pour  se 
Jeter  de  nouveau  dans  une  carri^e  de 
troubles  et  de  p^is :  ie  tsar  avait  cm 
trop  facilement  oe  qa*il  d6sirait  et  oe 
oui  n'^tait  gudre  possible:  il  s^^it 
flatt^  de  concilier  le  bonheur  des  ▼ain- 
ctts  avec  les  pretentions  des  vainqueurs. 
Des  manifestations  eclatantes  Fabo* 
s^ent  en  1814,  oomme  la  levte  de 
boudiers  de  1816  tebappa  a  son  ap- 
pi^iation :  k  la  premim  de  ces  ^po- 
ques  f  la  ¥oix  d'un  parti  pouvait  seuie 
se  faire  entendre,  et  il  prit  eette  voix 
pour  celle  de  la  nation  entito,  una* 
nime  dans  ses  yonn  comme  dans  ses 
reprobations ;  en  1815,  c'dtait  encore 
un  parti  qui  s'^tait  impost  momenta* 
R6ment,  et  qoi ,  dispose  k  s*ettseTelir 
sous  les  mines  du  pays,  nc  pouvait 
trouver  une  r^istance  efiOcace  dans 
one  fraction  de  la  population  lasse  de 
sacrifices  et  avide  de  repos ,  ou  dans 
les  hommes  de  Coblentz ,  ^urdis  d*ua 
coup  si  inattendu  et  priv4s  de  Tappai 
des  ^tran^ers. 

II  fallait  aux  alli^  une  tndenmitd 
et  une  garantie:  ^puiste  d'bonunes, 
la  France  devait  encore  toe  d^mem- 
bree  et  eouvdr  d*or  toutes  U»  traces 
de  ses  d^sastres. 

Le  traits  de  Paris  stipiila  les  exi* 
gences  de  la  conqute;  K  fut  8ign4 
le  20  novcnbre;  celui  de  la  sainte 
alliance  Tavait  M  le  20  septembre .  eiv- 
▼iron  deux  mols  avant.  Pour  bien 
dire  comprendre  eette  oeuvre  de  mys- 
ticisme  et  de  politique ,  nous  emprunte- 
roas  lerteit^  rhistorien  d' Alexandre. 

«Dds  1814,  Tempereur  Alexandre 
avait  eu  des  relations  avec  madame  de 
Krudener.  Depuis  queiques  annto, 
eette  femme  e^lebre  remplissait  le 
Nord  du  bmit  de  ses  suom  dans  la 


mission  si  sinniliiremeRt  dvangttque 
qu'elle  s'telt  cbmite ,  ou ,  si  Ton  vcut , 
qu'eUe  avait  recue  des  inspirations 
exalt^es  d'uae  Hoe  reli(;ieuae  et  ar- 
dente,  et  dHin  eoeur  qui  surabondait 
de  z^le  et  de  tendreaae  pour  Fbuna** 
nit^.  On  sait  que,  nte  dans  une  posi- 
tion 6]ev^,  et  au  milieu  des  don« 
oeurs  de  I'opuienee ,  dott(6e  d*une  beauts 
dont  I'attrait  toit  irr^istibie ,  madanse 
de  Krudener  renon^  a  ees  avantages , 
jeune  encore ,  pour  aoeomplir ,  en  an« 
non^nt  aux  hommes  la  parole  de 
Dieu ,  un  apostolat  dont  le  nit  n'^tait 
rien  moins  que  la  conversion  du  genre 
httmain.  Jusque-lli,  oomme  il  arrive 
ordinairementauxfondateursdesectes, 
die  avait  trouv^  pins  de  partisans  dans 
les  cabanes  que  aans  les  paiais ;  et  lea 

{irinoes ,  loin  de  se  feire  ses  pros^ytes , 
'avaient  perstoit^e,  jugeant  danse- 
reuses  les  pr^ications  et  mtoe  les 
aum^nes  au  moyen  desquelles  elle  en- 
tratnait  les  populations  k  sa  suite. 
D'ailleurs  eUe  pouvait  enflammer  les 
passions  des  classes  souffrantes,  et 
foumir  un  pr^texte  aux  rebellions ,  en 
mllant  k  ses  pri^res  des  predictions 
raena^tes  contre  les  poissonts  de  la 
terre  qui  s'ecartaient  de  la  droite  voie. 
Cependant ,  comma  eHe  avait  annonoe 
la  chute  de  Napoleon,  sa^ reputation 
de  propbetesse  commeo^a,  en  1814, 
k  s^olir  avee  une  soite  d^universa* 
lite ;  et  voyant ,  dans  le  grand  ehang!^ 
ment  qui  s*accomplit  en  Europe ,  une 
occasion  favorable  pour  tentwla  revo* 
lotion  reUgleuse  qu'elle-meme  medi- 
tait,  elle  se  rendit  k  Paris  en  ntee 
temps  que  les  souverains  allies.  Cetait 
snr  VapfMii  d* Alexandre  qu'eUe  comp*> 
tait  particuli^rement ,  non  -seolement 
parce  <pie  la  Russie  semUait  desoi^ 
mats  devoir  toe  la  moderatrice  des 
grands  debats  qui  s'ei^eraientpourla 
reconstruction  de  I'Europe,  mais  en- 
core  parce  qu*elle  savait  que  quelqoe 
chose  dans  VSme  de  ce  souverain  sym- 
patMsait  avee  ses  propres  idto  sor  la 
neoessite  d'une  r^olution  reKgiease. 
« II  est ,  en  ellfet ,  incontestable  qu'A- 
lexandre  etait ,  par  la  nature  de  son 
organisation  morale  et  pbvslque ,  pre- 
dispose au  mysUdsme,  et  a  subir  l^m- 


RU88IB. 


4§6 


pire  d«  id6ea  i«limiM8,  ntoeJttB* 
qutar  UhnioBstft  TilluiiiioimDe.  Saw 
pffter  de  oeite  tradance  li  gte^aie 
tea  le  Nord ,  et  qui  n'eieeple  pas  lea 
esprits  die  Pordre  le  plus  tieve,  on  peat 
resnder  leHnjrstidsme  eomme  le  r^ 
iflJtat  d'nne  loi  de  d^veloppement  dca 
passions  oonunane  k  tons  lea  indm* 
das  ebez  qui  b  sensiMlit^  du  eoeur  el 
PactiTit6  ae  Timagination  ne  sent  paa 
domiote  par  one  ntiaon  dnergiqae  et 
par  un  oaract^e  Tigoarem.  Loraoiie 
les  organes  af^noussent,  et  que  lea 
jouissances  aensuellea  ^happent,  11 
faut  nteaaaieement  que,  privMs  d'une 
activity  inteltectaetle  snftsante  poor 
mnplaoer  ee  qo'elles  ont  perdu;  cea 
Jtoes  trooipte ,  maia  nobles  et  ^lo- 
fkSy  eherdient  dans  la  sphke  sana  li- 
mites  des  afiectiona  religleuses  un 
Taste  dddommagement.  En  ^levant  lea 
termes  ou  lea  donnto  de  oetta  propo- 
sition h  km  plus  haute  ouiasanoe,  on 
explique  madame  de  Krudener ;  et  c^eat 
a  peu  prts  de  la  mtoe  mani^e  qu'il 
faodmt  raisonner  pour  rendre  rareon 
do  singQlier  ehangement  qui ,  en  1815 , 
t'^tait  opM  dans  les  idto  et  les  vues 
politiqDes  de  r^mpereur  Alexandre, 
s'H  m  sufBsaft  pas,  hlstoriqoement 
parbtnt,  d'en  constater  le  fait. 

« Ge  nit,  c'est  la  sainte  alliance.  La 
MNirae  de  oe  pacte  f ut  ^videmment  nne 
profoode  preoccupation  niystique  de  la 
part  d'Alexandre.  Depuis  1814,  les 
instructions  et  les  exhortations  de  ma- 
dame  de  Krudener  avatent  produit  leur 
cffet.  ERe  s^^tait  empar^  habilemenC 
de  oe  (^^i1  y  a  toujours  de  Tivant  et  de 
chatoQiHeux  dans  le  coeur  d'un  roi.... 
AlexaDdre ,  disait-elle ,  a  re^  mission 
derMifier  ce  que  Napol6on  avait  eu 
joissioo  de  d^tmire.  j4(exandre  est 
Vange  hkme  de  F Europe  etdu  mandey 
cmme NapoUon enfutVamge  wAr. 
«0d  attribue  k  Tinfluenee  de  ma- 
dame  de  Krudener  la  moderation  que 
J^ontra  ee  sourerain  dans  les  transac- 
^  qoi  se  firent  k  cette  ^poque  arec 
a Praace(*).  Ce  qu'il  y  a  de  sttr  an 

n  Mane'de  Krudener  tt'nmit  pas  cu 
"'FBs  tor  le  caractfa^de  ce  prinee,  ii 
^^  ■od^ratMA  n'eikt  pv  M  dns  la  ii%. 


moins,  c*M  qu*elle  lenait  a  Paris  des 
oonfiirences  nystiqaes  od  se  rtonit- 
saient  lea  souveraios  aUi^..  Son  er^ 
dit  dut  s*augmenter  lorsque  le  retoor 
de  nie  d*£Qie  et  la  joum^  de  Wa- 
terloo vinrent  oonfirmer  tontes  9ieM 
prWctions.  On  a  mtoe  attribue  h 
madame  de  Krudener  Tidde  de  la 
aainte  alliance;  et  il  est  vrai  qa>lle 
afait  r4?e  I'onion  des  rois ,  maia  dans 
rintMt  uttWersel  des  peuples.  Elle 
voukait  cbristiamser  le  monde  aelen 
les  nrincipes  de  f^glise  primitive ;  eNe 
yoalait  la  paix  universelie ,  et  ne  voyait 
d*antre  moyen  d'y  parvenir  que  ral- 
lianoe  des  puissants  du  sidde  amentee 
par  la  religion...  Yoici,  au  surplus, 
une  particularity  digne  de  remarque 
et  que  nous  rapportons  oomme  cer« 
tinne. 

«  L*empereur  Alexandre  ayant .  au 
roois  de  norembre  1815 ,  minute  de  sa 
main  le  projet  de  la  sainte  alliance , 
remit  son  brouillon  k  M.  Gentz,  fXNir 
le  porter  au  prince  de  Mettemich, 
aGn  que  oeltii-ci  rMigedt,  d'apr^  ce 
projet,  une  convention  ou  un  traitd 
dans  les  formes  cohsacrto  par  Pusage. 
M.'de  Gentz ,  avaat  de  remettre  ee  pa- 
pier au  pinoe  de  Mettemidi ,  le  mon- 
tra  au  due  de  d*A...,  en  tni  disant : 
L'empereur  m'a  charge  de  remettre  a 
M.  de  Mettemich  oe  cMfifon  de  papier 
qu*il  a  toit  dans  une  intention  tr^- 
ehr^enne;  vous  verrez  les  consd- 
menoes  que  oela  aura  dans  la  politique 
oe  I'Europe...  €e  fut  pour  cet  habile 
miniflitre  un  trait  de  himiere  sur  le  ca- 
raet^re  de  Tempereur  Alexandre ,  que 
jusqoe-ldi  il  n*avait  peut-toe  pas  bien 
comprls ,  et  sur  lequel  it  ne  connais- 
sait  pas  encore  le  moyen  d'agir  avec 
efficadte.  M.  de  Mettemich  abaissa 
modestement  ses  projets  devaat  U 
sublimits  de  cette  id^,  s'exalta  de*- 
yant  la  grandeur  des  r^sultats  qu'elle 
promettait,  et  n'oubMa  rien  penr  se 
montrer  ^baitti  du  oadme  esprit  de 
mysljcisme.  Voil^  done  deux  faits, 
sanfoir :  rorigine  de  la  sainte  alliaaoe, 
et  I'origine  de  rinflnenoe  du  cabinet 

tore  conme  dans  les  prinnipet  du  royal 
4idtpte. 


496 


L'UNIVERS. 


autrichien  sur  edai  6t  Saint -P^en* 
bourc ,  qui  ont  nne  sonroe  eonunune , 
s'expiiquent  run  par  T autre ,  oomme  la 
eause  et  I'effet. » 

Jusqu'lk  eette  ^poque,  AlexaDCbre 
avait  pani  peu  faToramemaat  dispose 
k  r^rd  de  M.  de  Metternidi,  soit  h 
cause  du  partage  de  la  Saxe  qu'avait 
appuy^  la  Russie  contre  le  voeu  de 
rAuoriche ,  soit  pour  des  causes  qui 
^chappeatM'appreciationparoequ'elies 
tieiuient  a  des  r^pufpnances  de  pure 
organisatioD.  Le  g^nie  du  diplomate 
avait  calculi  toute  la  port6e  d  un  con- 
cert parfait  entre  les  grandes  puis- 
sances parmi  lesquelies  la  Russie  te- 
nait  le  premier  ran^ ;  il  n*ignorait  pas 
que  si  1  ambition  se  joignait  k  la  force, 
rAliemagne  n*aurait  uit  que  changer 
de  mattre;  ii  saisit  done  avec  empres- 
sement  Toocasion  de  oontenir  le  plus 
dangereox  de  ses  alii^  par  un  frein 
moral ,  et  de  Tenchalner  dans  les  liens 
de  tout  un  systeme  dont  le  m^te 
semblerait  remonter  jusqu'd  celui  qui 
en  avait  con^u  la  premise  idee.  Ge 
plan  avait  encore  un  autre  avantage: 
il  lui  donnait  les  moyens  de  reoonsti- 
tner  la  vieille^llema^ne,  en  rafifermi&- 
sant  les  pr^jug^  aristocratiques  aux- 

3uels  les  idees  nouvelles  et  le  contact 
es  moeurs  firancaises  avaient  port^  de 
rudes  atteintes.  la  solidarity  des  in- 
ter^ts  monarchiques ,  ^tafaJie  par  la 
sainte  alliance ,  ajournait  ind^finiment 
les  esp<§ranoes  constitntionnelles  dont 
on  avait  flatty  les  peuples  au  moment 
du  danger;  dans  cette  combinaison 
de  la  force  mat^rielle  et  du  principe 
de  l^itimit^  appuy^  au  droit  divin, 
tout»s  les  r^lstancea  devenaient  vaines 
et  immorales;  c*^tait  Fdee  d'or  de 
Tabsolutisme,  qui,  pour  rnonneur  et 
la  8^urit6  de  son  systtoe,  travailla 
franchement  au  bienngtre  materiel  des 
peuples :  mais  les  cons6:|uences  m^mes 
deee  bien4trefavorisaient  led^velop- 
|/ement  intellectuel ;  et  plus  les  peuples 
recevaient,  plus  ils  se  trouvaient  en 
droit  de  demander.  D^ailleurs  cet  ^i- 
fice  reposait  sur  des  bases  fragiles ,  sur 
une  existence  individuelle.  Les  idees 
rdvolutionnaires ,  comprim6es  plutot 
que  vaincues ,  r^girent  h  cette  ^poque , 


mais  sans  ensemble  et  avee  toute  Tim- 
pmdenoe  du  d^sespoir;  les  ^dnements 
du  PitooDt,  de  Napk»,  de  Portugal 
et  d'Esnagne  ^  offrirent  a  la  sainte  al- 
Kance  1  occasion  de  se  prouver  par  des 
actes:  mais  la  rigueur  quelle  deploys 
dans  ses  mesures  repress! ves,  et  le 
caractere  de  sombre  religiosite  qui  les 
distinguait ,  justifldrent  les  ni^flances ; 
et  dans  un  si^e  ou  la  tolerance  rem- 
place  la  foi ,  la  sainte  alliance  dut  ap- 
paraftre  aux  peuples  oomroe  une  in- 
quisition d*£tat..  A  ehaque  instant  les 
cons^uences  de  ce  s^st^me  venaient 
se  heurter  contre  les  interto  les  plus 
vitaux  des  gouvemements  qui  s'e0or- 
caientdelemaintenir :  del^ ,  lan^oessit^ 
de  tant  decongres,  ou  les  difficuttes 
du  moment  n*^taient  levto  que  par  des 
mesures  qui  devaient  bientot  en  faire 
surgir  de  nouvelles.  «  Dans  ces  reu- 
nions,  dit  Rabbe ,  M.  de  Mettemicfa 
pouvait  d^loyer  avec  succes  toute 
t'adresse  et  toute  la  puissance  des  fa- 
cult^  oratoires  et  les  ressources  d*un 
esprit  aussi  deli^  qu'on  puisse  Tifflad- 
ner.  O,  le  ministre  conjurateur  des 
perils  de  la  royaut^  n'avait  besoin, 
pour  accr^iter  son  systeme,  que  de 
r^nergique  magie  de  ces  tableaux  ou 
les  complots  etles  crimes  du  g^nie  d6- 
mocratique  pr^  k  rompre  ses  cbaines, 
apparaissaient  oomme  une  vision  fan- 
tasmagorique. 

«  Uempereur  Alexandre,  victime  de 
cette  seduction  politique  dont  le  sue- 
c^  ^it  favorise  par  des  ^v^nements 
qui  semblaient ,  en  effet ,  menacer  avec 
les  dynasties  r^nantes  le  fondement 
de  toute  autonte  non  constitution- 
nelle « ^tait  cependant  ramen^  de  temps 
en  temps  par  sa  droiture  naturelle  k 
des  id^  toutes  diffi^rentes.  II  sayait 
pr^voir  que  les  circonstances  seraient 
plus  fortes  que  les  principes ;  et ,  tout 
en  subissanC  la  direction  que  4ui  im- 
primait  le  cabinet  autrichien ,  il  sem- 
nlait  attendre  avec  ime  sorte  d'impa- 
tience  le  moment  ou  la  force  des  choses 
viendrait  le  decharger  du  fardeau  de 
sa  responsabilit^.  Plus  d*une  fois  on 
lui  a  entendu  prof(§rer  ces  paroles  re- 
marquables :  Je  ne  sais  pas  jusqu'^ 
quelj^Qimt  et  jxtsqu'^  quel  temps  on 


RUSSIE. 


497 


pemrafaife  ce  que  tohfydt  dans  ce 
momentrd.  A  I'^poque  dela  r^olution 
de  Na^es,  se  trouvani  k  Varsovie,  U 
disait  a  M.  de  la  FerrooBays ,  ambas- 
sadeur  de  France:  Le$  affaires  de 
liofdet  ne  nous  regardent  pas ;  puis- 
que  le  peupie  na^pmktin  respecte  la 
famiik  rignante  et  n*atiaque  pas  la 
tegUindUy  onn*ad  se  phimo'e  que 
des  formes  par  lesqueiles  s'est  mand' 
fesU  le  WJBU  public,  etje  ne  pensepas 
qu'U  soU  uUle  d'employer  la  force 
conire  cette  manifestatkm,  Gepen- 
dant,  d^  aull  fiit  a  Troppau,  et  en- 
suite  h  Laybach ,  Alexanore  consentit 
a  toutes  les  mesures  jug6es  n^cessaires 
par  r  Autriche. » 

Par  one  eons^enoe  toute  naturelle 
d'un  systtoe  si  ombrageux,  I'esprit 
d*oppositioa  surgit  de  toutes  parts; 
bfentdt  foro6  k  se  cacher/il  fut  r^uit 
a  ooDspirer  dans  Tombre ,  et  n*en  de- 
▼int  que  plus  dangereax.  D^  Tann^ 
1616,  otieiques  jeunes  Russes,  reve- 
nus  de  r^ranger  apr^  les  campagnes 
de  1613, 1614  et  Idl^^et  oonnaissant 
la  toidaiioe  politi^e  de  plusieurs  so- 
ci^t6s  secretes  qui  existaient  alors  en 
Allemagne.conii^urent  Tid^  d'etablir 
en  Rttssie  des  associations  semblables 
( Rapport  sur  la  commission  d'enqu^. 
Sainl-P^tasbour^,  1626).  Quoique  le 
iNitdeoesassociations  rtformatrices  ou 
r^olotionoaires  ne  fdt  bien  connu  que 
queiqaes  ann^  plus  tard ,  n^nmoms 
fe  gouremement  en  apprit  assez  pour 
conoevoir  de  rinqui^tude;  et  ces  in- 
dices, trop  vagues  |x>ur  d^erminer 
des  poorsuites  ostensibles ,  emp^h^ 
rent  Alexandre  de  sortir  du  oerae  o^ 
Tavait  enferm^  la  politique  de  I'Au- 
triebe. 

(1617  et  1616.)  Nous  avons  cm  de- 
voir anttciper  sur  les  temps  post^rieurs 
poar  expliqner  les  causes  de  la  poli- 
tique de  la  sainte  alliance  ^  alnsi  ^ue 
le  rdle  que  M.  de  Mettemich  sat  im- 
poser  k  Alexandre,  en  profitant  k  la 
lois  de  ses  bonnes  intentions  et  de  ses 
fiitblcnes ;  nous  allons  tracer  sommai- 
remeot  les  traits  les  plus  saillants  du 
regne  de  ce  prince,  k  partir  de  T^que 
OQ  nous  avons  interrompu  notre  viai  \ 
Dom  suivrons  pour  Tordre  des  faits 

32*  Lwraison.  (Russib.)  t.  it- 


son  historiei^phe,  dont  nfNis  mser- 
rerons  Texpos^. 

Alexandre ,  apres  avoir  pass^  en  re- 
vue ses  troupes  dans  les  plaines  de 
Champagne,  se  dirigea  sur  Rruxellea 

rtr  y  oondure  le  manage  de  sa  soeur, 
grande-duchesse  Anne,  avee  le 
prince  d*Oran([e.  II  vouhit  visiter  le 
champ  de  bataille  de  Waterioo :  le  roi 
des  Pays-Bas,  le  prince  d*Orange  et 
le  prince  de  Prusse  I  y  accompagn^rent. 
Apr^  avoir  examine  les  diverses  posi- 
tions ,  lis  se  rendirent  ensemble  k  la 
ferme  de  la  Belle  AlUance.  Ui, 
Alexandre  ayant  demand^  un  verre  de 
vin,  dit,  en  le  prenant,  aux  deux 
princes :  «  Oui ,  c  est  v^ritablement  la 
belle  alliance,  aussi  bien»celle  des 
£tats  que  celle  des  families.  Fasse  le 
ciel  qu  elle  soit  de  lon^ue  dur^ !  » 
L'empereur  traversa  rapidement  \  Id- 
lenient  ,  mais  11  s^arr^ta  quelque  temps 
k  Berlin ,  pour  y  arrSter  le  mariage  au 
crand-duc  Nicolas  avec  la  fille  du  roi , 
la  princesse  Charlotte  de  Prusse. 
L*Autriche  ne  vit  pas  cette  alliance 
sans  inquietude ;  les  Russes  devin^rent 
que  le  sacrifice  que  ferait  de  sa  reli-  . 
gion  cette  jeune  princesse  serait  com- 
pens^  par  la  perspective  d*ane  oou- 
ronne,  et  que  les  droits  du  mnd-duc 
Constantin  seraient  sacrifitf.  Apr^s 
avoir  assure ,  autant  qu'U  a^rteoait* 
de  le  faire  k  une  provision  numaine, 
I'avenir  de  sa  famille  et  cekii  de  Fem- 
pire,  il  se  rendit  en  Poloane,  et  fiit  regu 
a  Varsovie  avec  cet  enthousiasme  qui 
n*est  souventque  la  voix  de  Tespdrance, 
et  qui  tombe  quand  cette  esp^rance  s'6- 
vanouit.  11  assura  aux  habitants  qu*ii 
voulait  faire  tout  ce  qui  pouvait  fonder 
leur  repos  et  combler  leurs  vceux.  L» 
actes  suivirent  de  pr^  ces  promesses; 
il  annon^a  que  bient6t  les  troupes 
russes  ^vacueraient  le  tem'toire  j  et  if 
donna  k  ce  peupie,  sinon  la  hbertd 
orageuse  d'autrefois^  du  moins  un 
eouvernement  coostitutionnel ,  ave^ 
les  restrictions  du  proteetorat ,  ^est* 
2^-dire  de  la  d^pendance.  Les  esprits 
^claitr^s  ne  s'abuserent  pas  sur  la  por- 
t6e  d'un  tet  bienfait ;  c*6tait  trop  de. 
liberte  pour  une  annexe  de  la  Russie; 
e'en  etait  trop  peu  pour  les  fr^res  des 

6 


499 


L^UmVBRS. 


fikMnMo^ski  €«  M  K««i«9Kk«.  An 
mois  de  d^oembre  181(^,  II  reotra?  dtiw^ 
an  atfitsif^  ob  Finlp^fatrlce  ^tait  ar- 
i4v^  la  Tetlle. 
la  ferrenr  t^fnittM  de  rcMipemK' 

Stafisait  iTaebiPohre  avee  Fflg^ ;  maisf 
I  fapportt  arec  lea  d^rdta  les  f\\i§ 
ejtaHiB  du  tft  romain  6laieni  (oift  d*a* 
voir  d^iM6  aes  oonWetfettt  snr  ret<- 
oellende  dvt  fft  grec;  i*ant)6e  pr^c^ 
dente ,  las  J^ftes  avai«At  ^t^  ex|m]sdflf 
dea  detix  capftales ;  une  ardeat  ihcoiH 
alddr^a  deWoUlji^irtit  Ie£l  ava  it  port^ 
^  ecmveftlr  phnietirs  dames  d^tin  rang 
^ev^,  et  quelqaea  Jjeunes  gens  doiit 
on  leur  arait  confix  f^dficfftioD ;  parm! 
eesderrriers,  on  remarquaitun  neveadU 
miriistre  dis  ctiltes ,  prince  Oalitzm. 
Catherine  II  arait  aocaeilli  les  jiatiltetf 
h  une  ^pogae  ah  its  ^taiefit  bantiis  ^ 
totfs  les  £&t8  catholiqaes  de  PRorope; 
mais ,  jpaf  cela  m^me,  ils  n*6taient  pasf 
d  crauidfe;  gnand  cat  tnterdit  fut 
Icv^,  et  qn'ira  purent  eorrespondre 
ent^e  enx ,  ils  detinrent  suspects ,  et 
le  prenrieir  grief  qu'on  ecrt  h  leur  re^ 
pivchef  d^terndina  leur  rentoi.  Ctst 
*  probabfem^nt  a  cette  cause  mi*il  £iut 
rappoiter  la  f bunion  du  nifnnlt^e  de« 
cuites  6t  de  rinstrU(itioA  ptibUque,qul 
a*op^ra  en  Itussie  au  commeneemenl 
d^  1817.  t^  finances  appel^rent  touM 
b  tolllcitade  du  souverain;  la  dette 
publique ,  depute  161^ ,  s'^tait  accrutf 
oans  une  proportion  innui^nte ;  on 
prit,  SUIT  le  tf^or  impmal  et  sur  lea 
retenus  de  la  isoufonne,  des  fonds  qui , 
pt&eyis  anbuellenient ,  detalent  ame-< 
net  dan$  un  avenir  pen  ^ioign^  I'et-^ 
(inction  dt  cette  d^te  et  fdquilibr^ 
entre  le  papier-ttionnaie  et  le  nume- 
raire. Les  &benges  ocedsionnto  par 
les  guerres  qui  ^lat^rent  dans  le  r^ne 
suivant  ont  &tt6U  la  totalisation  de 
eatte  mteure  |>rudeate.  Alexandre  en- 
couraged aussi  retablissement  d^und 
banque  impMale  dU  commerce;  ce^ 
te^issements  6t  quelques  autres  fa*' 
vorise^ent  Ie6  ^mprunts  que  le  gouV6r- 
nement  jugea  util6  de  contracter;  et 
rafBuenoe  des  capitaut  eterca  sui^  It 
Qommarce  la  plus  heureuse  influence. 
Cependant  la  diete  polonaise  allait 
inaugurer  le  nouvel  ^tat  politique  oc- 


troy^ k  la  Cologne :  Alexandit  saiw> 
dit  k  Vsfsovle;  mala  tl  pdrall qua, de- 
puissofi  retour  enRuaste ,  laUboralisme 
de  sea  preaMlras  mtentiona  avait  subi 
(foelqiiea  nwdtteationB :  il  m  montra 

Sins  oea«p6  4e  rimportanae  da  bien- 
lit  polit^a  qu'il  aecotdait  et  des 
aonditlons  qn'il  mettait  k  eette  favear, 
qoa  dea  dii^sitloBS  r^Ues  des  Polo- 
iivls.  II  les  exhortaft  k  na  pes  con- 
ftHidre  lea  principes  de  oes  Knatitotions 
Mfee  let  docMnes  s^boerskfts  qui 
a»aiewt  menacS  le  eysUme  sociai 
tfune  oatA$tnphe  ipouvantable.  Une 
ann^e  s'^tait  a  peine  toyal^  que  les 
Pokmaia  se  piaigmreiit  de  oe  que  la 
constitution  n'^tait  point  obserrte 
dans  sea  disposltiofis  esaentieUei;  de 
ee  que  leur  Tioe-roi  ZanoiicsEek  n'avsil 
^ue  Fapparence  de  Tautorit^,  taodis 
que  le  pouvoif  ^ait  r^llement  toot 
entier  entre  les  mains  du  grand -duo 
Gonstantin  qdi  eommandait  Vartnie 
polonaise,  et  de  If^voasiltsof,  eom- 
mtssaire  russe.  Le  mfoontenteroeat 
Mata  atee  d'autant  alin  d'amertome 

El  la  joie  arait  (st^  plus  viTe.  lie  del* 
isme  russe  revint  dux  conditions  de 
I  essence;  la  libertd  de  la  presse  fut 
suspeodoe;  et,  en  1819,  Tarm^  nS'^ 
tionale  fut  dissoule.  £b  1890,  les 
^aintes  d'Alexatidre,  accitte  par  les 
rapports  d*une  police  tracaasiere ,  m 
Manifeslirent  plus  nettement  ^neore. 
Malgr6  les  entrdyes  des  MIMrattans. 
Fes^d^opposftion  se  manifestad'ane 
mani^fe  «;latante;  an  projet  de  pro- 
(i6dure  crimlndle,  que  le  gouTeme* 
fflent  Toulait  ^re  passer  en  ioi,  fot 
teponss^  h  Hue  majority  de  eeot  vfaigt 
voix  contre  trois. 

Sans  doute  la  tflche  d*  Alexandre  toit 
delicate ;  les  seigneurs  msses  voyaieot 
afec  jalousie  la  Pologne,  oette  nation 
rivale ,  jonir  d^nstitutiima  plus  lib6- 
irales  que  la  Russia  vicCorieuse;  les 
uns  s*en  irri talent;  les  autrea  Tega^ 
daient  le  gouveftiement  aM>ide  snx 
Polottais  comrn^  un  spddmatt  de  celui 
qu* Alexandre  aooorderait  i  la  Rossie; 
m  plus  Jeunes  et  les  plus  ardenta  se 
promettaient  de  hiteir  k  tout  prbi  Is 
i^^n^ation  politique  des  jfMrya  alaves; 
et,  s^ns  SToirdes  ?aes  bien  arrMaft 


RUSSIV. 


499 


mfef  iiio]fetedereali8er  leuf  iitopie, 
ib  cherchaimil  des  eowplioeft  oaoa 
Pann^,  efc  ne  fecniaiaut  pas  ro^me 
^«»t  le  ncrifice  de  la  persoaoe  d^ 
rempotwr^  pcmr  delruire  1«  detpo* 
tisme  daas  0OB  npr^nt/mU 

« tar8aitedittrait6dePam(Eabbe) , 
IftFnice  se  trouvait  oWifite  fXHi-^eu* 
loneot  ^  une  contribatkn  wMilaire  de 
sept  cents  bbiUumis  de  frames,  maia  ea* 
core  de  iiqoidar  tooloa  tes  dettea  da 
gemeraeaaant  firaoQaia.  Off  ies  puia-* 
saoees  partaal  du  priaioipe  da  restitu^ 
tioD  le  pliis  g^n^al ,  avaie«t  d*abord 
n§u6t  oomme  cr^ncos  actives  lea 
mJoatioos  a^cesaaifement  arbitrairea 
de  tons  lea  genrea  de  laeriiices  que  lea 
lonpea  goerrea  soutenuea  contre  la 
FraooepoovaieQtaToir  ioiposea  a  leuF9 
IWDplea.  Le  rdsitltat  de  eettc  estiroa* 
tJon  pouvait  toe  une  aomnye  ^uiva* 
lente  aa  tiers  de  touta  la  valeur  ter« 
rftoriale   de  la   France,   L'^vidente 
impossibilite  d'obtenir  un  rembourad- 
ment  cpii  devait  ee  nombrer  par  mil- 
Itaids,  r^duisit  Ies  eouverains  k  ae 
ooolnler  de  pluaieurs  eentaines  de 
aii&ioas.  Uempereur  Alexandre  se  raiv 
gea  le  fffeoaer  dans  lea  Hmites  d*ane 
moderation  lans  laquelle  la  ruine  ou 
le  demeadireiDent  de  la  France  devait 
4kre  mm  k  fordre  du  iour  de  la  eoali- 
tion.  Noo  content  de  donoer  cet  exenv 
pie^  il  iiisiata  aupria  du  cabinet  df 
Berlin ,  et  it  toivit  a  Wellington  M^ 
mdoie  ponr  le  determiner  h  la  coodiH 
sioo  iTon  trabe  suppltoentaire  h  celui 
de  Paris.  Ge  traits  ou  convention ,  ooo- 
du  le  3  avril  1818 ,  fixa  d^finitivement 
la  aonDme  a  payer  par  la  France,  par 
suite  d^mie  reduction  nouve]|e«  9u  to- 
tal de  trois  eeot  vingt  millions ,  sur 
kqoel  la  Riissie  en  avait  qnarante^buit 
a  prendre.* 

«  L*evaeuatioD  du  territoire  de  la 
France  iiit  arr^t^  dans  Ies  m^es 
coefirenees.  Mais,  ind^peodaniment 
de  ee  dooble  objet  de  la  nouvelle  reu- 
nion des  souverains,  il  en  existait  un 
*itre:  c'toil  le  d^veloppement  plus 
dctailli  et  Fapplication  progressive  des 
<y«tiaes  de  goovemement  qui  otaieot 
^  eoroilaires  de  la  sainte  aliianoe. » 
^te  las  coos^qoenoes  de  ce  systemc 


se  d^veloppaient ,  plus  Tesprit  des  peu- 
pies  s'^lanqait  avee  inquietude  vers  lea 
ameliorations  sociaies  qui  lui  etaient 
interdites;  toute  racUvite ,  touteUener- 
gie  des  intelligences  se  portaient  sur 
Ies  iuterets  nolitiques;  et  souvent  le 
simple  CKpose  des  theories  gouverne* 
mentales  nrenait  aux  yeux  du  nouvoir 
un  earactere  de  r^sistapce  et  de  sedi- 
tion qui  reotraioait  h  des  persecutions 
mesquioea.  C'est  k  cette  epoque  que 
germerent  tons  ces  systemes  de  rege- 
neration religleuse,  politique  et  mo- 
rale ,  oill,  en  exposant  &  nu  Ies  vues  des 
princes  et  Ies  plaies  profondes  des 
societes ,  on  mettait  en  peril  tons  Ies 
pouvoirs,  on  d6considerait  \e$  institu- 
tions elles-memes.  Les  cabinets  alar- 
mes  voyaient  partout  des  conspirations, 
parce  que  partout  il  y  avait  resistance; 
en  descendant  ^  la  ruse  qui  est  Tarme 
du  faible,  le  pouvoir  semblait  douter 
de  lui-meme,  et  encourageait  Ies 
partis* 

Les  universites  de  TAUemagne,  ces 
eentres  de  lumieres  et  de  natriotisme, 
donnaient  uue  vive  inquietude ;  M.  de 
Stourdza  cut  le  courage  de  Les  calono- 
nier.  Cet  eerivain  attribuait  Tagitatioo 
qui  se  manifestait  en  AUemagne  aux 
causes  suivantes : 

r  A  un  deplaeement  universel  dep 
individus  et  des  classes »  fruit  imme- 
diat  de  la  revolution ; 

3*^  Au  vague  et  &  ta  desorgaiiisation 
des  idees  reJigieuses » devenues  la  pre- 
mier bespin  oe  Tbufnanite  souffrante , 
ety  par  consequent «  Tarme  principale 
de  la  passion  et  de  Terreur ; 

3"*  Aux  vices  toujours  croissants  de 
reducation  nqblique ,  devenus  enormes, 
et  tels  que  le  systeme  le  plus  complet 
d*administration  et  de  legislation  ne 
saurait  leur  servir  de  correctlf ; 

4°  A  une  tendance  des  classes  eclai- 
rees  vers  Tunite  politique  de  TAlle- 
magne; 

a  $°  EnAn,  a  un  mecontentement 
prononce  des  classes  in£6rieures,  fati- 
guees  de  changer  de  maltres ,  et  oour- 
Eees  sous  le  poids  d'une  administra- 
tion coropliquee,  plus  onereuse  pour 
le  peuple  q/yie  lecoiidf  en  resultats  bieo- 
faisants.  » 

8. 


500 


L'UNIVERS. 


II  est  Evident  que  de  ces  griefs  les 
uns  tenaient  au  d^ccord  entre  les 
anciennes  institutions  politiques  de 
l*Allemagne  et  le  progres  recent  des 
tumidres ,  tandis  que  les  autres  accu- 
saient  Tessence  mdme  du  syst^e  de 
la  sainte  alliance :  en  effet ,  les  souve- 
rains  n'avaient - ils  pas,  selon  leurs 
convenances ,  conserve  ou  modifi^Tan- 
cien  ordre  politique  de  I'Europe,  et 
Tesprit  public  pouvait-il  trouver  des 
limites  que  la  politique  elle-m^me 
n*avait  pas  respect^es  ?  Quant  au  vague 
des  idees  religieuseS)  ne  naissait-il 
pas  de  la  tolerance ,  et  cette  tolerance 
ne  devait-elle  pas  £tre  le  trait  le  plus 
saillant  d*4ine  alliance  entre  un  auto- 
crate  du  rit  grec  et  des  princes  pro- 
testants  et  catholiques  ? 

«  Ce  m^moire ,  dit  I'historien  d*A- 
iexandre ,  quelle  qu*ait  €t6  son  ori^ne , 
autrichienhe  ou  russe ,  avait  suivi  )a 
mort  de  Kotzebue ;  il  fut  le  prtoge 
des  mesures  qui  allaient  £tre  arr^es 
pour  raccomplissement  du  grand  oeu- 
vre  monarchique  enEurope,  et  de  la  nou- 
velle  profession  de  foi  que  renfermait 
la  declaration  d'Aix-la-Cnapelie.  Tbdo- 
rie  vague  et  tans  limites ,  dont  les  in- 
tentions exprim^es  dans  le  m^moire 
adress^  a  tous  les  ambassadenrs  russes , 
relativement  aux  affaires  d*Espagne, 
et  la  r^nse  fiaite  k  Z^  Bermudez , 
furent  une  application  premi^.  C'est, 
en  effet,  dans  ces  actes  que  le  mot 
d^intervenUon,  consacr(6  par  la  decla- 
ration que  nous  venons  de  citer,  fut 
employe  pratiquement,  pour  la  pre- 
miere fois,  comme  le  preservatif  des 
maladies  r^volutionnaires. 

«  Les  congr^  de  Troppau  et  de 
Lavbach ,  motives  par  les  troubles  du 
Piemont  et  de  Naples ,  existaient  vir- 
tuellement  dans  celui  d'Aix-la-Clia- 
pelle ,  puisque  la  declaration,  datee  de 
cette  viUe,  avait  determine  au  premfer 
ran^  de  ses  prevo^^ances  la  repetition 
proEable  et  procbaine  de  ces  reunions 
gui  auraient  pour  objet  de  discuter  les 
interets  des  souverains  (membres  de  la 
sainte  alliance) ,  ou  de  traiter  des  ques- 
tions dans  lesquelles  d'autres  gouveme- 
ments  auraient  formellement  reclame 
leur  intervention. » 


G*e8t  vers  cette  epoque  que  fempe* 
reur  Alexandre  et  le  roi  de  Prusse, 
qui  devaient  passer,  en  France ,  une  re- 
vue de  leurs  armees ,  se  rendirent  k 
Parts )  mais  sans  Caract^re  politiqae, 
et  sous  le  voile  de  VincognUo. 

Nous  ne  parlous  pas  du  prtendu 
complot  donton  vouluteffirayer  Alexan- 
dre, et  qui  devait  eclater  contra  oe 
prince  lorsquMI  se  rendait  d*Aix-la- 
Cbapelle  h  Bruxelles.  Le  but  que  Voa 
pretait  aux  conjures  etait  de  8*emparer 
de  la  personne  d* Alexandre ,  et  de  le 
forcer  h  signer  un  acte  par  lequel  il  se 
serait  engage  k  deiivrer  le  captif  de 
Sainte -Helene',  pour  retaUir  lui  ou 
son  fits,  sous  la  regence  de  Marie- 
Louise,  sur  le  trdne  de  France.  Quel- 
ques  arrestations  furent  faites.8ous  ce 
pretexte ,  mais  elles  n^amenerent  aucun 
resultat.  Quelques  personnes  jug^rent 
que  cette  conspiration  sans  conspira- 
teurs  emanait  de  la  cbancellerie  de 
Vienne. 

(1819  et  1820.)  Tandis  qo^Alexandre 
pretait  I'influence  de  son  nom  et  de 
sa  puissance  au  systeme  repressif  qui 
regissait  une  grande  partie  de  FEu- 
rope,  il  ne  n^ligeait  aucun  moyen 
d'eclairer  ses  sujets  pour  les  rendre 
plus  dignes  des  bienHftits  de  cette  oitoe 
liberte  dont  on  s'effor^it  d*arr^er  Fes- 
sor  dans  les  nations  ooddentttles.  Si 
Ton  cherche  la  cause  de  oes  contradic- 
tions apparentes  dans  la  politique  d'un 
prince  non  moins  eciaire  que  philaii- 
tbrope,  on  la  trouvera  peut4tre  dans  le 
desir  a'arriver  k  un  equilibre  aussi 

Sarfffit  que  possible  dans  les  besoins 
es  peuples,  non  moins  dans  Foidre 
de  rmtelligenoe  que  dans  celui  des  ia- 
terets  raateriels.  Cette  ponderation 
dans  le  monde  physique  ausai  bien  que 
dans  le  monde  moral ,  devait  se  pre- 
senter k  Tflme  bi'enveillante  da  mo- 
narque  russe  comme  renpressioD  la 
plus  avanoee  du  bien-dtre  oes  peuples ; 
et ,  presse  comme  it  retait  de  jouur  des 
resultats  de  cette  noble  conception  ,  i\ 
retenait  d'une  main  la  marche  aes  id^es 
partout  oik  elle  lui  paraissait  trop  ra- 
pide ,  tandis  que ,  de  Tautre ,  il  poossai t 
son  peuple  dans  la  voie  du  progrte. 
Conception    vraiment   humanitaire , 


RUSSIE. 


dOi 


nm  qu'il  ii*appartieiit  qifau  temps  de 
realiier. 

Sii  unrrenit^ ,  oelles  de  Moscou , 
deyiloa,  d*Abo,  de  P^tersbourg,  de 
Kharkof  et  de  Kasan,  re^urent  une 
organisatioB  complete ,  mais  qu'on  a 
ju^  atile  de  modifier  dans  le  r^oe 
mvrwoL 

Fid^e  am  priocipea  d'ane  sage  to- 
l^ranoe,  l^empereur  aatorisa  T^tablis- 
semeot,  k  Saint -P^tersboui^i;,  d'un 
si^e  Episcopal  pour  radministration 
des  confessions  evan^diques ,  et  celui 
d'un  tribanal  particiiiier  sous  la  direc-. 
tion  da   oonsistoire  ^vang^imie  de 
remmre.  «  L'^it  imp^al ,  relatif  a 
ees  deaz  ^blissements ,  porte:  que 
tes  deax  £glises  6?ang61iques  ne  se- 
mot  prot^^  et  maintenues  dans  le 
Ubre  exercieede  leur  eulte  cfo'h  la  con- 
dition de  rester  fidties  k  (ears  sjrm- 
bofe  et  confession  ^  pw  lesqoels  elles 
reconnaissent  lasainte  ccriture  oomme 
la  parole  de  Dieu.  L'empereur  eroit 
reraplir  on  devoir  sacr^  envers  Diea 
cC  les  ^lises  ^vang^liques,  en  prenant 
des  mesnres  pour  mettre  ces  Eglises  k 
Pabri  d'iiuioTations  danmsreuses  et 
B  aux  principes  du  christia- 


semblient  annoncer  que , 
d^  oette  epaqae ,  on  craignait  de  voir 
ViaOueBce  du  saint-si^e  s'etendre, 
sous  fa  protection  et  avec  ralliance 
de  la  politique,  jusque  sur  les  do- 
maioes  de  l*£glise  grecque;  la  d^ter- 
minatioD  prise  k  rejgard  des  j^ites 
(1890) ,  et  qui  n'^it  que  le  oomp]6- 
meot  de  leor  renvoi  des  deux  capitales 
en  1815 ,  fortifie  oette  conjecture. 

«En  1800,  dit  le  ministre,  les  j6- 
suites  obtinrent  la  permission  de  des- 
ficrvir  nn  des  temples  de  Saint-Peters- 
boorg,  assign^  au  culte  de  Tfi^lise 
nmiaine.  Le  p^  g^n^al  des  j^suites, 
s*aDiNi]^ant  suf*  un  r^ement  promui- 
I  ii  fivrier  1769,  forma  un  col- 
oil  bientdt  ftirent  requs  des  ^Idves 
;  distinction  de  culte.  A  ores  avoir 
Qvtiepass^  les  limites  de.ce  reglement, 
Ib  JMites  employdrent  toutes  sortis 
^  i^iuctions  pour  arracher  les  jeunes 
^eva  oonfi^  a  leurs  soins ,  ainsi  que 
<r^trc«  personnes,  h  la  communion 


de  ritglise  dominante,  et  ks  faire  pas- 
ser dans  la  leur. 

«  Se  mettant  constamment  au  -  des- 
BUS  des  lois ,  les  jesuites ,  malgr^  Tou- 
kase  imperial  du  14  mai  1801 ,  persis- 
t^rent  k  ne  rendre  aucun  compte  de 
radministration  des  fbnds  de  I'figlise 
catholique ,  dispos^rent  arbitrairement 
des  bto6fices  du  pensionnat;  et,  loin 
d'acmiitter  les  dettes  dont  r£glise  6tait 
grevee ,  lis  ne  se  firent  aucun  scrupule 
aen  contrader  de  nouvelles.  On  ajou- 
tera  enfin  que  les  jdsuites  ne  surent 
pas  mdme  se  concilier  la  confianoe 
d'un  gouvemement  patemel ,  en  of- 
frant .  dans  les  domaines  qu^on  leur 
avait  laiss^ ,  le  module  de  cette  pros- 
perity paisible  que  la  charity  ronde 
m^me  ici  -  bas,  Le  mauvais  etat  et  le 
deiaissement  des  paysans  de  leurs 
terres  etaient  peu  propres  k  att^ter 
leur  foi  par  leurs  oeuvres. 

«  Tant  d'empietements  et  de  viola- 
tions des  lois  sociales  et  eociesiastiques 
determinant  Sa  Majeste  I'emperenr 
k  ordonner,  en  1815,  le  renvoi  des 
jesuites  de  Saint -Petersbourg,  avec 
defense  d'entrer  desormais  dans  les 
deux  cap]tak». 

«  Cependant,  malgre  Turgence  ma- 
nifeste  de  ce  reklement,  Tempereur  se 
phit  k  prevenir  toute  consequence  pre- 
judiciable  au  eulte  catholique  romain. 
Les  dettes  qui  grevaient  rliglise,  et 
qui  se  montaient  k  deux  cent  mille 
roubles ,  furent  acquittees  par  le  tresor 
imperial.  II  fut  pourvu  k  oe  que  I'exer^ 
dee  du  culte  oe  soufifrit  aucune  inter- 
ruption. 

«Le8  jesuites,  quoique  suffisam- 
ment  avertis  par  ranimadversioo  qu'ils 
avaient  enoourue,  ne  chanaerent  pas 
neanmoins  de  conduite.  II  tut  bient6t 
constate,  par  les  raj^rts  des  autori- 
tes  civiles,  qu*ils  contlnuaient  k  atti- 
rer  dans  leur  communion  les  eieves 
du  rit  orthodoxe ,  places  au  college  de 
Mohilef ,  et  oela  au  mepris  des  obliga- 
tions qu'imposeii  une  communion  to- 
ler^  le  bienfait  de  la  protection  dont 
ello  jouit.  Alors  on  defendit  aux  je- 
suites d*admettre  dans  leurs  ecofes 
des  eieves  autres  que  du  rit  romain. 
Sans  egard  aux  bulles  du  saint-siege 


ao2 


L*UMIYKRS. 


nt  ant  loif  de  VtM  ^  interdtscnt 
ragregation  des  Grecs  «iiii8  k  la  jun- 
^ioti9«  dtt  rit  romMn  t  ies  j^ites  tra- 
vaMt^reiit  a  lea  attirer  daM  lea  Uenx 
mtoes  od  ia  presefice  dcs  prtottf^rees 
unis  rendait  cette^isurpetMm  inadmis- 
sible. A  Saratof ,  et  dans  auelques  pat- 
lies  de  la  Sib^'e ,  sous  pretexte  d'exer- 
eer  leim  fooctions,  ils  fi^introdiitsaieiit 
dans  des  contrte  oill  ne  to  ajipelait 
point  leur  minisl^ ,  et  leiir  e^t  de 
pros^ljrtisme  se  manifMa  fnoore  f>ar 
^e  nouvelles  au^estiooa  4ass  'teigoa- 
vamement  de  vttepsk. 

«  Le  ministto  lies  eultes  oe  man- 
^a  point  de  signaler  ces  transgres- 
-aioBS  an  Pte  goi^ral  de  Tordre,  d^ 
Taan^  iai5;  ees  reclamations  furent 
IntitHes ;  krin  ^le  s'abstenir ,  k  Tinstar 
de  i'Eghse  dominante^  de  tout  moyen 
-de  «mictioB  <et  de  coaction ,  les  id- 
suites  contittuerent  k  aemer  le  troubte 
dans  des  colonies  da  tit  p^teslant.,  et 
«e  pennirent  mtee  jusqu'la  la  ^iolenfie 
Mur  aoustraire  des  enfants  JoKs  k 
Jeurs  parents. 

«  Tel  «st  le  fliif^e  expose  des  faita. 
On  ae  s'arrdle  point  id  k  ddtailler  les 
circonstances  qui  les  aggra^^ent :  elles 
aeiirtotttent  sans  effort  a  tout  esprit 
droit. 

«Peut-^tre,  en  1815,  leur  renvoi 
d^finittf  iwra  des  limites  de  Tempire 
«Qt-H  cbvii  aux  graves  inconvtoients 
^i  le  iito»8i(ent  aiyounl'hui.  Mais 
«ne  n<^le  rdpognance  k  retirer  ua 
JiienHiit  avant  que  des  causes  tres- 
grsves«n  fissent  une  ntossitd  absolue, 
et  la  sollicitude  paternelle  de  Sa  Ma* 
jeste  I'empereur  pour  que  sesayets 
da  rit  <it>maiD  ne  fussent  |>as  pnv^ 
lout  k  «oup.,  dans  les  oolonies  et  att- 
leurs ,  des  pr^tres  de  leur  ixunmunion, 
et  qu*on>(iat  remplaeer  les  ignites  par 
des'eoclteiaatiques  derate  aans  les  Ian- 
giies  vulgaires;  oes  considerations  d^ 
termintont  Sa  Majesty  k  mitiger  la 
peiaequete  j^uiles  avaient  eneourue. 

«  Maialenaot  que  leurs  oontravea- 
tions  aux  lois  de  I'empire  et  aux  en- 
gagements qu'iis  avaient  contvaotds 
envers  le  gouvernement^  a  T^poque 
ott  lis  furent  aocueillis ,  n'ont  Halt  que 
8*aecroftre  par  le  sursts  aoooidd,  et 


qu'll  est  anriv6  que  les  autres  oidres 
monastiques  sont,^  mtoe  defoaniir 
autant  de  pidtres  gu*il  est  atossaire, 
le  lainistm  des  outes  B*est  om  «b)ig6 
de  soumettre  a  r«)jprobation  de  I'eiti- 
pereur  une  suite  dedispoeitioas  rela- 
tives k  leur  expulsion. » 

Par  suite  de  cette  mesure,  les  j^- 
auitesaortirentde  r^aapire  au  aonbre 
de  s(|it  oent  cinquanle;  quelques-nns 
aMrent  en  Obine;  la  plupart  se  ren- 
4ireat  dans  ies  limits  auti^ichiens  et  en 
Itaiie^  ou  ea  AUemagne.  La  oour  de 
Vieone  leur  donna  ie  odll^  de  Tar- 
•nopoi,  en  Gallioie. 

Nous  ne  coalestarons  pas  an  goa- 
veraemefit  russe  le  droit  de  protection 
sur  tout  €0  qui  tient  k  r£g1iae  domi- 
nante ;  mais  aous  croyons  que  les  ie- 
auites  ont  rendu  k  rinstruction  des 
■services  r6els,  aaftoutii  une  ^pome 
lod  la  Btfssie  auuiquatt  de  mattres  ba- 
Itilesc  d*aiUeurs  le  tniaist^  ae  pon- 
^t  igaorer  fue  req;»rit  m^Doede  ieor 
-ordre  les  porlerait  loinours ,  et  ^  kurs 
dsques  et  pdrils,  a  -miFe  des  pros^ 
lytes.  Quaait  k  I'espcir  que  ces  Peres 
ae  renfermeralent  dans  les  limites 
^u'on  leur  prescrWait^  leur  maxime 
virtuelle,  sifU  ut  sunt  atd  non  mU, 
anaoaqatt  saffiaaoimont  qu'tl  Matt  mal 
fond^  A  Tepoque  de  leur  espulsioii^ 
ils  'oommeacaiant  k  dtre  -phis  dange- 
Teux  ooe  neoesBaires ,  et  le  ministrf 
des  Gultes,  bless^  non  moins  dans  ses 
Mtributions  que  dans  see  liens  de  fe- 
initle,  crut  roccasiofi  favorable  pour 
&Bpper  an  eoup  d^isif. 

Les  assodations  secretes.,  organi- 
ses daas  4jn  but  patnotique^  •couti- 
nuaient  k  se  propa^er  en  Pologne, 
0ialgff6  les  investigations  d'une  police 
ombrogeuse  et  s^vkre^  Tappui  des  re- 
odvateurs  ^tait  dans  4e  asteontente- 
paeat  public  qui  s'aocroiasait  bu-m£me 
de  tout  oe  qu'ii  y  avail  d'arbitraire 
dans  les  mesures  preventives.  Le  eon- 
sell  de  Varsovie,  dit  BLabbe ,  se  ren- 
dant  organe  des  oraintos  g^n^ales, 
toivit,  avant^rouverture  x^  la  dicte 
de  1822,  au  ministre  de  yint^rieur, 
pour  lui  demaader  de  rasaurantes  e&- 
nlications.  Telle  fut  la  r^ponae  de  ce 
tanctiooaaire : 


RUSSIE. 


MS 


■lonoue  i'aufsraar  etdwj^ii  4e 

reiaUir  ji  PdoMe»  Hi  .rairait  pas 

d'aitse  ibut.  M  iraviilt.ea  msiaieie 

bonbear  d«  la  Pologne,  en  f Appdnati 

parta^r  k  deBtioee  4e  fioo  sBifwne  f  et 

ea  I'j  attacbent  par  4et  ikos  fmUar- 

nala,  de  ia  maniece  ipii  ]ai  .iiaraisamt 

la  plus  propra  i  iBOOsan  er  lea  avan- 

tag^  de  aon  canctave  luteaal.  fia 

Majesty  fie  ae  disaimala  peiot  icB  dtf- 

fiam  da  -catta  'Caitrapriae,  ^'ietle 

n'abaadoMkarait  qa'avec  lieaaieQup  de 

ohagrio,  at  ^'aar^  avoir  seeonnu 

l'ioipo96ibfli(6  et  lea  dangecs  4e  Ya^- 

€iilioa. 

« Gotte  impoasibttitd  4t  eea-daogeiis 
ne  potHPtaiaoC  pvaiveBir  qoe  das  tmkh 
aaia. 

<  Le  mioiatre  de  I'lnlMiar  at  de  la 
police  eat  anooiia  ahaiig6  d'ajouter  que 
wmonient  actual  Mdovble^se  danger, 
at  qaVm  ne  peut  r^carter  que  par  uhb 
jaste  oaoflance  dans  ie  gouveraemeiit, 
par  una  prudeoee  pemrAraote,  par 
WW  moderation  aanm,  par  ua  eapvit 
d*ordre.et  de  aouuNsaion  «ux  av^ri- 
t^.  £n  fiigualant  oe  danger,  Sa  Mi^ 
jeat^  g*est  acquitt^  -de  •aon  premier 
devoir;  maia  if  lui  en  raaterait  on  non 
moins  aaop^  h  vempKr,  al ,  malnr^cea 
afertiaaeinenta  que  aaa-saiDa  pateraela 
'lui  out  flBCBier^  aujooni^ui ,  un  dan- 
K^  senblaDle  de?ait  ae  manifeater; 
aar,  alofB,ce  8erait>aB  devoir ni'eai- 
P&^r,  par  les  mojem  lea  plua  effir 
eaees,  toute  ento^priae  qui  tendrait  k 
troablo-  la  tranqallUt^  publique ,  on 
ik  prodoire  du  acandate.  11  est  aatiafai- 
ttflt  paur  Sa  BlMeate  de  pouvonr  ea* 
p^fer  que  l^acneroent  dea  Polonaia 
pour  leur  patrie  triomphera  toujoora 
'  cbea  ecK  des^mlreprisea  a^itieuaes  de 
fiekpes  esprita  remuants,  ^il  devait 
jamais  a*en  trouver  pami  enx :  que 
w  Polonstia  ne  voudront  poa  foumir 
Clears  ennemis  I'oocaaion  d^tr^  par 
oeox-ei  de  r^p^ter  encore  avee  quel- 
^  traiaemblance  -I'aoeuaation  que 
Routes  les  tentatives  pour  faire  le  bon- 
beur  de  la  Pologn^ ,  poftr  lui  procurer 
^  situation  tnmquille  et  floriaaante 
1^  'le  moycn  d^me  constitution  qui 
^Qre  aon  existence  nationale,  ont 
W  et  sent  encore  sans  succ^.  'IjC  mi- 


yaraorie  mn  ooqwutnine  d^R^rtirilQpa 
aarudflBoaietdbeaaNr^eMrtiainaMia  la  ai* 
toaiwa  d«  merwine  icmaNoda  au  «si- 
4ieM  dea  .clnaanatanaas  okiim  <r^uva , 
a*jt  doit  parvenir  ^uiNti^i  la  J^uiasaiiaa 
dea  avanta^es  que  :aa  .«o«aStittio»  et 
ka  ;diMiaailiQoa  bkiafaiaiMMlea  4«  ^a 
MajeataramiieifMir  \mfm!a^tM^4*Mr 
tendaa*  Gn  oons^ueace^  l^,eoiiaailide 
yAraovie(tlahaKa>,  aana  doika^  in  ttixe 
aemfMOiiDa  a  tarn  ka  MiUwHa  ^e 
Ja  4ranqiiiliit6iQt  la  ipalieKoe  ^nt  fyoi- 

3ue«t  ladiapeaaaUa  moyen  poQr.coii- 
uiae  la  nation  k  un  ar«air  liaureux . 
4andi8  .qu'auHrcnieBt  J'ayenir  ae  kii 
4|Bidnerfiit  qu'une  dtaadutioa  M  joaa 
-ndna  toftala.  p 

Leai^reaeQaenitaiqiii  aoocNaipagtt^reBt 
.la  D6«elotion  du  ^o  ooxenabEe  <1880 « et 
les  jnteokaa  des  Polonaia  leacika, m- 
jdiquantdeilamaiii^re  la  plus  pt^ciae 
iFiOiBgHM  H  k  .dd?eiopp«nient  .d'uae 
-laate  oonjof ation  oontne  le  gouveana- 
jucnt  que  la  Buaaie  avait  iaaposd  k  la 
£otoj|ne;  maia  wiaimroenae  dispro- 
-portion.dana  lea  aooyenade jMstanoe 
aemblerait  accuser  lea  Polonaia ,  ^ai 
,l*.eta(to&  ila  ae  trouvaient;  aoMs  Ja  joug 
-vuaae,  ae  leor  edt  pam  intolMbia. 

Suant  ^onelibert^iDleineeteomplte, 
ina  ^laa  linMtea  de  la  .oonaMtutioii  de 
■I8.t6,  il  6tait  jiasai  4bffioile  a  aox  de 
M*y  rentenier  iqu'ii  vAileaandaa  de  ne 
paa  ae  aonvenir  qu^l  traaait  donnde, 
et  qu'il  avait  «la  moults  de  Ja  leticer. 
-Un  yiee-ra  daoaractare  de  Conslan- 
(Un  dtait  tpeq  propre  a  'pond^rar  iiafaa- 
ileoMBt  m  Hoert^  oonatttutionnettea 
4le  ia  nation  avac  lea  >n6oa8Bit6a  .qiii 
4iaiaaaiant  da  patronage  jakuu  .'d*uii 
gouYernement  ^deapoitique.  €e  prjnoe 
«vait  loutea  1^  bixarvariea  die  son 
pk« ,  at  rinoona^enae  de  sea  aetea 
tour  il  tour  ampreints  d'empovtamant, 
4e  g^B6roait6  et  de  mdfianoctaoait 
Jea  eaprils  dana  cme  appvdhenaion  con- 
tinuelle  ;'aon.  manage  avae  la  prlnoaaae 
de  Lowioe  a?ott  'aanaiblemont  aaliqd 
la  fougue  de  aaa  paaaiona,  'mats  paa 
aeaea  cependant  pour  .que  tout  le 
monde,  depuis  lea  ff^B^rauftJoaqu'au 
soMats ,  ne  tremblat  en  «a  praenee. 
^love  40  Soiivorof ,  11  n*ai^ait  bdrHd 


S04 


L'UMIVEHS. 


oue  des  acaossoires  de  ton  gtoie ;  runi- 
rorme  des  troupei ,  la  prMsion  mtoh 
nique  des  Evolutions  milltaires ,  tout 
rappelait  en  lut  Pierre  III  et  Paul  I*^ 
C^endant  les  bienfaits  de  la  paix  et 
d'une  administration  forte  n'avaient 
pas  6tE  sans  r^suitats. 

«  En  moins  de  dix  ans ,  des  routes 
que  Ton  pourralt  comparer  aux  voies 
romaineSt  sillonn^rent  dans  tous  les 
sens  h  n^aume  h  tracers  les  forto, 
les  martoiges  et  les  sables  rebelles , 
depais  un  temps  immtoorial ,  h  tous 
-les  efforts  de  rindustrie  humaine. 

«  La  capitale ,  peupl^  de  cent  quatre- 
▼ingt  milie  flmes,  resplendissait  de 
luxe  et  d'El^anoe.  Architecture ,  sculp- 
ture ,  g^nie .  tout  se  disputait  ie  pri- 
vil^e  d*emoellir  Tantique  Varsovie. 
Les  th^fttres ,  les  paiais ,  les  casernes, 
les  monttments,  les  promenades,  les 
places  et  les  rues  sortaient  comme  pw 
enchantement  du  chaos  oil  les  avait 
enfouis,  sous  la  republique,  un  me- 
lange bizarre  de  feste  et  de  mis^... 

«.Les  provinces  se  peuplaient  et  se 
oottvraient  de  villes  et  ae  manufac- 
tures... 

«  Un  ministre  tonome ,  industrteux, 
remplissait  les  caisses  de  TEtat  et  af- 
fermissait  Ie  cr^it  national.  Les  re- 
venus  du  royaurae  s'Elevaient  h  quatre- 
▼ingt-dtx  millions  de  florins  polooais; 
la  banqoe  contenait  un  capital  de  cent 
dnquante  niiilions,  et  Ie  tr^or  une 
r^sorve  de  trente  millions. 

«  La  population  s'^tait  prodigieuse- 
ment  accrue  dans  les  huit  palatinats 
dtt  royaume;  on  v  comptait  plus  de 

Suatre  millions  d^Ames.  Une  arm^ 
e  trente-ctnq  mille  braves  oomplEtait 
sa  puissance  mat^ielle. 

«  Le  commerce,  ce  vieii  objet  d'an- 
tipatbie  d*un  peuple  turbulent,  guer- 
rier  et  a^ricole,  commenqait^  enrichir 
les  particuliers  et  les  masses  (Histoire 
de  la  r^olution  de  Pologne,  par  Louis 
Mi^roslawski).  v  II  est  juste  de  dire 
que  r^loquent  btstorien  que  nous  ve- 
nous de  citer  compense  largement  ces 
^og^«  qui*  dans  sa  bouche,  n'ont 
jTien  de  suspect ,  par  les  rtoiminations 
les  plus  ameres  contre  le  gouverne- 
ment  russe;  mais  les  reproches,  m^me 


fondes,  perdent  de  leur  poids  lorsque 
la  passion ,  edt-elle  sa  source  dans  le 
patriotisme  le  plus  pur,  les  dicte  et 
les  exagere. 

Cependant  nous  sommes  loin  de  nier 
que  ie  gouvernement  russe  n*ait  pas, 
en  Pologne ,  employ^  des  moyens  qui 
doublaient  les  dangers  du  pouvoir  en 
le  d^nsid^rant ;  il  ^it  de  son  droit 
et  de  son  devoir  de  surveiller  ses  en- 
nemis  et  de  ne  pas  se  laisser  prendre 
au  d^urvu;  mais,  en  voulant  com- 
primer  toute  liberty  ^  il  augmeotait  ses 
embarras;  et  ses  rigueurs,  en  torn- 
bant  souvent  h  faux,  accroissaieot 
le  nombre  de  ceux  qu'une  occasion 
favorable  ppuvait  faire  dearer  contre 
lui.  Cest  ainsi  gue  des  mesurcs  se- 
v^res  assujettissaient  les  ^udiants  aux 
formalit<^  les  plus  g^nantes.  II  leur 
fallait  Tautorisation  de  I'empereur 
pour  se  rendre  dans  une  university 
etrai^^ ;  la  presse  fut  enchain^ ;  les 
delations  devinrent  un  moyen  sdr  de 
parvenir ,  et  une  espto  dioquisitlon 
politique  fit  d^pendre  de  rapports  de 
police  la  fortune,  la  silrete  et  Fhon- 
oeur  des  individus. 

Tandis  qu' Alexandre  immolait  ainsi 
ses  principes  aux  combinaisoos  de  la 
sainte  alliance,  ou  plut6t,  tandis  au*il 
ae  flattait  de  les  voir  se  r^aliser  dans 
Tensemble,  en  les  sacrifiant  sur  quel- 
qves  points,  le  congr^  de  VErone  s*ap- 
pr^it  h  statuer  sur  le  sort  de  la 
Grto.  II  fallait  toute  r habiletE  de  M.  de 
Metternicb  pour  persuader  ^  Tempereur 
deRussie  qu'il  oonvenait  k  sa  politique 
de  sacrifier  la  cause  des  Grecs ,  par  cela 
seul  qu'ils  osaient  recourir  a  rinsur- 
rection.  Ainsi  les  troubles  tant  de  fois 
suscit^s  en  Greoe  par  la  Russia  elle- 
mtoe;  les  vues  de  Pierre  le  Grand, 
cellesdeMunichqu'adopta  GatberineU, 
toute  rexpErieuce  du  passE  ne  parent 
decider  Alexandre  h  jouer  le  role  que 
son  influence.en  Europe  et  ses  convic- 
tions religieuses,  d'accord  avec  le  vera 
^En^ral  des  peuples  de  TOccident  et  les 
mter^ts  les  plas  vitaux  de  son  empire, 
lui  prescrivaient  d*adopter.  On  sail 
qu* Alexandre  se  trouvait  h  Lavbach, 
lorsque  la  nouvelle  de  la  lev^  ae  bou- 
cliers  que  venait  de  faire  Ypsilanti  lui 


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% 


RUSSIE. 


605 


pGorint.  avec  la  lettre  par  ]aquelle  ce 
^oce  le  suppliait  de  De  pas  refuser 
no  appoi  h  la  nation  greoque;  on  salt 
qa*il  se  hftta  de  faire  d^avouer  for- 
mdlement  par  ses  ministres  oette  en< 
treinise  :  ne  pouvant  la  consid(6rer, 
disait-il,  queoomme  Teffet  de  I'exal- 
,tation  qoi  caract^ise  T^poque  actaelle, 
amfli  one  de  rinexp^rience  et  de  la  16- 
gerete  de  oe  jeune  homme. 

U  est  probable  qae  le  prince  Ypsi- 
laati  avait  M  encourage  par  les  Russes 
enx-no^mes;  mais  que  les  id6es  de 
Tempereur  Alexandre  s'^nt  modi* 
flees  depuis  1815,  on  le  d^avoua  pour 
ne  point  parattre  en  contradiction  avec 
le  sUUu  quo  de  la  sainte  alliance  :  ce 
qui  vient  a  I'appui  decette  bypotbtee, 
€eBt  que  M.  uipo-d'Istria,  qui  ftvori- 
sait  les  mouvements  occulted  des  H6- 
tairisl^,  fiit  disgr^e  peu  de  temps 
aprte. 

1823.  Gqiendantreropereur  Alexan- 
dre dedara  que  rarm^e  au  Pruth  obser- 
Terait  la  plus  exacte  neutrality;  M.  de 
Strogonor  recot  Fordre  de  signifler  k 
la  Porte  que  &a  Mdjest^  6tait  d6cid6e 
h  reiler  oompletement  ^trang^  aux 
meanres  inil  pourraient  troubler  la 
tranquillite  des  fitats,  et  k  maintenir 
les  traites  esistaot  entre  les  deux  puis- 
saoees.  L'Autriche  appuya  diploinati* 
ooemeot  oette  d^uiamie;  toutefois  le 
lunui,  pour  plus  de  s6curit6,  soumit 
k  une  nsite  les  vaisseaux  qui  passaient 
le  detroit  des  Dardanelles.  Le  bon  sens 
ture  ne  poavait  admettre  qu' Alexandre 
restit  indifii6rent  k  la  cause  de  ses  core- 
ligioonatres.  Gette  determination  sou- 
k^a  plusieurs  explications  assez  vives 
entre  M.  de  Strogonof  et  le  reiss-ef- 
fimdi.  Le  mintstre  intoguait  les  traits 
ant^rienrs  dont  les  stipulations  n'a- 
Talent  pas  pn^TU  nettement  le  cas  qui 
se  pmentait.  U  appuya  avec  y^^- 
mence  sur  les  cruautes  exeroto  par  les 
Turcs  pour  ^ouffer  I'insurrection , 
sans  distinction  des  innocents  et  des 
coopables.  II  demanda  qu'on  ne  con* 
danonAt  les  Grecs  qu'apr^  une  en- 
qu^te  formelle,  et  qu'on  fit  cesser  les 
profanations  et  les  destructions  des 
f^lises. 

«  Le  rdss-effendi ,  se  fondant  sur  les 


m^mes  traits,  accusait  la  Russie  de 
les  enfreindre,  en  accordant  une  pro- 
tection d^is^  aux  rebelles  et  en  re- 
fusant  leur  extradition ,  quoique  ce  cas 
edt  ^  formellement  pr6vu  par  les 
transactions  qu'elle  invoquait.  II  ajou- 
tait  que  nul  traits  n'avait  pu  interdire 
au  sultan  le  droit  de  traiter  selon  la 
mesure  de  sa  s^v^t^  ou  da  sa  cld- 
mence,  des  sujets  hivolt^,  et  que  le 
patriarcbe  de  Constantinople  arait  subi 
la  peine  due  k  sa  trabison,  constats 
par  sa  correspondance  avec  les  r6voit^ 
de  la  Morto. 

«  Sur  ces  entrefaites,  Tarrestation 
d'un  n^ociant  grec,  accuse  d'avoir 
fourni  des  fonds  aux  insurgds,  vint 
compiiquer  les  difficult^ :  M.  de  Stro- 
gonof ayant  inutilement  reclame  le 
pr6venu  comme  banquier  de  la  l^a- 
tion  russe,  s'adressa  immediatement 
au  Grand  Seigneur,  et  n'en  obtint 
qu*un  refiis  formel. 

«  D^  lors,  ayoute  Rabbe^  une  rup- 
ture entre  la  Porte  et  la  Russie  parut 
inevitable,  et  M.  de  Strogonof  se  pr^- 
para  k  partir.  Les  demi^res  notes  qu'il 
remit  au  divan  (juillet  1821)  etaient 
encore  plus  precises  et  plus  fortes. 

«  Si  le  gouvemement  turc,  ecrivait 
ce  ministre,  temoignait,  centre  toute 
attente,  que  c*est  par  suite  d*un  plan 
librement  arrdte  qu'il  prend  les  mesu- 
res  touchant  lesquelles  le  soussigne 
lui  a  d^j^  expose  le  sentiment  de  son 
auguste  mattre,  il  ne  resteralt  k  Tem- 
pereur  qa'^  declarer  dk»  k  present  k 
la  Sublime  Porte  qu'elle  se  constitue 
en  etat  d'hostilite  ouverte  centre  le 
monde  Chretien,  qu'elle  l^itime  la 
defense  des  Grecs,  qui  d^s  lors  com- 
battraient  uniquement  pour  se  sous- 
traire  k  une  perte  inevitable;  et  que, 
vu  le  caractere  de  oette  lutte,  la  Rus« 
sie  se  trouverait  dans  la  stricte  obliga* 
tion  de  leur  oifirir  asile,  parce  qu  ils 
seraient  persecutes;  protection,  parce 
qu'elle  en  aurait  le  droit;  assistance  avec 
toute  la  chretiente,  parce  qu'elle  ne 
pourrait  pas  consentir  a  livrer  ses  frd- 
res  de  religion  a  la  merci  d'un  aveugle 
fanatisme. » 

Pour  toute  reponse  k  cet  ultimatum, 
ou  vouiut  enfermer  raoibassadeur  russe 


506 


L'UNl  VEILS. 


daas  le  chateau  des  SepMoura;  loette 
mesttre,  depvislQBgtem^lnusili^f&it 
arrfitee  par  Vlnterveoiion  d«s  jniaia- 
tres  .d*AngIeterre  <et  d'Autriche;  Iw 
oegociatiojos  se  pour suivaient,  l(vn^pi0 
ja  note  de  Tcmpflreur  Alexaodrci,  aiw 
,grandes  puifisaocas  4^  TEurop^,  I|b 
jiioDtra  au  laende  teomroe  le  «artyr 
da  300  propr^  systtoe.  Lepriaoe  ^w 
avait  reoveo^  &ip<M^D  n'osait  abor- 
der  una  ^[uesticA  qui  touobait  de  ai 

fir^  aux  iDt^te  de  son  peuple  et  k 
'hoDoeur  oompromis  de  son  -gpuvep- 
nement.  «  Sa  Majesty,  disait-on  daoi 
cette  note,  n'ayant  ^riea  tant  a  coeur 

Sue  ia  paoiOcatioa  de  FEurope,  etaii 
ispo»6e  a  faire,  pour  la  conservatiQ* 
de  la  paix,  lea  plus  grands  sacrifices, 
suppos^  ^e  les  cabinets  europ^eos 
.trouvassent  daos  leur  ^agesse  de« 
inoyeiKs  efficaoes  pour  obteoir  de  la 
Porte  ottomane  oe  met^e  les  Chre- 
tiens de  la  Tur^uie  ^  Tabri  d*une  r^ 
petition  des  scenes  violentes  dopt  ils 
avaJent  6i6  victimes;  et  telles  ^tantlea 
dispositions  de  S.  M.  Imp^riale,  les 
oours  de  l!£urctpe  .^taieot  pri6e»  d'ar 
vi^r  incessamtiient  awe  juoymis  pro* 
pres d*atteindre  le  butd^tr^^iet  de  la 
dispenser  ainsi  d^obtenir  per  la  force 
des  armes  raccomplissement  des  oon- 
ditions  <^e  ^'honneurde  lacooronne, 
le  niaiotiendes  trait^s,  la  potection 
de  lazelieioa  cbf ^enne,  et  l-nuBianite, 
lui  ont  fait  ua  dewir  .d*exiger  de  la 
Porte. « 

On  ne  peut  se  dissimuler  toutefois 
QU^il  regne  dans  tootes  ces  expressions 
un  sentimemt  qui  dMIe  la  lassitude 
d-une  fausse  position,  dL  le  d^sir  vif, 
quoiqueeombattu,  de  aortir  de  cat  ein- 
barras,  jsoit  par  r«fifort  politique  de 
rallianoe,  soit,  k  defaut  aespedient, 
par  le  seul  juoyen  efiOcaoe,  c'est-a-dive, 
par  riotorvention  arinee. 

Sans  sepffoduire  ioi  les  oole^  qui  ia* 
rent  encore  ^ohangees ,  nous  nous  bor* 
nergns  k  dire  que  la  Turquie  se  fefiir 
aait  k  tout  Arrangemeirt  avant  que 
rinsufrection  fdt  ^toufiee.  Ce  ij/oi 
faiaait  r^ilement  la  force  du  ^raison- 
nement  turc,  c'est  qu'au  food  il 
s'aeoordoit  avec  les  prinotpes  con* 
tie-revofaiiioiinatffes  qui  faisaient  la 


basedu  A^steme  de  la«ainte  aUiance. 
Aiu  miueu  de  eette  politique  ostea- 
Aiblement  ;toute  de  principes ,  mais  que 
ia  force  des  choses  lanMuait  k  lout 
4noBieot  aux  n^cessites  d'une  politique 
d*iiKt6r£t8«  les  cabinets  jr edoublaieot  de 
Joins  pour  iMtardv  la  cbute  du  ^y*- 
teme;  Bim  ^eo  ^tavani  les  piMrties  nial 
jffarmies  de  fMioce  de  r^lliancc^  oo 
r^branlait  dans  son  entier.  U  serait 
dtfBeile  de  s'^sxpliquer  Ofupineut  des 
Jbonunes  d'£tat,  doAt  I'apl^ude  ngalaift 
l!experience<,  avaient  pu  se  Jtracer  ^ne 
tflUe  li^  de  conduite,  si  J'tO^  i^  se 
-rappelait  qu'ip^a  les  sacrifices  .teor* 
•mes  de  TEurope  et  les  dangers  qu  V 
vaientiXHirus  tous  lesiibrtoeSi  il  ^itait 
asa^E  natwel  de  beioer  ks  peupJes  de 
Tespoir  d*un  long  repos^ifomd^  sur  des 
pdneipes  inflexibles  tela  que  ceux  de  Ja 
religion  et  de  la  legftimit^.  Si  Ton 
aioute  h  ces  considerations  que  Tequi- 
liiwe  de  Ji*£«wetpe,  Im  d'a«oir  M  f^- 
tabli  par  le^ngr^de  Vienna,  se  trou* 
srait  detruit  par  la  puisaanoe  enonBe 
de  4a  Aussie,  on  -oessena  de  s'otonaer 
^le  M.  deMettemiob  ait  soutenu  «ne 
eombkiaiflon  dans  laqualie  la  pi^n* 
di6ra«ee  de  Tempir e  orusse  ae  jteouvait 
pour  ainai  dire  neutraUa^  par  la  oio* 
dtottion  -tinior^  de  aoocbet.  hsi  i|ues* 
tion  d'Orient  excitai^  k  uo  haut4iegrtf 
la  sollicitude  du  ministre  aulrichien; 
il  voyait  .toute  la  port^  d'uoe  interven- 
tion ruasedanaJesaffiRiresde  laGreee, 
et  il  ne  lui  fi4  pas  diffioile  de  d^mon* 
teerlo^iquemaat  k  Alexiandre  qu«  Tin- 
sttrraotion  des  Bell^oes  ne  poiivait  ^tra 
appui^^par  les  mSmes  prinoee  qui  ve- 
naient  !<r6touffer  les  r^olutions  de 
Naples  ct  du  Piknont,  et^i  prcsori" 
vaient  k  la  France,  aous  :pei«e  de  aa 
voir  attequtesur  le  Rhin,de  jeter  cent 
roille  hommea  en  Espaei^e  pour  y  fpjre 
triompher  IcfNcinoipe  de  Fuiviolabilite 
des  laouferaina.  AleModve  ^sentit  pro- 
baUament  k  pi^e,  mais  il  6tait  trep 
eagag^  |iour  ceculer;  41  «st  d'autont 
plus  p^nible  de.confeJBaer  qu'on  a  ^ 
tromp^,  que  la  source  de  rerreur  est 

as  pure  et  plus  jwligieuBe,  d'ailleurs 
npeneur  liJexandre,  qui  ^tait  k  la 
fois  le  fondateur  et  Tappui  de  rallianoe , 
aoniblait  devoir  viwre  assez  loogtampa 


RUS8IE. 


567 


came  pour  yi'on  pAi  »<gltt  jittniti- 
vement  ks  qamUim  ies  flui  pn»- 
futes  lie  ToKM  {AliH^ije  «amp6en; 
la  iiiort  pv^matiirte  de  ccjiriiioe  pooQva 
^e  to  loide  flMawnent  et  4e{Nrogvte 
enile,  <|aoiqae  diffmnte  Am  «a 
aarohe  «t  ses  in,  pour  let  cabnitfti 
4»0MK  ipoiir  ies  {«Mlfli.  Vratefoii 
Tafenira  monM  queriteitriefae  moii- 
Ira  dan  la  question  greoque  an  sens 
foKtique  plus  droit,  una  fvivimm 
auesx  eotendne,  que  let  eoBemis  da 
saDelant  despotisme  des  Turoi;  et, 
apres  la  aport  d'Alcxandie,  oe  fai  le 
GoeM^eenvre  •de  la  dfplomatie  rvsae 
fK  da  s'appaycr  «iir  I'entliousiaaiiie 
irr^AMiide  toua  ies  petioles  poor  oon- 
lomnier,  deoenoert  aveeiespuissanoeB 
rifales,  la  mine  -de  la  Turqaie,  en  la 
pmant-d'oo  mtoe  coup  de  sa  marine 
et  da  aes  nusUenres  possessions  dasM 
TArdnpel. 

Chaeun  des  oongrte^qai  eurent  tiea 
dapvis  1M6  peat  dtoeeoMUbM-ceinme 
an  Mile  distinct  du  drame 'politique  de 
U  sainte  alliance;  mais  ie  plus  rempli 
d'ialMtiesty  sans  oontiedit,  eelui  de 
V^one;  c^est  lik  qve  ila  cause  de  la  1^ 
^^inat^  j'est  ddsagiie  de  la  cause  reN- 
giensa  poor  Falnorber  entidrament. 
Le  CQoote  iletaias  dtait  debarqa^  k 
lAoAna  pour  parler  en  &veur  dea 
Grecs;  oa  trewfa  plus  ais^  de  lui  1n- 
taidne  is  eongrte  inie  de  lui  r^ndre; 
eteoaaneiles  ooaseqoenees  d*un  pvin- 
eipeftuK  m^ent  logiqnemeift  a  ral>- 
surde,  ks  cabinets  i^pr^sent^  k  Y^- 
MM  fifsnt  innriter  le  -sultan  a  nommer 
M  aadiaasadeur  pour  y  soutenir  Ies 
droitsde-la  Porte.  Le  Grond  Seigneur 
decKaa  avec  iiert^  cette  offre  bizarre, 
sms  powoir  laaser  la  longantmite  du 
ooo^. 

Si  I'^on  ^CMMerrait  encore  ouelques 
iloatM  vsor  I'h^lsme  de  r^ignotion 
^  sinposait  Alenandre,  ces  doutes 
s^nnaDtraient  en  ilisant  le  passase 
saivaatdanB  un  diseonrs  prononc^  ^Ta 
oambre  par  M.  de  Chdteaubriand : 
"  le  niisbien  aide  ,me  dit  nn  jour  Vem- 
preur  Alexandre ,  quevoos  soyez  venu 
a^erone,  afin  de  rendre  t^otgnage 
a  b  T^ii^.  AorieK-vous  cru .  comma 
'f  disent  nos  ennemis,  que  t'alKance 


ii*est  qu*4Hi  not  qui  ne  eart  qii*i  oou- 
^r  des  anbHiMaf  Oela  peut^Mre  eOt 
4U  Yxm  dsM  fanoien  Mt  de  ehoses: 
inaia  il  a'aglt  bian  aojourdttuj  de  quel- 
^foes  mtMts  psrtiealiers  quand  le 
flBaade  cifilia^  estfn  pMI! 

«  U  ne  peut  plus  y  avoir  de  politique 
andaise  .trance ,  Tuaae ,  pfussienne , 
^utnefaianfie;  il  nV  a  nkia  qu'une  po- 
litiqneipMrale  qdf  doit,  pour  le  salut 
de  tous,  Mre  admise  en  eemmun  par 
•iaa  peuples  et  par  las  rots.  CesI  h  moi 
d^B  ne  montrer  le  premter  eenvainen 
des  principes  .aur  lesquels  f  ai  fond^ 
j^aAiance.  Uneoooasion  s^est  pr^sent^, 
leaoiddfenent  de  la  Grte.  Rien  sans 
doute  ne  paraissait  ^e  plus  dans  mes 
snt^rdts,  dans  oeux  de  mes  peuples, 
dans  P<^inien  de  roon  pays,  qu'une 
fneare  TCKgieuBe  centre  la  Turquie; 
mais  i*ai  cru  aemarguer  dans  Ies  trou*- 
bles-auPtfopon^  le  8igner<^lution^ 
mfine;  dds  lors  ie  me  sais  abstoni. 
QaenVt^n  pas  fait  pourrompre  Pal- 
lianoe?  On  a  eberoh^  tour  k  tour  k  me 
donner  des  prdtentions  ou  k  blesser 
mm  amour-propre;  on  tii*a  outrage 
oovertement :  on  me  connaissait  bien 
mal  si  on  a  cm  que  mes  prineipes  tie 
tenaient  qix*k  des  vanit^s  ou  pouvaient 
e6der  k  des  ressentiments.  Pfon ,  Je  ne 
me  s^parerai  jamais  des  monarques 
auxquels  je  me  suis  uni.  11  dort  Are 
permis  aux  rois  d'avoir  des  alliances 
publiques  pour  se  d^fendre  oontre  leS 
socidras  secr^es.  -Qu'est^ce  qui  pour- 
rait  me  tenter?  qu*ai-]e  besoin  d'ac- 
oroftre  mon  empire?  La  Providence 
n'a  pas  mis  a  mes  ordres  buit  cent 
mille  soldats  pour  satisfieiire  mon  am- 
bition, mais  pour  prot^ger  la  religion , 
la  morale  et  la  justice,  et  pour  faire 
r^ner  ees  prineipes  d'ordre  sur  les- 
quels -repose  la  soci^  humaine. » 

Quand  la  politique  d'un  cabinet 
change  tout  k  coup,  non  parce  que  Ies 
int^iets  out  chang^  en  m^me  tem|)S 
que  Ies  ram>ort8  intemationaux ,  mais 
par  suite  o^tucs  particuUeres  du  chef 
de  TEtat ,  il  arrive  que  mille  difficult^s 
viennent  eiftraver  la  marche  des  n^o- 
dations ,  parce  que  la  nouvelle  direc- 
tion ne  se  rattachant  plus  aux  pr^^- 
dents  dtplomatiques ,  tout  est  a  refaire , 


LUMIVERS. 


et«  pour  atiiai  dire,  a  crter.  Dans  ce 
cas ,  lea  ministres  eux-m^mes ,  quel  que 
aoit  d*ailleur8  leur  d^vouement  ii  la 
volenti  qui  les  dirige«  opposent  h  cette 
volonU  une  r^istance  qui  est  celle  dea 
ehoses ,  et  ne  sorteut  qu'k  regret  d'une 
vote  dont  le  but  leur  6tait  conou. 
C'est  oe  qui  avait  eu  lieu  sous  le  regne 
de  Paul,  lorsque  ce  prince  entra  brus- 
quement  dans  ralliance  fraq^ise;  c'est 
oe  qu'on  vit  se  reproduire  dans  les 
dernieres  annto  d* Alexandre,  k  Foe- 
casion  des  affaires  de  la  Gr^ce.  La 
chancellerie  minist^rielle,  tout  en  su* 
bissant  les  oons^uences  d*un  systtee 
va(;ue  et  de  thtories  creuses,  n'en  pre- 
nait  pas  moins  ses  precautions,  pour 
ne  pas  6tre  surprise  ouand  la  politique 
positive ,  celle  dfes  interdts ,  reprendrait 
Kiveur  k  I'exclusion  de  la  politique  de 

{>riocipes.  On  d^vouait  hautement 
es  chefs  de  Tinsurrection,  mais  on 
s'appuyait  sur  des  trait^  condus  k  dea 
epo(}ues  oil  des  r^voltes  semblables 
avaient  ^t^  non-seulement  encouragto, 
mais  susdt^es  par  le  gouvemement 
russe.  L*opinion  publique  ^tait  d*ai|- 
leurs  peu  favorable,  en  Russie,  k  cette 
religion  du  statu  quo,  dont  Alexandre 
etait  k  la  fois  le  revdiateur,  I'apdtre  et 
le  martyr.  Les  nobles,  apres  tant  de 
sacrifices,  trouvaient  que  le  tsar  n'a* 
vait  [las  su  tirer  parti  ae  la  uia^nifique 
position  que  la  fortune  lui  avait  faite, 
et  leur  on;ueil  souffrait  de  voir  toute 
carri^re  fermee  k  leurs  inclinations 
guerridres ,  qu*excitaient  des  triompbes 
r^cents.  Le  clerg6,  et  avec  lui  tout  le 
peuple  dont  il  avait  exalte  le  courage 
dans  sa  lutte  contre  Mapol^n ,  ne  pou- 
vait  compreodre  que  le  chef  de  rilglise 
orthodoxy  laissAt  Jes  Turcs  niassacrer 
des  freres  en  religion.  Aussi  la  politi- 
aue  du  cabinet  russe,  relativement  k 
1  Orient ,  fut^lle  plutdt  suspendue  qu'a- 
bandonn^e,  et  la  volonte  d'Alexandre 
ne  fut  alors  qu*un  accident. 

Aucune  mesure  ^nergique  et  par 
consequent  efficace  ne  pouvait  surgir 
du  congres  de  Verone. 

«  Lord  Strangford  avait  6U  renvoy^ 
a  Ckinstantinople  malgr^  le  refus  de  la 
faire  repr^senter  au  congres.  11  avait 
mission  de  demander  de  iiouveau  que 


le  divan  foumtt  des  preuves  de  la  sin* 
eerite  de  ses  dispositions  pour  la  paix ; 

3u*il  notifiAt  k  la  Russie  la  nomination 
es  hOspodars,  et  fit  evacuer  les  deux 
principautds  par  ses  troupes;  quMl  rt- 
tabitt  en  foveur  du  commerce  russe, 
et  de  toutes  les  nations  cbretiennes, 
les  roemes  avantages  de  libre  naviga- 
tion dans  la  mer  Noire,  dont  on  jouis- 
salt  avant  I'insurrection  greoque,  et 
dont  on  avait  6t6  pri v^ ,  sous  le  pretexte 
que  la  Russie  avait  seoouru  les  tD- 
surges. 

« line  partre  de  oes  conditions  fut 
ex^eutee  en  1823.  Une  lettre  du  reis- 
effendi,  adress^e,  dans  le  mois  de  ^ 
vrier  de  cette  ann^e,  au  comte  de 
Nesselrode,  par  Tentremise  de  lord 
Strangford,  en  fait  foi...  De  son  c&U, 
le  divan  r^clamait  rex^cution  comply 
du  traite  de  Boukharest,  et  enDD  il 
demandait  le  retour  d'un  ministre 
russe  k  Constantinople,  comroe  une 
garantie  des  dispositions  amicales  de 
rempereur  de  Russie  pour  la  sublime 
Porte. 

«  Ges  diverses  demandes  fiirept  «u- 
d^es  dans  la  demandeque  fit  le  ministre 
russe  au  reis-effendi ;  mais  lord  Strang- 
ford  fut  charee  de  faireconnaftre  verba- 
lement  cequ\>n  ne  voulait  pas  toire.^ 
La  Porte  avait  extoit^  ce  qu'on  avart 
demand^;  mais,  ne  pouvant  nier  la 
reality  des  concessions  qu*elle  veoait 
de  faire,  on  en  critiquait  la  forme,  on 
se  rejetait  sur  des  droonstaoces  de 
di^taif,  puis  surgissaient  de  nouveiles 

Slaintes  sur  I'toission  r6cente  don 
rman  qui  souroettait,  disait-on,  » 
commerce  europ^n,  dans  les  mersdu 
Levant,  k  des  vexations  inouics;  eonn 
Ton  revenait  aux  (jrecs,  au  droit  de 
protection  de  la  Russie :  on  exiwa»^ 
que  la  Porte  r^pondtt  nettemeot  a  ce 
sujet  (Rabbe). »  Probablement ,  on  vou; 
iait  faire  entendre  a  la  Porte  que,  « 
elle  s'obstinait  k  rejeter  tout  arrangej 
nient  en  ce  qui  regardait  les  Grecs,  on 
ne  manquerait  pas  de  pP^^^J?5!I« 
tirer  de  Pinterpr^tation  des  traitttdes 
motifs  sufBsants  de  rupture. 

Le  divan  feignit  de  ne  rj*",^'?' 
prendre  k  des  exigences  qm  d«nj^ 
toient  cette  moderation  de  1  ainance. 


RUSSII^. 


609 


et  il  r^solut  de  prendre  des  roesures 
energiques,  soit  quil  se  cr^t  en  ^tat 
de  les  soutenir,  soit  plut6t  qu'il  Mt 
secr^tement  encourage  dans  sa  resis- 
tance par  le  cabinet  de  Vienne,  qui 
poussait  ainsi  Alexandre  ju8(]u'aux  der- 
nieres  lioiites  de  son  systeme.  D'ait* 
leurs,  en  admettant  qu'aucune  in- 
fluence ^trangere  n*edt  agi  sur  la 
determination  du  divan ,  il  ^tait  Evident 
que  la  Russie  ne  pouvait  intervenir 
efficacement  en  Turauie  qi!i*avec  le 
concours  ou  du  moins  le  consentement 
de  FAngleterre  et  de  TAutriche,  et 
c*est  ce  qui  arriva  plus  tard  quand  les 
scrupulesd'Alexanaren'arr^terentplus 
le  cabinet  de  Saint-P^tersbourg. 

Quoi  qu'il  en  soit,  quatre  bdtiments 
sous  pavilion  russe  furent  s6questres 
dans  le  port  de  Constantinople ,  comme 
appartenant  a  des  Grecs  insurg^.  Le 
caoinet  deVienne  t^oicna  une  grande 
surprise ,  et  d^lara  que  le  systeme  etait 
en  danger;  c^^tait  attaquer  Alexandre 
par  son  c6te  faible.  Les  deux  empe- 
rears  eurent  une  conference  h  Czemo- 
witz;  M.  de  Mettemicb  tomba  malade 
pieecis^m^n^au  moment  de  s'y  rendre ; 
rabsence  de  ee  rooderateur  du  systeme 
laissait  h  Alexandre  les  bonneurs  ap- 
parents  d'une  resolution  non  influen- 
cee»  et  tout  n'en  alia  que  mieux.  Les 
deux  soaverains  se  borndrent  k  con- 
veoir  de  ]*opportunit6  de  quelques 
mesires  de  reparation  de  la  part  de  la 
Porte  ottoroane.  et  kurs  ministres 
furent  diarp^s  d  en  determiner  la  na- 
ture et  la  signification  politique. 

«  Les  deux  monarques  (Rabbe)  ne 
resterent  pas  plus  de  quatre  jours  en- 
semble. Alexandre^  en  partant  de  Czer- 
nowitz  pour  retourner  dans  ses  Etats, 
envoya  M .  de  Nesselrode  h  Lemberg 
pour  s'y  concerter  avec  M.  de  Metter- 
nidi :  M.  de  Tatistcbef  s'y  trouva  ega^ 
lement.  On  y  redi^  une  note  qui 
devait  etre  transmise  au  divan,  tou- 
jours  par  I'entremise  die  lord  Strang- 
ford;  outre  les  griefs  de  la  Russie, 
deja  «t  si  souvent  articuies,  M.  de 
Nesselrode  eut  Fadresse  d'y  inserer,  au 
nora  de  toutes  les  puissances  chre- 
tiennes ,  une  reclamation  energique  sur 
Jes  iosultes  faites  au  pavilion  russe: 


c'etait  un  acheminement  au  protooole 
du  4  avril ,  qui  fut  signe  trois  ans  plus 
tard.  • 

1823-1834.  Alexandre  voyait  avee 
mefiance  et  douleur  tous  les  germes 
de  mecontentement  se  developper  dans 
ses  £tats  :  sa  foi  dans  le  systeme  Met- 
ternich  etait  dej^  bien  ebraniee ;  mais 
11  y  persistait  fatalement,  en  donnant 
toutefois  h  ses  ministres  plus  de  lati- 
tude, et  en  laissant  k  leur  sagadte  le 
soin  de  sauver  les  apparences. 

Gependant  les  esprits  continuaient 
de  fermenter  en  Pologne;  Tenthou- 
siasme  avec  lequel  on  avait  salue  la 
constitution,  s'etalt  toume  en  baine 
contre  le  grand-due  Constantin  et  coo- 
tre  les  agents  de  ses  rigueurs;  les  de- 
tentions arbitraires,  des  ch^timents  qui 
rappelaient  Talliance  contre  nature  du 
despotisme  avec  la  liberte,  tout  indi- 
quait  qu' Alexandre  avait  promis  plus 
qu'il  ne  pouvait  tenir,  et  gue  les  Po- 
lonais,  a  la  premiere  occasion ,  risque- 
raient  lepeu  qui  leur  restait  d'indepen- 
dance ,  pour  arriver  a  une  position  plus 
franche,  fttt-elte  meme  celle  des  autnes 
provinces  de  Tempire.  Alexandre  avait 
devant  les  yeux  Texemplede  la  Greoe; 
et  quoique  la  lutte  de  ses  coreligion- 
naires  epuisftt  les  ressources  de  la 
Turquie,  il  redoutait  Tefifet  que  pro- 
duisait  en  Europe  I'heroTsme  de  cette 
terre  classique  de  la  liberte.  Au  reste, 
il  n'est  pas  douteux  que  Tentbousiasme 
presque  general  qui  se  manifesta  k 
cette  epoque,  etait  plus  que  de  la  sym- 
patbie  pour  un  peuple  cruellement  op- 

J>rime;  c'etait  une  protestation  contre 
a  politique  de  Tailiance,  qui  se  trouvait 
aux  prises  avec  le  principe  religieux. 
Tandis  qu'une  police  tracassiere 
epiait  en  Pologne  tout  cequi  ressemblait 
aupatriotisme,  la  jeunesserusselaissait 
paraltre  des  germes  de  fermentation. 
Les  societes  secretes  s'or^^isaient 
avec  ce  secret  qu'imposent  en  Russie  les 
formes  expeditives  du  despotisme;  oe 
n'etait  plus  une  conspiration  de  palaiS) 
un  coup  de  main ,  comme  les  derm'ers 
regnes  en  offrent  tant  d'exemples :  il 
s'agissait  de  changer  la  forme  meme  du 
gouvernement.  Alexandre,  sans  savoir 
jusqu'ou  allaient  ces  tendances ,  essaya 


Sl« 


L'UNIVtRS. 


#iniBnmer  une  marehepkis  inerf^kfoie 
k  raamioistratioii.  Le  prince  Aio^an- 
dre  Galitzin,  cbarg^da  miDistdre  des 
cxAtes  et  de  HiMtnietiOD  Dubfiqiie*  fot 
remplac^  par  l*amtral  Clhichkof  ^  otii 
portait  jusqire  dans  lea  fomwa  Hm- 
raires  sa  haine  pour  tes  innoTattons; 
toutefois  tl  s'^it  montr^  tout  aatre 
iorsque  le  soaverain  atait  mn  sa  soK 
lieitude  h  presser  r^mancipation  mo- 
rale de  aes  peuples;  mats  il  6tait  facile 
de  reconnartre  que  son  nouvean  r61e 
allaft  mienx  h  ses  conTictions.  Dans 
son  dtscours  d'installation,  M.  Chiehkof 
posa  en  prtneipe,  que  les  classes  infe- 
rieures  de  la  socim  n'ont  pas  besoin 
d'un  enseignement  ^ndu;  que  les 
lumieres  si  vant^es,  foumies  par  les 
Sciences ,  sont  pintdt  funestes  qu*a- 
vantageuses  aux  hommes  n^  pour 
oMir. 

Ge  n*^it  pas  seulement  dans  les 
classes  elev6es  de  la  society  que  se  r6* 
f^lait  cette  inquietude  vague,  avant* 
coureur  dts  crises  politiques :  les  sol- 
dats  avaient  apport^  de  i'^tranger 
guelques  notions  des  formes  et  aes 
institutions  de  TOoddent  :  ces  peu- 
ples, qu*on  leur  avait  d^peints  oomroe 
un  ramas  de  brigands  et  d'athto,  ils 
les  iivaient  trouves  noo  moins  8up6- 
rf eurs  a  eux  par  le  lien  des  iddes  mo- 
rales, que  par  les  fruits  d*une  oivilisa- 
tton  avancee;  et  comme  ti  arrive  dans 
les  invasions  sur  une  vaste  ^helle,  les 
mceurs  des  vaincus  r^girent  sur  les 
vainqueurs.  II  6tait  done  urgent  de 
donner  un  but  h  cette  effervescence ; 
les  circonstances  rindiquaient  :  une 
guerre  nationaie  contre  les  Turcs  ser- 
vait  a  la  fois  les  int^rdts  g^n^ranx  de 
I'empire  et  les  exigences  <m  moment : 
mais  alors  que  devenait  la  sainte  al- 
liance avec  ses  th^ries  de  l^gitimit^ 
et  de  statu  quo?  Si  Tinsurrection  con- 
tre le  despotisme  des  Turcs  ^tait  ou- 
vertement  appuy6e  par  Tautocrate,  qui 
pouvait  pr^voir  ce  aui  adviendrait  en 
Pologne,  dans  la  crim^  et  dans  la 
Finlande?  Ces  considerations  parais- 
sent  avoir  arr€te  Alexandre,  qui  trou- 
vait  plus  de  perils  dans  sar  moderation, 
quMI  n*en  avait  renoontreiorsqu*!!  avatt 
mis  sa  couronne  sous  la  sauvegarda 


de  la  noblesse,  du  cknrg6  et  de  tout 
tonpeuple. 

«  La  di^  polonaise  ne  fut  pas  con- 
¥oqaee  en  1834,  bien  que  les  assem- 
bMes  prtmairet  se  fussent  reunies  pour 
choisnr  lemrs  dfout^s.  Ce  retara  de 
I'appel  ordhnire  rait  aux  representants 
de  la  nation  ftit  bientdt  sufBsamment 
expfiqne :  on  avart  craint  d*exposer  b 
mesuredontnoosallonsrendreoompte. 
It  fopposition  d*nne  assembb^,  au  sein 
de  laquelle  les  elements  d'une  natio- 
nalite  renaissante  s'^tafent  d^ja  mani- 
festes. 

«  Dans  la  repuMique  de  Pologne,  la 

2 nalite  de  ettoyen ,  dont  la  dignite  itatit 
'autant  mieux  sentie  qu'une  exclu- 
'  sion  comparable  k  Hlotisme  en  privait 
la  grande  masse  des  habitants,  preva- 
lait  sur  tous  les  titres  dont  Texercice 
de  fonctions  puMiques  ou  la  naissance 
etaient  les  sources  eonununes.  L'ega- 
lite  politique  absohie  de  tons  les  noem- 
bres  de  la  noblesse  ^it  le  principe 
fondamental  de  la  constitution...  Les 
titres  de  prince,  comte,  etc.,  etaient 
de  veritables  anomalies,  nees  des  fa- 
veurs  dont  quelques  citojens  avaient 
ete  l*objet  de  la  part  des  princes  etran- 
gers,  ou  introduites  dans  r£tat  par  la 
naturalisation  des  families  qui  les  pos- 
sedaient;  quelle  que  fdt,  au  surplus, 
leur  engine,  s'ifs  etaient  prononces 
dans  la  cnambre  des  deputes  de  la  na- 
tion, ou  dans  toute  autre  relation  so- 
lennelle,  c*etait  une  pure  concession 
de  la  seVerite  du  droil  k  I'urbanite  de 
Tusaee. 

«  Ce  orincipe  d'egalite  avait  sunrecu 
k  tous  les  malheurs  de  la  Pologne ,  k 
toutes  les  dislocations  quVlle  avait  su- 
bies.  Cest  pourquoi  il  y  avait  encore 
en  ellequelque  chose  de  resistant  k  Tac- 
tion dissolvante  du  pouvoir  etranger; 
c'est  pourquoi  ses  membres  rompus  et 
separes,  conservant  une  vie  organique 
indestructible,  tendaient  k  se  reunir  et 
k  se  rajuster.  Le  danger  de  ce  prin- 
dpe,  qui  avait  echappejadis  aux  cupi- 
dites  tumuKueuses  des  rois  partaseurs, 
frappa  le  cabinet  de  Saint-Petersbourg 
en  1824.  Une  commission  fat  aussitdt 
nommee  pour  aller  extirper  ee  reste  de 
republicanisme.  On  imagina  avec  une 


UtTSSIE. 


5I( 


ngMiC6  ^iMKlle  H  firatf^iHhPis horn- 
nMJpt  de  iiiettr«  aim  pn»e»  les  yivaltM9 
▼aiteiise^,  $a  TeMit^  lea  tHtw  b^ 
JMr{Aqo6S  Fespectifii'...  Lsr  oonmnB' 
mm  aceomi^if  son  oGOtre :  elie  ^Mla 

IW  IMMW#B6  tlMDJAMttat  Mstsieiit  mh 
toriste  a  fM^ndre  le9tflr«i  udititedafw 
tef  hitoraiiei  moBareli  inKS.  En  H^ 
MKaty  M  9e  tnMvftMwsMMyriflrde 
oette  nudheareuse  r6pablique  dei«<» 
imiaies  &e  pHnees ,  sonant^<]ainze  de 
oxfltes  et  vimt  de  banms.  (Rabbe). » 
De  tttte  maaiere,  la  Rusaie  86  rosier'* 
nit  le  nMmopole  des  titres,  et  poa«' 
vaif  calculer  le  prix  da  d^vouemedt* 
R^tiompeiner  leadociles,  a^vircontrf 
lei  rteistances,  telitail  le  double  moyen 
sur  lequef  s'appuyait  le  syst^me  poli* 
time;  moren  £econd  et  ouissant  lors' 
mril  eat  tond^  sur  la  juatiee,  maia 
iangereax  et  pr^caire  ioraqu'H  n'agit 
one  sar  les  passioiis.  A  cette  ^poqne 
M  soKdarite  entre  les  intMta  dea 
priaeea,  Tactioo  des  cabinets  n*^tail 
ploi  circonscrite  aax  frontiires  re8pe<y 
tNes;  leg  proscri[>tioii9  comtne  lea  fa** 
f eon)  avaient  son  vent  nne  sooree  ^rai^ 
ette.  Le  eboix  de  nos  ambassadeurtf 
etait  toomia  h  la  cenaore  de  la  sainte 
aManee,  et,  h  Ffasoe  des  ^v^nementa 
d'Espagne  et  do  Portugal ,  des  decora-' 
tioiis  nsm  brilldrent  sor  la  poitnne 
de  nos  prinoea  et  de  nos  miniatres. 

Cette  mardte,  comme  nousTavona 
ftmarqo6,  bleasait  d'aatant  pins  lea 
Rosses  qn'elle  n'^tait  que  fexpresaion 
<le  b  volontfi  de  M.  de  Metternic^.  Pbi- 
sienrs  dr^nements  sinistreSfdans  les^ 
<ipels  le  people  crut  reconnaltre  la  mo- 
nife^ation  ou  courroux  o6!este ,  se  auo 
c6d^nt  coup<sar  coup :  nous  vtHilons 
prier  de  rincenVlfe  du  palais  de  Tsars^ 
Koi^-S^lo,  de  la  maladie  s^ieuae  de 
fempereur,  h  P^poque  mime  od  se  c^^ 
l^bmitle  mariage  da  grand-due  Micbel 
ivee  la  pn'ncesse  CharTotte  de  Wurtem' 
Iwg,  et  de  rinondation  de  la  capitate 
^  eift  lieu  au  mois  de  noTembre  1824. 

Dte  r^poque  de  la  fondatlon  de 
Si^Pftersbourg,  an  seindes  maraid 
fc  llngrie  et  k  I'endroit  mtote  oh  les 
ttttt  de  la  N6va .  qui  serYent  d*6cou]e^ 
Jheatau  lac  Ladoga,  se  versent  dans 
KgolfedeFinlaDde,Ie  derge,qui  voyait 


avec  fsHve  ta  supr^butie  de  Moscou 
aacrllRe  k  une  comtnnaison  doiit  la 
baste  port^e  lai  eckappail ,  a?ai€  re- 
paadu  vae  prMelta,  railteura  aasea 
vraisemblable,  sur  le  sort  de  la  non- 
wile  cafitafe.  F^teraboori;:,  AsMt  cette 
prMMoH,  serall  eogloatS  par  les 
eatix.  Eo  ellfet,  quafld  les  vents  d'ouest 
aoufOint  oonstammeflft  aitee  violenee, 
la  Mva,  refooMe  dans  son  lit,  menace 
de  toatefifahir.  «  l)n  ooragan  qui  ve« 
nait  de  booleveraer  la  mer  du  IVord  et 
la  Baltlqoe,  en  joncbant  leurs  plages  de 
mines,  de  cadavres  d'boromes  et  de 
di6bris  de  navires ,  ^leva  subitement  les 
eaux  do  goife  et  du  fleuve.  Les  ou-^ 
vrages  de  Cronstadt,  les  ^tabHsse- 
ments  riverains  furent  soodainement 
endommagds  ou  emport^;  bienVdt  la 
vMIe  elle-mtoe  fat  envahie  par  T^t^- 
ment  ftirieox  :  les  ponts  en  bois,  sub* 
mer§[^,  diaparurent  arracb<§s  h  Jeoni 
pilotis;  les  quais,  lea  roagasins,  lea 
easernea  s'^ievaient  comroe  des  flota 
au-dessns  des  vagoea ;  lea  quartlers  les 
plus  Aleves  (urent  converts  k  one  hau-^ 
tear  de  di%  pieda.  Tout  le  d^rdre« 
tons  les  accidents  qa*on  pent  imagi- 
ner  dans  le  naufnige  d'nne  grande 
elt^,  jetdrent  alora  Saint-P^ersbourg 
dana  la  consternation  et  la  lerreor } 
on  nt  les  sepultures,  dana  cette  mine 
oommune,  livrer  au  torrent  lea  osae' 
menta  qo'elles  renfermaient.  Le  d^ 
sastre  avait  a^vi  depuis  bail  beurea  dki 
matin  jusqn'd  trots  heures  du  soir; 
les  pertes  du  oommerce  farent  ^uor* 
mes.  Les  fapports  ofBciels,  destine 
aans  doate  h  detraire  Timpresslon  qu'a* 
vait  produite  une  estimation  exager^ 
des  pertes,  oonstaterent  la  mort  de 
cinq  cents  hommes ,  presque  tous  de  la 
classe  panvre  oa  appartenant  d  la  fon- 
derie  imp^aie.  Les  pertes  mat^iel^ 
les  qa*on  avait  d'abord  port^es  k  cent 
millKHts,  furent  6valudes  k  environ  un 
dnmiidme  de  cette  somme.  Gependant 
toute  la  campagne  dea  environs ,  aupa* 
vant  couvero  de  villaa  somptueuses^ 
^tait  comme  ras^.  La  forteresse  de 
Cronstadt,  ses  remnarta,  ses  bastions 
etaient  d^truits... ,  la  violence  de  I'ou" 
ragan  avait  disperse  I'artillerie  qai  h^ 
.  rtssait  cette  forteresse ,  et  des  pitees 


612 


L'UNIVERS. 


du  poids  de  cinq^  six  tniltiersv  defNiis 
un  sidde  immobiies  sur  leurs  lourds 
aCTAts,  avaient  ^t^  emportto  au  loin 
daus  la  mer  eomme  de  l^ers  soli^ 
veaux. 

«  A  la  suite  de  oe  d^astre ,  une  mul- 
titude de  malbeureux  erraieut  sur  des 
dlksombres,  sans  T^tements,  sans  res- 
source  et  sans  asile.  Le  souverain  ne 
fut  pas  sourd  aux  cris  de  leur  detresse ; 
il  assigns  d'abord  un  million  de  rou- 
bles pour  venir  au  secours  de  ceux  dont 
les  besoins  ^taient  les  plus  urgeots; 
et,  se  montrant  a  son  peuple  sous  un 
aspect  v^ritablement  ^ternel,  il  par- 
courut  lui-m^me  ia  ville,  envoya  ses 
aides  de  camp  sur  les  points  qu*il  ne 
pouvait  visiter,  et  ne  s'arr^ta  dans  son 
activity  secourable  que  lorsque  tons 
ces  iafortun^  eurent  un  abri  et  du 
pain. »  Le  zeie  des  particuliers  vint  en 
aide  a  la  sollicitude  de  Tempereur :  le 
prince  Alexis  Kourakin,  fr^re  de  Tan- 
cien  ambassadeur  pres  la  cour  de 
France ,  fut  charge  de  rassembler  et  de 
reguiariser  leB  dons  volontaires,  et 
s^acquitta  de  cette  tldie«d  la  satisfac- 
tion g^n^rale. 

On  remarqua  d^  cette  6poque  un 
changement  sensible  dans  Vbumeur 
d'Alexandre,  soft  que  sa  constitution 
robuste  eAt  €ti  affaiolie  par  les  grandes 
^reuves  qu'il  avait  subies,  soit  que  la 
cirection  religieuse  de  ses  idto  edt 
triompb^  de  ses  resolutions  politiques, 
et  que,  dans  V^i  de  donte  oi^  il  flot- 
tait,  le  d^astre  de  sa  capitale  eAt  pris 
a  ses  yeux  le  caract^re  d  un  didtiment 
providentiel;  il  parut  considerer  la 
crise  de  la  Grto  sous  un  point  de  vue 
plus  national.  «Dej^,  dit  Thistorien 
d'Alexandre,  on  avait  r6pandu  la  nou- 
velle  que  les  minlstres  ae  Londres  et 
de  Vienne  k  Constantinople  venaient 
enfin  de  triompber  de  Tobstination  du 
divan,  et  qu*en  vertu  des  r^olutions 
prises  a  Gzernowitz  par  les  deux  eni- 
pereurs,  de  faire  la  guerre  en  cas  de 
persistance  de  la  Pone  dans  son  sys- 
teme,  les  principautes  de  Valadiie  et 
de  Moldavie  allaient  dtre  ^vacu^,  les 
entraves  mises  au  commerce  et  a  la 
navigation  de  la  mer  Noire  allaient 
disparaltre,  enfln  que  le  sort  des  Grecs 


allait  <tre  assure  Pour  donfier  plus  de 
credit  h  ce  bruit,  M*  de  Ribeaupierre 
fut  aussitdt  nonun6  en  quality  d'en- 
voy^  extraordinaire  et  de  ministre  pl^- 
nipotentiaire  pr^s  de  la  Porte  otto- 
mane,  dans  letpoir,  dit  Tookasequi 
Pappelle  k  ces  fonctions,  que:  de  eon- 
cert  avee  nos  aUiUsy  nous  reussitim 
a  terminer  les  malhews  qtd  dUolesi 
fOrient. 

«  Mais  M.  de  Ribeaupiene  n*^t 
point  parti;  les  deux  provinces  nV 
vaient  pas  ^  6vacu6»,  ei  les  armto 
russes  rest^rent  sur  le  Dauube  et  le 
Prutb :  il  nV  cut  de  r6el  dans  tout  ce 
q|ui  avait  eteannonc^,  que  les  coooee- 
sions  faites  par  la  Porte  relativenient 
h  la  navigation  de  I'Euxin.  Ce  ne  fiit 
qu'au  retour  d*un  voyage  fait  dans  les 

{^ouvernements  de  Moscou,  de  Kj- 
ouea,  de  Toula  et  d'Orembours,  et 
apres  Tinondation  de  Saint-Peters- 
bourg ,  querem()ereur,  enquelque  sorte 
force  par  la  Toix  du  ciel  et  par  eelle 
des  hommes ,  parut  se  determiner  h  des 
demarches  plus  .positives  aupres  da 
divan,  et  c*est  alors  v^ue  M.  Mindaki 
fut  envoye  h  Constantinople ,  en  qualite 
de  simple  agent ,  pour  y  poursuivre ,  de 
concen  avec  M.  de  Stran^ord,  un  ar- 
rangement deflnitif  relativement  aux 
deux  provinces  et  k  la  Greoe  enti^. 

«  M.  de  Minciaki  fiit  parfaitemeot 
accueilli  par  le  ministre  ottoman ;  M.  de 
Strangford  oontinuait  egalement  k  itn 
Tobjet  des  plus  flatteuses  {Hrevenances ; 
cependant  on  n^avan^ait  pas ,  et  la  ques* 
tion  prealable,  cdle  de  revacuation 
des  deux  provinces,  etait  toujours  «i 
litige. »  Le  fil  des  negodations  etait 
entre  les  mains  de  TAutriche,  qui  en- 
eourageait«sous  main  la  resistance  du 
divan,  et  qui  prevoyait  bien  que  la 
conclusion  aes  affaires  grecques,  sous 
le  protectorat  de  la  Russie,  acbeverait 
bientdt  Tasservissement  de  i'enipite 
turc. 

Les  propositions  de  la  Russie  n*e- 
taient  point  admissibles  par  le  sultan; 
car,  une  fois  !es  negociations  diploina- 
tioues  entamees,  le  cabinet  de  Saints 
Petersbourg  ne  pouvait  que  renouer  la 
trame  si  nabilement  ourdie  depuis 
Pierre  le  Grand.  <i£lles  consistaient  a 


RUSSIE. 


61S 


noreel^  la  Grtee  ea  fmicipaiit^  dis* 
tineteg  oui  auraient  reconnu  la  suze- 
rajnet^  au  sultan.  *  L'analogie  de  cet 
ordre  de  cboses  avec  T^tat  de  la  Vala- 
cfaie  et  de  la  MoMavie  ii*^it  nen 
moinsqa'encooraffeante  pour  le  divan , 
et  n^rait  guere  de  nature  k  coneilier 
les  tnes  des  eabinets  des  grandes  puis- 
sances. Nous  verrons  bient6t  comment 
la  France  et  T Angleterre  se  troaverent 
enlacto  dans  la  politique  russe,  au 
point  de  lui  prater  le  secours  de  leurs 
Oottes  pour  racoomjdissement  de  ses 
Toes  les  plus  importantes. 

L'abondance  des  faits  politiques,  et 
reDcbafnement  qui  seul  pent  aider  h 
les  (aire  bien  coraprendre,  nous  a  d6- 
toume  de  la  marche  administrative  et 
des  r^formes  mat^rielies  dans  Tint^ 
near  de  Tempire. 

En  oe  qui  regarde  les  finances ,  nous 
dirons,  avec  Rabbe,  qu^une  am^liora* 
tion  progressive  dans  oette  branche, 
snrtout  depuis  que  M.  de  Gancrin  en 
avait  la  direction,  avait  ^t^  constats 
par  des  rapports  pr^sent^  k  la  fin  de 
chaqoe  ann6e  au  conseil  de  surveil- 
lance des  ^tablissements  de  credit. 
Cepoodant  on  avait  6U  oblig^  de  sus- 
pendre  k  systtoe  d'op^rations  par  le- 
qud  on  avait  jusqu'en  1822  proc^e 
avec  trop  de  rapidity  a  Textinction  de 
la  dette  poUtqiie;  c^est-^ndire  que  Ton 
araff  reconnu  Timpossibilite  de  retirer 
sibitement,  et  par  trop  grandes  mas- 
ses, les  assignats  en  circulation.  En 
1823,  il  D*en  restait  plus  que  pour  une 
somme  d'environ  six  cent  millions  de 
roubles ,  et  la  loi  qui  s^opposait  a  toute 
emission  nouvelle  ^tait  maintenueavec 
la  plus  grande  rigueur. 

Mais  I'ann^  suivante,  le  conseil  de 
surfdUance  d^ara  qu'il  y  avait  lieu  k 
snrseoir  k  raimination  du  oapier- 
moonaie ,  operation  qui  s'^tait  faite  p^ 
riodiquement  depuis  le  commencement 
do  regne  d'Alexandre. 

■  II  avait  et6  demontr^,  dit  h  ce 
sQJet  M.  de  Gancrin ,  que  la  reduction 
i^de  des  assignats  n  edt  pas  procure 
pia  cette  fois  les  avantages  qu'on  en 
pMnraitattendre,  puisqu'en  accelerant 
^  la  marcbe  de  semblables  opera- 
ws,  on  risquait  quelquefois  de  se 

33*  UoraUcn.  (Kussie.)t.  ii. 


mettre  en  oppositioB  avec  le  princtpe 
nitoe.  Le  n»nps  nous  appr^idra  le 
moment  ou  il  sera  opportun  de  reoomr 
mencer  a  retirer  graduellement  dffJi 
circulation  lessignes  r<^r^entatifs.d« 
numeraire. » 

•  Ce  qui  r^ulte  dvidemment  de  ce 
rapport,  ajoute  Rabbe,  c'est  que  1^ 
gouvememeut  russe  est  bien  lorn  en- 
core de  jouir  du  degr^  d'aisance  que  le 
developpement  du  commerce  et  de 
I'industrie  procure  aux  nations  riches, 
dans  Tacception  v^ritablement  ^no- 
mique  du  mot;  et,  de  fait,  le  com- 
merce languissait  en  Russie.  Les  ma- 
nufactures, faute  de  capitaux,  ne 
produisaient  pas :  dans  le  cours  de  Fan- 
nie 1822,  elles  avaient  obtenu  de  la 
caisse  d'emprunt  dix  millions  et  demi 
en  assienats.  L*ann^  suivante,  les  be- 
soins  de  cette  branche  languissante 
n'avaient  6te  guere  moins  considera- 
bles, et  la  situation  du  commerce  des 
matieres  premieres  laissait  beaucoup  a 
d^sirer;  md^pendamment  des  causes 
gen^rales  de  cette  lenteur  dans  le  de- 
veloppement de  rindustrie  russe ,  cause 
qu'il  taut  chercher  dans  Textr^me  dis- 
proportion de  la  partie  libre  et  labo- 
rieuse  de  la  nation  k  la  partie  serve  et 
indolente,  dans  le  defaut  de  grandes 
routes,  de  canaux  et  de  ddbouchds, 
la  contrebande,  cons^ence  naturelle 
des  prohibitions,  est  regard6e  comme 
le  plus  grand  obstacle  a  la  prosperity 
financi^re  et  fiscale  de  cet  empire.  » 

Les  Juifs  avaient  organist  un  vaste 
systeme  de  contrebande  sur  les  frontie- 
res  de  la  Pologne ,  et  faisaient  des  bene- 
fices considerables,  surtout  sur  la  mon- 
naie  de  cuivre  qui  n*a  point  subi  le  dis- 
credit des  assignats.  Les  edits  les  plus 
sevdres  furent  diriges  centre  eux.  Un 
oukase  de  1824  leur  interdit  la  faculte 
de  voyager  dans  Tinterieur,  celle  de  col- 
porter  des  marchandises,  et  ordonne, 
de  plus,  que  ceux  qui  sont  entres  en 
Russie  pour  s'y  etablir,  s*ils  n'ont  pas 
encore  ete  inscrits  dans  une  dasse 
d'habitants,  ^eront  immediatement 
ranges  parmi  les  manoeuvres  de  dis- 
trict, et  soumis  a  la  capitation  des 
bourgeois. 

Cest  a -cette  epoque  qu'il  faut  rap- 

9 


614 


L'UHIVERS. 


porter  ramngeMwiit  qai  t^la  dttBi*> 
tivefliient  to  puMcntiom  de  ia  Ausne 
r<Artiv6S  aax  irontikw  de  cet  empire 
dans  rAm^rique  du  Nord,  pretentions 
^6  kes  Etats-Unis  ayaient  ^nergiqve- 
ment  repouss^es. 

Si  Ton  iis^eait  des  ressources  finan- 
cidres  de  la  Rossle  d'aprds  le  d^velop- 
pement  d^  ses  forces  militaires  et  de 
SB  marine,  en  basanft  les  d^nses  sur 
oelles  des  autres  £tat8  de  TEurope ,  on 
tomberait  dans  nne  grave  erreur.  £n 
effet,  le  budget  de  rempire  serait, 
dans  cette  hypoth^,  plus  qu'absorb^ 
par  oes  seu'les  branches  de  service.  La 
inodicfti^  des  traitements  dout  tons  les 
grades,  le  bas  prixdes  emts  d'babille- 
ment  etd*6qaipement  militaires  qui  se 
confectionnenidans  les  fabriques  de  la 
couronne,  Textrdme  bon  mami^  de  la 
raain-d'cenvre ,  les  approvisionnements 
facility  par  le  systeme  qui  admet  les 
impdts  en  nature,  toutes  oes  causes 
r^unies  rendent  Tarm^e  et  la  ilotte  in- 
liniment  moins  on^reuses  que  partout 
aifleurs.  l^^nmoins,  maigre  ces  avan- 
tages,  il  ^tffit  facile  de  voir  que  ia 
Hussie  serait  ruin^e  ou  grev^  d*une 
dette  immense  avant  que  le  oommerce 
de  TAsie  par  les  mers  du  Levant, 
objet  tie  sa  constante  soHicitude, 
pin  lui  apporter  la  compensation  de 
tant  d'efforts  et  de  sacrifices.  II  s*agt8- 
salt  done  de  d^ever  le  tr^or,  non- 
seulement  par  des  reductions  nartielles 
et  insafBsantes  dans  reffectii  de  Far- 
m^e,  mais  par  un  systeme  large ,  qui 
tiendrait  toujours  h  la  disposifion  du 

§ouvemement  des  moyens  puissants 
e  defense  ou  d*a^ression.  On  cnit 
avoir  trouve  la  solution  de  ce  probieme 
dans  Torganisation  des  colonies  mili- 
taires ;  certes,  cette  idee,  que  T  Autricbe 
a  heureusement  appliquee,  n*est  pas 
nouvelle.  Les  populations  agricoles  que 
leur  position  geographique  exposait 
aux  incursions  des  tribus  nomaaes  ou 
barbares,  impuissantes  devant  des 
masses ,  t^aient  du  moins  de  repous- 
ser  k  main  armee  les  brigandages  tsoies 
et  les  attaques  partieites.  Ainsi  les  co- 
lonies romaines,  placees  sur  la  limite 
des  Ctats  qui  luttaient  encore  pour  leur 
independance,   ont  teen  successive- 


iB0DtuneorgMH8alioiiaiiaicigii6,eteilM 
se  trouvaient  ^lenei^  propres  a  de- 
fendre  et  k  envanir. 

La  premik«  application  du  syst^ 
des  ookHiies  miTitaites  en  Eussie  r^ 
fflonCe  a  Tannee  1819.  Le  general 
Araktch^ef,  autetir  du  projet,  fiit 
^duHrg^  de  le  mettre  k  execution,  et 
I'enpereur  Aleiandre  ne  &egligea  rien 
{KMir  assurer  le  ancc^  de  cette  grande 
mesurec  €e  lut  sans  doute  poiff  ins- 
peoter  ces  nouveaux  ^tablissements  et 
Juger  par  lui-fneme  des  avantages  et 
des  inconventents  que  presentaient  les 
locaiites,  que  le  tsar  eotreprtt  de  fre- 
quents voyages  dans  les  provinces  me- 
ridionBles  de  rempire.  Ges  prenaratift 
«larmdrent  r£urope,  et,  maigre  le 
mj^st^  qui  enveloppait  les  cdonies 
naissantes,  les  investigations  des  etran- 
gers  ne  tairddrent  pas  k  donnor  k  cet 
j^ard  des  rense^nements  plus  ou 
moins  exacts.  Quelques  auteurs  ont 
cru  retrouver  dans  les  plans  de  If  onich 
I'idee  premiere  de  cette  orj^anisatioa  h 
la  fois  agricole  et  mlKtaire.  II  avait 
Imagine ,  pour  defendre  I'Ukraine  oon- 
tre  les  incursions  des  Tatares  et  des 
mmuknans ,  de  la  ccNivrir  par  one  ligne 
de  seize  retranchements,  dont  cfaacun 
^tait  ocoupe  par  on  regiment  de  dra- 
gons.Qnatre  regiments  demilioeetaient 

repaftiB  sur  toute  r^ndoe  de  cette 
ligne,  et  les  homioes  ^i  la  dtfen- 
daient,  cultivateurs  en  temps  de  paix, 
se  transformaient  en  soldats  en  temps 
de  guerre.  Quoi  qu*II  en  soit,  void, 
d*8pres  les  observations  de  M.  Lyilli 
qui  a  visite  les  colonies  militaires  du 
temps  d*Alexandre,  quelle  dtaitalors 
leur  organisation : 

L*empeteur  rend  nn  oukase  dans  le- 
quel  sont  ddsij^es  les  vtflages  impe- 
riaux  destines  ii  reoevoir  des  otdonies 
militaires.  Dans  les  villages  ainsi  de- 
signes,  toos  habites  par  des  paysans 
de  la  couronne ,  et  par  conseqwnt  k  b 
disposition  do  monarqoe,  on  ports  sur 
des  registres  le  nom,  Tdge,  la  pro- 
priete  et  la  famille  de  diaque  chef  de 
maison.  Ceux  ^iont  plus  de  dnquante 
ans  sont  choisis  poor  composer  ee 
qu^on  appelle  les  tneHtres  ou  les  ch^ 
colons,  S*il  n'y  a  pas  assez  d^hommes 


aUHSIE. 


6f.^ 


(ieeet  ^e  f)our  former  le  nombre  re- 
guis.  on  prend  ceux  dont  Tdge  se  rnp- 
proene  le  pirn  de  cinqunnte  ans. 

A  la  place  de  leurs  eabanes ,  on  leur 
construit  des  matsons  alifpn^s  en  rues. 
Ces  habitations  sont  paralleles  et  s^- 
parees  Tune  de  Taatre  par  one  oour. 

Chaque  mdttre  eolon  revolt  en  par- 
tage  quinze  dessiatines  (la  dessiatine 
^uivaut  h  109 ,  26  d'are) ,  h  la  charge 
d*entr(^ntr  un  soldat,  sa  famille  et 
«on  cheval ,  si  c'est  un  corps  de  cava- 
ferie  qui  esrt  €tabU  dans  fe  village.  En 
echange.  le  soldat  doit  i'aider  dans  la 
cniture  de  son  terrain  et  dans  tes  au- 
tres  travaux  de  la  campagne,  guand  il 
n'est  point  occupy  h  son  service  mili- 
taire. 

II  depend  des  chefs  miiitaires  de  de- 
signer le  soldat  attach^  au  maltre  co- 
lon, et  d*en  placer  on  avec  sa  famille 
aupr^  de  chacun  de  ceux  qui  n*ont 
point  d'en&nts.  Le  colon  chef  devient 
soldat  lui-mtoe,  qnoiqu'il  ne  puisse, 
en  cas  de  guerre ,  marcher  en  campa- 
gne.  II  pent  dioistr  dans  sa  famille  un 
adjoint  pour  faider  h  exploiter  sa 
ferme;  cet  adjoint,  a  la  mort  du  mattre 
colon,  tui  sucoMe,  avec  ragr6ment 
toutefois  des  autorit^  miiitaires. 

Si  le  mattre  colon  a  plusieurs  fits ,  le 
phis  dg6  devient  son  adfjoint;  le  second 
prend  les  fonctions  et  la  qualification 
de  r^erve,  et  on  lui  donne  pour  de- 
meore  uoe  maison  adjacente;  le  troi- 
si»ne  peut  6tre  soldat  ctdtivateur :  les 
autres  sont  classes  comme  canton- 
niers,  3£ves ,  etc. ,  ainsi  que  nous  Tex- 
pliqnerons  ci-apr^. 

Le  soldat  one  f  on  constitue  membre 
de  b  famille  dn  mattre  colon,  qui 
mange  a  sa  table  et  qui  Taide  dans  ses 
travaux,  e^  d^signe  sous  la  denomi- 
nation de  soldat  cuUtoateur. 

Ces  soldats  cultivateurs  forment  la 
force  effective  des  nouvelles  colonies. 
Bans  le^ouvernement  de  Novogorod , 
on  ne  leur  faisait  faire  que  les  exercices 
de  Pinfantarie ;  mais  dans  les  trois  gou- 
vernements  du  midi  de  la  Russie,  on 
ks  forme  h  la  fois  aux  exercices  de  la 
cavalerie  et  de  Tinfanterie :  ces  exerci- 
ces sont  h  la  discretion  des  chefs,  et 
comme  les  soldats  n^ont,  pour  coop^- 


rer  aux  travaux  de  la  finraie,  que  Ic 
temps  qui  n'est  pas  oonsaer6  aux  exer- 
cices  miiitaires,  ii  «sl  sM  de  voir  que 
i'assi'staaoe  que  peut  attendre  d*eux  le 
colon  en  chei  depend  presqaetoujours 
de  la  volonte  de  roffioimr  commandant ; 
car  si  celui*ci  tient  &  la  s^v^it^  de  la 
discipliae,  surtout  pendant  la  belle 
saison ,  le  ookm  en  cbef  ne  tirera  que 
peu  de  secours  du  soldat,  qu'il  a  ce- 
pendant  k  sa  charge  avec  son  eheval 
pendant  toute  Tannito.  Trois  jours 
d*exercioe  par  semaine  passent  pour  un 
service  mod^^,  sans  compter  les  gar- 
des que  le  soldat  doit  montnr  r^gmi^- 
rement  a  son  tour.  En  outre,  onaque 
village  RHlitaire  est  tenu  d*envoyer,  a 
tour  de  role,  un  detachement  au  quar- 
tier  g^n^ral  du  regiment  pour  y  faire 
le  service. 

Le  soldat  eultivateur  est  soumis  au 
double  service  de  soldat  et  de  labou- 
reur pendant  vingt-cinq  ans  h  dater  de 
son  mscription  sur  le  registre,  s'il  est- 
Russe,  et  pendant  vinst  ans  s^il  est 
Polonais;  apres  quoi  il  est  libre  de 
quitter  le  service :  s'il  y  reste,  il  est 
dass^  comme  v^^ran  invalide,  et  en- 
voy^  en  garnison.  Sa  place  est  remplle 

fiar  le  r^erve  dont  nous  allons  par- 
er. 

Tout  pr^s  de  la  maison  du  colon 
dhefj  on  en  construit  une  exactement 
semblable;  celle-ci  est  occup6e  par  le 
reserve,  que  Fon  peut  regarder  comme 
un  second  soldat  cnltivateur;  c*est  fe 
colonel  du  redment  coionisi^  qui  le 
choisit  parmi  Tes  paysans.  Ge  reserve 
est  ordinairement  un  fils  ou  un  parent 
du  colon  chef.  On  instruit  le  reserve 
dans  tons  les  devoirs  du  soldat;  il  est 
destine  a  remplir  en  tout  point  la  place 
de  son  prototype,  ou  5  faire  partie 
d'une  armee  de  reserve  en  cas  de  dan- 
ger. Si  le  soldat  cultivateur  est  tQ6 
dans  une  bataille ,  ou  vient  It  mournr 
autrement.,  sa  place  est  occup^e  par  !c 
reserve.  Cest  par  les  honimes  de  cette 
classe  que  Ton  remplace  encore  les 
soldats  qui  ont  fait  leur  temps  de  ser- 
vice. Le  reserve,  h  son  tour,  est  rem- 
place par  un  cantonnier,  celui-ci  par 
un  enfant  de  troupe ,  etc.  Le  reserve 
doit  egalement  ooop^rer  a  la  culture . 

9. 


^16 


L'UNIVERS. 


aux  autres  travaux  de  manage :  il  est 
tailleur,  oordonnier,  etc. 

Le  ooloo  en  chef,  le  soMat  agricul- 
teur  et  le  rterve,  peuvent  se  dioisir 
une  femme;  on  con^it  <iiie,  dans  ce 
systtoe,  les  nuiriages  soient  encoura- 
ges; ies  femmes  une  fois  enMes  dans 
rencdote  des  colonies  militaires  ne 
peuvent  plus  se  marier  ailleurs. 

Les  fils  du  colon  en  chef,  du  soldat 
cuitirateur,  du  reserve,  de  I'dge  de 
treize  h  dix-sept  ans,  sont  d^igmte 
sous  le  nom  de  canionnieri.  On  les 
exerce  comme  soldats,  an  les  r^nis- 
sant  dans  le  village  ou  r^ide  le  colonel 
et  qui  sert  de  quartier  au  raiment. 
lis  suivent  des  ^les  pour  achever  leur 
^ucation. 

Les  gar^ns  de  huit  h  treize  ans 
vont  k  V6eo\t  du  village  ott  demeurent 
leurs  parents,  et,  de  deux  jours  Tun, 
lis  re^oivent  une  instruction  militaire. 
Comme  les  cantonniers,  ils  portent 
Tuniforme  et  sont  regard^s  comme 
soldats.  Les  gar^ns  au-dessous  de  huit 
ans  demeurent  avec  leurs  parents. 

L'education  des  enfants  est  un  des 
traits  caract^ristiques  du  systeme. 
Tons  les  enfants  rodles  sont  envoy^s 
aux  6coles  d'enseignemeot  mutuel :  1^ 
on  leur  apprend  k  lire,  k  ^rire  et  k 
compter;  on  leur  fait  aussi  apprendre 
une  espece  de  cat^chisme  sur  les  de- 
voirs du  soldat;  on  les  tnstruit  a  ma- 
nier  le  sabre,  aux  exercices  du  ma- 
n^e.  Quand  ils  ont  atteint  TAge  de 
treize  ans,  on  les  rassemble  au  quar- 
tier gdn^ral  du  raiment,  on  les  forme 
en  corps,  et  ceux  <]ui  se  distinguent  le 
plus  par  leur  aptitude  et  leur  bonne 
conduite  sont  promus  au  grade  d*offi- 
cier.  J'ai  vu  (dit  M.  Lyall)  au  quartier 
g6n6ral  du  premier  raiment  du  Boue, 
au  village  de  Sokolntk,  un  corps  de 
deux  cents  cantonniers  marcher,  &ire 
feu ,  et  ex^uter  toutes  les  Evolutions 
avec  une  prestesse  et  une  precision 
Etonnantes.  11  y  a  parmi  eux  un  esprit 
de  corps  qui  ne  pent  raanquer  a'en 
faire  de  bons  soldats. 

Pour  r^ucation  des  filles,  on  a 
Etabli  des  Ecoies  k  la  Lancastre  dont 
on  peut  esperer  de  bons  r^ultats. 
Pour  nous  r^umer,  nous  dirons  que 


les  Elements  des  colonies  militaires 
sont: 

1**  Le  colon  chef  ou  mattre  colon ; 

2*  L*adjoint  ou  aide; 

3*  Le  soldat  cultivateur  qui ,  ses  de- 
voirs militaires  remplis,  seoonde  le 
colon  chef  dans  ses  travaux  agricoles; 

4**  Le  reserve  aui  a  les  mtoes  fonc- 
ttons  que  le  precedent,  et  peut  le  rem- 
placer  au  besoin ; 

5*  Le  cantonnier,  enfant  mflle  de 
treize  k  dix-sept  ans; 

6*"  Les  en&nts  de  troupe  de  fault  k 
treize  ans; 

T"  Les  enfants  miles  au-dessous  de 
huit  ans; 

8**  Les  filles  et  lea  femmes; 

9«  Les  invalides. 

On  a  rejprochE  au  S]f8ttee  des  co- 
lonies mifitaires  plusieurs  inconv^- 
nients :  d^abord  ceuii  de  d^moraliser 
les  families  dans  les  villages  de  la 
couronne,  c*est-a-dire  precisdment  \k 
oil  la  condition  des  serfs  les  rappro- 
chait  davantage  des  bien&its  d  une 
Emancipation  complete ;  ce  changement 
forcE  <retat,  et  cette  agglomeration 
fortuite  ou  arbitraire  d'individus,  de- 
vant  nEcessairement  reldcher  ou  rom- 
pre  le  lien  des  affections  qui  peuvent 
consoler  mime  des  esclaves;  on  a  prE- 
dit  encore  que  les  soldats  seraient  de 
mauvais  cultivateurs,  puisqu*ils  ne  pos- 
sEderaient  qu*Eventudlement,  et  que 
les  paysans  rattachEs  au  r^me  nuli- 
taire  confondraient  leur  double  voca- 
tion dans  une  mlmerEpugnanoe.  Quant 
ki  Finstruction  donnEe  dans  les  «x)ies 
de  ces  Etabllssements ,  on  a  demandE 
k  qnoi  elle  pouvait  servir  aux  jeunes 
gens,  sinon  ill  leur  fiEure  mieux  apprE- 
cier  encore  la  rigueur  des  rEglements 
qui  renferment  leur  existence  dans  des 
nmites  infhinchissables.  PTest-il  nas  k 
supposer  que  le  dEsir  de  la  liberte  oui 
suit  toujours  les  lumidres,  ou  ramni- 
tion  d'un  dief  ne  vienne  k  tourner 
contre  le  gouvernement  lui-mlme  les 
ressources  que  sa  prEvoyance  avait 
crEees?  Quoi  qu'il  advienne  de  ces  pro- 
visions, le  systEme  des  colonies  mili- 
taires a  dEj^'subi  d'importantes  modi- 
fications. On  a  renoncE  k  coloniser 
rinfanterie;  mais  la  colonisation  de  la 


•  •  •  • 

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RUSSIE. 


617 


oralerie,  si  babileinent  df riff^  par  le 
conte  de  Witt,  |iaratt  avoir  aonn^  des 
Rsoltats  aatisfeisants,  oon-seuiement 
poor  rinstruction  des  homines,  la 
btwak  et  la  force  des  chevaux,  mais 
encore  poar  les  prodoits  de  culture  qpii 
ODt  foumi  aux  besoinB  de  la  oolonie, 
et  mtee  aux  approTisioimeineiits  ex- 
traordioaires  qu'ont  n^oessit^  les 
goerres  de  Perse  et  de  Turquie  et  la 
derniere  Insarrectioii  des  Polooais. 
Nous  reoTerrons  pour  les  details  les 
pins  rtents  k  la  relation  de  M.  le  doc 
oe  Ragose,  en  faisant  observer  toute- 
Ibis  que  des  nioti&  fadies  k  appr^ier 
Toot,  peut-ltre  k  son  inso,  entratn^ 
hore  des  limites  d'une  approbation 
impartiale. 

Jamais  rbistorien  ne  revtt  un  Cft* 
nctere  phis  solennel  que  lorsqne, 
debont  sur  la  tombe  des  princes,  il 
RKime  toot  un  r^e  dans  le  Jogenieot 
qoHl  portesur  leur  mtooire,  et  se  rend 
poor  amsi  dire  solidaire  des  arrto  de 
la  postMt^.  Que  8*il  a  suivi  la  vie  d'un 
Snod  peuple  d^  son  apparition  sur  la 
K^  da  moode,  dans  ses  transfer* 
natjons  soocessives,  en  voyant  les 
^^aementsr^agir  les  uns  sur  les  autres 
poor  i^expliqaer  et  s'enohatner  dans 

reuenble,  aiors  il  ne  considtoe  plus 
les  mooarques  que  comme  des  instm- 
BMotsprovidentiels  du  malheur  ou  de 
^  impute  des  peuples,  de  leur 
gfn're  ou  de  leur  ruine,  et,  dans  Tin- 
tait  mtoe  de  la  v^t^,  il  mesure  le 
Mne  ou  raoge  non-seulement  d'apr^ 
lesaetes  en  eux-m^roes,  mais  en  rai- 
ioo  de  leor  signification  bumanitaire. 

La  mort  d'Xlexandre  a  souleve  des 
soup^ons  que  nous  ne  croyons  pas 
foodes,  non-seulement  parce  que  des 
rapports  ofBdeis  sont  la  oase  de  notro 
opinion ,  mais  paroe  que  I'int6r^t  mdme 
de  eeox  sur  fesquels  ont  plan6  oes 
doates  6tait  loin  de  leur  conseiller  un 
td  crime.  Ces  bruits  ont  pris  trop  de 
oonsistanoe  pour  que  nous  ne  re^ar- 
dions  pas  comme  utile  de  les  r^ter. 

En  oe  qui  r^garde  leportfoUo,  nous 
avooerons  iei  tout  I'emnarras  de  notre 
tkbe;  les  pr^mptions  do  Tauteur 
anooyme  derarticle  intitule :  Denders 
iiiomeiUs  de  fempereur  Alexandre 


(n**  84  et  86,  page  141 ,  Mition  de  Pa* 
ris) ,  reposent  sur  des  donn6es  si  va- 
lues qu*elies  nous  paraissent  tout  k  fait 
madmissibles.  Selon  cette  version , «  a 
la  mort  de  Paul  I",  Nicolas  Ait  destine 

Sour  6tre  le  successeur  direct  d' Aiexan- 
re,  m£me  an  prj^judioe  de  ses  propres 
descendants  legitimes.  D^mentir  ce 
fait  jusqu*^  son  accomplissement  ^it 
le  ieu  constant  de  rhvpocrisie  et  de  la 
politique. »  Ce  mode  de  succession  avait 
et6  jadis  en  vicueur,  et  avait  €ik  une 
source  de  troubles ;  dans  quel  xntMX  les 
meurtriers  de  Paul  auraient-ils  voulu 
faire  revivre  cette  mesure?  ^it-ce 

K»ur  balancer  Taotorite  de  I'autocrate? 
ais,  en  admettant  cette  supposition, 
pourquoi  avoir  exclu  Constantin?  Pre- 
nons  encore  quelques  citations :  « II 
avait  m  6galement  dteid^,  a  la  mort 
de  Paul,  <|u'aprte  le  regno  d' Alexan- 
dre, rh^ritage  des  tsars  serait  partage 
en  un  empire  de  Russie  proprement 
dite,  et  un  autre  empire  compost  des 
provinces  polonaises  et  de  toutes  les 
d^pendances  de  k  Russie  actuelle.  Ni- 
colas devait  r^ner  sur  Vun  de  ces 
empires,  tandis  que  Fautre  appartien- 
drait  k  Th^ritier  legitime  d' Alexandre, 
ou,  k  son  d^ut,  au  grand  due  Cons- 
tantin. • 

Cette  ff^drosit^  des  conspirateurs  k 
r^ard  des  Polonais,  cet  abandon  des 
plans  de  Catherine  II,  cet  agrandisse- 
ment  spontan^  d'une  nation  rivale,  d^ 
passent  tellement  les  bornes  de  toute 
vraisemblance,  que  nous  concevoas 
Tembarras  de  Tauteur  a  entourer  de 
telles  cboses  de  quelque  apparence  de 
probability. 

«L*em^reur  Alexandre,  en  proie 
k  des  intrigues  tellement  actives,  que 
tous  ses  enorts  dtaient  impuissants  a 
leur  opposer  de  certaines  bornes ,  n*eut 
point  assez  d'autorite  pour  faire  ex^ 
cuter  les  mesures  qui ,  quaique  ^ma^ 
nant  de  lui-m^me,  s*barmonisaient 
n^nmoins  avec  les  engagements  doni 
ti  n^itaU  que  trop  reeuement  dilivre, 
mais  que  ses  scrupules  lui  represen* 
talent  toujours  comme  existants... 
L'empereor  se  proposait  de  continuer 
son  voyage  jusqu*aux  provinces  situ^ 
sur  la  roer  Caspienne,  ou  il  avait  tme 


5  IS 


L'UMlVfiRS. 


sorte  d'inteMon  de  foiuler  on  ftst  in- 
dependant  ao  profit  da  grand^lric  Mi- 
cliel. »  ^ertes,  voitit  le  chef  de  la  sainta 
alliance  bien«iiiaocip^;  il  rendra  tout, 
iusqB*^  la  conqu^te  de  Jean  leTerrUiie; 
lea  Polonais ,  ks  Snedois  et  lea  Turcs 
auroDt  bon  marcb6  de  ce  qui  restera 
a  la  nourdle  ou  plutdt  a  Tancienne 
Russie. 

« II  voulait  ensuite  se  rend  re  en 
VoUiynie,  au  quartier  general  dte  Yzr* 
mbty  y  jfaire  ?enir  les  grands-dues 
Constantin  et  Michel «  et  proolamer : 
1*  JNicolas  comme  son  suooesseur  direct 
au  trdne  des  Russies;  2*  Constantin 
comme  sotiverain  des  provinces  polo* 
naises,  avec  un  territoire  qui  aurait 
embrass^  presque  toutes  les  autres 
dependances  de  Tempire  russe  en  £o* 
roM,  en  mettant  en  m^me  temps  ce 
frare  en  possession  imm^iate  des  pro« 
vinees  polonaises  et  de  quelaues  pays 
audela,  tandis  que  leresteoes  d^^n- 
dances  ne  devait  y  £tre  d^initivement 
ajout6  qu*^  ia  mort  de  Tempe- 
reur  Alexandre.  •  Comment  Tempereur 
Alexandre  pouvait-il  pr^voir  que  Cons- 
tantin, dont  rdge  diffi^rait  si  peu  du 
sien,  devait  lui  survlvre?  D'un  autre 
o6t^,  Constantin  n*avait  point  d*heH« 
tiers;  I'auteur  suppose  peut-^trequ'il 
aurait  d^sign6  poor  son  suooesseur  un 
prince  polonais. . . «  Les  projets  de  Tern* 
pereur  ^ient  sinc^es  et  g6n6reux. 
Son  erreur  consistait  sans  doute  en 
oe  qu'il  ne  les  expliqua  pas  franehe' 
mentf  avant  leur  mise  k  execution ,  k 
oeux  dont  les  principes  se  trouvafent 
en  opposition  n^cessaire,  qooique  se- 
crete, avec  les  siens;  car,  si  oes  adver* 
saires  les  blAmaient,  les  redoataient, 
et  nous  pou vons  dire  les  d^testaient ,  ils 
p*auraient  eependant  pas  pouss^  Tin* 
famie  jusqu'a  le  faire  renverser  par 
des  moyens  aussi  affVeuat  que  ceux  dont 
ils  se  servirent.  Mais  ^ioign^s  de  tonte 
participation  k  ses  pens^,  les  enne- 
mis  cach^  de  Pempereur,  au  sein  de 
sa  famille ,  ne  virent  ses  projets  qu*d 
travers  une  sorte  de  nuage  ^jpais  aui  ne 
leur  oermettait  mime  pas  (Ten  distin- 
guer  les  ombres,  et  qui  les  leur  repr^n« 
tait  sous  des  Ibrroes  trop  subversives 
de  leurs  propres  pmjets ,  pour  que  leurs 


conseienees  d^a  souitt^  eusseot  pii 
s'arr^ter  eneore  devant  les  resolutions 
bideuses  qu*oa  les  a  vua  extoiter... 
L'empereur  Alexandre  mourut  de  mort 
vioiente.  L'imp^ratriee  devint  la  vio- 
time  du  m^ne  oomplot  un  peu  plus 
tatd,  mais  eependant  trop  tot  pour 

Sue  les  apparenoes  mtees  nisseat  gar- 
ies. »  Amsi,  dans  ropinioo  de  1  au- 
teur,  Alexandre  aurait  sucsombe  par 
le  crime  cl*un  des  membrea  de  sa  fa- 
mille; la  d^ignation  est  facile^  si  Ton 
ae  cotitente  de^oes  indications;  mais 
comment  se  fait-il  que  eeux  qui  n*ont 
pas  bimU  a  saertfier  Fimp^triee  ^i- 
BaMh  k  leur  impatience  de  r^gncr, 
aient  permis  au  doctetir  Wilie,  au  me* 
decin  d' Alexandre,  d*emporter  ea  An- 
gietarre  Son  terrible  secret?  Lea  res- 
sentiments  politiques,  m^me  ceux  dont 
la  source  est  pure,  ne  reouleot  devaat 
aueuns  moyens  de  se  satisfairCi 

Un  historian  polonais,  oh  Ton  troQve 
d'ailleurs  autant  de  partiality  nationale 
que  de  v^itable  talent,  avanee  qu^A- 
lexandre  a  6te  empoisonn^  par  le  senat. 
Cette  assertion ,  que  dement  la  pr^- 
dente,  n'a  pas  plus  de  foodement 
( Mi^roslawski ,  Histoire  de  la  r^volu* 
tion  de  Poloene).  Enfin  Rabbe,  dans 
son  Histoire  d' Alexandre,  s'exfMrimeen 
ces  termes :  «  £t  quelle  a  m  la  fin 
d' Alexandre?  serait-il  vrai  que  Ja  puis* 
sance  qui,  depuis  1815,  avait  exclu- 
sivement  influe  sur  ses  d^terminatiooB, 
k  la  veille  de  voir  s'^rouler  I'^ifice 
qii*elle  avait  bAti  sur  les  pieuses  illu- 
sions du  monarque  russe,  ait  vouhi 
a  tout  prix  (sr^venir  le  scandale  de  oette 
telatante  defection  :  £Eiut-il  croire?... 
Non ,  oes  sinistres  rumeurs  ne  peuveat 
pas  toe  aooueillies.  II  n'est  du  moins 
pas  permis  de  dornier  une  sanction 
nistoriqoe  ^pieloonque  au  bruit  d*un 
attentat  qui  passerait  les  homes  de 
toute  perversity  politigae. »  II  est  olair 
que  oette  demise  insinuation  regsrde 
rAutriche.  Certes,  s'il  edt  fallu  payer 
d'un  grand  sacrifice  la  prolongation  des 
Jours  d* Alexandre,  nolle  autre  puis- 
sance n'eOt  ^  plus  dispose  k  le  taire. 
Avec  Alexandre,  tout  ie  systeme  de 
ralliance  s^est  ^vanoui ;  son  succesaeur 
a  saisi  d*une  main  ferme  les  rtoes  -de 


mirssifi. 


«t9 


fcmeire,  ei  soas  Iqi  s'tot  aocompN  ce 
oiHs  rAutriGhe  redoutait  le  plus,  Fin- 
(wpemlaDee  de  taGfi^  S0119  le  pro^ 
Cectorat  russe,  rabaissement  d^finitif 
dt  hi  TUr^uie;  enfin,  aprds  la  mort  de 
ee prmce,  les  r^roiittioDs  de  Paris,  de 
BrBxetles ,  de  VarsoTie ,  de  BniQSwick , 
eo  se  r^rcutant  dans  I'Europe,  ont 
boulevcm  toate  r^nomie  du  con- 
gresde  Yienne,.et  rouvert  la  hitte 
entre  les  yieilles  monarchies  et  les 
exigences  constitutionnelles. 

Cxpendant,  ponr  qu^nn  bruit  de  oette 
nature  s'aocr6dite,  il  faut  bien  ad- 
mettre  qn'il  y  ait  eu  dans  le  cours  des 
^teements  des  indices  assez  forts  pour 
leur  prfter  un  caractere  de  yraisem- 
bhmee :  or,  nous  retrouTons  ees  indi- 
ces  dans  un  concours  frappant  de  cir- 
ooastances,  les  unes  poiitiques,  les 
aiftres  pr^entaot  mi  caractere  de  vio- 
lence qai,  h  r^poque  ou  dies  eurent 
lifil ,  empMi^rent  d'adn^ettre  des  cau* 
ses  pnronent  accidentelles. 

En  1825,  on  croyait  e^ndraiement 
(|D'Aiexandre  allait  prendre  une  r^o- 
Itition  ^nergique  an  sujet  de  la  Gr^; 
on  ajpprend  gu*il  voyaee  dans  les  pro- 
yineesmeridionales  derempire;  tandis 
que  Urns  les  esprits  sont  dans  Tattente , 
on  reooit  tout  a  coup  la  nouveUe  qu'A- 
lexanore  vient  d'expirer  a  Taganrok, 

206  des  troubles  serieux  ont  MaU  h 
^tersfoourg,  que  Gonstantfn  renonce 
a  la  couronne,  en  s'a?ouant  incapable 
de  Ja  porter,  et  que  Nicolas,  apr^s 
aToir  trtomphd  d'une  insurrection  mi- 
litaire ,  est  montd  sur  le  tr6ne  de  toutes 
lea  Russies.  Les  revolutions  de  paiais 
si  fr^uentes  dans  cet  empire,  cette 
mort  si  inattendue,  tout,  juaqu*^  Td- 
loieneroent  du  lieu  de  la  so^ne,  con- 
trimiait  h  rdpandre  sur  les  dernlers 
moments  d*Alexandre  ce  merveilleux 
tragi^e  aui  a  tant  de  prise  sur  Tima- 
gination  aes  hommes. 

Apr^  avoir  ^tabli  que  cenx  qui  ont 
prdtendo  qu^ Alexandre  avait  peri  de 
mort  TioJente  n'appuyaient  leur  dire 
que  sur  des  conjectures  contradictoires 
et  toutes  improbabies,  nous  allons  ex- 
poser  queiques-uos  des  documents  offi- 
ciels  que  nous  adopterons,  non  paroe 
fu'iis  ^manent  du  gouvemement,  mais 


paroe  qu'ils  paraiasmt  m^rtler  une  en- 
ti^re  confianoe. 

Au  eommeneement  de  Tautomne, 
Alexandre  r^lut  de  faire  un  voyace 
dans  les  provinces  mdridioDales  de 
I'empire;  robjet  principal  deee  voyajge 
etait  de  passer  en  revue  les  armees 
camp6es  dans  la  Volhynie,  dans  la  Po- 
dolie  et  dans  la  Bessarabie.  L'ernpe- 
reur  se  proposal!  atissi  de  visiter  la 
Crimde ,  et  spteialement  la  ville  de  Ta- 
ganrc^,  le  second  port  de  la  mer 
Noire.  On  s'dtait  flattd  que  quelques 
semaines  de  r^idenee  dans  cette  viHe 
pourraient  ameltorer  la  santd  de  l'ffiip6 
ratrice  Elisabeth,  qui,  depuis  quelque 
temps,  donnait  des  inquietudes. 

L  imp^ratrice  partit  deSaint-P^terfr- 
bourg  le  15  septembre,  accompagn^ 
du  prince  Yolkonski ,  de  son  mddeciii 
et  cPune  suite  peu  nombreuse.  Elle 
n^arriva  h  Taganrok  que  le  6  ectobre: 
Alexandre,  parti  deux  jours  avant  die, 
se  trouvait  dans  eette  ville  depuis  le  W 
septembre. 

jL'empereur  visits  tons  les  dtaUisse- 
ments ;  il  manifesta  fintention  de  6ire 
construire  le  lazaret  en  pierres  de 
taille,  et  exdcuter  de  grands  travanx 
pour  faciliter  les  aroroches  du  port. 
Apr^  un  mois  de  sejour  k  Taganrok , 
Alexandre  y  laissa  rimpdratrice,  et  se 
remit  en  route  pour  aehever  sa  toam^ 
dans  la  nouvelfe  Russie. 

Le  24  octobre,  arrive  h  deux  verstes 
de  la  viUe  de  Novo-Tcherkask,  il  fiit 
re^u  par  le  lieutenant  gdndral  Novafski 
et  un  grand  nombre  d*officiers  supd- 
rieurs.  11  desoendit  d'abord  k  la  maison 
de  campagne  du  comte  Platof ,  ou  se 
trouvait  radjudant  gdqdral  Tdiemi- 
chef.  Aprds  avoir  change  d'habits,  fil 
roonta  un  cheval  cosaque  magnifique- 
ment  hamach6,  et  alia  au-devant  de 
rhetman,  qui,  s'dtant  s^ard  de  sa 
suite,  s*avan^  vers  le  souverain  poor 
le  complimenter,  et  lui  pr^enter  le 
rapport  de  la  situation  g6ndrale  des 
corps  soumis  k  ses  ordres.  Alors  Tem- 
pereur  poussa  jusqu'di  la  suite  de  Yhet- 
man,  la  salua  de  la  mani^re  la  plus 
affectueuse,  et  se  dirigea  avee  elle  vers 
la  ca^edrnle.  La  route  ^it  bord^ 
par  une  fouie  nombreuse :  Tarr  reten- 


SS0 


L'UNIVBRS. 


tissait  d*i|Qclainations;  des  femmes  el 
de  jeunes  filles  joncbaient  de  fleurs  son 
passage;  et,  lorsquMl  arriva  k  la  catbe- 
drale,  le  haut  clerg6  vint  a  sa  rencon- 
tre pour  le  eomplimenter  et  Tintro- 
duire.  Quand  leservice  divin  fut  achevd, 
J'emperHur  se  rendit  k  la  maison  de 
rhetinan«  devant  laquelle  ^taient  dis- 
posto.  mr  deux  lignes  les  marques  de 
Ai^iqctionei  et  de  faveurs  aocordees 
afp-Cosaqu^s  en  recompense  de  leur 
d^vouemeot  et  de  leurs  services.  Sa 
Majesty  y  re^ut  les  felicitations  des 
officiers  de  la  cbancelierie  du  Don  qui 
forment  le  tribunal  supreme  de  cette 
province;  et,  lorsque  Alexandre  arriva 
devant  la  porte  de  la  maison,  les  bet- 
mans  des  districts  et  les  chefis  des 
anciens  lui  offirirent,  selon  Tusage,  le 
pain  et  le  sel...  Dans  la  matinee  du 
25,  Tempereur  donna  differentes  au« 
dienoes,  et  visita  les  6tablissements 
publics.  U  retourna  a  Asof  par  la  route 
de  Sraro-Tcberkask ,  et  arriva  a  Ta- 
ganrok  le  27  octobre. 

Le  1  *'  no  vembre ,  il  partit  pour  faire 
un  nouveau  vovage  dans  la  Crimee,  et 
visita  MariofK)!,  P^r^kop,  Sympb^ro- 
pol ,  Bakbtcbisarai  et  Eupatori.  Le  31 , 
li  adressa  au  ministre  des  finances  un 
oukase  portant :  «  Que  pour  adopter 
tous  les  moyens  possibles  en  faveur  de 
Taganrok,  point  si  important  pour  le 
commerce  interieur  de  la  Russie,  Sa  Ma- 
les!^ ordonnait  que  le  dixieme  de  tous 
les  droits  de  douane  per^us  dans  cette 
ville,  au  maximum  d'un  million  par 
an,  serait  mis  en  reserve  pour  Tame- 
Jioratiop  du  port  et  pour  la  construc- 
tion des  Edifices  necessaires ,  sur  une 
edieUe  proportionn^  h  Tetendue  de 
son  commerce.  » 

En  revenant  de  la  Crim^c,  Tempe- 
reur  fut  si  frapp^,  dans  les  environs 
de  S^astopol ,  de  la  beaute  de  la  v^ 
getation  meridionale,  qu*il  dit  au  ge- 
neral Diebitcb  et  au  comte  Vosontzof 
qui  Taccompa^naient :  «  Si  je  quittais 
un  jour  les  soms  du  gouvernement,  je 
voudrais  passer  le  reste  de  ma  vie  dans 
ce  lieu.  »  Plein  de  ces  idee$,  il  entra 
dans  un  monastic  du  voisinage,  ou  il 
demeura  plus  d'une  beure  dans  une 
pieuse  contemplation.  Quand  il  rejoi- 


Slit  son  escorte,  il  se  plaignit  de  ma- 
ise  et  de  frisson;  la  fievre,  qui  sr 
d^lara  avec  intermittence ,  devint  tout 
h  coup  plus  vioiente,  et  Tempereur  se 
hdta  de  revenir  h  Taganrok ,  aupr^  de 
rimp^ratrice  £lisabetb.  Comme  il  etait 
done  d*iine  forte  constitution,  sa  ma- 
ladie  n'edt  point  ^t^  dangereuse  s*il 
avait  re^u  des  secours  h  temps;  mais 
il  avait  jug6  trop  legerement  de  son 
mal,  et,  pendant  la  premiere  quia- 
zaine,  il  refusa  de  prendre  aucun  me- 
dicament. II  ^tait  deja  trop  tard  Ion- 
Sue  enfin  il  se  rendit  aux  sollicitations 
e  sa  famiiie  et  aux  pieuses  remon- 
trances  de  Tarcbimandrite.  Sa  maladie 
empira  rapidement;  mais  il  conserva 
Tusage  de  ses  sens  jusqu'a  la  derniere 
beure,  ou  il  dicta   son   testament 
L'imp^ratrice  £lisabetb  lui  prodigua 
les  soins  les  plus  tendres;  penaantcinq 
iours  et  cinq  nuits,  elle  ne  quitta  pas 
le  cbevet  de  son  lit.  Les  dernieres  pa« 
roles  de  Fempereur  furent :  «  Ab!  le 
beau  jour!  »  Les  rideaux  des  erois^ 
avaient  ^t^  tires,  et  le  soleil  d*automiie 
dardait  ses  rayons  dans  rapparteoieat. 
Lorsque  Tempereur  eut  rendu  le  der- 
nier soupir  dans  les  bras  de  Timp^ra- 
trice  £lisabetb,  elle  rassembia  ses  for- 
ces pour  lui  fermer  les  yeux  et  lui 
croiser  les  bras  sur  la  poi trine;  apres 
cet  effort  elle  s'^vanouit.  Les  deux  let- 
tres  suivantes  Writes  par  Timp^ratrioe 
l^lisabetb,  la  veille  et  le  jour  m^ne 
de  la  raort  d'AIexandre,  appartiennent 
a  rbistoire :  eiles  honorent  egalement 
Alexandre  et  celle  qui  lui  a  surv^u  de 
si  peu. 

Taganrok,  i8  novcmbre  >8a5. 
(3o  DO  vembre.) 

«  Ch^re  maman , 

«  Je  n'ai  pas  ^t^  en  ^tat  de  vous 
6crire  par  le  courrier  d*hier.  Rendons 
aujourd*bui  mille  et  mille  actions  de 
graces  a  TEtre  supreme.  Decid^roent 
la  sante  de  Tempereur,  de  cet  ange  de 
bonte  au  milieu  de  ses  souffrances,  va 
beaucoup  mieux.  A  qui  done  Dieu  re- 
serverait-il  sa  misencorde  infinie,  si 
ce  n'etait  pour  eel ui-ci  ?  Oh  I  nion  Dieu ! 
quels  moments  d'afHiction  J'ai  pass^^! 
Et  vous,  cbere  maman,  je  puis  roe 
Ggurer  voire  inquietude;  vous  receve; 


•  •  ■  • 

•  •  •• 

•  •  •  • 


■  ••  • 


•  ••  • 

•  •• 

•   • 

•  ■■■ 

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•  ••• 

•  •  •  » 


•  • ••       ••■  • 


•  ;• 


••  • 


••  •• 


■•  • 


nussie* 


591 


I«s  buHetins;  votis  afez  done  vu  h 

Sle  extr^mite  nous  avons  ete  re- 
5  bier,  et  surtout  dans  ia  soir^; 
mais  WIlie  ( le  m^decin  anglais)  dit  lui* 
m^me  aujourdliut  que  I'etat  de  notre 
dber  malade  est  satisfaisant;  mats  il 
esX  tres-faible.  Ch^e  maman,  je  voos 
avooe  que  je  ne  suis  pas  h  moi ,  et  je 
ne  puis  tous  en  dire  advantage.  Priez 
avec  nous,  avec  cinquante  millions 
d'hommes ,  pour  que  le  Seigneur  rende 
complete  la  gu^son  de  notre  malade 
bien-aiiii6. 


«  Notre  ange  est  an  del,  et  moi  je 
langois  encore  snr  la  terre!...  Qui  au- 
rait  pa  eroire  que  moi  infinne  je  lui 
aurais  sanrtoir...  Ne  m'abandonnez 
pas,  chere  maman ,  car  je  suis  absoiu* 
ment  seule  dans  le  monde. 

•  Notre  cher  d^fimt  a  repris  son  re- 
gard de  bont^;  son  sourire  me  prouve 
qu'il  est  heureux,  et  qu*il  a  devant  les 
jeuz  des  objets  meilleurs  que  ceuz 
d^id^ias.  Ma  seule  consolation  dans  oe 
malbenr  irreparable,  c*est  Tespoir  de 
ne  pas  lui  sorviTre;  j*espdre  me  bien- 
tdl  reunie  k  lui. 

« l^LISABBTH.  » 

lies  presMntiments  de  Timptotrice 
oe  Favaient  pas  tromp^;  die  ne  tarda 
l»as  d  rejoinare  dans  la  tombe  Tobjet 
de  ses  oonstantes  affections. 

Cependant  P^tersbourg  6tait  plough 
dans  one  Tive  anxi^t^;  les  nouvdles 
que  les  oourriers  apportaient  de  Tagan- 
rok  r^pandalenttantdt  i'espoir,  tantdt 
la  consternation.  Le  8  d^mbre,  on 
re^ut  des  nouvelles  plus  favorables; 
dies  ^ient  datto  du  29  novembre ,  et 
annon^ient,  comme  nous  I'avons  vu 
phis  haut,  une  amdioration  sensible. 
Sir  James  Wilie,  dans  le  bulletin  du 
mtoe  jour,  6crivait  qu'au  mojen  de 
v^fulstn  on  etait  parvenu  k  tirer  Sa 
Majesty  de  I'^t  iethargique  dans  le- 
qad  die  i§tait  rest^  longtemps,  de 
sorte  qii'on  ^it  fond^  k  en  esperer  les 
r6sultats  les  plus  heureux. 

Dans  la  mating  du  9,  un  courrier 
apiiorta  la  nouvelle  que^rempereur 
etait  expire  le  1''  dtosmbre,  entre  dix 
et  onze  beures  du  matin.  On  etait  a 


cddNrer  un  Te  Deum  d'aetions  de 
^ces,  lorsque  le  crand^duc  Nicolas, 
instruit  le  premier  de  la  perte  que  I'em- 
pire  venait  de  £Bire,  ordonna  de  sus- 
pendre  le  service  divin,  et  pria  Tar- 
chimandrlte  de  se  transporter  cbez 
riropdvtrice  mere  pour  la  preparer  k 
cette  nouvelle  douloureuse. 

Nous  avons  cm  devoir  entrer  dans 
oes  details,  qui  ne  sont  pas  du  domalne 
de  Thistoire,  paroe  quil  ^tait  impor-^ 
tant  de  les  rppprocber  de  qudques  ¥er* 
sions  bien  dinerentes ,  et  que  le  lecteur 
aurait  pu  adopter  sans  examen. 

Alexandre  lut  gen^ralement  reg;ret- 
t^,  quoique  sa  mort  ait  ^t^  le  signal 
d'une  r^oltepr^pareede  longue  main; 
c*6tait  moins  a  rbomme  que  s^adressait 
le  m^contentement  d'une  partie  de  la 
jeune  noblesse  qu'aux  institutions  elles- 
m^roes.  Sa  pi^te  viveet  sincere  lui  con- 
diiai  t  le  derg^ ;  sa  douceur  et  sa  philan-. 
tbropie«qu'onretrouvaitpeintessurse8 
traits,  lui  gagnaient  Taftection de  tous 
oeux  qui  Tapprodiaient;  sa  Constance 
dans  Iffi  temps  difBciles,  la  gloire  des 
armes  qui  se  reflete  toujours  sur  le  chef, 
n*eOt-il  d'ailleurs  aucune  des  quality 
qui  fbnt  le  guerrier^  tout  le  rendait 
cher  k  un  peuple  qui  ob^it  m^me  aux 
mauTais  princes,  et  qui  professe  un 
T^ritable  culte  pour  les  bons. 

La  simplicity  d* Alexandre  avait  beu- 
reusement  reagi  sur  les  mceurs  publi* 
ques;  le  godt  des  arts  et  de  la  litt^ra- 
ture  prit  sous  son  r^e  un  essor 
remaiquable;  il  combia  d'honneurs  et 
de  bieuaits  Thistorien  Karamzin,  dont 
la  mort  interrompit  les  travaux  en 
1826.  Joukovski,  Pouchkin,  Krylof, 
Dmitrief  ont  perfectionn^  la  langue 
po^tique,  et  un  grand  nombre  d'ecri- 
vains  distingu^,  quoiqu'en  general 
imitateurs,  ont  contribu^  a  r^pandre 
le  godt  des  sciences  et  des  etudes  lit* 
t^aires.  Sous ce  regne,  dont  les  quinze 

1>remi^res  ann^es  furent  si  agitdes, 
es  connaissances  militaires  firent  de 
grands  progres,  et  Tinstruction  pu- 
bllque  re^ut  un  developpement  dont 
on  a  jog6  prudent  d*amortir  Teffet.  La 
peinture,  rarchitecture,  I'art  typogra- 
phique  firent  aussi  des  pas  rapides. 
Les  embeUissements  de  Saint-Peters^ 


LiJIII¥B&S. 


koait;  oiffciit  cttle  WMe  au  premicf 
nmg  des  capitoles  de  J'Ewope ,  et  Vem- 
pcreurf  a  son  retoor  de  r^tranger,  put 
dire  sons^  ciag^ratioa  an  oarps  des 
maKhaodB  assem W  k  la  Boitrse :  «  J'ai 
visits  les  dtig  lea  plus  oeMbrea  da 
rEuvope;  je  snis  heureux  de  ^ooa  dire 

3ue  Petersbourg  est  la  plus  belle  vMle 
u  monde. »  • 

Par  wi  eoncoon  de  circonstaDees 
trto-remarquabkiB,  le  caractte  das 
prraoes  (pri  se  sont  sooeM^  sar  le  trdne 
de  Russie  depuis  Pierre  P',  a  M  ain- 
gulierement  favorable  au  d^veloppe-* 
tnent  rapide  de  la  pnissanee  et  des 
ressoarees  de  oet  empire.  I^  vie  du 
r^formateur  est  une  kmgue  Intte  conbre 
les  ifKBurs  et  les  pr^juges  natioiiaiix; 
son  g^nie  siiflBt  h  peine  k  oette  tAche  ^ 
la  nation ,  fatigu^  par  le  travail  d'une 
civilisation  improvise,  avait  besoin  de 
repos  poor  se  reoonnaltre,  pour  ^la- 
borer et  s'assimiler  des  changementB 
imposes  par  oukases;  les  regnes  sni* 
vants ,  sous  Tadministration  de  femmea 
volttptueuses,  ou  phit^t  sous  eelle  do 
leurs  favoris,  prennent  an  caractera 
retrograde.  Catherine  apparatt,  me- 
lange Rierveilleux  de  feiblcfise  et  de 
Srandeur,  de  dissimulation  et  de  force, 
e  patience  et  d'orgueil,  et  portant 
jusqu*^  leurs  demi^res  limites  les  vices 

§riv^  et  les  vertus  des  souverains. 
ous  le  sceptre  de  cette  f^e  couronn^, 
la  Russie  fait  nn  pas  immense :  la  Tar> 
quie  est  bumili^e,  mais  surtout  la  Po* 
logne  est  partagee ;  d^ormais  la  Russie 
est  une  puissance  europ^nne  de  pre- 
mier orare.  Comme  pour  montrer  de 
quel  poids  pent  ^tre  Talliance  russe,  un 
empereur  qui  porte  la  bisarrerie  jns- 

2u*a  Textravagance  succMe^  la  grande 
latberine.  Un  caprice  de  cet  homme 
lance  une  arm^e  en  Italic;  11  est 
vrafi  que  cette  arm^  est  command^e 
par  Souvorof :  elle  triomphe,  c^de 
enfln,  et  se  retire;  mais  la  reputation 
militaire  des  Russes  est  ^tablie.  Un 
autre  caprice  de  Fautocrate  le  rap- 
proche  ae  cette  r6pubiique  fran^ise 
qtril  voulait  an^nttr;  TAngleterpe 
tremble  k  son  tour,  et  Tassas^nat  de 
Paul  la  d^livre  k  point  nomme  de  ses 
craintes.  Mais  la  vieille  Europe  a  change 


de  face;  toitle  r^eifie  de  la  9^- 
blioue,  se  rteiaiaiit  dus  la  eonq«6e, 
se  disciplinant  sous  rtnflutneedu  geeic 
le  plus  guerriar  dea  aiklea  medemes, 
ae  rue  sur  les  trdnea,  les  renverse,  ae 
joue  de  lenrs  d^ria,  les  relive  un  ins- 
taiil  pour  lea  renveraer  enoore,  et  me- 
nace tout  ce  qu'dle  n'a  pae  encore  eu 
le  temps  d*atteindre.  A  cette  ^poque  et 
devant  ce  p^riK  un  jeune  pniiee  6*est 
assissur  le  trdne  dee  taera:  U  ne  porte 
poittt  au  front  la  oiar^iie  putssante  do 
g^nie;  ses  vertus  sont  douces,  sa  mo* 
d^ratioii  eat  ^dairte,  mais  il  n'y  a  rieo 
en  111!  de  pre^tigieux  -comme  homine, 
eemme  aouverain ,  aurtout  eomoie  sol- 
dat;  il  s'effiHoe  devant  lea  proportions 
gigaatesfiiesdesoQ  rival;  eteependant 
c'eat  ce  oatoe  prince  qui  Koutient  la 
rMiftanee  impoiasante  de  sea  allies; 
ses  revers  ne  I'abatteat  point;  in^e 
vaincQ,  il  obtient  dea  oonoitioos  booo- 
rables;  en  ehaageant  de  rd&e  dans  la 
hitte^  il  B*en  conserve  paa  rooins  la 
conacleooe  de  aa  fofoe;  enfin  il  se  d^ 
dare  aeul  cootre  toua,  attire  rennemi 
dans  ses  deserts,  brOle  devant  le  vain- 
queur  I'antiaue  eM  que  sea  aujets  ap- 
pellent  la  ville  sainte,  et,  opposant  le 
nombre  au  oombre ,  le  courage  au  cou- 
rage, I'eapace  et  lea  ^toents  au  gMe, 
il  ne  depose  I'^p^  que  loraque  son 
noble  adveraaire  eat  hora  de  combat. 
£st-ce  done  dans  le  s^ie  dea  auto- 
crates  qu'il  £Biiit  eherdier  la  cause  de 
tantde  faita  extraordinaires?  Non  sans 
doute;  la  nature  n'a  pas  r^serv^  ses 
prMilectioiia  pour  les  latitudes  septen- 
trionalea :  laprepond^ancede  laRossie 
lient  k  une  multitude  de  causes,  les 
unes  morales,  lea  autrea  nhysi<{US8; 
elletieot  a  T^tendue  de  aes  mntieres. 
k  la  politique  oonatante  du  gouverve- 
ment,  a  rob^issance  passive  dea  inasp 
ses;  die  tient  surtout,  il  faut  le  dire* 
k  d'anciennes  rivaiit6a  entre  les  ai^ras 
nations  de  FEiuope ,  qui ,  d^suoies  d*ftl- 
terdts  oomme  opposees  de  priocipefi, 
tout  en  vovant  le  danger  qui  lea  me- 
nace, hesitent  k  se  prater  aiutudie- 
ment  une  assistance effiQaee,etae eon- 
Solent  de  le6r  dependanoe  par  le  spec- 
tacle de  la  dependance  des  gouverne- 
inents  rivaiix. 


&UMIS* 


in 


Li  moMmtiom  ifAiexandfo  D*a  pac 
^  g^n^aUsnieat  approuvfe  par  lea 


»;  on  a  trosv^  qu*a  r^^vation  oit 
J'avaient  porU  lea  ^Ttocmenta ,  de  1 812 
i  IMS ,  il  aurait  pd  facitement  tirer  ud 
parti  ploa  avaotagem  de  aa  pr^od^* 
raaoe  an  Eoiope.  Nous  orojoas,  au 
eontiairt,  que  cettc  moderation  tint 
a  tempa  poor  cahner  lea  appn&cnaioiia 
de  l*An^eterre,  de  FAutrichc  et  de  la 
Pruaae.  A  cette  ^poque,  soe  extension 
de  fraoli^rM  o'etait  gu^  praticable 
que  do  oM  de  I'Orient ;  on  ne  poavait 
rattacber  une  gaerre  ooDtre  la  Turquie 
qo^ii  la  qoestioD  greeque;  et  e'est  ce 
qui  a'eat  Kiit  plus  tard ,  non-seoleinefit 
aree  PfnteiitioD  d'avanoer  vefs  les  Dar- 
danellea  et  de  s'asiurer  par  des  traits 
le  paaaage  Hbn  de  ee  dtooit,  mats 
pour  oeraper  raitn^,  dent  r^meote 
de  182S  amit  dd  affecter  ie  moral.  Le 
caraetdre  pacifique  d* Alexandre  eon* 
trilma  done  h  tranquilliser  TEuvope, 
et  la  diroetion  politique  des  eabineta 
une  fois  prise,  et  leur  attention  d^ 
toumde  ailleors,  il  derint  utt^eure* 
ment  bien  plus  diflSciie  d'obtenir  I'ae- 
eord  ndcessaire  pour  opposer  des 
obstacles  8(firieox  aox  empi^tements 
ulterieuTS  de  la  Russie.  Nous  ne  pr^ 
tendons  pas  ^tablir  ici  que  ee  r^uKat 
entrait  dans  les  pr^isions  d' Alexan- 
dre; oette  marche  ^it  dans  son  ca- 
ractere;  et  la  nature  mime  des  ^1- 
nements,  dans  les  quinze  premieres 
anoees  de  son  resne,  ry  avait  fait  per* 
sister;  mais  Ferret  de  eette  condoite 
mesni^^ ,  poor  Itre  naturel ,  n*en  ^tait 
que  plus  ^cace  et  plus  certain.  Ausst 
cette  temperance  de  rues ,  quelle  qu'en 
fdt  d*ailleors  h  source,  eut  des  conse- 
quences salutaires  pour  la  Russie,  et 
sous  le  rapport  de  sa  politique  g^6- 
rale,  et  parce  qn'elle  lui  faissait  le 
temps  de  reparer  le  d^ordre  de  ses 
finances,  de  fermer  les  plaies  d'une 
^ore  tongue  et  d^streuse,  et  enfin 
(Tavancer  dans  les  voles  rtentes  de 
•es  institutions.  £n  un  mot,  les  ver« 
tus,  et  jusqu'aux  faiblesses  d^Alexan- 
dre,  apprivois^rent  les  esprits  arec 
ridSt  de  la  preponderance  nisse,  iDs6^ 
jurable  jusqo'alors  de  prejuges  natto- 
naux  et  d'apprehensions  legitimes.  La 


mort  ,'qiii  enkewa  ca  priaoe  a  ^aranto- 
buit  aas,  Ta  laitee,  pour  ainsi  dire, 
eorapiet  pour  i'faistoire*  en  le  frappant 
a  rinstant  ou  peat-ltre  il  aUait  aban- 
donner  $ob  systeone,  sans  qu'il  i(ki 
poasible  de  prevoir  josqu'ou  Tentfalne- 
rait  la  pente  des  eveoeraeots. 

Nous  avons  easay^  de  presenter  Tein- 
pereur  Alexandre  sous  les  frfiases  {nrin* 
eipales  de  aa  vie  politique ;  nous  avons 
montre  eommeot  les  taits  eux-meroes 
cipliquent  les  contradietions  appa* 
rentes  de  sa  conduits;  parse  qu'ii  eut 
plutdt  de  bonnes  tntentiona  que  de 
grandcs  vues,  il  compromit  jusqu'a 
sa  reputation  de  droitore  et  de  since- 
rite,  en  deiaisant  qudquefois  son 
propre  ouvragp ,  aon  par  versatilite  oo 
absence  de  principes ,  mais  pour  arri* 
▼er  d*une  autre  maniere  au  but  qu*il 
regardait  eomme  le  plus  avantageox. 

Les  traits  aneodotiques  que  nous 
allons  rapporter  Tiemlront  a  I'appui 
do  Jittement  que  nous  avons  porte  sur 
ce  prmee :  e*est  surlout  dans  la  vie 
privee ,  quand ,  oessant  de  poser  de* 
vant  rbistoire  attentive ,  les  souverains 
se  montrent  tels  qu*ils  sont,  c*est 
alors  quV>n  salsit  mieux  ieurs  traits 
earact^stiques ,  et  qu*en  les  voyant 
plus  pres  de  nos  vertus  et  de  nos  fai* 
menes,  nous  les  iogeons  avec  moins 
de  raefiance ,  selon  les  r^les  constantes 
de  la  morale. 

«  Sa  tendresse  poor  le  colonel  La* 
harpe  tenait  jplutdt  de  la  piete  filiale 
que  des  egards  d*on  ei^ve;  il  preferait 
sa  societe  a  tous  les  plaisirs  de  son 
fige.  Un  jour  qu'il  se  jetait  ^  son  cou , 
ses  habits  resterent  converts  de  pou* 
dre :  Voyez ,  mon  cher  prince ,  lui  dit 
Laharpe ,  comme  vous  etes  arrange.  -^ 
Ob!  cest  egal,  repondft  Alexandre, 
personne  ne  me  btdmera  d'emporter 
tout  ce  que  je  pourrai  de  mon  cher 
precepteur.  PeOdant  son  sejour  k  Pa* 
ris,en  1814,  il  alia  visiter  madame 
Laharpe.  Comme  elle  restait  debout , 
II  lui  dit:  Vous  etes  bien  cbangee, 
madame.  —  Sire ,  repondit-elle ,  comme 
tout  le  monde;  les  ciroonstances...  -- 
Vous  ne  me  comprenex  pas ;  je  veux 
dire  que  vous  ne  vous  asseyez  |>as, 
comme  vous  avicz  coutume  de  1c  faire, 


su 


L'UNIVERS. 


a  ctU  d£  TMve  de  votre  mari,  en 
caiisant  famif  i^rement  avec  lui.» 

II  sut  se  teoir  en  garde  contre  la 
(H'odigalit^  ruineuse  des  r^oes  pr^c^ 
dents;  le  discernement  temp6rait  sa 
g^n^rosite  naturelle;  mais,  dte  qu'il 
s'agissait  de  r^mpenaer  les  servioea 
(Ml  le  m^rite,  il  donnait  avec  grdce, 
et  s'appliquait  surtout  k  £aire  touraer 
ses  faveura  k  Tavantege  du  pays.  Quoi- 
qu*il  godtAt  peu  la  po^sie,  feprofes- 
sear  Haui,  ^i  dirigeait  avec  suoo^ 
i*^tabli8seoMot  des  aveugles  k  Saint- 
P^tersboorg,  lui  envoya  un  jour  quel* 
ques  vers  k  sa  louange ;  Fempereur  lui 
envo^a  mille  roubles,  en  lui  faisant 
savoir  qu'il  les  avatt  lus  avec  plaisir^ 
ee  qui  ne  r^tonnait  pas  de  la  part  d*un 
homme  qui  apprenait  it  lire  a  des 
aveugles. 

Sa  oienfaisance  ^lata  surtout  lors 
de  I'inoodation  de  la  capitale:  uon 
content  de  prescrire  avec  la  plus  ac* 
tive  sollicitude  les  mesures  r^para- 
trices  que  r6clamaient  les  ciroons- 
tances ,  il  voulut  oonnattre  par  loi- 
mime  toute  T^tendue  de  oe  d^sastre. 
Tous  les  jours ,  seul  ou  aocoinpa£n^ 
du  gte^ral  Benkendorf ,  il  se  rendait 
dans  les  feuboures  les  plus  dcartes, 
et  consolait  les  iofortunes  plus  encore 
par  ses  paroles  que  par  les  secours  ef- 
fectifs  de  sa  munificence. 

En  1807,  rempereur,  dans  un  de 
ses  voyages  en  Pologne,  ayant  devance 
sa  suite ,  vit  plusieurs  personnes  ras- 
semblto  sur  les  bords  de  la  Wilia; 
et,  en  approchant  de  cet  endroit,  il 
reconnut  qu*on  venait  de  tirer  de  cette 
riviere  un  paysan  qui  ^raissait  sans 
vie.  A  rinstant  il  mit  pied  a  terre ,  fit 
placer  le  corps  sur  le  bord  de  Teau , 
et  8*oocupa  imm^iatement  de  lui  pro- 
diguer  les  secours  que  r^clamait  son 
^tat.  L'empereur  fut  bientot  rejoint 
par  sa  suite.  Le  docteur  Wiiie  essaya 
de  saigner  le  pavsan ,  mais  en  vain ; 
et,  aprds  trois  neures  de  tentatives 
inutiles  pour  le  rappeler  h  la  vie ,  il 
declara  qu'il  etait  inutile  de  continuer. 
L'empereur  supplia  le  medecin  de  ne 
pas  se  decoura^er,  et  de  recourir  de 
nouveau  k  la  saign^e.  Cette  fois ,  quoi* 
que  le  docteur  d6sesp6r&t  du  succes , 


le  sang  panit,  et  pea  a  peu  le  mon- 
bond  reprit  i*u8a||e  de  ses  sens.  A  cette 
vue,  et  dans  Tenifotion  de  sa  joie, 
Tempereur  s'toia  :  Mon  Dieu !  voiili 
le  plus  beau  iour  de  ma  vie!  et  qud- 

2ues  larmes  s  i6chapp^rent  de  ses  yeux. 
^n  redoubla  d'effbrts;  Alexandre  de- 
cbira  son  nioucboir  pour  en  Her  le 
bras  du  malade,  et  ne  le  quitta  que 
loraqu'il  le  vit  hors  de  danger.  Apres 
avoir  sauve  la  viedu  pauvre  Polonais, 
il  lui  fit  donner  une  somme  consid^ 
rable;  et ,  plus  tard ,  il  prit  soin  de  lui 
et  de  sa  famille. 

L'dme  d' Alexandre  s'ouvrait  &cile- 
ment  aux  Motions  douces;  le  beau 
dans  Tordre  physique,  aussi  bien  que 
dans  i'ordre  moral,  lui  causait  de 
Tives  impressions :  mais  les  seines  d*ttn 
caractdre  simple  etaient  plus  en  har- 
monic avec  ses  godts  que  les  beautes 
solennelles  et  s^v^res.  L'aspect  de 
Richmond-HiiUtait,  dans  son  opinioD, 
ce  qu'on  pouvait  voir  de  plus  s^ui- 
sant.  Souvent  on  lui  a  entendu  dire : 
«  qu'un  propri^taire  campagnard  an- 
glais 6tait  un  bomme  au-aessus  de 
tous  les  autres ,  et  que  Dieu  avait  mis 
en  son  pouvoir  tous  les  moyens  d'^ 
heureux. » 

L'amour  de  la  justice  s'alliait  dans 
son  esprit  k  l'amour  de  Tordre.  Uo 
jour,  au  moment  m^me  ou  il  avait 
donn^  le  mot  d'ordre ,  et  que  la  garde 
k  la  parade  etait  sur  le  point  de  lui 
reodre  les  honneurs  militaires,  ua 
homme  s'approche  de  lui ,  couvert  de 
haillons ,  les  cheveux  ea  desordre  et 
I'oeil  ^ar^,  et  le  firappe  de  la  main 
sur  r^paule.  Le  monarque ,  qui  se  te- 
nait  dans  ce  moment  la  face  toumee 
vers  la  ligne  de  front  de  la  garde ,  se 
retourna  avec  promptitude ,  et ,  aper- 
cevant  cet  homme  devant  lui «  il  re- 
cula  d'abord  de  surprise,  et  lui  de- 
manda  ensuite  d'un  air  d'^tonnement 
ce  qu'il  voulait.  —  J'ai  quelque  chose 
k  te  dire ,  Alexandre  Pavlovitch ,  re- 

gmdit  I'inconnu  en  langue  nisse.  — 
d  bien!  parle done,  r^pliqua  Tempe- 
reur,  en  reorenant  sou  expression  ha- 
bituelle  de  oont^.  II  y  eut  une  lon^ue 
pause;  la  garde  militaire  restait  mi- 
mobile,  et  personne  n'osait,  ni  de  la 


RUSSIE. 


69€ 


veil  ni  dii  gieste,  trouUer  cette  sin* 
goK^  eBtrenifi.  Le  grand-duc  Gons- 
tantin,  seul ,  s'avaii^  un  peu  vers  son 
frare.  Get  horoine  raoonta  alors  qu'il 
avait  M  capitaioe  an  service  de  la  Ra8> 
sie ,  et  sVtait  trouv^  aux  campagnes 
de  Pnisse  et  d'ltaJie;  mats  qu'il  avait 
^  pers6cttt^  ^r  sod  chef,  et  telle- 
meot  calomnie  aupr^  de  Souvorof 
qu'il  avait  €t^  cha^  de  son  corps, 
sans  amis  et  sans  ressource,  dans  un 
pajs  stranger.  Plus  tard ,  il  avait  servi 
oomme  simple  soldat  dans  Tarro^ 
russe ;  et ,  a^ant  €U  gri^vement  bless^ 
il  Zdneh  (ici  il  toirta  ses  haillons  et 
fit  voir  piusieurs  cicatrices ) ,  il  ^tait 
reste ,  jusqu'^  la  fin  de  la  eampagne, 
dans  one  prison  francaise.  Enfin,  il 
toit  retoum^  a  Saint-mersbourg  en 
mendiant  sur  les  routes ,  avec  le  des* 
sein  de  s'adresser  k  I'eropereur  hii- 
mime  poor  obtenir  justice,  et  de  lui  de- 
mander  qu'il  ordonndt  une  enqu^te  sur 
les  raisons  qui  I'avaient  fait  degrader. 
L'empereur  Pdcouta  avec  attention, 
et  lui  demanda  eusuite  d'un  ton  s^ 
vere :  I9'y  a-t-il  pas  d'exag^ration  dans 
le  r^cit  que  vous  me  faites. — Que  je  p^ 
risse  sous  le  knout,  dit  Tofflcier,  si 
Ton  trouve  que  j'ai  manqu^  a  la  v^- 
rite  d'un  seul  mot.  L'empereur  fit  alors 
&igne  h  son  Mre,  et  le  chargea  de 
Gooduire  ce  militaire  au  palais ,  en  at- 
(tendaot  qu'il  pdt  lui-meme  s'occuper 
de  cette  affaire.  Le  p^titionnaire  ^tant 
sorti  pur  de  cette  enqu^te ,  il  fut  r6in- 
t^^  dans  son  grade,  et  re^t  en 
outre  une  gratification. 

Quand  il  annonca  au  g^n^ral  Rou- 
tottsof  son  616vation  au  rang  de  prince 
de  Smolensk,  en  r^mpense  de  ses 
services  dans  la  campape  de  1813,  il 
jo^oit  h  sa  lettre  un  jovau  de  grand 
prix  qui  avait  fait  partie  des  ornements 
de  la  oouronne  imp^iale,  comme bom- 
mage  h  la  valeur  d'un  homme  par  le- 
Sef  cette  couronne  avait  6U  si  habi- 
nent  d^fendue.  II  fit  remplaoer  le 
joyau  imperial  par  une  plaque  en  or 
sur  laquelle  ^ait  inscrit  le  nom  de 
Routousof. 

Le  grand  cbambellan  Narychkin ,  qui 
avait  plus  d'un  titre  h  la  faveur  de  son 
maftre,  avait  re^u  de  lui  une  etoile 


de  I'ordre  de  Saint-Andr^ ,  nnnMt  en 
diamants,  et  ^vahi^e  k  trente  milie 
roubles.  Ce  seigneur,  connu  par  I'a- 
propoa  de  ses  repliques ,  et  plus  encore 
par  le  d^sordre  faabituel  de  sa  eon* 
duite,  mit  T^ile  en  gage.  Peu  de 
temps  apr^ ,  la  cour  donna  une  grande 
f(Ste.  Le  cbambellan  toit  dans  une  ex- 
treme perplexity.  II  ne  trouva  d'autre 
expedient,  pour  se  tirer  d'embarras, 
oue  de  s'adresser  au  valet  de  cbambre 
de  I'empereur,  qui  avait  entre  ses 
mains  deux  6toiles  du  mime  module, 
mais  plus  riches ,  et  dont  I'une ,  encore 
neuve ,  codtait  soixante  mille  roubles. 
On  n'a  rien  a  r^ser  k  I'^poux  d'une 
favorite;  le  valet  de  chambre,  apr^ 
quelque  b^itation,  pr^ta  I'^toile,  et 
M.  Narychkin  parut  h  la  cour  avec  la 
decoration  emprunt^.  Alexandre ,  soit 
que  ie  valet  de  chambre  edt  tout  avon^ , 
soit  que  la  beauts  des  pierreries  lui 
edt  donn^  qoelques  soup^ns ,  arr^ 
piusieurs  fois  ses  regards  sur  cette 
etoile ,  et  dit  enfin  a  M.  Narycbkin : 
«Mon  cousin,  Je  suis  etonn^;  vous 
portez  1^  une  etoile  qui  a  infiniment 
de  ressemblance  avec  une  que  je  viens 
de  recevoir  des  mains  du  joaillier. » 
Pour  la  premiere  fois  peut-Stre  I'es- 
pritde  M.  Narychkin  se  trouva  en 
d^aut.  L'empereur,  que  cet  embarras 
rendaitplus  attentif  encore,  finit  par 
lui  dire  tres-sdchement :  «  Mon  cou- 
sin ,  il  faut  que  je  vous  dise  toute  ma 
pens6e ;  je  crois  que  cette  etoile  est 
la  mienne;  la  ressemblance  est  par 
trop  frappante. » II  ne  restait  plus  qu'a 
faire  un  aveu  p^nible ;  le  cbambellan , 
en  confessant  la  v^rit^ ,  se  boma  k  de- 
mander  la  grdea^  valet  de  chambre. 
LVmpereur,')^p§nne  par  cet  aveu, 
se  contenta  def  lui  dire :  «  Rassurez- 
vous,  mon  cousin,  le  d^it  n'est  pas 
assez  grand  pour  que  je  ne  puisse  le 

Sardonner;  cependant  je  ne  [x>urrai 
formats  porter  cette  d^oration ;  il 
faut  done  que  je  vous  en  fasse  cadeau , 
h  condition  qira  I'avenir  je  sois  en  sd* 
rete  contre  de  pareilles  appropria- 
tions. » 

£n  1802,  lors  du  passage  de  l'em- 
pereur, la  noblesse  de  Livonie  donna 
une  f^te  brillante,  a  laquelle,  selon 


LUKIVKilS. 


Tufii^e,  Ifls  boturgeoit  ne  purent  Itre 
adoMfi.  AJenndre  a'y  pavut  {hs,  «t 
doana  le  leDdeantn  un  In]  ^  la  villt 
de  Biaaf  ou  il  dansa  iadistinctemeol 
afiee  m  damBi  aobles  «t  des  licmr* 
geoiaes. 

Pendant  la  voyage  de  IIMM,  prte 
Dorpat ,  iin  postiOoa  toarite  de  ehefai , 
et  la  Yoitore  4e  I'emperear  fan  paasa 
sor  ie  pied.  Alexandre  fit  arrtor,  at- 
tendit  one  faeure  ct  demie ,  iusqu'^  ce 

Su'on  edt  fait  venir  son  cnirurgien, 
onna  cnsnite  son  moacboir  pour  sei> 
▼ir  de  lieature,  et  fit  aa  Ineaa^  un 
present  de  oinq  cents  roubles.  Le  sei* 
eneur  dn  paysan ,  ie  oointe  ieelstrom , 
lui  aocorda  sa  liberty.  Un  inaiTidn  lui 
offrit  cent  roubles  pour  le  mouchoir ; 
maia  l*affranciii  dont  la  Kbert^  avait 
sutntement  ^v^  les  id^es,  dMara 
qu'il  ne  s'^n  s^parerait  pour  aucun 
prix. 

Lors  du  voyage  que  fit  madame  de 
Stael  h  Saint*Petersboure,  elle  fut  pr6- 
sentte  h  Alexandre  mA  la  re^t  avec 
toute  la  distinction  due  h  ses  talents. 
«  Voa  yeux ,  (fit  le  monarqne ,  se  trou- 
▼eront  id  Uess^  de  la  servitude  des 
paysans;  Fai  fait  tout  ce  qui  m*etait 
permis;  fai  donn6  la  lioert^  aux 
paysans  4e  flies  domaines;  mais  ie 
8UIS  dblig^  de  respecter  les  droits  it 
la  noblesse,  comme  si  nous  avions 
nne  constitution  qui  malheoreusement 
nous  manmie. »  —  Sire,  r^ndit  ma- 
dame de  stael ,  Totre  caractere  est  nne 
constitution.— En  cecas,reprit  Alexan- 
dre, le  ne  suisqn^un  heureux  accident. 

Sa  bienveillance  naturelle  n'^it  pas 
exempte  d'une  finesse  dont  le  succes 
^taft  d'autant  lAns  sCat  qu*elle  se  ca- 
chaft  sous  les  formes  les  phis  aimables 
et  les  phis  attrayantes.  Un  jour,  on 
ini  t6moignait  la  cratnte  que  les  bois 
communaux ,  vendns  par  OTdre  de  If  a- 
pol^n,  ne  fusseot  repris  aux  acqu6* 
reurs.  L'empereur,  aj;nres  !f  toerecueilli 
un  moment,  s'expnma  k  peu  pr^  en 
oes  termes: 

«  Qu'ils  ne  craignent  pas  plus  pour 
toute  espece  de  domaines  d'Etat  qu'ils 
auront  achet^s  que  pK>ur  les  biens 
ro^mes  .dont  its  auraient  h^rit^  de 
leurs  p^es.  La  seule  bonne  foi  des  ac- 


ffrirmn  serait  one  barritee  sufil- 
saate ,  quaad  mime  on  n'en  aarait  pas 
d'autret. 

«Cenx  qaf  vous  goavemeront  ne 
toadheroat  jamais  k  oes  biens.  Et  puis 
ne  troBveroBt*ils  pas  toujours  atec  le 
temps  de  boas  moyens  d'indemniser 
pea  II  peu,  subant  toiit^  et  raison, 
les  eonnnonaut^s  ou  les  patrticaliers 
qal  ont  de  joates  droits  k  r^clamer? 

« Imaginez  -  vous  bien  que  nous  ne 
venons  rien  d^foire  chez  vous*,  que 
nous  n'en  voulons  ni  h  la  France  ni 
k  ancune  olasse  de  Ftancais ,  ni  i  aa- 
cun  Francis.  Tious  n'attaquons  et  ne 
poorsaivons  que  rotre  empereur ;  noas 
n*«n  Toulons  qu'ii  kn. 

«  Si  vous  soafirez  de  notre  presence , 
quand  nous  prenons  tant  de  precau- 
tions, songez  un  peu  di  ce  que  nos 
peuples  ont  dd  soafnrir  de  vos  troupes. 
Je  sals  tr^s-bien  que  tons  les  soldats 
ne  sont  pas  aussi  r6serv6s  que  leurs 
che£i ,  malgr^  les  plus  s^^res  exem- 
pies  de  disdpltne.  Mais  ce  que  noos 
ne  iKHivons  emp#cher  est  une  suite 
inevitable  de  la  ^erre. 

« II  y  avait  si  longtemps  qu^on  ne 
Favait  vue  dans  vos  contrfes!  (Test 
ce  qui  vous  la  fait  trouver  encore  plus 
afmuse.  Au  reste,  je  sais  comDien 
sont  k  plaindre  surtout  les  habitants 
de  oette  vail6e  (il  6tait  k  Bar-sur-Aube) , 
qui  est  devenue  le  pivot  de  nos  mou- 
vements. 

«  Dn  moins,  je  puis  r^ndredela 
conduite  de  raes  Rnsses.  Les  pr^ten- 
dus  barbares  du  Iford  sont  disaplin^- 
lis  n'ont  pas  ^6  gdt6s  en  faisant  la 
guerre  k  l*ecole  de  Napol6on. 

ft  Que  de  mal  cet  nomme  nous  a 
fait !  II  vous  parlait  sans  cesse  du  g^ie 
dn  mal;  c'est  lui  qui  T^tait...  Quede 
calamity  n^a-t-il  pas  attir6es  sur 
vous!...  Mais  j'espdre  que  de  tous  vos 
malfoeurs  aucun  nepourra  jamais  nous 
dtre  impute. 

«  J'aime  les  Franqals ,  je  les  aime 
d'mclination.  Je  me  plnis  m6me  k  peib 
ser  qn'aucun  Fran^ais  n'est  renoemi 
ni  de  moi  ni  de  mon  peuple ,  corome 
la  Russie  est  necessairement  de  la 
France  ralli6e  la  plus  naturelle  et  la 
plus  sdre. 


RUfi6iB. 


ar 


«11  n'y  a  parmi  les  Fraa^ais  qua 
tar  cmpereur  qoi  s^eat  £iit  moA  ea" 


«  VoQs  ne  croiriez  pas  qae  je  i'ai 
aiaa^?.^  Cast  pourtant  vrai!...  De* 
anadez  h  Tolstoi.  Ja  la  croyaia  tout 
homteiir,  tandia  qa'il  o'^tait  qo^orgaail 
et  perfidie. 

«II  m'avait  sMvit,  nsprhs  taut  da 
aaooes,  avee  aea  protestatioBa  et  sea 
diacouTs  k  TUsitt  et  k  Erfort.  TolaM 
^tait  «acfaaDt6  et  tout  glorieux  du 
grand  rubaa  de  son  ofdre.  Mes  n- 
aislrea  m'ont  aomiGent  enteodu  dire : 
Voil^  on  souverainl  son  aHiaaoe  ne 
peiit  qae  m'toe  honorable  autant 
qu'otile. 

«  Oambien  ae  m*a<t-il  pas  t^p^ 
qu'il  ae  pourait  iamats  eatrer  ni  aaas 
aea  iatmts  ni  dana  son  ooear  d'etre 
une  imaute  en  gaerrea  vec  moi !  Conune 
il  mil  tromp^!  Mais  la  divine  Provi* 
denoe  m^a  seooonk 

«  Je  ne  aais  yraiment  pas  bien  -en- 
core aujocnnflnii  pour  quel  motif  il 
m'a  fait  la  gnerre.  S'il  est  yenu  m*at- 
taquer  aniquement  pour  tirer  une  Ten- 
geanee  ^Qlataate  d'un  ancien  refos  de 
nairiage,  •oomme  en  Fa  dit,  <fdtaiit 
one  kwigae  folte*  Si  c'«st  a  oauae  d(» 
Annals ,  oh!  je  ne  lui  ^tais  pent-  dtre 
qoe  trop  ffttorable  Iti^dessus. 

«  ie  n^aimais  neat-dtre  ^dre  plos 
lea  Anglais  qn'il  ne  les  ainaait  lui- 
isAne*..  Pourtant  jene  poisdnoonye- 
idr  que  leurs  relictions  ne  soient  utiles 
limes  peoples... 

«I1  ^it  si  facile  que  la  France, 
dans  sa  position ,  amenftt  insensible- 
ment  lea  Anglais ,  en  entrant  d'abord 
dans  toates  leurs  tues  mercantiles ,  h 
n^ftreplnsun  jour  que  les  conducteun , 
courtiers  et  entrepreneurs  de  sonoom- 
meive  maritime! 

«L^Europe  y  aurait  gagn6...  I^ 
mauvane  politique  de  votre  empereur 
a  tout  perdu...  Son  insatiable  et  or- 
gueilleuae  ambition  Ta  perdu  lui* 
m^me...  An  passage  du  Kidmen,  je 
hii  fis  encore  fatre  des  propositions 
pour  arriSter  la  guerre.  Je  consentais  k 
tout,  n  dit  It  Tolstoi :  Cest  un  verre 
plein,  Ufaut  le  vider!  Eh  bien!  H 
ravid^jusqa'lilalie. 


«  Au  Baste,  s'il  veut«  aes  affaires 
ne  sent  pas  encore  entidreroent  d^s^- 
n^te.  On  vieot  de  lui  faire  d'aaaee 
bonnes  conditions.  S*il  ▼  aegaiesce, 
vous  seres  bientdt  ddMntia^s  de 
nous.  Je  suis  de  bonne  foi ,  nuas  je 
crains  bien  qu*avec  eat  Iiommo4a  tout 
eela  ne  tienne  pas  kmgtaaips.  6*il  r»- 
luse,  ohl  akrs,  e'en  eat  £iit;  nous 
marchons  aur  Paris ,  et  nous  ie  detrd- 
nons.  Cest  une  afEure  ariangte.  Et 
miels  que  soient  ses  demiers  efforts, 
U  faudra  ioojours  qu'il  suoeomhe, 
ddt-il  rtosir  h  knar  une  nonveUe 
grande  armde.  L'Eurape  a  encore,  aa 
moment  ouje  vousparle^plusdequatre 
cent  mille  combattants  en  France;  aix 
oent  mille  lunmnes  sont  pv^ts  k  leur 
socedder,  et  nous  en  l^erons  le  doable 
s'il  le  isat. » 

Gertes,  en  ae  reix>rtaBt>aux  enrcons- 
tanoes  au  milien  oesquelles  eette  con- 
versation fat  tenue,  on  ne  pent  qa*ad- 
miver  toute  la  finesse  du  prince  dont 
Napoleon  a  dit  dupuis  ^ue  e'>^tait  aa 
Grec  du  Bas-Empire. 

«  Un  peu  plus  tard ,  dit  Rabbe,  aa- 
qod  nous  emtyrnntons,  en  les  abr6- 
geant ,  une  partiede  ces  d^ila  aaeodo- 
tiques ,  les  a\\v^  ayant  essuy^  pluaieura 
revers,  il  fut  question  de  repasser  le 
Rbfn.  Le  priooe  de  Schwmtaembei^ 
insistait  sur  I'atilit^  de  cette  retraile. 
U  d^ira^  qu'on  se  bomdt  k  ooeaper 
la  rive  drofte  de  oe  fleuve ,  et  a  laisser 
la  France  s'user  encore  elle-flA^me 
pendant  quelque  temps  par  faction 
des  divers  partis.  II  voyalt  Napoleon 
phis  fort  et  mieux  soutenn  qwon  ne 
I'avait  nens^.  II  craignait  que  les  ar- 
m^  alli^es,  qu*il  trouva^d^jd  singu- 
li^ment  affaiblies,  ne  renoentrasaent 
k  chaque  pas  quelque  nonveau  danger, 
et  ne  finisaent  per  s'epuiser  entiere- 
ment  en  Prance ,  comme  svaient  ftiit 
les  arm^  fran^ises  en  Espagne. 

«  Ce  fut  I'empereur  Alexandre  qvi 
s'y  opposa.  fl  repr^sentait  qu'on  ne 
connaissait  gu^  encore  I'ennemi  au- 
quel  on  avait  affaire;  que  les  alliA 
perdraient  k  jamais  tons  leurs  avan<> 
ta^  en  se  retirant;  que  la  France, 
visiMenent  6pnis6e  par  taut  d'efforts , 
abandonnait  napoleon  et  mettait  en 


528 


L'UNIVEKS. 


eux  tout  SOD  espoir  de  salut;  mais 
qu*eo  pen  de  mois,  elle  pouvait  rede- 
venir ,  dans  les  mains  d'un  td  homme , 
an  instrument  invincible. 

«  L'empereur  voulut  done  qu'on  re- 
doublet  aefiforts,  qu'on  mtt  en  mou- 
vement  toutes  les  rtonres,  et  qu'on 
r^ldt  de  nouvelles  levto;  enfin,  qu'on 
ne  laissdt  ancun  repos  aux  troupes  al- 
lito^  aucun  relAche  k  i'ennemi  avant 
d'avoir  atteint  Paris.  «  Ce  n'est  pas  k 
Ja  France ,  continue-t-ii,  que  nous  fai- 
sons  la  guerre,  c'est  k  Bonaparte.  £f- 
for^ns-nous  done  de  lui  6ter  prompte- 
ment  [&  France  qui  lui  ^appe.  Passons 
la  Seine  a  Paris ;  voila  notre  Rhin :  et 
tout  sera  termini. » 

Dans  I'audience  qu'il  donna,  le  2  avril, 
au  s^nat ,  il  adressa  a  ce  oorp^  i'allocu- 
tion  suivante :  «  Un  homme  qui  se  di- 
sait  mon  alli^,  est  entr^  dans  mes 
£tats  comme  un  injuste  agresseur; 
c'est  &  lui  que  j'ai  fait  la  guerre,  et 
non  pas  k  la  France ;  je  suis  I'ami  du 
peuple  fran9ais...  II  est  juste,  il  e^t 
safe  de  donner  k  la  France  des  insti- 
tutions fortes  et  lib^rales  qui  soient 
conformes  k  ee  siecle  Claire ;  mes  al- 
lies, tout  comme  moi ,  ne  sont  venus 
que  pour  prot^er  la  liberty  de  vos  d^ 
cisions. »  • 

L'empereur  s'arrSta  alors  un  mo- 
ment ,  et  reprit  avec  Amotion :  «  En 
t^moi^age  de  Talliance  durable  que 
je  desire  contracter  avec  votre  nation, 
je  lui  rends  tous  les  prisonniers  fran- 
^ais  qui  sont  actuellement  en  Russie. 
Le  gouvernement  provisoire  m'a  de- 
mand^ cette  faveur.  Je  Taccorde  au 
s^nat  en  cons^ence  des  r^lutions 
qu'il  a  prises  a^ujourd'hui.  » 

Pendant  son  &6jour  k  Paris,  Alexan- 
dre visita  dans  le  plus  grand  detail  les 
^tablissements  puolics,  les  manufac- 
tures et  les  fabriques  les  plus  c^l^res. 
II  consacra  plusieurs  beures  a  la  visite 
de  la  typographic  de  Didot,  inventeur 
du  prdc6de  s&reotypique. 

II  accueillait  les  corps  savants  avec 
une  bienveillanoe  qui  lui  ^tait  propre; 
etsa  conversation  prouyait  (]u'il  n'etait 
pas  Stranger  a  ce  que  les  sciences  et  les 
lettres  produisaient  de  remarquable. 

II  r^pondit  k  M.  Lacretelle  qui  lui 


fut  pr^senti  k  la  tite  d'une  ddputation 
de  rlnstitut  de  France : «  J'ai  toujoun 
admir^  les  progres  que  les  Francais  ont 
faits  dans  les  sciences  et  la  Utt^rature. 
lis  ont  beaucoup  oontribu^  k  r^pandre 
les  connaissaiices  en  Europe.  Je  ne  leur 
impute  pas  les  malheurs  ae  leur  pays, 
et  je  prends  un  vif  int^rSt  au  r^tablis- 
sementde  leur  liberty  Mon  but  unique 
est  d'etre  utile  k  la  ]ibert6,  et  c'est  le 
seul  motif  qui  m'a  conduit  en  France.  • 

Dans  une  visite  qu'il  fit  k  I'bdtel  des 
monnaies,  et  particuli^ment  a  celle 
des  m^ailles ,  il  examina  avec  int^rlt 
les  dififerentes  collections.  Entre  autres 
m^ailles  aui  furent  frapp^  en  sa  pre- 
sence ,  on  lui  en  pr6senta  une  andenne 
qui  avait  6t^  grav^  k  I'oocasion  du 
voyage  de  Pierre  le  Grand  en  Fiance. 
Le  directeur  offrit  aussi  k  rempereor 
une  m^aille  qui  portait  d'un  o6t^  Tef- 
figie  de  Pierre  le  Grand,  et  de  I'autre 
celle  d*AIexandre.  C'^tait  associer  dans 
un  m^me  bommage  deux  circonstances 
bien  dififerentes ;  mais  les  arts  qui  ne 
vivent  que  de  faveur  et  de  luxe^  ont 
touiours  ^t^  courtisans. 

De  m^me  que  Pierre  P'  avait  ,voulu 
voir  madame  de  Maintenon ,  survivant 
k  la  splendeur  du  grand  si^le,  Alexan- 
dre s'empressa  de  visiter  Jos6pbine, 
cette  femme  qui  8'6tait  r^ignee  a  ia 
plus  sensible  des  disgraces ,  mais  qui 
se  trouva  faible  et  inconsolable  devant 
les  revers  de  Thomme  qu'elle  n'avait 

Sas  cess^d'aimer.PIusieursfois  Alexan- 
re  s'etait  rendu  chez  elle ,  a  la  Mai- 
maison.  Inform^  qu'elle  etait  k  toute 
extr^mit^,  il  arriva  cbez  die  ^I'instant 
ou  le  prince  Eugene  et  la  reine  Hor- 
tense  recevaient  k  genoux  la  hea^ic- 
tion  maternelle.  II  assista  avec  un  re- 
cueiUement  douloureux  k  eette  scene 
pleine  d'enseignements ;  et,  lorsque 
rimp^ratrice^taitd^jadans  le  cercueil, 
il  s'approcha  du  corps ,  souleva  le  lin- 
ceul ,  et ,  dans  unederniere  allocution , 
il  exprima  d'une  mani^  aussi  simple 
que  touchante  son  estioie  et  ses  regrets. 
Tel  fut  Alexandre,  daos  les  diffe- 
rentes  phases  de  sa  vie  politique  et  pri- 
v^e;  toujours  bumain  et  bienveillant, 
quand  le  souverain    faisait    place  k 
1  homme;  mais  fondant,  pour  ainsi 


a    >  •   » 
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RUSSIE. 


62« 


dire,  tootes  ses  vertus  avec  ies  vues 
les  dJos  deliees,  quand  Ies  drconstan- 
oes  le  rappdaieot  aoz  exigences  de  sa 
liaute  position.  Les  qualit&dece  prince 
furent  Fceufre  de  la  nature;  sa  gran- 
deur, oelle  de  k  fortune. 

NICOLAS    I*'. 

(1825.)  Plus  rbistorien  se  rapproche 
des  fails  contemporains,  plus  sa  tdche 
derient  difficile.  Quand  son  regard  in^ 
terroge  Ies  ^poques  lointaines ,  quand 
son  jugement  ne  s'exerce  que  sur  des 
dioses  oonsonun^s ,  il  a ,  pour  se  gui« 
der,  toute  Texp^rience  de  cenx  qui 
I  ont  pree^d^ ;  les  documents  qu'il  oon^ 
suite  se  depouillent  graduellement  et , 
poor  aiosi  dire,  par  ordre  de  dates, 
de  la  passion  ou  des  pr^jug^  qui  se 
mdient  aux  sources  premieres ;  il  pent 
mieux  choisir,  et  ses  erreurs  memes 
oot  moins  de  port^ ,  car  elles  soul^- 
vent  tout  ail  plus  queiques  questions 
de  oritiqae  d'un  int^r^t  purement  litt^- 
nire:  an  contraire,  torsqu'il  essaie 
de  mettre  sons  les  yeux  des  homnu^ 
leoipropre  histoire;  lorsque,  de  Tasile 
^tdela  Tie  priv^,  il  porte  ses  in- 
vestigations sur  la  marcne  politique 
des  CTteements  du  jour ,  et  qu*a  chaque 
^H  itooontre  des  acteurs  des  scenes 
gull  dtoit ,  il  lui  fiaut  faire  la  part  des 
int^rlts,  et  rester  en  ddfiance  devant 
les  ioterpr^tions  les  plus  formelles , 
resamer  oonsdencieusenient  toutes 
ces  Toix  diverses  pour  d^mller  le  vrai , 
ou,  du  moins ,  le  probable  dont  le  plus 
sonvent  Thistoire  se  contente. 

En  effet ,  il  arrive  que  cenx  qui  ont 
ni  de  pr6s  les  6v^nements,  ne  les  con- 
siderant  que  du  point  oii  ils  toient 
places,  sont  inhabiles  k  les  coniprendre 
dans  leur  ensemble;  r^erivain,  dont 
laseule  mission  est  de  raconter,  doit 
les  examiner  a  loisir  sous  toutes  leurs 
faces  oonnues ;  et ,  s'il  s'est  montr^  ju- 
dicieox ,  les  renseignements  dont  il  dis- 
pose lui  permettent ,  sinon  de  pr6sen- 
ter  un  tableau  achev^ ,  du  moms  d'en 
esqoisaer  les  figures  principales. 

Cest  dans  cette  position  que  nous 
nous  trooYOos;  U  s'agit  de  d^rouler  les 
^rtmitrts  annto  d*uh  r^oe  qoi  dure 

34*  Uoraiion.  (Russib.)  t.  ii. 


encore ,  et  de  lier,  enquelque  sorte ,  le 
pr^ent  a  Tavenir ;  ici,  de  bautesoonve* 
nances  viennent  en^aver  ies  interpr^ 
tations  historiques;  favorables  au  nio- 
narque ,  elles  prendraient  le  caract^re 
de  la  flatterie;  severes  ou  accusatrices, 
elles  parattraient  s^adresser  h,  des  sym- 
patbies  d*un  autre  ordre ,  car  I'infor- 
tune  a  aussi  ses  flatteurs  intdresses ; 
ainsi,  rbistorien ,  qui  se  borne  au  sim- 
ple r^it  des  faits ,  reste  ordinairement 
au-dessous  de  Tattente  g^n^ale ;  et,  si 
ses  efforts  m^ritent  quelque  estime ,  ce 
n*est  qu'aupres  d'un  petit  nombre  de 
juges,  independants ,  par  position  et 
par  caract^re,  rie  toute  i  nfluence  comme 
de  tout  prejug^. 

Nous  entrerons  dans  queiques  details 
sur  la  conspiration  qui  ^lata  lorsque 
Nicolas  monta  sur  le  tr6ne ,  parce  que 
cette*s^ition  eut  un  caractere  parti- 
culier  qui  la  distingue  des  conspi- 
rations de  palais,  et  que  le  but  de 
ses  chefs  rait  une  rmrme  dans  les 
institutions  et  le  gouvemement.  Nous 
ne  pr^tendons  pas.  que  Tambition ,  qui 
souvent  mi^ne  Fhomme  k  son  insu ,  fitt 
6trangere  au  mouTement  du  14  (36) 
d^embre;  mais,  pour  qu'un  grand 
nombre  de  jeunes  gens  appartenant  a 
la  premise  noblesse  de  FeiDpire,  aient 
consid^re  ces  changements  oomme  n^- 
cessaires ,  il  faut  que  les  abus  qui  nais- 
sent  du  despotisme  aient  M  bien  vi- 
vement  sentis.  L'erreur  des  conjur^ 
tintsurtout  ^ceou'llscrurent  possible 
et  m£me  facile  d'int^resser  les  masses 
A  la  r^ussitede  leurs  plans  sp^ulatifs; 
r^v^nement  leur  prouva  qu'un  peuple 
esclave  nes'arme  point  pourconqu^ir 
des  droits  qu'il  ignore ;  on  va  voir  que, 
s'ils  obtinrent  la  cooperation  de  quei- 
ques soldats,  ce  ne  fut  qu'en  leur  per* 
suadant  qu'ils  defendaient  oontre  Ni- 
colas les  droits  de  Ck>nstantin ,  c'est- 
li-dire  la  forme  l^itime  de  11i6redit6 
an  trdne. 

Nous  avons  d^ja  dit  qWk  leur  retour 
de  r^tran^er,  en  1818, 1814  et  1815, 
auelques  jeunes  gens  con^irent  Tid^ 
a*organiser  en  Russie  des  society  se- 
cretes. En  1817,  ces  projets  prirent 
plus  de  oonsistance.  Les  statuts  de 
vUnUm  du  ndut  ou  des  vrtdt  etjid^let 

10 


sso 


UUniVBRS. 


enfanU  de  Id  patrie,  fwent  rMI^^ 
par  le  colonel  Pestel.  Gette  sooiM 
comprenait  trois  classes  :  les  frdrcs, 
les  hommes  et  les  iioyards.  Tous  a'cu- 
gageaient  par  semoent  k  se  soumettro 
aiix  dMsions  du  consefl  saprlme  dei 
boyards.  1Mb  Torigine ,  le  bot  de  oette 
associathm  ftit  le  cbangement  des  ins- 
titutioDS  existantes  dans  Tempire* 
(GooiBBission  d'enou^te.)  A  la  m^ine 
ipoque,  le  general  MIcnel  Oriof,  le 
comte  MamoDof ,  et  le  conieilier  d'£tat 
aoUicI  Touvu^nief ,  s'occupatent  de  la 
forotttion  (rune  autre  soct^t^  qui  de* 
Tait  porter  le  titre  de  SoeUH  des  ehe^ 
Miners  russei.  Le  bot  de  cette  asso- 
ciation edt  ^t^  de  mettre  un  terme  aux 
ooncussions  et  autres  abus  qui  s'^taient 
gliss^  dans  radministration  int^rieure 
de  rempire.  Gette  mission  renfermait 
virtuellement  la  r^forme  des  institu- 
tions dles-Bitees.  Toutefois,  la  so- 
ciety dte  cheraliors  nisses  fut  bientdt 
dissoute;  VUnUm  ponrsuiyit  son  or- 
ganisation, et  changea  blent^t  son 
BOin  en  oelui  d*  Union  du  bienpubUe, 
Le  r^lemeot  subit  plusieurs  modiO- 
cations*  Les  auteurs  de  ce  r^ement 
d^larent,  au  nom  des  fondateurs  de 
rassociation,  que  le  bien  de  la  patrie 
est  leur  seui  but,  que  oe  but  ne  sau- 
rait  tee  oontraire  aux  vues  du  gou* 
TemeoMnt,  et  que  les  travaux  ne  se*- 
raknt  poursuiTis  ea  secret  que  pour 
les  soustraire  aux  interpretations  de 
la  maiveiUanoa  et  de  ki  baine.  Lea 
meoibres  ^talent  divis^s  en  quatre  see* 
tions.  Chaoun  d'eux  devait  s'inserire 
dens  line  des  sections. 

La  premi^  avait  pour  obiet  la  phi- 
lantropie  ou  les  progres  de  la  bienfei* 
sanoe  publique  et  |viv^«  Bile  devait 
sunreiiler  tous  les  etaUissemeots  de 
cbarite, et  signaler  aux  directions  de 
ees  etablissements ,  ainsi  qu*ad  gou* 
Yemement  lui-^m^oM,  les  abus  qui 
pourraient  8*y  introduire,  etlesmoyens 
d*y  remMier. 

L*objet  de  la  seoonde  section  6tait 
FMucation  intellectuelle  et  morale,  la 
propagation  des  lumiires^  retablisse*^ 
ttient  a*6eoles  a  la  Lancaster,  et,  en 
gte^ral ,  une  utile  cooperation  i  Tins- 
irutition  de  la  jeunesae,  par  des  cxeoi- 


fries  de  bonnes  mceurs,  par  des  entre* 
tieus  et  par  des  torits  eonformes  h 
ees  Tues ,  ainsi  <(u'ao  but  de  la  sod^t^, 
lequel  6talt  politique.  Aux  roembres 
de  cette  seoonde  section  Unt  coD(Me 
la  surveillance  de  toutes  les  toles. 
lis  deraient  inspirer  k  la  jeunesse 
ramour  de  tout  ce  qui  est  national ,  et 
s'opposer  autant  que  possible  h  ce 
qu'on  la  ftt  Clever  hors  du  pays« 

La  troisieme  section  surreillait  Is 
marohe  des  tribunaux.  Ses  membni 
s'engageaient  k  ne  point  se  reAiser  aus 
fonctions  judiciaires  qui  pourraient 
leur  Mre  conler6es  pair  les  ^iectioDs 
de  la  noblesse  ou  par  le  gouvenie- 
ment;  k  encoorager  les  employ^  in- 
t^res,  ii  leur  aocorder  m^me  des  se- 
cours  p^uniaires;  a  raffermir  dans 
les  bons  principes  oeux  qui  trahiraient 
quelque  raiblesse ;  k  6dairer  oeox  qui 
manqueraient  de  comiaissancs ;  k  sir 
^aler  les  employ^  pr^varicateurs ,  et 
a  instruire  le  gouvemement  de  leur 
eonduite. 

Enfin,  les  membres  de  la  quatri^e 
section  devaient  s*oocuper  de  coordon* 
ner  les  ddments  pr^par^  par  les  trois 
autres ,  et  se  vouer  a  Tcconomie  poli- 
tique< 

L'activite  de  Tassociation  r6sidait 
dans  Tuniott  oentrale  qui  se  eompo- 
sait  des  plus  anciens  fondateurs; 
son  principal  objet  6taitde  multiplier 
le  nombre  des  aSffili^,  surtout  a  Pe* 
tersbourg,  oik  se  trouvait  la  majeure 
partie  de  la  direction  centrale,  (Tui 
exeicait  le  pouvotr  k^islatif ,  tandis 
que  le  pouvoir  ex^cutif  ^tait  confix  au 
conseil  central. 

Les  membres  influents  de  lUnion 
furent  kmgtemps  avaot  de  pouvoir 
s^acoorder  aur  la  forme  de  gouveme- 
ment qu^il  conviendrait  de  donner  k 
I'empire;  cependant  les  id^  rcpubli- 
eaines  triomph^rent;  ce  qui  se  oon^oii 
facilement  dana  one  reforme  essay^ 
en  haine  du  ponvdr  al»olu«  La  n^ 
oessite  de  mettre  d  mort  Tempereur 
Alexandre  fiit  reoonnue  par  plusieurs; 
et ,  s*il  faut  en  croire  la  depositioa  de 
Serge  Mouravief,  oette  proposition 
extreme  fut  adopts  en  stance  k  Is 
plurality  dee  voix. 


RUS6i£. 


sai 


Leremords ,  Th^itation ,  la  cramte , 
» tarderent  pas  a  se  manifester  dans 
une  rduaion  si  Dombreuse;  les  uns 
exjgeaient  des  inodiOcations  aux  sta- 
tute ;d*aftit  res  soulevaient  des  difficult 
tes  pour  se  manager  la  iaculte  de  rom- 
fre  des  engagements  p^Ueux.  Pour 
ecarter  les  membres  douteux,  oo 
^gnit  d'abandoDoer  tous  ces  projets , 
et  Tod  declara  (|ue  rUnion  mit  dis* 
note.  Les  afOiiations  continuerent 
dios  le  midi  par  les  soins  de  Pestel ; 
mais  la  sodm  de  P^tersbourg  ne  par- 
viot  a  se  rforganiser  que  vers  la  On 
de  1822.  Elle  se  partagea  en  croyatUs 
et  €0  adhirenU  ^  les  premiers ,  qui  fop- 
majent  ia  section  svperieurCf  avaient , 
entreautres  prerogatives,  celle  d'^lire 
les  membres  du  Directoire,  d'autori- 
<er  Selection  de  nouveaux  membres , 
€t  de  se  faiire  rendre  compte  des  op6- 
rations  du  directoire.  Les  membres 
Doufellement  admis  ^aient  soumis  h 
diff^^eates  ^preuves,  comme  dans  les 
loges  ma^oxiiques,  et  passaient  par 
pkineors  degr&  d'initiatioD.  Vers  la 
imde  1823,  les  croyants  adjoignirent 
a  Moiiravief ,  leur  president ,  le  prince 
Ser^  Tioobetzkoi  et  le  prince  Eu- 
gene OU^mski.  Vn  an  apr^,  Trou- 
Betzkol  se  rendit  ^  Kief,  pour  sur- 
veiUerla  eoodaite  de  Pestel ,  dont  on 
a^ffmtioi  Yues  ambitieuses ,  et  pour 
in«t&e  en  rapport  la  soci^t^  du  riord 
it  celle  da  Sua.  Les  membres  les  plus 
influents  da  directoire  de  Toulczyn 
etaieat  Pestel  et  Jouscbnevski ;  deux 
antres  comit^  ^talent  sutx)rdonnes  h 
ce  directoire ,  savoir :  celui  de  Ka- 
menka,  prteid6  par  Davydof  et  par  le 
prioce  Scarge  Volkonski ,  et  oelui  de 
Vassilkof ,  sous  les  ordres  du  colonel 
Serge  MouraTidT-Apostol  et  du  sous- 
lieutenant  Beatoujef.  Leur  but  ^taitde 
parreoir  i  renverser  le  gouvernement 
par  la  r^volte  des  soldats ;  ils  recon- 
mmnt,  apres  mAre  discussion,  que 
km  projet  ^tait  inex^table,  si  Ion 
Be  sacrifiait  Tempereur  Alexandre  et 
Urns  les  membres  de  la  famille  imp6- 
rUle. 

U  sod^  du  Sud  s*^tait  mise  en 
'spport,  quelque  temps  auparavant, 
3iec  la  soci^  secrae  de  Pologne, 


dont  le  but  ^tait  de  r^tablir  Tind^. 
pendance  de  ce  royaume  sur  le  pied  oh 
elle  se  trouvait  avant  le  partage.  Les 
conditions  de  cet  arrangement  ne  tar- 
derent pas  k  toe  arr^t^es  par  Bestou- 
ief-Rumin  pour  les  Russes,  etpar 
&.rzyzanoTski  pour  les  Polonais.  Plus 
tard,  ces  relations  entratn^rent  de 
nouvelles  n^ociations ,  et  il  fut  con- 
venu  que  les  pl^nipotentiaires  respec- 
tifs  se  r^uniraient  a  Kief  au  commen- 
cement de  Tann^  1826. 

Cependant  le  comit^  dt  Tassilkof , 
c*est-a-dire  Moaravief  et  Bestoivjef- 
Rumin  pr^paraient  un  soul^vement 
dans  la  0*  division  militaire ,  qui  cam- 
pait  aux  environs  de  la  forteresse  de 
Bobrouisk,  ou  elle  attendait  Tarriv^e 
d'Alexandre  et  du  grand-due  I9icolas. 
A  Taide  de  auelques  conjures  qui  au- 
raient  pris  1  unltorme  des  soldats  du 
regiment  command^  par  Schv^Ikovski , 
ils  devaient  s'emparer  de  la  personne 
de  Tempereur  et  de  celle  de  son  frere , 
soulever  les  troupes  rassembl^es  dans 
le  camp ,  et ,  apr^s  avoir  laiss^  une  gar- 
nison  dans  la  forteresse,  marcher  sur 
Moscou ,  entratnant  a  la  r^volte  et  ral- 
liant  a  eux  les  autres  troupes  canton- 
n^es  sur  la  route.  Cette  tentative,  ou 

{)lut6t  ce  projet,  fut  abandonn^;  mais 
*ann6e  suivante,  1824,  les  conjures 
r^solurent  d*attenter  aux  iours  d*A- 
lexandre  lorsquMI  viendrait  passer  la 
revue  du  troisi^me  corps,  pr^  du 
bourg  deB^laia-Tserkof.  Lorsque  Tern- 
pereur  serait  assassin^.  Serge  Mou- 
ravief-Apostol ,  Schv6ikovski  etTiesen- 
bausen  devaient  soulever  le  camp  et 
marcher  sur  Kief  et  Moscou :  de  Kief, 
Mouravief  se  serait  dirige  sur  Peters- 
bourg  pour  agir  de  concert  avec  ia  so- 
ci6te  du  P^ord;  mais  la  revue  n*eut  pas 
lieu ,  etles  conjur^^s  ajournerent  encore 
leurs  projets  9  dont  iis  remirent  Tex^- 
cution  h  Tannic  1826.  La  soci^t^  du 
Midi  d^couvrit  une  autre  soci^t^  se- 
pr^te,  celle  des  Slaves  riunisy  dont  le 
but  6tait  de  r^unlr  par  un  lien  fed^- 
ratif  et  sous  un  m6me  regime  r^publi- 
cain  les  huit  contrees  slaves  suivantes, 
et  dont  les  noms  ^taient  inscrits  sur 
un  sceau  octogone :  Russle,  Pohgne, 
Bohime,  Moravie,  Dalmatie  (Hon- 

10. 


693 


UUNIVERS. 


fffie 
9avi< 


et  Transtfivanie)^  (Servie,  Mol- 
avie  et  Yalacnie).  La  soci^t^  des  Sla- 
ves r^unis  comptait  environ  trente-six 
membres,  la  plupart  jeunes  ofDciers 
d*artillerie.  Bestoujef  ,membreinflueDt 
de  la  soci^  da  Midi,  leur  repr^enta 

3'  u'il  convenait  d'abord.  de  s'oocujper 
e  la  Russie,  et  parvint  ^  les  r^unir  k 
la  soci6t6  primitive.  La  revue  de  B^- 
laia-Tserkof  fut  I'^pjoque  fixde  uour 
frapper  le  coupd^cisif;  en  attenaant, 
ils  ne  n^gligeaient  rien  poor  mecon- 
tenter  les  soTdats ,  et  pour  leur  inspirer 
le  d^ir  d*un  nouvel  ordre  de  choses. 

II  n*entre  pas  dans  notre  plan  de 
rapporter  tous  les  details  de  cette  cons- 
piration qui  dura  pendant  tant  d*an- 
n6es,  ni  m^me  de  citer  les  noms  de 
ceux  qui  ont  ose  v  prendre  une  part 
active;  notre  objex  est  uniquement  de 
faire  comprendre  que  le  gouvernement 
despotique  ^toit  loin  de  r^pondre  auz 
id^es  de  la  classe  noble :  sans  vouloir 
examiner  la  question ,  si  le  but  excusait 
les  moyens,  nous  nous  oontenterons 
de  dire  qu'un  tel  projet  accusait  dans 
les  conjuri^s  une  grande  ignorance  de 
resprit  des  soldats  et  des  masses.  Une 
revolution  de  oalais  |)Ouvait  r^ussir; 
une  question  de  principes  ne  pouvart 
avoir  de  prise  sur  Tisnmease  majority 
de  la  population. 

Let  conjur^  apprirent  tout  ensem- 
ble la  mort  d* Alexandre,  Texistence 
du  manifeste  par  lequel  Tempereur 
avait  design^  Tn^ritier  du  trdne,  et  la 
prestation  du  serment  de  fidelity  au 

f  rand-due  Goostantin  par  tous  les  ha- 
itants  de  la  capitale.  En  pr^enoe  de 
cet  tenement,  on  d^lib^ra  sur  Top- 
portunite  d'une  dissolution  de  la  so- 
ciety; Tun  des  membres,  Batenkof, 
dit  k  cette  occasion  :  «  L'occasion  oui 
nous  a  6chappe  ne  se  prdsentera  plus 
dici  k  cinquante  ana.  S  il  y  avait  eu  de 
bonnes  t^tes  an  oonseil  d'Etat ,  la  Russie 
aurait  k  la  fois  pr^t^  serment  auiour- 
d'hui  k  un  nouveau  souverain  et  a  des 
lois  nouvdles...  Qu*il  est  ais^  d'operer 
un  changement  en  Russie!  il  sufnt  de 
distribuer  quelques  oukases  du  s^nat. 
Mais  la  Russie  ne  comporte  point  d*au- 
tre  gouvernement  que  la  monarchie. 
Les  seulet  pri^res  pour  la  famille  im- 


p^riale  y  rendent  la  r^pubtique  impos- 
sible. iJa  monarcbie  limits  est  n^ces- 
saire,  ne  fdt-ce  que  comme  transition.  • 
Sur  Fobservation  qu'un  monarque  con- 
qu^rant  pourrait  toujours  convertir 
une  autorite  limits  en  un  pouvoir  ab- 
solu ,  il  r^pliqua  qu'on  pouvaft  exclure 
les  hommes  du  trone,  et  qu'ils  avaient 
k  cboisir  entre  deux  impi^ratrices  el 
plusieurs  grandes-ducbesses. 

Les  directeurs  de  I'association  du 
Nord,  Ryl^ief,  le  prince  Troubetzkoi, 
le  prince  Obolenski  et  leurs  plus  in- 
times  conseillers,  ne  s'arr^drent  pas 
lom^mps  k  Tid^  de  la  suppression 
definitive  ni  m^me  temporaire  de  leur 
society.  lis  apprirent  que  Constantin 
persistait  dans  son  refus  d*accepter  la 
couronne,  et  cette  nouvelle  ranima 
leurs  esp^rances.  lis  concurent  Fespoir 
de  soulever  une  partie  des  troupes  et 
du  peuple,  en  leur  persuadant  que 
Constantin  u*avait  pas  renonofi  an 
tr6ne,  et  de  renverser,.^  la  faveur  de 
cette  insurrection ,  le  gouvernement  et 
Fordre  etablis.  Ryl^ief,  Obolenski, 
Alexandre  Bestoujef  et  Rabovski  r^so- 
lurent,  du  consentement  des  sections, 
de  nommer  le  prince  Troubetzkoi  dief 
absolu  ou  dictateur,  et  on  arr^  les 
mesures  suivantes : 

!•  Etablir,  apr^s  avoir  aniU  Tac- 
tion du  pouvoir  existant,  un  gouw^ 
nement  provisoire  qui  aurait  oidonn^ 
dans  les  provinces  U  formation  de 
chambres  charg^es  d'^lire  des  deputes ; 

y  Travailler  k  retablissement  de 
deux  chambres  legislatives ,  dont  Tune , 
la  chambre  haute,  devait  itre  torn- 
pos^e  de  membres  k  vie; 

3«  Faire  servir  a  rex6cution  de  oes 
desseins  les  troupes  qui  r^iseraient 
de  prater  serment  k  Tempereur  N ieo- 
las,  en  prevenant  tout  exo^s  de  leur 
prt,  mais  en  tdchant  d*augmenter 
leur  uombre. 

Plus  tard,  et  pour  donner  des  ga- 
ranties  k  la  monardiie  constitution- 
nelle,  11  devait  etre  proc^de : 

A  la  formation  de  chambres  de 
provinces,  qui  eussent  6t&  autant  de 
legislatures  locales; 

Au  changement  des  colonies  miH- 
taires  en  garde  nationale; 


V;z.„    y,  '//„ ;,v.---:  . 


•  • 


•        •  4    «        4        w  w 


RUSSIE. 


sri 


A  la  remiae  de  ia  citadelle  de  P^ 
tcfsbourg  oitre  les  mains  de  la  muni- 
cipality, que  Batenkof  appelait  le 
palladhtm  des  Ubertis  russeSy  et  ou 
devaient  aussi  £tre  plac^  le  conseil 
munidpal  et  la  gard^  dvique; 

k  la  proclamation  de  Tind^pendanoe 
des  umversitds  de  Moscou,  de  Dorpat 
et  de  Vilna. 

Les  conjures  n*^ient  pas  d*accord 
sar  le  personnage  qu'il  conviendrait  de 
mettre  a  la  t^  du  ^ouTernement ;  rim- 
possibility  d'uoe  republique  leur  ^tait 
demontr6e ;  mais,  quel  que  (Kit  le  chef  de 
I'^tat,  lis  voulaient  lui  iroposer  leur 
constitution.  Batenkof  fit  observes  i 
Troubetskoi  que  si  tous  les  soldats 
pr^alent  serment  h  Constantin,  Far* 
riv6e  de  ce  prince  h  P^tersbourg  leur 
Sterait  toute  chance  de  succ^ ;  il  opina 
poor  que  les  conjures  se  partageassent 
oe  teUe  sorte  que  les  uns  proclame- 
raient  Constantm,  tandis  que  les  au- 
tres  se  declareraient  pour  Nicolas.  Si 
ie  parti  de  Gonstantin  Temportait,  on 
esperait  que  son  frdre  consentirait  k 
retablissement  d*un  gouvemement  pro- 
visoire,  ou  qu'il  ajournerait  son  av^ 
nement  au  tr6ne;  nans  oe  dernier  cas , 
on  prtenteraitcet  ajournement  comme 
one  abdication,  et  Ton  proclamerait 
empereor  le  fils  atn^  de  Nicolas, 
^kxaodre  Nicola^vitch.  LMncertitude 
du  suooes  et  le  petit  nombre  d'offiders 
g^Q^raux  sur  lesqueis  on  pouvait  comp- 
ter les  emoMgch^ent  de  s'arr^ter  k  une 
determination  d^nitive  en  ce  qui  re- 
gardait  le  chef  f utur. 

C^endant ,  diez  Ryldef ,  comme  au 
lieu  a^ign6  pour  un  rendez-TOUs  e6« 
n^ral,  arrivaient  de  toutea  parts  des 
conjures  avec  des  plans,  des  proposi- 
tions, ou  pour  prendre  les  ordres  des 
direeieurs.  Le  1 2  d^cembre ,  deux  jours 
avant  eelui  de  Tinsurrection ,  se  rendi- 
rent  chez  Ryl^ief  le  prince  Troubets- 
koi, ks  trois  fr^res  Bestoujef,  Obo- 
leoski,  Kahovski,  Arbouzof,  R^in, 
le  oomteKonomitzin ,  leprince  Alexan- 
dre OdoieYski,  Soutfaor,  Poustcbin, 
Batenkof,  Takoubovitch,  Stcfa^pin- 
RostOTski.  Nicolas  Bestoujef  et  Arbou- 
sof  r^pondaient  des  marins  de  la  garde ; 
d*au^^  offiders  promirent  Tappui  de 


3uelques  compagBfes  des  raiments 
e  Moscou  et  de  Finlande;  Odoievski 
r^p^it  avec  enthousiasme  :  «  Nous 
mourrons,  mais  avec  quelle  gloirel  • 
Dans  la  soiree  du  13,  la  r^nion  ne 
fut  ni  moins  nombreuse  ni  moins  tur- 
bulente;  on  y  proposait  k  Tenvi  les 
mesures  les  plus  extrtoes,  et  Texalta- 
tion  6tait  k  son  combie.  Cependant  les 
eoniur^  savaient  positivement  que  le 
lendemain,  14  dMembre,  devait  pa- 
rattre  le  manifesto  de  Tempereur  Ni- 
colas sur  son  av^ement  au  trdne.  Le 
premier  procureur  Krasnokoutzki , 
memhre  oe  rassociation  du  Sud,  les 
avait  pr^venus  que  le  s^at  se  i^ftunirait 
k  sept  heures  du  matin  pour  la  presta- 
tion du  serment. 

Les  prindpaux  agents  avaient  dijk 
communique  leurs  intentions  aux  sim- 
ples membres  de  la  soci^tt^.  Le  prince 
Obolenski  avait  annonc^  k  ces  demiers 
que,  par  ordre  du  dictateur  et  du  di- 
rectoire,  ils  devaient  s'efforcer,  le  jour 
qui  serait  fix^  pour  la  prestation  du 
serment.  de  soulever  et  de  conduire 
sur  la  place  du  S^nat  autant  de  sol- 
dats de  leurs  raiments  que  faire  se 
pourrait,  et  que  s'lls  n'y  r6ussissaient 
point,  lis  devaient  au  moins  se  rendre 
sur  les  lieux  de  leurs  personnes.  On 
devait  agir  sur  I'esprit  de  la  troupe,  en 
lui  persuadant  que  la  renondation  de 
Gonstantin  t&tait  suppose.  Les  conju- 
re se  flattaient  que  Tempereur,  loin 
d'employer  la  force contre  les  rebelles, 
renoncerait  aussitdt  k  ses  droits  de 
souverainete,  et  entrerait  en  n^oda- 
tion  avec  eux.  Alors  ils  auraient  dictd 
les  conditions  suivantes :  1"*  que  des 
d^ut^s  fussent  oonvoqu^  de  tous  les 
gouvemements;  T  qu^il  fdt  public  a 
ce  suiet  un  manifests  du  s^nat,  dans 
lequel  il  serait  exprim^  que  ces  d^put^ 
auraient  ^Hoter  de  nouveUes  lois  or- 
ganlques  pour  le  gouvemement  de 
rempire;  S*  qu'en  attendant,  un  gou- 
vemement provisoire  fAt  ^tabli ,  et  que 
des  depute  du  royaume  de  Pologne 
fussent  appd^,  afin  d'adopter  les  me- 
sures n^oessaires  pour  la  conservation 
de  Tunite  de  TEtat. 

Quelques-uns  des  oonjur^  oonfidrent 
k  des  lettres  le  secret  de  leur  entre* 


534 


L'UNIVERS. 


prise.  Poustdiin  (xri^HSt  h  Moeoou : 
«i  ;Nou8  aorions  in6rit6  a  Juste  titre  le 
nom  de  Iddies,  ri  nobs  OTions  !aiss^ 
^^chapper  roccasion  actuelle.  Noos 
sommes  ici  soixante,  et  nous  pouvons 
compter  sor  quinze  cents  soldats... 
Adiea;  donne-nous  une  lurme,  si...  » 
Getle  lettre,  ainsi  mi'ane  autre  ^crite 
par  Troubetzkoi,  devaient  itte  moti- 
Mta  k  Moscou,  kux  g^ntonx  Yon 
Wieseo  et  Miehel  Orlof ,  soit  qu*on 
espMt  attirer  ces  deux  <»efs  dans  le 
mouTement  pre^t6,  soit  qneces  der^ 
niers ,  d^l  liuorm^s  de  tout ,  n^eossent 
eonsenti  aparattrequ*en  caader^ussite. 

Malgr6  lea  iDcertitadefe  qui  Tag!* 
iaient,  le  prince  TroubetzkoT  ne  re* 
nonqa  pas  ouvertenaent  I  Pexeroioe  de 
son  poavoir  dictatorial.  II  fat  arr^t^ 
qu*M  se  porterait  le  lendeinain  sor  la 
place  do  Senat  pour  se  mettre  h  la  t^te 
des  trotipaa  qai  refuseraient  le  ser- 
ment.  TaRoobo^iteh ,  et  te  colonel  Bou- 
latof  qui  devait  agir  sur  Tesprit  des 
grenaaiers  du  corps,  avaient  mission 
Se  comniander  sous  ses  ordres. 

Dans  la  matinee  du  14  d^mbre, 
Yakovbovitcb,  Arbonzof,  Alexandre 
Bestoajef  et  plusiears  autres  officiers, 
vinrent  troafcr  lea  matelots.  A  I'ar- 
rri^  du  general  RMjor  Sdiipof ,  cetix- 
d  re^iamnt  de  preter  serment.  Le 
g^niral  fit  arr^er  les  oommandants  des 
eompagnies;  moif  Nicolas  Bestoujef 
eagaffea  plusieurs  de  ses  complices  h 
les  delivrer.  Dans  cet  instant,  un  cri 
part :  Sotdats!  entendez^vaus  ces  di- 
chargetf  ce  sont  txxr  camar4ide8  que 
ton  massacre  I  et  le  bataillon  entier 
s*eiance  bors  des  casernes.  Les  offi- 
ciers, qui  jusqu'alors  n'avaient  pris 
aucuoe  part  aa  roouvement,  march^ 
rent  k  la  suite  du  bataillon.  Les  mate^ 
lota  rencontrtent ,  pris  du  manage  de 
la  garde  k  cheval,  le  lieutenant  Ts6- 
brikof  dn  r^ment  de  Finlaode,  qni 
lewr  oria :  En  carr6  eontre  ia  cava- 
kriei 

Dans  le  r6eiinent  de  Mosoou,  la  re- 
bellion aTBit  dej^  commence.  Le  prince 
StohepiB-RostoTski ,  Miehel  et  Alexan- 
dre Bestoujef,  Broke  ct  Wolkof,  par- 
ooururent  las  3*,  8*,  5*  et  6*  eompa- 
gnies ,  repetant  sans  cesse  aux  soldats : 


« On  nous  trompe  en  ezigeant  de  nous 
ce  serment;  le  grand-doc  Gonstantin 
n'a  point  renonoe  k  la  couronne;  il  est 
dans  les  fers  ainsi  que  le  grand-due 
Michel,   chef  de  notre  raiment. » 
Micbel  Bestoajef  s*toiait :  «  L*empc- 
reor   Gonstantin   augmentera  Totre 
aolde;  main  basse  sur  tous  ceux  qui  oe 
lui  resteront  pas  fidelesi »  Ce  Bestoujef 
ct  le  prince  StdMpin  ordonn^rent  aux 
eompagnies  de  prendre  des  cartouches 
il  bailes  et  de  charger  leurs  armes.  Ce 
dernier  ordonna  aux  soldats  iosarg6s 
d^enlever  le  drapean  et  de  repoasser 
les  grenadiers  a  coups  de  crosse;  iui- 
Intoie  se  pr6cipite  sur  le  g(&n^ral  Fre- 
dricks^  qu' Alexandre  Bestoujef  mena- 
cait  d^}h  do  pistolet,  le  blesse  ^  h  t^ 
et  le  fait  tomber  sans  connafssance;  il 
aejette  ^lement  sur  Ies6n6ral  Scbens- 
chm,  lui  porta  nne  proronde  blessure, 
et  continue  longtem|is  k  le  sabrer;  le 
colonel  Khvostcbinski ,  un  sous-ofGcier 
et  un  grenadier  sont  bless^  presqu*en 
rn^me  temps  par  le  mtoe  conjure  ^ 
qui  crie  ami:  soldats :  «  Je  vous  tuerai 
tous!»  Mattre  do  drapeau,  il  dirige 
les  eompagnies  mutinies  vers  la  place 
do  S^at. 

La  revolte  s*op€ra  par  les  ro^mes 
moyens  dans  ie  r6giment  des  greaa- 
diers  du  corps.  D^k ,  malgr^  les  efforts 
du  sous-lieutenant  Kojevnikof ,  les  sol- 
dats araient  prM  serment,  lorsque  It 
lieutenant  Sutbof ,  el  un  outre  otncier 
Domm6  Panof ,  les  rallik^ent  au  part* 
qoi  croyait  chifendre  les  droits  de 
Gonstantin.  Plusieurs  individus  per** 
tant  rhabit  bourgeois,  arm^s  de  poi- 
guards,  de  pistoiets  et  de  sabres,  se 
ndldrent  dans  leurs  rangs. 

Les  limites  de  notre  cadre  ne 
sous  permettent  pas  de  retracer  les 
^vtoements  da  eette  Jouni^e;  pres- 
que  tons  les  chels  de  la  con^ira- 
tion  abandonn^rent  k  finstant  du 
danger  eeox  qo'ils  avaient  mis  en 
avant.  La  fermetA  de  I'empei^ur  Ki- 
oolas  d^joua  leurs  projets,  non  sans 
qu'il  en  oodtdt  le  vie  a  un  grand  nom- 
bre  de  victiwes.  De  tous  ceux  qui 
avaient  organist  le  complot,  et  qui 
comptaient  en  tirer  4eB  a  vantages  in- 
diviuuals,  le  seuJ  Yakoubovitch  paya 


ftUSME. 


4tt 


4f  f»f«no«Ae  i  flMMeft  mteto  pmiuii 
4to  i»  »6vo|tp  «t  uu  as««E  grwMi  oombre 
(l6  soldaU  rdsialerei^  iiM^u'ibtt  soir. 
Kaho?ski  blessa  mottAWmmi^  d'ua 
£oup  de  pistQlet » le  g^eral  ooiote  Mv 
loradovitob)  et  tua  aussi  de  sa  inaia  le 
colonel  Srurler;  SLudielbecfcer  diricei 
son  pUtolet  contre  le  grand-due  Mi- 
4:hel,  maia  lee  matelote  euK-mtoes  \m 
arr^t^rent  le  brae;  Boulatof  oe  parut 
5iir  la  plaee  que  eomme  speetateur;  le 
prioce  TnHipetslu)!  ee  deroba  k  see 
oQinpIioee,  et  vioi  k  Tetat^^icuor  g(^ 
A^ral  prater  eernept  ^  renipereur 
Nicolas;  il  sy  trou^a  osal  a  pluaieum 
reiMriaee;  eDOn  il  alia  passer  la  mitt 
4aa»la  mgieon  du  mioistre  d'Aulriebe, 
oa  le  oomte  Ifesselrode  le  r^ciaina  par 
ordre  de  I'einperettr*  Eyl^ief,  cber* 
cbaot  partoat  le.dictateur  et  ae  le  tron- 
vaot  Das*  prit  le  parti  de  ae  retirers 
Bateakor  tmt  la  mtoie  oonduite;  le 
«>loQel  Boulatof  temoigna  uq  vif  re* 
peotir,  et  son  eialtation  pr^tant  plus 
de  force  k  ime  maladie  oout  il  etait 
attaqing,  il  suceomba  le  19  jan?ier  de 
Ymn^  suivante,  l^uaot  le  sort  de  see 
eofants  au  mooar^ue  dont  il  avail 
conspire  la  parte.  L'enseigne  prince 
Odoierski  resta  loogtempe  cadi^  aoua 
Varche  d'un  ppnt;  enfin,  r^lu  de 
sortir  k  tout  prix  d'une  telle  situation « 
il  M  reodit  ehez  son  onde ,  le  e^nateur 
Dinjtri-Landakoi,  aui  le  conduisit  im* 
m^iateoMnt  ebes  1  empereor... 

la  tranquillity  ne  fut  troubiee  sur 
aucun  autre  point  de  I'empire,  si  ce 
Q*est  il  YassilMof  et  aux  eoYirons.  Dans 
la  ▼ille  de  Moscou^  quelques-uos  dee 
memfares  de  la  soci^te  seer^  essays- 
rent  vainement  de  r6veiller  quelque 
sympatbie  pour  des  honimes  aont  la 
cause  etait  perdue.  Pestel ,  d^jl^  arr^t^ » 
a?ait  dit  au  prinee  Serge  Volkonski : 
« He  eraigoes  rien;  sauvez  seulement 
mon  code  rusae;  pour  ma  part,  ie  ne 
ferai  aueune  r^roation.  »  uspenaant, 
comma  I'atteste  la  eoRunission  d*en- 
qu^te,  il  a  DonuB^  tous  ses  compliees » 
qui  out  €U  enToyes  k  P^tersbourg  par 
les  auterit^  locales. 

Serge  et  Matthieu  Mouravief  avaient 
^te  arr^t^  par  le  lieutenant-colonel 
Gebel;  mais  plusieurs  officiers  appar- 


teneRl  a  la  siMiM  des  fitevea  vteiiie 
lee  deftlfrirait.  jUors  Serge  Mouniyier 
in^solut  de  Boulever  le  r^ment  de 
Tebernt^of.  Les  eeojuff^  eotrSnul 
aane  r^s tanoa  dans  VassBkof ,  oi^  iie 
fureot  rejekle  pmr  pinafeun  offieien. 
Mouravief  peueait  k  se  porter,  on  but 
ILief ,  OD  sur  Mam-Tserkof ,  ou  enfin 
euf  Jitouair  pour  ofittr  sa  jonelioB 
avec  les  officiers  de  la  sooiM  des 
Slaves  r^nis;  il  prlt  la  rtelutton  de 
Aire  un  nouveiDent  sur  Brooasilof , 
4*otk  il  aurait  DO.  en  un  jourde  nar* 
ehe,  j^agner  Kj«  ou  Jitomir,  suivaot 
les  oirooDstanees,  Avant  de  partir, 
Taumdoier  du  tegioaent  e^l^ra  rofBee 
divin ,  et  lut  il  la  troupe  un  catedibme 
oompos6  par  BestDUjef-Huniia,  dans 
lequel  Tauteur  ^tablissait  que  la  d^* 
VBoeratie  (§tait  la  senle  fome  de  cou- 
Kernement  agr^ble  k  Dieu.  Mais  il 
falhit  employer  d'autres  aijiumente 
pour  la  convafnore,  et  Ton  invoqua« 
comrne  k  Petersbourg,  le  nom  et  lee 
droits  da  grand-due  Constantin.  Daue 
leuf  maroie,   ils  entratn^ent  one 
povtie  de  la  oompagnie  des  aoueque- 
teires,  N*mnt  auoune  oouveile  de 
Kief « et  inKMrmd  que  les  troupes  qu'uo 
des  leurs  eomptait  soulever  n'raieni 
point  k  B^aia-Tserkof « Mouravief  ro« 
louroa  vers  Tilessi^;  nuis  il  rencootn 
k  quelque  distance  le  dtochement  de 
bussards  du  g6n6ral  (jeismar,  qui  aviit 
Me  envey^  k  sa  pourauite.  11  veoaitde 
donner  ordre  aux  soldats  de  ae  porter 
sur  les  pidees,  lorno'il  tomba  sans  con* 
naisaauce,  bkss^  d  un  eoup  de  mitrailiet 
revenu  k  lui,  ii  voulut  raAier  les  siene « 
mais  inutilement;  ses  propves  soldats 
le  livr^ent,  ainsi  que  Bestouief-Ru^ 
min,  au  cbef  d'escadron  du  regtraeaft 
de  Marioupoi  qui  avait  ebMs^  Ice  ror 
belles.  Hippdyte  Mouravief  fnt  tud 
dans  Faction;  le  lieutoiant  Kouzmin 
se  brdla  la  ca*velle  en  prdsenos  dee 
deux  Mouravief,  avec  lesqoeis  il  Malt 
enferm^.  Les  autres  fiurent  pris  imm6» 
diatement  ou  arrMs  dans  leur  fuite. 
Les  plus  compromis  furent  ignoroi- 
nieusementpendus;  les  autres  subirent 
la  degradation  et  I'exiL  La  princease 
Troubelilioi  ne  voulut  point  quitter 
son  man ,  et  ne  pouvant  le  sauver,  die 


L'UNIVERS. 


s'asaocia  gAi^reusement  a  sa  fortune. 
Cette  conapiration ,  dans  laquell«  trem- 
p^rcnt  tant  de  jeunes  militaires  de  ia 
plus  beUe  esp^rance,  ^choua  par  plu- 
sieurs  motits,  d'alM>rd  parce  qu'iis 
manquaientd'anchef,  ensuite,  oomme 
nous  I'avons  dit ,  parce  quMla  avaient 
inal  jug^  de  Teapnt  des  masses,  trop 
fa^onnees  a  robeissance  passive  pour 
ooniprendre  et  soutenirune  r^voiation 
de  principes;  enfin  parce  au'ilsrencon- 
trerent  dans  le  prince  qu'ila  voalaient 
d6trdner  un  homme  complet  pour  le 
despotisme.  Patient,  telaire ,  inflexible, 
calculant  froidement  la  port^  des  fa- 
veurs  et  des  supplices,  Nicolas  est  [^ur 
la  classe  immense  de  ses  sujets  qui  ne 
sait  que  prier,  ob^ir  et  mourir,  le  vrai 
type  de  rautocrate. 
'  Cette  conspiration  explique  mieux 
^e  ne  pourraient  le  taire  des  vo- 
lumes de  reroarques  et  d*observa- 
tions ,  r^tat  moral  de  Fempire  russe , 
les  dangers  et  les  ressources  du 
pouvoir,  la  ligne  profonde  qui  s^ 
pare  les  classes  inferieures  de  la  no- 
blesse; nous  avons  suivi  et  sou  vent 
reproduit  textuellement  le  rapport  de 
la  commission  d*en^u6te  instituee  par 
le  couvernement  lui-m^me;  mais  I  ap- 
pr&iation  des  faits  appartient  h  qui  lei 
expose,  et  nous  dirons,  sans  nous 
laisser  dominer  par  ce  sentiment  qui 
s'attacbe  au  malheur  dans  la  lutte  in^- 
gale  entre  le  puissant  et  le  faible,  que 
si  le  chef  de  T^tat  avait  le  droit  de 
s^vir,  bien  des  circonstanoes  auraient 
l^itim^  sa  cMmence.  Nous  ne  parlous 
pas  des  soldats  ni  deoeux  qui  croyaient 
6tre  fiddles  a  Gonstantio ,  ceux-Ia  m^- 
ritaient  non-seulement  una  amnistie 
entiere,  mais  une  recompense;  nous 
ne  d^fendrons  pas  Tambition  de  quel- 
ques  conjur^  dont  le  bien  public  n*6tait 
que  le  pr^texte,  mais  nous  pensons 

Sue  le  plus  grand  tort  de  ceux  qui 
esiraient  une  r^forme  fut  de  la  croire 
possible.  L*6ducation  des  jeunes  nobles 
confiee  a  des  strangers,  la  direction 
ordinaire  de  leurs  etudes,  tout  sem- 
blait  les  porter  a  ^tablir  dans  les  ins- 
titutions une  Emancipation  qui  se  trou- 
vaitdans  leur  intelligence.  Apr^  avoir 
bris6  ia  resistance ,  le  pouvoir  reconnut 


lui-mtoie  oette  v^t^,  en  s'elfHtant 
de  modifler  le  systeme  de  i'instruction 
tant  publique  que  particuli^re ,  de  telle 
sorte  que  oe  systeme  se  trouvdt  plus 
en  harmonic  avec  les  conditions  ^ou- 
▼ernementales  de  Fempire.  Parmi  lei 
r^ormes  administratives  essay^  par 
Fempereur  actual,  quelques-unes  pa- 
rattraient  emprunt^s  au  code  russe 
(RoDskaia-pravda)  de  Pestel. 

On  se  rappelle  que  les  Turcs,  pro- 
fitant  de  la  longanimity  d' Alexandre, 
et  encourage  par  les  suggestions  de 
FAutriche ,  s'^taient  refusS^aux  arran- 
gements que  le  cabinet*de  P^rsbourg 
avait  ju^es  convenables  pour  amener  la 
pacification  de  la  Grto  sans  troubler 
la  paix  g^n^rale.  A  la  mort  d*Alexan- 
dre,  les  ciroonstances  entre  la  Russie 
et  la  Porte  ottomane  ^taient  done 
telles,  que  la  guerre  pouvait  ^ater  au 
premier  moment^  et  avec  une  grande 
apparence  de  justice.  Le  nouveau  tsar 
^tait  appelE,  non  moins  par  la  foree 
des  cboses  que  par  son  caraet^re,  a 
adopter  une  politique  plus  franehe  et 
moms  padfique  que  celle  de  son  fr^re. 
II  8*agissait  pour  lui  de  satisfaire  aux 
exigences  nationales,  et  surtout  de 
retremper  par  une  guerre  Fesprit  de 
Farro^,  ou  la  r^volte  de  Saint-P^ers- 
bourg  avait  laisse  de  nombreux  germf  s 
de  m^fiance  et  de  m^ntentement. 
De  puissants  motifs  portaient  en  outre 
la  Russie  a  ouvrir  la  lutte  centre  FO- 
rient,  avant  que  la  reforme  militaire 
qui  s'introduisait  simultan^roent  dans 
la  Turquie  et  dans  la  Perse  edt  port^ 
tous  ses  fruits,  et  opposE  une  bar- 
ri^re  insurmontable  aux  empi^ments 
de  Fempire  vers  Fest  et  le  sud.  Toutc 
Fattention  de  F£urope,  excite  par  la 
longue  lutte  que  soutenait  la  Gr^ 
contre  ses  oppresseurs ,  embrassait  en 
m^me  temps,  avec  un  soin  curieux, 
les  rapports  de  la  Porte  avec  la  Russie. 
II  Etait  important  pour  le  cabinet  de 
Petersbourg  d'amener  la  France  et 
FAngleterre  a  faire  cause  commune 
avec  lui ,  et  a  sacriffer  les  int^r^ts  les 

Rlus  vitaux  de  FEurope  h  une  com- 
inaison  qui  devait  reduire  la  puis- 
sance de  la  Turquie  dans  FArchipe!, 
an^antir  ses  flottes,  et  preparer  ainsi 


RUSSIE* 


it? 


\m  foiet  k  rambicion  moaoovfte.  On 
salt  aT6c  quelle  adresse  1^  agents 
diploQDatiques  de  I'empire  amenerent 
ee  d^oAment.  Le  temps  d'agir  contra 
la  Turquie  n'teit  done  point  encore 
feou ,  mais  lien  n'emplchait  d*en  finir 
<Pabord  atec  la  Perse,  ^i  plus  tard 
uottvait  operer  uoe  diversion  flSiclieuse« 
Let  Persans  ail^rent  eux-mtoes  au- 
derantd'une rupture.  Le  prince  AU>aa- 
Ifirza,  impatient  de  ?oir  see  troupes 
nouvellement  organise  se  mesurer 
eoatre  les  Russes ,  entra  subitemeot  en 
Gtergie.  D*un  autre  cdU^  Schah-Ali- 
Mirza,  autre  fiis  du  roi,  r^lut  de 
faire  une  incursion  le  lona  des  riyages 
de  la  Caspienne,  a  la  t6ie  d'environ 
dmize  niiUe  hommes.  Ge  dernier  en« 
vahit  les  provinces  de  Rarabah,  de 
ChirTan  et  Chekinsk,  avant  que  les 
Rosses  aient  eu  le  temps  de  prendre 
des  Diesures  pour  repousser  ses  atta- 
quea.  Les  Persans  prirent  Leukiran, 
Saiian  etbloqu^rent  Bakou.  Us  allaient 
assizer  Rouban,  apres  avoir  compl6* 
tement  tounie  toute  la  chalne  du  Cau- 
case.  Le  g^ntol  Jermolof  comnian« 
dait  le  corps  d'arm^  du  Caucase.  Ses 
troupes,  disstointe  sur  un  vaste  es- 
paoe,  ne  pouvaient  faire  £sice  k  la  fois 
sur  tous  les  points  menace.  Le  g6- 
n^ral  Paskevitch  viot  a  son  aide;  il 
partit  de  Tiflis  a  la  t^te  de  cinq  ou  six 
iDiJIe  bommes ,  renoontra  Abbas-Mirza 
k  deal  lieues  de  filisavetpol ,  et  le  d^l 
oompl^tetnent.  La  nouvelle  de  cette 
▼ictoire  d^couragea  Ali-Mirza,   qui 
abandonna  subitement  son  arm^.  La 
fuite  de  ce  chef  eut  pour  r^sultat  la 
dissolution  imm^iate  du  corps  qu'il 
oomniandait.  On  assure  (Journal  ma* 
qnscritde  M.  Burgen)  qued^ja  les  ha- 
bitants d' Astrakhan  se  preparaient  au . 
depart,  et  que  les  tribus  belliqueuses 
du  Caucase  se  mettaient  en  mouvement 
pour  se  reunir    k  Tarmac  peraane. 
Paskevitch  passa  I'Araxe,  et  chassa  Ten-, 
nemi  du  territoire  russe.  L*hiver  sus- 
pendit  les  hostility.  L^annee  suivante, 
Paskevitch,  investi  du  commandement 
en  dief ,  poussa  la  guerre  avec  vigueur ; 
apres  avoir   emporte    le   monastere 
Etchmiadzine,  il  vint  mettre  le  si6ge 
deraot  la  forteresse  Abbas-Abud.  La 


Abbas-Mimvintrittaquer.PaskeTildi 
n*dbandonna  le  si^e  que  pour  aller 
battre  le  prince  perAm ,  qui  se  d^fendit 
avec  un  grand  courage,  et  qui  faillit 
torober  au  pouvoir  des  vainqueurs. 
A  la  suite  oe  cette  aflbire,  la  place 
eapitula ,  et  bientdt  la  prise  de  Sardar- 
Abbad  ouvrit  au  general  les  abords 
d'£rivan«  Le  si^e  de  cette  ville  ne 
dura  que  six  jours;  elle  se  rendit  aux 
Rosses  au  commencement  d'octobre. 
Tavris,  ancienne  camtale  de  la  Perse, 
les  forteresses  de  Khoi  et  Alandja 
(J.  Tolstoy),  r^puttes  jusqu'alors  m* 
aceessibles,  furent  successivement  en- 
levte,  et  facilit^ent  la  conqu^  de 
tout  I'Aderbidjan.  Abbas-Mirza,  sans 
se  laisser  d^urager  par  oes  revers, 
essaja  de  gagner  du  temps,  dans  Tes- 
poir  que  la  guerre  6claterait  bientdt 
contre  la  Turquie,  et  foroeratt  lea 
Russes  k  se  porter  sur  les  points  me- 
nacds;  il  ouvrit  done  des  conferen-. 
oes,  qui  se  prolongdrent  jusqu*au  com- 
mencement de  Fannie  1828.  La  nou- 
vdle  de  la  batallle  de  Navarin  vint  le 
confirmer  dans  ces  dispositions.  Pas- 
kevitch sentait  la  n^cessit^  d'en  finir 
promptement  avec  la  Perse;  malgr^ 
rhiver,  il  rouvrit  la  campagne,  fran- 
cfait  les  monts  Kouflankou ,  et  de 
nouveaux  avantaees  si^al^entsa  mar* 
che  precipit^.  II  §tait  k  Tourkmant-. 
chai,  sur  le  chemin  de  Tdi^an,  re- 
sidence du  schah,  lorsque  le  vice-roi, 
efifraj^  de  son  approcne,  envoys  des 
pl^nipotentiaires  pour  traiter  de  la 
paix.  Suivant  la  couturoe  des  Orien- 
taux,  ils  apportaient  avec  eux  de  riches 
pr^ents,  parmi  iesquels  se  trouvait 
le  diamant  qui  passe  pour  le  plus  beau 
et  le  plus  pr^eux  qui  soit  au  monde* 
Cette  campagne  mit  en  Evidence  les 

3ualit^  briUantes  de  Paskevitch ;  rapi- 
it^  dans  les  mouvements,  impetuosity 
dans  Fattaaue ,  coup  d'oeii  sdr,  tela  sont 
les  traits  aistinctifs  de  son  g^nie,  que 
Ton  a  quelquefois  compare  a  celui  de 
Souvorof. 

La  paix  sign^e  k  Tourkmantchal,  en 
fevrier  1828,  assure  aux  Russes  les 
provinces  d'£rivan  et  de  Nakhitdie- 
van ;  en  leur  permettant  de  prendre  k 
revers  toute  la  ligne  du  Caucase,  elle  les 


UUBTIVERS. 


mcttalt  en  Mai  4e  m  porter,  seloo 
i*ooeurreiice,  soit  dans  ia  Twqme  d'A- 
sie  et  ia  Perse,  toit  vert  lea  oontrte 
oooideutaleB  de  Tlnde.  La  Perse  dut 
payer  au  vainqueor  one  contrtbutiim 
de  quatre-vingts  millioos  de  iraDCt.  Le 
flfotel  Paakevitcb  fiut  61ev6  k  iaitoiiU 
de  comte  d^Jtrivan,  et  reeot  de  rem- 
pereur  une  gratification  a*un  miliion 
derooblea. 

Pour  prourer  que  la  Russie  tend  k 
un  agrandiBsement  ayst^matique  ^rs 
I'Orient,  nous  citerons  qaeiqoes-ws 
des  articles  du  traits  de  Towrkmani- 
chaT. 

Art  9.  Gonsidtont  que  les  hosti- 
lity sunrenues  entre  les  bantea  partial 
oontractaotes,  et  henreoaement  termi* 
nees  aujourd'hui,  ont  fiiit  cesser  les 
obligations  que  leur  imposalt  le  trait6 
de  Gulistan ,  Sa  Majeste  I'empereur  de 
lootes  les  Russies  et  Sa  Majesty  le 
achab  de  Perse  ont  Jug^  eonveoable  de 
remplacer  ledit  traits  de  Gulistan  par 
les  pr^entes  clauses  et  stipulations, 
lesquelles  sont  destine  k  r^ler  et  k 
oonsolider  de  plus  en  plus  les  relations 
futures  de  paix  et  d^aniiti6  entre  la 
Rnssie  et  la  Perse. 

Art.  3.  Sa  Majesty  le  schah  de  Perse , 
tant  en  son  nom  qu'en  celui  de  ses  h^ 
ritiers  et  soocesseurs,  Me  en  toute 
propriety,  k  rempire  de  Russie,  le 
khanat  d'^rivan  et  le  kbanat  de  Nak- 
hitcb^van.  En  oons^ence  de  oette 
cession,  Sa  Majeste  le  schah  s'engage 
a  faire  remettre  aux  autorit^  russes , 
dans  I'espace  de  six  mois  au  plus,  k 
pertir  de  n  signature  du  present  traits, 
toutes  les  archiyes  et  tous  les  docu* 
nsents  publics  ooncernant  Tadminis- 
tration  des  deux  khanats  ci-dessus 
inentionnes. 

Art.  4.  Les  deux  haotes  parties  con- 
tractantes  convtennent  d'etablir  pour 
frontiires  entre  les  deux  £tats  la  ligne 
de  demarcation  snivante,  en  partant 
du  point  de  la  frontiire  des  £tats  ot- 
tomans le  plus  rapproch^  en  ligne 
droite  de  la  sommite  du  petit  Ararat; 
oette  ligne  se  dirigera  jusou*^  la  som- 
mite de  oette  montagne ,  d  ou  elle  des- 
oendra  jusqu^a  la  source  de  la  Karas- 
mu ,  qui  d^ule  du  versant  meridional 


da  petit  Ararat,  et  eVe  suirra  sen 
eours  jusjfu'^  son  embouchure  dam 
r  Araxe,  Tis-a-Tts  de  Gh^rour ;  parvenue 
a  ce  point,  eette  liene  sniTra  le  lit  de 
TAraxe  jusqu*^  la  lorteresse  d' Abbas- 
Abbad ;  autour  deaouvnges  ext^riean 
de  cette  plaee,  qui  sont  situte  sur  la 
rive  droite  du  fleuve,  il  sera  trao6  un 
rayon  de  troia  verstes  et  demie  (une 
lieue  de  FVanoe),  lequd  s'^tendra  dang 
toutes  lea  directions;  tout  le  tcnraia 

Suisera  renferm^dans  la  eiroonftreoee 
e  oe  rayon  appartiendra  exdosive* 
ment  k  la  Russie,  et  sera  maraud afec 
la  plus  grande  exactitude  dans  respaee 
de  deox  mois,  k  dater  de  ee  jour. 
Depuis  Tendroit  oil  rextrtoit^  orien> 
tale  de  ce  rayon  aura  rejoint  TAraxe, 
la  ligne  fronti^  continuera  k  satvre 
le  lit  de  ce  fleuve,  de  telle  sorts  qua 
les  eaux  qui  eouleot  vers  la  Gaspienne 
appartiendront  k  la  Russie,  tanatsqoe 
oeues  dont  le  versant  regarae  la  Perse 
vesteront  k  ce  royaume.  De  la  crite 
des  hauteurs  de  Dj«k^r,  la  frontiere 
soivra ,  josqu'^  la  sommite  de  Karmar- 
koaia  et  au  dela,  les  crates  des  mon- 
tagnes,  toujours  en  observant  le  prin- 
cipe  du  versant  des  eaux.  Le  district  de 
Zouvante,  k  rexception  de  la  partie 
sittt6e  du  odt6  oppose  de  la  cime  des 
montagnes,  tombara  de  la  sorte  en 
partage  k  la  Russie.  A  partir  de  la  li* 
mite  do  district  de  Ydkidjl,  la  ligne 
frontiere  entre  les  deux  Ktats  suivra  la 
chalne  principale  des  montagnes,  qu*il 
traverse  jusqu'^  la  source  septentrio- 
nale  de  rAstara,  De  lli,  la  frontiere 
suivra  le  lit  de  ce  fleuve  jnsqu'a  eon 
embouchure  dans  la  mer  Gaspienne, 
et  compietera  la  ligne  de  demarcation 
qui  separera  d^sormais  les  possessions 
remectives  de  la  Russie  et  de  la  Perse. 
Le  S*  article  stipule  la  cession  a  la 
Russie  de  toos  les  pays  et  de  toutes  les 
ties ,  de  m^me  que  des  populations  no- 
mades  et  aotres  comprises  dans  les 
limites  indiquees.  Le  6«  fixe  le  mon* 
tant  de  la  contribution  pecuoiairedont 
iioua  avons  parte  plus  naut.  Le  7'  est 
remarquable,  en  ce  qu'il  r6veie  lei 
pretentions  de  la  Russie  a  6*immisoer 
dans  les  affaires  interieuresde  la  ^^^^ 
il  est  ainsi  con^u :  Sa  Majeste  le  schah 


RUSSIE. 


539 


lie  Perse  ayant  jog^  h  propos  de  d^- 
gner  pour  son  sticcesseur  et  li^ritier 
pr^omptif  son  auguste  fils  1e  prince 
Abl>as-Mirza,  Sa  Aajest^  remperear 
de  totites  lea  Rasstes  renege  a  recon- 
nattre  d^  aujourd*hui,  dans  la  per- 
fionne  de  oe  prince,  le  suocesseur  et 
hdritier  pr^omptif  de  la  couronne  de 
Perse  f  et  a  le  considerer  comme  l^i- 
time  souveram  de  ee  royaume  d^  son 
ay^nament  au  tr6ne. 

Cette  clause  6tait  d'aotant  plus  im* 
portante  pour  laRussie,  qu'elle  pla^ait 
sous  sa  protection  immraiate  Abbas- 
Mirza,  centre  lequel  d'aotres  fits  da 
scfaah  nourrissaient  une  jalousie  qui ,  h 
la  mort  du  roi,  aurait  pu  se  traduire 
en  'revolte.  Par  cette  raesore,  le  gou- 
vemement  russo  s'attachait  le  seul 
prince  que  son  courage  et  ses  efforts 
poor  une  prompte  r^tbrnie  ponvaient 
rendreiHi  jour  dangereux. 

Art.  S.  Les  bdtiments  roarchands  de 
ia  Rnssie  jouiront ,  comme  par  le  pass6, 
du  droit  de  naviguer  librement  sur  la 
mer  Caspienne,  et  d*aborder  sur  ses 
cdtes.  Le  m^me  droit  est  accord^  aux 
Mtiments  marchands  de  )a  Perse. 
Quant  aox  bdtiments  de  guerre,  ceux 
qui  portent  le  pavilion  russe  conserve- 
ront  le  privil^e  exclusff  de  naviguer 
sur  cette  mer. 

L'art.  9  est  relatif  aux  agents  et  am- 
bassadeurs  que  les  deux  parties  con- 
tractantes  jngeraient  a  propos  de  s'en- 
voycr. 

Cette  stipulation  permettait*  a  la 
Russie  de  surveiller  les  demarches  de 
la  Perse  J  et  la  mettait  a  Tabri  de  toute 
attaque  imprdrue. 

Le  10*  article  traite  des  privil^es 
et  des  devoirs  des  agents  commer- 
cianx. 

Le  tV  est  relatif  aux  affaires  et  aux 
rtelaniations  particulieres  amen^es  par 
rextension  des  fronti^es  russes.  Le 
13*  fixe  un  terme  de  trois  ann^  pour 
laisser  anx  Persans  le  temps  de  rendre 
ou  d*6changer  leure  propri^tes.  Le  13* 
stipule  r6cnange  des  prisonniers. 

Art.  14.  Les  hautes  parties  contrac- 
tantes  n'exigeront  pas  rextradition  des 
transfuges  ou  deserteurs  qui  auraient 
fdsse  sous  leur  domination  respective 


avant  ou  pendant  la  guerre;  toutefbis, 
pour  pr^venir  les  cons^ences  nm- 
tuellenient  phyudiciables  pouvant  r^- 
sulter  des  intellteences  que  quelques- 
uns  de  ces  transfuges  diercheraient  k 
entretenir  avec  leurs  anciens  compa- 
triotes  ou  vassaux,  le  gonvemement 
persan  s'en^age  h  ne  pas  toller  dans 
ses  possessions  voisines  de  la  Cas* 
pienne  la  presence  des  indlvidns  qui  lui 
seront  nominalement  d^sign^  mainte- 
nant,  ou  qui  lui  seraient  signal^s  k 
Tavenir.  Sa  Majeste  I'empereur  de  tou- 
tes  les  Russies  promet  egalement,  de 
son  c6t^,  de  tie  pas  permettre  que  les 
transfoees  persans  s*etabIissentou  res- 
tent  h  demeure  dans  les  kbanats  de 
Nakhitch^van ,  ainsi  que  dans  la  partie 
du  khanat  d'firivan  situ^  sur  la  rive 
droite  de  I'Araxe.  II  est  entendu  tou- 
tefois  que  cette  clause  n'est  et  ne  sera 
obligatoire  qu*a  regard  d*individus  re- 
vdtns  d'un  caract^e  public  ou  de  cer- 
taines  dignity ,  tels  ^ue  les  khans ,  les 
beys,  et  leschefiB  spirituelsou  mollabs, 
dont  rexemple  personnel ,  les  instiga* 
tions  et  les  men6es  dandestines  |)our- 
niient  exercer  une  influence  pernicieuse 
sur  leurs  anciens  compatriotes,  admi- 
nistres  ou  vassaux.  Pour  ce  (]ui  con- 
cerne  la  masse  de  la  population  dans 
les  deux  pays,  11  est  convenu  entre  les 
deux  parties  contractantes  que  les  su- 
jets  respectifscjui  auraient  passe  ou  qui 

f)asseraient  a  ravenir  d'un  fitat  dans 
*autre  seront  libres  de  s*^tablir,  ou  de 
sojourner  partout  oi!k  le  trouvera  bon 
le  gouvernement  sous  la  dominatioq 
duqud  ils  seront  plac^. 

Par  Tarticle  16,  le  schah  accorde 
une  amnistie  pletne  et  entiere  a  tous 
les  habitants  et  fonctionnaires  de  la 
province  d'Aderbidjan.  Aucun  d>ux, 
sans  exception  de  cat^one,  ne  pourra 
toe  poursuivl  pour  ses  opinions,  pour 
ses  actes,  ou  pour  la  conduite  qu'il 
aurait  tenue,  soit  pendant  la  guerre, 
soit  pendant  Toccupation  temporaire 
de  ladite  province  par  les  troupes  rus- 
ses. II  leur  sera  accord^  en  outre  le 
terme  d'un  an ,  a  dater  de  ce  jour,  pour 
se  transporter  librement,  avec  leurs 
families,  dans  les  l^tats  russes,  pour 
exporter  ou  pour  vendre  leurs  bieus 


L' UNI  VERS. 


meubles,  sans  que  les  gouvernemeots 
ou  les  autorites  locales  puisseot  y 
inettre  le  moindre  obstacle,  ni  pr^ever 
aucun  droit  ou  retribution  sur  les 
biens  ou  sur  les  objets  vendus  par  eux; 
quant  a  leurs  biens  inomeubles,  il  leur 
sera  acoorde  un  ternoe  de  cinq  ans  pour 
les  yendre  ou  pour  en  disposer  a  leur 
gr^. 

Art.  16.  Aussitdt  apres  la  signature 
du  {>resent  traits  de  paix,  les  pienipo- 
tentiaires  respectifs  s*enipresseront 
d'envoyer  en  tous  lieux  les  avis  et  tu- 
jonctions  ndcessaires  pour  la  oessation 
irom^iate  des  hostilit6s. 

Fait  au  village  de  Tourkmantchal, 
le  22  fevrier  1828,  et  le  5  de  scb^bone 
de  Tan  1243  de  Fb^re. 

Presque  toutes  les  stipulations  de 
ce  traite  annoncent  Tintention  de  d^ 
sorganiser  les  provinces  limitrophes 
de  la  Perse,  par  les  mtoes  moyens 
d^j^  employ^  avec  tant  desucces  con- 
tre  la  Pologneet  la  Turquie  :  contrdle 
des  actes  du  gouvernement  persan; 
protecfion  accord^  aux  habitants  pour 
les  exciter  k  abjurer  leur  nationalit6, 
et  h  venir  former  un  noyau  de  popula- 
tion dans  les  provinces  r^mment  in- 
corporees  h  1  empire;  ^tude  syst^ma* 
tique  des  voies  commerciales  les  plus 
avantageuses ;  rien  n'est  oubli^,  tout 
se  combine  pour  faclliter  des  euvahis- 
sements  ulterieurs. 

Tandis  que  la  Russie  reculait  ses 
frontieres  du  c6i6  de  FOrient,  seM 
agents  dipiomatiaues  suivaient  avec 
sollicitude  tous  les  ^v^nements  qui 
s'accomplissaient  en  Europe;  les  affai- 
res de  la  P^ninsule,  Toccupation  de 
TEspagne  par  les  troupes  fran9aises, 
la  resolution  energique  de  Canning 

Sour  soustraire  le  Portugal  k  Tin- 
uence  du  parti  antioonstitutionnel 
de  TEspagne,  mais  surtout  F^tat  de  la 
Grece,  que  la  bataille  de  Navarin  ve- 
nait  de  soustraire  au  joug  des  Turcs, 
toutes  ces  circonstances ,  disons-nous , 
etablissaient,  soit  par  des  luttes,  soit 

8ar  des  triomphes  aiplomatiques,  Fin- 
uence  pleine  d'exigences  du  cabinet 
de  Petersbourg.  L'orateur  anglais  qui 
a  qualifie  de  nefaste  la  victoire  de  Na- 
varin ,  avait  bien  mesure  toute  la  portee 


de  oet  evenement.  UAotridie,  qui 
etait  rest^e  froide  au  milieu  de  Fen- 
thousiasme  general  qu'excitait  en  Eu- 
rope la  cause  des  Grecs,  avait  aussi 
prevu,   avec  sa  sagacite  ordinaire, 

2ue  la  de£aite  des  Turcs  ne  serait  pro- 
table  qu*^  la  Russie;  non-seulement 
oette  derniire  puissance  an^antissait 
d*un  seul  coup  la  marine  des  Otto- 
mans, mais  en  agissant  de  concert 
avec  FAngleterre  et  la  France,  elle 
persuadait  au  divan  que  tout  appui 
etranger  lui  manquerait  des  qu*il  re- 
sisterait  aux  exigences  moscovites. 
Quoi  qu*il  en  soit,  le  pavilion  russe  se 
montra  avec  honneur  dans  ces  mimes 
parages  t^moins,  sous  lerigne  de 
Catherine,  des  suoces  d'Orlbf.  Aujour- 
d'hui  oue  la  Gihce  jouit  d'une  appa- 
rence  ae  liberty  sous  un  gouvememeot 
oonstitutionnel ,  ce  petit  royaume,  d6- 
chire  par  les  factions ,  endette  an  delii 
de  ses  ressources,  use  dans  des  luttes 
mesquines  ce  oue  ses  combats  pour 
Findepsndanoe  lui  ont  laiss^  d'^nergie; 
et  Finuuence  russe  p^se  encore  sur  ses 
destinies  1 

La  Turquie  allait  avoir  son  tour. 
Dans  cette  guerre,  11  faut  reconnaltre 
que  le  droit  etait  enticement  du  c6t6 
de  la  Russie;  la  longaaimite  d" Alexan- 
dre servit  singulierement  les  int^r^ts 
de  Fempire;  k  Fouverture  du  rdgnede 
son  suocesseur,  FEurope  etait  encore 
sous  le  prestige  de  la  moderation  du 
tsar  defunt ,  et  Fon  aimait  k  oonfondre 
avec  la  pens^e  du  cabinet  de  Peters- 
bourg ce  qui  n'etait  qu'un  accident,  que 
Feffet  anormal  de  circonstances  parti- 
culieres.  La  guerre  fut  done  deciaree. 
Nicolas  fit  parattre,  en  avril  1828,  ua 
manifesto  qui  annon^ait  a  ses  sujets 
que  Fheure  d'une  sanglante  reparation 
avait  Sonne.  Nous  croyons  devoir  ex- 
traire  de  la  declaration  de  guerre  que 
la  Russie  adressa  k  la  Porte  les  passa* 
ges  suivants : 

« Seize  annees  se  sont  ecouiees  de- 
puis  la  paix  de  Boukharest,  et  seize 
annees  ont  vu  la  Porte  enfreindre  les 
stipulations  qu*elle  venait  de  conclure, 
eiuder  ses  promesses,  ou  en  subor- 
donner  Faccomplissement  k  d^intermi- 
nables  deiais.  Trop  de  preuves,  que  le 


KUSSIB. 


Ml 


dbiael.  imp^ial  dtera,  d^montrent 
eette  taidaiioe  aveugl^ment  hostile  de 
la  politiqae  du  divan*  Dana  plus  d'une 
occasion,  et  surtout  en  1831,  elle  pnt 
k  regard  de  la  Russia  un  earact^re  de 
nroTocation  et  dlnimiti^  ouverte;  die 
le  repreod  depois  troia  mois  par  des 
actea  aolennels  et  des  mesures  de  no- 
tori^t^  enropN^nne. 

«  Ce  fat  le  jour  ou ,  en  quittant  Cons- 
tantinople, ies  ministres  des  trois 
puissancea  exprimaient  le  ylf  d^ir  de 
oonaerrer  la  paix;  le  lour  ou  la  Porte 
protestait  ^alenient  oe  ses  intentions 
pacifiques,  qu^elle  a  appel6  aux  araies 
oontre  la  Russie  tous  Ies  peuples  qui 
profeaaent  le  culte  de  Mahomet,  et 
qu'avooant  sa  relation  de  n^ocier 
uniquement  pour  8'ap|)r^ter  k  com- 
battre,  et  de  ne  jamais  remplir  Ies 
articles  essentiels  de  la  conventioB 
d'Akermann,  elle  a  declare  ne  Tavoir 
coDdQe  que  dans  Tintention  de  la 
rompre.  La  Porte  n'isnorait  pas  gue 
c'toit  rompre  aussi  tous  Ies  traits 
ant^eurs ,  dont  la  conrention  d*Aker- 
mana  a  stipule  le  renouvdlement; 
mats  elle  avait  arr^t^  d'avance  ses  d6- 
ddons  et  sa  raardie. 

«  Anssitdt  Ies  privil^m  du  pavilion 
niaae  soot  viol^,  Ies  batiments  qu'ils 
couTraient  detenus,  leurs  cargaisons 
aaisiea,  ieors  capitaines  contramts  de 
Jes  livrer  k  dea  priz  fix^a  arfoitraire- 
ment,  ies  valeurs  d'un  payement  tardif 
et  iocomplet  r^uites  de  moiti^,  et  Ies 
sujeta  de  Sa  Majesty  imp^riale  forc^ 
de  deaoendre  k  la  condition  de  rayas, 
ou  de  quitter  en  masse  le  territoire  de 
la  doounation  ottomane.  Gependant 
le  Bosphore  se  ferme,  le  commerce  de 
la  floer  Noire  est  comme  enchatn^,  la 
ruine  des  villes  nisses  gui  lui  doivent 
leur  existence  devient  imminente,  et 
Ies  provinces  m6ridionales  des  Etats 
de  l^mpereur  pnerdent  le  seal  ddx>uch^ 
de  leurs  produits,  la  seule  communi- 
cation  qui  puisse,  en  y  favorisant  Ies 
^changes ,  y  fkonder  le  travail ,  y  por- 
ter rindustrie  et  la  ricbesse.  Mais  Ies 
limites  de  la  Turquie  ne  suffirent  pas 
aoesmalveillantes  dispositions.  Quand 
elfes  ^laterent  k  Constantinople,  le 
g^Q^al  Paakevitcb,  a  la  suite  d'une  glo- 


rieuse  campagne.  n^ociait  avec  la 
Perseunepaix  dont  la  eour  de  Tehten 
avait  d^ja  accepte  Ies  conditions. 
Tout  d*an  coup  11  iut  surpris  des  obsta* 
des  apport^  k  la  signature  de  cette 
convention;  Ies  suggestions  de  la  Tur- 
quie en  toient  la  cause... 

«  La  Russie  n'insistera  pas  sur  Ies 
motifs  qui  Taatorisent  k  ne  point  to- 
l^rer  des  actes  dliostilit^  aussi  mani- 
festes,  et  a  en  empteher  le  retour... 
«  La  paix  de  1812  Halt  k  peine  si- 
gn^, que  d^jk  la  Porte  crut  pouvoir 
Srofiter  impun^ment  des  conjonctures 
ifficiles  oi!^  se  trouvait  alors  la  Russie , 
pour  multiplier  ies  infractions  aux 
engagements  qu'elle  venait  de  prendre. 
Une  amnistie  avait  ^t^  promise  aux 
Serviens :  elle  fut  remplac^e  par  une 
invasion  et  d'afireuz  ravages.  Des  im- 
munity ^taient  garanties  a  la  Moldavie 
et  k  la  Valacbie :  un  systeme  de  spolia- 
tion acheva  la  ruine  de  ces  malheu- 
reuses  provinces.  Les  incursions  des 
peuplades  qui  habitent  la  rive  gauche 
du  Kouban  devaient  dtre  r6prim^ 

Ear  les  soins  de  la  Porte :  dttes  furent 
autement  encouragto ;  et  la  Turquie , 
non  contente  d'dever,  au  sujet  de  olu- 
sieurs  forteresses  indispensables  a  la 
sAret^  de  nos  domaines  asiatiques ,  des 

{>r^tentions  dont  dle-m^me  a  reconnu 
e  peu  de  fondement  par  la  convention 
d'Akermann,  les  rendit  doublement 
inadmissibles,  en  favorisant  aux  bords 
de  la  mer  Noire,  et  jusque  dans  notre 
voisinaee,  le  commerce  des  esclaves, 
les  rapmes,  et  tous  les  genres  de  de- 
sordres.  II  y  eut  plus :  alors,  comme  k 
present,  les  vaisseaux  sur  lesquds 
flottait  le  pavilion  de  Russie  furent 
arr^Us  dans  le  Bosphore ,  et  toutes  les 
stipulations  du  traits  de  commerce  de 
1783  ouvertement  viol^es.  II  n*aurait 
tenu  qu'li  Tempereur  Alexandre  de 
tourner  sa  puissance  contre  la  Porte 
ottomane;  sa  position  lui  ofifrait  d*im- 
menses  avantages  :  il  renon^  k  s*en 
pr^valoir.  Une  si  haute  moderation  ne 
fut  pas  comprise;  pendant  cinq  ana, 
le  divan  se  roidit  contre  les  ouvertures 
conciliantes  de  Tempereur  Alexandre; 
et  cependant  une  guerre  avec  la  Tur- 
quie n'entratnait  aucune  complication 


542 


rUNIVERS. 


des  rapports  de  la  Russie  avec  ses  prfiv 
cipaux  allies.  Nut  pacte  de  garantie, 
nutle  solidarity  politique  ne  rattachait 
les  destinies  de  Tempire  ottoman  aux 
stipulations  r^ratrices  de  1814  et  de 
1815,  a  i'ombre  desquelles  PEurope 
civilis6e  et  chr6tienne  respirait  de  ses 
longues  discordes,  et  voyait  les  gou- 
\Trnement8  unis  par  le  souvenir  d'une 
^loire  commune^  et  par  une  henreuse 
identity  de  principes  et  d'intentions. 

« Un  soul^ement  general  de  la  Mo- 
r^e,etrirruptionenMoldavied'unc!)ef 
de  parti  infid^le  a  ses  devoirs ,  vinrent 
r^veiller  dans  le  gouvemement  et  dans 
la  nation  turque  tons  les  transports 
d*une  haine  aveugle  contre  les  chr^> 
tiens  ses  tributaires,  sans  distinction 
entre  Tinnocent  et  le  coupable.  La 
Russie  frappa  d*une  juste  rqprobation 
Tentreprise  du  prince  Tpsilanti;  elle 
autorisa ,  comme  puissance  protectrice 
des  deux  nations,  les  mesures  de  de- 
fense et  de  repression  l^itime  adopt^s 
par  le  divan ,  en  insistant  toutefois  au* 
prcs  de  lui  sur  la  n^cessit^  de  ne  pas 
confondredes  populations  inoffensives 
avec  les  fauteurs  de  troubles ,  qu*ii  im* 
portait  de  desarmer  et  de  punir.  Ses 
conseils  fiirent  repouss^;  le  represen* 
tant  de  Sa  Majesty  imp^riale  fut  in- 
sults dans  sa  propre  demeure;  l'6lite 
du  clergy  grec,  et  le  patriarche  qui  en 
etait  le  chef,  subirent,  au  milieu  des 
solennit6s  de  notre  sainte  religion ,  un 
supplice  ignominieux.  Tout  oe  qu*il  y 
avait  d^diev^  parmi  les  Chretiens  fot 
saisi,  d^pouilie,  massacre  sans  juge* 
ment;  le  reste  avait  pris  la  iulte.  Ge^ 
pendant  le  feu  de  insurrection,  loin 
de  se  ralentir,  se  propageait  de  toutes 
parts.  £n  vain  le  ministre  de  la  Russie 
essaya  de  rendre  a  la  Porte  un  dernier 
service,  en  vain,  par  sa  note  du  16 
Juillet  1821 ,  11  lui  indiqua  des  voies  de 
conciliation  et  de  salut. 

«  Apres  avoir  protests  contre  des 
crimes  et  des  fureurs  sans  exemple 
dans  l*histoire,  il  se  vit  oblige  de  rem* 
plir  les  ordres  de  son  souverain.  en 
quittant  Constantinople.  Ce  fut  dans 
ce  temps  que  les  puissances  amies  et 
allides  de  la  Russie,  toutes  int^resste 
au  maintien  de  la  tranquillity  gdn^- 


rale,  s*empresserent  d*oifrir  et  d^eni- 
ployer  leurs  bons  offices,  a  Teffet  de 
conjurer  Forage  qui  allait  gronder  sor 
le  gouvemement  turc,  irapp^  d*uii 
aveu^lement  funeste.  La  Russie  sus- 
pendit  h  son  tour  le  redressement  de 
ses  trop  nombrenx  griefs,  dans  Tea* 
poir  de  parvenir  ^  concilier  oe  qu*elle 
se  devait  k  elle-m^me,  avec  les  mana- 
gements que  la  situation  de  TEurope, 
et  son  re|)08,  plus  d*une  fois  compro- 
mis,  paraissaient  alors  r^clamer. 

«  D  aussi  grands  sacrifices  demeur^ 
rent  st^riles.  La  Porte  poursuivit 
Tex^tion  d'un  plan  destrueteur  con* 
tre  les  populations  dir^tiennes  son- 
mises  h  son  pouvoir...  Tattitude  du 
divan  devint  oe  jour  en  jour  plus  me- 
na^ante  k  T^rd  de  la  Servie,  et  t'oc- 
cupation  de  la  MoMavie  et  de  la 
Valacbie  se  prolonged  malgr^  les  ef- 
forts de  la  Grande-Breta^ne  et  les  plus 
solennelles  promesses  faites  ^  son  re- 
pr^entant,  malgr6  m^me  Vempresse- 
ment  de  la  Russie  a  r6tablir,  des 
qu'elles  fiirent  articul^s ,  ses  anciennes 
relations  avec  la  Porte.  Tant  de  proo6- 
d^  bostiles  devaient  enfin  hsser  la 
patience  de  Tempereiir  Alexandre.  11  fit 
remettve  au  mmistire  ottoman,  en 
octobre  1825,  une  protestation  6nergi- 
que;  et  quand  une  roort  pr^eooe  Ten- 
leva  k  Tamour  de  ses  peuples,  il  veniit 
de  d^larer  gu'il  r^leraft  les  afftires 
de  la  Turquie  selon  les  droits  et  les 
int^r^ts  de  son  empire. 

«Un  nouveau  r^ne  conMSien^.- 
D^  son  av^nement  au  trdne,  Tempe* 
reur  Nicolas  entama  des  m^ociations 
avec  la  Porte,  dans  le  but  d'ajuster 
phisieurs  diffi^reDds  qui  ne  regardaient 
que  la  Russie,  et  posa  ensuite,  le  it 
mars  (4  avril)  1826,  de  concert  avec 
Sa  Majesty  le  roi  de  la  Grande-Bre- 
tagne,  les  bases  d'une  intervention 
hautement  r^lam^  par  le  bien  g^n^ 
ral...  D'un  cdt6 ,  Sa  Majesty  imp^aie, 
esperant  de  Tunion  des  grandes  eours 
la  cessation  plus  facile  et  plus  prompte 
de  la  guerre  qui  ensanglante  rOrient, 
renon^it  k  toute  influence  isol^e,  fea^ 
tait  toute  id^  de  mesures  ezelUNves 
dans  eette  question  majeure;  de  Fau* 
tre,  par  ses  n^godations  imm^ates 


h 


RUSSIE. 


543 


iffK  le  divan,  «U€  s*«fibKait  de  lefer 
iDcore  on  obstacle  kh  moncitiaiton 
fatre  les  Tures  et  les  Qrea.  Sous  cos 
MfifNoeSf  les  confidrenees  d'Akermonn 
s'ouvrirent.  EUes  afaootirent  k  la  eon- 
doaoa  d'aneoooTentioD  additioiioeile 
aa  traits  de  BottkhansL...  Uamii 
d'uoe  missiQD  permanente  ^  Gonstan- 
tiaople  Biiivit  de  prts  eet  aeconunode- 
meot,  et  inentdt  le  traits  du  6  juillet 
1827  vint  encore  consacrnr,  k  la  face 
du  iBonde,  les  maximcs  de  dMnteres- 
semeat  dont  fait  foi  le  protooole  da 
29  avril.  Les  yoies  les  plus  amicales 
fareoi  tentdes  pour  faire  agrto*  a  la 
Porte  les  termos  de  cette  transaction 
sahitaare.  Des  comnninications  (run- 
efaef,  oui  ddraulaient  ii  ses  yeux  les 
pbas  des  troi^  cours,  la  prMnrent 
qie ,  dans  le  cas  d'an  refos ,  leors  flottes 
reuoics  seraieat  obligees  d'arrdter  .une 
liitte  devenue  incouipatible  ayec  la  sd^ 
rete  des  iners,  les  besoins  da  ooni*> 
meree  et  la  ehrilisation  du  reste  de 
TEarope.  La  Porte  ne  tint  aucon 
Qompte  de  ees  aTcrtissements.  Un  oom- 
maadant  des  troupes  ottomanes^  aus<- 
dtdt  aines  avoir  condu  u&  armistice 
prmoire,  viola  sa  parole,  et  finit  par 
ea  amkr  &  la  force.  AJors  eat  lieu  to 
coaibat  de  Navarin;  mais,  rdsaltat 
ntosHre  d^un  manque  de  foi  prouvd 
^td'aae  afpression  flagrante ,  oe  combat 
nlmefiMirait  k  la  Russie  et  ^  Ses  al* 
lio  PoQcaaion  d'exprimer  au  diran  to 
d^ir  de  maintenir  to  paix  sur  de  so^ 
tides  garanties. 

« Tel  est  le  syst^me,  teto  sont  les 
actes  aoxoueto  to  Porte  a  repondu  par 
aoB  manimste  du  30  ddoemhre,  et  par 
del  aiesareB  qa\  constituent  autant 
(PiofiractioDS  an  traits  de  la  Russie  v 
aotaat  d'insultes  Ik  ses  droits,  autant 
de  graves  attemtes  k  sa  prospdritd 
nrnmereiato^  autant  de  tmoimages 
da  ddsir  de  lui  snsciter  des  emoarras 
et  des  ennemtok 

«  Ptocee  des  lors  dans  uoe  position 
OQSon  bonneur  et  ses  intdrits  en  movS- 
france  ne  lui  perroetterit  plus  de  na- 
^«  to  Hussie  dddare  to  guerre  k  to 
PoHt  Ottbmaoe,  nonsans  regret,  mau 
aprto  a'amir  nen  ndgligi,  pendant 
Hiu  anndeseanaecutifes,  poiur  lui  en 


dpargoer  les  fonestes  eoosdjfuenoes. 

«  Provoqude  par  to  Turquie,  cette 
guerre  fera  peser  k  sa  charge  les  frais 
^'cHe  entraiae  et  les  pertes  essuyees 
par  les  sujets  de  Sa  Majestd  impdnale; 
entrepcise  pour  remettra  ea  vi^ewr 
des  trait^s  que  la  Porte  reoardeconiae 
non  avenus,  die  tendra  a  en  assurer 
Tobservation  et  Tefficadtd ;  amende  par 
le  besoln  impdrienx  de  garantir  au 
commerce  de  la  mer  Noire  et  li  la  na* 
vigation  du  Boaphore  one  libeftd  dd- 
sormats  inviotome,  elte  sera  dirigde 
vers  oe  but  6galement  utito  k  tous  les 
Etats  de  TEarope. 

«  En  recourant  aux  armei,  to  Rus- 
sie, loin  de  se  livrer,  comme  to  divan 
Ten  aoGttse,  a  des  sentiaoents  de  baine 
contra  la  puissance  ottoroane,  oo  d'en 
rodditer  la  cbota,  croit  avoir  ibami  la 
preuve  oonvaincante  que,  s'il  entratt 
dans  ses  vues  de  la  oombattre  k  ou- 
trance  ou  de  to  renverser,  elle  aurait 
saisi  toutf  s  les  occasions  de  gaerre  que 
8C8  retotions  avec  la  Porte  n'oot  oesse 
de  lui  offirir. 

«  La  Russie  n'cst  pas  moins  dioignde 
de  nonrrir  des  projets  ambitieux.  Assez 
de  pays  et  de  peoples  reconnalssent 
ses  lois,  assez  de  soins  s'attachent  k 
Tdt^ndue  de  ses  domaines. 

«  Pinalement,  la  Russie,  pour  dtre 
en  dtat  de  auerre  avec  to  Porte  par  des 
motifs  ittdependanta  du  traitd  du  6  juil- 
let ,  ne  s'est  pas  dcartde  et  ne  s'dcartera 
ri  des  stipulations  de  cet  acta.  II  ne 
coodamnait  point,  il  ne  pouvait  la 
oondamner  k  sacrifier  des  droits  antd- 
rieurs  d'une  haute  importance ,  k  to*> 
Idrer  di«  provocations  directes,  et  k 
napasdemander  la  rdparation  des  plus 
sansibtos  dommages.  Mais  les  devoirs 

Jia'il  lui  impose,  et  les  principes  sur 
esqoels  il  se  fonde,  seront,  les  una 
remplls  par  die  avec  une  scrupuleuse 
fldditd,  les  autres  observds  sans  devia- 
tion. Ses  allids  la  trouveront  taujours 
prdte  k  conoerter  avee  eux  sa  marche 
dans  Texdoution  du  traits  de  Londres^ 
toujoars  empressdede  coocourir  d  une 
QBuvre  que  sa  rdigion  et  toos  les  sen*- 
tioients  dont  Thumanitd  s'bonore  re- 
oommandent  ii  son  active  soilicituda, 
taujours  dispose  k  ne  profiter  de  sa 


U4 


UUNIVBftS. 


•ituation  actudle  que  pour.aoo^Mrer 
TaocomplisseineDtaes  clauBes  du  traits 
du  ejuillet,  et  non  pour  en  changer 
les  efifets  ou  la  nature.  L'em[>ereur  ne 
posera  les  amies  qu*aprte  avoir  obtenu 
IM  r^sultats  indiqu^  dans  la  preaente 
d^aration. 

«  Donne  a  Saint-P^tersbourg,  le  14 
avril  1828. » 

Le  mar6dial  oomte  Wittgenstein 
oassait  le  Pruth  le  mkot  iour  ou  la 
kussfe  d^arait  la  guerre  a  la  Porte. 
Boukbarest  fut  imm^iatement  oe- 
cup^,  et  Ton  mit  le  si^e  devant 
Brailof.  Un  troisi^me  corps  construisit 
une  digue  de  plus  d'une  lieue,  entre 
Toultcna  et  Issatcha,  pour  passer  le 
Danube  alors  d^bord^.  Ces  travaux  de- 
mandant plusieurs  semaines;  enfin 
le  passage  s  effectua  sous  la  direction 
de  I'empereur.  «l.e  |rfan  suivi  par 
Tarm^B  russe  ^tait  de  p^^trer  en  Bul- 
garia et  de  s'emparer  des  points  prin- 
cipaux ,  dans  le  but  de  facibter  Tappro- 
visionnement  des  troupes.  Varna  etait 
par  consequent  la  place  la  plus  impor* 
tante  et  la  plus  propre  k  servir  de  base 
d'op^ration;  mais,  pour  la  r^uire,  11 
fallait  Fattaquer  aussi  du  cM  de  la 
uieTf  et  une  flotte  rasse  ne  pouvait 
^tre  employ^  k  cet  effet  avant  aue 
Poti  et  Anapa  fussent  au  pouvoir  des 
Busses.  Gette  demise  place  fot  em- 
port^  par  le  prince  Mencfaikof.*  (J. 
Tolstoy,  HistoireduGomtePaske?itch 
d*£rivan). 

La  prise  de  Bra3of  ooAta  cfaer  auz 
Busses;  on  pretend  qu'ils  perdirent 
devant  cette  mMiocre  forterssse  de 
vinfft  k  vingt-cinq  mille  hornmes,  ce 
ou*n  serait  difficfle  d'admettre  sans 
reffet  meurtrier  des  mines,  qui,  au 
lieu  de  faire  sauter  les  remparts , 
firent  p^r  un  nombre  infini  d'assail- 
lants.  Le  grand-due  Micbel,  qui  diri* 
geait  les  travaux  du  si^e,  fit  reoom- 
mencer  Tassaut  aprds  une  tentative 
infructueuse,  et  la  ville  se  rendit  le  8 
juin.  Plusieurs  autres  places  d'une 
rooindre  importance  capitul^rent  suc- 
cessivement  Les  forces  des  Turcs  se 
Goncentraient  k  Schoumla ;  il  ^it  im- 
portant de  les  battre  dans  cette  posi* 
lion ,  ou  du  moins  de  les  bloquer  asses 


^tioitement  pour  les  empteher  de  pren- 
dre k  rerers  les  corps  russes  qui  se 
porteraient  sur  Varna.  L*emperear 
etait  k  la  t^  de  son  arm^.  On  rencon- 
tra  les  Turcs  entre  Kiscbla  et  Boulan- 
louk :  apr^  une  r^istance  briUante,  ilg 
seretirerentdans  leur  camp  retrancM. 
Les  Busses  <,  ne  pouvant  emporter  une 
position  dtfendoe  par  une  arm^  fo^ 
midable,  oero^rent  Schoumla  du  edii 
de  Test,  entre  la  route  de  Silistrie  et 
d^Eski-Stamboul.  Dans  les  combats 
fr^uents  qui  eurent  lieu  k  cette  ^po- 
que,  les  troupes  musulmanes  d^loye- 
rent  un  grand  courage,  et  montr^rent 
ce  qu'elles  pouvaient  devenir  quand  la 
rMbrme  militaire  aurait  porte  tous 
aes  fruits.  Gmndant  le  prince  Men- 
chikof  fiiisait  le  si^  de  Varna.  L'em- 
pereur  sV  rendit  le  31  juillet.  Le 
petit  nombre  des  troupes  russes  et 
rassiette  de  cette  place  lui  prouverent 
bient6t  que  les  traTaux  du  si^  trat- 
neraient  en  lonj^ueur.  D*un  autre  cdte^ 
Silistrie  r^lstait ,  et  sur  tous  les  points 
Tinsuffisance  des  moyens  d*attaque  se 
faisait  yivement  sentir.  L'empereur 
€U\t  r^urn^  k  Odessa,  et  d^^  per- 
suade qu'une  seconde  campanie  serait 
D^oessaire,  il  donnait  ses  orares  dans 
cette  oonviction.  Au  mois  d'aodt,  il  se 
livra  plusieurs  combats  sanglants  qui 
firent  mieuz  reconnattre  encore  com* 
bien  Tarm^e  russe,  disMknin^  sur  un 
espace  si  considerable,  se  trouvait 
bors  d*6tat  d'obtenir  des  a? antages  d^ 
dsifs. 

Le  37  aodt ,  Tempereur  rnoignit  ton 
arm^e  devant  Varna,  et  etaolit  son 
quartier  gte^ral  k  bord  d'un  Taisseau 
de  ligne.  «  La  flotte  se  trourait  em- 
bossM  dans  le  bassin  m^me  de  Varna, 
k  deux  nulle  pas  de  la  citadelle.  Le  to 
septembre,  les  Turcs  firent  une  vive 
sortie;  mats ,  repousses  aTCC  perte,  ib 
se  virent  oontramts  d*abandonner  tons 
1m  points  qu'ils  occupaient  sur  lea 
rives  du  lac  de  Demo...  Le  30  sep- 
tembre, on  fit  jouer  les  mines,  et  Tod 
pratiqua  une  breche  qu'un  faible  deta- 
chement  escalada  dans  la  nuit  du  33 
au  34.  Gependant  U  fut  oblige  de  ae 
retirer;  mats  cette  tentative  ouvrit  lea 
yeux  aux  Tures  sur  hi  possibility  d  un 


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•  « 
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•  ••    ! 


••-• 


&USSIE. 


S4B 


ttUQt,  et  Youssouf- Pacha  capitola. 
Le  twt  qu^on  se  proposait  dans  cette 
cunpagne  fut  atteint;  Varna,  apr^ 
Ink  mois  d'un  si^e  opinidtre,  se 
ivodit  le  2  octobre. 

« La  reddition  de  cette  place  occa- 
skmna  quelques  mouvements  dans  les 
corps  tores.  Omer-Vrione,  aor^  avoir 
inutilement  essay^  de  s'^tablir  sur  la 
rivt  droite  du  Kamtchick ,  fut  oblie^ 
de  rq>asser  le  fleuve  et  de  franchirle 
Balkan.  Dans  toutes  les  guerres  que  la 
Russie  lirre  k  la  Porte,  elle  a  soin  de 
s'assurer  de  la  Valachie.  Le  general 
Gebmar  occupait  cette  province  h  la 
t^e  de  cinq  ou  six  mille  Kusses.  Le  1 3 
septerobre,  le  pacha  de  Vidin,  qui 
oomniandait  vingt^sinq  mille  hommes, 
attaqaa  ce  general  pres  de  Tchorlou. 
Les  Russes ,  formes  en  petits  bataillons 
carr^,  tinrent  ferme  pendant  toute  une 
journee;  la  nuit  m^me  qui  suivit  cette 
belle  defense,  ils  fbndirent  sur  I'en- 
nemi,  qui  ne  s'attendait  pas  h  cette 
brusque  attaque ,  et  le  mirent  dans  une 
deroute  complete.  Sous  les  murs  de 
Schoumla ,  les  Turcs  prirent  Toffensive 
ea  plusieors  rencontres.  Le  g^n^ral 
BLoudzevitch  parvint  cependant  a  re- 
pottsser  Veiinemi ,  non  sans  ^prouver 
Jui-mtoe  des  pertes  assez  considera- 
bles. La  saisoD  ^tait  d^ia  avanc6e;  la 
neige  ooffimen^it  a  rendre  les  chemins 
impraticables',  les  troupes  russes  pri- 
reot  leurs  quartiers  d'hiver,  et  Fempe- 
reur  retourna  h  Odessa. 

«  Maiotenant  nous  aUons  tourner  nos 
regards  sur  TAsie,  et  exposer  succincte- 
Plenties  operations  du  corated'£rivan, 
donees  forces  occupaient  lesTurcs  dans 
leurs  Dossessions  m^idionales ,  et  les 
eoipraiaient  de  coneentrer  toutes  leurs 
forces  du  cot^  du  nord.  Anapa  et  Poti 
allaient  assurer  aux  Russes  les  bou- 
ches  du  Phase,  et  les  rendre  maltres 
du  littoral  de  la  Miogrelie  et  de  Tlme- 
retie.  Paskevitch  s'empara  de  la  for- 
.teresse  de  Kars,  qui  capitula  le  23  de 
juin.  JOeux  mille  Turcs  lurent  tues  ou 
blesses;  trois  mille,  au  nombre  des- 
ijuels  etait  £mir-Pachd ,  chef  du  pacha- 
lick  de  Kars,  deposerent  les  armes, 
et  Ton  trouva  dans  la  place  cent  cin- 
quante  pieces  de  canon  avec  un  nom- 

36*  Livraison.  (Russte.)  t.  ii. 


breux  materiel.  Le  general  russe  avail 
h  lutter  contre  les  diflkultes  des  lieux 
queiquefois  impraticables  pour  Tartil- 
lerie.  Des  symptdmes  de  peste  se 
declar^rent  parmi  ses  troupes;  son 
activity  et  sa  pr^voyance  triomph^rent 
de  tons  ces  obstacles.  Le  24  juillet,  il 
enl^ve  la  forteresse  d*Akhalkalaki.  A  la 
nouvelle  de  oe  succds,  Kertvis  et  Poti 
se  rendent  sans  r^istance.  Le  T'  aodt , 
Tarm^  russe  se  porta  a  Akhaltzik ,  ou 
les  Russes  avaient  r^uni  une  arm6e  de 
trente  mille  hommes;  elle  marcha  a 
travers  une  droite  chatne  de  monta- 

§nes,  ^avissant  des  sentiers  coupes 
e  precipices,  et,  le  5  aodt,  le  g^n&al 
dispersait  un  gros  corps  de  cavalerle 
turque  ({ui  venait  au  secours  de  la  ville 
pour  lui  disputer  le  passage  du  Kour. 
«  Le  oomte  d'J^rivan  n'attendit  pas 
Tarriv^  du  general  Papof ,  qui  se  trou- 
vait  encore  h  deux  journto  de  marche ; 
il  savait  qu*une  attaque  imp^tueuse, 
qiioique  avec  peu  de  troupes,  le  ser* 
virait  plus  efBcacement  que  s'il  avait 
recours  a  des  manoeuvres  lentes.  II 
laissa  le  general  Mouravief  devant  la 
place,  et  partit  avec  huit  bataillons « 
toute  la  cavalerie  et  vingt-cinq  pisses 
de  canon,  pour  tourner  le  flanc  droit 
de  i'ennemi...  II  tomba  sur  un  corps 
de  trente  mille  hommes  qui  sortit  de 
ses  retranchements  pour  se  d^endre. 
On  se  battit  toute  la  joumde;  les 
Turcs  furent  repouss^  dans  leurs  li- 
gnes,  et,  apres  une  vive  fusillade,  le 
camp  retranche  fut  emport^,  et  Ten- 
nemi  poursuivi  au  de\h  de  trente 
verstes.  On  ^valua  ses  pertes  a  deux 
mille  cinq  cents  hommes,  douze  ca* 
nons,  treize  drapeaux ,  sans  compter 
des  approvisionnements  considerables. 
«  Apres  cet  avantage,  le  g^n^al  en 
chef  .retourna  sur->le«champ  sous  les 
murs  d' Akhaltzik,  et  le  si^e  fut 
pousse  avec  vipueur.  L'assaut  fut  iivre 
le  15,  et,  apres  douze  heures  de  com*- 
bat  et  une  defense  desesper6e,  Akhalt- 
zik tomba  au  pouvoir  des  Russes.  La 
citadelle  se  rendit  le  lendemain  et  oh- 
tint  la  libre  sortie;  sa  garnison  ^tait 
forte  de  deux  mille  hommes;  eelle  de 
la  forteresse  de  treize .mille;  soixante* 
sept  canons  ,/)inquante-d6ux  drapeaux> 

11 


1 


646 


L'Ur«IV£llS. 


aoq  queues  de  paote  tombdrent  au 
poufoir  des  yaimiiieiiis.  L*eiinemi  i'^ 
tait  d^endu  avee  an  courage  extraor- 
dinaire :  sur  quatre  centi  artiijeurs,  il 
n'eo  reata  que  dnquante ;  une  oeBtaioe 
de  janiasairea  se  firent  tuer  jusqu'au 
dernier ;  sur  dix-huit  centa  aoldata  d'd- 
lite,  treize  cents  tomb^rent;  lea  habi- 
tants,  qui  eombatttreBt  auasi,  perdi* 
rent  trois  miile  homroes.  Vwaait 
ruase  ^rouva  de  son  e6ts  des  pertes 
seoatbloi,  aurtout  en  officiera;  die  en 
eut  neuf  de  tu^i,  dont  tin  coJonel; 
tnnte<ieuxfarentble68^.»(J-Tol8toy). 

Atzkhoura,  Anrasan,  Bajazet,  Ta* 
pruk-Kale  et  Diaolne  ae  soumirent 
suooeBsiYement  de  gr6  ou  de  force. 
Lea  Ruaaea  en  vinrent  aux  mains  k  di- 
veraearepriaea  aveclesKourdes,  cava- 
liers intrepides,  naaispeu  propres^com- 
battre  centre  des  masses.  PaakeTftch , 
aprds  avoir  aasur^  la  (ubsistancedeaes 
troupes,  suspenditles  operations  mili- 
taires,  et  ae  rendit  a  Tiflis  le4octobra. 

Quoigue  lliiver  edt  suspendu  les 
bostiiita  dans  la  Turquie  d*Europe, 
ie  sultan  prouva  par  quelques  d^ 
monstrations  que  le  syst^me  mili* 
taire  de  la  Turquie  itBXt  complement 
cbaag^.  Le  grand  Vizir  essaya  de 
surprendre  Pfovady,  mala  I'attitude 
des  Ruases  le  for^  Ji  la  retraite.  Le 
g^6ral  Geiemar  eut  aussi  k  repousaer 
ouelques  attaques  dans  laValacbie;  H 
s^empara  de  Kal^  et  de  Tarnovo.  Sise- 
boli,  ainsi  qu*un  petit  fort  dans  le 
golfe  de  Bourgas,  furent  aurpris  par 
une  e&cadre  rune,  et  la  flotle  turque 
qui  statioonait  sur  le  Danube,  prte  de 
Nicopolis,  Alt  d^truite  par  mie  esca- 
driile  rasse;  de  sorte  oue  les  Turca  ne 
poss^daient  plus  que  Gtourgevo  endei^ 
dn  Danube. 

Pendant  que  I'empereur  If  ieolas  or- 
donnait  de  nouvelles  lev^  et  organi- 
sait  de  puissants  nrayens  d'attaque  pour 
la  campaene  de  18S9,  la  dimomatie 
redoublalt  d'efforta  pour  empfleber  lee 
Rusaes  de  poursuivre  leurs  avantagea. 
Le  prince  de  Mettemidi  eollidtalt  a  la 
fois  les  cabinets  de  Londres,  de  Paris 
et  de  Berlin ,  d*empleyei:  leor  interven- 
tion pour  sauver  la  TUrquie  d'uoe  mine 
probable.  Le  butdee^t-bomnMd'lttat 


^talt  en  outre  de  laisaer  les  Rusaes 
sous  le  coup  d'unecampMie  maoqute 
S*il  faut  en  croire  lea  rev61attoiia  du 
Port-folio,  r  Angleterre  n*^tait  pas  dei- 
gnee  de  se  prater  k  cette  combinaison; 
il  a'agissait  d'entratner  la  France,  ce 
qui  aurait  mis  la  Prusie  dana  la  ntea- 
site  de  ae  prononcer  dans  ie  mtee 
sens.  L*habUete  du  comte  Poaco-di- 
Borco  fit  Mxmer  ces  tentatives;  il 
^mploya  son  influence  pcraonndle  anr 
Charles  X  et  sur  le  baron  de  Daaaaa 
pour  d^toumer  le  coup  fat  FAutridie 
ajlait  porter  k  la  Rusaie,  et  il  ooo- 
aeilla  a  aa  cour  de  reprendre  le  plus 
tAt  possible  les  hoatilitte,  bien  per- 
suacf^qu^une  victoire  aptom'rait  mleux 
les  difficult^  qu'un  eongr^  ou  des 
protocoles.  L'Autriehe ,  ae  voyant  aba» 
donn^,  eaaaya  de  palKer  ee  qu*il  y 
avait  eu  d*hostiie  dans  sea  intentioDS. 
et  se  resigns  k  aoufifrir  ce  qu'dle  ne 
pouvait  empMer. 

Le  sultan,  de  aoa  cdt6,  eooottrag^ 
par  qudquea  aucces ,  ne  o^ligeait  rien 
pour  opploser  k  Tennemi  une  rMatance 
vigoureuse.  M^med-Texid,  qui  avait 
aucced^  ik  Huasdn-Paeha ,  fot  reroplac6 
lui-mtoe  par  Resdiid»*Pacba :  ce  der- 
nier arrive  au  camp  de  Schoumla  le  $ 
mais.  L*arm6e  des  Tares  comptait 
environ  cent  mtile  homniee,  dant  an 
tiers  de  troupes  r6guli^res. «  Le  coNrte 
Diebltaefa,  nomni6  g^o^ral  en  chef 
des  armte  ruases,  ae  trouvait  ddil, 
depuis  le  8  f(6vrier,  k  son  quaraer 
e6n^al  dnraasl.  Vers  le  mUSeu  d*nvnl, 
(es  Rusaea,  partagte  ea  de«c  eokm- 
oea,  pasadrent  le  Danube  k  Wt- 
•ova  c^  Kalarascb.  Le  6  mal,  un  oorpe 
d'arm^  oerna  Sillstrie,  et  fbroa  q«el- 

n  troupes  turqoes  k  se  renfennet 
la  place,  abeMonnant  aux  Rimea 
lea  ouwages  avane^.  Le  andne  JcHir»  le 
giMral  Rotii  en  viataux  mains  av<ec  le 
grand  vislr,  qui  commandait  des  foroea 
quadruplea,  et  finitpar  le  flBetlredans 
une  d^roatecottiplite.Parmi  las  Messda. 
ae  trouMiH  Ali*Padia  lul-mdoMi.  Cette 
viotoiie,  bik  sept  mille  hommea  en  bal- 
tirent  trente  mille,  rendit  le  gdodral 
Roth  mattre  de  la  poakioD  de  Devno. » 
(Exfrait  de  fouvrage  d^  dt6,  par 
M.  J.  Tolatoy). 


Russie. 


S4t 


Le  IT  Juin,  SiKstrie,  aprdt  B'€tre 
dtfendue  pendant  six  semaines  ti  avoir 
sotttena  fingt-Sipt  ]oun  de  tranch^ 
OQveite,  ae  renait  aa  gtetek  Kras- 
lov^.  Tandis  oue  le  grand  TiBfr  es- 
sayait  de  repr«nare  Provadi ,  Diebitsch 
se  portait  Tera  Teni-Baaar,  ou  le  g6- 
nml  Roth  Tappuvait  tout  eo  obaerrant 
renmmi.  Le  cointnt  de  Yent-Bazar  fut 
tout  ^  I'ayantage  des  Russes;  ceiui  de 
Koaleftoba  oodta  pha  cAier  aa  ?ain- 
qoeor,  niaia  il  dMida  du  sort  de  la 
campa^ne  (19  mai).  II  paratt  que  Tao* 
tion  avait  €t6  kwgteoips  dooteuse,  et 
que  sans  on  corps  de  rterve  qui  fit 
pencber  I'aTantage  en  fyftur  des  Rus* 
ses,  la  Tietoire  eAt  4i6  au  moins  in- 
ceftasDO. 

Le  paast^  des  Balkans  pouvait  s'ef- 
fectoer  sans  danger  depnis  one  lea 
Russes  ^ient  mattres  de  SHSstrle. 
Pendant  que  toute  Tattention  du  vizir 
se  portaiic  sur  Seboanilaf  des  corps 
msses  qaittaient  I'armle  d'observation 
pendant  la  nnlt,  et  8'6coalaient  silen- 
deosement  sar  Is  route  de  Kamtchik. 
Le  passage  du  fleave  du  mAne  nom 
a*opm  amgr^  la  inteistance  des  Itiros : 
Rudlg^  pen^tra  dans  Aidos,  et  poui^ 
sn&Yft  Fesmeni  dans  la  direction  d^ 
Kamal»t  Dans  le  roCme  temps,  Roth 
e'emporiit  de  la  place  de  Bourgas;  les 
diffirents  passages  da  Balkan  fureot 
anecesaiTenent  occop^  II  y  eut  en* 
core  Has  affaire  asses  cfaauoe  pr^  de 
Slimo :  ectte  viHe  fot  emportee  d'as- 
seat;  el  Diebitsch «  qui  venait  de  ton* 
qa^rur  le  titre  de  Ziaoalkanski ,  s'aran- 
cait  sor  Afldfinople,  od  ii  fit  son  entn6e 
dans  les  demiers  Jours  do  mois  d'aodt* 

Tandis  que  ks  Tores  Toyaient  avec 
eloasenMat  et  d^sespoir  Tennemi  fran- 
cbir  eetteceintare  de  mcmtagaes  qu% 
araical  regard^  juaaa'alors  oonune 
uiiebarfi^tnsunnontable,  les  Russes 
nmportaient  en  Asie  des  avaotages 
BOO  imHaa  dMrift.  Salegh-Paehat 
tbat^  de  dtfendre  EnserouflD,  avait 
rteaf  une  armte  d'enyiron  dnquante 
aMJIehoiDnMs;  nais  an  Ueii  d'amquer 
les  Rosses  en  rase  campagneet  dtpro* 
filer  de  TavantaiQaihi  mibre,  et  de  la 
emaaiasaaee  q«^il  avatt  des  loealitssi 
poor  haiteler  renneini  et  inteeopler 


ses  oonvois ,  il  rterfut  de  repraidre  les 
places  fortes  dont  Paskevnch  s'^lt 
empar^.  Le  comte  d'^rivan  battit  oes 
coi|)8  s^parte,  inhabiles  tncore  dans 
Fart  des,  si^s.  G'est  ainsi  qoe  tons 
les  efforts  des  Turcs  yinrent  Miooer 
oontre  Akhaltzik.  Le  padia  de  Tr^- 
Eonde,  Kaia-Oglou,  qui  avait  rinten- 
tion  d'envahir  la  partie  rasse  de  la 
Gourie,  fut  d^fait  h  Limani  par  le  ^^ 
n^ral  Hesse.  Paskevitch.  oblige  de  laire 
face  h  une  arm^  nombreuse  qui  es* 
sayait  de  Tenvelopper,  fit  venir  quei- 
ques  renforts  de  Bajazet  et  d'firivao; 
toutefois  il  repiit  bientdt  roffenstve. 
Le  g^n^ral  Bourtaof  remporta  un  avan- 
tage  signal^  ^ur  le  lieotenant  du  s^ras^ 
kir,  presdu  village  deTchabori  C3juin). 
tt  Sur  ces  entrefaites ,  an  oorps  de  vingt 
mille  hommes,  sous  les  ordres  da 
Haki-Pacba,  s'avancant  d*£rzerouni, 
vtnt  prendre  une  forte  position  dans 
les  parages  bois^  de  Mili-Douz^,  sur 
le  versantdesflaontagnesdeSacanlottk. 
Un  aotra  corps  de  trente  mille  nonunes 
avait  qaitt6  EraBroum  et  suivait  ee- 
lui-ci« 

«  Le  ooarte  d'£rivan,  de  son  edt^, 
ayant  eonoentr6  ses  forces  prte  du  vil- 
lage Katanli ,  se  pr^parait  aa  coodiat..* 
Le  IS  jain,  il  fit  one  fausse  dteeas* 
tratioo  do  oAt6  da  camp  de  Haki^Pa*' 
eba;  il  ordonaa  en  meme  temps  au 
g^o^ral  Boortzof  de  se  porter  dans 
oatte  direction  avec  une  partie  de  ses 
troupes,  et  partit  lui-mtoe  k  marches 
fiHfcees  vers  les  gorge»des  montagnes 
de  Sagaalouk;  il  fit  eo  une  miit  trente 
ventes  par  des  chemias  inextricables, 
oouverts  de  neige  et  sifionnes  de  pro* 
fonds  ravins.  Le  soir,  il  arriva  au  bord 
de  la  rtvi^  ingis,  sor  le  flanc  de  Isi 
position  de  Tennemi...  Le  IS,  le  g^ 
n^rsl  en  cbrf  avait  toum^  enti^meBt 
la  position  de  Haki-Pacha;  roais  au 
moment  mime  de  Tattaqye,  Tavant* 
giarde  du  s^aaktr,  qui  arnvait  d*£rEe- 
rouof  avec  trente  mille  boBdmes  aa 
seoours  de  son  lieutenant,  d^yxmcha 
par  une  gorge  qui,  da  village  de  Ja« 
visa,  va  se  rmir  h  la  grande  vall^. 
Legdfitod  en  chef  rtelut  aossitdt  de 
ranaquer,  et  mansha  sar  le  s^raskiri 
q^'U  renoootra  pres  du  vtUage  de 


If. 


548 


L'UNIVERS. 


KainlL  La  cavalerie  du  s^raskir  en- 
tama  rafCaire  en  s'elan^ant,  par  un 
mouvement  en  cercle,  sur  Taile  droite 
de  rarm^  russe ,  que  le  comte  d*£ri  van 
conduisait  lui-m^me  h  Tattaque.  Les 
Turcs  furent  oblige  de  plier,  et  Pas- 
kevitch  r^solut  de  poursuiTre  sa  vie- 
toire  et  de  battre  son  principa]  ennemi 
a  fond ,  avant  que  Haki-Pacna  pOt  Hre 
inform^  que  le  s^raskir  ^tait  si  pres  de 
lui.  II  donna  ordre  au  g^n^ral  Bourtzof 
d*inqui^ter  le  eamp  de  Haki-Pacba,  et 
se  hata  d'en  finir  avec  le  s^askir.  Les 
Russes  attaqu^rent  en  trois  colonnes : 
une,  sous  les  ordres  du  g^n^ral  Mou- 
ravief ,  tourna  le  flanc  gauche  de  Ten- 
nemi,  en  s'^levant  sur  le  revers  de  la 
montagne;  la  seconde,  sous  le  ^^neral 
Pankratief,  tourna  sur  la  droite;  le 
g^^al  RaieCski  commandait  la  troi- 
sieme  au  centre :  ce  dernier  avait  ordre 
d*attendre  les  attaques  des  deux  ailes, 
et  de  saisir  le  monient  pour  les  sou- 
tenir...  Assaillis  sur  les  deux  flancs  par 
rinfanterie  russe,  les  Turcs  commen- 
cdrent a  fl^hir...  Au8sit6tla cavalerie 
et  rinfanterie  l^ere  s'^lanc^rent  en 
avant  sur  la  cr^te  de  la  montaene,  et 
la  retraite  de  Tenneroi  devint  oientdt 
une  fiiite  g^n^rale.  Les  Turcs,  aban- 
donnant  leur  artillerie,  se  r^gi^rent 
en  d^ordre  sur  les  roonts  Saganlouk. 
On  trouva  un  riclie  butiu  dans  lear 
camp ,  et  le  champ  de  bataille  convert 
de  morts  t^moigna  de  T^tendue  de 
leurs  pertes. 

«  Apres  cette  victoire ,  Paskevitch 
se  retouma  sans  perdre  de  tem[)8 
contre  le  camp  retranch^  de  Uaki- 
Pacha.  U  paraft  que  ce  dernier  ignorait 
encore  la  ddiaite  du  s^raskir.  On  lui 
envoya  un  prisonnier  pour  Ten  ins^ 
truire.  Le  pacha  voulait  capituler; 
mais  ses  troupes  s'y  oppos^rent  pro- 
bablement,  puisque  le  reu  des  batte- 
ries turques  recommen^  bient^t  avec 
force.  Cette  circonstance  d^cida  le 
comte  Paskevitch  h  donner  le  Signal 
de  Tattaque ,  et  Tarm^e  russe  s'^ranla 
en  cinq  colonnes. 

xLa  colonne  prindpale,  conduite 

Imr  le  comte  d'invan,  marcha  droit  k 
*ennemi;  la  seconde,  sous  les  ordres 
de  Pankratief ,  fnt  diarg^e  de  prendre 


en  flanc  la  position  de  Tennemi  pour 
lui  couper  la  retraite;  les  trois  autres, 
sous  les  ordres  des  eeneraux  &Mcken, 
Mouravief  et  Ltonot,  se  porterent  sur 
les  routes  de  Midgingerd,  de  Zanaah  et 
de  la  valine  d*Andjar.  Les  deux  pre- 
mieres colonnes  pen^trerent  dans  le 
camp,  qu*elles  mirentend^route;elles 
s^emparerent  des  canons  encore  fu- 
mants  des  Turcs,  et  les  touroerent 
aus8it4t  contre  les  fuyards.  Le  gdndral 
Pankratief  les  atteigmt  dans  leucftiite, 
et  fit  un  grand  nombre  de  prisonniers, 
parmi  lesquels  se  trouva  Haki-Paoha , 
lieutenant,  du  s^raskir.  Les  colonnes 
destinies  k  couper  la  retraite  de  l*en- 
nemi  rencontrerent  des  ravins  pro- 
fonds ,  des  for^ts  6paisses ,  et  ne  purent 
Temp^cher  de  se  Bauver  en  partie  dans 
les  voies  et  les  gorges  du  bassin  de 
TAraxe.  II  serait  difficile  d'^valuer  la 
perte  des  Turcs  en  morts  et  en  blesses ; 
les  prisonniers  ^talent  au  nombre  de 
douze  cents.  Dix-neuf  canons,  des 
armes  de  toute  espece,  et  tout  I  atti- 
rail  du  camp  tomberent  au  pouvoir  du 
vainqueur.  v  (Extraitde  FEssai  biogra- 
phique  et  historique  sur  le  comte  Pas- 
kevitch, par  J.  Tolstoy). 

L*armee  russe  avail  k  franchir  les 
monts  Saganlouk  pour  se  porter  sur 
Erzeroum ;  la  forteresse  de  Hussdn- 
Ral^  se  rendit  sur  une  simple  somma- 
tion.  Les  Russes  y  trouverent  des 
approvisionnements  consfd^rables  et 
vingt-neuf  canons.  Le  37  juin  ,Tarm^ 
de  Paskevitch  campait  k  quelque  dis- 
tance d*£rzeroum.  II  commen^  par 
s*emparer  des  hauteurs  deTap-Dagb, 
qui  dominent  la  ville,  et  Tartillerie 
russe,  de  ce  point  culminant,  ouvrit 
un  feu  terrible  contre  la  place,  qui  ca- 
pitula  le  37  juin.  Outre  des  approvi- 
sionnements et  des  munitions  de  toute 
esp(k$e,  on  y  trouva  cent  cinqoaote 
canons.  Le  Kraskir  et  quatre  autres 
pachas  furent  faits  prisonniers.  Paske- 
vitch, en  recompense  de  ce  britlant 
succ^ ,  fiit  nomm^dievalierde  Tordre 
militaire  de  Saint -Georges  de  la  pre- 
miere dasse. 

La  prise  d'Erzeroam  forqa  le  pacha 
de  Van,  qui  assi^eait  Bajazet,  a  r^ 
trograder  pour  alter  d^fendre  son  pa- 


RUSSIS. 


649 


(Mk.  lie  g^n^ral  Bonrtzof  s^empara 
deBaibourt ,  plaee  d'ane  haute  impor- 
tance a  cause  de  sa  position  dans  le 
roisinace  dea  mines  de  cuirre  dont  les 
Tores  tirent  un  revenu  considerable. 
Les  Rasses  continuaient  k  s'^tendre, 
oooapant  les  points  les  plus  favorables , 
taot  pour  assurer  leur  noofelle  con- 
qnte  que  poor  en  faciliter  de  nou- 
reUes.  Cependant  le  genial  Boortzof 
sortit  de  Baibourt  pour  se  porter  a  la 
rencontre  d^un  corps  tore  qui  s*6tait 
reoni  sur  la  route  de  Tr Aisonde ;  il 
Paltaoua  pr^  d*un  defile  vers  le  vil- 
lage de  Kiiart ;  mais ,  envelopp^  par 
d^  forces  supto'eures ,  il  toniba  franp^ 
d*une  balle ,  et  ses  troupes  furent  obli- 
gees de  se  renfermer  aaos  la  place. 
lies  Tdrcs  reprirent  Baibourt,  mais 
Paskevitdi  les  en  chassa  apres  un  as- 
saot  meurtrier.  Le  general  en  chef 
marchait  d^ia  surTr6oisonde,1orsqu*il 
apprit  que  la  paix  ^tait  sign^  a  An- 
ariDople  entre  la  Russie  et  la  Porte. 
n  retourna  k  Tiflis,  et  organisa  une 
expedition  contre  les  peuplades  au 
nord  du  Caucase,  qui  ^taient  en  pleine 
insurrection. 

La  campagne  d'Orient  venait  de 
finir  d^une  mani^re  glorieuse  pour  les 
Russes;  le  trait6  d\Andrinople,  con- 
du  le  i  (14)  septerabre  1829,  leur  as- 
sorait  des  avantages  qui  compensaient 
amplem^t  leurs  sacrifices.  Et  cepen- 
dant ces  sacrifices  furent  immenses. 
Sdon  le  rapport  du  lieutenant-colonel 
Cbesney,  aans  la  premiere  campagne 
qui  cut  pour  rdsultat  la  prise  de  Varna 
et  la  Iev6e  du  si^ge  de  Silistrie ,  des 
mllliers  de  Russes  p^rirent  de  la  peste , 
et  lis  perdirent  f  rente  mille  chevaux. 
D'aprte  les  m^mes  renseignements , 
les  Russes  traversdrent  le  Balkan  au 
nombre  de  quarante  mille  seulement , 
dost,  quelques jours  apres,  un  quart 
se  trouvait  dans  les  h6pitaux.  Get  of- 
ikaer  ajoute  que ,  sans  compter  les  Bos- 
niens  qui  ne  s*avancerent  pas  au  del^ 
de  leors  propres  frontidres ,  les  Turcs 
B*ont  jamais  eii  sur  pied ,  dans  cette 
guerre ,  plus  de  cent  mille  hommes  de 
troupes  UT^uli^res ,  et  quarante  mille 
de  troupes  r^gulieres. 

•  Les  Russes  se  ressentaient  cruelle- 


ment  de  Teffet  des  maladies  qui  n^at- 
teignatent  pas  les  Turcs ,  probaolement 
h  cause  de  leur  pratique  religieuse 
d*ablutions  oontfnuelles.  Les  Rosses 
souffraient  aussi  beaucoup  do  manque 
de  vivres ,  ou  p1ut6t  de  ce  qui  en  re- 
venait  au  soldat ,  en  vertu  des  contrats 
de  foumitures  passes  avec  les  ofB- 
ciers. 

«  A  Boukharest ,  en  d^embre  1829, 
le  m^ecin  en  chef  convenait  de  la 
perte  de  douze  mille  Russes  morts  de 
la  peste.  A  Varna ,  les  ofBciers  russes 
estimaient  leurs  pertes  k  dix  mille 
hommes.  A  Stiistne ,  la  mortality  ^tait 
terrible.  A  Andrinople*,  six  mille  ma- 
lades  moururent  tous  an  bout  de  trois 
mois.  La  perte  totale  des  Russes ,  dans 
les  deux  campagnes ,  fut  de  cent  qua- 
rante mille  hommes  et  de  cinquante 
mille  chevaux.  »  (Port-folio,  n*  26.) 

Bien  que  les  trait^s  n'aient  qu*une 
existence  ^ph^mdre,  il  est  cependant 
indispensable  de  les  m6diter,  parce 

3u*ils  expriment  la  situation  respective 
es  puissances  contractantes ,  ei  qu'on 
y  retrouve ,  sans  un  grand  effort  d'at- 
tention ,  les  tendances  ult^rieures  de 
la  partie  pr^pond^rante.  Guid^  par 
ces  motifs ,  noiA  aliens  rapporter  les 
stipulations  principales  du  traits  d*An- 
drinople. 

Le  premier  article  n*est  qu'un  pr^am* 
bule  ae  pure  forme. 

Article  2.  Sa  Majesty  Tempereur  et 
padischah  de  toutes  les  Russies  rend 
a  la  Sublime  Porte  la  principaute  de 
Moldavia,  avec  toutes  les  fronti^res 
au*elle  avait  avant  le  commencement 
de  la  guerre  h  laquelle  le  present  traits 
a  mis  fin ;  Sa  Majest6  imp^riale  rend 
aussi  la  principaute  de  Valachie,  le 
banat  de  RraTovat ,  la  Bulgarie  et  le 
pays  de  Dobroutche  depuis  le  Danube 
jusqu*i^  la  mer,  ainsi  que  Silistrie, 
Hirsova ,  Matcbin ,  Issaktcha ,  Toult- 
cha ,  Babadag ,  Bazardgik ,  Varna ,  Pro- 
vadi-et  autres  villes,  bourgs  et  vil- 
lages qu*il  contient,  toute  T^tendue 
du  Balkan,  depuis  l^min^ - Bournou 
jusqu'a  Kosan ,  et  tout  le  pays  depuis 
e  Balkan  jusqu*^  la  mer,  avec  Se- 
limno,  Yamboli,  Aidos,  Karnabat, 
Andrinople,  Bourgas,  et  toutes  les 


uo 


UVItlVEHS. 


vJUes,  boMifjji  «C  villagiB,  ainsi  que 
totttcs  l«t  places  ^e  let  trouDW  rusies 
fNit  oeevpees  daas  la  Rouinelie. 

Article  3..Le  Proth  continvera  de 
former  la  limUedee deui  emiares, de- 
IMiiB  la  point  oik  cetta  mi&e  teudie 
an  territoira  de  la  MoklaTia  josqu'^ 
sa  jonctioD  avee  la  DaooiM.  De  ce 

SoiDt  la  ligDe  fronti^re  suivra  la  eours 
u  Danube  joaqu'^  rembouehure  de 
Saint-Georaea;  de  aorte  que,  laiaaaQt 
toutea  lea  lies  form^ea  par  lea  divers 
bras  da  ee  fleuve  en  possessuNi  de  la 
Russia ,  la  rive  droita  rastei'a,  oomaia 
par  la  pasa^»eopo8aessioa  de  la  Porte 
ottomase.  Cependaot  il  est  oonvenu 
oua  eetta  rive  droite  restera  inhabit6e 
aapufs  la  point  oil  le  bras  de  Saint- 
Georgas  se  s^pare  de  celai  de  Soolini , 
h  une  distance  de  deux  heures  du 
fleuve  y  et  qu^aucun  ^tablissament  n'y 
sera  form^ ,  non  plus  que  sor  lea  ties 
qui  resteroot  au  pouvoir  de  la  Russie ; 
et ,  ^  Fexception  des  ouarantaines  qui 
pourront  y  toe  ^tabiies,  il  ne  sera 
perinisd*y  fsure  aucun  autre  ^tablisse^ 
inent.  Les  bdtiments  marchands  des 
deux  puissances  auront  la  faculty  de 
paroourir  le  Danube  dans  tout  son 
cours ;  et  ceux  qui  p^teront  le  pavil- 
ion ottooian  auront  libra  entr^  dans 
les  embouchures  de  Kill  et  SouUni, 
celledeSaiotGeorgearestantcoimnune 
aux  navires  de  guerre  et  b&timents 
marchands  des  deux  puissances  con- 
tractantes*  Mais  les  navires  de  guerre 
fusses « lorsquUIs  remonteront  le  Da- 
nube, n'avanceront  pas  au  dela  du 
point  de  sa  jonction  avec  la  Prqtb. 

Cea  dispositions  mettent  h  la  dispo- 
sition des  Ruases  rembouehure  du  Da- 
nube. 

Article  4.  I4a  Gfor^ie ,  I'lm^r^tie , 
la  Mingrelie »  la  Gourie ,  et  piusieurs 
autres  provinces  du  Caucase,  ayant  iU 
depuis  de  longues  ann^es  et  h  perp^ 
tuit^  r^unies  a  Tempire  de  Russie,  et 
ret  empire  ^ant  acquis »  par  le  traits 
de  Tourkmantcha! ,  les  kbanats  d'l^n^ 
van  et  de  Nakbitch^van  Jes  deux  bautes 
parties  contractantes  ont  reeonnu  la 
ndcessit^  d*^tablir  entre  leurs  ^tats 
respecti&  le  long  de  cette  ligne  une 
fronti^re  bion  tracee  pour  pr^venir 


twte  diseiiaaioB  uHMeHve.  EUea  out 
^emcBt  pria  en  eoasid^ralioa  les 
moyeas  oonvenables  de'a'opposer  anx 
Incuraioiis  que  lea  tribua  fOMioes  ont 
faites  juaqu^^  et  jour,  et  ffi^i  oot  si 
aouvent  oompromia  lea  relationa  d'ami- 
tid  et  da  boime  inteliigeBce  entro  les 
deux  empiras.  En  consequence,  il  a 
^t^  cOBvemi  de  consid^er  d^sonttais 
Gomme  fonnant  la  frontite  entre  les 
territoiree  de  la  cour  impMale  da  Rua- 
aie  et  oeux  de  la  Subume  Porte  en 
Asie,  la  Knie  qui,  aaivant  la  limite  ac- 
tuellc  da  la  Gourie  t  depuia  la  mer 
lioire ,  remoiite  juaqu'au  bord  de  rime- 
r^tie,  et  da  lli  en  lime  droita  jusqu'au 

Soint  oil  les  £pontierea  des.  pachaliks 
'Akhaltzik  et  de  Rars  renoontrent 
celles  de  la  Georgie,  laissant  de  oatte 
manidre  au  nord  et  au  dedana  da  eette 
liffie  la  viUe  d'AkhalUik  et  le  fort  de 
Knaltnanik  h  une  distance  motndre  de 
deux  heures.  Tous  les  pays  aituds  au 
midi  et  k  Touest  de  oette  ugne  de  d^ 
marcation ,  vers  lea  pacbaiiks  de  Rars 
et  de  Trebisonda ,  ainsi  que  hi  miyeure 
partie  du  padialik  d'Akhaltaik ,  reste- 
ront  a  perp^tuit^  sous  la  domination 
de  la  Sublime  Porte,  tandis  que  ceux 
qui  sont  situ6s  au  nord  et  k  Test  de  Is 
Ugne  mentionn^e  ct-dessus,  vers  la 
Gargle ,  llm^etie  et  la  Gourie,  aibsi 
que  le  littoral  de  la  mer  Noire,  de- 
puis rembouehure  duKoubaajusqu*au 
port  Saint-Nicolas  inchisivement ,  se- 
ront  sous  la  domination  de  Feoipire 
de  Russie*  En  cons^uenoe ,  la  cour 
imp^iale  de  Bussie  abandonne  et  rend 
k  la  Sublime  Porte  le  reste  du  paeha- 
lik  d^Akbaltzik ,  la  ville  et  le  pachafik 
de  Kars ,  la  ville  et  le  pachalik  de  Ba- 
jazet,  la  ville  et  le  pachalik  d*£rze- 
roum,  ainsi  que  les  places  occupto 
par  les  troupes  russes,  qui  peuvent 
dtre  en  dehors  de  la  ligne  mdiqu^e. 

Les  stipulations  contenues  dans  cet 
article  tendent  ^videmment  k  faciltter 
la  soumission  des  peuplades  du  Cau- 
case ,  en  les  isolant  de  tons  c6t^. 

Article  5.  Les  prineipaut^  de  Mol- 
davie  et  de  Yalachie  s  6tant  plac6es , 
par  une  capitulation ,  sous  la  snzerai* 
net^  de  la  Sublime  Porte,  elles  conser- 
veront  tons  les  privileges  et  immnni* 


RVSSIE. 


6iit 


ikm\  km  aaroni  4fU  aoeovMs,  soft 
pr  \a  trsit^  o(molo»  etitre  m  dcm 
eoms  nnp6iial«8.  soit  par  les  hati* 
Aktib  pronmlciiM  2^diferM»  ^poques. 
Elles  jobiront  da  libre  ocereice  de  leinr 
idi^ ,  d'Hoe  p«r&ife  nkxMS^  d'ana 
adminJttratkMi  Dationale  et  ind^pan* 
dantf ,  et  d*iiiM  entidre  liberty  de  oom- 

RNfOC)  etc* 

L'artide  0  eit  rdatif  aai  daoaas 
stipoMea  dans  la  oonveotkm  8^r6e 
relative  i  la  Senrie. 

Dana  I'articfe  7,  qui  eoneerne  tea 
tfroits  et  priYiMgaa  eominewaaqx,  on 
remarque  lea  paaaagea  aoiiraiita :  lea 
sojets,  bitimenta  et  marchandisea 
nuao  aaront  k  Fabri  de  toute  vio* 
loiee  et  de  toute  vexatfioii.  Lea  aajeta 
,  nistts  aeront  sous  la  joridictfOQ  ex- 
'  dnsiTe  et  la  pNOlioe  dea  miniatrea  et 
coDfloladeRuasaie.  Les  bdtimenta  nissea 
m  seroat  aoumis  ^  aucone  vidte  de  la 
part  dea  aotorit^  ottoman^,  nf  en 
mer,  ni  dana  aacnn  deaoorts  ou  radea 
dea  passeaaions  de  la  Subifme  Porte. 
Toatea  lea  mardiandiaea  ou  denrdea 
appartenant  k  tin  aujet  rasse,  apr^ 
avoir  payd  lea  drofta  ae  doaane  atipo- 
1^  par  lea  tarifa,  seront  libremenl 
tranaportto,  d^poate  a  terre,  dana 
les  magagina  du  propri^taire  ou  de 
Bon  coosieDataire,  ou  tranaportto  k 
bord  dea  biltinienta  de  toute  autre  na- 
tion qudconque,  aana  que  les  sujeta 
mssea  aoient  tenua  d*en  donner  a^ia 
aox  aQt(Nit6a  locales ,  et  encore  moina 
de  demander  leur  atxtorisation.  Lea 
grains  prorenant  de  la  Ruaaie  jouiront 
dea  mdioes  privildges ;  la  Sublime  Porte 
s'engage,  en  outre,  a  veiller  aoigneu- 
sonent  a  ee  one  te  commerce  et  la 
navigation  de  la  mer  Noire  aoient  d6- 
gagra  de  toute  entrave.  £]Ie  reconnatt 
et  d^lare  le  canal  de  Constantinople 
etieddtroit  dea  Dardanelles  libremeot 
oaverta  am  bdtiments  russea  sous 
parillon  marchand,  pour  la  sortie 
ooimne  pour  le  retour.  Le  passage  du 
caaal  de  Constantinople  et  du  detroit 
des  Dardanelles  est  ouvert  a  tous  les 
Mttments  en  paix  avec  la  Sublime 
1^.  Si )  ce  qu*a  Dieu  ne  plaise,  quel- 
QQ'mie  dea  stipulations  contenues  dans 
|e  present  article  ^it  et  demeurait 


enlretiite,  aoneMaat  laa  tMamationa 
dtt  miniatre  naaae  k  ea  aitjet^  la  Soblbne 
Porte  reoonnatt  d^avanee  le  droit  de  la 
eour  impdriale  de  Raaaie  de  eenaidd- 
ter  una  telle  tiifraetioo  oomnae  ua  aete 
d'hoatilitd. 

L'deoulemeot  dea  rlchea  produita 
de  la  Ruaaie  iiidrldioBale  eat  anurd  par 
oet  artiele ;  et ,  ooramercialenieot  par- 
lant ,  la  mer  Roire  n*eetpliiaqti*un  lae 
maae* 

L'artfete  9  ddAait  lea  htdenmitda 
duea  par  la  Parte  an  eommeree  ruase , 
depuis  la  guerre  de  IS06 ,  et  lea  fixe  h 
on  miUioii  et  demi  de  dueata. 

L*artiete  9  eat  felatif  ft  rindemnitd 
pour  lea  frala  de  la  aaerre;  elle  eat 
lixde  dana  Tar^le  addttionnel  h  dfx 
ffllHiona  de  ducata  de  Hollande ,  indd- 
pendamment  de  la  oeaaion  dv  terri- 
iotre  aaiatique  stfpujde  par  Tartiele  4. 

Artiele  10.  La  Sublime  Porte,  en 
ddelarant  son  adhdslon  en^^  aux  sti- 
pulations du  traitd  (sur  lea  affaires  de 
la  Gr^)  oonclu  h  Londres  le  24  juin 
(^  Jutllet  1827)  entre  la  Ruaafe,  la 
Grande-Bretagne  et  la  France ,  adb^ 

Salement  h  Taete  du  10  (24  mars  182^), 
[figdd'un  consentement  mutuel  entre 
ces  mdmes  puissances  sur  lea  bases 
dudit  traltd,  et  contenant  lea  meaorea 
de  detail  relatiyes  h  son  exdcution  d6fi- 
nttire... 

Article  IS.  Les  bautes  puissances 
eontractantes  aocordent  ira  pardon 
g^ndral  et  une  amnistie  pleine  et  en- 
tiere  k  tous  cent  de  leurs  sujets  qui , 
pendant  le  conrs  de  la  guerre ,  auront 
pris  part  aox  operations  militaires ,  ou 
manifestd ,  soit  par  leur  condutte,  soft 
par  fenrs  opinions ,  leur  attacbement 
a  Tune  ou  a  Fautre  des  deux  parties. 
En  consequence ,  aucun  de  ces  indiri- 
dus  ne  sera  inquietdni  persdcut6,  soit 
dans  sa  personne ,  soit  dans  sa  pro- 
prietd,  pour  sa  conduite  pass^e;  et 
chacun  aeux ,  recouvrant  les  proprid<* 
t^s  qu*il  possddait  aupararant ,  en 
jouira  paisiblement  sous  la  protection 
des  lois,  et  sera  libre  d'en  disposer 
dans  Tespace  de  dix-huit  mois ,  connne 
de  se  transporter  avec  sa  famille ,  ses 
biens ,  etc. ,  dans  le  pays  qu'il  aura 
choisi ,  sans  dprouver  aucune  entrare 


$6$ 


L*UlfIVEE-S. 


ou  vexation  quekooqiie.  Les  mimiu 
privilidges  soni  assnres  aux  sujets  res- 
pectins  des  deux  puissances  ^tablis  sur 
les  tevritoires  rendqs  h  la  Sublime 
Porte ,  ou  G^^  k  Ja  cour  imperiale  de 
Russie. 

Get  article  d^voile  toute  la  marche 
que  suit  le  cabinet  russe  dans  ses  ea- 
vahissements  suocessifs  pour  atUrer  a 
lui  les  populations  des  provinces  con- 
quises ,  et  pour  jeter  au  sein  des  con- 
Mes  liraitropbes  qu'il  oonvoite,  des 
Elements  d'opposition  qu'il  sait  exploi- 
ter en  temps  opportun. 

Article  15.  Tou9  les  traits ,  conven- 
tions et  stipulationfi,  arrlt^  et  con- 
elus,  a  diverses  ^poques,  entre  la 
^ur  imp^iale  de  Russie  et  la  Porte 
ottomane,  h  Texoeption  de  ceux  qui 
sont  annules  par  le  pr^ent  traits  de 
paix ,  sont  confirm^  dans  toute  leur 
lorce  et  eflPet ;  et  les  deux  bautes  par- 
ties ooniractantes  s*engagent  h  les 
executer  religieuseraent  et  inviolable- 
ment. 

L*article  additionnel,  qui  fixe  la 

Siotite  de  Tindemnit^ ,  stipule  que  la 
ussie  acoeptera ,  en  d^uction  de  cette 
somme,  des  ^ivalents  qui  seront 
Gonsentis  de  part  et  d*autre. 

Quant  k  la  stipulation  contenue  dans 
Tacte  $epare  concernant  les  urinci- 
paut6s  de  Moldavie  et  de  Valacriie ,  et 
^  vertu  de  laquelle  les  villes  turques 
situto  sur  la  rive  gauche  du  Danube, 
ToumoYO,  Giourgevo, Braiioff,  etc., 
avec  leur  territoire ,  doivent  £tre  r^u- 
nies  a  la  Valacbie ,  et  les  fortifications 
qui  Qht  ci-devant  exists  sur  cette  rive 
ne  jamais  £tre  rdtablies ,  il  a  ^t^  r^gle 
que  Giourg^vo  serait  remis  aux  trour 
pes  russes ,  et  que  les  fortifications  en 
^eraient  ras^. 

V^vacuation  des  provinces  d'Asie 
qui  doivent  ^tre  rendues  a  la  Porte 
aura  lieu  cpnform^ent  a  une  con- 
vention particuli^re,  que  le  g^n^ral 
QomtePaskevitcb  a  poqvoir  de  conclure 
avec  les  commandants  de  la  Porte  dans 
ces  contrees. 

La  Russie  venait  de  sortir  d*un 
g^-and  danger;  ies  guerres  d'Oricnt 
avaient  retrempe  Tesprit  de  ses  sol- 
dats,  et  malgr^  In  perte  dMiommcs  et 


les  d^pcnaes  cooaid^cables  qu'avaieiit 
en  trainees  la  double  campagne  de  Perse 
et  de  Turquie ,  Nicolas  avait  atteint  le 
but  que  lui  prescrivaient  a  la  fois  et  la 
politique  coustante  de  son  cabinet  et 
la  situation  particuliere  ou  il  se  trou- 
vait  a  la  suite  de  Temeute  de  1825. 
La  Gr^  ^tait  d^finitivement  s^paree 
de  la  Turquie;  for  et  les  intrigues 
russes  remuaient  profondement  les  par- 
tis dans  cet  J^tat  plac^  sous  la  tutelle 
des  puissances  liberatrices ,  comme  si 
Ton  avait  craint  qu'il  nepoussiStjusqu'a 
leurs  consciences  naturelles  les  prin- 
cipes  de  liberty  qui  Tavaient  soustrait 
au  joug  ottoman ,  et  que  Tener^ied^un 
peuple  qui  se  r^6nere  par  lui-m&ne 
ne  parOt  un  trop  dangereux  exemple 
pour  ceux  dont  la  politique  avait 
r^cemment  annihil^  la  nationality.  La 
conformity  de  culte  entre  la  Russie  et 
la  Grece  promettait  h  la  premiere  un 
point  d*appui  solide  pour  tons  les  res- 
sorts  qu'il  lui  importaitdVfairejouer. 
Nous  avons  vu  comment  radresse  des 
ambassadeursde  Nicolas  pres  les  cours 
de  France  et  d'Angleterre  etait  par- 
venue  k  assoder  aux  efforts  de  l^m- 
pire  centre  la  Porte  les  forces  mari- 
times  qui  auraient  M  ^tre  la  sau vegarde 
de  ripviolabilite  turque.  Les  Darda- 
nelles n*6taient  plus  un  obstacle ,  et  la 
M6diterran6e  s*ouvrait  d6soirmais  iibre 
et  riche  de  promesses  aux  dominateurs 
de  TEuxin.  L*Autriche  avait  ^choue 
dans  ses  tentatives  pour  opposer  un 
frein  continental  k  la  marche  envahis- 
sante  de  sa  puissante  rivale.  La  Tur- 
quie ^tait  d^bord^e  du  c5t^  de  la  Perse , 
et  le  Caucase  s'abaissait  devant  les  le- 
gions du  nord ,  entralnde$  par  un  pen- 
chant irr^istible  vers  ces  contr^  ierti- 
les  et  heureuses,  berceau  desplus  grands 
peuples  de  Tantiquite.  Cependant  les 
sacrifices  dont  la  Russie  avait  pay^  ces 
avantages  ^taient  immenses,  et  elle 
^vait  besoin  de  repos  pour  panser  ses 
blessures,  reviver  radministralion  in- 
t^rieure,  retremper  Tespritde  la  jeu- 
nesse  par  un  systeme  d*instruction  plus 
national ,  et  coordonner  les  Elements 
de  sa  force  agressive  avec  les  condi- 
tions de  ses  nouvelles  conqu^tes.  Tout 
5  coup  la  revolution  de  juillet  eclata ; 


RUSSIE. 


iiRniice ,  sorUnt  d'i»  long  sommeil, 
r^  tfans  Teiil  les  piinoes  que  lui 
avail  iiMos^  rinfliwnoe  ^trang^e, 
etqui,  pla<M§8  dans  raltemattve  de  se 
fflODtrer  bostiles  a  ceox  qui  avaient 
flit  la  restaaration «  ou  de  dtfendre 
moUement  les  droits  du  peuple  ^i 
Tavait  subie ,  oubiierent  que  la  l^ti* 
imt^abdiquedes  <]u'eUe  renonce  h  oette 
aetloo  coDser? atrioe  et  jalouse  gui  fait 
sa  force ,  et  d^chirtreDt  eux-memes  le 
traits  de  Vienne  en  portant  atteinte  a 
la  constitution  qu'ils  avaient '  jur^. 
Paris  eombattit  trois  jours,  et  la 
Fraace  fiit  libre.  La  Belgique  suivit 
oeteiemple ,  toute  rAllemagne  s'agita , 
nais  DuHe  part  Techo  des  oris  de  li- 
berty ne  fut  aussi  retentissant  qu'en 
Pologne.  Cependant  la  revolution  de 
jaillet  ne  fiit  point  la  cause  de  Finsur- 
reetion  de  Varaovie;  nous  avons  vu 
prMlemmeot  qu*une  vaste  conspira- 
tion ^teodait  ses  racines  dans  Farm^ , 
dans  les  university,  et  que  la  dispo- 
sition g^n^rale  des  esprits  toit  favo- 
rable au  but  r^^n^rateur  qu*elle  se 
proposait  Le  fluide  ^ectrique  dtait 
partoat;  il  sufQsait  d'une  ^tincelle 
pourqa'il  rayonndt  puissamment  de  la 
Baltique  k  i'Euxin.  Le  fer  dont  Gons- 
tantin  afait  convert  ses  legions  lui 
senritdeoonducteur,  etia  commotion 
fot  si  Tioloite,  que  le  trdne  de  Tauto- 
crate  en  fut  dbranl^.  Quelques  ann^s 
aoparavant ,  les  Pdlonais  avaient  66- 
battu  la  r^lotion  de  fusilier  sur  la 
plaee  du  palais  Tempereur  Nicolas  r^- 
ceounent  arriv^  k  Varsovte.  Les 
Kpr^sentaots  recul^rent  devaut  T^or- 
vBUi  de  rattentat,  et  le  gou{)  fut 
nanqni.  Les  plus  presses  se  virent 
forces  d'attendre,  et  d^  iors  «rar- 
■m^  et  principalement  la    ^arni- 

*  son  de  Varsovie  absorb^rent  bientdt 
•Urates  les  associations  seoondaires, 

*  ct  toot  oe  qui  brdlait  de  vengeance 
'  et  de  patriotisme  se  reposa  sur  Te- 

*  oereie  des  ef^atUs  du  UarivUch.  Les 
« ^coles ',  les  ateliers ,  les  provinces  et  la 
*<liete'mtoe  qui  conspiraient  tous, 
•jasqo*alors  separ^ment  a  leur  ma- 
•oiere,  leur  abandonn^rent,  par  nii 
'inatinct  r^llement  inexplicable,  les 


4M 


de  la  Fologne. »  ( Mitos- 
lawski. ) 

Durant  quatre  mois  de  pr6paratifs 
et  de  tdtonnements,  les  conspirateurs 
mdrirent  leur  oomplot;  Tex^utioh, 
selon  toute  inrobabilite ,  en  edt  dt^  re- 
mise jusqu^au  printemps  suivant,  si 
I'intention  non  d^iste  du  tsar,  dc 
marcher  sur  la  France  en  poussant 
devant  lui  la  Pologne,  n*edt  pr^ipit^ 
r^poque  de  cette  tentative  h^roique  r 
k  ce  motif  joignons  encore  que ,  parmi 
lea  nombreuses  arrestations  faites  par 
la  police ,  quelques-unes  avaient  donn^ 
TOTcil  au  gouvernement ,  et  qu'il  Malt 
important  de  ne  pas  lui  laisser  ie  temps 
de  se  reconnattre ,  et  de  prendre  le& 
mesures  que  reclamaiient  les  drobns- 
tances.  Dans  la  soiree  du  20  novem- 
bre ,  les  principaux  points  de  la  capi- 
tale  furent  envahis  par  les  troupes 
destinte  h  agir.  On  commen^a  par 
s'assurer  de  Tarsenal ,  et  Tattaque  du 
Belvedere  devint  I'objet  de  tous  les  ef- 
forts. Les  porte-enseignes,  comnoan- 
d^  par  Wysolcfci ,  et  appuy(6s  par 
quelques  oompagnies  de  chasseurs  h 
pied  et  de  la  ligne ,  devaient  ex^uter 
ce  bardi  coup  de  main.  Les  ^l^ves  de 
I'universite  vinrent  se  joindre  a  eux 
et  re^urent  des  armes;  bientdt,dans 
le  silence  de  la  nutt ,  ils  s'^lancent  vers 
la  demeure  de  Constantin ;  le  prince, 
ignorant  tout  se  qui  se  passait,  ^tait 
sur  le  point  de  s'endormir,  lorsque 
le  bruit  de  Tattaque  retentit  autour  de 
lui ;  il  n'a  que  le  temps  de  jeter  sur 
ses  epaules  una  robe  de  nuit ,  et  il  se 
glisse  inapcTQu  dans  les  jardins  du 
chateau.  Lubowioki ,  devou6  a  Cons- 
tantin ,  tombe  perc^  de  treize  coups  de 
baionnette.  Gendre ,  favori  du  grand- 
due,  subit  le  m^me  sort.  Cependant 
Wysolcki,  s'adressant  aux  porte- 
enseignes,  s'^crie :  «  Frdres  polonajs, 
lithuaniens,  volhyniens,  Theure  de  la 
liberty  et  de  la  venseance  a  sonn^ !... 
Aux  armes !  »  Ce  lut  avec  ces  faibles 
moyens  que  quelques  jeunes  enthou- 
siastes  essay^nt  de  detruire  Toeuvre 
de  Catherine.  Apr^  avoir  vainement 
lutte  contre  plusieurs  corps  russes  qui 
les  refoulaient  dans  toutes  les  direc- 
tions, les.insurg^  d^esp^rdrent  ui^ 


U4 


dc  km  eaive;  mait  ie  bruit 
de  la  mousqueterie  avait  ^veill^  la 
vilte;  de  nonlireiix  raiaemUiRiiento 
•e  fonn^entj  et  le  people  eul  trienlAl 
sejoint  lee  iniurgeB*.  La  rteiateDee 
8*or8aiiiia  nir  tone  ke  pointi;  et  le 
jeoneaae,  ae  metteni  a  la  Mte  de  la 
iDule  qiii  ae porfait fen  raraauil,CB^ 
lowia  rhymne :  Poloene ,  tn  n'cs  pea 
saae  dtfenseuvs.  Hauke,  minisftre  de 
la  gwerre,  fnt  maBaaer^;  le  mfyainl 
Koivieki  fol  fosilMf  parce  miele  peu* 
pie  Tavait  prie  poor  Lewicki  cpn  M 
^ftait  odteiix.  Trambicki » tombe  entre 
lea  niaina  de  oette  foiile  ferieuae  da 
libevt^  qm  le  presaait  de  prendre  pert 
k  la  rmltey  r^aendH  avcc  fermeU: 
•  J'ai  nir^  fid^lite  ii  moo  ao  vrerain  ;  »  et 
it  toaaba  rictime  de  aoa  d^voueaMot. 
La  lotte  ae  prolooge  pendant  qoelqne 
tempadu  edt^  de  Fanenal :  les  Runee 
pttent  9  et  bientdt  toutea  les  armea  oe»« 
aerWea  dana  lea  d^ta  de  I'Mfioe  de« 
vieonent  la  proie  dn  people.  Lea  liniitce 
denotre  cadre  ne  noas  pemaettent  pea 
d*entrer  dans  les  dteils  de  oette  m- 
morable  joum^.  On  re^tte  que  tant 
^b^rolsme  ait  M  st^ile,  et  ^e  trop 
sou?  ent  une  cruaot^  sansbnt  ait  doniA 
auz  efiforta  dn  petriotisme  rapporenoe 
d^une  reaction  cnielle.  On  se  bate  d*oii- 
vrir  lea  priaonst  et  tons  ceox  que  lea 
Rnaaea  n'avaient  paa  eu  le  tenuis  de 
dinger  aor  Tami^  en  retraite  furent 
inuMdiatement  d^'vr^  Le  Belvtidre 
Halt  eoTahi.  Le  grand -due ,  aecom* 
pagn^  de  I'ambaaaadenr  de  la  eour  de 
Berlin ,  sort  iurtiTenient  du  tardin  oo 
U  a'^tait  each^,  et ,  se  rtfngiant  dane 
une  cbaumi^re,  il  adrease  k  Nioolaa 
et  au  roi  de  Prosse  un  rapport  som- 
maire  de  ee  qui  vient  de  se  passer.  Ce 
prince  ne  vayait  aloa  aotour  de  lui 
que  queloues  gteeranx  et  de  foibles 
reates  de  Varmee  si  briliante  qu*il  s*6- 
tait  plu  il  former.  Le  lendematn  on 
put  mieoi  luger  de  T^tat  des  cboaea, 
et  il  6ut  dire  qoe  de  part  et  d'ao- 
tre»  c*est4-dire  ao  camp  de  Conatan- 
tin  et  dane  Varaovie,  le  desonlre  et  la 
cenfoaion  ^taient  ii  leur  oomble.  Lea 

Crda  s'^taieot  jetds  snr  les  boo- 
BBdes  jui&,  et  les  d6pouillaient  au 
Hen  de  la  justice  et  de  la  libertd;  le 


people  et  lee  inaurgaa  anient  biant4t 
r^rim^  lea  d^aordres,  mais  U  main 
quait  encore  a  la  moltitade  une  direc- 
tion»  c'cstRMite  dee  cbefii. 

Gependant  I'aigle  blanc  aaparut  sur 
lea  raoaanienta  puUica,  et  la  coearde 
nationale  defint  le  preooder  eigne  de 
rallienieBt;  la  eanae  da  people  sem- 
bleit  gagnte«  et  dte  lore  qiielqnes  nooM 

liliiBtres  o'bMtiient  pee  a  s'j  latta- 
eber.  Deux  gte^raox,  Sierawski  et 
Pac,  furent  refus  avec  transport  par 
les  insurgte.  Ce  dernier  fiit  nornm^ 
cemmandaBt  en  aitteaMiant  one  Pon 
trourdt  Cfaiopieki ,  vera  lequel  se  tou^ 
naient  toutea  les  eepdrances.  CUopiclLi 
jooiasait  d'une  baute  r^potatioa  niiUr 
taire«  et  aa  popularity  ae  relevait  en- 
core par  la  disgrdee  que  lui  avait  ia* 
flig^  le  grand-due.  Gependant  ce 
ftMral,  &»  babita^  k  calculer  les 
diancaa  d*une  gyerre  r^lito  qm 
capable  de  dnrl^  une  tosurrectioa  et 
d'iaipvo<nser  dea  resaouroes ,  se  teoait 
k  I'ecart  et  d^plorait  la  tem^t^  de  les 
eompatriotes  k  Tinstant  mtae  oh  son 
nom  ^tait  dana  toutea  les  bouches,  oo 
k  renomnate  de  son  courage  faisait 
naftre  la  ooofiaooe  dans  tous  les  coeurs. 
On  assure  qoe  Lubeeki  lui  avait  fait 
narvenir  ritat  de  Tarnito  acti^re  de 
rempiie ,  aign^  de  la  main  de  Nicolas. 
Le  bat  de  oe  renaeiffneme&t^taitsaDS 
doute  de  paralyser  d^abord  lea  mesures 
de  Cbloptcki ,  en  lui  demontrant  par 
un  document  ofBciel  que  la  Pologae 
serait  bora  d*tot  de  lutter  centre  une 
arm^  de  deux  cent  dnquante  millo 
hommes  y  deatin^e  ii  ^touiter  les  revo- 
lutiona  de  I'Oocident.  Ainsi,  la  poli- 
tique ruese  s'insinoa  d^  le  principe 
dans  Teaprit  de  ceux  que  le  peuple  ap- 
pelait  k  tatter  contre  elle.  Le  conseil 
s'^tait  assemble  au  palais  de  la  banque , 
soualapr^ideooeducomteSobolewsku 

et  dea  noms  v^nMs  pr^ti^rent  k  Tans- 
tocratie,  piot6t  entrain^  que  favora- 
ble au  moovement,  Pappui  de  leur 
oonaidtetion.  Lubeeki  dtolt  rinse  de 
oe  eonseil ;  on  le  croyait  ennemi  de 
Gonstantin ,  et ,  sooa  ce  masque  >  ii  put 
impun^mentdtei^niserkir^istaDee. 

Les  actes  du  eonaeil  ne  eessereiit  dc 
parler  au  nom  de  Tempereur  et  roi  i  ^t 


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HUSSIE. 


^66 


di  tniter  te  rdfolutfioa  eomne  on 
lelespontaii^.jpm^dtoportfe  et  de  si- 
gnfficatkm  politique.  Cependant  Teial- 
Mom  des  clal»«  eelle  de  la  jeunesae 
qui  te  preesait  autoor  du  pmesseur 
Lelewel,etl'iii8tioctdefl  masses  oontre- 
lientla  tendanoe  aristocratique;. 
jmblicaiiis  f  nststaient  sur  la  b6- 
de  dteraier  le  tsarMtcb  el  ses 
troupes ,  d'organiser  la  r^Tolution  dans 
toutes  les  profinoes  du  roTaunie ,  et 
d'entourer  d^aoe  surrefllsBoe  ^roite 
les  fmteurade  raoden  gouTernement* 
Ges  demandeSf  expriimes  dans  des 
potions  doergiqueS)  furent  ^ndto, 
mala  tmudement  et  avec  tous  les 
ddiors  de  la  prudsnoe.  Lubeckf  avait 
oompris  qu*fl  a'agissait  moins  de  r^ris- 
ter  aa  torrent  que  de  M  creoser  un 
lit;  Pancfen  oonseil  fat  dissous,  et  la 
nomiRation   de  queftjues   patriotes^ 

Sarmi  lesquels  figurait  Leiewel,  en- 
onnt  les  80U|>90ns  des  r^olutfon- 
nalres.  Chlopidii  fut  procfan)^  g4^o^a! 
en  ebef  h  runanimit^ ,  et  c6  cboix  fut 
le  cbef-d^oeuTre  de  Labecki ,  qui  ^tait 
sdr  de  garder ,  en  s'effa^nt ,  toute  son 
iofluence.  Aujounf  bui  qu*i]  est  permia 
de  peser  avec  impartiality  la  valeur 
morale  des  mesures  adopts  par  le 
conseil ,  on  est  eependant  embarrass^ 
iorsqu'il  s*a^it  d'apprteier  tous  les  mo^ 
U&  d^temunants  qui  le  guid^nt :  la 
lotie  eatre  la  Pologne  et  Tempire  russe 
pooTait-elle  ftre  de  longue  durde?  la 
disproportion  des  forces  ne  conseillait- 
eOe  pas  la  prudence «  et  peut-on  taxer 
de  serrilisme  ceux  qui  inherent  que  la 
oomititutioQ  de  1816  etiit  tout  ce  k 
qooi  la  Pologne  pouvait  raisonnable- 
meat  pr^tenore  ?  D'un  autre  oftt^,  apr^ 
aioir  tire  le  glaive,  devait-on  se  fier 
a  la  d^oieoce  nuxscovite?  La  marcbe 
la  plus  lationnelle  ne  consistait-elle 
pas  a  ^tendre  la  revolution  aussi  loin 
cpieDossible,pour'morceler  les  forces 
de  rennenit  et  renip(^er  de  tomber 
de  tout  son  poids  sur  le  centre  m^me 
de  rinsurrecuon  ?  Le  oioment  de  resis- 
tcr  ffficaeement  n'^it-il  pas  sufOsam- 
meot  indiqu^  par  les  circonstaoces? 
Me  devait-on  pas  rcg^rder  comme  une 
proaiesie  d'appuyer  la  Pologne  ks 
mouvements  revolutionuaires  die  TOc- 


eident ,  et  n'Mait-il  pas  permia  d*esp^ 
nr  que  r  Aotriefae  et  la  Pmsse  seraient 
moine  effrayies  de  la  r^rrectioa  po- 
loaaise  oue  dMreoses  de  voir  se  rde* 
ver  one  iiarriere  jniissaDte  ooatre  les. 
envahisssmeats  die  la  Russia?  VM- 
aemeat  a  rtelo  le  proUeme;  mais, 
toat  en  aeoeptaat  le  nit ,  il  eat  permis 
de  sueposer  que  si  la  Pologne,  dont 
les  efforts  seind^  et  parUels  ont  tenu 
deux  ans  la  Russia  en  ^cbee,  edt  de- 
plo!y6,  d^  le  prindpe,  toules  les  rai> 
sources  de  sea  provinces  leoaies,  la 
▼Ictofre  edt  m  Impossible,  on  du 
HMios  hkn  plus  cbmoieBt  aohetee. 

La  hitte  prit  doac ,  dds  rorigiae ,  un 
caracttoe  restreint ;  et  dte  lors  il  teit 
facile  d'en  pr^voir  le  r^ultat.  Chlo- 
pidii  etail  de  bonne  foi }  tf ev^  k  Ttoile 
de  Kosduszko,  11  avait  gftoriensement 
oombattu  ea  Italia  sous  Dombrowski. 
»En  1807,  II  commaadait  le  premier 
raiment  de  la  Vistula;  et,  deux  ans 
plus  tard ,  il  se  trouva  k  la  t^  de 
quatre  raiments  de  la  mime  Ug^oi, 
Mais  c'est  principalement  en  Espagae, 
sous  les  ordres  du  due  d'Albutera, 
qu'il  acquit  cette  reputation  de  talent 
et  d*intrepfdite  qui  lui  valut  depuis 
tant  de  glofre  et  de  popularity...  Bless^ 
k  Mojaisk ,  CUopicki  vint  a  Paris  soi- 
gner  sa  sante ,  et  v  rests  jusqu'd  la  pre- 
miere et  k'h  deuxieme  entree  des 
Russes. » (Midroslawski.) 

Alexandre  le  nomma  general  de  di- 
vision ,  et  c'est  avec  ce  titre  qull  re- 
touma  k  Varsovie.  II  ne  fut  pas  long- 
temps  sans  encourir  la  disgrice  de 
Constantin,  et  cette  disgrflce  mfyne 
ajouta  a  sa  popularity.  On  tgnorait 
encore  quelle  r&olution  prendrait  le 
grand-due^  les  troupes  quil  avait  bu- 
lour  de  lui  auraient  peut-etre  6ti  saf- 
fisantes  pour  le  ramener  triomphant 
dans  Varsovie ;  mais ,  soit  crainte  de 
tout  compromettre  en  cas  de  non  suc- 
c^s ,  soit  espoir  que  Faristocratie  po- 
lonaise ferait  mieux  ses  affaires  (pe 
lui-m^me,  il  transporta  son  quartier 
general  k  Mokotow,  et  resista  a  toutes 
les  sollicitations  de  ses  generaux  qui 
voulai'ent  marcher  sur  la  vifle. 

Leeonseil  prit  quelques  mesures,  et 
s*occupa  de  Torganisation  de  la  garde 


65(1 


L'UNIVERS. 


mitionale,  de  odle  d*ttiie  garde  dlion- 
near,  ei  de  quelques  mesures  de  police. 
Ckrastantin  se  contenta  d*envoyer  aux 
commandaotsdes  corps  statioon^  dans 
les  provinces  I'ordre  de  le  rejoindre  h 
MoKotow.  Mais  ia  nouvelle  du  mouve* 
ment  de  Varsovi6  s*^tait  r^pandue  avec 
la  rapidity  de  T^clair,  et  Ton  se  dis- 
peosa  d^ob^ir  k  un  prince  qpi  n^ociait 
par  oourrier  au  lieu  d*agir.  Presoue 
sur  tons  les  points  les  troupes  polo- 
naises s*eb^anlerent ,  niais  pour  alier 
partager  les  dangers  de  leurs  fr^res 
tfarmes.  Ssembeck ,  avant  de  cooduire 
dans  la  capitale  sa  brigade ,  se  rendit 
aupres  du  grand-due,  pour  lui  rendre 
compte  des  motifs  qui  le  d^liaient  de 
tonta  oblij^ation  envers  lui.  Constantin 
iui  repondit  qu*onle  trahissait  de  toutes 
parts;  que  ceux  monies  qu'il  avait  com- 
Dl^  de  bienfaits  le  pajraient  de  f61onie 
et  d'ingratitude ,  mais  qu*au  dela  du 
fioug  deux  cent  mille  nommes  n'at-. 
toidaient  qu^un  signal  pour  envabir  le 
royaume  et  punir  les  rebelles.  Une  de- 
putation du  oonseil  annon^a  au  grand- 
due  que  la  nation  lui  laisserait  la  li- 
berte  de  regagner  la  frontiere,  h 
condition  que  la  Russie  respecterait 
les  pro|ness«6  faites  par  Alexandre ,  et 
qu'eile  donoerait  des  earanties  pour 
Tavenir.  Apres  une  conference  de  quel- 
ques heure^ ,  on  convint  tacitement  de 
la  reb"aite  des  troupes  russes  et  de  la 
rentr^e  des  gardes  polonaises  dans 
Varsovie.  Le  tsarewitch  donna  Passu-, 
ranee  que  les  corps  d'armee  places  en 
Lithuania  ne  d^passeraient  pas  la  fron- 
tiere du  royaume ,  bien  qu  il  fdt  per- 
suade du  contraire.  II  proposa  un 
^change  des  prisonniers,  et  oromit 
d'intervenir  aupres  de  son  frere  en 
faveur  des  coupables.  Les  repr^sen- 
tants  se  recrierent  contre  cette  expres- 
sion ;  et  Ostrowski ,  Tun  des  deputes> 
s*ecria :  «  II  n'y  a  pas  de  coupables,  il 
n*y  a  que  des  vainqueurs. »  Du  reste , 
rien  ne  fut  decide  dans  cette  confe- 
rence, quant  il  ce  qui  regardait  I'ave- 
nir  de  la  Polo^ne :  toutefois,  cette  espece 
de  capitulation  eiitratna  la  defection 
des  troupes  polonaises  qui  etaient  res- 
tees  fldeles  au  grand-due.  A  leur  en- 
tree, Texasperation  du  peuple  faillit 


leur  ^tre  funeste;  mais  la  joie  de  re- 
trouver  des  freres  lui  rendit  la  cl^- 
menoefacile.  Le4decerobre,  les  Russes 
e?acuereut  Mokotow,  et  le  soir  du 
m^mejour,  le  tsarewitchatteignitGora- 
Kalwarya.  La  il  rendit-  la  '  liberty 
aux  prisonniers  d'Etat ;  conservant 
dans  cette  circonstance  ses  habitudes 
de  parade,  il  leur  recommandait  de 

garner  leurs  rangs  et  de  se"  tenir 
roits ,  les  ^paules  effacees..  II  remonta 
la  Vistule  jusqu'a  Pulawy,  et  se  diri- 
gea  sur  Lubartow.  Le  13  decembre, 
les  troupes  russes  entr^rent  en  Litbua- 
nie.  Cependant  le  peuple  se  levait  en 
masse ,  et  ne  deroandait  qu*a  etre  utile 
h  la  cause  de  la  liberty  et  h  mourir. 
Chlopicki  ne  sut  ou  ne  voulut  point 
mettre  h  proOt  cet  enthousiasme ;  ce 
capitaine,  forme  h  Tdcole  de  Napo- 
leon ,  evaluait  les  forces  du  pays  par  le 
nombre  des  bataiilons  organises;  et, 
en  renvoyant  dans  leurs  rovers  pres- 
que  tous  ces  hommes  dont  le  devoue- 
ment  I'enibarrassait,  il  crut  avoir  sim- 
plifie  les  elements  de  la  resistance ,  en 
reduisant  la  lutte  nationale  aux  pro- 
portions mesquines  d*une  guerre  stra- 
tegique.  II  laissa  le  grand-due  op^rer 
tranquillement  sn  retraite.  Toutefois 
les  Polonais  prirent  possession  de  la 
place  forte  de  Modlin ,  dont  la  gami- 
son  rentra  en  Russie  avec  armes  et 
bagages.  La  reorganisation  du  con- 
seii ,  dont  on  venait  d'exclure  Lubecki , 
en  septemvirat  provisoire,  avait  im- 
prime  au  mouvement  une  direction 
plus  f ranchement  revolutionnaire.  Mais 
tout  a  coup  Chlopicki  se  declare  dic- 
tateur,  et  assume  sur  lui  seul  la 
responsabilite  des  evenements.  Les 
uns  applaudirent ,  les  autres  murmu- 
rerent  faiblement,  prevoyant  que  le 
genie  des  demi>mesures  ne  serait  fort 
quedevant  les  exigences  du  parti  exalt6. 
Des  lors  I'avenir  deja  Pologne  fut  de- 
cide ;  que  pouvait  la'  resistance  renfer- 
mee  dans  les  huit  palatinats:^tait-c6 
avec  la  charte  d' Alexandre  qu'on  pou- 
vait reconstituer  serieusement  une 
Pologne?  liC  peuple,  pressentant  que 
ce  premier  pas  etait  une  grave  faute, 
demandait  a  mardier  en  Lithuanie. 
Les  radicaux  Tentretenaient  dans  cette 


RUSSIE. : 


Mfi 


diBO&ition ,  et  toute  la  Pologne  panit 
senfiser  ea  trois  camps :  daos  le  pre- 
mier figorait  raristocratie  d^ou6e  aux 
Rosses  Y  qui  dMrait  on  arraogement 
fieloonque  et  ii  toat  prix ;  dans  le  se- 
cond se  tnravaient  les  hommes  de  bonne 
foi ,  les  cfaartistes ;  en  un  mot ,  tous 
eeux  qui  i^vaient  les  institutions  de 
tSfS,  enfin,  le  troisi^me  renfermait 
les  patriotes ,  les  m^contents ,  les 
brouilloDS  y  et  le  peufde  des  classes  in* 
ftrieares ,  assemblage  oonfus  d'abn^« 
gatioD  gdn^use,  de  foueue  et  de 
passions  inquidtes,  ou  le  oien  et  le 
inal  dominaient  et  s'effa^aient  tour  h 
tour.  L'influenoe  de  oes  trois  partis 
resta  sensible  jusqu'li  la  chute  de  la 
Polosne.  fiiaigre  des  divergences  si  d^- 
piorables ,  « I^  arsenaux ,  les  maga* 
sins ,  les  bospioes ,  les  caisses  de  I'^tat 
s'emplissaieot  sans  que  le  tr^sor  public 
V  coQtribuAt.  Les  joyaux ,  Targenterie, 
les  meuUes  precieux,  les  equipages, 
tout  ce  qui  pouvait  ^tre  de  queljue 
valeur  entre  les  mains  des  oraanisa* 
teurs  de  farm^,  6tait  sacrifie  avec 
un  empressement  que  Fonnepourrait 
attribuer,  qu'^  une  religieuse  abnega- 
tion ou  k  un  enthousiasme  fanatique. 
Les  jeunes  gens  renonqaient  k  Theri- 
ta^e  de  lears  peres ,  les  femmes  cou- 
raient  jeter  dans  les  troncs  leurs 
bcmdesd'oreilles  et  leurs  anneaux  nup- 
tiauz.  Les  enfants  remettaient  clan- 
destinement  aux  precepteurs  les  pro- 
duits  de  leurs  epargnes,  et  jus!)u'5 
teun  jouets.  Les  moines  chargeaient 
sur  leurs  voitures  de  quotes  les  den- 
rees  ordinairement  abondantes  dans 
les  clottres ,  et  livraient  jusqu'^  leurs 
rations  journalidres  aux  preposes  des 
greniers  publics.  On  vit  ae  jeunes  en- 
thousiastes  se  pr6ienter  arm^s  et  sul- 
▼is  de  plusieurs  soldats  ^uip^  a  leurs 
frais,  abandonner  toute  leor  fortune , 
et  faire  voeu  de  chastet^  pour  ne  pas 
aroir  d'h^ritiers  k  d^poss^er.  Les  of- 
ficiers  offiraiient  les  deux  tiers  de  leurs 
gages ,  leurs  cordons ,  leurs  Epaulettes, 
Km  aigles,  les  boutons  de  leurs  ha- 
bits ,  etc'  Les  riches  propri^taires  ^ui- 
giient  et  sdldalent  des  escadrons... 
uelques-uns  partag^ent  leurs  vastes 
domames  entre  leurs  fenniers ,  a  con- 


dition qa'ils  se  foattraient  p6ur  I'inde^ 
pendance.  Les  cur^  des  cam^gnes, 
accompagnes  de  toute  la  paroisse  ar- 
m6e ,  portaient  I6s  d^pouillesdes^ises 
aux  reoe?eurs  du  district...  On  ne  lais- 
sait  dans  les  docbers  qu'une  cloche 
pour  sooner  le  tocsin ;  on  empioyut 
les  autres  dans  les  fonderies  de  canon , 
et  les  prtoes  Etaient  toujours  les  pre- 
miers k  devaster  les  ^lises  pour  ar- 
mer  et  nourrir  les  dofenseurs  de  la 
patrie.  »  (Mi^oslawski.)  Tandis  que 
vingt  mille  soldats  ^aient  campes  sous 
Praga  et  Varsovie ,  vingt  mille  autres 
prot^eaient  les  palatinats,  d*oQ  s*Elan- 
^aient  de  nouveaux  d^fenseurs.  Les 
obstacles  apport^s  k  Forganisation  de 
Tarm^e ,  et  par  la  nature  m£me  des 
choses  et  par  la  direction  supreme, 
accoutumerent  les  esprits  a  Tid^e  qu'ii 
fallait  se  borner  5  la  r^istance ,  et  re- 
noncer  a  une  guerre  d*initiative.  La 
population  travailla  avec  une  ardeur* 
mcroyable  aux  fortifications  de  Varso- 
vie.  Ouand  on  vit ,  dit  Mi^oslavski , 
que  les  faubourgs  pouvaient  servir 
a'abri  a  Tennemi  et  entraver  les  dE- 
fenseurs ,  les  propri^taires  s'assembld- 
rent  spontan^ment ,  et ,  armes  de 
torches  incendioires ,  lis  coururent 
mettre  le  feu  a  leurs  propres  maisons. 
Un  camp  retranche  embrassa  tous  les 
faubourgs  de  Praga,  et  Tenceinte  oc- 
cidentale  de  Varsovie  fut  prot^^  par 
une  double  ligne  de  forts  detaches. 
Pour  d^fendce  tous  ces  ouvrages,  il 
edt  fallu  une  arm^e  de  cent  mille  hom- 
mes ,  et  les  forces  r^unies  de  la  Pologne 
insurgee  ne  d^pass^rent  jamais  quatre- 
vingt  mille  soldats.  Ce  n'est  pas  ainsi 
que  les  Russes  avaient  calculi  lorsquMLs 
brOl^ent  Mosoou  en  pr^ence  m^me 
de  IVapolEon.  Toute  I'^ergie  de  la 
nation  se  d^pensait  en  tb^ries ,  et  les 
clubs  r^umaient  fidelement  les  divers 
partis.  Le  g^n^al  en  chef,  impuissant 
a  ^ilibrer  tous  ces  oontre-poids,  de- 
mandait  Tintervention  de  la  di^e; 
mais  sa  dictature  improvise  arr^ta 
cette  mesure;  et,  dans  le  besoln  qu'it 
avait  de  r^primer  tout  ce  qu'il  appe- 
lait  da  d^sordre ,  il  s'attaqua  aux 
dubs  qui  jugeaient  librement  ses  actes: 
Oilopicki  les  fit  fermer.  Une  r6volu« 


1 


UUmTBUff* 


timtquf  ifterte  aHenrfma  a'est  |>at 
twMe ;  tai  ii^gociaitMM  oilainteavee 
Vemtitmr  NioolMB'aTaieDtd'aiitre  tU 
gnfficatkNique  odleqa'aiinJteiie  t'aivini 

Cretflimpledela  faiblessedesfiMiirg^* 
ibeoki  nit  eharg^deoette  missioii ;  le- 
zfierski  lui  fut  adjoiat,  moint  sans  doute 

rrar  le  seconder  que  pour  ne  pas  laisser 
rintermr^latioii  des  patriotesdes  ^1^ 
roents deblAme  trop  patents.  On  r^ 
digea  une  protestation  eontre  les  abm 
du  tsar^witch,  et  Ton  reeommanda  h 
I'envoy^  d'exiger  de  Nicolas  qu'il  adh^ 
rdt  It  pittsieurs  demandes  relatives  k 
rfnd6pendanee  nationale,  k  rint^rit4 
du  territoire ,  et  k  rinviolabilit^  de  la 
charte.  Le  eonseil  et  la  dictature  po- 
saient  pour  bases  du  traits  Texpulsion 
des  troupes  n)oscovitcs  du  royaume 
de  Pologne ,  la  reunion  des  provinces 
llthuaniennes  et  rassiennes  aux  hurt 
palatinats ,  et  des  garanties  respecta- 
bles pour  robservation  du  pacte  de 
I8t5.  II  est  clair  que  la  Russie  ne 
pouvait  obterop^rer  a  ces  pr^entions; 
on  ne  pouvait  tes  lui  arracher  que  par 
la  force;  6bs  \ovs  il  ^talt  inutile  ^ 
dangereux  de  n^ocier.  Sur  ces  entre- 
fiiitcs,  le  colonel  Hauke  fiit  exp6di^ 
par  Tenipereur  k  Yarsovie.  II  niena^a 
au  nom  de  son  mattre,  et  Taristocra- 
tie  lui  sut  gr^  de  donner  des  motifs 
plausibtes  h  la  mtSdence  et  ik  la  tergi- 
versation qu*elie  avait  prises  pour  re- 
gies de  sa  oonduite.  Cest  au  milieu  de 
ces  ciroonstances  que  8*ouvrit  la  di^e . 
fille  du  gouvemement  oontre  lequd 
on  6tait  en  guerre*  amalgame  de  ira- 
ditions  consntutlonnelles «  de  d^voue- 
ment  au  pays,  et  dont  les  sentiments 
g^n^ralemeiit  honn^tes  n'etaient  pas 
cependaat  k  la  hauteur  des  ^v^ements. 
Depuis  le  depart  de  Lubecki ,  les  aris- 
tocratas  de  toutes  les  nuances  s'^taient 
tourn^  vers  le  prince  Czartoryski.  Ce 
dungement  devait  ^tre  d*autant  plus 
£stal  aux  intMts  de  rinsurrection ,  que 
le  prince  voulait  avec  droiture  et  fer- 
net^  oe  que  Lubecki  oonseillait  par 
mauvais  vouloir.  II  serait  ceoendant 
ii^uste  derendreresponsablMOu  man* 
vais  saoois  de  riBSurractioa  tous  oeuex 
qui  attunirent  la  tAche  diflicile  de  la 
dinger.  L'accord  le  plus  parfait  entrt 


tons  lea  pirtti*  et  qui  poufait  csiiler 
en  Pok)((iie  iBoias  que  ptrlout  aiHcors , 
eal  k  peme  suffi  pour  conjurer  Torai^ 
qui  grondaitdans  le  Nord.  Leshomnifls 
plaoei  tiers  k  la  t^  des  allaircs 
easMDt-ils  M  rtolos  k  tons  les  sacri- 
fices ,  ne  poavaient  ae  diasimuler  com- 
foien  le  suocte  ^ait  pea  probable.  Ih 
r6pondaient ,  noo  sans  uae  ipraode  ap> 
parenee  de  raison ,  k  ceux  qui  anraienc 
voulu  que  toutes  les  aocieunes  pro> 
▼inoes  oe  la  Pologne  fuasent  apjpei^ea 
k  seoouer  le  Joug ,  que  les  unes  etaieot 
d^ik  fa^nn^  a  rob^issance,  et  que 
les  autres ,  d  Ton  foisait  appel  ii  ieur 
ancienne  Kbert^,  commumqueraient 
le  mouvement  aux  provinces  Vetoes  k 
la  Pnisse  et  Ik  rAutrfohe ,  ce  qui  met- 
trait  en  ^tat  d'hostilit^  eontre  les  io- 
surg^s  trois  puissances  dont  les  int^ 
rdts  se  trouveraient  alora  solidaires, 
et  dont  une  seule  suffisait  pour  eontre- 
balanoer  toutes  les  forces  de  Ir  r^- 
blique.  Ce  dernier  moren  etait  pent-etre 
le  seul  qui  offrtt  des  chances  favorables, 
mais  dans  le  cas  seulement  od  la  France 
edt  jet6  son  ^p^  dans  la  balance.  Dans 
une  situation  aussi  erittque ,  11  lallait 
6tre  ou  un  hypocrite,  ou  un  patriote 
pur,  pour  prendre  en  main  le  timon 
des  amires. 

Avant  l*ouTerture  de  la  di^ ,  une 
deputation  de  quelques  nonces  se  ren- 
dit  aupres  du  dictateur,  pour  hii  re^ 
printer  que  la  nation  ne  Toyalt  de 
salut  que  dans  la  guerre.  GMopicki 
re^t  assez  mat  ces  representations , 
et  soutint  que  sa  mission  se  bomait  i 
prot^ger  les  limites  du  royaume  de 
1S15.  On  neput  done  s'entendre,  paroe 
qu'on  partait  de  principes  diffmnts ; 
et  les  chambres,  des  le  18,  proced^reot 
k  la  nomination  du  mar^cbal :  toutes 
les  voix  se  portirent  sur  Ostrowski. 
On  s*occupa  d'abord  de  la  sanction  de 
facte  r^volutionnaire  et  de  la  coi^- 
matlon  de  la  dictature.  Le  s^fiat,  au 
milieu  de  cet  entratnement  ff^neral, 
approuva  ce  qu'il  ne  pouvait  emp^ 
ciier.  Le  dictateur,  ;pii  se  regaruait 
toiuoujs  comma  le  Ueuttnaot  du  rol 
de  Pologne,  desapprouTalt  ces  me- 
sures ,  et  0  offint  sa  demiasfon.  H  cMa 
enfin  au  voeu  general,  et  la  dictature 


EUfisie. 


flit^omnrf^e,  mm  avacqadqim  reft- 
trictloQS.  Tout  ce  qa*om  put  ameber 
a  Chlopiekat  oe  fot  full  oommaade- 
rait  rannee  en  quality  de  dktatear  et 
an  Doai  du  roi.  Utt  Id  poovoir  ae  nen- 
tntiaait  daoa  laa  aoMequencea  oppcK 
a6ea  d'ttn  dooMa  prioeipe.  «  Le  pr^ 
mier  acte  du  dietataor  fiiVdea'aaaocier 
aae  oommiasioB  cxtalm  It  la  piaoa 
da  gpttvenMmaDt  pro?  iaoire,  qua  Vou* 
vcrture  de  la  diele  aTait  e£Giio6...  Ainai 
lea  rouagaa  da  f^vcnameot,  dejii 
cempiiqncs  par  la  difargence  de  lean 
nieniirea,  par  rafflttanoe  de  di&itenU 
priaeipea  qui  a'avaieat  aucoa  rapport 
eatra  em ,  par  k  subtil  ealaocaaent  das 
id^  r^nmieaioes  dans  k  syst^ma 
BQoaavchiqae,  ae  foreut  pltia  qu'ua 
amas  d'iaooQMqaenoes ,  dds  qoa  la 
Bovralle  comaitsaion ,  compowe  ea 
oartie  d*indi  WduB  dbxrakB  d^ia  d*aatres 
tonctiona  et  d'autres  dignitai ,  Tint  Je- 
ter aea  d^isioas  dans  la  foalaaee  de 
rantorite.  Pour  eompli^ter  le  gourer* 
nemeat,  le  dictateor  s'empressa  da 
Doaaaier  ies  mmiatrea  at  d'^tablir  la 
pea  d'ordre  dont  pouvait  fltre  suaeep* 
tiMe  aae  paraitte  machine. »  Ainsi  la 
gtNiTenKiaaBt  se  oomposait  de  Chio* 
picki,  dictateor;  d'one  d^^gation  de 
surf  «lUuiee  coimpoate  de  quatre  mem- 
braa,  panai  leagaels  on  reraarqaait  le 
prince  Adam  Cfzartoryaki,  le  prince 
Miefael  Radziwill ,  la  a6natear  Loaia 
Pae,  la  marfabal  de  h diMe,  etc. ;  de 
b  coaHDiasion  eitetiVe,  06  figuraient 
Csartoryski,  Radziwill ,  Bamkowski, 
Dembow^i ,  Oatrowski ;  eaDa  da  nai- 
ttiat^ ,  dont  lea  d^partamenta  etiilcBt 
aiaal  r^partia :  pour  la  guerre,  Kra- 
siaAi ;  pour  tea  ealtea  at  Tinstruetloa 
puMique,  LeiavaH;  poor  lea  ailiurea 
teanMMB,  CEartoryaki  et  GuataTa 
MalamwdLi;  aox  finaaoea,  Loafs 
Maki;  k  la  Juatiee,  Klemoioirski ;  k 
la  polfea  et  k  TinUnear,  Thomas  Lu- 
heaski ;  Plater  ftit  aoami^  aecrMira 
dnfctat,  et  VIneant  Niemokyaakf ,  prM- 
dantdeseonmtes.*  (Hiatolrede  la  r6- 
volotiandePMOfBCMrllMrosiawski.) 
Aprda  eatia  qafm-OKanlaatioa ,  la 
dietateur  a*oocapa  daa  maeaa,  de  la 
force  anaee ,  et  daa  reaaoaveaa  mate* 
iMIea  poor  tt  aaaarer  la  sabrtataaoe. 


L^anto^  aiguliira  padaeala  biantM  on 
el&ctif  d'enviroa  tranle-cinq  aaille 
hooimea«  infiBmtarie  el  cavalene;  laa 
noareUea  lefto  aiaato  de  faai  el  de 
piquea,  h  dtfaut  d'araiea  k  fen ,  et  lea 

aliments  de  eavalerie  kg^e,  ak- 
rea  sons  le  aom  de  Krakus  at  Ma- 
zures,  doubl^reat  h  peu  pr^  ce  pre- 
mier diififre:  c'tolt  done  avee  uae 
arro^e  d'enriron  aoizante  et  dix  aitUe 
hommes  que  la  Pdogne  allait  ae  nasa- 
rer  centre  Ies  forces  toutes  prdtas  de 
la  Russia.  Quant  au  nombre  dea  trou- 
pes agressives ,  il  est  assez  dififidle  de 
le  fixer,  si  ce  n'est  par  approximation. 
Lea  Polonais  lea  ont  exagerte  h  des- 
aein ,  tandis  que  ies  Russes ,  par  un 
motif  semblable,  lea  ont  misea  au* 
dessous  de  leur  ^tat  r^l.  Nous  pensooa 
qu*on  peut  Ies  ^valuer  h  eeot  quarante 
mille  nommes,  en  y  compreaant  lea 
renforts  envoys  sucoessivement.  La 
ganks  nationale,  rMuite  h  quelquaa 
milliers  de  bourgeois ,  n'toit  ^pkre  ea 
tot  d'ofirir  une  r^istance  s^ieuse  en 
caa  d'attaque.  On  conserva  une  forte 
eamiaon  oans  Zamoec  et  dans  Mpdlin , 
le  temps  ae  permettant  ^u^e  d*im- 
oroviser  de  aouveaux  pomta  de  d^ 
fenae. 

Cependant  If  ieoiaa ,  k  la  nourelle  de 
Tinsurrection  polonaise,  n'avait  vtea' 
a^lig6  poor  la  comprimer  dte  son  ori- 
gine ,  ou  poor  Fdcraaer  dana  le  cas  06 
elle  se  montrerait  mena^ante.  Lea  auc* 
d»  des  Russes  en  Perse  et  en  Tnrquie 
avaient  retren^  le  moral  de  aon  ar- 
m6d ;  lea  aoerres  de  TOrient  Pavaient , 
f  1  eat  nai ,  conaid^rablement  r6duite ; 
maia  lea  trait^i  lui  permettant  de  dta- 
poser  de  toutes  sea  fotcea,  il  mcna- 
^it  la  Pologne  du  poids  de  aaa  armes 
et  d9  aon  indignation.  Dana  la  situa- 
tion od  il  ae  trouvait,  tranaiger  avec 
Finsurreetion  c'toit  consacrar  la  na- 
tionality distiocte  d'un  pays  qoe  la  po* 
litlque  rusae  ne  regaidait  que  comme 
uae  province  privllMfe,  BMia  eoaqutae; 
c*toH  raculer  vers  r  Asia,  et  eneoanh 
gar  la  dMetion  probable  de  la  Lltbua- 
afe  et  des  aotree  proriaoea  ci-devant 
palMalaaa.  Le  dnraet^  du  tsar  toil 
ruae  trempe  assez  forte  poor  eafiaa- 
§ar  ff^aolomant la  pMl,  at  aon  Jage> 


560 


L'UNIVERS-. 


inent  tfop  sdr  pour  ne  |M8  calouler 
tout  de  suite  le  danger  encore  plus 
grand  qu'edt  entrain^  pour  lui  une  d^ 
Donnaire  condescendance.  II  avait  k 
opposer  a  la  fougue  des  Poionais  une 
arnri^  aguerrie  et  devout ,  comman- 
d6e  par  des  chefs  habiles.  Sa  determi- 
nation flit  bient5t  prise;  le  peuple, 
encore  6chauiU  par  des  succes  r^ents , 
sentit  se  reveiller  le  sentiment  de  sa 
haine  contre  la  Pologne  oonstitution- 
nelle ,  et  appuya  cette  guerre  de  ses 
sympathies.  Les  plans  de  Tempereur 
Nicolas  contre  les  r^volutionnaires  de 
J*Occident  se  trouvaient  rompus  ou 
ajourn^s  par  le  fait  de  Tinsurrection 
polonaise.  L'avant-garde ,  pour  nous 
servir  de  Texpression  de  Lafayette, 
s*etait  tourn^e  contre  le  corps  d  Vrmee ; 
ii  ne  s'agissait  plus  de  dieter  des  lois  k 
I'Europe,  mais  bien  de  veitler  au  salut 
de  la  Russie  elle-m^me.  Lorsque  Ni« 
colas  fut  informe  de  la  mission  de 
Lubecki  et  de  Jezierski,  il  leur  fit  no- 
tifier  a  Narwa  la  jd^fense  de  passer 
outre,  attendu  qu*il  ne  reconnaissait 
jas  au  gout ernement  insurrectionnel 
e  droit  de  traiter  de  puissance  a  puis- 
sance avec  le  roi  constitutionnel.  Lu- 
becki ^luda  cette  difficult^  en  d^ia- 
rant  qu'il  ne'voyageait,  ainsi  que  son 
coliegue,  que  comme  sujets  de  Sa  Ma- 
jeste.  II  serait  superflu  de  dire  qu*une 
negociation  ainsi  commenc6e  n'eut 
d'autre  r^ultat  que  Texpression  in- 
flexible de  la  volonte  du  tsar ,  c'est-i- 
dire,  le  rejet  d^aigneux  de  toutes  les 
demaodes  humblement  articuldes  par 
les  ambassadeurs.  Tout.eo  affectant 
de  m^priser  les  fauteurs  du  mouve- 
ment  de  novembre ,'  le  gouvefnement 
russe.se  mit  en  mesut«  avec  les  cours 
•voisines.  La  Prusse,  qui  craignait  le 
soulevement  de  la  Posname ,  inquiete, 
d'autre  part ,  sur  Tissue  de  la  revolu- 
tion fran^ise,  promit  de  rester  neutre , 
se  reservant  a'appuyer  par  tous  les 
moyeos  en  son  pouvoir  les  int^r^ts  de 
la  Russie.  Pendant  toute  la  dur^  de 
la  campa^ne ,  cette  soi-disant  neutra- 
lity a  ^te  interpret^e  dans  ce  sens. 
Gependant  les  Folofiais  regaiddrent 
comme  un  point  important  que  la 
Prusse  ne  leur  e(it  pas  of&cieUemeHt 


t 


d6clar^  la  euene.  .L*Autriehe  6tait 
retenue  |)ar  ^es  craintes  d*une  nature 
h  pea  pres  sembkdile;  la  Galicie  au- 
trichienne  pouvait  lui  6chapper;  mail, 
'd*an  autre  cdt^ ,  elie  voyirit  avec  satis- 
faction la  puissance  de  la  Russie  neu- 
tralist par  une  guerre  intestine.  Aassi 
retrouve-t-on  un  caractere  moinsoa- 
vertement  hostile  dans  les  mesoies 
qu'adopta  le  cabinet  de  Yienne  k  Y& 
gard  des  insurg^  poionais.  La  France 
aurait  pu  seconder  la  revolution  de 
Varsovie ;  la  crainte  d*une  guerre  g^- 
n^rale ,  celle  de  voir  la  royaut^  de  juil- 
let  s'efifacer  dans  un  mouvement  pure* 
ment  d^mocratique,  arr^ta  ses  bommcs 
d'etat.  Domini  par  des  souvenirs 
monarchiques,  ils  crurent  que  la  France 
ne  devait  pas  entrer  en  lutte,  avant  d'a- 
voir  subi  une  esp<bce  de  transforma- 
tion ,  qui  ne  pouvait  tout  au  pkis  que 
Tassimiler  avec  les  puissances  rivafes. 
Ils  ne  voulurent  [mint  comprendre 
que  le  temps  dont  ils  avaient  besoin 
pour  affermir  une  oouronne  serait  mis 
a  proflt'par  des  eonemis  irr^oonciiia- 
bles ,  et  qu'il  faudrait  fiaure  plus  taid, 
et  avec  moins  de  chanoes  de  suooesi 
une  guerre  que  renthousiasme  des 
neuples  edt  rendue  facile  en  m6ne 
temps  que  glorieuse.  Puisse  Tavenir 
donner  un  d(§menti  k  nos  pr^fisionSf 
et  ne  pas  confondre  trop  cruellement 
une  prudence  si  courte  et  si  pr^occu- 
p^  du  pr^nt !  P^rier  r^servait  ses 
rigueurs  pour  les  clubs  et  les  foeutes; 
M.  S^bastiani  d^larait  k  la  tribune 
qu'on  ne  pouvait  secouric  la  Pologne, 
parce  one  c^^tait  une  puissance  m^i* 
terranee ;  enfin ,  le  cabinet  du  Palais- 
Royal  ne  n^gligeait  aucua  moyen  poui 
capter  la  bif  nveiilance  des  coqrs  ^traa- 
geres  et  pour.se  faire  pardonner  son 
ori£ine.,La  Pologne  etait  done  reduite 
k  elie-mtoe;  elle  interrogea  le  cou- 
ra^  de  ses  enfants,  et  ned^sesp^ra 
point  de  son  salut.  Le  parti  exalte « qui 
murmurait  oontre  les  demi-mesuret 
du  gouvernement ,  se  rallia  autour  de 
Lelewel,  et  exhala.ses  bUmes  par  les 
organes  de  la  presse.  Cfalopicki,  dont 
le  credit  commenqait  k  diancder ,  es- 
saya  de  firapper  un  coup  d'aatorit^ ;  le 
12  Janvier,  il  fit  arr^er  le  ministn 


•  •  •  • 

•  •  •  • 


•      » 


•  •  •  •  • 

•»!•  •••• 

•  ••  •  • 


•  •   •• 


•  •  • 


•  *       •  •  •  I 


RUSSIl^ 


561 


Ldewd ,  Tex  -  prudent  du  club  Bro- 
nikowski  et  Boleslafi  Ostrowski.  Yar- 
som  8'tout  k  cette  nouvelle ;  il  failat 
reUcfaer  les  accosts.  L'opposttion  re- 
prodbait  au  dictateur  d'user  de  m^a- 
gement  avec  les  hommes  d^vou^s  au 
parti  ruase ,  et  d^avoir  emp^e  la  pu- 
Dlication  officielle  du  manifeste  qui 
saDctionnait  rinsurrection.  Sareesen- 
trefaitea,  le  colonel  Wylezinski ,  charge 
d'instractions  pour  lea  d^put^  Lu- 
becki  et  Jeziertki,  revint  de  Saint- 
P^rsbourg  avec  deux  d^p^ches  adres* 
s/6es  par  le  mioistre  diktat  Grabovski 
au  dfctateur  et  k  Sobolewski.  La  pre- 
miere 6tait  ainsi  conque  :  «  J*ai  Tnon- 
neur  de  vous  informer,  monsieur, 
que  Sa  Majesty  a  re^u  TOtre  lettre  du 
10  de  ce  mois ,  et  y  a  vu  avec  plaiair  lea 
sentiments  dont  vous  6tes  anime  en* 
vers  son  auguste  personne.  Sa  Majesty 
y  ajoutera  une  foi  entiere  si  vous  lui 
en  donnez ,  g^6ral ,  des  preuves  ir« 
recusables  en  vous  conformant,  autant 
que  possible,  k  la  proclamation  que  Sa 
Majesty  a  adress^,  en  date  du  18  no« 
vembre  18S0,  k  la  nation  fiolonaise.  » 
Dans  Fautre  d^pdche,  leministre  fi6li* 
citait  Sobolewski  d'avoir  quitt^  les  af- 
faires-Iiedictateurconvoqualacommis^ 
sion  extaitive  pour  lui  communlquer 
ces  pieces;  il  ne  lui  d^guisa  point  quMl 
fesaraalt  la  resistance  comme  Impos- 
sime ,  et  que  ce  au'on  avalt  de  mieux 
a  £iire ,  c'etait  de  recourir  k  la  cl^ 
nence  du  souverain.  La  majority  de 
U  commission  rejeta  ces  propositions , 
et  se  d^lar»pour  la  guerre;  quel^es 
heures  apr^  elle  avalt  aboli  fa  dicta- 
ture. 

(16  Janvier.)  Le  peuple  setrouvait 
done  sans  chef  a  rinstant  mtoe  oi^  il 
venait  de  jeter  le  gant  k  son  terrible 
adversaire,  et  il  n'avait  pour  sauve- 
eard^que  son  patriotisme  et  qaelgues 
ei^ents  incomplets  d'or^qnisation , 
improvise  dans  la  provision  d'un  ar- 
rangement diplomatique. 

Dans  ces  circonstances  dIfBciles ,  le 

I^rtnce  Czartoryski  adressa  au  peuple 
a  proclamation  suivante :  «  Polonais , 
notre  cause  est  sacr^;  notre  avenir 
est  entre  les  mains  du  Tout-Puissant ; 
mats  il  nous  rests  Tboitneur  national 

36*  UvrcUsan,  (RussiB. )  t.  ii. 


k  transmettre  k  la  post^rit^.  Union , 
oonfiance,  pers^vtonce,  telle  est  la 
devise  qui  doit  nous  garantir  la  gloire 
de  la  patrie.  Sacrifions  toute  notre  exis- 
tence a  oonqu^rir  notre  liberty  el 
notre  nationality. » 

L'ultimatum  de  Nicolas  ^tait  connu; 
I'empereur  voulait  une  ob^issance  en- 
ti^  et  sans  conditions;  des  demons* 
trations  mena^ntes  appuyaient  les  pa* 
roles  de  I'eutocrate. 

Le  19  Janvier,  la  di^te  s'assembia 
au  chateau  royal;  le  lendematn,  les 
membres  du  gouvemement  et  le  corps 
des  g^neraux  prociMteent  k  I'election 
des  candidats  pour  le  grade  de  gdnerft- 
lissime.  Le  prince  Radziwill  r^unit  le 
plus  grand  nombre  de  suffraees.  II 
voulut  en  vain  d^liner  ce  perilleux 
bonneur,  on  lui  fit  un  m^rite  de  aa 
modestie,  et  force  lui  fut  d'accepter 
(21  Janvier).  Cblopicki ,  auqud  on  avait 
inuttlement  offert  le  commandement 
en  cbef ,  offrit  d*6clairer  RadziiHll  de 
ses  conseils ,  et  le  fit  consdendeuse- 
ment  et  sans  la  moindre  ostentation. 
L'^lection  du  g^n^alissimefutaocudl- 
lie  avec  enthousiasme  par  la  fouie, 
avec  m^fiance  par  Parmee.  La  motion 
faite  par  le  nonce  Roman-Sotl]^k,  qui 

{>roclamait  Tind^pendance  nationaie, 
a  d^^nce  des  tsars ,  et  qui  relevait 
toutes  les  provinces  en  de^  et  au  deUi 
du  Ni^men  de  leur  serment  de  fid^it^ 
k  la  Russie ,  en  attribuant  aux  pava 
^mancip^  le  droit  de  se  donner  telle 
constitution  qu*ils  jugeraient  c6nve« 
nabie ,  fut  accueillie  avec  crainte  par 
les  uns,  avec  enthousiasme  par  lea 
autres.  Si  cette  mesure  6tait  adopts  < 
toutespoir  der^nciliation  s'6vanouis- 
sait  pour  le  parti  conservateur.  Let 
d^mocrates  purs  trouvaient  de  leur 
c6t6  que  cet  acte  etait  sans  port6e,  et 
insufnsant  k  raviver  T^nergie  natio- 
naie. Cependant,  par  une  esp^  d'ao- 
cord  tacite,  toutes  les  opinions  finirent 
par  se  rancer  k  la  motion  du  nonce, 
par  oela  mane  peut-^tre  qu*elle  n'^tait 
exclusive  d'aucune  Eventuality.  Le  jour 
oik  le  g^n^ralissime  avait  M  Ehi ,  les 
membres  des  commissions  avaient  M 

{>rodam^  par  le  mar6chal  de  la  diete : 
6  stoat  avait  aussi  r^le  radmlniatra* 

13 


LtlNIVERS. 


inUriMM,  la  lteisl«tloii  et  lei 
inanoes ,  en  adjoignot  phnieun  mem- 
Inne  k  ceux  qu'avait  choisis  la  diett. 
UetaitTisiblefuelaGhambredesnoDoet* 
|lu8  nombreuse,  et  reprtentant  plus 
nd^leinent  riosurreetion « allait-aMOc- 
ber  pea  k  peu  rinfluence  da  a^nat ;  au 
rette ,  dans  IfS  cirooostaoces  aetudles , 
Fappel  ^  nnd^peiidaiice  de  ia  Litbsa* 
irie  0t  des  ptovinoei  orientales  etait 
trop  tardif  pour  porter  des  fruits  i 
c^mit  tout  au  plus  uu  mojen  pour 
abuser  le  people  sur  sa  faiblesse,  eo 
M  prtentaat  oomoM  possible  un  n^ 
aultat  ou'M  n*^tait  okis  dooo^  k  per- 
sonne  d^ffectuer.  La  di^  r^a  ies 
attrflratiODs  du  g^ndralissime ,  et  lut 
assura  voix  d^'beratiTe  daoa  le  gou<- 
nrnemeut  en  ee  qui  oonoemalt  la 
guerre «  tent  que  le  permettrait  la 
proximity  du  quartiar  central.  On  lut 
dans  la  mtoe  s^nce  les  missives  de 
Grabovdd  k  I'ex-dlctateur,  et  deux 
proclamations  adresstoyparDiebitachf 
rune  aux  Polonais,  Tautre  aux  troupes 
polonaises.  La  vainquear  des  BaljKans 
s'y  rfoandait  en  mmiaoes,  et  s'atta- 
cbait  a  fiiire  contraster  tes  bien&its 
d'Alexandre,  qtd  n'tnoaU  rien  i£t,  et 
qui  a?ait  toot  donn^  aux  Polonais, 
aTOc  ringratttude  de  Bonaparte,  ^nl 
kuravaiiUnUM,etqfdneleuravaii 
rim  donmi,  Ces  manifestes  eurcnt 
pour  efbt  de  rihuir  instaotanfoent 
tous  Iss  partis  dans  une  haine  com* 
mune  eontrs  la  domination  de  I'^tran* 
ger.  Le  mot  de  d^^ance  fut  r(6pet^ 

Sar  toutM  les  bouches;  et,  k  voir  les 
ispositicms  de  tous,  on  edt  cm  que 
I'insurrectioQ  ne  datait  que  de  ce  jour, 
Cependant  Ifiemoewicz,  secretaire  du 
araat,  Wkligea  Tacte  qui  d^arait  la 
Fologne  iaJMpendante  de  la  Russia  ( 
Mais  H  donna  k  la  motion  deSoltfk 
ufleeauleur  n>oparcbiqHe»ce  qui  pre* 
Jtgeait  la  question. 

«  Le  dmet  portait  en  substanoe  ^«e 
les  traits  n^^tant  obligatoires  qu*au- 
taol  qu'iis  (Haient  fespect^  par  les 
doHi  parties  ceniraotantes ,  les  conti* 
•uelm  violations  de  la  charts ,  aous  les 
d0ux  ri^gnes  qui  araient  .prMd^  la  r«^ 
volution,  d^pgeaieBt  ia  nation  polo* 
naise  du  aerment  de  fiMit^  Que. 


n'ayant  obtenu  aucunes  gaxanties  pout 
Fobservation  du  jpacte  qA  Halt  le  loi 
au  pays,  la  nation  rentralt  dans  ses 
droits,  et  n'avait  plus  poor  n^onse  aux 
menaces  du  tsar  que  le  d^cnx>ir  et  le 
glaive;  qu*en  cons^uence,  le  peuple 
polooais  se  dtelarait,  par  I'orgaoe  de 
ses  rqirtentants ,  peupie  iodependant , 
et  Kbre  de  darner  la  couronoe  k  ce^ 
kii  qu'il  jugerait  capabled*ensupporter 
le  poids  sans  violer  ses  serroents  ui 
fouler  aux  pieds  les  francfaisea  natio- 
nales. 

«  La  multitude  r^pondit  a  I'acte  de 
d^^anoe  par  les  oris :  En  Litfauanie ! » 
(Midroslawski.)  Les  r6publieains  cm- 
rent  avoir  trion^ph^ ;  et ,  le  lendemain , 
jour  anniversaire  die  Tex^tion  des 
coospirateui^  russes  en  ia26,quelqaes* 
uns  a'entre  eux  soleonis^rent  cette  dr- 
eonstanoe ,  en  offrant  pubiiqnement  k 
leursmAnes  le  tributoe  leurs  aympa* 
tbies»On  tra^encaracteres  russes,sur 
desdrapeauxqueron  se  proposattde  Je- 
ter au  milieu  des  batalUonsdeDiebitsd): 
t>our  mire  liberU  et  pour  fe  vOlre» 
C^it  asscE  mai  connattre  le  moral 
des  soldats  russea ,  qui  avaicnt  r^te 
aux  provocations  de  leurs  ofliciers, 
et  dont  on  n^^iait  parvenu  a  entratner 

3uelq«iS8-utts  qu'eo  empruntant  le  oooa 
e  Gon8tantin« 

Kous  ne  dirons  rien  de  qodqqes 
tentatives  partielles  fsites  dans  Je  but 
de  fioulever  les  provinces  polonaises 
kiknee  k  la  Prusse  et  k  l^iutridie; 
elies  restdrent  sans  r^sultat,  et  ne  pro* 
duisirent  que  des  d^vouemeeto  inoivi- 
dufls.  Cependant  on  crut  ndcessaire 
de  crief  trois  Idgioos  destinees  a  ess 
bardie  transfiiges «  aous  le  nom  de  Pos- 
naniennSf  de  visile- a«ilicienfie»  et 
de  Litbuano-YoUiynienne* 

L*acte  de  dmmoe  annocigBi^  un 
souverain  fiatur ;  oik  trouver  una  caaifi 
capable  de  manier  le  sesptre  dans  de 
tefies  ciroonstaoees?!!  y  eut  bien  quel- 

Sies  voix  qui  6*6levte0nt  m  fiiveor  da 
rtoubliqqe;  mais.  il  faut  ie  dire ,  la 
]n6pMUique  avee  ses  tiralUemaats, 
comma  la  monarcbie  avee  see  rou- 
tines « ^tait  impuissante  k  saover  r£tat 
La  aeule  fbrme  transitoirequ*indiqpait 
la  fom  4»  fihof9s,  o*itiut  b  dietn- 


RUSSIB. 


UmveC  die  venait  d'toedAxNiskler^  9 
parot  ^pie  le  dictatemr  n'avait  pas  com- 
pris  aa  miaaioD.  «  Lea  chambrea ,  r6u- 
Bi'ca  le  39  Janvier,  d6eidmat  aae  le 
roi  aerait  pnmsoirement  reprcaent^ 
par  bh  qamtaoiYirat  ineaponaaUe... 
Le  prqjet  fut  adopU  k  ane  notalile 
majoritiiL  Las  arlidea  aniTanta  preaeri- 
Tirent  lea  attributioiia  de  oaCte  ewp^ 
de  directetre  monarcbiqae ,  Doming 
gottTeraemeDt  national : 

I*  Laa  aetea  et  ordonnanoea  pnbliea 
seront  promulj^n^a  au  nom  du  (^ou- 
vemenent  national ;  il  aera  aotons^  k 
Wrapper  monnafe  k  Teoipreinta  qu'il 
jogera  eonvenable ; 

T  Le  eouTemement  national  pr^i* 
dera  an  reeoarrement  daa  imp^ta ,  et 
h  Pemploi  du  budget  vot^  par  la 

W*  H  eondoia  lea  traits  de  eoin» 
meroe ,  et  aura  Ff nitiative  des  antrea 
trai^,  qa\ ,  d'aiilears ,  auront  besoin 
de  la  aanction  de  la  diite  pour  toe  \6» 

4*  n  nommera  leaofBders  g^n^raux , 
leaeoloneladeParm^,  lea  miniatrea 
et  oonaeillers  d^Etat,  lea  i^enta  di» 
plomatiqaea,  et  toua  leaemploy^ci  vila; 

6*  II  a  le  droit  de  grlee*poar  lea 
erines  pntinairea;  quant  aux  crimi- 
nela  d'Etot,  U  di^ta  aeuie  pent  lea 
gracier; 

e*  II  acoordera,  anr  la  pr^aentatioa 
du  fin^ralistime,  la  crolx  da  com* 
mandeur^  et  la  grand^erolx  de  r<Mtlre 
arilitaire; 

7*  Las  mittiatraa  somm^  par  lui  se 
partageront  lea  aix  d^rtements :  dea 
coltce t  dea finaneea,  de  la  juatloe,  de 
rint^ncar,  des  relationa  ext^leures, 
etde  la  gnerre.*  (Hiatoire  de  la  r^vo* 
IntiOD  de  Pologne  de  18«o.)  G'etait« 
4  l*exoc|ytton  du  veto,  la  royaut^  de 
1816,  moins  Tunit^;  e*^taient,  disona^ 
nooa,  lea  embarraa  de  eette  roniut^ 
^intopkSa.  L*^ection  eut  lieu  le  80 
Janvier;  Leiewel  reprtonta  le  purti 
patriote;  les  monarchistea  portlrent 
le  prince  Cftartoryaki  et  Barzykofwakl ; 
ks  oonstltutionnels ,  Vkieent  Nie- 
mofDweki  et  Morawski.  Czartoryaki 
fat  ilev^  ^  la  prfeidence.  Dhs  ce  mo* 
aienl ,  on  cemprit  que  le  salut  de  I'fitat 


d^ndait  de  rarm^;  et  tous  eens  qui 
dMiraient  ill  tout  prix  le  triomphe  na* 
tional  s'apprit^ent  ft  y  oontribuer  de 
leurs  personnes.  Gertes,  toutes lea  d^ 
monstrations  ne  furent  pas  sincilres ; 
plus  d'un  d^oueraent  ae  boma  k  la 
tenue  militaire;  et  bien  dea  ixMiagea 
Inutiles,  ainon  nuisiblea,  entravmnt 
le  jeu  de  la  rMatanee  g^nde;  toute- 
fois  n  eea  exoeptiona  appartiennent  non 
au  people  polonais  en  partieulier,  maia 
Il  rhumaine  nature:  tant  il  est  vrai 
que  la  guerre  la  plua  l^itime,  ceile 
qui  a  me  votte  d'enthousiaamev  sup<> 
poaeune^ergieoonatanteque  le  oom<> 
muB  des  hommes  poss^  bien  rare- 
ment.  Dana  les  dasaes  aiafes,  on  ae 
r^ne  plus  volontiera  II  un  sacriflce 
nne  foia  fait  qu'ii  une  auite  de  priva* 
tions  ou  se  retrempent  seules  Im  na- 
tijyres  pHvilte'te :  rhomme  de  labeqr 
aufiit  mieuz  a  eette  tiche  h  laquelle  il 
est,  Bour  ainsi  dire,  tout  fa^n^; 
et  s'n  a  foi  dana  oeux  qui  ae  cnargent 
de  le  conduiM ,  flatty  de  fiire  pour  le 
triomphe  d^une  Idte  ce  que  jusque-la 
il  avait  flit  pour  vivre ,  II  apporte  dana 
la  eauae  commune  on  denouement 

Cus  eomplet.  Mais  ce  qui  caraet6riaa 
Monaia  en  ftninl ,  e'est  une  in« 
soBciance  o6  if  se  repose  de  ses  pa* 
roxismes  d^enthoasiaame ,  et  assei 
aemblable  ft  oet  ^tat  d'affaiaaenientqui 
auit  la  fiftfre;  c'est,  pour  les  nobles; 
une  iuquitode  rague  qui  lea  pooase  ft 
Pintrlffue  et  ft  Tesprit  de  coterie ,  fti^ 
neate  n^ritage  du  veto  qui  donnait  au 

Bus  mince  gentilhomroe  de  la  r^pu- 
iqne ,  non  le  poovoir  de  crfter ,  qui 
appartenait  ft  toua ,  mais  celui  d'em- 
pmier;  tentation  ft  laquelle  rteis* 
taient  difflcilement  dea  nullity  or- 
(^iieuses,  Jalouses  de  sortir  de  leur 
obscurity  par  un  moyen  l^al. 

Le  gouveroement  r^oemroent  cons- 
titu6  avait  oeia  de  boo  qu'il  offrait 
une  forme  d^finie  et  qu*il  mettait  un 
terme  ft  Tinauietbde  Qt§  uns  et  aux 
pretentions  oes  autrea.  II  fut  d^id^ 
que  la  monarcble  r^idait  provisoire- 
ment  <lBns  le  qui ntumvirat ,  et  la  sou- 
verainete  dans  la  di^te :  la  prestation 
du  aerment  fiit  Jug^  nmssaire ,  et 
eUe  se  fit  spontan^ment. 

12. 


S64 


L'.UNIVERS. 


Le  6  Umet ,  on  apfurit  que  plosieura 
escadrons  de  Cosaques  avaient  pass^ 
le  Bug ;  les  chambres  adopt^ent  aussi* 
tdt  le  projet  suivant : 

« 1*  Les  communes ,  villes ,  districts 
et  palatinats  qui  ne  seraient  pas  occu- 
py par  I'ennemi «  mais  qui  se  trouve* 
raient  menace  d*une  attaque,  seront 
declares  en  ^tat  de  guerre; 

79  Le  gouvemement  national  est 
autoris6  k  prendre  dans  ces  contr6es 
toutes  ies  mesures  urgentes  pour  d^* 
truire  les  cbemins ,  les  ponts  «.te8  gues , 
les  masasins  et  bfltiments  qui  pour- 
raient  Tavoriser  la  marcbe  ou  couvrir 
la  retraite  de  Tennemi.  Le  gouverne- 
ment  est  de  m£me  autoris^  h  faire  en- 
lever  des  provinces  menac6es  le  b^- 
tail  et  ies  approvisionnements  de  toute 
espkee; 

3«  Ceux  aui  s'opposeraient  h  ces 
mesures ,  et  les  fonctionnaires  qui  res- 
teraient  dans  les  districts  eavabis, 
seront  consid^r^s  comme  trattres  a  la 
patrie  et  punis  comme  tds; 

4*  II  sera  tenu  compte  de  toutes  les 
pertes  ^prouv^es  par  les  babitants ,  et 
lis  seront  dddommag^  aux  frais  de 
r£tat 

Le  present  dtoet  sera  imprim^  et 

{>roclam6  du  haut  de  toutes  les  cfaaires ; 
'ez^ution  en  est  confix  au  gouver- 
nement  etaupeuple.*  (Mi^rosUtwski.) 
Ces  mesures  ^taient  sages;  mais  la 
brusque  irruption  des  Russes  les  ren- 
dait  presque  inex^utables.  Tous  les 
embarras  qui  s*attacbent  aux  organi* 
sations  improvise  surgissaient  k  la 
fois.  La  force  r6elle  de  rarm^e  n'ez- 
c^ait  gu^e  quarante  mille  bommes ; 
les  nouvelles  fev^s,  mal  armdes,  pri- 
vies de  rinstruction  n^cessaire,  n'e* 
taient  pas  en  6tat  de  tenir  la  campagne ; 
les  ressources  du  tr^r  ^taient  epui- 
;    Tadministration    fooctionoait 


sans  ensemble,  et  n*avait  pas  foi  dans 
f  avenir ;  enfin  les  n^ociations  nou^ 
ftvec  les  cabinets  6trangerSy  nteum^es 
en  esp^rpnces  vagues ,  sinon  en  refus 
formels,  placaient  la  Pologne  dans 
ralttrnative  ae  vaincre  un  ennemi  de 
beauooup  sup^rieur  et  qui  pouvait  fa- 
cilement  reparer  ses  pertes  t|  ou  de  ci- 
menter   ind^finiment   son   esclavage 


avec  ses  d^ris  et  le  plus  pur  de  son 
sang.  Lerainisterese  composaitcomme 
il  suit :  a  I'int^rieur,  Bonaventore 
Niemoiowski ,  en  remplacementde  son 
frere  Yincenjt,  nonun^  membre  du 
gouvemement  provisoire ;  k  la  guerre, 
Krasinski ;  k  la  justice,  Rembidinski, 
remplafantBonaventurel^iemoiovski; 
aux  finances ,  Biemacki ;  a  rinstruction 
publique ,  Bninski ,  k  la  place  de  Le- 
lewel ,  Tun  des  cinq  du  gouvemement 
provisoire;  aux  afiEaires  etrang^res, 
Czartoryski  et  Gustave  Malachowski. 

Sur  le  point  d*aborder  la  sdrie  des 
faits  militaires  qui  ont  dteide  du  sort 
de  la  Pologne ,  nous  essayerons  de  les 
coordonner  avec  la  marcbe  du  gou- 
vemement insurrectionnel ,  en  ela- 
gnant  les  details,  et  en  ne  noos 
permettant  que  Ies  d^veloppements  n^ 
cessaires  pour  rintelligmcede  ces  6v6- 
nements  mtoorables. 

L'assiette  m^me  des  palatinats  qu'il 
s*agissait  de  d^foodre  prescrivait  de 
prendre  la  Vistule  pour  base  des  ope- 
rations strat^iques  :  malbeureuse- 
ment  ^  soit  incurie ,  soit  faute  de  tem|)8 
et  de  ressources ,  on  n^igea  de  forti; 
fier  les  confluents  de  ce  fleuve  qui 
pouvaient  en  livrer  le  cours  k  Teoneini. 
Zamosc  ^tait  la  seule  place  forte  eo 
6tat  de  supporter  un  si^e  en  regie; 
mais  ce  point  trop  excentrique  ne  pou- 
vait dtre  d*une  grande  utility  dans  une 
campagne  ou  tout  devait  se  dicidet 
sous  les  remparts  de  Varsovie.  L'ar- 
m6e  ^tait  r^partie  autour  de  la  capi- 
tale  sur  la  rive  gauche  de  la  Vistule : 
de  I'autre  cdt^  du  fleuve  se  trouvaient 
les  d^pdts  des  nouvelles  levta,  qu'on 
avait  jueees  incapables  de  se  mesurer 
contre  Ies  meilleurs  sokJats  de  rem- 

Eire ,  mais  qu'on  destinait  k  completer 
»  cadres  de  la  vieille  arm^e.  Douze 
mille  bommes  environ  ^taient  repartis 
dans  les  forteresses ;  on  s'empressait 
de  terminer  les  ouvrages  exwieurs 
qui  ddfendaient  Varsovie;  et,  dans 
lint^rieur  de  la  ville,  on  6levaitqucl- 
ques  barricades.  L'artillerie  6tait  peu 
nombreuse ,  mais  le  zdle  et  rbabifeti 
des  officiers  qui  la  dirigoaient  sup* 
pl^aient  k  son  insufll&ance. 
L'arm^  russe  s*av|intait  et  embras- 


RUSSIE. 


S66 


cait  tout  Tcspwe  qui  s'^tend  du  rod 
an  Dord,  depuis  ka  sources  du  Bug 
Jusqu'^  rembouGhure  do  Ni^en ;  elle 
proentait  un  dTectif  d'eoTiroQ  cent 
mille  bommet.  Ses  diff<^ents  corps 
coDTergeaient ,  sans  6tre  inquidt^, 
vers   le  centre  du  royoume  ,  pour 
etreindre  dans  un  r^eau  de  fer  Var- 
sovie  et  Farm^  insucg^,  leur  couper 
toute  communication  avec  les  provm* 
ces ,  et  couronner  la  campagne  par  une 
lNitailledecisive.Quelque8eneagements 
ou  les  avantages  furent  balance  ou- 
vrirent  les  hostility,  et  n'eurent  poor 
resaltat  que  de  oonstater  la  sup^iorit^ 
nuiBK6rique  des  Russes.  Les  habitants 
fiiyaient  devant  leurs  coloones,  et  cou- 
raient  se  mettre  sous  la  protection  de 
rarmfe  nationale.  A  Dobr^,  les  Pdo- 
nais  disput^ent  ^ergiquement  la  vie- 
toire,  et  ne  oM^nt  au*k  des  forces 
triples.  Le  combat  d'Okuniew  ne  fut 
pas  rooins  opinlAtre;  cependant  les 
Russes  se  portaient  toujours  en  avant , 
et  les  insurg^s  achevaient  leur  mouve- 
meot  de  concentration.  La  bataille  de 
Wawer,  oil  prte  de  soixante  et  diz  mille 
Russes  ne  purent  vaincre  quarante- 
cinq  mille  Polonais,  iut  aussi  longoe 
que  meortriire.  On  combattit  deoz 
jours  avec  un  ^1  achameraent  ( 19  et 
20  feyrier)«  et  chaque  armfe  conserva 
ses  positions.  Pendant  cette  lutte,  que 
Dienitscb  avait  iugte  devoir  6tre  la  der- 
niere,  les  repr&entants  de  la  Pologne 
se  dedarerent  en  permanence ,  et  ren- 
dirent  le  decret  suivant :  La  est  la  pa- 
trie  au  trente-trais  nonces  et  on%e 
senateurs  sUgeront  pour  deUbirer 
sur  son  sort.  On  6tait  convenu  d'un 
armistice  de  quelques  jours  pour  don* 
ner  la  si^ulture  aux  victimes  de  cette 
sanipante  journ6e ;  Diebitsehsut  mettre 
oe  temps  k  pront,  et  de  nombreux 
renforts  lui  rurent  amen^  par  Scba- 
kfaovskoi ,  Manderstiern ,  et  per  le  tsa- 
rivttch  qui  commandait  une  reserve 
imposante.  L*aile  gauche  des  Russes , 
loos  les  ordres  des  g^n^aux  Kreuis 
et  Geismar,  occupait  le  palatinat  de 
Loblin.  Le  g^n^ral  Dwernicki,  avec 
tm  eoips  peu  nomhreux  de  cavalerie 
legke,  ioqoi^tait  le  mouvement  des 
RusseB,  qui ,  d^  le  9  Urrwr ,  s'^taient 


empartede  Lublin.  Rreutz  et  Geismar 
araient  oon^i  le  nitjjet  de  passer  les 
premiers  la  Vistule,  de  descendre  la 
rive  gauche  du  fleuve,  et  d'attaquer 
brusquement  les  derri^res  de  Tarm^e 

Solonaise,  tandis  que  le  centre  et  I'aile 
roitedu  feld-mar^hal  Di^bitsch  Tatta- 
queralent  de  flanc  et  de  front.  Dwer- 
nicki profita  de  la  separation  des  deux 
corns  ennemis  pour  les  aocabler  Tun 
apres  Taotre.  11  enfon^a  d'abord  les 
escadrons  de  Geismar  h  Stoczdr,  et 
acheva  de  les  mettre  en  d^route  dans 
les  vallons  de  Serocz)!!.  Dwernicki  r6- 

Sondit  aux  acclamations  de  ses  sol- 
ats :  «  Je  vous  ai  promis  de  vous  me- 
ner  h  I'ennemi ,  vous  m'avez  promis 
de  vaincre,  nous  avons  tons  tenu  pa- 
role. »  Aux  environs  de  Varsovie ,  la 
fortune  etait  bien  diffi^rente.  Diebitsch 
s'avan^it  mena^ant,  k  la  t^te  de  toutes 
ses  forces  r^unies;  les  glaces  oouvraient 
encore  la  Vistule/mais,  au  bout  de 
quelques  jours ,  le  d6gel  pouvait  rendre 
M  fleuve  praticable.  Sdiakhovskoi  ^it 

Sirvenu  a  s^emparer  de  la  position  de 
iaiolenka.  Une  affaire  pius  meor- 
tri^re  allait  avoir  lieu  k  Grochow ;  le 
prince  Schakhovskoi  avait  donn^  le 
change  aux  Polonais  par  one  savante 
manoeuvre ,  dont  le  but  ^it  d'attirer 
a  sa  poursuite  le  ^^n^ralKrukowiecki, 
qu'il  voulait  Eloigner  de  Praj^a.  Les 
Polonais  donn^nt  dans  le  pi^e ,  et 
diviserent  ainsi  leurs  forces.  Le  veri- 
table danger  etait  k  Grochow.  Km- 
kowiecki  s'obstinait  k  poursuivre  les 
grenadiers  russes  dans  la  direction  de 
Nieporent ,  tandis  qulls  operaient  leor 
jonetion  avec  les  corps  lithuaniens. 

Cependant  le  feld-marecbal  rteolut 
d*emporter  un  hois  que  les  Polonais 
avaient  defisodu  lors  de  la  bataille  de 
Wawer.  Aprte-une  defense  opiniltre, 
la  position  est  emportee  et  reprise. 
De  part  et  d'autre,  I'artillerie  fit  de 
grands  ravages.  Sur  les  deux  henres, 
Qilopieki  re^it  une  mve  blessure,  et 
cette  nouvelle  frappe  rarmee  polonaise 
de  stupeur.  Le  bois  si  lonctemps  dis- 
pute retombe  au  pouvoir  des  Russes; 
deja  Diebitsch  se  flatte  d*une  vietoire 
assuree,  et  donne  ordre  an  comte  de 
Witt  de  poursuivre  les  fuyards  et  de 


M6 


L*UNIVEJIS. 


•e  piM^itor  h  leur  raits  dans  Pr«gti« 
Une  r^istance  b^iooet  quoiqiM  pft- 
ralys^e  par  TabMoee  d*aoe  sage  direo- 
tioBf  oontint  que^pie  teoipa  I'elan  det 
guarriers  moacovites.  Jjia  isauea  da 
Praga  oomnien^icBt  k  B'enoombrari 
et  dq^  las  ciiirassiflra  du  priaea  Albert, 
enfoDfant  Ics  eoloiKiea  ea  retraite, 
meoa^ait  la  banriire  de  Grochow. 
tit  dmrdre  augmentait  d^une  naDiera 
efirayaote.  Cependant  les  oavriera  a*^ 
taient  ^laoe^  hora  de  la  Tille  pour 
ddblayer  lea  paasagea;  le  prince  €zav» 
toryaki  dpaaait  aes  ordrea  avec  calme, 
taodis  ^e  Radziwill ,  ee  g^o^ralisainie 
de  Dom,  se  plaigiiait  qu*on  I'tiU  &ef6 
nalgr^  lui  a  ce  poate  Eminent.  Lea 
Polonaia,  revenua  de  leur  firayeur,  ae 
retouroent  oontre  Teiiaeni^  qui  plie  k 
aon  (our;  Prondzyuaki  dirige  aur  euic 
le  feu  de  balteriea  i  laGougreve*  et  la 
oavalerie  polonaiae  ach^ve  de  lea  »^ 
pouaser.  C'etait  peuMtle  le  temps  de 
ceprendre  rolfeaaive,  pour  op^rar  une 
attaque  ^  fond  acir  rarm^  russe.  II 
D*en  fut  pas  ainsi;  rarmte  insunreo- 
tionuelle  repassa  la  Vistula.  D*on  autre 
edte»  on  ne  sait  eommeat  a'exDiiqaer 
rimprevoyanee  du  feld-mar^diai  >  ^ui « 
an  lieu  de  ae  porter  sur  Praga  a  Tins* 
taut  de  la  d^oute  de  Tennemi,  pour 
en  fiuir  d*un  seut  coup,  lui  laisaa  le 
loisir  de  se  reeoimattre  et  de  d^ruire 
en  detail  l^avant-garde  Tictorieuse. 
Telle  fut  la  batallle  de  Grochow,  une 
dea  plus  meurtrieres  de  cette  campa- 
gne » et  ottde  partet  d'autre  on  d^ploya 
plus  de  eoursge  que  d'habilet^. 

Cependant  Dwemicki,  d^  vatn- 
queur  de  Geismar,  venait  de  battre 
Kreuta  sous  Nowawies;  il  con^t  le 
hardi  prejet  de  renonter  vers  le  nord, 
et  d'operer  sa  jonetion  avee  la  vieiUe 
amie,  en  ae  frayant  un  eheroin  h 
travera  les  corps  de  Diebitsch :  des  or* 
dves  eonlialres  lui  Jaiposdyent  la  mis* 
sioB  de  chasser  I'emieini  dea  paiatinats 
de  Sandemir  et  de  Lubttn.  Le  g^a^ral 
ob^t  et  bat  I'ennenii  en  pluaieurs  ren- 
Gonlrea.  IMebitsch  a^enwreasa  d'en- 
veyer  un  reafort  considenMe  au  se* 
oours  de  son  aile  gauche,  et  en  confia 
le  eoninaodement  a  son  cbef  d'etat* 
Rvyor,  le  eonte  de  Toll.  Dwemi(^i, 


pour  donner  ouelque  sspos  k  a  petita 
troupe,  ae  nougia  k  Zanosc. 

L'lssoe  de  la  bataille  de  Grodiow 
avait  dteotttr^  la  ntossit^  de  donnet 
j^  rarmte  un  chef  noins  lobalrile  que 
RadziwilL  Ge  prinee  oonvenait  mU 
avee  tant  de  candeur  de  sou  in- 


capadtd,  qu'on  trouvait  k  peine  le 
eoinrage  de  le  bHbner.  Ghlopicki  gisait 
sur  un  tit  de  dooleur;  mais  incapable 
d'un  senrioe  netif ,  il  crat  encore  serrir 
la  patrie  de  ses  ocwseils  en  d^gnant 
Skrzyoecki   poor  gtotolissime.  Le 
prince  Czartorjrskf  mit  Element  fa- 
fOnibleicechoix;SkrEyneckl  fotelu  I 
Pnnanimite.On  lui  confera,  de  pios^u'a 
Radziwill ,  le  droit  de  si^er  parmi  les 
uembres  du  goutemement.  Son  ad- 
mission au  eonseil  entratnait  Pexpal- 
sfon  de  celui  des  quintumvirs  qui  aTsit 
iteni  le  noins  de  svfifrages.  Cette  me- 
anre  ezdoait  Leiewel,  le  ami  qui  re- 
priseutdt  Kopinion  r^publicaine:  il  ne 
si^eait  plus  qu'en  I'aDsence  du  g^^ 
raliaaime^  Le  nouTcau  cbef  s'occupa 
actiTeflseot  de  la  reorganisation  de 
I'am^e.  La  eonfianoe  conimencait  a 
renattre,  et  Diebitsdi  se  repliait  sur 
Minsk.  Prondzynski,  Thomme  leplus 
capable  de  rarm^,  remplit  les  fono 
tionade  qoartierwHialtre ;  et  si  ramoor- 
propre  de  Skrzynecki  e<lt  pu  se  r^- 
gner  ^  reconnaitre  un  superieur  dans 
son  subordonn^,  on  edt  pu  canceToir 
de  la  reunion  de  leurs  talents  les  plus 
brillantes  esp^ances.  Rrukowiecki, 
qui  aapirait  au  premier  rang,  dut  se 
oontenter  des  fonctions  de  gonveroetir 
de  Varaovie;  mais  11  se  promettait  bien 
da  ne  pas  nifigliger  riniueooe  que  lui 
donnait  cette  charce  pour  supphmter 
aussitdt  que  possiUe  son  rt?al.  Ou  loi 
doit  lea  barricades  qui  oliatru^ent  les 
paasages  les  plus  importants  de  la  ca* 
pitale.  Cette  defense  fiit  inutile,  par 
suite  de  la  capitulation;  mais  Taspeet 
de  eea  ouTrages  entretint  T^nergie  de 
la  population,  en  iul  mentrant  qu'on 
coointalt  aur  elle.  Qudquea  chanee- 
ments  dans  le  ministere  el  dans  les 
bauts  grades  de  ramde  suirirent  1*^* 
lection  du  g^A^raiissime.  On  assure 
qa'outre-passaat  la  limfto  de  sea  pou- 
voirs,  Skrzynedu  avait,  d^  le  com- 


EU9SIE. 


167 


As  nmt9t  eMmt  te  n^ 
foeiatioiw  af«e  DieUMfr,  et  mte  fe 
nM-«ity^«M,  ie  reafenkMiit  dans  la 
folonM  tttffevible  de  Fempemur,  avaft 
M  le  jmmier  a  fM  vompre.  Cetta  ten- 
dance dtpfoinatiqoe  ptwmrit  que  le 
g^taliaaime  d^sesperalt  de  la  irfe^ 
toire,  et  dana  ee  caa  il  amrait  dd  d4» 
aKoer  I'hoooeur  ga'on  lui  ikiaaft.  Atf 
fCBto,  la  BQa$erit6  dd  oonaell  ^tait  en- 
(pigifo  dans  lea  vole)  conatitutionneHes « 
et  sea  aedrdtee  a)isi|Mitfaies  n*allaient 
MB  an  defii  de  ia  constitution  de  1815. 
Le  seui  Leiewel  y  6tait  rapjmi  du  prin- 
cipe  r^fohitionoaire;  mais  si  $es  \i6e$i 
naoriea  par  Feipdrience  et  r^tude, 
dtaient  inrariaMenient  flx^a,  i\  faut 
eoarenir  que  par  ramblgnfft^  des  for- 
nes  et  le  tagne  de  sea  axiomes,  if 
faiaait  du  r^publicamsme  one  science 
qsi  n'^ait  paa  S  la  port^  de  toot  le 
monde.  On  edt  dit  qu'il  parrlait  en 
ehiflfrea,  etqu'flcraignait,  en  s'aran- 
qantfdeeommettre  qaelooe  sol6dsme 
IMriitiqoe.  Son  influence  dans  ses  fonc- 
tioDS  comme  nonce,  ministre  et  menfif 
bre  du  gouvemementjmrovisoire,  avaft 
dd  ntoasairement  s'enacer  detant  nne 
majority  aristocratique  ou  constitu- 
tSonneOe.  Les  patriotes  lui  conservaient 
toojours  la  mtoe  eatiiAe,  et  lui  sa- 
vatent  j;r^  de  ses  efTorts  eonrtme  fone- 
troBoaire  opposant;  mais  son  rdle 
d'iiomine  de  fmrti  s'6tait  rapetiss^  dans 
les  exigences  de  sa  sphere  d'action,  et 
sa  renomm^  pesalt  k  peine  dans  la 
boianee  des  partis. 

II J  arait  denx  maniires  d'enrisager 
nosarrection  lithuanienne :  on  pou  vait 
reidter  d^  le  commencement  de  la 
lotte,  et  diriser  ainsi  les  forces  de 
rarmifie  agreasiye;  c'^talt  Poptnlon  de 
Leiewel  et  des  repuUicatns ;  on  pouvait 
anssif  sans  reooneer  aux  avantages 
^enttxelis  d'une  sf  puissante  drrersion , 
la  rendre  plus  efBcaoe  par  des  victofres ; 
Gs  plan  paraft  atoir  m  cehit  des  eona* 
tftotioiinels,  et  fhr  iie  manquarent  paa 
d'arniments  sp^ieux  pour  en  d^on- 
trerl«  convenanee.  En  effet,  les  corps 
liOmaniens ,  dans  les  dernienr  combats; 
t^etalent  montr^  diHrou^  h  ia  cause 
de  fempefeur;  tout  semMaft  proorer 
^  le  people,  ia^onn^  k  Fobeissanoe 


Mr  le  dei^djgrte  et  par  FadmfniatrA- 
tion  moscoTifi,  n*^it  pas  encore  dia- 
posd  h  rfsmier  les  avantages  que  lui 
prdsentait  Fincorporatlon  a  Fempire, 
pour  les  perils  dime  r^volte  qui  atti- 
ferait  sur  Kif  tous  les  maux  de  II 
guerre.  II  fbilaft  de  grands  sucoes  pour 
le  d6cider,  ou  du  moins  des  efforts 
asse^  prolong^  pour  que  son  rdfe  na 
te  rfduistt  pas  k  celuf  dnine  abnegation 

ateriie. 

L'espoir  otfe  mettaft  Czartoryski 
dans  les  cabineta  dangers,  soilicitea 
au  nom  du  pacte  de  18i5,  ne  permet- 
tait  guere  d*a}lleurs  au  gouvemement 
Insurrectionnel  d*agir  snr  one  base  qua 
n'admettaient  pas  les  stipulations  de  la 
ebarte  d'Alexandre.  Leiewd  ne  s*^ 
eflbripit  pas  moins  de  soulever  lei 
provinces  au  deli  du  memen ,  et  la 
majorite  contre  laquelle  il  luttdit,  attrf- 
boait  le  pee  de  succ^s  de  ses  n^o<iia- 
iSons  k  ces  menses  anticonititution- 
nelles.  Le  pouvoir  legislatif  s'etait 
occupe  de  questions  Importantes,  mais 
dont  Fopportunite  pouvait  etre  con- 
testee :  ees  mesured ,  qui  tendaient  k  la 
reforme  de  Fordre  social,  avaient  pour 
objet  le  morcellement  des  grandes  pro- 
pnetes  foncieres  et  Fameiioration  oe  la 
condition  des  paysans.  Des  le  19  {6* 
vrier,  on  avait  assigne  pour  dix  mil- 
lions  de  florins  de  terres  aux  ofBciera 
et  aux  soldats  de  Farm^  nationale* 

Mais  toutes  oes  discussions  ne  pou- 
vafent  6tre  f^condees  que  par  la  vlc- 
tolre,  et  le  gouvemement  ne  pouvait, 
serieusement  donner  le  territoire  oti 
campait  Fennemi*  Cependant  la  Samo- 
gftie  se  Souleva,  et  la  Lithuania  pa- 
raissait  disposes  k  suivre  son  exemple. 
Toutefois  ces  insurrections  ne  prirent 
jamais  un  caractera  bien  seHeut,  et  la 
meilleure  preuve  qu^elles  IfUrent  insl- 
gniflantes,  c'est  mretles  ne  se  soutin* 
rent  qu'^  Faide  de  qoelques  partisans 
detaches  de  Farmee  de  Tarsovie,  et 
qn'elles  tomberent  d%s  que  oe  ftible 
apptri  lenr  manqua.  An  milieu  de  toua 
ces  ftraillements,  oilt  tea  partis  triom- 
pfaaient  tour  k  tour  pour  donner  suc- 
cessivement  la  mesure  de  leur  fair 
blesse,  toutes  les  esperances  se  tour^ 
naient  vers  Farmee;  1^  etait  vrafment 


66» 


L'UNIVERS. 


le  gouveroement,  ]k  6U\eai  la  vie  et 
U  r^istance  personnifi^s  par  la  force. 
Dwernicki  6tait  a  Zamosc  avec  qua- 
tre  mille  hommes;  Sidrawski  couvrail 
a?ec  six  mille  hommes  la  haute  Vis- 
tule;  de  la  Piiica  au  bras  septeotrional 
de  la  Yistule,  trente-cinq  mille  fantas- 
sins,  quatorze  mille  cavaliers  et  cent 
pieces  de  canoa  voilaient  la  capitale, 
Modlin  et  Plock.  Plus  au  nord, sur  la 
Wkra,  le  Bug  et  la  Narew,  trois  k 
quatre  mille  guerillas  aux  ordres  do 
zaliwki  et  de  Wengrocki  eclairaient 
Textr^me  gauche  des  Polonais,  et  iu- 

2ui^taieDt  le  flanc  du  feld-mardchal. 
^id)itsdi  r^solut  de  passer  la  Vistula 
yers  I'embouchure  du  Wieprz,etpour 
tenir  en  respect  la  garnison  de  Varso- 
vie,  il  fit  avancer  un  corps  d'observa- 
tion  pour  s*emparer  de  la  chauss^  de 
Brzesc;  II  manccuvra  dans  ce  but;  et, 
apr^  avoir  assure  sa  droite,  il  s*oocupa 
serieusement  de  Dwernicki.  Le  paia- 
tinat  de  Lublin  n'etait  pas  en  mesure 
de  resister;  les  troupes  fusses  Toc- 
cuperent.  Dwernicki  s'^appa  de  Za- 
mosc, et  le  g^n^ral  de  Witt  uit  charg6 
de  Tobserver.  L'aiie  droite  des  Russes 
8*etait  concentre  sur  Ostrolenka.  Le 
tield-mar^chal ,  laissant  un  corps  de 
trente  mille  bommes  devant  Praga, 
d^ploya  son  centre,  dont  lesdiff^rents 
corps  se  port^rent  vers  Stenzyca  pour 
y  francbir  la  Vistule.  La  debacle  du 
fleuve  eat  lieu  du  10  au  It  de  mars. 
Les  glacons  emporterent  le  pont  de 
Praga;  fes  eaux  du  fleuve  inonderent 
les  terres  basses,  et  ajout6r«nt  a  la 
difficult^  des  communications.  Les 
deux  armees  se  trouverent  done  en 
presence  et  s6par^s  par  les  vagues 
de  la  Vistule;  ii  s'agissait  de  se  bdter 
d*y  Jeter  un  pont  sur  les  deux  points 
C$1  les  uns  et  les  autres  voulaient  ^ta- 
blir  leurs  communications ;  c*est-a-dire, 
a  Praga  pour  Tarm^e  polonaise,  a 
Stenzyca  |x>ur  le  passage  des  Russes. 
Skrzynecki  disposait  de  toutes  les  res- 
sources  de  la  capitale;  il  previut  Die- 
hitsch,  qui  avait  h  lutter  conlre  tous 
les  obstacles  d*un  terrain  defono^  et 
les  embarras  de  Pencombrement  de  ses 
troupes.  Rosen  restaitseul,  retranciki 
dans  la  for^t  de  Milolna,  exposi^  aux 


attaques  de  Tarm^  p^rionaise,  dont 
un  tiers  seulement  avait  et^  envoys 
au-devant  de  Diebitsch  pour  lui  dispo- 
ter  le  passage  de  la  Vistule.  Proadzynski 
comprit  tout  le  parti  qu*0D  pouvait 
tirer  de  Tisolement  des  Russes.  II  pro- 
posa  de  tomber  k  I'improviste  sur  oe 
^^n6ral,  et,  apres  Tavoir  ^ras^,  de  s» 
jeter  sur  le  flanc  droit  de  Diebitsch, 
dont  les  corps  diss^minds  n*auraient 
pu  opposer  une  r^istanoe  efficace  k 
une  arm^e  victorieuse.  Skrzynecki  he- 
sita  longtemps  avant  de  se  rendre  aux 
instances  du  quartiar-m^tre.  Une  d^ 
faite  pouvait  tout  perdre;  mais,  d*un 
autre  cdt^,  il  valait  mieux  comlMttre 
une  arm^  morcelee  que  d'avoir  k  lutter 
plus  tard  contre  toutes  ses  forces  reu- 
nies.  Gette   consideration  d^ida   le 

S^n^ral.  Le  80  mars,  les  divisions 
'infanterie  Malachowski,  Gielgud  et 
Rybinski,  la  cavalerie  de  LubiendLi  et 
de Skarzynski ,  en  tout vingt-sept  mille 
fantassins ,  six  mille  cinq  cents  chevaux 
et  soaante  et  douze  pieces  d'artillerie, 
d^filerent  en  silence  sur  le  pont  de 
Praga ,  et  le  matin  les  oolonnes  polo- 
naises attaqu^rent  de  front  et  de  flane 
la  position  de  Tennemi.  Geistnar,  sur- 
pris  par  cette  brusque  attaque,  arr£ta 
quelque  temps  la  tougue  oes  legions 
polonaises ;  bientot  ses  retrauchements 
sont  tournes,  le  d^rdre  se  met  dans 
les  rangs  des  Russes ,  tout  ce  que  la 
fuite  n*a  point  soustrait  au  vainqueur 
mord  la  poussiere  ou  met  has  les  ar- 
mes.  A  deux  heures,  la  deroute  de 
Geismar  ^tait  complete,  et  il  se  rifu- 
giait  avec  deux  ou  irois  mille  hommes 
sous  la  protection  de  Rosen,  qui,  a  la 
tdte  de  vingt  mille  hommes,  attendait 
de  pied  ferme  le  choc  de  Tennemi.  Vers 
le  soir,  les  Russes  c^ent  pas  k  pas  le 
terrain,  et  la  cavalerie  polonaise,  bri- 
sant  leurs  rangs,  y  promene  le  ravage 
jusqu'a  ce  que  robscurit^  ait  arr^te  le 
vainqueur.  Cinq  ou  six  mille  prison* 
niers ,  deux  mille  morts  ou  blesses ,  dix 
pieces  de  canon  attesterent  les  pertes 
de  Fennemi.  Rosen  profita  de  la  nuit 

{>our  replier  precipitamment  ses  co- 
onnes  vers  Kaluszyn.  Le  lendeuiain, 
t"^  avril,  a  neuf  heures,  Tanu^  po- 
lonaise se  mit  a  sa  poursuite ,  renver- 


RUSSIB. 


Stilt  dans  sa  couifle  rapi^  les  corps 
laiss^  en  arri^re  pour  ittarder  sea 
progrte.  A  KaJaszyn,  la  luUe  recom- 
mend terrible;  mais  Rosen,  forc^ 
d^evacoer  cette  position ,  se  retira  au 
del^  du  Kostrzyn  et  brQla  les  ponts. 
Les  pertes  de  rarm^i;  russe,  dans  cette 
seoonde  journ^,  doubl^rent  celles  de 
la  veille.  Cependaot  le  g^n^alissime^ 
eofnme  s'il  rat  cm  que  la  victotre  lui 
tendait  un  pi^ ,  arr^  Tessor  de  Tar- 
mte  et  replia  see  forces,  que  I'arriv^ 
brusque  de  Dtebitsch  pckivait  oouper. 
Ce  dernier,  h  la  nouTeHe*de  F^ec  de 
Denodie,  avait  renonc^  au  projet  de 
passer  la  Vistula,  et,  se  repliant  sur 
son  corps  d'observation ,  il  se  rejetait 
dans  les  lenteurs  d'une  (perre  de  po- 
sition. La  bataiile  d'lgani^,  oik  Prond- 
zynski  fit  essuyer  une  perte  conside- 
rable a  Rosen  et  h  Pahlen ,  init  en  Evi- 
dence les  hauts  talents  roilitaires  du 
quartier-maltre,  et  si  elle  n'eut  pas  de 
resultats  plus  €6conds ,  il  fiut  en  attri- 
buer  la  faute  au  gEneralissime  qui  ar- 
riva  trop  tard ,  et  dont  les  dispositions 
avortto  permirent  k  Tennenii  de  se 
rallier  apres  la  ddaite.  L'approdie  de 
Didiitsoi  for^a  bientdt  les  Polonais  h 
r^troi^ader. 

Ainsi  les  avantages  des  Polonais  ^ 
9fdtieUs  du  plus  pur  de  leur  sang,  n'a- 
vaient  rien  cbangE  h  leur  situation. 
SkTzynedii  avait  concentre  ses  forces 
en  face  de  Diebitsch ,  et  ces  deux  ri- 
vaux,  k  peu  pres  ^aux  en  forces,  se 
mesoraient  de  Tceil  sans  oser  en  yenir 
a  une  bataiile  g^n^rale.  Sur  la  haute 
Vistule,  Sitewski,  avec  six  mille  re- 
cmcs,  fut  teasE  par  Kreutz.  Dwer- 
Dicki  etait  entr^  en  Volhvnie  k  la  t^te 
de  ^eloues  milliers  d'bommes;  on 
Tarait  ^argE  de  la  mission  difficile 
de  pea^trer  au  travers  des  corps  de 
Kreutz,  Rudiger  et  Roth,  qui,  mtoe 
isol^,  auraient  suilQ  pour  toaser  sa 
faiUe  troupe,  et  de  s'emparer  de  Ra- 
nienletz.  L'apparilion  de  Dwernicki 
n'exctta  qu'un  enthousiasme  sterile; 
les  Volhyniens  ne  demandaient  pas 
mieux  que  d'^re  d^ivrte,  mais  ils  pa- 
roreot  peu  dispose  k  prendre  une  part 
active  k  Tinsurrection.  Dwernleki  ob- 
(im  un  avaiitagc  a  Bortoen;  mais  la, 


eornme  ailleurs ,  la  plus  brillante  valeur 
s'arr^ta  devant  des  forces  toujours  re- 
naissantes.  Rudiger  perdait  plus  d'bom* 
mes  que  son  rival ,  et  ses  rangs  parais- 
saient  k  peine  ^lairds.  Au  lieu  de 
peroer  dans  la  direction  de  Karoenietz , 
le  partisan  polonais  s*^it  jet^  vers 
le  mrdi,  ayant  k  sa  droite  la  Iron* 
tiere  nentre  autricbienne.  La  Podolie 
lui  offrait  d'in^puisables  ressourees; 
mais  les  ^toeraux  Roth  et  Kayza- 
row  pouvaient  facilement  lecouper  du 
th^tre  de  Tinsurrection,  et  le  rejeter 
sur  la  limite  de  la  Galide.  Les  troupes 
russes  ne  craignirent  pas  de  violer  le 
territoire  neutre;  dies  toum^ent  la 
position  de  Dwernicki,  et  renveloppe- 
rent  si  ^troitement,  que  le  g6nErai  se 
vit  oblige  de  se  r^fugier  en  Galicie :  la , 
desaroieparlesautoritesautrichiennes, 
il  remit  son  sabre  dans  le  fourreau , 
aj^ks  avoir  &it  tout  ce  qu*il  etait  hu- 
mainement  possible  de  faire. 

Cependant,  comme  si  la  Volhynie, 
veuve  de  Dwernicki,  cAt  rougi  de  ne 
prendre  aucune  part  k  la  lutte  de  Tin- 
dependance,  eHe  arma  quelqucs  ci- 
toyens,  qui  combattirent  sous  les 
orares  de  Rozycki  et  Kolvsko :  ce  der- 
nier fut  oblige  de  se  rabattre  sur  la 
fronti^re  autricbienne;  quant  a  Rozyc- 
ki ,  apr^s  avoir  lutte  pendant  pres  d'un 
mois  centre  les  corps  dissemin^s  des 
Russes,  il  parvint  k  se  jeter  dans  Za- 
mosc. 

II  est  temps  de  toumer  nos  regards 
vers  la  Litbuanie.  Aux  premieres  nou- 
velles  de  linsurrectlon  varsovienncf 
les  autorites  russes  avaient  pris  toutes 
les  mesures  que  redamaient  les  cir- 
constances.  Presaue  tous  les  hommes 
en  etat  de  porter  les  armes  avaient  ete 
jetes  brusquement  sous  les  drapeaux; 
on  avait  regard^  comme  urgent  de  faire 
cette  presse  d*hommes ,  pour  ne  latsser 
au  pays  c(ue  les  ressourees  necessaires 
pour  abnter  et  nourrir  Tarmee  d*in- 
vasion.  Les  corps  de  Rosen  et  de 
Pahlen  occupaient  la  Lithuanie.  Les 
ofHciers  suspects  de  patriotisme  furent 
eeartes  ou  emptoyEs  dans  des  corps 
russes,  et  si  rmsurrection  se  fQt  de- 
daree,  elle  v&i  ete  immediatement 
paralysee  par  le  defaut  d'enseiTible  et 


•?• 


L*U!II¥ERS. 


4e  eoBSioee.  Un  oukase  fkoM^  mnfiii 
tM  gymmatA  aux  iiiTestigatioBS  de  hi 
ptriiee;  les  tUluts  lithuamengf  oa  m 
eoDservaieot  quelques  franchises,  fu- 
rent  modifies;  on  ^tablit  de  nouvcaus 
impute,  et  on  dMara  la  province  em 
tot  da  giierre«  Pour  completer  ces 
naeaures,  il  fut  procM^  a  un  d^sarmo* 
anent  g^odraU  Lea  d^nonciations  qui 
atteignaient  tea  patriotea  sem^rent  la 
defiance,  et  lea  rigoeurt  de  Fadminis^ 
tratioo  firent  douter  i  pluaieura  si  io 
p6ril  de  la  r6volte  n'toit  pat  pr^f6rablo 
aux  tracasaeries  et  aax  vexations  da 
Ueutenant  du  taar.  Cependant  il  exia* 
tei  1 41¥ikia  uo  eomit^  r^volutionnatre » 
maia  il  paraisaait  plus  dispose  k  dta* 
cuter  f^'h  agir.  Get  tot  d*atlente  et 
de  d^ance  se  proiongea  jasqu'au  naoia 
de  mars.  Lea  sooote  die  raraiite  de 
la  Vistula  exalfctont  quelques  espe« 
raneea;  les  campagnea  surtout,  apr^ 
avoir  longtemps  attendu  Tim^laion 
de  Wihia  *  senriblaient  disposto  a  pren* 
dre  roffaoaive.  C'toit  surtout  en  Sa* 
mogitie  que  le  m^ntentement  prenait 
un  caractire  plus  d6cid^  :  quelques 
paysanSy  apres  avoir  elu  un  chef, 
avaient  repousse  les  enrdieora  mos* 
oovites;  mais,  poiirsuivis  aussitdt  par 
una  oolonna  russe,  lis  s'toient  ais« 
pers^  dans  leurs  forto.  Staniewicz, 
raar^chal  de  la  noUesse  de  Rosieni^t 
courut  k  Lipawa  pour  y  acheter  des 
armes  et  des  munitions.  On  arma  de 
faux  et  de  hacbea  les  paysans  el  les 
employ^  des  cfatoaux ;  les  tories  des 
nartieuliera  fureftt  ouvertes  et  noises  k 
la  disposition  de  ouiooaque  savait  m»> 
nier  un  cheval.  On  maBquait  d*artil-* 
lerie^  mais  on  improvisa  queiquea  ca- 
nous  faita  avee  dea  tronca  d'arbrea 
creus^,  serrte  par  dea  cerclea  de  fer, 
et  auxqiiela  oft  doMia  pour  aifdts  des 
trains  de  carrossea.  Des  le  26  nuurs, 
les  premiers  attroupements  dtormd* 
rent  lea  gardes  russes  du  canal  de 
Windawa;  le  lendemaiB,  la  i^amison 
de  RositeM^  est  ehasste,  el  les  districts 
voistna  se  soul^eat  presque  simulta* 
ntoent.  Maia  pour  que  rinsiirraetioa 
aamogitienne  pdt  devenir  redoutaUe, 
il  feUait  qu*elle  se  eoordonnAt  avee  un 
souieveoaent  serieux  en  Litbuaaie.  Le 


mpaa  heoiein;  lea  P9ians  ne  parent 
tenir  eontre  deux  ariile  hommea  de 
troupes  r^li^res^  et  se  dispers^wmt 
bientdt  dans  toutes  les  directions  «  pour 
iiire  la  guerre  qu*ila  entendaienl  le 
mieoXf  oeile  de  partinns.  lis  rteaai- 
rent  ouelquefoia,  el  pkia  aouvent  aoo* 
combereiit.  Un  peu  pina  tard,  Sta- 
niewica  pressa  vivement  le  colonel 
Bartfaolemeua,  et  le  contraignit  k  ae 
rtogier  8«r  le  territoire  prossien.  Lea 
iaaurg^s  parvtnrent  mdnie  a  a'emparer 
de  Potonaav  petite  ville  au  moyen  da 
bquelle  lea  Rusaea  eorrespondaient 
avee  lea  Prussiens.  MaiB  oe  i>oint  ini- 
portaot  lut  repris  par  le  g^eral  Ren- 
nekanapf.  Oo  aaaure  que  quelques 
bitimenta  chaig^  d'annea  et  oestinte 
aux  Polonais  devaient  aborder  dans  le 
petit  port  de  Polonga,  ee  qui  expliqoa- 
rait  racfaamement  avee  lequel  on  ae 
dispolait  cette  position.  Au  reatey  la 
r^utanee  de  cette  province  ne  fiul 
qu*un  Msode  presque  inaper^u  au  mi* 
lieu  de  la  conflagration  gffitole.  «  Les 
canons  toient  si  rares^  dit  Midros* 
lawski,  qu*ila  inspiraient  aux  rawrea 
oampagaatds  una  sorte  de  culte  reK- 

{;ieux;  on  raconte  qu'un  artilleur jkh 
onaie  ayant  ameii6  deux  pieces  d^r- 
tillerieaiiqoartiergtotoldesinsuiges* 
tons  se  pressaient  pour  les  voir  et  lea 
toucber;  ils  devaient  leurs  voix  mena- 
fantes  vera  rouest,  protestant  qolla 
ne  craignaient  plus  Diebitseb.  « 

Les  dGTorts  que  faisait  la  SanMwitie 
pour  se  d^barrasser  de  ses  cfaunes 
n'toient  pas  perdus  pour  lea  Litbaa- 
nieoa;  Wilna  toil  sourdenient  travail- 
Ue  par  des  meneurs  sans  teergiev  ifui 
auraient  biea  voulu  que  la  r^olulion 
s'opMt  sans  fatigues  ni  perils.  Le  co- 
nilt6  de  oette  ville  soHicitart  lea  cam- 
pagnea de  marcber  sur  la  capitale  de 
la  province  pour  Taider  k  ae  soulever. 
De  leur  c6te>  les  districts,  saoa  dtre 
toign^  d'op^r  oe  mouvementt  troo- 
vaient  que  le  service  qu*on  attendail 
d*eux  valail  plus  ou'iin  simple  appd, 
el  que  queiquea  demonslrationa  de  ia 
part  du  eonm  toient  ntossairea*  En 
attendant,  le  district  de  Treki  d6eidail 
que  roo  s'emparerait  du  cheMeUt  et 


RUSSIE. 


57 1 


fae  Joiiyiw  ««l^«i«iipli  mtnii  trouH 
ttwK  d'ioiit9lfeur8f  on  ntrdHfait  dt 
0QM8ii  aurWilMk  Ge  ^i«Jel«  praque 
mmMt  eskmVk  qoe  ooofii,  mit  k  la 
di^pof  ition  des  iMirK^  qoelqiiea  aiv 
oMa.  Oaamiana  ant  le  mtee  aort.  Wil« 
koaaierzt  mmaoht  jpn  laa  baodea,  fat 
^vacute,  al  la  garoisoo  aa  raplia  aur 
WilM,  BOB  aaaa  avoir  aaaay^  d'asaes 
emidaa  partaa.  Gepcodant  lea  aotoriUa 
aa  IViina  dtelarmnt  qifau  pramiar 
aele  d^hoatiliU  de  la  part  da  paoplef 
la  garBiaon  ae  retirerait  et  Ibudraiarait 
la  ▼ille.  Laa  plus  r^iolua  s'^chappalent 
da  Yflkn^  pour  aller  groiair  lea  oandaa. 
CeUea-d  rMaiest  daaa  lea  diatrieta  oa 
lournaieBt  aatour  de  la  eapitale ,  ^piaul 
lea  oonvoia  et  FoccaaioD  do  delivrer  lea 
wyoanaia.  Kowno  ^ait  gard^  par 
m,  millo  Ruaaea.  Una  forte  sortie  quo 
it  la  gamlaoB  nettoya  d'insor^^  lea 
ooamnmicatiotta  autre  eeCte  ville  et 
oelle  de  Wilna.  Une  aeole  baude,  aooa 
le  eoBunandemeiit  de  ProsoTt  haroelait 
oonataiBineDt  lea  eouvoia  dea  Rnasea, 
et  leur  Mwppaitd^  qu*elle  teit  pout* 
8iam.GapeDdaftt  lagen^ralScfaimaiiDt 
aofti  do  JDunabourg  pour  aaoottor  le 
pare  da  reserve  deraamtedeDicbitaGb, 
a'ctait  retrancW  dans  Uciany.  Una 
jenae  heroine,  £milie  Plater,  avait 
/fh— ffi§  par  aa  presence  et  son  mys- 
tique patriotianM  lea  habitants  de  eette 
oratree;  Cter  Plater,  son  frere,  flfen^ 
pare  da  Tezierosy;  quelquea  antrea 
chda  lea  aecondent,  et  leors  foresa 
r^uioa  menacentbient^t  Udany.  L'in- 
surreetioBs'^lendait ,  mais  eapndeasei 
et  maaqnaoft  de  oette  UBit6  sans  la* 
quelle  le  eonrage  et  lea  aacrifieea  do- 
mewont  sterilea.  Uarriv^  de  quelquea 
jeonea  gaaa  plus  inatmita  que  les  au« 
tree  dtait  ragavdte  eomme  un  Mn^ 
meat  d'one  haute  importanee.  On 
s'obaiinait  k  marehcr  arar  Wilna.  Za<- 
luaki  passa  fai  Wflia  avec  queiqvea 
miNieaa  d'booMBHS ,  tandia  qu'nn  autiB 
partiaaD  de?ait  op^rer  sob  attaqae  aur 
le  mime  point,  en  dAoocfaant  par 
OanmiaDa.  Le  oomit6  n*en  resta  paa 
oMna  dans  rinaction,  aoit  faiblesse, 
lait  qoe  lea  mesurea  dea  autorites 
nasaa  hn  euaaent  6U  tout  moyen  d*a- 
gk.  Dm  eoioBnes  russes  marcfa^ent 


k  la  reacoBtre  dea  tnsoig6s  et  les  cul- 
butireBt.  De  Wilna,  de  Polonga,  de 
Kewno,  dea  d^tacbements  moscovitea 
balayaient  les  routes,  eemaient  les  in- 
surges,  lea  battaient  ordinairement 
lorsqu'ils  s*avisaient  de  r^sister  en 
masse;  mais  ne  pouvant  les  poursuivre 
dans  leurs  ratrartes ,  lis  perdaient  beau- 
eoop  de  monde  dans  lei  attaques  d*em« 
buscade«  La  fittigue  et  le  ehol^a  d^i- 
maient  lenrs  ranss,  et  la  raret^  des 
subatstaaees  ae  lalsait  sentir  toutes 
ka  foia  qu*on  s'doignatt  des  d^pdts. 
Lea  renforta  pvtis  du  ^uartier  g6n6rat 
de  Diebftseb  renoutelatent  sans  cesse 
lea  gamisons,  et  venaient  se  croiser 
avec  les  corps  qui  arrifaient  de  la 
Gourlande.  Lea  insurg^  oombattaient 
pertout  et  ne  tenaient  nulla  part;  Par* 
tilierie  ennemie  sufBsait  pour  arr^r 
leur  fougue.  Aprhs  une  attaqae  infriio- 
tuense  contre  Polonga,  ils  se  diss^mi- 
airent  poor  recommencer  la  guerre  de 
partlaans. 

11  a'eittre  pas  dans  notre  plan  de 
conaianer  tons  les  details  de  cette  lutte , 
cik  CDaoue  village  ^tait  un  centre, 
Cbaque  aonMne  de  ooeor  on  gto^ral; 
meia  Khistoire  doit  une  mention  au 
d^uement  des  Steves  de  Wilna;  cent 
d*entre  epx  ^taient  parvenus  k  s*6cbap- 
per  pour  prendre  part  aux  dangers  aa 
leurs  Mrea.  Cette  enisration  eontinua 
malgr^  lea  prtarations  les  plus  s^v^res ; 
en6n  tous  ceux  oui  ftaieni  rest^  a  Tu- 
mverail^  s'^vaderent  simultanement, 
el,  apr^  des  fitigoes  inouies,  se  joi- 
gmrent  au  partisan  Matusewicz  oui 
oommandait  les  insurg^s  de  Trofci. 
Une  colonne  russe  les  atteignit  bientdt, 
et  tons  ceux  qu^^rena  le  fer  de  Ten* 
nemi  alldreat  se  lolndre  aux  bandes 
samogitienaea  et  de  Wilcomir. 

Dans  les  provinces  rusaiennes ,  c^est* 
anllre  en  Volhynie  et  Podoiie,  et  en 
Ukraine  t  qodques  efforts  partiels  s^e- 
taient  asacna^  k  la  mission  de  Dwer- 
nicki;  mats  le  mauvais  suoc^  du  g^- 
ntol  avait  gfoc^  les  d^vouements  et 
firapp^d'impuisaance  les  mesures  d*ane 
noign^d'aventttriers  patriotes.  Toutes 
leurs  bandes  r^unies  d^pass^nt  ill 
peine  deux  mills  hommea.  Vainqneurs 
dans  quelques  rencontres,  ils  lurent 


S79 


LUNIVERS. 


toraste  par  les  masses  russes,  et  leurs 
debris  se  r^fiigierent,  le  S6  maj,  ea 
Galicie.  Rozicki,  plus  habile  ou  plus 
heureux ,  6*^tait  jete  dans  Zamosc. 

Cepeodant  racm^e  polonaise  avail 
recompl^te  ses  ran^s;  les  prisouniers 
lithuaniens  se  battirei>t  pour  1  insur« 
rectioa  comme  ils  s'^taient  battus 
contre  elle;  c^^taieot  d'excellents  ins- 
truments qui  venaient  de  cban({er  de 
mattres.  Le  Kostrzyn  s^parait  les 
Russes  des  Polonais.  Ghacun  des  deux 
g^ndraux  semblait  attendre  que  son 
adversaire  fit  une  faute;  les  maladies 
et  la  contagion  d^olaient  les  deux 
camps.  De  part  et  d*autre,  le  gt^nie 
militaire  semblait  s'^tre  rtfugi^  dans 
le  cerveau  de  deux  hommes  subor- 
donnas  a  Tomnipotence  de  la  hierar- 
chic militaire :  le  g^D^ral  Toll  pour  les 
Russes,  Prondzynski  pour  les  Polo- 
liais.  Le  24  afril,  I'arm^  russe  s*^- 
branla  dans  Tintention  de  tourner  les 
sources  du  fleuve  pour  accabler  la 
droite  de  Skrz^neckj ,  oouper  l*arm6e 
polonaise  a  Minsk  ou  la  refouler  sur 
Praga.  Diebitsch  mtt  de  la  lenteur 
dans  ses  mouvements,  et  lorsque  le  37 
Tarmac  russe  se  prints  devant  Minsk , 
Tarriere-ffarde  polonaise  6tait  rangte 
en  bataifle  pour  la  reoevoir :  la,  diz 
mille  Polonais  arr^t^rent  pendant  une 
journee  les  efforts  de  I'ennemi.  Le  fold- 
mar^chal  abandonna  Minsk  et  reprit 
saoremi^e  position. 

dur  ces  entrefaites,  la  droite  de 
Tarm^e  polonaise  essuyait  de  graves 
echecs.  Sierawski  battu  s*etait  replie 
sur  la  rive  gauche  de  la  Vistule;  Dwer- 
nicki  avait  disparu  du  th^tre  de  Tin- 
surrection.  Get  ev^nement  n'^tait  pas 
encore  connu  au  quartier  general ;  on 
crut  qu*il  ^tait  encore  temps  d*envoyer 
au  secours  de  ce  harai  partisan. 
Glirzanowski ,  chef  d'^tat-major,  fut 
charge  de  cette  perilleuse  mission ,  que 
six  mille  hommes  d'^lite  devaient  ac- 
complir  sous  ses  ordres.  De  son  cdt^, 
Diebitsch  envoya  h  Kreutz  un  renfort 
considerable;  la  petite  arra^  ou  le 
general  Ramorino  se  distin^ua  Ait  plu- 
sieurs  fois  attaqu^,  et  parviot,  a  force 
d^hahilete  et  de  courage,  h  mettre  en 
dtfaut  les  corps  charges  de  Tarr^ter 


et  de  la  d^truire;  enin  elle  trouva  un 
abri  dans  Zamoso. 

Vingt  mille  hommes  de  la  garde  hn- 
p^riale  rusae,  sous  le  oommandement 
du  erand-duc  Michel,  se  trouvaieot 
sur  le  chemin  de  Looza,  h  vingt-eioq 
lieues  environ  du  fdd-marMal.  Prond- 
ztnski  proposa  de  tomher  brosquement 
sur  les  gardes,  ce  qui  pouvait  Her  les 
operations  h  Tinsarrection  Itthua- 
nienne.  Ch]a|x>wski ,  k  la  t^te  d'une 
troupe  d'ofiSciers  et  de  sous-offiders 
instracteucs,  et  d'une  escorte  de  six 
cents  dievaux,  devait  profiler  de  la 
retraite  des  gardes  pour  soutenir  et 
discipliner  la  resistance  des  Lithua" 
niens.  Skrzynecki,  qui  ne  savait  oser 
qu'a  demi ,  crut  pouvoir  conciiier  Tat- 
taque  projetee  contre  les  gardes  atec 
le  maintien  de  ses  positions.  Uminski 
fut  charge  d*observer  Diebitsch  entre 
le  Bug  et  la  Vistule ,  tandis  que  le  corps 
d*armee  s'ecoulerait  le  plus  secrete- 
meot  possible  vers  le  nora.  Pendantce 
mouvement ,  Diebitsch  attoquaUmins^ 
ki ,  qui  se  defendit  de  maniere  h  iui 


[pedition  de  Louza  se  oomposait 

3uatre  divisions  d'infanterie,  de  trois 
e  cavalerie  et  d'environ  cent  boucbes 
k  feu.  Elle  marcba  sur  trois  eoloDoes. 
Le  prince  Michel  ignorait  entierement 
la  marche  de  Tennemi.  Les  Rasses  86 
retiraient  en  ordre ;  mais ,  devant  Czer- 
win,  ils  s'arretereut,  disposes  k  accepter 
le  combat  Skrzvnecki  avait  ravantage 
du  nombre  et  oelui  de  Toffensive;  mais , 
preoocupe  par  Tidee  de  s'emparer  da 
Louza  et  drOstrolenka,  pour  assurer 
sa  retraite  sur  Varsovie,  il  laissa 
echapper  I'occasion  de  vaincre.  Saken, 
qui  occupait  Ostrolenka,  repwtu 
totttes  les  attaques  de  Dembinski :  u 
ne  plia  que  lorsque  la  division  Gielgud , 
eovoyee  par  le  generalissime,  vint  sp- 
na/er  les  efforts  de  Dembinski ;  tovte- 
rois  il  avait  sau ve  ses  bsgaf^ « et  donae 
au  grand-due  Michel  le  loisir  de  se  re* 
oonnattre.  Gependant  Chbpowski  p^ 
netra  en  Lithuania,  a  travers  la  forit 
de  Bialowies.  Skrzynecki ,  aprds  avoir 
laisse  aux  gardes  tout  le  loisir  de  so 
retirer,  s*attacha  .inooDsiderement  d 


RUSSIE. 


57S 


kv  poursuite.  Le  prince  poursuivant 
aretraite,  que  prot^eaient  queiques 
Qombats  d*arriere-garde,  oecupait  a^j^ 
lykodn  et  le  pont  sur  la  Narew.  Dt- 
bu8qa6de  cette  position,  il  fut  oblige 
de  ae  rejeter  k  louest  de  Bialistock, 
ce  qui  le  coupait  de  ses  commnnica- 
tions  avec  le  feld-niar6clial.  Gependant 
Diebitscfa ,  inform^  du  danger  que  oou- 
raient  les  gardes,  se  bdta  de  jeter  un 
poot  a  Granne.  Skrz^ecki  se  replia 
vers  Ostrolenka ,  et  mit  tant  de  lenteur 
a  operer  sa  retraite  concentrique,  quMl 
laiasa  k  son  adversaire  le  temps  de 
Faille  les  gardes  et  de  prendre  s^eu- 
sement  ronensiTe.  Lubienski,  obarg^ 
d*ob6erTer  le  Bag  avec  dix  roille  hom- 
ines, oocupait  les  environs  de  Nur,  et 
pouisait  aes  reconnaissances  jusqu'^ 
Granne  et  Droghiczyn.  Les  Russes 
renvdoppj^nt  dans  cette  oosition;  il 
n*^cbappa  a  une  mine  totaie  qu'aprte 
de  vigooreux  efforts,  et  il  rejoignit 
Skrzjnecki  a  Sniadow. 

Gielgud  oceopait  Louza;  le  g^^a- 

lissime  ^tait  loin  de  pr^voir  que  Die- 

bistcb  allait  Tattaquer.  Le  36  mai, 

Skrzynecki  se  transporta  avec  son 

tet-ma^r  k  Ostrolenka.  A  huit  heures 

da  matin ,  I'armee  russe  se  montra  sur 

les  nmtes  voisines.  Les  troupes  de 

Lofawoski  fiirent  assaiUies  les  premid- 

ret^Sfazyneckialorsput  mesurer  toute 

feleodue  de  sa  faute;  les  bataiilons  po- 

tonats  arrivaient  un  Jinn ,  et  se  ruaient 

cooragcasement  contre  les  masses  de 

reonemi,  qui  avait  d^Ioy^  sur  les 

hautrars  une  artillerie  formidable.  Le 

gmtel  Langerroann  eut  un  cheval  tu^ 

sous  lui.  Tout  Teffort  de  la  cavalerie 

pokmaise  ^choua  oontre  les  disposi- 

tjoiis  da  terrain;  les  ehevaux  enfon- 

eaient  dans  la  vase  jusqu'an  j^itraiL 

Oeoz  cbefii,  Torgueii  de  I'armee,  Ra- 

minski  et  Kicki ,  tomb^rent.  Vers  le 

sotr,  rartillerie  polonaise,  dirig^  par 

Bern,  arrfita  la  marche  des  Russes.  Le 

Csui  vant  allait  d^oiler  toute  T^ten- 
des  pertes.  Le  cto^ralissime  polo- 
aais  convoqua  les  cnefs  et  tint  an  con- 
■eil  de  guerre;  il  fut  r^lu  qu'on  se 
Rplierait  sur  Yarsovie,  et  que,  pour 
tMter  le  corpe  de  Gielgud ,  qui  allait 
te  traiver  abandonn^  5lui-meme,  on 


lui  doanerait.Tordre  de  se  jeter  en 
Lithuanie ,  sur  les  reyers  de  Diebitsch , 
dans  le  palatinat  d*Augustow.  Lu- 
bicnski  fut  charg^  de  la  retraite,  et 
Dembinski,  avec  les  escadrons  de 
Posen,  alia  rejoindre  Gielgud  pour 
s'associer  k  son  exp^ition.  Slrzyn^Jii 
entra  le  lendemain  dans  Praga,  et  pen- 
dant trois  jours  les  debris  des  corps 
3ui  rentrdrent  dans  la  ville  purent 
onner  une  idee  exacte  de  la  defaite 
d'Ostrolenka.  L'infanterie  de  Pahlen 
et  de  Scfaakhovskoi  fit  tous  les  frais 
de  la  iournto :  les  gardes  et  la  cava- 
lerie aes  Russes  ne  donn^rent  point. 
.On  ne  conceit  pas  pourquoi  Diebitsdi 
ne  voulut  point  profiter  de  sa  victoire. 
Varsovie,  vivement  attaqude  pendant 
la  ddsastreuse  defaite  de  ses  defeo- 
seurs,  n*edt  pu  opposer  une  longue 
r^istance.  Mais  Skrzynecki  venait  de 
faire  une  finite;  la  courtoisie  du  fekl- 
.mardchal  ne  lui  permit  pas  de  rester 
en  arriere.  Le  general  ToU ,  aprds  avoir 
si  habilement  oonfu  le  plan  d'attaque, 
vit  avec  douleur  que  le  r^^ultat  d^ 
nitif  de  la  campa^ne  ^tait  compromis 
par  les  lenteurs  mexplicables  de  son 
cbef. 

La  bataille  d'Ostrolenka,  une  des 
plusmeurtri^res  qui  se  donna  entre  les 
Russes  et  les  Polonais,  eut  un  effet 
moral  tr^-fScbeux  sur  i'arm^  insuiw 
rectionnelle.  Un  des  r^uitats  les  plas 
directs  de  cette  iourn^  fut  de  re* 
placer  le  tb^tre  ae  la  guerre  dans  les 
mtoes  limites  strat^ques  qu'au  oom- 
mencement  de  la  campagne.  Gielgud, 
s^par6  de  Tarmac  en  retraite  par  le 
mouveroent  en  avant  des  Russes,  n'a** 
vait  plus  qu'k  remplir  sa  mission,  qui 
ddsormais  6tait  devenue  pour  lui  une 
n^eessit^,  celle  de  se  jeter  en  Lithua- 
nie. II  re^t  I'ordre  de  s'eniparer  de 
Kowno,  et  de  marcher  sur  Polonga, 
ou  Ton  esp^rait  trouver  les  armes  ex- 

Kite  par  le  comit6  de  Paris.  Dem* 
Bki  rejoignit  bientdt  Gielgud;  les 
deux  g^neraux  se  mirent  en  marche, 
enlevant  atnsi  k  la  d^nse  directe  de 
Varsovie  une  force  d'environ  dix  mille 
ocNnbattants.  II  s'agissait  d'enfonoer  la 
division  de  Saeken  avai^  i'arrivfe  des 
renforts  dirig6i  8|ir  oe  point  par  ie 


574 


L'UmVERS. 


feld*inar6ehal.  Sacken,  ignorant  quil 
avait  affisiire  il  une  division,  a'avanea  k 
la  rencontre  de  I'ennemi;  mais  bana , 
derant  Raygrod ,  il  n'eut  qne  le  teniiia 
de  r^trograder  aur  Angustow.  Oiel- 
god,  vaioqueur,  antra  le  90  mai  dane 
oette  yiile.  Lea  partisans,  ^lectris^ 
par  ce  suoe^ ,  reiorm^rent  leurs  ban- 
des ,  et  la  ditisioncontinua  ta  mardha. 
Chiapowski  p^n^tra  dans  la  for^  de 
Bialowies ,  maltipliant  ses  attaques ,  et 
r^veillant  c&  et  la  le  eourage  et  les  ea- 
p^ances  aea  habitants.  Ca  nouvelle 
de  rentr6e  du  corns  de  Gielgud  en 
LithuaDie  blessa,  dit-on,  son  amour- 
propre,  et  ridee  de  figurer  comme  su- 
Dordonn^dans  cette  expMMition  ^mons- 
aa  son  patriotisme.  Bient6t  ii  reeut 
nne  d^pecbe  de  Dembinski,  qui  lui 
eommuniqiialt  Tordred'abandonner  la 
chauss^  de  Wiina  poar  se  Joindre  k 
lui  en  Samogitie.  If  rallia  toutes  ses 
ioroes,  et  reocontra  Gielgud  k  Kief* 
dany.  Gependant  la  sollicituda  de  Die- 
bitsdi  s'^tait  portte  sur  Wfilna  t  lea 

f^^aux  russes  Kuruta ,  Saaken ,  Frie- 
!en  et  MalinoTskof ,  Khilkof  et  Tola- 
tot,  se  dirlgeaient  vera  la  capitale 
menace.  11  etait  d^i^  trop  tard  pour 
csp^rer  d'enlever  Wilna,  que  prot^ 
geaient  tous  ces  reoforts.  Cependant 
Kuruta  et  Tolato!  B*^tatant  paa  en- 
eore  arrive,  et  Tattaque  offirait  des 
ehanoas  da  sueote.  Gielgud  temporisa, 
et  dk§  lors  la  prudence  aurait  dd  dd- 
ternniner  les  Polonais  k  la  retraita^ 
Dembinski  et  Chlapow^  enrent  k  es- 
tnytt  deux  sorties  de  la  garoiaon  dt 
Wilna.  Le  mdcontentement  gagna  lea 
insura^s;  quelques«uns  se  proentent 
diez  le  gto^ral ,  le  sommeot  de  mar- 
cher sur  la  ville  on  d'abandonnar  la 
eomnoandament.  Gielgud  promit  tout; 
mais,  k  partir  de  ee  moment,  il  d^aes* 
jpim  de  sa  cause,  et  saariila  le  faiea 
g^n^ral  a  ses  nroprcs  ressentimenta. 
Chiapowski  refiisa  d'aocepter  la  direo* 
tion  dc  Tarmte,  et,  ntia£ut  de  voir 
Gielgud  humfili^,  il  pi^fite  le  rAle  d'un 
faooune  de  genie  qui  murmure,  et  nil 
bllme  st^ie  au  devoir  d'un  ebef  res- 
ponaaUe.  Cast  dans  caa  diapositioiis 
fflie  I'armte  pokmaiae  attaqua  Wilna. 
6nasfuiiaqueKhrapovicki,gouveniaar 


dela  plaoe,avait  menac^detoutr^duire 
en  cendrea  au  moindre  indice  d'losnr- 
Nction  iiarmi  les  habitants.  Tous  lea 
eifforts  de  Gielgud  se  briserent  centre 
la  position  retrench^  dePonary .  Aprte 
un  combat  de  douze  heuraa,  Gielgud 
ae  vit  oontraint  d'abandonner  I'atta- 
que.  Dembinski,  trop  ^k>i|nid  pour 
prendre  part  k  ractton,  ne  dtesp^ 
de  rien;  et  tandis  que  Chiapowski  re- 
fosalt  pour  la  saoonde  fois  de  d^iroger 
k  la  discipline,  en  aoceptant  le  com- 
mandament  de  rarm6B,  Gielgud  re^ut 
de  nouveaux  ordres  qui  lui  enjoi- 

g latent  de  se  maintenir  en  Samofitie- 
n  euince  jours ,  ce  malenoontreux  g^ 
ndral  se  vit  eoup^  de  la  Baltiqoe  et  de 
Pok>nga..On  aasure  que  Gielgud  et 
Chlapowaki  ouvrirent  des  correspond 
danoea  avec  lea  autorit^s  prasaiames. 
Quoi  qu'il  en  soit ,  au  bout  de  quelquea 

Crs  marqn^  par  dee  combats  mal- 
raux,  tona  les  d^ris  de  I'invasioii 
lithuanienne  ae  trouvaient  envdopp^ 
par  des  fbreea  sup^rieores.  Dans  cette 
extrteit^,  Oilapowski  propoaa  le  pre- 
mier de  se  rtfugicr  sur  le  territoire 
Jirussien.  La  furaur  a'empare  dee  Pie* 
onaia;  lis  oourent  ches  Gielcud,  qui 
lenr  nromet  en  tremblant  de  livrer 
batailk.  L'attaqua  da  Saawle  par  Dem- 
binaki  rallia  un  instant  rarmae  polo* 
naise ;  mais  elle  combattit  sans  enaera- 
ble;  personne  ne  reoevait  d'onires; 
Gielgud  et  Chlapowaki  ae  renvoyaient 
de  I'un  k  I'autre  les  aides  de  camp«  et 
la  mitraille  ruase  ravageait  les  batiul* 
ions ,  qui  combattaient  avec  nn  eourage 
di^ne  de  meilleurs  chefs.  Aprte  un  der- 
nier effort,  la  fortune  samblait  ae 
d^elarer  pour  lea  assailfanta ,  lorsqu'ila 
re^nrent  tout  k  coop  Tordre  de  bettre 
en  catraite.  Quelquea  ofBciers  s'dlan- 
cnit  vers  Gidgua ,  Tsccablent  de  re* 
proehes;  mais  le  genial,  aans  leur 
r^ndre,  aagae  la  route  de  Kurszaey, 
et  d^aeria  Tarm^  donn^.  A  la  suite 
d'un  eooaeil  de  |pierre,  on  d6cida,  ou 
plutdt  on  Mgnit  de  dMdcr  que  I'oi^ 
partagerait  les  forces  polooaiaea  en 
troia  corpa :  Chiapowski,  avec  ie  pre* 
mier,  devait  retoumer  k  Yeraovie; 
Rohland*  k  la  tite  du  second,  mar* 
aer  Polenga;  et  Dembinaki, 


•  •  • 


•  •  • 

•  •• 


RUfiSlE. 


6T$ 


livamH  de  i^prtMlier  ^nergiqiimiieat 
{(Hdsiid  son  imp^ritie,  exmiterait 
ivK  tt  troisitaie  w  projet  qa*i]  avait 
fbsoiXk  de  se  Jeter  en  (kmikiida. 
•Qooiqae  lea  projeta  6m  troia  gia^ 
nmnetussent  paa  on  myst^,  etque 
GUapowslu  ne  ae  fHH  inme  pas  donn6 
li  perae  de  lea  d^iriaer,  l*on  ae  ber^ait 
k  fespoir  que  quelquea  anoete  ram^ 
neraient  les  che£B  k  dea  aeBtimenta  ploa 
^6s... »   (Mi^roalawski.)   A  deux 
inifles  de  Lukniki ,  Gielgud  ae  rappro- 
cfaa  de  Chlapowaki;  k  quelque  dia«' 
tsDce,  quelquea  ebefa  d'lnsurg^s  vin^ 
rent  prendre  lea   ordrea  dea  deux 
g^iteux,  qui  lea  reuToyerent  bvea- 
goemeDt.  Cependant  le  oorpa  de  Roh«' 
and,  aux  prisea  arec  lea  Rusaea^ 
soRicitait  yiyeiiient  du  aecours.  (%!a- 
powiki  se  contenta  de  r^ndre  aux 
aides  de  camp  que  chacun  se  batteit 
poor  son  eompte.  Aus8it6t  il  monta  k 
cfaeral  et  se  rapprocha  de  la  fronti^ 
prassienne.  Ce  mouvement  vera  Teal 
poQvait  s'expliquer  par  le  rapprocfae* 
mcnt  des  Rusaes.  L^amour-propre  na- 
tional se  rtfugiait  dans  aea  doutea 
honorables ,  pour  n'avoir  paa  k  enviaa* 
ger  toutes  les  oons^eaces  d'une  triste 
T^t^.  £afln  parut  un  ordre  du  Jour 

3ui  aotorisait  les  offieiers  k  se  d^taeher 
a  oorpa  (f arm^e  pour  continufr  une 
rare  de  partisans  dans  I'int^rieur  de 
Litbuanse.  Chlapo.w8ki  a*approcha 
tout  il  coup  de  la  fronti^  pruasienne. 
et  informa  tea  autorit^  royales  qn'ii 
demandait  k  ae  r^foeier  sur  le  terri« 
toire  neutre  pour  t  <wposer  les  amifs. 
Le  oorpa  de  Roniana,  hareel^  sans 
reJIiche ,  se  repliait  sur  Twer ;  Sla- 
niewicz  ae  smra  de  Rolilaod  k  Kul^, 
ct  9  rassemblant  les  debris  de  sea 
acKnennea  bandea,  il  pr6f^a  lea  dan* 
gers  da  efaef  de  partisan  k  rbespitalit^ 
pmaaienne.  Cnendant  ie  corps  de 
Rohland  apprit  la  dtfeetion  de  Gielgud 
et  de  Cblapowaki, 

«La  fureor  ae  r^etlle  dana  lea 
eoeors  longtemps  affalaa^  aoua  Tlnfor* 
tune;  lei  ploa  entreprmaBls  montenl 
k  cheval  et  eoureot  d^irrer  leura  M» 
res.  ArririM  en  fMe  de  la  plaine,  oft 
Il  rage  anraehe  dea  larmea  aux  vM* 
ruia  ddsam^,  lis  s'entendent  appeler  , 


par  lean  ooaaa,  inviiquer  conume  dea 
^iea  aauyeora.  II  n'y  a  plua  de  fron* 
mre;  lea  langa  dea  priaooniers  et  dea 
lib^rateura  se  confondeat;  ceux  que  le 

Kint  d'homieur  ae  retient  pea  dana 
I  fera  allemanda  profitent  du  tumulte 
poar  reprendre  lenrs  anneal  sautent  le 
2Dsa6  qui  a^pare  les  deux  empires,  et« 
oondotta  par  queiqueaofllciera  et  prea- 
9ue  toot  rtot-major  de  Gielgud,  ae 
jettent  au  niiiieo  du  corps  de  Rohlaod. 

•  Lea  aoMata  prussiens  cfaerefaeot 
en  vain  k  a'opposer  a  eette  fiision ;  maia 
Cblapowaki  et  Gielgud  interposentleur 
autorit^,  ordoenent  aux  aoldata  de 
nster  en  place,  et  pendant  que  lea  in- 
d^s  baiaaeeot  entre  la  aenritude  prua- 
aienoeetttnemortdeh^roa,les  troi^ 
pea  royales  ae  d^ploient  aor  le  terrain. 
Au  milieu  de  cet  efifroyable  diaoa,  on 
quelquea  grandes  dmea ,  en  rdvolte  eon*' 
ire  les  trutres,  lea  meoaoea,  Tattente 
et  la  mcnrt ,  aacriflent  un  tenms  pr^eux 
i  la  d^ivranoe  de  lenrs  fireres,  quel- 
quea voix  d^ignent  les  dieft  a  leor 
rengeanoe.  De  rimmenae  ooloone  qui 
ae  meut  k  deux  pas  de  la  fronti^e  ae 
d^tache ,  le  piatofet  au  poing ,  le  propre 
aide  de  camp  de  Gidgod,  Skalski.  II 
Tole  droit  au  groupe  dea  gtetonx, 
arr^  aon  cheyal  k  ringt  paa  d'eux, 
lyuflle  Gielgud,  et  I'^tend  par  terre  en 
iui  jetant  one  nial^ictioD.  Cblapowaki 
a'evuit  et  ae  cache  au  milieu  de  aes 
lanciera;  mais  ae  royant  en  butte  k 
toutea  les  imprtoittons,  il  demaade 
asile  aox  aiitorit^  prussiennes,  qui 
Itti  formeot  ua  cortege.  A  rinstant 
mime,  Panri^ra-garde  aig^nale  Tappm* 
cfae  de  Temiemi.  Lea  oflfciers  du  corps 
de  Robland  raraaaaent  lea  pek>tona  de- 
baad^  et  ordonnent  la  retraite. 

«Le  oorpa,  bria^  par  tant  da  mi* 
adras  et  de  dteptions,  niarcha  eoatl- 
nuellemant  powrsuivi  uuqai'k  Nowo* 
Miaato  t  li  il  fit  Toito*&tce,  et  ae  battit 
pendaat  toate  une  joom^e.  Arrivie  k 
i>ekilci^,  k  coloane  ai^raod  toot  k 
eaop  que  la  diviaioa  Kreuta,  d^tach^ 
de  la  grande  armee,  s'avance  d^  par 
la  route  de  Marioupol,  et  ra  ooouper 
la  ligae  du  Niimaa.  Jorborg  ae  trosH 
vait  dgalenaent  au  pouvpir  de  rennemi. 
Troia  joora  auparavant,  oo  aurpit  pa 


/ 


676 


L'UNIVERS. 


trouver  une  issue  de  oe  edt^;  aiors  la 
chose  devenait  impraticable ;  le  temps , 
perdu  en  perfidies  de  la  part  des  g^ii6- 
raux,  en  incertitudes  oe  la  part  des 
troapeSf  en  temporisatton  de  la  part 
de  tons,  avait  tu6  Tinsurrection.  Le 
corps  de  Rohland  mit  le  pied  sur  le 
territoire  prussien ,  a  Packen-Mohnen , 
an  nombre  de  quatre  miUe  hommes, 
de  deax  roille  cheyaux  et  de  vingt  pieces 
d*artillerie.  Chlapowski  avait  Hi  de- 
sarm^  avec  deux  mille  hommes  et  douze 
cents  chevaux.  Trois  mille  iosurg^ 
^taient  rentr^  dans  leurs  foyers,  et 
trois  mille  autres  paroouraient  encore 
les  for^ts  et  les  martoges ,  faisant  une 
guerre  d*extermination  k  Tennemi.  11 
ne  restait  done  sous  les  armes  d'autres 
troupes  r^lto  oue  celles  de  Dem- 
binsdl :  leur  nomore  excMait  a  peine 
quatre  mille  hommes,  et  ils  n'avaient 
pour  toute  artillerie  que  six  pieces  de 
canon. »  (Mi^roslawski.)  Nous  ne  sui- 
vrons  pas  ce  general  dans  sa  retraite 
p^illeuse.  II  avait  eu  I'idee  de  se  jeter 
en  Gourlande,  mais  la  hardiesse  ae  ce 
projet  effra;^a  ses  compagnons  d'ar- 
mes;  alors  il  resolut  de  s'ouYrir  un 
passage  vers  le  royaume,  en  tournant 
w  ilna  et  Lida ,  toujours  |>oursuivi  par 
des  forces  sup6rieures,  ^vitant  les  ren- 
contres d^isives,  et  ranimant  qud* 
quefois  le  courage  de  sa  petite  troupe 
par  des  suco^  inesp^r^s.  Les  obstacles 
que  lui  opposaient  les  locality  ajou- 
taient  h  ta  aifficulte  de  sa  retraite;  mais 
ces  mtoes  obstacles  arr^taient  la  pour* 
suite  des  Russes,  dont  les  mouYements, 
coordonn^  k  une  roarcbe  r^uliere^ 
^taient  plus  difficiles  k  ex^cnAer  que 
ceux  d*un  chef  de  partisans ,  qui  n'a  vait 
d'autre  but  que  d'^apper  au  r^seau 
de  baionnettes  qui  Tenvironnait.  I^e  26 
iuillet,  il  entra  dans  la  for^t  de  Bia- 
lowies,  solitude  presque  impraticable^ 
travers6e  par  quelques  rares  sentiers. 
Un  faible  renfort  que  lui  avait  envoys 
Skrzynecki  le  rencontra  k  Rudnia  le  3 
d'aodt :  ces  deux  corps  r6unis  rentre- 
rent  k  Praga. 

Nous  avons  cm  devoir  donner  quel- 
aoes  d^doppements  a  ces  Episodes  de 
rinsurrection  polonaise,  pour  mon- 
Irer  quelles  ^taient  les  ressources  des 


provinces  r^voltto,  et  par  quel  cou- 
cours  de  circonstances  la  lutte  concen- 
tric dans  les  palatinats  du  centre  per- 
dait  de  son  Anergic,  k  mesure  que  le 
gouvernement  essayait  d'agrandir  le 
tb^tre  oilk  se  vidait  la  querelle  de  la 
liberty.  Cette  marche  etait  conforme 
au  voeu  national ,  qui  comprenait  ins- 
tiuctivement  que  fa  resistance,  poor 
^tre  efficace,  oevait  s'organiser  s^rieu- 


pr^voyaient  que  ces  expeditions  excen- 
triques,  loin  de  pouvoir  r^tabiir  Tequi- 
libre  entre  les  parties  bellig^rantes,  ae 
feraient  qn'^nerver  les  ressources  des 
palatinats  de  la  Pologne  de  1815.  Ils 
eurent  un  tort,  celui  de  supposer  que 
Nicolas  consentirait  k  traiter  avec  des 
rebelles;  mais  on  ne  pent  leur  faire  un 
crime  d'avoir  compte  sur  la  coop^; 
tion  de  TOocident,  a  une  ^poque  ou 
une  saine  politique  conseiUaii  a  la 
France  et  a  TAngleterre  dUntervenir 
dans  ce  grand  ddfiat.  Ces  puissances 
agissaient  alors  sous  rinfluence  des  n^- 
cessit^  qu'elles  s^^taient  cMes.  Louis- 
Philippe  voulait  r^rganiser  fortemeot 
la  monarchic,  avant  d*exposer  aux 
chances  de  la  guerre  la  jeune  royaut^ 
de  1830;  TAngleterre  guivait  d'un  oeil 
inquiet  toutes  les  demarches  de  sa  ri- 
vale  6mancip^,  et  se  r6signait  plutot 
a  voir  la  Russie  retablir  les  limites  du 
traits  de  Vienne,  qu'elle  n'^tait  dispo- 
se a  fi^reractivement  dans  une  lutte 
a  la  suite  de  laquelle  la  France  pouvait 
redevenirpr^pond^rante.  QuantaTAu- 
tricbe  et  a  la  Prusse,  le  rdle  au*elles 
avaient  k  jouer  ^tait  dict^  par  les  cir- 
constances elles-mSmes  :  la  resurrec- 
tion de  la  Pologne  devait  ruiner  t6t  ou 
tard  toute  T^nomie  des  partages, 
sans  qu*il  fQt  possible  de  pr^voir  ou 
s*arr£terait  la  fimite  des  restitutions. 
II  y  avait  done  pour  ces  puissances 
toute  probability  d*un  moroellemeot 
de  temtoire,  et  en  outre  une  question 
de  principes  qui  ne  leur  permettait 
guere  d*adopter  une  autre  iigne  de 
oonduite.  On  peut  lyouter  k  oes  consi- 
derations que  repuiseonent  oii  la  Russie 
•e  trouvait  k  k  suite  des  guerres  d*0- 


RUSSIE. 


577 


Titttetdes  efforts  qu*ellefaisait en Po- 
kpKt  la  rnettait  pour  quelques  annto 
tored*6tat  d'inqai^ter  FAlIeinagne. 

Rcnortons  maintenant  nos  regards 
nr  varsovie,  et  reprenons  ie  fu  des 
^T^nemeDts  k  partir  de  la  d^route 
d'Ostroteoka.  Le  prinoe  Czartoryski, 
apcte  avoir  reqa  tes  deptehes  du  ^& 
oMissime ,  convoqua  les  quintumvirs 
pour  delib^rer  sur  les  mesores  k  pren- 
dre dans  les  drconstanees  pr^ntes. 
La  majority  fiit  d'avis  que  le  g^era- 
lissime  avait  l»en  m^rit6  de  la  cause 
commune,  et  qu'on  ne  devait  pas  le 
rendre  responsable  des  malheurs  pu- 
blics. Cette  g^^rosit^  d^g^n^ra  meme 
fo  affectation;  les  repr6»entants  alld- 
reot  le  troo  ver  k  Praga ,  et  chercherent 
daos  rbistoire  ancienne  des  analogies 
pen  applicables  a  la  situation.  Skrzy- 
necki,  pr^ojant  peut-toe  tous  les 
embarras  qui  allaient  surgir,  choisit 
ce  moment  pour  essayer  d^tablir  une 
ooaveUe  forme  de  gouvemement.  Les 
Qos  deroandaient  1  abolition  du  quin- 
tiim?frat  en  faveur  de  ladictature;  les 
autres  pensaient  que  le  gouvernement 
poufait  snfBre  aux  n^cessit^  du  mo- 
niait;  quelqoes-uns  demandaient  un 
ni;  ki  m^ntents  critiquaient  tout; 
gaant^rarm^,  peu  lui  importait  la 
ronne  da  gouTernement  ,pourvu  qu*elle 
edtoacb^pourlaconduire  h  Tennemi. 
La  guestion  de  la  r^forme  ^tait  d'au- 
tant  plus  intempestive,  qu'elle  rnettait 
a  nu  tontes  les  exigences  des  partis, 
en  montrant  k  la  nation  que  runit^ 
de  Tolont§  et  d'action  n'^it  nuUe  part. 
Les  non-r^formistes  Temporterent  a 
one  faible  majority,  et  le  quintumvi- 
rat ,  ^ise  par  cette  derni^re  secousse , 
fat  n&nmoins  conserve.  Mais  r^ner|ie 
rerolationnaire,  r^uite  k  se  replier 
sor  elle-mtoe,  n'attendait  qu*une  oc- 
casion favorable  pour  formuler  nette* 
nent  ses  voeux;  il  toit  facile  de  pr^- 
Toir  qu'une  fois  resum^e  dans  un  chef, 
die  ne  tarderait   pas   k  agir.   Les 
forces  de  la  Pologne  ^taient  oonsid^- 
rabjement  r^doites;  raite  de  Tarm^e 
ctait  tombee  dans  les  champs  de  Wa- 
ver,  de  Grochow  et  d'Ctetrolenka; 
dependant  elle  pr^sentait  encore  un 
euectif  d'envirott  quarante  mille  hum- 

37*  LioraUon.  (Kusste.)  t.  it. 


mes  sous  Varsovie.  Les  corps  exp^- 
ditionnaires ,  les  garnisons  de  Praga, 
Modlin  et  Zamosc ,  doublaient  a  peu 
pres  ce  nombre.  On  voit  qu*elle  ^tait 
encore  en  ^tat  de  faire  face  a  Tennemi , 
oioique  la  d^oralisation ,  Tabsence 
de  chefs  experiments  et  TafQuence  des 
nouvelles  lev^  fussent  autant  de 
chances  en  faveur  des  Russes.  Heu- 
reusement  pour  les Polonais,  Diebitscb 
ne  sut  point  profiter  de  ses  nvantages; 
la  marche  ae  Gielgud  en  Lithuanie 
avait  absorb^  toute  sou  attention. 
Graignant  de  compromettre  son  cen- 
tre, k  I'instant  ou  ses  flancs  etaient 
menace,  il  d^tacba  des  renforts  pour 
couvrir  ses  ailes,  et,  au  lieu  de  |K>ur- 
suivre  une  guerre  d'initiative,  il  se 
renferma  dans  les  limites  d'une  guerre 
de  syst^me.  Le  cholera  exer^t  de 
grands  ravages  dans  les  rangs  mosoo* 
vites;  le  feld-mar^hal ,  d^vor^  de  sou- 
cis,  demanda,  dit-on,  son  rappel,  et, 
pour  s*etourdir  sur  les  suites  proba- 
bles d'une  disgr&ce,  il  achevait  de 
ruiner  sa  sante  nar  des  excS  de  table. 
La  mort  du  fela-marechal  a  et6  diver- 
sement  interpr^t^e;  on  a  et^  jusqu*li 
dire  qu'il  p^rit  empoisonn^  par  le  g^- 
n^al  Orlof ,  9ue  1  empereur  avait  en- 
voy^  en  mission  au  quartier  g^d^al 
de  Pultusk.  Cette  supposition  n'est 
appuy^  sur  aucun  indice;  d*ailleurs 
Tempereur,  pour  Eloigner  un  ch^dont 
il  etait  m^ntent,  n'avait  pas  besoin 
de  recourir  a  un  moyen  inflme;  il 
pouvait  purement  et  simplement  le 
remplacer ;  mais  I'esprit  de  parti  adopte 
de  preference  les  interpretations  les 
plus  odieuses,  et  les  regarde  oomme 
demontrees  par  cela  seul  qu'elles  sont 
possibles.  INous  croyons  done,  avec  le 
grand  nombre,  que  Diebitsch  d^j^  ma- 
lade  succomba,  apr^s  une  or{;ie,  k  une 
attaque  de  cholera.  Le  11  juin,  Toll 
prit  provisoirement  le  commandement 
de  larmee,  et  bientot  apres  Orlof 
partit  pour  Minsk ,  odi  se  trouvait  le 
grand-due  Gonstantin.  Par  un  jeu  bi- 
zarre de  la  fatalite,  le  prince  mourut 
de  la  m^me  mani^re  que  Diebitsdi,  et 
la  dud^essede  Lowicz  le  suivit  de  pres. 
C^e  coincidence  de  la  mort  de  Gons- 
tantin avec  la  visite  d'Orlof  acoredita 

IS 


n 


578 


L'UNIVERS. 


le  soupoon  que  la  politique  n'avait  pas 
recul^  aevant  un  double  crime.  Si  la 
contagion  edt  Arapp^  simultan^meat 
des  milliers  de  Tictimes,  personne 
n'edt  imaging  d'attribuer  oe  dtostre 
h  des  causes  sornaturelles;  mats  elle 
yeoait  d'atteindre  un  prince  et  nn  feld- 

mardcbal Un  homme.  portant  le 

m^me  nom  que  lea  instruments  trop 
c^l^res  des  vengeances  Imp^riales,  se 
pr^sentait  aux  soupfons,  et  dds  lors 
Orlof  fut  le  bourreau ,  et  Nicolas  avait 
dict6  la  sentence. 

Les  bulletins  poropeux  de  Diebltsch 
avaient  longterops  donn^  le  change 
aux  Russes  sur  les  r68ultats  t^tables 
de  la  campagne;  mais  quand  on  Tit 
que  les  choses  tratnaient  en  longueur, 
quand  des  rapports  plus  exacts  sur  les 
pertes  de  Farmde  d^mvasion  et  sur  les 
temporisations  du  feMnnar^al  eurent 
dtssip^  tous  les  doutes,  le  parti  russe 
murmura  hautement,  et  attribua  le 
mauvais  succ^  h  Timp^tie  des  chefs 
presque  tous  Allemands.  L*empereur 
n'ignorait  pas  que  les  traces  du  m^ 
contentement  dont  la  r^volte  de  di- 
cembre  18S5  avait  signal^  Texistence 
k  son  iv6iiement  au  tedne  n'^taient 
as  enti^rement  effacto.  Un  ^ec 
d^nsid6rait  en  Europe  et  aux 
yeux  de  ses  propres  eujets;  II  fellait 
vaincre  h  tout  prix;  il  fallait  flatter 
ramour>propre  national  en  confiant  a 
une  c^lmite  militaire  incontestable  la 
direction  de  cette  guerre  opinilitrp; 
Paskevitch  portait  un  nom  russe;  h  la 
fois  homme  de  t^te  et  d*ex^cution, 
encoredans  la  vigueur  derdge,entour6 
du  prestige  de  ses  victoires  en  Perse, 
il  pouvait  mieux  que  personne  r^parer 
les  fautes  du  feld-marechal.  L'emperear 
rinvestit  du  commandement  en  chef 
de  ses  armies.  Le  e^neral  Toll ,  n'osant 
assumer  sur  lui  la  responsabilit^  de 
guelques  nknivementsdecisif s,  se  boma 
a  completer  les  cadres  de  Farm^,  k 
retabltr  la  discfpline,  el  ^  se  tenfr  sur 
une  defensive  respectable.  Le  gfotel 
Riidiger  se  trouvait  h  Lublin ,  entidre- 
ment  coup^  du  eentrs  de  rarm^ 
russe.  Skrzynecki  r^oiot  de  Tattaqoer 
k  rimprovisle.  Rudiger  fgnorait  en- 
ti^i^ement  ies  intBnli6nB  de  Tennemi; 


S 


mais  les  Polonals  perdirent  an  temps 
prtefeux,  kigfrbneni  lears  cokmnes 
d'attaque ,  en  les  diss^minant  dans  Tes- 
pace,  et  les  corps  destine  k  s'appuyer 
mutaellement  agirent  sans  cet  eflsem- 
ble  qui  seul  peut  (aire  riussir  an  ooap 
de  main.  Imibs  Polonals  battirent  en 
retraite  devant  ks  forces  que  lesRusses 
avaient  eu  le  temps  de  tear  opposer, 
et  Ton  s'estima  trop  beureax  d^ediap- 
per  II  Tennemi  qa'on  s'^tait  flatty  de 
surprendre.  Les  chefs  se  renvmient 
de  run  k  Tautre  la  responsabilite  dece 
non-suoc^,  etce  fut  le  signal  des 
animosit6s  penonnelles  qai  bientdt 
devafent  paralyser  tous  les  efforts  de 
rinsurrection. 

Cependant  le  peuple  de  Varsovie, 
danger  aux  sobtilites  dialectiques  de 
la  presse,  entrafne  par  les  m6coDtent8 , 
qui)  k  dfifiiut  d'on  suoces  national, 
voalaient  au  moins  se  donner  le  plaisir 
de  renverser  leurs  antagonistes;  le 
peuple,  disons-nous,  se  croyait  trahf , 
paroe  qu'il  ne  comprenait  point  la 
marche  d*un  goavemement  qoi  oscil- 
lait  lai-mteie ,  obi^issant  aux  D6oes8it^ 
que  lui  tmposaient  les  ciroonstances. 
Au  milieu  de  cette  agitation,  la  qou- 
velle  se  r^nd  qoe  le  gien^ral  Jao- 
kowski  vientde  laisser  ecfaapper  Ro- 
diger.  La  fiireur  du  peuple  s'accrott 
du  mteontentement  de  Tarm^e.  Jan- 
kowski  pr6tendait  avoir  roea  I'ordre 
positif  de  recaler,  eeqai  rendaitSkny- 
nocki  res^nsable  de  I'^vt^nement.  Le 
public  6tait  dans  Tattente,  lorsque  ia 
rdv^lation  d'un  oomplot  d^tooma  Tat- 
tentlon  g^ndrale.  On  de? ait  distrilnier 
des  armes  aux  prisonniers  russet,  fatre 
sauter  rarsenal ,  et  ouvrir  les  portes  de 
Vartovie  k  Tennemi ,  tandisqae  Pannde 
serait  absente;  on  accasait  prindpale* 
ment  Jankowski  etKxukowiedu ,  ainsi 
que  quel^Ms  agents  secondaires.  Phi- 
sieurs  arrestations  eurent  lien,  et  dMk 
le  people,  Aisant  entendre  des  cris  de 
vengeance,  s'attrotipait  devant  les  de- 
meares  des  suspects.  Le  cok»d  Hur- 
tig,  d6ohir6  par  oes  ftirieox,  fut  Mir 
le  point  d'toe  pendn  k  ane  lantcme. 
On  demandait  ii  grands  oris  •«  dtait  le 
trattre  Jankowski;  il  fattut  ptomcttre 
au  peuple  qo'on  le  hii  ansteeratt 


RUSSIE. 


679 


deUi.  On  n*a  jamais  su  d'une  manidre 
biao  posilive  a'il  y  avait  eu  reeijement 
oomplot ;  on  acquit  seulemeot  la  preu ve 
fue  les  priaonniera  oorrespoodaieDt 
avec  plasieurs  prisooniera  du  dehors; 
qieoastance  que  leur  position  expli- 
quait  aaaez  naturallamcDt.  On  croit 
g^D^raleoieiit  que  Skrzynecki  pr^ta  h 
ces  re?^tioiis  une  importance  exa- 
g(ir6s ,  pour  eoTelopper  Jankowski  dans 
Qo  Dfoete  de  l^se-nation;  ce  <]ui  I'em- 
plcnait  de  s'expiiquer  au  sujet  de  sa 
retraite  devant  kudiger .  Le  1*'  juiliat, 
lur  la  motion  de  Szaoiewski,  la  dtete 
adressa  au  gouveroement  exdcutif  Tor- 
dre  de  declarer  la  patrie  en  danger,  at 
de  prooeder  k  la  lev^  en  masse  de  tous 
les  bommes  eu  ^tat  de  porter  ies  ar<» 
nies.  En  vertu  de  cette  r^olution,  le 
^uveraement  fit  parattre  la  proclama- 
tion suivante :  «  Au  nom  de  Dieu  et  de 
la  liberte,  au  nom  de  la  nation  plac^e 
entvtt  la  vie  et  la  mort,  au  nom  des 
rois  et  des  h^ros  vos  ancJItres  qui  sont 
tomb^  sur  les  champs  de  batailie  pour 
rind^^endanoe  de  1  Europe,  au  nom 
dea  gei»6ration8  flitures  qui  demande- 
root  k  vos  ombres  compte  de  leur 
^rvitude,  au  nom  des  peuples  qui  ¥Oos 
contemplent,  Polonais,  le?ea-vona  en 


Cette  roesure  ne  prouvait  rien  autre 
chose  siaon  que  linsurrection  ^tait 
a  Fagonie.  Les  enfants  et  les  vieillards 
r^poodirent  seuls  a  Tappel ;  la  Pologne 
tout  entiere  se  lerait  pour  frapper  ua 
dernier  coup  et  mourir. 

Orlof  s*^tajt  rendu  k  Berlin  pour 
deveiopper  les  plans  de  Kicolas  et  io- 
teresser  la  Prusse,  qui  ddsirait  vive- 
naent  voir  riasunrection  ^touf£6e.  «I1  fut 
oonvenu ,  dit-on,  entre  Orlof  et  Ancil- 
Ion,  l^^queRcenigsberg  et  Dantzig  se- 
raient  ouverts  aux  approvisionnements 
et  aox  troupes  que  la  Russia,  ooup6e 
du  rojraume  par  Tinsurrection  lithua- 
nieone,  serait  obligee  d'envoyer  par 
la  Baltique;  la  Prusse  se  chargeant  de 
tbiimir  les  bdtiments  et  les  escortes 
ntoKaires  poor  leur  faire  remonter  le 
tiicmen  ellayistulejusqu'alafirontiere 
du  royaiune;  2*  ^e  la  Prusse  s'en- 
Tsgesit  a  conatruire  un  pont  sur  la 
rjstide,  k  la  limite  la  plus  orieotale 


f 


de  son  territoire,  aftn  de  faciliter  aoK 
troupes  tsariennes  le  passage  du  fleu  ve , 
dans  le  cas  ou  ceux  que  le  g^ral  russe 
ferait  oonstruire  se  trouveraient  .4le> 
truits  ou  insufOsants :  la  Prusse  resiiMit 
charge  de  fournirles  pontonniers,  les 
embareations  et  les  equipages  n^ces- 
saires  h  toutes  ces  sortes  de  travaux; 
3"*  que  la  Prusse  abaiidonnerait  (urovi- 
soirement  Thorn  comme  ma^sin  et 
entrepot  a  Tarm^  russe.  se  reservant 
d*ailleurs  d'v  ameoer  dans  le  plus 
prompt  delaf  les  provisions  de  bouche 
et  de  guerre  que  demaodait  Tarmde 
alli^ ;  4°  quedans  lecas  d'une  d^ite  ou 
d^une  extension  de  manoeuvres ,  le  ter- 
ritoireprussien  serait  ouvert  aux  trou- 
pes imp^iales,  etjusqu*au  d^odment 
de  la  campagne  pourrait  lui  servir  de 
base  militaire. 

Aux  r^lamations  que  lui  adressd- 
rent  le  generalissimo  et  le  comte  de 
Flahaut,  ambassadeur  de  France,  la 
Prusse  se  contenta  de  rdpondre  qu*elle 
n'avait  jamais  ii&  neutre,  mais  seule- 
ment  inactive ;  que  ses  sympathies  pour 
la  Russia  n'ayant  pu  etre  douteuses 
durant  cette  guerre  entre  la  l^jptimite 
et  la  rebellion,  i1  n'y  avaitpas  a  elle  de 
deioyaute  a  seconder  les  efforts  de  I'em- 
pereur.  (Mi^roslawski). 

A  la  suite  de  cette  conyention. 
Tissue  de  la  campagne  na  pouvait  etre 
douteuse.  Paskevitch  arriva  au  quar- 
tier  general  de  Pultusk  dans  les  pre- 
miers jours  de  juillet.  Aussitdt  il  com- 
muniqua  aux  generaux  sa  resolution 
de  gagner  la  basse  Vistule  h  travers  le 
palattnat  de  Plock.  Uarmee  russe  etait 
refaite  de  ses  fiatigues;  elle  comptait 
encore  plus  de  cent  vingt  mille  hommes 
sous  les  armes,  dont  quatre- vingt 
mille  enyiroa  se  trouvaient  h  Pultusk. 
Le  4,  Farmee  s'ebrania,  decrivant  de 
flanc  une  courbe  immense,  quil  edt 
peut-etre  ete  possible  h  Skrzynecki  de 
rompre  pour  se  rabattre  en  force  sur  les 
corps  Isoies  et  en  pleine  marche.  Ainsi 
les  troupes  polonaises,  retenoes  par  la 
circonspection  de  Skrzynecki ,  attendi- 
rent  sous  Yarsovie  que  Teonemi  edi 
concentre  toutes  ses  forces,  au  lieu  de 
Tattaquer  quand  il  etait  vulnerable.  Le 
5,  le  generalissime trans£6ra  son  quar- 
ts. 


580 


UONIVERS. 


tier  g^n^ral  k  Modlin.  II  6tait  encore 
temps  de  se jeter  h  travers  les  corps  rus- 
ses :  cette  pens6e  de  salut  avait  irapp^ 
tous  les  gen^raux^  Skrzvhecki  seui  la 
rejeta ,  atl6guant  que  s'ii  perdait  une 
bataille  rang6e,  cen  ^tait  fait  de  la 
Pologne.  II  est  juste  de  reconnattre 
que  ce  raisonnement  ^tait  fond^;  mais 
SI  un  d^lai  servait  seulement  a  rendre 
d^sormais  la  lutte  impossible,  la  pru- 
dence du  chef  ^tait  une  faute  et  pres- 
qu*un  crime.  Le  8 ,  toute  I'armee  russe 
afHua  sur  Plock, et  fit  mine  deyouloir 
traverser  la  Vistule ;  trois  jours  apr^ , 
elle  d^passa  Lipno ,  et  s'^oula  sur  la 
route  o'Obrzvn,  le  long  de  la  Vistule. 
Ceux  qui  ont  voulu  expliquer  Tobsti- 
nation  de  Skrzynecki  lui  ont  pr^t^  I'in- 
tention  d'attirer  I'armde  russe  sur  la 
rive  gauche  de  la  Vistule  pour  lui 
couper  toute  voie  de  retraite,  et  la 
combattre  au  centre  m£me  des  pro- 
vinces insurg^s,  avec  les  forces  r^u- 
nies  de  la  Pologne;  mais  on  a  r^pondu 
que  la  Prusse  s*ouvrait  h  Paskevitsch 
en  cas  d'une  d^faite,  et  quMl  n'^tait 
pas  n^cessaire  de  sacrifier  les  incidents 
qui  surgissaient  de  la  marche  de  flanc 
aes  Russes ,  pour  attirer  le  comte  d*£- 
rivan  sur  un  point  otlt  il  se  portait  de 
son  plein  gr^. 

Gependant  Paskevitsch  avait  laiss^ 
plusieurs  corps  d'observation  en  face 
de  Tarm^e  polonaise;  celui  que  com- 
mandait  Golovin  fiit  surpris ,  et,  apres 
une  perte  assez  considerable,  ^chappa 
k  une  destruction  totale.  Pendant  ces 
operations  excentriques,  on  apprend 

?|ue  Paskevitsch  a  pass^  la  Vistule;  il 
allut  se  replier  en  hdte  sur  ies  pre- 
mieres positions,  et  Rozvcki  profita 
du  desordre  que  Tattaque  des  Polonais 
avait  jet6  dans  les  corps  d'observation 
de  Tennemi  pour  avancer  en  Lithuanie , 
k  la  rencontre  de  Dembinski ,  qui  ache- 
vait  alors  sa  perilleuse  retraite. 

Les  Russes  avaient  jete  sur  la  Vis- 
tule un  pont  en  face  du  village  d'O- 
sieck.  Le  corps  de  Pahlen  le  franchit 
le  premier;  enfin,  le  19  au  ^oir,  les 
quatre  corps  de  I'armee  imperiale  se 
trouv^rent  transport's  sur  la  rive  gau- 
che du  fleuve.  Le  feld-marechal  attira 
siiccessivement  k  lui  les  different! 


corps  qui  n*avatent  point  suivi  le  moo* 
vement  general ,  et  son  activite  se  oom- 
muniquant  aux  chefs,  ses  differentes 
marches  s'opererent  avec  autant  d'ba- 
biiete  que  de  promptitude. 

Penaant  que  la  manoeuvre  bardie 
de  Paskevitsch  changeait  brusquement 
toutes  les  combinaisons  de  cette  cam- 

gagne,  le  generalissime  re^it  de  Se- 
astiani  des  communications  rassu- 
rantes.  Le  ministre  franqais  parlait 
de  negociations  entamees,  annon^ait 
une  issue  prochaine  et  heureuse  aux 
efforts  de  la  diplomatic,  et  conseillait 
de  se  tenir  sur  la  defensive.  Le  parti 
des  conservateurs  aocueillit  avidement 
ces  nouvelles,  mais  le  plus  grand  nom- 
bre  n'y  ajoutait  aucune  foi.  L'inoer- 
titude,  si  crudle  quand  on  a  devant 
les  yeux  la  mine  et  le  desbonneur,  fit 
place  aux  murmures.  Les  chefs  ioter- 
pretent  en  sens  divers  la  conduite  du 

generalissime,  et,  le  24  juillet,  ladiite 
ecrete  k  Funanimite  que  Skrzynecki 
comparattra  devant  un  conseil  com- 
pose des  membres  do  gouvemement 
national ,  d'un  depute  pour  chau^e  pa- 
latinat ,  et  d'ofiBciers  de  Tarmee  active, 
choisis  par  le  gouvemement  d'une  part, 
et  le  generalissime  de  Tautre.  Le  ge- 
neralissime lui-meme  comparut  non 
comme  accuse,  mais  comme  membre 
du  gouvemement,  devant  ce  conseil, 
compose  des  plus  grandes  illustrations 
du  pays.  D*abord  Skrzynedu  pretendit 
avoir  le  droit  d'imposer  silence  aux 
generaux  places  soas  ses  ordres,  sdoo 
la  bierarcnie  militaire.  Get  avis,  qui 
presupposait  un  poovoir  inattaquable, 
tandis  qu'il  s'agissait  de  le  contrdler, 
ecarta  raccusation  que  Prondzynski 
avait  T6difie  contre  les  operations  du 
seneralissime.  II  ne  s'agissait  plus  que 
de  s'entendre  sur  les  mesures  k  prenore 
k  Tavenir.  Dans  cette  discussion,  ou 
les  orateurs  ceddrent  la  parole  aux  ge- 
neraux, le  parti  energigue  TemporU, 
et  il  fut  decide,  mal^re  les  represen- 
tations de  Skrzynecki  et  de  ses  adhe- 
rents, qu*on  marcherait  k  J*ennemi. 
«  Eh  bien ,  messieurs ,  tear  dit-il ,  puis* 
que  ni  mes  prieres ,  ni  mes  repugnances 
n*ont  pu  ebranler  vos   r^mtions, 
puisque  representants  et  sendraux  dt- 


RUSSIE. 


Ml 


BOBdent  one  bataille  daos  ta^uelle  w 
rMDent  ou  p^rissent  h  jamais  toutes 
lesesp^ranoes  de  salute  soit :  la  bataille 
sen  liTite.  L'annte  et  son  cbef  ont 
eoeore  du  sfflog  k  verser  pour  Tind^- 
pmdancft  nationale,  et  ce  sang,  ils  le 
r^pandroiit  jiisqu'^  la  dernidregoutte; 
dabs  trois  jours  tout  sera  fini...  mais 
je  declare,  k  la  iiaoa  du  del  et  de  la 
terre,  qae  j'agis  oontre  ma  oonvictioo. 
ReprMDtants !  oue  les  bto^ctions  ou 
Tanatfatoe,  que  le  triomphe  ou  les  d^ 
sastres  retombent  sur  vos  t^tes,  car, 
pour  moi ,  fen  rente  toute  la  respon- 
8aliiiit6!» 

On  enit  prudent  de  ne  point  laisser 
traospirer  dans  le  public  ropinion  du 
eeo^ralissime  sur  Tissue  de  fa  guerre; 
la  d^l^ation  se  oontenta  d^assurer  k  la 
ifiete  que  tout  aliait  aussi  bien  que  le 
pometlait  Vistat  des  cfaoses,  et  les  re- 
pr^sentants  s'endormirent  de  nouveau 
dans  una  insoudante  confiance.  Skrzy- 
necki  ooneentra  Tarm^ ,  et  la  fit  avan- 
eer  sur  la  Bzura.  U  6tait  visible  qu*il 
n'exfoitait  que  mollementdes  mcsures 
qo'ti  arait  condamnto.  Le  3  aodt,  il 
anriTa  au  camp  de  Sochaczew.  Les 
Eusses  avan^ient  toujours,  et,  du  3 
an  S ,  ils  tra?crs^rent  la  Bzura.  Centre 
Fattcnte  gto^rale,  le  5,  Tarmte  polo- 
naise se  replia  vers  Varsovie;  on  crut 
que  Citte  disposition  ^tait  Tavant-cou- 
rnir  de  la  bataille  que  le  g^n^ralissime 
avait  solennellement  promise.  Skrzy- 
'  necki  ftit,  dtt-on,  sur  le  point  de  se 
dteettre  de  ses  fonctions;  mais,  en- 
courage par  ceux  qui  esp^raient  que 
toot  se  terminerait  sans  effusion  de 
sang,  il  cooserva  son  poste,  et  mit 
Boe  esptee  d'h^roisme  k  braver  la  cla- 
meor  gj^n^rale.  Le  m^ntentement 
des  habitants  de  Varsovie  puisait  une 
oooydle  ^ereie  dans  celui  de  Tarm^e : 
OD  disait  toutnaut  que  les  cbefs  trabis- 
saicot,  qu'ils  entretenaient  de  coupa- 
Ues  correspondances  avec  Vennemi; 
et  oes  propos  r^p^t^s  enflammaient  les 
patriotes.  De  cet  ^t  k  une  r^volte 
oQverte,  il  n'y  avait  qu^unpas.  Cepen- 
iant  Dembinski  rentrait  dans  la  capi- 
taJe,  qui  saliiait  son  retour  comme  un 
triomphe.  On  crut  voir  en  lui  Thomme 
(fts  orconstances,  le  successeur  de 


Skrzynecki.  Le  prince  Gzartoryski  hil 

Sr^enta,  dit-on,  un  tableau  sombre 
e  la  situation  de  la  Poloene;  il  attri- 
bua  k  la  malveillance  et  ^  I'intrigue  la 
haine  que  I'on  portait  au  g^ndralissime ; 
et  oe  nit  sous  rinfluenoe  de  pareils  dis- 
oours  que  Dembinski,  trop  gto^ux 
pour  profiter  d'un  caprice,  se  dirigea 
vers  le  camp  de  Bolimow,  oQ  toute  l%r- 
m6e  polonaise  s'indignait  du  repos 
qu*on  lui  imposait.  L'entrevue  auMl 
eut  avec  Skrzynecki  le  confirma  aans 
sa  r^olution  de  roister  au  voeu  g^- 
n^al,  oui  le  dteignait  k  rhetmanat; 
et,  d^s  lors,  il  se  It  un  point  d'hon- 
neur  de  d^fendre  contre  tous  la  con- 
duite  et  les  talents  de  Skrzjmecki. 
Dans  son  emportement  cfaevaleresque, 
il  ne  m^nagea  personne.  A  Tentenare, 
toute  la  Pologne  ^tait  coupable  de  ne 
pas  appr^cier  un  homme  tel  que  le  g^ 
n^ridissime;  enfin  il  d^ara  hautement 
qu*il  mareberait  sur  ses  traces :  il  fut 
nomm^  divisionnaire  et  gouvemeur  de 
Varsovie.  Dans  ces  hautes  fonctions , 
il  crut  faire  aete  de  bon  citoyen  en  at- 
taquant  violemment  dans  »ea  discours 
Lelewel,  Pulawski  et  leurs  nombreux 
partisans. 

Sur  ces  entrefaites,  Rudiger  passait 
la  Vistule;  ce  mouvement,  en  iso- 
lant  I'insurrection  des  provinces  du 
sud,  lui  portait  un  con^  mortel;  tou- 
tefois  Rozycki  parvint  a  se  jeter  sur 
les  derri^res  des  Russes  pour  les  in- 
qui^ter,  et  paralyser  les  resultats  de 
leur  cooperation.  II  combattit  coura- 
Heusement  dans  plusieurs  rencontres; 
mais,  press^  par  des  forces  sup^rieu- 
res,  il  se  vit  oblige  de  s'enfoneer  vers 
le  sud.  Rudiffer,  d^arrass^  de  toute 
surrdllance  de  ce  cdt6,  s'^tablit  soli- 
dement  sur  la  Radomka,  et,  joignant 
I'aile  droite  de  Paskevitch,  complete 
rinvestissemept  de  Varsovie  et  de  Tar- 
m^  polonaise,  tonjours  inactive  dans 
les  champs  de  Bolimow. 

L'opposition  parlementaire  repre- 
nait  une  pr^pona^rance  factice  au  mi- 
lieu des  Qoutes  et  de  Tagitation  g^n4- 
rale.  Les  partis  de  Lelewel  et  de 
Bonaventure  Mtemoiowski ,  qui  repr^ 
sentaient  les  d^ocrates  et  les  consti- 
tutionnels  modifi^,  se  fondirent  et 


682 


UtJfNiVERS 


8*oi]^attMr«iit  en  clvte ;  ils  rtolurent 
de  taire  nommer  une  nouvelle  com- 
iiiisn(in  d'enqu^,  k  Peffet  d'examiner 
la  conduite  de  Sknynecki ,  et  au  besoin 
de  lui  dter  te  eomitiaddemeDt.  La  di^e 
adopta  oette  mesure  ^  et  la  d616gation 
charg6e  de  aes  ordres  fut  mume  de 
sim  pcuvoirB.  Dans  le  cas  ou  die 
rait  la  destitution  du  g^n^ralissime 
ssaire,  elle  devait  proceder  a  la 
nomination  d*un  nouveau  chef  mili- 
taire.  Le  parti  de  C2artoryski  ?it  avec 
frayeur  qne  les  cboses  s'acbeminaient 
Ten  un  d6no()ment  energiaue.  Dans 
Unapuiaaance  de  r^sister  de  front  2i  une 
mesure  adopts  ^  il  essaya,  du  moina^i 
d'en  paralyser  le  r^oltat ,  en  faisant 
tomber  le  cboix  sur  Dembinski ,  ce  qui 
aroenait  un  cbangenient  nominal ,  et 
non  undiangeuRntde  systeme.  Skrzy- 
necki ,  dans  son  tnterrogatoire ,  mon- 
tra  beauoonp  de  jgrandeur  et  d'abnega- 
tion;  mais,  soit  pour  expliquer  sa 
condaite,  aoit  oonyiction  r^Ie,  il 
avoua  que  la  disproportion  de  la  lutte  ne 
loi  laisaaitaocnneesptence,  et  il  con- 
■eilla  Itti-m^me  d'^lire  a  sa  place  Dem- 
binski ,  se  r6servant  de  oombattre  pour 
la  patrie,  fQt-oe  dans  le  rangdes  simples 
grenadiers.  II  serait  difficile  de  dtoire 
w  trouble  etles  agitations  qui ,  de  fas* 
aembl^  delib^rante,  se  communique- 
rent  alorsi  rarm^.  Eniln,  il  fut  d^cid^ 
oue  Dembinski  prendrait  le  comman« 
dement  |Kmr  trois  jours ,  et  soumet- 
trait  cette  Election  a  la  di^te,  qui ,  au 
bottt  de  oe  lerme,  Tannulerait  ou  la 
ratifierait  d^finitivement.  A  rinstant 
de  perdre  son  chef^  Tarmee,  si  exi* 
geante  oagute ,  s'^mut ,  et  ne  se  sou- 
vint  phis  que  du  m6rite  qtt*il  avait 
inontr6.  «  A  la  vue  des  deux  g^n^aux 
out,  suivis  de  l*^tat-major ,  venaient 
du  ouartier  g^n^ral ,  nne  rumeur  d*at- 
tenorissaraent  ^lato  dans  les  rangs. 
Le  oort^e,  arrM  devant  la  premiere 
brieade ,  ouvrit  un  passage  a  Skrzy- 
newi,  et  un  long  Tivat  i'accueillit  sur 
toute  la  ligne...  «Gonipagnons,  s'toria- 
t-il ,  je  votts  prtente  ce  fameux  ^kk6- 
ral  Dembinski,  qui,  seol  panni  les 
Gbefii  de  rarm^e  lithuanienne ,  fidele  h 
la  cause  nationale ,  a  sauv^  vos  frdres 
de  la  servitude ,  et  les  a  ramenes  cou- 


▼erts  dtf  gloire  dans  les  rours  de  notre 
capltale.  Fort  de  la  reconnaissance  de 
ses  compatriotes ,  ^aiement  puissant 
par  sa  popularity  et  ses  vertus,  ad- 
mire de  mes  g^ntoux  et  de  moi-m^e , 
hii  seul  peut  encore  vous  oonduire  h  la 
victoire.  Dodies  au  cboix  de  tob  re- 
pr^sentants,  6alues4e  Totre  chef«  et 
reportes  sur  lui  Tamonr  et  le  d^voue- 
ment  que  yous  m*avez  prodigues.  Vive 
notre  g6a€ta\  Dembinski !  »  Les  aol- 
dats  r^ondirent  par  des  exclamations 
que  dominait  ie  cri  g6n6ral :  «  Yire  ii  ja- 
mais Skrzynei^i.  •  Mais  rex-gteeraiis- 
sime  r^prima  cet  61an ,  et ,  mtiarnt  la 
priere  au  reprocbe ,  ii  se  diSroba  aux 
regrets  et  k  I'admiration  de  aes  frdres 
d'armes.  Dembinski  hii  tendtt  la  main , 
promit  d'imiter  un  homme  qui  empor- 
tait  de  si  ^datants  ttooignages  d*es- 
time ;  et  cette  marque  de  syomatfaie  et 
d'abn^ation  excita  des  appUudiase- 
ments  unanimes.  Skrzvnecki  prit  oio- 
destement  ie  oommattuementdu  corns 
de  reserve;  Ramorino  et  Uminski 
furent  plac^  k  la  t€t6  des  deux'0c»rps 
d*ann^.  Lubienski  conserra  la  chait^e 
de  chef  d*^tat-major,  et  Prondzynski , 
quoiqu*^  regret,  reprit  la  charge  de 
ouartier- mattre.  La  diete  connrma 
1  oeuvre  de  la  dd6gation :  tout  annon- 
^it  une  crise  decisive.  Mais  les  Varso- 
viens ,  m^ntents  de  ce  qoe  rhomme 
qu'iis  avaient  cboisi  edt  annooc^  bau- 
tement  Tintention  de  marcher  sur  les 
traces  de  son  pr^tosseur,  resolurent 
de  surveiller  les  deux  geo^raux.  La 
diete,  tant  pour  calmer  1^  inquietudes 
des  dimocrates  qui  redoutaient  un 
coup  d'Etat  militaire,  oue  pour  tenir 
en  bride  les  pretentions  de  Dembinski , 
rendit  le  d^cret  suivant : « 1*  La  nomi- 
nation et  la  revocation  du  ^dneralis- 
sime  appartiennent  desormais  au  ^ou- 
venMAnent  national ;  S«  le  generalissime 
cesse  de  faire  partie  du  gouvemeraent ; 
3"  toutes  les  attributions  accordees  au 
g6neralissime  par  le  dtoet  du  34  Jan- 
vier, lui  sont  conservees,  sauf  les 
modifications  que  dans  la  suite  la  re- 
presentation nationale  jugerait  neces- 
saires. 

On  etait  au  14  d^aoAt ,  et  dej^  Tar- 
mee  dePaskevitcl)  s^avanqait ,  ct  forfait 


RUSSIE. 


&83 


ies  Polooais  k  la  retraite ,  efaerchant 
k  Mbordtr  leor  gauche  oomuiandte 
par  Ramorino.  Bans  TintMeur  de  fa 
TtUe,  le  moorement  des  esprit  sem- 
Uait  aussi  annoncer  one  erise.  Le  dab 
ie  la  Redoote,  dont  Leiewel  6tait 
rime,  reprfoentait  aisez  fid^lement 
Ies  girondios  de  la  r^volation  fran- 
^aise;  Ies  bommea  de  oe  parti  dM- 
raient  one  rtforme  prompte  et  radi- 
cale;  inais,  s'eDTeloppant  de  theories 
tnaaiBiasables  pour  la  multitude,  ils  se 
pivatent  ainsi  de  tous  Ies  ^l^ments 
eoergkiDes  qui  auraient  pu  assurer  le 
triomphe  de  leurs  idto.  D'un  autre 
06I6,  Ies  membrea  Ies  plus  influents 
de  ee  club,  ^crivains,  journalistes , 
avocata,  n'avaient  aueune  prise  sur 
lea  iTiiipathies  de  Parm^.  Ainsi  le 
r^e  ie  phia  important ,  celui  gui  pou- 
▼ait  rallier  Ies  m^ntentements  popu- 
burea ,  restaitli  prendre :  Knikowiecki 
a^en  empara.  Sa  haine  contre  Faristo- 
cratie ,  son  habilet^  k  manier  Ies  pas- 
stona  du  penple ,  Ies  perstoitions  qu'on 
ne  hit  avait  pas  mdnagto ,  toutes  ees 
caiiaes  rtonies  lui  permettaient  de  se 
poser  comme  Thomme  des  masses. 
Aa  reste ,  il  est  assez  difVcile  de  di- 
dder si  sa  participation  aux  d^rdres 
dv  15  fut  la  suite  d*un  plan  raisonn^ , 
ou  afinpfement  roeuyre  d*un  homme, 
qui ,  pour  satisfsure  son  ambition ,  se 
prKatt  k  toutes  lea  ciroonstanoes. 
Sous  le  manteau  du  patriotisme,  il 
traTaiila  k  son  ^I^Tation  particuli^re; 
et ,  comrae  il  oe  pouvait  r^ussir  sans 
fuiBer  le  parti  anstocratiqoe,  suspect 
a  la  nniltitude,  le  quintumYirat  qui 
8*^tait  laias^  d^order  par  sa  Ulche, 
et  par  oontre^soup  tous  ceox  qui ,  dans 
rarmte,  d^siraient  une  capitulation 
^ueleonque  avec  rempereur,  il  raliia 
a  sa  cause  Ies  resolutions  ^rgiques, 
qui  ne  reculaient  devant  aucun  mojren 
pour  rendre  tout  rapprochement  im- 
posaible.  Panni  Ies  bommes  k  systtoe, 
Ies  mis  I'aooeptdrent  comme  instru- 
ment et  comme  ntossrU  transitoire , 
tandis  mie  lea  autres  voyaient  en  lui 
le  dictateur  indispensable.  Les  officiers 
m^eontentS'Ct  sans  service  actif,  qui 
pollolaient  dans  Yarsovie ,  et  les  clu- 
bhsUs  qui  entretenaient  de  secretes  in- 


telligences avec  Tarmee.  ^tendaien) 
I'influence  de  Knikowiecki  jusque  dans' 
les  camps ,  de  sorte  qu'il  tenait  k  h 
fois  dans  aa  main  et  le  peuple  de  Var- 
sovie  et  la  majority  des  soldats.  La 
garde  nationale,  kmctemps  efface, 
avait  repris  une  sorte  de  Civeur  dcpois 
les  dtestres  militaires ;  die  reprwen- 
tait  la  bourgeoisie ,  et  son  appui  n'toit 
pas  a  d^daigner.  Ostrowski,  qui  la 
commandait ,  fut  facilement  entrain^ 
dans  le  parti  do  gouvemeur.  11  ne  rea- 
tait  plus  a  Knikowiecki  qu*^  s'dever 
au  -  dessus  de  tous  ses  adherents ,  et 
k  Ies  dominer  par  quelque  acte  de  vi- 
gueur  ertraoroinaire.  Tel  ^tait  F^tat 
des  esprits,  lorsque  le  quintumvirat 
s'assembla  pour  donner  defiuitiTement 
un  chef  k  I'arm^.  Le  prince  Czarto- 
ryski  essaya  d'aboird  de  fkire  toraber 
le  choix  sdr  Dembinski ;  mais,  royant 
I'doignement  que  oa  g^n^ral  inspurait 
aux  hommes  influents  et  aux  masses , 
il  appuya  Tdection  de  Prondzynski. 
Un  roesaager  fut  imm^diatement  en- 
voy^ Il  oe  dernier  poor  Tinformer  de 
son  dection.  Mais  Prondzynski  refusa, 
aliquant  ^r  motif  Toppoaition  con- 
tinudle  qui  avait  r^n^  entre  lui  et  le 

Sto^lissime.  « II  ne  pouvait ,  disait- 
,  accepter  une  charge  que  aon  rival 
avait  remplie  sans  parattre  Tavoir  dd- 
poss^d,  et  s^attirer  la  haine  et  Ten- 
vie  de  ses  collies  plus  aneiens  et 
mieux  connua  que  ku ,  jeune  ofiicier 
de  la  revolution.  »  En  vain  lui  fut-il 
objects  que  le  salut  de  la  patrie  4evait 
remporter  sur  des  considerations  par- 
ticuli^res ,  il  refusa  obstinement ,  soit 
qu'il  se  senttt  bors  d*etat  de  maltrtser 
toutes  les  intrigues  de  parti,  soit 
qu'initie  a  tous  les  secrets  de  Torgani- 
sation  de  rarmde,  H  jogeflt  impossible 
de  rdsister  longtemps  au  fdd-mar6chil. 
S'il  faut  ajouter  foi  aux  r^vdations  de 
Dembinski ,  le  jour  mime  oil  il  refu- 
aait  rbetmanat,  il  proposait  k  ce  ge- 
neral de  transiger  avec  Paskevitch. 

]Noue  avons  vu  que  Krukowieeki 
n'attendait  qu*un  moment  favorable 
pour  amener  une  crise,  et  formuler 
nettement  ses  pretentions.  Pour  en- 
tretenlr  rirritaiion  populaire ,  on  rd- 
pandait    Ic   bruit   que   Taristocratic 


S84 


L'UNIVERS. 


reculait  h  dessein  lejugement  des  pri- 
sonniers ,  qu'elle  affectait  une  iodul* 
gence  strange  h  I'e^ard  des  agents 
russes.  Le  IS,  1^  midi  >  on  r^pete  dans 
Its  group^  que  Dembinski  marche 
sar  Varsovie  pour  soumettre  le  peuple. 

Sudcjues  jeunes  gens  d^l^{^^  par  le 
suple  s'adressent  au  quintumvirat 
pom  lui  fatre  part  de  ses  appr^n- 
sions ;  on  leur  repond  que  leurs  craintes 
sont  Taines  ou  pr^matur^es ,  et  ils  re- 
tournent  au  milieu  de  la  multitude, 
r^tant  que  les  hommes  d'etat  recu- 
laient  devant  le  contrdle  de  leurs  actes , 
et  eherchaient  h  les  entourer  de  mys- 
t^e. 

Gependant  le  canon  grondait  du  c6t^ 
des-'barri^res  de  Woia  et'de  Jerusa- 
lem. :Skrzynecki  et  Ramorino  battaient 
en  retraite  devant  les  colonnes  de  Ten- 
nemi,  qu'ils  arr^tereot  enOo  apres 
une  Yigoureuse  r^istanoe;  Varsovie 
^tait  dans  les  tourments  de  Pattente. 
Le  pouvoir  semblait  s'^tre  abdiqu6  lui- 
m^me;  la  fermentation  des  esprits  se 
trahissait  par  de  sourdes  rumeurs ;  il 
restait  toujours  k  nommer  un  g^n^ra- 
lissime ;  trois  brevets  conC6rant  cette 
charge  furent  remis  au  depute  Swier- 
kowski ,  avec  ordre  de  s'adresser  suc- 
eessivement  h  Malachowski ,  a  Prond- 
Z3mski  et  k  Lubienski.  Lorsque  le 
depute  montait  en  voiture,  remeute 
bouillonnait  d^j^  dans  la  ville.  Le 
peuple,  ne  sacnant  ta  qui  s'adresser, 
courut  aux  clubs.  L'abD<6  Pulawski  y 
prononca  un  disoours  empreint  de 
toute  Teneraie  r^volutionnaire.  Apr^ 
avoir  aceuse  Skrzynecki ,  Dembinski, 
le  quintumvirat  et  la  di^te ,  « il  de- 
manda  pourquoi  le  d^et  contre  Jan- 
kowski  et  ses  complices  n*6tait  pas 
promulgu^;  pourquoi  Skrzynecki  com* 
mandait  encore  sous  le  nom  de  son 
lieutenant;  pourquoi  le  gouvernement 
ne  rendait  pas  au  peuple  compte  de 
sa  conduite.  £t  il  concluait  en  s'^ant 
que  le  peuple ,  tromp6  par  les  hauts 
ronctionnaires ,  devait  aller  e»  masse 
les  interroger,  mais  avec  la  s^v^rit^ 
d'unsouverain  m^ntentdeses  agents. 
On  lui  r^pondit  par  des  oris :  Marcbons 
au  palais!  et,  sur  la  proposition  du 
president  Czynski,  on  lui  adjoignit 


trois  oommissaires  chargi^s  de  dtoon- 
cer  aux  quintumvirs  les  ^riefe  du  peu- 
ple. »  (Extrait  de  Fhistoire  de  la  revo- 
lution de  Pologne.)  Tandis  que  les 
commissaires  rempUssent  leur  mes- 
sage ,  et  parent  le  temps  en  explica- 
tions ,  la  foule ,  press^e  de  son  oeu  vre , 
se  ralliait  autour  de  Krukowiecki ,'  en 
d6pit  des  mesures  que  Wengierski , 
gouvernenr  de  Varsovie ,  et  Ostrowski , 
dief  de  la  garde  nationale ,  venaient 
d*adopter  en  toute  hdte.  La  foule  as- 
si^eait  le  ch&teau  ou  etaient  enfer- 
m£  les  prisonniers ;  quelques  officiers 
sans  emploi  se  jettent  au  milieu  des 
masses ,  en  s'dcriant :  Mort  aux  tral- 
tres !  les  aristocrates  a  la  potence !  La 
garde  nationale,  apres  avoir  r^siste 
quelque  temps,  et  la  ligne  elle-m6me, 
se  joignirent  au  peuple,  aux  cris  de: 
Mort  aux  traltres,  vive  la  liberty.' 
«  Le  premier  cachot  qu*on  enfonqa 
fut  ceiui  de  Jankowski :  on  le  tratna 
dans  la  cour,  ou  on  lui  fit  subir  un 
court  interrogatoire ;  apres  quoi  on 
lui  enfon^-a  plusieurs  baionnettes  dans 
la  poitrine ,  et  on  le  pendit  a  TS  d'un 
r^verb^re.  En  expirant,  le  malheureux 
protesta  de  son  innocence ,  et  r^peta 
tout  ce  (|u'il  avait  declare  lors  de  son 
arrestation.  6on  dernier  soupir  fut 
une  malediction  contre  Skrzynecki, 
qu*il  accusait  d^avoir  sacrifi^  ses  pro- 
pres  amis.  La  corde  s'etant  rompue 
sous  le  poids  de  son  corps ,  on  Tacheva 
k  coups  de  sabre.  Son  gendre,  Bou- 
kowski ,  fijt  atteint  et  massacre  a  Tins- 
tant  oi!t ,  apres  avoir  saute  par  une  fe- 
netre,  il  cherchait  k  se  giisser  dans 
les  fosses  du  chdteau.  Hurtig  et  Sa- 
lacki  furent  tues  dans  leurs  cachots , 
et  leurs  corps  livres  aux  outrages  du 
peuple.  Le  cnambellan  russe  Fenshave 
pent  d*un  coup  de  baionnette.  Les 
cadavres ,  depouilies  de  vltements  et 
baignes  dans  le  sang,  furent  accroches 
aux  reverberes,  et  flotterent  lourde- 
ment  sur  les  tetes  des  vivants  comma 
des  drapeaux  de  terreur. » 

Pour  que  cette  scene  de  carnage  (At 
complete ,  madame  Bazanow  fut  mas* 
sacree  dans  son  lit ,  malgre  les  larmes 
de  sa  jeune  fille.  La  foule,  furieuse  de 
ses  propres  exces ,  se  porta  vers  la  pri* 


RUSSIE. 


M& 


soo  des  espions.  GepeDdant  Rrako* 
wiecki  s*^tait  rendu  ati  chateau ;  1^ » 
ioform^  quMI  se  tramait  quelque  chose 
de  sinistrecoiitreDlusiearsparticuliers, 
parmi  lesquels  ngurait  fe  confiseur 
Lessel ,  dont  la  fille  avait  6pous^  Vaide 
de  camp  du  g6n6ral ,  il  courut  h  la  mai- 
son  de  son  prot^^ ,  dijh  assaillie  par 
les  ^or^ears ,  et  trouvant  qoatre  sa- 
pons  qui  s'^taient  introdaits  l^s  pre- 
miers ,  il  prit  les  quatre  bouts  de  son 
moochoir  dans  une  main ,  et  leur  fit 
tirer  au  sort  h  aui  pa^erait  la  t^m^- 
rit^  de  tons.  II  nt  fusilier  immMiate- 
meDt  le  malheureux  qui  avait  amen6 
lenceud  fatal.  Le  peuple  c6da  devant 
une  dnergie  qui  defiait  la  sienne,  et 
coDtinua  sa  roate  vers .  les  prisons. 
Quelques-uns  des  meneurs ,  qui  comp- 
taient  sur  une  journ6e  complete , 
essayerent  A  porter  le  peuple  au  mas- 
sacre des  airistocrates ;  mais  les  dis- 
positions dies  Yarsoviens  qui  se  tra- 
oaisaient  en  demonstrations  positives , 
recolaient  devant  des  crimes  qui  te- 
naient  k  la  combinaison  d*un  syst^e. 
!^ous  eroprunterons  encore  a  riiistoire 
de  Mieroslawski  le  trait  suivant,  qui 
proove  oombien  les  masses  r6volution- 
naires  passent  subitement  d*un  ex- 
trte  I  I'autre. 

<  doe  des  t^tes  de  la  colonne  qui , 
partie  da  centre  de  la  ville ,  se  r^pan- 
dait  deja  vers  Touest  en  quatre  nou- 
Tdles  ramifications ,  enveloppa  Photel 
Lobienski.  Un  oflficier  de  quatorzeans, 
qui  manifestait  une  inconcevable  f^ro- 
Qte,  la  oondulsait.  Un  bomme  en  che- 
mise et  k  demi  mort  de  frayeur,  que 
Ton  prit  pour  Henri  Lubienski ,  s'em- 
barrassa  dans  les  ranes  du  peuple. 
On  le  traf nait  d^j^  au  reverbere ,  lors- 
qnt  des  femmes  en  larmes  parurent 
aa  balcon ,  implorant  la  cl^mence  des 
menrtriers.  Quelqu'un  s'to'ia  qu*il  y 
3vait  erreur,  et  que  le  malheureux 
n'^it  pas  le  trattre  Henri ,  mais  bien 
fionfrore  Jean.  On  reldcha  Jean,  et 
une  autre  voix  demanda  alors  qu'on 
^Mt  dans  la  maison  pour  chercher 
le  Trai  coupable;  mais  la  multitude 
s^ccrta  que  jamais  le  people  ne  violait 
I*asile  prot^^  par  la  samte  pr^ence 
des  femmes  polonaises ;  et .  lorsqu'on 


▼it  i  la  lugnbre  dart^  d^  flambeaux 
des  pleurs  sillonoer  les  joues  des  sup- 
pliantes,  et  leurs  mains  s'^lever  en 
si^ne  de  gratitude « les  t^tes  se  d6cou- 
vnrent,  et  s*inclinerent  dans  un  reli- 
gieux  et  grave  recueillement.  b 

Le  peuple  avait  £ait  mine  de  p^n^ 
trer  de  fierce  dans  la  Banque;  on  lui 
repr^senta  que  la  propriety  nationale 
mit  placie  sous  la  sauvegarde  de  son 
honneur  y  et  il  abandonna  cette  proie 
pour  aller  s'enivrer  de  sang  aux  bar« 
ri^res.  Sur  ces  entrefaites,  le  gouver- 
nement  abdiqoa  de  fait.  Leiewel  d^- 
daigna  de  se  justifier  devant  ses 
coliegues,  qui  attribuaient  tons  ces 
^v^nements  k  Finfluence  de  ses  doc- 
trines. Leiewel  n*6tait  cependant  au*un 
r^volutionnaire  logicien ,  incapable  de 
sanctionner  la  violence ,  mais  la  rap- 
portant ,  par  des  raisonnements  irr^ 
iutables,  k  un  veritable  principe. 
Czartoryski  chercha  un  asile  dans  le 
camp;  on  assure  qu*en  traversant  au 
galop  la  barri^re  de  Wola,  il  entendit 
une  balle  sifOer  k  ses  oreilles.  IJn  seul 
gouverneur,  Vincent  NiemoTowski, 
affronta  le  danger,  et  resta  a  son 
poste.  Le  minist^re  se  d^sorganisa, 
et  les  r€nes  de  I'autorit^  flottaient  sur 
les  ^paules  robustes  du  peuple.  Kru- 
kowiecki  saisit  cet  instant  favorable , 
et  se  rend  k  Thdtel  de  ville ,  otk  ses 
adherents  le  proclament  gouverneur 
de  la  ville.  De  1^  il  court  aux  barrieres; 
d^ja  r^meute  avait  p^n^trd  dans  les 
maisons  qui  servaient  de  prison  li  quel- 
ques-uns des  agents  de  la  police  de 
Gonstantin.  On  les  massacra  sans  mi- 
sericorde;  Krukowiecki,  apr^  avoir 
inutilement  essay^  d'arrdter  cette  san^ 
glante  bouchene,  laissa  tranqnille- 
ment  i'oeuvre  s*accompiir,  et  courut 
laire  sanctionner  son  nonveau  titre  dtf 
gouverneur  de  la  ville  par  le  quintum- 
virat,  affirmant  gue,  lorsqu'il  aurait 
Tautorit^  n^cessaire,  il  aurait  bien^t 
musel^r^meute.  Vincent  Niemoiowski 
n*h^sita  pas ,  k  cette  condition ,  de  se 
rendffe  au  voeu  de  Tambitieux  vieil- 
lard.  Aussit6t  Krukowiecki  langa  son 
cheval  au  milieu  des  attroupements , 
et  k  sa  voix  tout  rentra  dans  Pordre. 

Pendant  que  ce  simulacre  de  terreur 


586 


L'U«1VERS. 


^UTantait  VarsOTie ,  Zwieri&owaki , 
awec  ses  trois  brevets  en  portefenille , 
esauyait  soooessitement  troia  refoa. 
Malachowaki  a'excusa  aur  aon  dge; 
Prondzynski  se  renferma  dans  aea 
premiers  motifs,  et  Lubienski,  qui 
eisait  siir  un  matelas  jet^  dans  un  coin 
de  sa  diambre,  r^pondit  qu'it  ^tait 
souffrant  et  bors  d'etat  d'assumer  ia 
responsabiiit^  de  I'betmanat.  II  ter- 
milla  en  denaandant  poor  toute  gHloe 
qa'on  le  laiaaflt  tranquille.  Le  lenda- 
main ,  les  details  de  la  nuit  arrivirent 
an  qaartier  g^n^rat.  Skrzynecki,  qui 
redoutait  plus  les  dangers  d  one  6nieute 
que  toute  autre  chose,  abandonna  Tar- 
m^,  resta  cadi6  k  Varsoyie  jusqu*^ 
la  prise  de  cette  vflle ,  et  plus  tara  se 
i«ugia  en  Autriche.  Le  caract^  de 
oet  homme  offre  un  melange  extraor- 
dinaire de  fermet^  et  d*h66itation ,  de 
bravoure  devant  Feooemi,  et  d'ap- 
pr^eosions  mesquines  devant  tout  ca 
qui  contrariait  la  marche  politique 

3u*il  avait  adopts.  On  Toit  q|ii*il  ^it 
omin^  par  I'ld^  ixe  de  Finf^riorit^ 
nuRi^rique  de  rarm6e  polonaise,  et 
qu*il  mettait  toute  son  esp^nce  dans 
les  n^^ociations  ayec  T^anger.  S'il 
se  trompa  dans  ses  pr^isions ,  la  pos- 
t^rit^  peut  Tabsoudre ,  car  l*int^r£t  des 
cabinets  de  Paris  et  de  Londres  rendait 
probable  une  a^rieuse  intervention. 
On  a  dit  de  lui  qu*il  depensa ,  pour 
perdre  Tavenir  de  la  Pologne,  bean- 
coup  phis  d'^nergie  qu'ii  ne  lui  en  edt 
faliu  poor  le  sauver.  L'histoire  iron- 
vera  sans  doute  oe  jugement  trop  se- 
vere ;  quand  de  nobles  esp^ranoes 
sont  d^es ,  le  regret  se  change  trop 
soovent  en  aecusation ,  et  le  malheur 
est  asshnil^  h  ia  trahison  ou  k  la  iai- 
Messe. 

Le  lendemain  de  Tteeute  il  jf  eut 
eocore  quelques  massacres;  raais  la 
CTlae  ^tait  pass^e,  et  quelaues  nggi- 
ments  de  oavalerie  imposerent  auz 
torboieDls.  Le  dub  s'assembla  en  tu* 
molta,  et  ses  prateurs,  apr^  avoir 
dMini  toute  responsabilite  dans  les 
maasacres,  parlerent  tr^  an  long  sur 
ce  qu*il  j  avait  h  feire ,  et  ne  d&id^- 
rent  rien.  Les  quintumvirs  tinrent  une 
conduite  sembiable ,  et  se  disculperent 


par  une  proclamation ;  ils  resohirent 
ensuite  de  tenter  un  nouvel  effort  an- 
pr^  de  Prondzynski.  Gegentolcon- 
sentit  k  se  cfaaiiger  de  Tbetmanat  jos* 
qu*au  lendemain.  Apr^s  ce  dernier  et 
st^le  enfiintement,  le  quintumvint 
proelama  le  jour  mtae  son  abdica- 
tion ,  dans  les  termes  suivants  : 

«  V^n^rable  s^nat , 

« Illustre  cbambre  des  rqpr^Mntants, 

«  Les  soussi^^s ,  membresda  gou- 
vernement  national ,  appel^  par  vous 
k  cette  haute  magistrature,  ont  la  pro- 
fonde  conviction  d*avoir  rempli  leur 
devoir.  Ayant  pour  but  unique  le  bieo 
g6n^ral  et  la  prosp^t6  de  la  sainte 
patrie ,  ils  se  pr^ntent  devant  vous 
a?ec  une  conscience  pure  et  des  noros 
sans  tache;  mais,  convaincus  par  les 
derniers  ^v^nements  de  la  necessite 
d'un  cfaangement  dans  le  personnel  du 
gouvernement ,  ils  d^posent  leur  au- 
torit^  entre  les  mains  de  ceux  qui  re- 
pr^sentent  la  souverainet^  du  peupte 
et  la  majesty  nationale.  Afin ,  cepen- 
dant ,  que  la  marche  des  affaires  ne 
soit  pas  interrompue ,  ils  continueront 
leurs  fonctions  jusqu'l^  ce  que  vous  les 
avez  remplao^s.  Son  altesse  le  pr^i- 
dent  Adam ,  prince  Gzartoryski , 
adhere  k  tout  ce  que  nous  avoos  re- 
solu  k  cet  ^gard ,  par  une  iettre  ^te 
k  Tun  des  membres. 

«  Signi  :  Vincent  Niemoiowski, 
Tbdophile  Morawski ,  Stanislas  Bar- 
zykowski ,  Joachim  Leievel. » 

D^ormais  la  Intte  n'extstait  plus 
qu*entre  Dembinski,  chef  de  ranMCi 
puisque  Facceptation  de  Prondsynski 
ne  lui  donnait  Thetmanat  que  pour  un 
jour,  et  Kiukowiecki,  maftre  de  la 
capitale.  Dembinski  usa  bientdt  son 
autorit^  par  des  rigueurs  intempes- 
tives  centre  les  dubisteset  les  meneure 
de  rteeute;  il  ne  s'apercevait  pas  qu'il 
afitrancbissait  aon  rival  des  seules  en- 
traves  qui  pouvaient  eneore  Tarrlter. 
La  di^te ,  k  bout  d*exp6dients ,  adopts , 
seance  tenante ,  le  projet  suivant : 

Artide  i  •'.  Le  gouvernement ,  cons- 
titu^  par  le  decret  du  28  Janvier,  Btr^ 
a  ravenir  dirig^  par  un  pr^ent  du 
coHseil  des  ministres .  k  1  Election  do* 


RUS6I£. 


M7 


S!i. 


to  ebambres  prooMcront  sam 


Aitidt  8.  Le  prudent  Domme  leg 
iRiaistres  d«s  six  d^parteaitiits  adtni- 
aistratift.  LeB  mininNB  B'aoront  que 
Yoa  eoMUltatiTe  dam  le  oonseil;  la 
pc^iidaot  OQ  aon  remplafant  aura  aaul 
fotz  dtiiMrative.  Toate  ordonnance 
dv  prdsidoat  sera  rendua  au  nom  da 
gooTeraement  national,  conseil  te* 
ant,  et  darra  dtre  contre^ifnee  au 
noJBi  Mr  un  des  inittiatreB  pnteents. 

Artiae  3.  En  outre  des  attribatioas 
sffedte  au  q^uintonBTirat,  le  prtei- 
deat  jOBira  du  droit  de  nommer  le  ^^ 
nm  ca  clief ,  et  de  oelui  de  faire 

Artide  4»  Ijm  attributiona  qui  d^- 
rireat  de  la  cliarte  constitutionnelle , 
conune  la  ddelaratioa  de  guerre  et  la 
eoodonao  dee  traitda*  reateut  a  la 
diitc 

Aitide  5.  lies  ebambres  d^b^re- 
nmt  reonies  jaaqn'a  la  d^livraaoe  de 
ia  capitale ,  ^  oe  pourront  §tre  proro- 
66es  00  di&aoutes  foe  de  leur  propre 

9^ 

Aiticia  6.  L'eztoition  du  present 
dtectesteonfi^au  pr^ident  du  86* 
utetaamar^chal  de  la  di^e. 

Inkawiacki  fut  ^o  pr^ideot  k  une 
anode  najorit^^  dte  lors  Dembinski 
aMoaiia  Bobtement  toutea  ees  pr^ 
IcatioBS ',  maia  d^A  aea  mesures  de  ri* 
gaeoronvera  lea  meoibres  ioflueots  du 
dab  iittriotique ,  qu'il  avait  fkit  arra- 
ter  et  meltre  en  ji^emeot ,  iui  avaient 
aliM  praaque  toutes  leg  sympathies. 
Le  prdsidoit  plaida  la  cause  des  accu- 
se, et  obtiot  aaus  peioe  lear  ^iargis^ 
KBUot.  Un  de  ses  premiers  actes  fut 
bdestitatioD  de  Dembinski ,  qu'il  rem- 
P^a  par  Malachowski.  II  donna  le  gou- 
▼emcment  de  la  capitale  h  Chrzanows- 
JH ,  an  des  chels  qu'on  croyalt  dispose 
a  Mter  aveo  Tempereur.  Apres  a?oir 
BOBMBelesmini^es,  il  contera  k  Za- 
iiwski  le  ooramandement  de  la  garde 
aHiaiiie;  cette  nouveile  organisation 
de  tous  les|>rol^taires  ea  ^tat  de  por* 
^,  ks  anaes  nernait  d'utiliser  les  of- 
fidensafisempioif  et  elle  poovait  garnir 
les  barricades  de  robustes  d^fenseurs. 
Nais  Cfarzanowski,  redoutant  les  con- 


s^aeneea  de  oatte  nieauM,  pariFint  li 
persuader  au  prdsktent  que  la  garde 
urbaineserait  phia  dangereuse  qunutile, 
el  elle  fat  dinoute. 

Cependant  Farmto  palonaiae  a*^tait 
retireeeur  Wola :  d^  un  dtochement 
command^  par  le  colonel  Legailois 
avait  M  mas^;  les  Rosses  envelop* 
paient  leurs  adversaires,  et  leur  sutm- 
riorit^  aam^que,  appuvte  de  Thabi- 
let^  et  de  Pei^ieDce  do  feld*mar6dial , 
ne  permettait  guk«  de  ae  faire  Illusion 
sur  Tissue  d*une  bataille  d^isive. 

« Krukowi(M±i  convoqua ,  le  19 
aodt,  on  0i;and  oonseil  de  gnerre. 
Troia  avis  diffferants  fbrent  ouverts. 
Kmkowiecki  propose  d'acoepter  la  ba- 
taiUe  dana  les  plaines  de  Wola.  Uminski 
d^reloppa  le  plan  de  Prondsyoski.  II 
voulait  q«*OB  d^tachlt  la  moiti^  de 
Tarrade ,  afia  de  battra  Rosen  et  d'ap* 
proviaionner  Varaovie ,  avant  de  rece- 
▼oir  Fattaqae  derri^re  les  lignes  forti- 
fides,  d*o&  i'on  pouvait,  meme  aprte 
un  dcbec ,  se  jeter  dans  les  rues ,  et , 
h  Taide  du  peuple,  ddfendre  pied  k 
pied  les  barricades.  Dembinski  enfin^ 
toujours  dooHfld  par  son  g^ie  de  par- 
tisan, proposait  d'dvacoer  une  ville 
qu'il  faudrait  t6t  ou  taid  cdder  k  la 
torce  et  &  la  famine ,  et  de  transporter 
la  guerre  en  Lithuanie,  en  passant 
sur  le  ventre  h  Rosen  et  k  Golowin.  v 
(Midroslawski.) 

Le  plan  d'Umioski  fiit  adopte.  Ra^ 
morino,  k  la  t£te  de  vinst  miUe  horn- 
mes,  recut  Tordre  de  degager  la  rive 
droite  et  d'aporovisionner  Yarsovie. 
Le  corps  expeaitionnaire  obtint  quel- 
ques  avantages  sur  I'ennemit  et  no* 
tamroent  k  Rogoznica ;  mats ,  pendant 

?u*il  s'dloignait  de  la  position  centrale  r 
'askevitch,qui  venaitde  rallier  k  Iui 
ie  corps  de  Kreotz ,  reaolut  de  porter 
toutes  ses  forces,  disponibles  centre 
Yarsovie  avant  que  Ramorrno  edt  eu 
le  temps  de  ramener  dans  la  capitale 
les  forces  dont  il  avait  le  commando* 
ment  It  jugea  qu'une  ibis  maltre  de 
la  ville ,  H  Iui  serait  facile  de  porter  lea 
derniers  cou|»8  a  rinsurrection. 

On  a  judicieusemeot  observd  que  le 
systtoe  de  ddfense  adopts  pour  Yarso- 
vie ^tait  vicieox ,  a  cause  du  trop  grand 


i»88 


L'UNIVERS. 


d^Telappciiieiit  donn^  aux  Ugnes  lorti- 
fito:  en  effetyCesysttee,  pour  avoir 
dts  r^oltats  utiles  9  supposait  une  ar- 
m^  double  de  celle  aont  pouvaient 
disposer  les  iosurg^ ;  et ,  dans  le 
cas  ou  la  Polo^e  aurait  pu  mettre 
sur  pied  une  force  aussi  imposante, 
elle  n'avait  pas  besoin  de  s^abriter  der- 
ri^re  des  remparts.  D'un  autre  odt6, 
si  tous  les  points  fortifi^  ne  pouvaient' 
^tre  d^fenaus  par  une  artillerie  nom- 
breuse  et  par  des  corps  redoutables , 
il  fallait  neoessairement  abandonner  la 
premiere  enceinte  k  Tennemi,  qui  sy 
^tablirait  pour  dd)usquer  les  Polonais 
des  ouvrages  plus  rapproch^  de  la 
ville.  Ce  systeme  aurait  pu  £tre  Juge 
convenabiedans  le  cas  seulenoentou  des 
corps,  manoeuvrantrapidementautour 
de  la  ville ,  auraient  constamment  tenu 
les  Russes  en  alerte,  et  les  edt,  en 
cas  d*attaque ,  exposes  aux  baionnettes 
d^un  cdt^,  et  au  feu  des  remparts  de 
Tautre.  II  faut  ajouter  k  ces  conside- 
rations qu*a  d^velopp^s  avec  sagacity 
I'auteur  de  la  Revolution  de  Pologne, 
que  plusieurs  points  d'une  baute  im- 
portance avaient  ete  negliges ,  ou  for- 
tifies d'une  manidre  incomplete.  Mais, 
quand  on  pense  que  tout,  dans  cette 

fuerre,  etait  improvise,  et  que  les 
^clonals  avaient  h  lutter  contre  des 
forces  bien  superieures,  on  ne  peut 
aue  s*etonner  de  la  longueur  et  de 
1  acbarnement  de  la  resistance.  Le  feld- 
marechal,  pour  eviter  Teffusion  du 
sang,  envoya,  le  4  septembre,  le  ge- 
neral Danenberg  aux  avant-postes  pour 
garantir  aux  Polonais ,  dc  la  part  de 
son  maftre,  I'oubli  du  passe,  des  assu- 
rances pour  Tavenir,  le  redressement 
des  griefs  oui  avaient  donne  lieu  k  la 
guerre ,  et  rexamen  des  exigences  rela- 
tives aux  provinces  transniemiennes. 
«  Prondzyinski ,  aui  etait  revenu  k 
Varsovie,  et  le  colonel  Wyrocki,  en- 
voye  pour  recevoirles  communications, 
repondirent  qu'ils  n*avaient  pas  de  pou- 
voirs  pour  traiter.  Le  lendemain ,  la 
majorite  du  conseil  des  ministres  con- 
voques  par  Rrukowiecki ,  d'aocord 
avec  la  diete ,  decida  que  Ton  ne  trai- 
terait  que  sur  les  bases  du  manifeste, 
fe  qai  equivalait  k  une  rupture  ou- 


verte.  »  (Mteroslawski.)  il  n'entre  pas 
dans  notre  plan  de  decrire  cette  bataiHe 
qui  efifo^  oe  la  carte  le  noble  royaume 
de  Pologne.  Nous  nous  contenterons 
d*indiquer  sommairement  les  prindpa- 
les  phases  de  cette  joumee  meoiorabie. 
Le  6  septembre ,  k  clno  heures  du  ma- 
tin ,  un  feu  terrible  edata  sur  toute  la 
ligne  des  Russes;  mats  c'est  contre 
Wola  que  se  dirigea  Tattaque  princi- 
pale.  Tandis  que  raile  droite  ocoipait 
Uminski ,  Rreutz  se  preeipitait  sur  le 
centre.  Une  redoute ,  que  les  Russes 
venaient  d'emporter,  saute  avec  un 
fracas  epouvantable :  un  ofBcier  polo- 
nais avait  mis  le  feu  k  la  poudfrtdre 
pour  ensevelir  les  vainqueurs  sous  les 
ruines.  J>^]k  les  Russes  prenaient  a 
revers  les  faces  de  Wola ;  Rrukowiecki 
courait  de  lunette  en  lunette ,  et ,  ju- 
geant  sans  doute  que  tout  etait  perd  u , 
u  touma  bride  et  disparut.  L'ennemi , 
mattre  de  Wola ,  oouronnait  dejb  les 
hauteurs  qui  dominent  Gzyste.  L*ar- 
tillerie  polonaise,  dirigee  par  Bern, 
ouvrit  un  feu  terrible,  et  porta  le  ra- 
vage dans  les  colonnes  russes.  Deux 
bataillons  d'infanterie  ach^vent  de  ba- 
layer  cet  espace,  lorsque  la  cavalerie 
les  arrete  et  les  force  de  reculer.  Les 
Russes  etaient  maltres  de  la  premiere 
ligne ;  ils  suspendirent  Tattague  pour 
la  recommencer  le  lendemam.  Rru- 
kowiecki eut  alors  recours  aux  nego- 
ciations.  Le  feld-marechal  n*epargna 
point  les  promesses,  sans  toutefois 
s'ecarter  de  ses  premieres  offres ;  et , 
sur  les  instances  du  president ,  il  ac- 
corda  un  armistice  de  huit  heures, 
pour  lui  laisser  le  temps  de  ramener 
les  esprits  k  une  capitulation  devenue 
necessaire. 

A  la  nouvelle  que  le  president  trai- 
tait  avec  Paskevitsch,  tous  les  mi- 
nistres donnerent  leur  demission.  Le  7, 
k  dix  heures  du  matin ,  la  diete  ouvrit 
sa  seance.  Prondzynski ,  de  retour  du 
camp  russe,  demontra  que  toute  re- 
sistance etait  desormais  impossible. 
Plusieurs  nonces ,  parmi  lesquels  se  dis- 
tinguaientBonaventure  Niemolowski  et 
le  marechal  Ostrowski,  s*eievent  ener- 
giquement  contre  toute  transaction; 
et  Leiewel  appuyait  leur  genereux  re* 


MOSCOU,  MOSCOU 


';,^^.^     ,^^      >*;;.„, ,-^     .'^l<'r^..,,.',.r 


•    *   *  •  • 


RUSSIE. 


5S9 


fus  de  son  Eloquence ,  lorsqu'un  aide 
de  camp  de  Rrukowiecki  vientannon- 
cer  que  rarmistioe  allait  expirer.  La 
diMe  continua  ses  deliberations ;  mais 
dej^  lepr^ident  avait  pris  ses  mesures, 
et  Tagitation  |)opiilaire,  ezcit^e  encore 
par  rindignation  des  repr^sentants , 
etait  frapp^e  d'impuissance.  L'armee 
polonaise  rdsista  quelque  temps  avee 
un  courage  d^sesp^re ;  Tartillerie ,  de 
part  et  d^utre ,  exerca  de  grands  ra- 
vages. L'attaque  de  1  aile  droite  russe 
absorba  pendant  quelques  heures  tous 
les  efforts  de  la  resistance ;  les  artil- 
lears  polonais  epuis^rent  leurs  mu- 
nitions ;   malgre   la   superiority   de 
leur  feu ,  ils  voyaient  Tennemi  reparer 
sans  cesse  ses  pertes,  et  emprunter  h 
sa  reserve  des  ressources  toujours 
nouvelles.  Des  le  matin ,  Paskevitsch 
ayait  eu  un  cheval  tue  sous  lui ;  il  con- 
fia  le  commandement  k  Toll,  ayant 
real  une  forte  contusion  qui  robligea 
a  s^eioigner  du  cbamp  de  bataille.  Vers 
cinq  beures ,  toute  la  ligne  des  Russes 
8*6Ian^  en  ayant ,  et  les  redoutes  po- 
lonaises tomberent  une  k  une  au  pou- 
Toir  de  I'ennemi.  Vers  cinq  heures  du . 
soir,  Tincendie  se  d^clara  aans  les  de- 
oombres  de  Czyste ,  et ,  gagnant  la  li- 
si&re  des  faubourgs ,  deiogea  les  Polo- 
nais du  dmetiere  et  des  jardins  ou  ils 
s'etaieot  retrancbes.   Les   insurges, 
refouies  par  une  dernito  attaque  de 
Schakhovskof ,  sur  Taliee  de  Wola ,  se 
defcndaient  toujours ,  et  leur  artillerie 
rompait  les  colonnes  des  assaillants. 
C*est  h  ce  moment  que  des  aides  de 
camp  yiennent  annoncer  que  le  presi- 
dent avait  capituie.  A  cette  nouvelle , 
les  uns  s'eioignent,  les  aotres  refusent 
d'interrompre  la  lutte ,  et  Bem  ordonne 
aux  p\hces  de  campagne  de  se  retirer 
sur  Praga.  cetait  ragodic  de  la  Po- 
lo^e;  Kukrowiecki  avait  envoye  sa 
demission  au  marechal  de  la  aiete; 
mais  tant  qu*elle  n'etait  pas  acceptee , 
il  rcstait  investi  du  pouvoir  de  traiter. 
La  diete,  apr^  d'orageux  debats,  re- 
fusa  la  demission  du  president ,  et  I'au- 
torisa  h  capituler.  Apres  ce  dernier 
acte,  qui   epargnait  h  Varsovie  les 
horreurs  de  rassaut ,  elle  vota  sa  pro- 
rogation et  se  separa.  Krukowiecki 


essaya  en  vain ,  dans  Tentrevue  qu*il 
eut  avec  Fenvoye  de  Paskevitsch ,  <rob- 
tenir  des  conditions  favorables;  le 
vaincpieur  pouvait  dieter  des  lois ;  il 
exigeait  une  soumission  sans  reserve. 
La  guerre  venait  de  rompre  le  pacte  de 
1816;  les  rapports  avec  Tempire  etaient 
desormais  changes :  la  force  8*autori- 
sait  de  la  victoire ,  et  Tavenir  n'etait 
plus  douteux.  Krukowiecki  ecrivit  au 
tsar  la  lettre  suivante :  «  Sire,  charge 
dans  ce  moment  meme  du  pouvoir  de 
parler  a  Votre  Majeste  imperiale  et 
royaie  au  nom  de  la  nation  polonaise, 
je  m'adresse,  par  son  excellence  noon- 
seigneur  le  comte  Paskevitsch  d'Eri- 
van ,  k  votre  coeur  paternel. 

tt  En  sesoumettant  sans  aucunes  con- 
ditions k  Votre  Majeste  notre  roi ,  la 
nation  polonaise  sait  qu'elle  seule  est 
k  meme  de  faire  oublier  le  passe,  et  de 
guerir  les  plaies  profondes  qui  ontde- 
chire  ma  patrie.  » 

La  liberte  eut  encore  un  beau 
moment;  la  minorite  de  la  diete, 
assumant  un  pouvoir  que  la  pro* 
rogation  avait  suspendu,  eiectrisee 

{)ar  le  chaleureux  desespoir  de  Mo- 
achowski,  yeut  rompre  toute  n^o- 
ciatlon.  Le  marechal  de  la  diete  va 
trouver  le  president,  le  somme  d'ab- 
diquer,  et  revient  avec  sa  demission 
au  milieu  de  Tassembie^  qui  nonune 
par  acclamation  BwPenture  Nie- 
rooiowski,  president  du  gonveme- 
ment.  Dans  la  nuit  du  7  au  8,  Berg 
et  Prondzynski  cherchent  Kruko- 
wiecki, pour  lui  demander  au  nom  du 
marechal  la  ratification  du  traite.  Mais 
la  demission  de  ce  dernier  rendait  cette 
formalite  impossible.  La  reflexion  avait 
succede  k  Tentbousiame.  Molacbowski 
se  rend  enfin  aux  instances  de  ceux-1^ 
memes  qui  avaient  applaudi  i  sa  re- 
sistance, et  si^ne  la  capitulation.  Il 
cede  k  Paskevitsch  le  pont  et  la  tete 
de  pont  de  Praga.  De  son  c6te ,  le  feld- 
marechal  s'engage  a  ne  pas  troubler 
la  retraite  de  l^mee  polonaise ,  et  lui 
laisse  quarante-huit  heures  pour  em- 
porter  les  armes,  les  munitions,  les 
effets  militaires  et  ceux  des  particu- 
liers  qui  voudront  suivre  Tarriere* 
garde. »  (Mieroslawski.) 


£90 


UUlflYRRS. 


L'^dfoement  de  Ramorioo  aeo^l^a 
la  chute  de  Yarsom ;  on  a  diversement 
ioterpret^  sa  conduite;  les  uns  Fexpli- 
quent  par  dee  ordres  pr^is ,  aoxquels 
il  ae  pouvait  d^b^r,  et  par  Vlgiio* 
ranee  oik  pb  Tavait  laiss^  de  oe  qui  se 
passait  aoz  portos  de  la  capitale ;  d'au- 
tres  le  blAoaent  de  ne  pas  £tre  rentr^ 
au  camp  apria  s'^tre  acfpiitt^  de  sa 
mission ,  qui  consistait  a  netto^rer  la 
rive  droite  du  (leave  et  k  approvision* 
ner  YaraoTie.  Lorsqu*il  oonnut  le  v^ 
ritable  ^tat  des  choees,  il  ^tait  trop 
tard.  Le  0,  apres  avoir  oonvoou^  un 
coQseil  de  guerre,  il  fut  dicw  que 
son  corps  d  armte  s'^uierait  vers  le 
sud ,  et  qu'il  se  r^fo^perait  sur  le  ter* 
ritoire  autricbien;  cette  r^olution 
4^tait  prise,  lorsquMl  requt  Tordre  de  se 
pester  sur  le  Bug  et  de  rejoindre  Tar* 
m6e  polonaise  k  Modlin.  Toute  con- 
fiance  ^tart  d^truite ;  Eamorino  se  crut 
dispense  d'ob^ir;  il  cx^ta  ce  que 
son  conseil  de  guerre  avait  decide ; 
press^  de  tous  cot&  par  les  masses 
russes,accul^ii  laGallicieautrichienne, 
il  |)a88a  la  fronti^re  k  Roscin ,  dans  la 
nuit  du  1$  au  17 ;  quelque  temps  apr^ , 
le  partisan  Rozycki  traversa  la  Yistule 
a  Bobrek ,  el  mit  sa  petite  troupe  h 
Tabri  des  Russes  sur  le  territoire  au- 
tricbien. 

Cependant  rarm^.principale,  sortie 
de  Praga  le  8  septembre ,  se  porta  vers 
Modlin ;  le  g^n^ralissime  Malaobovrski 
demauda  lui4ntae  qu'on  le  rempla^lt; 
il  s'accusait  avec  amertume  d'avoir  si- 
gn^ la  capitulation.Lecercledesgrandes 
reputations  miiitaires^taitbienr^tr^: 
Krukowiecki ,  Prondzynski  et  Ghrza- 
nowski  ^taient  rest^  dans  la  capi- 
tale;  il  ne  restait  plus  que  Dembioski , 
Uminski  ,RybinsKi ,  BemetSierawski. 
Rybinsk!  fut  ^u ;  cette  petite  arm^ 
ne  comptait  plus  que  vingt  mille  bom- 
mes  presque  tous  d^oraiis^ ,  nom- 
iMre  que  la  desertion  diminuait  encore 
tous  les  jours.  Paskevitsch  n'eut  pas 
de  peine  a  envek)pper  ces  d€bm.  Pro- 
fitantdeleur  disorganisation,  il  en- 
voys aux  Polonais  son  ultimatum.  11 
^tait  atnsi  con^u : 

'    «  V  L'arm6e  rentrera  dans  ses  de- 
voirs envers  son  roi;  2*  elle  lai  en- 


verra  une  deputation  pour  lui  deman- 
der  Toubli  du  pass^;  S''  en  attendant 
la  r^nse  de  Sa  Majesty  imp^riale, 
elle  prendra  ses  cantonnements  dang 
le  palatinat  de  Plock ;  4''  Modlin  sera 
remis  ificessamment  aux  troupes  iro* 
p^iales. 

«  Au  lieu  d'ob^ir  k  cette  Injonction , 
les  Polonais  jettentun  pont  sur  la  Yistu- 
le ;  bientdt  oependant  le  d^uragement 
reprit  le  dessus ,  les  cbefs,  m^coDteots 
de  Rvbinski,  transport^rent  le  com* 
mandement  a  Uminski ,  roais  riofan- 
terie  refusa  de  lui  obSr.  Les  nooces 
d^coora^^  avalent  pris  le  chemin  de 
la  frontiere  prussienne;  et  Tarm^, 
gagnant  toujours  vers  Touest,  ^tabiit 
son  quartier  gto^ral  k  Szpital.  Pablen 
^tait  toujours  sur  les  traces  des  fiiyards; 
Tarriere-^arde,  command^  parDem- 
binski ,  tira  les  demiers  coups  de  ca- 
non. Le  6  octobre ,  Tinfentene  d^posa 
les  armes  k  Jastrzembie,  rartijlerie 
et  la  cavalerie  pres  de  Brodnioa.> 
(Mi6rosIawski.)  L'insurrection  etait 
tointe,  la  Pologne  n'^tait  plus  qu'uoe 
province  russe. 

Aujourd'bui  que  guelques  ann^ 
ont  pass^i  sur  ces  ^venemenis  m^mo- 
rabies ,  il  est  permis  de  porter  un  ju- 
gement  plus  impartial  sur  les^  vam- 
queurs  et  les  vaincus ;  depart  et  d'aatrej 
les  deux  peuples  rivaux  ont  conserve 
leur  caractere  historique.  Les  Russes 
se  soot  montr^s  tels  qu*on  les  a  vus 
dans  lesgrandes  luttes  quails  ont  eues  a 
soutenir,  c'est-lt-dire,  braves,  r^goes, 
patients ,  et  oompensant ,  par  upe  dis- 
cipline severe,  T^Ian  qui  manquea  leun 
masses.  Diebitscb  n  a  montre  d^hdhi- 
\eti  que  dans  ses  mouvements  strate- 
£iques ,  mais  il  n'a  pas  su  profiter  de 
ja  victoire;  Paskevitsch  a  pousse  la 
bardiesse  jusqu*^  la  t^m^t^ ;  sonmou- 
vement  sur  la  basse  Yistule  est  une 
conception  neuve  qui  changeait  toute 
Teconomie  de  la  campagne :  le  succes 
Va  justifi^.  Les  Polonais ,  dans  le  hm 
comma  dans  le  mal ,  n*ont  pas  de- 
menti leur  ancienne  renommeie :  bra- 
vourechevaleresque .  d^vouement  com* 
plet,  mais,  k  cdte  de  ces  vertus, 
amour-propre  excessif,  jalousie  de 
parti  a  oarti ,  d^bomme  h  nomme  ^ n 


RUSSIE. 


&91 


n  mot ,  anardiie  dans  les  idtes,  votl^ 
ce  qu'on  retrouTe  dans  rhistoire  de 
leur  deroidre  guerre,  voil^  ce  qui  a 
£ut  leur  gloure  et  leur  faiblesse  dans 
Urates  ks  luUes  do  pass^.  Sous  le 
point  de  Tue  politique ,  Tiosurrection 
dePologne  mit,  pour  les  Russes 
oomme  pour  les  Volonais ,  une  ques- 
tion de  vie  ou  de  mort.  Si  la  PoR)gne 
edt  triomph^,  Texenaple  de  son  ind6- 
Mttdaoce  eCt  n^cessairement  souler^ 
les  provinces  prussiennes  et  autrl- 
chiennes  des  anciens  partages ;  la  Rus- 
m  perdait  ses  bases  politiques  et  com- 
merciales  sur  la  Baltique  et  sur  TEuxin ; 
la  Turquie  et  la  Suede  la  pressaient  du 
sod  aa  nord ;  la  r^^n^ation  de  I'O- 
rient  pouvait  se  developj)er  en  86cu- 
riti;  en  on  mot,  Tempire  des  tsars 
n'^tait  plus  qu'une  puissance  asiatique , 
et  la  iace  oe  FEurope  ^tait  changee. 
L'Eorope  n'a  pas  voulu  voirces  rSul- 
tats;  die  sobit  aujourd'bui  les  conse- 
quences de  aa  conduite ;  toutefois  eile 
a  acquis  la  conviction  que  la  Russie  a 
dd    employer  toutes    ses  forces   et 
presqu'una  ann^  nour  souaiettre  quel- 
i|ue8  palatinats;  eliesait  que,  sans  laoon- 
mvenoe  de  la  Prusseet  de  I'Autriche , 
Vissusdeoette  guerre  entre  le  despo- 
tisms  €t  la  liberty  eAt  dt^,  sinon  dou- 
teose,  do  moins  marqu^  par  des  sa^ 
crtfiocg  encore  plus  arands. 

La  Bossie  ^it  dennitivement  mal- 

treec  de  la  Pologne ;  presque  tous  ceux 

QUI  avaient  oonioattu  pour  Tindepen- 

dance  ^taient  disseniin&  en  Allemagne, 

en  France  et  en  Angleterre,  ou  ils 

^taient  Tobjet  de  la  sympathie  des  peu- 

ple6,apres  avoir  ^te  abandonnds  pr 

ics  gottvememeuts ;  les  restes  de  1  ar- 

DKe  polonaise  furent  bientdt  ittcorpo- 

res  oaas  I'arai^  russe.  Pour  leur  oter 

toQt  espoir  de  r^volte ,  on  les  empioya 

dcpuis  en  assez  grand  nombre  contre 

Itt  peoplades  du  Caucase. 

Da  oot6  de  TOrient ,  des  Emigrations 
f^id^rables  avaient  eu  lieu  sur  le  ter- 
ritoire  nouveUement  conc6d6  aux 
Russes.  Le'g^n^al  Lazaref,  charge 
fit  le  comte  d'^rlvan  d*agir  sur  Tes- 
prit  des  populations  arm^iennes,  fa- 
f(Hisa  le  depart  et  r^tablissemenA  de 
plus  de  dix  milk  families.  Le  patriar- 


die  de  r^gitee  arndnieane,  dont  le 
sito)  oecnintoique  dtait  le  monast^re 
d'Etchmiazdin ,  ftit  attirE  h  £rivan ,  et 
eette  ville,  sous  I'administratiott  des 
Russcs,  ne  pent  manquer  d'amener 
avec  le  temps  la  deoadaioe  d'Erze- 
roum. 

Itious  avons  vu  que  les  eomra^tes 
des  Russes  dans  la  Turquie  cTAsie 
leur  permettaient  d'a^  ir  d*une  manidre 

Krempte  et  presque  irresistible,  dans 
»  cas  d*une  guerre  en  Orient,  soit 
centre  la  Perse,  soit  contre  la  Porte 
ottomane;  niais  un  des  plus  grands 
avantages  de  la  position  que  leur  as- 
surent  les  traites  d'Andnnople  et  de 
Tourkraantchai ,  c'est  d'entourer  par 
meret  par  terre  les  peuplades  guer- 
ridres  du  Caucase  qui  luttent  encore 
aujourd*hui  contre  les  armes  du  tsar. 
La  r&istanoe  de  ces  belliqueux  mon- 
tagnards,  les  relations  reoentes  des 
Anfilais  sur  ces  contrdes  peu  connues , 
et  dont  les  retraites  inacecssibles  sem- 
blent  ddfier  les  efforts  de  la  tactique 
militaire  non  moins  que  les  bienfaits 
de  la  civilisation ,  tout  apoelle  sur  la 
Gircassie  un  intdr^  renmi  plus  vif 
encore  par  la  situation  aetuelie  de  TO- 
rient.  IJous  croyons  done  utile  de  ras- 
sembler  ici  quelques  details  sur  les  re- 
gions caucasiennes. 

La  cession  de  la  Gdorgie  ouvrait 
aux  Russes  le  versaht  mdridional  du 
Caucase ;  de  Tiflis ,  ils  peuvent  facile** 
ment  se  porter  le  long  de  TArarat ;  et 
les  forts  qu'ils  possMent  dans  les  kba- 
nats  d'^ivan  et  de  fiakbitcbevan  les 
mettent  k  I'abri  de  touteentreprise  s^ 
rieuse  de  la  part  de  la  Perse  et  des 
Turcs.  Les  Circassians  s'^taient  places 
sous  la  suserainetd  des  sultans,  ^i  les 
ont  abandonnds  k  la  Russia.  Mais  ces 
montagnards  ne  se  regardent  point 
comme  lids  j^r  des  traitds  eondus 
sans  leur  participation ;  ils  ont  ddclard 
qu*ils  reconnattraient  volontalrement 
rautoritd  de  la  Porte,  mais  que  nulle 
puissance  au  monde  n'avait  le  droit  de 
m  souaiettre  aux  Russes ,  contre  les- 
quels  ils  nourrissent  une  haine  pro- 
londe.  Les  montjsignards  du  Caucase 
prdsentent  une  divovitd  presque  infi- 
nie  de  races,  de  sectes,  didiomes  ^ 


S92 


LUNIVERS. 


d'instituttonB.  II  est  difficile  d*^aluer 
d*ane  oianito  exacte  le  cbififre  de 
toutes  ces  popolafions.  Rdnegg*  se^ 
ion  le  Port-folicr;  paratt  6tre  la  meil- 
leure  autorit^;  Klaproth  T^yalue  trop 
bas  par  syst^me ;  lea  rapports  rosses 
officials  le  repr^ntent  par  un  million 
cent  cinquaote  mille  Ames ;  les  autori- 
tes  locales  le  portent  h  quatre  mil- 
lions; nous  pouvons,  sans  craindre 
de  nous  tromper,  Testimer  a  plus  de 
trois  millions...  Ia  population  enti^re 
est  arm^.  II  n*y  a  pas  de  petite  ferme 
ou  Ton  ne  tronve  un  yatagan,  un 
sabre ,  un  fusil ,  ou  un  arc  et  des  Ar- 
ches. Beaucoup  d*babitants  possedent 
un  armement  riche  et  pittoresqne; 
vers  Touest  et  le  sud,  on  rencontre 
un  nombre  considerable  de  cavaliers , 
et  diaque  ferme  entretient  un  cheval 
de  guerre.  Lcs  Gircassiens  et  les  Ga- 
bardiens  sont  tons  cavaliers,  et  ils 
ont  fh^emment  k  la  bouche  la  me- 
nace de  marcber  sur  Moscou. 

Dans  rintervalle  qui  s^pare  les  lignes 
du  Terek  de  celles  du  Kouban,  la 
Russie  ne  possdde  que  ses  stations 
milttaires.  Les  Gircassiens  ont  pouss^ 
k  plusieurs  reprises  des  corps  de  cinq 
«&dix  mille  hommes  h  travers  cette 
■mnti^re  militaire;  ils  ont  p^n^tri 
.  &rt  loin  dans  Tint^ieur  de  la  Russie, 
et ,  baiayant  tout  devant  eux ,  lis  en 
ont  emmen6  de  nombreux  troupeaux 
de  b^tes  k  comes  et  a  laine ,  faisant  en 
outre  des  prisonniers  qu*ils  rendaient 
plus  tard,  soit  par  6change,  soit 
moyennant  une  rancon.  Leurs  sabres 
sont  de  fabrique  indigene;  ils  pr^pa- 
rent  eux-m^mes  leur  sellerie  et  leur 
buffleterie:  quant  au  plomb  et  h  la 
poudre ,  ils  ^taient  dans  Thabitude  de 
les  importer  deNtranger;  mais,  de- 
puis  Tinterruption  que  la  Russie  im- 
pose h  leur  commerce ,  ils  s'en  four- 
nissent  par  eux-m^mes ,  quoique  avec 
assez  de  difficult^. 

Le  nays  abonde  en  premieres  n^ces- 
sites  de  la  vie;  le  seul  luxe  des  habi- 
tants, c'est  d'avoir  de  belles  armes. 
Le  costume  des  Gircassiens  est  simple 
et  parfaitement  adapts  h  leurs  habi- 
tudes guerrieres :  c'est  un  bonnet  de 
peau  de  mouton ,  et  un  habit  en  forme 


de  redingote  d'une  sorte  de  flanelle 
^paisse,  de  couleur  grise,  avec  dea 
poches  destinto  aux  cartouches  sur  le 
devant,  et  serr^  par  une  celnture  au- 
tour  dea  reins.  Leurs  pantalons  sont 
fails  de  la  mtoie  6toffe;  une  seule 
pito  de  rhabillement  admet  quelque 
recherche:  ce  sont  des  bottines  en 
maroquin  rouge  ou  noir,  que  les  chefii 
portent  om6es  de  broderies.  A  peine 
y  a-t-il  quelque  autre  diff<6rence  dans 
le  costume  des  personnes  de  rangs 
diffl&rents ;  malgre  cela ,  le  peuple  ob- 
serve un  grand  respect  pour  les  an- 
ciens ,  les  anciens  k  regard  des  m^les , 
et  les  nobles  pour  les  princes. 

Dans  les  guerres  in&rieures  et  dans 
les  guerres  defensives ,  il  paraltrait  que 
oe  sont  les  princes  qui  d^ctdoit  et 
font  executor  les  mesures  n^cessaires. 
Mais ,  lorsquMl  est  question  d'une  ex- 
p^ition  au  dehors ,  la  troupe  entiere 
se  rassemble,  et  procMe  k  I'^lection 
d'un  chef,  qui  a  un  pouvoir  despotique 
et  irresponsable  tant  que  dure  rexp6- 
dition. 

Pour  les  affaires  int^ieures,  Tau- 
torite  supreme  est  b^r^itaire  en  quel- 
ques  enoroits;  allleurs,  elle  n'existe 
que  sous  des  formes  entiirement  re- 
publicaines,  et  se  trouve  entre  les 
mains  d'un  oonseil  €\u  parmi  les  ch^s 
de  municipality  qui  repr^entent  dia- 
que village.  Dans  beaucoup  de  lieux , 
radministration  de  la  justice  est  con- 
fide k  des  assemble  r^li^es ,  ou 
tons  les  intdr^ts  sontd^battus ,  oomme 
jadis ,  en  Grece ,  dans  les  assemble 
du  peuple.  (Port-folio.) 

Les  rivalites  de  peuplades  k  peupla- 
des,  les  haines  vivaces  entre  les  fa< 
milles  et  les  individus ,  empMient  les 
Gircassiens  de  lutter  avec  ensemble 
centre  les  corps  russes  qui  l4»  har- 
c^lent.  Gependant  la  communaut6  du 
danger  les  a  rdunis  souvent  dans  une 
m^me  pens^  de  salut  et  de  haine 
centre  leurs  oppresseurs.  Peut-^tre 
leurs  subdivisions  et  leur  mani^re  de 
guerroyer  que  favorisent  les  localites , 
sont-dles  plus  efficaces  pour  la  d^nse, 
que  si ,  en  adoptant  une  organisation 
militaire  plus  savante,  ils  se  hasar- 
daient  plus  souvent  k  oombattre  par 


RUSSIE. 


593 


masses  contre  un  ennemi  qui  ajirait 
toujours  I'avantage  du  nombre.  v 

La  principale  triba  du  Caucase 
oriental  est  celle  des  Leseuis ;  le  pays 
qu^elle  occupe  regarde  la  mer  Cas- 
pieime,  et  oomprend  les  districts  du 
Daghestan,  de  Jar  et  Belikhan.  Les 
L.esguis  de  ce  dernier  district  ont  des 
troupes  russes  cantonn^  cbez  enx. 
L.eur  pays  est  plus  accessible  que 
le  reste  de  cette  diafne  du  Caucase. 
Avec  le  printemps  et  le  feuillage  ils 
reprcnnent  leurs  armes ,  tandis  qu'eu 
hiver  les  arbres  d6pouilI^  ne  leur 
ofFrant  plus  d*abri  ,  la  rigueur  de 
la  saison  les  fait  descendre  des  hau- 
teurs ,  et  les  oblige  a  une  soumission 
appareote  devaut  leurs  ennemis  qui 
occupeut  la  plaine.  Plusieurs  de  leurs 
che£s  se  sont  r^fugi^  en  Perse  et 
en  Tnrquie.  Le  blocus  de  douanes, 

2ui  les  etreint  comme  le  reste  de  la 
ircassie  t  les  afTaiblit  par  degrds ,  et 
ils  sont  plutdt  maintenus  que  soumis. 
Derbent  et  Bakou  sont  les  deux  places 
raaritimes  r^uliirement  fortifiees  que 
la  Russie  possMe  sur  cette  rive.  Pen- 
dant la  derniere  guerre  avec  la  Perse, 
trente  mille  Lesguis  sont  venus  bio- 
quer  ces  deux  viiles ,  mais  leurs  efforts 
ont  €it  sans  r^sultat,  la  mer  6tant  au 
pouvoir  des  Russes.  Rlaproth  dit 
qu'un  de  leurs  chefs,  Nutscnam,  peut 
rassembler  douze  mille  hommes. 

Les  tribus  qui  occupent  la  chatne  du 
Caucase,  depuis  le  Vladi-Caucase,  sont 
sou?ent  en  ^tat  d'faostilit^  avec  les 
Russes ,  et  la  proximity  de  leurs  ro- 
chers  inabordabtes  impose  h  ces  der- 
niers  Tobligation  d'^re  constamment 
sur  leurs  gardes.  Les  plus  roioutables 
d>otre  ces  tribus  sont  celles  des 
Tdietchenetz  et  des  Soans.  Cependant 
une  partie  de  leurs  habitants  est  fix^e 
dansles  plaines  des  deux  Rabarda  et  sur 
les  autres  plateaux  soumis  aux  Russes. 
Les  villages  des  Lesguis  et  des  Tcbet- 
ciienetz,qui  reconnaissent  Tautorit^  du 
i;ouvemement  russe,  ont  Iivr6  des 
otages  et  payent  un  imp6t;  on  les  ap- 
peile  zamirnie  (pacifies):  mais  sou- 
vent  leurs  habitants  sont  plus  dange- 
reux  que  ceux  qui  veufent  rester 
ind^pendants.  Ayant  libre  aoc^  dans 

38*  lAvraUon.  (Russie.)  t.  n. 


les  vilies  et  les  camps  russes,  lis  ser- 
vent  toujours  d'espions  li  leurs  fr^res 
insoumis ,  et  les  appuient  en  cas  d*at< 
taque.  La  plupart  sont  inusulmans; 
lorsque  la  forteresse  d'Anapa  toit  en- 
core au  pouvoir  de  la  Porte,  cette 
puissance  leur  faisait  passer  des  armes 
en  Change  de  jeunes  garcons  et  de 
jeunes  femmes. 

Leur  costume  oonsiste  en  une  courte 
tunigue ,  un  large  pantalon ,  des  bottes 
h  pointdi  longues  et  recourb^es,  un 
bonnet  rond  surmont^  d'un  capuchon 
termini  en  pointe.  Leurs  maisons 
sont  petites  et  couvertes  de  terre;  une 
peau  de  mouton  leur  sert  de  lit ,  une 
selie  d*oreiller.  Leur  nourriture  con- 
siste  en  pain  de  mais,  qu'ils font cuire 
sur  une  pierre  ^haunSe,  avec  un 
morceau  de  viande  sai^nant  et  des 
oignons.  Ils  aiment  passionn6ment  les 
liqueurs  fortes.  Lorsqu'ils  ne  sont  pas 
en  guerre ,  la  chasse  et  le  pillage  les 
entrstnent  hors  de  leurs  foyers.  Les 
femmes  m^ent  Pexistence  la  plus  mi- 
s^able ;  elles  sont  moins  estimto  que 
les  chevaux  et  les  armes.  Ils  manient 
leurs  poignards  avec  la  plus  grande 
dexterity  :  la  lame,  longue  d*envi- 
ron  dix-huit  pouces,  en  est  d'une 
trempe  excellente;  on  assure  que  les 
habitants  plongent  ces  armes  dans  une 
substance  v^n^neuse  qui  en  rend  les  at- 
teintes  mortelies.  Lorsqu'un  Tchetche- 
netz  est  vivement  poursuivi ,  il  lance 
son  poignard  contre  son  adversai- 
re,  et  rarement  h  une  distance  de 
dix  pas  il  manque  son  hut;  s*il  est 
serre  de  trop  prte,  il  Tenfonce  dans 
son  propre  sein.  Ils  ont  des  esclaves 
quMls  emploient  aux  plus  rudes  tra- 
vaux ;  ce  sont  pour  la  plupart  des  pri- 
sonniers.  Un  ofBcier  superieur  russe 
resta  captif  au  milieu  d*eux  jusqu'^  ce 
au*on  etft  pav6  la  ran^n  quails  avaient 
fixde.  Pour  remp^her  de  fuir,  on  lui 
avait  fait  une  incision  k  la  plante  des 
pieds ,  et  on  la  laissa  ctcatriser  aprte 

L  avoir  introduit  du  crin  de  cheval. 
eurs  attaques  subites  tiennent  les 
troupes  russes  dans  une  alerte  oonti- 
nuelle;  la  nuit  les  postes  sont  dou* 
bl^,  et  des  patrouilles  nombreoses 
surveillf  nt  la  oandi^  de^  toUisse- 

14 


594 


L'UNIVERS. 


meats,  lis  do6(ienitent  par  milliers  de 
feurs  montagnes;  eoldvent  bommes, 
femmes ,  tcpuDeaux ;  et ,  defiant  toute 
poursuite  par  la  ragidite  de  leur  mar- 
che  et  la  dissemination  de  feurs  forces, 
its  regagnent  leurs  repaires  inexpu- 
enables.  Nousempruntons  h  M.  Tolstoy 
ie  r^it  suivant ,  rapports  par  an  om- 
cier  qui  s'est  trouve  sur  les  lieux. 
ft  Pendant  une  nuit  obscnre ,  une  ring- 
taine  de  Lesguis  descendent  des  mon- 
tagnes ,  traversent  I'Alazan ,  franchis- 
sent  k  pied  le  cordon  des  factionnaires 
qui  entouraient  un  camp  de  dragons 
etabli  pr^s  de  Tiflis,  s^^Iancent ,  le  poi- 
gnard  i  la  main ,  ters  une  caserne , 
massacrent  la  sentinelle  qui  gardaiC 
l*entr^ ,  et  p^ndtrent  en  silence  dans 
les  salles  int^rieures  ou  dormaient  les 
soldats.  Tout  ce  qui  s'ofTre  a  eux  est 
d'abord  dgorg^;  quelques  dragons  s*6- 
veillent  et  courent  aux  armes ;  les  Les- 
guis avaient  6teint  les  lumidres ,  et  se 
reconnalssaient  entre  eux  pai*  Tattou- 
chement  de  leurs  barbes.  Le  carnage 
continua  jusqu*^  rarriv^e  des  pa- 
trouilles.  Alors  lis  voulurent  se  faire 
jour,  mais  ils  furent  tons  enveloppes : 
les  uns ,  an  lieu  de  se  rendre ,  se  poi- 
enard^ent;  et  ceux  qui  n*eurent  pas 
Ie  tem|>8  de  se  frapper  t^moignaient 
leur  joie  de  se  voir  entour^  de  ca- 
davres  russes. « 

Au  mois  de  fierier  1830 ,  Kozi-Moul- 
lah  riunit  plus  de  six  mille  bommes 
dans  le  Dagbestan ,  et  parcourut  tout 
le  pays ,  dans  le  but  ou  sous  Ie  pr6texte 
de  r«ablir  Tautorite  du  tribunal  spiri- 
tuel :  battu  en  plusieurs  rencontres , 
il  se  refugia  parmi  les  tribus  sauvages 
de  la  cote  orientale,  ou  il  attaqua 
sans  succes  les  Tillages  oocup^  par  les 
Russes.  Apres  avoir  r^uni  quatre  mille 
de  ses  mouHds,  ou  fiddles,  a  Gherment- 
diouk ,  principal  village  des  Tchetcbe- 
netz ,  il  opposa  aux  troupes  russes 
la  r^istanoe  la  plus  opiniatre.  Pen* 
dant  Taction ,  soixante  et  dix  monta- 
^rds,  sous  la  conduite  d'Abdoul- 
Rhaman,  Tun  des  partisans  les  pliv 
d^vou^  de  Kozi-Moullab,  se  virent 
s^ar^  du  reste  des  leurs,  et  cernes 
dans  uM  graode  maison.  Lorsqu*on 
leur  proposa  de  se  rendre,  ils  enton- 


nerent  des  versets  du  Coran,  selon 
leur  usage  lorsqu'ils  se  d^vouent  k  la 
mort ;  puis ,  creusant  des  meurtri^es 
dans  les  morailles,  ils  fusillerent  tout 
ce  qui  se  pr^ntait  k  la  port^  de 
leurs  coups.  Quelques  grenades  lancte 
dans  la  cneminee  ^laterent  dans  Tin- 
t^rieur,  mais  ils  refusaient  toujours  de 
se  rendre.  L*ordre  fut  donn^  de  mettre 
le  feu  a  la  maison.  Senlement  alors 
douze  d'entre  eux,  suffoau^  par  la 
fum6e,  firent  une  sortie  le  poi^ard 
et  le  sabre  a  la  main ,  et  se  prdcipit^ 
rent  sur  les  baionnettes  russes ;  tout 
le  reste,  avec  Abdoul-Rbaman,  p^t 
dans  les  flammes. 

Cbass^  de  Gbermentcbouk,  Kozi- 
Moullah  se  retira  dans  le  Dagbestan , 
et  se  fortifia  k  Gboumrl.  Le  chemin 
de  Ghouinri ,  qui ,  depuis  fe  pays  des 
Tchetcbenetz,pr^nteles  plusgrandes 
diflQcult6s,  monte,  k  partir  delCaranai, 
Jusqu*au  sommet  neigeux  d'une  monta- 
gne  baute  et  escarp^e;  ensuite  il  descend 

Sendant  quatorze  verstes,  en  ddcrivant 
es  sinuositds,  et  comme  suspendu.au 
milieu  des  prdclpices;  au  dela  il  passe 
sur  des  sailiies  ^troltes  de  rochers  sans 
communication  entre  eux :  plus  loin , 
enfin,  il  se  r^tr^it  toujours  davantage 
entre  deux  raneto  de  rocs  perpenai- 
culaires,  jusqu^  oe  qu'il  soit  coap^ 
par  trois  murallles  en  avant  du  village 
deGhoumri.Ce  defile  ^tait  repute  inac- 
cessible ;  et  lei  montagnards  disaient : 
Les  Russes  n*jr  pourront  arriver  que 
comme  la  pluie ,  en  tombant  du  ciel. 
Les  Russes  s'empar^rent  de  tons  ces 
passages ,  mais  avec  des  peines  inouies. 
Une  tour  fortiG6e ,  ou  se  trouvait  Kazi- 
Moullab  et  les  plus  determines  d'entre 
les  siens ,  fut  prise  d'assaut,  et  tons,  j* 
com|)ris  oe  cbef  intr^pide ,  tomberent 
perces  de  coups  de  baionnettes.  Le 
comte  d*]£rivan  fit  des  excursions  fr^- 

Suentes  dans  les  lieux  les  plus  retires 
eces  oontr^es  sauvages,  et  il  s*em* 
para  d'une  forte  position  sur  le  bord 
de  b  mer  Noire ,  au  moven  de  laquelle 
communiquaient  les  vibus  Traus- 
koubanes  et  les  Abazes.  11  se  porta 
ensuite  sur  la  rive  gauebedu  Kouban, 
ou  ii  detruisit  pbis  oe  trois  cents  aoules 
(habitations  de  Tatars}.  Aprei  ces 


RUSSIE. 


^k 


dfedliioas,  il  retoarna  aTiflis,  lais- 
saot  au  gto^ral  V^iaminof  le  som  (to 
eoQtmuer  oette  guerre  interminable. 

Les  plaines  fertlies,  aitu^  eotre  U 
Caacase,  PArarat,  h  met  Noire  et  h 
mer  Caspieooe «  sont  pour  la  ph]|»art 
abaodonnte  k  une  y^^tatioQ  raxa- 
riante^  maia  Inutile.  Les  productiona 
de  DOS  Tersera  et  de  nos  jardina  y  cou- 
Trent  les  plaines  et  les  montagnes ,  et 
dia<|oe  aitre  est  festonD^j)ar  la  vigne. 
Iklais,  au  milieu  de  cet  Eden,  ce  qui 
manque,  c^est  fhomme.  l^es  champs 
de  ble  et  de  mals  se  trouvent  h  de  races 
intenralles ,  parmi  des  for^s  d'abrico* 
tiers  et  de  Wgnes.  Le  laboureur  offtre 
Taspect  de  la  mis^re  au  milieu  de  ces 
ndiesses  naturelles.  Dans  cet  ^tat  de 
choses,  la  Ruasie  ne  tronve  point  au 
(tela  du  Caucase  lea  subsistances  n^- 
cessalrea  pour  lea  arm6es  qu'elle  est 
obfa'gee  d'y  entretenir ,  mtoe  au  milieu 
delapaix.  n  lui  faut  tirer  sea  appro- 
Wsionnements  de  Fint^eur  de  I  em- 
pire h  grands  fraia  d'argent ,  de  temps, 
it  trani^rts  et  d'avaries.  En  temps 
de  guerre ,  cea  transporta  deviepnent 
presqne  Impossibles,  s'il  s*agit  de  lea 
proportlooner  aux  besoins  de  troupes 
considMiiea. 

Cest  I  ees  difflcult^s,  encore  plus 
oa'ao  ocNirage  des  montagnards^  qu'il 
rant  attribuer  la  prolongation  d  una 
lutte  a  inegale.  Maintenant  nous  aN 
ions  exposer  en  pen  de  mots  et  d'une 
mani^re  g^n^le  la  position  relative 
des  Rusaes  et  des  Circassiena  ^U$  le 
rapport  des  forces  milltaires ,  en  aver- 
tissant  nos  lecteura  que  nous  emprun- 
tons  la  |rfus  grande  partie  des  oetaila 
^i  solTent  au  Port-folio. 

Les  Tatars  et  les  Cosaques,  organic 
1^  eotre  la  mer  d*Azof  et  la  mer  Cas- 
pieane,  aont  au  nombre  d'environ 
oaqoante  mille,  dont  un  tjers  reste 
<a  service  permanent  et  effectif.  Un 
■ombre  k  pen  prte  dsal  de  troupes 
nvsea  statfonne  dana  Tes  forteresses, 
Ob  doit  Y  ajouter  lea  Kabardiens  et  lea 
Oai^iniena,  d^^  organist  en  grande 
pntie  par  les  llusses ;  mais ,  comma 
BOOS  I'avona  dit ,  il  serait  dangereux 
^/es  opposer  h  leurs  compatriotes. 
Les  op^rationa  majeures  contre  le 


Caueaae  ^  appoyeaa  par  les  corps  armda 
({ue  nous  venons  dlndiquer,  ont  tou- 
jours  M  conduites  pardea  troupea  ti- 
roes de  rint^rieur  de  Temptre,  et  par 
dea  d^tacbeooieota  de  Cosacuea  et  de 
Tatars  emplo^^  bora  de  leu  r  tour  d*acti> 
vit6  de  service.  La  Russie  a  mis  en 
campagne ,  dana  ce  cas ,  dea  corps  d^ 
tacb^  de  vingt  k  trente  mille  hommes. 

Dans  les  demidres  ann^s ,  la  |lu&- 
sie  occupait ,  sur  les  odtes  de  la  Cir^ 
cassie,  les  postea  suivanta:  Anapa, 
Gh^Iendgik,Zagra«  Pitsunda^  Bam- 
por,  Soukoum  -  Kal^ ;  \k  finissent  les 
montagnes.  Danstouteacesfortereasea» 
on  comptait  environ  treiae  mille  hom- 
mes. Tout  r6cemment  les  Russes  ae 
sont  empar^  de  Soudjouk  ^  Kal^ ,  un 
des  points  sur  lesquels  les  Gircassiena 
Msalent  un  commerce  d*armes,  de 
poudre  et  de  sel,  avec  les  barques  an- 
glaisea  ou  turques  qui  panrenaient  k' 
tromper  la  vi^Iance  des  croiai^rea  moa- 
covitea. 

On  a  toujoura  conaid^r^  Anapa 
comcue  le  boulevard  et  la  clef  de  tout 
le  pays :  oette  Tille  garde  le  passage 
maritime  vers  la  ligne  du  Kouban, 
ainsi  que  le  passage  septentrional  qui 
touobe  a  une  cbatne  de  montagnes 
presque  inaccessibles ,  de  mapi^  k 
isoler  Ie$  populations  du  sud  du  Cau- 
case de  cellea  du  nord. 

Anapa  6tait  le  ddboudi^  par  lequel 
le$  produita  du  pays  parvenaient  a  la 
mer  I>9oire,  et  le  point  central  des 
Ranges  que  les  naturals  feisaient 
avec  lea  commerqants  strangers.  Par 
la  conqu^te  d*  Anapa ,  la  Ruasie  a  tourne 
toutes  ces  reaaourcea  qontre  la  Ciroas- 
sie  elle-mtoe,  et  Toocupation  de 
Soudjouk -Kale  oon^pldte,  pour  ainai 
dire,  Tinvestissement  de  la  odte. 

Cependant  Tautorit^  des  Ruases  de- 
vient  plus  pr^caire  k  mesure  que  Ton 
avance  dans  les  terres ,  et  principale- 
ment  dans  (ea  r^iona  montagneqses. 
Hors  de  la  portee  du  canon  dea  forts, 
on  n*ose  s'aventqrer  lana  eaeorte; 
quelquefois  m&ne  les  Russea  ne  font 
pattre  leurs  troupeaux  que  aous  la  pro^ 
^  tection  de  rartillerie,  uont  les  monta- 
gnards  redoutent  surtout  les  effets, 
&ndis  qua  le  b^tail  des  peuplades  in- 

14. 


596 


L'UNIVERS; 


soumises  erre  paiiiblament  ilans  les 
gorges  et  sur  les  coteaux,  sous  la  con- 
duife  d'un  jeune  gar^n  ou  d'une  jeune 
fille. 

Au  sud  du  Caucase ,  oh  les  Circas- 
siens  sont  peu  h  craindre ,  Tattitude 
de  la  Rossie  cesse  d'etre  hostile ,  si  ce 
n^est  du  c6U  de  la  mer  Caspieone.  L^ , 
die  d^ploie  quelque  activity,  mais 
mollis  en  prenant  1  offensive  gu*en  sui- 
vant  une  marche  svsttoatique,  ap- 
puyee  d'ailleurs  sur  les  secours  et  les 
moyeos  de  transport  de  sa  marine. 

Dans  les  t)rovinces  plus  au  midi ,  les 
troupes  de  I  empire,  employes  h  main- 
tenir  la  soumission  generate ,  sont  dis- 
B^min^B  sur  une  vaste  6tendue  de 
territoire.  Les  populations,  moins  bel- 
liqueuses,  y  sont  contenues  par  de 
faibles  d^tachements ;  tandis  que,  sur 
quelques  points  oili  les  habitants  mon- 
trent  plus  de  nidesse  et  de  dispositions 
a  la  revolte ,  la  Russie  les  isole  sans 
les  oombattre,  et  se  contente  de  leur 
imposer  oertaines  formes  de  soumis- 
sion ,  telles  que  Tobligation  de  livrer 
des  otages  et  de  payer  un  tribut.  Ainsi 
Taction  de  la  Russie,  agressive  au 
nord,  est  conservatrice  au  midi.  Le 
nombre  des  troupes  qu*elle  maintient 
sur  le  versant  meridional  du  Caucase , 
dans  les  circonstances  ordinaires ,  ne 
d^passe  gu^re  quarante  mille  hommes. 

Dans  Tes  districts  encore  plus  avan- 
c^s  vers  le  sud ,  on  pent  dire  que  le 
pouvoir  des  Russes  est  si  compl^te- 
ment  6tabli ,  que  leurs  soldats  m^me 
isol6s  peuvent  voyager  partout  sans 
^tre  inquiet^s. 

Quoique  Tautorit^  du  tsar  soit  ^ta- 
blie  de  rait  dans  les  districts  plus  mon- 
tagneux  vers  la  Perse  et  la  Turquie 
d*Asie ,  Tadministration  russe  y  fonc- 
tionne  difBcilement ,  et  les  troupes 
n'y  apparaissent  que  par  detacne- 
ments. 

Le  centre  de  toutes  ces  possessions 
est  h  Tiflis.  Les  sacriflces  immenses 
qu*a  faits  la  Russie  pour  ^tablir  son 
pouvoir  sur  ces  contr^s ,  prouvent 
suflBsamment  toute  rimportance  qu*elle 
attache  h  la  pacification  definitive  des 
regions  caucasiennes ;  et  les  inquie- 
tudes de  r Anglcterre  en  presence  aune 


puissance  rivale,  pour  laqudle  la  paix 
n'est  qu'une  preparation  a  des  agran- 
dissements  ulterieurs ,  indiquent  Hn- 
fluence  qu'exercera  prochainemcnt  FO- 
rient  sur  les  destinees  de  TEurope. 

S'il  est  dangereux  de  lutter  de  front 
et  a  euerre  ouverte  contra  la  Russie, 
il  ne  rest  pas  moins  de  se  Her  avec  cet 
empire  par  des  traites  ou  les  avantages 
definiti&  de  TaUiance  sont  tous  pour  le 
vainqueur  qui  les  a  dictes.  Cest  ainsi 
que  rabaissement  de  la  Pologne  date 
de  la  protection  de  Pierre  le  Grand , 
comme  la  mine  de  cette  republique 
date  reellement  de  la  protection  de 
Catherine  n :  c'est  ainsi  que  les  trai- 
tes ont  arrache  a  la  Turquie  toute  in- 
fluence de  fait  sur  les  principautes  de 
Moldavie  et  de  Valacbic ,  dont  I'entree 
permet  aux  Russes  de  penetrer  prcsquc 
sans  obstacle  jusqu*au  centre  de  la  puis- 
sance ottomane ;  c'est  ainsi  cn6n  oue 
le  patronage  moscovite ,  d'autant  plus 
exigeant  qu'il  est  plus  efScacc,  vient 
d*arracher  au  sultan  le  traite  d*Unkwr 
Skeiessi ,  qui  couronne  les  stipulations 
d'Andrinople.  La  Porte  etait  en  oicrrc 
contre  le  pacha  d'lfegypte.  Apris  la  ba- 
taille  de  Koniab ,  la  Russie  jugea  of; 
portun  de  prouver  ^  Mahmoud  qu » 
n*avait  de  secours  ^  attendre  que  d  elic 
seule ;  tandis  que  les  agents  franfais 
et  anglais  luttaient  d'inllueoce  aupres 
du  vice-roi ,  le  cabinet  de  Petersboorg 
fit  avancer  des  forces  de  terrc  et  de 
mer ,  et  le  pacha  rebelle  fut  contraint 
de  suspendre  sa  marche  victoneuse. 
Le  traite  d'Unkiar  Skeiessi  fut  le  sa- 
laire  de  ce  service.  11  est  ainsi  con^u : 

Art.  1*.  II  y  aura  h  jamais  pw. 
amitie  et  alliance  entre  Sa  Majest* 
Tempereur  de  toutes  les  Russies  et  ba 
Ilautesse  I'empereur  des  Ottomans, 
leurs  empires  et  leurs  sujets ,  tant  sur 
terre  que  sur  mer.  Cette  alliance  ayani 
uniquement  pour  objet  la  defense  com- 
mune de  leurs  fetats  contre  tout  em- 
pictement ,  Leurs  Majestes  promctteni 
de  s'entendre  sans  reserve  sur  tous  les 
objets  qui  concernent  leur  tranquiU'i^ 
et  leur  sOrete  respectives ,  et  de  se 
pretcr ,  a  cet  effet ,  mutuellcmcnt ,  des 
secours  materiels  et  Fassistance  la  plus 
efficace. 


RUSSIE. 


407 


Art.  3.  Le  trai(6  de  paii  ioondu  a 
Andrinople  le  a  septembre  1829,  ainsi 
Qoe  tons  les  autres  traits  qui  v  sont 
imms ,  de  mtoe  aussi  la  o^nventioo 
signte  h  Saint-Petenbourg  le  14  avrtl 
1830,  et  rammgementcoDclu  1^  Cbnso 
taatioople  les  9, 31  juillet  1889,  rela* 
tHk  la  Grto,  sont  confirm^  dane 
totite  leur  teaoir  par  le  present  traits 
d'allianoe  dtfensive,  comme  si  lesdites 
tiansactioDS  y  araieDt  €16  ins^rte 
mot  poor  mot 

Art  8.  En  ooDS^ence  du  principe 
deoooser?atioo  etdedtfense  rautuelfe« 

S'sert  de  base  au  present  traits  d'aK* 
ice,  et  par  suite  du  plus  sincere 
desir  d'assarer  la  stabilite  et  Tentiere 
independaoee  de  la  Sublime  Porte ,  Sa 
Majot^  Pempereur  de  toutes  les  Rus- 
&«,  dans  le  cas  ou  les  circonstanoes 
fii  pourraient  determiner  de  nouveau 
laSablime  Porte  k  reamer  Tassis- 
tance  navale  et  noilitaire  de  la  Russie 
Tieodraient  ii  Se  presenter,  quoiquece 
cas  DC  goit  nuUement  k  prevoir,  pro- 
Bwtdefoomir,  par  mer et  parterre, 
aotat  de  troupes  et  de  forces  que  les 
deubaotes  parties  contractantes  le 
JQ|eniat  n^oessaire.  Ce  cas  ^cbitont, 
il  est  OQQTcnu  que  les  forces  de  terre 
et  de  mer  dont  la  Sublime  Porte  r^- 
™Krat  le  seoours  seront  tenues  k 
ttdi^pontion. 

^rt,  4.  SeloD  ce  qui  a  €t6  ^nonc^ 
pnu  haot,  dans  le  cas  ou  Tune  des 
<™  poissances  aura  r^a'm^  Fassis- 
^  de  f autre  ,  les  frais  seuls  d'ap- 
pvnsioDoement  pour  les  forces  de 
^^n  et  de  mer  qui  seraient  foumies 
^<io>beront  a  la  charge  de  la  puissance 
9^  aura  demand^  le  seoeurs. 

^  5.  Quoique  les  deux  bautes 
parties  contractantes  aient  lintention 
siaoere  de  maiotenir  oet  engagement 
jj"qa*ao  terme  le  plus  recule ,  oomme 
it  ae  pourrait  que,  dans  la  suite,  les 
onxmstances  exigeassent  qu'il  fidt  ap« 
PiMt^quelques  diangements  k  ce  traits , 
2.  est  Gonyenu  d'en  fixer  la  dur^  k 
i^t  ans ,  ^  dater  du  jour  de  T^chan- 
S^des  ratifications  imp^iales.  Les 
<|^  ptftiee ,  avant  Texpiration  de 
^  terme,  se  conceiteront ,  sdon  Tetat 
^  seront  les  choses  k  cette  6poque, 


sur  le  renouTellement  dii  dit  traits 

Art.  6.  Le  pr^Mnt  traits  d*alliance 
dtfensi  ve  sera  ratifi^  par  les  deux  bautes 
parties  contractantes,  et  les  ratifica- 
tions en  seront  ^chang^  a  Gonstan* 
tinople  dans  le  terme  de  deux  mois ,  ou 
plus  tdt ,  si  faire  se  pent. 

L*ai:ticle  s^par^,  qui  n*a  ^t^  com- 
munique que  trois  ans  plus  tard ,  sur 
la  demande  de  la  ebambre  des  com- 
munes d'Angleterre,  est  de  la  teneur 
suivante : 

En  vertu  d*une  des  clauses  de  Tar- 
tide  V  du  traits  patent  d*allianced^ 
fensive  conclu  entre  la  cour  imp^riaie 
de  Russie  et  la  Sublime  Porte,  les 
deux  bautes  parties  contractantes  sont 
tenues  de  se  prater  mutuellement  des 
seoours  mat^riels  et  Tassistance  la  plus 
efficaoe  pour  la  s^lret^  de  leurs  ^tats 
respecttflB.  N^anmoins ,  comme  Sa  Ma- 
jeste  Fempereur  de  Russie,  vouiant 
^pargner  a  la  Sublime  Porte  ottomane 
la  cbarge  et  les  embarras  qui  r^ulte- 
raient  pour  elle  de  la  prestation  d'un 
secours  materiel,  ne  demandera  pas 
ce  secours  si  les  ciroonstances  met- 
taient  la  Sublime  Porte  dans  l*obliga- 
tion  de  le  foumir;  la  Sublime  Porte 
ottomane,  k  laplaoedu  secours  qu'elle 
doit  prater  au  oesoin ,  d'apr^  le  prin- 
cipe de  rMprocite  du  traits  patent, 
devra  bomer  son  ac^on  en  fayeur  de 
la  cour  imp^riale  de  Russie  a  fermer 
le  d^troit  des  Dardanelles,  c'est-^-dire, 
k  ne  permettre  k  aucun  bAtiment  de 
guerre  stranger  d'y  entrer  sous  un  pr6- 
texte  quelconque. 

Le  prtent  article ,  s^par^  et  secret , 
aura  fa  mtoe  force  et  yaleur  que  s'il 
etait  ins^  mot  a  mot  dans  le  traits 
d'allianoe  de  ce  jour. 

Fait  k  Constantinople  le  SO  juin  (8 
juillet)  1888.  Sulvent  les  signatures. 
.  Toute  la  portded'uneoonyention  di- 
plomatique, qui  met  les  destin^de  la 
Turquie  entre  les  mains  d*un  tuteor 
int^ress^  k  la  priver  de  tout  moyen 
efficace  de  rteistanee,  se  pr^aente  ici 
d'une  maniere  si  nette  et  si  frappante , 
que  nous  ne  nous  attacberons  pas  2i  di- 
montrer  ce  qui  r^unit  tons  les  carae- 
t^res  de  T^vidence ,  mais  nous  eroyons 
utile  d'ajouter,  k  propos  do  traits 


L'lFNIVEltS. 


iwlickQt  qui  loudmrt  aux  4otMls  Ics 
ffkm  graves  de  rEntope. 

L«d«nL|misaaBoe8i,4oiit  It  AMlriiN 
it  ie  «6iiniiem  oot  M  depuis  km^ 
leniMiprMoaimaDts  daat  la  VMitBr*- 
raoee ,  sont  en  premier  lieu  T Ansle* 
lerre,  tftensuite  la  Franoe.  La  malit^ 
de  cet  deux  nations  a  josqu'id  fDer^ 
veiUeusemeBt  lehFi*  lb  ^KtMue  de  ia 
Rttssie.  Le  rftle  des  agents  AiBtome^ 
ttques  de  cet  empire  est  d*eqiiniln%rH 
pouh*  tinm  ^re^  ees  detx  fnfiuedlses 
ri^ales^  de  manl^re  k  empteher  que 
Tune  ne  derienn^  ln>p  prdpondteate, 
at  saiiout  de  pr^enir  un  aooord  oue 
la  divernnoe  to  intMts  rend  si  dif* 
floile.  Iroa  autre  cdt6.  ioole  tentative 
de  la  France  on  ds  I*  Anglelem  aor 
r^pte  on  la  ta!M  affeetant  nte»- 
saifement  Vdttti  de  la  Turquie ,  ia  Ri» 
sie  pent  aosstUH  if)ter?enir  dans  oes 
queaticnM ,  oomffle  tirtrlce  de  la  Porte 
oitomane,  et  ratCaeker  atnsi  k  ses 
propres  ooBfrenanoes  tons  les  acta, 
Ions  les  rappoi*ts  sossibles  de  rOrient, 
Si  r£gwte  Toolait  eonsoanmer  Fcenvre 
de  son  emaociptilioii  seva  le  proteoto* 
rat  de  TAngleterre,  le  saltan  Mah« 
mood  rMaraerait  aosaitAt  rappn  do 
tear;  et,  si  PAngletenre  passait outre, 
una  unerw  gendrale  s^BUSoivrait.  II 
n*y  a  pas  Jusqu'ii  la  question  d'Aiger 
qui  ne  tienne  au  traits  da  8  juillet, 
pufsque  les  r^ences  barbaraaques 
etaient,  noininalenient  du  moins,  sous 
la  suserainete  du  Grand  Seigneur. 
A  cbaque  instant «  et  k  propos  des 
qaestionn  en  apparenee  les  plus  secon* 
datres,  la  Rnssiepeot  mettreaux  prises 
les  nationa  de  la  vieille  Europe^  dont 
quelques-unes  sont  fatalemeirt  enlrat- 
nta  dans  sa  sphere  d*aetion>i  tandis 
que  -les  aiitres^,  ooaume  ^tonn6es  de 
leor  allianoe,  n^osent  agir  de' concert , 
et  aemblent  se  oonaoler  des  maux  pr6- 
aents  et  k  ^nir  par  la  certitede  qu'eileft 
ne  aeront  pasneules  atteiiltes.  Bien  des 
gens ,  en  enviaageaDt  la  question  d'<K 
rieht,  n^  troavent  gu^  que  Tabais- 
aetaent  proebaili  de  FAngleterre  et  la 
rainede  son  oomneree  &m  les  Indes 
orientaiea.  Qe  serait ,  nous  en  conye- 
tons ,  IViffet  le  plus  inim^diat  des  con- 


nottea  des  Busses  en  Asie.  Hals  inie 
foil  TAsf^elerre  efibofe,  od  sera  la 
digue  qui  arritefa  le  torrent?  Quaiid 
tous  lea  morcMsde  la  BaHraneet  da 
la  M^iterrante,  qnand  osox  du  gnmd 
Oo^a  altmenteront  le  trter  des  tsan^ 
le  dernier  obstacle  oni  les  arrfte ,  Ptet 
pfftaiire.de  leors  nnanees  aura  dis- 
paim;  et  Tor,  ce  moyen  I  la  fois  U* 
eond  et  cornipteifr  des  dvtlisations 
avanota ,  acbdvera  de  leur  somsiettre 
ce  que  leurs  armes  n'aoeont  pas  con* 
quis.  UnealliaoeefiBnne  et  sans  aiini^ 
peM^  entre  la  Franoe  ot  T Angieterre 
pent  seule  ooi^|iHer  oe  danger;  rint^- 
v^t  des  peoples,  eomme  oelni  des  dy* 
nasties,  la  conadlle;  tontes  les  aotna 
eonsid^ratiotts  ne  sont  qu'aooeaaoires , 
car  ifest  folic  de  fonloir  fonder  le  bien- 
itxe  mat^el  des  masses  et  le  triomplie 
de  I'lndnstHe  sn^  mie  base  quetemoio- 
drie  cboc  peut  irenTcrser.  A  oeux  qui 
troQvnrafent  que  nous  tirons  des  foits 
enstants  des  consequences  foiota, 
nous  deaftanderoos  pourqnoi  TAngle- 
terre « qui  ne  reconnait  point  le  Uocus 
oe^  cotes  de  ia  Gitoassie ,  a  laisse  cap* 
tarer  le  Vixen;  pourqooi  elle  trahit, 
par  deft  deaai-mesures ,  les  inquidtudes 
que  hii  cause  son  eonameroe  menace 
sor  le  golfe  Persique;  pourqooi  les 
Russes ,  derenus  anxHiaires  dea  Verses, 
poussent  ces  demiers  corame  avant* 
garde  dans  les  solttudes  qui  les  s^- 
pat«ent  de  llade.  Trois  c«mts  lienes  de 
pays  ne  sorit  pas  un  obstacle  infiran- 
ehissable  pour  des  -nonades  qni  peu- 
vent  aller  partout  oh  lenrs  ehevaox 
trottwont  de  Teau  et  des  plteia^ea,  et 
qui  n'exigedt  povr  leurfiroplv  anbais- 
tance  quece  que  la  nature  ne  refuse 
nulie  part.  *Les  Turcomans  et  les  Bou- 
ktMns  peuvent  ats^ment  sjvnpatliiser 
avec  les  Tatarsi,  les  BaofaiLifns  et  les 
nombreuses  tribus  BM»goles.  Mon- 
trez  k  la  foule  Teapoir  du  pillage ,  aux 
ebefs  la  perspectivede  queqaear6com- 
pisnses  et  de  la  protection  impMale, 
et,  en  peu  d^ann^ea,  le  dtert  aura 
abaiss^  ses  barri^rca  derant  leoourage, 
la  pers^^rance  et  rhabild^  de  «eox 
qui  marcbent  et  marcbent  sans  oissse 
pour  aoBomplir  les  totinees  de  la 
Russie. 


R17S15I£. 


La  qnettkm  greoque  a  ▼ivemeiit 
pr6occap^  TEafope,  qui  4Mt  lofn  de 
8e4ooter  eombien  le  triompbe  appa- 
rent de  la  MbertiS  senrait  les  intmta 
ks  plus  titaux  4u  dc^potisme.  U  ^tait 
nataret  que  le  principe  ^'une  guerre 
d^ind^eodaiiee  |>ardt  stranger  au  but 
de  la  Russie ;  mais  rerreur  await  4Q 
cesser  dds  que  Ton  vit  le  cabinet  de 
Mersbouig  se  declarer  protecteur  de 
k  r6voite  des  Hefl^nes ,  et  il  ne  fallaft 
pasune  grande  8a^it6  pour  dtouvrir 
que  la  Russie  allait  directement  k  son 
but  constant ,  rasservissement  de  la 
Turqoie ,  en  encbidnant  k  sa  politiflue 
les  ueux  pays  dont  Talliance  intern- 
gente  pouvait  paralyser  tous  ses  efforta. 
Kotre  sujet  ne  oomporte  pas  un  r^dt 
detarN^  des  ^T^nements  qui  ont  ameni§ 
f^reetion  de  la  Grece  en  royaume; 
mais  fl  n'est  pas  sans  importance  de 
rapporter  en  peu  de  mots  quelle  a  ^ 
ia  part  d*influence  de  la  Russie  sur  un 
mnement  qui  a  prepare  les  faits  tels 
mi*OQ  les  a  vus  raocomj^lir  en  Orient 
dans  OQ  but  qui  ne  sauraitplus  €ixt  un 
mystere. 

'(Test  apr^  la  paste  de  1756 ,  qui  d6- 
sola  la  (jrrhcie^  et  lorsqu'elle  avait  h 
peine  r^par^  ce  desastre ,  qu'eut  Ifen , 
en  tTTO,  rexpMition  des  Russes  en 
Morfo.  En  se  conformant  au  plan  de 
Montcfa,  Catherine  II  Toulait  op^rer 
one  sdssion  religieuse  entre  les  Turcs 
et  les  proirinoes  chr6tiennes  qui  leur 
^ient  soumises.  Gette  exp^ition  at- 
tira  de  grandes  calamity  sur  lesGrecs, 
que  la  Porte  regarda  toujours  depuis 
comme  disposes  h  devenir  les  auxi- 
liaires  des  Russes.  Des  hordes  d*Alba- 
nais  envahirent  la  peninsule,  occupy 
rent  les  districts  les  plus  fertiles;  et 
bientdt  furent  abolis  les  droits  stipules 
du  peuple^ee,  ses  institutions  natio- 
nales ,  fes  immunltes  de  son  £glise ,  et 
les  caract^es  prindpaux  de  son  admi- 
mstratton  interieure. 

Gependant  la  Russie,  mii\€e  k  toutes 
les  grandes  luttes  de  TEurope,  depuis 
la  revolution  de  69  jusqu'll  la  chute  de 
Hapalfon ,  n'avaitpas  le  loisir  de  pour- 
nifre  ses  projets  sur  la  Turqiiie.  Pen- 
^'aat  cet  intervalle ,  la  Grto  Jouit  de 
<foeiqne  rtpos;  <A  les  Turcs  n'tyant 


rien  ft  eraindr9 de  oefM,  its  la  lais- 
adrent  oiganiaer  denoiiveau  lesmoyens 
de  se  gouvemer  et  d'^glr  plus  tard 
avae  nne  oertaine  ind^ndaiioe. 

«  En  18S0,  nne  organisation  munl- 
cipale  existalt  sur  tous  les  points  de  la 
Of^.  Un  oonseil  nounicipal  centra! « 
reprtentant  les  communes  de  toute  fai 
Grke ,  si^eaH ,  comme  assesseur,  au- 
pr^  de  r8utorit6  d^l^u^  par  le  sul- 
tan. Son  intervention  toit  l^alement 
indispensable  dans  radministration  de 
la  province ;  et  non-seulement  ce  con- 
seil  grec  avalt  des  moyens  d'anpel  h 
Constantinople,  mais  ses  dele^u^ 
dans  cette  capitale  y  repr^sentaient 
les  int^rto  de  hi  province. » (Port- 
folio ,  n<»  )S  ert  93.)  ifous  sommes  loin 
d'avancer  que  le  gouvernement  turc , 
avec  1es  exactions  de  ses  pachas ,  et  sa 
iiaine  forutale  pour  tout  ce  qui  ^tait 
<sbr6tien ,  pdt  contenter  les  Grecs ; 
-nous  Toulons  seulement  Indiquer  que 
TEurope,  en  prenant  la-Gr^e  sous  sa 
tutelle,  devait  €tre  plus  soigneuse  de 
lui  assurer  un  meilleur  avenir.  ^ous 
Savons  que,  sous  le  resne  d*Alexan- 
dre,  en  f814,  une  sodm  (H^tserie) 
6*<^tait  organis^e  efvGr^dans  un  but 
d'tnd^pendance.  Malgr^  la  repugnance 
que  rempereur  t^moigna  depuis  le 
congr^deVieonepour  tous  les  mou- 
vements  qui  avaient  un  caract^re  in- 
aurrectionnel ,  la  Russie  ne  laissa  pa$ 
6chapper  l^occasion  de  dinger  les  voeux 
des  H^Uenstes  dans  un  sens  favorable 
k  ses  int^rdts.  L'ecrit  pubKe  en  1819, 
par  le  comte  Capo-d^Istria ,  indique 
suffisamment  cette  tendance.  D^  Tan- 
n^  suivante,  Tassociation  s'aocrut 
sensiblement ,  et  les  primats  des  lies 
grecqaes  entrerent  en  communaut^  de 
principes  avec  les  H^tnristes.  En  1821 , 
la  tentative  du  prince  Ipsilanti  fut 
hautement  d6savou6e  par  Alexandre, 
soit  que,  tout  en  approuvant  le  but  de 
^association,  il  juge^  que  oettelev^e  de 
boucliers  ne  pouvalt  avoir  I'appui  du 
chef  de  la  sainte  alliance,  soit  que 
I'exaltation  d'Ipsilanti  eAt  devanc^  le 
temps  opportun.  Quoi  qu*il  en  soit, 
les  preuves  de  la  coop^ation  indivi- 
dueile  d*un  grand  nombre  de  Russes 
ouvrirent  les  yeux  du  Sultan  sur  |e|i 


600 


rUNIVERS. 


dmger^  qui  le  menaqaieDt.  II  prit  aut- 
fiitdt  des  mesures  de  repression  dont  la 
violence  irrita  lea  Greea  et  rtodit  tout 
rapprochement  impossible.  II  impor- 
tait'i  la  Russie  que  cette  rupture  fAt 
profonde:  si  la  Grdce  parvenaiticon- 

2[u6rir  son  ind^pendaoce,  la  Turquie 
tait  affaiblie  et  perdait  une  position 
maritime  de  la  plus  haute  importance 
.dans  la  Mediterran6e;  si  la  lutte  se 
*prplongeait  ind6cise ,  les  Turcs  s'^pui- 
saient  en  efforts  st^riles ,  et  les  voies 
dipiomatiques  s'ouvraient  k  Tinfluenoe 
russe  ^  travers  les  pr^textes  les  plus 
sp^ieux.  G*est  dans  ce  but  que  le  ca« 
binet  de  Petersbour^  d^non^a  a  I'Eu- 
rope  cette  insurrection  dont  il  avait 
fi^nd^  les  germes.  II  proposa ,  dans 
un  m^moire  communique  a  toutes  les 
cours  europ^ennes ,  r^rection  en  Grece 
de  trois  principaut^s  qui  seraient  gou^ 
vemees  par  des  princes  grecs,  sous 
une  certaine  d6pendance  de  la  Porte , 
et  avec  des  institutions  analoffues  k 
celles  de  la  Moldavia  et  de  la  Vatachie, 
que  garantiraient  les  cours  alliees  ou 
celles  d'entre  elles  qui  voudraient  con- 
tracter  cet  engagement.  Ce  rapproche- 
ment etait  trop  siguificatif  pour  que 
TAngleterre  ne  s\>pposdt  pas  a  une 
telle  mesure,  que  la  Porte  declina  d*ail- 
leurs  forroellement. 

La  loi  organique  d'£pidaure ,  r^di- 
£;ee  en  18^1  par  Maurocordato,  sous 
rinfluence  anglaise,  etablissait  Tind^- 
{)endance  de  la  Gr«ce  sur  l^s  bases  les 
plus  larges  de  la  liberty  civile  et  reli- 
gieuse.  Ce  li-beralisme  de  vues  de  la 
part  du  cabinet  de  Londres  etait  tout 
simplement  une  affaire  de  |)osition ,  et 
le  resultat  de  la  crainte  qu*iospirait  la 
Russie,  plutot  que  Texpression  d*uu 
zeie  sympathique  en  faveur  des  Grecs, 
comme  la  prouve  depuis  la  conduite 
des  agents  anglais.  Cette  loi  (Port-fo- 
lio) tendait  a  attirer  en  Grece  la  popu- 
lation des  pays  voisins ,  a  y  offnr  un 
refuge  a  toutes  les  victimes  des  perse- 
cutions politiques;  et,  quand  l^irdre 
serait  retabli ,  a  assurer  le  bonheur  de 
tous  les  habitants  de  la  Grece  par  un 
systeme  de  tolerance  universelle,  d'e- 
plite  devant  la  loi ,  d'independance  de 
la  magistrature,  et  d*uue  forme  de 


Eouvemement  representatif^  devant 
(quel  Tautorite  executive  elte  serait 
responsable  de  Texercice  de  son  pou- 
voir. 

La  Russie  ne  pouvait  voir  d^un  ceil 
indifferent  les  maftres  de  Malte  et  des 
ties  loniennes  afBdier  des  pretentions 
sur  une  province  essentlellement  ma- 
ritime. EUe  avait  h  lutter  en  Grece 
centre  le  parti  anglais  et  le  parU  fran- 
cais.  Ce  denrier  ne  lui  inspirait  que  de 
taibles  craintes,  le  gouvemement  de  la 
restauration  appuyant  d*c»dlnair6  la 
politique  eenerale  de  Talliance;  quanC 
a  rAutricne ,  eUe  ne  pouvait  que  s^ei" 
iacer  entierement  dans  cette  question , 
apres  avoir  offert  h  la  Turquie  de  Fai- 
der  h  etouffer  Tinsurrection.  II  y  avait 
done  en  Grdce  une  lutte  diplomatique 
qui  dominait  la  lutte  de  fait,  et  dont 
les  efforts  tendaient  a  desorganiser  les 
elements  d'ordre  et  de  force  qu'une 
intervention  iranche  et  desinteressee 
aurait  nu  feconder  sur  cette  terre  clas- 
sique  de  patriotisme ,  de  genie  et  de 
civrfisation.  La  sympathie  des  peuples 
de  TEurope  chretienne ,  de  ceux  sur- 
tout  qui ,  dans  la  cause  des  Hellenes , 
appuj^aient  un  principe  oppose  aux 
pnncipes  du  congres  die  Verone ,  avait 
accoutume  les  Grecs  k  Y'ldie  oue  la  so- 
lution de  leurs  debats  ne  viendrait  que 
du  dehors ;  et ,  comme  leur  resistance 
s^appuvait  principalemetit  sur  leur  ma- 
rine, il  etait  naturel  qu*ils  tournassent 
leurs  vocux  du  c6te  de  I'Angleterre. 
En  1825,  les  primats  de  la  Moree  et 
des  ties,  le  prince  de  Malna  et  les 
membres  les  plus  distingues  du  clerge 
se  reunirent  pour  placer  rexistence  po- 
litique de  la  Grece  sous  la  protection 
exclusive  de  la  Grande-Bretagne ,  et  its 
envoyerent,  a  cet  effet,  une  deputa- 
tion en  Anjgleterre ,  avec  une  dedara- 
tion  appelee  Acte  de  protection ,  et  la 
demande  du  prince  Leopold  de  Saxe- 
Coboure  comme  souveram  de  la  Grece. 
On  declina  cette  offre,  qui  etait  plus 
hostile  au  sultan  que  rerection  des 
trois  principautes  proposee  par  la  Rus- 
sie ,  et  parce  que  cette  derniere  puis- 
sance ,  appuyee  de  la  France ,  n^aurait 
pas  manque  de  s'y  opposer. 
Le  desir  exprime  par  les  primats  do 


•  •  • 


•  •  a 


•  •  •• 

•••  ••• 

•  •  •  •         •  • 


•  -• 


•   a.   •   • 
•   -   » 


•   •  •  •  • 

•• • •  *•• * 


•  ••  • 
*   •  •  • 


RUSSI£. 


601 


Yok  la  Grte  fourero^  par  un  prince 
losiais  proavait  Ji  la  Russie  que  son 
iQiIuenoe  6tait  pr^  de  suocomber ;  elle 
eot  reooars,  pour  parer  ce  coup,  aux 
ressoaroes  de  sa  diplomatie  si  habile 
et  si  d^i^.  Le  protocole  sign^  a  Saint* 
P^tersbour^  en  fivher  1826  amena  le 
traits  de  juiiiet  1827 ,  entre  la  Russie « 
la  France  et  FAngleterre.  Pour  moo- 
trer  oombien  les  suites  de  ce  traits 
tromperent  les  provisions  du  cabinet 
britaonique  y  nous  citerons  le  Port- 
folio. 

« Le  fameux  traits  du  6  juillet  ac- 
oorda  k  la  Russie  de  si  formes  avan- 
Uges,  gu'on  pent  dire  qu'il  a  presque 
aooompTi  tons  ses  projets  h  T^ard  de 
la  Grm.  II  fonna  une  serie  de  coni- 
binaisons  pour  en  ouvrir  une  toute 
nottTelle.  Jusqu*^  oette  Opoque ,  quel- 
que  habtles,  beureuses  et  etendues 
^'eossent  6t6  les  intrigues  de  la  Rus- 
sie, oette  puissance  n*agissait  cepen- 
dant  que  dans  son  caractere  individuel , 
et  arait  coustaminent  a  se  premunir 
contre  les  chances  qui ,  d'un  moment 
i  Taatre ,  pouvaient  faire  dchouer  tous 
ses  jrians,  savoir :  I'union  de  la  France 
et  ne  TAngleterre  contre  elle ,  ou ,  ce 
qui  ^it  encore  plus  h  craindre ,  le 
rapproeheooent  de  TAngleterre  et  de 
la  Turqirie.  Par  le  traite  du  6  juillet, 
la  Rossje  se  vit  delivr^  de  ses  dan- 
gers, la  Turquie  fut  priv^  de  tout  se- 
cours  possible  de  la  part  des  puissances 
europeennes ;  TEurope  (ut  mise  en  op- 
position, pour  ainsi  dire,  avec  la  Tur- 
quie, et  hi  dir6tient0  avec  Tislamisme; 
enCnTinfluence  morale,  et,  par  suite, 
les  armes  de  TAngleterre  et  de  la 
France  furent  mises  a  la  disposition 
^  la  Russie...  Cette  puissance,  en 
montrant  qu*elle  avait  un  moyen  de 
^^oercition  a  r^ard  de  la  Turguie ,  et 
^annoncant  qu*elle  Texercerait  m^me 
^te  seafe ,  amena  T An^leterre  a  pren- 
dre port  h  ce  traite,  et  a  donner  ainsi 
j  sa  politique  un  point  d^appui  assez 
Krme  pour  prendre  a  loisir  tous  ses 
'vantages.  • 

I^  catastrophe  de  Navarin ,  la  mort 
l^rematuree  de  Canning ,  et  les  embar- 
fu  qai  assaillirent  le  cabinet  britan- 
Dfque,  embrouilldreot  les  n6gociations 


au  jirofit  de  la  Bmak »  qui  se  hkia  de 
vider  ses  griefs  partieuhers  contre  la 
Porte,  tandis  que  le  traits  de  juillet 
liait  et  TAngleterre  et  la  France. 

G'est  sous  Tempire  de  Tinfluenoe 
russe  qu*eut  lieu ,  en  Gr^ ,  la  nomi- 
nation de  Capo-d'Istria  k  la  prteidence. 
Get  homme  d'Etat  quitta  Geneve  en 
1827  poor  se  rendre  k  Saint-POters- 
bourg,ou,  apr^  s'Otre  affranchi  du 
service  russe ,  il  se  rendit  k  Londres 
et  k  Paris ;  ce  qui  8enri)lait  annoncer 
qu*il  prendrait  plutot  conseil  des  exi- 
gences politiques  des  puissances  signa- 
taires  que  de  I'Otat  du  nays  qu'il  etait 
anj)el6  a  administrer.  IJ  ddbarqua  en 
Grece  au  commencement  de  1828. 

«  Le  pays  Otait  tombe  dans  un  Otat 
oomplet  d  anarchie.  Le  peuple  mourait 
de  faim ;  la  ^erre  civile  desolait  Nau- 
plie;  rinterieur  Otait  infests  par  des 
brigands ,  et  les  eaux  de  la  Gr^e  ^taient 
couvertes  de  pirates.  Les  %yptiens 
6taient  en  possession  des  forteresses, 
et  le  president  n*avait  aucune  force  re- 
guliere  sous  son  commandement.  » 

A  Tarriv^  de  Gapo-d'Istria ,  Tordre 
s'^tablit  comme  par  enchantement ; 
mais  cet  accord  et  cette  soumission 
n^etaient  aue  Texpression  de  Tespoir 
qui  accueiilepartout  inauguration  des 
pouvoirs,  et  qui  fait  place  k  la  m^- 
nance  et  k  la  haine,  non  par  Tincons- 
tance  des  ^ouvem^s ,  mais  parce  que 
la  reality  dement  trop  souvent  tout  ce 
qu'on  avait  esp^r^. 

On  ne  fut  pas  longtemps  sans  recon-. 
naftre  dans  quel  esprit  il  comptait 
agir.  «  II  dit  a  la  premiere  deputation 
qui  le  saluait  a  bord  du  Warspite  : 
Sayez  sur  vos  gardes  vis-d-vis  des 
maltres  de  la  maison,  Lorsqu'il  visita 
Tamiral  Miaulis  k  bord  de  sa  fregate 
Hellas,  il  lui  dit,  en  le  prenant  a  part : 
fai  merveiUeusemerU  Hri  parti  des 
simpletons  de  Londres  et  de  Paris. 
Cest  vers  le  Nord  que  nous  devons 
tourner  nos  regards;  nos  amis  ne 
sont  que  Id,  Cest  de  la  part  dujetine 
homme  ( and  too  vsoO )  que  nous  pouvons . 
et  devons  attendre  tout  ce  qtd  peut 
nous  enrichir  et  nous  fionorer,  Bien- 
tot  apres,  le  conseil  l^gislatif  fut  rem- 
plac^  par  le  Panhellenium ,  conseil 


L*UNIVERS. 


fiompos^  de  vingt^sept  membrM 
sis  par  le  president, -et  asaooi^  k  la  res- 
poosabfliw  de  son  administratkni  Jut- 
qu'k  la  v6union  d'un  oangrte  national. 
Pour^kniner  les  liberty  munidpales, 
il  aboHt  le  aysttoe  des  Elections  po- 
-puiaires,  et  nomma  des  fitMeU  pro- 
Tinciaux ,  des  juges  de  pais  «t  des  d^ 
mogerontes. 

L'arriv^  d'on  ocnrps  francs  en 
Moree  pour  presser  r^?acaation  du 
pays  par  les  fifg^ptiens ,  et  les  conH^- 
rences  des  amoassadeurs  des  trois 
ours  protectrioes,  r^mis  k  Poros  en 
1 8S8 ,  d^toumi^eiit  I'attention  pufoli- 
que  des  affoires  d'organisation  int^ 
rieure.  Le  r^ultat  de  ces  eoof^renees 
fiit  de  combiner  en  Gr^  les  ti6ments 
du  ponvoir  repr^ntatif ,  qui  ressor- 
tait  des  aneiennes  institntions,  avec  le 
princrpe  d*un  pouvoir  supreme  hM- 
ditaire.  Capo-dlstria  essaya  de  para- 
lyser line  mesure  qui ,  en  subordon- 
nant  son  autorit^,  devaft  porter  un 
coup  fetal  k  I'influence  russe.  Le  oomte 
Bulgari  toivit  un  mtooire  sur  I'tot 
de  la  Grtee,  et  ce  document,  en?(w6 
k  P^ersbourg  par  le  pr^ident,  tut 
fmm^diatement  transmis  an  prince  de 
Lieren  pour  servir  d'annexe  au  pro- 
tocole  de  la  conf(^rence.  Ce  m^moire , 
toit  avec  une  grande  babilet^ ,  pr^ 
sente  les  primats  comme  ne  poss6aant 
ni  les  vertus  ni  les  talents  sur  lesqueh 
des  soci^t^  bien  organist  puissent 
reposer.  «  Ce  serait  une  illusion  bien 
strange ,  y  esMl  dit ,  de  penser  serieu- 
sement  k  organiser  en  Grece  un  gou- 
▼ernement  quelconoue  sur  des  prin- 
cipes  constitutionneis. 

«  Les  sacrifices  d^^  faits  par  les 
puissances  leur  donnent  le  droit  in- 
oontestable  d'exercer  une  interTention 
active  sur  la  forme  du  gouvernement 
en  Gr^e ,  et  d*en  exclure  tout  principe 
qui  parattrait  incompatible  avec  la 
r6elle  tendance  sociale  des  Grecs  et 
avec  le  repos  de  I'Europe. 

« II  est  nnportant  que  les  trois  cours 
s'aocordent,  sans  d6iai,  sur  la  forme 
du  jgouvememcnt  et  le  mode  d'organi- 
sation  k  introdnire  en  Grece.  Toutes 
les  autres  questions ,  mtoe  celles  de 
Itmites,  de  tribut,  etc.,  ne  peuvent 


1101 


<0ti6  coMkMries  ^e  ooBSine  oompl^ 
lement  seoondaires,  et  sobordona^ 
k  la  forme  du  gouvernement. 
«  £a  tairtant  de  la  Grtoles^Mments 
peuvent  trouUer  la  sddM,  les 
rois  oowrs  ne  sauraient  ne  pas  reodre 
farrangement  ^ul  va  rteulter  du  traits 
de  jumet  partie  intrants  des  ades 
de  1614 ,  1815  et  1818,  qui  ont  a68ur6 
la  IranciuiHit^  de  TEurope.  Ce  a^st 
^'ainsi  que  les  puiasanees  vont  frap- 
|>er  au  occur  les  dtoagogues  de  toQs 
les  pays ,  en  prouvant  qu^ucune  r6?o- 
iotionne  saurait  avoir  lieu,  sans  6tre 
aussit6t  6cr3s6e  par  les  forces  r^enies 
des  souverains  alli^ ;  et  que ,  lors<|fie 
m^me  certaines  r^volntioBS  seraient 
rafsonnables  et  possibles ,  elles  trou- 
veraient  toujours  une  barri^re  insar- 
montable  dans  Tactton  combing  des 
eouronnes ,  et  dans  leur  volenti  d^- 
d^  ou  de  les  d^truire  on  de  les  faire 
toumer  k  Tavantage  de  fordre  social. » 
Le  r6sultat  des  efforts  deCapo-d'Is- 
Ina  fut  d'annuler  le  voeu  du  parti  an* 
glais ,  en  emp^chant  indirectement  le 
prince  L^opoul  d'accepter  la  souvcral- 
net6  de  la  Gr^ :  il  eut  Tadresse  de 
prtedter  oomme  des  anardiistes  les 
primats  qui  invognaieirt  les  premiers 
la  forme  monarcnique.  Tout  ^it  eo 
Grhct  confusion  et  servilisme,  lors- 

2u*6clata  la  revolution  de  juillet.  Capo* 
'Istria ,  k  cette  nouvelle ,  s'toia  ini- 
m^me  que  son  beure  6tait  venue.  La 
Russie,  appuy^  par  la  France  k  la 
conference  de  Londres,  se  trouva  a 
son  tour  isol6e;  mais ,  toujours  babile 
k  tirer  parti  des  circoustances  en  ap- 
parence  les  plus  d^avorables ,  elle  oom- 
prit  que  I^uiion  moroentanee  des  deux 
cours  netiendraitquefaiblcment  centre 

la  rivalite  des  int^rto;  et,  tand^ 
qu'elle  contenait  la  jenne  royaut^^  re- 
volutionnaire  par  la  menace  d'une 
coalition  europ^enne,  elle  alamiait 
TAngleterre  sur  les  r^ultats  probaWes 
de  remancipation  fran^ise.  L^avene- 
ment  de  lord  Grey  au  ministirei  la 
question  de  rdforme ,  cdle  du  cathoii- 
dsme  en  Irlande ,  la  taxe  des  pauvrcs 
et  le  poids  de  la  dctte  nationale ,  teis 
sont ,  k  rteard  de  la  Grande-Bretagne, 
les  auxiliaircs  de  la  politique  russe. 


mvssiE. 


Qvant  i  te  FffBOM^  les  tondinoes  oMh 
Danii^aes4eaoa  eouverneaient,  prt* 
wets  du  fffinotpe  it  ia  I^timit6,  le 
d^ir  du  ipopos  dans  les  masses  en  op* 
positJoa  avec  ks  esigeiioes  logiqoes 
des  parli8,«n  ub  mot,  tous  Ics  am* 
barras  inseparables  d'te  g^nd  cIimh 
genM^t  dans  un  ^t  aussi  puissant., 
tels  sent  les  gagts  sinaii  de1)on  voih 
loir,  da  moitis  da  netftraljt6  fbro^ 
qu'eye  prtenta  ii  la  petitiqiie.  Nous 
alkma  voir  au*en  d^t  de  m  sagadtd 
dii  prinoe  de  TsU^and,  la  Russia 
n^en  poursuivit  pas  nioins  an  Grtoa 
roMivra  qa^Ue  avak  si  bian  eonn 


Le  prdsidanA ,  dans  son  projet  a?oo6 
de  rendn  la  Gireoe  d^pendante  de  la 
Rnasie,  6tafatit  un  systtoe  rigoureux 
de  donanes ,  at  ^tendit  si  loin  les  droite 
da  fiac,  qu'ti  leiiait^  poor  ainsi  dire, 
dans  sa  main  la  fortune  des  particu* 
Hers.  Pour  lier  ensemble  les  diTerses 
branches  de  son  admtaistration,  il 
er6a  an  agrst^sse  de  l^islation  si  oom- 
pti^u^  et  si  oontraire  aax  id^es  qui 
avaieat  oours  dans  le  psys,  que  ses 
lois ,  loia  de  pr^venir  les  abus ,  aem- 
blaient  faites  pour  rendre  insolobles 
ks  questbos  les  plus  simples ,  oa  plo- 
tfit  pour  awttre  a  la  discretion  da  poa« 
voir  eidcatif  la  liberty  des  indivHlus 
at  I'excKioe  du  droit  de  propriety 
CooMne  totttes  les  mesures  de  rarbi- 
tiaire  s'sppellent  et  s'eachatnent,  il 
lui  &]lut  entraver  la  presse  et  jpm6- 
vaAa  k  la  fois  les  patriotes  et  las  par- 
tisans de  rAngleserre.  II  n^est  pas 
doutaoK  quek  rerolte  de  Maina ,  d'Hy- 
dra  at  des  CycMes  !ut  excite  oar  les 
agmts  anglais.  Us  bidmaient  naolo- 
mant  radministration  du  pr^ident ,  at 
sendrialant  devoir  amyer  toute  oia- 
nifestation  conlre  Tintloenee  i^ussa. 
En  prdmee  de  oe  eonflit ,  le  pays  de- 
noaada  la  r^anion  d'oae  assenbKena- 
tionale:  Opo-d'istria  la  convoqua 
pear  le  16  oetobre;  an  mdme  temps  il 
travailta  h  s'assorer  la  roa^orit^  par  de 
Booiralles  Sections ;  et ,  appuy^  d'ail- 
leors  par  las  forses  de  la  eonf^renee^ 
il  envo^a  4es  ovdRS  seersts  a  Paros 
poor  abe  aroier  la  marine  natioaale , 
dans  le  iat  d*afttaqaer  las  iles.  Lors* 


que  les  insovcds  as  ioittit  eaqaorte  da 
la  fr^te  fielbs ,  du  reite  de  la  onurina 
at  de  Pares ,  Taroiral  nisse,  qui  eom- 
mandait  par  anciemiele  la  flone  aliite, 
ae  rendit  k  Paros  avec  soa  esoadte  et 
une  fr^figate  anglaise  pour  renforcer 
raotoril^  da  president.  On  fit  ooorir 
le  brutt  ott'oB  o'emploierait  que  das 
moyens  oe  persuasion;  mais,  pen- 
dant que  les  commandants  anglais  el 
fran^tt  ^taient  alks  k  Nauplie  pour 
r^ler  leur  conduite  ult^eure  sur  dit 
nouveiies  iostmetions,  les  Russes  at* 
taqu^rent  les  iarecs.  Miaulis,  k  Tap* 
nrodM  des  ebaloupes  russes,  fit  sau- 
ter  sa  frigate.  Le  pr^ident  annoa^ 
par  des  proclamations  uue  les  oom- 
maodaats  des  trois  escadres  s'^taieut 
mis  k  la  poursuite  des  vaissaaux  dea 
insar(|6s ;  ainsi,  tandis  que  le  r^ident 
anglais  avait  encoorag^  la  revolte,  il 
aj^issait  coalarm^meBt  aux  instioic- 
tions  de  la  conf(6renoe,  c'est-^-dire, 
bostilement  contre  ses  propres  pcin- 
cipes.  II  est  difficile  de  pen^trer  le  mo- 
til  d-une  telle  conduite.  Le  but  da 
TAngleterre  dtak-ii  untquement  d*em- 
p^er  rorganisation  de  ia  Gr^  sous 
un  pr^idaiA  russa,  ou ,  dans  la  crainta 
d^une  attianee  entre  la  Franoe  ^  la 
Russie,  se  trouvait-elle .  forcee  d'ap* 
payer  des  mesures  que  la  communaut^ 
d§  vues  de  ces  deux  puissdmoes  ne  lui 
permettait  pas  de  repousser  saas  ae- 
tomber  dans  le  m^me  isolement  ou 
etie  se  trouvatt  avaat  la  r^olution  da 
juillet?  Le  professeur  Thiersch  est 
d'avis  que  le  repr^entant  de  TAn- 

Sletarre  avait  n^lig^  les  int^dta 
e  sa  nation  pour  servir  eeux  d*un 
parti ,  qu'il  ^tait  enfin  un  reprtentant 
des  torys  sous  un  ministers  whig* 
Quoi  qu  il  en  soit^  il  en  resultait  pour 
la  Graade-Bratagne  una  deeonaia^sa* 
lion  r^lle. 

LeS'Garecs,  voyant  quails  6taientca- 
lomaies  auprds  de  la  conference,  et 
que  Gapo^'Istria ,  en  denaturaot  leurs 
rMamatioBS  at  leurs  griefs ,  a^ai  t  Tart 
de  printer  aux  oours  protaotriees  et 
au  public  eorop^n  son  administratioa 
oomme  r^poodant  aux  cRiganees  das 
temps ,  et  comoie  n^^tant  eembattue 
que  par  des  artisans  de  d^rdre,  r^ 


«04 


L'UmiVERS. 


solurent  d*^rter  a  tout  prix  Tobstacle 
qui  6'opposait  h  leur  r^^n^ration.  II 
paratt  qu*un  article  in8^r6  dans  la 
Courrier  de  Londres ,  et  dans  leguel 
on  censurait  ^ergiquement  le  sjstema 
arbitraire  et  antinational  du  pr^ideot, 
irrita  les  esprits  au  point  de  leur  mon* 
trer  le  meurtre  de  Capo-d*l8tria  eomme 
le  seul  rero^e  a  une  position  deses- 
p^r6e.  Quelques  enthousiastes ,  k  la 
wte  desquels  ^it  Mauro*Micball, 
tu^rent  le  pr^ident  au  milieu  de  ses 
gardes ;  et ,  d^daignant  de  fair,  ils  pa* 
rurent  satisfaits  d'avoir  firapp^  la  ty« 
rannie  au  coeur.  Dans  les  temps  an- 
tiques, on  leur  eAt  ^lev6  des  statues, 
et  les  femines  eussent  honors  leur 
d^vouementcomme  celui  d'Harmodius 
et  d'Aristogiton ;  mais  la  diplomatie 
moderne  redoute  et  condamne  les  actes 
d'energie  individuelle ;  elle  a  besoin, 
pour  vivre  elle-mtoe,  de  discipliner 
)usqu*an  m^pris  de  la  mort. 

«  George  Mauro-Michali ,  ouoiqu'il 
ne  pdt  me  coropte  parrai  les  nomroes 
les  plus  influents  de  la  Gr6oe,  se  trou- 
▼ait  n^nmoins  au  premier  rang  parmi 
les  Grecs ,  eomme  le  repr^entant  d'une 
de  leurs  families  indigenes  les  plus  dis- 
tioguto.  II  ne  s*etait  jamais  m^l^  d*in- 
Irigues  politiques ,  mais  il  6tait  oonnu 
par  sa  bravoure  sur  les  champs  de  ba- 
taille ,  par  FamabiJit^  de  ses  disposi- 
tions personnelles  et  par  une  ^l^anoe 
remarquable  d'esprit  et  de  corps.  Ce 
fbt  son  d^vouement  patriotiaue  qui  le 
poussa  h  son  action;  ce  fut  (a  simpli- 
city de  son  esprit  qui  Tempteha  d*uti- 
liser  la  chute  de  Capo-d*Istria  et  d*or- 
ganiser  un  parti. 

ftApr^  qu'on  se  fut  empar^  de 
Mauro-Michali ,  et  qu'Augustin  Capo- 
d'Istria  cut  sacc^6  k  son  fr^,  le 
sort  du  premier  parut  fix6.  Enferm6 
dans  un  des  forts  de  Nauplie ,  sous  la 
garde  de  toutes  les  forces  militaires  du 
gouvernement  Capo-d^Istria  et  du  ca- 
non des  flottes  alliees ,  il  ne  serablait 
▼  avoir  aucune  chance  pour  que  Mauro- 
Michali  pdt  ^tre  d^livT^  par  des  mou- 
vements  politiques  quelconques,  ou 
prot^6  par  les  sympathies  du  peuple 
grec.  Gependant  le  gouvernement  crai- 
gnit  de  conGer  son  proces  k  des  tribu- 


naux  ordinaires*  On  oonfoqua  une 
cour  marttale:  un  Anglais,  M.  Mas- 
son,  se  pr^Dta  devant  elle  eomme 
ddfenseur  de  Taccuse ;  et  oe  ne  fbt  pas 
sans  de  grandes  difficult^  qu'pn  y  ob- 
tint  une  oondamnation  capitale.  Le 
jour  de  I'extoition  vivra  longtemps 
dans  le  souvenir  de  toute  la  Gr^ce. 
Mauro-Michali  fut  fusiil^  devant  les 
reroparts  de  Nauplie,  odi  il  parla  il  la 
foule  assemble,  II  ne  Tentretint  ni  de 
lui-mdme  ni  de  son  sort ,  mais  de  son 
pays,  de  ses  gric»&,  de  ses  p(6rils;  et 
ses  expressions  si  vraies  touchaient 
tellement  le  eoeur  m^me  de  ses  enne- 
mis,  que,  lorsgu*il  tomba,  ramiral 
Ricord ,  qui  dirigeait  i'extoition ,  ou- 
bliant  son  rdle  de  Russe  pour  son  ca- 
ractdre  d^homme,  se  prtopita  vees  le 
cadavre  pour  le  prot^er  contre  les 
insultes  de  la  troupe  servile ,  et  s^^cria : 
Jamais  un  homme  ne  maunU  joius 
giorieusemeni!  y» 

On  serait  tent^  de  eroire  que  Tin* 
fluence  russe  dedina  en  Grrae  apres 
la  chute  de  Capo-d'Istria :  il  n'en  ftit 
rien ;  oe  n'^tait  pas  vainement  one  le 
comte  Nesselrode  avait  annonoe ,  par 
I'organe  du  prince  de  Lieven ,  k  la  con- 
fiirence  de  Londres ,  que  la  foime  du 
gouvernement  ^rec  ^tait  pour  Fempe- 
reur  une  question  vitale.  Le  premier 
protocole,  sous  le  minist^e  ae  la  re- 
forme  et  de  Talliance  anglo-fran^aiae , 
en  £iit  foi :  il  y  est  d^are,  entre  au- 
tres  stipulations : 

a  Que  le  principe  de  la  coiifi6reiice 
sera  de  continuer  k  prater  apmii  au 
gouvernement  provisoire  6taoli  en 
Grece,  jusqu'li  ce  qu'une  ^poque, 
oomme  celle  de  T^lection  d'un  aou^re- 
rain,  dans  un  temps  fort  lapprocb^, 
eermette  de  fonder  un  gouvetaemeot 
fixe  dans  ce  pays.  Ce  principe  ne 
pourra  que  porter  kus  pesidents  des 
trois  cours ,  les  commandants  de  hmus 
forces  navales  dans  rArcfaipd ,  et  Le 
commandant  des  troupes  tranguns 
en  Moree ,  a  employer  toute  leur  in- 
fluence pour  d^oourager  les  fauteurs 
des  tentatives  de  troubles  et  de  r^ 
voltes.  II  est  done  indispensable  : 

>'  t*"  Que  les  rteidentsoes  trois  oours 
en  Gr^,  et  les  commandants  des 


RUSSIE. 


605 


forees  navales ,  se  concertent  avec  le 
gouvernement  grec  sur  les  meilleurs 
rooycns  d^employer  leur  iDfluence  pour 
hvtt  cesser  1  6tat  d*insurrection  dans 
Tile  d'Hydra ,  et  de  pr^venir  Textension 
des  troubles  aux  autres  ties  de  la  mer 
tgfe; 

«  T  Qu'en  exi^cutioD  de  eette  tdche , 
Hs  tirent  parti  de  tous  les  moyens  de 
coneiliatioD ,  et  fassent  valoir  toute 
rinfluence  morale  de  leur  autorit^ 
r^nie; 

« Z^  Qu'ils  conviennent  des  mesares 
Deeessaires  pour  pr^venir  le  renouvel- 
lement  de  la  piraterie...  Ge  que  la 
oonfi^oce  ne  peut  trop  recommander 
aux  r6sidents  des  trois  cours ,  et  k 
leurs  ofBders  de  terre  et  de  mer,  c'est 
de  maiatenir  invariablement  une  par- 
faite  unit^  dans  leur  langage  et  aans 
leurs  decisions.  Nulle  separation  de 
raliiance  n*est  admissible  dans  led  af- 
Cures  qui  int^ressent  toutes  les  par- 
ties. Elle  ne  doit ,  en  aucun  cas ,  £tre 
^Doee  ni  avoir  lieu. 

«  Le  principe  fondamental  d^coule 
de  ruDioQ  existant  entre  les  trois  cours. 
L^obsorration  en  est  done  essentielle ; 
et  la  conference  de  Londres  ne  peut 
ft*empCdier  de  rappeler  encore  une 
fois  aux  r<^idents  de  France ,  d' Angle- 
tern  et  de  Russie  en  Grdce,  ainsi 
qu'ata  commandants  de  leurs  forces 
navaka  et  militaires ,  la  n^ssit^  ab- 
soloe  de  s'abstenir  de  toute  action  s^- 
par^,  et  de  faire  r^gner  une  unani- 
miteparfaite  dans  toutes  leurs  decisions 
et  toutes  leurs  mesures.  Sign6 :  Tal- 
leyrand, Palmerston,  Lieven,  Ma- 
tuszevics 

On  Toit  que  ni  la  revolution  de  juil- 
|et  ni  la  r^lorme  n*avaient  rien  change 
a  (attitude  de  la  Russie  dans  la  Gr6ce ; 
et,  comme  le  cabinet  de  P^tersbourg 
avait  iadis  exploit^  T^tat  d'bostilit6 
eatre  FAngleterre  et  la  France  jusqu'^ 
ia  chute  de  Napolton;  comme  depuis* 
li  avait  affaibli  Tinfluence  anglaise 
eo  encfaatnant  k  ses  vues  le  gouverne- 
oient  de  la  restauration ,  de  m^me  en- 
core, et  dans  des  circonstances  toutes 
difiia*entes,  il  trouvait  de  nouvelles 
itssouroes  pour  6veiller  les  appr^hen- 
sioos  et  les  susceptibilit^s  aes  deux 


cours  etonn6es  de  leur  alliance  rtonte , 
et  presque  entratn^es  par  la  seule  force 

de  leur  pass6  5  n*agir  que.  dans  la 

provision  que  les  rapports  de  leur 
mutuelle  btenveillance  pourralent  chan- 
ger d'un  instant  k  Tautre. 

Or,  dans  une  provision  de  cette  na^ 
ture ,  c'etait  k  qui  irait  au-devant  des 
pretentions  de  la  Russie,  moins  en- 
core pour  se  manager  Tappui  de  Tem- 
pereur  que  pour  emp^cher  un  rappro- 
chement exdusif  entre  la  Russie  et  le 
cabinet  rival. 

C'est  ce  qui  expligue  pourquoi  Au- 
gustin  Capo  -  d'lstria  osa  op^rer  en 
Gr^ce  des  changementsdevant  lesquels 
son  fr^re  avait  recuie.  Au  lieu  de  reu- 
nir  Tassembiee  nationale  qui  n'avait 
6t6  que  prorogue,  le  s^nat  assuma  une 
antorite  supreme,  et  cboisit  une  com- 
mission administnitiveVcompos(6ed'Au- 
gustin  Capo-d1stria,!de  Colocotroni  et 
e  Coletti :  Hydra  i^esta  bloqu^e,  et  ie 
resident  anslais  fut  encore  une  fois 
force  d*agir  hostilement  contre  le  parti 
aui  roettait  en  Jui  ses  esperances.  II 
etait  aise  de  piievoir  les  consequences 
d'un  pareil  etat  de  cboses.  Augustio 
fut  eiu  president,  et  les  opposants, 
dont  la  resistance  fut  bientdt  compri- 
mee  par  la  force,  ne  parent  distinguer 
leurs  amis  de  leurs  ennemis. 

Malgre  les  mesures  oonciliatrioes 
proposees  par  sir  Stratford  Canning, 
ambassadeur  britannique  pr^  la  Porte 
ottomane,  et  qui  etait  veiiu  passer 
quelque  temps  k  Nauplie,  Augustin 
Capo-d'Istria  pnblia  un  decret  decla- 
rant Coletti  et  les  deputes  rouraeiiotes, 
c'est-^-dire,  les  chefe  du  parti  anti- 
russe,  coupables  de  haute  trahison, 
et  les  proscrivit  comme  rebelles ,  trat- 
tres  et  gens  mis  bors  la  loi. 

Peu  de  temps  apres,  les  escadres 
des  puissances  allieessaluerentlecomte 
Augustin  Capo-dlstria  president  de  la 
Grece.  Les  protocoles  continuerent  k 
regenter  la  Gr^ce ,  sans  s'occap^  de 
detruire  la  racine  du  mal.  On  apprit 
bientdt  la  nomination  du  prince  Otbon 
de  Bavtere,  choisi  par  la  oonferenee 
pour  essayer  la  couronne  de  la  Grto 
re^eneree.  Les  partis  etaient  sur  le 
pomt  d'en  venir  aux  mains  ^  lorsqu'une 


too 


LTTNITKHS. 


p  ■ 


fi4nte  aa^ise  anrivs  or^  4e8  d^- 
praes  de  ConstantiQople ;  eUe  appor- 
tait  HO  QOttveau  protocokqui  prescri- 
vait  ao  gouvemement  UQ  ^steine 
d'aocommpdeiQeiil  et  de  toioci.  A  cette 
neurelle,  Auffostin  Capo-dlstria,  i^ 
doutant  peut-etre  le  sort  de  son  frire , 
s'emtenjiia  da  nuit  siur  un  brick  ruase , 
et  M  setira  a^eci  sea  partiaaas  lea  jdiM 
oompromis  dans  llle  de  Gorfou. 

Le  protoeole  dont  uoiis  veoons  de 
oerler  aviut  ^  dresa^  en  dehors  dea 
laits  accomplis ,  c'est^-dire ,  dans  la 
supposition  que  les  partis  en  Gr^ 
ae  troiivaient  (Jans  la  m^me  situation 
respective :  les  r^idents  8^  virent 
done  dans  l*obligatioa  de  SMivre  leurs 
instructions  h  la  lettre^  et  de  trayaiU 
ler  h  emp&^her  le  parti  national  qui 
trionphdit  li  ne  pouvoir  proiUer  de 
aes  avantagea;  c'etait  reorganiser  le 
d^rdre.  On  confia  done  au  s6nat  la 
ticbe  dlnstituer  un  nouveau  gouver* 
nement  de  eupq  membres  ^  dont  quatre 
furent  eboisis  dans  le  parti  ruase; 
oette  eombiiiaison  ayant  ^cbou^,  on 
easaya  du  norabre  sept,  niaia  aana 
plus  de  auccte :  alora  lea  residents  con* 
aentirent  k  laisser  pr^domioer  )e  parti 
Qonatitutiono^ ;  mais  oe  r^ltat  fut 
de  nouveau  aniiihile  Mi  moyen  d*una 
disposition  rtelam^  par  la  minorite 
rusae,  M  qui  rendait  n^oeasaire,  pour 
la  validity  de  cbaque  dtoet,  one  vm^^ 
iorit^  de  cinq  voui<  Pendant  ces  tirail* 
lementSi  rien  ne  a'aohevajt;  Tabsenee 
d*iin  gQMvememeHt  reooonu  ouyrait 
un  champ  ilbre  k  toutes  les  intrigues; 
le  service  public  ^tait  ep  spufjTraiBU^; 
on  e(H  dit  que  les  cours  protectric^ 
preoaient  a  ttehe  de  d^montrer^  par 
le  spectacle  de  ce  qui  se  paasait  en 
Grece ,  au'il  oe  pouvait  r^ter  d'une 
insurrection  populaire  que  nis^  et 
anarchic. 

Cokwotroni  m6oontent  guitta  Nau- 
pUe«  mena^t  de  revenir  avec  lea 
Klephtea,  pour  tirer  vengeance  du 
parti  eoBStitutionn^ ,  et  aoutenant 
au'il  en  avait  le  droit ,  puisque  la  coi»> 
nrenoe  e«  avait  nua  nors  la  loi  lea 
raembres  les  plus  influents.  Un  de  sea 
<»u8ins,  Zavellas,  a'cmpara  de  la  ci^ 
tadeUe  de  Patraa. 


«Le  gouvemement  provisoire  en 
appela  au  protoeole  de  mars,  et  de- 
manda  aux  r^idents  de  faire  oocuper 
par  lea  tronpes  de  ralliance  les  forte- 
resses  de  Patras ,  Ck)rinthe  et  NaapHe, 
Jusqu^i  Varriv^  du  roi  Ofton,  ^  la 
disposition  duquel  elles  avaient  d^i 
6Ce  plaetai  par  le  traits  du  7  mai.  Ja- 
inafs  lintervention  de  la  diplomatie 
ne  fiitplus  compl^tement  derisoire: 
le  g^n^l  Gu^^neuc,  commandant  des 
troupes  fran^ises,  marcha,  en  con- 
sequence, sur  Patras,  dont  les  habi- 
tants avaient  invoqu^  la  protection  du 
ministre  hritannique. 

«  A  Tarrivte  du  g^n^ral  firan^,  ii 
ae  trouva  que  les  residents  avaient 
toit  ^  leurs  consuls  h  Patras  de  som* 
mer  Zavellas  d*evacuer  la  fbrteresse, 
maia  de  rinformer  en  mtoe  temps 
que,  s*U  s*y  refusait,  il  n'y  serait  pas 
contraint  de  vive  force.  »  ( V<)ycz 
Thiersch,  tome  I,  page  ISO.)  Zavel- 
las f  sans  s'inqui^ter  de  la  solution  de 
cette  exigence,  commit  toutes  sortes 
de  violences  et  d^exactions  contra  les 
habitants  de  Patraa. 

Cependant  rasseoibl^  natlonale  al- 
iait  se  r^unir;  die  avait  ^d^Iib^er. 
1°  sur  la  ratification  ducboixdn  prince 
Othoo ;  20  sur  la  reconnaissance  da 

({ouvernement  provisoire ,  form^  pr 
es  r^idents ,  et  constitu^  par  le  stot , 
Eoais  d^pourvu  encore  de  sanction  1^ 
sale;  3<»  sur  la  garantie  des  emprunis 
faits  en  Angleterre  avant  qne  Vind^ 
pendanoe  de  laGrdceettt^t^reconnnei 
4*  aur  la  proclamation  d'un  aeted'ani* 
piatie  pour  tous  les  d^lits  politiques. 
Les  r^idents  entravdrent  de  toot  leur 

Souvoir  cette  mesure:  elleaorait  frapp^ 
'impuissance  les  partis  qui  se  seraient 
trouves  oppose  ^  la  manifestation  du 
voeu  national,  Cependant  I'assemblee 
se  r^nit  h  Pronia ;  elle  reconnut  par 
acclamation  le  prince  Othon  poursou- 
verain ,  et  d^igna  M.  Thiersch  pour 
porter  la  ratification  de  ce  diois  a> 
Bavi^.  Le  prince  de  MaTna ,  oubliant 
tous  aes  gnefs,  proposa  le  premier 
une  amnistie  ri^e  qu'on  aaopta  a 
Tunanimite.  L'assembm  proo^  en- 
suite  ^  retablissement  d*une  constitu- 
tion definitive ,  selon  le  vcru  de  la  con- 


!      \ 


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RCSSIE. 


607       ^ 


iieDoe,  etr  pcm  qte  les  di^MMitions 

^ipays  fusMQt  bicB  eoDiMCS  dii  nou* 

vnu sonveraiB.  La  Rnnie,  en  ce  qur 

^itgviadt  la  qncitioii  fisand^e,  avaft 

iomt  a  oe  qse  l»  Grto  ne  s'engage^l 

a  KKiiiie  raatitutiow  covers  la  Grande- 

BRtij^;  noas  empnnitima  la  cita- 

tknsuivaBte  aa  pronSBsem'  Thieraeh , 

poor  moalnsr  oocile  fbt  Taction  de  la 

poTitifBt  da  cairiiiet  imperial  dans  cea 

em^onctiires  si  d^cates;  et  si  eette 

^e  de  Botre  wMt  pandl  se  ratta- 

dier  fhu  partieoti^enieDt  I  rhistoirB 

deb  Grdee,  ette  n'en  est  pas  moins 

id  a  sa  place,  eoniine  cxpliquant  k 

*|Efpnid6r»ce  de  ka  Russie  dans  un 

fKjfB  ^'elle  avait  pepar^  de  longue 

■aiQ  a  nne  separation  Tiolente  d'aveo 

k  Tuimie ,  et  qu'elle  a'efforce  encore 

at^ottra'hai  de  ramener  aoos  son  pro* 

toefiorat  inuqidiat,  en  emp^ant  \e 

diteio^pemeiit  de  aes  institutions,  de 

SM  atbanees  et  de'sa  (nroep^it^ ,  sous 

toutees^eoe  degouTemement  qui  V^ 

loigDeraitd'ane  d^pendance  absolue. 

«  Panni  les  <qiposants  dans  Fassem* 

Me,  en  voyait  au  premier  rang  Pami* 

ral  Stranger  (Rieord).  U  avuit,  au  so 

de  toot  le  moode ,  pns  trop  de  part 

aux  afUrss  d'Argoe ,  et  ^ait  trop  Hd 

aYee  le  conte  Aogustin  poor  ne  pas 

louder  eomme  personnels  les  dan- 

CI  qui  mena^aient  la  reputation  et 
intMts  de  son  ann.  £n  n^gocia- 
tear  habile ,  il  oommen^i  par  cherdier 
jes  partisans  dans  les  rangs  de  ses  ad- 
veraaires.  Les  Malnotes ,  et  parmi  euz 
la  ^miUe  des  Mauro-Michahs ,  forent 
Tobjet  de  aes  pr^enances  empress^. 
L'amiral  leor  avait  t^nsoigne  k  diffi6- 
raatca  reprises,  au  temps  de  leur  ad* 
veraite ,  an  int^rft  et  une  bieoTeillance 
qoi  oertes  lui  faisaieot  bonneur.  Comp* 
taot  aor  leur  reconnaissance,  il  essays 
de  gagner  Elie  Itfauro-Michslis,  sans 
i^  laisser  ddcourager  par  radmiration 
que  mani&stait  oe  jeone  homme  pour 
40O  oBcie  Constantin  et  son  cousin 
George,  qui  afaient  tu^  le  president. 
I^  trouvant  peo  accessible  h  ses  a?an«- 
068,11  euToya  son  aide  de  camp  vers 
le  dbti  de  u  famille,  Pierre,  ^ale- 
ment  v^n^r^  par  ses  vertus  et  par  ses 
souffiranees,  et  qui,  avec  les  d^ut^s 


mainotes ,  r^i«feit  aiors  h  Argos .  parmi 
les  autres  membres  de  rassembiee  na- 
tkmale  qui  s'j  rendaient  en  grand  nom- 
bre  de  tons  cot6s.  Le  projet  deramiraf 
etait  de  detacher  les  Mauro-Midialis 
dn  reste  de  i'assemblee,  et  de  leur 
persuader  de  s'en  retonrner  ehez  ecrx , 
ee  qui  aurait  port^  les  repr^sentants 
de  leur  proTince  h  Its  suivre.  Sf  oela 
edt  en  Reo,  la  confiance  des  autres 
depots  se  serait  ^branlee ;  et ,  en  per- 
snadant  aux  uns  de  s'en  alter  et  aur 
aulares  de  ne  pas  venir,  on  esp^rait 
pouvoir  reduire  Passembl^  aux  deux 
tiers  da  nombre  vouki  par  la  loi  pour 
qu'eHe  pnisse  se  constituer.  Depais  le 
temps  de  Catherine  la  Grande ,  dit  le 
messager^  Pierre  Mauro-Mfcbalis ,  nos 
seuTcrains  ont  pris  beaucoop  d'int^r^t 
k  Totre  femille  ,^n  appr^iant  les  ser- 
vices qifelle  a  rendus  k  la  cause  qui 
noDS  est  conraiane ,  et  les  vertus  que 
voos  n'avez  cess6  de  d^ployer  pour  la 
d^ense  et  le  gouremement  de  votre 
pays.  L*eropereor  actnel  est  prit  k  te- 
moicner  qu  il  en  garde  ie  souvenir  par 
des  dons  et  des  bienfaits  proportionn^ 
k  Tos  besoins  et  k  votre  dignity,  si 
▼ous  oonsentez  II  suivre  ses  conseils. 
Ni  fall  ni  le  pdre  de  votre  roi  ne  sont 
d'avis  que  rassembiee  se  r^unisse  k 
present.  lis  constderent  cette  d-mar- 
che eomme  nuisible  aa  bien  de  la  Gr^ 
et  hostile  envers  son  souverain ,  puis- 
qa*ils  voient  que  Fassembl^  est  com- 
poS(6e  de  brouilions,  et  qu'elle  nMnter- 
viendra  dans  les  affaires  de  la  Grdce 
que  pour  y  fomenter  I'esprit  r-volu^ 
nonnatre  et  pour  y  rend  re  impossible 
I'dtabUssement  du  principe  nnonarcbi* 
que.  Les  amis  du  bon  ordre  et  de 
notre  souverain  sont  d^des  k  ne  pas 
tolerer  cette  r^nion  de  dtoagoguea 
et  de  brigands.  Vous  devez  k  votra 
dignity ,  il  votre  pays  et  k  votre  famille 
de  seconder  nos  efforts ,  et  soyez  as- 
sure aa*en  le  faisant  vous  aurez  bien 
m-rite  du  gouvemement  qui  va  s'-ta- 
blir  en  Grace ,  et  que  vous  y  occoperez 
une  des  positions  les  plos  ^ev^.  U 
pria  ensuite  le  prince  de  se  retiiier 
dans  son  pavs,  et  lui  oifrit.  k  oet  ef- 
fet ,  un  brkk  ou  mtoe  la  mgate  de 
Tamiral.  Le  vieoz  pt'inee  r^poudit  qn'fl 


608 


L'UWIVERS. 


ii*avait  jamais  douU  des  sentimeiits 
de  I'empereur  enYers  sa  fomille ;  que 
si  Sa  Majesty  avail  rtommeot  permis 
qu*on  la  per86cuytt,  la  faute  en  etait 
enti^ment  h  ses  agents  en  Grace, 
qui,  6*^tant  tromp&   eux-mtoes, 
avaient  dA  induire  aussi  en  erreur  leur 
souverain  par  rapoort  aux  sentiOMHits 
d*bonimes  n^  et  elev^  dans  Fattache* 
ment  h  son  auguste  famille.  £n  ce 
moment  m^me,  ajouta-t-il,  je  suis 
dispos^g  h  me  conformer  aux  vues  et 
aox  oonseils  de  Sa  Majesty  imp^ale; 
mais  ii  faut  d'abord  que  je  les  appranne 
d*une  maniere  positive.  Certes ,  si  telles 
sont  les  intentions  de  TempNereur  et  du 
roi  de  Bavidre ,  ils  les  exprimeroot  di- 
rectement  et  oliicielleraent  au  gouver- 
nement  grec  qu'iis  ont  reoonnu.  Mais, 
avant  que  cette  conjmunication  ait 
lieu ,  nous  devons  croire  h  une  com- 
munication qui  nous  vient  d*autre  part, 
^  qui  nous  repr^sente  le  roi  de  Ba- 
vi^ra  comme  ne  d^irant  aucunement 
de  nous  imposer  son  lils ,  mais,  au  con- 
traire ,  comme  souhaitant  que  ce  choix  • 
obtienne  Tassentiment  de  notre  pays. 
Get  assentiment  ne  serait  ni  complet. 
ni  valable,  sll  n'^tait  donn^  dans  les' 
formes  voulues  par  la  loi ;  et  oes  formes 
l^ales  n'existent  en  Gr^  oue  dans 
Tassembl^  qui  va  se  r^nir.  Nous  ne 
poQvons  done  pas  autrement  recon- 
naltre  notre  souverain,  et  nous  nous 
sommes  promis  de  faire  de  cette  re- 
connaissance le  premier  c^jet  de  nos 
travaux  l^slatin...  Le  jour  suivant, 
le  messa£er  ayant  it6  introduit  dans 
une  de  Teurs  r^nions,  il  y  d^clara 
qu*il  avait  €t6  dans  Perreur  h  leur 
egard ,  et  quil  ne  pouvait  plus  douter 
que  tant  de  citoyens  recommandables 
ne  fussent  intmss^  au  maintien  du 
bon  ordre.  On  lui  donna  I'assurance 
que  les  lois  et  les  institutions  pr^pa- 
reesseraient  d^cidtoent  monarchiques, 
et  qu^elles  ne  contiendraient  rien  de  r& 
volutionnaire  et  de  dangereux. » 

Cette  tentative  de  Y*amiral  russe 
ayant  manau^,  les  r^idents  parvin- 
rent  a  introduire  des  dissensions  entre 
les  d^put^  constitutionndset  les  mem- 
bres  tes  plus  influents  du  parti  anglais. 
Cette  scission  ne  flt  qu*augmenter  la 


coofusion  et  multiplier  les  eBibarras 

qu'on  pr^parait  k  la  regenee.  II  fiit  d6- 

cide  oue  la  reconnaissaDoe  des  somaMi 

dues  a  FAiigleterre  restenit  endehon 

des  arrangements  finaneiers  de  la  ooo- 

fi^rence ,  et  le  rte'deut  britamiique  de- 

vint  ainsi  complice  d'une  ummt  qui 

imposait  a  son  pays  un  saorifioe  d'en- 

viron  soixante  et  quinze  millioos.  L'ai- 

sembl^  nattonale  essaya  en  vain  d*ar- 

r^ter  le  s^nat  dans  reiercice  illegal 

d'utt  pouToir  reoonnu  par  les  ooun 

protectrioes ;  die  fut  disperse  violem- 

ment  par  la  force  armee,  et  Colooih 

troni,  I'ex^teur  du  parti  nu8e,s'a< 

vanqa  a  la  t^te  de  ses  bandes.  l^e  Mf 

k  la  nouvelle  de.  la  procbaine  arriTM 

du  prince  Othon ,  se  hita  de  noffloier 

un  gouvasiement  militaire,  compote 

deColoootroni,  Zavellas,  etdecinq  au- 

tres  capitanis.  Cest  ^leioue  temvi 

apr^  qu'un  r^meicii  de  a  brigade 

fran^ise ,  aprte  avdir'6ehapp^aiu  en- 

buscades  qu  on  lui  avait  tenduei  Ion- 

qu'il  traversait  la  Mor^  poor  ooaper 

ArgoSt  fut  ddoyalement  attaqu^dans 

cette  villcOn  peut  dire  que  les  intrigoes 

desj)artis^u8se  et  anglais,  en  frappaot 

la  Gr^^dans  son  existence  intiow, 

c^est-Miradans  ses  institutions,  d*(Hh 

pas  fait  moins  de  mal  k  ce  pays  f^ 

ne  lui  en  a  cause  rhostilit6d6darfedes 

Turcs.  Cest  au  milieu  des  violcnott 

excrete  par  les  soldats  de  Coloootrott 

que  le  pnnce  Othon  arriva  en  Gre» 

tine  flotte  de  cinquante-cinq  Ultiniena 

de  transport,  escorts  par  '*  TJ*" 

seaux  de  guerre  des  puissances  aliKtf) 

amenait  le  jeune  souverain,  une^ 

gence  d'hommes  d'fetat  hautcment  ^ 

timds  en  AUemagne ,  trois  mUle  sokja^ 

bavarois ,  et  des  ressources  P^"'*!'? 

sufQsantes  pour  les  premiers  bwoios- 

Le  spectade  sur  le  rivage  P»«^ 

un  contraste  frappant  avec  eette  uoidf 

d'installation,  C^tait  «?«>"15J! 

paysans  aocourus  sur  le  lieu  da  ^^ 

quement,  b6ros  obscurs  de  tani « 

luttes  ^trang^res  et  intestioes,  dom 

Text^ieur  miserable  semblait  aooon- 

cer  k  V6\u  des  cours  protectncci  wuw 

r^tendue  de  la  tflcbe  qji'il  nVait  ^ 

craint  d'aocepter  (f(6vner  ^W»)-     . 

La  r^elrtS,  composA?  du  coffW 


RUSSIE. 


600 


d'Annansperc,  du  g^eral  Heydeck, 
etdeHM.  Maurer  et  d'Abei,  devait 
tntoorar  le  prince  Othon  de  ses  con- 
seiis,  et  j^ouverner  en  son  nom  jusqu*li 
sa  majority.  On  proclama  une  amnis- 
tie  g^erale  pour  tous  les  ddlits  politi- 
ques.  La  nation  reoonnut  Tautorit^  de 
la  regence  et  prto  serment  de  fid^it^ 
aa  rot  Othon.  Trois  coura  de  justice 
furent  instituees  k  Nauplie ,  h  Misso- 
longhi  et  h  Thebes.  On  restreignit 
Tusage  des  armes  k  feu ;  on  cr^  une 
administration ,  une  arm^  et  une  ma- 
rine; descomit^  furent  institu^  pour 
aamioer  les  a£faires  de  I'fglise  et  les 
besoins  de  Tinstruction  pnblique;  et, 
pour  appuyer  les  mesures  de  police, 
on  cr^  un  corps  de  ^endarmene.  Les 

g retentions  des  anciens  partis  sem- 
iaient  efface ;  il  n'^it  plus  ques- 
tion dq  s^oat;  et,  pendant  qnelques 
iDois,  r^tablissement  de  I'ordre  amena 
ies  plus  heureux  rdsultats.  Mais  cette 
harmonic  ne  fut  pas  de  longue  dur^ : 
ie  d^raiement  des  palicares  et  le 
refus  inopportun  d'aroir  6gard  aox  pre- 
tentions exa^erees  des  capitants ,  exci* 
terent  parmi  eux  un  vif  m^ntente- 
ment.  Le  g^n^al  Church  se  fit  Tavocat 
des  reclamants ;  et ,  n'^outant  que  ses 
sympathies  militaires,  11  ne  cacna  pas 
que  ces  mesures  ^taient  dtopprouv^es 
par  le  comte  d'Armansperg,  qui  avait 
M  Met  sur  ce  point  a  la  determina- 
tion de  ses  colleges.  C'6tait  pubiier 
^'il  I  avait  scission  dans  le  conseil , 
et  raviver  les  lattes  intestines.  Le  sys- 
ttme  introduit  dans  la  perception  des 
impdts  oar  Maurocordato,  nomm^  mi- 
nistre  des  finances ,  et  (]uelques  autres 
reglements  sur  rexploitation  par  des 
particuliers  desterres  appartenant  a  la 
oonronne ,  blessaient  le  droit  local  et 
entravaient  sensiblement  Industrie  et 
I'agriculture :  cependant  les  bienfaits 
de  la  nouvelle  administration  compen- 
saient  largement  ses  fautes ;  et ,  ^  tout 
prendre,  la  Gr^  ^tait  dans  un  ^tat 
prospcre. 

Ce  d^eloppement  de  ressources, 
oas^surungouvemementind^pendant, 
oe  pouvait  aue  contrarier  les  voes  de 
H  Russie.  L  empereur  Nicolas  nomnoa 
poor  son  envoye  aupres  du  roi  Othon 

39*  Lh^aison.  CRussis.^  t.  ii. 


M.  Catacazi.  Get  agent  eut  ordre  de 
se  rendre  d'abord  k  Munich ,  afin  de 
ne  parattre  sur  le  th^tre  de  sa  mis- 
sion qu*arme  de  la  double  influence  de 
la  Russie  et  de  la  Bavi^e.  II  s*agissait 
d'alarmer  le  roi  aHemand  sur  la  ten- 
dance revolutionnaire  de  la  r6genoe , 
tdche  qui  n*etait  que  trop  facile.  M.  Ca- 
tacazi ,  k  son  arrive  en  Grece ,  sus- 
cita  tant  d'embarras  aux  quatre  con- 
seillers  bavarois,  qu'ils  ^crivirent  k 
P^tersbourg  pour  demands  son  rappel. 
C'est  sur  ces  entrefaites  qu^eut  lieu 
une  mesure  d*une  grande  portee  poli- 
tique. M.  Maurer  convoqua  le  baut 
derg6  a  Nauplie ,  institua  de  son  plein 
assentiment  un  synode  independant, 
et  placa  le  roi  Othop  k  la  t^te  de  T^- 
glise  de  son  royaume  (4  aodt)  (23  juil- 
let  1833). 

Les  Grecs  approuv^rent  formelle- 
ment  un  acte  d*autorit6  en  vertu  duquel 
le  pays  devenait  le  seul  en  Europe  (font 
r£ghse  portait  le  m^me  nom  que  r£tat. 
Ce  n'^tait  pas  sans  raison  que  M.  Ca- 
tacazi ne  voiilut  point  assister  k  la  so- 
lennite  qui  accompagna  Tacte  d'ind^- 
pendance  de  r£giise  grecque.  Nous 
rapporterons  ici  quelques-uns  des  ar- 
ticles de  la  d^laration ,  pour  indiquer 
combien  elle  g^ait  les  projets  de  la 
Russie  k  regard  de  la  Grece. 

Othon ,  par  la  grdce  de  Dieu ,  roi 
de  la  Grece ; 

D'apres  le  vceu  unanime  des  metro- 
politams,  archcT^ques  et  ^vtoies  de 
notre  royaume ,  de  nous  voir  declarer 
rind^pendanoe  de  T^lise  grecque ,  et 
instituer  un  synode  permanent,  nous 
avons  dto^,  de  I'avis  et  avec  I'ap- 
probation  de  nos  ministres ,  et  d^re- 
tons  ce  qui  suit.: 

Art.  1*'.  L'Eglise  orientale,  apos- 
tolique ,  orthodoxe ,  dans  le  royaume 
de  Grece,  en  ne  reconnaissant  pour 
son  chef  spirituel  que  Notre-Seigneur 
et  Sauveur  J^us  -  Christ ,  et  en  n'en- 
visageant  pour  son  sup^rieur,  concer- 
nant  la  direction  et  Tadministration  de 
r£glise ,  qpe  le  roi  de  la  Gr^ce ,  est  libre 
et  independonte  de  tout  autre  pouvoir, 
satis  prejudice  de  I'unite  du  dogroe ,  tel 
qu*il  a  toujours  ete  reconnu  par  toutes 
les  ^glisesorthodoxes  orientales. 

•   16 


6f0 


LTNIVERS. 


Art.  3.  Le  supreme  pouvoir  spiri- 
tuel  repose ,  sous  la  suprematie  da  roi , 
entre  le^  mains  d*un  saint  synode  per- 
manent... (Suivent  plusieurs  articles 
purement  r^glementalres.) 

Art.  8.  Lesermentsuivantserapr^t^ 
par  le  president ,  les  oonseillers  et  les 
assesseurs  du  synode : 

Je  jure  d'etre  fidele  au  roi ,  d*ob^ir 
aux  fois  du  royaame ,  de  m'acquitter 
consciencieusement  des  fonctions  qui 
me  sont  confi^s;  de  makitenir  reli- 
gieusement  les  droits  et  les  liberty  de 
l*£glise  orthodoxe  orientale,  aposto- 
lique,  du  royaume  de  la  Grice ;  de  ?eit- 
ler  h  son  ind^pendance  de  tout  pouvoir 
etraneer,  k  son  bien-^re  et  i  sa  pros- 
p6rite ,  etc. ,  etc. 

A  ores  une  eonspiration  ourdiecontre 
la  regence ,  ou  plutdt  eontre  MM.  Mau- 
rer  et  d^Abel ,  par  Goloeotroni  et  les 
chefs  les  plus  influents  pormi  les 
Klepfates,  on  acquit  la  certitude  que 
M.  catacazi ,  soutenu  par  M.  Dawkins , 
resident  anglais ,  avait  rtosi  k  oppo- 
ser  le  comte  d'Armansperg  k  ses  ool- 
t^ues ;  d^  lots  le  pr^ident  de  la  re- 
gence, eoropromis  par  son  mauvais 
vouloir ,  ou ,  du  moins ,  par  une  oondes- 
cendance  Inoualifiable ,  se  vit  foro6  de 
rediercher  rappui  de  la  Russie.  La 
dtouverte  de  toutes  ces  intrigues 
amena  un  changement  de  ministere 
dans  le  sens  constitutionnel;  mais,  par 
un  sentiment  outr^  de  d^licatesse,  on 
laissa  des  fonctions  importantes  entre 
les  mains  d'hommes  connus  par  leur 
hostility  auxnouvelles  institutions.  On 
d^ida  n^nmoins,  sans  plus  de  d^lai, 
de  procMer  a  la  cr^tion  r^uli^re  et 
syst^mati^  d*un  code  de  lois  et  d'une 
organisation  municipsde.  Cette  deter- 
mination ?alut  au  nouveau  ministere, 
de  la  part  de  M.  Catacazi  et  du  r^l- 
dent  anglais ,  la  qualification  de  r6vo- 
lutionnaire  et  de  r6publicain. 

M.  de  Gasser  avait  ^t^  envoy^  de 

Munich  en  Grdce  avec  Tordre  de  s'en- 

tendre  avec  M.  Catacazi ;  mats ,  ^and 

it  eut  vu  r^t  i^i  des  choses ,  li  in- 

'  forma  son  cabinet  de  toutes  les  intri- 

'^ues  de  Tenvoy^  russe;  il  toivit  m^me 

'*n  sa  oour  que  la  comtessed*Arman8perg 

ne  n^igeait  rien  pour  faire  du  jeune 


roi,  ou  du  moms  de  son  oaele,  le 
prince  de  Saxe-Alteidwurg^  un  de  ses 

Sendres.  Quel  que  filt  reioignement 
u  roi  de  Bavi^re  pour  une  m^aUiance, 
ses  craintes,  devant  tout  oe  qui 'avait 
une  couieur  libtole,  etaient  eocora 
plus  vives ,  et  il  ne  pouvait  se  r^oudfe 
a  voir  ^blir  en  Grdce  un  syst^e 
hr^l^  et  appropri^  aux  monirs  et  aux 
habitudes  nationales^  sans  se  croire 
complice  de  jacobinisme.  L'oppositien 
du  comte  d'Armanspere  aux  vues  de 
ses  oollegues  fut  probabiement  ce  qui 
le  matntmt ;  tandis  aue ,  oomme  poiir 
pr^ipiter  leur  disgrace  pr^n^e  avee 
tant  d'faabitete  par  le  parti  russe ,  sou- 
tenu  par   te   resident    britannique , 
MM.  de  Maurer  et  d*Abel  travaiitaieot 
k  la  redaction  de  quatre  codes  basfe 
sur  la  loi  commune  et  sur^les  an- 
ciennes  institutions  municipales.  Dans 
le  mime  temps,  on  jugea  le  proofs  das 
oonspirateurs  dont  oous  avons  dgi 
parle,  et  parmi  lesqueis  fi^praient  en 
premi^  ligne  Colocotrom  et  Golio- 
pulo ;  malgr^  les  efforts  du  {>arti  nisse , 
et  la  sympathie  non  dissinul^e  do 
comte  d'Armansperg,  le  sentence  fiit 
un  arr£t  de  mort  que  commua  le  roi 
en  vingt  annto  de  prison.  Qudques 
troubles  ^lat^rent  h  Maina ,  oi^  la  i^ 
volte  prit  un  caract^re  idneux.  En  pf^ 
sence  de  toutes  oes  diAcult^s ,  le  g^ 
n^ral  Heideck  et  MM.  de  Maurer  e( 
d'Abel  deraand^rent  lear  dtoission; 
mais  on  la  refiisa  pour  les  congidier 
bientdt  avec  plus  d  (6clat. 

M.  de  Robell  fut  envoy6  deMuniA 
avec  des  kttres  pour  le  comte  d*Ar^ 
manspere  et  M.  Catacaan ,  ce  dernier 
avant  d^k  re^  Tofdre  de  sa  cour  de 
placer  des  baionnettes  russes  k  la  dis- 
position deM.  Robell  etdu  comted'A^ 
mansperg ,  si  MM.  de  Maarerci  d'Abel 
voulaient  8*en  tenir  aux  stipulations 
du  qiiadmple  traits ,  et  par  cons^^ 
ne  pas  quitter  leur  poste.  M.  Robell 
fut  nomme  k  la  [riace  de  M.  de  Mau* 
rer ,  et  M.  Greiner  a  celle  de  M.  d'Abel , 
comme  membre  snppk^eBtaife. 

«  On  vit  alors ,  dit  M.  de  Maurer,  le 
singuUer  spectacle  que  le  suoeesseur 
d'un  bomme  d^nooo6  au  gouveraement 
brftannique  cevime  un  partisan  irop 


RUSSIE. 


611 


ardent  de  la  Russia ,  arri  va  lui  -  va&me 
a  rhotel  du  ministre  russe  en  Grece , 
pour  chasser ,  s1l  ^tait  n^^saire ,  par 
Tusage  des  armes  russes,  rhoinme 
deooDceoomroe  partisan  de  la  Russie. . . 
Les  consequences  de  notre  rappei  pou- 
vaient  dtre  facilement  entrevues ,  au 
moiDS  par  ceux  qui  connaissaient  les 
relations,  le  pays,  le  peuple  et  nos 
successeurs. 

« Si  nous  eussions  6ie  rap^^  quel- 
ques  mois  plus  tard ,  la  Grece  aurait 
01  deja  alors  ses  tribunaux ,  ses  ^les , 
son  uni versite ,  son  academie  des  scien- 
ces, et,  en  g^n^al,  des  foodements 
plus  solides  pour  son  aTenir.  » 

Quant  au  gem^ral  Heideck ,  il  atten- 
^t  que  son  engagement  fdt  expire 
pour  fitter  la  Grece,  ou  son  zele  et 
son  devouement  ^taient  d^orroais  inu- 
tiles.  La  guerre  civile  ^ata ;  un  neveu 
de  Plapontas  se  declara  lieutenant  ge- 
neral da  royaume,  et  arbora  les  cou- 
ieors  nisses,  pr^tendant  que  son  parti 
Q'a?ait  d^autre  but  que  d'assister  le 
jeune  roi  dans  Foeuvre  constitution- 
oelle.  Tous  ces  moyens  avaient  €t€ 
prepares  pour  d^rganiser  ia  r^ence ; 
niais  il  se  trouva  qu'ils  ^aterent 
ootttre  le  comte  d'Armansperg  lui- 
m^me,  I  Finstant  ou  11  ^tait  disbar* 
rasse  de  ses  coUegues.  Cependant  les 
rebelJes  furent  d^sarmes;  et  le  comte, 
^ptatum  doute  ^gard  h  Tintention 
primitive  des  coupables ,  se  garda  de 
sevir  centre  les  cnefs  du  complot ,  et 
se  coQteota  de  faire  ex6cuter  quel- 
qoes  malheureux  paysans  qui  n'6taient 
coupables  que  d'ignorance.  La  veille 
de  sa  majority,  le  roi  Othon  nomma 
ie  oomte  d'Armansperg  vice-diancelier 
da  royamne  :  le  bat  de  la  Russie  ^tait 
atteint;  et,  oequ'ily  a  de  pkisdigne 
d^atteotioo,  e'est  que  le  cabinet  bri- 
tannique  donna  lui-m^me  les  mains  k 
toQtes  kss  mesures  des  agents  russes, 
coQtrairement  k  resprit  des  protocoles, 
et  dans  la  crainte  pwrile  que  I'^tablis- 
Kment  d*on  goavernement  populaire 
n  Grto  ne  p6t  toe  attarU>ii6  au 
thompte  4e  la  revolution  de  jiiillet. 
^  importait  k  ia  Russie  que ,  pkts 
M,  M.  d'Annanspere  M  rappele; 
il  lui  importait  d^empecher  la  Grdce 


de  s'organiser  d'une  maniere  stable, 
de  faire  triompher  son  influence  a  tout 
prix,  et  de  pouvoir  compter  la  Gr^ 
comnie  une  annexe  de  ses  provinces 
maritimes  quand  Tbeure  de  Constanti- 
nople aura  sonn^. 

Pendant  que  la  Russie  ^tudiait  a 
fond  toutes  les  difficult^s  qui  entira* 
vaient  Taction  des  gouvemements 
Strangers,  soit  pour  les  forcer  h  adop- 
ter ses  vues,  soit  du  moins  pour  para- 
lyser leurs  intentions  hostiles,  Topmion 
aes  meilleurs  publicistes  de  r£urope 
prenait  au  serieux  un  systeme  qui  s'^- 
tablissait  non  plus  sur  des  theories, 
mais  sur  des  faits.  Pendant  longtemps , 
on  s'^tait  contents  de  r^pondre  a  ceux 
qui  si^nalaient  les  envabissements  de 
1  empire  du  Nord ,  que  son  etendue  de- 
mesurde  ^tait  un  indice  de  faiblesse, 

3ue  le  d^faut  de  centralisation  y  ren- 
ait  impossible  Texercice  intelligent 
du  despotisme ,  que  les  embarras  finan- 
ciers ne  permettaient  pas  d*entretenir 
une  force  arm6e  suffisante  pour  assurer 
la  s6curit^  des  frontieces ,  enfin  que  la 
reunion  b^t^rogene  de  tant  de  popula- 
tions dont  les  int^Sts  6taient  evidem- 
ment  difif<6rents,  amenerait  sOus  peu 
une  scission ,  et  que  Tunit^  eouveroe" 
mentals  serait  dStruite.  Si  la  Russie 
avangait  vers  TOrient,  c*etait  pour 
rem[)lir,  dans  un  but  humanitaire,  une 
mission  civilisatrice;  si  elle  ^tablissait 
des  colonies  militaires,  elle  retardalt 
par  cette  mesure  I'emancipation  des 
serfs,  en  changeant  maladroitement 
Tesprit  d'ob^issance  passive  de  ses  ar* 
mees;  elle  n*avait  pris  les  provinces 
baltiques  que  pour  assurer  un  debou- 
ch^ a  son  commerce ;  c*^tait  pour  un 
motif  semblable  qu'elle  s'^tait  m^nase 
quelques  points  sur  le  littoral  de  la 
mer  Noire  et  de  la  Caspienne :  quant  a 
la  Pologne ,  on  prouvait  victorieose- 
ment  que  ce  dernier  boulevard  devait 
ionher.  Cest  ainsi  que,  par  Ferreur 
ou  la  n^ligence  des  cabinets,  la  Russie 
s'emparait  suooessivement  de  toutes 
les  positions  qui  la  rendent  aujourd'hui 
inattaqiuJble ;  et  ^e ,  cessant  d^sor- 
mais  de  nier  ce  qui  est  manifeste,  elle 
marche  k  son  but  avec  toute  la  force 
d*uiie  organisation  politique  longtemps 

15. 


612 


L'UNIVERS. 


mdne,  et  dedaigne  de  Jeter  nn  voile 
sur  sea  projets  ult^rieurs.  Quand  la 
diplomatie  ne  fut  plus  en  mesure  de 
hier  Tevidence,  on  essaya  de  Bonder 
lea  r^lutions  de  la  Russie  par-des 
manifestations  sans  port6e,  dont  le  but 
se  reduisit  a  faire  voir  que  Timpnis- 
sance  ^tait  k  cdt^  de  la  x;rainte :  e'est 
ainsi  qu*en  Franoe  un  ministre  declara 
h  la  tribune,  que  la  nationality  polo- 
naise existait  en  droit.  L'empereur  Ni- 
colas r^pondit  h  ce  defi  en  pressant 
les  travaux  de  la  citadelle  d'Alexandre 
^  Varsovie,  et  le  discours  qu'il  tint  ^ 
la  deputation  de  cette  ville,  en  octobre 
1835,  annonce  iiue  s*il  n^est  pas  encore 
en  mesure  d'agir  directement  sur  FEu- 
rope  comroe  il  Fentend,  il  regarde 
du  moins  les  traites  comme  chose  mo- 
difiable, et  ne  reconnatt  aucune  espeoe 
d*interventlon  pour  oe  qui  le  regarde 
personnellement.  Nous  donnerons  ici 
le  texte  de  ce  discours  d'apr^  la  ver- 
sion de  Yarsovie. 

«  Je  sais,  messieurs,  que  vous  avez 
voulu  me  parler;  je  connais  mSme  le 
contenu  de  votre  discours ,  et  c*est  pour 
vous  6()argner  un  mensonge  que  je  ne 
d^ire  pas  qu'il  me  soit  prononc^.  Qui , 
messieurs,  c*est  pour  vous  ^pargner 
un  mensonge,  car  je  sais  que  vos  sen- 
timents ne  sont  pas  tds  que  vous  voulez 
me  le  faire  accroire. 

«  Et  comment  pourrai-je  y  ajouter 
foi ,  quand  vous  nravez  tenu  ce  m6me 
lang^e  la  veille  de  la  revolution ! 

«  N^est-ce  pas  vous-m^mes  qui  me 
parliez ,  il  y  a  cinq  ans ,  il  y  a  huit  ans , 
de  fiddite,  de  d^vouement,  et  qui  me 
faisiez  les  plus  belles  protestations  d'at- 
tachement?  Quelques  jours  apr^ ,  vous 
avez  brise  vos  serments,  vous  avez 
commis  des  actions  horribles. 

«  L'empereur  Alexandre,  qui  avalt 
foit  pour  vous  plus  qu'un  empereur  de 
Russie  n'aurait  dd  faire,  qui  vous  a 
combl6s  de  bienfaits,  qui  vous  a  favo- 
rises  plus  que  ses  propres  sujets,  et 
vous  a  rendus  la  nation  la  plus  floris- 
sante  et  la  plus  heureuse,  r empereur 
Alexandre  a  ete  paye  de  la  plus  noire 
ingratitude. 

«  Vous  n'avez  jamais  pn  vous  con- 
tenter  de  la  position  la  plus  avanta- 


geose,  et  vous  tfvez  fini  par  detroire 
vous-memes  votre  bonheur.  Je  vow 
dis  ici  la  verite  pour  eciairer  notre  po- 
sition mutuelle,  et  pour  que  vous  sa- 
chiez  bien  h  guoi  vous  en  tenir;  car  je 
vous  vols  et  je  vous  parle  pour  la  pre- 
miere fois  depuis  les  troubles. 

«  Messieurs,  il  faut  des  actions  et 
non  des  paroles ;  il  fant  que  le  repentir 
vienne  du  coeur.  Je  vous  parle  sans 
m'ecbauffer;  vous  voyez  que  je  suis 
calme;  je  n'ai  pas  de  rancone,  et  ie 
vous  ferai  du  bien  malgre  voas.  Le 
marechal  que  voici  remplit  mes  inten- 
tions, me  seconde  dans  mes  vues,  et 
pense  aussi  h  votre  bien-etre  {i  ces 
mots,  les  membres  de  la  deputation 
saluent  le  marechal).  Eh  bien,  mes- 
sieurs ,  que  signifient  ces  saluts?  A^ant 
tout  il  faut  remplir  vos  devoirs,  il  faut 
se  conduire  en  honnetes  gens.  Voas 
avez,  messieurs,  k  choisir  eotredeui 
partis :  ou  persister  dans  vos  illusions 
d*une  Pologne  independante,  ou  vivre 
tranquillement  et  en  sujets  fldeies  sous 
mon  ^oovernement. 

«  Si  vous  vous  obstinez  h  conserver 
vos  reves  de  nationalite  distincte,  de 
Polosne  independante,  et  de  toutesces 
chimeres,  vous  ne  pouvez  qu*attim 
sur  vous  de  ^ands  malheurs.  J*ai  fait 
eiever  ici  la  citadelle,  et  je  vous  declare 
qu'^  la  moindre  emeute  je  ferai  fou- 
aroyer  la  vilie,  je  detruirai  Varsovie, 
et  certes  ce  ne  sera  pas  moi  qui  la  re- 
bdtirai ! 

n  II  m'est  bien  penible  de  vous  parler 
ainsi ;  il  est  bien  penible  k  un  souve- 
rain  de  traiter  ainsi  ses  sujets ;  roais  je 
vous  le  dis  pour  votre  propre  bicn. 
C'est  k  vous,  messieurs,  de  songcr  a 
meriter  Foubli  du  passe :  oe  n'est  que 

rur  votre  oonduite  ct  votre  devouement 
mon  gouvemement  que  vous  poovei 
y  parvenir. 

«  Je  sais  qu*ll  y  a  des  correspon- 
dances  avec  retranger,  qu*on  envoie  la 
de  mauvais  ecrits,  et  qu*on  tkbe  de 
peryertir  les  esprits;  mais  la  meilleore 
police  du  monde,  avec  une  fiEtrntien 
conune  vous  en  avez,  ne  peut  emp^ 
cher  les  relationa  clandestines.  (Test  a 
votts-memes  a  faire  la  police ,  k  ecarter 
lemal. 


n 


ei4 


L'UBilYEES. 


G^engik,  ou  ii  est  arrive  le  leade* 
mttin  28. 

« lii ,  le  oontFe-amiral  Eamant ,  com- 
mandant  notre  statioo,  a  tobli  sur-le* 
diamp  une  commisaioii  d'enqu^te, 
diarg6e  de  procMer  formeUement  k 
rinterrogatoire  de  I'^ipage  et  a  I'eza* 
men  Je  toutes  les  arconstances  qui 
avaient  aroen^  la  capture  du  bdtiment. 

«  II  r^ulte  de  I'enqu^te : 

«'Que  )e  schooner  Fixen,  eapitaine 
Tbomas  Childs ,  etc. ,  etc. ,  a  4m  frM 

Gr  la  maison  Bell ,  etc. ,  etc. ,  h  Bouk* 
rest,  fM>ur  ^tre  employe  par  elle  ^ 
Constantinople,  dans  le  Danube,  dans 
les  ports  de  la  mer  Noire,  de  la  mer 
d*Azof  ou  de  Marmara ,  et  qu*en  vertu 
de  ce  contrat,  le  yixen  a  A^  mis  a  la 
disposition  de  Bell ,  lequel  a  fait  pren- 
dre au  bdtiment,  a  Constantinople,  un 
ebargemeot  de  sel ; 

«  Que  ce  dernier  a  laiss^  entierement 
ignorer  au  capitaine  le  but  de  leur 
voyage ,  iusqu*au  moment  ou  le  navire 
a  quitt^  le  Bosphore,  le  19  novembre: 

« Que  le  sieur Bell,  apres  avoir 

pris  un  piiote  turc  h  Samsoun ,  a  donne 
au  capitaine  Tordre  de  cingler  vers 
Toughs,  Pschad  ou  Soudjouk-Kal^, 
ces  trois  points  ^tant  sans  douane  ni 
quarantaine; 

«  Que  le  navire  est  reste  dans  ce 
dernier  endroit  pendant  trente-six 
heures  ^  Tancre,  avant  d'avoir  et6 
joint  par  VAjtix; 

«  Que ,  durant  cet  intervalle ,  le  sieur 
Bell  s'est  mis  en  rapport  avec  les-habi- 
tants  de  la  cote,  dans  le  but  avoue  de 
trafiquer  avec  eux ; 

« Qu*il  existe  un  fait  (jui,  dans 

la  oonjoncture  actuelle,  acqutert  le  ca- 
ractdre  d'une  preemption  tr^grave : 
c'est  que  sur  quatre  canons  dont  Par- 
mement  du  navire  devait  se  composer, 
ainsi  que  ses  documents  Tattestent ,  il 
ne  s*en  est  trouv6  h  bord  que  deux... 
Ces  considerations  reunies  ont  ^t^  ju- 
g6es  d^isives  par  la  commission ;  elle 
a  reconnu  que  le  Fixen  et  la  cargaison 
devaient  me  soumis  a  la  confiscation. 

«  D'apr^  cet  arr^t^,  ledit  bdtiment 
a  M  conduit  a  SebastopoK  ou  il  est 
arrive  le  89  novembre  ( 1 1  decern- 
brc). 


«  Toutes  ces  earconstanees  ayant  i^k 
port^ea  a  la  connatssaoce  du  gouver* 
nement  imperial,  il  vfent  de  trans- 
mettre  ^  ramiraute  de  la  mer  Noire 
Tordre  de  oonfisquer  le  schooner  le 
P^ixen  et  sa  cargaison,  et  de  lei  d^ 
darer  de  bonne  prise. 

«  Quant  h  I'^quipage  de  ce  bAtimeot, 
bien  qu'il  ait  eneoitru,  d'apres  les  lois 
sanitaires  dtablies  dans  tous  les  pays 
del'Europe,  les  peines  les  plus  graves, 
Sa  Majesu  Tempereur  a  daign^  prendre 
en  consideration  let  eiroonstanoea  at* 
tenuantes  qui  tendent  h  etablir  que  le 
capitaine  Childs  a  et^,  des  Torigine, 
etranger  a  one  entreprisa  dont  la  res- 
ponsaDilite  et  la  honte  ne  doivent  re- 
tomber  que  sur  les  armateurs  qui  ToDt 
tentee.  En  oonaequenoe,  I'empereur  a 
donne  ordre  de  suspendre  toute  pour« 
suite  ulterieure  contre  le  capitaine 
ChiMs ,  etde  le  mettre  en  liberie,  ainsi 
que  les  gens  de  requipoge.  De  plus, 
ayant  appris  par  les  rapports  de  rami- 
raute  que  ces  indiridus  se  trouvaient 
dans  nn  complet  d^niknaent ,  Sa  Maieste 
a  charge  le  gouverneur  general  ae  la 
Nouvelie-Russie,  comte  Voronzof,  de 
leur  foumir  les  moyens  de  retourner 
k  Constantinople... 

«Le  gouvernement  imperial  croit 
devoir  donner  la  plus  grande  publicit<i 
k  cet  acte  de  s^verite  et  de  justice, 
pour  prevenir  ddsormais  le  renonvelle- 
ment  d*une  tentative  que  proserit  la 
legislation  de  tous  les  pa^s. 

«  Afin  d'eclairer  completemeot  Topi* 
nion  du  public,  il  importe  de  rappeler 
encore  ici  les  circonetances  snivantes : 

«  Le  littoral  de  la  mer  Noire,  depuis 
Tembouchure  du  Kouban  jusqu'au  port 
Saint*Nicolas  indusivement ,  avant  ete 
place  sous  la  domination  de  rempire 
russe,  en  vertu  de  Tartrcle  4  du  traite 
d^Andrinople,  une  des  premieres  me- 
sures  arretees  par  le  gouvernement 
imperial  a  ete  de  fonder  d(»  ^blisse- 
ments  de  douane  et  de  quarantaine 
dans  les  ports  d' Anapa  et  de  Redout- 
Kaie.  L'un  et  Tautre  ont  4^  ouverts 
d^  lors  au  commerGe  reguiier  de 
toutes  les  nations,  a  Texclusion  ex- 
presse  des  antres  endrofts,  bates  ei 
navres  du  littoral,  oil  ii  n*existe  au- 


KUSSIE. 


.615 


cun  ^tablissement  sanitaire  et  aucune 
douane. 

« En  portant  oette  disposition  h  la 
connaissance  du  gouvernement  otto- 
man et  des  repr^entants  de  toutes  lea 
i puissances  r^sidant  h  Constantinople, 
a  lotion  imp^riale  a  ea  ordre  de  lenr 
aononcer  que  toote  tentative  des  na- 
▼igateavs  ebangers  oour  se  mettre  en 
Gommanication  atec  les  c6tes  ci-dessus 
mentionnto,  h  Texception  des  ports 
d'Anapa  et  de  Redout-Kal^ ,  serait  con- 
siddrfe  comme  constituant  un  d^lit  de 
contrebande,  et  soamettrait  les  indi- 
vidus  coupabies  d'un  pareil  aete  h  la 
resDonsabilit^  l^le  qu'entrafne  tout 
trafic  illtcite  et  clandestin. 

« Cest  au  mois  d'octobre  1831  que 
la  disposition  qui  vient  d*£tre  6nonc6e 
a  et^  nonununiqu^  tant  h  la  Porte 
oUomane  qu*aux  legations  6trangires ; 
et  c*est  depuis  oette  6poque  que  la  croi- 
siere  ^tablie  par  le  gouyemement  im- 
perial sur  le  littoral  de  la  mer  Noire 
exeroe  dans  ces  parages  la  surveillanoe 
dont  elle  est  l^galement  inrestie. 

« Bfalgr6  ces  mesures  formcllement 
annoncnes,  des  navires  strangers  ont 
essaje,  dans  le  courant  des  ann^  1834 
et  1835 .  d*entretenir  avec  les  habitants 
de  la  cote  des  relations  dandestines. 
Mes  ont  mis  le  commandant  de  notre 
croisiere  dans  la  n^cessit6  de  redou- 
I>i6r  dds  lors  de  sanreillance  et  de  ri- 
gooir. 

« M.  de  Boat^nief  a  isti  appel^  de 
son  cdU  a  renouveler  aupr^  des  l^a- 
tioos  ^trang^res  h  Constantinople  les 
oonmiunications  qu'il  leur  avait  faites 
en  1831.  En  cons^ence,  il  leur  a 
adress^  la  circulaire  que  nous  Tenons 
derapporter. 

■  Far  cette  note,  le  ministre  russe 
a  ioTlt^  tous  les  repr^sentants  stran- 
gers a  vouloir  bien  faire  parvenir  les 
arertissements  nScessaires  aux  bdti- 
roents  naviguant  sous  le  pavilion  de 
M  gouvernement  dans  les  parages 
pr^Gitgs  de  la  nier  Noire,  afin  de  prS- 
venir  les  cons^uences  qui  pourraient 
Y^uiter  d'une  contravention  aux  r^ 
elements  Stablis  contre  le  commerce 
ue  contrebande. 
« Cette  circulaire  porte  la  date  du 


13  septembre  1836;  et  c*est  en  dSpit 
des  avertissements  H\Ur6s  dont  nous 
venons  de  rappeler  la  teneur,  que  te 
f^ixen ,  ainsi  que  le  Morning-Chronicle 
I'annonce,  a  etS  exp^iS  de  Constan- 
tinople dans  le  but  avoue  de  braver  et 
d^nfrdndre  nos  regiements. 

«  Le  simple  expose  des  £aits  sulBra 
pour  placer  dans  son  vrai  jour  la  oon- 
duite  des  armateurs  anglais,  qui ,  wS- 
connaissaut  le  respect  qu'ils  devaient 
au  pavilion  national,  n'ont  point  h^ite 
k  en  abuser  pour  prot^er  un  honteiix 
trafic,  oa  pour  couvrir  de  perfides  des- 
seins,  que  le  jueement  impartial  de 
tous  les  nommes  Dien  pensants  ne  sau- 
rait  manquar  de  condamner  et  de  fl^ 
trir. 

«  La  publicity  que  le  gouvernement 
impMal  a  cm  devoir  donner  aux  de- 
tails de  cette  afZisure  servira  en  m^nie 
temps  k  faire  eonnattre  la  l^lite, 
aussi  bien  que  la  rigueur  des  mesures 
adoptto  par  la  Russie  pour  faire  res- 
pecter ses  r^lements,  et  les  mettre 
dSsormais  k  rabri  de  toote  nouvelle 
atteinte. » 

Les  consequences  de  oe  manifeste 
sont  rigoureusement  justes,  si  Ton 
admet  le  prindpe  d'oij  dies  d^ulent ; 
c*estp|k-dire ,  la  possession  par  la  Russie 
du  littoral  Circassian ,  en  vertu  de  Tar- 
ticle  4  du  traits  d'Andrlno|rie.  Oans 
tous  les  cas ,  le  gouvernement  britan- 
nique  a  manquS  a  sa  dignity  dans  ce 
diiterend :  s'll  reconnaissait  le  droit 
exclusif  des  Russes  sur  cette  cdte^  il 
devait  faire  signifier  k  son  commerce 
par  les  voles  officielles  que  le  blocus 
etait  consenti;  s'il  avait  juge  que  la 
Porte  n'avait  pas  le  droit  de  c^er  au 
gouvernement  imperial  un  pays  ind^- 
pendant,  et  avec  qui  les  Russes  trai- 
tent  journellement  de  puissance  armee 
k  puissance  ennemie  par  T^ange  des 
,prisonniers,  on  ne  pent  que  le  bldmer 
d^avoir  reculS  devani  la  demande  aussi 
juste  qu'Snergique  d'une  satisfaction 
^latante  et  compile.  II  en  est  result  * 
que  la  preponderance  russe  s'est  affer- 
mie  dans  1  Orient ,  au  grand  detriment 
de  rinfluence  anglaise;  et,  lorsqu'on 
voudra  reoourir  a  des  moyen$  st^Tieux , 
on  aura  laissS  echapper  cc  point  d'op- 


616 


L'UNIVEHS. 


portunit^  ou  le  droit  et  les  int^^ts  se 

Sr^tant  une  force  mutuelle ,  la  dignity 
es  gouTernements  re^it  un  Douveau 
lustre  du  d^ploiement  spontan^  de 
leurs  mo^ens  de  coercition. 

L*annee  1886  s*e8t  ouverte  par  ua 
chaogement  dans  radministration  des 
Cosaques  du  Don.L'empereur  Nicolas 
Jugea  eonvenable  de  leur  imposer  ane 
nouvelle constitution,  qui ,  en  effacant 
leurs  anciensprivildges ,  rattachHtd^une 
roani^  plus  intlme  cette  population 
remuante  et  guerridre  au  systtoe  de 
d^ndance  aosolue  qui  r^it  toutes 
ks  parties  de  Tempire.  Le  jour  de 
I'introduction  de  ces  nou?eaux  sta- 
tuts ,  qui  r^ent  d'une  mani^re  fixe  les 
rapports  mutuels  des  Cosaques  de 
rangs  diffi^rents,  a  €t^  c^i^br^  avec 
uiie  sorte  de  solennit^.  Les  picheries, 
des  secours  en  sel,  et  une  somme  au- 
nuelle  de  cinquante  roille  roubles,  ont 
^te  accord^  dans  le  but  de  soulager 
les  malades,  les  bless^,  les  veuves  et 
les  orphelins,  et  pour  subvenir  h  Tin- 
sufBsance  des  rdcoltes  dans  les  mau- 
vaises  anndes. 

On  ne  pent  qu'admirer  avee  quelle 
habilet^  le  gouvemement  russe  em- 
ploie  les  moyens  les  plus  opposes  pour 
aroener  k  Tunite  despotique  les  nom- 
breuses  peuplades  qui  entourent  le 
noyau  des  provinces* slaves.  Si  la  r^is- 
tance  se  manifeste  par  des  r^voltes,  il 
toase  du  poids  de  sa  puissance  mili- 
taire  ceux  qui  essayent  de  prouver  qu*il 
existe  une  di£f(6rence  entre  la  protec- 
tion du  tsar  et  une  soumission  com- 
plete. Quand  la  resistance  n'est  que 
dans  les  mccurs ,  c*e8t  dans  cette  source 
mime  qu'on  la  combat :  les  faveurs  ac- 
cord^s  aux  plus  dociles,  le  contact 
frequent,  en  temps  de  service,  de  ces 
soloats  irreguiiers  avec  lesautres  trou- 
pes, suffisent  pour  alt^rer  en  eux  les 
traits  distinctils  de  leur  caractere  mo- 
ral.  Quand  ce  travail  de  modification 
se  trouve  suffisamment  avance ,  le  pou- 
voir  laisse  alors  tomber  son  deniier 
mot,  et  Tarrlt  suprclme  est  interpret^ 
comme  une  faveur.  Les  Cosaques  du 
Don,  par  leur  situation  plus  rappro- 
ch^  du  centre  de  Tempire,  devaient 
^re  aussi  les  premiers  a  voir  s'effacer 


les  traces  de  leur  ancfenne  ind^pen- 
dance.  Elle  fut  s^rieuseraent  roenacee 
du  jour  (A  lis  confererent  rhetmanat 
k  des  seigneurs  russes.  Bientdt,  sans 
doute,  viendra  le  tour  des  autres  tri- 
bas  de  la  race  cosaque.  L'agriculture 
et  rindustrie  les  ameneront  gradoelie- 
ment  a  des  id6es  d*ordre  etde  sourois* 
sion ;  en  attendant ,  ils  portent  assez 
impatiemment  le  joug ,  et  Ton  a  vu  les 
Tatars  NogaTs  et  ceux  du  Kouban  exer- 
cer  sur  le  sol  russe  des  violences  et  des 
brigandages  dignes  des  monta^rds 
du  Caucase.  N^nmoins  Tinaction  oii 
les  retient  la  paix  ne  pent  que  reajir 
favorablement  sur  leurs  moeurs,  et  Tid- 
fluence  de  ce  cbangement  s'etendra 
graduellement  vers  TAsie,  surtout 
quand  les  Russes  auront  accompli  la 
pacification  des  r(6gions  caucasiennes. 
Pour  bien  faire  comprendre  Tinter^ 
qu'avait  la  Russie  k  imposer  aux  Cosa- 
ques du  Don  une  constitution  nouvelle, 
11  suftira  de  rappeler  que ,  bien  qu*or- 
ffanis^  par  regiments,  leurs  officiers 
etaient  elus  par  toute  la  communaute. 
Le  service  acheve,  les  distinctions  dis- 
paraissaient ,  et  chacun  rentrait  dans 
I'^alit^  la  plus  parfaite,  sous  le  rap- 
port des  devoirs  et  des  droits.  La  vue 
de  leurs  steppes,  leurs  chants  natio- 
naux ,  ou  vivent  leurs  traditions  d'in* 
depeoMiance,  les  ^loignaient  de  toute 
idee  d'esclavage;  aiassi  ne  trouvait-op 
chez  eux  ni  serfs  ni  propriltaires  de 
serfs.  L'oblieation  du  service  militaire 
n^etait  pour  les  Cosaques  que  rapplica- 
tion  de  leur  principe  eiectif  h  tous  les 
emplois.  D<^j^  leur  organisation  eo 
troupes  regulieres  et  soldte  les  avait 
en  quelque  sorte  assujettis  au  pouvoir; 
il  s  agissait  de  d^truire  rinfluence  de 
la  communaute  et  du  foyer.  La  nou- 
velle mesure  atteignait  ce  but,  en  fai- 
sant  dependre  tous  les  grades  de  la 
faveur  imp^riale.  II  fallait  que  Tofficier 
une  fois  nomme  conservdt  son  grade. 
On  a  donne  des  proprietes  et  des  seris 
aux  officiers  cosaques;  et,  comme  la 
matiere  esclave  manquait,  on  a  envoyo 
dans  le  pays  des  paysans  russes  pour 
les  distribuer  entre  les  elus  de  cette 
nouvelle  aristocratic.  C'est  ainsi  que, 
par  une  espece  de  fhtalisme,  ou  plul^t 


RUSSIE. 


617 


en  raisoD  de  Ja  foree  des  cboses,  la 
Russie,  au  lieu  d'atiliser  les  Elements 
de  fiberte  ^rs  c^  et  \k  sur  ie  sol, 
teod  k  les  assimiier  aui  institutions 

S derates,  oomme  si  elle  6tait  jalouse. 
e  r^er  par  oukases  la  marcfae  de  la 
drilintion ,  pour  lui  donnef  Pensenible 
et  la  precision  d'une  Evolution  mili- 
taire. 

Noos  av<His  d^j^  remarqu^,  et  par- 
ticoli^rement  dans  rintroduction  de 
cet  oarrage,  ouelles  sont  les  ressour- 
oes  actueiles  au  commerce  russe,  et 
comment  la  situation  g6oj^apfoique  de 
rempire  met  h  sa  disposition  un  sys- 
teme  complet  de  communications  k 
rinterieur,  et  des  dAouch^  aussi  com- 
modes que  nombreux  pour  ses  rela- 
tions ayee  les  quatre  narties  du  monde. 
Dans  rhypothese  meme  oh  ses  flottes 
rencontreralent  des  obstacles  dans  la 
Mediterrante ,  la  Russie ,  par  rinfluenoe 
qu'eUe  exeroe  sur  TAllemagne,  pour- 
rait,  au  moyen  du  Danube,  dont  elle 
occupe  les  embouchures  praticaMes 
en  yerto  du  traits  d*Andrinople,  s'ou- 
▼rir  les  grands  march^  europ6ens 
pour  ses  produits  et  pour  ceux  de  rAsie 
centrale.  On  peut  dire  que  la  question 
finaneiire,  c*est^^-dire ,  commerciale, 
M  oelle  qui  prtoocupe  le  plus  vive- 
meot  le  gouvemcment  de  Tempire. 
Cdle  de  )a  domination  russe  en  Orient 
t^j  rattache  par  des  consequences  n^ 
eessaires,  et  c*est  ce  qui  mspire  aux 
Aoglais  une  inquietude  qui  n'a  jamais 
ete  fflieux  fondee. 

Le  tarif  russe  a  €U  con^  dans  un 
esprit  presoue  exdusivement  prohibi- 
tir :  il  tend  evidemment  k  entraver  Tin- 
dustrie  manufacturiere  des  £tats  de 
TEurope  et  particuli^rement  de  la 
Orande-Bretagne.  Les  importations  to- 
ler6es  ne  sont  que  Texpression  d'un 
besoin  imperieux ,  comme  celle  du  eo- 
ton  file,  ou  les  droits  dont  elles  sont 
(nppees  equivalent  k  pen  de  chose  pres 
2  ooe  [HTohibitioD.  Ces  prohibitions,  la 
Itossie  les  l^vera  sans  doute  en  temps 
opportun,  Jorsqu'elle  aura  ecarte  les 
oostacles  de  la  ligue  prussienne,  et 
Qu'elle  ouyrira  aux  Allemands  I'acces 
de  son  vaste  territoife,  en  leur  permet- 
lant  (Texporter  leurs  marchandises  en 


Turquie,  en  Perse,  et  jusqu'au  eentre 
de  TAsie,  k  I'exclusion  des  produits  de 
I'industrie  anglaise.  Elle  y  gagnera 
d'toe  maftresse  des  conditions,  et 
d'etablir  sur  des  motifs  spedeux  sa 
marche  envahissante  en  Asie. 

dependant  la  situation  commerdale 
de  la  Russie  vis-ik-yis  de  TAngletarre 
pourrait  devenir  precaire ,  si  cette  der- 
nidre  puissance  s'ecartait  du  syst^me 
pacifique  et  conservateur  que  lui  impo- 
sent  les  necessites  presentes.  Les  con- 
siderations suivantes,  que  nous  em- 
pruntons  au  Port-folio ,  sur  le  contrdie 
commercial  que  TAngleterre  poss^de 
k  regard  de  la  Russie,  pourront, 
abstraction  faite  de  ouelques  exagera- 
tions,  donner  une  idee  assez  exacte  de 
Tinfluence  des  relations  britanniques 
sur  la  posperite  de  Tempire  russe. 

« Independamment  de  la  barridre 
que  TAngleterre  peut  opposer  aux  en- 
vafaissements  ulterieurs  de  la  Russie, 
par  Ja  reorganisation  de  Pempire  otto- 
man; independamment  de  ses  moyens 
de  detruire  les  forces  agressives  de  la 
Russie  en  faisant  flotter  son  pavilion 
dans  la  mer  Noire,  TAngleterre  pos- 
skle  encore  un  moyen  de  contr61er  et 
d'arreter  les  progr^s  de  la  politique 
russe  sans  choc,  sans  violence,  mais 
par  Teffet  seul  de  son  tarif. 

«  Cest  pour  laisser  les  choses  dans 
cet  etat  d*incertitude,  que  la  Russie  a 
sans  doute  refuse  de  participer  k  des 
stipulations  qui  lui  lieraient  les  mains 
relativement  k  son  commerce  avec  la 
Grande-Bretagne.  II  n'y  a  aucun  traite 
de  commerce  entre  les  deux  pays; 
rAngleterre  n'est  done  engagee,  vis- 
2i-vis  de  la  Russie,  par  aucun  contrat, 
si  ce  n^est  par  la  clause  du  traite  de 
1815,  qui  accopde  k  la  Russie  les  pri- 
vileges de  la  nation  la  plus  favorisee. 
Le  temps  semble  venu  pour  les  deux 
parties  contractantes  de  reexaminer  la 
valeur  et  la  tendance  du  texte  de  ce 
traite. 

«La  production  territoriale  de  la 
Russie  et  sa  circulation  commerciale 
ont  recu  leur  premiere  impulsion ,  et 
dependent  actuellement  des  demandes 
de  produits  bruts  que  lui  fait  TAngle- 
tcrre;  ses  ressources  financidres,  son 


•IS 


L'UNIVERS. 


Iioiivoir  politique,  et  jijsqu*li  sa  oolii^ 
sioD  interieure,  soot  li^  a  son  com- 
mcfoe  avec  la  Grande-Bretagne,  baus- 
seni  qnaod  oe  commeroe  augiucDte,  et 
aoui&snft  6H  qu'il  dedine. 

«  Certains  prodaits  tent  presque 
eidifsi?eiD0Dt  tir^  de  la  Russie,  il  en 
est  t6salt6  partout  la  oonviction  que 
TAngleterre  d^pendait  de  cet  empire 
sous  certains  rapports.  La  puissance 
rostes'estaocnUe  en  proportion  du  peu 
de  sef^t^  que  niontrait  TAngleterre 
h  peser  les  projets  d*un  gouvemement 
doiit  etie  croyait  avoir  a  dependre. 

«  Mais  ii  n7  a  que  la  i^isiation  com- 
mereiale  de  FAngleterre  qui  soit  en 
grande  partie  la  eause  de  ce  qu*on  s'ap- 
provisionnede  curtains  articles  presque 
ezdusivement.  en  Rassie  :  la  d6pen- 
dance  de  TAogleterre  k  ce  sujet  n^eat 
done  que  la  consequence  de  son  propre 
tarif  pendant  une  s^ie  d'annees. 

«  La  Turquiepourrait,  avec  ses  ar- 
ticles d'exportation ,  rrvaliser  avanta* 
geusement  avec  la  Russie;  de  la,  une 
nouve^e  ntossit^  ^our  la  Russie  de 
s'approprier  en  definitive  Tempire  otto* 
man,  et  de  le  desorganiser  en  atten- 
dant. Depuis  bien  longtemps,  oe  sont 
les  trait^s,  les  guerres,  et  surtout  les 
conseils  de  la  Russie ,  qui  ont  poursui vi 
avec  systems  et  intelligence  Tintrodnc- 
tion  ou  le  maintien  de  tous  lea  abus, 
et  de  toutes  les  mesures  qui  non-seu- 
lement  ont  empdch^  jusqu'ici  laTurquie 
de  jamais  entrer  en  concurrence  avec  les 
Russes,  mais  qui  ont  mSme  cacb^  a  ses 
yeux ,  oororoe  aux  ndtres ,  que  ceia  pou> 
vait  avoir  lieu* 

«  L'An^eterre  peut,  au  moyen  de  la 
modification  de  son  tarif,  priver  la 
Russie  d*une  partie  consid^able  de  ses 
ressources  aetuelles,  et,  par  la  seule 
menace  de  ce  changement,  elle  peut 
alarmer  les  intMts  a^coles,  ou,  en 
d^autres  termes,  Tanstocratie,  seul 
corps  qui  exeree  de  Tinfluence  sur  le 
gouvemement  russe. 

«  L'Angleterre,  eo  accordant  k  la 
Turquie  des  facility  qui  tondront 
beaucoop  la  production  sur  son  terri- 
toire,  obtiendrait  en  compensation 
Tabrogation  totale  de  toutes  les  res* 
trictions  qu*il  a  tant  coilt^  a  la  Russio 


d'y  ^tablir,  et  qui  forment  aujouid'hui 
les  ressources  de  production  de  oes 
mtoes  objets,  au  moyen  desquels  la 
Turquie  rivaliserait  jivantageusemeDl 
avec  la  puissance  dont  elle  subit  le 
joug.  Or,  ii  est  k  remarquer  que  les 
principaux  objets  d*exportation  de  la 
Russie,  k  savoir :  le  chanvre ,  le  bl6  Je 
fer,  le  cuivre,  lacire,  le  suif  et  le  boisde 
construction,  sontprofatb^  en  Turquie. 

a  Les  deux  mesures  dont  nous  ve- 
nous de  parler,  adopts  simultane- 
ment  comme  parties  ms^^rablas  d*un 
svsttoe  g6nttal ,  am^neraient  un  grand 
changement  dans  I'^tat  relatif  de  la 
Turquie  et  de  la  Russie,  ^tendraient 
Botre  march^  pour  les  produits  brutSt 
les  feraient  paisser  d'un  pays  qui  pro- 
hibe  nos  marcbandises  k  un  pays  qui 
ne  leur  fait  subir  aucune  restnctioo, 
d*un  pays  (A  s'^ve  une  marine  rivale 
k  un  autre  ou  tout  le  commerce  se  fait 
sur  des  navires  anglais,  d'un  pays 
enfin  contra  Finfluence  duquel  il  nous 
laut  lutter,  a  une  oontrte  que  nous  de- 
vons  dtfendre. 

a  La  richesse  des  nobles  russes  pro- 
vient  presque  exclusivement  de  la  vente 
de  leurs  produits  bruts  aux  Anglais. 
II  suffit  de  dire,  pour  entralner  les 
convictions ,  que  1  Angleterre,  en  di- 
minuant  son  march^ ,  en  y  appelant  les 

{)rodutts  rivaux,  ou  m^me  en  d^uil- 
ant  les  Russes  de  leuis  privileges, 
aceord^s  inconsid^^menl  et  cootre  les 
principes  d*une  saine  politique,  pos- 
sede  les  moyens  d*exercer  uoepuis- 
sante  influence  sur  le  corps  de  Ij 
noblesse  russe,  de  la  ranger  aux  inte- 
r^ts  anglais,  en  d^pit  de  rbostilit^  du 
gouvemement ,  et  de  la  faire  aeir  centre 
oe  gouvemement,  s*il  pers^verait  daos 
son  hostilite.  L'Angleterre,  rneoon- 
naissant  son  pouvoir,  a  jusqu'ici  res- 
serr^  doublement  les  liens  de  rasi&to- 
cratie  russe  avec  la  couronne;  d'un 
c6te,  par  les  continuelles  concessions 
faites  au  commeroe  pendant  que  la 
Russie  suivait  une  marcbe  opposee,  et 
de  Tautre,  par  Pindifif^rence  avec  ia- 
quelle  on  laissa  cette  derniere  puissaace 
avancer  dans  Faccomplissement  de  ses 
vufs  pour  Toccupation  du  Bosphore. 
«  Et  pourtaiit  rexp^rience  du  pas*c 


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AUSSIK. 


610 


depose  de  ce  pouvoir  de  i'AngJeterre 
daos  deux  m&oorebkM  oocasions. 

tOn  sait  qae  Fhostilit^  de  Paul  a 
r^aid  de  TAiigleterre  lui  co^lta  la  vk. 
Aloaodre  fut  foro^  d'abaudODner  le 
oootinental  dirig^  eootre  TAn- 
srre.  Les  mtoes  inter^te,  qui  ont 
biess^  alors  par  le  fait  du  gouver- 
oement  rasse,  foroeraient  aajourd*bui 
encore  Nicolas  k  abandooner  sea  pro- 
jets  sur  la  Turquie  et  TOrieot ,  si  r An- 
gleterre,  pendant  au*il  en  est  temps, 
pvtait,  pour  resouare  la  question ,  des 
mfaies  bases  qui  la  soutenaient  autrer 
fois,  et  qui  renvers^nt  non-seule- 
mat  les  (Mrqiets  russes,  mais  les  deux 
oofflbiDaisons  europtomes  qu'eUe  a?ai  t 
h  oombattre. 

«  Depuis  la  demi^re  des  epoques 
doQt  nous  YenoQS  de  parler,  la  Aussie 
estdevenue  plus  vulnerable  encore,  et 
TAugleterre  peut  ratteindreavecmoins 
d'iDooflviteiettts  que  jamais.  Les  ex- 

Ertatioas  de  la  Russie  se  sont  accrues, 
i  exportations  de  TAngleterre  ont 
diminue,  et  de  nouvelles  sources  sont 
ouvenes  au  commerce  anglais  |>our 
compenser  les  pertes  qui  rdsulteraient 
de  oe  Douveau  syst^me. 

«Cc8  suggestions,  quoique  propo- 
se oomme  nooyen  d'atteindre  un 
grsod  bat  politique,  n'oiit  pas  m^me 
besoifl  d'etre  «outenues  par  des  consi- 
dtetioos  poiiti^ues :  les  int^r^ts  du 
oommeroe  anglais  sufifiraient  pour  les 
justifier. 

«  Tandis  que  le  commerce  britanni- 
que  augmentait  plus  on  moins  rapide- 
laent  avec  les  autres  £tats  europeens , 
celoi  fait  avec  la  Russie  demeurait 
stationnaire  ou  diminuait  diropor- 
tance;  il  a  subi  d'ailleurs  un  diange- 
meot  fort  d^vantageux. 

•  II J  a  vingt-cinq  ans,  Timportation 
en  Russie,  par  le  fait  de  TAngleterre, 
consistait  enti^rement  en  ^toffes  an- 
glaises  de  laine  et  de  coton ,  et  en  auin- 
caiJierie;  aujourd'bui,  la  demancie  de 
oes  articles  a  diminu^ ,  et ,  ii  leur  place , 
la  Russie  ne  prend  plus  que  des  ma- 
ti^res  colorantes  et  autres  produits 
bruts,  ou  bien  des  denr^es  coloniales, 
qu'on  ne  fait  venir  d*Angleterre  que 
par  suite  du  bas  prix  des  frais  de  trans- 


port sur  les  navires  qui  arrivent  de  ce 
pays. 

«  La  Russie  consommait  a  F^poque 
ant^rieure  dont  ii  s'agit  pour  2  ou  3 
millions  sterling  de  marchandises  an- 
glalses.  En  1S31 ,  elle  n'importa  que 
pour  1,906,099  livres  sterhng,  dont 
1,251,887  livres  en  coton  S.U  pour  la 
fabrication  des  ^offes,  employees  en 
partie  k  supplanter  les  Anglais  sur  les 
marcb^  asiatiques;  de  facon  que  leurs 
produits  manufacture  n^entrent  plus 
en  Russie  que  pour  un  cinquieme  de 
leur  andenne  auantit^,  et  eependant  la 
population  de  I'empire  s'est  accrue  pen- 
dant cette  p^riode  de  plus  de  dix  mil- 
lions d'dmes. 

« L'extension  toujours  croissante 
des  domaines  de  la  Russie  commence 
done  h  ne  plus  ^tre  d'aucun  profit  pour 
la  Grande-Bretagne.  La  Russie  a  com- 
mence par  lui  retirer  ses  privities 
exclusifis;  aisuite  elle  a  augmente  les 
restrictions,  introduit  des  prohibi- 
tions, et  soumis  le  commerce  et  la 
navigation  k  des  mesures  s^v^res,  avec 
le  but  avou^  de  nuire  aux  exportations 
des  Anglais  et  d^^tabiir  des  manufac- 
tures nvales;  tandis  que  TAngleterre 
continuait  k  r^uire  les  droits  sur  les 
produits  de  la  Russie,  non  pas,  a  la 
verity,  pour  augmenter  les  n^n^fices 
de  cet  txaty  mais  aussi  sans  op^rer 
cette  reduction  de  mani^re  k  lui  sus- 
citer  des  marches  nouveaux.  Le  rdsul- 
tat  fut  done  le  m^me  que  si  les  in- 
tentions de  TAngleterre  eussent  ^te 
Gonstamment  amicales  pour  la  Russie , 
tandis  que  celles  de  Tempire  auraient 
eU  constamment  hostiles  a  la  Grande- 
Bretagne. 

« IraiHeurs  ces  r^ultats,  tout  im- 
portants qu'ils  sont,  paraissent  encore 
plus  avantageux  a  la  Russie  comme 
moyens  d*arriver  k  un  autre  but.  La 
cr^tion  d'int^r^ts  industriels  en  Rus- 
sie pent  devenir,  selon  les  vues  ac- 
tueifes  de  ce  gouvernement,  d'une 
tres-grande  importance  pour  contre- 
balancer  la  preponderance  des  int^r^ts 
territoriaux,  aui  se  trouvent  de  fait 
sous  la  depenaande  de  TAngleterre. 

«  Si  TAngleterre  tarde  plus  long- 
temps  a  faire  usage  du  pouvoir  qu'ell^ 


620 


UUNIYEES. 


potsdde  pour  arr^ter  tous  ces  projets 
avant  qu'ils  mdrissent,  die  perdra 
ce-que  la  Russie  se  propose  de  gagner, 
et  sacrifiera  tous  lea  jours,  en  atten- 
dant, des  avantaces  minimes,  compa- 
rativement  aux  objeta  que  la  Russie  a 
en  vue,  mais  importants  si  Ton  ne 
prend  plus  ce  terme  de  comparaison. 

«  La  Russie  a  exclu  presque  tous  les 
produits  anglais  par  ses  tarifs  les  plus 
rtonts;  eile  a  ^tendu  ce  systdme  a  la 
Pologne,  vers  laauelle  s'^ulait-une 
partie  consid6rabie  des  importations 
oritanniques  iaites  en  Allemagne  et 
dans  les  villes  ans^tiques^  La  Bessa- 
rabia se  trouve  r^unie  aux  domaines 
pusses,  et  ^chappe  ainsi  aux  marches 
anglais;  les  pnncipaut^  de  la  Mol- 
da¥ie  et  de  la  Yalachie  sont  entour^ 
de  eordons  sanitaires  russes,  qui  neu- 
tralisent  consid^rablement  leur  an* 
cienne  liberty  de  commerce;  les  c6tes 
de  la  Circassie  recevaient  autrefois,  a 
travers  TAllema^e ,  des  envois  de  mar- 
ehandises  anglaises,  aujourd'hui  elles 
subissent  un  blocus  permanent.  La 
G^rgie  6tait  le  grand  chemin  de  la 
Perse  et  de  I'Asie  centrale  pour  les  pro- 
duits anglais  venant  des  marches  d  Al- 
lemaj^e;  la  Russie  a  coup^  cette  com- 
mumcation;  seulement  elle  n'a  pu 
empfeher  TAn^leterre  de  s*ouvrir  une 
route  d^tournee  h  travers  la  Turquie 
d'Asie.  La  mer  Caspienne^  qui  appar- 
tenait  anciennement  h  un  Etat  dont  le 
commerce  ^tait  libre,  est  d^ormais 
perdue  pour  les  produits  des  manufac- 
tures anglaises  depuis  qu'elle  a  pass^ 
sous  la  oomi nation  russe.  Cette  puis- 
sance vient  d'arracber  encore  h  la  Tur- 
quie* UM  territoire  situe  a  quelques 
lienes  de  distance  de  notre  route  de 
communication  avec  la  Perse,  et  son 
influence' en  Turauie  a  6U  et  est  diri- 
g^  avec'succ^,  dans  le  but  de  rendre 
les  ressources  de  ce  pays  presque  inu- 
ttles,  et  de  Tempdcher  ie  nous  fournir 
toutes  soFtes  de  produits  bruts  h  meil- 
leur  compte  que  la  Russie,  plus  pr^ 
des  narcn^  europ6ens,  et  avec  plus 
de  facilit6s  pour  les.  Changes  du  com- 
merce. 

«Tels  sont  les  actes  r^nts  de  la 
Russie,  au  m^pris  des  forces  que  TAn- 


fleterre  possdde  sans  les  otUisur... 
/Angleterre  est-elle  sufflsamiaent  p^ 
n6ts^  de  la  n^cessit6  d'avoir  reeoan 
mtoe  k  la  guerre  pour  6carter  des 
daneers  plus  erands  q^e  tous  ceox 
qu*elle  aurait  a  redouter  de  la  force 
ouverte?  Si  c'est  la  le  cas,  elle  ponede 
un  moyen  prompt,  paei^e  et  iH  boa 
marcbe,  de  pr^venir  k  la  fois  et  la 

Suerre  et  oe  que  ia  guerre  serait  hon 
*^tat  de  pr^venir. 
« L'Angleterre  n'a  qu'^  dtor^ 
une  augmentation  saoement  propor- 
tionnte  des  droits  sur  le  suif ,  le  cnaa- 
vre,  le  Un  et  les  autres  exportations 
de  la  Russie,  et  la  noblesse  de  oe  pays 
arrangera  bien  vite  les  affaires  db  oe 
pays  avec  Tempereur. » 

Ces  rtoiminations  indiqnent  mieox 
mie  ne  pourraient  le  faire  des  volumes 
d'argumentations  jpolitiques  k  quelles 
faibies  attaches  tient  encore  la  paix 
entre  la  Russie  et  I'Angleterre,  c*est- 
k-dire  la  paix  de  TEurope.  L'Angle- 
terre se  trouve  dans  i'alteniattve  ou 
de  voir  s'effacer  enti^meot  son  in- 
fluence, ou  de  risquer  une  guerre  rui- 
neuse.  Au  milieu  mtoe  de  ses  mena- 
ces ,  il  est  ais^  de  voir  qu'elle  craint  de 
s'avancer  trop  loin;  quoi  qu'elle  en 
disc,  une  modiCcation  dans  son  tarif 
d'importation,  k  I'^ard  de  la  Russie, 
ne  la  mettrait  pas  dans  une  situation 
commerciale  et  politique  moins  pr^ 
caire.  Les  produits  indispensables  a  sa 
marine  militaire  et  mardiande  ne  peu- 
vent  lui  £tre  fournis  que  par  la  Russie 
et  la  Turquie;  or  nous  avons  vu  que  le 
traits  dllnkiar-Skelessi  met  cette  se- 
conde  puissance  enti^rement  k  ia  dis- 
cretion de  la  premiere;  de  sorte  qu'un 
tarif  prohibitif  a  I'egard  de  la  Russie 
laisserait  les  int^r^ts  britanniques  en 
souffrance,  sans  que  la  Turquie  leur 
pdt  venir  en  aide.  Quant  k  la  classe 
des  grands  propri^taires  en  Russie  ou 
des  nobles,  leurs  vues  se  sont  bien 
modifl^es  depuis  le  r^ne  de  Paul. 
L'issue  de  la  grande  lutte  qui  a  com- 
mence en  1812 ,  a  I'instigation  de  TAn- 
gleterre,  a  beaucoup  agrnndi  la  sphere 
de  leur  ambition ;  ils  comprennent  par- 
faitement  que  la  Question  de  prepon- 
derance russe  se  aenouera  k  Constan* 


RUSSIE. 


631 


tinople.  tU  savent  que  les  dol^ances  et 
le»iiieiiaoes  de  TAugleteiTe,  tant  ^ue 
eette  puissance  restera  \i6e  h  la  politi- 
que ^oite  qu^elle  a  adopts ,  ne  seront 
qu*autant  de  cris  de  d^tresse.  lis  s'iro- 
poseraieat  aa  besoin  tous  les  sacrifices 
pour  se  soustraire  UDe  fois  pour  toutea 
aux  exigences  de  la  politi<;|[ue  auglaise, 
et  ils  aspirent  k  la  possession  de  Cons- 
tantinople antant  par  esprit  national 
que  par  des  considerations  d'int^r^t 
pri?^.  Certes,  il  n^est  pas  difficile  de 
cooipreDdre  que.  les  accusations  por- 
tees  par  Tfiurope  centre  Tambition  du 
cabinet  imperial  retentissent  en  Russie 
eofflme  des  hymnes  en  Thonneur  du 
tsar;  tout  ce  que  les  Russes  lui  deman- 
dent  c'est  de  r^ussir;  et  la  profonde 
habilete  des  hommes  d'£tat  oui  diri- 
gent  la  politique  de  la  Russie,  la  cons- 
tenoe  oe  leurs  vues,  au  milieu  de  la 
confusion  qui  regne  en  Europe,  sont 
bien  de  nature  h  se  concilier  la  con- 
fiance  nationale,en  m^me  temps  qu'elles 
jettentralarme  dans  les  int^rets  rivaux. 
D'un  autre  c6te,  si  la  Russie  ne  s'em- 
pare  pas  encore  des  Dardanelles,  ce 
n'est  point  par  moderation;  Thistoire 
terooigne  que  la  moderation  des  Russes 
n^est  qu*une  affaire  d'opportunite. 
UAllemagne  a  encore  des  scrupules; 
eJie  besite  entre  le  protectorat  declare 
de  Ja  Rossie  et  TinTasion  du  liberalisme 
applique  a  une  reforme  administrative. 
Qaandces  scrupules  seront  leves,  ou  par 
Taojuiescement  unanime  de  la  grande 
fanulle  allemande,  ou  en  neutralisant 
par  une  opposition  habile  les  forces 
centrales  de  l^Europe,  alors  les  temps 
seront  veous ,  et  la  politique  des  caoi- 
nets  oonstitutionnel^  n'aura  plus  que 
la  ressource  de  proclamer  inevitable 
oeqaVUe  n'aura  pas  su  prevenir. 

Ce  qui  demontre  que,  dans  retat 
actael  des  choses,  le  systeme  pacifique 
n'est  qu*un  pretote  specieux  dont  se 
couYreot  des  intertts  mesquins  ou  des. 
malites  mal  deguisees,  c'est  que  la 
goerre  est  au  fond  de  toutes  les  ques- 
tions :  qu*dle  ressemble  h  une  royale 
partie  <rectec8,  comme  a  An  vers; 
qa'elle  se  dennse  sous  le  nom  d'inter- 
ventioa  particuliere,  comme  dans  la 
pteinsule  iberique;  qu*elle  eclate  en 


dissensions  et  en  emeutes  a  main  ar- 
mee,  au  mot  d'ordre  des  hautes  puis- 
sances interessees^  comme  en  Grdce« 
cen'en  est  pas  moms  la  guerre :  et  ee 
fleau,  pour  ne  frapper  que  quelques 
points  isoies ,  existe  comme  une  protes- 
tation irrecusable  oontre  les  mensonges 
dores  de  la  diplomatic.  Les  guerres 
franches  qui  sont  comme  un  duel  entre 
des  interits  irreconciliables,  quelques 
malheurs  qu'elles  entratnent,  ont  du 
moins  I'avantage  de  trancher  les  ques- 
tions que  la  divergence  de  ces  inter^ts 
rendrait  insolubles  de  toute  autre  ma- 
niere;  elles  eclatent  et  finisseut;  mais 
un  danger  toujours  imminent,  et  dont 
la  cause  subsiste  et  grandit  sans  cesse, 
est  un  poids  au-dessus  des  forces  de 
rhumanite;  h  la  longue,  renergie,  qui 
ne  demande  qu'a  entrer  en  lutte,  se 
consume  ou  se  tourne  centre  elle-mtoe , 
et  les  bases  de  Tedifice  social  sont 
ebraniees. 

Si  nous  jetons  un  coup  d*oeil  sur 
l*£urope,  nous  deduirons  aussitdt  la 
conclusion  que  tous  les  interets  sra- 
vitent  autour  de  quelques  centres  frac- 
tion oti  dominentdes  buts,des  princi- 
pes  ou  des  interets  rarement  analogues, 
souvent  difterents  et  mdme  contraires. 
La  Prusse  s'occupe  k  etablir  son  in- 
fluence sur  les  £tats  secondaires  et  sur 
les  petites  seigneuries  de  TAlleroagne; 
elle  aspire  a  regner  sur  la  confeoera- 
tion  par  la  representation  intelligente 
du  principe  protestant,  par  un  certain 
liberalisme  oppose  au  systeme  station- 
naire  de  TAutriche,  par  renlacement 
de  sa  ligne  conunerciale,  enfin  par  un 
syst^e  bien  regie  d'administration ; 
mais  si  reiement  democratique  se  re- 
trouve  dans  ses  institutions ,  Yon^itm 
de  sa  puissance  condamne  sa  politique 
au  despotisme  le  plus  riffoureux ;  elle 
s'est  agrandie  h  Fombre  ae  la  Russie, 
et  elle  n'agit  sur  TAllemagne  que  sous 
le  patronage  et  dans  Tinteret  de  sa  ppo- 
tectrice.  Ainsi,  par  un  bizarre  elfet 
des  combinaisons  qu'elle  a  subies,  la 
population  la  plus  edairee  de  I'Alle- 
magne  appuie  Tabsolutisme  dans  les 
grandes  pnases  de  son  action.  II  est 
impossible  que  la  Prusse  s'abuse  sur 
lerdle  qu'elle  joue  en  Europe,  qui 


62a 


L'UNIVERS. 


se  reduit  h  l^itimer  en  AUemagne  les 
pretentions  ult^ieures  de  la  Russie, 
et  h  preparer  doueemeut  la  conf(6d6ra- 
tion  a  V\d6e  d'une  dependance  plus  di- 
recte. 

L'Autriche  est  enti^ment  sous  la 
main  de  la  Russie;  son  influence  sur 
FAllemagne  est  neutralist  par  la 
Prusse;  et,  si  elle  y  jouit  de  quelaue 
consideration,  c'est  moins  par  les 
avantages  qu*elle  pourrait  aooorder  par 
elle-meme,  que  parce  que  la  grande 
famiile  altemande  voit  en  elle  un  en- 
nemi  naturel  de  la  puissance  russe. 
L'Autriche  a  plut6t  recouvr^  qu'elle 
n*a  gagne  au  partage  du  congr^s  de 
Vienne;  elle  est  encore  plus  que  la 
Prusse  un  gouTcmeroent  et  non  un 
l^tat :  elle  offre  le  spectacle  singuiier 
d*une  agglomeration  de  pennies  slaves , 
germains  et  itaiiens,  dont  la  cohesion 
a  besoin  d*un  lien  despotique,  et  que 
plus  de  liberty  politique  grouperait 
immediatement  en  nationalitds  dis- 
tinctes ,  pour  aller  se  confondre  bient6t 
avec  les  grandes  nations  d*une  origine 
coniimine.  La  marche  de  rAutricne,.. 
aussi  bien  que  oelle  de  la  Prusse,  est 
done  compfexe;  et,  tandis  que  son 
hostility  centre  la  Russie  la  rapproche 
de  rAngleterre,  elle  se  voit  contrainte 
d'appuyer  les  int^r^ts  les  plus  vitaux 
de  sa  puissante  rivale  dans  la  question 
hoUando-belge  et  dans  la  question  es- 
pagnole.  L'Autriche,  depuis  la  chute 
de  Napol6on,  n'a  fait  que  changer  de 
mattre;  vainement  elle  a  essaj^e  d*en* 
traver  les  desseins  de  la  Russie  h  T^- 
poque  de  Tinsurrection  grecque  et  pen- 
dant la  guerre  de  Turquie ;  erfe  a  trouv^ 
la  France  et  TAngieterre  si  insou- 
oiantes  de  leur  propre  conservation, 
qu*elle  s'est  vue  obligee  de  d^savouer 
ses  velieites  d^ind^pendance,  et  le  ca- 
binet Metternich  a  pris  le  parti  d^^viter 
soi^eusement  tout  ce  qui  pourrait 
exciter  pr6maturenient  le  mecontente- 
roent  de  la  Russie;  cependant,  en  cas 
d'unecombinaison  serieusementagres- 
sive  contre  la  Russie,  I'Autriche  ne 
pourrait  qu*appuyer  cette  coalition,  k 
moins  qu*elle  ne  sacrifldt  son  existence 
k  ses  pnncipes.  Elle  gagnerait  h  Tabais- 
dement  de  la  Russie  de  s*as6urer  ses 


possessions  d'ltalie  par  le  fait  de  son 
alliance  avec  la  France ,  et  de  reprendre 
h  la  di^te  gerroaniipie  le  r61e  que  lui 
dispute  aujourd'bni  la  Prusse,  dont  la 
fortune  suivrait  celle  de  la  Russie. 

L'Angleterre  est  denude  de  grands 
Rioyens  militaires;  die  est  absorbee 
par  les  soins  d*un  vaste  systeme  com- 
mercial; ses  alliances  se  traduisent  en 
chiffres;  coton,  suif,  soie,  fer,  sent 
des  mots  qui  r6sonnent  plus  haut  a 
Londres  que  ceux  de  dignity  Rationale 
et  progres  humanitaire.  L'Angleterre 
est  done  peu  propre  k  une  srande  ac- 
tion dMnitiative;  mais  Tinfiuence  de 
son  commerce,  de  ses  flottes  est  uni- 
verselle;  si  elle  figurait  dans  une  lutte 
europeenne  sans,  arriere-pensee,  et 
uniquement  dans  le  grand  lut^^r^  de 
Taihance,  nul  doute  que  son  interven- 
tion ne  fdt  decisive. 

La  situation  politique  de  la  France 
est  si  compliquee,  et  les  influences  qui 
s*y  trouvent  en  lutte  ont  un  caractere[ 
si  safUant,  que  cet  £tat  represente  a 
lui  seul,  quoique  sur  une  echelle  re- 
duite,  tons  les  pnncipes,  tous  les  in- 
terets  qui  reunissent  ou  gui  divisent  le 
monde.  Riche  des  produits  de  son  sol , 
forte  de  Thomogeneite  de  ses  popula- 
tions, adossee  aux  Pyrenees  et  aux 
Alpes,  et  baignee  par  les  deux  mers, 
la  France  a  pu  vivre  d'elle-meme,  et^ 
sans  inquietude  sur  ses  besoins,  elle  a 
traverse  toutes  les  phases  de  la  vie  des 
peoples,  experimente  toutes  les  insti- 
tutions. Elle  a  eu  ses  luttes  d*etablis- 
sement;  elle  a  grandi  sous  la  double 
influence  des  pnncipes  religieux  et 
feodaux,  pour  se  constituer  definiti- 
vement  en  monarchic ;  en  peu  de  sie- 
cies ,  elle  a  use  la  forme  monarchique, 
elie  s'est  deharrassee  de  raristocratie; 
mais  chez  elie  reiement  democratique 
a  grandi  trop  vite;  il  en  est  resulte  une 
monarchic  sans  racines,  une  liberte 
qui  est  dans  les  moeurs  sans  ^tre  dans 
les  institutions ,  des  alliances  equivo- 
ques commte  Tessence  elle-meme  du 
gouvernement.  Mais  ce  caractere  en- 
treprenant  des  Fran^ais,  ce  besoin 
d'appliquer  les  theories  gouveroemen- 
tales  pour  y  cbercher  de  suite  ce  qu'il 
y  a  au  fond,  est  jostement  ce  qui  fait 


RUSSIE. 


OSS 


ren^ranee  des  peu|rfes  ^isoaffrent, 

et  rappT^bensimi  oes  rsns  qui  oppri- 

ment'tn  peoples.  La  syropathie  d«s 

nasstt  pour  Tesprit  fran^ais  n'estaatre 

diott  qoe  del'espoir ;  elle  est  raisonn^ 

d  poisBante,  et  tient  k  la  fois  au  per- 

fecRonoement  moral  el  aui  intei^^U 

nat^ds.  Gependant  la  France  i  avec 

100  yatak  moDarchique  et  ses  i^formes 

jaoompi^tes,  ne  peiit,  dana  I'^t  ac- 

ttul  de  son  oraniisation ,  offrir  un 

point  d'appui  soTide  ni  k  TAngleterre, 

nii  est  ^  la  feitte  d'une  r^olutton  ra* 

dicale,  ni  h  I'Autriche  l^gitiariste.  Le 

^on?ema(nent  de  jnillet  restera  done 

isoJ^  ju8(}a*ii  oe  qu'il  ait  pris  one  atti* 

tode  moins  equivoque;  de  til  les  efforts 

des  cabioets  absolatiBtes  pour  Ten- 

tnlner  dans  une  marche  retrograde. 

Dans  la  question  d'Orient,  les  tnt^r^ts 

aetuels  oe  la  France  yiennent  se  oon- 

fondre  arec  eesx  de  la  Rossie ;  car  1*6- 

tablisseraeDt  d'one  oolonte  en  Afrique 

est  un  non  sens,  s'il  reste  r6duit  aux 

proportions  mesquines  d*nn  pied<4- 

terre  di^ndieax ;  si  la  pens^e  du  pou* 

roir  va  an  dellk,  elle  conspire  le  d^- 

memlMremeiit  de  t'empire  ottoman  et 

rapprodie  f^poque  de  la  conqu^  de 

Constantinople.  On  Toit  done  que  Tin- 

flueooe  de  la  France ,  nous  voolons  dire 

eelle  de  son  goaTemement,  est  neu* 

traKsdepar  T  Aotriche,  et  que  la  Prusse 

n'est  qa  one  annexe  de  la  Russie.  11  ne 

reste  plus  qoe  deux  pnissanoes  ind^ 

fwadantes  et  entralnant  les  autres 

Etats  dans  leur  sphere  d*action :  ces 

deux  puissances  sont  la  Russie  et  I'An- 

£;erre.  Or  ii  est  Tisible  que,  de  ces 
X  forces  rifales,  la  premiere  a  toutes 
les  chances  en  sa  faveur :  pr^nd^* 
rmoe  nimiMque,  organisation  mili- 
taire,  uirit6  de  Tolonw  sans  oontrdle 
pessHile  dans  rex6cution ,  altianoes  non 
dovteuses :  tons  ces  arantages  se  tron- 
vent  da  cdt^  do  nord. 

la  Russie  trouve  dans  la  simplicity 
<le  SOD  gooyemement  une  large  com- 
pensation ao  vice  de  son  administra- 
tion intMenre;  nn  secret  profond 
<*oinrre  sea  fsnites;  elle  sait  agir  en 
temps  opporton,  mais  die  sait  atten- 
<b«.  QamM  PEurope  a  le  loisir  de  s'oc- 
<»P«r  sMeusement  dn  danger  pr^nt , 


la  Russie  ne  p&ratt  plus  poursuiitre 
que  des  plans  d*amelioration  mt^neure, 
mais  ce  repos  n'est  qn'une  preparation 
a  d'autres  oonau^es;  et,  grdce  au  peu 
d'accord  qui  r^ne  entre  les  cabinets 
rivaux,  il  surgit  bientdt  quelque  ques- 
tion nouveile  oii  sed^penseractirftede 
la  diplomatic  rivale ;  alors  la  Russie  fait 

aueioues  pas  en  avant,  mais  de  ces  pas 
e  geant  qui  6crasent  des  empires,  et 
dont  Tempreinte  est  oomme  une  prise 
de  possession.  Chacun  de  ses  succ^ 
ajoute  k  ses  ressources  en  diminuant 
<rautant  les  ressources  des  puissances 
rivales.  Gependant,  eu  d^pit  de  cette 
marche  constamo^t  envanissante,  la 
position  de  la  BtnSie  devient  plus  dif- 
tieile  que  par  le  pass^,  a  mesure  que 
son  but  capital ,  1  occupation  des  Dar- 
danelles, est  plus  dairement  d6fini; 
et  c^est  un  spectacle  plein  d'ensdgne- 
ments  politiques  que  celui  de  tous  les 
ressorts  ou'elle  fait  jouer  pour  amener 
ce  grand  a^nodment.  Tantot  elle  eouvre 
la  Turquie  de  sa  protection;  h  Tenten- 
dre ,  c*eet  r  Angleterre  et  la  France  qui 
mmtent  la  mine  de  Tempire  ottoman ; 
ne  Toit-on  pas  ces  puissances  encou- 
rager  la  r^voite  de  TEgypte?  la  France 
ne  conyoite*t-ellepBS  toute  la  cdte  sep- 
tentrionale  de  TAirique?  mais,  grdce 
an  traits  d*Unkiar-Skeiessi,  la  Turquie, 
si  elle  est  fidele  aux  stipulations  que  la 
pr^ojance  mosoovite  lui  a  imposes, 
n*aura  rien  h  craindre  d*une  agression 
etrangere....  En  attendant,  la  Russie 
habitue  lefatalisme  des  Turcs  ^  la  rue  de 
son  pavilion  etde  ses  livrees  militaires; 
le  z^le  de  son  alliance  va  si  loin ,  qu'elle 
fait  distribuer  ses  decorations  aux  sot- 
dats  de  Mahmoud;  et  le  suHan,  place 
entre  la  resistance  des  Mnsolmans  et 
rimperieuse  bienveillanoe  du  tsar,  n*a 
d'autre  ressource  que  d'ensevdir  dans 
les  vagues  du  Bospbore  quelques  Turcs 
assez  amis  de  son  trdne  pour  rejeter 
des  distinctions  humiliantes.  Cest  tou- 
jours  le  meme  systeme  de  corruption 
dissolvanted'une  Dart  etd'intimidation 
de  Fautre;  c'est  rhistoire  de  la  Polo- 
gne,  de  la  Georgie,  de  la  Finlande, 
des  provinces  baltiques ,  de  la  Grimee, 
de  la  Moldavie,  de  la  Yalachie,  de  la 
Grece,  de  la  Perse;  et  la  Russie,  do 


634 


L'UNIVERS. 


milieu  de  tous  ces  £tat8  conquis,  d^ 
membr^  ou  h  la  veiile  de  Itoe,  la 
Russie  declare  h  TEurope  qu'elle  n'a 
que  des  ?ues  d^ordre,  de  justice  et  de 
modi^ration ;  TEurope  n'eii  croit  rien , 
mais  FEurope  est  dependante,  ^oiste 
et  divi»6e,  et  elie  repete  a  aon  tour, 
dans  ies  disoours  officiels  des  princes, 
que  la  paix  g^n^ale  n'est  pas  menacte, 
tandis  que  cette  paix  si  pr^cieuse  n'est 
que  le  r^ultat  d  une  coupable  condes- 
oendance. 

La  Russie  met  h  profit  tons  ces  ^1^ 
ments  de  faiblesse  et  de  division;  elle 
•  poursuit  babilement  et  rdsoiument  son 
ceuvre;  organisee.  jiour  la  conqu6te, 
elie  ne  s'arrltera  gjk  lorsque  le  prin- 
cipe  d'activit^,  qui  est  la  condition  de 
son  existence,  r^ira,  faute  d'aii* 
ments,  sur  elle-meme,  c*est-^-dire, 
lorsque  TEurope  et  TAsie  seront  russes 
de  fait. 

M.  de  Talleyrand,  qui  avait  profon- 
d^ment  ^tudi^  Ies  ressources  et  resprit 
de  la  politique  russe  dans  Ies  ^andes 
phases  de  Talliance  et  de  Thostilit^  de 
cet  itaX  avec  la  France  imp^iale, 
M.  de  Talleyrand,  disons-nous,  avait 
r^uit  le  probldme  de  la  lutte  centre 
1  influence  moscovite  k  sa  plus  simple 
expression,  en  concluant  le  traits  de 
la  quadruple  alliance.  Dans  Ies  vues 
de  ce  diplomate,  la  question  espagnole 
n'etait  qu*un  tb^me  qui  renfermait  le 
principe  fi6cond  de  ralliance  anglo- 
fran^aise.  Le  p^l  ^tait  grand  }X)ur  la 
Russie;  elle  se  bdta,  au  premier  cri 
d*alarme  de  ses  diplomates,  de  raviver 
des  susceptibilites  nationales  de  pays  h 
pajs,  et  d'opposer  partis  k  partis  au 
sein  m£me  des  deux  £tats  rivaux :  in- 
t^r^ts  dynastiques,  opposition  consti- 
tutionnelle,  pnncipes  radicaux  et  l^gi- 
timistes,  elle  emjploya  tous  ces  leviers, 
6pnisa  tontes  ies  combinaisons  du 
oalcul  et  de  la  politique,  et  arriva  enfin 
au  r^ultat  ^'elle  se  proposait :  la 
France  et  TAngleterre,  au  lieu  de  ter- 
miner promptement  le  conflit  espa- 
Snol ,  oe  qui  aurait  entraine  la  solution 
e  la  question  boliando-belge,  pour 
tourner  ensuite  toute  leur  attention 
vers  rOrient,  avoudrent  qu'elles  nV 
saient  intervenir  en  Espagne  dans  la 


crainte  de  la  Russie;  et  ces  deux  cou- 
ronnes  ies  plus  riches,  Ies  plus  puis- 
santes  du  fflobe,  dont  Ies  populations 
r^unies  s'elevent  au  cbiffredesoixante 
milUons  d'dmes,  ces  deux  couronDcs 
qui  peuvent  disposer,  Tune  des  foioes 
militaires  qui  ont  asservi  TEurope, 
Tautre  d'une  marine  sans  rivale  dans 
le  monde,  ont  accepts  rafiroat  et  la 
responsabilit^  d'une  condesoeodaooe 
plus  perilleuse  que  la  guerre  elle-mloie. 
De  bonne  foi,  peut-on  faire  un  crime 
h  la  Russie  de  son  habilet^  a  profiter 
et  des  dianees  que  lui  ouvre  la  for- 
tune et  des  fautes  des  cabinets  rivaux? 
chez  elie,  FambiUon  ne  se  confond- 
elle  pas  avec  la  loi  supreme  de  sa  pro- 

Sre  conservation?  Sans  Tempire  oe  la 
[^iterrande,  qui  la  rend  mattresse 
des  trdsors  de  TAsie  et  des  principaux 
march^  de  TEurope,  11  faut  qu'elle 
renonce  k  entretenir  une  arm^  dfe  buit 
cent  miile  hommes:  et  unefois  desar- 
m^,  une  fois  le  prestige  deson  om- 
nipotence detruit ,  ses  alliances  forcees 
lui  ^cbapperont,  et  en  pen  d'ann^ 
elle  aura  rdtro^radd  de  deux  sidles- 
Mais  si  la  Russie  obdit  a  la  ndoessi^^ 
en  accomplissant  sa  marche  envabis- 
aante  et  progressive,  I'Angleterre  et 
la  France,  qui  possddent  Ies  nioyens 
d*arr£ter  la  puissance  russe,  out  un 
tort  encore  plus  Evident,  celai  de  coo- 
rir  sciemment  h  leur  d^nsideration 
et  finalement  k  leur  mine. 

G'est  une  tdche  s^rieose  et  triste  que 
de  tirer  de  I'examen  des  foits  des  con- 
s^ences  oontraires  aux  int6r^s  de 
rbumanitd;  e'en  est  une  non  moiitf 
difficile  de  rdveiller  de  leur  sommeil 
Ies  socidt^  amoUies  et  ^oistes;  ell^ 
consentiraient  presque  k  Pabandon  de 
tous  Ies  droits  que  leur  a  faits  Ttoergie 
de  nos  p^res,  pourvu  que  le  trarail 
de  leur  transformation  ne  fAt  pas  trop 
pdnible.  C'est  surtout  dans  Ies  maladies 
de  langueur  que  Ton  s'^int  saosoon- 
vulsions.  ^ 

Sans  doute,  il  est  plus  facile  dMrnN- 
quer  le  mal  que  de  montrer  le  remede; 
mais  si  Tdtude  du  passd  n'a  pas  pour 
but  unique  de  satisfaire  une  curiosite 
sterile,  il  est  du  devoir  de  rbistorien 
de  porter  qudquefbis  ses  regards  sur 


•  ••  •  a    • 

••••    •••• 

•••       ••• 


•  -• 


•  •  •  • 

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•• •*    •••  • 
•  •_      • •  • 


•  ••* 


\ 


RUSSIE, 


6So 


Tavenir,  de  pr^ro*  les  eBprits  h  une 
appreciation  oonsdeneieuse  des  chan- 
ces probables,  pour  que  les  d^voue* 
ments  ^air^  ne'fassent  pas  defaut  au 
joiir  da  danger.  Semblables  h  ces  chefs 
qui  oot  rieiUi  dans  les  fatigues,  les 
deuples  de  TEurope  aspirent  a  jouir  de 
ieors  travaux,  et  cependant  I'heure  de 
la  s6cxxril6  n'est  pas  fenue.  A  I'ini^ 
rteur,  les  questions  les  plus  vitales  de 


eofin,  tout  est  k  refkire  ou  k  modifier; 
il  V  a  done  lutte  et  ^ril  dans  la  paix 
meme;  toutefbis  le  bon  sens  puolic 
est  sur  la  voie  des  am^orations; 
les  priTil^ges  et  les  abus  de  toute  es- 
IwcC)  jo^&  par  Topinlon ,  vont  tomber 
avec  les  institutions  qui  les  oonsacrent ; 
mais  de  quoi  serriraient  Texp^^rience 
des  siecles  et  le  long  travail  des  dvilisa- 
tioDs,  si  une  force  agressive  menace  k 
chaque  instant  de  d^truire  I'oeuvre  du 
temps  et  du  g^ie,  et  de  jeter  un  nou- 
veau  jottg  de  fer  sur  TEurope  r^6* 
neree.  II  y  a  done  aussi  p^ril  au  dehors. 
£t  c'est  an  milieu  de  tant  de  grafes 
i{uestioDS  ind^ses  que  i'on  s'oocupe- 
rait  k  dorer  les  bases  chanodantes  de 
la  sod^ ,  qu'on  oserait  prodamer  que 
Jer^sultat  de  tant  de  r^Tolutions  san- 
glaotes  est  definitivement  acquis!  Un 
caEe  de  salut  s'ofifre  au  monde,  c'est 
falliance  franche,  intell^ente«  c'est- 
i-dire,  efficace  de  la  France  et  de 
TAngleterre ;  tons  les  int^r^  de  dynas- 
ties, de  fronti^resy  de  d^Tcloppement 
iDoral  et  Industrie],  sont  pr6caires 
saos  die.  Si  cette  alliance  est  lavorable 
aax  droits  des  nations,  si  die  n'use  de 
ta  force  que  pour  prot^er  et  non  pour 
soumettre ,  pour  creuser  un  lit  profond 
au  torrent  qui  grossit  tous  les  jours  au 
Dord  eilirorient,  et  non  pour  changer 
bmtajenient  des  nationality  rebelles, 
olors,  et  peat^tre  mtoie  sans  efifiision 
desanff,  tous  oeoxqui  ontpouvoir  et 
gMe  devront  se  livrer  k  la  tflche  d^- 
somiais  possible  de  rendre  les  hommes 
phis  hoireux  et  plus  digues  de  T^tre. 

On  a  po  foir  oaiis  I'actioA  oonstante 
de  la  Rttssie  sur  la  politique  toang^ 
et  dans  rcspritdeses  traits,  que  toute 

40*  Uvraisan.  (Kussii.)  t.  ii. 


son  organisatloii  r^ad  k  un  plan 
immense  de  d^vdoppements  et  de  cod- 
qultes;  il  nous  reste  k  montrer  que 
ses  provisions  pour  TaTenir,  dans  Is 
systeme  de  Tinstruction  pubilque,  d^ 
cdent  la  mtoe  tendance ;  que  tout  s'y 
enchatne,  en  un  mot  que  le  gouvem^ 
ment  ne  consid^re  le  progr^  intellee- 
tuel  que  comme  un  moyen,  tandis 
qu'il  trace  au  progres  moral  deslimites 

2u*il  renferme  dans  les  exigences  du 
espotisme.  L'ouvrage  publie  rOcem- 
ment  parM.  Rrusenstern,  nous  ser- 
▼ira  de  guide  pour  les  details  et  les 
chiffres ,  mais  nous  tirerons  qudque- 
fois  des  mOmes  dements  des  conclu- 
sions contraires ,  non  parce  que  Pau- 
teur  ne  les  a  pas  sainement  appr^^, 
mais  parce  que  son  but  Otait  evidem- 
ment  apologOtique  tandis  que  le  ndtre 
se  renferme  dans  Tetude  impartiale  de 
la  v^tO. 

La  mOme  cause  qui  a  dd  faire  fiiire 
des  progr^  rapides  aux  connaissan- 
ces  OlOmentaires  dans  Tempire  rus* 
se ,  s'est  opposee  k  leur  dOveloppement 
transcendant,  et  cette  cause  c  est  Tae- 
tion  ^ouvemementaie  agissant  oomme 
principe  unique  sur  Tinstruction  de  la 
jeunesse  russe.  Nous  avoujerons  que  le 
systeme  adopts  ne  manque  ni  d'harmo- 
nie  ni  de  grandeur ,  mais  il  pdche  par 
la  cause  mime  qui  le  constitue.  II  im- 
pose une  barriere  k  rintdligjence,  il 
iui  prepare  des  mat^aux  ineomplets 
et  rejette  tous  ceux  qui  ne  pourraieoC 
entrer  dans  I'Mifice  du  despotisme. 
L'expOrienoedessiMes  et  des  dvilisa- 
tioqs  n'est  pr^nt^  auxd^ves  qu'avee 
les  restrictions  timides  d'une  oensare 
ombrag^se ;  en  un  mot,  si  le  voeu  goo- 
vernemental  est  rempli,  rinstruction 
est  tronqu^  et  au^dessous  des  lumidrss 
du  sitele;  si  die  s'd^e ,  mdcrO  les  en- 
traves  qu'elle  renoontre  k  cbaqoe  pas, 
die  se  trouve  comme  deplao^e  dans  le 
cadre  qu'on  Iui  destine. 

L'invasion  des  Mongols  ddtraisit 
le  germe  des  connaissanees  que.  les 
relations  avec  le  Bas-Empire  avulest 
port(6es  en  Russie  :  aprte  TexpulsioD 
des  hordes  asiatiques,  le  long  tr^dl 
de  la  rtoivanisation  des  apanages 
sooiB  un  mme  sceptre,  et  ks  M- 

1« 


616 


LTJNIVERS. 


tes  indedsatttes  !(▼«:  la  ^POtogne ,  la 
CrimeeetlaSuMis/^nip^hMiit  que 
les  arte  etles  sctendte  ne  fis^ent  m 
progres  tensiblesen  Moseovie.  Lahaine 
contre  les  i^trangers ,  motive  par  tailt 
d^invasions  isanglantes,  se  reporta  iin- 
que  sur  leilrs  moeurs  ^t  tours  institu- 
tidns :  aussi  les  efifbrs  de  quelqoes  tsars 
pour  introduire  dans  tears  Tastes  Etalis 
les  oounai^sanGes  europ6ennes ,  rest^ 
vent  longtemps  vains  et  fnfruetueux. 
La  discipline  militaire  elle-m^me  fiit 
.  repoussee  par  les  Russes  comme  enta- 
eh6e  d'un  caract^re  antinationai.  On  ^ 
▼u  afec  queHe  peine  Pierre  ie  Gi^nd  par- 
viiit'  k  introduire  ses  r^formes.  Avant 
foi  Tacadtoie  eod^asti^e  de  Mos* 
eou ,  foQd^  en  1679  par  le  tsar  F^odor 
Aiex^i^vitch ,  et  ^lev6e  au  rang  d^aea- 
dteie  en  1669 ,  ftit  le  premier  ^tablis- 
aemeat  destln^  k  r^guiariser  rinstruc- 
tion  en  Russie.  Une  de  ses  attributions 
'^it  d*6xaminer  les  Strangers  qui  se 
vouaient  k  Tenseignenient  dans  les 
liaisons  particuli^res :  on  pense  bien 
mi*k  cette  ^poque  ce  oontrole  toitau- 
flessos  de  sa  port^.  Pierre  le  Grand, 
avec  leqnel  tout  oommenoe  en  Russie, 
liuivit  une  mardie  phis  rationnelle ,  il 
envoya  un-^rand  nombre  de  jennes 
•Russes  ^tudier  k  T^tranger,  et  fit  venir 
d'AHeniasne,  de  France,  d'An'gleterre 
«fcde  Holiande,  des  homines  capables 
de  4e  seconder  dans  la  tAche  hnmense 
^iis'^tait  cr6te.L' tobHssement  d'6oo- 
les  ^toentaires  et  gratirites  dans  ^lu- 
•ieurs  Tilles,  tet  laivouveUe  organisa- 
•tiott  du  cl^g^,  suivhrent  ces  mesures. 
*La  yittgtitoe'  partie  des'  rerenus  des 
ODorents ,  et4a  trentl^me  de  celui  des 
^ises ,  fiirent  afleetto  k  Fentretien 
deoes^odes. 

Dans  la  derni^re  annte  de  son 
vdgiie,  Pierre  le  Grand  tra^a  le  plan 
deaott  aoadtaie  des  sciences  de  Saint- 
P^nbouvg.  Une  nouveile  imprime- 
rie  fut  ^tablie  a  Moscou ,  et  en  1716 
la  prMi^re  gazMte  russe  pamt  dans 
oette  TiUe;  n^annoins  telle  ^tait  la 
i^gnanee  des  parents  k  envoyer 
leura  enfants  aux  to>les ,  qu*il  faflut 
user  de  rfguear  pour  les  Tcontraindre. 
Limp^vatriee  Anne  tobUt  des  toiles 
de  gamison  pour  les  eo&nts  des  mili- 


tairesde'tout grade.  Ellecr^aen  1731, 
le  premier  corps  des  cadets  k  Saint- 
P6tersbours.  Sa  sollicitude  s'^tendit 
jusque  sur  les  peuplades  les  plus  ^loi- 
gnteSi  et  elle  oomprit  qu'elle  les  atta* 
cherait  k  I'empire  par  les  bienfaits  de 
Piiistniction  bien  plus  que  par  la  con> 
trainte. 

«  Tousltis  eiifants  appartenant  a  la 
dasse  du  clei^^ ,  et  qui  vivaient  sans 
^tat'Ct  dans  Toisivet^,  ajant  €tk  assu- 
jettis  au  service  militaire,  Timpera- 
trice  Anne  en  libera  cenx  qui  avaient 
fr^queiit^  les  ^coles ,  et  \es  admit  au 
service  civil  lor9qu*ils  ne  se  sentaient 
pas  de  vocation  pour  r^ise.  Cette 
sottversine  fut  la  premti^e  qui  soumit 
au  eontrdle  dn  gouvemement  le  nom- 
bre des  ^l^es ,  en  ordonnant  de  lui 
rendre  tons  les  ans  un  compte  exact 
desjeunes  gens  qui  fr^entaient  les 
^ooles  et  de  ceux  qui  les  avaient  quit- 
tto,  avec  rindicationderemploiqu'ils 
pouvaient  avoir  obteno.  « 

L'imp^ratrioe  Elisabeth  fixa  k'4ix 
roubles  pour  la  noblesse  et  a  deux  rou- 
bles pour  les  autres  classes,  les  amen- 
des  aaxqnelles^taieiitsouniis lesp^rcs 
de  famine  qui  ne  donnaient  pas  une 
MHoation  •  convenable  ^  Ieurs  enfents. 
£He'fonda,en  1744,  rBniversit6  de 
Moscou ;  ainsi  que  deux  gymnases ;  on 
lui  doit  aussi  la  fondation  d'^ne  aca- 
dtoie  des  beafux-<arts  k  P^tersbouiig, 
et  quek^es  dooles  inf^riMres. 

Depuisoette^oquejusqu'd  Tinp^ra- 
trice  Gathttine,  lesmcBdrsnisses  sem- 
blent  avoir repris4edessus,et  Tinstrvo- 
tian  publi^fu^  fait  un  pas  r6trogr«de. 
Cette  grandesauveraineforida  la  nui- 
son  dea  enfants  trou  v4s :  la  preaMere  fat 
^tablie  k  Moscow  en  1763 ;  un  an  aprls 
elto  ordonna  d'^blir  dans  toas  ies 
goavemements  des  ^les  k  deneure 
pour  les  deux  sexes ;  teHe  fot  rorigioe 
de  rinstiiut  des  demoiselles  tiobles  au 
convent  de  la  R^urtection  k  4Sakit- 
P6tersbeQrg.  «  En  ]775i  parut  Tor^- 
nisatkm  desgouvernements,  par  la- 
quelle  les  bineaux  de  curaldle  reou- 
rent  Vordre  de  veiller  k  ce  que  des 
deoies  dtoentaires  foasent  Mabltes 
dans  totttes  les  viiles  et  dans  tous  l«s 
bonrgs  popolaux Quelques  aaii6es 


RUSSIE. 


627 


tard  (t7d2) ,  une  commission  spe- 

iaalefut  charge  de  lafondationd*ecoIes 

qui  farent  placees  sous  leur  direction. 

u  nombre  des  universites  fut  fixe 

proTisoirement  dtf  ois,  savojr :  ltP$kof« 

a  Tchernigof  et  a  Penza.  En  1786 , 

toutes  les  ^coles  pObliqiies  furent  di- 

Tiseesensup^rieures  eteusubalternes; 

les  premjeres  devaient  se  trouver  dans 

ks  cbefs-iieux  des  provinces,  et  les  se- 

cofldes  dans  eeux  des  districts ,  et  dans 

cfaaque  paroisse  des  grandes  yilles.  On 

ne  lit  pas  sans  ^tonnement  que  daps 

ks  unes  comme  dans  les  aptr es  on  en- 

seignait  les  devoirs. de  Tbomme  et  du 

dtoyen.  Tous  ces  .^tablissements  fai- 

saient  vivement  seatir  le  besoin  de 

maitres;  on  cr^  k  cet  effet  k  Saint- 

Peterd)ourg  iin  gymnase  normal  qui 

devint  plus  tard  finstitut  p^agogi- 

que, 

-  Catberine  perfectionna  et  6t^ndit 
r^ocation  m)f|taire,  imprima  un  nou- 
vel  ^lan  a  Tacad^mie  des  beaux-arts , 
et  cr6a  pour  Jes  Qls  des  employ^  su* 
balternesde  la  marine,  des  ecoles  des- 
tinies h  former  des  chefs  d'ateliers 
^r  les  travaqx  de  lamirauti.  Des 
ecoles  pour  ia  .niarine  marchande, 
pour  les  mines  et  pour  le  commerce 
s'or^iserent  a  Samt-P^tersbourg.  A 
cette  epoque  la  famille  Demidof  consa- 
cra  un  capital  de  deux  cent  cino  mille 
rooMes  a  Tentretien  de  cent  Aleves  a 
Tecole  de  commerce. » 

Paul  V  introduisit  aussi  quelques 
ameliorations  dans  le  syst^me  de  1  ins- 
truction publique  :  elles  regardaient 
prindpalement  r^ucation  des  enfants 
et  des  orphelins  des  militaires.  On  pent 
dire  que,  Jusqu^au  r^ne  d' Alexandre , 
rinstroction  publique  en  Russie  ne  fut 
qa'un  t<ltbnnement ,  ti  que  les  ecoles 
publiques'  n'etaient  pas  moins  defec- 
tueoses  sou»  le  rapport  de  I'adminis- 
tiation  que  sous  cetui  des  etudes. 
L'esprit  eclaire  de  ce  mbnarque,  le 
^d^rqiiil  manifesta,  surtout  dans 
les  premieres  ann^s  de  son  r^gne, 
d*amdiorer  T^tat  n^oral  et  intellectiiel 
de  ses  peuples,  contribuerent  puissam- 
menta  repandre  dans  toutes  les  classes 
autant  de  lumieres  que  le  comportait 
I'etat  peu  avanc6  de  la  civilisation  russe. 


II  cr^a  le  minist^e  de  ^instruction 
publique  et  la  direction  superieure 
aes  ecples  ( 1802 ) ;  des  lors  toutes  les 
ecoles  de  Tempire  fiirent  divisees  en 
quatre  cathodes,  savoir  :  1**  ^ples 
paroissiales ;  2**  6coles  ^e  district ; 
3*  gymnases;  4"^  universites.'Le  hpm* 
bre  des  universites'fut.&xe.provisojre- 
inent  ^.Vix,  k  PorpaV,  h  ,ViW,  a 
Saint-P^tersbourg,^  Kasan  eta  Khar- 
kof ;  celle  de  Moscou  etait  conserve, 
inais  elle  fut  r^organis^  en  l|Bp4  sur 
le  pl£)n  general';  les  universites  de 
Yi^na  et  de  Qorpat,  centres  de  popu- 
lations plus  avanc^es,  eurent  leurs 
statuts  h  part ;  c^est  a  cette  ^poqua  que 
le  gymnase  de  Saint-P^tersboufg.fut 
transform^  en  institutpedagoglqfie.lie 
discredit  ou  6tajt  tomb^  Ie,papier-mon- 
baie  obligea  le  gouvernemerjt  a  aug- 
menter  le  traitement  des  professeurs. 
En  .1804  rentretien  de  quatre  univer- 
sites, quarante-deux  gymnases  et  quatre 
cent  Cinq^colesde  district,  co^itait  en- 
vironunmHlion'troispentmilleroubles. 
Dans  un  pays  comme  la  Russie ,  pu  la 
population  lihre  est  divisee  en  classes, 
netiaitndcessairededonneraux  person- 
nes  qui  se  voualent  a  Tenseigneineqt, 
des  grades  en  raison  de  leurs  services , 
etqui  les  assimilajentpour  le  rang  aux 
autres  employ^  de  1  £tat.  Une  anie- 
lioration  r^lie  eut  lieu  sous  le  m^me 
riene:  le  rang d'assesseur  decollete  et 
cemi  de  conseiller  d*£tat  ne  furent  ac- 
cord^ qu'a  la  suite  d'un  examen.  Les 
Aleves  eux-m^mes  avaient  droit  5  un 
grade  h  leur  eotr^  au  service  lorsqu*ils 
avaient  achev6  Jeurs  cours  dans  les  6ta- 
blissementsde  r£tat.  Les  ^oles  mili- 
taires suivirent  ce  mouven;ient;  le  corps 
des  pages,  et  les  ecoles  de  Tartillerie, 
du  genie  et  des  porte  -  enseignes  de  la 
garde,  furent  institu^s^  Saiiit-P^ters- 
bourg. 

«  Les  Ecoles  ecclisiastiques,]usque-15 
compos^es  de  quatre  academies'  et  de 
trente-sept'  $6minaires ,  recurent '  en 
1868  uiie  plus  grande  extension ,  et 
obtinrent  divecses  prerogatives-,  elles 
furent  divisees,  comme  les  ecoles  civi- 
les,  en  quatre  categories,  et  organisees 
d^apres  un  plan  unifortne  qui  leiir  sert 
encore  de  Mglement '  1814). » 

16. 


n 


638 


L'UNIVERS. 


Un  erand  iiombre  d*^les  sp6ciales 
oot  Ht  fondees  sous  ie  r^ne  de  rem- 
pereur  Alexandre.  A  oes  demises  ap- 
partiennent  rinstitot  des  Yoies  de  com* 
imiDication ,  les  teoles  de  pilotes  et  de 
coDStructeim  de  vaisseaux,  les  6cole8 
de  oommerce  h  Odessa  et  Taganrok  , 
deux  toles  foresti^res  et  une  pour 
ragronomie;  des  instituts  de  iii6decioe 
furent  attaches  k  chacvne  des  univer- 
sity, et  ceux  qui  existaient  d€}k  k 
Saint-F6tersbourg  et  k  Moscou  pnrent 
un  accroissement  considerable.  Le  pa* 
triotisnie  dont  la  nation  russe  donna 
sous  ce  r^ne  des  t^moignages  si  6cla- 
tantS',  se  manifesta  de  la  mani^re  la 
plus  honorable  par  des  fondations 
p^rticuli^res  en  fiiveur  des  ^coles  pu- 
olioues.  Le  oonseiller  d'l^tat  Paul  De- 
midof  leur  consacra  environ  un  million 
et  demi  de  roubles  dont  les  deux  tiers 
pour  r^ablissement  d*une  ^le  sup6- 
rieure  li  Jarosiavl;  le  prince  Besborooko 
suivit  eet  exemple,  ainsi  que  plusieurs 
autres  seigneurs  et  riches  n^ociants. 
La  noblesse  de  quelques  gouverne- 
roents  se  montra  6galement  empress^ 
a  doter,  soit  des  universit^s,  soft 
des  dcoles.  Malheureusement  ni  les 
oukases  d*un  prince  bienveillant,  ni 
les  sacrifices  des  particuliers  ne  peu- 
vent  changer  Fesprlt  des  masses ;  les 
institutions  qui  ne  sont  pas  encore 
dans  les  moeurs  peuvent  bien  imposer 
par  un  certain  ^clatext^rieur,  maislerd- 
sultat  en  est  loin  de  r^pondre  k  Tinten- 
tion  cr^trice.  Dans  les  deux  capitales 
la  surveillance  imm^ate  de  Tautorit^ 
comp^tente,  le  m^rite  des  professeurs, 
et  le  oontrdle  d'une  population  plus 
avanc^e ,  offrent  des  garanties  k  peu 
ores  sufBsantes;  mais  k  mesure  que 
les  chefs  d^^tablissement  s'^loi^nent 
de  oes  centres  de  pou voir  et  d'activit^ , 
ils  ex6catent  les  reglements  avec  moins 
de  ponctualite,  et  ne  songentpour  la 
plupart  qvi^k  tirer  le  parti  le  plus  avan* 
tageux  dfe  leurs  places.  La  preuve  la 
plus  incontestable  de  Tinaptitude  du 
corps  enseignant  en  Russie,  c'est  Tab- 
sence  de  productions  remaiquables :  k 
fexception  de  quelques  nationaux, 
les  professeurs  les  plus  instruits  sont 
des  etrangers ,  et  si  un  concours  euro- 


pten  etait  ouvert  aux  ^tudiants  des 
classes  supi^rieures,  soit  pour  la  pbiio- 
Sophie ,  soit  pour  les  sciences  ou  poor 
les  langues  savantes ,  le  pays  le  plus 
vaste  de  l*Europe  aurait  sans  doute  la 
moindre  part  aux  recompenses.  On  se 
tromperait  tputefois  en  concloant  de 
ces  remarques ,  que  les  Russes  oot  peu 
d'aptitude  aux  sciences  et  aux  lettres, 
ils  sont  sous  ce  rapport  heureasonent 
organises,  et  s*il  r^ussissent  moins 
bien  que  dans  d'autres  pays,  la  faute 
en  est  aux  institutions  qui  p^sent  sur 
tout  ce  qu*eiles  touchent.  Le  r^ne  de 
Fempereur  actud  a  ete  f6cond  en  chau- 
eements  plus  ou  moins  judicieux;toute- 
fois  on  ne  saurait  nier  qu'il  a  syste- 
matise avec  ensemble  toutes  les  parties 
de  rinstruction  publique :  il  a  pour 
ainsi  dire  obtenu  le  mieux  possible 
dans  le  mediocre,  et  oomme  rien  ne 
g^ne  autant  le  despotisme  que  tout  oe 
qui  est  transcendant,  il  pent  se  flatter 
d'avoir  atteint  son  but.  Sous  les  regnes 
precedents,  la  direction  de  rinstruc- 
tion publique,  tout  imparfiaite  ^u'elle 
etait,  laissait  au  moins  entrevoirrin- 
tention  de  s*eiever,  dans  un  avenir  phis 
ou  moins  rapproche,  auxconoaissaoces 

2ui  conviennent  k  des  hommes  libres. 
I'empereur  Nicolas ,  menace  d^  son 
avenement  au  trdne  par  une  conspin- 
tion  liberale,  a  cru  tarir  la  source  de 
ce  danger  en  disciplinant  jusqu'a  » 
science  y  la  litterature  et  la  philosophte. 
II  a  decrete  que  reducation  serait  na- 
tionale,  c'est-a-dire,  ^u'elle  n'irait 
que  jusqu'ou  le  despotisme  n'aurait 
point  k  s*en  alarmer.  Gette  marcbe  est 
lo^ique,  mais  la  Russie  a  recuie  d'un 
Steele  dans  la  vote  de  la  liberte,  et 
FEurope  qui  suit  d'un  ocil  inquiet  m 
envahissements  de  cet  empire ,  saitde- 
sormais  que  c'est  k  un  pays  organise 
pour  Tesclava^e  qu'eUe  est  menaoee  de 
se  voir  soumise. 

«  Puissent  les  ptos  de  hmilk ,  a  dit 
Tempereur  dans  un  manifests  (juiilet 
1826),  porter  toute  leur  attention  sur 
reducation  morale  de  leurs  enfants. 
Ce  n'est ,  certes ,  [mint  aux  i^rogres  de 
la  civilisation ,  mais  a  la  vanite  qui  oe 
produit  que  le  desoeuvrement  et  le 
vide  de  Tesprit .  mais  au  defaut  d'uoe 


RUSSIE. 


iwUuetuNi  rMIe,  qu*ii  fiaiut  attribmer 
cette  Koeooe  de  la  f&oa^y  cette  fougue 
det  paaaioos,  oea  demi-ooonaissancei 
n  ooQfoaes  et  si  funestes,  ce  penchant 
am  tileries  extrtoes  et  aux  visions 
politiqoes  qui  commencent  par  dtoo^ 
raJiser  et  finisstnt  par jperdre. 

« (^e  la  crainte  de  Dieu  et  une  so- 
lide  et  ratriotiqae  instruetion  soient 
la  base  de  toutes  les  esptonces  d'am^ 
liorationy  la  premier  aeroir  de  toutes 
Id  daases. «  M.  de  Rrusenstern  eon- 
chit  de  cet  avertissement  impdrial  que 
r^ocation  de  la  jeunesse  russe  serait 
2  la  fois  religieuse,  raonarcbique  et 
aationale.  Pour  qui  connaft  la  Russie , 
eei  paroles  signifient  seulement  que 
d^sormais  rinstruction  publique,  en 
Rustle,  ne  sera  plus  oonsider6s  par 
fegooremement  mie  comme  un  rooyen 
de  pcrfeetionner  les  ressorts  de  Tau- 
tocratie;  qioant  k  la  religion  et  ^  la 
morale,  dies  pjeuvent  adoocir  lei 
noeurs  des  propri^taires  d'flmes  et  la 
aonditioa  des  serfs,  mais  il  est  oon- 
trajre  a  leur  essence  de  consacrer  la 
dmte  illimit^  d'un  td  6tat  de  choses. 

L'instroction  publique ,  en  Russie , 
peat  tee  dnris^  oomme  fl  suit :  1*  les 
toks  piibiiques  de  toutes  les  classes , 
qui  ooostitnent  le  minist^  de  Tins* 
traction  publique  proprement  dit; 
^  les  6oom  militaires;  8*  les  6ooles 
eecloiastiques;  4*  les  ^coles  spdciales 
ctdivenes  rele?ant  des  autres  bran- 
ches de  radministration. 

Le  mioistdre  de  rinstruction  publi- 
que se  compose :  l^  de  la  chanoellerie 
■mitstMelle;  2*  du  d^partement  de 
rinstruetion  publique;  8"*  de  la  direc- 
tion sup6rieure  des  toles. 

Le  d^partement  de  I'instruction  pu- 
^icpiedirige,  sous  les  ordres  du  mi- 
nitre,  les  ^tablissements  scienttfiques 
2^  les  6oolts  de  rempire,  exception 
Bite  de  eenz  qui  relevent  imm^iate- 
Bcat  des  autres  branches  de  Tadmi- 
^btration.  La  competence  du  de[)ar- 
tsneat  s'^teod  ainsi  sur  les  obiets 
^vants :  1«  sur  I'^blissement,  Por- 
paisation  et  Fadmintstration  de  toutes 
Ki  teles  publiques  entretenues  par  le 
fiouTprnement ;  2«  sur  le  personnel  de 
^  teles ;  3^  sur  le  mode  d*enseigne- 


ment;  4*  sur  les  institutioiis  privte; 
&*  sur  les  9od€Us  savantes  et  pacth»« 
li^es;  6*  sur  les  bibHotfidques,  mu- 
ste,  etc.;  7*  eofin,  sur  la  reaction 
du  journal  du  minist^e  de  rinstrue- 
tion publique. 

La  direction  supdrieure  forme  le 
conseil  du  ministre.  Elle  s'oocupe: 
i«  des  modifications  ou  diangements 
ntessaires  soit  dans  I'orgamsation , 
soit  dans  les  r^lements;  2*  de  la  for* 
mation  de  nouvelles  teles  particu- 
litres;  8*  des  affaires  pteniaires  et 
contentieuses ;  4*  de  Pexamen  des  rap- 
ports des  fonetionnaires  envoyds  pour 
rinspection  des  teles;  5"*  ou  cnoix 
des  livres  d^enseignement.  La  distri- 
bution des  arrondissements  a  subi  des 
modifications  judideuses,  et  qui  r6- 
pendent  d*une  manite  plus  satisfoi- 
sante  aux  exigences  des  locality.  'M- 
sormais  la  suireillanoe  des  teles  dans 
lesprpTinoes  doignte  de  Tempire  par 
les  curateurs  ou  inspecteurs,  offrira 
moins  de  difficult^. 

Les  attributions  du  ministere  de 
rinstruction  publique  embrassent,  ou- 
tre les  objets  ci-dessus  indiqu^ ,  tout 
ee  qui  oonoerne  la  censure.  Des  modi- 
fications ntessitte  par  la  situation 
partieulito  des  provinces,  out  M  in- 
trodnites  sur  le  rapoort  d*un  ootnit^ 
dont  le  r^lement  tut  confirm^  en 
1838.  Les  dispositions  en  ^talent  appli- 
cables  aux  arrondissements  de  Samt- 
P^rsbourg,  de  Moscou,  de  Rharkof  et 
de  Casan.  Ce  r^lement  dififtre  de  celui 
de  1 804  en  eeque  la  liaison  qui  existait 
entre  les  teles  des  diff(^rents  dtgr^ 
fot  rompue.  Alexandre  avait  touIu  que 
I'd^ve  aune  tele  primaire  ou  parois- 
siale  pdt  continuer  ses  ^des  k  Ptele 
du  district,  puis  success! vement  au 
gymnase  et  a  runiverdt^ :  c*dtait  le 
moyen  d'ouyrir  k  Taptitude  et  au  g^nie , 
dans  qudque  rang  que  la  nature  les 
efit  caches ,  toutesles  ressources  crete 
parlegouvemement.  Cette  disposition 
qui  honore  la  pbilanthropie  de  ce 
prince,  toit,  il  laut  le  dire,  en  con- 
tradiction flagrante  a?ec  les  institu- 
tions du  pays.  Quelle  utility  pouvait 
tirer  d*une  education  d^nteoes  jeu- 
nes  gens  que  le  privilege  repoussait 


•» 


L'UNIVERS. 


vorstt^  de  Saint -Menbourg,  a  la 
somme  de  973,950  roablea ;  pour  oelle 
de  Moaoou ,  k  454,200  roubles;  pour 
oellesdeRbarkofetdeCaaan  ,11370,000 
loobies  chacune. 

En  18S5,  l*uniTffrsit6  de  SaintpP6* 
tersbours  comptait  385  ^tudiants. 
L'anomussement  qui  en  depend  ren* 
fennait  h  la  mtoe  ^poque  580  tooles, 
ayant  11,911  ^lifes. 

Uuniversit^  de  Moaoou  oomptait 
419  6l^?es:  rarrondissement  a?ait 
015  teles ,  renfermant  16,359  ^^es. 

A  runifersit^  de  Kbarkof ,  on  comp- 
tait 343  ^l^es,  et  dans  t'arrondisse- 
ment,  11,446  ^tudiants,  r^partis  dans 
317  teles. 

A  runi?ersit6  de  Rasan,  353  to- 
diants;  dans  rarrondissement,  198 
teles ,  et  8,459  6l^?es.  * 

II  ne  pouvait  6cfaapper  k  Tattention 
dtt  gourernement,  que  le  svst^me  de 
rinstruetion  publique,  dans  rarrondis- 
sement de  Kasan ,  doit  ntessairement 
<tre  adapts  aux  inter^ts  des  tribus  asia- 
tjqoes  qui  rhabitent  en  partie ,  et  de 
veiller  a  ce  que  I'universit^  de  oette 
fflle  dertnt  le  t^atnon  qui  rattachflt 
ces  demieres  k  la  population  russe; 
c'est  dans  ce  but  que  des  soins  parti* 
culiers  ont  it&  vou^  k  I'enseignement 
de  Tarabe,  du  persan,  du  tatare  et 
du  mogole. 

Cette  demi&re  langue  n'aTait  point 
jus(|u*a  prtent  de  grammaire  ni  de 
lexique;  Tacadteieten  ^midt  a  rem* 
pli  cette  lacune. 

L*universit^  de  Dorpat,  dont  la  des- 
tination sp^tale  est  de  repondre  aux 
besolns  intellectuels  des  trois  provinces 
baltiques,  jouit  de  privil^es  assez 
etendus;  le  culte  des  habitants  nYtant 
pas  eekii  du  reste  de  Tempire ,  eile  a 
une  fecttlt^  de  th^iogie.  A  cette  uni- 
versity sont  attaches  un  seminaire 
normal ,  et  un  seminaire  thtelogique 
destine  k  foumir  des  predicateurs 
pour  les  paroisses  protestantes  dans 
toutes  les  parties  de  rempire.  En  1835, 
runfverstte  de  Dorpat  comptait  567 
etudiants ;  et  les  253  teles  de  son  ^ta- 
blissement  offraient  un  total  de  8,826 
€i^es. 

L*arrondi8sement  de  la  Russie  blan- 


che,  sur  319  teles ,  a  ll«590deves. 
L'uDiTenit^  de  Sahit -Vladimir  k 
Rief  ne  paratt  pas  toe  dans  un  6tat 
florissant ,  ce  qu*H  faut  sans  doute  at- 
tribuer  aux  mesures  rtoressives  prises 
par  le  gouvemement  a  la  suite  de  la 
demi^re  insurrection  de  Pologne.  I^a- 

Srteleschiffres  de  M.deRnisenatera, 
1  professeurs  et  mattres  n'oocupeot 
Se  130  ^l^Tes ;  rarrondissement  a  90 
!>les  et  6,790  ^^ves. 

L'universit^  de  Yilna,  jadis  si  c^ 
Idbre,  est  diskxpi^  Dans  cette  ville, 
1^  Grodno ,  k  Blalystok ,  k  Vitepsk,  a 
Bfinsk  et  k  Mobilef ,  le  goufemement 
imp^ial  paralt  moins  oocup^d'etendre 
la  sphere  de  rinstruetion  qu'ii  ranorner 
k  an  systdme  uniforme  les  idte  pa- 
triotiques  des  populations. 

Le  \vc6t  d'Odessa ,  fond^  par  le  doc 
de  Ricnelieu ,  diffbre  pen  aujouid*hin 
des  autres  teles  superieures  de  Tem- 
pire.  On  remaroue  dans  oet  arrondis- 
sement  une  tele  destine  aux  jeuncs 
Tatars,  et  une  classe  de  langue  mal- 
dave  prte  du  gymnase  de  Ricbtef. 
L'arrondissement  d'Odessa  compte 
4,647  61^ves. 

Les  teles  des  provinces  trans- 
caucasiennes  ont  subi  ditT^rents  chaui- 
gements  en  rapport  avec  T^tat  poli- 
tique de  ces  oontrte.  D^  fann^ 
1819,  et  sur  la  demande  du  g^^ral 
lermolof ,  Tenseignement  du  latin  et 
de  Tallemand  y  fut  remplao^  par  eelni 
du  tatar  dans  les  gymnases,  et  Ton 
ajouta  au  cours  d'etudes  p^usieurs 
branches  des  sciences  militaires,  la 
jeunesse  du  pays  6tant  destine  au  ser- 
vice du  corps  d*armee  du  Caucase. 
En  1829,  un  nouveau  regleroent  viot 
oomplter  oes  dispositions  que  ren* 
daient  insuCBsantes  les  acquisitions  de 
Tempire  apres  la  campagne  de  Perse. 
Des  modiOcations  rtentes  ont  ^t^ 
faitesdepuis  dans  ces  ^blissements. 
En  general ,  les  (lis  des  fonctionnaires 
russes  doivent  apprendre  soit  le  tatar 
soil  un  des  idiomes  usit^  dans  ces 
provinces.  Des  ^coles  de  district  ont 
6te  fondees  k  Tifli^ ,  Gori ,  Elisabeth 
pol,  Routars,  Nakhitch^van ,  Akbalt 
zykh,  Bakou,  Derbent,  Erivan,  el 
dans  pittsteurs  autres  villes.  Ges  ^coles 


RUSSIE. 


9U 


ogttfois  classes;  dans  les  dfiui{ire- 
■iint,  rmstriictiOD  se  doone  dans  la 
laagve  du  pays ,  ft  en  russe  seulement 
dans  la  deniiere.  Le  nombre  dee  eieres 
qui  fr^quanteDtlfls  6ooka  transcauca* 
neones  est  d^  de  IMS:  oelui  de 
toutettes  fo>lesde  la  Siberia  ne  s'dl^e 
poiot  au-dessus  de  2,000. 

MaJgr^  tons  les  soins  et  les  sacrifi- 
ces du  goorenieiiient  poor  cr6er  des 
ecoles  naUonales,  les  Rosses,  prin- 
dplemeot  les  seigoeors  de  la  pre- 
miere distinetioa ,  prtf§raieot,  oomine 
ooQs  ra?ons  dit,  les  toles  particu- 
ttes,  presaoe  toates4ingte  par  des 
Hnoienj  le  oombre  de  oes  toies 
eCait,  eo  18S4 ,  de  99  dans  les  deux 
capitaJes;  d*uii  aotre  c6t6,  c'6tait  pres- 
aoe exdosifemeot  k  des  ^an^ers  que 
rooeoofiait  redocatioo  partieoli&e. 
L'amoar-propre  national «  ou  plotAt 
cduidopouToir,  soumitatoutessortes 
de  restnctioiis  F^t  de  prtopteur  et 
d'instituteur.  Sous  le  pr6texte  d'une 
onntie  morale » qoe  n'offre  pas  d'ail- 
tears  a  no  6egti  tainent  la  majorit6 
des  naHonaux ,  on  a  aigfi  des  institu- 
tean  etranoers  derenonoerd  leur  pays 
et  de  se  fiire  Rosses;  c'est-Wire, 

S*(m  Veop  a  impost  un  acte  immoral,  en 
\  pla^ant  entre  leurs  int^rto  et  leur 
deroir.  Aa  reste,  ces  mesures  aoront 
use  halite  portto  ^litique ;  mais  nous 
dootoos  qoe  oe  soit  en  fiiveur  de  Tern- 
pirenisw. 

n  suAt  de  Jeter  les  yeux  sur  le  re- 
caeil  des  actes  de  I'acaifemie  des  scien- 
ces de  Saint-P^rsbourg ,  pour  s'ssso- 
rer  que  les  Rosses  n'y  soot  pas  en 
nujonl^ ,  et  que  la  gloire  de  ce  oorfis 
iHuirtre  appartient  presqoe  exclusi- 
▼eiaent  a  rAllemagne.  Le  statut  qui 
determine  toutes  les  attributions  de 
TaiaHUmie,  porta  le  budget  annuel  de 
ttt  etabKssement  a  239,400  roubles. 

Le  d^£Mit  d'eqiaee  ne  nous  permet 
pvd'dnmii^rer  tous  les  ^tablissements 
iftema  qni  se  trouvrat  sous  la  direc- 
tion et  le  contrdle  Maire  de  Tacad^- 
niie;  mais  nous  emprunterons  a  M.  de 
Kruaeosteni  le  passage  suivont,  qui 
honore  la  munilicence  de  reinpereur 

HUfl. 

•  Par  son  ordre  ,  un  nouvel  obser- 


vatoire  a  M  fond^  i^  Helsii«fos;.la 
position  de  cet  ^tablissement  en  fait 
un  des  plus  importants  de  TEorope. 
D'autres  ont  dte  ^lev^  h  Moscou ,  k 
Rief  et  k  Casan ;  enfin  Sa  Majesty  a  or- 
donn^  qu'un  obserratoire  central  fidt 
dev6  k  Saint-P^tersbourg  sous  la  di- 
rection de  I'acad^mie  des  sciences. 
«Cet  dtablissement  va  devenir  le 

Cus  Taste  de  l^urope ;  il  se  trouve  sur 
montagne  de  Pulkovo,  pres  de 
Saint-P^rsbourg.  La  premim  pieire 
en  a  ^t(§  poste au  printemps  de  1834... 
Une  somme  de  2S1,438  roubles  a  Hi 
assign^  pour  la  seule  acquisition  des 
>  instruments  qui  tous  ont  eU  comoian- 
dds  dans  les  ateliers  les  pins  c^ebres 
de  l^urope.  Le  devis  ^6ieral  de  cons- 
truction s*^l(^ve  k  nres  d*uu  million 
huit  cent  mille  roubles. « 

Le  nombre  des  joumaux  et  autres 
publications  p^riddiques  dans  tout 
rempire,  en  rosse,  aHemand,  fran- 
fais,etc.,  est  de68. 

II  est  superflu  de  dire  que  la  cen- 
sure sur^eiUe  stcc  le  plus  grand  soin 
toutes  ces  publications ,  de  m^me  que 
les  ouYrages  imprim^  dans  le  pays 
ou  venus  de  T^tranger.  Au  reste ,  les 
r^ements  relatifs  k  la  censure  sont 
remanids  k  chaque  regne,  et  plutdt 
deux  fois  qu'une.  Cest  oue  dans  un 
pays  01^  le  pouvoir  supreme  fait  les 
lois ,  Hen  n'est  d^ni ,  rien  n'est  stable; 
et  1m  dtoets  rendus  dans  des  circons- 
tances  eiceptionnelles  n*y  sontabrogte 
que  lorsqu'ils  ont  produit  un  mal  irr^ 
parable. 

£n  1835,  le  nombre  des  volumes 
Imports  de  Ttoan^er  ^tait  de  300,000; 
celui  des  ouvrages  imprim^  en  Russie 
deTOS. 

En  examinant  la  marche  progressive 
des  toles  d^pendantes  du  mmistere 
de  rinstruction  publique,  on  trouve 

au*elle  a  ^  plus  rapide  sous  le  regne 
*  Alexandre,  avec  moins  de  moyens  et 
une  population  moindre;  en  euet ,  en 
1804,  le  nombre  des  el^ves  6tait  de 
33,481;  et,  en  1824,  il  s'^levait  a 
09,629.  En  1835,  il  ^tait  de  85,707. 

Les  ecoles  militaires  en  Russie  peu- 
vent  ^re  rangto  en  trois  categories 
distinctes  :   1*  les  toles  militaires. 


634 


L'UNIVERS. 


sous  la  direction  du  grand^docliffdiel ; 
T*  le  corps  des  cadets ,  et  les  ^les 
releYant  de  fetat-major  de  la  mame; 
3*  les  6coIes  militaires  qui  d^pcDdent 
du  ministere  de  la  guerre,  et  mii  sont 
reservees  sp^iatement  aux  enniDts  de 
soldats. 

Le  noinbre  des  ^les  militaires  pfa* 
c^s  sous  la  direction  du  grand -due 
Micher,  tant  ^ns  les  deux  capitales 
que  dans  plosieurs  cbefs*lieux  de  gou- 
vemement ,  est  de  87 ,  en  y  conSpre- 
nant  plusieurs  corps  de  cadets,  dont 
Tori^anisation  n'^ait  pas  achev^  en 
f  837 ,  mais  oni  Test  probablement  au« 
jourd'hui ;  efles  renferment  8,733  61^ 
ves,  dont  renseignement  est  gradu^ 
selon  les  destinations  spto'ates,  de 
sorte  qu'en  entrant  au  service,  les 
jeunes  gens  ont  toutes«les  connnais- 
sances  de  leur  arme  et  de  leur  grade. 
L*entretien  de  ces  6coIes  codte  annuel- 
lement  6,355,000  roubles.  En  g^n^* 
ral,  Tetude  des  langues  et  celle  du 
dessin  y  est  faible;  mais  celle  des 
sciences  math^matiques  y  est  poitde  k 
un-degre  satisfaisant. 

Les  eeoles  qui  rel^Tcnt  de  I'^t* 
major  de  la  marine  ont  2,394  el^es , 
dont  le  budget  annuel  est  de  633,194 
roubles. 

En  1824,  les  ^les  design  to  sous 
le  nom  de  section  d^orphelins  militaires, 
etqui  renferraaient  an  grand  nombre 
d'mves,  fbrent  placto  sous  la  direc- 
tion de  I'^tat-major  de  Tempereur  poor 
les  colonies  milttaires.  Deux  ans  plus 
tard ,  dies  fiirent  organisto  en  batatl- 
lons,  demi  batatlkms  et  oompagnies  de 
cantonistes,  formant  ensemUe  sept 
brigades,  et  quatre  r^ments  de  ea- 
rabmiers  d'instruction. 

Le  direeteor  do  departemont  des 
colonies  militaires  est  le  chef  de  tons 
lescantonistes;  les  differentes  brigades 
sont  distribute  dans  vingt-six  gouver* 
nements  qui  forment  pour  ainsi  dire 
la  ceiature  de  Tempire.  Les  brigades 
des  cantonistes  militaires  se  oompoifent 
principalement  d'enfants  de  soldats. 
On  y  recoit  eependaat  aussi  les  orphe- 
lins  de  toutes  les  conditions,  des  fils 
de  nobles  dont  les  titres  ne  sont  pes 
CR  regie,  ou  d'employ^s  qui  n'ont  pas 


le  grade  reqois  poui  dlvB  admts  au 
corps  des  cadets.  V^  d'admissios 
dims  les  brigades  est  depuis  six  ans. 
jasmi'^  dix-buit;  mais  la  phis  (pninde 
partiedes^l^vesenbas  dgeresteot  jus- 
gu'a  leur  mi^orit^  aupr^  des  parents. 
L'enseignement  dans  tous  les  batail- 
Ions,  demi^balaillons  et  oorapagnies 
des  cantonistes*,  le  bataiMon  de  Saint- 
P^rsboorg  excepts,  se  compose  de 
ooMiaissances  timentairas,  db  I'exev- 
cice  militaire,  et  d'ua  travail  mteni- 
que  qui  fome  les  ^^es  h  uaT  ro4tier 
utile.  Ainsi  ebaque  dasse  est  divisee 
en  deux  sections,  qui  se  trouvent  al- 
•  temativement  en  elasse,  h  rexercioeet 
dans  les  ateliers.  Un  certain  nombre 
de  cantonistes  dans  chaque  bataillon 
apprenoent  en  outre  la  mnsique  mili- 
taire  et  le  cbant  d*^ise. 

Lorsqoe  les  cantonistes  ont  acbev^ 
leoffs  ^des,  les  plus  capables  devien- 
nent  mattres,  6cnvain8  de  bureaux  ou 
mosiciens;  les  autres  sont  inoorpor^ 
dans  les  regiments  d'instruction  de 
carabiniers,  et  dans  ceux  de  la  ligne. 
Apvds  leur  incorporation  dans  les  r^- 
gonents  d'instmction  de  carabiniers, 
les  cantonistes ,  tout  en  s^ooenpant  phis 
spfcMlemcnt  dies  exereiees  militaires, 
continaent  k  se  perfectionaer  dans  les 
sciences  et  dans  les  metiers  qui  leur 
ont  iU  enseign^.  Les  plus  a?anocs 

R assent  cnsuite  comma  sous-officiers, 
»  autres  comme  simples  soldats,  dans 
les  regiments  de  ligne.  Le  bataillon  des 
cantonistes  deSaint-P^rsbourg  a  una 
organisation  h  part :  il  est  compost  de 
quatre  compagnies,  dont  la  premiere 
est  divis^  en  deux  sections;  rune  est 
une  ^le  normale,  Pautre  une  ^oole 
de  topographic. 

La  deuxitae  eompaenie  est  une 
6cole  dl^mentaire  d'arttlmie.  Les  el^ 
ves  de  oette  tele  paasent  dans  la  bri- 
gade d'instruction  de  Fartillerie. 

La  troiaitee  compagnie  est  une  tele 
^Iteentalre  du  g6nie;  die  fournit  <te 
conducteurs  k  radmioistration  de  eette 
arme. 

La  quatritee  compmiie  ou  ceUe  de 
ligne  est  rtervee  spdaalaroent  pour 
completer  les  regiments  dinstruction 
de  carabiniers.  Kile  fournit  aussi  des 


RUSSIE. 


636 


litiiograplies  powr  I'tot-iiMfor,  (jtes  em- 
ployes poilr  le  service  des  tel^raphes , 
d^  maftres  de  gymiMstiqoe,  detf  Am- 
mdtos  et  des  tonvatae  debiflpeatft. 

L'eoole  des  aaditaiw  appartieDt 
aussi  h  oette  oompagnie:  eUe  eat  oon^ 
posee  de  cent  Aleves,  dont  aoUante 
cantoiiDsteB  etqaarafnte  iis  d'officiers. 
On  les  idmet  au  aetfviee  arec  le  rang 
de  soiM-dfficiers  dans  lea  d^iartementa 
de  Faodftorial  des  miiristeriBs  do  la 
gaerre  el  de  la  mavme.  PHis  tard ,  A0 
sont  envoys  connie  audketffs  a  Tar- 
rnee.  Le  HOVDbre  des  cantometea  ac- 
toels  est  de  38,44^  pr^aenta,  et  de 
127,761  ptm  deleurs  piireflHa.  Cet^ta- 
blissement  important,  qui  suf&ait 
poor  r6T^er  la  tendance  BMKlaire  du 
gouYeraanent  raase,  poaa^de  un  ca^ 
pita)  qui  s'aecrott  joumellemeiit ,  et  que 
M.  de  Kroaettstern  porte  k  ayOOO,000 
roubles.  En  r^capitulant  en  utie 
somme  totale  lea  chifEi^  qtte  noas  Te- 
nons d'^noncer,  on  trou vera  que  lea- 
^les  nrihtaif  es  de  toi»tes  lea  eiaasea 
renferment  180,000  eleves,  dent  le 
budget  annuel  est  de  8^687,194  rou« 
bles. 

11  ssiste  en  Russie  d  wx  esp^cea  d'6- 
ooleseooiesiastiques ;  les  prenEii^ras  lOnt 
ceiles  do  rit  grec  orihodoxey  soumiaes 
au  ssiat  aynode  et  dtrig^  par  une 
commission  spteiale ;  les  secondes  sont 
les  6Goles  edcl^iastiques  des  cultes 
etrangers  relevant  du  d^partement  de 
oes  eultes,  leqael  fait  ^rtie  lui-mdme 
du  ministdre  de  Tinterieur. 

L'empereur  Alexandre,  apres  atvoir 
rdorganise  les  ^coles  seculieres,  voua 
la  m^e  attention  a  oelles  du  der^L 
En  1808,  il  fot  cr{s^  une  commission 
sp^ale  obargife  de  la  direction  sope- 
neiire  des  to>les  eod^iastiques;  et, 
eo  1814,  ces  ^coles  re^urent  un  r^le- 
naent  qui ,  aauf  quel^ues  modifications , 
sert  encore  de  Mse  a  leur  organisation. 
En  vertti  de  oe  r^lement,  toutes  les 
eooles  ecdesiastiques  sont  divis^es  en 
^ois  arrondissements :  ceux  de  Saint* 
^ftenbottrg,  de  Moscou  et  de  Kief, 
^nqne  drrondissement  est  compose 
deooles  aup^rieures,  d*^coles  moyen- 
»wi  et  d'ecoles  inferieures.  Les  ^les 
>U|)erieiire6  sont  les  acadtoies^  on  en 


compte  troji  :  ^SMnt-P^ersbourg,  a 
MoaeoQ  et  ^Kief.  Lefr  semiaairea  fer- 
ment les  doolea  moyennes;  elles  se 
tpouveot  pour  la  phipart  dans  les  cbefs- 
lienx  des  fOuveraemeBts.  Dans  les 
deeles  iafeviearea  sont  comprises  ceiles 
de  distrietset  de  [Xiroisses ,  qui  se  troit- 
veiit  darn  les  petites  vUlea  et  dans  les 
bourga.  Lea  ^eles  paroissiales  sont 
soboraonnto  a  eeUes  de  district,  et 
oellea-ci  aux  stoinaires,  qui  eux- 
mdoMS  reinvent  des  academies. 

L'administration  locale  des  ecoles 
de  eliaque  arrondissement  appartient 
a  Fatchevd^ue  dioctoin.  Bien  que  cha- 
citne  de  ces  qaatre  categories  d'^coles 
ait  an  riglemeat  special,  tous  les 
toblissements  d'education  du  clerg^ 
sont  diriges  d'apres  des  principes  uni- 
formes,  aous  le  rapport  de  TMucation 
morale  et  de  Teducation  scientiiique 
des  ^ves,  aussi  bien  que  sous  celui 
de  radministration  ^nomique. 

Lebttt  special  des  ^les  paroissiales 
est  de  fournir  des  Aleves  suffisamment 
prepare  aux  ecoles  de  districts. 

Tous  les  enfants  Hges  de  sept  h  huit 
ans,  appartenant  au  clergd  (Tun  cer- 
tain Aombre  de  paroisses ,  sont  tenus 
de  fr^uenter  les  ^les  paroissiales,  a 
Texeeption  de  ceux  dout  les  parents 
s'engagent  h  leur  faire  ac^uerir,  cbez 
eux  ou  ailleurs,  les  oonnaissances  n^- 
cessaires  pour  leur  admission  a  une 
^le  de  district.  Cbaque  ^ole  parois^ 
stale  est  dirie^  par  un  inspecteur  qui , 
selon  le  noniore  des  ^l^es,  a  sous  ses 
ordres  un  ou  deux  maftres.  Les  fonc- 
tions  d*inspecteur  sont  (Nrdinairement 
confix  au  cur6  du  lieu ,  ou  a  des  per- 
sonnes  gradnees  en  thtologie.  Les 
d^ves  des  ^les  paroissiales,  et  de 
preference  ceux  dont  les  parents  sont 
pauvres,  sont  log^  soit  dans  Tccole 
mtoe,  soit  dans  un  des  convents  voi- 
sins.  Ceux  que  les  locality  ne  permet- 
tent  point  de  |>lacer  de  cette  maniere . 
doivent  pourvoir  eux-m^mes  a  leur  lo- 
gement,  et  ne  viennent  h  Tecole  que 
pour  aasister  aux  lecons. 

La  destination  des  ^oles  de  district 
est  de  dinger  les  ecoles  paroissiales  oui 
leur  sont  soumises,  et  de  fournir  oes 
^.leves  aux  seminoires.  Elles  sont  diri- 


636 


LUNIVERS. 


iS^M  par  un  recteur  assists  de  plusiears 
mattres.  Le  rectear,  qui  est  ordinaire* 
ment  i'archimaodrite  ou  le  auo^riear 
du  oouvent  le  plus  Toisin ,  doit  joindre 
a  cette  quality  un  grade  thtologique. 

Las  d^Tes  des  stoinaires,  suivant 
leurs  progrte ,  passent  les  uns  aux  aca* 
demies,  les  autres  oomme  curte  dans 
les  paroisses  de  second  ordre,  comme 
mattres  dans  des  ^coles  inf^rieures, 
oomme  ^diants  dans  les  acadtoies 
de  medeeine ,  ou  enfin  comme  employes 
au  senrice  civil.  Ges  ^biissements  ont 
six  classes  oik  Ton  enseigne  la  tbeolo- 
gie,  la  rh^orique,  la  philosophies 
rhistoire  de  r£glise«  Thistoire  nnlve^' 
sella,  et  cdie  de  la  Russie  en  particu- 
lier,  IVbrcu,  le  grec,  le  latin  et  Tal- 
lemand. 

Les  acadtoies  eoci^siastiques  ont 
une  triple  destination :  1*  celfe  de  for- 
^  mer  des  jeunes  gens  pous  les  fonctions 
sup^-ieures  de  llKglise ;  3*  celle  d^^n- 
dre  ies  limites  desconnaissances  th6o- 
logitfues,  oomme  corjps  scientiflque,  et 
3*  celle  enfin  d*admmistrer  les  ^1^ 
qui  ieur  sont  soumises. 

Le  cours  d'^tudes  se  compose  de 
deux  classes,  Tune  de  thmogie  et 
Tatttre  de  philosopbie. 

L'^de  des  sciences  qui  forment  le 
cours  d'^tudes  des  academies  est  ou 
obligatoire  pour  tous  les  6l^ves  ou  fa- 
cultative. Aux  premieres  appartien- 
nent :  !•  un  cours  oomplet  de  tneolo^e , 
3*  un  cours  de  philosophic  th^or^ique 
et  de  morale,  3"^  un  cours  de  litt^a- 
ture.  4*  rhistoire  sainte  et  Thistoire 
de  I'Eglise,  5*  le  latin,  le  grec  et  rh6- 
breu. 

Les  objets  dont  T^tude  est  al)an- 
donn^  au  choix  des  6l^ves  sont  la 
physique,  les  hautes  math^matiques, 
les  lan^ues  fran^ise  et  allemande, 
les  antiquit^s  grecaues  et  romaines, 
etc.  Le  nombre  des  el^ves  des  Bootes  eo- 
clesiastiques  ^tait,  en  1886,  de  68,580, 
celui  des  ^tablissements  pour  les  cultes 
^nineers  de  8,803.  Cette  difference  r6* 
pond  a  celle  qu'exprime  le  chiffre  des 
populations  russes  qui  ne  professent 
pas  la  religion  de  FCtat. 

Parmi  les  ^oles  spfeiales  on  distin- 
gue celles  des  mines,  qui  sont  divis^es 


en  siibalternes,  moyennes  el  aup^ 
rieures.  Les  premieres  ont  4,0S4  de- 
ves.  Les  prindpales  sont  ^tiabiics  a 
Nertchinsk  et  k  BamaouL  Les  6collm 
sup^eures  sont :  f  Tinstitut  des  in- 
g6nieurs  des  mines  k  Saint-P6t»s- 
oours. 

Getetablissementffond^eQ  177Spar 
Catherine,  snr  la  demande  du  Bachkir 
Ismail  Nasimof ,  a  requ  en  1884  son 
organisation  actuelle.  II  se  divise  en 
deux  sections.  Tune  pr^ratoire,  ou 
le  cours  d*^udes  est  le  meme  que  oelui 
des  gymnases,  I'autre  mteial,  qui  re- 
pona  a  la  destination  oes  ^eves.  L.e 
cours  oomplet  des  6tudes  est  flx6 1^  neuf 
ann^es. 

Ce  qui  rend  I'institot  des  ingteieurs 
des  mines  un  des  toblissements  les 

{)lus  remarquaUes  de  TEurope,  d'est 
a  ricbesse  des  mosses  et  des  collections 
qu*il  renferme. 

2^  L*to>le  technique  des  mines* 

8*  La  section  des  m^ailies  k  rbdtel 
de  la  monnaie  de  Saint-P^tersbourg. 

4*  La  section  pratique  des  naines  et 
celle  des  usines  oe  I'^oole  de  Bamaoal. 

Le  nombre  des  Aleves  qui  suivent 
oes  to>les,  en  y  comprenant  quelques 
etablissements  fond^  par  des  particu- 
liers,  est  d'environ  5,000.  Nous  eite- 
rons  encore  Tinstitut  pratique  de  tech- 
nologic, r^coie  de  marine  marchaade 
^Saint-P^tersbourget^  Kherson,  Tins- 
titut  fotestier,  Ttole  des  eaides  fores- 
tiers  ,  etc. ,  etc.  Les  6coles  oe  m6dedne , 
les  to>les  rurales,  celles  destinies  aux 
fils  des  employ^  snbaltemes  de  bu- 
reaux, sont  des  institutions  dont  les 
reglements  m^ritent  d'etre  6tuditedans 
Fouvrage  de  H.  Krusenstem. 

Les  hospices  d*orphelins  et  les  ^coles 
de  pauvres  renferment  environ  10,600 
ei^ves. 

L'acadtoie  des  beaux-arts,  orpni- 
s^  par  Catherine  II,  a  subi  plusiears 
modifications;  elle  a  form^  plnaieurs 
sujets  distingu^,  mais,  il  fout  le  dire, 
oe  sont  d'assez  rares  exceptions. 

Un  des  ^tabiissements  qui  honorent 
le  plus  la  mtooire  d*Alexandre,  c'esi 
rinstitut  des  voies  de  communication; 
on  y  compte  365  jeunes  gens;  il  a  ^ 
fond^  en  1810,  sous  la  direction  de 


RUSSIE. 


687 


piasieuTS  &kves  sortis  de  Tccole  polj- 
technique.  Nous  citerons  eacore  i'^le 
des  ingteieurs  dyils,  et  cdle  des  con- 
ducteun  des  Toies  de  eommonication, 
organis^es  scms  ie  r^e  de  Temperear 
acbiel :  la  premito  renferme  100  €\h- 
Tes,  et  la  seoonde  800. 

L'eoole  de  jorlsprudence  m^iite 
aossi  ane4nention  particuli^re. 

L'institut  oriental  du  minist^re  des 
a£faires  ^trangdres  forme  une  section 
da  d^partement  asiatiqoe  de  ce  minis- 
tore;  ii  doit  son  origine  au  Tioe-cban- 
celier  comte  de  Nesselrode,  qui  le 
foods  en  1838,  dans  le  but  d*6tablir 
une  eoole  Aejeunes  lie  langues,  pro* 
pras  a  serrir  T^tat  oomme  interpr^ 
tes  diplomatiques  dans  les  missions 
russes  k  Constantinople,  en  Perse,  et 
dans  les  ^dles  de  I  Orient. 

Panni  les  institutions  de  bien&i- 
saoce,  it  faut  dter  en  premiere  ligne 
les  maisons  des  enfants  trouT^  de 
Mosoou  et  de  Saint-P6tersbous^.  Elles 
furent  plac6es  sous  la  direction  de 
rimporatrice  Marie,  qui  ne  n^ligea 
tienpour  les  faire  prosp^rer.  Aujour- 
dlmi  rimp^ratrice  Alexandra  8*en  oc- 
cope  avec  une  tendre  sollicitude.  Nul 
n*est  Tefus6 ;  tout  en&nt  d^pos^  ou 
nedans  la  maison  est  inscrit  sous  un 
nomero  qui  lui  reste,  et  qui  pent  ser- 
▼ir  il  oonstater  son  identi^;  II  est  bap- 
tist SQiTant  le  rit  grec,  et  remis  k 
une  noorrtce ,  k  sa  mere ,  de  pr^f^rence , 
sTeiie  veut  le  gard^  jusqu'li  i'dge  de 
septans,  moyennant  une  pension  men- 
suelle.  Tous  les  Aleves  des  maisons  des 
enfants  trouv^  sont  divis^  en  trois 
cat^ories  prindpales :  oeux  qui  se 
troavent  dans  les  hospices  memes; 
eeox  que  Ton  met  en  nourrice  dans  des 
nlbf^,  enfln  ceux  dont  r6ducation 
premi^  est  confine  k  des  habitants 
des  villes.  La  destination  des  premiers 
se  r^  d'aprds  les  dispositions  natn- 
relles  des  enfants.  Les  ^^es  de  la  se- 
conde  eattonrie  restent  dans  la  condi- 
tion iilaqueUeappKartiennent  les  fiamilles 
qui  ont  pris  soin  d'eux;  ceux  de  la 
voisieme  entrent,  aprte  avoir  attaint 
rige  de  sept  ans ,  soit  aux  hospices 
manes,  sort  aux  ^iSablissements  qui  en 
dependent. 


Le  gouvernement  ne  se  borne  pas  k 

{>rocurer  k  ces  enfants  les  blenfaits  de 
'Education ;  11  veilie  a  leur  avenir ;  et 
ceux  qui  montrent  Taptitude  necessaire 

Seuvent  terminer  ieurs  etudes  soit 
ans  les  6coles  sup6rieures ,  soit  dans 
les  academies. 

Le  defaut  d'espace  ne  nous  permet 
pas  d'entrer  dans  les  details  de  ces* 
londations  interessantes,  ou  le  blen- 
Dait  enrichit  sans  cesse  et  fi§conde  sa 
source;  nous  nous  bornerons  k  dire 
que  les  deux  maisons  des  enfants  trou- 
T^s ,  a  Saint-P6terSbourg  et  k  Mosoou , 
renferment  environ  cinquante  mille 
^l^ves  de  Pun  et  Tautre  sexe. 

Saint-P^tersbourg  a  en  outre  une 
to>le  de  commerce,  un  institut  des 
sourds-muets.  L'hospice  des  aveugles 
est  situ^  k  Gatchina.  Moscon  a  aussi 
une  6cQle  de  commerce,  fond^  par  les 
habitants  de  cette  ville,  et  une  maison 
de  bienfaisance ,  qui  porte  le  nom 
d'institut  des  orphelins  d' Alexandre. 

L'irop^atrice  Marie  a  voue  une  sol- 
licitude particuliere  k  Tdducation  des 
filles ;  les  ^tablissements  fondes  ant^- 
rieurement  ont  €t6  am^lior^s  par  ses 
soins,  et  un  grand  nombve  a'autres 
lui  doivent  leur  existence :  il  nous  suf- 
fira  de  nommer  I'institut  des  dcniai* 
selles  nobles  k  P6tersbourg;  eeluf  de 
Sainte-Catherine  dans  la  m^me  ville, 
^galement  destini^  k  la  noblesse;  la 
section  pour  les  demoisdies  prds  le 
corps  de  Paul ,  ouverte  aux  orpbdines 
de  militaires;  I'institut  de  Sainte-Ca- 
therine  k  Moscou ,  pour  la  petite  no- 
blesse ;  et  les  to>le8  pour  les  fiHes  de 
soldats  et  de  mateiots.  Ces  ^tablisse- 
ments  et  plusieurs  autres  sont  aujour- 
d*hui  placds  sous  la  protection  de 
rimp^ratrice  r^ante,  k  laqudle  la 
bien£aisante  Mane  les  a  l^u^  en  mou- 
rant. 

Parmi  les  6col6s  allemandes,  les 
prindpales  sont  cdles  de  Saint-Pierre 
a  Saint-P6tersbourff ,  celles  de  Satnte- 
Anne  et  de  Sainte-Catherine,  et  I'^oole 
pr^  ri^ise  r^form^  k  Saint-P^ers- 
bourg. 

II  existe  en  outre  un  grand  nombre 
d'6ooles  dans  les  colonies  allemandes 
qui  se  trouvent  particulidrement  dans 


e9» 


rUNlVERS. 


les  gouvernements  de  Kherson,  de 
lekaterkioslaf  vdeToherni^of ,  de  Saint* 
P^ersbourg ,  en  Bessarabieet  eh  Geor- 
gie.  Ces  6coles,  qui  sont  eatretenue$ 
par  les  communes,  r^ndent  aux 
^ooles  devillage3  (Dorf-sohulen)  de 
TAllemagne. 

Les  colonies  ^ang^es  en  Rassie 
sont  au  nombre  de  410,  y  com|Hris  les 
colonies  grecquea,  bulgaves  et  juives;, 
ct  renferroent  ensemble  une  population 
de  250,000  dmes,  dont  les  quatre  cin- 
quidmes  d'AUeoiands:  or,  comme  le 
nombre  d*el^ves  qui  fr^uentent  les 
^les  des  AUemands  colonist  est  de 
plus  de  35,000,  on  Yerra,  d'apres  le 
chiflfre  total  des  ^l^ves  de  tout  Tern- 
pire,  que  si  Ton  reprtente  par  Tunit^ 
la  civilisation  des  Allemaods  colonist , 
•  celle  des  Russes  ne  sera  exprim^  que 

gar  un  Tingtieroe.  Mais  les  Allemands 
x6s  en  Russie  sont  mokis  avanc^s 
aae  lenrseoropatriotes  nationaux ;  c*est 
done  une  mesure  au  moias  inten^p^- 
tiveque  d'avoir  mis  obstacle  ^  reqsei- 
gnement  par  des  Strangers ,  au  lieu  de 
se  contenter  de  prendre  h  leur  ^aid 
de  l^itimes  mesures  de  prtouitipp. 

Les  Tatars,  a  Texception  d.e  oeiix 
qui  existent  enoore  a  r^tat  nomade, 
savent  preaque  tous  lire  et  ^crire.ll 
y  a  ordinaireraent  une  ecole  pr^  de 
chaque  mosqu^e.  Le  mollah  exeroe  en 
intoie  temps  les  fonetions  de  maltre 
d*^le.  Du  reste ,  ces  ^tablissemeats 
ne  ressemblent  en  rien  wix  autres 
ecoles  ^roentaires.  La  maison  e$t  or- 
djnairement  achet^e  par  an  riche  Ta- 
tar;  on  autre  se  charge  4e  l*entretien 
Boit  pour  un  an ,  soit  pour  plus  long- 
temps,  selon  sa  fortune  ou  sa  devo- 
tion. La  maison  se  compose  <l'<un  petit 
vestibule  et  d'une  grande  salle  dout  le 
plancher  est  dispose  en  ji^nte.  Sur 
oette  elevation,  chaque  ^leve  oecupe 
un  espaee  d'enviran  deux  pas  de  long , 
oik  il  place  son  matelas  •»  ses  ef/ets ,  et 
mdme  ses  ustenailes  jde  cuisine  que 
«haQun  doit  apporter  avec  soi.  Cette 
salle  sert  en  meme  temps  de.  classe , 
de  dortoir  et  de  r<^fectoire  pour  1^ 


Aleves,  et  de  logement  pour  le  mattre. 
Les  enfants  tatars  sont  envoj^s  a  1>- 
cole  a  r^ge  de  sept  a  huit  ans ,  et  ils  y 
restent  pendant  cmq  aqnees ,  a  Texeep- 
tion  de  «eux  qui  se  vouent  h  Tetat  ec- 
clesiaslique ,  et  dont  les  Etudes  durent 
beaucoup  plus  longtemps.  Les  objets 
il'ejiseii;neme»t  sont :  les  dogroes  de 
la  religion  nMhom^tane,  la  lecture  ^ 
.r^rituie  arabes ,  et  quelquefois ,  selon 
les  besoins  looaux ,  le  persan  et  le  bou- 
kbare.  Les  Tatars  n'apprennent  point 
aux  Ecoles  leur  langue  matemeile,  at- 
tendu ,  disent*ils ,  qu*il  serait  superflu 
de  faire  des  d^penses  pour  un  ensei- 
gnement  qu'on  pent  reoevoir  cbez  ses 
parents.  Le  mattre  n*est  point  r^tribue 
en  argent ,  mais  en  nature ,  c'est-lhdire , 
en  vetements  ou  en  denrees  qu*on  lui 
envoie  en  forme  de  pn^nts. 

La  population  protessant  Tislamisme 
fi*ei^e,  dans  la  Russie  d^Europe,  a 
I,2»7v4a7dmes,  et  habite  particulie- 
rernent  les  goavernemeots  d'Oren- 
bourg,  Rasan,  Yiatka,  Nijni-Novgo- 

rrod ,  Astrakhan ,  Saratof ,  Peoza ,  Perm 
et  la  Tauride. 
ill  existe  dans  ces  divers  gourerne- 

tinents  561  to^les.mahoin^tanes,  ren- 

)  fermant  environ  •  14,000  ^eves. 

La  population  iuive,  groupte  dans 
les  provinces  polonaises  suecessive- 
ment  locorporMs  a  Tempire ,  dq>as$e 

:un  million  d'imes.  ,Les  ecoles  israe- 

.  lites  sont  au.  nombre  de  3,52)3 ,  toutes 
independantes  de  Taction  du  gouverne- 
meat ;  cependant  plusieurs  ecoles  qu'on 
pourrait  appeler  mixtes  Qui  €X^  fon- 
dto  dans  ie  bat  de  perfectiouner  Todu- 
cation  scientinque  de  quelques  jeunes 
Isra^ites;  le  r^glemeut  de  l«a5  oe 
peut  manquer  d*exercer  une  heureuse 
influence  sur  Tetat  moral  et  la  civili- 
sation de  cette  olasse  industrieuse,  si 
longteipps  et  si  injustemeat  oppri- 
mee. 

Le  total  des  ^Ics  sp^aies  et  di- 
verses  d^ins  tout  i*e9ipirej»t  de.  jeX2, 

r  renfermant.  l^y964  eldves. 

Lelableiiu  suivant  preseoite  T^tat  de 

'  Vriostruetion  puUique  en  Russie. 


RUSS1£. 


639 


NOMBKE 

toUldc* 

BOURSfBRS. 

SOIIMES  FODRNIKS 

par  le 

OOUTBRIIBMSHT. 

l^colet  dn  minuteratte  rinltnie- 
tion  miMiDiie ...t**.* 

65,707     I 

67,014 
1879864 

9r5,MO 
17j9,5oo 

.91,896    : 

.7^50,000  Tonblfli. 

8,687.194 

3,000,000 
9i496,947 

Am  ecolfift  mililaim* ........ 

Am  iooies  ecdeuastiqaes. .... 
Am  MQleft  fp^eialet  et  divcnes* 

Total  feaeral 

460,576 

95a,3ix 

.«8,734fi4i  roubles. 

Sor  oe  ncmilnre'  d*^^«6 ,  44,000  en- 
TitoD  raooifeDt  aae  inttniction  8up6- 
rieure;  ks  autres  MConteDtent  de 
coonaissaaoes  HSmentaAres  oa  prati- 
qaes.  Atnsi  le  nombre  das  6l%ves  (|ui 
stthrnt  les  ^coles  est  a  la  population 
totale  de  I'empire  dans  le  rapport  ap- 
proximatif  de  vn  ^  eent  quarante. 

Le  gouvemcment  poursait  avec  per^ 
s^^nce  la  tikdie  d6cl«rer  le  peaple 
rme;  mais  s'il  neut  d^cr^ter  Fetablis- 
semcntd'tti  ootl^oon  d'une  aead^ 
nrie,  il  est  uMpuisaant  h  donner  la  vie 
sdeotjiqneet morale.  End^tde  ton- 
tes  Jesfmantions ,  les  moyens  dont  M 
lert  la  Russia  poor  distribuer  les  In- 
mieres  daos  les  diferses  classes  desa 
faitoxfaiesociale^^tantie  produitd'une 
driliiatiott  plus  complete  j  oonserrent 
i'espritdeleurorigine;  et  iiapousse- 
roat  les  inteUigenoes  ii  Ja  liberty  ^i 
est  ias^pafable  de  la  science ,  ou  au 
jl^Bcspoir^'Entre  ces  deur  alternatives 
il  06  peat  y  avoir  qu'im  ^t  mixte  «t 
apatbiqae ,  w  toaitoit  {[oelquelbis 
1»  peijiles  qoi  out  pass^  par  tootes  les 
phases  politiques,  nuisiqui  ne  pent 
eoQvoiir  lottgtenips  a  one'natkmiqui 
at  dans  la  pdriode  laplosaicitivede 
son  d^etoppemeat. 

Les  derniers  voyages  de  Fenperenr 
ilicolas ,  ia  visite  inattendue  k  fiecna* 
<lotte ,  ses  excursions  en  Allemagne , 
qot  rappellent  raetlvit^  inqntte  de 
Pierre  le  Grand,  ont  sans  doute  on 
but  politique ;  mais  le  d^aut  de  ren- 


aeignements  positifs  ne  nouspermet 

Kis  de  oarac^riser  ces  dtoarches. 
ous  nous  oontenterons  de  r^p^ter 
•qae  le  but  da  cabinet  russe  est  de 
rompre,  ou  tout  au  moins  de  nentra- 
liser  ralliance  anglo -francaise  :  il 
manie  habilement  a  cet  effet  tous  les 
ineidents  qui  naissent  de  la  question 
imllando-belge ,  de  celles  d*Afrique  et 
d^Espagne,  et  des  embarras  ou's'est 
Jet^e  la  France  en  rompant  ses  reto- 
trons  amioales  avec  la  Suisse  et  le 
Mextoue.  Pendant  que  la  Russie  em- 
brouiile  tooseesfils,  die  prot^e  k  sa 
maoi^  la  Porte  ottom^ie,  la  Grece 
et  la  Perse;  etd^j^  les  contrees  limi- 
tropbes  de  Finde  s'^nmivent  sous  son 
influence.  Toutefois ,  plus  elle  apprpclie 
da  b«t,  plus  rAngleterre  sUnquike; 
et  lo  dernier  pas  sera  phis  difOcile  que 
itoas  les  antres. 

Les  racmrs  risses,  sons  le  regne 
actuel,  ont  repris  une  aUure  plus 
nationale;  encore  un  quart  de  si^le 
de  cette  'Sequestration  4e  Tempire  en 
£urof«  y  et  le  earactere  asiatiqueaura 
envabi  les  pins  hautes  classes  de  la 
'  soci^  ^  qui  ,*  sous  Temperear  Alexan- 
dre ,  •  se '  taisaient  •  remaiquer :  par  une 
SoKtesse  et  une  -Elegance  de  ^  Jangage 
ont  y^tonnteent  souvent  les  Gours 
•^tran^es*  Onpeutdirequelessctences 
militaires  ont  ^  senits  en  progrea; 
( les  arts  et  les  lettres ,  qui  ont^besoin 
pour  flenrir  du  soldi  de4a  "liberte ,  se 
courbent  sous  le  niveau  des  institu- 


640 


L*UN1VERS. 


tions.  Depuis  la  mort  du  poete  Poucli- 
kin ,  les  toivaios  russes  out  ouelque- 
fois  fait  preuve  de  talent  ;iDaisle  genie 
et  la  T^ritabie  inspiration  ont  disparu. 
Aprte  tout,  qu*importe?  La  oivilisa* 
tion ,  en  Russie ,  n'a  pour  mission  que 
de  perfectionner  robeissance ;  tout  ce 
qui  sortirait  de  oette  limite,  le  pou- 
voir  le  regarderait  moins  comme  un 
avantage  que  comme  an  obstacle. 

Quant  au  caract^  personnd  de 
Tempereur  Nicolas ,  11  est  toit  tout 
entier  dans  Tallocution  qa*il  a  adress^ 
a  la  deputation  de  Varsovie  en  octobre 
1835:  nous  le  r^umerons  en  deux 
mots :  inflexibility  et  perseverance.  Ses 
actes  les  plus  absolus  ont  uneempreinte 
de  granoeur;  il  poss^de  rartdlfDcile 
d*as60cier  son  peuple  aux  mesures  qui 
afferroissent  1  absolutisme ;  etrange 
sjpectade  que  celui  de  tant  de  millions 
ijrbommes  qui  applaudisseat  a  leur 
propre  assujettissement,  paroe  que  le 
reflet  de  la  gloire  militaire  dore  leuis 
chalnes! 

Nicolas  ne  s'est  point  signal^  per- 
sonnellement  par  de  hauts  laits  mili- 
taires ;  mais  il  salt  donner  Timpulston , 
demeier  et  reoompenser  le  m^nte ;  dans 
une  guerre  europeenne,  il  ferait  mar- 
cher jusqu'au  dernier  homme,  et  de- 
Senserait  le  dernier  rouble,  plut6t  que 
e  ceder  sur  un  point  qui  engagerait 
I'honneur  de  sa  oouronne.  II  a  montre 
un  grand  sang-froid  dans  des  drcons- 
tances  difficileiB :  son  attitude,  lors  de 
la  revolution  militaire  de  Saint-Peters* 
bourg,  en  1834,  a  donne  la  mesure  de 
sa  fermete.  Quand  le  cholera  edata 
dans  sa  capitale,  on  I'a  vu  8*avaneer, 
le  front  severe ,  aii  milieu  d*une  popu- 
lace furieuse,  lui  reprocber  en  termes 
brefiB  et  indsifr  son  egarement ,  et  la 
faire  tomber  k  genoux  d'un  geste. 

En  1838,  les  Russes  reprirent,  k 
Varna,  plusieuffs  canons  conquis  sur  les 
Polonais  en  1444,  lorsque  Ladislas  Ja- 
gellon  pent  au  siege  de  oette  viUe.  Nico- 
las, ^  la  vuedece  trophee,  ordonna  de 
transporter  oes  pieces  k  Varsovie  pour 
en  faire  an  monument  national. 

G'est  par  Tautorite  de  I'exemple,  non 
moins  que  par  ses  avertissements  su- 


premes,qu*il  exeroe  une  influence  irre- 
sistible sur  les  masses ;  il  a  le  dhtiit  de 
recommander  I'ordre,  reconomie  et  let 
vertus  de  la  famille,  lui  dont  les  moeon 
sont  rigides ,  et  qui  ne  deploie  de  ma- 
gnificence que  pour  recompenser  d*e- 
datants  services,  ou  pour  retablisse- 
ment  de  fondations  utiles.  Gertes,  sa 
severite  a  frequemment  depasse  1m  bor- 
nes;  mais,  pour  bien  juger  un  prince, 
il  faut  lui  tenir  oompte  de  certainrs 
exigences  de  position :  la  plus  inmerieu- 
se ,  peut-etre ,  a  ete  cette  sorte  de  reao 
tion  qui ,  dans  les  ifetats  despotiques, 
imprime  sou  vent  k  la  politique  du  nou- 
veau  souverain  une  marche  oontraire 
k  celle  de  son  predecesseur ;  soit  que  les 
abus  du  regne  qui  vient  de  finir,  s'at* 
tribuent  aux  trnts  caracteristiqiies  les 
plus  saiflantsdu  dernier  autocrate,soit 
que  le  nouveau  maitre,  presse  de  £lire 
acte  depuissance,  entre  instincti  vemcat 
dans  le  despotisme  en  s^eioignant  des 
limites  ou,  comme  les autres,  il  a  dd 
marcher  le  front  courbe.  Or,  nous  avoos 
vu  quelesqualitesdominantesd'Alexan- 
dre  etaient  la  demence,  et  une  doa- 
ceur  de  formes  qui  n'excluait  point  une 
grande  finesse  de  vues :  e'en  eftait  asset 
pour  prepsrer  la  Russie  et  le  moode 
au  gouvemementdur,  franc  et  entier  de 
I'empereur  Nicolas :  d^ailleurs,  quand 
un  homme  d'un  caractere  fort  est  mif- 
treabsolude  soixante  millions  d'^UMi, 
comment  ne  serait-il  pas  tente  de  briser 
violemment  les  redstanoes;  d,  quaad 
son  agrandlssement  personnd  n*est  que 
I'expression  de  la  puissance  collective 
de  tout  un  peuple,  peut-on  nier-qae 
ses  efforts  revetentun  caractere  impo- 
sant?  Ge  prince  pent  qudquefois  errer 
dans  les  moyens;  mais,  aux  yeux  de 
son  peuple ,  le  but  Tabsout;  rautocrate 
fait  son  devoir,  pourqooi  I'Eorope  ne 
fait-dlepaslesien? 

Les  anoetres  de  Nicolas  out  dit  aox 
Russes :  Abjurez  vos  ooutumes,  vos 
moeurs ,  pour  adopter  les  nxsmrs  et  ks 
ooutumes  etrangeres  :  Nicolas,  jpre- 
maturement ,  sdon  noos^a  dit  aox  Ros- 
ses :  Votrs  dvilisation  mdraa  d'elle- 
meme;  desormais  vooi  marchercs 
seuls... 


FIN  DE  LA  RUSSIE. 


I»*««»*««*1 


TABLE  DES  MATlfiRES 


CONTENUES  DANS  LA  RUSSIE. 


^  t  ^ 


Abo,  TiUe  devastee  par  un  inceodie  en 
iSa7,  33  b,  regardee  eocore  comme  la  plus 
giaiide  ville  de  la  Finhmde ,  45  b. 

Admiuistratioii  munidpale  des  viiies ,  a8 
a,  b;  etat  ioterieur  vers  Taa  iaa4t  loo  a. 

Aimant ,  mines  a  Perm  ,  S-j  a, 

Albatre,  belles  carrieres  a  Koungour, 
57  a. 

Aleoiiles,  iles  qui  renfenuent  quelques 
cnleres  tantot  fuioants ,  tautot  lau^ant  des 
flammes,  60  b ;  les  Russes  y  ont  forme  quel- 
ques eiablissements ,  61  a ;  epoque  de  leur 
deoovTerte,  commerce  qui  s'y  fait,  309  a. 

Alexandre  I^  (xSox-xSaS)  impUque  par 
Pahlen  dans  la  conspiration  contre  Paul  I"!*, 
et  sotttenn  par  loi  pour  son  a? dement  au 
trone  (V.  les  relations ,  398  a  —  4x1a');  idee 
de  ta  position,  de  ses  qualiles,  de  son  ca- 
ractere,  41X  b  —  4i3  a;  abandonne  les 
phns  de  Rml  I*' ;  live  Tembargo  mis  sur  les 
Mtinents  anglais;  Markof,  ambassadeur 
tusie ,  est  expulse  de  France ;  le  tsar  s'oc- 
tupc  d'aoeUorationsadmiuistratives,  reunit 
li  Georgie  a  Tempire,  a  une  entrevue  avec 
k  roi  de  Pmase,  declare  la  guerre  k  la 
France,  4x3  b— -  4x7  a;  envoie  une ambas- 
iade  poor  obtenir  I'entree  dans  les  ^tats 
ehioQis,  reprime  les  empietements  de  la 
Sqede  et  les  incursions  des  Lesghis;  aprea 
Feolevement  d'Ettenheim,  fait  remettre  une 
aote  terminee  par  un  ultimatum,  sur  la- 
jaelle  M.  de  Talleyrand  est  charge  de  noti- 
ner  la  reponse ;  enectif  auquel  est  portee 
I'annee  nisse,  4x7  a— >4ax  b;  utiles  re- 
fen&es  a  rinterienr ;  la  Russia  refuse  de  re- 
connaitre  IVapol^on  empereur;  campagne 
d'Aosierlitz ;  traite  de  Presbourg ;  entrevue 
de  Napaleon  et  de  Tarcbiduc  Charles;  la 
toatie  renouvelle  avec  la  Porte  le  trait^  de 
1799 ,  signc  nn  traiti  de  paix  avec  la  France, 
4>i  b  —  4^9  b ;  debate  entre  la  France  et 
la  Pmaae,  hostilites,  lena;  Telecteur  de 
Saxe ,  allie  de  Napoleon ;  Eyiau ;  campagne 

41*  Livrakfm,  (Russib.)  t.  ii. 


de  1807  contre  la  Kussie,  Friediand;  en- 
Irevue  de  Tikitt  a  laquelie  prend  part  la 
reine  de  Prusse ;  le  grand-ducbe  de  Tar- 
sovie  est  donne  au  roi  de  Saxe;  traite  de 
Tilaitt ;  I'An^leterre  determiae  la  Suede  a 
la  guerre,  fait  bombarder  Gopenbague  et 
s'empare  de  la  flotte  danoise;  declaration 
rendue  a  ce  sujet  par  Alexandre ,  embargo 
mis  siu*  les  vaisseaux  anglais ;  sur  les  arti- 
cles secrets  du  traite  de  Tilsilt,  429  b  — 
437  a ;  la  Russie  continue  la  guerre  sur  les 
frontieres  de  la  Perse ;  trait  Je  courage  de 
la  derniere  reine  de  Georgie;  expedition 
des  Anglais  dans  les  Dardanelles ,  resistance 
des  Turcs ,  renversement  de  Selim ;  la  Ta- 
lachie  est  gouvemee  par  un  divan  de  Russes 
et  de  boyars  du  pays;  expedition  en  1808 
de  la  Russie  contre  la  Suede,  occupation  de 
la  Finlande  suedoise;  deposition  de  Gus- 
tave  IV,  437  a  —  447  b;  guerre  d'Espagne* 
echec  de  Baylen ;  conference  d'Erfurl ;  lettre 
adressee  par  Napoleon  et  Alexandre  au  roi 
d'Angleterre ;  rAutricbe  atiaque  la  Baviere; 
Vienne  est  occupee  par  les  Fran^ais ;  Essling^ 
Raab ,  Wagram ;  traite  de  Schdobriixm , 
mariage  de  Marie-Louise;  nouveaux  soins 
donnes  par  Alexandre  a  Tadministration  in- 
terieure;  succes  des  Russes  sur  les  Turcs, 
paix  de  Boukharest ,  ib.  447  b  —  453  a;  si- 
tuation de  FEurope  en  18 13;  AJexandre 
leve  des  armees;  Napoleon  arrive  a  Dresde, 
donne  quelques  esp^ances  aux  Polonais,  est 

Erive  de  Vappui  ae  la  Suede  et  de  oelui  de 
I  Turquie;  dispositions  et  marches  des  deux 
armees,  Napoleon  declare  la  guerre;  sa  si- 
tuation deja  critique  a  Wilna,  453  a  —  459 
b;.  mouvements  et  engagements  entre  les 
deux  arm^ ;  Napoleon  revolt  a  Wilna  la 
deputation  de  la  diete  du  grand-duchc  de 
Varsovie;  manifestes  d*Alexandre  qui  se 
rend  a  Moscou,  puis  a  Abo,  oil  il  decide 
Bernadotte  a  comnattre  pour  la  Russie ,  459 
b  —  463  a;  mouvements  des  deux  armees 

41 


642 


TABlE  PES  MATItRES 


juiqu*&  Vilepik;  deux  corps  de'l^rm^e 
nisie  te  reunineiit  sons  les  miirs  de  Smo- 
lensk; poMtioQs  detcorpa  fofnuuH  im  ftilcs 
des  deux  armto;  nriie  de  Smoleiiik;  le 
combat  de  Pololsk  aecide  Napoleon  h  mar- 
gW  sur  Mosoou;  uno  dtviaiou  fran^aise 
prend  la  grande  redoute  de  Qierardino, 
463  a  —  467  a ;  victoire  des  nvn^is  k 
Borodino ,  entrte  a  Moaoou ,  ineeodie  de  la 
viile;  Napol^n  fiiit  des  propositions  de 
paix ;  brusque  attaque  par  les  Russes  k  Vin- 
lovo ,  combat  sanglant  k  Malo-Iaroslavetz , 
les  Fran^  repoussent,  encore  les  Russes  k 
Viazma ;  Napoleon  et  plusieurs  corps  ren- 
irent  ii  Smolensk ;  combats  sontenus  par  les 
Francis  dans  leur  relratle  w  milieQ  de 
souffranees  inouies ;  passage  de  la  B^reeioa ; 
Napoleon  confie  ik  Mqrat  le  commandement 
derarmeeetrentrei Paris,  407  a — 4^s; 
1«  Fran^  eY«coent  TViina ;  d^feetioo  d'lra 
corps  prussien ,  Posen  et  Beriin  sonf  ^a- 
cnes  j^r  les  Frennis;  en  i9i3,  Napoleon 
est  vamqueur  k  ijitzea ,  Bautzen  et  Wort- 
cben;  rupture dq  coogr^  die  Prague,  efllorti 
de  PAnglelerre;  netoire  de  Napolteti  k 
Dresde ,  tehees  essuy^  par  OqdiQOt  et  Tan- 
damme ;  Monsieur  se  rend  an  quartier  ^ 
neral  des  puissances  alli^es ,  480  a  —  486  a; 
x8i4,  Cnamp-Aubert ,  Hontnurail,  Tau- 
champ,  Arcis-sur-Aube ,  capitulation  de 
Paris  et  ses  consequences;  Alexandre  se 
rend  en  Angfeeterre ;  congr^*  de  Vienoe ; 
retour  de  Napol^n  en  France ;  Alexandre 
retoume  k  Petersboorg  par  la  Hollande  et 
Carlsrube ;  sea  acles  de  piete  apres  son  re- 
tour,  486  a  —  49a  a ;  traitid  avec  la  Per9e 
par  lequel  la  Russie  dtend  ses  flhmtierei 
m^dionales ;  Napolton  combat  k  Waterloo  i 
traite  de  I^uris;  Alexandre  a  des  relations 
wee  madame  de  KrudcQer ;  odgine  pr&u- 
m^  de  la  iainte  alliance;  resisiances  dans 
plusieun  pays ,  id^  d^iswdatious  secretes 
en  Russie,  499  a — 497  a;  Alexapdre  ar- 
rete  le  mariage  du  grand-doc  Nicolas  avec 
la  princesse  Charlotte  de  Prusse ;  il  est  recu 
a  Yarsox-ie  avec  rentbausiasme  de  Tespe- 
ranee;  renvoi  des  jesuiJLes^;  difficult^  dians 
radnioistration  de  la  Pologne;  mod^tioa 
d* Alexandre  dans  lies  conditions  impesf^  k 
la  FYanoe ;  causes  pr^um^  de  Tagitation 
qui  se  manifestait  en  Allenuigiie ;  Atexandre 
et  le  roi  de  Prusse  se  rendeat  k  Paris  inc^ 
gnito  ;  grieb  qui  ont  oocasionni  FexDuhioQ 
des  l^uites,  leur  nomln«,  leors  diverses 
retraites,  497  a  —  5oa  b;  assoi:iations  se- 
cretes en  Pologne  en  i8a9;'Xlexaiulre  di- 
savone  TpsiUnti ,  $99  b ;  jnibstient  de  sou- 


tenir  les  Grecs,  ses  |iaroles  a  M.  de 
CbiteanbriaDd  sur  oe  sujel ;  eongrk  de  Ve- 
lone ,  debats  avec  la  Turquie ;  aBodaiions 
seeriles  en  Russie,  5o9  b^  5xi  a;  nslidie 
sMense  d' Alexandre ,  inondalkm  de  Sskii- 
Petenboafg ;  eiat  des  negociatioos  sycc  Is 
Porte;  riduotioD  de  b  masse  des  anigmts, 
malaise  du  oommeroe ,  contrebande  aeroee 
par  les  juifs;  colonies  militaires,  5ti  a— 
317  a;  mort  d* Alexandre;  discussion  de 
Tautear  sur  les  assertions  avaocees  a  ce  sojet ; 
peu  de  temps  apres ,  mort  de  rimperatrice ; 
rtom^  sur  le  caractere  des  princes  qui  oat 
suoced^  k  Pierre  I<r;  portrait  d'Alexandre, 
traits  anecdotiques ,  5 17  a.  Sag  a. 

Alexandre  Mikha^ioviteh  (i3i9-tM). 
nonuni  grand  priftee  par  Usbeck,  €st  aasii 
chef  de  Novgorod;  Scherkal ,  eoesiD  #0h 
beck,  el  ses  Talm  sent  tallies  en  pmai  i 
Tver  par  fcs  Rassea,*  Uabeck  dAfaile|da; 
sieurs  villet  et  dratte  h  grande  prinofsate 
k  Jean,  prinoo  de  Meseov;  Gonrtanln, 
flrare  d'Alexandre,  raooit  dUsbeck  la  Rn>- 
cipaotft  de  Tver;  AieiaiidM,  samaii  de 
Gomparallre  devnnl  Usbeek, fiMt  an Liwia- 
nie,  el  dix  aiM  plue  tard  se  presenlei  Vt- 
beck  qui  lui  read  son  ^enge,  oais  qui 
ensnite,  d^pres  lea  acewatioBfl  deJasa,  b 
fait  moorir  ainst  que  sen  fib,  ro^  k- 
na  a. 

Alexandre  Ptewsky  (i«47-»>^)  ^ 
do  chef  taUr  Kief  et  loute  la  Rbmc  "^ 
ridionale;  somMf  lea  Nevgoridiamr^ 
vohes  contre  lui,  s*oppose  k  lean  «■»• 
cottire  les  TMara,  vent  excaser  •"P'^*' 
khan  dea  aetes  de  r^beBkNS  dte  .p"^ 
provinoes  russes ;  meurf  awis awroir  w»» 
tonsure  monacale;  a  re^ V nam  de MMf^ 
ses  reeftes  transpofils  mt  Pierre  I"  Mf  >* 
bordk  de  It  Nfva ,  io5  a -^  aetf  •* 

Alexis  Mikhaflo^tch  (s64^i^^)^ 
sans  suce^  le  trAae  de>  MogMt  ^T^* 
fille  d^m  sHnplegeatflbomme^sa  sseuriiv 
k  Boris^Moroeof  qui  avail  M^  aen  ffo«i«f 
near  et  qui  abuse  de  son  pouvoir;  It  ni» 
Christine  obtient  un  d6lomBMigeaM><^ 
rdnigration  en  Ruaie  d^»  gnwi  n^ 
de  ses  sujets;r4vehe  caosfe  i  Novforod  ptf 
k  diiette;  vn  nowvel  impoHeur  est  hn««i 
Holsteitt  an  gouveniement  r«*^>  J^  ^ 
l4Sd«  a  Bf oscoo ;  tea  Coeaf|uea  <fe  l'Okf>«|| 

sie  soumeHent  I  la  domination  '*""*J| 
gueiTe  est  dedarfe  4  la  Pdegae, ««  »  »^ 
prend  Smolensk  et  phnwurf  antK*  wiVf 
ti^ve  de  treize  ans;  bostililfii  v^«  >^ 
SQedoit,  puis  avec  em  une  pain  ddrniH^i 
epuisement  du  trisor,  nudadies  IpidteKI^ 


^. 


CONTEIIUES  Dxm  LA  RtlSSIE. 


64Z 


iMit  ripfiB^  par  hi  force ;  morf  ^  llf»- 
raiof,  tS7  a — 189  b;  fe  patnarehe  Nikon 
96  b'fiv  k  d'ioifMirtaiils  tnrvaiiM  eeel^siBfti- 
qMs;  mh  nie  va  jusqo^i  la  femkntkm  e€ 
la  cfvaetl;  il  OMupaae  la  |>rani^  histoire 
que  Ton  ait  sar  la  Ruasie;  Stenko-Rariii, 
Gosai|in  dn  Don ,  eil^bre  pttr  a«  brigaada- 
£es,  cstfiiecat^&lf6aeoa,ib.  189 b — tgi 
•;  le  Mr  ipMMa  ea  fleoonlBB  ooces  Natluh 
lie,  fine  d«  ealoMl  flaridikfit  qvi  devienC 
soo  miotstrey  et  qui  ae  cKsUa^ne  par  la  Mh' 
§eaat  4»  sea  adiaiiiislnitiaa ;  piiblieaCioii  du 
Code  Ooiaienie,  cfuelqiies  disMtitiotie  dea 
pRauer9CBa|iilMa$  ffwatages  da  son  le^ttc; 
tl  est  le  pcre  de  Pierre  le  Onrnd,  ign  a  -«• 
19}  b. 

AliM,  chalne  de  nwntegnes  assee  tiet^, 
Bisis  saaa  gbeiera  eomparables  i  eeux  des 
Alpes,  5  b ;  quela  tcirains  sqpare  uoe  de 
sgraaifieatKwa,  so^a. 

Asslffie  jaine ,  se  reeaeifle  sar  les  bords 
dekMl^oe,  8a. 

AmeriquerasBe,  61  a;iafcnBitedufroid, 
itid. 

— ffpiaafttaiadey  sadeeewerteaMnDute 
par  Fonter  aox  Honaands;  depuis  qaeRe 
cfie^,  7«  b;  iMaifes  d«  Ytmkit  nwe 
dan  ertia  r^gian ;  ^aergie  das  EMs-Ais 
centre  lenr  cxieasion ,  37  a ,  5i3  b ,  S14  a. 

AaMar,  flc«n«de  TAiie  septeatrionala,  an 
prcnd  saa  aoai  qn'a  la  preaoiere  jonetion 
de  dcBx  I'itiucj ,  ^lendne  de  son  eoart , 

9  ^f  '•  a.  

Aaara  (Ss  ifc  Ooorges)  ^  samoBHBe  Bo^ 
geboahfiiy  on  la  Piam  (1  r57- 1  xSg),  pfrnee 
de  Hadiaw;  iT  dame  A  cette  xi&tt  un  ae- 
awuweat  ceosidteble,  9a  a;  (11^ 
it^),  fl  rfmMloane  fe  systiuM  d'apaaage, 
nile  Msiislaf  (Tassilko,  Miebel  et  onelques 
boyan;  il  encre  daas  leaays  des  Paigarea  et 
War  MIe  plasieuffa  nUea.  (zi07-i]^)  II 
*«at  soamettre  la  ville  de  Novgorad ;  A»- 
■aa,  fib  de  Mstislaf ,  ^  la  goBTeraait ,  at- 
la^ue  l»  aiii^  d^Andi^;  oouM  s'eamare 
<le  Kief,  ef  fait  daThdimir  bi  C8pitale«e  lis 
Rasne,  9*  a*,  k  la  ville  de  Hovgorod ,  as- 
siesee  «r  AaM  ,  r£sis«&  avee  nguear,  pais 
^  ahaiaetf  airec  Mr,  et  K^it  enfin  poor 
pnace  sna  tti  Geo^gev,  aa  Ken  de  Rorik. 
Aadre  Biemr  assassine  par  sea  IlKorn,  9)  a 

Aadra  AlesaBAro«ilch(r  394-1 3o4),  pand 
priMe,  cBlre  ea  dnHftread  avee  Unuel  de 
XosBOB  ef  Jean  die  Mr^ashFrfe  oai  v^afent 
coa^Qcnr' Wiir  aiaepeaiwyiee*  AadBTc  sereaa 
%prci  da  |;racMl  Uiaa,  qnr  impose  hr  pafai 
Kn  primea  dtranis;  il  s'eMpare  de  k  ^le 


de  landskran;  il  meHft  reir<^ti  de  rhid>t( 
menasiimie ,  1 08  a ,  b. 

Andre  Yaroslaviwh  (ia47-fa63>,  priifete 
de  Hadioiir,  donne  lieir  an  pilfeige  de  aa 
DTOYince  par  Its  Tatars  et  ftnten  SuM<e ;  esf 
rorcer  de  coaipardf re  der aaf  an  des  ebefs 
tatars,  to5  a. 

Andrinopfe  (trah^  d^  sign^  par  la  Tor- 
qnie  en  r8a9,  549  b— ^  £f5a  a. 

Angara ,  rmere  qnr  se  jette  umM  le  lae 
Baikal,  10  b;  se  rinnit  a  Pllim  et  feiaienne 
des trois  rivieres  Tmingnnska ^ttn. 

AngieieiTe  y  ses  nar^gatenn  s  avanceai 
dans  rOcean  'sepfenirional  et  eoudtoeut  fnt 
traiti  de  cpmmerc^  avec  la  Rassio,  137  b; 
eBe  re^t  la  permissiott  <Py  exploiter  les 
mines  de  fer,  x4x  b;  i^lisabeu  obtient 
adroilemenr  des  sdret^  et  des  privileges 
ponr  son  eomaaeree,  f  58  a^  b-;  TAngletem 
retire  de  sa  mediatioii  eaCre  ii  Sucxle  et  m 
Rasaied^lm|ioruatsffrBn(agea,  1 86  b;  aehete 
le  priTil^e  de  dkebiter  du  tabac  c»  Raaaie , 
204  b ;  ramirid  aaalais  Noris  ae  pent  s^op* 
poser  aux  suecea  de  la  fletfe  nisse  dans  la 
Bdtiqne,  a38  a;  le  r^laUisseflaent  da  prfr- 
tendant  entrait  dans  les  projets  de  Goerta , 
224  b»  et  inqaietait  VAiiglelenv,  a5o  b; 
elle  pread  des  mesores  m>portUBes ;  Toit  sa 
politiqne  benrt^  par  €atberiBe  II ,  370  b , 
a  laouelle  elfe  onvre  ses  fresors,  98x  b; 
traite  de  sobsidesrompn  par  Paul  I*',  591  a; 
TAngleterre  fe  dMde  i  efltrer  dans  fe  se- 
conde  eoaiitiott,  ib.;  eAs  parall  afoir  faftle* 
ment  seeoarife  ses  alli^  daaa  fe  campagne  de 
Holfende ,  396^  b ;  Bnl  !<*  rompt  brasqne- 
ment  avee  e8e,  396  b;  PAagfeterre  a  p« 
n'tere  pas  Mnmgere  k  fe  mort  de  Paal  I** 
(T.  fes  refeiions,  398  a  — 4"  1);  eoada- 
siOR  d^ane  novreUe  eonteatioa  aatfitiaMi , 
414  a;  Alieiamirel^  I^feyeariferga  aiisaiir 
lea  Yatsaeanx  anglais,  4x3  b^,  4i4  *;  aptaa 
le  traits  de  lUsitf ,  PAn^tcnvdMermine  k 
fe  gaerre  centre  fe  Franee  fe  Snede  <pi» 
earaiephisieurs  partes,  433  b,  434  »>  bom- 
barde  Gopeabagne  ef  ^empare  de  fe  flaila 
danoiae,  ib.;  eipMiCian  aes  IfeHaaelfe», 
441  b  et  soiT.;  traiti  de  sabsidea  avoe  fe 
Sonde,  444  b;  flotta msse  priae  par  I'aaaMl 
Golton,  rendae  k  Alexandre,  447  'f  ^\ 
aotemes  payees  et  eajgagemeats  pna  par 
TAnglelerre  arrec  plnaieurs  pmssMioes  ear 
i8i3,  483  b;  elle  a  autnqnj  k  aa  dignilA 
dans  raflkire  de  son  navire  fe  rimm  aoofis- 
qai par  feRuasfe;  dtodfe  sar  oelte caplarat 
6x3  a  —  616  a;  eomment  TAngleMne  |Mal, 

rsoa  Urif ,  ooMNbafeMar  fo  pourair  de 
Husufe,  6*7  a--#ao  fe;  was  dTapvaa 

41. 


644 


TABLE  DES  MATlfeRES 


lesquolles  Tauteur  regai'de  comuie  un  gage 
de  salut  ralliance  de  t'Angleterre  et  de  la 
Pranoe ,  6ao  b  —  6a4  a. 

Anna  Petrovna  iiupire  une  vive  passion 
a  Paul  I**"  qui  la  surmoDle,  410  a,  in  b. 

Aime  (la  grande-duchesse)  regeute  avec  le 
prince  de  Brunswich  ( 1 74 1)  •  Munich,  nomme 
premier  miniatre ,  indispose  le  prince ;  plti- 
sieurs  attributions  lui  soot  otees ;  il  demande 
et  obtient  sa  demission;  le  prince  iHric  est 
declare   co-regent;    la   Suede   declare    la 

guerre,  la  Finlande  en  est  le  theAtre;  am- 
aasade  et  demande  de  Thamas-Kouli-Khan ; 
Anne  veut  se  faire  declarer  imperatrice; 
Elisabeth ,  GlLe  de  Pierre  I*'',  la  fait  enlever 
et  enfermer  avec  le  regent  et  leur  fils ,  a6a 
b  —  a65  a. 

Anne  Ivanovna  (1730-1740),  designee 
imperatrice  par  le  conseil,  signe  les  articles 
secrets  dont  on  lui  fait  une  condition;  se 
fait  uu  parti ;  fait  venir,  au  mepris  de  ses 
engagements ,  son  favori  Biren ,  aneantit 
I'autoritedu  conseil,  et  declare  voulotr  re- 
gner  par  droit  d'heritage ,  a54b  —  a57  a; 
nomme  Biren  son  chambellan,  etablit  un 
nouveau  conseil ;  Biren  fait  perir  d*une  mort 
cruelle  toute  la  famiUe  Dolgorouki;  sacre. 
de  rimperatrice ;  Biren  est  nomme  grand 
chambellan,  avec  la  dignitc  de  comte;  il 
fait  rompre  un  mariage  projete  entre  rim- 
peratrice et  rinfant  de  Portugal,  et  obtieut 
qu'elle  se  designe  un  suocesseur;  vues  di- 
verses  de  Biren ;  la  cour  quitte  Moscou  pour 
se  rendre  a  Petersbourg ;  les  conqu^les  sur 
la  Perse  sont  abandonnees  a  Thamas-Kouli- 
Khan  ;  hostilites  en  Pologoe  sous  la  conduite 
de  Munich  qui  roeti  pri\  la  t^te  de  Stanis- 
las ;  sie^e  d'Oczakof  jiar  Munich ,  rigueur 
de  sa  discipline  militaire ;  conditions  de  la 
paix,  de  Belgrade ,  aS?  a  —  aSg  b ;  Biren 
o))lient  rinvesliture  du  duch^  de  Gourlande, 
fait  enlever  ceux  qui  se  plaignent  de  son 
administration ;  Anne  traite  d'une  maniere 
iujurieuse  un  prince  Galitzin,  pour  quelle 
cause,  aSg  b  —  a6o  a ;  enlevement  et  as- 
sassinat  du  general  Sinclair  par  des  officiers 
nisses  et  dans  quel  but ;  paix  entre  la  Russie 
et  la  Porte;  nombre  presume  des  victimes 
de  Biren ;  Anne  adopte  et  d&i^ne  comme 
son  suocesseur  Ivan ,  fils  de  sa  niece  Anne ; 
par  son  testament,  elle  confere  la  r^ence  a 
Biren,  aOoa  —  a6i  a. 

Apanages  particuliers  donaea  anx  enfants 
des  aouveraim ;  Sviatosiaf  introduit  cct  usage 
fufiestev  79  a. 

Aral  (lac  d'),  auist  nomme  par  les  Russes 
ner  d'Aral  et  mar  Bkue;  sinw  ii  Teat  de  la. 


mer  Gaspienne ,  a  prubableoieot  la  bi4im 
origine  que  cette  mer,  re^it  plusieurs  ri* 
vieres  parmi  lesquelles  trois  mentent  une 
attention  particuUere,  comme  pouvant  ou< 
wir  d'importantes  voies  de  navigatiuu, 
J  a  a. 

Architecture ,  peu  analogue  au  cUiual  a 
Petersbourg  et  a  Moscou,  36  a. 

Argile  (F)  et  les  malieres  terreuses  propres 
aux  arts  se  trouvenl  en  de^  et  au  dels  det 
monts  Ourals,  19  b. 

Argounn,  riviere  qui,  avec  la  CliilLa, 
forme  le  fleuve  Amour,  u>  a. 

Arithm^tique  chiflree  substituee  a  la  ue- 
ihode  tatare,  ao4  b. 

Arkhangel,  chef-lieu  du  gouvemeoieni 
de  ce  nom ;  commerce  favorise  par  plusieiff^ 
fleuves  et  deux  mers ;  oonstruction  de  bsi>- 
ments  pour  T^tat  et  pour  le  commerce; 
peche  dans  les  mers  polaireSf  5o  a;  ^rauil 
empl(n'e  pour  la  mouture  du  gnin,  ib.; 
superucie ,  population ,  49  b ,  eomparee  i 
ceUe  de  la  Siberie ,  58  b. 

Armee ,  ctat  eslimatif  des  diverses  anuei; 
reserve,  gamisons,  colonies  militaires,  re* 
crutement,  temps  du  service,  39  h  —  4i  *i 
trouve  tes  remontes  dans  les  haras  de  l^ai, 
5 1  b,  ses  eclaireurs  parmi  les  Kir§au«s^ 
les  Cosaques,  61  a;  un  reglement  toiliisire 
est  publi6  \iar  le  tsar  Vassili  Schouulii. 
178  b ;  Pierre  I**"  eu  compose  un  pour  Tin- 
fanterie ,  aa3  b  ;  instilue  une  noblesse  mi- 
litaire, a38  b;  Munich  s*occupe  de  rorgapi- 
sation  de  Tarmee,  et  y  et^bUt  une  diicipliiK 
rigoureuse,  a58  a,  a59  a;  fondation  «le 
Tordre  de  Saint-Georges  par  Catherine  II. 
35a  a;  ecoles  militaires,  leur  division  eo 
trois  categories,  633  b  —  635  a  (V.  colonies 
mil.  5i4  b  —  517  a). 

Armenie ,  montagoes  separees  de  oelies  du 
Caucase;  Thabitant  adonne  au  commerce; 
population,  63  a. 

Arts  et  manufactures,  font  des  progns 
rapides,  mais  la  vente  des  produits  est  n* 
rement  avantageuae ;  estimation  du  nombre 
des  fabriques  et  des  ouvriers  il  yauue  diiaine 
d*ann^ ;  opinion  de  Vauteur  sur  la  direc- 
tion convenable  au  comnoieroe  de  la  Rusud 
35  a  *-  36  a ;  cette  puissance  tend  a  entraver 
rindustrie  manufacturi^  du  reste  de  IXu- 
rope,  617  a,  et  &  elablir  des  manufKiare* 
rivales  de  celles  de  I'Angleterre,  619  b. 

Aspect  general  de  la  Russie ,  assez  mooo- 
tone,  k  Pexoeption  de  oelui  de  la  Tauiide  el 
du  Cauoaae  ,5b;  plusieurs  points  pittora^ 
ques  sur  les  c6tes  ae  la  Finlande,  ^  h. 

Assif  nau,  a*etaient  muHipli^  sous  O^ 


CONTENUES  DANS  LA  RUSSIE. 


G45 


ime  U;  MUb  en  partie  par  Panl  I*',  385 
b;  iapostibiliti  reconnae  dc  les  retirer,  par 
trob gpandes  masses,  de  la  circulation »  5x3 

Assodalions  secretes  :  en  Pologne,  en 
tSaa,  Sm  b  et  suiv.;  en  Russie,  509  b ; 
organisition  de  plusieura  societes  secretes 
dans  rempire;  elies  lentent,  apres  la  mort 
d'AkxaDdre  I*',  de  meltre  leun  plans  k  exe- 
catioa   presqae  tons  les  chefs  aiMmdonnent 


cenx  qu*ib  avaient  mis  en  avant ;  siipplioe 
ou  exU  des  coDJnrcs  pris  dans  Paction  ou 
anr^t^  dans  leiff  fuite,  Sag  b^—  536  b. 
-  Astrakhan,  Title  et  gouTernement  qui 
offre  anx  naturatisles  des  faits  g^logiques  a 
obserrer;  population  de  races  europeennes 
et  asiatiques;  delits,  fait  digne  de  remarque 
sur  ce  point,  58  a. 

Avars,  leurs  expeditions ,  et  oelles  dts 
Ogors  sous  leur  nom ,  68  a ,  b. 


B 


Baikal  (lac),  nomine  aussi  mer  de  Baikal 
00  mer  Sainle :  ses  bords  retraoent  les  sites 
et  les  soeues  de  rAmM|ue  septentrionale, 
3  b;  recueille  les  eaux  d'un  grand  nombre 
de  rivieres;  d'nne  profondeor  considerable, 
Hi^me  k  pea  de  distance  du  rtvage,  xo 
1,  b. 

BriaM&a,  csp^  de  guitare  k  trots  cordes 
dont  le  peuple  s'accomnagne,  36  a. 

BargoQsine  (la) ,  riviere  qui  se  jette  dans 
le  lac  Baikal,  10  b. 

Baschkirs,  habitent  la  droite  du  fieuve 
Oonl,  la  b. 

Batory,  roi  de  Pologne^  obtient  de  grands 
tfuitages  sur  la  Roasie,  145  b —  148  b; 
a  mort,  partis  qni  montrent  leurs  preten- 
tioBs,  tSJ  b. 

6eaQi;4uts;  ont  deji  rendu  quekjues  nonis 
eelefares,  mais  sont  encore  sans  ^ole,  36  a. 
V.  Architectnre ,  Danse,  Musique ,  Peinture. 
^  Bemadolte  adresse  un  message  a  Napo- 
leon, 456  b;  accepte  les  conditions  d  A- 
lesuidre  et  s'engage  k  combatire  Tarniee 
dmrasion,  46a  b ,  463  a;  re^it  une  visite 
inatteodue  de  rficolas  I'%  639  a. 

fiessarabie,  Kichiuief,  capitale;  Bender, 
qui  appartient  aux  Russes  depuis  x8ia, 
55  a. 

Bestoujef,  diplomate,  vice-chancelier.  Y. 
Klisahetfa  Petrovna,  a65  et  suiv.;  sa  dis- 
pice,  271  a. 

Biaiystok,  capitale  d*un  cercle  peu  con- 
nderable;  exporle  eaux-de-vie  de  grain  et 
niirstannes,  56  b. 

Bibliotheque  imp^iale  de  Saint-Peters- 
boorg,  ooroposee  en  grande  partie  de  ceNes 
^i  oat  ete  enlevees  k  la  Pologoe,  68  a. 

Bireo,  favori  d*Anne  Ivanovna ,  devait  ne 
pas  Hre  amene  en  Russie  avec  elle,  355  a; 
m  elevation  sous  Anne  et  Ivan  YI;  il  est 
an^te  par  Munich,  255  a  —  363  a;  exile 
m  Sibarie,  363  a;  reparait  a- la  coiir  avec 
Munich,  37a  b;  rentre a  Mittau  comme  due 
de  Courlande,  391  b,  393  a. 


Bogolioubsky  ou  le  Pieux  (V.  Andre,  fib 
de  Georges),  93  a  et  suiv. 

Boleslas,  roi  de  Pologne,  engage  Sviato- 
polk,  son  gendre,  k  se  soustraire  a  la  do- 
mination de  la  Russie,  83  a;  Sviatopolk, 
mis  en  fiiite  par  un  de  ses  freres ,  s^tant 
refugie  Vers  lui,  Boleslas  bat  les  Russes  et 
retablitson  gendre  dans  Kief;  mats  ce  m6qie 
Sviatopolk  veut  se  soustraire  k  la  tutelle  de 
son  beau-pere,  et  les  Russes  poursuivent 
Boleslas,  qui  les  bat  et  sort  ensuite  de  la 
Russie,  83  a  —  84  a. 

Boris  Godounof  (1598-1604),  nommo 
tsar  par  une  grande  assemblee  nationale, 
160  a ,  marche  a  la  t6te  d'une  arinee  de  cinq 
cent  mille  hommes,  repand  des Kberaliles  et 
promet  de  ne  plus  appliquer  la  peine  de 
mort;  la  domination  russe  s'^tablit  dans 
TAsie  septentrionale;  Boris  condut  avec  Si- 
gismond  une  tr^e  de  vingt  ans ,  fait  deter- 
miner les  limites  entre  les  deux  Lapotiies; 
promet  des  secours  arremiiereur  d^Autriche ; 
protege  avec  succ^  Hberie,  mais  ne  pent 
retenir  la  Georgie  qOi  est  enlevee  k  Tin- 
flbence  russe;  le  prince  du  Carthuel  se  de- 
clare tributaire  an  tsar;  les  Russes  sont 
chasses  du  Dogheslan;  Boris  fait  exiler  les 
cousins  germains  du  tsar  F^odor;  delation 
encouragfe;  cruelle  famine;  des  serviteurs 
coiigedi^  ferment  des  bandes  qui  4ivrent 
bataiile  sous  les  murs  de  Moscou,  x6o  b  — 
x63  b ;  loori  Otrepief ,  dian'e  et  secretaire 
du  patriarche  Job,  se  dit  Dmitri,  reqoit 
I'appui  de  Sigisroond  et  des  Polonais,  est 
sal  lie  comme  souverain  par  plusieurs  villes 
impoHantes ,  combat  avec  gloire ,  m^me  dans 
la  dcfaite ;  mort  de  Boris  qui  avait  fait  bcnir 
son  fils  Feodor  comme  tsar,  i63  b  —  167  a. 

Boug  (le),  un  des  affluenls  du  Dniepr, 
traverse  des  pays  fertiles ,  x  5  b. 
'  Boutourlin  (M.  de).  Histoice  de  la  campa 
gne  de  x8i3,  cite  p.  433  a,  b  et  suiv.; 
canipagne  de  i8x3,  p.  483  a,  b  et  suiv. 

Bruce ,  extrait  de  ses  mcnioires ,  rclatif  a 


64K 


TiMlK'  DES  MATllJlES 


,  jfibdePjenwI*',  a35  a, 


b  mort  d* 
a3Cb. 

Budgel,  myitiMeuxi  dU&ple  4*Bil]fuii 
a  ^valuer  et  Mr  (|uclles causes,  38  b,  $9 a. 

Bul^iras,  leur  origioe,  migrations,  68  a, 
b,  69  a;  aoUiciient  Yladimir  d'adopter  )e 
mabftffnFri<ma,  81  b  9  lei^r  in^on  aaos  Ws 


teiTtt  de  MeuroiD »  86  b^karjuys  est  ra- 
vage piar  le  grand  iirince-Aiidii^,  9»  b;  cent 
d*OrieBt  Kgagoeot  kur  ftyt  pout  s'oppoier 
a  uoe  arm^  riisse;  acbelent  la  dux,  98b; 
iontieoiMat  aue  guarre  wn\n  Us  Tatars, 
x«7  b. 


€affa ,  d^gnee  souvent  par  l*aocieD  uoni 
Tbeodoaia ,  fandfe  par  les  Ginois ,  107  a. 

Canalisation.  —  Des  canauz  pourraient 
ioindiie  rirtiiGh  at  cpialquea  fkwrf»  de  l*Eu- 
rope  ,13a;  qudqnoHUtf  joiguent  la  Bfeva 
an  Volga ,  rOn^  k  b  Dvina ;  on  acbeirf  le 
canal  entre  le  Volgii  et  k  Don;  d'autres 
vandent  i  la  capilale »  x3  b ;  eonsidcratioua 
&ur  reosemblc  de  ca  a^st&me,  x3  b ,  i4  a ; 
un  canal  doit  &ijna  eviler  Its  ^cueiU  du 
Dniepr,  i5  b;  oalui  d^Oginaki  linnit  la 
pniepr  et  le  Niamen. 

Catacombes  aopa  h  lit  d*un  fleuve ,  53  a. 

Catbcrine  I",  AJeiieienia,  occupe  le 
troue  apres  la  mort  de  Pierre  I*'';  continue 
son  QBUvre  avec  Tappni  de  Mentchikof ;  ma- 
riage  de  la  prinoesse  Anne  avec  le  due 
d'lioUiein ;  Mentchikof  aoGeple  les  dons  de 
plusienrs  aoureraina  et  fait  avec  TAutricbe 
uo  traite  dosawautageux  k  la  Kusaie,  Cathe- 
rine persecute  Euooxia;  metures  fu'iaes  k 
propos  par  TAngleterre  dans  la  craiute  du 
pretendant ;  Mentchikof  doit  la  liberty  an 
due  d'Uolslein  qu*anauite  il  travaitle  k  per* 
dre;  Catherine  sent  dodiner  sa  sani^^  elJe 
elablit  par  son  testament  Pierre  n  pour 
tsar,  at  juac|u*i  sa  muonta  an  conseil  de 
rcgence;  regie  T^at  oaa  prinoea  et  prin^ 
cessea ;  aon  caractere ,  349  b  —  aSa  b. 

Calberiue  11  (x  76a- 1796) :  execution' du 
Gomplol  qui  la  place  aur  le  trdne,  Y. 
Pierre  III ,  37$  -^  a8a  b ;  situation  de  VEu- 
rope  et  de  TAsie,  28a  b  -^  386  b ;  elle  aur- 
weille  radministration ,  encourage  le  00m- 
meroe,  va  se  faire  sacrer  k  Moscout  adoucit 
la  rifueur  de  la  confiscation  des  bieos  du 
derge,  reprime  et  punit.une  nevolte ;  emeute 
des  soMats  aui  gardes  qui  veulent  proclamer 
emjpereur  le  jenne  Paul,  fils  de  Pieme  in, 
386  b «—  390  4 ;  double  projet :  agrandisaco 
ment  vera  TOrient,  demembrement  de  la 
Pologne;  Catherine  s*empare  de  hi  Cour- 
lande  ou  rentre  Biren;  nromet  k  Ponia- 
towaki  de  bire  roi  de  Pologne  lui  ou  aon 
couain ;  force  Auguste  k  rappeler  de  Mitteu 
le  due  Charles  aon  fils;  retire  les  troupes 
niaaes  de  la  Pologne;  inott  d" Auguste;  le 


primat  Lnbienaki  gouveme  en  Pologne; 
Catherine  ^puiae  aes  finanoca  pour  arriTcr 
an  oouronnement  de  Poniatowski;  die 
cooipteaurla  corrupti«n;Repaiat'Miai- 
voye ,  decide  ILeyaerling  a  eioplofcr  la  m- 
nace  J  traite  d'alfianoe  enire  U  Praiie  et  li 
Kuasie  en  1764 ;  Eadawil»  dief  da  iode- 
pendantf  ^  casse  diy  ^lectiona  laites  en  sob 
{tbsenoei  Poniatowski  appelle  uw  annee 
rusae ;  manifeate  de  pluaieurs  a^teun  el 
noncaa  oontre  la  pr^Maced'noe  ana^slnn- 
g^ ;  tunuikueuae  ouverture  de  la  dicte, 
&adxiwil  so  r^lii^  cfaea^  les  Tunes;  la  Rufiie 

et  la  Prusse  designent  Poniatowski  cooioie 
le  candidat  do  leuri  ooura,  Ic  divaa  dadare 
son  opposition ,  390  a  —  399  a ;  le  prince 
Ivan  t  dernier  obstacle  k  k  politiqua  de  Ca- 
therine •  est  aaaaasine^  399  a -* 3oo  b;  ea* 
trevue  a  Si^a*  ditMUi,  do  Catherine  a  de 
Poniatowski,  Poniatowski  est  prodameroi; 
axtenaion  dcg  frontierai  de  Tempirci  Ponii- 
towdLi  a'attiiv  rinimitio  de  Fi^deric  n  et  1 
rocours  a  la  protection  de  Catherine;  em- 
barraa  de  «a  iMmtipn ,  niananivris  da  Hep- 
nin;  4tat  de  TEurope',  3oo  b -^  3o6 a;  Ca- 
therine convoque  k  Moacon  ies  deputes  de 
tputfis  les  provinces  et  peuptodes ;  Moet  w 
nombre  de  aea  denMiacUea  d'hoanMir  U  fiUe 
de  Tcheglokof ,  of&aer  qui  anit  ^wk  h 
poignarder;  ae  fail  inoculer;  violence!  exer- 
c^  par  Kepnin,  resistance  des  palatiiu^ 
meridionaux ;  quatre  gnuida  d^  Pdogoe  toai 
enleves  et  transportea  en  Sib^t  3b6  a— 
3x3  a;  les  miniatrea  turcs  deioaodeDt qoe 
lea  troupes  ruaaea  aortenl  4»  la  Pdogne; 
basea  du  traite  qui  davait  etra  iopos^i  ^^^ 
a ,  b ;  premierea  meaurea  priaes  par  les  coo- 
f^ires  polonaia;  iia  obtieonent  de  ^i^ 
avantages;  Catherine  lea  dodare  wwoide 
aon  empire;  die  favoriaa  lea  aaoglantes  m- 
curaiona  dea  Coaaques  laporc^iMf;  ^l  f^ 
mettre  k  ISuaUpha  loutea  les  aatisiactJon< 
poaaibles;  cependant  les  Tnixa  oowaeoceut 
les  hostility;  Poniatowski  irrile  Calbeno« 
par  son  refua  de  marcher  a  la  tiie  des  Po- 
lonaia centre  lea  Xwca;  oampagae  dea  Turcs 
contre  lea  Russes,  qui,  d'abord  iolerieiu^i 


GOMTBimES  DAMS  LA  AUSSIE. 


647 


nftaaeni  fo  Dnieslr;  9$  pfay>tnt  ensoiM 
dins  h  MoUavie  et  h  Vaiachte;  Catherine 
prase  4  la  eonqu^e  de  la  Grimee;  die  ct^ 
sue  banque,  3i3  b  —  3%3  a;  un  brAlot 
rose  mcendie  la  flofle  tunpie,  Efphinston 
i^mnce  leal  dam  lea  Dardancllea;  vicloir« 
de  Rouoiianzof  nor  lea  Turca;  prbe  de 
Sender;  efforts  del  cotdMrit  poloiiiis; 
cDtretue  da  jeone  empereur  Joseph  n  et 
de  ftidkit ;  |ireBiires  ouvertnres  entre  lea 
pttissaiioet  allito  sar  le  partage  de  la  Polo- 
gne,  Mosoou  dho\^  ptf  la  peste;  conifi- 
tMBsdeia.paaatecle saltan,  3a3  a-^33S 
a;  tentative  malhenreiise  de  Tenlefenient  de 
PittUtowBkl  par  les  confiddrts;  premier 
pvtage  (en  1773);  mariage  suppose  d'Or- 
>of,  molle  coadahe  par  Ponpitchef ,  son 
aippiiee,  335  a  —  341  b",  Catherine  marie 
k graixMtte  Paul  son  fils,  341  a  —  343  a; 
Konkl  mariage  de  ce  prince,  347  a;  Po- 
tenkin  eomraencse  k  toe  en  fateur;  dispo- 
tiiioDs  idministratives  et  judiciaiivs ;  banqiie 
er^  i  Tobolsk  ;  snr  le  pen  de  succk  des 
pKBueres  colonies  d*toangers,  343  a  — 
346  b;  Repnin,  ambassadeur  ^r^  la  Porte , 
Qdortles  TWcs  iur  leur  position;  guerre 
<l'aa  an  entre  la  Prosse  et  I'Autriche;  les 
^caifeKsdes  1^tat»-ITnB  d'Am^ique  donnent 
ilea  au  syst^me  de  la  neutrality  armee;  oc- 
cu(«tioodelaCrim^;346b  — 35ob;  Po- 
teuia  eo  est  nonmi^  gouvemenr ;  voyage 
^  CaiWiiie  dans  la  Tauride  et  dans  la 
Ofmit\  {oerre  contre  la  Turquie;  diete  de 
^7^^;  aele  de  ooEifedtetton ;  paraUele  entre 
b  rerolation  de  France  et  celle  de  Polo- 

Si;  noiDs  de  pitisieurs  Polonais  vendus  i 
iberiDe,  35o  b  —  363  a ;  actes  de  la  dJMe 
^  '79' ;  noms  de  plusieurs  nobles  Polonais 
<Sin  ont  signe  Tacte  de  Targowicz;  les  trou- 

E^  rtatet  entreat  en  Pologne,  Catherine 
rorise  la  coalition  centre  la  France;  Su- 
nistas-Aopisle  ae  prdAe  au  nouTeau  partage; 
"^ioiTCction  de  Cracovief  sous  Kosciusko, 
rt  de  Tanone ;  les  Prussiens  se  reunissent 
»x  Rosses ;  priae  de  Praga  par  Souvorof , 
caiMtDlatioa  de  Tarsovie,  363  a  — 378  b; 
iroiiieBie  diatembrement;  sennent  exige 
dcs  Pran^2^  ea  ftussie;  incursion  dans  la 
'^^'^t  Gathcnne  envoie  Souvorof  oonire  la 
ffon ;  ia  morl  presque  subite ;  son  por- 
*nti,  un  caractere,  378  b— -384  b, 

Caocase  (gouvefn^Rient  du):  siege  trans- 
ne  4  Staropol;  forteresses  encore  neoes- 
*^  a  caoae  des  insurrections  frequentes 
de  diTerses  peuplades  et  du  brigandage  des 
>toDta|Qards ,  6a  b  —  63  b.  —  Proviuces 
(aacisiennes,  leur  importance  pour  la  Rus-# 


sie;  ftMnniront  d'exodteuts  soMais,  in  mtt- 
leriaux  potHr  la  marine :  afTriroM  au  voya- 

rr  des  mines  antiques  el  toiit^  les  bcaiiles 
la  nature,  61  a  -*-  6a  b;  insitrreclions 
Irftquentes  des  montagBards ,  69  a « ^at  po- 
litique de  ces  proriuees,  leur  population 
pr^un^,  armes,  costume,  Action  d'liii 
chef  pour  une  ezpUitiou ,  transmission  df. 
Tautorit^  supreme  Y  rivalitib  de  peuplade  k 
peuplade ;  bostiKta  exercto  par  pfusieUH 
de  oes  tribus;  qnelles  peupladea  y  parai^ni 
soumises  anx  Ruases;jpostiions  occupies  par 
la  tlussie,  591  a*— ^  b;  Mia  dans  les 
provinces  transcaucasieunes,  63^  b. 

Censure,  confi^  au  miuiitre  de  Pins- 
truction  publique,  27  b,  639  b;  les  uni- 
versity out  leur  propre  censure,  63 1  b. , 

Chambray  (M.  de).  Extrait  de  sa  refa- 
lion  sur  Fincendie  de  Moscou  (T.  la  note  p. 
471  et  suiv.). 

Oiameau  :  se  platt  dans  hi  Russie  meri- 
dionale,  54  b;  transporte  k  Orenbourg  les 
marchandises  de  TAsie,  56  a. 

Chants  ttationaux ;  les  peuples  qui  habi- 
lent  les  bords  du  lac  Baikal  en  ont  conserve 
qui  retracent  le  g^e  tatare  et  les  traditions 
sur  la  mer  Sainte ,  11  a ;  la  musique  en  est 
quelquefois  vive  et  graciense,  surtoutdans 
la  Petite  Russie ,  36  a ,  53  a ;  chants  des 
Staves,  71  a;  le  Cosaque  lermak  est  otiebre 
dans  des  chants  nationaux,  i5o  a. 

Charbon  de  terre ,  pen  abondant ;  quel- 
ques  mines  reconnues  en  Eid^pe  et  en  Asie , 
19  b,  dans  k  chaine  des  monts  Yaldai,  49 
a ;  annonci  nar  quelques  indices  dans  le  gou- 
vemement  oe  Toula ,  5a  b. 

Charlemagne  traite  avec  les  Slaves,  71b. 

Charics-Quint  entre  en  relation  avec  Tas- 
sili  Ivanovitch,  x3i  b. 

Chevaliers  porte-glaive,  ou  luerriers  du 
Christ,  fond^  par  Albert,  troisieme  iv6que 
livonien ,  97  a. 

Chilka,  riviere  qui,  avec  1'Argodnn, 
forme  le  fleuve  Amour,  to  a. 

Chine.  —  H  reste  peu  d*espoir  d*y  arriver 
par  une  route  ooverte  dans  les  eaux  polai- 
res ,  9  a ;  obstacles  que  presenterait  Cette 
navigation,  ib.;  Alexandre  P'  y  envoie  une 
ambassade  qui  n*obtient  point  Fentr^  dans 
ce  pays,  417  b,  418  a. 

Cholera,  a  exerc^  ses  ravages  daus  les 
armeesde  la  Russie,  577  b;  &  ses  attaques 
siiccombeot  le  feld-mari^chal  Dicbttsch  et  le 
grand-due  Constantin ,  ib. ;  a  ^lat^  il  y  a 
pen  d'auoees  k  Saint-Petersbourg,  640  a. 

Christine,  reine  de  Suede,  re^oit  du  tsar 
une  indemnite  pour  les  stijets  iniigr^s  dc  ses 


i^ 


TABLE  DBS  MATIERES. 


Ei«U  en  Rusftie,  187  a;  G^let-GusUve 
devient  roi  par  sou  abdicaiion,  189  a. 

rjerge,  son  organisation;  |KMiUon  pre- 
caire  des  ministres  du  cuke,  29  a,  b;  jouit 
de  quelques-unes  des  franchises  de  la  no- 
blesse; du  reste  nuUe  influence,  36  b; 
FieiTe  l'*"  lui  pte  le  droit  de  vie  et  de  mort, 
937  b;  Pierre  IIT  reunit  a  la  couronne  les 
riciiesses  du  clerg^ ,  274  a. 

Climat,  generalement  salubre,  sauf  les 
eihalaisons  produites  par  plusieurs  roarais; 
temperature  comparativeoient  plus  froide 
que  la  ndtre  a  mesure  que  Ton  avance  veri- 
J'esI,  x6  a —  17  a. 

Gloch(e  de  Tver,  d'un  poids  enOrme  i 
iia  a. 

Code  Oulajenie;  cxposi  de  (|uelque$-unes 
de.ses  dis|i^silions;  pen  de  duree  de  Taocien 
jCode,  en  ou^%  freauemment  modifie  ou 
meconnu ;  ioHnence  au  clerge  et  des  nobles 
dans  la  reaction  de  ce  dernier,  191  a  — 
191  b;  Codes  projetes  ou  publics  par 
Pierre  I",  24.7  a ,  b. 

<k)M^e  de  prevoyiince  forme  dans  chaque^ 
gouveniement ,  aS  b« 

Coloiiies  grecques  sur  les  cdles  de  la 
roer  Noire,  67  a 

.  Colonies  militaim,  leur   organisation, 
5x4  b  —  5i7  a.. 

Commerce ,  la  balance  en  est  en  faveur 
oe  la  Russia,  37  b.  Y.  Arts  et  Manuiao^ 
tures. 

Conseil  de  Tempire :  ses  i^ttribulions  16 
a .  »\  . 

Constanlin  grand  prince  de  Vladimir  et 
<fe  Souzdal  (i a  16-1219);  vainqneur  de  son 
(frere  Georges,  il  le  rappelle  aupres  de  lui, 
le  declare  heriiier  dc  la  grande  principaute 
et  lui  donne  Souzdal;  meurt  a  tren(e-trois 
>ps,  apres  avoir  donne  une  principaute  a 
pbacun  deses  deux  fils,  97  b,  98  a. 

Constantin,  second  ilis  du  gr«nd-duc 
Paul;  conjecture  d'apresson  nom ,  35i  a;  ce 
qu*il  manifesto  sur  la  mort  de  son  pere ,  409 
b ;  fail  ses  premieres  armes  sous  le  general 
Souvorof ,  395  b ;  il  appuie  forlemeni ,  dans 
la  campagne  de  Russie,  uu  avis  dont  le 
succes  etait  probable,  466  b;  a  le  coihman- 
<^em«nt  de  rfirmec  polonaise,  498  b;  a  Ic 
tilte  de  vice  roi,  son  caractcrc,  5o3  b,  5o4 
a;  la  nou\elle  se  repand,  aprcs  la  mort 
d*Alexandre,  qu^il  renonce  a  la  couronne, 
519  a;  plusieurs  conjures  venlent  qu*une 
jiariie  des  soldats  proclame  Constantin  em- 
pereur,  sur  Tassurance  que  cctte  renonria- 
lion  est  supposee ,  533  a  —  535  b ;  il  echappe 
^  Tiusurreciion  dc  Varsovic,  553  b;  abau- 


.donne  |iar  les  trounes  polonaises,  il  opin 
neanmoins  tranquiHement  sa  retraite,  553 
b  —  556  b ;  sa  mort ,  d*une  atlaque  de  cho- 
lira,  577  b. 

.  Constantin  Palcologne  donne  sa  niece  en 
mariage  au  grand  prince  Jean  m,  xaa  b. 

Constantinople  urise  par  les  Turos ,  X9 1  b. 

Gonlrebande :  die  est  le  plus  grand  obsta- 
cle a  la  prosperite  de  la  Russie,  5i3  b. 

Cosaques  du  Don ,  leur  genre  de  vie ;  dans 
ces  regions  Tbomme  surtuut  merite  d'etre 
etudi^,  54  a;  Cosaques  de  la  mer  ^'oire, 
font  partie  du  gouvemement  de  Tauridc, 
53  b,  54  a;  leur  service  dans  rarmce, 
6x  b;  les  Cosaques  s'organisent  en  Russie, 
xax  b;  ceux  de  rUkraine  se  soumettenl  a  la 
domination  rusae,  188  a,  b;  les  Cosaques 
du  Don  re^ivent  en  i836  une  oouvelle 
constitution  de  Tempereur  Nicolas,  6 16  a 
—  6x7  a. 

Croyances  religieuses,  nems  de  celle$(Uii 
sont  admises  par  les  divers  peoples,  24  b; 
surveillance  des  religions  dissidenteseieroee 
par  le  ministre  de  finstmction  publique, 
27  b;  a  Gatcbina  sont  conservees  quelques 
reliques  et  une  image  miraculeuse  de  b 
sainte  Vierge ,  44  a ;  la  religion  domioaate 
dans  TEsthonie  n'est  pas  celle  de  Tempire, 
44  b;  a  Pskof  ont  ete  reunis  des  objeif 
d'une  pieuse  veneration,  48  b,  a  Koliaxin** 
les  rebqufu  de  saint  Macaire,  ib.;  idoles  je- 
tecs  dans  les  eaux  a  Novgorod  lori  de  Pela- 
Idisscment  du  cluristianisme,  49  ^i  reliques 
(ieposces  a  laroslavi ,  5o  b;  Kief,  bcrceau  de 
la  religion  cbi'etienne ;  image  miraculeuse  de 
la  Vierge  k  Otkirka ;  etudes  theologiques. 
5a  a ;  religions  rapprochees  sans  se  confon- 
dre/  54  a;  mahomelans,  peuplcnt  presqwe 
toute  la  partie  ancienne  de  Simphiropoli 
55  a ;  la  religion  catbolique  domine  dans  la 
Russie  occidcntale,  ou  se  trouvenl  aussi  le 
culte  grec  el  le  judaisroe,  55  b;  i  Vilna, 
.ine  mosquee  et  des  eglises  de  toutes  !« 
communions  chretieuue."* ,  ib. ;  a  KamcneU- 
Podolski ,  grande  devotion  k  une  image  dc 
la  sainte  "Vierge,  56  b;  libre  excrace  dc 
lous  ies  cultes,  ib. ;  religion  el  pratiques  sn- 
perstitieuses  des  Kirguizes,  61  b;  <yllcsdes 
Slaves,  7a  b  — 73  b;  en  866,  qudquesRusr 
ses  deniandent  le  bapteme,  75  a;  Coastan- 
.1  iuople ,  assiegee  par  les  Variegues ,  est  sauiee 
par  un  miracle,  ib. ;  Peroun  el  Volosse, 
dieux  par  lesquels  jure  Oleg,  76  a,  8a  1;  k 
rhrislianisme  commence  a  se  repandre  daiis 
les  provinces  nisses,  ib. ;  vers  941 » i' /  *y*** 
un  asseK  grand  nombrc  de  dirctiens  a  Kiej, 
77  b;  en  ^55,  la  regente  Olga  embrasse  le 


GOMTEMUES  DANS  LJL  RUSSIE. 


649 


Araftjammne ,  78  a;  premicn  et  dcmiert 
■uiijrs  chr^ens  k  Kief»  81  a;  bapldme 
oHoone  au  peuple  par  Viadimir,  oependant 
^oriqnes  provinces  patent  paiennes,  8a  »; 
fivres  sacres  Iraduits  do  gree  en  slavon,  85 
a;  la  LiTooie  septentrionale  renonce  au 
chriftiaiiisme,  pg  b;  des  pr^res  font  en- 
mis  en  CariUie  poor  convertir  les  habi« 
Unts  an  christianisme ,  10 c  b;  le  prince 
Uichel  et  le  boyar  F^odor  refbient  ae  fl^- 
cbir  le  gcoou  decant  les  idoles  des  Tatars 
ct-TC^oirent  la  mort,  104  a,  b;  publication 
des  canoas  cedesiastiques,  107  a;  ecdettas- 
ti^ms  eaemples  d*un  tribut  impost  par  let 
Titars,  io5  b;  Berga»  khan  des  Tatars,  te 
bit  mahoiBitan,  xq6  b;  ITsbeck  propage 
eel(e  religion,  109  a;  interdit  lance  par  le 
metrnpolitain  sur  les  Pfekoviens,  xii  b; 
dnix  bis  d'on  khan  des  Tatars  sont  eonvertis 
le ,  1x4b;  Tabbe  Serge  b^it 


les  troupes  msces  qui  vont  combattre  le 
Titar  Maoai,  xx6  b;  la  lithuanie,  qui  a 
adople  la  eomnmniofi  laline,  est  hostile 
coBtre  lea  Rosses  attach^  au  rit  grec,  x  tj 
b,  ia6  b;  les  Permiens  sont  convertis  a  la 
ndipoa  cfar^enne,  ib.;  Jean  in,  k  la 
mUe  d*ane  expedition,  ordoune  des  prims 
pobKoues,  ia3  b',  fait  brdler  lea  fauteurs 
de  rberesie  jodaiqne,  127  b;  des  legats  ro- 
MiDs  teaient  d*operer  la  reunion  des  deux 
tiglUei,  x3t  b;  Jean  rv  sefait  sacrer,  i34 
a;  fait  b4tir  une  igKae  en  memoire  de  la 
pnse  delazan;  il  designe  dans  cette  viUe 
des oaplaoements  pour  des  temples,  137  a; 


Gr^goire  XIFI  tcnte  la  reunion  de»  deux 
Eglises,  147  b;  Clement  Tm  ecboue  dans 
la  mtoe  tentative,  x58  a;  hymne  chantee  a 
Tavenement  du  tsar,  x6o  b;  le  faux  Dmitri 
favorise  les  jesuites  et  leur  |)cnnet  de  chanter 
hi  messe  latine,  170  a;  Philarete,  pere  du 
tsar  Biichel  Romanof,  est  eki  ]Hitriarche, 
186  b;  Casimir  met  son  royaume  sous  la 
protection  de  hi  Yierge ,  1 89  a ;  le  patriarche 
Nikon  introduit  le  chaut  grec,  engage  le 
tsar  k  assembler  un  ooncile  qui  reconnait 
pour  la  seule  fidile  rancianne  Bible  sla- 
vonne,  189  b ;  introduction  du  plain-diant, 
X94  b;  oertaines  parties  du  eulte  r^ormees 
par  Pierre  I*',  907  a;  hi  Sorbonne  lui  pre- 
sents un  memoire  tendant  a  la  leunion  dee 
deux  iglises ;  il  r^pond  ^une  maniere  ^a^ 
sive,  et  plus  tard  il  execute  en  penonne 
une  boufibnnerie  burietque  en  derision  du 

5 ape,  aa6  b;  il  dte  anx  eodesiastiques  le 
roit  de  vie  et  de  mort,  937  b,  abolit  la  di- 
gnite  de  patriarche,  a38  b;  Elisabeth  Pe« 
trovna  fait  instruire  dans  la  religion  greeque 
son  neven  qu'dle  designe  pour  son  sucoas- 
seur,  367  a ;  Cut  embrasser  la  mtoe  religion 
a  la  prinoesse  qu'il  Spouse,  a68  b;  Cathe- 
rine n  se  conforme  k  toutes  les  pratiques  du 
eulte  grec,  974  a ;  Alexandre  I"'  re^it  du 
synode  de  Mosoou  une  relique  dont  il  confie 
la  garde  a  la  milice  de  cette  ville,  46a  b; 
Koutousof  offre  a  la  veneration  de  Tarmee 
une  image  miraculeuse  de  la  Yierge,  467  b. 
Culte  (V.  Croyances  religiensei). 


D 


Dagbo,  lie  principale  de  rEsthonie, 
Ub. 

Daniel,  prince  de  Galitch ,  se  soumet  a  la 
protection  du  khan  des  Tatars,  104  b;  est 
couroime  roi  de  Galicie  par  le  legat  du 
pipe,  ib.;  sa  mort,  son  eloge,  106  b. 

Danse,  celle  des  Russes  offre  une  panto- 
BiiiDe  variee ,  mais  pour  les  ballets  iis  nous 
Mot  ioferieurs ,  36  a ,  b. 

Daru,  sur  le  plan  de  la  campagne  d*Au8- 
teriiu,  4i5  b. 

Ditmar,  historien  allemand  contemporain 
de  Srialopolk  (eoi5),  Si  a. 

Dmitri,  fits  du  grand  prince  Michel 
(t3(9-i3a8)  et  prince  de  Tver,  venge  la 
nart  de  son  pere  en  perqanl  de  son  epee  le 
Snad  prince  Geo^es  Dauielovi(cli  :  dix 
nois  apres,  Usbeck  le  fail  mourir,  (09b, 
110  a. 

Doiitri    Alexaodrov itch    (  i  a  7f>- 1  a9<V ) , 


grand  prince,  se  rend  k  Novgorod  pendant 
que  les  autres  princes  accompagnent  les 
I'atars  conire  les  A  tains;  soumet  les  Care- 
liens  rebelles;  est  oblige  de  fiiir  deux  fois 
devaot  son  frere  Andre  qui '  s'etait  fait 
Domnier  grand  prince  par  le  khan  des  Ta- 
tars; re9oit  de  nouveau  la  couronne  du  khan 
Nogai;  entraine  par  Andre  et  Feodor  d'Ta- 
rcslavle ,  le  khan  met  en  marche  une  arm^ 
nombreuse;  Dmitri  prend  la  fuite,  et  les 
Tatars  mettent  Novgorod  a  feu  et  a  sang;  se 
reconcilieavec  Andre,  apres  avoir  abandonne 
le  titre  de  grand  prince,  107  a  — 108  a. 

Dmitri  Gonstantinovitch  de  Souzdal  (i  359* 
x36a),  designe  grhnd  prince  par  le  khan 
Naurous,  est  force,  par  son  coinpetitear 
Dmitri  Ivanovitdi  de  Moscou ,  de  compa- 
raitre  avec  lui  devant  le  khan  de  Sarai,  ^m 
prononce  en  favour  du  prince  de  Moscou : 
Constant inovilch  s^euluit  a  Souzdal,  et  Ivav 


TABLE  DES  MATllmES 


Mmtch*  Age  de  douat  ana,  Ini  tuooede, 
Hi  b,  iiS  au 

Dmktn  Ifanovilelt,  furaoiMii  DoMkoi 
(i363.i3«9),  OMnDe  gnod  prian  par  le 
khan  da  Sani,  lui  fWtta  qiuand  cmn«ci 
veut  la  dApoiaidar;  ivanpoite  aur  la  Tatars 
des  avaotaget  |»articU;  Olgtfd,  prince  da 
Lithuania,  jpmknn  ^  Rmiia,  bat  las 
iroupet  du  grand  prinea  at  davaHa  hs  an* 
rirant  da  Maaeou;  Doritri  afttaoae  Bikbd , 
prinaa  da  Tver,  qni  appeUe  Otgead  k  aao 
•eooitiB,  nak  Unilri  ae  rend  k  la  horde,  od 
U  cft  eonfimft  dana  k  frande  piincipatili; 
kr  khan  Manai  fnt  nvager  las  environs  da 
N^;  Michel,  sans  nttendva  Ohntl  et  Bla* 
nai  las  aVi^,  aniaaa  les  ho^lites;  k 
grand  prince  r^siife  ei  s'cDpare  da  Mikon- 
lin  «t  de  Tfer;  eanbat  de  noureau  ks  Ta- 
tars, rapiend  snr  ks  lirtinaniani  ipsdqnas 
pravinces;  rkiila  vkterienseniant  k  ana 
armia  innomhrabk  oandnite  par  M anm ; 
n*a  Idas  k  nAoe  rteluiion  oonim  Tokhta- 
■Muisch ,  ^ ,  guide  par  Okg ,  mat  Moaoou 
4  kn  et  a  san^,  et  devnt  lei|nal  il  anvok 
son  fik  slnoiilier  en  son  Boai;  il  fame  HAnr- 
gerod  k  raoannallin  aa  suaeninale,  mak 
craint  de  ae  ckdaicr  eontra  ka  litfauamena ; 
Tassli,  son'fik,  s'^ftut  de  k  honk  pour 
venir  reeneiHir  ses  demisn  soupirs  et  aa 
suoaassion,  ixS  t*^  117  b. 

Ihnkri  (k  fans),  i6o5-x6o6,  impend  k 
bruit  de  aapretendne  jnalltd  dans  un  eon- 
vent  de  moinesdont  il  kissit  partk  ayant  k 
nam  de  louri  Otrepief ;  soutient  ses  preten- 
tions par  les  armes  contra  k  tsar  Boris  Go- 
dounof,  x63  b — 166  b;  bit  ^traogkr  par 
des  assassins  k  tsarina  sa  veuve  et  son  fib 


eouviTUt 


nng  et 
nMita«  k  nHMt  k  diak 


nan  aprts  sen  eanwmnenwnt  canne  lisr; 
nil  son  enlr^  aolennelk  ii  lloscoe;  sei  pro- 
digalitcs,  aa  dissolution;  eansmnliaB  de 
Vassili  Sehnnialu,  aon  cul  et  eclai  de  look 
sa  baulk;  k  bum  Dnutri,  rcEonna  psrii 
mm,  aon  onek  et  son  bare,  ks  bit  eefer* 
mar  ou  eiikr;  se  eamposa  una  ^ank  ^t- 
trangen;  pawlonna  am  Schoniski,  qai  re- 
leur  lanjt  et  lenr  brtone;  &i( 
Oisippf  qui  Tsvait 
ii^inriii,  t66b-^i7a  b;  epoosa suleaDclk- 
mant  IfatinB,  filk  dn  voiifoda  da  Sss- 
doosir ;  diz  joun  aprea  dckle  k  eonspinlioD 
tnunie  par  Schoniski;  k bus Dmiln sspirc 
frappi  de  denx  coaps  de  foe,  Mariae  est 
ranuse  k  aon  pte;  maurtra  par  k  peii|>h 
d*un  mad  noatn  d'ctmngers;  Scbouiski 
assemide  k  eenseil,  il  y  est  saki  tar,  17* 
h — 176  a. -*Un  second  buDaulrijpoW' 
suit  k  gnsrre,  spouse  Marine,  eit  las  pir 
unprineeNogau,  17ft  a  —  i85a. 

Dnkpr,  toive  mpsde,  coura  moUe  par 
de  namteeuses  eatameles;  a  servi  aux  in- 
eonions  des  fikvaa  dans  k  BaaAapiR. 
i5a. 

Dniflrtr  (k),  Xyms  das  aatriens;  nanga- 
taon  bcik  et  abne,  i5  h. 

Don,  Xmaia  des  aneiens;  can  ianlafare; 
des  bancs  de  aable  eodiainssaat  hvqacn* 
aaent  son  ceavs;  nn  canal  b  jcindia  aa 
Volga,  x4b,i5a. 

Droit  ruaae,  nom  donni  au  nka  aaoea 
eode  de  Ion  civaka,  attribne  a  Tarodaf, 
as  a.  Y.  Code. 

Dvina  (k)  ooddentak  conduit  jinqo'* 
Riga  des  bob  de  constnictioa,  14  >  i  ^ 


£ 


^dncelion  partienliirs.  Les  tevngera  qui 
ae  daatinent  a  oelte  earrike  doivent  aubir 
un  eaamen  de  capadie,  34  a. 

^katMnoakf ,  ehcMieo.du  gouvemeraant 
de  oa  nom,  sitni  aopras  des  cataracles  du 
Dnkpr;  fohriquas  de  drap,  64  b. 

I^hsabeth  Ftovma  (f74x-x76x):  gra- 
cicuseet  bonne,  dk laiase eondamner  ecus 

rTon  veut  perdre,  acoonk.k  d'autres 
rieompenses  sans  mesure;  recommence 
k guerre  centre  k  Suede;  renvok  au  s^t 
k  oannaissauce  das  afbires;  d^aigne  aon 
naven  k  doc  de  Hoktein  pour  aon  sooces- 
aanr,  96S  a  —  967  a;  k  Finknde  tombe  au 
penvok  des  Rosses;  ^sabeth  bit  ponir 
crndknient  madame  Lapoukbin ;  bii  epoii- 
sar  i  son  neveu  la  princesse  Sophie-Augusta 


d*Anhalt-ZeriMt ,  depm  Gathcrina  H;  tnite 
de  b  quadrupk  aHianoa;  k  Ruawe,  i'Aa- 
gkterre  et  k  Holknde,  sootienncBi  lom- 
tMts  de  Marie-ThMae;  Galheriae,  de 
coAteedu  grand^ueaon  mari,  mat  kusp* 
a  profit;  elk  a  icrit  des  mteoiret;  m 
Kaisons  avec  Ponktowaki;  vidoirei  no* 
portees  sur  Frederic;  ezil  de  Bas(sojf>; 
prise,  de  BcHin;  moit  de  I'SmpMn^ 
avanoee  par  ses  ezob;  progrcs  da  k  p««' 
sanee  russe  sons  son  regne,  3678— a?-**- 
l&nancipation  das  serft :  qvelipMi  aMM  - 
les  prises  i  ce  snjet  par  Catberiaa  U,  307 1) 

—  3o8  b;  344  b— 145  b;  un  odMie  « A- 
lexandre  l^  change  k  oonditioB  <l«^' 
si  lea  scigneura  y  conaenteoty  en  ctHa  ac 
Cranca  tcnandera,  4x7  b;  unamcaurainiB' 


Goiminns  daw  la.  ebbsie. 


•Jit 


dot  tend  k  raAmdutiemeiit  dcfinitif  d^mw 
Mrtifl  sacoeaife  dei  lerfs,  4Aa  a;  uomhre 
OM  pajmv  deYenus  libra  de  i8o3  a  1810, 
45iia. 

Empensiir.  Ordre  de  soooenion  riM  ul- 
ttrieurement  par  les  empereurs  Paul  I*'  et 
Nkolat  r' (as.  V.  la  note).  Titre  de  r«m- 
pcrair  jtf  ies  ainoiriei ;  est  chef  supreme  du 
aint  sjDodei  a5  b,  a6  a;  nomme  les  i^iia' 
t«iiD,  96  b;  epoque  et  oocaaion  4  lanuelle 
k  tilre  df  peiar  on  tsar  leur  est  ^ontere,  87 


b;  armes  impMdes  et  leur  legende,  199  a. 

Enfants  trouv^ :  itabliwemeot  de  la  pre- 
miere maison  oui  leur  est  destinee,  6a6  a; 
leur  noiubre  dans  leurs  deux  maisons  k 
Samt-P^ersbourg  et  i  Mosoou;  leur  diri- 
sion  en  trou  categories,  637  a,  b. 

Alats-Unis.  ▼.  Am^ipie  septentriomde. 

Ex^rtalion  (comniepoe.cf) ,  quels  en  soot' 
les  pnncipaux  objets,  36  b;  qnds  peuTent 
itre  les  riwaux  des  Ruases  pour  ce  commerce , 
ib.  (T.  Arts  et  Bfano&ctures). 


F 


rcnpire  maae,  75  a. 
Kate  Aks^Ml  (<696-i58a)  Mnt  la 

Alois  MikhtMmUthi  mm»9  da  eounge 
el  de  la  knutink  «ratrt  les  Tatars  et  kt 
I^  imwa;  d*«|ini  1Mb  du  pnaot  G%- 
EtziD,  Mie  fiirnnflltmfitf  In  resiilns  da 
TMMiana  BoUaiM*  00  Hulitiie  dm  oidres 
qai  doiviiit  reoamiaftvB  la  superiorite  daa 
empleis  efleetifs;  on  lui  attriwe  pkisieurs 
Ngkasenls  et  ctaUisacmenU  irtilei;  a  laisse 
k  plan  d*une  aeademie :  il  desigM  Pierre 
poor  son  snecsiirig,  4  Ymdwmm  de  son 
mreTfan,  193  b — 195  a, 

Fcodor  Bonssevilcli  (i6ftS) ,  beoi  comme 
bar  afiBt  la  mort  de  son  pere  Boris,  ne 
^foA  rcsisler  an  laux  Dmitri  qui  le  fut 
ctooficr,  lid  et  la  tsarine  sa  n4re»  i^^  a — 
168  b.  y.  Dmitri  (le  fiiux). 

FiMv  lYWMvitch  («5^-iS98)«  jeune 
tiar  asriste  de  cinq  consaiUers;  Tun  aeux, 
Godoonof,  beau-frere  du  tear,  praod  le 
tHre  de  regent,  gomreme  gkorieiisflnent, 
acbefe  la  oonqn^e  de  la  liberie;  dejoue 
aw  conspiration  et  assure  par  la  force  son 
autoril^ ;  mart  de  Batory,  roi  de  Pokgne ; 
Feodor  est  un  des  pretendanti  k  oe Irtee;  il 
edone  et  fisit  avec  le  stoat  tnw  trive  de 
^aae  ans;  hostility  oontre  1&  Suede;  la 
loMc  s'empare  de  h  Gar^;  le  regent, 
poor  s^aasorer  le  ponvoir,  fait  mourir  Dmi- 
tii,  fils  de  Jean  IV;  defend  Taillameient 
Moseou  oontre  les  Tatars;  bostiltles  contra 
b  Finlande;  paix  de  Tiavsio  avec  la  Snede; 
villcs  bAties  et  ooonp^  par  des  gamisons 
pear  eontenir  les  Tatars;  paix  enCre  la 
ftoaie  et  la  Crimee,  sdretes  et  privileges 
aocord^.4  TAngleterre  pour  aon  commerce; 
beondition  du  serf  rosse  deviant  plus  dure; 
mott  da  Isar,  qui,  par  un  testament  ecrit, 
le  sceptre  a  sa  veuve  Irene :  la  taanne 


le  tcAmo  :  nae  grande  assemblee  nationale 
oonlere  la  Goumnna  de  Riissie  k  Boris  Go- 
dounof,  i5i  b — 160. 

Far :  ciftui  des  pninBom  du  nord  est  Ires 
cstime;  il  abonde  ausfd  et  est  d'une  excel* 
lenlc  quaUledaas  la  Cancase,  19  b;  pbisieurs 
mines  dans  le  (Boarcmement  de  Riasaa,  5& 
b;  dens  oahii  de  Tenia,  S%  a;  abendantcs 
dans  eeux  de  KLaloo^  el  d'Orel,  ib. 

Ferrand ,  dtk  phiaieers  fois  dans  I'bisioire 
des  demembremenls  de  la  Pologne  (V.  Polo* 
gneet  Caiberine  U). 

Feu  (peine  du),  dans  qnds  eas  elle aui«it 
ete  appliouee,  suiveat  le  plan  laisie  par 
Feodor  Alesiiimtob,  194  b. 

Feu  grigcois,  dctniit  les  barques  nisses , 
77  a ,  85  a. 

Fievre  de  CSrimee :  a  cause,  suivaat  Topi* 
nion  laphisaocreditee,  le  mort  de  I'empe- 
raiir  Alexendrr,  16  a ,  b ;  Sao  a ,  b. 

Finlande,  la  plus  vesle  des  provinces 
balliques;  ^lendee,  culture,  population, 
canctira  dn  Finlandais  ou  Finois,  45  b — 
46  a }  peuples  anaicnsqni  se  ratlachent  k  h 
soucbe  finoise  J  ^  b ,  'jotL 

Foires :  idee  du  tabkau  <|u*elles  presen- 
lent,  37  «,  b;  eelle  de  Nijei-Novgorod,  5c 
a;  une  st  tient  k  Onrioupmskaia,  55  a ;  iine 
4  Orenbowf ,  58  1;  4  Irbil ,  60  a. 

Fortifications  (art  des),  ausai  avanoe  que 
diea  lea  autras  nuissaaaas;  cependant  places 
fioirtes  pen  noanliraiBes ,  41  a. 

Fndint  H,  roi  de  Prusse,  battu  4  Ku- 
nendorf,  271  b;  est  Tobjet  die  radmiralion 
de  Pierre  HI,  974  a  et  suiv.;  il  Tavertit  du 
danger  de  sa  position,  976  b,  a77  a;  pro- 
jels  de  FrWnc ;  opinion  de  Tauteur  sur  le 
r4sttllatde8apottiique,e86a,a87  aC^-Ce- 
tberieell). 

Freres  lieravci,  ont  un  etablissement  a 
Sarepta,  57  b. 


M3 


TABLE  DES  MATI&RES 


Gardie  (Jac^es  de  la) ,  general  suedois , 
FraD^is  d^ori^e ,  sert  tant6t  conlre,  tantdt 
^UT  la  Riissie,  148  a,  i5o  a,  x8o  b; 
promet  aux  Polouals  de  ne  plus  servir  le 
tsar,  18  X  b;  prend  possession  de  Ladoga  et 
de  Kexhulm,  z83a;  s'empare  de  Novgo- 
rod, x84  b;  poursoit  ses  conqu^tes  dans 
les  provinces  septentriooales ,  186  a. 

Gediniin,  prince  de  lithuanie,  apres  pla 
sieurs  victoires,  s'empare  de  la  Russie  m^- 
ridionale,  et  prend  le  titre  de  grand  prince 
de  Lithuanie  et  de  Russie ,  x  xo  b ,  1 1  x  a. 

Genghis-Khan  et  les  Mongols,  letirin^-a- 
sion,  leur  marche,  leur  retraite,  too  b  — 
lox  a.  V.  Oktai. 

Georges ,  sourerain  de  Tladinir,  f9nda- 
teur  de  Moscou ,  90  b  —  10  x  b. 

Georges  ou  Touri,  sumomme  Dolgo- 
rouky  (xi55-xx57),  assigne  d'abord  des 
apanages  h  ses  fils;  ne  peut  rMUire  Mstis- 
laf,  qui  avait  chasse  Tladimir,  son  oncle, 
de  la  ville  de  Tladimir;  un  de  ses  fils,  cbasse 
par  les  NoTgorodieos,  cede  sa  place  k  Ros- 
tislaf ;  sa  mori  lorsoue  sa  puissance  etait  de}a 
menac^  dans  Kiel,  91  b ,  9a  a. 

Georges ,  fils  de  VsJvoIod  III  (xa  xa-x 9 16), 
design^  par  son  pere  cooime  grand  prince, 
s'unit  au  prince  de  Pereiaslavl^Zaiesky  et  k 
oelui  de  Yourief-Polsky  pour  marcher  contre 
son  frere  Constantin;  paix  simul^;  bataille 
apres  laquelle  Georges  vaincu  est  contraint , 
amsi  que  son  allie,  d*abandonner  ses  apa- 
nages,  97  a,  b  (iai9-x!ia4,  sous  le  nom 
de  Georges  II) ;  son  frere  Sviatoslaf  conduit 
uiie  arinee  russe  contre  les  Rulgares  d*0- 
rient;  Georges  fonde  la  ville  de  Nijui"* 
Novgorod;  la  ville  de  Galitdi,  apres  une 
bataille  sauglante ,  ouvre  ses  nortes  au  pnnce 
russe  Mstislaf ;  le  jeune  fils  du  grand  prince 
Georges  s'ochappe  de  Novgorod  et  retoume 
aupres  de  son  pere;  il  est  replace  de  nou- 
veau  dans  ceite  ville ,  98  a  — 100  a. 

Georges  Y  sevolodovitch  ( x  a  24-1  a38) :  etat 
de  Tadministration,  trails  caracteristiques 
desRusses;  invasion  de  Genghis-Khan;  I  ar- 
mee  russe  eprouve  un  cruel  echec;  Georges 
envoie  son  neveu  Yassiiko  qui  arrive  trop 
tard;  nouvelles  gtierres  civiles;  les  Lithiia- 
niens  sont  repousses  des  provinces  du  nord ; 
Taroslaf  abandonue  la  ville  de  Novgorod ; 
Georges  reconcilie  Michel  et  Taroslaf; 
Mstislaf  donuc  sa  fille  et  le  tr6ne  de  Ga- 
litch  au  fils  du  roi  des  Hongrois,  qui  plus 
tard  le  perd  et  le  recouvre;  invasion  du  Tatar 
\4Hi,  neveu  du  fils  atne  de  Genghis-Khan, 


Okiai';  inoendie  de  Moscou,  villes  et  pajs 
ravan;  mort  de  GeorgM  et  de  Yassiiko 
sous  les  coups  de  rennenu ;  retraite  de  Biti 
dans  le  pays  des  Polovtsi ,  xoo  a —  xo3  a. 

Georges  Danielovitch  ( 1 3 1 9-K  3a8) ,  grand 
prince  apres  la  mort  de  son  onde  Michel , 
envoie  son  frere  Athanase  gouveraer  Nov- 
gorod en  son  aom :  Dmitri,  fils  ainide  Mi- 
chel, est  prince  de  Tver;  bientot  il  obtieot 
du  khan  fa  dignity  de  grand  priooe;  Geor- 
ges, apr^  s*to«  rifugi^  k  Novgorod,  se 
rend  aupres  d'Usbeck ;  1&  se  trouve  aiusi 
Dmitri  qui  lui  plonge  son  ispike  dans  le  ctear, 
X09  b,  zxo  a. 

Gtorgie ,  contr^  jadis  illustre,  fait  partie 
des  proTinoes  caucasiennes;  brigandage  des 
■lontagnards ;  rigie  par  dm  lois  particulieits, 
63  a,  b;  precis  des  evteements  dn  dernier 
sii^le  et  trait  de  courage  de  hi  derail  reioe 
de  oe  pays ,  4^7  b  — >  440  b  (Y.  Caucase). 

Gouvemeroents  et  provinces  non  encore 
organist  (Y.  aussi  Territoire,  a 7  b,  98  a). 

Arkhangel ,  49  b ; 

Arnieiiie ,  63  a ; 

Astrakhan ,  58  a ; 

Augustow  (voievodio  d'),  65  a ; 

Caucase ,  6a  b ; 

Cosaques  du  Don ,  55  a ; 

Courlande,  45  a,  b; 

Daghestan ,  63  a ; 

Ekaterinoslaf,  54  b; 

Esthouie,  44  b; 

Fiulande  (grand-ducbe  de) ,  45  h,  46 1; 

Georgie ,  63  a ,  b ; 

Grodno,  56  a; 

laroslavi ,  5o  a ,  b ; 

Im^'ete ,  63  a ; 

Irkoulsk ,  60  a ; 

Kalisch  (voievodie  de) ,  65  a ; 

Kalouga ,  5a  a ; 

Kamtcnatka ,  60  b ; 

Kazan ,  57  b ; 

Kharkof,  53  b; 

Kherson,  54  b; 

Kief,  53  a; 

Kosf  roma ,  5o  b ; 

Koorsk ,  5a  a ,  b ; 

Livonie,  45  a; 
*    Mazovie  (voievodie  de).  Y.   Yarsovia* 
65  b; 

Mixisk ,  56.a ; 

Moliilef,  56  a;    * 

Nijni'Novgorod ,  5i  a; 

Novgorod  ,49a; 

Okhotsk,  60  b; 


GCnfTENUES  DANS  LA  RUSSIE. 


M> 


Olooetx  ,49b; 

Omsk,  60  b; 

OreobooTg,  58  a; 

Puiaa,  57  b ; 

Penn,  5^  s; 

Pbhk  (ToicTodie  de) ,  65  a ; 

Podolie.  ▼.  Kameiieti-PodobLi ,  56  a ,  b ; 

Poltava,  53  a; 

Akof,  48  a,  b; 

Riasao,  5x  b; 

Saiiii.Pielanlioiirg,  4^  •—44  b; 

Simbirsk  ,57b; 

Skibodes  (TUkraiiie.  V.  Kharkof ; 

Snofensk ,  47  b ,  48  a ; 

Tambef,  5x  b; 

Tiuride.  Y.  Simpbcropol. 

Tcfaernigof,  53  d; 

Tobolsk,  59  b; 

Tmila,  5i  b; 

Tver,  48  b; 

Viatka,  57  a; 

yibonrg,  45  b; 

Titeptk,  56  a; 

Vbdimir,  5i  a; 

^oUkynie.  Y .  Jkomir,  56  a ; 

Tolo^ ,  5o  a ; 

yorooeje,  5a  b; 

Takootok ,  60  b. 


Graniis  de  la  Finlande;  briUent  des  plus 
riches  coulean ;  peuvent  fournir  dei  mono- 
lithes  gigantesquef,  19  b;  Id  granit  forme 
les  trottoirs  de  PiHersbourg  et  de  Moseou , 
ib. ;  abondant  a  Perm  ,57  a. 

Gr^  (affaires  de  la) :  le  oongris  de  Ye- 
rone  s'apprMe  k  statner  sur  le  sort  de  oe 

Sajs;  Alexandre  l***  fait  desavouer  la  levee 
e  bondiers  faite  par  le  prinee  Tpsilaali, 
5o4  b ,  5o5  a ;  marche  habile  de  la  Ruasie 
dans  oette  affaire ,  qui  se  termine  par  le  pro- 
tocole  du  4  avril  x8s3,  signe  en  fevrier 
i8a6,  5o5  a — 509  b;  sea  suites,  6of  a; 
Alexandre  parait  dispose  k  faire  tenniaer 
lesneKociations,5j3  a  —  5i3  a;  resume  de 
tons  les  ev^nements,  installation  du  roi 
Othon,  independance  du  synode,  serment 
pr6te  par  tous  ses  membres,  influence  de  la 
Russie  mtoe  sur  les  mesures  prises  tout  r^ 
cemment,  599  a  —  6zz  a. 

Grodno,  dief-lieu  du  gouvemement  de  ee 
nom,  a  conserve,  mais  en  les  poyant  cherc' 
ment,  quelques  usages  de  ranoienne  admi- 
nistration, 56  a. 

Gustavo  Yasa  c«aclut  une  tr^e  de 
soizante  ann^  avec  Yassili  Ivanovitch,' 
i3i  b. 


H 


Hm  de  l*l^tat,  leur  destination,  5i  b. 

UdsiagifiDrs,  chef-lieu  du  gouvemement 
de  finiande,  pays  tre&>foriifie,  coupe  par 
dcs  foriiMt  des  rocberSt  des  marais  et  des 
ho,  45  b,  46  a. 

Henri  I*',  roi  de  France ,  epouse  une  sceur 
^  Taroalaf ,  85  a. 

Henri,  doc  d'Anjou ,  tiu  roi  dc  Pologne , 
retoume  en  France,  x45  a. 

Histoire  de  la  Ruasie  :  la  premiere  a  ett 
composee  par  le  patriarcfae  Nikon,  190  a. 

Histoire  natnrelle.  —  Precieuses  acquisi- 
liom  faites  k  rembouchiire  do  I>na,  sur 
ui  bonds  el  sur  ceux  de  quelques^ns  de  ses 
afBaents,  10  b;  flore  en  dc^a  de  rOoral, 
h  m^oie  que  celle  de  l^Europe;  boisson 
tine  de  la  canneberge ;  arbres  et  plantes 
<|W  nous  poorrions  y  recueillir,  17  a,  b; 
inimaox  utiles ,  inconnus  en  Europe ;  Etudes 
tt  aperiences  k  frire  sur  divers  points  de  la 
^oce;  ricfaesses  minerales,  17  b —  19  b{ 
Pfrlci  trouvees  dans  quelques  lacs  on  ri- 
^'icres,  46  a;  eanx  minerales  k  Kadiin,  49 
3;  a  Litepsk,   5x  b;  cristaox  de  roche 


dans  le  gouvemement  d*01onetz,  49  b;  ar-,- 
bres  fnuliers  riussissent  dans  le  gouveme- 
ment de  Yladimir,  5x  a;  pommes  presque 
tran^Mirentes,  ib. ;  beaux  vergers  a  Koursk , 
5a  a;  |e  miHer  parait  s'aodimater  dans  la 
Petite  Russie;  la  vigne  y  donne  des  espe* 
ranees  ,53b;  plusieurs  productions  de  I'^sie 

riurraient  ^tre  naturalisees  en  Europe ,  54 
;  mirage,  comme  en  l^pte,  57  a;  aimant 
a. Perm y  ib.;  lacs  salins  sur  la  rive  gauche 
du  Yolga ,  58  a ;  fails  geologiques  a  observer 
k  Astrakhan,  ib.;  arbres  recueillis  par 
l*Europe  du  gouvemement  d*Orenbourg ,  58 
b;  dans  la  Sib^e:  oerisier  nain  semblabie 
k  la  vari^e  qui  emit  en  France  sur  le  Mont- 
d*Or,  59  a ,  riri^  d'eau  thermale  et  veg^ 
tation  sur  ses  bords,  volcan  en  Option, 
volcnns  ^teints,  crateres,  tantdt  fumants, 
tantdt  ignivomes,  60  b;  intensity  du  froid 
dans  le  nouvean  monde,  61  a;  for^ts  da 
pins  et  de  bouleaax  dans  le  pays  des  Kir- 
guizes,  61  b;  oatoralisles  et  savants  qui 
ont  parcoura  les  prorincos  de  Tempire , 
309  b. 


iS4 


TABLE  BIS  MATIKRES 


I 


Mr  l«  ¥ol|ft,.  dMC-KM  a*aa 
MMMnienMDt  dr  oe  non;  etendoB,  P^P*^ 
tolioo;  agriculturt  pcu  iifpriiAi  nv  k  aol; 
pobili ,  aeiraie » inhNtm  lie  tat  h^Ntaou ; 
snatifet  pbyafUM  fui  le»  dMagiml, 
hcHHDCi  d  ItMHs;  obfBli  de  loun  IMb" 
mm ,  So  a ,  b. 
iMLale  (ditewt  #>,  I'raeieik  Botf^hoM 

aiMi«rMD,i4b. 

lteiM4i(le)»fleif««le  phn  oomidcvdble 
(!•  1»Sibci4e,»  jtlle  dln»  un  giUe dc b 
!,  iia,  b. 

I^  (9<»-945>,  dkonptt  ht  DmAeoi 

cimient  te  PMdi ' 


l^iMM  tm  OTI  miMiiifiwiy  trailA  db  pu 
€oacl»  ■Mb'  iin»  M»ade  oipbBlioHf  m 
mort ;  erfet  de  tes  ttuctbn*  nr  b*  Dm9» 

]^  Olj^oivitcfa  (ti4*«ii5i);  bt  liali»* 
tiBls  de  Kbf ,  nrionleBte  dci  boyan,  «b- 
tiennent  de  Ini  qu'i  raTcnir  ib  rsadvonC  to 
natiee';  ib  pixaiKMMBt  fcriibmcnt  k  Taias- 
bf  die  a'eaifMrer  de  b  aowreraiiMlft :  cttoi  ct 
marche  contre  Igor,  qui,  abandoaad  das 
sieos ,  est  ▼aincu  et  jeti  dans  un  oadiot  k 
Per^iasbvb,  89b,  90a;  il  se  bit  moioe, 
90  b;  est  massacre  par  les  babitants  de 
Kbf,  ib. 

lbs.  Les  plus  septentrionales  n'atteigiieiit 
pasba»*  <bgr6,r,5ft;ibidiB'baMrM- 
tique  doot  b  Runie  »  jugi  ulib  de-  I'biipa*- 
rer,  7  b. 

Il^ft,  Gosaqve,  seduanV  Pbn«,  fib  de 
P^odor,  est  peon  i  Btoeov,  178  »,  bb 

IRn,  nnin  (pi,  rlone  k  fAngan, 
ronne  one  cms  votf  « iioBgoiiBUi ,  i  s  a* 

Indigairba ,  fieuve  qui  eonb  d«  and  i« 


nord,  et  se  jette  diaa  b 
10  a. 

Industne,  ^t  de  aa  prospttild  dans  le 
gouvememeni  dr  Saiaft-Vtadbeu^t  44 1>. 

logeda.,.  iiMb«  qns^  aM»  TOtam,  fanM 
b  Gbilka,  xoa. 

Inocubtion.  Catberioe  II  s'j  looanl,  ct 
avec  elb  beaueonp  de  perMttics  dewodar, 
3ioa;  dm  hnspiaci  som  eauMla pear  sate 
optetioQ,  35 1  a. 

InstmetieB  pabfiqiML  Neitbne  dis  m- 
venit^,  des  difets  ^abliaaenaali»  ^- 
nases  r^ndiu  daiis  bs  gauvtraaamati, 
ecobs  dn  servieas  puUbs,  3kb«^20l); 
univeraite  ctiebre  k  Dovpat ,  44  b,  416 a; 
des  phu  fMouenlees  k  Vibiay  S5b;  cdie 
de  Moseou,  rond^  par  l^Iisabelh,  i7»b; 
detaib  sur  lous  les  ^blissemeau  curtsats, 
b nombre  des  tieres,  bs  faDBllci,tasMes 
des  services  publics,  ele^,  ete.r8t5a— 
639  a. 

Incemperanoe ,  b  go6t  ea  eat  ooaMim  au 
noble  et  au  scff;  par  qvale  oauie,  Sa  B^b. 

louri  Otr^ef.  V.  Dutri  (b  ftn)» 
i63b — 176  a. 

Irfcouitsk,  cbef-lieo  du  guuiiiaw— rtde 
oe  noon ,  en  Siberb,  lien  de  paatige  irb- 
friquent^ ,  brilb  du  loie  europte ;  sitaa- 
lion  sur  TAngara ,  pres  du  be  Baikal ^60*. 

Kan  V  (voy.  Pierre  T'). 

PvanTleiff^gBBoe  de  Birav  (i74<^i740  ■ 
Ifcnbb,  qui  avait  eook#iue i  rsttvalioo 

deBiran,  etsub  de  kn  anreAis;  i  sanaial 
avec  b  prineesas  dvchaaai  da  Bniaaaij* 
qu*il  s'emparera  de  Biren ;  il  mtt  ce  M^ 
ieafantion;  b  pfinoeMe  Ame  sa  dadare 
grande-dncbesse  et  regenle,  et  rs^  Ib  la^ 

nent  de  fidtiM,  s6i  •  — a6a  b 


Jean  Danielovitcb ,  samonmi  Kalita 
(i3a8-B34o),  nonun4  grand  prince  reai- 
dani  ik  Moscaupar  Usbeek,  ix»b;  bit  bn-> 
car  Pintcfdit  par  b  BB^ImoUtain  sur  les 
Pftkoviens,.  rabelbs  cnveia  b  kban ;, se  ri* 
oondlae  stac  No«gqrod„  mais  (ait  cbassea 
de  Pak^tl b  prince  Abaandrajil tramiib i 
■Atablir  runiiA  de  poovair^  et,  awant  ra- 
prfaantaAbaandrftconuneannfiidUikhan, 
d  ditaanin*  aiaai  Udbeski  b  biBanaouric, 
III  a — lu  b 

Jaann  I«0ioiiteb(i353>  i358),.desi|na 
pand  prince  par  bkban  des  Tatars, a  dV 
boni  pour  ennemi  Obg ,  prince  de  Kiazan , 
contre  leqnel  il  ^ite  la  guerre;  Olgcrd, 


prince  de  litbuanb ,  inqai^  bs  proviaca 
russes;  b  vilb  de  Briansk  se  aousast  k  la 
Liihuaub;  diasenainna  el  troubles  eatie  ks 
princes ,  et  mbne  dans  b  dene;  b  nclrs- 
poUtain  Abiift  gnarit  V^pMse  du  khan  Tcb^ 
uibck ,  et  desarme  b  oousnNU  de  aoa  fib 
Bardibck ,  xa4arb. 

Jean  UL  Tasailievitob  (i4fo-xSo5), 
grand  prince  a  Moaoou  »  est  iaroDae  par  Ml 

qHaatles  aunrenues  enttn  deoK  kbaBs;ajisai 
plusieurs^  campagnaa  aoumet  Xaian;  frait^ 
eruelbBant  Noveueod^qpoiquelui  biaMBt 
b  fiDRna  de  republique ;,  bit  aoaii  b  ^ 
qnke  de  b  Pennie;  les  Tatars  de  b  kords 
Doreeprconent  Abiin;  il  epoaaebnicea 


1 


GONTBHinES  DAUB  LA  R1I8S1E. 


eM 


de  Coulttitin  Pid^logne ;  fiiyoriM  les  arts, 
defend  Moscou  par  uoe  forteresse,  aliire  k 
lui  le  klian  de  Cnaa^ » depouille  enfin  Nov- 
gorod detoateind^pendanoe^xai  b — X34a; 
foodoit  aoe  annee  nombreiiw  centre  k  khan 
Aklunel;  lea  deux  anncea  r6lrog;radeiit ; 
Akhmet  est  to£  pea  de  temp  apres:  ]k 
cmt  Tmfifunrm  m  la  grande  norde  (horde 
Dm] ;  Jean  exerce  de  cnielles  represaillea 
eoBire  Tordre  de  livonie  et  les  oievaliers 
tcntonkpies;  ton  fiU  aioe  epouse  la  fiUe 
d'ftienne  111,  hofpodar  de  Mbldavie;  U 
poumiit  la  destruction  des  apanages » ib. 
~»5a;  le  tsar  d^  Kazan«  detr^ne,  est 
«Deoc  captif  a  Moscou;  Jean  commenoe  lei 
imtjfites  contre  lea  prorinoes  Uthuaoiennes ; 
Alnandre,  pand-dvc  de  lithuaniei  obtient 
de  lai  la  paix  et  la  main  de  sa  Bile ;  le  kban 
de Crim^  loi  reproche  oette  alliance;  Jean 
excne  k  Norgorod  dea  acteS'  de  violence 
eoatre  les  maiclunnfc  dea  Tilles  anseatiqaes» 
is6a;enToie  nne  ainbassade  k  Gonitanti- 
oople ;  declare  Vassili  mod  prinee  de  Not- 
forod  et  de  Fskof ;  nit  la  guerre  i  son 
Seodre  Akundre ;  les  Rnaaea  scat  battua 
par  les  dicvaliers  de  Liyooie ;.  le  khan  de 
Crimee  dtaiiit  ks  deroien  restes  du  royaooM 
(aoAk  par  B4ti;  sort  de  U  princessei  He- 
lene  et  (flfoienne ;  tr^e  de  six  ans  aveo  lea 
<^efalicrs  liTomena;  le  liar  de  Kazan  se- 
cove  le  ieog  des  Ruases ;.  ce  que  Jean  ni  a. 
Cut  poor  la  grandeur  de  k  Eu4sie,^ih. — 
iiSa. 

Jean  IT,  snmoittmfl  le  Tarrihle([i533- 
X  S$i)  I  Hieicne ,  veuve  d»  Jean  m  %  regenle« 
et  qnefaqes-  una  d»  tea  oonseillecB ,  se  por- 
tent a  dss  actea  de  cruaole ;  Sigismond  d^- 
nste  les  provinoes  meridionales ,  falf  une 
trbc  de  dnq^  ans ;  mort  subite  dUelene ; 
leneuz  prince  Scboiuaki  le  declare  chef  du 
goovcnement ,  se  montre  cruel  sekn  son 
cipnee»  mua  oeurt  poi  de  temps  apres ; 
son  fr^  Jean  lui  suoiwde ;  malhearettx  ^f 
de  la  Bjnaie « aani  quelques  actea  utiles  et 
rinfiaeoce  keumise  du  parti  de  Jean  Belzki , 
7D  peril  hicnldl  sous  ks  coups  de  Jean 
Sdwaiski,.  x3a  a—  i3d  h;  Jean  IT*  Age 
de  treize  ans ,  fait  d^vorer  par  des  chiens 
Andre Sc b^maki ;  annonce  d^jk  sa cruaule; 
piHsges  eurob  tour  k  tour  par  les  habi« 
K&U  de  Kaiam  tk  les  ]lf osoovites ;  Jean 
|*nd  k  titre  de  taar ;  son  sacre ,  son  ma- 
nage; ineendie  fortuity  mais  violent,  k 
Mttcou ,  qui  donoe  lieu  k  des  cruaut^  aveu- 
k|h  et  k  rinfpitatiiHi  d*ua  moine  dont  la 
^ve  renrinMide  adoucit  pendant  quekiuea 
aaoees  k  caradkee  de  Jean;  il prend Kaaan 
iprcsuneloDguierenstance,  i3ib  —  i37a ; 


H  ki  naft  vn  fils  quHl  disi^  pour  lui  suc- 
cMer ;  Ykdimir,  son  oousin ,  sera  regent , 
et»  si  k  jisttne  taar  menrt,  sera  souverain ; 
prise  d'Astrakhan ,  iraiti  de  commerce  avec 
rAngkterre ;  tr^ve  avec  k  Su^de;  erapiete- 
ments  sur  les  posseaions  de  Tordre  de  Li- 
vonie;  mort  de  k  tsarine;  Jean  retombe 
dans  k  dissolution  at  ks  cruaut^ ;  il  epousa 
k  fille  d'liA  priooe  taeberkasse»  137  a  — 
139  b;  combats  et  di§¥astations  en  Lithua- 
nie;  Jean  se  cree  une  garde  et  confie  Tait 
ministration  aux  bovars;nouvelks  cniaut^ 
mtiees  d'exercices  oe  piele;  il  souBict  kun 
oonaeU  general  ks  clauses  d%in  traiti;  il 
fait  k  k  reine  l^lisabeth  une  demande  qui 
atteste  sa  crainle  habituelk  ;  k  mort  de  la 
seoonde  tsarine  donne  tieii  k  de  nouvelka 
cruautes ,  sortout  dans  Novgorod »  xSq  b — 
143  a  ;  Magnus ,  souveraiu  de  Tile  d'OEsd , 
se  soumet  aux  vues  politiques  de  Jean;  in- 
vasion dea  Tatars  devant  ksquda  Jean  prwd 
la  fuile ;  il&  incendient  Moscou  et  redemau- 
dent  Kazan  et  Astrakhan;  nouveaux  raa- 
riages  de  Jean ,  oouvelks  cruautks ;  k  Uma 
essuie  une  dcfaite;  Henri,  due  dTAnjoUy 
kin  1:01  de  Pologne ;  Baioiv  lui  sueoede  et 
remporte  suz  Itt  Ruaaes  ds  g^knds  avan- 
tages»i43& —  x48a;sur  unsoup9on,vrai 
ou  simule,  Jean  firappe  son  fib  aun  coup- 
mortely  ib.;  ks  Husses  oommencent  knrs 
etabCssements  duix  k  Sibetie*  148  b  — 
iSo  a ;  sa.  mort,  nredite  par  ks  devins ;  il 
avait  dfkigjoe  Feodor  pour  son  suocesseur^ 
oe  qu'il  a  fait  d'utik  dans  radminisfralion» 
i5oh — iSxba 

Jean  Palkokgue  epouae  une  des  fillea  du 
grand  prince  Yaasili  Dmiirievitdb,  ii^h. 

Jeamtea,  sont  tenvoyka  de.  k  Russk, 
grieis  avances  conire  eiix,  kur  nombrey 
lieux  di  kur  retraite,  498  a,  5oi  a-^ 
5o»  b. 

Ji^on  (ou  Oxus),  fleuve  qui  versait  au- 
trefois une  partk  de  ses  eaux  dans  k  mer 
Caspienne;  il  se  jette  dans  k  kc  d'Aral, 
la  a. 

Jitomir,  chef-lieu  du  gQuvemement  de 
Ydbyme,  vilk  indiutriensc  et  commer- 
^ante,  56  a« 

Juili,  aunient  pu  kire  utiles  k  Tarmee 
fran^aise  en  x8ia,  460  a;  dea  edils  sont 
donnes  contre  eux  en  i8a4  au  suiet  de  k 
contrebande,  5x3  b;  montant  de  la  popu- 
ktion  juive,  nombre  des  ecoks  Israelites, 
638  b. 

Jures  assanuantes,  devest  lesqaels  parait 
le  deaandeur  avec  raacusa :  eoutume  pre- 
bablement  venue  dea  Variegucs,  85  b.  V. 
k  note. 


6M 


TABLE  BES  MAHERES 
K 


Kalouga ,  sur  I'Oka ,  cheMieu  da  gouver- 
nement  de  oe  nom;  pays  fertile;  foists, 
mines  de  fer,  industrie  et  commerce  tres- 
actifs;  etendue,  population,  5a  a. 

Kalmouiks ,  six  cent  mille  sortent  volon- 
tairement  de  I'empire ,  335  a ,  338  a. 

Kamenetz-Podolski ,  chef-lieu  du  gouver- 
nement  de  Podolie ;  forteresse  devenue  inu- 
tile ,  56  a ,  b. 

Kamlchalka ,  rigueur  du  climat ,  pheno- 
menes ,  6o  b. 

Karamzin,  historien  qui  a  fourni  le  fond 
ou  le  texte  de  plusieurs  articles ,  67  a ,  69 
bt7oa,b,7ia,74b,76b,ii7b,  i5o 
b,  x68  b;  comble  de  bienfails  par  Alexan- 
dre !•',  5a  I  b. 

Kazan  (royaume  de),  ses  commencements, 
xao  a. 

Kazan,  sur  la  Kazanka,  chef-lieu  du  gou- 
vernement  de  ce  nom;  sol  fertile,  beaux 
bois'de  construction,  57  b;  fondee  par 
Sain,  fils  de  BAti,  ou  par  B4ti  lui-m^e, 
116  a. 

Kharkof ,  chef-lieu  du  gouvernement  de 
ce  nom,  appele  aussi  gouTemement  des 
slobodes  d'Ukraine,  53  0;  terme  moyen  de 
la  population ,  5a  b. 

Kherson,  chef-lieu  du  gouyemement  de 
ce  nom;  Odessa,  qui  en  fait  partie,  est  la 
troisieme  ville  de  Teropire,  54  b,  55  a; 
note  sur  les  antiquites  de  celte  contr^, 
353  a ,  b. 

Khozars,  depuis  quelle  ^poque  connus 
en  Europe;  fondent  un  vastei^tat,  la  Kho- 
zarie ;  spumetteni  quelques  populations  sla- 
ves, 70  a,  b;  leur  puissance  est  an^ntie 
par  Oleg  dans  deux  gouvemements ,  75  b, 
d^truite  aussi  dans  la  Tauride ,  84  b. 

Kicliinief ,  capitale  de  la  Bessarabie,  55  a. 

Kief,  sur  le  Dniepr,  chef-lieu  du  gouver- 
nement de  ce  nom ,  berceau  de  la  toi  chrc- 
tieune;  catacombes  sous  le  lit  du  fleuve, 
53  a ;  terme  moyen  de  la  population ,  5a 
b ;  jusquVjti  1 169  le  s^jour  du  grand  prince ; 
prise  aassaut  et  pili^  par  les  alli^  et  les 
troupes  d*Andre,  sa  puissance  ne  fait  plus 
que  decroitre ,  93  b ;  saccagee  par  les  Mon- 
gols, io3  b. 

Kirguises,  parcoureiit  avec  leurs  trou- 


peaux  toute  la  rive  gauche  de  I'Oaral,  ii 
b ;  Kirguises  KaVssaks  presque  tous  souinu  a 
la  Ru&sie,  leur  principale  richesse,  leor 
service  k  Tarmee,  61  n;  divis^  eo  trois 
hordes,  ib. 

Kizin-Daria ,  riviere  qui  se  jette  dans  ie 
lac  d*Aral ,  xa  a. 

Klaproth,  orientaliste,  fait  partie  d'ooe 
ambassade  russe,  envoyee  poorobtenirreD- 
tl^  dans  les  l^taLs  chioois,  extrait  den 
relation,  417  b — 418  a. 

Knout,  etait,  dans  un  certain  cas,  infli^ 
a  Qir  delaieur,  193  a  (dans  un  autre,  Taurait 
cte  k  un  professeur,  194  h,  selon  le  plan 
laisse  par  F^odor  Alexeicvitch). 

Kobentzel,  ambassadeur  d^Autnche  pra 
Jean  IV,  145  b. 

Kolyma ,  fleuve  qui  coule  du  sud  au  nord. 
et  se  jette  dans  la  nier  Glaeiale,  10  a. 

Koriaks,  peuples  dont  le  pays,  (ilu^ 
entre  le  golfe  d'Okhotsk  et  la  mer  Glacials, 
est  traverse  par  dcs  fleuves  presque  toujours 
charges  de  gla^ons ,  to  a. 

KoscinszKO,  coounande  un  des  corps  de 
Tarmee  polonaise,  ses  succes,  ses  reven, 
368  b  —  377  b ;  est  rendu  k  la  liberie  par 
Paul  I***,  386  a. 

Kostroma,  sur  le  Volga,  chef-lieu  du 
gouvemement  de  ce  nom  :  agriculture  in- 
suffisaixte,  supply  par  le  commerce  et  Tio- 
dustrie ;  Etendue ,  population ,  5o  b. 

Kouban ,  fleuve  forme  par  les  eaux  du 
Caucase  et  des  alQuents  nombreox;  ^' 
sonneux ,  mais  pea  profond ,  x4  b. 

Koutchkovo,  ancien  nom  de  Hokou. 

Koursk,  chef-lieu  du  eouvemement  oe 
ce  nom;  beaux  vergers;  eteodue  et  popu- 
lation ,  5a  a ,  b. 

Kronstadt,  sa  population  a  iti  eugeree; 
port  bicn  fortifie ,  44  a. 

Kru^ener  (madame  de)  veut  aocomplir  a 
conversion  du  genre  humain;  avaitaononcf 
la  chute  de  Napoleon;  s'etait  cmparfe  de 
Tesprit  d*Alexandre ;  a  pii  faire  nailre  Tidce 
de  la  sainte  alliance,  494  a  —  496  a. 

Krusenstem  (M.)  sert  de  guide  pour  w 
details  et  les  cliif!res  sur  les  diven  ctabh^- 
sements  d'instrnction  pnblique,  6a  5  b. 


L 


*  Lacs  salins ,  sur  la  rive  gauche  du  Volga, 
dans  le  gouvemement  de  Saratof,  58  a; 
dans  le  pays  des  Kirguises .  6x  b. 


La  Harpe ,  instituteur  d*Alexandre  T, 
4t3  a;  reponse  affectueuse  qu'il  revolt  dc 
son  eleve  devenu  tsar,  5a3  b. 


COJSTENUES  DANS  LA  RUSSIE. 


667 


Liine  estimce  pour  sa  fiaeue,  dans  Tile 

Lapti,  chaussure  faite  avec  T^eoroe  du 
blkttl,  5o  b. 

lioa  (le),  un  d«s  plus  grands  fleofcs  da 
oord  de  (Aiie,  d*uoe  navigation  difiUale , 
charrie  preaqoe  continueUement  des  glaces : 
a  foo  einbouchare ,  sor  ses  bords  et  sur  ceux 
de  queUnies-oos  de  tes  affluents «  ont  et^ 
trouves  des  amas  d'ossenents  fossileSf  pres- 
qiK  tons  de  mammouthi ,  lo  b. 


Lithuanien9,attdquent  les  princes  russes, 
leurs  ancieiis  maltres,  gS  a,  reuporteot  snr 
eux  de  grands  avanlages,  99  b,  loo  a;  sont 
repousses  des  provinces  du  nord,  10 1  b. 

Litt^ture. — Auteurs  qui  ont  fleuri  sous 
l^isabetb,  173  b. 

Loupi  (\ts)  infeslent  la  rive  droite  seule- 
ment  de  la  Kama ,  xa  b. 

Luie  de  la  conr,  diminue  par  Catherine  II 
et  par  Alexandre  I*,  38  b. 


M 


Bfahomel  II,  mis  en  fnite  par'Genghis- 
Kliao,  10 1  a. 

Mahdies :  oeHes  qui  attaquent  le  principe 
de  b  generation  sont  tres-iuncstcs  dans  fes 
reeioDs  septentrionales ,  a3  b ,  59  a ;  maisons 
ipedales  etablies  poor  leur  traitement, 
J5i  b. 

Malo-Iaroslavetz,  les  Fhm^  y  essuye- 
mt  un  revers  en  1813 .  5a  a. 

Blammootb,  le  squcHelte  entier  d'un  de 
m  SDimaBX  se  Toit  a  Petersbourg;  lieu  011 
il  a  ete  recnnlli ,  10  a. 

Mansietn,  aide  de  camp  de  Munich,  a 
ham plusieurs  extraits,  954  b,  a55  a,  a56 

b,a59  1>«  '^<  ^*  '^^  ^>  ^^^  b,  371  a. 

Mane-llierese  condot  un  traite  avec  l^ti- 
Mheth  PetroToa,  269  b;  m^ntente  de 
ravencnieQt  de  Catherine  II,  387  a. 

Marine  rnsse.  Probabilite  de  sa  puissance 
future,  r  b,  349  a;  marine  marchaude 
niase  pra  considerable  dans  la  Ba!ti(|ue,  par 
OTjetfs  causes ,  8  a  ,  b ;  marine  nulitaire , 
airisee  en  trois  escadres;  bAtiments;  armee 
oarale,  4t  a,  b;  chantiers  de  construction 
pour  les  diverses  mers ,  ib. ;  une  parlie  de  la 
flotte  stationne  k  Revel,  44  b;  chantiers, 
aftnai  et  amiraute  h  Kherson,  55  a ; 
Pierre  I*  fonde  une  academie  de  marine , 
ai3b. 

Marine,  fille  de  Mnidiek,  voievode  de 
Sandomir,  epouse  le  iaux  Dmitri,  164  b, 
i;i  b  et  suiv. ;  s'attache  k  la  fortune  d*un 
fecoad  imposteur,  qui  est  tue  par  un  prince 
liopj;  les  boyars  la  livrent  au  conseil  de 
Mqscou  qui  la  fait  garder  ii  vue,  178  a  -- 
iS3  a ;  eile  promet  sa  main  a  Zaroutzki , 
^faef  de  Cosaques,  qui  est  pris  et  empale ; 
die  meurt  en  prison,  184  b,  i85  a. 

Maroquin,  fabriques  renommees  a  Tor- 
jok,  48  b. 

Mazovie(voievodiede].  V.  Varsovie,  65  b. 

Medecins  cantoonaux,  leur  nomination 
est  aoumise  k  un  conseil  de  medecine ,  39  a ; 
lensetgnement  de  Tart  de  guerir  mcrite 
paiticaliereaient  des  eloges ,  33  b. 

4y  Uvraison^  (Rcssib.)  t.  11 


Mcndicite,  se  montre  a  peine  en  Rus&ie, 
39  a,  rarement  a  Petersbomfg,  43  b. 

Mentchikof,  fait  penelrer  un  renfort 
dans  Poltava ,  3 1 3  a ;  condamne  a  des  retti- 
tutions ,  340  a ;  il  serl  Catherine  au  momcat 
de  la  mort  de  Pierre  I**",  a44  a;  est  tout* 
puissant  sous  Catherine  I"*,  disgracie  sons 
Pierre  U,  meurt  exile  en  Siberie,  249  a— ^ 
354  a. 

Mer  d'Aral.  Norn  donne  par  lea  Rnises  an 
lac  de  oe  nom.  V.  Aral. 

Mer  Baltiqne;  frontiere  natnrelle  de  la 
Russie ;  la  navigation  en  est  perilleoae ;  dan- 
ger auquel  pent  donner  lieu  le  vent  d'ouett 
soufiQant  longtcmps  avee  videaee  sur  eelte 
mer,  7  b,  8  a.  Set  aetsuiv.;  set  eaiixpett 
salee»;  foumit  rambre  jann^;  la  aoarine 
marchaude  rnsse  y  est  pen  cotisidcrahle, 
8  a ;  littoral ,  sur  plusaeors  points,  pittores- 
que,  8  b.  > 

Mer  Blanche,  le  pins  grand  des  goHes 
formes  |>ar  la  raer  Gladale ,  9  a. 

Mer  Bleoe  on  mer  d'Aral.  T.  Aral. 

Mer  Caspienne :  eiroite ,  gen^lemenl 
pen  profonde  et  d*une  navigation  perilleuse; 
est  abondaroment  people  de  poissons,  de 
phoques,  d'oiseaux  aquatiques,  de  san- 
pliers ;  les  terrains  sal^  qui  Tentoorent  et 
les  lacs  sales  qui  y  sont  en  tres-grand  nombre 

Sortent  a  croire  pen  ancienne  T^poque  du 
essechement  de  ce  snl ,  6  a  —  7b;  junction 
projetee  de  la  Caspienne  a  la  mer  Noire,  ib, 
6a  b;  possibilite  presume  d*etablir  une 
voie  navigable  entre  cette  mer  et  le  golfe 
Persique ,  63  b. 

Mer   Glaciale,    son    etendue;    U  mer 
Blanche  est  un  de  ses  golfes ,  9  a. 
Mer  Noire,  sujette  a  des  temp^tes  fre- 

auentes,  mais  preseute  un  grand  uomlire 
e  ports  sAra ;  Quelle  etendue  de  ses  cAtea 
possede  la  Russie  ,7b;  projet  de  sa  jonc- 
tion  avec  la  mer  Caspienne ,  63  b. 

Mer  dOkhotsk,  golfe  06  so  trouve  la 
petite  ville  de  ce  nom ,  9  b. 

4a 


658 


TABLE  DES  MATlEftES 


Mer  d'OiuidjT  (oq  golfe  d') ,  ptu  dn  €9cle 
poTafre,  lo  A. 

Mer  Saint«.  V.  Baikal  (lac). 

M^idien  terrtttre :  un  de^  en  a  ele  am- 
sure  sur  les  bords  du  iTorneo  par  des  aca- 
d^midens  frau^iiis,  14  b,  45  b. 

Messagete*,  de  quels  peuplet  modeniei 
lis  occupaient  le  territoire ,  67  h. 

Michel  (XI74-CI76)  afTemiit  la  puis* 
4aAce  de  la  Ville  de  Vladimir,  94  a»  b, 

Micbel  Paleologue  fait  aTUanoe  avec  No- 
l^i ,  chef  de  Tatars ,  xo6  a. 

Michel  Romanof  (i6i3-i645),  nommo 
tsar  par  les  etats ,  est  sacre  par  le  anitiopo- 
lile  de  Katan ;  ritablissement  de  I'ordre  dans 
radministratian ;  il  signe  avec  la  Suede  on 
tniti  de  pallt  (m^ux  k  la  Rustie,  aTanta- 
fftmM,  an  comnieree  dc  F Angleterre ;  si^^e  de 
Motooii  par  lea  Poloaais  qui  sont  fonxs  de 
aa  rMlrer;  le  tsar  acfa^e  par  des  sacrifices 
k  liberti  deson  p^  qui  est  notnine  patriar- 
«ha»;  aimvcAes  boslilil^  cotilre  la  Pologne, 
paix  coDclue  aux  oondiiious  de  la  tr^ 
nrMdaMei  Mkhel  ouvre  atec  la  Perse  e| 
fa  Chine  des  relations  eoaunerelales;  hustt 
letn&neAaanfilaaliii,  i85  b'-^ilt7  a. 

Miobel  Yaroslayitoh  ( 1 3o4^i  3(9)  obtieat , 
par  I'auloiisalioB  dn  khan,  le  filre  dm 
^•nd  prinoe  niiqoel  prtaMliiC  ion  neven 
Oeoifes  qui  fut  nomaM  pnmoe  de  MoiaMi? 
Michel  aa  rend  anpris  iPOsbeek;  la  Rnssle 
aoolfre  de  son  ahseoDe;  Geesfea  a^Mant  d^ 
dare  contse  Michel  a  la  1^  des  NoTgofo* 
diens ,  Michel  obtient  oontre  eux  des  avan^ 
tagea,  nais  ne«  dufahlaa;  Oaargna  ^pmiae 
la  sceur  du  khan  etBHvahe  eontra  Machel; 
il  est  Mincu»  U  soeur  du  khan  BMint ,  et  tea 
ennemis  de  Michel  repandent  le  bruit  qn'il 
Ta  empoisonnee :  le  khan  permet  aon  sap» 
plice,  10$  a — 109  b. 

Mi^ostawski ,  auteur  de  THiatoire  de  k 
revolution  de  Pologne,  cite  5o3  a^  5o4  b, 
5t8  b,  553  a,  b,  555  b,  559  a,  575  at 
579  a,  584  a»b,  585  a,  b,  58?  b,  588  a, 
b,  589  b,  590  b. 

Mikhatiovitch  (T.  Alexandre  Mik,  109 
et  Miv.,  et  Alexis  Mik,  187  et  suiv.). 

Mines  des  aonts  Ourals,  espace  qu^eUes 
oecttp<ait,  Oo  b;  ben^ces  rebdEs  des  ex* 

Sloitations  de  m^taux  divers,  ib. ;  residence 
b  Fadninistratlon  gto^rala  des  mines  de 
rAthu,  60  a;  quelqnes-unes  dija  exploit^es 
daw  les  [troTinces  caucasiennes ,  63  b, 

Miflislere^  divisi  en  sept  dipaitemenu ; 

de  plus,  deux  ministeres  pour  la  maison 

impkriaie  et  lea  apanages,  un  contr61dur 

general ,  27  a. 

htitukf  chcf4ieu  du  gouvemenient  de  ce 


aomi  agrieoltiins  florisaaolei  etploitstiou 
des  forto  entravee  par  la  diffieulli  dei  tnis- 
porla ,  56  a. 

Mittau»  chef-lieu  du  gouvernemeiri  de 
Gooriailde »  date  anei  reoenife  de  Fineorpo- 
ratka  de  I'ancien  ducbi  i  hi  Rusaie;  sopo^ 
fidw,  populalion,  tet  de  TinduMrie,  45 

Mohilef ,  s«r  la  Dnepr,  ehef-Hea  du  gon- 
venieiBettl  de  «e  nan ;  agriotthure  florin* 
sante ,  bois.de  constnidion  et  de  ebarpenie, 
56  a. 

Monnale  d*argent  et  de  cuivre,  i  quelle 
i|p(M|ue  «n  usage  dana  k  grand?  pniaapaaie, 

117  b. 

Montagnes;  eeBas  du  lud,  auisi  eleiees 
que  les  Alpes,  soilt  remar^uables  par  da 
ghiciers  et  k  beauie  de  k  vegelaLionj.lei 
mbnts  Alki  et  les  monts  Ourals  n'atieigD»l 
pas  une  tr^s-grande  hauteur,  5  a,  b;  ill 
torment ,  avec  le  numtCauoase,  trok  ofaaiaes 
bien  caracterlsees ,  6  a« 

BAomimeoU  anli^^,  ruined  dans  UTiA- 
ride ,  54  a. 

Moreau ,  atteint  d'un  boolet  frao^ais  a  l« 
bataille  da  Dmde ,  483  a. 

Mortottval  (fA,) ,  UUtoire  de  k  caopifx 
de  Russie,  cite  456  a ,  460  a. 

Moacou,  chef-lieu  du  gouvcsveoieDl  de 
ce  nom ;  ancieo  nom  de  oette  ville,  epoque 
et  origine  de  sa  fondation,  90  b,  9a  a;  plus 
grande  et  plus  peuplee  que  Petersbouif  i 
46  b ;  ^tendue  de  son  commcroc,  in«w- 
menis,  quartiers  qui  k  coropo««*f  ejaWtfj 
sements;  est  devenue  plus  riche  qua«» 
I'incendie  de  i8x& ;  etendue  de  ce  (oaver- 
nement,  popuktion,  46  a  — 47^*  *f^ 
di^  par  BAU ,  petil-fils  de  Genghis-KbaD . 
lot  b;  saccagee  par  Tokhtamouia*,  i}1 
a ;  construction  de  sa  forteresse,  la^a; »• 
cendie  fortuit,  propaga  par  uo  w««*  JJj 
ngan,  i34  b;  abandonnee  par  Jew  ^ 
eUe  est  briklee  en  enticr,  sauf  le  KreoiiB . 
par  les  TVitars ,  i34  b-,  incendiee  aa  m^ 
d^in  combat  entre  ks  Polonais  el  l»  *" 
sea,  184  a;  d^lee  par  k  P«^«»J*V' 
335  a ;  inoendife  en  i8ia ,  470  •  «*  !f  V„. 

Moulons :  k  Russie  d'Aaie  en  w«f *\  JT 
sieurs  races  encore  inconnues  en  fturor  • 

Mouture  dtt  grain,  au  moyen  de  we*** 
dej^^nit,  5o  a.  _       ..^i..«.  teis 


bottis  do  Dnkpr,  meurl  sans  ^^'-^^ 
kisse  ainsi  Taroikf  maitre  de  tput  rempif. 
84  b. 


CONTENUES  DANS  hk  RUSSIR. 


G59 


MstUaf  (if  95- 1  ill),  fib  de  Vladimir 
Mouooiaque,  prend  le  tilre  de  gra/id  prioce* 
se$  frcns  aj^JUit  cliaci(n  leure  apaoageA ;  i} 
repousst  Itt  Pobvtu  au  dela  du  Vo^a; 
doone  i  son  fils  deux  principaut^  enlev^ef 
«  des  princes  independaikU;  (ail  uoe  expe* 
dition  en  Lidmanie;  a  requ  le  nom  de 
Graaii f  88  a,  b. 

Mstislaf  de  Yolh^e  (i  167-1 169)  (fit  ap> 
pHe  au  ti'dne  k  Kief;  de  concert  a?ec  sea 
lilies,  it  taiUe  en  pieces  les  Polovtsi,  et 
roiivre  aux  bitiments  russes  la  navigatioo 
du  Doiepr;  il  donne  pour  gouvemeur  auji 
NoTgorodieos  son  fils  Aoman,  f|ui  aitaque 
les  aHi^  d^Aodre ,  prince  de  Yiadimir ;  oelui* 
d  anaque  la  Title  de  Kief,  la  prend,  et, 
apres  Ta^olr  Urr^  au  pillage,  fa  donne  a 
100  frere  Oleb;  Ustislaf  recouvre  Kiefy 


k  pcnl  da  nOHvaau,  «l  weiirt  a.Vladiaaiir, 
g3  a,  b, 

IduaicL  (le  a^areabal),  eite  aSo  b,  ueiii* 
bra  du  cooieil  aoua  Am  IvanovBa,  %S^  b 
et  sttiv.;  arratii  lora  de  la  d/kb^ance  d'Ana^ 

g^enie ,  965  a ;  p<Htrait  qu*il  fiidt  dUiioabetb 
troTna^  ib.;  eondwrn  k  ^re  ieartatt, 
QB  lui  fait  grAoe  4e  la  ^ie,  %G6  « { pcfianil 
k  la  cour  aveQ  Siren  aous  Pierre  IR,  %7% 
b ;  ve«t  soiitenir  Pierre  oonliw  Calbarina  U, 
a79b — aSx  ai  r«(Qit  do  Catbfrhie  le  cooh 
mandemenl  de  d^vx  provinoes  t  ^3  b* 

Musiqua;  le^  cbauia  nati^oanx*  suvtout 
dans  la  Petite  Ruaaie,  aoiU  atrraUes,  et  iea 
Rusiea  aoot  beureuMUViat  organiaea  pour 
oet  art,  36  a,  43  a;  troubaiUrars,  tfoiH 
ireres ,  inalrumaiiU  de  muai^iue  at  ebMMona 
obec  ks  Skvett  7'  ^9  7>  •• 


N 


Narva «  ^ia  villa  aaa^atiqua;  balaiUa 
9fBee  |Mir  dbarlea  XU,  44  a;  fondea  par 
phttieuri  Daliooa  4i4  mtrd  da  rEiiropa, 
loSb. 

Nestor;  aes  anoalea  out  lourm  diTeawi 
dutioDa,69  a»  b»  7oa>  7$  a*  77  b;  d*upa 
Tcradic  douteuse^  79  a,  bi  4on  ail^ace  fiir 
dti-icpt  annees  du  ragna  de  Yladiour,  S»  b; 
fio  de  la  auaalea  (1093) ,  87  b. 

Neva  da),  fleuve  4|ui  joint  le  lac  Oiwga 
au  golfe  ^  Finlande,  m  pas#aQt  k  Piterfrn 
boorg,  13  a. 
New4j  (Y.  Alexandre  Nawakv). 
Nicolas  I"  (iSaS)  Cait  suapeadra  Hn  aer* 
rife  dirin  ail  re^  de  la  nouvelja  de  la  morl 
d^Alexaodre,  at  prie  FarcbiaMmdiiii^  d*y 
preparer  rimperatrioe  merot  5a  1  b;  est  di* 
tipe  beritier  du  tir6ne  |par  im  manifeak 
d'Alexaadre,  $3a  a;  repnine  uyaa  eqi^uni- 
tioo  Uea^eodue*  orgaoisee  par  daa  assofi»< 
tlons  secreies,  5^9  b  —  53o  ^\  canpagM 
briOaate  oontre  les  PertaiUf  acquisition  par 
b  aotfie  de  deui  provinoes;  qlauias  4» 
^te  de  Tourkmantcbait  536  b  —  54a  a ; 
b  pierre  est  declares  a  la  Porte;  ciution  da 
pliHieurs  passages  de  cette  declaraMoBt  540 
a  — 544  a;  preaaiere  caippagne;  Yaroa  se 
1^  aai  Knsaes ;  ep  1 8a8 ,  nquvaaux  suceea 
^  Pittkevitdi,  qui  emporte  Akbaluik  de 
^ve  farce  et  se  rend  maitre  de  pUiaiaura 
>«tres  yilles ;  U  Qotte  torque  est  delruile  par 
liBe  escadrille  rusae;  VAulncbe  <eute  imiti- 
leneot  d'engager  d*autres  pgissanfes  contna 
b  Rquie,  544  a —  S48  b;  en  1839,  avan- 
^  renportes  svr  les  Turcs  par  pi^itscb; 
^  Roases  passeot  ks  monU  Balkans ,  en- 
^it  dana  Andrinqplei  nouvellca  vicloirea 
^  Pa^eritch,  prise  d*£rzerouni,  puis  da 


1;  la  aaarebe  sur  *Mb<zonde  est  ar- 
iMe  jaar  k  sigaataire  da  k  pais  d'Andrino- 
pk;  u  orgamaa  ene  expMition  eontre  ks 
peupkdea  au  aord  dv  Gavcase,  548  b  — 
S49  a ;  paples  eensid^raMea  des  Ruses  dans 
eette  ea^peyie;  eonditiona  dv  trait^  d*An- 
drinopk;  reavliaca  de  tonlea  ees  vktoires 
pour  k  Ruaak,  S49  a  —  55'  a ;  r^Yoturion 
de  juilkt  ea  France;  «'est  point  k  cause  de 
VinamreolMNi  de  Yanone;  rintentkii  dn 
tsar  de  maicber  aur  k  n^nee  en  pr^lpite 
k  pKiater  ^oavaoieBt ;  Constanlin  eebappe 
aax  aisaillaalSy  parrient  a  adresser  sHr  ces 
avenemeBla  mi  npport  k  Nicolas  et  au  rot 
de  Hwe;  CbkpicKi  eat  prockroi  ^n^l 
e«  iAmC ;  difikantes  dimarabes  de  Gonatan* 
lio ,  auqHal  Chkpidu  kisse  effeeluer  sa  re- 
U«ile,  653  a  ---  556  b;  il  fail  fenaaer  ks 
4obs;  Lobecki  eat  ehargi  des  n^odatiena 
avoe  Nioeka;  Cblopioki  ae  borne  a  k  qna- 
lile  de  diotateur;  il  eal  aaaisli  dHuie  delega- 
tion de  anrveillanoe  et  d*wie  oeamiasien 
eaiiciitive;  effeetif  des  troiipca  rtenies  par 
ka  Polonais;  BOBibre  probabk  des  troupes 
ruasea ;  Nicolaa  rcjette  toutc  prppovtion  dea 
ambasaadeura:  anotils  divan  qui  lienaenl 
dans  riaaction  trok  des  prineipaks  p«i»- 
sanees  dfi  TEucope;  prockasation  da  prioee 
Caartoryabi  an  peupk  poloaaist  k  prince 
Radaiwil  est  noaame  general  en  ebaf »  r4gle- 
inuita  iaterietira  par  k  aeoat;  meaaces  du 
general  ];ii^H|acb;  tioU  legions  sent  oriees 
pour  les  traMiugea  dea  proikoaa  devekes  k 
k  PvuMe  et i  rAutnabe,  i56b  — 563  b; 
ks  Polouaia  etabUaMnt  iia  quintuaaTirai ; 
cspinbats  Uvras  a  Dobi^,  a  Okunicw;  ba- 
tailk  de  Waerer;  Cblopicki  est  bksse;  be- 
UiUe  de  GrgcUow}  q^M4qiic8  nvasilagea  ika 

42. 


660 


TABLE  DES  MATltRES 


Volonais  sous  Dwernicki ;  Sknynecki  oomrae 
generaliasime;  avantages  des  Polooais;  ba- 
taille  dlganti,  dans  laquelle  Prondzynaki 
deploie  aes  talents  miUtaires;  insurrection 
partielle  de  la  Samogitie,  puis  des  Lithua- 
niensi  rkluite  k  hi  guerre  de  partisans, 
56a  b— 57t  b;  effotts  partiels  et  inutiles 
des  habitants  de  la  Tolbvnie,  de  h  Podoiie 
<t  de  rUkrmine;  combat  devant  Minsk,  son- 
tenn  par  rarriere-garde  polonaise;  ^hecs 
essuyes  par  la  droite  des  Polonais;  bataille 
d*Ostrolenka;  le  eineral  Gielgud,  apres  des 
Severs  et  son  retus  de  donner  des  ordres, 
est  tne  pat  son  aide  de  camp;  Chlapowski 
se  rtfugie  au  milieu  des  autorites  prassien- 
nes;  Dembinski  ne  ramene  k  Praga  que  des 
debris ;  position  de  la  France ,  de  T Angle- 

,  terre»  de  la  Prusse  et  de  TAulriche,  $71  b 
—  577  a ;  mort  de  Diebitsch  etpeu  apres  du 
crand-duc  Gonstantin;  Paskevitscb  est  mis 
a  la  t^te  de  Tarmfe  nisse ;  le  people  de  Var- 
aovie  se  crolt  trahi »  d'anres  Tevasion  d*un 
corps  d'amiee  russe  et  la  revelation  d^un 
complot  dans  Varsovie;  la  dtete  fait  paniitre 
line  prodamalioB  qm  orJonne  aux  Poloiiais 
la  levfe  en  masse,  577  a— >  579  a;  la  Prusae 
aeconde  la  Rua&ie;  Sknynecki ,  somm^  par 
la  diete  de  oomparaitre  dans  un  conseil  de 
guerre,  renie  toute  responsabiUte  des  ev^ 
Dements,  oependatit  il  conserve  son  poste; 
incertitude  ^armi  les  Polonais  sur  le  cbotx 
de  leur  general;  decret  rendu  par  la  diete 
sur  la  nomination  et  les  attributions  du  ge- 
neraliasime; menrtre  de  plusieurs  prisou- 
niers  dans  une  emeule  populaire;  Kniko- 
wiedci  la  fait  cesser;  il  est  nomm^  gouver- 
neur  de  Varsovie;  Skrzynecki  abandonne 
Tarmee  et  phis  tard  se  r^fugie  en  Autriche , 
579  a  —  5S6  a ;  abdication  des  membivs  du 
quintumvirat;  Krukowiecki  est  nomra6  pre- 
sident du  conseit  des  ministrss;  Paskevitsch 
propose  un  aooommedemeBt;  refiis  par  le 
conseil  dea  ministres  et  par  la  diete;  ba- 
taille et  capitulation  de  Tarsovie ;  le  reste 
des  troupes  polonaises  depose  les  armes; 
considerations  aur  les  suites  de  ces  evene- 
ments,  5S6  a — 591  a;  efforts  de  la  Russie 
pour  soiunettre  les  peuplades  du  Gaucese ; 
d^ails  sur  ces  eontrees  et  ieurs  habitants , 
591  a —  596  b;  marche  du  pacha  d*£^ie 
aiT^l^  par  les  troupes  nisses;  conditions 
du  traite  d'Unkiar  Skelesai  aocorde  en  re- 
compense par  la  Turquie;  reOexions  de- 

s  rauteur  sur  les  mesures  k  opposer  au  dan- 
ger, 596  b— 698  b;  ^venements  en  Grece 
denuis  1770  jusqu*&  rinstaHaiion  du  roi 
Ouion;  mesures  administratives,  syoode 
Jndepeodant,  inAucnce  de  b  Russie  dans 


tons  ces  niouvement« ,  599  a  —  611  b ,  rs- 
pOBse  de  Tempereur  Nicolas  a  la  dedarttion 
d'un  ministre  en  France  sur  h  natioBalite 
polonaise;  son  discours  en  x835  a  la  depu- 
tation de  Varsovie,  6xs  a — 6i3  a;  lawi- 
feste  public  CB  x836  sur  la  confiscalioD, jpsr 
la  Russie,  du  navire  anglais  le  FixeH,  oi3 
a  —  616  a ;  les  Cosaques  du  Don  n^veat 
une  nouvelle  constitution;  quelle  eiait  leor 
organisation  anteneure,  616  a — 6x7  a;  Mir 
le  tarif  commercial  de  la  Russie  et  aes  rap- 
ports avec  celui  de  TAn^leterre;  oamco 
du  d^veloppement  successif  de  la  pnissaaoe 
russe;  quelle  baniere  on  peut  lui  opposer, 
617  a  —  6a5  a ;  renseignements  sur  U  ten- 
dance de  renseignement  public^  les  uuifer- 
sites,  les  ecoles,  les  facultes,  la  ceosore, 
Tobservatoire  central  a  Saint-Petenboifff , 
les  ecoles  diverses  nour  les  services  publics, 
les  institutions  de  bienfaisance,  lesmaiiou 
des  enfants  tronves,  les  colonies  etitugeres, 
Teducation  des  jeunes  Tatars,  la  popniatioti 
qui  professe  Pislamisme,  la  popalatioa 
juive;  nombre  totd  des  fleves,  somma 
foumies  par  le  gouvemement,  6a5  a  ^6)9 
a;  but  tnoertain  dea  vovages  de  rempereor 
Nicolas,  de  sa  visite  iBemadotte;  sa  po- 
sition ,  son  caractere ,  639  a ,  640  a ,  b. 

Nijni-Novgorod ,  ciief-lieu  du  gouveroe- 
ment  de  oe  nom ,  au  confluent  du  Volga  H 
de  roka ;  foire  considerable  en  ete ;  mano- 
fectures,  commerce  aclif ;  pomiaes  estimefs, 
dont  quelques  especes  encore  infonow^ 
dans  le  reste  de  TEurope ;  ^tendoe ,  popu' 
hrtion ,  5i  a ;  son  fondateur,  9S  b. 

Nikon,  metropolitain  de  Novgorod  et^* 
triarcfae,  cabne  les  Novgorodieos  levoiiai 
187  a ;  a  compost  la  premiere  histoire  que 
Ton  ait  de  la  Russie;  austerity  de  la  vie, s« 
travaux  eccl^astiques ,  sa  cniaute  coiitre  les 
noa-confbrmistes ,  189  a — x9da. 

Noblesse,  a  perdn  une  graiide  psrlie  de 
son  influence ;  divis^  en  qnatotre  classtf  • 
parmi  lesqueQes  il  y  a  distinction,  29  "' 
3o  a ;  le  noble  a  an  fond  les  memes  de&ots 
et  les  m^mes  quality  que  le  serf,  33  a,  b. 
—  Plusieurs  maisons  d'Muoation  oat  ete 
fondees  par  les  tsars  et  les  iraperatrices  pouj 
des  filles  nobles,  34  a;  a  Moscou,  un  fraud 
nombre  de  gentilsbommes  cedent  a  Tattnit 
do  jen,  de  la  table,  ou  k  la  manie  des  d>^ 
vaux,  47  a;  a  (pelte  cpoque  comment* 
iHisage  des  armoiries ,  192  b. 

Nogai,  clief  latar,  donne  son  noai  i  une 
partie  de  ces  peoples ,  xo6  a;  rend  k  Dmi- 
tri sa  couronne  pour  prix  de  sa  soomissiont 
107  b;  accompapo^  de  Telebouga  et  d^ 
princes  de  Galiae,  il  marche  eootre  k> 


CONTraUES  DANS  LA  WJBSSE. 


66t 


HHiyras;  la  faim  et  la  maladie  aocableat 
Panaee  «les  Tatars;  deux  ans  plus  tard,  la 
dtMiiSo»deccsd«ix  dialii  sanfe  la  Mogne, 

loaik 

Novgorod ,  cbeMien  do  gouvcmemeiit  de 
oe  BOB,  aqieet  jnttoresqna;  baigiwe  par  le 
Yolckliof ,  qui  joini  les  lacs  Ilmen  .et  La- 
daga;  svpcricie,  popnlatioB ;  aiiues  de  fer, 


decoivre,  deploaibetde<liarboDdfttienre, 
49  a;  par  qui  folidte,  vers  quelle  ^poque, 
69  b ;  secoue  le  joag*  des  aottverams  de 
ILief,  89. a;  ravaeee  par  la  feoiine,  97  b; 
oi  proie  k  TaDarcbie  et  &  des  ileaui  de  toute 
espeee ,  io(  b ;  Buse  i  fen  et  i  sang  par  let 
Mongols,  Z08  a. 


o 


Ob,  fleuve  de  FAsie  septentrionale ,  oours 
da  sad  au  nord,  irers  un  golfe  de  la  mer 
6lactale»  est  forme  par  la  jonction  de  la 
Kia  et  de  la  Katounia ,  x  i  b. 

Obdisque  de  Poltava,  sorti  des  fonderies 
de  Petrozavodak ,  49  b. 

Ocean  oriental :  une  partie  en  est  com- 
prise dans  Tempire  niase,  9  b. 

Odessa,  situee  entre  le  Dniepr  et  le 
Dniestr,  i5  b;  sa  prosperity,  sa  population, 
4u  a ,  b. 

OEsd,  lie  qpii,  avec  pluaieurs  autres, 
forme  on  district  separ^ ,  45  a. 

Oginski  (le  comte)  ae  rend  sans  sncees 
aupres  de  Catherine  11,  dont  il  esp^ait 
fappai  pour  arriver  an  tr6ne  de  Pologne, 

Oka,  grande  riviere  dlBorope;  se  jetle 
dans  le  Tolga ,  i?  b ;  i  sa  jonction  est  Mtie 
Ni)ni-Novgorod ,  5i  a,  98  b. 

Okhotsk ,  province  de  la  Sib^e ;  orga- 
nisalioD  pss  encore  arrit^e ,  60  b. 

Okkvate,  lac  traverse  par  la  Dvina  occi- 
deatale,  14  a. 

Okfai,  fils  ain4  de  Genghb-Khan,  envoie 
son  oeveu  Biti  ravager  une  partie  de  la 
Rnssie,  xoi  a  —  to3  a ;  ses  conquites  de- 
vastatrioes,  sa  domination  et  celle  de  »e$ 
niceeasears,  ib.  —  124  b. 

Olbiopolls ,  vMle  aocienne ,  reconnue  par 
(les  medailles  et  quelques  mines ,  x5  b. 

Oleg,  regent  de  I'empire  russe  en  879, 
i'enpare  &  Kief  par  Tassassinat  de  sea 
princes;  diminue  la  puissance  des  Khozars, 
ctcod  sa  domination ,  et  va  attaquer  Cons- 
taDtiaopde :  Tempereur  Leon  le  Philosophe 
Tebigne  an  mojen  d*an  traite;  ces  avantages 
iai  ibnt  donner  par  le  peuple  de  Kief  le 
Bom  de  magicieo  ,75  a  —  76  b. 

Oleoek,  flenve  oui  coule  du  and  au  nord 
ven  la  mer  Glaeiale ;  le  coura  u'en  est  pas 
coticrement  connu ,  i  o  a ,  b. 

Olga,  veuve  dlgor,  venge  cruellement  la 
nort  de  oet  empereur.  Voy.  Sviatoslaf , 
77  b. 

Oloneix  (gouvemement  d'\  V,  Petroza- 


vodsk. —  (ville  d'),  situ^  sur  las  deux  ri- 
vieres Olonka,  M^^ga,  49  b. 

Omsk,  province  la  plus  m^ridionale  de 
la  Sib^ie,  est  propre  k  la  culture,  60  b. 

Onadyr,  le  plus  oriental  des  courants  qui 
traversent  le  pays  des  Koriaks,  vers  la  mer 
Glaeiale ,  lo  a. 

Onffres  (aujourd*bui  Hongrois) ;  leur  ori-r 
gina,  leurs  migrations,  6H  a ;  traversent  les 
Etats  d'Olcc  et  s*emparent  de  plusieors  pro- 
vinces, 7&  0;  s'etabuasent  dans  la  Pannunia^ 
76  b;  font  alliance  avec  Vladimirko,  89  b» 

Onone,  riviere  qui,  avec  Flngoda,  forme 
la  Chilka,  xo  a. 

Or,  sur  le  versant  oriental  des  monta  Ou- 
rals,  57  a;  dans  les  mines  de  Kolivyi,  60  a; 
un  peu  dans  le  Caucase,  6a  b, 

Ordres,  distinctions  individuellea,  deoo* 
rations  temporaires;  quelques  ordres  ilablia 
pour  les  dames,  37  b,  38  a, 

Orel ,  sur  TOka ,  chef-lieu  du  gouveme- 
ment de  ce  nom;  sol  tres-fertile ,  for£ta, 
mines  de  fer,  etendue ,  population ,  5a  a. . 

Orlof ,  tresorier  de  I'artiilerie ,  sert  puis* 
saroment  k  re:iecution  du  complot  qui  placa 
Catherine  II  sur  le  tr6ne,  a76  a  et  suiv« 
(V.  Catherine  II,  jusqu'a  la  p.  35  x  a). 

Orphelins  (les),  les  aveugles,  les  sourda 
et  muets  sont  recueillis  dans  des  etablisse* 
ments  bien  ordonn^s,  34  a,  b. 

Oufa ,  chef-lieu  du  gouvernement  d*Oren* 
bourg,  qui  a  conserve  le  nom  de  cette  der- 
niere  ville,  sa  premiere  capitate,  et  remar- 
qnable  par  la  £oire  qui  sV  lient;  terrains 
sales ;  arbres  recueillis  par  l*Europe;  ptebe* 
ries  de  TOural  tr^-productives,  58  a,  b* 

Oural ,  fleuve  qui  se  jette  dans  la  mer 
Caspienne;  les  Bascbkirs  et  lea  Kirgniaea 
habitent  ses  deux  rives ;  poisson  et  amai* 
eslimes,  xa  b,  x3  a. 

Ourals  (moots),  situ^  entre  I'Europe  el 
FAsie  (V.  Montagues) ;  terminent  a  l^uest 
le  bassin  de  rob,  xx  b;  pourquoi  a  et» 
cbang^  leur  auden  nom  Poias,  341  b. 

Ovide ,  a  point  fidilement  le  lieu  de  sou 
cxil,  16  b. 


W2 


TttU£  MS  KATIfiae 


PadM  i'ia^  (k)  eii  f/mn  cootre  k 
Porte ,  est  airki  per  U  &iiMie>  ^  b. 

Balttko  (le  oomte)  dirige  la  tompintHNi 
,Miu  laqucUe  suoooinbe  1^  I*',  39i  b  — 
409  b. 

Puuu ,  |»asM  en  Suede  plusieim  eiuite 
comme  miDistre  niase ,  276  a ;  il  accede  au 
fomplot  pour  TeleTation  de»CatheriDe  II| 
ib. ;  vonlait  attendre  au  lendeoiaiB,  377  b; 
8*emploie  neanuioius  daqs  rexeeuCion, 
178  D ;  eftt  kiutDin&  ministre  de  Catherine  II, 
9S9  b;  se  nresenle  tremblant  devant  elle  au 
moment  i*uut  revoke,  aS8  b  (V.  easuite 
Oitherfne  It,  juaqti'i  la  p.  35 1  a.). 

PatSieVitch ,  tail  contre  lei  Fenans  una 
ttttipagne  Mflante ;  mis  en  parallele  avec 
Souvorof,  537  a,b;  commande  en  chef 
datts  la  demiefe  caunpague  contre  Vaitovie, 
$78  a  —  590  b. 

^Ul  t*^  (k  796-  X  80 1) ,  regie  par  uo  ouLa«e 
fordre  de  sticcession  au  tr6Be,  a5  (Y.  hi 
ttote);  pfend  plusieurs  mesurei  contrairel 
4  timn  de  Citnerine  H;  fait  transporter  so- 
fennellement  le  corps  de  son  pere  avec  celui 
4}^  VhltpiSratiice  k  c6t£  de  k  sepulture  des 
tktt;  se  fatt  couronner  k  Moscou,  ses  hi- 
zarreries  souvent  cruelles ,  prohibitions  om- 
bra^uses,  saillies  de  generosile;  il  entre 
datais  la  sei^nde  coalition ;  accorde  k  Seuvo- 
rof  de  hautes  distinctions  pour  ses  premiers 
snctf^ ;  eatnpagnes  de  ce  capitaine  en  Suisse 
et  en  iralie ,  385  a  —  3^6  b ;  Paul  roropt 
viol<Mini^t  avec  TAngleterre,  envoie  une 
ambassade  au  premier  consul ;  consentait  k 
partager  avec  iiri  la  souverainet^  de  TEu- 
rope;  les  soup^ns,  les  rigueurs  de  Paul, 
raganhSs  comoie  une  des  causes  de  sa  mort 
violente ;  exposi  de  trois  relations  sur  cet 
^vftnement;  §inour  violent  de  Paul  pour 
Anna  Petrovna ;  il  le  surmonte  et  lui  fait 
^t^ser  le  prince  auquel  elle  se  destinait , 
396  b  —  410  a. 

Pbcbe:  tris-diondante  dans  k  Kama  et 
VOkn ;  bien  moindre  sur  k  Baltiqiie,  xa  b, 
t3  a ;  Ires-  productive  dans  le  lac  Peipous , 
48  a ;  pdcheurk  d'Afkhangel ,  vont  dans  les 
merk  fiolaires ,  56  a;  pteheries  de  TOural, 
Im  plus  productives  de  tootes  ceUes  de  la 
&dSsie,t3B,  58  b. 

Peine  de  mort  remplac^  par  des  amendes 
|l£ciiiiiaires,  sons  le  regne  aTsiaslaf ,  86  b. 

Peiuture ,  Peintres.  An  chitean  de  Mon- 
Maisir  est  tine  belle  collection  de  tableaux , 
41  b. 

Peinom ,  kc  cpii  communique  litec  celui 
de  PsLof  i  p^e  tres -productive,  48  a. 


.  Vmmt  Jirf  lian  4m  gamwwimwl  <k  ee 
Dom ,  Yilk  de  eommeree  et  de  kbsaqjdes ; 
«gri€ullive  floriasaHto*  S^  Ik 

PenB«  cbe(-lieii  dn  gouniBewnit  «k  «e 
aora;  fiehesaei  aHnMes^  aaliiMi  d*uii 
mad  prodnift;  «iM  voie  naTiyhk  pona 
itre  ouTerte  k  travers  let  montagnes ;  cette 
▼ilk  est  sur  k  route  de  P^enbourg  a  k 
Chine  par  k  Sibkie ,  S7  a ,  b. 

Perse  (k)  Mye  k  k  Ruanev«a  x6a8, 
une  forte  coatribtttion  apres  une  oaropagne 
desastreuse ,  et  signe  le  traite  de  Tourkmaat- 
cbai ;  articles  principalUL  de  oe  traite «  53?  a 
—  640  a  f  V.  les  regnes  precedents,  et  anr- 
tout  Pierre  I*' ,  Cathcriae  II » Alcxaiidre  P', 
Nicolas  I*'.) 

Peste ,  fait  eprou  ver  aux  Russes  de  grandcs 
pertes  dana  k  campagne  d^Orient  en  1899, 
540 a,  h. 

Peste  nohe  (la)  detok  TAsk  et  rEurope, 
xi4a. 


guerres ,  kar  extermination  presque  toCak 
|iar  Taroi^f ,  77  a  —  85  a;  repousses  en* 
core  par  'Vladuair  Mouomaque «  87  b. 

Petile-Kussk ,  etendue ,  moeurs ,  dialccle , 
miLsique  et  chants  nationaux;  natundisatiaa 
possible  de  certains  arbres  fruitiers,  phi- 
sienrs  vilks  remarqaables,  5a  a  —  S3  b. 

Petrole :  abonde  dans  quelqaes  iles  de  la 
mer  Caspienne ;  sO  trouve  en  Sibcrie  daus 
les  regions  mantagneuseat  to  a. 

Petrozavodsk,  poit  et  ch^-hen  du  gou- 
veroement  d'CAonetz;  usines  eiablies  par 
Pierre  le  Grand  pour  Tartillerie  et  k  ma- 
rine, 1 3  b,  49b;  miaeralogia  variee,  ib.; 
etendue,  population ;  pen  de  grains;  Ixelafl, 
poisson ,  gibier  aboudauls,  ib. 

Peuples  dndens  qui  a*^ient  point  Scy- 
thes; leurs  demeures  dans  diverses  parties 
de  la  Kussie,  67  a,  b,  68  a;  6yb,  70 a; 
leurs  migrations  9  etabUssements,  ib.  V. 
Skves. 

Pierre  1**"  et  Ivan  V  Aleitieievitch  (i68a- 
1^27).  L*election  de  Pierre  k  fexcluaioa 
divan  est  confirmee  park  couaeil  des  boy  an 
et  le  clerge;  sur  un  faux  bruit  ks  Streieli 
se  portent  a  de  crueb  exces,  et  deckrent 
tsars  Ivan  et  Pierre,  sous  la  tutelle  de  So- 
phk;  le  nouveau  dhef  des  streletz  est  mis  a 
mort  avec  son  fils  par  k  eour;  les  strelelz, 
sdr  k  point  de  se  r^olter,  se  soumetteai , 
et  les  plus  mutias  sont  mis  a  mort; Sophie 
conQe  Tadministration  a  Galitzin;  traili* 


CONTEEIUBS  DAM  tA  ROSSIE. 


I*4lliiiiee  eatre  k*  tarn  de  JMowmi,  do 
Tieiiae^  de  YanorM  «C  Ycbim;  le  Pnin9Bis 
Lefort  ioipira  k  Fierre  k  deiir  de  refoniMr 
rngaaitatiMi  militaire ;  etudes ,  eierciees , 
dnrwliaMBc&tt  da  jenne  ts«r;  Galitfiti 
Domme  Mazeppa  hetman  dee  GoMM^oee, 
onoie  en  Fkwne  use  aaabetsade  qui  est 
ant  eflct;  Pierre  s'empere  du  pcmoir, 
oile  OaiatEia  el  pout  le  ehef  des  etieielE 
«t  Mi  coopliees;  il  ipvM  Eiuiefw  La* 
pMkiiiii,  «t  CB  a  «  ok,  AJeziB;qualMi 
phyiMfmi  el  OMfelef  de«'Pieire,  196 a<^ 
199  b;  M  Uit  ndoofaer  sne  vieille  chakaye 
dt  eoMtmetieo  auglaiae,  poii  eoiistrowe 
deoK  fre^alet  ffufii  sonie  rnnawnff  pMote; 
kit  dcAenniaer  eiee  Fenperedr  de  k  Gkiae 
ki  liaiiles  dci  deu  emnnit ;  il  eeiMme  daw 
le  aege  d'Aaef ;  eiort  olvaa;  priae  d^Acof^ 
199  b —  eoi  a;  r^adiation  (rEadoxie  La^ 
feokbiii,  ac8  a,  as^  b;  punitioD  rifDU* 
ittue  d*un  voievode  eeafpirafeur;  d^MOt 
pour  ton  preauer  ▼oyage ,  aejonr  k  AoMtefs^ 
nai,  pttii  en  ^tikgede  Sardam ,  eotoie  utt 
Moran  de  troupes  k  rcbeteor  de  fiaaei 
piSK  en  AfigkieffrB ,  s'y  attache  Peni  el 
ttrfjumif  retoanw  en  HeBande  d*OB  il  eife 
voie  aae  celonie  k  Arklian^;  passe  k 
Ticnoe;  leioanie  a  Moseou  pour  puiur  ka 
strdeu  levolUs ;  rebeUi ons  egaleasent  pu* 
Bits  daui  ffuelqitts  provinces  eloignees; 
Vmn  ammemet  dlverses  refonnes ,  entra 
Maai|a^fioiitreChaiitsXH,  eatbatta, 
cavoie  des  troupes  en  Pologne,  obtieot 
Vwlquesaiantages,  aoi  a  —  209 a;  prise 
"f  Usrkoboavg;  Catherine,  jeane  livo« 
lunas,  se  irouTe  panai  ks  prisonniers; 
*«nicesftte  rend  k  ilolle  russe;  le  Isar 
paise  da  rang  de  lieatenanl  a  oelui  de  capi- 
■'iae,  pttk  re^t  fordre  de  Saint-Andre ; 
Cbariies  a  toujoan  I'avantage  en  Pologne ; 
feadatka  de  P^ersbourg;  a  k  prise  de 
])orpat,  Pierre  r^prime  nokmoMBt  k  fu* 
nvrdusoldat  TaiiH|ueur;  decbeanre  d'Aii- 
goik,  ^kclion  de  Slanisks  Leoendu,  se- 
ditioQ  dans  Astrakhan ,  punicion  das  plus 
Gsopables;  Auguate  eenchit  up  traiti^  bon- 
teu  aree  Ghacka  ^  se  revise  k  rouver^ 
hve  d^un  aceoBBmodement  arec  Pierre; 
(^ktfks  s'enfonoe  dans  TUkraine ,  Pierre  bal 
«a  nalort  ^m  lui  arrivail ,  Tattaque  k  IM- 
ia«a,  el  vempone  k  vidoire ,  209  a —  %ii  a ; 
le  trone  de  Pologne  eat  dde  k  Auguste , 
fMmpe  irionflMik  k  Moseou;  soumission 
<k  k  livonie;  k  Turquie  lui  dMare  la 
Ifaene ;  Pieere  organise  an  senat'de  regenoe  ^ 
•hnreCathiyineau  rang  detsarine;  enfenne 
(w  Tanaie  turque ,  il  eede  aux  conseik  de 
CailieriM  el  sigae  aa  iraite  awe  Meh^ 


met;  rand  eniti  A»f ;  recrate  sen  annte; 
fait  ^poaaor  k  tpm  fik  nne  bcAe-soeaf  de 
rempeffetarClhaflaayi;  etiebre  aokanelle- 
ncut  k  Pftlanhewg  son  union  avec  Cathe- 
rine ;  y  preaaa  le$  Irtivaux;  poiirauk  ka  hos^ 
tililes  eenire  k  SaMe,  enf«ie  un  renfoit  k 
aes  allies;  sa  telle  mt^rt  I'expedilion  de 
171$;  one  loi  assnjeltil  tons  k$  boyara  a  la 
i^larite  du  recratement,  ax4  a  —  eao  b; 
"nclaire  navale  d^Angoat,  Pierre  se  jette 
dans  ime  chaloapaet  aauve  aa  Hotte  par  son 
sBisepiditi ;  son  dlsooars  aprk  k  eeranonk 
de  Teairee  Irioa^ialddea  vainqaeora ;  Cher- 
ka  Xn  revkrai  en  Mide  el  transperte  k 
theAlM  de  k  guenv  en  Nonrftge ;  an  fib 
nak  k  Akxkf  eao  b  ie4  -^  ai  seeoad  ^yaee. 
de  Pierre  par  k  Pruiae ,  k  IVaHande  el  11' 
Fhuiee  oft  il  est  nonuae  meaAre  de  i*Aea^ 
demk;  son  esckmalion  au  tombeau  de  Ri- 
chelieu ;  H  enire  dans  lea  pNi^ls  de  Goeriz, 
revknt  dans  aes  l^ls  pnnr  reprimer  ks  in-« 
earrions  des  Tatars  el  lea  exactions  de  qua)- 
qufa>uaa  de  ses  bnotu ;  Moeation  de  son 
ms  Akxk ,  eaaacs  dlainiilie  enire  k  tsnr  et 
hit,  ^eaaiaa  d*Akxk ;  rameaft  4  Aleacou ,  il 
f  est  jagi  et  condamne k  merl;  tibnoignage 
de  Bruce  sur  ses  demien  momeiils ;  ex^- 
lions  uorobreuses  pendant  Tinstraolien  du 
pm^,£ttdoKie  iageH^,  aHa— a36a; 
Pierre  ordonne  qn'on  inforae  conlre 
Bienlchikof  el  plosiears  grands  nour  aiono* 
pok  des  fouroitnres  de  reut ;  il  k  defend  et 
obtieiil  sa  gr&oe ;  il  continue  de  kire  des 
MaUissemenls  miles,  et  suit  spn  pkn  de 
rtforme,  faaalisnie  des  raskoli^  qui  sV 
opposeni;  Pierre  expliqm  d'une  Aanieni 
iranhk  k  mirack  d^nne  image  qoi  fleure 
sur  ks  naax  futon  de  Pifttenbourg ,  te  anx 
aerlesiasliques  le  droit  de  vk  et  de  merl , 
a36  a — a37  b ;  mai^  les  dkpoaitioos  hos- 
tiles  de  plnsieurs  pniasanoes ,  la  flotle  russa 
deaesle  les  cAtes  de  k  8uMe,  et  k  reduil  k 
•signer  k  paix  deHeustadt;  k  tilre  d'eaipe* 
reur  lui  est  decern^  par  teules  ka  puis* 
sanoes;  il  aboKl  k  digniii  de  patriarche, 
son  d^aespoir  de  k  Aorl  da  xkniier  fiU  de 
Catherine ,  9)9  b  —  a38  b ;  il  institue  one 
nobleaae  aaililnm;  il  profile  dca  dissensions 
de  la Penie ,  et, pour  ven^k men  de  plu- 
aieafs  marcbuids  msaes,  il  entre  dans  Der- 
hent, KvieatpromptemeBti  Moacou;  pins , 
en  vertu  d*un  Inite ,  rtenit  k  aes  titals  Bakfao , 
Derbent  el  Irou  pravinoes;  il  prot^  le 
jeune  due  de  Hoktein  aaqnel  il  destine  sa 
fitte  Anne ,  a38  b  *^ a4iO  a;  afkiblissenienC 
de  sasante,  courooneroent  de  Cailierine; 
il  deoouvte  son  intrigue  avec  Hoeos  qui , 
sous  une  autre  accusation ,  est  condamne  a 


6IM 


TABLB  0ES  MATI^RES 


fienlre  la  iHet  Mn  exiciition  60  pr^Miioe 
dc  Catherine ;  Piore  echappe  avec  peine  a 
nne  maladie  boiileuie  atlnmi^e  k  la  fougiie 
de  Mi  passions;  il  reprend  sa  vie  active, 
a*elanoe  k  la  mer  et  sauve  plusieors  bommes 
«*B  danger  de  perir ,  renouveUement  de  ses 
iouleurs ,  la  paralysie  lui  permet  seulement 
de  treoer  auelqueB  mots  a  peine  lisibles ,  il 
expire  apres  une  cnielle  agonte ,  a4o  a  — 
a43  b ;  dascussion  sur  ces  moia  du  testament 
en  ce  qui  pouvait  interesser  Catberine  et 
Mentchikot;  Yioes  et  verius  de  Pierre;  ju- 
gemenls  divers  sur  ses  tilres  au  nom  de 
Grand  i  expose  de  qiielques  articles  du  plan 
qu'il  avail  eon^u  pour  ragrandissement  de 
Tempire;  ses  travaux  comoK:  legislateur; 
'quelc|ues-unes  de  ses  reponses  ou  de  ses  ac- 
tions dans  diverses  circonstances,  a43  b  — 

Pierre  n ,  Alexei^vilcfa ,  succMe  k  Catbe- 
rine I'* » rappelle  de  Texil  Eudoxie ,  sa  mere ; 
Mfentchikoi  fait  celebrer  les  fian^ailles  de 
sa  fille  oadetle  avec  le  jeune  tsar;  deux  ac- 
tions tero^raires  caiisent  sa  disgrlce ,  sa  con- 
damnation,  son  exil;  le  tsar  est  couronne  k 
Mosoou ;  la  Eamille  Dolgorouki  devient  toute> 
puissante;  Pierre  meurt  k  seize  ans ,  aSa  b 
--a54b;  le  conseil  proclame  imperatrice 
une  des  filles  d*Tvan ,  la  duchesse  de  C<our- 
hinde,  veuve;  et  deminde  qn*elle  signe 
pluiieurs  articles  secrets;  elle  signe  et  se 
rend  a  Moscou ,  a54  b  -—  a55  b  ( V.  Anne 
Ivanovna). 

Pierre  III  { t762),  au  moment  ni^nn*  de 
la  mort  d*^isabelb  se  fait  saluer  fsar  par  les 
gardes;  rappel  de  Munich  et  de  Btren; 
Pierre  indispose  les  esprils  par  sou  admira- 
tion outrce  pour  le  roi  de  Pnisse,  Frede- 
ric II ,  et  par  la  reunion  a  la  couronne  de 
toules  les  richesses  du  clerge ;  il  se  tivre  a 
des  orgies ;  laisse  ciKuler  le  bruit  de  la  ri- 
pudialioii  de  Catherine ,  fait  dans  ce  sens 
quelques  demarches ;  Catberine  et  ses  par- 
tisaus  gagneni  les  troupes  et  Tobligent  a  si- 
|;uer  une  renonciation  au  tr6ne ;  pen  apres 
il  est  eirangle,  a7a  a  -~  a8a  b.  (T.  Cathe- 
rine II.) 

Pierres  k  moellous ,  et ,  en  general ,  pieires 
pour  la  biitisse,  sent  rares ,  19  a ,  b. 

Pin  (le) ,  cembro,  rroit  sur  la  rive  gaurlie 
seulement  de  la  Kama,  fab;  serait  pour 
qous  une  ac^isilion  importante  ,17b. 

Plan  Carpin ,  moine  (ranciscain,  son  am- 
faassade  vers  le  khan  des  Tatars;  son 
voyage  contient  des  renseignements  interes- 
sanls ,  104  b. 

Platine ,  sur  le  versant  oriental  desmonis 
Ouials ,  67  a. 


Podolie.  Y.  Kamenelx  Podnlski ,  56  a ,  b. 

Po^sie :  poeme  remarqoable  par  le  sujet 
et  parson  andennete,  tai  b. 

Police ,  se  fait  avec  une  prodigiense  ac- 
tivite,  19  a;  sa  vigilaaoe  a  Saint  -  Peiers- 
boorg,  43  a. 

Pologne  (royaume  de) ,  d*apres  sa  consti- 
tution en  grand-duefae  par  Napoleon;  su- 
perfide  que  la  conqoMe  de  oe  pays  ajoiite 
a  Tempire  russe;  erreurs  de  son  adnaijus- 
tration;  sa  constitution  avant  i83i,  ooa- 
cession  de  Tempereur  Alexandre ;  aiatnt  or- 
ganique  donne  apres  les  evenements  de  z83i 
par  Pempereur  Nicolas,  63  a — 65  a ;  nons 
des  voi^odies  qui  correspondent  anx  gou- 
vememenis  dans  le  resle  de  rcmpire,  65 
a,  b;  engine  do  mot  PtUaniems  qui  a  forme 
oelui  de  Pelonais ,  69  a ,  b ;  ont  ravage  Totv 
eidentde  la  Russie,  9a  b ;  la  Pologne  a  ele 
bien  affiiibUe  par  la  defection  des  Gosaqoes 
de  rukraine,  r88  a,  b;  histoire  des  trois 
demembrements,  depuis  1773(337,  b)jus> 
qu'i  1 796(V.  Catherine  II,  984  b— 378  b.), 
position  de  la  Pologne.  lors  de  rinvasion  de 
Napo16on  dans  la  Russie ,  454  b  —  455  a , 
il  donne  aux  Polonais  quelques  esperanoes; 
456  a ;  Alexandre  I"  se  renid  k  Varsovie  el 
donne  a  la  Pologne  un  gouvemement  cons- 
titutionnel ,  497  b  —  499  a ;  les  assodatioos 
secretes  s*y  propagent ,  5oa  b  —  5o4  b ;  eve- 
iiemenls  de  i83i  (Y.  Nicolas  I");  discours 
de  Nicolas  V^  a  la  deputation  de  Vanovie 
en  i835,  6iaa — 6i3a. 

Polovtsi,  peiiples  qui  s*emparent  d'oee 
partic  des  cotes  de  la  mer  Noire,  et  fondeiit 
sur  la  Russie,  85  b,  86  a;  massacrent  Ro- 
man Sviatoslavich  qui  les  avait  pris  a  sa 
solde ,  ib. ;  prufitent  d'une  famine  et  d*iine 
peste  pour  exercer  leurs  brigandages;  lail- 
lent  en  pieces  une  armee  nisse,  86  b ,  87  a : 
soiit  appeles  par  des  pnnces  russes  romme 
auxiliaires,   S7  a;   sont   vaioeus   par  les 
Russes,  ib. ;  re|M>usses  par  les  tils  de  Tb- 
dimir  Monomaque,  87  b,  et  iiar  Mstislof 
au  dela  du  Volga,  88  a;  leurs  knaos,  oockt 
de  Sviatoslaf,  se  joignent  k  lui,  90  b;ausi- 
liaires  du  prince  de  Tchernigof,  91  b;  rhas- 
ses  au  dela  des  frontieres  par  Rostislaf ,  ils 
reparaissent  avec  Ysiaslaf,  9a  b;  les  Russes 
p^netrent  dans  leurs  terres,  93  a ;  sont  tall- 
ies en  nieces  par  le  prince  de  Kief  el  ses 
allies ,  ib.;  joints  a  Ysevolod  III,  ils  entreol 
avec  lui  danif  le  pays  des  Bulgares ,  95  a ; 
sont   repousses  de  la  Tbrace,  dnasteot 
Kief,ib. ,b;  gardent  pendant  Irois  ans  le 
prmcc  Dmitri,  leiir  prisonnter,  97s;  se 
joignent  a  Mstislaf  et  a  Daniel  centre  lei 
Hongroi^  et  les  Polonais ,  99  a ;  pounutvii 


CONTENUES  DANS  LA  RUSSIE. 


865 


ftr  les  Moogob,  le  refugient  duu  Kief, 
pfaat  de  Douveiu  deraot  eux,  lox  a;  BAli, 
ebef  des  Talart ,  tennine  tes  Mogkuites  ex- 
conioiis eo  se  retirant  daus  leiir  pays,  f  o3  a ; 
il  la  soumet ,  il>. 

Boliava ,  chef-lieu  da  ^oaveroeiQent  de  ce 
iioiB»  mooumeat  elere  a  Pierre  I'',  53 
a,  b;  population  mojenne,  5%  b ;  victoire 
de  Pierre  I'',  ai3  a. 

PMnme  de  terre.  Elle  a  deja  franchi  It 
6o*  depe  de  latitude ,  4  a ,  b ;  So  a. 

PDBiatowski,  favori  de  la  grande«dn« 
cbese  qui  fut  Galberine  11 ,  170  b ;  clu  roi 
de  Folo^ ,  3oi  a  (Y.  Catlierine  II  •  jusqu  a 
b  p.  37$  b.> 

Pooti  ft  cbauiieeB,  administration  icpa- 
we,  a7  b. 

Popalatioa.  Treize  nations  composent 
eeife  de  la  partie  coniiiientale ;  noms  et 
priadpam  traits  de  lous  ces  peuples,  cva- 
iution  du  total ,  classes  diverses;  affrancbis- 
icoent  dcs  serfs ,  ao  a  —  aS  b ;  quel  nom- 


bre  die  peut  atteindre  ,4b;  tableau  drs 
quatre  principales  classes ,  29  b  —  Sab; 
pourauoi  elle  est  motndre  dans  la  Russia 
meriaionale  one  dans  le  nord ,  53  b ,  54  a; 
celle  de  la  Siberie ,  58  b ,  Sg  a;  population 
professant  Tislanisme  dans  la  Russie  d'Eu- 
rope,  638  b;  population  juiTe,  ib. 

Polemkin  (V.  Catberme  II,  343  a — 
356  b.). 

Poiidre  a  canon,  sou  introduction  en 
Aussie ,  117b. 

Pougaldief,  sous  le  nom  de  Pierre  III, 
ifounc  <iu  fit  a  rttordrt  a  Catherine  II , 
339  b--  341  b. 

pKkof,  chef -lieu  du  gouvememcnl  de 
ce  nom,  bdtie  au  confluent  de  drux  n-, 
tieres ,  dont  Tune ,  au  nioyen  des  lars  de 
PsLof,  Pei|)ou5,  et  d'uue  scconde  n\icre, 
communique  avcc  le  golfe  de  Finlande  ,48a; 
Liendne  et  population ;  richesse  principalc ; 
bois  de  coustnicljon ,  iJ). 


R 


labbe,  Ifistoire  d'Alexandre,  dte  p.  S98 
sctniv,,  4i6b,4ai  a,4aaa,  4^4  ••  4«5 
b»4«6b,  43o  b,43x  b,  436  b,  45i  b, 
496  b,  499  a,  5o9  b,  5i3  a,  b,  5c8b. 

Hano  (Stenko-) ,  Cosaque  du  Don ,  oe- 
ieb«  par  ses  brigandages,  est  eaecule  a 
Monott,  190  a  —  191  a. 

iteotti/  dt  fikcu  officUUes ,  {Mr  Schoefl, 
veofcnw  k  preuve  (Tune  intdligeace  for- 
aiefle  eolie  njasieun  cabinets  en  i8i3 ,  48a 
a;  die  sou  p.  485  b,  486  a. 

Reuie  (le)  fdt  fta  richesse  des  Konaks , 
t3  b. 

Repdn  (le  prince)  arrive  a  Varsovie  pour 
presier  Tdection  de  Poniatowski,  agS  n. 

Revd,  chef-lieu  de  TEsthenie;  elat  actud 
da  commerce  et  de  I'agricultore;  popula- 
tion,  44  b ;  fondee  par  Vaidemar  II,  roi  de 
Dineaurk ,  99  b. 

Rhiooceroa  (osseoienis  de)  trouyes  sur  lea 
bards  du  Tiloui ,  10  b. 

Riasan ,  sur  I'Oka ,  ehef-lieu  du  gouver- 
•ement  de  ce  nom;  prosperile  de  la  eul* 
lure;  nooibreux  marais;  fbr^,  mines  de 
frr;  etendoe,  population,  donl  le«  Talan 
forment  le  tiers;  andenne  residence  de 
ieun  sonverains ,  mines ,  5z  b. 

Richelieu  (le  due  de)  a  procure  au  gou- 
vQnemcnt  de  Kherson  I^  fruits  d*une  ad- 
Binistraiion  edairee,  54  b. 

Riga,  chef-lieu  de  la  Livonie ;  exposee  a 
des  iaondations;  Miperficic,  population  de 
K gotiveriiement ,  45  a;  aitidcs  ae  son  codi- 
Pwce,  ib. 


Roman ,  prince  de  Kief,  entre  sur  le  Icr* 
riloire  de  Oalitch,  se  joint  aux  Orecs,.  et 
ddivre  la  Tltraoe  des  ravages  des  Polomi; 
oependant  ces  peoples,  conduits  par  les  OU 
govilchs  et  Rurik,  dievastcnt  Kief:  Roman 
porte  ses  arraes  dans  la  Pologne;  il  y  est  lue 
daus  une  balailie ,  94  a ,  95  b ,  96  a. 

Rostislaf  (1 1 54-1 15 5)  re^ut  la  couronne 
de  'Viatcheslaf,  onde  d*TsiasUf;  s'etaut  ap- 
nrodie  de  Tchemigof  avec  des  forces  iusuf- 
lisantes,  il  est  force  d'abandonner  Kief  et 
de  se  refugier  a  Smolensk ;  son  fils  est  aussi 
depossede  de  Novgorod,  et  Georges  entre 
en  triomphe  a  Kief,  91  b.  (11 59- 1167)*, 
Rostislaf,  qui  s'clait  refugic  a  Bielgorod,  7 
est  rejomt  par  ses  allies;  Tsiaslaf,  qui  avait 
eu  recours  aux  Polovtsi,  perd  la  vie  dans  sa 
fuite,  Rostislaf  reulre  dans  Kief;  il  meurt 
dans  nn  4ge  avance ,  oa  b ,  93  a. 

Roture,  classe  subdivisce  en  corporations 

Ekis  ou  moinsprivilegiees;  tendance  parmi 
is  Russes  a  former  di verses  corporations  9 
3o  b,  3f  a. 

Roumianznf,  son  genie,  moyens  qui  kii 
procuraient  ses  triomphes,  339  a  (Y.  Collie- 
rine  II). 

Ruines,  a  Kassimof,  ou  residaient  les 
sonverains  tatars,  5i  b;  restes  de  la  mu- 
raille  caueasUnne,  70  a. 

Rdhiere,  cite  373  b,  375  a\  aS5  a,  29$ 

a,  3oa  a,3tia,3iaa,b,3i5a,  33a  a, 

b ,  337  b.  . 

Rurik  cl  srs  deux  frcres,  Vancpiics 
(SOa-879),  rv^oivtui  k  souvcrain  pouvoir 


666 


TABLE  DES  MATll&fiS 


lies  Slavei,  qui  occupaicDt  qiielc|iies  pro- 
Vlxioet  tu  sud  du  golfe  de  Klnbnde :  oe  )iavt- 
prend  le  Dom  de  Russie.  Apr^  la  moit  m 
ses  freres,  Rurik  funde  U  mo&archie;  il 
taiue  un  fiU,  Igor,  en  bai  Ige,  et  Oleg  «m 
tuteur,  74  a,  7 5  b. 

Kuuie,  origiiMs  diverMi  do  mot  nutet 
70  b;  queDe  ptrtie  du  pays  re^ut  d'abord 
oe  noiD,ib.,  74  b;  considerations  g6iteles 
sur  Texistenoe  et  la  dastination  politiques  de 
la  Aussie,  66  b,  67  a;  traits  Tarics  de  la 
pbysionumie  de  ses  habitants ,  3  a;  ses  li- 
niites,  sa  superfide,  divenite  du  sol  de  sea 
diverses  r^ons,  3  b  —  6  b;  men,  princi- 
pBux  fleuves  et  canaux ,  6  b  -^  16  b ;  climat, 
•16  a — X7;  histoire  naturelle,  17  a  —  aOa; 

nulatiou ;  quel  nombre  elle  peut  atteindre, 
;  |MNjples  qui  la  composent,  rapporti 
ftumdriques  entre  les  divenes  classes,  total 
presmne,  90  a  —  a5  b ;  gouveniement,  ad* 
ministration ;  conlrees  et  villes  principales, 
a5  —  67 ;  histoure,  k  dater  d'euviron  dnq 
cents  ans  avant  J.  C.  jusc|U*en  i835,  p.  67 
jusqn'a  la  fin.  —  Souveratn*  tueeessifi  :  an- 
nfes  861-879,  Rurik,  Sintes  ct  l>oun>r, 
14.75;  879-911,  negencetfOleg,  75,  76; 
911-945,  Igor,  76,77;  945-971,  SvialOi* 
bf,  77-80;  ^7«-98e,  Taropotk,  6n;  98|»- 
1014,  Ylediflur,  80-8S;  ioi5-toi9,  SWa* 
topolk,  8S-85;  1057-1077,  Taiasbf,  86, 
86;  1078M09S,  VacfofcNi,  86;  t«93-<iily 
flviatopolk,  86,  87;  ttiS-iiiS,  Vladimir 
Monomaqna ,  87, 88 ;  xiiS-iiSa,  Mstirfaf, 
88;  IXS1-X139,  Yaropolk,  88,  89;  KS9- 
1146,  VsevalDdOlgOTilch,89;  xK8-xi54v 
Igor  Olgovitch  At  Tsiaslaf  Mstislaviteh ,  89- 
9x ;  »xS4-ifS5  ,  Roitislaf ,  91 ;  ixiS-ixfiT, 
Ceorges  ou  T01H7,  sumemmi  Do^arouk?, 
9X,  91;  ii57-t»69,  Tsiaslaf,  et  Andre, 
somemnie  Rogottoidsskr  ou  le  Pisux ,  9i>, 
93;ii67-xi69,M9tirfaffllAndri,93;  XX69- 
XI 74, .Andre,  93,94;  1x74-1176,  Micku^ 
94;  1 176-1111,  Ts^valod  III,  94-97;  Ilia- 
11x6 ,  Georges  et  GemtantMi ,  97 ;  xic6- 
tix9,  Canstantin,  97*  9*6;  xii^hiM, 
C^eorgea  II,  fits  de  Ts^akd,  fS-tooi 
xai4-xi38,  le  grand  prince  Gaoi^cs  W$^ 
voiodoTitch,  too-xoS;  ti38-ta47Y  le 
grand  prinea  Tareriaf  U  Ts^dlodenteh , 


io3-to5;  1147-x^,  %^mtQM  Tsfttota* 
dovitcfa,  Andri  Tarorfavileh  «4  Alcundra 
Newsky,  xd5,  106;  x  163-1171,  Taradid 
Taroslatitch ,  106,  107;   1171-1176,  Is 
G.  P.  Yassilt  Taroslavitcb ,   107;  xi76- 
X194 ,  le  G.  P.  Dmitri  Aletandrantek,  107, 
108;  X194-X304,  leG.  P.  Akxandrovitdi, 
X08;  x394-i3x9,  leG.  P.  Michei  Tarosls- 
iritch,  X09;  i3io-x3i8,lesGG.PP.  Gear 
ges  Banitiontdi,   Dmitri  el  Alcin^ 
Mikhaelowitd) ,  lop-t  c  i ;  x3i8-x34o,  le  G. 
P.  Jean  Danl^kmtch,  amnommt  KsNti, 
txi,  ixi;  k34o-x353,  le  G.  P.  SMm 
Ivanoriich,  smnommi  le  Saperba,  lu- 
1x4;  i353-i368,  \e  G.  P.  Jean  11  Ivaao- 
vilab,  1x4;  i959't56i,  le  G.  P.  Dmith 
Constautinoviicb,  X14,  xx5;  x363-i3S9,fe 
G.  P.  Dmitri  Iranovitdi,  suraomai^  Dons- 
koi,  X15-XX7;  x389-x4i5,leG.  P.TiMfi 
Dmilriivildi ,  x  x 7-1 19 ;  x4iS-x46a ,  k  G. 
P.  Vassili  Taasili^vitdi  faveugle,  X19-111; 
1461- J  5o5 ,  le  G.  P.  lean  m  TasiiiiMtab, 
XIX-118;  x5o5-x553 ,  le  G.  P.  Vaiiili  In- 
novitch,  ii8-x3i;   i533-i584,  le  G.  P. 
Jean  IV,  aumoane  le  Terrible,  x3s-iSi: 
s584*k598,  Fiodor  Iranontdi,  i5x-i67; 
x6o5,Fc!odar  Roriasorilcb*  X67-176;  1606^ 
t6ia,  Tasiili  Sebouiski,  x7G>x85i  i6i3- 
§6\S,  Micbel  EooMBof,  xI4ki87i  i^^i- 
1676,   Aieiia  JMIkbaelovilch,    xJt^-H)}; 
1676-1681,  Feodor  Aleaaiavilcb,  X9^i9^i 
i68a*i7iS,  Piem  !«  at  iwn  V  AleKoe- 
vildb,  195^49;  x7i^i7af,€atkaiBeP*, 
Akaeioffna,  aii^Sa;  1 787-1 73o,PieneU, 
Alexei^itcb,  fSa-ftSy;  x73a-x74o»  Aane 
XvaMnna,  aS^^i;  i74p-i74x,I^^'^ 
r^genoe  de  Biren,  i6x,  16a;  174^1  regeoce 
dak  grandfr-dttDbeMe  Asne-ctdu  ipriacede 

Bninswiek,  i6a*a65;  I74xrt76i,  |!Im>^'^ 
fteovna,  a65-i7a(  PieiM  IQ  fM^ 
ritcb,  a73-i6n;  i76i-x996,  GalbcnBeli, 

iii-S64;  1796-X80X,  Paul  I'',  S8^4i'i 
x8oi-x8i5,  Alexandre  !•'.  4ii-5a9;  '*•** 
Nicolas  JT,  Sa944«.— Grande  Rasiie,  40 
a— 5i  b;  Petite-Rusaie,  Si  b-53i>;  Kitf- 
sic meridionale,  53  b  — 55a;  Riunaacn- 
dentala,  55  a^S6  b;  Rnmie  oricntsle,  56 
b— 6x  a;  AaiMDraenMia,^!  a;fmTina* 

aaacasieoaeSf  6t  b-^  63  b» 


8aint-P(tersboarg'(gouvememem  et  ville 
de);  yue  magnifique  de  la  Neva;  six  palaii 
imperianx;  sur  sa  rire  gandie  est  la  plus 
belle  paftie  de  la  ville;  irois  lies  comprises 
dans  son  enceinte;  grand  nomlwe  de  beaux 
ol  vastes  edifices;  statue  c(|ucstre  de 
Pierre  r';  vigilance  de  sa  police,  41  a  —  44 


1;  snperfide  et  popnlBtion  de  ce  gMYtfo^- 
nent,  44  a,  b;  inondation  en  i824t  5ri  •• 


a 

ment, 

b  ry.  Pierre  P^. 

Salines,  anex  prodnciive  i  *|!!"u 
Roussa,  piris  du  lac  Ilmen,  4^  a;  dans  i' 
gmivemement  de  Vologda,  5o  a;  iresfw- 
ductivet  a  Perm,  57  a. 


COfffBmiES  DAM  LA  EUSSiE. 


€6T 


dim  I'MMKblM  MOfoqiiM  4  if  ticmi  f» 
Ciilieniie  11%  J«7  k 
SMgHini»  iMobrewi  talr  kt  b«r^  de  la 

fiMyiwme,  9  a. 
Sualdft  ehef-liM  dn  gouvvrseoMM  dt  ^ 
MB  que  trsMTw  le  YoUmi  <t'un  eAt6  <U 
fleu¥c,  pwidc  lartilMt  da  rinilM,  4aadat 

Scttlptarti  Mica  itaittgi  da  Marios, 
iUM»  44  a;  aMNHMieiiC  dA  k  T<ir«aUaett« 
d  d«iW  ik  la  maaiatre  ik  pmea  tfonia* 
lewki  (dtovt  par  let  R«aMl) ,  66  a. 

Scychat,  doBt  f  iM^iniiM  am  klHMiraiilni; 
kun  migrations,  67  a. 

Sqrlliie,  «  ^udlat  eauirees  aa  booft  ctait 
dooae  ipar  las  Gradi ,  67  k» 

Setioga  (la),  riviere  qui  sa  jatta  dans  la 
Ik  Buu1»  i«  li;  ^diaienteia  par  iia  )ae  tie 
M«|olae,  ic  a. 

S^ar  (k.  d«)  a  feumi  qaalqiies  astKiils, 
ai3b;ax9b;  a4o  b  —  »4<  b|  a44b{a46 

*►♦  «47  «• 

Seoat,  sa  composition,  ses  altribulions, 
rfpreseotation  du  couverain  dans  cbacun  da 
Ml  boit  departemaots,  a6  b  —  27  a;  siege, 
pvtie  a  PeterdNMUf,  parlss  4  Ataeoa^ 
374, 

Serb,  daiaa  qui  eon^pose  au  moiiis  les 
Qcsf  diiiemas  de  la  populalioa,  rcnferaM 
Itt  elements  d*uDe  orgaaiaatian  ▼igounaae; 
jaaqa'a  (rbeat  g^e  aeulement  dimitalion , 
3 1  b,  3i  a:  defiiuts  attaches  k  sa  aaodi^ 
UoQ|  ik;  bar  eaoaucipation  seide  (poar  fa- 
qneOe  fiea  n^cst  prepare)  pourra  procairer 
i  li  Aosse  on  rai^  elev^  parmi  les<BatioBa« 
i^M3a  b. 

Siberia.  EUe  pent  a'ciever  ua  jour  k  one 
gmide  paistancy »  9  a ;  fourail  das  our* 
l^»  19  a ;  aouffe  at  pcHrole  dans  ses  r»« 
poai  aonlagnrnaps ,  ao  a ;  etendua,  popu- 
blioa ,  Buaes  ,  eukure  ,  vkles  prioctpaus » 
pbeoooicnas,  58  b  —  6<  a;  gouverneiDenl 
priaitif  de  cette  conlree,  comment  las 
llttttcs  J  iiraiit  lenrs  premiers  etablisie- 
iBCDls,  x48  b  —  j5o  a{  de.noaveUes  villas 
sycleTem,  x6o  a,  b. 

Simbink ,  aur  la  nve  droile  da  Volga  et 
^  la  Sviaga,  ckef-lieada  aeuvemement  du 
i^^Be  Bom ;  sol  assez  fertile ;  prodtiit  prin* 
<>fal :  les  beitiaux  et  la  pdche,  Sfj  b, 

Sioieon  Ivanovilobt  sumeoune  le  ^u* 
/^^  (i34o-i353),  achate  du  lUaan  des  Ta- 
^  riovestitore  de  Ja  grande  principauti ; 
^  HIT  Novgorod  des  impositions  arbi- 
^ro;  les  viAes  de  Pskof  et  de  Novgorod 
s  nniisent  contre  les  AUemands ,  qui  essuient 
aae  dc£9ita  saaglautej  Olgerd,  prince  de 


■liUiiMAiia  I  aacrifie  a  son  nssenlilBciit  Eiiiia- 
die,  un  des  BDagialrala  «ia  Nov^DPod ;  Ala- 

JBua,  roi  da  SnodOt  vent  imposar  k  eboix 
'nae  religion  aux  Novgoradtens,  oni  bat* 
4ant  las  Suedois  et  penetrant  dans  Ja  Nor* 
wc(ga;  k  khan  livn  a  Simeon  le  frara  d'OI* 
genl  et  las  anbaasadeurs  lithnaniens,  qui 
aa«t  auanite  lenvoyes  moy^Mnal  nn^an; 
aavagas  da  k  pasta  ttoiM^  qui  cnkve,  k  ca 
que  Ton  oroii ,  k  grand  prfawe,  ses  deax  fils 
et  son  firere  Andre :  Simean  atait  pris  le  pnh* 
aUar  k  liti«  da  grand  pHaoe  do  ftanlea  les 
RUBsks,  ixa  b—  1x4  a. 

Simpberopol,  chaf4iea  da  gouvamement 
da  Tanride ,  54  a ,  b ,  55  lu 

SirT'Daria  des  Bookbares  (kxartc  <des  an- 
cians) ,  rvrikn  ifai  sa  Jetladaiisk  kc  d'Aral , 
za  a. 

Skves,  om  souvent  inqaiM  kfiaa«Em« 

ri en  deaefUftdaail  le Dmapr,  x5  a;  etendiie 
leur  a^onr  primitif ,  epoqoa  de  kura 
pmnieres  incursions  coalre  Tempire  ro- 
main;  migrations  et  tribus  diverges,  ib. ; 
traits  principaux  de  leur  physionomie;  qiiet- 
que  culture  des  arts  ;  nature  du  gouverne* 
mant,  tilres  da  dignites,  cer^raank  du 
sacra,  inOuence  do  chrislianisme  aur  ia 
transmission  do  powveir,  formes  et  objrts 
du  Gulte;  langue  et'ses  dialectes,  de  qui 
ppobablemaBt  ils  out  re^u  rccriiure,  6i  a 
—  74  hs  livras  aacras  traduils  du  grac  en 
slavon,  S5a» 

Skv»-Ruasea,  a  queUe  ^poqna  ils  exialaot 
comma  nation ,  69  a. 

Smolensk ,  eheAku  du  gouvtBuement  de 
ce  nom ;  a  sootenu  des  sieges  celebres^  47 
b.)  atandna*  popukiiaa,  exportation  de 
grains,  bois  de  vonslruotion ,  in.  et  48  a. 

Soufre,  foumi  par  les  firovinoes  do  midi^ 
AO  a ;  sa  treuve  auasi  dans  ks  ragkns  nson- 
tagneuses  de  k  Siberie ,  ib. 

Sottvorof,  idee  de  son  geme  at  de  ses 
moyans,  339  a ,  b;  ses  campagaes  an  Suisse 
el  en  ItaUe,  391  b  et  suiv. 

Stanislas,  roi  de  Pologne,  ranonce  a  ses 
pretentiona ,  at  gouvcsme  les  ducbes  de  Bar 
et  de  XoiTaina ,  a58  h, 

Suisse  rusM;  nom  donna  «u  Voldai  a 
causa  des  montkuka.,  qai  en  rendent  I'aspect 
moiiu  uaiConaa  que  aelni  de  la  pkipart  dea 
autres  contrees,  5  b«  49  a. 

SupentitioB ,  regne«  et  est  anfrelenne  par 
un  grand  nombra  da  sectcs  t  34  b ;  suite  du 
defaut  de  lumieres ,  100  b ;  on  croit  k  fin 
du  monde  imminenta>,  laa  -a;  exorcismea 
employas  par  les  Rnssas  dans-un  ai^«  i36 
b;  Jean  IV  cat  effraye  de  Tapparilion  d'ona 
coaaiote,  ib.,  x5ob. 


TABLE  DES  UATliRES 


SviaMipoHi  (lotS-toig),  aevca  de  Vla- 
dimir, M  Alt  pracbniMr  loinraniii  apres  la 
moat  de  son  oode;  fait  aatasstner  Uois  de 
Mi  freras;  Yarotlaf ,  ua  de  act  frovs,  prinoa 
de  NoYgorod ,  narohe  oontre  lui  et  le  foree 
h  la  fttite ;  Sviatopoik ,  leooara  par  Bolea- 
las ,  ion  beau-pere ,  rentre  Taiuqueor  dans 
Kief;  mais  bientdt,  dereau  enneati  de  Bo- 
leslas,  par  qui  il  est  battu,  il  est  de  nouvean 
defait  par  Taroslaf ,  et  neurt  dans  les  d^ 
serfs  de  la  BoMne,  83  a  —  84  a. 

Sviaiopolk  (1093)  re^it  le  Ir6ne  de  Via* 
diinir,  aui  part  pour  Tchemigof ;  il  Aut 
arrftter  In  anUMMsadetira  des  Polovisi ;  ba- 
taille  contre  oes  peuples,  qui  taiJlent  en 
pieces  rarmee  nisse,  et  font,  poar  Oleg,  le 
siege  de  Tchemigof;  nalheors  de  ce  regne ; 
les  PoloTtsi  sont  battus  par  les  Russes  rea- 
ms, 86  b — 87  a. 

Sviatoslaf  (94^^979),  fib  d'Igor,  s'^leve 
sous  la  regence  d*Olga,  sa  mere :  elle  tire 
des  Urevlieus  une  vengeance  cruelle;  elle 


embrasse  le  dnistiaBisnie ;  eiploits  d  eon- 
qn^es  de  Sviatoslaf;  il  asugne  k  ebaea  de 
ses  trois  fils  des  apanages  particnlien;  par-> 
fient,  apres  une  bataiUe  hwgteBips  doolettie 
oonire  les  Petchenegves,  k  s'enparer  de  la 
Itolgarie ;  anr^  une  lutte  adiame  eontre 
les  Grecs ,  il  sobit  les  conditions  dn  tivie 
ioMKW^  par  Zimisces;  ilperitdans  une  bn> 
taille  contre  les  Petchinflgiies ,  77  b,  80  a. 

Sviatoslaf  Ys^dodoviteh  (ia47-t«63) 
sucoide  i  son  ftere,  dont  les  fils  ic^>ftm 
des  apanages  particniiers :  le  khan  dies  IV 
tars  donne  a  ran  Kief,  k  rantre  Vlndioiir; 
Sviatoslaf  ridame  inutilement;  meort  dena 
ans  apres,  io5a. 

Svir,  rivi^  qui  joint  I^Onega  et  le  La- 
doga ,  i3  b ;  ckantiers  de  constmction  aur 
ses  bords,  ibid. 

Syaode  (le  saint),  a  loi  seal  ■riiiortiiiml 
les  affairesecd^iastiqoes ;  nominatioiia  fiotes 

rir  le  tsar :  siege  dans  les  deux  capitales,  a€ 
,  27  a.  V.  Clerg^ 


Taganrok ,  ville  ou  est  mort  rempereur 
Alexandre ,  54  b. 

Tilleyrand  (M.  de)*:  une  note  hii  est  adres- 
s^  sur  reolevrment  d'Etfeoheim,  410  a; 
r^ponse  qu^il  est  charge  d*y  faire,  4ix  a; 
represente  la  France  au  oongres  de  Yienne , 
489  a ;  viies  de  ce  diplomate  daus  sa  con- 
clusion du  traits  de  la  quadruple  alliance , 
6a4a. 

Taman,  ile  formee  par  deux  bras  du 
Kouban,  14  b. 

Tambof,  chef-lieu  du  gouvemement  de 
ce  nom ;  pays  surtout  agricole ;  eaux  ndn^ 
rales,  eCendne,  population,  5i  b. 

Tamerlan,  son  invasion,  sa  marche,  sa 
relraite,  1x7  b,  118  a. 

Tatars,  forment  le  tiers  de  la  population 
du  gouvemement  de  Riasan ,  y  font  le  com- 
merce avec  I'Asie,  5i  b;  andenne residence 
de  leurs  souverains,  ib. ;  deux  de  leurs  ca- 
pitales et  un  grand  nombre  de  leurs  peu- 
tilades  font  parlic  de  la  Russia  orientde,  56 
»;  Tatarie  mdependante,  sera  bient6t  lout 
euttcre  soomise  a  la  Russie;  nation  des  Kir* 
guiles,  se  compose  de  trois  hordes;  princi- 
pale  richesse  de  ces  peuples,  61  a,  b; 
ravages  et  domination  des  Mongols  sous 
Oeoehis-Khan  et  ses  suoeesseurs,  100  b  — 
ia4  o. 

Tatan-Nogais ,  de  qui  ils  prirent  re  nom , 
io6a;  expedition  malheureuse  de  deux  chefs 
talars  centre  les  Hon^rois,  1 08  b;  horde  de 
Ci'imce  fidelc  aux  Lithuanicns,  redoutaMe 


aux  Russes ,  xax  b;  le  tsar  de  Kasan  est  de- 
tr6ni  et  amene  captif  i  Mosoou,  xaS  a;  ies 
Tatars  du  Kouban  sont  sooniis  k  In  domi- 
nation msse,  s59  b;  details  sur  reducalim 
des  enfints  tatars  sous  rempereur  nctnel 
(Nieoks  1*),  638  a,  b. 

Tdicglokof  forme  le  projet  d'asanaaiMr 
Catherine  11 ,  109  a. 

Tcherkask  (le  nouvean  et  le  vieox),  den 
capitales  du  gouvemement  des  Cosaques  du 
Don;  vers  le  nord  se  tient  une  foire  an- 
nudle,  55  a. 

Tchemigof,  chef-lieu  du  goovemaiMni 
de  ce  nom ;  theAire  de  luttes  et  de  calami- 
ty,  53  b ;  population  moyenne ,  5*  b. 

Tchouktchi ,  peuples  dont  le  pays ,  sitae 
entre  le  golfe  d*Okhotsk  et  la  mer  Gteriale, 
est  iravers^  par  des  fleuves  presqoe  toujoon 
charges  de  gla^ons ,  xo  a. 

Territoire,  sa  division ;  quatorze  gonvpr- 
nements  gen^ux  subdivises  en  dnqaanle 
goovernements  reguliers,  27  b,  a8  a. 

Thamas-Kouli-Khan  fiut  dennnder  h 
main  de  la  grandedncbesse  Anne,  rigente, 
963  a;  la  Russie  lui  abandonne  les  eonqa^es 
qu'cUe  a  faites  sur  la  Pene,  358  b. 

Tobolsk,  ville  et  gouvemement  en  Sibe- 
rte,  chef-lieu  ecarti  de  la  prindpale  ligne 
des  communications,  59  b,  60  a,  b. 

Tolstoy,  histoire  du  comte  Paskevitdi 
d*^rivan,  dte  p.  544  a,  545  a  —  546  a, 
546  b,  547  b— 548  b. 

T<»m5k ,  sur  le  Tom ,  chefJieu  dn  gosTcr* 


CONTENimS  DANS  LA  RtJSSIE. 


609 


netnent  de  oe  iU>m ;  grattdet  nchetses  min^ 
rales ,  60  a ,  b. 

Tomeo  (le),  fleuve  <|iii  lert  de  limttc 
mtre  la  Russie  et  la  Suede;  utile  pour  1e 
rommeroe  enire  les  lapons  et  Ves  Fi&ois, 

14  b. 

Tonreo,  petite  viUe  ntuee  sor  ce  flenve, 
cplebre  par  les  operations  qui  B*y  sent  faitei 
poiir  la  mesure  d*nD  meridien  lerrestre, 
45  b. 

Toola,  sur  I'Oupa,  chef-Keu  do  gouver- 
nement  de  oe  nom;  pays  fertile »  manufac- 
lure  d'armes,  Industrie  variee,  surtoul  dans 
la  capitate;  mines  de  fer;  indices  de  char- 
bon  de  terre;  ^tendue,  population,  5x  b, 
5a  a. 

Toungouska,  peuplade  mdigtoe  dont  le 


Horn  a  el^  donne  par  les  Russes  a  trois 
fleuves  doot  elle  parcourt  les  bords  avec  sea 
troupeaux ,  et  qui  se  jettent  dans  le  li6nissei , 
f  I  a,  b. 

TVtbunaux,  leur  ornnisation ,  98  a. 

Turquie.  Elle  attend  le  joag  de  la  Russie, 
I  b;  Turcs,  dans  leurs  premiers  temps, 
68  a,  b  (V.  prindpalement  Pierre  I*,  Ca- 
therine II ,  Alexandre  I*  et  Nicolas  IT). 

Tver,  eheMieu  du  gouvememeut  de  oa 
nom ;  baign^  par  le  Tolga  et  deux  rivieres; 
mention  particuliere  de  plusieurs  villes  de 
ce  gouvemement;  grande  route  de  Moscou 
k  Petersbourg;  etendoe,  population;  eaux 
minerales,  48  b;  bois  de  construction  eC 
leur  mise  en  ceuvre;  navigation  anim^ ,  ib. 

Tyras  (le)  des  annens.  V.  Dniestr. 


u 

Usbeck ,  grand  khan,  permet  le  soppliee     vention ,  109  b;  refle  en  souverain  I'^tat  dei 
do  grand  pnnoe  Midid  stir  une  simple  pr6-     princes  nisaes;  sa  mort,  ib. '—  i  la  b. 


Vabdue,  se  constitua  en  principauti^ , 
114  b. 

Vari^oes,  peoples  sortis  de  la  Baltique : 
iroia  fireres  Yariegues  re^ivent  le  souverain 
pouvoir  de  plmieurs  peuplea  slaves  et  don- 
nent  k  nom  de  Russie  au  pays  qui  reoon- 
niiit  leur  domiaatiop ,  70  b ;  qnelqueMins 
vonl  assizer  Constantinople,  75  a. 

▼anovie ,  sur  la  rive  droite  de  la  Viitule , 
chef-lieu  de  la  voievodie  de  Maiovie;  un 
de  sea  fniboiirp  sor  la  rive  droite,  les  hiiii 
antres  sw  la  nve opposee ;  population;  fau- 
bourg de  Praga  pris  d'assaut  et  rase  en 
1794 ;  aspect  genial ;  palais  et  monuments 
(dont  Tun  tieve  k  la  gloira  de  Copemic); 
bibliotheques  aneiennemeot  existantes,  la- 
zaret digne  d*admiration;  promenades^  pliF 
sieurs  ^gtises  remarouables ;  monument  des- 
tine k  la  m^moire  au  prinee  Poniatowski ; 
faiblesse  de  I'assiette  de  hi  ville ,  65  b  —  66 
b ;  bataille  et  capitulation  de  Yarsovie  en 
x8Si ,  588  b;  Nieohu  I*  y  fnt  dever  un 
notinment  des  pieces  de  canon  reprises  en 
1896  k  Varna  par  les  Kusaea,  et  qui  avaient 
ete  prises  sur  les  Polonais  en  1444 ,  an  siege 
de  cetle  -ville ,  640  b. 

Yassili  Dmitri^itch  (1389- 14a 5)  ^  ^^' 
Tounk  grand  pnnce  par  Tambassadeur  de  la 
hoi^e,  et  obtient  au  khan  b  reunion  de 
quelques  provinces  k  la  grande  principaht^; 
par  quel  motif;  reunit  k  Tapmiage  de  Mos" 
eou  la  principaute  de  Sooxdal ;  impose  sea 
volont^  ii   Novgorod;  Tamerlan  pMftre 


dans  lea  provinces  sud-est;  Vasaili  a^apprlte 
a  la  r^istance ;  Tamerlan  change  de  diree- 
tion ,  prend  Azof,  ruine  Astrakhan  et  re» 
toume  vers  ses  frontieres :  YasstU  fixe  avee 
Yitovte,  prince  des  Lidinaniens,  dont  il 
avait  ipous^  hi  fille,  les  limites  des  deux 
empires,  et  s'oceupe  avee  lui  des  moyens 
de  s*opp08er  aux  Mongols:  ne  prend  point 
part  aux  vastes  projets  de  Yitovte,  qui  en 
vieut  aux  mains  avee  Tarmte  de  Tamerlan; 
defaite  de  Tarmee  lithuanienne;  inimili^ 
entre  Yassili  et  Yitovte  qui  fixent  la  limile 
de  leurs  ^tats ;  ^ig^,  general  de  Tamer- 
lan, marche  sur  Moscou,  et,  apres  Tavoir 
rUuite  k  la  demiere  extremite,  se  retire; 
mort  de  Yassili  k  PAge  de  cinquante-lfois 
ans,  1x7  b —  119  b. 

Yassili  Ivanovitch  (x5o5-z553),  grand 
prince ,  fiiit  enfermer  son  neveu  qui  meurt 
quelciues  aimees  apres;  Makhmet-Amin , 
tsar  ae  Kazan,  obtient  d*abord  un  avantage 
oonire  les  Rosses,  puis  se  reoonaait  vassal 
de  la  Russie;  par  suite  de  ses  pr^entaona  anr 
la  Pologne,  le  grand  prince  engage  oontre 
Sigismond  une  guerre  dont  I'issoe  fut  en 
favenr  de  oe  dernier,  laS  a,  b;  il  eonelul 
un  traite  de  palx  avee  la  Livonie ;  obbge  la 
viHe  de  MLof  a  renoncer  k  son  oonseir  na- 
tional et  a  ses  antres  institutions;  Sigismond 
d^tache  deTalliance  do  grand  prfinoe  la  khan 
de  Grimte;  s*ensiiit  une  goerie  dans  la* 
qtielle  les  Russes  sont  di&laitB;  Yassili  re^ 
couvre  eniin  Smolensk,  taS  b— fa9  b( 


670 


TABLE  DES  MATitHES 


▼ictaire  edataBte  des  TJthtianifnt,  mm  ^ 
ne  |)«uveat  recotiyrer  SinQl«ii3k;  In  IUmm 
MaJ^iuuet  le  j«Ue  sur  la  ^gjAie  meridio^alii 
av«c  Eastache  Dacbkovitch,   Litbuaiiieii, 

Eais  freod  les  ioter^ts  de  VaasUi  «(  devaste 
^  Lithuania;  contiaiiaiian  4a  la  giiarre; 
les  circoiistaoces  redaTieoaant  fav^tablas  % 
la  Lilhuanie;  la  Kiusie  est  altaqoee  par  laa 
Taiirieas,  le»  Talan»  let  Gxsaques,  le>  Ka- 
zanais ;  le  erand  prince  se  reronnait  tribu- 
taire  du  iLoaii « 129  b  —  x3o  b ;  U^ve  d^ 
ctQq  aus  avec  Sigixmond ,  traita  da  paisi  pour 
dix  aB9  avec  Tordre  de  Livonie;  lAJiutice 
criaote  contre  Yassili  Cheinyakia;  eKP^i- 
tiou  joalheureuBe  cQotre  Kaian  racwtee; 
tr^e  tuiiie  d-une  prohihiUoa  miiaibie  an 
commeFoe  rii^e;  relatioos  oavcrtat  avec 
Charle»<2uiut;  trevede  soixante  ans  aVec  Gu9- 
lave  Vasa;  iucursion  desaslreuse  du  khan  da 
Crimee;  Vatsili  deaigne  pour  auooesaeur  son 
fjUs  Jean,  k^  da  trois  aaa,  x3u  h< —  i3a  «• 
TassiU  Saiouiski  (i6o6-x6iay,  sahw  U^r 
par  le  conseil,  prononce  un  serment  pen 
agreable  aux  grands;  est  couronne  sans 
pompe;  fait  exnumer  at  exposer  publique- 
nent  ks  rcates  du  jaime  Dniari;  garda 
Goiniiie  otagaa  Maiiaa,  son  pm  et  qnabinea 
autraa  digoitairas;  n'aecuaiHa  qu'avec  i»- 
serve  les  oflres  de  la  Suade;  una  aoinraUo 
iasurrection,  at  cnoare  soiia  la  nan  da 
Daaitrit  repr^senla  par  le  aasaqiia  Ileilw, 
aniena  les  raballea  sous  leaauua  de  Masoadi 
kilte  prdongaa  avec  des  suaces  divers;  la 
tsar  fait  faire  qiiakfuas  exacvlions;  la  parti 
du  fuix  Dmitri  ae  ranima,  ranfotce  fMir  les 
Pokoais ,  par  fiapieha  et  par  Marine;  haUa 
de£eBse  du  inonaatera  da  SainliSerge  pour 
le  tsar;  Sigianand  raeemaenoa  la  gnatra; 
le  prinoB  Pqjaraki  etbtiaal  fnekfttti  suceaa 
paur  le  parii  nalional ;  Je  liua  Dmitri  vaiit 
sVnftarcr  de  Moaeoa;  il  ast  battu;  Sokopia 
Schouiski,  liberateur  da  Moscau,  meiirt 
anpoisqaai;  uu  parti  uational  aaut  alire  un 
souvarain^anaoBoa  k  TassiU  Scbouiski  aa 
dachcanea*  47^  a  —  i8a  ai  caCra  {ilusiawrt 
prataudaQls,  YladiiJas.,  fila  da  Sigisnend, 
est  salii6  Isart  coaibat  saagUat  k  Moaeoii 
aotoa  lea  Ruaaes  at  las  PoloMis,  qui  inoen- 
dient  la  vilie;  Yasstli  manrt  pnsomiiar  de 
Sigisaoad « 4(ui  a'anpara  da  Smolaaak;  Po- 
Janki  ec  Miniii»  a  la  tMa  du  parti  national, 
fiareant  Sigiaaaond  4  la  retraita  at  las  Mo* 
nais  a  una  «apitolalioB;  las  teta  eUsant 
liiokMl ,  fila  da  Pbilarcta,  18a  a^  186  k 
Tasaili  TasaiUMtoh  I'avaagia  ( «4n^ 
146a)':  la  horda  dMdean  sa  favanr  contra 
son  onalaYaun^  qui*  apraa  a'tea  anpar^ 
deux  ftia  de  Moacott,  wmrt  at  laitaapat- 


aiWe  pQiaasaanr  aoa  aei^ti  aaoav^  ti^*jiwncj, 
niais  cruel  neanmoins  contre  pn  de  •e^coii* 
sips :  ralnsa  an  asila  a  m  khin  exile  qui 
s^en^pare  da  I'ainidaeQipant  da  k'anaeane 
viHa  4i^  %umt  y  etUve  <hi  w^mbrevx  Mu- 
tants, et  marche  contre  Moscou;  Tissili 
pvead  la  foite ;  ea  khan  s'emivwe  enmiie  de 
Nijni  No^jforod  at  marclMS  mr  Movrom; 
TassiU  le  toroa  k  «e  raiirer ;  Taon^e  sqi- 
vante ,  combat  ineeal  dans  lequel  TassiU  eft 
frit  prisonnieF ;  Ctonyaka  lut,  avec  la  kban, 
un  lrait4  paar  dapoasader  TassUi ,  il  le  fait 
m^e  ealaver  oar  auiprua  et  lui  (Wt  crever 
les  jreiu ;  forea  cependant  de  hit  lendre  la 
liberte ,  il  lui  doone  la  viUe  de  Vologda; 
Tassili  aveugle  renlre  souveram  dans  Mot* 
oan,  danoa  la  tiira  de  grand  prinaa  k  too 
jeune  fils ;  Chemyaka  recommence  les  hos- 
tilitea,  est  baRii  et  tnenrt  empoisonne  i 
Novgorod;  Tassili  soumet  a  son  poirroir 
totts  IcaapioaM » excapli  Tvar ;  |1  M§m 
son  fils  i»k  beritier  de  la  gnnde  priad- 
paute,  119  b —  laca. 

Tassili  Taroshiviteh  (1372-1376),  gread 
prince  et  souveratn  de  Novgorod ;  se  joist 
ans  Bf  ogob  prto  a  nMHahcr  contre  ka  li- 
thnanieos;  meurt  regrette  des  princes  «t  du 
pa«^e,u>9,a. 

Tegteion :  aa  pcodigiewsa  rapidile  daai 
ksrrgioBaaaptflBtrianalQi.  ab^admiraUB 
sat  las  bards  de  la  nMr  GaspiaMa,  ya, 
at  anr  ka  flanc*  et  au  paod  daa  vaatagno 
du  sud,  6  a* 

Taivie,  eat  4  k  liana  da  W9»fMa9  pok/b^ 
cinqadii-bnit»6a. 

Tiatka  t  abef-liaw  du  faovwnamant  de  m 
ao«»;jnuMa»  £o)r|«i,  hafU Iret lakaodinti 

Tibourg  I  coummevieot  ranai  4H  ff9a^ 
dncbe  da  f  inUnda.  i$  b. 

TilM»  dbof-Jiflii  da  goavcfiianMat  de  » 
nom »  rianarqwahla  aar  aoa  wmanit^  1 1^ 
£ar«ia  aaa  aMsqaaa  at  4as  eglue*  ^ 
loutea  laa  ooviaMiaiQna  chr^Aieaaes,  55  b; 
fioadee  par  Qadiaiia  ^i  7  fixasa  laad^w*' 
ma. 

Tiatnla  (la) ,  qoeto  pcMB^faieil  en  ^n 
lea  oown«aiaati«aa»  14  a. 

Titepaky  anr  k  Dwiaa .  abr^4iaa  da  goa- 
vetnaaicnt  de  oa  aoaii  agFicithvie  ^^^^ 
sante ;  bois  de  eonstmctioa  ed  4efll>Myeat* « 
56a. 

Tkdiaiir,  dbaf4ieu  dn  fouveroMeat  de 
ae  noMitwl  fertile*  biea  aaltivi;  »k** 
Mtiers,  surtout  pomipiers  at  pnaiani 
^taqdua  et  popuktion;  fasiges  trts-ooo«ids- 
lablc*,  ^i  a;  a  qiwtte  apoqaa k  villa  daviol 
k  eapiftiik  da  k  ftuasia,  ^3  b. 


COHTEHUES  DANS  LA  EUSUE. 


67» 


VJidiMr<98**«aU>,  m  Un%  m  eulli 
da  idold  d  ]b  TaMOur  det  leaumt;  ftmiA 
phuHun  vfllcs  ffML  Slaves  Bolootta,  Boa»e 
M  cooqu^tet  Juaqu'au  gm  cU  Finlnde; 
ii  iowofe  k  MS  dieu  deuk  YarMgiMs;  nu- 
Mt  tes  Radinitches  rabdks,  d^itit  les 
Baigsres  orienlaox,  el  les  peoples  i|«i  per* 
teat  des  U»iL  Apres  t^Hn  atoporide  kW 
MB,  it  embrasse  la  christianiaaae,  oondiliaii 
fMi  lafudle  ies  enpereors  BasUe  et  Gaos* 
Uatia  Itti  dooneiit  en  nariage  k  prkicesae 
Aaae,  leur  soetir;  hit  eooMruire  pliiaiettra 
cfliset,  efdoone  an  peiiple  de  se  taire  bapli- 
Kr;  foode  des  ecc^;  parlage  ses  ^taia 
caire  pluriears  desas  fils ;  aoiivelles  gunTas 
coolie  las  Crovates  ct  les  Peicbei^guas; 
revolte  d'vtt  de  sas  fils ;  mort  de  Tladioiir 
iiis  SBcoesseur  desifii^;  jusqu'ii  quel  pouil 
it  s  aoite  le  •Dmom  die  Gtrama,  9oh  — 
13  a. 

\Iadiaiir  Monomaque  (itiS-iiaS^  ae- 
eqte  le  tr4«e  que  lui  ommi  ka  XlevMOs ; 
se  fib  sa  signaieBt,  ainsi  que  lui,  par  daa 
es(ieditions  ecmtie  des  peuples  enaonis ;  il 
porie  ica  amea  ceniie  Audriooplei  Aleiua 
Cosueoe,  par  ton  eftvaye  Neophjrte,  k  pr» 
duaeeesar  oQ  tsar  deRiissie;feniieleuiii« 
dwi  ki  a  U  doooeiir;  son  neven  Taroskf^ 
H«  vsat  Kpr«adre  k  viUe  de  Vkdiaair,  pe- 
ril daos  Qoe  eoabuacade;  piM»  sa^asse  d« 
V.  UkasMaque,  S7a,  «$a. 

^•Im  cMdiie  de  sou  eoura;  can  inaai* 
bdn  daai sa  parlie  sup^rieure;  M^oit  par 
k  JUns  les  produiU  de  k  Sibcrie,  la  b( 
KaMiie  k  att  irane  doot  ks  branehes  oaot* 
■wmiqeciit  k  tnh  ntn^  14  a;  vomtBeiMa 
«teiiavi9dblaiiRjer,48b. 

Viikgfkv  chtf-lieu  du  fouvcraemaal  de 
oe  Dom;  sdl  couTert  en  grande  partie  par 
^  lass,  daa  forils  et  d^  asarecaglw;  bois 
^  coBstradiaii,  goudfOA*  oiielqiiaf  four* 
>wtt;  miaas  de  feri  satinea,  2k>  a. 

Vabaire,  m  n^  daa  dpowieilk  d*£liifr- 
betb  Pelrovna,  279  b. 

Vorooeje ,  chef-lieu  du  gotnremenient  de 
ce  nom;  itendue;  popuktion  qui  ue  repond 
pit  ak  fertility  du  sol,  5a  b. 


VsAfkdy  uii  des  fib  de  Yanidaf,  est 
baita  per  Mai,  prioea  dea  Poloytsi  qui, 
apres  s*4lra  eapam  d'une  pasiie  des  <j^lca 
de  k  flier  Moira,  avaicBt  foodu  sur  k  Ri»- 
sie,  85b,  85  a;  de  X078  k  logS  suocede  4 
soa  Mn  Tsiariaf;  isivasiea  das  Bulgtfea 
dans  les  terres  de  Slouroiii;  pesle  et  kasiae 
qui  farorisent  les  brigaadago  des  Pelovtsi , 
86  b. 

Ts£vDlod«Ol9o^riteh  (cid^-si^^),  aVns- 
pare  k  maia  amea  de  la  soavendnei^  k 
Kief;  fail  k  paix  avee  ks  fik  de  Mononaque 
■u*il  emit  voalu  depouiHer;  ks  No«goro« 
dieas  soat  en  preie  k  ranarehie;  il  profile 
des  dissensions  de  la  Potogne  pour  k  devas* 
ter;  persuade  a  idusktirs  princes  de  s*unir 
k  Itti  eoBire  YkJiniirko,  souvarata  de  Ga* 
litcb ;  il  k  Hsduit  k  ane  nosilion  critkpie  tt 
hii  acoeide  k  pais;  il  rennit  ks  princes  et 
kur  d^igne  Iger  poor  sea  snccesscur;  Igor 
ealra  ea  Pelegae  poor  soutenir  Ykdiska 
SOB  bean-frere,  qui  y  seaovtre  qiiatre 
viUes:  Ytsna  est  eraee  a  la  Russia;  vsevo> 
kd  est  obligis  de  kwr  le  viege  da  Zeinigo^ 
■od  defrndue  par  k  vdkoreux  voievode 
Jean;  sa  aort  an  milieu  de  aaaveaax  pra- 
paradlide  guerre,  S^a,  h. 

Vsevold  in  (ic76*iBia),  irioainlie  de 
sea  Heveu  listiskf,  quibiealot  aprcs  pent 
airee  k  ptUMse  de  RiasBaa :  ftvkteskf ,  reoon- 
eflie  avee  Vs^olod»  regoe  k  Kief;  Yserokd 
eatra  daas  le  pays  dai  Rulgaies;  revolle 
des  liihuaniens ,  guerre  centre  les  Polovlsl ; 
sa  poUHque  nour  trrvrer  k  Vuake  monar- 
cbique;  il  rMutt  les  Novgoiadiens  4  acoep* 
ter  pour  piinte  son  jeune  fib ;  puis  k  rem- 
pkoB  par  acai  fik  Ceastantia,  ]dus  Igc; 
marche  veta  Mosoeu,  i^eatpare  des  bieae 
des  prinses  de  Riasan;  declare  libres  les 
Novgorodiens,  puis  kur  impose  de  nousreaa 
soa  jeuae  fik  Svktoskf ;  designe  pour  soft 
suooasaeur  son  fik  QoastaatiB  qui  bii  d^ae* 
beit;  pour  le  punir,  il  laisse  aa  couronne  k 
aa  autre  de  aes  fik,  aoataae  Geoiges;  fi)u- 
datiaade  Feidrodaaehaialian  pQrte*gliuve , 
94  b — 9*7  a. 


Taik,  aacwB  nom  du  fleuve  Oural ,  cause 
de  ee  cbangement  de  d^omination ,  xa  b , 
34xK 

Tak  (F)  on  bceuf  grognanl,  manque  en- 
core k  I'Europe,  17  b. 

Takoutsk,  province  de  k  Siberie;  ror- 
pnaation  n*en  est  pas  arrfttfe,  60  b. 

Taropoik  (972-980) ,  r&gne  k  Kkf ;  son 


frere  Oleg,  qui  r^gnait  sur  les  Drevliens, 
lui  declare  k  guerre  et  pdit  dans  une  de- 
route;  son  second  frere  TIadirair,  qui  re- 
gnait  k  Novgorod ,  se  rtfugie  chei  les  ¥a- 
riagues}  puk  revanaat  at  ec  un  grand  nombre 
de  Mormands  il  assiege ,  dans  Kief,  Taro- 
poik qui  se  rend  k  sa  merd :  il  k  fait  assas- 
siner,  80  a,  b. 


S  DAHS  LA  KUSHiE. 


'  fBBlra  )s>  chcvalwn  livoBieai,  pswedi 
Mailua  .,     I''"''  '  '   (n  bordide  I*  N«rT«i  TMvtbloiit  ippi 

■>«  F  '  '     ji  .''i"'  ■  ',',.;■■/  ,  ,      lr»  Moogolii  ion  lidc,  io6  ■ —  loit 

pDJif  "52  '"^B'''"i~"--Ln-"i         Tirojtavilch  (V.  AaM  T«r.,  loSi.). 

i5I*^'*P'j£i>*  W'e  l»     hiritia  du  triiMS  p*r  Ywtnlif,  KM 


-<fss5^ 


la  pranierel  tanto  Mat  occupm  pir  ue 

>'^ii^'f!L^irf*''*''*^'  btenlol  (uem  ciiile  enlie  RoitiiUr  ct  Glefaipiial 

'***i'*'?Si»*''^Uihf ;  Yani-  duui  de  Ml  £|«U:  lepronia-,  »pr«  •'•» 

/^^^^Sw-^'jC^  «"!"■  '«*   '''^  *™^   remporte  qticlqun  »»inl»™,  ol 

^i^f'^'^  "f!**  "^  f"'"  •  '"'"'"  e'opo'"'^*  Pf  ■"  Gma.  YiUilaf.  n\»- 

Zit    •''^i*'''  '' ""(fliiswndsiils  il.-  queurdew*  freres,  at  niocu  pir  Ih  Po- 

KtsT'  '%,-■  n"'"T,  -,ifiT«  longu.'S  !■[  lovl»i,  se  retugie  enPologne,  puii,i«:l( 

ff^^'^-'^'^l^it  Sovgorod  (1019-  Uii;cbnai  uno  leconde  toil  ptria  f™n». 

>j'                    '^ichMlif'  ion  Dcrmi,  qui  il  ■'■dreue  bu  imiw  Gregoin  Til,  lon^ 

^                   No»P>"^S '''™'"="  I*'  I""'  S»i«lo«l»f  eUnt  mort,  Tierolod  tai 

;  ,  :  qui  lui  cede  nuiuDoiru  attn  1>  paii  et  lui  cede  Kief.  II  bi  tut 

',,>:'    ''  J.  iiile  dii  Dniepr;  il  MumM  d'un  coup  de  lance  duu  ub  coobil,  lib 

"^r*"*  ^  (I ,  rwini  h  ion  frira,  il  pe-  —  96  b. 

.i^^'i^'la  nJleide  la  Ruuie  Rouge;  TiiuUf  MslUaTiich  (1146-1  (Si).  >^ 

u"*  I'^Lturt  u°<  enfant*:  Tiresbf  de-  noDca  par  de*  ictea  de  justice:  fleorga, 

■lit'''  In^de  loul  I'enipire;  il   bal  lea  louienin  de  Tladimir,  ntil  •'einptRr  i' 

n'^it^et  deliTie  k  Ruaaie  de  lei«  trAae  de  Kief;   mai*  H  cM  Miff!  it  f 


enfaEBi 


a  combat     dtfendre  eonire  Boiliriif ,  allii  d'Tni^i 


'"^riei  Ona ,  le  feu  gregeoii  et  la  Wi»-  Sriatoilaf ,  (rere   dlgor ,  aidi  dea  Pel**" 

^giiaintot  »  ftotit :  tiUi»aea  fermea  «ldeiBn>dDilLa,a'a)lieauipriDCe>tlcTite- 

^  Yjroilafavee  pluaieon  phoca  de  I'Eu-  nigof  eonire  Tsuulaf;  Igoretl  iDMaavpK 

Cpe;  il  bit  ilire  on  melnipaliuiii  niMe;  le  people  de  Kief;  guerre  iiecda  wa^ 

^^Bt  Taiaataf  pour  Nm  iaoc«aaeur  ,   le  diten ;  Georges  ct  fivbloilaf  la  ndNnl « 

^edudroitrunelui  eM  attribai,<4a —  MUTeH  en  umpagne;  Tsiailaf  nmn  ' 

gi  b.  Mire  k  Vladimir,  el  Geurn  enlw  i Kwi 

Taioilaf  n  Tiimladonlch  (is38-ia47);  Yuaitaf,  force  alon  d'abdiquer,  rede*)'*' 

}Utt,  chef  dea  Mon^li,  coatinue  tet  riTa-  auuile  mallre  de  Kief;  'Vladimiilo  wxtt 

ta,  a'empare  de  KieT  et  la  mine;  lea  Sue-  aufaitement ,  el  son  Sb  Tanubf  bn*  aM 

doupeaetrenlatec one flotle dans  b  Neva,  bataille  dantlesiMeesre>ledoataii;T>'^ 

ill  lont  defaib  pn- Ic  prince  de  Novgorod,  UfiiieurtjeoiM,elaniTCraeUemeBtRC>«»E, 

Alexandre  Taiwbiilcb ,  qui  repousie  ansii  yoa  —  91b. 

leaAJIenamlsetdeliTreNtoriTanubfll,  TuMUf(iiS7-iiS9),nnKiD«lfl<>>'tf< 

•ecompagnadetonflbConilanlin.Tarendro  Tillei  deson  apaaagc;b  plupart  ^f^^^ 

honnuage  k  (^ilai,  el  meurt  k  Mn  rMour,  le  foal  indtpmidants ;   il  cat  fota  '^^ 

io3  ■  _  104  a.  donner  tMtfui  outre  lei  portai  i  8»* 

Tiroalif  TarMlanlcb.(i>61-ia79),   lea  bf ,  ga  a. 
Mo^gorodieni  ae  loumetlait  k  too  pomoir ; 


a  Dia  naniait  at  ia  atiiau. 


AVIS 


FOUB    IiB    PLACBHBNT  DBS  6BAVUBBS  DB  LA  BUS81B. 


Pages. 

Carte  et  littoral  de  la  mer  Caapimne.  5 

littoral  de  la  mcr  Noire 7 

Littoral  ile  la  Baltiqne 9 

Partie  Mptentrionale  de  U  Roatied'A- 

sie  avec  rAm^riqne  rone. i4 

(S  Pedmxrs  do  Volf  ft 16 

I  Caimeberre  (Tftcdniom  oxicoocns)..  18 

II  Bartre  sibeline  et  hermine ao 

S  TcbeiiTachca sa 

M  Lapoaa a4 

i4  Coatiune  de  femmea  mordTiennaa a6 

4i  Arcfaioiandritca 19 

7  Paysans  roaaes 3i 

9  Daasea  rasaaa 36 

<7  Mooament  de  Pierre  I*'  et  aifaut. ...  4a 
5i  Tee  de  U  foiteresae  de  la  N^a  en 

kiver 44 

I  Tlieltre  de  reraitage  i  P^eraboorg . .  46 

l«  Palais  de  Strelna 48 

9  HoTgorod. 5q 

44  Astrakhan. 58 

la  Kirndsea 6t 

iS  Oitiaka 69 

i3  Sfiatorid.  diende  la  focrre. 73 

19  Cbefalicr  porte-glaiTe 97 

21  Bardie  de  BAti  sor  le  Don 104 

99lmilia iiS 

i3  Dautri  Doaakoi 177 

43  laMricar  dn  monaat^   de  Troitsa.  119 

iS  luu  (iS laf 

Platan  (a) i»i 

«9  lean  le  Terrible x3» 

>7CMM|aea. i36 

iiUni 143 

i7KTC7aagrec i45 

33  Cvte  de  Sibdrie. 147 

10  Tiiovtsk i5d 

3<Tobobk. iSa 

40  La  Parte  aaiote  et  scs  eimrons s55 

I  QMfal  de  Sib4rie  avec  son  poil  d'hi> 

.  »« i57 

39  Egijse  de  I'Aaaomption  k  la'Pokrovka.  z6o 

4(  Booastdra  de  rAaaomption. i6a 

7>  Vae  ant4neara  da  monastlre  de  I'As- 

,      «»»i«i t64 

^7  Otripieft  premier  faox  Dmitri 167 

38  Strdds,  garde  polonaise 169 

i>  SiBoleBSlL  (1611).. 180 

^  Vne  g4o4rale  da  monastAre  de  Troitu.  t83 

4i  Micbd  Romanor. 18S 

45  Alexis  MikbaAoTitdi 187 

49  Pierre  I*' 19S 

77  Are  de  triomphe  de  Peterhoff aoi 

it  Barcband  rosae  ealcniant  aamoyen  de 

grains  cnfil^ ao3 

'I  Obfliaqoe  k  PoilftTa aoS 

54  Catbenoe  l" aof 

^  P^tcfsbooii; ,  fortercsae  et  ^lise  de 

SnintrPiCTre  et  de  Saint*Paul an 

fo  Catherine  propose  k  Pierre  de  capita- 


Niun^oB.  Pages. 

ler  arec  les  Tares ax6 

58'  Maison  de  Pierre  I*'  an  jardin  d'M . .  a  1 8 

53  P^rhoff aa3 

6a  Moacoo,  murs  de  la  vieilie  rille. ....  a  54 
3 1  Anden  et  noaveaa    palaia   des   tsars 

(Moseou) a57 

3a  Caraliera  tatars a59 

60  lilisabeth a65 

55  Oranieobaum 870 

57  Tsarskoi^^Stio 871 

6z  Catherine  II a8a 

s8  Magidcna  tatars 3a  i 

10  Tombeaa  d'nn  khan  de  Bassimof. ...  3i8 

a4  Village  rosse 33i: 

4  Habitation  de  Kalmoaiks 33^ 

59  Bglise  de  Basan 34o 

3o  Tver 345 

47  Toar  d'lvan  Vdikoi 35i 

78  Tonr  de  I'^glise  Saint-Nicolas 37  a 

16  Batna  msses 384 

76  Interienr  de  I'^lise  de  Kasan 388 

75  £giise  et  r4fectoire  da  monastdre  de 

Troitxa 391 

5a  La  Boorse 399 

69  S^at 4o5 

84  Alexandre  I'' 4ix 

70  Perapective  de  Ncrski. 4iS 

68  Vne  da  qnai  anglais 4a3 

79  Palais  imperial  de  P^troTsky 43  c 

8 1  Vne  de  I'eut  major  da  c6li  da  canal  de 

la  Molka  en  hiTer 43S 

83  Vae  de  la  Boarse  et  d'une  partie  de  la 

forteresse 443 

88  Place  des  boatiqaes 453 

87  Mooast^e  de  Smolna 459 

85  Place  de  I'amiraatA 469 

100  Vue  de  Moscoa  prise  de  I'esplanade  da 

Bremlin . .  .^ 471 

aa  Le  Kremlin  tu  du  pent  de  pierre. . . .  477 

95  Vue  da  pent  de  pierre. 480 

90  Vne  da  pont  Rooge. 489 

89  Vue  da  grand  thMtre  impMal  (  Mos- 

coa)*   5o4 

98  Vue  dn  chktean  des  ingfeienrs &16 

94  Vae  da  pont  k  trois  arches  et  da  champ 

de  Mars Sat 

91  Nicolas  et  Alexandre 5x9 

9a  Colonne  d'Alexandre 533 

96  Scboamla 545 

73  Droachki 555 

74  Montagnes  roues 56z 

86  Pattneurs  et  traincaa 574 

93  l^lise  de  Vassili  Blagennoi 588 

63  Moajicka  aa  marche  aux  grains. 6o« 

64  Nait  fetee  k  Pergola  le  jour  de  la  Saint- 

Jean 607 

7 1  Place  de  Krasno'i  et  porte  de  Saint- 

Vladimir  6ia 

97  Maison  dea  enfants  trouT4s fli8 

66  bglise  et  pont  de  Troilski/I. , 6a4 


^ 


L'UNIVERS 


ou 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOUS  LES  PEUPLES, 

DE  LEURS  REUGIONS,  MOEURS,  COUTUMES,  mc. 


CRIMEE, 


PAR  M.  Cesar  FAMIN. 


^^  jdaat  les  yeux  sar  une  carte  de 
l*einpirerQsse ,  on  voit  la  Crim^  for- 
mer UD  qoadrilat^e  qui  paraft  sus- 
peoda  dans  la  mer  Noire  par  sa  pointe 
septentnonale,  de  telle  sorte  que  cba- 
<^  de  MS  autres  angles  correspond 
nun  &  on  des  points  cardinaux.  La 
sopofide  de  oette  figure  est  d'environ 
13,900  verstes  carr^ ;  sa  plus  grande 
n>nguear,de  Test  h  Touest,  est  de  300 
vostes,  et,  du  sud  au  nord,  de  180 
seuleincnt  (*). 

L'istfame  ^troit  ^ui  r^unit  ainsi  la 
Crimee  a  la  Russie  m^ridionale  est 
ahii  de  Piricop,  Tancien  T(0vs.  Ces 
<KQx  mots,  dont  Fun  est  russe  et  I'au- 
^  grec,  signifient  ^alement  foss^. 
n^tnaturel,enefret,  guccenom, 
]Qi  indique  un  systeme  d'lsolement  et 
V  defense,  fKH  donn^  au  seul  point 
^continental  par  leqnel  la  pdninsule  pdt 

(*)La  vertts  ou  wertt  est  de  104  ^  an 
^^;  eile  le  divise en  5oo lag^es.  La lieue 
ftuamane  de  a5  an  de^  correspond  k  4 
*^a^90sa|;faiM. 

P  Uorahon.  (CxudEi) 


itre  envahie.  Tout  le  o6te  qui  8*^nd 
de  P^r6cop  au  d^troit  de  JeidkaXi  est 
d^ir6  par  les  envahissements  I  du 
Palus-Mceotide.  Ces  eaux  stagnantes, 
qui  ne  oommuniquent  ^  la  roer  que 

Sar  le  passage  de  YenUski,  s'infiltrent 
ans  llnt^neur  des  terres,  et  devien- 
nent  des  marais  infects,  UnuU  sapra, 
ou  mer  Putride  de  Strabon  ( XtjAwi 
oavpa ) ,  lac  Bias  de  Ptol6m^,  Swasch 
des  modemes.  L'angle  oriental  pr^ 
sente  un  d^vdoppement  qui  denature 
la  regularity  du  quadrilat^ ,  et  forme 
lui-mtoe  une  seoonde  p^ninsule,  s6- 
pante  jadis  de  la  Crimee  par  un  voir 
hmj  ou  foss^ ,  que  d^fendaient  un 
mur  et  des  toureiles.  C'est  la  presqu'Ue 
Trach^,  ou  fiit  le  royaume  du  Bos- 
pore,  que  Mithra- dates  Eopator  a 
illnstr^  de  son  grand  nom;  Panticap^ 
en  toit  la  capirale  (*).  La  pointe  ooci- 

(*)  Bospore  et  non  pas  Bo^thort;  UUhra-' 
dates  et  non  Mithriaatt,  Si  l*usage  donne 
quelque  antoriti  aux  erreurs  les  pins  cho- 
qiianles,  elle  ne  les  sanctionne  pas  ii  tel  point 

1 


L'UNIVERS. 


dentale  est  une  steppe  qui  n'offre  d'ii^ 
t6ressant  que  les  rubes  de  randenne 
Eupatoria*  aujourd'hui  Koslow.  La 
o6te,  en  aesoeDdant  vers  le  sud-est, 
est  entrecoupde  de  marais  salants  et  de 

Setits  ruisseaux,  souvent  k  sec  pen- 
ant  ks  phis  fortes  chaleurs  de  I'm. 
La  partie  m^ridionale  de  la  ^in* 
sule  est  riche  en  souvenirs  bistonques. 
Pr^  de  I'ancien  golfe  Ctenus^  les 
Russes  ont  €iey6  SdlMisto^l ,  aujour- 
d'hui  Tun  des  ports  militaires  les  plus 
importants  de  tout  Tempire.  Non  loin 
de  1^,  on  retrouve  ranti(](ue  Cherso- 
nesus  dans  la  petite  pdnmsule  h(to- 
dtetique,  le  cap  Parthenkan,  oCh, 
selon  une  tradition  fabuleuse,  Iphi- 
e^ie  fut  sur  le  point  dimmoler  son 
ircre,  le  port  des  Stpnbales,  enfin  less 
colonies  mil^iennes,  asiatiques  et 
g^noises ,  dont  la  rive  est  bordde  de- 

f)uis  le  A  riod-m^^^pon  ( front  de  b^ 
ier)  jusqu*^  Thdoaosie,  aujourd'bui 
Caffa. 

Get  aper^  topographique  serait  in- 
oomplet'si  nous  omettions  de  men- 
tionner  Ttle  Toman,  G*est  un  promon- 
toire  situ^  en  face  de  la  pointe  orientale 
de  la  Crim6e,  qui  parait  d*abord  tenir 
au  continent  de  la  r^sion  caucasienne. 
mais  qui ,  en  r^ite ,  en  est  s^oare 
par  deux  bras  du  fleuve  Kouban,  aont 
le  plus  considerable  se  jette  dans  la 
mer  Moire,  et  le  moins  important  dans 
la  mer  d'Azow.  L'lle  Taman ,  la  Pian- 
UU  des  Ar^onautes  (noun6iO,  nom- 
m^  par  Pline  Eione,  et  par  Strabon 

qu*il  nc  soil  toujoars  temps  d'en  Mcouer  le 
joiif .  Bosphore  est  an  baniarisme  qui  pariit 
•▼Mr  M  subslitue,  par  amour  de  I'eupho- 
nie,  au  B^mropoc  des  Grees  et  au  Bosporus 
des  Latins.  Bospore  Tient  de  BoSc-irop^^*  trajet 
du  b«Bttf.  C*est  ainsi  que  les  anciens  nom- 
maient  on  detroit  que,  selon  eu&,  on  boenf 
poovait  oasser  k  la  nage.  Nous  avons,  poor 
adopter  la  veritable  ddnominaiion ,  entre 
autres  autorites,  oeUe  da  nvant  Millin  (ilfo- 
nwntnu  inidiu,  1 1 ,  page  17,  note  ai). 

Mithra»dates  tsi  le  nom  que  portent  ton- 
tes  les  medajlles  de  oes  rois  du  Pont,  et  on 
n'igoore  pas  que  c'est  un  hoounage  rendu  k 
rancien  culte  du  dieu  Mithra.  (Voy.  If^ 
ihri^si,  par  M.  de  Hammer.) 


Corocondamay  est  eomjjoaie  de  ma- 
tiires  volcaniques,  ainsi  que  de  Hts 
de  sable  et  de  mame  converts  d'eaox 
stagnantcs,  de  joncs  et  de  roseaux. 
Elle  fut  jadis  visit^e  par  tons  les  peu- 
ples  que  nous  verrons  figurer  dans 
rhlstoire  de  la  Tanride,  et  fit  paitic 
suecessivement  de  la  Saimatie  d^^sie, 
du  pays  des  SindeSy  de  rempire  da 
Bospore,  de  oelui  du  Kaptcbai  et  da 
khanat  de  Crim^.  Les  Grees  y  ^le^ 
virent  plusieurs  villes  ^i  durent  a 
leurs  relations  oommerciales  use  im- 
portance btstorique. 

Le  bras  de  mer  compris  entre  Tfle 
Taman,  k  Test,  et  la  presqulle Tra- 
chde,  k  Touest,  est  Tanden  Bospore 
Cimm^rien,  appel^,  depuis,  d^troit  de 
Zabaclie,  ou  Swasch,  de  JeiukaM  et 
de  Taman.  Sa  longueur  est  de  45 
verstes ;  sa  largeur  varie  de  5  i  SO. 

L'int^eur  de  la  Crim^  n*est  qu^une 
immense  steppe.  Le  regard  n*y  troure, 
pour  se  reposer,que  les  ^^vationspy- 
ramidales  oOi  d'anciennes  g^ndratioos 
dorment  ensevelies;  ce  sont  les  ttpnu' 
kUf  appel^  hourgans  par  les  Tfttares. 
Aujoimi'hui ,  ainsi  qu'au  temps  de 
Mithra^tes,  de  longues  caravanesde 
chameaux,  ces  navires  du  desert,  se- 
lon Texpression  pittoresque  des  en- 
fants  de   TArabie  ,  sillonnent  cette 

Elaine  infitonde,  portant  sur  ieurdos 
;  sei  et  les  mardiandises  de  transit 
Sfuelques  rares  tribus  de  Tatares  et 
e  Boh^miens  nomades  dressent  leuis 
tentes  sur  les  bords  du  Salghir*  le 
TapsU  des  anciens.  Ici ,  comme  dans 
les  autres  parties  de  la  graode  plaine 
tatare ,  les  preaves  irr^cusaUes  de  b 
retraite  des  eatn  sont  toites  sur  le 
sol.  Les  fossiles  en  oouvrent  la  soper- 
ficie ;  et  il  en  est  plusieurs ,  le  ^ 
nummuknius,  entre  autres.  Qui  se 
rapportent  a  des  animaux  dont  Fes- 
pece  a  enti^rement  disparu.  Les  itag* 
ments  coquiliiers  entrem^es  a  des 
coucbes  de  matidres  calcaires  defo^ 
mation  rtonte,  ajoutent,  par  ieur 
presence,  k  la  certitude  de  ce  pheoo- 
m^ne.  Dans  la  belle  saison,  cetteplaine 
est  couverte  de  gazon ;  on  y  voit  pal- 
luler  des  uu6es  de  sautei«lles»  des 
troupes  de  sourouk  ( gHs  marmotta)i 


GRIM^E. 


eC  des  taupes-souslik  ( mm  cUelku ). 
La  gerboise ,  bizarre  mammiiere  one 
I'on  ne  sait  s'il  feut  classer  panni  les 
quadrupMes  ou  les  bip^des,  tant  les 
appendices  ant^ears  sont  peu  pro- 
Dortionn^Y  chez  lui,  aux  pattes  de 
rarri^re-train ,  habite  les  mimes  loca* 
\ii6s.    De  nombretises  bantdes  d'ou- 
tardes,  d'oks ,  de  grues  et  de  cigognes 
s'y  montrent  fr^quemment.  Le  cha- 
ineau  a  double  bosse ,  dit  de  la  Tan- 
ride  J  ik'est  pas  inferieur  a  cdui  des 
plaines  africaines ;  il  a  la  mime  doci- 
lity et  le  mime  divoaement  pour  le 
seirice  de  Tbomme,  cet  ingrat  des- 
pote «  qui  toe  son  esclave  et  se  nour- 
rit  de  88  chair  guand  il  n'a  plus  rien 
a  espiacet  de  lui.  Les  loups ,  les  re- 
naraa,    let  Maireaux,  les  cherrenils 
et  ks  li^yres  sont  communs  dans  les 
montages  du  sud.  Les  di^vres ,  dont 
la  peau  eert  h  feire  un  maroqutn  fort 
I    estim6  des  Orientaux,  abondent  dans 
I     les  m^fDes  localitis;  mais  ce  sont  les 
moutoos  qui  forment  la  veritable  ri- 
chesse  des  Tatares  de  la  Grim^e ,  ^i 
tons  en  possddent  un  plus  on  moms 
grand  nombre.  H  n'est  pas  rare  de 
Tcnoontrer  des  troupeaux  de  20  ^ 
30,000  de  ces  animanx ,  et  mime  da- 
vantage,  qoi  appartiennent  h  un  seal 
propnteire.  11  y  en  a  de  deux  espdces, 
IB  frht  et  la  noire.  Le  mouton  de  la 
plaine  est  plus  gros  et  plus  robuste 
que  celoi  ae  la  montagne,  mais  sa 
laine    est   moins   longue  et   morns 
sojeuse.  Quant  aux  chevaux  tatares , 
ils  scmt  loin  de  pouvofr  6tre  compares 
a  oeox  de  la  Circassie ;  ginlralement 
petits ,  ils  sont  nianmoins  vife  et  ro- 
buites. 

Vers  le  sod,  la  steppe  s'6l^?e  sen- 
siblement ,  et  Ton  trouve  enfin  la  r^ 
(don  des  montagnes,  dont  la  chalne 
horde  le  littoral  de  la  mer  Noire , 
depuis  la  presoulle  biracllotique  et  le 
port  des  Bymocto  jusqu'au  Bospore 
Cimm^rien.  L'aspect  de  ces  ti^vations, 
dans  la  majeure  partie  de  leur  d^Te- 
loppement,  ne  pent  €tre  compart 
qu'a  cdui  des  colonnes  basaltiques  de 
la  grotte  de  Fingal ,  aux  ties  Hwrides. 
lei  de  grandes  masses  calcaires,  m^l6es 
de  marores  rouge  et  blanc,  de  jaspe, 


d'ardoise  et  de  grte ,  sans  aucun  ves- 
tijB»  de  granit  primitif ,  forment  des 
pfliers  perpendicalaires ,  serr6s  les  uns 
centre  les  autres  oomme  des  tuyaux 
d'orgue ,  et  couronn^  par  des  couches 
superieures  pos^  horizontalement.On 
y  trouve  des  agates ,  du  plomb ,  du 
cuirre,  du  fer,  du  crista!  de  roche, 
du  cfaarbon  de  terre ,  et ,  sor  le  riva^e, 
un  sable  entierement  compost  de  mica 
coior6  d^or.  C'est  aux  envntms  de  Ba- 
laclava aue  les  Tatares  recueillent  le 
kaff-himy  ou  ^ume  min^rale,  sorte 
de  terre  ^  foulon ,  dont  on  fait  de 
belles  noix  de  pipes. 

Le  mont  Trap^,  aujourd'hui  Tcha- 
tW'daqh^  est  le  point  culminant  des 
alpes  de  la  Crinm;  il  s'ddve  ^  one 
hauteur  de  4,700  pieds  (vo?.  pi.  4). 
Gette  partie  de  la  presmilfe  en  est 
^  la  fois  la  plus  fertile ,  la  plus  tem- 
p6r6e  et  la  plus  pittoresque.  La  valine 
de  Bandar,  h  quelques  verstes  de  Ba- 
IsMdava ,  m^ite  une  mention  spedale  : 
c^est  une  niaine  bien  cultiv^,  de  16 
verstes  de  longueur,  sur  4  de  largeor, 
entourde  de  nautes  montagnes  d*ou 
s'^obappent  de  minces  filets  d*eau  qui 
ooulent,  silencieux  et  inaper^s,  dims 
les  interstices  des  rocs,  et  entretiennent 
ineessamment  la  verdure  et  la  firat- 
dieur  de  la  vall^  Des  champs  de  bl^ 
entourte  de  haies  vivas,  des  jardins 
d^Kcieux,  des  villages  d*une  grande 
propret^,  des  prairies  ^mailltode  fleurs 
briliantes ,  des  rideaux  de  saules  et  de 

Seupliers,  des  bonnets  de  lauriers, 
es  bois  de  grenadiers  et  de  dattiers 
r^lament  de  tout  cdt^  Fadmiration  du 
voyageur. 

bans  les  autres  parties  de  la  region 
montagneuse ,  les  plantes  les  plus  re- 
marquables  sont ,  ind^pendamment  de 
celles  que  nous  venous  de  nommer, 
I'olivier,  le  fiffuier,  le  fr^ne  h  manne, 
le  ch6ne  a  un,  le  micocoulier ,  le 
poirier,  le  pommier  et  le  cerisier 
sauvages,  et  quelques  plantes  alpines, 
telles  que  les  sauges  et  les  centaury. 
Les  pains  de  la  Crim^  formaient 
autrefois  une  importante  branche  de 
commerce  que  les  guerres  d*invasion 
ODtruin^esensiblement.  Toute  la  plaine 
qui  se  trouve  comprise  dans  la  pres- 

1. 


L*UNIV£RS. 


fi1le  Trachee ,  sur  la  route  de  Cafifa 
Kertch ,  aujourd'hui  incuite ,  ^tait, 
dans  un  temps,  oouverte  de  o^r^es, 
dont  la  r^lte  donnait  de  1 5  a  20  pour 

La  culture  de  la  vigne  paralt  d*ail- 
leurs  devoir  remplacer  aujourd'hui  en 
Crim^  oelle  des  cdreales ;  nous  aurons 
I'occasion  d*en  reparler. 

Le  dimat  de  la  p^ninsule  est  sain 
et  agr^able  dans  la  partie  montagneuse 
du  sud-est;  il  Tesi  moins  dans  rint^- 
rie-ur,  et  surtout  aux  environs  de  la 
mer  Putride.  lA  r^nent  quelques 
fi^vres  endemiques  qui  atteignent  sur- 
tout les  strangers.  Gendralement  le  ciel 
est  pur  et  l^ir  mod^r^ent  diaud ; 
mais  dans  les  plaines «  le  firoid  et  la 
chaleur  sont  plus  sensibles  et  devien- 
nent  souvent  fort  incommodes. 

La  population  permanente  de  la 
Crim^  n'appartient  pas  k  moins  de 
sept  &miUes :  la  turque,  odt  sont  com- 
pris  les  pennies  faussement  appel^ 
Tatares  par  les  Russes  (  nous  oonti- 
nuerons  nous  -  mtoe  h  les  nommer 

(*}  «  On  ne  cease  de  rep^ter  que  le  pro« 
«•  gr^  de  ragricultnre  dam  les  pays  dont  la 
«  mer  Noire  oorde  le  littoral ,  et  Teitensioa 
«  qu*a  prise  depuis  qnelqiies  ann^  le  oom- 
•*  meroe  des  grains  duLevant,  sont  les  vMta- 
«  bles  causes  qniont  fait  baiaser  teur  prix  en 
«i  Europe :  c*est  oneerrenrqu'it  est  facile  de 

•  refoter.  La  valeur  des  grains  n*est  point  di- 
<•  minu^ ;  elle a  subi ,  an  eontraire,  laoons^ 
«  qnence  de  la  depreciation  du  nuoieFaire . . . 
<•  En effet,  une  mesure  de  ble  se  paie  quatre 

•  fois  pluscher  quedans  le  i6*  siecle;maisle 
«  marc  d'argeiit  codle  egalement  quatre  fois 
«  plus  qu'il  ne  valait  alors ;  oe  qui  nrouve 
.t  que  le  prix  de  cette  denize  n*a  point  Daissi, 
«  et  qu^elle  a,  au  contraire,  conserve  la  pro- 
M  pri6te  <^ue  la  plupart  des  iconomistes  lui 
M  reconnaissent ,  d'etre  oonstamment  en  rap- 
Mport  avec  la  valeur  do  numeraire.. . .  Le 
«  commerce  des  grains  de  la  mer  Noire  est 

•  d'ailleors  beaucoup  plus  ancien  qu'on  ne 

•  le  croit  gineraleraenL  Les  Genou  s*y  U- 
•I  vraient  avec  aideor  et  suoces  dans  les  dou- 
«  zi^DM,  treiziteie  et  quatonieme  siedes, 
«  et,  d^ttis  oette  ipoque,  les  nations  com- 
«  mergantes  en  ont  conslamment  fait  venir 
•«  dans  les  annees  de  disette.  »  (C  Fandn , 
Im  SicUe  eo/uulcrec  sous  le  rapport  de  fagri' 
cuUure.  Paris,  iS3i.) 


ainsi  pour  eviler  loute  confusioa) ,  Iti 
Ttircs  proprement  dits,  les  Anato- 
liens  et  les  Nogais;  lamongo^e,  com- 
pos^e  des  Kabnouks;  la  MauknU, 
des  Boh^miens;  la  simi^quBy  a  la- 
quelle  appartiennent  les  juifs  karaites; 
la  slave  f  souche  des  Russes;  la  ^ec- 
que^  et  enfin  Varmenienne. 

L^histoire  de  ces  divers  peoples,  en 
oe  qui  concerne  la  Crimee,  embrasse 
quatre  6poques  parfaitement  caract^- 
risees  :  celie  des  Tauro-Scytbes ,  jus- 
qu*au  cinquieme  si^le  avant  J.-C.; 
celle  des  rois  du  Bospore,  jusqu^u 
milieu  du  quatrieme  siede  a];>res  Ten 
chr^tienne;  T^poque  des  invasions,  qui 
nous  conduit  autreiziemesiede;  eonn 
celle  du  khanat  de  Crim^e,  jusqu'a 
Tannic  1783,  dans  laquelle  cette  p 
ninsule  fut  annex^e  au  vaste  empire 
de  Catherine  IL 

PasMiEEB  BPOQUB.  —  Le*  Tattfo^ 
Scythes.  Les  Cimm^iens,  KunmerUy 
qui  sont;  a  n'en  pouvoirdouter,Iepeu- 
ple  que  les  Hd)reux  ajqiielaient  Jtfa^i 
et  les  Grecs  Mcsoies  (voir  la  notice  sur 
la  Region  Cauctuienne) ,  apparaissoit 
les  premiers  sur  Thorizon  lointaiode 
Thistoire  qui  nous  occupe  :  c*est  eut 
qui  ont  donn^  Jeur  nom  k  la  Cn- 
mde.  lis  habitaient  d*abord  les  plaioes 
de  rint^eur;  mais  rinvasioo  o^s 
Skolotes ,  nation  barbare  qui  apparte- 
nait  k  la  grande  famille  des  ScyttiOi 
les  a\yant  refoul^s  dans  les  montagoes, 
ils  furent  appel^  Taures,  oe  qui  cor- 
respond k  Montagnards  (*).  Leurj^ys 
prit  dte  lors  le  nom  de  Tauride.  D^ 
venu  bientdt  commun  k  toute  la  ocm- 
tr6e,  remplac^de  nouveau ,  pIos>^^ 
si^es  apres,  par  oelui  de  Cnm^i  ce 
nom  a  pr^vaJu  une  seconde  fois,  et 
s'applique  aujourd*hui  k  une  province 
etkuhe ,  dont  la  presqulle  n'est  qu  ud 
d^membrement. 

(•)  Le  Taurus  de  r Arie-Mineore  n'a  p" 
d*atttre  itymologie.  Tm^  est  le  nomqui»y 
les  langues  de  cette  oontrte,  oorrapooi!  * 
Alpes.  rirw  en  chakteen.ronn^  en  jyT«« 
et  Toira  dans  la  langue  des  andens  ^V 
rieosy  signilient  cgament  montagne*  (j^T 
PetrooTliHguanim  totius  orhU  voeaM*' 
rittm^ 


CRIMJ^E. 


Les  Taurcs ,  a  r^troit  dans  leurs 
moDtagnes ,  et  peu  dispose  k  s'adon- 
ner  aiu  arts  de  ragricutture ,  v6cureiit 
Qoeique  temps  de  vol  et  de  pillage, 
pabord  ils  enlevaient  les  bestiaux  des 
habitants  de  la  plaine;  mais,  plus  tard, 
loraqu'i  la  suite  des  voyages  de  Phri- 
xos,  d'Hell6  et  de  Jason,  les  naviga- 
tearegpccs  se  montrtrent  sur  les  eaux 
de  Ja  mer  Noire ,  les  Taures  abattirent 
les  grands  chtees  de  leurs  forlts  jpour 
construire  des  barques  monoxjtones 
et  coorir  sur  les  Taisseaux  marcnsmds. 
yil  arriTait  que  le  r^niltat  d'une  croi- 
were  flit  heureux,  les  pirates,  satis- 
nusant  au  premier  besoin  de  toutes 
les  sod^t^  naissantes ,  ofifraient  une 
partic  du  butin  h  leurs  divinity,  parmi 
lesquelles  les  astres ,  et  la  Inne  notam- 
■cnt,  jouaient  un  grand  r61e.  Lorsque 
a  tonp^te  jetait  un  navire  stranger 
jur  leurs  cdtcs,  les  sauvages  h&i- 
tants  de  la  Tauride  ne  croyaient  pou- 
voir  roonnattre  dignement  cette  fa- 
▼eurdcleur  providence  qu'enlui  oflfrant 
«  bolocauste  quelques-uns  des  mal- 
neareux  naufrag^s.  Dans  ces  ciKon- 
^J^nces,  apres  les  c6r6monies  d'usage, 
ns  asaommaient  la  victime  d'un  coup 
??  «»ww»  puis  ils  lui  coupaient  la 
'etc,  rattacbaient  h  un  poteau,  et 
enterraicnt  le  corps  honorablement. 
C  est  un  usage  que  suivent  quelquefois 
encore,  k  T^ard  de  leurs  prisonniers, 
«rtaines  peuplades  du  Caucase,  les 
Ingoacbcs  et  les  Tchetdienses. 

A  Pepo^ue  oH  Hercule  et  Th^- 
sa  oitrepnrent  contre  les  Amazones 
w  rAsie  une  exp6dition  sans  but 
fommc  sans  gloire  ( quatortitec  si^le 
avant  Tere  dir^ticnne ) ,  un  vaisseau 
fu  portait  guelques-unes  des  plus  il- 
wstres  captives  fchoua  sur  les  c6tes 
«  Wpresqu'flc  Trach^e,  dans  le  Bos- 
pore  mime.  Echappant  a  la  vigilance 
ys  SCTthes,  ces  femmes  s'empar^rent 
j»  an  haras  de  chevaux  et  c6toy*rent 
»  Httoral  de  la  mer  Putride  pour  sor- 
«r  (te  la  Crim^  par  risthme  dit  au- 
pntThui  de  Pcrtop.  U ,  elles  trou- 
»erent  les  Hippomolj^ues ,  qui  sc  nour- 
n^^ient  du  lait  aigri  de  leurs  juments : 
s  etant  alli^es  avec  eux ,  elles  furent 
««aWir  au-dela  du  Tanais,  ou  elles 


donnerent  naissanoe  h  1»  natio»  dei 
Saoromates. 

Les  Grecs,  toojours  anis  de  la 
po^e  et  du  merveilleux,  raoontaient 
avec  exag(6ration  ce  qu'ils  savaient  des 
moears  de  ces  peuples.  Une  vaniW 
bien  oonnue  dans  Thistoire  leur  ftisait 
dire  que  les  dieux  honohte  en  Tauride 
avaient  une  orijgine  grecque,  oubltanl 
ainsi  quecesdivinit^  avaient  tapper 
t6e8  k  eux-mlmesenGrdce  par  des  co- 
lons strangers.  Yoyaient^ilsuiie  peopla- 
de  sauvage  adorer  le  soleil ,  la  lune,  le 
feu,  ou  un  glaive,  comme  le  fiiisaient 
les  Scythes ,  ils  publiaient  que  les  bar- 
bares  rendaient  nommage  a  Apollon, 
h  Diane,  k  Vesta  et  k  Mars.  Avant  de 
partir  pour  les  ri  vages  de  Troie ,  Aga- 
memnon avait  offert  un  sacrifice  a  une 
divinity  irrit^;  la  populace  crMule 
allait  jusqu'^  dire  qu  il  avait  immol^ 
sa  propre  fille ,  son  I|>hig6nie,  la  fian<^ 
d'Adiille,  mais  que  Diane  (la  kme)  avail 
enlev^  la  victime;  et  oik  aurait-elle  pu 
la  conduire,  si  ce  n*est  dans  le  pays 
ou  les  Taures  se  prostemaient  devant 
la  lune,  comme  on  a  vu  depuis  les 
P^ruviens  le  faire  k  I'eeard  du  soleil? 
La  elle  avait  oonti^  k  ui  jeune  prin- 
cesse  les  terribles  fonctions  du  saoer- 
docequi  Tobligeaient^  forger  les  maJ- 
faeureuxqai  venaient  ^chouer  sur  oes  ri- 
vages  inliospitaliers.  Ccpendant  Texii 
de  la  rc^le  pr^tresse  eut  un  terme 
prochain;  son  Mre  Oreste  la  reoon- 
nut  au  moment  oik  lui-m^roe  allait 
itre  immol^  par  elle,  &  la  suite  d'un 
naufrage,  et  reussit^larameneraupa- 
lais  de  ses  peres.  Toutefois  Hom to  ait, 
en  termes  bien  pr6cis ,  qu'Iphiff^nie 
n'avait  pas  quitte  le  toit  patcnuu  (*); 
mais,  quo!  qu'il  en  soit,  it  naratt  cer- 
tain qu'^  Tepoque  ou  les  Grecs ,  de- 
venus  plus  entreprenants ,  commen- 
c^rent  a  6tablir  quelques  colonies  sur 
les  c6tes  de  la  Tauride ,  ils  cherchtont 
k  se  rendre  les  peuples  indigenes  fa- 
vorables  en  leur  prouvant  qu'ib  avaient 
les  mimes  dieux ;  et  e'en  k  eux,  en 
cons^uenoe ,  et  non  pas  aux  Tauro- 
Scythes ,  qu'il  faut  attribuer  la  fbnda- 
tion  dfc  oes  temples  de  Diane ,  dont  on. 

f*^  Ili«i«,  chant  ix,v.  144,  * 


L'UNIVEES. 


retrouve  encore  qualques  vestiges.  Le 
promoDtoire  sor  fequel ,  sekm  m  tra- 
ditions KoGoles ,  Ipbig^oie  avait  cou- 
tame  d'immoler  les  Mansers ,  fut  ap- 
pel6  cap  Parth^nium ,  ou  ae  la  Vierge ; 
mm  les  archtologues  varient  sur  sa 
veritable  position ,  ou  peutngtre  y  en 
avait-il  pilusieiirs.  Nous  en  meationoe- 
rons  trois.  Le  premier,  dont  il  est 
question  dans  atrabon,  est  situ6  au- 
of^  de  la  modeme  Sebastopol :  c'est 
le  cap  le  plus  saillant  du  sud-ouest ; 
on  y  troiive  des  lacs  sal^  et  des  ruines. 
(Voir  h  pL  1.)  Le  second  est  place 
entre  fialadava  et  le  monastere  Saint- 
George.  Le  troisidme,  enfin,  appel^ 
oujourd'hui  ParthenU ,  se  voit  a  peu 
de  distance  de  Lamlmt. 

Le  eolfe  ou  les  pirates  avaient  oou- 
tume  de  rassembler  leurs  bateaux,  soit 
pour  combiner  de  nouvelles  exp^i- 
tions,  soit  pour  parta(;er  le  butin, 
^tait  admirablement  choisi.  Les  Grecs 
lui  donn^rent  le  nom  de  port  de  la 
Rencontre  (2ufA^o<),  d*ou  les  Latins 
Orent  porim  S^mbolorum.  Gette  bale 
est  situ^e  sur  la  cdte  du  sud ,  entre  le 
monastdre  Saint-George  et  Balaclava. 

Vers  Tann^  63S  avant  J.-C.,  les 
ScjrtbesSkolotes,  toujoursen  ^tatd*bos- 
tilit^  avec  les  Cimmeriens,  r^solurent 
de  rejeter  leurs  ennemis  hors  des  li- 
mites  de  Tfiurope.  lis  s(Nrtirent  dmic 
de  la  pteinsule,  sous  la  oonduite  de 
Mady«i,  ne  laissant  diez  eux  que  leurs 
femmes  et  leurs  esclaves.  Aprte  une 
longue  marehe  et  des  combats  dont  le 
souvenir  nous  a  ^  transrois  par  H^- 
rodote ,  ils  travers^rent  le  Caucase  1^ 
la  poursuite  des  fuyiurds ,  ravaaerent 
la  M^die<,  et  arriv^rent  enfin  oevant 
Ninive.  au  moment  ou  Cyaxare  en 
faisait  w  si^.  Ayant  vaincu  oe  mo- 
narque ,  its  se  disposaient  a  passer  en 
Egypte,  ou  r^ait  Psanmi^tique,  lon- 
que  oe  prince  obtint,  a  force  de  pre- 
sents, qu'ils  rebrousseraient  chemin , 
et  se  oontenteraient  de  gouverner  le 
pays  des  M^des.  Mais  apr^  y  avoir 
vtoi,  endeapotes,respacedea8ans, 
ils  en  furent  cfaass^  par  ce  m^me 
Cyaxare.  lis  r^lurent  alors,  eux  et 
les  enfants  qu'ils  avaient  eus  dans  leur 
Emigration  ,  de  retourner  sur  le  sol 


natal :  or ,  oendant  cette  longue  ab- 
sence ,  leurs  lemmes  les  croyant  morts 
s*Etaient  unies ,  faute  de  mieux,  \  ieurs 
propres  esdaves ;  et  de  ces  alliances 
il  Etait  r^ultE  une  nouvelle  ate^tion 
de  guerriers,  dispose  ^  diSDuter  le 
pays  ^  ses  anciens  maltres.  Lorsque 
ces  jeunes^ens  ap^rirentque  lesScvtbes 
6*approchaient ,  ils  se  retrancbereDt 
dans  la  presquHe  Trach^ ,  et  en  for- 
tifierent  Tentr^e  par  un  fosse  qui  pee- 
nait  toute  la  longueur  du  passage  dans 
sa  parUe  la  plus  Etroite  depuis  les 
monts  Tauriques  jusqu'^  la  mer  (IK- 
20W ;  on  en  voit  encore  aiyourdlHU 
les  vestiges ,  qui  s'Etendent  des  eovh 
rons  de  Th^osie,  ou  Kaffa,  jasqaa 
Arabat.  II  y  cut ,  entre  les  deux  par- 
tis ,  des  rencontres  sanglantes  sans 
r^sultat :  alors,  selon  Herodote,  lun 
des  anciens  oonqu^rants  de  la  Medie, 
s'adressant  ^  ses  compagnons,  lear 
dit  :  a  Que  faisons-nous?  quaad  ces 
«  gens-la  nous  tuent  nos  firoes,  notre 
«  nombre  diminue;  et  si  nous  toons 
«  quelqu'un  d*entre  eux,  nous  dimi- 
«  nuons  le  nombre  de  nos  esdaves: 
«  laissons  1^,  croyez-moi ,  nos  arcs  et 
«  nos  Javelots,  et  marcbons  3i  eux  »• 
«  m^  du  fouet  dont  nous  nous  ser- 
a  vons  pour  mener  nos  chevaux.  Tani 
«  ou'il  nous  ont  vus  avec  nos  armes, 
a  us  se  sunt  persuade  que  leur  god- 
«  dition  et  oelle  de  leurs  p^res  dtaiat 
«  semhlables  I  la  ndtre ;  mais  quain 
*  ils  nous  tverront  le  fouet  i  la  mam 
«  au  lieu  d*armes ,  ils  appreodroDi 
a  qu'ils  sont  nos  esdaves,  et  Doee- 
«  ront  plus  nous  raster.  »  Cc  pofflji 
fut  approuvE ,  et  le  succes  en  jusuna 
la  sagesse.  Les  esdaves,  suipnsae 
cette  mani^re  de  combattre ,  ne  ^ 
gerent  nullement  Ik  se  dtfcndre ;  "S 
s'enfuirent  pr6cipitamment  et  IcsfvaJD- 
queurs  rentr^ent  chez  eux  sans  owwj 
de.  Le  souvenir  de  cette  aventure  s  esi 
transmis  d'^een  ^e  ^  plus  d'unepett- 
pladeaujourd'bui  rSiigi&danslcsnaoD- 
tagnes  du  Caucase.  La,  on  voit,  oi  eneij 
aux  cdrtoonies  d'un  mariage,  le  ^ 
prendre  un  fouet  et  en  raenacer  h 
femme,  comme  pour  rappeler  le  sou- 
venir de  cet  antique  afBront  et  perpe- 
tuer  celui  de  la  vengeance.  Les  des* 


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eendants  de  oes  esdaves,  MoBOta  d'o- 
rigine,  forent  kmg-temps  oonniu  sons 
le  nom  de  Sindes;  ils  nabitaient  aux 
environs  de  la  mer  d^Azow. 

En  sai ,  les  S<7the8  de  la  Crim6e 
prirent  une  grande  part  dam  lea  guer- 
res  oontre  Darius. 

ScTTHBs.  — -  Les  Scythes  avaient  la 
barbe  tongue;  ilstoientg^n^ralement 
courerts  de  peaux  de  mouton;  les 
cheft  seuls  se  rer^taient  de  la  d^- 

g^uille  des  Mtes  fauves.  Ils  oombat- 
ient  h  chevaH,  et  se  serraient  de 
Qiassues,  dejavelots,  d*arcs  faits  avec 
to  comes  aantilope,  et  d^une  sorte 
de  glaiye  semblable  h  oelai  quite  ado- 
raient.  Ils  ^ient  bona  cavaliers  et 
excellents  archers.  A  la  gjuerre,  ik 
godtaicnt  du  sang  du  premier  ennemi 
ga'ils  avalent  tu^ ,  et  ooupaient  la  t^te 
a  tons  les  autres.  On  trouvait  parmi 
eux  nn  ^nd  nombre  de  devins  qui 
se  serraient  de  baguettes  de  saule 
pour  leurs  joneleries;  c'^taient  eux 
qui  exercaient  la  m^decine.  Vivant 
en  nomanes,  les  Scythes  dressaient, 
surdes  chariots,  des  tentes  k  compar- 
timents  int^rieurs;  c^^tait  I^  que  vi- 
vaieat  leurs  femmes  et  leurs  enfants. 
lUposs^daient  de  nonibreux  troupeaux 
de  boBofs  et  de  moutons,  nmis  ils 
prtfoaient  la  chair  de  cheval.  Quand 
ie  nM  venait  a  mourir ,  ses  amis  en- 
doisaient  son  corps  de  cire,  lui  fen- 
daieat  le  ventre  et  le  Bemplissaient  de 
psriuais  et  d*berbes  aromatiques.  lis 
le  reeousaient  ensulte  et  Tenterraient 
arec  nne  de  ses  concubines  qu*ils 
araient  ^ran^l^,  ainsi  qu'un  Mnan- 
soD,  un  cuismier  et  un  palefirenier. 
Cela  fadt,  Us  ^tranglaient  encore  une 
dnqoantaine  de  ses  serviteurs  avec 
un  jttrdl  nombre  de  ses  chevaux,  leur 
dtaient  les  entrailles  et  les  bourraient 
d'berfoes  s^es  et  de  foin.  Puis,  ils 
mettaient  les  hommes,  ainsi  empail- 
1^,  k  cheval  sur  les  animaux,  les 
assnjettissant  k  I'aide  d'un  pieu  qui 
leur  traversait  T^ine  dorsale,  et  les 
pla|pieiit  autour  du  tombeaa  pour 
d^fendre  leur  maltre  et  veiller  h  ses 
besoins. 

Tels  6taient  ces  baibares  qui  oppo- 
serent  une  tongue  et  impuissante  re- 


sistance aux  envabissements  de   la 
Grdee« 

Dans  le  courant  du  VII*  sikAe  avant 
J.-C. ,  on  Voit  arrive  en  Tauride  les 
ootonies  greoques,  appartenant,  pour 
la  plupaii,  ^lapuissante  Milet.  Les 
Hmcndes  de  Megare  et  ceux  du  Pont 
fondent,  dans  la  p^ninsule  du  sud- 
ouest,  la  vitte  de  Cherson  [Cherio- 
nesus),  long-temps  souvem^  en  r^ 
publique  sous  la  tutelle  de  la  m^tro- 
pole ,  et  devenue  si  cfl^re,  qu'il  fut 
un  temps  ou  la  Crim^  n'ent  pas  d'au- 
tre  nom  que  celui  de  Chersontee. 
Dans  la  presqu'tle  Trach^,  les  Mtl^- 
siens  jettent  les  fonderoents  de  Pati- 
Hcapee,  destine  h  devenir  un  jour 
la  capitale  d*un  empire  florissant. 
Gette  ville  peul  ^tre  consid^r^e  oomme 
la  m^  des  colonies  mil^iennes  du 
Bospore  Cimm^rien ;  elle  a  6t6  arae- 
1^  depuis  Bosporus  et  f^ospro  :  cmt 
la  modeme  Kertch. 

Parmi  les  autres  ^tablissements  que 
les  Grecs  form^rent  dans  la  Tauride, 
nous  mentionnerons ,  sur  I'autorit^ 
des  gtographes  de  cette  nation  et  de 
ceuxde  Byzance,  TfUodode^  Cytee, 
Nympfuaon ,  aujourd'hui  Apouk  ; 
MymUdon,  PcUakUm  et  Lampas;  et 
dans  le  pays  des  Sindes ,  au-deUi  du 
d^troit,  Pkanaqorie,  Hermonassa, 
KimmerUm ,  cme  (  actudlement 
C»pil  00  Sinai?) :  COfwimdama,  dont 
on  croit  reconnaltre  Templaoement  et 
le  nom  mtoe  dans  la  petite  ville  de 
Taman,  que  Gonstantm  Porphyro- 
e6n^  appelle  Tamaiarea;  AchUr 
Jmon,  ao  d6bouchement  du  Palos,  k 
Fendroit  o6  le  Bospore  est  le  plus 
dtroit;  plus  loin,  sur  le  littorai  du 
Pont-Euxin.  Portus  SMUnUy  main- 
tenant  S(mdffoukkale  ;  Sinda  et  Tori- 
cus,  Selon  Eustatbe ,  Phanagorie  et 
Hermonassa  furent  ainsi  appelto  du 
nom  de  leurs  fondateurs  Pbanagoras 
et  Hermon ,  cheft  des  colonies  voM- 
siennes :  mais  Arrien  rapporte  qu'un 
TSien ,  du  nom  de  Pbanagoras ,  fu^t 
la  domination  des  Perses ,  vint  jeter 
les  fondements  d'une  ville  k  laquelle 
il  imposa  son  nom,  pendant  qu'un 
citoyen  de  Mityl^,  k  la  t^te  o'une 
colonie  d'^^oliens,  fondait,  k  pen  de 


8 


L'UNIVERS. 


distance ,  une  autre  viUe  dont  lee  ooo- 
atructione  furent  acherto  par  sa  yeuve 
Uermonoisa. 

Ce  soot  1^  les  faits  les  phis  saillants 
que  Dous  puissions  recueillir  dans  la 
piemi^  periode  de  cette  histoire  jus- 
qu'au  V*  sitele  avant  I'dre  chr^enne, 
epoque  ^  laquelle  f ut  fond^  le  royaume 
dfi  Bospore  Cimmerien. 

Deuxibmb  epoqub.  —  Le$  roU 
du  Bospore.  —  ( De  Tan  480  avant 
J.-C.  a  Tan  350  de  1*^  chr^tienne.) 
—  Les  cdonies  greoaues ,  s'etant  ren- 
dues  assez  respectables  pour  mattriser 
les  bari)ares,  commenoerent  k  ^tendre 
leur  domination  dans  Tint^eur  des 
terres.  A  Cherson  elles  ^tabiirent  des 
archontes ,  ou  proterofty  appei^  quel- 
quefois  du  nom  de  h>is,  mais  qui 
n'^taient  en  n^alit^  que  les  premiers 
magistrats  d'une  republique  vassale  de 
la  m^tropole.  II  n^enfut  pas  de  m^me 
a  Panticap^e.  De  Tunion  des  Mil^- 
siens  et  des  Scythes  il  ^tait  r^ult6  une 
population  inmistrieuse  qui ,  s'ag^k)- 
merant  dans  les  murs  de  cette  viUe 
et  dans  ceux  de  Phanagorie,  ^prouya 
bientdt  le  besoin  de  se  soumettre  k 
une  volenti  unique  et  puissante ,  ca- 
pable de  prendre  les  mesures  qu*exi- 
geait  la  position  des  colonies  sur  les 
confins  du  monde  civilis^ ,  en  prince 
d^unenu^  debarbarescontinuellemeut 
en  ^tat  d^agression.  Les  premiers  cbefii, 
connus  sous  le  nom  irjirchsanacU' 
des  J  on  anciens  princes,  regn^rent 
d'abord  en  Asie,  au-ddli  du  Bospore. 
L'un  d*eux ,  Spartacus  I*',  r^unit  k  ses 
domaines  la  majeure  partte  de  la  pres- 
qu'tle  Trach^ ,  et  f ut  salu^  du  nom  de 
roi  du  Bospore  Cimmerien;  jusque- 
1^ ,  ses  pr^dcesseurs  s'^taient  intitu- 
le archontes  de  Bosporos  et  de  Th^ 
do»e,  rois  des  Sindes^  des  Torites 
et  aes  Dandariens  (tribus  masotes). 
Cet^vtoement  eut  lieu  Tan  439  avant 
notre  ^re.  Le  royaume  du  Bospore 
fut  d6finitivement  oonstitu6  sous  le 
regne  de  Leucon ;  ce  qui  a  fait  donner 
k  sa  dynastic  le  nom  de  Leuconienne- 
Cette  forme  de  gouyemement  ne  dura 
pas  moins  de  800  ans;  car  les  Ro- 
mains,  qui  succ^d^ent  aux  Grecs 
dans  le  droit  de  suzerainete  sur  cette 


oounmne,  sentirent,  oomme  oux, 
qu'il  ^tait  plus  convenable  k  leurs  ve- 
ntaUes  inCMts  de  prot^ger  les  rois 
de  ce  pays ,  dernier  boulevard  de  la 
civilisation  sur  les  fronti^res  de  la 
bairibarie,  oue  de  vouloir  y  gDuvemer 
par  eux-memes.  Les  rois  de  Pont  pos- 
sMirent  long-temps,  ainsi  qu^on  va 
le  voir,  la  couronne  du  Bospore.  lis 
^taient  plus  riches  qu*on  ne  pourrait 
le  supposer  d*abord ,  ayant  k  eux  seuls, 
en  qnelque  sorte,  le  monopole  du 
commerce  du  Pont-Euxin.  La  valeur 
et  rimportance  de  leurs  m6dailles  d'or, 
les  frakments  de  leur  histoire  6dhap- 
p^  k  roubli,  et  les  inscriptions  de 
quekpies  monuments  de  cette  Epoque 
nous  font  regretter  vivement  rigno- 
rance  ou  nous  sommes  encore  sur  des 
6v6nements  qui  jetteraient  certaine- 
ment  un  grand  jour  sur  toute  Tanti- 
quit^.  Nous  allons  signaler  ce  au'il^ 
a  de  plus  authentique  dans  oes  aAris 
de  I'histoire  C). 

(*)  Panni  let  savants  qui  se  sodI  oocupcs 
de  rhistoire  des  rois  du  Bospore,  fl  taut 
citer  Yaillant ,  Hardouin ,  Souaet ,  de  Buk, 
le  numismate  maneillais  Gary,  Visconti , 
MM.  Saint-Martin, IUoul-RocfaeUe,Koehlcr 
et  Rommel  dans  I*EneycIopidie  d*Er9ch  et 
Gruber.  Malheureusement  les  materianx  que 
rareh^ogie  a  mis  a  leur  dispositkm  oat  cte 
jusqu*ici  d'une  iniuflisanoe  deseqi^raDle ; 
des  mMailles  rongies  par  le  temps,  des  fng- 
ments  lapidaireamutilei ,  des  Ubummu  dlii^ 
toire  epars  dans  Diodore,  Strabon,  Dioo- 
Cassius,  Appien  ,  Gomtantin  Porphyroce- 
nete  et  quelques  autres,  iroil4  Ics  aeiiues 
sources  ou  ils  ont  puise  pour  elevcr  une 
trovene  plus  iogenieuse  oue  satislaiM 
Jusqu'id  m^e  on  n*a  pu  etablird*une 
niere  precise  la  Uste  de  oes  souverains.  Chn- 

3ue  jour ,  la  dioouTerte  d'une  mMailie  ou 
'une  inscription  necessite  la  rectificntkm 
d^in  fait  que  ron  jugeait  prioedemmeBt  bien 
itabli.  J*aipens6,  touterois,  qu'il  neaeraic 
pas  inutile  de  dresser  une  t^le  dironolofi* 
que  de  oes  rois,  telle  qu'cJle  rtedte  de  vAt 
adud  de  nos  connaissanoes  lur  cette  ' 
che  de  lliistoire  ancienne. 

EOU  DU  BOSPORB  OMMfalBf. 


4§t  (imlM  &«■lte^  MideM  prii 


avmt  aoiR  tri. 


crim£e. 


'  8parteei]sl*'et8ndeiix8ttOoe88eiin 
imm^diats,  Sfleucus  et  Spartacus  II, 
ae  figoieDt  dans  tliifltoire  que  oonune 
les  aOi^  de  la  Grtee ,  ainsi  qu'on  peut 


1 44oi433 


U. 


J.4L  (Ob  «crtti 
Am.) 
4uprteMmtr 


.4a»— 4M 

.4i>-^39a  S^TrwiMnltitn  m  titr* 


iiqae. 


m. 

I.. 
fctjmlL... 


UL. 


) 


3S»-a49AUalii«da 
1*9    »" 


M  IMVtaf  MIC  iM  dOMMll 

royaux.  Pariiadct  cft  nil 
M  nwf  dM  dlcas. 


IV 


}Stt-4e9flb  d«  PvlMdnlrr.  m 
dtepnicnt  la  coarooot. 

( acid  ) i09    I07  (folr  ci«d«nai.  J 

!▼ ai>7-4M  ib  iTBaaiilM. 

•  \  8  S  O  P  "*  '"  prio4dcDt  ? 

n*  DntAanx .  bitb  PwtiQos. 

Bitfcri  «rttfi  Fiyior.  «i8— <!    (icion  qoelqiMi   autMira 

iiS-63).  II  awxlc  aa  tvtea 


Smda  Gorglppla. 


n. 

v.. 
u. 


ten  SU  Uacharte. 
6i--«B   aatre  Ob  d«  Mltbn-^tM. 
4<^— ?    gcadrada  Pharaaea. 
14— il    unpataw. 

bnuian  dm  Tmntqon.  JUtoob  bbs  LsBcoviaBa. 
I,  vm  If  RMMBMccBMBt  dc r«r« c (D«> 


GoniL. 


I. 


'  ■  -      SS     i  2  eoncrmporaii 


IL. 


m  da  Tibare. 


83?|.r- 


C)C|f  D 


G4p*pjrla. 

tarriQOBa. 

da  J.-C.  db  da  PttMBMB  lew. 
4>  -49  aa  dooar  pour  dcacaadaai 
da  Mltb.  lapalDr. 

49     r     fr4ra  da  prirddaBt. 

in r— M  (DoBiUaadlaataBiparea 

-.II t4— lad  CTr^laB  Id. 

9«I>IU. lad— il>(4drlrii  id. 

.iSa— Id4  (Antaala  Id. 

164—171  ■PP'U  aoMl  Lupator. 

Ill 17^-110  datra  da  aea  aiidaHlaa 

coaBBaa. 
IV. . .  au— sag  pen  cobbb. 

II  i«(Ba  daaa  rcita  p^ 

rioda  aaa  fnada  ooafa* 

■iOB  clttBnolof  tqaa.  Cat 

ftaioaarqaaa  paraiaanii 

avDtr  r<fB4  aar  dlvarsaa 

partiaa  da  ai4BM  rafM* 

I  >  alMBltaadBMBt. 

■floB  ploairan  4crlvaia« , 

cc  priBca  B'aa  qBa  la  4*  da 


C«JllT 


I?. 


%»9 

B 


i:« 


ToniM, 


▼I. 


■\ 


«77 


Crkre  ds  prMdaai  Saure* 
BMtai ;  a'att  paa 


:paal4treqBa 


VL. .  i  3 

vn. . .  1 

VIII J44—  ? 


la  ▼«  da  I 

OB  BB  aaaralt  dxar  l'4po- 

Ka  prtciaa  a  laqaellr  bb 
oca  aBaTeraiBi  a  auf 
cM«  *  I'aatrc. 

daniier  amntnin  cobbb. 


le  voir  dans  Dtaostli^ne  et  Isocrate. 
A  Spartacus  II  suoc^da  un  prince 
connu  sous  le  nom  honorifi^e  de 
Saii(rus,  II  aooorda  aux  Ath^niens  le 
privil^e  de  faire  le  commerce  des 
grains  dans  ses  6tats ,  et  p^rit  au  si^ 
deTh^odosie.  Leuoon,son  ftls,  monta 
sur  le  trdne  Tan  893  avant  J.-C. 

Les  Ath^iens  appelaient  assez  to- 
lontiers  tyrans  les  rois  des  oontrte 
^oi^6es  I  mais  Leucon  fut  exempt  de 
cette  qualification;  il  fui  mtoe  honors 
du  titre  de  citqyen  d' AtMnes ,  et  ce- 
pendant  I'histoire  nous  le  montre  en- 
▼ironn^  d'espions  et  d*adulateurs.  L'un 
d'eux  lui  avant  un  jour  d^nonc^  un 
homme  ^viaemment  innocent :  «  Mi- 
serable, lui  dit  Leucon,  je  te  tuerais 
de  mes  propres  mains,  si  les  rois 
pouvaient  se  passer  de  tes  semblables ! » 
Ge  prince  soumit  Th^odosie,  y  porta 
le  grand  entrep6t  des  grains  de  la 
Grim^e,  r^gna  glorieusement  pendant 
quarante  ann^,  et  m^rita  de  donner 
son  nom  k  sa  dynastie.  Strabon  nous 
apprend  qu'U  envoya  aux  Ath^niens 
1,100,000  m6dimnes  de  bl^  ( 570,000 
hectolitres).  Spartacus  III,  ills  afn^  de 
Leucon ,  gouvema  pendant  quatre  an- 
nto  seulement.  Apr^  lui ,  ses  trois 
fibres,  Paerisades  r%  Satyrus  II  et 
Gorgippus  I*',  r^gn^rent  simultan^- 
ment  sur  diverses  parties  du  royaume 
(349  a  811).  Ges  monarques  ayant  en- 
voy^  du  bl6  aux  Ath^niens  en  un  temps 
de  disette,  ceux-d ,  sur  la  proposition 
de  D^mosthene,  leur  ^ng^rent  des 
statues  d'airain;  Paerisades  m^me, 
apr^  sa  mort,  tai  mis  au  rang  des 
dieux. 

(811-809)  >-  Sahrrus  III,  Prytanis 
et  Eumilus,  tons  trois  fils  de  Paerisa- 
des r%  furent  appel6s  h  recueillir  la 
succession  de  leur  p^e  et  de  leurs  on- 
cles;  mais  Eumilus,  las  de  partaser 
le  trdne ,  fit  la  guerre  h  ses  freres ,  les 
tua ,  et  conserva  trois  ans  le  pouvoir 
supreme.  II  eut  le  sort  du  fils  de  Tile- 
s' :  ses  chevaux  s'emport^ent  et  il 
fut  toas^  sous  les  roues  de  son  char. 
Son  fils  Spartacus,  quatritoedu  nom, 
lui  succ^aa  (307-288).  Ici,  il  exista 
dans  Diodore  une  lacune  que  Ton  peut 
combler  en  partie  h  Taide  de  la  nu* 


10 


L'UIilVERS. 


niisouitique  et  de  quelques  paaiam  de 
LucieB  et  de  PolyeD,  sans  ^'u  soit 
possible  de  ditsipar  robscunt^  cfaro* 
nolo^ique  de  cene  p6riode.  De  Fan 
388  a  118,  six  monarques  se  sueci^ 
dent  8ur  le  tr6ne  du  Boepore,  Leoca- 
nor,  que  I'on  suppose  fits  de  Sparta- 
cus  Iy,  EobiotuSf  fr^  natorel  du 
pr^c^ent,  Satyrus  lY,  Gorgippus  II, 
qui  fonda  une  vilie  non  loin  de  Pha- 
nagoria,  et  lui  donna  son  nom ,  Spar- 
tacus  V,  dont  les  Scythes  enyahissent 
les  ^tatSf  et  qui  adidte  la  pau  par 
une  concession  de  territoire,  et  enfin 
Paerisades  II  qui.erivironn^d^ennemis 
redoutables,  et  crai^nant  de  tomber 
lui-m£me  au  pouvoir  des  barbares, 
abdiqua  la  couronne  en  faveur  du 
grand  Mithra-dates ,  Firopiacable  en- 
nemi  des  Romains ,  le  roi  du  Pont , 
Tarbitre  des  destinies  de  TAsie-Mi- 
neure. 

( 118  a  61).  -- Mithra-dates ,  qu'il 
suffit  de  nommer  pour  r<6veiller  le 

Slorieux  souvenir  de  ses  victoires  et 
e  ses  yertus ,  de  ses  rerers  et  de  ses 
fautes,  apporta  aux  Bosporiens  I'^e 
pontique ,  aont  la  premiere  ann6e  cor- 
respond k  Fan  469  de  Rome,  997  avant 
J.-C.  De  son  temps,  les  Sarmates 
Jaziees  avaient  enyahi  la  Crim^e,  sou- 
mis  les  colonies  greoques  k  leur  payer 
tribut,  et  menaqaient  m^me  a*une 
destruction  prodiaine  la  r^puUique  de 
Cherson  et  le  royaume  du  Bospore. 
Mithra<lates  les  biattit  compl^tement, 
les  refoula  au-deld  du  Borystbtoe,  et 
saisit  cette  occasion  pour  soumettre 
les  Gbersonites  eux-memes  k  sa  domi- 
nation. Un  de  ses  g^^aux  fonda 
EupcUarium,  que  Ton  croit  ^re  la 
modeme  Koslow,  sur  la  cdte  occi- 
dentale  de  la  presqutle. 

L'histoire  ae  Mitiira-dates  se  rat- 
tadie ,  par  la  gloire ,  k  ceile  de  T A- 
sie-Mineure ,  par  les  revers  aux  fastes 
romains ,  et  par  la  mort  aux  annales 
du  Bospore.  Son  fils  Macharte ,  qu*il 
avait  associ^  k  sa  couronne,  l^re  1*^ 
tendard  de  la  rdiellion ;  mais  Icsucods 
ne  justifia  pas  cette  coupable  entre- 
prise ;  pouss^  dans  ses  demiers  retran- 
chements  et  d^sesp6rant  d*obtenir  le 
pardon  de  son  pere ,  Machar^  ne  vou- 


lot  pas  attendre  sa  justios  et  se  doua 
la  mort.  Yen  I'amiee  80  a? ant  Jtes- 
Christ,  d^KMsW  luinnlme  de  set 
6tats  de  I'Asie,  yaincn  et  abandoDn6, 
Mitiira-dates  se  retire  k  Panticap^, 
oil,  alli^  avec  les  Scythes,  U  r^e en- 
core la  destruction  de  Fempire  ro- 
main.  La  tnftiison  seule  fit  ee  fue  la 
fbrce  n*ayait  pu  op6rer;  elle  brisa  le 
glaive  de  ce  heros.  On  vit,  ^  Pbanago- 
rie,  un  homme  d'une  naissance  iUos* 
tre.  Castor ,  combl^  des  bieofaits  de 
son  mattre,  suivre  Fexemple  de  i*in- 
grat  Macharte,  et  chasser  da  Bo8« 
pore  asiatique  la  famiUe  du  roi. 
Cherson ,  qui  ne  snpportait  qu'en  fr^ 
missant  le  joug  ae  cette  royaot^ 
^trangto;  liiMdosieet  Nymphaioo, 
^uvant^ss  du  voisinage  d  une  arm^e 
romaine,  et  d'autres  villes  enooie» 
r6pondirent  k  &t  appd  de  la  liberte. 
Cependant  Mithra-^tes  ne  se  laissait 
pomt  abattre  :  il  envoya  ses  filles, 
sous  la  garde  de  quelques  eunuques 
et  d*une  troupe  de  guerriers,  cfaerm^ 
des  ^poux  et  des  alli^  parmi  les  Scy- 
thes; mais,  k  peine  cette  caravaoe 
^tait-elle  sortie  de  Pantica])^,  QU^ 
les  soldats  se  r^volt^rent,  mireat  les 
eunuques  k  mort  et  livrtont  les  jeanes 
princesses  aux  Romains.  Enfin,  le  se- 
cond fils  de  Mithra-dates ,  Pharnaoe, 
se  mit  k  la  t^te  des  r^yoit^  pour  as- 
sizer son  pire  dans  son  propie  yfr 
iais ,  esp^rant  livrer  cet  iilustre  w: 
lard  k  ses  ennemis  et  se  rendre  amsj 
agr^able  au  peuple  romain.  Le  gr^n 
homme  sut  mourir  comme  il  aw 
y6cu,  enh^ros !  HabiledansFartdepr^ 
parer  les  poisons  et  trop  robuste  poor 
ne  pas  roister  long-temps  k  leur  ac- 
tion, il  ordonnaau  Gaulois  Bituitusde 
Faider  du  seoours  de  son  Me  et  de 
lui  ^argner  ainsi  la  honte  de  tooao^ 
yivant  entre  les  mains  de  ses  ennfr 
mis;  il  ftit  ob6i,  et  d^  ce  moment 
Rome  put  respirer  plus  k  False.  Alois 
on  vit  un  spectacle  digne  d'une  txa- 
nelle  reprobation ;  Fodieux  Pharnaoe 
envoya  le  corps  deson  pirc  k  ^^^ 
lui  demandant  pour  salaire  de  sen 
crime ,  les  royaumes  de  Pont  et  oii 
Bospore.  Le  gdn^ral  remain  tersa , 
dit-on,  des  larmes  d'attendrissemeot 


€RIM££. 


U 


et  d'admiratum  ea  voyant  le  cadavre 
de  too  Uhistre  advenaire. 

MHlira-^tes  fut  enseveli  a  Sinope 
dans  letombeau  de  sea  an^Hres;  aiosi 
c'est  sansrfondflment  qu'une  tradition 
locate  fidt  dire  aux  habitants  actuela 
debpr^a'lie  Tracb^e,  qae  ce  prince 
a  sa  sepulture  aux  eoTirons  de  Kertch. 
Ges  lieux,  k  la  Terite,  sont  pleins  de 
SOD  soavenir  :  le  promontoife  le  plus 
Toisin  de  Jenika]^  se  nomme  phare  de 
Mithra-dates;  c'est  le  phcmar  des 
Rosses.  Les  vieilles  colonnes,  les  rui- 
oes  impoeantes,  les  d^ris  poudreux 
et  jDsqu'aux  montagnes  elles-m^mes, 
toot  id  est  par6  du  nom  de  oet  illus* 
tre  rival  de  la  grandeur  romaine. 
Pomp^e^  oependant,  n'avaitpas  nnigi 
d'aooonler  k  Phamaoe  le  titre  d'ami  et 
aili6  du  pcuple  romain.  II  lui  refusa 
rinvestitiijre  du  royaume  de  Pont; 
mais  il  lui  coninna  celledu  Bospore, 
a  Ttxceptioa  de  Phanagorie ,  qui  fut 
declare  TiUe  libre  en  recompense  de 
ce  qu'eile  avait  donn^  Texemple  de  la 
revolte.  Pen  satisfait  de  oes  conces- 
sioDs ,  Phamaoe  ne  vit  pas  pliis  tdt  les 
Romains  partis  de  ses  etats,  qu'il  vint 
OMttn  le  si^e  devant  Phanagorie  et 
la  pnt  par  femine.  II  soumit  ensuite 
b  Golehide ,  rentra  dans  I'Asie-Bii- 
Miiit»teata  de  reconqu^rir  leroyaume 
dePont,  et  battit  mane  les  Romains 
CD  divecses  rencontres.  Toutefois,  cet 
iodigae  fiJs  de  Tun  des  plus  grands 
rois  qui  aient  jamais  exists  ne  jouit 
Ptt  long-temps  du  fruit  de  son  for- 
rait  Les  quereUes  de  C^ar  et  de  Pom- 
p^  avaient  seules  retard^  I'explosion 
de  la  Tengeanoe.  Libre  d^rmais  et 
Taiaqoeur,  C^sar  quitte  TEgypte,  ren- 
tit  dans  le  Pont ,  voit  Pharnace  et  le 
■net  dans  uned^route  complete :  f^etUj^ 
<^*y  vid  ( je  suis  venu,  j'ai  vu,  j'ai 
uinoi),  toivit-il  k  cette  occasion. 
Phaniaee  obtint  la  permission  de 
s'onbaiquer  pour  le  Bospore,  ou ,  a 
peine  arrive,  h  fut  tu^  dans  une  bataille 
^e  lui  livra  Asander ,  son  lieutenant 
et  son  gendre,  qui,  pendant  son  ab- 
sence ,  s'etait  empare  de  la  couronne. 
Cet  Asander  r^giui  paisiblement,  sou- 
mis  a  la  domination  de  Rome;  mais, 
parvenu  a  un  Ige  avane6,  on  ne  sait 


quels  motifs  le  jport^rent  a  se  laisser 
mourir  de  faim.  Un  aventurier,  nomm^ 
Scribonius ,  monta  sur  le  trdne  et  fut 
bientdt  apies  mis  k  mort  par  le  peu- 
ple,  quand  on  sut  que  Pol^mon  I*', 
roi  de  Pont,  s'avan^t  k  la  t^te  d*une 
arm^e  nombreuse,  sur  Tordre  que  lui 
en  avait  donn^  A^rippa ,  proconsul  de 
Syrie.  Ce  Pol^mon,  reconnu  roi  du 
Bospore,  fit  la  guerre  aux  Aspurgi- 
tains,  peuple  de  la  Sarmatie  asiatique, 
et  fut  tue  aupr^s  d'une  ville  nomm6e 
Cesia.  Comme  il  ne  laissait  que  des 
en£ants  en  has  dse ,  sous  la  tuielle  de 
leur  mke  Ihrthoaoris ,  une  revolution 
appda  sur  le  trdne  bosporien  les  re- 
jetons  de  Tantique  dynastic  des  Leu- 
coniens ,  et  on  voit,  k  cette  6poque 
(premieres  ann^es  de  I'ere  chretienne), 
ngurer  sqccessivement  quatre  souve- 
rains  de  cette  £imille,  Rheskoupo- 
ris  r%  Cotys  r\  dit  VAs^qien , 
Sauromates  I*',  contemporain  de  Ti- 
bere ,  et  son  fils  Rheskouporis  II,  qui 
r^gne  sous  la  tutelle  de  Oepepyris 
sa  mere.  Toutefois ,  les  Romains  ne 
soufi^irent  pas  long-temps  cette  usur- 
pation de  la  descendance  des  Leuoh 
fdem;  Tempereur  Caligula  rendit  la 
couronne  k  Foiemon  II ,  fils  du  der- 
nier roi  pontique  ( de  38  11  42  de  Fere 
chretienne  }.  A  partir  de  ce  point 
nous  aurons  peu  de  chose  a  dire  d'une 
serie  de  22  souverains,  dont  les  noms 
seuls  a  peu  pr^nousontetetransmis 
par  la  numismatique  et  les  lambeaux 
ahistoire.  Ces  princes,  qui  sMntitu- 
laient  amis  de  cesar  et  du  peuple 
romain  ( ^iXvcaioaps^  et  ^tXopwfuitoi), 
promptement  ch^ties  par  leurs  suze- 
rains chaque  fois  qu'ils  tentaient  d'en 
secouer  le  joue ,  ne  brillerent  de  quel- 
que  eclat  que  dans  leurs  contestations 
avec  les  Scythes  ou  leurs  voisins  les 
Chersonites.  Plus  d'une  fois  raeme , 
battus  par  les  proteron  ou  magistrats 
de  Cherson,  iis  virent  leurs  posses- 
sions resserrees  dans  les  plus  etroites 
limites.  La  vie  de  ces  rois  est  d*au- 
tant  moins  susceptible  de  recevoir  ici 

Suelque  developpement  que  leurs  me- 
ailles  contribuent  elles-memes  a  y 
Jeter  la  confusion,  en  demontrantque 
plusieurs  souverains  ont  regne  simul 


la 


L' UNI  VERS* 


tan^ment  dans  cet  empire  si  6troit. 
On  est  port^  a  croire  ^e  les  princes 
legitimes  durent  maintes  fois  associer 
klenr  royaut^  des  chefs  barbares , 
tels  que  Inintbimfyus ,  Ar6ans^ » 
T^iranes  et  Rhadani6adis ,  qui  flrent 
frapper  des  m^daUles  d*or  k  leur  ef- 
figie,  en  ro^me  temps  que  les  Sauro- 
mates  et  les  Rheskouporis  (  voyez  la 
table  chronologize  ).  Sans  doute  de 
nouveaux  mat&iaux  6clairciront  un 
jour  nos  doutes  k  ce  sujet,  le  gouver- 
nement  russe  mettant  un  grand  soin 
a  conserver  dans  les  mus^s  d'Odessa, 
de  Nikolaieff ,  de  Caffa  et  de  Kertch, 
les  precieuses  antiquity  dont  chaque 
jour  amene  la  d^couverte. 

Les  querelles  des  Cbersonites  et  des 
Bosporiens  amenerent  la  chute  du 
royaume  dont  nous  venous-  de  tracer 
une  si  rapide  esquisse.  Dans  les  premi^ 
res  annees  du  V*  siecle,  unproieron  de 
Chersonese,  nomm^  Pharnace ,  fait  la 
gu^re^  Sauromates  Vni,  letue  en 
combat  singulier,  ravage  tout  le  pays, 
ne  prevoyant  pas  que  c  6tait  favoriser 
rinvasion  de  ces  nouvelles  l^ions  de 
barbares  qui,  sorties  des  r^ions  hy- 
perboreennes,  venaienta  leur  tour  ra- 
vager  le  midi  de  I'Europe. 

Troisiemb  epoque.  —  Les  tnoo- 
sions.  Deux  peuples  qui  joaent  dans 
rhistoire  un  role  fort  important,  rdle 
de  sang  et  de  larmes ,  vont  d'abord 
se  montrer  k  nous.  Ge  sont  les  Goths 
et  les  Huns.  Mais  k  T^poque  oh  nous 
sommes  parvenus  (  400  k  420  de  J6- 
sus-Christ ),  si  nous  n^avons  pas  men- 
tionn^  encore  le  nom  des  premiers, 
c'est  que  nous  avons  craint  de  jeter 
quelque  confusion  dansle  r6cit  des  6v^ 
nements  relatifs  aux  rois  du  Bospore. 

Les  Goths,  que  plusieurs  auteurs 
supposent  onginaires  des  pays  que 
baigne  la  Baltique  et  qu'arrosent  la 
Vistule  et  rOder ,  tandis  que  d'autres 
les  font  venir  de  TAsie ,  commenc^- 
rent  a  deborder  sur  le  midi  de  TEu- 
rope,  vers  la  fin  du  ir  si^le  de 
r^re  chr^tienne.  Plusieurs  de  leurs 
tribus  s*^tendirent  durant  les  premi^ 
res  annees  du  si^le  suivant ,  jusqu'au 
TanaTs  ou  elles  se  confondirent  avec 
les  Sarmates  et  les  Alains.  Ces  der- 


niers  avaient  alors  suocade  aux  Tauro- 
Scvtbes  dans  la  domination  de  la  Cri*' 
mee,  et  ils  ne  cessaient  dUoqui^ter 
leurs  voisins  les  rois  du  Bospore. 
Vers  376,  Tempereur  Tacite  reaoontre 
dans  la  Cappadoce ,  une  division  de 
ces  bjurbares ,  la  pousse  devanil  lui,  et 
la  refoule  sur  le  Bospore  Cimm^eD. 

On  est  fond^  k  croure  que  les  Goths 
ne  sont  pas  un  autre  peuple  que  celui 
que  Ton  voit  ^tabli ,  au  IV*  si^e , 
entre  le  Danube  et  le  Borysthtee, 
sous  le  nom  de  G^tes.  Nous  parta- 
geons  enti^ment,  k  oe  sujet,  une 
opinion  de  M.  de  Saint-Martin ,  d'a- 
pr^  laquelle  oes  peuples  seralent  eux- 
m^mes  les  anciens  Scythes,  dont  le 
nom  n*est  qu'alt^  par  une  prosfli^. 

Cependant  la  troupe  hideuse  des 
Huns.  d*origine  finno-ouraiieime, 
vient  a  son  tour  pousser  devant  elle 
les  Goths  et  les  Alains.  Ceux-den 
fiiyant ,  se  iettent  dans  la  Crim^,  le 
Caucase  et  rAsie-Mineure.  Quelques- 
uns  passent  le  Danube ,  entreat  dans 
la  Pannonie,  inondent  les  Gaokset 
Tempire  romain ,  et  d6placent  sobite- 
ment  des  nations  enti^res.  C*est  un 
curieux  ^>ectacle  que  de  voir  ces  hom« 
mes  qui ,  vaincus,  abandonnent  leur 
propre  territoire  et  se  prtentent  en 
vainqueurs  sur  celui  des  autres.  Une 
de  leurs  plus  puissantes  tribus  se  fixe 
sur  le  littoral  de  la  mer  Noire,  dans 
le  royaume  du  Bospore  mtoe ;  c^est 
celle  des  Goths  T^d-axites. 

Ammien-Marcellin ,  Sidoine-A[K)l- 
linaire ,  et  plusieurs  autres  toiyains 
contemporains  nous  ont  laisse  on 
portrait  des  Huns  ,  digne  d'etre  con- 
serve. Leurs  traits  ^ient  horribles 
k  voir  tant  ils  prenaient  de  soin  dV 
jouter,  par  des  usages  terribles  et  bi- 
zarres,  a  leur  difformit6  naturdle.  lis 
etaient  forts  et  trapus,  avaient  la 
t^te  grosse ,  les  yeux  petits  et  ooifoo- 
0^ ,  la  bouche  Isuree  et  le  teint  livide. 
Par  un  raffinement  de  ce  qu'on  poor- 
rait  appeler  la  coquetterie  de  la  law 
deur ,  lis  aplatissaient  le  nez  k  leors 
enf^nts,  et  leur  oouvraient  le  front 
et  les  Joues  de  cicatrices  taiiladto  ^- 
m^triquement  V^tus  depeaux  oud|- 
toffes  grossidres ,  la  t^te  envetoppM 


CRIMEE. 


13 


d'une  ealotte  de  cuir ,  et  montes  sur 
des  cfaevaux  de  petite  tailtef  mais 
1*006  grande  ygeret^,  ils  oombat- 
taient  avee  Tare  et  le  sabre,  et  por- 
taient,  en  outre,  une  sorte  de  filet 
dont  iJs  se  aerraient  habilemeDt  pour 
envdopper  leurs  ennemis.  Lea  femines 
et  les  emanta  lea  suivaient  k  la  guerre ; 
nMis  les  vieillards  restaient  en  ar- 
li^,  ou  se  donnaient  la  mort,  ear 
diez  oe  peuple,  la  vieillesse  iitaii  un 
objet  de  mepris  et  de  honte.  lis  n'a- 
noent  pour  aemeures  que  des  chariots 
trains  par  des  boeofs,  et  pour  nour- 
ritme  que  les  radnes  crues  et  la 
diair  de  cheval  mortifi^  sous  la  selle. 
lis  bayaient  ayec  passion  le  koitmiss, 
fareuwe  d'eau  et  de  lait  de  jument 
aigri.  Enfin  la  difformit^  et  rabrutis- 
sement  des  Huns  ^talent  tela  qu'on 
les rcgvda en  Europe,  dit  Jomand^, 
oomme  des  monstres  issus  du  com- 
merce des  femines  scythes  ayec  les 
demons. 

Nous  ne  suiyrons  pas  ces  £Eurouches 
oonqutents  dans  leurs  expMitions; 
tes  gnerres  que  Tempire  romain  eut 
i  aoQtenir  contre  les  Goths  et  les 
Buds,  ks  yictoires  et  la  roort  d'At- 
tila,le)l^tf  de  Dieu,  appartiennent 
a  uneaatre  histoire.  Nous  nous  borne- 
foos  idire  que  la  Crim^  partagea  tons 
k»  dtestres  que  oes  barbares  firent 
peser  snr  les  nations  qu'ils  enyahirent. 

.  D'autres  conqu^ants  arrivdrent 
^ientdt  sur  les  traces  des  premiers. 
Ltt  Ougres  j  ou  Jgaun,  penetrant  en 
Ohokit^  ou  ils  demeurent  pendant 
deux  Slides,  en  d^pit  de  tous  les  ef» 
forts  des  Goths  T^teaxites.  La  p6nin- 
sole  est  bouleyersfe  par  les  guenres 
intestines  de  oes  nations,  parmi  les- 
qaelles  la  politique  des  empereurs  grecs 
s'efforee  d'entretenir  la  niune  et  la  ja- 
loosie.  Apr^  elles,  diyerses  trflms , 
veaoes  de  Tint^rieur  de  TAsie,  les 
^Iffares  et  les  Giour^en,  appartenant 
a  la  raee  turque,  bien  que  de  nos 
gars  encore  on  s'obstine  k  les  appeler 
Titares,  se  heurtent  tour  k  tour  sur 
« loi  4e  la  Tauride,  ne  laissant  au- 
tiarepos  aux  andens  peuplesde  cette 
Wide.  Les  Chersonites  invoquent  en 
uia  le  secours  des  empereurs  de  By- 


xance ;  ceux-ci  ont  assez  de  peine  k  se 
dtfendre  eux-mfimes,  et  rarement  lis 
peuyent  satisfaire  aux  yoeux  de  leurs 
yaasaux. 

Les  Khaxari  entrent  dans  la  Cher- 
son^  •Taurique  yers  le  milieu  du 
septieme  sitele,  y  refoulent  les  Goths 
dnis  les  montagnes,  et  fondent  un 
empire  puissani;  la  Crim^e  prend 
mane  le  nom  de  Khazaria,  Les  yilles 
crecques,  quoique  rdeyant  toujours 
ae  la  cour  de  fiyzance,  se  soumettent 
k  payer  aux  Kbaiars  un  tribut  annuel. 
Partout,  dans  cette  p^riode,  nous 
yoTons  r^gner,  sur  le  sol  de  la  pres- 
qirlle,  la  delation,  Tanarchie  et  la 
misere ,  rdsultat  inevitable  d'une  suite 
non  interrompue  de  conqu^tes  et  d'u- 
surpations.  I/^tat  de  Uierson  ^tait 
r^put^ ,  en  narticulier,  un  s^jour  si 
fUcheux,  ou*u  devint ,  oomme  aujour- 
d'hui  la  Sib^e,  un  lieu  d*exil  pour 
plus  d'un  iUustre  proscrit;  nous  dte- 
rons,  entre  autres,  le pape Martin  I*' 
et  Justinien  II. 

Martin  ^tait  un  pontife  respectable 
et  sayant;  il  fut  cMri  et  YtoM  de 
ses  ouailles,  mais  il  eut  le  malbeur  de 
d^plaire  k  Tempereur  Constant  II, 
petit-fils  d*H^racliu8 ,  qui  le  fit  traiter 
ayec  une  barbaric  inouie.  L'infortun^ 
pontife,  charge  de  chaines,  fut  traln^, 
mal«le  et  pauyre ,  dans  la  Calabre,  k 
Messine,  a  Constantinople,  et  edSn 
k  Cherson,  oCi  il  sucoomba  k  la  fa- 
tigue et  au  diagrin ,  le  16  septembre 
ess.  ( Voir  ItaHe ,  pag.  43. ) 

Justinien  II,  monstre  alt^r^  de 
sang,  sumomm^  le  Rhynotm^  de- 

Kis  qu*^  la  suite  d'une  r^volte  ^i 
yait  jet^  a  has  du  trdne,  le  patnce 
L^ontius  lui  ayait  fait  couper  fe  nez, 
firt  exil^  ^i^ement  k  Cherson,  ou 
quelques  railleries ,  que  les  habitants 
ae  permirent  sur  sa  mutilation ,  le 
jet&ent  dans  de  violents  acc^  de  fii- 
reur.  Pr6occup^  par  des  id^es  de 
yen(»ance,  il  se  retire  auprtedukhan 
des  AJiazars,  qui  I'accueillit  d'abord 
avec  bienveiUance ,  et  lui  donna 
mdme  sa  soeur  11i6odora  en  mariaffs; 
mais,  plus  tard,  gagn^  par  Tor  des 
ennemis  de  oe  prince,  ie  khan  allait 
le  faire  p^rir  si  Theodora  ne  s'y  flAt 


M 


L'UNITERS. 


opposte.  Le  Rbynotm^  s'enfuit  cliei 
un  peiq>le  pousaat  qui,  fix6  auprdt 
du  P'olga,  ou  Bolga,  ayait  reqa  le 
Dom  de  Boulgare.  Lc  chef  de  oette 
nation  aooorda  au  fii^itif  une  protec- 
tion int^esg^,  et  Taida  m^me ,  sons 
de  duns  conditions,  k  reconquer 
son  trdne.  Justinien,  rentn^  k  Con- 
stantinople ,  n'oublia  pas  d'envelopper 
les  Gh^'sonites  dans  sa  vengeance 
(692  de  rdre  chretienne).  II  voulait 
d^ruire  leurs  TiUes  de  fond  en  com- 
Me,  mais  le  seoours  des  Khazars  d^ 
joua  cet  odieux  prcjet  £n  731 ,  la 
puissance  de  ce  dernier  peuple  avait 
acquis  un  td  lustre ,  que  rempereur 
lion  ni,  sumomm^  Tlsaurien,  qpousa 
la  fille  de  leur  khan.  Gette  princesse , 
oonvertie  k  la  religion  clur6tienne , 
^ifia  ses  sujets  par  ses  vertus  et  sa 
pi^t^.  En  840 ,  rempereur  Th^ophile 
▼isita  la  Crim^,  et  re^t,  de  la  part 
des  Khazars ,  des  marques  de  respect 
et  d'attacbement.  II  leur  foumit,  sur 
leur  demande ,  des  ouvriers  pour  con- 
struire ,  sar  le  Tanais ,  une  vifle  nom- 
m^  Sarkelf  ou  la  Station  bianche. 
Vers  la  fin  du  neuvi^me  sidcle ,  de 
nouyelles  cohortes ,  imigries  de  I'A- 
sie ,  les  Patzinaces  ,  appelds  encore 
PeUMnigues  f  de  race  turque^  par- 
▼iennent,  apm  des  sucote  yanes,  k 
s'emparer  d  une  partie  de  la  Crim6e, 
ou  IChazarie  proprement  dite. 

Les  Petch^n^es  toient  aussi  un 
peuple  sauvage  et  nomade,  v^  de 
peaux  de  b^tes  Csiuves,  yi?ant  sous 
des  tentes,  se  nourrissant  de  chair 
mortifi^  sous  la  seile,  de  quetooes 
racines  et  de  lait  de  jument.  lis  tni- 
flquaient  ct^endant  avec  les  Grecs, 
les  Byzantins  et  mtoe  les  Russes, 
fbumissant  k  ces  peuples  du  miel, 
des  ouirs,  des  besnanx  et  une  sorte 
de  cochenille.  En  retour ,  la  ooor  de 
Byzanoe  leur  enycyait  des  bijoux,  des 
oouromies  d'or,  et  autres  nches  pre- 
sents :  elle  adressait  k  leurs  chefe  des 
lettres  traeto  en  caractdres  dor^,  et 
leor  donnait,  on  ne  sait  trop  pour- 
quoi,  le  titre  d'archonte.  Leur  his- 
tetre  ult^rieore  est  toute  oontenue 
dans  oelle  des  Russes. 

Aox  Peteh^n^es  suoeMe  un  autre 


peuple  de  mtoe  orieine  et  parlant  \ 
peu  pr^  la  m#me  uiBgoe.  Les  Co- 
mans,  ou  Kiptehak,  que  les  Rosses 
appellent  PoloutaeSy  se  font  oomutltR 
en  Eurqie  vers  Tan  1000  de  J.-C. 
Conf ondus  bieotdt  ayec  les  pr^c^dents, 
ils  paraissent  dtee  les  ymtaUes  so- 
ctoes  des  NogtOs.  Ce  fut  sous  lev 
donunation  que  la  Grim6e  derint  en- 
titoment  ind^pendante  des  soaverains 
de  Byzance. 

Depuis  long-temra  le  ztie  des  mii- 
sionnaires  du  christianisme  et  les  re- 
lations ayec  les  Grecs  avaient  intro- 
duit,  dans  la  pres^'tle,  la  relifioD 
chr6tienne,  mais  rinfluenoe  des  eo- 
pcreufs  d'Orient  j  amit  prop>g^J| 
schisme  de  Pbotius.  Cepoidant,  10 
diyerses  nations  que  nous  veooos  de 
nonuner  se  soumirent  maintes  fois  k  Ja 
religion  de  Mahomet,  conseryant  d'aii- 
leurs ,  dans  Tune  et  I'autre  croynee, 
les  pratioues  superstitieuseB  et  bar- 
bares  de  leur  premier  culte. 

La  fin  de  oette  fi^ode  csteanctt- 
ris6e  par  le  premier  d^yelo|feneai 
d'un  empure  qui  devait  embcaster  on 
jour  la  moiti^  de  rEnrope  et  le  tien 
de  TAsie.  Les  grands  princes  noes 
pouss^rent  leurs  conqu^tes  josqaratt 
pied  du  Caucase  et  dans  les  steppes 
de  la  Tanride.  Vladimir-le-Giandt  jni 
yenait  d'abiurer  ses  faux  dieux  et  wt- 
tsat  Gonyerti  k  la  rdigion  catbobqo^ 
grecque,  mardia  sur  Cherson,  etsoj 
empara  en  988,  sous  le  pr6tei(e<|oii 
y  trouyerait  les  pitoes  et  les  rclifW 
dont  11  ayait  besoin.  On  rapporte  que, 
pendant  le  si6ge  de  cette  yille,  uo  ei- 
pion,  nomm^  Anastase,  lanfa  daDS» 
camp  des  assi^geants  une  fl^cfae , « i*' 
quelle  toit  attach^  un  biUet  ooofu  en 
ces  termes :  «  Cberdiez  denritoyjWS; 
«  vers  rOrient,  vous  y  trooyews  w 
«  canaux  qui  foumissent  I'eau  ai' 
«  yille.  »  Ce  fiit  par-Ui ,  en  eftj, 
que  Vladimir  r^isit  les  Cberto- 
nites  It  se  rendre  k  ^ser€tk»yj^ 
oe  prince  ayant,  peu  aprte^  4|!^ 
la  soeur  de  rempereur  grec  f^^^J^ 
ville  k  son  premier  mattre.  m  »^» 
Mtislay,  passa  dans  Hie  de  Tanian^ 
oil ,  depttis  la  cbote  de  TeoipirfJ^ 
porien ,  s'^il  Ibm^  on  4M 


CRIM^E. 


foitt  le  Dom  de  nqranme  de  T^nou- 
tarak^.  II  y  tromra  un  peuple  ala- 
nicroe,  ies  lasses,  dont  le  chef  Tap- 
pdh  eo  combat  aingulier.  Mtislav  sor- 
tit  ?ain(jiieur  de  ce  duel,  et  entra 
dans  la  ville  de  Tainan ,  capitate  de  ce 
Douf  d  apanage  de  I'einpire  des  grands 
iiincea. 

Enfin,  noua  toiichons  au  tenne  de 
cette  triste  ^poque,  oii  tant  de  peaples 
birbares  se  aont  ra^s  lea  una  8ur  lea  an- 
tics, ne  laisaant  d'autres  traces  de  leor 
BKsage  qne  la  destruction  et  la  mort. 
L*historien  trouve  peu  k  daner  sur  oe 
damp  6iBo\6,  ou  les  inonoations  n'ont 
iifOB6  aucun  germe  de  ftoondit^; 
mais  il  n'en  aera  paa  de  mtoie  de  la 
Mo&e  suivante ,  qui  s'ouvre  derant 
le  mnd  nom  de  Tdiinghis*Kban. 

QUATBIBMB  BPOQUB. —  LeS  khOMS 

de  CrtnUe.  La  premi^  inrasion  de 
TduncMs-Khan  date  de  Fan  1391  de 
notre  ore.  Ge  serait  sortir  des  limites 
d'une  notice  narticuli^re  a  la  Crim^, 
et  enfahir  le  aomaine  de  Thistoire  unt- 
verseUe,  aue  d'entrer  dans  de  trap 
longs  details  sur  Torigine  de  son  pea- 
pie  et  sur  les  succ^  ou  les  revers  de 
M  ooorses  en  Europe.  Cependant  il 
^  oeitaiiis  points  g6n^raux  sur  les- 
qoeb  aotre  attention  doit  se  (lorter 
^p^nJement  pour  la  comply  intel- 
^eooe  de  cette  ^poque,  bien  qu'ils 
MNent  peut-toe  plus  directement  n^ 
cesBsires  aillears. 

Tdunshis-KJian  commandait  k  des 
nations  d'origihe  roongole ,  les  Tatares 
ci  les  Mongw  proprement  dits,  pas- 
teios  noauHJes  et  barfaares ,  dont  les 
triins  oommient  ie  vaste  plateau  gui, 
desconfins  de  la  Stb^rie,  s'^tendjus- 
qo'aox  fironti^res  de  la  Cbine.  La 
perre  seute  pourait  tenir  ces  hordes 
nroudies  r^ies  sous  rob^issance 
d^  dief ;  aussi ,  lorsque  la  yoix  puis- 
ttote  de  Tchingbis-Rnan  les  edt  con- 
roqute  dans  les  solitudes  de  I'Asie , 
ce  grand  capitaine  ne  leur  laissa  plus 
de  repos;  u  leur  fit  entretoir,  oans 
le  lointain,  les  ridiesses  de  Byzanoe 
ct  de  Kicnr,  mit  k  profit  Fenthou- 
ttne  d'un  instant,  et  les  entndna 
<  dea  cooiftMilB  qui  ne  devaient  avoir 
■I  terme  qua  poor  qnelques  cbefs 


15 


i.  Les  lieutenants  de  TdiiB- 
obis  seuls  p^n^tr^ent  en  Russie  et 
dans  la  Cnm^.  En  1337,  Toucbi- 
Khan ,  son  fils,  acbera  la  conqu^te 
des  possessions  russes  en  Europe,  et 
Batbou-Kban,  son  petit*fils,  fonda 
peu  apr^,  au  nord  de  la  mer  Cas- 
pienne,  Tempire  du  Kaptehak,  qui 
s^^tendait  jusqu'au  Dni^r.  Les  princes 
du  Kaptcbak  s*intitulaient  khans  de  la 
horde  dor6e.  Ce  pays  ^tait  alors  oc- 
cupy par  des  nations  turques ,  qui  se 
soumirent  aux  chefs  tatares.  Or,  Far- 
ni6e  de  ceux-ci  ne  tarda  pas  ^  se  reti* 
rer ;  elie  se  disperse  mime  si  compl^- 
tement,  qp'au  Dout  de  quelques  an- 
nte  leur  langue  ^tait  ouolile  dans  le 
Kaptchak ;  et  lorsque  eut  lieu  le  dd- 
membrement  de  cet  empire  et  sa  r^ 
partition  entre  plusieurs  princes  d*o- 
rigine  mongole ,  on  oontinua  k  donner 
mal  k  propos  a  leurs  sujets  le  nom 
de  Tatares,  que ,  de  nos  jours  encore, 
on  applique  aux  descenoants  des  Co- 
mans  ou  des  Petehin^gues  qui  babe* 
tent  la  Crimde,  Kazan  ou  Astrakan. 
Ges  pdtendus  Tatares  sont  posttive- 
ment  de  race  turque ,  difffarant  essen- 
tiellement  nar  lelangage  et  les  traita 
physiques  aes  Tatares-Mongols ,  aux- 
quels  lis  furent  souniis  Jadis.  Ce  point 
une  fois  bien  dtaUi,  nous  pouTons 
continuer  li  nailer  des  fNrdtendns  Ta- 
tares de  la  Cnmde ,  sans  craindre  au- 
cune  mdprise. 

Le  cheTde  la  horde  dorde  dirisa  ses 
conqudtes  en  plusieurs  gouvemements, 
k  la  tdte  desquels  tl  mit  les  phis  farates 
de  ses  lieutenants^  ou  les  phis  chdris 
de  ses  parents.  Ajouter  ainsi  k  Fau- 
toritd  de  ces  ambitieux  dtait  intro- 
duire,  dans  les  constitutions  du  nou- 
yel  empire,  un  germe  de  dissohition 
que  nous  allons  yoir ,  arec  te  temps , 
mdrir  et  se  ddvetopper.  En  1340, 
Batou-Kban  soumit  ia  Grimde  enti^, 
Fincorpora  k  Fempire  du  Kaptchak « 
et  cboisit  pour  sa  rdsidence  une  ville 
connue  aujourd'hui  sous  le  nom  de 
EsU-Krimy  Fandenne  Crimde.  Lois- 

Su'on  y  a  vu  se  sucodder  arec  tant 
'achamement  les  invasions  des  Bar- 
bares  ,et  tous  lea  ddsastresquidevaieBt 
en  dtre  la  oonadqaence,  on  con^  b 


16 


L'UNIVERS. 


difBcult^de  reoonnattre  remplaoement 
de  quelquesHinesdes  villes  les  plus  c6- 
Idbres  de  la  presqu'tle.  Th6odo6ie  elle- 
mliiie,  emport^dans  oe  tourbillon  des 
guerres  intestines ,  avait  disparu  enti^ 
reroent,  ou  laissant  si  pen  de  vestiges 
deson  existence,  que,  des  Tann^  1370, 
lorsque  les  G^nois  eurent  fond^sur  son 
emplaoement  une  nouvelle  ville, nom- 
m^  C^ffa.  leurs  bistoriens -^r^ten- 
dirent  qu'iu  avaient  cboisi  pour  oela 
Hit  Iku  dUert 

Les  Gteois  et  les  Vtoitiens  avaient 
•commence,  dds  la  fin  du  XI*  sitele 
de  r^re  chr^enne ,  Ik  tenter  quelques 
operations  oommerciales  ayec  les  (mi- 
pies  de  la  mer  Noire ;  les  premiers 
s'^taient  particuli^rement  ding^  vers 
la  Tauride.  D*abord  lis  y  Miangeaient 
les  marchandises  manu^BM^turaes  de 
I'Europe  oontre  les  Wa  que  oette 
p^ninsule  produisait  en  si  gnmde  abon- 
danoe;  mais,  k  la  suite  des  invasions, 
la  decadence  de  ragrioilture ,  tout  en 
-diminuant  les  exportations  des  c6- 
r^es ,  ne  fit  qu'inspirer  aux  Gteois 
un  plus  vif  d^ir  de  prendre  un  pied 
h  terre  sur  le  littoral  de  la  Crimte , 
afln  de  mieux  ^tendre  leurs  relations 
dans  rint^ieur  et  de  oonnattre  tes 
ressources  ou'ils  pouvaient  en  esp6rer 
soit  en  pdleteries ,  soit  en  sel,  en 
vins  et  autres  denr6es.  Uarriv6e  des 
Tatares-Monsols  leur  semUa  fiivorable 
pour  rex6cution  de  ce  projet.  Une 
colonic  gtooise,  sous  la  conduite  de 
d*Auria  (ou  peut-^tre  d'un  Doria) ,  vint 
d^barquer  sur  Templacement  de  Tan* 
denne  Th6odosie,  et  obtint  du  kban 
des  Tatares ,  moyennant  un  ridie  pre- 
sent, la  permission  d'y  Clever  quel- 
ques ma^sins  pour  servir  d'entropdt 
aOx  marchandises  ( 1270  aprte  J.-(!.). 
Cela  fait ,  les  colons  s*^ndirent  un 
peu  au-deU  du  terrain  qui  leur  avait 
^  oonc^e ;  puis  ils  firent  entendre 
au  khan  que  la  prudence  voulait  qu'on 
ne  laissAt  pas  ainsi  de  riches  dep6ts 
exposal  ^  un  coup  de  main  dans  un 
pays  encore  infeste  par  des  vagabonds 
et  des  pillards.  Ils  creusi^nt  done  un 
foss^;  devant  ce  foss^  ils  jet^nt 
quelques  pierres,  qui  finirent  par  se 
transformer  en  bastions;  enfln ,  ils 


dev^rent,  a  la  grande  mortification  du 
khan,  une  redoutable  oeinture  de  rem- 
rarts,  et,  dans  le  centre,  ils  bfttirent 
Cafifo.  Le  Tatare  s'aperQut  ^op  tard 
de  son  imprudence ;  il  se  pUignit  for- 
tement,  mais,  du  haut  de  leors  rem- 
parts,  les  G^oois  se  prirent  i  rire  en 
voyant  passer  cette  colore  impuissante. 
Cam  devint  bientdt  une  vilfe  riche  et 
florissante;  vinflft  annto  lui  suffirent 
( 1289)  pour  s'elever  ii  un  td  degr^ 
de  puissance ,  qu'elle  put  envoyer  des 
galnres  au  secours  de  Tripoli  de  Syrie, 
alors  senr6e  de  pres  par  les  enoemis 
de  la  chr^tiente.  Non  contents  de  oela, 
les  Gtoois  formkent  des  ^tabltsse- 
ments,  plus  ou  moins  importants,  sur 
tout  le  littoral  de  la  (Mmte.  C'est 
ainsi  qu'on  vit  parattre  Soldqfa^  pr^ 
de  Soudak ,  k  45  verstes  au  sod-ouest 
de  Caffo.  En  cet  endroit ,  la  forteresse 
g^noise  s'elevait  sur  une  tour  carrie 
gui  J  de  nos  jours  encore ,  domiDe  les 
rortificattons  que  les  Russes  f  <^ 
i^outte  an  commencement  do  wmier 
si^de.  Du  haut  de  oette  tour,  tes  sen- 
tinelles  gteoises  d^uvraient  unevaste 
etendue  de  pays ,  etobservaient,  sans 
lesredouter,  fes  mouvementsderen- 
nemi.  La  hauteur  de  ce  colosse  sem- 
ble  prodi^euse  par  la  di^iiositioDdes 
narois  qui  forment,  avec  le  rocher, 
des  lignes  perpeadiculaires.  De  tout 
c6t^  se  imente  un  abtme  ^^^ 
oeil  exero6  pent  aeul  sonder  la  ptw^- 
deur  sans  redouter  ni  ^blouissefflent, 
ni  vertige.  . 

On  volt  tolement  des  raintf  <k 
forteresses  genoises  auprte  de  S^ 
topol,  de  Balaclava,  de Panticapee  a 
dans  I1le  Taman. 

La  Crimde,  depuis  sa  r6umoDdans 
les  mains  d*un  pouvoir  bomogeoe 
commencait  h  reprendre  cette  impor 
tance  politique  qui  lui  avait  w. en- 
lev^  par  son  d6membrement  ^^^'"^ 
k  r^poque  des  invasions.  DM  1^« 
Mangou-Khan  Tavait  M6d  a  lOO  oe- 
▼eu,  Oran,iititrcdefiefrelefiDt«^ 
la  suzerainet^  du  Kaptchak  ^nii 
payanttribttt  Cette  intempestite  tfj»; 
dpation  ne  !ut  pas  le  premier  oo^ 
port^  ji  to  puissance  du  nouvel  eopiiC' 

Les  lieutenants  de  Tchinghis  n'enter 


CRIMfiE. 


17 


dant  plus  la  voix  redoutaUe  dti  inattre, 
cheroiaient  h  se  rendre  ind^pendants. 
Nogai,  le  plus  o^Iebre  d'entre  eux, 
y  rdutfit,  srace  h  la  protection  de 
rempereur  Michel  Paltologue,  et  fut 
le  premier  chef  de  ces  fameux  Tatares- 
NosaTs  qai  passdrent  dans  la  steppe 
du  Kouban  et  dans  laTauride  au  com- 
mencement du  XVir  sidde. 

G^nes,  heureuse  et  fi^re  d'avoir 
acquis  une  colonic  aussi  importante , 
pourvot  a  son  gouvemement  par  des 
tois  qui  temoignaient  tout  fe  prix 
qu'elle  y  attadiait.  Chaque  ann^  eile 
y  envoyait  un  consul  choisi  dans  Tune 
ilcs  families  gtooises  les  plus  consi- 
d^r^.  Ce  haut  fonctionnaire  emme- 
oait  avec  lul  un  proconsul  charg6  de 
le  remplaoer  en  cas  de  d6o^.  Le  consul 
s'entouraitde  magistrats  et  d'emj^ov^ 
qui  tons  devaient  dtre  G^nois.  Ennn, 
la  m^tropole  institua  I'ofQce  de  Kha- 
zaria  et  oelui  de  Campagna,  Le  pre- 
mier r^dait  h^  GiSnes  :  c*^it  un  ve- 
ritable ministdre  des  colonies,  dont 
le  nom  seul  rappelait  la  plus  impor- 
tante des  possessions  de  la  r^ublique. 
Le  leoond  etait  ^bli  k  Caffa  :  if  ju- 
pit  les  contestations  survenues  entre 
Ks  Gteis  et  les  Tatares;  souvent 
nkat  oes  demiers ,  pleins  de  confiance 
dans  SOD  ^quit^,  en  appelaient  k  ses 
d^'oos  pour  les  diffi^ends  qui  s'61e- 
raient  en£re  eux. 

Cependant  les  V^nitiens  n*avaient 
pas  VQ  d'on  ceil  d'indifiference  le  d^- 
vetoppement  de  la  nouvelie  colonic  g^- 
noise.  Le  moment  vint  ou  leur  jalou- 
sie dut  6clater,  ne  pou?ant  endurer 
une  plus  longue  ^preuYc.  lis  enyoy^- 
rentdonc,  en  Tannde  1396,  vingt- 
cinq  galores  qui  mirent  la  colonic  a 
sic,  et  ddtniisirent  en  quelques  jours 
I'ouTrad^  de  piusieurs  annto.  Cen 
etait  £ut  de  cet  dtablissement  si  les 
clients  ne  fiissent  Tcnus  au  secours 
des  vaincas.  L'hiver,  c^tte  ann^l^  ^ 
^  d'une  rigaeur  excessive ;  une  hor- 
rible femine  d^la  la  presqulle  en- 
tiere,  a  tel  point  que  les  Vdnitiens, 

Jii  avalent  cm  prendre  possession 
on  paradis  terrestre ,  se  virent  con- 
tfaints  d'abandonner  leur  nouvelie 
cooqu^te,  apres  y  avoir  perdu  le  tiers 

2*  UvraUon,  (  Cbimbs.  \ 


de  leurs  soldats.  lis  aTaient  Jet6  les 
bases  de  piusieurs  ^tabiissements  sur 
la  cdte  septentrionale  de  la  presqutle 
Trach^,  dans  la  mer  d'Azow;  on 
croit  y  reconnaltre ,  de  nos  jours,  les 
ruines  d'une  ville  qu'ils  y  avaient  fon- 
dee. 

Les  Gdnois ,  rentr^  chez  eux ,  s*ap- 
pliquerent  si  bien  k  rdpawr  les  d^s- 
tres  de  cette  ann^  fatale,  que  la  ville 
de  Caffa  se  vit,  en  peu  de  temps ,  plus 
florissante  que  jamais.  EUe  avait  ac- 
quis, en  1318,  une  telle  importance, 
que  le  (lape  Jean  XXII  la  choisit 
pour  r^idence  d'un  dv^ue  mdtropo- 
titain,  dont  la  juridiction  s'^toioait 
du  Pont-Euxin  jusqu'au  pays  des 
Russes. 

Depuis  un  si^e  le  royaume  du 
Bospore  n'existait plus.  Lardpublique 
de  cherson,  abandonn^  h  elie-m^me 
par  rimpuissance  des  empereurs  ^- 
zantins,  avait  6galement  subi  le  joug 
des  Tatares.  Ceux-ei  et  les  Gdnois  do- 
minaient  seuls  alors  dans  la  Crim^. 
Mais  les  fiers  Liguriens  toitaient  les 
descendants  des  compagnons  de  Tchin- 
ghis  avec  le  mdpris  que  les  peuples 
civilis^  tdmoignent  aux  barfoares,  et 
ces  derniers ,  a  leur  tour,  ne  suppor- 
taient  qu'avec  impatience  le  voismage 
de  oe  peuple  maraiand  qui  s'dtait  in- 
troduit  chez  eux  h  I'aide  d*un  vil  stra- 
ta^dme.  La  paix ,  on  le  voit ,  ne  pou- 
vait^trede  longue  dur^;  la  guerre 
dclata,  en  1342,  a  la  suite  d'un  meurtre 
oommis  par  un  Gdnois  sur  un  Ta- 
tare.  Le  khan  qui  regnait  alors  dans 
la  presqu'tle  r^olut  de  tirer  une  ven> 
geance  ^latante  de  cet  assassinat , 
mais  il  cut  Torgueil  de  croire  que  sn 
volenti  suffirait  pour  chasser  des  voi- 
sins  aussi  incommodes;  il  leur  signifin 
doncd'avoir^dvacuer  immddiatement 
tous  leurs  dtablissements  sur  une  terre 
qui  n'dtait  point  h  eux.  On  devine  la 
reponse  des  Gdnois ;  elle  fut  telle  que 
le  khan  ne  crut  pas  devoir  user  d'une 
plus  grande  longanimite.  II  s'avanca 
a  la  tete  d'une  puissante  arm^,  et 
vint  mettre  le  si^e  devant  Cafifa.  Son 
espoir  de  s'emparer  de  cette  ville  fut 
dequ  comp^^ment;  il  ne  put  ni  I'en- 
lever  de  vive  force ,  ni  la  prendre  par 


18 


L'UNIVERS. 


fiamiae ;  bien  plus ,  la  lonnieuT  du  si^ 
r^uisit  ses  propres  soMats  k  un  6tat 
de  dendment  tef ,  quMl  vit  le  moment 
ou  lui-mdme  seraif  forc^  de  se  livrer 
k  discretion  aux  assieg6s.  Alors,  il 
accepta  la  mutation  que  G^nes  lui 
offrait  en  faveur  de  sa  colonie.  Une 
paix  hnxxrite  fut  jur^  entre  les  par- 
ties bellig^rjjintes  :  les  Tatares  recon- 
nurent  Texistence  de  droit  des  colonies 
liguriennes ;  les  colons ,  k  leur  tour , 

Sermirent  k  un  pr^fet  tatare  de  rosi- 
er k  Caila ,  pour  y  r^ler  les  affaires 
de  police  et  de  commerce  qui  concer- 
naient  uniquement  les  hommes  de  cette 
nation ;  ce  magistrat  devait  6tre  choisi 
par  le  khan  et  confirm^  par  les  G^ 
nois.  Ces  conditions  furent  ex^uti^es 
durant  plusieurs  ann^,  quoique  sou- 
vent  aft^to  par  des  contestations 
fri voles  en  apparence,  crueUes  par  les 
r^ultats. 

Le  temps  arriva  oik  Tempire  du 
Kaptchak  ,  d^ja  affaibli  par  la  defec- 
tion de  Nogai ,  allait  tomber  sous  les 
coups  d'un  ennemi  formidable.  Tok- 
tamisch  regnait  en  1406,  lorsque  Ta- 
merlan  vint  le  renverser  du  trone.  La 
defection  ^daircit  aussitdt  les  rangs 
des  vaincus ,  et  Ton  vit  surgir  de  ce 
d^membrement  du  Kaptchak  trois 
nouveaux  etats  ind^pendants :  le  kha- 
nat  de  Kasan ,  celui  d' Astrakan  et  ce* 
lui  de  Crimee.  Les  troubles  qui  fu- 
rent la  consequence  immediate  de  cette 
dissolution ,  se  manifesterent  avec  une 
grande  violence  parmi  les  Tatares  de 
la  peninsule.  L'anarchie  etait  k  son 
comble;  plusieurs  pr^tendants  k  la 
souverainete  s^etaient  pr^sentes  si- 
muitanement ,  et  chacun  avait  ses 
creatures.  Le  sang  allait  couler,  tandis 
que  le  peuple  flottait  encore  indecis  et 
consteme.  En  ce  moment  critiqjue, 
un  berger,  nomme  Gherai,  vient 
trouver  les  chefs  assembles ,  eondui- 
sant  avec  lui  un  jeune  homme  de  dix- 
huit  ans,  Hadjy,  qu'il  leur  presente 
oomme  le  descendant  de  Batou-khan 
et  de  Toktamisch.  Persecute  par  ses 
parents ,  ce  jeune  rejeton  d'une  race 
ilhistre  avait  dQ  sa  conservation  k  la 
pitie  de  Gherai.  Les  chefs  hesitaient 
sur  )e  parti  qu'ils  avaient  k  prendre^ 


iorsque  le  people  s'ecria  qu'il  ne  vou- 
lait  pas  d'autre  souverain  que  le  jeuoe 
Hadjy.  Celui-ci,  par  reconnaissanoe 

Sour  son  bienfaiteur ,  prit  alor^e  nom 
e  Gherai,  et  fut  le  chef  d'une  dy- 
nastic souveraine  qui ,  depuis  Tanme 
1440  jusqu'en  1783 ,  donna  des  khans 
a  la  Crimee.  La  famille  des  Gb^rai, 
auoique  dechue  du  trdne,  n'est  point 
eteinte;  c*est  elle  qui  foumiraitdes 
sultans  a  Constantinople,  si  la  race 
de  ces  derniers  venait  It  manquer. 

S^uant  au  berger,  ii  fiit  anobli ,  et  sa 
esoendance  est  connue  dans  Ffaii^e 
sous  le  nom  de  Tschaban-Gbefai. 

L  Hadjy -Gherai  re£na  glorieus^ 
ment  iusqu'en  1467.  iTeut  plusieuK 
demeies  serieux  avec  les  colons;  ii 
s'en  tira  toujours  heureusemeot.  Son 
fils  a!ne ,  Nour-Eddaulah ,  devait  lui 
suoceder ,  mais  il  fut  chasse  par  son 
frere  Menghely. 

II.    Men^eiy- Gherai  r  est  le 
plus  illustre  des  khans  de  Crimee.  U 

Sartage  avec  Mithra-dates  rhoDoeur 
'attacher  k  cette  oontree  de  |Nc»« 
souvenirs  historiques.  AppreDantaue 
^n  frere  s'etait  r^ie  auprto  deCa- 
simir  IV,  loi  de  Pofogne,  etquMlen 
avait  ete  accueilii  CavoraUen»nt ,  u 
craignit  que  ce  monarque ,  dont  il  con* 
naissait  les  liaisons  avec  le  khan  da 
Kaptchak ,  ne  tentdt  de  replacer  sur 
le  tr6ne  le  legitime  successeur  de 
Hadjy.  II  crut ,  en  oonsequence ,  de- 
voir rechercher  I'assistance  des  Rus- 
ses ,  qui  obeissaient  alors  au  jcraod 
prince  Iwan  III.  Pendant  qu'il  ne- 
gociait  pour  se  roenager  ce  puissant 
auxiliaire,  il  eprouva  de  la  parJJ* 
son  plus  jeune  frdre,  Hayder,  letnu- 
tement  qu'il  avait  lui-meme  6it  siuiir 
k  Nour-Eddaulah.  Renverse  du  trone 
et  ne  voyant  de  salut  que  dans  la  ^ 
tection  des  Genois ,  il  s'enfait  a  Cm. 
dont  le  consul  raccueillit  avec  bien- 
veillanoe,  et  l^i  assigna  MankoiipjP|>°'' 
residence.  Cetait  une  forteresseaniee 
a  douze  verstes  de  Balaclava,  rew- 
ire Mengheiy-Gherai  erlt-fl  termm* 
dans  cet  exil  son  obscure  existeaoe  sans 
un  evenement  qui ,  portant  a  la  »oi| 
un  coup  terrible  k  ses  P.«>^j^!: 
oomme  k  ses  ennemis ,  lui  rendit  i' 


CRIMI^E. 


19 


sceptre  Miapp^  de  ses  mains.  Nous 
avoos  dit  que  les  Tatares  ayaient  le 
privil^e  de  nommer  h  Caffa  un  pla- 
net que  rfntoiit6  g^noise  refusait  ou 
oonfljrmait  :  mais  en  1474,  le  prtfet 
Mainak  ^tant  mort,  le  khan  choisit, 
pour  ie  remplacer,  un  de  ses  lieute- 
nants nomme  Eminek.  Celui-ci  ar- 
rire  h  Caffa,  et,  selon  Tusage,  de- 
mande  Pinvestiture  au  consul  g^ois ; 
il  en  ^prouve  un  refus ,  car  la  veuye 
de  Mainak  avait  obtenu ,  k  l*aide 
d'une  forte  sooime  d'argent,  que  les 
d^positaires  du  pouvoir  refuseraient 
de  reconnattre  pour  pr^fet  tout  autre 
qoe  le  tils  atne  du  d^funt.  Eminek 
revint  auprte  du  kban;  et  celui-ci, 
Gboqa^  avec  raison  de  cette  conduite 
des  G^nois,  le  renvoya  une  seconde 
fois.  Tlouveau  refiis  de  la  part  des  co- 
lons ,  et ,  de  till ,  une  discussion  qui 
allait  amener  des  hostility,  lorsque 
les  deux  partis  adopt^nt  un  terme 
mojen  pour  pr^venir  Teffusion  du 
sang  :  oe  tilt  de  rejeter  h  la  fois  les 
deux  candidats  et  de  dioisir  un  autre 
prefet  Eminek,  indign^  de  la  fai- 
nesse  de  son  mattre,  autant  gue  de 
Hnjostioe  des  G^nois,  se  rendit  aus- 
sHot  a  Constantinople,  certain  d'y 
tronver  on  venseur.  Ce  poste  avanoe 
de  h  ehr^ente  ^it  tomb6 ,  depuis 
/rfos  de  vingt  annto  (1451),  au  pou- 
foir  des  CNmmans.  Mohammed  It  ap- 
penant  les  qu^relles  qui  divisaient 
ies  Tatar^s  et  les  G6nois,  con^  le 
profet  de  les  faire  servir  h  la  gloire 
da  croissaiit. 

Le  1"  juin,  une  flotte  de  quatre 
cents  cal^res  torques  se  pr^senta  de- 
vant  (S^ ,  pendant  qu*£minek  s*ap- 
prochait  do  <^te  de  terre  k  la  iSte 
d'one  arm^  de  Tatares  et  de  Turcs. 
Les  G^nois  jusque-lii  n'avaient  r6- 
ponda  que  par  le  m^prls  et  les  raille- 
ries aux  ennemis  qui  avaient  eu  Tin- 
loience  de  se  montrer  au  pied  de 
leuTs  remparts,  mais  cette  fois  ils 
eommenoerent  a  ^rouTcrdes  craintes 
serieiises,  que  r^enementjustifiabien- 
Mt  Ames  cinq  jours  d'un  feu  ^gale- 
ment  bien  nourri  de  part  et  d'autre , 
les  assi^g^  perdirent  tout  espoir  de 
roister  lon^-temps.  Une  deputation 


des  notables  g^nots  se  rendit  aupr^ 
d'Achmet ,  le  chef  de  Parm^  otho- 
mane,  et  lui  jpr^enta  bumblement  les 
clefs  de  la  Tiile,  se  recommandant  h 
sa  generosity.  Le  pacha  refusa  d'ri)ord 
de  les  recevoir;  mais  enfin,  touchy 
par  les  larmes  et  les  supplications  des 
vaincus,  il  envoya  un  de  ses  lieutenants 

(prendre  [X)ssession  du  palais  consu- 
aire.  Lui-m^me  fit,  le  lendemain, 
une  entr^  solennelle  h  Caffa ,  o£t  son 
premier  soin  fut  de  dresser  une  liste 
exacte  des  biens  et  des  en&nts  des 
habitants.  Quinze  milie  colons  furent 
envoy^  h  Constantinople  pour  y  ^tre 
incorpor^  k  la  milice  des  janlssaires. 
Lereste  des  habitants  fut  dirig6  vers 
la  m^me  capitale ,  pour  ^tre  colonist 
aux  environs  de  Pera. 

Les  autres  ^tablissements  g^ois 
tomb^nt  suooessivement  au  pouvoir 
du  vatnqueur,  et  entre  autres  la  for- 
teresse  de  Mankoup,  ou  se  trouTait 
Mengh^ly-Gh^rai.  Ce  prince,  envoys 
k  Constantinople,  d'a))ord  conune  es- 
clave,  y  fiit  recu  oomme  roi.  I!  fit 
avec  Mohanmiea  un  trait^  par  lequel 
il  admettait,  pour  lui  et  ses  suooes- 
seurs,  la  suzerainet6  du  Grand -Sei- 
gneur, et  le  droit  de  celui-ci  de  nom- 
mer et  ded^poser  les  khans  de  Oim6e. 
II  jurait  de  lui  ^tre  ftl^le,  et  de  lui 
foumir,  en  cas  de  guerre,  des  sub- 
sides en  hommes  et  en  argent.  De  son 
c6U,  remjpereur  othoman  reconnnt 
Men^hely-Gh^rai  pour  l^time  sou- 
veram  de  la  Crimee ,  s'engageait  k  le 
replacer  sur  son  tr6ne ,  lui  aooordait 
le  droit  d'arborer  cinq  queues  pour 
etendard,  et  d'etre  nomm^  aprte  lui 
dans  les  pn^respubliques.  Depuis  cette 
^poque,  les  Grands-Seigneurs  d^la- 
rent ,  a  leur  avenement  au  trdne,  que 
si  leur  race  vient  k  s'^teindre,  celle 
des  Gh^rai  doit  6tre  appel^e  a  la  rem- 
placer. 

Leregne  de  Mengh^ly-Gh^rai  nc 
dura  pas  moins  de  36  ans.  II  fiit  une 
suite  continuelle  de  guerres  glorieu- 
ses  contre  le  roi  de  Poloffne,  et  son 
alli6  le  khan  du  Kaptchi&,  qu'il  par- 
vint  m^me  k  renverser  du  trone. 
Fiddle  k  ses  traitfe  avec  Iwan-le- 
Grand ,  on  le  vit  devenir  le  principal 

2. 


20 


L'UNIVERS. 


instrument  de  la  puissance  des  Russes 
et  de  la  dtodenoe  des  Tatares-Mon- 
gols.  Quand  la  force  des  amies  ne 
sufiSsai!  pas  k  raccomnlissement  de 


ses  projeu,  il  appelait  k  son  aide  la 
ruse  et  la  politique ;  c*est  ainsi  que , 
^us  d'une  lois,  11  panrint  k  soulever  les 
Mogais  du  Kaptchak  contre  leur  souve- 
raiUf  etdut^cette  puissante  diversion 
d'^ckitants  suoc^.  Deux  fois  il  ra- 
vaga  la  Yolhinie  et  la  Podolie;  mattre 
de  ICiew,  il  fit  6prouver  aux  Polonais 
Jes  plus  grands  d^sastres,  et  leur  en- 
leva  jusqu'^  cent  miUe  captifs.  Ce  fiat 
dans  Tune  de  ces  expraitions  qu'il 
fonda  OtchaJunv ,  au  confluent  du 
Bog  et  du  Dnif^per,  sur  les  mines 
d'Alktros,  petite  ville  qui  avait  ap- 
partenu  k  une  reine  des  Sauromates, 
et  que  les  G^tes  d^tmisirent  en  m^me 
temps  gu*01bia,  un  si^le  avant  J^ 
sus-Gbnst.  Mengh^Iy  toivit  k  oe  sujet 
k  Iwan  III  :  «  Je  suis  toujours  le 
«  mtoe  bomme  pour  mon  Ure  le 
«  grand  prince,  et  je  constmis  k  pr6- 
•  sent,  a  la  bouche  du  Dnieper ,  sur 
«  la  vieille  ville ,  une  nouvelie  forte- 
«  resse ,  afin  de  nuire  aux  Polonais. » 

La  guerre  ne  fut  pas,  toutefois,  Tu- 
nique  occupation  de  cet  illustre  mo- 
narque.  II  prot^ea  les  arts,  encou- 
rages Fa^iculture,  et  ne  nd^lisea  rien 
de  ce  qui  pouvait  hUter  la  civilisation 
de  ses  peuples.  Sous  son  r^ne,  on 
vit  les  Tatarespratiquer,  pour  la  pre- 
miere fois,  Tusage  des  silos,  ou  fosses 
destinto  a  la  conservation  des  grains. 
Elles  ^taient  creusdes  dans  une  terre 
areileuse  et  soumises  pr6alablement 
k  raction  du  feu. 

Mengh^ly  releva  les  mines  d'Eski- 
Rrim  et  de  quelques  autres  villes  que 
la  ^erre  n'avait  pas  6pargn^.  II  fit 
bdtir  plusieurs  forteresses,  des  mos- 
quto  sans  nombre  et  des  palais  d'une 

Srande  magnificence.  BaRktchirSirai 
evint  en  particulier  Tobjet  de  ses 
soins,  et  acquit  une  telle  splendour 
que  depuis  oe  moment  elle  ne  cessa 

r\  d'etre  la  r^idence  des  kbans  de 
Crim^ ,  jusqu'ik  la  chute  de  leur 
domination.  On  y  voit  encore  leurs 
mausol^  et  les  restes  de  ce  ricbe 
palais  dd  a  la  munificence  du  fonda- 


teur  d*Otcbakow.  Deux  inKriptioos 
lapldaires  attestant  les  titres  de  oe 

Srince  k  la  reconnaissance  des  amis 
e  la  bdle  ardiitecture.  Lejmlais  da 
khans  k  Bakhtchi-S(6ra!,  successive- 
ment  embelli  par  les  suooesseurs  de 
Mengbdy ,  paratt  encore  une  de  oes 
fiamtastiques  conceptions  dont  les  poe- 
tes  de  rOrient  emoellissent  lean  oon- 
tes.  lA ,  on  voyait  de  larges  rosaces 
d^up6es  ^Jour,  comme  une  pre- 
cieuse  dentelte,  des  ddmes  et  des  ai- 
ffuilles  de  la  plus  ^^ante  l^erete , 
des  portes  en  ogives,  de  petites  oo- 
lonnes  nannies  en  faisceau,  de  riches 
inscmstations ,  des  murs  tapisses  de 
mosaiques.'  converts  d'or  ou  d'^- 
tantes  oouJeurs  ,  de  larges  p6risfyles 
pav6s  en  maifore,  des  bosquets  de 
myrtes  et  de  roses,  et  mille  toataioes 

2ui  versaient,  en  murmurant,  une  eau 
ralcbe  et  limpide.  Tout ,  dans  cette  r^ 
sidence  des  andens  khans,  nppeile 
I'Alhambra  de  Grenade.  Ce  palais  de 
faerie  fait  k  juste  titre  rorgoetl  des 
habitants  de  Bakhtchi-S^rai.  Coocfae 
sous  un  feuillage  sombre,  anpHs 
d'une  limpide  cascade ,  le  Tatare  se 
ra^peile  ces  g^ntotions  de  goerriers 
qui,  dans  les  loisirs  de  la  paix,  v^ 
naient  ici  prodiguer  les  tr^rs  edev^ 
aux  vaincus.  II  contemple  ces  mar- 
bres,  ces  tables  de  porphyre,  ces  ara- 
besques en  stuc,  ces  peintuies ,  ces 
bi^ro^lyphes ,  ces  domres,  et  ces  in- 
scriptions sacr6es,  et  se  demande  ce 
que  sont  devenus  les  mattres  de  cette 
somptueuse  demeure;  il  voudraitsa- 
voir  oik  sont  all^  leurs  s^millaDtes 
odalisques  et  leurs  troupeaux  d'es- 
claves.  Les  mines  repondent  :  lb 
ont  disparu  avec  I'onde  du  ruisseao 
qui  coulait  a  leurs  pio^,  avec  la  fo- 
m^  du  parfiwi  aont  ils  aimaieot 
k  s'enivrer. 

Dans  les  derni^res  annto  de  sa  n^ 
Men^h^ly  eut  la  faiblesse  de  o6der  aox 
soUicitations  de  Sigismond  I'',n)ide 
Pologne  :  il  rompit  ses  vieui  traittt 
avec  les  Russes ,  et  d^clara  la  gac^ 
k  leur  grand  prince  Vassili  V*  Les 
hostilites  durmnt  mdme  plosicnn 
annto  avec  des  suoo^  vari&.  ^^^ 
la  paix  fat  renouvel^,  et,  deux  an- 


ciiim£e. 


ai 


(  1514  de  J^sufrChrist), 
tenniiia  tine  Tie  gloriease, 
laqaelle  iJ  arait  monM  les 
▼ertm  qui  font  les  bons  rois ,  et  les 
qualiUs  qui  constituent  les  grands 
Bomnies.  Son  fils  atn^,  Mohammed- 
GMrai,  loi  SQOo6da. 

III.  Mohammed-Gb^rai  I*',  prince 
d*liomear  belliqueuse,  employa  les  buit 
annto  de  son  r^ne  k  latter  oontre 
les  Hoscovites  et  les  Circassiens.  On 
croit  qa*]l  p^rit  dans  une  exp^ition 
oontre  les  Dadians  ou  princes  de  la 
Mingr^ie  (1532-8). 

Pendant  plus  de  deux  siecles,  I'bis- 
toire  des  khans  de  la  famiile  de 
Gb^rai  ofifre  nne  triste  monotonie  de 
goerres  sans  Mat  Gomme  sans  r^iul- 
tat  d^nitif  avec  les  Polonais,  les 
Russes  ou  les  Tatares  du  Kaptchak. 
A  cbaoroe  av^nement ,  le  nouveau 
khan  aUait  h  Constantinople  recevoir 
I'lnYestitare  de  ses  fonctions.  Quel- 
quefois  le  Grand-Sei(^eur  d^posait  le 
prince  regnant  et  lui  substituait  un 
autre  souverain,  pris  6galement  dans 
la  dynastie  des  Gh^rai.  II  paralt,  d'ail- 
lean,  que  le  droit  de  primogeniture 
eUdt  fort  mal  observe  parmi  ces  prin- 
en,  car  on  vit  souvent  plusieurs  freres 

se  disinter  le  pouvoir,  et,  en  cesoo- 
casiooSy  le  saltan  choisissait  selon  ses 
eonrenanceSfet  non  selon  le  droit  d'al- 
oesse.  A  cette  mtoe  ^poque  figurent 
les  pnnoes  de  Mangoup,  sorte  de  sei* 
gnears  suzerains,  tributaires  k  la  fois 
ies  Tatares  et  de  la  PortoOthomane; 
noais  ce  qui  caract^rise  phis  particu- 
lierement  cette  p^riode,  c'est  Tim- 
portamce  que  commence  h  aequMr 
rblstaire  d^un  nouveau  peuple,  forra^ 
de  la  lie  de  diverses  nations  errantes 
ft  baii>ares ;  nous  voulons  parler  des 
Cosaques.  Leurs  traits  rappellent  ceux 
des  Mongols ,  et  leurs  moeurs  se  rap- 
prodient  incontestablement  de  celles 
des  andens  Scythes. 

IV.  Sadet-Ghtoi  V  rtoia  douze 
ans.  En  montant  sur  le  trone  il  avait 
envoys  son  fr^re  Sahed  k  Constanti- 
nople pour  lui  servir  d*otage.  Battu 
hiHn^me  aux  environs  d'Azow  par 
an  autre  de  ses  Mres ,  du  noni  dls- 
lam ,  il  d^^posa  la  couronne,  que  le 


Grand-Seigneur  donna  li  Sahed  (15SS). 

V.  Sahed-Ghtel  P',  s*U  but  en 
croire  les  toivains  orientaux  ,  fiit  un 
prince  cruel  et  sanguinaire.  II  lut  de- 
pose en  1551 ,  et  assassin^  holt  an 
apr^,  par  Dewlet,  son  cousin  et  son 
comp^titeur. 

VI.  Dewlet-Ghdrai  I*'.  On  sait  peu 
de  chose  de  ce  monarque ,  bien  qu'il 
ait  r^gn^  vingt-six  ans  (1551-1577). 
Sous  le  r^e  prMdent,  il  avatt,  oon- 
form^ment  ik  I'usage,  r^id6  k  Constan- 
tinople, pour  V  servir  d'otage. 

VII  et  VIIi:  Mohammed-Gh^ai  II 

Si  lui  suoo^,  avant  refuse  de  mar- 
er  oontre  les  Persans,  fiat  d^pos^ 
en  1584,  apr^  six  ann^  de  r^ne. 
II  se  retira  cfaez  les  Cosaques  ,  qui 
embrass^nt  sa  cause  et  lui  foumi- 
rent  une  armte  pour  I'aider  k  recon- 
quer la  couronne.  Mohammed  ftit 
vaincu  et  tu^  par  les  Tures;  mais  son 
successeur,  Islam-Gb^rai  I*',  p^t 
dans  cette  mime  rencontre  (1587). 

IX  et  X.  Ghazy-Gh^rai  I*%  fils  de 
Dewlet,  montra  de  grandes  quality 
et  une  plus  grande  cruaut6.  Le  sultan 
Texila  en  1596;  mais  au  lieu  d'ob^ir , 
ce  prince  oourageux  se  rendit  k  Con- 
stantinople mtoe,  oik  il  plaida  sa 
cause  et  obtant  son  pardon.  Pendant 
son  absence,  son  (rare,  F^tah-Ghi^ 
rai  I**,  s*^tait  arrog^  le  pouvoir  su- 
preme ;  en  expiation  de  cette  audaoe, 
Ghazy  le  fit  p^rir.  II  mourut  lui- 
mtoe  Tan  1608-9. 

Xi.  Sonfr^,S^laniet-Ghte!I*% 
qui  lui  suoo^da,  €ta\t  hydropique.  II 
suooomba  Fan  1610. 

XII.  On  ne  oonnatt  pas  les  motifs 

Sii  port^rent  le  sultan  k  d^poser 
jan-Beyg-Gh^ral,  frkre  et  successeur 
des  pr6c«aents.  Ce  prince  avait  r6gn< 
glorieusement  de  1610  k  1638,  et 
avait  fait  preuve  d'une  rare  Inravoure 
et  de  beaucoup  de  talent  dans  la 
guerre  qu*il  avait  soutenue  contre  les 
Persans ,  au  sein  mdme  de  leur  em- 
pire. 

XIII.  Mohammed-Gh^rai  III,  oin- 
qui^e  fils  de  Dewlet,  portait  la  plus 
tendre  amiti^  k  sonfrereChahyn.  Mais 
celui-d,  abusant  des  bont^  de  sonsou- 
verain,  leva  T^ndard  de  la  r^bellion^ 


22 


L'UIIIVERS. 


et  marcha,  a  la  t^te  d*uiie  troape  nom- 
breuse  de  Tatares ,  contre  son  bien- 
faiteur  et  son  fr^re.  Mobamined  sue- 
comba  les  annes  k  la  main ;  mais  le 
fratricide  n'osa  pas  ceindre  sod  front 
de  oette  oouronne  qu*il  venait  d'en- 
sangianter.  Redoutant  avec  raison  la 
colore  du  sultan ,  il  chercha  un  re- 
fuge a  la  cour  de  Perse,  aupr^d'Ab- 
bas-le-Grand  (1627).  Djan-Beyg  fut 
alors  r^tabli  sur  le  trdne  de  Grim^ , 
au*il  occupa  jusqu'en  1638.  A  oette 
epoque  il  rut  a^pos^  de  nouveau. 

XIV.  La  fiicilit^  avec  laquelle  la  oour 
de  Constantinople  accueillait  ks  d^non- 
ciations  dirig^  oontre  les  khans,  et 
la  promptitude  qu'elle  mettait  k  66- 
poser  ces  fiintdmes  de  rois,  sont  des 
t^moignages  irrtoisables  de  la  vtoa- 
lit^  de  oette  cour ,  autant  que  de  Tes- 
prit  d'intriffue  qui  animaii  les  mem- 
Dres  de  la  ramllle  de  Ghim.  Enaiet, 
qui  8uco6da  k  Djan-Beyg,  fat  d^pos^ 
aprte  deux  ans  seulement  de  r^gne. 
( 16S6— 7. ) 

XV.  II  eut  pour  suocesseur  B^ha- 
der ,  protecteur  de  la  scienoe  et  de  la 
po^ie,  savant  et  po^  lui-mdme ,  qui 
mourut  en  1640. 

XVI.  Son  jeune  frere,  Mohammed- 
Gh^rai,  quatri^me  du  nom,  monta 
sur  le  trdne.  Inhabile  a  tenir  les  r^nes 
du  gouvemement ,  ce  prince  fiit  exM 
apra  trois  ans  de  regne ;  il  reviendra 
sur  la  sc^ne  politique. 

XVII.  Isiam-Gherai  II ,  qui  oeignit 
la  couronne  pendant  18  ans  ( 1648  ii 
1655 ) ,  a  laiss^  de  lui  une  mtooire 
glorieuse.  Ses  suoote  contre  les  Mos- 
eovites,  sa  bravoure,  sa  gto^rosit^  et  sa 
justice  font  encore  Tobjet  d'une  v^n^- 
mtion  traditionnelle  parmi  les  Tatares. 
Afirte  lui,  Mohammed-Ghdrai  IV,  son 
preddoesseur ,  revint  au  pouvoir. 

En  I'ann^  1647 ,  Vladislas  VII ,  roi 
de  Pologne ,  ayant  refuse  de  payer  au 
khan  de  Crina^  le  mime  tribut  de 
pieces  d'or  et  de  peaux  de  moutons  que 
son  pr^^cesseur,  Sigismond  III,  lui 
av^t  accord^ ,  le  khan  joignit  ses  ar- 
mes  k  celles  du  oelebre  Kmielnitski , 
hettman  des  Cosaques  -  Zaporogues , 
^aloiten  guerre  avec  la  Pologne.  I^4i 
resiiltnts  de  cette  glorieuse  campagne 


Talurent  aux  Tatares  de  riches  de- 
pouilles  et  des  monceaux  d*or  enleves 
aux  vaincus.  Leur  puissance  paraii, 
k  cette  Ipoque,  avoir  atteint  sa  plus 
brillante  phase.  En  efifet,  les  bos- 
tilit^  ayant  recommeno^,  en  1649,  eo- 
tre  le  roi  de  Polosne,  Jean  Gasimir, 
et  Kmielnitski,  le  khan  de  Crim^e 
conduisit  k  ce  dernier  un  seooors  de 
100,000  Tatares.  L*bettman,  de  son 
odi€ ,  avait  reuni  200,000  oombattants. 
Cette  armte  formidable,  qui  rai^ait 
les  anciennes  incursions  aes  Softbes, 
d'Attila  et  de  Tchin^is-Khan,  iDOoda 
ks  provinces  polonaises,  semUaMea 
ces  flots  de  sable  poussite  par  le  fu- 
neste  steoum,  qui  d^astent  et  rai- 
versent  tout,  les  villes  et  les  Gam- 
pagnes ;  qui  comblent  les  vallto,  en- 
sevelissent  les  ruisseaux,  et  ne  laissent 
derri^re  eux  que  le  dtert  et  la  moit. 

La  Ixavoure  et  la  prudence  de  Jean 
Casimir  furent  insuffisantes  poor  ar- 
riter  ce  torrent  d^astateur;  il  con- 
dut  foro^ment  k  Zborow  (17  aodt 
1640 }  un  traits  on^reux,  par  tequd 
il  s'engagea  notamment  k  payer  an 
khan  de  Crim^  la  pension  annoeUe 
que  lui  avait  accord^  Sigismond  III. 
aes  conditions  avec  Thetfinan  ne  soot 
pas  du  domaine  de  cette  histoire. 

Quelques  intrigues,  auxqueDes les 
seigneurs  polonais  ne  furent  pas  stran- 
gers, ayant  amen^,  d^  TannSe  sui- 
vante,  une  rupto«  entre  Jeai^Casi- 
mir  et  Kmielnitski ,  le  khan,  avide 
de  gioire  et  de  butin,  aooourut  a  la 
premiere  invitation  de  son  ancieo 
alli^;  mais  la  victoire,  infideie  oette 
fois ,  passa  du  cdt^  des  Potonais  (bo- 
taille  de  B^resteko,  29  juin  1651 ) : 
on  dit  m6me  que  les  Tatares ,  saisis 
d'une  terreur  panique,  caus^reat Ja 
d^uie  complete  de  rarmee  des  allies. 
Le  khan  perdit  ses  Equipages,  sa  tente, 
son  ^tendard,  ainsi  que  le  petit  tani- 
bour  d*arffent  dore ,  au  moyen  du^ 
il  appelait  les  personnes  de  sa  suite. 
La  retraite  des  Tatares  fut  si  prect* 
pit^ ,  qu'au  m^ris  des  prtont^  re 
ligieux  ilsabandonnereotauxcnretiei^ 
leurs  morts  et  leurs  blesses.  L'annee 
suivante ,  le  khan  fit  la  paix  avec  iean 
Casimir  :  il  8*engagea  a  entrcr  sur  les 


CRIM^E. 


i3 


termdes  Cosaques ,  ses  ancieos  alli^ 
ii  d^Taster  leurs  colonies,  et  k  lui  re- 
mettre  tous  les  prisooDiers  qui  tom- 
beiaient  en  son  pouToir.  A  son  tour, 
le  roi  de  Pologne  promit  de  ne  point 
quitter  les  armes  qu'H  n*edt  mis  son 
alli^  en  possession  du  kbanat  d^As- 
trakan.  De  leur  odt6 ,  les  Cosaques  se 
fldrent  sous  la  protection  de  la  Russie ; 
ct  on  pent  dire  que ,  de  oe  moment, 
^tent  v^taUement  les  pretentions 
des  Russes  sur  la  Crim^. 

Instruit  a  F^aole  du  malbeur,  Mo- 
hammed r^gna  dorieusement  pendant 
huit  annte.  Ii  sootint  des  guerres 
heureuses  contre  les  chr^iens  et  les 
Cosaques;  ce  qui  ne  Temp^Scha  pas 
d'etre  d^pos^  une  seoonde  fois  (1663). 
L'usage  ^it  alors,  pour  les  khans 
disgrad^ ,  de  se  rendre  k  Constanti- 
nople; mats  Mohammed  jucea  plus 
prudent  de  se  r^fiigier  chez  les  A.al- 
moocks. 

XVm.  Adil-Gh^rai,  dix-huititoe 
khan,  ^tait  fils  d'un  prince  que  des 
malbearsdomestiques  ayaient  forc^  k  se 
faire  gardien  de  tronpeaux,  et  qui  avait, 
acause  de  cela,  requ  le  nom  de  tchaban 
(ber^er.) 

Loin  d'apporter  sur  le  trdne  la  sim- 
plidt^  et  la  droiture  de  la  vie  des 
cfaainps,  Adil  se  montra  f(6roce ,  astu- 
deax  et  d^bauch^;  son  regno  ne  ftit 
oa'ane  s^rie  de  crimes.  Ce  monstre  fut 
dAos^  en  1673. 

XIX.  Seiym-Gh^rai  I",  qui  lui  suo- 
eeda,  aurait  pu  se  faire,  k  peu  de 
frais,  une  reputation  de  bonte  et  de 
sagesse,  tant  le  souvenir  du  r^gne 
precedent  rendait  les  Tatares  fadles  ill 
contenter ;  mais  ayant  voulu  soumettre 
ses  sujets  li  de  noureaux  impdts,  il 
soaleva  de  vives  reclamations,  et  four- 
nit  ainsi  un  pr^texte  k  la  Porte  pour 
le  deposer  (1678).  Nous  le  verrons  re- 
paranre  plusieurs  fois. 

XX.  L'histoire  ne  dit  rien  de  son 
soccesseur  Mourad ,  si  ce  n*est  qu'il 
perit  en  1682—8. 

XXI.  Hadiy-Ghera!,Tingt«tmnitoe 
khan,  noontra,  en  diverses  ciroon- 
stances ,  une  rare  intr^dite;  il  paralt 
m4me  que  la  Porte  s*efiraya  de  ses  qua- 
lity guerrieres ,  puisqn'elle  le  d^posa 


apres  huit  mois  settlement  de  regne , 
donnant  pour  motif  la  pretendue  ava- 
rice de  ee  prince. 

Seiym  fut  alors  rappeie  k  la  t^te  du 
gouvemement.  Pendant  sa  oourte  ab- 
sence, ses  sujets  avaient  iq;>pris  k  le 
regretter;  aussi  levirent-ils  reparaltre 
avec  une  grande  joie,  et  il  justifia  leurs 
esperances  en  regnant  avec  douceur, 
avec  bonte ,  et  surtout  avec  justice. 

En  1689,  le  bonheur  dont  les  Ta- 
tares jouissaient  sous  le  gouvemement 
de  Seiym  fut  trouble  par  une  invasion 
des  Moscovites.  Le  czar  parut  subite- 
ment  au  eceur  de  la  Crimee,  tratnant 
k  sa  suite  une  formidable  artillerie, 
ou  figuraient  quelques  obusiers,  que 
les  habitants  du  pays  envahi  vovaient 
alors  pour  la  premiere  fois.  uedat 
des  bombes  porta  Tefifroi  et  le  d^r- 
dre  dans  les  rangs  des  Tatares  :  c*en 
etait  fait  de  ce  peuple  si  le  sang-froid 
de  Seiym  n*edt  pas  ete  plus  grand  que 
le  peril.  Sa  bravoure  ranima  Tardeut 
de  ses  sokiats;  ils  revinrent  a  la 
charge ,  forc&rent  leurs  ennemis  k  Ui- 
cher  le  pied,  les  poursuivirent  sans 
relAche  Pepee  dans  les  reins,  et  les 
foroerent  enfin  k  sortir  de  la  penin- 
sule.  Seiyni  ne  recueillit  pas  les  fruits 
de  sa  victotre  :  la  jalousie  de  la  Porte, 
et  les  intrigues  de  quelques  ambitieux , 
le  contraignirent  li  ceder  une  seconde 
fois  un  pouvoir  qu'il  exerqait  si  bien. 

XXII  et  XXIII.  Deux  suoeesseurs 
pass^rent  rapidement  sur  le  tr6ne 
vacant,  Sadet-Gheral  II  et  Safah- 
Gherai. 

En  1693,  Seiym  fut  rappeie  de  nou-. 
veau ;  faveur  qu'il  dut  a  k  gravite 
des  ctroonstances.  La  guerre  avalt 
eclate  entre  les  Turcs  et  les  Imperiaux , 
et  oeux-ci ,  k  la  suite  d'une  campagne 
heureuse ,  s'etaient  empares  de  quel- 
ques places  importantes.  Seiym  se  mit 
k  la  tete  des  armees  otfaomanes,  bat- 
tit  les  Russes  en  plusieurs  rencontres, 
leur  reprit  les  vtlles  oonquises,  et 
rentra  dans  ses  etats  pour  y  jouir  en 
paix  de  sa  gloire,  de  la  reconnaisaanoe 
de  la  Porte ,  et  de  Tamour  de  ses  su- 
jets. Eniin ,  en  1698 ,  il  demands 
et  obtint  la  permission  de  reftiellKa  la. 
couronne  a  son  61s  atne. 


u 


LUmVfiRS. 


XXIV.  Dewlet-Gh^ai  II  ne  fut 
oocup6  (m*k  &ire  la  guerre  aux  chr^ 
tiens ;  il  leur  enlevade  riches  depouilles, 
dont  il  enrichit  sea  sujets.  On  ignore 
Um  motifs ,  si  toutefois  il  en  existe , 

aui  port^rent  le  Grand-Seigneur  a  le 
6poser  vers  Fann^  1703.  Ge  prince 
remonta  sur  le  trdne. 

A  cette  ^poque ,  S^lvm  reparalt  une 
quatri^me  rois  a  la  tete  des  affaires; 
mais  alors  il  ^tait  vieux  et  accabl^ 
d*infirmit6s  :  aussi  les  deux  annees 
de  son  nouveau  regne  sont-elles  dd- 
pourvues  de  tout  eclat. 

Selym ,  diene  contemporain  de 
luouis  XIV  et  a'Abbas-le-Grand,  mou- 
rut  en  1704. 

XXV.  Ghazy-Gh^rai  II,  second  fils 
de  ce  prince ,  fit  jouir  ses  peuples  de  tout 
le  bonheur  que  peuvent  procurer  la 
paix  et  la  confiance  sous  un  gouver- 
nement  patemel.  II  mourut  en  1707. 

XXVI.  Kaplan -Gb^rai,  troisieme 
fils  de  S^lym ,  ne  fiit  pas  heureux  dans 
les  guerres  au'il  entreprit;  et  la  Porte 
crut  devoir  le  d^poser  apres  un  an  de 
regne.  Rhodes  fut  le  lieu  d^igne  a 
son  exil. 

Dewlet-Gh^rai  II  est  rappel6.  A 
Texemple  de  son  fr^ ,  il  attaque  les 
Moscovites;  mais,  plus  heureux  que 
lui ,  il  les  bat  en  diverses  rencontres, 
ravage  leur  territoire ,  enleve  du  bu- 
tin  et  des  prisonniers,  et  force  Pierre* 
le-Grand,  qui  r^gnait  alors,  k  venir 
lui-m6me  defendre  ses  domaines  a  la 
t^te  d'une  puissante  arm^.  De  leur 
cdt6,  les  Turcs  se  joignent  aux  soldats 
de  Dewlet,  et  leurs  forces  reunies 
vont  affronter  le  czar  sur  les  bords 
du  Prutb.  La  bataille  dura  un  jour  et 
demi  :  le  suooes  en  fiat  douteux;  mais 
]es  Kusses  manquant  de  vivres,  et 
M^uits  k  Textremit^,  6taieot  peutngtre 
perdus  sans  ressource,  si  Catherine, 

?iii  n'^tait  encore  que  la  maltresse  de 
ierre  I*"*^,  ne  se  lilt  devout  pour 
eux.  Elle  tenia  de  negocier  elle-m^me 
directement  avec  les  Turcs,  et  le  sue- 
0^  cotpronna  son  entreprise.  La  Rus- 
sie  abandonna  la  ville  d'Azow ,  et  la 
paix  fut  signee  imm6diatement  (1711). 
Ce.  Itat  r  dit-on ,  le  souvenir  de  cet 
evenement  qui,  plusieurs  ann^  apres, 


engagea  Pierre-le-Grand  a  faire  cou* 
ronner  sa  maltresse. 

La  Porte  reconnut  nial  lea  services 
^minents  que  Dewlet  lui  avait  reodus 
dans  cette  glorieuse  campagne;  elle  le 
d^posa,  en  1713,  pour  rappder  Ka- 
plan-Gberai.  Dans  cette  seconde  pi^ 
riode  de  son  regne,  Kaplan  fut  investi 
du  oommandement  d*one  arm6e  otiio- 
mane  destine  k  agir  centre  les  Polo* 
nais.  II  entrait  sur  leur  teiritoire  au 
mois  de  decembre  1716,  lorsqu*il  recut 
la  nouvelle  de  sa  deposition;  il  fut  fe- 
Idgu^  k  Brousse,  d*ou  nous  le  ver- 
rons  revenir  au  pouvoir  une  troisieme 
fois. 

XXVII.  Kara-Dewlet,  fils  d'Adil- 
Gh^rai ,  fut  cboisi  pour  le  remplacer. 
Ce  prince,  dg^  alors  de  50  ans,  n'e- 
tait  nullement  agr^able  aux  Tatares, 
qui  refuserent  de  le  reconnaltre  pour 
souverain.  lis  envoy^nt  m^me,  a  cet 
effet,  des  ambassadeurs  k  Constanti- 
nople. 

A.XVIII.  Sadet-Gh^rai,  troisieme 
du  nqm ,  ^tait ,  disent  les  ecrivains 
orientaux,  un  prince  lascif  et  avare. 
II  fut  d^pos^  apr^  sept  annees  de 
regne  ( 1724—6. ) 

XXIX.  Mengh^ly-Gb^rai  II ,  son 
successeur,  ^tait  unbon  prince,  qui 
reno^  aux  conqu^tes  pour  s'oocuper 
des  anatres  int^rieures  de  son  peuple. 
La  Crim^  ^tait  alors  infest^e  par  des 
bandes  de  voleurs  et  d'assassins  qui 
se  pr^sentaient  audacieuscment  aux 
portes  m^mes  des  villes.  A  ces  mal- 
faiteurs  se  joignaient  souvent  les  me- 
contents  et  les  rebelles.  Mengh^ly  prit, 
k  V^prd  de  ces  bandes ,  des  mesures 
si  vigoureuses,  qu'en  peu  d'ann^es 
elles  furent  d^truites  et  le  pays  en- 
tierement  pacifie.  Le  sultan  Atuued , 
satisfait  de  cette  conduite  de  Men- 
gh^ly ,  Tappela  a  Constantinople ,  ou 
il  lui  fit  faire  une  entr^  triomphale. 
La  faveur  du  khan  ^tait  k  son  apogi6e 
lorsqu'une  revolution  6clata  soudaine- 
ment  dans  la  capitale  de  rempire  des 
Othomans.  Ahmed,  prteipit<^  diu  tr6nf , 
entralna  son  favori  dans  sa  chute. 

Kaplan-Gberai  fut  rappele  de  nou- 
veau. Ce  monarque  aooomplit  I'oeuvre 
commeno^e  par  son  pi^Messeur,  en 


crih£e. 


n 


Khe?aiit  d'exteminer  les  voleinrs  et 
la  rebelles.  II  n'eut  fns  le  mdme 
racoadanssacampagnede  1736ooiitre 
leg  Russes  :  oeox-ci  ayaient  viol6  les 
ooDditioDS  de  leur  dernier  traits  avec 
tes  Tmrcs ,  et  lepris  notaniment  la  yille 
d'Azow.  Clisabe^,  alors  czarine,  en* 
voya  ses  troupes  en  Crim^.  L'irrup- 
tioD  des  Moscovites  fut  si  instantanee 
que  les  Tataies,  k  peine  revenus  de 
fair  malheoreuse  exmdition ,  se  trou- 
Tereot  hors  d'^t  d^oDposer  une  r«^ 
sistaoce  s^euse ;  Ba^tcbi-S^i  fat 
pris  et  inoendi^  par  les  vainqueurs, 
qui  demear^rent  maftres  absolus  de  la 
presqalle  pendant  trois  mois.  Kadan 
deso^it  au  trdne,  la  paix  fut  n^o- 
dee ,  et  les  Russes  se  retir^rent ;  mats 
il  fiit  ais^  de  pr^voir  d^  tors  que  la 
Tauride  finirait,  tot  ou  tard,  par  de- 
venir  une  de  leurs  provinces.  A  partir 
de  cette  6pociue ,  la  politique  des  czars 
epia  toutes  ies  occasions  de  fomenter 
les  troubles  interieurs  de  la  p^ninsule; 
eUe  s'attacfaa  surtout  k  brouiiler  les 
khans  avec  le  Grand-Seigneur;  elle 
aocueiiiit,  a  bras  ouyerts,  les  mecon- 
tents ,  les  transfuges ,  les  rebelles  de 
toate  espeoe,  et  ne  cessa  de  leur  four^ 
nir  des  seeours,  soit  ouvertement , 
Boit  en  sous  main,  jusqu'au  moment 
00  eOejMit  enfin  n^liser  ses  ambitieux 
projats. 

aXX.  Sous  le  r^e  de  Fetah- 
Gherai  n  (  1787—8) ,  les  Russes  font 
uoe  DouYelie  irruption  en  Crim^ ;  ils 
brdlent  Kara'SOU-JBazary  et  emm^- 
ncDt  avec  eux  un  erand  nombre  de 
prisonniers.  F^tah  fut  d6^08/^  Tannic 
0!^  de  son  av6nement  au  trdne. 

Mengbely^h^i  II  reparaft  sur  le 
trone  :  tous  ses  efforts  se  toument 
vers  les  Russes,  dont  il  envahit  le 
territoire  y  portant  de  tous  odt^  le  fer 
et  la  flanune ,  sans  piti^  pour  I'd^  ni 
le  sae  des  habitants.  Mais  Thiyer , 
ce  formidable  auxiliaire  de  la  puis- 
sance russe ,  vint  au  seoours  des  vain- 
cus,  et  les  Tatares,  d6cim^  par  le 
froid,  songorent  bientdt  k  rentrer  chez 
^,  ne  8a|>eTcevant  pas,  dans  cette 
Ktraite  prrapit^,  que  leurs  eunemis 
Iffi  suivaient  depres.  Geux-ci,  en  effet, 
cotrcrent  avec  eux  sur  le  sol  de  la 


Crim^;  mais  vaincus  dans  une  ren- 
contre (1738— 9)  ,  I'une  des  plus  lon- 
gues  et  des  plus  sanglantes  dont  £m- 
sent  mention  leurs  annales ,  ils  aban- 
donndrent,  pour  cette  fois,  F^temel 
objet  de  leur  convoitise.  Menghdv 
mourut  peu  de  mois  apr^  oet  te- 
nement. 

XXXI.  S^lamet-Gb^raT  II ,  prince 
pacifique  et  ami  des  arts,  r6gna  quatre 
anuses  (1780—1743) ,  qu*il  employa  ik 
relever  Baghtchi-Siria;  il  y  fit  con- 
struire  de  nouvelles  mosquto,  des 
bains,  desfontaines  et  divers  Edifices 
d'utilit^  pubiique.  Une  intrigue  de  coor 
amena  sa  deposition. 

XXXII.  SJ^lym-Gh^rai  II,  fils  de 
Kaplan,  appel^  k  i^gner.  eut  d'abord 
a  combattre  la  r^Uion  de  son  lieute- 
nant, (]ui,  battu  dans  plusieurs  affaires, 
se  retira  en  Pologne.  Peu  apres ,  S^lym 
eut  occasion  de  rendre  k  son  sei^eur 
suzerain  un  service  signal^.  La  disette 
la  plus  comply  d^lait  Constanti- 
nople :  SiAym  y  envoya  spontan^ment 
plusieurs  navires  charsds  de  bl^ ,  sau- 
vant  ainsi  cette  ville  crune  perte  cer- 
taine. 

On  rapporte  de  ce  prince  un  trait 
bizarre  qui  peint  assez  oien  les  mceurs 
de  cette  ^poque  dans  la  Tauride.  La 
Circassie  etaii  alors  soumise  aux  khans ; 
mais  son  vasselage  se  limitait  k  un 
tribnt  de  300  jeunes  esdaves  des  deux 
sexes  offert  a  chaque  nouveau  regne, 
tribut-  aussi  honteux  pour  le  peuple 
qui  le  recevait  que  pour  celui  qui  le 
pr6sentait.  S^lvm  resolut  de  se  fiiire 
payer  700  esdaves  au  lieu  de  800; 
aussi,  lonque  les  d^put^  teherkesses 
vinrent,  a  son  av^nement  au  trdne, 
lui  offrir  leurs  hommages,  il  les  re^ut 
avec  une  extreme  bienveillance,  les 
traita  splendideraent,  et  ne  les  ren- 
voya  pas  sans  leur  avoir  fait  a^^r 
quelques  16gers  pr^ents ,  que  ces  mon  • 
tabards  reourent  avec  une  grande 
joie.  Mais,  Vann^  suivante,  S^ym 
feignant  d*avoir  k  d^attre ,  dans  son 
oonseil ,  une  question  d'une  haute  im- 

Eortance,  convoqua  les  nobles  tcher- 
esses;  et  ceux-ci,se  souvenantde  ses 
bons  prooMes,  aocoururent  en  foule 
a  sa  cour.  S^lym,  jetant  alors  le  mas» 


26 


L'UNIVERS. 


que,  les  retiot  prisonnien,  et  ne  ies 
reldcba  qu'arar^  avoir  reqa  les  700 
esdaves  qu'ii  d6sirait.  Cette  tnsigne 
mauTaise  foi  servit,  plus  tard,  de 
pr^texte  k  la  Porte  pour  le  d^poser. 

XXXIII.  Arslan ,  fits  de  Dewlet- 
Gh6rai,  fiit  tir6  de  I'exii  pour  moDter 
sur  le  trdne  en  1 748.  La  Crim6e  compte 
peu  d'aussi  bons  souverains.  Son  gou- 
vernement  peut  dtre  cit^  comme  un 
module  de  sagesse  et  de  fermete.  Au 
dehors  il  repoussa  les  ennemis,  au 
dedans  il  contint  les  factieux ;  il  aida 
le  sultan,  son  seigneur  suzerain,  de 
ses  triors  et  de  ses  soldats;  mais 
ayant  voulu  y  joindre  quelques  salu- 
taires  avis  sur  uk  conduite  de  la  Porte 
k  r^ard  de  ses  amis  et  de  ses  enne- 
mis,  cette  liberty  fut  prise  en  mauvaise 
part,  et  sa  deposition  ne  se  fit  pas 
long-temps  attendre  ( 12  aotlt  1765); 

aXXIV.  Alym-Gb^rai,  cousin  et 
lieutenant  du  pr^oMent,  fut  appel^li 
lui  suoc^er.  Son  passage  au  pouvoir 
est  signal^  par  une  r^volte  aes  No* 
gais.  Ces  Tatares  bdliqueux  et  no* 
mades  6taient  ordinairement  com* 
mandds  par  un  prince  de  la  maison  de 
GhdraT,  dlu  par  eux  et  confirm^  par 
le  khan.  Les  r^llions  n'dtaient  pas 
rares  parmi  eux;  mais,  cette  fois, 
leur  lev^  de  boudiers  avait  un  carac* 
t^e  plus  s^ieux,  puisqu*elle  avait  lieu 
a  rinstigation  de  leur  ^n6ral ,  Grym- 
Ghdrai,  ambitieux  qui  convoitait  le 
tedne. 

XXXV.  Alym  ayant  dtd  ddposd  le 
21  octobre  1758,  la  Porte  rappela,  pour 
lui  succ^er,  A.rslan,  qui  languissait 
dans  Texil  h  Chios;  mais, dans I'inter- 
valle  qui  s'6ooula  edtre  son  rappel  et 
son  arriv^  aux  Dardanelles,  les  Ta- 
tares 61urent  Crym-Gh^aT.  Arslan 
partit  aussitdt  pour  la  Romdiie.  Cr3rm 
etait  un  politique  habile,  un  brave 

guerrier,  un  ron  tacticien;  il  avait, 
it  le  baron  de  Tott,  des  oonnais- 
sanoes  en  gdograpbie ,  en  astronomie, 
en  musique  et  en  chimie.  Doud  de 
toutes  les  quaHtes  qui  peuvent  faire 
aimer  un  souverain ,  il  ne  sut  que  se 
faire  hair;  mais  les  circonstanoes ,  il 
faut  en  convenir,  eurent  une  iSicheiise 
mfluenre  sur  les  relations  de  ce  prince 


avec  ses  sujets.  Son  r^gne  fiit  troiibk 
par  deux  grands  fldaux  qui  foodirait 
presque  simultandmeot  sur  ses  ^tats , 
les  Cosaques  et  la  peste.  Enfin,  apr^ 
six  annm  de  guerres,  de  travanx,  de 
dtestres  de  toute  nature,  il  fut  d^poi^ 
( 6  octobre  1764).  Le  motif  all^6  en 
cette  circonstance  fiit  qu'il  s'dtait  aUi6 
aux  Prussiens  sans  I'aveu  de  la  Porte. 

XXXVI.  La  politique  d'Azymet 
Gberai ,  son  sucoesseur,  le  rapprocha 
des  Russes ,  qui  dtaient  devenus  alon 
trop  redoutables  pour  ne  pas  £tre 
mdnag^.  II  fut  oeposd  au  mois  de 
mars  1767.  Arslan ,  rappeld  poor  b 
troisi^e  fois ,  mourut  peu  ae  mois 
apres. 

XXXVU.  Maksoud-Gb^ra!  ne  oon- 
nut  que  les  d^Ots  de  la  loyaat^.  Trois 

Kuissances  qu  il  lui  fallait  ^rgiier,la 
LUS8ie,laP(HogneetlaTurqpie,anleDt 

alors  entre  dies  de  vives  discussioDS. 
Enfin,  en  1768,  la  Porte  ayant dtfoi- 
tivement  d^clar6  la  guerre  h  la  Bos- 
sie,  le  Grand-Seigneur  saciifiaMak- 
souda  la  Dolitique;  il  le  d^pou^ 
rappeler  Crym-Gfadrai ,  qui  re^t  en 
meme  teoqis  le  commandement  d*une 
arm^  formidable,  compost  decent 
vinst  miUe  Tares  et  de  cinquante 
mille  Tatares.  Crym  ne  justifia  pas 
I'espoir  que  la  Porte  avait  mis  en  lui; 
il  fut  battu  compl^tement  Au  mon 
de  fierier  1770,  oe  monarque  fut 
empoisonn^  par  un  m^ectn  grec. 

XXXVIIL  S^lym-Ghtei  III  eat 
un  regne  aussi  oourt  que  malbeoreux* 
II  n'arriva  au  trdne  que  pour  voir  les 
Russes  s'emparer  de  la  presque  tota- 
lity de  la  Crim^.  II  fut  (fipoi^  Tann^ 
m^me  de  son  av^nement  au  trdne,  c» 
courut  diercher  un  refuge  sur  le  ter- 
ritoire  de  ses  ennemis.  Ceuz-df  d^ 
jugeant  pas  que  le  moment  fiit  vena 
de  r^liser  leurs  desseins  ambitieox , 
voulurent  oependant  faire  un  pas  de 
plus  vers  la  domination  de  cette  coo- 
me  en  s'arrogeant  la  pr^rogatiTe  df 
nommer  les  ktians.  On  vit,  en  coo- 
stouenoe ,  pour  la  premito  fois  (1771 K 
la  Russie ,  usant  de  son  droit  de  con- 
qu^te ,  appeler  au  tr6ne  de  Cn^ 
un  prince  de  la  famille  Gh^rai;  ^« 
jeta  les  yeux,  k  cet  eflfet,  sur  le  jc«i* 


GRIM££. 


27 


Sabeb,  aupres  s'^tre  assure  prudem- 
meot  de  rassentiiiieDt  des  Tataies. 

XXXIX.  Gette  Section  ne  wHiTait 
inanqaer  d'etre  contests  par  la  Tor- 
qvie.  Cette  puissance  refusa  Tinves* 
uture  k  Sabdl).  Backty,  fib  de  Crym, 
et  Maksoud,  Favant-dernier  khan, 
Jvigu^rent  alors  le  trdne  vacant.  Cha* 
con  d'eux  avail  des  droits  k  taire  va- 
loir,.de8  intrigues  a  mettre  en  jeu, 
dtf  partisans  h  pousser  en  avant. 
Haksoud  Temporta  sur  son  comp^ti- 
teor ;  mais  les  Russes ,  maltres  ae  la 
majeure  partie  de  la  Crim^  et  de 
tottte  nie  de  Taman ,  influenc^rent  si 
bien  lei  Tatares,  que  oeux-d  refus^rent 
mtme  de  le  recevoir.  lis  confirm^nt 
r^ection  de  Sabed,  lui  donnant  pour 
lieutenant  (keUgah)  son  frere  Chanyn. 
Cest  ce  dcornier  qui  aura  la  triste  oe- 
l^brit^  d'etre  le  aemier  khan,  et  qui 
livra  son  pays  k  la  Russie. 

La  Porte  ne  se  contentaitinsdu  droit 
d*investitare  que  hii  conoedait  sa  ri- 
Tale;  elle  Toulait  conserver  cdui  de 
nomination ,  et ,  s*obstinant  a  repous- 
MT  le  prot6g^  des  Russes ,  elle  nonuna 
un  noureau  khan,  Dewlet-Gh^raT. 
Mais  les  ev^nements  de  la  guerre  d^- 
oonoertereut  son  opiniAtret^.  Un  traits 
de  paix  fiit  sign^  a  Kukudk-Kenard^t/j 
ao  mois  d'aodt  1774.  Par  ce  traite, 
la  Porte  o^e  k  la  Russie  Kertch, 
Jeittittli  et  KUbomou;  elle  lui  aban- 
donne  le  droit  de  navi^er  dans  toutes 
les  eanx  de  la  dkMuination  otbomane ; 
aoooide  aux  Tatares  leur  ind^pendance 
nationale  et  la  liberty  de  se  cnoisir  un 
khan  parnii  les  descendants  de  Tchin- 
xh»,  le  Grand-Seigneur  se  reservant 
wQtefois  la  supr^matie  spirituelle  et 
le  droit  d^inrestiture;  ennn ,  elle  con- 
sent ^  reoonnattre  T^lection  de  Saheb. 
lionqu'elle  envova  k  ce  prince  les  attri- 
bots  de  I'investiture,  elle  en  excepta  le 
nbre,  oe  qui  indiquait,  dans  le  langage 
^bolique  de  TOrient ,  nne  r^rve , 
^ne  sorte  de  protestation  contre  Tin- 
<lcpendance  a&olue  du  nouveau  khan. 

Ao  commencement  de  Tann^  1775, 
ivtt  r^olution  subite  delate  dans 
Ba|ijhtchi-S6rai;  Saheb  s*enfuit  pr6ci- 
Aitamment  et  se  jette  dans  les  bras 
de  la  Turquif .  Le  Grand-Seigneur  lui 


assigne  une  pension  de  trois  mille 
piasms ,  et  Tenvoie  raider  k  Rodosto, 
oans  la  Romaic. 

XL.  Dewlet-Ghdra'i  III  fut  nomme 
en  remplacement  de  Saheb ;  mais 
Tambitieux  Chahyn,  frere  et  lieute- 
nant de  ce  dernier,  soul^ve  les  Plogais 
du  Kouban  et  s^avance  k  la  t£te  d'une 
arm^  de  quarante  mille  Tatares, 
Nogais  et  Circassiens ,  dans  Tintention 
de  revendiquer  le  tr6ne  pour  son  pro- 
pre  compte.  Dewlet  rassemble  ses  for- 
ces ,  passe  dans  Tfle  Taman  et  vient 
presenter  la  bataille  k  ce  rebelle.  Ici, 
il  est  curieux  d'observer  Tattitude  de 
la  Porte  et  celle  de  la  Russie  :  ces 
deux  {luissances.  alors  ennemies  ir- 
r^oonciliables ,  a^iraient  ^galement 
un  pr^texte  pour  violer  le  traite  de 
Kenardlf^y  mais ,  par  un  reste  de  pu- 
deur  politique ,  aucune  ne  voulait  pren- 
dre 1  initiative.  La  Russie,  en  cons^ 
quence,  fit  passer,  en  sous  main,  des 
secours  de  toute  nature  k  Chabyn, 
tandis  que  la  Turquie  en  faisait  au- 
tant  k  r^ard  de  Dewlet.  Ce  dernier 
venait  d'etre  abandonn6  par  lesm^aa, 
ou  nobles*  qui  s*^ient  d^lar^  ou- 
vertement  en  faveur  de  son  rival.  La 
victoire  seule  pouvait  le  tirer  de  ce 
mauvais  pas ,  mais  le  sort  des  armes 
lui  fut  oontraire.  Vaincu  au  mois  de 
novembre  1776 ,  dans  une  affaire  g6- 
n^rale,  il  rentra  nr^cipitammentdans 
ses  etats ,  suivi  des  debris  de  son  ar- 
mee.  Les  Russes ,  a  cette  nouvelle , 

i'ug^rent  inutile  de  dissimuler  plus 
ong-temps ,  et ,  se  declarant  ouver- 
tement  les  protecteurs  de  Ghahyn ,  ils 
6*emparent  de  P^^p  et  envahissent 
de  nouveau  la  ptoinsiue.  De  son  o6t6, 
Chahyn  passe  le  detroit ,  marche  sur 
Caf& ,  d^oi^  il  se  dirige  sur  Baghtchi- 
S^rai.  £n  vain  Dewlet  veut  lutter 
centre  cette  double  invasion;  Torage 
Tenveloppe  de  tons  c6t^,  et  le  force 
bientdt  a  cMer.  II  se  retire  alors  a 
Constantinople,  abandonnant  k  son 
rival  ce  trdne  diancdant,  qui  ne  sub- 
siste  plus  que  sous  le  bon  {rfaisur  des 
Russes  (11  mail777). 

XLI.  Chahyn,  dernier  khan.  A 
peine  install^,  ce  prince  entra  dans  la 
voie  p^rilleuse  des  reformes,  et  tenta 


28 


L'UNIVERS. 


de  civiliser  son  peuple.  II  soumit  les 
troupes  i  une  nouvelle  organisation , 
ieur  assigna  une  solde  r^lidre,  ieur 
donna  des  myrza  (nobles)  pouroffi- 
ciers;  il  organisaun  corps  d^artiilerie, 
et  songea  mtoe  h  6tablir  une  manu- 
facture d*armes ;  il  diminua  les  rede- 
vances  gue  les  myrza  peroevaient  sur 
les  cultivateurs ,  et  pnt  d'autres  me- 
sures  portant  ^galement  Tempreinte 
de  la  sagesse  et  du  g^nie;  mais,  nial- 
beureusement ,  il  s'adressait  h  un  peu- 
ple que  sa  religion  et  ses  habitudes 
rendaient  ennemi  de  toute  innovation. 
Au  m6contentement  des  Tatares,  pre- 
mier obstacle  que  rencontra  Chahyn , 
se  joignit  bientot  le  manoue  d^argent. 
II  n*y  avait  plus  moyen  a'en  emprun- 
ter  h  la  Turauie ;  la  Russie  n'offrait 

?ue  des  solaats,  et  la  Crim^e  ^tait 
puisne.  Chahyn  fit  battre  monnaie  h 
un  titre  dont  la  gravity  des  circon- 
stances  pouvait  seule  excuser  Tim- 
posture,  mais  cette  ressource  precaire 
ne  {)ut  le  tirer  d'embarras.  La  Porte 
intriguait  sourdement  pour  exciter 
les  Tatares  h  la  r^volte ,  et  ceux-ci  ne 
tarderent  pas  h  r^pondre  h  son  appel. 
Chahyn  ne  put  que  se  jeter  enti^rement 
dans  les  bras  de  la  Russie.  Cette  puis- 
sance ,  heureuse  de  trouver  sit6t  une 
occasion  qu*elle  n'avait  pas  ose  esp^- 
rer  encore ,  fit  entrer  des  troupes  en 
Crim^ ,  sous  pr^texte  de  secourir  le 
khan.  La  Turquie,  h  cette  nouvelle, 
s'^cria  qu'il  y  avait  violation  des  trai- 
tes,  et  elle  envoya  dans  la  p^ninsule 
uu  corps  d'arm^e  qui  se  cantonna  aux 
environs  de  GuslevL  petit  bourg  ta- 
tare ,  situ^  non  loin  ae  Tantique  Cher- 
son.  On  en  vint  bient6t  aux  mains  ; 
les  Russes  ^prouverent  d'abord  quel- 
ques  ^hecs ;  Chahyn  recut  deux  gra- 
ves blessures  et  fiit  force  de  se  retirer 
au  quaKier-g^n^ral  deses  protecteurs, 
tanais  qu*un  nomm^  S^lym ,  son  oom- 
p^titeur,  s'avand^it  vers  Ackmetched, 
Les  Russes  prirent  bientdt  Ieur  re- 
vanche :  huit  mille  d^entre  eux,  sous 
le  commandement  de  Cliahvn,  batti- 
rent  oompl^tement  Tarmee  turco- 
tatare  et  contraignirent  Selym  a  s'em- 
barquer  en  toute  hdte.  Chahyn  n*^tait 
plus,  a  cette  ^poqne,  qu^un  fantdme 


de  souverain ;  la  Russie  gouvemait  de 
Ml  dans  les  pbunes  de  la  Tauride, 
comme  dans  oelles  de  Kazan.  La  po- 
litique de  oette  puissance  lui  8ugg6n, 
vers  ce  temps-la,  une  mesure atroce, 
qu'eile  a  quelquefois  renouvel^  de- 

{wis,  mue  par  le  d^ir  de  peopler 
es  solitudes  de  ses  vastes  poss^ons. 
Les  Nogais  venaient  d'abandonner  un 
canton  dans  le  voisinage  d'Aiow;  les 
Russes  y  transport^rent  de  force  les 
families  grecques  et  armdniennes  qui, 
depuis  piusieurs  ann^,  s*^taient  eta- 
blies  en  Crim^.  Le  nombre  des  emi- 
gre s'^leva,  dit  un  grave  historien 
anglais,  h  75,000  individus  de  toot 
dge  et  de  tout  sexe.  Tous  ces  malbeo* 
reux  parent  de  froid,  de  fiiim  et  de 
nostaleie  (*).  La  Crim^,  qui  jadis  avait 
pu  mettre  sur  pied  des  araH^  de  qua- 
rante  mille  combattants,  ne  ^ossedait 
plus  qu'une  population  de  cioquaate 
mille  ames;  man  on  y  traosporta  piu- 
sieurs families  russes  en  remplaoefDeDt 
des  dmigr^  d'Azow.  Les  rerenus  du 
khan  peuvent  £tre  ^valu6s,|iour oette 
^poque,  k  environ  trois  millions  de 
francs. 

Enfin ,  le  cabinet  de  Versailles  in* 
tervint  entre  les  parties  belligerantes^ 
et  grace  a  son  intervention ,  uoe  nou- 
velle paix  fut  sign^e  h  Amahly-G^ 
vack ,  pr^  Constantinople,  le  31  nui 
1770.  Les  Russes  s'engaserent^^ 
cuer  ia  Crim^  et  abuiaomi^reot  ,*o 
Grand-Seigneur  le  droit  illusoire  d'io- 
vestiture  et  de  suzerainet^  spirituelle 
sur  les  khans  de  Crim^e. 

Un  an  s'^tait  a  peine  km\i  depus 
les  ratifications  de  ce  dernier  traits, 
que  les  Turcs  cherchdrent  de  oouveau 
a  soulever  les  Nogais,  et  trouveraDt 
de  puissants  auxilialres  dans  la  faonll^ 
mime  du  khan ,  dont  les  deux  freres, 
Behader-Ghdrai  et  Arslan-Backtgr,  se 
mirent  a  la  tite  des  revoltisuCctte 
lev^e  de  boucliers  fut  oomprim^f » 
est  vrai ,  mais  elle  le  fut  par  w^' 
vention  des  baionnettes  russes.AK^t 
le  malheureux  Chabyn ,  triste  jooetoe 
la  politique  et  du  fanatisme ,  abreove 
ded^oQts  de  toute  nature,  nayani 

(*)  Eton's  iwvey  ttf  the  turkisk  tt^- 


•    *      4 


•>    •    • 


i_ 


crimi*:e. 


29 


que  du  m^iiris  pour  les  Tiircs ,  de  la 
mine  pour  les  Russes,  de  la  piti^ 
pour  ses  ooin|Kitriotes ,  trop  MaM 
poor  ne  pas  voir  sa  ratable  position, 
aasez  sage  pour  en  oonnattre  les  re- 
m^dcSy  mais  inhabile  h  les  appliquer, 
ae  nfoiffoa  aux  dtoets  de  la  Provi- 
deiHse.  Irois  fois  il  prostema  son  front 
dans  la  poussitee,  trois  fois  il  semeur- 
trit  le  sein;  puis  ayant  ainsi  pay6  a 
V  rhunoanlt^  le  tribut  qa'elle  r^damait, 
il  prit  n<ri>lement  son  parti  etdxtiqua 
franchement  et  sans  restriction  pour 
hii  et  sa  postdrit^. 

La.    CanOBE  DBFUIS  SA  UUHION 

A  t.*EacpiRB  RussB.  —  La  poj^ation 
de  la  presquile  se  compose,  amsi  que 
nous  rayons  dit^  d'^lements  b^ro- 
stoes ;  mats  la  nation  des  pr^tendus 
Tatares  {oend  seule  id  nne  pbysio- 
Domie  locale. 

ILia  religion  des  Tatares  est  un  ma- 
honn^tiMie  m^l^  de  pratiques  supersti- 
et  souTent  mtoe  d'idoUtrie. 


II  y  a  parmi  eux  des  nobles  et  des 
seim.  Ces  demiers  n'ont  h  donner  h 
leur  nudtre  que  deux  jours  de  la  se- 
maooe;  ks  montagnards  sont  traits, 
pour  la  phipart,  conune  les  paysans 
de  la  oouronne.  Us  placent  de  pr^e- 
renoe  Inurs  cabanes  dans  la  partie  la 

ens  sombre  et  la  plus  toufiiie  des 
is ;  c'est  1^  qu*ils  aiment  k  aocueiU 
lir  on  stranger  et  k  lui  prodiguer  les 
aoios  de  Thospitalit^,  avec  une  fran- 
chise   et    une    cordiality    que  Ton 
cberdieraityainement  chez  les  Grecs 
du  m^nie  pays.  Dans  les  maisons  des 
ricbes  on  prtente  au  nouTeau  venu 
une  longue  pipe  k  tube  de  cerisier , 
termini  par  un  morceau  d'ambre  ou 
d^iTOire;  puis,  on  lui  offre  lemiel, 
si  exqais  dans  toute  la  Crim^,  les 
fruits  de  la  saison  et  le  lait  caill6. 
Lies  Tatares  mangent  avec  leurs 
doiffts ;  mais  ils  n'omettent  jamais  de 
se  laver  les  mains  avant  et  apr^  U 
repas.  Les  murs  de  leurs  salles  a  man- 
ger sont  gamis  de  serviettes  d'une 
Sande  propret6,  om^es  mtoie  de 
ntelles.  Les  femmes  ont  un  appar- 
tement,  et  qu^uefois  une  maison  a 
part.  L'ameublement  de  ces  demeures 
est  d'une  grande  simplicity  :  un  sopba 


pour  les  dieux  p^nates ,  un  tapis  ou 
des  nattes  pour  les  maltres  de  la  mai- 
son ,  une  petite  table  k  peine  4Aef6t 
d'un  pied  et  quelques  vases  en  bois. 
L*habillement  de  ce  peuple  oQre  un 
m^ange  du  costume  des  Arm^iens 
et  de  oelui  des  Turcs  ( voy.  p/.  8). 

Cest  assez  g^nteilement  auprte 
de  Baghtchi-S^rai  qu*on  rencontre 
des  troupes  de  Bob^miens ,  malheu- 
reux  cosmopolites  qui ,  aux  extr6mit^ 
de  TAsie,  comme  k  oelles  de  I'Eu- 
rope.  ne  viventque  du  tribut  prtoiire 
que  leur  paie  la  crMulit^  du  peuple.*^ 

Les  Grecs  et  les  Tatares  avaient 
bdti  ou  agrandi  plusieurs  villes ,  mais 
les  Russes  reoommeno^nt  I'oeuvre 
de  destruction  des  Huns  et  des  Mon- 
gols, lis  achev^nt  de  renverser  les 
mines  de  Cherson  pour  y  cbercber  les 
mat^aux  n^oessaires  k  la  construc- 
tion de  SdNustopol,  qo'ils  ^lev^rent 
aupres  d'un  ancien  village  tatare, 
nomme  Aktiar,  dans  la  p^ninsuie 
b^racltotique. 

S^bastopol  est  une  petite  viUe  bdtie 
en  amphith^tre,  sur  la  dtelivit^  d'une 
coUine.  Ses  murs  de  pierres  et  de 
briques,  entrem^l^  de  trontjons  de 
colonnes ,  de  chapiteaux  et  d'lnscrip- 
tions  lapidaires,  nobles  d^ris  de  I'an- 
tique  Cherson,  se  r6fl^issent  dans 
les  eaux  d*une  bale  que  Ton  consid^re 
k  iuste  titre  comme  Tune  des  plus 
belles  du  monde;  c'est  la  station  or- 
dinaire de  la  flotte  imp^riale  de  la 
mer  Noire.  Douze  ou  quinze  vaisseaux 
de  ligne  et  un  nombre  proportionn^ 
de  Mtiments  1^^  assurent  k  la 
Russie  la  dominaSon  du  Pont-Euxin 
(vov.  pi.  2). 

II  existe  a  Sdbastopol  des  cliantiers 
de  radoub,  mais  il  n'y  en  a  aucun 
pour  la  construction ;  I'entr^  du  port 
est  interdite  aux  navires  du  com- 
merce. La  population  6trang^re  k  la 
marine  n'excede  pas  3000  habitants ; 
ce  sont  pour  la  plupart  des  Grecs 
marchanos.  Leurs  femmes  sont  d'une 
beauts  remarquable. 

La  baie  de  S^bastopol  est  infests 
par  des  myriades  de  vers  de  mer 
phospborescents  ( teredo  naoaUi  ou 
caiamiiasnavktm^Limii)^  qui  s*at- 


30 


L'UNIVERS. 


tacfaent  aux  navires  et  les  mettent  en 
peu  d'ano^es  hors  d'etat  de  servir. 
On  ne  pent  pr68erver  un  bdtiment  des 
ravages  de  ces  dangereux  animaux 
qu'en  le  renversant  sur  le  flanc  pour 
lui  faire  subir  Fop^ration  du  feu,  tous 
les  deux  ou  trois  ans.  Cette  rade  est 
le  Cienos  deStrabon.U  Tad^crite  avec 
une  admirable  pr^ision :  on  retrouve 
ais^ment  dans  les  trois  baies  qui 
touohent  a  celle  de  la  quarantaine, 
les  trois  ports  qu'il  a  mentionnes. 

£n  suivant  le  littoral  on  <q>er^it 
le  cap  Parthenium^  qui  se  termine 
par  un  pr^ipice  d*une  grande  hau- 
teur; au-deUi.  un  golfe  entour^  de  ro- 
chers  escarpes  et  sauvages,  au  milieu 
desquels  s'el^e  le  monast^  Saint- 
George,  jadis  opulent,  aujourdliui 
habite  seulement  par  quelques  nao- 
vres  moines  dteeuvr^,  qui  m^itent 
sur  les  temp6tes  de  la  vie>,  en  voyant 
ies  flots  6cumer  et  bondir  au  pied 
de  ce  tranquiUe  sejour.  Le  promon- 
toire  8acr6,  Ajaboumim^  se  trouTe 
entre  le  monastto  Saint-Geor^  et 
Tancien  port  des  Symboles ,  aujour- 
d*hui  Balaclava ,  ville  remaiquable 
par  ses  rues  pavte  en  marbres  rouge 
et  blanc. 

A  trente  verstes  a  Test  de  S^bas- 
to(M>l ,  et  a  Tembouchure  de  la  petite 
riviere  Ouzen,  on  d^couvre  Inker- 
man  J  la  ville  des  Cavemes.  C'estune 
montagne  dont  la  d6divit6  est  toute 
perc6e  de  grottes  oue  Ton  suppose 
avoir  i^  creus^es  dans  le  IV*  sikle 
de  notre  ^  par  les  Ariens.  Une  co» 
lonie  de  oes  schismatiques,  fiiyant  la 
persecution  des  empereurs  byzantins, 
vint  demander  rhospitalit^  aux  habi- 
tants de  Cherson.  Ceux-ci  lui  ^ermi- 
rent  de  s'^tablir  dans  les  environs, 
sanstoutefois  Tautoriser  ^  y  bitir  une 
ville;  les  Ariens  creus^rent  alors  les 
cavemes  dont  11  est  ici  question.  On 
a  rstrouv^  dans  qoelque^nes  de  oes 
grottes  dns  vestiges  d'autel  et  de  figu- 
res peintes  repr&entant  des  saints  et 
des  apdtres  (voy.  p/.  6). 

Mon  loin  de  la,  en  se  dirigeant  vers 
le  sud,  on  voit  le  diflteau  des  Tcber- 
kesses,  Tcherkeshemumy  qui  rap- 
pelle  Torigine  des  princes  circassiens 


de  la  Kabardah;  la  ferteiene  Mso- 
goup ,  ancienne  propriety  des  G^aois, 
et  la  belle  vall^  de  Baidar.  Aintes- 
sus  de  S^bastopol ,  en  remontant  vers 
Koslow,  on  trouve  sbcoessivcacBt 
cinq  petites  rivieres,  dont  deax,  la 
Concha  et  le  Belhehy  entourent  me 
plaine  oonnue  sous  le  nom  de  K<A»' 
dah  et  de  plaine  des  Tcherkesia. 

Ak-Metcnedf  la  roosqu^e  bbadie, 
d'origine  tatare,  sur  lesboidsduSal- 
ghir,  est  la  capitale  actuelle  de  la  Tao- 
ride ;  les  Russes  lui  ont  donn6  le  doo 
bizarre  de  Symph^ropol,  d^riT^  de 
&fAf  tD»,  je  suis  utile.  Cette  ville  n'a 
rien  de  curieux  qu'un  gymnase  et  ime 
belle  ^ise. 

BagMM-S^aHy  Tandenne  M- 
dence  des  khans,  situ^  ^  S4  ventes 
d'Ak-Metcbed ,  sur  la  route  de  Ste- 
topol ,  est  la  ville  la  plus  oontidMife 
de  la  Crim6e.  Sa  po^ilatioD,  coouoe 
oelle  de  la  pr^o^dente,  se  oompoaede 
Tatares,  de  Juifa,  d^Arm^niena  ^de 
Russes.  Saocag^  et  inoenditemaiotes 
fois,  die  est  encore  remarquaUe  air 
ses  mosqute  aux  ^l^ganta  mioami, 
ses  nombreuses  fontaines ,  sea  cantox, 
ses Jardins ,  ses  bains ,  quelques  befles 
maisons,  le  palais  des  kluns ,  et ,  eni&i 
par  une  |)OSition  des  phis  pittoreaqoes. 
On  y  voit  de  nombreuses  w»xssS» 
tures  de  maroquins,  de  tapis  de  fto- 
tre  et  d^artides  de  ooutellarie. 

A  quelques  verstes  seolemeDt  de 
Baghtcbi-Sto!  se  trouve  rintdressante 
colonic  de  Caraitesde  Tchoufimt-Kak. 
Les  Cardites  sont  des  Jui6  diasideati 
qui  rejettent  kss  superstitioDs  et  jg 
mepties  du  Talmud.  On  en  reooooDC 
en  £gypte,en  Syrie,  dans  leCaoc*^ 
et,  ennn,  depws  plusieura  sidckSi  > 
Caffa,  et  surtout  k  Tchoufout-Rale.  Ce 
villa^  est  situ^  sur  le  sommet  (Toae 
montagne  en  apparence  inacoeanw; 
les  maisons  y  sont  bdtiessurleaflaocs 
*des  sommit^  les  phis  escarpdea. 

Les  Garaltes  se  font  remarquer^ 
leurs  moeurs  patriarcales,  leur  doo- 
oeur  et  leur  probity :  Tchoufoot  es^ 
pourtant  un  terme  injurieux  ^^ 
fut  donn^  par  les  G^nois;  leslMai^ 
le  conserverent  sans  le  oomfirmr^- 
«t  y  joignirent  la  terminaison  kairt' 


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ckim£e. 


31 


qui  corfopond  a  forterene.  C'est  au- 
presdeTchoufout-Kai^,  h  iinedistanoe 
d'en?iioii  seise  verstes,  que  s'deve 
le  moot  Trapse  de  Strabon,  aujoar^ 
d'hui  TchatjnNlaefa,  on  mont  de  laTente. 

Les  enTUfons  ae  Baghtcfai-S^ai  sont 
oSkftts  par  le  s^joor  de  Pallas.  Aussi 
doux  et  tiniide  qu'il  6tait  savant ,  Pal- 
bs  ^t  TCDU  en  Taiiride  a  la  fin  du 
XYIir  Steele,  avec  les  preventions 
que  les  Russes  de  cciUe  ^poqoe  nour- 
rissaient  contre  on  pa}/!  mal  connu , 
et  habits  par  leurs  andens  ennemis; 
mais  ayaot  trouv^  le  oontraire  de  ce 
qu'il  avait  siajppos6j  ses  preventions  se 
ooDvertirent  en  une  admiration  exa- 
ger^,  si  bien  que  Catherine  II  ne 
cnit  pouToir  mieux  payer  ses  travaux 
qu'en  loi  donnant  one  terre  dans  la 
preaqa^tte,  avee  une  assifliation  an- 
nueUe  de  deux  milie  roubles.  Pallas, 
qai  tremblait  an  seul  nom  de  sa  sou- 
veraine,  prit  cette  faveur  pour  une 
disgrace.  II  vint  s'^tablir  en  Crimee 
oommeenun  lieu  d'exil,  y  vecutplu- 
siearaannees,  6ou£frant  d^esprit  et  de 
corps,  et  n'osant  exhaler  ses  plaintes, 
w  ses  Merits,  que  sous  un  double 
voile  de  reticences  et  d'alluaions.  La 
oBort  de  oet  bomme  de  bien  fut  un 
Bujelde  deuil  pour  tous  ceux  qui  Ta- 
vaientoonnu. 

La  m^moire  de  Pallas  n'est  pas  la 
Mole  qui  reveille  ici  une  vieille  sym- 
paftie.  Le  due  de  Richelieu,  oe 
Dienfiiitear  d'Odessa,  qui  devint,  de- 
pois,  pnnnier  ministre  en  France, 
sous  Louis  XYIII ,  fiit  quelque  temps 
gouTemeur  de  la  Tauride.  Iiavaitfixe 
sa  r^idenceaupr^s  de  Gouesouf  (voy. 
pi*  3).Voici  ce  qu'6crivait,  dii^  s^jet,  en 
1S20,  le  comte  Mourawiefif  Apostol , 
dans  son  voyagede  la  Tauride  :  «  Je  ne 
«  oonnais  personne  qui  ait  laiss^  une 
'■  m^oireplus  venme  hors  de  sa  pa- 
« trie.  Les  lataresprononoenttoujours 
« son  nom  avec  emotion  et  tendresse. 
<  —  Nous  le  regrettons  sans  cesse, 
■  me  dit  le  podestat  de  Goursouf.—  Je 

*  lui  repondis  quejeconnaissais  beau- 
'  coup  le  due  de  Richelieu;  et  cela 

*  seul  fut  pour  moi ,  aupr^s  des  habi- 

*  tants,  une  meilleure  recommanda- 

*  tion  que  n'aurait  pu  T^tre  un  fir- 


«  man.  Jje  ne  saurais  vous  exprinier 
R  avec  quelle  curiosite  ils  m'eooute- 
«  rent  (juand  je  leur  dis  :  —  II  est  le 
«  premier  apres  le  roi ;  il  jouit  de  Ta- 
«  mour  et  de  la  oonfiance  bien  med- 
«  tee  de  ses  compatriotes ;  et  cepen- 
«  dant  11  se  rappelle  toujours  avec 
R  plaisir  ces  lieux,  iju'il  reviendra 
«  peut-etre  visiter  un  jour.  —  A  ces 
«  mots ,  mes  auditeurs  versdrent  des 
«  larmes  de  joie  et  s'ecrierent :  Que 
«  Dieu  le  fasse !  » 

Koslow,  I'ancienne  Eupatoria ,  est 
une  ville  importante  par  son  port  uranc 
et  le  voisinage  des  grands  lacs  sales 
qui  fournissent  annuellement,  h  Vex- 
portation,  quarante  a  soixante  miUe 
powis  de  sel  ( 650  ^  980,000  kilog. ). 
Les  autres  extractions  de  cette  sub- 
stance out  lieu  aux  environs  de  Peie- 
cop,  de  Caffa,  de  Kertch,  et  dans  le 
lac  Sivasch.  L'exportation  totale  s'est 
eievee,  dans  les  bonnes  annees,  h 
3,600,000  jpotMif  (41  millions  de  kil.). 

A^arojotf-^ozar^place  commer^nte, 
ainsi  appdee  parce  qu'elle  est  situee 
entre  deux  bras  de  la  riviere  aux  eaux 
noires,  jfiTaro-Mw,  est  une  ville  mal 
betie,  insalubre  et  triste. 

Sur  la  cote  sud-est ,  depuis  Merdven^ 
ou  les  Degres,  passage  romantique 
par  lequel  on  descend  sur  le  bord  de 
la  mer,  jusqu'ikTheodosie,  on  rencon- 
tre des  villages  d'origine  grecque  ou 
{;enoise,  dont  les  environs  sont  au- 
jourd'hui  peupl^,  en  grande  partie, 
par  des  colons  allemands  qui  selivrent 
avec  ardeur  a  la  culture  de  la  vigne. 
Nous  citerons  Alot/gpka ,  MachareSch, 
Nikita^  Gourstntfy  LampaSf  Alousta , 
et  particuli^rement  Souaak,  oh  le  gou- 
vemement  a  etabli  une  ecole  de  viti- 
culture et  un  jardin  botanique.  Les 
prindpaux  vignobles  appartiennent  au 
comte  Woronzoff ,  k  I'amiral  Mordwi- 
noff,  aux  princes  Galitzin ,  Borozdine, 
Myryschkme  et  plusieurs  autres.  On 
y  trouve  les  ceps  de  vime  les  plus 
choisis  du  Rhin,  de  la  Bourgogne, 
dela  France  meridionale,de  TEspagne, 
de  Chypre  et  de  Madere.  Cette  cul- 
ture est  dans  un  etat  de  prosperite 
auquel  chaque  ann6e  ajoute  un  nou- 
veau  developpement. 


32 


UUNIVERS. 


En  travenant  la  steppe  depnis  Ak- 
Metcbed  jusqu'^  P^r^p ,  on  ne  voit 
que  quelques  relais  de  poste  tatares, 
et  un  bazar,  situ6  a  trois  verstes  seu- 
lement  de  cette  demise  place,  fre- 

auent^  par  des  Grecs ,  des  Arm^niens , 
es  Juirs  et  des  Russes.  Piricop^  la 
clef  de  la  presqu'tle,  n'est  pour  ainsi 
dire  qu*uiie  ^ande  route  oord^  de 
maisons;  mais  k  une  certaine  ^poque 
de  I'ann^,  c'est  un  lieu  plein  de  vie 
et  d*int^r6t  par  le  passage  continuel 
des  caravanes  de  chameaux,  des  trou- 
peaux  de  moutons,  des  chevaux,  des 
chariots  de  poste  et  des  patrouilles 
de  la  douane  (vo^.  pL  7). 

II  nous  reste  a  mentionner  quel- 
ques villes  de  Tancien  Bospore  ciin- 
m^rien.  Caff  a  y\A^t  par  les  G^nois 
sur  remplacement,  ou  du  moins  dans 
le  Toisinage  de  Tancienne  Th^odosie, 
poss^e  un  musde,  une  bibliotiii^e 
publi^ue  et  un  iardin  botanique.  Son 
port  jouit  de  la  franchise  comme  celui 
de  Koslow. 

Kertchy  raneiennePanticap6e(j9/.  &), 
n'est  remarquable  que  par  son  mus^, 
riche  d^pdt  des  antiquit^s  srecques 
trouv^s  dans  la  Tauride.  C  est  aux 
environs  de  cette  viUe  ^'on  voit 
VAUyrif^xho,  grande  ^l^vation  que  le 


vulgaire  croit  dtre  le  tombeau  de 
Mitihra-dates.  JenikaU  est  une  forto- 
resse  qui  commande  le  d^troit  et  loi 
donne  son  nom. 

Les  Tumuli  J  les  mines  deJIfyrma^ 
dum  et  celles  de  Nymphaewny  le  sou- 
venir de  vingt  villes  greoques  ou  pon- 
tiques  disparues  k  jamais,  le  mona- 
ment  de  Saiyrusj  les  vases  antiques, 
les  bijoux  et  les  m^ailies  que  Ton 
trouve  diss^min^  sur  le  sol,  tout  donoe 
un  ^and  int^r^t  historique  a  cette 
partie  de  la  Crim6e.  La  superstition 
populaire  ne  pouvait  manquer  de  s'em- 
barer  d*un  sujet  si  fertile  en  contes 
fantastiques.  «  Chaque  soir ,  dit  one 
l^ende  locale,  une  vierge  ^lor^B, 
une  blanche  sylphide,  vient  s^sseoir 
sur  Yj4liyn^abOy  et  la  elle  pousse  de 
longs  g^missements  que  le  vent  de  la 
nuit  emporte  k  travers  la  bnif^e.  > 

Cette  neureusecr^ulit^,  qui  people 
les  d^rts,  qui  anime  les  mines  et 
oouvre  la  froiae  v^rit6  du  manteao  de 
la  po^ie,  est  pr6f6rable  peut-^tre  k  la 
science  qui  ne  trouve  ici  que  des  sou- 
venirs confus,  ailleurs  que  des  osse- 
ments  blanchis  oudes  pierres  Ivisies, 
plus  loin  qu'une  vaine  poussicbne,  et 
partout  qu^un  silence  de  mort  qui  op- 
presse  le  coeur  et  glace  rimaginatioo. 


FIN. 


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L'UNIVERS, 


on 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOHS  LES  PEUPLES. 

DE  LEURS  REUGIONS,  MOEURS,  COUTUMES,  bic. 


»•• 


REGION  CAUCASIENIVE  ^\ 

PAR  M.  CteAR  FAMIN 


etoGEAPHIB  PHTSIQUB. 

^I  V(m  trouTejpartont ,  sur  le  globe , 
les  traces  ind^oiiles  des  accidents  qui 
en  ont  change  la  sur&ce  h  des  6poques 
oO  toQte  chronoloeie  denent  imponi- 
Ue,  nolle  parWeUes  ne  portent  un 
caract^e  de  certitude  plus  prononc6 
que  dans  la  r^g^on  caacasienne. 

PrOBABILITBS  ciOGRAPHIQUSS.— 

Le  Gancase .  cette  majestueuse  forte- 
resse  qui  separe  TEurope  de  FAsie , 
^teod  son  dotdilerempan  des  rires  du 
Pont-Eoxia  h  celles  de  la  mer  Cas- 
pienne.  Vers  la  partie  septentrionalef 
sabase  rnose  sur  despiaines  saUon- 
neuses  Jadis  coovertes  par  les  eam  de 
la  mer.  Le  plus  simple  examen  de  la 
%>graphie  suflBrait  pour  attester  ce 

(*)  !•  region  ctncnieiiiie  ett  phii  oom- 
"wnihnfnt  appeUe  en  EurmM  du  nom  da 
*^  principaiei  pnmnoes  :  Gdarrm  et  Cir- 
^if.  Nous  aTont  dA  adopter  la  denonii* 
i^KioD  rtnende  qui  lei  embrasse  egikment 
tOBtci  dieiiz,  eo  y  oomprenanl  leun  annexei, 
»  WngrdUe,  VJhatte,  le  Daghutan,  etc 


£But  quand  11  ne  serait  pas  confirm^ 
encore  par  la  tradition ,  par  les  r6dts 
des  historiens  de  Tantiquit^ ,  et  enfin 
par  les  observations  modemes  des  Pal- 
tas ,  des  Saussure ,  des  Dolomieu ,  des 
Delisle  de  Salles  et  des  Cuvier.  Cest 
un  fait  que  la  philosophie  et  la  physi- 
que s'aocordent  ^alement  h.  avouer « 
u  mer  Gaspienne  est  im  d^membre- 
ment  de  la  mer  Noire,  les  ph^nomd- 
nes  qui  ont  boulevers^  la  terre  ont 
foit  surgir,  certainement,  des  terrains 
qui,  autrefois,  ^taient  cacb^  dans 
rablme  des  mers,  et  ont  enseveli  ceux 
qui  8*dle¥aient  au-dessus  des  eaux, 
converts  d'une  fbrte v6gdtation,  et  sans 
doute  aussi  habits  par  des  g^ntotions 
qui  ont  disparu  subitement  dans  la 
templte.  «  On  ne  pent  le  nier,  a  dit 
«  Cuvier;  les  eaux  ont  recouvert  les 
«  masses  qui  forment  aujourdliui  nos 
«  plus  hautes  montagnes.  » 

IL  n*entre  pas  dans  notre  plan  de 
disselrter  sur  la  grande  catastrophe 
prodam6e  d'abord  par  un  livre  qui  se 
trouve  en  dehors  de  toute  discussion , 
oorrobon^  ensuite  par  le  t6moignage 


r*  Uvraison.  (GiftOASsiB  bt  Georgib.) 


L'UNIVBRS. 


de  tous  les  peuples  >  et  confirm^  en* 
fin  par  Finspection  gtologique  de  notre 
plandte ;  mais  il  ^tait  du  moins  n6oes- 
saire  pour  nous  de  rappeler  cet  ^vtoe- 
ment,  parce  qu*il  selie  6troitement  It 
la  contr^  que  nous  entreprenons  de 
dtoiie,  soil  qu'on  Tappelle  dtiuse  de 
No^  dans  Tbistoire  sMne,  de  Xixur 
thrus  chez  les  GiaM^ens,  de  Peymn 
dans  la  Chine ,  de  Deucalion  et  tPO- 
gyg^s  chez  les  Grecs,   de  BocMca 

Karmi  les  Muyscas  de  la  GolomftMe,  etc. 
ious  ajoutmms  que  c*est  encore  un 
fait  avm  que  les  eaux  se  retirent  de 
certaines  locality  pour  faire  ailleurs 
de  nouvelles  conqu^tes  :  le  golfe  de 
PouzzoUes ,  h  quelques  milles  de  Na- 
ples, couvre  des  villas  qui  furent  ha- 
bit^ par  des  contemporains  de  Qo^- 
ron ;  la  mer  baigne  le  pied  d*un  an- 
cien  temple  de  Diane  dont  les  Mar- 
seillais  ont  foit  leur  cath^dnJe,  et  qui, 
jadis  2  6tait  avanc6  dans  Tint^rieur  de 
la  ville.  Par  oontre ,  les  anciensports 
de  Brindes ,  de  Ravennes  et  de  Frojus 
n'existent  plus;  Memphis,  qui  servait 
de  retraite  h  dies  floites  nombreuses, 
est  maintenant  a  vin^  lieues  du  goife 
de  Suez ;  les  fkAs  batbient ,  il  y  a  peu 
d'ann^ .  les  murs  de  Caatx ,  qu'ils 
ont  abandonnds  aujourd'hut.  £t^  pour 
revenir  k  notre  suiet,  le  tnangle 
compris  entre  la  chame  du  Caucase , 
le  Bon  et  le  Volga,  n'est  ou^une  vaste 
lande,  ou  steppe,  de  nature  saNne, 
entreiml^e  de  sable  et  de  terre  giaise, 
de  marais  salants,  de  sel  cristaHis^, 
etde  coquiflages  qui  n'ont  aucun  rap- 
port avecceux  des  £[euyes ;  indices  cer- 
tains de  Tancienne  union  de  la  m«r  Cas- 
Sienne  et  du  Pont-Euxin  par  la  mer 
'Azow.  Le  lac  d'Aral  hii-m^me  n*est 
qu^une  fraction  de  la  premi^:  ce 
que  d^montre  incontestablement  rin- 
spection  du  sol  intermddtaire.  Buf- 
fon  a  fait  observer,  conune  preuve 
de  cette  jonction ,  que  la  Canrienne 
ne  recoit  aucun  fleuve  du  oot6  de 
Torient,  ni  TAral  du  c6t€  de  Focci- 
dent.  It  ne  servirait  k  rien  de  deman- 
der  ce  que  sont  deyenues  ies  eaux 
ainsi  d^pfac^,  car  nous  pourrions 
r^pondre  qu'ellcs  ont  vers^  leur  trop 
plein  dans  le  sein  du  vaste  Oc^an,  sott 


par  des  passages  droits  semblables  h 
ceux  de  J6ukai^ ,  de  Constantinople , 
des  Dardanelles  et  de  Gibraltar,  soil 
par  des  canaux  souterrains.  En  effet , 
des  voyageurs  assurent  que  tous  les 
ans ,  k  Pentr^e  de  I'hiver ,  on  voit  sur- 
nager,  dans  la  partle  sunirieore  du 
golfe  Persiqae,  dee  fenules  et  des 
orandia^  appartenant  k  des  ?^ 
taux  ^1  ne  ae  trovrent  que  dans  ks 
provinces  voisines  de  la  mer  Camicn- 
ne,  et  nous  afifirmons,  sur  le  temoi- 
gna^t  de  M.  Gamba,  a  qui  on  doit 
plusieurs  travaux  utiles  sur  oetteoon- 
tr6e,  et  notamment  une  carte  hydro- 

grapnigue ,  r^uite  sur  oelle  de  iLou- 
>uzo£r,  que  cette  mer  est  sujette  ^des 
variations  de  profondeur,  et  qu'en 
1822,  par  exempk,  elle  admettait 
des  vaisseaux  tirant  dix-huit  pieds 
d'eau ,  tandis  qu'en  1826  elle  n  <^it 
plus  navigable  ^ue  pour  des  navires 
lirant  au  plus  qumze  pieds.  Ctftte  baisse 
ne  s*est  point  op^ree  sans  kusser  h 
dtouvert  des  edifices  qui  attract 
qu'autrefois  il  y  a  eu  des  mouvements 
al  tematifs  de  hausse  et  de  dtooissanoe. 
Qui  nous  dira  ce  que  devienncnt  les 
eaux  dans  la  p6rioded*abai8sc»ieQt? 

Maintenant,  si  nous  r^unissons  par 
la  pens^  ce  aue  le  temps  a  s^par^, 
nous  verrons  le  Caucase,  le  Taurus, 
la  Tauride,  le  D^mavend  et  oueiques 
autres  sommit^s  former  des  Ties  bai- 

{(nto  par  les  eaux  de  TOo^an.  Vers 
e  nora,  la  mer  Baltique  et  la  mer 
Blanche  ^taient  unies  k  ces  nappes 
d*eaa  que  Ton  a  appeldes  depuis  Pont- 
Euxin  ,  mer  Caqjuenne  et  mer  d'Aral; 
et ,  en  effet ,  on  ne  trouve  entre  Riga 
et  Azow,  entre  Archangel  et  Astra- 
kan ,  qu'un  petit  non^nre  d'di^Tations 
de  formation  r6cente. 

Versle  sud,  les  lacs  d'^rivan,  d*Or- 
miah  etde  Van  ne  sont  que  les  restes 
des  eaux  qui  convraient  autrefois  ia 
Perse,  et  se  r6unissaient  au  gooe 
Penimie  par  le  terrain  qui  farme  an- 
jouidliui  le  Naaubemkuif  oo  mad 
66seTt  sal6.  Cette  observaooo ,  w^ 
sur  des  preuves  gtologiqoes,  expHqoe 
la  presence,  dans  la  mer  Caspmiieet 
dans  celle  d'Aral .  de  certaines  esptes 
de  coquillages  et  ae  poissons  analogues 


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CIRGASSIE  £T  Gl^ORGIE. 


h  celles  de  i'Oo6an.  Mais  qii'oii  ne 
s'imagine  pas  que  les  seuls  ecrivains 
profanes  ont  pu  Clever  oette  bypa- 
th^. nVeipritdeDieu^taUportisur 
«  les  eaux  y »  dit  la  Gente.  —  «  M 
« poslirUi  de  Japhet  se  ditpersa 
« doHs  les  iies  des  naUons.  —  Au 
*  commencement  du  mondey  Peau 
«  cowraU  toute  la  terre,  »  ajoutent 
<>  saint  Jean-Damaso^ ,  saint  Am- 
«  broise,  saint AugustinetsaintBasile. 

Les  peupies  les  plus  anciens  s'enor- 
cueillissent  d'une  engine  insulaire  : 
fe  r^it  de  Platon  sur  TAtlantide  est 
assez  oonnu  sans  que  nous  le  rappelions 
ici.  Un  philosophe  de  notre  siede  s'en 
est  empar^  poor  une  ing^ieuse  et 
savante  dissmation  sur  Tori^ine  des 
Atlantes ,  de  ce  peuple  primitif  qu*il 
place  dans  le  Caucase.  II  hii  pauralt 
certain,  par  la  concordance  des  plus 
vieilles  fraditions,  que  les  anoetres 
de  ees  gyrations  qui  couvrent  le 
grand  plateau  de  la  Tatarie ,  la  vaste 
acythie  des  anciens ,  la  Perse  et  T  Asie* 
Mmeore^  ^talent  descendus  des  hau- 
teurs caucasiennes ;  aussi  doit-on  peu 
s'^ner  de  Toir  que  oe  mont  ^it  un 
oljet  de  onlte  pour  les  plus  anciens 
peoples  de  rOrient.  Et ,  en  effet ,  une 
tradition  de  FAsie,  rapports  dans  la 
B/bfiothdgne  orientale  de  d*Herbelot, 
Porte  qu^  I'^wque  oili  la  terre  fut 
donn^  h  Adam ,  le  peuple  ant^eur 
fot  reKgu^  dans  les  montagnes  du 
Caucase. 

Les  t^itiiires  qui  enyeloppent  le 
berceau  de  Thistoire  oonunencent  k 
{Kine  k  s'^daircir,  que  nous  Toyons 
s'derer,  sur  cet  horizon  n^buleux, 
une  ^nde  finire,  Fram-theut,  qui, 
an  dire  de  Pelloutier,  Phtstorien  des 
Celtes,  simifie  dans  la  langue  des  an- 
ciens Scvftes  dwMU  bienfaiiante ; 
dans  cede  des  Grecs,  c'est  le  dieu 
pr^oyant  (  npo(&)i6iuc ) ,  Prom6th6e , 
^i,  ayant  rayi  le  feu  du  del  pour 
animer  les  statues  d'argile  que  ses 
mains  ayaient  paries,  les  organisa  en 
Mci^  dans  ceue  mtoe  contree ;  mais 
j[«piter,  irrit^  de  Taudaoe  de  cet 
bomme,  usurpateur  de  ses  propres 
'^^^ ,  le  fit  her  ayec  des  chalnes  de 
sur  un  rocher  que  la  tradition 


dit  £tre  le  Mqimvari,  ou  Kasbeck, 
et  il  youlut,  en  outre,  qu'un  insatisdble 
yautour  lui  d^chirftt  1^  entrailles.  Ce 
supplice  ^pouyantaMe  ne  finit  que 
lorsqu'un  n^ros  yint  d^liyrer  le  pere 
des  hommes,  et  tuer  le  monstre  k 
coups  de  fl^hes  :  myst^rieux  et  res- 
pectable sonyenir  d'un  grand  homme , 
d'un  bienfaiteur  de  rhumanit^,  qui 
anime  des  6tres  stupides  et  abrutis  du 
feu  sacr^  de  lapens6e,  mais  que  Fin- 
gratitude  et  I'enyie  abreuyent  de  d^- 
espoir  jusqu'au  jour  oik  le  bras  d*un 
yengeur  se  l^e  pour  sa  d^iiyrance. 

Les  annales  mythologiques  de  TO- 
rient  nous  montrent  les  rodiers  du 
Caucase  peupl^  de  divet^  sorte  de 
grants  qui  r^nent  sur  toute  la  partie 
habitable  du  globe.  L*un  d'eux ,  Ar- 
genhy  iXtit  sur  ce  mont  un  palais  od 
sont  consery to  les  statues  des  rois  de 
cette  6poque.  Un  danger,  noramd 
Huschenky  yient  attaquer  les  dhes^ 
mont^  sur  un  dieyal  k  aouze  pieds,  ou 
phit6t  sur  un  nayire  k  douse  rames ; 
un  rocher,  lanc^  par  un  de  ses  ad- 
yersaires,  Ttoase  dans  les  monta- 
gnes du  Damayend.  Or,  il  est  impor- 
fimt  de  remarquer  que  ofres,  dans  les 
anciennes  langues  de  TAsie.  d^signe 
une  tie,  et  il  est  la  racine  des  mots 
MaldiveSyLaouedlve8ySerandk>e{Qey' 
Ian ),  et  de  plusieurs  autres. 

Les  m^mes  traditions  orientales  rap- 
portent  que  des  colonies  sortirent  du 
Caucase  pour  se  r^pandre  sur  les  ties 
yoisines;  d'oik  il  faudrait  oondureque, 
de  procfae  en  prodie,  elles  peuplerent 
les  sonamit^  du  Taurus,  ou  Liban, 
de  I'Atlas ,  des  Pyr^nto ,  des  Alpes , 
des  monts  Ourab,  de  T Altai  et  dn 
plateau  de  la  Tatarie. 

Nous  pouyons  ajouter  enfin  que  les 
Tcfaerkesses,  que  nous  ndmmons  im- 
proprement  circeusiensy  se  donnent 
a  eux-m^mes  le  nom  ^Adtghiy  A€riv€ 
de  Ada^  qui,  dans  le  langage  tatare- 
turc,  correspond  a  ^.  Mais  il  est 
tempiB  de  sortir  aussi  de  cette  tie  du 
Caucase,  oCi  Tenfance  de  Fhistoire  se 
trouye  empisonn^e  dans  des  lan^ 
^troits.  L'efmis  rideau  qui  nous  yoife 
les  temps  primiti&  est  tomb^  pour  de 
longs  siteies ,  et  quand  il  se  leyera  de 


L'UNIYERS. 


t 


nouveau,  Taspect  de  la  terre  ne  sera 
plus  to  mdme;  tea  eaux  se  sont  d^la- 
oto,  et  lea  ties  ont  fornix  des  conti- 
nents. Si  le  Caucase  est  encore  bai- 
g^6k  Test  et  k  I'ouest  par  une  double 
mer,  au  nord  il  toudie  h  PEurope,  et 
▼era  le  sud  il  dtend  ses  ramificationa 
dans  la  plus  vaate  partie  de  I'anden 
monde. 

HisTOiBB  DU  Caucjlsb.  —  TVcmA- 
tkmt.  La  cfaatne  caucasienne,  situ^ 
entre  les  40*  et  45*  degr^  de  biti- 
tude  N.,  et  les  35*  et  47*  de  longitude 
orientale,  a  enyiron  350  iieues  com- 
munes dans  sa  plus  inrande  longueur, 
depuis  Anapa  iusqu'a  Bakou.  VEl- 
bfina,  la  plus  Ae?ee  de  ses  sommit^s, 
a  16,700  pieds,  le  Mqimvari,  ou  rocher 
de  Prometh^  en  a  14,400,  et  le  Choi- 
^Ibrauz  sur  lesconflns  du  Daghestan, 
environ  13,000.  La  steppe  que  la  re- 
traite  des  eaux  a  mise  a  d^uvert  du 
cdt^  de  la  Russie,  est,  ainsi  que  nous 
Tavons  dit,  une  vaste  plaine  de  sable 
et  de  sel  cristaHis^^  formant  un  triam- 

e  scalane,  eompns  entre  le  Don  et 
a  mer  d'Azow  h  I'ouest,  le  Volga  et 
la  mer  Caspienne  k  Test.  Vers  le  sud, 
plusieuis  cnatnons  descendent  en  toas 
sens,  et  vont  se  r^nir,  les  uns  au 
mont  Taurus  dans  la  Turquie  d*Asie, 
les  autres  au  pic  de  D«nayend  et 
aux  mmitasnes  du  Tab^stan,  dans  le 
royaume  ae  Perse.  Au  centre  se 
trouTerAnn6nie,que  dominele  mont 
Ararat  J  diii,  selon  la  tradition  locale, 
8*arr6ta  I'arcbe  de  No^. 

Le  Caucase  forme  deux  rangto  de 
montagnes  paralldles,  dont  la  plus  61e- 
vde  se  trouye  au  sud.  et  la  plus  basse 
au  nord.  Gette  demiere,  connue  sous 
ie  nom  de  Montagnei  Noire$,  se 
perd  dans  une  vaste  plaine  qu'arro- 
sent  de  grands  courants  d*eau.  EUe 
iustifle  son  nom  par  son  aspect  sau- 
vage  et  Tobscurite  babitueile  qu'entre- 
tiennent  dans  ses  valkes  le  rapnroche- 
ment^des  grandes  sommit^,  r^pais- 
seur  des  fdr^ts,  la  fr^uencedes  pluies, 
la  firoideur  des  vents,  et  la  densite 
des  brouillards  qui  descendent  des 
montagnes  neigeuses;  obscurity  que 
rendent  plus  sensible  encore  la  douceur 
du  climat  et  la  puret^  de  Fair  dans 


la  steppe  voisine.  Chaoune  des  hau- 
teurs prindpaies  des  montagnes  Noi- 
res  est  d^sign6e  dans  le  pays  par  une 
d^omination  caraot^ristique:  tels  soot 
la  motUagne  ChauDtj  k  mimtdet 
f^oieurs,  odai  d&  la  Forit  BoHitf  le 
Bolt  Sombre,  le  Poignard file mtmi 
des  TempStet* 

Derri^  cette  premite  dtatne  8'6- 
l^ent  les  montagnes  Neigeuses  oii  Ton 
remarque  FEIbrouz  et  le  M^wari, 
dont  nous  avons  d^a  parl6.  Xa  tra- 
dition afiOrme  que  nul  n^a  grar  i  la  dme 
de  TElbrouz ,  et  (fu'il  faudrait  poor 
cela  une  permission  particuli^  de 
Dieu.  Le  Mqinwari  est  appd^  par  to 
Russes,  Kasbeck,  paroe  que  le  vil- 
lage de  St^phan-Tzminda ,  situ<  au 
pied  de  oe  mont,  ^tait  autrefois  la  i^ 
sidence  du  Kasi-beck,  offider  charfje 
de  la  garde  du  d^fil6.  Ces  sonunites 
gigantesques  sont  flanquto  par  d*au- 
Ires  pics,  dont  les  t6&s  sont  ^gale- 
ment  couvertesde  neiges^temelles,  et 
dont  la  base  se  cache  sous  des  marais 
pestilentiels  qu'y  entretient  la  foate 
des  avalanches. 

Ge  rempart  nature! ,  jet^  k  Yem- 
mit^  de  TEurope  sur  les  oonfins  de  T  A- 
sie,  laisse  pourtant  deux  passages  par 
Oik  les  conqudrants  ont  qnelquefois 
pte6tr^  de  rune  k  I'autre  nartie  alter- 
nativement ;  ce  sont  les  d^nMs  de  Der- 
bent  et  ceux  du  T6rek.  Mais  mm, 
de  temps  immemorial,  les  peoples 
voisins  se  sont  attach^  k  dtfendre  oes 
passages  par  des  fortifications  mie  b 
disposition  des  locality  rendait  for- 
mid{d)les  li  pen  de  firais.  Ces  d^bna 
detours,  de  murs,  de  bastions, de 
foss^  et  de  f&rteresaes  ont  donn6  lieu 
2i  la  fable  si  aocrWt^  pmni  les  (>uca; 
siensde  la  filmeuse  muraiDe  gui  bordait 
la  crite  du  Caucase,  depuis  le  Poot- 
Euxin  Jusqu*^  la  mar  Cainnenne.  En- 
tre les  mille  r^dts  extraoroinaires  dus 
k  rimagination  des  peuples  orientaox, 
il  en  est  un  qui  a  m  adopts  par  ouel- 
ques  toivains  de  TOocident,  cw  ce- 
lui  qui  attribue  a  Alexandre-le-Gwd 
la  construction  de  ce  rempart,  ben 
qu'il  soit  dtoontr6  que  ce  conquoaDt 
n'a  Jamais  visits  le  Caucase.  Mais 
id  la  tradition  fait  honneur  k  Alezan- 


CIRCASSIE  £T  G^ORGIE. 


dtt  de  toii8  les  grands  soayenin,  de 
mliiie  qa*en  imVd  eUe  lea  oonaacre 
d^ja  k  adp(A6on.  Mabomet  lui-mtoe, 
dans  ses  mystiques  allocutioiis,  foit 
allusion  au  conqu^rant  mao6donien, 
en  pariaat  de  oe  mur ,  car  il  en  al» 
triixie  la  fondation  k  Zoul-Camalln 
( le  bioome ),  ayant  probablement  en 
vue  ies  deux  comes  d'Ammon,  figu- 
rte  sur  Ies  m^dailles  d* Alexandre  (*). 
Cest  au-deU  de  ce  rempart  que  le 
proriidte  place  Ies  descendants  maudits 
de  Gog  et  de  Biagog.  pr^destin^  k 
raTager  la  ttoe  peu  de  temps  a^ant 
la  fin  du  monde.  Ges  peuples  cruds 
( Ies  YaeffaiuOes  et  Ies  Mc^foueffes), 
sans  doute  Ies  Scythes-MoBotes  des 
Grecs,  ^talent,  selon  Ies  toivains 
orieotaux,  contenus  dans  Ies  r^ons 
sqytenMonales  par  le  rempart  du  Cau- 
case.  Vaici  ce  qu'en  dit  le  Koran : 
Zoul-Gamain,  arrive  au  pied  dedeux 
montagneSf  y  trouva  des  peuples  qui 
De  coDoprenaient  qu'k  peine  le  lan- 
caffB  oral.  Ges  hommes  s'adress^rent 
a  lui :  —  0  Zoul-Camain,  Ies  Yad- 
eougs  et  Ies  Mad^ougs  raTa^rent  la 
terre;  nous  te paierons un tnbut  si 
to  veux  61e?er  un  mur  entre  eux 
et  nous.  U  r^pondit :  -*  Les  dons 
de  Dieu  sont  nr6f<6rables  It  tos  tri- 
ints  y  je  satisrerai  k  tos  d^sirs.  Ap- 
portez-moi  du  fer,  et  entassez-le 
myn^k  la  hauteur  de  vos  montagnes. 
Pais  il  leur  dit  :  SoufDez  pour 
embraser  le  fer ;  et  il  ajouta  :  Ap- 
portez-moi  de  I'airain  fondu,  ana 
que  Je  Fv  verse. 

«  Les  xad^ougs  et  Ies  Madgoum 
ne  purent  m  firanchir  ce  mur,  ni  le 
peroer. 

«  Cela  a  M  £ait  par  la  grace  de 
Dieu.  Mais  quand  T^oque  qu'il  a 
d^ign^e  sera  venue,  il  renversera 
ce  mur ,  et  Dieu  n'annonce  rien  en 
vain.  » 

PIqsieurs  bistoriens  de  TOrient  qui 
ecrivaient  dans  les  premiers  sidcles  de 
ll)6giR,  sont  entresa  ce  sujet  dans 
de  curieux  details  :  les  Yadjoujes  et 
les  Madgougs,  sont,  disent-ils,  des 

(*)  M.  a  d'Ohsaon  (  Moundjt ).  Dei 
peoples  dtt  Caucaw ,  di.  vix  et  note  37. 


grants ,  dont  la  taille  s'^l^ve  k  une 
bauteur  pxodicieuse ;  ils  ont  des  fprif- 
fes  et  des  denti  indsives ,  comme  les 
animaux  camassiers ,  dont  ils  parta- 
gent  les  godts  et  1^  babitudes.  Le 
mur  dev6  contre  eux  est  ooostruk  en 
briqnes  de  for  et  de  cuivre,  soudto 
ensemble  et  reoouvertes  d'une  ooucfae 
d*airain  fondu;  nuds  qudque  sottde 
que  soit  ce  rempart,  iL  tombna  coomK 
un  pabnier  que  la  cogn^  a  firaippi§, 
quand  le  temps  sera  venu  oik  les  en- 
fants  de  Macog  devront  se  r^pandre 
sur  la  terre  et  y  porter  la  destruction, 
Pincendie  et  la  mort,  jusqu'au  Jour  so- 
lennd  oii  la  mati^  sera  anmitist  et 
lliumanit^  tout  enti^  jette,  trem- 
blante  et  dtermte,  aux  pieds  de  son 
Crdateur.  En  attendant,  les  gudiens 
de  ce  mur  viennent,  de  temps  en  temps, 
firaii^;)erli  grands  coups  de  marteau  sur 
ses  portes  d*airain ,  et  ce  retentisse* 
ment  sonore  foit  savoir  aux  Madgougs 
que  le  pays  est  bien  gard^. 

Les  peuples  caucasiens  aocueiUent 
avidement  ces  r^cits  prodigieia,  et  il 
ne  £Btut  pas  s*«n  ^nner,  leinr  g^nie 
offirant  im  mdange  de  Pimagination 
ftonde  des  pontes  de  POrient  et  des 
reveries  ossianiques  des  montagnards 
^cossais. 

D^Ja,  dans  unebaute  antiquity,  les 
Grecs,  frapp^s  de  Paspect  k  la  fois  im- 
posantet  bizarre  de  ces  montagnes ,  y 
avaient  laiss^  tomber  les  germes  de 
plusieurs  traditions  mytbologiquesre- 
cueillies  avec  entbousiasme  par  les 
peuples  de  TAsie.  Rien  de  si  fimtas- 
tique,  en  effet,  que  cette  cfaalne cau* 
casienne,  lorsque  au  jour  tombant, 
le  v<^ageur  merveilie  peut  voir  la 
gigantesque  silbouette  d'une  crdte  b6- 
risMc  de  dents  et  d^ir^e  par  les 
convulsions  volcaniques.  Les  rayons 
du  soldi ,  rdlMiis  par  les  prismes  de 
la  glace,  prennent  Us  plus  bviliantes 
coiueurs  de  Paro-en-dei.  l^es  monta- 
gnes Noires,  tapissta  de  bois  de  pins, 
de  ffen^vriers,  de  boukeaux,  de  sapins 
et  ae  chtoes,  jettent  dans  les  inter- 
stices deces  sombresfor^ts  leurs  anti- 
ques rocbes  calcdres  que  recouvrent 
ies  cristaux  de  fdd-spath  vitrein,  le 
quartz  et  Parophibole.  Des  torrents , 


L'UNIVERS. 


descenditt  de  ces  hauteurs  colossales, 
bondissent  avec  fracas  et  roulent  dans 
le  fond  des  vallto,  tandis  que  le  si- 
knce  du  tombeau  rtgne  plus  loin,  au- 
tour  des  sonmit^s  basauiques.  Pen- 
dant la  miit,ce silence  des  neiges6ter- 
nelles  est  interrompa  par  les  oris  du 
chacal.  On  dirait  on  signal  du  depart 
qoe  se  donnent  les  dmons  pour  les 
regions  tevto.  o&  de  temps  inun6- 
morial  la  crMulit^  populaire  a  ^taMi 
leurs  assemblto  nocnimes.  SouTent 
im  montagnard  t^m^raire,  m^prisant 
les  avis  de  la  vieillesse ,  ose  franchir 
le  seuil  de  sa  cabsnepour  jeter  un  re- 
gard profane  sur  la  nature  qui  Ten- 
vironne;  et  quand  arrive  Pheure  so- 
teoneUe,  ou  la  lune  balance  ses  rayons 
bleultres  sur  les  pics  neigeux  du  Cau- 
case,  Tenfant  du  desert  voit  une  file 
degigsntesques  fantdmes  qui  seoouent 
dans  les  airs  leur  cbevelure  blanche ; 
au  mOieu  d*eux,  quelquefois,  est  une 
jeune  fiUe,  en  longs  habits  de  lin :  c'est 
la  Tidime  dont  le  sang  va  servir  aux 
esprits  infemaux  pour  la  oonsomma- 
tlon  de  leurs  nudefioes. 

lA ,  Zoroastre  placait  le  mauvais 
fE^nle  Aritman :  i\  s'^iance,  disait-il , 
on  sonunet  de  FElbrouz ,  et  son  corps 
^tendu  sur  Tabtme  semble  un  pont 
fet6  entre  les  mondes. 

Plos  has,  vers  une  r^on  culttv6e, 
se  troa?e  la  caTeme  du  prcphdte  Elie. 
Un  rocfaer,  en  forme  d^autel ,  y  sup- 
porte  un  gobdet  d'argent,  rempli  de 
bite.  GbMue  ann^,  quand  la  mois- 
soo  doit  titre  abondante,  la  liqueur 
d^borde  et  Ta  fertiliser  les  champs 
voisins.  Jadis  un  montagnard ,  fidele 
adorateur  d'^lie,  ayant  6&  fait  prison- 
nier,  parvint  &  s'^chapper;  mais  il 
ignonft  son  chemin  et  se  trouvait  en 
daiigar  de  retomber  entre  les  mains 
deaes  ennemis,  lorsqu'un  aigle  Ten* 
leva  dans  les  airs  et  le  d^posa,  sain 
et  sauf  f  sur  les  bords  de  la  caveme; 
cfaague  ann^e ,  ses  descendants  vien- 
nent  prooessionnellement  remercier  le 
et  lui  offrir  de  la  bite  et  des 


aux. 


Sur  Tun  de  ces  pics  neigeux ,  ha- 
bite  encore  le  nfin-paduchah,  le 
prince  des  demons ,  et  ,6ur  un  autre 


I'oiseau  Anka ,  que  toute  Tantiquitc 
orientale  a  c6l^re.  Plus  loin ,  c'est  le 
rocher  od  le  pte  des  hommes  fut  ex- 
pos^ ^  la  voracity  d*un  rautour.  Enfin, 
U  n'est  conte  si  extraordinaire  ^1  ne 
trouve  cr^ance  parmi  les  superstitieux 
habitants  du  Caucase.  Le  christia- 
nisme  lui-m(6me  y  a  laiss^ ,  comme 
traces  de  son  passage,  des  souvenirs 
empreints  d'une  credulity  remarqua- 
ble :  au  pied  du  Mqinwari,  se  trouvait 
quelques  grottes  taillto  dans  le  roc , 
peut-^tre  par  des  bri^^ands  k  qui  an- 
ciennement  elies  servaient  de  reiiaires. 
Plus  tard,  de  pieux  ctoobites  vinrent 
s*y  retirer:  aujourd'hui  elles  sont  ap- 
pelees,  en  langue  g6orgienne,  GroUes 
de  BethUem,  Les  montagnaitls  disent 
que  dans  Tune  de  ces  prorondes  retrai- 
tes  on  voit  voltiger  une  colombe  d'or; 
dans  une  autre,  est  suspendue  une 
chalne  de  fer,  ^  i'aide  de  laqudle  ou 
pent  grimper  par  un  soupirail  jus- 
qu*au  tombeau  de  J^us-Christ,  et  se 
promener  sous  les  palais  de  cristal , 
qui,  ^ev6s  sur  la  cime  des  monta- 
gnes,  absorbent  les  rayons  de  la  lu- 
mite,  et  ne  refldtent  que  les  cou- 
leurs  de  rarc-en-del. 

Laissons  de  c6t4§  maintenant  les  re- 
cite fabuleux,  au  risque  de  perdre  la 
trace  de  quelques  rares  v6rit6s  ense- 
velies  sous  les  mines  de  Thistoire,  et 
voyons  ce  que  nous  offrent  de  plus 
certain  les  traditions  locales. 

£lev6  entre  des  peuples  qui  difiF<§- 
raient  essentiellement  ae  moeurs  et  de 
langage,  le  Caucase  6tait  une  barrite 
naturelle  que  Ton  songea  k  fortifier  ^ 
dte  hi  plus  haute  antiquity.  La  tradi- 
tion a  conserve  le  nom  de  MarpisU  k 
un  rocher  du  d^fil6  de  Oariel,  ou 
r^v^ue  Jomandis  assure  que  cette 
reine  des  Amazones  fit  construire  des 
fortifications.  Yirgile  a  chants  ce  mont 
Marp^ien. 

ati'on  ne  s^^tonne  pas  de  nous  cu- 
re parler  des  Amazones  aprds  avoir 
annonoe  que  nous  allions  quitter  le 
domaine  oe  la  Fable.  Les  redts  que 
le  vdn^rable  Herodote,  ce  pte  de 
rhistoire,  nous  a  transmis  sur  ces 
femmes  mierridres ;  ceux  que  nous  en 
ont  fails  Diodorc  dc  Sicile,  £tiennede 


GIRGASSIE  ET  Gl&ORGIE. 


Ijnaiioe,  Pliiieet  viast  Mitves,  sont 
•onrofacNPfo  oar  des  tnmioiis  trap  im- 
foeantoB,  oiesiaoiiiinieiitsti^imca- 
Milks  y  pour  que  nous  bMtioiu  ^  adop- 
ter oommevrailefoiiddBcettefaigtone 
que  rimagiiiatkm  des  potos  fgncs  a 
eavdoppoe  d^ornements ,  et,  duona  le 
mot,  de  mensongea.  II  aeraitj  abaurde 
de  suppoaer  gue  lea  Amaaones  aient 
vtai  en  rdpuDiique  aana  honunea;  il 
restaanadoute  auaaide  croiiequ^^ea 
ae  motilaient  le  aein  pour  ^trej^ 
proiNrea^iiiaiiier  lea  armea.  Ceafamea, 
rtailtat  inMtabled'ime  ^poque  att  Ti- 
gnorance^  dea  proodd^  typo^nmhimiea 
kiasait  toute  (atitode  aux  exageratiooa 
da  r6Gii  CHral,  oomme  k  Feaaor  d*iiiie 
imaguiatioii  po^ique,  ont  ^  aigiia- 
l^es  avec  affectation  par  dea  eaprita 
pesaeux  qui  ont  trouy^  plua  racile 
nier  que  d'approfondk.  t^oor  d'ao- 
8  il  n^est  pais  difOcile  d*y  d^m^ler 
In  ydrite  aur  rexistenoe  de  oette  co* 
lonie  de  Scytfaea  beUiqueux ,  qui  tei* 
gra  du  jpafs  dea  Mceotea ,  traversa  le 
Cancaae,  et  a'^taUit  dana  lea  plainea 
de  Th^miacyre.  Lea  principaux  goer* 
rieis  de  cene  arm6e  furent  taill&  en 
pieoes  par  les  peuplea  voiains .  ou  r(6* 
Oiuts  k  readavage,  et  lours  femmea , 
oooaerrant  dans  le  malheur  le  souve- 
nir dea  flXBura  nataks,  prirent  lea  ar- 
mea pour  d^endne  leura  en£Eints  et 
Jeurs  propri^tda;  car  toute  I'antiquit^ 
a'acooide,  dana  aea  Merits  et  dans  aea 
moDiuneata,  1^  noua  rq[)r^enter  les 
femmea  des  Scythes  comme  habitute 
a  combattre  journellement  k  o6t6  de 
leurs  6poux,  et  aussi  habiles  qu'eux  k 
roanier  Tarc^  la  hache  et  la  lance.  Elles 
nTentareprirentpas  les  guerreslointaines 
mi*on  a  misessur  leur  compte;  mais,  ai* 
a6es  par  des  honunesdebasaeconditi<Mi, 
OQ  dea  eaclaves ,  et  allito  k  des  dtran- 
sers,  ellea  firent  qnelques  exp^itiona 
dana  Tune  desqoelles  Marp6Bie  tiera 
sur  le  Caucaae  des  fortificationa  qui 
nimel^rent  long-temps  son  nom  a  la 

Les  deux  passages  dont  nous  avons 
tut  mention  plus  haut,  les  seuls  indi- 
qu65  par  la  nature,  sont  ceux  qui,  depuis 
une  naute  antiquity ,  sont  connus  sous 
k  nom  de  Port^s  Cancasiennes ,  Sar- 


Portet,  et  autres  dteonunatfona. 

Le  premier,  appall  eoamunteent 
aaioaid'hui  d^m  de  Bariel  (Pfhe 
Caucasim  de  Pline) ,  ae  tnnive  aur  la 
lOuGte  de  Moadok  k  Tfflia,  et  diviae 
riattuae  cancaaien  en  deux  partiea  a 
Mu  arte  ^galea.  L'encaiaaenient  d'une 
aouue  didae  de  moatagnes  eacarp^ 
qui  court  du  aud  an  mm  fnrme  une 
gorge  ^troite,  ailloon^  par  le  fleu%e 
Tmk  et  par  aea  a£Suenu.  Gette  pn- 
sition  est  natureUement  ai  redODtable, 
one  lea  plua  aim^ea  fbrtifiGationa  aul^ 
nraient  a  ime  poignte  de  combattantt 
pour  J  arr6ter  une  armte  formidable. 

La  distance  ^i  s^iiare  Moadok  de 
Tiflis  eat  d'enTtron  240  werstes  ( ee 
lieues  }.  A  moiti^  diemin ,  et  ^  30 
werstea  du  Mqinwari ,  on  voit  sur  les 
borda  du  Tdrek  lea  ruinea  de  Taaden 
chateau  de  Dari6la.  On  ae  sait-  rien 
de  bien  poaitif  sur  F^moiogie  de  oe 
mot.  Selon  une  traditicm  montagnaide, 
une  prinoesae  du  aom  de  Daria  flt 
Clever  cette  fbrfeereaae,  k  une  6poqae 
absokunent  inoonnue.  Elleyftui  sa  leai* 
deuce  pour  y  dtoouascr  les  passants;  et 
lorsqirun  Toyageur  avait  le  malheur  de 
lui  plaire,eliete  gardait  aupads  d*eUe, 
le  oomblait  de  dona  et  de  careaaea, 
s'abandonnait  a  lui ,  et  le  feisait  en* 
auitepr^piter  danaieaeauxdnTdrek. 
Mala  M.  Kk^rotfa,  qui  a'est  liTr6  af«e 
tant  de  suooda  a  d'importaotea  reaber- 
ches  sur  rhistoire  du  Caucaae,  penae 
que  Darida  doit  ae  lire  DarM^  et 
quece  mot  vient  du  tatare,  et  signHle 
ddOl^  (de  dar^  ^troit,  et  ^  route).  Le 
fort  aurait  M  ocmstruit  par  un  roi 
de  Gtoigie,  du  nomde  Mirwan,qui 
r^^oa  de  Taa  167  k  1S8  avant  notre 
ire.  Ik  toit  ausai  la  fortoesae  Oih 
numSa  des  andens. 

Pluaieurs  historiens  d' Alexandre  ont 
6ait  que  oe  conqu^rant  avait  &it  ftr- 
mer  ce  paaaaee  par  uneporte  de  ler« 
If ous  avons  deja  dit  qu'if  ne  riaita  Ja* 
mais  le  Caucase ,  et  il  ne  paralt  pas 
que,  de  son  vivant  du  moins,  ses 
lieutenants  aient  fortifi^  la  porte  cau- 
casienne. 

Dans  le  moyea  3ge,  lorsaue  le  paya 
etait  occupy  par  les  Huns,  les  inonar* 


8 


L'UNIVERS. 


ques  byzantinspqrAieiita  cesbaitMyres 
un  fort  tribut  pour  la  jgarde  de  cette 
.  poffte.  L'histoire  gfergieiiiie  dit  aussi 
que  Cabadet ,  roi  de  Perse ,  oontem- 
porain  de  rempereur  Justinien,  s*em- 
para  da  paasagey  et  qu'il  y  fit  dl^er 
un  mur  a  Teffet  d*y  arrdter  lea  incur- 
sions des  Si^&es  dans  les  domaines 
de  la  Perse  et  de  Tentpire  romain.  On 

}r  voit,  en  efifet,  des  debris  de  murail- 
es  et  des  fortifications  roin^es  qui 
attestent  les  precautions  prises  anden- 
nement  oontire  les  populations  turbu- 
ientes  qui  habitaient  vers  le  nord  de 
la  contree.  Aujourd'hui  les  Russes  ont 
eter^  unefortmue  h  pea  de  distance 
de  I'ancien  Dari^.  EUe  est  encaiss^ 
entre  des  rodiers  granitiques,  tene- 
ment ^v^  et  rapprocfa^  les  uns  des 
autres,  qu*on  s*y  oroirait  dans  un  puits. 
De  Laars  k  Dariel ,  la  vallde ,  dont  la 
km^ueur  est  de  7  werstes,  est  si 
^troite  que  le  soleil  y  p^ntoe  k  peine 
quelques  heures  pendant  les  plus  tongs 
jours  de  I'^t^.  Vers  les  mois  de  juillet 
et  d'aodt,  la  chute  des  avalandies  y 
cause  sodrent  de  grands  d^to  par  la 
nipture  des  ponts  du  T^rek  et  le  d^ 
bordement  du  fleure.  A  quelques  wers- 
tes  du  T6rek,  on  trouve  FAragwi,  qui 
coule  en  sens  inverse  dans  ce  m^me 
passage. 

Le  second  dM€  est  oelui  qui  doit 
son  nom  h  la  ville  de  Deri)ent ,  sur  les 
bords  de  la  mer  Caspienne,  dans  le 
Daghestan.  La  fondation  de  cette  ville 
est  encore  attribu^  h  Alexandre-le- 
Grand ;  supposition  que  rien  ne  Justi- 
^ ,  mais  que  pent  expliquer  une  ya- 
nite  oomRmne  h  tant  de  yilles.  Une 
forte  muraiOe  qui  s'^tendait  de  la  cit^ 
h  la  mer,  dtfemlait  la  Perse  centre  les 
agressions  des  Scytties.  Des  portes 
de  fer  de  quinze  pieds  de  largeur  don- 
naient  panage  aux  voyageurs  inoffen- 
sift;  on  pretend  qu'elfes  ont  6t6  d^po- 
ste  au  monastdre  de  Gelaeth,  pr^ 
Kboutaissi  (*).  Des  yestiges  de  Fanti- 

('^  Le  n*  I  de  la  planche  premiere  est  im 
denu  du  monast^  de  Gelaeth ,  situ^  a 
deux  Ueacs  de  KhoatttMi,  tnr  la  dMiTite 
d'lnie  montapM  oouverte  d'arbres.  Getle 
maiMNi,  babitee  par  des  moines  imMtliieiis 
du  rite  grecicst  placie  sous  I'inTOcation  de 


one  rempart  se  voient  encore  aiuite 
de  la  yilfe,  et  mtoie  sur  la  cr6te  de  la 
montagne  yoisine.  II  6tait  constniit 
en  srandes  pierres  coquiHifares  super- 
posees  h  la  mani^  des  Romains,  sans 
ciment  et  sans  fer.  S'il  fisiut  en  croiTe 
une  version  fort  aocr6dit^,  oelte 
muraOle  se  prolongeait  sur  toutela 
cfaafne  des  monts  du  Ibabasseran,  et 
elle  6tait  due  k  Kosroes-Ifourdiivan , 
9tti  avait  voulu  par-1^  se  preserver  des 
mcursions  des  Khazars. 

Le  passage  de  Derbent  est  sans  oon- 
tredit  le  plus  important  pour  la  sdrett 
de  la  Perse,  car  il  ofifre,  dans  toute 
sa  longueur,  une  steppe  C)  sans  ao- 
cune  elevation,  et  press^  d'un  oSt6 
par  les  eaux  de  la  mer  Caspieone,  ^ 
de  I'autre  par  des  monta^nes  ^levte 
et  des  rochers  coupes  k  pic.  Une  par- 
tie  de  I'ancien  mur  se  trouve  aujoar- 
d'hui  plongde  dans  la  mer.  Le  gragra- 
phe  Abd-ocnr-Raschid  to'ivait,au  com- 
mencement du  XV*sidcle.  que  Bakoo, 
sa  ville  natale,  ^tait  d^a  en  partie 
submerg^e  par  les  eaux  qui  mena^aient 
d'atteindre  la  grande  mosqu6e. 

Derbend  signifie ,  en  persan ,  bar- 
ri^e ;  et  cette  ville  est  aussi  appdeei 
rar  figure,  la  Porte  des  portes ,  oti  b 
Porte  de  fer. 

L^  ^taient  v^taUement  les  portes 
caspietmei,  ainsi  nommto  du  voisi* 
nage  de  cette  mer;  mais  Ferreur  de 
Strabon,  qui  les  place  dans  le  d^6  de 
Dari^la,  n'est  pas  aussi  grave  ^*on  a 
voulu  le  supposer,  s'il  est  vrai,  ainsi 
jne  plusieurscriti^es  Fontpens^,  que 
les  deux  denominations  de  fa  monta- 


saint  Grigoire ;  son  arehiieotnre  est  a  la 
fob  reonarquable  par  sa  simplidti  et  sa 
puret^.  On  croit  que  oe  monumeDt  dale 
du  XI'  siede  de  Vin  chritieniie.  Le 
n«  3  est  la  reprtentatioo  d'un  antioue  bat- 

Bur  sept  k  peu  prcs  de  largear,  et  tout  barda 
de  fer.  Selon  la  tradition ,  oe  seraient  lit  les 
restes  de  la  porte  caucasienne,  Fantre  bat- 
tant  ayant  M  enlevi  par  les  Turcs  :  oa  y 
voit  la  vestiges  d*one  loscriplion  arabe,  gn- 
▼ee  sans  doute  par  les  oonquerants  k  una 
^poque  d^invasion. 

(*)  On  peut  dire  aussi  un  sttp. 


CIRCASSIE  £T  G1&0RGI£. 


9 


gne  el  de  la  mer  ont  une  ^tymologie 
commune. 

Le  mot  Caucase  oa  Kaukas  est 
peu  usit^  parmi  les  habitants  de  oette 
region;  il  y  est  m^me  a  peine  oonnu 
du  volgaire.  Selon  une  tradition  g6or- 
gienne,  Tantique  nom  de  Caoeas  est 
oelui  de  Tun  aes  huit  fits  du  patrlar- 
che  TkargamoSf  ^  qui  les  Armniens, 
et  g^ntolement  tous  les  peuples  de 
)a  mteeoontr^,  attribuent  leur  m- . 
gine.  Les  Arabes  donnent  k  oette 
chatne  de  montagnes,  le  nom  de  Co- 
bokh;  les  anciens  Perses  disaient 
Cnc/b-ed/y  et  les  Persans  de  notre  ^- 
que  K^kAfy  ou  mont  Kdf ,  ce  qui 
paratt  ^quivaloir  k  mont  des  monts, 
mofltagne  par  ezcellenoe.  Dans  une 
haute  antiquity ,  les  honunes  croyaient 
qoe  le  Caucase  fiiisait  le  tour  du  monde; 
aoasi  appelaient  -  lis  ainsi  toutes  les 
grandes  chatnes  de  montages.  II  est 
rest^  k  Pistfame  seal  qui  fait  Tobjet  de 
oette  notice.  Nous  allons  maintenant 
entrer  dans  quelques  details  d'histoire 
natoitUe,  dont  nous  croyons  devoir 
faire  pi^oMer  la  partie  politique.  ^ 

HnrcoiES  katurbllb.  —  La  dme 
det  montagnes  de  ndge  est  form^e  de 
porpfape  oasaltiqae,  de  granit  et  de 
vimvt.  Parmi  les  porphyres  on  en 
oJstiDflie  de  belles  espeoes,  bleu  ta- 
cbettde  jaune,  ou  de  rouge  et  de  blanc, 
nmge  oriental  et  vert.  Dans  les  gra- 
nits,  on  trouve  le  rose,  le  gris,  le 
noir  et  le  bleu. 

Les  montagnes  Noires  sont  entre- 
m^lto  decalcaire,  de  or^  mameux, 
et  de  scbtste  tabulaire  sfllonn^  par  des 
veines  de  spath  et  de  quartz. 

On  disait  autrefois  que  le  Caucase, 
et  Dotanunent  la  Colchide,  renfer- 
maient  des  mines  d'or.  Gependant,  la 
oonqoto  de  la  toison  d'or ,  ou ,  en 
d'aatres  termes,  une  speculation  mer- 
cantile, ne  fut  pas  le  seul  but  de  Fex- 
Stion  de  Jason;  nous  verrons  plus 
que  ce  voyage  eut  encore  un  but 
politique.  Strabon  parte  avec  oomplai- 
ttaoe  des  mines  de  ce  pays ,  et  il  ajoute 
que  dans  la  partie  occup6e  ^  les 
sooanes  (Minsr6lie  ),  les  ruisseaux 
diarriaient  de  I'or  et  de  I'argent  que 
ces  barbares  recueillaient  dans  des  al- 


vMeset  surdespeaux  gamiesde  polls; 
oe  qui  donna  lieu  k  la  £aMe  de  la  fiih 
mease  toison. 

Ces  mines  ont-elles  exists?  Cest  oe 
qu'il  serait  peut-^tre  tbanknxtt  de  nier 
positivement;  mais  il  est  du  moins 
certain  que  les  traces  en  ont  et6  per- 
dues,  et  que  toutes  les  tentatives 
qu*on  a  pu  fiaire  jusquMd  pour  les  d^ 
couvrir  n'ont  amene  aucun  r^ultat. 
Ce  n'est  pas  que  les  mdtaux  manquent 
dans  La  region  caucasienne;  mals  il  ne 
paratt  pas  que  leur  abondanoe  puisse 
offrir  un  large  d6donunagement  aux 
frais  de  Texploitation.  Une  inscription 
en  langue  gtorgienne  qu'on  lit  encore 
sur  r^lise  de  Nmaala^  dans  rOss6- 
thi ,  parte  de  mdtaux  pr^cieux  abon- 
dants  comme  la  poussi^  dans  cette 
region  (*) 

Le  haut  territoire  du  bassin  de 
rOuroula  et  toute  TAbasie  sont  fort 
riches  en  mines.  On  dit  qu'il  en  existe 
une  d'or  et  plusieurs  d'argent  ores  du 
village  de  Soouksou,li  peu  de  distance 
de  Soukoum-kaie ,  sur  les  bords  de  la 
mer  Noire.  Ce  qui  est  plus  authenti- 
que,  c'est  que  les  Mingreliens  pr6ten- 
dent  que  le  Phase  et  la  TzkhSnit- 
^oA  diarriaient  encore,  il  y  a  ^  peine 
un  demi-sidde,  des  paillettes  et  m^me 
des  morceaux  d'or,  dont  le  lavage  for- 
mait  un  des  principaux  revenus  des 
rols  de  Mingiielie. 

L'ignorance  des  Im^r^iens  est ,  k 
cet  ^gard,  un  double  obstade  a  la  oon- 
naissance  de  la  v^it6;  ils  prennent 
les  substances  brillantes  pour  des  m^ 
taux  pr^eut,  et  sans  doute  aussi  les 
m6taux  pr6cieux  pour  de  viles  produc- 
tions, car  il  est  fort  k  pr^umer  que 
leurs  montagnes  possddent  une  partie 
des  richesses  que  la  tradition  leur  at- 
tribue.  II  est  positif  du  moins  qu'on  y 
trouve  en  diverses  locality  des  mines 
de  fer ,  de  plomb,  de  cuivre ,  d'aimant , 
de  sel  gemme  et  d'alun. 

Apr&  les  min^raux ,  il  nous  reste  k 
parler  de  la  substance  bitumineuse  con- 
nue  sous  le  nom  de  naphte ;  et  comme 
die  se  rattadie  k  Thistoire  des  Guibres 

(•)  Journal  Jsiatique,  oclobre  i83o, 
pag.  3io. 


JO 


L'UNIVERS. 


ou  PoTfis^  nous  lui  ooosacrerons  qiid- 
ques  details. 

La  naphte  est  une  huile  de  pierre 
(pHrole),  U^gtire^  transparente  et  io- 
liammable.  On  peut  8*en  servir  pour 
r^dairage ,  pour  le  chaufiage  meme , 
la  cuiason  des  aliments,  et  divers  au- 
tres  objets  d'^nomie  domestique,  ou 
elle  remplace  Phuiie  et  le  bois.  Gette 
oombiistion  oe  se  fait  paa ,  ^  la  vdrit^ , 
sans  r^pandre  une  odeur  fort  dto^a- 
Ue  et  une  fiun^e  ^paisse ,  oe  qui  ne 
rend  son  usage  Traiment  utile  que 
pour  les  peuples  qui  n'ont  jamais  oonnu 
lea  ressouroes  que  se  procure  notre 
civilisation.  On  s'en  sert  encore  pour 
graisser  les  roues  des  chariots ,  pour 
enduire  les  outres  qui  servent  k  trans- 
porter le  vin,  et,  eniln,  elle  entre 
duns  la  preparation  d'un  ciment  fort 
estim^  dans  le  pays.  On  croit  qu'elle 
avait  ^U  employ^  dans  la|ponstnio- 
tion  de  Babylone  et  de  Ninive. 

Gette  substance  paratt  ^tre  le  r^sul- 
tat  de  la  d^mposition  des  bitumes 
fiotides,  op^r^  par  les  feux  souter- 
rains  dans  le  sein  de  la  terre.  Elle  se 
r^doolte  sur  plusieurs  points  du  globe; 
mais  I'espto  la  plus  pure  abonde  sur 
la  cdte  ouest  de  la  mer  Gaspienne , 
depuis  Derbent  jusqu'^  Bakou ,  dans 
leDaghestan  et  le  Cnirvan,  prorinces 
qui  appartiennent  h  Tisthme  caucasien. 
A  peu  de  distance  de  la  mer ,  aux  en- 
virons de  Bakou,  on  a  creus6  des 
puits  dont  la  profondeur  varie  de  dix 
a  soixante  pieds ,  sur  un  terrain  de 
mame  argileuse  imbibe  de  naphte. 
On  en  compte  plus  de  cent  pour  la 
naphte  noire ,  et  quinze  seulement 
pour  la  blanche.  Gelle-ci  n*est  qu'une 
purification  de  la  premise ,  op6T6e  par 
rinfiltration  naturdle  au  travers  d'une 
couche  de  grte.  Ge  bitume  se  rassem- 
hie  peu  a  ^u  dans  les  puits,  qu'on  vide 
au  rur  et  a  mesurc  des  besoins.  U  s'en 
exporte  annuellement,  de  Bakou ,  de 
soixante  a  quatre-vingt  mille  quintaux 
m^triques ,  la  plus  grande  partie  pour 
la  Perse,  le  reste  pour  Astrakan.  Le 
produit  en  est  d*environ  doux  cent 
cinquante  mille  francs. 

Cest  aupres  de  Bakou  quese  trouvc 
Ic  sanctuairc  du  feu,    jirfechrgah ^ 


Tun  des  plus  o6lebres  sectateurs  dr 
Zoroastre. 

Arteck-gah  est  siM  dans  un  pays 
aride  et  infects  par  I'odeur  de  la  na- 
phte. Un  Edifice  carr6,  oik  sont  com- 
prises une  vingtaine  de  oeUules,  seit 
de  monastic  aux  adeptes  du  Zend- 
Avesta.  Dans  la  oour  du  milieu  s'e- 
l^e  un  autel  flanqu^  de  quatre  cbe- 
minto  quadrangulains;  au  centre  est 
un  foyer  que  la  pi6t6  des  Par^  ali- 
mente  perp^udlement  au  moyen  de 
la  naphte.  En  vain  les  annm  ont 
siiooM(6  aux  amides;  eo  vain  les  ooo- 
qudrants  ont  portd  la  perstotion 
au  sein  de  la  patrie  des  Mages;  ie 
culte  de  Mithra ,  sanctionnd  par  Zo- 
roastre ,  a  rdsiste  k  toutes  les  atU- 
ques,  et  les  descendants  des  (jU^ 
6rei  ont  entietenu  le  feu  Bacr6  dans 
hi  longue  sdrie  des  slides.  Fuvant 
devant  lenrs  perstoiteurs,  ils  font 
emportd  ^ns  rexil ,  et  se  sont  ^taUis 
k  »irate,  k  Bombay,  sur  les  bords 
du  Gange ,  dans  ie  midi  de  la  Pose 
et  sur  les  rives  de  la  mer  Gaspienne. 
Un  de  leurs  prindnaux  articles  de  foil 
est  de  croire  que  le  feu  au'ils  oonser 
vent  avec  tant  de  soin  est  le  mtoie  que 
celui  qui  hrdlait  du  temps  de  Zoroastie. 

Les  moBurs  douces  et  honni^tes  des 
ParsUy  auxquels  se  sont  r^nts  qod- 
ques  Hindous,  les  rendent  dignes  de 
la  tolerance  qu'on  leur  aooorde  an- 
jourd'hui.  Geux  d*Jrtech^ah  paiaisr 
sent  satisfaits  de  leur  sort.  Bans 
chacune  des  cellules  de  leur  monas- 
tkre ,  les  reclus  ont  pratique  plusienis 
tuyaui  d'oii  s'exhale  le  gaz  inflannna- 
ble ;  k  certaines  heures  du  jour  et  de 
la  nuit  lis  en  approchent  une  lumi^ 
et  la  flamme  se  manifeste  aussitot. 
Le  matin ,  ils  ^ient  le  lever  da  sdetl 
avec  un  sentiment  d'impatienoe  ni^l^ 
d'anxidtd,  et  it  peine  aper(oiveDt-ils, 
sur  les  homes  de  Thonzon,  ce  (KHot 
lumineux  qui,  le  premier,  ^€met 
dans  Tespaoe,  qu'ils  le  saluent  par  des 
cris;  ils  s'embrassent  en  se  fdicitant 
mutuellement  sur  le  retour  du  ^^ 
Le  soir,  ils  s'afOigent  en  le  voyant  dis- 
parattre,  et  rien  ne  pent  les  ooosoler 
de  son  absenoe  que  respoir  de  le  re* 
voir  bientdt. 


GIRCASSIE  £T  G^ORGIK. 


11 


La  directioo  des  chatnes  de  monta- 
gnes  et  ieur  ^tendue,  le  nombre  et  la 
profondeur  des  vallto  y  I'd^vation  des 
plateaux  et  la  nature  des  bas-fbnds, 
soDt  autant  de  droonstanoes  qui  font 
Tarier  id  les  dimats  physiqpies,  ex- 
cepts 8ur  le  sonunetdes  grandes  imm- 
tagnes  ou  r^e  un  ^ternel  hiver. 

A  Tiflis ,  le  del  est  eonstamment  se- 
ran;  a  pdney  nleut-il  trente  ou  oua- 
raiate  jours  de  rannte.  L'hiTer,  qui  ne 
oommeDoe  qn*en  dtembre,  y  finit  en  f(^ 
vricr,  et  les  strangers  peuTent  s'y  pr6- 
senreraiatoent,  avee  de  laaobrim,  des 
ttrres  intennittentes  qui  se  manifes- 
teat  h  r^poque  des  fortes  chaleurs.  Le 
thenuonietre  s'y  soutient  habituelle- 
ment ,  en  ^ ,  entre  34  et  28  degr6i ,  et, 
sur  les  hauteurs  environnantes,  ou  les 
nciiea  Tout  se  retirer  dans  leurs  mai- 
aona  de  eampagne ,  11  ne  yarie  qu'entre 
18  et  23  d^riB. 

A  Ananour  et  dans  le  pays  oocup^ 
par  les  Lesshis,  I'air  est  extremement 
sain;  maisaans  les  autres  locality ,  et 
Dotamuicnt  dans  Tancienne  Ck)ldiide 
et  le  pays  des  Abases  sur  la  mer  Noire, 
le  dimat  est  diaud  et  pluvieux  outre 
menae.  Les  pluies  forment  des  lacs 
ou  Tiennent  pourrir  les  y^^taux  que 
leor  %e  ou  ks  aoddents  ont  renyer^. 
Derenoes  alors  des  marais  pestilen- 
tkky  ces  navies  d'eau  r6pandent  au 
lotn  kurs  miasmes  morbinques.  Les 
fiirres  y  rdgnent  ordinairement  du 
15  juillet  au  IS  octobre,  et  on  y  yoit 
UD  grand  nombre  d'hydiopiques. 

Le  yoisinage  de  Tempire  ottoman 
ajoate  souyent  anssi  lefl^u  de  la  peste 
a odui  du  dimat,  et  pour  que  rien  ne 
nuBiqiie  k  oes  gnnres  causes  de  d^po- 
pplanoa,  le  cbol^ra-morbus  y  est  ar- 
riri  {dttsieurs  fois  de  Flndfe  par  la 


Enrteni6,  la  temperature  des  pro- 
^noces  ocddentales  et  de  la  majeure 
PVtiede  Tisthme  caucasien  est  qud- 
?Kfoi8gladale,  souyent  tres-cbaude , 
^Nours  exoessiyement  humide. 

Lesnelges  et  les  giaders  inoessam- 
OKot  entretenus  sur  les  sommit^s  do 
cctte  r^on  montagneuse  donnent 
^aittanoe  h  une  innombrabie  quantity 
<K  oourants  d*eau  qui  desccndent  en 


minces  filets ,  se  grossissent  par  leui 
reunion,  deyiennent  torrents  sur  les 
narois  de  la  montagne,  ruisseaux  danB 
la  yall^,  et  fleuves  dans  la  plame.  II 
serait  6galement  difBdIe  et  superflu 
de  les  ^um^rer  tons :  beaucoup  n'oni 
qu'une  foible  importance  locale,  et 
qudques-uns  m^me  disparaissent  mo- 
mentan^ment  dans  la  saison  des  cha- 
leurs; aussi  nous  bomerons-nous  h 
dter  Id  le  petit  nombre  de  ceux  qui 
offient  quelque  intMt  historique. 

Le  Kouban  et  le  T^k  forment  la 
limite  septentrionale  de  Fistiime  cau- 
casien. Au  sud ,  le  Qfms  et  VAraxt 
rempiissent  le  mtoe  objet. 

Le  Kouban  prend  sa  source  sur  Ic 
yersant  de  I'Emrouz ,  trayerse  la  pe- 
tite Abasie ,  embrasse  toute  la  Gircas- 
sie,  et  se  jette  dans  la  mer  Noire  au- 
dessous  de  l*tle  de  Taman.  H^rodote  et 
Strabon  font  mention  de  ce  fleuye  et 
lui  donnent  le  nom  d'Hypanis  ;  Pto- 
i^m^e  Tappelle  yardanusy  d'autres 

f^ographes  Font  d^ign6  sous  le  nom 
e  MmoUsy  et  en  font  la  limite  de 
TAsie  et  de  I'Europe.  Les  Tatares , 
qui ,  dans  le  treizi^me  si^le  de  notre 
ere,  enyahirent  la  S^tbie,rappel^rent 
Kouban,  ou  Koumafiy  et  les  Russes 
ont  adopts  oette  denomination  dont 
retymologie  est  encore  un  probl^e. 
Le  Terek  sort  d'une  6troite  yallde, 
au  pied  du  mont  Khokhi  et  du  Moin- 
wari ;  il  coule  dans  le  fameux  defile  de 
Dariel,  trayerse  le  pajs  des  Tcher- 
kesses,  baigne  successiyement  Vladi- 
kaukas ,  Mosdok  et  Kislar ,  et  se  jette 
dans  la  mer  Gaspienne.  De  tous  les 
oourants  d'eau  de  Tisthme,  il  n'en  est 
point  de  plus  rapide  que  le  T^rek ,  et 
il  en  est  peu  d'aussi  turbulent.  Pen- 
dant I'biyer,  il  charrie  des  glaccs, 
obstrue  son  passage ,  brise  les  ponts 
et  bouleyerse  la  route;  pendant  Vete, 
il  se  grossit  de  la  fonte  des  ndses, 
inonde  la  yall^e  jusou'^  une  hauteur 
quelquefois  consiaerafble ,  entasse  dans 
son  anden  lit  le  sable,  les  pierres 
et  les  arbres ,  et  ya  porter  ailleurs  ses 
flots  capricieux.  Au  nord  du  T^rek,  la 
Kouma  traverse  la  steppe  duGaucasc, 
baigne  Georgiewsk ,  et  se  rend  ^galo- 
raent  dans  la  Caspicnnc. 


12 


UUNIVERS. 


En  suivant  le  littoral  de  la  mer  Noire, 
du  iDord  au  sud-^st,  depais  rembou- 
diare  du  Kouban ,  on  trouve  on  pa^ 
bienbois^et  montagneux,  oii  milleniu- 
aeaux,  desoendus  du  rersant  occidental 
de  la  grande  chatnedu  Gaucase.portent 
a  la  mer  Tbumble  tribut  de  flots  qui 
n*ont  pas  de  noms.  Enfifk,  on  en  ren- 
contre quelques-uns  qui  ont  ^chapp^ 
h  rob8curite;'de  ce  nombre  sont  la 
Khopi,  Qranus  des  anciens,  et  le 
Phoie^  devenu  si  c^l^re  par  Fexp6- 
dition  des  Argonautes. 

La  Kkopi  serpente  dans  un  nays 
fertile,  se  cache  derridre  des  oolnnes 
boisto,  reparalt  aufond  d'une  vall^ 
pittoresque,  et  offire  partout,  sur  ses 
riyes ,  les  plus  riants  paysages.  Des 
cayouques.  cfaarg^es  de  nriques ,  et 
des  trains  de  bois  de  charpente,  la  sil- 
lonnent  k  de  lonss  intervalles.  Le 
passage  de  ces  embarcations,  en  d6- 
celanT la  presence  de  quelques  hommes 
industrieux  et  sociables,  est  un  €v& 
nement  heureux  pour  TEurop^n,  au 
milieu  de  ces  solitudes  oii  se  cadie  une 
rare  population  adonn6e  au  brigandage 
et  ennemie  de  toute  civilisation. 

Le  Phase,  aujourd'hui  Rion ,  des- 
cend du  mont  Elbrouz,  traverse 
Khoutaissi,  Tancienne  Kyia^  oii  na- 

attit  la  magicienne  M6d6e ,  et  se  jette 
ans  la  mer  Noire  ^  peu  de  distance  de 
Poti.  U  viennent  se  presser  en  foule 
les  souvenirs  de  la  Grdce ,  et  nous 
aurons  bientdt  a  les  rappeler  avec 
guelques  d^ils.  Les  pnncipaux  af- 
fluents du  Phase  sont  la  Qwhila  et  la 
TthhMi'UqaU.  Cette  demi^re  ri- 
viere ^tait  appelde  Hipfnuyst  les  an- 
ciens ,  tant  les  barres  qui  1  obstruent , 
et  sa  rapidity,  lui  donnent  I'allure  d'un 
cheval  qui  court  et  bondit  dans  la 
plaine  (*). 

Le  CifruSy  connu  de  nos  Jours  sous 
le  nom  de  Kour  {JUtcwari^  y  prend  sa 
source  dans  les  montagnes  de  TArm^- 
nie,  passe  k  Tiflis,  re^it  VAraguH^ 
I' yon,  ou  Cambysus  des  anciens ,  et 
TAlazan,  et  verse  ses  eaux  dans  la 
mer  Caspienne.  VArcu,  qui  sert,  sur 

(*)  La  planche  ii«  3  represento  une  vue 
du  Phase ,  prise  dam  la  Miogrelie. 


plusieurs  points,  de  ligne  de  d6na^ 
cation  k  Tempire  msse  et  an  rovaame 
de  Perse ,  est ,  sans  oontredit,  le  plos 
grand  t^uent  du  Gyrus,  puisqu'il  le 
surpasse  par  le  volume  de  ses  eaux. 

D'autres rivieres,  que  nous  ooyons 
inutile  de  d^gner  iMurticulitameot , 

Srennent,  pour  la  piupart,  leur  nom 
e  la  contr^  qu'elles  arrosent,  en  j 
joignant  la  particule  don,  Gette  tenoi- 
naison.^tait.  dans  les  andennes  Ian- 
gues  du  Nora ,  le  nom  gMrique  d'eaa 
ou  de  riviere.  On  reoouiattraseseoiih 
pos^  Dan  et  Tim,  si  on  anal^les 
mots  Danube,  Danatter  ou  Dniester, 
Danaper,  ou  Dnieper,  TanOs,  au- 
jourd'nui  le  Don;  la  mtoe  radne  se 
rencontie  dans  la  langue  g6orgienne, 
et  dansoelle  des  Ossms. 
Les  eaux  min^rales  ne  maoquent 

Ss  dans  cette  r^on.  Cellcs  du  Beck- 
to  ( les  cinq  montagnes )  sont  iesfrtus 
renomm^.  On  y  a^lev^unemaisonde 
bains,  assez  grossidrement  coDStniitf 
en  bois ,  sur  une  hauteur  form^  park 
d^t  odcaire  des  eaux.  Les  sources 
min^r^des  do  Bech-taw  r^nandent  one 
forte  odeur  de  soufre,  et  leor  tem- 
perature ordinaire  s'dleve  au-dessui  de 
50  d^gr^s  de  R^umur. 

La  flore  caucaaienne  est  Tune  des 
moins  connues  du  globe.  La  difficnlti 
de  parcourir  des  montagnes  infiBStto 
de  Drigands,  les  privations  de  toute 
nature ,  et  les  obstades  physiques  aoDt 
des  drconstances  qui  ont ,  jusqvici , 
refroidi  I'aideur  des  botanimiks* 

Les  plaines  qui  bordent  le  versant 
septentrional  du  Caucase  offirent  one 
triste  uniformity  de  plantes  raboa- 
gries,  ch^tives,  rougeditres  et  de  na- 
ture saline  pour  la  piupart  II  n(^ 
pas  rare  de  voir  briUer  les  benes 
de  ces  steppes,  soit  par  acddent, 
soit  par  la  vokmt^  des  tribus  no- 
mades.  Dans  ce  dernier  cas,  rin- 
cendie  a  pour  but  de  preparer  le  tfl^ 
rain  k  la  culture,  ou  mtee  pour  on 
simple  campement  La  s^dieNsse  de 
ces  plantes  et  leur  agglomtotion  don- 
nent bientdt  k  I'inoendie  le  phtf  v^^ 
d^veloppement,  surtout  quand  u^ 
fiivorise  par  la  violence  des  vents,  ws 
voyageurs  Taper^oivent  assez  a  temps 


•  • 


•  •    • 


1»  •  •       ••  •  • 

•    «  •   •  •   4 

_  •       ••• ' 


•-  -• 


GIRGASSIE  ET  G£0RGIE. 


13 


pour  se  mettre  k  I'afari  du  fM\ ,  en 
rebroussant  diemin;  mais  si  le  sang- 
froid et  la  prudence  n'^galent  pas  diez 
eux  Ta^it^,  ils  oourent  le  danger  de 
s'^prer  dans  la  plaine.  Surpris  par  la 
nut,  ils  peuYent  I'dtre  aussi  par  les 
flammes  qui  s'avanoent  en  grondant 
oomine  les  flots  de  la  mar^  montante. 
Le  oarti  le  plus  convenable  est  alors 
de  diercher  son  salut  dans  le  p^ril  iui- 
m^me ,  en  se  rejetant,  par  le  premier 
interstice ,  au-ael^  de  nncendie.  Mais 
ooiiibien  de  dan^rs  k  redouter  dans 
ce  moment  critique !  La  terreur  des 
cherauz ,  les  ondulations  des  flammes 

Jul  fouettent  Tair  k  une  hauteur  pro* 
iffleuse,  T^paisseur  de  cette  fiimde 
sofibcante,  les  tourbiUons  de  oendres 
et  de  sable,  la  yoix  des  oonducteurs  et 
les  cris  des  animaux  forment  unde  ces 
graves  Episodes  de  la  yie  humaine, 
dont  lapius  longue  carri^e  ne  sanrait 
effaoer  le  souvenir. 

Nousavons  dit  que  ces  accidents 
aTaient  quelquefois  pour  but  de  pr^ 
parer  le  terram  k  la  culture.  En  eset, 
us  Tatares  et  les  Turcomans  cultirent , 
daos  les  steppes,  d'excellentes  espdces 
de  potirons,  de  oonoombres,  de  me- 
lons ,  de  past^^s  et  de  melong^es. 

En  atanqant  vers  la  partie  monta- 
9>cose,  on  trouve  enfin  des  arbris- 
seaux  dont  la  vue  fait  oublier  la  fati- 
gante  monotonie  de  la  (lore  des  step- 
pes :  Tanb^ine ,  le  n^flier,  les  fusains ; 
les  types  de  nos  principaux  arbres  firui- 
^^1  le  oerisier,  le  poirier,  le  pom- 
inier,  Fabriootier;  la  r^lisse  et  le 
<^Of>N»  sangutnea,  Sur  le  bord  des 
Ijiusseaux  croissent  le  saule  blanc, 
[vbousier,  ToliTier  de  Bohtoe^  le 
|i^nd)le,  rosier,  la  yiome,  le  troene, 
'^  groseillier ,  la  cl^matite  et  les  ro- 
sters. Sur  les  hauteurs  moyennes 
^onunenoent  les  for^ts,  qui  abondent 
dans  risthme  oitier.  La  dominent 
I  aane  et  le  h^tre ;  mais  on  y  voit  en- 
^  le  di^ne,  le  tilleul  aux  gif^an- 
l^iWs  proportions,  quelques  Indi- 
ans de  cette  espece  n'avant  pas 
ff^ps  de  vingt-cinq  pieds  de  droon- 
'^fence;  le  chUtaignier  et  I'oliyier 
^▼aee.  Les  parties  plus  ^ev^es  de  la 
contree  ofifrent  diverses  esptos  alpi- 


nes  phis  int^ressantes  pour  le  natura- 
liste  :  le  rhododendron  ponUcum  et 
Vazalea  pontica  m^tent  bi  premi^ 
mention  par  la  propri6t^  remarquable 
que  oes  mantes  oommuniquent  au  miel 
iorsque  les  abeUles  ont  y  tot  de  leurs 
sues.  Cette  propriety  est  d'eniyrer  aussi 
complement  que  la  liqueur  la  plus 
ferments.  Dans  les  memes  locality 
croissent  les  germandrto,  les  sauees, 
les  ydroniques,  Ytutrantia  majors 
le  verafyrum  aunan,  le  swerUa  pe- 
remUs^  le  Umicera  cwruleay  le  col- 
chioue,  deux  esptos  d'absinthe,  et 
quelques  liliao6es.  Puis,  yient  la  re- 
gion ^y^e  des  pins ,  des  sapins ,  des 
mousses  et  des  lichens.  Dans  les  bois , 
la  vispe  entrelaoe  ses  sarments  aox 
brancnes  des  grands  arbres,  comme 
les  lianes  des  fiorfits  am^ricaines. 

Nous  terminerons  oe  qui  a  trait  k 
la  botanique  en  disant  quelques  mots 
de  Vabsmthe  ponUque  des  pflturages 
du  Ghiryan.  Cette  plante,  que  les 
cheyaux  mansent  ayec  une  faude  s^- 
curit^,  a  la  nmeste  propri6t^  de  les 
£aire  mourir  dans  une  sorte  de  oon- 
yulsion.  U  psuratt  oependant  que  les 
boeuft  et  les  moutons  peuyent  en 
manger  impun^ment :  les  Tatares  as- 
surent  mime  qu'une  bouteille  de  sang 
de  mouton ,  ayal6e  k  temps ,  est  un 
puissant  spedfique  pour  les  cheyaux 
oontre  ce  poison.  Eii  Tann^  1723 , 
Iorsque  Tarm^e  de  Pierre-le-Grand 
marchait  contre  Chamacky,  elle  per- 
dit  dans  ce  passage  tons  les  cheyaux 
de  son  artillerie;  et,  un  sidde  sq>r^, 
un  ^y^nement  semuable  forca  le  g6- 
n^al  Tzitzianofif  k  remettre  a  la  cam- 
pagne  suiyante  le  si^e  de  Bakou. 

L'isthme  caucasien ,  r^ion  de  mon- 
taffnes,  de  bois  et  de  steppes,  est  peu- 
ple  d'une  multitude  d*animaux  diyers, 
dont  plusieurs  appartiennent  aux  gen- 
res camassiers. 

Le  tigre  y  arriye  jusqu'aux  enyirons 
de  Tiflis ,  ruyant  de  la  Perse  deyani 
les  grandes  chasses  des  princes  de  la 
maison  r^nante.  L'ours  etle  l^pard 
sont  assez  oonmiuns  dans  les  stqipes 
du  nord  et  dans  les  montagnes  de  la 
Gtogie;  ils  sont  plus  rares  dans  la 
Minnie.  Les  montagnards,  qui  leur 


14 


L'UNIVERS. 


font  la  chasse  pour  le  oomiile  des 
n^ociants  arm^niens.  ^?iteiit ,  au- 
tant  que  possible,  oe  faire  k  ces 
animaux  des  blessures  qui  pourraient 
endommager  leur  foumire.  lis  ne  se 
serrent  des  fldches  ou  des  armes  h  feu 
que  lorsqu'il  y  a  ntossit^  de  dtfeudre 
leur  propre  existenoe.  Le  chasseur  qui 
aper^oit  un  leopard ,  suit  ses  traces 
avec  un  instinct  merveilleux  pour  les 
reoonnattre  sur  le  sable ,  oomme  sur 
le  sol  humide  des  bois ,  et  par  mille 
circonstances  qui  ^chapperaient  h  des 
yeux  moins  exero^s;  et  quand  il  a 
dtoniyert  sa  retraite,  il  tend ,  h  une 
oertaine  distance  ,  un  pi^e  oii  la  b^te 
feroce  manque  rarement  de  se  laisser 
prendre ,  attir^e  par  la  pdture  que  le 
chasseur  y  a  d^poMe.  Lorsqu'il  se  sent 
pris ,  le  feopard  ne  pousse  pas  un  cri , 
pas  une  plamte,  car  il  derme  oue  ce 
serait  le  signal  de  sa  mort ;  il  rait  si- 
lencieusement  mille  efforts  pour  se 
d^li?rerdes  entrayes  qui  le  captiyent; 
quelquefois  il  y  r^ussit,  et  abandon- 
nant  alors  ses  fordts  et  sa  tanidre, 
il  6migre  d'un  pa]^  oik  Thomme  lui 
fait  une  guerre  si  d^loyale.  Mais  le 
plus  Bouyent  il  reste  emprisonn^  jus- 
qu'au  moment  cii  le  chasseur,  qui 
8  est  ayano^  ayec  la  plus  grande  cur- 
conspectioD,  Taperooit  et  F^trangle 
au  moyen  d'un  noeua  coulant. 

L'ours  au  poil  roux  n*est  pas  rare 
dans  le  pavs  montagneux.  Les  san- 
gliers,  les  cnats  sauyages,  les  martres, 
fes  litres,  les  loups,  les  renards  et 
les  chacals  abondent  dans  toutes  les 
parties  de  Tisthme. 

Les  chacals  s'attaquent  rarement  h 
une  proie  yivante ;  leur  timidity  est 
m^me  si  excessiye,  que  le  b^lement 
d'un  mouton  suffit  pour  les  mettre  en 
fuite;  mais  lis  recherdbent  ayidement 
les  corps  morts,  et  surtout  les  cada- 
yres  humains.  Us  r6dent,  la  nuit, 
autour  des  dmetidres  en  poussant  des 
hurlements  plaintife  assez  semblables 
aux  yagissonents  des  enfants.  01^- 
rius ,  qui  florissait  dans  le  XVIP  sid- 
de,  rapporte  qu'ayant  ^  enyoy^  au- 
pr^  du  schah  de  Perse  par  le  due  de 
Holsteitt,  le  yaisseau  qui  le  transpor- 
tait  flt  naufrage  sur  les  odtes  du  Da- 


ghestan ;  son  secretaire ,  homme  ^ve 
et  instruit ,  s'^ara  daiis  les  bou  et 
passa  la  nuit  sur  un  arbre.  Le  lend«- 
main,  lorsqu'on  ramena  oe  malheo- 
reux,  11  ayait  perdu  la  raison ,  et  ja- 
mais depuis  11  ne  Ta  reoouyra;  seuie- 
ment  oncomprit  (Kar  ses  r^ponscs,  que 
cet  ^y^ement  6tait  la  suite  de  Tefiioi 
que  lui  ayaient  &it  ^prouyer  les  cha- 
cals. II  afiirmait  s^rieusementqueplu- 
sieurs  de  ces  animaux  s'^ieat  las- 
sembl^  sous  son  arbre  et  ayaient  long- 
temps  conyers^  entre  eux  coimnedes 
cr^tures  raisonnables. 

Les  Alpes  caucasiennes  noorrissent 
des  troupeaux  de  diamois,  de  dit- 
yreuiis,  de  dieyres  sauyages  et  de 
bouquetins.  On  yoit  fir^uemment  ces 
allies  animaux  grimper  sur  les  asj)^ 
nt^  les  plus  saillantes  des  localites 
rocallleuses,  s'^lanoer  ayec  aadaoesor 
d'affreux  priteipices,  tomber  surleun 
grandes  comes  sans  en  ^prouTcr  le 
moindre  mal,  ou  s'arr^ter  d'^-plomb 
sur  le  pic  le  plus  aigu  de  la  mon- 
tagne. 

Le  bouquetin  du  Caucase,  aussi  ap- 
peie  tourty  est  un  peu  moins  graod 

Sue  le  cerf ;  ses  comes  atteignentun 
egre  de  force  et  de  d^ydoppement 
prodigieux. 

La  gazelle ,  si  syelte  et  si  l^g^i  ^ 
le  saT^  yiyent  par  bandes  nombreu- 
ses  dans  les  steppes  du  nord  et  dans 
les  plaines  de  la  G^orgie.  Le  $(W^ 
(antilope  scythica)  paralt  itte  le  kotos 
de  Strabon.  Ses  comes  sont  creusB) 
semi-transparentes,  affile ,  toornees 
en  forme  ae  lyre,  ct  d'unc  loDguciff 
remarquable.  Sa  llyre  supArieure sa- 
yanoe  comme  une  trompe ,  de  sorte 

Sue,  pour  brouter ,  Tanimal  est  oWiff 
c  marcher  k  recutons.  Ses  jambcs  de 
derri^  sont  plus  grandes  que  celles 
de  deyant ;  son  poiI  est  blanc  et  iai- 
neux,  et  la  forme  de  sa  t^te  mouton- 
n^.  Les  Scythes  se  serraicnt  de  ses 
comes  pour  faire  des  arcs. 

Les  gazelles  portent  la  yicilanoe » 
Tagilitd  i  un  UA  degrt,  qi?a  scrait 
impossible  de  les  atteJndre,  si  la  rm 
ne  yenait  id ,  comme  en  tant  d  autres 
circonstances ,  au  seoours  de  J*""FJ[!' 
sance  humaine.  Les  chasseurs  arme- 


CIRCASSIE  £T  G^ORGIE:. 


15 


Diens  s'afTubleiit  d'une  peau  dt  banf, 
pr^par^  pour  cet  osage ,  et  porvien- 
oent  ainsi  a  les  approcner. 

Cest  aussi  dans  la  stqppe  immense 
oomprise  entre  le  Caucase,  la  mer 
d*Azow  et  la  mer  Caspienne ,  que  se 
trouveot  des  troupeaux  de  chevaux 
pm^  et  saui^es.  Ges  demiers  doi- 
Yesnt  leur  origine  aux  chevaux  domes- 
tiques  qui  se  sont  ^ar^  dans  le  pajrs. 
lis  sont  de  petite  tailte;  leur  t^te  est 
fjosse ,  leurs  oreilles  pointues,  la  cri- 
niere  coorte  et  h^riss^ ,  et  la  queue 
moins  longue  que  cdle  des  cheraux 
privds.  II  en  est  plusieurs  dont  le 
manteau  est  gris  argents,  ou  brun 
fonc^;  mats  commun^ment  ils  sont 
d'un  brun  fauve ,  et  jamais  noirs.  lis 
vivent  par  petits  troupeaux  de  einq  h 
m^  indiviaus,  compost  d*nn  ^lon, 
dejuments  et  de  poulains.  D^  que 
oes  derniers  commencent  k  grandir , 
r^talon  les  chasse  de  la  society  oiH , 
scul,  il  a  la  Dr6tention  de  Tivre  en 
sultan,  an  miliea  de  ses  corapagnes, 
OQ  plut6t  de  ses  esdaves.  Sourent  il 
amve  qo'un  jeune  poulain,  expuls^ 
trop  t6t  par  vtiakin  despote,  suit  de 
loin  le  troupeau ,  Tobserve  d'un  oeil 
de  regret,  et  re^oit  furtiveoDent  quel- 
gues  visites  de  celle  qui  lui  donna  le 
iour  et  le  nourrit  de  sonlait.  On  en  voit 
aussiquirddentautourdelasod^dans 
nn  autre  but :  Tinstinct  de  la  femille 
s'est  deja  manifesto  en  eux.  Cbacun 
de  ces  maraudeurs  ^ple  le  nooment  oti 
rpbjet  de  sa  poursuite  restera  en  ar- 
ri^  du  troupeau ;  il  ose  alors  s'en 
^tpprocfaer,  au  risque  d'etre  apereu 
(^  le  Tteox  dief .  La  jeune  cavaie  re- 
siste  d'abord  et  s'eniuit,  puis  elle  re- 
cent, et  ce  man^  dure  souvent 
ptusieors  jours.  Enfin ,  quand  les  Toeux 
de  Famant  ont  fi^it  place  aux  droits 
de  r^ponx ,  le  nouvel  6talon  s'^loigne, 
suivi  de  sa  oompagne ,  et  va  cacher 
Ks  saoTages  amours  dans  les  solitudes 
oe  la  plaine. 

Cescbevaux  sont  g^n^ralement  forts 
^  agiles ,  raais  feroucbes  et  indomp- 
^^.  lis  ont  un  instinct  merveilleux 
poor  deriner  lesapproches  de  Thomme, 
doQt  ils  fuient  la  pr^ence  avec  plus 
de  pr^pitation  qu*ils  if  en  mment 


decant  le  tigre,  Tours  et  le  loup.  Ce- 
pendant ,  les  Cosaques  et  les  Tatares, 
qui  leur  font  fr^uemment  la  diasse , 
parriennent  k  s'en  approcher  k  Paide 
d'une  jument  dressee  k  cet  exerdoe. 
lis  les  tuent  k  coups  de  fusil  et  les 
^rchent  sur  place.  La  peau  leur  sert 
k  divers  objets  d'tonomie  domestic 
que ,  et  la  oiair  est  pour  eux  un  roets 
mand  qu'ils  pr^rent  k  la  viande  de 
boeuf. 

On  trouTe  encore  dans  les  stoipes 
une  espdce  de  marmotte  qui  y  est  ires- 
commune,  des  taupes  et  des  musa- 
raignes.  Vonagre  ( dne  sauvage )  vit 
dans  la  region  des  montagnes  ou , 
sans  cesse  occupy  k  fuir  devant  les 
loups,  les  ours  et  les  l^pards  ,  son 
existence  n'est  gu^  plus  douce  que 
dans  r^t  de  domesticity. 

Les  insectes  caucasiens  sont  pen 
oonnus ;  roais  il  en  est  un  qui  a  une 
certaine  renommte  locale,  c'est  la 
phalanae. 

La  nnalange,  ou  araignte-soorpion 
( phatangium  araneoides ),  est  com- 
mune dans  les  plaines  de  la  G^orgie 
et  dans  la  partie  moyenne  des  monta- 
gnes. Sa  grossenr  est  k  pen  prte  celle 
du  scorpion.  Son  corps  est  mont^  sur 
des  pattes  courtes ,  sa  bouche  est  ar- 
m6e  de  dents,  son  caractdre  est  irw- 
cible,  sa  furenr  et  son  agility  incon- 
cevables.  Elle  vit  dans  des  trous  en 
terre.  La  morsure  de  ce  hideux  insecte 
est  mortelle ,  si  on  la  neglige ;  mais  il 
est  heureusement  plusieurs  remddcs 
fENnles  k  la  port^  de  rhomme,  et, 
entre  autres ,  celui  de  frotter  la  plaie 
avec  de  Thuile,  ou  tout  autre  corps 
gras. 

Les  sauterelles,  amente  par  les 
Tents  du  midi  comme  des  nute  qui 
iribscurcissent  les  radons  do  soleil ,  en- 
vahissent  par  mynades  les  champs 
ensemenc^  de  bfe  et  de  mats ,  et  y 
causent  d'inrem^iables  dommages; 
mais  ici ,  comme  en  l^gypte,  ces  trou- 
pes malfaisantes  sont  ordinairement 
suivies  par  des  oiseaux  libteteors  qui 
▼ienntnt  alder  Thomme  k  dompier 
ce  redoutable  fl^u.  L'oiseau  que 
les  G6orgiens  nomment  Tarbv  (po- 
raditea  trMU)  arrive  par   bandes 


16 


L'UNIVERS. 


nombreuses  a  la  suite  des  sauterdles, 
et  leur  fait  une  guerre  k  mort;  aussi 
devient-il ,  dans  le  pays ,  Fc^jet  d*une 
v^n^ration  si  ferande,  au'elk  ra|q[ieUe 
le  culte  de  Vibis  cbez  les  Egyptiens. 

Parmi  les  reptiles ,  nous  nous  bor- 
nerons  a  mentionner  les  serpents  et 
les  lizards.  Les  premiers  sont  tene- 
ment nombreux  dans  la  steppe  du 
Moghan ,  comprise  entre  la  mer  Gas- 
pierine  ct  Tembrandiement  de  I'Aras 
et  du  Kour,  que  la  terre  en  est  toute 
jonch^.  L'arm^  de  Pompde,  au  dire 
de  Plutarque ,  ayant  tent^  de  traverser 
cette  plaine ,  tut  contrainte  de  s*en  re- 
tourimr ,  tant  les  hommes  et  les  che- 
vaux  furent  effirayds  par  la  multitude 
de  ces  reptiles.  Le  s^n^ral  Zuboff  6tant 
venu  attaquer  Salian,  en  1800,  et 
ayant  voulu  passer  Thiver  dans  le  d^ 
sertde  Moghan,  ses  soldats,  obliges 
de  creuser  la  terre  pour  y  planter  leurs 
tentes,  trouvdrent  une  prodigieuse 
guantit6  de  serpents  engourdis  par  le 
troid  de  la  saison. 

Les  oiseaux  sont  peu  nombreux 
dans  risthme.  Les  cailles  seules  sont 
tr^-communes  en  G^rgie .  dans  les 
diamps  de  millet  et  les  bruy^res, 
oik  Ton  voit  aussi  la  perdrix  du  Cau- 
case.  Les  bois  de  la  region  moyenne 
sont  habits  par  des  jgrives,  des  mer- 
les, des  pigeons  ramiers.  La  Mingre- 
lle  nourrit  une  grande  vari^t^  (Toi- 
seaux  de  proie  et  plusieurs  esp^ces  de 
faisans ,  ce  gui  rappelle  la  tradition 
de  rimportation  en  Europe  de  cet  oi- 
seau  par  les  Argonautes.  Les  parties 
aqueuses  donnent  asile  k  des  troupes 
de  gnies,  de  pies,  de  fireux  et  de 
choucas.  Dans  les  nautes  montagnes 
du  nord ,  on  ne  Toit  que  des  oiseaux 
de  proie,  I'aigle,  le  milan  et  le  vau- 
tour.  Seulement  on  y  rencontre  assez 
fr^uemment  un  oisiUon  chanteur  qui 
rappelle  de  plus  douces  contrto :  c'est 
le  serin  d'Europe,  oelui  qui  anime  nos 
bosouets  de  son  aimable  ^ouiUement. 
On  le  retrouve  ici  dans  la  chalne  des 
montsqui  boident  la  steppe,  etonle  voit 
sautiller  de  rocher  en  rocher,  toujours 
gai ,  toujours  chanteur.  La  vue  de  oe 
petit  animal  dans  les  solitudes  sauva- 
ges  du  Gaucase  a  foit  battre  plus 


d'une  fois  le  coeur  d'un  vovaReur ,  en 
lui  rappelant  le  pap  natal  ci  les  jeux 
de  la  premiere  enfimoe. 

Les  courants  d'eau  de  risthme  cau- 
casien  ne  sont  pas  tous  ^gakmentpois- 
sonneux ;  quelques-uns  oat  trap  de 
fraldieur  et  de  rapidity ,  ou  sent  char- 
ges d*une  surabondanoe  de  parties  mi* 
n^rales.  Dans  les  autres,  on  p^cheune 
exoellente  quality  de  saomon,  I'^^tur- 
geon,  le  stmet ,  la  carpe,  le  baibillon, 
le  sewronga,  le  sUuruSy  le  brocbet, 
le  bareng  de  Kislar,  lespetites  tanches, 
les  corassines  et  les  poissonsd'arg^t. 
La  pdcbe  des  phoques  dans  la  mer 
Caspienne  est  une  importante  bran- 
che  dindustrie.  Sur  les  bords  de  la 
mer  Noire ,  les  Mingrdliens  pficheot  le 
tiion. 

Tdks  sont  k  peu  pr^  les  ressouiees 
naturelles  qui  appaniennent  k  FistbiDe 
caucasien.  De  nouvelles  explorations 
ne  peuvent  qu'en  accrottre  beauooup 
la  nomenclature;  mais  nous  croyoos 
avoir  signal^ ,  dans  le  domaine  ooonu, 
tout  ce  qui  6tait  digne  de  quelque  at- 
tention. Pious  passons  mamtaunta 
Tbistoire  de  Tbomme. 

PAETIB  USTORIQUX- 

On  parviendrait  plus  aistoent  a  re- 
trouver  dans  les  stepjpes  du  Cauc^ 
les  grains  de  sable  prunitifs  qui  y  n* 
rent  suooessivement  d^pos^  par  les 
vents  du  desert,  qu'on  ne  jMurnit 
d^irouiller  le  chaos  gdn^alogique  des 
anciens  habitants  de  la  region  cauca- 
sienne.  H^rodote,  Thucydide,  Bio- 
dore,  Pline  etStrabon  foumisswcer- 
tainement  k  cet  ^rd  les  plus  prtoeui 
reaseisnements;  mais  k  F^poque  ou 
toivaient  oes  v^n^bles  bistonens, 
ils  manquaient  de  toutes  les  ressqurces 
que  le  oeveloppement  des  connaissaD- 
ces  humaines  a  mises ,  aprte  plusioiTS 
siddes ,  au  pouvoir  des  g^ograpbes  et 
des  historiens.  ^^ 

Dans  le  principe,  les  Grecs  doane- 
rent  un  nom  oouectif  k  tous  les  p«»- 
ples  qui  occupant  suocessiveinent  w 
r^ons  inconnues  qu'anrosaient  je 
Danube,  le  Borysthtee  et  le  Tanais 
et  qui  s^^tendaient,  en  Asie,  en  de(a 


I 


CIRCASSIE  ET  GlfeORGIE. 


17 


et  au  dela  des  monts  Imaiis,  soli  oue 
oes  peuples,  de  race  japh^ique,  nis- 
sent  deacoidus  des  hauteurs  du  Cau- 
case ,  soit  qu*ils  appartinssent  h  T^mi- 

rioD  d*une  fiuDifle  asiatique.  Comme 
pramiers  d'entre  eui,  qui  furent 
reiia}iitr68  par  les  Orecs ,  oombattaient 
h  cberal  et  montraieot  une  adresse 
extreme  a  seservir  de  Tare,  ils  furent 
appeles  Scffthes ,  v^taUe  onomatup^ 
pour  dMgner  le  jet  de  la  fldche.  Les 
Grecs  apinrirent  aussi  que  ces  peuples 
fie  donnaient  entre  eux  ]e  nom  de 
Skoloies ,  c'est-i^-dire  cavaliers.  Dans 
]a  langue  finnoise  modeme,  ]es  mots 
SMittia,  Kitta  et  KU  d^stgnent  encore 
un  archer.  Nous  ferons  remarquer ,  en 
outre  J  qu'fl  y  a  une  ^vidente  analogic 
CBtre  le  nom  de  CeUes^  KeUes^  ou 
KSHe$  (Karot  •  KOtTCu) ,  oomme  di- 
saient  les  Grecs  y  etoelui  de  Skolotes. 
Les  g^ographes  de  la  Grdoe,  et, 
aprte  eux,  oeux  de  Ronie  et  de  By- 
zaoee,  voulant  classer  m^thodique- 
meot  les  direrses  peuplades  conion- 
dues  k  tort  sous  un  nooi  identique , 
oominiKent  la  £uite  non  moins  grande 
de  d^aijper,  par  di verses  denomina- 
tions, des  peuples  qui  appartenaient 
Mdeinment  k  une  m^me  nation.  De 
lii  Get  niextricaUe  rdseau  qui  enveloppe 
la  gfognudue  ancienne ,  et  que  la  cri- 
tufue  modeme  pent  bien  trancher  har- 
dimeat  sans  gruid  ihoonvtoient ,  mais 
qu^elie  nesaurait  d^rouiller.  Nousne 
neodrons  aucun  oompte  des  Sq^thes 
HamaaeoiHens,  ainsi  nomm^s  paroe 
qu'ils  Tivaientsur  descbaffiots,  comme 
le  font  encore  de  nos  jours  les  Tatares 
Kondures;  des  Hippomolques  ^  out 
buvaieDt  le  lait  de  leurs  juments ;  des 
SkinUes,  qui  reposaient  sous  des  ten- 
tes;  des  Trogtbdutes  ^  qui  vivaient 
dans  des  grottes ;  dbs  Aorses^  ou  peu- 

esiteadeux,. paroe  qu*au  lieu  de 
/ants  chariots ,  ils  employaient  des 
cfaaraeaux  au  transport  de  leurs  ba- 
eages;  ni  de  Tinct  nations  dont  les 
iMes  ne  se  rattaoient  k  Thistoire  de 
eette  oootr^e  que  par  un  fil  trop  d^i^ 
pour  nous  servir  de  {^uide.  Les  Cim- 
mMens  m^ritent  de  nous  occuper  plus 
s^neuseroent.  Peut-^tre  descendaient- 
ils  d*une  colonic  voyageuse  qui ,  dans 


les  temps  primitifs,  avait  franchi  l« 
Caucase  pour  chercher  vers  le  nord 
une  patrie  moins  ingratf  que  les  de- 
serts de  la  Bactriane .  et  des  rives  plus 
hospitalidres  que  celles  de  TOxus.  Ils 
s'^taient  arr^tes  sur  les  bords  du  Koii- 
ban,  sur  ceux  de  la  mer  Moire,  et 
dans  les  grandes  steppes  oui  offrent 
tant  d^attrait  h  I'indolenoe  des  peuples 
nomades. 

Une  autre  nation ,  dont  nous  avons 
d^ja  eu  Toocasion  de  parler,  habttait 
alors  sur  les  bords  du  TanaTs  et  du 
Palus-Masotis ;  c'est  cellc  des  Magogiy 
ainsi  nomm6s  par  les  H6breux,  Sevmes 
MsBOtes  des  Grecs,  Oalaciopnoffes 
d*Hom^,  Massagite*  d'H^rodote, 
et ,  depuis ,  les  Sarmates  des  K^ogra- 
phes.  Chez  les  Maeotes,  les  femmes 
apprenaient  le  metier  des  armes;  elles 
montaient  h  cheval ,  tiraient  de  Tare , 
allaient  k  la  chasse  et  li  la  guerre  avec 
leurs  maris.  Gontrari^  peut-^tre  par 
rarriv6edes  Cimm^riens,  cette  nation 
envoya  au  dehors  une  colonic  sous  la 
conduite  de  deux  jeunes  princes,  Ilinos 
et  Scolopitus ,  pour  d^couvrir ,  s'il  se 
pouvait,  une  terre  plus  tranquille. 
Les  Emigrants  traverserant  les  gorges 
du  Caucase,  sans  6tre  arr^t^  ni  par 
les  asp^rit^  de  ces  montagnes,  ni 
par  les  mille  torrents  qui  content  de 
leurs  summits  neigeuses,  et  se  fix^- 
rent  dans  le  pays  de  Th6miscyre ,  sur 
les  bords  du  Thermodon.  C^est  la  colo- 
nic qui  donna  naissance  aux  Amazones. 

A  peu  pr^  vers  la  mdme  ^poque 
( 1680  avant  J.-C.  ? ) ,  les  Maeotes  se 
ru^rent  sur  les  Cimm^riens,  et  les  re- 
foul^nt  vers  le  sud.  Les  vaincus 
traversdrent  le  Caucase;  quelques-uus 
y  fix^nt  leur  demeure ,  fe  plus  grand 
nombre  dmigra  en  Arm^nie,  et,  depuis, 
ravagea  une  partie  de  TAsie. 

Trois  sidles  apr^  ( 1S88  av.  J.-C), 
nq»B  voyons,  sur  la  lol  des  traditions 
^gyptienncs  ,  S^sostris  faire  sa  fa- 
meuse  expedition  dans  le  pays  des 
Scythes.  Ce  conqu^rant  revient  par 
le  nord  de  la  mer  Caspienne,  passe 
dans  Tisthme  et  v  etabnt  une  oolonie 
sur  les  bords  du  Phase.  Get  evenement 
fit  dire  par  la  suite  aux  Golcheens  qu'ils 
etaient  issus  des  Egyptiens. 


T  Uvraisan.  (Giegassie  et  Georgie.  ) 


18 


L'UNIVERS. 


Les  poiHilatioos  sauva^es  qui  habi- 
taknt  alon  les  boids  de  ui  mer  Noire, 
vivaient  moins  de  leur  lAdustrie  sur 
uo  sol  ingrat,  que  des  ressources 

5 'dies  se  fNrocuraient  par  le  brigan- 
ge  etia  piraterie.  Get  usage  imme- 
morial des  peoples  caucasiens  de  ecu- 
rir  sur  les  vaisseaux  marchands  a 
traverse  les  sidcles  et  s'est  perp^tu^ 
jusqii'a  Dotre  epoque.  Lorsqu'un  na- 
vire  faisait  naufrage  sur  oes  c6tes  in- 
ho^itatidres,  les  gens  de  re^ipage 
devenaient  esdaves,  s'ils  n'^taient  pas 
offeits  en  holocauste  aux  monstrueu- 
sesdivinites  du  lieu.  Ges  drconstances 
furent  cause  que  les  Grecs  donndreut 
i  la  mer  Noire  le  nom  de  Pont-Jxin , 
^1  vautdire  mer  inkoipUaU^e;  mais 
lis  k  Gbang^rent  plus  lard  en  celui  de 
Ptmi'Euxin  ou  mer  hospUaMre, 
at  oe  lut  loTsqu^ils  en  eureut  euz- 
m^mes  peupie  le  littoral  {*),  Us  com- 
prirent,  en  effet,  la  necessity  de  vi- 
sitor ces  peuples  £Bffoucfaes  et  de  for- 
mer des  mmissements  stables  parmi 
eux,  tant  pour  Clever  une  barri^e 
oontre  leor  d^bordement  que  pour  leur 
apport^.  au  moj^en  du  commerce,  le 
bienftit  de  la  dvilisation. 

Les  plus  aaciens  souvenirs  des  pre- 
mieres emigrations  de  la  Grdce  se 
rattacfaent  aux  voyages  de  Phrixus  et 
d'HeOe;  oette  epoque  se  perd  dans  les 
tenebres  de  la  mytholo^ie,  et  nous 
nous  bomons  h  la  mentionner.  Mais 
il  n'en  est  pas  de  meme  de  Texpedi- 
tionde  Jason,  sur  Fauthenticite  de  ia- 
queUe  il  n'est  plus  permis,  au  point 
ouen  est  arrivee  la  science,  de  con- 
oevoirdes  doutes.  Un  savant  archeo- 
k^e^  M.  Raoul-Rochette ,  a  dit  avec 
raison  que  les  £3Mes  m^mes  qui  defi- 
gurent  oette  tradition  ne  paraissent 
qu'un  garant  de  plus  de  la  verite  des 
evenementB  qu'elle  retrace.     . 

Le  desir  de  purger  la  mer  des  pi- 
rates qui  I'intetaient,  Joint  h  I'espoir 
de  trouver  dans  la  Golchide  des  ri- 
ehesses  dont  sans  doute  les  premiers 
nawgateurs  avaient  exagere  Timpor- 

(*)  idiivoc  ou  A{tv6<  et  Ev^cvGc.  (Tovei 
PUne ,  TcrtuUien ,  Aristote ,  etc ;  d'AnviJle, 
Xardi«r,  Millin,  Kaoul-RochcUe ,  etc.) 


tanoe,  attirii  sous  les  ordres  de  Jason 
reiite  des  heros  de  la  Greoe.  Plus  de 
quarante  cheft  se  rMgerent  sous  aes 
ordres,  et  chacun  montait  uu  vaineau 
que  manoeovraient  les  hommes  de  la 
nation.  Quant  k  Jason,  U  fit  eonstniire, 
au  pied  du  raont  Peiion,  unvaisseau 
long,  sembiaUe  k  e&a  dont  se  ser- 
vaient  les  Phenidens ,  et  qu'on  apfw- 
lait  j4fyo  ou  j4reo,  II  y  monta,  suivi 
d'une  route  de  jeunes  guerricrs.  dont 
les  noms  appaitienBent  wdl  traditions 
herolques  de  la  Hdlade.  Parmi  eux  ob 
remarque  Castor  et  PoHux,  zetk  et 
Calais,  Hercule,  Orphee,  Teiamon  et 
Tiphys.  Jason  partit  du  port  dloldios, 
et  apres  diverses  aventuces  dk  il  eut 
It  lutter  contre  la  perverslte  des  hom- 
mes et  la  furie  des  elements,  ildeoou- 
vrit  le  mont  Caucase  et  entra  dans  les 
touches  du  Phase.  L'eatnpriaedesA^ 
gonautes  eut  peu  de  suooes.  Leur  dicf 
enleva  la  fille  d* Aetes ,  roi  de  CMtMas, 
la  fiuneuse  Medee,  et  se  retira  apnte 
avoir  inutilement  guerroye  contre  des 
peuples  barbares.  Cependant  son  ex- 
pedition servit ,  en  qiwlqoe  sorts ,  d*i- 
tineraire  k  oelles  que  la  Greoe  entie- 

{>rit  successivement.  Alors  on  vit  s'e- 
ever,  sur  cette  partie  du  littoral  du 
Pont-Euxin ,  des  villes  et  des  peoples 
qui  revendiquerent  I'homiear  d*une 
origine  argonaotiquoC)-  iMotemiaSj 
aujourd'hui  Iskowriah.  presde  Sou- 
koum-kaie,  liit  fondM,  dit-on,  par 
les  compagnons  de  Castor  et  Pollttx, 
oonnus  sous  le  nom  de  Diosoures. 
PhasU ,  qui  devait  6tre  situee  sur  la 

gauche  du  Phase,  en  feoe  d'OEa ,  mais 
ont  il  ne  reste  plus  de  traces ;  FUj/m, 
devenue  Pitzunda,  et  B^aoUe^  au- 
jourd'hui Afuupij  remontent  a  la 
meme  source.  Les  Parrhasiens,  sur 
les  bords  de  la  mer  Caspienne,  sedi- 
saient  issus  des  ParrhasieBs  d'Axca: 
diej  les  Alboniens,  les  Iberieos,  la 
nation  des  Henioques,  les  lyndirides 
et  vingt  autres  redamaient  ^galemeat 


(*)  Kaoul-Rochette,  itaSHssemat  des 
lonies  grec^ues,  (  Dcnyt-le-Ptri^te ,  "9^^ 
bon,  Arrien,  Ammicn  Marcellin,  RiiMbCi 
Pomponius  Mela,  Pline,  TMtle,  Sotiat 
^iennc  do  Byunce,  etc.) 


GIRCASSIE  ET  Gl^ORGIE. 


19 


ia  rodnM  origuie ,  et  leur  fur^leDtioii  1^ 
oet  ^rd  ff^ajMNiyali,  non  aeolemeiil 
sur  des  traditions  bistoriqufis^  mais 
encore  sur  des  rapports  physiques, 
dont  plusieurs  oaturiuis^  oal  cm  re- 
connaitre  les  traces  chez  les  desoen* 
dants  de  ces  peuples.  Les  tdmoignages 
mat^riels  du  voyage  de  Jason  exis- 
taient  oioore  du  tonpsde  Strabon,et 
U  &ut  peu  s'^nuer  de  ne  plus  les 
retrouver  dans  oe  pays,  o&  se  sent 
heurtto  tant  de  populations  ignoran- 
tes,    fanatiques  et  superstitieuses. 

L*^tablissement'des  colonies  foumit 
aux  Grecs  les  moyens  de  connattre  les 
peoples  du  Caucase;  mais  leur  g^e 
po^tioue  a  rev^tu  les  faitshistonques 
de  oette  6poque  d'un  voile  qui  rend 
la  v^rit^  bien  difficile  a  discemer ,  et 
il  faut  convenir  que  les  ^vtoements 
dont  oette  contr^  a  ^t^  le  th^tre  ont 
singulidnement  eontribu^  h  embrouil- 
ler  la  question.  Cent  tribus  diverses , 
auxqueUes  il  serait  ridicule  de  vouloir 
assigner  des  limites  territorialeB,  se 
montrent  tour  k  tour  sur  la  sc^ne  po- 
litique, dans  un  flux  et  reflux  de  guerre 
et  d^^migration.  Enfin  la  grande  ir- 
ruption des  Mongols  et  des  Tatares 
arrive  au  moment  ou  les  t^^bres  de 
rhistoire  commenfaient  h  se  dissiper 
devant  les  lumi^res  du  christianisme. 

Ge  n*e8t  qu'au  moyen  de  I'analyse 
que  nous  pouvons  esp^rer  de  porter 
quelque  dart^  dans  ics  ^v^ements 
qu*il  nous  reste  h  raconter ;  nous  al- 
Ions  le  tenter. 

L'isthme  Caucasian  comprcnd  au- 
jourd'hui  environ  vin^  nations  qae 
nous  rattacherons  h  trois  groupes  prm- 
cipaux,  savoir :  1*  la  Giorgie :  nous  y 
ferons  figurer  les  G^rgieDS  propre- 
nient  dits ,  les  peupjes  ae  rancienue 
Colchide,  ceux  de  Tiflbanie,  les  Souanes 
et  les  Lazes;  T  le  p<M9  des  monta- 
ffnes.  X*histoire  des  Tcherkesses  ou 
Circassiens,  et  celle  des  Abases  entrent 
dans  oette  cat^orie,  odi  il  sera  parl6 
^galemeDt  des  Lesghis,  des  Ossdtes  et 
des  Tchetohenses;  8°  la  rigian  de  la 
fteppe,  Nous  y  comprendrons  les  Ta- 
tares, les  NogaTs,  les  Turcomans,  etc. 


• 

La  Georgia  embrassait  jadis  trois 
tots,  que  1^  anciens  nommaient  M- 
rie,  ColcMde  et  Albarde. 

L'Albahis,  dont  le  nomse  trouva 
aocidentellement  le  m^me  qua  celui 
d*une  province  de  la  Tor^uie  d'£u- 
rope,  dans  le  flolfie  Adriatique « 6tait 
habits  par  les  Derbies.  Elle  s6ten- 
dait  le  long  de  la  mer  Caspienne ,  de- 
puis  remplacement  oOs*est  ^ev^  Der» 
oefU,  jusqu'au  conflumit  du  Gjrrus  et 
de  FAraxe.  Elle  a  fornK6,de  nos  Jours, 
le  Daghestan  m^ridioiuil  et  le  Chir- 
van. 

La  CoLGHiDS ,  s^panfe  de  Tibbie 
par  une  diatne  de  montasii^^  8*^ten- 
oait  sur  les  boids  du  Pont-Euxin , 
jusqu'au  pays  des  Abkazes ,  au  nord , 
et  jusqu'au  fleuve  Apsarus  au  sud. 
^ie  s*est  diviste,  dans  les  temps  mo* 
demes ,  en  trois  provinces :  la  Mingri- 
^^r/m^^/AiouImirette,etle  Qowria. 
LcA  principales  villes  6taient,  sur  la 
c6te  J  en  descendant  du  nord  au  sud  , 
Tancienne  LazUa.  PUyusa,  DatuUtri, 
DioscuriaSf  jircniopoUs,  OEa^  Pha- 
sis;  dans  rint^rieur ,  Kuta,  MechleS' 
sus.  Madia  J  Surktm^  etc.  On  est  peu 
fixe  sur  I'dpoque  h  laquelle  le  nom  de 
Colchide  a  cc^  d'etre  eu  usage. 

Le  t^moignage  des  historiens  place 
dans  cette  province  les  Colcb^ens,  les 
Melanklgnes ,  les  Goraxites  ou  habi- 
tants de  la  montagne  du  .Corbeau ,  les 
Apsiliens ,  les  Missimaniens  et  diver- 
ses autres  tribus  dont  les  noms  npus 
paraissent  aujourd'lmi  arbitraires  e,t 
capricieux.  Mais  le  peuple  le  plus  in- 
tcressant  est  cdui  des  Soano-Ciol' 
dies  de  Ptolem^,  ou  Souarm  de 
Strabon  et  de  Pline.  II  ^tait  origi- 
naire  de  Tlb^rie  et  se  trouvait  m- 
bli ,  du  temps  des  Argonaute^,,  dans 
les  monta|;nes  de  la  Colchide,  au-des- 
sus  de  Dioscurias.  Ce  neuple ,  d'une 
grande  bravoure,  6tait  a*une  malpro- 

Sret6  si  excessive ,  aue  les  Grecs  lui 
onn^rent  le  nom  de  Phtyrophage. 
( roangeur  de  poux  ).  Strabon  assure 
que  les  Souanes  avaient  un  roi  et  un 
conseil  compost  dc  300  mcmbres,  et 

3. 


20 


L'UNIVERS. 


qu'Ut  pouyaient  mettre  sur  pied  des 
arnito  fonnidaMles,  attenda  <{ae  chez 
eux  tous  les  homines  portaient  les 
armes  sans  distinctioii  d'age.  Pers6cii- 
Ug  par  ton  voisinst  et  toujoun  en 
^tat  d*bo6tilit6  arec  eox « lea  Souanes 
ont  M  tour  k  tour  aoumis  aux  Bv- 
zantins,  aux  Perses,  aux  princes  de 
la  Mingrflie  et  aux  rois  de  la  Gtor- 
g;ie.  Fuyant  enfin  devant  une  civilisa* 
tion  gui  ne  s'ofifrait  h  eux  qu'^  la 
condition  de  perdre  la  liberty,  iis  se 
sont  retfr^  dans  les  Alpes  caucasien- 
nes,  et  Tivent  actudUement  dans  ies 
parties  habitiddes  les  plus  6levto  de 
la  province  ^Odichi:  on  en  rencontre 
cependant  aussi  sur  les  bords  de  Tln- 
gour,  o£k  ils  ont  mtoe  quel<iue8  villa- 
ges; d'autres,  mais  en  petit  nombre, 
nabitent  les  rives  du  Tzkh^nis-ts^i, 
et  ceux-Uk  ont  conserve  la  religion 
cbr^tienne ,  tandis  one  les  autres  en 
ont  enti^rement  perau  le  souvenir.  Les 
Souanes ,  qui  se  donnent  k  eux-mtoes 
le  nom  de  Chnaou,  forment  la  na- 
tion la  plus  pauvre  du  Gaucase.  Elle 
n*a  pour  se  procurer  des  toiles ,  des 
draps ,  des  ustensUes  de  mtoage  et  du 
sel ,  que  la  ressource  de  vendre  des 
femmes  et  des  enfiints.  On  dit  pour- 
tant  que  les  homines  font  eux-mtoes 
leurs  fusils  et  leur  poudre.  lis  sont 
g^^ralement  braves,  robustes,  grands, 
oienfaits,  mais  d*une  malpropret^  b^ 
r6ditaire;  vivant  sous  des  nangars,  ils 
donnent  p61e-mdle  sur  une  couche 
commune,  sans  distinction  de  sexe,  et 
mtoie  avec  leurs  bestiaux.  Les  femmes 
de  cette  nation  sont  fort  belles ,  et  de 
moeurs  tr^dissolues.  Le  costume  des 
bommes  est  assez  difficile  k  caract^ri- 
ser,  n'^tant  le  plus  souvent  qu*une 
reunion  de  haillons ,  attach^  autour 
des  jambes  et  des  bras  et  recouverts 
d'une  sorte  de  tablier  qui  leur  tient 
lieu  de  culottes.  Les  femmes  mariees 
.portent  des  robes  et  des  moudioirs 
ecariate,  leur  oouleur  depr^ilection; 
elles  se  coiifent  avec  une  pi6ce  d*^ 
toffe,  de  mani^re  h  ne  montrer  qu'un 
oeil ,  tandis  que  les  fittes  nubiles  vont 
ate  nue. 

Les  Lazes  sorit  ^alonent  d'origine 
l^forgienne.  lis  ont  impost  leur  nom 


h  toute  la  o6te  qui  s'^tend  depuis  la 
Mingr^ie  et  le  Gouria,  jusques  et 
y  eompris  Tr^zonde.  Ge  pieuple  sau* 
vage  et  adonn^  k  la  piratene  a  doming 
quelque  temps  dans  la  Mingr^ie  sous 
la  tutelle  des  rois  de  Perse*,  mais,  ^ 
I'exception  de  ce  fiiit,  son  histoire  ne 
mMte  pasde  nous  arr^ter  plus  long- 
temps;  elle  n'est  ni  phis  noble,  ni 
plus  int^ressante  que  ceHe  de  tous  les 
voleurs  de  grand  chemin. 

Les  CoUMens.  qui  se  donnent  one 
illustre  origine  due  a  rezpMitioa  de 
S^stris ,  n'ont  aucune  ressemblanoe 
avec  la  race  ^gyptienne.  II  est  I  pr^ 
sumer  que  les  descendants  des  cod- 
temporams  de  S^ostris  ont  ^t^daois 
long-temps  remplao^s,  sur  le  sol  de  la 
Golchide,  par  une  population  compo86e 
d'^^ments  hdt^rog^nes  que  dominait 
le  type  g6orgicn. 

L^bistoire  de  la  Golchide  se  confood 
tantdt  avec  celle  des  Remains ,  tantot 
avec  celle  des  Persans ,  etpresqae  too- 
jours  avec  celle  des  G6orgfens.  On  voit 
les  Golcb^ens  servir  dans  les  annees 
de  Gyrus,  de  Xerx^,  de  MithrkUte, 
de  Gorbulon  et  de  Chosroes.  Toujours 
tributaires,  ils  ofifraient  annueilement 
k  leurs  suzerains  cent  jcuiics  filles  rt 
cent  jeunes  gar^ns.  Mithrldate  fit  la 
isonqu^te  de  la  Golchide  enti^  et 
Tannexa  k  son  royaume  de  Pont ;  nuus 
la  fortune  des  Romains  lui  enleva  cette 
province,  qui  fut  gouvem^  par  des 
rois  tributaares  de  la  race  de  Pol^mon. 
Pomp6e  traversa  la  Golchide  et  eut  a 
oombattre  les  j4kU$u ,  peuple  soer* 
rier  qui  babitait  au  nord  du  Caocase; 
sous  le  r^gne  de  If^ron,  die  fiit  mise 
au  rang  des  colonies  romalnes ,  et  sob- 
jugu6e  pen  aprds  par  les-  Lazes,  qiUi 
en  d^it  des  empereurs  romains ,  en 
firent  hommage  aux  rois  de  Porse- 
Vers  lafin duIV sidde de Tto dw«- 
tienne ,  les  Hum  (*}  dominent  dans 

(*)  Left  peiipleft  oompris  mmi  eene  din»- 
miiiaUoik  aoQl  encore  Vobjet  dVme  •nf' 
fiort  oomoiune.  Let  hims  prapfMBcnt  diti 
soQt  d'origine  onralo-finnoiie  (  do  noits 
Owait  k  la  FinUndi: ).  Geux  doni  il  at  Ka 
question  ne  soot  pai  autres  que  cAU  aaUM 
de  Turks  d^Hgncs  dans  les  jiMMki  e^ 
noise*  sous  le  nom  de  Hiotrng-nou, 


CIRGASSIE  ET  GitORGIE. 


ai 


h  Miogr^e ,  comme  dans  le  reste  de 
risthine  caucasien,  pendant  que  lea 
Homains  degdndr^s  et  lea  Peraana  ae 
dispiitent  la  possession  de  FAsie  a?ec 
des  alternatives  de  bona  et  de  mauYaia 
suoo^.  Dans  le  V*  aidcle,  un  roi  de 
CoIchide«  nomm^  Zathua,  6d)appe  k 
rob6curit6  historique,  en  6pousant  une 

EriDoesse  chr^enne  et  en  reoevant 
:  bapt^roe.  Alora  a'^l^ve  oe  fameuz 
rerapart  qui  avait  environ  vine^  lieucai 
de  longueur,  et  qui  s^pnrait  Tes  pro- 
viooes  romaines  ou  persanea  des  pays 
0CGup6s  par  les  Scythes;  on  en  voit 
encore  1^  restes  aupr^  de  Soukoumr 
Kali.  La  faiblesse  des  empereurs  sem- 
Uait  licber  le  frein  h  la  licence  de  la 
soidatesque  et  auz  d^pr^ationa  des 
e^ndraux.  Geux-d,  voulant  s*as8urer 
rimpunit^  dans  les  provinces  lazes, 
bAtirent,  sur  les  borda  de  r^dnosif , 
la  forteiesse  de  Petra^  qui  devait  lea 
Diettre  h  fabri  du  ressentiment  popu- 
bire;  mais,  k  oette  m^me  ^poque,  la 
Proiddenoe  envoie  h  la  Golchide  un 
souveraln  qui  avait  aasez  de  qualit^s 
pour  devenir  un  Piene^le-Grand,  ai 
elle  TeiH  plac6  sur  un  trdne  moins 
etroit :  Gunaze  fiut  aervir  tour  k  tour 
les  Persans  et  lea  Romaina  h  la  d^li- 
vraaoe  de  aon  ]^s ,  jusqu'^  ce  qu'en- 
''~  il  tombe  lui-m^me  aasassine  trat- 


treuaement  par  des  officiers  bvzantins. 
Soii88onregne,le  grand  roi  de  Perse, 
Chosro^  Nouchirvan,  oonunen^i  Foeu- 
m  de  oonqu^te  que  aes  suooesseurs 
devaient  aoocmiplir.  Aprte  Gubaze ,  la 
Golchide  fiit  obscur^ment  soumise  aux 
Byzantins  et  aux  Grecs,  avec  le  titre 
de  royaume  du  Phase.  La  province  su- 
perieure,  d^i^n^  sous  le  nom  d*/]n^- 
rithij  en  avait  ^t^  d^tachdc  a  une 
ifoqae  recul^,  pour  faire  partie  d'un 
royaame  dit  des  Abkhars ,  aont  le  sou- 
▼eratn  de  droit  ^taittouj<Nirs  I'h^ritier 
pr^somptif  du  trdne  de  G6orgie ;  mais 
vers  l*ann6e  1343 ,  les  Mongols ,  ayant 
divis^  rh^tage  du  roi  George  Lascha 
entre  les  deux  David  ses  fite,  Flm^ 
i^hi  devint  principaut^inddpendante, 
et ,  depola  lors.  fl  fut  tantdt  s^par^  de 
la  G^rgie ,  tantot  r^uni  sous  le  m6me 
sceptre,  juaqu'li  Salomon  II,  mort  h 
Trebizondc  en  1819. 


Dana  lea  prani^res  amtedb  XIV* 
sidcle ,  on  vit  un  autre  dtoemlMreDMDt 
de  la  Goldiide  et  du  royaume  des 
Abkhars ,  la  M^igr^,  ae  oonstituer 
en  royaume  indoendant.  Ce  nouvel 
tot,  que  baigne  16  Phase  i^  aon  em- 
bouchure, fin  akNTS  gouTern^  par  des 
souverains  quiiprirent  le  titre  de  D€h 
(Mans.  Ces  princes  forment  une  sMe 
de  bri^nds  qui  disparaiasent  toua, 
aucoesai vement,  aasassin^s,  mutii^  ou 
aveugl^  par  ceuz  qui  ambitkHinent 
de  leur  suco6der« 

Vera  le  milieu  du  XV*  sihde ,  Ma- 
homet II  rtoiit  les  provinces  cauca- 
siennes  k  sea  possessions,  et  leur  im- 
pose le  double  joug  de  sa  suzerainet^  et 
dosa  religion.  Pen  apr^,^la  psortie  m^ 
ridionale  de  la  Min^^ie  opoe  sa  revo- 
lution et  ae  constitue,  a  son  tour , 
Srovince  ind^pendante ,  aoua  le  nom 
e  Gottfio.  Le  dernier  Gcwridj  ou 
prince  de  ce  pays,  v^6tait,  il  y  a 
quelques  anndes,  k  Constantinople. 

L'histoire  civile  de  ces  tots  se  com- 
pose k  pen  prte  uniquement  de  guetr 
res  intestines  et  de  querelles  de  fa- 
mille.  Cest  une  p^noae  san^lante  pen- 
dant laauelle  lea  lorfaits  les  plus  atroces 
se  suooSdent  avec  un  acbamenient  qui 
tonne  Timagination.  La  l^lslation, 
plus  ou  moins  empreinte  de  f(6rocit6, 
scion  les  capricea  du  Dadian  ou.du 
Gouriel^  y  etait  g^ntolement  bas^ 
aur  les  ^reuves  dit  JuffetnaU  de  Dieu. 

Enfin ,  la  Russie ,  mettant  L  profit 
les  levto  de  boudiers  des  souverains 
de  la  Pase,  franchit  le  Caucase. 
Alexandre  F'  fait  de  la  Mingrdie ,  du 
Goiirla  et  de  I'lm^r^thi ,  de  nouvelles 
annexes  k  ses  vastes  domaines. 

Le  commerce  des  esclaves  avait 
form^,  de  tout  temps,  la  principale 
ressouroe  de  L'ancienne  Golchide;  les 
Russes ,  en  occupant  la  contr^ ,  ont 
&it  cesser  ce  trade  infame.  La  religion 
qui  domine  aujourd'hui  dans  les  vems 

i provinces  est  le  christianisme  selon 
e  rite  grec,  mais  entrem^le  do  pra- 
tiques superstitieuses,  ou  jpint  h  une 
grande  iiidiffi6rence.  La  Russie  entre- 
tient  un  souvemeur  qui  r^ide  k  Khou- 
taissi ,  et  dont  la  juridiction  s'^tend 
sur  une  nartie  de  rAbasie,. 


22 


UUNIVERS. 


Kho/uk^H  est  la  ville  la  plas  im- 
portohte  deft  trois  provinces  de  Tan- 
d^me  Goldkide ;  elle  en  est  la  capitale, 
et  sert  de  residence  aux  autorifes  ci- 
vfteir  et  ihilitaim.  Gonune  la  yXwpsti 
d^  antitones  cft^ ,  die  se  divise  en 
tflle  tieille  et  tlUe  nenve.  La  premi^, 
dontonvoitenooteles  mutsd'enceinte, 
et  06  Pcm  retrouve  les  vestiges  de  pla- 
^ents  6iffloes  remarquables ,  est  situde 
SUf  une  ^Inenoe  h  la  diroite  du  Pbase 
( MM),  mmis^rrotts  dit  plus  haut  que 
cette  ville,  Pancienne  Kyta  {Cotatvs)^ 
ifitait  i^ardde  oomme  la  patrie  de  nf6- 
d^;  il  Serait  difficile  de  presenter 
des  tftto  d'une  noblesse  plus  illustre. 
Attjourd'hui,  on  j  va  oiercher  des 
souvenirs  on  y  donner  quelques  in- 
stants  il  rexamen  des  mines  d'une 
andenne  et  belle  cath6drale.  Un  as- 
semblage de  maisons  en  bois,  d6cor^ 
du  nom  d'ardievdch^,  un  magasin  h 
poudte ,  qudqiles  cabanes  de  cultiva- 
teurs,  et  un  admirable  point  de  vue, 
fbrment,  avec  les  debris  de  la  cath6- 
dfale,  tout  ce  qui  mdrite.  Inattention 
des  toyageuts. 

La  ville  neuve  est  bfttle  dans  une 
plaine ,  sur  la  caucbe  du  fleuve.  On  y 
voit  un  vaste  bazar,  dont  toutes  les 
boutiques,  h  peu  prte,  sont  tenues 
par  des  Arm^niens  ou  des  Im^r^thiens. 
Tiflis ,  Akhaltzikbe  et  Constantinople 
approvisionnent  oe  march6,  oCh  les 
achats  se  font  soit  au  comptant ,  soit 

{)ar  Mianse.  lA  viennent  sVntasser 
es  soies,  lea  foumires,  le  mid,  la 
dre,  les  ootons,  le  bl^,  le  mais  et  le 
vin.  Les  artides  de  n6cessit^  premie 
J  sont  k  trte-bes  prix ,  puisgu'en  temi» 
ordinaire  la  bouteille  ae  vm  revient  a 
moins  d'un  sou ,  la  livre  de  viande  k 
8  ou  4,  le  tchetveri  de  bl6  &  13  ou  15 
francs  {4nrancs  environ  les  100  livres), 
et  cdui  de  ma!s  k  la  moitl^. 

Les  maisons  de  Khoutaissi  sont  en 
bcris  pour  les  plus  ridies  habitants,  et 
pour  les  autres  en  clayonna^  entre- 
m^Ms  d'wgile.  Manchie  ext6neurenaent 
au  moyen  de  la  chaux.  Les  rues  et  ks 
places  pttbUques  sont  om6es  d'arbres ; 
aiissf  Pensenible  de  la  viHe,  quoique  ir- 
nfi^lier ,  est  des  plus  pittoresques.  Le 
pnnocGortscbakoffra  d'ailkurs  beau- 


coup  embellie  et  agrandie  depuis  qud- 
ques  ann6es,  et  c'est  k  lui  que  Ton 
dolt ,  notamment ,  les  nouveauz  corps 
de  caserne ,  les  hdpitaux  et  le  jardin 
public.  Les  Russes  y  entretiennent  une 
gamison  nombreuse.  La  population 
permanente  ne  d^passe  pas  dix-huit 
cents  ames ,  dont  une  moiti^  se  com- 
pose d*AnnMens,  dlm^rdthiens  et 
d*6tran£ers  de  divers  pays ,  et  Kautre 
de  Juifi  seulement.  Ces  demiers  ont 
un  quartier  k  part;  lis  s'oocupcnt ,  a 

8eu  prte  exdnsfvement,  de  la  vente 
es  odr^ales  et  autres  productions  de 
la  terre  (*). 
Aedem^iTa^  est  le  port  le  pins  im- 

Sortant  detoute  la  c6te.  So  noommeroe 
*totrepdt  a  pris ,  depuis  quelques  an- 
uses, un  grand  d^eloppenient  Les 
artides  d'exportation  consistent  eo 
dre,  tabac,cuirsdeboeufetdebuflle, 
fourrures,  bois  de  noyer,  mats,  etc. 
La  population  de  Redkme-KaU  est  de 
neuf  cents  ames  seulement ,  y  oompris 
une  gamison  de  quatre  cents  honunes 
au  moins.  PoU  et  AnaAHa  m^ritent 
d'etre  mentionn6s  comme  ayant  fait 
le  principal  objet  de  plus  d*une  guerre 
de  la  Russie  avec  la  Porte.  La  pre- 
mih^e  de  ces  deux  puissances  avait 
commis  la  faute  ^norme  de  les  laisser 
entre  les  mains  de  la  seconde ,  lors  de 
la  paix  de  Bouckarest  (1812). 

OfU  est  un  village  assez  considerable 
du  canton  de  Raisdui.  au  nord  de 
Khoutaissi.  Ce  canton  abonde,  dit-on, 
en  mines  d'argent,  de  cuivre  et  de 
fer.  Les  mines  de  tours  et  de  forte- 
resses,  diss^inte  sur  le  sol  de  cette 
int^ressante  partie  de  la  Colcbide,  at- 
testent  les  ravages  que  la  guerre  v  fit 
autrefois.  On  trouve,  d*ailleurs,  dans 
toute  Tandenne  Colchide  un 


(*)  Noi»  donnont  dans  U  plandie  ■*  > 
que^uei  fragments  de  b  oathraralfldeKliMH 
UuMi.  Cette  biitfre  architecture,  dont  ks 
omements  represenlent  det  anipuuix «  (let 
fleurs,  del  candelabres  et  Tingt  mjds  ca- 
prideux ,  atteste  une  epoque  de  decadcnee. 
n  n*en  retlera  bientM  plus  de  totisiei.  car 
c*est  maintenant,  dans  le  Toisint^,  1  qui 
enletera  une  pieite  on  nn  fitl  de  coloDne 
|ionr  les  joindre  anx  m&tfriwx  de  conslmc- 
tion. 


"^^.M^'^t^^    -/^^   '^-^r^V^. 


H<j^tktrcbe  cu  Cotiya  . 


A 


CIRCASSIE  ET  G^ORGIE. 


grand  noiiibre   de    forteresses  dont 

Slusieurs  sont  encore  en  bon  ^t  de 
6fense  (*).  ZougdUU  est  un  petit 
bourg  int^ressant ,  parce  qu*0  est  la 
r^idence  du  Dadian^  ou  prince  de  la 
Mingr^lie.  Ce  souTerain  d6chu>  et 
ponrtant  toojours  h^ri^taire,  voyage 
avec  sa  coor  pour  se  procurer  des 
mqyens  d^existenoe;  il  visite  ainsi, 
sucoessivement,  la  demeure  de  chsMnxn 
de  ses  rassaux,  passant  de  Tune  h 
I'autre,  lorsqu'll  en  a  ^puis6  les  pro- 
visions de  vm  et  de  volailles.  Gette 
condition  du  prince  peut  £adre  apprd- 
cier  le  degr^  de  pauvret^  de  ses  sujets, 
Les  seigneurs  mingr^iieos  ou  im^- 
thiens  et  les  dames  de  la  cour  du  Dctr 
(Uan  ont  pourtant  des  v^tements  re- 
marquablefli,  sinonparleur  propr^t^, 
du  moina  par  une  pretention  au  luxe. 
Les  dames  portent  des  manteaux  tor- 
late  et  des  chapeaux  de  feutre  de 
cette  couleur,  garnis  de  galons  d'or  et 
de  petite  plaques  ou  monnaies  de 
mtoe  nddtai.  lies  nobles  voyagent  a 
cfaeval ,  et  leurs  vassaux  les  accompa- 
ment  k  pied ,  par  respect  ^ur  le  droit 
ae  suzerainete.  La  condition  du  jpeu- 
pie  est  des  plus  malheureuses ,  et  ce- 
pendant  elle  s*est  bien  am^ior^  de- 
puis  rincorporation  de  ce  pays  a  la 
Russie*^  Les  gentilshommes  n'ont  plus 
le  droit  de  vie  et  de  raort  sur  leurs 
vassaux;  mais  ils  conservent  encore 
sur  leurs  biens  et  leurs  personnes  des 
privileges  qui  doivent  c^er  tot  ou 
tard  au  progr^  de  la  civilisation. 

Les  nobles  mingr^liens  sont  pas- 
sionnds  pour  la  diasse;  et  oomme 
leur  p^  abonde  en  oiseaux  de  proie 
de  toute  espto ,  ils  passent  la  plus 
crande  partie  de  leur  temps  ^  les 
dresser  a  cet  exercice. 

Dans  la  Mingr^lie,  les  iiommes  de 
basse  condition ,  encore  moins  favo- 
ris^  que  leurs  voisins  de  rim^r^tlii , 

(*)  La  planch  a*  6  renreaeiite  une  forte- 
cfise  du  canton  de  Hadsc/ta,  h  Vextrhaile 
du  Tillage  de  Karagone,  au  confluent  du 
Phase  et  de  la  Longonne.  Nous  avona  pcnsc 
(lu'elle  pouvait  dounei*  une  idee  suflisaiitc 
tics  rcssottrccs  que  ce  pays  uiontagneiix  a 
fournies  h  Tesprit  helliqucux  des  Inicic- 
thicns;  elle  se  nommc  Tmindos-Tzike. 


23 

deo^ent  un^  extiftme  mis^e  sur  leur 
personne  oomme  dans  leurs  habi- 
tations, lis  se  rasent  ordinairement 
la  t^,  n*y  laissaot  qu'une  oou- 
ronne  de  cbeveux  k  la  fa^n  des  moi- 
nes.  lis  vont  les  jambes  nues  ea  touted 
saisons,  et  jettent  sur  leurs  ^ules 
un  bourka.  netlt  manteau  de  feutre 
assez  sembiaole  par  la  forme  k  bos 
grands  collets  de  cavalerie.  Leur  cbaus- 
sure  consiste  quelquefois  en  un  sim- 
ple moroeau  de  peau  appr^tte,  nou^ 
autour  de  la  cheviUe,  mais,  plus  or- 
dinairement, en  une  sorte  de  sandales 
beauooup  plus  larges  que  le  pied,  et 
tress6e  comme  une  daie  d^osier.  Les 
plus  ais^  ajoutent  k  oe  costume  une 
calotte  de  feutre.  Selon  Tusage  oom- 
mun  k  tons  les  peuples  du  &iicase, 
ils  ne  sortent  pas  de  diez  eux  sans  ^tre 
arm^ ,  et  cette  prtoution  ne  leur  est 
pas  inutile,  tant  ils  ont  k  redouter  les 
attaques  de  leurs  redoutables  voisins, 
les  Abates,  qui  sont  sans  cesse  occu- 

ek  leur  tendre  des  embdcfaes  pour 
emmener  en  esclavage ;  mais  elle 
favorise  singulidrement  aussi  leur 
penchant  au  vol  et  aux  actes  de  vio- 
lence. 

Les  Mingrdliens  se  souviennent  d'a- 
voir  iU  Chretiens.  lis  ont  encore  un 
patriarchequ'ils  appellent  CcUhoUcos, 
des  ^v^ues  et  des  pr^tres,  onpofHu. 

Le  CathoUcos  A  les  ^v^ques  sont 
assez  riches,  parce  quMls  vivent  aux 
d^pens  du  peuple,  vendant  les  abso- 
lutions, les  amulettes,  les  gu^risons 
et  toutes  les  jongleries  des  prdtres  du 
paganisme.  Les  papas,  au  contraire, 
sont  g^n^ralement  fort  pauvres;  aussi 
ne  sont-ils  ^uere  moins  adonn^  au 
vol  et  au  brigandage  que  le  reste  des 
Mingr^liens.  La  plupart  de  ixs  papas 
sont  mari^ ,  et  plusieurs  ont  jusqu*a 
six  ou  liuit  femmes.  L'entr^e  des  egli- 
ses  n^est  permise  qu*aux  hommes. 

Lorsqu'un  noble  se  marie,  11  est 
assiste  a*un  parrain  qui ,  tandis  que  le 
prltre  r^ite  les  pri^res  d'usage ,  s'oc- 
cupe  k  coudre  les  epoux  ensemble 
par  leurs  habits;  il  prend  ensuite  deux 
couronnes  de  fleurs  naturelles  et  les 
pose  altcrnati?ement  sur  leur  t^te  les 
changeant  de  Tun  k  Tautre,  d'apres 


24 


L'UNIVERS. 


I'ordre  doiine  paur  rofficidnt.  Puis  il 
!cur  ofTre  du  pain  et  du  vin,  manse 
et  boit  avec  eux,  et  annonoe  que  la 
c^r^monie  est  aooomplie. 

Le  Toyageur  Chardin ,  qui  dcrivait  h 
la  fin  du  XVIP  si^le ,  a  donn^ ,  sur 
son  s^jour  en  Mingi^lie ,  des  dtoils 
curieux,  mais  qui  offrent  bien  peu 
dMn^r^t  aujoura*hui ,  paroe  quits  se 
rattachent  k  des  mccurs  que  le  temps 
et  le  contact  de  la  nation  russe  ont  mo- 
^ifl6es.  La  princesse  de  Mingr6lie  qui 
re^ut  Charain  ^tait  une  espto  de 
courtisane  effiront^e  qui  ranconna  no- 
ire Toyageur,  dont  les  malfes  furent 
encore  pill6es  par  les  princes  ou  nobles 
du  pays.  Geux-d  Fauraient  pjeut-^re 
m£me  fait  p6rir ,  s'ils  ne  Tavaient  pris 
pour  un  capucin. 

Les  Orientaux  donnent  II  la  Min^r^- 
lie  le  nom  ^Odichi;  les  Arm^iens 
appellent  les  habitants  de  ce  pays 
Eg^qtM,  ou  descendants  d'Egros, 
que  la  tradition  fait  regarder  comroe 
le  foqdateur  de  la  nation  (*). 

Quant  au  mot  MinariUe,  le  voya- 
geur  Reineffgs  I'a  derive  de  Ming- 
raoui,  miiie  ruisseaux,  paroe  que 
oette  contr^  est  arros^  par  des  oou- 
rants  d'eau  sans  nombre.  Suivant  une 
autre  opinion ,  il  viendrait  de  Migrel- 
fdy  qm  correspond  k  EgiraMhy  sui- 
vant les  procMite  sp^iaux  des  langues 
arm^nlenne  et  g^rgienne. 

L'extr^me  bumidit^  de  la  terre, 
^chauflite  en  €U  par  Tardeur  du  so- 
leii,  fait  de  la  Mingr^lie  un  s^Jour  des 
plus  malsains.  Les  strangers  y  con- 
tractent  de  ^ves  malacues ,  et  les 
uaturels  atteignent  rarement  h  une 
grande  vieillesse.  L'hydropisie  est  tr^ 
commune  chez  eux;  mais  g^n^ralc- 
inent  toutes  leurs  infirmity  ne  doi- 
vent  nas  £tre  attributo  au  climat 
seal ,  les  mccurs  du  pays  y  contribuent 
beaucoup  aussi.  Les  Mmgreliens  ne 
maneent,  pendant  la  plus  grande  par- 
tie  de  Tann^,  que  leurs  ^normes 
choux ,  auxquels  ils  aioutent  quelques 
poissons  safi^s  ou  de  fa  diair  de  pore ; 
lis  boivcnt  une  sorte  de  vinaigre  fait 

(*)  Voy.  Chronique  gcorg'unne ,  Uadtiitt: 
par  M.  Brossct.  Tari^,  i83o. 


avec  le  bouillon  dc  ces  ni^mes  choux. 
Des  racines  fu'ils  oouvrent  de  sel  et 
quelques  firuits  sauvaees  oompl^teni 
leur  nourrlture  habitueile.  Ils  patient 
leur  vie  k  dieval ,  ne  s'arrltent  que 
pour  dormir  sur  an  terrain  mouill^, 
et  sont  oonstamment,  enfin,  d^or^ 
par  la  vermine.  Ce  peuple  fidt  une 
grande  consommation  de  gomi  ( pani- 
cum  italicum ),  espdce  de  millet  I9oos 
allons  d*ailleurs  retrouver,  en  pariant 
de  rib^rie  et  de  la  Gircassie ,  les  au- 
tres  traits  caract^ristiques  des  habi- 
tants de  Tancienne  Colcbide. 

LIBERIE,  dont r6tymolo{^e  est  in- 
certaine,  a  form^  la  utorgie  propre- 
ment  dite ,  ou  le  Kartfali,  borne  au 
nord  par  la  chafne  des  montagnes  iid- 

guses  du  Caucase ,  k  Touest  par  la 
^Ichide ,  k  Test  par  TAlbanie,  au  sud 
par  TArm^e,  dans  une  limite  varia- 
ble et  Ions-temps  ind^termin6e.  Tout 
ce  pays ,  lors  de  la  colonisation  rive- 
raine  des  Grecs ,  ^tait  oocup^  |»ar  les 
Masques,  dont  faisaient  partie  les 
tribus  des  Tibarrh^niens ,  des  Ma- 
croses ,  des  Amardes  et  autres.  Quel- 
ques auteurs  supposent  que  les  Grecs 
appelerent  ces  peuples  Giorgiens,  du 
mot  GiorgoSyldltmreixT;  mais  cette 
.etymologic  est  peu  soutenable,  quand 
on  consid^re  que  Tagrlculture  de  cette 
contrte  ne  pouvait  oertainement  pas 
£tre  un  objet  d*admiration  pour  la 
Grto.  II  n'est  pas  plus  raisonnable 
de  penser  que  ce  nom  leur  fiit  donn^, 
apras  rintroduction  du  christianisme, 
en  rhonneur  de  saint  George,  dont 
la  memoire  est  tenement  v^nme  parmi 
eux,  que  la  mmeure  partie  de  ^rs 
^lises  lui  sont  d^ito,  et  gulls 
n^ont  pas  eu  moins  de  treise  souve- 
ratns  au  nom  de  George.  L^^tymolo- 
cie  la  plus  vraisemblabie  est  odie  qui 
lire  le  mot  G^oraie  de  LfforzoH ,  le 
plus  andennemeni  donn^  a  cette  con- 
Ir^  par  les  auteurs  arabes ,  ou  de 
Gawftffistanf  sous  lequel  die  futcon- 
nue  au  XII*  si^e,  aprte  Toccupation 
du  pays  par  les  Gourtfjei. 

La  Geor^ie  fiit,  depuis  le  XIII*  Ste- 
ele, subdivis6e  en  plusieurs  provinces, 
dont  les  tioms,  pour  la  piupart  imposes 
par  les  conquerants  venusde  la  Perse, 


CIRCASSIE  ET  GfiORGIE. 


35 


ont  traverse  les  siedes  et  bc  retroa- 
Teot  dans  oertaines  localiUs  auxquel- 
les  il  serait  impossible  d'assigner  des 
limites.  Panni  oes  dtoiembrements , 
le  KakMM,  le  KharthH  et  le  Swn- 
khit/U  ont  form^,  h  diverses  ^po« 
ipics.  des  royauines  ind^pendants.  Au- 
joura*bai  le  CanM-baa.  entre  le  Kour 
etTAras,  et  le  TaUdfy  qui  boide  la 
mer  Caifnemie ,  sont  les  provinoes  les 
plus  mmdioDales  de  Tempire  nisse, 
sur  les  frontidres  de  la  Perse. 


Les  Gtoglens  appellent  leur  pays 
Karthli,  et  toates  lean  tribos  Thar- 
gamoiilani,  nomg  quails  ont  adopts 
depais  Tintrodaction  du  christianisme 
pour  se  donner  nne  origine  bibllque. 
Thargamos ,  natriarche  de  1' Arm- 
oie  et  de  toute  oette  partie  de  TA- 
sie  septentrionale,  ^tait  le  petit-ills  de 
Jc^ihei.  II  eut  huit  flls,  dent  le  se- 
oood,  noaim6  KharthiaSf  vint  s'^ta- 
Mir  sur  le  yersant  meridional  du  Can- 
case  ,  et  f ut  le  fondateur  de  la  nation 
g^orgienne.  ^tienneOrp^lian,  arche- 
ttoue  de  Siounie,  qui  vivait  dans  le 
Xul*  siMe ,  rapporte  que  ce  fils  du 
patriarche  bAtit,  an  pied  du  mont 
Annaz,  une  forteresse  k  laquelle  il 
doona  le  nom  d'Orveth.  Cette  ciroon- 
staaoe  est  digne  d*£tre  not^e ,  car  elle 
nous  senrira  de  point  de  depart  pour 
riiiitoire  de  la  race  des  Orpdians, 
v^taMes  maires  du  palais  des  rois 
g^rgiens. 

Mhketkosy  Faln^  des  fils  de  Kartk- 
lot,  fonda  auprtedu  confluent  de  TA- 
ragwi  et  du  Kour  une  ville  h  laq|uelle 
ii  donna  son  nom,  et  ^ui  servit  de 
capitale  k  aes  sucoesseurs  jusqu'en  470. 
Plusieurs  d'entre  eux  y  furent  inhu- 
me. II  faiit  rejeter  parmi  les  contes 
penans  la  tradition  gtorgienne  selon 
laquelle  un  roi  des  Knazars ,  qui  avait 
fait  une  irruption  en  G^rgie  et  en 
Ann6nie «  Fan  du  monde  3300 ,  aurait 
donn^  h  son  fils  Ouobos  tens  les  pri- 
Bonniers  ramass^  dans  la  contr^ 
comprise  entre  le  Kour  et  i'Araxe, 
ft  raurait  MkAi  roi  du  pays  situ^  a 
i'est  du  T^rek. 

Des  fragments  de  la  chronologic 
des  rois  georgiens  se  trouvent  diss6- 
mia^  dans  les  bistoriens  persans  et 


b^ntins ;  Constantin  Porphyrog^- 
nete  dit  que  tons  ces  rois  se  pr6- 
tendaient  issus  de  la  femme  d*Urie , 
enlevte  par  David.  Deguignes,  Gnl- 
denstsedt  et  KlafNroth  en  ont  donn6  des 
listes  incompletes,  et  qui ,  cependant, 
ne  comprennent  pas  moins  de  120 
monarques;  mais  nous  ne  tenterons 
pas  de  tirer  leurs  noms  obacurs  de 
roubli  ^i  les  menace.  II  iraporte  pen 
de  savoir  que  des  Artakj  des  Datchi^ 
des  Bakour,  des  Minoan,  des  Lontar- 
sab ,  des  ytManfj  ont  administre  sans 
gloire  un  peuple  inciTilise ,  sous  la  tu- 
telle  des  empereurs  d'Oocident  on  des 
rois  de  la  Perse ;  Tattention  ne  doit  se 
porter  que  sur  quelques  rares  sommi- 
Us  qui  apparaissent  de  loin  en  loin , 
dans  le  domainede  Thistolre,  comme 
des  oasis  dans  un  desert  de  sable. 

LPS  chroniques  g6orgiennes  dtent 
Phamaoaz  ou  Phamabace  comme  le 
premier  qui  ait  pris  le  titre  de  roi  de 
G^rgie.  II  vivait  environ  800  ans 
avant  Fere  chr^tienne.  Mais  il  n*est 
pas  question  de  lul ,  sous  ce  nom  du 
moins,  dans  la  chronologie  de  Degui- 
gnes. Un  de  ses  sucoesseurs ,  du  nom 
S'Aderki,  divisa  ses  ^tats  en  deux 
royaumes ,  celui  ^Armazel  et  celui 
de  Mtsket.  qu'il  laissa  en  mourant  h 
ses  deux  flu ;  mais  h  la  sixi^me  g^n6- 
ration,  le  souverain  d'Armazel  les 
r^unit  de  nouveau.  Un  roi,  nomm^ 
Mirvan ,  fit  bdtir  la  forteresse  de  Da- 
riel,  et  dever  un  rempart  pour  servir 
de  boulevard  k  la  Gtorgie ,  contre  les 
invasions  des  Alains  et  des  Khaza 
res  (*) ;  cela  n*empdcha  pas  les  Alains 

(*)  Le«  Mains.  L'antiauil^  confondait 
sous  06  nom  g^eriqiie  pWieun  natiou 
▼oiiines  du  Caucase  et  de  U  mer  Caspienne. 
Selon  Eustathe,  ce  mot,  dans  la  langue  Jes 
Sarmates,  signifie  montagnanls.  Ceux  doni 
il  est  id  question  ont  ete  la  souche  des 
Oss^tes,  dont  il  sen  parle  plus  bas. 

Les  Khazares.  D'apres  M.  Lesur,  et  ge- 
neralement  d*apris  les  ecrivains  modernes, 
ks  Khazares  seraient  d'origine  turqiie. 
M.  Khproth  a  dtoontr6  victoriensement , 
selon  nous ,  quec'est  la  une  erreur,  et  que  ce 
peuple  est  plut6t  d*origine  finnoH>uralienne. 
Il  en  est  question  dans  Herodpte  et  Strabon 
sous  1c  nom  dc  Katiars;  daus  Procope,  so« 


96 


L*UNIV£RS. 


daiis  le  stdde  suivaat  ( tOO  ans  arant 
J.-C. )  de  traverser  deux  fois  le  Cau- 
case  du  nord  au  sud  pour  se  porter 
vers  rAnn^ie  et  la  M^ie. 

A  la  fin  du  III*  si^e  de  I'dre  chr^ 
tienne ,  nous  voyons  un  roi ,  JtpO' 
gour,  abolir  la  couturoe  d'immoler  des 
enfants  aux  idoles.  Get  ^vdnemmt  fut 
le  presage  d'un  grand  diangement  qui 
allait  s*op^rer  parmi  les  peuples  cau- 
casiens ,  par  i'lntroduction  du  chris- 
tianisme.  Diocl^tien  tenait  les  r^nes 
de  rempire,  Tiridate  r^ait  en  Ar- 
m^nie,  et  Mirian  en  Georgie  (  965  k 
818 ),  lorsqu'une  esdave  que  les  cliro- 
niques  arro^niennes  appeuent  Ninaf 
maiB  que  les  martyroloses  ne  ddsi* 
gnent  que  par  les  mots  oe  saitUe  ser- 
vante  chretienncy  vint  en  G^rgie  et 
y  porta ,  avec  Texemple  de  toutes  lea 
vertus ,  la  foi  de  J6sus-Christ.  Le  roi 
Mirian  fit  oonstruire  h  Mtsketha  une 
chapelle  en  bois  oil  fiirent  d^os^es  de 
pr^ieuses  reliques.  Mirdat ,  son  ]^it> 
nls ,  rempiafa  par  une  ^lise  en  pierre 
la  baraoue  due  h  la  pi^t^  paramo* 
nieuse  de  son  aleul.  En  469 ,  le  roi 
Waktang-Goureaslan  abandonna  sa  ca* 
pitale  de  Mtsketha  pour  une  nouvelle 
villequMi  avait  fait  txltir  sur  Templa- 
cement  d'un  ancien  village,  nomm^ 
Tphilissi  ou  TpfMskalaky  la  ville 
cnaude,  k  cause  de  ses  sources  d'eau 
thermale.  Gette  ville  n'a  pas  oess^ 
d'etre  la  capitale  du  royaume ;  elle  se 
nomme  aujourd*hui  Tiilis. 

Le  Yir  sidcle  de  notre  dre  vit  nat* 
tre  rislamisme.  Gette  nouvelle  reli* 
gion  ne  fut  pas  ^trang^re  aux  roaux 
qui  vinrent  assaillir  pendant  plusieurs 
sidcles  les  nations  caucasiennes.  En 
684,  le  kalife  Valid  envoie  dans  le 
Gaucase  une  arm^e  de  8000  hommes, 
sous  le  commandement  de  son  fr^re 
Muslimeh.  Gelui-ci  s*empare  de  Der- 
bent  apr^  une  bataille  memorable,  oik 
fut  tue  un  h^ros,  dont  la  m^moire 
est  chdre  aux  musulmans  :  son  nom 
est  Kriklar,  On  voit  encore  son  mau- 
sol^  aux  environs  de  Derbent ;  les 
Lesghis  y  viennent  en  pdierinage. 

cclui  de  Khazires  ;  dans  Moisc  de  Kliorenp, 
el  les  crrivains  posl^rieurs  .H  !*erc  cbrclienne, 
soils  oelui  de  Khazart  ou  Kozars. 


De  cette  ^poque  jusqu'^  la  fin  da 
IX*siMe,  les  Arabea  eontinueDtleiin 
incursions  dans  la  Gtogk,  le  Ghir- 
van  et  leDaj^hestan,  dont  lis  fottent 
ceux  des  habitants  qui  tombent  en  tear 

K»uvoir  k  embrasser  la  religloa  de 
aluRnet  En  861 ,  ils  s'emparent  de 
Tifiis,  mats  aprtecet  Exploit,  loir  do- 
mination commence  sa  periode  de  de- 
cadence. Ils.avaient  cepeocbint  envoy-e 
Slusieurs  colonies  dans  le  CaucMC^  ft, 
e  nos  jours  encore «  on  troove,  au 
nord  de  Derbent ,  une  peuplade  arabe, 
dont  Torigine  remonte  jusqu*^  cette 
cokHiisation.  Nous  arrivons  eofin,  en 
laissant  de  c6t^  une  longoe  sMe  de 
petits  souverains  sur  les  noros  et  Tor- 
ore  desquels  les  chroniqueuri  et  les 
historiens  ne  sont  pas  meme  d'aocord, 
k  quelques6v6nementsqtti  oonoeroest 
la  race  si  int^ressante  des  Orp^iaos. 
Les  G^rgiens  g^missaient  d^is 
long^temps  sous  le  Jouc  des  infickles. 
Leurs  souverains ,  forc&  de  suivre  les 
inspirations  d*un  commissaire  ^tran- 

ger,  n'avaient  plus  qu'une  ombre  d'au* 
mti .  et  n'osaient  mtoe  prendre  fe 
tih*e  de  rois;  ils  se  faisaient  appder 
Patricks  (patriciens),  ou  mamasa- 
TUUiH  ( p^res  de  maison).  La  nmiuvaise 
administration,  aui  ^tait  la   cons^- 

auence  inevitable  oe  cet  ^tat  de  choses, 
onnait  naissance  a  une  foule  d*abu$, 
et ,  par  suite ,  h  la  corruption  et  aux 
d^sordres  de  toute  nature.  Sur  oes 
entrefaites,  une  grande  revolution 
s*op6n  dans  un  pays  de  I'Orient, 
voisin  des  Tatares,  et  qui  s'einDd, 
dit  rarchev^que  de  Siounie,  J^tienne 
Orpeiian  {*) ,  jusqn*anx  monts  Imaos. 
A  la  suite  de  cette  revolution ,  une 

rirtie  de  la  famille  r^gnante  se  voua 
^emigration ,  et,  de  oontr^s  en  oon* 
tree ,  eile  arriva  au  pied  du  Gauease. 
Le  chef  de  ces  nobles  voyageurs  ^it 
un  prince  de  bonne  mine,  brave  et 
courageux.  Apprenant  la  triste  posi- 
tion des  Georgiens,  de  plus  en  plus 
onprimes  par  les  Persans,  il  leur  fit 
omrir  ses  services ,  et  se  mit  inoon* 
tinent  en  devoir  de  les  deiivrer  de 
leurs  tyrans.  La  fortune  secondant 

(*)  Yoyez  Ic  li^re  curicux  ct  saTanl  (k 
M.  Saint-Martin,  Meffioires  sur  CArfwnit 


CIRGASSIE  £T  0KOR6IE. 


27 


son  courage,  il  put  tenir  tout  ce  qu^il 
a?aitproini8  aux  peuples  de  la  Geor- 
gie.  Cenx-ci ,  leoonnaissants  d'un  pa- 
reil  bienfiiit,  d^oon^nt  de  grands 
bonneiirs  h  ces  strangers,  et  surtout 
a  leur  brave  chef.  Le  roi  lui  donna , 
entre  autres  domaines ,  la  forteresse 
i'Orpeth,  d'o^  lui  iot  acauis,  pour 
loi  et  ses.  descendants,  le  sumom 
^Orp^Uan,  Cette  famille  ne  cessa  de 
rendre  h  la  G^rgie  des  services  si- 
gnal^; elle  fut  en  possession  de  four- 
nir  I  la  couronne  ses  plus  fermes  sou- 
tiens,  et  au  peuple  ses  plus  braves 
d^eoseurs.  Convertis  k  la  foi  chr6- 
tienoe,  les  Orp^lians  la  servirent 
toujours  avec  zele  contre  les  entre- 
prises  des  infld^les,  et  ^cquirent  tant 
de  gloire ,  qu'il  n'edt  tenu  mfh  eux 
deremplaoer  sur  le  trdne  les  fant6mes 
de  rois  qui  s'y  sncoMaient  obscur6- 
ment  sous  leur  protection.  Le  chef 
des  Orpelians  6tait  de  droit  sbcUasar, 
ou  g^D^alissime  des  armto  g6or- 
siennes ;  il  avait  en  propre ,  oun%  la 
forteressf  d'Orpeth  et  autres  apana- 
ges, douze  ^tendards,  sous  cnacun 
aesquds  se  rangeaient  mille  combat- 
tants.  Dans  les  solennit^  publiques, 
il  marchait  devant  le  roi ,  portant  une 
baguette  surmont^  d'une  wte  de  lion. 
Son  drapeau  ^tait  rouge ,  pour  le  dis- 
tio^er  de  celui  du  souverain ,  qui 
^tait  blanc.  A  la  table  royale ,  il  avait 
seul  le  privil^e  de  manner  couch^ 
sar  un  lit ,  et  d'etre  servi  avec  des 
plats  d'areent ;  enfin  ,  c*6tait  lui  qui 
couronnait  le  roi.  On  con<^it  que  tant 
d'honneurs  aient  pu  exciter  Tenvie  de 
la  noblesse  g^orgienne  et  du  souve- 
rain lui-mdme  :  il  n'y  aura  plus  lieu 
d'en  douter  apr^  les  6v6nements  que 
oous  allons  raconter. 

En  Tannte  1049  de  notre  ere ,  sous 
le  r^e  d'un  roi  nomm^  David ,  les 
Tares  Seldioukides  flrent  une  irrup- 
tion dans  rAsie-Mlneure  et  les  pro- 
Wnces  caucasiennes.  Le  roi  Davia  cut 
{)eur  et  se  sauva  dans  les  montagnes; 
<nais  le  sbalasary  Libarid  Orpelian , 
s'avan^  bravement  ^  la  rencontre  des 
inGdMes,  suivi  seulement  d'une  poi- 
Rn^  de  guerriers  auxquels  se  foigni- 
rmtquelqucs  cxirps  am)6niens  cf  grecs. 


II  pr^enta  la  batadle  h  un  ennemi 
dont  rarn)6e  ^it  vingt  fois  plus  nom- 
breuse  que  la  sienne,  se  comporta 
vaillamment  et  fbta  la  victoire  sous  ses 
drapeaux.  Get  ^v^nement  lui  acquit  tant 
de  gloire ,  que  les  nobles  g^rgiens  en 
conqurent  une  violente  jalousie.  Ges 
ingnits  ne  rougirent  pas  de  se  liguer 
contre  leur  chef,  qu'ils  assassin^rent 
trattreusement.  Geforfaitn'atiendit  pas 
long-temps  son  chAtiment :  I'arm^  des 
Turcs  s'etait  d6bandde ,  mais  eile  n*^- 
tait  pas  d^ruite,  et  quand  elle  revint 
h  la  charge,  les  Chretiens,  priv^ 
d*Orp^lian,  n'os^rent  lui  tenir  t^te; 
lis  furent,  pour  la  plupart,  taill^  en 
pieces ,  et  la  G^orgie  tbmba  au  pou- 
voir  d^  Seldjoukioes.  Tiflis  ne  fiit  pas 
plus  6pargn^  que  les  autres  villes ,  et 
les  vainqueurs  v  mirent  une  garnison, 
pendant  aue  les  debris  de  Tarrode 
vaincue  allaient  cbercher  un  refuge 
dans  les  hautes  roontagnes. 

Gependant  Libarid  avait  laisse  un 
fils ,  Ivan6 1*'.  Get  h^ritier  de  la  gfoire 
patemelle  fut  rappel^  par  le  roi  David- 
te-Fort ,  deuxi^me  du  nom ,  et  rentra 
non-seulement  en  possession  de  son 
patrimoine,  mais  r^t  encore  le  don 
de  la  forteresse  de  Lorhi.  L'an  1160, 
David  III ,  qui  avait  r^gn6  avec  sa- 
gesse  et  moderation ,  mourut  et  laissa 
un  fils  en  bas  dge  nomm6  Temna.  La 
veille  de  sa  mort ,  il  avait  appel6  au- 
pr^s  de  lui  le  conn6table  Ivan^  Orpe- 
lian III,  petit-fils  du  pr6cMent,  et, 
en  pr^ence  de  toute  sa  cour ,  lui  avait 
tenu  le  langaee  suivant  :  «  Quand  je 
«  ne  serai  plus,  mon  fr^re  George 
«  gouvernera  T^tat  au  nom  de  son 
«  neveu ,  comme  un  bon  et  loyal  re- 
«  gent  ayant  la  crainte  du  Seigneur. 
«  Quant  a  vous,  Orpelian,  je  vous 
«  laisse  la  tutelle  de  mon  fits ;  veitlez 
«  sur  ses  jours  et  son  ^ucation ,  je 
<  le  confie  a  votre  loyaut6  :  quand  11 
«  aura  atteint  Tdge  de  majority,  vous 
ft  le  ferez  reconnattre  pour  mon  I^gi- 
«  time  successeur.  »  Gela  dit ,  il  avait 
mis  I'enfant  entre  les  bras  du  shiUa- 
sar;  et  celui-ci  avait  jure,  sur  son 
6p6e ,  de  remplir  fid^lement  les  inten- 
tions du  monarquc  expirant.  II  tint 
parole;  et  le  jennc  Temna  apprit,  sous 


28 


L'UI41VERS. 


ses  ordres,  conment  W  lauait  gou^ 
verner  un  peuple  guerrier  dans  tin 
temps  de  troubles  et  de  discordes.  A 
r^pooue  de  la  majority  du  prince ,  les 
granas  du  royaume,  mm^ntents  de 
I  administration  de  George  ^  vinrent 
trouver  Orp^lian,  le  pressant  de  faire 
reconnattre  le  veritable  roi.  Ivan^  se 
rendit  k  leurs  d^irs ;  mais  oorome  il 
arriva  que  le  regent  ne  voulut  pas 
rendre  la  oouronne ,  il  fallut  reoourir 
aux  armes.  George  se  retira  k  Tiflis, 
or*  Ivan^  vint  I'assi^er;  roalbeureu- 
s«ment  ce  g^n^ral,  esp^rant  que  la 
reflexion  ramenerait  Fusurpateur  k  de 
meilleures  dispositions  ^  laissa  trainer 
le  si^e  en  longueur.  Son  adversaire 
profita  si  bien  de  ce  d^i,  qu'en  peu  de 
temps  Ivan6  se  vit  abandonn^  par  la 
majeure  partie  des  seigneurs ,  que  les 
promesses  fallacieuses  du  premier  atti- 
raient  aupr^  de  lui  .Oblige  alors  de  fuir 
kscn  touTy  il  se  retira^ avec son  pupille, 
dans  la  forteresse  de  Lorhi,  et  envova 
son  frere  Libarid  et  ses  deux  fils  ae- 
mander  du  secours  aux  Atabeks  de 
Perse  et  d'Arm^nie.  Le  r^ent  ne 
tarda  pas  k  venir  mettre  le  si6ge  de- 
vant  Lorhi ,  qui!  r^uisit  k  la  derni^re 
cxtr^mit^.  La  presence  seule  du  jeune 
roi  donnait  encore  quelque  force  au 
parti  de  ses  d^fenseurs ,  lorsque  ce 
prince,  saisi  d'une  terreur  panique, 
d^rta  lui-m^me  sa  propre  cause ;  et 
s'^tant  laiss^  couier  au  pied  des  rem- 
parts,  vint  se  jeter  aux  ^enoux  de 
son  onde,  implorant  sa  piti^,  et  ne 
demandant  que  la  vie.  Le  vainqueur, 
que  nousjpouvons  appeler  maintenant 
George  In,  la  lui  accorda,  dans  Tef- 
fusion  de  sa  surprise  et  de  sa  ioie  j 
mais  mieux  edt  valu  mille  fois  la  lui 
dter !  Le  monstre  fit  crever  les  yeux 
k  ce  faible  enfant ,  et  le  r^duisit  a  cet 
6tat  abject  od  Thomme  ne  peut  |)lu8 
esp^rer  les  douceurs  de  la  paterniti§. 
La  guerre  d^rmais  devenait  sans 
objet.  Orp^lian  consentit  done  a  se 
rendre.  sous  la  condition  qu'ii  ne  lui 
serait  rait  aucun  mal.  George  en  avait 
donn^  sa  parole ;  et  cependant,  quand 
il  eut  en  son  pouvoir  celui  qui  avait 
voulu  TempMier  de  r^gner,  il  ne 
craignit  plus  de  se  parjurer  :  il  traita 


en  tout  son  prisonnier  comme  il  avait 
traits  son  neveu ,  lui  laissant  la  vie 
par  derision.  Non  content  de  oela,  il 
attira  auprds  de  lui  les  parents  di- 
van^ et  les  fit  tous  massacrer^  sans 
^ard  pour  les  enfants,  les  vieiUards 
ni  les  remmes.  Enfia,  voulant  an^an- 
tir ,  s'il  6tait  possible,  jus^u'an  sou* 
venir  de  la  race  des  Orp^bans ,  il  fit 
ef&cer  leurs  noma  de  toutes  les  in- 
scriptions des  ^gUses ,  ainsi  que  des 
livres  historiques. 

Sur  ces  entrefaites,  Libarid ,  frere 
du  malheureux  Ivan^,  ignorant  oetle 
catastrophe ,  arrivait  avec  une  arm^ 
de  60,000  hommes.  Mais  quand  il  eut 
appris  ce  qui  s*6tait  pass^ :  «  Les  chr6- 
«  tiens,  dit-il,  n'ont  psui  &it  oela, 
«  pourquoi  irais-je  les  punird^uncnme 
«  qu'ils  n*ont  pas  oommis?  »  II  se  re- 
tira done ,  et  oong61ia  son  arro6e.  Ses 
deux  neveux  le  suivirent  dans  Teiil , 
et  se  rtfuffi^rent.  Tun  dies  TAtabek 
Ildigouz,  Fautre  auords  de  Vhoit  de 
Kondsag.  Ce  ne  fut  que  long-teniDS 
aprds,  sous  le  r^e  de  Tliamar,  fiUe 
et  h^nti^  de  Georee  III «  que  Tun 
d^eux ,  du  nom  de  Lmarid ,  consentit 
k  rentrer  en  G6orgie ,  oili  on  lui  res- 
titua  la  forteresse  d'Orpeth.  II  fut  la 
source  des  nouveaux  Orp^lians. 

Le  rdgne  de  Iliamar  forme  la  j^ 
riode  la  plus  glorieuse  de  Tbistoire 
g^orgienne.  Gette  princesse,  que 
ses  peuples  reconnaissants  appeUiroDt 
Mep*hif  nom  qui  ne  convieni  qu'aox 
souverams  de  1  autre  sexe,  efii  acquis 
une  MihriU  historique  sur  un  diamp 
plus  vaste;  die  edt  ^t^  Stouramis  a 
Babylone,  Elisabeth*  k  Londres,  Ca- 
therine k  St-P^tersbourg.  EOe  rappela 
k  son  service ,  ainsi  que  nous  venons 
de  le  dire ,  les  illustres  rejetons  de  la 
race  des  Orp^lians,  chassa  les  Persans 
qui  avaient  envahi  ses  ^ts  ,  conqutt 
tout  le  pays  situ^  entre  le  Rour  et 
FAraxe,  rendit  tributaires  plusieurs 

{ princes  voisins,  et  ^tendit  sa  domina- 
ion  de  la  mer  Caspienne  k  la  mcr 
Noire.  Son  fils,  George  IV,  sumommc 
le  Lippu  (Z/KcAa),  second^  par  Ivan^ 
Orp^lian,  entreprit  plusieurs  guerres 
heureuses  contre  les  tribus  situ^es 
hors  de  la  limite  m^ridtonale  dc  la 


CIRCASSIE  £T  G^ORGIE. 


219 


ti^gie,  et  les  contraignit  h  embras- 
ter  le  christianisme.  Mais,  en  rann^ 
1330,  les  MoBgote.  que  conduisaient 
les  gMnm  de  Teoio^is-KJiaii.  en- 
imkkt  dans  T Arm^nie  et  se  porterent 
<ie  1^  Ten  le  Caocase,  cpi'ib  traver- 
s^rent  en  eotier,  aemant  paitout,  sur 
leor  paaaage ,  la  d^aatation  et  la  mort. 
La  Tiefllesse  de  George  IV  ftit  abreu- 
T6e  d'amertumes  par  one  suite  de  mal- 
iieon  oui  ofiBrent  neu  dlnt^r^  histo- 
riqiie.  ll  iaissa  on  Ills  en  has  Age,  qui 
f^  depuis  sous  le  nom  de  Dayid  IV , 
et  oonfia  sa  tute&e  k  sa  soeur  Rou- 
Mudas.  Gette  prinoesse  s'empara  de 
la  eoonmne  en  1234,  au  dement  de 
SOD  nereu.  Sons  son  rtoie,  les  Mon- 
gols rentrdrent  dans  listimie  cauca- 
sieQ ,  et  y  cans^rent  encore  une  fois 
d^mufantabies  ravages.  A  dater  de 
cette^poque,  jusqu*^  la  fondation  du 
JMwreao  rojraume  de  Perse  ( 1600  de 
^•-C),  rhistoire  atorgienne  se  oon- 
lond  avec  cdle  aes  oonqu^tes  de 
Tchinghis-Kban  et  de  Hmour-Lang 
(Tamerlan).  Seulement  on  Toit  briller, 
<i«  temps  en  temps ,  quelques  beaux 
^  d*anne8  inspire  par  le  ddsespoir 
da  vaincus.  Des  suoote  naomentan^ 
uinent  aux  peuijles  opprim^  le  temps 
de  renirer;  mats  les  oonqutents  ne 
twdeoi  pas  h  revenir ,  grossis  et  mur* 
flKmnt  comme  les  vagues  de  la  tem- 

K.  De  1805  k  1846 ,  plusieurs  com- 
m^tent  k  George  VI  le  sumom 
de  Dris-ilkutre.  £n  1888,  Tamerlan 
KTage  de  noaveau  la  Gto-gie,  dont 
u  enuntee  le  roi,  Bagrat,  prisonnier. 
Geiui-d  feint  de  se  conyerbr  k  la  reli- 
.  (poa  de  Mahomet :  il  gagne  ainsi  la 
<:oDiiance  du  vainqueur,  lui  demmde 
one  anii^s  pour  rentrer  dans  ses  ^tats 
^  60  appder  les  habitants  au  musul- 
nanisme  :  le  guerrier  mongol  donne 
{uns  Je  p^e ,  et  envoie  ses  soldats  k 
u  mort  Furieux  ensuite  et  rugissant 
comme  un  lion ,  11  rentre  en  Georgie , 
%  dans  trots  era^ditions  suocessives , 
u  d^vaste  les  villes,  les  campagnes  et 
Ks  monastdres ;  fait  oouler  des  flots 
de  sang  et  ne  d^tniit  pas  moins  de  sept 
ojnts  Tillages,  tandis  que  George  VII, 
5*8  ct  suocesseur  de  Bagrat,  se  cache 
dans  les  gorges  les  plus  reculto  du 


Caucase.  En  1404,  Tamerlan  aban- 
donne  enfin  oe  malheureux  pays ; 
Georee  descend  de  ses  montagnes,  re- 
prena  successivement  Tiflis  et  les  prin- 
cipales  forteresses  occupies  par  les 
Persans,  et  vit  encore  quelques  an- 
n6e9  tranquille  et  heureux,  autant 
qu'il  Douvait  T^tre  au  milieu  des  rui> 
nes  de  sa  patrie,  encore  fumantes  du 
sang  g^orgien.  Dix  ann6es  aprte, 
Alexandre,  de  la  maison  de  Bagration, 
r^nit  sous  sa  domination  tons  les 
pa^  gtorgiens. 

De  1500  k  1708.  c'est4-dire  Jus- 
qu'au'  n^e  de  Vakhtang  VI  ^  le  der- 
nier roi  de  la  branche  principale  des 
Bagratides,  on  yoit  se  suco6der  douze 
monaraues  du  nom  de  David j  Louar- 
iaby  Simon  ou  George^  tons  tribu- 
taires  de  la  Perse  ^  quelquefois  en  tot 
de  rebellion ,  mais  toujours  victimes 
des  dissensions  intestines.  En  1618, 
Cbah- Abbas  emm^ne  dnq  cent  mille 
G6orgiens  des  deux  sexes,  et  les  dis- 
stoine  sur  le  sol  de  la  Perse.  Les 
royaumes  de  Kakheth  et  de  Karthli 
se  forment  des  debris  de  oelui  de 
G6orgie;  puis  ilsse  fondent  Tun  dans 
Tautre ,  se  s^arent  de  nouveau  et  se 
r^unissent  encore.  Les  jHrovinces,  k 
oette  6poque,  ^taient  administrtopar 
des  gouyemeurs  qui  prenaient  le  titre 
de  Khans,  Enfin ,  ^htang  VI ,  qui 
attacha  son  nom  k  un  code  long-temps 
v€u€T6y  et  Tun  des  plus  belli^ueux 
souverains  du  Caucase ,  vient  mter- 
rompre,  par  d*^atantes  vertus,  cette 
longue  m)6curit6 ,  jusqu'^  ce  que , 
vaincu  lui-m^me  et  ayant  ^puis^  ton- 
tes  ses  ressouroes,  il  se  jette  dans  les 
bras  de  la  Russie,  et  se  retire  k  Astra- 
kan,  pour  y  mourir  en  paix  (*). 

DqMiis  long-temps  le  zde  religieux 
des  u^orgiens  et  rhorreur  que  leur 
insjfirait  le  joug  des  mahometans  les 
avaient  oort^  a  recherdier  secrdte- 
ment  Tahiance  de  la  Russie.   Gette 

Suissanoe  s'toit  d6Ja ,  depuis  le  r^gne 
'Ivan-Vassilievitdi,  ^ndue  iusqu  au 
pied  du  Caucase ,  et,  dte  I'annee  155&, 
plusieurs  tribus  tdierkesses  ayaient 

(*)  Pour  quelques  Orientalislet,  oe  prince 
u*esl  que  le  cinqui^e  dc  son  nom. 


30 


L'UMIVERS. 


reconnu  son  vasselMe.'  En  1S86,  un 
roi  de  Kak^thi  se  mit  sous  la  protec- 
tion du  czar  Fodor,  ettroisans  aprte, 
unc  ambassade  g^orgienne  vint  implo- 
rer  son  secours  oontre  les  Turcs.  Get 
^v^nement  se  renou?ela  souvent  et 
inspira  aux  Russes  oette  convoitise 
des  provinces  caucasiennes  ou'iis  ont, 
depuis,  si  largement  aatisiaite.  En 
1722,Fierre-l(^Grand  traverse  le  d^- 
fll^  de  Derbent ,  et  vient  assi^r  le 
vieux  Chamacki«  ou  des  sijyets  de  son 
empire  avaient  6t^  Idchement  assassi- 
ns par  les  Parsaas.  Un  traits  lui  as- 
sure la  possession  des  provinces  qui 
bordent  la  mer  Caspienne;  mais  auel- 
ques  anodes aprl^.elles  sontrendues 
a  Nadir-Schah.  Ennn,  arrive  le  re^e 
d'H^radius ,  deuxilme  du  nom.  Si  la 
dignity  de  Thistoire  nous  perraettait 
de  reproduire  ici  une  expression  de- 
venue  proverbiale,  nous  dirions  oue 
ce  fut  le  coaimencement  de  la  fin. 
H^radius ,  voulant  se  soustraire  k  la 
domination  des  Persans ,  se  constitua 
vassal  de  Catherine  II ,  par  le  traits 
de  Gheorgiewsk  (24  juiUet  1783). 
Douze  aimto  apres,  une  arm^  per- 
sane  vient  ravager  ses  6tats  pour  pu- 
nir  cette  desertion;  Aga-Mohamed- 
Khan  s'empare  de  Tiflis ,  Tabandonne . 
au  pillage,  met  tout  ^  £eu  et  5  sang , 
et  emm^ne  vingt  mille  prisonniers. 
Il^radius  ne  re^oit  de  la  Russie  que 
d'impuissants  secours ;  il  meurt  (1798) 
accaol^  de  chagrins  et  de  regrets.  Son 
Gls  George  n'a  pas  un  regne  plus  tran- 
quille.  Constamment-  occupy  h  guer- 
royer  oontre  les  montagnards  lesghis 
et  les  Persans ,  il  implora  la  protec- 
tion de  Ten^iereur  Paul  F',  et  mou- 
rut  avec  la  certitude  qu'il  6tait  le 
dernier  roi  de  G^orgie.  La  reine  Ma- 
rie, sa  veuve,  voulut  d'abord  s^opposer 
aux  pretention's  des  Russes;  on  dit 
m^me  qu'eUe  fi  tpoiffnarder  un  olllcier 
gup^ieur  que  le  genial  TzitzianofT 
avail  charge  de  la  oooduire  k  Moscou. 
Enfin  die  se  reudit,  et  son  fils  David, 
ayant  peu  apr^  ( 1800 )  fait  une  en- 
ti^re  cession  k  TemiKveur  Alexandre 
de  rh^ritage  de  ses  b^res ,  tous  deux 
se  retir^nt  h  St-P^iersbourg.  A  da- 
ter  de  cctte  6poque,  la  G^rgic  de- 


vient  une  province  russe;  elle  n'est 
plus  du  domaine  de  llustoire. 

Les  G  togiens  piofessent  k  religion 
chr^tieiiDe,  et  affwrtiAPoeDt,  pour  la 
njupart,  ^  T^lise  graoque  orthodoxe. 
bans  celte  natuWf  les  lioniaies  soot 
grands  et  robustes;  ils  ont  rhuneur 
guerriere  et  qoelquefois  faroucfae;  ik 
soot  intelligents ,  hosBitatiers,  mais 
ignorants  et  peu  afiGmes.  Lean  fem> 
mes  ont  des  traits  ddicats  et  rtoiUen, 
le  remrd  doux ,  la  CaiUe  ^anoee  et  la 
peau  Uanche.  Leur  beauts  leur  a  de 
tout  temps  valu  une  grande  eiiSantit. 
A  r^poque  oik  les  provinces  du  Ciu- 
case  n'mjent  pas  soiwla  protection 
de  la  Russie,  les G^ori^iennes  peu- 
piaient  les  harems  de  I'Cmeiil ,  et  par- 
tageaient  avec  lesCiraassiennesrhoa- 
neur  de  donner  des  souroaiaes  ii 
TAjBie. 

Les  bdles-lettres  ont  ^t^  ooltivte 
avec  quelque  succ^  par  les  G^r- 
giens.  La  traduction  de  la  Bible,  qui 
remonte  au  VIII'  sidele ,  est  rest^  le 
premier  et  le  plus  beau  monument  du 
pur  idiome  de  oe  peuple.  Les  rois  de 
ce  pays  envoyaient  ordinairement  quel* 

Sues  jeunes  gens  choisis  s'instniiR 
ans  les  Bootes  d'Ath^nes;  aussi  les 
mythograjphes  srecs ,  les  ouvrages  de 
leurs  anciens  pnilosophes  et  ceox  des 
P^res  de  I'Eghse ,  ont-ils  €ie  traduits 
en  g6orgien.  Pius  tard ,  des  rapports 
suivis  avec  les  musulmans  de  TArabie 
et  de  la  Perse  amenerent  dans  la  litte- 
ratureduGaucase  une  invasion dugoilt 
de  oes  peuples.  An  XVin*  siede,  ks 
d3masties  royales  des  Moukraniens  et 
du  Kakheth  produisirent  les  littera- 
teurs les  plus  distinguds.  La  traduc- 
tion de  la  Bible,  revue  et  oompl^t^e  par 
les  soins  de  trois  rois ,  (iit  imprim^ 
h  MosGOU  ,  et  plusieurs  des  roeil- 
leurs  ouvrages  francais  du  si^e  de 
Louis  XIV  obtinrent  le  mtoe  boo- 
neur. 

La  langue  g^orgienne,  dont  la  plus 
belle  ^poque  date  du  regne  de  Tha- 
mar,  tient,par  la  resseroblance d'uae 
grande  partie  de  ses  mots ,  aux  idio- 
mes  nersan  et  arm^nien.  Sans  ^tre 
rude  a  la  prononciation ,  elle  est  so- 


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GIRCASSIE  £T  GI^ORGIE. 


31 


note  ft  abondante  en  articulations 
fortes  (*). 

La  population  de  la  G^orsie ,  dans 
ses  limites  actuelles,  s'^l^e  a  400.000 
indiridus  enTiron,  et  se  compose  a'in- 
dig^nes ,  d*Ann6nien8  qui  rayent  de- 
vant  la  persecution  manommne ,  de 
Juifis,  oie  Rourdes,  de  Tatares,  de 
Persans  et  de  quelques  Turcomans , 
dans  le  district  de  Bortdialo.  Les  Ar- 
m^iens  ont,  en  quelque  sorte,  le  mo- 
nopole  du  commerce ,  les  Gforgiens  se 
llTrant  de  pr6f6rence  k  la  culture  des 
tcrres. 

Outre  les  vignoUes  du  Kakethi  qui 
fourntssent  h  la  Gtorgie  tout  le  vin 
n^cessaire  h  la  consommation,  on  cul- 
tive ,  dans  les  trois  provinces  de  Tan- 
den  royaume,  la  garance,  le  mdrier, 
les  c6reales  et  surtout  le  riz.  Le  Ra- 
rabagh  est  renomm^  pour  sa  belle  race 
de  cheraux  persans.  Les  moutons  sont 
fort  nombreux  dans  toute  la  contr6e; 
les  boeufe ,  les  eochons,  et  g^n^rale- 
ment  les  animaux  domestiques  de  TEu- 
rope  font  partie  de  ses  ricnesses  agri- 
ooles. 

TyUSj  que  traverse  le  Rour,  ou 
C^ntf  9  est  encore  ia  ville  la  plus  im- 
portante  de  la  Giorgio  modernc.  ( Voy. 
hpl,  4. )  Prise  et  saccag^  pJusieurs 
fois,  notamment  en  1796,  elle  a  ^t^ 
recoostruite  avec  eodt.  Elle  se  divise 
eu  ville  vieille ,  sale  et  tortueuse ,  et 
en  ville  neuve ,  dont  les  rues  n*ont 
pas  moins  de  60  pieds  de  largeur;  les 
roaisoDS  y  sont  construites  en  oriques, 
et  sunnontto  par  de  grandes  terrasses 
sur  lesquelles  les  femmes  aiment  h  se 
rassembier  dans  les  belles  soirees  d*6te. 
On  y  Yoit  les  dames  dgto  causer  entre 
elles  et  prendre  des  rafrafchissements, 
tandis  que  les  jeunes  filles  dansent  au 
son  de  la  guitare  ou  du  tambour  de 
basque.  (Yoy.  pi.  11.) 

On  remarque  k  Xiflis  de  belles  places, 

(*)  Nqus  ckvpns  h  Tobligeance  de  M.  Bros- 
«t,  tiiteur  de  flusiciin  ornngu  At  philo- 
logie  gtergienfie,  la  eomoiuiuoBlioii  de  quel- 
(pM»  «•!«  int^wtiwanlaB  aur  k  tauigue  et  U 
UlteraUire  de  la  G^rgie. 

Vorez  aiuii  les  divers  fragments  inseres 
dais  le  Journal  asiatique,  et  surtout  les 
»«anis  iaiu  de  M.  KTaproth. 


de  vastes  caravans^rails ,  des  h6pi- 
taux,  une  cathMrale  et  un  jmrain 
botanimie.  6a  population,  oompos^ 
dlndimies ,  d'Arm^iens,  de  Russes , 
de  Juin  et  de  Persans,  peuts'dever  a 
90,000  ames.  Le  diof^raniiorbus  y  a 
fait  plusieurs  fOis  d'assez  grands  ra- 
vages. 

L'abondanee  des  marchandises  de 
tottte  nature  et  de  tout  pays,  la  va- 
ri^  des  costumes  orientaux ,  le  pas- 
sage des  chameaux  et  des  cnevaux, 
donnent  k  Tiflis  uu  aspect  pittoresque 
et  anim^,  que  4es  dangers  ne  peu- 
vent  se  lasser  d'admirer. 

Mtsketha^  dont  I'origine  se  perd 
dans  les  faraditionsbibliques,e6taujour- 
d'hui  presque  enti^rement  niinee ,  k 
I'exception  de  la  cathMrale  et  de  la 
forteresse;  sa  population  ne  d^passe 
pas  1000  k  laoo  ames. 

Gori  est  sitn6kW  werstes  N.-O.  de 
Tiflis,  sur  la  Pchimd^  k  peu  de  dis- 
tance du  oonfiuent'de  cette  rivi^  et 
du  Rour ;  cet  emplacement  rappelle 
fancienne  Gor9€nna,  Cest  la  seconde 
ville  du  royaume ,  sous  le  rapport  de 
la  population  et  du  commerce ;  on  y 
voit  huit  ^ises ,  dont  une  appartient 
au  rit  catlwlique. 

Souramy  dans  le  Rarthli,  est  re- 
marquaUe  par  la  beauts  du  pays  en- 
vironnant.  Le  diftteau  est  situ^  sur 
une  montagne  ^evte ,  d*pik  la  vue  pent 
plonger  dans  les  ^troites  vall^  qui 
conduisent  en  Im^r^thi.  (Voy  pi,  10. ) 
A  une  werste  de  Souram ,  un«  groupe 
de  cabanes ,  entour^es  de  peupliers , 
sert  k  la  quarantaine  des  voyageurs 
qui  viennent  ^^AkaUxike. 

Rmdssp  est  im  petit  village  de  Rar- 
tbli ,  que  nous  mentionnons  ^ur  si- 
gnaler une  ^ise  d'une  ardutecture 
elegante,  dont  Torigine  remoRte  au 
moyen  Age.  (Voy.  le  n"  J  de  la  pi,  1.) 

EUsabetpoly  capitate  du  kbanat  de 
Gandjab ,  est  d^ue  de  son  ancienne 
prosperity,  bien  qu'elle  compte  encore 
12,000  habitants ;  les  vastes  solitudes 

aui  rentourent  sont  remarquables  par 
es  ruines  immenses  etdMnt^ressantes 
antiquit^s.  De  ce  nombre  est  la  oolonne 
de  ChamhhoTy  dont  on  ipore  k  la 
fois  Torigine  et  Tusage  primitif.  EHe 


3!l 


L*UNIVERS. 


est  construite  en  briques  rouges,  po- 
w6e»  par  assises  r^li^res;  sa  nau- 
teur  est  d^environ  200  pieds.  On  y 
remarque  une  galerie  exterieure,  k  la- 
quelle  conduit  un  escaiier  en  spirale. 

La  G^orgie  ottomane  a  M  enlevte 
demidrement  k  la  Turquie ;  nous  men- 
tionnerons ,  dans  oette  proyinoe,  ^A- 
kaUMM,  ville  iniportante  et  trds-peu- 
pl^,  oi!^  Ton  trouve  une  biblioth^e, 
un  coll<^e,  et  la  belle  mosqute  d'Ab- 
med,  construite  sur  le  mod^e  de 
Sainte-Sopbie  de  Constantinople. 

Dans  l^cienne  Albanie,  qui  forme 
aujourd'hui  le  Daghestan  meridional, 
on  remarque  Derbent,  dont  nous 
avons  d6ia  parl6 :  sa  populajtion  est  de 
8000  hwitants;  Tancienne  Kouba  ^ 
que  I'insalubrite  de  son  climat  fait 
abandonner  peu  h  peu  par  tous  ses  ba- 
bitants;  la  nouveue  Aouba,  situ^  h 
peu  de  distance ;  Koura.  oik  reside  le 
Khamoutai-Khanf  sorte  de  prince 
brigand,  qui  rea>it  un  tribut  de  la 
Russie ;  Yarti,  (m  demeure  le  kadi  du 
Tabass^ran ,  autre  chef  d*une  popula- 
tion f<§roce,  qui  n'est  soumise  k  la 
Russie  que  nominalement .  et  dont  le 
cbef  est  m^me  oensionne  par  oette 

S'ssance ;  Barcniifet  Tarkou  servent 
lement  de  repaires  1^  des  Khaau 
ou  TchamkaU^q^t  la  Russie  est  obli- 
gee de  stipendier  pour  prtenrer  ses 
sujets  de  leur  brigandage.  Gbacun  de 
ces  petits  souyerains  pent  mettre  de 
6  k  8000  bommes  sur  pied.  Voil^,  k 
notre  ayis ,  la  v^table  position  so- 
ciale  qui  sert  de  transition  entre  le 
yoleur  de  grand  chemin  et  le  conqu^- 
rant  k  la  mani^re  d* Alexandre.  Ces 
nations  appartiennent,  par  la  naissance 
et  la  lawie,  aux  Tatares,  aux  Kal- 
mouks  et  aux  Cosaques. 

Dans  le  Chiryan,  proyinoe  situ6e 
au  Slid  du  J>aghe8tan ,  les  usages  se 
rapprocbent  beauooup  des  moeurs  per- 
sanes.  Les  harems  musulmans  y  sont 
aliments  par  des  esdayescircassiennes 
etde  jeunes  et  belles  bayaderes  tatares. 
Les  yilles  les  plus  remarquables  sont 
le  yieux  et  le  nouyeau  CkamackL  Bc^ 
kou  et  SaUan.  Le  yieux  ChamacKi  est 
une  yille  o6ldi>re  dans  la  m^moire  des 
peuples  Caucasians ;  elle  fut  jadis  Ten- 


trep6t  du  commerce  de  TOrient.  Ses 
mines  Imposantes ,  ses  yastes  can- 
vans^rails,  ses  palais,  et  rheureox 
choix  de  sa  position ,  attestent  son  an- 
cienne  opulence ,  ainsi  que  Findustrie 

2ui  distinguait  ses  100,000  liabitanti. 
^^truite  et  d^peupl6e  par  les  Turcs, 
les  Mongols  et  les  Russes,  die  fixa, 
en  1830,  Tattention  du  f;te6ralTer- 
moloff ,  qui  s^oocupa  s^neusement  ^ 
relever  jes  mines.  Cette  kMiable  en- 
treprise  a  616  couronn^  d'un  pidn 
suocte ,  et  tout  pr^sajze  au  yieux  Cha- 
macki  une  tre  nouyelle  de  prospdrite. 

Nous  ayons  d^a  parl6  de  Rasou  au 
sujet  des  fiiuneux  puits  de  naphte.  Son 
port  est  le  plus  tr6quent6  de  la  mer 
Caspienne.  La  pdche  des  nboques  se 
fait  sur  une  He  situ6e  k  quelques  lieues 
seulement;  elle  donne  chaque  annee 
de  5  ^  6000  indiyidus.  La  soie,  le 
safran,  le  fiz,  lagaranceet  le  sesame 
constituent  les  ressouroes  agricoles 
des  environs  de  Rakou,  et  gaa^nk- 
ment  du  Chinran. 

Salian  est  une  petite  yille  qui  tire 
de  la  p^e  toute  sa  richesse  :  die  est 
situ6e  dans  un  angle  que  forment  deux 
bras  du  Kour.  Au-ddlt  de  ce  fleuve , 
en  allant  au  S.-E.,  commence  le  d^ 
sert  de  Moghan. 

Sur  la  route  militaire ,  qui  de  Tiflis 
mene  k  Mosdok,  on  trouye,  ao-dela 
de  Mtsketha ,  Jnanour,  petit  bomig 
de  3  li  800  habitants ,  ou  les  yoya- 
geurs  font  quarantaine  avant  d*entrer 
en  Gtoraie:  Kasbeky  ou  r^ide  le 
chef  des  Ossetes  (*);  Z>arte[.forteresw 
oui  donne  son  nom  au  d^^;  VlaS* 
kawhasy  d'origine  moderae,  r^- 
dence  du  gouveraeur  de  la  province 
du  Caucase ;  Mosdok,  ville  conuner- 
(ante,  et  forte  station  militaire;  et, 
enfin,  plusieurs  villages  et  quelques 
stanUza  de  Cosaques. 

PATS  DBS  MOHTAOHBS. 

Nous  comprendrons  d*abord,  dans 
oette  section ,  deux  peuples  qui  ont 
entre  eux  les  ptas  gnods  rapports, 

(*)  La  plandie  sepii^me  est  ime  ^^^ 
moot  Kasoeek,    ou  Mqlnwari,      '  '^ 
rodier  de  ProDiiihfo 


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CIRCASSI£  ET  G^ORGIE. 


33 


ies  Abates  et  les  Teherkesses.  Ghacun 
d'eax ,  vivant  en  aristocratie  mUitaire, 
oa  platdt  diastotn^  en  r^publiques 
fi^odales ,  pr^sente  le  curieux  spectacle 
d*une  nation  qui  a  brav^  les  oonqu6' 
rants  et  traverse  les  siMes,  en  con- 
servant  la  physionomie  de  T^tat  social 
prinnitif,  les  moeurs  beUiqueuses,  le 
ro^pris  de  la  propri6t6 ,  le  penchant 
au  vol ,  les  relations  du  maltre  avec 
ses  esdaves,  et,  sur  toutes  choses, 
le  respect  le  plus  piofond  pour  les 
droits  de  rhospitalife. 

ABAS£S.-<LV6(Miesediv]se  en  deux 
r^ons,  la  grande  et  la  petite.  La 
Grande- Ahasie  forme  le  liuoral  de  la 
mer  Iloire,  en  remontant  vers  le  nord- 
ouest,  depuis  la  limite  de  la  Mingr^lie 
josqu*^  la  ville  d* Anapa ,  enlev^  der- 
ni^rement  aux  Turcs.  La  Petite- Abasie 
est  comprise  dans  les  r^ons  sup^ 
rieures  entre  la  rivi^e  Malka  et  leKou- 
ban ,  ^  Tendroit  oh  ces  deux  courants 
d^eau  prennent  leur  source.  La  pre- 
miere nit  fr^ent^e ,  d^  la  plus  haute 
antiquity,  par  les  navigateurs  ^ecs,  et, 

eus  tard ,  par  les  Romains.  La  ^taient 
s  Zykhes  ( Zux<><) )  les  AchxenSj  les 
Ker&tes,  les  Sanniges,  et  ouelques 
autres  qui  se  sont  fondus  dans  les 
deia  groupes  oui  font  I'objet  de  cet 
article.  Peut-^tre  les  Gran^-Abases 
soDt-ils  les  descendants  des  Egyptiens 
oui  vinrent  en  Golchide  sous  la  con- 
dulte  de  S^sostris :  c*est  du  moins  ce 
qu*on  pourrait  arguer  de  leur  consti- 
tution physique.  lis  ont  la  t^te  oom- 
prim6e ,  le  bas  du  visage  court  et  le 
nez  saiUant. 

Les  G6orffiens  donnent  aux  Abases 
le  nom  dl*Joka$si;  plusieurs  c^ogra- 
phes  appellent  leur  pays  AMMme^ 
et  m&ne  AvogaH:  eux-m^mes,  enfin, 
prennent  le  nom  o^Ahzni. 

Ge  peuple  est  fort  anden  dans  le 
Caucase.  ll  fiit  autrefois  soumis  tour 
i  tour  aux  Lazes,  aux  G6orgiens,  aux 
Romains,  aux  Mongols  et  aux  Per- 
sans,  ou  plutdt  il  fit  altemativement, 
aTec  cbacune  de  ces  nations,  ces  traits 
hvpocrites  que  le  plus  &ible  reqoit  du 
mus  fort ,  avec  la  condition  tacite  de 
Ks  fouler  aux  pieds  ^  la  premiere  occa- 
sion. L'an  560 ,  sous  I'empereur  Jus- 


tinien,  les  Abases  furent  oonvertis  au 
christianisme.  Les  Turcs  ont  essay^ 
maintesfois  depuis  de  les  amener  k  leur 
culte.  II  en  est  r^ult^  qu'ils  ne  sont 
ni  Chretiens,  ni  mahom^s,  leur  re- 
ligion se  bomant  k  qudques  pratiques 
superstitieuses ,  au  milieu  desquelles 
on  retrouTC  les  traces  imp^aites  qu*y 
ont  laiss^es  les  missionnaires  de  r£- 
vangile  et  ceux  du  Koran.  Du  temps 
du  Bas-£mpire ,  le  z^e  pieux  des  che- 
valiers de  la  chr6tiente  et  I'ardeur 
entreprenante  des  peuples  commer- 
cants  attirerent  \  la  fois  chez  eux  des 
Francs  et  des  G6nois ,  dont  ils  ont 
conserve  le  souvenir.  lis  montrent 
encore  de  vieilles  ^ises  6levto  par 
les  premiers ,  et  meme  des  ^pto  et 
autres  armes  qui  appartiennent  k  \&- 
poque  des  croisades.  II  est  possible 
aussi  que  ces  objets  aient  it/k  apport^ 
chez  eux  par  les  Arabes,  qui  les  avaient 
enlev^  aux  prisonniers  Chretiens. 
Quant  aux  G6nois,  leur  nom,  l^^re- 
ment  alt^r^.  s'est  conserve  dans  cette 
contree ,  ou  les  habitants  aiment  ^ 
parler  des  B^enaoiSy  mot  qui  se  rap- 
proche  trop  de  Titalien  genooese  pour 
qu'on  pulsse  sy  m^prendre. 

Les  Abases  viventdans  un  ^tat  per- 
p6tuel  d'hostilit^  avec  leurs  voisins 
les  Russes  de  Soufffauk-Kali  et  les 
Min^liens;  mais  its  n'ont  pas  d'en- 
nemis  plus  redoutables  que  le  peuple 
avec  lequel  pr^cisdment  ils  sembie- 
raient  devoir  le  plus  sympathiser ,  les 
Teherkesses.  Ceux-ci ,  qui  les  traquent 
dans  les  for^ts  comme  des  b^tes  fauves, 
ont  pris  sur  eux  un  si  grand  ascen- 
dant moral ,  que  TAbase  se  consid^ 
gresque  comme  I'esclave  n^  du  Tcher- 
esse. 

La  Russie  entretient  une  croisite 
sur  les  cdtes  abasiennes;  ce  qui  n'em- 
p^e  pas  ces  incorrigibles  forbans 
de  se  iisauer  en  mer  sur  des  bateaux 
longs  etptats ,  semblables  aux  camerm 
des  anciens  Goths ,  et  de  courir  sur 
les  navires  marchands  que  le  cabne  a 
surpris  dans  les  parages  de  cette  mer 
tomours  inhospitali^re. 

Les  femmes  abases  sont  fort  belles; 
elles  allaient  autrefois  alimenter  les 
march^  d* Anapa  et  de  Tiflis ,  06  .let 


3*  Uvraison,  (  Circassib  et  Georgib.  ) 


8 


31 


L'UNIVEHS. 


Turcs  ct  les  Persaiis  vcnaient  appro- 
visionner  leurs  s6rails.  On  se  fait  a& 
ih^ralement  en  Europe  une  fausse  ia6e 
sur  cette  rente  des  femmes  de  TOrient. 
La  philosophic  s'en  indigne,  sans  doute, 
inais  rhumanit6  pent  s'en  consoler. 
En  effet ,  les  Jeunes  Abases,  comme 
les  Tcberkesses  et  les  Mingr^liennes, 
mdnent  dans  leurs  montagnes  une  vie 
fort  triste  et  fort  pr^caire;  aussi, 
toute  leur  ambition  se  borne-t-elle  h 
^tre^  vendues  et  conduites  dans  un 
harem,  oH  elles  auront  un  6poux, 
des  esclaves  et  des  bijoux ,  ot  elles 
godteront  enfin  mille  douceurs  qu'elles 
ne  pcuvent  esp^r  dans  leur  sauvage 
patrie.  Nous  n*en  dirons  pas  autant 
pour  ce  oui  conceme  la  vente  des  per- 
sonnes  ae  Tautre  sexe  :  ici  Fexcuse 
serait  d'autant  nioins  admissible,  que 
ce  commerce  abominable  fut  long- 
temps  acoompagn^  de  la  mutilation, 
Ceux  des  jeunes  Abases  que  Ton  ne 
soumettait  pas  k  une  atroce  opera- 
tion, passaientguelquefois  en  £^pte, 
01^  ils  etaient  mcorpor^  dans  la  re^ 
doutable  milice  des  Mamelucks.  L'un 
d*eux,  nomm^  Barkok,  est  devenu 
sultan  en  1382. 

Ici,  un  p^re  a  le  droit  de  vendre 
ses  enfants ;  le  fils  aln^  a  la  mtoe 
prerogative  sur  ses  fr^res  et  soeurs 
quana  le  p^re  n'existe  plus.  Les  Tcber- 
kesses et  les  Abases  oontinuent  k  faire 
ce  trafic  de  chair  humaine  quand  ils 
en  trouvent  Foocasion ;  mais  les  Russes 
y  mettent  des  obstacles  qui  ont  fait 
singuli^rement  rench6rir  le  prhc  des 
esclaves.  Autrefois,  un  enfanf  se  ven- 
dait  de  8  ^  4  6cu8,  une  femme  12  ecus, 
un  homme  d'un  age  mdr  15  ecus,  et 
une  jeune  fille  de  treize  k  dix-huit  ans 
20  &m. 

Les  hommes  de  cette  nation  sont 
extreraement  paresseux ,  et  par  conse- 
quent trds-pauvres ;  ils  pref&rent  la 
vie  de  brigands  h  ceile  d'agriculteurs. 
Ils  eievent;  pourtant  des  chevaux  d'une 
race  tres-estimee ,  des  moutons  cham- 
(ouky  doiit  les  grosses  queues  sont 
pour  eux  un  mcts  friand ,  des  ch^vres 
ct  aurtout  des  abeilles. 

L'Abasie  sunerieure,  qui  confine  a 
«l*cmbourhure  clu  Kouban ,  faisait  par- 


tie  de  Tancienne  Sindique,  ou  region 
des  Sindes.  On  croit  memereoonnattre 
Templacemcnt  du  partus  sindicitt  de 
Scylax,  dans  la  modeme  Soudjouk- 
kali  J  k  50  werstes  d' Anapa,  en  re- 
descendant  la  cdte  du  nord  au  sad-est. 

Jnapa ,  jadis  residence  d'un  padia , 
ville  de  3000  ames ,  Saueffouk-kaie , 
que  nous  venons  de  nommer,  Che- 
Ufijihy  PcMa,  FouXariy  PUzunda  (Pan 
cien  PytMus)^  Sokoum-Kalah,  H 
quelques  autres  villages  dont  les  rades 
servent  d'asile  aux  croiseurs  russes  sur 
une  cdte  infestee  par  la  piraterie,  sont 
les  seuls  points  du  littoral  qui  meritent 
d'etre  siguaies. 

TcHEaKESSfis.— Les  Tcherkeues^ 
ainsi  nommes  de  deux  mots  tataresqui, 
litteralement,  equivalent  ^  coi97e«rs(fe 
chemin,  c'est-k-dire  brigands ,  se  don- 
nent  k  eux-m^mes  le  nom  &Jdi^M* 
Nous  les  appelons  k  tort  Gircassiens. 
Leurs  voisins,  les  Ossetes,  les  nomment 
KhascLkhs ;  et  il  est  a  remarquer  gue  la 
Kasakhia  des  historiens  bjzantins  se 
trouve  sur  leur  territoire  :  ce  sont  les 
Ktusoghi  des  chroniques  russes  du 
Xl'siecle.  D'un  autre  cdte,  plosieurs 
tribus  cosaques ,  au-del5  du  Kouban , 
portent  le  nom  de  Tcberkesses ;  et  il 
existe  en  Crimee,  a  peu  de  distance 
de  Sebastopol ,  dans  la  peninsule  heia- 
cieotique,  des  mines  oonnues  sous  ce- 
lui  de  Tcherkesskerman  J  ou  forte- 
resse  des  Tcberkesses.  Sur  la  droite 
de  la  bale  de  sebastopol ,  on  trouve 
egalement,  entre  les  rivieres  Ratcba 
et  Belbek ,  une  plaine  des  Tcberkesses 
(  Tcherkess'touz)^  dont  la  partie  su- 
perieure  est  appeiee  Kabardah.  Or, 
les  princes  circassiens,  qui  se  disent 
issus  d'une  famille  arabe,  s*intituleat 
princes  de  la  Kabardahy  et  c'est  le 
nom  qu'ils  donnent  k  la  oontree  sou- 
mise  a  leur  autorite.  Toutes  ces  cir- 
constances  indiquent  clairementla  part 
que  les  Tcberkesses  peuvent  s'attri- 
buer  dans  Torigine  oe  la  nation  des 
Cosaques,  dont  la  physionomie  est 
aujoiml*hui,  k  la  verite ,  parfaitement 
caracterisee ,  mais  qui  n*etait,  dans  le 
principe,  qu*un  melange  confus  de  di- 
vers peuples. 

Les  Tcberkesses  appartiennent  aui 


GIRGASSI£  £T  GM;0RG1R. 


8S 


Zykhes  des  auteurs  grecs.  lU  vivent 
dans  Jes  hautei>  montagnes  d'oii  s'^ 
chappent  le  Tdrek ,  la  Malka  et  le  Kou- 
ban ,  et  s^^teodent  jusqu'au  rivage  de 
la  mer  Noire,  en  se  confondant  a?ec 
les  Abases.  Le  T^ek  forme  dans  leur 
|Kiy]5  deux  divisioDS  :  la  grande  et  la 
petite  Kabardah;  et,  d*apr^  oe  que 
Dous  venons  de  dire,  ce  nom  a  ^t^  ap- 
port^  par  les  priiiGes  dont  il  est ,  de 
nos  jours,  le  titre  edn^ique. 

On  sait  peu  de  cnose  sur  Thistoire 
de  cette  nation.  Soumise  d*abord  aux 
G togiens ,  eUe  s'en  s^para  au  XVI* 
siecle  •  pour  passer  sous  la  domination 
des  khans  ae  Crini6e,  et  plus  tard 
sous  celle  de  la  Russie.  Le  czar  Iwan 
Vassilievitch^pousa,  en  1560,  Marie, 
princesse  tcberkesse,  fille  de  Tern- 
rcuk. 

En  1700,  le  khan  de  Grim^voulut 
tenter  de  faire  rentrer  les  Tcherkesses 
sous  sa  domination.  II  se  mit  done  en 
marche  ^  la  t^te  d*une  arm^e  formi- 
dable, passa  le  Kouban,  d^t  les  re- 
belles  en  plusieurs  rencontres ,  et  les 
oontraignit  k  se  retirer  dans  les  soli- 
tudes les  plus  ^vto  de  leurs  roonta- 
gnes.  Retranch^  denize  des  rem- 
narts  de  glaoe ,  et  des  pics  inaccessi- 
Ues  aux  Tainqueurs,  les  Tcberkesses 
espdr^rent  d*abord  que  cdte  arm^ 
abandonnerait  unpays  ou  elle  ne  trou* 
vait  plus  d^ennemis  a  oombattre;  mais 
il  n'en  fut  pas  ainsi ,  et  le  kban  s*ob- 
stina  h  les  tenir  bloqu^,  certain  de 
les  r^duire  par  la  famine.  En  eCfet , 
apr^  avoir  epuis^  leurs  provisions  de 
toute  nature,  les  assises  furent  con- 
traints  ^  abandonner  leur  retraite.  On 
les  vit  alors  descendre ,  d'un  air  sup- 

f pliant,  et  conduire  aux  Tatares ,  dans 
*espoir  d'obtenir  un  pardon  peu  m^- 
rite,  plusieurs  jeunes  et  belies  filles 
qu'ils  livrdrent  k  la  brutality  de  la 
sokiatesque^  Ini  ofi&ant,  en  outre, 
tout  ce  qui  leur  rest^t  de  liqueurs 
fortes  et  enivrantes.  I^  soidats  tata- 
res ne  s'^taient  jamais  trouv^  k  pa- 
reille  ffite ;  la  voix  de  leurs  chefs  tut 
tmpuissante  k  les  contenir,  et  leur 
canopdevint,  en  quelques  heures,  un 
th^re  de  d^rdre  et  d'ivresse.  La 
Quitseule  mit  un  terme  k  cette  orgie, 


dont  les  auteui^  s*endormirent  gorges 
de  vin  et  de  debouche.  C'^tait  Xt  mo- 
ment que  les  vaincus  attendatent  pour 
prendre  une  ^datante  revandie  :  un 
corps  nombreux  qui  s'^tait  embusqu^ 
a  peu  de  distance,  vint  inopin^ment 
fondre  sur  les  Tatares,  portant  de 
tons  cot^  I'inoendie  et  le  fer,^or- 
geant ,  sans  piti^,  tout  ee  qui  s'offrait 
a  lui.  Le  lendemain,  Vmxubb  assi^- 
geante  n'existait  plus ,  et  son  chef  se 
sauvait  dans  la  st(»pe,  de  touie  la 
Vitesse  de  son  chevaf. 

Les  Tcberkesses  se  divisent  en  trois 
classes  :  les  princes ,  ou  Pcheh^  les 
nobles,  ou  Ousdetij  et  les  vassaux, 
ou  paysans. 

Les  princes  sont  de  v^ritables  pala- 
dins ,  bujours  bard^  de  fer  depuis 
le  lever  du  soleil  jusqu*^  son  coucher , 
mont^  sur  de  magnlfiques  cbevaux , 
et  vivant  dans  up  ^tat  porp^tuel  d^hos- 
tilit^  avec  leurs  voistns,  soit  pour 
leur  faire  une  guerre  ouverte ,  soit 
pour  les  voler  ei  les  j^lkar.  lis  se  di- 
sent  descendus  d'une  famille  arabe , 
qui  devait  elle-m^me  son  origine  a 
Sem,  Gls  de  Mo6.  Leur  §6n^logie  se 
retrouve  assez  dairement  depuis  la 
fln  du  XTV*  si^ede  F^re  chr6tienne. 

Les  Ouauien,  panni  lesquels  on 
compte  des  vassaux  afifranchis ,  ser- 
vent  d^toyers  aux  premiers.  Quoique 
nobles,  ils  ne  peuvent  s*allier  k  la 
dasse  pr^c^dente ;  et  quand  Fun  d*eux . 
a  eu  l^udace  de  squire  la  fille  d'un 

I)rinoe,  une  prompte  fuite  peut  seule 
e  soustraire  k  la  vengeance  r^serv^ 
k  un  pareil  affront :  la  mort !  Mais  il 
est  inutile  d*ajouter  que,  dans  le  cas 
contraire ,  (fest-^-dire  iorsqu*un  Pcheh 
a  daisn^  jeter  les  yeux  sur  la  fille  d'un 
Ouz£n,  cdui-d  s'en  tient  fort  ho- 
nor^, mtoe  quand  fl  n'en  r6nilte  pos 
une  alliance  l^itime;  et,  a  son  tour, 
il  en  agit  de  mtoe  avec  les  filles  de 
son  vassal.  Ge  dernier  n'a  rien  qui  lui 
appartienne  :  sa  femme,  sa  fille,  ses 
bestiaux,  ses  provisions,  tout  jusqu'j^ 
sa  vie  est  a  la  disposition  des  princes 
et  des  nobles.  Lui-mdme  il  fait  partie 
de  leur  patrimoine,  et  peut  Itre  trans- 
mis  par  heritage.  Hamtudlement  les 
vassaux  foumissent  k  leurt  seigneurs 


36 


L'UNIVERS. 


un  tribut  qui  considte  en  une  oeriaine 
quantity  de  foin,  de  ctMks ,  en  tdtes 
ae  bestiauxt  et  en  plusiean  journ^es 
de  traTail.  Mais  il  est  oonaolant  de 
pouToir  ajouter  que  si  les  Tassaux 
n'ont  rien,  absolument  rien  qui  ne 
soit  la  propria  des  nobles ,  en  re- 
vanche us  ont  le  droit  de  demander  k 
ceiix-ci  les  T^tements  et  les  meubles 
tfui  sont  It  leur  oonvenanoe.  Les  re- 
niser  serait  une  chose ,  sinon  odiease, 
du  moins  ridicule ;  aussi  Toit-on  quel- 
quefois  un  Quzden  rentrer  chez  lui 
Convert  de  haillons ,  apr^  en  6tre  sorti 
ridbement  v^\  c'est  qu'alors  il  a 
renoontr^  un  paysan  auquel  il  a  plu 
de  lui  proposer  un  6diange  d'babits. 

Nous  croyons  d'ailleurs  devoir  en- 
trer  dans  quelques  details  plus  eten- 
dus  sur  la  physionomie  et  les  mceurs 
de  oe  peuple. 

Religioh.  —  Le  duristianisme  fot 
imports  jadis  dans  les  montagnes  de 
la  Circassie.  Des  crois^s ,  prisonniers 
de  guerre )  vendus  sans  doute  k  des 
princes  de  la  Gtorgie  et  enlev6s  k 
oeux-ci  par  les  Tcherkesses,  jet^nt 
chez  eux  les  premiers  germes  de  la 
foi  dir^tienne,  second^s  en  cela  par 
les  colonies  ^^oises  qui,  dans  le 
moyen  ^e,  vinrent  s'^tablir  sur  les 
odtes  de  la  mer  Noire.  Plus  tard.  les 
relations  commerciales  des  Tcherkes- 
ses avec  les  Turcs  favoriserent  Tintro- 
duction  de  Tislamisme.  II  est  rdsult^ 
de  oe  melange  de  deux  cultes  avec 
Tancienne  idcHAtrie  de  cette  nation , 
des  croyances  religieuses  qui  ofifrent 
la  rtonion  de  tous  Yes  c({ract^res  sans 
en  avoir  aucunqui  lui  soit  particulier: 
les  Tcherkesses  sont  Chretiens  en  ce 
qu'ils  conservent  le  symbole  de  la 
croix ,  qu'ils  oonnaissent  une  mbre  de 
Dieu,  qu'ils  invoquent  des  ap6tres, 
et  qu'ils  cdldlirent  un  sacrifice  assez 
seinblable  1^  celui  de  la  messe ;  lis  sont 
mahom^ns  paroe  qu'ils  avouent  la 
mission  du  faux  proph^te,  mi'ils  di- 
sent  leurs  pridres  en  arabe,  le  visage 
toum6  du  cdt6  de  la  Meoque,  qu'ils 
ont  horreur  de  la  chair  de  pore  et  sui- 
vent  d'autres  prtontes  de  nslamisme ; 
enfin,  lis  sont  uiolfltres,  puisquMls 
odorent  une  d^esse  des  abeines ,  Me- 


riisay  un  dieu  Seoi$Mi,  qui  oom- 
mande  aux  vagues  et  aux  temndtes , 
un  protecteur  des  forgerons,  TW^se, 
et  autres  divinit^s  auxmielles  ils  of- 
frent  des  animaux  en  boiocauste. 

On  retrouve  encore  chez  eux  quel- 
ques-unes  des  croix  qu'y  avaient  plan- 
tees  les  missionnaires  cfar^ens.  Ils 
ne  savent  plus,  il  est  vrai,  oe  que 
veut  dire  oe  signe  de  la  r^deniption, 
mais  les  Turcs  leur  ont  donne,  k  oe 
smet,  une  version  qu'ils  aiment  k  r€- 
p^ter  sans  avoir  I'air  d'y  ajouter  une 
entidre  anoyance.  Sdon  cette  fousse 
interprtotion,  le  pn^h^  des  dura- 
tions ^tait  sur  le  point  de  p^rir  dans 
un  bain ,  victime  d^un  lAche  assassinat, 
lor^'un  anse  vint  se  montrer  k  la 
f entire,  et  rinvita  k  se  sauver  par 
cette  ouverture;  mais  le  prophete 
porta  sa  main  au  front  pour  inmquer 
que  sa  t^  ^tait  trop  grosse  etne  pas- 
serait  jamais  par  la.  L'ange  ayantr^ 
pliqu^  qu'il  se  trompait,  le  prophete 
porta  suooessivement  la  mam  a  son 
ventre  et  k  sestpaules,  afin  de  con- 
vaincre  I'envoy^  celeste  de  I'impossi- 
bilit^  oili  il  ^tait  de  passer  par  une  ou- 
verture aussi  ttroite. 

Les  rites  du  sacrifice  tdierikesse 
sont  todement  un  m^nge  des  usa- 
ges de  Tantiquit^  paienne  et  des  mys- 
teres  du  chnstiamsme.  Au  sein  d'une 
sombre  fortt,  dans  une  vaste  solitude, 
une  croix  plants  sur  un  tronc  d'ai^ 
bre  G0up6  mdique  I'autel  o&  le  sacri- 
fice va  se  consommer.  Les  voisins  se 
rassemblent  k  I'heure  indiqu6e,  trat- 
nant  la  victime  avec  eux  :  c'est  une 
eh^vre ,  un  mouton  ou  un  bocuf ,  se- 
lon  la  solenni^  du  jour.  Le  plus  an- 
cien  de  I'assembl^  se  d6couvte  la  tdte, 
rev6t  un  manteau  de  feutre,  prononce 
quelques  paroles  mystiques,  puis  0 
approche  un  flambeau  du  com  de  Ta- 
nimal  pour  lui  brAler  les  noils  a  Ten- 
droit  oil  il  faut  frapper.  Un  esdave 
s'avanoe  alors,  arme  d'un  couteau,  et 
le  sacrifice  s'accomplit.  La  t#te  de  la 
victime  est  suspendue  It  un  arfore 
voisin ,  c'est  la  part  r^serv6e  k  Dieu. 
La  peau  ajppartient  k  I'oflldant,  el 
la  chair  est  destinte  k  un  festin  au- 
quel tDus  les  assistants  peuvent  pren* 


CIRCASSIE  ET  G^ORGIE. 


37 


dre  part.  Le  prftre  re^t  emuite  des 
mains  de  son  esdaye  une  coupe  de 
boitsta  et  un  moroeau  de  pain.  II  les 
4^e  vers  le  del,  en  adrasant  une 
pri^  k  Dieu,  pour  qu'il  daigne  b^nir 
cette  offrande.  Gela  fait,  il  passe  la 
coupe  et  le  pain  au  plus  ancien  des 
assistants,  et  ripkte  cette  ofo^monie 
autant  de  fois  qu'il  y  a  de  Tieillards 
dans  rassembl6e. 

Lbgiblatioh.  —  Ge  peuple  ne  fait 
pas  de  lois;  des  usages  oonsacrte  par 
te  temps  lui  tiennent  lieu  de  code. 

Ln  nobles  se  r^unissent  k  dlTcrses 
6poques  pour  d^battre  les  afGures  d'un 
intmt  gtotol;  ces  assemble,  pr6- 
sidte  par  le  membre  le  plus  ancien , 
se  nomment  Pok. 

Dans  cfaaoue  tribu ,  les  andens  for- 
ment  un  trmunal  devant  leqnel  Tien- 
nent comparaftre  tons  les  individus 
mmpqomA  d'un  d^it  quelconque.  La 
pdne  de  mort  tfest  pas  en  usage;  les 
d^timents  graves  sont  Famende,  Texil 
et  Tesdavage.  Le  crime  r^put6  le  plus 
atrooe  aux  yenx  des  Tcherkesses  est 
le  parjure.  Cdui  oni  a  engag6  sa  foi , 
s'ilTient  k  la  Tioler,  est  rendu  aux 
TurcB.  Le  meurtrier  est  condamn^  k 
payer,  k  titre  d'amende,  neuf  t£tes 
de  gros  b^tail ,  et  k  compter  aux  pa- 
rent de  la  victime  une  forte  indem- 
nity. Le  Toleur  pris  en  flagrant  ddit 
est  condamn^ ,  en  punition  de  sa  mal- 
adresse*  k  une  forte  amende  et  &  la 
restitution  de  sept  fois  la  Taleur  de 
robiet  d^b6. 

Mgburs  nationalxs. — Les  Tcher- 
kesses ont^  de  singuli^res  idte  sur 
la  propria.  Le  toI  et  le  brigandage 
sont  diez  eux  des  titres  de  gloire 
dont  le  sonrenir  se  transmet  comme 
an  pr^eux  d^t  aux  gdntotions  les 
plus  recolto.  S'il  natt  un  fils  li  un 
prince  on  noble,  Ten&nt  est  secr^te- 
ment  enlev^  par  un  voisin  qui,  le  len- 
demain ,  se  nit  connattre  et  se  con- 
stitue  j4takk,  c'est-^-dire  ptee  nour- 
ricier.  II  donne  tons  ses  soins  au  jeune 
enfont,  lui  apprend,  quand  I'lige  le 
permet,  le  metier  des  armes,  les  exer- 
ciees  dievaleresattes ,  et  surtout  Tart 
de  voler  arec  adresse.  Enfb,  torsque 
r^i^e  a  donn^  des  prenres  manifostes 


t 


de  sa  boime  SducaUon,  on,  en  d'au- 
tres  termes,  quand  il  a  void  son  ata- 
lik,  cdui-d  le  rend  au  pte,  et  con- 
serve dans  la  famille  les  droits  de  pa- 
rents. Quand  un  prince  va  a  la  guerre, 
il  est  sum  de  tous  ses  vassaux;  mais 
lorsqu'il  va  voler,  il  n'est  accompagn^ 
que  de  ses  procbes  et  de  ses  intimes 
amis. 
Les  Tcherkesses  ne  s(mt  soumis 
'en  apparenoe k  la  Russie;  ils  sont, 
e  fiedt,  ind^pendants ;  plusieurs  de 
leurs  princes  sont  m^me  salari^i  par 
cette  puissance,  sous  la   condition 

gu'ils  renonoeront  k  leurs  incursions 
ostiles.  Du  reste,  il  existe  parmi  eux, 
comme  chez  les  Abases ,  et  gto^rale- 
ment  chez  toutes  les  nations  belli- 
queuses  du  Gaucase,  un  usi^e  qui 
rappeUe  les  moeurs  patriarcales;  c'est 
celui  de  Phospitalite  des  Konak.  H 
suffit  k  un  stranger  de  savoir  le  nom 
d'un  prince,  d'un  noUe ,  d'un  person- 
nage  queksonque,  etde  declarer  qu'il  se 
met  sous  sa  protection ,  pour  £tre  res- 
pect^etbien  traits.  Le  protecteur  prend 
aiors  le  titre  de  Konak;  il  est  oblige, 
sous  peined'infamie,  etmdmede  dilti- 
ments  coipords,  de  d^endre  sonprot^ 
o^deradmettreaufoverderhospitaliti^, 
de  le  nourrir,  de  le  raire  accompagner 
dans  ses  voyages,  de  le  chMr  ennn, 
et  de  te  trailer  comme  son  enfont. 
Cette  admirable  institution  sufiOrait 
seule  pour  r^ncilier  ces  peuples  bar- 
bares  avec  rhumanit^.  Il  est  vrai 
qu'ils  y  ajoutent  quelques  formes  qui 
ne  sont  pas  d^anm  de  tout  ridicule ; 
c'est  ainsi  qu'un  ^trang^er  aoquiert 
forc6ment  le  droit  de  famille  lorsqu'il 
a  pu  presser  de  sa  bouche  le  sdn  nu 
de  la  matteesse  de  la  maison.  II  est 
alors  cens^  avoir  suc^  son  lait ,  et  il 
acquiert  un  pere,  une  m^  et  des 
frares^  tous  obliges  de  le  dtfendre  et 
de  le  bien  traiter. 

Avant  que  la  Russie  eAt  entidre- 
ment  r6uni  la  r^on  caucasienne  k 
ses  possessions,  les  jeunes  filles  tcher- 
kesses ^taient  fort  recherdito  par 
les  pourvqyeuQB  de  harems.  Les  pnn- 
oes  avaient  plus  particuli^rement  le 
privU^  de  ee  commerce ;  ils  cakni- 
hient  Teur  fortune  sur  le  nombre  des 


L'UNIVERS. 


?assales  dont  ils  pou?aient  disposer. 
Les  unes  tolent  oondaites  h  Anapa 
et  h  Poti,  d'oili  on  les  ftisait  passer  h 
Constantinople  ou  en  tmie\  les  au- 
tres  toient  vendues  sur  divers  marches 
de  la  Georgia  et  de  rArmteie,  et  em* 
barqu6es,  assez  commnnteent  sur 
te  merCuplenne  oosur  TAraze,  pour 
^tre  transportdes  dans  la  Perse.  H.  A. 
Jaubert,  qui  voyaseait  en  Arm^ie 
en  f  806,  dit  avoir  renconM  trois 
jfunes  filles  tcfaerkesses,  que  Ton  con- 
duisait  h  un  march^  d'esdaves.  Elles 
etaient  oouvertes  de  haillons  k  peine 
sufllsants  pour  les  garantir  de  rtnd^ 
mence  de  m  salson,  avaient  I'air  souf* 
frant,  et  paraissaientimpatientesd'ar- 
river  k  leur  destination.  Quand  dies 
voulaient  se  reposer  Tune  d'elles  se 
r^ignait,  h  tour  de  rdle,  h  servir  d*o- 
reiuer  h  ses  eompagnes.  Nous  ne  sau- 
rions  trop  rMter ,  d'ailleurs  ce  que 
nous  avons  oit  d^a,  qn'il  seralt  ab- 
surde  de  s'apitover  sur  le  sort  de  ces 
{eunes  filles,  pufaque  le  bonheor  ^tant 
relatif,  le  leur  oonsiste  principalement 
dans  ce  qui  nous  paraft  digne  de  notre 
piti6.  Peu  oonsider6es  dans  leur  pays, 
mal  noorries  et  mal  v^tues,  tout  leur 
espoir  <tait  d*6tre  un  jour  vendues  et 
inarito,  pour  godter  les  ddiees  du 
86rail. 

Gependant ,  11  est  juste  d'ljouter 
que  fes  femmes  tdieriiesses  ne  sont 
point  aussi  jalousement  survdllto  que 
celles  de  la  plupart  des  peuples  cauca- 
siens.  Les  jeunes  gens  aes  deux  sexes 
dansent  et  jouent  ensemble;  les  fem- 
mes marines  re^ivent  mtoe  les  6tran- 
gers.  Mais  fl  est  un  homme,  un  seul 
omme  dont  la  prince  est  pour  une 
Circasdenne  un  objetde  scancule,  c*est 
son  maril 

lIlAaiAGBS.  —  Lorsqu^un  Tcher- 
kesse  a  jet^  les  yeux  sur  unejeune  fille 
pour  en  faire  sa  femme,  il  dierche. 
roccasion  de  lui  d^larer  son  amour, 
et  il  est  rare  qu'il  n'j  parvienne  pas 
en  peu  de  temps ,  attendu  que  les  deux 
sexes,  dnsi  que  nous  ravons  dit, 
ont  la  fadlit6  de  communiquer  entre 
eux.  Les  pr^liminaires  sont  Id  les 
m^mes  ^e  dans  FEurope  dvlliste, 
c'es^^•dire  qiie  si  les  voeux  du  sou- 


pirant  sont  agrM ,  on  lui  rtoood  avec 
modestie  de  s'adr^ser  a  lafamille,  oe 

3ui  ^ivaut,  dans  toutes  les  lau^es 
u  monde,  k  Taveu  positif  d'une  Hd- 
procit6  de  sentiments.  Un  ami  se 
charge  alors  de  porter  la  demande 
aux  parents,  et  quand  ceux-d  oot 
donne  leur  consentement,  les  diefii 
des  deux  families  s'aboudMot  pour 
stipulef  le  montant  de  la  dot.  luiis , 
tandis  que  obex  nous  c'est  la  future 
qui  apporte  un  douaire,  en  Gircassie 
^est  r^poux  qui  est  grev^  de  cettc 
charge.  S'll  amurtient  h  la  premise 
dasse  de  sa  tribu ,  11  ofifire  a  sou 
beau-pte  une  cotte  de  mailles .  ricbe 
present  de  2  ^  3000  piastres;  dans  le 
cas  oontraire,  il  donne  des  obevaux, 
des  esdaves,  des  annes,  des  ^toffes 
OQ  des  troupeaux. 

Une  fois  les  conventions  aoo^tto, 
le  fiitur  ^ux,  ud6  de  ses  amis,  en- 
Idve  sa  flane6e,  autre  o6rtoonietd- 
lement  oppose  jk  nos  id^es,  qu*dle 
semble  en  toe  la  critique.  La  jenne 
fille  est  oonduite  chei  un  voisin ,  ou 
ses  parents,  arm^  de  bAtons,  vien- 
nenc  bientdt  la  r^damer.  Une  seoonde 
troupe,  ^gdement  pourvue  de  bitons, 
fiut  mine  de  vouloir  dtfendre  cette 
pr^deuse  conqu^te ,  et  les  deux  partis 
se  livrent  un  smiubicre  de  combat  qui 
cease  aussitdt  qu'on  voit  parattre  V& 
poux  tenant  sa  fianete  par  la  main. 
Son  pfliii  crie  vietdre,  rautre  pardt 
se  r&igner;  tons  se  rendent  k  la  de- 
meure  du  man ,  et  les  r^ouissances 
commenoent  aussitdt;  mds  ce  peuple 
bizarre ,  mdange  incomprehensible  de 
bonnes  et  de  mauvaises  audita ,  porte 
^  un  td  deitr^  le  scrupme  de  la  chas- 
tet^,  que ,  dnez  bii ,  ce  serait  uoe  bonte 
pour  deux  ^ux  de  se  montrer  en- 
semble en  public.  Cest  le  mari  qui , 
en  chevalier  galant,  abandonne  la 
place,  et  pendant  que  tons  les  convi^s 
se  livrent  aux  plaisirs  de  la  danse  et  a 
ceux  de  la  tabic,  il  se  cache  dans  les 
bois  jusqu'^  la  nuit  dose.  Ses  amis 
viennent  alora  le  diercher  pour  le  con- 
duire  kh  chambre  nuptide.  II  en  sort 
au  point  du  jour,  regagne  sa  retraitr 
et  continue  ce  man^  pendant  deux 
tnois.  Au  bout  de  ce  temps  il  ^vitc 


GIRGASSIE  ET  GlfcORGIE. 


onoore ,  autant  que  possible ,  de  se  ren* 
oontrer  publiquement  avec  sa  femme, 
et  souvent,  plut6t  que  de  se  laisser 
sarprendre  avec  elle ,  il  lui  arriTe  de 
sauter  nar  la  fen^tre.  Loraqu'il  lui 
oaftun  nls ,  il  manifeste  le  moiie  sen- 
timeut  de  honte  et  va  de  nouTeau  se 
cacher  dans  les  bois  :  «  Chague  fois, 
•  dit  M.  Thaitbout  de  Manguy  (^} , 
«  oue  je  demandals  k  mon  Gircassien 
«  acs  nouvellesde  sa  femme  ou  de  ses 
«  enfants,  il  me  r^pondait  d'un  air 
«  oonfus  et  embarrass^. »  Si  Tenfant 
est  du  sexe  €6niinin ,  la  m^  lui  domie 
un  nom  et  se  cbarge  de  son  Education ; 
81  c*e8t  un  gar^n ,  la  nation  Tadopte, 
et  un  voisin  ou  un  parent  vient  le  r^ 
damer.  Cest  VAtalik,  dont  nous 
avoDs  d^ja  parM. 

Rbpas.— Les  Tcherkessesobservent 
ri^oareusemant  Tusage  sineulier  de 
boire  toujours  trois  verres  de  Ta  liqueur 
qoi  leur  est  ofTerte,  et  oela  quelle  que 
soit  la  dimension  du  Tase  et  la  qua- 
lit^  du  liquide. 

Quand  un  stranger  s'assied  h  la  ta- 
ble deFbospitalft^,  sous  la  hutte  d'un 
Tcherkesse,  le  chef  de  la  famille  se 
tient  req^ectueusement  aupr^  de  lui 
et  De  ^iteDd  place  que  quand  il  a  fini. 
Les  ftaimes  mangent  h  part  dans  une 
cbambre  s^par^.  A^rte  le  repas  des 
membres  de  la  famiUe,  les  amis  et 
les  Tassaux  Tiennent  ^  leur  tour  se 
noorrir  des  d^ris  du  festin ,  les  ser- 
▼itears  leur  sucoMent,  et  lorsqu'il 
s'agit  d'un  repas  extraordinaire,  il 
n'est  pas  rare  de  voir  tout  un  yillage 
y  prendre  part. 

Les  plats  sent  servis  h  Tusage  turc 
sur  one  petite  table  ronde :  ils  consis- 
tent en  viandes  rdties  •  en  venaisons , 
en  poissons  sal^ ,  miel,  racines,  fruits 
saovages,  et  suilout  en  gomi,  ou 
millet  bouilli  avec  du  sel ,  qu'ils  ap- 
pellant plus  comrauntoerttjMssto,  mot 
qui  sans  doute  leur  a  €t^  apporu  par 
fes  G6nois.  Les  convives  se  servent 
de  leurs  doigts  en  guise  de  fonrchette , 
mais  Ils  connaissent  I'usage  des  cuil- 
lers  en  bois.  Leur  boisson  habituelle 
est  le  bovza;  c'est  une  eau  dans  la- 
quelle  on  a  fait  fermenter  de  la  fa- 

(•)  Voyage  PI!  CircasMC.  iSi8. 


rine  de  millet,  lis  aiment  le  vin  et 
Teau-de-vie.  Lorsqae  les  convives  d'un 
rang  Bm6  veulent  donner  k  un  des 
assistants  des  preuves  d'attachemenl 
et  de  complaisance,  ils  cholsissent  un 
bon  moroeau  et  le  lui  iettent|  comme 
on  ferait  h  un  cbien ;  il  est  rare  que 
I'homme  ainsi  favoris6  ne  receive  pas 
cette  offrande  avec  antant  a'adr^se 
et  de  recomutoanoe  que  le  fidtte  qua- 
druple. 

lis  aiment  passionntoent  le  tabac« 
qu'ils  fument  dans  des  pipes  de  4  a 
i  pieds  de  longueur. 

MAIiADIBS,  nSDECXHS.  —  La  so- 

bri^t^  est  une  des  vertus  du  Tcher- 
kesse.  Quand  il  va  en  expWtion ,  il 
porteun  petit  sac  pleindefMBstoy  sua- 
pendu  k  m  selle  ae  sa  monture,  et , 
pendant  plusieurs  jours ,  eette  seule 
nourriture  peut  lui  suffire. 

Une  grandelong^vit^  n'est  pas  chose 
rare  dans  les  montagnes  de  la  Circas- 
sie;  peu  de  maladies  y  sont  connues, 
mais  deux  fl^ux  y  exeroent  fr^em- 
ment  d'^uvantables  ravages  :  la 
p^te  et  la  petite  v6role.  Le  premier 
est  la  consequence  des  relations  de  ce 
At  avec  les  Turcs,  et  quoique  ne 

..ageant  ins  les  idte  de  fatalisme 
__  ces  demiers,  les  Tcherkesses  n'op- 
posent  aucun  obstacle  k  I'envahisse- 
ment  de  la  fatale  contagion,  leur  igno- 
rance les  portant  k  juger  inutiles  tour 
tes  precautions  et  tous  rem^des.  Quant 
k  la  petite  v6role ,  lis  ont  commence , 
d<^pui8  quelques  annte ,  Il  prendre  de 
sages  mesures  pcmr  s'en  preserver. 
Lorsque  les  premiers  svmptdmes  de 
cette  maladie  viennent  a  se  manifes- 
ter  chez  un  Tchwkesse,  on  se  hAte 
de  le  transporter  dans  une  diambre 
s^par^,  o(k  ne  sont  admises,  pour  le 
soigner,  que  les  seules  personnes  qui 
d^ja  ont  tU  atteintes  du  mime  mal. 
Les  parents  du  malade  cesseni,  en 
signe  de  deuil,  de  vaquer  k  leurs  tra- 
vaux  habituels;  ils  laissent  crottre 
leurs  ongles ,  ne  changent  plus  de  vl- 
tements  et  ne  font  ancune  ablution. 
Get  6tat  de  privation  dure  autant  que 
le  danger,  mais  quand  il  est  j^ass^,  le 
deuil  se  termine  par  des  rejouissances 
et  un  sacrifice  solennel 


40 


L*UMIVERS. 


Parmi  les  m^dedns ,  queiqiies-uns 
•ont  TUrcs,  les  autres  Gternens  ou 
TdMrkesses;  mais  tous,  indUtiDCte- 
ment,  donnentdaiis  Texevcioe  de  leur 
profession  des  preuves  inoontestables 
d'une  e»M8sive  ignorance  ou  d'une 
impartinente  fouroerie:  les  Tores  font 
usage  prindpalement  d*amulettes  et 
de  prims;  leurs  confreres  emploient 
la  saignfe ,  quelques  simples ,  du  miel , 
de  la  cire  ou  du  beurre.  On  ne  sera 
pas  surpris  d'aiUeurs  d'apnrendre  que 
le  traitement  des  plates  oiez  ce  peu- 
ple  euerrier  se  pratique  avec  suoc^ ; 
id  l^exp^enoe  a  su|^e^  k  la  sdenoe. 
Les  mededns  se  servent  uniquement, 
dans  ces  droonstanoes ,  de  substances 
v^tales;  mais  ils  s'unissent  aux  pa- 
rents et  aux  amis  du  bless^  pour  se 
livrerau  plus  bizarre  cdr6momal.  D*a- 
bord  ils  lont  enlever  soi^eusement 
tootes  les  armes  qui  tapissaient  les 
mors  de  sa  chambre;  puis  ils  d^po- 
sent  au  pied  de  son  lit  un  soc ,  un 
marteau  et  un  bassin  plein  d'eau  avec 
un  oeuf  dedans.  Cbacun  des  visiteurs 
prend  le  marteau  en  entrant  et  frappe 
trois  coups  sur  le  soc  ;  il  trempe  en- 
suite  ses  doigts  dans  Teau ,  et  en  as- 
perse le  patient,  en  priant  Dieu  delui 
rendre  la  sante  :  c^est  encore  ]k  un 
souYenir  bien  caract^ris^  d'une  c^6- 
monie  chr^enne.  Les  assistants  pas- 
sent  la  soir^  h  iouer  de  divers  instru- 
ments et  k  r^p^ter  des  chansons  guer- 
ri^res  composes  en  I'honneur  du  ma- 
lade  ,  afin ,  peut-^tre ,  de  soutenir  son 
courage  et  ae  ranimer  ses  forces.  Les 
jeunes  filles  dansent  des  rondes,  et  les 
▼idllards  r^tent  des  fables  jusqu'au 
moment  oik  le  souper  est  servi.  Apnte 
le  rroas,  les  jeuxoruyants,  les  aan- 
ses  et  les  chansons  reoonmiencent  de 
plus  belle  et  se  prolongent  pendant 
tonte  la  nuit. 

Si  le  Uou^  gu^rit ,  on  offre  un  sa- 
crifice k  Dieu ;  s'il  meurt « les  femmes 
oommenoent  k  pousser  des  oris  aflreux 
qui  attirent  tout  le  yoisinage. 

FuifSRAii«LBS.  —  Le  corp0  du  d^- 
fimt,  lav^  avec  soin,  ras^  et  rev^tu 
d*habitsneu£s9  est  plac6  sur  une  natte. 
Aupr^  de  lui  sont  d^poA^  ses  habits 
les  plus  riches;  ses  armes  ferment 


un  trophte  au  seuil  de  la  porte.  Les 
femmes  ne  cessentde  crier,  tandis  que 
leshommessefra(^Mentsilendeusenient 
la  poitrine.  Le  sacrifice  expiatoire  oom* 
mence,  et ,  sdon  la  qualm  et  les  res- 
sources  de  la  veuve  ou  de  la  mto  du 
d^font,  11  consiste  k  immder  unboeof, 
un  mouton  ou  une  ch^vre;  les  chairs 
de  la  victime  servent  ensuite  au  repas 
des  funtoilles.  Yingt-quatre  heures 
apr^  ledMs,  le  corps  est  tranfflDort^ 
k  sa  demito  demeure.  Les  vieiuards 
marchenten  t^du  cortege,  lesieu- 
nes  gens  portent  la  bi^re  ou  marcneot 
k  ses  cdt6s ,  les  feounes  suivent  et 
font  paraltre  une  grande  douleur,  en 
s'arrachant  les  cheveux  ou  se  d^i* 
rant  les  chairs.  Quand  la  tombe  a 
re(u  son  d^pdt ,  les  parents  y  d^ 
sent  du  oomi  et  du  Soma  :  c'est  un 
repas  ofuert  aux  passants  pour  hono- 
rer  la  m^moire  du  d^funt.  La  c^ 
monie  se  termine  par  un  tir  di  la  dble, 
ets  enfin ,  par  le  r^t  d*un  jpoeme , 
sorte  d'oraison  fun^re  en  rhonseur 
du  mort;  apr^  quoi ,  les  assistants 
se  retirent  en  silence.  Mais,  rano^e 
suivante,  k  pareil  jour,  les  parents  et 
les  amis  de  la  personne  dmd^e  vien- 
nent  c^l^rer  sur  son  tombeau  Tan- 
niversaire  de  ce  triste  6v^ement.  Les 
sacrifices  expiatoires,  les  festins,  les 
courses ,  les  luttes  et  tons  les  jeux 
chevaleresques,  pratique  dans  cette 
ciroonstance,  rappellent  les  mfleun 
de  hi  Grtoe,  et  on  croit,  quand  on 
en  6coute  le  r6dt,  lire  un  passage 
d'Homte  ou  de  Virgile.  Si  la  £iniille 
est  riche,  die  ofi&«  aux  vainqueurs 
des  ^ffes ,  des  armes ,  des  cbmux 
des  esdaves,  et  qadquefds  wim 
une  cotte  de  mailles. 

GOSTUMB     BI     PHTSIOKOIIIS.    —x 

Le  Tcberkesse  ceint  habitueUonentt 

Susieurs  brasses  de  cordes  autour 
) ses  reins,  pour  ^tre  touioors  pret 
k  attacber  les  bestiaux  ou  les  stran- 
gers qui  pourraient  lui  tomber  sous  Ja 
mam.  hes  nobles,  dans leur  costume 
de  guerre,  portent  un  casque  siur- 
montS  d'une  pointe,  une  cotte  de 
maiUes ,  des  ^antdets  et  des  brassaras, 
le  tout  en  acier  poli.  L'arc  et  le  car- 
quois ,  le  fusil  et  les  pistolets ,  le  sa- 


CIRCASSIE  £T  GEORGIE. 


4i 


bre,  le  poi^nard  et  le  pito,  sorte  de 
fouet  termini  par  une  plaque  de  cuir, 
oompUtoitleiiraceoutKineiit,  aor  le- 
quel  ila  jettent  qoel^efoia  iiii  man- 
teau  h  lonffs  poila  (voir  p/.  8,  n*  8). 
Ha  tirent  lecora  oottea  de  maiUes  da 
pays  des  Abases,  ou  de  la  tribu  des 
KoMtchi,  dans  le  Dagbestan.  Lear 
habit  dyfl  oonsiste  en  on  petit  bonnet 
cHiat^  ayant  la  forme  d'une  cooronne 
fenoMfe,  en  on  sartoot  trds-oourt,  sar 
la  poitrine  duquel  11  y  a,  de  chaqae 
cdte ,  une  ran^  de  petites  poches  k 
cartooches,  et  en  boues  rouges  k  ta- 
lon haut.  Les  princes  et  les  Ouzden 
seuis  out  le  privilege  de  combattre  k 
cheral. 

Gbez  cette  nation ,  les  hommes  ont 
Fair  martial  et  fler,  la  taiUe  ^anode 
et  s?dte,  les  dieveux  et  les  yeux  noirs, 
et  le  teint  bran.  On  connatt  la  repu- 
tation de  beauts  des  Circassiennes ; 
die  est  peut-^tre  un  pen  exagdr^e, 
mais  ce  n^estpas  la  fiiuie  de  la  nature, 
qui  leur  a  donn6  des  yeux  lai^es 
et  briilants,  des  traits  gen^ralement 
beaux  et  rt^liers,  et  un  profil  grec, 

Se  couronnent  les  lignes  suaves  d*un 
mt  gradeux:  id  encore,  ce  sont 
les  moeurs  qu'il  &ut  en  accuser.  On 
neut  dire,  en  efifet,  que  les  jeunes 
circassiennes  font  tons  leurs  efforts 
pour  s'enlaidir.  D*abord,  dies  por- 
tent, dte  Tflge  de  la  puberty,  des  ca- 
misoles de  peau  tenement  serr6e8,  que 
leur  respiration  en  est  gto^.  Ce  v£- 
tement  moommode  leurcou?re  la  poi- 
trine et  le  buste  jusqu'aux  hancbes, 
et  il  a  pour  but  d^empflcber  le  d^TC- 
Iqipement  de  la  gorge .  car  il  serait 
bonteux  k  une  jeune  fille  de  ressem- 
bler  k  une  femme  marite.  C'est  k  1*6- 
poux  seul  qu'il  est  rdserv^  d'enlever 
ces  fScbeuses  entraTes  :  arm^  du 
quMHal  (*),  son  premier  soin,  dans 
fa  nuit  des  noces ,  est  de  couper  la 
camisole  de  sa  fiancee,  non  sans  dan- 
ger de  la  blesser. 

Une  taille  mince  et  droite  6tant, 
dans  les  idte  de  ce  peuple,  une  des 
plus  indispensables  conditions  de  la 
beauts,  les  jeunes  filles  mangent  f<Ht 

(*)  Poignard  a  fil  tnmchant. 


peu,  de  crainte  d'engraisser.  Elles  se 
lei^oent  les  ongies  en  rouge ,  et  cher- 
cbent  enfinii  eomcer  leurs  mrmes  sous 
un  amas  de  voiles  et  de  bijoux,  la 
plupart  d'assez  mauvais  goAt  Elles  se 
coiffent  de  ce  ridicule  bonnet,  en 
forme  de  mdon,  dont  se  servent  les 
bommes  dans  le  costume  dvil;  dies 
portent  aussi  des  culottes,  et  font 
usage  de  souliers  mont^  sur  de  peti- 
tes planchettes  carries,  de  bi  bauteur 
d*un  demi-pied. 

Les  Tcherkesses  font  surtout  con- 
sister  leur  luxe  dans  le  nombre  et  la 
propret^  de  leurs  armes.  A  peine  le- 
v^,  lis  les  examinent,  les  nettoient, 
renouvellent  les  amorces  des  armes  a 
feu ,  et  les  suspendent  sy m^triquement 
aux  murs  de  la  pito  principale  de 
l^u*  cabane.  Quant  au  poignard ,  ils  ne 
s'en  dessaisissent  jamais ,  et  mtoe  ils 
s*doi^ent  rarement  de  cbez  eux ,  pour 
une  simple  promenade,  sans  avoir  une 
paire  de  pistolets  k  la  ceinture,  un 
sabre  au  c6t6 ,  et  un  fusil  sur  T^paule. 

Ihdustrib.  —  L'industrie  de  cette 
nation  est  des  plus  limitdes ;  die  pos- 
sklepourtant  de  nombreux  haras  d'une 
tr^-bdle  race  de  chevaux  dont  die 
trouve  un  abondant  ddx>ucb6  sur  le 
march^  de  Tiflis.  On  lvalue  k  20,000  le 
nombre  des  dievaux  circassiens  qui  se 
vendent  annuellement  sur  cette  place. 
La  g^n^ogie  des  meilleures  races  est 
oonnue  dans  toute  la  contr6e ;  die 
influe  singuli^ement  sur  le  nrix  des 
individus.  La  noblesse  d'un  cneval  est 
indiqu^  par  une  marque  particuliere 
jk  sa  race ;  il  porte  sur  une  cuisse  cette 
honorable  cicatrice-  Mais  on  a  constats, 
depuis  qudques  ann^es ,  plus  d*un 
exemple  de  supercberie  k  cet  ^ard ; 
inconvenient  qui  etait  jadis  inconnu , 
car  alors  les  Tcherkesses  y  mettaient 
la  plus  grande  bonne  foi,  et  Pallas 
assure  m^me  ^*une  fraude  de  ce 
genre  etait  punie  de  mort.  lis  ddvent 
encore  des  abeilles ,  des  moutons ,  des 
chdvres,  des  bulBQes  et  des  bceufs. 

Jtuelques  cabanes  en  dales  d'osier, 
uites  d*argile ,  recouvertes  en  paille, 
et  dispos^es  quadrangulairement  avec 
une  cour  commune  dans  le  centre , 
forment  leurs  villages. 


42 


L'UNIVERS. 


Langoe8."-Nous  placerons  lei  une 
observation  qui,  bien  qu'elle  ooncerne 
plus  particulierement  lesTcherkesses^ 
peut  s*appliquer  a  la  |)lupartde8  nations 
caucasiennes.  Leurs  idiomes,  aussi  va- 
ri^  que  leurs  noms,  ont  un  trait  carac- 
t^ristique  oommun,  c*e8t  qu'ils  sont 
plus  difficiles  h  prononoer  qu*aucune 
autre  langue  du  monde  (*).  lis  offrent 
a  la  fois  des  syllabes  fortes  et  guttura- 
les,  desdiphtnonguesmodifito  a  Tin- 
fini ,  des  ciaquements  et  un  gazoniUe- 
ment  que  I'^iture  ne  saurait  traduire 
et  que  la  pens^  ne  peut  comparer  k 
rien.  Et  ce{|endant  Tart  de  la  mdlodie 
n'y  est  pas  inoonnu.  Les  Tcherkesses 
ont  notamment  plusieurs  airs  natio- 
naux  qui  portent  Tenipreinte  de  leur 
caractere  oelliqueux.  II  en  est  un 
quMls  affectionnent  surtout  et  dont 
lis  entonnent  le  refrain,  Orirachay 
dans  toutes  les  ciroonstances  un  pen 
importantes. 

Priv^s  des  moindres  notions  de 
r^riture,  ils  conservent  leurs  tra- 
ditions historiques  dans  des  chansons 
que  le  temps  a  tellementd^atur^es, 
qu'on  ne  saurait  plus  y  reconnaltre  les 
v^ritables  traditions  'auxquelles  elles 
doivent  leur  origine. 

Les  tribus  tcherkesses  sont  tr^- 
nombreuses.  La  plus  importante  est 
celle  des  Abazeks,  chez  laqudle  on 
trouve  quelques  esdares  etoeserteurs 
russes.  Ind^pendamment  de  leurs  pro- 

Sres  sujets ,  les  princes  de  la  Kaoar* 
ah  tiennent  sous  leur  domination 
plusieurs  peuplades  d*origine  tatare, 
mais  dont  la  race  s'est  embellie  par 
le  m^ange  avec  le  sang  gdorgien  et 
tcherkesse.  Ces  tribus  sont  stabiles  k 
la  source  du  Kouban  et  des  rividres  les 
plus  voisines  de  ce  fleuve;  ce  sont  les 
Bassians  et  les  Karaich<a  j  ou  Tcher- 
kesses noirs.  Gette  demiere  nation  a 
des  moeurs  infiniment  plus  douoes  que 
celles  des  peuplades  voisines;  elle  pro> 
fesse  rislamisme ,  se  livre  h  Tagricul* 
ture  et  5  T^ucation  des  chevaux; 
die  cultive  le  tabac ,  Torge  et  le  bl^ , 
fait  de  rexcellentebiere,  et  commerce 

{•)  Voy.  Pallas ,  OnldeiKtacdt ,  Rt*iiiPfg«, 
Potnolii,  Haliii,  T.  Kla|»i*ot)i.  rir. 


avantageusement  avec  les  Nogaia,  1<« 
Souanes  et  les  Abases. 

Les  autres  peuples  montacnards  doot 
il  nous  reste  k  parler  sont  les  Lughi, 
les  Ossite*  et  les  Tchetchetues ;  vm 
se  divisent  en  une  infinite  de  tribus 
qai,  pour  la  plupart,  prennentleor 
nom  oe  la  montagne  ou  de  la  rivi^ 
la  plus  Toisine. 

Lbbghi.  —  Le  pays  comfHris  entre 
le  KoT-sou ,  r AJazan  et  la  mer  Gas- 
pienne ,  ordinairement  appd^,  sur  nos 
cartes,  Daghestan  septentrional,  est 
oonnu  6«Jement  des  Tatares  sous  le 
nom  de  Lesghistan.  Strabon  et  Plu- 
tarque  ont  parl6  des  Lughiy  qu'ils 
appellent  L^hes.  On  aurait  tort  de 
Toir  une  senle  nation  sous  cette 
dtoomination,  qui  n*estque  le  mot 
g^nMque  par  lequel  on  d^igne  di- 
Terses  peupladts,  voisines  Tune  de 
I'autre,  gut  se  ressemblent  par  des 
mcenrs  roroces  «t  des  habitudes  de 
tnigandage,  mais  qui  d'aiUeursne  par- 
lent  pas  la  mtoe  langue  et  ne  formeat 
nuUement  un  corps  nomogene. 

Ces  peuples  paraissent  etre  un  ro^ 
lange  de  diverses  nations  europ^eoaes 
et  asiatiques ;  ils  sontcruels,  pillards 
et  audacieux.  On  les  Toit  quelquefois 
se  basarderjusqu'aux  environs  de  Ti- 
flis  pour  y  enlever  les  bestiaux  et  les 
paysans :  ils  descendent  de  leurs  moo- 
tagnes  ordinairement  vers  le  pnn- 
temps,  et  se  r^pandent  dans  les  cam- 
pagnes ,  oi^  leur  prince  est  un  fl^au 
)lus  danffereux  que  les  ravages  des 
oups  et  aes  ti^pres.  Embusques  dans 
es  mines  des  vieilles  chapelles,ou  der- 
riere  dVpais  taillis ,  ils  attendent  leur 

Eroie  avec  une  pm^vtonce  que  la 
lira,  la  soif,  ni  rinterop6rie  de  lair 
ne  sauraient  dompter .  Quand  ils  ontfait 
un  priaonnier,  lis  le  garrottent  avec 
les  cordes  qui  leur  servent  de  cem* 
ture,  le  tratnent  pr^cipitamment  a  leur 
suite ,  trayersent  les  locality  les  plus 
dpres,  les  buissons  ^ineux,  les  n- 
vii^reseties  pr^pices,  jusqu'^  oequ  Us 
raient  mis  en  sOret^.  Ld,  ib  font 
pr^venir  sa  famille  et  lui  demaodent 
une  ranoon  souvent  exorbitante :  a  de* 
faut  de  paiement ,  le  malheurcux  pn- 
sonnier  est  soumis,  pendant  du  an- 


CIRGASSIE  ET  Gl^ORGIE. 


43 


nte ,  a  toutes  les  peines  du  plus  dur 
esdavage.  Cest  ainsi  que,  depuis  plu- 
sieurs  mdea ,  oes  brigands  se  Jouent 
de  la  Tie  et  de  la  libera  des  hommes. 
Les  Rosses  ont  Mt  contre  eux  quel- 
ques  expMitioiis  heureuses;  mais  con- 
traries par  la  nature  du  pays,  oD  leurs 
ennemis  trouvent  des  retraites  inac- 
oessibles ,  ils  ont  dd  capituler  avec  eux, 
et  accorder  des  subsides  annuels  a  leurs 
princes.  Le  khan  des  Avars  y  la  plus 
odliqueuse  des  tribus  lesghines ,  revolt 
un  traitement  de  40,0(M)  francs.  Ge 
prince  reside  d  Khoim-DzeM;  il  pent 
armer  de  8  li  10,000  hommes.  Les 
Ktui-koumouks  n'en  peuvent  mettre 
sar  pied  que  6000  environ ,  mais  ce 
sent  les  ennemis  les  plus  adiam^  des 
Russes.  Les  Lesghi  du  bourg  de  Kau- 
bUcki  sont  renomm^  pour  la  fabrica- 
tion des  cottes  de  roailles  en  acier  :  on 
les  connaft  dans  tout  le  Caucase  sous 
le  nom  persan  de  dbereb-kerdn  ( fa- 
bricants  de  cuirasses).  A  BarcMu^x^" 
side  un  khan  qui  prend  le  titre  d  oug- 
mei :  sa  tribu  esf  celle  des  KaUaM; 
elle  anne  de  7  &  8000  hommes.  A 
j4kxmchaj  les  habitants  sont  plus  in- 
dustrieux  et  moins  fi^roces  que  leurs 
▼oisins;  ils  sont  pasteurs,  et  fabri- 

2uent  un  drap  assez  estfm^  dans  le 
laucase. 

OssBTES.  —  L'an  633  ayant  J.-C, 
lesScythestraverserentleCaucase  sous 
les  ordres  de  Mady^;  ilsconduisirent, 
ainsi  que  nous  Tapprend  Diodore  de 
Sidle,  une  colonic  ae  M^es  en  Sarma- 
tie.  Gstte  colonic,  stabile  dans  la  par- 
tie  centrale  du  Caucase,  au  nord  de 
la  Gtorgie,  a  donn^  naissance  aux 
peuples  appel^s  Alaln$  et  Azes  dans  le 
moyen  dge;  aujourd'hui,  c*est  la  na- 
tion qui  prend  elle-mdme  le  nom  dV- 
roUy  que  les  Gtorgiens  connaissent 
sous  ceiui  d^Ossi,  et  nous  sous  celui 
d*  Ostites.  Leurs  mceurs  se  rappro- 
chent  trop  de  celles  des  montagnards 
lesghi  pour  que  nous  puissions  nous 
^tendre  davantage  h  leur  sujet.  Nous 
ajouterons  tout^ois  quMls  sont  d'une 
taille  ^ev6e,  qu'ils  ont  Fair  martial 
et  imposant,  et  que  leur  costume, 
d^eag^  du  pesant  accoutrement  des 
Tcnerkesscs ,  est  cciui  qui  convient  le 


(dus  a  un  peuple  montagnard  :  de 
grands  bas  oe  cuir  h  jarretidres ,  un 
surtout  court  et  d^age,  un  bonnet  a 
bourrelet ,  une  ceinture  garnie  de  pis- 
tolets  et  de  poignards,  un  fusil  en 
bandoulidre ,  et  un  bAton  fourchu  pour 
poser  le  fusil  et  tirer  plus  juste ,  en 
sont  les  principales  panics. 

TcHBTCHBifSES.  —  Lcstribus  appe- 
Ito  MUzefjeghi  par  les  Gaucasiens ,  et 
TchetchenseswiT  les  Russes ,  sont  ^ta- 
blies  dans  le  (jaucase  depuis  une  anti- 
quite  fort  recul^.  Parmi  elles ,  la  na- 
tion des  Inffouches  se  fait  remarquer 
par  quelques  coutumes  bizarres ,  celle , 
par  exemple,  de  marier  les  morts ,  as- 
sociant  ainsi  les  jeunes  gens  des  deux 
sexes  quMls  supposent  devoir  se  conve- 
nir  dans  le  ciei.  lis  stipulent  une  dot, 
que  paie,  en  cette  curconstance ,  le 
p^  du  fianc^;  car  c^est  un  usage 
g^n^ral  dans  ces  oont^^s  que  le  mari 
apporte  une  dot  h  son  beau-pere. 

Les  In^onches  sont  paiens  et  fort 
superstitieux ;  ils  attriouent  a  leurs 
actions  la  plus  grande  influence  sur 
la  destine  des  morts  de  leur  famille. 
Lorsqu^un  creancier  veut  ^tre  pay^  de 
son  ddi)iteur,  il  le  menace  d'aller  tuer 
un  chien  sur  le  tombeau  de  ses  morts, 
ce  qui  r^duirait  ceux-ci  h  un  affreux 
d^sespoir.  Voleurs  comme  tons  leurs 
voisins,  ils  portent  h  un  plus  haut 
degr^  que  ceux-ci  Tavidit^  et  la  sc^l^- 
ratesse.  On  en  a  vu  s'^fforcer  de  plaire 
a  de  jeunes  filles,  les  s^duire  et  les 
enlever  ensuite  pour  les  vendre  h  des 
strangers ;  des  fds  d^natur^  ont  porte 

J)lus  a*une  fois  une  main  sacrilege  sur 
curs  vieux  peres,  et,  entratnant  de 
vive  force  oes  vieillards  d^rm^,  ils 
les  ont  vendus  pour  quelques  mesures 
de  sel  ou  quelques  aunes  de  drap. 

Ce  peuple  se  distingue  encore  ae  ses 
voisins  par  Temploi  du  bouclier. 

Les  Tchetchenses  ont  ^t^  tour  a 
tour  Chretiens  et  musulmans.  Aujour- 
d'hui, leur  religion  paratt  n'^tre  plus 
qu'un  th^isme  entremSle  d'abus  gros- 
siers  et  de  superstition.  Ce  sont  des 
brigands  plus  Jraroces  et  plus  d^termi- 
n^  encore  que  les  Lesghi  eux  m^mes. 
Quand  lis  ne  peuvent  gardcr  un  pri- 
sonnier,  ils  nc  le  renvoient  pas  sans> 


44 


L'UNIVERS. 


lui  avoir  coup6  le  nez  ou  les  oreittes. 
II  y  a  peu  d^annte  qu'ils  entevaieiit 
fir^quemment  des  smets  ruases ;  maia 
oea  aocidenta  aont  devenoa  beauooup 
plua  iar€8  depuis  que  le  gouTemement 
a  oern^  lea  retraites  de  oea  d6termin^ 
voleura  par  dea  poetea  de  Gosaquea. 

E^GION  DES  8TBPPB8. 

Les  TurctmoMj  lea  NogtOSy  lea 
Kmanauks  et  lea  Kalmauks  d<mt  il 
va  £tre  id  question  n'habitent  pas  ex* 
cluaivement  les  steppea  de  la  r^on 
caucasienne ;  et  oependant  noua  ayona 
eu  des  motifs  suffisants  pour  les  com- 
prendre  dans  cette  catdgorie,  puisque 
ces  nations  ^talent  toutes ,  dans  Tori- 
gine ,  nomades  et  habitantes  dea  plai- 
nes,  qu*elles  le  sont  encore  pour  la 
plupart ,  et  que  les  autres  v  aont  dia- 
a^mindes  en  partie,  de  aorte  ou'il  ae- 
rait  impossiUe  de  les  rattadber  aux 
groupes  des  peuples  monta^rda. 

Les  Turcomans  sont  d'ongine  tur- 
que  (*) ;  leur  langue  a  mdme  oonsenr^ 
une  puret§  remarquable.  Ua  descen- 
dent  de  ces  Turcomans  qui.  soumia 
jadis  aux  Kalmouka  sur  les  bords  du 
Jaik ,  refus^nt  d'en  suivreles  hordes. 
Devenus  sujets  de  la  Russia ,  ilsfurent 
transportds  dans  la  steppe  du  Kislar. 
lis  errent  avec  leurs  troupeaux  dana 
cette  immense  plaine  sablonneuse  qui 
s'^tend  depuis  le  T^rek  et  la  Kouroa 
jusqu^a  la  mer  Caspienne.  A  Tiraitation 
dea  anciens  Scathes  Hamaxobiens, 
lis  portent  leurs  tentes  sur  des  cha- 
riots, et  se  font  suivre  par  leurs 
grands  troupeaux  de  cheyaux,  de  cha- 
meaux  et  de  bestiaux  de  toute  espto. 
Leur  nourriture  consiste  en  ^lande 
de  monton,  en  lait  aigri,  et  en  une 
petite  quantity  de  farine  de  gruau  ou'ils 
ach^tentdes  Russes.  Le  manque  d*eau 
potable  est  un  fl6au  dont  lis  ^prou- 
vent  souvent  toute  la  rigueur.  A  cela 
pr^,  leur  sort  est  assez  heureux;  ila 
ne  paient  aucune  imposition  et  ne  sont 
tenus  qu'au  aervice  militaire  et  k  une 

(*)  Ne  confondez  pat,  ainii  oa'on  le  hit 
habitiieneiiieiit,  les  Tores  a^ec  let  Tatares 
dont  Torigine  est  mongole. 


contribution  de  chevaux  de  cbatse. 

Les  Turcomans  aont  bien  fiits,  vifs, 
brayea,  courageux,  maia  paresseuii 
comme  toua  lea  peuplea  nomades.  H  y 
a  dans  leur  manim  de  se  y^tir  un 
luxe  qui  ne  manque  paa  d^^oner  les 
voyageurs  qui  descendant  des  monta- 
gnes  du  Caucase.  Us  portent  des  sur- 
touts  en  ^tofifes  cramoisies  ou  diver- 
sement  bariolto,  et  galonnds  d'or, 
nou^  autour  des  reins  par  une  ricfae 
oeinture,  des  bonnets  ronds  gamis 
de  peaux  d'agneaux  noirs .  et  des  hot- 
tines  jaunes  a*une  forme  ASfantt.  Les 
caiquoia  et  les  area  dont  us  se  ser- 
yent  sont  particuli^rement  om&  (voy. 
pi.  8,  n""  5)C*).  Enfin,  ila  montent 
de  beaux  dieyaux  qu*ils  manient  ayee 
une  sraoe  remarquable.  Le  costume 
dea  femmes  est  aussi  riche,  nudsil  est 
moinspittoresque;  un  bonnetsemblable 
i^celui  dea  Tcherkeaaes,  unechaussure 
exhauss^  sur  deux  plandiettes,  et, 
le  plus  souyent,  un  anneau  plao6  dans 
les  narines,  aont  des  omements  qui 
nous  senddent  de  mauyaia  aodt. 

Kislar f  viUe  de  neuf  mule  ames » 
aur  la  riye  gauche  du  T6rek ,  est  la  re- 
sidence de  plusieurs  riches  n^godants 
arm^iens  qui  y  ootfedt  bAtir  demi^ 
rement  une  assez  bdle  ^ise. 

(**)  Nous  avons  rinni  dans  les  troit  phn- 
ches  numiros  8 ,  9  et  xa ,  les  cosUupes  lei 
plus  remmrquables  de  la  region  cancasienDe; 
en  Toid  Texplication  : 

Planche  S.  — N^  x.  Gircassienne  de  condi- 
tion noble ,  coifTi^e  dn  bonnet  k  oootodiw  , 
et  mont^  sur  une  diaussiire  qd  tient  le 
milieu  entre  le  sooqne  et  rfebMse.  N<»  «• 
Noble  drcassien,  en  habit  dyil;  hom^ 
ouati  ea  forme  de  mdon,  justaucorps  de 
drap,  portant  des  podies  k  cartooches  sur 
U  poitrine.  N*  3.  Noble  drcassien  en  babit 
de  guerre.  N"  4«  Circassien  k  dieral,  oou- 
vert  du  hourka.  Son  fusil  est  envdoppe 
d'une  foumire.  N*^  5.  Turcoman. 

Planche  9.  —  N*  1.  Jeune  fiUe  ciitsj- 
sienne.  N«  a.  Abase.  N»  3.  Jeune  Mingre- 
Uenne.   No  4.  Prince  im^rediien.  N*  5. 


gioraen. 
chariot  d'osier. 

Plameke  la.  — N«  i.  DM»e  g«»^J- 
N*  a.  Bayadere  tatare  du  Chirvan.  N»  3. 
Lesgbi  en  habit  de  guerre.  N«  4.  Ingousdw. 
N«  5.  Princesse  nungrelienne. 


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CIRGASSIE  ET  GEORGIE. 


45 


GioraiewMk  sur  le  Podkoumok  est 
le  ohef-iieu  de  la  proTinoe  du  Caucase ; 
(fesi  une  petite  Tille  fortifi^ ,  rtoi- 
H^  et  agreable.  Constantino^^sk  et 
Stawropol  offrent  peu  d'lDt^rdt. 

Le  Bech'Taw,  ou  les  Onq  numta- 
gne$f  donne  son  Dom  k  la  partie  la 

iilufl  septentrionale  da  Caucase  dans 
e  bassin  de  la  Kouma.  Le  Metchoukaj 
qui  fiiit  partie  des  montagnes  adjacen- 
tes ,  a  auelque  ofl^brit^  par  le  voisi- 
oage  d  une  source  d'eau  thermale. 
Cest  aux  environs  du  Bech-Taw 
qu'on  ^l^e  les  meilleurs  chevaux 
tdierkesses  et  abases. 

A  soixante  werstes  au  nord  de  G^r- 
dewsk,  on  voit,  sur  les  bords  de  la 
Kouma ,  les  mines  de  Madjari.  Gette 
viUe,  d'origine  tatare,  paralt  avoir 
eu  de  rimportance  au  &IV*  si^e, 
sous  les  pnnces  de  la  horde  dorie; 
elle  servit  long-temps  de  lieu  de  pas- 
sage et  d*entrep6t  aux  marchanoises 
que,  de  la  mer  Caspienne,  on  trans- 

Sortait  h  celle  d'Azow.  Sa  destruction 
ate  du  XV*  siMe.  Au  temps  oi!k 
Gmdin ,  Guldenstaedt  et  Pallas  visitd- 
rent  oes  ruines  •  elles  offiraient  encore 
an  grand  intmt;  mais  les  Tatares  et 
les  rfogais,  qui  demeurent  aux  envi- 
rons, y  sont  venus  depuis  cfaercber 
les  mmriaux  ntossaires  \  la  con- 
struction de  leurs  villages.  Au  mo- 
ment ojli  nous  toivons ,  elles  ont  sans 
doute  entidrensent  disparu  (voir  le 
fond  de  la  pL  6 ). 

Les  l^€as  habitent  dans  la  steppe 
aux  environs  de  Stawropol,  mais  on 
les  retrouve  dans  le  Dagnestan,  dans 
la  steppe  du  Volga ,  dans  la  Tauride 
et  en  Orim^. 
Le  nom  de  ce  peuple  est  cdui  de  son 

Jiremief  chef.  Peu  d'ann6es  aprte  la 
ondation  de  I'einpire  du  Kaptcfaak , 
les  lieutenants  de  Tchinghis-khan ,  n'6- 
tant  plus  contenus  par  la  prince  de 
ce  grand  homme,  pensdrent  que  le 
moment  ^it  venu  de  seoouer  la  do- 
minaUon  de  son  successeur,  et  ils 
commMmc^rent,  en  cons^ence,  cette 
(Euvre  impolitigue  de  d^membrement 
qui  flnit  par  Iivrer  I'empire  entier  k 
fa  merci  oe  ses  ennemts.  Un  de  ces 
lieuteiuaits,  nomm6  Nogta,  avait  re^u 


Tordre  de  soumettre  h  la  domination 
tatare  les  peuples  qui  habitaient  au 
nord-est  de  la  mer  Caspienne  entre 
le  Jaik  et  le  Tobol ;  mais,  ayant  ac- 
compli heurensement  cette  mission .  11 
devint  ambitieux.  et  cr^  un  ^tat  m- 
d^pendant  dont  il  se  oonstitua  le  chef 
(1259-1371  de  J.-C).  La  politique  de 
Tempereur  Michel  PaI6ologue  seconda 

Suissamment  cette  dtfection ;  ce  prince 
onna  m^me  une  de  ses  filles  a  No- 
r".  Les  Tatares  qui  avaient  suivi 
fortune  de  ce  rebdle  ^pous^ent 
des  fenunes  de  race  turmie  et  furent 
la  soucbe  du  peuple  dont  il  est  ici  ques- 
tion. Les  iMogais  passant  en  Eu- 
rope au  commencement  du  XVIir 
siecle. 

Le  teint  basan^,  les  yeux  brid^  et 
le  nez  ^pat6  des  NogtOs  attestent  en- 
core la  part  qu'ils  ont  h  r^clamer  de  la 
soudie  monsole,  bien  qu'on  s*aooorde 
assez  g6n6ralement  k  les  dasser  parmi 
les  peuples  turcs. 

C^est  une  nation  essentieUement  no- 
made,  voyageant,  h  la  mani^  des 
Scythes-Hamaxobiens ,  sur  des  cha- 
riots converts  de  tentes  en  feutre  et 
tratn^  par  des  boeufs.  Cest  une  veri- 
table hutte  portative  que  les  Russes 
appellent  KwUka,  les  Tatares  Karat- 
cnouj  et  les  Kalmouks  Gkbr.  Lorsque 
la  caravane  se  met  en  mardie,  les 
hommes  se  tiennent  k  cheval  auprte 
des  chariots ;  ils  poussent  devant  eux 
de  grands  troupeaux  de  chevaux  et 
de  boeufs,  se  servant,  pour  ramener 
les  individus  ^chapp^ ,  d'une  sorte  de 
lance  fort  longue,  termin^e  par  un 
noeud  coolant  quMls  jettent  adroite- 
ment  autour  du  oou  ae  Tanimal.  Les 
femmes  et  les  enfants  vivent  sur  les 
chariots  et  en  descendent  rarement. 

Ind^pendamment  du  MbUka,  les 
Nogais  ont  de  grandes  huttes ,  ^gale- 
ment  en  treillis  et  recouvertes  en  feu- 
tre, qu*ils  ploient  et  chargentsur  des 
chameaux  ou  des  boeufe.  Arrive  au 
lieu  d^ign^  pour  le  campement, 
quelques  heures  leur  sufBsent  pour 
G^ployer  tout  ce  bagage  et  former  un 
oMf  mot  que  Ton  pourrait  traduire 
par  village  provisoire.  La  calotte  du 
mbUka  s*ouvre  h  volenti  pour  don* 


40 


L'UiNlVERS. 


ner  du  jour  et  de  Fair  h  rint^rieur. 
Ces  iioinades  sc  servcnt  encore,  pour 
le  transport  des  marchandises,  de 
grands  cnariots  a  quatre  roues,  tir^ 
par  des  boeufe,  et  connus  sous  le 
noni  d'arba  ou  de  maggiari(  Toy. 
la  pi,  5  ). 

On  assure  qu'on  trouve  chez  les  TSo- 
ga'is  cette  infirmity  qu*H6rodote  dit 
avoir  pbserv6e  parmi  les  Scythes  :  les 
^nareens  ou  ejf Amines  sont  des  hom- 
ines que  rdge  et  les  fatigues  de  la  vie 
nomade  seniblent  pr6cipiter  dans  la 
classc  des  individus  de  Tautrd  sexe. 
lis  en  prennent  alors  les  liabits  et  les 
occupations,  et  ressemblent  en  tout 
^  de  vieilles  femmes  iiuberbes  et  trem- 
blotantes.  Les  Nogais  leur  donnent  le 
nom  de  Kos, 

L'habillement  de  ces  Tatares  res- 
semble  h  cdui  des  Turcomans,  mais 
il  est  moins  ricbe.  Les  hommes  se 
rasent  la  tite ,  et  les  femmes  mar- 
chent  sur  deux  planchettes  adapt^es  ^ 
ieurs  souliers ,  en  guise  d'dchasses. 

Les  Tatares-Koumouhs  habitent  au- 
del^  du  T^rek ,  entrc  les  rivieres  Aksai 
et  Koi-sou;  its  se  iivrent  avec  succ^ 
aux  arts  de  Tagriculture ,  et  vivent  en 
paix  avec  les  Russes.  Leurs  princes, 
ou  khans,  r^ident  a  Endin,  ville  de 
10,000  araes,  k  KosUahy  Aksaiy  Bra- 
goun,  etc.  Le  chamkal,  le  plus  puis- 
sant d^entre  eux,  vit  k  Tarkou,  sur 
les  bords  de  la  mer  Caspienne,  village  k 
peupr^  aussi  considerable  {\\\'Ena€ri, 

Les  cdr^monies  fund[)res  usit^  cliez 
oe  peuple  m^ritent  une  mention  parti- 
culiere.  Toutes  les  femmes  de  la  fa- 
mille  du  d^fimt  s'assemblent  pendant 
plusieurs  jours ,  se  d^couvrent  la  poi- 
trine  et  se  d6chirentia  chair  avec  leurs 
ongles.  Autrefois ,  quand  il  mourait 
un  prince  de  cette  nation ,  son  pr^p- 
teur  se  coupait  la  moitie  des  oreilles , 
et  sa  nourrice  s^enterrait  ?i  vante ;  mais, 
dansce  dernier  cas,  onlui  iaissaitordi- 
nairement  la  tite  hors  de  terre  et  re- 
couverte  d'un  pot  cass^ ,  'par  I'ouver- 
ture  duquel  on  lui  donnait  k  manger. 
Si  elle  existait  encore  apr^  un  noimire 
de  jours  determine ,  on  mettait  fin  a 
son  supplice  en  la  retirant  de  son 
tombeau. 


Les  KtUmouhi  d^origiae  mongole 
sont  diss^min^  sur  touie  la  surface  de 
la  steppe ,  depuis  le  Kouban  jusqu^au 
Volga.  Le  nom  qu'ils  se  donnent  k  eux- 
m^mes  est  celui  d^Eleuths,  ou  OleUy 
tandis  que  la  denomination  de  Kai- 
mouks  n*est  qu*un  terme  injurieux  que 
leur  idoliitrie  leur  a  fait  appliquer  par 
les  Tatares  mahom^tans  d'abord ,  par 
les  Russes  ensuite,  et,  enfin,  par 
FEurope  entiere.  La  Tatarie  indepen- 
dante  etant  la  region  propre  aux  kal- 
mouks ,  leur  histoire  ne  serait  pas  ici 
k  sa  place,  et  nous  ne  pouvons  don- 
ner  sur  les  hordes  qui  passent  dans 
les  steppes  de  la  Russie  ^e  quelques 
considerations  caractdristiques. 

Les  honunes  de  cette  nation  ont  la 
taille  moyenne ,  bien  prise  et  robuste. 
lis  ont  la  t^te  grosse  et  large,  le  vi- 
sage plat ,  le  temt  oliv&tre ,  les  yeux 
bien  fendus,  mais  peu  ouverts  et  fort 
6cartes  Tun  de  I'autre ,  le  nez  plat,  la 
bouche  petite  et  la  barbe  rare.  Pour 
costume  ,  ils  portent  des  hauts-de- 
chausses  d'une  largeur  extraordinaire, 
une  veste  en  peau  de  mouton  sans 
manche  et,  par  dessus,  une  espece 
de  surtout  diont  les  manches,  d  une 
excessive  longueur,  peuvent  se  re- 
trousser  sur  Tepaule,  afin  de  laisser 
les  bras  nus  et  Imres  d'agir.  De  gran- 
des  bottes  fort  inoommodes,  une 
ceinture  de  cuir  et  un  petit  bonnet 
rond  completent  leur  toilette,  ou  la 
couleur  rouge  domine  habituellement. 
Les  traits  et  le  costume  des  femmes 
sont  k  peu  pr^s  les  m^mes. 

Les  fcalmouks  possddent  des  trou- 
peaux  de  chevaux ,  de  bceufs ,  de  mou- 
tons  et  de  chameaux  qui  fomoent  toute 
leur  richesse.  lis  en  tirent  k  la  fois  la 
subsistance,  les  vStements  et  les  ar- 
ticles d'ediange.  La  chair  de  cbeval  est 
la  nourriture  qu*ils  pr^f^rent ;  le  kott- 
miss  •  ou  lait  de  jument  aigri,  fcmne 
leur  boisson  favorite.  Ils  sont  aussi 
braves  et  moins  pillards  que  les  Ta- 
tares mahometans,  et,  oonune  eux, 
ils  sont  polygames. 

Ge  peuple  superstitieux  a  un  grand 
respect  pour  les  diiens,  qu'il  nour- 
rit  souvent  avec  des  cadavres  ho- 
mains.  Quant  k  lui ,  le  lait  aigri  forme 


»    _  • 


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y 


CIRCASSIE  ET  G^ORGIE. 


47 


la  base  de  scs  rcpas.  Quelques-unes 
de  leiirs  hordes  ont  embrass6  le  chris- 
tiaiiisme;  elles  ont  des  pr^tres,  dent 
la  principale  occopation  est  de  leur 
apprendre  a  lire  et  d  6crire.  Les  aii- 
tres  sont  encore  plongto  dans  les  t^- 
n^res  de  ridolAoie. 

La  fatigante  monotonie  des  steppes 
parcourues  par  ces  di  verses  nations  est 
interrompue,  sur  leborddes  rivieres, 
par  une  multitude  de  tumukts  ou  ^16- 
vations  tombales ,  surmont^  par  des 
statues  d'une  pierre  grisdtre ,  grossie- 
rement  travail!^.  Ces  figures,  assises 
pour  la  i^u|)art,  et  tenant  ddns  leurs 
mains  un  objet  gu'on  pourrait  prendre 
pour  une  ta^ ,  appartiennent  6videm- 
ment  k  une  nation  mongole.  La  face 
plate  et  large,  les  cheveux  divis^  en 
trois  tresses,  les  colliers  de  coraux 
pour  les  femmes  et  les  petits  bonnets 
roods  sont  des  indices  que  Ton  ne 
saurait  m6connattre.  Ces  antiquit^s 
sont  communes  prte  du  Kouma,  du 
Kouban  et  du  Volga  (  voir  la  p/.  i , 
n»  4.) 

On  voit  sur  les  bords  du  Je- 
toka ,  aox  environs  de  Gtorgiewsk , 
une  statue  6galement  int^ressante ,  et 
cependant  non  moins  grossi^rement 
travail!^.  Elle  repr^sente  un  homme 
habiil^  et  arm6  h  la  tcherkesse,  les 
jftmbes  embott^es  dans  une  gatne  h  la 
mani^  des  anciens  Hermtt.  Ge  pi^- 
destal  auadrangulaire  offre  sur  la  pre- 
roite  nee  une  inscription  en  carac- 
t^res  grecs  et  ^davons  m^l6s.  Au 
bas,  atnsi  que  sur  les  autres  faces ,  on 
voHfdiverses  figures  d'honmies  et  d*a- 
nimaux  sculpt^  sans  art. 


On  a  pu  remarquer  que  nous  nous 
sommes  attach^,  dans  cette  notice, 
aux  ^Doques  de  rbistoire  ancienne  et 
aux  fraditions  locales  plutdt  qu'aux 
^v^nements  de  l*histoire  modeme.  La 
raison  en  est  simple :  Tancienne  p^- 
riode  rentrait  essentiellement  dans 
notre  domaine,  la  nouvelle  appartient 
aux  annales  de  la  Russie  d*une  part  et 
a  cdies  du  royaume  de  Perse  de  Fau- 
tre. 

L*isthme   caucasien  6tait ,  depuis 


long-temps,  un  objet  de  cx)nvoitise 
pour  les  czars ,  non-seulement  parcc 
qu'il  sert  de  fronti^re  h  leurs  posses- 
sions du  cdt6  de  I'Asie  m^ridionale, 
mais  encore  paroe  qu'il  ofire  en  lui- 
m^me  une  importance  que  de  bonnes 
institutions  pourraient  accrottre  ra- 

{Hdement.  Entrain^  tour  h  tour  par 
es  missionnaires  du  Christ  et  ceux 
de  Mahomet,  places  entre  deux  enne- 
mis  acham^s,  les  peuples  du  Caucase 
ont  6t6  long-temps  foul^^  aux  pieds 
des  combatants;  enfin ,  ils  sont  ecbus 
en  partage  au  plus  vaste  empire  du 
monde.Par  ie  traits  de  TourmafUchai 
(10  [f(6vrier  1828),  les  Persans  ont 
cMi  k  leurs  rivaux  les  provinces  d'tr 
rivan  et  de  Nakhitchevan ,  et  par  celui 
d'Andrinople  ( 14  septembre  1839)  la 
Porte  a  a^nitivement  abandonn^  h 
la  m^me  puissance  Anapa  y  PoH^ 
Akhaltzik^  Atzhaur  et  AhalkalalU. 
La  population  actuelle  de  la  region 
caucasienne  est  d'environ  2,400,000 
ames;  elle  serait  susceptible  d'un  |)ro- 
digieux  accroissement ,  mais,  ainsi 
qu'on  devait  s'y  attendre,  elle  a  ^prou- 
v^,  depuis  quelques  ann^es,  une  di- 
minution sensible  par  suite  des  moyens 
violents  que  la  Russie  a  dd  employer 
pour  s'mblir  avec  stoirite  dans  une 
oontr6e  o^  des  nations  entidres  ne 
sont  compost  que  de  brieands.  Pour 
compenser  cette  perte,  les  Russes 
cherchent  k  coloniser  leur  nouvelle 
possession.  Ils  y  appellent  des  cultiva- 
teurs  allemands,  race  laborieuse,  pa- 
tiente  et  sobre.  Ses  ^missairea  se  H- 
pandent  aussi  dans  les  campagnes  des 
provinces  m6ridionales  pour  embau- 
cher  les  populations  chr^tiennes  de 
TArm^nie.  La  religion,  en  ceci ,  vient 
au  secours  de  la  politique:  et  c'est 
surtout  aux  pWStres  que  s  adressent 
les  agents  russes  ,<  car  I'exp^rienoe  a 
fait  voir  que  ceux-d ,  en  Emigrant , 
sont  suivis  ordinairement  par  plusieurs 
families  chr^tiennes  et  souvent  par 
toute  la  population  d'un  village.  Ar- 
rive sur  le  sol  russe ,  le  colon  reQoit 
Tassignation  d'une  pito  de  terre, 
quelquefois  m^me  celle  d'une  petite 
habitation.  Avec  du  travail  et  de  la 
perseverance,  son  sort  pourrait  ^re 


48 


L'UNIVERS. 


«  nii'Xdr* 


assez  beureux ,  sans  le  voisinage  des 
forbans  indompt^s  aui  infestent  le 
Caucase.  Lea  tchetcnenaes  sont,  de 
oe  odt^ ,  lea  ennemia  lea  plus  redou- 
tabieadea  oolona  arm^iens.  Si  la  haine 
hdr6ditaire  de  cea  hardis  moatagnarda 
ae  porte ,  en  principe ,  sur  la  nation 
moaoovite,  elle  embraase,  dana  aes 
r^ultats,  lea  strangers  qui  vivent 
soua  sa  protection. 

On  a  vu ,  par  ce  qui  precede ,  qu 
la  Ruasie ,  en  cherohant  h  augment 
la  population  de  son  vaste  territoi* 
aux  oepens  de  aes  alli^,  prend  quelqu 
foia  des  moyens  peu  compatibles^ay 
les  proo6d^  de  bon  voisinage.  La  PeitiK 
en  a  fait  le  sujet  de  plus  d'une  plainte«    ^ 
si  la  guerre  ^atait  de  nouveau  ent 
ces  deux  puissances ,  rembauchagec 
Arm^niena  en  serait  le  motif  ou  U 
au  moina  le  pr^texte.  Le  prince  ro\ 
Abbas -M3arza,  aujourd'nui  d6c» 
ecrivait  au  moia  de  juiUet  1828  aul      I  f 
lonel  Lazarefif,  commandant  milit  ^  %^^ 
de  Tauria.  lors  de  Toocupation  d*..^^^ 
province  d'Azerdeidscban  par  le  «^*  iK  "^^ 
n^ral  Pask^witscb : «  Nous  n'ignor  IB[  | 
«  pas  que  vous  avez  rautorisatioid| 
«  votre  gouvemement  pour  favop' 
«  la  transmigration  des  Arm^ie 

mais  quana  nous  remarquons  q 

dana  tous  les  lieux  oii  vos  sok 

se  sont  arr^tds,  la  population 

m^nienne  a  ^mi^,  voumtairef^ 

ditea-vous,  la  raison  et  laconsciiM 
«  nous  dictent  de  vous  demandei 
«  est  possible  queplusieurs  millici 
«  families  aient  pu  abandonner  s| 
n  tandment  une  patrie  de  mille  at 
"  laisaerla  leura  propri^tds,  leurs 
«  dins,  leurs  maiaons,  pour  se  tr? 

k  votre  suite,  sans  savoir  oh 


des  passqports  aux  Armdniens  qui 
ont  quitti  Tauria ,  et  ie  sais  qae 
leur  emigration  eat  causee  par  celle 
de  leura  pr^trea ;  or ,  ai  toui  les 
ecd^iastiques  de  ce  paya  viennent 
de  Tabandonner,  nul  doute  que  la 
faute  en  est  au   primat  d*'^'   ^- 


II 


(I 


« 


«i 


«  pourraient  se  reposer. 
« J*ai  d^livr6,  de  mea  pi 


propresnr 


FIN. 


i 


L'UNIVERS 


on 


HISTOIRE  ET  DESCRIPTION 

DE  TOUS  LES  PEUPLES, 

DE  LEUBS  REUGIONS,  MOEURS,  COUTUMES,  nc. 


ARMENIE, 

PAR   M.   EUGENE  BORE, 

DK  l'aGADBMIB  ARKBirxmVS  Dl  aAIHT-LAZAIll  DB  TBlTrSB  BT  O0  OOimiL 
DS  LA  SOGirrd  ASIATXQUB  DE  PABIS. 


INTRODUCTION 


JbiRTBB  FEuphrate  et  Ja  mer  Cas- 
pienne  se  trouve  un  pays  k  peu  pr^ 
anssi  ^tendu  que  le  royaume  actum  de 
France,  lorsqu*on  fixe  ses  limites  sep- 
tentrionales  a  la  Gtergie  et  au  mont 
Caucase ,  et  que  Pon  descend  au  midi 
jusqu'au  Diarbekre.  Ge  pays  est  I'Ar- 
m^ie,  dont  le  nom  nous  est  connu 
par  nos  premieres  lectures  des  livres 
saints ,  et  par  les  souvenirs  qui  nous 
restent  de  quelques  auteurs  dassiques 
de  coU^e.  En  effet,  on  se  souvient 
qu'il  est  dit,  dans  la  Gen^,  que  les 

Kandes  eaui  du  deluge  s'^nt  retirto, 
Tdaerqoosa  surlesmoniaanescrj4' 
raraf;  et,  d*un  autre  cdt6,  les  noms 
de  Tigrane  et  de  Mithridate  (*) ,  le  r6- 

(*)  Mithridate  le  Grand  ilait  roi  de  Pont 
et  noD  pas  d'Ann^nie ;  mais  comme  oes 
daux  rats  se  touchaient ,  et  qu'il  cherdia 
a  k  COOT  de  Tirana  oo  asila!,  son  nom  se 
titniTe  m^l^  aux  evenements  du  peuple  que 
nous  vottlons  faire  connaitre.  De  plus,  quel- 
ques  icrivains  latins  lui  ont  donn^  le  titre 
oe  roi  des  Armeniens,  sans  doute  paroe 
que  les  limitesde la  premiere  Arm^e  n'etant 

I'*  JAvra4son.  (Abhbntk. 


dt  de  leurs  guerres  et  de  leur  lutte 
oontre  la  puissance  romaine  ^  demeu- 
rent  grav^  dans  notre  m^moire.  A  la 
y^rite ,  pour  plusieurs  personnes ,  la 
oonnaissance  de  ce  qui  conoeme  I'Ar- 
m^ie  ne  s'^tend  pas  aude^  de  oes 
premiss  notions ;  et  Ton  ignore  que , 
dans  cette  partie  de  i'Asie ,  subsisw  un 
peuple  formant,  plus  de  quinze  slides 
avant  notre  dre ,  une  des  monaidiies 
les  plus  puissantes  de  TOrient,  ayant 
ses  iois  et  sa  constitution  propre,  ses 
moeurs ,  ses  dynasties  de  rois ,  son  Ian- 
gage  ,  sa  littarature,  et  sa  liturgie  ec- 
cl&iastigue,  iorsqu'il  entre  dans  la 
famille  aes  peuples  Chretiens.  On  ^tu- 
die  dans  tons  ses  details  Thistoire  des 
empires  primitifs  de  I'Assyrie  et  de  la 
Perse,  et  Ton  ne  daigne  pas  arr^ter 
ses  regards  sur  ce  royaume  adjacent, 
moins  vaste ,  moins  peupl^ ,  et  qui 
trouva  n^anmoins,  dans  Fene^ie  et  la 
fiert^  natives  de  ses  habitants ,  assei 

pas  neCtement  tracees ,  il  pouvait  dominer 
effectivement  sur  des  populations  de  race 
annenienne. 


L*UIIIV£RS. 


de  ressouroes  poiur  lulter  oonire  ses 
foisins,  et  reoooqa^rir  Piiid^pen- 
danoe  qu*il  pouvait  perdre  momenta- 
nteent. 

Cette  sorte  d'oobli  ou  de  ddaisse- 
ment  dd  la  natloa  armtoieaiM,  q^'on 
pourrait  aa  premier  abord  i^prouyer 
comme  injune,  tient  k  deux  causes 

SrindpaleB.  La  premi^  se  troupe 
ans  a  nature  mime  de  notre  esprit , 
Gontraint  de  se  bomer  dans  I'immense 
besoin  de  s^yoir  qui  ie  tourmente ,  et 
ne  pouvant  donner  plaee  en  lui  qu'aux 
oonnaissanoes  les  plus  saillantel,  en 
sorte  qu*ll  plane  toujours  sur  les  hau- 
teurs des  g6n^ralit&  ou  des  princi- 
Sauz  fiuts  •  h  moins  qu*il  ne  s'abalsse 
ans  les  rqp'ons  seoondaires  de  This- 
toire ,  soit  pour  en  mieux  saisir  Ten- 
semble,  ou  seulement  pour  satisfiiire 
sa  propore  curiosity.  La  seoonde  cause 
est  le  manque  de  moyens  ou  de  docu- 
ments sumsants  pour  arriver  k  Tintel- 
ligenoe  de  Tbistoure  et  de  la  vie  de  ce 
peuple  i  s^par6  de  nous  plus  encore  par 
sa  langue  que  par  les  mers  et  par  ies 
montagnes.  La  langue  est  ce  qui  nous 
r^vtte  les  penste,  les  habitudes,  en 
un  mot,  Texistenee  nidividuelle  d'une 
nation ,  comme  la  jparole  est  ie  moyen 
gte^rai  qui  nous  rait  entrer  en  com- 
munioation  aveo  les  autres  hommes. 
Cest  ce  qui  fait  que  les  andens  nous 
ont  donne  fort  peu  de  rensevipcments 
sur  r^tat  dn  peuple  armenien.  Les 
Grecs ,  les  Penes  et  les  Romains ,  qui 
suooessifementdomintevntrArmtoie, 
ont  toujoors  dMaign^  d'apprendre  la 
langue  de  ce  pays,  et  it  peine  reoon- 
nalKon  les  T^ntables  noms  des  rois, 
des  tillee  on  des  fleuyes  dtes  par  leurs 
historiens.  A  la  tM(4,  on  nomme 
qudques  andens  auteors  cbald6ens  ou 
syriaques ,  et  mime  grecs ,  qui  auraient 

ims  soin  andennement  de  consigner 
es  faits  de  leur  histoire  nationale ,  at- 
tendu  que  Tiynoranee  Itait  trop  grande 
dans  la  nation  pour  qu'dle  pdt  elle- 
mlme  s'aoquitter  de  cette  tfldie.  Mais, 
eomme  tous  ees  premiers  monuments 
historiques  ont  piri ,  les  Armlniens 
durent  refaire  ce  travail,  lorsque  le 
cbristianisme  les  eut  civilisis ;  ce  fu- 
rent  eux  qui  purent  se  faire  oonnattre 


k  nous,  et  leun  premiers  historient 
ont  travailll  sous  Pinmiration  de  cette 
id^  commune.  Gependant  ils  sont  res- 
tls  dans  Toubli  pendant  des  siMes, 
jusqu'ii  ce  que  quelques  misrionnaires 
00  savants  europlens,  initio  k  tear 
langue,  nous  aient  transmis  le  rliol- 
tat  de  leurs  dloouvertes. 

Gelui  qui ,  le  premier,  nous  fit  soup- 
^nner  tout  ce  que  l*Armlnie  renfer- 
mait  de  richesses  littlraires  et  histo- 
riques, fnt  un  missionnaire  de  la 
Propagande ,  Galanus ,  homme  de  zMe 
et  de  savoir,  mais  thdologien  aoerfoe. 
Intolerant,  et  souvent  fautif  dans  les 
juf  ements  qu*il  porte  sur  plusienra 

EMnts  de  la  sdence  ecd^iasbque.  Ga- 
nus  vivait  au  dix-septitee  sidcle;  il 
avait  €i6  trouver  les  Armlniens ;  el  le 
dipdt  de  oonnaissanoes  qu'll  avait  rap- 
porti  de  ce  voyage ,  se  serait  probable- 
ment  fiort  peu  aocru ,  si  les  Armlniens 
n*ltaientvenus  aussi  nous  trouver,  lors 
de  la  fondation  du  dUtore  couvent  des 
MIchitaristes  de  Yenise,  dont  nous 
nous  proposons  de  norler  assez  lon- 

fuement  dans  la  suhe  de  oet  foit. 
'^tablissement  de  ces  religieux ,  dont 
les  presses ,  si  remarquables  par  le  luxe 
et  la  correction  typographiquea,  onl 
rendu  aussi  oommuns,  dans  le  com- 
meroede  la  librairie,  les  aneiens  ma- 
nuscrits  de  leurs  Icrivains ,  que  le  aont 
actudlementt  cfaei  nous,  les  cfaeft- 
d'oeuvre  de  la  littlrature  allemande  on 
italienne ,  a  done  spldalement  oontri- 
bul  k  oropager  I'ltode  de  la  langue  et 
de  la  litteniture  armlnienne.  Sons  oe 
rapport ,  la  France  m^rite  les  jmne- 
miers  honneurs:  c'est  elle,  en  enet, 
qui  nous  a  donni  les  savants  Villolte« 
veysi^,  plus  eonnu  sous  le  nom  de 
Lacroze,  ie  docte  abbi  Yillefroi.  Mais 
tous  les  travaux  de  ces  hommes  ont 
It^  surpasses  par  rillustre  Saint-Martin, 
dont  les  orientalistes  ont  k  diplorer  la 
perte  rioente.  Nous  croyons  devoir 
pr^venir  nos  lecteurs  que  nous  avoas 
eu  souvent  occasion  de  profiter  de  ses 
recherdies .  en  ce  qui  tient  sartout  k 
la  partie  geographique  de  oe  travail. 

Etymolooib  dv  hot  AnviRni.  — 
Un  fait  assez  singulier,  c'est  que  le  nom 
^Armenie^  usite  ginlralemeot  par 


arm£nie. 


tolls  tes  taHraiM  aneiiniit  ou  modemes 
de  rOficnt  etik  I'Ooddeiit,  poor  d^ 
sign^  le  |»ays  qae  fioas  nous  propo- 
fldnt  de  deerire ,  n*est  point  ceiui  qae 
les  Arm^nJeDS  donnent  h  lear  patrie. 
lis  fappellent  HaXasdany  on  pays  des 
HdiMhs,  da  nom  d'un  oertam  Haig, 
lear  pranier  roi ,  qui  vtnt  de  Baby- 
lone  9'^hlir  en  Arm^nie ,  avee  touts 
sa  famine,  environ  vingt-deux  siftcies 
avant  notre  ire.  Its  ont  encore  phi- 
sieurs  autarss  noms  tir^s  de  quelqnes 
anciens  patriarches  mentiomies  aans 
la  Bible,  et  qui ,  par  cons^^ent,  ne 
doiTent  pas  dtre  ant^ricars  a  I'^tablis- 
sement  ao  cbristiantsine  en  Arm^nie. 
Tel  est  le  nom  fAsk'hanaz^an^  d^- 
riv6  de  celai  dn  patriarcbe  Askenez , 
filsatn^deGomer,  flis  de  Japhet.  On 
trou?e  aussi  fr^quemment,  dans  les  aa- 
teors,  le  royaume  d'Arm^ie  d^lgn^ 
sous  Is  nom  de  Maison  de  Tkorgomj 
dont  ils  ont  form^  Tautre  nom  g^n6- 
rique  de  ThorhomatHf  dans  lequef 
cmains  orientalistes  ont  h  tort  vooltt 
retrouver  le  mot  Turcoman.  lis  pr6- 
tendent  qae  le  patriarehe  Thorgom 
etait ,  comme  Askenez ,  fills  de  Thiras , 
fils  de  Gomer ,  oaoiqae  ntcritore  nous 
dise  qu'il  ^tait  oirectemefrt  Ms  de  Go- 
mer. selon  ces  histof  ions ,  ee  Tborgom 
aurait  6t6  le  p^  de  Haig ,  premier 
chef  de  leur  nation.  Les  traditions 
fftorgiennes  sont  patfritement  con- 
formes  a  cette  opinion :  les  Arm^niens , 
les  G^rgiens ,  et  tons  les  peuples  da 
Gaacase ,  sont  d^slgn^  par  la  oenomf- 
nation  g^rale  de  TMrqamofianif 
OQ  descendants  dn  patriarcbe  Tharga- 
mos.  dont  le  fils  atn^,  appel^  ffaos, 
est  evidemment  le  mime  que  Halg. 

Uorigine  praise  du  nom  d'Arm^* 
iiie  est  euTelopp^  d'obscurit^s.  Les 
historiens  nationaux  le  bai  d6river 
d^Aram ,  un  de  leurs  plus  aneiens  rois , 
qui  se  rendit  fi^  e^lebre  par  ses 
grandes  conqo^tes.  «  On  raoonto  d'A** 
ram,  dit  Molse  de  Kbetenf  Fhisto* 
ricn  le  phis  e^libre  de  la  nation ,  beau- 
coup  de  traits  de  courage  et  de  belfes 
actknis  CRiT  ^tefkHreift  dans  tous  les 
sens  les  limltes  de  FArm^ie.  Cest  de 
son  nom  que  tous  les  peoples  tirenf 
celui  de  notre  pays.  Les  Grecs  le  nom- 


ment  Armen;  les  Syriens  et  les  Per- 
sans  le  nomment  Arm^nig  »  Plusieurs 
autres  6crivains  soutiennent  la  m^me 
opinion.  Quo!  qu*il  en  soit  de  rorigpe 
de  ce  nom ,  ii  est  certain  qu'il  est  fort 
anclen. 

On  pourrait  peut-ltre  le  rapporter 
^  celui  d'Aram,  donn^  dans  la  Bible  a 
la  Syrie  et  It  la  M^potamie.  H  ^tait 
connu  des  Grecs  dti  le  cioouiime 
si^e  avant  liotre  ^,  et  ils  rappli- 
qaaient  au  pays  que  nous  appelons  Ar- 
m^nie ,  et  meme  qudquefois  h  la  j^ar- 
tie  oTientale  de  la  Cappadoce.  La  Bible 
mentionne  trois  fois  le  pays  d* Ararat, 
sans  le  designer  sous  le  nom  d'Arm^ 
nie  (*).  Les  udorsiens  n*appellent  leurs 
Yoisins ,  les  Armeniens ,  que  Somekhi, 
a  cause  de  la  province  de  Somkhe^ , 
situ^  pres  de  leurs  firontiires. 

HVAtUBfi  DU  PAYS.  — TXHPBBATUBB 

Dt  CLtif  AT.  —  Les  anciens  pla^ient 
commun6ment  le  paradis  terrestre  vers 
les  sources  de  rEuphrate,  dans  les 
piaines  de  FArm^ie;  et  rimmortel 
Milton  s*est  conform^,  dans  son  poeme^ 
^  cette  tradition^  Si  la  nature  du  sol 
n*avait  en  quelque  sorte  iustifi^  cetto 
opinlod,  il  est  vraisemblable  qu'elle 
n  etit  jamais  eu  cours ,  mtoe  parmi  les 
poetes.  L'aspect  du  pays  est  extr^nie- 
ment  t ari^ :  coup^  par  de  Iiautes  et 


(*)  Le  psiaage  dc  iMamt,  dwjf.  5i ,  r. 
99,  o^  il  eM  dit :  A/m^ncez  muer^w  d^Ai^ 
rat,  dt  Henni  o»  Mini  ei  JtAtketWL,  eie,n 
a  beauooup  embairaM^  les  eomneiAateiift. 
Le  mot  Mefuii  place  prii  de  deu  amie* 
aui  eonTiennent  au  pan  de  VAnnenie,  a 
iaiC  croire  quil  designait  I'Annenie  mime; 
aiusc  U  irersioo  des  Sepfante  et  les  textes 
aitD^nien  et  syriaque  (raduisent  ce  mot 
par  celui  &  Armenia.  NeanmoiAS,  ji  flpoque 
de  Jerknie,  ce  nom  fv'etait  point  encore 
usiti.  Le  savant  Saiut-Martiu  a  cru  recoit* 
mtftre  daaa  ce  nom ,  cehri  de  Maoiataz,  fils 
da  Krilf ,  ^t  fbt  le  pSre  d^uiie  post^if  eifoito' 
breuM ,  efablSe  dans  la  provinee  de  Rark'h, 
0&  la  vflle  de  Manaiiperd  ftit  ftmdie.  Csite 
partie  de  binatumetaitdSrisateaons  lenotti 
Meeial  itManataptlans.  II  paiail  aun  que 
IxMi  appelait  Minjras  on«  certaiae  contreS 
de  rAimenie  oeutrale,  j^icolas  de  Dimas, 
hiitorien  conteroporain  d^Augnste ,  en  bit 
roeotlon. 

I. 


UUI^IVERS. 


loDgues  diatnes  de  montaisnes  qui  cou- 
rent  et  se  croisent  dans  toutes  les  di- 
rections, il  offire  les  sites  les  plus  di- 
vers. Tel  cdt<^  d*une  monta{;ne  est  nu , 
d^cham^  et  st^ile ,  tandis  que ,  sur 
rautreversant ,  s*ouvrent  de  profondes 
et  rarissantes  vaiite ,  oik  la  f6condit6 
du  sol  ne  le  c^e  point  a  la  beauts  du 
paysage.  Si  la  culture  avait  atteint, 
dans  ces  lieux ,  le  degr^  de  perfection 
oJk  certains  peuples  de  FEurope  Font 
port^  J  et  si ,  d*un  autre  cdt^ ,  Tadmi- 
nisteation  capricieuse  et  exigeante  des 
Turcs,  ou  les  incursions  des  Kurdes  qui 
infestent  toute  la  partie  m^ridionale,  ne 
d^urageaient  les  agriculteurs,  nul 
doute  que  ce  pays  ne  devtnt  une  mine 
in^puisable  de  toutes  les  productions 
agricoles. 

La  triste  situation  politique  dans 
laqudie  lan^it  oe  malheureux  nays 
depois  des  si^es,  a  chang6  et  d^te- 
rior6  la  surfece  du  sol.  Les  anciens 
nous  parlent  de  fordts  et  de  lieux  plan- 
ts d*arbres,  dont  on  ne  trouve  plus  au- 
cun  vestige.  La  culture  et  Tart  n'ont 
point  i^r^  les  perp^tuelles  devasta- 
tions des  guerres  et  des  incendies.  Les 
agriculteurs  manquaient  pour  replan- 
ter  ce  que  la  hache  ou  le  feu  avait 
d^truit;  et  les  flancs  des  montagnes, 
en  se  d^uillant  de  leurs  bois ,  n*ont 

gtts  retenu  dans  leurs  ravins  les  eaux 
indues  des  neiges  qui  y  entretenaient 
unesalutaire  frudieur  pendant  les  ar- 
deurs  de  VM ,  de  sorte  au^un  solell 
d^orant  caJcine,  durant  filusieurs 
mois  9  le  oKSme  sol  oue  les  frimas  re- 
eouvrent  le  reste  de  rann^e.  Plusieurs 
vaU6es  sont  devenues  totalement  inf^ 
condes,et  de  longs  plateaux,  d€nu6a 
de  toute  verdure  et  ae  toute  vegeta- 
tion ,  rappdlent  h  Toeil  attriste  qui  les 
onbrasse les  steppes  d^solds  de  la  Tar- 
taric. 

«  Lesjpins ,  disait  Tournefort ,  lors- 
mi*il  visnait  ces  contr^es ,  commeuoent 
a  devenir  fort  dair-semes;  et  Ton  en 
deoouvre  peu  qui  Invent  de  graine.  Je 
ne  sais  comment  ils  feront  quand  on 
aura  coop6  tous  les  grands  arores,  car 
ils  ne  sauraient  bAtir  sans  ce  secours ; 
je  ne  dis  pas  les  malsons  oi^  Ton  n*em- 
ploie  les  poutres  que  pour  soutenir  les 


converts ;  je  parle  des  chaumi^ies  qni 
sont  les  maisons  les  plus  oommuoes , 
dont  les  quatre  murailles  soot  ftbri- 

fi^es  avecdes  pins  ranges  par  la  poinle, 
angles  droits ,  les  uns  sur  les  aatres 
ju8qu*au  convert,  et  arr^tes  dans  let 
coins  avec  des  chevilles  de  bois. »  Les 
Armeniens,  an  Ueu  d*user  d'one  sage 
prevision  et  de  menager  pour  leurs  diSh 
cendants  des  bois  de  construction ,  cot 
abattu  sans  planter;  aussi  sont-ils  re- 
duitsactuellement  k  habiter  de  simples 
huttes  d'argile,  qui ,  disseminees  dans 
ces  immenses  plaines,  se  oonfondent 
de  loin,  pour  Tccil,  avec  les  herbes 
jaunies  que  le  soleil  dessdche  et  briUe 
pendant  les  ardeurs  de  rete. 

La  viene  y  vient  h  merveille ;  et  la 
qualite  diBS  vins  serait  superieure  avec 
un  autre  mode  de  preparation.  Les  Ar- 
meniens ,  en  se  fondant  sur  la  tradition 
biblique,  qui  donne  le  mont  Ararat 
comme  le  ueu  oi^  8*arreta  Tarcbe,  ure- 
tendent  que  Noe  s*etabiit  d'abora  en 
ces  lieux ,  et  que  la  vilie  de  Nakbdja- 
van,  qui  signine  Ueu  de  la  premiere 
descerUe,  conflrme  oe  fait  [lar  Tanden- 
nete  de  son  nom  (*),  Ils  ajoutent  que 
e'est  dans  le  mdme  endroit  que  le  pa- 
triarche  planta  la  vigne.  Aussi  men- 
tra-t-on  a  Cbardin,  h  une  lieue  d*£ri- 
van ,  un  petit  dos  que  Ton  assure  ilre 

(*)  Plusieon  aatret  nomt  de  lieu  fbit  an- 
tiques  lembleiit  perpetuer  le  Boavenir  tni- 
ditionnel  de  r^tabliffeoient  primitif  de  U 
fomille  Muiree  du  deluge.  Ainii  Toa  fut  dcri- 
▼er  le  nom  de  b  petite  proWnoe  d'Arhmiode, 
sttuee  k  I'orient  da  moot  Anuvt ,  de  troie 
mots  signifiant  at^ris  Jupied  de  No€,  ptrce 
que  Noe  m  lertit  airete  dans  ee  canton  en 
soitant  de  Tarche.  La  ville  de  Marant  sitiiee 
dans  I'Aderbaidjan,  vers  le  lac  d*Ounniah, 
tirerait  son  nom  des  mots  mair  ant,  c'ett- 
i-dire, /s  iM^  ef/ i(i «  paroe  que  Noeouan^ 
la  prkendue  femme  de  Noe ,  anrait  ete  cn- 
teR^e  dans  oet  endroit.  L*ori^ne  de  ees 
noms  est  anterieue  an  christianisma,  puit- 
qn'ib  sont  dies  par  Ptoiemee  et  lliistoriett 
Josephe ,  et  le  seal  moycn  d*expliqner  oelte 
coincidence  asses  remnqoable,  c'est  de  les 
attribuer  aux  Juifii  tenus  antcriaureBMnt 
en  Annenie ,  et  qui  avaient  etabli  leurs  od> 
lodes  sur  les  bords  de  VAitue ,  dans  les 
environs  de  cette  proTincc 


ARM£NIE. 


edui  de  Noe.  Ge  fait  serait  attests  par 
le  nom  d^Agorhiy  qae  porte  oette  pe- 
tite bourgade,  et  qui  viendrait  des 
deux  mots  org  ouriy  signifiant  UplarUa 
lavigne. 

On  cnltiTe  avec  suoods  le  froment, 
Forge,  I'avoine,  le  seigle,  et  tous  les 
autres  grains.  Colunieile,  Pline,  et 
Diodore  de  Sicile,  ont  parl^  de  I'excel- 
lence  et  de  Tabondance  des  firuits  de 
TArm^nie,  qu*on  transportait  h  Baby- 
lone  par  la  voie  du  Tigre.  Ces  fruits, 
^alement  renoram^  aiijourd'bui , 
tout  Folive,  i'orange,  Je  citron,  la 
p^cbe,  Tabricot,  le  brugnon,  la  m()re, 
la  prune,  la  poire,  la  pomme,  la  noix, 
la  figue ,  et  les  melons.  Le  miel  que 
Ton  tire  des  montagnes  est  plein  de 
saveur;  et  la  cire  est  une  des  princi- 

Siles  ressources  pour  le  commerce, 
n  Fexporte  en  Russle  et  h  Ck)nstan- 
tinople,  ainsi  que  le  chanvre  et  le  co- 
lon. La  soiey  aoonde,  mais  on  ne  salt 
pas  la  filer,  ni  en  tisser  des  dtoffes. 

Les  montagnes  du  nord  rec^lent 
d'abondantes  mines  d'argent  et  de  cui- 
▼re exploits  dte  une  haute  antiquity; 
et  Ton  trouve  aussi  de  Taimant ,  du 
salp^tre,  du  soufre  et  du  bitume. 

La  rbubarbe  le  cddepeu  en  quality  k 
celle  de  Tlnde,  et  il  est  a  croire  qued'ha- 
biles  botanistes  feraient  oertamement 
de  nombreuses  d^uvertes  dans  ce 
pays.  Pline  cite  le  kuer^  tant  estim^  des 
Remains,  et  que  I'on  tirait  de  la  M6dit 
et  de  I'Arm^nie.  II  serait  aussi  assez 
important  de  constater  ce  que  le  m^me 
naturaliste  appelle  ctdamarUide,  plante 
dont  la  vertu  serait  telle,  que  les  lions 
les  plus  sauvages  perdraient,  en  la 
mangeant,  leur  f<^cit6.  II  rappelle  le 
nourrisson  de  PJrmSrUe  etdela  Cap- 
padoce.  On  vantebeaucoup  la  r^isse, 
ghfCffrrhiza,  des  bords  de  TAraxe; 
elie  atteint  une  grosseur  prodigieuse, 
et  elle  surpasse  celle  d*Espagne,  d*Al- 
lemagne  et  de  Russie,  au  rapport  de 
plusieurs  voyageurs. 

La  flore  d*Arm^nie,  explore  h  la 
hUte,  et  seulement  dans  quelques  par- 
ties ,  par  Toumefort ,  est  fort  riche. 
On  y  remarque  une  tres-belle  espeoe 
de  pavot  appel^  apkUnij  et  dont  on 
mange  en  assaisonnement  les  t^tes  en- 


core vertes ;  la  mortn^^  plus  grosse  que 
le  pouce,  longue  d'un  pied,  partag^e 
en  grosses  fibres  brunes,  geroees,  pen 
cheyeiues,  et  avant  le  parfiimducb^yre- 
feuille;  la  cachrysorientaUs  auxfeuil- 
les  aromatiques,  mais  Acres  et  am^res; 
la  biMne  crientaley  PiiSphaSy  que  les 
botanistes  appellent  la  plus  belle  plante 
d'Orient;  Taconit  tuenlofup;  la  cassida 
aux  feuilles  d^coupto  comme  la  ger- 
mandrde;  le  lepwum  k  feuilles  de 
cresson  fris^;  le  carduus  oriefUaHs, 
dont  les  fleurs  n*ont  point  d'odeur 
sensible,  mais  dont  les  feuilles  sont 
tr^-amdres;  le  cusctde,  qui  abonde 
sur  le  coursdeTAraxe;  lepofygorUdeSy 
arbuste  de  trois  i^quatre  pieds  de  long, 
dont  les  fleurs  rappellent  par  leur  odeur 
celles  du  tilleul ;  le  lychms  et  le  geum  ; 
enfin ,  la  campanula  et  Idi/eruia  orien- 
taHs. 

La  temperature  de  T Arm^nie  est  va- 
riable comme  dans  les  pays  de  mon- 
tagnes, et  le  dimat  du  nord  est  tr^- 
rude;tandis  que,  dans  les  provinces 
du  sud ,  on  eprouve  les  fortes  chaleurs 
de  la  Syrie.  Anciennement,  les  rois 
d*Ann6nie  avaient  leurs  habitations 
d'hiver  dans  les  plaines  m^ridionales ; 
et  pour  se  pnfeserver  des  ardeurs  de 
Nte,  ils  remontaient  au  nord,  ou  se 
trouvaient  leurs  paiais  de  plaisance. 
«  L'air  est  bon ,  dit  Chardin ,  mais  fort 
froid;  il  neige  encore  au  mois  d'avril, 
ce  qui  oblige  les  paysans  k  enterrer 
leurs  vignes,  qu'ils  ne  ddoouvrent  qu'au 
printemps.  » 

M.  Am6d^  Jaubert,  dans  sa  Rela- 
tion du  voyage  int^ressant  qu'il  fit  en 
Arm^nie  et  en  Perse  Tan  1806 ,  et  qui 
nous  a  fourni  plusieurs  renseignements 
pr^cteux ,  remarque  que  le  climat  d'Er- 
zeroum  est  extranement  rigoureux. 
On  a  vu  tomber  de  la  ndge  dans  cette 
ville  le  27  juin ;  et  dans  tout  le  nord, 
elle  ne  quitte  la  terre  que  du  10  an  15 
avril.  Quelquefois  I'hiver  y  commence 
au  mois  d'aodt. 

En  1808,  lorsque  le  g^n^raF  msse 
Godowitch  feisait  le  blocus  d'l^rivan , 
ayant  €U  repouss^  avec  perte,  il  se 
retira  k  Tiflis.  Mais  comme  il  fut  sur- 
pris  dans  cett^  retraite  par  Thiver,  il 
perdit  la  moiti^  de  son  arm^. 


L'UIKIVERS. 


Toutefois « on  doit  dire  que  le  cUroat 
eo  %6a€nl  est  sain.  La  constitution 
robuste  et  Fair  de  santt^  oommuns  au 
peuple,  en  sont  une  preuve  visible. 
L*air  est  vif  et  diastique,  ^tant  renou- 
▼eL6  oontinuellement  par  les  vents  qui 
descendent  des  montagnes. 

MoNTASRBS. -^  Le  nord  de  TAr- 
mtoie  est  ferme  par  une  barriere  d^ 
hautes  montagnes  qui  la  Apparent  de 
la  Georgie,  et  s'l^tcodent  par  le  pays 
des  Lazes jusqu'i  la  mer  Noire  (*).  lies 
Turcs  leur  donnent  le  nom  d'Eikezi ;  le« 
Arm^niensles  apptllentilf^/Ainou/^ii4^ 
hrewesy  probablement  a  cause  des  nua^ 
ges  et  des  brouillards  qui  enveloppent 
presque  perp^tuellement  leurs  ames. 
La  chatne  qui  court  vers  le  sud-est  a 
re^u  Le  nom  de  Bin-ffueul,  qui  veut 
dire  en  turc  les  miUe  lacs,  sans  doute  a 
causedes  innombrablestorrentsetrivid- 
ressans  oesse  aliments  par  les  neigeset 
les  glaciers,  et  oui  forment  de  vastes 
reservoirs  d'oti  s  ^appent  les  fleuves 
dont  nous  parierons.  Les  Anndniens 
n'ont  point  de  nom  gdn^rique  pour 
d^igner  ces  montagnes ,  qu'ils  appel- 
kntvaguement  Afon^  des  Chaldeens; 
tandis  qu'ils  nomment  montagnes  de 
Carin  eelles  qui  vont  d*£rzeroum  k 
fr^bizonde.  Strabon,  Pline  ^  Pto- 
lemhb  connaissaient  cette  chatne  sep* 
tentrionale,  dans  iaquelle  ils  ont  plac^ 
les  moots  Polyarres^  Paryadres  et 
Moschiciy  dont  plusieurs  etaient  re- 
Qommes  par  les  mines  receives  dans 
leursflancs,  etdontquelques-uues  sont 
encore  en  exploitation. 

All  sud-ouest  se  trouve  une  autre 
chatne  de  montagnes  trds^Iev^  nonv 
mto  ArtskadZj  lesguelle^  vont  se 
r^nir  vers  Tonent  a  la  chafne  des 
nyontagnes  de  Tancienne  province  de 
Siounui'h* 

De  I'Araxe  aux  borda  du  Tigre  et 
jusau'aux  rives  de  I'Euphrate  et  du  lac 
de  Van,  s'^tendent  de  longs  chatnons 

(*)  Le  defile  qui  doone  passage  de  I'Ar- 
Vitfiie  dans  la  Oeoifie  sp  nomme  la  porte 
de  Daritl  oa  TaritU.  Gel  endroit  est  Kniar* 
quable  mt  la  bauteiir  des  rocbere  lailles  a 

i»c  et  lomiant  des  gorges  sombres  et  pro- 
bndes.  Les  Russes  y  ont  ^tabli  une  redoute 
pour  en  garder  rentrce. 


dont  la  partie  la  plus  6levee  est  le  o^- 
li^yre  mont  Ararat  des  saintes  Ventu- 
res, lies  anciens  rappelaient  Masis^ 
nom  qu*il  conserve  encore  yulgaire- 
ment  dans  le  pays;  mais  les  Turcs  lui 
donnent  aujourd'hui  oelui  d^jigri- 
Dagh  (*). 

Le  mont  Ararat  se  compose  de  deux 
immenses  pics  dont  Tun  est  beaucoup 
plus  elev6  que  Tautre  (**).  L'escarpe- 
ment  des  rocbers  tallies  a  pic,  et  la  cou- 
che  des  glaces  qui  les  recouvre  ^rnel- 
lemeot,  avaient  toujours  avant  ce  siede 
fiut  re^arder  son  ascension  comme 
impraticable.  Aux  obstacles  sans  nom- 
bre  et  aux  perils  certains  qui  arr£- 
taient  les  plus  ooura^eux,  se  joignait, 
chez  les  anciens  babitants  de  I'Arm^ 
nie,  la  pieuse  tradition  que  le  sommet 
de  cette  moot^^ne  ayant  ^te  le  port  de 
salut  de  Tarcne,  Dieu  y  conservait 
miraculeusement  ses  d&)ns ,  et  qu*au- 
cun  pied  mortel  ne  pouvait  le  profaner 
depuis  que  Noe  y  Mait  aborde  avec  sa 
£amille. 

On  raconte  mtee  que  du  temps  du 
premier  patriarebe  de  TArm^nie,  un 
rooine  nomm6  Jacques,  qui  elevait  des 
doutes  sur  Tauthenticite  des  livres 
saints,  voulut  verifier  par  lui-mtoe  le 
bit  cru  g^n^raJement  du  d^pot  des 
restes  de  rarche  sur  la  cime  cfu  mont 
Ararat.  II  partit  done ;  mais  apres 
avoir  gravi  pendant  lon^jtemps  la  mon- 
tagne,  ils'endormit^puisedefiitigues, 
et  le  iendemain  ii  se  trouva  transports 
au  lieu  d*oii  ii  Stait  parti.  U  voulut 
tenter  de  nouveau  le  m^me  voyage, 
et  9  le  nrodige  se  renouvelant .  il  coni- 

f^rit  qu^un  pouvoir  sumaturel  ddiBndait 
'acc&  de  ces  lieux.  Cette  opinion, 
transform^  en  eroyance  diez  les  Ar- 
mdnieiis,  empdcba  dans  les  Ages  sui- 
vants  qu'aucun  habitant  dupays  n*osdt 
se  hasarder  au  del^  des  glaces  Sternd- 
les.  C'^taient  les  homes  inlrancfaissa- 
bles  de  cet  autre  Sina! :  en  outre,  la 
science  de  Tastronomie  et  de  b  mi- 
ttorologie  n'^tait  point  assez  avancee 
pour  engager  ceux  qui  en  avaient  quel* 
que  notion  a  gravir  cette  montagoe , 

C)  Voy.  la  plancbe  »•  i. 
(♦♦)  Voy.  la  planclic  n^  i8. 


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AR1|£NI£. 


aOtk  it#  Uat  de  nou^dles  exp^ences. 
Ud  ToyagBur  boUandais  ▼wita  oetta 
moiitagDa  au  oommeooenient  du  dix- 
A^itae  si^e;  c*est  Jean  Struys. 
▼oici  oe  qu*il  dit  de  son  excursion  : 
«  Nous  parttmes  le  matin  pour  aller 
Tislter  rermite  qui  Ti?ait  sur  la  mon- 
tagne.  Son  ermitage  ^tait  si  ^loign^  Je 
tern  9  qa^  I'ous  n'y  fillmes  qu'au  bout 
de  tiffi  jours,  cbacuo  desquels  nous 
fimes  cinq  lieues.  Nous  trouvions  tous 
les  soirs  une  halte  pour  reposer^  et 
Termite  qui  Thabitait  nous  donnait  le 
lendemain  un  paysaa  et  un  &ae«  le 
premier,  pour  nous  coriduire,  et  cttui- 
d,  pour  porter  des  vivres  et  du  bois. 
Gette  derail  provision  est  si  utile. 

Sie,  sans  oela,  la  montagne  est  inba- 
table,  et  le  froid  y  est  tel ,  qu'un  ca- 
valier peut  courir  sans  risque  sur  la 
glace  de  trois  beures. 

«  De  plus,  on  ne  se  cbauffe  que  du 
cbauffage  qu  on  y  porte ,  car  il  n'y  crott 
ni  arbres,  ni  balliers,  ni  rooces,  et 
dans  toute  la  montagne  il  n'y  a  pas 
m&ne  un  pouoe  de  terre.  Les  premiers 
nuages  que  nouspasslmes  dtaientobs- 
curs  et  epais.  Les  autres  6taient  extrd« 
mementfiroids  et  pleius  de  neise,  quoi* 

queunjMuplusbaslachaleurfdtgrande* 
et  le*'  ^aisins  et  autres  fruits  dans  une 
profonde  maturity.  Dans  le  troisitoe 
nuage,  nous  pensdmes  mourir  de  froid ; 
nous  avions  beau  courir,  rien  ne  pou- 
vait  nous  ^chaufiTer,  et  si  oet  espace 
fflac6  avait  dure  encore  un  quart 
a*beure,  je  croif  que  nous  y  fussions 
morts. » 

Toumefort,  pendant  son  voyage 
scientiflque  d'Arm^iie,  explora  le 
jDont  Ararat ,  sans  s'^lever  i  une  hau- 
teur consid^able.  «  Nous  assurtoes 
nos  guides,  dit-il.  que  nous  ne  pas- 
serions  pas  au  dels  a*un  taa  de  neige 
que  nous  leur  montrHroes,  et  qui  ne 
paraissait  gudre  plus  grand  qu*nn  Rft< 
teau;  mats  quand  nous  flilimes  arrives, 
nous  y  en  trouvdmes  plus  qu*il  n*en 
fallait  oour  nous  rafratcfair;  car  le  tas 
avait  puis  de  trente  pieds  de  diamtoe. 
Chacun  en  mangea  tant  et  si  peu  qn'il 
vouhit,  et,  d'un  commun  consente- 
ment,  il  fiuit  r^solu  qu'on  n'irait  pas 
phis  loin.  Nous  desoendtmes  done  avec 


one  viniear  admirable,  ravis  d'avoir 
accompli  notre  vobu  ,  et  de  n'avoir  plu9 
rien  h  faire  que  de  nous  retirer  au  mo- 
nast^.  »  Toumdbrt  veotsans  donte 
parler  id  du  monastte  de  Saint-Jac- 

Sues,  situ6  sur  le  versant  noid-ouest 
e  la  montagne ;  puis  il  ^oote :  «  Nous 
nous  laissdmes  ^sser  sur  le  dos  pen- 
dant plus  d'une  beure  sur  ce  tapis  vert ; 
nous  avandons  chemin  fort  atorfeble- 
ment ,  et  nous  aDions  plus  vite  de  oette 
fefon-lft  que  si  nous  allions  sur  nos 
jambes.  On  continua  h  jdlsser  aotanl 
que  le  terrain  le^ermit;  <^,  qoand 
nous  renoontriodF  des  calHoux  qui 
meurtrissaient  nos  dpenles,  noos  sus- 
sions  sur  le  ventre ,  ou  noos  marduons 
i^  reculons  a  quatre  pattes.  » 

Ltfkre  et  le  pred^oesseur  de  M^ 
b^meci-Behahil,  pacha  de  Bayazid, 
voulut  faire  rasoendon  de  la  monta- 
gne; mais  il  t^vnita  k  deux  mille  qna- 
&e  cents  pieds  des  Bdges,tant  il  etait 
efifray^  des  dangers  et  des  fatigues  qui 
i'attanddent.  La  doire  de  I'asoension 
^tdt  r^serv^  au  aoctemr  Fr.  Parrot, 
professeur  de  physique  h  Dorpat  L'an 
1880,  il  partit,  commeun  autre  Saus- 
sure,  pour  escalader  oette  montagne 
plus  haute  que  le  Mont-Blanc.  Aprte 
pinsieurs  jours  de  maiche  et  des  rati- 

gues  inooies,  il  parvint  h  la  hauteur 
e  quinze  nille  cent  trente-huit  pieds 
au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  c*est^- 
dire  trois  cent  dnquante  pieds  environ 
plus  baut  que  le  Mont-Blanc.  IJl  il 
planta  dans  la  glace  une  longue  croix 
noire  avec  cette  inscription  : 


r   AUTOGAATOBS 


BOG   A8TI.UM   SACBOSAITCTUII 

A&MATA  MAW  ▼nn»fCATrr 

VIDBI   CBEUTtAa^ 

MAVVBS  niK»«iioi  Fnim 

PAJKSWfTtCB   AM   BEIVAlf 

Amo  BOMon  imoocnvi. 

Aprte  avoir  dnsi  prodam^  dans  les 
nues  la  puissance  de  Nicolas,  empe- 
reur  des  Rusdes,  et  la  victoire  de  son. 
gdi^rd  Pask^witiKh,  Fr.  Parrot  s'ap- 
prdtdt  k  s'dever  encore,  loisqu'une 
tourmeote  souddne  obscurdt  I  air  ei 


L'UMIVERS. 


ie  for^  de  rodesoendFe  pr^pitamment 
pour  6cfaapper  k  une  mort  certaine.  II 
revint  au  monastdre  de  Saint-Jaoques; 
mais ,  ne  r^ardaDt  point  sa  Uiche  com- 
me  aooompiie,  il  se  pi^para  h  une  se- 
oonde  ascension;  et,  le  23  septembre, 
il  se  mettait  en  route  a?ec  un  jeune 
diacre  du  couvent  d'Eczmiazin ,  deux 
soldats  du  41*  regiment  de  chasseurs  et 
deux  paysans  arm^niens.  II  sui  vit  la  m^ 
me  route  que  la  premi^  fois.  et  profita 
desescaliersqu'us  aYaienttaill^dansla 

Slaoe.  Le  27  septcao^re  k  trois  heures, 
^tait  sur  le  poilt  culminant  de  la 
montagne.  Il  trouva  1^  une  plate-forme 
unie  de  deux  cents  pas  de  diam^tre,  la- 
quelle  pouTait  par  consequents  comme 
le  remarque  notre  voyageur,  fort  bien 
servir  de  point  d'appui  a  Tarcbe  lors- 
qu*elle  s*y  arr£ta,  puisque  le  r^citde 
la  Gen^  ne  donne  h  ce  vaisseau  de 
Noe  que  trois  cents  coudees  de  lon- 
gueur sur  dnquante  de  lai^eur  (*}. 

De  cette  ^fevation,  qu'il  lvalue  a 
16,200  pieds,  Toeil  embrassait  un  ho- 
rizon immense :  toute  la  valine  de  I'A- 
raxe  avec  les  ▼illesdi&rivan  et  de  Sar- 
darabad,  qui  semblaient  comme  deux 
tacbes  noires,  se  d^roulait  majestueu- 
sement  au  pied  de  la  montagne;  au 
sud  apparaissaient  les  montagnes  sur 
lesquelfes  Bayazid  est  pos^  comme 
Taire  de  Faigle;  au  nord-ouest,  le 
mont  Alaghes  ^levait  sa  t^te  resplen- 
dissante  comme  de  Targent  poll  lors- 
que  le  soleil  dardait  sur  ses  glaciers. 
Puis  k  (hroite  et  k  gauche,  les  divers 
lacs  apparaissaient  comme  des  oasis 
scintiliantes  au  milieu  de  Tuniforme 
desert  de  la  plaine 

Au  sud-ouest  du  mont  Ararat,  vers 
les  sources  de  TEuphrate  meridional , 
est  le  Niphates  (**)  des  anciens  ou  le 
mont  Nebad ,  Justement  cei^bre  dans 
rhistoire  arnienienne,  parce  que  c'est 
dans  son  voisinage  que  le  premier  roi 
Chretien  de  FArmenie,  Tiridate,  fut 
baptise  par  le  premier  patriarche,  saint 
Gregoire  I'llluminateur. 

O  ^^7- 1*  planche  n<>  ai. 

(**)     Et  potius  Dova 

Cantemus  Anpusti  trophaBa 
Oesans;  et  rigidiim  Niphaten, 

llor.  Carm.  lib.  i> ,  cnI.  vi. 


Au  sud  de  FAraxe,  en  se  dirigeaot 
vers  Torient,  on  trouvait  les  monta- 
•gnes  Oaspiennes  qui  separaient  les  fwo- 
vinces  de  cette  partie  de  FAnnenie, 
de  la  mer  Gaspienne ,  du  Ghilan  et  de 
rAderbaidjan. 

Toutes  les  montagnes  qui  separaient 
au  midi  les  provinces  armeniennes  de 
FAssyrie  ne  portaient  auciin  nom  par- 
ticuher.  Les  Turcsleur  en  ont  ass^ne 
plusieurs,  parmi  lesquels  on  remarque 
celui  de  Rarab-Dagh  ou  montagnes 
noires,  lesquelles  servent  au  pays  de 
limites  du  cdte  de  la  Perse. 

Flsuves  bt  biyi^rbs.  —  Plusieurs 
savants,  qui  ont  cm  voir  dans  le  pays 
d'Armenie  Fancienne  position  du  pa- 
radis  terrestre ,  ont  apporte,  a  Fapi>ui 
de  leur  assertion ,  la  preuve  de  Yeiis- 
tence  des  quatre  grands  fleuves  men- 
tionnes  dans  la  Genese.  lis  ont  retrouve 
le  Pichon,  le  Guichon  et  le  HideiLel 
dans  le  Gour,  FAraxe  et  le  Tigre. 
Quant  k  FEuphrate ,  specialement  de- 
signe,  il  n'y  avait  pas  lien  k  contesta- 
tion ,  puisqu'il  prend  effectivement  sa 
source  dans  le  nord,  et  qu'il  sert  de 
limite  k  FArmenie  meme,  du  cdte  de 
Foccident.  En  efifet,  il  a  son  origine 
pr^s  de  la  ville  actuelle  d'Erzeroum 
oil  il  sort  des  monts  Bin-gueul,  c'est- 
a-dire,  les  mille  lacs.  H  se  forme  de  la 
reunion  de  plusieurs  autres  rivieres 
plus  ou  moins  considerables,  parmi 
lesquelles  on  remarque  le  Kail,  qui  est 
eviaenment  le  Lycus  de  Pline ,  puis- 
que ce  mot,  dans  la  langue  armenien- 
ne,  a  la  signification  de  loupi  comme 
Xuxoc  en  grec.  Depuis  le  lieu  ou  toutes 
les  rivieres  qui  contribuent  a  former 
FEuphrate  se  reunissent,  ce  flenve 
coule,  vers  le  midi ,  entre  la  petite  et 
la  grande  Armeoie;  il  separe  la  Meso- 
potamie  de  la  Syrie,  et  il  entre  en^n 
dans  FIrak  araoe,  ou  il  se  joint  au 
Tigre.  Ces  deux  fleuves  se  jettenteo- 
semble  dans  le  solfo  Persique  au-des- 
sous  de  la  ville  de  Basrah. 

Aujourd'hui  que  FAngleterre  chcr- 
che  avec  tant  de  perseverance  k  ouvnr 
une  nouvelle  communication  plus  di*- 
rectc  avec  FInde,  jwup  la  voie  de  1  Eu* 
phrate,  il  n'est  pas  inutile  derapp^^ 
qu'au  rapport  d'lierodote ,  FArmo"^ 


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Hk^^B  ^rVB 

^^yB|Ki!^^^l 

ARMENIE. 


envoyait  autnlois  par  ceHeuve  k  Ba- 
bjlone  la  plupart  de  ses  approvision- 
nemeDta.  Les  bAtiments  de  transport 
^taieot  dt  difij^rentes  especes.  Les  una, 
nomm^  corades,  oonsistaient  en  une 
sorte  debateau  prehear  deformerondet 
d*un  diamdtre  d'environ  diz  pieds;  ila 
^taient  feits  d*osier  ou  de  roseauz ,  en- 
duits  de  bitume  et  dirig^  a?ec  une  seole 
rame.  Lea  autres  n'^ient  qae  des  ra- 
deaox ,  que  Ton  mettait  h  flot  au  moyen 
d*oatare8  remplies  d'air ;  oomme  ils  ne 

Souvaient  remonter  le  fleuve  k  cause 
e  k  force  du  oourant,  le  bois  dont 
ils  6taient  construits  ^tait  vendu  sur 
les  mardi^  de  Babylone ,  et  les  outres 
^talent  reuToyte  en  Arm^le  sur  des 
dnes  anient  k  cet  effet.  Ge  qui  rend 
la  navigation  de  I'Eupbrate  aussi  jp^ 
rilleuse,  c*est  qae  sa  profondeur  n^t 
jamais  proportionn^  k  sa  laxi^enr. 
Dans  la  saison  des  basses  eauz ,  il  y  a 
une  multitude  d'endroits  oik  Ton  ne 
troq?e  fii'un  ou  deux  pieds  d*eau,  tan- 
dis  qu'il  se  rencontre  plus  loin  des 

Sounres  et  des  toumants  n^ides,  ou 
es  bas-fonds  ^e  les  bateaux  les  plus 
lagers  ne  sauraient  franchir.  L'empe- 
reur  Trajan  descendit  ce  fleuve  depuis 
Kerkisie  ou  Circesium  jus^'au  golfe 
Persique.  Ammien  Marcellin  nous  ap- 
prend  que  Julien,  k  la  t^  d'une  flot- 
tille  de  onze  cents  bateaux,  fit  lem^me 
trajet.  Dtoleseizi^mesitele,  des  n6eo- 
ciants  anglais,  imitant  Texemple  aes 
raarchands  v^nitiens,  allaient  par  la 
Mediterran6e  k  Latakia  sur  la  cote  de 
Syrie ,  et  de  11^  ils  gaenaient,  en  passant 
par  Alep,  Bir;  ils  transportaient  en- 
suite  k  dos  de  chameaux  leurs  mar- 
chandises ,  puis  ils  descendaient  jusqu*^ 
Bagdad;  et  les  marchandises  que  ron 
d^arquait  k  Orpba,  arrivaient  par 
terre  a  Carahemit ,  sur  le  Tigre ,  qui 
^tait  alors  un  des  grands  entrepots  de 
commerce.  De  1^  on  les  envoyait ,  par 
le  golfe  Persique,  dans  Toc^n  indien. 
Le  Tigre  prend  sa  source  dans  Tan- 
cienne  provwce  de  Haschdean,  et  il 
«ort  des  montagnes  appdto  monts  des 
Kurdes.  En  armenien  on  Tappelait 
Tegghath.  II  coule  parallMement  a 
rEuphrate,  et  le  pays  renferm^  entre 
ces  deux  fleuves  forme  la  M^sopota- 


mie.  Apres avoir  recu surson  passage 
le  tribut  d*une  infinitude petites  rivie- 
res,  il  va  se  Jeter  dans  le  golfe  Per- 
sique. 

Au  nord  d'Erzeroum  et  k  Touest  de 
Baibourt  est  le  fleuve  Horokh  nonun^ 
Tchorok'hi  par  les  G^r^iens ,  et  que 
Ton  crolt  ^tre  TAcampsis  des  Grecs. 
II  coule  dans  les  vallees  profondes  et 
presque  inabordables  deFancienne  pro- 
vince de  Daik*b;  il  fait  la  limite  du 
territoire  de  Trdbizonde  et  de  celui  de 
G^rsie.  Son  embouchure,  dans  la 
mer  iNoire,  est  pr^  de  la  ville  deGou- 
niab. 

Le  Gour  (*),  ou  Cyrus  des  anciens ,  a 
sa  source  dans  la  mtoe  province  de 
Daik'h.  11  sort  du  mont  Barkhar,  puis, 
apr^  avoir  coup^  les  provinces  les  plus 
septentrionales  de  TArm^nie,  il  entre 
dans  la  G^rgie,  passe  a  Gori  et  k 
Tiflis ,  capitale  de  ce  royaume ,  descend 
ensuite  vers  le  sud-ouest,  rentre  en 
Arm^nie  ou  il  reooit  TAraxe,  avec 
iMTuel  il  se  confona,  jusqu'^  ce  qu'ils 
aiOent  tons  les  deux  se  perdre  dans  la 
mer  Gaspienne.  On  compte  parmi  les 
prindpales  rivieres  qu'il  revolt,  celies  de 
Jori,  Aragvi,  Alazan,  sans  parler  des 
nombreux  torrents  qui  descendent  du 
Schirwan  et  de  la  Georgie. 

L'Araxe(**),dans]equeltous  les  voya- 
geurs  reconnaissent  le  Pontem  Mug- 
naku  Arcuces  des  anciens,  k  cause  de 
la  rapidity  de  ses  eaux  qu*il  roule  au 
fond  d^^troites  gorges  et  de  valines  si- 
nueuses  avec  un  fracas  ef&ayant,  est 
I'Abos  des  anciens,  le  Ras  ou  Aras 
des  Arabes ,  des  Turcs  et  des  Persans. 
II  est  aliments  par  les  rivieres  et  tor- 
rents sortis  des  provinces  de  Siounik'h 
et  de  Khapan.  Apr^  s'dtre  r6uni  au 
Gour,  et  avant  de  se  jeter  dans  la  mer 
Gaspienne ,  les  marais  de  FAderbaidjan 
et  les  montajgnes  du  Ghilan  leur  ap- 
portent  plusieurs  cours  d*eau  conside- 
rables. 

On  voit,  par  cette  ^norme  ouantite 
de  fleuves ,  de  rivieres  navigaoles  r^- 
pandues  sur  la  surface  deTArm^nie, 
et  qui  circulent  dans  son  sein  comme 
des  veines  bienlaisantes  pour  porter 

(•)  Toy.  U  planche  «•  lo.  (*•)  ttkm. 


10 


UUniVERS. 


daos  tool  ee  Taste  eorps  I'aiioiidaiioe 
eC  la  fieondit^,  <(uel  parti  an  peuple 
civilian  poarrait  tirer  de  oette  r^on 
oh  lea  moyena  de  tranaport  poor  le 
eommeroe  aoni  ai  maitipiiday  et  oi^  il 
eat  ai  £M:ile  de  rem^dier  a  la  a^cherease 
dea  6t^,  la  principale  cauae  de  ateri- 
Ut^  dea  pays  orientaux.  Lea  Turca  iii 
lea  ArmeDieiis  neaavent  point  profiter 
de  cea  ricfaeaaea  natorelfes.  Ainai  ila 
laisaent  en  en  moment  Thonneur  et  les 
b6n^fices  de  i'entrepriae  de  la  naviga- 
tion de  rEuphrate  h  une  compagnie 
ioduatrielle  d  Anglaia. 

Lags.  —  L'Arm^nie  renferme  en 
outre  plusienra  laca  dont  quelquee-wis 
ressemUent  h  de  petitea  mera  m6diter- 
ran^nea.  Tel  eat  le  lac  de  Van,  au* 
quel  le  g^graphe  ture  Hadjy*KJialfa 
aasigne  environ  aofxante  lieuea  d'^n* 
due.  Lea  Arm^niena  lui  donnent  cent 
milles  de  longueur  et  aoixante  millea 
de  largeur.  Ses  eaux  aont  salte,  ce  qui 
fait  qu'on  le  d^gne  sous  le  nom  de 
mer  sal4e.  II  est  auasi  connu  sous  la 
denomination  de  lac  d'Agbthamar,  k 
cau.se  d'unefle  qui  a'y  trouve,  et  qui 
est  la  residence  d*un  patriarche  arm6- 
nien. 

«  La  tranquillity  de  ce  lac,  dit 
M.  Jaubert  dana  fouvrage  prMte,  et 
ses  eaux  bleudtres  le  feraient  prendre 
de  loin  pour  une  mer  sans  orages.  £n- 
vironn6  de  bauteura  oouvertea  de  peu- 

{)tiers,  de  tamarina,  de  myrtoa  et  de 
auriers-roses ,  il  eontient  pfusieurs  lies 
verdoyantes  qu'babitent  de  paisibles 
anacborMes.  La  pdcbe  du  lac  donne 
un  revenu  de  aoixante  mille  piastrea; 
elle  commence  au  20  mars  et  finit  au 
80  avril.  EUe  est  tr^s-abondante,  et 
eonsiste  en  un  seul  poisson  nomm^ 
tarikb,  lequel  ressemble  aasez  k  la 
sardine  (*).  * 

Un  fait  aasez  singuliery  consign^  par 
le  m^me  voyageur,  c^est  mie  lei  eaux 
du  lac  empi^nt  oontinuellement  aur 
les  terres,et,  par cette  cause,  les  fm- 
bourgs  de  la  ville  de  Van,  aitu^  sur 
ses  bords,  deviennent  de  plus  en  pkis 

(*)  Ea  1 8o6 ,  il  B'eiifltit  que  scpc  •«  luiit 
bateaux  a  voik  sur  ee  lac,  pour  le  oommerce 
dt  U  petite  viOe  dt  Biddltt. 


inbabitables.  Les  andens  auteun  ar- 
m^ens  parlent  tf  one  dictie  immense 

Su'aurait  constmite  Stoiramis,  sent 
oute  pour  prot^ger  la  ville  oontre  les 
inondations.  Les  vestiges  de  oe  travail 
gigantesque  subeistent  encore,  et  le 
nom  persan  de  Bend-ma ,  i%tte,  on'ii 

S9rte,  Concorde  k  prouversa  destina- 
on  primitive. 

A  rorient  du  lac  de  Van  se  troove 
un  autre  lac  auquel  le  g^ographe  aiabe 
Abou*lfi6da  donne  cent  trente  miUes  de 
long,  sur  la  moiti6  environ  de  large* 
n  porta  plusieurs  noms;  d'abord  il 
est  connn  sous  celui  de  lac  saM,  ce  qui 
fieiit  qu'on  Ta  confondu  quelquefois  avec 
le  lac  de  Van.  Les  Persans  et  les  Tuna 
Tappellent  indifif(§remmeDt  lac  de  T^ 
bru  ou  lac  d'Ourmieh.  Souvent  il  est 
d^gn6  oomrae  lac  de  T^,  k  cause 
d'une  petite  tie  de  cenom  situ^  au  mi* 
lieu  de  ses  eaux ,  et  oh  Tempereur  mo^l 
Houlakouavait&itcoostruire  une  for* 
terease  pour  y  mettre  en  d^t  aea 
triaon.  Le  sumom  de  Khabodau,qa*il 
porte  encore,  est  une  ^itiite  arm^ 
nienne  qui  signifie  bleu,  et  qui  lui  a 
probablement  ^t^  appliqu^  k  cause  de 
razurdeses  eaux. 

Dans  les  oontrto  septentrionalea  et 
sur  la  rive  gauche  de  TAraxe  est  situ^ 
le  troisidme  grand  lac  de  rArm^nie.  I! 
porte  le  nom  de  lac  de  S^an,  k  cause 
de  nie  appel^  ainsi  qu*il  renlferme  et 
oik  se  trottvait  un  monast^  de  oe 
m^me  nom,  fort  c61^bre  par  la  aaintet^ 
et  le  savoir  de  ses  religieux.  Les  Turcs 
et  les  Persans  Fappellent  Kouktduik- 
Daria  ou  Tengiz ,  ce  qui  veut  dire  p^iie 
mer.  II  se  distingue  des  deux  autres 
grands  lacs  par  la  quality  de  aes  eaux 
qui  sont  douces.  Outre  oes  trois  lacs, 
remarquables  par  leur  ^tendue,  il  e'en 
trouve  encore  dans  lesdififtentes  pro- 
vinces une  tr^-^rande  quantity.  On 
dte  celui  qui  avoisine  la  ville  de  Kan. 
nomm^  B)Edagatsis,  et  teas  ceuz  qui 
entourent  Erzeroum,  dont  le  grand 
nombre  a  fait  donner  anx  mootacnea 
au  milieu  deaquelles  ils  sont  aenes  le 
nom  de  Bin-gueul  ou  les  mlUe  htcs, 
ainsi  que  nous  I'avons  dit. 

GiooBAPmB  DB  ii'AxiiiHn;  sa 
]>m8iON  AiiciBiiif B,  —  II  est  ateolu- 


ARK^NIE. 


11 


meat  DfoMaire  de  imn  ooimahre 
randemia  lihrisioo  de  rAnnemc,  telle 
que  nous  la  dooneot  lee  toivaine  srecs 
et  latiiw*  £Ue  6tait  partag^  en  deux : 
k  Forient  de  rEuphrate  6tait  la  cranSe 
Arm^nie,  qui  s'^tendaitjuaqa'ji  u  mer 
Caspienoe;  k  roccident,  la  petite  Ar- 
nuftoie,  qui  ae  aubdiviaait  en  troia  au- 
tres  d^partementa  oomm^  premite, 
aeooode  et  troisiteie  Arm^nie. 

Soiyant  le  patriarche  Jean  VI,  hia* 
torien  fort  remarquable,  nn  anden  roi 
de  I'Arratoie,  nomme  Armaniagy 
ayant  soomis  apr^  de  rudea  com* 
bats  lea  Cappadociens,  appela  de  son 
Qom,  premiere  Arm^ie,  cette  prok 
finoe;  depuis  le  Pont  juaqu'au  terri* 
toire  de  Mtiitene,  il  nomma  ce  pays 
leoonde  Arm^nie;  la  troisitee  Armie* 
nie  a'<^tendit  depuis  M^itdne  jusqu'aui 
ffontieres  de  la  Sophtoe;  le  pays  com- 

Iiria  en^e  la  Sophooe,  Martyrdpolis  et 
*occident  de  la  proTince  d' Aghdsnik'h , 
filt  oomm^  quatri^me  Armenie. 
Toutelbis  ees  subdivisions  ne  ftirent 

Ktee  adoptte  que  par  les  ^riTaiaa 
Kantina,  et  lea  autres  g^ographea 
ae  contentaient  d*admettre  les  deux 
orandes  divisions  de  grande  et  de  pe* 
fite  Armenie,  ce  que  font  aussi  lea 
naodernes. 

Au  dnquitoe  siede,  la  partie  qui 
nasaa  sous  la  domination  des  Perses, 
lors  de  Textinction  de  la  race  des  Ar- 
saddes,  prit  le  nom  de  Persarm^nie. 
L'empereur  Justinien  divisa  le  pays  en 
dnq  provinces  distinctes  :  la  grande 
Armenie,  dont  les  sources  de  l*Eu- 
phrate  dtaient  k  peu  pr^  le  centre ,  et 
qui  portait  ausai  le  nom  d*Anm^ie  in- 
t^eure ;  au  midi ,  restait  la  partie  que 
les  Remains  nommaient  quatriraie 
Arm^ie ,  et  oui  oontenait  les  cantons 
d'Anxitine,  dTIneilene,  de  Belabitdne 
et  de  Sophdne;  a  Tooeident  de  I'Eu- 
phrate,  on  trouvait  la  premiere,  la  se- 
ooode  et  la  troisidme  Armenie,  ou  le 
PontIV>ldmoniaqueavecTrdi>izonde(*). 

(*)  L*ardi0v^utdeTli«Malomque,Eiitta- 
tka ,  npporte  daas  ion  GonunenUire  sur 
Dnw  \t  P^iegale,  que  Justinien  op^ni  une 
mysnon  nn  pen  diiereale.  u  pirlaset  fAr- 
menifi  en  quatie  parlies :  de  It  premiere , 


La  division  proprement  nationale  de 
rArm^nie,  et  cdie  que  anivent  ordi- 
naireaieat  les  autenra  armdnlens,  par- 
tageait  le  pays  en  quinze  provinces,  oik 
dtaient  enciavdes  ae  petitea  prindpau- 
t^  aeooadaires.  Les  noms  de  oes  pro- 
vinces ^taient : 

\^  La  haute  Armenia, 

2«Daik*h, 

9«  Koukark'h, 

4*0udi, 

S«  Quatritaie  Armenie, 

6*  Dooroup6ran, 

7*  Ararad, 

8*  Vasbouragan, 

0*  Siounik'h, 

10*  Artsakh, 

ll^Phaldagaran, 

13»Aghdsnik'h, 

13'Mogkb, 

14*Gordjaikh, 

15*  Persarm^nie. 

II  serait  assez  diUBcile  de  designer 
avec  precision  les  limites  de  cette  der- 
ni^re province,  qui  changeaient  k  cha* 
que  nouvelle  guerre  engage  entre  les 
Perses  et  les  Arro6niens. 

Les  conqu^tes  ult^rieures  des  Grecs 
d^une  part,  des  Persans  de  Tautre,  les 
invasions  successives  des  Arabes  et  des 
Turcs  seldJQukides,  chaneerent  k  plu- 
sieurs  reprises  cet  ordre  de  choses. 

La  totality  du  royaume  est  actuelle- 
ment  partag^  entre  Fempire  turc,  le 
royaume  de  Perse  et  Fempire  de  Rus- 
sie,  sans  compter  les  districts  dont  se 
sont  empar6s  qudques  princes  kurdes 

il  foma  une  itliisiie  bepUpole,  dont  le 
dief^iea  iuit  Baianis,  wnBomhe  anl^riea- 
renient  liCOBtopoUs ;  Th^odosiopolis  Golo- 
i|ia«  Trebiionae  et  Cerasus  du  Pont  Poli^- 
moniaque  y  etaient  comprises.  Justinien 
forma  easute  la  deuxiime  Armenie ,  et  en 
fit  une  pentapole  ou  se  trouvait  S^baste.  La 
troisieme  Arm^e ,  appelee  ausisi  quelque- 
foisseconde,  fut  constitu^  enhexapole;  sa 
capitale  itait  M^litene.  On  trouyait  encore 
dans  cette  province  Comaaa,  Chryse  ei 
Cucosus.  Enfin  la  quatri^e  Arm^ie,  gou- 
vemee  per  des  satrapes,  fiit  formee  de 
diYorses  pro^inoes  qui  jporlaient  les  noms 
de  TZopkane ,  de  Baibitene  el  d'autres  sem- 
blaUes  denemiiiatioBS  barbares. 


12 


UUNIVERS. 


oui  savcnt  y  maintenir  leur  ind^peii- 
oance. 

POBIIOH  DB  L'AbMBNIB  AFPABTB- 

HANT  A  LA  TuBQUiB.  —  Les  Turcs 
possMent  h  Touest  de  TEuphrate  toiite 
rArmtoie  mineure,  et  h  Torieiit  le  ter- 
ritoire  qui  leor  est  soumiB  8*6teiid  dei 
montagnes  de  la  Gtorgie  k  eelles  de  la 
M^potamie,  en  a'avan^ant  da  cdU 
de  Torient,  jusqu'au  delli  da  mont  Mih 
sis.  Six  paebas  sont  diarg^  de  Tadmi- 
nistration  de  oe  pays,  et  leor  gouver- 
iien]ent8*appelle|ENicAalU(.  Les  aoms  de 
oes  pachahks  sont  Eneroum,  Akiska, 
Khars  Y  Bayazid,  Moasdi,  Diarbekr. 
lis  renferment  ane  grande  quantity  de 
sandUakaU  oa  districts  Mininistr^^ 
par  des  esptos  de  vaivodes,  dont  plu- 
siears  se  sont  aifranchis  du  tnbut 
qa*ils  doivent  payer  k  la  Porte  Otto- 
mane. 

POSSBSSIONS  DB  LA  RUSSIB.  —  La 

Russia  marche  cbaque  jour  k  la  oon- 
qu6te  de  TAnn^ie,  et  il  est  blen  cer- 
tain qu'elle  occupera  prochainement 
tout  cet  ancien  royaume.  ^Ir^li-Khan 
lui  a  d^jli  fiiit  enti^ment  l^andon 
de  ses  domaines,  comprenant  et  la 
G^rgie  et  FArm^nie  mmeure.  Depuis 
ce  temps,  elle  a  conquis  tout  Tespace 
oompris  entre  le  Kur  ou  ancien  Gyrus 
et  TAraxe,  jusqu'au  confluent  de  ces 
deux  fleu?es,  prte  de  la  ville  de  Berd^ 
et  de  Djavad.  Cette  presqu'tle  contient 
trois  lacs :  le  Paravan ,  le  Palat  et  le 
S^van.  Les  deux  villes  les  plus  consi- 
derables sont  Tiflis  sur  le  Rur,  et 
l^rivan  prte  de  FAraxe,  qui  ^tait  la 
residence  du  khan  persan.  On  remar- 
que  aussi  plusieurs  autres  Tilles,  telles 
queCbaki,  Ghirvan,  Ghamakhi,  Nact* 
diavan,  Asdabad,  Lori,  Berd6.  Qe 
pays  est  d^fendu  par  la  place  forte  d'E- 
riyan,  et  I'imprenable  forteresse  de 
Chouchi ,  oik  les  princes  arm^niens  al- 
laient  autrefois  aierdier  un  asile  cen- 
tre les  incursions  des  Perses  et  des 
Arabes.  Les  montagnes  qui  I'entou- 
rent  forment  par  leur  encemte  une  se- 
conde  citaddle,  que  la  nature  semble 
avoir  fortifiee  sans  le  secours  de  Tart. 
Gette  presgulle  comprenait  autre- 
fois les  proYtnoes  de  rAnnteie  ma- 
jeure, de  Daik,  de  Koukark,  d*Ara- 


rat,  et  une  partie  du  Vasbouragan  sur 
TAraxe.  Au  confluent  du  Kur  ct  de 
TAraxe  se  trouve  la  province  d*Oudi , 
appel^  Ottoe  par  Pline,  et  Mottee  par 

Comme  Eczmiaxin ,  iMdenoa  do  pa- 
triarche  universel,  est  enclave  dans 
oes  possessions,  il  ne  &ut  pas  s'^ton- 
ner  si  la  Russie,  pour  consolider  ses 
conqultes,  tient  beauooup  a  maintenir 
sous  sa  puissance  le  si^e  du  chef  spi- 
rituei,  sur  Section  duqud  le  cabinet 
de  Saint-P^tersbourg  influe  dirocte- 
ment  aujourd*hui.  Les  Russes  ont  cm 
que  la  scission  existante  entre  I'^glise 
d'Arm^e  et  oelle  de  Rome  rapmo- 
cherait  d'eux  ks  Arm^niens.  Mais 
oeux-d  ont  une  profonde  antipathie 
pour  leurs  nouveflix  mattres,  en  qui 
us  retrouvent  toutes  les  erreurs  et  les 
pratiques  des  Grecs,  avee  lesquels  ils 
se  sont  dispute  des  sidcles,  sans  pou- 
voir  jamais  s*accorder.  En  outre,  les 
pretentions  du  czar,  qui  veut  coneen- 
trer  dans  sa  personne  toute  Tautorite 
q)iiftueile  de  son  empire,  et  qui,  par 
consequent,  tend  toujours  h  afraiblir 
oelle  oil  patriardie  armenien,  ne  fait 
qu'accrottre  le  roeoontentement  des 
fideles  de  cette  l^slise. 

Les  conquetes  aes  Russes  ne  se  sont 
pas  bomees  k  cette  presqulle  d^jik  asses 
vaste;  elles  s'etendent  au  mkli  au  Mk 
de  TAraxe ,  et  pendtrent  fort  avant  dans 
r  Ararat  et  le  vasboun^an,  qui  appar- 
tenaient  au  khan  d*]£rivan.  La^irtie 
situee  au  del^  du  conflumt  du  Rur  et 
de  FAraxe,  en  allant  jusqu'ii  la  oier 
Caspienne ,  a  cede  depuis  peu  aux  amies 
de  ui  mdme  puissance. 

POSSBSSIONS  DB  LA  PBBSB.  —  U  ^ 

a  encore  peu  de  temps  que  la  partie 
montagneuse  de  FArmenie,  situee  i 
Toccident  de  Gandjah  et  de  Berde ,  etait 
soumise  a  plusieurs  petits  princes,  trf- 
butaires  des  Persans,  qui  prenaient  le 
titre  de  mMk.  nom  arabe  synoimne 
du  mot  roi.  Mais,  dans  lesdemieres 
guerres  oontre  la  Russia,  la  Perse  a 
perdu  ce  territoire,  et  il  ne  lul  reste 
plus  que  la  portion  comprise  entre  la 
partie  soumise  aux  Turcs,  les  monta- 
gnes des  Kurdes  et  le  lac  d'Ounnieb. 
Quant  aux  cantons  situ^s  au  sud  du 


•      • 


•  ••  ■ 
■  •  •  * 


arm£nie. 


13 


lac  de  Van,  en  allant  vers  le  Kurdistan 
et  le  Tigre,  Us  sont  sooinis  a  divers 

{irinoes  kurdes  r^idant  k  Betlis ,  Djou- 
amerk  et  Amadiah. 
Poor  que  le  lecteur  saisisse  d'une 


mani^  daire  et  succincte  les  demiers 
Ghaii{;eaients  survenus  dans  la  division 
politique  de  TArni^nie,  nous  les  r^- 
merons  dans  le  tableau  suivant : 


novniGu  Ajrcnmrig. 
Taabouragaii 

Siounie. 

Phaidigareti 
Outfi. 

Koukar. 

Gordjaik  et  Persarmenie. 

Dourouperan. 
Annenie  siip^ieure. 

Dttk'li. 


DITttlOV  MODSmVB. 


PKniiepe 

Seoonde     { Arminie 

Troiiiinie 


ie.  I 


iSrivan,  Van  et  une  paitie 
de  I'Aderbaidjan. 

Nakdchivin  el  une  partie 
du  Karabagh. 

Karabagh. 

ScMiiekheti  oa  Armenie 
georgieime. 

Aderbaidjan. 

PachaKluT^e  Kan,  de 
Bayaiid ,  f  Kurdistan. 

Akbiaka. 
Diarbekre. 

ktiuiwim  Mnriumi. 

Kesarieh,  QhuMid, 
Siwas,  sibasle. 


Province  nuM  de  I'ilmeme 
ou  gouvernement  dl^van. 


)  Province  nuse  de  Karabagh  ou 
)     gouTernement  de  Ckondia. 

I    Gouvernement  nuse  de 
I  Tiflis. 

I  Chefs  kurdes  et  gou^mement 
i  persan  de  Tauriz. 

Pachaliks  turcs. 
Padudiks  turcs. 


Pachaliks  turcs. 


I 


VILU8   BBKABQUABLBS   DB  L'AB- 

GmfKB  Abmbnib;  NOMS  DB  GBLLBS 

QUI  ONT  GONSBBVB  QUBLQUB  IMPOB- 

TANGB«— j&rserottfii(*).  La  viile  prind- 
pale  de  la  hante  Ann&ie  est  Gaarinj 
qui  prit  le  nom  de  ThMosiopolis, 
paroe  qu*elie  fut  fond^  vers  Tan  415, 
par  Anatolios,  gdn^ral  des  arm^s  de 
rempereur  Th^odose.  Gomme  elle  itait 
plus  particnlidrement  sous  la  domi- 
nation des  enopereurs  grecs,  on  Pap- 
pela,  vers  le  nnlieu  du  onzi^me  sikle, 
Arzroum  ou  Erzeroum ,  corruption  de 
la  denomination  aiabe  j4rzel  roum  ou 
lys  des  Homains,  c'est-^-dire  des 


la  continuation  de  Tenroire  remain. 

AukMird'hni  die  est  la  plus  peu|d^ 
des  vules  d'Arm^e;  on  y  oompte  cent 
mille  habitants,  que  quelqucs  voya- 
geurs  dvaluent.  mime  h  cent  dnqoante 
miUe.  Toutefois  des  rensdgnements 

(*)  Toy.  la  planche  n*  a. 


post^rieurs  k  la  demito  guerre  des 
Russes  montrent  que  hi  pcste  des  an- 
nto  pr6o6dentes  avait  be»icoup  r^uit 
la  population:  on  ne  revalue  qu'ik 
dbatre^ingt  mule  flmes.  Le  nombre  des 
ramilles  turques  est  porti  k  onze  mllle 
sept  cent  trente-trois,  et  oehii  des  fa- 
milies chr^ennes  k  quatre  mille  six 
cent  quarante-dnq;  on  y  trouve  dn- 
quante  ftunilles  du  rit  grec,  et  six  cent 
quarante<9nq  du  rit  catholique.  La  po- 
puUtion  n'est  pas  toute  armenienne;  il 
s'y  trouve  beancoup  de  Turcs,  de 
Grecs  et  de  Gtorgiens;  on  y  voit  une 
grande  cbapeUe  annlnienne.  Les  mai- 
sons,  construites  en  bois,  sont  assez 
basses.  Le  froid  y  est  trds-vif ,  et  hi 
neige  oouvre  la  terre  la  moiti^  de 
I'ann^.  Dans  le  voisinage  de  la  ville 
coulent  des  eaox  min^rales  fort  c6- 
ld>res^  Le  gouvemenr  qui  y  r^ide  est 
un  pacha  k  trois  queues. 

La  dtadeUe  seuie  (*),  qui  occupe  le 
centre  de  la  ville,  est  prtentement 

(*)  Toy.  la  planchen*  3 


H 


rUNlVEES. 


fortMMe;  die  ett  sitii^  sur  une  petite 
toitienee  et  entour^  (fun  fos^  assez 
Dfofond;  une  double  enceinte  de  murs 
renvironne,  mais  le  second  mur  seu- 
lement  est  en  bon  tot;  il  est  bdti  de 
pierres  carrto  et  solides  avec  assez  de 
rtoilarit^  ,«cfao8e  fort  rare  dans  les  for- 
tincations  desTurcs.  Les  maisons  n'ont 
ou'un  toffe,  et  leor  cb^ve  apparence 
aonne  h  rint^rieur  de  la  ville  un  air 
de  d^nAment  et  d'abandon  qui  attriste 
le  voyageur^  Les  toits  plats  des  mai- 
sons forment  une  esp^  de  terrasse 
enduite  de  terre  glaise  que  tapisse  une 
petite  mousse  verdAtre,  et  cette  im- 
mense mosaTgue  de  verdure ,  form^e 
par  Tagglomeration  des  toits,  donoe 
de  loin,  a  Erzeroum,  |>lut6t  Taspect 
d*une  prairie  que  d'ane  ville.  Da  r^te , 
les  environs  sont  nus  et  arides,  et  k 
peine  Toeil  rencontre-t-il  quelques  jar- 
dins  dans  la  plaine.  Les  Arm^niens 
dissidents  sont  r^gis  spirituellement 
par  un  6vtoue ,  qui  a  sous  sa  juridiction 
tout  le  i>adialik.  Un  s^minaire  assee 
Dial  administr^  ne  peut  sufifire  h  Tins- 
truction  du  clerg6,  qui  est  ignorant  et 
pen  nombreux.  Aueune  tole  n'est  to- 
blie  pour  la  jeonesse^  et  il  est  trte- 
difBcile  de  renccmtrer  oms  femme  qui 
sacbe  lire*  C'est  cbez  les  Armteiens 
catboliques  ^e  Ton  tvou^  ieulcment 
une  civilisation  grogrestive  et  dee  eon- 
naiasanccs  ^tenducs.  Leor  noinbre  ^kt- 
croft  chaqae  jour,  et  lea  fruita  qu*ils 
recueilleni  senient  eoeore  plus  abon- 
dants,  i^ils  tolent  ^ergiqaemeiit  se- 
condte  par  I'tgliae  d'Oaadent.  L'^ta- 
blisaeraent  des  mtasMmnaires  catboli- 
ques remonte  a  VmmSt  1688.  Ge  furent 
les  j^suites  qui,  aooi  la  protectioD  de 
rambassadeurfranfais  4  vuirent  lea|V«- 
roiers  eieroer  Icur  £^le  qxntolique 
dans  cea  cobMu.  Us  omt  en  pleaieors 
perateutions  violentes  li  endurerf  dont 
le  oontre<<oapretomba]t  avec  violence 
aur  leur  nrtlt  troopcau;  mais  rien  n'a 
pu  ^ranler  la  Constance  de  ees  fiddles, 
oui  trouvaient  dans  Fint^rit^  de  lear 
m  un  adoucissemeni  cflicaoe  k  tous 
leora  mam. 

•  Le  climat  d*£rzeroum ,  dit  Tour- 
nefdft  dans  son  voyage  dn  Levant ,  est 
extrtoiement  froid.  Je  ne  suis   pas 


6tonn6  de  ce  one  Lucalhu  troote 
strange  que  les  oiamps  fussent  encore 
tout  nus  au  milieu  de  P^t^,  hii  oui 
venait  dltalie,  oh  la  moisson  est  faita 
dans  ce  temps-lli.  n  fnt  encore  bien 

{)lus  surpris  de  voir  de^la  glace  dans 
'equinoze  d*automne ,  d'apprendre  qoe 
les  eaux  par  leur  fifoideur  faisaient 
mourir  les  chevaux  de  son  arm^ ,  qu'il 
fiedlait  cesser  la  glace  poor  passer  les 
rividres,  et  que  les  soldats  ^talent  for- 
c^  de  camper  parmi  la  neige  qui  ne 
cessait  de  tomber.  Alexandre  S^y^ 
ne  fut  pas  plus  satis&it  de  ce  pays. 
Zonare  remarque  que  son  arm^e,  re- 

Sassant  par  l'Arm6nie ,  fut  si  maltait^e 
a  froid  excessif  qui  s'y  feisait  eenfeir, 
qu*on  fut  oblige  de  couper  les  mains  et 
MS  pieds  h  plusieurs  soldats  aue  Poa 
trouvait  k  demi-gel6s  sur  les  diemnis. 
Cette  ville  est  le  passage  et  le  repoaoir 
de  toutes  les  marebandisea  des  Indes. 
Ces  marcbandises,  dont  les  prindpales 
sont  la  soie  de  Perse,  le  coton,  les 
drogues,  les  toiles  jpeintes,  ne  font 
que  passer  en  Arm^nie.  On  y  vend  tr^ 
pen  en  detail,  et  on  laisserait  mourir 
un  malade  foute  d*nn  groade  rfaiifatfbe, 
quoiqu'il  y  en  eAt  plusieurs  ballet  tent 
entims.  On  n'y  d^ite  que  dn  caviar, 
qui  est  un  ragotlt  d^testiMe.  Ceat  un 

C'overbe  dans  le  pays^  que  si  I'on  vou- 
it  doimer  a  dejeuner  an  diaide,  il  In- 
drait  le  r6galer  avec  do  cal(6  Sana  aocre , 
du  caviar  et  du  tabac;  je  voodraisy 
igouter  le  vin  d*£r2eroum.  Hern  flf- 
mes  surpris  de  voir  arriver  iiEneroum 
une  si  grande  quantity  de  gafMiee, 
qo'ila  appdlent  6oia;  die  vient  de 
Perse,  d  aert  pour  la  teinture  des 
Guirs  et  des  toim.  » 

J^re%f  on  Erzenga,  Tune  des  vBies 
principales  du  mtoe  pachaiik  dlMe- 
roum,  teit  cA^bre  dies  les  amiedo 
par  aes  temples  dev^s  k  la  ddasse 
Anabid,  qui  est  la  Vtois  dei  Orett. 
Les  antiquaires  pomrndeot  MM  de 
pri6cien8eB  d^eouvertca  pafioi  lis  r«- 
nes  que  phisienrs  trsmManiHits  de 
tsrre  ont  aocnnroUes  dais  sss  eaeeMe. 
EUe  fut  longltmiii  g/smsiiide  pas  das 
6mirs  mogols  ou  tartares,  qui  en 
conservirent  la  souverainet^  jveqte 
sous  les  fils  de  Tamerlan. 


ARMeiflE. 


15 


) 


AfUf  boofg  d^ndant  aujourd'hui 
d'Encroum,  et,  ancienDement,  forte- 
resse  cfl^re  que  d^end  la  rive  ooci- 
dentale  de  TEuphrate.  A  I'^tablisse- 
ment  du  christiaoiame,  aa  biblioth^ue, 

Sr^deuae  pour  les  traditiona  antiques 
e  la  Perse,  fot  d^truite.  Elle fut  Iod^- 
temps  le  d6p6t  des  tr^sors  et  des  n- 
cfaesaes  des  rois  arm^eDS. 

Berdi,  ou  Berdaah,  petite  ville  qui 
aoquiert  chaquejour  de  IMmportaDce 
depuis  la  conquete  de  oette  province 
par  la  Russia.  EUe  6tait,  au  nuiti^me 
sitele,  la  r^idence  dea  rois  des  Agho- 
vans. 

Aniy  qu'il  ne  &ut  pas  confondre 
avec  ie  bourg  de  ee  mema  nom.  Elle 
faX  longtemps  la  capitale  de  TArm^nie 
enti^  Situte  au  confluent  de  I'Ak- 
liour^  et  dtt  Rhab,  qui  se  iettent 
dans  TAraxe^  elle  oontenait,  dit-on, 
au  onzitoe  si^e,  cent  mille  maisons 
et  mille  ^lises.  En  1064,  aprte  avoir 
^t^  iivrde  par  trahison  auz  Grecs,  die 
iut  prise  d^assaut  par  le  sultan  Seld jou- 
kide  Alp-Arslan.  IjCs  Armtoiens  ren- 
trkent  en  possession  de  cette  ville, 
mais  pour  peu  de  temps,  ^tant  toa- 
jours  diasses  par  les  hordes  toan- 

Sires.  En  1319,  elle  fut  boulevers^  et 
dtruite  de  fond  en  comble  par  un 
tremUement  de  terre.  line  partie  des 
habitants  se  r^fiigia  dans  bi  Grim^, 
ou  leurs  descendants  existent  encore 
prtentement. 

M.  Ker-Porter,  qui  a  visits  ses  mi- 
nes, nous  en  fait  une  description  bien 
propre  ^  6veiller  Tattention  des  autres 
voyeurs.  D^fendue  d*un  odt^  par  la 
rivim  Aipatcfaai,  elle  est  femwe  au 
nord  et  ^  rest  par  un  double  rang  de 
hautes  muraillei  et  de  tours  dont  la 
construction  6tonne.  Toute  la  surface 
du  terrain  ne  pr^sente  que  des  debris 
de  colonnes,  de  statuea,  dont  Teztoi- 
tion  est  parCadte.  Ce  qui  reste  de  qud- 
guea  ^ses  nous  donne  une  haute 
Kite  de  leur  andenoe  magnificence. 
Mais  ce  qu*il  y  a  de  plus  fmKligieux, 
€esi  Panaen  palais  des  rois  d' Anmnie ; 
on  le  prendrait  pour  une  ville,  k  son 
itendue.  H  est  si  magnifiquement  d^ 
cor6  au  dedans  et  au  dehors,  qu'au- 
cune  description  ne  saurait  donner  une 


id^  de  la  variM  et  de  la  ricbease  des 
sculptures  qui  en  couvrent  toutes  lea 
parties,  ni  des  dessins  en  mosafqne 
qui  oment  le  sol  de  ces  salles  innom- 
brables.  Toua  les  restes  d'Mifice  que 
renferme  cette  ville  exdtent  Tadmira- 
tion  par  la  solidity  de  la  bAtisse  et 
rexceUence  do  travail. 

f^agharsehabad,  bAtie  six  sikles 
avant  notre  ire ,  par  le  roi  £rovant  I*', 
et  qui  fut  le  siege  du  royaume.  Aujour- 
d'bui  elle  est  entiirement  niin^,  et  il 
n*en  reste  que  I'^ise  d'Ecsmiazin, 
dont  nous  donnerons  la  description 
dan\un  futre  lieu. 

Ardoichadj  bfltie  d'apr^  les  avis 
d'Annibal,  sdon  Strabon  et  Phitarque: 
elle  fht,  vers  la  fin  du  auatri^e  siede 
de  notre  ktt^  bi  r^ioienoe  des  rois, 

gui  la  quittmnt,  k  cause  de  Tinsalu- 
rit^  de  Fair,  pour  aller  a'^tablir  k 
Tovin.  Les  Armtoiens  donnent  ao- 
tuellement  k  ses  mines  le  nom  d'Ar- 
dascbar.  Cbardin  les  a  viait^es,  et  il 
parle  avec  admiration  des  d^ris  d'un 
magnifique  palais  nomin^,  par  les  ba- 
bitanta  du  pavs,  TaJM  Terdat,  c'est- 
Mire,  le  trone  de  Tiridate,  nom  qui 
lui  vient  probablement  du  premier  roi 
chr^en  de  I'AnnMe. 

Tcvin  ou  Tevin^  ainsi  nommte  par 
les  Persana,  selon  rhistorien  Bioise  de 
Khoren^  k  cause  de  sa  podtion  sor 
une  colline,  bien  que  ce  mot  ne  se 
trouve  point,  comme  il  le  pretend, 
avec  cette  signification ,  dans  la  langue 
persane ;  elle  fut  qudque  temps  la  ca- 
pitale des  rois,  et  les  patriarehes  y 
tranafl^drent  leur  si^e  k  pludeurs 
reprises.  Elle  fut  conquise  par  les  Gter- 
giens ,  puis  par  les  Atabeks  de  T  Ader- 
baHyan ,  et  enfin  par  les  Mogols.  De- 
puis cette  ^poque .  die  est  condd^a- 
blement  draiue :  les  voyagenrs  m^me 
nous  la  d^pdgnent  comme  une  ch^tive 
bouigade. 

L'ao  894  de  notre  to,  la  vUle,  oui 
^tait  alors  florissante  et  bien  peapm , 
fut  rain^e  par  un  treroblementde  terre. 
Nous  emprunterona  k  la  plume  riche- 
ment  descriptive  de  Jean  VI,  rhisto- 
rien et  le  patriarche ,  le  r^t  de  ce 
dtostre  dont  il  avdt  H/i  en  qudque 
sorte  le  t^moin  oculaire.  «  vers  ce 


16 


UUNIYERS. 


temps « lUHiB  dit-il ,  un  borribie  trem- 
blement  do  tern  arriva  aubitement  la 
nuit  k  ToYin.  Le  trouble,  la  atupeur , 
Ta^itation  et  la  ruine  pestont  h  la 
fois  sur  les  habitanti  de  la  Tille  cnii 
fut  boulevers^  de  fond  en  oomble. 
Car  lea  murailles  d'enoeinte ,  lea  palais 
dea  eranda  et  les  bumbles  maisons  du 
peuple,  forent  ^alement  renvers^s; 
et,  en  un  clin  d'oeil,  cea  lieux  devin- 
rent  comme  la  plaine  sterile  d'un 
d^rt.  L*^difice  sacf^  de  T^lise  m6tro- 

Solitaine  et  les  autres  chapellea  soU- 
ement  bdties,  furent  &ranl^,  d^- 
molis  et  ruin^a ,  et  offrirent  la  Crista 
similitude  de  cavemes  encombr^es  de 
roca  arides.  A  la  yue  des  monoeaux 
decadayrea  6toufif<68  sous  lesd^mbres 
dea  toits ,  ensevelis  sous  terre  ou  rou- 
lant  sur  la  pouasi^re,  le  coeur  le  plus 
insensible  et  ausai  dur  que  le  roimer , 
^it  saisi  dedouloureuzg^missementa, 
et  se  fondait  en  larmes.  Je  ne  parlerai 
point  dea  membres  de  la  meme  fa- 
mine ,  dea  amis  ou  des  personnes  unies 
par  dea  liens  de  parente ,  inconsolables 
dana  leur  douleur ,  leur  deuil  et  leura 
lamentations ;  je  tairai  les  pleurs ,  les 

Stoissements  et  les  ebants  fun^res 
ea  jeunes  filles ,  dea  bommes  et  dea 
femmea  se  d^lant  sur  leurs  pertes , 
et  Levant  leurs  eria  juaqu*au  del. 
Quant  k  la  multitude  des  morts ,  elle 
ebit  telle ,  que  les  tombeaux  n'j  pou- 
▼aient  sufnre ,  et  beauooup  6taient  ie- 
t6s  dans  de  larges  foss^  ou  dans  lea 
erevasaea  des  robbers. » 

Ani  se  releva  de  ses  mines,  et  Ka- 
kig  n ,  dernier  roi  des  Pagratides ,  la 
oAsL  aux  Grecs  ^i  ^tablirent  un  gou- 
vemeur  avec  le  titre  de  due.  En  1064 , 
le  edl^re  sultan  des  Seldjoukides , 
Alp-Arslan,  assidgea  la  ville,  et  s'en 
empara.  II  rasa  les  murailles  et  laissa 
un  (;ou?emeur  persan ,  qui  cMa  ses 
droits  k  V6mir  de  Tovin,  pour  une 
somme  d*argent.  Get  6mir,  nomm6 
Fhadloun ,  aborigine  kurde ,  en  donna 
le  gouvemement  k  son  petit -fils  Ma- 
noutch^,  qui  rebAtit  les  murs  de  la 
ville ,  et  y  ap^la  an  grand  nombre  de 
nobles  armoiiens. 

fTm,  situ^,  au  sud-est ,  sur  la  nve 
du  lac  qui  porte  le  mtoe  nom ;  cette 


ville  est  fort  ancienne.  D*apr^  les  an- 
ciennes  traditions ,  elle  fut  fondle  par 
S^miramis,  quirappela^^m^anocarfe. 
Plusieurs  bistoriens  ont  d6crit  majgni- 
fiquement  les  antiques  constmctiona 
qu'elle  renfermait ,  et  qu*on  attribuait 
aux  aouverains  de  rAssyne.  Lorsmie 
Timour  envabit  cea  pays ,  il  vooiut  a6- 
truire  ces  vieux  monuments ;  mais  leur 
solidity  ofifrit  un  obstacle  msurmon- 
table  II  aon  vandaliame.  On  voit  encore 
dea  travaux  semblables  aux  constrac- 
tiona  dites  miopdennes,  entr^ris 
dlans  le  but  de  servir  de  digue  aux 
eaux  envahissantes  du  lac;  et  nul 
doute  que  oe  monument  ne  remonte 
aux  ft^es  les  plus  recul^. 

L'historien  Molse  de  Kboren  parle 
aussi  d'une  montagne  artificielle  que 
Steiramis  ^eva  au  nord  de  la  ville 
actuelle,  sur  laquelle  elle  avait  place 
aon  palais.  M.  Sdralz ,  qui ,  par  ordre 
du  gouvemement  fran^is ,  visitait,  en 
1837,  cette  contr^,  et  qui  a  trouv6 
une  fin  malbeureuse  cbez  lea  tribua 
aauvages  des  Kuides ,  a  reoonnu  la  oof- 
line  form^  d'dnormes  quartiers  de  ro- 
diers ,  et  qui  porte  la  dtadelle  actuelle. 
Cette  oollme  s*^teod  de  Touest  k  Pest 
Peapace  d'une  beure  de  chemin.  A  Tin- 
t6neur,  aont  d'immenaea  cavemes  et 
des  sallea  voAt6es  oik  Ton  trouve  beau- 
ooup de  d^ris  de  statues.  Ge  qu'il  y  a 
de  plus  remarquable,  ce  sont  les  ins- 
criptions cun^formes,  ou  en  fimne 
de  clous,  qui  couvrent  I'entree  et  les 
flancB  de  la  montagne,  et  que  H.  Schulz 
a  copito  pour  la  premiere  fois.  Toute 
la  contr^e  est  converte  de  mines  qui 
semblent  £tre  de  la  mtoie  nature  que 
eelles  de  la  ville. 

Le  aouvenir  de  S^miramis  s'est  con- 
serve dans  ces  contrto,  car  Tune  des 
petites  rividres  qui  descendent  des 
montagnes  des  Kurdes  dana  le  lac, 
porte  encore  le  nom  de  Torrent  de 
S^miranUs. 

II  convient  de  donner  ici  la  traduc- 
tion du  chapitre  ou  Moise  de  Kboren 
rrle  des  andennes  constructions  de 
grande  rdne  de  T  Aasyrie.  On  verra 
que  le  r^t  des  voyageurs  moderoes 
Concorde  avec  le  sien. 
'  •S6miramis,  apres  a'ltre  repos^t 


arm£nie. 


17 


quelques  jours  dans  la  plaine  d' Ararad , 
aiDsi  nonuD^  du  roi  Ara,  s'avan^a 
vers  uDe  region  montaeuse ,  situ^  au 
nord(car  c^^it  la  saison  de  V6t6). 
pour  se  rto6er  dans  ces  riantes  cam- 
pagnes  et  oes  champs  en  fleur.  La 
beautd  du  pays,  la  puret^ de  Tair,  la 
limpidity  des  sources  et  le  murmure 
de  rivieres  majestueuses  dans  leur 
cours,  frapp^nt  sa  vue:  «I1  faot, 
dit«lle,  batir  une  ville  et  un  palais 
propre  a  habiter ,  dans  ce  lieu ,  ou  Tair, 
reau  et  la  terre  sont  si  salubres ,  afin 
de  passer  agr^ablement ,  en  Arm^nie, 
la  quatridme  partie  de  Tann^,  V€U^ 
et  de  rester  k  jNinive  pendant  les  trois 
autres  saisons  plus  fit>ides. » 

«  Ayant  traverse  une  certaine  ^ten- 
due  de  pavs,  elle  arrive  au  bord  d*un 
lac  sal6.  Elle  aperfoit  sur  ses  rives  une 
oolline  allongee,  s'^ndant  de  I'ouest 
a  Torient ,  et  l^^ement  incline  vers 
le  nord ;  tandis  qu*au  midi  ^tait  une 
caveme  profonde,  ouverte  vers  laciel. 
II  y  avait  aussi ,  an  pea  plus  au  sud , 
une  vall^  longue  et  Diane  qui ,  en  tour- 
nant  du  e6U  oriental  de  la  montagne , 
redescendait  vers  le  bord  du  lac, 
comme  un  torrent  lone  et  sinueux. 
De  grands  ooors  d'eau  cTune  agr^le 
saveur,  sortant  de  la  montagne^  apr^ 
s'^tre  infiltr^s  h  travers  les  ravins ,  et 
s'^tre  r6onis  dans  la  partie  inf(6ri«ure, 
s'^pandaienten  larges  rivieres.  A  droite 
et  a  gaudie  s'^levaient  de  nombreux 
Edifices;  et,  k  Torient  de  cette  mon- 
taene  enchants,  on  voyait  une  autre 
ooTline  plus  petite. 

«  S^miramis,  ayant  fix6  son  choix 
sur  oes  lieux ,  fit  venir  sur-le-champ, 
dans  1  endroit  qui  la  charmait ,  vingt- 
deux  mille  manoeuvres  de  I'Assyrie  et 
des  autres  parties  de  ses  £tat8 ,  puis  six 
cents  de  ses  plus  babiles  ouvriers  exer- 
c^  k  travaiaer  le  bois  et  la  pierre, 
Tairain  et  le  fer;  ce  qui  fut  ex^ut^ 
conform^ment  h  ses  ordres.  On  lui 
amena  done  promptement  une  multi- 
tude d'ouvriers  apprentis,  sous  la  oon- 
duite  d'architectes  et  de  maltres  ins- 
truits  dans  leur  art.  EUe  commenca 
par  faire  oonstruire  une  digue  pour  la 
rivi^e  avec  des  quartiers  de  rocher 
d^ane  ^norme  grandeur,  cimentds  avec 

^  Uvraison,  rARMENiE) 


de  la  eliaux  et  du  sable ,  dans  des  pro- 
portions prodigieuses  de  longueur  et 
de  largeur ;  construction  qui  subsiste, 
dit-on ,  dans  toute  sa  solidity,  jusqu'i 
ce  jour.  On  nous  a  racont^  que ,  dans 
les  crevasses  et  les  souterrains  de  cette 
di(nie,  les  brigands  et  lea  gens  pros- 
cnts  cherchent  une  retraite  aussi  sdre 
que  sar  les  sonunets  des  rocbers  et 
des  montagnes.  Que  si  quelqu'un  vou- 
lait  en  faire  I'expdrience ,  if  ne  pour- 
rait  ,  malgre  tons  ses  efforts,  d^tadier 
de  cette  aigue  une  petite  pierre  ^rosse 
oomme  celie  d'une  fronde.  L'ajuste- 
ment  des  blocs  est  si  parfait,  que 
celui  qui  les  considdre  croirait  que  Ic 
tout  est  le  jet  d'un  liquide  fondu.  La 
digue  se  prolonge  Tespace  de  plusieurs 
parasanges,  jusqu'ji  Templacement  de- 
sign6  de  la  ville. 

«  La  reine  divlsa  en  plusieurs  ordres 
la  troupe  des  ouvriers,  et  pr6posa  a 
chacun  de  ces  ordres  des  mattnes  ba- 
biles dans  leur  art.  Ayant  press^  de 
cette  mani^  Touvrage,  au  bout  de 
quelques  anndes  elle  termlna  ce  mo- 
nument admirable  par  ses  murs  indes- 
tructibles,  et  dont  les  portes  ^iept 
d*airain.  Au  milieu  de  la  ville ,  elle  fit 
bAtir  en  f^ande  quantity  des  maisons 
dont  les  pierres  etaient  de  dififi^rentes 
couleurs,  et  h  deux  et  trois  stages, 
toutes  convenablement  expose  au 
soleil ;  die  divisa  les  quartiers  de  la 
Vflle  en  un  certain  nombre  de  rues 
spacieuses  et  r^lidres ,  et  elle  y  cons- 
truisit  des  bains  somptueux.  Une  bran- 
che  du  fleuve  d^toum^  fut  distribu^ 
au  milieu  de  la  ville  pour  les  divers 
besoins  des  habitants ,  et  pour  I'arro- 
sement  des  vergers ,  des  jardins,  et  des 

f>arties  environnantes  de  la  ville ,  sur 
a  rfve  droite  et  la  rive  gauche  du  lac. 
Tous  les  lieux  exposes  au  nord ,  au 
midi  et  au  levant ,  furent  embellis  de 
chAteaux,  d'arbres  touffiis  aux  fraits 
et  aux  feuillages  varies.  Elle  planta  la 
vigne  dans  beaucoup  de  fertiles  vallons, 
et,  lorsque  la  ville  fiit  ceinte  d^une 
muraille  remarquable  par  sa  structure , 
elle  y  fit  habiter  une  colonic  d'hommes 
innombrable. 

. «  Comme  pen  de  personnes  ont  po 
connattre  Traifice  qu*el1e  construisit  ^ 

2 


18 


L'UNIVERS. 


la  pointe  de  la  ville,  et'les  admirables 
travaux  qu'elle  y  extota,  nous  n'en 
parlerons  pas.  Apr^  avoir  environn^ 
ces  hauteurs  d*un  mur  dont  les  entrees 
etaient  aussi  difBciies  que  les  issues , 
elle  y  bdtit  des  palais  pour  sa  r^i- 
dence,  et  des  retraites  terribles. 
N'ayant  aucun  renseignement  positif 
sur  ces  constructions,  nous  nosons 
pas  les  d^rire.  Nous  nous  contente- 
rons  de  rapporter  au*on  s'aocortte  g^ 
u^ralementa  regaraerce  travail  comme 
le  premier  et  le  plus  imposant^e  toutes 
les  constructions  royaies.  En  face  de 
la  caverne  expose  au  sole!! ,  dans  ce 
roc  si  dur  que  le  poin^on  d'acier  ne 
peut  y  tracer  une  seule  ligne ,  elle  avait 
pratique,  de  distance  en  distance,  des 
temples ,  des  salles ,  des  lieux  de  d^ 
p6t  pour  ses  tr^sors,  et  de  longs  sou- 
terrains  ,  sans  que  personne  puisse  sa- 
voir  exactement  la  destination  de  ces 
travaux  surprenants.  Sur  toutes  les 
parois  du  rocher ,  elle  a  grav6  de  nom-' 
breuses  inscriptions,  comme  celled 
que  le  stylet  empreint  sur  la  cire ,  chose 
dont  la  vue  seule  frappe  tout  le  monde 
d*^tonnement.  En  outre,  die  61eva, 
dans  le  pays  des  Arm^niens ,  beaucoap 
de  colonnes  qu*elle  couvrit  d'inscrip- 
tions  pour  perp^tuer  sa  memoire. 
Dans  beaucoup  de  lieux ,  elle  posa  des 
limites  charg^^  de  la  m6me  toiture.* 

Ces  details,  donn6s  par  un  auteur 
du  cinqui^me  si^e  de  notre  ^re ,  sur 
des  monuments  encore  existants,  et  vi- 
sit6s  r^cemment  par  des  voyageurs, 
font  vivement  d^irer  que  quelque  sa- 
vant puisse  un  jour  d^chinrer  cette 
6criture  qui  paralt  6tre  ctmHforme^ 
et  nous  expliquer  ces  inscriptions,  a 
Taide  desquelles  on  suppl^rait  vrai- 
semblablement  a  d'importantes  lacu- 
nes  de  rhistoireancienne  de  rAssvrie. 

Le  P.  Luc  Indjidjan,  membre  tr6s- 
distiiijgu^  de  la  congregation  des 
M^hltaristes  arm^iens  de  Venise, 
nous  donne,  dans  sa  G^grapbie  de 
TArm^nie ,  les  details  suivants  sur  les 
antiquit^s  de  la  ville  de  Van ,  traduits 
par  M.  Saint-Martin. 

«  Au  nord  de  la  ville, dit-il,  en  ligne 
droite ,  est  une  tr^-haute  montagne 
•de  pierre ;  on  ne  pourrait  en  atteindre 


le  sommet  avec  une  balle  de  fusil: 
c'est  la  que  fut  fond^  et  taill^  le  cha- 
teau impenetrable  de  Van,  oavnge 
de  Semiramis  (*).  Cette  montagne  est 
d*ane  pierre  dure  d'on  genre  particu- 
lier;  elle  s'etend  de  Touest  a  Test, 
Tespace  d*une  heure  de  chemin:  le 
pied  de  la  montagne  du  cdte  du  midi , 
est  oontigu  aux  murailles  de  la  ville ; 
c'est  III  qu^est  le  faubourg.  Cette  mu- 
raille  et  le  chateau  sont  a  une  demi- 
heure  de  distance  du  lac.  Le  cdte  ex^ 
terteur  de  cette  montagne ,  c^esMniire, 
celui  qui  est  an  nord  du  cdte  de  la 
plaine ,  est  une  hauteur  tr^s-escarp^ , 
remplie  d'enormes  rochers;  les  mu- 
railles ont  et6  souvent  detruites  et  re- 
construites. 

•  On  trouve  dans  rinterieur  de  ce 
rocher,  en  cinq  ou  six  endrolts,  d'im- 
menses  cavemes  creus^es  dans  le  roc 
par  les  anciens ;  les  portes  en  sont  tour- 
nees  du  c6te  de  la  ville  ou  du  midi. 
On  voit  d'autres  cavemes  de  I'autre 
cAte  de  la  montagne,  c*est-^Hlire  au 
nord.  Elles  sont  toutes  abandonnto 
maintenant.  Ce  sont  les  excavations, 
les  cavemes,  les  souterrains  dont 
parle  Molse  de  Khoren. 

«  Du  cdte  du  midi ,  on  voit  une  ou- 
verture  tailiee  avec  la  plus  grande 
peine  dans  le  roarbre  le  plus  dur,  qui 
conduit  h  une  tres-belle  pi^  dont  le 
plafond  est  en  forme  de  vodte;  sur 
toute  la  longueur  de  Touverture,  se 
trouvent  des  inscriptions  dont  les 
lettres  sont  inconuues  aux  habitants. 
Cette  porte  conduit  jusqu'ao  centre  ou 
au  coeur  de  la  montagne.  II  est  fort 
difficile  aux  habitants  d>  parvenhr 
avec  des  dchelles ,  soit  qtt*iis  viennent 
par  en  haut  de  la  citadelle ,  ou  par  en  has 
de  la  ville.  On  trouve  egalement,  du 
c6te  du  nord ,  vers  le  bas  de  la  mon- 
tagne ,  trois  ouvertures  qui  conduisent 
aussi  h  des  pieces  dont  les  plafonds 
sont  en  forme  de  vodte :  on  voit  ega- 
lement  sur  ces  portes  des  inscriptions 
en  caract^res  inconnus  aux  habitants ; 
ce  sont  probablement  les  inscriptioiis 
en  lettres  anciennes,  tracto  par  rordre 
de  la  reine  Semiramis,  et  dont  parle 

(•)  Voy.  la  planefae  a«  4. 


AKMl&NIE. 


19 


Mofse  de  Rhoren.  Sur  lea  cdUs  nord 
et  Slid  de  oette  montagna  de  ^erre, 
on  a  scolpU,  en  divers  endroits,  de 
petites  croix  et  des  figures  d'bommes. 
II  n'y  a  pas  longtemps  gu'en  creasant 
dans  rint^rieurde  la  vilie,  on  a  trour^ 
una  statue  en  pierre,  reprdsentant  un 
bomme  h  cheval. 

•Cettemontagneetla  forteresse  n*ont 
pas  d'eau;  mais,  en  temps  de  paix,  il 
existe  un  chemin  faeile  par  lequel  on 
monte  du  pied  de  la  montagne  k  I'oc- 
ddent,  pr&  la  porte  I*keld  Kapmui; 
c'estpar  la  que  Von  porte  I'eau  n^ces- 
saire  aux  habitants  du  chfltean.  On  y 
trouve  une  source  d'eau  excellente  qui 
s'^coule  dans  le  lac ;  on  voit ,  aupr^  de 
ce  ruisseau,  de  tr^- grands  blocs  de 
marbre  qui  sont  abandonn^,  et  une 
tour  ruin^e  dans  le  yoisinage.  » 

II  n*e8t  pas  inutile  de  faire  observer 
id  que  les  lones  d^ils  favBsmis  par 
Diodore  de  Sicue,  sur  les  fpgantesques 
travaux  de  la  reine  S^miraniis  dans 
rArmtoie,  pourraient  fort  bien  ^re 
ceux  qu'on  lui  attribue  k  Van ;  et  cela 
avee  d'autant  plus  de  raison ,  que  la 
partie  de  I'Arm^ie  qui  comprmi  la 
▼ille  de  Van,  a  souvent  6ti  confondue 
avec  la  Medie  dont  elle  est  d'ailJeurs 
voisine ,  et  dont  die  a  m6me  port6  le 
nom  h  qudqnes  ^poques. 

Une  colonte  oonsid^able  de  jutfs,  a 
Tepoque  de  leur  dispersion ,  vint  s'^« 
bliroanscetteville;  et,  des  le  qua* 
tri^me  sitele,  ils  6taient  derenus  si 
nombreux,  que  le  roi  de  Perse,  Sa- 
por III,  s'^tant  empar^de  Van,  j  d^ 
truisit  dix-buit  milfe  maisont  de  juift. 
A  Vwtmie  des  Turcs  sddjoukides ,  elle 
tomba  en  leur  pouvoir.  limonr  la  prlt 
en  1 393 ,  et  y  fit  un  cama(;e  efifroyaole. 
En  1638,  les  Turcs  la  prirent  auxPer- 
sans;  et,  depuis  cette  ^poque,  ils  en 
oni  conserve  la  jouissanoe.  Elle  est  la 
capitale  d'un  pachalik  qui  a  dans  sa 
doiendance  unp  grande  partie  de  I'Ar- 
menie  turque,  et  qui  est  subdivis^  en 
treize  sanaiakats. 

Prte  de  van,  r^de  un  archevtoue 
aoi  tient  sous  sa  juridiction  tons  les 
er^qius  r^sidaut  autour  du  lac.  II  ba- 
l»te  le  monastte  de  yarah,  situ^  a 
six  milles  de  la  vlUe ,  sur  uiie  muutagne 


du  n^me  nom ,  et  qui  est  fort  c^lebre 
Chez  les  Arm^iens,  k  cause  d'une 
croix  plants  sur  ce  lieu  m^me  par 
sainte  Ripsimte,  jeune  vierge  marbre 
de  la  fot  dunttienne  sous  le  roi  Tiri* 
date(*). 

La  ville  est  encore  d^endue  par  one 
dtadelle  assise  sur  un  roc  isM  qui 
passe  pourtmprenable.  EUer^sistapiu- 
sieurs  ann6es  aux  armte  du  roi  de 
Perse  Abbas  II ,  qui  s*en  empara  en 
1636.  On  y  oompte  aujourdiitti  de 
quinze  k  vingt  mille  habitants. 
-  idesse,  appelee  en  syriague  et  en 
arabe  Owrha  ou  Rouhaf  bAne,  selon 
M.Buckinffham,  sur  les  ruinesd'Ur  (**), 
ville  chaldeenne  que  le  patriarcbe  Abra- 
ham quitta  pour  aller  habiter  Haran. 
Ce  savant  voyageur,  qui  I'a  visits 
demitoment,  Ta  trouv^  bien  bAtie, 
indastriease  et  oonuperfante,  et  porte 
jusni'ik  dnqnante  mille  le  nombre  de 
ses  nabitann.  Elle  fiit,  au  tamps-d'Ab* 
gare,  connn  par  lacorrespondanoaque 
la  tradition  lui  attribue  avec  Notre- 
Seigneur  Jtai»Ohrist,  la  capitate  de 
I'Arm^ie.  Elle  passa  tour  k  urarsous 
la  domination  desRomains  etdes  Ara- 
bos,  et  dloretomba  ensuite  au  pouvoir 
des  empereutv  de  Constantinople. 

En  1099,  Baodouin,  fr^  de  Godc- 
froy  de  Bouillon,  en  fit  la  oonquAte, 
et  elle  rests  entre  les  mains  des  Francs 
jusqu'en  U44,  qu'elle  leurfiit  enlev6e 
par  l^ad-eddin-ZoDghy,  sultan  des 
Atabeks  de  Syrie.  Ners^s,  Tuu  des 
toivains  les  plus  remarquables  de  I'Ar- 
m^e,  a  chants  dans  un  poeme  d^a- 
que  justement  renomm^,  la  prise  de 
cette  ville  infortun^s. 

Elle  est  maintenant  soumise  k  I'em- 
pire  ottoman  et  gouvemte  par  un 
pacha.  La  plus  grande  partie  de  sa  po- 
pulation est  encore  compost  d'Arme- 
niens. 

(*)  Nous  avoDs  rintention  de  reproduire 
dans  un  autre  lieu,  comme  inudele  de 
l^^de  armimeiine,  le  nartjre  de  eetle 
sainte ,  td  qu^il  est  rapport^  par  Agathange, 
historien  oontemporain. 

(**)  Gen^,  ck.  XI,  v.  aS.  Tajis  k  ee 
sujist  BtfdMrt  lu  Mialag: ,  I.  x ,  di.  ai ;  Cel- 
larius  in  Geogr.  ant.  p.  xi ,  p.  729-760;  Mi- 
chael is  Bibl.  oriest.  p.  stie  ,  p.  76. 

9. 


10 


L'UNIVEaS. 


NMbCy  en  armtoien  Medapin.  viJle 
ancienne  qui  fut  quelque  temps  la  re- 
sidence des  souverains,  et  connuepar 
le  si^e  que  Tigrane  y  soutint  contre 
les  Romains.  Amrte  la  mort  de  rem- 
pereur  Jttlien ,  eflepassa  sous  la  domi- 
oatkm  des  Perses ,  qui  ia  oonserv^nt 
loDgtemps,  malgr6  tous  ies  efforts  des 
Romains  pour  la  reoouvrer.  li  n*en 
reste  que  oes  muraiiies  et  autres  mines 
remarquables  par  leur  construction. 
Elie  mi  situ6e  a  oueique  distance  de  la 
ville  actueUe  de  Nissibin ,  d'une  medio- 
cre ^tendue. 

Bayazid  (*),  ville  pittoresquement 
situteau  fond  d'unevalKe  tooite,  en* 
touree  de  montagnes  nues  et  escarpto. 
Les  maisons  sont  ^prses  entre  les  ro- 
chers  qui  des  deux  c6t^  bordent  ie 
d<6fil^.  A  gauche,  sur  un  pic  pres^oe 
inacoessibiiB,  s'^dve  une  vieiUe  cita- 
ddle,  dont  on  attribue  la  construction 
au  sultan  Ba;fazid  ou  Bajazet  r',  sur- 
aomm^  Ild^m  la  Foudre.  Cest  dans 
oechfltean  que  M.  knMib^  Jaubert, 
dont  nous  avons  mentionn^  Ie  Toya^e 
en  Anotoie ,  fut  ddtenu  plusieurs  mois 
par  ie  perfide  jpacfaa  Mabmoud,  lors- 
qu*il  aUait  en  Perse  diarg6  d'une  mis- 
sion secrete  par  Na|x>16on. 

La  ville  de  Bayazid  a  acquis  demi^- 
rement  quelque  importance  par  son 
commerce.  Sa  population  pent  8*^ever 
a  quinze  mille  flmes. 

On  en  exportele  tabacet  lamanne, 
que  les  Persans  appdlent  ma,  et  qui 
se  trouve  en  grande  quantity  dans  le 
Louristan  et  dans  le  district  de  Rhou- 
sar  en  Irak.  L'aibre  que  cette  roanne 
semble-affectionner  {nrticuli^rement, 
et  sur  lequel  on  la  reoueiMe  en  plus 
grande  quantity,  est  le  chtoe  nain.  On 
ramasse  les  feuilles  qu'on  laisse  s^cher, 
puis  ensuite  on  les  essuie  soigneuse- 
ment.  On  Tapporte  dans  cet  ^tat  sur 
les  march^,  et  c'est  en  la  faisant  bouil- 
lir  qu*on  parvient  li  la  purifier  de  toutes 
ses  ordures  et  autres  parties  li6tdro- 
g^nes  qui  y  sont  toKiibk.  On  recueille 
aussi  sur  les  rochers  et  les  pierres  une 
autre  espdce  de  manne  blanche -beau- 
coup  plus  pure  et  plus  estim^qiie  ceile 

(*)  Toy.  la  planchs  n*^  7 


des  arbres  et  des  plantes.  La  saison 
oil  commence  cette  rtoolte  est  la  fin 
de  juin;  et  lorsqu'li  cette  ^poque  de 
Tannte  la  nuit  est  plus  froioe  que  de 
coutume,  les  habitants  du  pays  diaent 
qu'il  pleut  de  la  manne.  En  effet,  eile 
est  toujours  plus  abondante  le  matin 
au  lever  du  soleil. 

5is.  Dans  la  Cilicie,  qui  faisait  par- 
tie  de  TArmtoie  Mineure,  on  remar- 
que  la  ville  de  Sis,  situte  dans  una 
plaine  ji  vingt^uatre  milles  d' Anazarbe, 
au  nord,  sur  les  bords  d*une  petite  ri- 
vi^e  oui  se  joint  au  Djihan.  Elle  exis- 
tait  ^ik  au  dizitee  sirae  de  notre  ktt. 
En  1186,  le  roi  Uon  II  rapandritet 
I'orna  de  quelques  beaux  raifioes.  En 
1394,  k  la  suite  des  guerres  qui  afiU- 
geaient  le  pays,  on  transports  lesi^ 
patriarcal dans  cette  ville,  oik  ilam 
maintenu  depuis  cette  ^poque ,  quoioue 
le  titulaire  reside  k  Alqi.  Au^nrd'nul 
Sis  est  presque  totalement  ruinte. 

Anm  ou  HamW^  est  la  ville  que  les 
Turcs  appellent  Karm-AnUdf  k  cause 
de  Tenceinte  de  rocs  de  basalte  qui 
renvironne.  Sa  position  sur  le  Tigre 
a  change  avec  les  Ages.  Ammien  Mar- 
oellin  nous  apprend  qu'elle  etait  situ^e 
sur  la  rive  orientate,  et  auiourd'hui 
elles^eidvesur  lebordopposedu  fleuve. 
Avant  le  quatridme  sime  de  notre  dre, 
son  nom  n*est  mentionne  jMur  aucun 
historian.  La  chronique  syriaque  d*E- 
desse,  que  nous  trouvons  dans  Ass6- 
mani,  fixe  k  Tan  849  de  notre  hit  I'^po- 
que  oik  rempereur  Gonstance  ajsrandit 
consideraUement  cette  ville,qm  acquit 
par  la  suite  une  nouveUe  importince 
au  temps  des  guerres  des  emperenrs  de 
ConstantinopTe  et  des  rois  de  Perse.  H 
est  probable  qu'elle  oocupe  k  pmi  prte 
Femplaoement  de  I'ancienne  vilte  de 
Tigranoeerte,  ainsi  nommde  k  cause 
de  I'illustre  Tigrane,  son  fondatear. 
Elle  fut  longtemps  florissante  et  trte- 
peopl^  Pendant  les  guerres  des  Grecs 
et  dies  Perses,  elle  passa  plusieurs  fois 
k  chacune  de  ces  deux  puissanees,  qui 
la  prenaient  etla  perdaient  tour  li  tour. 
Elle  a  «t^  te  dief-lieu  d*un  pachalik 
puissant  qui  oomprenait  treize  sandya- 
kats  ottomans  et  nuit  saniyakats  tuns, 
depuis  que  les  villes  de  MerdiB« 


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*  . 

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•    •  •« 


•  t 


ARMENIE. 


91 


Nesibin,  Djezireh  et  Sindjarfont  par- 
tie  du  padudik  da  Bagdail ,  sod  terri- 
toire  est  moins  dtendu. 

irk>an(^).  On  suppose  que  lefonda- 
teur  de  cette  ville  est  £roTant  11 ,  qui, 
pour  oonsenrer  le  trtfne  jgu'il  avait 
usurps,  c6da  aux  Roinains  fiiesseaYec 
toute  la  Mesopotamia,  et  transporta 
sa  rteidence  k  Armavir,  ancienne  ca- 
pitate de  TArm^ie.  Peu  de  temps 
apres,  fatigue  du  s^Jour  de  cette  viile, 
11  en  fit  oonstruire  une  autre  au  con- 
fluent de  rAraxeaTeciefleuveAkbou- 
r6an,  qui  fut  appel^e  de  son  nom  £ro- 
vantaschad.  Moise  de  Khoren  nous  la 
reprtente  comme  situ^  au  milieu 
d'une  plaine  riche  et  verdovante  dont 
elle  semble  ^tre  Toeil,  tanais  que  les 
lisi^res  de  bois  et  de  vignobles  qui  se 
dessinent  a  Tentour  de  ses  murailles 
en  sont,  pour  ainsi  dire,  les  cils.  De- 
Duis  les  oonquttes  de  Nadir-Schar,  elle 
taisait  partie  de  la  Perse:  mais  depuis 
les  demi^res  conqu^tes  de  la  Russia, 
elle  a  €U  ajout^  h  rimmense  territoire 
de  oet  empire.  Le  fond  de  la  popula- 
tion est  tout  arm^nien.  M.  Ker-Por- 
ter ,  aui  I'a  visits  dernidrement ,  fiiit 
une  nelle  description  du  paysage  pit- 
toresque  qui  Fentoure.  Elle  est  arros^ 
par  la  rivito  Zengag,,  qui  ya  se  per- 
dre  dans  TAraxe.  Une  autre  petite 
riyidre,  leQuerk-Boulak,  est  distribute 
^  dans  la  yiUe  par  une  infinite  de  petits 
canaux.  Cbardin  nous  a  dterit  la  for- 
teresse,  qui  est  sans  doute  F^van- 
tagerd,  fond^  ^alement  par  £royant 
en  fftce  de  la  capltale.  et  qui  signifie 
cluUeauoQ  forteresse  d'£roTant.  Cette 
forteresse  pent  encore  passer  pour  une 
petite  ville.  EUe  est  ovale  et  a  quatre 
mille  pas  de  circuit,  avec  buit  cents 
boutiques  environ.  Les  Arm^niens  y 
ont  des  boutiques  oh  ils  travaillent  et 
trafiquent  le  Ions  du  jour.  Le  soir,  ils 
les  ferment  et  ren  retoument  1^  leur 
maison.  La  forteresse  a  trois  murailles 
de  terre  ou  de  briques  d*argile  k  ct& 
neaux,  flanqutes  de  tours  et  munies 
de  remparts  fort  droits,  selon  Tan- 
cienne  mani^re  de  fortifier,  sans  rtoi- 
larite,  k  la  ^n  de  FOrient.  II  edUt^ 

(•)  Toy.  It  plandie  no  8. 


mime  difficile  de  faire  un  ouvrage  r^ 
guiier,  parte  que  la  forteresse  s*elend, 
au  nontouest ,  sur  le  bord  d'un  6pou- 
vantable  prteipice  large  et  escarp^, 
de  plus  de  cent  toises  de  profondeur, 
au  tond  duquel  passe  le  fleuve.  La  ville 
est  eioignte  de  la  forteresse  d'une  por- 
t6e  de  canon.  II  y  a  deux  dglises  dans 
la  ville,  blties  du  temps  des  demiors 
rois  d'Armteie*  Les  autres  sont  peti- 
tes  et  enfoncte  dans  la  terre ,  ressem- 
blant  plutdt  h  des  catacombes. 

«  Procbe  de  F^vteh^,  dit  Cbardin  (*) , 
il  y  a  une  vieiile  tour,  bltie  de  pierres 
de  taille.  Je  n'ai  pu  savoir  ni  le  tero|» 
auquel  elle  a  6U  construite ,  ni  par  qui, 
ni  a  quel  usage.  II  y  a  au  dehors  des 
inscriptions  gui  ressemblent  h  de  Far- 
m^ien,  mais  que  les  Arm^niens  ne 
sauraient  lire.  Cette  tour  est  un  ou- 
vrage antique  et  tout  h  fait  singulier 
pour  Farcnitecture.  Elle  est  vide  et 
nue  par  dedans.  On  voit  au  debors 
plusieurs  mines  disposes  de  fagon 
qu'on  dirait  qu'il  y  a  eu  lit  un  clottre, 
et  que  cette  tour  ^tait  au  milieu.  » 
M.  Rer-Porter  a  chercb^  cette  tour, 
et  ne  Fa  pas  retrouvte.  On  lui  a  dit 
que  le  tonnerre  Favait  d^truite ,  et  que 
ses  mines  avaient  servi  a  r^parer  les 
murailles  de  la  ville.  Une  multitude 
de  monuments  couvrent  cette  plaine, 
qui  est  au  pied  de  FArarat.  C*est  bien 
la  qu'on  pent,  k  Faide des  mines ,  re- 
monter  aux  premiers  Hges  du  nionde. 
Les  prindpates  mines  sont  Ardashir, 
Kara-Kala,  Artaxate,  Armavir. 

Kars,  Cette  ville,  situte  au  paya 
de  Vanant,  est  arroste  par  FAknou- 
rten.  ConstantinPorphyrogenite,  qui 
la  n^arde  comme  la  capitale  de  FAr- 
m^nie ,  est  le  premier  out  substitue  le 
nom  de  Kara  k  ceiui  de  uarouts  qu*elle 

Sortait  anciennement.  Elle  fut  la  r^i- 
ence  des  rois  de  la  race  des  Pagratides 
depuis  Fan  928  jusqu'en  961.  Elle  fut 
prise  tour  k  tour  par  les  Turcs  sekijou- 
kides,  par  les  Mongols,  les  Persans  et  les 
Ottomans.  EUe  est  encore  auiourd'hui 
assez  consid^ble,  puisqu'elle  est  la 
residence  d'un  pacha  qui  a  dans  sa  d^ 
pendance  six  sandjakats. 

(•)  Voy.  la  pUnche  n?  fl. 


22 


L'UNIVERS. 


/ti{f«eu  Dfvtfa,  ville  assez  oomi- 
d6raoleqiie  Vtm  r«g»i«copiine  un  des 
faubourgs  d'Ispahan.  Eileen  est  separ^ 
par  les  jardins  do  roi^qui  ontunelieue 
d'^tendue,  etqiu  bordentlesdcox  cdtes 
du  chemja.  Au  miliea  de  ce  efaemui 
eat  un  canal  oikde  distance  en  diatanee 
on  a  m^nag^  de  grands  rterfoini.  Des 
arbras  fon  iHevin  q[u'oB  appdie  chi- 
narsy  fonneot  k  droite  et  a  gauche  on 
onibriige  agr^ble.  Entre  ces  arbres 
sont  <m  esp^oes  de  parterres,  mais 
sans  compartiments.  Au  bout  de  ce 
chemin  on  trouve  un  pont  de  pierre  de 
dix-huit  ou  vingt  arches,  fort  beau  et 
fort  long.  De  oe  pont  jusqu'ii  JuUb,  il 
n*y  a  plus  qu'un  quart  de  lieoe.  La 
population  armteienne  est  ^^alu^  h 
dix  mille  habitants.  La  rille  se  divise 
en  trois  parties  dqnt  la  principale  est 
Julfa,  la  seeonde  ISriran,  et  la  troisi^ 
me  Tauris.  On  y  confute  enTiron  vingt- 
deux  ^lises. 

Gette  ville,  que  Ton  appdie  aussi 
nouoe&u  Julfa,  recut  son  nom  du  Jul&, 
faisant  partie  de*  Tancienne  {nroTince 
de  Vasbourwan,  situ6  sur  la  rive  seu- 
tentrionale  de  I'Araxe,  au  sud-est  ae 
Nakhdjewan.  Cette  andenne  ville,  qui 
servait  de  passage  direct  pour  aller  en 
Perse,  toit  devenue  I'entrepdl  du 
commerce  :  aussi  s'aocrut^lle  consi- 
d^rablement.  En  1006,  le  roi  de  Perse 
Shah  Abbas  V  fit  d^ruire  cette  ville, 
et  il  en  transports  one  partie  de  la  po- 
polation  h  bnmban,  cit  il  lui  permit 
de  s'dtablir  oans  lea  environs  de  cette 
capitale. 

noQs  nous  dearterions  de  notre  but 
en  nommant  Urates  lea  colonies  par- 
tielkss  de  la  mdme  nation  stabiles  sor 
divers  points  de  TAsie,  particuliere- 
ment  dans  I'lndc  et  dans  plusieurs  con- 
trte  de  TEurope. 

FAMII.LB8  00  TmiBUS  ANCnilNBS 
BT  VODBBlfBS  DB  LA  NATION  ABMB- 

nibnnb;  colonib  allbmandb.  —  La 
race  armtoienne,  malgr^  son  unite 
d'origine,  se  divisait  en  plusieurs  tri- 
bos  seoondairea  fixto  en  divers  can- 
tons cA  elles  conaervaient  one  oertaine 
indipendance  fWrale,  tout  en  restant 
unies  au  corps  de  la  nation.  La  plus 
puissante  de  ces  tribus  €in%  celle  qui 


Sretendait  femonter  h  SIsag,  fils  de 
Legham,  ^uatritoe  deaesMant  de 
Haig.  Elle  etendtt  aes  poaaessrons  au 
dda  du  Koor,  et  die  donna  naiasnoce 
BOX  Agbovans^  dont  le  pays  est  le 
mtoe  qot  odui  ^0  les  Grecs  appdaieiit 
autrefois  Alfaanie.  «  Ge  pays « dit  Mo^ 
de  KJMMn ,  fiit  appeK  Aghomm  d^un 
motqui  exprime  la  oouoeur  des  moeurs, 
paroe  due  Sisas  toit  ausd  nonune 
j4gkou  a  cause  de  la  bont6  de  son  ea- 
ractte  (*).  » 

Cette  oommunaut^  d'origine  attri- 
buteaox  Aghovansestfort  contestable, 
vu  qo'ils  parlaient  une  autre  lan§|ue , 
laqiwlle,  suivant  le  m€me  histonen, 
mit  ffutturale,  tr^-dure  et  trea-ac- 
oentoee.  Aussi  Mesrob,  Tinventeur  de 
Talpbabet  arm^nien,  fot-il  Mif^  d*en 
former  un  autre  adapts  au  gtoie  de  la 
langue  d'Albanie,  oonune  il  Tavait  fait 
pour  les  Gdorgiens.  H  est  done  plus 

Srobable  que  les  Aghovans  ^taient  une 
e  oes  tnbus  nombreuses  r^ndues 
dans  le  Gaucase,  et  qui  ^ient  venues 
andennement,  sous  la  protection  des 
rois  arm^niens,  s*teblir  sur  les  bords 
du  Kour.  Au  temps  de  Vagharacfaag, 
ils  ^ient  soumis,  et  apr^  lui  ils  con- 
tinuant k  (aire  partie  de  la  nation 
arm^nienne,  jusqu'aux  temp»  de  Ti- 

Srane.  Mais ,  proutant  des  troubles  qui 
^rganiserent  le  royaume  lorsqoe  les 
Romains  Tenvahirent,  ils  seoou^reot 
le  joug  et  conquirent  leur  independence. 
Entreprenants  et  courageux,  ils  osd- 
rent  tenir  t^te  avec  suoaes  aux  legions 
romaines.  Quand  les  Arsacides  iment 
renvers^ ,  la  monarcbie  des  Aghovans 
agraadit  son  territoire  aox  d^pens  des 

(*)  Ea  effet  Jghtm  tignifie  en  armiiiicc 
douceur,  omtniie,  Les  persoones  qui  ne  oon- 
aaiuent  pas  la  Taleiir  de  certaines  lettres 
de  I'alphaDct  armenieD ,  pourroot  s'etonoer 
que  le  mot  j4ghovan  sott  le  mtoie  que  fe 
mol  grec  Alhania,  Mab  la  lettre  annenienoe 
tt>anscrite  par  les  deux  lettrei  gh  coirci- 
pond  aussi  4  I,  puisque  tons  les  mots  greo, 
par  exemple,  oi  oelte  lettre  se  retroore, 
s'^crifent  en  annenien  avec  nnrhad:  ainsi 
Paului  se  pronoDoe  Bogbos.  Noui  aroos 
done  Aloran  on  Aloban,  les  Graes  sobititiiant 
k  cheque  instant  le  ^  au  v;  d*oii  enfin 
Aiban,  Alhati; 


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ARM^NIE. 


23 


liens ,  paisqu'elle  envahit  les  pro- 
d*audi,  d\Ajrt8akh  et  de  Phai- 


Arm^niens  > 
vincesd* 

dagaran.  Sa  puissance  se  maintint  pin- 
siears  sidles  arec  le  m^me  ^lat,  et 
elle  r^slsta  avec  avantage  aux  Arabes. 
Les  invasions  des  Turcs  seidjoukides, 
vers  la  fin  du  onzidme  sitele,  d6trui- 
sirent  cette  monarchie.  Le  nom  seul 
des  Af^ovans  est  rest^,  et  les  peoples 
habitant  les  provinces  de  Gandjah, 
d'Eiivan  et  de  Nakdjewan,  soumises 
aujourd'hui  k  la  Russie,  se  glorifient 
encore  da  titre  di  Aghofuanlih. 

OoDiBNS.  —  Sur  les  rives  du  Kour 
et  pr^  Aei  frontidres  de  la  Gtorgie» 
^tait  situto  la  province  d*Oudi ,  entre- 
coup^e  de  hautes  montasnes  et  de 
vallto  sauvages  dont  les  tor^ts  et  les 
torrents  donnent  k  Taspect  du  pays , 
comme  au  caractdre  de  ses  habitants , 
quelque  chose  de  rude  et  de  severe. 
Les  Oudiens  n'^taient  point  le  m^me 
peuple  que  les  Aghovans ;  on  les  a  faus- 
sement  confondus  dParce  que  ceux-ci 
les  r6dai8irent  k  differentes  reprises  et 
les  Incorpor^ent  dans  leur  petit  rojau- 
me.  Au  commencement  du  troisitoe 
siecle  de  notre  ^re,  les  rois  d*Arm6nie 
^talent  encore  les  mattres  de  cette  con- 
tr6e,  etils  v  passaient  I'hiver,  au  rap- 
port d'Agathange.  R6unis  aux  Agho- 
vans h  I'epoque  de  la  chute  des  Arsa- 
cides,  les  Oudiens  leur  rest^rent  assez 
fiddlement  attach^.  La  haine  qu'ils 
portaient  aux  Arm^niens,  leurs  an- 
ciens  mattres,  les  aveugia  au  point  de 
prater  du  seoours  aux  Arabes.  lis  fai- 
saient  aussi  de  fr^uentes  incursions 
oik  ils  commettaient  beaucoup  de  d6- 
gflts.  Le  roi  Achod  I*'  marcha  centre 
eux  dt  les  r^prima.  Le  gouvemeur 
qu'il  laissa  dans  cette  province  sou- 
mfse  se  r^volta  bient^^t  eontre  son  au- 
torit^  et  se  rallia  aux  Aghovans,  dont 
la  puissance  infirieare  k  celle  des  Ar- 
meniens  ofErait  des  garanties  plus  sdres 
k  leur  ind6pendance.  A  dater  de  cette 
dpoque,  le  nom  des  Oudiens  reparatt 
a  peme  dans  Thistoire  d'Arm^nie,  et 
il  est  a  pr^omer  qu'ils  suivirent  la 
bonne  et  mauvaise  tortune  des  Agho- 
vans. 

Kabtmaniens. — Les  Kartmaniens 
^taientune  petite  tribude  TOudi ,  niats 


vivant  8^r6eetind^ndante  au  fond 
de  ses  vailte  fnacoessibles,  dont  plu- 
sieurs  forteresses  en  d^fendaient  ren- 
tr6e.  Les  Aghovans  en  firent  ()lusieurs 
fois  la  conqu^te,  sans  r^ussir  jamais  a 
soumettre   entidrement    ces    monta- 

fnards  courageux.  Ce  pa]^s  contimia 
'6tre  r6gi  par  ses  souverains  particu- 
tiers  jusque  vers  le  dixi^me  siecle. 

DZANABIBlfS  BT  DZOTBBIVS.  —  CeS 

deux  tribus,  r^es  chacune  par  un 
chef  particulier  a  qui  la  cour  de  Cons- 
tantinople donnait  dans  ses  actes  le 
titre  d'archonte  occupaient  les  mon- 
tagnes  que  Ton  appelle  Fortes  du  Cau- 
case.  Suivant  lea  Arm^niens,  cette 
petite  souverainete  aurait  6t^  fondle 
par  quelques  pr^tres  de  la  Chald^ 
tuyant  les  persecutions  des  califes  de 
Bagdad,  ce  qui  expliquerait  le  titre  ec- 
cl^siastique  de  chirreoique  que  portait 
le  prince,  quoiqu'il  fdt  simple  laique. 
Les  Arabes, d*apr^  Massoudy,  reven- 
dionent  de  leur  c6t^  I'honneur  d*avoir 
colonist  le  jiays  de  Dzanar.  La  cause 
de  r^mij^ation  aurait  6t^  Tattacheinent 
a  la  foi  chr^tienne  de  ces  cheiks. 

Kabkabibns.  —  Les  Karkariens, 
rel^u6s  k  I'extr^mit^  du  pays  des 
Aghovans  dans  les  fforges  du  Caucase, 
^taientunetribupanantune  lansuepar- 
ticuli^re.  Strabon  rapporte  qu'elle  etait 
venue  avec  la  tribu  des  Amazones  du 
ays  de  Tli^myscire  sur  les  bords  du 
ont-Euxin ,  et  qu'ensuite  elle  s'^tait 
avanc^  dans  Tinterieur  des  monta- 
gnes. 

Nous  ne  parlerons  pas  des  Kogh- 
thMens  9  des  Touschdouniens  et  dc 
quelques  autres  tribus  trop  peu  im- 
portantes  pour  £tre  mentionn^es  ici. 
Nous  ferons  remarquer  seulement  ce 
fait  assez  singulier,  que  la  Chine  a 
envoys  dans  rArm6nie  plusieurs  colo- 
nies. 

^HIOBATIONS  DB  LA  CHINB  BN  AB- 

MBNiB.  —  «  Pendant  les  dernieres  an- 
n6es  de  la  vie  d'Ardeschir,  dit  I'his- 
torien  MoTse  de  Rhoren,  un  certain 
Arpog  itait  <jienpagour,  c*est-lkiire, 
roi  des  Chinois ;  car  c*est  ainsi  que  dans 
leur  langue  les  peuples  du  Dfenasdan 
(de  la  uiine)  appellent  le  titre  royal. 
II  avait  deux  neveux,  Peghtokh  et 


E 
P 


34 


L'UMIVERS. 


Mamkon.  qui  ^taient  des  prinoes  dis- 
tineu^.  Peghtokh  calonmia  Mamkon, 
et  le  roi  Arpoc  ordonna  de  le  faire 
mourir.  Quana  Mamkon  en  fut  in- 
form^, il  ne  se  rendit  pas  k  rinvitation 
du  roi ,  qai  I'appelait  auprte  de  iui ,  et  se 
sauva  avec  \ei  sieos,  A  se  rtfugia  au* 
pr^  d'Ardeschirj  roi  de  Perse.  Arpog 
envoya  des  ambassadeurs  pour  le  re- 
demander;  mais  comme  Ardeschir  ne 
St  pas  atteDtion  k  sa  demande,  ie  roi 
du  Djdoasdan  se  pn^ra  k  Iui  faire  ia 
guerre.  Ardeschir  mourut  alors,  et 
Schabouh  Iui  suco6da. 

«  Ge  prince  ne  livra  pas  Mamkon 
entre  ses  mains,  parce  oue  son  pdre 
avait  jur^  par  la  lomi^re  du  soleil  ae  le 
proti^er.  «  Je  pause  avoir  assez  fait 
pour  vous,  ajoutait-il;  je  l*ai  cbass^  de 
roes  £tats,  je  Tai  envoT^  I  Textrdmit^ 
de  la  terre,  au  lieu  ou  le  soleil  se  cou- 
che,  ce  qui  est  comme  une  mort  cer- 
taine;  qu*il  n*y  ait  done  pas  de  guerre 
entre  vous  et  moi.  »  Comme  les  habi- 
tants du  Dj^nasdan  sont,'a  ce  que  Ton 
dit,  les  plus  pacifiques  des  habitants  de 
la  terre,  on  se  contenta  de  cette  expli- 
cation pour  fiiire  la  paix.  » 

MamKon  arrlva  done  en  Armdnie  a 
r^poque  oCi  Tiridate,  ce  roi  vraiment 
Chretien ,  remontait  sur  le  tr6ne  de  ses 
p^res.  Ce  prince  accueillit  Tillustre 
etranger  et  sa  nombreuse  suite  avec 
la  ^db^rosit^  la  plus  oordiale,  et  il  leur 
assigna  la  provmce  de  Daron  comme 
lieu  d'^tablissementpour  cette  colonic. 

Les  annales  de  la  Chine  font  foi 

Su'au  troisitoe  si^e  de  notre  hrt  la 
ynastle  des  Han  fut  renvers^  par  la 
dynastie  des  We),  revolution  qui  oc- 
casionna  de  jprofondes  seoousses  dans 
Tordre  sodai  de  la  Chine,  en  sorte  que 
le  prince  Mamkon  pent  fort  bien  &n 
un  des  roembres  de  la  dynastie  d^ 
trdn^;  proscrit  ou  exil^  volontaire,  il 
serait  venu  cbercher  un  asile  dans  le 
pays  d'Oocident.  De  Mamkon  descend 
riflustre  maison  des  Mamigon^ns ,  qui 
ioua  un  r61e  brillant  dans  rhistoire  des 
ages  uit^ieurs. 

Les  n^ociations  entre  la  Chine  et 
la  Perse,  mentionnto  par  Thistorien 
que  nous  avons  cit^,  relativement  ^ 
1  extradition  de  Mamkon,  prouventqu*il 


y  arait  des  relations  ancienneDDcnt 
existantes  entre  les  oours  des  deux  em- 
pires. Un  autre  historien  du  quatrtcme 
siede,  Z^ob,  nous  apprend  que  le  roi 
du  Dj^nasdan  ofifrit  sa  m^iation  pour 
r^tablir  la  paix  entre  Ardeschir,  roi  de 
Perse,  et  Khosrov  T',  roi  d'Arm^oie. 

Outre  les  Mami^on^ns,  nous  voyons 
encore  les  Orp6hans,  qui  vinrent  en 
Arm^nie  par  la  G^rne,  lonetemfn 
avaut  eux.  lis  ont  recu le  nom  crOrpe- 
lians  de  la  forteresse  ao  Schamchouilde, 
dans  la 
pelait 

teur  fut  ceuee  par  les  (jeorgiens. 
les  appelle  aussi,  en  gtorgien,  Djeo^ 
voul ,  et  ,•  en  arm^nien ,  Dj&atsi ,  c*es^ 
a-dire  Chinois. 

Les  invasions  successives  des  Tuns 
seldjoukides,  des  Mongols  et  d^autres 
tribus  errantes  de  la  Tartaric,  ont  al- 
Xir€  la  puret^  de  oes  diverses  faimiUes. 
Outre  les  Kurdes,  qui  depuis  plusieors 
si^es  occupent  rArmenie  roeridio- 
nale,  on  trouve  ailleurs,  ^parses  sur  son 
sol ,  des  hordes  ^trang^res  appartenant 
^  la  grande  famille  des  peuples  tartares ; 
tela  sont  oes  nouveaux  Troglodytes 
camp^  sur  les  rives  du  Rour,  habitant 
i'hiver  dans  des  maisons  souterraines, 
et  conduisant ,  au  retour  du  printemps , 
leurs  troupeaux  dans  les  plames  ou  sur 
les  plateaux  verdoyants  des  monta- 
gnes.  La  langue  qu*ils  parlent  est  celle 
des  habitants  des  provinces  russes  au 
deUi  du  Caucase,  et  des  gouvemements 
du  nord-ouest  de  la  Perse.  Ce  dialecte 
du  turc  n'a  ni  la  douceur  ni  F^l^anoe 
de  la  lansue  parlte  ^  Constantinople. 
Fort  enclins  au  vol  et  an  pillage,  ils 
sont  contenus  par  la  s^v^it^  des  lots 
du  gouvemement  russe,  et  vivent  dans 
un  etat  de  vie  douce  et  pastorale,  qui 
serait  plus  digne  d'envie,  si  Tignorance 
dans  laauelle  ils  croupissent  n'^tail 
aussi  degradante.  La  religion  qu*ils 
pratiquent  est  le  musulmanisme  m^l^ 
a  d'absurdes  superstitions ,  et  ils  sont 
divis^  entre  les  deux  sectes  des  sun- 
nites  et  des  scbutes. 

Pr^  des  mines  de  Fancienne  ville 
de  ShamkOr  se  trouve  la  colonic  alle- 
mande  d*Anenfeld,  eroup^e  en  un  vil- 
lage sem^  au  milieu  de  vergers  touftus, 


%  >  •   ' 


ARM^NIE. 


35 


et  ceint  de  plaines  bien  caltivto.  U  est 
assez  important  d'expliquer  la  cause 

3ui  a  amen^  d'aassi  loin  cette  troupe 
€migpis.  U  y  a  quelques  annees,  des 
pr6dicateurs  protestants  parcoururent 
le  Wurtemberg,  en  annon^ant  au  peu- 
pie  que  vers  ran  1836  ^laterait  un 
sdiisme  sui?i  d'ardentes  persecutions, 
lis  avaient  lu  dans  I'Apocalypse  ^ue  les 
▼rais  fid^es  devaient,  eomme  les  Chre- 
tiens, k  rapproche  de  la  ruine  de  Je- 
rusalem, cberdier  un  asile  dans  les 
pays  lointains,  et  une  revelation  leur 
apprenait  que  ce  lieu  de  refuge  avoisi- 
nait  la  mer  Caspienne.  Aussitdt  une 
foule  de  paysans,  entratnes  par  les 
predictions  ae  leurs  ministres,  se  dis- 
posent  h  aller  a  la  recherche  de  la  nou- 
velle  terre  promise.  A  leur  nombre 
sans  cesse  croissant  se  joignent  tons 
les  aventuriers  desireux  du  change- 
ment,  et  quinze  cents  families  aban- 
donn^rent  spontanement  le  Wurtem- 
ber^.  Les  deux  tiers  de  cette  nouvelle 
emigration,  cpii  rappelait  celles  du 
temps  des  croisades,  avaient  succombe 
aux  fatigues  de  la  route,  avant  d'avoir 
atteint  Odessa.  £n  1817,  ils  arrivdrent 
dans  la  Georgie,  et  se  partagerent  \k 
en  sept  colonies.  L'une  d  elles ,  repartie 
en  deux  villages  appeies  Marienteld  et 
Petersdorf,  est  dans  le  Kakbeti;  deux 
autres,  la  Nouveile-Tiflis  et  Alexan- 
dersdorf,  sont  etablies  sur  la  rive 

faucbe  du  Kour,  non  loin  de  Tiflis; 
Jizabethtbal  et  Catherinenfeld  sont 
dAis  la  Somkheti ,  et  enfin  Anenfeld  et 
Helenendorf  situees  dans  le  voisinage 
de  Ganjeh.  L'empereur  deRussie,  qui 
avait  un  puissant  interet  k  favoriser 
retablissement  de  ces  colons,  qui  ap- 
portaient  dans  ces  pays  i'industrie  eu- 
ropeenne,  leur  accorda  beaucoup  de 
privileges,  et  leur  conceda  une  im- 
mense etendue  de  terrain  exempt  de 
tout  impdt.  Dans  les  commencements, 
les  colons  ont  eu  beaucoup  de  peine  a 
s'acclimater,  et  les  maladies  en  ont 
emporte  un  grand  nombre.  Dans  les 
demieres  guerres,  les  Persans  en  ont 
emmene  captifs  une  partie,  et  la  co- 
lonic d^Helenendorf  a  ete  decimee  par 
les  byenes  qui  descendaient  en  troupes 
des  montagnes  voisines.  Aujourd'nui 


leur  situation  est  plus  prosp^,  et,  a 
mesure  que  la  puissance  msse  se  con- 
6olidej*a  dans  ces  contrees,  leur  si- 
tuation deviendra  plus  avantageuse. 
Toutefois  le  nombre  des  colons  nes'e- 
leve  encore  qu'^  deux  mille. 

DBS  &UBDB8.  —  Nous  cTOVons  ne- 
cessaire  de  parler  id  des  Kuraes  (*) ,  et 
de  fiiire  oonnaltre  un  peu  les  mceurs 
et  le  caractere  de  ce  peuple  aui  occupe 
le  sttd-est  de  TArmenie,  nien  qu^il 
difG^re  essentiellement  des  Armeniens 
sous  le  double  rapport  moral  et  physi- 
que. Le  Kurdistan,  ou  la  provmce 
qu*ils  habitent,  est  ainsi  appeiee  de 
leur  nom  de  Kurdes,  lequel  signifle ,  en 
persan,  belliqueux  et  brave,  soit  que 
leur  bravoure  naturelle  ait  donne  ce 
sens  a  leur  propre  denomination,  ou 
bien  soit  encore  qu'ils  I'aient  re^de 
comme  un  titre  decerne  k  leur  valeur. 
Les  limites  du  Kurdistan,  du  cdte  de 
la  Perse,  sont  les  monts  Sourkeou  et 
le  lac  de  zeribar.  II  n^est  point  tout 
entter  renferme  dans  I'empire  persan; 
la  partie  nord-ouest  depend  de  la  Tur- 
quie.  La  ligne  de  demarcation  entre  la 
partie  turque  et  persane  est  posee  par 
la  chafne  de  montagnes  qui  separe  les 
deux  lacs  de  Van  et  d*Ormiah ;  elle  suit 
la  chatne  des  monts  Rhelessin  jusqu^a 
celle  des  monts  Tcbil-Tchecmeh ,  puis 
elle  longe  la  riviere  de  Mebrivan ,  et  va 
se  rattacber  au  Djebel-Tak. 

Le  Kurdistan  turc  renferme  de  cette 
maniere  huit  sandjakats  ou  provinces , 
dont  les  goavemeurs  prennent  et  s'ar- 
rogent  le  titre  de  pacha.  Ces  sandja- 
kats sont  ceux  de  Bayazid ,  de  Moudi, 
de  Van,  deDjulamerk,  d'Amadia,  de 
Suleimanieb,  de  Cara-Tcholan  et  de 
Zahou.  II  ne  faut  pas  croire  que  le 
Grand  Seigneur  £9isse  reoonnattre  son 
autorite  parmi  ces  peuplades  comme 
dans  les  autres  parties  de  son  empire; 
il  n*y  a  gu^re  que  le  pachalik  de  Van  oti 
son  nom  soit  connu  et  respecte ,  k  cause 
des  troupes  qu'il  y  entretient.  Du  reste , 
ils  se  considerent  si  peu  comme  sujets 
de  la  Porte  Ottomane,  qu'ils  refusent 
d'adopter  le  costume  distingue  surtout 
par  le  caouc  ou  turban.  Les  pachas  et 

(*)  VoY.  la  planchc  n^  5. 


26 


L'UNIVERS. 


les  twvs  qui  les  r^isseot  se  tiennent  re- 
trancn^  dans  lears  montagnes ,  comme 
dans  des  dtadelieSf  et,  assur^  qu'ils 
sont  que  les  collecteurs  d*imp6t8  ne 
viendront  pas  les  inqui^ter^  refusent 
le  tribut.  Lorsqu'on  emploie  la  force 
pour  obtenir  d*eux  oe  droit,  lis  ne  c^ 
dent  qu'aprte  la  plus  vive  nbistance. 
Ces  cnefs  sont  ^tectifsvmais  choisis 
dans  la  mtoe  famiUe.  On  les  propose 
au  gouTernement  turc,  qui,  par  sa  r&> 
oonnaissanoe,  leur  donne  une  espto 
dinvestitore.  U  est  rare  qu'une  elec- 
tion, en  stimulant  rambition  des  divers 
membres  de  la  m^me  famille,  ne  soit 
ensanglant^  par  quelque  combat. 

«  Les  Kurdes,  ait  M.  Jaubert  dans 
son  Voyage  en  Arm^e,  se  subdivisent 
en  un  giand  nombre  de  hordes  ou  de 
tribus,  dont  les  cbefs  recoivent  Tin* 
vestiture  du  pacha  oa  du  oe^.  Le  mo- 
naniue  persan  n'exeroe  aussi  que  Tau* 
torit^  de  suzerain  dans  la  partie  du 
Kurdistan  q[ui  est  comprise  dans  son 
empire;  mais  la  fennet6  de  Feth-Aly- 
Ghah,  sou?erain  actuel  de  la  Perse, 
emp^e  les  nomades  de  sesl^tats  d'etre 
aussi  turbulents  que  le  sont  oeux  de  la 
Turquie.  Le  chef-lieu  des  Kurdes  per- 
sans  est  Sineh. 

«Ces  peuples,  soit  qu'ils  m^nent 
une  vie  sedentaire  ou  qu'ils  errent  dans 
Us  campagnes,  se  pr^tendent  issus  des 
Mongols  et  des  Uzbeks,  dont  les  ir- 
ruptions soudaines  ont  si  souvent 
trouble  I'Asie;  mais  la  grandeur  et  la 
beauts  de  leurs  veux ,  leur  nez  aquilin , 
la  blancheur  de  leur  teint  et  I'^leVation 
de  leur  taille,  d^mentent  oette  origine 
tartare.  lis  profteent  I'islamisme,  et 
tous,  sans  m6me  excepter  oeux  qui  re- 
Gonnaissent  les  lois  du  chah  de  Perse, 
sont  de  la  secte  d'Omar.  Leur  mani^ 
de  se  T^r  dififere  de  cdle  des  Turcs, 
en  ce  que  leurs  habits  sont  plus  l^ers , 
quoiqu'a  peu  prte  de  la  meme  forme, 
qu'ils  les  reoouvrent  d'un  grand  man- 
teau  de  poll  de  cb^re  noir,  et  qu'au 
lieu  d'un  turban.  Us  portent  un  long 
bonnet  de  drap  rouse,  entour^  d'un 
chflle  de  soie  ray^  de  couleurs  tran- 
diantes;  une  infinite  de  glands  de  soie 
sont  attach^  k  Fun  des  bouts  du  bon- 
net, qui  retombe  fort  has  sur  les  6pau- 


les.  Gette  ooiffare  leur  sied  trte-bien. 
Us  se  rasent  la  tto  et  nortent  des  mous- 
taches; les  vieillards  seuls  laissent 
erottre  leur  barbe. 

«  Les  Kurdes  excellent  k  manler  la 
lance  et  k  monter  k  cberal  (*)•  La  prind- 

rle  occupation  des  nomades  consiste 
Clever  aes  bceufii,  des  di^rres,  des 
moutins  et  des  abeilles;  aussi  dans  la 
langue  kurde,  langue  form^  de  i'arabe 
et  du  persan,  et  divis^e  en  plusieors 
dialectes,  le  mot  tndlj  qui  signifie 
biens,  fortune,  richesses,  sert-il  plus 
sp^cialement  k  d^igner  des  trou- 
peaux. 

«  Les  exercices  militaires  sont  poor 
les  Kurdes  le  principal  amusement.  Us 
airoent  beaucoup  les  contes ,  et  lis  com- 
posent  des  chansons  (jui  ont  pour  sojet 
ou  des  amours  lioencieux  ou  des  com- 
bats, ou  des  ^T^nements  m^morables 
et  tragiques. 

«  Quoique  simple,  la  musique  des 
Kurdes  n'est  pas  entiirement  wpoar- 
vue  d'art;  elle  est  expi^essive  et  nwlan- 
colique.  Le  cbanteur  prolonge,  en  les 
mooulant,  des  sons  monotones;  il  ar- 
ticule  quelques  mots  qu*il  entreooupe 
de  soupirs,  de  sangloCs;  il  verse  des 
pleurs  et  finit  par  pousser  des  cris  la- 
mentables.  On  estime  la  jiistesse  et  la 
douceur  de  la  toIx  beaucoup  rooins 

Sue  son  6tendue,  et,  pour  ftiire  I'^ge 
'un  chanteur,  les  Kurdes  disent  ao'on 
I'entend  d'une  parasange.  A  la  Terit^, 
le  chant  est  pour  eux ,  lorsqu'ils  errent 
dans  les  montagnes ,  un  moyen  de  £rfre 
reconnattre  le  point  oOl  its  se  trouyent 
plac^. 

« lis  sont  tr^endins  au  vol.  Peat- 
tee  ce  penchant  est-il  une  des  causes 
qui  les  portent  li  errer  sans  oesse.  Les 
autres  motift  de  leur  go^t  pour  la  vi« 
vagabonde  sont  ou  le  voisinage  d'une 
horde  ennemie,  ou  le  manque  de  pAtu- 
rages,  ou  la  rieueur  de  la  saison. 
L'niver  ils  vont  oiercher  on  asile  sous 
le  toit  du  laboureur,  k  qui,  pendant 
r^t^,  ils  ont  enlev^  une  partie  de  ses 
r6coltes.  Press^  par  le  besoin ,  d'ind^ 
pendants  et  de  farottches  qa'tls  teieot 
auparavant,  ils  se  mootrent  alors  scm- 

(*)  Voy.  li  pUndie  n*  7. 


ARM^T^IE. 


27 


pies  et  soumis,  et  ils  Tiyent  d'assez 
bon  acooid  avee  leurs  hotes. 

«A  Tapproche  du  printempa,  les 
Kurdes  repreonent  le  seore  dni  vie  aai 
leur  eat  propre.  Oraiiiairemeat  lea 
lieux  qu'ib  aK>i8issent  pour  aaaeoir 
leur  camp  aont  dea  prairiea  agr^ablea, 
aitu^ea  au  bord  de  quel^ue  ruiaseau. 
Leura  tentea,  qu'ila  prtferent  aux  ha* 
bitationa  lea  plua  fastueuaea  dea  villes, 
aont  compost  d*un  tiaaa  de  laioe 
noire  et  grosaidre,  et  ont  tres-peu  d'e- 
l^vation.  Ua  lea  entourent  d'une  dale 
de  roseauz,  en  dedana  de  laquelle  ils 
placent  leurs  bagages,  et  souvent  ce 
qu'ils  ont  pris  aux  caravanea.  Cette 
sorte  de  ddture  est  tr^l^^re  et  tr^ 
fadle  a  tranaporter.  On  I'emploie  aussi 
a  s6parer  rhabitation  des  bonimea  de 
celle  des  femmes,  et  k  faire  des  parca 
pour  les  troupeaux.  Un  trou  de  quel- 

aues  pieds  de  diam^tre  et  de  profon- 
eur,  servant  de  four  et  de  cuisine ,  est 
creus^  au  milieu  de  chaque  tente,  qui , 
au  moindre  vent ,  est  remplie  de  fum^ ; 
inconvenient  assez  grave,  mais  auquel 
les  hommes ,  les  femmes  et  les  enfants , 
aont  accoutum^.  Les  cbevaux  sont  at- 
taches a  dea  piqueta  plant^s  hors  de 
Fenceiute,  et  on  les  tient  presque  tou- 
jours  selies;  en  g^n^ral,  tout  est  dis- 
pose pour  qu'on  puisse  plier  bagase  et 
prtir  en  quelques  instants.  Tout  I'eta- 
Dlfssement  coute  k  peine  un  jour  de 
travail. 

«  Lea  peuples  qui  se  livrent  le  plus 
au  vol  et  au  brigandage  sont  souvent 
aussi  ceux  qui  remplissent  le  plus  ri- 
£Oureusement  les  devoirs  de  Tnospita- 
Hte « et  c'est  ce  qui  &it  que  dans  I'Orient 
un  vojageur  experimente  redoute  aur- 
tout  les  contr^ea  oi!^  cette  vertu  est  le 
plus  en  honneur;  les  Kurdes  en  four- 
niasent  la  preuve.  Un  etranger  de  quel- 
que  apparence  arrive-t-il  pr^s  d'une  de 
leura  hordes,  des  cavaliers  s'empres* 
sent  d'ailer  h  sa  rencontre.  «  Soyez  le 
bien  venu,  lui  disent-ils;  c'est  chez 
voua-mtoe  que  nous  allons  vous  rece- 
voir.  Cette  heure  nous  est  agreable, 
puiase-t-elle  vous  Itre  propice.  »  On  le 
conduit  a  la  tente  du  vieillard  le  plus 
riche  et  le  plus  consider^  de  la  tribu , 
et  les  femmes  s'empressent  h  preparer 


un  repas.  Tandis  que  les  unes  petris- 
aent  a  la  hAte  une  rarlne  groaaiere,  lea 
autres  vont  chercher  du  roiel  et  des 
laitages,  ou  etendent  sur  la  terre  des 
tapis,  oavragea  de  leurs  mains.  Dans 
ie  mtoe  temps,  les  jeunea  gens  on^le 
soin  d'dter  aux  betes  de  aomme  leurs 
facdeaux,  de  laver  les  pieds  aux  die- 
vaux,  et  en  hiver,  pour  empecher  que 
le  froid  ne  les  aaiaiase,  de  lea  conduire 
autour  du  camp,  d'abord  avec  vitesse, 
puis  insensiblement  avec  lenteur.  «  En- 
fants, dit  le  vieillard,  ayez  soin  de 
notre  hdte  :  retranger  est  un  present 
de  Dieu.  Que  rien  ne  lui  manque  ni  k 
aes  gens.  Sonj^ez  aussi  aux  montures. 
ce  sont  les  vaisseaux  du  desert :  et  toi , 
voya^eur,  sois  le  bien  venu;  tu  es  id 
parmi  les  tiens;  que  le  contentement 
que  tu  eprouveras  soit  pour  nous  le 
gage  dea  benedictions  du  del.  Si  tu 
passes  avec  noua  quelques  heures  agrea- 
bles ,  nous  serons  plus  heureux  que  toi- 
meme. »  En  pareiUe  occasion  ce  Ian- 
gage  est  sincere;  mais  lorsque  les 
Kurdes  sont  eioignes  de  leurs  foyers , 
qu'ils  vont  chercher  fortune  sur  les 
chemins,  dans  les  moniagnes  et  au  fond 
des  deserts,  ils  considerent  oomme 
leur  appartenant  en  propre  tout  ce  qui 
passe  sur  leurs  terres,  et  ne  se  font 
aucun  scrupule  d'employer  les  discours 
les  plus  flatteurs,  les  promesses  lea 

Slus  mensongdres,  pour  venir  k  bout 
e  leurs  desseins. » 

Plusieurs  tribus  kurdes  m^nent  une 
vie  compietement  nomade,  et  ne  tirent 
leurs  moyens  de  subaistance  que  du 
pillage :  telles  sont  celles  qui  errent 
dans  le  desert  de  Syrie,  uniquement 
occupees  k  surprendre  les  voyageurs 
et  les  caravanea.  Leur  usage  est  de  se 
partager  en  petitea  bandes  de  douze  a 
vingt  cavaliers,  d'epier  tons  les  mou- 
vements  de  la  caravane,  d'attaquer  les 
tratneurs  ou  m^me  la  troupe  enti^re , 
si  celle-ci  paratt  les  craindre,  ou  si, 
determinee  a  se  defendre,  die  n*est  pas 
en  nombre  tres-superieur  k  celui  de 
leur  bande.  Bien  dinerents  des  Arabes, 
qui  se  font  un  scrupule  de  massacrer 
le  voyageur  tombe  dans  leurs  mains, 
les  Kurdes  repandent  volontiers  le 
sang.  Le  voyageur  qui  est  tondi)e  en 


38 


L'UNIVERS. 


leur  puissance  est  trop  heureux  8*il  est 
seulement  d^poaill^.  lis  sont  mal  dis* 
ciplin^,  et  ne  paraissent  aroir  poor 
leurs  diefs  que  peu  de  subordination. 
Us  poussent  quelquefois  la  hardiesse 
jusqu'^  venir  attaquer  an  nldn  jour  les 
habitants  de  Djraaid6,  run  des  fau- 
bourss  d'Alep. 

Le  Toyageur  qui  veut  traverser  le 
desert  et  ies  autres  lieux  infests  par 
ces  bagdes  n*a  d*autre  moyen,  pour  se 
pr^er?er  de  leurs  attaques,  que  de 
tormer  des  liaisons  avec  les  principaux 
chefs  des  tribus.  Ces  liaisons  sont  sou- 
vent  trts-dispendieuses  h  cause  de 
I'exigence  des  che& ,  qui  requi^rent  de 
riches  cadeaux  qu*on  doit  consider 
comme  une  v^table  ran^n.  Mais  il 
est  tr^-difflcile  k  un  Europ^en  d'en- 
trer  en  relation  avec  eux,  et,  h  Focca- 
sion ,  its  se  montreraient  peu  scrupuleux 
d*oubIier  leurs  premiers  engagements. 
LorsquMIs  sont  supdrieurs  en  force,  il 
n'v  a  guere  de  titres  aupr^  d*eux  pour 
ecnapper  h  leur  avidit^X*). 

Toutefois  il  ne  faut  pas  attribuer  a 
la  race  enti^re  des  Kurdes  ce  caractere 
sauvage  et  sanguinaire  qui  distingue 
certaines  tribus.  Les  Clans  qui  vivent 
dans  les  montagnes  menent  la  vie  des 
anciens  peuples  pasteurs;  quelquefois 

(*^  Un  Toyageur  raconte  uue  anecdote 
qui  indique  asses  la  diflerence  qu*il  faut 
ctablir  entre  les  Kurdes  et  les  Turcomans 
qui  exercent  dans  ces  lieux  le  mftme  m^ier, 
mais  avec  plus  de  loyaute. 

Pres  du  khan  El-Assel ,  deux  caivliera. 
Tun  kurde ,  Tautre  turcoman ,  furent  abor« 
des  par  on  pajsan  4  cheral,  qui  vinf  se 
mettre  sous  leur  protection,  et  leur  deoianda 
de  les  suin«  jusqu*i  la  Tille ,  afin  d'eriter 
sons  leur  esoorte,  toute  mauvaise  rencontre. 
Sa  demande  lul  fut  genereiisement  accord^ 
par  le  Turcoman :  le  Kurde  parut  ^re 
d*abord  du  mteie  avis ;  mais  il  ent  k  peine 
marche  quelques  pas ,  que  se  repentant  de 
oette  protection  eraiuite ,  il  prit  a  part  son 
camarade,  et  lui  demanda  son  agrement  pour 
^rcer  I'itranger  et  s'emparer  de  ses  de- 
pouules ,  qn'il  oflrit  de  partaker  atcc  lui. 
Alors  le  Turcoman  indi^ne  lui  defendit  de 
toucher  k  odni  qn*il  avait  pris  sous  sa  pro- 
tecdon ,  et  ce  ne  fut  qu*apres  une  auerellc 
asset  ^Te  qu*il  panrint  a  le  sauver. 


lis  manifestent  le  plus  enticr  d^voue- 
ment  pour  leurs  dieft.  Lorsque  le  frere 
d'Abourrahman  Pacha  mourut  k  Baa- 
dad,  un  de  ses  serviteurs,  Kurde  die 
nation ,  qui  se  tenait  pr^  du  lit  od  gi- 
Bait  le  cadavre  de  son  mattre,  8*6cria : 
«  Quoi!  le  be^  est  mort!  je  ne  veux 
plus  vivre  un  seul  instant;  »  et  ao  mo- 
ment mtee  il  s'tianfa  dans  la  rae  du 
haut  de  la  maison,  et  le  sang  de  sa 
cervelle  telgnit  le  pav^. 

lis  supportent  la  pauvret^  et  la  pri- 
vation sans  le  moindre  murmure; 
cependant  ils  redoutent  beaucoup  le 
trajet  des  solitudes  embraste  du  de- 
sert. 

Les  demi^res  observations  des  voya- 
geurs  tendent  k  d^roontrer  qu*il  y  a 
parmi  les  Kurdes  deux  races  bien  ais- 
tinctes,  ce  qui  sert  a  expliquer  la  dif- 
ference de  go<lts  et  d'inclinations  chez 
les  membres  de  la  m€me  tribu.  Les 
uns,  en  effet,  ne  pensent  qu*ii  guer- 
royer;  les  chevaux,  les  armes,  le  com- 
bat et  le  butin ,  voila  ce  quails  cheris- 
sent,  et  ce  qui  fait  le  sujet  continue! 
de  leurs  conversations  et  de  leurs 
chants.  lis  ont  besoin  d'avoir  des 
ennemis  pour  ^puiser  Tardeur  guer- 
ridre  qui  les  d^vore;  et,  lorsque  ies 
peuples  voisins  ne  leur  foumissent  pas 
roocasionde  satisfairecette  passion,  ils 
toument  contre  eux-m£mes  leurs  ar- 
mes, et  se  d6chirent  dans  les  querelles 
de  leurs  factions  intestines.  L'autre 
partie  de  la  population ,  qu*ils  appellent 
Rayahs  ou  KeugUes  dans  certaines 
oontrto,  repr^ente  les  paysans.  lis 
cultivent  la  terre  et  prennent  soin  des 
troupeaux.  Les  Sipahs  ou  Kurdes  mi- 
litaires  se  regardent  comme  leurs  sei- 

fneurs,  et  quelques-uns  d'eux  pr^ten- 
ent  que  les  paysans  ob^issent  parce 
qu*ils  sont  crees  pour  leur  usage ;  aussi 
la  condition  de  oes  serfs  est-eile  plus 
miserable  souvent  que  celle  des  n^res 
de  TAm^rique.  HaDitn6s  k  servir,  ils 
ont  dans  leurs  maniires  et  leur  langage 
quelque  chose  de  timide  et  de  rampant ; 
k  peine  osent-ils  lever  les  yeux  sur  leurs 
chefs,  et  jamais  ils  n*oseraient  prendre 
le  costume  ou  la  contniance  d*un 
Kurde  de  noble  race. 
Quand  un  clief  devient  possesseur 


ARM^NIE* 


29 


par  conqu^te  ou  par  hdrita^e  d'une 
nouvelle  ^teodue  de  terrain ,  il  en  as- 
signe  une  portion  k  cbacun  de  sea  aerfr, 
et  il  leur  fait  en  outre  des  diatribu- 
tiona  d'armea  et  de  cbevaux.  Lm  en- 
fanta  aont  ^lev^  dana  la  haine  com- 
mune des  Turca  et  dea  Peraana,  et  ila 
parviendraient,  aana  aucun  doute,  k 
asaurer  Jeur  ind^pendance  contre  cea 
deux  puisaanoea,  ai  lea  rivalitte  dea 
dieft  ne  d^truiaaient  la  force  qu*il8 
peuvent  retirer  de  leur  union.  La  po- 
litique de  la  Porte  et  d'lapahan  tire 
habilement  parti  dea  disaensiona  que 
rint^r^t  ou  la  vanite  fiait  nattre  parmi 
lea  cfaefa  de  tribua.  Elle  donne  aux  una 
des  secours  d'argent,  et  leur  promet 
oertaina  privil^ea  dans  le  caa  oik  ila 
r^uaairont  k  reduire  lea  chefa  inaou- 
mia;  aux  autrea,  elle  promet  de  lea 
reoonnattre  oomme  paoiaa  ou  beys, 
recompenae  qui  est  le  dernier  terme  de 
leur  ambition  y  et  dont  Teapoir  leur 
fait  oublier  les  liens  sacr^  du  aang  on 
de  Tamiti^.  En  outre ,  cea  cfaefa,  re- 
eonnus  par  la  puissance  ottomane  ou 
par  la  cour  de  Perse,  ont  une  existence 
tr^-prtoiire;  ila  peuvent  6tre  r^fo- 
quds,  et  leurs  irequentes  mutations 
contribuent  ap^alement  k  entretcnir 
dans  la  nation  oes  divisions  qui  lui  sont 
si  fatales. 

Au  milieu  de  leur  barbaric ,  les 
KLurdes  conservent  certains  usages  qui 
montrent  en  eux  un  penchant  pour  la 
civilisation.  Ainsi  lis  aiment  beaucoup 
la  soci^te ,  et  entre  tons  les  autrea  peu- 
pies  orientaux  ce  sont  peut-^re  lea 
seuls  qui  se  plaisent  k  prolonger  la 
veill4e  dans  les  visites  et  la  conversa- 
tion, lis  se  Invent  fort  tard,  font  des 
paris  considerables  pour  des  combats 
de  cbiens  ou  de  percirix ,  et  dans  leurs 
rapports  ils  ont  de  rafijabilit^  et  de  la 
bienveillance,  sans  garder  Tetiquette 
d*une  froide  c^monie. 

Dana  les  temps  de  guerre,  ou  lors- 

?{u'ii8  ont  une  vengeance  k  satis- 
aire,  rien  ne  les  arr^te.  Ila  se  livrent 
aux  actea  les  plus  r^voltants;  ils  con- 
servent en  meme  temps  un  air  de  re- 
ligion. Ainsi.  apris  avoir  tu^un  bomme 
aana  acropale,  on  les  voit  se  mettre 
it  geaoux  et  s'acquitter  des  pri^res 


preserites  par  la  loi.  Pleinsde  rancune, 
ila  viennent  demander  satisfaction 
d*une  injure  quelquefoia  trois  ou  quatre 
ana  aprea  I'avoir  easuy^ ;  pendant  oet 
intervalle  ila  ^piaient  aoigneusement 
Toccasion.  On  cite  oomme  exemple  de 
leur  irascibility,  le  trait  d'un  cbef 
qu'un  moucberon  importunait  en  se 
pla^ant  toujoura  sur  son  ceil,  et  qui 
ne  pouvant  le  cbasser,  prit  son  poi- 

Snard,  pour  mettre  un  terme  k  sa 
ouleur,  et  se  I'enfon^  dana  Foeil ,  au 
riaque  de  padre  la  vie  avec  la  vue. 

Les  femmes  kurdes  prennent  moins 
de  soin  de  se  d^rober  aux  regards  des 
bommes  dans  rint^rieur  de  leur  roaison 
que  les  femmes  turques  ou  arabes. 
Queiquefois  elles  paraissent  recher- 
cner  rattention  des  etrangers.  Lors- 

S 'elles  sortent,  un  voile  bleu  couvre 
ir  t6te;  rarement  elles  I'abatssent 
sur  la  face,  excepts  les  femmes  d'un 
haut  rang  qui  ne  veulent  pas  ^tre  re- 
connuea.  Quelques-unes  ne  sont  pas 
voilto  et  ne  craienent  point  de  se 
m^ler  aux  assemnlees  des  bommes. 
Malgr^  cette  liberty  ext^rieure,  leur 
vertu  est ,  di(*on ,  plus  severe  que  cel- 
le  des  femmes  turques  toujours  gar- 
d^es  k  vue,  et  dana  tous  leurs  actes, 
ellea  conservent  la  pudeur  et  la  dtonoe, 
qui  sont  le  premier  omement  de  leur 
sexe. 

Elles  prennentpart  aux  r^ouissances 
publiques ,  et  M.  Rich  dana  son  Voyage 
au  Kurdistan ,  qui  vient  de  parattre 
tout  nouvellement,  raoonte  qu'il  a^t^ 
ttooin  d'une  dense  nationale  appel^e 
tehopi  (*).  II  trouva  r^unta  dans  une 
vaste  cour  un  nombre  consid^able  de 
spectateurs  dont  le  cercle  entouralt  un 
CDOEOT  de  danseuses.  Elles  se  tenaient 
par  la  main  sans  former  un  rond  par- 
tait.  Leurs  exercices  consistaient  en 
des  balancements  de  corps  et  de  t£te 
dont  la  mesure  ^tait  marqu^  simul- 
tantoeut  par  le  pied.  De  temps  k  autre 
elles  poussaient  des  cris  moduli  uni- 
formement,  mais  qui  exprimatent  assez 
leurjoie.  Les  assistants,  mont^  sur 
une  esp^  de  hangar,  prenaient  un 
vif  mtirit  k  ce  spectacle,  surtouf  les 

(')  Voy.  la  plancoe  n^  6. 


30 


L'UNIVERS. 


jeuaes  ^ens.  Les  homines  restaient 
aocroupu  ou  couchtet  fumant  avec  im- 
passibility leurs  pipes.  EUes  danstont 
prds  d'une  heure,  apres  quo!  la  mu- 
sique  cessa,et  d'autres  femmes  leur 
succ^ereni,  sans  apporter  k  la  danse 
beaucoupde  vari^t^  ae  pas  et  de  mou- 
vement.  Le  spectacle  se  termina  par 
Tarrivee  d*UQ  boufTon  arai^  d*une 
^orme  canne,  et  qui  fit  les  sauts  et 
les  cabrioles  les  plus  grotesaues.  Daop 
leur  danse,  les  fenunes  n'etaient  pas 
voiles,  et  quelques-uoes  semblaieat 
par6es  a?ec  beaueoup  d'l^l^ance  et  de 
recherche.  Leur  robe  parsem^de  pail- 
lettes ^tait  de  soie  ae  diverses  cou- 
leurs.  La  daose  teimin^,  cbacune 
d*eUes  reprit  son  voile  et  s^achemina 
trauquillement  vers  sa  demeure. 

En  g^n^ral  la  condition  des  femmes 
kurdes  est  bien  preferable  a  celie  des 
autres  femmes  des  peuples  mahom^ 
tans  de  I'Orient.  Elles  sont  traitto 
par  leurs  ^poux  avec  ^ard  et  respect 
et  non  pointen  esclares.  Quelques- 
unes  donnent  des  preuves  de  courage 
jnconnues  mtoe  parmi  nous.  On  cite 
une  jeune  filie  de  la  tribu  kurde  de 
Bulbassi  qui  ^tait  le  meilleur  cavalier 
de  son  clan.  D'une  conduite  irr^ro* 
chable,  elle  suivait  les  troupes  dans 
les  expeditions  guerrieres,  et  combat* 
tait  m^me  a  leur  t^te.  Elle  portait  un 
v^tement  d'homme,  un  large  mou- 
choir  de  soie  enveloppait  sa  t^te,  et 
un  poignard  garni  de  diamants  pen- 
dait  a  sa  ceinture ;  elle  etait  grandie 
et  svelte,  de  vingt-dnq  ans  environ, 
d*un  bruu  fonc^ ,  et  une  fois  elle  tua 
de  sa  main  un  Ture  qui  avait  voulu 
attenter  a  son  honneur.  Dans  plusieurs 
autres  occasions  on  la  vit  marcher  la 
lance  en  arr^t  et  aller  tuer  les  artil- 
leurs  ennemis  k  la  bouche  de  leur  oa« 
non. 

Le  costume  des  femmes  ressemble 
a  celui  de  la  Turquie.  Elles  portent  de 
larges  pantalons  et  une  longue  chemise 
qu'elles  serrent  k  la  taille  avee  una 
ceinture*  om^ede  deux  outrois  agrafes 
d*or  et  d*argent.  Elles  mettent  par- 
dessus,  leur  robe  couple  comme  ceile 
des  hommes ,  boutonn^e  sous  le  men- 
ton  ,  mais  entr'ouverte  sur  le  devaiit 


et  laissant  voir  la  ceinture  et  ka  che- 
mise. Leurs  etofifes  viennent  de  Go- 
zeratou  de  (Constantinople,  et  varieot 
suivant  la  saison.  La  robe  est  reooa- 
verte  d'un  l^ger  manteau,  gtedraie- 
ment  de  satin,  mais  avee  des  manches 
plus  larges  qui  ne  d^pissent  point  le 
conde.  En  hiver,  cet  ajustement  est  de 
ooton,  et  elles  y  ajoutent  aussi  scmvent 
un  teharokfUa  de  tartan ,  sans  nsan- 
ches,  s'agrafant  sur  la  poitrine,  et  re- 
tombant  par  derriere  jusqu'^  nai-iam- 
bes.  Leur  coiffe  consiste  en  des  crates 
ou  foulards  roul^s  avec  art  autour  de 
la  tete,  et  attaches  sur  le  front  avec 
une  epin{;lette ,  oe  qui  ressemble  asscz 
k  une  mitre  ou  aux  tongues  ooiffes  de 
nos  femmes  de  la  Normandie.  Les 
coins  de  ce  chAle  pendent  sur  tes 
epautes,  et  quelques  elegantes  ▼  akMi- 
tent  des  giurlandes  de  conii.  Les 
femmes  marines  ajoutent  un  moroeau 
de  mousseline  qui  leur  couvre  le  front 
en  bandeau.  Les  cheveux  sont  ooa- 
verts,  il  n'en  parattou'unetwade  torn- 
bante  pris  des  oreiltes.  Gette  coifi^ 
est  tres-pesante,  et  il  faut  un  art  par- 
ticulier  pour  savoir  la  porter.  Ge  qu*il 
y  a  d'extraordinaire,  c  est  qu'eUes  la 
conservent  la  unit  pour  dormir,  et  a 
cet  eCfet  elles  portent  avec  dies  de 
petits  oreillers. 

Le  costume  des  hommes  est  fort 
simple.  Le  vStement  ext^rieur  ressem- 
ble a  celui  qu'il  reoouvre,  si  oe  n*est 
qu'it  est  tioutonne  k  la  gorge.  Les  reins 
sont  serr^s  par  une  laree  ceinture  en- 
ricbie  de  Iwodes  et  d'agrafes  d'or, 
d'argent  ou  de  pierres  precieoses.  Ce 

Si  lesdistinguespedalement,  c'estteur 
rban  forme  d*un  tartan  de  soie  tmr- 
riol6e,  dont  les  nuances  sont'roqges, 
jaunes ,  bleues  et  eroisto  par  des  fits 
d'or  et  d'argent.  Le  foont  reste  tou- 
jours  k  d6couvert,  et  sur  les  ^paules 
pendent  des  franges  et  des  dands  de 
m^me  couleur ,  ce  qni  teur  domie  uu 
air  sauvage,  surtout  lorsqu'ils  mettent 
leurs  chevaux  au  galop. 

Les  tiabits  de  la  dasse  pauvre  soot 
sembtables ,  si  ce  n*est  quoits  sont  d6- 
pourvus  de  tous  ces  omemeiits.  Aind 
leur  ceinture  est  conunimteent  uim 
nmpte  corde,  et  te  torfaau  est  d'un 


ARM^NIE. 


II 


rottse  fonc^.  Le  poignard  ou  kan^jar 
est  Teur  arme  indispeiiBable  qo'ils  ne 
quittent  jamais. 

On  trouye  des  Tieniards  d'un  ^e 
fort  avano^  oonserrant  encore  une  ?i- 

Sueurremarquable,  malgr^les  rigueurs 
u  climat  et  les  fatigues  de  leur  vie 
aventureose.  La  taille  des  homines  et 
des  femmes  est  g^n^alement  aranta- 
geuse ,  et  tout  annonce  en  eux  une 
satne  et  robuste  constitution.  Les  en- 
fants  ont  la  peau  tres-bianche ,  et  les 
joues  ros^.  Ge  qui  confirme  les  ob- 
servations des  voyageurs  distinguant 
parmi  ce  peuple  deux  races  diverses, 
c*est  qu'en  effet  la  phjrsionomie  et  la 
taille  des  pavsans  diffi^rent  de  Fair 
martial  et  de  fa  stiture  de  leurs  chefs. 
Us  sont  moins  bienfaits,  et  leurs  traits 
n*ont  pas  la  beauts  des  nobles  ou  sei- 
gneurs qui  rapptillent  les  beaux  types 
grecs.  A  la  premiere  vue  on  peut  ais^- 
ment  assurer  que  ceux-ci  sont  les  maf- 
tres  du  pays. 

Tels  sont  les  dtoils  que  nous  avons 
jug^  utiles  et  int^ressants  pour  roet- 
tre  le  lecteur  &  port^  de  connattre  oe 
peuple,  pen  connu  jusqu'^  present, 
et  qui ,  occupant  toute  Textr^mit^  m^ 
ridionale  de  TArmenie,  doit  naturel- 
iement  faire  partie  de  Thistoire  de  oe 
pays ,  quoiqu  il  soit  d*une  autre  race 
que  le  reste  de  sa  population.  Les 
Kurdes  sont  des  hdtes  incommodes 
que  les  Armtoiens  ont  6t6  contraints 
de  recevoir,  et  il  est  fort  possible  qu'un 
)our ,  si  un  lien  f<6d^ral  unissait  leurs 
tribns,  lis  poussassent  plus  avantvers 
le  Nord  leurs  incursions. 

Le  sultan  ferme  les  yeux  snr  leurs 
depredations ,  soit  par  une  ooupable 
insouciance ,  soit  par  la  conscience  de 
rimpuissance  de  ses  troupes  regimes 
pour  soumettre  oes  ennemis  vagabonds 
qui  sont  k  la  fois  nulle  part  et  par- 
tout,  puisque,  avee  chaqae  saison,  ou 
sor  la  plus  lek^re  esperanoe  d'un  gain 
queloonque,  lis  emportent  leurs  tentes 
mdiiles  et  dian^nt  le  lieu  de  leurs 
camfMemants.  Aujourd'bui,  moins  que 
jamais,  la  Porte  est  en  jnesure  de 
r6primer  ces  ennemis  eioign^s;  lorsque 
dans  le  grand  corps  de  eet  empire ,  la 
iDort  et  le  froid  gagoent  le  coeur,  com- 


ment rappeler  la  vie  et  le  mouvement 
aux  exti^mltes? 

HISTOIRB  BBUGIEUSB  DU  PBUPLS  ▲BMBNIBN. 

l^rire  Tbistoire  religjieuse  d*un  peu« 
pie,  c'est  chercher  ^  faire  connattre  la 
pens6e  morale  et  intime  qui  a  inspire 
lous  ses  differents  actes  et  a  dd  les  re- 

Sler.  Ce  travail  prepare  celui  qui  n'a 
'autre  but  que  d'exposer  les  ev^ne- 
ments  varies  et  confus  qui  se  pressent 
sur  la  scene  politique.  Sans  la  connais- 
sanoe  de  la  loi  spirituelle  ou  religieuse, 
les  faits  seraient  de  muets  hieroglypbes 
dont  on  ne  pourrait  trouver  rexplica- 
tion,  faute  d'en  posseder  la  clef;  ou 
bien  si,  par  hasard,  quelqu'un  avait  la 
pretention  de  nous  les  expliquer,  tl  est 
tres-probable  quMI  se  tromperait  lui  et 
ses  lecteurs,  parce  qu'il  deroulerait 
seulement  h  leurs  regards  une  serie 
d'acddents  ranges  peut-etre  dans  I'or- 
dre  de  leur  succession  chronologi- 

3ue ,  Gomme  les  medailles  ou  les  statues 
'un  rausee,  mais  il  ne  pourrait  rendre 
raison  de  la  loi  secrete  et  providen- 
tielle  qui  a  preside  h  leur  enchatne- 
ment,  ni  saisir  le  lien  harmoniqtie  qui 
les  unit,  en  etablissant  entre  deux 
evenementa  rapproches  le  rapport  ne- 
oessaire  de  cause  &  efifet  L*ecrivain, 
en  suivant  cette  methode,  ressemble- 
rait  assez  k  I'anatomiste  qui  croirait 
nous  donner  une  idee  exacte  de  la  na- 
ture propre  et  du  caractere  d'un 
homme,  en  decrivant  avec  soin  tous 
ses  organes  et  leurs  fonctions  determi- 
nees  par  les  lois  physiologiques  de  son 
temperament.  Oui ,  s'attacher  exclusi- 
vement  k  Tordre  esrterieur  des  faita  po- 
litiques,  (fest  ne  wbore  que  la  lekre 
qui  tugy  et  se  priver  des  hunineux  et 
feconds  developpementa  qui  naissent 
du  prindpe  superieur  one  nous  nom- 
mons  reliffieux  ou  intellectuel. 

S'il  est  Don,  suivant  nous,  de  poser 
cette  regie  bistoriqne  avant  de  parler 
d'un  peuple  quelconque,  son  observa- 
tion devient  rigoureusement  neces 
saire  lorsqu'il  s'agit  d'une  nation  dont 
le  caractere  essentlel  et  distinct  est 
I'esprit  religieux,  comme  chez  les  Ar- 
meniens. 
£n  effet .  si  nous  exceptons  la  race 


33 


L'UNIVERS. 


juive,  plus  particuMrement  fiivoris^ 
du  ciel,  et  signal^  dans  le  monde  an- 
cieo  par  un  r^me  austere  et  une  dis- 
cipline r^ementaire,  comme  ^tant 
destine  h  donner  au  monde  le  Dieu- 
homme,  son  R^emptear,  nous  ne 
trouvons  point  parmi  les  autres  peu- 
ples  de  r  Asie  une  nation  aussi  directe- 
ment  soumise  k  Tinfluenoe  de  la  loi 
religieuse  que  la  nation  arm^ienne. 
D^  les  temps  les  plus  recul^,  que 
I'on  asstgne  commundment  oomme  re- 
poque  de  la  formation  des  diflf^rentes 
nationality  de  TOrient ,  nous  la  voyons 
se  d6?elopper  k  part  et  se  oonstituer. 
Bien  qu'elle  soit  oontrainte  plusieurs 
fois  de  Met  aux  attagues  des  grandes 
monarchies  de  TAssyne  ou  de  la  Perse, 
eile  ne  perd  jamais  avec  son  ind6pen- 
dance  sa  foi  m  son  culte;  elle  courbe 
un  instant  la  t^,  et,  lorsqu'on  la 
croyait  efifacte  de  la  liste  des  peuples 
asiatiques,  on  la  voit  avec  ^tonnement 
reparattre  plus  forte  et  plus  jalouse  de 
Gonserver  ses  traditions,  puand  I'apd- 
tre  Thadd^  et  le  patriarche  samt 
Gr^oire  eurent  oonverti  h  la  loi  de 
r£vanffile  ce  pays,  les  esprits  demeu- 
r^rent  fermement  attach^B  au  nouveau 
symbole  qu'ils  avaient  accepts,  et  le 
cnristianisme  s'est  conserve  Yivant  et 
fort,  malgr^  les  perstoitions  qu'U  eut 
k  soutenir  contre  la  Perse,  adonn^e  au 
culte  du  feu  et  du  magisme,  et  plus 
tard  contre  les  Arabes  et  les  Turcs, 
z6i6s  propaj^ateurs  du  mahom^sme. 
Aujourd*nui  les  Arm^niens  sont  dis- 
perse dans  toute  I'Asie  Mineure;  on 
les  trouve  au  fond  de  la  Russia,  k 
Constantinople,  en  Perse,  dans  les 
vilies  les  plus  oommercantes  de  Tlnde, 
et  jusque  sor  les  frontieres  de  la  Chine , 
et  partout  lis  sont  in^ranlablement 
attach^  k  leur  foi,^  la  liturde  et  aux 
pratiques  de  leur  Eglise,  teOe  qu'elle 
etait  constitu^  au  quatriime  avtele; 
ils  se  r^lgnent  Tolontiers  k  toe  pri?^ 
de  certains  droits  politiques,  et  ik  se 
soumettre  aux  mdmes  avanies  que  les 
juift;  ils  soufirent  le  m^pris,  les  ca- 
prices et  les  ill^alit^s  de  leurs  domi- 
nateurs;  tout  leur  6gal,  pourvu  qu*ils 
conservent  le  libre  exercice  de  leur  re- 
ligion. 


Conune  le  people  armenien  a  rare- 
ment  €t6  consider^  sous  oe  point  de 
Tue,  et  que  son  histoire  rdigieiise  oc- 
cupe  n6anmoins  une  place  impoitante 
dans  rhistoire  plus  gentole  du  chris- 
tianisme  en  Onent,  nous  donneroDs  a 
nos- considerations  quelques  d^eiop- 
pements.  Mais,  avant  de  passer  a  Te- 
poque  chr^tienne,  nous  voulons  exa- 
miner quelle  ^tait  la  croyance  des 
Arm^niens  dans  les  Ages  qai  pr6o6de- 
rent  la  renue  de  J^sus-Christ. 

On  salt  commun^ment  que  r  Arm^cue 
est  d^ign^B  par  la  tradition  bibliqoe 
comme  le  lieu  o^  Noe  et  ses  en£ants 
descendirent  de  I'arche :  «  Dieu,  est-il 
«  dit  au  chap,  viii,  v.  1 ,  se  soayint de 
«  Noe ,  de  tons  les  animaux  et  de  toutes 
« les  b^tes  qui  ^talent  avec  lui  dans 
« i'arche;  il  fit  passer  un  vent  sor  la 
« terre,  et  les  eaux  s'arrdtereot;  les 
«  sources  de  Tabtme  et  des  cataractes 
«  du  del  se  referm^nt,  et  la  {duie  ne 
« tomba  plus  du  ciel;  les  eaux  se  reti- 
«  rtent  de  dessns  la  terre,  ailant  et 
«re?enant,  et  aprte  cent  dnouante 
c  jours  elles  dimmu&rcnt,  et  larcfae 
«  reposa  sur  les  montagnes  d' Ararat, 
«le  septi^me  mois,  au  dix-septitee 
«jourdu  mois. » 

Sans  examiner  id  de  nouveau  si  Ic 
mont  Masis  est  r^dlement  la  montagne 
dont  le  nom  nous  est  conserve  dans  les 
saintes  lettres,  nous  rappellerons  que 
les  antiques  traditions  des  peuples 
flxent  unanimement  la  premito  patrie 
du  ^enre  humain  dans  ce  plat^u  de 
TAsie.  La  plaine  de  Senoaar,  ou  se 
fondent  les  premieres  vilies,  et  ou 
Nemrod,  ce  puissant  chasseur  devant 
le  Sei^eur,  etablit  le  sidge  de  sa  do- 
mination, n'est  pas  fort  distante  de 
TArmdnie;  Ton  pent  done  affirmer  que 
ce  pays  ftit  ooeup6  d^  la  plus  haute 
antiquity.  En  examinant  I'histoire  po- 
litique de  ce  peuple,  nous  verrons  que 
son  premier  oiefou  roi ,  nommd  Haig , 
trouva,  lorsqu'il  vint  prendre  posses- 
sion du  pays ,  une  race  p<»  nombreuse , 
il  est  vrai,  mais  toute  difii§rente  de  la 
sienne,  etddj^  mattresse  du  sol.qu'dle 
cultivait.  Qudle  est  cette  race  primi- 
tive? Les  andens  documents  histori- 
ques  ne  jettent  aucune  lumidre  sur  oe 


AllMKNIE. 


33 


fall,  Qu'ils  ir.'ii(|noitv  frt  passant;  et,  si 
nous  fe  remarquons ,  c'est  qu'ils  offrcnt 
une  andlogie  frappante  avec  les  annates 
de  la  Chine,  de  llnde  et  de  la  Gr^e, 
ou  Ton  rencontre  ^galement,  avant 
Farriv^e  des  P^lasges  et  des  Hellenes , 
des  autochthones  ou  aborigines.  Ces 
premiers  habitants  ne  peuvent  ^tre 
consid^r^s  comme  faisant  partie  de  la 
nation  arm^nienne,  dont  le  nom  ne 
convient  proprement  qu'a  la  race  con- 
auerante  amende  de  Babylone  par  Haig, 
uls  dupatriarcheThorgom,  ran  2107 
avant  Ji^sus*Christ. 

La  religion  primitive  de  TArm^nie, 
comme  celle  des  autres  peuples,  fut 
pure  et  exempte  des  mensonges  que 
rignorance  ou  la  corruption  du  cceur 
y  apport^rent  par  la  suite.  Fondle  sur 
la  tradition  que  Thorgom  tenait  des 
premiers  patriarches,  elle  consistait 
dans  Tadoration  du  vrai  Dieu ,  dans  le 
repentir  de  la  dech^ance  primordiale, 
et  dans  Tattente  d'un  supreme  r^para- 
tnir.  Le  culte  ^tait  simple,  reposant 
sur  la  pri^re  et  le  sacrifice  san^lant. 
Le  p^re  de  famille ,  k  la  fois  pontife  et 
roi,  en  regissait  lesmembres  avec  une 
sage  equity ;  il  offrait  au  Tres-Haut, 
comme  le  m^iateur  cboisi ,  les  prieres 
et  ies  victimes,  il  terminait  les  diff(6- 
rends,  et,  sous  ce  r^^ime  patriarcal, 
tous  jouissaient  d'une  paix  profonde. 
Mais  les  enfants  de  fa  race  maudite 
de  Cham,  qui  perp^tua  la  race  mau- 
vaise  et  antedihivienne  de  Cain ,  trou- 
bidrent  bientdt  Tharmonie  qui  regnait 
parmi  les  descendants  de  Sem  et  de 
Japhet.  Ayant  rejete  de  bonne  heure  la 
tradition  de  leurs  peres,  ils  suivirent 
la  voie  perverse  de  Torgueil  et  de  la 
concupiscence;    ils   substituerent  au 
culte  du  vrai  Dieu  des  honneurs  rendus 
aux  ^tres  secondaires  de  la  creation, 
tels  que  les  astres  et  les  forces  sup^- 
rieures  de  la  nature.  L'adoration  du 
soleil,  des  plandtes  et  des  constella- 
tions, donna  naissance  au  sab^isme, 
qui  prit  lui-m^me  son  origine  dans  les 
plaines  de  la  Chald^,  dont  le  peuple 
ifianifesta  toujours  un  goCit  irr^sistiole 
a  lire  dans  Fecriture  myst^ieuse  des 
astres  les  secrets  du  ciel  et  ses  pro- 
pres  destines  terrestres.  Ce  culte  avait 

8*  lAvraison,  (Armrnie.) 


en  lui-nidrne  quelque  chose  d^^leve  «t' 
de  grand;  il  est  possible  que  dans  le 
principe  une  pensee  coupable  n*en  al- 
t^rdt  pas  la  majesty,  et  que  Fid^e  du 
Dieu  unique,  inondant  de  ses  clart^ 
tous  ces  piles  miroirs  de  sa  puissance, 
sem^s  avec  profusion  dans  Fespace, 
domindt  Fensemble  de  ces  conceptions , 
fruit  d'un  noble  effort  de  FinteUigence. 
Maiheureusement  Forgueil ,  cette  pre- 
miere pierre  d'achoppement  pour  la 
raison  d'Adam,  est  toujours  vivace  au 
fond  du  cceur  humain,  et  il  corrompt 
les  plus  pures  pens^s.  Aussi  Fessor 
qu*avait  pris  soudainement  la  science , 
en  se  livrant  aux  recherches  astrono- 
miques,  porta  les  esprits  a  pr^umer 
d'eux-m^mes.  En  scrutant  trop  pro- 
fond6ment  les  oeuvres  de  la  cr&tion> 
on  oublia  le  Cr^teur,  et  peu  h  pen  on 
lui  substitua  la  cr^ture.  C'est  alors 
que  commence  proprement  Fidoldtrie. 
Babylone  est  le  lieu  que  la  tradition 
nous  d^signe  comme  le  foyer  de  cette 
grande  erreur,  et  c*est  \h  e£fectivement 
qu'on  ^leva  le  premier  temple  et  la 
premiere  statue  au  dieu  Belus. 

Remarquons  aussi  cc  fait  impor- 
tant, que  le  berceau  de  Fidolitrie  voit 
en  m^me  temps  nattre  et  grandir  le 
principe  de  la  force  brute  ou  du  despo- 
tisme.  Le  premier  trdne  est  dresse 
dans  la  ville  ou  Fon  commence  k  renier 
Dieu;  les  horomes  qui  avaient  refuse 
de  soumettre  leur  raison  aux  v^rit^s 
traditionnelles  de  la  foi,  tombent  sous 
Fasservissement  de  Nemrod;  Fescla- 
vage  et  Foppression  de  Fbomme  par 
Fhomme  suivent  le  refus  d'ob^ir  a  la 
Divinity. 

La  colonic  amen^  de  Babylone  par 
Haig  ne  tarda  pas  a  ressentir  les  eftets 
de  la  revolution  religieuse  et  politique 
op^r^  dans  la  m^tropole.  L'amour  des 
conqu^tes,  suite  inevitable  du  nouveau 

gouvcrnement  despotique,  poussa  au 
el^  des  limites  de  la  Chaloee  les  ar- 
m6es  des  Assyriens ,  et  ils  vinrent  por- 
ter la  guerre  en  Arm^nie,  Fan  1725 
avant  notre  ere.  Le  roi  Anouscbavan 
fut  vaincu,  et  son  royaume  demeur» 
soumis  a  Fempire  assyrien  jusqu'au 
temps  de  Baroir,  son  trente-auatrieme 
snccesseur,  c'est-a-dire ,  penaant  prds 


34 


L*UNIVERJI>. 


de  dix  siteles.  Ge  fiit  pendant  ce  long 
cycle  d'ann^es,  qu'enveloppent  d*e- 
paisses  t^nMires,  que  la  religion  et  le 
cuhe  de  la  Chald^  se  propagmnt  dans 
rArm^ie.  Motse  de  Khoren,  le  plus 
ancien  historien ,  et  qu'on  pent  appeler 
^  juste  titre  rH^rodote  ann^ien,  paroe 
^u*il  nous  rappelle  et  T^rudition  et  la 
simplicity  maiestueuse,  oomme  aussi 
la  crddulit^  die  I'ecrivain  grec,  nous 
apprend  que  ce  m^me  Anouschavan 
offirait  des  sacriGces  sous  les  platanes 
de  rantique  Armavir^  sa  capitale,  et 
que  le  mmissement  des  feuilles,  agi- 
tees  |)ar  un  vent  i^er  on  impj^tueux, 
serrait  ensuite  aux  pr^tres  h  tirer  des 

tronostics  heureux  ou  d^vorables. 
ien  qu^il  ne  soit  pas  dit  qu' Anouscha- 
van lui-m^me  soit  tomb^  dans  ces  su- 
perstitions, n^ninoins,  comme  ces 
m^mes  arbres  oonserv^rent  dans  les 
Siftes  suivants  un  caractte  sacr^  et  |>ro- 
pnetique ,  il  est  probable  que  la  relis ion 
primitive  avait  d6j^  perdu  queique 
chose  de  sa  pureU. 

On  pent  done  6xer  cette  ^poque 
comme  le  temps  dk  le  sab^isme  se  r6- 
pandit  dans  I  Arm^nie.  La  conqu^te 
d'un  peuple  par  un  autre  ne  s'effeduait 
jamais »  dans  les  Ages  psimitifs,  sans 
que  le  vainqueur  nImposAt  au  vaincu 
sa  eroyance,  et  c'est  ce  qui  nous  fait 
nrdsumer  que  la  religion  officidle  de 
la  cour  des  rois  d*ArmMe  dut  6tre 
celle  des  monarques  de  Babjrlone ,  quoi- 
que  dans  d'antres  parties  au  pays  ran- 
cienne  tradition  pdt  se  oonserver  avec 
plus  ou  ODoins  d*mt^^.  Le  sab^isme 
enfanta  ntessairement  les  erreurs 
grossi^es  de  I'idolAtrie ;  le  roi  avait  ses 
temples  et  ses  dieux ,  et  lorsque  Nabu- 
chodonoflor,  aprte  avoir  men^  les  Juifs 
h  Babvione,  en  contraignit  quelques- 
uns  d^6migrer  en  Arroenie,  nous  sa- 
vons  que  Sempad,  chef  de  I'ancienne 
faroille  des  Pagratides,  ^nt  venu  se 
presenter  devant  le  roi  £rovant  P% 
celui-ci  le  perstoita  cruellement ,  paroe 
qu'il  refosait  d*ador«r  ses  idoles. 

La  chute  de  Tempire  assyrien  rendit 
au  peuple  arm^nien  son  ind^pendanoe 
politique;  mais,  sous  le  rapport  reli- 
gieux,  il  fut  entratn^  dans  le  nnouve- 
ment  de  TA^yrie  et  de  la  MMie,  con- 


quises  pari  Cyrus.   Le  sabi^isme  on 

I  idoldtrie  pure  c^^rent  aux  attaques 
nuissantes  du  magisme  ou  du  culte  dti 
feu ,  reg^n^r^  par  Zoroastre.  L'Arm^- 
nie,  qui  touchiBiit  aux  frontidres  de  la 
nouvelle  monarchic,  6tait  sous  la  main 
des  missionnaires  de  la  nouvelle  doe^ 
trine.  lis  y  p^n6tr^nt  et  firent  de 
nombreuses  conversions.  Conune  le 
zend  6tait  la  langue  sacr6e  des  mages 
et  de  leur  liturgie,  ils  n'ont  pu  imposer 
leur  foi  au  peuple  arm^nien,  sans  im- 
porter dans  sa  langue  un  certain  noiiv 
ore  de  mots.  Si  ces  mots  sont  relatifs 
aux  objets  du  culte  et  de  la  croyanoe , 
la  langue  arm^nienne  litt^rale,  bien 

au'elle  alt  change  depuis  cette  ^que, 
oit  cependantenconserver  des  traces, 
qui  sont  autant  de  t^moins  irr^usa- 
Dies  de  la  domination  religieuse  des 
Perses.  Or,  c^est  ce  que  la  philologie 
orientale  dtoontre;  et,  si  oe  ^enre  de 
recherches  n'^tait  d^plac^  ici,  nous 
donnerions  une  liste  comparde  de  mots 
absolument  identiques  dans  les  deux 
langues,  tels  que  ceux  qui  expriment 
le  nom  m^me  de  cUeu,  cdui  de  sabi" 
teUj  6^ feu ,  de  bUcher^  de  cuUe,  etc. , 
etc  Les  monum^ts  historiques  vien- 
nent  a  Tappui  de  la  preuve  que  nous 
citons.  Tigrane  I",  contemporain  des 
Grecs,  secourut  Cyrus,  au  rapport 
des  bistoriens,  dans  sa  guerre  oontre 
Astyages,  roi  de  Mddie,  et  c'est  lui  qui 
contrinua,  avec  le  nionarque  persan, 
k  di^truire  la  puissance  du  Dragon,  si- 
gnification du  mot  Astvages. 

Tigrane  avait  un  tfls  nomm^  Va- 
bakn ,  c6l^re  par  sa  valeur ;  des  chants 
populaires,  conserve  par  les  noonta- 
guards,  et  qui  remontent  peut-dtre  a 
son  ^poque,  vantent  ses  hauts  feits ,  et 

II  est  tres-remarquable  que  \efeu  appa- 
raisse  d^a  dans  ces  vers,  voil^  sous 
les  id6es  du  magisme.  Void  oe  qu*ils 
disent :  «  Le  del  en&ntait,  la  terre  en- 
«  fantait,  ainsi  que  la  mer,  oouieur  de 
«  pourpre.  Les  douleurs  de  renfaute- 
«  ment  tourmentaient  aussi  le  roseaii 
«  rouge.  De  son  extrtoit^  8*6chappait 
«  une  fum^,  et  bientot  la  fieinme 
«  parut ,  et  de  cette  flamme  s  (^lan^ait 
«  unjeunehommealachevdurebloncie. 
c  La  flamme  entourasesboudes  et  roi- 


ARM£NI£ 


Zb 


« tigeait  autour  de  sa  barbe;  ses  yeux 
«et  ses  paupitea  ^taient  deux  so- 
« leils. » 

Gette  sorte  de  chant  insgM  montre 
que  dte  le  prindpe  la  doetrine  de  Zo- 
roastre  avait  ^  accepts  en  Armtoie , 
et  oe  qoi  le  prouve  encore ,  c'est  que  ce 
mtee  Yahakn  reoit  aussi  le  nom  d' Ar- 
mazd,  qui  eat  ^videmment  le  mtoe 

Sue  celui  d'OnnuaEd,  nom  du  principe 
u  bien  dans  le  magisme. 
Lor8q[ue  Alexandre  le  Grand  se  jeta 
sur  I'Asie  et  qu'il  y  ^tablit  la  domina- 
tion grecque,  la  religion  sensuelle  et 
proprement  paiennedes  conqu^rants, 
entour^  du  s^duisant  cortege  des  di- 
vinity de  roiympe,  livra  une  lutte 
assez  faible  au  culte  plus  sMeux  et 
plus  intellectuel  de  la  Perse.  L*Arm^nie 
resta  presque  totalement  attach^  k  la 
doctrine  du  magisme;  seulement  les 
parties  de  TArm^ie  Mineure  avoisi- 
nant  la  Gappadoce  ou  les  autres  pro- 
vinces greoques,  r&ist^nt  moins  au 
contact  imuMdiat  et  habitue!  des  idees 
paTennes,et,  lorsque  la  puissance  ro- 
maine,  qui  avait  adopte  le  culte  des 
Grecs ,  6tendit  ses  armes  sur  ces  mfimes 
regions,  la  rtforme  oj^He  dans  les 
idSes  reliijieuses  des  Arm6niens  devint 
plus  sensible,  bien  qu'elle  ne  tdi  ja- 
mais complete  ni  radicale,  parce  quuls 
pr^il^raient  allier  les  ^Itoents  h^t^ro- 
genes  du  polyth^isme  et  du  dualisme. 
lis  o6daient  sans  doute  en  cela  aux  exi- 
gences de  la  politique  romaine,  qui 
voulait  imposer  aux  vaincus  ses  divi- 
nity comme  ses  lois.  De  \h  vient  que 
le  nom  d'Armazd  ou  d^Ormuzd,  le 
bon  principe,  sert  aussi  h  dteisner  Ju- 
piter. Reste  a  savoir  si  au  fonode  leur 
conscience  les  Arm^iens  entendaient 
par  ce  nom  celui  du  Jupiter  Capitolin 
et  Tonnant ,  ou  bien  sMls  ne  v^neraient 
pas  plutdt  en  lui  I'implacable  et  ^eta^ 
nel  ennemi  d'Ahriman,  principe  du 
mal.  De  mdme,  ils  laissaient  traduire 
le  nom  de  Zerwan,  signifiant  le  temps 
sans  homes  y  magnifique  id^  de  I'm- 
fini,  oongu  sous  sa  notion  d'StemiHj 
par  le  mot  Saturne.  Satume  est,  ^  la 
▼erit^ ,  le  ytre  des  dieux  chez  les  Grecs ; 
il  apparaft  h  Torigine  des  choses  comme 
primmi  Jupiter  et  les  autres  divi- 


nity; mais  il  n'a  poinl  le  caractere 
imposant  de  Zerwan,  qui  fcbappe ,  dans 
les  mysterieuses  proiondeurs.  de  son 
essence,  au  regard  de  Tesprit  humain. 

Un  culte  cel^re  diez  les  Arm^ 
niens,  et  dont  parle  Strabon ,  est  celui 
de  la  d^esse  Anahidy  qu'il  nomme 
AmaUs,  EUe  avait  plusieurs  temples 
dans  la  provmce  que  les  G6orgiens 
nomment  aujourd'hui  Ek^hUtsUh.Tan- 
t^t  les  Grecs  interpr^nt  oe  nom  par 
celui  de  f^hiuSy  et  tant6t  par  celui  de 
Diane.  Gette  confusion  tb6ologique 
vientdecequececulte^tait^tranger  a  la 
Grtee,  et  que  la  d^esse  Anahid  ^it 
proprement  la  Mylitta  ou  I'Astart^  des 
ChaMtois,  ce  oui  jetait  du  vague  sur 
ses  attributs.  L  admiration  du  peuple 
avait  aussi  consacr^  quelques  noms  de 
h^ros  correspondants  a  ceux  d*Hercule , 
de  TbMe  et  autres,  qui  portent  en 
G  rtee  le  nom  de  deminiieux ;  tels  teient 
Sbaniarad,  yahtUsn  et  Tiani. 

Ghaque  peuple  a  toujours  eu  dans 
son  territoire  un  lien  choisi  et  v6aM, 
auquel  se  rattachaient  ses  anciennes 
traditions  religieuses,  et  oft  il  fixait  le 
si^  de  son  culte,  de  ses  pilerinaees 
et  de  ses  premiers  pontifes.  Ge  lieu 
dtait  ordinairement  regard^  comme  le 
point  central  de  la  terre.  Nous  retrou- 
vons  cette  Id^  cbez  les  Indlens,  les 
Persans ,  les  Grecs,  et  mime  en  ^grpte. 
L*Armlnie  avait  ^ement  sa  terre 
sacrte ;  c'^it  le  pays  de  Daron,  district 
du  canton  de  Dourouperan.  Lorsque 
la  religion  chr^ienne  envahit  TArm^- 
nie,  cette  province  fut  le  dernier  asile 
oil  se  retranchdrent  les  sectateurs  du 
magisme ,  et  les  arguments  qu'Us  oppo- 
s^nt  aux  ap6tres  de  T^vangile  n'^ 
taient  pas  ceux  de  la  dialecti^e,  comme 
nous  le  dirons  aiUeurs,  mais  une  r6sis- 
tance  Ik  main  arra^  et  par  la  force. 
II  paratt  que  I'lnde  avait  aussi  exerc^ 
une  influence  religiease  sur  oe  pa^; 
s^nt  Gr^oire  riliuminateur,  premier 
patriarcbe  de  TArmdnie,  trouva  dans 
ces  lieux  des  statues  et  des  temples  con- 
sacr^  k  Thnidre  et  k  Gisane*  divini- 
ty que  les  prMres  lui  dirent  etre  ve- 
nues de  rinde,  sans  pouvoir  pr6ciser 
r^poque. 

Ainst,  apr^ ralt^ration  de  la  croyance 


36 


L'UNIVERS. 


primitive ,  la  Chald^e  et  ia  Perse^vaient 
successivement  Cait  pr^valoir  leur  sym- 
bole  religieux  dans  I'Armdiiie.  La 
Greoe,  post^ieurement  la  puissance 
romaine ,  qui  adopta  son  culte,  et  d'une 
autre  part  Tlnde,  essa^^nt  aussi  d*y 
dominer,  mais  leur  action  fut  beaucoup 

Rlus  restreinte  et  moins  durable.  Quand 
i  diristianisme  parut,  TAnn^nic, 
comme  les  autres  nations  de  TAsie, 
etait  travaill^e  de  la  corruption  g^n6- 
rale;  ddmembr^  par  les  Romains  et 
par  la  puissance  croissante  des  Par- 
tbes ,  sa  dissolution  politijpie  iitait  ine- 
vitable, si  la  foi  chr^tienne  n'^tait 
venue  vivifier  et  r6g6n6rer  cette  race 
appel^  encore  k  de  glorieuses  desti- 
nes. 

En  effet,  T^vangile,  en  changeant 
r^tat  des  croyances ,  modifia  heureuse- 
ment  la  position  sociale  de  ce  peuple; 
il  opera  une  scission  morale,  profonde 
et  perp^tuelle,  entre  TArmeuie  de- 
venue  chn^tienne  et  la  Perse  soumise 
au  culte  de  Zoroastre.  La  ntossit^  ou 
elle  dtait  de  defendre  sa  foi  contre  Tin* 
tolerance  j^rsane  la  porta  a  revendi- 
quer  son  md^pendance  politioue,  de 
sorte  que  la  foi  enfanta  cnez  eile  la  li- 
berty; de  plus,  sous  le  rapport  de  la 
civilisation ,  la  revolution  oper^e  par  le 
christianisme  fiit  encore  plus  sensible. 
Car  nous  ne  voyons  pas  que  TAi^ 
menie  eut  participe  anterieurement  au 
mouvement  intellectuel  des  Grecs  et 
des  Syriens  qui  Tavoisinaient.  L'igno- 
rance  etait  telle,  que  les  anciens  rois 
n'avaient  pas  d'historiens  nationaux 
capables  de  transmettre  dans  leur  lan- 
gue  les  annales  de  leiirs  r^gnes,  et  ils 
ne  nous  sont  oonnus  que  par  les  chro- 
niques  compos^es  en  grec  et  en  syriaque 
que  oonsulta  Moise  de  Kboren,  qui 
tait  lui-meme  cette  remarque.  D^s  que 
i'idee  chretienne  a  subjugue  les  esprits , 
lis  perdent  leur  ancienne  rudesse,  Ta- 
mour  de  la  science  et  le  godt  des  let- 
tres  se  developpent ,  et  la  face  du  nays 
se  couvre  d*ecoles ,  comme  nous  auons 
le  dire,  en  suivant  Phistoire  religieuse 
de  ce  peuple. 
Suivant  la  tradition ,  Abgare  (*) ,  roi 

(*)  Nous  pensons  que  nos  lecteurs  noiii 


d'£desse,  instruit  par  la  reiiommeedes 
miracles  eclatants  du  Christ,  qui  ac- 

tturont  gri  de  mettre  tout  lean  jeia  la  oor- 
respondanoe  attribaee  4 Abgare  eta  Noti«< 
Seigneur  jesos-Christ.  EUe  eat  extnite  de 
Molae  de  Khoren  et  elle  oonoorde  aveeoeUe 
que  rapportent  plusieun  hiftarieus  grecs. 

ttDet  envoyes  d* Abgare  lui  raoonterenf,  a 
leur  retour  de  Jenualem ,  ce  qu*ils  avaieot 
entendn  dire  du  Messie  qui  parcourait  alors 
les  villes  de  Judee.  Ce  r6cit  etouna  le  roi 
d'^esse ,  qui  crut  auuitdt  reoonnaitre  le 
fits  de  Dieu.  «  Ces  prodiget,  disait-il,  n« 
sont  point  ceux  d'un  homme ;  la  puissance 
de  ressusciter  les  morts  n'appartient  qu*i  la 
DiTiniie. 

»  Or,  le  roi  ilait  trsvaille  eo  ce  moment 
d*une  maladie  cruelle.  Tous  les  medecint 
avaient  en  vain  epuis^  les  aecrels  de  leur 
art ,  ils  n*afaient  ootoBU  aucun  heureox  re* 
sultat  Abgare  espera  que  le  Messie  pour- 
rait  le  guerir  de  son  mal ;  en  consequence 
il  lui  ecrivii  une  letire  con^iie  en  ces  ter- 
mes : 

•Abgare,  fits  d'Arscham,  prince  d*]&leste, 
i  Jesus,  sauTenr  et  bienfaiteur,  nouveUe- 
ment  apparu  au  pays  de  jenisalem,  salul: 

«  Nous  avons  entendu  parler  de  tous  et 
des  guirisons  operees  par  vos  mains ,  sans 
aucun  remede,  car,  comme  on  le  dit,  tous 
donnes  I'ouie  aux  sourds ,  ia  vue  aux  aveu- 
gles ,  vous  failes  marcher  les  boiteux ,  tous 
purifies  les  lipreux ,  vous  cbassex  les  esprits 
impurs ,  vous  rendex  la  tante  a  ceux  qu'af- 
6ige  une  longue  maladie,  et  vous  reasuscitez 
les  morts.  En  apprenant  oeci ,  j'ai  &it  cette 
double  supposition :  que  vous  %les  ou  Dieu 
mime  descendu  du  ciel ,  ou  le  fils  de  Dieu. 
C*est  |x>urquoi  ie  vous  ai  ecrit  de  prendre 
la  peine  de  venir  chez  moi ,  et  de  me  guerir 
de  la  maladie  que  j*ai  depuis  longtemps. 
J'ai  aussi  appris  que  let  Juifs  miirmurent 
contre  vous  et  qn*ils  veulent  vous  persecu- 
ter.  Ma  ville ,  quoique  petite,  est  assez  agrea- 
ble,  et  elle  sumrait  poor  nous  deux.  • 

«  Les  porteurs  de  la  lettre  trouverent  Notre- 
Seigneur  a  Jerusalem ,  et  c'est  ce  qu'indi- 
quent  les  ^vangiles  par  oe  passage  qiu  quel- 
ques  idoldtres  ittdent  venus  U  trouvtr. 

« Jesus  re^ut  cette  lettre,  mais  il  n'alla 
point  k  Edesae ,  il  fit  ik  Abgare  la  repoiise 
suivante : 

«  Heureux  celui  qui  croit  en  moi ,  sao« 
m'avoir  vu ,  car  c*est  de  moi  qu'il  est  ecrit 
que  ceux  qui  me  voient ,  ne  croieut  pas  en 
moi,  et  que  ceux  qui  ne  me  voient  pas. 


ARMftNIE. 


37 


complissait  alors  sa  mission  en  Jud6e, 
envoya  vers  lui  le  prier  de  le  gu^rir 

croient  et  reqoivant  la  vie.  Yous  m'ecriTez 
d*aller  Toas  trouver,  mais  il  faut  que  j'ac- 
compUflseidtouies  lochosespour  Icsquelles 
j'ai  ete  envo^i.  Apres  leur  aocomplisseineiit, 
jt  m'eleverai  vers  celui  qui  in'a  envoyi ,  et 
je  irous  envemi  Tun  de  mes  disciples  pour 
gu^rir  votre  maladie,  tous  doniier  la  vie  et 
k  tous  oeux  qui  sont  avec  vous. » 

«  Abgare  le^ut  oetia  letlre  d'Anao,  qui  lui 
remit  ea  Divine  temps  Timage  du  Sauveur  (*) 
que  Ton  conserve  jusqu*a  ce  jour  daos  la 
ville  d*tdeBae, 

•Apres  I'ascensioa  de  Jesus,  Thomas,  Tun 
des  douze  apotres ,  envoya  Thaddee  >  Tun 
des  soixante-dix  disciples,  dans  la  ville 
d*^e&8e  pour  guerir  Abgare  et  revao§|e- 
liser.  II  descendit  daos  la  maison  de  Tobie, 
prince  juif ,  que  Ton  dit  £tre  de  la  famille 
des  Pagradites,  et  quin*ayantpas  abandonni 
le  jodaisme  au  milieu  des  gentils,  se  con- 
vertit  ensuite  au  christianisroe.  La  oouveUe 
s*en  r^ndit  aussitdt  dans  la  ville,  et  lots- 
que  Abgare  Teut  apprise,  il  dit :  •  (Test  oelui 
au  soiet  duquel  Jesus  a  ecrii.*  Il  le  manda 
prisdie  lui,  et  lorsque  Thaddee  entradans  la 
salle ,  son  visage  parut  resplendissant  a  Ab- 
gare, qui ,  se  levant  de  son  tr6ne ,  se  pros- 
tema  sur  sa  face  et  lui  rendit  cet  hommage , 
au  grand  ^tonnement  des  seigneurs  qui  Ten- 
touraient.  Abgare  lui  dit  :  m  Si  tu  es  par 
hasard  le  disciple  du  bienbeureux  Jesus, 
qn'il  m*a  dit  envoyer  ici ,  ne  peux-tu  pas 
gu^ir  mon  mal  ?  »  Thaddee  lui  r^pondit : 
«  %Si  tu  crois  en  J^us ,  le  fits  de  Dieu  ,  ta 
tlemaode  sera  exauoee. » 

•(Abgare  lui  dit :  «  Je  crois  en  lui  et  en 
son  pere ,  et  c'est  pour  cela  que  ie  vouiais 
prendre  mes  troupes  et  aller  detruire  la 
nation  juive  qui  Ta  crudfii ,  si  je  n'en  avais 
i*(e  empdche  par  les  Romains. » 

-Alon  Thadd^  Tevangelisa  lui  et  toute  la 
\ille ;  puis  lui  imposant  les  mains,  il  le  gueril, 
ainsi  qu*Abdia ,  prince  aussi  consider^  de 
la  cour  que  du  peuple.  Tous  les  malades  et 
les  infirmes  de  la  ville  recouvrerent  egale- 
ment  la  sanl6.  Abgare  et  toute  la  ville  re^ut 
le  baptdme,  on  ferma  les  portes  des  temples, 
H  les  statues  fnrent  oouvertes  de  roseaux. 
l^rsonne  n'etait  amene  violemment  a  la  foi, 
«*t  cependant  chaque  jour  le  nombre  des 
lideles  aogmeotait.* 

Abgare  ecrivit«»ncore  a  Tempereur  Tibere 
\a  lettrc  Miivante  : 

n  V07.  li  Fl.nch«  n«  11. 


de  la  maladie  cruelle  gui  l*affligeait. 
Comme  sa  demande  ^tait  faite  dans  un 

«  Abgare,  roi  des  Armeniens,  a  mon  sei- 
gneur Tibere ,  empereur  des  Romains ,  salut : 

«  Quoique  convaincu  que  tout  oe  qui  se 
passe  dans  votre  empire  n*est  point  cacbi  4 
Y.  M. ,  je  vousavertis  cependant  par  cette 
lettre,  comme  votre  fidtie  ami ,  que  les  Juifs 
de  Palestine  ont crucifix  le  Christ, qui  n'etait 
ancunemeut  coupable,  k  cause  desesgren- 
des  et  bonnes  oeuvres ,  de  ses  prodiges  et  de 
set  miracles  qui  allaient  jusqu'A  ressusdter 
les  morta.  Sachez  qnecette  puissance  n*est  pas 
celle  d*un  homme,  mats  bien  celle  d*unDieu. 
Aussi,  au  moment  ou  ils  le  crudfierent,  le 
del  s'obscurdt  et  la  teire  trembla.  Apres 
trois  jours  il  ressusdta ,  et  presentement  il 
acGomplit  dans  tous  les  lieux  des  choses  ad- 
mirables  par  la  main  de  srs  disciples.  Yotre 
Majesty  sait  ce  qu'il  convieot  a*ordonner 
touchant  les  Juifs  qui  ont  agi  de  la  sorte.  II 
faut  ordonner  qu*en  Ions  lieux  on  adore  Ic 
Christ ,  comme  le  vrai  Dieu. 

Repoaie,  « Tibere,  empereur  des  Ro- 
mains, a  Abgare,  roi  des  Armeniens,  salut  : 

«  On  a  lu  devant  moi  la  lettre  dictfe 
par  votre  amitie ,  et  pour  laquelle  je  vous 
rends  des  actions  de  grAoes.  Pilate  nous  a 
donne  des  details  sur  les  miracles  dont  nous 
avious  entendu  parler  pr6cedemment,  et  il 
nous  a  dit  comment,  apres  sa  resurrection, 
il  avait  ete  recomiu  comme  Dieu  par  beau- 
coup  de  gens.  CVsl  pourquoi  j'ai  pense  a 
faire  ce  que  vous  me  oooseillez.  Mais  comme 
la  coutume  des  Romains  veut  qu*une  divi- 
nite  ne  soit  reconnue  que  par  ordre  du  steat, 
j*ai  consuite  sur  ce  point  cette  assemblee 
qui  a  rejeti  ma  proposition.  Toutefois,  nous 
avons  permis  k  quiconque  le  voudra ,  de  re- 
connaitre  Jesus  pour  Dieu ,  en  mena^nt 
de  la  mort  ceux  qui  le  caloroaieront.  Quant 
aux  Juifs  qui  ont  ose  le  crudfier,  bien  qu*il 
meritAt  des  bonneurs  et  des  r^mpenses , 
au  lieu  de  la  croix  et  de  la  mort ,  lorsque 
Taurai  rMuit  les  Espagnols  r^olt^,  je  leur 
infligerai  le  chAtiment  qu*ils  mMtent.  » 

L*authenticite  de  ces  lettres  a  beaucoup 
exerce  la  sagacite  des  critiques.  Tillemont , 
Pari  ct  d'autres  ont  rifuti  longuement  ceux 
qui  la  revoquent  en  douie.  D'aulres,  comme 
J.  Damascene ,  de  Fide orlhod.,  liv.  4 ,  ch.  1 7; 
S.  Ephrem,  sur  le  Testament;  Nicephore, 
liv.  9 ,  ch.  7  ;  Procope  ,  de  Bello  Persico , 
I,  ts ,  ch.  18 ,  se  sont  contentes  de  respecter 
i'antiquite  de  ces  leltres ,  et  de  croire  a  la 
poMibilile  de  la  correspondance ,  «ans  pre- 


as 


L'UNIVERS. 


esprit  de  foi  et  d'humilit^,  le  Saaveur 
Tezauga,  et  il  envoya  Thadd^,  Tun 
des  soixante-douze  disciples,  qui  le 
gu^rit ,  et  jeta  dans  oette  ville  les  pre- 
mieres semenoes  du  christianisme. 
L'apdtre  Barth^lemi ,  que  les  peuples 
de  rlnde,  de  I'Arabie  et  de  la  Perse, 
yr€n<tceat  comme  leur  illustre  mission- 
naire,  porta  aussi  ses  pas  ^  Edesse,  et 
de  Ui  il  traversa,  avec  Thadd^,  TAr- 
m^ie,  la  Cappadoce  et  1' Albania.  Les 
germes  pr^eux  de  la  foi  iiirent  done 
d^pos^.en  Arm6iie  dte  le  commence- 
ment de  la  mission  des  apdtres;  mais 
ils  ne  prirent  leur  aocrotssement  et  ne 
fiructin^nt  que  lorsque  saint  Gr^oire 
Tint  les  fdconder  de  ses  sueurs  et  de 
son  sang. 

Saint  Gr6goire  (*) ,  tel  est  le  nom  du 
vrai  civilisateur  de  TArm^nie ;  aussi  lui 
a-t-on  donn^  le  titre  d*iUuminateurf 
comme  ayaot  6clair^  de  la  lumi^re  de 
r£vangile  ce  peuple  encore  assis  aux 
ombres  de  Tidolfttrie. 

Issu  de  rillustre  maison  des  Arsaci- 
des,  il  naquit  vers  Tan  240  de  notre 
dre,  k  r^poque  oh  la  dynastie  de  Sas- 
san  montait  sur  le  tr6ne  de  la  Perse. 
Son  p^  Anag  re^t  la  triste  mission , 
de  la  part  du  monarque  persan.  d'aller 
en  Armdnie  assassiner  le  roi  Rnosro?, 
de  la  famine  des  Arsaddes ,  dont  les 
droits  k  la  couronne  qu'il  avait  usur- 
p6e  ^talent  l^times.  Ana^;  rdussit 
dans  rex6cution  de  soa  dessem ;  il  sur- 
prit  et  tua  Khosrov ;  lui-m^me  porta  la 
peine  de  son  crime,  et  il  expira  sous 

tendre  que  le$  lettrea  soient  exactement  les 
mtoies.  Dans  un  concile  tenu  sous  le  pape 
Gelase ,  Tan  4g4 ,  ou  rangea  oeUe  oorres- 
pondance  panni  les  apocr^phes.  Mais  la 
sentence  de  l^lise  ne  d^tnut  en  rien  Tauto- 
rit^  du  temoignage  des  historiens  de  VAr- 
m^e  Ott  de  la  Syrie,  et  n*erige  point  en 
article  de  foi  leur  faUificBtion,  conune  quel- 
ques-uns  pourraient  Tima^ner.  Le  jugeraent 
que  des  ecrits  n*ont  pas  eie  transmis  direc- 
lement  par  les  ap6tjres,  et  n*ont  point  le 
degre  d*authenticite  des  ivangiles,  n'em- 

Slique  point  en  soi  la  faussete  de  ces  rnhna 
ocuments.  Cette  decision  les  dasse  seule- 
ment  dans  la  categorie  des  aiilres  sourreii 
historiqnes  de  Tanliquiie. 
(•)  Toy.  la  plnnrhr  n«  la. 


le  fer  des  gardes  du  roi.  II  laissait  tm 
jeune  enfant  h  la  mamdle,  qu'on  sauva 
avec  peine,  en  I'emmenant  dans  le  ter- 
ritoire  de  Tempire  romain,  ou  il  fiit 
^ev^  dans  la  religion  chr^'enne.  D'un 
autre  cdtd,  le  fils  de  Khosrov,  Ele- 
ment en  bas  dge,  avait  4A6  conduit  a 
Rome  pour  dcnapper  aux  trames  per- 
fides  du  roi  persan.  II  grandit  dans 
oette  viUe,  au  milieu  des  camps  et  des 
exercices  militaires,  puis,  avec  les  se- 
cours  de  Temperrar  Dioddtien,  il  re- 
vint  en  Armdnie  reveodiquer  le  trdne 
de  ses  p^res.  A  peine  avait-il  oonsolid^ 
sa  puissance,  que  Grdgoire  venait  k  sa 
oour  lui  ot&ir  ses  services,  toutefois 
sans  se  faire  connattre.  Le  roi  lui  £aJt 
un  accueil  favorable;  au  bout  de  qud- 
que  temps,  il  ddcouvre  que  Grdgoire 
est  durdtien,  il  le  persecute  borrible- 
ment  pour  sa  foi ,  le  torture ,  et  le  jette 
au  fond  d^une  dterne,  oil  il  lan^t 
quatorze  ans.  Dieu  lui  conserve  mira- 
culeusement  la  vie ;  il  sort  de  ce  goufEre 
infect  et  revient  prdcher  la  foi  a  la 
cour  de  Tiridate,  nom  du  roi  ann^ 
men.  Ce  prince,  gu^ri  par  lespri^res 
du  saint  cie  la  maladie  qui  Tafuigeait, 
se  convertit  k  Tfivangile,  et  acoepte  le 
baptSme  avec  toute  sa  cour. 

Lorsque  le  christianisme  devint  la 
religion  de  ll^tat,  il  prit  un  rapide 
aocroissement,  et  cette  revolution  re- 
ligieuse  fiit  secondde  par  celle  qu'op^- 
rait  siroultan^ment,  dans  Tcmpire  ro- 
main, la  conversion  de  Gonstantin  le 
Grand.  L'^pte  de  Tiridate  et  Telo- 
quence  de  Gr^oire,  unies  par  une  ten- 
dre charity,  ^tendirent  le  royaume  du 
Christ  dans  tons  les  lieux  encore  sou- 
mis  au  magisme.  Le  roi  mourut  dans 
un  dge  avanc^,  b^ni  de  ses  sujets,  et 
plac6  par  r£^lise  arm^nienneau  nombre 
de  ses  premiers  saints.  Gr6goire  pa^ 
toute  sa  vie  a  organiser  son  Eglisenais- 
sante,  et  il  r^di^ea  des  r^lements  qui 
sont  encore  suivis  par  elle  avec  une 
ponctualite  scrupuleuse.  Sur  la  fin  de 
ses  jours,  il  se  retira  dans  la  solitude, 
ou  il  re^ut  la  couronne  du  martyre , 
ayant  ^te  tu^  par  Tordre  d*un  prince 
infidele  (*). 

(*)  Les  auteiirs  arinenien»  parleni  d'uo 


\ 


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9   • 


Saint  Gi^oire  avait  et6  le  premier  mence  oette  sdrie  d*Antra  patriarcbes 

patriarche  de  la  nation ,  et  en  lui  com-  qui  se  suiveDt  d'une  maniere  non  in- 

voyage  que  saint  Grcgoire  fil  a  Rome  avec  Tiridale,  el  Gr^goire ,  ce  martyr  mtoA ,  le 

le  roi  Tiridate,  pour  allcr  deposer  au  pied  couragcux  confeneordu  Christ,  lillamina* 

du  pape  Sylvcstre  Tbommage  de  IT^glise  leur  de  rorient  et  da  Septentricm ,  noas 

naissanle  d*Ann^e.  l\i  citent  mtoe  un  faisoni  sairoir,  disoot-noiu,  qu'etix,  nos 

actesoleniielleinenteoncluefiireGoiifttaiitiD,  tres^ers  frirea  en  J.  C,  les  prindpanx 

empereur  de  ConsUotinopIe ,  Sylvesire,  su-  amis  de  notre  trea^tiguate  ioaverainele,  cei 

prime  pontile  de  Rome ,  Tiridate ,  roi  d'iir-  chefii  illustros ,  admia  k  not  deliberations , 

m^eet  saint  Grigoirelllluminateur.  Nous  Mnl  venus  pres  de  nous  pour  voir  le  lieu 

pensons  qu*on  a  confondn  le  voyage  que  le  <le  notre  siege ,  dont  la  puissance  s'^tcnd 

m^sae  saint  fit  avec  le  roteie  roi  k  Cisar^  de  TOrient  a  TOocident,  Fhcritage  des  sainU 

ville  de  Pempire  remain .  et  dont  TevAqne  et  premiers  apdtres ,  et  le  pape  qui  est  leur 

confera  longtemps  rinvesUtureaux  patnar-  auccesseup;  qu*en  outre  ils  sont  venua  viti- 

ches  d'Armenie.  Nous  doonons  un  extrait  tcrleglorieux  empereur  r^oemmentoonverti 

dc  ce  traitc  qui  a  une  haute  anliquiteel  qui  i  !■  foi  chr^tienne,  et  la  tres-exoeilente  et 

est  fort  connu  dans  Thisloire  ecd^siasUque  trea-puissante  imptetrice  Hfline. 
de  oette  l^lise.  ^est  pour  oela  que  le  si%e  de  notre  au- 

torit^,  ddegufo  par  Dieu,  en  a  ressenti  une 

Acte  d'aliiance  et  de  eomeorde  da  grand  g,^de  jubilation,  et  que  nous  sommet  aor- 

empereur  ConsUmtm  etdu  pape  Sjhestre,  tU  avec  un  cortege  impoMOit  k  la  rencontre 

.avec  Ttridate,   nu  ^Jrmime,  et samt  ^^  <^  Ulusties  penonnagea;  puis,  api^ 

Gregoire,  CiUimunaUitr  de  CArmMe,  nous  itre  salu^  r^proquement,  et  nous 

Par  Teffet  de  la  volontd  et  de  la  puissance  to«  rendu  les  honneura  conveuablei ,  nous 

de  la  sainte  Trinity   coosobstanlielle ,  du  sommes  entris  dans  I'^lise  des  Saints  apA- 

Pere  incomprdiensible  dans  son  to« ,  de  tres;  nous  y  avona  adora  le  Dieu,  maitre  de 

son  Fib  unique,  notra  seigneur  et  notre  r^  lenra  saintes  reliquci ,  et  le  Christ  qoi  ecu- 

dempleur,  du  Saint-Espnt  qui  donnela  vie  ronne  les  saints 

et  la  d^vrance,  ce  present  Initi  impMal ,  

ratifii  et  rendu  irrevocable  par  Dieu,  a  et ^  

ecrit  par  Tordre  de  nous  Constantin,  su-  

prtene  empereur,  toujours  victorieux,  tris-         Par  TefTet  de  la  volonti  divine  et  de 

auguste,  roi  des  rois,  possesseor  de  Tem-  rinteroession  de  la  mirede  Dieu,  des  saints 

pire  romain,  qui  embnsse  tout  TumverB,  ap6tres  et  de  tons]  les  saints,  nous,  roi  et 

et  qui  subsiste  depuis  des  sidles;  nous  qui,  pontife   suprteie  det  deux  nations,   ro- 

en  vertn  du  secours  du  vrai  Dieu,  ^tendons  maine  et  arminienne ,  nous  conduons  le 

notre  antoriti  des  borda  du  vaste  Ooian  traite  et  noua  Jurons  le  serment  d'une  Ater- 

jusqa*aux  Ueux  o&  se  leve  le  soleil,  sans  nelle  alliance  entre  le  pcuplebeUiquenxdes 

que  jamais  la  victoire  nous  abandonne,  gri-  Remains  et  le  peuple  invincible  d'Armfoie, 

ce  a  I'assistance  de  la  croix  de  J.  C  en  presence  de  la  croix  giorieuse  de  J.  C. ; 

D'une  autre  |)art,  cet  acte  a  die  egal^  et,  pour  donner  4  cet  acte  un  caraetere  in- 

nent  dresse  par  Tordre  de  nous  Syhreslre ,  dtiebile,  nous  I'avons  sodld  du  sang  prddeox 

souverain  pontife  romain ,  sucoasseur  du  et  redoutable  du  Christ ;  nous  y  avons  hcnX 

siege  des  princes  des  ap6lres,   Pierre  et  le  nomde  frftre,  qui  doit  dtrecommnn  aux 

Paul ,  nous  qui ,  tenant  en  noi  mains ,  les  deux  nations  de  TOrient  et  de  TOoddent. 

defs  du  royaume  des  deux ,  avons  le  pou-  En  vertu  de  qnoi  nooa  nous  engaieons  i 

voir  de  lier  et  de  ddier  sur  la  terre  et  au  un  amour  et  a  une  foi  aemblables  i  ramoor 

del,  chez  toutes  les  nations  de  la  diretienti  et  4  la  foi  jur^  au  Christ  qui  a'est  fait  notre 

eparses  de  TOricnt  a  rOcddent,  et  qui  regis-  firfare,  nous  promettant  de  nooa  dtfendre  les 

sons  Vtj^&nt  universelle  du  ChrisL  uns  les  autres  jnsqu*4  la  mart,  mteie  de 

Par  ee  present  acte  nous  fiiisons  connal-  nous  saorifier  mntuellement  avec  joie,  et 

tre  k  tous,  ^u*appd^  par  TEsprit  saint,  le  d*a¥oir  les  mimrs  amis  et  leS  mteies  cnne- 

puissant  roi  d'Annenie  Jean  (^ ,  qui  est  mis.  Aucune  des  deux  nations  n'osera  tirer 

*.*  -     ,    ,       ^  .u_^  .  .  X  »--sj  ^     .  le  glaive  oontre  rautrc.  Que  le  fer  perpe  le 

MM  dtmt*  le  nvorwa  so*  qn'il  ncvt  Ion  <k  wmi  ^^^Bur  de  oeux  qm  auraient  cette  audacr ! 

baptrair.  quc  Icur  WK  sc  brisc  daus  leurs  mains  1 


40 


i;UMVERS. 


tcrrompuc  jusqu'a  nos  jours.  11  eut 
pour  successeur  Arisdages  (*),  son  tils , 
qu'il  avait  eu  d'un  manage  contracte 
uvant  son  ordination.  Le  nom  de  ce 
vertueux  pr^lat ,  qui  fut  aussi  une  des 
lumieres  de  i'^glise  armenienne,  est 
insere  parmi  les  noms  des  ^v^ues 
mentionn^  dans  les  actes  du  concile 
de  Nicee ;  il  y  assista  et  en  rapporta 
les  d^isions  en  Arm^nie.  On  Ta  quel- 
quefois  confondu  avecun  autre  6v^ue, 
parce  que  les  Grecs  ont  totalement  d^- 
figure  la  prononciation  de  son  nom , 

Cc  traile  subsi^tera  CDtre  les  deux  nations 
jiiaqu'a  la  fin  des  temps,  ct  quiconque  ose- 
rail  Tenfreindre ,  qu*u  soit  nstranche  de  la 
sainte  foi  chrelienoe;  que  les  maledictions 
de  Cain ,  de  Judas  et  des  pritres  deicides 
ftesent  sur  lui ,  el  que  dans  le  ciel  les  anges 
repetent :  Ainsi-soit>il !  ainsi-soit-il  I 


Au  Dom  de  la  tres-«ainte  Trioite ,  nous 
benissons  Gregoire ,  en  plaoant  sur  sa  tite 
venerable  la  main  droite  clu  divin  apotre 
Pierre,  et  le  linoeul  sacre  de  J.  C;  nous  le 
constituons,  lui  et  ses  successeurs,  suprteie 
patriarche  de  tous  les  Armeniens ;  nous  vou- 
loos  que  dorenavant  le  pontife  d'Armenie 
ordonne  le  natriarche  dt  Georgie ,  et  qu'il 
ait  le  pouvoir  d'instituer  des  ^v^ues  parmi 
les  Armenieus  disperses  chez  les  antres  na» 
tions  de  la  chretiente;  que  le  pays  de  TAl- 
banie  soit  soumis  particuliereroent  a  son 
ohcissanoe,  et  que  celui  qui  aura  ete 
choisi  par  le  roi  du  pays  soit  consacre  par 
le  pontife  d*Armenie ;  quen  outre,  lorsque 
les  trois  patriarches  d'Alexandrie,  d'Antio- 
che  et  c|e  Jerusalem  ordonneront  un  nou* 
▼eau  patriarche ,  que  cela  se  fasse  avec  le 
concours  de  la  volonte  du  patriarche  de 
TArmenie ,  car  nous  Telablissous  notre  vi- 
catre  dans  TAsie  Mineure. 

Done,  d'apres  notre  autorite  supreme, 
nous  conferons  au  pontife  des  Anneniens 
le  pouvoir  de  lier  et  de  delier  sur  la  terre  et 
au  ciel  tout  ce  qu'il  voudra,  en  se  confor- 
mant aux  canons  apostoliques;  que  ceux 
qu'il  aura  benis,  soieni  benis  par  le  Christ , 
les  saints  apdtres,  les  autres  saints  et  nous- 
mime;  que  oeux  qu*il  excommunicra  de- 
meurent  sous  le  poids  de  la  m&ne  excom- 
munication, jusqu'a  ce  qu'ils  reviennent  k 
Dieu  |>ar  une  sincere  penitence.  Aimi-soit-il. 

(•)  V«y.  ligure  n*  i». 


quails  invent  tant^t  Arostane  ou  Ros- 
tane. 

La  d ignite  patriarcale  resta  lon^- 
temps  dans  la  maison  de  saint  Gre- 
goire. Le  o^libat  n'etait  point  impose 
aux  pr^tres  armeniens ,  pouryu  qu'ils 
contractassent  leur  mariage  avant 
d'etre  promus  aux  dignites  ecclesiasti- 
ques.  Vertban^C*) ,  mre  d'Arisdages, 
lui  succ^a;  et,  en  mourant,  il  laissa 
son  siege  a  son  fils  Housig,  lequel 
mourut  martyr  de  son  zele,  en  reAi- 
sant  d'adorer'ies  statues  des  dieux  que 
Julien  I'Apostat  voulait  faire  honorer 
dans  tout  rempire.  Ses  deux  01$,  Pap 
et  Athakines ,  etant  morts ,  et  IVerses , 
Ills  d* Athakin^ ,  ^t'lnt  troj)  jeune  pour 
dtre  sacr^ ,  la  dignity  patriarcale  sortit 
de  la  maison  de  saint  Gregoire,  et  on 
la  oonf<6ra  a  un  certain  Pharnhersefa 
qui  ne  si^gea  que  trois  ans. 

LorsquMl  fut  mort,  Nerses  alia  dans 
la  ville  de  C^sar^ ,  dont  Tev^ue  saint 
Lton  avait  autrefois  sacr6  samt  Gre- 

Soire ;  et ,  depuis  cette  ^poque,  le  chef 
el'l^glise  arm^nienne  etait  toujours 
rest^  sous  la  dependence  du  si^e  de 
C^sar^,  observation  qui  n*est  pas 
sans  importance  dans  Thistoire  eccl6- 
siastique.  Ners^  fut  6lu  patriarche, 
et  il  etait  digne  d'oocuper  cette  place 
eminente,  puisque  ses  vertus  et  ses 
utiles  r^formes  dans  I'^glise  et  dans 
la  soci6te  lui  ont  m^rite  le  titre  de 
grand.  Quel  plus  bel  ^loge  que  celui 
de  Thistorien  taisant  cette  r^ilexion  sur 
son  administration :  «  Alors,  dit- il, 
Tancienne  barbaric  disparut,  et  on  ne 
vit  plus  dans  le  pays  que  des  citoyens 
bonn^tes  (**).  »  Nerses  attaquait  avec 
trop  de  courage  les  vices  du  roi  Pap , 
aui ,  ennuy^  de  ses  remontrances ,  hii 
nt  servir  un  breuvage  empotsonne.  Le 
saint  nK>urut  apres  un  si^e  de  trente- 
quatre  ans. 

Apr^  lui  vient  Sahag,  qui ,  trop  ia- 
loux  de  sa  propre  dignity ,  ne  voulut 
plus  aller  k  Cesar^  recevoir  Tinvesti- 
ture.  Cette  disposition  fdcheu&e  brisaiC 
dftjh  quelques-uns  des  liens  de  Tunite , 

(*)  Voy.  figure  n»  1 3. 

(••)  Jean  Vf,  dit  I'hislorien.  Histeire  (TAr. 
mvnie ,  mamiscrii  91  ilcU  r>ibliutlitH|uc  roy. 


ARMENIE. 


41 


et  faisait  presager  la  rupture  qui  eclnta 
plus  tard. 

La  nation  avanqait  a  grands  pas  dans 
la  civilisation.  Saint  Mesrop'fixait  la 
langue  en  lui  donnant  un  alphabet  et 
un  systeme  graphique.  Cette  invention 
paraissait  si  belle  et  si  merveilleuse  h 
ses  compatriotes ,  que  le  bruit  se  r^- 
pandit  dans  le  pays  que  ie  Saint-lfeprit 
loi  avait  r^vel6  cette  pr^cieuse  d^cou- 
verte.  Mais,  comme  il  est  inutiledefaire 
intervenir  le  del  dans  des  actes  depen- 
dants de  la  nature  et  des  facult^s  Ira- 
maines ,  surtout  lorsque  Fexemple  des 
autres  peuples  confirme  cette  observa< 
tion ,  it  est  plus  probable  que  le  saint 
r^igea  un  alphabet  d'apres  la  double 
conuaissance  qu*il  avait  des  alphabets 
syriaque  et  zend ,  comme  le  fait  pr^- 
siimer  leur  mutuelle  comparaison.  Les 
livres  $aints  furent  traduits  en  lan^e 
arm^nienne;  etce  travail  fut  si  habile- 
ment  ex^ut^ ,  que  la  traduction  devint 
le  type  et  la  pierre  angulaire  de  T^i- 
fice  litt^raire  eleve  dans  les  dges  sui- 
vants.  Nous  ne  nous  arr^terons  point 
ici  k  citer  la  lon^ue  serie  des  ^crivaim: 
remarquables  qui  honorent  cette  na- 
tion :  cette  partie  de  notre  travail 
trouvera  sa  place  dans  I'histoire  litte- 
raire  de  I'Armenie. 

Zaven ,  Asbourages  occup^rent  peu 
de  temps  le  trdne  patriarcai ;  ils  Grent 
place  a  Sahag ,  surnomm^  le  Grand ,  h 
cause  de  sa  saintet^  et  de  ses  lumieres. 
II  vit ,  par  la  mort  d'Ardashir,  s'^tein- 
dre  entiereroent  la  race  des  Arsacides , 
qui  avait  oocup^  le  trone  d*Armenie 


ans.  L'Arm6nie  tomba  done  sous  la 
dependance  de  la  Perse ;  et  ses  rois  fu- 
rent remplaces  par  des  merzbans  {*)  ou 
satrapes  qui  accablerent  le  pays  d'exac- 
tions  et  de  tyrannies.  Comme  les  vain- 
ciis  n'ob^issaient  qu*^  la  force,  et  se- 

(*)  Le  mot  merzban  est  persan;  il  derive 
de  la  double  racine  merz,  ou  mewz,  eXban, 
Marz  signifie  iimite  on/rontiere,  et  Ban, 
gardien,  Cette  racine  se  relrouve  dans  mar- 
ifuis  et  margrave,  noms  qui  avaient  le  m^e 
aens  a  Torigine ,  puisqiie  ceux  qui  les  por- 
taient  etaient  charges  de  la  defense  des 
marciit4. 


couaient  le  jou^  qui  leur  6tait  impose 
des  que  Toccasion  s'en  pr^sentait ,  les 
rois  de  Perse  penserent  que  la  cause 
de  rinsubordination  r^sidait  dans  la 
difference  du  symbole  religieux ,  parce 
que  les  Arm^niens,  comme  Chretiens, 
combattaient  en  eux,  et  les  ennerois  de 
leur  nation  et  les  idolStres  contraires  a 
leur  foi.  En  consequence,  ils  suscit^rent 
dans  ce  pays  une  persecution  gen^rale, 
pour  y  retablir  le  culte  deZoroastre,  et 
le  sang  des  martyrs  ruissela  abondam- 
ment.  Mais  c*est  en  cette  occasion 
ou'eclaterent  surtout  pour  la  premiere 
rois  la  fidelite  inviolable  et  la  foi  ro- 
buste  de  ce  peuple,  qui  depuis  s'est 
toujours  montrc  aussi  sincerement 
Chretien.  Non-seulement  il  resista  aux 
tortures  et  aux  seductions  de  tout 
^enre  employees  par  la  politique,  mais 
il  sortit  de  cette  lutte  terrible  plus 
fortement  attache  a  ses  croyances. 
L'opposition  politique  de  la  Perse  eut 
li^n  effet  salutaire ;  elle  fit  comprendre 
aux  Armeniens  aue  la  foi  chretienne 
etait  leur  plus  solide  rempart ,  et  qu'ils 
ne  pouvaient  rien  esperer  de  ceux  qui 
pretendaient  etendre  leurs  droits  jus- 
que  sur  le  doraaine  sacre  de  la  cons- 
cience (*). 

L'ennemi  le  plus  dani^ereux  de  I'Ar- 
menie  n'etait  point  la  Perse,  dont  elle 
brisait  toujours  les  fers  a  force  de  resis- 
tance ;  c*etait  bien  plut6t  le  fam  esprit 
rationaliste  des  Grecs  qui  la  travaillait 
et  qui  decomposa  sa  foi  religieuse  jus- 
gu'alors  si  pure.  Le  lecteur  comprendra 
tacilement  que  1^  reside  la  cause  la- 
tente  de  tons  les  maux  qui  accablerent 
ulterieurement  cette  nation  infortu- 
nee ;  et ,  pour  lui  mettre  a  nu  revi- 
dence  de  cette  conclusion ,  nous  aliens 
rappeier  succinctement  Toridne  et  Foe- 
caston  du  schisme  de  Tl^glise  arme- 
nienne. 

La  foi  du  christianisrae  identique, 
des  sa  naissance ,  a  celle  qui  fait  pre- 
sentement  le  fond  du  symbole ,  n*etait 
cependant  pas,  au  commencement, 

(*)  Dans  la  troisieme  partie  de  oe  travail 

3ui  a  pour  but  de  trailer  rhisloire  politique 
e  TArmenie,  nous  decrirons  cette  guerre 
meniorable. 


42 


UUNIVERS. 


auari  d^eloppee  qu*auJouni*hui  sur 
certains  poina ;  sans  doute  paroe  qu'ijs 
n'avaient  pas  M  attaqu^  et  qiM  I'E- 
fflise  n'avait  point  juge  ntossaire  dt 
fatre  oonnattre  ses  decisions.  Les  h^ 
r^ies  sans  nomlire ,  qui  pullulent  avec 
le  premier  siMe,  n«»s8itant  des  ex* 
plications  et  des  Maircissements  sur 
les  points  contests «  on  pent,  par  ce 
motif,  les  regttrder  oomme  providen- 
tielles :  on  dirait  des  ombres  jette  et 
dispers^es  avec  ordre  par  le  doigt  do 
Dieu  dans  le  tableau  de  son  Eglise, 
pour  en  mieux  faire  ressorttr  les  par^ 
ties  lumineuses. 

Le  grand  condle  de  liic^,  en  con- 
damnant  Tarianisme.  ^laira  toute  In 
chretient^  sur  la  queistion  fondamen- 
tale,  mais  difficile,  des  deux  natures  en 
Notrfr^gneur  J^s-Christ.  Le  sjm- 
bole  qu*ir  formula,  adopts  par  les 
£glises  d*Orient,  et  rapports  en  Ar- 
mtoie  par  le  fils  de  saint  Gr^oire, 
y  fut  attaqu^  sur  le  m6me  point,  malgr6 
sa  precision  et  sa  clarte.  Nestorius, 
qui  reconnaissait  avec  I'^glisedeux  na- 
tures en  J6sus-Girist ,  s'tioigna  de  Tor^ 
thodoxie,  en  concluant  de  la  duality 
des  natures ,  la  duality  de  personnes. 
Son  h6r^ie  renouvelait  toutes  les  er- 
reursd*Ariusauquel  il  ^tait  contraire. 
L'£glise  sedtelara  pareillement  contre 
lui,  et  il  fiit  anathematise  Eutychds, 
Tadversaire  le  plus  zeU  du  nestoria* 
nisme ,  fUt  conduit  k  I'erreur  diame- 
tralement  oppos^e  a  celle  qu'ii  com- 
battait  si  araemment.  En  effet,  en 
fioutenant  Tunit^  de  personne ,  il  en 
Vint  h  proclamer  Tunit^  de  nature. 
Cette  nouvelle  hMsie,  plus  subtile  et 
plus  dangereuse  que  rautre,  parce 
qu*en  paraissant  glorifier  la  divinity  de 
J^us-Christ,  elle  aboutit  k  la  negation 
de  son  hiunanit^,  se  propagea  avec 
une  effrayante  rapidity  dans  tout  1*0- 
rient.  Les  d^fenseurs  ou  partisans  de 
Tunite  de  nature,  furent  gen^alement 
dtei^i^  sous  le  nom  grec  de  mono- 
physUes.  A  la  v^rit^,  tous  ceux  qui  ad- 
roettaient  lanaturetmede  J^s-Cbrist, 
n*^taient  pas  hMtiques  par  le  fait 
mtoe,  car  nous  voyons  plusieurs 
Pseres,  fort  orthodoxes,  entendre  par 
le^not  nattire  cclui  d'hypostase  ou  dfi 


substance;  et  il  est  trto-oertain  que  la 
substance  du  fils  de  Dieu  est  ratucale* 
roent  et  essentiellement  im^.  Cette  dis- 
tinction convient  surtout  a  TArm^ie , 
et  die  pent  servir  a  absoudre  d'injustes 
accusations,  beaucoup  de  tbtologiens 
qu*on  a  dass^  parmi  les  monopby- 
sites. 

Le  quatritoe  condle  cecum^ique 
de  Cbaic^doine  avait  attaqu^  la  doc- 
trine d*Eutychds.  Ses  partisans ,  reunis 
Il  ceux  de  Diosoore,  se  r^pandirent 
dans  TAsie,  r^p^tant  que,  dans  cette 
assemblde ,  on  avait  allmis  la  dualite 
de  personnes,  et  renouvel6  les  erreurs 
de  Nestorius.  L*esprit  de  la  nation  ar- 
m^enne  etait  peu  favorablement  dis- 
pose h  regard  des  Grecs  qui  etaicnt 
mtervenus  dda  plusieurs  fois  h  main 
armde  dans  les  affaires  du  pays,  et 
dont  la  politique  astudeuse  ^tait  sou- 
vent  aussi  detestable  que  celle  des  Per- 
sans.  On  aoeueillit  done  avidement  les 
faux  bruits  semds  par  les  6missaires 
des  b^r^tiques;  et  le  pape  L6on,  qui 
avait  convoqu6  le  conciie  de  Cbalce- 
doine ,  fut  depeint  sous  les  plus  noires 
couleurs.  Vers  Tan  596,  le  patnarcfae 
Abraham  I*' ,  rassemble  k  Tovin ,  alors 
capitale  du  royaume,  les  ^^es  de 
TArm^nie  au  norobre  de  dix;  et,  li, 
il  s'ddve  hautement  contre  le  condle 
de  Cbalc6doine.  «  On  anath^matisa , 
«  dit  Jean  Phistorien,  tous  les  fauteara 
« de  I'h^r^e,  et  les  imprtoitions  fu- 
«  rent  terribles.  On  d^fendit  de  com- 
«  muniquer  en  aucune  mani^  avec 
« les  Grecs ,  de  n'avoir  aveo  eux  ni 
•  rapport,  ni  rdation  commerdale, 
«de  ne  contracter  aucune  aUianoe, 
«  dans  la  crainte  que,  par  ces  rappro- 
«  chements,  ils  se  moassent  k  nous, 
«  ce  qui  pouvait  alt^rer  la  puret^  de 
«  notre  orthodoxie ,  et  d^truire  la  bar- 
«  ri^re  apostolique  qui  nous  prot^.  • 

Cest  ainsi  que  la  nation  arm^enne 
fut  poussee  dans  les  voies  du  schisme. 
Depuis  quatorze  sidles  ce  schisme  sub- 
siste ;  et ,  bien  que  les  Arm^iens  soieot 
aussi  opposes  que  r£glise  oatboUque 
h  la  peraonne  d*Eu^aik,  qu*ils  re- 
jettent  comme  b^r^tique,  n^moins, 
par  une  contradiction  d^orable.  ils 
condamncnt  avec  la  m€me  cbaleur  le 


ARM^NIE. 


43 


pape  lAon  et  le  concile  de  Chalo^dolne 
qui  condamntont  Eutych^. 

Cette  scission  eat  les  coDsdquenoes 
les  plus  ftcheuses  poor  la  prosp^t^ 
de  fa  nation.  Sdpar^  des  Syrians  h 
qui  ils  Youaient  une  vieille  haine  de- 
puis  leur  tentati?e  de  mettre  le  si^e 
patriarcal  de  I'Armenie  sous  la  d^pen- 
dance  de  Fl^lise  de  Syrie ,  retranch^ 
de  la  communion  des  Grecs  et  de 
toute  r£glise  d'Ooddent  par  la  posi- 
tion nouvelle  qu*ils  prenaient ,  les  Ar- 
meniens  se  trouvaient  ainsi  d^iaissds 
et  comme  oonfin^  dans  leur  propre 
individuality  lis  perdirent  les  auxi- 
liaires  qui  nouyaient  seuls  les  d^endre 
contre  la  lorce  encore  paienne  de  la 
Perse.  N6anmoins,  telle  est  la  force 
de  Tantipathie  qui  a  son  principe  dans 
les  querelles  religieuses  suscitto  au 
sein  d'une  communion  pr^c^emment 
unCf  que,  dans  la  suite,  on  vit  plu- 
sieurs  fois  les  Arm^ens  appeler  h 
leur  secours  les  Perses  contre  les 
Grecs,  ou  favoriser  leurs  tentatives 
contre  I'empire,  quoiqu'ils  compris- 
sent  hmpossibilite  d*^tablir  avec  euz 
une  alliance  durable ,  et  qu'ils  pr^vis- 
sent  les  malheurs  d*une  condition  en- 
core plus  dure.  Dans  lesi^e  suivant, 
iorsque  les  Arabes  inonderent  I'Arme- 
nie ,  les  Grecs  et  les  Syriens  abandon- 
n^rent  les  Arm^niens,  tandis  que  les 
Perses ,  convertis  h  la  foi  musuimane, 
aidaient  les  ennemis  h  renverser  ce 
royaume  chr^tien. 

Sempad ,  qui ,  {pendant  son  adminis- 
tration ,  chercba  a  r^tablir  la  paix  re- 
ligieuse,  6choua  dans  son  entreprise, 
et  r£glise  d'lb^rie  se  s^fMura  alors  pour 
toujours  de  la  communion  de  r£glise 
d'Arm^nie. 

Une  preuve  nouvelle  de  I'esprit  d*ln- 
dividuaiisme  et  de  T^loignement  de 
r£glise  arm^nienne  pour  tout  ce  qui 
la  rattacfaait  a  la  communion  des  au- 
tres  £glises,  c^est  qu*en  reformant  sa 
liturgie,  elle  voulut  avoir  son  hre  pro- 
pre; pretention  bl^able,  puiscjue 
toutes  les  nations  chr^tiennes  avaient 
celle  de  la  venue  de  Jdsus-Christ.  Le 
patriarche  Moise  II  fixa  Touverture  de 
cette  ^poque  a  Tan  551.  Cest  T^re  ar* 
m^nienne  proprement  dite,  et  cctt£ 


mani^re  particuli^  de  compter  n*a 
eu  d'autre  eifet  que  de  jeter  plus  de 
confusion  et  d'obscurit^  dans  la  chro- 
nologic. 

Un  autre  r^ltat  du  schisme,  et 
qu*il  n'est  pas  moins  important  de  re- 
marquer,  c  est  que  r£glise  arm^sienne, 
en  se  s^parant  de  I'Eglise  d'Ooddent, 
le  vrai  centre  de  J'unit^,  ^prouva  le 
mdme  sort  que  les  Edises  d' Allemagne 
et  d'An^leterre ,  h  i'^poque  de  la  r^ 
forme;  jeveux  dire  qu'elle  perdit  la 
majeure  partie  de  son  ind^pendanoe 
spirituelle,  et  qu'elle  tomba  sous  la 
juridiction  directe  des  princes  tempo- 
rels.  En  ^et,  ils  commencent  a  exer- 
cer  une  influence  sur  la  nomination 
des  patriarcbes.  dont  la  di^nit^  se 
transmettait  d'abord  b^r^itaire  dans 
la  maison  de  saint  Gr^goire,  sans  que 
le  chef  de  r£tat  fflt  consults.  Cette 
influence  va  toujours  croissant;  et ,  un 
siede  plus  tard .  nous  lisons  dans  les 
histonens  que  le  prince  et  les  grands 
de  sa  cour  placent  sur  le  si6ge  supreme 
le  pontife  a  gui  ils  semblent  oonf^rer 
une  sorte  d'mvestiture :  en  un  mot , 
dans  I'Armenie,  comme  dans  toutes 
les  autres  Eglises  dissidentes  de  I'O- 
rient.  la  liberty  religieuse  diminue 
dans  les  m6mes  rapports  que  Tortho- 
doxie. 

On  a  confondu  quelquefois  le  second 
synode  deTovin,  tenu  par  Abraham  1*% 
avecceluiqu'assembla  Moise  II  envi- 
ron quarante-cinq  ann^s  auparavant. 
Cette  erreur  est  grave ;  Moise ,  dans  le 
premier  synode ,  se  contenta  de  refor- 
mer le  calendrier ;  et ,  bien  que  ce  chan- 
gement  pdt  £tre  dej^  un  indice  de  se- 
paration prochaine,  et  m^me  pr^pardt 
cette  separation,  neanmoins  rien  ne 
prouve  au'elle  s'elfectua  dans  ce  temps. 
La  foi  de  Moise  pourrait  etre  difiQcile- 
mentsu8pectee,puisque  c'est  lui  ^ui 
nomma  patriardie  de  la  GeorgieCyrion 
ou  Cyrus ,  connu  par  son  attachement 
h  la  doctrine  de  Chalcedoine ,  et  qui 
travailla  surtout  a  Tetablir  dans  ce 
pays.  Lorsque  MoTse  II  mourut , 
Abraham  I^,  son  successeur,  ^and 
ennemi  des  Grecs,  inrite  de  voir  Cyrus 
adh<^rer  h  leurs  decisions ,  et  persister 
dans  le  refus  dc  suivre  ses  proprcs 


44 


UUNIVERS. 


principes ,  prend  ia  resolution  d'assem- 
bler  les  ^v£ques  pour  le  frapper  d*ana- 
th^me.  Telle  fiit  roocaston  au  second 
concile  de  ToTin,  qui  eut  pour  la  na- 
tion les  effets  funestes  que  nous  avons 
decrits. 

Parmi  les  autres  mesures  bldmables 
que  prirent  les  membres  de  ce  concile, 
nous  distinguons  la  scission  ofQcielle 
oper^e  entre  TEglise  armdnienne  et 
celle  de  Gtorgie ,  dont  le  peuple  lui 
avait  toujours  et^  un  fidele  alli^.  On 
d^fendit  en  outre  les  pelerinages  a  Je- 
rusalem ;  defense  que  Ton  reearderait 
comme  un  incroyable  m^pris  dies  saints 
lieux  chez  ce  peuple  Chretien ,  si  nous 
ne  savions  que  son  motif  provenait  de 
la  crainte  qu*inspiraient  aux  schisma- 
tiques  des  che£s  de  monast^res,  c^le- 
bres  par  leur  savoir  et  leur  attache- 
ment  aux  doctrines  de  Chalc^oine, 
tels  qu'Eutyme,  Saba  et  Th^odose. 

La  liturgie  subit  alors  une  addition 
importante,  laquelle  estdevenue  un  des 

I)rincipaux  chefs  d'accusation  contre 
es  dissidents.  U  s'agit  du  Trisagiony 
hymne  sacr^  oil  le  nom  de  Dieu  saM 
est  r^pete  trois  fois,  et  a  la  suite  du- 
quel  on  ajouta  ^<fui<isiti  cruqfie  pour 
notts.  Pourquoi,  disaient  les  Grecs, 
ne  substituez-vous  pas  au  nom  de  Dieu 
celui  du  Chrfst,  qui  n'a  souffert  que 
comme  homme ,  et  non  comme  Dieu  P 
Vous  absorbez  Thumanit^  dans  la  di 
vinite,  vous  n'admettez  qu'une  seule 
nature,  et  cons^uemment  vous  retom- 
bez  dans  Terreur  d'Eutyches. 

Quelque  oppos6  que'fQt  h  T^glise 
grecque  le  concile  de  Tovin ,  la  separa- 
tion des  deux  communions  n*etait  pas 
encore  complete.  Les  Arm^niens 
avaient  quelque  veil^it^  de  r^oncilia- 
tion ;  iis  le  prouverent  au  synode  de 
Garin  ou  d*Erzeroum,  assemble  par 
Tordre  de  Tempereur  Heraclius^  vain- 
queur  de  Khosrov  II,  roi  de  Perse. 
Cest  au  retour  de  son  exp^ition  que 
ce  prince  engagea  le  patriarche  Ezr  ou 
Esaras  a  convoquer  les  6vdques.  Plu* 
sieurs  prelats  de  TEglise  grecque  et  les 
grands  de  TArra^ie  assisterent  a  cette 
reunion ;  on  revisa  les  questions  trai- 
ts dans  le  synode  precedent;  on  r^- 
tracta  la  nouvelle  formuledu  Trisagion ; 


on  convint  de  suivre  le  rite  grec  rela» 
tif  a  Tusage  du  pain  fermente ,  et  ati 
melange  ae  Teau  et  du  vin  dans  le  ca- 
lice;  et  il  fut  en  outre  ddcid^  qu'^  I'a- 
venir  on  ne  cel^brerait  plus  la  fSte  de 
la  Nativite  conjointement  h  oeile  de 
r^piphanie.  Toutefois,  ces  concessions, 
propres  a  effectuer  une  reunion  defini- 
tive entre  les  deux  figlises,  n'^taient 
Sas  faites  dbns  un  esprit  sinoerement 
^sireux  de  la  paix.  Car,  h  peine  dix 
ans  s*etaient  6coul^,que  le  sooces- 
seur  d*Esdras,  Ners^s  in,  d^larait, 
avec  ses  ^v^es,  qu'on  devait  s*en  te- 
nir  aux  d^isions  des  trois  premiers 
conciies  oecumeni<|ues,  sans  ajouter 
cellos  de  Chalc6dome.  II  faut  avouer 
aussi  que  Tesprit  turbulent  et  domi- 
nateur  des  Grecs  reussissait  meryetl- 
leusement  par  son  faux  zele  h  eloigner 
les  Arm^niens  de  Funite  dogmatique. 
Des  ordres  de  Tempereur  et  des  Curo- 
palates  obligeaient  les  fiddles  k  se 
soumettre  aux  pratiques  de  Tfglise 
grec<^ue;  ce  n*etaient  plus  les  sages 
avertissements  de  la  charity  cbr^- 
tienne,  inais  bien  les  injonctions  shdbes 
d*un  mattre  h  son  esclave,  tellement 
que  la  susceptibility  politique  de  la  na> 
tion  s'^veiila ;  elle  craisnit  pour  la  perte 
totale  de  son  independance.  Elle  tou- 
lait  ^tre  cbr^tienne ,  mais  a  la  condi- 
tion de  demeurer  arm6nienne. 

Un  nouveau  concile  fiit  done  forme 
dans  la  ville  de  Manazcerte  vers  Fan 
660.  On  condamna  ce  que  Ton  avait 
approuv6  dans  le  synode  d'Erzeroum , 
et  la  m^moire  d'^ras  fut  attaquee. 
Sur  la  question  de  la  nature  de  Jesus- 
Christ,  on  s*en  tint  k  la  declaration 
qu*elle  6tait  une  et  sans  melange  ;  dis- 
tmction  qui ,  en  paraissant  eviter  l*er- 
reur  d*Eutych^,  y  rentrait  neanmoins, 
puisque  la  dualite  des  natures  etait  re- 
jetee  (*).  La  liturgie  primitive  fut  con- 

(*)  Certaioement  let  dissideoU  ne  auivent 
nas  les  erreurs  d'Eutyches.  lis  disent  m^iiie 
hautement  anatbemei  oet  heresiarque  pour 
avoir  soutenu  que  les  deiu  natural  ajvei 
runion  se  sont  confondues  ensemble  pour 
n*eQ  faire  |ilus  ^u'une ,  on  que  la  dhnnite 
absorbe  rhuroamte.  En  quoi  errent-ils  done 
relativeinent   a  I'incarnation  ?  c'cst  qne , 


ARMKNIE. 


45 


servee;  etle  pain  azvnie,  avec  le  vin 
pur ,  sans  aucun  melange  d'eau ,  fut 
seul  employe  dans  le  saint  sacrifice  de 
la  messe.  La  rigidite  des  jednes  et  de 
Tabstinence  a  de  tout  temps  caract6- 
ris^  la  discipline  ecclesiastique  du  pea- 
pie  armdnien  naturellement  sobre ,  sa- 
chant  viyre  de  peu  et  se  livrant  avec 
amour  aux  plus  austeres  mortifications. 
Dans  leur  car^me,  beaucoop  plus  long 
que  le  ndtre,  ils  s'abstiennent  de  chair 
et  de  poisson,  d'cea£s,  de  beurre,  de 
lait  et  de  fromage » en  ne  faisant  qu'un 
repas  par  jour,  au  coucher  du  soleil. 
Le  Tin  est  ^alement  interdit  dans  ces 
jours  par  lesanciens canons.  Les  Grecs, 
dont  la  discipline  n'^tait  point  aussi 
severe,  les  avaient  engage,  ao  ooncile 
d*£rzeroum ,  k  rtformer  cette  partie 
reglementaire,  qui,  ne  touchant  point 
au  fond  immuaole  des  dogmes,  pent 
^tre  modifiee  suivant  les  temps  et  les 
cireonstances.  Les  ^v^ues  y  avaient 
oonsenti;  mais  le  peuple,  invariable- 
roent  attach^  h  la  tradition  de  ses  peres , 
8*imagina  qu'on  changeait  toute  la  re- 
ligion; et,  k  cette  occasion,  il  mani- 
festa  Topposition  la  plus  violente ,  d^- 
clarantqu'il  voulai  t  suivre  les  pratiques 
de  son  Eglise,  qnelque  rigoureuses  que 
fdt  leur  observance. 

La  voie  dans  laquelle  le  patriarche 
Nerses  III  avait  engage  T^lise  d*Ar- 
m^nie  la  s^parait  totalement  de  Tltglise 
grecque  et  du  reste  de  la  chr^tient^. 
uependant  il  ne  faut  pas  croire  que  le 
monophysisme  pr^dominflt  exclusive- 

comme,  saivaot  raocienne  philosophie,  par 
Tunioix  physique  de  notre  corps  et  de  notre 
Ame,  il  se  forme  une  seule  nature,  ensorte 
que  ces  deux  parlies  de  nous-memes  con- 
courent  ensemble  a  toutes  nos  actions,  VAme 
aux  mouvements  du  corps ,  le  corps  aux 
mouvements  de  Vkme ,  ainsi  ib  pretendent 
que,  par  Funion  hypostatique,  ladiviuite  et 
I  bnmanite  en  J.  C.  sont  devenues  un  seul 
principe  actif  de  toutes  nos  operations ,  de 
maniere  que  ses  actions ,  je  Teux  dire  celles 
qui  repondent  aux  nolres ,  ne  sont  pas  seu- 
Icment  divines  par  rexcelleaQce  qu'elles  tirent 
de  la  divinity ,  mais  encore  parce  qu^elles 
en  emanent.  Cette  obsenration  pent  conre- 
nir  ausfti  auxCophtes  et  aux  ]£l£iojpiens ,  et 
a  la  plus  grande  partie  des  Jacobites. 


ment;  la  masse  des  fiddles  suivait  ses 
pasteurs,  sans  entrer  dans  les  que- 
relies  th^logiques  qui  les  divisaient, 
et,  m^me  dans  le  clerg^,  la  majorite, 
amie  de  Funion  et  de  la  paix,  g^missait 
sans  doute  en  secret  des  divisions  que 
Tesprit  sophistique  des  Grecs  semait 
dans  leur  sein.  Les  plus  ardents  entraf- 
naient  les  autres,  et  ceux-ci,  au  bout 
de  quelque  temps,  effrayes  de  Tabtme 
ou  on  les  conduisait,  fevenaient  sur 
leurs  pas;  en  sorte  qu*il  y  eut  dans 
leur  £^lise,  pendant  plus  d'un  siecle, 
des  fluctuations  oontinuelles ,  sem- 
blables  a  I'aeitation  d'une  roer  tour- 
mentee  par  des  vents  contraires.  C*est 
ce  que  nous  d^montre  Tavenement 
du  patriarche  Jean  IV,  dit  Imasda- 
ser  ou  le  Philoscphe.  bomme  d*une 
capacite  rare,  et  protond^ment  vers^ 
dans  la  science  theologique.  Lorsqu'il 
fut  monte  sur  le  siege  patriarcal,  il 
frappa  un  coup  violent  sur  les  mono- 
physites,  et  nous  poss^dons  le  beau 
discomrs  qu'il  pronon^a  dans  cette  cir- 
Constance,  vrai  chef-d'oeuvre  de  logi- 

Sue  et  d'eloquence.  Ainsi ,  puisque  Tor- 
lodoxie  revenait  de  temps  a  autre  a  la 
t^te  des  affaires  eccl^iastiques ,  on  ne 
peut  douter  que  le  parti  de  Tunion  ne 
m  considerable  et  puissant  parmi  le 
peuple.  Jean  IV  pr^sente  dans  son  re- 
gne  le  dernier  terme  nettement  distinct 
de  cette  s^rie  de  pjatriarches  orthodoxes 
ou  dissidents  qui  se  succedent  depuis 
saint  Gr^goire  rilluminateur.  Entre 
ces  deux  ^poques,  il  s*^tait  ecoul^  416 
ans,  et  environ  trente-cinq  patriarches 
avaient  occupy  successivement  le  si^e. 
Les  vingt-deux  premiers,  jusqu*a  Ner- 
ses II  a*Aschdarag,  ont  une  foi  ^vi- 
demment  a  Tabri  de  tout  soup^on.  On 
ne  peut  en  dire  autant  des  six  patriar- 
ches qui  suivirent  Nerses  III;  il  est 
beaucoup  plus  probable  qu*ils  partag^- 
rent  les  ia^s  de  rupture  ou  aopposi- 
tion.  Mais  les  sue  autres,  qui  precede- 
rent  Jean  le  Philosophe,  appartiennent 
h  la  liste  des  patriarches  orthodoxes. 
A  mesure  que  nous  avan^ons  dans 
rhistoire  religieusc  de  TArm^nie,  il 
devient  toujours  plus  difficile  d'appr^- 
cier  la  puret^  de  la  foi  des  pasteurs. 
Les  ims ,  emportes  par  un  zele  national 


4G 


rUNIVEBS. 


trop  ardent,  se  ddciiatoent  contre  le 
coneile  de  ChaloMoine,  paroe  qu'ils 
voient  dans  ses  d^isions  on  acte  artn* 
traire  de  r£glise  greoque.  toujoun 
trop  exigeante  pour  eux.  lis  ressem- 
blent  beauooup  a  nps  f^llicans  moder- 
nes,  Jalouz  de  rEgfase  romaine,  et 
voulant  conserver,  au  prix  m6me  de 
Porthodoxie,  ce  qu'iis  appellent  leura 
liberty.  Les  aatres  se  reitterment  dans 
tin  silence  absoiu ,  lequel  ne  permet  pas 
d'interpr^ter  leurs  actes  en  aocone  fa- 

Son.  Plusieurs,  en  attaqoant  le  parti 
lissident  eten  dtfendant  la  dualite  des 
natures,  ont  peine  h  d^gager  leur  foi 
des  obscurites  propres  a  la  rendre  sus- 
pecte  k  Tortbodoxie  romaine,  et  c'est 
ainsi  que  le  discoursO  du  patriardie 
Jean  iV,  dont  nous  avons  ^arl6  pr^c^ 
demment,  a  M  mis  demi^rement  k 
rindex  par  la  censure  eecl^iastique  de 
Rome. 

Les  invasions  et  les  guerres  cruelles 
des  Arabes  qui  avaient  subjugu^  le 
pays,  oh  ils  etablirent  un{gouYemeur 
sous  le  nom  d'osdigan,  mirent  un 
terme  aux  discussions  religieuses.  hea 
alarmes  continuelles  qui  tenaient  en 
^veil  la  nation,  ne  permettaient  point 
aux  ^y^es  et  aux  princes  de  s'assem- 
bier  pour  traiter  des  questions  th^oJo- 
gijues.  En  outre,  les  vainqueurs  tou- 
laient  imposer  aux  vaincus  la  foi 
musulmane,  et  les  pers^utions  susci- 
t6es  au  christianisme  port^ent  les 
esprits  a  d^fendre  leur  roi  plutdt  avec 
la  r^ignation  du  martyre  qu'avec  les 
armes  de  la  dialectique. 

Lorsque  Thabilete  de  la  famaille  des 
Pagratiaes  eut  d6jou^  les  projets  des 
inusulmans,  et  que  le  valeureux  Acbod 
eut  relev^  le  trdne  d'Arm^nie,  la  paix 
renaissante  ouvrit  un  libre  cours  aux 
controverses  religieuses.  Le  trop  c^l^- 
bre  Photius,  a?ant  de  consommer  le 
schisme  des  Grecs  avec  r£glise  latine, 
nvait  travail!^  h  la  reunion  de  I'^glise 
arm6nienne.  A  cet  effet,  il  avait  ecrit 
au  patriarche  Zacharie  I**",  pour  lui 
donner  certaines  explications  relatives 

(*^  II  a  ete  public  par  les  Armeniens  de 
Venue  en  r8i6;  le  texte  est  accompagnl 
d*une  traduction  latine. 


au  Goncilede  ChaloMoine :  elte  avaient 
pour  but  de  dissiper  les  pr^ju^  et  de 
d^truire  rantipatbie  de  la  nation  pour 
les  Grecs.  Le  roi  Acbod  dMgna  pour 
repondre  k  ces  lettres  on  certaia  Isaac 
Meroud,  boname  violent  et  emporti, 
qui,  loin  d'aoo6der  anz  conditions  de 
paix,  se  r^pandit  eo  invectives  oontre 
r£glise  foreoque.  N^nmoina  Tentie- 
mise  de  vaban,  archev^e  de  Nicfe, 
parvint  k  r^tablir  pourquelque  temps 
la  Concorde,  et  ron  reunit  un  con- 
eile dans  lequel  les  decisions  de  rasseni- 
blee  de  ChalcMoine  furentaocept^es, 
tandis  qu'on  anatbtoatisa  oelles  qui 
avaient  6%^  prises  k  Manaoerte  et  au 
dernier  synode  de  Tovin. 

Peo  de  temps  aprte  Zacharie  I**,  le 
si6ge  patriarcal  fut  illu^r6  par  deux 
hommes  d'un  rare  talent :  le  premier 
est  Maschdots,  abb^  du  monast^  de 
S^van.  Son  savoir  6tait  vaste;  on  hii 
attribue  la  reaction  du  rituel  et  du  re- 
cueil  d'hymnes  ^i  portent  son  nom. 
II  eut  pour  disciple  et  suooesseur 
Jean  VI,  samomme  VhUtorien  par  ex- 
cellence, a  cause  de  T^clat  et  de  Tori- 
Sinalit^  de  son  style.  Jean  6tait  un  zde 
tfenseur  du  parti  des  dissidents,  et 
la  passion  avec  laouelle  il  attaque  !'£- 
glise  grecque  d^ngure  malheureuse- 
ment  son  histoire  d'Arm^nie,  ai  re- 
marquable  sous  d^autres  rapports.  Pour 
prouver  au  lecteur  la  justesse  de  notre 
observation ,  nous  citerons  un  pas- 
sage extrait  de  cet  ouvrage  in^it 

«  A  oette  6poque,  dit-il,  mourut  le 
bienheureux  empereur  Z^non ,  si  aar^ 
ble  k  Dieu  par  ses  moeurs  et  par  I'in- 
t^it^  de  sa  foi.  Sous  son  regne,  il 
avait  dissip^  Tombre  et  les  nuages  du 
detestable  et  turbulent  coneile  de  Chal- 
c6doine,  pour  ramener  dans  r£glise 
de  Dieu  la  liuniere  resplendissante  et 
glorieuse  de  la  foi  apostolique.  Ensuite 
le  grand  patriarche  Papgen  oonvoqpa 
un  coneile  des  ^vdques  Sd  TArm^e, 
de  la  Gtorgie  et  de  TAlbanie;  car  on 
n'avait  pas  encore  accepts  des  tradi- 
tions destructives  du  monde,  et  on  se 
tenait  fermement  sur  le  mime  fonde- 
ment  que  saint  Gr^goire;  aussi,  dans 
ce  temps ,  la  foi  et  la  pi6te  florissaient* 
elles  universellement  dans  le  pays  de& 


•  • 


ajim£nie. 


Grecs,  des  Armeniens,  des  G^rgiens 
et  des  Albaoiens.  Mais,  apres  trente- 
cinq  ans  d*ortlK)doxie  constante,  lors- 
que,  Anastase  ^tant  mort,  Fimpie 
Justinien,  cet  eropereur  plein  de  ma- 
lice, abolissant  et  renversant  ces  dtoi- 
sions,  r^tabUt  la  pernicieuse  doctrine 
Je  GfaalcMoine,  alors  il  pers^uta  par 
des  supplices  atroces  et  intoldrables  les 
saints  oommes  qui  persistaient  dans 
Tortbodoxie,  et  il  inonda  de  sang  ie 
pav^  de  ri^lise  de  Dieu«  • 

£n  lisant  oes  lignes,  on  doit  se  de- 
mander  si  Tauteur  a  reellement  voulu 
parler  des  hommes  et  des  ^v^emeots 
que  nous  connaissons  d'apr^  d'autres 
sources;  et,  en  sonceant  aux  malbeu* 
reuses  preventions  de  Tesprit  de  parti 
qui  enveniment  les  quereiles  rellgieu- 
ses,  on  ne  reconnatt  gue  trop  la  pos- 
sibility de  semblables  jugements. 

L*etat  int^eur  de  I'Eglise  depend 
toajours  de  ses  chefe.  Atnsi  d^  gue  la 
puissance  patriarcale  etait  remise  au 
pouroir  d'un  pr^lat  a^itateor  et  turbu- 
lent, toutes  les  questions  dangereases 
que  la  prudence  tenait  assoupies,  se  ra* 
nimaient  comme  la  flamme  d'un  foyer 
mal  ^int,  et  Tincendie  ^odait  de- 
rechef  ses  ravages  au  loin.  La  pacifi- 
cation opMe  par  ie  conciie  de  Zacba- 
rie  I'%  tenu  k  Schiragvan,  ne  fnt  pas 
de  longue  dur^:  Ie  parti  national,  qui 
etait  leplus  oppose  aux  Grecs,  travail- 
lait  toujours  a  d^truire  les  bons  n^l- 
tats  obtenus  par  les  efforts  des  amis  de 
Tunion. 

Au  commencement  du  douzitoe  si^ 
cle,  la  division  allait  croissant,  et  il 
fallait  chercher  de  nouveau  des  moyens 
de  conciliation.  Le  siege patriarcal  etait 
dignement  occup^ :  Gr^oire  III,  sur- 
nomm^  Bahlavouni,  paree  qu'il  ^tfiit 
Ksu  de  la  race  des  Arsacides,  admi- 
nistrait  I'^lise  d'Arm^nie.  II  avait 
pour  fr^re  le  gradeux  Ners(b(*),  ainsi 
norom^  h  cause  de  la  douceur  et  de  la 

Iiurete  de  son  stjrle,  qui  le  dassent  a 
a  t^te  des  toivains  armeniens.  Lors- 
qu^il  eut  suoc^e  k  Gn^ire  III,  il 
concut  le  g^^reux  desseui  de  porter 
un  dernier  coup  k  I'esprit  de  discorde 

(•0  Voy,  figure  ii«  i3. 


47 

qui  d^cbirart  r£gltse,  et  il  r^nit  le 
grand  synode  de  Romcla,  plus  connu 
dans  I'nistoire  eocl^tastique  sous  le 
nom  de  sjnode  de  Tarse,  paree  que 
I'arcbeT^que  de  Tarse ,  Ners^  dit  Lam- 
pronensisy  y  prononca  k  I'ouverturt 
son  disooui;^,  qui  est  'demeur^  un  des 
premiers  monuments  de  r^loquencear- 
m^nienne.  Les  propositions  raites  aux 
dissidents  ^taient  celles-ci :  Nous  vous 
demandons ,  l«  d'anatb^matiser  les  pai^ 
tisans  de  Tunit^  de  nature,  comme 
Eutycb^,  Dioscore,  Timothy,  £lurus 
et  leurs  autres  adherents;  T  nous  de- 
mandons que  vous  confessiez  Notre- 
Sei^neur  Jesus-Christ ,  fils  unique ,  seul 
Christ,  seul  Dieu,  hypostase  une,  sans 
division,  sans  chan^ement,  sans  alte- 
ration ,  sans  confusion ;  que  vous  con- 
fessiez que  le  fils  de  Dieu  n'est  point 
autre  que  le  fils  de  la  Yierge,  m^  de 
Dieu ,  et  fils  de  Tbomme;  que  vous  re- 
connaissiez  dans  ses  deux  natures  Tu- 
nite  de  sa  divinity,  et  son  unite  dans  la 
duality  des  natures,  le  m^me  Christ 
ayant  deux  operations  oonfbrmes  k 
sa  nature.  Tune  divine  et  I'autre  hu- 
maine,  sans  qu'elles  soient  contrai- 
res,  puisque  en  effet  I'operation  hu- 
maine  Concorde  avec  Toperatiott  di- 
vine; 3*  nous  demandons  que  tous 
recitiez  le  Tritagion  sans  raddltion  de 
oes  mots :  Qui  enictfianu  et  pro  fto- 
bis,Qaie8  crucifix  pour  nous. 

Tefles  etaient  les  prineifwles  propo- 
sitions auxouelles  la  majority  des  pre- 
lats  assembles  repondirent  qu'ils  les  ao- 
ceptaient  avec  soumission  et  bumiiite. 
Nerses  foudroya  des  traits  de  son  elo- 
quence tous  les  fauteurs  du  desordre 
3ui  ne  chercbaient  qa'k  troubler  la  paix 
e  I'Eglise.  On  crut  quelque  temps  k 
un  accommodement  definitif ;  maw  la 
mort  de  remperenr  Manuel,  celle  de 
Nerses  Lampronensis  et  du  patriarche 
Degba,  suocesseur  de  Ners&  le  Gra- 
deux  J  iirent  evanouir  ces  heureuses 
esperances.  Les  actes  arbitraires  de 
mielques  ftuuitiques  grecs  en  furent 
roocasion;  de  raversion  on  pas^a  k  la 
haine,  et  la  separation  desdeux Eglises 
fut  complete.  Le  schisme  effectue  pre- 
cedemment  par  Photias ,  et  ensuite  par 
Michel  cerulaire,  legitimaiti  sousunrap- 


48 


L'UJNIVERS. 


port ,  les  appr^hen^ons  des  Ami^niens. 

S6par^  enticement  des  Grecs  et  du 
reste  de  la  cbr^tient^ ,  les  Armeniens 
se  trouvCent  r^duits  k  leur  propre  in- 
dividuality, et  cet  isolement,  cause  par 
un  motif  religieux,  ne  leur  fiit  pas 
inoins  nuisible  sous  le  rapport  intel- 
lectuel  que  politique.  Lorsque  les  der- 
nieres  lumiCes  de  r£glise  arm^nienne , 
representees  par  les  deux  Netses ,  eu- 
rent  disparu ,  une  nuit  longue  et  triste 
se  fit  cnez  oe  peuple.  La  civilisation 
diminua  a  inesure  que  I'ignorance  allait 
croissant;  conune  si  le  g^nie  intelleq- 
tuel  de  la  nation,  dess^cne  tout  a  coup 
en  ses  racine^,  n'eut  plus  eu  la  force 
de  rien  produire,  ii  se  touma  a  Timi- 
tation  froide  et  servile  des  autres  peu- 
ples,  notamment  des  Grecs  et  des  La- 
tins. Ce  fut  le  temps  des  traductions , 
et  pendant  quelques  siecles  les  Arme- 
niens ne  firent  que  reproduire  des 
oeuvres  etrangeres ,  au  moyen  de  leur 
langue,  qui,  par  sa  nature,  se  pr^- 
tait  merveilleusement  a  cette  sorte  de 
travail.  Deux  6coles  litteraires  se  for- 
merent  dans  ce  but,  ecoles  ennemies 
et  diametralement  oppos^es,  qui  per- 
petuerent  la  hitte  vive  et  soutenue  que 
nous  avons  vue  diviser  les  croyances 
des  fideles ,  selon  la  double  disposition 
qui  se  manifestait  depuis  longtemps, 
ou  de  se  rattacher  au  centre  de  la  chr^ 
tiente  ou  de  s'en  s^parer  definitive- 
ment.  II  faut  avouer  que  le  parti  ve- 
ritablement  national  etait  pK>ur  le 
schisme,  parce  qu'on  lui  faisait  envi- 
sager  ce  moyen  comme  le  seul  compa- 
tible avec  la  conservation  de  Tinde- 
pendance  et  de  Thonneur  de  la  nation. 
Dans  la  fondation  des  deux  ecoles  dont 
nous  parlous,  la  mdme  chose  arriva. 

La  premiere,  veritable  association, 
designee  sous  le  nom  des  Fr^res  UniSy 
fut  etablie  par  Jean  de  Kemi,,dans 
Tespoir  de  travailler  a  reunir  I'Eglise 
armenienneetrEglised*Occident.  Cette 
societe  avait  des  ramifications  chez  les 
Latins,  parmi  les  dominicains,  et  leur 
but,  non  publiquement  avoue,  etait 
d'eclairer  le  peuple,  et  de  combattre 
les  erreurs  qui  tenaient  toujours  les 
esprits  divises.  £lle  traduisit  plusieurs 
ouvrsges,  organisa  desmissionnaires. 


et  s'etendit  sur  la  face  du  pajs.  Comnie 
un  faux  zele  en^agea  les  freres  dans 
des  voles  d'opposition  a  Tesprit  public , 
en  tant  qu'ils  faisaient  cause  oonimune 
avec  les  Latins,  Tatteotion  et  la  de- 
fiance furent  eveiliees  parmi  les  che6 
du  parti  contraire,  et  recole  rivale  sc 
forma.  Elle  avait  son  centre  dans  le 
eeiebre  convent  de  Datev,  Tun  des  phis 
considerables  de  TArmenie.  Celui  qui 
la  fonda  etait  un  moine  violent  et  su- 
perbe  nomme  Gregoire,  et,  comnne  il 
etait  superieur  de  ce  monastere ,  il  est 
connu  sous  le  nom  de  Gregoire  dr 
Datev  (*}.  II  engagea  une  polemique 
acerbe  et  passionnee  contre  les  freres 
unis,  attaquant  les  Eglises  srecque  ei 
latine,  et,  non  content  de  s  opposer  a 
toute  espebe  d^accommodement ,  il  mit 
en  oeuvre  tons  les  moyens  prc^res  a 
fomenter  la  division.  L'arguroent  prio- 
cipal  qu*il  faisait  valoir  oontre  ses 
adversaires,  etait  leur  attadieroait  a 
une  l^lise  etrangere,  qui  cherdiait, 
assuraiMl ,  a  ravir  h  TEguse  d' Armenie 
et  son  independance  et  ses  vieiUes 
constitutions.  Ses  paroles  trouverent 
un  accueil  trop  facile  dans  Tesprit  de 
la  multitude,  et  les  fir^res  unis  ne  pa- 
rent realiser  leurs  intentions  louables. 
Eugene  lY,  en  montant  sur  le  trone 
pontifical ,  resolut  d*operer  la  ngunioo 
des  Eglises  d'Orient  a  la  grande  com- 
munion chretienne.  Vers  la  moitie  du 
quinzieme  siecle,  il  fit  un  appel  aui 
chefs  du  clerge,  et  le  lieu  de  I  assem- 
biee  fut  fixe  a  Florence.  L'Armenie 
envoya  plusieurs  representants  a  ce 
concile,  ^Sce  au  zele  de  son  patriar- 
che,  qui  etait  alors  Constantin  V.  Les 
le^ats  se  montrerent  empresses  de  sous- 
cnre  h  tons  les  actes  tendant  a  renou- 
veler  Tunion  des  £glises  d'Orient  et 
d'Occident.  Le  pape,  plein  d'un  oon- 

{*)  ll  est  Tautetir  du  livre  des  Demandes 
etreponses,  oil  il  traite  des  erreurs  d» 
Juifs,  des  Manicheens,  des  MahomeUiis 
et  d'aatres  heresiarques.  Gregoire  avait  de& 
vues  philosopliiqncs  ctendues,  et  ii  traite 
dans  cet  ouvrage  des  questions  dilficites , 
lelles  que  relies  relatives  a  la  creation ,  a  b 
iin  du  monde ,  etc. ,  etc.  Ses  oni^tcs  oot  cffe 
publiees  dans  un  volume  in-folio,  a  CoRstAn- 
tinople,  en  17'iy. 


ARMltNIE. 


49 


tentenient  inexprimable,  salua  Taurore 
d*une  paix  universelle  dans  TEglise. 
Les  Grecs,  de  ieur  cdt^,  avaient  te- 
motgn^  le  d^ir  d'un  accommodement, 
et  tout  faisait  esp^rer  que  la  Concorde 
serait durable.  Mais,  lorsque  les  l^gats 
arm^niens  furent  retourn^  dans  Ieur 

Says,  la  revolution  qui  s*opera  au  sein 
e  Ieur  propre  Eglise,  d^truisit  les  r6- 
sultat^  heureux  du  concile  de  Florence. 
L*occasion  des  troubles  survenus 
dans  r£glise  fut  le  changement  du 
siege  patriarcal.  A  Torigine,  les  pa- 
triarchfs  r^sidaient  dans  la  ville  de 
ya<^arschabad ,  que  les  anciens  rois 
nv^ent  choisie  pour  Ieur  capitale.  Cest 
la  que  si^geait  saint  Gr^oire  rillumi- 
nateur.  Ses  successeurs  rest^rent  dans 
la  m^me  ville  pendant  un  sihcle  et  demi , 
*iisqu*a  ce  qu'ils  en  fussent  chass^  par 
'epee  des  conquerants.  lis  se  r^^ie- 
rent,  en  452,  dans  la  ville  de  Tovin, 
qui  devint  la  capitale  du  royaume,  et, 
jusqu'^  la  fin  du  dixidme  siecle,  ils 
continuerent  d'y  fixer  Ieur  r^idence. 
£tant  tomb^e  au  pouvoir  des  Turcs 
Seld joucides ,  le  roi  Aschod  III,  qui 
avait  transfere  sa  cour  a  Ani ,  ville  qui 
contenait  au  onzi^me  siecle  cent  iniile 
maisons  et  mille  ^lises ,  ii  apijela  les 
patriarches,  qui  y  deineur^rent  jusqu'li 
ran  1118.  Alors  les  n^cessites  des 
temps  obligerent  les  patriarches  de 
changer  plusieurs  fois  de  s^jour  et 
d'errer  dans  les  villes  situ^  sur  les 
bords  de  TEuphrate.  Le  concile  tenu  h 
Romcia  prouve  qu'li  cette  ^poque  cette 
cit^  ^tait  devenue  le  si^ge  patriarcal. 
Lorsque  le  sultan  d'^gypte  se  fut  em- 
par6  de  cette  place,  en  1294,  les  pa- 
triarches suivirent  a  Sis  le  roi  L^n  II, 
qui  y  fixa  sa  residence,  et  ils  n'eurent 
pas  d'autre  siege  jusau'li  la  mort  de 
Joseph  III.  Gregoire  IX,  son  succes- 
seur,  ayant  fait  quelques  innovations 
dans  son  £glise,  quatre  ^v^ques  de  la 
Cilicie  r^dig^rent  une  lettre  adress^  k 
toat  le  clerg^  arm^nien,  dans  laquelle 
lis  se  plaisnaient  et  de  sa  conduite  et 
de  r^tat  deplorable  ou  ^tait  reduit  le 
si^e  de  Sis.  On  r^olut  de  transferer 
h  Eczmiazin  le  si6ee  patriarcal ,  et  dans 
ce  but  une  assemblee  fort  nombreuse, 
<!ompos^  d'^v^ues,  de  8up(6rieur8  de 

4'  IJvraison.  (Abmenik.) 


monasteres,  d'erniites  et  de  simples 
pr^tres ,  fut  reunie  a  Eczmiazin  mtoie ; 
et  comme  Gr^oire  persistait  a  rester 
h Sis,  on {NToceda  k  Idection  d*un  pa- 
triarche  nouveau  et  universel.  Le  sort 
tomba  sur  Syriaque,  abb^  du  monas- 
tdre  de  Virap.  Ayant  r6uni  les  voix 
des  quatre  premieres  l^glises  particu- 
lieres  de  TArm^nie,  dont  I'assentiment 
^tait  ntossaire  pour  l^itimer  son 
Election,  on  le  regarda  comme  le  ve- 
ritable et  supreme  patriarche,  d^ore 
du  titrede  CathoUcos,  A  partir  de  cette 
^poque,  les  patriarches  d'Eczmiazin 
exemrent  une  pleine  juridiction  spiri- 
tuelle,  et  ceux  cle  Sis  ne  furent  places 
qu'au  second  rang.  D'un  autre  c6te, 
en  Ills,  David,  archev^ue  d*Agtbai» 
mar,  petite  ville  situee  au  milieu  du 
lac  de  Van ,  dans  une  tie  du  m^me  nom, 
se  rendit  ind6pendant  du  patriarche 
universel,  et  s'arrogea  la  mime  di- 
gnity. Ainsi  r^glise  ^Armenie  se  trou- 
vait  divis^e  en  troisEglisesdistinctes, 
ayant  chacune  ses  rivaiit^s,  ses  int^- 
rets  et  son  rite,  fiineste  source  de 
troubles  et  de  disputes  interminables. 
Chacune  de  ces  £glises  a  conserve  ses 
patriarchs.  Sis  en  compte  environ  tren- 
te-quatre  depuis  I'^rection  de  son  si^ge^ 
La  juridiction  de  son  patriarche  est 
assez  vaste;  elie  s'^tend,  hors  de  TAr- 
m^nie,  sur  les  l^lises  de  la  CiUcie,  de 
la  Svrie ,  de  I'j^pte  et  de  la  Palestine  i 
r^veque  arm^nien ,  r^idant  h  Jerusa- 
lem, lui  est  aussi  soumis.  L'^lection 
du  patriarche  est  un  droit  reserve  aux 
douze  premiers  evdques  les  plus  rap- 
proch^s;  Tinfluence  du  peuple  et  au 
gouvemeur  politique  du  pays  deter- 
mine souvent  leurs  suffrages. 

Le  patriarche  d'Eczmiazin  a  tou- 
jours  ele  generalement  consider^ ,  ainsi 
que  nous  ravons  dit,  comme  leCatlio- 
licos  ou  primat  universel.  On  a  pre- 
tendu  que  ce  qui  avart  donne  h  cette 
Eglise  sa  preeminence,  c*etait  la  trans- 
lation d'un  bras  de  saint  Gregoire  dans 
le  reliquaure  de  la  cathedrale.  Cette 
opinion  est  denuee  de  fondement ,  vu 
que  r^glise  de  Sis  est  touiours  restee 
en  pos&ession  de  cette  relique,  et  ou 
doit  plutdt  attribuer  cet  avantage  a  Te- 
tablissement  primitif  du  m^me  siege 


L'UNIVERS. 


dans  oe  lieu ,  et  a  la  oomferatioii  qu'en 
flt ,  pour  ainsi  dire ,  la  presence  de  saint 
Giigoire  riilumiDateur. 

Qaoi  qn'il  en  soft,  la  suprtoatie  du 
si^e  d'Eczmiazin  ne  peat  ftre  contes- 
ts,  et  nous  pouvons  regarder  ses  pa- 
triarches  comnie  les  seuuTraissacoes- 
seurs  de  saint  Gr^oire.  Le  Catholicos 
est  nomm^  par  tous  les  Stales  et  pr6> 
lats  dependants  de  sa  juriaiction,  et, 
8*ils  nepeuvent  yenir^  la  reunion  oik  il 
est  choisi ,  ils  envoient  leurs  Mgats.  Ge 
mode  d*eiection  a  vari^  dans  les  temps 
modernes,  et  la  nomination  est  aetuel- 
lement  r^servS  k  an  nombre  deter- 
mine des  premiers  pasteurs  da  llq^ise. 
(Test  lui  qui  a  le  pouToir  ezclusif  de 
%onsaerer  le  saint  chrftne  poor  toutes 
les  ^lises  d^pendantes  de  sa  puissance. 
II  est  propose  h  la  garde  de  la  foi,  au 
maintien  de  la  discipline  et  des  insti- 
tutions; en  un  mot,  il  est  le  pape  de 
I'Armenie,  et  cette  denomination  ne 
lui  convient  que  trop ,  depuis  qu*ii  s'est 
soustrait  h  Tautorite  du  aeul  chef  vi- 
sible etabli  par  jesus-Cbrist. 

La  conquete  de  Constantinonle  par 
les  Tares  apporta  un  nouveau  change- 
mant  dans  retat  de  I'^ise  arme- 
nienne.  Mahomet  II,  pour  repeupler 
la  ville  qu*il  avait  derastee,  donna 
Tordre  h  Joachim,  arcbeveque  arme- 
nfen  de  Boursa ,  de  se  transporter  avec 
un  grand  nombredefiBimilles  armenien- 
nes  dans  la  nouyelle  eapitalede  son  em- 

fnre.  II  leor  conoeda  dans  Galata  un 
ieu  vaste  et  commode  pour  babiter. 
Le  chef  de  cette  ^glise  mpit  le  nom  de 
patriarcbe,  et  il  etendit  sa  juridiction 
sur  tous  Ks  autres  Armeniens  etablis 
dans  la  Grdoe  et  dans  TAnatolie.  Tel 
fut  Torigine  de  ce  nooreau  patriar- 
cat  n,  qui  a  acquis  une  grande  impor> 

(*)  L'electioa  du  pitriirche  de  ConsUn- 
tinople  cit  oonuDunemeot  dans  lltglise  ar- 
meDieone  roecasion  d*Un  grand  leandale. 
La  cupidlte  des  vizin  tire  habilement  profit 
des  ambitioDS  secretes  du  derge ,  en  meltant 
k  Teneao  oette  premiere  dipite  eeri^iasti- 
qoe.  Le  gouvemement  preieve  sur  oeUe  no- 
minatMni  mi  fort  impdt  nomfltie  mukatta, 
veritable  iribiit  amrady  oui  doit  eire  payi 
au  stthw  I  des  ^o^aes  detcrmiiiees.  Ob  a 


taoee  avec  raccroissement  de  la  po- 
pulation armenienne.  La  tolerance 
musulmane  lui  a  toujours  laisae  le  pteia 
exercice  de  ses  droits,  a  condition  sett- 
lement que  lui  et  son  troupeau  spri- 
tuel  respecteraient  les  lois  da  Tain- 
queur.  La  liberte  du  derge  armenico 
ae  Constantinople  repose  sur  an  firman 
que  lui  octroja  Mahomet  II.  Nous  ver- 
rons  comment,  k  certaines  epoqoes, 
la  partie  catholique  du  derge  eot  k  se 
plaindre  de  la  violation  de  oette  ^o- 
messe  solennelle. 

L'institution  du  patriareat  de  Cons- 
tantinople signale  la  derniere  ere  de 
decadence  de  TEglise  armenienne.  De- 
puis la  conquete  des  Turn,  le  iia 
d'unite  qui  rattachait  encore  une  oer- 
taine  masse  de  fiddes  h  im  s^mboie 
commun  se  brisa,  et  Tanarcfaie  spi- 
ritudle  n'a  fait  qu'au^menter.  Ge  n*est 
pas  que  le  musulmamsme  ait  fait  des 
proselytes  dans  la  nation;  la  loi  de 
ralcoran,  placiat  inoomplet  du  ju- 
daisme  et  au  diristianisme,  n'a  jamais 
prevalu  parmi  tout  un  peu^e  deja 
converti  a  T^vangile,  et  il  nous  soffit, 
pour  se  convaincre  de  la  justesse  de 
cette  remarque,  de  jeter  les  yeax  sur 
les  divers  pays  oi^  penetra  la  reiigioa 
de  Mahomet.  Les  Arabes,  les  Persans, 
les  Tartares,  etaient  adonnes  k  Tidoll- 
trie,  au  magisme  ou  au  feticbisme,  et 
c'est  pour  oda  qu'ils  entrireat  oonune 
naturellement  dans  les  nouvelles  voies 

vu  le  gouvememeDt  ture  sprier  avideneBl 
sur  le  droit  d'instaUstion.  Ainsi,  doraiit  b 
deniicre  moitie  du  dix-septieme  siede«  qua- 
torse  patriarches  se  sucoedereot,  et  qud- 
ques-ons  d'eux  fureot  elus  et  deposes  suc- 
cessiTement  neuf  fois.  Le  siege  etait  lim 
au  plus  offrant,  et  le  mukatta  iCi^^m^  dc 
100,000  i  400,000  aktdie  ou  aspres.  Le 
droit  que  paye  actuellement  le  pairiardic 
est  de  10,000  piastres,  sommequ'il  prclevc 
sur  les  diverses  £glises  de  sa  juriaiction. 
Angora  foumit  loeo  piastres,  IsQikinid 
xooo ,  Cesarie  800,  Moush  5oo,  Tekirdagb 
5oo,  Smyme  5oo,  Sivas  5oo,  8ia  Soo, 
Adreneh  5oo,  Eraeroom  4S0,  Diatbeii* 
45o ,  Orfdi  400,  AraUur  400 ,  Tokat  Soo, 
Ktttaya  3oo,  Biiboiat  aSo,  Anasta  soo, 
Karm-Hisar  aoo,  IVebisoDde  x5o ,  Ti 
i5o,  GuHHsb-Uaneb  roo,  etc.,  de. 


▲rm£nie. 


$t 


religieufles  ouTertes  derant  eiu ,  et  oui 
les  oondaisaient  k  an  6tat  social  et  in- 
tellectael  T^itablement  supdrieor.  II 
n*en  fiit  ^  de  mtee  des  petioles  chf^ 
tiens  qui  conscrf^rant  jsmralement 
leur  foi ,  suiYant  eette  lot  premiere  de 
rhumanit^  oui  ne  pennet  Jamais  de  r6- 
trograder.  Sons  ce  rapport,  les  Grecs 
peuTent  dtre  assimii^  aux  Ann^niens , 
et  oomme  eax  i\s  ont  ea  le  courage  de 
d^fendre  et  deconserver  leur  religion. 
Ainsi  f  tout  en  rendant  hommage  h  la 
Constance  et  i  la  giniaamii  du  peuple 
arm^nien,  qui,  depuis  quatre  siddes, 
soumis  aux  musulmans,  pr^fi^  la 
croyance  de  ses  p^es  k  la  liberty  et 
court  joyeusement  au-devant  delalmort 
et  des  perstoitions  pour  la  maintenir, 
nous  ne  pouvons  iMiunoinsnouseDipd- 
cber  de  remarqoer  an  £iit  oomman  k 
d*aatres  peapies,  et  qui  a ,  en  partie,  son 
explication  dans  la  natare  de  Fesprit 
humain.  La  domination  musulmane, 
queloae  toltente  gu'on  la  suppose,  fdt 
nnisiDle  au  cbristianisme,  qa*elle  tint 
dans  une  suj^on  assez  humiliante. 
Les  Armtoiens  commenc^ent  k  com- 
prendre  que  les  Grecs ,  avec  leur  esprit 
disputeur  et  jaloux,  avaient  du  moins 
une  foi  commune  sur  les  prjncipaux 
dogmes,  et  en  outre,  la  rivaiite  exis- 
tante  entre  les  deux  Eclises,  qui  se 
trouvaient  oomme  en  praence,  contri- 
buait  k  entretenir  une  oertaine  activity 
religieuse.  Si  ces  nombreax  oondles  et 
toaies  ces  discussions  thfologiqaes 
dont  nous  avons  parl^  n'amenaient  pas 
d'heareux  rteltats,  on  Toyait  ntiin- 
moins  en  cela  an  signe  de  mouvement 
et  de  Tie.  Apr^  la  conqo^,  les  Ar- 
m6niens  se  rapprochmnt  politique- 
ment  des  Grecs  sans  se  reunir;  les 
trois  patriarcbes  d'Eczmiazin,  de  Sis 
et  d'Aghtamar,  se  renferm^nt  plus 
strictement  dans  le  cercle  de  leur  juri- 
diction  respective.  Le  jpatriardie  de 
Constantinople,  plus  nivorablemsnt 
plac6  pour  sujrarendre  les  favours  du 
poavoir,  usa  ae  son  cr^it,  souvent 
dans  le  but  uni^e  d'empi^ter  sur  les 
droits  et  les  attnbats  de  ses  rivaux. 

Les  6migratioii8,  les  guerres,  les 
persecutions  et  les  malbeurs  de  tout 
genre  auxqueh  la  nation  armenienne  a 


M  en  butte,  Tont  fait  comparer  nlu- 
sieors  fois  a  la  nation  juive.  En  eiSfet, 
nous  retrouvons  quelques*ans  de  ses 
enfents  disperse  dans  toutes  les  r6- 

flons,  oomme  oeux  du  peuple  lifi)reu. 
Is  s'occupent  ^galement  de  oanque ,  de 
trafk:  et  dMndostrie,  et,  s'ils  ont  Tba- 
bilete  des  juifs,  ils  ont  de  plus  la  re- 
putation d^une  loyautA  parfaite.  Ge  trait 
de  ressemblance,  frappant  au  premier 
abord ,  s'explique  bistoriquement,  lors- 
qu'on  considdre  les  nombreuses  colo- 
nies qui  vinrent  k  diverses  r^rises  de 
ia  Palestine  s'^tablir  en  Armtoie. 
A  r^poque  des  deux  transmigrations  k 
Babylone,  sous  Alexandre  le  Grand  et 
lors  de  la  grande  dispersion ,  apres  la 
mine  do  temple  de  Jerusalem,  des 
bandea  de  eolons  vinrent  fonder  deti 
villages  dans  les  provinces  du  sud  et  de 
Test  Ge  £iit  expliqae  aussi  la  ressem- 
blance qui  existe  dans  le  type  de  la 
physionomie  entre  les  t^tes  juives  et 
armtoiettnes,  si  ee  n*est  que  celles-ei 
ont  g^ninlement  plus  de  noblesse  et 
de  boiote.  Ce  melange  de  sangisra^lite 
an  sane  de  I'andenne  race  de  Tborgom 
nous  nit  oomprendre  comment,  au 
sein  de  cette  nation  oui  semble  d'abord 
exdnsivement  atta<me  au  sol  de  son 
pajs  par  ses  godts  agrieoles  et  s^den- 
tairea,  il  se  trouve  one  autre  partie  de 
la  population  entrain^  par  des  godts 
aventureox  k  aller  cbercber  fortane 
dans  des  terres  lointaines ,  et  i  se  livrer 
aux  op^tions  mercantUes  et  flnan- 
ci^res.  Ainsi  les  Armtoiens  sont  dis- 
semin^  dans  tootes  les  villes  eoronier« 
cantes  de  TAsie,  jusqu'au  fond  de 
rlnde  et  pres  des  irontidres  de  la 
Chine;  partout  ils  parviennent  en  peu 
de  temps  a  tenir  dans  lenrs  mains  tout 
Pari^i  des  fortnnes  publiqnes.  Comme 
In  jui6,  ils  demeurent  invariable- 
ment  attacbes  a  leur  foi  hMditaire, 
et,  k  Yienne  oomme  k  Madras,  ils  ce- 
I^rent  rolBce  divin  selon  la  lituigie 
primitive  de  leur  Eglise. 

En  Perse,  il  existe  une  colonic  im- 
portante  d'Armeniens.  Elle  r^ide  a 
Julfa,  faubourg  d'Ispaban,  s^par^  de 
la  ville  par  les  jardins  du  roit  qui  ont 
one  lieue  d'^tendue.  EUe  y  6it  trans- 
feree par  Abbas  I*%  qui ,  lors  des  co» 


52 


L*UNIVERS. 


quotes  qu'il  fit  en  Armenie,  ramena 
avec  lui  vingt-troismilie  families  arm^* 
niennes  dans  le  Guilaa.  L*£||;lise  qu'ila 
ont  form^  est  r^e  par  un  patriaf  che 
particulier.  ij^troitenient  attach^  aux 
principes  de  lear  ji^iise  nationale,  its 
rejettent  le  ooncilede  GhaloMoiDe,  la 
distinction  des  natures,  et  conservent 
pour  les  Grees  une  antipatbie  insur- 
montable.  Leur  aversion  pour  lea  La- 
tins n'est  pas  moins  grande;  les  mis« 
sionnaires  envo^^  par  la  Propaganda 
ont  presque  toujours  ?u  ^cbouer  leurs 
tentatives,  h  cause  des  intrigues  du 
clerg^  ann6nien  qui  redoute  leur  pre- 
sence. Chardin  et  Tavernier  les  accu* 
sent  de  simonie  et  d'avarice,  et  Tigno- 
rance  qu'ils  leur  reprochent  serait 
encore  plus  grande  que  oelle  du  clerg6 
de  TArm^nie  m£me. 

Au  milieu  des  disputes  thdologigues, 
et  inalgr^  les  efforts  du  parti  national 
pour  rompre  entidrement  avec  rf^llse 
romaine  d'Occident,  dont  les  anciens 
ecrivains  ont  toujours  reoonnu  pkis 
ou  moins  expressem^nt  la  suprdmatie 
spirituelle,  if  s'6tait  conserve  un  autre 
plarti  plus  fiiible  a  la  v^t^,  mais  non 
moins  tenaoe  k  ses  idto;  et  oe  parti , 
proprement  catholique,  correspondratt 
asaez  bien  k  ce  que  nous  appelons  cbez 
nous  les  nttramontains.  Leur  ^glise 
8*etait  perp^^  au  sein  de  I'autre  ^ 
ayant  son  clerg^,  ses  thtologiens  qui 
se  mettaient  en  rapport  avec  T^glise 
d'Occident  aussi  souvent  qu'ils  le  pou- 
vaient.  On  pent  dire  que  oette  portion 
desfiddes  repr^ntait  la  partie  la  plus 
intelligente  et  la  plus  avanc^  de  la  na- 
tion ,  puisqu'elle  comprenait  mieux  le 
principe  de  charite  et  d'union,  et 
qu'elle  ne  se  staiestrait  pas  dans  un 
noid  et  sec  isolemeat.  C/^tatt  oesca- 
tholiques  qui  recevaient  les  mission- 
naires  latins  (*),  et  qui  travaillaient 

(*)  Depois  qnelaues  anaees  U  societe  des 
Metbodistes  am^caim  8*est  eprise  d*une 
tendre  solUcitiMie  pour  les  l^glises  orientales 
d'Ann^e ,  de  Georgie  et  de  Perse ,  et  elle 
a  cn?oyi  dans  oes  oontito  des  missiounat- 
rek  En  iSao,  MM.  Fisk  et  Panons  firent 
un  iMirdaiis  TAsie  Mineure;  en  18*7,  M. 
■Madlej  peneUii  dans  la  Gappadoce.  Der- 


toujours  a- la  reunion  des  fegliaesdis- 
sidentes.  11  leur  fiiUait  du  courage  poor 

nierement  MM.  Smith,  Dwight,  Dituich 
ont  visile  TAnnenie.  Nous  louons  le  but  el 
les  efforts  de  ces  hoonaes ,  qui  abandooBent 
oourageusement  leur  patrie ,  et  se  deTouent 
aux  fatigues  et  aux  perils  de  oes  lointaines 
excursions.  Si  leur  propagande  religieuse 
est  completement  denuee  de  suoces,  du 
moins  ili  nous  foumissent  d*exeellentes  ob- 
servations geographlques  ,  et  des  details 
locaux  de  mceurs  et  de  coutumes  propres 
k  completer  oertaines  parties  des  voyages 
de  Chardin  ou  de  Tavernier.  Apres  avoir 
fait  ainsi  la  part  aux  ^oges  qu'ils  mcriteut, 
nous  leurs  soumettrons  ici  qudques  respec- 
tneuses  oonsiderations.  D'abord  nous  n'ap- 
prouvons  pas  leur  ton  de  suffisanoe  a  Tegard 
des  Anneniens  papisles(*),  dont  ils  plai- 
gneot  a  chaque  instant  le  servile  attadbe- 
ment  au  siegie  romain,  bien  qn'ils  reeon- 
naiaseot  dans  certains  panagei  de  lear  jour- 
nal ,  que  les  catholiques  sont  la  seule  portion 
vMtablement  eelairee  de  ce  people,  et  sui- 
Vant  le  mouvement  progressifde  la  ctTilisa- 
lion.  lis  laissent  mime  echapper  k  regret 
cet  aveu  trap  favorable  a  la  cause  qa*ils 
attaquent  partout  ailleurs  avec  un  zele  digne 
des  rtformes  oontemporains  d*Henri  Tm. 
(Ibid. ,  pag.  x4).  En  second  lieu,  oe  qne 
nous  neleur  pardonnons  pas,  c'est  leur  oook- 
plete  ignorance  des  premiers  dogmcs  de  la 
religion  chretienne  qu*iis  pretendent  aller 
prfoher  aux  Orienlaox.  Comment  pouvaieot- 
ils  s'attendre  k  kirt  accuciUis  bvorableuMBt 
par  ees  hommes  dont  Hb  plaigneiit  Tigno- 
ranee ,  lorMue  oeux-d  leur  ontendaioot  nier 
la  divinity  de  J.  C. ,  retablissement  hi^m^ 
chique  de  la  primitive  l^lise,  el  quib  les 
voyaient  rester  tout  stupefaits  de  oe  qee 
dans  ce  pays  on  baptisAt  encore  les  cofanta, 
paroe  que  la  pratique  de  oe  sacreoieDt  de> 
note,  suivant  eux, la  superstitieuse  croyanoe 
au  pische  originel.  (Ibid.,  p.  22a.) 

En  quoi  consistait  done  leur  mission?  Ils 
nous  le  disent  eux-m^es.  Arrives  dans 
une  ville,  ils  allaient  dans  les  bazars  et  sur 
les  places  publiques,  mettre  d*abord  en 
vente,  et  ensuite,  fiiute  d*achetettn,  sini- 

Slement  y  diposer  quelqnes  exemplaim 
es  traductions  des  saints  iftvangiles »  fai- 
tes  k  grands  frais  par  la  woctkk  bibUque. 
lis  s'imaginaient  que  des  Turoi  ou  des  Kur- 
des  aHaioit  se  oonvertir  k  leur  foi  en 


O   Miisionary  r«Mareh«  in  Armenia,  1^  F« 
Smith  ef  G.  O.  Dwigkt.  l^oirfMi.  il34. 


ARMRNIE. 


68 


s*^leverau-des6U8des  jalousies  et  des 
haines  des  opposants  qui  leur  repro- 
chaient  amerement  d'eutretenir  des 
intelligenoes  avec  un  chef  ^raoffer, 
et  de  vouloir  absorber  leur  Eglise  dans 
une  £ffiise  plus  universelle.  lis  M- 
saient  dMnutiles  efforts  pour  leur  d^ 
montrer  que  rind^peDdanoe  de  leur 

Slise  ne  serait  point  d^truite  par  sa 
tnion  au  centre  de  la  catliolicit6 ; 
ceux-ld  trou?aient  leur  intir^t  a  ne 
pas  les  comprendre;  et,  comme  les 
Galileans ,  ils  vantaient  hautement  leur 
soumission  au  pouvoir  temj^rel  dont 
ils  ^veillaient  u'ailleurs  injustement 
les  soupcons  sur  la  oonduite  des  catbo- 
liques.  II  teit  curieux  de  voir  des  Ar- 
m^niens  se  constituant  d^fenseurs  de 
la  puissance  turque  qui  les  ^rasait,  et 
la  poussant  k  pers6cuter  ces  monies 
catnoliques  qui,  dans  leur  g6n6reux 
d^ouement  h  FEelise  latlne ,  mettaient 
r6ellement  plus  de  patriotisme  que  les 

porlaot  oes  livres  Inspirateun  dont  ils  ne 
poturaiait  oomprendre  la  Utidocfion  faii- 
tivtt  et  inoorreole,  ff'ib  Mvaient  lire.  Mais 
quel  ^it  lenr  d^ppointement ,  hnrsqiie  le 
lendemain  ils  retrouvaicDt  par  les  rues  les 
hunbetiix  ipars  de  I'Anden  et  du  Nouveau 
Testament.  (Ibid. ,  p.  73).  Gertes  les  mis- 
sionnaires  romains  aont  ib  envient  les  tra- 
vaux  prosperes,agi9sentaotmnent.  lis  eom- 
menoent  par  se  oaluiiliier,  pour  ainst  dire, 
chez  le  people  qu*ils  vetilent  erang^liser,  et 
cela  en  adoptant  sa  langue ,  ses  wages.  lis 
cbeoiinent  a  pied ,  portent  le  poids  du  jour, 
&  travers  les  lieax  sausages  et  deserts,  et 
non  pas  sur  le  dos  des  mnles «  et  en  trafnant 
a  leur  suite  un  aitirail  de  bagages,  de  tentes 
et  de  matelas ,  semblable  k  la  cararane  d*un 
pacha  allant  prendre  possession  de  son  gou- 
vemement.  lis  ne  comptent  point  avec  in- 
quidtnde  les  pulsations  de  leur  pouls,  pour 
connaitre  l*influence  variable  de  ratmos* 
phere  sur  leur  temperament.  Us  ne  prennent 
pas  la  peine ,  dans  leurs  relations,  de  nous 
dire  Pheure  k  laquelle  ils  se  sont  leves  ou 
conches ,  les  mets  qu*i!s  ont  trouves  chez 
leurs  hdtes ,  el  ils  ne  se  plaignent  pas  que 
le  thi  ou  le  cafS6  leur  aient  manque.  (Ibid., 
P*  79 f  83,  173).  En  un  mot,  avant  d'oser 
attaquerles  missions  catholi^ues,  il  faudrait 
que  ces  messieurs  missionnaurs  touriste*  et 
gentiemen  reforroassent  Icurs  proprcs  mis- 
sions. 


autres,  puisqu'ils  esf^aieot  trouver, 
dans  la  ronton  religieuse,  un  moyen 
de  reoouvrer  leor  ind^pendaDce  poli- 
tique, en  se  ralliant  51a  oommunion 
d(»  peoples  d'Oocident.  Ge  qu*0Q  pent 
reprocber  au  parti  cathoUque,  est  un 
exc^  de  z^e,  et  I'air  de  sop^orite 
qu'il  prenait  naturellement  pour  deux 
raisons;  la  premise,  paroe  que  ses 
oommunications  avec  FOocident  lefai- 
saient  partidper  davantage  aux  lu- 
mieres  de  la  citilisation ;  et  la  seoonde, 
parce  qu'il  ^tait  fier  de  d^endre  contre 
un  plus  grand  nombre  des  principes 
appuy^  sur  la  tradition  des  dges  pasMS 
et  sur  la  science  ecd^iastique.  lis  af- 
fectaient  aussi  5  tort  de  rejeter  oer- 
taines  pratiques  de  leur  litui^e,  pour 
adopter  d'autres  ceremonies  de  la  li- 
turgie  romaine,  preference  que  les 
dissidents  regardaient  comme  une  in- 
sulte.  De  \k  Teioignement  qu'ils  leur 
tdmoiperent ,  et  qui  fut  pousM  jusqu'^ 
la  baine(*).  Les  deux  partis  etaient 
sans  cesse  en  presence,  comme  deux 
camps  ennemis  obserrant  leurs  moin- 
dres  mouvements ,  et  toujours  dispo- 
ses 5  Tattaque.  Nulle  relation  n'exis- 
tait  entre  les  deux  £glises ;  jamais  le 
membre  d*une  de  oes  deux  aodetes 
n*edt  oonsenti  5  s'allier  par  le  manage 
a  Taatre;  une  ligne  de  demarcation 
infrancbissable les  diTisait, et  ils  ma- 
nifestaient  moins  d'antipathie  pour  un 
Turc  ou  un  Grec,  qu*ils  savent  etre 

(*)  Au  rapport  d*un  missionnaire ,  les 
dissidents  de  la  Perse  anathematisentsolen- 
nellement  le  concile  de  Chalcedoine,  saint 
Leon  et  l*]^lise  romaine,  quatre  fots  Tan- 
nic ,  k  savoir :  a  la  Quinquagesime,  la  veille 
de  I'Assomplion,  la  veille  de  la  Transfigura- 
tion et  la  veille  de  Noel.  Void  ce  que  Tonr- 
nefort  pensait  de  leur  aversion  pour  les  ca- 
tholiques.  «  La  reunion  des  religions,  dit-il, 
est  un  mirade  que  le  Seigneur  operera, 
lorsqu*il  le  jugera  k  propos.  C'est  du  del 
qu*il  faut  attendre  la  veritable  conversion 
des  schismatiques ,  donl  le  nombre  est  infi- 
niment  plus  grand  que  cdui  des  Armeniens 
romains.  Ces  malheureux  schismatiques,  par 
leur  credit  et  leur  argent,  feraient  deposer 
nn  patriarche  ciui  donnerait  les  mains  a  la 
reunion.  La  haine  au*ils  ont  pour  les  Latins 
parait  irrecondliable. » 


64 


UUNlVfiES. 


\mn  mumauM  naturels ,  que  coatK  an 
deteiirittMBMtriotetd'uoeooiimiiuuon 
diff(&reBt6.  Ijoatez  k  eet  eaoMs  rdi- 
gieuMf  l«s  nvaiilte  naisMotes  de  la 
ooDOiurrenoe  et  d€8  intMls  eommer- 
ciain,  Yous  awes  une i<Me  k  peu  prti 
oomplke  des  principam  motifs  de 
guerre  et  de  diaeorde  eziatant  parmi 
eui ,  ^ ,  de  plus .  TOUB  trouveres  b  one 
des  caoieB  de  la  deroito  crise  de  1SS8 , 
qui  a  ^t6  si  fatale  aux  catholiques. 

Parmi  les  ^ises  cathoUques  qui 
ont  pers^M  avec  ie  plus  oe  cons- 
tanee,  on  peut  citer  les  trois  ^lises 
du  rite  ariMniea  ^taUies  daos  Ie  Li- 
ban.  Elks  oe  sont  point  autoristo  per 
un  firman  du  Grand  Seigneur;  la  po- 
sition inaccessible  des  montagnes  qui 
les  prot^ent  leur  en  tiennent  lieu. 
Elles  ont  ^t^  formto  par  les  refugi^ 
qui ,  fuyant  une  patriecontinueUement 
raTag^  par  les  ennemis »  et  en  proie 
k  one  anarchie  religteuse  et  politique, 
vinrent  chercher  dans  ces  montagnes 
un  asile  assure.  La  concorde  et  la  cha- 
rity rtenent  dans  cette  petite  soci^t6. 
Dans  Ie  si^e  dernier,  la  direction  de 
r£«dise  a  M  confix  h  un  natriarche. 

une  autre  ^'se  ind^ndante ,  bien 
qu'elie  soit  renfermee  dans  une  des 
provinces  de  I'empire ,  est  celie  de  Mer- 
din.  Soumise  k  rautorit^  d'un  gnind 
pacha,  d6coT^  da  titre  de  vice-roi  de 
babvlooe,  elle  joniasait  au  dernier 
si^le  d*uoe  liberty  complete ,  en  vertu 
du  priyil^e  accord^  par  Ie  sultan  k  oe 
prefet,  lequel  TafSranchit,  sous  Ie  rap- 
port religieux ,  de  toute  juridiction , 
en  sorte  que  les  fiddles  arm^iens  ne 
reinvent  pas  du  patriarehe  de  Cons- 
tantinople. Partisans  des  opinions  er- 
ronto  de  I'Eglise  armtoienne,  ils  se 
sont  coDTertis  aux  prindpes  de  la  foi 
catbolique  au  commencement  du  dix- 
huitime  sidde. 

Aoette  ^poque,  il  y  eat,  parmi  les 
Arm^uens ,  un  mouvement  visible  vers 
Tunit^  catbolique.  MMitar,  ce  o61^re 
fbodateor  de  rordre  savant  de  Saint- 
Lazare ,  dont  nous  nous  proposons  de 
parler,  toocb^  du  d^Iorable  Hai  de 
sa  nation ,  ooncevait  Ie  projet  d*appor- 
ter  un  remMe  efBcace  a  ses  maux,  en 
extirpant  les  germes  de  division.  Les 


misaionnalres  europeens,  eavoy^  par 
la  Propi^sande,  et  qui  ^ent  aae 
norabreux  k  Constantinople,  lecon- 
dirant  d'abord  heoreaaemoit  lei  pro- 
jets.  Mais  cnsoite  ils  ne  proo6dirait 
got  avec  toote  la  prodcnce  rejoiie 
IS  les  moyens  qu'ils  employvat 
poor  ramener  les  dissidents.  lis  dw- 
qodrent  oovertement  ce  parti  bem-  I 
coop  plos  nombreox,  en  interdisant 
aux  catholiques  Tentrte  de  leors  egilMs 
qu'ils  representaient  comme  Ie  saoc* 
fiiaire  de  Satan (*}, et  en  attaqiuntia 
liturgie  et  les  pratiques  de  raadeime 
£glise  arm^nienne.  On  refuse  Talso- 
lution  il  qukonque  contrevenait  i  oet 
ordre.  Les  catholiques,  trop  diqioies 
a  s'dloigner  de  leiiurs  fr^res,  prire&t 
tellemeni  en  borreur  leurs  t^istt, 
qu'en  passant  devant  la  porta,  ils  (K- 
toumaient  la  t€te  par  mqiris,  conuiK 
si  c'edt  ^  une  pagode  d'idoliitres.  Od 
renouvela  toutes  les  disputes  assoopies 
depuis  plusienrs  siMes,  touchant  k 
pape  LcIni  et  Ie  amdle  de  Cbalo6doine. 
De  leur  odt6 ,  Ifs  partisansdu  patriardie 

itttriguaient  vivement  contre  lei  mii- 
sioonaires,  qu'ils  d^peignirent  ^  r«i- 
torit6  civile  oomme  dea  conspirateon 

O  De  leur  cAte,  lei  diMidents  Bettaiat 
iioe  flsirteie  puaoD  k  vexer  Im  citboii- 

3uei  Qui  aeinblftieiit  let  fiiir  oomme  do  ib« 
out  Ie  contact  toit  impur.  A  JiiUa»  ^ 
dependaate  difpahan ,  leur  jakmiie  eoaln 
lei  citholiquei  liftit  grande  au  demiw  m- 
de,  etiia  lofcilereal  ouvertement  ime  loop* 
pcnkutioii,  Todaiit  let  hin  chanar  ^  ^ 
vaOe.  Ik  etaient  toui  aoulev^  eoafire  cix. 
femmet,  eafaati.  C*ert  alon  qpfmM^ 
fiuBiille  k  qui  Ton  diiait  que  «ieiid  il  n'j 
am«it  plus  de  pcrca  ni  d«  mimioimaimci' 
iboUquei,  U  leraU  bien  fofcA  d'aOer  a  tctf 
egliae,  fit  cette  reponse  remarquable :  •  ^ 
ne connaia  qii*une  ^tgUaey  c'cit  I'tgliM  f- 
maine  daaa  laqueUe  je  raia  ne,  et  awe  b- 
quelle  je  auia  en  communion.  8*U  ne  rtfi* 
plus  k  Julfii  de  miinonnairai  et  de  prAtrtf 
catkioliqiies,  je  auia  venf,  par  ooDaeqvoi 
Bbra;  j'irai  me  faire  ordooner  pritre,  afio 
de  pou¥oir  satisfiiire  ma  devotion ,  et  fff*" 

rmea  enfimta  trouvent  dans  leur  bm>*^ 
quoi  remplir  les  devoirs  de  cbretieBi. 
sans  ^tre  obliges  d'aliej-  aux  eglises  KbisnM- 
tiqurs.  •■ 


AKMElilE. 


bk 


■oodoj^  par  te  cour  d'Ooeident.  Ges 
fimx  rapports  ^ient  trap  fadleineDt 
aocoeillis  par  les  vizirs  et  les  grands , 
toujours  oppose  aux  catbolique8,qu'ils 
savaient  reconnattre  an  chef  spintuel 
Granger.  lis  dtfendirent,  sous  peine 
de  mort,  ft  qui  que  ce  iflAt,  da  donner 
asile  k  ces  pritres  latins;  et  il  fut 
prohiM  en  outre  aux  catholiques  de 
s^assembler  dans  d*autres  ^lises  que 
celies  d^ndantes  du  patriarche  ar- 
m^nien.  On  ne  voulait  pas  les  laisser 
communiquer  avec  les  Francs  catholi- 
ques, toujours  d'aprte  les  principes  de 
la  politimie  si  ombrageuse  de  la  Porte. 
Les  cattiolioues  armteiens  se  trou- 
v^rentdonc  dans  une  grande  perplexity, 
et  le  plus  affreux  d^rdre  ooulerersa 
les  deux  ^giises.  Lesang  ooula;  et  si 
les  catholiques  n*avaient  trouY^  un 
appui  politique  dans  les  ambassadeors, 
et  principalement  dans  eelui  de  France, 
leprotecteur  ofSdel  de  la  religion  des 
Latins ,  ils  n'auraient  pu  roister  h  la 
pers^ution.  Get  ^tat  anarehique  a  dur6 
tout  le  dernier  siMe,  et  de  Tioientes 
secousses  se  sont  fait  encore  sentir 
dans  celui-ci. 

Enfin,  a  la  demi^re  guerre  qui  a 
consacr^  Find^pendance  de  la  Grhce , 
rinfluence  europ^enne  ayant  pris  un 
iiouvel  ascendant  sur  la  politique 
ottomane ,  les  cabinets  strangers  de- 
manddrent  que  les  catholioues  arni6- 
niens  rentrassent  dans  le  droit  com- 
mun ,  et  qu*on  leur  accorddt  le  libre 
exercice  de  leur  culte.  IjtgkiMi  Guil- 
leminot,  ambassadeur  irancais,  les 
servit  puissamment  dans  oette  con- 
foncture ;  aussi  les  eathoKques  lui  at- 
tribuent-ils  tout  Tbonneur  du  succte. 

Avant  d'obteiiir  la  reconnaiManoe 
d'un  droit  auni  naturel  que  sacr6, 
FEglise  catholique  amitoienne  derait 
passer  par  I'^preure  des  perstoitions, 
comroe  I'^glise  chr^enne  aux  pre- 
miers sidles  de  sa  naissanoe.  Elle  coro- 
menca  en  1837,  alors  que  la  Gr^  bri- 
sait  les  demiers  liens  du  joug  ottoman. 
L*oocasion  fut  la  dtfaite  de  Navarin , 

3ui  bumilia  si  profond^ment  Torgueil 
e  la  Porte  qu'elle  voulait  h  tout  prix 
trouver  une  raison  de  ce  revers,  ailkwrs 
^^e  dans  son  impuissance.  Les  dissi- 


dents poiiss^rent  la  haine  contre  les 
catholiques  ik  un  tel  excte,  qu'ils  par- 
vinrent  k  persuader  au  Sultan  que 
ceux-ci ,  unis  de  communion  aux  La- 
tins ,  entretenaient  avec  eux  des  intd- 
ligenoes  secretes,  et  qn'ils  avaient 
trahi  le  goavemement.  tine  calomnia 
aussi  perfide  trouva  quelque  cr^nce 
dans  les  esprits.  Galio- Pacha,  grand 
vizir,  et  Seld-Effendi ,  mlnistre  des 
affaires  6trang^res,  qui  soutenaient 
les  catholiques  de  tout  leur  pouvoir, 
furent  dis^ci^ ;  le  8  Janvier  1828 , 
huit  bancjuiers  des  principales  maisons 
sont  exiles  a  Angora,  et  le  soeU6  est 
mis  sur  leur  comptoir.  Tons  les  habi- 
tants de  la  mtoe  ville  d* Angora ,  re- 
sident a  Constantinople,  re^oivent 
I'ordre  de  partir,  abandonnant  tout 
ce  quMls  poss6daient.  Cette  mesure 
s'^tend  bient6t  a  tons  les  autres  ca- 
tholiques, qui,  d'apres  un  nouveau 
firman  dont  la  promulgation  avait  6te 
remise  au  patriarche  schismatique, 
furent  oondamn^  k  quitter  Constanti- 
nople dans  Tespace  de  quinze  jours, 
pour  aller  habiter  d'autres  villages 
voisins,  occupy  par  les  dissidents. 
Contraints  de  vendre  leurs  maisons  et 
leurs  meubles,  ils  furent  r^uits  a  la 
derniere  mis^re  (*). 

Le  31  mars,  on  dtfendait,  sous  les 
peines  les  plus  s^v^res,  de  cacher  un 
catholique  ou  de  lui  donner  asile.  En 
mtoe  temps,  on  annonoiit  que  le  sul- 
tan ne  reconnaissant  quSine  seule  na- 
tion et  une  seule  secte  arm^jaienne, 
les  catholiques  devaient  se  eonformer 
Il  la  loi  et  abjurer  leur  erreur ;  c'est  k 

(*)  Od  vit  des  iemnet  et  des  vieilUrds 
brouier  I'herbe  des  champs-  an  milieu  des- 
quels  ils  eiraient.  La  passioo  des  dissideott 
allait  jusqu*a  la  barbaria,  oomme  od  le  Tern 
par  Teiemple  saivant.  Uoe  pauvre  femme 
catholique  r^giee  dans  un  grenier  avec  sa 
famille,  manquaitdenourriture.  Presseepar 
la  Cum ,  elle  envoie  un  de  ses  petits  enfanis 
prier  le  cuisinier  d*nn  banquier  schismati- 
que  de  lui. donner  les  restes  qn*il  jetait  aux 
chiens.  J*aime  mieux  les  donner  aux  chiens, 
ripoodit  le  cuisinier  qu*a  toiis  autres,  chiens 
de  catholiques;  ft  f enfant  All  chasse  de  la 
maison  Ans  pouvair  soulager  sa  faim  et 
cdle  de  sa  mere.    • 


&G 


L'UNIVERS 


cette  condition  qu'on  poavaifc  leur  par- 
donner.  Mais  nous  dirons  k  la  gloire  des 
eatholiques  arm^niens,  que  pas  un  seul 
n'apostasia.  Cest  dans  cette  circons- 
tance  aue  Tambassadeur  francnis, 
M.  Guilieminot,  protectear  legal  de 
tous  les  eatholiques  de  Tempire  turc , 
op^  une  reaction  heiireuse  au  moyen 
de  ses  ^nergimies  repr^entations.  La 
ruine  momentan^'du  commerce ,  les 
pertes  incalculables  qui  r^ultaient  de 
la  proscription  de  tant  de  riches  ban- 
auiers,  acheverent  de  produire,  sur 
r^me  du  sultan ,  Timpression  qui  de- 
vaitnaltre  du  moindre  sentiment  d*hu- 
manit^.  Le  calme  revint,  olusieurs 
eatholiques  furent  r^ntegr^  aans  leur 
place ,  et  auiourd'hui  leur  inOuence  est 
anssi  grandfe  qu'autrefois.  La  liberty 
des  cuRes  ayant  ^t^  proclam^ ,  Rome 
envova  aux  eatholiques  un  patriarche 
que  r^tat  reoonnatt. 

Puissent  desormais  ces  deux  com- 
munions vivre  dans  un  esprit  de  paix 
et  de  cbarit^ ,  et  ne  plus  donner  aux 
musulmans  le  triste  exemple  des  divi- 
sions et  des  hatnes  que  defend  la  loi 
du  Christ ,  laquelle  est  une  loi  d'amour! 

LA  PAMILLB  DVUOGUOV, 

Nous  raconterons  ici,  corame  une 
espece  d*^pisode  dans  I'histoire  politi- 
que et  religieuse  des  Armeniens,  ia 
suite  des  intrigues  et  des  6v^ements 
qui  ont  prepare  ia  chute  de  la  puissante 
maison  catholique  des  Duzzoglou,  ri- 
ches Arrodniens  qui  s^^taient  Aleves  a 
Constantinople,  vers  le  commencement 
de  ce  si^cle ,  a  un  tel  d^pre  de  puissance 
et  de  cr^it ,  que  le  contre-coup  de  leur 
disgrdce  s*est  fait  ressentir  dans  une 
grande  partie  de  la  nation. 

Cette  famille  6tait  originaire  d'Alle- 
magne  et  remontait  h  un  orf^vre,  qui , 
deux  sidles  auparavant,  ^tait  venu  s'e- 
tablir  ^  Pera.  Son  habilet^  lui  acquit 
promptement  une  grande  reputation, 
et  il  devint  le  joaillier  du  sultan.  S'^tant 
oiarie  a  la  fille  d'un  Arm^nien ,  il  voulut 
definitivement  se  Oxer  a  Constantino- 
pie,  et  il  prit  rang  parmi  les  ralas  (*). 

(*)  On  doiine  ce  Qom  a  iou&  lei  sujets 


Son  fiis,  probe  etdroitcomme  lui,  cban- 
gea  son  nom  europeen  en  celui  de  Du^ 
zoglou,  lequel  exprime  cette  qualite(*). 
Pendant  plusieurs  generations,  cette 
famille  grandit  en  silence  et  amassa 
des  richesses  considerables.  A  Tavene- 
ment  de  Mahmoud,  sultan  reforma- 
teur  qui  r^siste  aujourd'hui  a  Tintol^- 
ranee  des  ulemas,  avec  la  m^me  vic^ueur 
qu*autrefois  il  lutta  contre  le  despo- 
tisme  capricieux  des  janissaires,  les 
Duzzoglou  eta  lent  dans  le  plus  brillant 
etat  de  prosperite. 

Jean  Tchelebi  remplissait  les  fouc- 
tions  de  directeur  de  la  Monnaie, 
charge  que  le  sultan  lui  avait  conferee , 
a  cause  de  ia  conOance  quMnspirait 
cette  maison  patriarcale  oil  les  vertus 
se  transmettaient  hereditaires  comaie 
la  fortune.  II  mourut  en  1813 ,  laissant 
une  famille  nombreuse,  composee  de 
six  garcons  et  de  six  filles.  Les  deux 
aines,  Gregoire  et  Serkis,  succedereot 
a  Temploi  de  leur  pere. 

Leur  fortune  s'accrut  encore  beau- 
coup,  gF&ce  aux  renseignements  qu'uD 
religieux  de  Tordre  des  Mecbitaristes 
de  Saint-Lazare  de  Venise  leur  apporta 
d'Europe  sur  la  fabrication  de  la  mon- 
naie. 

Le  sultan  fut  teilement  satis&it  dii 
suoces  de  cette  innovation  dans  la  fa- 
brication des  pieces  d'or,  qu*il  prodigua 
ses  faveurs  k  fa  tamiile  des  Duzzoglou , 
et  lui  aocorda  le  privilege  du  pent- 
che(**),  Ce  privilege,  qui  soustrait 
celui  qui  en  jouit  aux  vexations  arbi- 
traires  des  vizirs,  en  le  placant  sous 
Tautorite  dlrecte  du  sultan,  n^avait  ete 
accorde  qu'a  deux  autres  £auniiles, 

chretient  de  Tempire ,  rait  ArmenieiM  ea- 
tholiques ou  dittideats ,  soit  Gf«Gs,  el  leun 
droita  politiquea  ne  soot  jamais  auasi  com- 
plets  que  ceui  des  autres  sujets  mahome- 
lans. 

(*)  Duz  en  tare  signifie  droit  et  iniegre, 
et  oglou  jUs, 

(**)  On  appelleainsi  rempreinle  des  canf 
doiris  de  la  main  {pentchd  en  persan)  que 
Mahomet,  qui  ne  savait  ni  lire ,  ni  ecrire . 
apposait  comme  sa  signature.  Dans  la  suite 
on  a  donne  ce  nom  par  extension  au  chiffrc 
ou  toghrd  du  sultan. 


ARM£lfIE. 


57 


Gr^ire  rarcbitecte^  et  Jean  Dadien, 
inspecteur  des  poudres,  tous  ks  deox 
^atemeDt  Arm^niens. 

La  prosp^rit^  est  d'ordinaire  plus 
nuisible  k  rhomrne  que  rinfortuue;  car 
celle-ci  eicite  et  met  en  jeu  ses  vertus, 
elte  le  contraint  k  lutter,  tandis  que 
Tautre  I'^nerre  et  T^tourdit.  *  Lors 
in^e  que  I'dme  conserve  son  calme  et 
son  ^galit6  au  milieu  de  Fatmosph^ 
enivrante  des  grandeurs,  il  est  difficile 
d'echapper  aux  traits  des  envieux,  et 
rare  de  ne  pas  rencontrer  dans  le  reste 
de  la  societe  une  multitude  de  gens  qui 
travaillent  secr^tement  h  votre  ruine. 
C'est  ce  qui  arriva  pour  la  famille  des 
Ouzzoglou. 

Le  faste  qu'elle  ^talait,  inconnu  jus* 
qu'alors  dans  la  classe  des  raias,  d^ 
plaisait  aux  Turcs,  dont  la  morgue 
nationale  ne  pouvait  souffrir  la  rue  de 
tant  de  grandeur  et  de  fortune  chez 
des  Chretiens.  La  magniGcence  des  mai* 
sons  de  ville  et  de  campagne,  la  re- 
cherche des  chevaux  de  pur  sang  arabe , 
le  nombre  des  domestiques  attach^  au 
service  de  ces  nobles  Arm^niens ,  tout 
contribuait  a  attirer  sur  eux  Tattention 
malvdilante  des  musuhnans.  II  ne 
manquait  qu'un  bomme  qui  osit  atta- 
quer  leur  cr^it  dans  Tesprit  du  sultan , 
et  renverser  ainsi  par  sa  base  tout  Te- 
chafaudage  de  leur  prosp^rit^.  Get 
homme  se  rencontra  :  c*6tait  Haled. 
Fourbe,  rus^  et  dissimule  a  Texces,  il 
^tait  venu  perfectionner  en  Europe, 
durant  son  ambassade  k  la  cour  de  Na- 
poleon, ces  premises  quality  d'un 
habile  diplomate.  De  retour  k  Cons- 
tantinople, il  s'etait  doucementinsinue 
dans  les  bonnes  grdces  de  Mahmoud, 
si  bien  qu*il  ^tait  devenu  le  conseiller 
de  tous  ses  actes.  Mahmoud  ne  cachait 
point  Tascendant  qu'fiUiled  exer^it  sur 
son  esprit,  et  Ton  se  souvient  que, 
dans  une  sMition  des  janissaires,  il 
repondit  k  quelques-uns  des  plus  hardis 
(lui  lui  demandaient  Texil  et  la  disgrace 
de  son  favori :  «  Quoi !  vous  vouariez 
me  couper  le  brasy  et  me  priver  de 
celui  dont  la  sagesse  m'assiste  dans 
toutes  mes  entreprises?  » 

Haled  etait  jaloux  de  la  puissance 
des  Duzzoglou ;  il  avait  jure  leur  ruine 


au  fond  de  son  ooeur,  et,  pour  parve- 
nir  k  ses  fins,  il  se  cacha  demere  le 
voile  de  la  plus  noire  hypocrisie.  II  sa- 
vait  que  Mahmoud  aocordait  toute  sa 
conflance  aux  f^res  arm^niens,  qu*il 
^tait  convaincu  de  leur  bonne  foi ,  que 
mdme  il  ^tait  li^  envers  eux  par  une 
tacite  reconnaissance.  Comment  done 
s'insinuer  dans  I'fime  du  sultan?  par 

auel  moyen  lui  persuader  que  ses  plus 
^vou^  serviteurs  sont  au  contiaire 
des  ennemis  dangereux?  Ne  risoue-t-il 
pas  lui-mdme  de  se  perdre  dans  rabtme 
qu'il  veut  creuser  sous  leurs  pas? 

Profond  connaisseur  du  coeur  hu- 
main  et  de  tous  les  ressorts  secrets  qui 
mettent  en  mouvement  ses  passions, 
il  avait  observe  que  celle  qui  dominait 
au-dessus  de  toutes  les  autres  i'dme 
du  sultan,  ^tait  une  insatiable  avarice; 
il  8*^tait  convaincu  qu'en  flattant  ce 
vice,  et  qu^en  faisant  briller  aux  yeux 
du  despote  cupide  Tespoir  d'accumuler 
de  nouveaux  tresors,  on  pouvait  Ta- 
mener  sdrement  a  ses  propres  d^irs. 
II  p^n^tre  done  par  cette  voie  dans  la 
confiance  de  Mahmoud ,  et  c'est  en  lui 
jetant  cet  appflt  qu*il  le  dispose  en  sa 
favear. 

II  commence  par  lui  manifester  son 
^tonnement  de  Texcessive  prosp^rit^ 
des  Duzzoglou;  il  laisse  deviner  ses 
doutes  sur  ViniignU  des  moyens  par 
lesquels  ils  se  sont  dev^  a  cet  ^tat;  il 
fait  entrevoir  aussi  tous  les  dangers 
qui  peuvent  r^sulter,  pour  lui  et  pour 
sa  nation ,  de  cette  immense  sup^riorite 
de  fortime  dans  une  maison  de  dbr^- 
tiens  naturellement  ennemis  desTurcs; 
il  sugg^re  enfin  au  prince  Tid^e  de 
s'emparer  de  ces  tresors  et  de  les  ajou- 
ter  au  sien ,  moyen  court  et  facile  de 
se  cr6er  de  nouvelles  ressources  finan- 
cidres. 

Ses  discours  perfides  persuaderent 
Mahmoud.  D'un  autre  cot^,  pour  ne 
pas  ^veiller  les  soupqons  des  Duzzo- 
glou, il  se  lie  a  eux  par  une  feinte 
amitie,  et  cherche  toutes  les  occasions 
de  les  convaincre  de  son  d^ouement 
mir  quelque  service  apparent  ou  reel. 
Gr^oire,  le  plus  capable  des  deux  fre* 
res,  etait  principalem«it  I'objet  de  ses 
provenances.  C'etait  un  esprit  calme  et 


58 


L'UmVERS. 


s^vto,  p^n^trant  avec  une  sagacity 
merreilleuae  le  ncBud  de  toulea  lea  in- 
trigaes,  et  jpoasMant  2i  un  deflT6  re- 
marquable  rintdtigence  dea  uifairea. 
A  la  finease  propre  aux  Annteiena,  H 
joigoait  la  grayit^  et  la  solennit^  dea 
maniirea  ottomanea.  Ghaque  matin 
Gr^tre  allait  viaiter  Haled,  qai  le 
retenait  longtempa  dana  son  palaia  pour 
ddib^r  ayec  lui  dea  affalrea  de  TElat. 
Le  yizir  6tait  h  son  tour  souTent  inTit^ 
diez  lea  frerea  armtoiens,  qui  1*6* 
gayaient  par  dea  ffites  aplendides,  dea 
Illuminations  et  des  featins,  luxe  d'^ 
ttquette  inconnu  pr^cMemment. 

Peraonne,  et  les  Duzzoglou  bien 
moins  encore  que  tous  les  autres,  ne 
pouvai'ent  penser  qu'Haled  nourrissait 
dans  le  fond  de  son  ooeur  des  projeta 
sinistres.  Cependant  ii  allait  porter  le 
premier  coup  k  ses  pr^tendus  amis. 
Voici  Gomme  il  s*y  prit. 

Aucun  rala  ne  pent  en  droit  rem« 
plir  une  fonction  publique;  il  taut  €txt 
musulman  fiddle.  Les  deux  Mrea  ar* 
m^niens ,  bien  qu'oocupant  dans  la  r6a* 
lit^  la  charge  iroportante  de  directeora 
de  la  Monnaie,  etaient  repr^ent^  nsr 
un  Turc ,  esp^  de  fonctionnaire  flctif , 
au  nom  duquel  ae  dressaient  tous  les 
actes.  Ge  Turc,  nomm^  Abd  Arrha- 
man,  ^it  un  bon  et  simple  Tieillanl, 
enti^ment  d^Tou^  aux  Duzzoglou  et 
tr^SHCOndliant.  Haled  voulut  I'dcarter, 
et  lui  aubatituer  une  de  aes  cr^tures, 
oppose  aux  int^r£ts  des  Duzzoglou. 

II  repr^aente  done  au  sultan  qu'Abd 
Arrfaaman  est  trop  vieox,  qu'ii  n'est 
plus  capable  d'aucune  aunreillanoe, 
qu*il  est  gorg^  de  richesses  et  enti^re* 
roent  gagn^  par  oeux  qu'il  doit  repre- 
sentor avec  impartiality.  II  met  en 
avant  un  autre  personnage,  le  mermar- 
bachiy  ou  grand  architecte  de  TEtat, 
IxHnme  parvemi,  et  conserrant  oontre 
les  Duzzoglou  une  implacable  ranoune , 
parce  qu'autreftus  il  8*6tait  adresse  a 
eux  dana  une  aflEsire,  sans  obtenir  ce 
qu*il  sollidtait. 

Abd  Arrbaman  est  renroy^  et  con- 
fine dans  un  village  foisin  de  Goostan- 
tinople,  et  une  partie  de  Targentqull 
avail  auiasa^  pendant  son  emploi  paaae 
dans  les  coffires  du  sultan.  Les  n'^res 


armfoiena ,  itonnte  de  oe  ohaa^BBicBt . 
en  demandent  la  raiaon  a  EbM,  et  k 
prient  de  s'oj^poaer  k  la  somiDalion  du 
melmar-bachi,  attenda  qa'ila  redou- 
talent  sea  mauvaises  intentloni  a  lenr 
^gard.  Mala  Haled  lea  rasaure,  et  leur 
oonaeille  de  bannir  toutes  ees  vaines 
inquidtodea^  promettant  que  son  au- 
torite  aplanirait  toutes  ces  difiBciilt^ 
efifravailtea  k  la  premito  viie,  et  il 
ajooie  qo*au  boutde  pea  de  temps  ils 
trouveront  en  Idi  un  aecood  Abd 
Arrbaman. 

La  kM  exige  qa'k  la  nomination  d'un 
nouveaa  zerpaiU^mMf  ou  iDtendant 
de  la  Monnaie ,  on  pr^sente  on  oompte 
net  de  T^t  financier.  Lonque  le  met- 
mar-bachi  entra  dans  sea  fonctiona,  la 
premi^  chose  qu'il  dit  aux  Duzzoglou 
ht  de  les  avertir  de  ae  oonforrner  am 
r^ementa,  c'e8t-^-dire,delui  dresser 
I'etat  de  ieurs  oomptes.  II  suffisait  ordi- 
nairement  de  £eure  aur  le  papier  le 
relev6  das  sommes  contenues  dans  le 
tr^or  de  la  Monnaie.  Les  ft^res  ar- 
mdniens  penstont  d^abord  qu'ils  n'^ 
taient  astrdnts  (fa'k  oette  q^^ation, 
aussi  ne  furent-ils  pas  trop  efifray6s. 
Mais  quelle  surprise  fut  la  leur,  lors- 
qu'en  remettant  I'^tat  dea  oomptes  au 
meimar-bacbi ,  oelui-ci  leur  dit :  «  Le 
sultan  ne  se  contentera  pas  d'un  sim- 
ple papier;  il  veut  en  argent  oooaptant 
et  aana  ddai  le  capital  qui  aMdtpoBk 
anciennement  entre  vos  mains. » 

II  font  savoir  qu'en  Turquie  la  mon- 
naie se  Abriaue  an  profit  do  saltan, 
de  m^me  qu'etleestfipapp^e  en  son  nom 
et  ^  son  effigie.  C'est  loi  qui  r^^  et 
determine  la  quantity  d'aliiage  qifon 
doit  mettre  dana  For,  et  qui  foornit  les 
linflots.  Outre  ces  ^normes  valears  d'or 
et  d*argent  brut,  Mabmoud  kiasait  en 
d^pdt  (£ez  lea  frfirea  amkiniena,  oomme 
joailliera  de  la  oouronne^  beaoooap  de 
Dijooz  et  de  pierres  prMeoaea.  Le  ca- 
pital des  foncb  oonfi^  aox  Dossc^loo 
pouvait  ^tre  ^alu6  environ  k  vingt- 
dnq  millions.  Comma  ils  faiaaient  la 
banque,  cea  foods  ae  trouvaient  dis- 
perses et  r^partis  dans  plusieors  autres 
maisons  et  dans  diversea  places  de 
I'Europe,  notaroment  en  Angletwre  et 
en  France.  Comment  rappeler  i  Tins- 


ARMEINIE. 


69 


tant  et  de  si  loin  toutes  oes  sommes 
^parses?  comment  fermer  les  cMits 
tmnrtB  et  eiiger  des  pavements  dont 
recMaace  toit  fort  recall?  Ces  con- 
siddrattons  jet^rent  les  deux  fr^res  dans 
des  pei^exit^  etranges;  lis  tAefaaioit 
inutilement  de  remonter  k  la  cause 
d'un  ordre  aussi  inconcevaUe;  ils  se 
perdaieot  dans  leors  conjectures.  Gr6- 
gtnre  ne  voit  d'autre  issue ,  pour  sortir 
de  son  embarras,  que  de  courir  chez 
Haled  ioi  demander  des  explications. 
Haled  simule  de  la  surprise,  et  dit 
qu'il  arrangera  i'affaire  pr^  du  sultan ; 
mais  qu'il  faut  saisir  le  moment  j&vo- 
rable  de  lui  parler,  et  que,  pour  cela, 
le  d^ai  d'une  semaioe  est  necessaire. 
Gr^oire  revient  cbez  lui  plus  rassur6, 
mettant  toute  sa  confiance  dans  le 
cr^it  du  vizir,  son  ami. 

Le  melmar-bachi ,  en  quality  d'in- 
tendant  de  la  Monnaie,  allait  cbaque 
jour  a  rhdtel  ou  elle  se  fabrique,  et 
rusage  voulait  que  les  deux  agents  res- 
ponsables,  les  deux  fibres  Duzzoglou, 
ne  pussent  sortir  de  la  maison  ni  s'ab- 
senter  avant  le  moment  du  d^rt  du 
zerpan^mini,  lequel  avait  lieu  ordi- 
nairemeot  vers  les  quatre  beures  du 
soir.  Or,  un  vendredi  que  le  meimar- 
bachi  ^tait  venu,  suivant  sa  coutume, 
inspector  les  ateliers  et  les  bureaux,  il 
demeura  plus  lonctemps  dans  son  ca- 
binet, si  bien  qu*a  huit  beures  du  soir 
ii  n'^tait  pas  encore  sorti,  au  grand 
etonnement  de  toute  la  maison.  Enfln, 
vers  les  neuf  beures,  il  descend,  et 
troove  les  deux  fr^s  qui  I'attendaient 
au  bas  de  Tescalier  pour  lui  printer 
ieurs  bommages,  irapres  Tetiquette. 
L'intendant  les  regarae  avec  fiert^, 
re^it  silencieusement  Ieurs  civility, 
ct  se  Gontente  de  leur  dire,  lorsqu'il 
est  mont^  k  cheval :  «  Le  sultan  or- 
donne  que  vous  ne  quittiez  pas  rb6tel 
des  Monnaies. » 

Ces  paroles,  qu'il  laisse  tomber 
comme  une  sentence,  en  poussant  son 
cheval  en  avant,  plon^ent  les  deux 
fr^res  dans  la  stupefaction.  lis  se  re- 
gardent,  s'interrogent,  et  trouvent 
nioins  que  jamais  une  solution  a  1*6- 
nigme  terriole  qui  pese  sur  eux  de  tout 
son  iwids.  Ils  envoieni  Ieurs  serviteurs 


k  la  maison  chercber  quelques  provi- 
sions. Toute  la  famille,  surprise  du 
retard  iDacooutum^  de  Gr^oire  et  de 
Serkis,  commen^t  k  ooncevoir  des 
inquietudes.  EUes  redoublirent,  quand 
les  serviteurs  rapport^rent  que  Ieurs 
mattres  ^ient  oblige  de  rester  dans 
rbdtel  des  Monnaies  par  un  ordre  ex- 
pr^  du  sultan.  La  nuit  se  passe  en 
allies  et  venues ,  et  ils  ne  voient  d'autre 
moyen  de  sortir  de  leur  incertitude 
que  de  s'adresser  k  Haled,  qu'ils  croient 
toujours  dans  Ieurs  int^rets. 

Micbel  Duzzoglou,  leur  fr^re,  va  le 
lendemain  matin  trouver  le  vizir;  il 
vient.  dit-il,  de  la  part  de  ses  freres, 
chercber  des  folaircissements  sur  un 
ordre  extraordinaire  du  sultan,  en 
vertu  duquel  ils  sont  retenus  prison- 
niers  k  I'notel  des  Monnaies;  ilagoute 
que  Gr^oire  et  Serkis  esperent  que 
ieur  ami  Haled  les  tirera  d'embarras 
des  que  leur  position  lui  sera  connue. 
Micbel  allait  continuer  son  discours, 
lorsque  Haled  I'interrompit  froidement 
et  lui  dit :  «  Je  sals  tout  ce  que  vous 
pouvez  me  raconter;  mais  le  sultan  est 
Juste,  et  II  absoudra  vos  fr^res,  s'ils 
sont  innocents,  c*est-a-dire,  s'ils  peu- 
vent  rendre  leur  compte.  »  II  accom- 
pagna  ces  demises  paroles  d'un  sou- 
rire  ironique  et  d^un  air  de  satisfaction 
mal  d^guis^.  Micbel  comprit  toute  la 
malice  d'Haled,  et  ce  trait  lui  d^voila 
le  myst^re.  II  retoume  vers  ms  freres , 
qui  ,'en  entendant  la  r^ponse  du  vizir, 
sentent  clairement,  mais  trop  tard , 
mie  le  coup  part  de  sa  main.  Au  lieu 
des  consolations  et  de  I'assistance  qu'ils 
attendaient,  ils  se  voient  abandonn^, 
trabis  et  pr^ipit^  dans  un  abtme  dont 
le  fond  dispsuralt  a  Ieurs  reeards. 

Le  samedi  matin,  les  aeux  freres 
attendent  Tarriv^e  du  zerpan^-^mini , 
et  lui  repr^ntent  qu'il  n'est  pas  pos- 
sible d'acquitter  une  somme  aussi  con- 
siderable k  I'instant  m^me,  et  qu'on 
devrait  leur  aocorder  un  deiai.  L'in- 
tendant, sans  fixer  le  terme,  r^pond 
qu'ils  auront  quelques  jours  pour  se 
pourvoir  contre  Tarr^t  du  sultan.  Son 
astuce  |)erfide  ^vitait  de  ne  pas  de- 
terminer le  jour  des  comptes,  afin 
de  pouvoir  les  prevonir,  dans  le  cas 


60 


L'DNIVERS. 


ou  lis  seraient  en  6tat  de  s'acquitter. 
La  r^ponse  Evasive  du  zerpan^ 
^ini  est  interpr^t^  favorablement 
par  les  freres ,  qui  esp^rent ,  en  s*adres- 
sant  a  la  generosity  et  k  ramiti^  des 
autres  Armeniens ,  pouvoir  se  tirer  bo 
norablement  de  ce  pas  difficile.  lis  font 
un  appel  aux  banquiers  de  Constanti- 
nople, d^p^hent  des  courriers  a  An- 
gora (*) ,  et  prient  tons  ceux  qui  pour- 
ront  venir  sur  le  champ,  de  se  trouver 
au  rendez-vous ,  pourd^liberer  sur  leur 
{M>sition  et  les  aider  dans  cette  neces- 
sity. La  moiti^  de  leurs  amis  pr^ents 
a  Constantinople  vient  le  lendemain  a 
Tassemblee;  Teffroi,  la  preoccupation 

3ui  les  agitent,  rendent  impossible  une 
6cision;  et  cependant  les  Duzzoglou 
auraient  r^ssi  h  r^unir  le  capital  n^- 
cessaire,  sans  I'indigne  Idcbete  du  plus 
riche  de  leurs  parents,  Aznavour  Duz- 
zodou ,  honime  qui  leur  devait  tout  son 
credit  et  toute  sa  fortune*  Au  lieu  de  se 
sacriGer  pour  ceux  qui  dtaient  le  prin- 
cipe  et  la  cause  de  sa  prosperity,  il 
craint  de  se  compromettre  aux  veux  du 
pouvoir,  et,  sans  mot  dire,  il  s  esquive 
de  rassembiec  pour  courir  chez  le  zcn 
pane-emmi,  a  qui  il  compte  Taffaire 
dans  tous  ses  details.  «  Void,  dit-il, 
qu*on  reclame  de  moi  telle  somme  pour 
payer  le  sultan;  suis-je  oblige  de  la 
fournir?  »  LMntendant,  qui  voit  dans 
son  reftis  un  moyen  plas  sdr  de  perdre 
ses  ennemis,  iui  r6pond  que  non-seu- 
lement  il  n*est  point  oblige  a  se  m^ler 
des  affaires  de  ses  parents ,  mais  qu*il 
Iui  defend  nieme,  sous  peine  de  la  vie, 
d'y  intervenir  en  rien.  La  frayeur  d' Az- 
navour redouble,  et  il  ne  songe  plus 

(*)  Angora  est  rancienne  ville  d'Ancyre. 
Le  grand  noinbre  d* Armeniens  qui  Phabi- 
leiu ,  parmi  lesquels  se  trouveot  les  capila- 
lisies  les  plus  riches  et  les  plus  influents  de  la 
nation ,  la  rangent  en  quelque  sorte  dans 
la  categorie  des  villes  armeniennes.  C'est  en 
l*ouvlsageant  sous  oe  point  de  vue ,  que  nous 
nuuA  sommes  permis  de  reproduire  dans  nos 
figure^i  Iti  cdebre  momiment  d*Auguste, 
qtif.  k's  del  uicrt^s  observations  des  voyageurs 
IiorlenI  a  fairccqnsidei-ercomnieun  temple, 
rle^e  petit-iftiw  sous  les  siuspices  de  cet  em- 
pweur.  Voy.  1*«  fig«in!8 ,  33  ,  34  ,  35 ,  36. 


qu'^  se  renfermer  chez  Iui  pour  saucer 
ses  tresorsC*). 

L'assembiee  se  separe,  apr^  avmr 
arrM  qu*on  demandera  un  deiad  de 
huit  jours.  On  s'adresse  impnidem- 
ment  au  zerjpane-emini ,  pour  le  char- 
ger de  solliciter  cette  gdkx  pres  da  sol- 
tan;  et  Ton  aurait  dA  penser  que  sa 
liaison  avec  Haled ,  I'unicjue  cause  de 
tous  ces  maux,  ne  poavait  permettre 
d*esperer  qu'il  plaiderait  mvorable- 
ment  leur  cause.  Bien  au  contraire,  il 
devait  de  tout  son  pouvoir  hdter  le 
moment  de  leur  mine ,  ce  qu*il  fit  effee- 
tivement. 

L'ingratitude  d^Haled  envers  les 
Duzzoglou  etait  d'autant  plus  noire  et 

{)lus  inexplicable,  qu*il  avait  reap  de 
eur  part  des  services  de  toat  genrr. 
Lui  qui  les  accusait  de  dilapidation, 
avait  contribue  par  ses  emprants  r«i- 
teres  et  nullement  inscrits  sur  le  cahier 
Jes  charges ,  parce  qu*ils  etaient  oon- 
sideres  comme  les  avances  d*un  ami  a 
son  ami,  k  rendre  leur  position  phis 
critique  et  plus  gdnante.  En  effet,  il 
etait  leur  debiteur  de  fortes  sommes, 
et  il  esperait  par  ses  basses  intrigues 
eteindre  sa  dette  dans  le  sang  de  ses 
creanciers.  Lors^ue  Michel  se  pr^nta 
derechef  chez  lui  pour  Tengager  k  ren- 
dre ce  qu*il  devait  k  ses  fibres.  Baled 
lui  repondit  avec  une  impassibilite  ap- 
parente,  qu'il etait  tout  prSt  ^s'acquit- 
ter, et  qu*il  ferait  promptement  re- 
mettre  la  somme  k  Thotel  des  Monnaies. 
Michel  se  contenta  de  cette  reponse, 
et  retourna  la  notifier  k  ses  frdres. 

Pendant  ce  temps,  Haled,  stimule 
par  la  crainte  de  rembourser  les  som- 
mes empruntees,  s*il  n'acceiere  la  con- 
damnation  des  Duzzoglou,  court  in- 
continent pres  de  Mahmoud.  II  le  trouve 

(*)  An  moment  ou  il  y  avait  du  oourage  a 
temoigner  quelque  iuteret  a  la  famiUe  Duz- 
zoglou ,  certains  honimes  parmi  les  Francs 
lui  donnaicnt  des  sigiies  non  equivoques  de 
leur  attachement.  TVous  nous  plaisous  a  citer 
id  le  nom  de  M.  Jouaonio,  attache  a  ram- 
bassade  fran^ise,  et  aujourd*hui  premier 
secrelairc-interprele  du  roi.  II  ful  pour  les 
Duzzoglou  di^gracies,  un  ami  aussi  MUt 
que  durant  leur  prospcrilc. 


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arm£nie. 


G1 


dans  la  salle  de  son  conseU ,  et ,  comme 
s*il  avait  des  revelations  importantes  a 
lui  communiauer,  il  le  prie  de  cong^- 
dier  Tassembfi^e.  Lorsqulis  sont  seuls, 
Haled  ^leve  la  voix,  et,  feignant  tou- 
jours  que  le  z^Ie  qu'il  diploic  contre  les 
Duzzoglou  est  un  effet  de  son  attache- 
ment  a  la  personne  de  Sa  Majeste,  et 
non  un  mouvement  de  son  interSt  pro* 
pre,  puisqu'il  a  ete  contraint  de  briser 
tous  les  liens  d'amitie  qui  les  unis- 
saient ,  il  dit  qu'il  est  temps  de  prendre 
une  decision ,  parce  que  tous  les  Arni^ 
niens  s*entendent  entre  eux,  et  que  les 
coupables  pourront  echapper  a  sa  jus- 
tice, en  lui  pr^entaut  I'argent  de  leurs 
parents  et  de  leurs  amis;  qu*ils  doivent 
porter  la  peine  de  leur  luxe  effren^,  eux 
qui  b&tissent  des  chiiteaux  plus  ma^ni- 
fiques  que  son  serail;  que  temponser 
annoncerait  de  la  faiblesse  et  indispo- 
serait  la  masse  des  iideles  musulmans, 
lesquels  attendent  une  mesure  digne 
de  son  courage  et  de  sa  justice. 

Mahmoud,  excite  par  les  paroles  de 
son  ministre,  entre  en  fureur,  et  lui 
repond  qu'il  est  r^olu  de  s^vir  contre 
les  coupables,  mais  qu'il  ignore  les 
movens  propres  a  les  atteindre  tous. 
Haled  avait  un  plan  de  proscription 
arr^te,  et  il  I'expose  au  sultan.  II  con- 
sistait  k  faire  main  basse  sur  toute  It 
famille  des  Duzzoglou,  en  y  compre- 
nant  les  parents  et  les  amis  compromis 
dans  cette  demiere  affaire;  ils  devaient 
£tre  saisis  au  milieu  de  la  nuit  mdme, 
et  conduits^  les  bonunes  a  Tbotel  de  la 
Monnaie,  pour  6tre  r^unis  aux  trois 
frdres  prisonniers,  et  les  fenimes  au 
palais  du  patriarcbe  armenien.  Mah- 
moud  approuve  le  conseil  d'Haled,  et 
lui  laisse  plein  pouvoir  pour  Tex^cu- 
tion. 

Vers  les  onze  heures  du  soir,  le  bos- 
tandji-bacbi ,  ou  dief  de  la  police, 
marche  avec  une  nombreuse  brigade  a 
la  r^idence  de  la  famille  Duzzoglou , 
et  p^netre  dans  la  maison.  On  con^it 
aisement  quelle  frayeur  agita  toutes 
ces  feaimes  et  ces  enfants  eveilles  en 
sursaut  au  milieu  de  la  nuit,  et  se 
voyant  environn6s  de  gens  arm^,  sur 
le  visage  desquels  on  dtscernait  des  in- 
tentions hostiles,  qui  leur  r^vddrent 


trop  clairement  que  leurs  tristes  pres- 
sentiments  allaient  se  rfoliser.  Le  bos- 
tandji-bacbi  les  rassure,  et.  afln  que 
personne  ne  lui  ^appe,  il  leur  dit 
qu'ils  n'ont  rien  h  craindre,  qu'il  yeut 
seulement  leur  oommuniquer  un  ordre 
du  sultan,  et  qu'il  les  prie  de  se  r^unir 
tous,  sans  en  exoepter  un  seul,  dans 
Fappartement  principal  de  la  maison , 
aiin  ou'ils  en  entendent  la  lecture.  On 
lui  oo^it,  et,  lorsque  tous  sont  ras- 
sembl^  dans  la  srande  salle ,  il  fait  lire 
le  mandat  d'arret.  A  cette  lecture,  les 
femmes  qui  se  voient  arracb^s  h  leurs 
maris  poussent  des  sanglots,  auxquels 
les  petits  en&nts  m6lent  leurs  ens  et 
leurs  larmes.  II  faut  cider  k  la  force, 
malgr6  le  sentiment  de  son  innocence, 
et  suivre  ces  soldats,  qui  les  condui- 
sent  a  la  iner  et  les  entassent  dans  une 
grande  barque  ou  caique,  destine  au 
transport  des  briques  et  des  pierres  de 
construction.  Pendant  le  m^me  temps , 
d'autres  agents  fouillaient  les  domiciles 
des  autres  victimes  de  PinfiSme  cupi- 
dity d'Haled.  Le  nombre  des  families 
amStees  s'^leva  k  dix-buit. 

Toutes  les  femmes  ftirent  transfe- 
rees cbez  le  patriarcbe  armenien: 
qu'on  se  figure  oes  dames,  ^levees  dans 
le  luxe  et  la  moUesse ,  r^uites ,  avec 
leurs  filles  ou  leurs  jeunes  enfants,  a 
eoudier  sur  quelques  mis^rables  lits  de 
paille,  pdle-m^le  avec  les  autres  femmes 
attacbees  k  leur  service,  n'ayant  pour 
nourriture  que  du  pain  noir ,  privies 
de  lumiere  et  d'air ,  suffoqu^es  par  une 
odeur  infecte,  et  Ton  n^aura  encore 
qu'une  bien  faible  id^  des  douleurs  et 
aes  amertumes  dont  elles  ^taient  abreu- 
vto.  Gar,  k  cela,  se  joignaient  les 
pNunes  morales  causees  par  la  separa- 
tion de  leurs  maris,  et  Tineertitude 
ou  on  les  laissait  toucbant  leur  propre 
avenir.  Les  satellites  qui  les  gardaient 
a  vue  avaient  la  barbaric  d'emplcber 
les  communications  avec  le  dehors,  et 
de  ne  laisser  introduire  aucune  des 
choses  capaJ}les  d'adoucir  les  ri^eurs 
de  la  detention.  La  patience  cbretienne 
avec  laquelle  elles  supportaient  ces 
jnaux  etait  Tunique  consolation  qui 
pdt  les  temperer.  Les  souffrances  du 
corps  impriment  d'ordinaire  aux  Snies 


62 


L*UNIVERS. 


gfo^uses  une  teergie  nouYelle  qai 
r^agit  heoreuaenient  sur  rorganisme ; 
c'est  ce  qui  arriva  pour  plmiean  de 
ces  jeunes  femmes  li  d^iicatea,  toa- 
joun  languissantes  et  inaladives  sur 
leurs  ricMs  sofas  et  tapis  de  Perse , 
et  recourant  journellement  anx  ordon- 
nances  de  la  onMecine.  Alors  qu'elles 
n'avaient  que  les  aliments  les  plus 
grossiers  et  la  oouche  la  plus  dure, 
elles  recouTi^reot  la  saot^  et  la  force 
suflBsaiite  pour  supporter  nobiement 
leur  infortune. 

Les  hommes,  de  leur  cM ,  avaient 
^t^eDfermte,  ainsi  que  nous  Tavons 
dit,  dans  Fbdtel  de  la  Monnaie.  lis 
^taient  encore  traits  avec  plus  de  ri- 
gueur.  Les  trois  finhvs,  et  quelques- 
uns  de  leurs  plus  procbes  parents ,  fu- 
rent  wtpax^  et  s6questrte  dans  une 
chambre  basse  et  obscure  qui  avait 
toute  I'apparenoe  d'un  cacnot.  Les 
autres  Armtoiens,  au  nombre  de 
soixante  et  dix  personnes  environ, 
^taient  rtenis  dans  un  mtoe  apparte- 
ment  Quel  triste  spectacle  pour  eux, 

Sue  la  Tue  des  misires  qui  m  frappent 
'une  mani^  si  soodaine !  De  ropu- 
lenoe ,  des  douceurs  de  la  vie  int^rieure 
de  famille ,  ils  passent  k  Textrtoe  d^ 
ndment  et  aux  dures  priTatlons  des 
prisonniers  d'£tat  en  Turquie.  A  pnne 
resolvent -ils  les  aliments  ntossaires 
pour  apaiser  les  premiers  besoins  de  la 
faim ;  et  plusieurs  d*entre  eox ,  habi- 
tue k  se  dteltdrer  dans  de  riches 
coupes  d*or  on  dans  les  cristaux  les 
plus  brillants  d'Europe,  presaent  avi- 
dement  de  leurs  Imea  une  erucbe 
d'arsile,  qui  ne  oontient  qu'une  eau 
troimle  et  jaunAtre.  Ce  qui  enfonee  le 
dernier  trait  dans  leurs  Ames,  cfest 
la  prince  du  banquier  Axnavoor, 
qui  n*avait  pu  adieur  son  salut  au 
prix  de  la  trabison  et  de  la  basaesse. 
Haled,  qui  eonvoitait  ses  trters, 
Tavait  port^  sur  ses  tables  de  proscrip- 
tions, et  le  malheureux  partageait  h 
captivity  de  ceux  qu*il  aurait  peuUtoe 
delivT^ ,  en  oflfrant  avec  d^ouement 
une  jpartie  de  ses  capltaux  poor  rem- 
plir  la  somme  tMuukt  par  le  sultan. 
Apres  quelques  jours,  on  fiiit  sortir 
du  Zerpeneb  les  fir^res  Duxaogio« ,  et 


on  les  tratne  au  s^rail ,  ou  ils  soot  je- 
t^  dans  une  autre  prison  secr^  et 
plus  intoltoble.  Le  cruel   Haled  se 
platt  k  torturer  ses  Tictimes  par  les 
privations  de  tout  genre  qu*il  leur  im- 
pose ,  et  par  les  craintes  coDtinuetta 
S|u'il  leur  mspire,  soit  en  r^pandant  de 
ausses  nouvelles,  oomme  le  bruit  de 
la  mort  de  leurs  femmes  et  de  lom 
enfants ,  soit  en  leur  faisant  envisager 
leur  propre  perte  oomme  prochaine  et 
assuree.  Ce  qui  oontribua  k  les  jeter 
dans  les  plus  vives  inquietudes,  fot 
le  supplioe  de  Finfortune  Abd-Anba- 
man,  qu'Haled  avait  r^ussi  ^  enyo^ 
k  la  potenoe  vpour  oonfisquer  ses  biens. 
Sa  ftte,  port6e  au  bout  d'une  pique. 
Alt  exposee  k  la  porte  du  strait ,  et  on 
acoorda  aux  firms  arm^niens  le  triste 
privil^e  de  oontempler  les  restes  sae- 
glants  d'un  ami ,  innocent  oonune  eox, 
et  dont  la  bouche  bdante  semblait  kor 
Jeter  de  loin  une  propb^tie  sinisCre. 
Deux  serviteurs,  qui  avaicnt  la  per- 
mission de  p^n^tKr  dans  le  cacbot. 
rapportaient  chaque  jour  k  leurs  msl* 
tres  les  rumeurs  publiques  qo*ite  n- 
cneillaient  sur  leur  passage;  et  too^ 
ees  bruits  vagues  et  discordants  res- 
sembiaient  au  roulement  confiis  e( 
lointain  des  flots  et  du  vent,  sigv 
prtoirseur  de  la  temp^te.  Elle  ne  tsnb 
pas  k  Plater :  Mahmoud ,  pooss^  psr 
Haled  qui  le  harcelait  sans  cesse ,  dans 
la  crainte  qu'il  ne  vlnt  k  recoDnaflre 
la  trame  seer^te  de  ses  foniiieries, 
institua  une  commission  de  trois  mem- 
bres ,  charge  de  faire  rinveotairs  de 
toos  les  meubles  et  immeublestantdes 
Duzzoglou  que  des  autres  AnnMeos 
arrft^  avec  eux.  Ces  trois  membres 
teient  Haled  lui  -  mime ,  le  serpan^ 
6mini,  et  le  directeur  des  dooanes. 
Par  leur  ordre ,  on  fouille  tootes  la 
maisons  sur  lesquelles  on  avait  appose 
les  scell^s,  et  on  transporte  an  Zer- 
paneb  meubles,  bijoux,  tr^sors,  et 
autres  efifets  pnKieux  au'on  vdteMivre. 
Ce  mii  ne  pouvait  etre  d^plao^  iiit 
laissesnr  les  lieux  et  vends  plus  tard 
k  I'encan.  On  ne  saurait  ^valuer  la  ri- 
cbesse  de  toos  les  objets  de  luxe  trou- 
v^  dans  les  palais  de  ces  riches  ban* 
quiers,  et  que  plusieurs  g6n6ratioDS 


ARM£NI£. 


es 


ivaient  iuocessivement  aocrus  >  en  y 
accumulant  les  produits  ks  plus  pre- 
cieux  de  Tindustrie  eoroptaKiieetasia- 
tique.  Dans  la  crainte  que  quelque  d^- 
pot  seeret  n'^chappAt  k  leurt  perquisi- 
tions ,  les  inspecteurs  tures  usdrent  de 
toutes  les  ruses  de  leur  maligne  et  in- 
satiable cupidity.  lis  allaient  trouver 
toutes  oes  nobles  dames  d^tenues  dans 
le  palais  du  patriarche,  et  ils  leur  di- 
saient  que  la  vente  de  leurs  propri^t^ 
ne  sufnrait  point  pour  payer  la  dette 
du  tr^r  public;  que  sans  doute  elles 
avaient  d&nMh  leurs  recfaerches  d'aa- 
tret  valours  en  argent  ou  en  bijoux ; 
que«  dans  leur  intmt,  ils  lespnaient 
alndiquer  exacteioent  les  lieux  de  oes 
d6pdts ,  afin  de  sauver  leur  vie  et  cdle 
fie  leurs  maris.  Ges  questions  insi- 
dleuses  arraeb^rent  beaucoup  d'aveox 
par  lesquels  Fezistence  de  tr&ors  ines- 
timables  fut  r^vel^ ;  car  le  despotisme 
des  souverains  habitue  les  sujets ,  en 
Orient,  k  enfouir  dans  les  profon- 
deurs  de  la  tcrre  les  richesses  qu'ils 
veulent  soustraire  k  son  avidite.  Au- 

tirte  des  hoBimes ,  on  mit  en  oeuvre 
es  mdmes  supercheries,  et  avee  un 
sucote  6gal. 

Haled ,  qui  cberchait  soi^eusement 
tous  les  moyens  de  noireir  aux  yeux 
du  sultan  les  pr^veuus,  et  de  multi- 
plier les  chefs  die  leur  accusation ,  trou- 
vait  joumellement  dans  I'inventairede 
nouveaux  sujets  de  grie&.  Un  jour, 
on  d^oouvrait  dans  Tint^ieur  de  quel- 
que maison  Texistence  d*une  chapelle; 
crime  ^lorme,  puisque  la  loi  defend 
de  s'assembler  dans  les  ^lises  qui  ne 
sent  pas  autoristo  et  recoonues.  Ainsi, 
Ton  paria  beaucoup  d'un  Mifiee  trou?^ 
dans  le  jardin  d'un  n^godant,  et  qui, 
sous  I'apparence  trompeuse  d*un  ma- 
gasin,  cachait  une  ridie  chapelle.  Le 
lendemain,  c'^tait  des  granores  ou 
des  tableaux  aecus^  d'obsodnit^  et 
d'attentat  a  la  aM>rale  publique,  at- 
tendu  que  I'Alcoran  drand  la  nq^- 
sentation  de  toote  figure  humame. 
Enfin  les  jMpiera  de  oertainfi  pr^enus 
renfermaient  une  oonrespondanoe  se- 
crete avec  les  puissances  toanfs&res 
et  ennemies.  Toutes  ces  accusations, 
fausses  ou  pu^iles,  sem^ra  parmi  le 


peuple,  rindisposaient  centre  les  ac- 
cuses; et,  en  s'^eyant  jusqu'li  Mah- 
moud ,  prenaient  un  caractto  nouvcau 
de  gravity.  Haled  profltait  de  la  pr^- 
cupation  gdn^rale  pour  se  livrer,  avec 
I'impudeur  la  plus  r^TOitante,  k  ses 
rapacity.  Dans  la  liste  de  Tinventaire 
il  n'inscrivait  que  ce  qui  lui  conve- 
nait ,  sp^oiant  sur  la  yaleur  de  chaque 
objet  que  lui-mtoe  fixait,  et  d^tour- 
nant  k  son  prodt  des  valeurs  conside- 
rables. Comme  les  ^missaires  d'Haled 
demandaient  avac  une  insuitante  iro- 
nic k  Tun  des  fr^res  Duzzoglou  s'il 
n'avait  point  en  r^svre  quel<^ue  trter 
pour  aequitter  sa  dette,  eelui  -d  leur 
repondit  courageusement,  que  le  pr6- 
tendu  deficit  dont  on  Taocusait  pr^  du 
sultan,  serait  di^  combl^,  si  Haled, 
leur  mattre,  restituait  les  sommes 
qu'il  lui  avait  pr^tte  sur  la  garantie 
de  sa  parole.  Haled  copQut  un  td  d^ 

Eit  de  cet  aveu,  qu'il  jura  d'acod^rer 
I  mine  de  ces  giaours;  et,  transfor- 
mant  ce  repiocfae  en  un  dief  nouvcau 
d'accnsation,  il  dla  dire  k  Mahmoud 
qu'on  osait ,  sans  respect  pour  son  ca- 
raetire,  suspecter  son  int^rit^  et  le 
d^int^ressement  de  son  administra- 
tion. Ensuite  il  d^fia  solennellement 
qui  que  ce  fdt  de  £ournir  une  seule 
preuve  positive  contra  lui.  Un  si  haut 

rrsonnage  a  toujours  raison ,  surtout 
Constantinople;  et,  comme  bien 
Ton  pense,  personne  n'deva  la  voix. 
A  en  croire  Haled ,  entre  les  mains 
de  qui  s'arr^taient  des  sommes  formes 
soustraites  au  premier  inventaire,  les 
biens  menbles  et  immeubles  de  tous 
les  aocus^  ne  pouvaient  restituer  au 
sultan  le  capital  qu'il  avait  depose 
Chez  eux.  Les  giaours  trouvaient  mille 
moyens  de  detourner  une  partie  de 
leurs  fonds,  et  il  fallait  n^cessaire- 
ment  les  intimider  pour  les  oontramdc^ 
k  rendre  gorge.  En  cons^enoe ,  on 
dto^te  un  firman  i»ar  lequd  on  donne 
le  ddai  de  trois  jours  seuleroent  k 
quicooque  poss^  ou  recde  des  effets 
ou  valeurs  appartenant  aux  £imilles 
des  pr^enns,  pour  venir  en  fidre  la 
dedaration  et  les  d^poser  chez  le  pa- 
triaiehe  armtoien.  Le  ddinquant  de- 
vait  6tre  poni  de  mort.  Aussitdt  que 


64 


L'UNIVERS. 


cet  ordre  fut  promulgue ,  T^avante 
saisit  tous  les  Arm^nieos  de  F^a.  Les 
parents  et  les  amis  apportaient  scru- 
puleusement  cbez  le  patriarcbe  tout 
ce  qui  pouvait  appartenir  aux  pros- 
crits.  Un  tailleur  avait-il  un  cafetan 
ou  des  robes  commandos  par  Tune 
de  ces  families ,  Thorloger  reparait-il 
une  montre ,  tous ,  croyant  leurs  jours 
en  danger,  s'empressaient  de  porter 
ces  objets  a  Tendroit  d^ign^.  L'af- 
fluence  fut  telle  au  palais  patriarcal , 
que,  durant  trois  jours,  trois  ^cri- 
vains ,  uniquement  employ^  k  inscrire 
Tetat  et  la  nature  des  restitutions ,  ne 
purent  y  sufGre ,  et  le  patriarcbe  de- 
manda  un  sursis  au  sultan ,  qui  Tac- 
corda. 

Pour  tirer  le  plus  d'arjcent  possible 
de  cet  immense  d^t  d'efifets  mobi- 
tiers  de  toute  esnhce ,  on  d^cida  quils 
seraient  vendus  a  Tencan.  Un  encan  h 
la  turque  est  un  singulier  spectacle ;  il 
offre  le  tableau  r^sum^  de  toutes  les 
injustices  et  vexations  possibles  dans 
un  pays  oii  la  loi  est  le  caprice  du  sou- 
verain ,  et  oh  ceux  charges  de  I'appli- 
quer  ne  connaissent  d'autre  r^le  de 
oonduite  oue  I'int^r^.  Haled  avait  re- 
commande  aux  banquiers  et  aux  riches 
n^ociants  d'entre  les  Chretiens  d'as- 
sister  a  la  vente ,  et  surtout  de  ne  pas 
baiter  d'acheter  les  objets  mis  k 
Fencbere.  Aucun  d'eux  ne  manqua  k 
I'invitation ,  car  ii  y  allait  de  leur  t^te. 
Qu*on  ne  croie  pas  les  assistants  libres, 
comme  en  Europe ,  de  surench^r  et 
de  n*accepter  que  ce  qui  leur  oonvient. 
Non,  ils  doivent  se  tenir  muets  et 
impassibles  ttooins  et  acteurs  de 
ce  drame  inique.  Un  geste  d*improba- 
tion ,  un  clignement  de  Toeil  pent  les 
perdre.  Malbeur  k  oelui  qui  n^aocepte 
pas  de  bonne  grdce  oe  que  lui  adjuge 
I'huissier-priseur,  apres  sa  cri^e,  ou 
il  fixe  lui  seul  le  prix ,  sp^lant  sur 
la  valeur  de  chaque  objet  et  sur  les  ter- 
reurs  de  celui  a  qui  il  le  livre;  en  ce 
sens  que ,  s*il  ne  re^oit  pas  secrete- 
ment  guelque  don  .pour  adoucir  sa 
mauvaise  humeur  et  le  d^ommager 
de  sa  peine ,  il  pent  miner  le  capita- 
iiste  le  plus  riche ,  en  lui  d^cemant  le 
privilege  de  ses  adjudications.  I/^uis- 


sier-priseur,  dans  cette  circoastan^, 
6tait  un  homme  vendu  k  Haled ,  et  qui 
lui  avait  jur^  d*extraire  des  du^cns 
jusqu'au  dernier  para  (*),  pour  assou- 
vir  sa  soif  du  lucre.  II  d^ploya  une  ha- 
bilet6  ^tonnante  pour  elever  a  un  taux 
excessif  les  choses  d*une  minoe  valeur. 
sauf  les  actes  de  complaisance  qu'il 
faisait,  en  passant,  aux  grands  sei- 
gneurs turcs,  etque  les  raias  payaieat 
en  revanche.  11  prolonged  Tencan  au 
de\k  de  deux  mois.  Le  produit  de  la 
vente  fut  si  oonsid^able,  qu'il  egalait 
presque  k  lui  seul  la  somme  exigee  da 
saltan.  On  put  solder  aux  sujets  des 
diverses  puissances  europ^nnes  les 
cr^ances  qu'ils  r6clamaient ;  et  m^ 
Ton  se  montra  si  facile  a  leur  ^ard , 

3ue  plusieurs  en  abus^rent ,  en  denoan- 
ant  au  del^  de  ce  qui  leur  6tait  redk^ 
ment  dd.  Quant  aux  raias ,  on  ne  fit 
aucunementdroit  k  leurs  rMamations ; 
et ,  bien  loin  de  reconnattre  leurs  crean- 
ces,  tout  Targent  qu'ils  avaient  verse 
dans  ces  dimrentes  maisons  fut  ra- 
glouti  et  absorb^  dans  la  confiscation 

g^n^raie.  Aussi  voit-on  encore  aujour- 
'hui,  a  Constantinople,  une  multi' 
tude  de  families  r6duites  au  dernier 
d^dment  par  suite  de  cette  lanien> 
table  catastrophe. 

Pendant  tout  ce  temps ,  les  detenus 
g^missaient  au  fond  de  leur  cadiot; 
et  les  fir^res  Duzzoglou ,  toajours  iso- 
1^  dans  les  oubliettes  du  s^ail ,  s'aban- 
donnaient  aux  sombres  pressentiments 
du  d^espoir.  Excite  par  la  veille  et 
le  jedne ,  la  penste  du  prisonnier  ac- 
quiert  une  force  inconnue ;  les  chafnes 
et  Tetroite  enceinte  du  cadiot ,  au  lieu 
de  oomprimer  sa  liberty,  factivent  et 

auadruplent  son  ^nei^ie.  Elle  se  rit 
es  gediiers,  et  emporte  Tdme  au  loin 
dans  rimmensit^  de  I'espace ,  ou  Teai- 
p^rance  construit  mille  Offices  ima- 
ffinaires  que  la  crainte  renverse  sou- 
dain.  La  tonsueurde  la  captivity  m^me 
relevait  parfois  leur  courage ,  en  eloi- 
gnant  les  terreurs  de  T^chaiaud.  Car, 
se  disaient-ils,  si  nous  devions  ^tre 

(*)  Peiite  monnaie  ttirqoed*une  m^diorre 
valcnr  ct  usitee  ici  dans  Ic  sens  prowrbial 
d  oholf*. 


armi!:nie. 


65 


condamn^  a  perdre  la  t^te ,  notre  sen- 
tence serai't  dej^  prononc^ ;  tout  d^lai 
est  un  adoucissement  h  la  s^v^rit^  mu- 
sulmane.  Ah !  oui ,  s'toiait  Serkis,  ce- 
lui  des  quatre  fibres  dont  rimainnation 
^tait  la  plus  vive,  et  qui  soumrait  le 
moins  patiemment  les  angoisses  de  la 
prison ,  nous  serons  exiles  sur  quelque 
terre  sauvage  et  lointaine ;  mais ,  du 
moins ,  nous  pourrons  encore  resnirer 
librement  et  contempler  la  douce  clart^ 
du  jour.  Peut-^re  nous  laissera-t-on 
emmener  nos  femmes  et  nos  en&nts ! 
Alors,  serait-ce  un  sacrifice  que  d'a- 
bandonner  a  la  convoitise  des  Turcs 
ces  richesses ,  source  de  nos  infortunes. 
Non,  nous  retremperons  au  moins 
dans  la  dis^ce  nos  flmes  amollies  par 
la  prosp^nt^.  —  Taisez-vous ,  Serkis , 
reprenait  un  jeune  bomme,  leur  cou- 
sin, gisant  sur  la  paille  dans  Tangle 
du  cachot,  et  perp^tuellement  enfono^ 
dans  une  morne*  m^itation ;  ne  vous 
livrez  pas  k  tos  folles  imaginations, 
vons  n  (6cbapperez  pas  ^  la  vengeance 
d*Haled ,  qui  ne  vous  a  iaisse  de  vie , 
jusqu'k  cette  heure ,  que  pour  multi- 
piier  vcs  soufCrances,  en  les  proion- 
geant.  Rappelez-vous  les  deux  princes 
Vahabites  que  I'ann^  derniere  vous 
vttes ,  a  pareille  ^poque ,  trainer  sur 
un  cheval  maiere  a  la  porte  du  s^rail , 
pour  y  dtre  decapites.  Le  m^me  sort 
nous  attend ! 

La  plupart  des  prisonniers  repro- 
chaieoi  k  ce  jeune  nomme  ses  predic- 
tions sioistres ,  qu'ils  attribuaient  h  un 
^t  de  langueur  et  de  m^lancolie.  Un 
soir,  ayant  prolong^  plus  que  de  cou- 
tume  leur  entretien ,  iis  ne  Vinterrom- 
pirent  que  lorsque  le  sommeil  vint  fer* 
mer  leurs  paupi^res  et  leurs  levres 
fatigue,  m  reposaient  tranquille- 
ment,  et  leur  Ame  ^tait  sans  doute 
rafratchie  par  les  illusions  du  r^ve 
plus  attrayantes  que  les  imposantes 
r^alit^s  de  la  prison ,  lorsqu'ils  furent 
r^veill^  en  sursaut  par  le  bruit  des  ver- 
rous  et  les  voix  des  ge61iers.  C^tait  le 
24  aodt.  Les  premieres  lueurs  du  cr^ 
puscule  dissipaient  avec  peine  les  t^- 
nebres  d*une  nuit  sombre  et  humide ; 
et  les  yeux  des  prisonniers,  efifray^ 
de  cette  visite  inaccouturo^e ,  recbn- 

5*  Uvraisan,  (Abmrnie.) 


nurent  diiUcilement  le  bostandji-bachi. 
Us  attendaient  silencieusement  leur 
sentence.  Quelle  est  leur  surprise, 
lorsque  le  oostandji-bachi  leur  dit: 
«R^jouissez-vous,  mes  amis,  voici  le 
terme  de  vos  soui&ances ;  je  vous  ap» 
porte  les  ordres  du  sultan.  Gr^goire 
et  Serkis ,  vous  serez  releguds  dans  une 
tie  de  I'Archipel ;  et  vos  deux  firdres , 
Michel  et  Jean ,  iront  dans  TAsie  Mi- 
neure.  Quant  au  reste  des  prison- 
niers, lecsoltan  n*a  pas  encore  statue 
sur  leur  sort;  ils  attendront.  Ainsi, 
que  les  quatre  freres  Duzzoglou  me 
suivent. » 

A  ces  mots ,  les  quatre  freres ,  pleins 
de  joie ,  se  jettent  au  cou  de  leurs^eom- 
pagnons ,  les  couvrent  de  baisers  et  de 
tarmes ,  en  disant  que  la  douleur  de 
les  quitter  ne  sera  compens^  que  par  la 
nouvelle  de  la  grto  qu'ils  obtiendront 
certainement,  puisqu'eux,  les  seuls 
coupabies,  ne  sont  condamn^  qu'au 
bannissement.  lis  sortent  done  et  s'a- 
cfaeminent  a  travers  les  all^  du  jar- 
din.  Quand  ils  ont  march6  quelques 
centaines  de  pas,  le  bostandji-bacbi 
les  arr6te,  en  leur  disant  qu*ils  doivent 
se  s^parer ,  puisque  Gr^oire  et  Serkis 
n*ont  pas  la  m^me  destination  que  leurs 
deux  aubres  freres.  En  m^me  temps , 
il  dit  k  quelques-uns  des  gardes  de  con- 
duire  au  Bospbore  Michel  et  Jean.  La 
scene  touchante  des  adieux  de  la  pri- 
son se  renouvelle ,  et  les  quatre  freres 
s*embrassent  sans  pouvoir  se  dire  une 
parole ,  k  cause  de  leur  Amotion.  Les 

fardes  les  s^parent;  Gr^oire  et  Ser- 
is  prennent  la  direction  de  la  porte 
du  serail.  Serkis  marcbait  avec  precipi- 
tation en  avant ,  sautant  et  poussant 
des  cris  de  joie ,  sans  prendre  garde  k 
la  pluie  qui ,  tombant  avec  abondance, 
p^^trait  ses  v^tements.  lis  francbis- 
sent  rapidement  le  portail;  et,  lors- 
qu'ils  sont  en  face  de  I'hdtel  des  Mon- 
naies,  ou  les  autres  detenus  etaient 
renferm^s ,  Serkis  ^l^ve  sa  voix  robuste, 
et  fait  retentir  ces  paroles :  «  Courage , 
nos  freres,  nous  sommes  libres,  et 
riieure  de  votre  d^ivrance  est  pro- 
chaine. »  Les  prisonniers,  qui  ont  re- 
connu  la  voix  de  Serkis ,  se  pr^ipitent 
aux  fen^tres  pour  le  voir,  mais  les 


rUNlVERS. 


gardet  kt  repoostent  et  Jes  oontien- 
nent  dans  laur  (nrisoo.  Us  prftent  al- 
teotivement  Toreille  poor  recueillir  les 
autres  paroles  des  Duzzosioo;  mais 
tout  k  coup  les  cria  d'aUegresae  ae 
cbangent  en  fl'autrea  cria  per^anta, 
entreooapte,  diminuant  gradueHemeDt, 
jiuqa'li  oe  aue  le  pins  morne  ailenoe 
auoMde  k  ragitation  du  dehors.  Les 
d^tenoa  du  Zerpaneh  fr6inirent  et 
eurentoommeun  vague  pressentiment 
dea  ebosea  horribles  qui  TenaieDt  de 
8*aocomplir. 

Serkis  mardiait  done  joyeusement 
vers  la  porte  du  Zerpaneb,  et  d^Jli  il 
eft  soulevait  le  marteau ,  lorsau'il  aper- 
9]t  dans  le  massif  Toisin  de  cmtks 
quatre  bourreaux  cachtte  et  en  emoua- 
cade.  Gette  Yue  lui  r^vtie  incontinent 
les  atroces  machinations  d*Haied  et  les 
mensonges  du  bostandji-bachi,  qui  lea 
menait  a  la  mort  en  leur  promettant  le 
salut;  il  comprend  que  sa  demidre 
heure  approche.  Les  bourreaux  s'^lan- 
cent  sur  les  deux  Mrea  et  les  garrbt- 
tent.  Gr^oire  les  oonsid^e  avec  fiert^ , 
et ,  comme  oes  martyrs  de  la  primiti?e 
£j^Iise  qui  faisaient  g^n^reusement  a 
Dieu  le  sacrifice  de  leur  vie,  il  se  laisse 
Her  et  trainer  au  supplice  sans  perdre 
son  calme.  L*tet  de  Serkis  toit  tout 
autre.  D*une  nature  boulllante,  em- 
port^,  il  ne  peut  supporter  la  Yue  de 
tant  d'injustice,  et  il  se  sent  le  besoin , 
avant  de  mourir,  de  dMiarger  tout  le 
|)oids  de  sa  colore  et  de  ses  malMic- 
tions  sur  les  auteurs  de  sa  mine.  Son 
exaltation  et  sa  fiireur  ooncentr^e  ajou- 
tent  k  sa  force  musculaire;  les  liour- 
reaux  ne  peuTent  le  contenir,  et  ils 
appellent  les  gardes  k  leur  aide.  Pen- 
dant le  trajet  du  Zerpaneh  au  lieu  de 
rex6cution,  Serkis,  d'une  voix  ton- 
nante  et  formidable,  appelie  la  yen* 
geanoe  du  del  sur  la  tete  d*Haled, 
o^umdre  les  iniquity  de  son  vizirat, 
fiiit  ses  adieux  II  sa  famille,  plaint  le 
sort  de  ses  compatriotes  envelopp^ 
dans  la  proscription ,  et,  maudissant  la 
coupable  condescendance  de  Mahmoud 
ciroonvenu  par  son  ministre,  il  ter- 
mine  en  s'teriant :  «  Que  sa  barbe  soit 
teldte  de  notre  sang ! »  Gr^oire  se  tai- 
sait,  et  il  n*ouvrit1a  boucne  que  pour 


lappeler  II  aon  frire  que  M  otre-Seiaieur 
JMus-Christ  avait  autrefois  panunn^ 
k  ses  bourreaux  en  expirant,  qa'il  de- 
▼ait  aonger  au  salut  de  son  ime  ^  k 
reoommander  k  Dieu.  Les  deux  genoux 
k  terra  et  les  yeux  le?te  au  dd,  fl  piie 
avecunesainte  fenreur,  tenant  serrte 
entre  ses  mains  la  relique  qu"!!!  avait 
ooutume  de  porter.  II  pronon^  quel- 
qnes  paroles  en  ami6nien,  inlnteUi- 
giblea  aux  bourreaux  et  aux  autres 
assistanta.  CT^tait  vraisemblabiement 
quelque  pril^  de  son  fglise.  So'kis, 
tout  en  donnant  des  marques  de  pi^ 
et  de  fi>i ,  refuse  de  pioyer  le  eeiiou. 
Tandis  que  les  deux  nreies  se  disaient 
du  regard  un  dernier  adieu « la  babhe 
dea  bourreaux  abattit  leur  tdte. 

Lorsque  le  bostandji-bachi  voit  a 
nieds  leurs  cadavres  sanglants ,  il 
a  aocompiir  Fautre  partie  de  m 
sion ,  et  il  va  retrouver  les  deox  firires, 
Miehel  et  Jean,  qu*il  avait  envuyes  ao 
Bosphore.  Ils  Fattendaient  dans  one 
lar^  caique,  ignorant  le  triste  sort  de 
leurs  frms ,  et  ne  pr6Toyant  paa  cdoi 
qu*on  leur  rtenrait;  ils  diaoouiaicat 
sur  leur  exil  et  se  consolaient  de  la  s^ 
TMt6  de  cet  ordre,  oar  I'espoir  de  re- 
▼enir  un  jour  dans  leur  niere  patrie. 
lis  TOient  le  bostandyi-bacht  aooourir 
avec  empressement,  et,  k  un  signal  de 
sa  main ,  des  hommes  caehte  a  la  poope 
se  Invent  et  viennent  sur  le  pont.  C^ 
tait  aussi  des  bourreaux.  lis  saisis- 
sent  les  deux  fr^res,  tandia  que  les 
rameurs  oonduisent  phis  loin  la  caique, 
en  face  de  VMtA  Duzzoglou ,  aitud  sor 
la  rive  du  Bosphore.  lis  abovdeiit,  et 
lee  bourreaux  de  chereher  un  liea  oa 
ils  pourront  pendre  les  deux  Irdrea,  et 
de  le  trouTer  aussitdt,  grte  h  Thabi- 
let^  qu'ils  out  d'improviser  des  polen- 
oes.  On  voulut,  par  un  rafBnement 
inoui  de  cruaut^,  r6TeiUer  dans  Time 
des  victimes  toutes  les  dmotioos  que 
le  souvenir  et  le  spectade  de  oes  lienx 
pouvaient  leur  apporter,  oOBiniie  un 
auppl^ent  aux  douleurs  du  sapplioe. 

1^  mort  des  quatre  Mres  ajpaisa  b 
colore  du  sultan,  au  fprand  cleplaisii 
d*Haled,  qui  le  poussait  au  massnore 
g^eral  de  tous  les  detenus.  On  pto- 
nonca  oontre  eux  un  arr^  de  ' 


ARMtfNIE. 


fi7 


senneiit  perp^tuel,  toutefois  en  eieep- 
tant  U»  femmes,  qui  eurent  la  faculty 
de  rester  a  Constantinople.  Les  oon- 
trte  les  plus  sauTSges  de  la  Turquie 
d'£arope  et  d'Asie  fiurent  assignto 
pour  la  r^idence  des  proscrits.  Plu- 
sieurs  y  p^rirent  d'ennui  et  de  mis^re. 
D'autres  eurent  le  courage  et  le  talent 
d'y  trainer  leur  ch^tive existence,  jus- 

3u'au  moment  oi!l  le  sultan ,  oonvaincu 
es  fonrberies  d*Haled,  rappela  les 
exil^.  De  ce  nombre  ^tait  Jacques 
Duzzoglou,  qui  avait  ecbapp^  k  la  cod- 
damnanon  de  ses  fr^res  comme  mira- 
culeusement  Au  moment  ou  Forage 
eclata  sur  sa  famille,  Jacques,  qui 
avait  la  mission  d'inspecter  les  mines 
et  les  places  fortifi^  de  TArcbipel, 
^tait  ^ign^  de  Constantino[>le.  Haled 
envoie  un  b&timent  de  FEtat  a  sa  pour- 
suite,  avec  ordre  de  le  ramener  pri- 
sonnier.  Lorsqoe  ce  vaisseau  le  ren- 
contre, Jacques,  qui  montait  un  brick 
fin  voilier,  aurait  pu  se  sauver,  s'il 
avait  suivi  les  conseils  du  capitalne 
espagnol ,  plein  de  t^  et  de  r^tution . 
Mais  comme  on  lui  faisait  entendre 
^erfidement  que  le  refus  de  se  sou- 
«nettre  entralnerait  la  perte  de  ses  fre- 
res ,  et  ^ue  d'ailleurs  if  ^tait  fort  de  ia 
conviction  de  sa  propre  innocence,  il 
prefera  aller  partager  courageusement 
les  fers  et  les  maux  des  autres  Arm6- 
niens.  Haled,  qui  avait  intdr^  h  le 
perdre,  osa  dire  au  sultan  qu'il  n'avait 
c^  qu'li  la  force,  et  apr^  avoir  £ait 
oouler  le  sang  de  T^uipage.  Jacques 
allait  ^tre  condamn^  sans  le  courage 
du  capitaine  du  vaisseau  y  qui ,  consulte 
par  le  sultan  sur  ce  point,  r^(K>ndit 
qu'au  oontraire  le  prevenu  avait  te* 
moign^  le  plus  proiond  respect  pour 
Tautoht^  de  Sa  Majesty,  en  portant  a 
sa  boucbe  I'arr^t  de  sa  condamnation 
et  en  s'indinant  devant  sa  volont6  su* 
prtoe.  Jacques  ne  fut  pas  ex^cut^; 
Haled  le  m  exiler;  et,  lorsque  des 
lettres  de  grflce  furent  envoyra  a  ces 
malheureux  diss^min^  dans  toutes  les 
provinces  de  Tempire,  il  revint  h  Cons- 
tantinople, ou  le  sultao  lui  rendit  plus 
tard  I'andenne  diarge  h^rMitaire  de 
HB  femille,  la  direction  de  la  Moanaie, 
oflice  qu'il  remplit  encore  actuellement 


avec  une  rare  int§grit6.  Cest  lui  qui  a 
reeueilli  les  d^ris  de  sa  famillft^  et  Ta 
tir^  de  Tabjection  oili  Tavait  roduite 
cette  catastrophe,  en  les  assodant  a  sa 
nouvelle  fortune.  De  ses  guatre  frhres , 
un  seul,  Serkis,  avait  laiS8(6  un  fils  en 
bas  Age.  Ses  autres  [Mirents  en  prirent 
soin;  ils  ont  voulu  lui  donner  les  avan- 
tages  de  T^ducation  europdenne,  et, 
en  ce  moment ,  il  puise  dans  nos  ^les 
de  Paris  toutes  les  lumieres  de  la 
science  et  de  la  civilisation  modernes. 
La  famille  Duzzoglou ,  sans  s'dever  an 
m^me.  de^6  d*opulence  et  de  cr6dit, 
oocnpe  aujourd'hui  un  rang  important 
dans  la  soci^  amenienne.  Elle  a  re- 
couvr^  son  ancien  hdtel ,  qu'un  juif 
nomm6Eskel  et  banquierd*Haled  avait 
achet^  ^vil  prix,  lors  de  la  confiscaticHi 

S6n^le.  Eskel  perdit  la  vie  par  ordre 
u  sultan,  peu  de  temps  apr^  la  fin 
tragique  du  vizir  inique  dont  il  diri- 
geait les  affaires;  car,  pour  le  d^od- 
ment  de  ce  drame,  il  taut  savoir  que 
la  fortune  d'Haled  fut  inconstante 
comme  celle  de  tons  les  coupables  heu- 
reux.  Ses  ennemis,  c'est4i-aire,  tout  le 
peuple  de  Constantinople  et  les  grands 
seigneurs,  parvinrent  a  d^truire  les 
prmntions  favorables  du  Grand  Sei- 
gneur, et  h  ouvrir  ses  yeux  sur  la  s^e 
de  crimes  dont  il  avait  souilK  son  mi- 
nistere.  On  trouva  des  preuves  mani- 
festes  de  sa  oom|>licit^  dans  la  r^volte 
du  pacha  de  Djanina ,  et  les  janissaires 
^leverent  si  fortement  la  voix  contre 
lui ,  que  Mahmond  seniit  la  ntossite 
d*immoler  a  son  int^r^t  celui  qui ,  du 
reste,  avait  toujours  tout  sacrifl6  au 
sien  propre.  II  lui  dit  done  qu'il  se  s^- 
parait  h  contre-coeur  de  sa  personne, 
mais  que  la  tranquillity  de  I'Etat  I'exi- 

Seait;  qu*il  ^tait  quelquefois  n^cessafre 
'obtemp^rer  aux  injustes  exigences 
d*un  public  ingrat  et  passionn^;  qu'au 
reste  il  consewerait  a  jamais  la  m^ 
moire  de  ses  services  et  de  son  d^one- 
ment  pour  le  trdne.  Haled  ^it  trop 
fin  pour  ne  pas  comprendre  que  ces 
remercfments  6taient  au  fond  une  ve- 
ritable disgrace.  II  tremble  pour  sa 
vie,  en  pensant  ^ue  ses  ennenns,  et  il 
savait  ^'ils  ^taient  nombreux,  tra- 
vailleraient  h  sa  mine  dte  qu'il  serait 

5. 


68 


L'UNIVERS. 


^loigne  de  la  cour.  Le  sultan  se  sou- 
viendrait-il  alors  de  sa  promesse?  Pour 
avoir  au  moins  une  garantie,  il  prie 
Mahmoud  de  lui  donner  par  6crit  ras- 
surance  qu'il  ne  reviendra  plus  sur  les 
actes  de  son  administration  apres  sa 
retraite. 

Mahmoud  consent  a  cette  condition , 
et  Haled  part  avec  ses  triors  pour 
aller  jouir  au  fond  d'une  province  de  ia 
s^urite  gull  ne  pouvait  esperer  k  Cons- 
tantinople. A  peine  a-t-il  fait  quelques 
journ^  de  marche,  qu'il  voit  arriver 
un  agent  du  eouvernement  avec  des 
lettres.  C^taitle  kaboudji-bachi.  Haled 
maudit  dans  son  coeur  I'mconstance  de 
Mahmoud  et  sa  faciJite  a  se  parjurer. 
n  MaiSf  lui  dit  le  kaboudji-hachi ,  c'est 
que  Sa  Majeste  a  connu  enfin  la  verite, 
elle  sait  tons  vos  forfaits;  le  sans  in- 
nocent que  vous  avez  vers^  comme Teau 
de  nos  tontaines  a  crie  et  obtenu  ven- 
geance. Tendez  le  cou  a  mes  janissai- 
res.  »  Haled  eut  la  t£te  tranchee,  tons 
ses  biens  entrerent  dans  le  tr^r  pu 
blic,  et  son  cadavre  fut  expose  sur  les 
fourches  patibulaires ,  comme  celui  des 
criminels. 

Ainsi  finit  ce  vizir,  dont  le  nom  est 
reste,  ^  iuste  titre,  un  objet  d'horreur 
et  de  malediction  parmi  les  Arro^niens. 
Sa  disgrace  Tempecha  de  r^liser  com- 
pletement  le  plan  machiav^lique  qu'il 
avait  concu.  if  avait  abattu  du  premier 
coup  les  hautes  t^tes  du  parti  catholi- 

3ue,  en  ddcimant  la  famille  et  les  amis 
es  Duzzbglou ;  mais  il  convoitait  en- 
core les  fortunes  de  plusieurs  autres 
maisons  opulentes.  Quel  moyen  nou* 
yait-il  prendre  pour  parvenir  a  sesuns? 
II  songeait  k  profiter  des  dissensions 
religieuses  qui  s^parent  les  catholiques 
d'avec  les  scnismatiques,  en  faisant  en- 
tendre au  sultan  que  les  deux  partis, 
formant  une  m^me  nation,  devaient 
avoir  un  mdme  chef  spirituel.  II  savait 
que  les  catholiques,  en  refusant  de  se 
soumettre  au  patriarcbe,  lui  foumi- 
raient  Toccasion  de  d^ployer  contre  eux 
la  s^v^rit^  et  Tintoleranoe  des  lois; 
puis,  la  persecution  entratnaot  la  con- 
fiscation, il  pourrait  se  livrer  impun^ 
meat  k  de  nouvelles  d^pr^ationsv  La 
mort  ne  lui  permit  pas  aaooomplir  ses 


d^testables  desseins,  et  cepeodaot  il 
r^ussit  a  semer  au  sein  des  Ann^niens 
oes  germes  de  divisiODs  qui ,  en  se  de- 
▼eloppant,  amenerent  la  d^sastreuse 
reaction  de  1828  contre  les  catholiques. 

SIMON  HTRA.PIBT. 

Le  sort  des  Armeniens  de  la  Perse 
est  encore  plus  pr6caire  et  plus  dur  que 
pour  les  sujets  de  la  Turquie.  Gonrune 
lis  sont  moins  nombreiix,  et  qu*ils  ne 
disposent  pas  par  leurs  immenses  ca- 
pitaux  du  credit  public,  ainsi  que  oeb 
se  passe  cbez  les  banquiers  de  doostan- 
tinople  et  d' Angora,  leur  influenoe 
dans  r£tat  est  i  ncomparablement  moins 
grande ,  et  ils  sont  par  consequent  beau- 
coup,  plus  expose  aux  vexations  et  aoi 
avanies,  que  leur  attire  dej^  la  qua- 
lite  de  Chretien,  de  la  part  des  musul* 
mans  z^l^s.  £n  second  lieu,  TactioD 
de  la  civilisation  eiiropeenne,  qui  presse 
et  cerne  de  toute  part  la  Torquie,  ea 
arrachant  cbaque  jour  a  sa  vieiUe  bar- 
baric quelque  heureuse  concession, 
n'est  point  aussi  puissante  dans  le 
centre  de  la  Perse,  et  rintervention 
des  ambassadeurs  Chretiens  n*o£fre 
point  aux  raias  un  rempart  oontre  les 
iniques  exigences  du  despotisme  orien- 
tal. 

Jusqu'a  nos  jours  le  peuple  de  la 
Perse  n'a  guere  cesse  de  traiter  les 
Armeniens  avec  le  mfyne  m^pns  que 
le  schah  Abas,  qui  ne  voyait  en  eoi 
^u'un  troupeau  ahommes  enleves  par 
jalousie  a  la  domination  turque,  et 
tratne  dans  Tinterieur  de  son  royauaie 
pour  le  peupler  et  v  importer  une  in- 
dustrie  qui  pouvait  lui  ^tre  utile.  Le 
coeur  se  souleve  d'horreur,  et  la  pensce 
cherche  en  vain  dans  la  langue  oes  ex- 
pressions assez  fortes  et  assez  fl^is- 
santes  pour  vouer  a  Fexecration  de  la 
postal  te  ce  conquerant,  quand  le  recit 
des  historiens  du  temps  vient  etaler  a 
vos  regards  le  ricbe  tableau  de  ses  cri* 
mes  et  de  ses  brigandages.  Qu*on  se 
figure  en  efifet  douze  milie  families  ar 
rachte  a  leur  patrie,  deposs^^  de 
leurs  biens,  chassees,  comme  on  vii 
b^tail,  par  des  soldats  grossien,  et 
dieminant  attrist^  vers  des  terres  in- 


ARMliNIE. 


69 


connues,  sans  entreToir  aucun  terme 
aux  maux  de  tout  genre  qui  les  aeca- 
blent.  L*£urope,  dans  ses  jours  n^fas- 
tes ,  n*a  rfen  a  opposer  k  ces  grandes 
scenes  d'iniquit^. 

La  faim  et  la  fatigue  ayant  constd^- 
rablement  r^duit  le  nombre  des  exil^, 
mille  autres  fomliles  furent  enlev^es  h 
la  populeuse  Aniienie,  et,  en  1606, 
Abas  lancait  de  nouveau  ses  bandes 
8ur  les  districts  de  Ganzak ,  d'Artavil 
et  d'£rlvan,  avec  ordre  de  lui  ramener 
dix  mille  families.  Rel^gu^  dans  les 
cantons  de  Gaurapat  et  de  Yahrapat, 
elles  furent  entidrement  an^anties  en 

3uelques  ann6es,  comme  ces  plantes 
elicates  qui,  transplantees  dans  un 
sol  malfaisant,  se  dess^ent  et  p^ris- 
sent  de  langueur. 

II  n'y  eut  que  la  colonie  de  Julfa  a 
prosiM^rer,  et  encore  le  nombre  de  ses 
families  ne  s'est-il  jamais  gu^re  6lev6 
au-dessus  de  deux  mille  cinq  cents, 
roalgre  les  flots  de  population  qu'on 
versait,  pour  ainsi  dire,  dans  son  sein, 
a  cette  ^poque  qu^on  pourrait  avec  jus- 
tesse  appeler  le  temps  de  la  traite  des 
ArmMens.  Julfa,  comme  nous  Ta- 
vous  dit,  est  en  quelque  sorte  un  fau- 
bourg d'Ispahan ,  et  cette  petite  ville 
est  exclusivement  arm6nienne.  Les  ha- 
bitants sont  soumis  a  Pautorit^  d*un 
chef  choisi  dans  leur  sein  et  nomm^ 
Kalantbar,  lequel  releve  du  magistrat 
persan  sup^rieur.  Ce  mode  de  consti- 
tution s'est  conserve  juscju'a  ce  si^cle. 
Lorsque  la  cour  r^idait  h  Ispahan , 
la  presence  du  roi ,  qui  avait  toujours 
quelque  int^r^t  h  d^fendre  cette  indus- 
trieuse  colonie,  arr^tait  les  gouver- 
neurs  et  les  emp^hait  d^^tre  aussi  en- 
treprenants  k  pers^cuter  les  Chretiens. 
Mais  depuis  que  les  sourerains  ont  fix6 
le  siege  de  leur  royaume  k  T^h^ran ,  la 
distance  rendant  la  surveillance  plus 
difficile  et  moins  directe,  la  cupidite 
et  les  autres  basses  passions  des  gou- 
vemeurs,  excit^es  et  encourages  par 
Tespoir  de  I'impunit^,  ont  suscit^  aux 
Arm^niens  des  pers^tions  nouvelles 
^appesanti  leur  joug. 

Ivous  relaterons  ici,  en  preuve  de 
oette  observation,  T^v^nement  tragiquc 
gut  a  jet^  dans  le  deuil,  voici  seule- 


ment  quelques  anndes,  tous  les  liabi- 
tants  de  Julfa.  Simon  Hyrflpiet,  fits 
du  pr^cMent  kalantbar,  avait  ^,du- 
rant  plusieurs  ann^,  attach^  au  ser- 
vice d*£mini  Daoulah,  gouvemeur 
d'Ispahan,  pres  de  qui  11  remplissait 
les  tonctions  de  secretaire.  Son  z^le, 
son  <ictivit^  et  sa  rare  intelligence  des 
affaires ,  Favaient  fait  appr^cier  du  gou- 
vemeur, qui,  pour  le  recompenser,  lui 
donna  le  commandement  du  village  de 
Pheriah,  habits  par  des  Arm6niens  et 
des  Persans. 

Simon  Hyrapiet  accepta  cette  di- 
gnity, nouvelie  pour  un  Arm^nien, 
afin  d'user  de  Tautorit^  qu*elle  lui  con- 
f6rerait  k  Tavantage  des  chr^ttens  de 
sa  nation.  La  droiture  de  sa  conduite, 
la  franchise  de  tous  ses  actes,  lui  atti- 
rerent  aussi  la  confiance  des  Persans; 
il  6tait  Tarbitre  universel  de  tous  les 
diffirends ,  et  son  eloquence  populaire , 
second^e  par  une  connaissance  pro- 
fonde  de  la  legislation  du  pays,  gagnait 
chaque  cause  qu'il  plaidait.  De  cette 
mani^re,  il  avait  ac(]uis  un  lari^e  as- 
cendant sur  les  esprits  de  son  district 
et  des  cantons  voisins,  tellement  que 
Tetat  general  des  Arm^iens  s*etait 
considerablement  am^lior^,  et  un  Per- 
san ne  se  serait  pas  permis,  comme 
anciennement,  la  moindreavanie,  re- 
tenu  qu'il  6tait  par  la  crainte  que  lui 
inspirait  Simon  Hyrapiet. 

Cependant  le  khan  de  Lombun. 
beau-frere  du  gouvemeur  d'Ispahan, 
vovait  avec  un  oeil  de  m^contentement 
rel^vation  de  ce  magistrat  arm^nien , 
qui,  en  consolidant  par  son  adminis- 
tration habile  la  position  des  raias,  les 
mettait  k  Tabri  de  ses  concussions,  et 
opposait  a  sa  rapacity  une  barriere  in- 
franchissable.  Ce  khan  s'appelait  Hadii 
Hacbim;  issu  de  la  tribu  de  Lore,  celle 
a  la  t^  de  laquelle  il  6tait  plac6  est 
connue  sous  le  nom  de  Chirouni,  La 
puissance  d'£mini  Daoulah  avait  con- 
tribue  k  accroftre  la  sienne,  et  il  avait 
discipline  les  hommes  de  sa  tribu  de 
maniere  k  en  former  un  petit  corps 
d'arm^e  dont  il  se  servait  contre  les 
propres  sujets  du  royaume,  et  surtout 
contre  les  Chretiens  pour  les  spoiler. 
II  portait  I'audace  jtisqu'li  pousser  sen 


70 


L'UMIV£RS 


iDcursioos  dans  le  ooeur  d'lspahan,  en 
plein  jour,  sans  que  peraonne  os^  lui 
resister,  dans  la  orainte  d'toe  diteign^ 
k  sea  parliaaiia  et  de  a'aUirer  la  mort. 

II  aavait  dooc  que  Simoii  H]rrapiet 
a'^tait  4^v6  oontre  aes  ezote ,  et  ii  crai* 
gnait  que  le  peuple,  aoolev^  k  sa  voix , 
oe  lepoussdt  |Nir  la  force  aa  Yioleoee, 
ou  ne  se  soumtt  moina  oomplaiaam- 
ment  h  aea  exigences.  Alors,  Yers  le 
eommenoement  de  novembre  de  Tan- 
n^  1824,  il  vientli  Julfa,  ayant  aoua 
ses  ordres  une  troupe  assez  nombreuse, 
et  il  p^n^tre  dans  le  couvent  arm^nien. 
II  entre  irr^ligieusement  dans  I'^lise 
a?ec  pluateurainusiciensY  a  qui  il  fai- 
sait  ex^ter  par  d^ision  des  chants  et 
des  airs  de  dense.  II  prend  possession 
de  ce  lieu ,  comroe  de  tout  autre  en- 
droit  profane,  et  il  annonce  qu'il  veut 
parler  k  Simon  Hyrapiet.  Ce  resoec- 
table  magistrat,  averti  que  le  klian 
Ha^ji  Hadiim  le  mande,  vient  sur-le- 
cbamp  le  trouver,  sans  s'inqui^ter  des 
pt^rils  qu*il  court,  avec  le  y^n^rable 
pr^lat  Carapiet  et  le  moioe  Gr^oire. 
En  entrant  dans  le  temple,  Simon  voit 
avec  indignation  ces  musiciens  ivres 
profaner  le  sanctuaire,  et  Hadii  Ha* 
chim  effront^ment  assis  sur  rautel 
oomme  sur  un  simple  si^e.  II  veut 
sortir,  mais  le  khan  le  rappelle.  Simon 
s*approcbe  de  lui ,  et  lui  repr^sente  res- 
pectueusement  qu*il  est  dans  la  maison 
de  Dieu;  qu'un  chr^tien  n*oserait  ja- 
mais se  permettre  d'entrer  avec  un 
semblable  cort^e  dans  une  mosquee, 
lors  m^me  qu'ifpoUrrait  le  faire  im- 
pun^ment,  et  qu'il  le  prie  de  renvojrer 
ses  gens  dont  fa  conduite  est  aussi  in- 
d^c^te. 

Le  khan,  furieux  d*entendre  ces  re- 
montrances,  ordonne,  pour  toute  r^- 
ponse,  a  ses  soldats  de  se  saisir  de 
Simon ,  de  lui  lier  les  mains  et  de  Fem- 
mener.  Le  pr^lat  Carapiet  et  le  moine 
Gr^oire  tombent  aux  genoux  de  Hadji 
Hacnim,  et  le  prient  d^cuser  le  saint 
zele  de  leur  frere,  qui  dd&nd  la  cause 
du  Tres-Haut  sans  vouloir  offenser 
Sa  Hautesse.  Toutes  leurs  prieres  sont 
inutiles.  Kn  vain  ils  lui  donnent  a  en- 
tendre qu'iis  auront  recours  a  son 
beaufrerc,  le  gouverneur  dJspahan ; 


oette  demi-meoaoe  ne  fait  qu'aocroitre 
sa  colere,  et  il  leur  d6dare  bautemeot 
que,  bien  loin  d*6tre  retenu  par  le  res> 
pect  dd  k  son  autoriti,  il  s'est  port^  a 
cette  mesure  pour  se  venger  des  pre- 
tendues  injures  qu'il  liii  reprochait,  et 
pour  lui  donner  une  prcuve  manifote 
de  son  m^ris  pour  sa  jnridictioo. 
Puis,  se  tournant  vers  Simony  il  dit: 
«Tu  esperes  fiaiussement  qu*£miju 
Daoulah  te  d^livrera  de  mes  mains,  il 
n'en  a  pas  la  puissance,  et  moi  je  le 
reduirai  au  dernier  d^ndment.  »  n  se 
debarrasse  des  mains  suppliantes  qui 
le  retenaient,  et  ajoute  avec  un  accent 
mogueur :  « Braves  Chretiens,  je  ne 
crois  pas  jamais  revenir  k  votre  cou- 
vent,  recevez  done  mes  adieux.  »  Le 
malheureux  ignorait  au'il  proph6tisait 
vrai ,  comme Tavenir  le  prouva. 

Les  soldats  ayant  done  garrotte  Si- 
mon, Tavaient  attacli^  au  pied  d*ua 
arbre  hors  de  la  porte  du  couvent. 

8uand  le  prelat  Carapiet  et  le  moioe 
r^oire ,  qui  aocompagnaient  le  khan , 
eurent  apergu  ce  respectable  vieillard 
dans  cet  6tat,  la  persuasion  ou  ils 
^taient  que  sa  demiere  heure  ^it 
venue,  leur  arrach^rent  de  nouveaux 
cris  de  supplication  et  de  d^sespoir; 
ils  s'approchent  des  bourreaux  et  les 
oonjurent  d*^pargner  Tinnocente  vic- 
time  quMIs  s'appretent  k  immoler.  I^ais 
ces  brigands  toument  leurs  armes  sur 
les  deux  religieux  et  font  une  d^charge. 
Les  balles  les  ^pargnent  comme  par 
miracle,  et  ils  rentrent  dans  le  eouvent 
sans  pouvoir  assister  aux  demiers  mo- 
ments de  Simon. 

Hadji  Hachim,  pour  relever  le  cou- 
rage des  assassins ,  qu*il  ne  cro3rait  ps 
aussi  sanguinaires  que  lui-m^me,  les 
mene  a  une  taveme  voisine,  et  ils  y 
nassent  la  nuit  a  boire,  entrem^lant 
leur  orgie  de  chants  f6roces  et  disocnr- 
dants.  Simon,  oonune  un  autre  Sdbas- 
tien,  demeurait  li^  k  son  arbre,  et  il 
recommandait  pieusement  son  dme  a 
Dieu,  en  lui  demandant,  oomme  autre- 
fois son  fils  sur  la  croix ,  le  pardon  <lc 
ses  bourreaux.  La  fatigue  caus^  par 
sa  position  violente,  la  stupeur  ou 
le  pion^eait  cet  evenemait  imprevu, 
robscunt^  ^paissf  dr  la  nuit,  toutes 


ARM&N1£. 


71 


tm  Giuses  r^unitt  avalent  abattn  ses 
forces,  et  sa  tto  assoupia  retombait 
■ur  sa  poitrine,  lorsqa'un  aoldat  la 
meurtrit  d*ua  coup  du  mancbe  de  son 
poicnard ,  et  le  reveille  eo  lui  annoo* 
^ntqu*il  n'a  qu*i  se  preparer  h  la 
roort.  Simon  ouvre  les  yeox ,  et  il  Toit 
les  autres  bourreaax  acoourir  vers  lai , 
chancelants  dans  leor  iyresse,  et  armer 
leurs  mousquets  h  quelques  pas.  lis  le 
percent  de  bailes,  et«  de  peur  qu'il  ne 
lui  r^t^t  encore  un  soufue  de  viCy  Us 
ouvrent  sa  cervdle  et  sa  poitrine  avec 
leurs  kangiars.  Ensuite  Ton  d^taehe 
son  cadavre,  et,  apr^  lui  avoir  coup^ 
la  t^  et  mutil^  tous  ses  membres,  ils. 
les  iettent  dans  une  excavation  pro- 
fonde.  Lorsoue,  vers  le  milieu  du  jour, 
les  moines  ou  oouvent  vinrent  prooes- 
sionnellement  vers  le  lieu  de  rex^cu- 
tion,  afin  de  recueillir  les  restes  de  co 
v^table  martvr,  ils  trouv^rent  seulo- 
ment  la  terre  oai^nte  de  son  sang,  et 
ils  cfaerchftrent  inutilement  son  ca- 
davre. 

La  terreur  r^ait  k  Julia,  et  eette 
nouvelle  sinistre  s'itait  propag^  avec 
rapidity  dans  Ispaban.  D^  que  le  goo* 
verneur  fiit  inform^  de  ce  qui  se  pas- 
sait ,  il  envole  un  de  ses  officiers  avec 
un  d^chement  de  cavalerie  poor  ame- 
ner  le  sup^rieur  du  monastdre.  n  vou- 
lalt  le  preserver  des  nouvelles  tenta- 
tives  de  pillage  oud'assassinat  d'Hadji 
HacbimSJuin,  en  m^me  temps  canl 
d^irait  connaltre  F^v^ment  oans 
tous  ses  details.  II  reoit  avec  bont6 
etpr^enanoes  le  r^.  F.  Carapiet,  le 
pnant  de  raconler  les  diverses  dr- 
constanoes  de  la  roort  de  Simon  Hvra- 
piet ,  et  le  eonsolant  dans  sa  douieur 
par  Tespoir  qu*il  lui  donnait  d'une  ven- 
geance prompte  et  certaine. 

£mim  Daoulab  pr^oyait  avec  rai- 
son  oue  le  khan  ne  se  contenteraii 
pas  o^une  seule  vietime,  et  que  la 
vie  du  supdrieur  du  oouvent  n'toit 
point  en  sQret^  k  Julfa.  Effective- 
ment  Hadji  Hachim  revenait  dte  le 
soir  Jeter  la  consternation  parmi  les 
habitants  de  la  vilJe.  II  s^amta  k  la 
m^me  taverne,  et  Uk  il  s'informa  si  le 
r^er.  P,  Carapiet  ^tait  au  coavent 
On  lui  dit  qu*il  6tait  a  Ispahan  avec 


Voskhan,  bea»4rtede  Simon.  Lekhan 
voolait  aussi  immoler  k  sa  ftireur  oe 
dernier,  et  de  d^it  de  voir  qu'il  lui 
avait  dchapp6,  il  nt  incendier  sa  mai- 
son ;  puis  u  envoya  ses  soldats  d^truire 
les  habitations  de  quelques  autres  ri- 
ches  arm^niens.  Sor  leadix  heures  du 
soir,  il  part  et  prend  la  route  dlspa- 
han.  Arrive  aux  portes  de  la  viUe,  il 
lencontre  un  troupeau  de  chameaux 
n*jl  &ii  toirger;  ses  sens  se  r^n- 
dent  dans  les  rues,  mlient  les  bouti* 
ques  et  se  retirent  charge  de  butin , 
sans  que  la  garde  du  gouvcmeur  osAt 
r^primer  son  insolence. 

Gependant  Emini  Daoulab  promit 
au  i«v.  F.  Carapiet  de  prendre  des 
mesures  pour  threr  vengeance  des  cri* 
mes  de  cet  audacieux.  Plusieurs  per* 
sonnes  soop^nnto  d*avoir  favoriw  sa 
f^volte  furent  arr^t^;  on  envova 
une  gamison  k  Julfa  dont  les  baoi* 
tants  ^taient  oomme  atterr^  sous  le 
coup  de  la  terreur  que  leur  inspirait 
ibMiyi  Hacbim.  On  retrouve  le  13  du 
mime  mois  le  corps  de  Simon  Hyra- 
plet  dans  la  fosse  de  Gharazar ;  on  put 
compter  ses  nombreuses  blessures ,  et 
lui  rendre  les  honneurs  fim^res.  Les 
Armlniens  et  les  Persans  assisterent 
rdigleosement  k  la  translation  de  ses 
restes  dans  le  cimeti^  de  Meidan. 

Si  la  vengeance  divine  suit  en  boi- 
tant  le  coupable,  selon  Texpression 
des  anclens,  elle  finit  n^nmoms  tou- 
jours  par  I'atteindre;  ses  d^lais  ne  font 
qu*a((graver  la  peine  mi'elle  lui  infiige. 
Hadji  Hacbim  en  orare  un  exemple 
firappant  dans  sa  personne.  II  s*^tait 
Mge  en  petit tyran  de  la  province, 
et  cheque  jour  il  devenait  plus  redou- 
table  par  les  renforts  qu'il  recevait  de 
tous  les  d  torteurs  et  autres  gens  sans 
aveu  qui  venaient  grossir  ses  bandes. 
Son  ambition  le  poussait  mtoe  secr^ 
tement,  sans  douta,  k  aspirer  au  gou- 
vemement  d'Ispaban.  Heureusement 
I'arrivte  impr^vue  du  foi  d^ncerta 
ses  projets.  Feth  M  Schab  vint  vi- 
siter la  capitale  dorancienoe  dynastic. 
Le  gouvemeur  I'informa  de  la  conduits 
du  Khan,  et  illni  eiposa  Taffirire  da 
mani^  k  ri6veiller  son  amour  ombra* 
geuxdu  ^ouvoir,  en  lui  psdsentant 


ra 


L'UNIVERS. 


Hadji  Hachim  oomme  un  e^rit  torim- 
lent  et  aadacieux  qui  pourrait  procbal- 
nement  causer  des  maux  s^rieux  au 
royaume,  ai  sa  seigoeurie  ne  s^viasait 
contre  lui.  £mini  Daoulah  iui  prouva 
en  outre  qa'il  dtait  de  ses  int^^ts  de 
prendre  ouTertement  la  d^ense  de  la 
odonie  armenienne ,  si  utile  au  com- 
merce et  ^  I'industrie,  ajoutant  que 
8*il  se  montrait  leur  protecteur,  cet 
exempleauraitdu  retentissement  dana 
les  provinces  de  TArmdnie  persane, 
et  aervirait  ainsi  k  prot^er  ses  firon- 
tidres  contre  les  invasions  de  la  Rus- 
sie. 

Feth  Alt,  d'un  esprit  naturellement 
droit  et  aagace ,  comprit  la  port^  de 
ces  observations,  et,  quelques  jours 
apr^ ,  il  se  rendit  a  Julfa.  II  entre 
dans  te  convent  du  Saint-Sauveur ,  et 
interroge  le  reverend  pto  sur  I'^vd- 
nement  relatif  k  la  mort  de  Simon  Hy- 
rapiet.  II  lui  demanda  aussi  quelques 
details  sur  la  position  politique  de  ses 
compatriotes,  Fassnrant  que  son  uni- 
que d^ir  dtait  de  rendre  heureux  tons 
ses  sujets,  et  qu*il  voulait  tirer  un  did- 
timent  exemplaire  du  khan  Hadji  Ha- 
chim. 

Gette  menace  ^it  r^lle  :  le  khan 
fut  arr^td,  charge  de  chalnes  et  con- 
duit devant  le  roi ,  qui  proceda  lui- 
mtoie  k  son  jugement.  Avant  reconnu 
sa  culpabilite,  il  le  condamna  a  ^tre 
ras6  sans  eau  avec  un  rasoirdmoussd; 
on  lui  per^  le  nez,  et  dans  le  trou 
on  passa  une  corde ,  puis  on  le  placa 
sur  un  dne,  le  visage  tournd  vers  la 
queue  qu'il  tenait  entre  ses  mains,  et 
It  fat  promend  dans  cet  dtat  au  milieu 
des  bazars  et  de^  marches  dlspahan. 
LepeupIe,accouru^ce  spectaclecomme 
k  une  tSSte ,  Taccabiait  de  ses  hu6es  et 
de  ses  sarcasmes.  Arrive  sur  le  Met- 
dan ,  en  face  du  palais,  on  luiappliqua 
la  bastonnade,  apr^  quoi  on  lui  ar- 
radia  les  jeux  et  les  oreilles ,  et  il  alia 
expirer  tristementau  fond  d'un  cachet. 
Tons  ses  biens  fui^nt  confisqu^:  ceux 
qu'il  avait  pris  par  violence  furent 
restitues  k  leors  legitimes  possesseurs ; 
la  tribu  des  Chirmmi  fiit  decimee,  et 
£mtni  Daonlah  fut  remplaae  dans  sa 
charge  par  Youssouf-klianl  comme 


coupable  de  Mbkeam  durant  son  ad- 
ministration. 

Non-seulement  le  roi  confirma  les 
droits  conc^ds  anciennement  am  Ar- 
mdniens,  mais  il  leur  en  aooorda  de 
nouveaux,  et  depuis  ce  moment  iis 
jouissent  d'une  plus  haute  considera- 
tion dans  l'£tat.  C'est  ainsi  ^ue  le  sanf; 
innocent  injustement  verse  servit  a 
racbeter  le  reste  de  la  nation ,  et  le 
noQvel  Aman,  au  lieu  de  la  perdre, 
contribua  par  sa  sodldratesse  k  assurer 
son  existence  politique,  en  T^evant 
dans  la  consideration  et  la  feiveur  du 
roi. 

HHTOIRB  POUTIQUE  DB  L'ABMENIE. 

La  philosophic  de  Thistoire  nous  re- 
pr^^sente  chaoue  peuple  comme  un  #tre 
collectif  se  adveloppant  selon  des  lois 
particulitos  et  passant  par  diverses 
phases  correspondantes,  chez  I'indi- 
vidu ,  k  r^tat  d^enfance ,  d'adolesoeooe , 
de  virility  et  de  vieillesse.  Sans  exami- 
ner maintenant  si  cette  maniere  d'en- 
visager  la  vie  d*un  peuple  est  partarte- 
ment  vraie  et  justifi^  par  Pexp^ence, 
pour  ce  qui  tient  k  ces  quatre  divisions 
si  tranche  et  si  distinctes  dans  la  vie 
individudle,  nous  croyons  du  moins 
en  reconnattre  la  justesse  pour  oe  qui 
concerne  la  premiere  pdriode,  celle  ou 
la  nation  nait  et  commence  k  se  {nto- 
duire  sur  la  sc^ne  historique. 

En  efifet,  elle  a  la  petitesse  et  la  fai- 
blesse  du  has  dge;  ses  premiers  pas 
sont  lents  et  mal  assures;  la  langue 
n'est  point  formee,  et  elle  ne  fait  que 
b^ayer;  tout  est  mystere  et  prodige 
pour  die  comme  pour  Tenfant,  et  les 
gdnies  aux  formes  gigantesques  et  fan- 
tastiques  environnent  son  berceau.  Tels 
nous  apparaissent,  du  moins  k  leur 
origine,  les  peuples  de  la  Chine,  de 
llnde  et  de  la  Qrkce. 

Mais  c*est  surtout  pour  ce  qui  re- 
garde  les  souvenirs  et  les  documents 
historiques  que  la  convenance  de  cette 
remarque  est  sensible.  L'enfant,  dans 
le  has  d^e,  n*a  pas  conscience  des 
choses  qui  le  frappent  et  des  accidents 

?ui  se  pressent  autour  de  lui ;  du  moins 
impression  de  tons  ces  faits  sur  son 


ARM£I<IE. 


73 


iiitelli|^ce  est  si  jtassag^re  et  si  su- 
perficielle,  qu*il  D'en  garde  qu'un  sou- 
venir vasue  et  oonfus. 

Consunez  toutes  les  premieres  tra- 
ditions des  peoples,  celles  de  la  nation 
juiye  excepts,  vous  y  retrouverez 
cette  incertitude  et  ces  obscurit^s. 
C'est  qu'ordinairement  un  peuple  ^tait 
d^ja  fort  avanc^  dans  sa  vie  nolitique, 
lorsqu'il  pensait  h  consigner  aans  Tnis- 
toire  les  actes  ou  les  ^veneroents  ant6- 
rieurs  de  son  enfanoe.  Comment  h 
vingt  ans,  par  exemple,  pourrait-on  se 
rappeler  tous  les  premiers  accidents  de 
la  vie,  et  raconter  de  quelle  mani^re 
notre  intelligence  s'est  form^,  ou 
comment  nous  avons  commence  a  nous 
mouvoir  et  a  agir? 

L'histoire  primUwey  generalement 
si  iocertaine,  comme  nous  venous  de 
le  dire,  pent  I'dtre  encore  davantage 
pour  certain  peuple,  et  nous  alions  in- 
diquer  pour  quelles  raisons  les  origines 
de  la  nation  arm^nienne  sont  envelop- 
pees  de  grandes  obscurity. 

Tant  que  la  langue  d'un  peuple  n*est 
point  fix6e  par  Tecriture,  le  mouve- 
ment  intellectuel  est  presque  nul  chez 
lui ;  il  se  borne  a  quelques  chants  tra- 
ditionnels  plus  ou  moins  no6tiques, 
oonservant  d'anciennes  traaitions  de 
faits  politiques  ou  sociaux.  C'est  ce 
que  les  voyageurs  modernes  ont  pu 
reconnaftre  cnez  les  peu^lades  de  TA- 
ro^Tique  et  de  la  Polynesie.  II  en  ^tait 
ainsi  de  TArmenie,  ou ,  d^apr^  les  an- 
ciens  auteurs ,  les  montagnards  de  quel- 
ques cantons  avaient  seuls  conserve  la 
m^moire  de  plusieurs  ^v^nements  j^s- 
s6s,  dans  des  chansons  populaires 
qu'ils  r^p^taient  au  son  des  instru- 
ments, en  formant  des  chceursdedanse. 
On  reprocbe  en  outre  aux  rois  et  aux 

{>rinces  une  aversion  d^aigneuse  pour 
es  lettres,  et  une  insouciance  extreme 
qui  ne  leur  faisait  prendre  aucun  des 
movens  propres  h  perpetuer  le  souvenir 
de  leur  r^ne.  De  cette  mani^re,  nous 
serious  rest^  k  jamais  dans  Pigno- 
rance  la  plus  complete  sur  tout  ce  qui 
se  passa  dans  ce  pays Jusqu'au  regno 
du  ^nd  Vagharsbag  I  ,  lequel  est  Bx^ 
environ  un  si^e  et  demi  avant  J6sus- 
Christ,  si  nous  n'avions  a  consulter 


que  les  auteurs  nationaux.  Heureuse- 
ment  TArm^nie  etait  entouree  de  peu- 
ples  d'une  culture  et  d'une  activity 
mteJIectuelie  superieures;  ces  peuples 
avaient  des  ^rivains  dont  la  ouriosite 
scientifique  ^tait  eveiJl^  sur  leurs  voi- 
sins,  et  ils  ont  pris  la  peine  de  nous 
transmettre  (|uelques-uns  de  leurs  ^v^- 
nements  politiques,  surtout  lorsqu'ils 
se  liaient  a  ceux  de  leur  propre  his- 
toire.  Par  ce  moyen,  on  peut  remplir 
quelques  lacunes,bien  qu'ilreste  ^tendu 
sur  plusieurs  faits  un  voile  que  la  cri- 
tique ne  pourra  jamais  soulever. 

Ces  auteurs  etrangers  etaient  Chal- 
d^ns,  Syriens  ou  Grecs  de  nation.  Le 
premier  historian  de  TArmenie,  soit 
pour  I'anciennet^  de  son  siecle,  soit 
pour  la  sup^riorite  de  son  talent, 
Moise  de  Knoren,  nous  en  cite  plu- 
sieurs qu'il  a  consults,  et  oil  il  a  puise 
de  riches  documents  malheureusement 
incomplets.  Ces  historiens  sont  fib- 
rose, Abydene,  C^phalion ,  Mar-Abbas- 
Catina,  et  plusieurs  autres  dont  nous 
ne  connaissons  pas  m^me  les  noms. 
Eusebe,  dans  sa  chronique,  avait  cer- 
tainement  fait  usage  des  monies  auto- 
rites  ,  et  les  fragments  historiques  qu*il 
nous  transmet  sont  bien  propres  a 
faire  regretter  la  perte  de  leurs  an- 
nales. 

Les  auteurs  armeniens  qui  ont  tra- 
vaiil^  sur  ces  documents  sont  poste- 
rieurs  k  Fere  chretlenne.  Ils  font  re- 
monter  les  origines  de  leur  nation  a 
Tepoque  qui  suivit  immediatement  le 
deluge,  et  h  laquelle  on  assigne  la  for- 
mation des  principaies  monarchies  de 
rOrient.  Vinct-deux  siecles  avant  notre 
^re,  Haig,  fils  de  Tbaglath,  qui  est  le 
m^me  que  Thorgom,  fils  de  Japhet, 
sortit  de  la  Babylonie,  et  vint  k  la  t^te 
d'une  colonic  nombreuse  se  Oxer  dans 
les  plaines  qui  avoisinent  le  mont  Ara- 
rat. II  prit  possession  de  ce  territoire 
et  voulut  en  €tre  le  maltre  indepen- 
dant;  mais  Belus,  roi  d'Assyrie,  dont 
il  avait  fui  la  domination  arbitraire, 
et  qui  voyait  avec  peine  ce  chef  de  tribu 
6cliapper  a  son  autorite,  voulut  le  sou- 
mettre,  et  il  vint  lui  presenter  bataille 
pres  du  lac  de  Van.  La  cause  juste 
triompha;  B^lus  fut  tue  de  la  main 


74 


L'UNIVERS. 


d*HaTg,  et  la  noavdle  oolonie  resta 
inattresse  du  pays.  Mais  batons  Phts- 
torien  Jean  nous  raconter  oes  mdmes 
ev6nements,  qu*il  resume,  avec le  nit- 
rite <]ui  le  distingue,  dans  la  premito 
partie  de  son  travail. 

«  Le  troisi^me  patriarche,  aprte  Ja- 
phet,  engendra  trois  fiis,  Askanaz, 
Riphad  et  Thorgom;  et,  oomme  il  pos- 
s^ait  en  propre  et  personneliement  le 
pays  des  Thraces,  ii  jugea  convenable 
de  partager  en  trois  lots  oe  royaume  et 
ses  autres  possessions,  pour  les  donner 
en  h^'tage  h  ses  trois  flls;  testament 
qui  re9ut  son  execution.  Ainsi  il  donna 
la  SSu'matie  k  Askanaz,  qui  d'aboid 
avait  impost  son  nom  h  notre  nation; 
Riphad  reoit  le  pays  des  Saramades: 
et  quant  a  Thorgom,  s*^tant  aoproprie 
par  la  suite  I'Arm^nie  et  en  etant  de- 
venu  le  souverain,  il  conserva  le  nom 
le  sa  dynastle  k  ce  rovaume,  qui  por- 
tait  jusqu'alors  celui  0* Askanaz. 

«  Ainsi  retenez  bien  que  nous  des- 
cendons  a  la  fois  d' Askanaz  et  de  la 
maison  de  Thorgom ;  c'est  le  moyen  de 
croire  h  Tauthenticit^  des  traditions 
concernant  les  premiers  chefs  de  notre 
nation,  bien  que  quelques-uns  adop- 
tent  sur  ce  point  une  opinion  difite- 
rente. 

«  Les  saintes  lettres  gardent  un  si- 
lence absolu  jusqu'aux  temps  ant^ 
rieurs  h  Thorgom,  et,  pour  la  suite, 
elles  n'ont  pas  jug^  convenable  de  faire 
Gonnattre  rorigine,  la  succession  et 
r^at  de  ses  descendants,  ni  de  nous 
6num^rer  tous  les  rois  d*Arm^nie,  ou 
de  nous  dire  comment  elle  fut  r^ie 
ult^rieurement  par  des  satrapes. 

«  Mais  nn  certain  homme,  Syrien  de 
nation,  nomm^  Maribas  Catina,  fiit, 
par  Tordre  de  notre  roi  Vagarschag, 
visiter  les  archives  des  rois  de  Perse, 
l^tant  plein  dMntelligence  et  de  saga- 
city, et  vers^  dans  les  lettres  chal* 
deennes  et  grecques,  il  y  ddoouvrit, 
apres  de  iongues  recherdies,  un  livre 
authentique ,  qu' Alexandre ,  fils  de  Neo- 
tan^be ,  avait  fait  traduire  du  chald^n 
en  grec.  Bien  qu'il  renfermflt  beaucoup 
de  renseignements  sur  Thistoire  de 

f)lusieurs  autres  peuples,  Mar-Abbas  les 
aissa  de  c6t^ ,  commc  toangers  h  son 


travail,  et,  recueillant  aniqafimeit  ee 
qui  concernait  notre  natioii,  il  nntle 
presenter  k  Vagarscbag. 

c  Grdce  k  lui ,  notre  histoire  a  M 
oonnue  et  a  acquis  une  autlienticit6  in- 
dubiteble.  Ainsi  nous  apprenoos  que 
le  beau  et  vaillant  b^ros  Ha^,  h  k 
stature  gieantesoue,  6tait  fils  aeTho^ 
gom,  qu*u  fut  le  premier  chef  et  le 
p^re  de  notre  nation.  L'bistoire  nous 
enseigne  encore  que,  de  concert  avec 
la  race  primitive  des  gtoits,  il  tra- 
vailla  k  la  construction  de  la  tour,  mo- 
nument ocrtossal  de  Torgueil,  qae  ks 
bommeSj  dans  lears  penste  extrava- 
gantes,  imaginatent  pouvoir  adiever; 
mais,  sulvant  le  r^t  des  saintes  £m 
tures^  un  vent  terrible  soufila,  par  la 
permission  de  Dieu ,  contre  oette  tour 
et  la  renversa ,  mettant  ainsi  k  na  Tim- 
puissance  de  leur  travail. 

<  Peu  apr^,  Nembrod,  qsi  est  le 
mtoe  personnage  que  Bel ,  bomme  fier 
et  entreprenant,  veut,  en  8*6levaotde> 
mesur^ment ,  dominer  sur  toute  la  race 
des  grants. 

«  Mais  notre  robuste  Haig  ne  coorbe 
pas  la  t^te,  et  se  soustrait  h  son  ob^ 
sance.  II  marche  rapideroent  vers  notre 
pays  avec  Armenag ,  son  fils ,  qa'il  avait 
eu  a  Babylone,  dL  suivi  de  ses  filles, 
de  ses  petits-fils, deses  domestiqaes  et 
des  autres  dangers  attach^  k  sa  per- 
Sonne.  Or  Nembrod ,  ou  antreroent  Bd 
le  suivaif  avec  ses  soMats,  hommes 
habiles  k  tirer  Tare  et  k  manier  T^iee 
et  la  lanoe.  lis  se  reneontr^reot  dans 
une  vail6e  vaste  et  unie,  comme  deox 
torrents  furieux  qui  se  prMpitent  avec 
fracas;  aussi  leur  duel  jetait-il  dans 
toutes  les  dmes  le  tremblement  et  une 
terreur  profonde.  Mais  du  long  arc  de 
notre  Haig  part  un  trait  au  fer  trian- 
gulaire,  qui  transperee  la  cairasse 
d'airain  de  Nembrod  aa  d^at  de  Fe- 
paule  et  va  s'enfoncer  ensuite  dans  la 
terre.  Haig,  ayant done  tu6  Bel,  r^na 
sur  le  pays  que  lui  avaient  I^d^  ses 

f^res ,  et ,  de  son  nom,  il  rappela  ffaik. 
1  8*occupa  de  r^gler  ses  Etaits,  et, 
apr^  avoir  v6cu  encore  plasieurs  an- 
nees,  il  mounit,  transmettant   son 
royaume  k  son  fils  Armenag. 
«0r  Armenag,  unique  et  paisible 


AilM£MIE. 


75 


possessair  de  rArm^oie,  fixa  sa  r^i- 
dence  dans  une  plaine,  d*un  aspect 
agreable,  laquelle  ^it  enTironnde 
d  une  muraille  de  hautes  raootagnes 
a  la  cime  neigeuse,  et  qui  etait  ar- 
ro8^  par  des  rivieres  dont  les  eaux 
murmurantes  la  coupaient  en  aMofil* 
trant  dans  les  terres,  et  la  traver* 
saient  dans  toute  sa  loneueur.  S'^tant 
ensuite  bAti  une  ville  pr&  de  la  mon- 
tagne  situ^  au  nord ,  il  l^appela  de 
son  nom  Arakadj ;  et  la  plaine  qui  s'6- 
tend  a  ses  pieds  prit  celui  d'Arakad- 
zoden.  II  eut  pour  fils  Armais ;  et,  apr^ 
avoir  encore  v^u  quelques  annto ,  il 
mourut. 

« Cest  dans  cette  mtoe  plaine,  oik 
se  trouve  une  petite  coUine  pr^  des 
t)ords  de  rAraxe^qu'Armais  batit  une 
ville  et  un  palais ,  ouvrage  qui  fiit  ad^ 
mirablement  ex^nt^  avec  des  pierres 
d'unegrande  solidity.  II  appela  la  ville 
Armavir.  Les  autres  anciens  histo- 
rieos  ont  sufBsamment  raoont^  tous 
les  exploits  de  sa  bravoure.  II  ^tait 
d6ik  assez  avano6  en  Ace  lorsqull  en- 
gendra  Amasia;  et  apres  il  vecut  en- 
core quelque  temps, et  mourut. 

«  Amasia  s'^tablit  dans  cette  mtoe 
ville  d* Armavir,  et  fit  des  construc- 
tions au  pied  de  la  montagne  situ^ 
au  midi ,  qu'il  appela  de  son  nom  Ma- 
sis  ;  toute  la  plame  qui  s'etend  alen- 
tour  prit  celui  de  Masisoden.  Apres 
quelques  annto ,  il  engendra  Kegham , 
puis  il  termina  ses  iours. 

«  Kegbam  vint  s  etablir  sur  le  cdt^ 
nord-est  d*un  petit  lac;  et,  y  ayant 
bdti  des  villages  et  des  fermes ,  il  ap- 
pela de  son  nom  la  montagne  Ke^m ; 
et  le  bord  du  lac  ou  il  avait  fait  ces 
^tablisseroents  prit  le  nom  de  Kerar- 
kouni.  II  eut  deux  fils ,  Harma  etSisag. 
II  assigna  Armavir  pour  r^idence  a 
son  fils  Harma,  lequel  fut  cbarg6  de 
Tadministration  du  royaume  de  son 
p^re.  Quant  a  Sisae,  il  eut  pour  sa 

{»art  le  pays  qui  s*etend  du  nord  du 
ac  au  sud-est,  jusqu'^  la  plaine  que 
traverse  I'Araxe,  dont  les  eaux  rapides 
et  toumoyantes  se  pn^dpitent  avec 
fracas  par  l\>uverture  ^troite  et  res- 
serr^e  d*une  caverne ;  d*oii  vient  que 


plusieurs  ont  nomme  ce  lieu  Kara- 
vagb.  Kc^bam  bitit  ensuite  un  bel  et 
vaste  ^ifloe,  qui,  d*abord  nomm^ 
Kegbami,  fiit  appele  ensuite  Quami 
par  le  prince  Quarnig ,  puis  il  mourut. 
Son  fils  Harma  engendra  Aram,  et 
mourut  aussi. 

«  On  raoonte  d'Aram  un  grand  nom- 
bre  de  faits  glorieux.  Sa  valeur  guer- 
ri^re  recula  les  frontieresde  i'Arm^ie 
dans  toutes  les  directions ;  et  c'est  h 
cause  des  actions  illustres  de  ce  beros 

3ue  les  nations  voisines  nous  aj)pellent 
e  son  nom  Arro^niens.  Ce  prince  ne 
s*empara  pas  seulement  des  [)ays  dont 
la  conqu^te  6tait  facile ,  mais  encore 
de  la  Cappadoce ,  qu'il  soumit  de  vive 
force  (*;.  s 

Les  Assyriens  ne  renonc^nt  pas  a 
leurs  pretentions;  et  la  oonquminte 
Stoiramis  vint  plus  tard  faire  valoir 
ses  droits.  L'historien  MoIsedeKboren, 
dont  nous  avons  ddja  parl^ ,  nous  a 
transmis,  sur  cette  expedition  et  aur 
lestravaux  exi^euUs  oar  cette  reine, 
des  renseignements  fort  curieux  que 
nous  cbercberions  vainement  cbez  tout 
autre  auteur  ancien.  Bien  que  le  r^it 
romanesque  semble  un  fragment  d^ta- 
ch^  de  quelque  ancien  poeme,  nous 
avons  cm  qu*il  pourrait  int^resser  le 
lecteur,  ^  qui  il  donnera  en  m^me 
temps  une  iu^  de  Texposition  bistori- 
~ue  et  du  style  des  meiUeurs  toivains 
e  TArm^nie. 


a 


AKA.  SA  MORT  DANS  Ull  COMBAT  COMTIIK 
SiMIRAMIS  C*). 

«Pea  d'annte  avant  la  mort  de 
Minus ,  Ara  r^t  en  mattre  sa  patrie, 
ayant  obtenu  de  oe  prince  la  rotoe 
favour  quil  avait  accord^  k  son  p^ 
Aram.  Mais  rimpadiqueetvolnptueuse 
Steiramis,  qui  depuis  tongues  anotoi 
avait  entendu  parler  de  sa  teaute ,  brd- 
lait  de  s'emparer  de  sa  personne  •  sans 

f*}  Jean  YI.  Hist.  d*Arm. ,  manusc.  arm. 
de  la  Bibl.  roy.,  n«  91 ,  pages  1 1 ,  la,  i5, 
17,  ao. 

{**)  Moisc  de  Khoren ,  liv.  i ,  ck.  1 5. 


76 


L'UNIVERS. 


toutefois  rien  oser  entrq>reiidre  ou- 
vertement.  Or,  apr^  la  mort  ou  pla- 
tdt  apr^s  la  ftiite  ae  Ninus  dans  Hie  de 
Cr^te ,  comme  je  le  crois  (*),  S^mira- 
rois,  donnant  un  libre  coars  h  sa  pas- 
sion y  envoya  pr^  du  bel  Ara  des  mes- 
*  sagers  char^^s  de  dons  et  de  prints , 
et  qui  devaient  employer  la  pri^re  et 
la  menace  pour  Tengager  h  venir  h  Ni- 
nive ,  soit  pour  T^pouser  et  r^er  sur 
tout  le  pays  qu*administrait  Ninus, 
soit  seuiement  pour  satisfaire  son 
amour,  et  retourner  ensuite  paisible- 
ment  dans  ses  ifetats,  avec  de  nches  ca- 
deaux. 

«  Comme  les  messages  se  r^p^taient 
sans  qu*Ara  donndt  son  consentement , 
S^miramis  entre  en  fureur,  met  fin 
aux  n^ffociations ,  et ,  a  la  t^tede  forces 
considerables,  elle  atteint,  par  ses 
marches  forc6es ,  le  prince  en  Arm^- 
nie.  A  en  juger  par  les  apparences , 
son  intention  n*6tait  point  de  tuer  ou 
de  poursuivre  Ara,  mais  bien  de  le 
soumettre  et  de  Tamener  par  la  force 
a  consentir  h  ses  impurs  aesirs.  L*ar- 
deur  de  sa  passion  ^tait telle,  que,  lors- 
qu'on  parlait  de  lui ,  elle  tombait  dans 
le  d^lire ,  comme  si  eile  le  voyait.  Elle 
arrive  done  prteipitamment  dans  la 
plaine  nommee  Ararad ,  du  nom  d^Ara ; 
et  i  apres  avoir  range  ses  troupes  en 
bataille ,  die  reoommande  a  ses  gen6- 
raux  de  prendre  tous  les  moyens  pos- 
sibles pour  conserver  la  vie  au  prince. 
Mais,  lorsque  le  combat  fut  engas6, 
I'arm^  d'Ara  fut  battue ,  et  il  perit 
dans  la  m^lee  de  la  main  d*un  des  en- 
fants  de  S6miramis.  Dans  sa  victoire, 
elle  envoie  sur  le  champ  de  bataille 
des  hommes  charge  de  d^pouiller  les 
morts ,  pour  cherdier ,  au  milieu  des 
autres  cadavres,  oelui  de  son  cher 
amant.  lis  trouv^rent  Ara  parmi  les 
braves  qui  avaient  suocomb^,  et  elle 

(*)  L'bistorien  parie  a  deux  reprises  dif- 
fereotes  de  oe  pr^tendu  exil  volontaire  de 
Nintu  dans  Tile  de  Crete ,  pour  ne  pas  ^re 
\kao\n  des  exces  de  la  reioe ,  son  epouse. 
II  ne  dit  pas  sur  quelle  autoritc  il  appuie 
cette  opinion,  dont  on  ne  reirouve  aucune 
trace  cnei  les  autres  ecrivains. 


fit  porter  son  corps  dans  son  pa- 
lais. 

«  Comme  les  troupes  des  Arm^iens^ 
d^sireuses  de  venger  la  mort  d*Ara, 
6taient  venues  attaguer  dans  un  se- 
cond combat  la  reme,  elle  dit :  Pai 
command^  aux  dieux  de  IMier  ses 
blessures  et  de  le  ressusciter.  Pliisieur! 
fois  Texc^  de  sa  passion  la  porta  a 
recourir  aux  enchantements  de  la  sor- 
oellerie  pour  le  rappder  h  la  vie.  Lors- 
que le  cadavre  tomoa  en  putrtfaction, 
elle  le  fit  jeter  et  cacher  dans  une 
grande  fosse.  Puis,  tenant  en  secret 
un  de  ses  favoris  par^  comme  Ara ,  elle 
r6pandit  ce  bruit :  Les  dieux  ont  le- 
ch^ les  plaies  d*Ara ;  il  est  ressusdte. 
et  ils  ont  mis  le  comble  a  mes  desxrs. 
C'est  pourquoi  ils  meritent  desormais 
de  recevoirde  plus  grands  honnetffs, 
puisqulls  se  sont  montr6s  si  propios 
a  nos  voeux.  Elle  ^leva  une  nouvdie 
statue  aux  dieux,  et  I'honora  en  lai 
offrant  beaucoup  de  victimes ,  voulant 
fairecroire  h  tous  que  les  dieux  avaient 
ressuscit^  Ara.  C*est  en  r^pandant  re 
bruit  dans  FArm^nie,  et  en  Faccr^i- 
tant  parmi  le  peuple,  qu*elle  apaisa 
la  guerre. » 

La  victoire  de  S^miramis  consolida 
la  domination  assyrienne ;  et,  jusqu^an 
renversement  de  cette  grande  monar- 
chie .  FArmenie  resta  tributaire  et  de- 
pendante.  Lorsque  Varbag,  gouver- 
neur  de  M^ie ,  lequel  n*est  que 
FArbaces  des  Grecs ,  se  souleva  contre 
Sardanapale,  BaroTr,  souverain  de 
FArm6nie ,  entra  dans  cette  conspira- 
tion ,  et  le  fruit  qu'il  en  retira  fut  de 
rendre  a  son  pays  sa  premiere  inde- 
pendance.  Ti$[rane  I*',  contemporain 
de  Cyrus,  ^tait  un  prince  puissant;  et 
X^nophon  nous  dit  que  Fassistanoe 
qu'il  pr^ta  au  fondateur  de  la  nouvdle 
monarchic  des  Perses,  contribua  di- 
rectement  a  sa  victoire  sur  Astyages , 
roi  des  M^es.  Son  fils  Yahakn  iut  tel- 
lement  renomm^  par  sa  force  et  ses 
exploits ,  qii'il  occupe ,  dans  les  anciens 
chants  nationaux,  la  place  de  FHer- 
cule  des  Grecs.  Ses  successeurs ,  jus- 
qu'h  Vahe ,  continuerent  d^administrer 
le  pays ,  en  reconnaissant  la  suzerai- 


ARM£NIE. 


77 


net^  des  rois  de  Per8e(*).  Mais  les  con- 

3u^tes  d'Alexandre  changerent  oet  ^tat 
e  choses. 
En  effet,  le  jeane  roi  mac^donien, 
en  d^trutsant  la  dynastie  persane  y  ne 
laissa  point,  dans  les  ifetats  environ- 
nants,  de  traces  de  la  royaut^.  II  tou- 
lait  ^tre  I'unique  souverain ,  et  il  se 
contenta  de  placer  dans  TAnn^nie  un 
simple goiiverneur.  A  la  mortd'Aiexan- 
dre,  ses  g^^raux  se  partagerent  Tem- 
pire ;  et  celui  qui  s'empara  de  la  Syrie 
r^lama  TArm^nie.  Mais  quelgues  sei- 
gneurs ,  qui  souffraient  impatiemment 
<;ette  domination  etrangere,  chasserent 
les  oonqu6rants;  et  la  fondation  de  la 
nouvelle  dynastie  des  Arsacides  porta 
le  coup  mortel  aux  Grecs. 

Celui  qui  op^ra  cette  revolution 
etait ,  nous  dit  Jean  VI ,  le  valeureux 
Arschag  ou  Arsace,  de  la  race  d*A- 
brahatn  par  Kedourgha ,  qu*il  prit 
pour  sa  fenime  apres  la  mort  de  Sara ; 
il  regna  a  la  fois  sur  les  Medes,  les 
Perses  et  les  Babylonlens.  Aussi  sa 
grande  puissance  lui  merita-t-elle  le 
nom  de  Parthe.  11  soutint  plusieurs 
combats  contre  les  chefs  les  plus  aguer- 
ris,  et  demeura  toujours  vainqueur. 
Les  conqultes  le  rendirent  entrepre- 
nantf  et  11  pla^a  sur  le  trdne  d*Arm^- 
nie  son  frere  Vagharschag ,  prince  qui , 
h  la  bonte  du  caractere,  unissait  la 
prudence  et  la  bravoure.  Apres  de 
nombreuses  victoires  remportees  sur 


ses  ennemis ,  il  fit,  avec  un  ordre con- 
venable,  beauooup  de  r^glements  ci- 
vils  d'une  grande  utility  pour  la  vie 
publique.  11  commen^  par  donner  h 
la  royaut^  le  lustre  et  T^clat  de  ses 
moeurs  personnelles ;  puis,  lorsqu'il 
eut  affermi  le  pouvoir  aans  ses  mains , 
il  pla^a  dans  son  palais  et  dans  tout 
son  royaume  des  nommes  distingu^ 
et  capables ,  de  la  race  d'Hai^  ou  des 
autres  premieres  families ,  variant  pour 
chacun  les  attributions  de  sa  digniti^. 

Ainsi ,  Pakarad ,  juif  d'origine,  dont 
on  fait  remonter  la  maison  a  David , 
fut  specialement  charg<^  de  oouronner 
le  roi ,  et  oela  pour  le  r^compenser 
d'etre  venu  le  premier  offrir  ses  ser- 
vices h  Vagharschag.  En  outre,  il  fut 
nomme  sbarabied,  et  il  command(ait 
un  corps  de  onze  mille  hommes ,  outre 
qu*il  avait  le  gouvernement  du  pont  et 
de  la  ville  de  C^aree ,  nomroee  Mids- 
hag,  ainsi  que  de  toutes  ses  d^pen- 
dances. 

Le  roi  s'avan^a  ensuite  du  c6t^  de 
lamer,  vers  le  mont  Caucase;  et  il 
commanda  h  la  peu|)Iade  sauvage  des 
Chourdapars  de  quitter  ses  moeurs 
bnrbares  et  de  renoiicer  a  sa  vie  de 
brigandages  et  de  meurtres,  pour  en- 
trer  dans  son  obeissance,  et  de  lui 
pa^er  tribut;  moyennant  quoi  ils  pour- 
raient  devenir  dignes  d*^tre  €\ey&  aux 
dignites  et  au  rang  de  la  noblesse  ar- 


menienne. 


(*)  Yoici  la  litte  des  princes  de   la  race  haiganienne  qui  se  sonl  succede  pendant 
dix-huit  siecles  enTiron. 


At.  J.  C. 

2t07  Haig. 

aaa6  Armteag,  son  fiU. 
19S0  AramaU,  son  fits. 
:  940  Amaria ,  soii  fils. 
190a  Keg  ham ,  aon  flls. 
s8S8  Harma*  son  fils. 
18x7  Aram ,  son  fils. 

■  769  Ara,  son  fits. 
1743  Gaatos ,  son  fils. 
1735  AnonscbaTan ,  son  flls. 
166a  Bared. 

ffita  Arpag. 
t568  ZaTan. 
1 53 1  Phamaca  l«^ 
1478  Soaz. 
>433  Havanag. 
■4o3  Vaachdag. 
i38f  Haifag  I"', 
f  363  Ampag  V'. 

■  349  Arlinaf. 


At.  J.  C 
i33a 
i3a6 
i3oa 
1189 
>a8S 
1367 
ia4a 

««97 
1194 

ii8a 

itSo 

it37 

iioa 

1075 

io3S 

98S 

941 

4)10 

1183 


Scbavarscb  l*^ 

Korair. 

Vesdam. 

Gar. 

Korbag. 

Orootes. 

Endsag. 

Kelag. 

Horoi. 

Zarmalr. 

Interrigne. 

SehaTarsch    II. 

Benlj   1". 

Arpoun. 

Berdj  W. 

Pazoag. 

Roi. 

Hooaag. 

Ampsg  n. 

Oaibag. 


Ay.  J.  C. 

838  Pfaamabace  !•'. 
8o5  Pfaarnag  l\. 
765  Sgaiorti. 
748  Baroir. 
700  Ilrateh4a  ,  son  fils. 
678  Phamabacv  II. 
665  Bfldjoidj  ,  son  fils. 
63o  Gurnhag  ,  son  fils. 
6 ja  Pharos ,  son  fils. 
6o5  iliigag  II.  son  fib. 
569  Krovant  1*"*  son  fils. 
565  Tigraiie  1*',  son  fils. 
5ao  Vahakn*  son  fils. 
493  ArbavaB.  son  fite. 
475  Nerseb,  son  fils. 
440  Zarrh ,  son  fils. 
394  Armok ,  son  fils 
385  Paikam,  son  fils 
371  Van,  son  fits. 
35i   Vahe  ,  son  fiU 


L'UNIVERS. 


78 


Apra  avoir  aiosi  port^ 
dans  kes  parties  eitMrieuies  de  son 
royaume ,  il  songea  k  r^ler  rint^rieur 
de  son  palais,  et  ^  y  ^tablir  toutes  les 
institutions  utiles  ijai  sont  do  ressort 
de  la  royaut^.  Ainsi ,  outre  Ja  dignity 
consenrte  k  Pakarad ,  il  cr^  des  cham- 
bellans,  des  gardes  du  corps,  des 
gardes-ohasses  charge  de  prendre  sotn 
du  gibier  destine  a  la  table  royale,  des 
valets,  des  serviteurs,  et  des  cbiliar- 
ques  pour  les  sacriflces.  II  ^tablit  en 
outre  des  ^chansons ,  des  Cnuconniers , 
et  des  hommes  specialement  oharg^ 
d'appr^ter  la  neige  pour  la  boisson 
d*ete,  et  d*autres  pour  les  provisions 
d'hiver.  II  avait  une  Itejon  k  qui  la 
porte  du  paiais  6tait  eonnee ;  puis  un 

grand  nombre  d'eunuques.  La  seconde 
ignite  du  royaume  rut  donn^  k  un 
personnage  de  la  iamille  d*Astyages , 
roi  des  Medes,  laquelle  porte  aujour- 
d'hui  le  nom  de  Mouratsant. 

L'administration  de  son  patlais  une 
fois  organist ,  il  nomma  des  chefis  de 
province,  des  satrapes,  des  gouver- 
neurs  et  des  pr^ets,  dont  Tun  r^idait 
au  nord,  dans  le  pays  de  Roukar,  et 
Tautre  au  nord-ouest,  dans  le  canton 
d'Ardscbk'n.  II  regla  les  heures  d'au- 
dience  et  les  jours  d'assembl^  de 
conseil,  et  de  ietes.  11  attacha  aussi  k 
sa  personne  deux  bommes  dont  Tun 
devait  Tavertir  des  bonnes  actions 
qu'il  faisait,  et  lui  rappeler  les  senti- 
ments de  justice  et  d*numanit^  lors* 
qu'il  s*en  uoi^ait.  L'autre  devait  Ten- 
gaeer  k  punir  les  m^cbants,  et  Ik  les 
chatier  selon  leurs  crimes. 

II  voulut  que  Ton  traitAt  avec  plus 
de  distinction  les  habitants  des  villes 
que  ceux  descampagnes ;  mais  en  m^me 
temps  il  d^fendit  a  ceux-1^  de  s'^iever 
avec  orgueil  et  m6pris  au-dessus  des 
paysans,  cberchant  a  toblir  entre  ces 
deux  classes  une  union  patemelle  et 
d^pourvue  de  jalousie;  fondement  de 
la  stability  et  de  la  paix  publique.  Aprks 
toutes  ces  belles  et  sages  institutions, 
qui  lui  ont  m^t^  le  nom  de  bon  et  de 
glorieux,  il  mourut  k  Nisibe,  ayant  oc- 
cupy le  tr6ne  vingt-deux  ans  (*). 

(*)  J»n  YI.  Manus.  aim. ,  n*  9t.  p.  ^5. 


Les  armes  vietorieoies  de  ses  des- 
cendants repouss^rent  les  Grecs  jus- 
qu*au  dela  de  TEuphrate.  Un  des  mem- 
fires  de  cette  maison ,  Vagliarschad , 
repit  comme  domdine  TArm^nie;  et , 
dans  sa  personne ,  commence  one  nou- 
velle  dynastie  de  rois  qui  subeista  jus- 
qu'a  rusurpation  du  tr6ne  de  Pme 
par  les  Sassanides. 

Quelques-uns  de  ces  rois  jouerent  an 
rAle  brulant;  tel  fut  Tigrane  n,  qm 
s'afifranchit  totalement  de  la  puissance 
des  Parlhes ,  et  oonquit  la  Syrie  et  plu- 
sleurs  provinoes  de  FAsie  Minenre. 
Les  historiens  romaina  ont  d6crit  le 
faste  dece  fid^e  allii  de  Blithridate  C). 

Sui  balan^a  quelque  temps  la  fortune 
e  leurs  armes.  Mais  oe  roi  des  rois, 
k  la  tMe  de  trois  cent  soixante  mille 
hommes,  tons  bardes  de  fer,  ne  pot 
tenir  devant  les  legions  de  LocoUas  et 
de  Pompee.  Artavasde,  Ills  et  sueces- 
seur  de  Tigrane ,  surpris  par  le  peifide 
Marc-Antolne,  est  eminent  captif  a 
Alexandrie,  ou  il  fut  dtoipite  par  Yd- 
fet  d*un  caprice  de  GMopAtre. 

Rome  tendait  k  s'assimiler  tons  les 
peuples  conquis  par  ses  armes,  et  a 
e£racer  ches  eux  les  traits  distinetift 
de  leur  nationality.  Elle  laissa  k  TAr- 
mteie  ses  princes,  mais  en  linntaat 
leur  pouvoir  comme  cehii  de  see  pro- 
consuls. Les  Arm^iens  se  troaYaieet 
sous  le  coup  de  deux  puissaDoes  qui 
cherchaient  simultanment  k  les  doni- 
ner:  c*6taient  les  Remains  et  les  Par- 
thes.  Trouvant  en  ces  deux  peoples 
des  ennemis  dMar^s  de  leur  propre 
liberty,  ils  n'ob^issaient  qu*icontrc> 
cceur;  et  c'est  ce  qui  fiiisait  dire  a  Ta- 
cite  (**) :  «La  nation arm^nienne,  doot 
le  caract^e  de  ses  habitants  nous  est 
aussi  peu  connu  que  remplaoenciit  de 
son  territoire,  s*etend  jusgue  ches  les 
M^es,  en  bordant  au  lorn  nos  pro- 

(*)  Les  huloriens  annenicns  en  s*appiiyaat 
•ur  une  autorit^  qui  nous  est  incomwe. 
prelcndent  que  Mithridate  ne  s'ewpoiaopna 
pas  lai-mArae;  que  ce  /ut  IH>mpee  qui  hii 
presenta  le  breuTage  oiortd,  apies  %*^tn 
empare  de  sa  personne  par  kt  aitificrs  d« 
Pilate. 

(••)  Tacil.  Aon. ,  lit.  ii ,  J  56. 


ARM^NIE. 


79 


f  inctt.  JMe  au  milieu  de  deux  grandg 
empires,  eiie  est  le  plus  souvent  ea 
disGorde  par  haine  ooutre  les  Romains, 
et  par  riaaHU  oontre  les  Parthes.  » 

La  distinction  de  rbistorien  romain 
etait  juste.  La  mtoe  religion,  le  ma- 
gisme,  rapprocbait  les  Arm^iens  des 
Perses,  avec  lesquels  ils  ayaient  aussi 
decommun  des  mt^rdts  de  dynastie, 
les  mceurs  et  les  lois.  lis  ^ient  dooc 
plus  port^  k  faire  alliance  avec  ces 
voisins  qui  resjpectaient  encore  mieux 
leur  libert6  politique  que  les  conqu^ 
rants  de  I'ltalie,  dont  Je  despotisme 
inflexible  et  uniforme  ramenait  T^t 
social  de  chaque  peupie  nouvelleroent 
conquis  k  celui  de  la  cit^  mto. 

IMais,  lorsque  le  christianisme  eut 
p^n6tr^  dans  ce  pays  «t  soumis  les  in* 
telligences  parlaj[>ersuasion,  iesliien- 
faits  de  oette  religion  sainte  et  civili- 
satrioe ,  imports  chez  eux  de  I'empire , 
diang^nt  les  dispositions  du  peupie 
et  le  reconcili^nt  avec  les  Romains. 
II  oomprenait  qu'il  trouverait  parmi 
eux  ses  protecteurs  natoels  oontre  la 
Perse,  adonn^  aux  prineipes  de  Zo- 
roastre  et  ennemiedu  nom  oir^ien  (*}• 

Abgare  occupait  la  partie   m^ri- 

(*)  Les  princes  gui  occuperent  le  tr6iie 
d^Annenie  depuis  Ardayazt,  et  qui  nous 
sont  prindpaleroent  conovs  par  les  hislo- 
riens  grecs  el  latins  sent : 

At.  J.  C  3o.  — Artax^  II  qui  chasse  les 
troupes  romaines  laisste  par  Antoine. 

20.  — Tigrane  II ,  son  frere. 

1 5.  —  Tierane  lU ,  son  fils ,  detr6ne  et 
retabK  par  les  Romains. 

6.  —  Artavasde  IL 

a.  —  Erato «  veuve  de  Tigrane  HI.  Apres 
an  regne  de  courie  duree ,  elle  est  forc^ 
d'abdiqaer. 

Ap.  J.  C  9."— Ariobenane,  prince  mede 
que  lea  Romains  declarent  roi. 

4. — Artavasde  HI ,  ou  Artabase,  son  fils, 
detr6D^  peu  aprea. 

5. — Erato  remonte  snr  le  tr6ne.  Sa  roort 
est  suivie  d'un  interre^. 

16.  —  Yonones,  roi  des  Panbes,  ills  de 
Phrahates  IV.  Cbaase  par  Artaban  lU,  11 
vint  clierdier  un  asile  cbez  les  Armeniens 
qui  le  plaoerent  sur  le  trine ,  on  il  nc  put 
sc  maintenir. 

17. — Interregne. 


djonale  de  FArm^ie;  il  r^dait  h 
Edesse.  Sa  magnanimity ,  la  droiture 
de  ses  actes  et  ses  vertus  avaient  r^- 
pandu  au  loin  sa  reputation.  Aussi 
nit-il  choisi  pour  arbitre  entre  les  en- 
fants  du  roi  de  Perse,  qui  se  dispu- 
taientla  couronne.  II  donna  Ic  sceptre 
a  Ardacb^ ,  et  sipara  les  autres  freres 
avec  leur  soeur  en  trois  branches  nom- 
mte  Gar^i,  Bahla,  et  Sour^ni.  De 
ces  trois  families  sont  sortis  ses  prin- 
ces et  d*autres  personnages  celebres 
dans  les  annales  de  la  nation.  Ainsi 
le  premier  patriaMie,  saint  Gr^goire, 
descendait  des  deux  maisons  Sour^ni 
etBabla. 

Cest  sous  le  regne  d*  Abgare ,  comroe 
nous  t*avons  dit  dans  la  partie  reli- 
^euse  de  cette  bistoire,  que  le  chris- 
tianisme jeta  dans  les  dmes  ses  pre- 
mieres semences.  A  sa  mort,  le 
royaume  fut  partag^  entre  son  fils 
Anan6  et  Sanadroue,  son  neveu.  Mais 
oe  dernier,  d^vor^  crambition ,  mardie 
sur  Edesse,  la  livre  au  pillage,  d^truit 
la  fiimille  et  la  posterity  d' Abgare,  et 
transfto  le  si^e  de  son  royaume  k 
Nisibe ,  qu'il  orna  d*^ifices  splendides. 
Aprte  un  r^gne  de  trente  ans,dans 
lequel  il  se  livra  a  toutes  les  perversi- 

18.  —  Zinon,  fils  de  Polemon,  roi  de 
Pont.  II  fut  Gouronn^  par  Germanicus,  et 
il  prit  le  nom  d*Artaxias. 

a3.— Tigrane  nr,  fils  d*Alexandre,  fils 
d'Hirode ,  roi  des  Juifs.  On  le  fit  mourir 
par  Tordre  de  Tibere. 

35. — Arsace  n,  fils  d*Ariaban  m,  roi 
dei  Parthes. 

45. —  BAitbridale,  p^  de  Phartsmane, 
roi  d'lb^e.  Il  fut  pbisieurs  fois  depossM^ 
par  les  Parthes  et  retabli  par  ksa  Romains , 
jusqa*a  oe  qu'il  fut  assaasine  par  son  neveu 
Hhadamiate. 

5x. — Rhadamiste,  fils  de  Pharasoiane. 

5a. — Tiridate  l*"" ,  pere  de  Yologese  I**, 
roi  des  Parthes.  Il  fut  plu&ieurs  fois  chasse 
par  les  Romains. 

60.  — Trigane  T,  fi1sd*un  certain  Alexan- 
dre ,  de  la  race  dllerode,  et  neveu  de  Ti- 
grane IV.  Les  Parthes  le  detrdnerent. 

6a. — Tiridate  est  retabli  sur  le  trone 
par  I'ordre  de  Neron.  Il  uarait  qu'il  renia 
encore  onze  ans.  Yoy.  Saint-Martin ,  Mem. 
sur  I'Armenie,  1. 1,  p.  410. 


HO 


L'UNIVERS. 


t6s  de  son  coeur  deprave,  et  oa*il  souille 
du  •sang  des  saints  mar^rs  Thadd^  et 
Barthelemi,  tl  p^rit  nais^ablement  k 
ia  chasse. 

A  la  cour  des  rois  d*Orient,  se  trou- 
vait  un  personnage  qui  avail  pour  at- 
tribution le  droit  de  poser  la  couronne 
sur  la  t^te  du  roi ,  a  son  avenement  au 
trdne.  Ge  droit,  h^Mitaire  dans  la 
mtoe  famille ,  lui  donnait  une  grande 
influence ,  puisqu'elie  remplissait ,  en 
quelque  sorte,  1  office  d^voiu  au  pou- 
▼oir  religieux  en  certaines  autres  con- 
tr6es,  et  puisque  sa  sanction  ^tait  1^- 
^aiement  ntossaire  pour  rendre  apte 
a  regner.  Cette  institution  remontait 
h  Vagharschag,  et  la  noble  famille  des 
Pa^ratides  ^tait  investie  de  cette  di- 
gnity. Lors^ue  plusieurs  oorop^iteurs 
revendiquaient  la  royaute,  oelui  qui 
n'avait  point  re^u  I'mvestiture  de  la 
l^itimit^  etait  re^arde  oomme  usur- 
pateur.  G*est  ce  qui  arriva  pour  £ro- 
vant  II,  de  la  famille  des  Arsacides, 
qui ,  profitant  des  troubles  que  la  mort 
de  Sanadroug  avait  jetes  dans  le  pays, 
se  constitua  son  suocesseur,  au  detri- 
ment de  sa  posterity.  U  voulut  aussi 
aneantir  sa  race,  comme  Sanadroug 
avait  eteint  celle  d'Abgare;  et  il  aurait 
r^ussi  dans  son  sinistre  dessein,  si  un 
jeune  enfant ,  nomm^  Ardasches ,  n'eilt 
eU  sauve  miraculeusement,  et  conduit 
a  la  cour  du  roi  de  Perse. 

Ardascb^  ^tait  un  vengeur  futur 
qui  grandissait  dans  sa  retraite,  et 
m^ditait  en  silence  les  projets  d'une 
terrible  vengeance.  Lorsqu'il  se  sentit 
la  force  d*agir,  11  demanda  a  son  royal 
hdte  des  secours;  et,  k  I'aide  des  m- 
telligences  qu'il  entretenait  parrai  les 
princes  de  sa  nation ,  il  se  trouva  bien- 
tdt  k  la  t^  de  forces  considerables.  II 
vient  presenter  bataille  h  £rovant  sou- 
tenu  par  les  Remains  et  le  roi  de  G^or- 
eie ,  et  demeura  mattre  du  cbamp  de 
bataille.  £rovant  perit  dans  sa  capi- 
tate de  la  main  d*un  soldat ;  et  Ardas- 
ches devint  le  paisible  possesseur  du 
trdne  qu'il  avait  reconquis.  Son  r^gne 
Art  p/ospere;  il  administra  sagement 
ses  £tats ,  et  arr^ta  les  invasions  des 
Alains  et  de  plusieurs  autres  peuples 
du  Caucase  qui  menacaient  TArmenie. 


Dans  une  des  bataiUes  qa*il  Kvn  h 
oes  barbares ,  le  fils  do  roi  tomba  entre 
ses  mains.  Comme  il  se  disposait  k  le 
mettre  a  mort,  la  fiile  do  roi  barbare, 
nommee  Sathinik,  remaiqoable'par 
sa  beaute,  lui  adressa  ces  paroles: 
«  O  puissant  et  brave  Arsaoe ,  qui  as 
soumis  les  belliqueox  Alains,  eooute 
les  prieres  de  la  nlle  infortun^  du  roi 
de  ce  peuple ,  et  rendsnnoi  mon  jeune 
fr^re.  Il  ne  convient  pas  de  conserrer 
de  la  rancune  contre  un  ennemi  tombe, 
et  de  lui  ravir  la  vie.  Conduons  plut^t 
un  traite  de  paix  entre  nos  deux  grandes 
nations.  »  Les  paroles  de  la  jeune  fille, 
ses  larmes,  et  Texpression  touchante 
de  sa  beaute,  firent  une  telle  impres- 
sion sur  le  cceurd* Ardasches ,  q|u*il  de- 
livra  le  jeune  prince,  et  promit  de 
conclure  un  traite,  a  condition  que 
son  pere  consentirait  a  lui  donner  en 
manage  Sathinik.  Le  pere  la  lui  ac- 
corda,  et  Ardasches  revint  dans  son 
royaume  avec  sa  nouvelle  epouse ,  qu'ii 
decora  du  titre  de  reine ,  entre  ses  ao- 
tres  femmes. 

Les  tentatives  qu'il  fit  pour  sesous- 
traire  a  la  domination  roraaine,  ne 
furent  pas  couronnees  de  succes.  Tra- 
jan envoya  contre  lui  une  forte  armee 
?|ui  le  battit  en  deux  rencontres ;  et  ce 
ut  a  cette  occasion  ^ue  rempereur 
romain  ajouta  h  son  titre  de  Partki- 
cus  celui  d'Jrmenicus. 

Les  bistoriens  nous  reveient,  a  Fck- 
casion  de  la  mort  de  ce  roi ,  on  fait 
tres-important  dans  Thistoire  des  reli- 
gions paiennes  de  Tantiquite.  II  parail 
qu*en  Armenie  la  coutume  exigeait  que 
les  funerailies  du  prince  fiissent  oele- 
brees  par  un  bolocauste  de  victioies  bu- 
maines ,  et  que  mime ,  durant  sa  ma- 
ladie ,  on  versait  d€jk  le  sang  humaio, 
pour  que  les  dieox ,  devenos  propioes. 
detournassent  la  mort  de  sa  tlte 
royale. 

On  raconte  done  que  le  fils  putor 
d' Ardasches,  nomme  Artavazd,  revottr 
k  la  vue  du  sang  que  Ton  r^pandait. 
fit  ^  ce  sujet  des  representations  a  son 
pere,  et  lui  dit :  «  Tandis  que  to  suis 
cette  voie,  et  que  tu  emportes  toute  la 
population,  comment,  apres  toi,  con- 
sentirais-j€  a  ne  regner  que  sur  des 


iRM^niE. 


81 


ruioes?  »  Le  p^e  irrit^  le  oiaudit,  en 
disant :  «  Si  tu  sors  a  la  diasse  sur  le 
inont  Ararat,  iesjfarts  te  aaisiront,  tu 
y  resteras,  sans  jamais  revoir  la  iu- 
ini^redujour. » 

En  effet,  ce  prince,  en  poursuiyant 
a  la  cbasse  des  cerfs  et  des  onagres, 
fut  emport^  par  son  cheral  dans  un 
abtme,  ou  il  disparut^  Les  chants  po- 
pulaires  r^petent  qii'il  demeure  en- 
chatn^  dans  une  caverne,  que  deux  de 
ses  chiens  mordent  ses  fers  pour  le 
delivrer,  et  que  le  prince  fait  tous  ses 
efforts  pour  sortir  de  cette  prison  et 
venir  desoler  le  pays. .«  Mais,  ajoute- 
t-ott ,  le  bruit  des  marteaux  des  artisans 
rive  ses  cbafnes  et  les  oonsolide,  et 
voila  pourquoi  les  forgerons  continue 
rent  longtemps  de  frapper  le  dimanche 
quelques  coups  sur  leurs  enclumes, 
de  peur,  disaient-ils ,  qu^Jrtavasd  ne 
brUdt  ses  chaines,  » 

Ti^rane  III,  fr^e  d'Artavazd,  se 
r6umt  aux  Perses  et  comment  les 
hostility  centre  les  Remains.  S^v^- 
rien ,  gouvemeur  de  la  Cappadoce ,  vint 
lui  presenter  bataille,  apres  avoir  con- 
suite  I'oracle,  qui  lui  repondit :  «  Le 
fil  de  ton  6p6e  atteindra  les  Perses  et 
les  Arm^niens;  tu  retoumeras  a  Rome 
avec  les  lauriers  de  la  victoire;  les  rives 
du  Tibre  te  recevront  avec  joie,  cou- 
ronn6  de  palmes  triomphales. »  Gepen- 
dant  S^v6rien  fut  battu ,  et  Alexandre , 
le  prStre  du  dieu,  pour  sauver  Tinfail- 
libiiit^  de  Toracle,  substttua  au  premier 
ordre  cet  autre  :  «  Ne  marche  point 
centre  TArmtoie;  il  s'ourdit  centre  toi 
des  complots,  et  tu  pdriras  de  la  bles- 
sure  d'une  fl^e. »  Un  trait  vint  effec- 
tivement  percer  S^v^rien  au  milieu  de 
la  bataille  et  lui  dta  la  vie.  V^rus,  en- 
voy^ par  Marc-Aurdle,  vengea  sa  d^- 
faite. 

Une  revolution  importante  cban- 

feait  Tancienne  dynastie  des  Arsacides 
e  la  Perse;  Artashir  commen^ait  la 
dynastie  nouveUe  des  Sassanides,  Tan 
226  de  notre  ^.  Khosrov,  roi  d'Ar- 
menie  et  Arsacide,  comprit  quelle 
importance  avait  pour  TArmenie  ce 
diangement  politique  qui  le  mena^iit 
personnellement.  II  declara  done  la 
guerre  i  Artashir,  et  Tobligea  k  quitter 

e,"  JJvraism,  (Armbnte*^ 


la  Perse  pour  s^enfuir  dans  I'lnde. 

L'usurpateurprevitau'il  ne  peurrait 
jamais  assurer  sur  sa  tete  la  couronne , 
tant*qu'il  aurait  un  adversaire  aussi 
redoutable  que  Khosrov ;  il  voulait  s*ea 
d^faire  II  ouelque  prix  que  ce  fdt.  II  c;ut 
recours  k  la  perfldie  d*un  certain  Anag , 
chef  de  la  maisen  des  Sur^iens  Pan- 
lavi,  alli^  aux  Arsacides,  il  est  vrai, 
mais  devoue  k  la  nouvelle  dynastie  per- 
sane.  II  fut  convenu  qu'Ana^  se  reti- 
rerait  en  Arm^nie  avec  sa  famiUe,  pr^ 
du  roi  Khosrov,  comme  proserit  poli- 
tique, qu'il  prendrait  les  apparences 
d*un  sincere  d^vouement,  pour  trouver 
plus  ais^ment  le  meyen  de  le  surprenr 
are  et  de  le  tuer  avec  tous  les  siens. 
Pendant  cette  fuite  simulee,  sa  femnie 
mit  au  monde  un  fits,  qui  convertira 
ce  pays  au  christianisme.  Le  nem  de 
cet  enfant  est  saint  Or^goire,  sur- 
nomm^  rilluminateur.  Admirable  con- 
duite  de  la  Providence,  qui  fait  du  fils 
de  Tassassin  de  Khosrov  rap6tre  de 
rArmenie^  Tami  et  le  guide  spirituel 
du  fils  du  roi  assassin^! 

Car,  pour  reprendre  le  fil  des  ^v6- 
nements,  nous  dirons  au*Anag,  hono- 
rablement  re^  par  Knosrov,  captiva 
facilement  sa  cenfiance  et  fut  ^lev^, 
en  peu  de  temps,  aux  premieres  digni- 
ty. Le  trattre  saisit  la  premiere  occa- 
sion de  frapper  son  bienfaiteur;  il  le 
poignarda  done,  et  cherdia  son  salut 
dans  la  ftiite.  II  ne  put  echapper  k  la 
poursuite  des  gardes  du  roi ,  qui  le  mas- 
sacrerent.  Toute  sa  famille  fiit  enve- 
lopp^  dans  une  commune  proscrip- 
tion, a  Texception  du  jeuneGr^oire, 
mie  sa  nournce,  pieuse  femme  chr^ 
tienne  nomm^  Sophie,  emmena  k  Ce- 
sar^. Ul  il  fut  baptist  et  ^lev^  dans  la 
foi  chr^tienne.  D*un  autre  c6te,  le 
jeune  Tiridate,  fils  de  Khosrov,  fut 
conduit  a  Rome,  dans  la  crainte  que 
quelque  criminelle  tentative  n'^teignlt 
dans  sa  personne  la  race  arm^enne 
des  Arsacides.  Tiridate  jnrandit  et  se 
forma  dans  la  ville,  au  milieu  des  exer- 
cices  militalres;  il  fit  mdme  parmi  les 
legions  romaines  plusieurs  campasnes 
centre  les  barbares ,  dont  les  premieres 
invasions  mena^aient  Tempire. 

Diocl^tien,  pour  r^mpenser  sa  va- 

6 


82 


L'UIflVERS. 


leor,  voikhit  lui  reodre  le  royaume 
dentil  avait  €U  d^poss^^,  ei^ant, 
avec  raison ,  que  oe  prince,  devena  le 
ild^e  alli^  des  Romains,  ferait  de  la 
puissance  arm^nienne  le  plus  aolide 
fempart  de  rempire  centre  la  puis- 
sance persane.  Tiridate,  arri^r^  en  Ar- 
m^nie  h  la  t^te  de  quelques  troupes 
rorAaines,  fut  re^  avec  entbousiasme 
par  les  principaux  chefs  du  pays,  et, 
en  peu  de  temps,  il  recouvra  tout  le 
territoire  occupy  par  I'ancienne  mo* 
narchie  arm^nienne.  Alors  Gr^oire 
vient  de  G^ar^  h  la  cour  du  roi;  sea 
pr^ications  ^vang^liques  alarment  Ti- 
rklate  encore  idolAtre,  gui,  tenant  en 
outre  a  ddcouvrir  son  online ,  ordonne 
qae  le  saint  soit  |>r6cipite  dans  une  d- 
terne,  od  il  langult  quatorze  ans. 

Le  roi,  frapp^  d'une  maladie  que 
Ton  juge  incurable,  est  miraculeuse- 
ment  gu^ri  par  le  saint  retir6  de  la  ci- 
teme.  II  se  convertit  h  la  foi  de  J6sus- 
Christ,  et  le  christianisme  s'^tend  ra* 
ptdement  par  tout  le  royaume. 

Apr^s  la  mort  de  Tiridate,  Sana- 
droug  II,  prdfet  de  la  viile  de  Phafda- 
garan,  se  revolta,  et  appela  plusieurs 
tribus  barbares  campees  au  nord  de 
TArnY^nie,  qui  se  jeterent  sur  les  pro- 
vinces limitrophes.  Alors  le  patriarche 
Verthan^  alia  tronver  lempereur 
Constance,  pour  le  supplier  de  fairo 
mooter  sur  le  tr6ne  d'Arm^ie  Rhos- 
rov,  fils  de  Tiridate  et  son  l^itime 
successeur.  « Ainsi ,  hii  dit-il ,  nous 
serons  soumis  ^  votre  puissance,  qui 
vtent  directement  de  Dieu ,  et  non  pas 
a  oelle  des  Perses,  cette  nation  sans 
Dieu.  »  Conform6ment  k  sa  demande, 
Rhosrov  ful  reconnu  roi. 

Diran,  son  successeur,  apostasia  la 
foi  du  Christ,  h  Texempfe  de  Julien, 
dont  il  osa  placer  I'effigie  dans  T^glise 
patriarcale,  pour  que  les  fidties  lui 
rendissent  un  culte  public.  Ce  scandaie 
foumitau  patriarche  Housig  Toccasion 
de  d^ployer  son  courage.  II  entra  dans 
le  temple,  saisit  Timage  et  la  foula  aux 
pieds.  Le  saint  tronva  la  recompense 
de  son  E^le  dans  le  martyre. 

Aradiag,  successeur  oe  Diran,  ex- 
ctta  par  sa  dtfecKon  la  colore  de  Va- 
ienfinien,  qui  tua  Tiridate,  son  frere. 


qu'il  tenait  en  otage.  Neraea,  rittwlic 
patriarche  de  ce  temps,  vfnt  i  Omw- 
tantinople,  et,  par  sa  mMialfon  pni- 
dente ,  op^  une  rdcondliatiott  qm  an- 
rait  €U  durable,  si  Valens  ii*avait 
mopin^ment  suooM^  k  VateotiDien, 
dont  la  mort  laissait  le  trdne  vacmt, 
et  s*il  n^avait  ouvert  sod  r^gne  far  an 
acte  d'hostilite,  en  envoyant  des  trou- 
pes contre  FArmenie. 

Th^odose,  ^iu  peu  de  temps  apres, 
devient  plus  favorable  aux  Amteiens; 
il  ^tablit  Pap  h  la  p^aee  de  sob  pere 
Arscha^,  que  le  roi  de  Petse  taoait 
prisonnier  dans  ia  forteresse  de  VOu- 
ofiC)-  Comme  oe  prince  s'6tait  rebelK, 
il  fut  strangle  par  ordre  de  Tempe- 
reur. 

Varazdat ,  fils  de  Pan ,  toit  en  otag« 
a  Constantinople.  Sa  rorce  inoonipara- 
ble  le  foisait  nommer  par  les  Grecs 
THercule  arm^nien;  son  courage  n*e- 
tait  pas  moins  grand,  et  il  en  anlt 
fourni  des  preuves  en  plusieurs  occa- 
sions. Th^ose  Tenvoya  r^gner  a  b 
place  de  son  p^e;  mais,  par  une  juste 
d^Gance  que  16gitimait  la  conduite  des 
rois  pass^,  trop  prompts  a  otdifier 
leurs  devoirs  d'ob6issanoe  dans  h 
bonne  fortune,  il  garda  sea  deux  ffis 
Arschag  et  Vagharsdiag.  Theodosr 
agissait  prudemment ,  car  Varazdat  r- 
fiisa  bientdt  de  reoonnattre  son  suze- 
rain. L'exil  fut  la  punition  de  ce  ddit, 
et  ses  deux  fils  forent  en  mtee  temps 
pr^posfe  au  gouvemement  de  PAr- 
mraie. 

La  cour  de  Constantinople  esperait 
que  la  rivalitg  et  Topposition  d*int6rto 
tiendraient  respectivement  les  deux 
princes  en  bride,  et  affaibliraient  pro- 
portionnellement  leur  puissance.  La 
politique  de  Th^odose  ^ft  savante;  il 
cherchait  a  d^truire  d^un  seul  coup  b 

Suissance  de  rArm^nie,  perp6tuel  foyer 
e  guerres  et  d'hostilit^;  car  le  peupte 
arm6nien  ob^issait  toujours  k  regret 
au  peuple  grec,  dont  il  n*admettait 
plus  le  symbole  religieux,  et  d^  qu'il 

(*)  On  la  nommait  ainsi  paroe  que  ks 
detenus  qui  y  6uueDt  enfermo  ne  sortaicnt 
jamaii  de  ces  cachots ,  oe  mii  rappelle  kt 
oablicttet  des  chlteaiu  ttodenifs. 


arm£nie. 


en 


se  sentait  la  force  de  secouer  le  joug  it 
\e  faisait. 

La  roort  de  Vagharsdiag  et  la  fai- 
blesse  d'Arsace  permirent  aa  roi  de 
Perse  d'entrer  en  Arm^nie  et  de  s'em- 
pirer  de  plusieurs  provinces.  Ensoite 
il  fit  avec  Fempereur  Th6odose  un 
traits  qui  partageait  le  royaume  entre 
les  Romaios  et  les  Persans.  Toutefois 
on  laissa  encore  quelaue  temps  one 
forme  d'independance  a  ce  pays  con- 
quis;  aiosi  Schabpour  et  Vrham-Scba- 
bouh  ooDserv^nt  le  titre  de  roi. 
Aprte  eux ,  le  sceptre  passa  aaz  mains 
du  jeane  fils  de  Vrham-Schabouh,  le- 

3 net  opprima  tellemeot  ses  sujets  pen- 
ant  un  r^gne  de  six  ans,  oue  le  roi 
de  Perse  Tenferma  dans  la  torteresse 
de  rOubli,  et  ainsi  s'^teignit  en  Arme- 
nie  la  race  des  Arsacides  (*). 


(*)  Nous  donnons  ici  le  tabieaa  de  U 
seconde  bnnche  de  U  maison  dei  Anacides. 
Let  auteun  arminieDs  ne  peavent  a  eax 
seuls  fournir  sur  cetle  quetdon  dei  reosei- 
gnements  sufBsanU.  II  &11ait  consalter, 
comme  M.  Saint-Martin  Ta  fait,  les  faisto- 
riens  des  autres  peoples. 

At.J.C.  38.  Ancham,  Mre  deTigra- 
ne  I*',  r^ne  h  t/Aeaat  par  I'ordre  d'Oro- 
des  I*r,  roi  des  Parthes.  H  est  encore  ap- 
pele ,  par  Josephe  et  par  Moise  de  Kboren, 
Monobaxe  et  Manovsz.  Dans  la  dironique 
syriaque  de  Denys  de  Tel-Mahar ,  il  est 
nomme  Maanoa  Sapheloul. 

xo.  Abaanou,  fils  de  Sapheloul. 

Dep.  J.  C.  5.  Abgare,  fils  d'Ancham, 
sumomme  par  les  Sjriens  Oucbama  (le 
Noir)  ,  et  appdi  Monobaze ,  par  Josephe , 
comme  les  antres  princes  de  sa  fiimille. 

3a.  Anane  on  Ananoim,fib  d'Abcare, 
regno  a  Adesse,  et  Sanadroag,  fils  d*une 
HEur  d' Abgare ,  ^^ne  sur  una  partie  d« 
VAnnenie  et  de  rAdiabeae. 

36.  Sanadrong  fut  perir  le  fils  d*Abgare, 
et  r^e  seuL  Ce  prince  eat  appeli  late 
par  Josephe.  Des  descendants  d' Abgare  eon- 
tinuerent  de  regner  i  ^dcsse  sous  son  an- 
toritd. 

58.  levant,  ism  par  sa  mere  de  la  race 
des  Arsacides ,  s*empare ,  apres  Sanadrong , 
de  la  portion  de  TAfmenie  qui  lui  apparte- 
nait  Des  descendants  d'Abgare  et  d'Izate  oii 
Sanadroug  continuireot  de  regner  a  tdtmt 
«t  dans  VAdiabene.  tirovant  etendit  aon^em- 
pir«^  MIT  toute  IWrmenie ,  sans  doitle  spros 


Alors  le  partage  d^finitif  du  royaunie 
s*op6ra,  et  la  partie  orientale  la  plus 

la  mort  de  Tiridatel<%  frera  de  Yologte  I«% 
roi  des  Parthes. 

78.  Ardaches  HI ,  fils  de  Sanadroug,  eal 
retabli  sur  le  trdiie  de  son  pere  par  YolO' 
gese  I*',  et  r^e  sur  toute  I  Armenie.  II  est 
appel^  par  les  Grecs  Ezedares  on  Axidves. 
if  tut  plusieon  fols  retabli  et  chan^  par  his 
Romams.  II  eut  pour  oomp^titeur  n  prince 
parthe,  nomme  Parthamasiris,  qni  fvt  plu- 
sieurs fois  plaoi  snr  le  tr6ae  par  les  rois 
parthes  et  chasse  par  Tnyan. 

ISO.  Ardafut  lY,  fib  d*Aidaehes  Ili, 
qui  ne  re^  que  quelques  jours. 

xai.  Dwaa  I*',  son  frere. 

14a.  Tigrane  IT,  son  frere.  Ce  roi  fut 
chasse  par  Lucius  Verus ,  qui  met  sur  le 
tr6ne  eu  sa  place,  vers  Fan  i6x,  un  cer- 
tain Soheme,  qui  itui  issud'une  autre  bran- 
che  de  la  fiuniUe  des  Arsacides. 

178.  Yagharsch  on  Yologese.fils  de  Ti- 
grane YI, 

xpS.  CboflPo^ooKbosrov  I*',  sumomme 
Medz  (le  Grand),  son  fils,  assassin^  par 
Anag,  prince  Anacide  de  Perse. 

a 33.  Ardeschir,  premier  roi  de  Pane, 
de  la  race  des  Sasaanides,  se  rend  maitre  de 
TArmenie,  qui  reate  soumise  wax  Persans' 
pendant  vingt-sent  ans,  sous  ii»  regno  et 
sous  cdni  de  son  nls  Scbahpoor  I*'. 

^Sg.  Dertad  ou  Tkidaie  n ,  sumomme 
Medz  (le  Grand),  fils  de  Chevoea.  II  fut 
retabli  par  les  Romains  aur  le  trdne  de  son 
pere.  Le  gboenA  Ardavact  Mantagouni ,  qui 
ravait  eleve  et  tir^  des  mains  des  Persans , 
fut  eM  sbarabied,  et  eut  sous  son  regne  la 
phis  grasde  part  au  gonvcmement.  II  est 
sans  doute  le  m^me  qu'nn  certain  Artabas- 
des,  que  Tribeilkis  PoHion  (in  Yrier. ) 
appelle  roi  des  Armeniens. 

314.  InlerrA^aprwlamartdeTiridate. 
Sanadroug ,  pnnce  Anaeide ,  usnrpa  alors 
le  titre  de  roi  dans  le  nopd  de  rAmMe , 
et  ftigour,  de  b  raee  das  ArdarounieosY  eu 
fit  autant  dans  le  midi.  Mais  leur  usurpation 
fut  deoouitedmifo. 

3x6.  Chosroes  ou  Khosrov  11,  uxmrnuwui 
P*bok'hr  ( le  Petit) ,  Os  de  Tiridale. 

3a5.  Dinm  U,  aan  file. 

S4t.  Arsace  ou  Anefaag  Ul^aon  fils. 

370.  Pap,  son  fils,  appelle  nm,  par 
Ammien  MarisalliB. 

377.  Yanurtad,  fils  d'Anob,  hmd'Ar- 
sace  in. 

383.  Anace  lY,  et  YaiarMceon  Yaghsr 
schag  If ,  fils  de  Pap. 

6. 


84 


L'UiMVERS 


ricfae  et  la  plus  vaste  resta  li  la  Perae. 
Le  gouYeraeur  charge  de  son  adminis- 
tration prit  le  titre  de  marzban,  ou 
garde  oeiafronHire,  La  condition  du 
peupl6  armenien  devint  fort  triste :  il 
etaii  sous  le  joug  de  deux  puissances 
rivales  et  ennemies,  qui  n^avaient 
d^autre  int^rSt  commun  que  celui  d^af- 
faiblir  et  de  pressurer  le  malheureux 
royaume  dont  dies  se  disputaient  les 
lambeaux.  Aux  horreurs  de  Tanarchie 
et  de  la  ^erre  civile  se  m^I^rent  les 
persecutions  du  fanatisme  religieux. 
La  partie  persane  de  rArm^nie  ^it 
attirte  vers  le  magisme,  soit  de  vive 
force,  soit  par  tons  ies  autres  genres 
de  seductions  possibles:  la  partis  greo- 
que,  tout  en  restant  diritienne,  n*d* 
tait  pas  cependant  en  unit6  de  conunu- 

3SI.  Anace  IT,  seuL 

3S7.  Le  royaume  d^Armenie  eit  pulagi 
entre  les  Romains  et  les  P^nani.  Anaoe 
ooDtioue  de  souvemer  k  portion  oeciden- 
tale ,  comme  vasial  de  rempereor  de  Cons- 
taatinqple;  Le  roi  de  Bene ,  Schahpour  m, 
donna  la  partie  qui  hu  ^it  echue  k  Kbot- 
rov  ni ,  isio  d*one  autreliranche  de  la  race 
det  Anaddes. 

389.  Apret  la  mort  d*Arsaoe  IT,  I'empe- 
reur  grec  donna  le  fouTeraement  de  TAi^ 
menie  greoque  an  general  XLaiavon,  fiU  de 
Sbantarad,  de  h  iamille  des  Gamiaragant, 
issue  de  la  noe  des  Anaddes  de  Perw.  Ce 
S^eralsesoumitbient6t  apresiUosrov  m. 

Si  se  reconnut  alon  tributaire  de  Fempire. 
tte  oonduite  mtontenta  le  roi  de  Perse, 
Babram  IT ;  Kbosrov  fut  alon  detrdne  et 
enfermi  dans  la  forteresse  de  rOobli  dans 
Susiane. 

39ft.  TrbanKSrfwbouh  on  Bahfam-Sdudi- 
penr,  frere  de  Uosrov  m ,  place  siir  le 
tr6ne  par  Bahram  IT. 

4x4*  Kbosrov  m,  retabli  apres  la  mort 
de  son  firere  par  leroi de  Pene  tadedjerd  I«r. 

41 5.  Sdiaboub  ou  Schabpour,  fib  du  roi 
Jetdedjerd  I«r. 

4x9.  Interrtgne.  Le  patriarohe  Sabag  II, 
et  son  neveu  le  g^eral  Tartan,  de  la  race 
des  Mamigon^ans,  prince  de  Diunon ,  gou- 
▼enwrent  T  Armenie. 

4aa.  Aidadies  TT,  nommi  ensuile  Ar- 
daschir,  fils  de  Trbam-Sdiaboub ,  est  placi 
sor  le  tr6ne  par  le  roi  de  Perse  Babram  T. 

41S.  II  est  ditrdni  par  le  mAme  prince , 
et  le  rojranme  des  Arsacides  est  detruit. 


nion  avec  I'^glise  de  Constantinonle. 
Ainsi  les  Ann%niens  6taient  diTiaes  I 
la  fois  par  la  oonqu^te  et  par  la  doc- 
trine (•). 

(*)  MABIBASS  ou  OOUTKUrXUmS  SOMMBS  PAS 
I.BS   aOM   DE   PKBSK. 

4a8.  Teb  Mibir  Scbabpour,  nommi  per 
Bahram T.  Le  prince  Taban,  de  la  race  des 
Amadounicns,  fut  charge  de  radministn- 
tion  inlerieure  dn  pays ,  et  Tartan  Mami- 
goq^n ,  prinoe  de  Daron ,  sumommi  Bfedi 
( le  Grand^ ,  fat  pendant  dix-nenf  ans  sban- 
bied  ou  gen^ralissime. 

44a.  Tasag ,  prinoe  des  SiounieDB,  Domme 
martban  par  Jesdedjerd  II,  roi  de  Pene. 

45a.  Adronnizt-Aracfaagan,  Penan,  BOB- 
BIN aossi  par  Jesdedjerd  II. 

464.  Aderveschnasb-IoanentbtiifBBRan, 
nomm^  per  Fyrouz. 

481.  Sabag,  asbied  on  chevalier,  de  k 
raoe  des  Pagratides.  U  se  revolta  oontre  la 
Penans,  et  momul  en  eombattant  oontre  eui, 
apres  un  goureniement  d'un  an  et  sept  mois. 

483.  Schahpour  -  Mihran^am ,  Persan, 
nonuni  par  Fyrouz,  gouverne  pcn<iantsix 
mois.  Nikbor>Teschnasb-Tad,  Pwsnn, 
me  ausii  par  Fyrouz,  gouveme 
quatremois. 

484.  Ant^n,  Persan,  nonime  par  Fj> 
rouz ,  pendant  sept  mois. 

485.  Tabam,8urnommeMedz(leGnBd)» 
de  la  race  des  Mamigoneans,  prince  de 
Daron,  fils  de  Hmaieag,  fr^  de  Tartan  le 
Grand.  II  s*etait  revolte  contre  les  Persan, 
et  il  contraignit  le  roi  Balasch  de  le  nommer 
manban.  u  fut  ensuite  confirme  dans  aa 
digoite  par  Kobad,  fi«re  de  Balasch  -et  fib 
de  Fyrouz. 

5i  z.  Tart ,  frere  de  Tahan.  Tl  se  revolu 
oontre  Kobad ,  qui  le  destitua  et  renuncna 
prisonnier  k  Gtesipbon, 

5x5.  Poarzan,Persan,nooune  par  Kobad 

5iS.  Mejcj ,  prinoe  de  la  race  des  Kenou- 
niens,  nomme  par  Kobad,  et  confirme  par 
son  fils  Chosroes  le  Grand,  ou  Koarou- 
Anouschrewan. 

548.  TenscbabouhouTenschahpour,  Per> 
san,  place  aussi  par  le  m^e  roL 

55a.  Tetchnasrahnn ,  Penan,  plac«  aussi 
par  le  mteie  roi. 

558.  Taraztad ,  Persan,  nonuneaoasi  par 
Chosroes. 

564.  Souran-Djihrveschnasbouhen,  Per> 
san,  eouverneur  plao^  par  le  mdme  roi.  11 
lot  tue  par  Tartan,  prince  des  Blanugoacaiis 
qui  s*elait  r^olte. 


ARM^^MIfi. 


8& 


Les  Perses  exer^ient  une  propa- 

gande  active  pour  arr^ter  Ite  progr^ 
u  diristianisme,  et  pour  ^ndre  les 
£rincipes  du  magisme.  En  Fan  441, 
Mihir  Nerseh,  g6n6ral  persan,  fiit  en- 
voy^ avec  beaucoup  de  prtoes  et  de 
soJdats  pour  remplir  une  mission  relf- 
gieuse.  Menaces,  orients  et  proroes- 
ses,  tout  fut  ein{Hoy6  pour  gagner  ou 
epouYanter  les  princes.  II  leur  adressa 
une  proclamation  qui  contient  un  expo- 
se curieux  de  la  doctrine  de  Zoroastre, 
et  de  la  manidre  dont  on  concevait  h 
cette  ^poque  le  christianisme.  En  voici 
le  contenu : 

«  Mihir  Nerseh  aux  Arm^niens,  salut. 

«  Sachez  que  tout  bomme  habitant 
sous  le  cid,  qui  ne  suit  pas  les  pr^- 
ceptes  de  la  religion  de  nos  p^res,  est 
sourd,  aveugle  et  s^uit  par  les  g^nies 
d^Ahriman.  £n  effet,  avant  Texistence 
des  cieux  et  de  la  terre,  ie  grand  dieu 
Zervan,  ou  le  temps  som  homes ,  of- 
frit  un  sacrifice  pendant  mille  ann^s, 
en  disant :  «  Peut-£tre  aurai-je  un  fils 
nomm^  Ormuzd,  qui  fera  le  ciel  et  la 
terre. «  Or  il  conqut  dans  son  ventre 
deux  fiis.  Fun  parce  qu'ii  offrait  des 
sacrifices,  et  I'autre  en  prof^rant  le 
mot  petd-^tre.  Lorsqu'il  oonnut  qu*ils 
^taient  dans  son  ventre,  il  dit:  «  Celni 
qui  viendra  le  premier,  je  lui  donnerai 
la  royaut^.  *  Mais  celui  qui  avait  €t6 
con9udans  ledoute,  lui  fendit  le  ventre 
et  sortit  par  cette  ouverture.  Zervan 
lui  dit :  «  Qui  es-tu?  ~  Je  suis,  t6- 
pondit-il,  ton  fils  Ormuzd. »  Zervan 

571.  Tartan,  surnomme  Pliok*hr  (le 
Petit )  prince  de  Daron ,  de  la  race  des  Ma- 
m^neans,  fils  de  Yasag,  fils  de  Yart, 
prince  independant ,  soutenu  par  les  Grecs : 
ibais  &  h  fin  il  fat  dliassi  par  les  Persans. 

578.  Mihran-Djihnreghon,  Persan,  nom- 
tak  par  Chosroes  le  Grand. 

5o3.  Sempad,  surnomme  Pazmaiagfath 
( le  Yictorieox) ,  de  la  race  des  Pagratides , 
marzban  d'Ann^nie  et  da  pays  de  Tcrgan, 
nomm^  par  Chosroes  n ,  ou  Khosroo-Perwiz. 

601.  Darid,  prince  de  la  race  des  Sahap- 
bouuens,  nonuni  par  le  mteie  roi. 

6«5.  Yarazdirots,  de  la  race  des  Pagra^ 
fides,  fils  de  Sempad,  nomme  aussi  par 
lUiosrou  Perwig,  gouveme  pendant  sept 
ans. 


lui  dit:  «  Mon  fils  est  lumiuctix  et  ex- 
hale une  affr^le  odenr;  toi  tu  es  t6- 
ndl)reux  ex  ami  du  mat. »  Gomme  il 
pleura  am^rement,  il  hii  donna  la 
royaut6  pour  mille  ans. 

«  Ayant  engendr6  un  second  fils,  il 
le  nomma  Ormuzd ,  etenleva  la  royaut^ 
Ik  Abriman  pour  la  lui  ddnner,  en  di- 
sant :  «  Puisque  j'ai  offert  des  sacrifices 
pour  toi,  c'est  a  toi  maintenant  d'en 
ofirir  pour  moi. 

«  Et  Ormuzd  fit  le  ciel  et  la  terre ,  et 
Abriman cr^ centre  lui  lemal  ,divisaQt 
ainsi  en  deux  les  cr^tures :  les  anges , 

2ui  viennent  d'Ormuzd ,  et  les  dewsC). 
!'est  ainsi  que  tons  les  biens  existants 
aux  cieux  etJci-bas  viennentd'Ormuzd ; 
tandis  que  Abriman  est  I'auteur  de 
tout  le  mal  qui  arrive  dans  les  deux 
mondes.  De  m^me  Ormuzd  a  fait  tout 
ce  qui  est  bon  sur  la  terre ,  et  ce  qui 
n'est  pas  bon,  c'est  Abriman  qui  ra 
fait.  Ainsi  Ormuzd  a  cr^  I'homme , 
et  Abriman  les  maux ,  les  maladies  et 
la  mort.  Toutes  les  inimiti^  et  les  ^v^ 
nements  fAcheux ,  les  guerres  pleines 
d^amertumes  sent  les  ceuvres  du  mau- 
vais  principe;  et  les  choses  beureuses, 
la  puissance ,  la  gloire ,  les  bonneurs , 
les  avantages  du  corps,  la  beauts  du 
visage,  I'^loquence,  la  long6vit6,  tout 
cela  est  le  produit  du  bon  principe. 
A  tout  ce  qui  est  diffi6rent,  il  s*y 
trouve  m^M  un  ^l^ment  mauvais. 

«  Tous  ceux  qui  disent  que  Dieu  a 
ct66  la  mort,  et  que  le  mai  et  le  bien 
proc^ent  de  lui ,  sont  dans  Terreur. 


cette ptmition ,  parce  qu'il  avait  mang^ 
une  figue.  Cependant  si  Thomme  ne 
porte  pas  d'ordinairc  cette  haine  k  un 
autre  nomme,  encore  moins  Dieu  aux 
autres  bommes ;  celui  qui  dit  cela  est 
aveugle  et  sourd;  il  a  ^t6  seduit  par 
les  dews  d* Abriman. 

« II  est  encore  une  autre  erreur  que 
oommeUent  ceux  qui  disent  que  Dieu , 
le  crdateur  des  cieux  et  de  la  terre ,  est 

(*)  Norn  des  mauvais  genies,  dont-  on 
croit  relrouver  le  radical  dans  les  mots  i/ia- 
foAsn,  devil,  etc. 


#« 


L*UniV£RS. 


desoeodu  et  est  ne  d'une  femme  nom- 
ine Marie ,  dont  le  aiari  s'appeUe  Jo- 
seph. Beaucoup  sa  soot  ^ar^  a  la 
auite  de  c^  homme.  Si  le  pays  des  Ro- 
maiDS  est  enseveli  dans  la  plus  profonde 
ignorance,  et  8*il  s*est  s^par^  de  notre 
religion  par£ute,  c'est  qu*il  ne  s'in- 
quiete  pas  du  mal  qui  peat  en  rdsulter. 
Pourquoiy  vousautreSfVOOs  linez-voas 
aux  m^mes  ^arements?  La  religion 
que  suit  yotre  mattre  est  aussi  la  vfftre , 
et  nous  cberchons  k  vous  convertir , 
etant  obliges  de  rendre  oompte  un  jour 
a  Dieu  de  vous. 

«  Ne  Yous  fiez  pas  a  vos  chefs  que 
vous  noromez  Nazar6ens,  car  ils  sont 
tr^s-fourbes ;  et  ce  qu'ils  vous  ensei- 

J^neot  pr  leurs  paroles ,  ils  ne  peuvent 
e  r^liser  par  leurs  oeuvres.  Manger 
de  la  viande,  disent-ils,  n'est  pas  un 
p^he,  et  eux- monies  refusent  d'en 
manger.  II  est  i>erniis  de  prendre  une 
femme,  disent-ils  encore,  et  cepen- 
dant  ils  refusent  de  regarder  les  rem- 
mes.  C'est  un  ^rand  p6ch6,  selon  eux, 
d*amass€r  des  nchesses ;  et  ils  estiment 
plus  la  pauvret^  que  I'opulence.  lis 
respectent  la  misere  et  ils  condamnent 
les  riches.  Ils  se  rient  de  la  fortune, 
et  m^prisent  la  gloire.  lis  aiment  les 
v^tements  grossiers,  et  ils  pr6f&rent 
ce  qui  est  vfl  aux  choses  honorables ; 
ils  louent  la  mort  et  m^prisent  la  vie ; 
ils  d^aignent  d'avoir  une  post^rit6, 
et  ils  honorent  le  c^libat.  Si  vous  les 
ecoutiez,  et  si  vous  vous  ^loigniez  de 
vos  femmes,  la  fin  du  monde  viendrait 
promptement. 

«  Mais  je  n'ai  pas  I'intention  de  vous 
mettre  par  ecrit  toutes  leurs  erreurs , 
car  il  y  a  encore  beaucoup  de  choses 
qu'ils  disent.  Le  pire  de  tout  ce  que 
nous  vous  avons  6crit,  c'est  de  pr6- 
cher  aux  hommes  que  Dieu  a  ^t^  mis 
en  croix,  qu*il  est  mort,  qu'il  a  ^t6 
enseveli ,  qu'ensuite  il  est  re8suscit6 , 
et  qu'il  est  mont^  aux  cieux.  N*^tait-il 
pas  digne  de  vous  de  jueer  ici  des  doc- 
trines aussi  d6testables  f  Les  dews  ne 
sont  pas  m^hants ;  ils  ne  peuVent  ^re 
ni  pris,  ni  tourment^s  par  les  bommes ; 
bien  moins  encore  le  Dieu  cr^teur  de 
tous  les  ^tres ;  choses  absurdes ,  que 
nous  rougissons  de  r^p^ter. » 


Les  ^v^ues ,  assemble  par  fe  pa- 
triarche  Joseph  I**,  protest^nt  centre 
oet  6dit ,  et  demeur^rent ,  avefc  la  masse 
de  la  nation,  in6branlablement  atta- 
ches k  la  foi  chretienne.  Quelques 
princes  apostasi^rent  Get  exemple 
produisit  d'heureux  r^ultats,  chose 
assez  extraordinaire ,  car  le  people ,  in- 
dign^decette  Idchet^ ,  courtaux  armes ; 
le  patriotisme  est  exalte  par  le  zele  re- 
ligieux,  et  les  ^trancers  idolfttres  sont 
repouss^.  Les  nomnreusesforteresses 
dont  les  Persans  avaient  courert  le 
pays,  sont  d^truites;  et  tout  ce  qui 
tombe  sous  la  main  des  Arm^niens  est 
emmene  en  captivite ,  hommes ,  femmes 
etenfants.  Les  temples  des  mages  sont 
renvers^,  et  les  omements  qni  les 
d^corent  servent  h  embellir  les  6glises 
du  vrai  Dieu.  De  cette  maniere,  dit 
I'historien  £lis6e,  a  la  place  des  idoles 
on  vit  briller  la  croix  du  Christ  re- 
dempteur,  et  tous  les  cosurs  s^onvri- 
rent  k  Tesp^rance. 

Comme  la  puissance  des  Perses  etait 
trop  formidable  pour  que  les  Arme- 
niens  esp6rassent  pouvoir  r6sister  seids 
h  de  nouvelles  attaques,  et  commc, 
d*un  autre  c6t6,  ils  savaient  que  llin- 
miliation  des  demi^res  d^faites  avait 
allum6  diez  leurs  ennemis  la  soif  de 
la  vengeance,  ils  songerent  a  chercher 
un  appui  et  des  ddfenseurs  parmi  les 
Grecs.  lis  en  voydrent  done  une  ambas- 
sade  k  Constantinople.  L'empereur 
Th^odose  expirait,  et  Maroien,  son 
successeur,  partisan  troo  zele  du  con- 
cilede  Cbalo6doine,  renisa  de  prater 
son  assistance  ii  des  schismatiques. 
D*apr^  les  conseils  de  quelques  pa- 
triciensmal  intentiono6s,  il  enroya  un 
ambassadeur  a  la  cour  de  Perse ,  en  lai 
recommandant  de  traiter  sacretement 
avec  le  roi.  II  promettait  en  outre  de 
s*opposer  k  toutes  tentatives  d'insur- 
rection  des  Arm6niens.  Ceux-ci  ne  lii- 
rent  point  d^courag^  par  cette  defec- 
tion; reunis  sous  le  commandemeot 
deVartan,  ils  alldreot  presenter  ba- 
taille  a  Tennemi  sur  les  frontieres  de 
la  Gtorgie,  et  remport^nt  une  tic* 
toire  conflate.  Le  roi  de  Pme  aooourt 
venger  la  dtfaite  de  Tapostat  Vasag , 
son  general ,  et  trouve  Vartan  dans  lea 


ARMANI  E. 


plaines  d'Artaxate.  Vartao  avait  eavi- 
roo  8oiiuint(B-six  mille  bommes  soqs 
ses  ordres,  tous  dispos(68  a  Ycrser  la 
derniere  ^outte  de  leur  sang  pour  la 
oonsenration  de  leur  foi  et  de  leur  pa- 
trie.  Les  ^vdques,  les  pr^tres  et  les 
docteurs  de  la  nation  ^taient  venus  se 
roller  aux  troupes,  non  pour  prendre 
une  part  active  au  combat ,.mais  oour 
releTer  le  courage  46S  soldats  par  leurs 
exhortations. 

Le  2  juin  de  Tann^  451,  les  deux 
arroees  en  vinrent  9ux  mains.  «  La  ba- 
taiile,  dit  le  m^me  faistorien  £lis^, 
56  livra  a  la  fin  du  printemps;  et  les 
prairies  verdoyantes  furent  d^vast^ 
par  la  foule.  Le  coeur  saignait  a  la  vue 
des  monceaux  de  cadavres ;  ajoutez  a 
ce  spectacle ,  les  lamentations  des  bles* 
ses ,  le  rdle  des  mourants ,  la  fiiite  pr^ 
cipit^e  des  Idcbes,  des  feromes;  les 
gemissements  des  enfants,  les  plaintes 
des  parents  et  des  amis ,  et  tous  aures 
encore  une  faible  id6e  de  cette  scene 
d^hirante.  «  Le  brave  g6n^ral  Vartan 
cueillit ,  dans  oette  joum^ ,  la  palme  • 
du  martyre ;  il  p6rit  au  fort  de  la  m^ 
tee « et  sa  mort  ne  fit  c[u*exciter  les 
adorateurs  du  feu,  qui  firent  main 
basse  sur  tous  ceux  qui  r^sistaient. 
Les  d6bris  de  Farm^  arm^ienne  se 
r^fugierent  dans  une  forteresse ,  que 
le  manque  de  vivres  et  les  assauts  rei- 
t^r^  des  Persans  les  forewent  bientdt 
d'abandonner.  Sept  cents  hommes  se 
frayerent  un  passase  autraversdePar* 
in&  ennemie,  et  opererent  leur  retraite; 
le  reste  fut  massacre. 

L'apostat  Vasag  fut  investi  du  gou- 
vernement  du  pays ;  mais  ses  compa- 
triotes  rouffirent  de  $e  soumettre  a 
son  autorite.  Aussi  les  voyait-on  de- 
serter en  foule  les  villes  et  les  bour- 
gades ;  T^pouse  quittait  sa  coucbe ,  et 
le  nouveau  mari^  la  chambre  nuntiale; 
les  vieillards  ^taient  arracbds  a  leur 
demeure ,  et  les  petits  enfbnts  au  sein 
de  leurs  m^res.  Les  jeunes  bonunes 
et  les  jeunes  filles  fuyaient  dans  les  re- 
traites  inaccessibles  des  montagnes. 
Yivre  a  la  maniere  des  b^tes  sauvages 
au  fond  des  antres,  leur  paraissait  pr^ 
ferable  k  une  vie  tranquille  dans  leurs 
demeures ,  achetee  au  priz  de  Tapos- 


87 

tasie.  lis  se  nourrissaient ,  sons  mur- 
murer,  d'berbes  et  de  racines,  ou- 
bliant  leurs  mets  aoooutura^ ;  et  les 
vodtes  de  leurs  souterrains  leur  sem- 
blaient  aussi  douces  a  babiter  que  de 
riches  appartements  lambriss^.  Les 
chants  quils  fiaiisaient  entendre  ^taient 
les  psaumes,  et  IXcriture  sainte  ^tait 
leur  lecture.  Ghacun  se  tenait  lieu  a 
soi-m^me  de  temple  et  de  pontife; 
leur  corps  6tait  le  saint  autel ,  et  Tlime 
la  victime  de  I'holocauste.  lis  suppor- 
taient  avec  calme  la  perte  de  leurs 
biens;  et  jamais  il  ne  revenait  a  leur 
m^moire  qu'autrefois  ils  les  avaient 
possed^.  Toutes  leurs  esp^rances 
etaient  en  Dieu ;  et  la  seule  demande 
qu*il8  lui  faisaient,  c'6tait  qu'il  ne  les 
exposdt  pas  h  devenir  les  temoins  de 
la  ruine  de  sa  sainte  £glise. 

Telle  est  la  peinture  touchante  que 
les  historiens  contemporains  nous  font 
des  malheurs  de  TArm^nie;  et  cepen* 
dant  ils  n'^taient  en  quelque  sorte  que 
le  prdlode  de  plus  effroyaoles  d^stres 
qui  ne  cesserent  de  Taocabler. 

La  famille  des  Vahan  fournit  de 
nombreux  chefs  distinguds  par  leur 
valeur,  et  qui  organiserent  contre  la 
Perse  une  guerre  sanglante  de  par- 
tisans. Ils  reussirent  k  confirer  la  di- 
gnity de  marzban  k  Sabag ,  de  la  fa- 
mille des  Pagratides ;  mais  TArmenie 
resta  toujours  soumise  k  la  Perse ;  et 
le  schisme  religieux ,  alors  croissant , 
favorisa  les  vues  des  Chosro^,  enje- 
tant  de  nouvelles  semences  de  division 
entre  les  Grecs  et  les  Arm^niens. 

«£n  ces  jours,  dit  Jean  Thistorien, 
parut  Mahomet ,  audacieux  novateur , 
qui  pretendait  ^tre  envoys  de  Dieu 

Eour  pr^cher  les  verites  de  la  foi  d*A- 
rahara  et  de  la  loi  de  Molse.  Injuste 
dans  sa  justice ,  d^honore  dans  ses 
honneurs,  parjure  dans  ses  serments, 
ses  offrandes  ne  pouvaient  £tre  agr^^es 
de  Dieu ,  et  sa  piti6  6tait  cruelle.  Cela 
devait  ^tre;  jamais  le  filji  de  Tesclave 
n*a  pu  ^tre  Tn^ritier  <^  Tenfant  libre ; 
et  le  fiddle  n'a  jamais  pu  ceder  ses 
droits  a  Tincroyant. « 
Les  forces  d^  Tlsma^lite  etaient 

Srandes,  et  il  d^fit  toutes  les  troupes 
c  Tempefeur  Heraclius.  Bient6t  la 


Of? 


L'UNIVEaS. 


plaine  de  T Ararat  fut  envahie;  Tovin 
nit  emport^  d*assaut.  Un  norobre 
considerable  d'habitants  perdit*la  vie. 
Trente-cinq  mille  furent  yendus  et  em- 
men^  dans  la  Syrie. 

La  force  de  fa  nation  ^tait  totale- 
ment  ^teinte,  quand  le  voile  sombre 
du  Sud  fut  dMiir^,  et  qu'il  s'^lera 
contre  nous  un  ventmortef  et  brdlant, 
qui ,  dess^ant  toutes  lesjeunes  plan- 
tea  du  jardin  denotre£glise ,  ies  fi^trit 
de  son  souffle:  alors,  au  bout  de  peu 
d*annto ,  la  race  des  Isma^iites ,  apr^ 
avoir  mis  la  confusion  et  le  d^rdre 
dans  le  Nord ,  s'empara  de  tout  le  pays. 
A  cette  Tue,  Theodore  et  d^antres 
grands,  saisis  d*6pouvante,  se  sou- 
mtrent  a  oes  brigands ,  faisant  un  pacte 
avec  la  mort  et  une  alliance  avec  Ten- 
fer.  Us  avaient  abandonn^  le  parti  de 
Tempereur ,  qui ,  aprte  avoir  rassem- 
bie  one  armM  nombreuse ,  vint  en  di- 
ligence en  Arm6nie  pour  ies  soumettre. 
li  ne  trouva  d*ob^ssants  que  Ies  G^r- 
giens,  ce  qui  redoubia  la  colere  de 
Constantin ,  en  sorte  qo*il  pensait  il 
exterminer  notre  nays.  Beureusement 
Ies  supplications  du  patriarche  Ners^ 
changerent  la  resolution  du  roi,  qui 
vint  avec  des  sentiments  pacifiques 
dans  la  ville  de  Tovin ,  et  pnt  son  lo- 
gement  dans  le  palais  patnarcal  (*). 

Apr^s  un  ou  deux  engagements ,  Ies 
Arabes  rest^rent  mattres  de  TArm^- 
nie ,  et  prirent  pour  otages  Ies  femmes , 
Ies  fils  et  Ies  nlles  de  tous  Ies  princes 
du  pays.  Theodore  accompagna  Ies 
Arabes  en  Syrie  avec  toute  sa  maison , 
et  il  V  raourut.  Son  corps  fut  rapports 
et  depose  dans  le  tombeau  de  ses  an- 
otftres.  Lorsque  le  patriarche  Nerses 
cut  appris  sa  mort,  et  qu'il  ne  vit  plus 
le  pays  inquiete  par  Ies  Arabes,  il  re- 
touma  a  son  siege,  et ,  de  concert  avec 
Ies  grands ,  il  nomma  prince  de  I'Ar- 
menie  Hamazasb,Mamigonean,homme 
qui ,  outre  son  amour  pipur  Ies  lettres , 
et  son  instruction  variee,  s*effor^.ait 
encore  de  computer  la  gloire  de  la  va- 
leur  de  ses  anc^tres. 

Aflranchis  du  joug  onereux  et  dur 
des  Arabes,  Ies  Anneniens  se  sou- 

O  Jean,  pair.,  pag.  147,  r«a. 


mirent  a  Tempereur,  a  oni  Nerses  de- 
manda  qu'Hamazasb  fut  cree  cmo- 
palate  et  gouvemeur  de  rArmenie. 
informe  de  cela,  remir  fit  massacrer 
tous  Ies  otages  des  Armeniens,  au 
nombre  de  plusieurs  mille.  A  partir 
de  oe  jour,  i'esprit  de  disoorae  fut 
soscite  par  Dieu,  et  jete  au  mllico  du 
camp  des  Arabes,  qui  se  leverent  Ies 
uns  contre  Ies  autres;  et,  tirant  leor 
glaive,  firent  entre  eux  un  bornble 
carnage.  L'emtr  lui-m#me  fut  toe,  et 
on  lui  en  substitua  un  autre  (*). 

Les  troupes  arabes  d^gypte ,  en  fai- 
sant leur  paix  avec  Pemperenr,  em- 
brasserent  la  foi  chretienne ;  et  seize 
mille  environ  recurent  le  bapt^me. 
Mava,  eiu  generaf,  apres  le  meurtre 
de  I'autre  emir,  eut  la  domination  uni- 
verselle  des  Arabes,  et  il  fit  regner  la 
paix  dans  tout  son  empire. 

Hamazasb,  apres  avoir  e^  rtr&a 
trois  annees  de  la  dignite  de  curopa 
late,  arriva  au  terme  de  sa  carriere, 
mourot,  et  fut  reuni  a  ses  peres. 

Sempad  le  Pagratide  pnt  en  maio 
le  commandemeni.  Alors  Merwan  faX 
envoye  dans  TArmenie  comme  o»fi- 
gan  (**),  et  il  livra  defrequents  ooiriiats 
a  la  nation.  Tous  ceux  qull  prenait, 
il  les  tuait  et  les  mettait  en  pieces  sur- 
le-champ.  Vt\e  de  Sevan ,  situee  dans 
le  lac  de  Khegham ,  ne  fut  pas  empor- 
tee  des  la  premiere  attaque ,  roais  un 
ou  deux  ans  pins  tard.  Elle  leur  fht  li 
vree,  et  tous  ceux  qui  se  trouvaient 
dans  la  forteresse  furent  emmenes  cap- 
ti£s;  et,  apres  avoir  pris  tout  le  butin, 
ils  la  detruisirent  de  fond  en  comble. 

L'an  85  de  Tdre  des  Arabes ,  Abd-el- 
Melek  etait  calife.  Ses  troupes  gui 
etaient  en  Armenie  mirent  tout  a  fai 
et  a  sang,  comme  si  le  demon  avait 
souffle  en  eux  sa  rage.  Au  moyen  de 
promesses  trompeuses,  de  fausses  es- 
perances  et  d^autres  seductions,  on 
par  vint  a  reunir  dans  un  meme  lieu  les 
corps  formes  de  la  noblesse  a  cheval . 
et  lis  inscrivirent  leurs  noms  dans  Ic 

(*)  Jean,  patr.,  pag.  i63,  174. 

(**)  T/osdigan  etait  un  prefet  ou  prooonsuK 
charge  de  regir  Ic  pays  dont  il  recevaii  Ic 
gouvemement  au  nom  du  calife. 


arm£nie. 


89 


tribunal,  comme  si  Ton  devait  leur 
distribuer  ia  solde  annuelle.  Enstnte , 
lorsqu'iis  furent  d^sarmes,  on  les 
renferma  dans  l*^lise  de  la  ville  de 
r^akhdchivan;  puis,  ayant  mure  les 
portes  avec  des  briques ,  on  leur  bou- 
cha  aiDSi  toutes  les  issues.  Ces  infbr- 
luB^s ,  se  Toyant  surpris ,  cbant^rent 
le  cantique  des  enfants  de  la  foumaise, 
tandis  que  leurs  impitoyables  bour* 
reaux ,  apr^  avoir  enlevd  le  toit  de 
r^lise,  la  remplirent  de  feu ,  dont  les 
flammes  s'^lev^rent  avec  plus  de  fiirie 
que  celles  de  Babylone,  au  moyen  des 
inati^res  inflammables ,  du  toit  en  bois 
de  r^glise,  et  des  briques  ardentes  que 
Ton  versait  sur  eux;  et  cqiendant  leur 
cantique  d'actions  de  grdces  ne  cessa 
qu'avec  le  dernier  soupir.  Ces  bar- 
bares,  pour  se  d^livrer  de  la  crainte 
que  leur  inspirait  des  soldats  aussi 
braves,  firent  prisoaniers  ceux  que  le 
feu  avait^pargn^,  et  les  conduisirent 
li  Tovin ,  a'ou  ils  les  envoy^rent  sous 
bonne  escorte  h  Damas  {*). 

Abd-el-Melek  eut  pour  successeur 
au  califat  son  fils  Velid,  qui,  6tant 
mort  au  bout  de  peu  de  temps ,  fut 
remplac^  par  son  ir^re.  Puis  vint  Omar, 
qui  nt  tourmenter  cruellement  Vahan , 
lequel ,  apr^  avoir  fait  les  plus  belles 
actions  pour  le  nom  du  Christ ,  re^ut 
a  Houroudjaph ,  vilje  de  Syrie ,  la  cou- 
ronne  du  martyre. 

Les  fonestes  effets  de  Tesprit  de 
parti,  qui,  dans  les  matidres  reli- 
gjieuses,  d^ff6n^re  toujours  en  fana- 
tisme ,  sont  oien  sensibles  dans  ce  fait 
rapports  par  Je  m6me  historien,  avec 
un  air  d'aporobation  tacite ,  bien  qu*on 
voie  des  chr^tiens  recourir  a  I'inter- 
vention  des  musulmans  pour  s^vir 
centre  d*autres  ebr^tiens.  «  Pendant 
qu'£lie  ^it  patriarche,  dit  Jean ,  un 
certain  Nerses,  archev^que  d*Alba- 
nie ,  ^gar^  par  un  orgueil  impie ,  se 
d^clara  le  partisan  de  la  secte  ae  Chal- 
cedoine;  et,  ayant  gagn^  la  princesse 
qui  etait  aiors  charg^  du  gouverne- 
ment  de  cette  province ,  ils  travaillaient 
de  concert  h  precipiter  le  pays  dans  la 
scandaleuse  ner^sie  de  Leon ,  qui  fait 

(•)  Jean ,  pair. ,  pag.  1 6? ,  17',. 


de  J6sus -Christ  un  homme.  Ce  fait 
6tantvenu^  la  connaissancedes  grands, 
lis  en  avertirent  le  grand  patriarche 
Nerses,  qui,  malsr^-le  zele  qu'il  d^* 
ploya ,  et  les  nomoreuses  lettres  qu'il 
leur  envoya  a  deux  reprises  diverses , 
pour  leur  expiiquer  la  vraie  foi,  ne 
put  les  ramener  de  leur  funeste  er- 
reur.  Alors  le  patriarche,  mettant  a 
execution  les  conseils  de  sa  sagesse 
et  de  sa  longanimity,  ^rit  une  lettre 
au  calife  Omar,  dont  voici  la  teneur : 
«  Nous  avons  dans  notre  pays  un  pre- 
lat  et  une  princesse  qui,  sortis  des 
yoies  de  la  sonmission  qu*ils  doivent 
a  Votre  Majeste,  refusent  aussi  de 
nous  ob^ir,  a  nous  qui  mentionnons 
toujours  votre  nom  dans  nos  prices , 
tandis  qu*eux  cherchent  a  soumettre 
notre  pays  au  roi  de  la  ville  de  Rome; 
et,  si  vous  ne  vous  empressez  de  les 
enlever  d'ici,  ils  s'entendront  avec  les 
Romains  pour  ce  qui  regarde  les  tri- 
buts  et  les  autres  reglements.  »  En 
recevant  cette  lettre,  le  calife  traita 
avec  la  plus  haute  distinction  Tenvoye 
du  patriarche;  et  lui-m^rae  lui  d^p^- 
cha  le  chef  de  ses  eunuques,  avec 
Fordre  de  lui  amener  sur -le- champ 
les  deux  coupables.  Lorsqu'il  fiit  venu 
en  Arm^nie ,  il  s'empara  de  leurs  per- 
sonnes ,  les  chargea  de  fers ,  et ,  les 
faisant  mooter  sur  des  chameaux  y  il 
revint  vers  le  calife.  Ainsi  la  pru- 
dence du  patriarche  ^loigna  de  son 
troupeau  la  mort  spirituelle,  en  fai- 
sant punir  Ners^  et  la  princesse.  En- 
suite  il  consacra  un  autre  arcbev^que, 
et  le  mit  h  la  place  de  Th^r^tique. » 

Vers  ce  temps,  le  calife  envoya 
comme  osdigan  de  TArm^nie  un  cer- 
tain l£chid ,  qui ,  arrive  dans  la  ville  de 
Nakhdchivan,  nomma  dans  chaque  pro- 
vince des  commandants  et  des  gouver- 
neurs.  Lorsqu*il  eut  soumis  la  province 
de  Pakrevan,  il  y  6tablit  pour  prefet 
un  de  ses  favoris,  lequel  ^tant  venu 
dans  le  convent  de  Saint-Gr^oire, 
situd  en  ce  canton ,  y  fixa  sa  r^dence. 
II  avait  €t6  frappe  de  la  beauts  et  de  la 
magnificence  ae  tous  les  objets  d'or  et 
d'argent  servant  au  culte  des  autels^ 
des  couleurs  vives  et  varices  du  rideati 
du  sanctuarre  et  des  v^tements  sacer- 


92 


L'UNIVERS. 


en  son  pouvoir,  avec  toute  sa  famille, 
par  renet  d'une  ruse.  Les  aatres  sei- 
gneurs du  pays  subissent  le  m6me 
sort ,  ce  qui  ne  put  se  faire  sans  effu- 
sion de  sang.  Captifs  et  encbatn^s, 
ils  sent  conduits  a  la  cour  de  rtoira- 
bied  par  Sempad,  qui  esp^rait  qu*on  lui 
donnerait  h  regir  une  grande  partie  de 
rArmenie,ouqu'onlecongedieraitaTec 
beaucoup  d*honneurs  et  de  pr^ents. 
Mais ,  lorsqu'il  ivt  en  presence  de  1*6- 
mirabied,  on  lui  fait  partager  les 
mtoes  chatnes ,  et  ii  est  jet^  en  prison , 
sans  ^ard  pour  les  bons  precede  de 
son  ancienne  alliance.  Aprts  queloue 
temps ,  les  princes  arm^niens  et  altn* 
niens,  qui  6taient  prisonniers,  sont 
soumis  a  T^preuve  d  embrasser  ie  mu- 
sulmanismeven  reniant  la  foi  du  Christy 
de  recevoir  des  presents  et  des  bon* 
neurs,  et  deretourner  dans  leur  patrie, 
au  sein  de  leur  fkmille,  ou  bien  de  ter- 
miner leur  vie  dans  les  supplices  et 
des  tortures  inouTes.  Comme  on  les 
effrayaitchaque  jour  par  des  menaces, 
et  qu'on  prolongeait  leur  detention , 

3uefques-uns ,  sur  la  foi  des  promesses 
e  Temirabied,  abjurent,  et  d^autres, 
sans  se  soumettre  h  la  circoncision , 
faisaient  cependant  esp^rer  que ,  dans 
un  temps  opportun,  its  condescen- 
draient  aussi  a  ses  d^sirs. 
Le  sbarabied  Sempad  oppose  coura- 

{^eusement  au  mensonge  un  amour  de 
a  vianU  digne  de  ses  aieveux  blancs. 
D*une  foi  parfaite ,  et  confiant  dans  les 
promesses  de  la  vie  ^temelle ,  il  ne 
pr^te  Toreilie  a  aucune  de  leurs  pro- 
positions, aimant  mieux  mourir  pour 
le  Christ,  aue  de  jouir  de  la  vie  dans 
le  p^^.  A  se  contenta  de  cette  r^ 
ponse :  Je  ne  puis  abandonner  la  reli- 

gion  chr^tienne,  don  que  la  grdce  du 
apt^me  m'a  accord^,  pour  me  sou- 
mettre a  votre  culte  impie.  Lorsqu'on 
comiut  sa  volont^  inebranlable ,  on 
songea  k  le  faire  p^r  dans  les  tour- 
ments.  La  grAce  celeste  lui  permit  de 
se  racheter,  par  la  mort  du  corps ,  de 
la  mort  ^ternelle de  TAme ;  et,  en  evi- 
tantde  tomber  dans  J'apostaste,  il  s'as- 
sura  rhonneur  du  martyre.  Tous  les 
ordres  des  dir^tiens  enleverent  son 
corps  en  recitant  des  psaumes ,  au  mi- 


lieu des  btoMictioiis  et  du  d&ants  spi* 
rituels ;  et  ils  le  transfirdrent  dans  la 
cbapelle  de  Saint-Daniel  le  prophcte,  i 
rendroit  m^me  06  il  avait  A6  pr6cipite 
dans  la  fosse  aux  lion&. 

En  850,  Acbod  lePagrattdereeerait 
le  titre  de  prinee  des  princeM,  et, 
par  son  babilet^,  il  sut  n  bien  se  eoo- 
cilier  les  bonnes  grices  de  Fenipereor 
grecet  ducalifearabe,qu'il  fotreoooDo 
plus  tard  ro<par  Tun  etpar  Fantre.  U 
ville  qu*il  a  vait  pour  capitate  6tait  Gan, 
Kars  ou  Garouts,  situte  sor  le  fleuve 
Akhour^n,  dans  lepays  deyanant(% 
Sempad,  ills  d'Acbod^  fat  moins  ben- 
reux;  pris  dans  Tovin,  otk  il  s'^tjit 
enferm^  avec  ses  tr^sors,  il  resta  a  U 
merci  du  g6n6ral  arabe  Alisdiin.  La 
fortune  lui  devint  ensuite  (tos  iswon- 
ble,  et  sans  la  jalousie  des  grands,  qui 
craignaient  tOujours  r616vation  de  qwd- 
qu'un  d'entre  eux,  il  aurait  pu  d^vnr 
son  pays  du  jow  des  ^ransers.  Mail 
I'esprit  d'indivtdualisme  et  de  rivalite 
qui  a  toujours  perdu  la  nation  arme- 
nienne,  se  r^veilla  plus  forteroentdaos 
les  esprits;  les  seigneurs  pr^t^reot  kor 
assistance  au  genial  Toussouf,  d 
Sempad  fut  vaincu.  Apr^  un  an  de 
captivity,  il  mourut  mis^rablenieiit  a 
Tovin.  Son  fils  Acbod,  i^€»  defir^ 
essaya  de  le  venger.  A  la  Me  de  braves 
determine,  il  oourait  le  pays,  surpre- 
nant  les  bandes  arabes,  qu^il  tatill^ 
toujours  en  pidoes.  Les  seoours  qu'il 
reQut  de  Constantinople  lui  pennireDl 
de  livrer  une  bataille  rang^  dans  b- 
quelle  Youssoufeutle  dessous^etA- 
chod  se  vit  paisible  souverain  du  royan- 
me;  il  re^ut  mime  le  titre  ftstueux  de 
rol  des  roiSy  ce  qui,  dans  la  rialite, 
d^ignait  simplenient  sa  pr^mineooi 
ou  sa  suzerainet^  sur  les  autres  petits 
princes  ses  vassaux. 

Sous  le  r^ne  d'Apas,  son  frte,  lei 
^mirs  arabes  et  kuraes  du  Diarbekre 
se  revoltdrent  pour  conqu^rir  une  in- 
d^pendance  que  quelques-uns  n'ont  pas 
perdue  depuis  oette  epoqae.  Adiod  111 , 
fils  d* Apas ,  commit  la  faute  impardon- 
nable  de  diviser  son  pouvoir,  en  noin- 
mant  son  frere  roi  de  Kars.  Cetu 

(*)  ^oy*  1^  figures  a  4  et  29. 


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ARM^NIE. 


9S 


nouvelie  dynastie,  ainsi  que  oelledes 
Corigdans  dans  rAlbanie  araiteieniie, 
et  Ja^naison  des  Ardzrouniens  dans  le 
Vasbouragan,  ne  fireat  que  d^truire  le 
lien  d'unm  form^  par  la  restauration 
de  la  monarchie.  Les  princes  musul- 
mans  profltaient  habilement  des  riva- 
iit^  (voduites  par  la  diversity  des  in- 
t^rto  de  tons  oes  rois.  Toutefois 
Sempad  II,  ifils  d'Acbod  II,  eut  un 
regne  liriUant,  et  ayant  fix6  sa  r^i- 
dence,  il  y  bfttit,  suivant  la  tradition, 
miUe  et  une  e^lises,  par  lesquelles  le 
peuple  arm^nien  jurait  proverbiale- 
ment  dans  ses  serments  (*}. 

Au  commencement  du  onzieme  si^- 
cle,  lesTurcs  seldjoukides  se  montrent 
sur  les  fi-onti^res  d'Armto'e,  s*enhar- 
dissent  k  passer  TAraze,  et  ne  se  reti- 
rent  que  devant  le  sbarabied  Vasag, 
qui  ies  ddfait  beureusement.  La  terreur 
causee  par  rirruption  de  ces  barbares 

(*)  BTNASTIE   DIS   PAOBATIDU. 

Dep.  J.  C  748.  Achod ,  fils  dc  Tasa^  oree 
patrice  et  gouvemeur  de  rArmeDie  par  Mer- 
wan  n ,  dernier  calife  de  la  race  des  Om- 
iiiades. 

758.  Sempad ,  fils  d* Achod ,  tue  en  com- 
battant  contre  les  Arabes. 

781.  Achod,  sumommi  Mesager  carni- 
vore ,  son  fils. 

830.  Sempad,  sumoomi^  le  Confesseur, 
son  fils.  II  souffrit  le  martyre  k  Bagdad. 

859.  Achod,  samomme  le  Grand. 

890.  Sempad  I*',  dit  le  Martyr,  son 
fils. 

914.  Achod  11 ,  Bras  de  fer,  son  fils. 

9a  X .  Achod ,  frere  de  Sempad  I*',  se  foil, 
avec  Tappni  des  Arabes,  d^darer  roi  k 
Tovin. 

9«8.  Apas  siiocede  a  son  frere  Achod  11. 

95a.  Achod  HI ,  dit  le  Misirioordieux. 

977.  Sempad  U,  dit  le  Oominateur. 

989.  Kakig  ]«,  smrnonmi  Roi  des  rois , 
frere  de  Sempad  II. 

zoao.  Jean ,  nomme  aussi  Sempad ,  fiU 
de  Kakig  I<^ 

Z040.  Interrigne. 

zo4a.  lUkig  n,  fils  d'Achod  lY. 

X079.  II  ttt  assassine  par  les  Grecs  dans 
ta  forteresse  de  Cybistra,  et  la  monarchie 
des  Pagratides  en  Armenie  fut  entieremeot 
cteinte. 


inspira  au  roi  du  Vasbouragan  I'id^ 
de  e6der  ses  £tats  a  Tempereur  des 
Grees,  Basile,  k  condition  qu'il  lui 
donnerait  en  ^change  la  ville  de  S^ 
baste. 

Gette  concession  fut  fatale  aux  Ar- 
m^iens ,  parce  qu*elle  attira  pr^  d'eux 
des  voisins  dont  rambition  tendait  sans 
cesse  k  accrottre  leur  domaine;  aussi 
d^tachaient-ils  chaque  jour  du  royaume 
des  Pagratides  une  portion  de  leur  do- 
maine. Le  roi  de  Georgie,  se  coalisant 
avec  le  roi  Jean ,  ess^a  de  roister  aux 
tentatives  de  Basile  II ,  mais  sans  aucun 
succ^;  car  Tempereur  grec  ne  lui  par- 
donna  qvL^k  condition  qu^il  se  recon- 
nattrait  son  Yassal.  A  la  mort  de  Jean , 
les  princes  arm^niens  voulurent  se- 
couer  |e  jou^ ,  et  ils  fiirent  assez  heu- 
reux  pour  raire  lever  le  sidge  d'Ani, 
bloquee  par  les  Grecs.  Constantin  Mo- 
nomaque  soutint  les  droits  de  son  pr^- 
decesseur  Basile,  et,  apr^  avoir  pris 
de  vive  force  Tovin  et  Ani,  il  se  vit 
possesseur  tranquille  de  toute  TArm^- 
nie.  Gette  oonqu^te  ^it  mal  assuree, 
et  die  obligeait  les  Grecs  k  entretenir 
dans  le  pays  un  corps  de  troupes  con- 
siderable, pour  la  prot^er  contre  les 
attaques  continuelles  des  Seldjoukides. 
Tant  qu'ils  eurent  affaire  k  Thosril- 
Begh  ou  k  ses  g^6raux,  ils  se  defen- 
dirent  avec  avantage:  mais  quand  vint 
le  belliqueiu  Alp-Arslan  ou  le  IMm,  les 
Seldjoukides  chasserent  devant  eux  les 
Grecs  et  les  Arm^niens ,  et  m6me  s'em- 
par^rent  de  la  majeure  partie  de  la 
Gtorgie.  Ainsi  les  empereurs  de  Cons- 
tantinople perdirent  a  jamais  leur  au- 
torite  sur  rArm^nie. 

La  plus  grande  difficult^  qu'^prou- 
vent  les  conqutonts,  c'est  de  conser- 
ver  leurs  conqu£tes :  les  princes  seld- 
joukides en  sont  un  nouvel  exemple. 
D^  qu'ils  furent  maltres  de  FArm^- 
nie,  il  s'deva  parmi  eux  des  rivalit^ 
et  des  querelles  interminables.  L'il- 
lustre  maison  des  Orp61ians ,  originaire 
de  la  Chine  et  occupant  le  Mne  de 
Georgie,  profita  de  I'occasion  pour 
chasser  du  pays  les  Turcs,  et  pour  d6- 
livrer  en  m6me  temps  les  Arm^niens. 
David  II,  d  qui  ses  victoires  ont  valu 
le  nom  de  ReparcUeur,  commenqa  le 


04 


LTJNIVERS. 


premier  oette  tiehe.  La  tranqQillit^  ftit 
r^tabiie  jotqu'ii  rapparition  dcs  Mon- 
gols, qui,  80U8  Djinghis-Klian  et  son 
sttcceeseur  Oktay,  flrent  des  imiptioiiB 
dans  les  diffi^rentes  parties  de  TAr- 
m6nw  et  de  la  Q^rgie.  Les  Orpdians , 
s'^nt  Kttach^  k  leur  fi>rtune,  ftirent 
m^nag^  et  consenerent  ane  uertaine 
paissance. 

Les  Arm^niens  ^ient  moins  hen- 
reux  que  leurs  voisms  les  G^rgiens. 
Les  invasions  des  barlxires  avaient 
efface  les  derniers  vestiges  de  i*an- 
cienne  puissance  nationale,  h  l*excep- 
tion  de  la  petite  pnncipaut^  qu^un  cer- 
tain Rhoupen,  lors  de  Pextinction  de 
la  race  des  Pagtatides,  s'^tait  con- 
serve dans  les  gorges  da  mont  Taurus. 
Vers  I'an  1100,  ji  r<6poque  oii  les  Grot- 
s' afOuaient  d'Europe  en  Aste  pour  la 
defense  des  saints  lieux,  les  princes  de 
cette  maison  s'alK^ent  aux  chefs  la- 
tins, et  les  seooorurent  autant  qu*il 
etait  en  leur  purssanoe.  La  maison  des 
Rhoup6niens  subsista  quatre  siecles 
environ.  Econtons  to  savant  Saint- 
Martin  nous  raconter  comment  s^^tei- 
gnit  Icur  royatit6(*). 

«  Le  r^ne  de  L6on  IV  fut  court;  ce 
prince  p^it  en  1808  avec  son  oncle 
H^thoum,  par  la  perfidie  d'un  g^^ral 
mongol,  nommi6  Bilarghou,  qui  les 
fit  assassiner.  Le  irere  d^H^tnoum, 
Oschin,  conn^table  et  prince  de  Gant- 
choT,  se  mit  aussit6t  a  la  t^te  des 
troupes  poor  venger  la  mort  de  son 
neveu,  vainquit  Bilarghou,  le  chassa 
de  la  Cilicie  et  fut  proclamd  roi.  II 
mourut  en  1820,  apr6s  un  rdgne  de 
douze  ans  et  quelcfues  raois ,  ne  laissant 
qu'un  ieune  enfant  &g6  die  dix  ans, 
nomme  L^on,  qn'il  avait  en  d^unefille 
du  roi  de  Chypre,  de  la  maison  de  Lu- 
signan.  Les  aisoordes  civiles,  les  in- 
vasions des  Mamelouks,  des  Tartares 
et  des  Turkomans,  aohev^rent  de  r6- 
duire  I  la  derni^eextr^nit^  leroyaume 
d'Arm6nie  d^ja  consid^ahlemen  t  affai- 
bli;  c*^taient  des  devastations  et  des 
ravages  perp^tuels. » 

«  A  la  mort  de  Leon  V,  les  grands 

(*)  Memoires  siir  VArmt'nie,   lom.  I, 


d'Annteie  choisirent  alors  pour  lav 
roi  on  certain  Jean4eLaBigDm,neven 
du  roi  de  Cbypre  et  allie  de  la  ran 
royale;  ils  lui  donnireot  le  nom  de 
Gonstantin  III ,  et  le  cooroon^reDt  dam 
la  ville  de  Sis.  Ce  prince  ne  r^gna  qa^on 
an :  il  se  conduisit  si  mal  eC  se  fit  tri- 
lement  m^riser  par  sa  iftchet^,  que 
les  nobles  se  r^voit^eBt  contre  lui,  le 
tu^rent,  et  appelerent  au  tr6ne  sm 
fr^re  Guy,  o^leiire  dans  rempire  gra 
par  son  courage.  En  1846,  ils  cbos- 
rent  un  autre  prince  de  la  maison  de 
Lusignan,  qui  r^a  sons  le  nom  de 
Gonstantin  IV. 

«A  sa  mort,  on  diotat,  d'apres 
Tavis  du  pane  Urbain  Y,  an  prince  de 
la  maison  oe  Lusignan,  qui  porta  k 
nom  de  L6on  VI  et  fdt  le  demier  roi 
d'Arm^nie.  A  peine  dtait-il  snr  le  trdoe 
que  les  ^gyptiens  entrant  en  Olicie. 
Pour  s'opposer  h  leur  marclie,  il  es- 
vova  k  leur  rencontre  son  conn6table 
LitMirid,  qui  fut  vaincu  et  ta6  apra 
des  prodiges  de  valeur.  Lfon  alors  de- 
manda  en  suppliant  la  paix  au  sultaa 
des  Mamelouks,  qui  la  lui  aooorda,  m 
exigeant  de  lui  de  fortes  sommes  iTir- 

§ent.  Mais  ensuite,  inform^  que  le  rm 
'Arm^nie  avait  envoye  des  amba^a- 
denrs  en  Europe  pour  exciter  les  pria- 
ces  chr6tiens  contre  lui,  le  soitaa 
d'Egypte  r^olut  d*an6antir  le  royamoe 
d*Arm^ie;  il  donna  en  consequence  a 
son  g^n^ral  Schahar  Oghli  Torared'eii- 
trer  dans  la  Gilicie  avec  une  nombieiBe 
armde,  et  lui  enjoignit  de  poorsaiTre 
le  roi  k  toute  outrance.  Les  £gyptieos 
p6n^tr^eot  sans  difficulte  dans  la  D- 
licie,  prirent  et  brdlerent,  en  Tan 
lv371 ,  la  ville  de  Sis ,  vainquirent  le  rot 
L6on  et  son  gin^ral  Schahan,  fniaoe 
de  Gorigos,  qui  teient  veniis  les  ooo^ 
battre.  Le  roi  fiit  blesa^  dans  cett? 
bataiUe,  et  oontraint  da  se  r6f«^kf 
dans  des  montagnes  inaoeesaibles  oq  0 
se  tint  longtemps  cach^,  et  on  le  out 
mort;  mais,  en  1878,  il  revint  daos  b 
ville  de  Tarse,  dans  le  temps  que  sa 
femme  Marie  allait  ^pooser  Otiboc. 
due  de  Brunswidk ,  (|ui  devait  6tre  coo- 
ronn^  roi  d'Arm^nie.  L6on  cfaercha  a 
entamer  encore  des  n^gociations  avec 
le  sultan ,  qui ,  sdr  du  resultat  de  cetu 


AEMlftl^tE. 


»5 


iutte,  ne  voulut  entendre  h  aucune 
proposition.  Les  Egyptiens  reRommen- 
cerent  U  guerre  avec  une  nou?elle  fu- 
reHT)  en  1874,  d^vast^rent  le  pays, 
prirent  tootes  les  viUes  et  les  chateaux , 
et  enfln  contraignirent  le  roi  de  se  ren- 
fermer  dans  la  forteresse  de  Gaban, 
avec  sa  femme,  sa  filte  et  le  prince 
Scbaban,  ok  its  soatinrent  un  si^e  de 
neuf  mois,  et  furent  oblige,  par  le 
manque  de  vivres,  de  se  rendre  pri- 
sonmers.  Ge  triste  ^v^nement  arriva 
en  Tan  1875.  L^on  VI  fut  conduit  avec 
sa  famille  k  Jtosalem,  et  de  )^  au 
Cairo,  oili  it  resta  eaptif  pendant  six 
ans.  En  1381 ,  il  obtint  sa  d^livrance 
par  la  mediation  de  Jean  I*',  roi  de 
Castille.  II  passa  ators  en  Europe,  alia 
d'alxird  ft  Rome,  puis  en  Espagne,  a 
la  Gourde  son  lit)^ratear;  il  vintensuite 
en  France,  ou  il  fixa  son  s^jour.  » 

Le  r^e  de  ce  prince,  issu  de  Til- 
lustre  maison  des  Lusignans  et  le  der- 
nier monarque  de  I'Arm^nie,  n'a  €t6 
qu'une  suite  de  revers  et  d'infortunes. 
L'ineertitude  et  les  obscurity,  triste 
fruit  de  la  l>arbarie  de  ces  dges,  qui 
noi^s  cacbent  les  premidres  ann6es  de 
son  av^nement  autrdne,  n^ont  pu  ftre 
dissip6es  par  les  recbercbes  de  rhisto- 
rien  Micbel  Tcbamtcfaian ,  ni  par  la  cri- 
tiqae  6clair^  de  M.  Saint-Btartin.  Nous 
savons  seulement  que,  fait  prisonnier 
dans  une  bataille ,  il  languit  au  Cairo 
dans  une  longue  captivity.  B^vr^  de 
sa  prison  par  le  roi  de  Castille,  son 
parent,  H  passa  en  Espagne,  oh  il  de- 
vint  successivement  seigneur  de  Ma- 
drid et  d'Andujar;  de  tli  il  vint  en 
France,  ou  nos  rois  Ini  accorderent 
le  chdteau  de  Satnt-Ouen;  et,  apr^s 
avoir  attir^  sur  sa  personne  Ves  bonnes 
graces  du  souverain  pontife  et  des  rois 
d*Angleterre,  il  mourut  h  Paris,  le  19 
novembre  1391 ,  et  fut  enterr^  dans  la 
cbapelle  du  convent  des  C^lestins.  Son 
tombeau,  depose  dorant  quelques  an- 
nto  dans  le  mus^  des  Petits-Augus- 
tins,  a  €U  r6uni  aux  tombes  royales 
des  cataoombes  de  Saint-Denis.  On  -lit 
sur  son  ^itaphe  le  titre  de  dnqui^me 
roi  latfn  ae  VArmirde ,  ce  qui  veut  dire 
Qu'il  ^tait  le  cinquieme  aes  rois  de 
1  Arm^nie ,  apres  rextinction  de  la  ligne 


masculine  de  la  dynastie  des  Kboup^ 
niens  (*). 

(*)  DTHASTIK   BSS   RBOUPUIIBirt. 

Dep.  J.C  loSo.  Rhoiipeii  P^,  mimomme 
Medt,  le  Gfand ,  pu«Dt  de  Kakig  II ,  deroier 
roipagratide. 

1095.  Goadantin  ou  Onutantin  !■« ,  mq 
fils. 

I  zoo.  Thoros  ou  Theodore  I**,  ton  fils. 

z  ia3.  Leron  ou  Leon  1%  sou  frere»  eoi- 
men^  prisonnier  a  Constantinople  oil  il 
meurt  dans  la  captivite. 

1x38.  Interregne. 

1144.  Thoros  ou  ThMore  n,  ills  de 
Leon  I*'. 

I  x68.  Thomas ,  prince  laiin ,  beau-pere 
de  llioros  U ,  gouveme  avec  le  titre  de  haUe 
ott  regent 

iiOg.  Heleh,  frerede  Thoros  II. 

ix^4>  RhottpenH,  fils  dl^lienne,  frere 
de  Tlioroi  n  et  de  M elefa. 

I X 85.  Leon  n ,  surnommi  le  Grand,  frere 
de  Rhoupea  II. 

XX  98.  II  est  cooronni  ivi  par  Cotttid, 
arche^ue  de  Maycace. 

iai9»  Zabel  on  Isabelle,  sa  ille. 

xaao.  Philippe,  son  man,  fib  de  Bohi- 
mond  lY,  priooe  d'Aotioche. 

xaaa.  Interrj^gne. 

iaa4.  Heihouu  ou  Haython  I'',  fib  de 
Constantin ,  seigneur  de  Pardserpert ,  issu 
de  la  famille  rotate. 

1967.  Leon  ni,  son  fib. 

1189.  Haython  11,  son  fib ,  abdique. 

xa93.  Theodore  II,  son  fr^ 

X  295.  Haython  II ,  iikabli,  abdique  encore. 

1396.  Scsnpad,  son  {tktt, 

xa98.  €onftantin  II,  son  frere. 

x3oo.  Haython  n,  encore  r^tabli,  abdi 
que  pour  la  troisieme  et  derniere  fois. 

x3o5.  L^n  lY,  fiJs  de  Theodore  III. 

x3o8.  Oschin,  frere  de  Haython  II. 

i3ao.  Leon  Y,  son  fib. 

z34a.  Constantin  III,  de  Lusignan,ttom- 
me  auparavant  Jean  (en  arm^ien  Bjivaa), 
fib  d*Amauri  de  Lusignan ,  prince  de  Tyr, 
frere  de  Henri  H ,  roi  de  Cliypre ,  et  d'une 
fiUe  de  Lkm  m,  roi  d'Armenieu 

1 3 4  3.  Guy  (en  armenien  Koridon  ou  Gid), 
son  fir^re. 

x343.  Constantin  lY,  aussi  de  la  maisoxi 
de  Lusignan. 

x363.  Interregne. 

X  365.  Leon  Vl ,  parent  de  ConsUmtin  I Y. 

x375.  nest  eminent  prisonnier  en  ^{«- 


90 


L'UNIVERS. 


A  peine  le  royaume  d'Arintoie  ve- 
nait-ii  de  finir  dans  la  personne  de 
Leon  VI ,  que  Timour  leng,  ou  le  Boi- 
teux,  apres  avoir  conquis  la  Perse  et 
la  Syrie ,  accourait  ddsoler  ce  pays  par 
ses  rava^  et  ses  massacres.  Sa  mort , 
arrivee  a  Samarcande  (*)  en  1406,  d^- 
iivra  rOrient  de  ce  terrible  fl^u  de 
Dieu.  En  1008,  Shah  Abbas  renouvela 
toutes  ces  horreurs ,  lorsqu'il  prit  d'as- 
saut  la  ville  de  Julfa  et  qu^il  la  depeu- 
pia ,  pour  tratner  sa  population  a  tra- 
vers  les  montagnes  et  les  d^erts  jusque 
dans  les  faubourgs  de  sa  capitale,  ou 
ces  exiles  fonderent  une  autre  ville  du 
nom  de  Julfa. 

La  Perse  retint  sous  sa  domination 
les  parties  orientales  de  rArmenie^qui 
continent  a  ses  fronti^res,  et  de  petits 
^mirs  kurdes,  proteges  par  les  monta- 
gnes qui  couvrent  ce  pays  au  sud ,  eri- 
gdrent  en  principautes  ind^pendantes 
le  territoire  qu'iis  devaient  d'abord 
administrer  au  nom  du  sultan,  tear  le- 
gitime suzerain. 

Le  reste  de  Tancien  royaume  d'Ar- 
m^e  fiit  compl^tement  soumis  k  la 
Porte  Ottomane,  qui  le  divisa  en  plu- 
sieurs  pachalicks  r^s  par  des  prefets 
ou  pachas.  Au  commencement  de  ce 
siteie,  la  Russie,  qui  pousse  toujours 
ses  conqu^tes  vers  rint^rieur  de  TAsie, 
apr^  s'^tre  empar^  de  la  G6orgie,  a 
pen^tr^  dans  les  provinces  armenien- 
ties,  et  depuis  quelques  ann^  Tim- 
portante  place  d*£rivan  {**)  est  tomb^ 
en  son  pouvoir.  Nul  doute  que,  dims 
un  avenir  assez  rapproch^,  die  ne  de- 

te ,  et  soa  royaume  est  entierement  conqub 
^ar  les  in^deles. 

tSgS.  Leon  meurt  k  Paris. 

(*)  Un  fait  assez  curieux  eC  qui  merite- 
rait  &Hn  ¥erifi£  par  les  voyageurs ,  c*est 

Sue  sulvant  la  tradition  Tamerlan  eroporta 
ans  Samarcande  tons  les  Kvres  qu*il  trouva 
soit  dans  la  Perse  ou  TArm^e ,  et  ils  furent 
entass^  Hans  une  large  tour  ou  personne 
ne  pouvait  entrer.  Si  la  chose  est  vraie ,  on 
pourrait  encore  troinrer  la  de  predeox  tre- 
son  lilleraires. 

(**)  fovan  G^  vers  le  mois  d*OGtobre 
1S27  aux  attaqnes  de  Paskewitsch,  qui ,  en 
rhonneur  de  ce  triomphe ,  a  requ  le  litre 
de  prince  dltrivan. 


vienne  maltresse  de  tout  le  pajrs.  I^ 
majeure  partie  des  Armdoieos  suhrant . 
coinme  nous  Tavons  dit,  un  rit  ood- 
forme  en  plusieurs  points  h  ceini  de 
FEglise  russe,  est  naturellement  fdoi 
portde  a  se  rapprocher  d'une  natkn 
cbr^tienne  que  des  Turcs ,  avec  lesquds 
eile  n*a  aucune  communaut^  de  godts 
ni  d*idte.  Aussi  le  parti  annteien  fa- 
vorise-t-il  sous  main  la  cause  des  Ros- 
ses, et  depuis  un  demi-siMe,  on  les 
voit  ^mijgrer  par  masses  et  refluer  ven 
les  provinces  centrales  de  reoipire  roos- 
covite,  oH  ils  trouvent  securite  et  pro- 
tection. La  plus  considerable  des  emi- 
grations qui  aient  eu  lieu  rfoemment 
est  celle  qu'op^ra  le  oomte  Latzarew, 
apres  les  conqu^tes  du  g^^ral  Faskr- 
witsch.  Plus  de  huit  mule  fianiiUes  le 
suivirent  de  TAderbaidjan  en  Russie, 
et  trois  mois  sufifirent  k  ce  depUo^ 
ment  Les  frais  de  voyage  ne  s*eiere- 
rent  qu'l^  quatorze  mille  ducats  et  qia- 
tre  cents  roubles  d'argeat.  Moyennaat 
cette  somme  assez  modique,  la  Russie 
gagna  quarante  mille  sujets  laboricoi 
et  pleins  d'industrie.  La  perle  quV 
prouva  la  Turquie  par  suite  de  cettr 
emigration  fut  incalculable;  la  pfas 
^rande  partie  de  rAderbaidjandemeiira 
inculte  et  deserte,  et  le  tresor  fotdi- 
minu6  d*un  million  six  cent  miUe  roo- 
bles,  somme  que  le  oommeroe  et  rin- 
dustrie  des  Armdniens  y  appoftaicot 
chaque  ann^  (*). 

mus  termineroDS  ici  nos  conside- 
rations politiques  sur  Tbistoire  des 
Arm^iens,  en  citant  Fadmirable  fiae- 
ment  el^iaque  qui  cl6t  le  trofsieme 
et  dernier  livre  de  Molse  de  Khoreo. 
L*ecrivBin  se  lamente  sur  le  triste  sott 
de  sa  nation ,  qui ,  d^ir^  int^rieo- 
rement  par  le  scbisme ,  avait  perdu  sa 
dehors  son  ind6pendance.  Ce  noroeao, 
inspire  par  un  elan  de  douleur  proph^- 
tique,  peut,  sous  certains  rapports. 
convenir  Element  aux  siecm  ulte 
rieurs,  surtout  lorsque  le  roymaof 
d*Arm^nie  fut  completement  d^tniit. 
Les  Arm^niens  le  sentent  bien ;  aussi 
ne  peuvent-ils  rfciter,  sans  avoir  la 
yeux  baign^  de  larmes,  ces   pages 

(*)  Voy.  la  planchc  n*  17. 


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ARM^NIE. 


9f 


qu*on  dirait  avoir  M  arrach^  aux 
Lamentations  de  J^r6mie : 

a  Je  pleare  sur  toi ,  r^ion  de  TAr- 
in^nie ;  je  pleure  sur  toi ,  la  plus  il- 
lustre  des  contrto  du  Nord !  car  ia 
royaut^,  le  saoerdoce  et  Fenseigne- 
ment  des  doctenrs  ont  dispani  de  ton 
sein.  La  paix  s'est  chanjg^  en  trouble, 
et  le  d^sOrdre  a  pris  racine  parmi  nous ; 
Torthodoxie  8*en  est  ali^ ,  et  Tigno- 
ranee  a  install^  le  schisme  a  sa  place. 

«  Je  gi^mls  sur  toi ,  6  Eglise  des 
Arm^iens!  F^lat  resplendissant  de 
ton  sanctuaire  s*est  obscurci;  tu  es 
priv^  de  ton  troiipeau  et  de  son  vigi- 
lant pasteur.  Je  ne  vois  plus  ce  m£me 
troupeau  spirituel  errant  dans  de  verts 
pdturages,  ou  reposant  pr^  des  sources 
d'eau  vive,  puis  reuni  dans  un  mtoe 
liercail  <,  a  Tabri  des  loups  d^vorants ; 
mais  il  est  disperse  par  les  deserts  et 
dans  les  lieux  st^riles. 

«  J'envie  tes  deux  premieres  migra- 
tions, puisque,  tandis  que  T^pbux 
etait  s^par^  de  sa  fianc^ ,  tu  as  sup- 
ports ce  veuva^e  en  conservant  intacte 
ta  cliastete ,  amsi  que  Fa  dit  avec  sa- 
gesse  un  de  nos  anciens.  Lorsqu'un 
adult^e  cut  Taudaoe  d'attenter  a  la 
puret6  de  ton  lit ,  tu  n'as  point  violS 
ta  foi ,  bien  que  la  violence  eAtexpulsS 
Tepoux ,  etque  des  fils  orgueilleux  m^ 
pnsassent  leur  p^re ,  tanois  <iue  les  bA- 
tards  avaient  le  m^me  d^ain  pour  ce 
pere  inconnu  et  Stranger.  Cependant 
tu  ne  fes  pas  montree  aux  nommes 
comme  d^sesperSe ;  tu  attendais  le  re- 
tour  de  ton  epoux  et  de  son  coadju- 
teur,  et  tu  as  cbSri  tes  enfants,  non 
pas  comme  une  marAtre ,  mais  oomme 
line  mere  tendre. 

«  Dans  ta  troisieme  Emigration ,  il 
n'est  pas  d*es|>oir  da  retour;  tu  es  se- 
parSe  de  celui  qui  facoompagnait  en 
portageant  tes  travaux.  II  vaudrait 
mieux  ^  pour  tes  enfants ,  qu*ils  habi- 
tassent  avec  le  Christ ,  et  que ,  se  re- 
posant dans  le  sein  d' Abraham,  ils 
oontemplassent  les  cfaoeurs  des  ar- 
changes. 

•  Tu  es  dSlaissSe  dans  ton  veuva^e, 
et  nous,  malheureux,  nous  sommes 
prives  du  chef  qui  etait  a  la  fois  notre 
pto.  Nous  ne  ressemblons  pas ,  Sci- 

7*  UmraUon,  (Arhbntr.) 


gneur,  a  votre  ancien  peuple :  notre 
condition  est  pire.  En  effet,  aprSs  que 
MoTse  nous  a  etS  enlevS ,  nous  n*avons 
plus  un  JosuS  pour  nous  introduire 
dans  la  terre  promise.  Roboam  a  StS 
dSpouillSde  son  heritage,  et  son  flls 
l^abad  lui  a  succedS;  ce  n'est  pas  le 
lion ,  mais  I'anciennetS  des  temps  aiii 
a  dSvorS  Phomme  de  Dieu  (*).  Elie 
nous  a  etS  enlevS ,  et  ifclisSe ,  double- 
ment  inspirS,  ne  nous  est  pas  rests 
pour  oinare  JShu.  Azael  a  StS  suscite 
pour  la  perte  d'Israel ;  SSdScias  a  Ste 
tratnS  en  captivitS,  et  il  ne  s'est  pas 
rencontrS  de  Zorobabel  qui  rStabItt  le 
royaume.  Antiochus  nous  contraint 
de  violer  les  lois  de  nos  pSres,  et  nn 
Matathias  ne  lui  rSsiste  pas ;  la  guerre 
nous  presse  de  toutes  parts,  et  un 
MachabSe  n'est  point  notre  libSra- 
teur.  Au  dedans ,  nous  avons  le  com- 
bat, au  dehors,  la  terreur;  oui,  la 
terreur  des  palens  et  les  combats  des 
hSrStiques ;  et  cependant  il  ne  se  prS- 
sente  pas  de  cher  pour  nous  conseiller 
et  nous  preparer  a  la  lutte. 

«  O  deshonneur !  6  lamentables  ca- 
tamites !  Comment  trouverai-je  la  force 
de  supporter  oes  maux  ?  Par  quel  moyen 
ralTermirai-je  mes  esprits  et  ma  langue , 
de  mani^re  k  pouvoir  remercier  mes 
peres  de  m'avoir  engendrS  et  SlevS? 
En  dffet,  ils  m'ont  nourri  de  leur  en- 
seignement ,  et  ils  m'ont  envoyS  ail- 
leurs  le  completer.  lis  espSraient  qu'a 
notre  retour,  il  leur  reviendrait  quel- 
que  gloire  de  notre  talent  perfectionne 
et  de  nos  compositions  plus  parfaites. 
De  notre  cdtS ,  nous  esperions ,  en  cou- 
rant  k  Constantinople ,  revenir  assister 
aux  danses  joyeuses  des  noces ,  et  chan- 
ter des  Spitnalames,  nous  qui  sommes 
exercSs  dans  ces  chants;  mais  voila 
gu*au  lieu  de  cette  allegresse  espSrSe , 
le  me  lamente  et  me  desole  sur  le  tom- 
neau  qui  les  renferme,  sans  que  j*aie 
eu  le  temps  de  leur  fermer  les  yeux , 
d'entendre  leurs  demiSres  paroles ,  et 
de  recevoir  leurs  bSnSdictions ! 


«  En  pensant  a  oes  choses,  l^s  sou- 
(*)  Toy.  I  rois ,  ch.  xm ,  v.  34. 


m 


L'UNIVERS. 


pirs  et  les  g^nisseroents  s^emparent 
ue  mon  coeur,  et  m'excitent  a  pronoo- 
cer  des  paroles  tristes  et  lugubres. 
Mats  je  ne  sais  oomroent  formuler  mon 
el^ie,  et  sur  quel  su|et  arr^ter  ma 
douleur.  Ainsi  ^eurerai-je  mon  jeuoe 
et  infortuD^  roi  cbasse  par  les  corn- 
plots  des  mechants ,  et  pr^ipit^  igno- 
roinieusement  du  trdne  avanl  le  terme 
de  la  mort ,  ou  bien ,  moi-m^me,  dont 
la  t^  a  ^te  d^pouill^  de  sa  couronne 
glorieuse?  Pleurerai-je  le  patriarche, 
cet  autre  pere  d'une  sagesse  superieure, 
et  toujours  ^air^  par  une  saine  rai* 
son;  qui  dispose  toutes  choses  dans 
leur  ofdre ,  et  qui ,  tenant,  pour  ainsi 
(iiie,  les  r^nes  des  ^venements,  sait 
f^ncore  refr6nerles  langues  medisantes; 
ou  plaindrai-je  mon  sort,  moi  ch^tif , 
abandonn^  de  TEsprit  saint  et  reduit 
u  la  derniere  extr^nit^?  Pleurerai-|e 
sur  odui  qui  ra*a  ei^endr^,  source  vi- 
vante  d'enseignement,  qui  versa  sur 
nous  des  flots  de  justice ,  dans  lesquels 
rimpi^t^  a  ete  suomergee ;  ou  bien  re- 
uandrai-je  des  larmes  sur  moi,  ^tre 
languissant  et  fl^tri ,  parce  que  je  n*ai 
pu  me  d^salt^rer  h  la  fontaine  de  la 
doctrine?  Plut6t,  mes  pleurs  ne  se- 
ront-ils  pas  pour  les  malheurs  actuels 
de  ma  patrie ,  et  pour  les  infortunes 
qui  lui  sont  r^servees  ? 

« Qui  s'associera  a  mon  affliction , 
en  compatissant  k  ma  peine;  et  qui 
ni*aidera  a  inscrire  oes  eboses  dans  tes 
unnalesdel^istoire? 

«Leve-toi,  J^remie,  l^ve-toi,  et 
que  ta  voix  proph^ique  fasse  entendre 
ses  plaintes  sur  toug  les  maux  que 
nous  avoos  soufferts,  et  sur  ceux  qui 
nous  afflieeront.  RappeOenaous,  conune 
le  Gt  Zaoiarie  jadis  en  Israel ,  q^ue  de 
taux  pasteurs  se  sont  lev^  dans  la  na- 
tion. 

«  Les  vartableds  ou  docteurs  sont 
ignorants ,  ^pris  d*eux-mtoies,  et  rap- 
portant  tout  bonneur  a  leurs  per^ 
sonnes.  Us  ne  sont  point  appeles  par 
Dieu ;  c'est  Fargent  et  non  le  Samt- 
fsprit  qui  les  fait  dire;  ils  aiment 
For,  ils  sont  envieux,  s*^loignent  de 
la  mansu^tude  dans  laquelle  Dieu  ba- 
bite;  et,  transform^  en  loups ,  ils  d^ 
^irent  leur  troupeMj. 


ft  Les  religieux  sont  bypocrites . 
pleins  d'ostentation ,  desireux  des  va- 
nity ,  et  plus  epris  de  la  passion  de  ia 
gloire  que  de  Tamour  d*  Dieu. 

«  Les  dignitaires  sont  orgoeilleux , 
oisifs,  paresseux,  et  discourant  vai- 
nement;  ils  d^testent  les  eoseigne- 
ments  des  docteurs ,  et  se  iiTrent  au 
trafic  ou  au  jeu. 

«  I^s  disriples  sont  lents  pour  ap- 
prendre  ,  et  prompts  a  enseigner , 
avant  d'avoir  la  vue  de  la  science  di> 
vine. 

«  Les  orateurs  sont  sunerbes ,  tur- 
bulents;  ils  ont  des  paroles  sonores: 
ils  sont  infatu;ables ,  acerbes,  nii^ 
chants,  et  ils  frustrent  Torphelin  de 
son  patrimoine. 

•  Les  soldats  sont  sans  lovaute , 
avides  d^un  faux  bonneur,  denstaut 
les  armes ,  paresseux ,  aimaot  la  vo- 
lupt^,  intemp^rants ,  pillards,  et  li- 
vres  au  brigandage. 

o  Les  princes  sont  rebelles,  volaot 
ceux  qui  volent ;  rapaoes ,  d'une  afa- 
rice  sordide ;  ils  ravagent  les  proviaors, 
se  plaisent  dans  le  mal ,  et ,  avec  eda, 
ils  ont  le  eceur  de  vils  esclaves. 

«  Lesjuges  sont  iniques,  meoteors. 
faux  et  faciles  a  squire ;  ils  ne  saveot 
pas distin^uerle droit;  ils  sont  inoons- 
tants  et  disputeurs ,  et  sans  commise- 
ration, comme  sans  pudear  aiacune. 

«  Et  quel  sera  le  chdtiment  de  ee^ 
crimes ,  sinon  que  Dieu  detoame  sfs 
regards  et  cbange  pour  nous  la  saturr 
des  dements?  Le  printemps  devient 
sec  t  ret6  est  pluvieux ,  Fautonuie  res^ 
semble  k  Phi  ver,  et  Fbi  ver  estrigoureux. 
rempli  de  temp^tes  ^  ddmesurtiiieiit 
long.  Les  vents,  terribles  par  leur  vrofeo- 
oe,  sont  charg^  de  maladies ;  les  nuees 
recdent  la  foudre  et  la  gr£le ;  ks  ploiei 
tombent  sans  utilite  hors  de  loir  sai- 
son.  L'air  est  dor  et  brumeux ;  kf 
eaux  ddbordent  inutilement ,  sansou'oii 
puisse  les  retenir.  La  terre  est  simk : 
ses  races  dto'oissent,  et  elle  est  bou- 
levers^  par  les  tremblements.  Ajou- 
tez  a  tous  ces  maux  la  discorde  uni- 
verselle ,  suivant  qu'il  a  6t^  dit :  *  Les 
impies  ne  ^o^teront  pas  la  paix.  *> 

«  Les  rois  dominent  avec  despotisnie 
et  cruaute;  ils  aggravent  lea  impets. 


ARM£NI£. 


et  promalguent  des  lois  intolerables. 
Les  pr^fets  sont  exacteurs  et  sans  pi- 
ti^.  Les  amis  sont  trattres,  et  les  en- 
nemis  puissants.  La  bonne  foi,  dans 
eette  vie  trompeuse,  est  derenue  v6- 
nale;  de  tous  c6t^,  les  bandes  des 
ennemis  nous  attaquent ;  les  maisons 
sont  renyers^es,  les  propri^^  spo- 
ilt ;  les  chefs  sont  charg&  de  chatnes 
et  jet6s  en  prison ;  les  hommes  libres 
sont  tratn^  en  exil ,  et  les  soufirances 
du  peuple  ne  peuvent  se  compter.  Les 
▼illes  sont  incendito;  la  famine,  les 
maladies  et  la  mort ,  sous  toutes  ses 
faces ,  nous  enviroiinent.  La  piM  est 
oubli^ ,  et  cependant  Tenfer  nous  me- 
nace. 

n  Que  le  Christ  Dieu  nous  en  pr^ 
serve ,  ainsi  que  tous  ceux  qui  Fadorent 
en  v^it^.  Gloire  h  lui,  dans  T^r- 
nit^  (*) !  » 

DE  LA  UTT^RATURB  DE  I.'ARM^IE. 

La  litt^rature  d'un  peuple  est ,  h  pro- 
prement  parler,  I'expression  de  sa  so- 
dM'y  c*est  elle  qui  nous  r^ydle  ses 
pens^  intimes,  ses  moeurs,  ses  lia^ 
bitudes ,  la  force  native  de  son  g^nie. 
Elle  est  la  forme  mobile  que  rev^t  au 
dehors  leprincipe  intellectuel  qui  Ta- 
nime  et  la  vivifie;  et,  de  m^me  que 
les  traits  de  la  physionomie ,  les  gestes , 
les  poses ,  et  tous  les  actes  exterieurs 
devoilent  ordinairement  Ttot  habltiiel 
de  r^me  dans  la  personne,  ainsi  la 
forme  du  style ,  son  ton  et  sa  oouleor, 
le  genre  des  sujets  traits  avee  prtf(6« 
rence ,  tout  oet  ensemble,  en  un  mot, 
nous  fournit  des  donnto  certaines  et 
suffisantes  sur  le  caract^re  et  la  nar 
ture  d'une  soci6t^. 

Maintenant ,  si  le  peuple  armeniea 
est  n^  a  la  vie  intellectuelle  en  rece- 
vant  la  lumi^re  de  r^van^ple ,  s*il  doit 
au  diristianitme  sa  civilisation ,  son 
progres  dans  les  sciences  et  dans  les 
arts,  nul  doute  que  sa  litt^ature  ne 
reproduise  Tappiication  de  cette  loi 
invariable  de  Tesprit  humain.  Or,  e'est 
ce  (ni*il  nous  est  ^ile  de  ddmontrer. 

En  effet,  parmi  toutes  les  litt^ra- 

(*}  MoiM  de  Khoren,  liv.  xii ,  cb.  6S. 


tures  de  POrient,  el  Imus  peoirloM 
dire  du  monde  civliis^ ,  aoonne  ne  nr6- 
sente  un  caract^  aussi  trancba  et 
aussj  exdusif  que  la  lit^ture  arm^- 
nienne;  c*est  cpi'elle  ne  common^ 
qu'avec  le  cbristianisme.  Car,  lee 
anciens  monuments  historiques  et 
po^ques,  conserves  smt  dans  les  li  vres 
ecrits,  soit  dans  les  chants  populairee 
dont  parlent  ses  premiers  nistonens 
de  Vhre  cbr^tienne,  furent  d^tevitt 
par  Tefifet  d'un  zde  top  ardent  qui 
voulait  preserver  les  nouveaux  conver- 
tis  des  prindpes  et  des  errears  du  ma- 
gisme. 

La  culture  inteUeetuelle  de  TArm^- 
nie  paienne  devait  6tre  pea  developp^e ; 
car  si  elle  avait  eu  quelques  produc- 
tions d'un  m^rlte  superieur ,  elle  les  au- 
rait  probablement  conaervte ,  oomme 
Pont  foit  les  Grecs  ct  lea  Latins.  Ses 
historiens  ne  nous  apprenoeBt-ils  pas 
efifectivemaQt  que  saint  Afesrob  com^ 
posa  I'alphabet  vers  le  milieu  du  tkh 
quitoesiMe?  Et  le  nora  dV/Amtina^ 
teur  donn^  au  premier  patriardie  saint 
Gr^oire,dit  sufBsamment  qu'aTant 
lui,  ce  pays  maoqnait  des  lumi^ret  de 
la  foi  et  de  la  sdence. 

Une  autre  preuve  qui  vient  a  Tap- 
pui  de  oette  considtetion ,  est  ia  oi- 
rection  exduaivement  chr^tienne  qu'a 
conserves  Tesprit  litt^raire  de  ce  peo- 
ple ;  et  certaiaement ,  8*il  avait  eu  one 
autre  litt^rature  palenne,  des  traces 
en  resteraicnftempreiDteadanaleBliyres 
de  quelques-ttns  de  sea  toivains,  qui 
n'auraient  pas  tous  rencno^  spontan^ 
ment  et  simultaatoeat  k  un  ptss^ 
qui  vivait  eneore  dans  leur  souvenir. 

Nous  crovons  done  que  Tesprit  litt^ 
raire  de  l\Arm^nie  est  propremeot 
sorti  des  entrailles  du  christiaiusme; 
et  nous  avouons  ouf ,  si ,  en  se  tenant 
aussi  fermement  dans  la  foi  ou  Tordie  ' 
divin ,  il  s*toit  hasarde  dans  les  pre- 
miers slides  k  entrer  qudquefois  oaiis 
Tordre  humain ,  per  lequd  nous  en- 
tendons  la  philosophie  speculative,  la 
po^sie  ^pique  ou  dramatique,  et  les 
sdenoes,  sesproductions  auraient  beau* 
coup  gagnft  en  variety  et  en  origina- 
lite;  et,  de  plus,  cette  coneentration 
perp^elle  de  toutes  les  fnoultto  in- 


L'UmVERS. 


UXMnfUm  sur  des  roati^res  purement 
religieoses  et  thMogiaues,  n'aarait 
pas  Dait  naftre  autant  ae  querelles  et 
dedisDutes,que  nous  avons  reoonnu 
dans  rhistoire  religieuse  de  ce  pays, 
^tre  la  cause  des  maux  politiques  qui 
affligerent  ce  royaume,  at  de  la  deca- 
dence intellectuelle  qui  s'y  manifests 
pkis  tard. 

Le  caractere  de  I'esprit  arm^nien 
ainsi  d^6ni .  nous  dessinerons  k  larges 
traits  ie  tableau  de  sa  iitt^rature ,  dont 
rhistoire  prteente  surtout  trois  ^po* 
ques  plus  remarquables,  s^par^es  les 
unes  aes  autres  par  un  tntervalle  a  peu 
prte  ^al.  Ces  epoques  fuvent  le  cin- 
quiefne ,  le  douzitoe  et  le  dix-huiti^nie 
sidcles. 

Les  premiers  essais  litt^aires  du 
peuple  arm^nien « semUaUes  a  oeux  de 
tons  les  autres  peuples  enfants ,  fnrent 
de  simples  bynanes  ou  des  cbants  lyri- 
ques  en  Tbonneur  des  h^ros.  Lonc- 
tesps  ils  se  sont  conserve  dans  la 
mMoire  du  peuple,  et  surtout  des 
mentagnards^  toujours  plus  fid^es  a 
ganfer  les  traditions^  comma  si  les 
masses  tmposantes  et  immobiles  de  la 
nature  qui  les  environnent  les  habi* 
tuaient  euz-m^mes  k  ne  rien  changer 
dans  leurs  moeurs ,  leurs  crojrances  et 
leurs  souTenirs.  Ges  poemes  primitifs 
etaieat  plut6t  le  jet  orut  et  spontan^ 
de  la  nature,  que  I'oBuvre  de  Part.  La 
cttHxire  intellectuelle  du  peuple  6tait 
nolle  comme  sa  ciTilisation.  Les  lu- 
mieres  de  la  science  grecque  s'^tent 
arr^tto  h  ses  frontieres ,  et  il  fallait 
n^cessairement  les  franchir  pour  pren- 
dre  qudque  teinture  des  lettres.  Aussi , 
de  tous  les  points  de  cette  partie  de 
TAsie,  les  jeunes  sens  afllnaient  aux 
ecoles  de  Cesarte .  de  Constantinople , 
d'Alexandrie  et  d^Ath^nes. 

Saint  Gr^ire,  emport^  miraculeu- 
sement  loin  de  son  pays ,  comme  nous 
Tavons  racon^,  ^it  rest^  k  Ctor^; 
et  1^ ,  il  avait  puls^  les  principes  de 
la  science  en  meme  temps  que  ceux  de 
la  foi.  Se  regardant  comme  suscit^  de 
Dieu  pour  annoncer  a  T  Arm^ie  la  pa- 
role ae  rifevaneile ,  il  6tait  venu  la  con- 
vertir.  Son  eloquence  bouleversa  la 
face  de  ce  royaume,  et  Tignoranee  du 


fKBganisme  dtsparut  ayec  ses  supersti- 
tions. I^es  ^les  qu*il  fonda  devmrent 
un  foyer  radieux  de  toutes  lesconnais- 
sances  humaines.  Agathange  6crit  la 
vie  du  saint  lUumi$uUewr.  et  oelle  du 
roi  Tiridate,  dont  il  est  fe  secretaire. 
Z^nobe,  disciple  de  saint  Gregoire, 
raoonte  ses  missions  apostoliques  au 
pays  de  Daron. 

fliais  la  langue  arm^nienne  ^tait  en- 
core si  rude  ct  si  peu  fa^nn^  aux 
lois  du  style  f  que  les  toivains  em- 
l^yaient  oe  pr^i^renoe  les  langues  ^- 
riaque  ou  grecque.  Les  caracteres 
propres  a  la  transcription  etaient  sy- 
riaques.  II  fallait  que  saint  Mesrob 
hiventdt  le  nouvel  alphabet  qui  sert 
encore  presentement  aux  Arm^ieos , 
et  qu'il  empninta  partiellement  a  qud- 
que alphabet  d*un  idiome  inconnu  ou 
perdu  de  TAsie  Sup^rieure. 

Nous  jetterons  ici  en  passant  quel- 
ques  observations  siir  la  nature  et  le 
caractere  de  la  langue  arm^nienne. 
Certains  auteurs,  pr^oocupes  d^une 
vanite  nationale  trop  ridicule ,  ont  pre* 
tendu  que  la  langue  parlee  par  Noe,  a 
sa  descente  de  Tarche ,  etait  la  Uu^ue 
arm^nienne.  C^it  dire  en  m£ne 
temps  que  leur  idiome  ^tait  Tidiome 
primitir,  puisque  le  patriarche  devait 
avoir  traditionnellement  conserve  la 
langue  de  ses  premiers  p^res.  Adam, 
dans  le  paradis  terrestre ,  aurait  done 
parl6  arm^nien  ?  11  est  inutile  de  s^ar- 
r^r  id  k  demontrer  oombien  cette 
pretention  estpeusoutenable.  D'abord 
tl  est  pbilosophiquement  impossible 
de  eonstater  aujourd^bui  quelle  etait  la 
langue  du  premier  homme,  surtout 
lorsqu'on  s'l^puie,  comme  nous,  snr 
la  tradition  qui  suppose  Thomme .  pere 
du  genre  humain  non  d^u,  dev^  a 
un  si  haut  de^re  d*intdligence ,  et  td- 
lement  sup6rieur  dans  sa  conoais- 
sance  de  Dieu  et  de  Tunivers,  qu'il 
n'aurait  pu ,  apr^  sa  chute ,  balbutier 
la  langue  qu*il  parlait  pr6:61emment. 
Mais,  sans  entrer  dans  cet  ordre  de 
consideration ,  que  le  lecteor  pourrait 
avee  raison  oonsiderer  comme  mys- 
tique ou  stwematuraUste ,  ainsi  que 
disent  les  Ailemands,  nous  nous  con- 
tenterons  de  dire  ^ue ,  d'apres  nos  re- 


ARM#.N1E. 


lot 


eherches  propres ,  nous  sonimes  arri- 
y^  a  reconnattre : 

Premidrement ,  que  la  grammaire 
arnn^ienne  repose  sur  les  menies  bases 
que  la  grammaire  greoque,  et  a  des 
rapports  frappants  surtout  ayec  la 
grammaire  sanskrite,  ou  le  tableau 
desdtelinaisons,  con^ues  commecelles 
de  Tarm^nien ,  dous  prtonte  la  ooin- 
cidenoe  remarquable  aucas  instrumen- 
tal, et  oili  nous  trouvons  encore  le 
m^me  systime  numerique  des  noms 
de  nombre,  dont  plusieurs  sont  iden- 
tiques  pour  le  son  et  pour  T^riture. 

Secondement,  que  Tarm^nien  pro- 
ekie  comme  le  Sanskrit  et  le  grec  aans 
la  composition  des  mots,  mettant  tou- 
jours  le  nom  de  d^pendance  devant 
oelui  de  qui  il  depend ,  et  donnant  sett- 
lement au  dernier  la  d^inenoe  gram* 
maticale. 

Troisi^mement,  enfin,  et  cette  troi- 
sieme  observation  est  un  fait  materiel 
constats  par  les  nombreux  travaux  de 
la  science  modeme,  que  chacun  pent 
veriGer,  que,  dans  Tarm^nien,  se 
trouve  un  certain  nombre  de  mots 
communs  au  Sanskrit,  au  persan  etau 
gree ,  qui  ne  sont  point  des  mots  eoi' 
prunt^  post^rieurement,  parce  qu*ils 
expriment  des  objets  de  premiere  ne- 
cessite ,  en  ce  qui  tient  a  la  vie  reli- 
gieuse  ou  sociale  du  peuple.  L'on  peut 
ajouter  encore  que  ronfre  et  la  cons- 
truction de  la  piirase  arm^nienne  res- 
semblent  parfaitement  k  la  marcbe  de 
Ja  proposition  grecque,  qa*elle  peut 
imiter  dans  ses  tours  et  m^me  ses  ir- 
r^ularites  avec  une  fld^lit^  si  heu- 
reuse ,  que  les  traductions  arm^niennes 
sont  un  caique  exact  des  originaux 
grecs ,  et  nulle  autre  langue  ne  pos- 
shde  k  un  plus  haut  degre  cet  avan- 
tage. 

jNous  ne  pr^tendons  pas  dire ,  pour 
cela ,  que  rarmenien  soit  une  langue 
moins  ancienne  qu'aucune  de  celles  de 
la  famille  indo-germanique ,  h  laqudle 
nous  le  rattachons,  ni  qu'il  aii  ^t^ 
form6  comme  un  patois  avec  les  debris 
de  Tune  d'elles  ou  de  toutes  ensemble. 
Non :  rarmenien  est  une  langue  pro- 
pre,  Gommc  le  saiiskrit ,  \p,  persan  et 


le  gree.  Seulenieot  nous  crovous  qtril 
ne  formt  pas ,  parmi  les  idionus  de 
rOrient,  une  classe  k  part,  et  ijae  la 
race  du  peuple  qui  le  parte  dbit  ttre 
toujours  soi^neusement  distingu6e  de 
la  race  s^mitique,  avec  laquelle  die 
n'a  aucun  rapport  de  langage.  I^a  com- 
munaut^  d'ongine  d*une  langue  avec 
une  autre  ne  detruit  en  rien  son  m^- 
rite  et  sa  perfection  relatives.  Per- 
sQnne  ne  doute  que  le  latin  ne  soit 
fr^re  du  grec;  et  cependant  a-t-oo 
moins  d'admiration  pour  la  langue  du 
peuple  remain  ? 

Que  si  nous  appr^ions  k  present 
le  merite  intrinsic  de  la  langue  ar- 
m^nienne,  nous  reconnaltrons ,  avec 
les  savants  Yillefcoi  et  Saint  -  Martin , 
qu*elle  a  tous  les  avantages  d*une  lan* 
cue  port^  k  un  haut  degr^  de  d^ve- 
loppement  par  une  culture  inteilec- 
tuelle  vari^  et  ancienne.  Sans- avoir  la 
douceur  du  grec,  k  cause  de  ses  aspi- 
r6es  et  de  ses  sifflantes  dont  elle  est 
plus  prodigue,  elle  n'est  pourtant  pas 
dure  a  Toreille  dans  la  bouche  d'un  Ar- 
m^nien. 

On  demande  ordinairement  si  telle 
langue  est  plus  ricbe  que  telle  autre , 
et  peut-^tre  k  tort;  car  ce  qui  fait  pro- 
prement  la  richesse  d*une  lan§[ue  est 
le  g^nie  de  rhomme qui  Temploie;  et, 
sous  ce  rapport,  toutes  les  langues 
sont  ^alement  riches, c*est-^- aire, 
susceptibles  d*exprimer  toutes  les  pen- 
sees  ae  la  raison  et  les  sentiments  du 
coeur.  Que  si  Ton  entend  par  richesse 
le  materiel  des  mots,  nous  dirons 
qu*en  ce  sens ,  Tarm^nien  est  inf(6rieur 
au  chinots  et  k  I'arabe.  Cependant, 
comme  la  comparaison  de  son  diction- 
naire  avec  un  lexique  grec  prouve  qu*il 
a  pour  chaque  mol  un  sjrnonyme  cor- 
respondant  qui  le  traduit  avec  exacti- 
tude ,  on-ne  peut  Taocuser  d*indigence , 
ou ,  du  moins ,  cette  pauvret^  est  bien 
supportable. 

I/alphabet  armenien  se  compose  de 
trente-huit  lettres.  Les  trente-six  pre- 
miers caract^res  furent  formes  au  qua- 
trieme  sitele;  les  deux  demiers  no 
furent  ajout^  aux  autres  que  vers  le 
douzldme  siecle. 


102 


L'UNIVERS. 
ALPHABET   ARM^VIEN. 


MAJOKUUS. 

h 

St 

X 

IT 

8 

•u 

A 

ft- 

s 

♦ 
O 


BOITDU.        IT4LIQUI. 


J- 

A 

A- 
♦ 

f. 
a' 

,r 
./ 

1 


I' 

5 

A- 
O 


r 

t 

c 
f 

■ 
p 

L 

r 

to 

i 

ar 


n 


p 

9 


nOMK. 

raoifovciATKMr. 

aip 

A. 

pieii 
kim 

P  iaible. 

K(aible,C,Q 

ta 

T  faible. 

yetcli 

t  bref,  it. 

za 

Z. 

d 

£:  long. 

yet  ou  ei 

E  muet. 

toue 

T  fort,  TH. 

je  ou  ge 

J. 

in  ou  mi 

I. 

Hun 

L. 

\he 

KH  du  gosier. 

dza  ou  (Isa 

DZ  ou  DS. 

guien 
noue 

G  ou  GU. 
H  aspire. 

tsa 

TZ. 

ghad 
dje 

GH  du  gosier,  {•  anbe 
DJ                   "^ 

mien 

M. 

hi  ou  y 

H  faible  ou  Y,  I. 

nou 

N. 

cha 

CH. 

oue 

0  bref. 

tcha 

TCH. 

be 

B. 

tche 

TCH  faible. 

ra 

R  fort. 

se 

S  comnie  double. 

vicv 

V  fort 

diun 

D. 

re 

R  faible. 

tzouc 

TZ  ou  TS  fort. 

yunou  hieun 

Y,U,  V. 

piour 
ke 

P. 

K  fort. 

o 

0  long  AU. 
FottPH. 

fe 

U  est  eitrtoemeot  difficile  pour  on 
European  d*aoqu^ri.r  una  prononciation 
nacte  et  barmonieuse  do  I'ann^ien , 


paroe  ^e  oette  langae  renfenne  non- 
seulonenl  oertaines  aspirdes  et  (^uttu- 
rales  propres  aux  langues  s^mitiques, 


ARM£ME. 


t«3 


Idles  que  Tiiebreu  et  Tarabe,  et  man- 
quant  tatalement  aux  notres ,  mats  elle 
possMe  encore  certaines  lettres  parti- 
cuK^res  dont  Taccent  et  I'intonation 
sitllantc,  en  off  rant  entre  elles  quelaue 
analogic,  sont  n^anmoins  ais^ment  ais- 
tingues  par  una  oreille  habile,  et  ne 
font  qnVmbarrasser  T^tranger  qui 
eooute  ou  qui  parte.  D'un  autre  cote, 
cette  riche  vari^t^  de  tons  et  d*accents 
semble  avoir  assoupli  d'une  maniere 
exceptionnelle  les  oi^anes  de  la  voix 
ehez  ce  peuple,  et  lui  donne  une  apti- 
tude et  une  pr^isposition  ^tonnante  h 
Sarler  les  autres  idiomes,  surtout  ceux 
e  TEurope.  Get  avantage  est  m^me 
plug  inarqu^  chez  les  Arm^niens  que 
chez  les  peuples  europ^ens  de  race 
slave,  et  tuusieurs  fdis  nous  avons  ad- 
mire quelques-uns  des  savants  reli- 
gieux  au  convent  arm^nien  de  Yenise 
parlant  avec  une  ^ale  faciiite  le  fran- 
cais,  ritalien,  Tanglais,  rallemand  et 
le  russe.  Aussi ,  dans  la  diplomatie  de 
Constantinople  et  dans  plusfeurs  ^cliei- 
les  du  Levant,  les  Armeniens  font-ils 
d*excellents  interpretes  ou  drogmans. 
La  grammaire  est  simple,  et  nous 
ne  pouvions  mieux  la  comparer,  quant 
h  sa  marche  et  h  sea  procides ,  qu*au 
grec,  langue  qui  lui  est  fa  plus  analo- 
gue, entre  celles  que  oonnaft  probable- 
ment  la  maiorite  de  nos  lecteurs.  Elle 
a,  comme  la  langue  d*Homere  et  de 
Platon^  le  m6rite  incontestable  d'avoir 
des  themes  ou  radicaux  servant  de 
fond  et  de  support  a  tous  les  autres 
mots  qui  en  sortent,  soit  en  les  com- 
btnant  entre  eux  suivant  certaines  lois 
regulieres  d'apposition  ou  de  composi- 
tion ,  soit  en  les  allongeant  par  diverses 
terminaisons,  dont  le  caractere  nette- 
ment  determine  lesclasse  aussitdtdans 
la  categoric  des  substantifs,  des  quali- 
Ocatifs  ou  des  verbes. 

Le  verbe,  premier  mot  essentiel  de 
toute  langue ,  puisque  c'est  lui  qui  sert 
a  exprimer  Texistence  du  sujet  et  sa 
relation  h  Tattribut,  pr^sente  ici  le  ca- 
ractere  g^n^ral  des  langues  indo-euro- 
p^ennes,  et,  pour  la  terminaison  radi- 
cate de  rinfinitif ,  il  offre  le  singulier 
rapprodiementd'avoir  comme  le  mdnt- 
cliou  qoatre  desinences  sp<^iales.  Ses 


temps  sent  |>kis  varies  que  dans  les 
lances  semitiques;  il  a  un  present, 
un  imparfait ,  deux  imp^ratifs ,  des  sulh 
jonctifs  et  plusieurs  participes.  L'^vo- 
lut*on  du  thdme  dans  la  conjugaison 
est  logique  et  r^guli^re,  pui8au*on  re- 
trouve  dans  la  desinence  des  oifTerents 
modes  les  temps  correspondants  du 
verbe  substantit,  qui ,  en  8*unissant  au 
radical,  lui  communique  ainsi  r^lle- 
ment  la  substance  ou  r6tre. 

Le  nom  ou  substantif ,  dont  les  pre- 
miers ^l^ments  radicaux  se  confonaent 
souvent  avec  ceux  du  verbe,  recoit  dif- 
ferentes  desinences ,  lesquelles  /orment 
les  cas  des  declinaisons.  Ces  cas  sont 
d*abord  ceux  du  grec  et  du  latin,  puis 
nous  en  retrouvons  quatre  autres ,  deux 
pnrticuliers  au  Sanskrit,  Finstrumen- 
tai  et  le  locatif ,  et  deux  autres  propres 
seulement  a  farm^nien,  le  circohf^- 
reiitiel  ou  cas  exprimant  Faction  de 
tourner  autour  d  une  chose,  de  Fem- 
brasser  dans  le  double  sens  Intel  lectucl 
et  physique,  et  le  narratif ,  qui  expriine 
la  quaiite  de  F^tre  ou  de  la  chose  sur 
laquelle  on  discourt.  Les  grammairiens 
sont  divises  sur  le  nombre  des  decli- 
naisons; cependant  on  en  admet  i^^ne- 
ralement  neuf  n^guli^res  et  plusieurs 
autres  irr^^ulieres, 

L'adjectif ,  facile  h  distinguer  par  ses 
terminaisons  propres,  n^oocupe  pas, 
comme  dans  d*autres  langues  de  F  Asie , 
une  place  iixedansla  proposition.  Ainsi 
il  peut  prec^er  ou  suivre  le  substantif 
auquel  il  se  rapporte,  il  peut  concorder 
ou  non  avec  lui  en  cas  et  en  nombre. 

La  syntaxe,  en  principe  fort  simple , 
devient  confuse  et  compliqu^  dans 
Fapplication,  par  la  faculteque  F^ri- 
vam  a  de  s*6carter  de  certaines  regies 
fondamentales.  Le  verbe  n*est  point 
rejete  regulierement,  comme  chez  les 
Grecs  et  les  Latins,  k  la  fin  de  la 

f>hrase,  et  cependant  la  p^ode  offre 
es  mdmes  analogies  dans  son  develop- 
pement  majestueux  et  cadence.  Ce  qui 
nous  explique  ce  rapport  de  ressem- 
blance,  c'est  F^ucation  litteraire  que 
FArmenie  recent  de  la  Gr^e.  Lorsquc 
son  peuple  secoua,  au  groiid  jour  du 
christianisme ,  les  langes  de  sa  tene- 
breusc  ignorance,  tous  ceux  qui  etaient 


104 


L*l]MV£RS. 


floUicit^  par  le  desir  de  oonnaltre  et 
d*apprendre  allaient  puiser  la  science 
aux  eooles  d'Ath^es  et  de  Constanti- 
nople. Les  premiers  toivains  s'etaient 
done  forni&  sur  les  beaux  modeles  de 
I'antiquit^,  et  ils  chercherent  h  mouler 
leur  langue  sur  ce  type. 

En  second  lieu,  par  I'effet  d*un  at- 
trait  particulier,  Fesprit  arro^nien  se 
U?ra  avec  predilection  a  F^tude  du 
style,  en  cultivant  soigneusement  la 
grammairey  dont  la  connaissance  fut 
elevee  au  rang  d'une  science  v^itaMe. 
Cette  etude  ne  se  bornait  point  chez 
ce  peuple,  comme  parmi  les  Grecs, 
surtout  a  r^poque  de  la  decadence  du 
bon  ^odt  litteraire,  k  des  speculations 

{meriles  et  infructueuses  sur  le  cboix, 
a  disposition  ou  Tetymologie  des  mots. 
On  ne  se  proposait  pas  seulement  de 
parvenir  k  rendre  sa  pensee  avec  eie- 

Sance  et  en  observant  toutes  les  lois 
u  code  de  la  grammaire,  on  etendait 
ses  vues  plus  loin,  dans  la  persuasion 
ou  Ton  etait  ()ue  le  style,  sans  la  rai- 
son  pbilosophitfue  qui  Tinforme,  pour 
ainsi  dire,  n'etait  qu^un  corps  denu^ 
d'dme.  La  logique  et  la  haute  metaphy- 
sique,  qui  doivent  presider  h  Pensem- 
ble  de  ses  lois ,  se  liaient  done  cons^- 
quemment  h  retude  de  la  grammaire, 
et  voici  Dourquoi  dans  ces  temps  le  titre 
de  kerthogh ,  ou  de  grammairien ,  etait 
la  qualification  la  plus  recherchee^ 
comme  la  plus  honorable.  Ainsi  MoTse 
de  Khoren  est  ddcore  de  ce  nom,  qui 
implique  encore  la  signification  de 
poete.  II  nous  a  legue  sur  cette  science 
un  traite  qui  nous  prouve  jusqu'li  quel 
haut  degre  de  perfection  elle  avait  €\/t 
portee. 

La  langue  litteraire  a  ete  fixee  en 
Armenie ,  comme  les  langues  allemande 
et  anglaise,  dans  les  temps  modernes, 
par  la  traduction  des  livres  saints.  Ce 
rait  ne  doit  pes  nous  surprendre : 
quelles  oeuvres  en  eifet  seraient  plus 
capables  de  fa^nner  un  idiome  nais- 
sant  a  toutes  les  formes  de  la  pensee, 
et  de  le  doter  richement  d'expressions 
simples  et  sublimes,  que  ce  livre,  ^ue 
celui  qui  n'y  voit  pas  un  reflet  de  Tins- 
piration  divine,  juge  neanmoins  le  plus 
parfait  des  proauctions  de  rintelligencc 


humaioe?  Dans  TAncien  et  dans  Ir 
Nouveau  Testament  on  ittrouve  tons 
les  tons  et  toutes  les  nuances  de  st? le, 
la  pastorale,  le  genre  descriiitif,  rae- 

§ie,  la  dissertation  philosopnique  et  Ic 
ithyrambe.  Une  traduction  correote 
et  fidele  conservera  Fempreinte  de  oes 
formes,  surtout  si  la  langae,  jeune 
encore,  pent  se  prater  a  la  naivete  du 
style  primitif ,  et  Fon  peut  mtoe  ajou- 
ter  que  la  condition  d*etre  jeune  est 
indispensable  pour  la  langue.  Ainsi 
voila  pourquoi  nous  autres  nous  o'au- 
rons  jamais  une  traduction  vraiment 
nationale  des  livres  saints;  e*etait  a 
Amyot  ou  a  Montaigne  de  la  faire. 

Les  traducteurs  armeniens  etaieot 
les  hommes  les  plus  capables  du  temps . 
et  les  {>lus  ceiebres  par  leur  sagesse  H 
leur  saintete;  ils  ont  eieve  un  monu- 
ment durable,  et  qui  serait  k  lui  aeol 
une  raison  suffisanted'etudier  la  lansue 
anuenienne ,  vu  Futilite  que  peat  o£ir 
dans  la  science  de  Fexeg^se  une  ver- 
sion qui  remonte  au  quatrieme  siede 
de  notre  ere.  Ils  n*ont  pas  traduit  sur 
le  texte  hebreu,  mais  sur  les  Septante; 
cependant,  oomme  la  langue  de  la  Svrie 
etait  fort  repandue  chez  les  Arhie- 
niens ,  qui  s*en  servaient  dans  la  litur* 
gie,  on  a  dA  consulter  les  versions 
syriaques,  comme  ie  prouve  aisemeni 
une  comparaison  un  pen  serieuse  des 
textes.  L*£glise  d' Armenie  a  adopte 
cette  version  dans  sa  liturgie,  et  les 
ecrivains  des  d^es  posterieurs  empnin- 
tent  a  chaque  instant  des  expressions 
et  des  passages  qu'ils  intercalent  dans 
leurs  compositions,  sans  avertir  le  lec 
teur  ^ue  c*est  une  citation  biblique . 
c'est  a  lui  de  la  reconnaltre,  oomme 
lorsqu'il  lit  les  rabbins.  Les  auteuis 
musulmans  agissent  de  m^me  a  Fegard 
de  Falcoran. 

Des  que  le  premier  elan  intellectuei 
fut  communique  aux  esprits,  il  s'opera 
un  grand  mouvement  litteraire,  ef 
Fere  des  ecrivains  superieurs  com- 
men^a.  A  leur  tgte,  nous  remarquons 
MoTse  de  Khoren  (*),  le  plus  ancien, 
le  plus  enidit,  le  plus  concis,  comme 

(*)  ^t.  10-4°,  a  Londres,  par  lesfrerca 
Whis(oti ,  1736.  Id.  in-i8  ,  a  Venise,  1827. 


ARM^JNIE. 


105 


aussi  ie  plus  obscur  des  historiens  de 
rArioenie;  puis  viennent  Jesnig  (*), 
auteur  de  dissertations  subtiles  et  dS- 
series  sur  les  cultes  paiens,  £lisee  (**), 
historiograpiie  des  guerres  religieuses 
de  la  Perse  et  de  rArm^nie,  La- 
zare  (***)  de  Parbe,  autre  historien 
reoommandable  par  la  nettete  et  P^le- 
ganoe  de  son  style. 

Ce  cinquieme  siecle  est,  a  propre- 
ment  |)arler,  I'dge  d'or  de  la  litterature 
arm^nienne.  Avant  cette  epoque,  la 
laneue  syriaque  predominait,  et  11  est 
probable  que  sans  Mesrob,  qui  dota 
son  pays  de  la  pr^ieuse  decouverte  de 
ralphaoet,  la  langue  armenienne  edt 
totalement  dispani.  Aussi  Gorioun, 
Tun  des  disciples  de  Mesrob,  nous  dit- 
il  qu'il  n'a  pas  assez  de  reconnaissance 
pour  ce  saint  homine,  qui  etait  tou- 
jours  dans  la  plus  grande  tristesse,  en 
voyant  les  penibles  travaux  aue  les 
jeunes  Arm^niens  etaient  obliges  d*en- 
treprendre  pour  acquerir  la  connais- 
sance  de  la  langue  et  des  livres  syriens. 
lis  faisaient  beaucoup  de  depenses,  et 
consumaient  leur  vie  dans  des  voyages 
lointalns,  paroe  que  le  culte  divin  et  la 
lecture  des  saintes  Ventures  ne  pou- 
vaient  se  faire  qu*en  langue  syriaque 
dans  les  ^lises  et  les  monasteres  de 
TArm^nie;  aussi  ne  pouvait-on  ins- 
truire  le  peuple. 

Les  deux  siecles  suivants  sont  pres- 

3ue  st^riles;  les  guerres  continuelles, 
'une  part ,  qui  ensanglanterent  le  pays, 
et,  de  Tautre,  les  disputes  oiseuses  et 
sophistiaues  des  th^olojgiens,  arr^t^- 
rent  la  seve  du  g^nie  national.  La  ques- 
tion relative  «^  la  duality  des  natures 
du  Christ  et  h  VuniU  de  sa  persoune 
divisa  tous  les  esprits  en  deux  classes 
contraires  et  ennemies,  suivant  qu'ils 
admettaient  ou  rejetaient  le  concile  de 
Cbalo6doine.  On  discutait  bien  moins 
par  amour  de  la  v^rit^  et  pour  s'eclairer 
nintuellement,  que  par  une  passion  se- 
crete contre  le  parti  oppose,  et  avec 
des  sentiments  d*aigreur  auxquels  se 

(*)  Smyrne ,  1 76a.  YeiUM ,  1 8a6 ,  in-x8. 
(••)  Constantinople  1764  et  1823.  A  Ve- 
nue, i8a8,  in- 1 8. 
r')Veiiisc,  179?. 


m^laient  des  ressentiments  politiques. 
Nous  avons  essay^  de  d^montrer  ce 
fait  dans  la  partie  religieuse  de  This- 
toire  de  ce  peuple,  et  ilest  inutile  d'y 
revenir  en  ce  moment.  Nous  voulons 
seulement  rappeler  que  la  vaine  dia- 
lectiquede  Tesprit  disputeur  des  Grecs, 
dont  les  Arm^niens  avaient  malheu* 
reusement  herit6,  emp^ha  que  Tim- 
pulsion  donn^  aux  lettres  par  les  pre- 
miers ^rivains  obtlnt  son  complet 
r^sultat.  Ce  serait  s'torter  de  notre 
but  que  d'^num^rer  la  longue  liste  des 
auteurs  secondaires  qui,  dans  ce  si^le 
ou  dans  les  Ages  suivants,  ont  enrid^i 
la  litterature  de  leurs  travaux  plus  ou 
moins  importants.  11  en  est  surtout  un 
grand  nombre  qui,  par  leurs  traduc- 
lions  des  anciens  auteurs  de  la  Gr^ce, 
profanes  ou  sacres ,  peuvent  offrir  au 
philologue  un  utile  moyen  de  verifica- 
tion, pour  s*assurer  si  les  modeles  qu'ils 
onttraduits  nous  sont  parvenus  entiers 
et  sans  alteration,  et,  sous  ce  rapport, 
ils  sont  un  precieux  supplement  pour 
la  sdence. 

Au  huitieme  siecle ,  nous  ne  vovons 
que  Jean  IV,  dit  le  Philosophe  ou  Oz- 
nien,  attirer  les  regards  au  critique 
par  ses  ceuvres  theologiques,  que  dls- 
tin^uent  reievation  des  idees  et  la  lu- 
cidite  de  sa  logique.  Les  Mechitaristes 
ont  publie  un  de  ses  discours  ou  il 
traite  la  question  du  dogme  de  I'Incar- 
nation.  La  censure  romaine  y  a  d^cou- 
vert  quelques  propositions  contraires 
h  rorthodoxie  et  Ta  mis  a  Tindex. 

Au  neuvieme  siecle,  deux  historiens 
egalement  remarquables  se  produisent 
sur  la  scene  litteraire.  Le  premier  est 
le  patriarche  Jean  VI ,  surnomme  THis- 
torien.  Son  style  vif,  concis  et  anime 
damages  k  la  couleur  orientate,  fait 
oublier  les  petits  defauts  de  detail  que 
Fon  rencontre  dans  le  cours  de  son 
histoire,  laquelle  resume  rapidement 
toutes  les  anciennes  traditions,  pour 
s'arreter  particulierement  aux  nom- 
breuz  evenements  politiques  qui  rem- 
plissent  Tdge  otj  il  vivait«  Le  oefaut  de 
Jean  est  sa  partialite  cboquante  a  re- 
gard des  catholiques,  et  le  faux  zeie 
u*il  deploie  pour  defendre  les  maximes 
u  concile  de  Chalccdoine.  Le  second 


3 


106 


UUNIVERS. 


est  Thomas  Ardzerouni ,  d'un  vastc  sa- 
voir,  et  fort  vers^  dans  la  connaissance 
de  differentes  lances  orientales.  Son 
histoire  traite  specialement  de  la  fa- 
in ille  des  Ardzerouni ,  et  tous  les  au- 
tres  ^v^nements  rentrent  dans  le  sujet 
principal. 

Au  milieu  de  la  nuit  du  dixieme 
siecle,  le  genie  de  saint  Gregoire  de 
Nareg  jette  la  plus  vive  lumi^re ,  et  fait 
revivre  les  beaux  temps  de  la  littera- 
ture  arm^nienne.  £minemment  poete, 
la  suavite  de  son  style  et  Televation  de 
ses  pens^es  le  mettent,  aux  yeux  des 
Arm^niens,  au  rang  des  lyriaues  les 
plus  estim6s  des  autres  peupfes;  ses 
eldgies  sacr^es  ont  une  onction  tou- 
chante,  et  il  excelle  h  ^eindre  les  gran- 
des  v^rites  de  la  religion.  II  fernie  la 
liste  des  hommes  remarquables  de  cette 
premiere  periode  de  la  litt^rature  ar- 
m^nienne. 

Vers  le  onzi^me  si^e,  la  science  et 
les  luniidres  s'^taient  r^fugi^s  dans 
les  ecu  vents ,  en  Arm^nie ,  comme  dans 
TEurope  occidentale.  Les  plus  c^lebres 
rtaient  ceux  de  Sanahin,  de  Halbat  et 
(le  S^van,  qui  fbrent  une  p^piniere 
tr^crivains  plus  ou  moins  distingu^. 
A  leur  t^te  doit  6tre  rang^  saint  Ner- 
s^,  qui  n*appartient  cependant  qu'au 
douzieme  siecle,  vrai  Fenelon  pour  le 
style,  et  qui  a  m^rit^  le  surnom  bono- 
rinque  de  Gracieux.  La  capacite  de  son 
esprit  s*appliquait  a  tout,  et  il  est  aussi 
distingu6  comme  poete  et  historien  que 
comme  orateur,  thdologien  et  pbilolo- 
gue.  Un  autre  6crivain  non  moins  re- 
marquable,  et  qui  porte  aussi  le  nom 
de  Nerses,  est  Tdoquent  ev^ue  de 
Tarse,  auteur  du  long  et  touchant  dis- 
cours  prononc^  dans  le  synode  de 
Romcia,  assemble  pour  operer  la  reu- 
nion des  dissidents,  en  1179,  et  qui 
malbeureusement  n'atteignit  pas  le  but 
qu'il  s^etait  propose.  L'bomme  qui  avait 
puissamment  contribue  a  la  restaura- 
tion  des  lettres  est  Gregoire  Machis- 
truos ,  auteur  de  plusieurs  traites  re- 
commandables  et  dont  le  GIsGregoire, 
surnomnie  Veghajaser,  est  aussi  une 
des  lumi^res  de  Tl^glise  d'Arm^nie  (*). 

(*)  Voy.  la  ptaiirlie  n*  a5. 


Pendant  toute  cette  nouvelle  pf- 
riode ,  le  nombre  des  ecrivains  ra  crois- 
sant, mais  un  petit  nombre  d'entreeux 
seulement  se  distingue  par  un  mMe 
reel.  Nous  citerons  vartan  de  Parzer- 

{)erh  en  Cilicie.  auteur  d*une  histoire 
ongue  et  detailfee,  commen^nt  a  To- 
rigine  du  monde  et  s'arrltant  h  Tao 
1267.  Les  extraits  que  Tcbamtcbean 
cite  dans  son  histoire  universelle  nous 
fonfcomprendre  toute  rimportancede 
cet  ouvrage,  que  les  Mechitaristes  de 
Venise,  pour  des  raisons  a  nous  inooD- 
nues ,  n'ont  point  encore  voalu  poblier. 
Le  livre  des  Fables  publie  en  1825  a 
Paris ,  par  M.  Saint-Martin ,  et  attribue 
h  cet  ecrivain ,  ne  nous  donnerait  pas 
une  haute  idee  de  son  roerite,  car  le 
style  en  est  aussi  vul^aire  que  les  peo- 
sees  sont  triviales  et  meiegaotes. 

L'eveque  de  Siounie,  ^tienne  Or{)e- 
lian ,  composa  sur  sa  province  une  his- 
toire pleine  de  documents  curieux,  que 
le  savant  Saint-Martin ,  trompe  par  on 
renseignement  inexact  de  la  Croze,  a 
confondu  avec  Thistoire  de  la  mm 
des  Orpeiians,  ecrite  beaucoup  p 
tard  par  un  autre  ecrivain  inoonnu. 

A  partir  de  cette  epoque,  le  bw 
godt  deperit,  et  la  langue  vulgaiif. 
qu'il  faut  toujours  soigneusement  diV 
tmguer  de  Tarmenien  dassique  ou  lit* 
teral,  gagna  dans  le  peuple  au  detrimeot 
de  Tautre.  Dans  les  dges  precedents,  i^ 
litterature  avait  et6  enricnie  parlestra* 
ductions  des  meilleurs  auteurs  grecs, 
ce  qui  contribuait  k  perfectiooner  la 
lan^e  et  k  nourrir  le  g^t  des  lettres- 
Mais  vers  ce  temps  un  autre  systeme 
de  traduction  fut  iroporte  par  deus 
associations  litteraires,  connues  sot^ 
le  nom  de  Fr^rcs  Unis  et  de  Date- 
viens,  associations  opposees  Tune  > 
Tautre,  et  n*ayant  pour  point  de  con- 
tact que  leur'mauvais  goAt,  qui  ^ 
portait  a  traduire  des  ouvrages  latins 
extremement  mediocres  et  encore  d^ 
figures  par  leur  style  incorrect,  quek 
public  neanmoins  accueillit  avideaienti 
en  mettant  de  cdte,  par  un  dedain  io- 
juste,  plusieurs  ouvrages  d*aateurs  luv 
tionaux  et  certaines  traductions  an; 
ciennes  plus  importantes,  qui  ont  fim 
par  se  perdre  entierement. 


ARMliNIE. 


107 


La  conqu^te  definitive  de  Tempire 

§rec  par  les  Turcs  avait  acliev^  d*etein- 
re  en  Arm^nie  les  dernteres  lueurs  de 
la  civilisation.  Heoreasement,  dans 
toutes  les  ehoses  humaines,  la  Provi* 
dence  place  le  remMe  pr^  du  mal. 
Ainsi ,  en  m^me  temps  que  la  barbaric 
etendait  sur  FAsie  son  lugubre  lin- 
ceul ,  au  sein  de  TEurope  la  science 
proserite  de  TOrient  renaissait  avec  un 
nouvel  6clat,  grdce  h  I'lnvention  de 
rimprimerie. 

Le  contre-ooop  de  cette  revolution 
intdlectuelle  se  nt  promptement  res* 
sentir  en  Asie ,  et  prindpalcnient  dans 
TArmenie,  <^  Abgar  de  Tokat  vint, 
en  1563,  popnlariser  cette  invention. 
Avec  kBS  livres ,  le  got)t  de  Tinstruction 
se  r^ndit  parnii  lepeuple;  et  la  nation 
armenienne  participa  bient6t  au  mon^ 
vement  scientifique  qui  reg^nerait 
I'Europe.  Au  commencement  du  dix- 
septieme  sidcle ,  des  presses  armenien- 
nes  etaient  etablies  k  Milan,  Paris,  Ams- 
terdam, Constantinople  et  Leipsick. 
La  propagande  romame  attlsait  le  feu 
sacre  par  ses  missionnaires  qui  ap- 
portaient  dans  TOrient  des  ouvrages 
inoonnus ,  h  cause  du  peu  de  commu- 
nications existantes  entre  oette  partie 
du  monde  et  le  pays  des  Latins.  Gala- 
ous  m^rite  surtout  d'etre  cite  par  son 
zeie  et  son  erudition,  bien  qu*elle  soit 
faative  dans  certains  passages. 

Mais  ce  fut  le  ceiebre  Mechitar, 
fondateur  du  couvent  de  Saint-Lazare 
de  Yenise ,  dont  nous  parlerons  dans 
la  dnquieme  partie  de  cet  ecrit ,  qui 
fiit  rinstrument  du  changement  litte- 
raire  opere  au  commencement  du  dix- 
huitieme  siecle ,  et  qui  ouvre  la  troi- 
sieme  grande  epoque.  D^s  qu'il  cut 
fonde  sa  societe,  son  premier  soin  ftit 
de  retablir  la  langue  armenienne  dans 
son  andenne  purete  des  temps  classi- 

3 IMS,  etde  la  purger  du  grand  nombre 
e  mots  barbares  que  rignorance  ou 
le  mauvais  godt  y  avait  introduits.  Le 
moyen  de  parvenir  k  cette  fin  etait  de 
faire  une  refonte  generate  de  tous  les 
roots,  et  meme  des  locutions  usitees 
par  les  autears  eorrects,  et  de  donner 
ainsi  une  esp^ce  de  r^e  et  de  crite- 
riuro  decisifdans  les  difncultes  du  Ian- 


gage.  II  composa  done  le  grand  dic- 
tioonaire  qui  porte  son  nom ,  et  qui , 
pour  la  langue  armenienne ,  rempiace 
celui  de  TAcademie. 

Le  developpement  que  prit,  dans  le 
couvent  des  Mechitaristes ,  retude  de 
la  langue  armenienne ,  reveia  k  quel- 

3ues  savants  de  I'Europe  Texistence 
'un  nouvel  horizon  ouvert  k  la  saga- 
cite  de  leur  erudition.  La  France  tut 
le  premier  centre  ou  I'on  s'occupa  de 
cette  etude.  Jacques  Villotte  publia 
plasieurs  travaux  recommandables ; 
apres  lui ,  viennent  le  savant  Veyssiere , 
autrement  dit  la  Croze,  Yillefroi,  Lour- 
det,  et  enfin  Saini*Martin ,  qui,  pent* 
etre  moins  verse  dans  la  connaissance 
materielle  de  la  langue  que  audques- 
uns  de  ses  devanders ,  les  a  neanmoins 
surpasses  par  la  critioue  et  I'impor- 
tance  des  resultats  qu'il  a  obtenus.  En 
An^leterre,  les  freres  Whiston  pu- 
bliaient  la  traduction  de  Moise  de  Kno- 
ren,  travail  surprenant,  eu  e^ard  k 
I'epoque  k  laqudle  il  a  etc  termme ,  et 
au  peu  de  ressources  qu*avaient  oes 
hommes  laborieux.  L'Ailemagne,  sui* 
vant  son  habitude ,  ne  resta  point  en 
arriere  des  autres  pavs;  et  Schroder 
composa  son  Trisor  de  la  langue  ar- 
miniewne.  ouvrage  grammatical  le 
plus  compiet  que  nous  avons  sur  cette 
matiere.  Aujourd'hui,  I'universite  de 
Munich  possede  le  docteur  Neumann , 
qui  vient  de  terminer  une  serie  deja 
Tongue  de  beaux  et  utiles  travaux  sur 
I'histoire  et  la  langue  armenienne,  par 
un  tableau  de  sa  litterature  (*) ,  plus 
compiet  que  cdui  du  reverend  P.  8u- 
kias  Somal.  La  congregation  de  Saint- 
Lazare  n'a  pas  cesse,  depuis  sa  fon- 
dation,  de  produire  aes  hommes 
recommandables  par  leur  science  et 
paries  travaux  qu'ilsontexecutes.  Nous 
(lesignerons  de  preference  le  P.  Tcham* 
tcbean ,  auteur  d'une  histoire  univer- 
selle  de  sa  nation ,  ouvrage  rerapii  de 
documents  rares  et  importants  pour 
I'histoire  de  certains  autres  peuples  de 
I'Asie.  Nous  ayouterons  les  noma  d'In- 
gigiean  et  des  deux  frdres  Aucher, 

(*)  Veroick  einer  Geschichte  der  armen. 
Utter,  Leipsick,  tS36. 


108 


L'UNIVERS. 


dont  Tatn^  sortout  se  fait  remarquer 
par  une  solide  Erudition.  La  congrega- 
tion perdit,  au  oominenoenient  de  oe 
slecle,  un  homme  d'un  ?aste  sayoir  et 
d*une  critique  sOre ,  le  docteur  Zoh- 
rab,  traducteur  de  la  chronique  d'Eo- 
sMm  ,  et  qui  sortit  de  Tordre  de  Saint- 
Lazare&causedefdcheuses  eiplications 
provoqu6e8  par  la  publication  de  oette 
oeuvre  scientifique. 

Saint-Martin,  dans  sea  Memodret 
9wr  rArm^fUe ,  porte  oe  jugement  sur 
la  litttoture  arnmienne : «  Cette  litt^* 
rature,  dit-il,  sans  avoir  I'int^r^t  et  la 
richesse  de  la  litttoture  des  Arabes, 
des  Persans,  des  Hindous  et  des  Ghi- 
nois,  ne  m^rite  oependant  pas  Toubli 
dans  lequel  elle  est  rest^  jusau'a  pre- 
sent; le  grand  nombre  d'ecrirains 
qu'elle  a  produits  la  rendent  recom- 
mandable  a  tous  ^rds.  On  doit  sur- 
tout  distinguer  parmi  eux  les  histo- 
rtens  qui ,  sans  compter  qu'ils  nous 
fontconnattre  Thistoire  de  feur  patrie, 
moins  fertile,  il  est  rrai,  en  grands 
^v^ements  que  ceile  des  autres  pays 
de  rOrient,  peuvent  encore  servir  k 
remplir  une  lacune  assez  considerable 
dans  les  annales  de  TAsie,  et  nous 
fournissent  en  outre  de  grandes  lu- 
mi^res  et  des  renseignements  tres-im- 
portants  pour  Thistoire  des  Grecs  de 
Constantinople,  des  rois de  Perse  de  la 
dynastic  des  Sassanides,  des  Arabes 
musulmans,  des  Turcs  seldjoukides , 
des  croisades,  des  Mongols,  et,  en  ge- 
neral, de  tout  rOrient,  depuis  le  com- 
mencement du  quatri^me  sidcle  jus- 
qu'aux  temps  les  plus  modemes. 

a II  est  bien  certain 

que  les  historiens  ont  ordinairement 
le  m^rite  de  mettre  beaucoup  plus  de 
soin  dans  le  choix  des  ^T^nements 

Su'ils  racontent,  de  rapporter  moins 
e  faits  peu  importants,  et  de  soigner 
plus  g^tolement  le  stj^le  de  leurs  ou- 
trages, que  les  historiens  arabes  et 
persans;  on  pent  m^me  assurer  qu'ils 
8ont  bien  supdrieurs  k  la  plupart  des 
6crivains  du  Bas-Empire.  Par  rapport 
aux  beauts  de  la  diction  et  aux  asr6- 
ments  du  style,  ce  n'est  pas  ce  delire 
d*imaf[ination  qui  emporte  les  autres 
6crivams  orientaux,  lorsqu'ils  veulent 


itre  ^loquents.  Sans  quitter  toot  a  bUt 
ce  gui  constitue  le  style  oriental, !« 
ecrivains  armtoiens  savent  o^anmoias 
s'abstenirdeces  comparaiaoos  bizami, 
de  ces  m^taphores  ambitiemes  qui  fbii 
asaez  gen^alement  le  caractere  dis- 
tinctif  ae  Teloquence  arabe  et  persaae: 
on  peut  mtoe  assurer,  sans  etaigaa- 
tion,  qu'il  en  est  pluaieurs,  tds  qat 
Molse  de  Khoren,  Elisee,  Lazan 
Fharbatsi,  le  patriarcbe  Jean  YI,  a 

Suelques  autres,  qui  ne  seiaient  pas  ia- 
ignes  de  rattention  d'un  lecteur  ea- 
rop^n,  par  leur  Eloquence,  la  poicte 
sootenue  de  leur  style,  et  la  oonla- 
turesayantede  leurs  periodesoratoires, 
et  qui  pourraient  encore  se  laire  lire 
avec  inw^t,  apr^  les  grands  modds 
que  nous  poss^dons,  pt  a|«e8  cein 
mme  que  Rome  et  la  Greoe  ont  pro- 
duits. 

» I^  litterature  sr- 

riaque  neut  encore  tirer  de  granfe  se- 
eours  de  celle  des  Armeniens,  taot 
pour  rhistoire  politique  que  pour  fbts- 
toire  eoclesiasttque  et  la  PoMctifK. 
Lors  de  Tintroduction  du  dvwa- 
nisme  en  Arm^ie ,  il  s'y  dtablit  bem- 
coup  de  Syriens  qui  vinrent  j  prMxr 
la  doctrine  ^ai^^ique ,  y  fooder  do 
monast^res ,  et  y  eriger  des  si^es  cpi»- 
copaux.  Toute  la  partie  du  sud-ouest 
de  rArm^nie,  entre  le  Tigre  et  TEa- 

Shrate,  les  environs  d'Aroid  el  de 
liafarekin,  la  proyinoe  de  Sopbeae 
et  les  autres  contr^es  yoisines  aevia* 
rent,  pour  ainsi  dire,  des  dependanoet 
de  la  Syne ,  au  moins  sous  les  rapports 
religieuxet  litt^aires.  Tons  les  Mqiits 
de  ces  proyinces  ^ient  Syriens,  et  de> 
pendants  du  patriarcbe  d'Antiocfae; 
tous  les  moines  et  les  6criyains  ne  se 
servaient ,  dans  TofBce  dirin  ou  daos 
leurs  ouyrages ,  que  de  la  langue  sr- 
riaque.  Les  pr^tres  syriens  etaicot  a 
puissants,  qu'ils  tent^rent,  ao  coai* 
mencement  du  dn^ikne  siede.  de 
s*emparer  de  la  dignity  patriarcale. 

« C'est  dans  les  Kyres 

arm^niens  que  Ton  peutesp^rerdetrou- 
ver  le  plus  de  renseignements  positii$ 
propres  k  ^laircir  lliistoire  des  rois 
de  Perse  de  la  dynastic  des  Sassanides. 
et  a  nous  faire  connattre  les  opiniem 


ARMltNIE. 


109 


reltgieuses  des  anciens  Persans,  secta- 
teurs  de  Zoroastre.  Apr^  la  destruc- 
tion de  la  monarchie  arm^nienne ,  les 
mages  dierchh'ent  a  profiter  de  la 

Suissance  et  de  la  protection  des  rois 
e  Peree ,  pour  ^tablir  leur  religion  en 
Arm^te ;  et  les  thMo^iens  de  oe  pays 
forent  tr^B-soavent  obliges  de  d6fendre 
oontre  eux.  par  6crit ,  la  relipon  chr6- 
tienne ,  pour  empteher  les  princes  ar- 
m^niens  d'embrasser  la  croyance  des 
strangers ,  qui  fit ,  malgr^  cela ,  parmi 
eux ,  un  griind  nombre  de  proselytes. 
(Test  dans  oes  Merits  poltoiques  qu'il 
faut  recherdier  une  foule  de  traits  et 
de  traditions  d'autant  plus  importants , 
qu*ils  se  trouvent  dans  des  livres  com- 
posite par  des  hommes  qui  vivaient  au 
inilien  des  peuples  dont  ils  combat- 
taient  la  doctrine.  Les  Arm^niens  pos- 
sddent  encore  plusieurs  traits  de  tn^ 
logic  destine  a  combattre  les  erreurs 
de  divers  h^r^tiques  ou  fiectaires ,  qui 
ne  sont  peut^6tre  que  les  successeurs 
des  disciples  de  Bardesanes ,  de  Mar- 
cion  <,  de  Valentin  et  de  Man^ ,  qui , 

Cendant  longtemps ,  furent  tres-  nom- 
reux  et  tr&  -  puissants  h  £desse,  h 
Harran ,  et  dans  le  reste  de  la  Meso- 
potamie.  QuoiquMls  aient<,  h  diverses 
^poques,  ^rouv^  de  sanglantes  per- 
secutions ,  il  paratt  qu'il  en  existe  en- 
core en  Armenie ,  du  c6te  de  la  ville 
de  Knous,  et  dans  la  M^potamie, 
ou  on  les  nomme  Jezidt. 

«Malffr^  les  nombreux  avantages 
que  je  viens  d'^num^rer,  la  litt^rature 
amoenienne  est  restee  enti^rement  in- 
connue  en  Europe  jusau*i^  nos  jours. 
II  est  bien  difficile  de  determiner  pr6- 
cis^ment  les  raisons  de  Tindifference 
que  Ton  a  montr^e  pour  elle :  le  defaut 
de  dictionnaires ,  de  livres  ^l^mentai- 
oes,  et  le  tr^-petit  nombre  de  manus- 
crits  oue  nous  possMons  dans  nos  bi- 
bliotMques,  en  sont  sans  doute  les 

Erincipales  causes ;  mats  elles  ne  sem- 
lent  pas  suffisantes  pour  Texpliquer 
d*une  maniere  satisfaisante ,  parce  que 
ces  m^mes  causes  auraient  dd  6gale- 
ment  nous  d^toumer  de  I'^tude  des 
autres  litt^ratures  de  TOrient.  Ce  qui 
me  paratt  avoir  contribu^  le  plus  puis- 
samment  h  perp^uer  jusqu*^  nous  cette 


indilf(^ence ,  c'est  I'^t  oomplet  d'.-js- 
servissement  oi^  se  trouvait  T  Armenie, 
lorsqu'au  milieu  du  dix-septi^me  si^le, 
la  literature  biblique  cessa  d'etre  Fob- 
jet  prescfue  exclusif  des  travaux  des 
orientalistes,  et  que  Ton  comraen^a  k 
se  livrer  a  F^tude  des  langues  de  TAsie, 
dans  des  vues  purement  titt^raires.  De- 
puis  longtemps  les  Arm^niens  avaient 
perdu ,  avec  leur  ind^pendance ,  le  rang 
politique  que  I'^tendue  et  Timportance 
de  leur  pays  leur  donnaient  droit  de 
tenir  parmi  les  autres  nations  de 
TAsie.  II  etait  difBcile  de  penser  qu'un 
peuple ,  dont  la  plus  grande  partie  ^tait 
soumise  au  joug  des  rousulmans,  et 
Tautre  errante  et  dispers^e  dans  toutes 
les  parties  de  I'ancien  monde ,  s'occu- 
pAt  de  belles  -  lettres  et  au'il  poss6dAt 
une  langue  savante ,  fixeie  depuis  fort 
longtemps,  et  polie  par  un  grand 
nombre  d'ouvrages  de  tout  genre.  Par- 
tout  le  godt  des  Arm^niens  pour  le 
commerce  les  faisait  confondfre  avec 
les  juifs;  et  leur  langago  vulgaire, 
rempli  de  mots  et  de  famous  de  parler , 
arabes ,  persans  ou  turcs ,  emp^hait 
delesdistinguer  de  leurs  dominateurs. 
Ainsi  une  premiere  injustice,  qu'on 
iivait  faite  aux  Arm^iens  eux-m^mes, 
est  devenue  la  source  d'une  injustice 
plus  grave ,  que  Ton  continuera  peut- 
etre  longtemps  encore  de  faire  a  leur 
litt^rature. » 

Nous  ne  croyons  pouvoir  mieux  ter- 
miner ce  tableau  rapide  de  la  litt^ra- 
ture  arm^nienne  que  par  queiques  de- 
tails sur  le  couvent  de  Saint-Lazare  de 
Venise,  d'ou  sont  sortis  tous  les  tra- 
vaux propres  a  nous  faire  connattre  la 
langue  et  la  triple  histoire  religieuse, 
politique  et  litt^raire  des  Armeniens. 
Ces  renseignements  sont  extraits  de 
rhistoire  de  la  society  religieuse  de 
ce  convent,  que  nous  y  avons  pu- 
blide  en  1835 ,  pendant  notre  s^jour  k 
Venise. 

SOCI^lt  REUGIEDSB  AH^IANIENNB  DES  H6- 
CHrTARISTES  DB  L'lLB  DB  SAINT-LAZARE 
PRto  VEMISR. 

Parmi  les  ties  semees  dans  les  lagu- 
nes  de  Venise  et  toutes  occupees  an- 


•  •  •  •  «   • 



••••  •...• 

•  •  •  • 


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V. 

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•  •• 

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•  •••  • 
•••>•  •••• 

•  ••• 

•  • •*  •••  • 

•  m^  • ••  • 


•  ••• 


'•  •' 


arm£nie. 


Ill 


doute  qu*on  voulait  porter  atteinte  k 
868  oncienoes  traditions ,  a  is  memoire 
de  ses  saints  pontifes  et  de  ses  doc- 
teiurs,  ou  du  moiiis  qu'on  ne  les  respee- 
tait  pas  assez. 

La  premiere  condition  exigte  pour 
6tre  re^u  dans  la  soci^t^  est  d^tre 
Annenien  d*origine;  et,  afin  de  se 
mieux  pdn^trer  de  son  esprit  et  de 
i'objet  ae  ses  institutions,  on  preftre 
les  sujets  encore  ieunes,  ^levds  dans  la 
maison ,  sans  qu  il  soit  fait  la  plus  1^- 
gere  distinction  entre  le  riche  et  le 

gaavre.  Lorsque  ces  jeunes  gens  ont 
lit  preuve  de  leur  capacity  et  de  lears 
dispositions,  ils  revftent  la  robe,  cos- 
tunhe  de  Toidre;  ils  habitent  un  corfw 
de  bitiment  s^par6,  nomm6  le  Novi- 
ciat,  od  ils  ont  des  mattres  capables  de 
les  diriger  dans  lenrs  etudes,  qui  cor- 
respondent alors  a  oelles  de  nos  gym- 
oases  ou  collies.  Lorsqu*elles  sont  ter- 
mini, et  qu'^  une  bonne  sant^ 
capable  de  supporter  les  travaux  de  la 
▼ie  de  savant  ou  de  missionnaire  se 
joint  une  capacity  intellectuelle  sufB- 
sante,  on  les  laisse  iibres  d'entrer  dans 
la  society.  S'ils  manifestent  le  d^ir 
d'etre  admis,  on  les  prtente  k  la  so- 
ciety, dont  la  majorite  des  nsembres 
doit  opter  pour  leur  admission.  Alors 
lis  passent  dans  T^le  appel^  Profes- 
sorat,  ou  ils  se  livrent  k  I'tode  de  la 
th^logie  et  de  la  philosophic,  en  y  joi- 
gnant  cdle  des  Peres. 

Lorsou'ils  ont  ache?^  ce  nouveau 
cours,  lis  refoi?ent  le  sacerdoce,  et  on 
leur  assigne  pour  chambres  celles  qui 
sont  occupto  par  les  docteurs.  S'ils  en 
sont  dignes,  et  s'ils  soutiennent  avec 
avantage  les  examensrequis,  ils  resol- 
vent aussi  le  titre  de  Tartabied,  et, 
suivant  leur  vocation  ou  les  disposi- 
tions quMls  montrent,  on  les  envoie 
dans  les  missions  d*Orient,  ou  ils  res- 
tent  dans  le  convent  pour  Taquer  aux 
travaux  Utttoires. 

Th>is  fdis  par  Jour  les  religieux  s'as- 
semblent  dans  r^lise  poor  r^ter  en 
oommun  lenrs  prieres;  les  jeunes  en- 
ftnts  seulement  sont  dispense  de  la 
pri^re  du  matin  faite  aans  T^lise. 
Outre  tous  les  exercioes  qui  occupent 
les  religimix  durant  ta  journ^,  il  leur 


reste  sept  heures  completes  de  travail. 

Une  imprimerie  a  €U  ^tablie  dans 
le  monastere,  et  la  beauts  de  ses  types , 
la  correction  et  I'd^ance  de  tous  les 
ouvrages  qui  en  sortent,  non-seulement 
la  mettent  a  la  t^  des  autres  presses 
arm^niennes  que  Ton  trouve  a  Cons- 
tantinople, a  Smyme,  k  Madtos,  a 
Yienne,  a  Saint-P^tersbourg,  k  Lon- 
dres  ou  k  Paris,  mais  encore  ces  qua- 
lit^  lui  valent  Thonneur  d'etre  dassee 
parmi  les  premises  imprimeries  orien- 
tales  de  Tfiurope. 

Les  travaux  de  la  soci^t^  peuvent  se 
diviser  en  deux  classes :  la  premiere 
Gomprend  ceux  execute  dans  le  but  de 
servir  k  T^ducation  spirituelle  et  mo- 
rale, ou  a  rinstruction  de  la  jeunesse; 
il  £aiut  ranger  dans  la  seconde  ceux  qui 
ont  un  caract^  proprement  sdeutifi- 
que ,  et  qui ,  s'adressant  k  tout  ie  public 
htt^ralre,  ont  un  int6*dt  tout  particu- 
lier  pour  les  orientalistes. 

A  notre  premiere  classification  se 
rapportent  les  oeuvres  aso^tiques  des- 
tinees  a  diri^er  la  conduite  des  fiddles 
en  tout  ce  qui  tient  a  la  relision :  telles 
sont  la  Vie  des  Saints  du  calendrier  ar- 
m^nien,  les  Commentaires  de  TCcri- 
ture  sainte,  le  Br^viaire,  le  Missel  et 
le  Rituel  de  r£glise  armenienne,  une 
Doctrine  chr^tienne,  et  une  multitude 
d*autres  livres  dont  Tdnum^ration  fati- 
guerait  le  lecteur.  Dans  le  domaine  de 
la  litt^rature  profane,  nous  trouvons 
des  traductions  d'ouvrages  europ^ens , 
et  particulidrement  francais,  corres- 
pondants  aux  diverses  nranches  de 
rinstruction ,  conune  THistoire  de  Rol- 
lin,  Tel^maque,  la  Vie  des  bommes 
illustres  de  Plutarque,  la  Mort  d*Abel 
de  Gessner,  leParadis  perdu  de  Milton , 
les  Pensto  de  Young,  les  Caracteres 
de  Th^ophraste,  des  Traits  d'arithm^ 
tique,  de  gtom^trie,  de  trigooomtoie, 
de  perspective ,  une  Geographic  univer- 
selle,  un  Traits  de  m^ecioe  pratique, 
et  plusieurs  autres  ouvrages. 

La  seconde  dasse  des  travaux  plus 
importants,  et  directement  utiles  J 
la  science  europeeiinc,  cooiprend  ia 
Grande  Histoire  tuuverseile  de  I'Ar- 
minie  du  P.  Tchamtcbean,  les  JnU- 
quUis  d'Jrminip.  et  sa  G^ocnraphie ,  pai 


112 


L'UNIVERS. 


le  P.  Incigean ,  la  Chronique  d'Eusebe , 
par  le  P.  Jean*Bapti8te  Aucher. 

Une  riche  collection  de  manuscrits 
armeniens  oroe  la  bibliotheque  du  cou- 
▼ent;  chaque  jour  de  nouvelles  acqui- 
sitions Yiennent  enrichir  ce  tr^r  iit- 
teraire ,  et ,  sans  la  dissidence  religieuse 

3ui  ferme  aux  M^itaristes  Fentr^ 
es  monast^res  de  TAmi^nie,  il  est  a 
§  roomer  qu'ils  seraient  en  possession 
*un  certain  nombre  d*atitres  tents  pr^ 
cieux  que  Ton  croit  perdus.  Esperons 
qu*un  jour  un  Toya^eur  europten 
pourra  oonstater  la  v^it^  de  ce  fait.  II 
ne  trouverait  pas  les  monies  obstacles 
qu'un  Arm^nien,  et  il  pourrait  s*ae- 
qu^rir  quelque  gloire  scientiflque. 

La  partie  la  plus  riche  de  Tancienne 
litt^ratiire  est  celie  qui  traite  des  ori- 
gines  du  christianisme  en  Arm^ie,  et 
qui  comprend  les  vies  et  les  actes  des 
saints.  Nous  empruntons  ici  k  un  teri- 
vain  du  cinquieme  sitele,  A^athange, 
le  rteit  du  martyre  de  la  sainte  dont 
le  nom  est  aussi  populaire  dans  cette 
contrte  que  celui  de  Genevieve  en 
France,  et  d'£lisabeth  en  Hongrie;  elle 
s'appelait  Ripsymte.  Nous  retrouvons 
ici  tons  les  caract^res  de  la  legende. 

SAINTE  RIPSYMKB. 

En  ce  temps-la,  il  se  passa  dans 
TArm^nie  un  fait  merveilieux  qui  fit 
briller  d'un  nourel  telat  la  vertu  chr^ 
tleniie,  en  montrant  les  prodiges  qu*elle 
pouvait  op^rer  dans  le  coeur  de  sim- 
ples femmes. 

Suivant  la  tradition,  Diocl^tien, 
Tempereur  remain,  voulant  ^pouser 
la  femme  la  plus  belle  de  son  empire , 
euToya  dans  les  diverses  provinces  des 
peintres  habiles,  pour  rechercher  les 
jeunes  filles  dont  on  vantait  la  beauts ; 
et  its  devaient  prendre  leurs  portraits, 
afin  qu'il  pOt  se  decider  et  cboisir  celle 
que  son  coeur  d^irait.  Longtemps  les 
perquisitions  des  toissaires  iurent  in- 
tructueuses;  toutes  les  femmes  qu*ils 
avaient  trouvto  et  dont  ils  avaient  en- 
voy6  le  portrait  h  Tempereur,  man- 
quaient  oe  certains  avantages ,  oe  qui 
les  emptehait  de  r^liser  le  beau  ideal 
qu'il  at  ait  con<^u.  Un  jour,  iis  arri- 


v^rent  k  la  porte  d*une  vaste  maisoa, 
situte  solitairement  <bns  la  gmrn  d'une 
montagne ,  et  dont  la  constnictMMi  sia- 
guli^re,  avec  le  silence  et  Tordre  a^ 
parent  qui  y  regnaient,  les  frappa  ex- 
traordinairement.    Ils    demandereot 

3uels  6taient  les  paisibles  hafoftanti 
e  cette  retraite,  et  quelles  poavaint 
6tre  leurs  occupations.  Lorsqu*on  lor 
eut  r^ndu  que ,  dans  ces  lieux ,  do- 
quante  jeunes  vierges ,  de  la  religion 
chr^ienne ,  vivaient  sous  la  condoite 
d'une  autre  vierge,  leur  m^re  com- 
mune, qu'elles  passaient  les  jours  et 
les  nuits  en  pneres,  se  livrant  aax 

Clusdures  aust^rites,  et  n'aj^ant  poor 
)ute  noorriture  que  les  berbes  sau- 
vages  des  montagnes,  leur  admlratioB 
s'accrut  avec  leur  curiosity ;  et ,  comme 
pousses  par  une  inspiration  secrete, 
lis  voulurent  voir  ces  femmes  si  dignes 
d'^tonnement,  et  ils  forcerent  i*cntr«e 
de  la  maison,  dans  Tespoir  d'y  trouvcr 
peut-^tre  la  beauts  quMIs  cfaerchaioit 
ailleurs  inutilement. 
A  peine  avaient-ils  franchi  le  seuil, 

3u'une  jeune  vierge,  au  maintien  mo- 
este  et  ^  la  figure  suave  et  ang^iqite, 
s  of&e  k  leurs  regards.  C^tait  Ripsr- 
mee ,  issue  d'une  maison  de  princes  (k 
rOrient,  et  Tdeve  ch^ie  de  Caiaaa, 
charg^  de  la  conduite  du  monasters. 
Jamais  ces  Romains  n'avaient  vu  dans 
une  femme  Fair  de  candeur  et  Texprei- 
sion  de  quietude  s^rapbioue  eropreinte 
sur  le  front  de  la  jeune  can^enoe ;  iis 
iurent  frapp^  d^admiration ,  et  s^e- 
cri^nt  de  concert :  Certes,  voil^  bioi 
la  femme  que  Diod^tien  nous  £iit  cbcr- 
cber !  Un  peintre  tire  aussit5t  scs  pin- 
ceaux,  et  esquisse  son  portrait  qu*oo 
envoie  k  Vwnperear. 

Dte  que  Diocktien  eut  vu  la  figure 
de  la  vierge  chr^ienne  j  il  tomba  en  ex- 
tase  devant  ce  mod^  de  perfectioo, 
et  il  sentit  s'allumer  en  son  coeur  Ta- 
mour  le  plus  ardent,  en  sorte  qu'il 
ne  soupirait  plus  qu*apr^  rinstaot  ou 
il  s'unirait  a  oelle  qu*il  cboisiasait  par 
Feffet  d'un  attrait  irr^istible.  II  en- 
voya  done  sur-le-champ  des  ofliden 
de  son  palais  au  convent  des  vienes 
chr^iennes,  en  leur  donnant  rormv 
d'amenerRipsym^B.  Lorsquecettenou- 


ARM^NIE. 


lis 


vette  parvint  dans  la  solitude  des  saintes 
finnroes ,  elle  y  jeta  la  constenuition. 
Caiana  fit  venir  Ripsyroee  et  ses  autres 
oompagnes;  elle  leirr  exposa  le  motif 
de  rarriT^  des  officiers  romains,  la 
volont^  de  Tempereur;  elle  le»r  nriOD- 
tra  tons  les  artifices  du  dimon  qui 
cherehait  k  troubler  leur  foi  et  le 
calme  de  leur  retraite ;  puis  elles  torn- 
b^reot  toutes  a  (;enoux ,  et  adress^ent 
au  ciel  cette  priere : 

«  Seigneur  des  Setfjneurs,  Dieu  sou- 
verain  et  ^temel ,  Dieu  du  ciel ,  pro* 
cr^teur  de  I'ineffable  lumi^re ;  toi  qui 
as  affermi  toutes  choses  par  ta  paroijp, 
toi  qui  as  fait  le  ciel  et  la  terre  et  tous 
leurs  omements;  toi  qui  as  cr66 
rhomme  du  limon  et  Tas  ^bli  dans 
oe  inonde ;  toi  qui  secours  dans  leurs 
miseres  tous  les  aflliges  esperant  en 
ton  nom ,  secours  -  nous ,  6  Seigneur! 
au  milieu  du  combat  qui  nous  presse, 
afin  que  nous  triomphlons  des  em- 
bAches  de  Satan.  Ton  nom  sera  glo- 
rifie,  et  la  crainte  sera  bannie  du  sein 
de  ton  ^lise.  Fais  que  nous  puissions 
arriver  auz  demeures  celestes  r^ser- 
v^s  k  tes  ^lus.  Que  Thuile  ne  manque 
point  dans  nos  lampes ,  et  que  le  flam- 
beau de  la  foi  ne  s'^teigne  pas ;  que 
nos  pieds  ne  chancellent  jamais  dans 
tes  sehtiers  lumineux ;  que  les  ^upilles 
de  nos  yeux  ne  se  ferment  pomt  aux 
rayons  resplendissants  de  ta  v^it^, 
etque  Toiseau  de  la  mort  n'enleve  pas 
la  semence  de  vie  ^'a  jetee  au  milieu 
de  nous  ton  fils  unioue  Jesus  -  Christ , 
Notre-Sdgneur.  Ne  livre  point  la  sain- 
tet^  de  ton  troupeau  a  la  dent  de  la 
b^  f(6roce;  que  le  -loup  destructeur 
ne  triomphe  point  de  tes  orebis ,  et  que 
Tennemi  de  notre  foi  ne  disperse  pas 
tes  agneaux  de  ta  sainte  ^lise. 

«  Jette  du  haut  du  ciel  un  regard  de 
compassion  sur  nous,  de  peur  aue 
nous  ne  ressemblions  a  celui  qui  batit 
sur  le  sable,  et  dont  I'^ifice  croule 
sous  les  coups  de  la  premite  pers^cu* 
tion.  Afifermis-notts  dans  la  v^rit^  de 
ton  ^vangile,  et  d^salt^re-nous  k  la 
eoape  do  martyre ,  afin  que  nous  rece* 
vions  pour  prix ,  au  jour  du  jugement , 
la  oouronne  de  rimmortalite. » 

Aprte  avoir  achev^  cette  pri^e, 

8*  Uvraisan.  (Armenib.) 


Caiana  et  Ripsym^,  miraculeusement 
inspire  de  Dieu ,  song^nt  k  quitter 
leur  retraite  <,  et  li  se  pr^errer  par  la 
fuite  des  atteintes  des  paiens  envoys 
a  leur  recherche.  £lles  voulurent  se 
rendre  dignes  de  la  r^mpense  que 
J^us-Christ  promet  a  celui  qui  aban- 
donne  en  son  nom  ses  parents  et  sa 
demeure.  Elles  se  r^gierent  done  au 
pays  des  Arm^niens^  dans  la  plaine 
d* Ararat,  pres  de  la  ville  de  Vaghars- 
chag.  La,  retirees  dans  quelques  che- 
tives  masures,  qui  servaient,  a  I'^poque 
de  la  r6oolte ,  de  pressoir  pour  les  rai- 
sins et  les  olives,  elles  vivaiant  du 
travail  de  leurs  mains,  au  moyen  des 
colliers  de  perles  qu'elles  iaisaient 
chaque  jour. 

Cependant,  comme  les  envoys  de 
I'empereur  remain  n'avaient  point 
trouve  les  saintes  viwges  dans  leur 
retraite ,  ils  ^talent  passes  aussi  dans 
la  grande  Arm^nie ,  et  ^tendaient  de 
tous  cdt^  leurs  perquisitions,  ce  qui 
jetait  le  trouble  nans  le  pays.  Arriv^^ 
a  Va^harschag,  ils  all^nt  trouver  le 
roi  Tiridate ,  et  lui  remirent  une  iettre 
ecrite  de  la  main  de  Diocl^tien,  dans 
laqudle  cet  empereur,  commen^ant  par 
se  plaindre  des  troubles  continuels  ex- 
cites en  son  empire  par  les  Chretiens , 
et  de  leur  refus  obstin^  de  reconnattre 
les  divinity  de  r£tat,  pour  adorer  de 
pr^(6rence  un  juif  crucifix,  il  lui  an- 
noncait  ensuite  qu*ils  avaient  ^are 
par  leurs  artifices  et  leurs  dangereuses- 
suggestions  une  ieune  vieree  de  leur 
secte ,  remarquable  par  sa  beaote ,  et 
qu'il  s'^tait  choisie  pour  Spouse.  II  Ta- 
vertissait  qu'on  Tavait  emmen^  fugi- 
tive dans  ses  £tats,  et  il  le  conjurait 
d^user  de  tout  son  z^e  et  de  son  auto- 
rit^  pour  deoouvrir  le  lieu  ou  elle  ^tait 
tenue  cach^  (*). 

Lorsque  Tiridate  cut  lu  cetti  Iettre , 

(*)  Le  roi  Tiridate  eUit  eflecti  vement  con* 
temporain  de  Diocletien.  A^thancdos  de 
qiri  nous  aYons  extrait  oette  leeeAde ,  s'ac- 
corde  eu  ce  point  avec  Moise  de  Khoren , 
qui  nous  dit,  chap.  8a,  liv.  a,  p.  333,  que 
Tiridate  moAta  sur  le  trdne  de  rAroienie  la 
seconde  annee  du  regne  de  IVmpereur  ro- 
main. 

8 


114 


L'UNlfERS. 


il  doima  I'ordre  sor-te-chadnp  de  re- 
dierd^  aree  la  plus  grande  exactitude, 
dans  toutes  lea  provinces  de  son 
royaume ,  la  .retraite  de  la  vierge  que 
Iqi  demandait  Diocl6tien ,  promettant 
de  riches  presents  k  celui  qui  rameoe- 
rait  dans  son  palais.  Ses  envoys  se 
r^ndirent  au  loin  dans  le  pays,  et 
fouill^nt  chaque  village  et  diaque 
hameau,  mais  sans  sucote,  puisque 
la  saiote  toit  toujours  dans  la  ville 
mtoie* 

Cependant  Ripsymte  fut  trahie  par 
quelgue  infid^e ,  qui ,  avide  de  recevoir 
la  recompense  promise,  alia  dearer 
au  roi  que  la  sainte  toit  cadi^  aux 
portes  ae  la  ville,  dans  un  pressoir  a 
demi  ruin^.  On  envoya  un  corps  de 
troupes  pour  investir  toute  la  maison 
t't  en  garder  toutes  les  issues,  et  les 
soldats  prolong^nt  oette  espdoe  de 
si^e  trois  jours  durant.  lis  eurent  oc- 
casion d'entrevoir  la  sainte,  et  tons, 
en  voyant  sa  beauts ,  demeurerent  stu- 
p^its.  Le  bruit  de  oette  merveille  se 
r^andit  promptement  dans  la  ville, 
et  les  habitants  accbururent  en  foule 
pour  voir  Rtpsymte.  Les  seigneurs  et 
les  dtoyens  les  plus  riches ,  ainsi  que 
lespauvres,se  pressaient^  Teovi  pour 
admirer  la  servante  de  Dieu.  Les  con- 
fidents du  roi,  en  rentrant  au  palais « 
Itti  flrent  une  peinture  si  gracieuse  et 
si  attrayante  de  la  jeune  vierge ,  que 
Tiridate  con^ut  un  violent  dfeir  de  la 
consid^rer  de  pr^  et  de  Tentretenir. 
11  donna  done  rordre  de  la  transpor- 
ter dans  son  palais ,  au  lever  du  jour, 
elle  et  ses  oompagnes.  Bien  plus ,  Tiri- 
date avait  d^\k  torm^  dans  son  ooeur 
le  dessein  de  r^user,  et  il  avait  d6- 
p^ch^  quelques-uns  de  ses  officiers, 
avec  de  riches  v^tements  et  des  ra- 
deaux  d'un  grand  prix ,  afin  qu'ils  ra- 
menassent  en  triomphe  Ripsymte  dans 
la  ville. 

Mais  la  sainte,  voyant  aux  por- 
tes de  sa  retraite  ce  ooncours  pro- 
digieux  d^hommes  arm^dont  tons  les 
regards  s'attachaient  avidement  sur  sa 
personne ,  se  troubia ;  une  rongeur  pu- 
dique  couvrit  ses  joues ,  et  die  se  r6- 
fugia  dans  les  bras  de  Caiana,  qui  lui 
<lit :  «Souvien8-toi,  d  mon  enfant, 


que  tu  as  meprise  et  quitt^  tous  les 
vains  honneurs  de  la  pourpre  vovak, 
dans  ta  patrie,  et  que  tu  as  prnM, 
aux  avantages  de  la  terre,  le  titre  du- 
rable et  milie  fois  plus  glorieux  d'^pouse 
de  J^ufr€hrist;  que  si,  aujounrhul, 
un  prince  paien  et  perstoteur  de  h 
foi  au  vrai  Dieu  te  fait  chercher  pour 
t'elever  h  la  dignite  de  reine ,  dMaigne 
ses  ofifres ,  et  pr^fere  au  trdoe  la  croix 
du  Sauveur. » 

Ripsymee  r^ndit  a  ees  paroles 
par  des  torrents  de  larmes  et  des  oris 
de  donleur;  puis ,  devant  ses  yem  au 
cieJ ,  et  plafiuit  ses  bras  sur  sa  poi- 
trine  en  forme  de  croix ,  elle  fit  en- 
tendre ces  mots :  «  Seigneur  tout-pnis- 
saoC,  qui  avez  ftit  passer  du  nant  a 
Pexistence  tous  les  dtres,  et  qui  aves 
peupl^  les  deux  d*6toiIes,  les  mcrs  et 
la  terre  de  mille  6tres  vari^ ,  jetei  sur 
nous  un  regard  de  compassion;  sao* 
vez-nous  du  p^ril  qui  nous  menace, 
comme  vous  avez  epa^sn^  autrefois  k 
juste  I9o^  dans  le  deluge ,  conune  vous 
avez  ddivr^  Abraham  des  mains  des 
Canan^ens,  et  Moise,  avec  tout  n 
penple,  de  la  servitude  d*£m>fe.  Le 
tivre  de  votre  loi  nous  present  ae  sane- 
tifier  votre  nom  dans  nos  cocnrs;et 
void  qu*une  troupe  d'idolAtres  le  blas- 
pheme h  mes  ordlles,  et  se  prepare 
a  porter  une  main  crimineile  sur  rotn 
servante.  Doux  Seigneur,  amant  des 
hommes,  si  vous  nous  avez  expos6es  a 
eette  ^yreuve,  donnez-nous  la  vietoire 

fiar  voire  puissance,  et  assurex  -nous 
a  WkxHnpense  promise  a  eeax  qui  per- 
sistent dans  la  crainte  de  votre  nom 
et  dans  Tobservanoe  de  vos  aunman- 
dements.  Si  vous  preoez  soin  des  oi- 
seaux  des  champs,  comment  meprise- 
riez-vous  les  pneres  de  oeux  que  voos 
nommez  le  temple  et  le  vase  de  votre 
dection  ? » 

Les  officiers ,  les  soldats  et  toni  k 
peuple,  attir^  par  la  curiosity,  on 
envoy^par  le  roi  au  lieu  de  la  retraite 
des  sainus  vierges,  attendaicnt  impa- 
tiemment  aux  portes ,  dans  respoir  de 
les  voir  sortir ,  et  d'admirer  oelie  dont 
on  parlait  dans  k  royaume.  La  fnyeur 
des  timides  reduses  augmontait  avce 
k  tamulte  et  la  conliision  du  dehors , 


ARMENIE* 


II4» 


dies  poussftieot  des  cris  entreeoup^ 
de  sanf^ots ,  et ,  les  bras  ^lev^  au  ciel , 
eiles  disaieDt :  «  Malheur  a  doiui  ,  si  les 
hooneurs  ou  la  grandeur  peuvent  nous 
s6duire,  si  la  erainte  de  la  persdcation 
nous  ebranle ,  et  si  noftre  courage  Cai* 
Uit  devant  la  mort !  Malheur  k  nous , 
si  nous  pref^rions  une  vie  passagere  a 
r^meile  imidtSl  Non,  ni  les  digni- 
tds  ou  les  tortures,  ni  les  piaisirs  ou 
les  chalnes ,  ni  Teau ,  ni  le  feu ,  ni  le 
glaive,  ni  la  pauvrete,  ni  ce  nionde 
entier,  ni  la  vie ,  ni  la  mort ,  non ,  rien 
ne  pourra  nous  s^parer  de  I'amour  de 
Jesus  •  Christ :  nous  lui  avons  offert 
notre  virginity,  afin  de  nous  conserver 
pures  dans  sa  sainte  union ,  et  nous 
demeurous  attach^  a  lui  par  un  in- 
violable amour,  afin  de  paraftre  un 
jour  a  ses  yeux  sans  honte  et  sans 
erainte. » 

Dieu  eut  piti^  de  ses  fiddles  servan- 
tes ,  et  il  permit  qu'au  commencement 
de  la  premiere  veille  de  la  nuit,  un 
orage  violent  obseurdt  le  ciel ,  et  que 
le  bruit  de  la  foudre  et  de  la  pluie 
tombant  par  torrents ,  jetAt  le  desordre 
parmi  toute  la  foule  rasseroblee  aux 
portesdu  pressoir.  Les  soldats,  saisis 
d'une  frayeur  inconnue,  cberchaient 
a  s'enfuir ;  et  comme  ils  se  g^naient 
mutuellement,  les  uns  tirdrent  leurs 
^p6es  et  s'^rgdrent,  d^autres  tom- 
berent  foul^  aux  pieds  des  chevaui. 
Quelques  officiers  de  la  cour  arrivdrent 
predpitamment  au  palais,  et  racon- 
terent  k  Tiridate  I'^v^nement  qui  s'^* 
tait  pass^  sous  leurs  veux* 

Le  roi  se  mit  en  colere ,  etdit :  «  Puis* 
que  ces  femmes  n'ont  pas  voula  venir 
pr^  de  moi  librement  et  entourto 
alK>nneur,  on  les  trafnera  de  force  k 
mon  palaiset  jusquedans  naacfaambre. » 

On  ex^cnta  ses  ordres.  D'antres  sol- 
dats partirent,  et,  arrive  ores  de 
Ripsy ro6e ,  ils  la  saisirent  brutalement ; 
et  comme  eUe  les  repoussait  de  la 
main ,  ils  la  tratn^ent  a  terre ,  en  pro- 
t?h'ant  les  plus  noires  impr^tions. 
Ripsym^  s  ecriait :  «  Seigneur  Jesus- 
Christ ,  seoourek-moi !  6  mon  Sauveur, 
venez  kmon  aide!» 

De  temps  en  temps ,  les  soldats ,  fati- 
gue de  la  tratner  .s*arr#taient  ^  re* 


gardaient  avec  stupeur  oette  innooeote 
vierge,  qui  continuait  sa  priere  en 
disant: «  Dieu  supreme!  toi  qui  ouvris 
le  sein  de  la  mer  Rouge  p<Mir  laisser 

Sasser  ton  peuple ,  toi  qui  fis  descen- 
re  ton  serviteur  Jonas  dans  le  ventre 
de  la  baleine  pour  Ten  tirer  ensuite 
avec  ^clat  et  puissance,  toi  qui  as 
change  la  ferocit4§  des  lions  excite 
contre  Daniel  en  une  douceur  ^^ale 
a  celle  des  agneaux ,  toi ,  le  vrai ,  Tuni- 
que  Dieu ,  abandonneras-tu  ta  pauvre 
servante,  qui  n*aimeque  toi  et  n'es- 
perequ*en  toi?» 

Tandis  que  ces  ardentes  prieres  s*^- 
chappaient  des  levres  meurtries  et 

eles  de  Ripsym^,  elleentrait,  avec 
cortege  de  ces  ferooes  satellites, 
dans  la  cour  du  palais  de  Tiridate.  Le 
peuple,  qui  connaissaitd^ja  Tintention 
du  roi  d'en  faire  son  epouse,  la  regar- 
dait  comme  une  fiancee  que  Ton  con- 
duit a  la  c6n^onie  nuptiale;  et,  comme 
il  s*imaginait  que  la  r^istance  de  la 
jeune  fiile  ^tait  Teffet  de  la  timidite  et 
de  la  frayeiir,  il  voulait  I'encourager 
par  des  signes  de  joie  et  d'approbation. 
En  consequence ,  il  se  livra  k  une  joie 
bruyante ,  faisant  retentir  Tair  de  ses 
chants  et  du  son  des  instruments  qui 
dirigeaient  les  choeurs  de  danse. 

Enfin  les  efforts  de  la  jeune  vierge 
sont  inutiles;  elle  est  introduite  dans 
le  palais  et  dans  la  chambre  mdme  du 
roi.  Tiridate,  en  voyant  ses  traits  an- 
g^iques  et  T^lat  de  ses  yeux,  que  la 
sainte  indignation  de  la  vertu  alar- 
mke  animait  d'un  feu  nouveau,  sentit 
s'allumer  dans  son  ooBur  la  passion 
dont  des  rapports  asseas  vagues  avaient 
fait  naltre  les  premiers  germes.Ne  com- 
prenant  point  Topposition  de  la  vierge 
chr^tienne  et  I'air  oourrouce  avec  le- 
qael  elle  ae  presentait  devant  lui,  il 
empkne  d'abord  les  promesses  et  les 
sollidtations  les  plus  pressantes  pour 

gagner  sa  volonte;  il  lui  montre  les 
onneurs  et  la  aloire  qui  I'attendent  a: 
die  veut  oonsenur  jidevenirsoni^poiise. 
Ripsymee  le  refuse  avec  un  m^pns  in- 
suftant,  et  le  roi,  rugissant  de  fiireur, 
vent  obtenir  de  la  force  oe  que  la  per- 
suasion n'avait  pu  lui.conoilier.  Mais 
Dieu  n'abandonna  point  cdle  qui  lut- 

8. 


lt« 


L'UNIVERS. 


tait  aussi  gto^reuaement  pour  son 
nom ,  et  le  fiint-Esprit  I'investit  d'une 
force  inoonnue,  qui  lui  permit  de  r^ 
sister  h  }a  brutality  de  Tiridate,  bien 
qu'il  fat  c^ldsre  dans  toute  I'Asie 
pour  la  vigueur  extraordinaire  de  son 
bras. 

Le  roi  esp^a  qu'il  parviendrait  k  ses 
fins  en  faisant  intervenir  Tautorit^  de 
Caiana,  a  laquelle  Ripsvm^  ^tait  com- 

()i^tement  soumise.  II  fa  fit  appeler,  et 
orsque  cette  seoonde  mere  en  J^us- 
Christ  de  la  sainte  fut  en  sa  presence, 
il  la  somma  d'user  de  tons  ses  movens 
de  persuasion  pour  ?ainere  Tent^te- 
ment  de  son  eleve.  Mais  Caiana  n'ou- 
vrit  la  bouche  que  pour  enoourager 
Ripsym^ ,  et  elle  lui  criait  d*une  ?otx 
forte :  «  O  mon  enfant!  persiste  dans 
ta  courageusedtfense;  Dieu  te  sauvera 
des  mains  criminelles  du  roi.  Malheur 
a  toi,  6  mon  enfant,  si  tu  prtf^rais 
h  r^ternelle  couronne  quelques  fleurs 
de  oette  terre,  aujourd'hui  belles  et 
domain  fletries!  >>  Elleallaitcontinoer, 
lorsgue  les  gardes,  par  ordre  du  roi, 
lui  frapp^rent  la  t6te  et  les  mAchoires 
du  pommeau  de  leurs  6pees,  en  sorte 
quells  lui  briserent  les  dents.  Mais  la 
sainte,  que  Tamour  de  Dieu  ^levait 
au-dessus  d*elle-m^roe,  puisait  aussi 
dans  Fassistance  divine  une  force  mi- 
raculeuse,  et  die  poursuivait  avec  un 
accent  plus  p^n^trant :  «  Courage,  6 
mon  enfant!  vois  le  Christ  qui  t'ap* 
porte  d^jd  sa  couronne.  Rappelle-toi 
les  instructions  spirituelles  que  je  t*ai 
donnto  et  les  commandements  divins 
que  je  t'ai  enseign^;  soutiens  coura- 
geusement  la  pers^ution  que  je  par- 
tage  avee  toi,  et  mourons  ensemnle. 
Que  le  d6oouragement  ne  nous  abatte 
pas :  ie  Sauveur  des  hommes  saura  bieo 
nous  assfster,  lui  qui,  pour  Famour 
de  nous,  n'a  pas  craint  de  verser  son 
sang  sur  la  croix  et  de  se  livrer  k 
la  mort,  afin  de  nous  introduire  h  la 
vie  ^temelle.  • 

Ces  paroles,  r6p6t6es  avec  Texpres* 
sion  d'un  saint  zele  et  d'un  courage 
pr^t  a  tout  endurer,  inspiraient  h  Ri^ 
spnoe  une  nouveUe  ardeur  de  se  sacn* 
tfer  pour  Dieu,  et  Fauraient  affennie 
dans  oe  dessein ,  si.sa  volont^  avait  et^ 


un  seul  instant  chanoetante.  Elle  d^ 
concerto  tous  les  efforts  du  rot,  et, 
ouvrant  les  portes,  die  s'daoee  au  mi- 
lieu des  ganles,  qu*dle  traverse  ainsi 
que  la  foule,  sans  qu'aucune  main  ose 
rarr^ter,  comme  si  die  avail  M  pre- 
e6l6e  d'un  ange  invinble  qui  Ini  edt 
firay^  le  chemin. 

Elle  retouma  h  son  andenne  re- 
traite,  et  comme  die  craignait  d*tee 
deoouverte  dans  ce  lieu ,  elle  se  rdlugia 
dans  une  solitude  voisine,  ou,  pour 
consacrer  en  qndque  sorte  son  arrivee , 
die  commen^a  par  adiesser  k  Dieu 
cette  priere : 

«  Seigneur  des  bommes,  cooiment 
reconnaftre  dignement  les  bienftits  si- 

fnal^  de  votra  grAce,  en  me  ddiviant 
es  mains  impures  d*un  roi  perven? 
Soyez  lou^  de  nfavoir  considme  com- 
me attach^  il  votre  service,  en  me  fai- 
sant soufifrir.  Hors  de  vous,  Seigneor, 
mon  coeur  languit,  et  milie  Ibis  vao- 
drait  mieux  mourir  que  d^adorer  d*an- 
tres  dieux  qui  ne  sont  que  o^nt.  II 
me  tarde  de  sortir  de  ce  corps  de  booe, 
pour  m'unir  k  votre  divin  Fils,  moii 
unique  ^poux. » 

La  nuit,  tandis  que  la  sainte  ^tait 
encore  en  privies,  les  emissaires  de 
Tiridate,  envoys  k  sa  poursuite,  gui- 
d^  par  les  denondations  des  trattres, 
arriv^rent  dans  sa  solitude  et  la  sur- 
prirent.  lis  commenc^rent  par  lui  lier 
les  mains,  et  ils  essay^rent  de  lui  arra- 
cher  la  langue.  Ripsym^,  de  son  |ilda 
gr^,  ouvre  la  bouche  ^  ieur  ivrttente 
sa  langue,  qu'ils  coup^rent  jiuqu*^  la 
radne;  puts  ils  mettent  en  lambewa 
les  v^temeots  qui  couvraient  son  oons , 
et ,  prenant  quatre  dous ,  ils  en  enron- 
cent  deux  dans  ses  pieds  et  deux  dans 
ses  mains,  en  sorte  qu'eile  resta  cru- 
cifix sur  le  sol,  a  rexemple  de  soo 
divin  maltre ,  auqud  die  s'offirit  jq3fai> 
sement  en  bolocauste.  Les  soldats  eii- 
rent  Tatrocit^  de  mettre  ie  feu  ii  ses 
chairs  palpitantes  a  mesure  qu*ils  les 
dtonpaient,  et  ils  lui  chargerent  le 
sdn  de  pierres  ^normes,  tdlement  que 
son  ventre  se  fendit  et  ses  entraiUes 
sortirent.  Chaque  fois  quails  eolevaient 
avec  Ieur  sabre  un  de  ses  membres, 
ils  r^p^taient  atrocement :  «  Qu'aiosi 


armi9;ni£. 


11 


meure  quioonque  osera  enfreindre  et 
m^priser  les  ordres  du  roi!  » 

De  saints  homines  et  de  pteuses  fern- 
mes  Ghr^tiennes,  apr^  avoir  oonou  la 
mort  de  Ripsymde,  aocoanireat  au  liea 
de  son  supplioe*  demandant  k  recueillir 
ses  pr^ieux  restes  pour  les  inhumer. 
Les  soldata  leur  demanderent  s'tis  pro- 
fessaient  la  raimt  religion;  et  oomme 
tons  oonfessaient  hautement  au'ils 
etaient  Chretiens,  Us  tir^rent  leurs 
ep6es  et  les  massacr^ent  tous  impi- 
to^ablement.  Pendant  cette  barbare 
execution ,  on  les  entendait  chanter  lea 
louanges  de  Dieu  et  dire :  «  Oui,  Sei- 
gneur, nous  mourons  pour  la  glorifi- 
cation de  votre  nom,  et  nous  vouJons 
avoir  part  a  la  oouronne  que  vous 
venez  de  d^cerner  h  votre  servante 
Ripsjm^. » 

Rips^rm^  et  les  autres  saints  mar- 
tyrs qui  partagdrent  son  sort  furent 
les  premiers  a  arroser  de  leur  sang  1e 
sol  de  la  haute  Arm^nie,  pour  la  con- 
fession de  la  foi  chr^tienne;  aussi  leur 
memoire  est-elle  en  ^rande  v^n^ration 
dans  r£glise  arm^nienne,  et  la  litur- 
gie  c^I^bre  leur  Ute  arec  une  pompe 
particuliere. 

P0£S1K   SPIBITUBLLB. 

De  toutes  les  £giises  d'Orient,  rH;- 
glise  d*Armtoie  est,  sans  contredit, 
celle  ou  la  poesie  chr^ienne  a  produit 
les  plus  ricnes  compositions  d'un  asce- 
tisme  tendre  et  |)ur,  a  la  gloire  de  la 
religion  et  des  saints  qui  ont  travaill^ 
activement  a  la  propagation  de  la  foi. 
Le  g^nie  poetique  de  fa  nation,  exclu- 
sivement  porte  sur  les  cboses  de  I'ordre 
spirituel,  exhalait  dans  des  hymnes  re- 
ligieuses  et  de  saints  cantiques  ses 
amoureuses  aspirations,  et  ses  senti- 
ments de  reconnaissance  et  d*all^ 
gresse.  Tous  ces  chants ,  qui  font  partie 
de  la  Kturgie  arm^nienne,  ont  et^ 
recueillis  et  reunis  dans  un  ouvrage 
connu  sous  le  nom  de  Charagan ,  lequel 
signifie  un  colUer  de  perles,  denomi- 
nation familiere  aux  Arabes  et  aux 
Persans  pour  designer  un  recueil  de 
poesies,  ou  d'autres  compositions  cboi- 
sies  et  pr^cieuses  comme  les  perles.  Lc 


style  du  Charagan  est  Apire  et  rhythmi- 
que;  la  pensee,  en  se  devetoppant  avec 
hardiesse,  s^^l^vesouventvers  les  hau- 
teurs d*une  mysticite  m6taphysique : 
une  attention  soutenue  est  nmssaire 
pour  la  suivre  et  la  reconnattre  sous 
le  v#tement  spiendide  des  mtophores 
orientates  qui  la  parent.  On  rencontre 
aussi  h  chaqoe  instant  des  expressiona 
qui  ne  sont  que  des  allusions  froertains 
passages  des  saintes  Lettres,  et  c*est 
dans  la  oonnaissance  approfondie  des 
textes  sacrds  qu'on  en  peut  trouver 
rintelligence.  Nous  avons  traduit  les 
h}rmnes  composte  h  Thonneur  du  pa- 
triarahe  saint  Gr^oire ,  et  qui  se  chan- 
tent  le  jour  de  sa  £§te,  afin  de  comply 
ter  les  documents  relatifs  h  sa  vie, 
et  pour  donner  en  m^me  temps  h  nos 
lecteurs  une  id6e  de  ce  livre  justement 
c^tebre  dans  I'Ejglise  d^Armenien. 

« Aujourd'hui  brille  d'Un  vif  eclat 
r£gltse,  arbre  plants  par  Dieu  et  cou- 
ronni^.  d^  fleurs,  d'ou  nous  vient  Gr^- 
goire,  rejeton.  d'immortalit^  qui  rem- 
plit  tous  les  lieux  de  ses  fruits.  Rameau 
convert  de  grappes  de  la  veritable  vi- 
gne,  il  a  6te  cultiv^  par  les  mains  pa- 
ternelles  de  Dieu ;  c'est  par  lui  que  s  est 
eniplie  la  coupe  qui  a  rejoui  les  nations 
attristdes,  et  qui ,  en  nous  d^altdrant, 
nous  anitned'uneall^esse  spirituelle. 
Le  souffle  printanier  du  vent  du  Midi, 
echauff(6  par  le  feu  de  l^Esprit  saint,  a 
chasse  les  glaces  de  ridol&trie  des  na- 
tions du  Nord,  et  celles-ci  ont  vu  fleu- 
rir  au  milieu  d'eiles  toutes  les  sciences 
divines.  L'arbre  glorieux  que  Grdgoire 
a  plants  au  pays  des  Arm^niens,  au 
prix  de  ses  efforts  et  de  ses  sueurs, 
apres  avoir  €t6  arrose  des  flots  de  la 
parole  divine  versus  par  la  pr^ication , 
s^t  convert  de  fleurs  et  a  pouss^  d'ad- 
mirables  rejetons.  La  lumiere  celeste  a 
hii  sur  la  terre;  elle  jaillissait  du  soleil 
de  vie,  et  sa  splendeur  a  chass^  les 
epaisses  tenures  r^pandues  sur  la  na- 
tion arm^nienne,  en  sorte  qu'dle  a  vu 
clairement  les  graces  de  TEsprit  saint. 

«  Les  choeurs  incorporels  des  armees 
celestes  se  r^jouissent  de  concert  avec 

n Charagan, Consiantiooplf,  i8[5.  in-H*, 
p.  a)2-236  et  448-457. 


118 


L'UNIVERS. 


uou»,  el  ieiiciteut  uotre  nature  ter- 
restre  de  ce  qu'elie  a  donn^  h  Dieu 
saint  Gregoire,  aui  a  enfante  tant  de 
ills  h  l*honneiir  de  la  vraie  foi.  Gr6goire , 
dont  les  bienfaits  sont  Timage  du  bien 
suprtoie.  est  un  berger  compatissant : 
«a  voix  pieine  de  douceur  a  ranien^  les 
brebis  &ar^  et  les  a  r^unies  dans 
le  bercaii  du  vrai  pasteur.  Patriarche 
tr^-pur  6Iu  de  Dieu,  pr^icateur  de 
la  parole  de  v^rite,  il  presente  au  Sei- 
gneur un  peuple  nouveau  et  purifi^,  en 
le  conviant  h  la  gloire  de  la  Si^n  ce- 
leste. Omement  de  la  brillantt  cou- 
ronne  des  Arsacides,  6  Gr^oire! 
homoie  aux  vertus  apostoliques ,  tu  Pas 
encore  embellle  des  pierres  pr^cieuses 
du  martyre,  et  tu  as  ainsi  form^  un 
nouveau  diademe  digne  de  la  sainte 
iglise.  Tu  as  re^u  comtne  un  heritage 
le  troupeau  d'Armenie,  vicaire  du  saint 
apdtre  Tbaddde ,  germe  vivant  fecond^ 
par  ses  reliques ,  ravon  de  la  grice 
dard6  par  refucacit^  de  la  pri^;  rose 
pourpree  et  6panouie  d*une  tige  epi- 
neuse,  Gr^oire,  ap6tre  de  la  grdce, 
ton  suave  parfum  a  rempli  le  pays 
d'Armenie  6t  nous  a  apport6  Todeur 
de  la  science;  fleur  lumineuse  sortie  de 
la  terre,  m^ecin  des  Smes,  tu  es  le 
palmier  agreable  au.  goAt  plante  dans 
le  jardin  du  Seigneur,  et  nourrissant 
ses  enfants  des  fruits  de  la  foi. 

«  Martyr,  oonfesseur  du  vrai  Dieu 
et  cruel lement  torture,  6  Gregoire!  tu 
as  souffert  sur  ton  corps  des  supplices 

3ui  font  la  joie  de  T^glise  et  la  gloire 
^s  enfants  du  ciel. 

«  Pere  spirituel ,  brdlant  d^un  amour 
divin,  pere  compatissant,  tu  nous  as 
purifl^s  partes  tourmentsdessouillures 
du  pech6,  et  ta  parole  lumineuse  a  en- 
fante des  enfants  de  Dieu. 

«  Image  de  la  gloire  du  Fils  unique 
deDieu,  martyr  victorieux,  les  plantes 
de  tes  pieds  n'ont  re^u  des  clous  de  fer 

3ue  pour  nous  raieux  ciouer  a  PEglise 
e  Dieu. 

M  Pere  de  la  foi  armeniennc,  apotre 
elu ,  aux  mocurs  de  cenobite ,  les  iam- 
bes  de  ton  corps  sanctlGe  n'ont  6te  en- 
chatnees  dans  des  etaux  de  bois  que 
pour  nous  after  mi  r  sur  Ic  rocher  dr  la 
t'oi. 


V  D'unc  voix  suppliante,  nous  o^- 
brons  ta  memoire,  p^re  iiluminateur 
de  nos  dmes,  toi  dont  on  a  charge  de 
poids  dnormes  les  genoux  sans  oesse 
attach^  a  la  terre  par  lears  g^u- 
flexions,  pendant  que  tu  ^taissuspendu 
a  la  potence. 

"  Avec  le  gouvernail  de  la  foi  tu  as 
traverse  la  mer  du  moode,  et  les 
cuisses  de  ton  corps  souflfrant  n'ont 
€t€  6cartelte  que  pour  raffermir  le^ 
membres  spirituels  de  ton  £g)ise. 

«  0  Gr6goire!  fontaine  inepuisabic 
de  grdces,  toi  que  remplit  rintelligenre 
de  rEsprit  saint,  Teau  n'a  €i&  introduite 
dans  ton  ventre,  en  lui  causant  une 
douloureuse  enflure,  pendant  que  tu 
6tais  suspendu  en  Tair,  la  t^e  renver- 
s^,  que  pour  nous  laver  de  la  souil- 
lure  du  pech^. 

«  Sel  purifiant  et  savoureax  de  PAr- 
meiiie,  pere  vigilant  et  courageux  ob- 
servateur  des  lois  divines ,  tu  iras  souf- 
fert le  poids  d'^normes  blocs  de  sd 
Sue  pour  nous  decliarger  du  fairdeau 
u  peche.     , 

"  En  enum^rant  tons  tes  supplioes. 
nous  te  tressons  une  couronne  a  or  et 
de  pierres  pr^ieuses,  6  Gregoire!  toi 
dont  la  bouche,  organe  du  Verbe  d^ 
Dieu,  a  re^u  le  frein  et  le  bdillon. 

« Vaillant  martyr,  soldat  elu  dit 
Cbrist-roi ,  tu  as  supports  rexhalatsoij 
de  fi^tides  odeurs,  en  ayant  la  t^  Ten- 
vers6e  et  les  pieds  elev6s  en  Pair,  pour 
diriger  nos  pas  vers  le  ciel. 

CI  Rayon  lumineux  du  diemin  de  Ki 
vie,  toi  qui  cours  h  la  poursuite  de> 
promesses  celestes,  en  respirant  par  1<* 
nez  de  la  cendre  imbibe  de  vioaigre, 
tu  nous  as  rdjouis  par  ta  bonne  odeur. 

« Chef  auguste  et  respectable,  i- 
Gr^oire  dont  IMme  est  notre  mod^ ' 
ta  ^te,  nieurtrie  de  coups  et  placrr 
sous  un  pressoir,  a  relev^  nos  t^tr-N 
abaiss^. 

«  Omement  de  notre  nature  tem^ 
tre,  6  Gregoire  le  supplicie!  la  pointr 
des  chardons  et  la  dent  de  la  sae  ont 
labourd  tes  chairs,  le  plomb  fondu  :i 
coule  sur  tes  os  consumes. 

«  Compagnon  des  choeurs  et  des  ar- 
mces  du  ciel,  Gregoire  a  Paur^le  rest- 
picndisiiantc,  tu  es  desccndu  dans  Ic 


ARMBNIE. 


!!•' 


iond  d*uii  puiti  hamide  et  boueux,  au 
nyieade  reptUet  TeDiiiieaz,pour  nous 
d^vrer  du  inauvais  dragon. 

•  Par  I'efiBcacit^  de  tea  pridres  brQ- 
lantia  et  de  ton  amour,  6  Gr^oire  dont 
TAme  toit  travaill^e  par  Tesp^ance! 
retire  oeux  qui  sur  cette  terre  gisent 
au  fondde  i'abtme,  bless^  par  la  mor- 
sure  du  jpkb6 ,  et  ^ve-les  avec  toi  aux 
demeurea  otiestea. 

«  La  manue  des  consolations  cdlestes 
desoendalt  sur  toi,  pendant  les  quinze 
ans  de  pifinitence  psusn^s  dans  ton  puits ; 
et ,  apres  avoir  joui  de  la  me  de  Dieu , 
tu  as  gn^ri  les  victimes  de  la  fureur  de 
Satan,  et  Tefibision  de  ta  iumineuse 
parole  les  a  confirm^  dans  la  foi. 

«  Ttooin  d*une  vision  surnatorelle, 
•ifrayante ,  ton  esprit  proph^ique  a  vu 
s'entr'ouvrir  les  cieax  inond^  de  dar- 
t^,  et  lu  as  m^l^  ton  corps  aux  ar- 
n^  des  anges. 

«Le  sang  ponrpr^  des  martyrs  a 
purifi^  de  la  souillure  du  p^^  cette 
terre  ou  tu  as  jet^  les  fondements  du 
temfde  saint  d^otl  jaillit  la  source  de 
propitiation  (*). 

«  Sage  administrateur  de  la  maison 
de  Dieu  et  jug6  digne  de  ses  grdoes, 
destructeur  des  idoles « d^mdisseur  des 
temples  jpaiens  avec  Tarme  de  la  croix , 
patriairebe  ^u  par  I'^iection  divine,  tu 
as  €U  appel^  par  la  voix  du  del  sur  le 
si^  apostolique;  par  too  ^loquente 
parole,  tu  as  lUumiM  TArm^ie  r^^ 
n^r^  spirituellement,  en  oouvrant  la 
(ace  du  pays  d*^ifiees  ^lev^  k  la  gloire 
de  Dieu. 

•  Gr^oire  an  corps  lumineux,  objet 
d*envie  pour  les  smphins,  pures  es» 
sences  sans  corps,  tu  as  habits  dans 
le  desert,  a  Texemple  de  Jean  et  d*Eli* 
ste,  et  de  Molse,  oe  l^islateur  divin. 

« Intercede  pr^s  du  Pere  celeste  p6ur 
les  enlants  tourment^  et  amaigris  par 
le  p^ch6,  et  prie-le  poor  que  nous  ter- 
minions  notre  course  dans  la  voie  de 
TorthodDxie. 

«  Martyr  vivant,  conjure  le  Fils,  v6- 

(*)  Let  martyn  dcmt  il  esl  ici  question 
MBt  les  saintes  rierges  Guana  et  Ripsymee, 
et  Fegliie  batit*  |)ar  saint  Gregoire  esl  la  ce- 
metropok'  d'Ecsmiiiziji. 


ritable  lumi^  venue  du  Pte ,  d'Mai- 
rer  nos  ooeurs  par  sa  divine  sagesse. 

«Lyre  m^lodieuse  de  Tesprit  de 
Dieu,  6  Gr^oirel  pure  intelligence 
unie  k  un  corps,  prie  TEsprit  saint, 
proc^nt  du  Pere  et  coassoci^  a  la 
gloire  du  Fils,  de  purifler  nos  dmes  du 

«  Montagnea,  r^jouissex-vous  toutes 
de  la  gloire  ^clatante  r^serv^  au  mont 
Sdi)oiiin(*),  qui  a  servi  de  retraite  a 
saint  Gr^ire,  colonne  Iumineuse  de 
la  sainte  £glise  d'Arm^ie,  lui.  au 
sijget  duquel  elle  se  r^jouit,  k  la  gloire 
de  la  Slon  celeste. 

(*)  Sehouh  tigniSe  en  arminien  m>bU, 
tRsttngue,  Ce  nom  fnt  sans  doule  donn^  k 
oette  montagnt  paroe  qa*elle  serrit  de  re- 
traite i^  saint  Gr^oire.  Elle  portait  prM- 
demment  le  nom  £t  wool  Manit  paroe  que 
la  sainte  iUustre,  ainsi  nonunee,  amit 
habits  dans  nne  des  groites  oiivertes  sur 
le  flanc  de  la  montasne.  On  la  connaii 
aussi  sous  la  denomination  de  montagne  de 
Taraoagb ,  du  nom  du  district  ou  eUe  etait 
situee ,  et  qui  faisait  partie  de  la  proTinoe 
ancienne  de  I'Arm&iie  superieure.  Yoyex 
Moise  de  Khoren,  liv.  ii,  cfa.  88;  G^gr 
du  pere  Indgigean,  Venise,  x8aa,p.  4; 
Saint •  Martin,  Mte.  sur  rArm^e,  t.  z, 
p.  37,  et  (.  II, p.  k^i.  Dans  la  giographie 
attribuee  k  Moise  de  Kiioren  on  IrouTe  oe 
passage  :  «Le  mont  Sibonh ,  visits  de  Dieu . 
el  oik  repose  saint  Gr^ire,  poss^  Tep^ 
que  Teropereur  Gooatantin  donna  au  roi 
Tiridate.  Quand  le  roiTiridatevoulut  visiter 
le  saint  illumiaateor,  il  vint  le  trouver  an 
moot  S^booh,  et  le  eonsdta  sur  T^poque 
de  la  chute  des  Arsacidei.  Le  saint  prit  r^pee, 
la  benit  oomme  one  croix,  la  pla^i  en Tair 
par  Tefficaoit^  de  la  parole  de  Dieu  et  dit : 
« II  Tiendra  une  Taleureuse  nation ,  oelle  des 
Fhincs ;  ce  signe  paraitra  alore,  on  le  prendre 
et  tout  le  monde  se  r^uuira  k  euz. »  Le  saint 
ensuite  s*^Ieva  vers  Dieu.  Ik  se  trouve  aussi 
le  raonastere  des  Scrapfains,  ainsi  nomme 
paroe  que  Dien  y  cnvoya  des  s^pliins  vers 
le  cberubin  terrestre ,  retiri  dans  une  pro- 
fonde  vall^,  et  qui  avait  rtelu  d'aller  a 
Jerusalem ,  snr  ses  genoux ;  ce  dont  11  fut 
emptehe  par  les  briUanls  seraphins. »  Cette 
m^e  montagne  reniennait  une  fontaine 
salutaire,  dont  les  eaux  salees  avaient  ete 
changto  en  eaux  donoea  par  saint  Gr^rc; 
et  .dans  la  suite ,  elle  fut  disign^  sous  la 
nom  dc^  fontalpe  a  IVaii  savoureusc. 


120 


L'UWIVERS. 


2 


«  Qui  a  plus  de  8ujet  de  se  rejouir 
que  le  moot  Ararat  (*)  aux  cimes  es- 
carp^es?  car  dans  ses  flancs  repose 
saint  Gr^oire,  arelie  r^emptrioedu 
deluge  de  p<6ch^  qui  coutrait  rArm^ 
nie,  et.qui  nous  met  pour  toujours  a 
I'abri  de  la  fureur  de  ses  flots. 

•  Que  le  mont  Sebouh,  oouronn^ 
d'une  auntole  lumineuse,  se  i^jouisse 
a  Texemple  du  mont  Sinai :  c'est  1^ 
qu^appafut  rarc-en-ciel  de  I'esp^noe, 
saint  Gr^oire,  au  front  Matant  de 
lumi^re,  comme  oelui  de  Mofse,  et 

ui  a  fiiit  briller  nos  faces  par  la  grace 

u  Saint-Esprit. 

« jGr^oire  a  joui  du  m^me  privil^e 
ou*Esaie,  fils  d'Amos,  le  propbdte, 
(lont  un  cfaarbon  ardent  purifia  les  le- 
vres,  et  qui  vit  en  esprit  les  ch^ru- 
bins  aux  six  ailes  brAlant  de  Famour  de 
Dieu;  pour  lui  aussi  la  profonde  voAte 
des  cieux  a  M  ouverte. 

«  La  droite  rois^ricordieuse  de  J6- 
sus^Christ  a  honors  Sebouh ,  k  Texem- 
ple  des  montsSaniretHermon(**) :  de 
ses  flancs  jaillit  une  source  d*eau  excel- 
lente,  qui  s'ecoule  en  ruiteeaux  abon- 
dants  et  r^jouit  la  terre  fertilise. 

«La  sainte  Vierge,  en  enfantant 
dans  ratable  de  BethTeem ,  a  appris  aux 
lilies  d'Eve  a  devenir  m^res  au  Christ 
en  restant  vier^es.  Ge  prodige  eciatant 
s*est  renouvele  dans  la  caverne  de 
Man^f  et  c^^t  par  la  puret^  des 
momrs  de  ces  vier^es  que  nous  avons 
et^puri6^sde  la  souilluredupdch^  (*"*). 

«  Uesprit  inspire  des  propnetes  avait 
pr^it  la  gloire  r^rm  au  mont  S^ 
Douh ,  lorsquMIs  demandaient  oik  serait 
le  tabernade  de  Dieu  et  le  lieu  ou  il 
habiterait;  nous  avons  vu  saint  Gr6- 
goire  r^oudre  cette  question. 

«  C'est  pour  ce  meme  Gr^oire  de 
moeurs  si  pures,  d'une  si  grande  jus- 

(•)  Voy.  U  egare  n"  rS. 

(**)  Cis  deax  montagnes  situees  dans  la 
Paiestine  sont  celebres  chez  les  Armeaiens, 
comroe  formant  des  eaux  de  leurs  lorrenls 
les  deax  principales  sources  du  Jourdain. 
Voy.  Saint-Martin,  Mem.  sur  TAnn. ,  t.  rr, 
pag.  400. 

(***)  n  est  ici  question  de  sainte  Caiana  qui 
sejourna  loii^temps  dans  la  caverne  du  mont 
Sebouh. 


tree  de  c^ur  et  si  ▼^idiaue  dans  ses 
paroles ,  que  les  troupes  oes  di^mbias 
se  sont  abaissees  du  ciel  sur  la  tern, 
aiin  de  cootempler  les  mortifications 
de  son  corps,  miracle  qui  a  consacre 
lenomde  celieuH. 

«  De  simoles  bergers  ont  d^ooavart 
les  restes  de  oe  pasteur  vigilant,  1*1- 
luage  du  v^table  et  divin  Pasteur,  et 
ils  les  ont  enaevelis  prte  de  la  caverne 
Mane;  precieux  remede  dans  nos  ma- 
ladies, pures  reliques  qui  nous  preser- 
veot  du  poison  du  dragon  tnfiernai! 

«  O  toi ,  soleil  de  justice,  e&vof6  da 
P^re.  et  qui  as  r^pandu  ta  lumiere  ea 
tons  lieux  par  le  minist^  des  apdtres, 
Dieu  de  nos  peres,  nous  te  glorifions! 

«  C'est  toi  qui  as  envoys  en  Annate 
saint  Gregojre,  oomme  vicaire  des 
a|»dtres  etle  i^r^icateur  de  ta  parole; 
Dieu  de  nos  peres,  nous  te  glorifions! 

«  Toi  qui  as  dissipi6  les  tenibres  de 
rignorance  des  peuples  du  Nord,  par 
Tedat  de  la  parole  de  saint  Gr^oire, 
Dieu  de  nos  p^res,  nous  te  ^loriuons! 
Et  vous  tons ,  discipltt  du  samt  Illumi- 
nateur,  glorifiez  la  lumiere  dinuit 
d'ombres. 

«  Aujoord'hui,  peuples  de  TAime- 
nie,  instruits  de  la  verity  par  renSi«- 
mise  de  saint  Gr^oire,  b^issex  la 
lumiire  qui  n*a  pas  cle  commencement , 
gi(Mrifiez--la  ^terndlement. 

«  Aujourd*bui  que  vous  avez  M  r^ 
g^n^te  par  le  bapttoe,  et  illamincs 
de  la  sagesse  par  le  minist^  de  saint 
Gregoire,  louez  la  lumiere  venne  da 
P^e,  ^lorifiez-ia  ^ternellement. 

«  Aojourd'hui  que  le  prftre  acoom- 
plit  cfacE  nous  le  celeste  sacrifice,  en 
vertu  du  pouvoir  que  lui  a  transmis  le 
saint  patriarche  unegoire,  glorifio 
le  distributeur  des  grdces,  o^^bres 
le  Seigneur. 

«0  toi  qui  as  convi^  les  nations 
doignte  aux  fianqailles  de  ton  Fils 

unique,  par  Tentremise  de  saint  Gr^ 

• 

(*)  Nous  avont  dit  pr^cedernment  que  la 
montagne  de  Seboidi  renfennail  un  monas- 
lere  appele  le  couvent  des  Stephint ,  Ibrt 
oonnuaans  rhistoircrcligieQaederAmienir. 
II  devait  oe  nom  au  miracle  op^  en  faveur 
dc  saint  Gregoire. 


V  o  •    «■ 


ARMfiNIE. 


121 


§oire,  afln  de  les  desalterer  h  la  coope 
e  la  sagesse,  grdce  h  son  interoes- 
sion ,  aie  piti^  de  nous. 

«  Toi  qui ,  poor  prix  des  souffranoet 
sarhumaines  de  ton  ^lu,  a  ramene  les 
peoples  ^ar^  k  la  connaissance  de  la 
v^rite,  grdce  k  son  intercession,  aie 
piti^  de  nous. 

«  Toi  qui,  au  fond  de  son  puits,  as 
6cras^  la  t^  du  dragon,  et  qui,  en 
i'abaissant  dans  cette  fosse,  nous  as 
elev^  josqu'aux  cieux,  grdce  a  son  in- 
tercession, aie  piti^  de  nous. 

«  Venez  aujourd'huf  glorifier  le  saint 
patriarcbe  Gr^oire,  qui  a  Mam  de 
la  lumi^re  inteliiffible  eeux  qui  ^ient 
assis  dans  les  t^nebres. 

«  Venez  glorifier  le  distributeur  des 
dons  de  Fesprit  incorruptible,  chez  les 
tils  de  Tborsom,  lui  qui  toos  a  pro- 
er^  fils  de  la  lumidre. 

«  Venez  louer  Tinterprto  de  la  pa* 
role  difine  chez  les  Arm^niens,  vous 
ses  enfants  et  ses  disciples. 

•  Aujourd'hui  Tl^lise,  rtonie  aux 
anges,  cbante  avec  tons  ses  enfiants 
la  m^moire  de  rillominateur,  glorifi^ 
dans  les  hauteurs  des  cieux. 

«  Aujourd'hui  r£glise  c^ebre  avec 
ioie  la  m^moire  de  saint  Gn^oire,  qui 
ra  illumin^e  de  son  ^clatante  lumi^re. 

•  Enfants  orn^  de  tuniques  bro- 
ch^  d*or  et  couronn6i  de  fleurs,  b^ 
nissez  leChrist-roi! 

«  Aujourd'hui  les  nouTeaux  enfants 
de  lumiere  se  r^jouissent,  au  souvenir 
du  saint  Illuminateur  qui  les  convie  au 
banquet  tr6s-pur  et  les  introduit  chez 
r^ux  c^este,  dans  son  palais  lumi- 
neox. 

•  Enfants  om^  de  tunioues  bro- 
chte  d'or  et  oouronnes  de  fleurs,  b^- 
nissez  le  Christ  roi! 

«  Aujourd'hui  les  pr^tres,  ministres 
du  sacrifice  spirituel ,  honorent  le  saint 
patriarche  Gr^oire  qui  les  a  associ^ 
a  I'ordre  des  pontifes  celestes,  lors- 
qu'en  s'^levant  au  ciel  il  est  entr^  dans 
le  Saint  des  saints  pour  intero6der  per- 
petuellement  en  notre  faveur  aupres  de 
Dieu. 

«  Enfants  orn^  de  tuniques  bro- 
clito  d'or  et  oouronnes  dc  fleurs,  be- 
nissez  le  Christ-roi!  » 


M<BURS  BT  CODTCMES  DO  PCPPLB   ARME- 
NIBN.  CAiUCTteS  DB  LA  MATIOll. 

On  pent  dire  en  g^n^al  que  le  peu- 
pie  arm^ien  est  beureusement  oou^ 
par  la  nature.  En  eff<^,  on  retrouve 
dans  son  caractere  et  ses  habitudes  les 
deux  traits  distinctifs  des  deux  grandes 
races  auxquelles  il  rattache  son  origine. 
Suivant  ses  annales  historigues,  le 
jDJbrt  de  la  nation  fut  un  fietit-fils  de 
Japhet,  Thorgom.  Ce  t^moignage,  qui 
claase  d'une  maniere  nette  et  tranchee 
la  race  armenienne  paraii  les  peuples 
de  race  japb^tique,  est  yMM  par  rex- 
pMeoee  que  foumissent  T^tude  com- 
par6tf  des  nations  de  I' Asie  et  la  science 
de  la  linguistique.  Gomme  les  Persans 
et  les  Grecs,  les  Arm^niens  ont  I'es- 
prit  mobile  et  p^n^trant,  une  activity 
inquiete  cbercnant  toujours  a  epuiser 
dans  Faction  I'exc^dant  de  son  Anergic , 
naturellement  belliqueux,  on  les  voit 
engages  dans  des  guerres  continuelles 
ou  ils  font  face  k  des  enneoiis  supe- 
rieurs  :  quoique  forc^  de  ceder  au 
nombre ,  ils  ne  se  rebutent  point ,  et  ils 
reviennent  plus  ardents  a  rattaque. 

Sous  le  cOt^  intellectuel,  les  Arme- 
niens  ont  la  conception  facile  et  vive 
des  Grecs ,  et ,  lorsque  nous  avons  parl^ 
de  leur  langue  et  de  leur  lltt^rature, 
nous  avons  indiqu^  auels  rapports 
^troits  unissent  les  proouctions  ae  leur 
esprit  aux  chefs-d'oeuvre  de  la  litt^ra- 
ture  greoque,  quant  k  la  fonne  et  k  la 
nature  du  style;  nous  avons  fait  obser- 
ver aussi  que  leur  langue  appartient  k 
la  classe  des  Ungues  indo-germani* 
ques,  nouvellement  ^tablie  par  les  phi- 
lologues.  Ce  &it  seul  prouve  qu'il  y  a 
communaut^  de  race  entre  elfe  et  les 
peuples  venus  de  I'lnde,  ou,  post^- 
rieurement,  du  Caucase. 

Nous  avons  parl^  pr^cedenunent  des 
nombreuses  colonies  juives  qui,  trans- 
plants k  diverses  reprises  dans  le  ter- 
ritoire  de  I'Ann^nie,  ont  dd  n^cessai- 
reoaent  modifier  le  type  et  le  caractere 
de  la  race  primitive.  Ce  fait  nous  ex- 
plique  comment,  avec  tous  oes  points 
de  ressemblance  qui  nous  font  regar- 
der  la  race  armenienne  .comme  mnt 
de  la  mtoc  famille  que  les  races  de  la 


\'22 


L'UNIVERS. 


Grece,  de  la  Perse  et  de  I'lnde,  nout 
voyons  eependant  dans  aa  phyaionomie 
des  traits  totalement  divers  et  qui  Fas- 
similent  au  contraire  k  la  raee  sdniti- 
que.  Effectivement,  nous  avons  dia- 
tin^^  chez  elle  oet  amour  dea  chosea 
religieuses  et  ce  tenace  attachement  k 
ses  traditions,  qu*on  ne  retrouve  aa 
m^me  d^r^  que  chez  la  race  atn^e  et 
privii^^e  de  Sem.  De  plus,  oomme 
elle,  les  Armteiens  se  sont  toajoors 
tenus  h  Ftort  des  autres  peuples,  M- 
tant  de  se  m^er  h  eux ,  et  se  montrant 
partout  extr^mement  Jaloux  de  oon-> 
server  leur  nationality,  tellement  que, 
dans  tous  les  pays  oi^  ils  sont  actnelle* 
ment  dispers&,  on  les  reconnatt  k  la 
particularite  de  leurs  usages,  k  l'orsa« 
nisation  domestique  de  la  familJe, 
comme  k  la  forme  des  v^tements  et  k 
Fexpression  de  la  physionomie.  L*a- 
mour  et  le  goQt  du  commerce,  trait 
distinctif  de  leur  caractdre,  leur  sont 
encore  communs  avec  les  enfieints  d'ls- 
mael ;  comme  eux  ils  sont  disperse ,  el 
dans  toutes  les  villes  d'Asie  et  d'Eu* 
rope  oH  on  les  rencontre,  ils  aocapa* 
rent ,  au  bout  de  peu  de  temps,  tout  le 
n6goce  et  Targent  du  i)ays;  mdme  les 
juiTs  ne  peuvent  soutenir  centre  eux  la 
concurrence,  parce  que  les  Arm^niens , 
en  apportant  le  m£me  ordre  dans  leurs 
affaires,  agtssent  plus  srandement  et 
avec  loyaut^.  Aujourd*nui  encore  les 
finances  de  I'empire  turc  sont  entre  les 
mains  de  quelques  riches  families  arm6- 
niennes.  Voici  le  jugement  de  Toume* 
fort  sur  le  genie  commercial  des  Arm6- 
niens :  «  Ces  n^ociants,  dit-il,  sont 
infalieables  dans  les  voyages  et  ra6pri* 
sent  les  rigueurs  des  saisons.  Nous 
en  avons  vu  plusieurs ,  des  plus  riches , 
passer  de  grandes  rivieres  a  pied  ayant 
reau  jusqu*au  oou,  pour  reiever  les 
chevaux  oui  s*^taient  abattus  et  sauver 
leurs  balies  de  sole.  On  les  accuse  mal 
a  propos  d'aimer  trop  le  via ;  ii  ne  nous 
a  jamais  paru  qu'ils  en  abusassent;  au 
contraire,  il  faut  eonvenirque  de  tous 
les  voyageurs  les  Arm^iens  sont  les 
plus  sobres,  les  plus  economes,  les 
moins  glorienx. » 

Leurs  relations  oommerciales  ne  se 
bornent  plus  aujmird*hui  a  rOrient .  el- 


leaa'^tecdent  jusqu'a  11 
tale.  En  1824,  six  n^odants'arm^eu 
sont  venus  pour  la  premik«  fois  k  la 
foire  de  Leinsick,  y  ont  achet6  pour 
six  cent  milie  francs  de  prodoits  des 
manufactures  d'Europe,  les  ont  exp6- 
di^  en  transit  par  la  Galide  et  la 
Russie  m^ridionale  jusqu'a  Odessa,  ou 
lis  ont  6t^  embarqu^  pour  Redoute- 
Kale ,  en  suivant  la  route  que  leur  avait 
indiqu^e  le  n^odant  SaratgefT  de  Ti- 
(iis.  £n  1836,  les  marchanoises  aefae- 
tees  a  Leipsick  se  sont  devte  ik  la 
valeur  d'un  million  deux  cent  mille 
francs ,  et  suivant  un  artide  du  jdamal 
de  Francfort ,  en  date  du  20  juin  1826, 
on  porte  k  la  somme  de  sept  cent  miUe 
thalers,  ou  deux  millions  huit  cent 
mille  finincs,  la  valeur  des  achats  fiuts 
a  la  demi^  foire  (*}. 

Le  sane  de  ce  peuple  est  beau;  les 
traits  des  bomoMs  sont  fortement  pro- 
noncds;  iis  ont  de  grands  yeox  noirs 
fins  et  luisants  qui ,  tout  en  exprimant 
leur  activity  interne  et  remuante,  sa- 
vent  n^nmoins  voiler  habilement  le 
fond  de  leurs  pensto.  Leur  taiUe  n^est 
point  aussi  6lev^  que  odie  de  plusieurs 
autres  peup[c»  caucasiens;  neanmolDS 
il  faut  aistrngujer  parmi  eux  la  popula- 
tion des  montagnes,  otli  I'on  trouve  des 
moddes  de  force  et  de  stature  athl^- 
ques.  Extrdmement  bruns,  la  barbe 
que  portent  leurs  prtoes  et  vartabieds 
est  remarquable  par  sa  couleur  noire 
comme  le  jaspe,  et  die  tooibe,  k  la 
maniere  des  Persans,  sur  la  poitrine. 
Rien  n*est  plus  propre  k  inspirer  au 
peuple  le  respect  et  la  veneration  pour 
ses  dieflB  spirituels,  que  Fair  de  dignity 
des  pr^tres  armtoiens,  et  la  gravite 
avec  laqudle  ils  ofBdent  dans  les  cM- 
monies  religieuses. 

(*)  On  porte  a  vingt  rotlle  Ames  le  nombre 
des  Armcaiens  r^paodus  dans  lea  ▼illes  de 
Bombay ,  de  Madras  et  de  Calcutta.  Leon 
courtiers  et  lears  agents  passent  le  Gauge  cf 
penetrant  jus^u'i  Barma ,  Siam  et  les  pos- 
sessions anglaises  qui  avoisinent  la  dune. 
Les  plus  riches  negociants  de  k  ville  de  S»- 
gapour  sont  Armeniens.  On  les  retroaw  a 
Java ,  Bomfo ,  Siimaira,  et  dana  qudques 
autres  lies  de  oet  archipd,  et  ils  ont 
reussi  a  s*introduire  a  Canton. 


ARMCNIE. 


123 


M.  le  chevalier  Gantba,  dans  son 
Voyage  au  dela  du  Caucase,  nous  de- 
peint  ainsi  les  Arineniens,  dont  il  a 
trouTe  de  nombreases  colonies,  soit  a 
Tiflis,  soit  dans  les  environs :  «  L'Ar- 
in6nien ,  dit-il ,  est  un  peu  moius  ^and , 
inais  plus  ^ros  que  le  Gtorgien;  il  a  les 
traits  aussi  r^guliers ,  le  nez  plus  droit , 
le  regard  s^ieux ,  I'air  reflechi  et  sou- 
mis;  il  r^unit  deux  choses  qui  seniblent 
opposees,  les  mceurs  des  patriaiches  et 
les  d^uts  attach^  au  long  ^tat  de  d6- 
pendanoe  sous  lemiel  il  a  vto.  Gomme 
au  temps  d' Abraham  et  de  Jacob,  le 
premier  n^  est,  apres  le  pere,  le  inal- 
tre,  le  chef  bMditaire  de  la  maison; 
ses  frdres  putn^  lui  sent  soumis;  ses 
soeurs  sent  presque  ses  servantes.  Les 
uns  et  les  autres  sont  plein»  de  respect 
pour  ieur  pto;  rarement  ils  s'asseyent 
devant  lui  et  se  mettent  a  table.  lis 
sont  ses  serviteurs  les  plus  d^ou^; 
et  c'est  Tatn^  des  Ills,  cnez  ce  peupie 
hospitaller,  qui  sert  les  etrangers  ad- 
mis  a  la  table  de  son  pere ,  ou  qui  offire 
la  collation  dans  le  cas  oii  une  visile 
arriverait  a  Theure  du  repas.  J*avais 
et^  reoommand^  a  un  negociant  arm^ 
nien  de  Nackchivan.  A  mon  arriv^, 
il  vint  m'embrasser  oomme  une  an* 
ctenneconnaissance,  meoonduisitdans 
la  cfaambre qui  m*^tait  destine,  me  Ot 
preparer  le  bain,  fit  tuer  un  mouton, 
et  mvita  tous  ses  amis  au  festin.  Je 
me  rappelais  alors  les  usages  des  peu- 
pies  pastenrs,  oeux  de  cette  ^poque 
voisine  du  beroeau  du  monde,  ou  on 
s'aocueillait  d*autant  plus  au*on  se 
croyait  plus  rapprocb^  a*une  tige  com- 
mune. Et  peut-#tre  ii*y  aurait-il  nul 
oontraste  h  Ieur  opposer,  si,  nation 
ind^pendante,  ils  avatent  vecu  dans 
une  situation  tranquille  et  n'avaient  eu 
a  ob^ir  qu*a  leurs  lois.  » 

l«s  femmes  arm^niennes  sont  cele- 
bres  en  Orient  par  Ieur  beaute;  dies 
ont  h  la  fois  quelaue  chose  do  type  grec 
At  juif.  T^eur  taille  svelte  et  elancee,  la 
vivacity  de  icurs  lar«es  yeux  noirs  cou- 
ronn^  de  longs  cils  arqu^,  I'^pais- 
scur  de  Ieur  chevelure  d'db^ne,  que 
releve  un  teint  pdle  et  mat,  en  font 
Hes  modeles  de  gr^e  et  de  perfection 
qtii   rappellent  les  statues  antiques. 


A  cette  beauts  ext^rieure  se  m^ent  les 
cbarmes  et  les  aer^ents  de  Tesprit 
que  Ieur  donne  F^ucation  de  fainiile, 
bien  superieure  k  celle  des  femmes  ttir- 

Sues  ou  persanes  au  milieu  desquelles 
[les  vivent.  On  reconnatt  en  eiles  la 
v^rit^  de  ce  principe,  que  le  cbristia- 
nisme  seul  a  eleve  la  ferome  au  rang  de 
dignite  et  d'honneur  qu*eUe  occupe 
dans  les  societes  modernes.  Vovez  a 
leurs  cot^  les  femmes  de  musufmans 
sequestrbes  et  ajgglom^r^es  dans  un 
harem,  iojer  d*intri^ues,  de  corrup- 
tion et  de  jalousie ,  ou  elles  sont  con- 
siderees  comme  un  simple  meuble  de 
luxe  ou  d*agr^ment.  Quelle  difr(6rencc 
entre  Tesclavage  et  Tabjection  morale 
ou  elles  languissent  et  la  liberty  des 
femmes  chretiennes !  Cest  que  dans  le 
christianisine  le  dogme  divmise  pour 
ainsi  dire  la  femme,  en  la  regardant 
comme  mere  de  Thomme-Dieu,  notre 
R^empteur.  Tous  les  peuples  qui  ne 
font  point  partie  de  la  grande  ramille 
chretienne  la  tiennent  encore  dans  un 
^tat  de  sujetion  humiliante.  LejudaTsme 
en  est  une  preuve  visible;  cette  reli- 
gion qui  n*est  que  le  christianisme, 
rooins  les  di^veloppements  apportes  par 
oehii  qui  est  venu  accompUr  la  loi  et 
nan  pas  la  delruire,  considere  tou- 
jours  ia  femme  comme  un  £tre  mora- 
lement  inferieur  k  Thomme,  et  Tas- 
treint  k  milla  pratiques  gtoantes. 

Toutefois  la  liberte  des  femmes  ar- 
m^niennes  est  plutot  interieure  et  do- 
mestique  qu'ext^rieure  et  publique. 
La  legislation  et  la  coutume  des  Turcs 
les  obligent,  k  Constantinople  et  dans 
le  reste  de  Tempire  ottoman,  de  se 
soumettre  aux  regies  de  bieiiseance 
dtablies  pour  Ieur  sexe.  Ainsi  elles  sor- 
tent  voilees  et  couvertes;  mais  dans  la 
maison  elles  ne  sont  point  rel^gu6es 
dans  un  harem,  et  eUes  se  tiennent 
ordinairement  dans  la  m^me  salle  oue 
les  hommes(*).Elles  reqoivent  etfont  les 
honneurs  de  la  maison  aux  dangers. 
Dans  plusieurs  families  riches  de  Cons- 
tantinople,  les  jeunes  iilles  commen- 
oent  a  adopter  certaines  modes  euro- 

p^ennes ,  et  actuellement  plusieurs  mo- 

« 

{*^  Toy.  la   figure  n"  '*a. 


12^ 


UUMIVERS. 


distes  de  Paris  ont  a  P6ra  (*) ,  fiuibourg 
habits  par  les  Arm^iens  et  les  Francs, 
d*^l^ntes  boutiques.  Les  jeunes  filles 
se  permettent  une  gaiett  simple  et  in* 
nocente  qu'elles  peraent  Mant  martte. 
Alors  elles  ne  cnercbent  plus  h  plaire 

S'k  celui  qu'elles  ont  choisi  |XHir 
[>ux;  elles  se  renferment  eiclusive- 
ment  dans  les  soins  minutieux  de  la 
famille  et  du  roteage,  sans  songer  k 
attirer  les  regards  des  Strangers.  LMn- 
t^rieur  d*une  famille  armenienne  a 
quelque  chose  de  Forganisation  patnar* 
cale :  I'^pouse  ose  a  peine  lerer  les  yeux 
sur  son  epoux;  dlerougiraitd'adresser 
la  parole  k  tout  autre  qu*a  lui ,  et  la 
fille  ne  s'assied  jamais  en  presence  de 
son  p^re.  Leur  devotion  et  leur  fid^Iite 
coniugale  ne  peuTent  donner  prise  aux 
amertu  censures  de  la  m^sanoe.  Elles 
parleiit,  ou  plutdt  chantent  avec  une 
douce  harmonic  la  langue  turque,  si 
flexible  et  si  m^lodieuse. 

A  Constantinople,  les  femmes  ar- 
meniennes  se  distinguent  des  femmes 
turques  k  la  couieur  des  brodequins , 
lorsqu*eIles  sortent  dans  les  roes.  Leur 
v^tement  est  semblable  k  oelui  des 
hommes  en  beaucoup  de  choses.  Ellas 
portent  un  cale^on  tombant  sur  la  che* 
ville  du  pied :  et,  oomme  elles  ne  font 
pas  usage  de  has ,  elles  ont  les  jambes 
moins  fines  que  les  Europeennes.  Leur 
chemise  ouverte  sur  le  devant  laisse 
a  deoouvert  la  gorge  qu'elles  oment 
de  fleurs  et  deriches  colliers  (**).  Sur  les 
epaules ,  pend  une  espeoe  de  long  man- 
teau  flottant  jusqu'aux  talons.  Quand 
elles  veulent  se  o^rober  k  la  yue  d*un 
stranger,  elles  se  oouyrent  d'un  voile 
qui  enveloppe  les  Epaules  et  le  sein ; 
et  si  elles  sortent ,  elles  ajoutent  un 
grand  voile  blanc  qui  les  couvre  de  la 
t^  aux  pieds.  A  Julfa,  les  femmes 
portent  quatre  voiles,  deux  qu'elles 
mettent  au  logis ,  et  deux  autres  qu'elles 
rtorvent  pour  leors  sorties.  A  la  mai- 
son ,  elles  ont  le  has  du  visage  voile ; 
et ,  si  elles  sont  martte ,  elles  se  ca- 
chent  m6me  le  nez ,  afin  que  leurs  pa- 
rents ou  les  prdtres  qui  les  visitent  ne 

n  ^oy- 1*  plaiwhc  ii«  1 6. 
(**)  Voy.  la  figure  n*  3i. 


puissant  disttnguer  les  traits  de  leur 
visage.  Les  Jeunes  filles  ne  portest  e& 
voile  que  jusou'lt  la  boucbe ,  afin  qa'oe 

{misse  juger  de  leur  beauts ,  et  en  6ire 
e  r6cit  aux  ieunes  gens. 

Les  Armeniennes  de  la  Pwae  ont 
aussi  emprnnt^  dans  leors  ooatumes 
la  riehe  variM  de  la  mode  pereine. 
Les  habits  des  femmes  riches  sont  ea 
^ffes  de  soie  d'or.  Le  corps  de  Fba- 
bits'attachepar-devantjusqa'ii  la  eon- 
ture,  avec  des  rubans  ao  boutdesqneb 
on  suspend  un  gland  d*or  on  one  perle; 
il  se  retr6cit  vers  le  contoiir,  et  il  est 
pliss^  pour  relever  la  Aiiesse  de  la 
taille.  La  jupe  qui  desosnd  jaaqn'sox 
talons  n'est  point  s^par6e  du  omsde 
I'habit.  Elles  se  servent  de  soiuicn 
plats,  converts  d*torlate,  avec  quel- 
ques  fleurs  d'or  en  broderie.  Elles  les 
quittent  ais^ent  et  toujoors,  lon- 
qu'elles  entrent  dans  leors  apparte- 
ments  qui  sont  couverts  de  beaux  tapis. 
EUes  sont  coifKes  en  cheveox  d'une 
maniere  fbrt  vari6e,  tantdt  en  pjn- 
mide,  tantdt  en  triangle  ou  en  crois- 
sant ;  d'autres  fois ,  en  roses,  en  tulipes, 
ou  autres  figures  de  fleurs  au^dles 
imitenten  assujettissant  leors  cneveox 
au  moyen  de  boucles  d'or  gamies  de 
diamants.  Plus  commun^nwnt,  elles 
divisent  leurs  cheveux  en  tresses  pen- 
dantes  sur  les  Epaules,  et  y  atta- 
ehent  de  petites  plaques  d*or  et  des 
pierreries.  (Test  un  des  secnsts  de  Is 
ooquetterie  que  de  savoir  laire  alois 
certains  mouvements  de  t^te  piopres 
k  faire  paraltre  la  beauts  et  le  briUant 
de  leur  chevelure. 

Dans  leurs  chambres,  il  n*y  a  d'ao- 
tre  tapisserie  que  celle  sur  laqaeile  on 
niarche.  Elles  sont  om6es  de  grands 
miroirs ,  de  canap^ ,  d'enfonoements 
dans  les  murailles  en  forme  de  nidies, 
ou  elles  rangent  des  vases  de  cristal , 
d'or  et  d'argent,  pour  oonserver  leun 
parfums,  leurs  confitures,  et  les  petite 
meubles  de  leur  toilette.  L'usage  des 
chaises  v  est  inconnu.  II  y  a  de  petits 
tabourets  sur  lesquels  dies  peuveol 
s'asseoir;  mais  dies  en  font  rarcment 
usage:  dies  pr^ftrent  s'asseoir  sor 
leurs  riches  tapis,  les  jambes  croisees. 
Derriere  dies  est  un  grand  coossia 


•  • 


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V-. 


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■  • 


ARMENIE. 


13S 


de  hrocart,  sur  lequel  elles  s'appuient, 
et  qo'elles  ramteent  et  chaocent  h  vo- 
lonte. 

Leur  ooeupation  se  borne  d  de  pe- 
iits  ouTnges  k  raiguHle.  SouTcnt  eUes 
i^anisseot  lean  amies;  et,  pendant 
1'^  t  on  apporte  de  la  limonade  pour 
se  rafrakbir;  on  mange  des  fraits, 
des  confitmres,  et  une  espto  de  gA- 
teaa  foit  avec  la  ferine  de  froment, 
d^ay^e  dans  do  hiade  canne  k  aucre, 
auquel  on  m^e  mi  lait  et  de  Teau  de 
Toae  (*). 

(*)  M.  LamartiiiedaiitMn  Tojage  d'Orimt 
fait  une  peinture  nYisunte  des  femmei 
armeoieiiiies  de  Damai ,  de  leur  habitation 
et  de  leur  Tie  donoe  et  paiiiUe.  «  Nom 
nvoos,  dit-0 ,  eireuli  d'abera  nendant  aiaes 
ioogtwnps  dant  les  luei  tombrei,  sales  et 
tortttemcs  da  qnartier  amienMn.  On  dirait 
un  des  plus  miserables  villages  de  nos  pro- 
vines.  Les  maiaons  sent  constniites  de  bone ; 
elles  sont  pereto,  sur  la  me,  de  auelques 
petites  et  raras  fentoet  frilUcs  dont  les 
voletsBont  peints  en  rouge.  EUes  sont  bastes, 
et  les  portes  sarbaisste  ressemblent  k  des 
portes  d*itablcs.  Un  tas  d'immondioes  et 
une  mare  d'eau  et  de  fiinge  rcgnent  presque 
pariout  aniour  des  portes.  Nous  sommes  en- 
tr&  eependant  dans  qnelques-unes  de  ces 
maisons  des  urindpaux  u^godants  arme- 
niens ,  et  j*ai  mk  frmk  de  la  ricbcsse  el  de 
r^Mganee  de  ces  habitations  k  rinlMeur. 

«  Apras  avoir  passi  la  porte  et  frnaehi 
un  eotridor  obseur,  on  se  trouve  dans  une 
oour  onee  de  snperbes  Ibntaines  jaillissantes 
en  marbre,  et  ombragees  d*un  oo  deux  sy- 
comores  on  de'saules  de  Perse.  Cette  cour 
est  pavee  en  Utget  dalles  de  pierre  polie  ou 
de  marbre ;  des  vignes  tapissent  les  murs. 
Ces  mnrs  sont  ravMus  de  marbre  blanc  et 
noir;  dnq  ou  six  portea,  dont  les  montants 
sont  de  marbre  aussi ,  et  sculpt^  en  ara- 
bcscnies ,  introduisettt  dans  antant  de  salles 
ou  de  salens  oik  se  tiennent  les  hommet  et 
les  fammes  de  la  fsmiUe.  Ces  sakms  sont 
vaitcs  et  vo6tis.  Us  sont  perois  d'un  grand 
nombre  de  petites  fenltres  ^levte,  poor 
laissar  sans  oene  jouer  Ufarament  Pair  exte- 
rieur.  Plresque  tous  sont  composes  de  deux 
plans :  un  premier  plan  infMeur  06  se  tien- 
nent let  servilenrs  et  les  esdaves ;  un  second 
plan  ikffk  de  quelcpies  marehae,  et  sipare 
du  premier  par  une  balustrade  en  marbre 
ou  en  hois  de  ocdre  marveilleuiaMnt  de- 


Qaand  une  femme  perd  son  mart , 
elle  rev^t  sur-le«hamp  les  habits  de 

coup^  En  gteiral ,  une  ou  deux  Ibntaines 
en  jet  d'eao ,  murmurent  dans  le  milieu  ou 
dans  les  angles  du  salon.  Les  bords  sont 
gamis  de  vases  de  fleurs;  des  hirondelles  ou 
des  oolorabes  privees  viennent  librement  y 
boire  et  se  noser  sur  les  bords  des  bassins. 
Les  pamb  ue  la  piece  sont  en  marbre  jus- 
qn'a  une  oertaine  hauteur.  Plus  haut  elles 
sont  reviAtues  de  stuc  et  peintes  en  arabes- 

rde  mille  couleurs,  et  souvent  avec 
mouluras  d'or  extrimement  chargees. 
L'amenfalement  oonsiste  en  de  magnifi^ues 
lapis  de  Perse  ou  de  Bagdad  qui  couvrent 
partout  le  plancher  de  marbre  ou  de  cedre, 
et  une  grande  quantite  de  ooustins  et  de 
matehtt  de  soie  epars  au  milieu  de  Tappar- 
lemcnt,  et  qui  serveni  de  sieee  ou  de  do»- 
sien  aux  penoniies  de  la  iamille.  Un  divan 
recouvert  d'etoffcs  prMeuses  et  de  tapis 
infiniment  plus  fins,  regne  au  Ibnd  et  sur 
les  contours  de  la  chambre. 

«  Les  femmes  et  les  enfants  y  sont  ordi- 
nairement  accroupis  ou  etaidus,  occupes 
des  diffifaients  travaux  du  menage.  Les  uer- 
ceaux  des  petits  enfants  sont  sur  w  plancher, 
parmi  ces  lapis  et  ces  coossins;  le  mailre 
de  la  maison  a  toujours  im  de  cm  salons  pour 
lui  seul ;  c*est  la  qu'il  revolt  les  ilrangen: 
on  le  trouve  ordioairemeut  assis  sur  son 
divan,  son  ecritoire  k  long  mauche  pos^  a 
terre  k  c6tk  de  lui;  une  feuille  de  papier 
appuyee  sur  son  genou  ou  sur  sa  main  gau 
eke,  et  em  van!  ou  calculant  tout  le  jour, 
car  le  commerce  est  Toccupation  et  le  gtoie 
unique  des  habitants  de  Damas.  Fartoul  oii 
nous  sommes  alles  rendre  des  visiles  qu*ou 
nous  avait  faites  la  veille ,  le  proprietaire  de 
la  maison  nous  a  re^  avec  p'Ace  et  cordia- 
lite ;  il  nous  a  Cut  apporter  les  pipes ,  fc 
cafe,  les  sorbets,  et  nous  a  conduits  dans  le 
salon  ou  se  tiennent  les  femmes. 

«  Quelque  idkt  que  j'eusse  de  la  beautc 
des  Sjriennes ,  quelque  imwe  que  m*ait  lais- 
ait  dans  respnt  la  beaule  des  femmes  d« 
Rome  etd'Atnenes,  la  vue  des  femmes  el 
des  jeunes  filles  armeniennes  de  Damas  a 
tout  surpasse.  Presque  partout  nous  avons 
trouvi  des  figures  que  le  pinceau  europtoi 
n*a  jamais  tracees,  des  yeux  ok  la  lumiere 
sereine  de  Vkme  prend  une  couleur  de  som- 
bre aiur ,  el  jelte  des  rayons  de  velours  hu- 
mides  que  je  n*avais  jaoiais  vu  briller  dans 
des  veux  de  femme  -,  des  traits  d'une  finesse 
et  d*une  purele  si  exquises ,  que  la  main 


IM 


L'UNIVERS. 


deiiil ,  et  die  ne  sort  qu*au  bout  de 
(|uanaite  jours.  Quelques-unes  mtoe 

la  plus  Icgere  et  la  plus  «mire  ne  pourrait 
Ics  iBulcr,  et  uoe  peaa  u  irauspirente  et  en 
mine  temps  si  colorie  de  leiales  vivaiites, 

3tte  leslei&lcs  les  plus  d^lkales  de  la  feiiille 
erase  ne  poumient  en  rendre  la  pHe  frai- 
dieur;  les  denU,  le  sourire,  le  nalmvl 
moelleux  des  formes  et  des  noii?eroenU,  le 
timbre  dair,  sonore,  argentin  de  la  voix, 
tout  est  en  haniionie  a?ee  om  admirables 
apparitions ;  eUes  oaosent  aveo  grice  et  uoe 
modest*  ratenue,  mais  sans  embams  et 
comme  neeout— Aes  a  I'admiration  qu'elles 
inspirent;  elles  paraissent  conserver  long- 
lemps  leur  beaura  dans  ee  dimat ,  et  dans 
nne  vie  d'interieor  et  de  loisir  paisible,  ou 
les  Mf^tflm*  foctives  de  la  soaete  n'usent 
ribne,  ni  le  corps.  Dans  presque  loutes 


ni 


les  maisons  ou  j'ai  ete  admis ,  j*ai  trouvA  la 
mere  aussi  belle  que  ses  fittes ,  quoiquc  les 
filles  parass^t  avoir  d^  quinie  a  seiie 
ans ;  elles  se  marient  k  dome  on  tieiae  ans. 
Ija  costumes  de  oes  femmes  sont  les  plus 
el^ants  et  les  plus  nobles  que  nous  ayons 
euoore  admires  en  Orient :  la  tMe  nue  et 
cbarg^  de  dieveox  dont  les  tresses,  mIMn 
de  teirs,  font  plusieors  tours  sur  le  front, 
et  retombent  en  tongues  nattes  des  deux 
c6t^  du  cou  et  sur  les  epaules  nues ;  des 
festonsde  payees  d'or  et  de  rang^  de  peries 
mBkm  dans  la  chevelure ;  une  petite  Mloite 
d*or  cisde  au  sommet  des  cbevfux;  une 
petite  vesle  k  mancbes  larges  et  oouvcrtes 
d*une  ^ofle  de  soiebrocb^  d'argent  ou  d*or ; 
im  large  pantalon  blanc  descendant  k  plis 
jusqii^li  lacbevilledopied;le^4nu  cbansse 
d'uue  pantoufle  de  maroqnin  jaone;  une 
tongue  robe  de  soie  d*une  cooleur  Ma- 
tante ,  descendant  des  ^panics ,  ouverte  sur 
le  sein  et  sur  le  derant  dn  pantalon,  et 
retenue  settlement  autour  des  bandies  par 
une  oeinture  dont  les  bouts  loticbant  a  terre. 
Je  ne  pouvais  detacher  mes  yeas,  de  ces  ra- 
vissantes  femmes ;  nos  visites  et  nos  con- 
versations se  sont  proloog^i  partout,  et  je 
les  ai  trouT^  aussi  aimables  que  lielles ; 
les  usages  de  I'Europe ,  les  costumes  et  les 
babiindes  des  famnes  d'Ooddent,  ont  M 
en  general  le  sujet  des  edtretiens;  elles  ne 
semblent  rien  envier  a  la  vie  de  nos  femmes ; 
et  quand  on  cause  avec  oes  chaimantes  crttf 
tures ,  qnand  on  trouve  dans  leurs  conver- 
nltirns  et  dans  leurs  maniires  cetle  grAce , 
cenatiitTl  parfiiit ,  cette  bienveillanoe ,  oette 
•Mrite ,  cvtte  pais  de  Tesprit  et  du  oorar 


ne  sortent  qu'au  bout  d'uo  an;  et, 
pendant  tout  cet  intervalle  de  tenips , 
elles  n'entendent  pas  la  messa. 

Elles  se  font  un  devoir  de  nourrir 
elles -mtees  lean  eolaDts,  qo^dles 
^^▼ent  soigneusement  dans  la  crainte 
de  Dieu ,  et  dans  la  ooDnaissanoe  de 
tous  les  prindpauz  devoirs  de  la  reli- 
gion. De  1^  Tient  cet  attachement  sen- 
ptileux  k  la  tiaditioo  de  lenrs  peres, 
et  oet  amour  penM^vdrant  de  la  religion , 
qui  les  distingue*  A  nMsure  que  le 
peuple  armdnien  se  civilise « il  attache 
toujours  un  soin  nouveau  a  TMucation 
de  la  jeunesse ;  outre  le  college  epis- 
copal de  Calcutta,  et  celui  que  les  Me- 
chitaristes  ont  fond^  a  Venise  et  a  Pa- 
jdoue ,  on  cite  Tinstitut  de  Moscou . 
tobli ,  en  1816 ,  par  le  conseiller  d'Etat 
Lazarew.  Son  double  but  6tait  <le  for- 
mer une  ^le  d'interprites  des  iangues 
orientales,  propres  k  servir  la  eoar 
de  Russie  dans  ses  relations  diptoma- 
tiques  avec  TAsie;  et  il  yonlait  en 
meme  temps  que  cette  matson  derfnt 
le  s^minaire  des  eccl^astiques  du  rite 
arm^nien,  pour  les  6glises  de  Kossie. 
Vingt-deux  professeurs  environ  soot 
attaches  h  cet  6tablissement,  dont  b 
direction  fi^n^rale  reste  a  Tun  des 
membres  de  la  fomille  Lazarew ,  noai 
de  son  illustre  fondateur ,  qui  a  laisse 
un  legs  consideraUe  nour  reotretien 
et  ravancement  des  ^eves  C). 

qui  se  conservent  si  bien  dans  la  vie  d^* 
famille ,  on  ne  sait  ce  qudles  aoraieDi  a 
envier  it  nos  femmes  du  monde,  qui  saveat 
tout ,  excepte  ce  qui  rend  heureuz  dans  Tia- 
terieur  d'one  fiuniile,  et  qui  dilapidsai 
en  peu  d^annies,  dans  le  mouvement  tu- 
muttueux  de  nos  soci^tes ,  leur  4me,  lair 
beaoti  et  leur  via.  Ces  femmes  se  voicat 
quelquefois  eatra  elles ;  elles  ne  sont  mdM 
pas  entiercmenl  aeparees  de  la  sodete  de$ 
hommas ;  mais  oelle  sodete  se  borae  a 
quelques  jeunes  parents  ou  amis  de  la  nsi- 
son ,  parmi  lesquels,  en  consultant  leur  in- 
clination et  les  rapporti  de  CamiUe,  on  leur 
dkoisit  de  tres-bonne  beure  nn  Banoe.  O 
fianoe  vieot  alors  de  temps  en  temps .  « 
mttar ,  comma  un  fils ,  aui  pUisirs  de  U 


(•)  Toy.  la  figure  n«  »6. 


•  k       • 


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ARMltNIE. 


127 


C^KMONIES  DU  MARIAGE. 


Apres  avoir  parl^  des  femmes ,  nous 
passons,  par  une  transition  naturelle , 
an  manage,  Tacte  le  plus  important 
et  fe  plus  solennel  de  leur  vie.  La  ma- 
niere  de  le  contracter  nous  fera  con- 
nattre  aussi  une  autre  face  de  leur  exis- 
tence. 

Les  Arm6niens  ne  connaissent  point 
Tart  des  entremetteurs;  ce  sont  d*or* 
dinaire  les  parents  qui  traitent  cette 
affaire.  La  mire  du  jeune  homme  va 
visiter  la  personne  sur  laquelle  eile 
porte  ses  rues;  elle  rient  plusieurs 
(bis  examiner  attentivement  son  ca- 
ractere,  surprendre  ses  dtfauts,  et 
elle  s*enquiert  de  son  dge ,  de  P^tat 
habitue]  de  sa  sant^ ,  ce  dont  elle  feit 
au  retour  un  rapi)ort  toujours  exact. 
Si  la  jeune  fille  lui  convient ,  elle  pro* 

Sose  aussit^t  son  fils  anx  parents ;  et 
es  que  sa  demande  est  agre^e,  on 
Tapprend  h  la  future ,  qui ,  persuad^e 
que  ses  p^e  et  mire  ne  cherchent  que 
son  bien ,  accepte  leur  volonti,  comme 
une  decision  du  ciel.  Alors  les  parents 
du  Jeune  homme  lui  font  connattre  le 
consentement  de  la  jeune  fille ,  qui  de- 
vient  ainsi  sa  fiancie,  bien  que  souvent 
il  ne  Fait  jamais  entrevue.  Toutefois 
ceci  arrive  aujourd'hui  fort  rak^ment; 
et  la  civilisation  europ^enne,en  pin6- 
trant  chez  les  Arminiens,  tend  h  abolir 
cet  usage ,  reste  de  la  barbaric  musul- 
mane ,  qui  isole  les  fenmies  de  la  so- 
ciety et  leur  interdit  les  relations  les 
plus  innocentes  avec  les  hommes. 

Lorsque  le  consentement  des  deux 
partis  est  obtenu ,  on  s'enquiert  soi- 
gneusementsi  oudque  cause  dirimante 
n'empicbe  pas  le  manage.  Les  lois  re- 
ligieuses  sont  fort  s&fkres  k  cet  d^ard ; 
les  liens  de  parents  jusqu'au  septiime 
degri,  ou  la  parents  spirituelle  que 
confere  le  titre  de  panrain  et  de  filleul , 
sont  autant  d'emp6cbements.  Si  rien 
ne  gdne  leur  liberty,  le  fianci  fixe  le 
douaire  ou'il  apportera  h  sa  femme, 
suivant  lusase  oriental,  diamitrale- 
ment  oppose  au  ndtre.  En  effet, 
Tepquse  n'apporte  a  la  maison  de  son 
mari  que  ses  v^tements ,  ses  joyaux , 
son  or ,  et  I'ameublement  de  la  cham- 


bre  nuptiale ,  lequel  consiste  en  un  lit , 
un  sora,  des  chaises,  des  tables,  des 
chandeliers,  et  tout  ce  qui  sert  a  la 
toilette.  Durant  tout  le  temps  que  se 
traite  Taffaire  du  mariage,  le  jeune 
homme  ne  peut  voir  sa  fianc^ ;  Jamais 
on  ne  d^roee  k  cette  rdgle,  sur  I'ob- 
servation  de  laquelle  les  Arm^niens 
sont  inexorables. 

Au  jour  de  la  calibration  du  ma- 
riage, un  prtoe,  acoompagni  de  son 
diacre ,  se  rend  a  la  maison  de  la  flan- 
c6e ;  il  binit  son  habit  nuptial ,  et  il 
ricite  diffirentes  priires ,  en  conjurant 
le  Seigneur  de  sanctifier  leur  union , 
et  de  ripandre  sur  les  jeunes  maries 
le  tresor  de  ses  fiiveors.  Alors  arrive 
I'ipoux,  en  grande  pompe,  accompagne 
de  ses  parents  et  amis ,  revitu  de  ses 
plus  magnifiques  habits  etportant  un  d- 
raeterre  k  sa  ceinture.  II  trou?e  sa  fian- 
cie  couverte  de  voiles,  sans  qu*il  puisse 
encore  distinguer  ses  traits.  Celle-ci 
fait  en  avant  quelques  pas,  oomnse 
pour  lui  rendre  hommage,  et  le  pritre 
recite  le  psaume  commen^ant  par  ces 
paroles : «  Je  chanterai  les  misiricordes 
divines  dans  Titemite ; »  il  prend  la 
main  droite  de  I'ipouse ,  et,  en  la  met- 
tant  dans  la  droite  de  Tipoux ,  il  dit : 
«  Dieu  prit  la  droite  d'£?e,  et  il  la 
prisenta  h  la  droite  d'Adam,  et  Adam 
s'ieria :  «  Ceci  est  vraiment  les  os  de 
mes  OS,  la  chair  de  ma  chair;  eile 
s'appellera  .^mm€^  comme  itant  tiree 
de  rbomme  (*).  Acause  d'elle ,  Thomme 
dilaissera  son  pire  et  sa  mire ,  il  s*at- 
tachera  a  son  ipouse,  et  ils  seront 
deox  en  une  seule  chair.  Que  Thomme 
ne  sipare  done  pas  ce  que  Dieu  a  uni. » 
Le  pritre  rapprodie  ensuite  leurs  ^tes 
de  maniire  qu'elles  se  touchent ,  puis , 
en  y  faisant  le  signe  de  lacroix ,  il  dit  : 
"Seigneur,  Dieu  iternel,  qui  unis 
ceux  qui  sont  siparis  et  disunis ,  en 

(*)  Notre  Uuigue  ne  peut  conserver  ni 
reproduire  le  jeu  de  mots  existant  dans  The- 
breu,  06  il  est  dit :  elle  s*appeUera  Lscha, 
parce  qu^elle  a  ite  prise  de  isch,  rhomme. 
En  latin  ou  dirait  voca6itur  virago  ^uia  ex 
viro  sumpta  est,  bien  que  le  sens  de  virago 
ne  corrcsponde  pas  avec  juste sse  a  Vidre  lit 
feminc. 


128 


L'UNIVERS. 


les  liant  du  lien  indissoluble  de  ta  loi, 
toi  qui  b6nis  Isaac  et  Rebecca,  son  Spou- 
se, toi  qui  roultiplias  leur  g^^ration, 
en  aooomplissant  pour  eux  tes  pro- 
messes  ,  b^nis  aussi  tes  serviteurs ,  en 
les  dirigeant  dans  la  voie  du  bien,  en 
vertu  de  la  crdce  et  de  Tamour  pour 
les  hommes  de  Notre-Seigneur  et  Sau- 
veur  J^us- Christ,  h  qui  appartien- 
nent  la  ^ire,  la  puissance  et  Thon- 
neur,  maintenant  et  dans  les  si^es 
des  sidles. » 

Ces  pri^res  termin^es,  les  ^pouz 
s'achemment  vers  T^lise,  oik  se  con* 
somme  la  b^n^iction  nuptiale ,  aor^ 
laquelle  on  dit  la  messe.  L'un  et  rau- 
tre  communient  ordinairement.  Le 
pr^tre ,  en  mettant  une  seoonde  fois  la 
droitede  I'epousedanscelledeT^ux, 
dit :  aSuivant  le  pr^oeptedivin  queDieu 
a  transmis  aux  chefs  de  son  ^lise ,  je 
vous  donne  cette  Spouse  qui  vous  sera 
soumUe}  voulez-vousltre  son  patron  ?» 
Le  man  r^pond ,  en  tenant  sa  main : 
«  Avec  la  voUmU  de  DieUf  je  veux 
Ore  ion  patron. »  Le  pr^tre  leur  piaoe 
sur  la  tete  deux  couronnes;  et ,  lors- 
que  la  certoonie  est  achevte,  i'epouse 
est  conduite  a  la  maison  de  T^ux , 
SHI  milieu  des  hymnes  et  des  chants 
d'allegresse.  lis  portent  leurs  cou- 
ronnes pendant  huit  jours  ou  trois 
jours  au  moins;  et,  pendant  cet  espace 
de  temps,  ils  vivent  s^par^  Tun  de 
Tautre ,  dans  une  continence  parfaite. 
A  la  fin  de  ces  iours  d^ign^ ,  le  pr^tre 
revient  avec  le  diacre  reprendre  les 
couronnes ,  et  fait  de  nouveaux  voebx 
pour  la  prosp^rit^  de  leur  mariage. 

OBSBaVAHCBS  BT  PRATIQUES  DIVERSBS 
DBS  AKMJSNIENS. 

Lbubs  jbunbs.  —  Nul  autre  peuple 
ne  pousse  aussi  loin  Taust^rite  et  la 
mortification  dans  les  jednes  de  r£glise ; 
et  nous  avons  vu  qu'une  des  causes 
de  leur  aversion  pour  les  Grecs,  pro- 
venait  des  tentatives  faites  par  cenx-ci 
de  reformer  la  loi  de  leurs  abstinences. 
Les  jednes  sont  aussi  fn^uents  que 
rigoureux.  Durant  tous  ces  jours,  ils 
s^abstiennent  de  viande,  de  poisson, 
d'oeufs ,  de  beurre ,  de  lait  et  de  fro- 


mage,  ne  faisant  qu'un  repas,  aprii 
le  coucher  du  soleil.  Le  vin  et  rbuik 
sont  aussi  interdits  par  les  andens  ca- 
nons. 

lis jeAnent  tous  les  mercredis  et  fea- 
dredis  de  Tannde,  excepts  depuis  Pil- 
ques  d  I'Ascension,  qui  est  le  temps 
oik  ils  ont  le  plus  de  r^jouissanoes  ea 
mtooire  de  la  resurrection  de  Notre- 
Seigneur.  Ils  font  ensuite  les  dix  jednes 
suivants,  chacun  d^une  semaine :  !•  o^ 
lui  d'apr^  le  premier  dimancfae  de  b 
Trinite,  qu'ils  appellept  jeOne  de  pe- 
nitence ;  3«  le  jedne  de  la  Transfigura- 
tion; 3*  le  jedne  de  TAssomptioD; 
4«  le  jedne  de  la  Croix  en  septembre; 
&*  un  jedne  de  p6nitence  apres  le  trei- 
zi^me  dimanche  de  la  Trmit^ ;  6*  un 
autresemblableapr^  le  vingt  et  uni^e 
dimanche ;  7«  le  jedne  de  TA  vent ;  8*"  ce- 
lui  de  Noel,  dont  ils  ne  commenoent 
pas  la  f(Ste  h  minuit ,  mais  le  matin , 
comme  pour  les  autres  f(gtes,  jednant 
la  Vigile  du  soir ;  ^  un  jeAne  de  peni- 
tence a  vant  le  carnaval ,  gui  dure  quinze 
jours;  10*  le  grand  careme  qui  com- 
mence des  le  Tundi ,  oik  Ton  redouble 
d*austdrite.  On  voit  que  les  jedoes 
d*obligation  emportent  la  moiti^  de 
Tannee.  II  y  a  encore  trois  jednes  de 
devotion  pour  les  plus  fervents ,  chacun 
de  cinquante  jours.  Le  premier  est  de 
Piques  h  la  Pentecdte ;  le  second ,  de  la 
Trinity  k  la  Transfiguration ;  le  troi- 
si^me  commence  cinquante  jours  avaDt 
Noel.  U  y  a  en  outre  un  petit  jedne 
surerogatoire  de  TAscension  a  la  Pen- 
tecdte. 

Les  Arm^niens  distinguent  trois  ^ 
gr^  dans  le  jedne.  Bachj  qui  consiste 
a  s'abstenir  non  -  seulement  de  chair, 
mais  encore  de  poisson ,  d*an]&  et  de 
laitage.  Dzuom,  aui  est  propreoaeot 
le  jeime  dans  leguel  on  ne  boit  ni  Ton 
ne  mange  jusquau  coucher  du  soleil. 
Le  navagatih  est  simplement  oe  que 
nous  appelons  Tabstinence  ou  la  priva- 
tion de  viandes. 

Cette  discipline  austto  de  nsglise 
arm^nienne  remonte  a  rorigine  de  soo 
etaUissement.  Saint  Gr^soire  TIllu- 
minateur ,  son  premier  patriarcbe ,  et 
qui ,  au  milieu  de  ses  missions ,  mens 
toujours  la  vie  d'un  anacborete,  fit 


ARMJ^NIE. 


129 


passer  dans  les  institutions  de  ce  peu- 

t)le  ler^ime  s^v^re  adopts  par  lui ,  vou- 
ant  r^mer  dans  ces  pratiques  toute 
]a  pens^  du  christianismev  qui  n'^tait 
k  ses  yeux  qu'une  grande  el  conti- 
nuelle  expiation  sur  (sette  terre.  Que 
ceux  qui  attaquent  rEelise  catholique 
oonune  imposant  a  ses  fiddles  des  mor- 
tifications trop  rigoureuses,  aillenten 
Armdnie,  fls  se  convaincront  que  la 
privation  et  Fabstinence  ne  sont  pas 
aussi  nuisibles  a  Thygidne  publique 
que  rintemp^rance  ou  Texo^s  dans  le 
Doire  et  le  manger.  La  beauts  du  sang, 
r^lat  du  teint  des  femmes,  la  force  des 
hommes,  prouveront  suflSsamment  h 
Tobservateur  que  le  r^me  le  plus  dur 
peut  Stre  aussi  le  plus  sain ,  lorsqu'il 
est  simple,  calme  et  r^gulier.  £n  outre , 
il  ne  faut  jamais  oublier  que  les  Orien- 
taux  sont  infiniment  plus  sobres  que 
nous,  et  qu'ilsneconnaissent  pas  tous 
les  raffinements  d'un  luxe  oomipteur. 
l^OLiSBS. — Dans  Tint^rienr  de  I'Ar^ 
m6nie,  oh  la  pauvret^  du  peuple  est 
grande  h  cause  des  exactions  aes  pa- 
chas, les  ^ises  sont  petites  et  sim- 
ples ,  n'^tant  distinguto  des  maisons 
ordinaires  que  par  une  croix  trac^ 
sur  la  porte  d'entr^e.  L'autel ,  suivant 
Tantique  usage ,  regarde  I'Orient;  du 
reste ,  tout  <st  fort  simple  ^alement 
ik  I'int^rieurf  et  elles  n'ont  pour  orne- 
mentquequelquespeinturesgrossidres. 
Les  fiddles  n'y  entrent  que  nu-pieds ; 
et ,  lorsqu'ils  passent  devant  la  porte, 
lis  vont  en  baiser  le  seuil. 

A  Constantinople ,  et  dans  les  autres 
villes  otH  habitent  de  riches  banquiers 
et  des  ndgociants,  la  maison  de  Dieu 
est  oonvenablement  ornde.  La  facade , 
comme  la  partie  intdrieure ,  rappellent 
les  dglises  des  Grecs.  Le  grand  autel , 
correspondant  k  leur  bema ,  est  vof  Id 
par  deux  rideaux ,  dont  le  plus  grand 
cache  le  sanctuaire  au  peuple,  ainsi 
que  le  prdtre  cdldbrant ,  les  diacres  et 
ceux  qui  les  assistent,  pendant  cer- 
taines  parties  de  la  messe ;  usage  orien- 
tal qui  ajoute ,  du  reste ,  k  la  cerdmonie 
un  caractdre  mvstdrieux ,  plus  impo- 
sant. Il  rappelle  ces  temps  de  la  pri- 
mitive l^lise ,  ou  le  diacre  ordonnait 
aux  profanes  de  sortir  avant  la  con- 

W  Uvraison.  (Armsnie.) 


sommation  du. sacrifice.  Le  second  ri- 
deau  cache  seulement  le  cdldbrant  au 
moment  de  la  communion ,  comme  s'il 
devait  alors  dtre  sdpard  du  reste  des 
humains,  et  n'avoir  pour  spectateur 
que  Dieu  et  les  anges. 

Toutes  les  dglises  sont  sous  la  dddi- 
cace  du  Seigneur,  de  la  Vierge,  de  la 
croix ,  des  apdtres ,  de  saint  Grdgoire 
rUluminateur,  et  de  guelques  autres 
saints  des  premiers  siecles.    • 

Le  dimanche  et  les  iours  de  f(!tes,  les 
fiddles  accourent  a  T^ise  arant  I'au- 
rore.  Us  y  restent  dans  le  plus  grand 
recueillement,  ne  se  permettant  ja- 
mais d'y  parler,  ou  de  cracher  sur  le 
pavd.  Les  hommes  tiennent  ordinaire- 
ment  un  diapelet  k  la  main ,  et  sont 
sdpards  des  remmes.  Les  offices  sont 
fort  longs ;  lis  durent  cina  ou  six 
heures.  Suivant  le  rite  de  rSglise  ar- 
menienne,  on  ne  cdldbre  la  messe 
ou'une  fois  par  jour  dans  la  mdme 
^lise;  et,  aux  solennitds,  oette  favour 
est  rdservde  aux  dignitaires  du  clergd. 

Eglisb  patriabcalb  d'Eczmia- 
xiN.  —  Nous  empruntons  au  cdldbre 
voyageur  Ghardin ,  qui  visita  ces  lieux  a 
la  fin  du  dix-septidme  sidde,  la  des- 
cription qu'il  en  donne ,  et  qui ,  si  nous 
en  excepCons  les  remarques  inconve- 
nantes  qui  lui  sont  suggdrdes  par  son 
esprit  reformiste  et  intoldranl,  s'ac- 
oorde  exactement  avec  celle  du  savant 
professeur  Parrot ,  dans  la  relation  de 
son  Yoyaee  au  mont  Ararat.  «  A  deux 
lieues  a'Erivan ,  dit-|l ,  est  le  cdldbre 
monastdre  desTroisEglises  (*},  le  sanc- 
tuaire des  chrdtiens  armdniens,  s: 
j'ose  ainsi  parler,  et  le  lieu  pour  lequel 
lis  ont  le  plus  de  ddvotion.  Les  Armd- 
niens rappellent  Eezmiazin^  c*est-d- 
dire ,  ia  descenU  du  FU$  unique  en- 
gendri;  et  ce  nom,  disentails,  a  dtd 
donne  k  ce  lieu,  parce  que  Jdsus- 
Christ  s'y  fit  voir  clairement  a  saint 
Grdgoire*^  qui  en  fut  le  premier  pa- 
triarche.  Les  Mahomdtans  la  nom- 
ment  UtchicUss€y  c*est-d-dire,  les  trais 
igUses,  a  cause  qu'outre'l'dglise  du 
couvent ,  il  y  en  a  deux  autres  assez 
proches ,  et  qu'en  tout  elles  sont  an 


r*\ 


Toy.  figure  n"  tgr. 


J 


tao 


LUNIVERS. 


nombre  de  trois.  La  premiere ,  la  prin- 
cipale  aui  s'appelle  Eczmiazin ,  comme 
Ton  a  ait ,  est  un  bAtiment  fort  massif 
et  fort  vaste,  et  qui  est  tout  de  grosses 
pierresde  taille.  Les  piiastres,  qui  ont 
septante  pieds  de  hauteur,  sout  de 
lourdes  masses  de  pierre.  Le  dome  et 
les  vodtes  en  sont  aussi.  Le  dedans  de 
r^lise  n'a  aucunornementdesculpture 
Didepeinture.  Les  chapelles  sont  du 
cdte  ae.rOrient.  II  y  en  a  trois  au 
fond  de  I'^lise.  Gelle  du  milieu  est 
firande  et  a  un  autel  de  pierre ,  k  la 
faqon  des  chr6tiens  orientaux,  assez 
bien  orn^.  Cdles  des  c6t6s  n'ont  point 
d*autel ;  mais  une  sert  de  sacristie ,  et 
fautre  de  tr^or.  La  raison  pour  la- 
quelle  on  n'y  trouve  point  d'autel, 
c'est  que ,  dans  la  cr^nce  des  Arm^ 
niens,  de  mime  qu'en  celle  de  tous 
les  autres  Chretiens  d'Orient ,  Ton  ue 
c6i^bre  les  saints  myst^res  de  la  com- 
munion eucharistique  qu*une  fois  le 
jour,  en  une  ^lise,  et  Jors  seulement 
quil  s'y  trouve  quelque  fidde  pour  y 
narticiper.  Ainsi  il  n*est  pas  n^ssaire 
d'y  avoir  plus  d*un  autel  en  chaque 
^lise. 

«  Les  moines  du  lieu  font  voir  dans 
la  sacristie  plusieurs  parements  fort 
beaux  et  fort  riches ,  des  croix  et  des 
calices  d'or,  des  laropes  et  des  chande- 
liers d'argent  d*une  extraordinaire 
grandeur.  On  y  voit,  dans  le  tr^sor, 
plusieurs  chftsses  d'argent  et  de  ver- 
meil dorl.  Les  principales  relives  du 
lieu  sont,  au  rapport  des  moines  qui 
en  ont  la  garde,  le  haut  du  corps  de 
sainte  Eipsymde ,  un  bras  et  une  jambe 
de  sainte  Caiane,  un  bras  de  saint 
Gr^goire,  suraonun^  Tllluminateur, 
a  cause  qu*il  convertit  TArm^ie. 

«  Au  centre  de  I'^glise ,  il  y  a  une 
grande  pierre  de  taille  carrde ,  de  trois 
pieds  de  diamdtre,  et  de  cinq  pieds 
d*^pais8eur.  Les  Arm^niens  disent  que 
c'est  Tendroit  ou  saint  Gr^oire,  leur 
ap6tre ,  vit  Jdsus-Christ.  1&  assurent 
que  J^nis  •  Christ 'fit ,  autour  de  ce 
saint,  avec  un  rayon  de  lumiere,  le 
dessin  de  VMise  d  Eczmiazin ,  et  qu'ii 
lui  commanda  de  faire  bdtir  I'^lise 
sur  la  flffure  qu*il  avait  trac6e.  Us  aiou- 
tent  q|rau  mtoe  temos  la  terre  s  ou- 


vrit  a  Teudroit  ou  est  cette  pierre ;  que 
Notre-Seigneur  ieta  la,  dans  Fabtme, 
les  diables  qui  etaient  dans  les  tem- 
ples d*  Armdnie ,  et  y  rendaient  des  ora- 
cles; et  que  saint  Gr^oire  fit  aussitdt 
couvrir  cette  ouverture  d'un  marbre. 

« lis  ajoutent  qu' Abbas  le  Grand , 
rol  de  Perse ,  enleva  ce  marbre,  le  mit 
autr6sor  royal  de  Perse,  et  fit  mettre  en 
la  place  la  pierre  dont  nous  avons  parie. 

«  Le  grand  clocher  a  6ti^  nonvelle- 
ment  reb&ti.  II  y  a  six  cloches ;  la  plus 

Srosse  est  de  douze  cents  pesant.  Un 
es  petits  dochers  fiit  abattu  il  y  a 
guarante  ans :  et  depuis  on  ne  Fa  pas 
rait  relever ,  faute  d'argent ,  disent  les 
moines.  Le  premier  monast^  de  cette 
^lise  fut  bati  par  Nerses,  vingt^neu- 
vieme  patriarche  d*Armenie.  Les  Tar- 
tares  le  ruinerent;  et,  si  Ton  en  veut 
croire  la  chronologic  du  lieu,  il  a  ^te 
cinq  fois  abattu  k  rez-de*chauss6e.  II 
est  a  pr^ent  hdti  de  briques.  II  y  a , 
dans  le  convent ,  des  logements  pour 
tous  les  strangers  qui  le  viennent  vi- 
siter, et  pour  quatro-vingts  moines. 
lis  ne  sont  d'oniinaure  que  douze  a 
quinze.  Les  patriarches  d'Arm^iie  sont 
oblig^  de  resider  h  ce  couvent.  Le  pa- 
triarche d'Eczmiazin  a  quelque  vingt 
6v£ch^  sous  lui. 

«  Les  deux  autres  ^ises  qui  sont 
proches  d'Eczmiazin  s  appelient  Tune 
Sainte -Ripsym^,  et  Tautre  Saiote- 
Caiane,  du  nom  de  deux  vierges  ro- 
maines,  qui,  dit-on,  s'enfiiirent  en 
Arm^nie  durant  la  neuvitoe  perstai- 
tion,  et  qui  furent  martyriste  au 
mtoe  lieu  oiii  ces  ^lises  sont  bAUes. 
Sainte-Gaiane  est  k  la  droite  du  mooas- 
tere ,  k  sept  cents  pas  seulement.  Sainte- 
Ripsymee  est  a  la  gauche,  lideux  miUe 
pas.  Ces  deux  ^lises  sont  a  demi  mi- 
nxes ;  il  y  a  longtemps  qu'on  n*y  fait 
plus  le  service. » 

Les  revenus  du  couvent  d'Eczmia- 
zin Etaient  autrefois  beauooup  plus 
consid^ables.  Trente-trois  villages  en 
d^pendaient;  et,  aujourd'hui,  trois 
sont  restes  seulement  au  patriarche.  II 
permit  un  ducat  d*impdt  personnel  par 
individu ,  et  vingt  pour  cent  des  diffe- 
rents  produits.  Les  pelerinages  et  les 
aumones  sont  aussi  une  des  ressources 


ARMENIE. 


131 


(Ju  couvent,  qui  comptait  encore ,  en 
1833 ,  dans  les  cloltres ,  ^uatorze  ev^- 
ques,  quarante-cinq  on  cinquante  var- 
cabieds ,  sept  ou  buit  diacres. 

En  1822,  comoie  les  Kurdes  pous- 
saient  leurs  incursions  jusqu'a  la  porte 
du  convent  d'Eczmiazin,  pour  lever 
des  contributions,  et  que  deux  reli- 
gieux  avaient  succombe  a  leurs  roau- 
vais  traitements ,  le  patriarche,  avec 
tout  son  clerg^,  se  retira  dans  les  into- 
vinces  russes.  Le  comroandant  de  la 
province  accueiUit  tous  ces  illustres 
fugitifs  avec  les  plus  grandes  marques 
Ue  distinction ,  et  leur  donna  pour  do- 
micile le  couvent  de  Sanain  en  Som- 
kethie.  Dans  le  dernier  traite  de  paix 
que  la  Russie  a  oonclu  avec  la  Perse, 
eWe  a  obtenu  la  cession  du  couvent 
d'Eczmiazin ,  et  le  patriarche  a  pu  ren- 
trer  en  possession  de  son  siege.  Le 
CdtJioUcos  actuel  se  nomme  l^phrem , 
et  en  1833  il  entrait  dans  sa  ^uatre- 
vingt  et  uni^e  ann^.  11  avait  pay^ 
dix  mille  francs  au  schah  de  Perse  pour 
le  droit  de  son  installation. 

Get  impdt,  prdev^  par  les  rois  mu- 
sulmans  sur  les  patriarcbes  d'Eczmia- 
zin ou  de  Constantinople,  a  aouvent 
forc^  ceux-ci ,  comme  nous  Tavons  re- 
marqu6  plus  haut,  de  se  livrer  h  une 
coupable  simonie,  afin  de  s*acquitter 
des  dettes  qu'ils  contractaient  pour 
leur  nomination.  Aussi  les  voyait-on 
vend  re  au  poids  de  Tor  le  myron  ou 
rhuile  sacree,  et  exiger  d'un  ^v^ue, 
pour  son  ordination ,  des  sommes  con- 
siderables. 

LiTUBGiE.  —  La  liturgie  arm^- 
ntenne,  telle  qu'elle  est  encore  suivie 
dans  les  eglises,  est  fort  ancienne.  On 
la  fait  remonter  a  Mesrob,  ce  m^me 
saint  qui  inventa  les  lettres  de  Falpha- 
bet ,  vers  le  commencement  du  cinqui^* 
raesi^le,  et  ()ui  presida  a  la  traduction 
des  livres  samts.  Mesrob  ^tait  vers^ 
dans  la  connaissance  des  lettres  paien- 
nes  et  de  la  littcrature  classique  de  la 
Grece;  en  outre,  c'etait  un  homme 
d'oraison  et  fort  avanc^  dans  les  voies 
de  la  vie  spirituelle :  son  style  et  ses 
comnositions  porCent  le  cachet  de  cc 
double  caractere.  La  partie  de  la  li- 
turgie concernant  le  saint  sacriGce  de 


Va  messe  est  la  plus  parfaite.  Les  livres 
qui  servent  a  la  lituiqgie  et  au  cultesont 
le  Jamaklrky  ou  breviaire  r^lant  les 
exercioes  spirituels  de  cbaque  jour,  et 
contenant  les  prikres  que  ron  doit  r^ 
citer  aux  divers  moments  de  la  joum^ , 
lesquels  sont  le  milieu  de  la  nuit  ou 
i*heure  de  la  r^urrection  de  Jesus- 
Christ;  i'aurore,  ou  Theure  h  laquelle 
Jesus-Christ  apparut  aux  deux  Marie, 

f)res  du  s^ulcre;  le  lever  du  soleil ,  ou 
e  moment  de  son  apparition  k  ses  dis- 
ciples; neuf  heures,  ou  I'instant  du 
crucifiement;  midi,  ou  le  moment  de 
Tobscurcissement  de  la  tenre  couverte 
de  tenures;  trois  heures,  seconde 
heure  canonique  a  laguelle  le  Fils  de 
rhomme  rendit  resprit;  le  sour,  alors 
qu'il  est  descendu  de  la  croix  et  ense- 
veli;  le  couvre-feu,  ou  I'heure  a  la- 
((uelle  il  descendit  aux  limbes  pour  d^- 
livrer  les  flmes  des  justes;  et  enfin 
rheure  du  coucher.  Le  Charagan,  ou 
Collier  deperlesy  recueild'hjrmnes  etde 
proses  k  la  louanoe  de  Dieu  et  des 
principaux  saints  de  r£glise  d*Arm6- 
nie,  est  un  ouvrage  d'un  asc^tisme 
tendre  et  elev^.  On  pent  ajouter  le 
Scufhmosy  ou  livre  des  psaumes  de 
David ,  avec  les  lemons  choisies  des 
prophetes,  des  j^vangiles  et  des  ifept- 
tres;  le  Dja^hots  ou  Missel;  le  Khor- 
/lertadeTf  ^alement  pour  la  messe; 
et  le  MiichaoUj  liturgie  attribute  5 
un  savant  et  pieux  moine  du  neuvidme 
siecle  de  notre  ere,  et  qui  sert  aux 
differentes  c^r6monies  du  culte. 

L'ordre  des  ceremonies  et  des  prie- 
res  du  supreme  sacrifice  badarak  ne 
resseinble  aucunement  a  notre  rit 
romain.  La  messe  n'^tant  dite  qu'une 
fois  chaque  jour,  se  o^lebre  toujours 
avec  une  certaine  solennite.  L'ofiiciant, 
les  diacres  et  les  acolytes,  ont  des  v^ 
tements  sacerdotaux  d'une  forme  par- 
ticuliere  qui  u*est  pas  sans  maiest^. 
La  tiarc  oes  patriarcbes  et  leur  chasu- 
ble rappellent  la  mitre  pontificale  et  le 
pectoral  des  grands  pretres  h^reux. 

Lc  pain  mystique  est  prepare  par  un 
diacre  la  veiDe  du  sacrifice.  lis  ne  siii- 
vent  point  dans  sa  preparation  Le  rit 
des  autres  Orientaux ,  puisqu'il  lc  font 
snns  levain,  ainsi  que  les  maronitcs. 


133 


L'UNIVERS. 


L'iH>stie  est  ronde ;  elle  est  aussi  grande 
que  celle  des  Latins,  mais  plus  ^aisse. 
Outre  les  hosties  de  la  communion ,  ils 
f*n  b^nissent  simplement  qudques  au- 
tres  plus  grandes  et  plus  minces  pour 
ies  Hlistribuer  aux  fideles  ii  la  fin  de  la 
inesse.  Leur  distribution  remplaoechez 
eux  celle  du  paiu  b^ni. 

I^  corps  de  la  messe  est  rempli  de 
(>rieres  pieines  d'onction  et  de  subli- 
mite.  Apres  avoir  mis  le  vin  dans  le 
ralice ,  le  pr^tre  dit :  «  Seigneur,  notre 
DIeu ,  dont  la  puissance  est  inscrutable 
et  la  gloire  incomprehensible,  toi  dont 
la  mis^ricorde  est  immense  et  la  pi^t^ 
infinie,  jette  les  yeux  de  ton  inenar- 
rable  amour  sur  ce  peuple  et  sur  ce 
saint  temple ,  verse  sur  nous  et  sur  nos 
coassoci^  dans  la  priere  ta  misericorde 
et  la  piete.  w 

Pendant  qu*on  chante  le  c^lebre  TW- 
sagion  dont  nous  avons  parl6,  le  c^l^ 
brant  r^itecette  autre  oraison :  «  Dieu 
clement,  aui  habites  au  milieu  des  saints, 
les  ch<^ruDins  te  louent  et  te  glorifient 
avec  le  TYisagion;  toute  la  milice  ce- 
leste t*adore,  toi  qui  as  fait  passer 
toute  creature  du  non-^tre  k  I'^tre,  qui 
as  forme  Thomme  a  ton  image  et  ik  ta 
ressemblance,  qui  Tas  orne  de  toutes 
tes  grdoes  et  lui  as  appris  h  rechercher 
la  sagess^  et  TinteUigence;  toi  gui  n'as 
pas  m^prise  le  pecheup^et  qui  lui  as 
impose  seulement  la  penitence;  toi  qui 
nous  as  permis,  serviteurs  indignes  que 
nous  sommes,  de  nous  tenir  en  ce  mo- 
ment devantia  gloire  de  ton  saint  autel 
pour  t'offrir  cette  priere  de  glorifica- 
tion. Seigneur,  recois  de  la  bouche  des 
p<^cheurs  la  benediction  trois  fois 
sainte,  et  conserve-nous  par  reflfet  de 
tn  ciemence;  remets-nous  nos  peches 
volontaires  ou  involontaires;  purifie 
notre  Ame ,  notre  esprit  et  nos  corps ; 
accorde-nous  de  te  servir  dans  la  sain- 
tete  tous  les  jours  de  notre  vie,  par 
rintercession  de  la  sainte  Vierge  et  de 
tous  les  saints  qui  font  ete  agrdables 
uendant  ce  sieclc,  parce  que  tu  es 
HotrC'Scigiieur  saint,  ct  qu*a  toi  appar- 
ticnnent  la  gloire,  la  principaute  et 
riionneur,  dans  tous  les  siecles  des 
si<'cles. » 

\a's  premiers  missionnaircs  catholi- 


ques  qui  vinrent  en  Armenie,  totale- 
ment  etrangers  aux  moeurs  et  au  lap- 
gage  du  pays,  port^rent  contre  ses 
habitants  cette  accusation  grave  qu'ils 
etaient  encore  livres  aux  superstition^ 
de  Tidoldtrie.  Ils  alieguaient,  oomme 
preuve,  les  offrandes  a*animaux  quMIs 
raisaient  ^  certaines  solennit^,  et  anx- 
quelles  ils  donnaient  le  nom  de  bada- 
rak^  nom  qui  designe  egalement  le 
sacrifice  mystique  de  la  messe;  mais 
ils  ne  savaient  pas  que  ces  dons  volon- 
taires, faits  par  aumdne  ou  oomme 
accomplissement  d'un  vohi  ,  pour  Hrt 
repartis  entre    les   pauvres,    etaient 
une    institution    eminemment   chre- 
tienne,  puisqu'elle  astreignait  le  ncbe 
a  donner  aux  indigents,  k  certains 
jours  de  Fannee,  une  part  de  son  su- 
perflu.  II  faudrait  aussi  bien  regarder, 
comme  une  tradition  du  paganisme, 
I'offrande  du  pain  beni  qui  se  pratique 
encore  dans  les  eglises  catnoliques. 
Jean  VI  THistorien  raconte  qu'un  mar- 
tyr du  buitieme  si^e  s'ecriait  du  baut 
ae  la  croix  ou  Favaient  suspendu  les 
Musulmans  :  «  Seigneur,  en  ee  jour, 
fete  annueiie  de  samt  Georges,  Tavais 
coutume  de  vous  offrir   un  beiier: 
eh  bien,  aujourd'hui,  je  m'offremoi- 
meme,  pour  la  gloire  de  votre  nom,  a 
la  place  de  cette  victime. «  Est-ce  la  te 
langage  d*un  paien? 

Nerses  le  Gracieux ,  dans  son  traitf 
appeie  Enthanragan ,  donne  au  sujetde 
cette  offrande  les  details  suivants,  qui 
ne  sont  pas  sans  interlt :  «  La  victime 
pent  etre  un  boeuf  ou  une  brebis,  ou 
quelque  autre  animal  pur,  sans  en 
exdure  les  volatiles.  Les  pretres  appo^ 
tent  roffrande  k  la  porte  de  I'^lise, 

{>1acent  le  sel  devant  Tautel,  et  lisent 
e  passage  des  saintes  l^icritures  adapte 
k  la  circonstance ,  mentionnant  le  nom 
de  la  personne  qui  fSit  ce  don ,  etpriant 
Dieu  de'  lui  accorder  la  remission  de 
ses  -peches.  On  presente  alors  le  sel  a 
I'animal ,  puis  on  regorge.  Une  portion 
appartient  au  prdtre,  Tautre  est  distri- 
buee  aux  pauvres,  et  le  reste  est  re- 
parti  entre  les  amis  ou  les  parents. 
Tout  doit  etre  man^c  avant  le  knde- 
main  matin.  Ce  sacrifice  n'est  pas  con- 
sidere  comme  propitiatoire,  k  la  ma- 


ARM£lfI£. 


133 


nicrc  des  anciens  sacriGccs  du  rit 
judaiaue,  mais  seulement  comme  un 
acte  de  charity  m^ritoire  et  faTorabie 
aux  indigents.  Ses  m^rites  sont  aussi 
applicables  aux  morts,  surtout  lorsque 
le  m6nie  jour  la  messe  a  ^t^  o^l6br6e 
en  leur  m^moire.  Les  autres  cirooos- 
tances  ou  Ton  pratique  la  m^me  cdr^ 
monie  sont  les  principales  f(Stes  de 
I'ann^e  et  les  anniversaires  des  plus 
grands  saints.  A  Piques  surtout,  on 
off  re  dans  chaque  localite  une  ou  plu- 
sieurs  victimes,  au  nom  de  toute  la 
communaute  des  fideles  aui  contri- 
buent  tous  h  la  d^pense,  cnacun  sui- 
vant  ses  facult6s.  Ce  jour  est,  h  pro- 
prement  parler,  la  Ute  des  pauvres, 
puisque  ce  sont  eux  qui  ont  tous  les 
proOts  du  sacrifice.  iHers^,  en  s*ap- 
puyant  sur  Fautorite  du  patriarche 
Iscuic  le  Grandy  fait  remonter  I'insti- 
tution  de  cette  ci^r^monie  a  saint  Gre- 
goire  niluminateur,  qui,  apres  avoir 
converti  la  nation  armenienneau  chris- 
tianisme,  voulut  assurer  aux  pr^tres 
des  idoles  devenus  chr^iens  une  sub- 
sistance  honorable.  A  cet  effet,  il  leur 
accorda  le  droit  de  pr^lever  la  dime 
sur  les  Gdeles  de  leur  troupeau ,  et  leur 
permit  la  continuation  des  sacrifices 
sanglants,  mais  toutefois  en  changeant 
le  but  de  cette  pratique  et  en  la  trans- 
formant  en  une  oblation  meritoire 
pour  les  tr^passes,  preuve  irrefragable 
de  Tantique  foi  de  ritglise  arm6nienne 
a  un  lieu  d'expiation ,  qui  o'est  que  le 
purgatoire. 

La  ^rande  diffi6rence  existante  entre 
Koblation  du  sacrifice  de  la  messe, 
selon  le  rit  arm^nien,  et  celle  prescrite 
par  le  rit  romain ,  c*est  que  dans  le  ca-> 
lice  ils  mettent  seulement  du  vin  sans 
aucun  melange  d'eau.  Les  premiers 
chefs  de  Tfiglise  annenienne  avaient 
introduit  cet  usage  dans  la  liturgic, 
afin  de  d^jouer  les  supercheries  d'une 
ancienne  secte  tenant  aux  manicheens, 
ct  qui  employaient  le  vin  et  Teau 
comme  repr^ntant  les  deux  principes 
du  bien  et  du  ma  I.  Lorsque  dans  la 
suite  la  cause  qui  avait  necessite  ct 
chan^ement  cut  disparu,  les  chefs  de 
la  meine  Kglise  devaicnt  rentrer  dans 
la  pratique  commune  dc  la  clirrticnlc, 


surtout  lorsqu'oti  leur  en  faisait  la  do- 
mandeexpresse.  Dans  la  vingtdeuxieme 
session  ou  concile  de  Trente,  il  ^tait 
dit  express^ment :  «  Le  saint  concile 
TOUS  avertit  que  le  prtopte  des  pr£- 
tres  de  I'l^glise  est  ae  m€ler  Teau  au 
vin  dans  le  calice,  d'abord  parce  qu'on 
croit  que  Notre-Seigneur  Jesus-Cnrist 
en  fit  autant;  en  second  lieu,  parce 
qu*il  sortit  de  son  flanc  de  Teau  et  du 
sang,  ce  que  le  m^lan^e  sacramentel 
rappelle;  en  troisieme  heu,  parce  que 
samt  Jean  dit  dans  son  Apocalypse 
que  ce  melange  reprdsente  I'union  du 
peuple  fid^e  avec  son  chef,  qui  est  le 
Christ  (*). . 

Les  controversites  repr^nterent  en 
outre  aux  Arm^niens  que  toutes  les  li- 
turgies de  rOrient  se  conformaient  sur 
ce  point  a  celle  de  Tl^lise  d'Occident. 
On  leur  citait  les  deux  liturgies  adop- 
tees par  r^lise  d'Alexandrie  et  attri- 
butes. Tune  a  saint  Marc,  Tautrc  a 
saint  Cyrille,  celle  des  Copthes,  des 
£gyptiens  et  des  Arabes ;  puis  on  leur 
montrait  Tuniformite  imposante  des 
Eglises  d'Occident  sur  cet  article.  Le 
refus  obstine  des  patriarches  de  faire 
la  moiodre  concession  rendit  la  reu< 
nion  impossible. 

Calbndribr  litubgique.  —  Nous 
avons  eu  occasion  deja  de  parler  dc 
Fere  arm^nienne  fix^e  a  Ton  552  de 
Fere  chr^tienne,  dans  les  temps  ou  les 
premiers  sympt6mes  de  scission  reli- 
gieuse  sc  manifesterent.  L'£glisc  fixa 
aussi  son  annee  eoclesiastique,  laquelle 
est  totalement  dififerente  de  la  ntitrc; 
elle  commence  le  11  du  mois  d'aodt  et 
se  termine  le  7  de  juillet.  Le  premier 
mois  se  nomme  navasardi  et  com- 
mence le.U  d'aoQt;  le  second  mois, 
horri.  commence  le  10  septembrc ;  Ic 
troisieme,  scJimiy  le  10  octobre;  Ic 
quatrt^me,  thri.  le  9  novembre;  le 
cinquieme,  kaghot4y  le  9  d^cembre; 

(*)  Les  dissidents  rcprochonl  aiix  rnllin. 
liqiies  romains  dc  incUr«  de  IVmi  daiis  k 
ralicc ,  parce  que  J.  C. ,  disentails ,  en  ron* 
sacranl,  ne  se  servit  que  de  vin,  ct  quo  U 
roesse  ctant  le  renouvellement  dc  la  One , 
on  doit  praliquer  de  point  en  {loinf  re  rpn 
J.  C.  lui-mcme  a  pratique. 


lai 


i;uisivKus. 


le  sixiemc ,  arats.  le  8 Janvier ;  le  sef)- 
ti^me,  mehekiy  le  7  fiftvrier;  le  hul- 
tiemc,  arekiy  le  9  mars;  le  neuvi^me^ 
ahkiy  le  8  avril;  le  dixieme,  mareri, 
le  8  mai;  le  onzieme,  mar  gats  y  le  7 
iuin;  le  douzieme,  hirroUUy  le  7  juil- 
iet.  Comme  oe  roots,  ainsi  qae  les  au- 
tres,  n*a  que  trente  jours,  il  teste 
quelques  jours  superflus  oa  aveUk  pour 
aller  jusqu'au  11,  premier  jour  de 
Tann^e. 

Les  figtes  sont  distribuees  dans  un 
ordre  particulier  qui  ne  coincide  pas 
avcc  celui  de  I'^lise  latine;  il  y  en  a 
inline  plusieurs  aui  nous  sont  incbn- 
nues,  comme  celles  que  Ton  c^lebre 
en  rhonneur  de  saint  Gr^oire  I'lllu- 
minateur.  La  fiSte  de  Pdques  tombe  a 
Pepoque  fiz^  anciennement  par  les 
lilglises  d*Orient. 

Une  o^r^onie  particuli^re  a  r£glise 
d*Annenie  est  la  benediction  des  ri- 
vieres, aui  se  c6iebre  communement  le 
jour  de  r^pipbanie.  Voici  ce  que  rap- 
porte  a  ce  sujet  le  voyageur  Jean 
Struys  :  «  L'^v^que  commence  par 
chanter  la  messe  plus  matin  que  de 
ooutume,  puis  II  fait  un  sermon  sur  le 
texte  pris  de  r^vangile  du  jour,  h  la 
Hn  du^uel  il  annonce  la  benediction  de 
la  riviere  qu'on  appelle  Chatscke  Schu- 
ran{*).  Pendant  le  sermon  de  rev^- 
que,  tous  les  Armeniens  du  pays  se 
rendent  autour  du  lieu  oik  Ton  doit  ce- 
lebrer  la  fSte,  avec  la  croix  et  la  ban- 
nierc.  Ceux-ci  6tant  tous  rassembles, 
le  khan,  h  qui  ils  firent  un  present  de 
niille  ducats,  leur  envpya  des  soldats 
pour  emp^cher  le  peuple  He  les  insulter ; 
ensuite  il  s*y  rendit  en  personne  avec 
son  fils,  notre  ambassadeur,  et  un  Ar- 
inenien  envoye  de  la  part  du  rol  de 
Perse  vers  ie  czar.  Sitot  que  Ic  khan 
fut  entre  dans  une  belle  tente  qu'on 
avait  dress^e  expr^s,  il  envoya  dire  a 
i*ev^ue  qu'il  |)ouvait  bardiment  com- 
mencer  la  ceremonie. 

ft  Celui-ci  fit  un  signe  auquel  des 
Armeniens  tout  nus  sautereiit  sur  la 

(*)  Nous  croyons  que  ce  mot  devrail  sc 
UWMcriiY  plus  ciaclement  khatche  tchrouin, 

7ui  vetit  dire  croiz  tie  teau ,  o»  faite  sur 
eau,  iiigiie  distiiidif  dc  ctHte  ceremouif . 


glace  ct  la  ronipircnt  en  plusieurs  en- 
droits ,  pendant  que  rev^que  s'amusait 
a  lire  et  le  peuple  a  chanter  des  hym- 
nes,  des  psaumes  et  des  cantiques. 
Lorsque  la  glace  fut  rompue,  le  peuple 
se  tut  et  Ton  entendit  ie  son  des  clo- 
ches ,  des  cymbales  et  des  trompettes . 
durant  lequel  Fev^ue  avan^  vers  Ten- 
droit  ou  I'eau  paraissait,  et,  apres 
avoir  r^pandu  de  Fhuile  benite,  il  In 
benit  avec  une  croix  enrichie  de  pier- 
rerics ,  et ,  pour  confirmer  la  benedrr- 
tion,  il  la  plongea  par  trois  fois  d«'<r)s 
Teau ,  fit  la  m^me  chose  avec  la  crosse , 
et  dit  plusieurs  pheres  qui  ne  durerent 
pas  longtemps.  A  peine  les  eut-il  fiuies, 
que  le  peuple  accourut  en  foule,  les 
uns  pour  boire  de  cette  eau  et  les  au- 
tres  pour  s'en  laver  les  pieds,  les  mains 
et  Ie  visage.  Comme  11  y  en  a  partout 
d*une  devotion  singuliere,  plusieurs  se 
depouillerent  et  sauterent  tout  nds 
dans  Teau.  Le  zele  et  la  ferveur  les 
empecbaient  de  sentir  le  froid  qui  et;iit 
intense.  » 

Du  BAPriMK.  —  T>es  que  fenfant 
est  ne ,  le  parrain  design^  et  les  parents 
viennent  se  presenter  a  la  porte  de  IV- 
gltse.  lis  s'arretent  sur  le  seuil,  ou  le 
pr^tre  recite  differentes  priercs.  li 
tresse  une  cordelette  a  trois  fils,  et 
pendant  ce  temps  il  invoque  la  tre.s- 
sainte  Trinite  et  la  vertu  puissante  de 
la  croix.  Ija  femme  qui  tient  Tenfant 
entre  ensuite  dans  Teglise  avec  le  par- 
rain  et  les  autres  parents,  faisant  an- 
tant  de  genuflexions  que  Tenfant  conipte 
de  jours,  apres  quoi  on  le  depose  stir 
le  seuil.  Pendant  ce  temps,  le  [Kir- 
rain  se  confesse,  afin  d*accomplir  o* 
sacrement  en  etat  de  grto.  On  lui 
fait  ensuite  une  multitude  de  questions 
auxquelles  il  repond  au  nom  de  Ten- 
fan  t  qu'jl  represente. 

L'eau  benite  est  versee  dans  le  bap- 
tistere ,  et  le  pretre  recite  ectte  priere : 
«  1  oi ,  Seigneur,  qui  par  ta  puissance 
supreme  as  fait  la  mer,  les  continents 
et  toutes  les  cireaturcs  de  la  terre;  (oi 
qui  as  separe  et  resserre  les  eaux  sut>e- 
rieures  au  firmament  au  milieu  aes 
armees  brillantes  du  ciei,  cliantant  per- 
petuellement  tes  louan^es;  tot.  Sei- 
gneur Jesus-Christ,  qui  as  envoye  tes 


ARM£NIR. 


13.> 


saints  apotres  en  leur  ordonnant  de 
prdcher,  de  baptiser,  au  nom  du  Pto, 
du  FUs  et  du  Saint-Esprit,  tootes  les 
nations,  et  en  dtelarant  par  ta  parole 
T^ridique  gue  les  fimes  r^^Mes  dans 
i'eau  et  resprit  entreront  seulement 
dans  le  royaome  de  Dieu,  parole  qui 
efiraye  ton  serriteur  et  qui  fait  que, 
d^ireux  de  la  Tie  ^temelle,  il  vient 
volontairement  au  iiapttee  de  oette 
eau  spiritadle;  nous  le  prions  done 
d'envoyer  ton  Esprit  saint  dans  cette 
eau ,  de  la  benir  et  de  la  purifier  comme 
oelle  du  Jourdain ,  afin  qu'elle  serve  a 
la  remission  des  p^^ ,  a  la  reception 
de  TEsprit  saint,  a  Fadoption  du  Pere 
celeste  et  a  I'b^'tage  du  royaume 
etemel.  » 

Aprds  cette  pri^,  le  pr^tre  d^- 
pouille  I'enfant  de  ses  lanees,  et,  le 
pr^sentant aux assistants ,  ildit :  « Sei- 
gneur, d^pouille-le  de  la  v^tust^  du 
p6cb^,  renouvelle-le  par  une  vie  nou- 
veUe,  remplis-le  de  la  vertu  de  TEsprit 
saint;  »  et  il  ajoute  :  «  Que  demande 
oet  enfant?  »  Le  parrain  n^pond :  « II 
demande  la  foi ,  Tesp^rance ,  la  charity 
et  le  bapt^me;  il  demande  k  dtre  jus- 
tifi^  et  [Kirifi^  du  pdch^  originel  et  a 
tervir  Dieu.  • 

On  lui  impose  ensuite  le  nom  qu*il 
portera,  et  alors  on  le  plonge  dans  le 
oaptist^re  en  lui  tenant  la  t^te  toum^ 
vers  Foccident,  les  pieds  vers  Torient 
et  la  face  vers  le  ciet.  L'immersion  se 
r^pdte  par  trois  fois ,  afin  de  rappeler, 
dit  la  rubrique,  la  sepulture  de  J.  C. 
qui  dura  trois  jours. 

Ueau  seule  n'est  pas  la  mati^re  du 
sacrement  de  bapttoe ;  le  saint  chrome, 
myrcny  est  aussi  employ^.  II  faut  sa- 
voir  que  le  patriarche  d'Eczmiazin 
avait  seul  le  pouvoir  de  le  oonsacrer,  et 
c'^it  un  des  principaux  attnbuts  de 
sa  puissance,  comme  aussi  la  premiere 
source  de  ses  revenus ,  parce  qu'il  le 
distribuait  aux  autres  Eglises  a6pen- 
dantes  de  lui ,  moyennant  une  certaine 
somme  d'argent.  Dq>uis  la  separation 
des  patriarcats  de  Sis  et  d'Agntamar, 
chaque  chef  de  ces  ^lises  particulieres 
s*est  arro§6  la  m^me  puissance. 

On  fait  sur  la  t£te  et  sur  les  mem- 
bres  de  Tcnfant  plusieors  onctions,  ct 


on  le  revdt  d'une  robe  blanche  ^^e  lin ; 
on  Tapprodie  du  tabernacle  poor  lui 
faire  adorer  la  croix,  et  ensuite  le  pr€- 
tre ,  prenant  une  paroelle  de  I'hostie 
consacrte,  le  oonununie,  en  disant: 
« Que  le  corps  de  Notre-Seimeur  J^- 
sus-Christ  te  sauve  et  te  oonduise  h  la 
vie  etemelle.  »  A  la  fin  de  toute  cette 
c^r^monie,  on  reoonduit  en  grande 
pompe  Tenfant  k  la  maison. 

On  voit  dequeues  e^rtoonies  lesAr- 
m^iens  environnentoe  premier  sacre- 
ment qui  initio  proprement  le  chr^en 
h  la  grande  sodm  religieuse.  Le  sa- 
crement d'extr^meonction ,  qui  man- 
3ue  k  ri^lise  arm^enne,  est  remplace 
ans  cette  droonstance  par  le  saint 
chrome.  On  leur  a  beauooup  reproche 
de  ne  pas  admettre  ce  dernier  sacre- 
ment, et  k  cela  ils  r^ndent  oue  Tu- 
sage  frequent  du  saint  chrtoe  le  rem- 
place, et  de  plus,  ils  oignent  k  Farticle 
de  la  mort  les  membrea  des  prtoes  et 
des  religieux.  Toatefois ,  ils  n^attachent 
pas  k  cette  c^rtoonie  la  m4me  id^ 
que  les  autres  catholiques ,  puisqu'ils 
attendent  qoe  le  malade  ait  rendu  le 
dernier  aoupir. 

Si  un  malade  ne  pent,  k  cause  de 
quelque  indisposition,  recevoir  la  com- 
munion, rt  qu'il  y  ait  danser  de  mort, 
ils  lui  mettent  n&nmoins  Fhostie  oon- 
sacr^  dans  la  bouche,  lors  mdme  qu'il 
n'aurait  pu  confesser  ses  fautes. 

CiBEMONiBS  nmiBBSS. — Lorsque 
le  mort  a  ^  expose  un  certain  temps 
sur  son  litde  pSsurade,  le  pr^tre  vient 
avec  les  autres  ministres  faire  la  levee 
du  corps,  et  apr^  avoir  r^cit^  les 
psaumes  et  les  bymnes,  et  brAI6  Fen« 
cens,  il  rq[>rend'le  chemin  de  Fdglise. 
Durant  le  trajet,  tout  le  convoi  pousse 
des  g^missements  et  verse  des  pleurs; 
on  couvre  la  bi^re  de  vdtements  pr^- 
cieux ,  et  on  Fome  de  fleurs.  Puis  il 
s'^tablit,  par  les  prieres,  un  dialogue 
d^irant  entre  le  ddfunt  et  les  assis- 
tants ;  ceux-ci  lui  expriment  leurs  re- 
grets, leur  d^oCit  pour  cette  vie  si 
passag^e  et  si  incertaine ,  la  terreur 

2ue  leur  inspirent  les  juj^ements  de 
Meu.  De  son  c6t^,  le  denint  fait  ses 
derniers  adieux  a  Feglise  et  au  sanc- 
tuairc  qu'il  avait  tant  de  fois  visit^s , 


136 


LUNIVERS 


au  pr^rc  qui  lui  annon^ait  la  parole 
Bainte^  k  sea  parents,  a  ses  amis  et  k 
tons  les  assistants ,  pois ,  tout  en  mani- 
festant  sa  frayeur  pour  ies  redoutables 
jugements  du  Trds-Haut ,  il  montre  oue 
son  esp^rance  dans  rinflnie  miseri- 
corde  ne  peut  et  ne  doit  pas  dtfail- 
lir. 

Au  sortir  de  T^ise,  on  s'acbemine 
vers  le  cimetiere,  ordinairement  sttu6 
a  une  certaine  distance  dans  les  fau- 
bourgs de  la  Tille  ou  dans  la  campagne. 
Arrive  prds  de  la  fosse,  le  pr^e, 
apr^  de  nouvdles  pri^res,  repand, 
comroe  chez  nous,  quelques  poignees 
de  terre  b6nite  sur  le  cercueil  que  Ton 
descend  en  prononcant  ces  toucbantes 
paroles :  «  Que  la  ben^iction  divine  se 
r^pandie  sur  la  terre  de  ce  mort ,  et  que 
sa  poussito  gemae  et  refleurisse  au 
jour  supreme  de  T^ternit^ ! » 

Pendant  toute  I'octave  qui  suit  le 
iour  du  convoi,  le  pr^tre  va  r^li^- 
rement  visiter  les  parents  du  deiunt; 
il  prie  pour  lui  en  commun  avec  tons 
les  membres  de  la  famille ,  II  les  exborte 
k  la  patience  et  les  console.  Le  premier 
samedi  de  cette  semaine  de  deuil ,  les 
parents  et  les  amis  se  r^unissent  pour 
un  simple  et  modeste  banquet,  dont 
on  distribue  les  restes  aux  pauvres, 
Mifiantes  agapes  ^i  rappellent  celles 
des  premiers  chr6tiens. 

Lorsqu'un  pH^tre  menrt,  la  c^r6roo- 
nie  funebre  est  plus  solennelle :  r^v6- 

3ue  ou  quelque  autre  personnage  ^iev^ 
ans  la  himrrchie  vient  b^nir  le  lieu 
de  sa  sepulture  ou'il  fixe  en  traqant  une 
croix  sur  le  sable,  dont  Uss  extr^mites 
regardent  lesquatre  points  cardinauxdu 
del.  Les  autres  pretres  ses  colldgues 
lavent  soncadavre,  puis  ils  Foment  de 
bandelettes  et  d*un  long  manteau  blanc 
de  lin.  On  lui  met  k  la  main  un  petit 
rouleau  de  parcbemin,  renfermant  le 
premier  et  le  dernier  verset  des  saints 
Evangiles.  II  est  tourn^  vers  Forient, 
et  sa  face  regarde  le  ciel.  Pendant  Toe- 
tave ,  au  bout  de  quarante  joucs ,  et 
au  jour  de  ranniversaire ,  les  autres 
pretres  et  moines  viennen(IA>rier  sur 
sa  tombe.  • 

On  a  pr6tendu  que  le  peupic  arme- 
nien  ne  croyait  pas  h  1  existence  du 


pursatoire ,  et  on  a  range  cette  pre- 
tendue  erreur  parmi  toutes  les  autres 
au'on  lui  impute.  Gette  assertion  est 
evidemment  faosse :  les  longues  prie- 
res  r^serrees  pour  les  morts,  la  cele- 
bration de  la  messe,  les  aumdnes  faites 
en  expiation  de  leurs  p^^,  sont  au- 
tant  de  preuves  de  la  ferme  croyaDce 
des  fiddes  et  de  leur  foi  a  un  lieu  ou 
I'Ame,  non  r^serv^  a  de  plus  mods 
chUtiments,  doit  se  purifier  ae  aes 
souillures  et  mdriter  d  £tre  introduite 
au  sejour  celeste. 

Du  GLRAGB.  —  Le  derg^  der£|glise 
arm^nienne  se  subdivise  en  plusieurs 
ordres  hierarchiques ,  domines  par  un 
chef  spirituel  nomm6  patriarche.  Son 
election  repose  sur  le  suffrage  univer- 
sei.  En  effet,  lorsque  le  si6ge  est  va- 
cant ,  le  corps  du  clerg^  cboisit  trois 
repr^sentants,  charge  du  rdleque  rem- 
plissent  les  cardinaux  dans  T^ise 
romaine.  Ces  trois  pr^lats,  pris  ordi- 
nairement parmi  les  hommes  ks  plus 
distingu^  par  leur  science  et  leur  vertu, 
examinent  attentivement  quels  sont 
les  titres  des  personnages  propose, 
quelle  a  ^  leur  conduite  anttoeure , 
et  si  la  r^ularitede  leur  vie  r^iond  a 
leur  savoir.  Au  jour  de  Fdection « tout 
le  der§^<6  se  r^nit  dans  la  m^tropole, 
et  il  doit  y  avoir  au  moins  douse  ^r^- 
ques  prints.  A  la  face  de  Tassembl^ , 
on  fait  comparattre  le  prdat  elu ;  il  est 
interrog^  et  examine  de  nouveau.  Si 
ses  r^ponses  sont  satisfaisantes ,  le 
m^tropolitain  prononce  a  haute  wix 
ces  paroles  :  «  La  grdce  divine,  qui 
suj>pite  touiours  aux  besoins  de  1*6- 
glise  apostolique,  ^l^e  N.  au  patriar- 
cat,  pour  la  dirisction  de  la  maison 
de  Thorgom ,  pour  le  minist^re  de  la 
sainte  Eglise  et  pour  la  pr^lature, 
conformement  a  son  ttooienage  et  a 
celui  de  tout  le  peuple.  G  est  pour- 
quoi  Je  lui  impose  les  mains ,  et  vous 
tons  priez  afin  qu'il  soit  digne  d'admi- 
nistrer  purement  le  saint-siege  aposto- 
lique. »  En  prononcant  cette  formuk , 
il  tient  les  mains  etendues  sur  la  t^ 
du  prdat  choisi,  et  il  fait  une  tongue 
priere  a  TEsprit  saint,  afift  qu'il  lui 
aocordc  la  grdce  de  remplir  dignement 
le  si^ge  de  saint  Barthelemi .  de  saint 


¥-^m^ 


.«V.V"..... 


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ARM^NIE. 


137 


Tbadd^  et  de  saint  Gr^oire  riUu- 
minateur  (*). 
Lorsqa'une  Eglise  particuliere  man- 

3ue  d*^v^e,  son  derg^  envoie  une 
6|mtation  pr^  da  Datriarcbe  k  qui 
elle  pi^sente  la  liste  oes  candidats ,  et 
les  ttres  qu'ils  peuvent  avoir  k  VAeo 
tion.  J>ts  que  le  patriarche  a  fix6  son 
choix  sur  run  d*eux ,  celui-ci  vient  le 
trouver,  subit  un  rigoureux  examen, 
et,  8*il  est  jue^  capable  de  oette  dignity, 
on  proc^e  a  sa  nomination,  en  sui- 
▼ant  Tordre  des  ceremonies  indiqu^ 
dans  le  rituel. 

Les  ^v^ues  ordonnent  les  simples 
pr^tres  (**),  dont  Tordre  compreno  la 
corporation  des  varttibieds  ou  doc- 
teurs.  Us  sedivisentendeux  classes ,  les 
grands  et  les  petUs  vartabieds,  Les 
premiers  portent,  comme  marque  dis- 
tinctive de  leur  caract^re,  un  b&ton 
autour  duquel  sont  entrelac^s  deux 
serpents,  tandis  que  ceux  de  la  seconde 
dasse  ne  portent  a  leur  espece  de  ca- 
duc^e  qu'un  seul  serpent.  G^  bdtons 
sont  orainairement  uuts  de  bois  pr^- 
cieux,  enrichi  de  perles  et  travaille 
avec  beauooup  d'art. 

La  f>remim  classe  des  majeurs  se 
subdivise  en  dix  degr^,  et  la  second* 
de  minewrs  en  quatre,  oe  qui  donne 
en  tout  quatorze  rangs  par  lesquels 
chaque  docteur  passe  successivement. 
Pour  ^tre  adnus  au  simple  titre  de 
vartabied,  il  faut  dtre  dans  les  ordres 
et  rev^tu  du  caract^re  sacerdotal. 

L*eievation  aux  premiers  degr^  du 
doctorat  est  tres-solennelle;  lecandi- 
dat  est  conduit  processionnellement 
par  ses  coUegues  en  pr^ence  de  T^v^- 
que  qui  Tinterroge  sur  sa  foi  et  sur 
ses  doctrines.  La  formule  de  Tinstai- 
iation  diange  suivant  le  degr^  qui  iui 
est  confi^r^.  £n  donnant  le  b&ton  du 
dernier  d€^ ,  le  pr^lat  dit :  «  Re^ois 
ce  degr6  du  nombre  parfait  dix,  et 
apres  avoir  €t^  rempli  de  TEsprit  saint, 
exerce  dans  r£glise  ces  cinq  devoirs, 
d*apr^  le  pr^cepte  de  Tdrotre,  les- 

3uels  sont  de  psalmodier,  d'enseigner, 
e  r^v^ler  la  parole  de  Dieu ,  de  pnr- 


(*)  Voy.  figure  n<»  3o. 
(•*)  Voy.  figure  n"  aS 


ler  les  langues,  et  dinterpreter  les 
textes  pour  l^^ification  de  nos  fibres 
et  Taocroissement  de  r£glise  de  Dieu. 
Que  notre  Seigneur  J.  C,  assez  puis- 
sant pour  te  fortifier  et  confirroer  dans 
oe  degr^ ,  te  conserve,  te  soutienne 
par  sa  force,  et  fasse  fleurir  par  la 
recondite  de  ses  grdces ,  ton  Ame ,  tes 
sentiments,  ton  ooeur,  tes  pens6es, 
tes  paroles,  tes  ceuvres,  ton  entr^ 
et  ta sortie  (le  conunencement  et  la  fin 
de  tes  actes) ;  qu'il  te  prSte  assistance 
avec  sa  main  forte  et  son  bras  ^lev^ , 
en  r^pandant  sur  toi  la  clart6  de  TEs- 

{)rit  aux  sept  dons,  qu'il  a  vers^  sur 
a  tdte  de  ses  disciples,  sous  la  forme 
de  langues  de  feu ,  afin  qu'^alement 
consume  de  la  flamme  de  la  grdce  di- 
vine, tu  tressailles  dans  la  possession 
de  Dieu ,  de  joies  inepuisabies,  et  afin 
que  tu  t'abreuves  au  torrent  des  d^- 
lices  divines  par  I'effet  de  oette  bene- 
diction. Au  nom  du  P^re ,  du  Fils  etdu 
Saint-Esprit.  Ainsi  soit-il. » 

Les  convents  etaient  fort  nombreux 
autrefois  en  Armenie,  et  plusieurs  sub- 
sistentaujourd'hui,  quoique  avec  moins 
d'edat.  Les  moines  sont  encore  la  par- 
tie  la  plus  eclairee  du  clerge,  et  cela 
provient  du  temps  qu*ils  passent  au  con- 
vent k  se  preparer  aux  ordres.  11  en 
est  qui  y  restent  huit  ans  avant  de  re- 
cevoir  m^me  Tbabit.  Le  jour  qu*ils  le 
prennent ,  on  leur  fait  une  croix  h  la 
tete ,  en  coupant  une  touffe  de  cheveux 
sur  le  front  et  sur  I'occiput ;  puis  ils 
passent  quarante  jours  dans  la  solitude, 
dans  le  jeOne  et  dans  la  pri^re.  Pour 
mieux  sanctifier  ce  temps  preparatoire, 
ils  sont  astreints  h  ne  parler  h  per- 
sonne ,  ils  sont  prives  de  la  clarte  du 
soleil,  et  ils  ne  mangentqu'une  fois  par 
jour.  Apres  cettequarantaine,  ils  s'abs- 
tiennent  de  viandes  pendant  deux  ans. 
Lorsque  leurs  cheveux  sont  repousses, 
on  leur  fait  une  couronne  en  merooire 
de  la  couronne  d'epines  du  Sauveur. 

Le  clerge  armenien  n>st  oblige  k 
la  loi  du  oeiibat  qu'aux  conditions  sui- 
vantes  :  celui  qui  a  contracte  un  ma- 
riage  legitime  et  qui  veut  etre  promti 
aux  ordres,  n*est  point  ecarte  du  sane- 
tuaire ,  et  lors  m^mc  qu'il  est  revetu 
de  la  dignite  sacerdotalc ,  il  peut  en- 


138 


L'UMVKRS. 


core  user  des  droits  d'tipoux.  Le  ma- 
riage  contracte  apres  les  ordres  mi- 
neurs  est  ^galement  valide  et  l^itime; 
mais  des  qu'on  a  re^u  les  ordres  ma- 
jeurs ,  ie  o§libat  est  scrupuleusemeat 
ordonn^ ,  on  ne  peut  plus  se  marier, 
et  toute  union  nouveile  serait  consi- 
deree  comma  un  adultere.  Les  ordres 
inonastiques  sont  aussi  sev^rement 
astreints  k  la  loi  de  c^libat.  De  m^me 
un  pr^tre  marie  ne  peut  devenir  ^v^- 
que ,  sauf  le  cas  de  veuvage.Il  est  inu- 
tile de  dire  que  la  partie  proprement 
catholique  du  clerge,  et  reconnaissant 
la  suprematie  du  pape ,  n*a  pas  d'au- 
tres  reglements  que  ceux  du  derge 
romain. 

Le  mariage  des  prtoes  cathoiiques, 
r£ve  par  quelques  esprits  comme  une 
importante  rw>rme,  ne  serait  pas  un 

f>rogres ,  conune  ils  le  croient ,  puiscjue 
a  cause  latente  de  la  d^r^nisation 
et  des  vices  du  clerg6  arm^nien  r^ide 
dans  ce  pretendu  privilege.  En  effet, 
les  charges  que  leur  imposent  F^ta- 
blissement  et  la  conservation  de  la  fa- 
mille,  font  que  la  simonie  entrepresque 
toujours  dans  rezercice  de  leur  minis- 
tere.  Charge  guelquefois  de  la  sub- 
sistance  d*une  tamiUe  nombreuse,  ils 
n'administrent  lessacrements  qu*apres 
etre  oonvenus  de  la  somme  qui  sera 
donnee  pour  leur  houoraire.  Ils  font 
^alement  leurs  conditions,  quand  ils 
s^gitd*enterrement8,  surtout  pour  les 
gens  du  peuple.  Us  ne  composent  pas 
avec  les  riches  et  les  grands,  parce 
qu'ils  sont  sArs  d*un  salaire  consid^- 
rablclls  sont  dfectivement  bien  paves, 
et  les  enterrements  content  fort  cner, 
|)arce  au*ils  se  font  avec  un  certain 
appareii,  ce  qui  flatte  la  vanity  des  par- 
ticuliers. 

«  Les  ev^ues ,  les  vartabieds^  dit 
un  missionnaire  qui  r6sida  longtemps 
a  Julfa,  sont  tous  religieux.  lis  de- 
meurent  dans  leurs  monasteres  et  sont 
tous  habill^  de  la  m^me  fa^on.  lis 
n'ont  pour  unique  distinction  que  le 
bliton  pastoral  qu'ils  tiennent  en  main 
lorsqu'ils  pr^ent.  Le  suj>erieur  du 
inonastere  est  toujours  evique ,  et 
quand  il  sort,  un  novice  porte  de- 
v.mt  lui  le  bAton  pastoral,  ("xs  mo- 


nasteres ont  de  grands  jardios  qui  pro- 
duisent  beaucoup,  et  ils  recoivent  des 
aum6nes  considerables.  Le'patriarche 
a  seul  le  droit  deconsacrer  les  ev^ques, 
et  il  les  ooQsacre  pour  de  Targent. 

n  Pour  son  election ,  il  faut  le  con- 
sentement  des  Armeniens  de  Julfa  et 
de  ceux  de  Constantinople,  parce  que 
sa  juridiction  s'^tend  sur  la  Perse  et 
sur  la  Turquie.  Ce  chef  des  Armeniens 
demeure  ordinairement  dans  le  mo- 
nast^re.  II  n'en  sort  que  pour  aller  dis- 
tribuer  le  saint  chreme  ^  diff^rentes 
eglises ,  et  ce  n'est  qu*a  prixd*argent.» 

La  simonie  est  la  plaie  du  clerg^  ar- 
m^nien,  parmi  les  dissidents.  Tout 
s*achete;  les  dignity  eod^siastiques 
appartiennent  au  plus  offrant,  surtout 
la  dignite  patriarcale.  Les  Turcs  spe- 
culent  sur  Tambition  de  ces  hommes, 
qui  ach^tent  a  un  taux  si  elev6  cet 
cinploi  suprtoie ,  qu'ils  sont  contraints 
de  se  livrer  le  reste  de  leur  vie  aux 
exactions  les  plus  revoltantes  pour  s*ac- 
quitter  des  dettes  qu*ils  ont  oontrac- 
tees  (*). 

CONSID^ATIONS  SCR  L'ANCIKNNB  CONSTI- 
TUTION SOCIALB  ET  POUTIQUK  DE  L'AB- 
MfiNlR. 

Notre  travail  serait  n^cessairement 
incomplet,  si  nos  considerations  s'ar- 
r^taient  a  T^tat  actuel  de  la  society 
arm^nienne ,  dont  le  caract^re  le  plus 
frappant  est  d'ofTrir  un  element  d*ordre 
et  de  permanence  au  milieu  de  son 
desordre  et  de  son  instability ,  et  de 
pouvoir  subsister  r^gulierement,  en 
recelant  dans  son  sein  plusieurs  causes 
sufiisantes  de  dissolution  pour  d'au- 
tres  societ6s.  En  outre ,  cet  ^tit  anor- 
mai,  bien  qu*il  soit  ext^rieurement 
calme ,  et  trouble  moins  fr^uemment 
par  de  violentes  secousses ,  qu'aux 
temps  ou  la  nation  ^tait  constitu^  en 
royaume,  est  neanmoins,  dans  son 
essence ,  un  ^tat  violent  et  transitoire. 

(*)  Deroidrement  le  paU-iarche  de»  sclii>> 
maliqucft  a  acheie  du  viiir  pour  deux  mille 
bourws  le  droit  d'emp^her  un  membre  dc 
son  Kglisc  de  so  faire  calholique.  Chaque 
l»oursc  vaiit  crnt  %ingt-rinq  francs  environ. 


ARiMKlNlK. 


13» 


Taiitqu'uii  peuplcconMrvcscs iiHriirs^ 
son  langage  et  son  caractere,  il  tend 
invinciblement  a  reunir  sfs  menibres 
disperses  et  h  reconqu^rir  son  exis- 
tence personnelle  et  individuelte  parmi 
les  autres  peuples  de  I'humanit^.  Nous 
ne  voulons  pas  dire ,  pour  cela ,  que 
ravenirverslequel  il  aspire  inipatiem- 
ment*,  ne  sera  que  la  copie  fideie  de 
son  pass6;  le  mouvement  progressif 
qui  cmporte  les  societes  ne  leur  per- 
met  ni  de  fa  ire  haite  dans  le  temps , 
ni  de  revenir  a  reculons  sur  des  voies 
deja  fray^es.  Elles  croissent  et  se  de- 
veloppeiit  corame  Thomme;  et,  si,  h 
son  exemple ,  elles  ne  peuvent  retour- 
ner  aux  premiers  dges  du  berceau  et 
de  Fadolescence ,  elles  ont  de  plus  que 
lui  rheureux  privilege  de  ne  pas  des- 
rendre  dans  la  tonme,  car  ce  qu'on 
appelle  iraproorement  'eur  mort,  n'est 
qu  une  transformation  providentielle. 

La  soci^t^  arm^nienne ,  errante  et 
eparse  aujourd*hui  dans  les  diverses 
eontrees  de  TOrient,  a  subsists  a  Fetat 
de  nation  plus  ou  moins  independante , 
suivant  les  temps  et  les  circonstances, 
jusqu'a  la  fin  du  quatorzieme  siecle. 
Comme  toutes  les  autres  soci^t^  de 
TAsie,  die  a  en  sa  constitution  propre, 
qui,  tout  en  reroptehant  de  se  con- 
rondre  avec  les  peuples  environnants , 
determinait  specialement  la  nature  et 
le  mode  de  son  d^veloppement.  Dans 
Tetude  particuliere  d'un  peuple ,  il  nous 
semble  d*une  haute  importance  de  re- 
rhercher  cet  ^l^ment  d  ordre  et  de  vie 
qui  fait  quece  peuple  subsiste  par  soi , 
element  que  nous  pourrions  appeler 
r^me  de  son  organisme.  Nous  ajoute- 
rons  m^me  que  le  premier  devoir  de 
rhistorien  est  de  p^n^trer  par  Tanalyse 
res  causes  internes  qui  expliquent  les 
mouvements  et  les  actes  ou  corps 
social. 

Pour  ne  pas  nous  ^arer  dans  les 
recherclies  d'une  antiquity  confuse  et 
t^nebrduse ,  nous  ne  depasserons  point 
les  Irmites  de  I'epoque  cbr^tienne  qui 
iicheva  de  determiner  d'une  inaniere 
definitive  la  nature  de  la  constitution 
sociale  de  TAnn^nic.  I)*ailleurs  il  sera 
assez  curieux  de  montrcr  qu*un  peuple, 
prcsse  ct  gcn<^  par  les  deux  puissances 


du  Bas-Enipire  et  de  la  Perse,  qui 
cherchaient  simultan^ment  ill  labsor- 
ber  dans  leur  individualite ,  ait  long- 
temps  continue  de  vivre  et  de  se  d^- 
velopper  en  vertu  de  certaines  lois  qui 
faisaient  pr6cisement  la  base  des  so- 
cietes franques  et  germaines,  que  nous 
voyons  s'etablir  h  la  m^me  epoque 
dans  le  nord  de  T Europe. 

Toutefois  une  difference  important c 
distingue  les  Arm^niens ,  antiques  pos- 
sesseurs  du  sol ,  et  ces  tribus  de  la  Ger- 
manie  aui  viennent  avec  la  violence  ct 
r6p^  de  la  conqu6te  d^pouiller  les 
premiers  colons.  Les  annates  de  la  na- 
tion representent  a  la  v^rite  le  fonda- 
teur  de  la  monarchic  arm6nienne 
Emigrant  de  TAssyrie  pour  aller  se 
fixer  au  pied  da  mont  Masis;  mais 
I Vloignement  des  iges,  que  la  tradition 
fait  remonter  presquejusqu*au  deluge , 
ne  nous  permet  pas  de  savoir  si  cette 
oocopation  fut  sanglante  et  injuste; 
et ,  d'un  autre  c6i6  ,"ron  ne  peut  nier 
qu'a  Torigine  du  christianisme  que 
nous  prenons  ici  pour  point  de  depart . 
la  prescription  pr^tendue  de  plus  dc 
vingt  si^cles  n'ait  legitime  et  oonsacre 
ce  qui  pouvait  toe  primitivement  une 
usurpation. 

Des  leprincipe,  les  colons  ^taient 
devenus  propri^taires  uniques  du  soi 
qu'ils  cultivaient;  et  cette  propriety 
se  transmettait  integralement  ae  ge- 
neration en  generation ,  h  la  faveur  du 
regime  patriarcai  qui  subsista  plus 
longtemps  chez  ce  peuple  que  che/. 
tout  autre.  Ld,  le  fils  atne  beritait  seul 
des  droits  du  pere;  et  ce  privilege ,  que 
toutes  les  legislations  modernes  ten- 
dent  a  abolir,  ctait  un  nouveau  moven 
d'empecher  la  division  de  la  propriety , 
et,  par  suite,  son  alienation.  Chaque 
chef  de  famille,  en  ooncentrant  dans 
sa  personne  tout  droit  de  propriete , 
devenait  naturellement  mattre  et  sou- 
verain,  suivant  cette  remarque  bien 
vraie  de  Montesquieu ,  que  «  celui  qui 
a  les  biens  a  toujours  aussi  la  puis- 
sance, o  Les  autres  membres  de  la  fa- 
mille restaient  simples  possesseurs  ou 
usufruitiers  *,  ce  qui  les  pla<;.ait ,  a  re- 
gard du  chef,  dans  une  situation  ana- 
logue a  cello  des  Leudes  chcz  les  Gcr- 


140 


LUNIVERS. 


mains.  Les  terres  qu'ils  pouvaient 
reoevoir  etaient  comme  allodialea ,  sans 
qu'il  existAt  |>armi  eux  des  serfo  sou- 
mis  k  la  servitude  de  la  gl^,  pr6ci- 
s^ment  h  cause  de  Fantiquit^  de  l*oc- 
cupation  qui  ue  s'^tait  pomt  effectu^ 
1^ ,  comme  ailleurs ,  au  oetrimeDt  d'une 
race  primitiye,  nombreuse,  et  d^j^ 
propnetaire. 

Ges  premiers  che£i  de  famiUe  for- 
merent  les  dif!i6rentes  souches  des  fo- 
milies  puissantes  des  grands  oonnus 
sous  le  oom  de  nakhararkf  vdrita- 
bles  patriciens,  et  les  colonnes  de  oette 
aristocratic  dont  il  reste  encore  d'im- 
posantes  et  de  yivaces  ruines.  lis  pos- 
s^aient  en  quelque  sorte  h  eux  seuls 
tout  le  pays;  et  le  chef  de  r£tat  ^tait 
ntossairement  et  de  droit  celui  qui 
avait  les  plus  vastes  propri^t^.  C^tait 
ra6me  k  la  propri^t^  qu^il  devait  direc- 
tement  sa  puissance,  puisque  nous 
voyons  plusieurs  maisons  renversto , 
et  Met  le  sceptre  h  des  dynasties  nou- 
velles  qui,  aussi  illustres  d6j&  pour 
Tanciennet^  de  la  noblesse,  avaient 
obtenu  la  preponderance,  comme  con- 
sequence de  Taccroissement  de  leur 
fortune  et  de  leurs  biens.  Voici  com- 
ment: chaque  nakharar,  qui  portait 
encore  le  titre  d*itchkany  prince,  et 
de  der,  seigneur,  ou  danouderj  sei- 
cneur  de  maison ,  etait  oblige  de  veil- 
ler  h  la  defense  et  a  la  conservation 
de  ses  terres,  surtout  aux  epoques  on 
les  ennemis  du  dehors  et  toutes  les 
hordes  conquerantes  accourues  soit  de 
r  Arable,  soit  du  nord  de  TAsieorien- 
tale,  mena^aient  oontinuellement  de 
devaster  et  d'envahir  le  pays.  Gette 
surveillance  Pobligeait  d*entretenir  k 
ses  frais  des  gens  d'armes  et  des  ar- 
chers choisis  parmi  ses  vassaux,  ainsi 
oue  le  pratiquaient ,  durant  le  moyen 
age,  les  dues  et  les  comtes  des  pro- 
vinces. 

II  n'y  avait  pas  d'armee  soldee  par 
le  roi  seul  ou  par  r£tat;  seulement  il 
dcvait  entretenir  un  corps  de  troupes 
plus  considerables  aue  celles  des  autres 
nakharark ,  pris  inaividuellement ,  afin 
de  pouvoir  les  mettrc  c^  la  raison ,  en 
cas  de  revolte ,  et  pour  les  empecher 
d'aspircr  h  la  souveraine  puissance, 


en  les  intimidant.  Lorsque  les  enne- 
mis ou  etrangers,  comme  les  Perses 
et  les  Grecs,  dedaraient  la  guerre  k  la 
nation,  le  roi  faisait  un  appd  aux 
nakharark,  il  convoquait  le  ban  et 
I'arriere-ban,  et  chaque  seigneur  ve- 
nait  au  temps  et  au  lieu  indiqu^,  avee 
le  nomhre  de  fantassins  ou  de  cava- 
liers qu^il  devait  foumir  proport*on- 
nellement  k  I'etendue  de  ses  domaines , 
mais  plutot  benevolement  que  oomme 
dette  obligee. 

Nous  irexaminerons  pohit  ici  les 
avantages  ou  les  inoonvenients  de  oette 
constitution  politique;  Thistoire  des 
Armeniens  et  celle  des  autres  peoples 
regis  par  un  gouvernement  analogue, 
montrent  assez  visiblement  que  les 
£tats  administres  par  une  aristocratic 
puissante,  dont  chaque  tete  repre- 
sente  un  souverain,  sent  livres  fre- 
quemment  k  Tanarchie  et  a  des  dechi- 
rements  interieurs,  resultat  en  quelque 
sorte  necessaire  des  rivalites  jalouses 
et  des  interets  opposes  qui  s*agitent 
confusement  au  sein  de  la  societe. 
Nous  nous  proposons  seulement  de 
mettre  ici  ce  fait  en  lumiere ,  que  la 
propriete  etait  en  Armenie  Tunique 
tbndement  de  la  puissance ,  et  qu*elle 
avait  un  caractere  sacre  d'inviolabilite 
que  nous  cherchons  inutilement  chez 
les  peuples  voisins. 

Ainsi ,  en  Perse ,  outre  que  les  terres 
des  particuliers  pouvaient  etre  assez 
faciiement  confisquees,  elles  n*appar- 
tenaient  a  leurs  proprietaires  que  pour 
quatre-vingt-dix-neuf  ans;  durant  ce 
temps ,  lis  les  vendaient  et  en  dispo- 
spient  k  leur  gre,  a  moins  toutefois 
qu'ils  ne  commissent  quelque  crime 
qui  emportflt  la  privation  de  leurs 
biens.  Quand  les  quatre-vingt-dix-neuf 
ans  etaient  echus ,  ils  pouvaient  pren- 
dre un  nouveau  bail  pour  un  pareil 
terme,  mais  en  payant  le  revenu  d'un 
an.  II  n*y  avait  quune  esp^ce  de  pro- 
priete r&IIement  inviolable ;  c'etait  le 
oien  ecciesiastique.  Le  roi  iii  les  do- 
nateurs  n'avaient  aucun  droit  reserve 
dessus,  et  il  n*etait  pas  sujet  a  confis- 
cation, Les  sujets,  pour  assurer  a  leurs 
heritiers  la  possession  dc  leurs  biens , 
devaient  soiivent  rccoiirir  au  moyen 


arm!!;nie. 


141 


qui  se  (iratique  actuellement  en  Tur- 
quie.  lid ,  les  biens  en  fonds  de  terre 
ou  maisons,  annei^  k  Tfi^Hse,  soit  en 
reversion,  soit  en  possession  actueile, 
^tant  regard^s  par  le  prince  et  par  la 
nation  oomme  sacr^  et  inviolables ,  il 
arrive  joumeUement  qu'un  piopri^- 
taire ,  quel  que  soit  le  mode  de  son  ac- 
quisition, donne  la  reversion  de  ses 
biens  a  queique  fondation  religieuse, 
aGn  de  les  transmettre  sans  trouble  et 
sans  contestation  k  son  h6ritier.  II  en 
est  quitte  pour  paver  annuellement  un 
cens  de  peu  de  vaieur,  Jusqu*^  oe  que, 
par  Textmction  des  boirs  mdles,  Fob- 
\et  substitu^  soit  d^volu  a  la  fondation 
a  laqueile  il  est  reversible.  La  propriety 
mise  ainsi  sous  T^ide  de  la  religion , 
devientjinviolable ,  St  le  souverain  n'ose- 
rait  d6roger  k  oette  loi. 

En  Arm^nie,  rinviolabilit^  6tait  g^ 
n^rale  et  rigoureusement  observe.  Les 
biens  ecdesiastiques  jouissaient  k  plus 
forte  raison  du  m^me  privilege ,  aans 
un  nays  oik  toute  la  soci^t^  ^tait  pro- 
fondment  p^n^tr^  de  Tesprit  et  de  la 
morale  du  christianisme ,  bien  que  I'o- 
riffine  de  ces  biens  fOt  diffi^rente  de 
ceUe  des  propriety  appartenant  aux 
seigneurs.  En  effet,  ils  consistaient  en 
donations  et  legs  pieux  faits  par  les  sei- 
gneurs ou  les  rois,  le  cler^^  n'ayant 
point  eu  primitivement  de  biens  en  son 
pouvoir,  oomme  on  le  voit  par  ce  pas- 
sage de  la  vie  de  saint  Gr^oire  Tlllumi- 
nateur,  oili  il  est  dit :  «  qu  apr^  la  con- 
au£te  du  pays  de  Daron,  plusieurs  des 
niux  pr^m%s,  pr^edenunent  attach^ 
au  service  des  idoles,  furent  sacr^ 
pontifes  du  vrai  Dieu.  Alors,  comme 
les  paiens  ne  leur  foumissaient  plus  les 
petites  retributions  servant  a  leur  sub- 
sistance,  et  que  les  Chretiens  etaient 
encore  trop  pauvres  ou  trop  peu  nom- 
breux  pour  subvenir  k  leurs  besoins, 
ils  vinrent  trouver  Gr^goire  et  lui  ex- 
poser  leur  situation.  «  Mes  enfants, 
leur  r^pondit  le  saint,  continuez  de 
servir  avec  amour  le  Dieu  vivant  et 
veritable,  et  placez  en  lui  toute  votre 
confiance;  ne  pensez  qu'au  royaumc 
celeste,  1^  oii  le  Christ  est  alle  a  la 
droite  du  P^rc,  et  demandez  au  Sei- 
gneur qu'il  vous  y  prepare  une  place , 


pis  tout  le  reste  vous  sera  donn^  16 
oas  par  surcrott.  Au  lieu  des  victimes 
impures  qui  vous  faisaient  oommuni- 
quer  avec  les  esprits  de  ten^bres ,  vous 
recevrez  les  pures  oflrandes  du  saint 
sacriGoe,  et  elles  vous  feront  partici- 
per  aux  benedictions  que  Dieu  aocorde 
a  ses  anges.  En  outre,  les  fiddles  vous 
donneront  les  premices  des  troupeaux 
et  des  fruits  de  la  terre,  vous  prel^ve- 
rez  la  dtme  sur  les  vignes,  vous  jpren- 
drez  aussi  votre  part  des  offrandes  de 
boeufs  et  d'agneaux  faites  aux  pauvres ; 
surtout  vivez  dans  Tamour  de  la  pau- 
vrete  et  de  la  privation :  c'est  ainsi  que 
vous  trouverez  votre  sort  doux  et  mu- 
reux.  » 

Le  clerge  re$ta  dans  la  suite  fiddle 
k  Tenseignement  et  aux  conseils  de 
son  premier  patriarche.  11  etait  gd- 
neralement  pauvre,  et  son  influence 
etait  toute  spirituelle.  Le  pouvoir  re- 
ligieux,  repr&entant  reidment  intellec- 
tuel  de  la  society,  exer^t  une  juridic- 
tion  salutaire  sur  le  pouvoir  des  princes, 
qui  U,  aussi  souvent  qu'en  Europe, 
degenerait  en  force  brute  et  arbitraire. 
Les  patriarches  avaient  continuelle- 
ment  a  lutter  centre  la  nature  rude  et 
indomptee  de  ces  princes  travailies  par 
des  passions  violentes,  et  sollicites  au 
mal  pfflr  Texemple  des  souverains  qui 
les  avoisinaient.  Plusieurs  d'entre  eux , 
comme  saint  Housig*  trouvdrent  la 
mort  pour  recompense  de  leur  zeie ,  et 
neanmoins  leors  successeurs,  aucune- 
ment  efifrayes  des  dangers  de  leur  mis- 
sion apostolique ,  intervenaient  encore , 
comme  mediateurs ,  soit  dans  les  diffe- 
rends  qui  s*eievaient  entre  les  sei- 
gneurs ,  soit  k  la  cour  des  rois  de  Cons- 
tantinople, pour  obtenir  leur  protection 
ou  pour  d&armer  leur  courroux.  Le 
roi  reconnaissait  touiours,  du  moin.v 
tadtement,  cette  espece  de  suprema- 
tie,  soit  en  ne  prenant  la  couronni 
qu*apres  avoir  ie(u  Tonction  sainte, 
soit  en  consultant  le  patriarche  dans 
toutes  les  affaires  importantes.  Une 
ancienne  loi  armenienne,  conservee 
dans  le  code  georgien  du  roi  Wakh- 
tang ,  etait  ainsi  con<}ue  :  « Que  per- 
sonne  ne  prenne  pour  siege  un  trdne 
ou  un  souzan  sans  autorisation  du  sou 


f  12 


L'UNIVERS. 


verain :  encore  n'y  a-t-il  que  \e  patrrar- 
che  qui  puisse  si^er  sur  un  souzan; 
que  fe  sou^erain  ne  8*asseye  pas  dans 
la  maison  du  patriarche  h  la  premiere 
invitation ;  que  le  prince  des  Chretiens 
ne  le  soit  pas  seulement  par  son  luxe, 
Gomme  cetui  des  infid^les.  » 

Les  sou  verains  comprenaient  si  bien 
la  n^oessit^  d'avoir  1  approbation  du 
{)OUVoir  spirituel  pour  regner,  qu'a  la 
fttort  d*un  patriarche  ils  mettaient  en 
jeu  toutes  les  intrigues  et  tous  les 
moyens  pour  faire  nonuner  un  succes- 
seur  favorable  a  leurs  inter^ts.  Dans 
cette  circonstance,  on  edt  dit  qu'ils 
voulaient  contre-balancer  par  leur  in- 
lluence  celle  quMIs  subissaient  forc^- 
ment  pendant  la  vie  du  patriarche,  et 
en  tirer  guelaues  repr^^illes;  car  un 
autre  article  du  code  armenien  decla- 
rait:  «^u'un  homme  ne  peutdevenir 
souveram  sans  rautorisation  ou  Itaveu 
ilu  patriarche. » 

La  dignity  royale^  b^reditaire  en 
principe,  ne  devait  pas  n^nmoins  se 
transmettre  rigoureusement  de  fils 
atn6  en  fils  atn6.  La  loi  modiliait  sage- 
ment,  comma  chez  nous  durant  la 
premiere  race,  ce  que  Id  constitution 
pouvait  offrir  de  dan^ereux,  en  ne  de- 
terminant pas  le  vrai  caractere  de  la 
l^gitimite.  £lle  ajoutait :  «  Le  roi  doit 
tenir  la  place  de  Dieu  sur  la  terre,  et 
si  parmi  les  enfants  qu'il  laisse  en 
mourant  il  y  en  avait  un  plus  digne, 
plus  habile  et  plus  sage,  ce  sera  celui- 
la  que  Ton  plaoera  sur  le  tr6ne  de  son 
pere.  —  Le  prince,  ^tait-il  dit  ailleurs , 
est  etabli  par  Dieu  pour  conserver  et 
proteger  le  pays,  «t  non  pas  pour  Top- 
primer.  C'est  a  cette  condition  quil 
regne.  » 

Aussi  vit-on  k  diverses  reprises  les 

§  rands  et  les  simples  sujets ,  indignes 
e  la  tyrannic  de  leur  souverain,  venir 
s'adresser  au  patriarche,  qui  usait  de 
son  autorite  pour  le  ramener,  par  ses 
avertissements,  a  des  idees  d'ordre  et 
de  justice.  S'il  s'obstinait  a  r^er  des- 
potii^uement,  le  patriarche,  comme  le 
pontife  de  Rome,  lan^ait  contre  lui 
une  excommunication,  et  deliait  les 
sujets  du  devoir  d'ob^issance. 
Outre  son  domaine  priv6,  le  roi 


troiivait  une  autre  source  de  richesses 
dans  la  perception  des  imp6ts.  La  terre 
ensemeno^  payait  le  sixieme  h  titre  de 
r^colte;  les  autres  terres  et  la  vigne 
n'etaient  pas  soumises  a  un  im^. 
Tout  sujet  non  ehr^tien  ^it  astreint 
a  fournir  le  droit  de  capitation. 

Si ,  dans  la  guerre,  le  roi  s'emparait 
d'un  pays ,  et  s^il  le  livrait  k  la  merci 
du  soldat,  tout  Tor  lui  appartenait. 
Quant  au  reste  du  butin ,  y  oompris  les 
captifis,  le  souverain  en  avait  la  moitie 
et  rama^  I'autre,  mais  on  devait  sor 
les  deux  parts  pr^lever  le  dixitee  poor 
rfiglisc. 

Le  code  de  Wakhtang  a  consent 
cet  autre  article,  que  la  Illation 
du  sang  ,  ou  rappiieation  oe  la  loi 
qui  conceme  la  peme  capitate,  est  re- 
servee  exdusivement  au  prince.  Voas 
ne  pensons  pas  qn'il  faille, entendre  ici 
par  prince  le  chef  de  I'Etat,  qui,  a 
certaines  epoques,  fut  decor^  du  titre 
de  prince  aes  princes.  U  d^igne  sioi- 
plement  le  nakharar,  dont  le  pouroir 
etait  triple :  ii  s'^endait  d*abord  k  la 
terre  ou  a  la  propri6t^  fonciere,  ainsi 
que  nous  Tavons  dit;  mais  il  atteigpait 
aussi  en  second  lieu  les  personoes,  et 
rhistoire  nous  prouve  a  chaque  page 

Sue  le  seigneur  avait  le  droit  de  vie  et 
e  mort  sur  ses  vassaux,  sans  que  le 
roi  pOt  l^alement  sV  opposer;  et,  s'il 
intervenait  quelquefois,  c*6tait  plotot 
au  nom  de  I  humanity  et  pour  arr^r 
une  iniustioe  trop  r^vol^te,  qu*efi 
vertu  de  sa  quality  de  souverain.  Le 
seigneur  avait  encore  un  droit,  celui 
de  ne  f]5urnir  son  oontinffent  de  trou|)es 
qu'autant  qu'il  jugeait  la  chose  favo- 
rable a  Tint^t  public  et  au  sien  |»t>- 
pre;  ce  qui  rendait  impossible  a} 
Armdnie  le  pouvoir  despotiqueet  arbi* 
traire,  parce  que  les  nakharark  pou- 
vaient  ou  se  reunir  contre  le  souverain , 
ou  abattre  d'un seul  coup  sa  puissance, 
en  retirant  les  troupes  qu'ils  lui  avaient 
fournies.  Le  seul  point  qui  montrait 
leur  d6pendanoe  du  chef  de  r£tat- 
etait  robligatioQ  contractee  envers  ce 
m^me  chef  de  lui  payer  annuellement 
une  certaine  somme  comme  iropot.  C/ft 
ardent,  en  entrant  dans  le  tresor  ou 
roi ,  servail  a  couvrir  toutes  ses  depew- 


arm£nie. 


H3 


868,  si  ses  revenus  ne  suffisaient  jms, 
ik  payer  sa  maison,  les  fonctionnaires 
^tablis  dans  le  roTaume,  k  solder  les 
troupes,  h  bfttir  les  Edifices  publics,  k 
entretenir  les  routes,  et  enfin  k  subve- 
nir  aux  firais  extraordinaires  de  la 

guerre.  Le  droit  d'impdt  coustituait 
one  uniquement  la  pr6eminencedu  roi 
sur  les  autres  seigneurs ,  qui ,  en  le  re- 
fusant.  se  pla^ient  dans  un  ^at  ma- 
nifeste  de  r^volte. 

II  derait,  pour  se  les  eoncilier, 
user  h  la  fois  d'adresse  et  de  pru- 
dence. Comnie  nos  rois,  ceux  d  Ar- 
m^nte  cfaercbaient  k  attirer  la  haute 
noblesse  k  leur  oonr  par  Fappdt  des 
honneurs  et  des  ricfaesses.  On  insti- 
tuait  des  charges  et  des  dignity  pour 
satisfaire  leur  ambition ,  pour  occuper 
leur  activity  inquidte,  et  tous  oes  grands, 
si  indodles  dans  leurs  terres,  deye- 
naient  k  la  cour  des  serriteurs  com- 
plaisants  du  pouvoir;  ils  liaient  leur 
propre  cause  k  la  sietine,  et  contri- 
ouaient  k  le  faire  triompher  des  obsta- 
cles Qu^il  renoontrait  dans  I'amour  de 
rindependance  et  dans  Finsubordina- 
tion  oes  autres  nakharark.  Le  souve- 
rain  devait  hdiilement  manager  leur 
susceptibilite  orgueilleuse,  parce  qu'il 
s'adressait  k  des  pairs  plutot  gu'^  dts 
sujets.  La  noblesse  de  la  Perse  n'toit 
ni  aussi  ancienne  ni  aussi  puissante, 
comme  nous  le  voyons  dans  un  dis- 
oours  que  le  roi  Chapour  tint  aux  pands 
d'Arm^nie  et  aux  seigneurs  oe  son 
royaume  assemble  dans  un  mtoe  con- 
sell.  «Nous  connaissons,  dit-il,  tous 
les  ordres  de  la  noblesse  persane,  mais 
il  n'en  est  pas  ainsi  de  la  noblesse  ar- 
m^ienne,  que  les  rois,  nos  prdd^ces- 
seurs,  et  les  autres  historiens,  n'ont 
iamais  pu  oonnattre. » 

ittienne  Orp^lian  .^alue  k  auatre 
mille  le  nombre  des  nakharark,  et 
d'dutres6criTains  Font  fait  monter  jus- 
qu'a  neuf  mille,  sans  doute  paroe  ou'ils 
y  comprenaient  tons  ceux  qui,  a'une 
noblesse  secondaire,  s*6taient  ^lev^s 
successivement  au  rang  de  riches  pro- 
pri^taires.  Cette  dasse  de  gentilshom- 
mes  portait  le  nom  de  sebom .  Gompris 
dans  la  grande  cat^orie  des  azaa  ou 
nobles,  nom  dont  il  n'est  peut-^tre  pas 


inutile  de  faire  remarquer  ici  T^tymo- 
logic  persane,  ils  ^ient  sup^rieurs  a 
Tordre  des  simples  bourgeois  et  arti- 
sans, sans  pouvoir  pr^tendre  n^n- 
moins  k  la  dignity  des  nakharark.  lis 
n'^ient  par  con^quent  ni  der  ni  da- 
noudery  <rest-^-dire,  ni  seigneurs,  ni 
chefs  de  famille,  et  ils  manquaient  du 
droit  r^erv6  aux  propri^taires. 

La  classe  des  nakharark  se  subdiyi- 
sait  en  trois  degr^  hi^rarchiques  : 
f*  les  simples  seigneurs  vivant  libres 
et  retire  dans  leurs  terres;  2«  les 
grands  qui  remplissaient  des  charges 
publiques,  et  8'  les  families  qui  ont  ete 
port^  alternativement  sur  le  tr6ne, 
oomme  les  Pagratides,  les  Ardzerou- 
niens,  la  maison  de  Siounie  etquelques 
autres. 

Plusieurs  de  ces  families  subsistent 
pr^sentement ,  telles  que  les  Bagrations 
ou  andens  Pap^tides,  qui  habitent  la 
G^rgie  et  Samt-P^tersbourg;  les  Or- 
p6lions  ou  Orp^lians,  oue  Ton  trouve 
aussi  en  G^rgie  ou  dans  la  Russie. 
Le  gouyernement  russe  a  grand  soiu 
de  les  attirer  k  la  cour,  de  peur  qu'en 
viyant  dans  leur  patrie  ils  ne  regret- 
tassent  un  jour  la  noble  ind^pendance 
de  leurs  ani»tres.  Dans  les  montagnes 

gui  avoisinent  Mouch  domine  encore  la 
rave  maison  de  Sasoun,  qui  n'a  ja* 
mais  ^t^  soumise  par  aucun  des  nom- 
breux  oonou^rants  dont  F^pee  a  en- 
sanglant^  ie  sol  de  FArmenie.  Nous 
pourrions  citer  aussi  les  roaisons  du 
nom  d'Aghnak ,  de  Sli  vantsik,  de  Roch- 
guetsik  ,  de  Malakhovski  et  de  Sa- 
begha. 

On  ne  peut  croire,  d*apres  ce  que 
nous  venons  de  dire,  que  le  gouyerne- 
ment arm6nien  ait  m  une  monarchic 
pure;  il  s'y  m^lait  un  ^6ment  aristo- 
cratique  qui  le  temp^rait,  en  Femp^- 
chant  de  d^6n^rer  en  despotisme, 
comme  dans  les  autres  contrdes  de 
FOrient.  Son  organisation  ^tait  forte 
et  compacte;  sans  les  causes  internes 
de  dissolution  qui  le  travaillaient,  sur- 
tout  sous  le  rapport  religieux ,  ii  aurait 
pu  r^sister  plus  longtemps  aux  enneniis 
du  dehors. 

Malgr^  Finfluence  de  la  classe  aris- 
tocratique ,  In  loi  protegeait  ^galenieut 


144 


L'UNIVERS. 


ies  citoyens ,  et  elle  punissait  quiconqae 
venaitle  sang  innocent,  par oette  raison 
que  « la  yaleur  et  le  pnx  de  rhomme 
ne  peuvent  6tre  fixes,  puisqu'il  est 
Touvn^e  de  Dieu  et  son  image,  et  que 
lui  seulpeat  ressusciter  un  mort.  »  U 
fallait  seulement  que  le  suiet  fQt  Chre- 
tien. La  loi  etait  moins  severe  sor  le 
coinpte  des  infid^les  dans  le  cas  d'ho- 
inicide,  et.  d'un  autre  cdt^,  elle  s^vis- 
sajt  plus  lortement  contre  eux  lors- 
qu'ils  se  rendaient  coupablesde  gudque 
taute;  c'est  oe  que  prouve  Particle  sni- 
vant :  ft  Si  un  homme  se  livre  avec  son 
patron  au  brigandage ,  qu*il  soit  pris  et 
oonvaincu :  infidele,  on  lui  cr^vera  Ies 
yeux  et  on  lui  coupera  la  main;  sa 
femme,  son  fils  et  ses  biens,  seront 
confisqu^  au  profit  du  trdne,  et  lui- 
m6me  sera  exn^  en  terre  ^trangdre : 
Chretien ,  on  lui  fera  restituer  Ies  objets 
vol^;  sa  maison  et  tout  ce  qui  lui  ap- 
partient  seront  vendus  au  profit  de 
r£tat;  mais  sa  femme  et  ses  enfants 
seront  libres ;  on  nepeut  rien  sur  euv.» 
Auiourd*hui  la  nation  arm^ienne 
est  rqgie  par  toutes  Ies  l^islations  di- 
verses  des  pays  dont  ies  souverains  ont 
envabi  ouelque  portion  de  son  terri- 
toure;  elle  n  a  conserve,  m&ne  dans  sa 
patrie,  aucune  de  ses  anciennes  fran- 
chises. Les  peuplesconquis  par  laforce 
restent  toujours  sous  la  loi  dure  et  in- 


flexible de  la  force,  Jusqu'a  oe  que  ces 
dominateurs  violents  suooombent,  us^ 
par  leur  violenoe  mteie;  alors  les  op- 
prim^s  reinvent  la  t^te  et  travaillent 
avec  confianoe  k  aooomplir  les  destinte 
nouvelles  que  leur  roerve  la  l^roYi- 
denoe  dans  sa  mis^ricoide  et  dans  sa 
justice. 

£n  terminant,  nous  prions  le  lec- 
teur  de  ne  j>oint  iuger  trop  s^v^rement 
notre  travail.  If  a  &llu  nous  renfer- 
mer  dans  les  limites  qui  nous  avaient 
6t6  prescrites ,  et  voici  premierement 
pourquoi  certaines  parties  sont  plus 
longuement  d^velofip^es ,  tandis  que 
d*autre8  restent  moins  completes.  En 
second  lieu ,  nous  ^ions  retenus  par  la 
double  crainte  ou  d'etre  trop  superficiel 
en  n'explorant  que  les  points  gdneraux 
etculmmants  des  choses, ou  de  tomber 
dans  la  s^eresse  d*une  Erudition  lo- 
cale et  technique.  Celui  qui  nous  lit  et 
nous  juge  sera  peut-^tre  plus  indulgent 
s*il  oonsidere  gue  Fhistoire  et  la  litt6- 
rature  arm^ieimes  sont  connues  de 
la  France ,  seulement  depuis  un  petit 
nombre  d*annto.  Nous  croirons  avoir 
atteint  en  {uurtie  notre  but ,  si  nous 
avons  r(6ttS8i  k  inspirer  quelque  senti- 
ment  de  curiosite  ou  d*inter€t  pour 
une  nation' qui  a  droit  d^occuper  une 

8  lace  parmt  les  peuples  anciens  et  nio> 
ernes  de  I'Orient. 


FIN 


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V 


^   t       ♦ 


V    I 


i .  '^ 


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