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Medlott^,^.
f. LIBRARY
Toronto
HISTOIRE
POÉSIE LITURGIQUE
AU MOYEN AGE
HISTOIRE
DE LA
POÉSIE LITURGIQUE
AU MOYEN AGE
LES TROPES
LÉON GÂUTÏER
PROFESSEUR A LECOLE DES CHARTES
PARIS
VICTOR PALMÉ I ALPHONSE PICARD
KUE DES SAINTS-PÈRES, 76
RUE BONAPARTE, 82
1886
:\
J LIBRARY !")
V.,. TV - , , '
»JUL 2 2 1965
xi^U^
PRÉFACE
C'est en 1853 que j'ai abordé l'étude des Tropes , et
leur histoire forme une partie notable de la thèse que je
soutins à l'école des Chartes, le 14 novembre '1855^
En 18G6, chargé de professer à la même école un « Cours
d'histoire de la poésie latine au moyen âge », je consacrai
aux Tropes plusieurs de mes leçons, et j'eus l'occasion,
en 1873, de les réimprimer, avec quelques modifications,
dans les colonnes d'un journal quotidien '-.
Le livre que je présente au public est presque absolu-
ment nouveau : il est le résultat d'un long et conscien-
cieux labeur. Je m'étais , au déljut de mon œuvre , attaché
spécialement aux Tropaires de la Bibliothèque nationale :
j'ai voulu, en 1878, étudier sur place ceux de Saint -Gall,
qui sont les plus anciens de tous. J'ai pii faire venir à
Paris quelques manuscrits des bibliothèques étrangères ,
et me procurer les copies ou les analyses de beaucoup ^ ^
d'autres. Mes idées se sont modifiées sur plus d'un point : ^^^^^
•■^3
' Les « Positions » en ont été publiées.
2 Monde, des 21 , 29, 31 octobre, 4 et 7 novembre 187.3,
VI i'iîi:['Af;K
ceux (|iii oui (r;iv;iill('' l()ii;4l('iii|)s sur iirio rnc'ino matière
n'eu scioiil ni sc;iiiil;tiisé.s, ni surpris ',
i'cndant le cours d'un ;!ussi Ion»; travail, j'ai eu sou-
vent besoin de recourir à l'ohligeance d'un grand nomlji'e
de personnes : l)il)iiotli('caires et érudits, confivres de tous
))ays cl amis di' louh; dalc. Je n'ai |tas une seule fois
lriiuv(' leur (h'vouenicnt en di-l'aul, cl je liens à les remer-
eier ici ilu l'nnd de mon cspril el de nidu Cd'ur.
.le iciueicic tout d'ahord flom Pnthicr, le très savant
auteur des Mélodies g ré tj ariennes cl l'crudit le jilus
compctcnt en nialièic de clianl liturgique, qui a l»ien
voulu rcvoii' mon (euvre, comph'ler mes notions inipar-
l'ailes et se faire enlin mon guide sur un cheniin aussi
difficile. Dom Potliior ne professe pas pour les Tropes
celte sévérité dont j'ai fait preuve. Il voudra lùen me
pardonner d'avoir gardé, à ce point de vue, des convic-
tions (pii sont profondes et que j'ai dû seulement adoucir
et tempérer. Les meilleurs conseillers sont ceux qui
ollVent leurs conseils et ne les imi»osent i)as.
Je l'cmeicie iM. F.éopold Delisle, (pii m'a donné toutes
facilités pour analyser chez lui les manuscrits si libérale-
ment envoyés i)ar les liiMioliièques étrangères; -- M. Paul
Meyer, directeur de l'école des Cliartes , qui utilise ses
voyages , non seulement pour faire d'importantes décou-
veites, mais pour se rendre utile à tous ses confi'ères, et
qui a plis i)0ur moi de précieuses notes sur les Tro-
paires de Londres et d'Oxlonl;— M. l'alilM' Durhesne, qui
s'est empiessé de ré[)ondre à une consultation sur une
Vie du ]ia|ic Adiien II. où (>sl soulevée toute la question
' Le seul livre qui ail li-s Tropes pour objet spécial est celui de l'abbo
Heiners {Die Tropen-Prosen Pràfations Gesaïuje des feierUchen Hochamies im
Millelalter, l.uxembourjT . llarn, 188i, in-8». 12i pp.'i. M. l'abbé Heinors n'a
pas eu l'orrasioii de connaître nus travaux anlérii>ur>. .*^on livre est fort inté-
ressant, l't j'y ri^nvoie mes lecteurs.
PREFACE VII
de l'origine des Tropaii-es et des Tropes; — le très aimable
bibliothécaire de Saint-Gall, M. Idtensohn, près de qui j'ai
passé de si douces heures en 1878, et dont la complai-
sance s'est toujours montrée infatigable; — M. Lœwen- ■
feld, qui, à Berlin, a copié et fait copier pour moi tout
un Tropaire, et m'a par là donné le témoignage d'un admi-
rable dévouement aux intérêts de la science ; — le profes-
seur R. Béer, de Vienne, qui a pris la peine de dé-
pouiller les Tropaii'es de la Bibliothèque impériale , et
mon ancien élève, ^I. Millot, ({ui s'est mis à ma disposi-
tion pour compléter d'aussi utiles renseignements; — le
docteur G. Laubmann , directeur de la bibliothèque de
^lunich , qui n'a pas craint de faire voyager deux de ses
plus précieux manuscrits , et m'a ainsi permis d'en faire
une analyse complète ; — les bibliothécaires de Colmar,
de Zurich et de Ratisbonne , qui m'ont si habilement mis
sur la piste de manuscrits déplacés ou peu connus ; —
l'administrateur du British Muséum, ^I. Thompson, qui,
tout accablé qu'il soit par la direction de ce vaste dépôt,
a trouvé le temps de décrire pour moi deux manuscrits
d'une rare valeur; — M. Gustave Masson , le chroniqueur
de la Revue des Questions historiques , qui s'est créé des
loisirs pour compléter les analyses de M. Thompson ; —
mon ancien élève et ami, M. Ernest Langiois, membre de
l'école française de Rome, à qui je dois la table des deux
Tropaires de l'Angelica et de la bibliothèque Victor-
Emmanuel.
Je remercie tout particulièrement M. Edouard Garnier,
qui a bien voulu dessiner les plus belles lettrines et les
plus curieuses miniatures des Tropaires de Paris : il l'a
fait avec cette sûreté de sens archéologique et cette déli-
catesse d'exactitude qui ont toujours distingué euti-e tous
l'auteur de la Céramique et de VÉmaillerie. J'associe
M. Sellier à ces éloges si justement mérités.
VIII im!i;fa(;h
iM. Depitiz ;i mis à mon service cette complaisance iné-
|)iiisal)l(î que connaissent tous les lialjitnés du départe-
ment (les manuscrits à la ]Jil)liotliè({ue nationale;; mais il
■ m(; fainliiiil, pour le remei'ciei- di'xnement, me monti-er aussi
;iiiii;il)l(' envers lui (|iril Ta loujoiirs v[r cnNcrs mi)i , (_'l je'
renonce à une Inllc (ii'i je me sens vaincu (l'aviince.
Je ne veux pas enlin oublier M. \'iol , directeur de
rimi)rimerie Marne, qui, en vérilalde ami, a ap{)orlé des
soins exce[)tionnels à la typofjraphie d'un livre où ahon-
daieiil les diflicultés de toute sorte, el autpid il a voulu
donner le caractèi'e d'une beauté sévère et vf'iitabicnieni
scient ilii^ue. Mes lecteurs jugeront s'il y a réussi.
C'était un devoir pour moi de témoigner ma reconnais-
sance à tant de coni'rères et d'amis dévoués. La liste en
est longue, et je ne suis pas certain de les avoir tous
nommés. Il est doux de penser qu'il existe ainsi une vé-
ritable confraternité entre les savants de tous les pays.
Quand l'un d'eux — si humble (ju'il soit — réclame un
service des autres, toutes les mains se tendent vers la
sienne, et c'est à qui mettra à lui venir en aide le plus
de cordialité et d'empressement. J'ai été heureux d'en faiie
l'expérience. ,
Léon GAUTIER.
19 novembre 1886.
HISTOIRE
POÉSIE LITURGIQUE
CHAPITRE I
DEFINITION DU TROPE
Qu'est-ce qu'un Trope?
C'est l'iNTERPOLATiON d'un TEXTE LITURGIQUE : inter-
polation que l'on a principalement l'occasion de con-
stater, depuis le ixe jusqu'au xiie siècle, dans certains
livres de chant à l'usage des églises de l'Allemagne , de
l'Italie, de la France ^
C'est l'intercalation d'un texte nouveau et sans auto-
rité dans un texte authentique et officiel; dans ce texte
même dont saint Grégoire avait si sagement tracé et
fixé toutes les lignes.
1 Sauf de rares exceptions, ces églises sont monastiques, et c'est ce qu'a
fort bien vu le cardinal Bona en son beau livre que Martène appelle un Traité
d'or: Rerum liturcjicarum libri duo (Rome, 1671, in-4o, p. 296) : « Quorum
[troporum] exstant exempta in antiquis monasteriorum libris. A munacliis
enim, privala quorumdam abbalum auctoritate, ut prisca ferebant tempora, hœc
additamenla orisrinem traxisse puto, qui non solum introïlus, sed alias etiam
liturgicas preces eodeni modo interpolarunt. » Nous y reviendrons.
I — 1
2 1IIST(HI{K I)K I.A POKSir: 1. ITU l! lil O'-'E
Qu'ost-cr <|iriim' « \>\rci- li'0{)éo »?
C'est uni' |ti<''C(' où — (\.ii\:< le liiit pieux (!<' rciidic une
fùUi plus soleiiuelle m ;il|((ii^r,.;iiit !'( )rfice s.-iciv — ^m a
intercalé de nouvelles pai"(jles visihlenient destinées à
préparer ou à (l('velo|)per les paroles du tlièiue primitif.
Les Tropes, eii elVct, jicnvciit l.iul'M [)récéder les textes
préexistants de la vraie lilniiiie, l;inl«M les suivie tantôt
enfin se *i;lisscr entre toutes leurs phrases et prendre
place entre tous leurs mots'.
Un exemple vaudr.i mieiix (|iie |;iiii dr (L'-fini-
tions.
Nous sommes, si vous voulez Meii , dans la Lelle
et radieuse matinée de Noël, et voici rintroït de la
Messe du jour, tel (ju"on le chantait avant renvahisse-
ment des Tropes; tel encore qu'on le chante aujourd'hui
dans cette liturgie romaine qui a été si heureusement
préservée de tant dinnovations dangereuses :
« Puer iialus est lujbis, et lilius ilutus est nuLis, cujus im-
perium super humerum ejus, et vocabilur nomen ejus magni
consilii angélus*. Ps. Cantate Domino c;mti(UMi nuvuni, ijuia
mirabilia fecit ''. Gloria Patii, etc. »
' « Tropus, in re lilurpica, est versiculus quidam nul etiani plures ante,
INTER vel posT alios ccclesiasticos canlus appositi. » (.Marlin Gerbcrt, De canlu
et niiisica sacra a prima Ecclesiœ ivtate ustjue ail pricseiis tempua , in nionas-
loriu S. Blasii, i77'i, I, p. iJ'iO.) Celte dolinition est plus exacte que celle de
Guillaume Durand: «Tropus est quidam versiculus qui, praccipuis festivitatibus.
lantalur inmiediate ante Inlmïtuni, (juasi quoddam prxanil>ulum et continuatio
ipsius Introïlus, ut, vi-rhi irratia, in ft-sto Nali\ italis. Cuntinit ault-m tria trupus.
vidilicot Antiphonani, N'ersum v[ (Uoriain » { Italionale , lib. IV, cap. v,gi)). —
Dom (JULraML'er (Institulunis lifunjiijucs , 1' éd.. \'. Palmé, \b'it<. I, p. 2-49)
expose à peu près la même doctrine ijui^ Cierberl : « Les Tropes étaient une sorte
de I'roloi:ue qui jiréparait à rintroït... Plus tard, on intercala des Tropes dans
les pièces de chant, dans le corps même des Introït, «-ntre les mots Kijric et
eleison, à certains endroits du Gloria in exeelsis, du Saiwtus et de l*.4(/nu«
Dei. On en plaça aussi ù la suite du verset .iUelnia... ■•
* Isaïe, i.\, l>.
3 Ps. xcvii, f>.
DEFINITION DU TROPE 3
Et voici maintenant ce qu'était devenu ce même
Introït après l'invasion, après le triomphe deê Tropes^ :
Gaudeamus hodie quia Deus descendit de cœlis, et propter
nos in terris Puer natus est nobis, quem Prophetse diu vaticinati
sunt. Et filius datus est nohis. Hune a Pâtre jam novimus adve-
nisse in mundum Cujus imperium super humerum ejus, po-
testas et regnum in manu ejus. Et vocabitur nomen ejus Admi-
rabilis, consiliarius, Deus fortis, princeps pacis, magni consilii
angélus. Ps. Cantate Domino canticum novum, quia mirabilia
fecit. Gloria Patri, etc. ^.
i Bibl. nat. lat., 887, f» 9 v», etc. etc.
2 Types des prinxipaux tropes de la messe aux x"=-xii'= siècles : I. Introït.
(In natale sancti Johannis evangelistse) : Dilectus i-ste Domini Juhannes est
apostolus, scriptis cujus et monitis poUet decus Ecclesiee. — Quoniam Dominus
Je.sus Christus sanctum Juhannem plus quam cœteros diligebat apostolos, In
medio Ecclesise aperuit os ejus , Ut Sacramentum fidei et Verbum cofeternum
Patri scriptis pariter et dictis prsedicaret. Et implevit eiim Doininus , Qui eum
in tantum dilexit, ut, incœna sacralissima, supra pectus suuni ipsum recumbere
perniisisset, S'^Jf'/'i^it sapientice et inlellectus, Quo inspirante, evangelizavit dicens ;
« In principio erat Verbum, et Verbum erat apud Deum, et Deus erat Verbum. »
Stolam (jloriee induit eum. Ps. Bonum est confiteri Domino, et psallere no-
mini tuo, Altissime. Inde nos moniti , omnes una voce collaudantes , tibi.
Christe, sanctoque Johanni psallimus, dicentes. In medio. Gloria... Amen
(Bibl. de Saint-Gall, i\° 376, pp. 42, 43, etc.). * II. Kyrie. Cunctipotens
genitor, Deus omnicreator, eleison: Kyrie, eleison. — Fons et origo Boni, pie,
Luxque perennis, eleison. Kyrie, eleison : — Salvificet pietas tua nos, bone
Rector : eleison. Kyrie, eleison : =; Christe, Dei splendor, virtus Patrisque
sophia, eleison: Cliriste, eleison. — Plasmatis humani factor, lapsi reparator,
eleison: Cliriste, eleison. — Ne tua dampnelur, Jesu, factura, bénigne eleison:
Christe, eleison. = Amborum sacrum spiranien, nexus amorque eleison: Kyrie,
eleison. Procedens fomes , vita3 fons , purificans vis , eleison : Kyrie, eleison. —
Purgator culpae, veniae largitor opimœ, — Offensas dele, sancto nos munere
reple, — Spiritus aime, Kyrie, eleison. (Nous énumérons plus loin tous les
manuscrits où nous avons trouvé le texte de ce trope célèbre.) * III. Gloria.
Gloria... voluntalis. Laudamus Dominum quem laudat cœlicus ordo, Laudamus
te. Nomen et imperium cujus est semper benedictum, Benedicimus te. Cuncta
poli jubilatio quem veneranter adorât, Adoramus te. Gloria, digna tuis qui
confers praemia sanctis , Glorificamus te. Qui pietate tuis sola misereris
alumnis, Gratias afjimus. Machina te cœli, te laudat spiritus omnis. Domine
Deus Bex cœlestis. « Sanctus » ter Seraphim , « Sanctus, » resonent tibi « Sanc-
tus », Deus, Pater omnipotens. Plebibus et nostris plus esto vocibus istis,
Domine Fili unitjcnite, Jesu Christe. Pectora noslra tuo confirma numine sancto,
Domine Deus. Sordibus a cunctis nos munda, Christe, piacli, Agnus Dei.
yElerni Patris ingcniti splendorque perennis Filius Patris, Ut, sceleris sine
labe, tibi placeat tuus orbis, Qui tollis. Mentibus ut puris valeamus psallere
tibi, (Jui loUis. Priiicipium siiii> principio, sine lemporis a^vo, Qui sedes. Flec-
4 IlISTolllK I>K I.A l'OKSli; 1. 1 T I l< (; |n I' bl
Los Tropf's se pi'c'sculciil à nous sous (]il]<'r<'iitcs
formes.
Certains sont en prose, d'autres en vers'.
Nous parler<tns de tous.
lilur (inino >.'eiiu, ciii hulidilur atquc |)(ilo,-Ui.s, Quimiatn lu soins sandus. Hex
rapuiii l)omiiius rcsidoiiH su|)er anlrn polorum, Tu soins Dominus. Cuncla tcnens
sunimoque rcfrens nioderainino Verbi, Tu soins AUissimus, Jesu Chrisle, Qui
rœluni terramquo lenes, mare ncciie profuiidum Cuni saneto Spirilii in (jloria
Dei Patris. Amen {Y . ]>]»?, loin le lablcau do tous les manuscrits qui contiennetit
ce Tropo). * IV. Okfkrtoiiu;. Cuncta crean.s , cuncta regens, tibi lius : Tui srtnt
rii-li, et hi(t t'sl terra. Orhe>n lerrarum et plenitud'tnem ejus tu fundasti ; quic/juid
\cp|,it, quirquid natal, quirqiiid ro|)il. Juslitia. (Hcrlin, Tbcol. lai., n" 11, ('" '» v",
ij r», etc.)* \ . SANCTLS.6an(7».v iJcus orbis, Sanctus l'aradytus, ipse est f'Iirislus.
Sandus Dominus super Ihronos angelurum, iJeus sahaotli omniupKjue virlulum.
IHeni sunt tirli et terra tua; charitatis, Gloria tua. Ilosanna, qui vonis judicare
in die Judicii //( c.ccctsis. lieneclirtus, etc. ( Bibl. do Saint-Gall, n* 'i8'i, p. 239.)
* VI. A(3NLS Df.i. Spes niundi, laus atquc salus, iJous et humo vcrus, Aijnus
Dei. Morte perire dolens hominem, veiiis, ipse Creator, Qui tollis peccala ntundi.
Inducras huniinem, certans cum Principe morlis : Miserere. Juste beiligerans
Numen celas Deitatis, eia, Miserere. Crucem scamlis homo, maclaris ho.«tia
Patris: Dona nobis pacem. (Bibl. nat. lat., 1flo(!8, f» 126 v". etc.) * Vil. Com-
munion (Pâques) : Laus, bonor, virtus I)eo nostro. decus et im|)erium Hepi
noslro qui protium redemptionis Pasrha nostruin iunnolatus est. Peccala noslra
ipse portavil, et propler scelera noslra oblalus est Christus. Alléluia. Itaquc
epulcmur in azipnis siiweritatis et veritalis. Alléluia, alléluia. Léo de tribu
Juda hodie surro.xit a morluis : alléluia. In cujus laude dignas voces personate :
Alléluia, alléluia. (Bibl. nal. la!., 'J'iW, f" 38 v", etc.) = A l'occasion de ces
textes nous sommes ici amené à l'ormuler deux observations importantes et qui
devront trouver leur application dans tout ce volume :
1» Nous imprimerons toujours en italique le texte liturgique
officiel, afin de le distinguer nettement des Tropes eux -mi^mes, dont le texte
sera toujours imprime en « romain ».
2o Nous publierons tous nos textes d'après les principes de la
notation classique avec les œ, les se (qui se trouvent en un certain nombre
do tropaires); avec la forme Christus au lieu de Xpjs/iM,etc. etc. Nous comp-
tons d'ailleurs publier un jour les variantes précises de tous no* mamMcrils. =
Ces deux observations sont ici faites lne fois pour toutes.
' Parmi los sept typ\>i qui viennent d'être cités, trois sont en vers : le Kyrie,
le (Uoria , V.Xynus; quatre en prose : l'Introït, l'Offertoire, le Sandus et la
<i CoiiMUUiiiun ».
CHAPITRE II
BUT DU PRESENT LIVRE
Il semble, au premier coup d'œil, que ces étranges
interpolations n'offrent aucun intérêt vivant, et que
c'est seulement affaire de petite curiosité, sans lar-
geur et sans horizons. Mais il convient de s'élever plus
haut.
Nous nous proposons, dans les pages qu'on va lire,
de montrer comment la liturgie catholique a traversé ,
aux ixe-xic siècles, une crise fatale et où elle a failli
sombrer. Or, ce danger auquel elle a victorieusement
échappé, c'étaient ces Tropes mêmes dont nous allons
écrire l'histoire. Ils avaient fini, vainqueurs, par tout
envahir et tout dominer. Il est certain qu'en plus
d'une église, ils étaient parvenus à se confondre très
intimement avec la liturgie grégorienne. Ces œuvres
de rhétoriciens de second ordre étaient transcrites,
avec l'antique liturgie, sur la blancheur du même par-
chemin. L'or pur de saint Grégoire ne se distinguait
plus de cet alliage. C'est en vain qu'aux yeux des
vrais chrétiens ces Tropes paraissaient entachés de
6 iii.s'r<tii!i; iii; i. \ im)i;sii; i.i'rim;iMi'i-:
vices pi('si|ii(' iiKutcls; c'est en sain que les esprits
sages s'étoiinaii'iil (|iic lOn tii|t|ài ainsi (|)Our ne i"ien
dire de plus) la longueur des anciens offices, et qu'on
fatiguât de la sorte la bonne volonti' ^\('y^ meilleures
âmes; c'est en vain que l'on prononrait, deux ou
trois siècles à l'avance, le mot charmant de Gautier
de Goincy : « 11 n'est secpiencc, n'ai le] ni»' — (Jui trop
n'ennuit, s'ele trop dure '. » G'est en vain quL- Wjh
trouvait ces Tropes médiocres, encombrants, dange-
reux. Ils avançaient, ils pi-ogressaient toujours, et le
jour vint où l'on put voir (c'était à l'auioiv du
xie siècle) l'abbé d'une des plus célèbres abbayes
de l'Allemagne se diriger solennellement vers Tau tel
entouré de courtines rouges et dorées, vers Tau tel
au-dessus duquel était suspendue la colombe eucha-
ristique, et 1^. respectueux et grave, déposer officiel-
lement sur la pierre sacrée un livre <{u<' ses moines
venaient d'achever, un chef-d'œuvre de calligraphie
et de peinture, une incomparable merveille, un Tro-
paire. On n'aurait guère mieux traité la Bible *. En
d'autres lieux la même confusion se produisait avec
le même engouement; le même enthousiasme se don-
nait carrière, et les Tropes s'installaient dans la li-
turgie comme chez mx. Giand était 1<' péril, et nous
le ferons toucher du doigt. Rome, par bonheur, veillait
> Edit. Poquot, col. twy.
' Prum, Bibl. nat. lai., 9iW, I" i"*. " iloilicoiD istum. r.iiitii-; nuxiiilnniine
|)loinim , domni Hilderici . voMcrnbilis nbbati< , Icmpuro cju^quc lic^iitia,
Wickiiipi, lidelis monachi. impensis altjuo precalu scribcre arpliim; domni
vcro Stophani, succcssoris pracfati ablx)ti.s, lemporo alque l)cncdiclione dili-
penlissimc , ut ccrniliir, con<iimniatiini ; s.vm;ti s.\lvatoris i>omim no^tri Jksc
CiinisTi AUTARi iMTO.'SiTUM ; hiUc Miicto Priimieiisi caMiobio perhonni memoria
iioviimis tradilum. « Cf. .\d. Heiiier?. Dii' Ti'open - Pi-osett , ctr. ( I.uxemlHMirp,
J. Uarii, 18y'i, p. .^■>.)
BUT DU PRESENT LIVRE 7
et ne se laissa pas entamer. Elle eut l'art de se garer
de ces nouveautés et de n'en conserver, par un tri
merveilleux, que quatre ou cinq morceaux'. La liturgie
fut sauvée, et nous verrons comment.
Si médiocres que soient ces compositions de rhé-
teurs, elles reproduisent à tout le moins, et reproduisent
exactement les doctrines qui avaient cours dans les
plus illustres monastères de ces siècles mal jugés. Il
faut bien le reconnaître : si le style en est peu relevé,
les doctrines en sont hautes. Ces pauvres vers sont
pleins de sursum, et nous avons eu la joie fort vive de
n'y jamais rencontrer une idée vile ou fausse. C'est ce
que nous essayerons de mettre en lumière, et c'est
ce qui est, suivant nous, d'une véritable importance. Il
n'est pas un seul esprit vraiment clairvoyant et profond
qui ne fasse quelque cas de l'Histoire du Culte chez une
race civilisée; mais l'Histoire des Idées durant trois
siècles est encore d'un plus haut prix. J'ose à peine indi-
quer, d'un coup de crayon discret, commentées Tropes,
si méprisés et trop souvent dignes de l'être, nous ou-
vrent une éclaircie sur la vie monastique et nous per-
mettent de constater que, grâce à ces développements
de la liturgie, on y vivait dans une fête continuelle de
l'esprit et du cœur. Dans ces Tropes joyeux, « c'est le
« cœur qui parlait, et il était plein. »
Encore moins oserais-je, en un chapitre de début,
signaler les réels et grands services que tant de Tro-
pistes inconnus ont rendu à l'art musical, en consti-
tuant dans leurs monastères de véritables Conserva-
• Rome n'a conservé, en effet, dans le Missel réformé de Pie V que quatre
Proses : une de la première époque, le Viclimx Paschali laudes; trois de la se-
conde : Veni, sancte Spiritus ; Lauda, Sion; Bios irœ; et un Planctus : le Sta-
bat mater.
8 lIISTrtlHI'; ItK LA IMJÉSIK UT H I< CIo r K
toires do musique sacrée. Les mélodies de nos Tropes
valent iiiiciix (jiir Iciii's paroles, et il y aiiiail injustice
h séparer ici deux éléments qui sont si étroitement
liés. « Tel Trope, qui semble d'abord insignifiant, con-
quiert avec SCS neumes une valeur inattendue, et il y a
là des mélodies véritablement [)opulaires avec je ne
sais quelle bonhomie d'allure qui est pleine de distinc-
tion et de finesse. » Sans doute, il ne faut lien exa-
gérer; mais il est juste de tenir compte des moindres
efforts vers le Beau, et de savoir en lemercier (jiii de
droit.
Ce n'est pas tout, et les Tropes nous réservent encore
plus d'une surprise. Transformés au xne siècle en véri-
'tables chansons rimées, ils peuvent, aux yeux d"un
érudit qui se pique de remonter aux textes originaux,
être considérés comme la source de toutes les chansons
latines de ces Goliardi des xne et xnic siècles, dont
la verve méchante s'est attaquée, hélas! à toutes les
choses sacrées, surtout aux clercs, surtout au Pape.
Ces Goliardi ont commencé par chanter innocemment
des Tropes, et ont fini très rapidement par chanter des
« gauloiseries », et pis encore.
Mais là n'est pas, suivant nous, le plus haut intérêt
de cet humble chapitre de notre histoire littéraire, et il
convient de voir dans les tropes une des origines du
théâtre moderne, .le n'ose pas dire : « l'Origine, » et je
serais cependant tenté de le croire. Par une série de
transitions dont nous essayerons de faire saisir toutes
les nuances, les Tropes sont, petit à i^etit, devenus des
Mystères; les Mystères sont, petit à petit, devenus des
« Jeux », et les « .leux » enfin sont, j^etit à petit,
devemis des Drames en langue vulgaire. Nation folle
BUT DU PRÉSENT LIVRE 9
de théâtre comme nous le sommes, nous accorderons
peut-être quelque attention à ces origines d'un genre
littéraire qui nous passionne presque à l'excès. Ces
pauvres Tropes du xe et du xie siècle, qui nous sem-
blaient si morts tout à l'heure, ils vont soudain s'ani-
mer sous notre regard. Ils deviennent dramatiques;
donc ils sont vivants. Et voici qu'enfin nous nous pre-
nons décidément à les tenir en quelque estime...
Tels sont les côtés élevés du sujet que nous abor-
dons aujourd'hui... et qu'à coup sûr nous n'aurions
jamais abordé, s'il n'avait point de ces côtés.
CHAPITRE III
LES ORIGINES
Si nous ouvrons aujourd'hui un Missel et que nous
fixions notre attention, entre FÉpitre et l'Évangile, sur
la pièce appelée Graduel^, nous nous convaincrons
facilement qu'elle se compose de plusieurs éléments,
dont il est nécessaire de faire ici la distinction l
Prenons pour exemple le beau Graduel du Missel
romain pour la fête des Saints Innocents :
1° Anima nostra sicut passer erepta est de laqueo venantium.
jr. Laqueus contritus est, et nos liberati sumus. Adjutorium
nostrum in nomine Domini, qui fecit cœliim et terram.
2o Alléluia, alléluia, i. Laudate, pueri, Dominum ; laudate no-
men Domini. Alléluia^.
'A ce moment du saint Mystère, FÉglise primitive chantait un Psaume.
(Martène, De antiquis Ecclesise ritihus, I, 37o. )
2 Ainsi qu'un grand nombre de liturgistes modernes, nous envisageons ici le
« Graduel» comme une pièce unique composée de divers éléments, que nous
avons ci-dessus énumérés. Mais il va sans dire qu'à étudier les origines et l'es-
sence des choses, « le Répons Graduel (notre n» 1) est un morceau complet
en lui-même, et que l'Alleluia et le Verset (notre n» 2) forment un autre mor-
ceau également indépendant , et qui ne tient qu'accidentellement au premier.
L'un et l'autre avaient primitivement la même forme : celle du Répons. »
3 Le Graduel n'a pas reçu de modification importante depuis la constitution
12 mSTnlUK l>K I. A ImjÉsII'; I.ITUHCloUK
La première partie est ce qu'on appelle proprement
le Répons. Le verset Laudatc, qui se trouve précédé
et suivi (le V Alléluia, a reçu le nom de « Verset allé-
luiatique » ou « Verset de V Alléluia ». Un dernier Allé-
luia, comme on vient de le voir, clôt dignement cette
petite pièce, ou plutôt cet assemblage de petites pièces
liturgiques, où se trouve admirablement condensé tout
l'esprit de chaque fête ^ C'est sur ce dernier Alléluia
(ju'il faut porter surtout notre regard; c'est là qu'il va
se passer un fait important et, en ce qui concerne les
Tropes, décisif.
A une époque très reculée, et que la science, faute
de documents, n'est pas encore parvenue à déterminer
assez exactement, le dernier Alléluia du Graduel était
suivi d'une série de notes joyeuses, de vocalises (jubili,
de l'Antiphonaire par saint Grégoire le Grand. Durant tout le moyen âge, nous
le trouvons substantiellement composé des mêmes éléments. Il est presque
inutile d'ajouter que chacune de ses parties a été longuement commentée par
les nombreux liturgistes de cette époque profondément liturgique, et noLnm-
ment, au xu" siècle, par Honoré d'Autun; Rupert, abbé de Tuy; Robert Pau-
lulus, etc. Dès le ix* siècle, Rémi d'Au.xerre, en son Expositio de celebratione
misses, établit clairement toute la doctrine que nous résumons ici en quelques
mots. (Maxima Bibliotheca Patrum, Lyon, 1677, in-f°, t. XVI, p. 914.)
Quant à s'assurer, d'après les manuscrits eux-mêmes (auxquels tout critique
doit remonter), que le Graduel était dès lors composé comme il l'est aujour-
d'hui, c'est chose trop élémentaire, et l'étude du premier Antiphonaire sufl'irail
à le prouver.
' Durant le Temps pascal (à partir du Dimanche in albis) on dit, aux lieu et
jilace du Graduel, le Verset précédé et suivi de ses Alléluia ordinaires; puis un
second Verset, qui est lui-même couronné par un quatrième et dernier Allé-
luia : le tout conformément au type suivant, que nous empruntons à l'office de
l'Ascension ; « Alléluia, alléluia, y. Ascendit Deus in jubilatione, et Dominus in
« voce tubae. Alléluia, y. Dominus in Sina, in sancto : ascendens in altum.
Il captivam duxit captivitatem. Alléluia. •> = Dans les temps de deuil et de pé-
nitence, l'Église supprime tous les Alléluia, et le Verset alléluiatique est rem-
placé |iar le morceau appelé Tract us, qui. le plus ordinairement, consiste en
un plus long fragment du Psautier. Tous les liturgistes ont aisément donné la
raison de ce changement : « In diebus luctus, et maxime a Sopluagesima usque
ad Pascha, non dicitur Alléluia, quia musica in luctu est importuna, d (Gui-
bert de Tournai, De offirio Kpiscopi et Earlesiœ cferemoniis, Maxima Biblio-
theca ratrunt, Lyon, 1677. in-f", t. XXV, p. 408.) Etc. etc.
LES ORIGINES 13
neumse), que l'on chantait sans paroles sur la dernière
voyelle a du mot alléluia. Ces neumes avaient été tout
d'abord d'une étendue modérée, comme nous le voyons
dans tous les manuscrits grégoriens; mais ils avaient
fini par comporter des mélodies assez longues, et qui,
dans l'esprit parfois trop subtil des liturgistes du moyen
âge, peignaient par leurs balbutiements l'impuissance
de l'homme à exprimer la louange de Dieu et ses sou-
pirs vers la Patrie éterneUe'.
1 Versus Alléluia tangit cantorem interius, ut cogitet in quo debeat laudare
Dominum, aut in quo lœtari. H^ec jubilatiq, quam cantores Sequentiam vo-
CAXT, statum illum ad mentem nostram ducit, quando non erit nécessitas locutio
verborum. (Amalaire, De Offîciis ecdesiasticis , lib. HI, cap. xvi. Patvolorjie
de Migne, t. CV, col. 1123.) = Jubilatiq, qvje sequentia vocatur, significat
illum statum, dum necessaria non erit locutio verborum. (Honoré d'Autun, Sa-
cramentarium , cap. lxxxii; Migne, CLXXII , col. 788. Cf. le texte d'Ama-
laire). = Seçut'Mïi'a ideo dicitur QUIA neumam jubili sequitur. Sequentiam ideo
jubilamus, quia... faciem Domini in jubilo videbimus. ( Honoré d'Autun, Gemma
animai, lib. I, cap. xcvi. Migne, CLXXII, col. o7o.)= Alleluiatici cantus mo-
dulatio subsequitur, quae laudes lidelium dicatas exprimit et gratiaruni actiones
Deo devotas, quibus suspirant ad œterna gaudia. Verbum est brève, sed longo
PROTRAHiTUR PXEUMATE. (Etienne de Baugé, évùque d'Autun, Tractatus de Sa-
cramento altaris, cap. xii. Migne, CLXXII, col. 1284.) = Canitur ergo allé-
luia post Graduale, canticum lietitise post luctum pœnitentiœ... Jubilamus
magis quam canimus, unamque breveni digni sermonis syllabam in plures
neumas vel neumarum distinctiones protrabinius, ut jucundo auditu mens
attonila repleatur et rapiatur illuc ubi « sancti exultabunt in gloria et laetabun-
tur in cubilibus suis ». (Rupert, abbé de Tuy, Be divinis officiis, cap. xxxv.
Migne, CLXX, 29, 30.) = Pneumata quae in Alléluia et ceteris cantibus in
paucitate verborum fiunt, jubilum significint qui fit, cum mens aliquando sic
in Deum afficitur et dulcedine quadam inelîabili liquescit, ut quod sentit plene
effari non possit. (Robert Paululus, De officiis ecclesiasticis , lib. II, cap. xviii.
Migne ^CLXXVIl, 381. Ce chapitre est intitulé : De Alléluia et pneumatum
significatione.) = Alléluia modicum est in sermone, et multum in pneumate,
quia gaudium illud majus est quam sermone possit explicari... Sic Eccle-
sia, pneumatizando (dictu mirabile), expressius, quodam modo, et melius sine
verbis quam per verba innuit quantum sit gaudium Dei ubi verba cessabunt.
{Spéculum de Mysteriis Ecdesisc; traité mis sous le nom de Hugues de Saint-
Victor, cap. vu; Migne, CLXXVII, col. 359. = Cf. B. Hauréau, tes- Œuvres de
Hugues de Saint- Victor, 2" édit., 1886, pp. 199-201.)= Verbum hoc modicum
in scrmune pneu.matizando protrauimus , ut mens repleta stupore et extasi ra-
piatur illuc ubi erit perpétua vita sine morte, dies sine nocte... Unde in
diebus luctus, et maxime a Soptuagesima usque ad Pascha non dicilur Alléluia,
quia inusica in luctu est importuna. (Guibert de Tournai, De ofjicio Episcopi
et Ecclesiœ cœrononiis , Maxiiua Bihliothcca Palnou , Lyon, 1677. in-fo, XXV,
408. );= Gaudium autem saiictoruni iutiM'niiii.-diili' cl iiiriraiiili- dicilur. ([Uod per
14 iiisToiHK m-; I. \ l'oKsii: i.nuHGinUE
S'il ('luit ])('i-mis, apiL-s le stirstnn i\'\in U-\ syinho-
lisme, de redescendre un peu sur la terre, nous ajou-
terions que ces vocalises ' (que Ton ajjpelle pittoresque-
ment la sequela ou la sequentia, c'est-à-dire le cortège
ou la (lucue de l'Alleluia*) étaient devenues d'une
exécution difficile'. Les chantres les plus lialjiles
s'égaraient dans l<; dt''(l;il(' de ces vocalises, et, s'ils
n'avaient i)()inl de livre sous les yeux, perdaient tout
à fiiil la tête. Encoi'e, si à ces iiitfiininahNjs neumes
pneunia post Alloluia, dulcc et lutigum, salis proprie declaralur. ïfolemus
enim, loiigam iioLnin toiiando (st'u teneiido) post Alloluia, ^uper liane litle-
ram A prolixius deainlarc. (ï^aint Boiiaventure, Exposiiio Hissœ, en ses
Œuvres, éd. do Lyon, i&'iH, ^ 11, p. 7'i.)
1 Ces vocalises do IWIIeluia porlaii-nt dilTérenls nonio : juhili, jubilatio;
neutnœ, neumata, pneuniala , iicutnulutn distinvtiunes, tneUnlia:, vantilenœ.
Exécuter ces mélodies, c'était, suivant les auteurs du moyen âge, neumatizarc,
jubilarc , ou encore prolrahere alléluia. (\'. dans notre Histoire abrégée des
proses, Paris, Julien, Lanii-r, Cosnard et Cie, l8i>8, p. 7, les textes cités à rappui
de chacune des alfirmalions précédentes.)
* C'est ce qu'a fort bien exjrimé le cardinal iîona : <> Julùli ab aliis setiuentia
dicti sunt, quia sunt (jitwclain veluli sequela et appendix cantici alléluia, qu2e
sine verbis post ipsuni sequunlur. » (lietntin lilurgicarum libri duo,\>. 3(>9.) Le
MOT SKQl'KNTIA EST DONC KSSENTHCI.LEMKNT LN TEUME MlsIC.\L. LcS manUSCfitS de
Sainl-Gall et ceux do riaint-Martial sont, à ce point de vue, également significa-
tifs. Dans l'admirable niaimscril de riaint-Gall, Wi, qui est du \* ^iécle, ces se-
ijuenlix (p. 2ij8- 497 ) nous sont ollertes sans j>arolcs; dans les mss. 376, 381, '<82
de la mémo abl)aye, comme aussi dans le ms. 121 d'LinsiedeIn ( lesquels appartien-
nent au xi" siècle), on indique avec soin la mélodie, la séquence, l'air enfin sur le-
quel il convient de chanter chacune des proses du cycle liturgique. Il est aisé de
constater les mêmes faits à Limoges. Dans lems. de la Bibl. nat. lat., 887^P» »7r«)
les mots ineipiunt segtteutia: sont jdacés en tète de ces mélodies sans |)aroles, et
on les oi>pose aux prosw, dont la série conmience onze feuillets plus loin ((* 'ù6r^).
|)ans le ms. 1118(f''131 v° ) on peut. lire, en tète de ces mêmes ju6i7i, également
sans paroles, ces mots à peu près iilentiquos : Sequencias de loto circitlo anni.
Cesl l'équivalent do VInri])iiiut ineUntie animales in festivitalibus dicemijr du
ms. I(IK7 (f° U\H r»\ et de Vlnci})iunt seguentiw de cirt'ulo anni du ms. 1134
( f° 107 r"). En d'autr.'s manu>crils de même origine, on a tran.^crit a part le»
Se(iueliv de r.\lleluia en indiquant seulement le premier mot de cljacunc de»
proses qui en sont dérivées. ( Hibl. nal. lat.. 'MO, f- MO v*; IliSi, (*> 197 \«; 1I'2I,
l'ik< r-; 1133, f» 'M r»; IKio. 1-1 r>; IVM. P'y2; 1137, P> :W r». etc.)
3 Cuni adhuc juvenculus essom et MKi.i>i>i.t: i om.is«im.»; s.Tpius, memori.i- roni-
mendata", instabile corculum aufug''renl... cœpi tacilus nRvum volvere quonnni
modo cas poluerim colligare. (l'rologuo de .Notker, en tête de son LÀber sequen-
iiantm; Migne. C.XXXI, col. lINK^t, collationnc par nous sur l'?s mss. de Sainl-
Gall et de Munich.)
LES ORIGINES 15
on avait eu l'idée d'attacher, de lier quelques paroles,
la mémoire de nos pauvres chanteurs en eût été heu-
reusement rafraîchie, et ils seraient peut-être parvenus
à retenir ces airs malaisés et longs. Mais, pour toute
parole, la voyelle a : c'était trop peu.
On ne pense pas tout d'abord aux plus simples re-
mèdes, et c'est ce qui eut lieu pour les a queues » de
l'Alleluia. Toute la musique sacrée, d'ailleurs, souffrait
alors du même mal, et l'on commença par tenter une
réforme générale. C'était à Rome que l'on trouvait
alors les chantres les plus habiles : on se tourna vers
Rome.
Grégoire II envoya en France les chantres (nous
dirions aujourd'hui les maîtres de chapelle) qu'on
lui demandait; mais ils moururent sans avoir formé
de bons élèves, sans avoir fait école. Les années cepen-
dant succédaient aux années , et le mal ne faisait que
croître. Gharlemagne parut.
On connaît l'amitié très tendre qui unit entre elles
les deux âmes du pape Adrien et du roi Charles. Le
souverain pontife n'avait rien à refuser au Franc victo-
rieux, au Patrice de Rome, et il lui adressa sans
retard deux maîtres de haute valeur, deux musiciens
consommés: Pierre et Romaine
Ils partirent, et leur voyage fut inégalement heu-
reux : Pierre ouvrit à Metz cette école de chant qui
était destinée à jouir, durant tout le moyen âge, d'une
1 Rom.'iin avait aiiporlé avec lui une copie de l'Antiplionaire de saint Ciréiïoii'o,
quod ipse, Romas de autlientico tvanscrlptum, attulerat. Cet Anliiihonaira
de Romain, que l'on gardait à Saint- Gall connne une relique, est encore aujour-
d'hui, sous le n" 3i39, conservé à la bibliothèque de la célèbre abbaye. (Voy. un
fac-similé de ce précieux manuscrit dans les So'i/ffojvs de Pertz, II. p. 201, etc.)
Ce n'est pas ici le lieu de réveiller les polémiques relatives à la date et à la
valeur de ce texte.
16 iii.-Toiiii: itE [.A poK>ii: i.rrrndouE
incomparable réputation. (Jiiant à Romain, pris de
fn';vre, il (lut s'arnHer en route dans la célèbre abbaye
de Saint-(iall, et s'y trouva si bien qu'il y resta.
Pierre avait fondé l'École de Metz; iiomain créa
l'Kcole rivale. l'Keole-sœur de Saint-Gall. lleureu.se ri-
valité el «lui lu! sin^ailièrement profitable au cliant
sacré.
Les deux clianlies, donc, corrigent à l'envi et renou-
vclliiil les mélodies liturgiques. Ils composent de nou-
veaux morceaux et en font composer par leurs élèves.
Et quel est le genre où ils s'exercent de préférence?
Ce sont précisément ces neumes, ces sequeîx de l'AUe-
luia, que le temps avait atteintes et déformées. Pierre
compose des Séquences, (jui con(juièrent rapidement
un gland succès et qu'on appelle « Metenses », les
Messines; Romain compose des Romaines.
Les unes et les autres se cbantent toujours, sans
paroles, sin- la dernière voyelle a du mut .\lleluia '.
' « Qirolus nosler, Palricius, re.xaulem Francorum, dissonantia Homani el Gal-
licnni cnntus Rom.T oITensus, ( uni Gallorum procacilas cantuni a nostralibus qui-
liusdain naïiiiis arpunu'iilarelur es.se corrujitum, no.«lrii|ue e diverso authciitirum
niitipliuiiariiim |iri>l>abililer ostcntaroiil, iiilerropas.se ferlur quis « inter rivuni el
« foidi'iii liiii|piilioiX'm nqunm conservaro solerel »? I<es|ioiidoiitibiis « foidem », pru-
deiilor adjei'il ; « Krpo ot nos, qui do rivo corru|itani lynii>bani usque hadenus
" bibinius, ad pcreiinis fontis necesse est fluonla |irinci|>nlin rerurranius. » Mox
itatiuo duos suoruni iiidustrios clericos Adrianu lune cpiscuiiu deroliquit : quibus
t.itideni salis elepantor in^t^u^tis, Mi-tensein niotrii|iolini ad suavilateni nuxlula-
linnis |pristiihT ri'vocavit. ji.t «juani illaiii lot un rialliani suani correxil. .'^■•d, cum,
niulla posl l(Mnpora, di-funclis his qui lUmia' fuerant educali. cantuni (iallicana-
nuu < b'siarum a .Motensi discr.'pare prudi'ulissinius ri-cruni vidissel, ao unum-
i|U('niijue ab alterulru vilialuni cantuni jaitantt-in advertorel : a Iteruin, inquit.
« ri'deainus ad l'onteni. »Tunc. repis precibus, sicut hodie quidam veridice adsti-
pulantur, Adrianus pa|>a porniotus , duos in Galliani canlores eniisit : quorum
judiriii rox omiies quideni corrupisse dulcvdinem Homani cantus. b»vitali' quadam.
copiu)vit ; Mf'tens's vcro, sola naturali foritate, ]>aullulum «juid dissonar' |>er-
vidit. I Ionique usipie quantum Itomano caidui .Melensis cedil, taiduni MotiMibi
cedoiv ("lallicananim Gcrmaniarumqui' cantus. ab bis qui meram voritalem dili-
frunt. comprobiitur. Ila>c erpo per anticipaliomMu rclulerim. ne indiscussam (îal-
loruni Ifvitatem vidcar pneteri.sse. » ( Vita S. (iregurii /xi/w, aucloro Juliniinc
IHacono. lib. U, cap. i ; Artn SS. ^hll•fii, U. I i7. I'i8.)= n Knrcdus impomior.
LES ORIGINES 17
Cependant, en dehors de Metz et de Saint- Gall, en
dehors de ces deux nobles foyers de la science litur-
gique et musicale, les vocalises de l' Alléluia, défor-
mées et corrompues, demeuraient insaisissables à la
plupart des chantres effarés ou impuissants. Il semble
qu'à Saint -Gall même on les avait rendues plus dif-
ficiles en les faisant plus savantes et plus longues,
et les meilleurs élèves de Romain se disaient avec
désespoir : « Melodise longissimœ, ssepius mémorise com-
mendatse, instabile corculum aiifugiunt ' . » C'était le cri
de l'impuissance.
Bref, les gens d'esprit de ce temps -là se préoccu-
paient de trouver un moyen mnémotechnique pour gra-
cognomine Magnus, cum esset Romœ, ecclesias cisalpinas videns Romanae eccle-
siœ multimodis in cantu, ut et Johannes scribit, dissonare, rogat Papam,
tune secundo quidem Adrianum, cum defuncti cssent, quos ante Gregorius mi-
serat, ut iterum mittat Ronianos cantuum gnaros in Franciam. ^littuntur, secun-
dum régis petitioneni, Petrus et Romanus, et cantuum et septem liberalium
artium paginis admodum imbuti, Metensem ecclesiam , ut prières, adituri. Qui
cum in Septimo lacuque Cumano aère Romanis contrario quaterentur, Romanus ,
febre correptus , vix ad nos usque venire potuit; Antiphonarium vero secum,
Petro renitente, vellet nollet, cum duos haberet-, unum Sancto Gallo attulit. In
tempore autem, Domino sejuvante, convaluit. Mittit imperator celerem quem-
dam, quieum, si convalesceret, nobiscum stare nosque instruere juberet. Quod
ille quidem, patrum hospitalitati regratiando, libentissinie fecit : Quatuor, in-
quiens, inercedes vos, sanctiDomini, in me une acquisiistis. Hospes erat, et in me
eum collecjistis ; infirtaus , et visitastis; esurivit in me, et dedistis niihi in eo
manducare; sitivit , et dedistis ei hiberc. Dein uterque, fama volante, studium
alter alterius cum audîsset, emulabantur pro laude et gloria, naturali gentis suse
more, ut alterum transcenderet. Memoriaque est dignum, quantum bac emula-
tione locus uterque profecerit, et non solum in cantu, sed et in cœteris doctrinis
excreverit. Fecerat quidem Petrus ibi jubilos ad sequentias, quas Metenses
vocant; Romanus vero romane nobis econtra et amcene de suo jubilos modula-
verat: quos quidem, post, Notker quibus videmus verbis ligabat; frigdorse autem
et occidentanœ, quas sic nominabat, jubilos; illis animatus etiam ipse de suo
excogitavit. Romanus vero, quasi nostra prœ Metensibus extoUere fas fuerit,
Romanse sedis honorem Sancti Galli cœnobio ita quidem inferre curavit. »
(Ekkehardi IV, Casus S. Galli, cap. m. Pertz, Scnptores, II, p. 102. Cf. Vita
B. Notkeri Balbuli, auctorc Ekkehardo, decano Sangallensi, cap. ii. Acta San-
ctorum Apt'ilis, éd. V. Palmé, I, 379, 580. Ce dernier Ekkehard n'a guère fait
que reproduire, sans aucune critique, les deux textes précédemment cités.)
^ C'est le commencement de la Préface (Y. pp. 14 et 20) que Notker a placée
en tète de son Séquentiaire et que nous aurons lieu de mentionner plus d'une fois.
I — ■}.
18 IlISTOlIiR DK I.A POKSIF. L ITIJ nOIQUE
ver enfin ces terribles neumes dans la mémoire des
(( ncuin.ili/.imts » aux abois. IMiis diiii iimine, à Saint-
(lall, en avait i'(;sprit «obsédé et se posait ce rude pro-
blème dans ses méditations du jour et même de la
nuit : « Ctr'pi mecum volrere qiionam modo eas {melo-
dias\ jtotuerim colllgarc \ » (le cri naïf était le cri de
tous ceux (jui avaient alors quelque souci du chant
sacré, et la « queue de l'Alleluia » était certainement
r()l)j<t d'une de leurs i)lus vives sollicitudes. Gomment
faire ?
C'est du Nord que vint l.i lumière.
Un jour (c'était vers Tan 860) un étranj^^er se pré-
senta à la porte de Tabbaye de Saint-dall et y sollicita,
d'une voix humble, cette hospitalité que les abbayes
bénédictines ne refusent jamais. Cet étranger était lui-
même un moine et portait un gros livre sous son
bras. Quand on lui demanda d'où il venait : <( J'arrive.
« dit -il. de l'abbaye de Jumièges, qui a été dévastée
« pai- les Normands. Mon livre est un x\.ntii»honaire:
« le voici. »
Les moines de Saint-tlall accueillirent létranger, et
firent à son livre un accueil encore meilleur; mais sou-
dain ils jetèrent un cri de surprise. Les sequela' de
rAlleluia, ces jubili difficiles, ces vocalises compliquées
ne se chantaient pas, dans l'Antiphonaire de Jumièges,
de la même façon cpie dans les livres de Saint-Gall :
ELLES NE s'y CHANTAIENT PAS SANS PAROLES et SUr la
dernière voyelle a du mot alléluia. Non, non; là-bas.
en Xeustrie. on avait fait un pas en avant, un pas dt*-
cisif, et l'on avait remplacé cette voyelle a par des pa-
' C.0 sont les {«arolos mêmes (li> Nulk^r, l.c. |>. Jll. iioli' I.
LES ORIGINES 49
rôles, par un texte « suivi » et qui avait pour but de fixer
dans la mémoire les complications des mélodies allé-
luiatiques. A chaque syllabe correspondait une note;
à chaque note une syllabe. Le tout formait une œuvre
littéraire servilement calquée sur l'œuvre musicale,
mais qui était intelligible et pouvait devenir vivante.
Le grand, le vrai moyen mnémotechnique était enfin
trouvé, et c'est là ce qui excitait l'étonnement des
moines de Saint- Gall.
Or, il y avait à cette époque, dans l'abbaye de Saint-
Gall, un jeune religieux du nom de Notker, et qui
vers 840 y avait été offert tout enfant K C'était un
1 Notice sur Notker. a. D'Achéry et Mabillon ont consacré au bienheureux
Notker une excellente Notice en leurs Acla Sanctorum Ordinis sancti BenecUcti
(Sœculuni quintum, p. 11 et ss.). Ils commencent par distinguer nettement l'un
de l'autre les différents Notker dont le nom est parvenu jusqu'à nous, et la
besogne n'est guère moins aisée que pour les Ekkehard. D'après le Syllabus
monachorum Sancti Galli, il y en aurait eu jusqu'à douze. = b. Notker était-il
de Carolorum génère et sanguine Saxonum ? C'est ce qu'affirme Ekkehard V,
le crédule auteur de la Vita sancti Nolkeri. L'auteur plus autorisé des Casus
Sancti Galli, Ekkehard IV, se contente d'affirmer « qu'il était de famille illustre».
On Voffrit à Saint-Gall en 840. Il y eut pour maîtres Marcel et cet Ison qui
mourut le 14 mai 871 ; comme condisciples et amis Tutilon et Radpert. = c.
Ekkehard, qui est mort vers 1040, a fait de lui un portrait charmant : « Notkerus.
hominum mitissimus. » (Ekkehard IV, Casus S. Galli, cap. m. Perlz , Scripto-
res, II, p. 93.) « Notker corpore, non animo, gracilis; voce, non spiritu, bal-
bulus ; in divinis erectus, in adversis patiens, ad omnia mitis, in nostratium acer
erat exactor disciplinis; ad repentina timidulus et inopinata, prœter dœmones
infestantes, erat; quibus quidem se audenter opponere solebat. In orando, le-
gendo, dictando, creberrimus. Et ut omnis sanctitatis ejus in brevi complectar
dotes, sancti Spiritus erat vasculum, quo suo tempore abundantius nulluni. »
{Id., ihid. , p. 94.) = d. Charles le Gros tenait Notker en particulière estime.
Un messager de l'empereur trouva un jour ce poète et ce savant fort humble-
ment occupé à arracher des racines et à faire des plantations au jardin de l'ab-
baye. (Cf. le Thésaurus anecdotorum de Pez, t. I, 3» partie, p. 570.) =
e. D'Achéry et Mabillon énumèrent les différents livres attribués à ce Notker,
qui fut véritablement un des érudits, et surtout un des « saints » de l'il-
lustre monastère. Il avait fait sur les Epîtres canoniques en langue grecque un
travail que lui avait demandé Tévêque de Verceil, Liutward; mais ce travail
fut à moitié détruit par un envieux : « De Notkero , quœ reliqua sunt , au-
denter narrabimus , quoniam illum Spiritus sancti vas electum ncquaquam
dubitamus. Remansit ille sanctissimus uterinis in spiritu viduus et orbus.
Tandemque malum illi, quu dolore cordis intrinsecus tactus est. accidif. Episto-
20 IIISTOIHK DE I.A POKSIK I.ITritr.lOl'E
homme d'étude, et qui surtout «'tait IVrii de musique.
Il lut lavi à la vue d(3 l'Aiitiplionaire de .luiuiAges;
mais, avec son goût littéraire qui ne manquait pas
d(3 fmesse, il comprit rapidement que les paroles
du crû de Jumièges n';ivaient aucune valeur, et se
l»rit sur-le-chanqj à en composer de nouvelles.
Ce furent les premières proses '.
las cnnonicas grœcas a l^iulwardo Vercollensi episeopo petitâB , mulli» sudo-
ribus ille oxcmplaveral. Et crxc Siiidolfus, mapriius jam et iira-polens in loco,
lit (liximus , codicern illum délicate 6cri|)tum , casu incurreris , furatus est el
sirigulas qualernioiium , sicut hodie vidcre opt, cultro excisas discerpsil atque
depravavil. » (Ekkehard IV, Casus Sancli Galli, cap. m. Veriz , Scriptoras , H,
p. \()\.) = f. Le principal litre de gloire, l'œuvre la plus célèbre de Notker, fui
le « Livre des Séquences » dont nous avons parlé. ( l'atrolofjic de Mipno , LXX.XI,
roi. 993-1179, etc.) V les textes précédents. Cf. (juiberl de Tournai, De of-
fuio Ephcopi et Ecclesix cœretnoniis ; Maxinia Libliol liera Palnim , Lyon,
1677, XXV, 'lOS; saint Bonaventure, Expnsitio Missw, en ses Œuvres, édit. de
Lyon, lfi68, t. Vll, p. 7'i; Vita li. Notkeri Jialhuli, auctore Ekkehardo. decano
Sanpallensi, cay>. iv, Acta S3. Aprilis, édit. l'aimé, I, p. oH'i; œuvre dont il faut
se délier et qui, d'après Mabillon, L c, p. M. erralis referta est, etc. etc. =:
g. D'après les Annales Sanfjallenses majores, la mort de N'otk<'r peut être fixée
à 912, et c'est cette date qui est adoptée dans les Scriplores de Pertz (M.
|i. 101 , note 33); Mabillon l'avait |ilacée en 9(»9. Le Necrolofjium Nvlkeri nous
aide à aller plus loin, et l'on jieut attribuer au liuit des ides d'avril l'obit de ce
Notker fjui serjuentias lotnposnit. (Acta Satulorum Ordinis sanrti Benetticti ,
l. c., 17.) = /(. Si l'on veut connaître l'écriture même de Notker. on en trouvera
un si)écinien curieux dans les Scriptores Ae l'ertz (t. Il, en repard de la p. 101,
n" 2, a). V. sur Notker les Notices de D. Ceillier, Histoire yénérale des au-
teurs sacrés et ccclésiastifjties , édit. Vives, Xll. col. 9r>3, et de Vllisloire
littéraire, VI, p. i:5'» et suiv.
' Tous les faits qui précèdent sont tirés de la Préface du Liber sefjuentiarutn
de Notker, dont nous avons eu déjà l'occasion de citer les premières lipnes :
« ("uni adbuc juvenculus esseni, et melodiae lonpissimse, saepius memoriae com-
mendata?, inslabile corculum aufuperent, cœpi lacitus mecum volvere quonam
modo cas poluerim collipare. Intérim vero contigit ut presbyler quidam de
Gimedia, nupcr a Nordmannis vastala, veniret ad nos, Antiphonarium suum
secum deferens, in quo aliqui versus ad sequentias erant modulali, sed jani
tune nimium viliali. (Juorum, ut visu delectalus, ita sum pustu amaricatus. Ad
imitationem tamen corum cœjii scribere : Laudes Deo conciliât orbis universus,
qui (jralis est libcratus, et infra : Coluber Adœ tnalesuasor. (^Kios cuni nia-
gistru nieo Ysoni obtulissem , ille, studio mec conpralulitus imperitis'que
compassus, quse placuerunt laudavit ; qujc autem minu*. cmemlare curavit,
dicens : « Singuli motus ranlilonn» singulas syllabas debent habere. •• Quod au-
diens, ea quidem qUcT in ia veniebant, ad liquidum correxi. Quœ vero in le vel
lu quasi impossibilia vel altomperarc neplcxi, cum et illud postea vi.»u farilli-
nuim deprehenderim, ut testes sunt Dominus in Sma el Mater. Horque modo
iii^truilus, secunda niox voce diclavi : ■■ Psallat Kcclesui mater in/i/xi/a. »
LES ORIGINES 21
A vrai dire, ce furent les premiers tropes, et la
prose n'est, en effet, que le trope du dernier allé-
luia DU GRADUEL '.
Quos versiculos, cum magistro meo Marcello prœsentarem , ille, gaudio reple-
tus, in rotulos eos congessit et pueris cantandos aliis alios insinuavit... »
(Patrologie, CXXXI, col. 1003, collationné sur les mss. de Saint-Gall et de
Munich. )
1 Cf., sur cette origine, les textes suivants, que l'on pourrait aisément multi-
plier : 1" Graduale et Alléluia Ambrosius composuit, sed Gregorius papa ad
missam cantari instituit, qui etiam in festivis diebus neumam, quae jubilum
dicitur, jubilare statuit. Sed abbas Notkerus de Sancto Gallo sequextias pro
NEUMis COMPOSUIT, quas Nicholaùs papa ad missam cantari concessit. » ( Honorii
Augustodunensis Ge»i»m animss, Bibl. nat. lat., 11579, f'Sov", etc. etc. — C'est
par erreur que, dans ce texte comme dans plusieurs autres , Notker est appelé
abbé de Saint-Gall.) := 2» Quando sequenti.\ sequitur, posterius alléluia non
HABET PNEUMA ; SED CHORUS IN LOCO EJUS SEQUENTIAM CONCINIT qUSG idCm sigui-
ficat, id est œternœ vitae gaudium atque delicias. Unde illa nova solet habere
verba et inusitata, quia cœli gaudium secretum est... Quidam ecclesi.c mystice
pneumatizant SEQUENTIAM SINE VERBis. » (Speculwii de MijsterUs Ecdesiss, attribué
à Hugues de Saint -Victor, cap. vu ; Migne, CLXXVII, col. 319.) = 3° Post
responsorium sequitur Alléluia gaudium ineffabile designans... Alléluia repctitur
cum pneumate, et significat laudem Patris. Significatur autem per sequen-
TiAM idem quod per PNEUMA , uudc iu autiquis sequentiis sunt verba incognita ,
quia ignotus est nobis modus laudandi Deum in patria. (Bibl. nat. lat., 14801:
Tractatus domini Hugonis cardinalis « De ordine missee », f° 132 v°. ) =
4° Additur sequentia, et non protrahitur secundum Alléluia, sed sequentia loco
EJUS canitur, per quam œterna gaudia et sanctorum laudes designantur. Unde
scriptum est : « Beati qui habitant in domo tua, Domine; in saecula saeculorum
laudabunt te. » Unde et sequentia maxime in consecrationibus et dedicationibus
ecclesiarum dicitur, verba continens laudabilia et dulcedine cantus plena, in
signum sanctorum igné sancti Spiritus^ardentium et dulciter concordantium ,
ut in ista sequentia dicitur : « Rex Salomon iacit templum. » (Guibert de Tour-
nai, Tractatus de officio Episcopi et Ecclesise cseremoniis; Maxima Bihliotheca
Patrum, Lyon, 1677, XXV, 408. ):=5° Antiquitus enim mos erat, ut semper
cantaretur alléluia CU.M PNEUMA ". scd postca idem papa [Nicolaiis] instituit,
LOGO iLLius PNEUMA, in prœcipuis festivitatibus, sequentias dici. Quando ergo
NON dicitur alléluia, NON DEBET SEQUENTIA DICI, QUONIAM LOCO PNEUM.E EJUS
dicitur, et idem significat. (Guillelmus Durandi, Rationale, IV, cap. xxii; éd.
de Lyon, 1574, f» 124 r". ) = 6° Nocherius, abbas Sancti Galli in Theutonia , primo
SEQUENTIAS PRO NEUMIS ipsius ALLELUIA COMPOSUIT, et Nicolaiis papa ad missas
cantare concessit. (Guillelmus Durandi, Rationale, ibid.) := 7» Quidam ecclesi^
MYSTICE pneum.itizant SEQUENTIAS SINE VERBIS aut saltom aliquos versus earum.
(Guillelmus Durandi, Rationale, ibid. Cf., plus haut, le texte d'Honoré d'Autun.)
= 8» Hodie sequentiee cum voce signilicativa dicuntur. (Guillelmus Durandi,
Rationale, ibid. = 9* In quibusdam ecclesiis, in quibus neuma non dicitur...,
LOCO JUBILl et NEUMiE TROPIII ET SEQUENTIiE DECANTANTUR... (Ibid., V, Cap. Il,
§ 32, éd. de Lyon, 1576, i" 216 v, 217 r».) Etc. etc. = Ce n'est pas ici le
lieu de relever les erreurs évidentes qui sont contenues en quelques-uns des
textes précédents. Nous le ferons dans notre Histoire des Proses.
22 MISTOIItK I)i: I A lM)i;<IK I.ITUHGIOL'E
Certes, les proses ne ressemljlent pas absolument
à ces interpolations liturgiques, à ces tropes qui seront
l'objet particuli"'i- d»- ce travail. Mllfs oui uik- imitor-
tance et oflrent un développement plus considérables ;
elles ont été écrites (le plus souvent du moins, à l'ori-
gine) sur une musique préexistante; elles ont d'abord
présenté un caractrre principalement mnémoteclinique;
elles n'ont eiilin (pie médiocrement allongé l'office
divin.
Mais, malgré tout, c'est là une addition, et une addi-
tion dangereuse, aux textes vénérables, aux textes pri-
mitifs de la liturgie catholique. C'est le premier outrage
qu'on ait fait subir à l'œuvre auguste de saint Grégoire;
outrage respectueux, je le veux bien: outrage pieux, je
l'accorde encore, mais outrage enfin, et qui sera suivi
de beaucoup d'autres.
Prosce: tel est le nom qu'on ne tardera pas à donnera
ces paroles placées sous les neumes. sous les sequentiie
de ralloluia.
Prosic : tel sera aussi le nom (pie l'on donnera
bientôt aux tropes du Kyrie, de l'Oirerloire, du Sanctus.
L'exemple est donné : on va le suivre.
CHAPITRE lY
A SAINT-GALL — LES VERSUS *
C'est à Saint-Gall qu'il nous faut faire halte; car
c'est de là que vont tout à l'heure sortir les tropes
1 Notice sur les Versus. — 1" Les Versus, qui tiennent de l'hymne plus que
de la prose, ont peut-être eu leur premier type dans l'hymne Pange, lingua,
(jloriosi lauream certaminis, attribuée à Fortunat , que l'on chante, avec un
iiEFRAiN {Dulce lignum), pendant le rite ani^uste de l'Adoration de la Croix le
jour du Vendredi saint. Leur second type, plus récent, est ce Gloria, laus,
lionov, de Théodulfe, qui est chanté, depuis dix siècles, durant la procession du
dimanche des Rameaux. = 2» Les Versus sont toujours chantés. {Versus
Ilartmanni ante Evangeliuni, cum legatur, canendi, Saint-Gall, 381,
p. 23, etc.) Ils sont partout, dans les manuscrits, accompagnés d'une nota-
tion musicale. = 30 Les Versus ne sauraient être confondus avec les
Hymnes. Ils en diffèrent essentiellement : a Par leur place dans l'office divin.
Les Hymnes ont uniquement leur place marquée dans les Heures canoniales,
où LES Versus n'ont jamais pénétré. Ces derniers, comme nous le verrons
plus loin , se chantent principalement aux Processions, b Par leur refrain.
Nous établirons tout à l'iieure que le plus grand nombre des Versus comportent
un double refrain, c Par la doxologie, enfin, qui fait défaut à beaucoup de Versus.
= 4" Il y a plusieurs espèces de Versus, et rien ne saurait être moins fixe que
ce genre, dont le nom lui-même est si général. Mais, à tout prendre, on
peut diviser en deux grandes catégories les Versus de nos manuscrits, suivant
qu'ils olîrent ou n'offrent pas de refrain. (Sont munies d'un refrain les
pièces suivantes : Ardua spes mundi; Aurea lux terrse; Dumpietas multi-
moda; Laudes, omnipotens ; Sacrata libri dogmata; Salve, lacteolo decoratmn
sanguine festum; Salve mirificiim,... venisti; Salve mirificum,... hoc fecundata ;
Volis simplicibus.) = ÎJ» Il importe de se faire une juste idée de la façon dont
est agencé le refrain des Versus. Ce refrain et-t douislk. Voii-i, i)Our prendre un
2', msToiiii': i)i: i..\ poksii: m'i inciorr-:
pour laiif le loiir «riiiif Liiatid*- jtartir «le la clirf'liciilL'
occidciilalc. Si nous pouvions dresser une carte de
cxiMiipl'! cl.iir, !<!?! iliux |priiiii<'r- vurs de la pièce Aurca luu- li'rru- : « Aurea
lux terrn?, doiiiiiinlrix iiirlyl.n, wilve, — O»"' «liirnilnis noptris nurir Lenedicla
vonis. » I>e )»rcmi<'r vers, Aurea, c<iinpoi«e un |treinicr refraiit, que Ton répète
après les rouplets 2, 'i, 0; le second vers, (J\tiv ilotnihux , eu foriii' un aulrc,
que l'un répèle après les couplets 3, 5, 7. ( PalroUxjie , LXX.W'II, col. ''il.)
.\utre exemple (jue, pour |)lus de lucidité, nou- donnons ici m extenso (.Saint-
Gall,38I, |i. 23) : Sacrata libri dopmata — l'ortantur evanpelici , — Ci/sctib
slupenila genlibus — Kt pra-ferenda laudibus. Sarrata = Mundcmus omiics
corpora — Sensusque cordis simplici — l'urfrantes conscientia, — Verha pen-
scmus inyslica. Citnclis = ^'ullu declini jiariler — Clausa lenenles stomala.
— Stemus inlonlis aurihus, — L'I decet ante iJominum. Sacrala. = Ncc
sat videlur soiiitus — Auditu solo capere, — Nî cor purfr-dum teneal —
Faclisque Jussa cumpleat. Cunclis. ( Palruloffie, LXX.Wll , col. 29.) Kn
somme, il y avait, comme on le voit, deux refrains alternativement emprun-
tés aux deux parties de la première strophe, et qui sont alternativement ré-
pétés à la fm do chacune des autres stro[)hes. Pour les distiques . cliacun
de ces refrains consiste en un seul vers; pour les ïamliiqucs, en deux. =
6° Comme l'indiquent les rubriques mêmes de nos manuscrits ( .Saint -Gall,
3<)0, p. 1, Versus in Nativilale, in prm'essionibus vel infra ranendi), les
Versus se chant*Tient surtout i>ans I-es processions. Mais, tout d'abord, il ne
s'apit pas uniquement ici des processions «avant la .Messe ». Il y avait,
par exemple, le llivc est clam (ties ( Hibl. nal., nouv. acq., 123o, f" 76 v"), qui,
dans certaines CL^ises, se chantait le jour de IMques in reditu fontiutn; le
liex sanctonnn Angeloruin , qui se chantait, durant la nuit de la même fête,
après le grand Baptême ; VO Redemplor, sume carnwn, qui remonte au
v«-vi" siècle, et se chante encore le Jeudi saint « ad Chrisma ». Des Ver-
sus qui, plus que les autres, ressemlilent à nos tropes, ce sont ceux d'Hart-
mann, qui se chantaient avant l'Evantrilo : Sacrata libri dorjmata. Knfin, il y a à
sitrnaler, dans un dernier irroupe , tous ces T'tvsi/s ad suscipiendum retjent que
l'on chantait, en dehors do l'oftlce, lorsqu'on allait processionnellenicnl au-devanl
dos souverains qui visitaient î^aint-Gall. Malgré tout et somme toute, les
Versus sont surtout un chant proci'ssjonnai. = 7"» Un certain nombre
de Te»\sMs manquent absolument de doxolopie: Carniina nttnc feslis; Cutn nalus
essel Dominus; Jlumili prece; Jain /idelis turba fratrutn; Miles ad castnitn;
Sacrata; Salre, lactcolo; Votis supplicibus; Aurea lux lerrac; Ave, beali fjer-
uiinis; Jniperatoruni cjcninien potenluin ; liex benedicte, reni ; Sah'c, (esta
(lies: Suscipe rle»ienteiii. Pour ces six dernières pièces, consacrées à la récep-
tion des rois ou des reines, l'absence de la doxolopie n'est que trop naturelle.
— Quelques Vt;»\«îi<s ont une doxolopie indécise : Annua , sonde Dci : Chrislus
ad nostras. — D'autres, enlwi, ont une véritable doxolopie: Ardua spes ntundi ;
iMudes , nn}nipotens; Mire c\inclorinn ; Ilex sanclunnn a«f;«'/o»*N»«.= H» Mètres
employés dans les IVrsi/s .• a. Distiques : .t>i;ii(n. sancte Dei ; Attiua sfies tnundi :
Jluniili prece; Laudes, nniniiMtens; Rex l>enedirte , veni ; Salve, fesia dies ;
Salve, lactcolo; Salve, tnirifiniin..., venisli ; Salve , niirificunt... Iioc feeundala :
Suscipe clenientetn... — /;. lambiques dimètres ; .lie, beati genninis; Cum na-
tus esset Dominus; I)um ])ielas )nultimiHla; Sacrala libri dogmala. — c Se-
ptenarii trochaïques : Rex sanctorum angelontm... — d. Strophes saphiques :
Clirislus ad noxiras; Iniperalonim ijenimen fHitenlutn ; Miles ad casiitim ;
A SAINT-GALL — LES VERSUS 25
leur itinéraire, c'est de là que partirait notre tracé.
Nous le dessinerons ailleurs.
Mire cunctorum. Ces strophes saphiques sont déjà réduites a un même nombre
DE SYLLABES 1 Cliristus ad nostras veniat camœnas, — Christus et vocem tribuat
salubrem, — Christus et vitam vehat ad i^erennem — Se modulantes. =
9' Assonance. Le goût de Tassonance se développe dans les Versus de la fin
du IX' siècle, du commencement du x", et l'on voit que ce goût était déjà uni-
versel et profond. Quand Salomon (abbé de Saint-Gall, 890-919) contraint les
écoliers de Saint-Gall à « se racheter » un jour d'un léger manquement contre
la discipline, ceux-ci le payent à coups de vers latins, voire de fort mauvais
vers. L'un lui dit : « Quid tibi fecimus iale, ut nobis facias male9 — Appellamus
vegem, quia nobis fecimus let/em » : et voilà qui va jusqu'à la rime. Mais il n'en
est pas toujours ainsi, et c'est ce qu'attestent les vers suivants : « Non nobis pia
s,pes fuerat, cum sis novus hospes — Ut vêtus in pe/!<s transvert ire tute velis
JMS. ))(Ekkehard IV, C'asKS Sancti Galli. Pertz, Scriptores , II, p. 91.) Cette ten-
dance se manifeste dans tous les mètres de nos Versus: a. Anmia (distiques):
Annua sancte Bei celebremus festa diei — Qua , pater, e terrîs sidéra , Galle ,
petfs. — b. Ardua spes nmndi (distiques) : Aspice nos omnes, clemens Baptista
Johannes^ — Petreque cum Paulo^ nos rege doctiloquo. — c. Cum natus esset
Doininus (ïambiques) : Completur sœva juss/o; — Mactatur omnis pus?o; —
^tatis bimœ parvuh', — Vel infra, subduntur nec(. — d. Dum pietas (ïambiques) :
Dum pietas multimoda^ — Deus gubernans omnia, — Per virginem puerjieraxi
— Formam sumpsisset carneatti. — e. Laudes, omnipotens (distiques) : Angélus
œthereîs sanctus descendit ab astris, — Purificans corpus cor pariter que prius. —
f. Salve, mirificum..., Venisti (distiques): Venisti mundo nova gaudia condere
mœsto — Et tibi devotis pandere te famuh's. — g. Salve, mirificum..., Hocfecun-
data : En Jesse virgam décorât bene flosculus illam^ — Vatis ut exorsa prœci-
nuere sacra. = lO" La date exacte de la composition des Versus est difficile à
préciser. II en est cependant qui semblent porter leur date en eux-mêmes ; mais
là encore il peut y avoir matière au doute. Telle est la Litania attribuée
à Notker { Patrolog ie , LXXXVII, col. 42), où nous lisons ces vers caracté-
ristiques : « Ut rex noster Chuonradus et exercitus — Hinc inde servetur. »
Cette pièce ne peut se rapporter à Conrad I (912-918) si l'attribution à
Notker est véritable. En effet, Conrad est monté sur le trône en oc-
tobre 912, et Notker était mort en avril de la même année. Il est donc plus
que probable que la pièce aura été retouchée, que le mot Chuonradus est
le fait d'un scribe du xi" siècle, et que ce vers enfin se rapporte à Con-
rad II (1024-1039): d'autant que, suivant M. de Longpérier, la forme Clmon-
radus se réfère particulièrement à ce Conrad. Comme on le voit, les difficultés
sont grandes. = 11» Il convient de se défier des attributions de tels ou tels
Versus à Radpert, à Hartmann, à Notker le Bègue, à Notker le Médecin
et à Tutilon. La plupart de ces attributions n'ont rien qui s'impose à la cri-
tique. On peut affirmer que V Ardua spes mundi est de Radpert et Vllumili
prece d'Hartmann ( Ekkehard IV, Casus Sancti Galli. Pertz, Scriptores, II,
p. 80); mais il y a quelque incertitude pour la plupart des pièces congénères.
^ i2° C'est à Saint-Gall que les Versus ont reçu leur plus complet dévelop-
pement. Peu d'églises sont entrées dans celte voie, et il ne nous est définiti-
vement resté, dans la liturgie, que le Pange, lingua (à refrain) du Vendredi
saint, le Gloria, laus , Itonor du dimanche des Rameaux, et l'hymne 0 iîec/ewp-
tor pour la consécration du saint Chrême.
26
IIISTniIiK |)K I.A l'OKSIK UTUHriKtl E
Grûco à un licaii plan du ixe siècle, il est aisé de se
représenter auj()ui<riiui ccl illustre monastère, qui lut
13" Type dos Versus :
Versus in Nat., in processionibus vcl infra canendi.
Salve, mirificnm sompcr Dcus in Paire Vnrliutn,
Mirilico iiarlti jaiii caro carne satiini. Salvi;...
Venisli miindo nuva f^audia condere niœsto
Et libi dcvotis pandcrc te fumulii^. Mirifico...
Pcrsultant nostr.T libi, Virpo Maria, raniœna;,
Quac rutilas lantis conpTua mystcriis. Salve...
Sed qua: condig-nas libi linfrua rependere laudes
Praîvaict, cxtollons nomcn ad asira luum? Mirifico..
Quem non immcnsi capiat teres orbila niundi.
In tua se clausit viscera, factus liomo. Salve...
Ad crucem
Cœlum curvavil, sola fecit, et squora fudil,
Principii princcps, omne quod est faciens.
Ad Sanctum- Othmarum
Excrescens lapis, absque manu de monte revulsus,
Mole sui niundum obtinuit stupidum.
I.N CUOIIO
Scmper cun» Paire, cui virtus et gloria consors,
iliquipar et regnum , splendor, honor, solium !
(Bibl. de Saint-Gall, 300, xii- siècle, pp. 1 et 2,610.)
1 i" lablc des Versus :
.Viinua, sanclc Dei, celebremus fesla diei.
.\rdua spcs mundi , solidator et inclj te cœli.
.\udax es, vir juvcnis.
.\urea lux terra;, doniinalrix inclyta, salve.
Ave, beali germinis,
clytc.
Invicte rcx et in-
Vcrsus Radperti de festivitate sancti Galli, Bibl.
de Saint-Gall, 381, p. 1-4. Cf. 360, p. 25, etc.,
et Palrologie de Migne, d'après Canisius,
LXXXVII, col. 35.
Versus Hadporti ad proce«<ionem diebus do-
minici?. Pibl. de Saint-Gall, 381, p. 42,
et 350, p. 23. .Munich, lat., 11083, f» 3« v ( ms.
de Saint -Emmeran), etc. Dans le ms. 3C0,
la rubrique est la suivante : Infra Ocl. Peu-
tecotte» , etc. Dans le ras. de Saint -Emme-
ran, ces vers sont mis au nombre des Domi-
nicale» Utaniœ. — Cf. Palrolotjxe, LXXXVII ,
col. 30.
Petit [Mjème, dont les vingt-trois o'Uplfts com-
mencent par .\, B, C... II a pu être employé pra-
tiquement le mercredi des Cendre?, puisqu'on
lui a donné wmme refrain les fameuses pa-
roles : Attende, Homo, quia putci* e$, et in
pxtlvrrem recerlerit. [Mono, Hymni lalini
medii ecvi , I, p. 3»5, no 288).
Versus Hadperli ad reginam suscipiendam. Bibl.
de Sainl-iiall, 3.^1. p. S8, etc. Cf. Patro-
logie, LXXXVII, col. il.
Ad su^icipicndum roî.'om '( versus] Nolkcri ma-
gislri. Bibl. de Saint-Gall. 381. p. 47. Cf.
Patrologif, LXXXVII. col. 40.
A SAINT-GALL
LES VERSUS
27
un moment le centre musical du monde chrétien. Je |
me persuade qu'aux ixe et xe siècles tous les moines y S
Carmina nuncfeslis psallamus ritechoreis.
Christus ad nostras venial camœnas.
Cru;; fidelis, intor omnes arbor una nobilis.
Cuni natus esset Doniinus.
Dum pietas multinioda, — Deus gubcrnans
omnia.
Exornet , niundando nostra — Clemen-
tissime pectora.
Factor orbis angelorum per novenos ordi-
Feslum sacratum psallimus.
Gloria, laus cl honoi- libi sit, rex Chrisle
redenipior.
Hœc est clara dies, clararum clara dierum,
Humili prece et sincera devotione.
Imperatorum genimen potcntium.
Inventer rutili, dux bone, luniinis.
De sancto Magno , auctore Hartmanno. Bibl.
de Saint- Gall, 381, p. 101. Cf. Patrologie,
LXXXVII.col. 47.
In Ascensione. Aurtore quodam monaclio Sancti
Galli anonymo. Bibl. de Saint-Gall, 381, p. 138, et
■ 360, p. 17, etc. Cf. Patrologie, L.XXXVII, col. 33).
Feria sexta hebdomadis sacrœ : Fange lingua
gloriosi , etc. Auctore Venantio Fortunato.
(V. Lettres chrétiennes, janvier- février 1882,
p. 245 et suiv. CL yione, H ijmni latinimedii
aevi, I, p. 131 , n» 101 , etc. etc.) C'est un des
types les plus anciens des Versus ; mais ce
n'est réellement qu'une hymne chantée en
cette circonstance avec un refrain.
Versus [Hartmanni] de festivitate Innocentiuni.
Bibl. de Saint-Gall, 381, p. 27. Cf. Ilymni
latini medii sévi , III, p. 32, no 640, et Patro-
logie, LXXXVII, col. 31.
De sancta Maria Magdalena ; auctore sancto .\ud-
berto episcopo? Ms. bisontin du xf siècle. Bibl.
de la Propagande, Borgia, M VI 27, fo 236 v.
In Penlecoste. Bibliothèque de Saint-Gall, 360,
p. 21, etc.
? In festo sancti Michaelis. Il n'est pas certain,
à beaucoup près , qu'on ait jamais chanté ces
Versus dans les processions. — Mené, Ilymni
latini medii wvi, I, p. 438, no 306.
In festivitate sancti Othmari. Auctore ? Rad-
perto.Bibl. de Saint-Gall, 360, p. 27, etc. Cf.
Patrologie, LXXXVII, col. 33.
In ramis Palmarum. Auctore Theodulfo. Un de
nos plus anciens types des Versus. Bibl. de
Munich lat., 14083, fo 85 ro. Bibl. nat. lat.,
1121, fo 143 vo, et 1240, fo 21 vo (mss. de
Saint -Martial), etc. etc. De tous les Versus,
c'est, avec le Crux fidelis et l'O Eedemptor,
le seul qui soit définitivement entré dans le
corps de la liturgie.
In die Paschae, » in reditu fontium ». Bibl. nat.,
nouv. acq., 1235, fo 76 vo, etc. etc.
Versus Hartmanni ad processionem dominicis
diebus. Cette lilania, approuvée par le pape
Nicolas m y est l'œuvre la plus célèbre d'Hart-
mann : Bibl. de Saint-Gall, 381, p. 29; Bibl. de
Munich lat., 14083, fo 3 vo, etc. etc. — Dans
le ms. de Munich, qui vient de Saint -Emme-
ran, ces vers sont placés parmi les Dominica-
les letaniœ. — Cf. Patrologie, LXXXVII, col. 32.
Ad regem suscipiendum. Auctore ? Waldramno
decano. Bibl. de Saint-Gall, 381, p. loO, etc.
Cf. Patrologie, LXXXVII, p. 44.
In sacro Sabbato, novum lumen ad dcferendum de
sacrario in ecclesiam, isti versus Prudentii canen-
di sunl : Berlin, Theol. lat., no 1 1, fo 42 ro, etc.
2S
in.-TOIHK I)K LA l'OhlSlK \AT\J ÏH.Kji:]-:
devaient «'tre musiciens; mais quatre noms, à tout le
moins, méritent detre arrachés à lOiihli : Notker,
Ilarlin.iiiii. Iiailpcrt . Tutilnii.
Jani fidcli» liirlin fralrtim voce dulciïonct.
I.auilcfi, omnifiotens , forimus tihi doua h
renie».
Miles nd caslrum propcrcs novclluiii.
Mire cunclorum Deus cl crcalor.
O Hedemplor, sumc «armon tomcl (onci
ncntiuin.
Pangc, lingua, gloriosi. (V. Criix fideliê.)
P/ieumatis aetcrni, Deus, assit gratia nobis.
lîcx bcncdicle , veni , visons liabitacula
Galli.
Hex sanclorum angeloruni , loium miinduni
adjuva.
Sacrnla libri dogmata — l'urlantiir evan-
goiici.
Salve, crux, salve, niiindi.
Salve, festa dies, loto vcncrabilis aevo.
Versus ad soleinnern (lor campos et montes pro-
ccA<<ion<-m de rcliquiis sancti (iallL Auctore?
Waldrainno : Palrologie , I, XXXVII, o>\. Vt.
Vcrwu" (Madpcrli?) ad Kucliaristiam samt^ndam.
liibl. de Sainl-Gall , 3H0, p. 104 et 3«t , p. 45.
Ft.rliii , Theoi. lat., n« 11, f» 54 r». Munich,
lat.. liffr'a, f« 85 vo, etc. etc. Cf. Palrologie,
I-XXXVII.col. 40.
Inviiatio »ancli Magni; anonymi. Patrotogif ,
LXXXVII, col. 4«.
I<adperli,dc sancio Mapno. Bibl. do Sainl-Gall, 3«l,
p. 151, etc. Cf. Po<ro/o^i>, LXXXVII, col. 4i.
Versus ad chrisma canendi. Berlin, Theol. lat.,
n» 11, 32 ro; Londres, Add. manu?. 1976»*,
fo37, etc. etc. Cf. .Mone, /. c, p. 102, n» M), c\n. etc.
Ce chant remonte certainement à une plus haute
antiquité que la plupart des autres Venu».
In Pentecoste. Bibl. de Saint -Gall, 360, p. 21,
et Ztii, p. 14, etc.
Versus Waidramni? ad suscipicndum rcgem. Bib!.
de Sainl-Gall, 3«l , p. 14, etc. Cf. Palro-
logie, LXXXVII, col. 44.
Bibl. de Sainl-Gall, 300, p. 20; 381, p. 49; 382,
p. 14, etc. etc. Il Ad desccnsum fontis • (Bibl.de
Sainl-Gall, 381). « Lelanix ad baplismum
in Sabbato sancto. ■> (Munich, lat., 140x3,
fo 83 ro). I) In noctc vcl die Pasch* , ad bap-
lismum, in fonte sancti baptismi * (Mone,
Hymni latini fnedii levi , I, p. 183, n» 138).
Cf. Palrologie. LXXXVII. col. 40.
Versus liartmanni anlcEvangclium, cum lepalur.
canendi: Bibl. de Sainl-Gall, 3«<i. p. !i>l ; 381,
p. 22, etc. Cf. Mi>no, //j/nini latiui medii «ci,
I, p. 302, cl Palrologie, LXXXVII, col. -29.
Sur la croix : « L)ulco lignum « : Echlernach, Bibl.
nat.,105I0,f°49,elc. Cf. Beiners,/. c, pp. 90,»!.
Il Versus Forlunati de resurrectione Domini. •
(Bibl.de Sainl-Gall, 381, p. 30.) ■ In ilie Pas
chx. •> (Bibl. de Saint -Gall, 360. p. 5. Berlin,
Theol. lat., n« 11, 46 r<>. Muni.-h. lai.. 140». f» «
v», etc. etc.) Cf. Martène, De anliçui* BecU-
$iœ rilibus, III, 508, etc. elc. — On répète oc
chanl les 2«-5« dimanches après Pâques, mais
avec des vers Sf>ooiaux pour chaque dimai>chc :
2» dimanche : Chrisle, decus rcrum , bon« con-
dilor alquc redemptor. Bibl. de Sainl-Gall,
360, p. 7. — 3» dimanche : Qui cracifiia» eml,
Deus ecrc per omnia régnai. Ibid., p. 8. —
4» dimanche : Qui pcnus humanum cernons
mersissc profundo. Ibid., p. 9. — > dimanche :
Bex sacer, ecce tui radial pars ma^nui trium-
phi. Ibid., p. 10.
A SAINT-GALL — LES VERSUS 29
Notk^r n'a pas été, il est vrai, le premier inventeur
des Proses; mais il les a si visiblement perfectionnées,
qu'il a fait oublier les pauvres moines neustriens, dont
l'œuvre était à la fois si ingénieuse et si imparfaite.
Tutilon, qui mourut dans le premier quart du
xe siècle, peut passer pour le véritable créateur des
Tropes, et il n'a eu que trop d'imitateurs.
Enfin son contemporain Hartmann est, avec Rad-
pert, l'auteur incontestable d'un certain nombre de
pièces en vers, qui commencèrent sans doute par
être modestement extra -liturgiques, mais finirent, à
Saint- Gall et ailleurs, par revêtir bientôt un carac-
tère plus officiel. C'est ce qu'on appelle fort simple-
ment les versus.
Salve, festa dies, laudabilis atque bcata. In susceptione principis. Auctore ? Tutilonc.
Bibl. de Saint -Gall, 360, p. 33. Patrologie,
LXXXVII, p. 56.
Salve, lacleolo decoratum sanguine festum. Versus Hartmanni de natali Innocentium. Bibl.
de Saint -Gall, 381, p. 25,61360, p. 2, etc. Cf.
Patrologie, LXXXVII, col. 31.
Salve, mirificuni semper Deus in Pâtre In Xalivitate Domini. Bibl. de Saint -Gall, 360,
Verbum;— ... Venisti mundo. p. I, etc. Cf. Patrologie, LXX.XVII, col. 55.
Salve, mirificuni, etc.. — Hoc fecundata. In Epiphania Domini. Bibl. de Saint -Gall, 360
p. 3, etc. Cf. Patrologie, LXXXVII, col. 55. '
Salve, pater regum invictissimoruni. Versus Radperti ad regem suscipiendum. Bibl.
de Saint -Gall, 381, p. 46, etc. Cf. Patrologie.
LXXXVII, col. 40.
Suscipeclementem, plcbs devotissima , re- Versus ad suscipiendunn regem. Auctore ? Hart-
gem. manno. Patrologie, LXXXVII, col. 43.
Tellus ac astra jubilent — In cœna magni «Versus in Cœna Domini ad Mandatum» (Mu-
principis. nich , lat., 14083, fo 86 ro. Berlin, Theol. lat.,
no 11, fo 37 vo. Bibl. Na'., 1240, fo 24, etc.
Cf. Jlone , //j/mni latini medii asvi , I, p. 101,
no 79. (I Versus Fhivii.) i> Dans le nis. de Mu-
nich, qui provient de Saint-Eninicran , on lit la
rubrique suivante, qui a son importance :
(I Versus in Cena Domini ad refectorium ca-
nendi. ( fo 86 vo.) »
Votis supplicibus voces super astra fera- Rhylmica litania. Auctore ? Notkero. Palro-
mus. /o^ie, LXXXVII, col. 42. Munich, lat., 14083,
fo 4 vo (ms. de Saint-Emmeran), etc. Dans ce
ms. le Votis est compté au nombre des Do-
minicales lilanix.
Cette table, que nous ne donnons pas comme complète, sera par nous tenue au courant
et complétée dans une édition ultérieure.
30 HISTOIHI': ItK l,A l'OÉSIK LITITirilnlK
; Lo l)ut do la [tliipait do cos entreprises est tou-
j jours le môino : « iJoinier à TOffico sacn' i)lus de dé-
veloppement avec plus de solennité. »
Il est en effet certain que, dans les monastères
carlovingiens , il y eut, après les réformes dues à
la vigueur et au génie de Charlemagne, un grand
mouvement de piété qui n"a pas encore été assez
remarqué. La liturgie, dont le chant venait dtHre si
heureusement restauré , passionnait ces populations
de moines qui habitaient les vastes abbayes. Les
laïques eux-mêmes, dont la ferveur était encore
toute vive, prenaient part à cet engouement, et quatre
ou cinq heures d'office ne leur faisaient pas peur.
Hartmann et Tutilon se proposèrent donc le même
dessein, mais employèrent des moyens différents.
Hartmann composa toute une série de petits poèmes
à refrains que Ton chantait tout dune teneur, en cer-
tains moments de l'Office, mais surtout à la proces-
sion ou avant TÉvangile. Il eut un émule. Radpert.
qui employa dans le même cloître la même méthode,
et auquel nous devons plusieurs de ces poèmes, plu-
sieurs de ces versus doù la vraie poésie n"est pas
absente et qui, avec un caractère sévèrement clas-
sique, ont toujours un certain air de grandeur.
Représentons - nous ici, d'une laçon vivante, les
longues files de moines se développant sous les
cloîtres immenses et faisant solennellement leur entrée
dans le chœur en chantant par exemple VHumili prece
et sincera devotione. Encore un coup, c'était grand.
Tutilon' eut recours, lui, à un autre svstème : il in-
' 11 a aussi composé dos rc»>u.s el cultive réollomen! tous les penrcs ; mais
nous prenoiKs ici sa « doniinaiilo >>.
A SAINT-GALL — LES VERSUS 31
terpola les textes préexistants de la liturgie grégorienne.
Il prit entre ses mains un Introït, lui composa une
sorte de petit prologue; prépara, annonça, commenta
chacun de ses membres de phrase, et fit chanter
toutes ces petites additions sur des mélodies, sur
des cantilenx , sur des tro'pi, qui tantôt avaient une
existence antérieure, et qui tantôt, sans doute, avaient
été composés par lui ou par quelques-uns de ses
frères.
Ce furent les Tropes.
Les deux systèmes sont loin d'offrir les mêmes
dangers , et nous n'hésitons pas à préférer celui
d'Hartmann et de Radpert. Ces poètes , à tout le
moins, ne touchaient pas d'une main téméraire aux
textes mêmes des livres grégoriens, et rien, après
tout, n'était plus aisé que de faire abstraction de leurs
poèmes. Ces vers , plus ou moins élégants et parfaits ,
étaient simplement parallèles ou juxtaposés au vieil
Antiphonaire pontifical : ils n'étaient pas, comme les
Tropes, soudés et collés avec lui.
Les Versus n'ont porté réellement aucune atteinte
à la beauté de la liturgie : les Tropes ont failli la
ternir.
Il est temps de les étudier de plus près.
CHAPITRE Y
A QUELLE EPOQUE REMONTENT LES TROPES
Plusieurs opinions ont été émises sur la date
originelle, sur l'antiquité des Tropes. Elles peuvent
se réduire à trois.
Que les Tropes remontent « plus haut que le
ixe siècle »; qu'ils aient pris naissance à Rome; qu'ils
aient été l'œuvre de saint Grégoire et de ses premiers
continuateurs, c'est une thèse téméraire et qu'on ne
saurait véritablement appuyer sur aucun document.
Le cardinal Bona et Martin Gerbert en ont fait justice
avant nous ^
Que les Tropes n'aient paru dans l'Église que vers
les dernières années du xe siècle, aux environs de
l'an mille, c'est une doctrine qui nous avait séduit^
' « De quibus [tropis] nuUum superest moaumentum tempore Adriani IL..,
ne quid de Gregorio Magiio, Adriano I et Alcuino dicani a quibus cantilense ha?
festivales constitutœ dicuntur. » (Martin Gerbert, De Cantu et Musica sacra a
prima Ecclesise éclate usque ad jirsesens tempus, in monasterio Sancti Blasii, 1774, .
I, p. 3'»L) Dom Guéranger a dit: « Les Tropes furent comme une première l
ébauche des Séquences qui leur succédèrent. » {Institutions liturgiques , \ .,
2» édit., I, pp. 248,249.) C'est, suivant nous, le contraire qui est la vérité. ' (\vl
2 n Essai sur la poésie liturgique au luogen âge, Proses, Tropes, Offices rimes,
I — 3
3/1 HISTnlKK DE LA POÉi^IK MTrRriIQT'E
après Bona lui -môme ', et nous l'avons défendue jadis
avec d'autant plus de vivacité que nous ne connais-
sions encore, à cette époque, que les Tropaires de
Paris.
Une étude attentive des Tropaires de Saint -Gall
nous permet aujourd'hui d'affirmer que les Tropes re-
montent au xe siècle, et même un peu [)lus haut.
Le plus ancien des Tropaires de Saint- Gall est celui
qui, dans la charmante hibliothèque de l'antique ab-
baye, porte aujourd'hui le n» 484. C'est un minuscule
manuscrit, un des plus petits que le moyen âge nous
ait légués. Un joyau !
Ce Tropaire est du xc siècle.
C'est, notez-le bien, un Tropaire bien constitué,
complet, régulier, et qui nous offre de précieux élé-
ments de critique. On y peut lire notamment le fa-
meux Trope de l'Offertoire de saint Etienne : Omnium
virtutum gemmis, et le Trope non moins célèbre de l'In-
troït de Noël : Hodie cantandus. Ce ne sont pas là des
documents à négliger : car, dans ses Casus Sancti
Gain, Ekkehard attribue nettement ces deux mêmes
pièces à Tutilon -, et une telle autorité est décisive.
suivis d'une Histoire de la Versification latine à la même épociue : » positions
de la thèse soutenue à l'École des Chartes, le l 'i novembre Itôo. — Cours pro-
fessé à l'École des Chartes, 1866. — Monde, 10 octobre 1873.
' « Nullum eorum [Iroporum] inveni .npud scriptores (|ui,an(e annum Christi
niillesimum, libres de divinis (ifliciis ediderunt. » (licrum lilurgicarum Uliri duo,
Koiiia', 1671, in-'i", p. 2%.)
* « Quœ auteiu Tuotilo dictaverat, siiipularis et apnoscibilis nielodiae sunt. quia
per psalterium seu per rothlam, qua potontior ipse erat, iieumata inventa dul-
ciora sunt, ut apparet in Hodie cantandus el Omnium virtutum gemmis, Qt os
QuiuEM TROPos Karolo, ad Oflerendam quain ii>se rex fecerat , obtllit caxendos.
nui rex etiam, Viri Galilivi olTerendani i uni diclasset, Tuotiluni versus addere
injunpit, ut aïunt ; Quoniam Dominus Je^us Christus, cum esset ; ihnniiMtens
ijcnitor, fons et origo, cum sequentibus, Haudcte et cantate, et alios quidem ; sed
islds proposuimus, ut quam disjiar ojus nielodia sit ca'leris, si musicus es. noris. •
( Kkkehard IV, Casus Sancti Galli, cap. m. Perlz, Sa'iptores, U. p. 101.)
A QUELLE EPOQUE REMONTENT LES TROPES 35
Quel était donc ce Tutilon dont nous aurons si
souvent à prononcer le nom, et dont la biographie va
si heureusement nous servir à fixer la date des pre-
miers Tropes ' ?
' Notice sur Tutilon. Ekkehard nous a tracé de Tutilon un « crayon » très ori-
ginal. Après avoir parlé de Notker, il lui oppose, ainsi qu'il suit, Tinventeur pro-
bable des Tropes et l'auteur de ces célèbres vers : Salve, mirificurn, dont nous
avons eu l'occasion de parler plus haut : « At Tuotilo, longe aliter, bonus erat et
utilis. Homo lacertis et omnibus membris, sicut Favius atlhetas eligere docet;
erat eloquens, voce clarus, celaturae elegans et picturae artifex; musicus sicut et
socii ejus; sed in omnium génère fidium et fiitularum prœ omnibus: nam et
filios nobilium, in loco ab Abbate destinato, fidibus edocuit. Nuntius procul et
prope sollers; in structuris et cœteris artibus suis efficax; concinnandi in utraque
lingua potens, et promptus natura, serio et joco festivus , adeo ut Karolus
noster aliquando ei maledixerit, qui talis naturœ hominem monachum fecerit.
Sed inter hœc omnia (quod pra3 aliis est) in choro strenuus, in latebris erat
lacrymosus ; versus et melodias facere prœpotens ; castus, ut Marcelli disci-
pulus qui feminis oculos clausit. » ( Ekkehard IV, Casus Sancti Galli , cap. m.
Pertz, Scriptores,t. II, p. 94.)= Ekkehard raconte ici, avec quelque complai-
sance , un beau trait de la sévérité de son héros à l'égard d'un moine qui avait
été sur le point de succomber à une tentation impure. Mais il se complaît encore
plus vivement dans l'éloge de cette belle et universelle intelligence de Tutilon :
« Tuotilo vero, abbatum sub quibus militaverat permissis plerumque et prœceptis,
multas propter artificia simul et doctrinas peragraverat, ut in suo capitule
tetigimus, terras. Picturas etiam et anaglyphas carminibus et epigrammis deco-
rabat singulariter pretiosis; tantœque auctoritatis , ubicunque moraretur, appa-
ruit, ut nemo illum qui vidisset , Sancti Galli monachum dubitasset. Erat autem
in divinis et humanis ad responsa paratissimus, et, si quid incondecens, maxime
in monachis, usquam vidisset, pro loco, tempore et persona, zelator erectus. »
(Ekkehard, Casus Sancli Galli, cap. m. Pertz, Scriptores, II, 97.) = Ce
Tutilon , comme Notker, avait partout la réputation d'un saint , et Ekkehard nous
raconte de ses miracles. La Vierge un jour descendit du ciel pour aider le
moine-artiste à peindre le portrait de la Mère de Dieu. Son biographe nous le
montre chassant les démons , et prend soin d'ajouter : « Sunt vero et alia quae de
illo audivimus multa. »^ Quelle fut la date de la mort de Tutilon? Il est malaisé
de le déterminer, et ce n'est pas le témoignage d'Ekkehard qui est ici de nature
à nous éclairer vivement : " De obitu autem ejus quia nihil constaxs compe-
RiMus, hoc solum, quod ad gaudia seterna eum migrasse confidimus, indubi-
tanter asserimus. » (Ekkehard IV, Casus Sancti Galli, cap. m. Pertz, Scrip-
ptores, II, 101. Cf. Ekkehardi V, VilaB. Notkeri; Acta Sanctonun Aprilis, édit.
Palmé, I, p. 187.) Il faut donc aller chercher nos ressources ailleurs. Le Codex
traditionum Sancli Galli {i\° l'S, ed.nov. 771) nous fait connaître un diplôme de
l'abbé Salomon, en date de 912, où l'on trouve parmi les signa: « SignumTuo-
tilonis hospitarii. » D'un autre côté, on lit dans le Necrologium de Saint-Gall
( v kal. maii) ; « ObitusTuutilonismonachi atque presbyteri. Doctoriste nobilis ce-
latorque fuit » (Bibl. de Saint-Gall, n°91o.) D'où il suit que Tutilon existait encore,
selon toute apparence , en l'année 912, et qu'il mourut le 27 avril , après 912, d'une
année qu'il reste à fixer. Le bibliothécaire de Saint-Gall, qui a publié dans les
Scriptores de Pertz tous les manuscrits relatifs à l'histoire de la célèbre abbaye.
36 iiisTrJinr-: dk i.a i-oksik liturgique
C'était, avec Radpcrt, l'ami liVs tciidiv de ce Notker
qui était la gloiiv du monastùrc de Saiiil-(iall. Elèves
des mêmes maîtres, de Marcel et d'Vsoii. ils aimaient
d'un môme amour les belles-lettres et Dieu. Ces trois
âmes d'élite, ces trois belles intelligences étaient fra-
ternellement unies, et un historien de Saint-Gall les
appelle, illi très inseparabiles. On vit souvent ces trois
moines se promener sous 1(; cloître de Icin chère ah-
baye. C'est là sans doute, ou dans le silence du scrip-
torium , qu'ils se montraient leurs œuvres récentes,
Notker sa dernière prose, Tutilon ses Iropi, et Uadpert
ses versus. Hartmann n'était pas loin.
Tutilon n'avait pas la même nature que Notker,
lequel est qualifié par son biographe de cette belle
épithètc : mitissimus hominiwi. Tutilon était plus viril
et savait môme, à l'occasion, être vigoureux et i iule.
Bel homme et d'une verve si entraînante, que l'em-
pereur Charles s'écriait un jour en le voyant : « Quel
« dommage qu'il soit moine! » pieux et chaste jusqu'à
la sainteté, sachant baisser les yeux devant les dangers
du monde, esprit en éveil, homme universel, il était
à la fois poète, orateur, musicien, peintre et ciseleur;
semblable à ces artistes de la Renaissance qui furent
D. I. von Arx, ajoute en parlant do Tutilon : « Scpultus est in capella sancta?
Catharinœ, quœ postea s^ancli Tulilonis pacellum fuit nuncu|>ata. » ( /. c, U,
p. 101, note 32.) I/épiLiphe du saint moine nous a été consen'ce : « Vir-
frinis alniifica; pictor mira arte Tulclo, — E.xcollons nierilis et piotate |>oten<,
= Nemo Irislis abit qui te colit cl veneralur; — Fors cunctis plarid<-)ni <]uip|>c
salutis oi)eni. » Cf. sur l'ensemble de la vie de Tutilon : ICkkehard IV, /. r.
— Ekkeliard V, Vita li. Notkeri, Aria 6'a»j<7ewi/m , t. I .\prilis , p. 58fi. —
B. Pez ; Anecdotorutn lliesaurus, Aujïu.>-ta' Vindelicoruni, ITil-IT'i». I. pars m,
p.i>72. — Canisius, édit. Basnape, t. Il, |>ars m. pp. IS^, !><*>. — DWchéry et .Ma-
billon, Acta Sa)iclontm Ordinis sancii Uenedicti , sa»c. v, p. 13. — Histohv lillé-
raire, t. V, p. 071. — U. Ceillier, Histoire des auteurs sacrés et ecrlèsiasttifues ,
édit. Vives, XU, pp. 7(»:<, 70'..— Vntmlntjic. I.XXXVII . roi. 5l-5f>. .-t C.XXIX,
H(UJ, S6f>, otr. .-le.
A QUELLE EPOQUE REMONTENT LES TROPES 37
plus tard tout cela, et qui le furent d'une façon supé-
rieure. Tutilon était illustre. On faisait appel, de fort
loin, à son talent de peintre et de ciseleur, et il trou-
vait le secret d'utiliser dans cet art son talent de poète
en composant lui-même les inscriptions de ses images :
Ecce polo potior solio , terraque scabello^, inscrivit-il
un jour sur un autel d'or où il avait peint la majesté
de son Dieu. Nous ne le pouvons aujourd'hui juger que
comme poète, et le préférons comme ciseleur. Les
quelques Tropes qu'il nous a laissés ne sont pas notable-
ment au-dessus de tous les autres ; mais enfin ce sont, à
notre sens, les premiers que l'on connaisse. Ajoutons,
en réservant ici la gloire du musicien, que Tutilon eut
l'honneur, comme tropiste, d'être le collaborateur de
Charles le Gros. Ils échangeaient leurs compositions,
et ce n'est peut-être pas manquer de respect à l'em-
pereur et aux Tropes que de penser que Charles eût
pu mieux employer son temps.
Les meilleures amitiés sont tôt ou tard brisées par la
mort. Notker mourut en 912 et Radpert dès 902; mais
il y a bien plus d'incertitude sur l'époque où le der-
nier des « trois inséparables » quitta son cher Saint-
Gall pour « le monastère du ciel ». Scherer se fonde
sur un diplôme de 912 qui porte le seing Tutilonis
hospitarii, pour prolonger sa vie de quelques années.
La vérité est que cette date avait été de bonne heure
oubliée, même à Saint- Gall, et Ekkehard lui-même
déclare naïvement qu'il n'en sait rien : « De obitu ejus
nihil accepimus. » 0 gloire!
Somme toute, Tutilon, qui fut probablement l'auteur
* Ekkehard IV, Casus Sancli Galli, cap. m. Perlz , Scriptores, H, p. 98.
38 HISTOIHE DE [.A POÉSIE LITURGIQUE
des premiers Tropes, a vécu à la fm du ixe siècle, au
commencement du xc.
Les Tropes « avec paroles » (les autres ne sont pas
en cause) sont, à tout le moins, aussi vieux que lui.
D'après le manuscrit 484 de Saint-Gall, d'après
celui de Vienne, qui est peut-être plus ancuen', on no
peut refuser aux Tropes cette antiquité qui est scienti-
fiquement assurée ^
1 nil)l. imp., n» 1609. Nous en donnons plus loin rnnalyse.
2 La date que nous venons d'attribuer aux premiers Tropes ne saurait être infir-
mée par un texte que l'abbé Lebeufa publié dans son Traité /iistori(jue sur léchant
ecclésiastique (p. 103), que dom Gucranfrera rcédilc dans ses Institutions litur-
giques (2" éàil., I, p. 266) et que l'abbé Duchesne a transcrit dans son Liher
ponti/tcalis (p. CLxxxii, note 1). Il s'açrit d'un supplément au Liber pontifica-
lis, d'une Vie du pape Adrien II qui nous est fournie par le manuscrit latin 2't(Ml
de la Bibliothèque nationale : « A la différence des manuscrits édités par Bianchini,
Vignoli et Muratori, la vie de ce pape, que ces derniers nous présentent tron-
quée, offre, dans le manuscrit cité par Lebeuf, des particularités curieuses qui
ne se trouvent pas sur ceux qu'ont publiés ces auteurs. » (Dom Guéranger, /. c.)
Or ces particularités ont précisément pour objet l'origine des Tropes, et voilà
qui nous met en demeure de publier nous -même ce texte in extenso : a ÏVic
[Adrianus] constituit per monasteria ad Missam majorera in solemnitatibus prœ-
cipuis, non soluni in hymno angelico Gloria in cxcelsis Deo canere hymnos
interstinctos quos Laudes appellant ; verum etiam in Psalmis Daviticis quos
Introïtus dicunt interserta canlic^a decantare, quaï Bomani « festivas laudes »,
F'ranci tropos appellant ; quod interpretatur : « Figurata ornamenta in laudi-
bus Domini. » Melodias quoque ante Evangelium concinendas tradidit . quas
dicunt Sequentias, quia sequitur eas Evangelium. Et quia a domno papa Gre-
gorio primo et, postmodum, ab Adriano una cum Alcuino abbate, delicioso ma-
gni impcratoris Caroli, hœ cantilenœ fostivales constitutœ ac compositae fuerant.
niultum in bis delectato supradicto Cresare Carolo, sed negligentia c«intorum
jam inlermitti videbantur, ab ipso almifico pra"'sule de quo loquimur ita cor-
roboratai sunt ad laudem et gloriam Domini Nostri Jesu Christi, ut, diligentia
studiosorum, cum Antiphonario simul doinceps et Tropiarius in solempnibus
diebus ad Missam majorem cantilenis frequentetur honeslis. » Quelques remar-
ques paraîtront ici nécessaires sur ce texte que nous avions déjà longuement
discuté en 18oo et \SC^ : I" Tout ce qui concerne les Tropes (et ne se trouve
pas dans les autres manuscrits publiés par Bianchini, Vignoli et Muratori) est
une interpolation évidente. 2° En admettant l'authenticité de ce document, il
n'irait pas rigoureusement à l'encontrc de la date que nous fixons à l'origine
des Tropes : Adrien 11, en effet, est monté en 867 sur le siège de saint
Pierre et est mort en 872. 3° Depuis les mots melodias quoque il ne s'agit
visiblement, dans le texte du ms. 2i(X) (où l'on s'est inspiré du texte de Jean
Diacre, publié plus haut), que des sequela; musiciles, des vocalises, des neumcs
qui accompagnent le dernier alléluia du Graduel. Il ne saurait donc y êlre ques-
tion des Tropes -parlés. i° Le manuscrit cité par Lebeuf est le Parisinus l-'ti^.
A QUELLE ÉPOQUE REMONTENT LES TROPES 39
Selon toute probabilité, ils ne sont postérieurs que
de quelques années à ces prosdB que Notker écrivit
vers 860 sur les queues neumatiques, sur les sequelx
de l'AUeluia.
Ces deux intimes et fraternels amis, Notker et Tu-
tilon, ont fait, à peu près vers le même temps, deux
œuvres que l'on peut considérer comme analogues et
parallèles, deux œuvres -sœurs.
provenant de Saint-Martial de Limoges. Ce manuscrit, longuement étudié par
l'abbé Duchesne, renferme en effet (f» 138-151) un Abrégé du Liber pon-
tificalis que l'on doit, non pas à un auteur romain, mais à Adhemar de Cha-
bannes, moine de Saint -Cybar, à Angoulême, et champion célèbre de l'aposto-
lat de saint Martial (f 103 'i). Ces dernières observations, que nous devons à
M. l'abbé Duchesne, enlèvent toute valeur au témoignage précité. (V. le Liber
pontificalis, par l'abbé Duchesne, pp. clxxxii-clxxxv.)
CHAPITRE YI
LE MONASTERE OU L'ON A CHANTE LES PREMIERS TROPES
Il y aurait, ce me semble, un charmant tableau à
faire de cette célèbre abbaye de Saint -Gall durant la
seconde moitié du ixe siècle, où il faut peut-être
placer l'apogée de sa gloire. Les documents ne nous
font pas défaut, et il serait presque aisé de rendre
la vie, pour quelques instants, à ce grand monastère
d'où sont sortis nos Tropes. Ce ixe siècle, d'ailleurs,
est une époque qui n'a pas encore trouvé son peintre,
et l'on y sent partout je ne sais quel ressouvenir en-
core puissant du vieil empire romain. L'influence de
Gharlemagne, qui s'est éteinte si rapidement dans le
monde politique , a persisté plus longtemps dans les
cloîtres. Les abbés de Saint -Gall nous apparaissent
comme de véritables souverains. Plusieurs d'entre eux
ont plus vécu à la cour que dans le cloître ; d'autres
ont été évêques en même temps qu'abbés. La plu-
part sont les amis des Césars, et nous constations
tout à l'heure que Charles le Gros ne craignit pas
de s'abaisser en se faisant l'humble collaborateur
42 iiisToiRi- i)f- LA i»op:sir: (.ituhoique
non [)as mémo dos abliés, mais des moines de Saint -
Gall.
Une discipline rigoureuse donne à ce corps mona-
stique une vigueur qui ne durera point toujours; mais
c'est principalement comme école que Saint-Gall est
célèbre dans tout le monde occidental. Qui dit alors
« moine de Saint-Gall » dit « un savant, un poète, un
artiste ». On était fier d'appartenir h ce cloître, et Ton
s'imaginait volontiers que de tels religieux étaient plus
intelligents et plus actifs que tous les autres moines. A
Saint-Gall, la musique régnait; l'Antiphonaire de Ro-
main y était conservé comme une relique', et l'on n'y
pouvait faire dix pas sans entendre des bruits de psalté-
rions et de lyres, ou sans voir des enfants armés de ces
longs rouleaux (pii étaient couverts de neumes. C'était,
pour ainsi parler, un concert perpétuel; mais c'était sur-
tout une fête sans fin. Tous les jours nouvelle solennité à
la basilique, nouveaux chants, nouvelles proses, nou-
veaux tropes. On ne saurait lire ces Tropaires du x^ siècle
sans envier les moines auxquels la liturgie donnait tant
de joies sans cesse renouvelées. L'austérité n'en souffrait
pas, ni la piété, ni la foi ; mais on aurait tort de s'imagi-
ner qu'on s'y ennuyait. Sous ce cloître sacré, de char-
mantes amitiés se nouent, et qui sont durables autant
que charmantes -. Les « trois inséparables », dont nous
• C'est aujourd'hui le n" 3o9 de la bibliothèque de Saint-Gall. Romain avait
exposé son Anliphonaire dans la basilique de Saint-Gall, de même que saint
Grégoire avait jadis exposé le sien circa aram Apostolonun. (Perlz, Scrip-
tot'cs, n, p. 103.)
- « Hinc de Hisone magistro et discipulis ejus N'otkero Rilbuio, Tuolilone,
Ratperto vilas, ut ita dicam, non neglipendas apprediar scribendas. » (Ek-
kehard IV, Casus Sancti Galli , cap. ii. Perlz, Scriptores , t. U, p. 92.) =
« De Notkero, Ratperto, Tuotilone discipulis ejus [Isonis] et Marcelli , quoxiam
QuiDEM COR ET ANI.MA u.NA ERANT , mixlim , qualia tres unus fecerint, quantum a
patribus audivimus, narrare incipimus. » ( Ekkebard IV, Casus Sancti Galli,
ou A-T-ON CHANTÉ LES PREMIERS TROPES 43
venons de parler, Radpert\ Tutilon- et Notker ^ sans
parler d'Hartmann \ forment un de ces groupes frater-
cap. m. Pertz, Scriptores , II, p. 94. Reproduit et délayé par Ekkehard V, Vita
B.Notkeri, Acta Sanctonun Aprilis, I,p. o79 : Très isti discipuli... ita unanimes
in omni familiaritate, virtutum honestate et morum conversatione erantut esset eis
cor unum, et anima una esset. Individui in amore fraternœ caritatis, et, sicut ma-
ter unicum filium, ita amabiles in vita sua dilexerunt se, et, cum morte sint sepa-
rati, in regno tamen Christi in unum sunt congregati.) = « Hi quidem ab Hisone
cum in divinis non mediocriter essent praelibati, Marcello... sunt conjuncti.
Qui in divinis œque potens et humanis, septem libérales eos duxit ad artes;
maxime autem ad musicam.» (Ekkehard IV, Casus Sancti GaUi, cap. m. Pertz,
Scriptores, II, p. 9i.)= « Erat senatus reipublicse nostrœ tune quidem sanctissi-
mus. Consuluntur Hartmannus consilio magnus, ille quidem qui Humili prece
nielodiam fecerat; Xotkerus qui sequentias; Ratpertus qui Ardua spes miindi;
fuotilo qui Hodie cantandus est et pleraque alia dictaverant... » (Ekkehard I\ ,
Casus San<-ti Galli. Pertz, Scriptores, t. 11,80. Reproduit presque littéralement
dans la Vita B . Notkeri d'Ekkehard \\ Acta Sanctoru m Aprilis , I, p. o83.)
1 Notice sur Radpert. Ekkehard nous a laissé sur Radpert des détails tou-
chants. Ce poète était, avant tout, un professeur amoureux de son métier. 11 avait
succédé à Ison comme écolâtre : « Ratpertus autem inter ambos quos diximus (Not-
kerum scilicet et Tuotilonem ) médius incedebat. Scolarum ab adolescentia magis-
ter, doctor planus et benevolus, disciplinis asperior. Raro prœter fratres pedem
claustro promovens, duos calceos annum habens, excursus mortem nominans ;
ssepe Tuotilonem itinèrarium, ut se caveret, amplexibus monens. In scolis sedu-
lus, plerumque cursus et missas negligebat : «Bonas, inquiens, missas audimus,
« cum eas agi docemus. » Qui cum labem maximam claustri impunitatem nomi-
nasset, ad capitulum tamen nonnisi vocatus venit, cum sibi officium capitulandi
et puniendi gravissimum , ut ait, sit traditum. » (Ekkehard IV, Casus Sancti
Galli, cap. m, Pertz, Scriptores, II, p. 9o.)= On sait qu'il mourut le 2o oc-
tobre, et c'est le Necrologium de Saint-Gall qui nous l'apprend : « VIII kal.
Nov. : Obitus Ratperti magistri atque presbyteri. » Sur l'année on n'est pas
d'accord, et l'on hésite entre 890 et 902. ( Mittheilungen der Ziiricher Anti-
quarischen Gesellschaft, t. XII, p. 266.) 11 est certain seulement qu'il mourut
avant ses deux meilleurs amis, Notker et Tutilon. Le récit de sa mort est des
plus émouvants : « Ratpertus vero et ipse sanctus circa claustrum Sancti Galli
cum languidus iret, nec tamen docere desineret, quadraginta discipulis quon-
dam suis, canonicis, tune quidem presbyteris, loeo propter festum advenienti-
bus, animam singulis in manibus commisit, quorum quisque ei triginta missas
obituro promiserat. Sicque ille laetissinius, Deum uti se diutius morbo coque-
ret rogans, panis nitidus factus, inter discipulorum manus in Paradisum,
ut credimus, transiit. Pro quo Notker et Tuotilo prœter cœteros fratres dolentes
qui post eum relicti sunt, multa fecerunt. » (Ekkehard IV, Casus Sancti Galli,
cap. m. Pertz, Scriptores, II, p. 100. Cf. Ekkehard V, Vita B. Notkeri,
Acta Sanctoriim Aprilis, I, p. 586. = Voy. Canisius, l. c, p. 188; d'Achéry et
}>lahi\ïon , Acta Sanetoruni Ordinis sancti Benedicti , l. c, pp. 16-17. — Cf. Pez,
l. c, I, 3» partie, p. o70. La fameuse litanie de Radpert Ardua spes tnundi a
été chantée dans toute l'Église et même, si l'on en croit Ekkehard V, per
totum orbem.
2 V. plus haut, sur Tutilon, la note 2 de la page 3b.
3 V. plus haut, sur Notker, la note 1 de la page 19.
* Notice sur Hartmann. — 11 v a eu à l'abbave de Saint-Gall deux Hartmann
/,/i iiis'ioiiii': ni'; i \ I'()K^ii; i.rirucK.tri-;
nels. Sous la rohc du inoiiii' !<■ caractùre persiste, et rien
ne s'harmonise moins, par exeini)l(', qur la f'oii^'uc de-
Tutilon et la doMcein- de Notker. J'uis, là connue }»ai-
tout, dans la réallN' et rlans le dianic. il y a le Mal qui
lutte avec le liien. Le Traître nirme Jic manque pas au
tableau, et il nous ap[)araît à Saint-Gall sous les traits
de ce méchant et sournois Sindoll. (|iii s'est lait Tenncmi
mortel de nos tnjis amis. Il laiil lire, dans la |ir(jse
candide d'Ekkehard, l'histoiic anmsante du châtiment
que lui inflige Tutilon. Certaine nuit, Sindolf commit la
grave imprudence de se cacher derrière une fenêtre du
scriptorium pour épier (espionner serait lu vrai mot) la
conversation de Tutilon avec Radpcrt et Notker, conver-
sation toute scientifique et qui avait la Bible pour objet.
Tutilon, cet athlète, s;iisit l'espion par les cheveux, se
fait apporter par Radpert la verge qui était dans l'étuve
des frères, et étrille Sindolf de la belle façon : « Le
« diable! le diable! s'écrie-t-il. jr viens de prendre le
qui ont ctc poètes ; « llartnmnnus majur, llarlniannu? minor. » Le premier
c:?t, à coup sûr, le plus illustre des deux, et a été aljbé de Saint-Gall. Esl-
ce à lui cependant, ou à l'autre, qu'il faut attribuer les Versus dont nous
avons parlé? Ekkehard IV lui-même n'ose se décider : « Ulrius sint a'qui-
voc^ntio dubia facil. » (Pertz, l. c, p. 1(12.) Nous pencherions pour l'abbé;
mais il est difficile de se montrer ici plus affirmalif qu'Kkkeliard. Sur llarl-
nianii, dont les deux œuvres les jilus connues sont Vllumili prece (le plus
|ii'pulaire des Versus) et le Sacrafa libri dogtuala , cf. les textes sui-
vants : « Hartniannus , consilio magnus , ille qui llmnili prece mclodiam
fecerat... » (Ekkehard IV, Casiis Sanrti Galli. Pertz, ^Scriptores , t. II.
p. 8(1.)=: « Erant illo in tcmpore Sanclo Gallo et alii ctenobit» quidem sancti...
Inler quos llarlinannus et ipse doctissimus abl)as cœnobii post S.ilonionem ;
Waltramnus, etc. » (W., itlib., j». %. ) := « Wailrannius autem, quem supra
dixinius , decanus, sed et Ilartmannus qui abbas noster factus est, quas fece-
rant laudes, sua nomina, quia pra^ferunlur in cantilenaruni libellis, studiose
Iransimus... Fecerat et Ilartniannu< minnr qua^dam : qua* ulrius sint, n?qui-
vocfltio dubia facit. » (/(/., ùiib., pp. i01-10"2.) — Cf. Per, /. c, I, 3« partie,
p. iJTO; — Uinisius, éd. Basnape, t. II, partie III, p. 10(1; — D. Ceillier, His-
toire des auteurs sacrés et ecclèsiastiijues, éd. Vives, XII, p. 870; — et surtout la
l'atrologie de l'abbé Migne, LXX.XVII, col. 29-38, où l'on trouvera tous les
rtT>i<*- qui sont attribués ii ilarimann.
ou A-T-ON CHANTE LES PREMIERS TROTES 45
diable. » Les frères accourent au bruit, et vous pouvez
juger de la confusion du traître, quand soudain la
lumière éclaire son visage et qu'il est reconnu par tout
le couvent'. D'autres épisodes sont encore plus joyeux
et se terminent sur un spectacle heureusement moins
rude. C'est le jour des Innocents : les élèves des écoles
monastiques sont ce jour-là hors la loi, exleges; ils ont
le droit de s'emparer de la personne des « hôtes » jus-
qu'à ce qu'ils se rachètent. Or, c'est l'abbé lui-même
qui, par un singulier hasard, tombe le premier entre
les mains de ces tyrans d'un jour. L'abbé s'appelle Sa-
lomon : c'est un grand personnage et qui est en même
temps évêque de Constance. Tant de dignités n'arrêtent
point nos écoliers ; ils le font prisonnier : « Ce n'est pas
« l'abbé, s'écrient -ils, c'est l'évêque, c'est l'hôte que
« nous prenons », et, de vive force, ils le poussent, ils
le juchent dans la chaire du professeur. Mais ici la
scène change; Salomon enfle soudain la voix et leur
dit : « Voilà qui est bien; je suis votre maître, et c'est
« moi qui vais vous infliger un juste châtiment, si vous
« ne vous rachetez pas. » Ils baissent la tête et s'ap-
prêtent à recevoir le fouet, mais essayent du moins de
se racheter en composant de méchants vers qui font
rire et désarment l'évêque- abbé. Et tout de se terminer
par un éclat de rire et par un présent de l'excellent
Salomon.
On en pourrait citer bien d'autres'-; mais les murs
mêmes de Saint -Gall étaient éloquents à leur manière,
et rien n'en dit plus long sur ce cloître du ixe siècle
que le beau plan du ixe siècle, publié naguère par Fer-
1 Ekkehard IV, Casus Sancti Galli. Pcrtz, Scriptorcs, II, p. 96.
2 Id., ibid., p. 91 .
/»6 iiiRTOinr: dk i.a I'Oesih i.rrnr.oioT'K
(linand Keller'. Il seirible qu'elle passe en ce moment
sous notre regard ravi, cette })asilique immense*, avec
ses deux absides, son maître-autel ({ui est consacré à la
Vierge et à saint Gall ; les sept degrés de son altarium
et ses deux analogia ou ambons, l'un pour le jour,
l'autre pour la nuit. Il me semble la voir avec sa biblio-
tliùque et son sacrarium, avec son « autel de la croix «
devant lequel s'arrrtcnt les prcjcessions, avec ses fonts
où, durant la nuit du samedi saint, un nouveau peuple
était enfanté dans l'eau du grand baptême^; avec ses
deux colonnes d'observation au dehors, son grand
cloître, ses jardins et ses vergers où méditaient les
moines. L'abbé Grimald avait donné tous ses soins à
l'ornement de cette basilique, qui était une des plus
belles de l'Occident chrétien; il avait fait couvrir de
peintures l'abside qui était derrière le grand autel'; il
avait surtout, lui et son successeur Hartmot, enrichi
la bibliothèque de nombreux livres dont les catalogues
nous ont été conservés par Radpert". Des châsses d'or,
renfermant de précieuses reliques, sortaient parfois de
la basilique et, sur les épaules des moines, allaient
bénir tout le pays. On les voyait onduler à travers les
' Bauriss des Klosters Si. Gallcn von Jahr 820, Zurich, bt-i Moior und Kt'I-
ler, 184'j, in-4<». Co même plan avait été publié d'une façon informe |>.ir Ma-
billon. (Annales, II, pp. o71-o72.)
2 La basilique do Saint-Gall a été, on réalité, commencée en 830. dédiée
en 83a et entièrement achevée en 837. Les bâtiments monastiques n'ont été com-
plètonionl terminés que vers 8oj.
' « Mitte sanctum nunc aniborum trpiritum Paradituni — In hanc plebem quam
recentem Ions baptismi parturit. n ( lier sanctoi'uni Anijelontm.)
* « Prœterea coronis arpenteis aliisque diversis luminaribus pariter. cum multi-
modis variorum ornamentorum splendoribus, i|)sam mapnupere studuil insiL'iiire
basilicam. Absidam quoque post altarium sancti Galli ila honorincc pictura
deaurata, sicut in pra-senti vidomus, ipso [Grimaldus] composait temporc. »
(Radpert, Casus Sancti Galli. Pertz, Scriptores, II, p. 70."!
!" Hadperl, Casus Sancti Galli. Pertz, Scriptores, II, pp. 70 et 72.
ou A-T-ON CHANTÉ LES PREMIERS TROPES 47
plaines et les montagnes, à travers les vallées et les bois,
saluées de tout ce peuple dont elles étaient la consola-
tion et la gloire ^ D'autres fois c'était un empereur, un
roi, qui venait visiter l'abbaye, et on l'accueillait avec
de beaux vers tout fraîchement composés par un Hart-
mann ou un Radpert : « Puisse le Dieu qui fait les
« rois, lui disait- on, te donner la force qui vient du
« ciel'-. » Si la reine était là, on l'appelait « la lumière
« dorée de la terre », et on se plaisait à constater que le
ciel depuis son arrivée semblait avoir un plus gracieux
rayonnement. « Plus de nuages : la lumière partout ^ »
Mais les hommes du ixe siècle n'étaient pas plus que
nous exempts de terreurs sociales, et la belle abbaye
connut des jours bien tristes : « Chassez, chassez loin
« de nous les païens qui approchent, » s'écriaient alors
les moines, et ils ravivaient leur foi en chantant cer-
tains versus * auxquels ils donnaient volontiers la forme
d'une litanie. Ils saluaient dans la Vierge la « répara-
trice illustre du monde ^ «, et, pour s'exciter à la force,
contemplaient longuement les martyrs rouges de leur
sang, ces purpurei proceres, ces invincibles qui avaient
dompté les fureurs du démon *'. Puis ils se disaient en
1 « Jam fidelis turba fratrum... — Dulce pondus et beatum in lectica deferens...
— Scandens et descendens inter montium confinia , — Silvarum scrutando loca
valliumque concava, — Nullus oxpers ut locus sit istius solaminis. » {Jmn
/idelis.)
2 « Rex Dominus, regum factor rectorque potentium, — Qui te terreno prœtu-
iit imperio, = Hic te confortet semper virtute polorum. » {Suscipe clementem.)
3 « Aurea lux terrœ, dominatrix inclyta, salve, — Quœ domibus nostris nunc
benedicta venis.= Plus hodie subito radiât sol clarus in alto, — Cunique serena
venis, nubila cuncta teris. » {Aurea.)
■* « Ut sœviens gladius et paganus populus — Depellatur a nobis... » ( Votls
suppUcibus.)
s « Reparatrix inclyta mundi... — Perpétua radias cum virginitate pudoris
— Indignos famulos, Virgo Maria, tuos. » [Iluinili prece.)
0 « 0 vos, martyrio decorati in noniine Christi, — Conspicui testes, purpurei
proceres, — Qui, bello invicli, superastis da'iuonis iras. » (Huniili prcce.)
48 HISTOIHE DK LA l'OÉSlE MTUU(U.jLE
dépit des ruines qui s'amoncelaient : « .Tatn novitas
« régnât, totus et orbis ovat \ »
Tel est le témoignage des versus; tel est le liK.nastere
où l'on va chanter les Ti-opes.
. l'ic.-c Salve, min(in»n... Ilnr frcundoU,...
CHAPITRE VII
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES
ET DE LA SIGNIFICATION PREMIÈRE DE CE NOM
Ces interpolations de nos textes liturgiques, ces
versiculi ante, inter vel post alios ecclesiasticos can-
tus appositi, ne portent pas un nom unique dans les
manuscrits où nous nous proposons de les étudier ;
mais enfin il est un de leurs noms qui est beaucoup
plus fréquemment employé que tous les autres, et qui
s'est communiqué, pour ainsi parler, aux livres où ils
sont contenus. Ce sont des « Tropes » : tropi ou
trophi. D'où les « Tropaires » \
1 Trojn canninum : Saint-Gall, 484, p. 4; 376, p. 39; 378, p. 41; 381,
p. 195, etc.
Tropus, tropi, tropos : Saint-Gall, 382, p. 21 (et les mss. qui viennent d'être
cités); Paris, Bibl.nat. lai., 887, f°»9 r°, nv; lat., 1118, f" 1 r°, 2r<', 16r<>,27 r",
33 ro, etc. ; lat., 9448, f" 75 r°, etc. ; lat., 10510, f° 2 v», etc. ; lat., 13252, f" 3 r\
4 v°, 5 r», etc.; Arsenal, 1169, f" 1 v", 3 r°, 9 r°, etc. = Le genre de ce mot
était si peu déterminé, que, dans le ms. 1118, on trouve sur le même feuillet
(f» 85 r* et v°) alios, alia et alii, se rapportant à un pluriel masculin ou
neutre.
Trophi, trophos: Paris, Bibl. nat. lat., 909, 1» 13 r% 18 r»; lat., 1119, f» 47;
lat., 1120, fo63 r-; lat., 1121, f» 14 V; 15 v"; 17 r°; 28 r"; 51 v», etc.; 1134,
fo 105 r»; 1240, f" 18 v», 19 r"; 13252, f» 3 r", etc. = Trophum se trouve dans le
ms. lat. 1120, fo (j'i v, etc. = Au f» 13 r» du ms. lat. 1121 , le scribe avait
I — 4
150 HISTOIRE DE EA POESIE LITUHOigUE
Après ce mot, il en est un autre dont la fortune a été
heureuse et qui a fait quelque concurrence au pre-
mier. C'est ce mot, c'est ce môme mot qui, de très
l)onne heure, a désigné tout naturellement les paroles
que Notker et les notkériens ont écrites sur les neumes
T^.^ern lukiLuntr Afir^<^f <v^
-^ i- ~ i . ^ r ^
/ // ^ - J^ ^ ^ ^ --r^
jjùte' Smuffolr^vorefUfffcixUf
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ék-Te • êgLyrtofifrime-re^rn
sCt^^^W^
^
Tropes sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 216, dernière ligne.)
du dernier Alléluia du Graduel : c'est 'prosa '. ou son
d i m i n u t i f j9 rosida - .
d'abord écrit alla [tropha], mais on a visiblement rétabli alios. = Le? deux
formes tropi et trophi se trouvent à la même page du même manuscrit (lai..
132o2, f<'3 r').
' Prosx. jo Tropes du Kyrie : Hibl. nat. lat., l'2i(l, f* 79 r*. etc. 2" Tropes de
rOffertoire, Bibl. nat. lat., 887, f» -'l'i v». Nouv. acq., 123o, f» 9 V, 10 v», etc.
3* Tropes de la Coninninion : Hibl. nat. lat.. 9(19, ^21 v». 4o Tropes des Répons
de Noël : a. Répons Dcacciuiil, Rilil. nat., nouv. acq., 1235, f" 19 r« et v:
b. Répons Sancta et inunaculatix Viryinitas, ibid., f» 20, eli".
* Pfosulœ. lûTropesdu Kyrie: Ribl.nat. lat., 1119, f* ai r»; lat., 1120, f''C7r<'.
2" Tropes (lu Gloria { lîeynutii tioini soliiium) : Ribl. nat. lat.. 1121. f* iJO V.
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES 51
On disait couramment au xie siècle les « proses »
du Kyrie, de l'Offertoire ou des Répons, et l'on disait
alors, tout aussi couramment, les « petites proses »,
les prosuîœ du Kijrie, du Gloria et de l'intérieur du
Graduel.
-t
6. Te. ---•. n -^^ ^ .^^
A- Te -
et Te -^:'-' r^ /^ ^-^^^.
1[ UA>ri
-ctnC
<Smyf
rv rtohif tfoup
Tropes sans paroles. (Bibl. de Saint- Gall, 484, p. 217.)
On remarquera, comme exception, les « Tropes avec paroles » des deux dernières lignes.
(V. la note des pp. 39-60.)
Le vocable laudes^, lui, n'est guère décerné qu'aux
3" Tropes de Tintérieur du Graduel: Bibl. nat. lat., 903, f" 1 r", 10 r» et v°, etc.
40 Tropes de l'Offertoire: Bibl. nat. lat., 903, f» 2 r», 3 r», etc. 5° Tropes de la
Communion : Bibl. nat. lat., 909, f» 24 r", etc. Cf.? Prosellus : « Post ultimum
responsorium, sequitur Prosellus ^/mttw te.» (OrdinariumNarbonense, in die
Paschœ; Martène, De antiquis Ecclesiae ritihus , III, 483.)
1 Le premier sens du mot laudes (ou laus) c'est l'antique Gloria lui-même,
sans interpolation, dans sa pureté liturgique, et c'est le sens qui est conservé
en plusieurs de nos Tropaires. (Bibl. nat. lat., 1118, ^4 v" : Laudes cum tropis.
Cf. ibid., fo 50 r», laus, et Arsenal, 1169, f°l v° : Incipiunt tropi cum laudi-
bus, elc.) Le second sens, celui de « Tropes du Gloria », n'a pas tardé à déri-
ver du premier : Incipiunt Glorie cum laudes (Bibl. nat. lat., 1119, f» 90 r";
lat., 1120, f» 82 r", etc.). Le sens reste douteux en plus d'un manuscrit. (Lat., 1121,
rj2 IIISTOIHK DK LA POESIE LITURGIQUE
Tropes du Gloria, et il est demeuré très significatif en
ce sens. Nous y reviendrons; mais, dès h présent, nous
pouvons dire, à ce sujet, (|u'oii doit ici se mettre en
garde cçntre une double confusion. Il ne faut pas ou-
blier que Laudes a d'abord signifié le Gloria lui-même,
b
- / ^ ^ ^^^^ ^ ^ ^
de nunc firnylo aamtrto cjinA—
*nufe>i/%^- Une <tr
m,^ ' ' -
Tropus sans paroles. (Hiljl. de Saint -Gall, 484, p. 45.)
En tôle de celte page on lit dans le manuscrit les mois : In Dedicacione eccl[tsie\.
le Gloria non tropé, et que ce sens a eu plus tard un
prolongement dans nos livres liturgiques. Il faut,
en second lieu et comme nous le disons ci -dessous,
ne pas confondre ces Laudes avec les fameuses Ac-
clamations : Christus vincit, Christus régnât, qui ont
porté le même nom.
Somme toute, le mot tropi l'emporte et finit vic-
P 'lo V; S87. f» G9 i"; 132o2, f» 3o r», 36 r, elc.1 Enfin le mol laudes con-
serve liturgiqucment une dernière sipnilîcalion et qui nV^t ni la moins impor-
tante ni la moins ancienne : il désigne les belles Acclamations solennelles, le
Christus vincit, Clirislus régnât, etc. ( BihI. nat. lai., I'2 ii>, f" VU, etc. etc.)
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES 53
torieusement par désigner le genre tout entier, un
genre où l'on peut légitimement faire rentrer jusqu'aux
grandes proses qui suivent le Graduel et précèdent
l'Évangile.
Ce mot « Trope » , qui a fait un si beau chemin dans
Km- -
.."y-.r--"
7 ^/vr^
1 nxaixraa^em'
Tropes sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 46.]
le monde liturgique, a une physionomie grecque qui
n'a pas échappé aux clercs du moyen âge. L'histo-
rien officiel du concile de Limoges, en 1031, n'a pas
manqué de le faire observer : « Tpo^i grseco nomine
dicuntur a conversione vulgaris modulationis *. »
Depuis longtemps le mot TpoTro; était passé dans la
langue latine. C'était un terme musical, uniquement
1 Labbe, XI, 890, etc.
54 HISTOIHK HK LA POKSIK LITURGIQUE
musical, qui signifiait «mode», et ne tarda pas à
signifier « mélodie » , par une transition facile à saisir :
« Tropus, dit Forcellini, id est cantus, sonus. » Et c'est
dans ce sens que notre Fortunat l'a plus d'une fois
employé : « Reddebantque suos pendula saxa tropos '.
Crrp
»M eu
''*\ c. >n- ri/-
L. .L.
O
S
.y'/y-
Tropes sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 47.)
Yox erat una tropis -. Mulceat atque aures fistula
hlanda tropos^.
Nous avions cru, dans notre première rédaction, que
le mot « Trope » exprimait un changement de voix, une
alternation entre deux chœurs *. Le premier de ces
chœurs aurait, dans cette hypothèse, chanté le texte
1 X, 10, 5'â.
î Id., 60.
' M., 12, 4. Ces citations sont de Forcellini, etc.
* Nous nous fondions principalement sur un texte de Jean Belelh , qui, au
chai>itre i.ix de son Exposilio riiviiii of/ïcii, |)ropose cette ctyniolopie ; Tropi
dicuntur, quia pri)num canitur versus ac poslca Eleison, et iterum verstu ,
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES oo
liturgique officiel, tandis que le second lui aurait
répondu en chantant l'interpolation, le Trope avec ou
sans paroles.
Nous avons renoncé depuis longtemps à cette inter-
prétation compliquée.
Çecunaum Mmem
Jjornau/^ Momcnqviodexxxr ont
ne- flippr* Hijmmtyuoci /ùpemf
^ ^ ./ ^ / ^ . ^ ^
^^crtrriunv pcmfhcxxf -vcrr^ d^tn ^
ftrtiftiuod Juàcrsate d/trefi^UjT-
I arrrlftcrc ' jlin» modo cumder
/" - ^ ^' ^ - 1 ^ - ^ ^^
fstt.éi/trtdeufimjierctxc
Tropes avec et sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 6.)
A nos yeux donc, tropus est et demeure, même en
liturgie, un terme primitivement musical et qui est,
à l'origine, le synonyme de melôdix, de cantilenx, ou
de moduli et de cantus rythmici. Encore ici, Martin
Gerbert a rencontré la vraie doctrine, lorsqu'il a dit :
« Tropi proprie sunt moduli nomenque retinuerunt,
Eleison deinde. Le même liturgiste confirme ailleurs le même système, que
nous avions jadis adopté : Tropus idem est ac conversio, quoniam istic fieri
soient qitœdani conversiones. (Cap. xxv.) Guillaume Durand dit avec encore plus
de clarté : Hi versus tropi diamtur quasi « laudes ad antiplionam convertibiles " ;
■zp'j-Koz enim grœce , conversio dicitur latine. (Rationale, VI, cap. cxiv, 53.) Cf.
Martin Gerbert, De Cantu et Musica sacra, I, 342.
56 III>Tnii;K DK I. A POKSIK \A'\V UCKjVE
ciim illis vcrha sunt substitula, ut postea de sequentiis
dicemus '. » Dans cette excellente définition un seul
mot sonne faux. C'est « substiluta », auquel nous pré-
férerions (' conjuncta ». Et tout alors, suivant nous,
serait au mieux.
k' ^ "" "^ H "^r 'l'^ ^ ^ ■ ^
A^^^^ <kAui -abi -crier e Cl uh\-
ho cite cummAgriA Lice <ie{c£nAi
/' / y // ^/^ . ji^.^/ ^ /
mdicrce dcmint eiA ir^jk-
M cumiummo fArrrrtr efcortdi
y / /■/ - .^ ^ ^ ^^
W ui Tum: c^ 0 f Tui /umr c^
Tropes avec et sans paroles. (Bibl. de Sainl-Gall, i84, p. 7, première ligne.)
Mais Gerbert s'est contenté d'une affirmation et
n'a rien prouvé. Les preuves cependant ne manquent
pas.
Si nous ouvrons les plus anciens Tropaires de
Saint-Gall, nous y trouvons cette expression carac-
téristique, qui sert de titre ou de rubrique à plu-
sieurs de ces recueils de Tropes : Inc.ipiunt tropi
CARMINUM IN DIVERSIS FESTIVIT.\TmUS MISSARUM C.\-
' De Cantu et Musica sacra, I, 3i0.
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES S7
NENDi. Ce qui, suivant nous, doit se traduire ainsi
qu'il suit : « Ici commencent les mélodies des vers,
des compositions poétiques » qu'on lira plus loin;
mélodies qui, « les jours de fête, doivent être chantées
à la messe ».
I x^mvelletxiif- i^em fetrrcmf
Tropes avec et sans paroles. (Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 42.)
La synonymie de moàulus et de tropus est en-
core plus clairement établie par l'autorité des textes
que cite Ducange. Dans un vieux glossaire dont
il ne donne pas la date, tropus est offert comme
exactement synonyme de modulus et de cantus. Un
autre texte est encore plus explicite : « Modulus dici-
tur cantus qui praecinitur in principio Missse vel
Horarum, et dicitur etiam tropus. » Rien n'est plus
clair.
88 niSTOIHK r»K I. A l'OHSII- MTri{r;inUE
En tête des Tropes sans paholes on lit le nKjt tropi,
ou Tropes.
Nos Tropaires, qu'il est temps d'ouvrir, sont encore
plus éloquents.
^ haffirne- ^crmiriA. auocî cflorr4J7i
' ^^ ^ ^,- i^^ - ^-^ - S
Jimen
vX Wi^Wmnrctciîm ddeva (\yeciAltcer-
celei>rtmufcltccrmf- hlkif^nf'
/ y . / v< ^ ^ ^ / ^
Tropes avec et sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 'iSi, |>. 43.)
Nous avons déjà observé que le manuscrit 484 de
Saint-Gall était le plus ancien Tropaire de cotte biblio-
thèque, qui est presque sans rivale pour les manuscrits
liturgiques.
Dans ce manuscrit, qui est du xe siècle, nous ren-
controns des mélodies intercalaires, des Tropes sans
paroles \
A ces mélodies sans paroles on donne aussi le nom de
Tropi. Mais ne sont -ce pas là en réalité des mélodies
préexistantes? ne sont-ce pas là des mélodies qui ont
< V. les far-aiinile des patres o<K 5t , ii2, 10, o'é. 62, 66, etc.
DU NOM QUE PORTENT LES TROPES 59
précédé les Tropes parlés, « de même que les neumes
« de l'Alleluia ont précédé les proses »? C'est l'avis de
Gerbert, c'est le nôtre, et, nous le répétons à dessein, le
mot « Trope » n'a été, à l'origine, qu'un terme musical \
r\oÇ' Icnedicxofiniiuic^ffecilh
. ^ ^^' p'^ *■ "
Tropes avec et sans paroles. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 224.)
(V. la note des pp. 53, 60.)
Si ce n'est pas la certitude absolue, c'est, à tout le
moins, la probabilité la plus plausible.
Le lecteur décidera -.
^ C'est l'opinion de M. de la Fage (Z)e la Reproduction des livres du plain-
chant romain), que le mot « Trope » s'est entendu aussi bien des mélodies
que des paroles ainsi intercalées. « Les Tropes, dit ce savant, se composaient
de parties intercalées dans une pièce de plain- chant, dont chaque période se
trouvait ainsi coupée par une composition différente. L'habileté des tropistes
consistait, pour les paroles comme pour la musique, à faire en sorte que la
pensée s'enclavât sans effort dans le texte sacré en le développant ou en l'ex-
pliquant. »
2 Nous réduirons ici tout notre système à trois propositions, appuyées sur des
textes : Première proposition. Pour les Tropes parlés comme pour les proses.
00 IIISTOIKI': I»K I, A l'OKSIl-; I.ITIIUJIQUK ^
il y a eu une musiqin; prcexisUinte, des neumes préexislauth : « lu quibusdaiu
ccrlosiis iii quibus iieuma riuri dicilur, rnoriii et scquentim decantantih. » (Guil-
laume Durand, ftaliimale, V, cap. ir, § 32, édit. de Lyon, 1o70, f* 216 v» et
217 r°.) = l)F.ixiKME i-mjj-osrrioN. Ces Tropes musicaux, ces mélodies sans
texte se trouvent dans quelques Tropaires anciens, et en particulier dans le
manuscrit ■'i8'i de la bibiiotiièque de Haint-Gall : elles affectent surtout V Introït
et le Gloria. {Wt, pp. 11, 13, 27, 38, 39, /ifl, 43, 4G, 85, m; 210, 217, etc.;
381, p. 28'», etc. Cf. les fac-similé des pajres ljt)-'6't, G2, etc.) = Thoisikme i-no-
posiTioN. Les chantres avaient à leur disposition, dans le même Tropaire, les
Tropes sans paroles et les Tropes avec paroles ( '«84, pp. G, 7, 10, 23, 28, 42, 43,
166, 22'», etc. Cf. fac-siinile des pages 5o-u9, G'», etc.), et l'on peut ajipliquer
aux Tropes ce que Martin Gerbert dit excellemment des Séquences : « Neque
ideo pneumata sive neumœ cessarunt postquam Sequentiae introduct* sunt,
c;uM POTUERUNT MUTUO siDi suBSTiTUi. » {De Cantu et Musica sacra, I, p. '»fl8. ;
— La démonstration de celte troisième proposition peut aisément être tirée de
deux feuillets du manuscrit de Saint -Gall n° 48'» (sans |)arler des autres).
Entre les Tropes « avec paroles » de notre page of), et les Tropes « sans pa-
roles » de notre page 51, il y a une corrélation évidente. Le fac-similé de notre
page o9 est encore plus concluant, et la mélodie y est la même pour les Tropes
avec et pour les Tropes sans paroles. Rien ne saurait être plus décisif.
CHAPITRE VIII
LES PLUS ANCIENS TROPES CONNUS
Il n'est pas absolument c'ertain que Tutilon ait « in-
venté » les Tropes, et il est probable qu'il en a composé
d'autres avant ceux dont nous allons citer le texte. Mais
nous ne voulons mentionner ici que des œuvres sur
lesquelles il ne puisse y avoir aucune incertitude, et
le témoignage d'Ekkehard ' donne aux deux pièces
suivantes un caractère d'authenticité contre lequel il
serait difficile de s'élever. Ajoutons seulement que la
solennité avec laquelle Ekkehard parle de ces deux
Tropes tend à prouver qu'il s'agit ici d'un genre
tout nouveau, et dont on cite volontiers les pre-
^ C'est le lieu de citer une seconde fois le texte si important d'Ekkehard ,
et une telle répétition est rigoureusement nécessaire : « Quse autem Tuotilo dic-
taverat, singularis et agnoscibilis melodise sunt, quia per psalterium seu per
rothtam, qua potentior ipse erat, neumata inventa dulciora sunt, ut apparet in
Hodie cantandus et Omnium virtutum gemmis , quos quidem Tropos Karolo,
ad Offerendam quam ipse rex fecerat, obtulit canendos. Qui rex etiani, Viri
Galilœi offerendam cum dictasset, Tuotiloni versus addere injungit, ut aiunt;
Quoniam Dominus Jésus Cltrislus cum esset, Omnipotens genilor, fons et orir/o;
cum sequentibus, Gaudete et cantate, et alios quidem; sed istos proposuimus,
ut quam dispar ejus melodia sit ceeteris, si musicus es, noris. » (Ekkehard IV,
Casus Sancti Galli , cap. m. Pertz, So-iptnyes , II, p. 101.)
62 IIISTDIHK DH LA POÉSIE LIT LRGIQUfc;
miôres œuvres, ou, pour parler plus juste, les pre-
miers essais.
L'une de ces deux pièces est le fameux Trope de
l'Introït de Noël, VHodie cantandus est. 11 est revêtu
de je ne sais quelle majesté qui, indépendamment de
Ji mtytr
-fl nrnexuf
_^^ /T /f //'^ /C /. «/T. /v ..4 /••
Ij!J omeiaf
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^^. -r^ ^ ^ x-^. /- / ^ - .
Trope de Tutilon : //odie canlandits. (Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 13, ligne 8 el suiv.
sa place dans le cycle de l'année liturgique, lui a fait,
en un certain nombre de Tropaires, donner la place
d'honneur. Il ne paraît pas cependant que son incon-
testable et merveilleuse popularité ait dépassé notable-
ment les limites de rAllemagne, et on le trouve à
peine dans un ou deux Tropaires français. Mais, dans
l'Allemagne, quelle gloire! Les ornemanistes décorent
avec amour l'H initial de ce Trope primitif. On le
respecte comme un ancêtre.
En voici le texte, que Ton ne jugera peut-être pas
LES PLUS ANCIENS TROPES CONNUS 63
digne d'une aussi vive célébrité; mais il ne faut pas
oublier que nous le voyons ici en une sorte de nudité
pitoyable, dépouillé de sa mélodie, froid, mort :
Hodie cantandus est nobis puer quem gignebat ineffabiliter ante
tempera Pater, et eumdem sub tempore generavit inclyta mater.
- ./ / - ^ / /: r-/- ^
éjoandenx {vAy-xemyorv- q^p-
M ^^ r .- ^ /-/-, -
^ /" /r y- ^ /t i^ y z' ^
^ / /-- .^ - r-j'^
n)fr3ryaannf diariam -uocifersL.
/ /x^ ^/ . c r -
Tif' apercer noiytf m: colLtuctA^
-corW e/iTe jyoffimuf- Kt^?
xc enifh efh cfuem jjyyiXguf <V
*f ^ / ^ n ■ y- -^ ^ ^
tLeccaf fymmifhc dei ^AarraJ
Trope de Tutilon : Hodie cantandus. (Bibl. de Saint -Gall, i84, p. 14.)
Interrogatio. Quis est iste puer quem tam magnis prœconiis
dignum vociferatis? Dicite nobis ut collaudatores esse possimus.
RESPONSio. Hic enim est quem preesagus et electus symmista
Dei, ad terras veiiturum preevidens, longe ante pnenotavit sicque
prasdixit : Puer natus est nobis absque nascentium ordine pro-
creatus de virgine sine viri semine. Et filius dalus est nobis,
qui nos filios sui Parentis adoptivos fecit, carnem sumens , quos
et nominat fratres ^ Cujus itnperium super humerum ejus, Deus
1 Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 13; 381, p. 199; 382, p. 21. Le texte de 484,
reproduit ci-dessous, nous offre des e cédilles dans les mots preroniis, pre-
sagus, previdens, predixit, prenotavit, etc. =■ Cf. Berlin, Theol. lat., n» 11,
fo 2 r». Oxford, Douce, 222, f" 2 v». Londres, British Muséum, Cotton :
64 iiisTfiiHr: DK i.A l'DKsii: i.irri{(iif)UK
quod Pator suo iiiisso in iiiuiKium Nalo cl incarnate semper
suum dat sccunduin carncni. El vocabilur nomen ejus nonicn
quod cxstat onin(^ super n(jni(,'n, ((uud supcrnaj licniunt polcsta-
tcs, terra et infcrus (juod adorant et trépidant, Magni consilii
anyelus. r*s. Cantate Dumino canticum novum, quia rnirabxlia
fecil, niiro modo, cuni d(.' Virginis utero ut lumn) prucessei^at et ut
Deus iiMperilal. Gloria Patri et FUio et Hpirilui sancto. Sicut
^ . ^ ^
i uer-nÔb A^lfc^iie njifcermum
^fdno^' i^inoffiUof fui
.. / - . y ^ - ^ - r-
XjArertdÇ âÀopdtxofÇ^cxc oxr"
^ . ^ - y .^ ^ ^
nem fumer) f auofd'naTnirtTxr
^ am e%uf' êetxfijuod p.tzrer ftu>
cAjmAXD ferriver" funm axp
Trope de Tutilon : Hodie cantandus ( Bibl. du Saint-Gall, 484, p. 15.) —
On complétera le texte manuscrit nvec notre texte (p. Ci, deuiiémc ligne cl suiy.
erat in principio et nunc et semper, et in sœcula sœculorun}.
Amen. Alléluia! Laus tibi, Christe, qui hodic cum mafrna luce
descendisti. Dicite, eia : Alléluia!
Le second Trope de Tutilon est loin d'avoir conquis
Caligiila, A, XIV, ("•!. Vienne, 18io, f» ">8 rv Pari?. Bibl. nat.,a4i8 (Prum).
f" 2 r-; KXilO, f<> 1 v (lÀ-hlernacli) ; \3-21il, f* 3 V (Paris), etc. = Itans le
manuscrit 'i8i de ï^aint-Gall, les mois du texte lilurpiijue: S'obis,... Et filius...
Nobis,... Ejux,... Sotncn ejus,... Amen, ?onl répétés, et accompagnés cliacun
d'une série de neunies ou de vocalises sans paroles. = C^ Trope a élé l'objet
d'un remaniement dont nous p,trli'rons plus loin.
LES PLUS ANCIENS TROPES CONNUS 65
la même célébrité, et ne semble pas avoir été emporté
très loin hors de son abbaye originelle. Il est vrai qu'on
le chantait seulement à l'Offertoire, et que ces Tropes
de l'Offertoire n'ont jamais été appelés à la même « po-
pularité » que ceux de l'Introït. Il convient cependant
OiQtnnia*^ uifxrtxum ^jvynmxf
rtirn fi/rniftnvopuLa cvfuf
- y ' V 'y ^. r X ,.
csrtcern rt^Wnjn^' mAt^mi
irrcemtiui domtni iponcfuùu*7t
q-tmhuf fuvvUcrcer' dçvtm t>
hLCinorrbufitjlofmrrt ôr^karterh *
Trope de Tiitilon : Omnium virlulum gcmmis. (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 33.)
de se rappeler qu"il était exécuté le lendemain de Noël,
en ce jour lumineux où l'Église honore la mémoire de
l'illustre Protomartyr, qui est le patron d'un si grand
nombre de nos cathédrales, et que les imagiers du
moyen âge ont représenté la tête ceinte d'un nimbe
de pierres (pierres de son martyre, devenues les pierres
de son auréole) :
Omnium virtutum tïemmis adornalum atque miraculorum si^nis
iii populo coruscaTitciii p;ilinaqii(^ iii;u-tyrii pro Jesu noiniiK^ co-
06 lllS'IOllil-; DK I.A l'UKSli: MTLI'ililuLK
njuaiidiiin Elegerunt [apostoli Slephanurn] /ei'i7a/vî. Cdliiiiinam in
k'iiiplo iJci ponoiuluiii ('ju.s(|ii(' iioiiiiiu' CijM.si^Miaiuluin, Plénum
fide \et Spirilu sancto, qvem lapidavcrunt] Judœi, lerrae positis
fîC'iiihus, supplicilor D(3um pro faciiiorilms ipsorurn oranlem [et
dicenlem : Domine Jesii, accipe spirilummeum. Alléluia /']
Dans ses Casus Sancti Galli, Kkkoliard attribue à
' -r f - -^//^ - - ^,/ ^
ô rlj[unc cogriofcxtnur d/noiiorimuf
/ ^ ^ yf/^'^ ti- "
\1.
ILl6A.ULil-
- u.^-^-^'^"^-^'
^ xt^JUvn meAu. '■>
« — -^^■y, fvt /itJLK if>- *■' y^
Trope rm GûWat. ; lîibl. de Saint -Gall, i8i. p. 121.;
Tutilon plusieurs autres Tropes : le Gaudete et cantate,
qui est rOffertoire de Pâques -; le Quoniam Dominiis
Jésus, qui est un Introït pour la f<Me de saint Jean
rÉvangéliste ^; et VOmnipolens gerdtor. (jiii est un des
plus beaux Tropes du Kjirie '.
> nil.l. de Saiiil-Gali, 'iS'i, \k 33; 3Sl . p. 206; 382, p. 2o. — Berlin. Theol.
lat.. n» 11, f» 0 V». etc.
2 Hibl. de Sainl-Gall, iS'i. p. 132; 381. p. 2i'.>. etc.
3 Hibl. de t^aint-Gall, 370. p. i2; 381. p. 21»'.. _ Berlin. Théol. lat.. n» 11.
foy yo. — Vienne, 18'io. f" 58 v". — l>an.s ce dernier manuscrit, c'e*t le seul Trope
qui soit Consacre à saint Jean. — Nous en avons donné le texte plus haut (p. 3).
* Hibl. de .STint-Gall, W». p. 21 , etc. Nous énumérons ailleurs tous les ma-
nuscrit-; m'i se trouve ce Tropi^.
LES PLUS ANCIENS TROPES CONNUS j57
Quant à l'Offertoire de l'Ascension, Viri Galil3ei\ les
manuscrits ne nous en donnent que les neumes, qui
sont probablement l'œuvre de l'empereur Charles ^
Un Trope composé par un empereur, c'est un fait
OJt yé^xx<iexx, <S/cAîtcxzer auuLhodie-
^ //> ^// ^' A^^^'tr
Çurreycrt: tiûfrttnuf de- 'féjJuL<hr^
y-^/f r ^ <^ ' ^ '^ ^
f ^ ^ ^ r- - -'"v;>r
{xnctxsr^nx furreycitrimi^DxLrefixi —
"r /^ ^//- / ^^'^'' -.'"
nsnnn^ etA.- f¥erTVt -areratm: •
Trope Gaudete et canlale. (Bibl. de Saint -Gall, 484, pp. 132-133.)
unique, mais qui, somme toute, ne justifie pas le
genre.
^ Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 125, etc. — L'éditeur moderne des Casus,
D. \. von Arx (Pertz, Scviptoves, H, p. 101 , note 41), avait reconnu avant nous
que nous ne possédions que la musique du Trope Viri Galilœi.
2 Ekkehard V, en sa Vita B. Notkevi (qui n'est, en général, qu'une copie
sans autorité des Casits), donne une importance plus considérable à la collabo-
ration de l'empereur et de Tutilon: Alla etiarn phi)-a ad invireiii composuernnt.
CHAPITRE IX
DES LIVRES QUI NOUS ONT CONSERVE LE TEXTE DES TROPES
— LES TROPAIRES
Un Tropaire {troparium, troparius , tropharius, tro-
ponarius, trophonarius, etc. '), c'est le livre noté qui
1 1° Troparium. Duo hymnarii grossati, octo troparia, duo omiliarii {Inven-
tarium Sancti Martini Pontisariensis, ann. 1241; cité par Ducange au mot tropus).
— Troparium ou troparius. Missalibus, tropariis, collectaneis (In Vitis abba-
tutn Sancti Albani ; cité par Ducange, l. c.). = 2° Tropharius. Plures dulcisonos
cantus in trophario et antiphonario edidit. (Orderic Vital, III, p. 485. — Cf. Syn.
Exon., ann. 1287, cap. xii.) = 2° Troponarius. Troponarius liber continens
xpÔTtoyç, id est cantus, etc. Quidam etiam hune librum « prosarium »a prosis
appellant (Johannes BaXeÛï., Expositio divini Officii^cap. i.ix; Martin Gerbert,
l. c, p. 342). — 4" Trophonarius, trophonarium. Est autem trophonarius, in quo
continentur ii cantus qui cum Introïtu Misses cantari soient. {Id., ibid.) In
parvis trophonariis (Ordinarium Sancti Pétri Aurese Vallis , cité par Ducange,
verbo trophonarium). Cf. troperium, tropiarius, etc. = Il convient d'observer
que les dillërents noms, énoncés ci -dessus, ne se rencontrent pas en
tête de nos manuscrits, mais dans les textes des historiens
ou des liturgistes, dans les canons des synodes, dans les In-
ventaires, etc. = Autre observation. C'est à tort, suivant nous, que Jean
BeIeth(£'irpos!^io divini Officii, cap. lix) a prétendu que certains donnaient au
Tropaire le nom de Prosier, à cause des proses qu'il renferme. Le Prosier peut,
tout au plus, être considéré comme une partie du Tropaire; mais il ne convien-
drait pas d'aller scientifiquement plus loin. = Certains Tropes ont porté le nom
de prosx et àeprosulas: tels sont notamment ceux du Kyrie, de l'intérieur du
Graduel , de l'Offertoire , de la Communion , du répons Descendit ( Fabrice
mundi) et du répons Sancta et immaculata virginitas (V. plus haut, p. t>0,
notes 1 et 2). Mais ce sont là des cas qui peuvent légitimement passer |iour
7(1 IIISTniMK l»['. I. A l'OKSIK I. IT I' Mfi lO T K
contient les interpolations des textes liturgiques ap-
pelées « Tropes ». Ces interpolations sont tantôt en
prose, tantôt en vers, et atteignent à la fois roffice de
la Messe et celui des Heures.
La plupart des définitions du Tropaire qu'on a don-
nées jusqu'ici sont incomplètes ou fausses : fausses,
parce que leurs auteurs n'avaient pas la notion précise
du Trope; incomplètes, parce qu'ils y ont seulement
visé certains Tropes, et notamment ceux de l'Introït.
Ce que les liturgistes ont vu plus nettement, c'est le
caractère monastique de la plupart des Tropaires qui
sont parvenus jusqu'à nous. Les Tropes, comme le fait
observer Jean Beleth. « ont été surtout chantés par les
moines * ». Pour un Tropaire séculier, on en trouve
neuf qui ne le sont point. Neuf ou davantage.
Il importe de ne pas confondre le Tropaire avec
l'Antiphonaire, qui est ce livre liturgique, — officiel et
non interpolé, — où l'on trouve, accompagnées de
leur notation musicale, toutes les parties de la Messe
qui sont chantées par le chœur (Introïts, Graduels,
Offertoires, Communions, etc.). Cet Antiphonaire d'autre-
fois correspond au livre de chant qu'on appelle depuis
longtemps le Graduel.
Quant au Responsorial , qu'on a pu légitimement
considérer comme formant la seconde partie de l'Anti-
phonaire complet -, il contient les chants de l'Office ou
exceptionnels; elle mot prosariuin , que l'on trouve dans un de nos manuscrits,
ne doit s'entendre, comme le français prosier, que de « la collection des proses
qui suivent le dernier allchda du Graduel ». Cette question d-^ noms a une vé-
ritable importance.
' Est autem tro|>honarius in que conlinentur ii cantus qui cum Introïlu Missae
cantari soient, et maximi; qliuem \ monaciiis; cujusmodi sunt Iropi, ^equenli».
Kiirie eleison et ncxima;. (E.r]wsi(io divini ()/"/»Vii, cap. i.ix ; Gerberl, l.c, I. 3V2. )
- Sur rAuliplionaire de saint Grégoire et sa division en « Graduel » cl « Rc-
LES TROPAIRES 71
des Heures, et ne saurait davantage se confondre avec
le Tropaire.
Il faut, à ce sujet, se tracer une règle fixe et partir
toujours du même principe : « Là où il n'y a pas in-
« terpolation, il n'y a pas Tropaire. » Un Tropaire,
sans doute, peut renfermer certaines parties du Gra-
duel ou du Responsorial ; mais il ne les renferme
qu'accompagnées d'interpolations ou de Tropes. C'est
une loi qu'il est aisé de comprendre.
Il semblera peut-être inutile de distinguer ici le
Tropaire d'avec le Sacramentaire, lequel n'est pas un
livre de chant et contient les oraisons et préfaces qui
concernent le rite auguste de la Messe durant tout le
cycle de l'année liturgique.
Avec le Missel, qui est principalement dérivé du
Sacramentaire, la confusion n'est pas moins difficile.
Même observation, d'ailleurs, que tout à l'heure : les
Tropaires peuvent çà et là offrir telle ou telle partie de
l'antique Sacramentaire ou du Missel; mais, encore
une fois, de tels extraits sont, en pareil cas, accompa-
gnés d'interpolations ou de Tropes. Personne ne sau-
rait s'y tromper.
Le Tropaire n'a rien de commun avec l'Hymnaire;
mais on n'en saurait dire autant du Séquentiaire, de
ce livre de chant où l'on transcrivait, avec ou sans pa-
roles, les vocalises ou mélodies neumatiques qui sui-
vaient le dernier Alléluia du Graduel. Le Prosier, à tout
prendre, n'est qu'un Séquentiaire « avec paroles ».
sponsorial, » voy. Dom Guéranger, Institutions lituvfjiques , 2° édit., I, 164 :
« L'Antiphonaire de saint Grécoire se divisait en deux parties : Tune qui con-
tenait les chants usités dans la Messe, et qui est connue depuis longtemps sous
le nom de Graduel; Tautre, appelée dans l'antiquité Responsorial, et contenant
les répons et les antiennes de l'Office, laquelle a retenu le nom d'Antiphonaire. »
72 IIISTOllii; \)\: LA l'OKSH-; U'iriiClnlJE
Que ces paroles aient été écrites sur des mélodies
préexistantes ou sur des mélodies nouvelles, peu im-
porte : il y faut voir, selon nous, de véritables interpo-
lations et qui ont un rapport intime avec les Tropes. Si
donc nous considérons les pro^x comme un véritable
Trope, nous regarderons aussi les « Séquentiaires avec
paroles » , ou les Prosiers, comme une partie intégrante
ou, à tout le moins, comme un supplément du Tropaire.
L'I^jistolier nous offre, avec quelques annexes, le
texte de toutes les « Kpîtres » lues à la Messe depuis le
premier dimanche de l'Avent jusqu'à la fin de l'aimée
liturgique : il est aisé de ne pas le confondre avec le
Tropaire, où l'on trouve aussi le texte d'un certain
nombre d'Kpitres, mais interpolées, mais tropées, mais
farcies. La différence est grande.
Quelques Leçons des Nocturnes ont été suivies de
Tropes ; mais il n'y a rien dans cette circonstance qui
puisse nous autoriser à prendre jamais le Lectionnaire
pour un Tropaire. Nous n'avons pas à parler ici du
Bréviaire, qui n'est pas un livre de chant, et avons
enfin épuisé la liste de tous les livres liturgiques avec
lesquels le Tropaire pourrait être confondu. Il y faut
parfois regarder d'assez près.
Il importe de ne tomber ici dans aucune exagération
et de ne pas s'imaginer en particulier que nos biblio-
thèques nous offrent souvent des Tropaires <* à Tétat
pur ». Rien n'est plus rare au contraire quun manu-
scrit contenant iNinrKMKNT un Tropaire; mais rien
n'est plus commun (pic de rencontrer un Tropaire dans
le même manuscrit où nous trouvons déjà un Aiili-
phonaire ou un Prosier. Ces différents éléments, si
rapprochés iprils soient, si mêlés (pfils paraissent.
LES TROPAIRES 73
sont nettement distincts l'un de l'autre, et il faut laisser
ou rendre à chacun sa vie indépendante. Cuique suum.
Certes, on a pu, d'une main plus ou moins respec-
tueuse ou maladroite, toucher au texte plusieurs fois
vénérable de l'Antiphonaire grégorien; on a pu lui faire
subir de regrettables additions. Mais enfin (et sur ce
point tous les liturgistes sont d'accord) l'Antiphonaire
grégorien existe et persiste comme une entité, comme
une unité indiscutable. On n'en pourra jamais dire
autant des Tropaires.
Il n'y a pas un Tropaire qui soit le prototype de
tous les autres.
Les plus anciens, qui sont ceux de Saint- Gall, ont
été reçus et adoptés un peu partout; mais n'allez pas
croire qu'on s'en soit contenté longtemps. On s'est mis,
de très bonne heure, à fabriquer de nouveaux Tropes,
et peu de fabrications ont été aussi actives. Quant
aux anciens Tropes, il en est parmi eux qui « ont eu
la vie dure » et se sont énergiquement défendus; mais
combien ont disparu pour faire place à de nouvelles
productions qui ne valaient pas les anciennes ! Cette
production incessante ne dura guère moins de deux
siècles.
Parmi les églises qui ont été ainsi atteintes de la
passion des Tropes, il en est qui l'ont été plus ou
moins gravement. Saint-Martial de Limoges a certaine-
ment dépassé toutes les autres , et personne ne saurait
lui contester le premier rang.
C'est dans les monastères, disons-nous, que ce
mouvement a été le plus vif. Nous nous persuadons
que les Tropes ont été alors, })ar certains côtés, ce
que nous appellerions aujourd'hui des exercices de
74 IIISTMllil': l)K I.A l'OKSIi; LITIliClnl K
rhétorique. Les moines en composaient volontiers de
nouveaux et en feisaient composer aux élèves des scolie
interiores et aux novices. De là cette sin^nilière at)on-
dance et variété.
Voilà, pour le redire en passant, ce <jiii jnoiivc que
les Tropaires n'ont jamais été, dans toute la force de ce
mot, un livre véritablement liturgirpie et officiel, '[jos
Papes ont pu approuver et encourager, en certains mo-
nastères, cette forme nouvelle de la piéti'; mais ils
n'ont pas été, mais ils ne pouvaient aller plus loin que
cette approbation et cet encouragement. Tous ces faits
sont à peser.
Nous ajouterons une dernière considération : c'est
que le plan des Tropaires parvenus jusqu'à nous est
loin d'être le même. Nous aurons lieu tout à l'heure
de constater trois ou quatre dispositions notablement
différentes dans l'économie de ces livres, qui n"ont
jamais eu de caractère officiel ni de vérital)le unité. Est-
ce que l'Antiphonaire de saint Grégoire a jamais subi
d'aussi nombreuses, d'aussi profondes modifications?
Un de nos plus anciens Tropaires est celui qui fait
aujourd'hui partie d'un précieux manuscrit de la bi-
bliothèque impériale de Vienne', dont on peut fixer
la date au commencement du xe siècle. Rien n"est plus
simple, rien n'est plus bref: cinq feuillets! Le système
de l'interpolation n'est encore appliffué ([u'à l'office de
huit fêtes : Noël, saint Jean TÉvangéliste, les saints
Innocents, l'Epiphanie, Pâques, TAscension, la Pen-
tecôte et l'Assomption. Comme nous l'avons dit jilus
haut (mais nous ne saurions en administrei' la
' Vioiiiio, Bilil. iini>., KVl'.t. I"- !-".•.
LES TROPAIRES 7o
preuve mathématique), ce Tropaire représente, à nos
yeux, les premiers essais des Tropistes de Saint- Gall.
Quoi qu'il en soit, le Tropiste est encore timide; il ne
se répand pas, il se contient. Que n'en est-on resté là!
Un Tropaire à l'état pur, un Tropaire remplissant à
lui seul tout un manuscrit ! Nous avons dit que le cas
était des plus rares; mais il est indispensable de signaler
ici un type véritablement classique, et ce sera cet in-
comparable manuscrit de Prum , qui est à coup sûr un
des plus beaux Tropaires connus ^ L'ordre de l'année
liturgique y est rigoureusement suivi, et chaque fête
y est à sa place, munie de tous ses Tropes. Nous ne
pensons pas qu'on ait jamais rien fait ni de plus ré-
gulier, ni de plus achevé.
Pour bien saisir ce qui va suivre, pour comprendre
les trois plans auxquels on peut réduire tous les Tro-
paires qui sont parvenus jusqu'à nous, nous devons
tout d'abord établir une distinction entre les grands
Tropes {Kyrie, Gloria, Sanctus, Agnus) et les petits
(Introït, Offertoire, Communion, etc.). On voudra bien
ne pas attacher ici un sens trop absolu à ces deux
mots « grands » et « petits », qui vont nous être si
utiles pour établir une classification raisonnée.
Étant donc admis ce point de départ, trois cas
peuvent se présenter, et l'on peut distinguer trois
classes de Tropaires.
Un certain nombre de manuscrits nous offrent,
nettement séparés l'un de l'autre, en deux catégo-
ries distinctes, les « grands » Tropes d'une part, et les
« petits » de l'autre. Entre ces deux groupes il y a
ï Bibl. nat. lat., 9448.
76
iifsToiiM': hi; I. \ i'(ti;sii-; i.n riirii(ii-|-:
commo une ligne de démarcation qu"(jn no veut pas
franchir \
D'autres Tropaires, dont les auteurs se sont peut-r-tre
montrés plus logiques, sont divisés en autant de
tranches qu'il y a de fêtes dans l'année liturgique -.
Dans chacun de ces chapitres (celui de Pâques par
exemple), l'ordre adopté est celui des différentes parties
de la Messe. Après les Tropes de l'Introït Resurrexi ,
viennent immédiatement ceux du Kyrie et du Gloria,
qui précèdent directement ceux du Graduel et de
l'Offertoire. Après ceux-ci on lit ceux du Sajictus et
M»
Saint -Gall.
2<.
—
3'»
—
4.
—
5»
—
fio
—
70 1
^ari^.Iiibl.ii.il.l
8"
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9»
—
10»
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H»
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12»
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Berlin,
lo»
Munich,
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—
17-
Londres .
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N'iennc,
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Home,
M»!
'aris. Hil.l.n.il.
2"
—
3»
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l3-
—
6»
Arsenal,
7"
Home .
8»
Oxlonl,
370, petits tropes, pp. 39 et puiv.; grands tropes, Giiet suiv.
378, même disposition que dans le manuscrit précédent.
380,petitstropes, pp.28ct suiv.; grands tropes, 83 et suiv.
381, petits tropes. pp.1'.)o et suiv.; grands tropes, 2'.io et suiv.
382, petits tropes, pp. 21 et suiv.; grands tropes, o7 et suiv.
'i8'i, petits tro|ies, pp. iiet suiv. ; grands tropes. 2(l2 et suiv.
lai., 887.])etits tropes, f» 8 r° et suiv.; grands tropes. f^Wr' et suiv.
9(19. petits tropes, l'°9ro et suiv.; grands tro[>es, foS^ir" et suiv.
inSi. petits tropes, f" 39 r° et suiv.; grands tro|>es.f<'92r'' et suiv.
1119, petits tro|>es, f» 'ir°et suiv.; grandstropes. f°84r»elsuiv.
1120, petits tropes, l"! r«etsuiv.; grands tropes, f" fur» cl suiv.
1121, petits tropes, f" 2 r» et suiv.; grands tropes, f» i2r''etsuiv.
13252. petits tropes. f° 3 r»et suiv.; grands tropes. f" 20 r» et suiv.
Theol. lat.. n" 11 : prlit~ trojx-s. f <> 1 v"(t>uiv.: grands tropes,
l'o 7y ro et suiv.
Lat., l'»08,3, petits tropes. f»80v°et suiv.; grands Iropes. foUVI
r" et suiv.
Lat., 14322, petits tropes, f»108r<'etsuiv.;grands tropes, f* |(Y)
r» et suiv.
Hrit. Mus., Cottonien, Caligida. .\ Xl\ . j-etits tropes. f» 1 r*
et suiv.; grands tropes , f* 37 t° et .-«uiv.
Bibl. imp. , 18 'lii, petits tropes, f* 58 V», suivis des grands l^ope^
qui ne se confondent pas avec eux.
Bil)l. Vitlorio Lmmanuele, 13ii, petits trope.-, f» li^ r»et suiv.;
grands tropes, f" I r" et suiv. Etc.
lat.. 1118, 1° 1 r' et suiv.
12'i0, 1» 18 V» et suiv.
9'i'i8, f" 7 v' et suiv.
9<J'»9, f" 7 r» et suiv.
1(»510, f° 1 V et suiv.
1109, I- i v» et suiv.
Bibl. Angelica B., 3 18, f» iiSi v° cl fuiv.
Bodléienne, Douce, n* 222. f* 0 r* et suiv. Etc.
LES TROPAIKES 77
de VAgniis, qui sont eux-mêmes suivis de ceux de la
Communion et de Vite Missa est. Même il arrive que
les proses sont là, à la place qu'elles doivent réguliè-
ment occuper en leur qualité de Tropes du Graduel.
D'autres Tropaires enfin ne renferment que les
grands Tropes \ Car, il faut bien le dire, on avait
fini par se lasser des autres, qui, décidément, allon-
geaient trop impertinemment l'antique et bel office et
obscurcissaient la lumière du texte liturgique. Il y a
certainement eu, dès la fin du xie siècle et au siècle
suivant, un mouvement de dégoût et de réaction contre
les anciens Tropes. On en avait assez ; on n'en voulait
plus.
Telles sont les trois grandes familles de Tropaires.
Ce que nous tenons à constater, c'est le caractère
éminemment pratique de ces différentes conceptions
d'un même recueil.
Le Tropaire était un livre de chant que les moines
emportaient à l'office. Certains religieux trouvaient plus
commode d'avoir à part les Tropes du Kyrie et du
Gloria : ils marquaient cette place avec je ne sais quels
sinets et s'y reconnaissaient mieux. Certains autres , au
contraire, préféraient ne pas avoir à tourner les feuil-
lets de leur Tropaire et à trouver en quelques pages
« d'une seule et même teneur » tout ce qui concernait
» l°Pans,Bim.nat. lat., 1086, f» 18 r» et 123 r et suiv.
2°
—
1087, fo 98 r» et suiv.
30
—
1132, fo 110 v» et suiv.
40
—
1133, fo 43 i-o et suiv.
5"
—
113'i, fo 102 roet suiv.
6»
—
1135, f Sro; 175 r; 177 r.
7»
—
1136, f» 96 r» et suiv.
8»
—
1137, fo 29 v°; 34 r».
9"
—
10518, fo 6 r» et suiv".
Kl»
—
Xouv. acq., 1177, f» '1 i-o et suiv.
Etc.
78 IIISTOIIU-: r)K LA POKSIK 1. 1 T I' HGIQUE
la mcme fête. Nous n'avons pas à i)arler de l'époque où
l'on ne chanta plus guère que les grands Tropes; mais,
quant au reste, il ne faut point disputer des goûts, et
tous les plans se peuvent comprendre.
Il nous reste à indiquer des manuscrits qui puissent
être scientifiquement considérés comme les types
exacts de ces trois grandes catégories de Tropaires.
Le type du premier groupe — grands et petits Trojjcs
formant nettement deux séries indé|)endantes — est le
vénérable manuscrit de Saint -Gall 484, le plus ancien
des Tropaires que l'on peut aujourd'hui consulter dans
la bibliothèque de l'antique abbaye.
Le second groupe — tous les Tropes se suivant dans
l'unité d'une seule et même fête — est caractérisé par le
Tropaire si régulier de Saint-Martial, qui est aujour-
d'hui conservé à la Bibliothèque nationale sous le
no 1118.
Le troisième enfin — pas de i)etits Tropes — est
représenté par le beau Tropaire de Saint -Évroult ', dont
nous ferons plus loin le portrait.
Nous disions tout à l'heure que le Tropaire « à l'état
pur » est chose rare ; mais de quels autres éléments se
composent les manuscrits où l'on rencontre les Tro-
paires? Il importe d'autant plus de le savoir, que ces
éléments doivent avoir une étroite connexion avec les
Tropes eux-mêmes. Dans un seul et même volume
on a dû réunir les morceaux de clinnt qui t'taient exé-
' Bil.l. n,U. Int.. IO0O8.
LES TROPAIRES 79
cutés en même temps que les Tropes. C'est, en effet, ce
qui a eu lieu.
Entre tous ces éléments, l'Antiphonaire d'une part,
et, de l'autre, le Prosier, tiennent la première place.
C'est l'Antiphonaire et le Prosier que l'on trouve le plus
souvent accouplés au Tropaire, et rien ne semblera plus
naturel. L'Antiphonaire % en effet, est le texte liturgique
qui a été, aux ixe-xie siècles, la matière de presque tous
les Tropes , et le Prosier - nous offre la collection de ces
prosœ que d'illustres liturgistes ont pu légitimement
assimiler aux Tropes du Graduel. Il en faut dire autant
de ces sequelai^, de ces jtihili du dernier Alléluia du
Graduel , de ces mélodies enfin que certaines églises
« neumatizaient » sans paroles, et dont les phrases
musicales étaient, en d'autres lieux, chantées alterna-
1 Saint-Gall, 376, pp. 82-312. - Paris, Bibl. nat. lat., 9(13, H 1-133 r»; 1087,
fos i_98; 1132, f"^ 5-107 v"; lOolO, f"^ 73 ro-117 v». — Rome, Bibl. Angelica,
pp. 117-184 r», etc. etc. = 11 va sans dire que ces indications se rapportent uni-
quement à cette partie de l'antique Antiphonaire qui, «depuis longtemps déjà,
a reçu le nom de Graduel ».
2 Saint-Gall, 376, pp. 312-432; 378 (ce ms., jusqu'à la p. 345, offre la même
disposition que le ms. 376) ; 380, p. 125 et suiv. ; 381 , p. 182 et suiv. ; 382, p. 94
et suiv. — Paris, Bibl. nat. lat., 887, f''96 r" et suiv.; 903, fol80roet suiv. (le mot
prosarimn s'y trouve); 1084, f" 221 r» et suiv.; 1086, f" 27 r» et suiv. (la plus
grande partie des proses appartiennent à la seconde époque); 1087 (les Prosse
annuales in festivitatibus dicendse, f° 101 v° et suiv., sont opposées aux Melo-
dise annuales in festivilalibus dicendse, t" 108 r" et suiv.); 1118, f" 144 r» et
suiv.; 1119, f" 140 et suiv. (le Prosier est à sa place normale après le Kyrie et
le Gloi'ia, avant le Sanctus et VAgnus) ; 1120, f» 106 r" et suiv.; 1121 (frag-
ments de Prosier), f" 196 r°, 200 r" ; 1132, f" 113 v« et suiv.; 1133 (très in-
complet), fo 50 \° et suiv.; 1136 (peu étendu), f" 17 et suiv.; 1137, f" 51 \° et
suiv.; 1240, f» 40 V et suiv.; 1338, i° 9 r» et suiv.; 9449, f» 85 r» et suiv.;
10508, fo 44 vAM v; 10510, f" 23 v''-72 r»; 13252, fo 39 r» et suiv.; nouv.
acq., 1177, f» 53 r''-89 r"; nouv. acq., 1235, f>J 177 v et suiv.; — Arsenal,
1169 (mêlé intimement au Tropaire), f» 1 r" et suiv. — Munich, 14083, f° 7 v°,
et 14322, fo 16 r». — Berlin, Theol. lat., n» 11, f» 14'i. — Londres, British Mu-
séum. Add. mss. f" 55 et suiv. Etc.
3 Saint-Gall, 484, p. 258.— Paris, Bibl. nat., 887, fo 87 ro; 909, fo 110, r»;
1084, fo 197 r"; 1087, f° 108 ro {Melodise annuales in festivitatibus dicendœ ,
opposées aux Prosse annuales in festivitatibus dicendœ, f* 101 v"); 1118,
fo 131 vo ; 1121, fo 58 r» ; 1133, f» 59 ro ; 1134, fo 107 r" ; 1135, fo 1 r- ; 1136, |o 92; 1137,
fo 39 ro. Etc.
80 MISÏOIHK 1)K I.A l'OKSIK I.II r li (il n I K
tivement avec ou sans les paroles des proses. Ces
sequehr se trouvent dans la plupart des 'rroi)aires de
Saint- Martial.
Que, pour leur plus grande commodité et avantage,
les moines de cette même abbaye et quelques autres
aient encore commandé à leurs scribes d'insérer dans
les Tropaires les Graduels ^ , les Traits -, les Versets al-
léluiatiques '^ il ne convient pas de s'en étonner. Ce sont
là autant de pièces liturgiques qui faisaient naturelle-
ment partie de l'antique Antiphonaire, et qui ont avec
les Tropes d'évidentes affinités de voisinage. Le Graduel
et son Verset alléluiatique ont été violemment tropés, et
le Trait (qui ne l'a jamais été) remplace l'Alleluia du
Graduel durant les temps de pénitence, et alors que le
Tropaire est muet. L'Offertoire * alors n'était point
aussi simple qu'il l'est aujourd'hui, et se composait
primitivement d'une suite de Versets auxquels nos
pères attachaient une grande importance. Le moine
était heureux d'avoir sous la main ses Offertoria
cum versibus, en même temps que ses Graduels, ses
Traits et ses Versets alléluiatiques. Tous ces élé-
ments se complétaient l'un par l'autre, et le religieux
n'avait pas besoin d'emporter deux livres au chœur :
ce bienheureux Troi)aire suffisait à tous ses besoins.
1 Paris, Bibl. nat. lat., 113'., f» 8r->; 1136, f-39; 1137, f» 110 v» ; nouv. acq..
1177, f" 18 ro et 43 i-. Munich, lat., I'i083, f" 39 r» et l'i322, f- 'k. r».
î Paris, Bibl. nat. lat., 909, i» 126 r"; 1121, f" 73 r"; 113'i, foBr»; 1135, n>lu9r ;
1136, i° 1 r»; nouv. acq., 1177, f" 18 r» et 'i3 r». Munich, Int., l'iOS;^, f" 39 r".
et 14322, fo 45 r°.
3 Paris, Bibl. nat. lat., 909, i'»17'i r"; 1121, fo INI r"; 113i. f" 39 r»; \iX'>.
f° 97 r»; 1136, f° 76 r°; 1137, î» 1 r"; 132o2, fo 81 r»; nouv. acq.. 1177, 28 r<>. Mu-
nich, lat., 14083, fo 63 v», et 1 'i322, f" 77 r», etc.
■* V. les Offertoria cum l'ersibus dans les manuscrits suivants: Saint-Gall,
380, p. 270; Paris, Bibl. nat. lat., 909, fo 206 r»; 1121 , fo'go ro; 1134, fo60r«;
113o. fol4 vo; 1136, fo i;o ro; 1137, fo 118 r»; nouv. acq.. 1177. f" 9 v". Munich.
lat., ri083. fo m v". ol r.322, fo 1-Jl r.
LES TROPAIRES 81
C'est à Limoges que tout cet ensemble a été conçu et
exécuté.
A Limoges, c'est à Limoges encore qu'on a fait entrer
dans ce recueil les Antiennes des Heures et en parti-
culier celles des Vêpres, et qu'on a réservé une place
spéciale à ces Antiphonae de Evangeliis sacrosanctis *
qui étaient uniquement composées avec le texte évan-
gélique et se chantaient durant l'office des dimanches
après l'Epiphanie et après la Pentecôte.
A Limoges , c'est à Limoges surtout qu'on a fait une
place d'honneur aux grandes Antiennes procession-
nales -.
A Limoges, c'est à Limoges qu'on a fait entrer fort
naturellement le Tonarium - dans le corps de ce même
recueil.
On ne s'étonnera pas sans doute de lire en quelques
Tropaires, limousins ou autres, YOrdo des rites de la
semaine sainte \ et le texte de ces deux admirables
Antiennes ad sumendum corpus Christi % le Venite d'une
1 Paris, Bibl. nat. lat., 909, f» 260 r»; 1121, f» 178 r» (après l'Epiphanie), et
187 r° (après la Pentecôte), etc. Cf. les Antiphonse per hebdomadem, ad Horas;
1135, f° 10 v°; les Antiennes de Vêpres, 1121, fo 185 \° (elles sont seulement
annoncées); les AUehda des Antiennes, 909, f°268 v°, etc. etc.
2 Bibl. nat. lat., 903, f<> 133 r»; 909, f» 150 r»; 1086, f» 2 r°; 1121, fo 138 r"; 1136,
f- 99 v°, etc.
3 Bibl. nat. lat., 909, f'»251 r»; 1084, f» 155 r»; 1118, f°104 r". Cf. 13252, fo71 r».
Ce dernier manuscrit n'est pas limousin , « mais à l'imitation de Limoges. » = Le
Tonarium n'est autre chose qu'un Traité de chant élémentaire.
< Paris, Bibl. nat. lat., 1240, f° 21; Berlin, Théol. lat., n» 11, f» 26 r»; Mu-
nich, lat., 14083 (intercalé dans la série des petits Tropes), f° 80 v° et ss.;
Londres, Add. mss., 19768, f» 44 v», etc.
s Paris, Bibl. nat. lat., 1086, f» 15 v»; 1121, f" 4 r», etc. etc.
Voici le texte de ces deux beaux morceaux :
I. Emitte Spiritum sanctum tuum, Domine, et dignare, sanctificando, mundare corda et cor-
pora nostra ad percipiendum corpus et sanguinem tuum.
DiACONUs. Nos frangimus, Domine : tu dignare tribuere, ut immaculatis nianibus illud
Iractemus.
Chorus. 0 quam beatum pectus illud quod Christi corpus meruerit digne percipere !
Ad altare. 0 quam pretiosa hujus escœ comestio, quœ esurientem satiat aninuim!
Chorus. 0 quam beati viri illi qui Christuni nierucrint suslinere, oui Angeli et Archan-
I - 6
82 HISTOIRE DE LA POESIE LITURGIQUE
part, et VEmitte de l'autre, que l'on chantait, lo jour
de Pâques et le jour de Noël, dans les basiliques éclai-
rées de mille cierges, alors que tous les fidèles s'avan-
çaient en longues files vers la table eucharistique.
Le Venite du jour de Pâques est resté célèbre jusqu'au
dernier siècle : il avait une incomparable majesté et
sentait sa belle antiquité liturgique.
Ce même jour de Pâques, à la grand'messe, on
voyait après la Collecte un grand mouvement se pro-
duire soudain dans le chœur. Plusieurs frères, qui
avaient été choisis pour l'étendue et la beauté de leur
voix, se détachaient des autres et s'avançaient grave-
ment jusque devant les corps des saints martyrs. Puis,
tout à coup, au milieu du silence universel, ils enton-
naient les fameuses Acclamations connues sous le nom
de Laudes : Christus vincit, Christus régnât, Christus
imperat. Cette première Acclamation était répétée trois
fois. Après un Exaudi Christe également répété trois
fois, on priait alors pour l'Église : Ecclesia sancta Bei,
salus perpétua; puis, pour le pape régnant : Johanni
pontifici et universali papx vita; puis, pour le roi :
Ugone rege serenissimo, a Deo coronato, magno et pa-
cifico, vita et Victoria! Nous citons à dessein un exemple
tiré d'un de nosTropaires, et il s'agit ici, comme on le
voit, d'Hugues Gapet et de Jean XVI.
geli munera offerunt, immortali et jeterno Rcgi! Allcluia (version du manuscrit de Saint-
Martial. Dibl. nat. lat., 1121 , f" 4 ro). La profonde beauté et le caractère dramatique de celte
Antienne n'échapperont à personne.
II. Venite, populi, ad sacrum et immortaie mystorium et libamen agondum. Cum timoré et
fide accedamus manibus mundis. Pœnitenlia; niunus communicemus, quoniam proptcr nos
Agnus Dei Palris sacrificiuni proposilum est. Ipsum solum adoremus, ipsum glorificemus,
cum angelis clamantes : Alléluia !
C'est de cette dernièi-e Antienne que le plus illustre lilurcisie de notre temps a pu
dire : « Enfin le moment où la foule de» fidèles va jvirticiper au divin banquet
est arrivé. L'antique Eglise des Gaules faisait retentir alors un appel sublime
LES TROPAIRES 83
Ces Acclamations ^ formaient avec le Venite une sorte
d'Office exceptionnel qui avait tout naturellement son
droit d'entrée en un recueil de Tropes. Ce que ces vieux
livres ne nous disent pas, ce que nous avons appris
ailleurs, c'est que, dans les églises cathédrales, les
chantres, après avoir achevé les Laudes, montaient
lentement jusqu'au trône de l'évêque, qui leur donnait,
avec sa bénédiction, plusieurs pièces de belle et bril-
lante monnaie l Quel charmant sujet de tableau !
Les moines de Saint- Gall connaissaient ces Accla-
mations, et nous en possédons un texte qui provient
d'un de leurs Tropaires; mais, en général, les manuscrits
de ce vieux monastère ne renferment que des Tropes
et des proses. Presque toujours, presque partout, c'est le
Tropaire commencé par Tutilon, accompagné du Sé-
quentiaire de Notker. Il y faut joindre, pour être com-
plet, un certain nombre de ces Versus dont nous avons
parlé plus haut, et qui, par plus d'un côté, avaient
quelque peu le caractère des Tropes. CesVersus, comme
nous l'avons dit, se chantaient surtout aux processions
et parfois au dehors du monastère, quand les moines
allaient solennellement au-devant d'un empereur, d'un
roi ou d'un évêque. Les chantres alors emportaient
avec eux leurs Tropaires, qui étaient de petite taille.
qu'elle adressait à toute cette multitude avide du pain de vie. Cette Antienne
lyrique se conserva dans nos cathédrales, même après l'introduction de la liturgie
romaine par Pépin et Charlemagne. ))(Doni Guéranger, Année liturgique, le
Temps pascal, 1, p. 201. Cf. les Voijages lilurgiques du sieur de Moléon,
pp. 17 et 29.)
1 Sur les Acclamations ou Laudes en général, voy. Martène, De antiquis
Ecclesiœ ritibus, I, 369-371; De antiquis Monachorum ritibus, 424. Cf. les
Voyages liturgiques du sieur de Moléon, pp. 323, 325. = A Vienne, c'étaient deux
chevaliers qui entonnaient le Christus vincit; à Lyon, sex équités sen advocati
seu capituli consiliarii.
2 A Reims, deux sous; à Laon, duodeciin nuiiuni boniv nwnetie.
84 HISTOIRE DE LA POESIE LITURGIQUE
et, dès que le souverain ou le prélat paraissait, en-
tonn aient, de leur plus belle voix, les hexamètres ou
les distiques d'Hartmann et de Radpert.
Les Versus, comme on le voit, avaient leur place
toute marquée dans les manuscrits (jui nous occupent,
et c'est par eux que nous terminerons l'énumération
de tous les éléments d'un Tropaire.
Les premiers Tropes, comme nous l'avons montré
plus haut, remontent sans doute à la fin du ixe siècle
ou au commencement du xe. Leur diffusion a été rapide
et ne semble pas s'être ralentie durant tout le cours du
xe siècle. C'est pendant la première moitié du xie siècle
qu'il faut peut-être placer ce que nous n'oserions
appeler leur gloire; mais, à coup sûr, leur décadence a
commencé dès la fin de ce même siècle. Au xiie sièclo,
les nouveaux Tropes, les Tropes rimes, les Tropes-
motets, les Tropes-chansons sont à peu près les seuls
qui soient véritablement à la mode; mais, au xiii*^, tout
semble écroulé, sauf quelques morceaux de choix qui
résisteront au temps. Tels sont ces très anciens Tropes
du Kyrie, du Sanctus et de VAgnus, que nous trouvons
dans le Missel romain de Paul III et on d'antres Mis-
sels encore plus modernes. C'est tout.
D'après ce qui précède, on peut d'une façon géné-
rale soupçonner, d'ores et déjà, quelle est la date de nos
Tropaires.
Il n'en est parvenu jusqu'à nous qu'un assez petit
nombre du xe siècle, et je n'hésite pas à donner, parmi
eux. la place d'iK^niour au manuscrit 484 do Saint-
LES TROPAIRES 85
Gall. Martin Gerbert, qui est bon juge, s'est cependant
trompé en décernant le même brevet d'antiquité à
ceux de Saint- Emmeran. Quant au magnifique manu-
scrit de Prum, il a certainement été commencé durant
les toutes dernières années du xe siècle, et achevé
durant les premières heures du xie. Le Tropaire d'Echter-
nach et celui qui est aujourd'hui conservé à la biblio-
thèque Victor- Emmanuel ne sont pas beaucoup moins
anciens. Mais il y a peut-être quelque exagération dans
le sentiment de l'éditeur des Casus Sancti Galli, qui ne
craint pas d'attribuer au xe siècle les manuscrits 376,
378, 381 et 382 de la bibUothèque de Saint-Gall. Nous
ne les pensons pas, en leurs meilleures parties, anté-
rieurs au xie siècle. Le xp siècle est la grande époque
de la production des Tropaires, et nous n'en comp-
tons pas moins de trente, dont la moitié ont été
exécutés à Saint-Martial de Limoges. C'était là le centre
réel de la fabrication, et l'on « exportait ». Quatre Tro-
paires du xne siècle! C'est peu, mais c'est un chiffre
qui est éloquent à sa manière, et atteste la décadence
de l'institution. Nous ne parlerons ici, d'ailleurs, que
des Tropaires et Tropes de la première époque : les
Tropes rimes ont duré plus longtemps.
Les dates que nous venons d'établir ne sont pas tou-
jours sans donner lieu à quelques doutes, et il y a ici plus
d'une difficulté à résoudre. Les éléments de critique sont
moins nombreux et moins sûrs qu'on pourrait le croire.
Entre les écritures minuscules de la fin du x^^ et
celles du commencement du xie siècle, la distinction
n'est pas toujours aisée. Il y a bien l'emploi de Vae et de
Voe, de l'e cédille ou de Ve simple qui peut nous fournir
quelques lumières ; mais on a singulièrement exagéré
86 IlISTOITŒ lŒ I. A l'OKSir: TJTUHr.IQTJE
la précision « mathématique » de cos données, et il y
a eu, à ce point de vue, des pays ou des scribes qui
ont été plus ou moins en retard.
Par bonheur, nous avons de meilleures ressources,
et telles sont les Acclamations, tel est ce beau Christus
vincit où l'on crie tour à tour : « Vive le pape ! Vive
« le roi ! Vive l'évêque ! » mais en prenant soin de les
nommer par leurs noms. De tels noms valent des
dates.
Le Tropaire de Saint-Martial, qui porte le n» 1240
dans le fonds latin de la Bibliothèque nationale, ren-
ferme des Acclamations au pape Jean (c'est Jean XI,
qui a vécu sur le trône pontifical de 933 à 936), au roi
Raoul (923-936), à l'évêque de Limoges ïurpion (905-
958). Voilà un Tropaire qu'il n'est pas impossible de
dater (si l'on se convainc scientifiquement que tous ses
éléments sont réellement de la même date), et l'on ne
saurait hésiter qu'entre les années 933-936. Notez, au
reste, qu'il pouvait s'agir ici, non pas de ce manuscrit
lui-même, mais d'un original sur lequel il aurait été
servilement copié*.
Un autre Tropaire de Saint-Martial, l'un des plus
importants, contient de belles laudes où figurent les
noms d'Hugues Gapet, rege serenissimo , et de Jean XVI,
universali papa. C'est entre les années 987 et 996 qu'il
faut placer ce manuscrit, s'il remplit réellement toutes
les conditions que nous venons de préciser plus haut *.
I « Incipiunt laudos in Pascha sive in Pentecosten : « Clirij^tu:* vincit, Cliriî-tus
régnât, Christus imperat. Exaudi, Christe, johanm summo roNTiFici (en marpe,
d'une main postérieure, Honorio); Hopulko, hege serenissimo (en marpe.PAi-
Uppo et Ludovico, MCCXXIII )\ TinrioM pontikici et omm plebi (en marge,
Joharmi et Bcrnavdo, MCCXVIII }. » Bil)!. nat. lat., l-2'iO. f» 60.
- « Christus vincit, Christus régnai, Christus imperat {Jllvicibus]. — Exaudi,
Christe ( III vicibus ) : Ecclesia sancta Dei , salus rEnPETi'A. Redemptor
LES TROPAIRES 87
Le Tropaire de Berlin est du xie siècle; mais on peut
arriver à le dater plus exactement, grâce à ses Accla-
mations, où figurent notamment des vivats en l'honneur
du pape Jean XIX (1024-1033), du roi des Romains
Conrad (1024-1039), et de l'évêque Sigebert*. Ce der-
nier est un évêque de Minden, qui a occupé son siège
épiscopal depuis 1022 jusqu'en 1037. De tous ces
chiffres , combinés avec plusieurs autres mentions
dont nous donnons ci- dessous le détail, il résulte que
notre Tropaire n'a pu être écrit ni avant 1024 ni
après 1033.
Nous avons gardé pour la fin ce gracieux petit Tro-
paire de la bibliothèque de l'Arsenal , qui est enfermé
et comme blotti dans un bel ivoire du nie siècle. Ses
Acclamations ne nous sont pas d'un moindre secours.
Avec ce bel et grave enthousiasme liturgique que
vous connaissez, on y prie pour le roi Robert (996-1031)
et pour l'évêque d'Autun, qui s'appelait alors Gautier
mundi, tu illam adjuva. Sancta Dei Genitrix, tu illam adjuva. Sancte Michael,
tu illam adjuva. Sancte Gabriel, tu illam adjuva. — Exaudi, Christe {III vici-
bus) : JoHANNi poNTiFici ET uNivERSALi PAP^ viTA. Sancte Petre , tu illam
{sic) adjuva. Sancte Paule, tu illam adjuva. Sancte Clemens, tu illam adjuva.
Sancte Silvester, tu illam adjuva. — Exaudi, Christe {III vicibus) : Ugone,
REGE SERENISSIMO, A DeO CORONATO , MAGNO ET PACIFICO, VITA ET VICTORIA. SaUCta
Maria , tu illum adjuva. Sancte Johannes , tu illum adjuva... » ( Bibl. nat. lat.,
1118, f°38v").
' « Christus vincit, Christus régnât, Christusimperat. — Exaudi, Christe (to-) :
JoiiANNi suMMO PONTIFICI ET UNIVERSALI PAPE VITA. Rcdemptor muudi , tu
illum adjuva {ter). Sancte Petre. Sancte Andréa. Sancte Clemens. Sancte Sixte.
— Exaudi, Christe {ter) : Heinrico, Romanorum imperatori augusto, a Deo
CORONATO, MAGNO ET PACIFICO, VITA ET VICTORIA {ter). ChÔNRADO REGI NOSTRO , A
Deo CORONATO, magno et pacifico, VITA ET VICTORIA {ter). Salvator mundi, tu
illum adjuva. Sancta Maria. Sancte Michael. Sancte Gabrihel. Sancte Raphahel.
Sancte Johannes. — Exaudi, Christe {ter) : Chunigunde imperatrici auguste
A Deo coronate, salus et vita. Gisèle regine nostre a Deo coronate, salus
et vita. Sancta Félicitas {ter), tu illam adjuva {ter). Sancta Perpétua. Sancta
Cecilia. — Exaudi, Christe {ter) : Nobilissime proli regali salus et vita.
Sancte Stéphane, tu illum adjuva {ter). Sancte Laurenti. Sancte Pancrati. —
Exaudi, Christe {ter): Piligrimo archiepiscopo, a Deo electo , salus et vita
PERPETUA. Sancte Gereon, tu illum adjuva. Sancte Pantaleon. Sancte Séverine.
88 IIISTOIKK DE LA IMJÉSIE LITUKfilOUE
(977-1024). Concluez et dites avec nous, servatis ser-
vandis, que ce charmant manuscrit a dû être exécuté
entre les années 996 et 1024'.
Il y a bien çà et là quelque obscurité dans ces mon-
tions chronologiques, et nous ne voudrions pas nous y
perdre; mais on conviendra qu'elles sont parfois de
nature à donner aux dates des Tropaires une heureuse
et désirable précision.
Un autre critérium existe, mais qui est seulement
applicable aux manuscrits de Saint-Martial. On sait
qu'un concile fut célébré à Limoges en 1031, touchant
la grosse question de l'apostolicité de saint Martial.
Pouvait-on, devait-on lui décerner le titre d'Apôtre?
C'est ce qui fut l'objet de débats passionnés et reten-
tissants. Le concile se prononça pour l'affirmative, et
personne n'applaudit plus vivement à cette décision
— Exaudi, Christe (ter) : Sigeperto, hujus ecclesi.« episcopo, salus et vita
PERPETUA. Sancte Gorgoni , tu illum adjuva (ter). Sancte Dionif^i. Sancte Eleu-
theri. — Exaudi, Christe (ter) : Omnibus jldicibus et clncto exebcitli
CHRisTiANORiM VITA ET VICTORIA. Sanclc Maupici, tu illus adjuva. Sancte Kiliani.
Sancte Hommeramne. (Berlin, Théol. lat., n» 11, f» 111.)
1 " Chrislus vincit, Clirislus rognât, Christus imperat. R. In choro, simililer Hl.
Exaudi, Christe. Illi slmmo pontifici et u.niversali pap.« vita (ter). —
Sancte Petre. R. Tu illum adjuva. — Sancte Paule. R. Tu illum adjuva. — Sancte
Gregori. R. Tu illum adjuva. — Exaudi, Christe. Rodpf.rto magxo et paci-
Fico REGE VITA ET VICTORIA. Sanctc Dionisiï, tu illum... — Sancte Cornelii, tu
illum... — Sancte Medarde, tu illum... — Exaudi, Christe : Walterio hl'jus
ECCLESI.E pontifici ET OMNI CLERO ET PÙPlLO SIBI C0MMIS50. SALUS ET VITA. —
Sancte Nazarii, tu ill[os] ad... {une ligne effacée)... vasii, tuillo8î»djuva,etc.etc. »
( Bibl. de l'Arsenal , 1 160, f» 22 v.) = Cf. le Tropairc de .Nevers , avec ses éléments
chronologiques : «Christus vincit, Christus rognât, Christus imperat (tribus vi-
cibus). — Exaudi, Christe (111). — Summo.pontifici et u.niversali pap.ï, vita.
Salvator niundi, tu illum adjuva. Sancte Petre, tu illum adjuva. Sancte Paule,
tu illum adjuva. Sancte Andre[al. — Exaudi, Christe. Hiconi, pontifici nostro,
SALUS ET VITA. Sancte Cyrice, tu illum adjuva. — Henrico rege, Filippo rege
SERENISSIMO, A DeO CORONATO. MAGNO ET PACIFICO, VITA ET VICTORIA... » ( Bibl. nat.
lat., 94i9, f" 30 r».) Cf., dans le manuscrit de Saint -Emmeran (aujourd'hui
conservé à la bibliothèque de Munich sous le n» 1 1322), les Acclamations qui
nous donnent le nom de Gebbard, évoque de Hatisbonne. 11 ne peut-être ici
question que de Gebbard II ou de Gebbard III, et le manuscrit a dû être cié-
culé entre les années 102'» et 1036. Nous discutons le cas plus loin.
LES TROPAIRES 89
que les moines de Saint -Martial. Vite, ils mirent
leur liturgie au courant. Jusque-là on avait chanté
pour la fête de saint Martial la Messe Statuit des
Confesseurs; mais vraiment cette Messe n'était plus
de mise, et on la remplaça par une autre Messe dont
l'Introït commençait par le mot : Probavit. On n'hésita
pas à opérer sur les Tropaires des grattages plus ou
moins intelligents et qu'il est trop aisé de constater
aujourd'hui.
Tous les Tropaires où ces grattages ont été pratiqués
sont visiblement antérieurs à 1031 : tels sont notamment
les manuscrits 1120 et 1121.
Tous ceux où figurent, sans grattages, les indications
de la Messe nouvelle sont postérieurs à 1031 : tel est
le Tropaire 909; tel est ce curieux manuscrit 1119, où
l'on a écrit en toutes lettres : In festivitate sancti Mar-
tialis APOSTOLi '.
Mais ce sont là d'heureuses fortunes que le critique
n'a pas toujours l'occasion de rencontrer. Il est donc
astreint à une grande prudence, quand il date un Tro-
paire. Au reste, ces manuscrits pseudo -liturgiques vont
bientôt devenir moins nombreux, puis disparaître.
1 a. Tropaires de Saint-Martial qui ont subi des grattages, après le concile
de 1031, en vue de changer la Messe Statuit en la Messe Probavit, et qui,
par conséquent, sont antérieurs a 1031 : 1084, f° 47... ; 1120, f" 46 r» et
suiv. (un autre mot a été gratté, f» 47 v, dans la phrase suivante entre les mots
advenit et hic: « Sedibus hesternis advenit... hic almus » ); M21, i° 28 v" et
suiv. (La correction est surtout très visible au f» 30 r°. — Dans ce même ma-
nuscrit (?) on a inséré le mot apostolutn au lieu d'un autre mot gratté, et l'on a
ajouté les mots Galliam cunctam deduxit, etc. — Au neuvième Trope de
l'Introït , le- correcteur s'est fatigué ( f» 30 v») et a cessé de changer statuit en
2)yobavit.)
b. Tropaires de Saint- Martial qui ne présentent aucune trace des grattages
ci-dessous mentionnés. Ces textes sont postérieurs à 1031. Ce sont, comme
nous le disions plus haut, les manuscrits de la Bibl. nat. lat., 909, f" 42 v,
et 1119 (["54 v), etc.
90 niSTOÏRt: DK LA POKPIK LirrRoiorK
Cette évolution, sans doute, ne s'est pas faite en un
jour. Aux anciens Tropaires du xp siècle ou a fait subir
un certain nombre d'additions, auxquelles les xiiie et
xiv^ siècles ont mis la main; mais enfin, mais malgré
tout, le vieux texte était mort, et c'est sur les marges
d'un des Tropaires de Saint-Martial qu'on a commis
l'irrévérence d'écrire un jour la chronique de Bernard
Ithier'. Est-ce qu'on aurait osé, aux x« et xic siècles,
commettre une telle « profanation »?
Décidément , le vieux Tropaire est mort.
L'origine des Tropaires est parfois aussi difficile à
établir que leur âge. La question, d'ailleurs, n'est pas
moins importante, et mérite également tout l'effort de
notre attention.
QuelesTropes aient été inventés à Saint-Gall -, dans
ce véritable conservatoire de musique religieuse; qu'ils
soient partis de là pour commencer leurs voyages dans
l'Europe chrétienne , le fait ne semble pas douteux. Les
Tropaires de Saint-Gall ont véritablement ser^i de type
à tous les autres. Au reste, ils ne sont pas difficiles à re-
connaître : la place importante qu'y occupent le culte
de saint Gall et celui de saint Othmar, les vers de Rad-
pert et d'Hartmann, tout nous met dans l'impossibilité
de les attribuer à aucune autre église. J'imagine que le
t Bernard Ithior a vécu entre les années 1163-1223. Le manuscrit en question
est celui de la Bibl. nat. lat. 1338.
* Le manuscrit '»84 de Saint-Gall est le plus ancien (peut-être après celui de
Vienne, n» 1600). Cf. 376, 378, 38(), 381, 382; Vienne. 18^1: <">xt"..rd ■ \\nirc .
222); Londres (Add. rass. 19768).
LES TROPAIRES 91
petit Tropaire aujourd'hui conservé à Vienne* est un
des plus anciens parmi tous ceux qui sont sortis de la
célèbre abbaye. Quelques-uns sont aujourd'hui dissé-
minés dans cette même bibliothèque de Vienne- et
dans celles de Londres \ d'Oxford * et de Berlin ^ ; mais
presque tous les autres sont restés dans la bibliothèque
de Saint -Gall, et en particulier ce minuscule et pré-
cieux manuscrit 484, où abondent encore les Tropes
sans paroles, et qui a par là un vrai parfum d'anti-
quité.
De Saint- Gall à Einsiedeln il n'y a pas loin, et ce fut
là sans doute la première conquête des Tropes. Mais ils
étaient appelés à faire un plus beau chemin dans le
monde.
C'est sans doute du côté de l'Allemagne qu'ils jetèrent
leurs premières ramifications; puis, en France et en
Itahe. Tel est là leur triple itinéraire, qui n'est pas
toujours une traînée de lumière.
En Allemagne, une des premières haltes a été Saint-
Emmeran'^, près de Ratisbonne; puis Reichenau. Mais je
ne vois aucune raison pour croire que Prum et Echter-
nach" n'aient pas reçu presque immédiatement l'in-
fluence de Saint-Gall. Les deux Tropaires de ces abbayes
sont les plus beaux qu'ait produits l'art latin : deux
chefs-d'œuvre. Ils sont presque trop beaux, et nous
aurions voulu qu'un luxe de si bon aloi fût unique-
« No 1609.
2 No 1845.
3 British Muséum, Add. mss. 19768.
* Douce, 222.
^ Théol. lat., in-4o, n» M.
8 Ces manuscrits sont aujourd'hui conserves à la bibliothèque royale de Mu-
nich sous les no« 14083 et 14322.
7 Echternach, Bibl. nat. lat., 10510, cl Pram, 9448.
92 HISTOIRE DE LA POE?IE MTÎ'nniOUE
ment consacré, comme nous l'avons déjà fait entendre,
à l'Antiphonaire de saint Grégoire ou au Sacramen-
taire.
Cependant le mouvement tropistique allait son train.
Il est certain qu'à Nuys les Séquences, à tout le moins,
ont eu un épanouissement exceptionnel, et nous avons
un manuscrit de Londres ' qui nous Tatteste vivement.
Saint Quirin y est à deux reprises l'objet d'une préoc-
cupation liturgique qui n'a pas lieu de nous sur-
prendre, car rien n'égalait à Nuys la popularité de ce
martyr, dont les reliques, en l'an 1050, étaient venues
de Rome. Les haines religieuses s'acharnèrent plus tard
sur ces restes glorieux, et les calvinistes les jetèrent
au vent.
Pour déterminer l'origine du beau Tropaire de Berlin,
nous avons deux traits qui ne sauraient nous induire
en erreur. Dans les Acclamations déjà citées plus haut,
et dans certaines rubriques encore plus précieuses , on
y trouve en toutes lettres, comme nous l'avons vu. le
nom de Sigebert, évéque de Mindon (1022-1037), et
l'on y peut lire un peu plus haut une hymne en l'hon-
neur de saint Gorgonius, qui est le propre patron' de
cette même cité épiscopale de Minden, dont l'évéque
était suffragant de Cologne. C'est ici que se termine
notre voyage en Allemagne, et nous n'avons pas de
textes qui nous permettent d'aller plus loin.
Revenons sur nos pas, et faisons rapidement une
pointe en Italie.
1 Manuscrit de Londres, British Muséum. .\dd. mss.. n» 19768. Cf. les Arta
Sanclonun , au 3(1 mars.
* P. Cahier, Caractéristiques des Saints, p. 6o7. — Ce manuscrit de Berlin,
en ce qui concerne le Tropaire proprement dit, vient de Saint-Gall : It% festi-
vitate sancli patroni nostri Galli (p. 69), etc.
LES TROPAIRES 93
Il est certain que les Tropes ont pénétré de bonne
heure en Italie, et les deux Tropaires de Rome nous
en fournissent la preuve. Celui de la bibliothèque An-
gelica consacre une place d'honneur au culte de saint
Synèse et de saint Théopompe \ qui sont les patrons
de Modène^; aux saints Hippolyte et Gassien^, dont le
premier est honoré à Rome et le second à Imola; aux
saints Vital et Agricola \ qui sont particulièrement po-
pulaires à Rologne. Quant au Tropaire de la bibho-
thèque Victor- Emmanuel, on y voit figurer aussi
solennellement les saints Théopompe et Synèse, et son
origine, par là, ne saurait demeurer obscure. Mais il
nous est permis de dépasser Modène, Rologne, Imola,
Rome, et de descendre bien plus au midi. Les Tropes ont
fleuri ou, si vous aimez mieux, ont sévi au Mont- Cas -
sin. Les Ordinaires publiés par D. Martène ^ ne laissent
aucun doute à cet égard. Il nous serait doux d'aller
plus loin et de débarquer en Sicile; mais, jusqu'ici du
moins, rien ne nous y autorise, et force nous est de ne
point passer le détroit.
En France, il s'est trouvé une abbaye privilégiée
qui a fait des Tropes sa chose, son domaine, sa gloire,
et dont le nom est désormais inséparable de leur his-
toire. Saint-Gall, je le veux bien, n'a pas été éclipsé par
Saint-Martial de Limoges; mais peu s'en est fallu. Les
Tropaires limousins^ représentent encore aujourd'hui la
1 Bibl. Angelica, B. III, 18, f» 265 r".
2 3 janvier. — Les saints Synèse et Tiiéopompe, martyrs à Nicomédie sous
Dioclétien, sont honorés tout particulièrement à Rome. (V. Acta Sanctorum, I,
127, et les Addenda de l'édition Victor Palmé, p. 723. Cf. les Caractéristiques
des Saints, du P. Cahier, p. 657.)
3 13 août.
< 4 novembre.
5 Martène, De anliquis Monachorum ritihus, col. 276, 423, etc.
6 Saint- Martial, S87, 909, 1084, 1087, 1118. 1119, 1120, 1121, 1132, 1133,
94 HISTOIRE DE EA POÉSIE LITURGIQUE
moitié de tous ceux qui sont parvenus jusqu'à nous: ce
sont aussi les plus compliqués et los plus Ioïv^h. Saint-
Martial doit beaucoup à Saint-Gall; mais on lui doit
plus encore. Saint-Martial a rayonné. Nul doute, sui-
vant nous, que de Limoges, à travers certains inter-
médiaires que nous ignorons, les Tropes n'aient été
^ transportés jusqu'à Nevers. Notez (le cas est rarissime)
qu'il s'agit de la cathédrale de Nevers S consacrée à
saint Gyr, et qu'enfin nous avons affaire à un Tropaire
séculier. De Nevers à Fleury-sur-Loire il n'y a pas loin,
et voici que nous avons sous les yeux le beau Tropaire
de Fleury-sur-Loire*. Par un autre chemin, les Tropes
étaient un jour venus faire leur apparition à Autun et
s'étaient victorieusement installés dans la cathédrale
de cet illustre diocèse \ Mais ne jetons pas ce regard
en arrière. Ne nous arrêtons pas : marchons encore,
marchons toujours.
Paris, où viennent se manifester toutes les modes
nouvelles, Paris ne pouvait échapper à celle des Tropes.
Il l'a subie, comme l'atteste à tout le moins un de nos
plus précieux manuscrits *. Mais, après Paris, il ne nous
reste plus guère qu'à aller entendre, le jour de Noël,
un Office tropé à l'illustre abbaye de Saint-Denis en
France^, et à nous permettre (ce sera la dernière) une
échappée en Normandie, jusqu'à Tabbaye de Saint-
Évroult^ où l'on va nous mettre entre les mains un
1134, 113S, 1136, H37, 1138, 1240. — Cf. 1086, qui e?l de Saint -Léonard, etc.
— Sainl-Yrieix est représenté par 903.
> Biljl. nat. lat., 94/i9, et noiiv. acq., 1235.
» Bibl. nat. lat., nouv. acq.. n» 1177.
3 Bibl. de l'Arsenal, 1169.
' Bibl. nat. lat., 13252.
'' V. Marlène, De antiquis Monathonim rilibus, cul. 425.
<> Bibl. nat., lat. 10508 (ancien Supplément latin 1017). Sur l'activité litur-
LES TROPAIRES 93
Tropaire merveilleusement écrit et tout à fait classique.
Restons -y.
Voici cependant que notre « tour du monde » est fini,
et il serait trop aisé d'en dresser la carte. Mais nous
n'avons pu nous servir que d'un certain nombre de
Tropaires découverts par nos devanciers ou par nous.
Demain peut-être on en trouvera de nouveaux qui
nous donneront de nouvelles idées et nous permet-
tront d'aller plus loin.
Nous le désirons vivement.
gique qui régnait dans ce monastère de Saint -Evroult, cf. Ordéric Vital :
« Prœfatus monachus [Witniundus] granimaticœ artis et musicae peritissimus
erat : quod nobis adhuc testantur Antiphonœ et Responsoria quœ ipse condide-
rat. Plures enim dulcisonos cantus in Trophario et Antiphonario edidit. »
CHAPITRE X
SUITE DU PRECEDENT — LES TROPAIRES
Les Tropaires ont une forme qui est essentiellement
variable. Il en est qui sont des manuscrits de luxe :
d'autres, au contraire, ne sont que des livres à bon
marché. Il est facile de comprendre la coexistence de
ces deux types. Ils répondent à deux idées, à deux
courants, à deux besoins.
A Saint- Gall on s'est tenu dans le juste milieu. Ces
vieux Tropaires ont bonne mine, mais on n'y saurait
signaler aucun excès. A Prum et à Echternach on ne
s'est pas montré si modéré, et les Tropaires de ces
deux abbayes peuvent passer pour des chefs-d'œuvre
de calligraphie et de peinture. Nous ne saurions nous
en plaindre au point de vue de l'art; mais nous esti-
mons, encore une fois, qu'un tel luxe était déplacé
et que les Tropes ne méritaient pas un tel honneur.
11 y a plus : cette magnificence était dangereuse et
pouvait contribuer à mettre en trop vive lumière ces
longues et médiocres interpolations du texte litur-
gique. Les moines de Saint- Martial ont été plus
I - 7
\)S HISTOIRE DI- LA l'OKSli: MÎT liClnUP:
<« i»ratiques », et ont surtout considéré les Tropairos
comme des livres d'un usage fréquent et qu'il fallait
souvent emporter au chœur avec soi. 11 est vrai que
deux ou trois moines pouvaient chanter en se servant
du même volume; mais c'était, je pense, le maxi-
mum. De là, dans un chœur assez nourri, la nécessité
irem
me
Q arrt LttjiJitur tr>t3trVc4erTxre{
. > ^ - r -^ ^ /
Fac-similé des principaux Tropairos. — Le plus ancien Tropaire de la bibl.de Saiiil-Gall
(i8'i, p. 32). Fragment d'un Tropc de l'Introït de saint Ktienne.
de posséder un certain nombre de Tropaires. Beau-
coup, sans doute, ne sont pas parvenus jus([ii"à nous ';
mais, parmi ceux qui nous sont restés, il en est peu
qui soient d'apparence luxueuse. La plupart, s'il t.iul
tout dire, sont l'œuvre de scribes médiocres. Nous au-
rons lieu de le constater tout à l'heure.
En revanche, quehpies églises ont été hantées de la
1 En lèle du ms. lat. de la Bibl. nat., 1138 (f" I v), il y a un feuillel de
garde qui est composé avec le feuillet, jilié en deux, d'un Trojxiire du xi* siècle
(Trope du Kyrie... Descender,' voluisli iiropler liominem).
LES TROPAIRES 99
même idée que les monastères de Prum et d'Echternach,
et ont voulu donner à leurs Tropaires une parure artis-
tique que le seul Sacramentaire eût vraiment méritée.
Le Tropaire d'Autun, qui est aujourd'hui conservé à la
bibliothèque de l'Arsenal \ a été orné de miniatures
-lAndeffiTenuc eux.' tufhirttcp
1 1 ^ ^ /- / y /* / v< /- /T
fnvLftliiLxucLeTetA lluilufirrp
n^^^ '^ f^ • ^ ^ "^ r'^ '^'^t/
ne; eu; PUrrattuf-
— c&r/er» iXnujtm euifcmem AmAhxcr
Fac-similé des principaux Tropaires. — Le plus ancien Tropaire de la bibl. de Saint-Gall
(484, p. 42). Fragment d'un Trope de l'Olïertoirc de saint Jean l'Évangéliste.
d'un caractère original, et l'on s'est donné la peine,
hélas! de scier un bel ivoire du me siècle pour lui com-
poser une reliure qui fût digne de lui. Peut-être y
a-t-il là quelques excès. On nous alléguera que l'Anti-
phonaire grégorien de Saint-Gall a été revêtu d'une
parure analogue; mais nous n'en sommes aucunement
scandalisé, et maintenons ici la différence profonde que
1 N'o 1169. On trouve dans ce même manuscrit des cordelettes servant de
sinets pour indiquer les fêtes de la Purification (f« 12) et de l'Epiphanie (M 4),
100 IllSTOItii: DK LA POÉSIE LITURGIQUE
nous avons toujours établie entre l'œuvre vénérable de
saint Grégoire et ces Tropaires, qui sont, maljz:ré tout,
rnotbb rtuoc^ftz
^PiCTflllSON
^cctv cxim njcro noftri mi
ytUiLlîSohj'
sans autorité et sans valeur. Nous préférons à ce luxe
déplacé le système intelligent des moines normands de
^^ f^ /" y r y f> , /■
(JO Inie^ onfcA^ Xq-nuTclcT Je
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tninurvTjrfururTtufpronolyif
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Uicmce^ fu rp&nfu/'.nadie^ Xlcén
délier sAcciof vêito frxtr^fl^
Fac-similé <ics principaux Tropaires. — I.e plus ancien Tropaire do la bibl. de Saint -G«ll
(484, pp. '216 el 125). Cos fac-similé ofTrcnl, le premier un fragment du Tr«»pe du Kyrie .
le second un Trope de la Communion.
Saint-Evroult : ils oui voulu avoir un Tropaire bien
lisible, bien propret, bien net, et y ont i^arfaitoment
réussi. Est modus hi rcbus.
,^ LIBRARY
O'I
LES TROPAIRES 101
6
lon^ ineaccelnf dcD * fx: TTrcrrrapaa*
hominibufhone^ uolunzanf- luiiiaa.
muATCr ■ D m etli c i rrvurœr- KAo ra Truif-ter-
Glvrvfic^Lmufré - Gr3X>iAf Acrimuf-abt
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^ ^ - • • .^ ^-- ^*< ^-- ^^ ^ -T
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'ivVhfpecx:^cc^rTiundLrritfer^rt nohi^-
\uwvlU.fytcc^a^ nuinatfufoi'pe^de'prer
cdvioncmnofrrsirrv' n^uxicoJti'^ciàjejcver
r^mYy^^mfrmfejTr' re^nohif-cfuonxânv
/t * é^ j^, ^ ^ *^ j j^ ^ ^^
ru fptuf /an (5hx^ -W folvifcLo mxraxfva
foiuf^CbciffimvLS iî5v ^srçicr cuTnfktiéîlp
|y|c?rTe redempTDrnfdum tondrc^cjucc^
fhuperrntrrôre rrixAcnfciu^ repA
Fac-similé des principaux Tropairos. — Le Tropairc d'Echlernach (Bibl. nat. lat., lO.")!!),
M3 V") : ce fac-similé offre la fin d'un Trope d'un Kyrie, le commencement d'un Trope
de l'Offertoire, et, entre les deux, un Gloria non tropé.
102 iiisTOiin-: i)K F, A iM)i:siK uïcncioiTE
Le luxe (lu moillciir aloi pour un manuscrit, c'est la
correction de son texte. Cette condition si désirable est
J / ,.^ J ^ ,
[■ne cJirrcvcu.Tn
rtûuum^ ctiXxA. rrvira. btUJ^ fcctzz • I ttcf '
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UCT*"* Î3 ictnr CT2rr vnVl'tncvjPlc* £^ryur\c
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Fac-similé des principaux Tropaircs. — Le Tropairc de Prum (Dibl. nal. lai., 9448, fo 7 v"^;
fragment d'un Trope de l'Introït de Noël. — La page n'es", pas compicle : on en trouvera
la partie inférieure au chapitre sur les Tropes du A'yrie (p. 235).
heureusement réalisée dans les Tropaires allemands et
italiens; mais on n'en saurait dire autant de tous les
Tropaires français, et en particulier de ceux de Saint-
LES TROPAIRES
103
— Suspensus ^'^^'^^i^-^'nCcLfU{,l<cf'm,^.^
out est à peu ',' ■> '''* '^7' .C /,^. .J
Martial, qui ont eu une si grande influence sur le
développement de la littéra- .v, j a, ., ' f/*^'-r'
ture tropistique. Il en est plu- . r ^ r
sieurs qui sont d'une incor- y^^^^^.çd;^ X^, J^Uf.
rection scandaleuse ', et rien
ne peut à ce point de vue se i3*"^«':r.iii«rAi;fior.^„.fvçrjpArt
comparer au manuscrit 1118, 1 i j 1 p • ,• ,'.j-. -v /
qui, ayant à reproduire le [f^^<^^r\c^àAnUf\;^X.u(fX
Vexilla Reqis, nous offre dès ' rcj-' • '" ' • 1','
la première strophe : Qiio car- ^^t-
nîs conditor — Suspendit pa- aa»m)(hVo?r*c.^rJivnmifli^r:Vp
tibulum , au lieu de : Qiio carne , ,- j. i* . ,»
Garnis conditor
est patibulo ^ Tout
près de cette force ^
Il ne faut donc pas s'éton-
ner si l'on est souvent dans la , ,
nécessité de corriger le texte yr,xm1^^^^^u^frr'y^u*^cAi
ou la notation musicale de ces . , ' , -^ 1 ^ ^' \ J
Tropaires qui étaient parfois fcrxxu^uv^l,uàeç'X^Xa> '0
écrits trop vite et singulière- .h "^ J J ^ -^ 1' ' ' ''
ment négliges. Maigre tout, j V
certains scribes ont pris plai- «i^^fp^'. Q^l^cu^jj^..
sir à se nommer, même en des , , , , " * /
œuvres qui ne sont pas d'un rc»*pr444fvT75utia.\jTTrin.»fnjr^«-
Fac-simile des principaux Tropaires. — LcTropaire d'Autun (hibl.de l'Arsenal, llG'J,f'>34 ro):
fragment d'un Trope du- Gloria.
' On peut cependant en signaler de tort beaux ; tels sont les mss. lllU, 1240, etc.
2 F- 174 v». Cf. 1338, f" 3't r-, î- 21 v», etc. etc. Il y en a par centaines. De telles
incorrections ont frappé, avant la nôtre, l'attention des clercs du xi» siècle, et l'on
trouve la trace des corrections qu'ils ont faites. Voy. notamment 1120, f° 26 v"
(à Pencre rouge); 887, f« 121 v°, 122 r", etc. etc.
3 Ailleurs, le notator a oublié d'écrire les neumes au-dessus des paroles.
Voy. 1119, f"» r», 13, 19, 3û, o2; 1120, f" 26 v°, 32 v°, 33 v», 43 r», 44 r\ etc.
Il resterait à déterminer les circonstances auxquelles sont dues toutes ces lacunes.
[j-»r»i *»*-•*
I0/| HISTOIRE DE F, A POÉSIE [.ITI'KCInrE
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Vurnenfftobtf .vflif ibefu t?onr«rMiu.iTnurinTc:
\-— ;j[._,;4.^ x^
S yt*
Fac-timile des principaux Tropairos. — l..- 1r..p,iir.> i|.> S.iinl - KvimuII
(Bibi. nat. lat., lOôOti, f» lu v»,.
LES TROPAIRES
lo;
caractère très relevé, et nous savons, par exemple, que
le Tropaire 1121 est l'œuvre de deux moines, dont le
premier s'appelait Adhémar, et l'autre Daniel'. Je com-
prends mieux la rulirique un peu solennelle du magni-
Illustration des Tropaires. Cinq frises et dessins d'enroulement.
(Bibl. nat. lat.. 1087, f» 65 v».)
tique Tropaire de Prum, où l'on nous apprend l'époque
exacte où ce manuscrit a été exécuté et le nom du
• Bibl. nat. lat., 1121, fj 58 r» : « Ademarus moLiiachus] Sancli Marcialis »
(en lettres rouges); f» 60 r" : « Ademarus monachus, Danihel nionachus; »
f" 72 v» : « 0 Danihel monachus, pra'lucens dogniate Christi, — In mirabili-
busque bonis tu sis Ademari — Pertractans actis qui hune biblum rite notavit.)y
Il ne faut pas oublier que « notare » signifie : « Notas musicas libris ecclesiasticis
adscribere. » L'un des deux scribes avait écrit les paroles, et l'autre la notation
musicale. (V. Ducange, au mot Nota, éd. Didot, IV, G43.)
106 IIISTOII^K l'K I.A l'OKSlK LITT HOIQU F.
moine .ini doit d.-in.'iiivr attaché à une exécution .IHn
goût aussi parfait'. On serait fier à moins.
Illustration .les Tropaires. Un jongleur (lùlisle cl un ..jongleur jonglant ...
;nil.|. n.M. lat., 1HK. follivo.)
. ..Codicem isunn ..u.tu^ nH.,l,.l.nHno plonum, .iomni Milderici abbatis tem-
pore eiusqtie licnlia. Wickinp lUloli. mon.ich. inpet.sis .nt.i«e precilu. «rnbere
œptuni; domni vero Sloph.u.i, succes.oris pr.Tfnli abl^li- lompore atque bene-
LES TROPAIRES
107
L'illustration des Tropaires mérite toute notre atten-
tion. On y trouve rarement des compositions aussi ma-
gistrales que celles duTropaire de Prum : véritables ta-
Illustralion des Troppires. Une jongleresse. (Bilil. nat. lat., 1118, f» Iti r»)
ictione diligentissime , ut cernitur, consummatum ; sancti Salvatoris Domini
ostri Jesu Christi altari impositum ; huic sancto Prumiensi cœnobio perhennis
mémorise novimus traditum. » (Bibl. nat. lat., 94^8, fo48 v">.) — Immédiatement
après cette note on en trouve une autre qui complète la première et est d'une
lecture plus malaisée : « Ast nota hune sanctum, doctum, lidelem monachum,
islum librum non suis sumptis scripsisse, sed suc impenso labore ac sintrulari
indu stria, » etc..
11(8
IIIST(»lliK l)K I. A |M»KS1K 1. 1 I I H CI O IJ K
l)lcaux et pouvant IfV'itinieriiciit (Mrv iT-'^^anlés coiinnc Je
ly|)L' (le la iniiiiaLiiic loiu-iiic m la fin du xe siècle Le
Tropairc do l'Arsenal, celui-là lurinr (juj est revôtu de
celle licllc cnveloi)!!!' d'ivoire païen jauni pai- le tenni»s,
ce pelil manuscrit long est oiné de miniatures dont la
naïveté n'est pas le seul mérite. Aux moines de Saint-
Martial il ne faudiait pas tant demander, et les seides
lllustratiun des Tropaires. Leilrc Q (Mibl. nal. lat., UI'J, f" i r- .
miniatures vraiment curieuses qu'on trouve en ces nom-
breux Tropaires sont peut-être celles du manuscrit 1 1 18,
où nous voyons défiler toute la «jent des jongleurs et des
jongleresses, avec cabrioles diverses et instruments de
musique fort lieinvuscmeiit vai'iés. Les lettrines, par
bonheur, nous dédommagent, à Limoges, de la rareté
des miniatures proprement dites. Elles y sont nom-
l)reuses, fantaisistes, osées, charmantes, et peuvent
rivaliser avec celles de tous autres pays. Quelle en-
tente de Fornement! quelle verve! quel esprit!
Ce que j'estime encore le plus dans l'exécution des
anciens Tropaires, c'est le respect qu'on y a parfois
LES TROPAIRES
109
témoigné pour le texte liturgique. Dans certains manu-
scrits de Saint-Gall, ce texte auguste a été écrit en
lettres capitales, tandis que l'on se contentait de faire
aux Tropaires les honneurs de la minuscule \ Dans
certains autres -, on a souligné le texte liturgique à
l'encre rouge, comme pour marquer bien nettement
Illustration des Tropaires. Lettre Q (Bibl. nat. lat., 1119, f» 21 r^).
sa supériorité sur les interpolations dont on le sur-
chargeait. Les scribes du xie siècle ont exprimé par là
l'idée même qui nous a animé durant tout ce travail ; ils
sont nos auxiliaires et nos témoins.
< —
' Tels qu'ils sont, nos Tropaires méritent d'être
étudiés de plus près qu'ils ne l'ont encore été et
à d'autres points de vue l Qu'ils nous fournissent
1 Ms. 376, p. 39; 380, pp. 29, 31, 33, 58, Go, etc.
2 Ms. 382, pp. 21-23.
2 II faut, à tout le moiiiri, noter, en passant, que les scribes prennent soin
d'indiquer le ton des tropes (1118, f" 33, etc. etc.) et les «stations» lilurdques
de Rome {ibid., f" 6 r", etc. etc.). Une « patrination » qui n'est pas spéciale à
nos Tropaires, mais qui mérite cependant d'élro relevée, est celle qui consiste
no
IlISTOIlii; Di: l,.\ IMjKSIi: IJTUKGIOUK
tiles renseignements sur certains rites liturgiques au-
jourd'hui disparus ' et sur la popularité de tels ou
tels saints dans telle ou telle région-, on n'en sera
pas surpris. Mais il ne faut pas craindre de leur de-
mander davantage, et de les interroger en particulier
sur la vie privée, l'ameublement ou le costume de
lllustrntiun dos 'l'ropaires : Icllrc Q (Bibl. nal. lat., tllO, f" G<J r" et 70 vo).
à donner le même chifîre à un reclo de feuillet et au verso du fecillet précé-
dent (1132).
' V., par exemple, l'extrait suivant d'un de nos plus curieux Tropaires de
Saint- Martial sur la veille de la Saint- Matthieu : « Coitibus angelicis gaudium
sil in cœlis, in terris omni populo celebris exuUalio, quia hodie vigilia sancti
Matthaei fulgida. Pellitur nebuluni omne gemitus et tristitise ab amicorum inti-
mis cordis duorum socrelis... Firmatur fœdus integrœ ac fortis amicitiae, etc. »
(H20, f°220 et dernier, v"; ajouté au xi'siècle parun autre scribe.) — Cf. VOrdo
du manuscrit de Berlin, oij nous voyons que, le jour des Rameaux, on faisait
un sermon au peuple après le chant duPueri Hcbraiomm , et que, durant cette
dernière Antienne, les clercs des sfo/œ monastiques, d'une part, et les petits en-
fants laïques, de l'autre, jetaient, comme jadis les petits Juifs à Jérusalem,
leurs vêtements par terre avec des rameaux : « Scolastici... jaclanles in terram
cappas... adorent Crucifixum in similitudine Hebrœorum puerorum; simililer et
ipsi laïci pueruli jaclent veslimenla sua raniosque palmarum.» (Berlin, f » 29 p"
et 30 V.)
* C'est dans nos Tropaires qu'on peut, une fois de plus, constater jusqu'à
quoi point saint Pierre était alors i*lus populaire que saint Paul. Onze Tropes
de rinlroït sont consacrés à saint Pierre dans le Tropaire 1120 (f«» 41 vo-4o v»).
deux seulement à saint Paul (45 v°et 'iôr"). Dans le ms. 1121. cinq sont donnés
àsaint Pierre (fo26r<') et deux à saint Paul (28 r"). Pans le petit Tn..paire 13252.
nous trouvons six Tropes qui ont saint Pierre (12 r>) et un seul qui a saint
Paul pour objet (12 v"). — Il est à peine utile d'attirer l'attention sur la popu-
larité de saint Martin dans tous ces monastères des x» et xi* siècles (1121)
f" 41 r» et v, etc. etc.), et de rappeler que les véritables patrons de notre
France à celle époque étaient, avec saint Martin, saint Ptiiis et saint Hémi
(9449, fo 36 v). Ktc. etc.
LES TROPAIRES
lil
nos pères ' et sur certaines « actualités » de leur his-
toire l
^ Quelque médiocres qu'ils soient littérairement, nous
ï Jam dulcis arnica, venito, quani sicut cor meum diligo; intra in cubiculum
meuni. Ibi siint sedilia strata absque velis..., floresque in domo spavgnntur,
herbœque flagrantes miscentuv. (Bibl. nat. lat.,1118, f''247 v.) — Dorsum illius
quasi scutum scidptile, omatum gemmis undique. (Saint-Gall, 546; cité par
Gall-Morel, p. 176, n» 288 : Dilectus Deo , etc.).
Illustration des Tropaires : lettres 0, A, E (Bibl. nat. lat., 1119, f»s G8 vo et 71 ro).
2 II est difficile de préciser en quelle heure d'angoisse a été composé le chant
suivant, qui est véritablement un cri de douleur:
0 Maria, puellarum homnium sanctissima,
Quaî Tonante[m] inter sacra(s) bajulasti viscera.
Vide clades famulorum atque contumelias
Quas pro vita criniinosa patimur assiduis [sic).
... Gentibus credimur undique nos opprimentibus;
Barbaris manibus captivali dislrahimur...
Argue, increpa, tanta sanes ut vulnera...
(1084, fo 317 ro et vo. )
2 TADLE DES TROPAIRES DONT LE TEMOIGNAGE A ÉTÉ UTILISÉ
DANS LE PRÉSENT LIVRE
l» (Paris, Bibl. nat. lat.) Lat. 887. — Tropaire suivi d'un Séquentiaire
et d'un Pr osier.
Fo 1 ro. Petits Tropes suivant l'ordre de l'année liturgique, depuis la Sainte -Lucie (13 dé-
cembre) jusqu'à la Saint-André (30 novembre). — Fo 47 ro. Grands Tropes {a. du Kyrie,
47 ro; b. du Sanclus , 61 vo; c. de VAgnus Dei, 65 vo; d. du Gloria, 69 ro; e. Regnutn ,
84 vo). — Fo 87 ro. Mélodies ou Sequelœ de l'AUoluia. Dans les Sequelx des grandes fêtes,
quelques phrases musicales sont, par exception, accompagnées des ciausi/te, des paroles
correspondantes de la Prose. Cette particularité s'explique par ce fait qu'en certaines églises
les clercs ou les moines se partageaient en deux demi -chœurs, qui chantaient alternative-
ment, l'un les paroles de la prose, l'autre les neumes de la séquence. D'autres fois, comme
aujourd'hui, l'orgue alternait avec le chant des paroles. (Cf. le texte d'Ekkehard V en sa
Vita B. Nolkeri : u Jubilus, id est neuma, quem quidam in organis judilant. » Acla
SS. Aprilis, édit. V. Palmé, I, 585.) — Fo 96 ro. Prosier.
xio siècle. — Parch., 151 feuillets, 275 sur IQOmm. Quelques belles lettrines de style roman.
Voir la lettre Q du fo 19 ro, et la lettre F du fo 59 vo.) — Bel. maroquin bleu aux armes de
France.
Saint- Martial de Limoges.
2° Lat. 903. — Tropaire précédé d'un Graduel (avec les Prosulœ
de l'Offertoire) et d'un Processionnal; suivi d'un Prosier.
Feuille de garde : « Privilegium de Arnaro. » — Fo 1 ro. Graduel avec Tropes -proswia? de
roiVertoire depuis le premier dimanche de l'A vent (on remarquera, au fo 95 ro, la rubrique;
H2 lIISTOIliK l>n LA POÉSIE LITURGIQUE
n'hésitons pas, après les avoir lus très longuement et
la plume à la main, à attester ici qu ils r.nf.Tin.-nt
Illustration des Tropaircs : lettre Q (Bibl. nat. lat., 1121 , t» 2 r
f un ro I.-.Q mole • •( Sancli Aredii abbaiis » etc./.
„ Nat. saneti Medard. ... '^''^ZLLl^t^^',:.. Tro,"aire : Incipiunl tropi de Nali-
Fo 117 ro. Ant.phona: proccssionalcs, a.. - h ^ * ^^^y
vilate Domini : « Quom qua.r.l.s -, etc. Au f» «•'9. ^" ''^ '^ T 7r"nd" cla-és suivant leur
obbatis ... - Après la série do, pCts Tr^l-J. -en^^ent Ic^ g a^ds^ a ^^^ ^^ ^_
ordre le plus ro^^ulicr : les Kyrie iropes, fo 63 r», .'" G'*'"f ' '^ 7^; ,.g ,., ^^ ^uiv. ). où
et les aIuus Hei . 179 ro. - Le tout est couronne pa un ProMor (f 1-3 ^
Saint-Yri'eix (comme le prouvent les rubriques ci-dessus mcnt.onnec.
LES TROPAIRES
113
parfois d'originales et véritables beautés; qu'ils ont tou-
jours un certain air de grandeur avec une chaleur de
3°. Lat. 909 — Tropaire suivi d'un Séquentiaire, d'un Tonaire
et de fragments d'Antiphonaire et de Graduel.
Fo 9ro. Tropaire: 1° Petits Tropes (saint Austreclinien, fo 59 r»; saint Justinien, 60 r» etc.). —
Fo 62 vo, Office de saint Martial. — F» 86 ro, 2" Grands Tropes : Gloria et « Regnum ». —
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. lat., 1121, fo 1 r").
Fo 110 po. Mélodies ou sequelse de l'Alleluia, avec les premières paroles des Proses qui en
sont dérivées. — Fo 126 ro. Traits. — Fo 150 ro. Antiennes processionnales , etc. — Fo 174 ro.
Versets alléluiatiques. — Fo 206 ro. Offertoires. — Fo 251 ro. Tonaire. — Fo 260 ro. An-
tiennes <( in Evangeliis ». — Fo 268 vo. <i Antiennes avec l'Alleluia. » =r Ce manuscrit offre un
rapport frappant avec le 1121.
XI» siècle. — Postérieur à 1031, ce manuscrit offre, sans grattages, l'Introït de la Messe
Probavit. — Parch., 277 feuillets; 268 sur 15omm. — Lettrines remarquables au point
de vue de l'originalité plus que de la facture (au.x î»^ 150 ro et 154 ro, deux D ; au fol58r",
un V très curieux, etc.). Rcl. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
I — 8
114
IIISTOIIîK DE I.A POÉSIE LITURGIQUR
vei'vc «jui 110 se rcfi'oidit j)oint, et qu'enfin nous n'avons
jamais eu la douleur, comme nous le disions plus haut,
h° L.l. 1084.
— Trfiiinire accompagné d'un Séqucntiaire,
diiii l'rosier et d'un Tonai re.
Recueil mal con(;u et iiiinlellifçenimcnl exécuté. En tôle se trouve [ f" 4 r") cette série, si
intéressante, et qui a toujours sa place à part, des Tropes qui suivent le dernier verset de
Illustration dos Tropaires (Pilil. nal. lat.. f» 8 vo .
l'Oflertoire cxim versibus, A ces Tropes de l'Offericire sont mOlés, comme en d'autres ma-
nuscrits, les Trojtes qui accompagnent le Verset alléluialique avec quoiques-ims decesTr»>pcs
(1 de fabrice mundi i< dont nous aurons ailleurs a délorminor la nature et la place : ce sont là
des pit'ccs do la même famille. Après quoi ( f » 3U r°) commencent les petits Tropes deNo«-l.
avec quelques inlercalations de Proses. Il semble, au reste, que tout ait été bouleversé dans
ce singulier manuscrit. Les Tropes du Kyrie ( f» 92 r" ) sont directement suivis de ceux du
Sanclus (f« 9i vo)ct de VAgnus Dei [f» 90 vo); mais on comprend moins bien la place qu'on
a faite à ceu.\ du GloHa ( f- 99 r« ; et do l'Introït ( f» 127 r») , et au Regnutn ( f» H9 n> ). La fin
du manuscrit oITre du moins quelque apparence de Uigiqu^. Après le Tonaire {{<> 155 r»
LES TROPAIRES
115
d'y rencontrer une idée qui fût basse ou exprimée bas-
sement, « Une telle poésie ne saurait sans doute être
viennent les mélodies, les sequelae de l'Alleluia, dont quelques-unes sont entrecoupées de
paroles (fo 197 r"), et enfin le Prosier (fo 221 r»), précédé de son prologue Precamur.
xi= siècle. — Antérieur au concile de 1031 , comme le démontrent les grattages opérés
(fo 39 ro et suiv.) sur le mot Statuit. — Parch., 335 feuillets, 223 sur 138mm. Lettres ornées,
d'un goût primitif ou bizarre ( Voy. l'I du f» 4 v»; le Q du f» o3 v», etc.}. — Rel. maroquin
bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. lat., 1121, fo 6 vo).
5° Lat. 1086. — Tropaire précédé d'un Recueil d'Antiennes
et accompagné d'un Prosier.
Le manuscrit débute (fo 2 ro) par ces « Antiennes processionnales » qui étaient si solen-
nelles et tenaient dans la liturgie une si grande place. Puis vient le texte de ces deux magni-
fiques Antiennes eucharistiques qui furent si populaires en France parmi les innombrables
communiants de ces âges de foi : l'Emitte spirilum de Noël et le Venile populi de Pâques
(fo -15 vo). On aborde alors la série des grands Tropes : ceux du Kyrie (fo 18 ro) et du Glo-
ria (fo 24 ro); mais on ne considérait souvent les Proses que comme un « grand Trope »,
et l'on place ici très logiquement (fo 27 r») le Prosier tout entier précédé de son pro-
logue Precamur. Il est à peine utile d'observer que, vu l'âge du manuscrit, un certain
nombre de Proses de la seconde époque y ont envahi la place jadis rés^vée aux seules
nolkériennes [Anni nobia circulus rénovât solemnia , fo 104 r»; Exullel vox sonora,
folûovo).Les grands Tropes du Sancius (fo 123 ro) et de l'yl jnus (fo 126 vo) complètent cet
ensemble, auquel viennent s'agréger, d'une façon très irrégulière, deux Épîtres tropées qui
sont là tout à fait hors de leur rang (fo 128 ro et 129 vo). On remarquera au fo 32 ro la pruse
Mundus heri lœtabalur, qui nous offre une autre version de VHeri niundus exxdtavit d'Adam
de Saint -Victor. (Voy. nos Œuvres poétiques d'Adam de Saint-Victor, 2» édit., p. 80.)
Fin du xn» siècle. — Parch., 132 feuillets, 2Go sur 180n>m. — Rel. maroquin bleu aux
armes de France.
Saint -Léonard.
6° Lat. 1087. — Tropaire précédé d'un Antiphonaire,
d'un Séquentiaire et d'un Prosier.
C'est, jusqu'au fo 98, un simple Antiphonaire. Au fo 98 commencent les Tropes du Kyrie.
suivis de quelques Gloria (fo 100 ro) et de quelques Agnus Jo loi ro) notés. Viennent alors
110
IIIÏ^TOTRF, DE LA POÉSIE ElTErUliniJE
étudiée au microscope : elle ne mérite jj;is un tel exa-
men et ne saurait le subir à son avantage; mais, prise
dfiux séries d'une iinporlancc considérable et qui se complètent: 1» i';S Protie annualei [in]
reslivitalibua dicendx (f" 101 vo). et 2° les lielodiœ annualen in festivilattlms dxcendai
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. lat., 1121, f » 28 r»).
(fo lu« r'>). Quelques-unes de ces mélodies sont entrecoupées de
clausulœ. Le plan de ce manuscrit n'a rien de compliqué : il en est
peu d'aussi simples.
xi" sitcle.— Pareil., 118 feuillets, 233 sur IGO-"". Un débris informe
de grande miniature ( f o 75 6i«); cinq frises assez élégantes (fo 65 vo),
et toute une suite de lettrines remarquables (Voy. notamment le P
du fo 111 r« cl le D du fo 51 V", etc. etc.). — Bel. anc. ; peau blanche.
Saint -Martial de Limoges.
7" J.ot. 1118. — Tropaire accompagné d'un Tonaire,
d'un ricquentiaire et d'un Prosier.
C'est d'abord un Tropaire complet (fo t r", 103 vo], cl d'après l'ordre
exact de l'année liturgique, depuis la Sainle-Lucie (13 décembre) jus-
qu'à la Saint-André (30 novembre). Les petits Trof>cs ne font, povr
CHAQUE FÊTE, qu'unc seule et même série avec les grands, série com-
plète et fort bien ordonnée. 11 est peu de Tropaires d'un aspect aussi ré-
gulier et d'un usage aussi commode. — Fol04,ro Tonaire. — FollSvo;
131 ro. Tropes de <i l'Offertuire avec versets » ; de l'intérieur du Graduel
avant le Verset alléluiatique, et Fabrice mundi. Cette série, si cu-
rieuse, s'étend depuis le premier dimanche de l'.Avent jusqu'à la Saint-
André. 11 est évident que les moines de Saint -Martial attachaient à
cette famille de Tropes une importance toute particulière, et c'est ce
qui est attes'.é par un grand nombre de leurs manuscrits. — Vien-
nent ensuite ( f o 131 v», li3 vo) \cs aequelw , les mélodies de l'Alleluia
avec certaines intcrcalalions de paroles que nous avons expliquées
plus haut. — F» 144 ro-248 ro, Prosier complet. Hemarquczau fo2i7 vo
une pièce amoureuse en prose: « Jam, dulcis amica, venito, etc.»
XI" siècle (? commencement du xii«). — Les « Acclamations ■• du
fo 38 vo renferment, comme nous l'avons vu plus haut, les noms
d'Hugues Capet et du pape Jean XVI ; mais ce fait permet seulement
de supposer que l'original de celle partie du manuscrit 1118 était de la
lin du x» siècle. Parch., 249 feuillets, 245 sur 148"»n>. — Miniatures
barbares dans le Tonaire, mais 1res intéressantes pour l'histoire de la musique instrumenUle ;
Fo 104 ro, Diivid avec une vielle; 105 vo, Dùte ; 106 v», llùte de Pan; 107 V", autre fliite.
jongleur jonglant ; 108 r-, jongleur dansant ; 110 ro, décacordc; 111 ro; olifant et psallérion ;
113 vo, lUite double, jongleur jonglant; 114 ro, jongleresse dansante.— Belles lettrines
(Voy. l'A du fo 132, le Q du fo 8 vo, etc.). — Ilel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
8° Lat. 1119. — Tropairc-Prosicr.
Fo 4 ro, petits Tropes. — F» b\ r». grands Tropes : a. du Kyrie et h. du Gloria —
Fo l-iO vo, Prosier précédé de la préface Pre-camur. — Fo 244 ro, grands Tropes : e. du
Sanctus et d. de VAgnuê. Ordre remarquable. La Prose, considérée comme un grand
Trope, est placée au rang qu'elle occupe dans l'Office sacré.
LES TROPAIRES
117
et jugée dans son ensemble, elle est souvent haute et
grande, et il y a telle Séquence notkérienne qui a vrai-
xi" siècle. — Postérieur au concile de 1031. La rubrique Probavit s'y trouve sans aucune
trace de grattage. Cf., au f» 54 v, la rubrique : In festivitate sancli M[arlialis] apostoli
Illustration des Tropaircs (Bibl. nat. lai., 1121, f" 24 vo]
Parch., 251 feuillets, 230 sur 135in">. Plusieurs lettrines ont été enlevées au canif (f» 47 r»,
54 vo, etc.). La série des lettres ornées présente, malgré ces lacunes, un véritable intérêt.
Voy., fo 4 r", un Q très curieux (poisson mangé par quatre monstres) ; fol3 vo, un H (lance
et gonfanon) ; fo 17 vo, un 0 (Présentation de Notre -Seigneur au Temple); fo 21 r", un Q ;
fo 39, un I (gonfanon) ; fo 42 ro, un Q ; fo 54 ro, un X ; fo 58 vo, un S ; fo 68 v», 69 ro, 70 ro
toute une suite de désossés et de grotesques; fo 140 ro, un P, etc. — Rel. maroquin bleu
aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
9» Lat. 1120. — Tropaire-Prosier.
C'est l'ordre liturgique qui est très régulièrement suivi dans ce Tropaire, où le scribe a
seulement pris soin d'intercaler {cl rien n'est plus logique) un Ordo pour le dimanche des
Rameaux et toute la Semaine sainte.— Fo 1 ro, petits Tropes depuis l'Epiphanie jusqu'à la
Saint-André (30 novembre). L'Ovdo, dont il vient d'être question, figure aux f"' Il ro.20ro.
118 IIISTDIMI-: DK I. A POÉSIE M TI' lUil O CE
ment la majr.'sté dune cathédrale romane Je compare-
rais volontiers nos Tropistes à ces peintres des pre-
— Fo 67 r», grands Tropes : a. du Kyrie; b. du Sanctus ; c. de \'Agnu$ Dei ;d. du Gloria;
e. negnxim. — F" 106 ro ProBxer : très étendu.
XI» siècle. — Antérieur au roncile de 1031. I, 'indication do la .Mc««o Slaluit a été Irc» visi-
blement grattée, et on y a sulistitué l'indication de la Messe Probavil f (■• -40 r", vo, etc.);
220 feuillets, 230 sur lUO""". Lettres ornées, d'assez médiocre facture. Quelques-unes mé-
ritent cependnnt d'être signalées comme curieuses (f» 39 r», 41 r», 46 r», etc.}. — Hcl.
maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
10° Lnt. 1121. — Tropaire accompagné d'un Hoquenliairf,
d'un Graduel (incomplet) et d'un l'rosier, etc.
l'o 2 ro, Tropairo complet (petits Tropes), depuis le Quem quxriti» in prxaepe de Noël
jusqu'à la Paint-André (30 novembre). — La place est ensuite laissée aux grands Tropes: à
ceux du Gloria ( f « 42 r») et aux Hegnum ( f ■> liO v). Puis viennent (f';>« ro) les ttqutlae,
les «queues » neumatiques do l'AlIcluia. Quelques-unes sont entrecoupées de paroles
( Gloriosa , f» 59 ro ; Organicis , f» !J9 vo ; Fulgens prœclara, f» 60 v» ; Benedicla, l-> 62 r» ;
Obscrvanda , fo 09 v»). Celte première série est accompagnée de quelques alise teqmnlix
quw non sunt vatde in ««u ( fo 70 ro). Le reste du manuscrit mérite d'attirer l'atlention, et
forme un ensemble qui répondait, comme livre de chant, aux principaux besoins litur-
giques d'un moine de ce temps : a. fo 73 ro : les Tractus usités dans les temps de pénitence;
(au lieu de Iraclus, une première main avait écrit tracti) ; b. fo 90 ro : les Offertoires cum ver-
sibiis; c. fo 138 ro : les Antiennes processionnales ; d. {° 174 r" : les Invitatoires {vitatoria);
e. fo 180 ro (cf. 210 vo cl suiv.) : les Versets alléluiatiques per annum ; f. f» 178 r» : les An-
tiennes de Evangeliis sacrosanciis, qui étaient tirées uniquement du texte évangélique et
n'étaient chantées que les dimanches après l'Epiphanie (f» 178 fo) et les dimanches après
la Pentecôte (f" 187 vo) ; g; les Antiennes de Vêpres (seulement annoncées), et enfin
h. fo 218 ro : les Alléluia qui suivent les Antiennes des Heures dans les fêles joyeuses. Le
tout se complète par des fragments de Prosier, où il faut remarquer (fo 200 ro] les [PtxMte]
domiyiicales pour les dimanches après la Pentecôte, etc. etc.
XI» siècle. — Antérieur au concile de 1031, comme le démontrent les grattages opérés sur
le mol Staluil (fo 28 v» et suiv.). La notation ae, qui égale à la fois ae cl oe (cf. cependant
coetus au fo 44 vo), est très fréquente. Quelques e cédilles (fo 41 vo, etc.); lettres enclavées
(fo. 28 vo, 32vo, etc.).
Parch., 247 feuillets, 270 sur 170n>"'. Lettrines de grand style. Voy. notamment Q, fo 2;
H, fo 5 ro ; E oncial (paon), fo 6 v»; H oncial, fo 8 vo; 0, fo 10 ro; q", fo H v«; C, fo 17 vo;
Q, fo21 vo; F, fo 24 vo; E oncial (autre paon), fo 26 vo ; M oncial magnifique (un homme entre
deux paons), fo 28 vo. Cf. fo 34 ro ; 35 vo; 36 vo; 39 vo; 41 vo; 73 ro ; 90 ro, etc. Au fo42r«,
une belle frise carrée (feuillages et labyrinthe). — Rel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
\l° Lat. 1132. — Pftit Tropaire préccdc d'un Graduel
et suivi d'un Pro?ier.
Fo 5 ro. Graduel. (On y remarquera, comme ailleurs, la Miua prima et la major Mitaa
pour la fête de saint Jean l'Evangéliste ( fo 13), et les deux Messes pour les fêles de saint
Jean-Baptiste.) — (Fo 110 vo); Tropaire contenant uniquement quelques Tropes du Sanciiu
(fo 110 vo) et de VAgnus (fo 112 vo). — K" 113 vo; Prosier.
Fin du xi« siècle. — Parch., 146 feuillets, 2.'>(J sur 162"'»'. Lettrines très simples et d'une seule
couleur (rouge), mais d'un dessin assez élégant. — Bel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
12° Lat. 1133. — Tropaire précédé des Offertoria cum versibus
et suivi d'un Prosier et d'un Séquentiaire incomplet.
Fo 1 ro, Offertoria cum versibus. — Fo 42 vo, Kyrie non tropes. — Fo 43 r«, Gloria Iropés.
— Fo 44 vo, Gloria et Agnu» tropé*. — Fo M \«, Prosier, où l'on ne lit qu'un peljl
nombre de Proses. — Fo 59 ro, Sequelw de l'.Mleluia (avec les premiers mots de» Proses
auxquelles elles se rapportent ). Certaines Sequelm sont accompagnées de quelque? dau-
sulai de la Prose correspondante.
LES TROPAIRES
119
mières écoles de Sienne, de Venise et de Florence, qu'on
appelle aujourd'hui les «primitifs ». Ces «primitifs »,
Hluslralion des Tropaires (Bibl. nat. lai , 1121, fo 28 v
XI" siècle. — Parch., 69 feuillets 220 sur 140'nm. _ Rel. maroquin bleu aux armes de
France.
Saint -Martial de Limoges.
13» Lat. 1134. — Tropaire précédé d'un Graduel (incomplet)
et suivi d'un S é q u e n t i a i r e .
Fo 8 ro, Graduel et Traits. — F» 39 ro, Versets alléluiatiques. — Fo 60 ro, Offerloria
cum versibus. — Fo 100 V", Kyrie et Gloria non tropés. — Fo 102 ro. Sancliis cl Agnus
•20
IMSTOlIiK l)K LA l'CiKSlK LITT H (ilOT'I-:
ils n'ont pas la perfection d'un Raphaël ou d'un Léo-
nard; mais ils sont plus prime-sautiers, plus originaux,
Iropés. — Fo 107 r°, Sequelx iJo l'Allcluia (comme dans le manuscrit 1133, avec lequel
celui-ci offre de grandes analogies 1.
xi« siècle (?). — Parch., 118 feuillets, 210 sur 128'»'". — Hel. maroriuin bleu aux armes
de France.
Saint- Martial de Limoges.
Illustration dos Troiiaires (liihl. nal. Int., 1I'2I, fu .Ti r»
l^" Lit. 1135. — Tropairo précède d'un Séquentinire et d'un
(îraduel inconijvlet.
V" 1 r», Scquentiairc : Sequelx ou mélodies nlliMuiatiqucs avec le? premières paroles des
proses correspondantes. Quelques intercalations de claïuulte on prose dans les S^uonces
det grandes /êtes. — F» 10 v», Anliphonœ per hebdomadam , ad Primam. etc. — F» M v»,
Offerloria cum vrsibus. — F» 97 r», Versets alléluiatiquos. — F" I.''i0 r». Tractus. — F» 172 r«.
mélanges de tiraduel et de Tropairo (fragments]. — Nous ne placerions pas ce manuscrit
au nombre des Trupaires, si nous n'y Irnuvions : a. un h'yri« tropo [Cunclipotent grniior.
fo t< r") ; 6. Deu.x Agnits tropés ( Omnipolen* aeterna Dei lapientia , et Qui Patrii ad dex-
teram, fo 17;> ro et v»); c. un Sanclu* Iropé {Sanctuê, admirabih't splendor, {» 177 r»);
d. les Sequelw accompagnées de quelques fragments de ces Proses que l'en peut considérer
Comme les Tropes du (îraduel.
XI" siècle. — On trouve à la fois daos ce manuscrit Jes ae, des e cédilles et des e. Parch.,
LES TROPAIRES 121
moins conventionnels , plus vivants. Il en est ainsi des
auteurs de nos meilleurs Tropes et Séquences, avec
178 feuillets, 242 sur lOO'nm. Quelques lettrines originales (V. notamment fo 14 v et f° 97).
— Rel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Blartial de Limoges.
15° Lat. 1136. — Tropaire précédé d'un Graduel (incomplet),
d'un Prosier et d'un Séquentiaire, et suivi d'un Processionnal.
Fo 1 ro, Traclus. — Fo 17 r», Prosier. — Fo 39 vo, Graduels. — F» 50 ro, Offertoires.
— Fo 76 ro, Versets alléluiatiques. — Fo 92. Quelques sequelœ ou mélodies de l'Alleluia
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. lat., 1121, f" 90 ro).
avec les premières paroles des Proses correspondantes et quelques intercalations de clau-
sulx. — Fo 96 ro, Tropes du Sanctus et de VAgnus. — Fo99 vo. Antiennes processionnales.
xp siècle. — Parch., 111 feuillets, 200 sur 135ram. — Rel. maroquin bleu aux armes de
France.
Saint -Martial de Limoges.
16° Lat. 1137. — Tropaire accompagné d'un Graduel,
d'un Séquentiaire et d'un Prosier.
Fo 1 ro. Versets alléluiatiques (depuis le premier dimanche de l'Avent). — F° 24 vo,
Graduel avec fragments de Tropaire [Sanctus tropé, fo 29 ro; Agnus tropé, fo 34 vo). —
Fo 35 ro. Grandes Antiennes eucharistiques de Noël, Einitle, et de Pâques, Venile. —
Fo 39 ro, Sequelx, mélodies de l'Alleluia avec les premières paroles des Proses correspon-
dantes et quelques intercalations de clausulse. — Fo 51 vo, Prosier. — Fo 110 vo, Graduels.
- Fo 118 ro. Offertoires cum versibus.
xie siècle. — Parch., 1C7 feuillets, 203 sur 130"'m. — Rel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
17° Lat. 1138. — Tropaire accompagné d'un Obituaire
et d'un Prosier.
Ce manuscrit n'est en réalité qu'un Prosier ( f o 7 ro) avec la Préface ordinaire Precamur
(fo 7 ro) et les prosse dominicale» { fo 129 v»), qui, comme nous l'avons dit, sont chantées
les dimanches après la Pentecôte. Si nous le faisons rentrer dans la série des Tropaires,
c'est à cause du Trope du Kyrie qui se lit au fo 1 vo, et du Trope « ad rogandum episco-
pum i> du fo 136 vo. Entre les fos 2 ro et 6 vo, Obituaire précieux.
XI" siècle. — Parch., 140 feuillets, 200 sur IIO""». — Rel. maroquin bleu aux armes do
France.
Saint -Martial de Limoges.
122
HISTOIRE riK I. A l'OKSii; i.n riu;i(»rK
moins de naturel et de simplicit*'. On regrette la
surabondance de hiurs (îpithètes et la préciosité de
18° Lat. 1240. — Tropniro accompagné de VOrdo
pour la Semaine sainte et d'un Prosicr.
1'" l.s vo, Tropairc complot depuin Noël jusqu'à la Toussaint. Les grands Tropes (qui sont
rares) ne font, poun ciiaole fête, qu'une seule et même série avec les petits Tropes. Au
Illustralion fies Tropaires (Bibl. nat. lai., 9448, fo 62 r»).
f° 21, VOrdo du dimanche des Rameaux, du jeudi saint, etc., et, au fo 40, un choix de
Proses.
XI» siècle. — On y trouve (f» 6.t) des Acclamations en l'honneur de « Jean, pape [Jean XI,
t 936), de Raoul, roi (f 936), de Turpion, évoque» (•{• 944), et ce sont ces laudt* qui ont
fait allrihuer au x« siècle l'exécution de ce Tropaire; mais il ne faut peut-être voir dan» cette
partie de notre manuscrit que la copie d'un manuscrit plus ancien. — Parch., 194 feuil-
lets, 230 sur 16î)'nin. — Rel. maroquin bleu aux armes de France.
Saint -Martial de Limoges.
19° l.at. 1338. — Tropaire- Prosier.
Ce manuscrit se divise en deux parties qu'il est facile de distinguer l'une de l'autre: !• un
Prosier (f« 9 r», 85 v»), où l'on prend soin do distinguer les anciennes Proses ( série com-
plète depuis Noël jusqu'.i la Saint-Martin, f» 9 r>'-69 v») des fada» novat prota» ,f«69 vo),
c'est-à-dire des Proses nouvellement composées ou connues depuis peu; '-• un Tropaire spé-
cial : « Tropes de l'intérieur du Graduel et de la fin de l'Offertoire, • qui ont été particulière-
ment en honneur à Sainl-.Marlial (f» 85 r», 138 r").
LES TROPAIRES 123
leurs images; mais comme on sent la foi, l'entrain, la
vie, la joie!
XI» siècle (?). — Parch., 253 feuillets, 187 sur 115™™. _ Rel. maroquin bleu aux armes
de France.
Saint -Martial de Limoges.
20» Lat. 9448. — Tro paire.
Dans ce magnifique manuscrit, type d'un tropaire a l'état pur et sans mélange,
on a groupé, pour chaque fête, les grands et les petits Tropes dans un seul et rBèmc
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. lat., 9449, fo 14 ro.)
groupe. C'est ainsi, — pour prendre un exemple décisif, — que pour Noël nous avons, d'une
seule teneur : a. VHodie canlandus est de l'Introït (fo 7 vo); 6. c. les Tropes du Kyrie [Te,
Christe rex, supplices, i" 7 vo), et du Gloria [Laits tua, Deus, resonet, t° 8 ro); rf. un
Offertoire cum versibiis non tropé (9 r»); e. le fameux Emilie [ad corpus Domini siimen-
dum), qui correspondait au Venite de Pâques (fo9 vo), et enfin les Tropes de l'Agnus [Rex
regum, gaudium angelorum) et de la Communion ( fo 10 ro). Il en est ainsi pour les
autres fêtes, et rien n'est plus net qu'un tel plan. (V. l'ouvrage de l'abbé Reiners : Die
Tropen Prosen und Prdfations - Ges'ànge des feierlichen Hochamtes itn Miltelalter.
Luxembourg, J. Harn, 1884, in-8o, 124 pp.)
Fin du x» siècle, commencement du xi^. — Parch., 91 feuillets, 323 sur 155m™. Œuvre
d'un calligraphe de premier ordre, qui en a fait l'un des plus beaux manuscrits de cette
époque, le Tropaire de Prum a, en outre, reçu la parure d'une u illustration i> qui, pour
ce temps, est presque sans pareille. — V., fo 54 vo et 55o ro, quatre miniatures sur l'histoire
et la légende de saint Pierre et de saint Paul, où Simon le magicien joue un grand rôle;
fo 60 vo, une Assomption très curieuse, et fo 62 ro, une belle « Vierge dans la gloire » ;
fo 71 ro, saint Michel ; fo 73 ro, un baptême par immersion ; fo 76 vo, un superbe saint Mar-
tin; fo 81 ro, un très beau saint André et une tombe avec le mort; fo 83 ro, une jeune fille en
larmes {à cause de l'air Virgo plorans sur lequel on a écrit une Prose De uno martyre),
et une autre jeune fille à laquelle le peintre s'est efforcé de donner une apparence agitée
(à cause de l'air Puella turbata sur lequel on a écrit une Prose Z)e sanclis virginibus). Etc.
— Rel. maroquin rouge.
Abbaye de Prum.
21° Lat. 9449. — Tropaire-Prosier.
Chaque fête possède, en ce Tropaire, tous ses Tropes (y compris la Prose), qui se suivent
d'une seule et même teneur. C'est ainsi que pour Noël (Messe du jour), nous y lisons
( fo 7 ro et suiv.) : a. le Quem quieritis et d'autres Tropes de l'Introït ; 6. le Trope du Kyrie
[Te Chrisle, supplices] \ c. celui à.\x Gloria [Pax sempilerna] ; d. la Prose Cselica résonant;
I2'< IIISTOII{K IiK I. A r'OKSIK I. IT I* H GIOUF
La joie ! telle est en eiïet « la dominante » de toute
cette poésie : Dominum veneremur, cia et eia, laudes
e. le Trope de l'OITerloiro Dcxtera L/ei; f. celui du Sanclu*,iumme Paler ,- g. idui de VAynu»,
Quem Johanne», et enlin : h. celui de la Communion, Radix Jetée. Au f- hô r», un [>elil l'rosier
sans imporlancc. C'est dans ce précieux manuscrit [(•> 17 v) qu'on lit le fameux OfGc« de
l'Étoile [Vertus ad tlellam faciendam), mis en lumière par M. Léopold Dclisie, et qui est
l'un des monuments primitifs do l'histoire de notre théâtre.
Pecond tiers du xi« siècle. — Les Acclamations du f» 30 sont consacrées aux rois Henri (1)
et Philippe [I]. Or Philippe I»' n'a été associé à la couronne que le '23 mai loM , et Henri I" est
mort le 7 août lOGO. — Parch., 100 feuillets, '/.l'i sur 13'in>ni. I^etlrines intéressante» : f» I r»,
un scribe; f» 14 r», un N; f» 67 vo, un bel H oncial ; f» 70 r», un autre, moins beau;
fo 76 vo, un S. La plus curieuse de ces « illustrations », c'est, à coup sûr, celle du t» 34 vo,
qui représente des jongleurs -musiciens. — Hel. moderne, maroquin rouge.
Église cathédrale de Nevers (comme le prouve la large place donnée à l'office de saint
CjT, qui depuis le ix« siècle est le patron de celle cathédrale; GcUtia chrittiana, H, p. 791 ;
Acla Sanclurum , édil. V. Palmé, tome IV de .luin, p|). 17, 1«, etc. elc.j. C'est l'un des très
RAitEs TuopAinES qui ont été en usage en des églises séculières.
22° l>.it. 10508. — Tropaire-Prosier.
C'est, de tous les Tropaires, celui qui offre peut-être le plan le plus régulier: a. f» 6 r»,
Tropes du Kyrie pour toutes les fêles de l'année ; b. f» 17 vo, Tropes du Gloria; c fo 44 r»,
Prosier; d. fo 117 vo, Tropes du Sanctu$;e. fo 125 vo, Tropes de VAgnus. Comme on le voit,
le manuscrit 10;X)8 ne contient que les grands Tropes, parmi lesquels il admet la Prose. —
On a relié avec ce Tropairc (fo 130 ro et suiv.) le célèbre traité de Gui d'Arczzo: De Mutioa.
XII" siècle. — Parch., 159 feuillets, 205 sur 121 mm. Manuscrit d'une belle exécution et qui peut
passer pour un type presque achevé. Traits verts et rouges au-dessus de chaque ligne de la nota-
tion neumatique (V. les lettres T au fo 6 ro; N au fo 46 vo, etc.). — Hel. moderne, veau fauve.
Abbaye de Saint -Lvroult, en .Normandie.
23° 10510. — Tropaire-Prosier-Graduel.
Manuscrit d'une exécution incomparable et d'une division très normale : a. un Tropaire
(fol vo. — 22 vo); b. un Prosier ( fo 23 vo. — 72 ro);c. un Graduel (fo 73 ro. — 117 vo. C'est une
trilogie facile à saisir. Ce Tropaire est un de ceux où tol's les tropes d'i'ne fête se suivent
d'une seule et même teneur. C'est ainsi que pour Noël on y lit d'abord ( fo 1 ro) les Tropes
de l'Introït; puis (fo 3 ro) ceux du Kyrie; puis (fo 3 yo) ceux du Gloria; puis encore
(fo 4 vo) ceux du Sanctu», et enfin (fo 4 vo) ceux de l'Agniu. On y fait entrer, pour des
fêtes très solennelles, les Offertoires avec versets. (V. l'ouvrage de l'abbé Reiners : Di»
Tropen-Prosen und Priifation» - Get'ànge de» feierlichen Ilochamtea im Miltelaltfr.
Luxembourg, J. Ilarn, 1884, in-8o, 124 pp.)
Tin du x« siècle, commencement du xi«. — Parch., 127 feuillets, 214 sur OS"».. Minuscule de
luxe. Une magnifique miniature occupe toute une page (fo 000). — Rel. ancienne, peau rouge.
Echternach.
240 Lat. 13252. — Tropaire accompagné d'un Prosier, et suivi
d'un Tonaire et de fragment? de Graduel.
Fo 3 ro, Trophi in Nali vitale Domini : Hodie canlandut , etc. Les petits Tropes sont grou-
pés ensemble pour chaque fête de l'an.née liturgique, depuis Noël. — Fo 20 ro, grands
Tropes : a. du A'yrie ( fo 20 ro, 26 ro ) ; 6. du liloria (fo 26 ro. — 28 ro ). — Fo 39 r», Prosier. —
Fo 67 ro, Sanctiu tropes. — Fo 69 ro, Agnuê tropes. — Fo 71 ro, Tonaire. — Fo 81, Ver-
sets alléhiiatiques, etc.
XII» siècle. — Parch., 95 feuillets, 200 sur 95'ni". Lettrines charinaniê~ ; ali.hal^-t i repro-
duire. (V. le superbe G du fo 19 ro, etc.) — Rel. parchemin.
Paris, abbaye des SS. Magtoire et Barthélémy (?).
Ce manuscrit a appartenu à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés («Ex liLris faiicti Ger-
mani e Pratis »; note du xviii» siècle au fo 1 vo). Le fonds du Tropaire a été composé, suivant
nous, avec un Tropaire de Saint- Martial, comme permet de le supi-tiser la Prose à saint
Martial ( V'alde lumen, U 49 ro); mais on y a ajouté tout un « F"'r«>pre» important, comme
l'atteste la place qu'y occupent saint Barthélémy (17 ro' , saint Magloire [fo 19 [roT, uiol
Denis et saint Germain, etc.
LES TROPAIRES
125
persolvamus , canentes : Eia. Ce cri eia retentit mille
fois dans chacun de nos Tropaires; il en est, en quelque
23° Bibl. nat. : nouvelles acquisitions, 1177. — Tropaire-
Prosier-Antiphonaire.
Le Tropaire ne commence qu'à la feuille 4. Grands Tropes : a. du Kyrie (f" 4 ro); b. Re-
Illustration des Tropaires (Bibl. nat. laU, 9449, f» 34 v
gnum (f» 4 ro et v»), etc. Mélanges sans suite : Proses de saint Benoît ( Sancli mérita ] ; de
saint Pierre [Pollet aima], fo 5 ro ; un nouveau Regnum pour la fête des saints Pierre et
Paul (fo 6 ro); le Verset alléluiatique de la Saint -Benoît : l^ir Domini Bénédictin (fo 6 ro)
(ici plusieurs feuillets ont été perdus); une Prose de Pâques (7 ro); la fameuse Antienne
eucharistique Venile (7 v»); un Agnus Dei tropé : Omnipolens œierna Dei sapientia
(7ro) ; une Prose de saint Martin (8 ro); le Graduel de l'Assomption (8vo) et deux AUetuia
de l'Avent (9 ro). — Fo 9 vo, Offertoires cum versibus. — F» 17 ro-27 vo et 43 vo-o2 vo,
Graduels et Traits. — F" 28 ro, Versets alléluiatiques. — Fo 53 ro, Prosier.
Fin du X16 siècle, avec quelques additions de la fin du xii» et du xnp siècle. — Parch.,
89 feuillets, 290 sur 126"ini. — Demi-rel. maroquin rouge.
Fleury- sur -Loire (comme il appert notamment d'une Prose de la deuxième époque en
riioiineur de saint Benoit : Sit in donis benedictus — Per quem pater Benedictus — Nostra;
datur gloriae. — Isto flore floret pictus — Floriacus locus dictus — Sua; donc gratiae (fo 87 vo).
26» Bibl. nat.: nouvelles acquisitions, 1235. — Trupaire-Prosier.
Fo 177 vo, 244 vo, Tropaire -Prosier complet, précédé de l'éloge ordinaire de saint Gré-
goire, e;c.
126
HisToinr: nr la porrsiE MTfnoioT'E
maniùrc, le résumé et l'essence. C'est \r.ir là, c'est par
cette constatation équitable que je veux c(jrriger et atté-
xii« siècle. — Pareil., '202 feuillets , 277 sur 185'»™. Lellrines ( Voy. l'A el le G du f» U r", etc.).
— Demi-rel. maroquin rouge.
Nevers.
27" Biljj. de l'Arsenal, 1169. — Tropaire suivi de fraprnenls
de Prosier.
Ce manuscrit peut passer pour le type de ces Tropaires où les « pclits » et les « grands »
Tropcs nn forment, pour chaque fkte de l'année LiTunciQUE, qu'une seule cl même série
( y compris la Prose, que l'on considère comme un Trope). Chaque fi'-lc, en d'autres termes,
y forme un tout complet, et est munie de tous ses Tropes. Les Tropes de l'Offertoire el ceux
llluslralion des Tropaires (Bibl. de l'Arsenal, 1109, f" 3 %••).
de la Communion ny apparaissent qu'exceptionnellement; ceux du Gloria y sont nombreux.
— Fo 1 vo, Incipiunt tropi cum laudibus. Les Tropes sont groupés très régulièrement
par fêtes, depuis Noël (f" 1 v") jusqu'à la Saint -Michel (48 r»), et nous n'aurons a noter,
dans ces quarante -huit feuillets, que les éléments véritablement dignes d'une attention spé-
ciale. — Fo 18 vo, Répons et versets qui étaient chantés durant la Procession à l'Office do
sépulcre. Cet Office, tout primitif, consistait uniquement dans le Quem quwritiê. — F«22 v»,
Acclamations très précieuses et qui nous permettront tout à l'heure de dater le manuscrit
(ces Acclamations s'adressent à Hobert, roi de France, 996-1031, et à l'évèque d'Autun,
Gautier, 971-1024). — Fo 39 ro. Hunes, etc. — Fo 49 ro, Fragments de Prosier (Proses en
l'honneur de la Vierge, de « tous les saints », de saint Etienne; Proses de la Pentecôte
et de Noël). — Fo 55 vo, Prose Adett namqtie dits aima, etc. En trois endroits de cette
l'rose (lignes 8, 15, Ifij.on a gratté le nom d'un saint jiour y substituer le mol Latart. Celle
prose était visiblement consacrée à un aulre saint, el le mot Lazarty a été sans doute intro-
duit au xu» siècle, quand le culte de saint Lazare de Béthanie prit une extension plus con-
sidérable à Auiun, et peut-être alors que (le 13 des calendes de novembre 1147) on transféra le
corps du saint dans une église superbe qui fut l'une des deux cathédrales d'Auiun. L'aulre
était consacrée à saint Nazaire et à saint Celse. On remarquera au f" 39 ro un fragment qu'on peut,
suivant M. Omont, rapprcchor du De musica d'.Mcuin : •• Autenttu dicilur <• autoritas » sive
<i testaincntum » ; prolus dicilur « primus « ; autentus protus, autoritas prima dicilur, etc. •
Ce fragment, très curieux, est écrit selon un double syslènie cryptographique: !• Emploi
de lettres grecques corres|Mndant aux lettres latines ; 2o voyelles a, », o, u, remplacées par
les lettres g, ,1;, g, :.
XI» siècle. — Grâce aux Acclamations du f» 22 vo, il esl permis de dater plus exaclemenl
ce précieux manuscrit. Après celle qui est adressée au pa|)c, dont le n«m n'csl \*as donné
[llli sutnmo pontifici etuniver$ali papx, vila, etc.;, viennent , comme toujours, celles dont
le roi e>l l'objet : llodbtrlo maijno et pacifico rege viUi el Victoria. Il ne peut «'agir ici
que de Itobert II (9%- 103! ] ; le? ."^ainls auxquels on le recommande spécialement soni ; saint
Denis, que l'on peut regarder à celle époque comme le patron de la monarchie française, el
saint Corneille et saint Médard, patrons de deux abbayes presque aussi célèbres, a Cam-
LES TROPAIRES 12'
nuer certaines sévérités contre les Tropes que j'ai crues,
et que je crois encore autorisées et légitimes.
piègne et à Soissons. La mention de l'évèque est plus précieuse : Wallerio hujus ecclesise
ponliftci et omni clero el populo sibi commisse, salus et vita. Le seul Gautier auquel con-
vienne cette acclamation est Gautier, qui fut évèque d'Autun depuis 977 jusqu'à 1024. Il y a
eu, à la même époque, un autre Gautier sur le siège de Besançon (1016-1031 ) ; mais il ne saurait
être ici question de lui, puisque le saint auquel on recommande notre Walterius (sancte Na-
zarii, luiUiim adjuva) est précisément le patron de la cathédrale d'Autun. Donc le doute
n'est pas permis, et notre Tropaire (dont l'écriture concorde parfaitement avec ces données)
peut être placé entre les années 996, date de l'avènement de Robert, et 1024, date de la
mort de Gautier. — Pa/cli., 167nim de long sur GO de large ( f» 12, pris pour type), 56 feuil-
lets. — Illustration très intéressante, de facture primitive et originale : fo 3, v». Nati-
vité de Jésus -Ciirist; f" 4, adoration des bergers ; fo 6 vo et ro, lapidation de saint Etienne ;
Illustration des Tropaires (Ribl. de l'Arsenal, 1169, f» 3 vo
saint Paul garde les vêtements des bourreaux; fo 9, saint Jean, sur le point de mourir, dit
adieu à ses frères et descend lui-même dans son sépulcre (c'est ce que la liturgie mozarabique
a énoncé en ces termes : a Johannes, diem recessus sui antea praesciens, efludi ipse sibi prae-
cepit locum sepulcri. In quo valedicens fratribus , sine ullo mortis dolore, ingressus ,
requiescit, usque ad adventum Domini, incorruptus. » V. le P. Cahier, Caractéristiques des
saints , 426 , note 5 , et Monographie des vitraux de Bourges, p. 275 et suiv. ) ; f>i 11 ro, mas-
sacre des Innocents ; fo 1 1 vo, le vieillard Siméon ; fo 13 vo, l'adoration des Mages ; fo 14 vo, mar-
tyre de saint Vincent : les ongles de fer ; fo 15 ro, martyre de saint Vincent : le feu ; fo 16 vo,
trois saints (types des autres Bienheureux pour la Toussaint ) ; fo 22 ro, résurrection de
Notre-Seigneur ; fo 40 r». Ascension; fo 41 vo, Pentecôte; fo 44 ro, Zacharie à l'autel des
parfums; fo 44 vo, délivrance de saint Pierre; fo 46 ro, martyre de saint Paul. — Reliure
très remarquable. Ivoire attribué au uio siècle : une femme, jouant de la lyre avec le plectrum,
est assise entre deux hommes qui l'écoutent. Il n'est pas étonnant qu'une telle pièce ail été
trouvée à Autun. On l'a sciée très maladroitement pour en composer les deux ais de celte
reliure, et une bande notable d'ivoire sculpté a été perdue. Cet ivoire a été reproduit et com-
menté dans les Mélanges archéologiques des PP. Cahier et Martin, 20 série, t. II, p. 75.
Cathédrale d'Autun. Cette origine ne saurait être douteuse. L'évèque Gautier, acclamé au
fo 22 vo, a gouverné l'église d'Autun, dont saint Xazaire est le patron principal avec saint
Celse. Après son nom (fo 22 vo) on a gratté toute une ligne, laquelle pourrait être en partie
restituée ainsi qu'il suit : [Sancte Celse, tu illum adjuva. Sancte Ger]vasii, tu illum adjuva.
Le but de ce grattage était, sans doute, d'insérer dans ces laudes le nom de saint Lazare,
dont le culte reçut à Autun une si grande consécration au xii' siècle.
28° Saint-Gall, 376. — Tropo ire-Graduel-Prosier.
Le plan de ce manuscrit est des plus simples, si l'on veut bien en défalquer les trente-
huit pages qui sont consacrées au Comput. C'est une trilogie dont la première partie est
donnée aux Tropes (pp. 39-81), la seconde au Graduel (pp. 82-311), la troisième au Prosier
ou Liber sequentiarum do Notlter (pp. 312-432). Le Tropaire, oii l'on suit l'ordre de l'année
liturgique (depuis Noèl jusqu'à la Saint-.\ndré) , se divise lui-même en deux parties: lo pe-
tits Tropes (Introït, Offertoire, Communion, pp. 39-65); 2o grands Tropes {Gloria, p. 05;
Kyrie, p. 72; Sanclus , p. 75; Agnus, p. 76).
XI" siècle (quoique l'éditeur des Casus Sancti Galli, Pertz, Scriplores, II, p. 101, note 45,
et p. 102, note 53, le considère comme du x» siècle). — Pareil., 434 pages.
128
lIISTOinF OK I. A POK^IF I, FTT lUlFOr F.
Mais c'est surtout au point de vue théoIogi(jiic (jue
les Tropes inéritent dV'tre étudiés. Leur orthodoxie,
Saint -Oall, comme ratlcsle la [ilnre qui y est occupée par le culte de Bainl Gall (pp. 2M,
308, etc.) cl de saint Otlunar (p. 2r.2, etc.). C'est dans ce manuscrit qii'csl la mention déjA
signalée par nous: u VIII id. aprilis, obitus Nolkeri qui Scqucntias c<>ni|>osuit (p. 17^. ■
29» Saint-Gall, 378. — Tropairo-Graduel-Pros ier.
Môme plan que le manuscrit 37G, avec lequel il offre de grandes ressemblances (les qua-
rante premières pages y sont consacrées au Compul) : 1» Tropaire divis/; en deux («arties :
lllustrnlion des Tropaircs (Hibl. de l'Arsenal, 1163, f» 11 r»)
a. petits, et b. grands Tropes (p. 42) ; |2o Graduel ; S» Prosier ou Liber Sequentiarum de
Notker divisé en deux parties (p. 154). — Quelques notkériennes {Quid tu Virgo maler,
plorai, Prompla mente, etc.) se trouvent dans 378 et ne sont pas dans 376. — P. 345,
Proses qui ont été ajoutées par une main du xiii» siècle, avec quelques Tropes du Kyrie
(p. 367), et du Gloria (p. 375).
xi« siècle (Mone, Hymni lalini medii xvi, I, 303; III, p. 265, etc., le date do x* siècle.)
— Parch., 4011 pages.
Saint-Gall. Même observation (jue pour le ms. 376.
30o Saint-Gall, 380. — Tropaire suivi d'un rro^ier
et d'un Ant iphonaire.
Ce manuscrit débute par (|uelques feuillets [pp. 3-20) qui n'en ont pas toujours fait partie
et qui sont complétés par un cahier placé un peu plus loin (pp. 41-52). Ces feuillets, qui
ont été écrits vers le milieu du xi» siècle, renferment les principaux éléments du Compul
ecclésiastique (p. 4, calendrier : « In nomine Domini incipit martyrolofrium per circulum
anni ; » p. 7 : « Incipit compotus Gr.tcorum; » p. 8: " Re|rul. conourrentium, re^l. epartc ;
p. 20: Ciclus jiascalis; » p. 41: Concurrents; p. 45 : Tableau offrant sur six col'.: ■ • -
lo l'année ; 2» l'indiction ; 3" les concurrents; 4» le cycle lunaire; 5o la date du j" '
Pâques, et 6» la luna ipsius [diei\. I.e point de départ es l'année 1054. D'autres éUn,. :.'. -
ont été ajoutés au xn» siècle : p. 21 : " Celsa lux Sjon; » Prose en l'honneur de saint l'an-
taléon; p. 22 : Antienne et Prose pour la fête dos Onze mille Vierges; p. 24 ; " De sancta
cruce. Salve, crux sancta; salve, lignum Iriumphale ••. (l'.f. Mone, I. p. 137. n» 103.) A la
même date appartiennent la <c Sequentia de sancta Afra : Laudes Dco perenni " (p. 48), et
une autre Prose en l'honneur de saint Thomas Decket , qui a dû élre écrite peu de temps
après le martyre de l'archevêque de i;anlorlH>ry : " In festo TlK>m« archiepiscopi cl msrtj-
ris : Spes mercedis et corons, » etc. On remarquera l'absence, sans doute fortuite, du mol
sancti. La canonisation île saint Thomas (mercredi des cendres 1173) n'a été que de trois
LES TROPAIRES
129
pour être imagée et rythmée, n'en est pas moins d'une
exactitude absolue et d'une élévation constante. » Nous
ans postérieure à sa mort. Avant d'arriver au Tropaire proprement dit, il faut encore si-
gnaler la Prose en l'honneur de sainte Marie Madeleine : « Laus tibi, Cliriste, » qui a joui
d'une vogue extraordinaire, et celle en l'honneur des Apôtres : « Cœli enarrant gloriam Dei »
(p. 26). Tropaire: l» petits Tropes (p. 28); 2o grands Tropes [Gloria, p. 83; Sanc/us, p. 99,
Agnus Dei, p. 100; Kyrie, p. 106). On y a intercalé quelques Versus : les k Versus ante
Evangelium cantandi : Sacrata libri dcgmata , » et le <i Laudes, omnipotens, ferimus n. —
Illustration des Tropaires (Bibl. de l'Arsenal, 1169, fo 13 vo).
P. 113, Tropes de l'Introït pour la fête de saint Remacle et pour celle de saint Nicolas : textes
introduits après coup. — P. 116, Trope Fabrice mwidi; El veriiale ; Vox exullationis (écri-
ture du xiK siècle). — P. 118, commencement du Liber Sequentiarum de Notker. Le luxe
calligraphique que l'on a dépensé pour en écrire le prologue montre assez cloquemment
l'importance qu'on lui attachait : il est écrit en capilales roujïts ombrées d'or : <( Summœ
sanctitatis merito, summi sacerdolii décore sublevato, domino dilectissimo Liutwardo, incom-
parabilis viri Eusebii Vercellensis episcopi dignissimo successori , Notker, cueullario-
rum Sancto Gallo novissimus. » — P. 24, (( In Chrisli nomine incipit liber Ymnorum i\ot-
keri Balbuli, » etc. Suivent les prétendues Hymnes, qui sont des Séquences. Elles sont au
nombre de 71, tandis que la môme collection ne se compose, dans le nis. do Munich 14322,
que de 37 Séquences. C'est le cas de faire remarquer que la composition de ce célèbre recueil
n'est à peu près la même dans aucun manuscrit, et qu'il reste à faire un travail critique pour
déterminer nettement quelle est exactement l'œuvre de Notker. — Dans le présent manuscrit, le
Liber Sequentiarum est divisé par la fête de Pâques en deux parties d'inégale étendue, et l'au-
teur a écrit un Prologue spécial pour la seconde partie : <( Pars, Liutwarde, pr.or linitur calle
sub arto, n etc. {P. 160, lignes alternativement écrites en noir et en rouge.) Les Séquences
sont partout écrites, comme en d'autres manuscrits de Saint-Gall, avec leur notation neuma-
tique dans la marge de droite. — P. 370, «lOlîertoria cum vcrsibus. » — P. 369, Premiers mots
des Introïts et des Communions per circulum anni. — Pp. 387, 388, addition du xii» siècle :
«I Alléluia i> de Pâques; Prose en l'honneur de la sainte Trinité : <i Henedictio trinae Deita-
tis, I) etc. — P. 389, additions du xiu" siècle. Prose de sainte Catherine : <i Digna Deo Catharina...»
I - 9
VU)
iii^Tdiiii: FŒ i.A rni':?ii- MiTTiniori-:
consacrerons ailleurs un Inu;/ cxaun'ii ;"i r''lt'ui<'nt
philosopliiquf! (le nos 'rr()[)iiires, el Tou y liouvera une
xi« siècle (sauf les aildilions ci-dessus énuméréc», cl sauf la fameuse Prose Veni , iancte
Spiritus, p. 2«, (]iie IJ. (Jui ranger estimait avoir élé coiii|M)s<e durant la (fuerrc rontrc le»
Albigeois, et qui n été ajoutée ici par un scribe du conirneri'x-niciit ilu xiii* siècle). I.e manu-
scrii, en sa forme aotuello, a clé constitué avec deux manuscrits : le pn.inier ((x>m[>ut ecclé-
siastique) a été écrit vers l'année iOii'i et est représente par les p(>. 3-20 et MH'i; le second
(p. tl3 cl suiv. )> tl"i>t il est moitjs aisé de prériser la d;itc, niai» <)ui est certainement du
llluslrntion dis Tropaires (Hibl. de l'.\r?enal, llf.O, f- 17 r" .
xi« siècle, est Celui qui renferme presque tous les autres éléments dont nous avons donné la
liste.— Parchemin, 390 paffcs ; hauteur, 177 ccntim. ; largeur, 88 millim. Dcmi-reliurc veau fauve.
Saint -Gall (comme le prouvent les Tropcs » de sancto Galle.. [[>. 2V, "de sancto
Olhmaro .. (p. 78), etc.)
31» Saiiil-Gnii, 381. — Tropairo précédé de Vt*>-«u«
fl d'un 1* rosier.
Pp. !), Il cl 12, Acrlnm liions : " Auxilium nostrum , Christus vincit, •• etc. — P. C. lettre
do Nolker à son « frère » Lambert sur la signification musicale de certaines lettres.
P. '22 Versus destinés i\ être chantés durant les Processions (œuvres d'Hartmann, de
Hadpert, deTutilon. etc.). — P. 182, Prosier incomplet (quelques notkerienncs). — P. 195,
Tropaire : a. petits Tropes, suivant l'ordre de l'année liturgique, depuis No«?l (p. iVi);
b. grands Tropes : Kyrie tropés {i'iï>)\ Gloria (-•97); Sanctua (309); Agnui Dei (310).—
P. 32a Prosier ou Liber Sequentiarum de Nolker. — .\ la p. 307, on peut lire quelques
Tropes do l'intérieur du Graduel.
XI» siècle (L'éditeur des Coêui Sancti Galli , Portz. Scriplor^, II, p. 102, note M, le
considère comme du x» siècle). — Parch., S"» pages : 11.")-.!» sur 117.
Saint -Goll. Môme observation que pour les mss. 376, 378, 380.
32- Saint-riall, 382. — Tropa ire-I'rosicr-ri rail iiel .
Après les Versus des |pro.o-'si..iis , mmmcnce (p. 21 } le Tropnire proprement dit : a. polit»
Tropes, suivant l'ordre de l'année liturgique, depuis Noël (p. 21 ); 6. tçrands Tropes, ajoutés
par une main du xiii» siècle ( p. Tû ) ; c Tro|*s du Te Deum ( p. 71 ; d. Kpllres IropAes (p. 73) :
LES TROPAIRES 131
« Exposition complète de la foi » telle qu'elle était com-
prise dans ces cloîtres des xe et xie siècles où reten-
c. Sanctus et Agiius (p. 70). — Le manuscrit se termine par un Prosier notlcêrien ,
où alternent les éléments du xi» et du xiiie siècle (pp. 94 et suiv.), et par un Graduel du
XI» siècle (pp. 219-270.)
Les parties de ce Tropaire qui ne sont pas du xiii» siècle: pp. 1-56; 94-218 (avec de
nombreuses intercalations); 219-270, sont attribuées au x» par l'éditeur des Casus Sancti
Illustration des Tropaires (Bibl. de l'Arsenal, 1169, f» 46 v).
Gain (Pertz, Scriptores, 11,102, note 53); nous les croyons du xi». — Parch., 270 pas-es :
184™m sur 135.
Saint-Gall. Même observation que pour les mss. 376, 378, 380, 381.
33° Saint-Gall, 484. — Tropaire suivi des Mélodies iiriinitives
de l'Alleluia.
Ce manuscrit est le plus ancien et le plus précieux des Tropaires qui soient conservés aujour-
d'hui à la bibliothèque de Saint-Gall. C'est celui où l'on trouve les Tropes musicaux sans
TEXTE que nous regardons comme antérieurs ;i la plupart des autres. Rien d'ailleurs n'est
plus simple que le plan de ce précieux Recueil : lo Tropaire divisé en deux parties : a. petits
Tropes suivant l'ordre de l'année liturgique depuis Noël (pp. 5-201) ; b. grands Tropes
du Kyrie, du Gloria et Regnum (pp. 202-257); 2o Mélodies, sequelui ou queues neuma-
tiques de l'Alleluia, d'où les Proses ont tiré leur origine (pp. 258 et suiv.).
x» siècle. (M. Weale, dans son Catalogue des livres liturgiques qui ont été exposés à
Londres en 1885 (p. 3), le regarde comme du commencement de ce siècle. — Parch.,
318 pages. C'est le plus petit des Tropaires connus : lOo""» de hauteur sur 90 de largeur.
Saint-Gall.
34" Berlin, Bibl. roy. ms.; Théol. lat., n" 11. — Tropaire suivi de
Versus et d'un Prosier.
Ce Tropaire (décrit imparfaitement dans VArcfiiv de Pertz, XVHI,844, et dont nous
avons sous les yeux une copie complète due à l'extrèmo obligeance du docteur Liiwenfeld et
\3-2 IIISTMlHl'. DK I. \ l'OKSlE I.lTriiGlnl K
tissait I;i lans perennis. Ce sera it(Mil-rtic la i.ailJL' de
notre (l'iiviv <ini ollViia à nos lecteurs le plus d'nti-
do ses élèves) se divise en deux (larlies disliriclcs. I.a première ((»» 1 v»; 74 v») con»Ul«
dans la série régulière des peliln Tro|.es (Iiitroil, (Jfferloirc, Oiiiifiiunioii), distribués fort
exaclement, fêle par fêle, suivaiil l'ordre régulier de l'année liturgiiiue d'-pui» Noël jusqu'à
la Saiiil-Aiiilré. L'Ofdo il: la semaine sainte (f» iC ro-i'J v) coinplrle «et insemble sans en
Irùubler riiarniuiiic. — An 1" "ij r", comnienn; la siionde partie, qui se conip<j»e d'- dix Troj»c«
du Kyrie: O thcoa critis, etc., suivi» du Carmen angelicum ou du Gloria seize fois ré-
|)élé, etc. La lin de ce précieux volume esl loin d'offrir la même régularité, cl nous n'avons à
y signaler, en ce qui concerne la présente élude, que les Act^'lamalions ( f» 111) qui vont nous
aider tout à l'iiouro à dater lo manuscrit, quelques VerMii» (fo ll'i),cl surloul (f' 144) le l'ro-
sier ou Liber sequenliarum de .Nolker, où la notalion musicale (comme dan» les mcillcura
manuscrits de Sainl-Gallj ne se trouve point placée au-dessus du lexle, mais en marge.
XI» siècle. On peut arriver â une date plus précise en se référant aux AccLimations du f" 111.
(Cf. Ici <i Litanies » ou Laudes d'un manuscrit de Wolfenbultel llelmstad, n<> Hxim, f» •iOT;
Pertz Neues arch., I, -iiO, et celles que les Hollandistes ont publiées , Acl. 83. Julii, III , 7:iV,
et qui ont été réimprimées dans la Palrologie de Migne , CXL , col. 54.) Ces A<rlamations de
notre manuscril nous offrent successivemenl les noms du pape Jean XL\ ( 1024-1033), de
l'empereur Henri II (tl024) et de sa femme sainte Cunégonde (•{• lO'iO) ; de Conrad, roi
des Itomains (1024-1030) et do sa femme Gisèle (f 1043); de l'arclicvéque de C<->logne, Pili-
giim (1021-103G), cl de l'évèqucde Minden, Sigeberl (1022-1036). Ce dernier est même nommé
dans une autre partie du manuscrit et qui n'est pas de la même main , el on lit c<'tte mention
dans le Prosior : « Hune codiccm ex studio Sigeberli, pra'sulis almi, — Conscriptum, Cbristo
laus ut canlelur in islo, — Aspiciat ipiisquis, rogo, verbis valdc benigiiis: — Fili Celsithroni,
dicat miserere patranli. » Il résulte do toutes ces mentions (f» 143) que noire manuscrit a
sans doute élc (en tout ou en i)arlie) exécuté entre les années 1024 el 1033. — Parch.,
2IO"'i" do hauteur sur 137 de largeur. — 226 folios. — Écriture magnifique ; manuscril
très orné. V. notamment au f» l'i4 une miniature décrite par Bcthmann (Fcrli, .-IrcAio.,
VIII, «45), etc.
Manuscrit exécuté à Minden, comme ratteslenl le nom de l'évéque Sigeberl cl l'hymne en
l'honneur de saint Gorgonius, patron de Minden (f» 85 v»); mais évidemment copié sur un
manuscril de Saint -Gall (au moins pour la plus grande partie). C'est ce que prouvent les
Tropes M /"e*<tui(a/e sancti Galli : « Hodie sanclissimi patrosi nostui anima, clioris supcr-
nis juncta, jubilai » (f» 09), et ceux en l'honneur do saint Olhmar (f» 73 ro). Cf., fo54 v», les
Versus de Uadperl ad communicandu7n , etc.
35° Vienne, Bibl. iinporialo, 1609 — Tropaire.
Le Tropaire n'occupe dans ce manuscril que cinq feuillets, mais qui ont une importance
considérable (f» 4 r»; 8 vo). Huit fêtes seulement sont ici malière ii Tr«pes : lo .Noël ; 2o saint
Jean l'Kvangéliste; 3» les saints Innocents; 4» l'Épiplinnie; 5» Pâques; 6» l'Ascension; 7o la
Pentecôte; 8» la sainte Vierge. Il n'y a la que de petits Tropes, mais qui forment, cunime
on lo voit, un tout assez com[ilet. C'est, suivant nous, le Trof>aire primitif.
Fin du ix« ou commencement du x° siècle. — Parch., ISfi sur 185""». — 60 folios.
Saint- Gall.
36» Vienne, Bibl. iin]icriale, 1845. — Tro|iaire précéilo d'un (iraduel
cl d'un Prosier, suivi d'un ï^acra mon taire el d"nn Martyrologe.
Le Tropaire, qui est en effet précédé d'un Graduel (f'« 1-42) et d'un Prosier (f» 47-
58), et suivi d'un Sacramentaire et d'un Martyrologe (f<» Cl -75), ne commence qu'au f* S8 r* :
7ncipiu>il Iropi carminutn de Nativitate Domini : llodie cantandu* ut , el ne s'étend que
jusipi'au f" 60 v». Les fêles dont l'iifiice a été iropé sont les suivantes: 1» .Nucl; 2» saint
Ktieimo ; 3» saint Jean ri-vangêlisto ; 4° les saints Innocents ; .""r» l'Lpiphanic ; C» la Purilica-
lion de la Vierge; 7» Piques; 8" la Penlecùto ; 9» saint Jcan-flnplislc ; loo jtainl Pierre;
11o saint Laurent ; 12" r.\ssompliou ; 13» la Nalivilc do la Vierge ; 1 4o la Toussaint ; 15» la
Dédicace. — Ce très polit Tropaire se subdivise in deux parties: 1» pclil» Tro|ies (M v»-
59 V"); 2» Tropes : du Kyrie (O iheos crilis, Canamus cuncli laudes (hlymnilicas ; O cun-
ctipotens genilor), suivi de trois Gtoria et du Symbole de:» Aixllrcs, etc.
Fin du XI» ou commencement du xn» siècle. — Parch. — 273 folios, 173"" sur 232"". Sli-
niatures (notamment dans le S.icramcnlaire. f» 75 cl suiv ).
Sainl-Gall.
LES THOPAIRES
133
lité scientifique; mais ce sera, à coup sûr, celle qui
donnera à tout notre livre le plus de ce sursum
37o Munich, 14083. — Tropaire précédé d'un Prosier
et accompagné d'un Graduel.
Fo 1 yoj Gloria non tropé. — « Alléluia » de sainte Marie Madeleine : » Hœc est illa
Maria, i> etc. — Fo 2 ro, Prose en l'honneur de la même sainte : « Laus tibi, Christe. » Au vo,
on lit la célèbre Supplication qui est encore chantée de nos jours, mais avec quelques va-
V>' Y
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^ÎTïKéjz.
— "■''^^ i-«B£lS»***l.-.
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Reliure des Tropaircs : du \w siècle, servant de reliure au Tropaire d'Autun
(l'.ibl. do l'Arsenal, 1169).
riantes : <i Miserere, miserere, miserere populo tuo quem redemisti, Christe, sanguine tuo,
ne in aeternum irascaris nobis. » — F» 3 r», <( Dominicales letaniœ. » Ce sont les FersKS
déjà cités : » Humili prcce, i> ci Ardua » et (( Votis supplicibus ». — F» 4 v, Dencdictio
cerei. Cest VExultel du samedi saint. — F» 7 v, Prosier ou Liber Sequenliarum attribué
à Notker. On observera que ce recueil (qui contient 71 Séquences) n'est pas le même
que celui des manuscrits de Saint-Gall, du manuscrit de Munich 14322, e'.c. etc. Remar-
quer la Prose qui a saint Emmcran pour objet : « Gaudens Ecclesia banc dieculam, etc.»
Le Prosier est, d'ailleurs, disposé ici comme dans les meilleurs manuscrits de Saint-Gall,
et la notation neumatique y est en marge. — Fo 39 ro. Graduels et Traits. — Fo Cl vo,
Prose de saint Denis: « Exultemus in ista, fratres, solemnitate, » avec un renvoi qui cor-
respond à cette note marginale : » In cœnobium istud transtulerat — Mortalium re.\ in-
virlissimus regum Arnolfus — Sanctissimi thesaurum corporis Dionisii. » La Prose elle-
même renferme les deux clausxdx suivantes : <i 0 quam felix Parisius civitas qua tanti mar-
lyris sepulta noscuntur ossa corporis, — Sed non minus Ratispona bcata, qua^, nutu su-
pero, translata nunc ossa tenet cadem ! » — Fo 63 ro, Versets alléluiatiques. — Fo 80 v",
Tropaire : a. Petits Tropes. On a intercalé dans cette série les Antiennes et Répons pour la
procession du dimanche des Rameaux et les Versus qui se chantaient durant la semaine
sainte et le jour de Pâques. On notera les » Versus in cœna Uomini ad refeclorium ca-
(loiil aiiciiiio œnvi'<!. iiiriiio ('niditr'. iio >;iiirail se
passer.
ncmli : Tellus ne rnllira. m — ]■'•> H») r» : h. CthwU Trûpcn : KyrU ' f" UtO r"), Gloria
(fo 103 V"), Sancluê (f« lOH v"), Annus ( f" 110 t-]. — V- 111 r», Offertoire» oum vtrti-
bus. — Vo 128 r", Tropcs tli; VUe Mitsa e»l <;l du Ueo gralioê.
XI» siècle. — rarchciniii. — VlH f"«. — .'{JO""» du hauteur i-ur 143""» de largeur. — Reliure
curieuse en parchemin gaufTn:.
Saint- Emmeran. C'est ce qu'altegle l'imiiorlancc donni'-e au culte de saint Kmmeran. Au
fo 98 r», on fait précéder la Prose qui lui est consacn-e d'une lettrine aussi solennelle que
pour les fcMes de Pâriucs et de la l'entecôti'. Dans li;s iMucte» du f' 'J3 r», le» mots SancU
Emmeramne sont écrits en (,'raiiilcs It-ltres. Cf. le Sancle Emmeramue , ora pro noMs du
fo 88 V», cl le Verset all<'luiali(|tii; 'le sancl') Kmmcramno du f' 70, etc.
38» Munich, Int., 14322. — Tropaire précédé d'un Prosier
cl accunijinpiié d'un (Jraduel.
l'"o 1 r», « Angelicuni carnicn secundum Gra;co3 : » Doxn en ipsistis, etc. — F» 1 v«, • Hc-
gale Carmen : « ce sont les Acclamations ou Laudet, et on leur donne ici un nom que nous
n'avons pas trouve ailleurs. Il est très évident, du reste, qu'on a voulu établir un contraste
entre VAngelictim et le Régale carmen. iJans ces Acclamations, rien de sf)écial : le» noms
cnt été effacés. — Fo 4 vo, Symbole et Sanclu» en grec. — F» 5 v», Tropcs de l'inli-ricur du
Graduel. Ces Tropcs sont do deux sortes : il y a celui de V Alléluia qui précède le Verset
alleluiatiquc cl n'est qu'une invitation à la louange, a la joie. Puis il y a relui du Verset
alloluialique lui-même. (\'oyez, au f» 10 r», le Vox ejcultalionit , et .lu f» 11 r«, le JuMius
ul palma.) — Fo 13 ro. Prose de sainte Marie Mad'leine : Laué Ixbi , Chrisie, qui et Crea-
tor. — Fo 15 ro, Préface du Liber Sequentiarum de Notker , « Cum juvenrulus essem, " etc.
— Fo 16 r«, Soquentinirc ou Prosier avec la notation neumatique sur la marge de droite,
comme dans les Tropaircs de Saint-Gall. Indépendamment d'une Prose en l'honneur de saint
Emmeran : n Gaudcns Ecclesia hanc dieculam, i- etc. (f" 32 ro), on remarquera la Prose de
saint Denis: « In natale sancti Dionisii Areopagitœ et cpiscopi sociorumque ejus : Exullemus
in isla, fratres, solcmnitalo » (fo iZ ro), qui est accompagnée dans la marge supérieure de
cette même note que nous avons déjà trouvée dans le manuscrit 1-H>i3 : •■ In crrnohium istud
Iranslulerat, n etc. La seule variante à noter dans le texte de la Prose c'est la forme /?ada«-
pona au lieu de Ralifpona du manuscrit 11083. — F» 45 r». Graduels et Traits (d'une autre
main, avec des ae plus fréquents). — F» 77 ro. Versets alléluiatiques (pour la plupart non
tropés). — F« 98 v», autres ,\cclamations : on a effacé le nom du roi des Romains; mais il
est possible de lire C[huonra]iio. En revanche, on n'a point effacé le nom de l'évéque de
Ratisbonne, qui est Gebehardxit. — Fo 10(J ro, Kyrie tropés (V. f» 102 vo, le Kyrie avec
mélodies sans paroles). — Fo 10-4 r», Gloria tropés. — Ici (f» 108 r») finit la première série
des grands Tropés, et commencent les petits : <i Incipiunt tropi in natale Domini : Hodie
cantanrlus est. » Par exception, deux ou trois grands Tropés du Kyrie (f« 108 v»; et du Oto-
ria ( fo 109 ro) ; mais, en général, on ne trouve ici que des Tropcs de l'Introil en petit nontbrc
et peu développés. — F» 118 r«, seconde série des grands Tropcs : Sanclu* tropés (f» 118 r»),
Agnus tropés (fo 119 ro). — Fo 121 ro. Offertoires cum vertibu*. — F« H7 r», n Grcfrorins
pr.Tsul meritis et nominc dignus , i> etc. C'est le célèbre éloge de saint Grégoire qui se
trouve en tête de r.\ntiphonairo. Or il ne s'agit pas ici de l'Anliphonsire, mais simplement
de ces Tropcs de l'Offertoire cum versihu» sur lesquels ni^us aurons lieu d'attirer plus
d'une fois l'attention de nos lecteurs. Nous en exjiosons ailleurs tout le mécanisme, et
un exemple ici nous suffira. Donc, la fin de l'Offertoire » avec versets ■• du second dimanche
de l'A vent se termine pnr ces mots : Jutlilia de ceelo protpexil, cl voici oc qu'en a fait le
tropistc du manuscrit 1S322 : « De ccrlo ex le, Domine, Verbum cxiit, corpus assompsit,
Virgo pcperil, nos redemil, regnum suum nobis gaudere dédit. Laudc* sibi ferte cuncti, qui
nos ubique intuendo prospexil. >• Les tropistes ont simplement placé des paroles sous les
notes grégoriennes de la vocalise du mot ca-to; mais, quoi qu'il on soit, on voit par U que
les vers sur snint Grégoire peuvent être ici considérés comme un l>cau jortiquc indi^ment
plaqué contre une pauvre maison. Les Tropcs de l'Offertoire répondent mal au • Grego-
rius pr.TSul ». Peainit in piêcem.
xi« siècle. Ce manuscrit n'est pas homogène, et ily faut voir, suivant nous, l'œuvre de plusieurs
mains. Deux scribes, à tout le moins, y ont travaillé : celui qui a écrit les Graduels (f» W r«
cl suiv.), et qui employait encore assez volontiers la notation a e, etc.; celui qui a écrit la
LES TROPAIRES 133
La Poésie religieuse dans les cloîtres des ixe-xie siècles :
tel sera le titre de cette étude destinée à compléter
plus grande partie du livre, en se servant surtout des c cédillos. La date du manuscrit
(pour la plus grande partie) semble établie par les Acclamations du f» 98, où nous lisons le
nom de l'évêque de Ratisbonne, Gebbard. Mais il y a ici plus d'une difficulté : trois Gebbard
ont successiveitient gouverné l'église de Ratisbonne : Gebbard I, mort en 1023; Gebbard 11,
mort en 1036; Gebbard 111, mort en 1060. Par bonheur, il est encore possible de lire aujour-
d'hui le nom effacé du roi des Romains qui vivait au moment de la rédaction de ce Tro-
paire : Chuonrado. Il s'agit évidemment de Conrad II (1024-1039), et notre manuscrit n'a
pu être écrit que sous l'épiscopat de Gebbard II , ou au commencement de celui de Geb-
bard m, c'esl-à-dire entre les années 1024 et 1036. — Parcliemin ; 156 folios, 283 millim.
sur 118. — Manuscrit d'une exécution très soignée.
Saint-Emmcran (comme le prouve les places données à ce saint dans le Prosicr, fo 32 r", etc.)
39» Rome, Bibl. Angelica, B, 3, 18. — Tropaire précédé
d'un calendrier, d'un comput et d'un Antiphonaire.
Le Tropaire commence au f» 184 v. Il est précédé : 1" d'un calendrier (fus 1 ro-4 r») qui,
s'étend de 1039 à 1120; 2o d'un comput fort intéressant (fo 5 r", 16 vo) ; 3o de l'Antipho-
nairede saint Grégoire per ciculum anni (fo 17 ro et suiv.). — Le Tropaire lui-même, qui
est très complet , commence à Noël et s'achève à la Saint André. Chaque fête y est munie
desesTropes, petits et grands. Ces derniers sont rares.
XI" siècle. — D'après le Calendrier cité plus haut, et qui a l'année 1039 pour point de dé-
part, on peut supposer que ce manuscrit a été exécuté en 1039, et c'est à quoi ne con-
tredisent ni l'écriture ni les miniatures. — Parch., 265 feuillets. — 252mm de hauteur ;
177mm de largeur. — Nombreuses miniatures, très grossières. Voy. en particulier celle du
fo 17 ro, qui représente la Visitation avec ce vers : « Elisabeth Régis matrem tenet ccce
percnnis. »
L'origine du Tropaire est évidemment italienne. C'est ce que prouvent les Tropes consacrés
à saint Hippolyte (qui est honoré d'un culte particulier à Rome) et à saint Cassien, qui est
le patron d'Imola (fo 247 ro); aux saints Vital et Agricola, qui sont les patrons de Bo-
logne (fo 256 ro); aux saints Synèse et Théopompe, qui sont les patrons de Modène, suf-
fragant de Bologne (fo 265 ro). Les lieux où sont spécialement honorés ces saints déterminent
la région où le Tropaire a été exécuté.
40" Rome, Vittorio-Emmanuele, 1343 — Tropaire-Prosier.
lo Grands Tropes [Kyrie, fo 1 ro-3 vo; Gloria, i° 4 ro-13 vo; Sanclus, fo 14 ro-15 vo;
Agnus Dei, fo 16 ro-17 vo). 2o Petits Tropes, suivant l'ordre de l'année liturgique, depuis
le premier dimanche de l'A vent (fo 18 v») jusqu'à la Saint-André (fo 47 r»). Rien n'est donc
plus élémentaire que le plan de ce Tropaire, qui est très nettement divisé en deux parties,
dont nous venons de donner les titres.
XI» siècle. — Parchemin, 81 feuillets; 2o8mm sur I72mm. — Lettrines dans le style du
Mont-Cassin (l'écriture n'offre pas le style de cette école et n'est pas en caractères lom-
bards). Musique sur une portée de trois lignes; barres verticales, etc.
D'après la place qui est faite dans ce Tropaire (fo 32 vo) aux saints Synèse et Théo-
pompe, patrons de la ville de Modène (dont l'évêque était suffragant de Bologne), on peut
déduire aisément la région à laquelle il convient d'attribuer ce Tropaire.
'il" Londres, British Muséum, Coltonien, Caliguln, A, XIV. — Tropaire.
Fo 1 ro, Tropaire: a. Petits Tropes, depuis Noèl jusqu'à la Dédicace (fo 36). b. Grands
Tropes : Kyrie (fo 37 r"), Gloria (fo 41 ro). — Fo 43, Prosier, depuis l'A vent : Balus
selerna indeficiens, mundi vila, etc.
xi« siècle pour les trente-six premiers feuillets; fin du xiioou commencement du xiii» siècle,
pour les feuillets 37-92. Les quatre-vingt-douze premiers folios sont les seuls qui se
rapportent à notre sujet. — Parchemin; 225 sur 730mm. — Miniatures intéressantes aux
fo» 3 vo, 20 vo, etc. Ces images sont encadrées de vers hexamètres. C'est ainsi qu'autour de
l'image de saint Etienne on lit ces quatre vers au fo 3 vo : k Florigera vita Stephanus patet
ipse levita — Albo vestitus stolaque rubente vcnustus — Palmam victricem vegetans
seseque felicem (V). — Hujus nos precibus, nos protège, Christe, rogamus. »
Origine incertaine.
136 IIISTOllîl-; l)i; LA l'CiMsiK IJTI'lîGini'I-:
celle (|iH' nous avons jadis consacrée à Vfdée religieuse
dans les chansons de geste.
hl" I^oiidrori, iSiili^li Miisciiiii , A<lil. lu.inu-if., 19768. — 1 ropaire
accompagné d'un Prosier et suivi d'un Ordo de la Semaine mainte.
Le inariuscrit roinmenco par un l'rositT notk^^ricn, cl c'csi «oulcmcnl au f» 24 qu'on
rencontre li; Tropairc suivant l'ordre de l'anni^e liturgique depuis Nool (De Satioitate Do-
mini : Ilodic salvalor inundi) jus(iu'ù la h^aint-Martin. — F« 40 v», Ordo de la scniaine
sainte. — I'» 5.'i. Second Prosier.
xi« siècle. — Pareil., HO feuillets.
Ce manuscrit n'est pas liomo^rène, el l'on observe aux f-" "Ji et M un cliaM^enionl de main.
Saint-Gall ( comme le prouve la Prose du f" 10 vo, In Natale $ancti Galli confeêtoriê.
Cf. au f" 14 vo : De nanclo Olhmaro). Une partie de ce manu'irit a /•(/; (H'culcV a .Nuy«.
Nous l'avons affirmi'; iilus haut en fondant |>rineipalemcnt notre argumentation sur le cullc
de saint (Juirin, etc.
43" Oxford, Bodléienne, iJoucc, n° 222. — Tropairc.
Le plan de ce Tropairc ressemble à cjlui d'un ^rrand nombre de ceux que nous avons dé-
crits plus haut. Les petits et les jçrands Tropcs y sont mêlés dans l'Office inlcrfxjli' df rhaquc
fôte. C'est ainsi que yiour Noël on a, d'une seule el m!'mc teneur, les Irojic» de l'Inlroii
(Quem quœrilis, fo G r" ; llodie cantandui, 0 vo) ; ceux du Kyrie ( Te, Chriele, rex, $up-
plxces, fo 7 vo); du Gloria [Par scmpiterna, f» 7 vo); du Graduel, de l'Offertoire et de la
Communion {8 V", 9 r»). — Ce Tropairc s'étend deiuiis rAvcnl('2 v») jusqu'à la Saint- André
(34 vo), avec une nouvelle série de prands Tropes : a, du Kyrie (f« 36 v») cl 6 du Gloria
(fo 42 ro), etc. Au fo 83 ro, commence le Prosier.
xi« siècle. — Parch., 207 feuillets.
Saint-Gall (?).
44» Oxford, Bodléienne, 775. — Tropairc.
En tclc, se lisent les prand^ Tropes (ceux du Kyrie, Te Chritie rex supplice*, f» 2 r<> ;
Thcoricam, fo2 ro; Kirrie, rex genilor ingenite, f- 2 vo; Paler crealor omnium, fo2 v»;
Clemens rector, fo 3 ro ; Kirrie, rex regum , Domine Deut Sabaoth, f' 3 v ; Cunclipoten*
genili)r, f» 3 vo ; Piissime rex, Kirrie, rector, f" 4 ro; Kirrie salve temperque , f« 4 vo;
Conditor Kyrrie omnium, (" "> t" \ O Pater excelse, h S vo ; Lvx et origo lucit, f" 6 r» ;
Kyrrie, rex sempiteme, huic caterve, (" C vo. — Les n petits Trop^'s » commenconl au
f" 8 ro : <i Incipiunl tropi de : dvenlu Domini .Ihcsu Chrisli : 0 bencfida luis assis protcclio
servis» (Premier dimanche de r.\venl ). L' llodie canlanduâ se lit au fo 10 v«. Sur ce manu-
scrit de la Bodléienne, V., dans VAcademy du 23 octobre itwG, une lellre très imporlanlc
de M. F. E. Warren.
Origine douteuse.
OBSEnvATiON GKNtRALF.. — 1. Lcs Tropaircs que nous venons d'énumérer ne
sont pas les seuls qui existent aujourd'hui, el il en est d'autres dont nous n'a-
vons pas encore pu utiliser le témoignage. Dom Pothier nous en signale au
mont Cassin et au presbytère de Gladbach, etc. Nous tiendrons notre liste au
courant.
11. C'est à dessein que nous n'avons pas fait figurer dans cette énumèralion
les Tropaires de la deuxième époque, tels que les niss. lat. de la Bibl. nat.
lat., 1139, 3719, etc. Nous les énumérerons ailleur.-».
CHAPITRE XI
DE CERTAINS CARACTÈRES QUI SONT COMxMUNS
AUX TROPES DE TOUS LES TEMPS
Durant les premiers temps de leur courte histoire,
les Tropes gardaient encore, vis-à-vis du texte litur-
gique, une sorte d'infériorité bien marquée. C'est ce
qu'il est facile de constater dans les Tropaires de Saint-
Gall.
Dans l'un d'eux', on a réservé au texte liturgique
le privilège des lettres capitales : c'est topique. Dans
un autre, le texte liturgique est écrit en lettres rouges,
et cet honneur n'est pas décerné aux Tropes -. C'est
plus concluant encore.
Par malheur, cette distinction si naturelle et si légi-
time ne fut pas d'assez longue durée, et l'on en vint,
comme dans les splendides volumes de Prum et d'Ech-
ternach, comme dans les Tropaires plus modestes de
Saint -Martial, à confondre partout le texte avec la
glose. Supposez un instant que certains commentaires
' Bil.l. rlc Saint-Gall, 37fi, j). 39. (V. le fac-similé de la p. 130.)
2 Bibl. de Saint-Gall, 332, p. 21.
138 IIISTOIIU': I)K I. A l'OI-;?!!-, MTfnr.inT'E
de l'Évangile soient arrivés à faire corps avec lÉvan-
ç^Wc lui-même, et vous aurez quelque idée de ce que la
liturgie eut alors à soufirir.
Cette confusion a été de natun- à impressionner
vivement les âmes pieuses du moyen âge, à en atliis-
ter quelques-unes, à en scandaliser quelques autres;
mais un trop grand nombre s'y sont laissé prendre, et
ont accepté le mélange.
C'est contre un tel état de choses que l'érudition est
en droit de protester. Nous ne cesserons de le répéter :
les Tropes sont avant tout des documents extra-litur-
(jiques et qu'on a fait, un peu par contrebande, entrer
dans les Antiphonaires et les Graduels. Quelques églises
les ont admis : l'Église, non pas.
La dévotion mal entendue (suivant nous) de cer-
tains moines les a introduits dans l'usage liturgique
de certains monastères. C'est tout; mais c'est trop
encore.
« Certains moines, » disons-nous, et « certains mo-
nastères )). C'est qu'en effet, à fort peu d'exceptions
près', les Tropes offrent ce premier caractère détre
une institution monastique. Jean Beleth la dit au
xiie siècle : Cantari soient maxime quidem a mona-
chis. Le cardinal Bona, ce liturgiste de premier ordre
et qui était remonté aux sources, est le premier qui,
fort vigoureusement, ait mis ce fait en l)onne lu-
mière : A monachis hœc addimenta originem traxisse
piito -. On ne saurait mieux dire.
' Les plus importantes sont celles qui se réfèrent au Trojviire de la cathé-
drale de Nevers (BiM. nat. lat., 9449) et au Tropaire de la cathédrale d'Autun
(Arsenal, H69).
ï Renim Uturgicaruni lihri duo, etc., p. 296. Texte déjà cité, comme le pré-
cédent.
CARACTÈRES COMMUNS A TOUS LES TROI'ES 139
y^.-^^v r- ^ / ^ y /i /J
JO !-£ CA,>r TAi^DTJ^ £5r I^OBIS
_ ^ _ / / . / / . / •/ - /t /-./>/• /J^ X^_ / y^ y
porx^'pxixi^ â^extntlem {xJoTcrrrpoTe- ^vnermun::^ inclxrr^
/ / / /i / j /-..s/ / / f . / . /. . r _^
rnxc^r'' Qvir^/î^ tfh&jfVL&r' quem-r^im mAfrnrfprcco^ i/c>ic^a
ucyci'fhrXPlf'C>iCTt:& .nohif^vn:^cx>rLLuzcbcaype^efj^ pafYîmizf •
1 1 / z^^'. j /f- . J n /) / j- / ^ j ^ /--. y. f r
jtlic £!— ntm efhcpj^rnjyreiX^zr^^etecTuffyrnTnifhx^ deiAclrœr'
/) / /'A- / / f . . F -^^■-^. . y /7 J>,,
. / / • . ./././ / r / / . / ' -
yvwroniTri conflxcuzvinem. Jetxvr^ne^ procr^^u^ttT -
TîTittm fernprx::eTrircza:^ uero confhb/èarrTnAltf deo^jy/ctri '
- / / / o / / . // /-. ///-- //*-'
JErifOCABlTlfîV.- Ptnuif^o pxmffiUifh^ni' tfOM-rtf
^ fl / A / / / . / / / - -^ r '^ yl/î "^
F >IJ5 • \uAexf Acnrrvibrif AAnvLTmAnr fê- deum • ivl A.
Trcipaircoù lo texte liturpiquc est écrit en capil;ih;s et le Tropc on miiuisculcs ( Bibl. de Saint- Uall , 376, p. 39).
— Cet Hodie canlandxis oiTre , n partir lio la lipnclO, une version
(lui ne concorUe pas avec le manuscrit iSi précédemmcnl cité (p. 62).
l'iO [IISTOIIU'; l>K LA l'OKSIE ]ATV\U\\(jVE
Les Tropes, quoi qu'on en ait dit, ne sont pas dori-
ginc romaine: car il n'est pas un livie ponlificalemont
romain qui en porte la trace authentique. J'admets que
certains papes ont pu donner quelque encouragement
à cette dévotion, mais il y a loin de là fi l'adopter
officiellement. Sous le pontificat de Paul III \ on trouve
dans le Missel romain imprimé à Lyon quelques
Tropes du Kyrie, du Sanctus et de VAgnus Dei -; mais
ces Tropes sont précédés de cette rubrique extrêmement
précieuse et dont tous les mots méritent d'être sou-
lignés : « Sequuntur devota verha super Kyrie eleyson,
Sanctus et Agnus Dei, ibi oh nonnullorum sacerdotum
pascendam devotionem posita, licet non sint de ordi-
NARio RoMAN.E EccLESLE. » Et notez quc cotto rubriquo
significative est antérieure à la grande réforme de la
liturgie romaine qui suivit le concile de Trente.
Si mince d'ailleurs qu'ait été cette tolérance du sou-
verain pontife, les liturgistes de Rome ne tardèrent pas
à se la reprocher. Dans le Missel romain approuvé par
saint Pie V, ces Tropes furent décidément supprimés
comme n'ayant pas, dit Martin Gerbert, le goût et la
saveur de l'ancienne liturgie romaine \
Non, non, les Tropes n'ont jamais été admis par
l'Église universelle : les preuves abondent et sura-
bondent.
La meilleure de toutes, ce sont les manuscrits eux-
' lo3'i-1oSn.
2 Kyrie, fous honilatis; Kyrie omnipotens genitor, etc. Ce fait n'est pas
unique , et plus d'un Missel renferme les nu-mes éléments.
3 « Tropi inler Kyrie eleison, Gloria in crcehis , Sanctus et Agnus Dei m\^eri
soliti, in Missnli lîomano jussu Pii V edito, ablati sunt. quod priscam Homanae
ecclesire liturgiam minime sapèrent. » {De Cantu et Musira sarra , I,3-'i6.) Ce-
pendant il y a certaines éditions du Missel romain postérieur,-- à saint Pie V,
et môme à Clément VIU, où l'on trouve encore les Tropes du Kyrie, mais
toujours avec la rubrique restrictive que nous avons citée plus haut.
CARACTERES COMMUNS A TOUS LES TROPES 141
mêmes. Pour mener à bonne fin le travail que nous
offrons aujourd'hui au public, nous avons dû tenir entre
nos mains et analyser une cinquantaine de Tropaires.
Sauf deux ou trois, tous sont monastiques. C'est le
cas de s'écrier pour conclure, avec un de nos meil-
leurs liturgistes : « A monachis hic mos est derivatus. »
Une seule objection, quelque peu spécieuse, pourrait
être opposée à la doctrine qui vient d'être exposée, et
il importe ici d'en tenir compte ou plutôt d'en faire
justice.
Il existe, à la suite du Liber jwntificalis , une Vie du
pape Adrien II, qui, dans un seul manuscrit, signalé
par l'abbé Lebeuf, nous offre, sur l'origine des Tropes,
des particularités qui peuvent à tout le moins passer
pour singulières K
Il n'y a que deux mots à répondre aux allégations qui
sont contenues dans ce texte dont on a exagéré l'im-
portance; deux mots, mais ils sont décisifs. Cette ré-
daction de la « Vie du pape Adrien » n'est pas l'œuvre
d'un auteur romain. Ce n'est pas une œuvre du ixe ni
du xe siècle. On en doit la contexture et la façon à
Adhemar de Chabannes, qui écrivait au xie siècle. Elle
n'a donc aucune valeur, et l'objection cesse d'être une
oljjection.
Mais même en admettant que cette rédaction fût
• Voici ce texte que nous avons dû citer ailleurs: « Adrianus papa C\TI,
sedit ann. V; natione Romanus, pâtre Julio. Hic constituit per monasteria ad
Missam niajorem, in solemnitatibus prœcipuis, non solum in Hynmo anirelico
Gloria in excelsis Deo canere hyninos interstinctos quos Laudes appellant, ve-
runi etiam in psalmis Daviticis, quos Introïtus vocant, interscrta canlica de-
cantare, quae Homani feslivas laudes, Franci tropos appellant; quod interpre-
talur fiyuntki ovnamenta in laudibus JDomini. » (V. l'abbé Duchesne, Liber
potilificalis , p. CLXxxii et ss.) Le manuscrit en question est le Parisinus 2400.
(Cf. Lebeuf, Traité hislorique et pratique sur le chant ecclésiastique, 1741,
p. 103 et ^uiv.; D. Guéranirer, TnstituHons liturgiques, 2" cdit.. 1. p. 2G6.)
14-2 iiisTOiiM': ni': la poksU'; UTUp.iiiQui-:
authentique, il n'en résulterait rien de contraire à la
thèse que nous avons soutenue.
Il y est dit qu'Adrien encoin^'igea les tropistes et les
Tropes : Hic constituit per monaderia ad Missam ma-
jorem , in solemnitatibus prœcipuis, etc. Le mot capital
est ici PKR MONASTERIA, et toute l'action du pape au-
rait consisté à autoriser le chant des Tropes dans les
seules églises monastiques, dix ou vingt ibis par an,
ù la grand'messe. Rien de plus.
Mais, encore une fois, ce texte no mérite aucune
créance, et il le faut rejeter.
Les Tropes, au reste, ont eu leur temps de vogue;
puis ils ont un jour disparu comme ils étaient venus.
La véritable liturgie ne les avait pas reçus; les véri-
tables liturgistes ne les regrettèrent pas. Mais les vieux
livres grégoriens résistèrent : ils vivront toujours.
Nous regrettons que d'éminents érudits n'aient pas
vu ces choses, et aient été jusqu'à attribuer à la Papauté
une large part dans Tinstitution des Tropes.
Le gardien de la liturgie, c'est le Pape. Il n'aurait
véritablement pas été fidèle à sa fonction, s'il avait laissé
ces nouveaux venus pénétrer dans le corps officiel de
l'Office divin.
La sentinelle aurait laissé l'ennemi pénétrer dans la
place.
Elle n'a pas manqué à son devoir : elle a veillé.
Un second caractère distinctif des Tropes est l<'ur
allure et physionomi(^ joyeuse, et c'est par là qu'ils res-
seml)lent aux « Séquences » de rAlleluia. Ils apparais-
CARACTÈRES COMMUNS A TOUS LES TROPES 143
sent toujours, dans la liturgie, comme un signe de joie.
On les interrompt, tout comme les Proses, durant les
époques de pénitence, et c'est à peine si l'on découvre
alors dans nos Tropaires quelques pauvres neumes
sans paroles.
Ce n'est pas sans raison qu'on les appelle cantilenœ
f estivales, et cette expression est juste de tout point.
Ce n'est pas sans raison que les plus anciens Tro-
paires de Saint-Gall annoncent clairement, en leur
rubrique première, que les tropi carminum sont faits
pour être chantés les jours de. fêtes, « in diversis festi-
vitatibus canendi'; » et je ne serais aucunement surpris
que les plus anciens eussent été tout spécialement com-
posés pour la fête très joyeuse de Noël, et pour la so-
lennité non moins joyeuse de l'Epiphanie, en pleine
allégresse de la crèche, des bergers et des mages.
Ce que l'on peut affirmer à coup sûr, c'est que les
Tropes de cette époque de l'année liturgique sont, à
beaucoup près, les plus nombreux dans la plupart des
Tropaires. On ne saurait, h tout le moins, leur com-
parer que ceux de Pâques et de la Dédicace.
En revanche, depuis la Chandeleur jusqu'à la Ré-
surrection, on fait un bond, et un bond qui est énorme.
C'est que la Septuagésime est venue, et avec elle les
adieux à l'Alleluia. Plus d'AUeluia, plus de joie, plus
de Tropes.
Et désormais l'on n'en entendra plus jusqu'à l'ex-
plosion de la grande joie pascale, jusqu'à ce cri so-
lennel : Salve, festa dies, toto venerabilis sevol
On ne saurait demander aux Tropes d'être aussi
1 Bibl. de Saint-Gall, 376, p. 39. Ce manuscrit est regardé par M. Weale
comme étant du x' siècle.
l/|/i IIISÏOIUK Iii-: I. \ l'OKSIK [.n CliClOl K
alléluiatiques «lue les Séquences, lesquelles sont le
propre commentaire et la glose naturelle du rnot
Alléluia. Mais ils ne sont pas loin dT-tre aussi joyeux,
et c'est d'eux, comme des Proses, (jue parle sans doute
le bon Gautier de Coincy rjui vivait sous le règne de
Philip[)e-Auguste :
Chantons, chantons, clers et clergesses,
Les délicieuses kirieles,
Les séquences plaisans et helles^
Cette règle, à la vérité, est comme toutes les autres,
et admet certaines exceptions dont il faut faire estime.
Les Tropes du A'i/ne ne sont i)as des cris d'alli'gresse;
mais on respire, dans ces chants de déprécation, cette
certaine joie que l'on éprouve à espérer le pardon de
Dieu.
Les Tropes de l'Avent * ne sentent pas l'Alleluia de la
Naissance ni celui de la Résurrection; mais, après
tout, l'Avent n'est qu'à moitié un temps de pénitence,
et l'attente du Rédempteur y donne à tous les cœurs
une joie contenue qui éclatera dans la nuit de No('I.
Le dimanche des Rameaux ^ est le premier jour de
la grande semaine de deuil; mais ce n'est pas une fête
uniquement triste, et YHosanna y retentit tout près du
Crucifige eum.
Il ne reste donc à signaler (pie les tropi lidjubres
1 Ediliuii lVu[ucl, Oui. Go7 ou Go9.
- Ms. d'Oxford, Douce. 222, f' 3 r», etc. Ces Tropes «ont rares et iraiïeclenl
guère que le |ircinier dininuche lie l'Avent, le dimanche .!</ le Icravi. Il faut.
d'ailleurs, observer qu,' le temps de l'.Vvenl a comporté des Proses (Sains
sctcnia y Reynanlcm, Qui fegis, JttbiU'itms). Ces Proses sont courtes et res-
semblent aux Tro|)es comme facture de texte et de chant.
3 Londres. Cotlonien, Calivrula, A xiv, f» 12 v; Home. Victcr- Emmanuel,
13i3, f" 28 r".
CARACTÈRES COMMUNS A TOUS LES TROPES 145
dont parle Rupert S et quelques Tropes sans paroles
dont on a égayé, mais fort rarement, les rudes austé-
rités de l'antique Carême K
Ici, comme partout, les exceptions confirment la
règle.
> « Qui, exstinctis luminaribus, in ipsis tenebris, prœcmentibus cantoribus et
choro respondente, flebili niodulatione decantantur, incipientibus a Kyrie, elei-
son. ^^ {De cUvinis Officiis, lib. V, cap. xxvii.) = Il convient ici de n'excéder
en rien, étant donné le sens très général de trophi , qui signifie cantiis, me-
lodise.
2 Bibl. de Saint-Gall, 381, p. 243, etc.
I - lU
CHAPITRE XII
DEUX PÉRIODES DANS L'HISTOIRE DES TROPES
— LEURS CARACTÈRES DISTINCTIFSi
L'histoire desTropes se divise en deux époques, dont
chacune a ses caractères propres, et que l'on peut aisé-
ment distinguer l'une de l'autre.
t ÉTAT COMPARATIF DES TROPES DE LA PREMIÈRE
ET DE LA SECONDE ÉPOQUE
I. Tropes de l'Introït. — Première époque. — L'Introït est alors interpolé
phrase par phrase, tantôt en hexamètres (type A) qui sont rarement assonan-
ces; tantôt en prose (type B). — Pour chaque Introït il existe deux, trois,
cinq, dix Tropes diirérents. Cette abondance est tellement remarquable, que
les anciens liturgistes s'y sont trompés et ont été jusqu'à regarder les Tropes
EN GÉNÉRAL commc l'intcrpolation du seul Introït. C'est, en réalité, la partie de
l'Office sur laquelle les anciens tropistes se sont le plus volontiers exercés. =
Deuxième époque. — Les Tropes de l'Introït sont alors très rares. On les a rame-
nés au système rythmique, et l'on a principalement eu recours aux combinaisons
du septenarius trochaïque.
Pectore lauditluo decantct mysticusorrtorSu-
scepimus.
Cum te proferret Simeon senilibus iilnis In
medio.
Virgo te gremio portât queni nuindus ado-
rat Secundtim.
Nam sicul est libi virtus, honor, œtcrna po-
testas, Ha.
Omnia quae constant tua sunt, Dominator, et
indc Juslilia. (fiibl. nat. lat., 112Û, f" 3, vo.
Purification de la Vierge.)
Cantemus omnes mellifluum carnien, fi-
brarum ore psallentes : Gaudeamus. Quia
hodie sola innupta virgo Maria coeios con-
scendit, exultemus Diem. Quœ sola digna
est Regem cœli gignere et post partum virgo
innupta manere: De cujus, Cantica prœdulcia
summo Régi persolvanuis ovanter Sub ho-
nore, Benedictam conlaudantes dominam
quam universae machinœ niundi benedicunl
Etcollaudant. (Bibl. nat. I,it., lliO, fo 54 V".
Assomption.)
l/i8
HISTOIRE DE LA POKSIK fJïriMilnrE
La première de ces deux ix'riodos s'étend ciiviion
jusqu'aux années 1070-108U, et telle est aussi la fiatc
Ecce regum Hex cl lator
Lcgis, virginum amator,
Vonict cum gaudio: Ad te levavi.
Hcx , dignarc visitare
Corda, mentes, cl inundarc
Tuo cum auxilio: Vias luas.
(Ju'\ pir Flamcn obumbravil
Matrem et illurniiiavit,
Sil laus l'atri i-um l'ilio : Gloria l'alri.
Virginaliit aiila: fructu'*,
Uui de l'atris arl nos ductus
Ms regali •■olio, Ad te levavi.
[F.ngelberg, */j5, fo bH , xiv« sR-cle ; Gall-
Morul, n" 7, p. ^.)
II. Tropes du Kykie. — PniiMiÈRE ÉPOQUE. — Chacune des neuf Supplications
est alors précédée ou accompa},'née d'unTrope très court, suit en prose (type A),
soit en vers, lesquels sont presque toujours des hexamètres et qui sont rare-
ment assonances (type H). = Deuxik.me époouk. l'ius de Tropes en prose.
Les hexamètres sont rimes, et parfois on consacre deux de ces vers à chaque
«cri» liturgique (type G). On emploie volontiers le rythme au Vu-u du mètre,
et notamment le décasyllabe rythmique (type D), ou certaines combinaisons
de plusieurs rythmes (ty|)e K) qui donnent auTrope du Kyrie un développement
de jjIus en plus considérable. 11 est à peine utile d"ajoutt.'r que, durant celle
deuxième époque, tous ces vers sont strictement assujettis à la rime.
Ttieoricam praclicamquc vitam rcgcns , Ueiis
Pater, eleison. Kyrrieleison.
GeniteqiieCliriste, qui es l'atri carus, eleison,
Kyrrieleison.
Spiritusque Paracijlc, liic nobis psallcn-
tibus eleison, Kyrrie.
Vindex es in malis cl largitor boni, eleison :
Chrisle , eleison.
Tuquc (|ui, cum Paire, veriia? ciincla, Chrisle,
eleison, Chrisleleison.
Cunclorum es factor et pius adjutor, eleison,
Christe.
Eia, nunc, calcrvalim dicite nobis : Christe
eleison. Kyrrie, eleison.
IJl Dco piaceamus nus modo canenlcs eleison,
Kyrrie, eleison.
Cœlicis sulTragari gaudiis œstuans, plcbs pro-
clamai : Kyrrie.
Ul suis deiiclis indulgeal Dcus Dci Filius
El ul queal cœli gaudia adipisci , dical
eleison , eleison.
(Ribl. nal. lai., 10308, f» 12 v, 13 r".)
0 Pater exccise , sinccra mente colcnde ,
eleison. Kyrrieleison.
Ingenitus genitor, quoquc pacis amator,
eleison. Kyrrie.
Parce luis, usion, pie conditor orbi*, eleison.
Kyrrie.
Christe, Palris genite, famulorum rriniina
terg«, eleison. Christe. eleison.
C
Hex Deus œlerne, sine principio, sine fine,
Kyrie.
Ordinc qui reriim cursum facis cssc liiennn,
Kyrie.
Fons vita;, menti dans pocula le silienM',
Kyrie.
Christe , sophia Pain» et forma suae Dci-
lalj"«;
Ipsius et verbum, quod pro nobis caro fac-
Uim, Christe.
In le cum maci</a pcccati non foret uUa,
Legem sanxi8<t. lcgis sancila subi«(«, Christe.
Morle nccans morlem, dcvinccns in cruce
fortem ,
Vitam dona«/», surgens, el ad aslra IcvoiM*.
Christe.
Sacrum Spiramen, pcccatorumque levamm,
Kyrie.
Puritica mentes, procul hoslcs pelle noom-
tes : Kyrie.
l'npoquc pectora, dcslrue vincula, gaudia
doiut
In Paire Proleqiie qua juslis datur jcqua
coTona,
Ul, vitœ munia, videatur Trinus cl Unuê:
Kyrie.
(Bibl. de Sainl-Gall, 378, p. 36-2, Cf. une
autre version d'après un autre manuscrit ,
Gall-Morel , p. 57, n» W.)
?ummc Palcr, summum Principium, e.
Non nb ullo sumens exordium, e.
Crcans lucem el noctis spatium, t.
TROPES DE LA l'" ET DE LA 2'' ÉPOQUE
149
que l'on peut scientifiquement attribuer au commence-
ment de la seconde époque. Rien ne semblera plus
Purifica mentes, ceisi Patris unica proies.
Chrisle.
Ut te laudantes nitcant virtutibus onincs.
Chrisle.
Nec genitus, nec ingenilus, lu Spiritus al-
niiis, eleison. Kyrrie, leison;
Sed Patris et genitt vera communio, nostrt
eleison. Kyrrie.
Suscipe devofe clamantes, Spiritus, ad le,
eleison. Kyrrie.
(Bibl. nal. lat., 10508, fo 9 v», 10 ro).
Christe, lumen cœlestis luminis, e.
Christe, lapsi redemplor hominis, e.
Mundans noxas per partum Virginis, e.
Ab utroque Spiritus exiens, e.
Cum utroque cuncta perficiens, e.
Lux justorum nunquam deficiens , e.
(Bibl. nat. lat., 3719, fo 33 r» v».)
E
Kyrie, — Rex pic, — Da nobis hodic, — Vcniae
— Munus et gratiœ : Eleison.
Omnia — Noxia — Depelle crimina : — Tur-
pia — Deterge vitia : Eleison.
Te sine, — Domine, — Caremus lumine;
— Sustine — Pro tuo nomine : Eleison
Christe, rector pr£eclare, — Lumen singulare.
— Nos velis juvare : — Lumine — Nos tuo
protège : Eleison.
Jesu, mundi lucerna, — Tu, Salus aeterna,
— Duc nos ad superna — Gaudia; — Nos
tibi socia. Eleison.
Tu qui Patris es Verbum, — Quicquid est
superbum, — Quicquid est acerbuni , —
Remove; — Nos tuos refove : Eleison.
Kyrie, Spiritus — Sacer, Paraclitus, —
Assis non invitus, — Cœlitus — Nobis
exhibitus : Eleison.
0 rex clementiae , — Ignis justitiœ, — Nobis
. in bac die , — Prospère — Da in te gau-
dere : Eleison.
Flamen vivificans , — Mentes mundificans —
Et has inhabitans , — Gratia — Qua re-
ples omnia, eleison. Kyrie.
(Bibl. nat. lat., 1086, 21 bis \o.)
IH. Tropes du Gloria. — Première époque. — Le Gloria est alors interpolé
phrase par phrase, et ces interpolations, généralement brèves, sont tantôt en
prose (type A, Laiis tua), tantôt en vers (type B, Omnipotens pie). Nous
n'avons pas, d'ailleurs, à entrer ici dans le détail, ni à signaler les Tropes du
Gloria en distiques (Laudat in eœcelsis) ou en vers plus ou moins régulière-
ment assonances (Bex, tibi laits celsis), etc. Ce ne sont là, à vrai dire, que
des exceptions ou des raretés sur lesquelles nous aurons à nous étendre dans
le chapitre spécial consacré aux Tropes du Gloria. = Deuxième époque. — On
n'a pas écrit, à la seconde époque, de Tropes du Gloria. Ceux de la première
période ont alors continué de jouir de la faveur des monastères ou des églises
séculières. On n'a pas, en d'autres termes, éprouvé le besoin d'en composer
de nouveaux.
Gloria in exKUis Deo , el in terra pax hominibus bonx voluntatis. Laus tua, Dcus,
rcsonet coram te, Rex; laudamus te. Qui venisti propter nos, Rex angelorum, Deus, Bene-
dicimus te. In scde majeslatis tuœ, Adoramiis te. Gloriosus es, Rex Israël: in tlirono
Patris lui, Glorificamus te. Qui unus idemque es, veneranda Trinilas, Gro/ias agimus
tibi, propter magnam gloriam tuam. Propter miindum redimendum et hominom digna-
tus fuisli de cœlis in terris descendere. Domine Deus. Redemplor Israël, Qui tollis. Par-
150 IIISTOIHK l>K LA l'OKSli; I, I T T li ( i I n I ' K
clair. Mais quoi est donc IV-véncmeiit iinpoituul, au
point de vue littéraire, (|ui s'est produit en France
durant ces dix années 1070-1080?
vulus nalus in orlin, qiiani mnpniis es in poli nri-c! Qui tollxt. Orinstiiim, torrci^lrium et in-
fcrnoriiin rex , Qui scdeg. (Jiii, i)ictal(; polli^ns , (ll.•^>f•(;nllis^i ail n)i«iTi>s Qxioniavi. Omnifio-
Icns fillissimc, Vcrbimi l'alris i:t ^i-iiilc, aiixiliaro, l><im\u<'. Je tu. fllro inorUli iJominutn
indulum carne prcccniur Cum sancto Spiritu. (Bibi. nal. Iat.,11'^0, f" 83 v", 8i r», clc. elr.)
B
(imnipotnns |iie rox , qncm laiidal spiritus omni? , iMudatnu* te.
Coni[)laciiil tit)imct mortem, rox, jure pubire : Denedicitnus le.
Ablalo lelo, vitam porfundis lioncslam : Adoramus te.
Glorificant Icmct mites in tcniporc voccs : Gloriflcamxis <«.
Qui régis aclus sempcr pratantor liuniano? : Gratias.
Cœloruni sislis factor, tclluris cl aiiclor, Domine Dcus.
Es tu principium cunclariim congrue rcruni, Domine fiti.
Tu rcctor milis per saecula cuncta niancbis, Jesu.
Quem cecinil Johannes in clauso viscère niatris, Agmis.
Tu nobis aperis cœlestia régna, redemplor. Qui toUis.
Protège servorum ciementcr corda tuorum. Qui sedes.
Cuncta régis, o lu, pie rex, cl cuncta gubcrnas, Quoniam.
Poscimus ecce, paler; pcllas delicla potentcr, Jesu.
In deitatc niancns procciarus ubiqiic redemplor, Cum.
f nibl. nat. lat., Ill«, f» 71, 1120, f» 88 r» et v. ,
IV. Tropes « Hegnum ». — I'remièue lii-oyiE. — Ce Trope n'est, comme on le
verra plus loin, que l'interpolation d'une phrase du Gloria: on en peut donner
le type ci-dessous. ^ Seconde époque. — A la seconde époque, ce Trope a
complètement disparu.
Regnum tuum solidum, — o summe Bone, prolem tuam qui, indutam corpore, — nostra
salute, crucifixam dcvexisli in .\rce. — Ab omni nos, pie, delue crimine, — ei fac cum eo
resurgere, — ut potens es in œternum.
(Bibl. nat. lat., 1120, f» %roet v». Le manuscrit nous donne les leçons piœ, deliue,elc.).
V. Tropes des Acclamations (Litaniœ ou Laudes). — Première époque. —
Ce n'est pas sans une très vive hésitation que nuu> nous hasardons à voir dans
la pièce suivante une amplification, une interpolation, un Trope du Chrislus
vincit. Il nous semble cependant qu'il faut, à tout le moins, y voir une addi-
tion qui, TRÈS anciennement, a été faite aux Litanix, et nous ne voulons point
nous enciraper plus avant ;
Auxilium nosirum, Christus vincil. Forlitudo nostra, Cliristu» vincit. Prudcntia cl tcm-
perantia nostra, Christus vincil. Liberalio et rcdemplio nostra, Christus vincil. Murus
noster inexpugnabilis , Christus vincit. Victoria nostra, Christus vincit. Dcfcnsio et rialtatio
nostra, Christus vincit. Ipsi soli imperiuni, gloria et poicstas por infinila sccula sœculorum.
Amen. Ipsi soli laus, honor et jubilatio per infinila s.TCula sœculoruni. .\nicn. Ipsi soli vir-
lus et fortiludo et Victoria ])er omnia ssecula sœculorum.
Christus vincit, Chrislus rcgnat, Christus imperal (Iri6u* vicibu*].
Christc, audi nos.
Kyrie, eleison. Chrisle, eleison. Kyrie, eleison. {Lilaniir anonymi cujutdam palrit Sancti
Gain, publiée par Canisius, d'après un nis. de Saint-Ciall cl reproduites dans la Patrolo-
gie, LXXXVII, col. 31.)
Le manuscrit dont il est ici question n'est autre que le ms. 331 (p. 5). Dans
le curieux Tropaire d'Autun (Bibl. de l'Arsenal. 116U, f" 22 v) on retrouve ce
même dcvelopj>ement des Laudes, avec quelques variantes et quelques Accla-
TROPES DE LA V° ET DE LA 2° EPOQUE
151
Cet événement, c'est le triomphe de la rime, qui
pénètre alors presque tous les mètres, presque tous les
rythmes de la versification latine.
mations de plus, au début : Rex regum, Christus vincit, Christus re(jnat. —
Gloria nostra, Christus vincit, Christus régnât. — Misericordia nostra, Chri-
stus vincit, Christus régnât. — Spes nostra, Christus vincit, [Christus régnât],
— Auxilium nostrum, etc. Ces mêmes amplifications sont soudées au Christus
vincit dans un certain nombre d'autres Tropaires. Encore une fois, ce ne sont
pas là, d'une façon assurée, des Tropes proprement dits. =^ Deuxième époque.
— Rien.
VI. Tropes de l'Epître. — Première époque. — Les Epîtres sont , à la pre-
mière époque, interpolées en prose, avec « prologues » et « finales » en clau-
sulse ou en vers rythmiques assonances (type A). = Deuxième époque. — Les
Épîtres tropées deviennent rares; elles sont alors interpolées en vers rimes
(type B). 11 est bien connu qu'on a été jusqu'à les farcir en roman. V. no-
tamment Revue des langues romanes, II, p. 133, etc. etc.
A B
Epistola in feslo sanctorum hinoccntium.
Omnis Chrisli actio
Nostra sit instrucU'o/
Ergo pangat haec \ectio
Quae sit Joliannis visio.
Lcclio libri Apocalypsis Johannis apostoli.
Qui mentis vidil acic
Cœlcstis numen cur»«.
In diebus illis,
Dum quod ab œvo latuil
Per Johanncni paluil
Revelantem cœlicà
Voce evangalica,
Vidi, supra monlem Syon, Agnum stan-
tem :
Immunem ab omni peccato,
Communi sub peccato nalo.
Et cnm eo cenlum quadraginla quatuor
millia, habentcs nomen ejus , et nomen
Patris ejus scriplum in fronlibus suis,
Qui, hercdes Christi constituai,
Legcm sui calicis sunt consecuii.
Et audivi vocem de cœlo, tanquam vocam
aquarum inuUarum.
Sanctimoniam Diviniiah's
Vociferan/em
In sedeque Tiailatis
Agnum magnificaniem.
Et vocem quam audivi, sicut citharxdo-
rum citharizantium in ciiharis suis,
Quia cœlesti muncrc (vcli
j'Etcrno gaudio sunt rcplcti.
Et canlabanl quasi canticum novum ante
sedem , et anle quatuor animalia, et se
niores
Hymnum et glortani,
Salutcm et victortam.
Epistola in Natale Domini vel in
Circumcisione,
Laudcm Deo dicam per sœcula,
Qui me plasmavit in manu dextera
Et rcformavit cruce purpurea
Sanguine nati.
Ab ortu solis, orbis per ciimata,
Usque ad mundi partes occiduas.
In laude ejus clamorem excitot
Leclio Ysaiee prophètes, In qua Christi
lucida valicinatur nativitas. Haec dicit Domi-
nus Pater, Filius, sanctus Spiritus : Popu-
lus gentium Qui ambulabat in tenebris,
Quem creasti, quem fraude subdola hostis
expulit Paradiso, Vidil lucem magnam.
Fulserunt et immania , nocte média , pasto-
ribus lumina Habitantibus in regione
umbrcB mortis. Lux sempiterna et redemp-
tio vere nostra Orta est eis. 0 mira geni-
tura! 0 proies gloriosa! o stupenda nativi-
tas ! Parvidiis enim natus est nobis ,
Magnus hic erit Josus, Et Filius Patris
summi Datus est nobis Ab arce summa,
Et factus est principalus super humerum
ejus Ut cœlos régal atque arva. Et vocabi-
tur nomen ejus : Messias, Sothcr, Emma-
nuel, Sabaoth, Adonay, Admirabilis , Radix
David, Consiliarius Dci Patris qui creavit
omnia, Deus forlis , Pulchre dœmonum cas-
tra purimens tcterrima, Pater futur i sœculi ,
Rex omnipotens, Princeps pacis. Per sœ-
cula sempiterna AluUiplicabitur ejus impe-
rium, In Jérusalem, Judaca, sive et Sa-
maria; Et pacis non erit finis Hic cl in
aevum. Super soliuvi David et super re
gnum ejus sedebit, Et regni meta sui non
erit aliqua, Ut confirmet illud et corroboret
lo2
HISTOIRE DE F. A l'OKSIK I, I T nuilOIJ K
Qu'est-ce donc à proprciiuiit jiarlci- (jiic lu rime dans
les documents latins? C'est une consonance qui atteint
non seulement toute la dernière svllahe, mais encore
In fidci pignorc, In judicio el jiulitia,
.ludcx cum vcncrit judicarcsacculum. Amodo
illi dcbctur gloria , laus el juldlalio El
usque.
Scmpcr, o pic, succurre calervas
Noslrœ in laude, lîcx , lui conjuncla;,
Qui virginc in lomporc maire,
Complcxibus nalus maris absque,
Morlis dodisli prclio lua;, nos i)Ossc
Cœlicolarum inessc dignos glorifls,
Quorum vcre es in sempilernum.
(Bibl. nat. lai., 1086, fo 128 r». — Le texte
ainsi interpolé est d'Isaïc, ix , 2-7.)
A'< nemo paierai dicere canlicum , ni»i iUa
cenlum r/uadraginta qualuor millia, t/ui
empli êunl de lerra,
Quorum corj^ra , morte cruentafa ,
Sacriflcium Dco, sunt immolata.
Kl qui de terra empli
Sanguine ipsius suiil rciiempli.
lia sunl qui cum mulieribut non êuul
coinf/uinali : virgineê enim tunl.
Hii sunl qui raslitalis norem ab illcrcbris
mundi cl deliciis crebris convcrtcrunl in di-
vinitatis amorem.
Iliiècculisunl ('^\r]Agnum quocumque ieril.
Animi inlcgrilale
Perferla carilaU
Ac corfioris sinrcritale.
lia empti iunl ex hominibut , primilix
Deo el Agno;
llos sibi dcxtcra Patri*
Uelegit pugiles Ecclesiac ma(ri«;
Et in ore ipiorum non esl invenlum men-
dacium ,
Quia, gralia Dei amplcia(«,
Ipsius monilis ncqucunl cssc fruslro/t.
Sine macula enim sunt anl« Ihronum Dei.
0 dulcis conlemp<aJio,
.Miranda Tclatxo!
Slupcl nalurx rad'o
Quod Deitali* aciio
In carne sil loçalio.
Hujus a[iproba<io
Esl Agni reveiad'o.
Hinc Dei incarnaMVj
Nostra sit salvad'o. Amen.
(Bibl. de SainlCall , 382, xiii« siècle, p. 93.
— Le texte ainsi interpolé esl de VApo-
calxjpte de saint Jean, xiv, 1-5. A la
25« ligne, Divinilalit est douteux.)
VII. Tropes de l'intérieur du Graduel. — Première époque. — a. Les pro-
sulx de l'intérieur du Graduel (nous donnons à ce dernier mot le sens que nous lui
avons attribué p. H) remontent aux premiers temps de rinvention des Tropes. — b.
C'est à Saint-Gnll que l'on en a, sans doute, conçu la première idée. — r. .\.Saint-
Gall, et surtout à Saint- Martial, ils forment un groupe à part avec cou.\ de l'OITer-
toire « à versets ». — d. C'est le mot « Alléluia » qui nous permet do les dislinpuer
sur-le-champ de ces Tropes de l'OITerloire, avec lesquels ils sont presque tou-
jours mêlés en une série spéciale. — e. Les Tropes de l'intérieur du Graduel .lont
de deu.x sortes, ou, pour parler jdus net. il y en a deu.\ qu'il faut savoir distinguer
l'un de l'autre. — f. Le premier de ces deu.\ Tropes était chanté immédiatement
après cet Alléluia qui précède le Verset alléluiatique ; le second est une interpo-
lation de ce verset alléluiatique lui-même, dont il reproduit en effet el com-
mente tous les mots. — g. Nous donnerons ici comme exemple le Verset allé-
luiatique du troisième dimanche après Pâques :
Alléluia, y. Dicito gfntibxts quia Dominus regtiavit a ligno.
ÏROPES DE LA 1"= ET DE LA 2" ÉPOQUE lo3
la voyelle de la pénultième syllabe et « tout ce qui
suit cette voyelle ».
Avant la rime , les vers avaient conservé la physio-
El voici maintenant le même Verset tropé. Ici encore le tropiste n'a fait qu'ajouter
des paroles aux vocalises grégoriennes. La théorie des mélodies préexistantes trouve
son application non seulement dans les Séquences , mais dans un certain nombre
deTropes, et Ton peut aller jusqu'à dire que c'est un système prt'S(/i<e général.
Alléluia. Laudetur omnis tibi caterva a cunctis, potens qui condidisti cœlorum asira et
régnas per saecula. Dicile genlibus quia Dominus regnavit a ligno. Dicite , concuncti
et psallite in genlibus quia mngna Doniini clementia, suis respiciens ovibus, regnavit
omnia et imperavit a ligno, proprio Filio suo crucifixo qui surrexit et sedet in trono, de-
conculcalo Zabulo. (Bibl. nat. lat., 1338, fo 107 ro. Cf. 117 ro : texte détestable.)
Après quoi l'on chantait le dernier Alléluia du Graduel et la Prose.
De ces deux Tropes, le premier {Laudetur) est toujours un commentaire de
l'AUeluia ; le second {Dicite, concuncti), qui est souvent précédé de cette rubrique :
Ad versum, n'est autre chose que le Verset alléluiatique interpolé ou « farci ».
La théorie qui précède va nous aider à comprendre le sens exact de quelques
pièces fort anciennes que nous trouvons dans nos Tropaires (même dans ceux de
Saint-Gall), et qui pourraient embarrasser un jour les historiens de la liturgie. Il
s'agit notamment de cinq pièces qui sont simplement intitulées : 1° Vox exulta-
lionis; 2° In ve)'itate;3° Sicut cedrus; 4° In lomjitudineni dienun;^° Et Veri-
tas ejus. Deux de ces pièces (n« 1 et 4) sont des Tropes de l'OfTertoire, et nous
y reviendrons tout à l'heure; mais les trois autres (n« 2, 3 et 5) sont des
Tropes de l'intérieur du Graduel, et nous allons le faire voir.
1° Vox exxdtationis... in tabèrnaculis n'est autre chose que le Verset alléluia-
tique du jour de la Dédicace. Ce Verset a été particulièrement célèbre et a servi
de thème à un Trope non moins connu. Voici tout d'abord le Verset lui-même:
« Alléluia. Vox exultationis et salutis in tabernaculis justorum. » Sur la voyelle a
du mot tabernaculis, on exécutait un jubilus ou des vocalises très étendues. Et
maintenant voici le Trope : « Vox exultationis , et salutis, et lœtse jucunditatis,
eeternœ juventutis. In tabernaculis justorum pax, [lux] jucundaque lœtitia. Gau-
dentes lœtentur omnes. Jubilant juvenes, senes, sedulo, dulcibus cantibus, in habi-
tationibus, in tabernaculis justorum. i) (Bibl. nat. lat., 1118, fo 126 \°. Cf. le ms.
de Saint-Gall, 378, p. 373, xin« siècle, qui ofTre des variantes notables.) Etc. etc.
2» 7/1 veritate. Au Graduel du mercredi des Quatre -Temps après le 3« di-
manche de l'A vent, on dit le verset suivant : « Prope est Dominus omnibus
invocantibus qui invocant eum in Veritate » (avec des vocalises, -avec un jubi-
lus fort développé sur ce dernier mot). De là la pièce intitulée: « Super jubi-
lum In veritate: Quem œthra. » (Saint-Gall, 360, p. 30; 381, pp. 493-496, etc.)
3° Sicut cedrus. C'est le Verset alléluiatique « in natale unius martyris seu
confessons ». — « Alléluia. Justus ut palma florebit, et sicut cedrus mul-
li|)licabitur. » Un long jubilus était chanté sur l'e de cedrus. Voici le Trope
qu'on avait ajouté à ce verset : « Alléluia. Et sicut liliorum candor in
gloria splendebit coram Chrislo beato, — Et ceu rosarum pulchritudo rutilât
in magno décore , — Et sicut arbor odorem — Quse vocitatur nomine ce-
drus. » (Einsiedeln, 121, x«-xr siècles, à la suite des Séquences de Not-
ker. Dans ce manuscrit, ce même Trope est accompagné de deux autres :
Omnes gentes et Lœtemur gaudiis, que Gall-Morel a imprimés avec le pré-
cédent, sans les distinguer l'un de l'autre; p. 30, n» 49.) = Deuxième
Éi'OQLE. Les prosulai « de l'intérieur du Graduel » sont alors presque uni-
i:;'i IIISÏOIHK I)K I, \ l'OKSIi: I.ITri!(i|nIJE
nomic antique : louL au plus, (Haieut-iJs sfjuiui.s à ia
loi de l'assonance. Or, l'assonance atteint seulement la
vcrsollcment abandonnées. Néanmoins, à Hainl-Gall, on en fabriquait encore,
au XIII" siècle, on vers rimes. Telle est la prosula suivante, à l'honneur de
saint Jean- Baptiste, que nous citons ici sous toutes réserves :
[AlUiluia]. Aurcolain irinam fers: a-gris fi;r incdicinam. Allcliiia. — Saiirti Johannis Hap-
listre — Coffla nfislra niundi:t [lettd'o — Kl ad ti: [lordiiral, CUriatir , — Al)<»f|uc pecoati vi7io,
— V^gua. L'l)i roKii.'i'; ciiiii j-'loria. a. — y. 'l'ilii d<rii>i, laiis, honor, |>')te«la>< , viclorta. a.
— y. Feslum recolen/es — Tui l'rœcursorig — y. El le runiilenUs — A via erron» a. —
y. Duc sine siipplicio, a. — Chorus. Absquc peccali vt7to. (tJilii. de Saint -Gall, 382,
xiii» siècle, p. 78. En lèle on lit: » Priiisquam, etc. Super Alléluia. » Le manuscrit porte :
« Et ad le, Christe, pcrducat, » cl plus loin : « Suplucioi». )
VIII. TiioPES ad ou ante scqucnliam. — Piucmière kpooi'e. — L'n Trope aphès
l'aLLEI.UIA qui l'IllîCÈDE LE VEHSET AIXÉl.UIATIQUE ; UU autre Trope IiANS CE
VERSET, et, enfin, ce vaste Trope, la Séquence, ouï vient après le dernier Allé-
luia du Graduel : c'était beaucoup, ce semble. Les Iropistes cependant ne se
sont pas tenus pour satisfaits, et ont imaginé un Trope avant i.a séquence,
ante ou ad sequentiam. Ils ont eu, du moin>, la |)udeur de le faire très court.
= La place de ce Trope est facile à déterminer. On le chantait avant le dernier
Alléluia du Graduel. = On peut se demander si ce Trojie n'est pas le même que
le Trope ad t'ersum dont nous avons parlé plus haut. La différence est sensible.
Le Trope ad version n'est autre chose que le Verset alléluialique interpolé presque
mot par mot,tropé, farci; tandis que le Trope ad sequentiam est une introduc-
tion à ce dernier Alléluia du Graduel qui va servir de thème et de préle.\te à
la Séquence. = Types duTro[)e ante sequentiam. » Ante sequencia {sic) : Christus
surrexit a mortuis, mortis confractis vinculis ; gaudentes angeli vocem in
altissimis proclamant, diccntes Alléluia. » (IJibl. nat. lat., H20, f"> 22 v«; 1240,
f" 31. Le même se trouve dans le ms. 1121, f» 13 v°, avec les mots: Ad
seq[entiam]; ce qui prouve que ad, ici, égale a«<e.) = Autre : .1'/ sequentiam.
« 0 dux Magorum, tibi sit laus, gloria, jucunditas sempiterna. .Nos quoque,
omnes dicamus : Lia. Alléluia. » (Bibl. nat. lat., 1121, f» 9 \°.) = .\u lieu des
mots ad seq., on emploie ]iarfois le mot ad prosa'jn]. Ex.: « Ad prosai m]. Christus
apostolico Martialeni culmine compsit : — Laudibus angelicis nos inde canamus
ovanter. Alléluia. » (Bibl. nat. lat., 1119, f" GO r».) Ce dernier Trope, comme
on le voit, est en vers. — Deuxième époque. — Ce Trope n'a point persisté.
IX. De la Prose ou Séquence considérée comme un Trope. — Première époque.
— Nous avons l'intention de consacrer aux Proses tout un volume de notre
Histoire de la poésie liturgique, et ne voulons indiquer ici, d'une façon très
sommaire, que les grandes lignes du sujet. = n. La corrélation évidente
entre les Proses et les Tropes a frappé les liturgistes du moyen âge, et c'est
ainsi que Guillaume Durand a pu dire : « In quibusdam ecclesiis... in quibus
neunia non dicilur,... loco jubili et neumœ tropiii et skquenti.*: de<-anlanlur. ■
{Balionale, V. cap. ii, ï? 32, édit. de Lyon, 1576, f" 216 v», 217 i-<>.) = b. Un
certain nombre de Tropes (ceux notamment du Kijrie , de l'inlérifur du Graduel,
de rOlîertoire avec versets et des répons de .Matines) ont porté le nom de prtis<T
ou de prosulx, et offrent encore une plus profonde analogie avec les Séquences.
=^c. A un grand nombre de Tropes (Introït, Kyrie, Gloria, c\.c.) on a, en outre,
appliqué le système des clausulœ, qui ont. deux par deux, le même nombre de
syllabes, les mêmes pauses, la même notation musicale. C'est une ressemblance
de plus, et qu'on n'a |)as encore ob-ervée, entre les Tropes et les Proses. = rf. Les
Proses peuvent être considérées comme les Tropes du dernier Alléluia du Gra-
TROPES DE LA V ET DE LA 2" ÉPOQUE 155
voyelle de la dernière syllabe, « sans qu'on ait à tenir
compte de la consonne ou des consonnes suivantes. »
duel. = e. Elles n'ont été à l'origine que des paroles écrites dans un but mné-
motechnique, sur les mélodies jubiliques, sur les vocalises compliquées de l'Al-
leluia, que les chanteurs ne pouvaient graver dans leur mémoire, mais qu'avec
ces paroles ils ont plus aisément retenues et plus correctement exécutées. =
f. Notker, moine de Saint- Gall,— le Notker qui, Spirltu sancto procul dubio
inspirante (Ekkehard IV; Pertz, Scriptores , II, 394), composa les premières
Proses parvenues jusqu'à nous , — naquit à Eligowe , aujourd'hui Elgg, en Tur-
govie. Il mourut dans son monastère, en 912. = g. Les mélodies employées par
Notker n'ont pas été empruntées , toutes , à des sequelie préexistantes de l'Al-
leluia : il en a composé lui-même de nouvelles ou s'est servi parfois de celles
que composaient ses contemporains. = h. Parmi les mélodies préexistantes
dont Notker s'est servi, il y en a certaines qui n'étaient pas des sequelfB ou des
queues de Y Alléluia, mais fort probablement des chants profanes, tels que:
Virrjo plomns ; Puella turhata, etc. = i. En résumé, les cinquante mélodies
de Notker peuvent être réparties en quatre groupes : 1" mélodies alléluia-
tiques préexistantes^ antiques sequelm de l'Alleluia, ou j»fe(7f plus ou moins
modifiés, avec l'indication précise du Graduel auquel ils se rapportent : Justus
ut palma; Beatus vir; Niniis honorati, etc.; 2o Mélodies alléluiatiques où il
faut voir une œuvre nouvelle de Notker ou de quelqu'un de ses contempo-
rains : elles sont généralement désignées, dans les Tropaires, par des termes
essentiellement musicaux; 3" Mélodies alléluiatiques qui ont servi pour d'autres
Séquences. C'est ainsi, par exemple, que VEia recolamus est chanté sur l'air de
VEia turma (Saint-Gall, 376, p. 322, etc. etc.); 4» Mélodies préexistantes, mais
non alléluiatiques, comme Vinjo plorans, etc. = j. Si l'on étudie le texte d'une
« notkérienne », ou Prose de la première époque, on s'apercevra tout d'abord qu'elle
est composée d'un certain nombre de paires de clausul^ ou versiculi. = k. Cet
ensemble de clausulse peut être, dans chaque Prose, précédé d'un prologue ou
entrée, Qi suivi d'une finale. = 1. Les dausulae sont, deux par deux, composées
d'un même nombre de syllabes et chantées sur les mêmes notes : « Versus se-
quentiarum bini et bini sub eodem cantu dicuntur, quia (ut plurimum) bini et
bini perrhytmos sub paribus syllabis componuntur. » (Guillaume Durand, Ratio-
nale, IV, cap. xxi, édit. de Lyon, 1574, f" 123 v».) = m. Un exemple, mieux
que toutes les définitions, fera saisir l'économie de ces Proses de la première
époque et comprendre pratiquement ce que c'est qu'une entrée, une finale, une
paire de clausulse :
SABBAT O ANTE SEPTUAGESIMAM
Prologue ou entrée. — Nostra tuba
j Regatur fortissime Dei dextra et preces audiat 1"?.
( Aure placalissima et serena : ita enim nostra l"?.
i Laus erit accepta, voce si quod canimus, canal pariter et pura conscientia. 26.
■ I Et, ut liœc possimus, omnes divina nobis semper flagitemus adosse auxilia. 26.
Illo namque sine valet mens nulla dignum sibi cogitare et medilari liuniana. 27.
Asta nobis: est via prœposita; relinquentes lalam quœ ducit ad loca tarlarca, î".
j^ l Christi vestigia scquamur clara, et non caduoa gaudia. 19.
( Hic quia est vita, illic mors atra, et sempiterna tornienta. 19.
(0 bonc Rox, pie, juste, misoricors, qui es via et janua, 20.
( Portas regni, quœsunius, nobis rcseres, diniitlasquc facinora, 20.
Finale. — Ut laudemus Nonien nunc luum atque per cuncta sœcula.
(Saint-Gall, 37G, p. 349. Les petits chiffres placés à la fin des clausulx indiquent le nombre
de syllabes dont elles sont, okux par »i;ux , composées. — Cette môme Proso se trouve,
avec de notables variantes, dans les mss. de Saint-Martial, 1118, f»» 201, 887, etc.)
loG IIISTOIHK DK I.A l'OKSlK M T I " K ( i I n T K
Mais de bons exemples vaudront mieux que le vague
ou l'obscurité de tant de définitions.
n. I>a répctilion dos clausulx n'ÉTAirrAs u'unk MÎCK8Hrri';iiiG0L'nF.U8E, et il est un
cerlain nombre de Séquences où l'on ne ji^ut en consUilfr la |)r(!;i^r'ncc.(V. liartsch,
p. 18, et le cha|iitre du iiiènie érudit intitulé : Mi'luilicH sann rt'ju'tition , \>. 20 el
suiv.) Guillaume Durand dit que lu-^ clausulx vont ut plurintuin deux {virdeux;
mais il ne dit pas souper ni nhifjue. = o. On peut signaler des Proses brèves qui
ne présentent pas de rci)Ctition de clausulœ : Jmus tibi sit (Hchubigcr, 17); Tu
rcfjnator (18); 0 quant mira (22), etc. =p. Le prologue et la finale sont quel-
quefois redoublés; d'autres fois, il n'y a ni prologue ni finale. (Barlsch, 1. c,
p. 29.) = r. Il existe quelques Proses à refrain. (liartsrh, p. 140.) = «. Les plcb
ANCIENNES Séquenccs n'étaient pas assonancées, et Nolker n'en a fait de telles
que ver.s la fin de sa vie (Bartsch, p. 130) ; mais l'habitude s'établit bientôt de les
assonancer, principalement en a (à cause du mot nlleluia). Suivant une loi qui est
jiresque générale, la consonne qui .'^uit Ta ne détruit pas l'assonance ([«otentia»/!,
salvandas, Bibl. nal. lat. ,11:32, f» 116 v° : dixera<, cognoscam, ibul., 116 r'; nuptia*,
tencbras, ib., f" 121 v"; exultai, dexlera»i, 1138, f" 37 v; vivificas, furia», ib.,
21, yo; malitiajH, ib., 22 r"; régnai, ib., 83, r», etc. etc.). = t. Les prosac do-
minicales, qui occupent dans nos Tropaires une place spéciale, ne sont pas,
comme on a pu le croire, les Proses des dimanches ordinaires, mais, d'une
fanon plus spéciale, « celles des dimanches après la l'entecôte». (Bibl. nat. lat.,
H21 ; Deusjiulex, f" 198 r"; Ornnes yentes, ibid.; Te decct Injnmus, 198 v"; In
te, Domine, speravi, 199, r»; De alléluia l'aratuni cor, 201 r"; Coacf]ualis,2flO r.
Cf. Bibl. nat. lat., 1138, f" 129 v» et suiv., f" 64 v», etc.) = r. On exécutait
les prosœ de plus d'une façon : 1° On chantait, en certaines églises, la Sequen-
lia toute seule et sans paroles d'aucune sorte : c'était le système où Ton se
montrait le plus respectueux de la véritable antiquité liturgique. — 2» On
chantait (et tel fut parmi nous le cas le plus fréquent) tolte la Sequenlia
avec TOUTE la Prose. — 3° On chantait enfin la Sequentia, la Scquela musicale
ou les vocalises de l'Alleluia, en y intercalant certains fragments de la Prose.
Un demi-chœur, en ce cas, exécutait un fragment de la Sequela » sans paroles »,
et l'autre demi-chœur lui répondait en chantant un fragment de la Scquela «avec
paroles». C'est d'ailleurs ce qui résulte très clairement d'un texte de Guillaume
Durand: « Quœdam ecclesia; pneumatizant Sequentias sine verbis, alt saltkm
AMQuos VERSUS EORUM. » {Rationalc , IV, cap. xxii,éd. de Lyon, 1574, (*l20v*.)
Ces mots de Guillaume Durand sont justifiés par la présence . en nos vieux
Tropaires, de Mélodies alléluiatiques où l'on a intercalé certains fragments des
Proses correspondantes. (Bibl. nat. lat., 887, f» 89 v»; 1087, f- 109 f; 1118,
f° 133 v»; 1121 , f» Wl V; 113'i, f" 107 r»; lI3o, f» o r*; 1137. f- 37, etc.) Ces in-
tercalalions se produisent })rincipalement dans les Séquences que l'on chante le
jour de Pâques ot les jours des grandes fêtes. — 4» On en vint, dans un cer-
tain nombre d'églises, à chanter alternativement une clausnla avec les nf'umes
el l'autre avec les paroles de la l'rose. — 5° Quand on chante toute la Prose,
elle est chantée, en certaines églises, par tout le chœur (Sequentia ab omni-
bus decantatur : Guillaume Durand, Rationale , V, cap. u, Jî 32, éd. de Lyon,
11)76, {' 267 r°); en d'autres églises, jvir deux chœurs alternativement ( Pangai
chorus Ai.TERNATiM clara modulamina : Epislolier de Besançon, Bibl. de la Pro-
pagande, Borgia, M VI, 27, f» 234). On peut enfin supposer, avec Bartsch,
que Yentrcc et la finale étaient chantées jwir tous les exécutants, el les clau-
sulw alternativement par deux demi-chœurs: l'un d>» moines, l'autre d'enfants.
— 6" Nous n'avons pas trouvé de document qui nous permette d'établir à quelle
TROPES DE LA 1'"'= ET DE LA 2'' ÉPOQUE lo7
Voici des vers assonances : « 0 Pater excelse, sin-
« cera mente colende. — Ad casum {endit quidquid na-
époque précise l'orgue a exécuté la musique d'une claimtla tandis que le chœur
chantait la clausuïa correspondante. Nous avons un texte d'Ekkehard V, qui,
dans sa Vita B. Notkeri {Acta Smictorum , t. I d'avril, p. 587), constate ce fait
important: « Jubilus quem quidam in organis jubilant; » mais, sur I'alterna-
TiON, l'argument principal est l'usage actuel, qui remonte à une époque ancienne,
mais encore indécise. — y. On a pu citer quelques Proses en langue vulgaire,
et l'exemple le plus souvent invoqué est la célèbre « cantilène de samte Eu-
lalie », où des érudits ont pu constater les mêmes lois que dans la Séquence
latine 'correspondante. Dans le manuscrit de Saint-Gall o46 (xv siècle) on lit
deux Proses allemandes : l'une (p.l) sur l'air Comjaudent angelorum; l'autre
(p. 29) sur l'air : Ave pvseclara. Mais ni la cantilène de sainte Eulalie, m les
Proses allemandes que nous venons de mentionner, n'ont été chantées, sui-
vant nous, nTCRGiQLEMENT, ct l'ou pcut les assimiler, comme emploi, aux can-
tiques actuels de nos catéchismes ou de nos missions. = ;. On a fait des not-
kériennes très tard; on en a composé de nouvelles jusqu'au xv siècle. Mais
on a conservé les anciennes plus longtemps encore, et encore aujourd'hui l'Eglise
chante le Victimm paschali laudes. = Deuxième époque. — A la place du sys-
tème des doubles dausulx, qui est le caractère de la première époque :
( 1. Nunc gémit Pharao sibi raptos plaga mortis quos afflixit vernaculos. 2«.
I 2. Nos autem referamus supremo grates Régi qui nos redemit barathro. 2ï.
on a recours alors au système de la versification rythmique. — Plusieurs vers, plu-
sieurs combinaisons rythmiques (trochaïque, ïambique, etc.) sont concurremment
employées pour remplacer l'antique clausuïa; mais la première et la meilleure de
toutes ces combinaisons consiste dans l'emploi du septenari «s trochaïque rythmique :
1. Ad honorem tuum, Christe,
Recolat Ecclesia
2. Prœcursoris et baptistœ
Tui natalitia.
dont le premier hémistiche (huit syllabes à pénultième longue) a été un jour très
heureusement redoublé : , , , .
i Sic de Juda leo fortis ,
( Fractis portis dirœ mortis,
Die surgens tertia,
( Rugiente voce Patris ,
"■ \ .\d supernae sinum malris,
Tôt revexit spolia.
C'est ainsi , c'est par ces paires de septenarii que les paires de clausulai ont
été principalement remplacées. Au besoin on triplera, on quadruplera le pre-
mier hémistiche du septenarius, et l'on obtiendra de la sorte des strophes
qui sont presque aussi variées et aussi étendues que les anciens vcrsiculi.
— Les versificateurs corrects de cette époque ont, dans le premier hémi-
stiche de ces septenarii trochaïques , accentué les syllabes impaires (1 , 3, 5, 7)
et se sont imposé la loi d'établir toujours une pause après la quatrième syllabe.
— La combinaison trochaïque n'est pas , à beaucoup près , la seule qu'aient
adoptée les prosistes et même les tropistes de la seconde époque ; ils en ont
employé vingt, trente autres que nous aurons lieu d'énumérer ailleurs. =
Nous aurons peut-être achevé de dire ce qu'il est indispensable de savoir, en
ajoutant que les Proses de la seconde époque n'ont conservé que bien irrégu-
lièrement Ventrée et la finale antiques, et que l'absence de finale est le cas
le plus fréquent. (Bartsch, p. 174.) = Pour se faire une idée juste des carac-
tères qui sont particuliers aux Proses de la seconde époque et permettent de les
158
IIISTOIHK Iti: I. A l'OKSIK LITIJUmorK
« tura creavi^. — ffiiic lacrymai manant, liinc juste
« gaudia surinant. »
distinguer nettement d'avec celles de la première^ douk allons placer en regard
deux des plus célèbres compositions du moyon âge, consacrées au mtîme sujet et
que l'on peut considérer comme les types fort exacts des deux « in-inières »:
Type d'une Prose de la 1" époque : Type d'une Prose de la 2' époque :
l'^NiUKi:. Sjiiicli Spirilus assit iiobis grali.i ,
l OuîB corda nosira sibi facial haijitn-
culum, IM.
Exfiulsis indo cunctia viliis .s|)irila-
iibus. 15.
Spirilus alnic , illustrator lionii-
num, 1*.
Horridas noslrœ mcnlis j)iirj<a tonc-
{ bras. lî.
; Anialor sancle scnsatoriim semper
\ co^^italuum , i*.
(Infunde unclioneni tuani , cicmcns ,
noslris sensibus. 16.
Tu purificator omnium flagiliorum,
Spirilus, 17.
Purifica iiostri oculuni iiiterioris lio-
minis : 17.
Ul vidcri supremus Genilor possil a
nobis, 1^.
Mundicordes quem soli cerncre pos-
sunl ocuii. la.
Prophelas lu inspirasti , ut praeconia
Christi prœcinuissent inciyla ; ïS.
Apostolos conforiasli uli Irophaeum
(Christi per lolum mundum vehe-
runt. 23.
/ Quaiido maciiiiiam per Vcrbum suum
\ fccit Deus cœli,terrae, marium, -l.
J Tu super aquas, folurus cas, numcii
\ tuum expandisli , Spirilus. -K
(Tu aiiimabus vivificandis aquas fe-
cundas; 15.
I.
II.
III.
IV.
V.
VI.
VII.
VIII
iTu aspi
mines
rando das spirilales esse lio-
IX.
Tu divisum per linguas mundum et
rilus adunasli, Domine; 19.
Idolâtras ad cullum L)ei revocas, ma-
gistrorum optinie. 19.
Ergo nos, supplicanles tibi, exaudi
propilius sancle S|)irilus, *i.
Sine quo preces omnes cass.-e credun-
tur et indignœ Uei auribus, il.
Tu qui omnium sa.Tulorum sanclos
lui numinis docuisti inslinclu am-
pleclendo, Spirilus, 30.
Ipse hodie apostolos Christi donans
nuincre insolito et cunctis inaudilo
sa;culis, 30.
Finale. Hune diem gioriosum fecisli.
(Mono, I, '2J>4, Reiuers, 1. c., p. 87, etc. etc.;
revu sur le manuscrit de Sainl-Gall, 376,
p. 373, etc.)
XI.
I
Qui jiri-KTdis ab uiroque»
Cenitorc Cenitoque
l'aritcr, l'araclilc,
Kcddc linguas éloquentes,
Fac ferventes in te mentes
Flamma tua divile.
II
Amor l'atris Filiiquc,
r*ar amborum et utriquc
Com[iar el consimilis,
Cuncta repies, cuncta foves,
Astra régis, ca-Ium movcs,
Permancns inmiobilis.
III
l.umcn carum, lumen clarum,
Internarum tenebrarum
Effugas caligincm;
Per te mundi sunt mundati;
Tu peccatum, tu pcccati
I)estrui3 rubiginem.
IV
V'eritalem notam facis
Et ostendis viam Pacis
Et iter Justitix.
Perversrifum corda vitas
Et bonorum corda dites
Munere scienliœ.
V
Te docente nil obscurum ;
Te prœsente nil impurum;
Sub tua prxsenlia
Ciloriatur mens jocunda;
Per te laeta, perte munda
Gaudet conscientia.
VI
Tu commutas cicmenta;
Per te suam sacramenla
Ilabcnt effioaciam;
Tu nooivam vim repolli».
Tu confulas et refellis
ilostium nequitiam.
VII
Quando venis
Corda lenis ;
Quando subis,
Atrx nubis
ElTugit obscuritas.
Sacer ignis,
Pcclus ignis ;
Non comburis,
Sed a ctiris
Purgas, quando visitas.
TROPES DE LA F" ET DE LA 2" ÉPOQUE lo9
Et voilà maintenant un vers rimé : « Vis cessare
metum; sed mortis sentio \etum. »
VIII XI
Mentes prius imperitas Tu qui quondam visitasti,
Et sopitas et oblitas Docuisti, confortasti
Erudis et excitas ; Timentes discipulos,
Foves linguas , formas sonum : Visitare nos digneris ;
Cor ad bonum facit pronum Nos, si placet, consoleris
A te data caritas. Et credentes populos.
IX XII
0 juvamen oppressorum, Par majestas personaruni;
0 solamen miserorum, Par potestas est earum,
Pauperum refugium, Et communis deitas;
Da conteniptum terrenorum ; Tu procedens a duobus
Ad amoreni supernorum Coœqualis es ambobus :
Trahe desiderium. In nulle disparitas.
X XIII
Consolator et fundator, Quia tantus es et talis
Habitator et amator Quantus Pater est et qualis,
Cordium liumilium, Servorum huniilitas
Pelle niala, terge sordes, Deo Patri, Filioque
Et discordes fac concordes, Redemptori , tibi quoque
Et affer prcesidium. Laudes reddat débitas !
(Adam de Saint -Victor, Œuvres poétiques , 2e édit., p. 56.)
X. Tropes « ANTE EvANGELiuM » (appelés aussi Conductus). — Les conduc-
tus étaient chantés pendant que l'on conduisait solennellement le Diacre vers
Tainbon, oîi il devait chanter l'Evangile. Ce Trope, généralement à refrain,
paraît, à première vue, une invention qui appartient à la seconde époque de
l'histoire de ces interpolations liturgiques ; mais il convient toutefois de se
rappeler que les antiques Versus ante Evangelimn , notamment ceux d'Hart-
mann : Sacrata libri doijmata (à refrain), ont été, dès le ix» siècle, la véri-
table origine des conductus. Nous donnons ci -dessous deux types très caracté-
ristiques et qui, bien qu'appartenant tous deux à l'époque de la rime, offrent
une physionomie bien différente :
Type A (Noël).
Laetitiae studeat pie noster conventus ,
Preecipue laudibus summi Régis intentus,
Cui prœsidens Artifex cœlorum virtutibus
Visibilem tcrreis se dédit obtutibus.
Chorus.
0 res alla nimis, o res mirae novitatis !
Sufficiens hominum salvationi causa,
Nascitur ex virgine quae, porta semper clausa,
Angelicae titulis discipliiiae referla,
Deo soli creditiir et signalur aperta.
Chorus.
0 res alla nimis, o res mirœ novitatis 1
Solempniis Steplianus hiis digne coaptatur;
(Juondam slomachantibus Judœis obluctavit.
Jaclibus lapidœis ad solum consternatus,
Orat, eis macula ne sit ulla reatus.
Chorus.
0 res alta nimis , o res mirœ novitatis !
100 IIISTOIHK DP, LA POKSIK LIT IJ FifilO'* H
On nous demandera peut-tîtro où nous avons i)U
trouver, pour la naissance de la rime, une date aussi
rigoureusement précise. A dix ou vingt ans près, nous
Tcxlus cvan(?clicus in nobis confirmclur,
Et scdulc bomino quœ placent o|icrelur.
Corporis ac animx sic (lc|)crit omne gravamcn ;
Cum soniore tencr clangat dcvolior : Amen.
Chonu.
0 res alla nimis, o res mirae noviialis !
(Bibl. de Sainl-Gall, 382, p. '23. Ce ms. est du xi» siècle. Il ne faut pas s'étonner d'y trou-
ver des vers rimes, puisque la rime a paru en Allemagne dès 1020 ou 1030.)
Type B (Pâques).
Unicornis caplivatur;
Aulae regum prœsentalur
Venalorum laqueo.
l'alo serpens est levalus;
Mcdicalur sauciatus
Vnncni impcrio.
n. Alléluia canite
Agno niorienli ;
Alléluia pangiln,
Allcluia proniilc
Lconi vincenti !
Pelicano vulnerato,
Vita redit pro peccato
Nece stratis misera.
Phos phœnicis est eiusta
Concremanturque velusta
Macrocosmi scelera.
R. Alléluia canite
Agno niorienli ;
Allcluia pangite,
Alléluia promite
Leoni vincenti !
Idrus intrat cocodrillum,
Extis privai, nccat illum
Vivus inde rediens.
Tris diebus dormilavit
Léo , quem rcsuscilavit
Basileos rugiens.
|{. Allcluia canite
Agno moricnti;
Alléluia panpilc.
Allcluia promitc
Lconi vincenti !
(Call-Morcl, p. 43, noTi, d'après un manuscrit d'Engelbcrg, du xiv» siècle).
Ce Conductus est d'une toute autre physionomie lilléraire que le précédent,
avec lequel il forme contraste. Il est notablement moins ancien. On voit assez
qu'il consiste en un emprunt aux Besliaires des .\ii'-.\iii' siècles.
XII. Tropes de l'Offertoire. — Première époole. — Les Tropes de l'Offer-
toire offrent, durant cette première époque, une importance exceptionnelle. 11 y
en a de deux sortes : ad Offercndam et i>ost Offertorium. Pour les Tropes ad
TROPES DE LA 1'° ET DE LA 2° ÉPOQUE 161
avons jadis indiqué, pour la France, le troisième quart
du xie siècle. D'où vient-elle? Comment? Pourquoi?
Les manuscrits sont rarement datés, et les inscrip-
Offerendam , qui sont les plus anciens et ont été pratiqués à Saint-Gall dès le
ix" siècle, il n'existe aucune difficulté, et en voici les trois types principaux :
1" Hodie Redemptor mundi ascendit cœlos, mirantes apostoli, Angélique eis locuti sunt,
dicentes : ViriGalilœi. (Bibl. nat. lat., 9i49, fo 48 ro, etc.)
2o Qui es sine principio cum Pâtre et Filio et Spiritu sancto, Fili Dci, Tiii su7it. Nobis
hodie natus de Virgine, Deus Homo ab initio, et nunc et in sœculum, Juslitia. Prxparalio.
(Bibl. nat. lat., U19, fo 6 ro).
„ „ , f Tibi soli dati, Petrc, fundamenli constanti, !•">
i° Beatus es. ! t i • ti ■ .• .• ■. i ■\ 4-
( Imbrmm nuUa vi perpcli rucnti nocuit [sic). l->
( C.œlesti donc tuti '?
l Karismatum sacrati "^
Fulgore sacre pectoris tui; lo
Sed Pater meus te cœlestis docuit Deus i'»
( Qui est persistens lux indeficienter, 12
( A quo bona sunt omnia quœque vigent. 12
( Cœlitus conlaudantes 7
\ Alque benedicentes ■?.
iQui gubernat mare, tellureni, altim résidons in cœlesti virtute ful-
gentis. 2-4
Ante Deum, Petre beale, intercessor existe plebi, comnioda poscens
cuncta. 24. (Bibl. nat. lat., 887, fo 44 vo, 45 r". Texte incorrect.)
Ce dernier Trope, appelé prosa, se compose, en efl'et, comme une notké-
rienne, de plusieurs couples de clausulss égales, et offre à l'intérieur d'autres
versets «sans verset similaire et avec musique spéciale ». Mais il y a bien plus
de difficultés pour les « Tropes 2^ost Offertorium » , qui ont été sans doute in-
ventés à Saint-Gall, comme le prouvent Vin longitudinem dierwa et VEt Ve-
ritas ejiis , attribués à Notker. Pour les bien comprendre, il faut tout d'abord
se rappeler que l'Offertoire était, a l'origine, composé de plusieurs ver-
sets, ET non d'un seul. Prcuons pour exemple l'Offertoire du second dimanche
de l'Avent, tel qu'on le lit aujourd'hui dans le Missel romain :
Deus, tu convertens vivificabis nos, et plcbs tua lœtabitur in te. Ostende nobis niiseri-
cordiam tuam , et salutare tuum da nobis.
Voici le même Offertoire « avec versets», tel qu'on le chantait primitivement:
)■. Deus, tu conversus vivificabis nos, et plebs tua leetabitur in te. Ostende nobis mise-
ricordiam tuam , et salutare tuum da nobis.
y. Benedixisti, Domine, terram tuam ; avertisti captivitatem plebi tuae.
^. Misericordia et Veritas obviaverunt sibi; Veritas de terra orta est, et Justifia de cœlo
prospexit. Ostende nobis.
Puis, enfin, voici le Trope du précédent Offertoire. On observera qu'au com-
mencement et à la fin dudit Trope, « on répète les derniers mots du dernier ver-
set de l'Offertoire liturgique, et que, le Trope fini, on reprend la seconde par-
tie du premier verset de ce même Offertoire » :
De cœlo plebem hanc miserere qui es et clemens et omnipo::ens, juste videns, juste alque
regens, et cuncta cœli juste tcrraeque disponens, qmo. JuslUia de cœlo prospexit. Os-
tende nobis. (Bibl. nat. lat., 903, fo 3o ro, etc.)
Un dernier mot est ici nécessaire. Dans l'Antiphonaire grégorien, les Offer-
toires étaient déjà très riches en vocalises, et il existait sur la dernière voyelle
du mot cœlo une suite des vocalises sur lesquelles ont été écrites plus tard les
paroles qui ont constitué notre Trope. C'est encore là une application de la
grande loi des mélodies préexistantos.
~ l — Il
162 HISTOIRE DE LA POKSIK MTl'nflIOTJE
tions funéraires n'ont parfois (Hl' rédigées qiw viii^t on
trente ans après la mort de celui qu'elles célèbrent.
Il y a f'u, d'ailleurs, plusieurs autres comljinaisons, | lusif^urs autres types
de ceTropo de rOllerloiro, et nous eu j)arlerons plus loin; mais c'est là le type
plus important, et la théorie qui iirécède va nous aider à comprendre le sens
de quelques pièces que nous trouvons dans les plus anciens Tropaires. Nous
en avons déjà parlé, au sujet des Tropes de l'intérieur du (iraduel, et ce sont
les morceaux qui sont intitulés : 1° Vox exullationis; 2° In veritale ; ii" Sicul
cednis; h" Jn longilutlineia (Uetnun; îi" Kl verilas i\jus. Les pièces 1 , 2, 3
sont des Tropes du Graduel, et les pièces 4 et tj, comme nous allons le voir,
des Tropes de roilerloire. = Jn Uimjiludinctn dienitn. L'Offertoire avec
versets de la Messe de Noël In ijalli canlu se termine ])ar ce verset, qui de-
vint |)articulièrement célèbre j)armi les musiciens de l'école de Saint- Gall :
« Mirabilis in excelsis Dominus; testimonia tua credibilia facUi sunl nimis ;
donium tuam décent sancta, Domine, in longitudinem dierum. » Or, sur la
voyelle edece dernier mot il y avait originellement à exécuter un \on\' jubilua ,
d'interminables vocalises. C'est sur cette fin d'Oiïertoire que Notker a composé
une Prosida (Saint-Gall, 381 ,xi«s., p. 496; Gall-Morel, n° 107) : « Lœtemurgau-
diis quos redemit Verbum Patris — A rçatus laqueo primi parentis Dei jussa sper-
nenlis, — Artem perhostis. heu! quando, Paradisum deserens, — Exsul venit in
exitiales rnundi istius labores. — Posthunia hinc proies omnis rueret — Nisi hanc
in carne Chrislus nalus levaret — Et firima corona vestirct, — Atque rursus in
cœlo coUoGiret. » (Cf. Sainl-Gall, 5 i6, p. 318; et surtout Einsiedein, 121, pp.o93,
î)94, sans musique.) = Et i^eritas ejiis. Ce sont les derniers mots de rOHertoire
cimi versdnts du premier dimanche après l'Epiphanie, et voici le dernier verset
de cet Oflertoire : « Laudatc nomen ejus , quoniam suavis est Dominus ; in aeternum
Misi'.ricordia ejus et usque in sajculum sœculi Veritas ejus. » Sur la syllabe tas
uwjulnlitii sans fin. C'est ce qui a fourni la matière du Trope suivant, qui n'est
autre en effet qu'un Trope de l'Offertoire : « Verilas istam salvando turmam bé-
nigne regat, sola sua misericordia interveniente, soluta pessima hostis catena
quamconteratnobispietase/us. » (Bibl. nat. lat., 9449, f<'20 r». Cf. 1338, f* 94 r*.)
Xll. Tropes du SANcras. — Première époque. — Les Tropes du Sanctus (qui
font essentiellement partie du même grouiie que ceux du Kyrie, du Gloria et de
VAgniis) ont été d'abord composés en prose. Rien n'est plus bref à l'origine
(type A) que cette interpolation, où l'on a sur-le-champ et fort naturellement
fait pénétrer l'idée de la Trinité. Peu à peu le type s'allonge (B, puis C, D), et
l'on adopte un jour l'hexamètre (K), qui est parfois assonance. = Deuxième
ÉPOQUE. — On fait subir aux Tropes du Sanctus le système des léonins rimes
intérieurement (F); puis on leur applique successivement tous les .«ystèmes
rythmiques, rasclépiadicn (G) et les autres (H, 1). On remarquera l'attribution
à saint Thomas d'Aquin d'un rythme du Sanctus.
A F
Sanclus, Dcus fortis. Sanctua Verbo nianilavit, per Verbum cun-
Sanclus , Films exceisus. cta creavil;
i-anctiis Dominus Spiritus sanctus qui re- Sanclu*. qucm sine virgo viro pnxluxerat
gnas il) Triiiitale Devs Sabaolh, etc. ordiiie miro.
(BILI. de Sainl-C.ail, 4.si, .\- siècle, p. '210.' Sanc/u»,ignisdivine, flammasconsumeruin».
Dominus Deus Sabaoth. l'ieni aunl cceii et
B
terra gloria tua.
Sanctus, antc sxcula Dcus pater. Sanctiu Dominus Patris Natique Spiritus
Sunc<us, in princi[iiocum Paire mancnsNatus. cl ipse .
TROPES DE LA 1'° ET DE LA 2*^^ ÉPOQUE
103
OÙ sont-ils? où sont les documents qui soient datés
de l'année, du mois, du jour, presque de l'heure?
Deus Sabaoth, Plenisunl cœli et lerra glo-
ria tua.
Hosanna in excelsis. Nos, cernui lui fa-
niuli, de tuo adventu gratulantes dicinius:
Benedictus qui venit in nomi7ie Domini.
(Bibl. de Saint-Gall, 37fi, p. 75.)
C
Sanctus admirabilis splendor , inaccessabi-
lisque lux, Pater Deus.
Soncfws Va rbu m quod erat in principio apud
Deuni.
Sanctus Dominus Paraclilus utriusque Spi-
ritus, Deus Sabaoth.
Pleni sunt cœli et terra gloria tua. Ho-
sanna in excelsis.
Cui omne flectitur genu, et oninis lingua pro-
clamât dicens : Benedictus qui venit i7i
nomine Domini.
(Bibl. nat. lat., 887, fo 62 vo.)
D
Sanctus, Sanctus, Sanctus, Dominus Deus
Sabaoth. Conlaudemus Dominum , eia.
Pleni sunt cœli et terra gloria tua. Onines,
tua gralia quos a morte redemisti perpétua
Morte tua, jus mortis cum principe procul-
cans, vitœ nos reparans,
Dec Patri dans carum te pro nobis pre-
tium et vivam hostiam,
Tecum nos resuscitans, lecum in cœlis collo-
cans et regni largiens consortia.
Te ergo deposcimus ut , cum Judex advene-
ris cunctorum discernere mérita ,
Nos cum Angelis et Sanctis socies, cum qui-
bus tibi canamus : Hosanna in excelsis.
Gloria, Victoria et salus œterna sit Dec no-
slro ! Benedictus qui venit in noininc
Domini. Hosanna in excelsis.
(Bibl. nat. lat., 887, fo 61 vo, 62 ro. Cf. 10508,
fo 118, qui offre des variantes importantes
avec lesquelles nous avons pu corriger le
texte précédent. La pièce est écrite en
clausulx. )
E
Sanctus, Sanctus, Sanctus, Dominus Deus
Sabaoth. Omnipotens, nostris tua da medi-
camina mortis.
Pleni sunt cœli et lerra gloria tua : Condi-
tor insignis, nam verbo cuncta creasti.
Hosanna in excelsis. Benedictus qui venit
in nomine Domini. Passim salvificet cui
nos modo psallimus omnes : Hosanna in
excelsis.
(Bibl. nat. lat., 10508, fo 118 vo.)
0 Ueus, aspice mitis et accipe vota precan-
tum. Hosanna in excelsis. Benedictus
Qui, sine delicto, crucis addictus maledicto,
qui venit in nomine Domini.
Solveque vincula, pelle pericula , solve rea-
tus. Hosanna in excelsis.
(Bibl. de Sain;-Gall,382,xiue
64.)
G
siècle.
pp.
Sanclus. Pater ingenite, creator omnium.
Este propitius choris canentium.
Sa7ictus. Verbum factus caro qui niortem
superas,
Emitte Spiritum, sicut promiseras.
Sanctus. Adsis, Paraclite, fidelibus tuis,
Ut nos illumines, dum sordes abluis.
Lux indeficiens, beata Trinitas,
Summum vere Bonum, fons, lumen,
charitas.
Procédant igitur Hebrœi pueri:
Sequantur, jubilent fidèles ceteri.
In excelsis.
(Bibl. nat. lat., 3719, 88 vo.)
H
Sanctus, fons viviis vitas,
Quo vivunt Israelitse.
Sanclus, panis adultorum,
Fidei mel, lac puerorum.
Sanctus, solamen mentis
Mundum calcare volentis.
Dominus Deus Sabaoth. Pleni sunt cœli et
terra gloria tua. Hosanna in excelsis ;
Vires énerves
Hostiles, et tua serves :
Benedictus , etc.
(Bibl. nat lat., 1086, fo 123 vo ; 3710, fo 89 vo.)
Divinum niysterium ,
Sempt'r declaratur,
El mens infidelium
Tumens excœcatur :
Firma spes credentium
Fide roboratur, etc. etc.
Attribué à saint Tiiomas d'Aquin? par le
cardinf ' ''na, Rerum liturgicarum libri
duo y édit. de 1671, p. 3i7.)
XIH.Tropes de l'Agnus Dei. — Première époque. — Ces interpolations, d'abord
en prose (type A et B), ont été de bonne lieiire soumise^^ à la lorme méti-ique
Kl'i
iiisT(tii;i; iti'i [.A l'OKsii-: i.niiu.iocK
Ces textes précieux, nous Jes avons sous la main, et
ce sont les Rouleaux des morts.
de l'hexamètre, sans assonances (C).=: Dkuxikme i'.I'ooue. — I^ rime pénètre
dans rhexamètre (D), et les rythmes rimes remplacent les mètres (E).
A
Agnus Dei, qui toUis peccala mundi, qui
sedes ad dexteram l'atris, tfolus invisiliilis
rex, Miserere nobis.
Agnus Dei, qui loUis peccala mundi. Itox
rejîuni, gaudiunion;<eluruiii,A/iserererjo6i8.
Agnus Dei, qui toUia peccala mundi. Lux
iiidi'lii'ii'iiS , pax porpclua, oniiiiiiinque re-
deinplio sancta , [ Dona nobig pacem. ]
(Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 243. Cf. 370,
p. 76, etc.)
B
D
I)aiÉielis proplietia
ijuctn pra-dixit, liunc Maria
Vir}.'0 iJeurn gcnuit.
Jam descendit ut inactctur :
riebs fidelis jocuiidctur,
Kccc Chriï-tUii sumitur.
Vilam (.'Oiiferl Apims ille
Cui canunt cliori mille :
Il Verum corpus sumite. »
Dibl. de Saint-Gall, 382, p. 54 ; d'une main
du XIV» siècle dans un manuscrit du xi«.
Cf. Mone, n°2K, I, p. 309, d'après un
autre manuscrit.)
E
Cujus in /Eg)-ptuni salval cruor Israélites,
Miserere nobis.
Qui propriae carnis dape corda fidelia dites.
[ Miserere nobis. ]
Integer, immunis, vivens cibus atqnc j)er-
cnnis, Dona nobis pacem.
(Bibl. nat. lat., lOst".. f» |-J7 vo.'i
I'nr:xiiKHF. ki'OQle. — Le Trope de la
que nous allons, pour l<i première fuis,
Qucm Jolianncs iii Jordaiio ba|ilizavil ovan?,
et diccns : Eccc Agnus Dei.
Qui gratis niodcraris cuncta som|it'r indcli-
ciens rex , Miserere nobis.
Lumen sine nocte, virlus angelorum, ma
neiis scmpcr, piissime, eia, Miserere.
Tu adc's, corona confitentium, Deus : Dona
nobis pacem..
(Bibl. nal. lat., 10508, f' 125 v<^, 126 r». )
C
Agnus Dei qui tollis peccata mundi, onini-
polens reterna Dei sapienlia, C'Iiristus, Mi-
serere nobis.
V'orum subsistens vero ('e lumine lumen.
Miserere nobis.
Optimal perpétua concedens gaudia vitœ,
Dona nobis pacem. [Ibid., f» 126 v».)
XIV. TiiOPEs DE LA Communion. —
Communion a revêtu plusieurs lurm
essayer de mettre en lumière.
1° Type simple, en forme de préface :
Corncre quod Verbum Domini merucrc, canamus. Eia. ]'iderunt omnes fines lerrx
salulare Dei noslri. (Bibl. de Saint-dall, 484, pp. lU, 20. — Noil , Messe du j 'Ur.)
iNuntii superni Christum ascendonleni super astra )polorum clara voce praediierunt : Ptal-
lile Domino qui ascendil super cœlos cœlorum. (Bibl. nal. lat., 'J449, f» 48 v. — .\scen9ion.)
2° lype simjile, en forme de finale (rare) :
Vidcrutit omnes fines ierrss salutare Dei noslri. Eia! laus tibi, Cliriste. Alléluia, eia, oie,
et eia, eia ! (Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 20. — Noël. Messe du jour.',
3" Type à double interiiolatiun :
a. Corpus quod nunc in terra siiniinius, jani sedet ad doxtoram l'atris in i-.iluni, il idco
ronsona voce Psallite [Domino qui ascendil super calos cirlorum]. Vf. Exturgal Deu*.
Date gloriam Dco nosiro, magnilicenlia et virlus ejus in nubibus. Ad orientem. Alléluia.
(Bibl. nat. lat., 1120, f» 36 ro et vo, etc. el<'. — .\scension. )
b. Dum esscnl discipuli propter mclum Jtida;orum in unum congreirali, factu* est rtpenlt
de coelo sonus, lanquam advenienlis spiritus veliementit ubi erant sedente*. .itleluia.
Et apparuerunt eis dispertilae lingux tanquani ignis, sedilque supra singulos eorinn. Et rt-
l'ieli sunl omnes Spiritu saucto , loquenle* magnolia Dei. Alléluia, Alléluia. , Ibid.,
fo 38 vo, 39 ru. — Pontorô'.e.) 11 n'est pas besoin d'observer que le Trope est iri emprunté
presque textuc^lloment aux Acle« des .ipôlres. «'ap. ii.
THOPES DE LA 1'= ET DE LA 2° EPOQUE 16S
Lorsqu'une abbaye avait perdu quelques-uns de ses
frères, l'abbé faisait écrire leurs noms sur un long rou-
4" Type à double interpolation et avec le Gloria Patri :
Félix qui potuit promissum cernere Cliristum. Eesponsum accepit Simeon a Spirilu
sancio no7i visiirum se mortem , nisi videret Chtislian Domini. El venit in Spiritu in
Templum. Gloria [Patri et Filio et Spiritui sancto. Sicut erat in principio et nunc et senipcr,
et in saecula] saeculorum. Amen. (Bibl. nat. lat., 887, fo 19 ro. — Purification.)
S» Type complexe et très solennel, avec répétition de l'Antienne de la Com-
munion, un verset de psaume et le Gloria Patri :
Cœlos apertos cernens Steplianus clamavit ore henigno : Video cœlos aperlos et Jesum
slantem a dextris virliUis Dei. Intratus cœlum, beatus Steplianus ait: Video, etc. Grandino
lapidum mox morituru? , sanctus Steplianus, spe vitœ nianenlis laetabunclus , ita dicebat :
Video, etc. Positis autem genibus beatus Stephanus orabat, dicens : Domine Jesu , accipe
spiriium tneuni, et ne statuas iUis hoc peccatum. Gloria Patri... sœculorum. Anicn.
Magna est gloria ejus in salutari tuo ; gloriam et magnum decorem impones super eum.
(Ps. XX : Domine in virtute tua.) Gloria... saeculorum. Amen. (Bibl. nat. lat., 887, fo 14.)
Cf. dans le manuscrit de la Bibl. nat. lat. 909 les Prosulse de la Communion (fo 24 r» et vo).
Seconde époque. — Pas de Tropes de la Communion.
XV. Types de lTte Missa est. — Première époque. — I. Interpolations en
prose: i» type simple (A); 2° type solennel (B). — H. Interpolation en vers
(type C). =Deuxième époque. — Le Trope de Vite Missa est tombe alors en dé-
suétude et ne devient pas, comme tant d'autres, l'objet d'une rénovation rythmique.
Ite pabulo refecti dextraque Doniini benedicti, missa est.
Deo qui nos ad patriam , per mortem propriam , revocavit gralias. (Bibl. nat. lat., 887,
fo 69 ro; bibl. de Saint-Gall, 382, p. 70, partie écrite au xm» siècle, etc. etc.)
Ile sine dolo et lite. Pax vobiscum : Missa est. ^. Deo semper agite in corde gloriam et
gratias. (Bibl. de Saint-Gall, 378, p. 392, xui» siècle.)
B
Qui régis astra, corda sedula, corpora, mentes et niundum. Lux qui es tt Vita, deduc
nos in seniita recta quae ducit ad régna supera. Deinde dicat Diachonus : Ite Missa est.
Noxia crimina laxare digneris in aeternum, haec et prœniia... [sic] : Deo gralias. (Bibl. nat.
lat., 1118, fo 17 ro. Le texte porte mentis, etc. Sedula est "? pour sxcxda.)
C
lie ; sit Rex cœlestis vester protector ubique. Amen.
Omnibus atque horis vos muniat ex inimicis. Amen.
Salvos vosque regat sua quousque potentia régnât. Amen.
Nunc illi dignas simul omnes pangite laudes. Missa est.
^. Deo qui nos ad patriam, per mortem propriam, revocavit gratias/
(Bibl. de Saint-Gall, 382, p. 70; partie écrite au xni= siècle. Le Répons est en
prose, comme dans le type A.)
XVI. Tropes du Deus in adjutorium. — Prenuère époque. — Tout l'effort
des tropistes de la première époque s'étant principalement porté sur les pièces
liturçriques du Missel, il ne faut pas s'étonner que le Deus in adjutorium n'ait
alors donné lieu à aucune interpolation. = Deuxième époque. — Les tropistes
alors se donnent carrière et rythment ce Trope suivant plusieurs systèmes,
parmi lesquels il faut principalement signaler les ïambiques trimètre ou
dimètre (A, B).
Ce même Trope se retrouve, avec des variantes notables, dans im précieux
manuscrit de Saint-Martial de Limoges qui remonte au xir' siècle, et est au-
100 IllSTOIIiK ItK l,A l'fiKSli: 1. 1 T I" li ( IIQU E
leaii do parchemin qu'il adressait aux autres monastères
par un porteur spécial, par un rotuliger. Sur ce parche-
jourd'hui conservé à la Bibliotht'qiie nnlionale (lat., ll.'W, f<> ^2 r" v<>). Nous avons
emprunté à ce manuscrit la leron Natuni du second vers au lieu de Deuin, etc.
De siipcrnis affero nuntium
Naluni esse Consiliariuni ,
Deutn foricin, principem genlium.
O qiiam fesla dies !
0 lu, canlor, qui debes cancre,
Aut incipc, vel fac incipere :
Jam lenipus est psallcndi vespere:
O quam fesla dies !
Nullum, fralcr, libi sil taedium;
Rumpe moras, runi[)e silentiuni ,
El die : Deu» in adjutorium.
0 quam festa dies !
(Engelberg, */î5r ^°^'-> xiv» siècle; Gall-Morel, n- 104.)
XVII. TrOPES du RtPONS DE NoEL « DESCENDIT » ET QCI SONT CONNUS SOUS LE
NOM DE « Fabrice mundi ». — Première éi'OQue. — Le troisième ou le quatrième
répons du troisième Nocturne de Noël était, en certaines éelises, le suivant : <' De.—
cendit de cœlis missus ab arce l'atris. Introïvit, per aurem Virginis, in retrionom
nostram, indutus stola purpurea. Et e.xivit per auroam portam, lu.x et decus
universœ fabricas mundi. » (Bibl. nat. lat., 17296, f* 21 v°; nouv. acq., 1233,
f° 19 y». Cf. 99'i9, fo 5 r", etc. etc.) C'est sur les deux derniers mots de cet étrange
répons qu'on a, dès le ix» siècle sans doute, compo.sé un Trope appelé à une
singulière fortune, qui a reçu parfois le nom de prosa (Nouv. acq., 1535,
fo 19 V"), et que l'on trouve enfin dans un nombre considérable de manuscrits.
{Super jubihwi Fabrirse, Saint-Gall, 360, p. 30; 380, p. 116, etc.) Les mots
fahricsd mundi étaient liés primitivement à un chant très simjile. Amalaire [De
Ordine antiphonarii , cap. xviii) raconte comment on a substitué aux notes pri-
mitives des traits mélodiques sur lesquels on a plus tard écrit des paroles. Ce
Trope a été fort j>rubabiement inventé à Saint-Gall par un notkérien, peut-être
par Notker lui-même, en même temps que les Tropes de l'intérieur du Graduel
( Vox e.vidtalionis , In verilate^Sicut cedrus)el en même temps aussi, sans doute,
que les Tropes de l'Offertoire avec versets (In lomjitudinem dicrunt , Et veritas
ejus). Il y a entre ces diverses compositions une corrélation évidente. ( Bibl. nat.
lat., 1084, f»» 7 r°, 9 r°, etc.)= De Saint-Gall, les Fabricae mundi ont été trans-
portés en d'autres monastères; mais ils ont surtout prospéré à ."^aint- Martial
(Bibl. nat. lat., 1084, 1. c; 1118, 1° 117 v et suiv., etc.1, comme au«si à .Nevers
(9443, fo i) r») et à Kleury-sur- Loire (.Nouv. acq., 1235, f'29 v*).— Il y avait
des Fabri((c majores (Fac, Domine Deus, Bibl. nat. lat., 1118. f« 118 r* et v»)
et des Fabricœ ))ùnores (Felicia angclorum , ibid., f" 118 v-"). Mais ce qu'il im-
porte le plus de connaître, c'est le type primitif des Tropes du Fabriae mutuii.
l" Auscultate, onincs ubique fidèles :
Propagator nosler et Auctor aeternus,
Dolens malc nosmcl pcriisse
Et patria lonpe exsulasse ,
CoîElernum sibi filiuni misil ut eriperct homincni.
Idcirco jubilel Domino circus universalis fabriox mundi...
(Saint-Gall, 380, p. 116; 360, p. 30.)
2o Prosa. Familiam cuslodi, Cliriste, tuam, quam, nalus aima de Virginc, redcmisti morte
tua, ut cofrnoscal te ronditorem fabricœ mundi. dloria Patri et Filio, etc. Lux et decus uni-
vers»; fabrica; mundi! ( tMbl. nat. lai., 9Si9, f» 'o ro. Cf. nouv. acq., 1235, f»29v».;
TROPES DE LA r° ET DE LA 2° EPOQUE
167
min, les religieux de ces différentes maisons écrivaient
tour à tour les noms de leurs propres défunts , avec des
3° Fabricator extra polum conditor ex astra (sic) vegit (sic), ut desccndat splendidaque
regionis introeat gloriosus rex fabricœ mundi (1084, fo 8 r», et 1118, fo 117 v». Dans ce
dernier manuscrit, ce Trope est accolé à trois autres qui se chantaient sur le même air.
— Le texte de ces Tropes, en ces différents manuscrits, est toujours défectueux et sou-
vent incompréhensible. )
Quant au répon?, Descendit , qui avait donné lieu aux Tropes Fahricsc mundi,
il a un jour blessé certaines susceptibilités et délicatesses peut-être exces-
sives. En de certaines églises on prit le parti de troper à sa place un autre
répons, le Conditor mundi (Oxford, Douce, 222, f° 3 v°, etc.), dont l'exécu-
tion très solennelle précédait immédiatement la Messe de minuit. En certaines
autres églises on se contenta de le modilier ainsi qu'il suit : « Descendit de cœlis
Deus verus a Pâtre genitus. Introïvit in uturum Virginis, nobis ut appareret visibi-
lis, indutus carne humana, protoparente édita, et exivit per clausam portam,
Deus et homo, lux et vita, creator mundi. » (Bibl. nat. lat. , 1410, fo24, et 1411,
f° 23.) Enfin le Descenc/zï disparut complètement. = Deuxième époque. — Durant
la seconde époque de l'histoire des Tropes, Xd Fabricie «îUMrfi disparaît, lui aussi,
en même temps que le répons qui lui avait servi de prétexte ou d'excuse.
XVIII. Tropes des répons autres que le « Fabrice mundi ».
Première époque. — Ces interpola-
tions, assez rares, sont toujours en
prose. C'est ainsi que le célèbre répons
des Matines de Noël : Sancta et im-
maculata Virginitas, quibuste laudibus
efferam nescio, quia quemcœli capere
non poterant , tuo rjremio contulisti, a
donné lieu au Trope, à la prosa suivante
qui est le pendant du Fahricse mundi :
Prosa. — Beata es, Virgo, et gloriosa in-
ter omnes mulieres et benedicta. Gabriel hœc
dicens attulit affata : « Paries filium, virgo
(I intacta; Jésus erit nomen ejus cuncta per
(I sœcla. Perfecta suntinte jamque sunt perac-
« ta. I) Hodieex te Christus natusest in terra.
Ex te, mater casta, processit. Maria. Ave, spe-
ciosa in cœlis regina et benedicta, inter omnes
sancta. Laus, honor, potestas, majestas et
deilas sit Dec Palri, Nato, Spiritui sancto.
(Bibl. nat., nouv. acq., 1235, f» 19 vo.)
Cf. dans le même manuscrit (f^lOl r»)
le Trope ou la prosa du sixième répons
de saint Loup , archevêque de Sens :
Insignis de Christo , et surtout le ré-
pons ou la prosa de saint Nicolas :
« Clementem te prœbe, rex Sabaoth, Ec-
clesiœ; turbines amove tempestatesque
Sathana), pro Nicholao prcesule dans
indulgentiam " (f" 5 r° et v"), etc.
Ces prosse, comme il est facile de
s'en assurer, sont généralement conçues
selon le système des clausulœ.
Deuxième époque. — Les Tropes des
répons deviennent alors de petites
pièces lyriques soumises au rythme et
à la rime. Le huitain suivant nous ser-
vira de premier type :
Prosula de sancto Benigno EngoUsinensi
-martyre, in fine responsorii noni:
Virginis filium quem praedicaverat ,
Pro cujus noniine tôt pœnas tuleral,
Benignus hodie ad caelos properat,
Visurus Dominum, sicut optaverat.
Robustus belliger, devictis hostibus ,
Triumphat, angelis secum ovantibus;
Psallaraus igitur plausu laetifico,
Dum martyr inclitus scandit, angelico
Comitante choro.
(Bibl. nat. lat., 3719, fo26 r». )
Ces Tropes des répons ont pris, à
Saint- Martial, une importance considé-
rable. On en jugera par le type suivant ;
Proso (après les répons d'un office rimé de
la Vierge) :
Pater per sœcula
Sponsam ad oscula
Invitât Virginem.
Adolescentula ,
Confestim credula,
Gignit propagineni.
Bes mira gcritur :
Vilibus tegiiur
Hic infans vestibus,
Quo solo tegitur
I()8 IIISTOlIîK I)K I, A l'OKSIi; \.\T\U(j\(jVi:
réflexions on prose ou en vci-s siii- lu vanit»' dos choses
humaiiKJS, sin- los vertus de leurs chers moils, sur les
prières dout ils devaient leur payer lo liihut.
Oiiii-quiii <'i)ii('i|iiiiir Matrcm et filiani
In mundi liiiibiis. Fiilcli!< iX)pulu8!
Mostis perfiiliani, AuTeral hmc molom Tranganlque prccamina
Non per irijiiriani, Prolem.
Ilio frc'il paiviilus. ''• ^* Maria, ne limcas, invcnisti, clc.
l'rcoelur Maiiani (Bibl. nat. lat., 113'J, fo 121 vo, 122 r-.;
l II troisième et ilernior type mérite de (ixer notre .ntlention. Le répons des
Saints Innocents {posl. seci(ncla>n lectionem) est acconiftapné, dans un manu-
scrit do Saint-Marlial, d'une sorte de polit drame dont il faut faire estime comme
d'un document notable dans l'histoire dos origines de notre tliôdtr.^. Je dois
ajouter que je ne suis pas absolument certain que le dialogue suivant . entre
l'Ange et Rachel, doive être considéré comme le J'rope du répons Hub allure;
mais je suis très porté û le croire, et soumets la question aux juges compé-
tents. Donc, voici le répons et son Tro] e « présumé » :
Sub allare Dci audivi voces occisorum, diccntium : « Quarc non défendis sanguincm
nostrum? i> Et acceperunl divinum responsum : <i Adliuc suslinete niodicum tcmpus, donec
iniplcatur niinicrus fralrum veslrorum. » ^. Vidi.
C'est après le mot Vidi que vient immédiatement la Lamcnlatiu JUu/tcl :
0 dulces filii, quos nunc progenui ,
Olim dicta mater, quod nomen tcnuiV
Olim per pignora vocor puerpcra :
Modo siim misera natorum \Hdua.
Heu! mihi miseree, cum possim vivere.
Cum natos coram me video perdere
Alque lacerare, parum detruncare.
Herodes impius, furore repletus,
Nimium siiperbus perdit mecs partus 1
A N G E L i- s
Noli , l^aclicl , deflere pigiiora :
Cur tristaris et lundis peclora ?
Noli flere, sed gaude potius :
Tui nati vivunt felicius.
Ergo gaude !
Sunimi Patris œterniFilius,
Hic est illc quem quxril perdere
Qui vos facit œterne vivere.
Ergo gaude ! (Ribi. nat. ial.. IK'.O, f» 32 v.)
XIX. Tropf.s avant les leçons. — PRE.Mif:RE lipoofE. — On ne connaît pas encore
ce genre d'interpolation. =^ Seconde époque. — Ces Tropes (que l'on chantait
sans doute avant la première Leçon) ont été inventés par les tropistes de la lin
du xr ou du .mi» siècle. Ce sont de petits poèmes que l'on a pu, en quelques
manuscrits, confondre avec les Benedicamus, mais qui en sont nettement dis-
tincts. Nous avons hésité, pour en donner un type, entre trois pièces égale-
ment remarquables : le Nunc clencorutn vonrio, qui se termine i>ar ces mots
signific^ntifs : Modo dicaliir leclio, et a pour refrain : Gaudeat /lonio (Bibl.
nat. lat., 1139, f" 33 v"»); VHomo gaude — Nova lande, pièce sans refrain et
qui s'achève })ar ce tercet ; Ergo lege, — Die de rege, — Lector, testimonia
ÏROPES DE LA 1'- ET DE LA 2° ÉPOQUE
169
Ces vers sont datés du jour même ou ils ont été
COMPOSÉS.
Nous les avons étudiés de près, et n'avons guère
(BibL nat. lat., 3719, f" 19 r-'-V), et
préféré aux deux autres, et dont voici
I.
Plebs Domiiii,
Hac die lœtaniini,
Et pie
Laus Virgini Mariae
Et cordibus
Et vocibus
Et actibus
Promatur !
Befr. Mariam vox, Mariam cor,
Mariani sensus, mens, vigor,
Proclament hac in die,
Et Filium Mariœ.
II.
Homo Deus est natus,
Homo Deus renalus,
Judaeus est csecatus ;
Rex servulus ,
Vas figulus,
Fons rivulus
Creatur.
Mariam vox...
Refr
m.
Rcs agitur novella :
Sol oritur de Stella,
Nec laeditur puella.
Puella est
Quae mater est.
Quod est non est
Natura.
Refr. Mariam...
IV.
Infans subest papilla;
Sed Deus est et ille;
Rex puer est ancillae
Rex aetheri?
Sub pauperis
Mulieris
Est curn.
Refr. Mariam...
enfin le Plebs Domini, que nous avons
le texte :
Sol nuncius diei,
Qui Filius est Dei,
Et radius par ei
Quo tegitur,
Detegitur.
Sit igitur
Res mira.
Refr. Mariam...
VI.
Dum gralia subvenit,
In propria rex venit;
Opprobria invenit;
Omnipotens
Fil impotens.
0 pia mens ,
Respira.
Refr. Mariam.
VII.
Hoc zabulus explorai ,
Hoc œmulus ignorât ,
Hoc angélus adorai.
Hoc omnium
Ingenium
Non nimium
Miratur.
Mariam...
Refr.
VllI.
Hoc sobrie décanta ,
Slirps graliœ , gens sancta ;
Materie de lanta ,
Cum gaudio
Fit menlio.
JaM LECTIO
Legatlr.
Refr. Mariam...
(Bibl. nat. lat., 3719, f" 40 r». Le texte porte,
au couplet VII, labulus. Nous avons , au
couplet IV, quelques doutes sur le mol pa-
piUœ. Le manuscrit semble indiquer pre-
piUe {fpupillx). Il y a d'autres difficultés.)
X\ Tropes du «Tu auïem ». - A la fin de chaque leçon, le lecteur dit : Tu
autem, Domine, miserere nobis, et on lui répond : ^'- 3^-«;;«J- ^^
Tu autem que l'on a tropé en langue romane dans un de. plu. précieux
^^nuscrits de Limoges, dans un de ces singuliers ^vres d'etud.a.Us qut n
tiennent principalement des Tropes. Il va sans dire que le Irope Tu autem a
n<» IIIST(tlHI-: DE LA l'OKSIK I. IT i: 1{ ( ;i n T K
trouvé avant 1070 les prouves manifestes «l'une intro-
duction sérieuse de la rime. On pont même ajouter
qu'il n'y a encore à cet égard rien de décisif avant 1095,
clé inventé à la seconde époque, cl on observera qu'il était chanté par le seul
lecteur :
Ue deu hoimais finir noslra razos :
Un pauc soi las, que trop fo aut lo sos.
Lcveii iloi cler, que dejcn lo rei<f>os.
Tu autem, Deu», qui est paire glorios,
Nos ti; prciam que t' rcmcnibrc de no^ ,
Quant triaras los mais d'antre los Los. (Bild. nat. lat., U3'J, f" ii ;
XXI. TiiOPEs DU « Te Deum ». — pREMiiatE époque. — G'e.*l alors, fort sim-
plement, un Trope- Préface, un Trope invil<Ttoire, qui varie suivant chaque
fête, et dont je n'ai encore constaté l'existence qu'à Saint-Gall. I£n voici le type
en vers :
De Rcsurrectione Domini. llœc est aima dies in que spolialur Avernus ; — Hesurrcxil
Homo Deus: exsultatc, redcmpti. Te Deum. (Saint-Gall, 376, p. 76. Cf. 382, pp. 71 et 73.)
Deuxième époque. — Ce Trope a été supprimé de bonne heure et n'a jamais
été ni rythmé ni rimé.
XXH.Tropes avant l'Invitatoire de Matines. — Nous n'en connaissons que
peu d'exemples. Il est d'ailleurs difficile de préciser à quelle époque se rap-
porte le Trope suivant, publié par Gall-Morel, d'après un manuscrit du
xv» siècle. Ce texte est évidemment monastique, et je nie persuade, malgré
sa rubrique, qu'on le chantait avant l'Invitatoire des très solennelles .Matines
do Pâques :
De sancla Magdelena.
Slellam Christum matutinam
Cum Maria pr.-çstolantes ;
Haec sola stat foris plorans :
Nos cum ea vigilemus ;
Ut per noclem , quem in somnis
Queerendû dilexerat,
Hune inventum, simul una,
Procidentes adoremus.
(Einsiedeln, 92, p. 2Vi; Gall-.Morel. no 483, p. 272.)
X.XIII. Tropes avant le Magniiicat. — 11 n'en existe que de la seconde
époque, et ils sont rares :
Qua; commisit fcmina
Luit mundus crimina;
Sed redcmplrix Domina,
Vitae via ,
Casta parens est Maria,
Quod leslatur Prophelia.
Ad Mariam nuncius,
TanUc roi conscius,
Venions quam citius ,
Inquit ci :
(I In te fiel Verbuni Dci :
« Sic exquiril ordo rci. "
ErgO , PSALI.ENDO CASTICIM
Hic chorus fidelium
TROPES DE LA 1'° ET DE LA 2^ EPOQUE 171
avant le rouleau de Foulques, abbé de Corbie : « 0
M major mundo , clamamus corde profu^do. »
Les épitaphes ne nous offrent également rien de
Qui est salus hominum
Corde pio,
Benedicat altissimo
Régi regum Domino.
(Saint-Gall, 383, p. 142, xiii"- siècle; Mone, ii" 313, H, p. 45.)
XXIV. Tropes des grandes Antiennes a la Vierge. — Les Antiphonœ beatse
Mariae, qui, encore aujourd'hui, sont dites in fine Officii post Completorkim ;
après Laudes, si tune discedendum sit a chovo , alioquin in fine uUimae. Horse;
ces grandes Antiennes ont donné lieu à des Troiies de la seconde époque,
dont nous donnons ici le type :
Salve Regina. O flos virgiiiitatis ,
Candor caslitatis ,
Vena pietalis.
Nos junge bealis.
0 spes peccatoruni,
Mater orphanorum ,
Nobis regem cœloruni
Plaça et angeloruni.
0 Maria, virga Jesse,
Te precamur, ut interesse
In extremis, nec abesse
Velis , mater glo'riœ.
Virgo, parens Chrisli, paritura Deum genuisti.
Uum paris et gaudes, tibi canunt agmina laudes. 0 pia.
Fulgida Stella maris, nos protège, nos tuearis. 0 dulcis Maria.
(Engelberg, n" V25, f° 51. — Gall Morel, no 166, p. 101. Cf. les Tropes sur l'Aima redcmp-
toris, il)., no 204; sur VAve regina, no208', etc. etc.).
XXV. Tropes du « Benedicamus Domino». — Première époque. — Cette inter-
polation, une des plus importantes de nos Tropaires, n'a pas été, comme on l'a
cru, une invention des tropistes de la seconde époque. Dès la première on avait
jugé nécessaire de Iroipev ce Benedicamus Domino et ce Deo dicamus cjratias qui
terminent toutes les Heures canoniales, sauf Matines; ce Benedicamus , disons-
nous, dont le chant est surtout solennel après Laudes et après Vêpres, comme
aussi (par une exception unique dans l'année liturgique) après les Matines de
Noël. — Rien n'est plus simple ni plus href que les plus anciens Tropes du Bene-
dicamus. Ils sont en vers (type A) ou, plus souvent, en prose (B et C). =
Deuxième époque. — Les Tropes du Benedicamus prennent alors une importance
considérable et se changent en petites pièces oîi l'on conserve d'abord l'asso-
nance (D),mais où la rime pénètre bientôt en victorieuse (E, F).Ils deviennent
innombrables, ils envahissent tout, il y en a pour toutes les fêtes, et nous pou-
vons prendre ici pour type le Benedicamus sanctse Marisa (G). Certains se chan-
tent à deux parties (H). 11 convient d'ajouter, à un autre point de vue, qu'on
peut les diviser en deux groupes, suivant que l'on trope à la fois (A, B, C, E)
le Benedicamus Domino et le Deo dicamus gratias (ce qui est le plus ancien
système), ou qu'on interpole le seul Benedicamus (D, F, G, H). Bref, les Benedi-
camus deviennent en quelque sorte toute une littérature, et ils partagent, avec
17 2
iiiSToiin-: iti: i, \ poksii: uTinriinri-:
définitif avant 1077 : « Hic jacet X'mardus, redolons
ut pistica nardus. » Mais, depuis lors, ow a marché, et
la linu' a abusé de son triomphe.
Eh l)i('n! c'est également vei's l;i lin du \ie siècle
qu'il faut i)lacer la limite enti-e les deux p/riodes de
cette histoire des Tropcs.
Il s'agit maintenant de [)réciser lucidement les carac-
tères de ces Tropes durant chacune de ces deux phases.
lesProscsdela secundc époque, le triste liuimciir irnvuirili.iiné ii;iis>.Tiire à la poéfie
goliardique.
A
Benedicamrts Domino De supcro qui nos
solio henedical in hymno.
Dca (jralias innumcras, pie, crcdulitas ferai
vcncranda.
(BiM. nat. lat., 887, fo f,Y, yo.)
B
Odas débitas nempe solvaniu? tilii,agie,
rex optinie. nosterquc cliorus rcsultet in
allis, cia : Benedicatnus Domino.
Deo rhytmica dicamus cantica jugiter in
hac ailla, vocis in jubilo, quae nostra concio
canatani laHa. Pcmpertibi, rex, gralias!
{ Bibl. nat. lat., 887, fo '15 v».)
Benedicamus Domino, Deo gralias.
Benedicamus Domino.
Angélus sedens ad scpulcrum, et ccce 1res
niulieres qua; qua?rebanl Dominum.
Dei angélus dixit mulieribus : u Quem qua;-
ritis? Jesum Nazarcnum ? Surrexit; non
est hic. Gralias ! »
Benedicamus Domino, Deo dicamus gra-
lias ( trois fois).
Benedicamus Domino [deux fois).
Alléluia, alléluia.
Benedicamus Domino !
(liibl. nat. lat., 1139, fo 62 r".)
D
Itex omnia tcnens imperio,
Mac in die, labentc saeculo,
Egrcssus est de niatris utero
Sponsus uti fulgcns de tlialamo.
Kl quasi sol surgens dilueulo
Dansque lueeni ubique radio;
Sic, prœdietum uro proplietico,
Exortum est lumen in populo.
Nos igitur, voce? in jubilo,
Benedicamus corde Domino.'
(Bibl. nat. lat., 3"1'J, 7.". r». :
6 V.
l'atholicorum concio summo, sumnio, summo
cum gnudio.
In hoc sacro solempnio solval, solvat, solval
laudes Deo !
Puro corde et animo bene Benedicamut Do-
mino.
Laudifluas atque pias Deo, Deo dicamus gra-
liaf. {Bibl. nat. lat., 1139, f» 44 v».)
F
Mundus ovans replctur gaudio,
.\gni Dei quem immolatio
Expiavit ab .\da; vitio.
Non merili?, sed sola gralia,
Infernoruni abstulit spolia :
Tulil Christus crucis supplicia.
Infernorum abstulit spolia
Et surrexit in die tertia.
Mors illius est rcsurrectio:
Nos rcddidit cœli palatio.
Bcnedicant redenipti Domino.
(Bibl. nat. Int.. 3719, fo Jt v.
G
Benedicamus sanct» .Varir.
Jubilemus,
Exultcmus,
Intonomu»
Cantirum
TROPES DE LA 1>° ET DE LA 2" ÉPOQUE 173
Les Tropes de la première époque sont tantôt en
vers S tantôt en prose-; ceux de la seconde, sauf des
exceptions très rares, sont toujours en vers.
Redemptori, Cum ingenti gaudio
Plasmatori, Conlaudantes,
Salvalon Exultantes
*^"^"'"'"- Benedicamus Domino.'
Hoc natali (Bibl. nat. lat., 1139, fo 41.)
Salutari
Omnis nostra H
'^"'■"^"''» Virga Jesse noruit,
Deum laudal : g^^^^ ^^^^^^ ^^^^^.^
S'I^i Plaudat Plog „ojjig eondoluit
P^f «=tf "^ Dura in ligno marcuit.
Saecula.
r, ■ , ,• Sol in alvo Virginis
Qui hodie „ . . °. .
DeMariœ Expers vm seminis,
,T, „ ,. Tulit quod est lioniinis
Utero progrediens , c„.„,l ..... ^,.,„,;.,.v
Servans esse Numinis.
Benedicamus Domino.
Homo vivus
Rex atque herus
In terris apparuit. (Avec des vocalises interminables sur la
Tam beatum , voyelle o, Bibl. nat. lat., 3719, fo 45 r»,
Virgo, natum 46 vo.)
1 II y a peu de Tropes en vers dans les manuscrits de Saint-GalL Quant aux
Tropes rimes, la plupart sont d'origine française (bien que la rime ait paru on
Allemagne cinquante ans plus tôt qu'en France ).
2 Un certain nombre de Tropes en prose (mais un certain nombre seulement)
ont subi le système des dausulss, dont nous aurons lieu de parler plus loin,
et qui n'avait été tout d'abord appliqué qu'aux Proses notkériennes. Ces dau-
sulee ou versiculi ont, deux par deux, le même nombre de syllabes et se chan-
tent, deux par deux, sur la même phrase musicale. Un tel système Con le
comprend) ne pouvait s'appliquer qu'à des Trop3s d'un certain développement,
comme à ceux de l'Oirertoire, etc. Nous allons en donner deux exemples :
i Patris sapientia "'
\ Per quem vivunt omnia, 7
.. I Cum Pâtre qui régis omnia 9
(Rutilans, simplex Substantia, ^
f ^qualis est cum gloria, s
( Majestas et coseterna. 8.
I Olim qui pro nobis natus es ex Maria, I3
i Non linquens supera venisti in infinia 13
., ( Heparare perditum vita hominem a morte perpétua. li'
( Tibi cuncti, voce publica, cananuis cum plèbe Davitica. la
(Bibl. nat. lat., 1080, f" I2i r-.)
. ) Ab ortûdoxa et catliolica 10
'. Plèbe bcnigna atque devota, 10
.. ( Maria, cœli regina, "
* Impctra, tu, cœlestia *.
^ Régna beata ac sempiterna; i<>
( Da, per tcmpora, clemens mundana 10
IV. Cuncta prospéra nobis.
(Trope (le l'Offertoire: Ribl. nat., nouv. arq., 2495, f" 109 vo, ajouté à la fm du xnic siècle.)
17'» insToiiir: lu: i..\ itjksik MTi'nnioi'E
Lorsqu'ils sont en vers, les 'l'roj)es de la promièrc
époque ne sont même pas assonances, ou ne le sont
que fort rarement '. Tout au contraire, ceux (!<• la
seconde sont rimes, toujours rimes.
Durant la première époque les Troi)es en vers * ne
nous offrent, neuf fois sur dix, que des hexamètres.
Quelques distiques % quelques quatrains eu ïamhiques
dimètres^; mais c'est à peu près toutl (lliose digne
1 L'assonance est assaz rare dans les Tropaires de la iirernifre ^[mque. ot on
ne la trouve qu'EXCRi'TiONNELLKMENr dans reux de Saint-Gall et de Saiut-Martia!
( Voy. cependant 1120. f" 44 v°). Les deux Tropaires de Paris (Bibl. nat.
lat., 13252) et de Saint- Évruult (Bibl. nat. lat., lOîktS) nous en ofl"r.;nt, au con-
traire, des exemples a.^sez nombreux : « Laudemus Domini<m cujus re| b't ordine
mundio/i... — Vox Domino laud(?;/(, ferat actio sancta decorem... — llis coMum
geminis scandit Laurentius ali's... — Qui cœlique mnr/s Deus est et conditor
orbis... — Gloria cum su|ier(S ipsi debetur et omnis » (13252, f» 13 r"). = « l'ra--
sulis insignis Niiholaï vocibus altis... — Annua pacidcf,' jubilentur canlira ;
namque... — OlTicio dieriuo/t qui sanxil pra??ulis illior?... — Ac sibi per|ielui<»;i
concessit ab hoste triumphum » {IbiiL, f" 16 r°, etc.). = «() Pater excelst», pmi-
cera mente colendf... — (>liriste, Patris genite, famulorum crimina terpe... —
Purilica mcntt's, celsi Patris unica proies... — Ut te laudantes nileanl virtu-
tibus omnes » (10i)08, f-* 9, etc. etc.).
2 L'emploi des mètres antiques nous semble indiqué dans ce versintlus
d'un de nos Tropaires: « Dicat nietra Dec laudes hœc concio sacra. » (Bibl.
nat. lat., 887, fo 40 r».)
3 Les distiques sont assez fréquents dans les Tropaires de la première
époque, et particulièrement parmi les Tropes du Gloria : « Laudat in excelsis
cœlum terramque regentem, — Angelicus cœtus laudat et omnis lionjo (Bibl.
nat. lat., 1121, l'° 44 v°). Qui de morte tuum voluisti surgere Natuni — Kt
mortis vincla solvere morte sua » (10508, f« 30 r"). Etc. = Les distiques ont
pénétré plus rarement dans les autres Tmpes; mais cependant on les trouve
dans ceux du Kyrie: « In tridui spatio » (887, f° 57 r") et, — bien plus rare-
ment, il est vrai, — dans ceux de la Séquence : « Hegi immortali laudes nunr
(licite celsas; — .Mleluia canens nostra caterva sonet » (1121. f" 20 v"), et de
la Communion : « Gaudia mente geris ; cœlos attendis aperlos — Qui Chrii^
lum, Stéphane, cernis in arce Dei » (Saint-Gall, 4Hi, |. 29. etc. t-tc.K
* Lxsurge, rector gentium.
Nec moriturus amplius
Orbemque totum posside
Tuo redemptum sanguine.
(Patrologie, LXXXVll, 52. d'après un manuscrit de Saint-Gall. Etc.)
'^ Les Tropes en vers de la première époque offrent certaines incorrections
ou « licences » métriques qui étaient [wssées dans l'usage commun. L'une des
plus fréquentes consiste à considérer comme longue une brève en césure : « Bex
l)eus immensf, quo consl.it inarliina niundi (^Bibl. nal. lai.. 1120. f* 93 n);
TROPES DE LA 1''^ ET DE LA 2"^ EPOQUE 175
d'attention, tout change durant la seconde période, et,
depuis l'introduction de la rime, on ne trouve dans les
Tropaires que des vers rythmés appartenant au sys-
tème ïambique ou asclépiadien , aux dérivés du septe-
narius trochaïque *, ou à vingt autres combinaisons
rythmiques. Quelques hexamètres apparaissent çà et là.
Tout a pris un autre aspect , et ce n'est ni la même
origine ni la même nature de poésie. Voulez -vous en-
core ici des exemples frappants, décisifs? Nous les
emprunterons à cette fête, à cette belle fête des Saints
Innocents, qui avait donné lieu, chez nos pères, à de si
beaux transports liturgiques.
Donc, voici le texte de l'Introït pour cette très
joyeuse solennité : « Ex ore infantium, Deus, et lacten-
« tium perfecisti laudem, propter inimicos tuos. »
Durant la première époque on avait, très simple-
ment, interpolé en prose ce verset si touchant et
si bien approprié : « Ex ore infantium, Deus, fecisti
laudare nomen tuum, et lactentium perfecisti laudem.
Triumphantes de hoste vipereo, florem aeternae virgi-
nitatis, eos in cœlesti gloria suscepisti propter ini-
micos tuos. »
Mortificando sua propter te corpora Sancti (112i, i'» 17 r°, etc.); Genlilium
doctor et sacri spermatis auctor (13252, f» 12 v»); 0 Pater egregie, nostrorum
vincula solve (1120, f» 46 v"); Sanctificas cuncta censés quœ jure sacranda
(9449, f°6 v°); Et mortis vincla solvere morte sua » (10508, f" 30 r»); etc. etc.
= Les brèves deviennent longues, même en dehors de la césure : « Sancttis
en veniens sanctorum pectora lustrans » (1121 , f" 23 V»), etc. etc. = Il n'est
pas besoin de signaler d'autres licences moins justifiables, et qui fourmillent.
' Les septenarii sont très rares à la première époque. Cependant nous trou-
vons dans un manuscrit de Saint-Gall un « Invitatoire » ou « Prologue » du
Trope de l'Introït pour l'Octave de rE;iiphanie, qui visiblement consiste en
deux septenarii trochaïques : « Rege nostro carne tecto, voce patris prodito, —
Hac die, nos ejus omnes immoremur laudibus » (Saint-Gall, 376, p. 47). Mais
le fait peut passer pour une exception , et c'est dans les Tropes de la seconde
époque que les septenarii sont appelés à triompher.
17G IllSTOiriK I)i: I. A l'OHSIK MT f I! C in IJE
Ce même verset luL (l;iiis I*' inrino temps, interpolé
en vers avec une simplicité (|ui ik- manque j)as de
charme : « Panf^ite jam, pur-ri, laudes, et |jromite
Christo. Ex ore infanlimn, Deiis, nalc iJei cl«'nn'ns,
parvorum snscii)e laudes et luctentium perfeciati lau-
deyn, (pii tibi jam nati certanmt sanguiiK- [»uro }>ropter
inimicos tuos \ »
Tels sont les deux types auxciuels on peut laiiirucr
tous les Tropes depuis la lin du ixe siècle, pendant
près de deux cents ans. Il est aisé do se les firavci' dans
sa mémoire.
Au xue siècle, on chantait encore à Saint-Martial les
deux Tropes que nous venons de citer; mais on en
fabriquait de nouveaux qui n'étaient pas taillés sur le
môme modèle et n'étaient point destinés à la niéme
partie de l'Office: « In laudes Innoceiitium — Qui passi
« sunt martyrium, — Psallat chorus infantiinn — Al-
« leluia-! » Ces jolis vers rythmiques, lestes et so-
nores, seront, si vous le voulez bien, le type des Tropes
de la seconde époque; mais ce n'est pas là leui- seul
caractère, et il faut arriver aux autres.
Nous parlions tout à l'heure de la idace qu'occupiut
les Tropes dans l'Office sacré : le plus «iraiid ctïort des
tropistes de la première époque a porté siu' la Messe
et sur les différentes parties de ce livre tle chœur
qu'on appelle aujourd'hui le Graduel. Le })lus ^rand
effort des tropistes de la seconde période a porté, au
contraire, sur les Heures et sur les différentes parties
de cet autre livre ([u'on nomme aujourd'hui l'Antipho-
' Bibl. iint. l.il.. 1121. r» s i-o; 887. I"» li) v; llli*. f» 2»'. v: {« 13252,
I'' 7 r». etc. .'te.
î nilil. nnt. lat.. 1139. 1' -'lO r.
TROPES DE LA 1'° ET DE LA 2° ÉPOQUE 117
naire. Telle est la seconde distinction qu'il convient
de faire entre les œuvres de ces deux époques. Elle
est capitale.
Que trouvons -nous, en effet, dans les Tropaires de
la première époque? Des interpolations de l'Introït, du
Graduel, de l'Offertoire, de la Communion, comme
aussi des Tropes du Kyrie, du Gloria, du Sanctus et
de VAgnus. C'est à peine si nous y rencontrons çà
et là quelques lignes consacrées à l'Office canonial,
quelque Benedicamus Domino en vingt mots. Il n'y
a guère qu'une exception à cette règle et qui est jus-
tifiée par l'extraordinaire solennité de la fête de Noël :
ce sont les trop célèbres développements du répons
Descendit, ce sont ces Fabricx mundi dont nous
avons eu plus haut à expliquer l'origine et à détermi-
ner le sens.
Que trouvons -nous, au contraire, dans les Tropaires
de la seconde époque? D'innombrables Tropes du Bene-
dicamus Domino, dont chacun forme un petit poème;
des interpolations du texte liturgique avant le Deus in
adjutorium et avant l'Invitatoire , avant les Répons et
les Leçons, avant le Te Deum et le Magnificat, et entre
les Heures canoniales. C'est à peine si l'on y découvre
quelques Introïts en vers rimes, quelques Kyrie de
même nature, quelques -Sandws et quelques Agnus Dei
des xne et xnie siècles. Pas de Gloria.
Ici les exemples sont inutiles, ou, pour mieux dire,
il faudrait tout citer. Cela, d'ailleurs, se comprend de
soi, et nous aurions mauvaise grâce à insister plus
longuement; mais il nous sera peut-être plus malaisé
de faire saisir le troisième et dernier caractère qui va
nous permettre d'éta])lir une si grande, une si décisive
I - i2
178 IIISTOIRK DK I..\ POKSIK LITURGIQUE
différence entre les Tropes dr l;i i)r<'iiii<''i(' et ceux de
la seconde manière.
L'idée des premiers tropistes était bien simple : ils se
regardaient uniquement comme des interpolateurs, et
leur zèle se born;iit à intercaler quelques m(jts de leur
crû entre les différents membres de phrase qui compo-
saient le texte primitif, le texte auguste de la liturgie.
Toute leur ambition eût été d'interpoloi- le texte mot
par mot; mais ils n'avaient pas de plus liautes visées.
Quand, le jour de Pâques, vers dix heures, l'évoque,
précédé d'un cortège superbe, faisait son entrée dans
la cathédrale éblouissante alors de la clarté de millf
cierges, le chœur entonnait ce bel Introït que con-
naissent encore tous les chrétiens de nos jours. « Re-
« surrexi, et adhuc tecum sum. Alléluia. Posuisti super
« me manum tuam, Alléluia. Mirabilis factaest scientia
« tua. Alléluia, Alléluia. »
Sur ce noble canevas nos premiers tropistes ont
brodé vingt ou trente de leurs Tropes en vers ou en
prose. Dans l'un et l'autre cas, ils serraient de très près
le texte interpolé, et ne le perdaient pas de vue un seul
instant. Écoutez plutôt : « Ego autem constitutus sum
« Rex prœdicans prœceptum tuum, et, Morte devicta,
« Resurrexi, et adhuc tecum sum, Alléluia. Dormivi,
« Pater, et surgam diluculo, et somnus meus dulcis
« est mihi. Posuisti super me manum tuam, Alléluia.
« Ita, Pater, sic placuit ante t(^ ut. moriendo, niortis
« mors fuissem, morsus inferiii ot mundo vita. Mira-
(t bilis farta est scientia tua, qui abscondisti hcec sa-
« pientibuset rovclasti parvulis. Alléluia, Alléluia*. »
» Bibl. nat. lai., 1121. 1" '21 v\ otc. etc.
TROPES DE LA r° ET DE LA 2° ÉPOQUE 179
Toute autre est la méthode des tropistes de la se-
conde époque. Ils prennent prétexte d'une partie de
l'Office, comme par exemple du Benedicamus qui ter-
mine les Heures, pour entonner une sorte de chanson
pieuse, qui a ses proportions et ses lois, et où il sub-
siste à peine quelque trace du texte liturgique. Ne
quittons pas ce beau jour de Pâques, ce dies dieriim,
et suspendons-nous à la voix d'un tropiste du xiie ou
du xme siècle commentant le Benedicamus :
Adplaudamus Christi victorise ,
Modulantes carmen laetitiae :
Mortem enim damnavit hodie
Pacis princeps et Sol justitise.
Summi Régis visa potentia,
Judœorum arsit invidia;
Résurgente Christo cum gloria,
Consolata fuit Ecclesia.
Ergo mecum quidquid est hominum
Resurgentem conlaudet Dominum ,
Vita cujus ignorât terminum.
Telles sont les deux méthodes. Avec les yeux de l'es-
prit, placez en face l'un de l'autre Y Ego autem consti-
tutus sum de la première manière et V Adplaudamus de
la seconde, et vous embrasserez d'un coup d'œil tous
les caractères des Tropes de l'une et de l'autre période.
C'est vivant.
Ce que nous allons maintenant mettre en lumière,
c'est la série de transformations étranges et réelles qu'a
subies le type Adplaudamus. Nous allons faire voir
qu'à force de le transformer, ou plutôt de le déformer,
on est arrivé à le changer en un simple Motet; puis en
1 Bibl. nat. lat., 1120, f» 104 v".
■18(» IIISTOIliK l)K LA l'OESlK Ll TT HCIOIJE
unn pièco morale on d'actualité; puis, un peu jdiis laid,
en nne pièce « léj^ère »; puis culin, avec les Goliardi,
en de très grossières satires, ou en des obscénit('s plus
révoltantes et plus scandaleuses encon*.
Tout cela se suit, hélas! et tout cela s"ciicliaîne.
Donc, le point de départ, c'est le Trope de ce Bcnc-
dicamus que l'on chante encore aujourd'hui à la fin (!••
toutes Heures, sauf Matines, Là- dessus on s'est donné
carrière, et le mal, le lléau a commencé par là. Que dans
certains de ces Tropes on ait conservé les mots Denedi-
camus Domino et Deo dicamiis gratias; que l'on n'ait
conservé qu'une seule de ces deux formules; qu'on les
ait remplacées toutes deux par des équivalents, et qu'on
ait même fini par les supprimer presque aljsolument,
peu importe. Les petits poèmes, dont cette exclamation
finale a été le prétexte, sont arrivés fort naturellement
à prendre je ne sais quelles proportions et quelle am-
pleur, et l'on n'a pas tardé à s'y permettre d'assez vives
libertés. Mais enfin et pour n'excéder en rien, choisis-
sons un type moyen. Voici ce qu'on chantait, le jour de la
Dédicace, à la fin d'une de ces Heures que l'on sait, et
n'oublions pas, en lisant ces strophes enthousiastes, que
cette solennité de la Dédicace était une des plus joyeuses
et des plus fêtées de toute l'année litur<ii([ue :
Iliec testiv.i
Transit iva
Dedicatio
Infinilain
Si^Miat vilam
Plenain ijraudio.
I
TROPES DE LA l"'' ET DE LA 2" EPOQUE 181
Nos hanc vitam
Contemnentes ,
Infinitam
Appetentes ,
Benedicamus Domino '.
Ce type est des plus simples, et il ne faudrait pas
s'imaginer qu'on s'en soit tenu là. Il y a des Benedica-
mus qui sont autrement étoffés, et c'est ce qui a donné
aux poètes monastiques de petites bouffées de liberté.
Il était visible qu'on irait beaucoup plus loin.
Le Benedicamus terminait les Heures; mais il y
avait entre elles un espace qui, par bonheur, demeu-
rait libre. Nos poètes s'en emparèrent, et s'affran-
chirent ici de la contrainte que leur faisaient encore
subir les formules Benedicamus Domino et Deo gratias.
Liberté, liberté. Bref, le Trope du Benedicamus va tour-
ner au cantique, j'allais presque dire à la chanson. Ce
qu'il y a de certain, c'est qu'en ces vers de plus en plus
indépendants, on a souvent à constater la présence d'un
refrain plus ou moins bref, plus ou moins vif. En réalité
ce refrain est une indication précieuse et nous révèle un
nouvel état de choses. Nous en offrons ci -dessous un
exemple, et ce sont ces vers joyeux et prestes où l'on
a conservé le système antique de l'assonance :
Régi nato Domino
Utero virgineo,
Gaudeat omnis homo !
Angeli de puero
Nuiitiant cum gaudio :
Gaudeat oiniiis homo !
1 Mone, Hyinni latini mcdii œvi, I. p. 328, n» 257.
182 HISTOIRE I»K LA l'OKSIE IJTIHCIQIJE
Gandiiim paslorihiis
Nuntiavit Angélus :
Gaudeat omnis hoino !
Qui sine principio
Est in matris gremio :
Gaudeat otniiis hoino !
De cœli sidereo
Ad nos venit solio :
Gaudeat omnis homo ' !
C'est surtout aux fêtes joyeuses de Noël et do l'Epi-
phanie que ces vers éclataient comme des fusées, et
le temps de Noël est en effet celui qui se prétait le
mieux à ces charmantes et dangereuses fantaisies. Mais
il y a plus : cette époque de l'année liturgique où Ton
1 Bibl. nat. lat., 1139, f" 41 v°. — Cf. la pièce suivante :
Fulgel in tencbris
Dies percelebris,
Efficax Mcdicus,
Unice Unicus.
Oritur hodic,
Summa laetitia' ,
Mundi principium
Kt finis omnium.
Ergo rongaudcat plcbs vilae reddita
Parvuli Filii gratia prfedila !
Nova puerpcra
Sud dat ubera
Patri et Filio
Consiliario.
Virginis gremio
Egct cibario
Qui pascil infera
Solus et supera.
Ergo congaudeat plebs vit.T reddita
Parvuli Filii gratia prrcdila.
Paslor fideiium
Pastorum omnium ,
Ovem centesimam
Invcnit perdilam.
Ercptam vcpribus ,
Muilis criminibus,
Gralulans , gerulas
Levai in scapulas.
[Ergo congaudeal, etc.].
(Bibl. nal. Int., 3851, 45 v»; commenccmenl du
XII» siècle.)
TROPES DE LA 1'° ET DE LA 2° EPOQUE 183
honore, où l'on chante l'enfance de Jésus, ce « temps
de Noël », était considéré comme appartenant spéciale-
ment aux enfants. Ils étaient alors les rois, et ces
chants nouveaux, ces Versus de la seconde époque
étaient souvent chantés par les seuls enfants de chœur :
« Gratulentur parvuli , — Nato rege parvulo ' . » Et
ailleurs : « In laudes innocentium — Psallat chorus
infantium '. » Et ailleurs encore : « Sint infantes —
Festivantes, — Et sonorus — Psallat chorus ^ » Vous
les entendez d'ici, ces voix fraîches du xiie siècle, qui
réjouissaient les cloîtres.
Voici cependant que nous avons déjà assisté à deux
phases, à deux transformations de la poésie qui nous
occupe. Voici qu'après les Tropes du Benedicamiis, nous
venons d'entendre chanter ces nouveaux Versus entre
les Heures. Au reste, il n'y a pas entre ces deux types
une différence aussi profonde que l'on pourrait le croire.
Les Tropes du Benedicamus , que l'on exécutait à la
fm de certaines Heures, ont donné fort naturellement
naissance à ces Versus qui leur ressemblent de si près ,
moins la formule finale. Mais, en vérité, c'était beau-
coup que de se défaire de cette formule. Allégée de
ce poids, cette poésie allait pouvoir marcher plus vite
et toute seule. On observera cependant qu'elle n'est
pas sortie de l'église. Elle y va encore rester quelque
temps.
Les Versus ont engendré les Motets de la même façon
que les Tropes du Benedicamus avaient engendré les
Versus. Le mutetus est une pièce à une ou plusieurs
1 BibL liât, lat., H39. l» 40 v".
2 Bibl. nat. lat., 1139, f" 40 r».
3 Bibl. nat. lat., 3719, 1'» 43 v°.
18^1 iiisïninK ])]■: I. \ l'oKsii: i.iTriKiinri-:
voix (jui se cliaiitc. (Tiiik' l";ir()ii iii(l('')tcinl;iMt('. A TKL
OU TEL M0MP:NT DK L'nl'I'KlK. Il laill iri >r iiiOIltni-
largo, ol comprendre sous cette (h'iioiiiiii.itiMn tontes
les pièces lyriques de laiif^iic laliix' (jiii ont un carac-
tère pieux sans avoir de place df'teriiiiiiée dans la
journée liturgi(pie. Comme nos Motets (raujourd'luii
qui sont exécutés par les maîtrises, ces Motets d'autre-
fois se chantaient ad libitum. La phqiart sont Itrefs,
mais quelques-uns sont ornés d'un refiain, et il en est
d'autres qui ont plusieurs couplets et olFrent un cer-
tain développement. Le « déchant », qui est l'harmonie
du moyen âge, y trouve fréquemment son emploi, et
il y a de ces pièces à plusieurs parties, il y en a par
centaines dans les manuscrits musicaux des xnc et
xnie siècles. J'en veux citer une dont les paroles,
empruntées plus ou moins textuellement aux écrits
plus ou moins authentiques de saint Bernard, sont
véritablement dignes d'attention. C"est le Christ rpii
parle à l'homme du haut de sa croix :
Homo, vide quce pro te patior,
Si est dolor sicut (pio ciueior.
Ad te clamo qui \)vo te nmi'ior :
Vide pœnas quil)us afticim",
Vide clavûs quibus confodior.
Cum sit tant us dolor exterior,
Interior planctus est gravior,
Tam ingratum te dum experior '.
La musique de VHomo vide est médiocre, mais il n'en
est pas de même pour un autre Motet à une voix,
pour VHomo considéra, dont nous ne pouvons fran-
> Bibl. liai, lat., 8i33,f« ^o v°.
ÏROPES DE LA 1''= ET DE LA •2'' ÉPOQUE 185
. . 1^ - : —
-au -^ J m • m Il( 3 , a
Ê "Tc^îà f ccoiif ^ Cqtialtmf t^tm'ato'^ DiUcq2i&- ^ôvti\îîu\^â uapozis ftiUtq
— —. Il - ■ -^^ . -T^-^
4!
'^I-^-' -^1 ■< ^ ' " , ^ ^ "~J^J' _ ^J . - ^ 4 T ^ ^
Imtgrhmoiié moi^f ^r tu|J^ ÇïchiU^ ucxpam àXcçoiii* ^ ^tx^tgf
Jtetim ^'^mVix^^^uàfiO odi ûOtCf^ ctu^'rio 00111^6 ^mctnoi c«lm5 ^Ic^^jtîS'a/
T^tn<^c?g— Hrg- ^^ '■ — —
Tyiie des Motets (Bibl. iiat. lat., 8433, 1" 45 vo)
186 HISTOIRE DE LA POÉSIE LITURGIQUE
scrire ici que les derniers vers, alambiqués et lourds,
et qui est accompagné d'une mélodie véritablement
remarquable :
Vido ne difTeras ;
Vide ne (léseras,
Oblitus, creatorem.
Culpam dum itéras,
Tuiim exaspéras,
Ingratus , redernptorem. . .
Humilem eligas
Vitam, quam dirigas
Per viam altiorem.
Dum attendis iiltoreni,
Redimas te per timorenn.
Duniiniim diligas;
Te totum colligas
Amantis in amorem ^
11 nous serait trop facile de multiplier les exemples;
mais nos lecteurs ont déjà compris ({uel est le carac-
tère distinctif des Motets. On s'y permet des privautés
avec la pensée et avec le rythme ; mais enfin on y est
toujours chrétien, toujours pieux, et le Motet, ne l'ou-
blions pas, se chante près de l'autel. C'est un ciiant
extra- liturgique, mais c'est encore un chant d'église.
Un pas, un seul pas de plus, et nous allons franchir
la porte du temple. Nous venons d'étudier les trois pre-
mières formes de ce genre littéraire (|ui dérive do nos
Tropes ; mais il nous reste encore à examiner cin(j
autres formes, ou, pour mieux parler, cinq autres
groupes de chants qui ne sont plus exécutés entre les
murs sacrés de la basilique.
1 Bibl. nat. laf., 8433 , f» 45 v ; à la même pape que la pièce précédcnlo. Voy.
le fac-simih çi-coi)lro.
TROPES DE LA V ET DE LA 2" ÉPOQUE 187
Supposez donc un moment que vous assistiez à la
fin d'un Office dans une église abbatiale. Les moines
sortent en silence, mais il n'y a pas là que les moines:
il y a la scola, il y a les enfants de chœur. Or nous
sommes, si vous le voulez bien, le premier jour de
l'an, et voici que, pendant la récréation, sous le cloître
et dans la bibliothèque, ou bien encore en plein air,
dans les cours et dans les jardins, on organise de petits
chœurs. Que vont chanter ces enfants? Que chantent-
ils? Vous n'avez qu'à ouvrir l'oreille :
Annus novus in gaudio
Agatur in principio.
Magna sit exultatio
In cantoris tripudio \
A ce solo succède le refrain : « Ad hsec solemnia —
« Goncurrunt omnia — Voce sonantia, — Cantoris
« gratia — Et vitae spatia — Per quem laetitia — Fit
« in ecclesia. » Puis, le soliste entonne le deuxième
couplet : « Anni novi principium — Vox celebret psal-
lentium. » Et la chanson (car c'est une vraie chanson)
est enlevée, de verve, jusqu'au dernier vers.
Elles ne manquaient pas dans les abbayes du moyen
âge, les occasions de ces concerts monastiques, et il
y avait là tout un petit monde qui avait besoin de se
divertir. Véritables collégiens, étudiants de première
année, ils aimaient la pointe, les jeux de mots, une
certaine petite impudicité mal voilée. Ils s'en don-
naient à plein gosier. Pendant tout le temps de Noël,
ce n'étaient que chants : « Ergo, gaude, gaude, juve-
* Bibl. nat. lai., 1139, l» 36 v°. Le texte porte agnus au lieu d'annus, et plus
loin anni novi principio.
188 lIISTOITiK DK LA priKSH- f,nr|i(;|urE
« nilis concio '. *> Le jour de lu Saiiil-M.iitiii. ^n-;iii<l la-
pa^(! : « Fc'slivetiir lucc cleiicis, — Si.mI niMxime sco-
« lasticisl ') On miilti[)liait ces fûtes. 11 est d'ailleurs
aisé de comprendiv qu'en pai'fils cas, ces jeunes gens ne
se maintenaient jjus L(jiij(>u]s dans les limites de la sa-
gesse cléricale et de l'austérité monacale. De là ces
chansons troj) libres, ou iiiênie tout à fait scandaleuses,
aux(iue||('s nous allons arrivei- tout à l'iieure, et que
l'on est joui f'ionné de rencontrer dans les Tropaires.
Ces Tropaires de la seconde époque^ n'étaient en réa-
lité que des livres d'étudiants.
De ces chants sur la Saint-Nicolas ou sur le jour de
Fan on en vint, par une pente inévitable, à glisser en
des chants d'un caractère décidément trop « laïque ».
Passe encore pour ces pièces morales, d'où s"exhal<.'
un si profond ennui : « Mordax detractio, — Livoris
filia, — Plena versutia, — Pungis ut scorpio, — Frémis
ut bestia. — Dente nefario . — Gorrodis omnia. »
Passe encore pour ces centaines de prétendues Mora-
lités auxquelles on n'a pas toujours eu le courage d'ap-
pliquer une notation musicale; mais, si nous allons
seulement un peu plus loin dans cette voie oii Ton ne
saurait s'arrêter, nous tombons, hélas! de la morale
dans la politique, et, pardon du mot, dans « l'actua-
lité ». Si fermés que fussent les murs d'un monastère,
les nouvelles y pénétraient avec une ra{)idité qui est
parfois de nature à nous surprendre. C'étaient surtout
les pèlerins qui colportaient ainsi les événements nou-
1 Bil.l. liât, lat., 1139, i'o ol.
î Bibl. liât, lat., 1139, t° 'i9.
' Les deux types de ces Tropaires de la décadence sont. |»ar excellence, les
deux manuscrits de la Bibl. nal. lat. 1139 et 371'.». tin no saurait assez les
étudier.
TROPES DE LA V ET DE LA 2"^ ÉPOQUE 189
veaux, et il arriva de bonne heure, de trop bonne heure
peut-être, que nos poètes de couvent s'en inspirèrent.
On trouve dans le précieux recueil d'Edelestand Du-
méril un certain nombre de chansons latines qui
doivent être classées dans cette intéressante catégorie.
Si l'on en désire un type, on lira, non sans quelque
émotion, les vers suivants qui ont pour sujet les graves
événements dont la Terre Sainte venait d'être le théâtre.
Il n'y avait pas alors de plus poignante actualité, et
tous les yeux étaient cloués sur le saint Sépulcre.
Exultemus et lœtemur
GanticLim laetitiœ ,
Ac reddamus quas debemus
Laudes Régi glorige,
Qui salvavit
Urbem Davit
A paganis hodie.
Festum agitur,
Dies recolitur
In qua Dagon frangitur
Et Amalec vincitur.
Natus Agar pellitur,
Jérusalem eripitur
Et Christianis redditur.
Diem colamus igitur, etc. '.
Telles sont ces « actualités » que nous sommes
amenés à considérer en ce moment comme la sixième
transformation de nos Tropes.
Jusqu'ici, cependant, nous avons pu supposer que
toute cette production poétique était due à la seule
1 Bibl. not. lat., 3719, l» 42 V.
190 lIlSTOIlîK I)K LA POÉSIE LITURGIQUE
activité des moines, et il est très probable, en effet,
que la plupart de ces Motets et de ces chansons pieuses
ont eu pour auteurs des religieux ou des novices; mais
voici venir un nouvel élément, et dont il convient de
tenir le plus grand compte.
En 1227, le concile de Trêves lança un sévère ana-
thème contre les écoliers vagabonds, les truands et les
goliards qui se présentaient dans les églises séculières
et monastiques « sous prétexte d'y chanter des vers
sur le Sanctus et YAgnus Dei ' ». Chacun de ces mots
est à peser longuement, et il n'y a peut-être pas de texte
qui montre mieux l'influence dangereuse, mais consi-
dérable, de ces Tropes dont nous écrivons l'histoire.
Donc il a existé, dès le xe siècle à tout le moins
(puisqu'il en est question dans les règlements de Gau-
tier, archevêque de Sens, en 915), il a existé toute une
séquelle de clercs errants qui ont été la honte de la
cléricature et le fléau de l'Église. Ils avaient l'audace
de porter la corona, et c'est en vain que les conciles
indignés ordonnent de les raser pour faire disparaître
une tonsure qui était décidément par trop compromet-
tante. C'étaient, à vrai dire, de mauvais sujets qui
avaient manqué leur vocation et s'étaient fait ignomi-
nieusement chasser des monastères ou des églises. Il y
avait là de ces méchants écoliers qui avaient dû aban-
donner les bancs, et que nous pouvons assimiler à nos
étudiants de dixième année. Comment vivait toute cette
bohème? Elle vivait d'aumônes et }tayait en chansons.
^ «I Prœcipimus ut omnes sacerdoles non permiltant trutannos et alios vagos
scolares aut çruliardos cantare Versus super Sanctus et Aijnus Dei. n ( ^!arl^ne
et Durand, Amplissiina Collectio, VII, p. 117; Ducange, au mot TnUaiums.
VI, p. G90, et surtout Reiners, /. /., p. 17.)
TROPES DE LA l'" ET DE LA 2'' ÉPOQUE 191
Comme tous les déclassés de tous les temps, ils étaient
aigris contre la société, mais surtout contre l'Église, qui
les nourrissait. Ils connaissaient assez le cœur humain
pour savoir que les petits sont toujours heureux des ou-
trages qu'on jette aux puissants, et avaient, eux, ces
trutanni, déclaré la guerre à la Papauté et à l'Épisco-
pat, qu'ils couvrirent d'injures pendant plus de deux
cents ans. Ils faisaient rire d'un mauvais rire et qui
ressemblait à une grimace; mais enfin on les croyait
sur parole, et l'on s'indignait avec eux. A leur arc ils
avaient une seconde corde, qui était la luxure, et s'en
servaient habilement. Ils exploitaient la plus abjecte
des passions, et y mêlaient un amour malsain de la
nature et du printemps, qui mettait les âmes en rut.
Un grand nombre de ces chants nous sont restés, et
on peut les lire dans la collection de Flacius, dans
les Carmina Burana, dans le recueil des œuvres at-
tribuées à Gautier Map. On ne serait pas sincère (et il
faut toujours l'être) si l'on n'avouait pas qu'il y avait
alors de véritables abus à Rome et dans toute l'ÉgUse;
mais il convient d'ajouter que les goliardi les ont sin-
gulièrement ampUfiés. C'étaient les pamphlétaires de
ces siècles sans journaux ^
Eh bien! c'est grâce aux Tropes qu'ils se faufî
laient parfois dans les meilleurs monastères : « Nous
« savons, disaient -ils, de beaux Tropes du Sanctus
« et de VAgnus. » Ils les chantaient, en effet, mais
de telle façon que le prêtre à l'autel en était trou-
blé et les assistants scandalisés. Après l'Office ils ré-
citaient sous le cloître leurs sempiternelles satires
1 Ou trouvera les preuves de toutes les propositions précédentes dans le Glos-
saire de Ducange, à l'article Goliardi, etc.
102 IIISTOIHK DE ].\ POÉSIE MïTIiClQUE
contre Rome, et se faisaient ccoulf-r. Ils ravageaient les
âmes.
Les Tropaires de la seconde époque portent la
trace de leur passage, soit que les moines aient écrit
sous leur dich'c quelques - unes de ces obscénités
goliardifiucs , soit que les jeunes religieux aient
adopté ce genre et imité ces « maîtres », en se ser-
vant du moule commode des anciens Tropes ou des
Motets.
Toujours est-il «pic dans [»lus (Fun Tropaire' nous
lisons des chants d'amour, et même, pour lont dire,
des chansons véritablement obscènes. Encore un».' fuis,
ce sont là îles livres d'étudiants, et |)arf()is d'étudiants
en goguette.
Je n'en veux pas citer long, et suis obligé cependant
d'en donner quelque idée.
Que dire cependant, que dire de ces jeunes clercs
qui pleurent sur la mort d'une jeune femme (elle s'ap-
pelait Dulcia, et c'était tout simplement une courtisane
de la dernière espèce) et lui consacrent tout un petit
poème mêlé de passion et de piété :
Pauperum et divituiii,
Clericoi'uin, inilitum,
Ciaudium est perclitum...
l'ro illius requie
Clerici quotidie,
Quorum erat proprie,
Dicant : « Rex propicie ,
Miserere ^. »
Encore y a-t-il là quclipic tempérament, j'allais
1 Bibl. liai. Int., 3719, i<" 37 v». 38 r». 23 r et v». de; 1139. jmssitn , etc.
» Bibl. liai, lat., 3719, l» 87 \°.
TROPES DE LA r° ET DE LA 2° ÉPOQUE 193
presque dire quelque grâce; mais ailleurs c'est l'explo-
sion de la passion brutale et qui va jusqu'au blasphème :
Nutritur ignis osculo
Et leni tactu virginis ;
In suo lucet oculo
Lux luminis.
Non est in toto sœculo
Plus numinis '.
Il faut s'arrêter et renvoyer pour le reste aux poésies
de Gautier Map et de ses congénères.
« Ces poésies sortent de nos Tropes, » c'est là ce
que nous nous étions proposé de démontrer.
La source était à peu près pure : le ruisseau est
sale.
1 Bilil. nat. lat., 3719. f° 4L
13
CHAPITRE XIII
LES TROPES DE LA PREMIERE EPOQUE
ET TOUT D'ABORD CEUX DE LA PROCESSION
La Procession est un rite auguste, et que l'on re-
trouve chez tous les peuples qui ont été doués du sens
artistique et surtout du sens religieux. Les théories
de la Grèce n'étaient que des processions, auxquelles
il nous est permis de supposer aujourd'hui je ne sais
quelles physionomie et allure incomparables, sous la
splendeur d'un tel ciel et avec ces beaux êtres humains
qui savaient si bien se draper. Mais il n'est que juste de
le proclamer : c'est à l'Église catholique qu'il a été
donné de pousser jusqu'à la perfection un rite aussi
naturel et aussi imposant. « Procedamus in pace, » dit le
diacre au début de la marche sacrée, et tout le chœur
lui répond : « In nomine Christi. » Tout l'esprit de nos
processions est dans ces quelques mots.
Il y a plusieurs sortes de processions. Les plus
antiques, les plus célèbres sont celles qui ont pour
objet la Supplication, et c'est par là que le mot Sup-
plicationes est liturgiquement deveim svnonvme de
106 HISTOIHK I)K LA l'OKSlE 1. ITI'lU;iOlJE
Processiones. Ces marches graves sont empreintes
d'une tristesse i)rofonde et divine, et il faudrait
plaindre celui qui ne se sentirait pas ému jusqu'au
fond de l'âme par le spectacle de la Procession du
Vendredi saint, alors qu'elle s'avance silencieusement
vers le tabernacle lointain où l'on a déposé l'hostie
sacrée. Sans doute il y a certaines Processions qui
sont joyeuses : il y a des Processions « de triomphe » :
telle est celle de Noël vers la crèche ' qu'on a dressée
derrière le maitre-autel; telle est celle du dimanche
des Rameaux, de ce jour unique dans le cycle litur-
gique, qui s'ouvre dans l'Alleluia et s'achève dans la
douleur^; telle est encore celle de la nuit pascale, au
sortir de ce baptistère où t.mt de catéchumènes viennent
* Cette Procession de Noël a pris de bonne heure un cirmltM-r- dr.-iin.'itique .
comme on en ])Ourra juger par le type suivant :
(I Prœsepe sit paraUim relro allarc, et imago sanclœ Maria; sit in co posita. Inpriinis qui-
dam puer antc cliorum, in excelso, ad similitudinem Angeli, nativilalem Domini nunlians,
ad quinque canonicos quindecim niarcarum et libraruni, vcl ad eorum virarios de secunda
sede; Pastores inlrantes per magnum ostium cliori, por modum chori transeunles ad locum
in quo paraluni est praesepe, afcrdant, canlanlcs hune versuin Pax in terri». Salutent Pasto-
res Virt'inem...; tune, viso puero, Pastores adorent eum. » (Ordinariuin /lolhomngense , Mar-
tène, De anliquia Ecclciiœ rilibus, III, 9C.)
Cet Office ad prœsepe avait lieu aiirès Maline?. Moléon, dans ses Voyages
liturgiques, en constate encore la célébratinn à Clermont (p. 76), à Angers
(p. 91), etc.
2 « Ordo processionis in... ramis Palmarum... Conveniant canonici Sancli trte-
phani de Monte cuni i)rocessione et omni décore ad majoreni ecclesiam. Conve-
niant et coter» congrcgationes, excepta iSancti Pauli... [Onines; eant adSanclum
l'aulum... Primuni aqua beuedicta ; deliinc vexilla ; tune candelabra sicque
Ihuribula. Debinc cruces. Tune subdiaconi cuni Evangeliorum iibris. Tune fere-
truni cum reliquiis; sicque duo acolilhi eum candelabris , duo cum thuribulis
aureis. Infer hos niedios diaconus indulus dalnialica, porlans brachium donini
Stephani. Post hoc exeat scola cum timoré Pei et reverenlia, sicque seniores
incipientes a majoribus usque ad minores, iucedcnles bini et bini. Dominas
autem Pontilex veniat ultimus omnium, quem pra?cedat crux. sicut solito vcxillo
apposito. Post hune lurba populorum. C-anlores aulem non incedant in ordine
cum aliis; sed, tenentes virgas in manibus, muniant processionem ex utraque
parle incedenles, nunc ante, nunc relro, comiirimentes tumultum. monenle?
clerum ut cum Dei timoré cuncta liant hones^le.)» {Processionnal -Epistolier de
Besançon. Borgia . M. \ i. 27, f"» 39, 'i2. 'iS; à la bibl. do la Pro|tagande. à
B..me.")
LES TROPES DE LA V ÉPOQUE — LA PROCESSION 197
d'être plongés ' ; telle est enfin , telle est surtout celle du
Corpus Christi , qui est demeurée la plus populaire. Il
arrive aussi que, dans les monastères et dans les cathé-
drales, on annonce un jour l'arrivée d'un souverain et
que l'on va processionnellement à la rencontre de cet
empereur ou de ce roi, et c'est encore là un rite où la
douleur n'a point de part '. Il en était de même pour
l'arrivée d'un évêque et la réception d'un abbé. Mais
les vraies et primitives Processions sont avant tout
«suppliantes, » et leur véritable type est celle des
Rogations, qui remonte à une si haute antiquité. Ce
sont encore celles de la Saint-Marc, du mercredi des
Gendres % du mercredi saint et in jejuniis Pente-
costes. La plupart se font, ou plutôt se faisaient pieds
nus, et je ne sais pas si l'on s'accommoderait aujour-
d'hui d'une telle rudesse \ Le premier jour de Carême,
' La Procession ad fontes se renouv^elait, comme on sait, le jour de Pâques :
« Post Vesperas fiebat processio solemnis ad fontes, » et devint, sous cette
forme, d'un usage presque généraL (Martène, l. c, UI, 497 E, 499 G, 503 B,
b09 C.) A Bayeux, cstte procession avait lieu à cinq heures, très solennelle, et
avec le Corpus Christi porté sous le baldaquin {l. c, 498 A). A Chalon-sur-
Saône, le même rite était répété tous les jours de la semaine pascale, etc. etc.
2 Sur les Processions ad regem suscipiendum , voy. Martène {l. c, 801 E,
802 A). Chanoines ou moines allaient au-devant du roi deux par deux, en
chappes, précédés de la croix, silencieusement. On offrait l'eau bénite au roi,
et le chœur chantait : Ecce mitto anrjelum meitm. S'il s'agissait de la reine, ce
n'était plus VEcce mitto, mais le Cum sederit. = Cf. les Processions ad susci-
piendum episcopum (Martène, l. c., 802 E, 803 A) et ad abbatem suscipien-
dum (I&/rf._,803 B), et surtout les Versus usités à Saint-Gall pour la réception
d'un roi : Salve, proies reijum (Patrologie, LXXXVll, col. 40); Ave, beati ger-
minis {Ibid., col. 40); Suscipe clementem [Ibid., col. 43) ; Rex benedicte, veni
(Ibid., col. 44); Imperatorum genimen (Ibid., col. 44), etSalve, festa dies lau-
dabilis atque beata {Ibid., col. 56);— ou d'une reine : Aurea lux lerrse {Ibid.,
col. 41).
3 Martène, Z. c, III. 161.
■* Sur les Processions nuclis pedibus,\OY. Martène {De antiquis Ecclesias riti-
bus, III, 127 E, 128 A, 161 B, 226 B, 379 D, 518 B, 532 B; De antiquis Mo-
nachorum ritibus, 310 A, 314 E, 430 C, 468 D, 550 C, 537 A, 808 D). Ce rite
existait encore au xviir siècle, comme le constate le sieur de Moléon en ses
Voyages liturgiques (pp. 30, 74, 111, 112).
198 IIISTOIIIL: de la l'OESlE MTIJH(ilni;E
le papu lui-mùmc allait pieds nus, avec les cardinaux,
jusqu'à l'église Sainte -Anastasie ad Sanctam Sabi-
namK A Besançon, le mercredi saint, l'évoque et tout
son clergé allaient, pieds nus, visiter les malades*. La
Supplication, toujours la Supplication. Un fléau s'abat-
tait-il sur un royaume, sur une ville ; la peste, la
guerre ravageaient-elles ces peuples croyants, vite ils
demandaient une Procession avec tous les reliquaires
de leurs cités, et l'on se souvient encore à Paris de
celles de Sainte-Geneviève. Un monastère avait- il vu
ses murs renversés et ses biens pillés % les moines,
deux par deux, allaient processionnellement conjurer
Dieu de pardonner de tels crimes, et demander aux
hommes de les réparer. Les pèlerinages eux-mêmes
avaient leurs théories sacrées qui se déroulaient au flanc
des montagnes, et c'était ici, comme ailleurs, la forme
solennelle de la Supplication.
Il n'en est pas ainsi de la Procession (pii. chaque
dimanche ou chaque jour de fête, se met en marche
AVANT LA MESSE. Ce u'cst, à Vrai dire, ni un rite
triomphal, ni un rite de pénitence ou de réparation.
Comme Martène l'a établi, cette Procession est essen-
tiellement liée avec l'Aspersion, et n'a même été in-
stituée (jue pour accompagner dignement le prêtre
« asperseur' ». Dans les cathédrales et dans les mo-
1 A la station on apportait de Peau chaude pour rcrliaufTer les pieds du
pape.
* Martène, /. <•., UI, 226. Cette procession avait lieu avant Tierce.
' « Processionesreliquiarum adversus invasores bonorum monasterii » (Mar-
tène, De antiquis Monarhorutn ritihus, 807 C); « Processiones ad obtinendas
eleemosynas pro roparamlis monasterii c-ediliciis » (/6iVf., 811 A). — Cf. les Versus
ad soletnneni per campos et montes professione») de veliiniiis sancti Galli :
« Jam lidelis turba fratrum, etc., «dans les Hunini antiijuorutn jHitnttn mona-
sterii Sanvti-Galli {Patrolorjie, LX.XW'M, col. 'i6).
* Après l'imposition de IWntienne Asperges me, le prêtre asperge successi-
LES TROPES DE LA 1'° EPOQUE — LA PROCESSION 199
nastères, cette fonction était à la fois plus solennelle
et plus longue que de nos jours, et l'on jetait l'eau
bénite sur la maison de l'évêque, sur les cloîtres, sur
tous les bâtiments et dépendances monastiques ^ De là
la nécessité pour le chœur de s'arrêter plusieurs fois,
ou, pour parler un langage plus liturgique, de faire
quelques « stations » en attendant que le célébrant eût
achevé de parcourir toutes les parties de l'édifice reli-
gieux. Ces stations avaient lieu soit dans le cloître, soit
dans l'église. A Saint-Gall il y en avait trois : l'une ad
crucem, l'autre ad Sanctum Othmarum, et la dernière
m choro. Grâce au plan de 820, il est aisé d'en déter-
miner la place l
Pendant ces diverses Processions, qui duraient un
assez long temps, il fallait chanter et chanter sans
cesse. Mais que chanter?
Le système des Antiennes s'imposa fort naturellement
dans un certain nombre d'églises % et c'est celui qui
vement tous les autels et les cimetières. Le chœur chante tour à tour le Mise-
rere rnei Deus, le Salve Regina et l'Antienne Beprecetnur (ou, au temps de
Pâques, Christus). La Procession fait le tour du grand cloître : plu-ieurs sta-
tions sont assignées aux chantres et à la scola, tandis que le prêtre continue
l'aspersion. Après la récitation des Collectes, le rite se termine par le répons
Gloriosissimiun , chanté par tout le clergé qui rentre dans le chœur. ( Viennensis
Ecclesise ritus , Martène, De antiquis Ecdesise rilibus , IH, col. 65.)
1 a De scola aliqui eligantur qui, cuni uno presbytero et cruce una, aquam
benedictam per omnia officina aspergant, etc. » (Ordo Cameracensis et Atrebatensis
Ecclesise, Martène, De antiquis Ecclesiac ritibus , UI, col. 66.) Martène ajoute :
« Hic ritus diu viguit in monachorum cœnobiis. » Au temps du célèbre béné-
dictin, ce même rite pouvait encore être constaté dans certaines cathédrales, no-
tamment à Lyon : « Chorus... aliquod responsorium concinens, claustrum cir-
cuibat, ad januam ecclesiœ subsistons atque exspectans, donec sacerdos ab
officinarum perlustratione rediret orationem decantaturus.» C'est de ces attentes
du chœur qu'ont fort naturellement dérivé les stations des Processions, les-
quelles ont lieu « sive in rlaustro , sive in navi ecclesise ». — Cf. Moléon,
Voyages liturgiques: Saint -Maurice de Vienne, p. 12; Saint-Jean de Lyon,
]i. 50; Fontevrault, p. 119; Saint-Aignan d'Orléans, p. 211 ; le Mans, p. 221 ;
Rouen, p. 228, etc.
2 Voir plus haut le Salve nnrificion, p. 26.
3 « Antiphonœ processionales. » V. les mss.de la Bibl. nat. lat., 1120 (xi« siècle),
•200 HISTOIHK |)K LA |M)K<|K I. IT IJ RCI O (J E
lut notamment adoj)t(' à Saiiit-Marlial. Dans les Ti'o-
paires de l'illustro aljhayo, nous jjoiivoms lire tmilc une
suite cVAntijjhonag processionales (\()]ï\ nous n'avons ici à
déterminer ni l'antiquité ni le caractère \ A Saint-r,;ill
avait prévalu un autre système, celui dea Versus, dont
nous avons déjà (;u lieu de nous occuper longuement.
Il n'y avalait, d'ailleurs, qu'à applaudir à ces vers so-
lennels, corrects et parfois colorés, s'ils ne pnHaient
vraiment à trop de longueur. Mais, après tout, ces
œuvres de Radpert et d'Hartmann ne sont ni sans
piété, ni sans mérite, et, encore aujourd'liui . nous
prenons quelque joie à les entendre, en nous transpor-
tant par l'esprit sous les vastes cloîtres de Saint-dall,
devant les reliques de saint Othmar. La fête de Pâques
étant l'axe de toute la liturgie, c'est le Salve, festa (lies
toto venerabilis œvo, ce sont les Versus de Pâques qui
sont restés les plus célèbres; mais on ne saurait oublier
ni ces vers charmants d'Hartmann adressés aux Inno-
cents : Salve, ladeolo decoratum sanguine festum , ni ce
Christus ad nostras veniat camœnas de l'Ascension, ni
cette hymne à refrain de Radpert, où il demande à
r« seternum Pneuma » Mansor ut ipse cordium — Velit
esse fidelium; ni enfin ces distiques du même poète oii
l'on célébrait le patron de la grande abbaye: Annua,
sancte Dei, celehramus festa âiei — Qua, pater, e terris
1° lo4:« Incipiuiit Anliphonœ processionales; » lat., il21 (w siècle), l'<* 138 r»:
« Antiphona; processionales, » et 1° 17'» r» : «c Expliciiinl oinnes Antiphona?
processionales; » lat., 1136 (xi" s.), f° 99 r" ; « Incipiunt Antiphonae pro-
cessionales; » lat., 903 (xi" s.), f» 137 v° et suiv. ; lai., 909 (\i* siècle),
f» 150 et suiv. Ces mss. (sauf le 903 qui e^t do Saint-Yrieix) sont de Saint-
Martial.
1 11 en est que j'estime anciennes ; « .\nti|)hon.T in Pascha ad pruce?sionem :
Cum rex gloria} Christus infernum debellaturus intrarot, et chorus angelicus,
anio faciem ejus, porta- principum toUi prœciperet , etc. » (B'M. nat. lat.,
lOiilO, f» 11 v°.)
LES TROPES DE LA 1'° EPOQUE - LA PROCESSION 201
sidera, Galle, petis '. Ces compositions, où il est per-
mis de signaler plus d'une faute contre la métrique
et contre le goût -, sont généralement touchantes et
dignes '\ On aurait dû s'en tenir là.
Dédaignant le système des iVn tiennes, qui est correct,
et celui des Versus, qui est approuvable, certaines églises
en adoptèrent un troisième qui est plus périlleux, celui
des Tropes. Et c'est par là que nous rentrons directe-
ment en notre sujet.
L'idée originale consista ici à relier très étroitement
entre eux les Tropes de la procession et ceux de l'In-
' C'est cette dernière pièce que nous alluns ici donner pour type :
Annua, sancte Dei, celebremus festa diei — Qua, pater, e terris sidera, Galle, pctis. ^
Ecce dies populis micat hœc sanctissima noslris — Quorum tu, princeps, auctor ad astra
meas. =: Finibus Occiduis abicns, succedis Eois, — Dans lucem plebi dogmatis igné lui.
= Quœ tenebrosa fuit fidei nec luce refulsit — Per te cœlestem cœpit habere diem. = Hic
ubi noclicolae tenuere cubilia larvae , — Ad laudem Christi psallit ubiquc chorus. = Hic fuit
ecce feris statio gratissima saevis ; — Nunc scdes sanctis te résonante manet. =; Tu , pater,
liuc vcniens, fers tecum pacis lionores, — Hinc totum pellens quiquid adesse nocet. = Ex-
puleras nocuuni, complens dulcedine totum, — Quo, corpus linquens, spiritus astra petit. =i
En liodic meritam tu post certamina palmam — Sumpsisti, Galli; protège nos liodie = Jani
super astra nitens, famulorum suscipe laudes — Qui tibi devoto nunc jubilant module. =
Aspice propitius vénérantes nobile pignus — Corpus prœclarum. Galle béate, tuum. :=
Aspice quœ canimus ; expugna corda bcnignus, — In rébus cunclis rector adesto tuis. =
Hinc Domino trino laeti pangîmus et uno — Qui nos nunc talem fecil habere patrem. Amen.
[Palrologie, LXXXVH, col. 35, 36.) Cf., comme un second type, le Salve mirificum que
nous avons publié plus haut (p. 26), d'après le manuscrit 360 de Saint-Gall (p. 11.
- Un de leurs principaux défauts, c'est leur longueur excessive, mais qui était
peut-être nécessaire pour la durée de la Proce~,èion. VHutnili prece d'Hartmann
n'a pas moins de 80 vers [Patrologie , LXXXVII, col. 32) et était cependant
d'un Usage fréquent {ad processionem , dominicis diehus).
3 Voici, d'après le ms. de Saint-Gall 360 (xii» siècle), la liste de ces Versus
processionnels : 1° Noël : Salve mirificum... Venisti, mundo (p. 1); — 2" Saints
Innocents: Salve, lacteolo (p. 2); — 3° Epiphanie: Salve, riiirificum... Hoc
fecundata (p. 3) ; — 4» Pâques : Salve, festa dies toto venerabilis mvo (p. o);
— 5° Deuxième dimanche après Pâques : Salve, festa dies... Christe, decics
rerum (p. 7); — 6° Troisième dimanche après Pâques : Salve , festa dies... Qui
crucifixus erat (p. 8); — 7° Quatrième dimanche après Pâques : Salve, festa
dies... Qui genus humanum (p. 9); — 8° Cinquième dimanche après Pâques :
Salve, festa dies... Rex sacer (p. 10); — 9" Ascension : Cliristus ad nostras
veniat camœnas (p. 17); — 10" Pentecôte : Pneumatis seterni (p. 21); —
11° Octave de la Pentecôte et dimanches: Ardua spes mundi{p. 23); — 12» Fête
de Saint-Gall : Annua, sancte Dei (p. 23); — 13° Fête de saint Othmar : Festum,
sacratum psallinius (p. 27). — Nous ne citons ici, à dessein, que les Versus
susceptibles d'être chantés à la Procession qui précède la Messe. 11 y faut
joindre Vllumili prece. {Patrologie, LX.XXN'll, col. 32.) Etc.
202 mSTOIHK ItK l..\ l'nKSiK I. IT I' I{(; | n r K
troït, ot à ]i"('M faire, poiii- parlcj- plus claijcjiicnt,
qu'une seule et môme pièce.
Donc, on chantait, durant la Procession, la préface
plus ou moins développée du Tropf; de l'Iiilroït.
Puis, quand la Procession était finie et (jue les
chantres étaient revenus au chœur, un commençait
l'Jntroït lui-môme avec tous ses autres Tropes. Rien de
plus simple.
Un exemple, un type fera mieux comprendic tout cet
agencement.
Le jour de la Saint-Jean-l'Évangéliste, la Procession
se mettait en marche, chantant à pleine voix :
« Hodie, caiididali clioii sacciddliini , ceiileni et milleni, conju-
bilant Clirish» dilcctoiiue siki .hiliamii ,
« Queni , stola gloi'iic iiiduliim, lindir Ipse in conviviimi susce-
pit îeternum.
« 0 vere sanclum, laudabilem in terra , cœli arce splendentem
in gloria magna !
«Alléluia! Saccrdotes , eia, jubilemus Deo in beato Juhanne
Iheologo, celsa voce et humili corde, eia, dicite '... »
C'est alors que commençait l'Introït, qui parfois
était orné d'une seconde préface.
Que ce système ait été fort répandu, c'est ce que
nous ne pensons pas, et le système plus sain des An-
tiennes, des Répons et des Hymnes a heureusement
1 Bibl. nnt. lai., 13252. f" G r\ — Autre exemple :
(I En adstat candida concio oninisquc expcclal calcrva dare vores in cxcelso. — Oplamus
Régi regum diccrc udas qui sic in suo milite triumphat liodic. — Laudabilc c?t Chrislo psal-
lere : mine jiibilandi, paraplionisia, die, domnc : — « Alléluia nunc, levila" exultante*, jubilemus
Stopliano qucm elegil sumnius Apex in sepleno numéro. — Kia dicite... "(Bibl. nat. lai., 132r>2,
4 vo, 5 ro. Fè:c do saint Etienne.) Cf. Bibl. nat. lat., iOt<i , f» 40 ro; lat., 909, f» 12 v ;Rctro
allare, de sancto Slepliano); lat., 9449, f» 10 r».
On remarquera que les deux premières CInusnhv de la pièce citée ci-dessus
sont « parallèles » et ont chacune vingt -six syllabes.
LES TROPES DE LA l'"^ ÉPOQUE — LA PROCESSION 203
fini par l'emporter. Mais enfin les Tropes ad proces-
sionem ont eu leur place et leur heure.
Il est bon, à tout le moins, de constater l'emploi,
dans ce Trope peu connu, de ces doubles clausulds, de
ces versiculi qui ont deux par deux, comme dans les
Proses, le même nombre de syllabes.
Nous aurons lieu, bien souvent, de le constater
ailleurs.
Les Tropes, comme nous l'avons dit, ne sont que de
petites Proses, et il n'est pas étonnant de les voir sou-
vent assujettis aux mêmes lois.
A Echternach et ailleurs, les vers Salve, festa dies
ne suffisant pas à la durée de la Procession, on y avait
joint, avant l'Introït, une pièce liturgique en prose et
à refrain, un répons fort connu et fort ancien qui
ne manque pas en effet d'une certaine beauté presque
antique :
« Sedit Angélus ad sepulchrum Domini , stola claritatis cooper-
tus. Videntes eummulieres, nimio terrore perteiTitœ, astiterunt a
longe. Tune locutus est Angélus et dLxit eis :
« Nolite metuere : dico vobis quia ille quem quseritis mortuum
jam vivit, et vita hominum cum eo surrexit.
i. Crucifixum in carne laudate, et sepultum propter nos glori-
ficate, resurgentemque a morte adorate. Nolite, etc.
y. Recordamini quomodo prœdixit, quia oportet Filium hominis
crucifigi et tertia die a morte suscitari...
Ce répons , dans l'admirable Tropaire d'Echternach ,
est intitulé : In Introilu monasterii \
« BibL nat. lat.. 10510. fo 12 r"; Reiners, l. c, p. 74. — V. le même texte
avec variantes et sans le dernier verset, Arsenal, 1169, f" 18 \°.
204 lllsToiiîi- DK LA l'OKsii-; i.iTi-m.inrE
Peut-etro était-il chanté devant cette représentation,
(levant ce (li'-cor du Sépulcre ({ui attin- ici notre l'egard
et va bientôt nous arrêter quel(iues instants.
En tout cas, ce n'est pas un Trope.
CHAPITRE XIV
LES TROPES DE LA PREMIERE EPOQUE
— V INTROÏT
Tandis que le prêtre et ses assistants se revêtaient
dans le Sacrarium de la splendeur des vêtements litur-
giques, les psallentes, divisés en deux demi-chœurs,
chantaient, dès les premiers siècles, un ou plusieurs
psaumes dans la basilique peuplée de clercs et de
fidèles. Le premier demi -chœur chantait le premier
verset; l'autre demi -chœur chantait le second, et ce
chant alterné donnait au prêtre le temps d'arriver au
pied de l'autel'. A une époque qu'il est assez difficile
d'établir scientifiquement, ce psaume ou ces psaumes
étaient accompagnés d'un refrain de la même partie tiré
du psautier et qui reçut le nom d^Antiphona. C'est cet
ancien refrain, c'est cette Antiphona ad Introïtum ou ad
Ingressum qui chez les Romains a été appelée plus briè-
' Le moment précis où le célébrant doit arriver à Faute! n'est pas déterminé
partout d'une façon uniforme. Généralement il semble que cette entrée ait eu
lieu au moment où le chœur entonnait le Gloria de l'Introït. (Martène. De an-
tiquia Monachorum ritibus, 146 B, 147 P.) Aujourd'hui on ne conmience pas
rintroït avant que le prêtre soit à l'autel.
200 HISTOIRE T)K l..\ l'OKSIE IJTURfilQUE
vement Introïtus, chez les amhrosiens Ingressa, chez
d'autres Officium. L'Introït existe dans les Antijphonarii
a sando Gregorio ordinati : c'est tout ce que l'on peut
ici affirmoF de plus sûr. Mais quel en a él»' le premier
Hobif
\y^huriJiaf \nu\C\mier xn\rn\cof
^ AJTtxcr> fccrv ■ iycfe rLvcum fm&
, - r . . /. ■■ ^ ^
mjxre' ejcrruar^ fkcienftfrvdt
fvr fine V jtcrc-é^m
A L I T L fL
ODU NATVS i$T XVICTUS
- u^ S - < ^ -^Z ^ -
Type d'un Tropc de l'Inlroil (Bibl. de Saint -Gall, i8i, pp. C et 7).
inventeur? C'est ce que, faute de documents, on ne sau-
rait établir d'une façon suffisamment critique '. Enfin, et
1 L'attribution à saint Grép-oirc est commune dans nos 'l'ropaires : « Sanctis-
simus namque Gregorius, cuni procès fundcrot ad Dominum ut musica» do-
num ei dosuper in carniinihus dedisset, tune descendit Siiiritus sanctus super
eum in spocie columb;e et inlustravit cor cjus. et tune demum exorsus est canere,
ita dicens:.4</ lelevavi.» (Oxford, Douce, ms. 222, f" 3 r». etc. etc.) On a trans-
lornié en un Prologue de l'Introït (pour le premier dimanche de l'Avent) deux
petits jioèmes hexamétri([ues en Tlionneur de saint Grégoire, qui commencent tous
deux par ce vers ; Gregorius prœsul )neritis et twniine tiignus. Le premier n'a que
cinq vers; l'autre en a quatorze, et son introduction dans la liturgie a été attri-
buée au pape Adrien II par l'auteur d'une Vie de ce pape qui fait suite au
Liber ponti/iialis, mais qui n'a réellement aucune autorité. (Lebeuf, Traite
historiijite et pratique sur le chant ecclèsiastifiue , p, 103; D. Guéranger. Insti-
tutions liturgiques, 2» édit., I, p. 2(56.) On trouvera dans ce dernier ouvrage
(/. c., pp. 250 et 104) le texte de ces deux petits poèmes, qui se trouvent en léte
de nos plus vieux Anliphonaires et ont joui d'une véritable célébrité liturgique.
h
LES TROPES DE LA l^" ÉPOQUE — VINTROIT 207
quoi qu'il en soit, VAntiphona ad Introïtum ou Vlntroïtus,
une fois entré dans le corps de la liturgie, n'en est plus
sorti et y restera sans doute jusqu'à la fin des temps'.
Il importe ici de se faire avant tout une idée exacte
_ r // S - ///* J y
^ ^ ^ ' ^ ' . ^-
mtxndij/ effer Çkcruf depArre*
um iern^rcernivrn jaxhfuvernujTt
u*r cfiuccjiud cfUfxrerrtfhue- caj^t
Type d'un Trope de Vlnlroïl (Bibl. de Saint -Gall, 484, pp. 6 et 7).
de V Introït, de sa constitution, de sa charpente, des
différents éléments qui le composent.
Ces éléments sont au nombre de quatre :
Une « Antienne » (c'est ainsi que l'appellent les plus
anciens manuscrits de l'Antiphonaire), dont les pre-
miers mots, très caractéristiques, servent encore au-
jourd'hui à désigner un certain nombre de fêtes et ont
' Martèae signale quelques particularités relatives à l'Introït, dont quelques-
unes seulement méritent d'être notées. L'Introït de Noël était, en certaines
églises, répété jusqu'à cinq fois. [De antlquis Ecdesiss rilibus , III, pp. 103,
104.) A Tours, en cette même fête, avant l'Introït de la troisième Messe, deux
enfants criaient soudain : Accendite. Tous les assistants alors allumaient leurs
cierges, et on entonnait le Puev nains. [IbicL, 1. c.) Etc. etc.
208 IlISTOinK DK I.A l'OKSIE MTUHr.IQUE
servi, durant tout le moyen âge, ù dalcr des milliers
de chartes ;
Le verset (Tim psaume, (jidiiiairciiK'iil If |)ieiiii<'r. et
qui était désigné sous le nom de psalmus ' ;
Une doxologie, qui est celle des psaumes ;
Et enfin une seconde exécution, une rejirisr de l'An-
tienne initiale. C'est cette reprise que les rultiiquis des
Tropaires spécifient par ces deux mots : Ad repeten-
dum ■-.
Tels sont les quatre éléments constitutifs de rintioïl;
mais, si nette que soit cette énuméialion, un exemple
vaudra mieux. Voici donc l'Introït de l'invnilion de la
sainte Croix avec l'indication pj-écisc (\('> (|ii;ili(' jculics
dont il est formé :
1° Antipiiona. Nos autem gloriari oportet in (Irucc J)(.iiiiiii
nostri Jesu Christi in quo est salus, vita et resuirectiu iKistia,
per quem salvati et liberati sumus. Alléluia, alléluia.
2° Psalmus. Deus misereatur nostri et benerlicat nnhis. lllunii-
net vulluin smuii sii|)er nos, et niisereadir ikoIii.
> DoxoLOGiA. Gloi'ia l'ali'i et Filio rt S|iiiiliii saneto. — Sicut
erat in pi'incipio, et mine, cl srnipcr. »■( in sa'cnla sicculoruin.
Amen.
•4° Ad hepetendum (reprise de VAntipliona]. Nos autem glo-
riari oportet in Cruce Domini nostri Jesu Christi in quo est salus,
vita et resurrectio nostra, por rpioni salvati o\ liberati sunius.
Alléluia, alléluia.
Rien de plus sagement compris ni de mieux propor-
tionné que cette pièce liturgique. Les dilTi'rt'nls textes
' « Priiiiitivemerit un coiiliiiuait une partie de ce p>.Tunie vu répctanl IWm-
lienne à chaque verset, ou bien encore « tou^ le? ileu.x ver.^elî' ».
2 « Apre:; le Gloria, qui devait se chanter par toit le chœur, les chantres
ajoutaient iiriniitivement un versus ad rrpi'lcniltnn qui était d>^-tino à laisser
reposer le clneur avant qiw celui-ci répétât VJutroîl. ■>
LES TROPES DE LA V° ÉPOQUE — VINTROIT 209
qu'on y a fait entrer sont heureusement choisis ; leur
lien n'a rien que de naturel ; l'ensemble est excellent.
Voyons maintenant ce que les tropistes en ont fait,
et observons tout d'a])ord qu'ils ont aimé, tout particu-
lièrement, à travailler sur l'Introït. C'est par un Introït
et par un Offertoire que le premier tropiste connu,
Tutilon, s'est principalement imposé à notre attention,
et les Tropes de l'Introït ont joui d'une telle célébrité,
que bien des liturgistes n'ont admis que ceux-là.
Les Tropistes ont touché a toutes les parties de
l'Introït.
Ils ont — parfois mot à mot — tropé l'Antienne initiale,
qu'ils ont en outre ornée d'un prologue plus ou moins
développé et dont il nous est resté plusieurs types ' ;
' Tropes -Préfaces de l'Introït. — 1" Type développé (Tropus antequam di-
catiir officiu»)) : « Jam venit lux vera, et qualis sit ipse, Domine, nuntia nobis :
ille qui illuminât omnem hominem venientem in hune mundum. Deo gratias
semper ! In Bethléem natus est, Jérusalem visus est, et in omnem terram ho-
norificatus est rex Israël. Deo gratias ! Amplilicare carmina laudis, dulcis amator
melodiœ, et die : Lux fulgebit. » (Bibl. nat., 1118, f" 6 r" et y°.) Dans le texte
qui précède, officmm signifie Introït. — Cf. plus haut (p. 200) les Tropes ad
processionem , qui sont de même ordre.
2° Type avec Invitatoire. Cet Invitatoire est en vers ou en prose, a. En vers:
<i Rege nostro, carne tecto, voce Patris prodito, — Hac die nos ejus omnes
immoremur meritis. » ( Ici finit ITnvitatoire en vers et commence immédiate-
ment le Trope-Préface en prose) : <i Gaudendum est nobis, fratres carissimi, in
hac sacra solemnitate, laude decenti, in qua summo puero Stella micat splendore
novo. Cui omnes pangamus dicentes : Ecœ advenit. » (Octave de TÉpiphanie.
Bibl. de Saint-Gall , 376 . ) = &. En prose : « Hodie cantandus est nobis puer queni
gignebat inelTabiliter ante tempera Pater, et eumdem sub tempore generavit in-
clyta mater. » ( Ici finit Tlnvitatoire et commence la Prélace ) : « Quis est iste puer
quemtam magnis prœconiis vociferatis? etc.» (Noël. Bibl. de Saint-Gall, ■iS^, p. 13.
C'est le fameux Trope de Tutilon publié plus haut, pp. 63, 64.) » Infirma mundi
eligis — Ut fortia confunderes, — Nec plene membris prseditos — Triumpho dans
idoneos. » (Ce qui précède est ITnvitatoire écrit en capitales; ce qui suit est
la Préface): « Hodie parvulorum cunulœ pretioso perfunduntur sanguine; sed
Christus, qui quœritur, potenter evasit inlsesus. Ideo, fratres devoti, etc. »
(SaintsInnocents.Bibl.de Saint-Gall, 376, p. 44.) — Cf. bibl. de Saint-Gall, 381,
p. 221 : Hodie pro Domino; 376, ]>. 48 : Forma speciosissinms féliciter, etc.
30 Type bref : <( Adest nunc celebranda sollempnitas constantissimœ virginis
Lucite, quam Propheta dudum intuens féliciter conlaudat dicens : Dilexisti. »
(Sainte Lucie; Bibl. nat. lat., 1118. f» 1 r°.) .■ Jam fulget Oriens. jam praecur-
I — 14
210 IIISTOIHK DE LA POESIE LITIIlUilOUE
Ils ont tropé le Psaume ^ ;
Ils ont tr()})é le Gloria^ ;
Ils ont tropé la reprise de l'Antienne l
runt 8itrna ; j;mi v'.'iiil l)iiniiiius visiUnro nos. Allfliiin. " fHC9.) a Queni
vales cecinerunt jain in ulcru Virginis deBceiidil. iJnuiinus di.vit. » (Noi-I,
Messe de la nuil; Hiljl. nat. lat., 887, ï" 8 v».)
''(" Type moyen. Il y a i nlic le type développé et le tyjje lirel' un modèle in-
i^ om eiuf • ' AL
\ltVi.'Uû3l9- SlxnurvJif efi: ho
die- pXnxcor\f munAx-
^ um etuf* éuiuf^ote-flAf efir
p
^^'^A-^ ^ '' /'^^r'^A
A L I T £ K
]
3 tuf {^(bffxcer- fxxzxir^ ffcuir
Type d'un Trope de i'Introïl (l5iljl. de Saint-Uall , Aai, p. l'.i (Noël). Voir plus haut, p. 62,
la suite de ce dernier morceau, qui esl le type d'un Trope sans paroles).
lermédiaire dont nous devons donner un exem])Ie : .. Hodie Hej-'i ma<ïno Maci
munera oblulerunt; hodie Filius Dei a Johanne baplizari voluil; hodie Jésus
r.hrislus aquani nuilavit in vinuni. Onnies, una voce, eanlenius (Urentcs :
Ecce. » (Epiphanie. Hild. nat. lat., 887. I» 10 r».) Ce dernier Tri>pe ••.-l un véri-
table modèle de concision et de doctrine.
1 Type des Trojjcs ad Pmhninn : « Agmina jam codica dent libi laudes p.?r-
henni : Exaudi. » (Bihl. nat. lat., &87, l"» 17 v. )
s Type des Tropes ad Gloria : « Hodie indytus martyr Stephanus Paradisum
laureatus ascendit. Nunc, omnes, gloriam pangite Triniliti sumnue. Gloria. <>
(Bibl. nat. lat., H18, I» 19 r°.) Dans ce manuscrit, les Tropes ad Gloria de l'Introït
sont placés, comme une série distincte, ajirès les Tropes de l'Introït lui-même.
3 Type des Tropes ad repelendum : « Gaudeamus omnes in Domino qui leni-
tam gratiam sancto Stéphane demonstravil ut cœlos viderel aperlos et Filium
honiinis staidem ad de.vterain Patris. Eia, dicite ; Etenitii.n (Saint Etienne.
Hibl. nat. lat., 1118, 1" l'.l r".) Même observation que pour les Tropes ad Gloria.
— CI'. Homo, Angelica. f" |'.)0 v\
LES TROPES DE LA l'° ÉPOQUE — VINTROIT 211
Rien enfin, rien n"a pu se dérober à leur dange-
reuse activité , et voici, pour continuer l'exemple pré-
cédent et donner une idée plus claire des choses, ce
qu'ils ont fait de l'Introït Nos autem :
■1" Glorientur cuncti fidèles Christi in Inventionis die ligni pre-
liosi. Nos autem gloriari oportet in eo qui nos proprio redemit
cruore, in cruce Domini nostri Jesu Christi, cujus complexu Deus
Pater régit undique mundum; in quo est salus, viia et resur-
^UCTAT VUlSiû VtCTùKi
^if^ - ^-^^/-.-^^
Type d'un Trope. — Préface de l'hilroït, 484, p. 35. (Saint Jean rÉvangéliste. )
Le premier mol est [e]ructul.
rectio noslra; per ipsum indiiti stolam immortalitatis , per queni
salvali et liberali sumus. Alléluia, alléluia.
2-5 Ad Psalmum. Se ipsum offerens hostiam inimaculatam Deo
Patri pro nobis, Deus misereatur nostri et benedical nabis. Illu-
minet vullum suurn super nos, et misereatur noslri.
*3o Ad Gloria. Gloria nostra cruels est Victoria et paradisi
janua. Gloria Palri et Filio et Spirilui sancto. — Sicut erat in
principio, et nunc, et semper, et in sœcula sœculorum. Amen.
¥ Ad repetendum. Gœlestem, Cln-iste, Largire benedictionem,
pro noljis fundens in cruce sanguinem. Nos autem gloriari opor-
tet in cruce Domini nostri Jesu Christi, in quo est salus , vita et
resurreclio noslra, per quem salvali et liberali sumus. Alléluia,
alléluia ' .
Cet exemple paraîtra sans doute décisif, et montrera
1 I5il)l. uni. lat., 1120, 1" 28 r et v".
212 HISTOIRE Di: I, A POKSIE LITURGIQUE
jusqu'à quel degré les tropistcs ont possédé l'art d'al-
longer l'Office divin.
Rien de régulier, d'ailleurs. Un grand nomlirc (riii-
troïts n'ont subi les interpolations des troiiislcs (pie
dans leur première partie, dans leur Antienne initiale.
D'autres ne sont tropés que dans cette Anli<'inie et
dans le Psaume, et il est à remarquer, pour épuiser
ce sujet, que les Tropaires nous offrent plus rarement
les interpolations ad Gloria et ad repetendum.
D'autres Introïts n'ont qu'une préface'.
Certains sont longuement tropés, et, pour ainsi par-
ler, phrase par phrase -, tandis que d'autres le sont
d'une façon plus brevet
' " Eia, caiioiulo sonos supplici inodiilaininc dulces, Gai«/t.'a>Hiis. » (Toussaint.
Bibl. liât, lat., 1118, f» 93 r".) « VA sodeat in tlirono David, palris sui, in a-ler-
num, Ecce. » (Epiphanie. Bibl. nat. lat., 1120, 1° 1 v°.)
2 « Dilectus iste Doniini Johaniies est apostoius, scriplis cujus et monilis pollet
decus Ecclesiee. — Quoniam Dominus Jésus Christus sanctum Johannem plus
quam cœteros dilisrebat apostolos, In medio Ecclesix aperuit os ejus, L't Sacra-
mentum fidei et Verbum coœlernum Palri scriptis [lariter et dictis prœdicaret.
Et hnplevit eum Boui'tnus, Qui cum in tantum dilexit ut in ccena sacralissima
supra pectus suum ipsum rocunibere permisisset, Spivitu sapienliœ et intellfi-
ctiis. Quo inspirante, evangelizavit, dicens : In Prini.ipio eral \'erbum, et Ver-
bum erat apud Deum, et Dous erat Verbum, Slolam yloriw ixcluit eum.
Ps. Bonum est confitcri Domino, et psaUere nomini tua, Altiss'nne. Inde
nos moniti, omnes uiia voce collaudantes tibi, Chrisle , sancloque Jolianni psal-
limus, dicentes : In 'medio Ecdesiee. Amen. » ( Saint Jean rËvangéliste. Bibl. de
Saint-Gall, 376, pp. ^i2, 43. — Attribue à Tutilon et déjà cité par nous, p. 3;
mais c'est un type tellement complot, que nous avons jugé nécessaire de le ci-
ter une seconde fois.)^ «Domine Jesu Christe, summe princeps, quia te pra?-
dicabam et colui, et in tuo nomine multa operatus sum miracula, Etcnim. Oui
se exigtimabant legis esse peritos suisque mendaciis me vincero cupientes Et
advei'siim. Me scductorem legisque Mosaïca? blasphematorem esse dicenles, Et
iniqiii. Cum lapidibus interlicientes comniunemque cunctis sepulturam mihi
denegantes. Adjuva me In quo omnem s|),^m nieam llducianique positam ha-
beo, Quia servus. Ps. Beati immaculali! ijuam iste adeo servavit ut niorli pro
ipsa succubuerit. Glovia. l'ro qua vonerandus Stephanus usque ad morlem
viriliter disputando certavit. Etenim.v (Saint Etienne, Tropairo dy Saint -Emnie-
ran, etc.)
' « llodie in terra pax est. Puer nalus est uobis. Deus de cœlo dédit nobis
unicum Filium suum. Et Eilius dalus est nobis. Poteslas ejus in cœlo et in
terra. Cujus imperium super humerum ejus, Et regnum in mami ejus. Et voea-
bitur nomen ejus, Magiius et metuendus, et pius super omne~, Magni consilii
LES TROPES DE LA V° ÉPOQUE — VINTROIT 213
Il est des Tropes de Tlntroït qui sont en prose, et il y
en a qui sont métriques ; d'autres enfin sont mêlés de
prose et de vers. Ces vers sont parfois des ïambiques ,
mais le plus souvent des hexamètres ^
Nous aurons tout dit- en ajoutant que le plus ancien
Tropaire de Saint- Gall nous offre des Tropes de l'Introït
SANS PAROLES et Uniquement composés de vocalises.
Ces mélodies sans paroles ne sont pas, comme nous
l'avons dit, sans offrir quelque difficulté.
Nous estimons, encore un coup, qu'il faut entendre ces
Tropes musicaux dans le sens que Guillaume Durand
angélus. »(Noël. Bibl.de Saint-Gall , 484 , pp. 8, 9.)= « Cœlitus instrucli Gau-
deamus. Stirpe David fulsit rais hœc stemmate cslsi De cujtis. Spiritus œthe-
rei pro qua pia cautica solvunt Et conlaudant. » (Nativité de la Vierge. BibL
nat. lat., 1084, f» 49 r°.) = « Puer... nobis. Nativitas est hodie Salvatoris
niuiidi. Hnmevum... ejus. Cujus potestas est in hoc sœculo... Nomen ejus Deus
fortis, Pater futuri sœculi. » (NoëL Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 12.) = « Cœ-
lica cœlestem décantent verba Johannem : In medio , Aurea pro meritis sus-
tollens régna polorum. Et itnplevit, Principium reserans trinum Deitatis et
unum. Stoîam. Ad Gloria. Summœ Trinitati et unicœ, supplici modulatione,
canamus Gloria. » (Saint Jean l'Évangéliste. BibL nat. lat., 887, f" 14 v".)
^ Il serait inutile de citer ici un type des Tropes de l'Introït en hexamètres :
il y en a par centaines. On trouve çà et là quelques distiques : « Nunc meino-
rare tuse, prsesul, super œthera turmœ — Quo valeat summo cantica ferre Deo»
(1120, fo 6H ro-v"); mais les ïambiques sont beaucoup plus rares, et je n'en
connais que peu d'exemples : « Laudemus omnes Dominum — Qui, Virginis per
uterum, — Parvus in mundum venerat, — Mundum vincens quem fecerat.
Puer. » (Noël. Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 5; Vienne, 1609, f°4r°.) «Exsurge,
rector gentium — Nec moriturus amplius, — Orbemque totum posside — Tuo
redemptum sanguine» {TroY)Uf, Be resurrectione Domini. Berlin, fo52 r", etc.). —
Cf. le même ms.,f° 12 v° : « Inlirma mundi eligis — Utfortia confunderes — Nec
plene membris preeditos — Triumpho dans idoneos.» Et plus loin : « Nato novo
principe — Viso novo sidère, — Urbe Magi regia — Ipsum vadunt queerere. »
(15 v°.) Ces ïambiques, comme on le voit, sont le plus souvent assonances.
F'ius rares encore sont les septenarn trochaïques : « Rege nostro, carne tecto, »
déjà cité plus haut. (Berlin, f» 17, etc. etc.).
2 II y a cependant deux mots qui restent encore à expliquer dans la partie de
nos Tropaires qui est relative à l'Introït. C'est d'abord le mot ad sufficiendum
(Bibl. nat. lat., 887, f»» 8 v», 10 v°). Ce mot me paraît signilier à peu près
« prout placuerit, ad libitum, à volonté». (V. Ducange, éd. Didot, t. VI, p. 426,
col. 2, lignes 14, 15.) Les mots ad offichun (887, f-' 11 r") sont plus faciles
à expliquer. Officium, en effet, a le sens précis d'Introïtus. Ducange en cite
des exemples, et, aujourd'hui encore, le Missel et le Graduel dominicains don-
nent à l'Introït ce môme nom.
21/i IIISTOIUK l»K LA i'OÉSIK L I T f lidi (j IJE
attriliue au chant des Séquences sans paroles : « Dans
certaines églises, dit-il, on neumatizk l'aik des sé-
quences SANS EN PRONONCER LES PAROLES '. »
C'est à dessein que nous citons ici ce texte jjour la
seconde fois. Il est d'une importance capitale, et lira ne
Type d'un Tropc de Vlntroïl snns paroles (Ribl. de Saint -Gall, 'i8i, p. 100).
s'oppose à ce qu'on l'applique à nos Tropes, surtout à
ceux de l'Introït l
1 RathmaJc, I\', cap. xxii, éd. de Lyon, 1574, 1'" 124 v : « (Jua-dam eccle-
siiT niyslice pneumalizant Sequentias sine verbis, aut snltem aliquos versus
earuiii. » Cf. Téd. Ch. Barthélémy, U, 127. —Le le.xte suivant n'est pas
moins précieux : « In quibusdam ecclesiis, in quibus nouma non dicitur... loco
jubili et neuma) Trophi et Sequentiœ decantantur. » (Guillaume Durand, /. c,
V, cap. Il, § 32, éd. de Lyon, 1576, f"' 216 v», 217 r'.)
* Dans tous les Tropaires que nous avons analysés, le seul qui nous olTre
des Tropes <i sans paroles » c'est le ms. 484 de Saint -Gall. En voici l'énuméra-
tion : .Noél, pp. 10, 11, 12, 13; saint Etienne, pp. 27, 30; saint Jean, pp. 38.
39, 40; Dédicace, pp. 45, 47; Messe Prote.cisti pour un Martyr, \>. 46; In-
troït Multx Irilndationes , p. 46; premier dimanche du C-Trèm*. j». 47; Ha-
meaux, p. 47; Messe Staluit pour un Martyr ou pour un Confesseur Poulif;,
p. 47; Messe Osjusli puur un Confesseur, i>. 48; Messe Iiilrct j'our plusieurs
LES TROl'ES DE LA 1''= ÉPOQUE — VINTBOIT 21o
Nous nous persuadons, comme nous l'avons dit
ailleurs, que le chœur avait à choisir entre les Tropes
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Type d'un Trope dramatique de l'Introït (Bibl. nat. lat., 1118, f» 8 v i)
Martyrs, p. 48; Sainte Innocents, pp. 54, 56; Epiphanie (six Tropes sans
paroles), pp. 83, 86, 87; Purification, pp. 91, 92; 102; Pâques, pp. 109, HO,
114; lundi de Pâques, p. 116; mardi de Pâques, p. 116; mercredi de Pâques,
p. 117; Octave de Pâques, p. 117; Ascension, pp. 122, 125; saint Jean-Baptiste,
pp. 146, 147; saint Pierre, pp. 151, 152; saint Laurent, p. 153; Assomption,
pp. 161 , 168, 170; Nativité de la Vierge, pp. 172, 175; Messe d'un Confesseur,
pp. 178, 179; saint Michel, pp. 181 , 185, 198, 200, etc. — Quelques Tropes sans
paroles de Tlntroït (en dehors de ceux que nous venons d'énumérer) sont pré-
cédés d'un Invitatoire parlé. En voici un type, qui est emprunté à l'Office de
saint Jean l'Évangéliste : « Laudes dicamus Greatori nostro. » C'est tout, et les
autres Tropes du même Introït sont purement musicaux. (Bihl. de Saint-Gall,
/:84, p. 38.)
1 Ce fac-similé est le seul qui , dans le présent livre , ne soit pas dû à la
photographie.
216 IIISTOIHK DE I.A POKSIE E IT (' lUilO C E
parlés et ces mélodies sans paroles qui ont été' an-
térieures aux paroles elles-mêmes. C'est ainsi qu'à
Saint- Gall, aux ixc et xc siècles, on pouvait, le joui-
de Pâques, chanter le Trope Resurrexi, principe in-
ferni devido, claustris ac reseratis, etc., ou hien, ad
^ "^ 1- Q ti *^ / - ^ '' -
^ ^'-^ f - -"^ ^. */" .
3I( orie/r \i\c iurmcrc (icinrvrtxii
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pcerar- |re nxxntvxzt, <faiA. {tiv
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C^TOA/AMiACTUi-HOMOru^
*^ . ^ / /i J^ - -
Type d'un Trope dramatique de Vlntroïl JVûA. de Saint -Gall, 484, p. 110).
libitum, exécuter seulement les mélodies sans paroles
intercalées dans l'ancien Introït'. Il en était de même
pour d'autres fêtes -.
Bref, il y avait alors des interpolations avec paroles et
des interpolations sans paroles, entre lesquelles il fut
longtemps permis de faire un choix. Mais les Tropes
parlés finirent par l'emporter sur les autres, dont il ne
reste que peu de traces dans les Tropaires du xie siècle \
' Bibl. de Saint-Gall, 484, pp. 106, 109. Voy. le fac-simUe de la p. ili.
* Voy. un autre type, tout aussi important, dans le même ms. 484 : « Hodie
natus est Christus, etc.» (Noël, pp. 6,8.) Etc.
' Les Tropes parles sont eu.\-nicnies ornés de jubili, de ncunics ou de voca-
LES TROPES DE LA T" ÉPOQUE — VINTROIT 217
Il résulte de là que , — si
du Kyrie et les Séquences,
— les Tropes de l'Introït
sont ceux qui, au point
de vue musical, ont eu le
plus de solennité et d'im-
portance. Mais ce n'est
point là le seul intérêt
qu'ils présentent, et nous
allons montrer qu'il y faut
chercher l'origine pre-
mière du Drame litur-
gique, et par conséquent
du théâtre moderne.
La question est vivante,
et rien ne peut être plus
intéressant que de sui-
vre à travers les temps
le progrès, la marche, la
transformation d'unTrope
dramatique de l'Introït en
un véritable Mystère, en
un Drame complet.
Nous possédons un cer-
tain nombre de ces Tropes
dramatiques de l'Introït :
ils se rapportent aux fêtes
de Noël, de Pâques, de
l'on en excepte les vocalises
3'
' ej Œ-An «;ilu.r aJ fVj> ut c rV « <L>7n» n»
/ n/j"''^ / ^ J J f'k^ , ^.C
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C-x^wUuc Cicliipr'i-*-acLjTaAnr(i
l
tCmm
Jf
Type d'un Tropc dramatique de V Introït
(Bibl. de l'Arsenal, 1169, f" 11 vo).
lise» INTÉRIEURES doiit il ne semble pas que les érudits se soient encore assez
occupés. Voy. notamment, comme type, le Trope pascal Factus liomo dans le
manuscrit de Saint- Martial du xi» siècle, qui est aujourd'hui conservé à la
Bibliothèque nationale sous le n° 1121 (f" 13 r°). Etc. etc.
218 HISTOIRE DE l..\ l'OÉSlE LITURCIOIJE
l'Ascension et de la Saint- Pierre. Fêtes populaires, s'il
en est.
Le plus ancien Trope connu, le fameux Hodie can-
tandus, nous apparaît dans les plus anciens Tropaires
sous une forme visiblement dramatique : Interrogaïio.
Qiiis est iste puer? — Responsio. Hic enhn est, etc.*.
C'est le premier germe d'un futur théâtre; c'est l'em-
bryon qu'il faut presque étudier au microscope. Mais
un autre Trope de Noël révèle un nouveau progrès
et a exercé une plus profonde influence siii' l;i for-
mation du drame : « Quem qiixritis in prœsepe, pas-
tores, dicite? — Respondent. Salvatorem Christum
Dominum, infayitem pannis involutum , secund)(m ser-
monem angelicum. — Respondent. Adest hic parvulus
ciim Maria, matre sua, de qua, vaticinando, Isaïas
Propheta : Ecce Virgo concipid et pariet filium. Et nun-
tiayites, dicite quia natus est. — Respondent. Alléluia,
alléluia. Jam vere scimus Christum natum in terris, de
quo canite, omnes, cum Propheta dicentes: Puer natus
est *. » Ces derniers mots sont le commencement de
l'Introït pour la troisième Messe de Noël, et l'on con-
clura de là, comme des citations suivantes, que ces
Tropes dramatiques dont nous faisons ici l'histoire ap-
partiennent à la famille des Tropes-Préfaces, des Tropes-
» Saint -Gall, 484, p. 13; Ribl. nat., nouv. acq., 1235, f» 205 v», etc. —
Cf. 10510, fo 2 r», où le mot Interrogatio est remplacé par Infjuisilio, etc.
Dans le ms. de Vienne, 1845, f' 53, ces doux mots Interrogatio , Responsio
sont en capitales rouges.
2 Bibl. nat. lat., 1118, f°8v,etc. Dans le ms. d'Oxford (Douce, 222. fo6 v»),
la mise en scène de ce même Trope est plus précise encore? : « In natale Do-
mini , ad Missa»! (Messe du jour) sint p.vrati duo diacom inpiti dalmaticis,
RETRO ALTARE DICENTES : « Qucm qucCritis )) , etc. Respondeanl duo cautores in
choro : « Salvatorem », etc. Item diaconi : « Adest », etc. Tune cantor dical
excelsa voce : «Alléluia, alléluia. Jam vere scimus, etc. Puer natus est. » Tous
ces Tropes dramatiques aboutiront un jour au mystère ou au dr.\me des
PASTEURS. (Einsiodeln, 366, etc. etc.)
LES TROPES DE LA l'*" ÉPOQUE — VINTROIT 219
Invitatoires de rintroït. Il n'en pouvait guère aller au-
trement.
Nous aurons lieu de revenir sur le Trope de l'Ascen-
sion : « Quem creditis super astra ascendisse, o christi-
colse? — Respoxdent. Christum qui surrexit desepulcro,
0 cœlicolse, etc. ', » et sur celui de la Saint-Pierre: « Quis
es, domine? — Respondet. Adsum Petrus, « lequel est
précédé d'une sorte de petite indication de mise en
scène: Petrus, ad ostium pidsans, occurrit ; puella
illum interrogans hocius -.
Nous avons réservé pour la fm les Tropes drama-
tiques de l'Introït de Pâques ^ Cette fête prêtait au
drame plus encore que celle de Noël. L'Introït lui-
même avait depuis longtemps ce caractère : Resur-
rexi ; mais les Tropes l'ont encore accentué plus
vivement : « Exsurge , dit le Père d'en haut, exsurge,
gloria mea, fili. » Et le Fils répond : « Exsurgam dilu-
culo, pater \ » Il y a là tout un petit drame céleste et
vivant. Néanmoins, c'est au fameux Trope Quem quœri-
tis qu'il était réservé d'agir le plus efficacement sur les
développements du drame chrétien.
L'histoire du Quem quseritis ' n'est rien moins que
» Bibl. nat. lat., 1118, f» 57 v» (Saint- Martial) ; 1121, f> 21 v» (Saint-Mar-
tial); 9449, f» 46 (Nevers), etc.
2 Bibl. nat. lat., 1 118, f» 73 r».— Cf. le manuscrit de Rome, Victor-Emmanuel ,
1343, f" 33, etc.
3 II convient ici de tenir en éarale estime le Victitnse paschali et de peser
scientifiquement son influence dramatique, qui a été considérable a côté de
CELLE DE NOS TROPES.
* Bibl. nat. lat., 887, f» 20 r».
^ Les textes évangéliques d'où ce Trope est tiré sont les suivants :
lo Saint MaUliieu, xxvni, o, 6. o Respondens auteni Angélus mulieribus : Noiite tinicre
vos ; scio enim qiiod Jcsum, qui crucifixus est , quseritis. — Non est hic; surrexit enini, sicut
dixit. Venile,ct videte locum, ubi posi'us erat Dominus... i. = 20 Saint Marc, xvi, 6 : « No-
iite cxpavescere : Jesum quaeritis Nazarenum crucifixum; surrexit, non est hic; ecce locum
ubi posuerunt euni. » = 3o Saint Luc, xxiv, 5, 6: <( Quid quœritis viventem cum mortuis?
Non est hic, sed surrexit. »
On remarquera que ces textes ne sont ni littéralement ni littérairement
220 iiisToiin': f»!'] I. \ l'oKsii'; i.ni'Hiiini'E
l'histoire des origines du théâtre sacré, et nous allons
essayer de le montrer en (jii('|(|iics ]i|,mes.
Voici d'abord le Trope en son état pi iiiiitif. d td que
nous roffrc le j)lus ancicii manuscrit de Sainl-lJall :
« Qiiem qi(ieriiis in aepidchro, \o\ chrldicolui? — Je-
sum Nazarenum crucifixum, o vœlicohr. — Son esl hic:
surrcxit, sicut priedixerat. lie, nuuliate quia surrexit
de sepulchro. liesurrexi '. »
Dans les manuscrits de Saint-Martial, on peut (|('jà
constater un développement nouveau. Le mot respon-
dent, (Fahord, y indique plus constamment les rôles
des personnages-, leur dialogue, leur jeu; mais surtout
quelques lignes y sont ajoutées aux précédentes et
semblent continuer discrètement une rubrique de mise
en scène : Respondent : Alléluia. Ad sepulchrum re-
sidens Angélus nuntiat resiirrexisse Christ um : « En
ecce completum est illud quod olim ip^e per Prophetam
dixerat, ad Patrem taliter inquiens: Resurrexi l »
« Mise en scène, » avons-nous dit. C'est qu'en effet il
y eut mise en scène de fort jjonne heure, et sans doute
dès le ixe siècle. Oui, sur l'autel même, ou derrière
l'autel, ou à l'entrée de la basili(iue, on dressa la figura-
réquivalent e.\act de notre Trope; et celt3 observation s'oppli(jii''. ^^u^toul à
son début qui est si nettement dialogué, à l'opposition entre cliristicoUc el
cœlicolsc, etc.
' Bibl. de Saint-dall, ''i8A. p. 111 : Jcsioii est écrit eu caractères grecs.
2 Cf. Berlin, f»» 45 v% 48 r»: « lNTEnR(5GArLa : Que m (|uaritis? Responsio:
Jesum Nazarenum, etc. »
3 Bibl. liât., 1H8, fo4n v°. Dans le ms. 9449 (f» 34 r"), ce Trope dramalicjue ne
fait plus partie de ITntroït, et il se prés Mite sous la forme suivante, qui a persisté
dans quelques Mystères : « QHem quœritis, etc. Jesum, etc. Non est hic,
surre.xit sicut prœdixerat. Ite ; nuntiate quia surrexit. Alloluia. — Hosurrexit
Dominus hodie, resurrexit loo fortis, Christus Filius Dei. l»icite Eya. Te
Deum, etc. Dicant nunc, etc. Qui sunt hi si'rmones? etc. Vidi aquam, etc.Anl.
Sedit Angélus ; Ante Crucilixum : Egosum A et Ù; Kgosum vestra redemplio. »
Après quoi l'on chante le «Salve fesla dies » et enfin l'Introït.
LES TROPES DE LA 1'° ÉPOQUE — VINTROIT 221
tion d'un tombeau, comme on y avait dressé à Noël la
représentation d'une crèche. C'est devant ce tombeau
qu'on chanta le Trope dramatique dont nous venons de
donner le texte. Le moment où on le chantait a pu
varier; mais c'était le plus souvent, sans doute, à la fin
de la procession et, comme le dit un de nos plus pré-
cieux manuscrits \ ante officium, avant l'Introït.
Sur ce fait de la construction d'un sépulcre simulé,
près duquel on chantait ainsi le Qiiem quxritis de
Pâques, nous avons, à tout le moins, deux témoignages
que l'on ne peut récuser. L'incomparable Tropaire
d'Echternach, qui fut terminé vers la première année
du xie siècle, nous offre cette rubrique précieuse : « Ad
visiTANDUM SEPULCHRUM. Interrogatio : Quem quxri-
tis-, » et un manuscrit de Saint-Gall, au xn^ siècle,
nous dit d'une façon tout aussi explicite : « In visita-
TiONE SEPULCHRi, VERSUS: Quem quxritis '. »
Un grand pas vient d'être fait, mais ce n'est pas le
dernier. Les esprits travaillent sur le Quem quxritis;
on lui donne de plus en plus une forme dramatique; on
lui impose même une autre place dans l'Office sacré;
on ne le soude plus à l'Introït; on le chante à Matines
après le dernier répons et avant le beau chant du Te
Deum qui devra un jour clore dignement tant de Mystères.
Encore, encore un pas, et nous aurons sous les yeux
un véritable drame. Écoutez.
Nous sommes à Laon : c'est le matin, le beau matin
de Pâques. Les deux grandes cloches sonnent en même
1 Bibl. nat.. 1118, 1° 8 v".
2 Bibl. nat. lat., 10510, f" H r».— V. également Berlin, f-' 45 v", 46 r° : « In
die sancto Paschae, ad visitandum sepidchnun Domini. »
3 Bibl. de Saint-Gall, 360, p. 31 . — .Cf. le ms. 1139, f» 53 r : « Ubi est Christus,
meus Dominus et Fiiiusexcelsus. Eamus viderepepulchrum : Quem quaM'itis. »
222 HISTOIRE DE LA POÉSIE LITI li'iinUE
temps, et la Procession se met en marche vers le
Sépulcre. En tête, les petits clercs avec les cierges
et les « enseignes »; d'autres clericuli cliargt's de
chapes de soie et portant des croix d'or; puis le
chantre et le sous-chantre, bâtons d'argent en main,
escortés de deux diacres en chapes et de quatre sous-
diacres en tuniques, soutenant sur leurs hras le poêle
dont on aura lieu de se servir tout à l'heure; puis
enfin la longue file des autres clercs, marchant deux
par deux, cierges allumés. On arrive Icnlciucnl au hut
de la procession. Les deux diacres chantent Ardens
est \ et un petit clerc, qui a été d'avance logé dans le
Sépulcre, prenant à partie les deux diacres qui se sont
arrêtés : Quem quiiritis? leur demande- 1- il d'une voix
claire. Jtsum Nazarenum, répondent-ils. Et le petit clerc
de leur crier : iYon est hic. Le chantre et le sous-chantre
continuent le Surrexit Dominus vere, suivi du Victimie
paschaii laudes, et se dirigent en chantant vers le
crucifix qui est au milieu de l'église. Le célél)rant, en
chasuble blanche, portant sur sa poitrine le calice d'or
avec le corps du Christ, sort alors du sépulcre et se
place sous le poêle que quatre sous-diacres, en tuniques
blanches, étendent avec des bâtons au-dessus de sa
tête. La procession s'ébranle de nouveau au chant du
répons Christiis resurgens et du verset Dicaiû nunc
Judxi"-. L'évêque cependant est là- bas dans sa chaièrc,
mitre en tête, attendant que le prêtre ait déposé sur
l'autel son précieux fardeau, et. d'uue voix reteiitis-
1 Cet Ardens est est entré dans le corps de plusieurs Mystères : o Ardens
est cor nieum; dosidero videre Dominum meum. Quœro, et non invenio ubi
posuerunt eum. » (Coussemaker, Drames liturgitiues, pp. -io, 183, 26-i.)
- V. le texte du Dicant nunc Juiln-i dans le nis. do la bibl. de Saint-Gall
360, p. 31; dans le ms. de la Bibl. nat. laf. 9449, l- 3'i r»; etc. etc.
LES TROPES DE LA 1'''= ÉPOQUE — VINTROIT 223
santé, il s'écrie alors : Domine, labia mea aperies. C'est
le commencement des Matines '.
A Soissons le rite est à peu près le même; mais
l'évêque y prend place dans la procession. L'élément
dramatique est d'ailleurs plus visible ici qu'à Laon. « A
la fenêtre du Sépulcre » se tiennent deux diacres en
dalmatiques blanches, qui représentent les Anges. L'un
est à droite, l'autre à gauche, et tous deux en même
temps : Quem quxritis in sepulchro , o christicolse?
disent-ils, et deux prêtres en chapes, qui figurent les
saintes Maries, leur répondent: Jesum Nazarenum cru-
cifixum, 0 cœîicolœ. Les deux diacres -anges de s'écrier
alors : Non est hic, surrexit sicut prœdixerat ; ite, nun-
tiate quia surrexit, et les deux Maries d'ajouter sur un
ton plus élevé : Alléluia, surrexit Dominus hodie; re-
surrexit leo fortis, Christus, Filius Bei. Deo gratias.
Amen. Du fond du sépulcre alors, le chapelain de
^ « In die Paschse ad Matutinum duœ magiiae campanœ de miraculis insimul
pulsantur. Processio vadit ad Sepulchrum ordinata iu moduni qui sequitur.
Primo preecedit clericulus, aquam benedictain deferens ; hune sequuntur duo
clericuli ferentes insignia ; duo alii clericuli ferentes cereos ; duo alii clericuli
cappis sericis induti, ferentes duas cruces aureas; ho3 sequuntur clericuli;
deinde cantor et succanlor cappis sericis induti, portantes baculos deargenta-
tos in manibus; deinde duo diaconi similiter cappis sericis induti, et quatuor
subdiaconi canonici, albis tunicis induti, pallium supra brachium ferentes; se-
quuntur alii combinati, unusquisque cereum accensum deferens. Prœdicti vero
diaconi ad ostium Sepulchri venientes incipiunt : Ardens est. Clericulus stans in
Sepulchro respondet : Quem Qu^Rrns? Diaconi : Jesum Nazarenum. Clericulus :
Nox EST HIC. Postea cantor et succentor incipiunt : Surrexit Dominus vere.
Alléluia. Deinde psal. Victimse paschali laudes. Et, sic cantando, procedunt
ante Crucifixum in medio ecclesiee. Sacerdos, alba casula vestitus, portans cali-
cem cum corpore Christi, egrediens de Sepulchro, reperit ante ostium quatuor
subdiaconos albis tunicis indutos, pallium super baculum toUentes, et illo pro-
tectus, incedit in fine Processionis, prœcedentibus duobus clericulis cum cereis,
et aliis duobus juxta ipsum cum thuribulis. Dum autem Processio pervenerit in
medio ecclesiœ , cantor et succentor incipiunt responsorium : Christus resurgens.
Duo diaconi cantant versum Dicant nunc. Quo cantate, Processio intrat chorum
cautando ; Quod enim vivit. Sacerdos calicem super altare doponit. Intérim
campanae simul pulsantur; episcopus stans in cathedra, mitra et cappa prœpara-
tus, incipit : Domine, labia mea apeWes. » ( Martène . De antiquis Ecclesiœ riti-
bus, III, 482.)
224 lîISTOiriE DE LA POÉSIE MTCRGIQUE
révoque, en surplis, tend aux diacres le calice avec le
corpus iJomini. Aussitôt toutes les sonnettes tintent,
toiUos les cloch(3S retentissent. La sainte Eucharistie
s'avance sous un dais que les sous-diacres soutiennent;
la procession entre dans le chœur, le prêtre y pénètre
après elle, et dépose l'hostie sainte sur l'autel dont on
vient de fermer les grilles. Il ne reste plus qu'à chanter
le Te Deum '.
Le Quem quœritis cependant parcour.iit victorieuse-
ment toutes les églises. On le trouve au noid et au
midi, à Strashourg- et à Narbonne '. Dans le nord, il
' « Tune cat processio ad Sepulchrum i^ic. l'uor primuni l'oreiir; tinliniinljula, cl
alii cuni vexillis; deinde candelabra, thuribula, crux, quatuor subdiacoiii in aibi*.
Hos sequuntur duo presbyteri cum cappis de pallio; ca-leri quoque in ordine
suo. Ad ullimum episcopus, cum baculo pastorali et niitra et cappa do pallio;
cum ipso veio capellanus. Et cum perveiitum fuorit ad sepulchrum, invenian-
tur ii)i duo diacones, aibis simplicibus [et in] capitibus auiictis cuoperli, uiveis
dalnialicis t^uporinduti. Hi in similitudine angelorum, ad fenestram stanle» Se-
pulchri, unus ad dextrani et alius ad ?ini»trani, voce humillima rt capitibu» in-
clinatis versisque ad Sepukrum : (Jlem ofEruTi» in Si:r'LLCiiiio, o ciU:^rii.0L.*:?
Duo presbyteri, in cappis d.3 pallio, in loco Mariarum : JesLM Nazarenlm
CRUCiFixuM, 0 CŒLicoL/E. Duo diaconcs-angeli : Non est hic; suhrexit sicut
pr^dixekat; ite, nuntiate quia surrkxit. Presbytiri, qui et Mari» dicunlur.
voce altiore respondeant: Alléluia. Resurrexit Dominus iiodie; resurrexit leo
FORTis, Christus, filius Dei. Deo gbatias. Dicite eia. Tune capellanus de Se-
pulchro, ab intus in superpelliceo stans, porrigat diaconis-angelis va.-culum cum
Corpore dominieo. Et slatim pulsentur tintinnabula, et omnia signa ecclesiae.
Cantor autem incipiat : Clnuslus resiirgens. Tune extendalur vélum quoddam
super Corpus dominicum a subdiaconis quatuor. Cerei quoque cum vexillis.
thuribulo et crucibus prœcedant... Ferra circa altare claudnntur. » (Martène, /V
anliquis EcclesiiB rilibus, HI, pp. 500, oOl.)
- «Ad Matutinum... linito responsorio ultimo. denuo repelatur. :^ed intérim,
dum cantatur, duo diaconi canonici vt?l alii prœbMidarii, albis cappis induti. ad
Sepulcrum venientes, unus ad caput, alter ad jiedes s>.^debit, e.\speclantes
visitatoros Sepulcri. Finito autem responsorio, 1res sacerdoles quibus cantor
injunxerit, cappis induti, singuli thuribulum cum plurimo incensu portantes,
ad Sepulcrum procédant, quos astantes diaconi canlanles interrogant : Qlem
Qu^Riris IN Sepulcro, 0 CRisTicoL.c? Respoudeiit sacerdotes : Jeslu Nazarenum
CRUCIFIXU.M, o CŒLicoi-.E. Dicuut diacoui : Non est hic : surrexit siclt phje-
uixERAT. Ite, nuntiate ouia surrexit de Sepulcro. SuperjRisitum danl ois
sudarium, canentes Antiphonam : Venite et viilete loruin itbi positus erat Do-
minus. AUeluia, alléluia. Quo acceplo, redeunl in choro, canlanles hanc .\nli-
phona m : Dicn/i/ nunv Judwi , eic.^i {Ordinariunt Fccli'xiir Animlina' .Warlbno.
l. c, III, col. b07.)
3 « Post ultimum responsum sequilur prosellus Almum If. (Juo linilo. suit
LES TROPES DE LA V'° EPOQUE — VINTROIT 225
est encadré dans une fonction liturgique qui est encore
d'une grande simplicité et austérité. A Narbonne, le
rite tourne davantage au drame; on y voit des cos-
tumes, de vrais costumes; les enfants qui jouent le
rôle des anges ont des ailes aux épaules, et cet Office
enfin renferme de véritables couplets ou vers , que
l'on retrouve dans la Résurrection de ce fameux ma-
nuscrit de Tours d'où M. Luzarche a tiré le Drame
cVAdam '.
Ce dernier fait nous servira de transition pour en
arriver aux Drames proprement dits; à ceux qui ne
sont plus formés avec les seules paroles de la liturgie;
à ceux enfin qui sont de véritables compositions ori-
ginales sorties du cerveau de certains clercs. Là aussi,
le Quem quœritis fait son entrée dès le xiie siècle. On
le trouve textuellement dans la Résurrection du manu-
scrit de Tours ^ et dans les Saintes Femmes au tombeau
parati très clerici cum cjppis albis et amictibus in capitibus eorum, portantes
quilibet eorum in manibus ampullatam argenti, et ille qui fungitur officie
Magdalenœ vadat in medio et introïtu chori. Incipiant cantando insimul primum
versum : Omnipotens Pater altissime, et, in fine ipsorum versuum, flexis ge-
nibus, dicant : Heu! quantus est dolor noster ! Deinde procédant ad pulpitum,
et coram eo dicant versum : Amishnus enim solatium. Postea accédant ante
altare et ibi dicant alium versum: Sed eamus unrjuentum emere. Quibus dictis,
sint duo pueri super altare, induti albis et amictibus, cum stolis violatis et sin-
done rubea in faciès eorum et alis in bumeris, qui dicant : Quem qu^ritis in
Sepulcro? Quo dicto, omnes Maria) insimul respondeant : Jesum Nazarenum.
Deinde pueri dicant : Non est hic. Lèvent cum filo pannum qui est super libres
argenti super altare in figura Sepulcri, et, facta responsione a pueris, omnes
Mariée insimul vertant se versus chorum, et Magdalena cantet sola versum
Victimss paschali laudes, etc. [Onlinarkon Narbonense, Ibid., col. 483, 484.)
1 «Omnipotens Pater altissime, — Angeiorum rector mitissime, — Quid faciant
iste miserrime? — Heu! quantus est noster dolor! = Aniisimus enim solatium
— Jesum Christum , Mariae filium. — Ipse erat nobis consilium. — Heu! quan-
tus est noster dolor! = Serf eamus unguentum emere, — Ut hoc corpus possi-
mus ungere — Quod non vermes possint ccmedere. — Heu! quantus est noster
dolor! » ( Cous&emaker, Drames liturgiques, pp. 37, 38, d'après le ms. de
Tours 237, du xii° siècle.)
- Coussemaker, Drames liturqiqitcs, p. 41, d'après le même manuscrit de
Tours.
I — 15
•22G iiisTiJiin-; i)i: la i'oksik LiTi,i{(ii(ji;i-:
du manuscrit de Saint-Bonoit-siii-Loiic '. (Jii le tivjiivo,
sous la môme forme, dans les Drames manuscrits du
XIII'' siècle* et, sous une forme ('riiiivalcMlc dans ceux
du xive siècle^, dans ceux-là luèim: «lui sont mêlés
d'éléments latins et d'éléments romans*. Nous renon-
çons dès lo)"s à suivi*.' sou histoire; car nous ne vou-
drions excéder eu rien, et craignons déjà d'avoir été
trop loin •'.
Ce Quemqmeritis, qui n'était qu'un Trope, avait pris
une telle importance, qu'on avait oiiMié son ori^nix-. et
qu'on s'avisa un jour de le troper lui-même ou, à tout
le moins, de lui imposer une préface, un prolojiue :
Mora est, psallite. Jiiba, dompnus, cancre. Eia, eia,
dicite : Quem quxritis °.
Le Trope d'un Trope!
1 Coussemakcr, l. c, p. 189, d'nprès le ms. de Saint- Benoit-. -ur- Loire,
Liibl. d'Orléans, n» 178.
* V. la Nuit de Pàryues, d'après le ms. de la BIIjI. nat. Iat.,90'i, f» 11 ; ("ous-
semaker, l. c, p. 23'i.
3 Oriijny- Sainte- Benoîte, bibL de Saint-Quentin, 75. (Coussemakîr, i. c,
p. 275. )
* V. le Sépulcre, ibid., p. 304, d'après le Processionnal A du x\\* siècle con-
servé au.\ Archives du chapitre de Cividale, et le Jour de la Bésurrcclion,
p. 309, d'après un ms. du xiv siècle marqué tvii au Trésor de l'église de
Cividale. L'un et l'autre de ces deux textes (dont on peut rapprocher celui
d'EinsiedeIn, 366) nous offre la version suivante : « Quem quœrilis, o tre-
mulx mulieres, in hoc tunndo ploranlcs'-? Omnes .Maria' respondenl simul :
Jesum Nazaremon crucipxuiti ijuœriitnts. n^On pourrait multi|)lier ces exemples
d'après les autres Mystères du même ordre ; les précédents sont des types et
sullisent.
s « La procession « avant le jour » du matin de l';îcju<s avec le dialogue
Quoti (juœritis est encore indiquée et décrite dans le Liber sacrrdolalis ap-
jtrouvc i>ar le pape Léon X en 1520 et qui est demeuré le livre ofllciel de liome
jusqu'à la publication du Riluel par Benoit XIV. »
*' Bibl. nat. lat., 1118, f" 40 v". Juba et do)n))iius sont d -ux leçi.n» qu'il est
aisé de corriger.
CHAPITRE XV
LES TROPES DE LA PREMIÈRE ÉPOQUE — LE KYRIE
Voici, entre tous les Tropes, ceux qui sont certaine-
ment les plus naturels, les plus légitimes, les plus
approuvables. Ce sont aussi, entre tous, ceux qui ont
dû avoir et ont eu en effet la plus longue destinée et
la vie la plus dure. On les a pieusement conservés dans
certaines éditions du Missel romain au xvie siècle; et,
quand, au xvnie, le sieur de Moléon fit en France ces
Voyages liturgiques où l'on trouve aujourd'hui tant
de détails précieux, il put se donner la joie d'entendre
les Tropes du Kyrie à Saint- Lô de Rouen et à la
cathédrale de Sens : « C'est, dit- il, ce qui se pratique
« encore à Lyon, à Soissons et ailleurs, w Et l'excellent
liturgiste a pris la peine d'énumérer ces Tropes qui
étaient si obstinément restés en usa^e : c'était le Fons
hoyiitatis, Pater ingenite; c'était le Ciinctipotens geni-
tor; c'était le Clemens rector. Ils remontent aux ixe et
xe siècles '.
• « A Saint-Etienne de Sens..., le premier choriste ou chapier, tourné du côté
du clergé, coininence le Kyrie. Si c'est une lète annuelle, semi-annuelle ou
228 IIISTOIRF. DE l.A POÉSIE LITERniorE
Nous avons dit tout à Flieuie que ces Tropes sont
« natinx'ls », et avons l)osoin «le le prouver'. Il est cci--
tain que ces deux mots Kyrie et eleison, avec les voca-
lises qui les séparaient l'un de l'.iiitn', prêtaient singu-
lièrement à l'interpolation, ils la sollicitaient, })0ur
ainsi parler. Les Tropes du Kyrie sont ceux tpii res-
semblent le mieux à ces Proses qu'on a jadis écrites sur
les sequelx, sur les queues de l'Alleluia du (iiadiiel.
Nous avons vu plus haut, nous aurons lieu de consta-
ter à nouveau que les Proses ont été, à rori<i,ine, un
moyen mnémotechnique inventé par un homme d'esprit
pour retenir plus aisément des vocalises difficiles. Je
me persuade que, toutes proportions gardées, il on a
été de même pour les Tropes intérieurs du Kyrie. Eux
aussi, ils ont eu leurs mélodies préexistantes.
Lorsqu'on eut attaché ces paroles mnémotechni({ues
aux plus anciennes vocalises du Kyrie; lorsque, plus
tard, on eut composé des mélodies spéciales pour ces
interpolations en prose ou en vers, il fut permis, en
certaines églises, de chanter ad libitum soit les paroles,
soit les neumes. Bref, on appliqua aux Tropes du
Kyrie ce que Guillaume Durand a si bien observé au
sujet des Séquences- : « En quelques lieux, dit-il. on
duublo, on y njoute les Tropes Fdiis bonilatis, Patvr hnienite; Cuncli))oten.'i
(jenitor ou Clemens rector : ce qui se j)ratique encore à Lyon, à SoisFons et
ailleurs. » {Vo)ja<jes litiirfjiqucii du sieur de Moloon, p. 107. Cf., p. ^Oi, le Kyrie
qu'on chantait aux quatre l'êtes, avf.c les Tropes, dans l'êtrliso ."^nint-Lô de Hou^n.)
1 11 ne faut pas s'étonner, étnnt donnés ces deux mois ktjric et eleyson, ?i
l'on affecte da parler grec dans les Tropes mêmes du Kyrie: « Kyrie, o Iheos;
kritis, o dischios; iskyros ke at/ianatos, ymas eleison » (Bibl. nat. lat., 10510,
f° 3; Ueincrs, Le, 26). — « Jesu, Hedemptor omnium, lu t/ieos, yitton pic cley-
sorDti (Bibl.nat. lat., 13252, f*23 V, etc.). — « Condilor kyriie omnium j/ma«...»
(IbiiL, fo 22 V). Etc.
* «Quœdam ecclesiœ mystice pneumatizant sequenlias sine vcrbis, aut saltem
aliquos versus carum. » (Guillaume Durand, lialiunale, IV, cap. xxii, êdil. de
Lyon, lo7i, f''124 V.) Les nécessités de notre exposition nous ont obligé à citer
ce texte plus d'une fois.
LES TROPES DE LA 1'" ÉPOQUE — LE KYRIE 229
les neumatise sans paroles. » C'est du moins ce qui
semble résulter de quelques manuscrits très précieux
où l'on trouve des Kyrie uniquement neumés, mais où
ces neumes sont accompagnés très visiblement des
premiers mots du Trope parlé auxquels ils se rap-
portent : Theoricam practicamque vitam ; Rector cos-
^
xncxxifc^j aui orrtniJL rr^rtv
k.
A L / T £ K.
A
c/> 6J [xLcxf o-ngp
Type d'un Tropc du K\jrie : u Omnipotcns gcnitor (1). » ( Bibl. de Saint- Gall, i8i, p. 211.)
mi, etc. ^ Nous n'irons pas toutefois jusqu'à ajouter,
avec Moléon : « C'est ce qui a donné lieu à ces longues
traînées de notes qui nous sont restées au Kyrie, lors-
qu'on a retranché nos Tropes. » La question est bien
1 Bibl. nat., nouv. acq., 1177. Dans ces K\jr\e, uniquement neumés, les
Kyrie et les Christs ne sont marqués que par des K et des X ; mais en tète de
chaque Trope musical on lit le premier mut du Trope parlé auquel il corres-
pond (f» 14 v°, Clemens, etc.). Cf. le ms. de la Bibl. nat. lat. 1087, f-^OS r°, 99 r».
Après des Kyrie non tropés (98 ro) on y trouve les Kyrie musicaux avec l'indi-
cation des Tropes-paroles auxquels ils se rapportent : Clemens rector (98 r»);
Jesu redemptor omnium (98 v); Theoricam practicamque vitam (98 v"); Rex
magne (99 v°) ; Cunctipotens genitor (99 r").
230 HISTOIRE DK LA FOÉSIK IJTIlHilnl'K
plus comploxo que ne paraît lo croiro !<• liturgiste du
xviiie siècle, et il y a très certainerneiil de ces « tr.iî-
nées » qui sont antérieures aux ïropes ou qui en oui
toujours été indépendantes ^
Les Tropes du Kyrie ne sont pas sans i)réscnlrr en-
core d'autres ressemblances avec les Séquences ou les
ProseSj et ce n'est pas sans raison qu'on jrur a imposé
le nom de prosuUe, petites Proses -. S'ils méritent cette
appellation, c'est principalement 5 raison de leur éten-
due ; mais il y a plus, et on leur a appliqué le système
de ces clausulœ qui ont le même nombre de syllabes et
sont exactement chantées sur les mêmes notes. Un
exemple semble ici nécessaire ^ :
j .. ; , i Orbis factor, rcx œterne, eleison. Kyrrie.
de huit syllabes. Pietatisfons immense, eleison. Kyrrie.
(Memcnuiation / Noxas omnes nostras pelle, eleison. Kurrie.
musicale.) \ i i o
/Christe, qui lux es iiuindi, dator vita?, eleison.
-P . ^l- , i Christe.
Irois claiisulx \
de onze syllabes. / Ai'te Ifosos Dsemonis infuero, eleison. Christe.
(ilenie notation / Qonfirmans te credentes cuiiservaiisque, eleison.
musicale. ) ^ '
V Christe.
111. / Patrem tuum, teque Flamen utriusque, eleison.
Deu.x ctausidx V Kyrrie
de douze svllabes. <,
(Même notation i Deum scimus uiîum atque trinum esse, eleison.
musicale.) ' Kyrrie.
' « Dans les niss., on écrit parfois les kyrie sans paroles à la suite des Tropes,
parce qu'on chantait tantôt « avec » et tantôt « sans paroles », tantôt enfin des
deux manières à la fois. »
2 Prosulœ ad Kirricleison (Bibl. nat. lai.. 1 1 10. f» 5i r») ; Incipiunt prosulsc de
Kyrie (1120, f» 07 v"), etc. La notation orlhocraphique du mot Kyrie a donné
lieu d'ailleurs à d'étranges fantaisies de nos scribes : Kirie, Kirrie, Kirrielei-
son, etc. elc.
3 UOrbis factor est sans doute sorti de Saint-Ciall [Bibl. do Sainl-Gall,
378, p. 368). Il a été admis à Saint-Martial (Hibl. nat. lat., mS6, f» 19 r«),
à Nevers (Bibl. nat., 9i'i9, f" 1), à Saint- livroult (Bibl. nat. Int., 10508,
f» 16), etc. etc.
LES TROPES DE LA F" ÉPOQUE — LE KYRIE 231
IV. /Clemens nobis assis, Jesu bone, iit vivamus in te.
Deux clausulse \ „
de seize, dix-sept) Kyrrie.
syllabes. 'jEt, cum sanctis tuis, assidue simus in requie.
(Même notation f , .
musicale.) ' Eleison , ekison ' .
Le texte précédent nous amène fort naturellement à
une observation que nos lecteurs, sans doute, auront
VlCti VhlSÔN
^ ^ ^ /• ^ . ^ y-
A âcpium -rerry tniffiif ^^nt ^
"txirif xbArvc
Type d'un Tropo du Kxjric : « Omnipotens genitor (2). » ( Bibl. de Saint -Gall, 485, p. 212.)
faite avant nous. C'est qu'on a profité de l'allure ter-
naire du Kijrie pour en faire l'application aux trois per-
sonnes de la Trinité. Il est, en effet, un grand nombre
de Tropes du Kyrie où. les trois premières clausulse sont
consacrées au Père, les trois secondes au Fils, les trois
dernières au Saint-Esprit-. 11 s'y fallait attendre, et
1 Cf., comme répétition de clausnlœ, le ms. lOoOS, f" 8, 9, 11, etc. — Dans
certains Tropaires, chaque clausida des Kyrie tropés est précédé du mot Versus
en abrégé : y. (Bibl. nat. lat., 9449, f" 10 v", etc.)
2 V. comme type, Bibl. naf. lat., 887, fo 36 r^, etc. etc.
232 msTOiHi': in-: la toksie i.rriiHfiiQUE
cette disposition n'a rien en soi que de très légitime et
de fort simple.
Il y a eu, d'ailleurs, plusieurs manières de concevoir
l'agencement des Tropes (pii nous occupent. Tantôt on
a placé l'interpolation avant les mots Kyrie eleison;
tantôt on l'a placée aphks; tantôt enfin, on l'a inter-
calée ENTRE le mot Kyrie et le mot eleison. Ce sont
là les trois modes piMucipaux; m;iis ce ne sont pas les
seuls.
Si l'on veut se faire une idée nette du premier de ces
deux systèmes, il faut lire ce beau Trope solennel que
lant de manuscrits nous ont conservé' et que nous
avons déjà eu l'occasion de citer comme un type.
Cunctipotens genitor, Deus omnicreator, eleison. Kyrie, eleison.
Fons et origo Boni, pie, Luxque perennis, eleison. Kyrie, eleison.
Salvificet pietas tua nos, bone rector, eleison. Kyrie, eleison.
Christe, Del splcndor, virlus Patrisque sophia, eleison, Chrisle
eleison.
Plasmatis humani faclor, lapsi reparator, eleison, Chrisle, eleison.
Ne tua dampnetur, Jesu , factura, henïgne eleison, Chrisle, eleison.
Amborum sacrum Spiramen , nexus amorque , eleison , Kirie
eleison.
Procedens fomes, vitœ tons, purificans vis, eleison, Kine, eleison.
1 Le Cunclipolens rjenilor, écrit peul-ôlro à Sainl-Gall (Bibl. de Saiiil-GaU,
378, p. 36o), a été très guùlé à Saint- Martial (BibLnat. lat., 887, f'oGr'; 1086,
l" 18 v»; 1087, f" 99 r"; 113'i, f» G v"; 1135, f» 8 r») et san^, doulî transporté
de là à Nevers (9'i49, f» 39 r°), à Saint- Benoît-sur-Loire (Nouv. acq.,
1177, f° 4 r"), à Paris {132o2, f- 2'i r»), à Saint-Évroult (IO0O8, f° 10 r»), etc.
— Gail-Morel a édité le Cunctipotens genilor, n» 90, p. 56 (d'après un ms.
d'Engelbsrg, xu" s.). — Mone en a publié les l", i' et 8* vers {Hymni latini ,
I, 302, H" 236) d'après un manuscrit du .\iv« siècle conservé à Karisruhj
(S. Peter, n° 16, p. 278). L'éditeur allemand en a cjupé. ainsi qu'il suit, son
dernier hexamètre :
Purpalor culpaD,
N'enise
Largilor oplimc {aie).
Reiners [l. L, p. 28) en a, d'après Sinner, publié intépralemeni le t'xt**. qui
offre qu'^lquos variantes.
LES TROPES DE LA 1'° ÉPOQUE — LE AT/Î/E 233
Purgator culpse , veniœ largitor opima3 ,
Offensas dele, sancto nos munere reple, — Spiritus aime : Kjrie,
eleison \
Si l'on veut un type du second mode, il convient
[Tc^ mundi ctitpAjn munaJ^
fU fArurume fitfo-
k
y
- /
y^
fpxrrcuf Almuf
yïLi£ L£ z ' s ON-
Type du Trope d'un Kyrio : « Omiiipotens genitor ( 3 ). p) ( Bibl. de Sainl - Gall , 484 , p. 213.)
d'ouvrir un des Tropaires de Saint-Gall et d'y lire ce
Trope bref :
1 On peut rapprocher du type précédent le Trope Clemens, qui est celui que
l'on trouve dans lo plus grand nombre de manuscrits, et qui est qualifié, dans
un manuscrit de Saint-Martial (887, f'^ 47 v°), de pulcher par excellence :
Clemens rector, œlerne Pater immense, eleison.
Nostris necne vocibiis adsis, benedicte Domine, Kyrie.
j^îter stellifer noster, nosiri bénigne eleison, Kyrie.
Plebi tuœ Sabaolh , agie, semper rege, eleison.
Trine et une, sedulas noslras procès, rcx, su?cipc, eleison.
Fidem auge his qui credunt in te; tu succurre, eleison.
Respice nobis omnibus, inciyte, fer opem de excelsis, et noslras, redemptor orbis
terrae, voces vocibus angelorum adjunge : eleison.
Cunclipotens, sophiœ tuœ lumen nobis infunde, elfison.
Tripertite et une Domine, qui mânes in œternum cum Paire; te cre, te corde
atquc mente psallimus. Nunc tibi, o béate Jesu bone, te precamur omnes assi-
due: Eleison. (Texte établi d'après les mss. cités plus loin, p. 240.)
« On observera que la partie du Trope correspondant au dernier Kyrie est
plus longue à cause delà répétition de la mélodie à ce dernier Kyrie , répétition
qui se pratique encore de nos jours. »
234 HISTOIHK DK I. A l'()i;siE LITURGIQUE
Kirie, eleison, pater infantium.
Kirie. eleison, releclio lacteiitiuiii.
Kirie, eleison, consolatio pupillorum.
Chrisie , eleison, imago Genitoris.
Chrisle, eleison, abolifio Carinoris.
Christe, eleison, restauratio plasmalis.
Kirie, eleison, fomos carilatis.
Kirie, eleison, pleniludo probilalis.
Kirie, eleison '.
Souhaite-t-uii eiiliii de su •^qaver dans l'esprit un
type facile du troisième et dernier système, il n y
aura qu'à lire ce Trope si populaire , et encore usité au
xviiie siècle :
Kirie, tons bonitatis, Pater ingeiiite, a <|Uû bona cuncta proce-
dunt, eleison.
Kirie, qui pati Natum, iiiumli pio criniine, ipsum ut salvaret,
misisti, eleiso7i.
Kirie, qui septiformis das dona Pneumatis , a quo cœluin , terra
replentur, eleison, etc. "-.
Il est une autre division qui s'applique aux interpo-
lations du Kyrie comme à la plupart de nos Tropes.
Les uns sont en prose, les autres en vers :
En prose, comme \c Fons bonitatis et le Pater infan-
tium qu'on vient de lire ^ ;
1 Bibl. de Saiiil-Gall. 378. p. 363; 376. p. -io. V. le fac-siinile de la p. IM.
2 V. plus bas la liste des manuscrits où l'un trouve ce Trope. Cf. notamment
les Tropes de Saint-Évroult : A'j/n-jt», rex celsc (i(KJ08, f» 13 v»); Kyrrie, res-
plendens co:U arce (f» l'i v°); Ki/rrie, »r,r gcnilor ingenite (f<> 11 v*), elf. etc.
3 Cf. les Tropes suivants :
Deus solus et immon^ii?, K.c. K.c.
Plasmator lioniinuni et cuncl.T creaturcP luae. K.c.
( Qui, de siipernis noliis conip.T?«us, ad inia vcni«li X.e. .\.c.
il Alque homineni pcrditum do morte rcvocasti X.e.
Ipsumquc in p.itria copli looasti. K.c.
Palcr cum Nato, nnsiris miserlus maneto K.c.
Paiiclu«qiic, qui omnia régit, nobis scm[ier Spirilus adsil.
(Ril.l. nat. lai., lit;', f» 19 r«.)
K\rri, urbs ciclestis ita est facta Hierusalcm, eleiton. h'ijrrie, f letton.
Priniuni jaspis , sapliirus et calccdonius, eleison. Kyrrie. eleison.
r^rii-
LES TROPES DE LA l'" ÉPOQUE — LE KYRIE 235
En vers, comme le Cunctipotens, comme VOrbis fac~
tor ou comme le Trope suivant :
Kyrie, omnipotens genitor lumenque et lucis origo, eleison.
Kyrie, de nihilo , jussu Verbi, qui cuncta creasti; eleison.
- J / / / , , , ^ ^\ , ^^w5.
l^ iTneXer ~y{hn .-
TJ - ' ' ' ' ' ' ' / , J
i . . / -, ^ - -/^?.
J^< tJ^tAje: y {on.
k\, rr^^- ■ yfjn -
Type d'un Trope du Kyrie : « Te C.hriste supplices. » (Bibl. nat. lat., 10310.
Tropaire d'Echternach, f» 13 ro. )
Kyrie, humano generi peccati pondère presse : eleison.
Christe , ad cœnum terrœ missus Genitoris ab arce : eleison.
Hinc smaragclus, sardonix sextus, sardiusque, eleison, h'yrrie, eleison.
Grisolitus, beriUus; est nonus topazius. Christe, eleison, Christe, eleison.
Decinuis chrysoprasius ; jacinctus deinde. Christe, eleson. Christe.
Duodicimus anielistus : isti sunt lapides. Christe, eleison. Christe.
Duodecim portae sunt, duodccimquc margaritse. h'yrrie, eleison, h'yrrie, eleison.
Et singula; portœ ex margaritis sunt singulis. h'yrrie, eleison, h'yrrie. dosun.
Et plateee ejus lucidum aurum est, niundum quoque, tanquam auruni perluridum
clarumque. Kirrieleison, Kirrieleison.
[1120, fo 72 ro-vo. La noie porte GrisoUprassus. — Cf. 887, fo 14 r» ; un autre texte avec
quelques variantes.]
236 lUSTUlUE bïù LA l'OESlL LlïUIlCinUI-:
Clirisle, indueras carnom, casta de Virginc natus, eleison.
Christe , et miiiidi culpain rnuiidasti saiiguiiif fuso : eleison.
Kiric, îpqualis l'.ilii seu Nalo, S))irilus aliiius, eleison.
Kiric, U'iiiLis pcrsoiiis Dcus , iii I)oilal(; sod iiiiiis, elcison\
Suivant kl soloiinitc do la IcHo liliirgi(|iio à laijiicllc
ils étaient spécialement consacrés*, les Tropes du Kyrie
offraient plus ou moins de développement et d'am-
pleur, et il y a encore là le fondement d'une nouvelle
et dernière classification. Le CuncHpotens genitor, poiu-
prendre un exemple, était un Trope employé in magnis
festivitatibus: il méritait bien cet honneur ^
La place qu'occupent dans les Tropaires les Tropes
du Kyrie n'est point partout la même, et il n'est pas
superflu de la connaître. Tantôt ils ne forment qu'une
seule et même nomenclature, pour chaque fête litur-
gique, avec les autres Tropes de cette fête, quels qu'ils
soient*; tantôt ils font « bande à part », s'il est permis
1 Bibl. de Sainl-Gall, '.S'i, pp.211-213 [V. le fac-similé des pp. 229-233).—
Cf. Reiners, l. c, p. 52.
2 Que chaque fêle ait eu son Trope spécial du Kyrie, c'est ce qui est attesté
à toutes les pages de nos Tropaires. C'est ainsi qu'on chantait à Noël le Te,
Christe, supplices (Bibl. nat. lat., 9i49, f» 7 \°) ou le Christe Redemplor (1118.
fo 12 r"); le jour de saint Etienne, le Deiis sohis et inunensus [Ibid., f" 19 r») ou
le Clemens reclor (9i49, 1° 10 v»); le jour des saints Innocents, le Bex ruagnc
Domine {Ibid., f» 27 r°); àl'Oclave de Noël, le Jesu Redcmptor omnium (9449.
f" 16 v»); le jour de Pàquos, le Kyrie, rex sœclorum {Ibid., f»35 v»), etc. etc.
Certains Tropes servaient à plusieurs fûtes, comme le CumUipotens genitor,
qui, à Nevers, se chantait le lundi de Pâques et le jour de la Ponlccôte (t/i'i9.
f" 3'J r" et 49 v"); comme le Clonens rector, qui, à Saint-Martial, était exécute
le jour da la Chandeleur et le lundi de Pdques (1118, f «37 r» et 50 r»), etc. etc.
A Echternach, on chantait à Noël et à Pàque»; les mêmes Trupes ( Reiner-,
l.c.,~\î). De même que les fêles Ai Jésus-Christ avaient leurs Tropes, c?rlainr^
autres, comme \e Re.vviryinum amator, étaient consacrés au.\ fêles de la Vierge
(1086, f" 22 r). Enfin, des Tro|ies étaient réservée au chint des dimanches or-
dinaires , comme VOrbis faclor ( 1086, f" 19 r°, etc.; H.'iners, /. c, p. 30^.
3 10b6, fo 18 v, etc. La rubrique « in magnis festivitatibus » se rapporte
éfralemenl au Kyrie, rex sœchrum (f» 21 r"), etc.
■' Tel est le cas des Tropaires de Saint- Martial (Bibl. nal., 1118), que nous
proiulrons ici jiour type, et de Novi-rs (Bibl. nal. Int., 9419), elc. etc.
LES TROPES DE LA l'° ÉPOQUE — LE KYRIE 237
de parler de la sortes et la série de tous les Kyrie tro-
pés figure en tête ou au milieu de nos manuscrits,
pîoe X^vi>\3 mîtmi.t^M tsaâ^vî^t
Type d'un Troiie du K\jr\e : » Paler infanliir.n. j. (Ribl. do Saint-Goll, 378, p. 305.)
avant la série de tous les Gloria tropés, avant les Tropes
1 Tropaires de Saint-Martial ( Hil>l. nnt. lat., 1087, 1'° 98 r»); de Saint-Évroult
(Bibl. nat. lat., 10508, f « 6 r"), etc. etc. = La série des Tropes du Kyrie prend
place après la série complète des petits Tropes (Introït, Offertoire, Commu-
nion, etc.) dans les Tropaires de Saint -Martial (Bibl. nat. lat., 887, f" 47 r»,
et 1119, f" 67); de Paris (Bibl. nat. lat., 13232, f» 20 ro), etc. etc.
238 IIISTOIIM': Dl'] LA l'OKSli: MT l' iMilnlJ K
du Sandus et de VAgnus* .-car ce sont là (juutre groupes
plus solennels, plus augusU.'S, plus impoilants (pu- tous
les autres.
La statistique exacte des Tropcs du Kijric ne serait
pas sans offrir éfialemcnt quelqu<3 iidéret, et il est trop
évidcnl (piils ont rlr moins coûtés, <■! par conséquent
moins varies, moins nondiiciix qn»- ceux <lii (îloria. Le
plus ancien manuscrit de Sainl-( l.ill ' ne nous en olTrc
(pic deux à côté de treize Gloria tro[)('s; à Saiiit-Mai-
tial, à Saint-Evroult, à Paris, l'inégalité n'est pas moins
sensible -. Mais il n'en faudrait tirer aucune conclusi(jn
excessive. Les Tropes, chants de joie, étaient mieux faits
pour la louange que pour la supplication mêlée de
pleurs.
Ils ne prêtaient guère au drame', les Tropes du Kyrie,
et cependant nous trouvons, en un des plus anciens
manuscrits de Saint-Martial, une sorte de dialogue
entre le diacre et les chantres *. Ce n'est pas encore
un drame, mais c'est bien près d'en être le crayon
1 Bibl. de Saint-Gall, 484.
2 A Saint- Martial, le Tropaire qui e>t aujourd'hui à la IJibl. rial. iat. (1H9
renferme dix -neuf Gloria tropes et quatre Trope» du Kyrie; le ms. 887 nou«
offre dix-huit Gloria et quinze Kyrie. Etc. etc. ^ A Sainl-Evroult (Iat., 103(>5),
il y a vintït-huit Tropes du Gloria et seize du Kyrie. = A Paris (Iat., 13232)
liuit Kyrie seulement et vinçrl-sciit Gloria, etc. = A celle règle pènérale il y a
eu quelques exceptions (Bibl. nat., 1086. etc.) que nous aurons lieu dVxpliquer.
= 11 est certain, dailleurs, que le besoin de nouveaux Tropes du Kyrie s'est
fait assez vivement sentir; car on a ajouté, dans certains manuscrits, un cer-
tain nombre de Tropes de la première époque ou de la seconde. (Bibl. nat.
Iat., 132u'2, 887, etc.) Les doux listes, qu'on trouvera plus loin, des Tropes du
Kyrie et de ceux du Gloria dunnerunt fort exactement la proportion que nous
iiidi([Uons.
' 11 faut observer cependant que le Kyrie lui-m»'me se chantait, dès l'origine.
à deux chœurs: u Kyrie eleison autem nos neque dicimus, sirut a Gra-cis dicilur;
quia in Graîcis slml'l omnes dicunt : apud nos autem a clkiucis dicitir, a i-o-
l'i Lo RESPONDKTLU, et tulidcm vicibus etiam C/iriste eleison dicitur. ijuod apud
Grœcos nullo modo dicitur. » (Saint Grégoire, lib. VU. e|>ist. 37, citée |>ar Mar-
tènc. De anlirjiiis Knlesiic rilihus. I. 'M'6.)
< Bibl. nat. iat., 1118. I" 12 r".
LES TROPES DE LA l'<' ÉPOQUE — LE KYRIE 239
OU l'esquisse. On n'a pas été plus loin dans cette
voie.
Quoi qu'il en soit, ces Tropes du Kyrie furent tou-
jours plus solennels que la plupart des autres. On n'en
confiait pas l'exécution au premier venu; mais, dans les
grands monastères, on choisissait à cet effet les plus
belles voix. A Saint -Denis, quatre bene cantantes
entonnaient ensemble le Clemens rector. Nos Tropes —
ceux-là en particulier — constituaient alors ce qu'on
appellerait aujourd'hui une « Messe en musique ». Les
assistants étaient tout oreilles'.
Si beaux cependant que fussent ces développements
nouveaux et poétiques, et quelque supériorité qu'il con-
vienne d'accorder aux Tropes du Kyrie -, — lesquels sont
' «AdMissam très cantores, in rubeis cappis, in choro assistant, et incipiant
officium Etenim sederunl ; Kyrie Clemens a quatuor bene cantantibus , etc. »
{Consuetudines San-Dionysianse; Martène, De antiquis Monachormn ritibus,
col. 282.)
2 Nous donnons ci-dessous une table des Tropes du Kyrie que nous sommes
LOIN DE CONSIDÉRER COMME COMPLÈTE, ET QUE NOUS PRENDRONS SOIN DE TENIR AU
COURANT. Nous n'y avons lait figurer que les Tropes de la première époque ;
c'est pourquoi on n'y trouvera point, entre autres, le 0 Pater ingenite ni leRex
Deus œterne du ms. 116 d'Einsiedeln. (Gall-Morel, n'^ 91, 92, p. 57, etc. etc.)
TABLE DES TROPES DU KYRIE
Canamus cuncti laudes hymnificas. BerIin,Theol. lat., no H,fu76r<'. Saint-Gall.
— — Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343 fu 1 vo. Romagne,etc.
— — Vienne, 1845, fo 60 ro. Saint-Gall.
— — Munich, lat., 14083, fo 100 vo. Saint-Emmeran.
— - — 1432^, fo 103 ro. _
— — Oxford, Douce, 222, fo 39 ro. Saint-Gall.
Christe, cœlitus nostris assis precibus. Bibl. nat. lat., 10508, fo 2 ro. Saint-Évroult.
Christe redeniptor, miserere nobis. — 887, fo 47 ro. Saint-Martial.
— — — 1084 , fo 90 yo. —
— — — 1118, fo 44 ro. _
— — — 1119, fo 84 ro. _
— — — 112U, fo 67 ro. _
— — . — 903,fo66vo. Saint- Yriei.\.
— — Arsenal, 1169, fo 3. Autun.
Christe, unice Dei patris genite. Bibl. nat. lat., 10508, fo 1 yo (ajouté
postérieurement ). Saint-Évroult.
Clemens rector. Saint-Gall, 378, p. 367.
— Bibl. nat. lat., 887, fo 47 vo. Saint -Martial.
— — 1084 , fo 93 yo. _
— — 1086, fo 18 ro. _
240
IIISTOIKH DK LA F'OKSIE LITITUlIQUE
plus Ihéologiques et plus littéraires que les autres, —
nous les considérerons, eux aussi, comnne un délit
Clcnicns rcctor.
r.lenienlissimc rcdoniplor.
Coiiditor Kyrie, (Jimiiuiii ymas.
f!unilitor rerum almo.
(limctipotcns dominalor cœli.
Cunclipotens genilor.
Cunctipolens orbis far.tor
Deiis rcdeniptor, miserere nobis.
Iléus soins cl immensus.
Dominalor Deus piissime...
Firmator snnctc lirmamcnti.
Fons bonilalis.
Fons , origo lucis perpétua.
InefTabilis et iiilcrminabili?.
liibi. nal. lai., 10«7, f- 'JH t".
— 111«, f" 37 ro.
— III'J, fo m ro.
— IIUO, f" 07 vo.
— 1130, fo 'Jl r».
— IKJ'J, fo 108 vo.
— 903, fol 03 vo.
— a^W , fo 10 vo.
— io:;o8, fo 7 ro.
— 132r,2, fo 2\ ro.
Arsenal, 1100, f» 7 ro.
Oxford, liodbMenne, 77.';, fo 3 r».
bibl. nat. ial., 10:^W, fo 13 T".
— lonoH, fo 7 vo.
— 13252, fo 22 vo.
— 887, fo Kl ro.
Oxford, Bodléienne, 77u, fo 5 r".
Saint- Gall, 370, p. 7i.
— 37H, p. 303.
— 380, p. 100.
— 382, p. 57.
Berlin, Théol. Ial., no 11, p. 77 ro.
Munich, lat., iVm, fo 101 ro.
Bibl. de Saint-Gall, 37«, p. 305.
— 382 , p. 58.
Bibl. nal. lat., 887, fo 50 ro.
— 1080, fo 18 vo.
— 1087,fo90ro
— 1134, fo 0 V".
— 1135, fo8 ro.
— 1139, fo 112 ro.
— 903, fo 107 VO.
— 9119, fo 39 ro.
— 10508, fo 10 ro.
— 13252, fo 2i ro.
— Nouv. acq., 1177, fo 4 r
Saint-Martial.
Sainl-Yrieix.
Never».
Painl-fcvroult.
l'arig.
Autun.
?
Paint-Kvroult.
Paris.
Saint-Martial.
?
Saint-Gall.
Saint-Emmeran.
Saint-Martial.
Sainl-Yrieix.
Never«.
Sainl-Évroull.
Paris.
S.-BenoU-
sur-Loire.
Saint-Gall.
?
Saint-Gall.
Romaime.
Saint-Gall.
Oxford , Douce, 222, fo 30 vo.
— BodI., 775, fo 3 yo.
Bibl. de Saint-Gall, 378, p. 309.
Rome, Angelica, fu 2'i0, r> et 2i5 vo.
Bibl. de Saint-Gall, 4x4 , |.. 2iM.
— 381, p. 293. —
Bibl. nat. lat., 1118, f» 19 ro. Saint-Martial.
Munich, 14083, f» 103 vo. Saint-Emmeran.
Berlin. Théol. lat., no M , fo 78 vo. Saint-Gall.
Bibl. nal. lat., 903, fo 105 vo. Saint -Yrieii.
Home, Vilt.-Emmanuele, 1343. fo 2 vo. —
Bibl. de Saint-Gall, 378, p. 370. Saint-Gall.
— 382, p. 01. —
Enpelberp (Gall-Mortl, no 89, p. 76). 1
Bibl. de Saint-Gall, 382 p. 59. Saint-Call.
Bibl. nat. Int., 3719, f» 33 yo. Saint-Martial.
— 10508, fo 1 vo (ajouté
postérii urcment ). Sainl-Évroull.
Bibl. nat. lat., 9448, fo 11. Pruni.
Londres, Cotlonien, Calipula A XIV. T
Bibl. de Saint-Gall, 378, p. 378. Saint-Call.
LES TROPES DE LA 1'-'= ÉPOQUE — LE KYRIE 241
anti-liturgique, comme une sorte de profanation du
texte saint.
Ineffabilis et interminabilis.
Tn tridui spatio solis.
In onini verbonostro laudemus Dominum,
Jesu redemptor omnium.
Kirie, eleison, pater infantium.
Kirrie, salve semperque.
Kirri (sic), rex reguni Domine Deus
Sabaoth.
Kyrie, aime rex, Domine,.
Kyrie, Deus sempiternae vitœ.
Kyrie, fons pietatis.
Kyrie, logos, Patri Pneumatique.
Kyrie, omnipotens Pater.
Kyrie, o theos, kritis.
Kyrie, qui baptizatus in Jordanie unda.
Kyrie, resplendens cœli arce.
Kyrie, rex celse, tibi laudes.
Kyrie, rex genitor ingenite.
Kyrie , rex pie.
Kyrie, rex saeclorum.
Kyrie, Sabaoth judex.
Kyrrie, rex senipitcrne, huic catervse.
Kirri {sic), sapientia, virtus quoque
Dei summa.
Lux et origo lucis summe Deus.
Bibl.de Saint-Gall, 380, p. 109. Saint-Gall.
— 381, pp. 304, 316. —
Berlin, Théol. lat., n» 11, fo 82 r-» et v». —
Munich, lat., 14083, fo 102 v". Saint-Emmeran.
Bibl. nat. lat., 887, fo 57 r".
— 887, fo 53 ro.
— 1087, fo 98 vo.
— 13252, fo 23 vo.
— 9449, fo 16 vo.
(y. Pater infantium. Observation qui
s'applique à un certain nombre
d'autres Tropes.)
Oxford, Bodléienne, 773, fn 4 vo.
Saint-Martial
Paris.
Nevers
Saint-Gall.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Nevers.
Paris.
Saint-Gall.
Saint-Emmeran.
Saint-Gall.
Echternach.
Saint-Gall.
Autun.
•?.
Saint-Emmeran.
Oxford, Bodléienne, 775, fo 3 v"
— Douce, 202, fo 39 vo.
— — 887, fo 54 ro.
— — 887,fo56ro.
— — 1086, fo 21 bis ro.
— — 903 , fo 166 ro.
— — 9449, fo 39 ro.
— — 13252, fo 25 vo.
Saint-Gall, 378, p. 369.
Munich, lat., 14G83, fo 94 V".
— 14322, fo 108 vo.
Londres, Cottonien, Caligula AXIV.
Saint-Gall, 376, fo 73.
Bibl. nat. lat., 10510, fo 3.
Berlin, Théol. lat, no 11, fo 75 ro.
Bibl. de l'Arsenal, 1169, fo 19 vo.
Vienne, 1845, f» 89 vo et 60 v.
Munich, lat., 14083, fo 100 ro.
— 14322, fo 100 ro. —
Bibl. nat. lat., 10508, fo 2 vo (ajouté
postérieurement). Saint-Évroult
Bibl. nat. lat., 10508, fo 14 vo. —
— 10508, fo 13 vo. —
— 10508, fo 11 vo. —
Oxford, Bodléienne, 775, fo 2. ?
Londres , Cot'.onien, Caligula A XIV. ?
Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343, f» 3 vo. Romagne.
Bibl. nat. lat., 1086, fo 21 Ws vo.
— 1086, f 21 ro.
— 1139, fo 114 ro
— 903, fo 166 ro.
— 9449 , fo 35 vo.
— 10508, fo 23 vo.
— 13232, fo 20 ro.
Munich, lat., 14083, fo 103 vo.
Oxford, Bodléienne, 773, fo 6 vo.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Nevers.
Saint-Évroult.
Paris.
Saint-Emmeran.
Bibl. nat. lat., 13252, fo 23 ro. Paris.
Berlin, Théol. lat., n" 11, fo79 ro. Saint-Gall.
Munich, lat., 14083, fo 102 ro. Saint-Emmeran.
— 14322, fo 101 ro. —
Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343, fo2ro. Homagne.
— Angelica, fo 196 ro. —
Oxford, Bodléienne, 773, fo 6 ro. ?
1 — 1(J
242
HISTOIRE DE LA l'OK-lE UïriUilOlJE
Ces neuf beaux cris vers Dieu, dépouillés de tout
artifice oratoire, ces neuf eleison très simples, sont
plus éloquents que tous les Tropes du inondr*.
Mis^f^rero, I)oiiiiiie; voce, corde.
Miserere, rex oiiiniuni.
0 Deus oninicreator.
Omnipotens geriilor liimoiiqiu- cl fontis
()ri''o.
C) l'ater excelse.
O Pater immense, nù scmper idem ma-
nel esse.
0 Paler piissime.
Orbis faclor, rcx a-terne.
O Uex clemcns.
0 Theos agie.
0 Theos aime, tilii.
Paler, creator omniiiin.
Paler cuncla qui guburnas
Paler infanlium.
Piissime rcx Kirrie rector.
Princeps aslrigeram geiiitor quia lu
régis aulam.
Pro nobis qui dedisti unicum lilium.
Qui de limo formaveras (?).
Kcgnorum rector mundi.
Hcgum sumnic Domino.
Hcx Ueus a>terne, sine |)rincipio.
Mibi. nat. lai., 'J'i-iU, fo i:( r». .Xcvcrs.
— 1H«, f" 4 r". ?^aiiil Maniai.
Londres, Cottonien, Caligula A XI\'. Y
fiibl. de i^.iinl-flall, /i8/i,p. 211. ' Saint-Oall.
— 370 , p. 72. —
— 380, p. 108. —
— 381 , (1. 2%. —
Hibl. nat. lai., 9448, f» 15. Prum.
Herlin, Théo!, lai., n- M, fo 81 vo. Saint-Gall.
Munich, lat., Ii083, f» 101 v». Sainl-Emmeran.
— ri322, fo 100 vo. —
nome,Vitl.-Kmmaiiuelc, 1343, fo 1 v". Homagne, el''.
Vienne, iH'iï,, f" GO r". ï
l^ibl. nat. lat., 10.-508, f- 'J r». Sainl-F-:vroult.
Dxford, Bodléienne, 775, f» 5 vo. ?
Munich, 14083, fo 02 vo. Sainl-Kmmeran.
Bibl. dcSainl-Gall, 380, p. 110. Saint-Gall.
— 381, p. 317 (ajoute
postérieurement ). —
Berlin, Théol. lat., noll,fo83ro. —
Bibl. de Saint-Gall, 378 , p. 368. —
— 382, p. 60. —
Bibl. nat. lat., 1080, fo 19 r». Sainl-Martial.
— 1139, fo 113 ro. —
— 9449, fo 1. Nevers.
— 10508, fo 16. Sainl-Évroult.
— 13252, fo93 ro {ajouté
poslérieuremenl). Paris.
Londres. Coltonien, Caligula, A XIV. ?
Bibl. nat. lat., 903, fo 164 ro. Saint-Vrieix.
— 887,fo48vo. Saint-Martial.
— 10508, fo 8 vo. Sainl-Évroull.
Oxford , Bodléienne, 775, fo 2 vo. t
Bibl. de Saint-Gall , 378, p. 368. Saint-GalL
— 382, p. 61. —
Bibl. nal. lat., 1086, fo 19 ro. Saint-Martial.
— 1139, fo 115 vo —
— 378, p. 365. Saint-Gall.
Bibl. de Saint-Gall, 376, p. 45. —
— 381 , p. 218. —
— 382, p. -2». —
Berlin, Tliéol. lat., no 11, fo»4 vo. —
Oxford, Bodléienne, 775, f» 4 r". 't
Munich, 14083, f» 102 vo. Saint-Emmeran.
— 14322, fo 102 vo. —
Berlin, lai., no 11, fo 80 vo. Saint-Gall.
Bibl. nat. lat., 9449, fo 18 ro. Nevers.
Saint-Gall, 376, p. 74. Saint-Gall.
Munich, lat., 143-22, 102 ro. Saiul-Eniracran.
Bibl. nat. lat., 10508, fo 10 vo. Saint-Èvroult.
Londres, Cuttonien,Cali);ula, .\ XIV. Y
Bibl. de Saint-Gall, 378, p. 36-2. Saint-Gall.
— 382, p. 57. —
LES TROPES DE LA 1'-° ÉPOQUE — LE KYRIE 243
Il n'est pas besoin de tant de mots pour dire à Dieu :
« Pitié. »
Rex magne, Domine, quem Sancti.
Rex magne, genitor.
Rex regum, Domine, rector cœlorum ac
terrœ.
Rex, virginum amator.
Suavis tu, Deus, rex noster verus es.
Summe Deus, qui cuncta créas.
Summe Pater a quo.
Te (on tibi), Christe, supplices (Va-
riantes: Te Pater, supplices, 10508;
Te, Christe rex, supplices. Vitt.-Em-
manuele ).
Bibl. nat. lat.
Nouv. acq.,
Theoricam practicamque vltam.
Theos bénigne. Domine, eleyson.
Unice Christe qui es lux.
Unus omnipotens creator.
Urbs cœlestis.
Virginitatis amator. (Cf. Rex virginum.
Bibl. nat. lat., 1118, f" 27 r».
— 1139, fo 110 xo.
— 903, fo 164 ro.
Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343, fo3ro.
Bibl. nat. lat., 10508, fo 8 t».
— 887 , fo 49 ro.
— 1084 , fo 91 ro.
— 1119,fo85vo.
— 1120, fo 68 ro.
1086, fo 22 ro.
2194, fo 106 ro.
Londres, Cotlonien, Caligula, AXIV.
Bibl. nat. lat., 887, fo 52 ro.
— 1086 , fo 20 ro.
— 10508, fo 11 ro.
Bibl. nat. lat., 9448, fo 7.
— 1084, fo 90 vo.
— 1120,fo67ro.
— 1119, fo 84 ro.
— 1240, fo 79.
— 903 , fo 163 , ro.
— 9449, fo 7 vo.
— 13252, fo 20 ro.
— 10508, fo 6 ro.
Oxford, Bodléienne, 775, fo 2 ro.
Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343, fo i r".
— 8S7, fo 50 ro.
— 1087,fo98vo.
— 1139, fo 111 ro.
— 903, fo 165 ro.
— 13252, fo 21 vo.
— 10508, fo 12 vo.
Oxford, Bodléienne, 775, fo 2 ro.
— Douce, 222, fo 37 vo.
Bibl. nat. lat., 1084, fo 144 vo.
Bibl. nat. lat., 887, fo 55 ro.
— 887,fo52vo.
— 887, fo 54 vo.
— 1120, fo 72 vo.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Romagne, etc.
Saint-Évroult.
Saint-Martial.
•?
Saint-Martial.
Saint-Évroult.
Prum.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Nevers.
Paris.
Saint-Évroult.
Romagne, etc.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Paris.
Saint-Évroult.
Saint-Gall.
Saint-Martial
CHAPITRE XVI
LES TR0PE3 DE LA PREMIERE EPOQUE
AD ROGANDUM EPISCOPUM
L'évêque a encensé l'autel, assisté par son archi-
diacre; il a donné le baiser de paix aux diacres, aux
prêtres assistants, à son chapelain. Puis il s'est, à pas
lents, dirigé vers son trône, qui est disposé contre la
muraille, derrière l'autel, au milieu et au fond de l'ab-
side. Il en a gravi majestueusement les quatre degrés
et s'est assis. Le Kyrie vient de s'achever : il se fait un
grand silence : on attend'.
Encore aujourd'hui, c'est un spectacle grandiose que
celui de l'évêque sur son trône, les mains sur ses
genoux, grave et immobile. Mais il faut avouer qu'au
moyen âge c'était bien autre chose. L'évêque alors était
une sorte de potentat, de souverain, et sa cathedra
était vraiment un trône.
Au seul évêque, pendant longtemps, il fut permis
d'entonner le Gloria in excelsis \ Cette discipline ,
^ V. les Voyages liturgiques du sieur de Moléon, p. 16, etc.
2 « A Rome, au ix" siècle, les prêtres ne pouvaient chanter le Gloria in ex-
celsis, même quand ils remplaçaient le pape empêché, si ce n'est le jour de
246 HIPTOlIiK |)K LA pOKSIi: MTT'F.GIOÏIE
établie par saint Grégoire, fut sans doute respectée
jusqu'à l'époque où l'on chanta les |)remiers Tropes. Il
n'y avait d'exception que pour la l'rtc de Pâques, et le
plus humble des prêtres pouvait, ce jour- là, aborder la
grande Doxologie tiiomphale. Mais une telle rigueur
ne tarda point à s'adoucir, et les souverains pontifes
accordèrent, pour le chant de l'Hymne angélique, des
autorisations plus ou moins nombreuses à des prêtres
séculiers ou réguliers. L'antique Règle de saint Gié-
goire : « Gloria in excelsis a presbyteris minime diri-
tur, » fut peu à peu effacée de l'usage liturgique. On
n'en a même pas gardé le souvenir.
Il n'en était pas ainsi aux xe et xi*^ siècles.
Ce qu'on attend dans l'église où nous venons de
transporter nos lecteurs, c'est que l'évéque entonne le
Gloria, et voici qu'on l'en vient prier.
Pour une telle circonstance, un nouveau Trope a été
jugé nécessaire, et le ton en est très solennel : Sinnrne
sacerdos, emitte vocem tuam et recita nohis Angelonim
cantica qiiœ prœcinuerunt Régi nato Domino. Eia,
die, domne, eia\
Ce Trope, d'ailleurs, ne fut pas le seul, et les Tro-
paires nous offrent ici une seconde formule : Sacerdos
Dei excelsi, veni ante sanctum et sacrum altare, et,
in laude Régis regum, vocem tuam emitte. Supplices
te rogamus et petimus. Die, domne -.
Pâques.» (Ordo )-0)iianus, 1; Mahillon , Muséum ilalinon , (. U. ]>. 17. cilé
par Tabbé Duchesno, Liber poiiti/icatis, p. 130. — Cf. Mnrtène, De n/iM'/uis
Ecelesix ritibus, I, 3G6. )
' Bibl. nat. lai., 909, fo H r»; 1118, fo 13 r»; lO&i, f' 39 r; 887. f<> 69 v».
Après le Summe sacerdos, ce dernier manuscrit nous offre le le\te suivanl,
qui, un jour sans doute, a été appliqué aux simples prêtres : Domxe s.vcer-
Dos, etc. (887, f" 69 \°.) Ce dernier Tropaire ajoute une variante de ce même
Trope qui convient à la loto do Pâques: « Resurgenli Domino, rogi macrno, «etc.
2 Bibl. nat. lat., 1120, f° 03 V; 887, f» 69 v; 1118, f* 19 v»; 12'iO,^ f» 37 v»;
LES TROPES DE LA T" ÈP.—AD ROGANDUM EPISCOPUM 247
On a pu se demander si le Sacerdos Dei excelsi
n'était pas destiné aux simples prêtres, et le Summe
sacerdos aux évêques. Mais nous avons lieu de croire
que les deux formules s'adressaient également au pon-
tife, et il y a, à cet égard, des rubriques qui sont déci-
sives.
Il y avait dès lors une tendance à faire cet honneur
au prêtre comme à l'évêque. Mais un rite aussi solen-
nel ne convenait, à l'origine, qu'à un personnage con-
stitué en dignité, et de telles invitations ne se faisaient
que devant un trône.
13252, ^26 r. — V. Gall-Morel, n» 93, p. 58, d'après le ins. 55 de Rhei-
nau, p. 105, et Gerbert, De Cantii et Miisica sacra, I, 463. — Cf. la forme
suivante qui offre certaines variantes assez importantes: aPastor bone, veni ante
sacrum et sanctum altare, et, in laude Régis regum, vocem tuam prior emit-
tere digneris; supplices te rogamus. Eia die, domne : Gloria. » ( Bibl. de
l'Arsenal, 1169, fo 3 V.)
CHAPITRE XYII
LES TR0PE5 DE LA PREMIERE ÉPOQUE
— LE GLORIA IN EXCELSIS
On connaît la charmante légende qui s'est attachée
aux origines du Te Deum. Dans le premier enthou-
siasme où la conversion de saint Augustin avait jeté
l'âme de saint Ambroise, le convertisseur s'écria,
presque affolé de joie : Te Deum laudamus. En proie
au même lyrisme, le converti lui répondit soudain :
Te Dominum confitemur. Saint Ambroise lui répliqua
par cette exclamation ardente : Tibi omnes Angeli,
que saint Augustin accompagna, sans plus tarder, du
Tihi Cheruhim et Seraphim. Il en fut de même pour
la composition de tout ce cantique sublime, et c'est
ainsi que ces deux nobles âmes, formant à elles seules
deux demi -chœurs, en improvisèrent tous les versets.
Encore une fois, c'est charmant; mais ce n'est qu'une
légende.
Les origines du Gloria in excelsis ne sont guère plus
précises que celles du Te Deum. Avant le commence-
ment du vit siècle, il n'en est question que deux fois :
2o0 Ilis'l'niiii; hi; i, \ l'Oi;-!!'; litiiicique
dans les Con>itUif lions apostoliques ' <it dans le (ùodex
Alexandrinus de la Bible grecque *. Encore le texte du
G^/ona nous apparaît-iL dans ces deux documents, sous
une ioi-nie très dlfff'rente de la loimc latine -. Le Liber
pontificalis attribue au pape Télesphore ' l'adoption de
ce beau cantique j)()ur la seule solennité de Noël, et il
est trop visible qu'il a été spécialement composé pour
cette fête. Le mrme chroniqueur, dans cette Notice du
pape Symmaque^ qui est certainement Toeuvre d un
contemporain*^, nous apprend, en termes fort clairs,
que ce pape étendit l'usage du Gloria à l'Office de tous
les dimanches et de toutes les fêtes des saints martyrs \
Quant à Fauteur, il faut renoncer à le découvrir, et
tenir pour non avenue l'opinion de Jean Beletli, cpii en
fait honneur à saint Hilaire de Poitiers \
Nous disions tout à l'heure que, pendant longtemps,
le pape à Rome et chaque évêque en sa basilique
' vu, 47.
2 v° siècle.
3 Liber pontipcalis, éd. de l'abbé Duchesne, ]>. 130.
■^ «Hic Tele?;phorus ] constituil ut... ante sacrificium Hymnuo diceretur an-
gelicus, hoc csl Gloria in excelsis.)> {Liber pontificalis , éd. de l'abbé Duchesne.
p. 129.) Cette Notice de Télesphore appartient à la première partie du Liber
pontificalis, laquelle a été, d'après l'abbé Duchesne, rédigée au temps des
Goths. = La première édition du Liber pontificalis limitait à la nuit de Noël
l'usage de chanter le Gloria in cxcelsis. Sous le pape frymmaquc, il fut permis
de le chanter tous les dimanches et jours de l'êtes. Le second éditeur n'a pas
senti le besoin de conserver (à l'article Télesphore) la formule tantum noctu
natale Domini qui marque la difTérence d'usage avant et après l'ordonnance de
Symmaque. Tout cela, d'ailleurs, doit s'entendre seulement de la Messe épis-
copale. (Abbé Duchesne, Liber pontificalis, p. 130.)
s '.89-iii'i.
6 Ce contemporain, d'après l'abbé Duchesne, termina son travaM par la
Notice di Féii.\ IV (o26-o30).
7 « [SymmachusJ constituil ut omne die dominicum vel natniicia martyrum
Gloria in excek/symnus diceretur. » {Liber pontificalis, éd. de l'abbé Duchesne,
p. 263.) — «Antérieurement à Symmaque. le Gloria in cjrcelsis, comme nous
l'avons dit, ne se chantait qu'à Noël. Ce décret, donc, est l'extension d'un usage
ancien plus restreint. » {Ibid., p. 268.)
? Martène, De antiquis Eivlesix ritibus, I, 366.
LES TROPES DE LA 1'° ÉPOQUE — LE GLORIA 2ol
avaient seuls le droit de chanter le Gloria. « Chanter »
semblera peut-être excessif: « entonner » serait le vrai
terme. Ce qu'il y a d'assuré, c'est qu'à l'exception de
ses premiers mots , l'Hymne angélique était en cer-
taines églises chanté, d'un bout à l'autre, par tout le
clergé et par tout le peuple, mais que presque partout
il était alternativement exécuté par deux chœurs. Il
y avait là un grand effet musical que l'adoption des
Tropes ne détruisit pas. Un des deux chœurs, sans
doute, fut chargé de chanter ces Tropes; l'autre, le
texte \ Encore ici, d'ailleurs, nous nous trouvons en pré-
sence de ces Tropes sans paroles qui ont déjà attiré
notre attention dans la contexture des interpolations de
l'Introït et du Kyrie. C'est dans le plus ancien manu-
scrit de Saint -Gall, et c'est là seulement que nous ren-
controns, pour le même Gloria, une série double de
« Tropes parlés » et de « Tropes sans paroles » entre
lesquels nous nous persuadons que les chanteurs
avaient la permission de faire un choix-. On renonça
d'assez bonne heure à cet ad libitum, et les Tropaires
de Saint -Martial ne nous présentent plus que des Tropes
avec paroles. Il faut ajouter qu'ils sont souvent char-
gés de vocalises interminables ^, surtout à la fm du
' V. les Voyages Utiirrjiques du sieur de Moléon , p. 17 (deux cliœurs);
pp. 53, 56, 157, 167 (un seul). = Le liturgiste du xviii"' siècle ajoute : « Le
jour de Noël, à Saint-Maurice de Vienne, on chantait le Gloria in excelsis à
trois chœurs, dont l'évoque et les assistants faisaient un. » {Ibid., p. 17.)
2 Exemples de Gloria avec ou sans paroles, ad libitum: Bibl.de Saint-Gall,
484, pp. 219, 221 , etc. etc.^ Exemples de Gloria tropes sans paroles : Bibl. de
Saint-Gall, 484, pp. 216, 218, 219, etc.= Cf. le ms. 381 de la même bibliothèque.
3 V. notamment Bibl. nat. lat., 1121 , f"» 47 v°, 46 r» ; 10508 (Saint-Évroult),
fos 26 r", 34, .36, etc. Au f° 26 r" de ce dernier manuscrit on lit : « Christe cœ-
lorum rex aime, voces nostras, inchte, vocibus Angelorum adjunge.Cwm sancto
Spiritu. » Avant le Cum sancto il y a deux séries de vocalises, Tune brève,
l'autre développée, entre lesquelles les chantres pouvaient choisir. C'est ce
qu'indique le mot aliter.
2;j2 iiistoihk |)K I. a i'oksik UTiiuiiMi i;
Gloria; mais il y a loin de là aux deux séries com-
plètes du plus antique Tropaire de Saint-Gall.
Ces interpolations du (Jloria lunnt [tlus populaii-es
que la plupart des autres; on les aimait, ces laiides (tel
était leur nom le i)lus ordinaire' ); on ne les trouvait ni
trop prétentieuses ni trop longues. Elles eurent, elles
conservèrent longtemps un Iteau succès, dont nos
manuscrits- nous permettent .lujourd'hui de mesurer
l'intensité. L'un d'eux ne leur consacre pas moins
de cinquante feuillets, de cent pages. C'est presque
trop l
' Le mot laudes, comme nous Pavons dit plus haut (chap. vu, p. 51), offre
ces deux sens : l» le Gloria lui-même, et 2° les Tropes du Gloria. Lorsqu'on
lit dans le ms. 1118 : Item laudes cum tropis, nous avons évidemment affaire
au jiremier sens ( f<" 3 v» et 4 r°); tout au contraire, le second est clairement
établi par les mss. 1119 (f» 90 r") et 1120 (l'o 82 r») : Incipiunt Glorite mm
laudes. Dans beaucoup de textes, le sens reste douteux (887, f"8 et 9). Etc. —
Cf. le mot laus au singulier (1118, f» 50 r" et passim). = Il ne faut pas s'éton-
ner si les mots laus et laudare se trouvent au commencement de la plupart de
ces Tropes du Gloria; c'est leur esprit, c'est leur essence :
1. Laudemua Dominum quem laudat cœlicus ordo (10508, t» 17).
2. Queni voro jiia laus, ?olum quem condoccl liymnus... (18 vo).
3. Quem laudant humana agmina (2o strophe, 19 v).
4. Quem cives cœlesles... laude fréquentant (23 r»).
'o. Latis tua, Ueus, resonet (25 ro).
6. Rector ab arce polens, te laudat cœlicus ordo (26 r»}.
7. Laus tibi. Domine, celsa potestas (28 r»).
8. Quem jugi voce... agmina cœlestium laudant (31 ro).
9. Quem dominum rerum collaudant omnia verum (32 r»;.
10. Sit tibi laus trina (33 r»).
11. Angelica jam Pater laude (33 r»).
12. Quem cuncla lawianl (36 r»).
13. Nulia qui laude indiges (36 V"'.
14. 0 laudabilis rex (37 ro).
15. 0 gloria sanctorum /ausque Angeloruni (38 r»).
16. Quem vere pia laus (41 v»). Etc.
2 Les Gloria tropes, comme les Tropes du Kyrie, peuvent occuper, dans les
Tropaires, l'une ou l'autre de ces deux places : tantôt ils forment, tols en-
SE.MBLE, un proupe à part après le proup:* d^s Tropes du Kyrie (type : Bibl.
nat. lat., 1119 et 10508); tantôt ils sont relégués, pour chaque fête, à leur
place normale, parmi les petits Tropes de la Messe; Inlroïls, Offertoires, etc.
(type : lat. 1118, etc.).
3 Le manuscrit de Saint-Gall 484 (x* siècle) r.^nferme treize Gloria tro|>és el
le ms. 381 onze. Le manuscrit de Saint-Martial 887 nous en offre dix-huit;
1121. vingt-quatre; 1084, trente et un; 1119, trente-trois. Le Tropniro de
Saint-Évroult (10508) en présente trente et un, et celui de Paris ( 13252 jvingt-
LES TROPES DE LA V'° ÉPOQUE — LE GLORIA 253
Ces Tropes du Gloria avaient le don d'attirer, plus
vivement que tous les autres, l'attention du peuple et
des clercs. On les chantait avec une solennité presque
extraordinaire; on s'estimait heureux de les faire en-
tendre aux « profanes ».
là/Tf . y /^^ .
xiS' ILtur t^*^ ^^f r^
qt.
1 \ y /^ . -'^ y Y*" .ut/ " f
K "Te-- iljH uernih^ortcer- riof
Type des Tropes du Gloria (Bibl. de Saint-Gall, 48'j, p. 225] :
Lans tua, Deus, resonet coram te, Rex (1).
Le 18 novembre 1031, à Limoges, lorsqu'on ouvrit
ce célèbre concile où fut proclamée l'apostolicité de
saint Martial, l'historien anonyme du concile ne man-
qua pas d'observer que le Gloria fut chanté, devant les
Pères, avec ces tropi , avec ces festivse laudes qui
avaient reçu, dans l'abbaye de Saint-Martial, un si
merveilleux développement. Beaucoup de ces prélats
ne connaissaient pas encore ces ornements dangereux
sept. Pour le seul Temps pascal, un des manuscrits de Saint-Martial ne con-
tient pas moins de six Gloria tropes (1121 , 1'°* 45 v», 49 r°). Etc. etc.
254 HISTOinE DE LA POÉSIE MTrRr.IOUE
du texte liturgique, et, sans doute, en prirent le goût
qu'ils répandirent autour d'eux. Mais la mod»; en passa'.
On ne s'étonnera pas qu'on puisse diviser en i)lii-
sieurs espèces un genre aussi alKjndant. Nous ne nous
attarderons pas longtemps à la division qui résulte
du ton sur lequel est écrite la musique du texte
tropé, ou de la solennité plus ou moins grande des
fêtes auxquelles les Tropes sont consacrés -. On inter-
p{jlait de préférence les Gloria des grandes fêtes. Parmi
les laudes du Gloria, il en est qui sont spéciales à tel
ou tel jour de l'année liturgique '; il en est d'autres, au
contraire, que l'on chante ad libitum et qui conviennent
à toutes les fêtes*. Mais il y a à signajci- ici hien d'autres
' « Angelico hymno cuii tropis, idestFESTivis laldibus, ornatissitne expleto...
Iiiter LAUDES autem ( quaî xpôuoi grœco nomine dicuntur a conversione vulgari»
modulationis), dum versus Trinitatis a cantoribus exclainarelur... » (Labbe,
IX, 890.)
- Les G/o*va non tropes sont divisés en deux groupes ; a. /« magnis festivita-
libiis (1086, f" 24 r°);b. In festis privalis {Ibid., 25 r°),ou De minoribits fesli-
vitatibus {1133, l" 9 r"). ^ 11 en est natureilenient ainsi pour les Gloria in-
terpolés : Incipiunt laudes de circulo auni, Majontm Festuruni (Bibl. nat.
lat., 887, (fo fi9 r») ; De minore {Ibid., 1» 83 r»). — Cf. le nis. 1121 : De se-
cundo Gloria (f" 53 r°); De Gloria minore (f» 56 r»), et 1120, f° 99: De se-
cundo Gloria. Etc. etc.
3 Dans les Tropaires, [•'■s interpolations du Gloria sont ordinairement classées
suivant l'ordre de Tannée liturgique, avec l'indication précise des fôtes au.x-
quelles elles se rapportent (Bibl. nat. lat., 887, l» 70 r<» et suiv.; 1118, f» 2 r
et suiv.; 1120, f" 82 et suiv. , etc. etc.). A Noél on chante VOninipotens alti^-
simeverbum {Bibl. nat. lat., 1118, fol3 r°; 1119, fo90; 1121 , f» 42r% etc.), ou 1.-
Paxsempiterna (Saint-Gall, 484, p. 214, etc.). Le jour de saint Etienne, à .Sainl-
Gall, on entonne le^lua i>tcp/tanus ( Saint- Gall, 484, p. 215) et à la Saint-Mar-
tial l'O laudabilis rex (Bibl. nat. lat., 1121, 43 v»). A Pâques, c'était lo Ghriste,
salus mundi (1119, 10 99 r»; 1121, f» 4dv°); à l'Ascension, le Prudentia pru-
dentium (887, 1" 79 v»; 1118, f" 45 r», etc.) ; à la Toussaint, le Laits tibi sumitte
Deus (1118, l'o 93 V). Etc. etc.
< « Ubi volueris, laudes : Qui indiges nuUius laude.» (1121, f» 44 f.) — «De
quolibetlesto : Angelico alTalu. » (887, f» 81 v".)= Parmi les Tropes ■■ communs d
on peut citer le Laiis, honor, Ghriste (1118,1° 97 r"), qili se chante le jour de
la Saint-Martin et n'a aucun rajiport avec celte fêle. Tel est encore lo Protège
verum Pascha {Ibid., 102 v"), qui a été évidemment composé pour Pâques et
qui est indiqué pour la lète de saint André. = C'est peul-ètro ici le lieu d\>b-
server que Ton luisait entrer dans certains Tropes du Gloria quelques phrases
LES TROPES DE LA T" ÉPOQUE — LE GLORIA 255
particularités qui ont donné lieu , parmi les Gloria tropés,
à des groupes distincts. Nous allons les faire connaître.
Aux laudes du Gloria on a jugé I)on de donner quel-
quefois une préface, à ce petit temple un portique. Le
jour de Noël, pendant la Messe de minuit, à la cathé-
J «v^cpi -iominertitxifretler^
tir u/I? xaki/îtTrïNT. A^Krnurn
rtuim fo uAum ^ ^^
Types des Tropcs du Gloria (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 225) :
Laus tua, Deus, resonet coram te, Rex (2).
drale de Nevers, dans celle d'Autun et en d'autres
églises, une voix faisait entendre ce cri très solennel ' :
Lœtentur cœli cœlorum, et exultei omnis orbis terra-
qui avaient déjà élé utilisées dans certaines autres interpolations du même
morceau liturgique. C'est ainsi que dans le ïrope Laus tibi, Domine, celsa
potestas, le verset Cœlestium (après le Suscipe) se retrouve (1121, f» 49 r»)
après le second Qui tollis du Trope de Noël Laus tua [Ibid., 43 r°); c'est ainsi
que le verset Héros poli de Cœlestium se retrouve dans VOmnipotens altissime
(après le Tu solus); c'est encore ainsi que la même phrase : Parvulus natus
in orbe, quam magmis es in poli arce! se retrouve : 1° dans le Trope Omni-
potens, après le Domine /ili (1121, f^^-Zv»), et 2» dans le Trope Lans «UO;, entre
les deux Qui tollis (f» 43 r"). Etc. etc.
1 Bibl. nat. lat., 9449, t'° 5 r". — Cf. I)il)l. de l'Arsenal, 11G9, 1» 5 v" (Messe
de la nuit de Noël).
•2uG IIISTOIHK l)i; I \ l'UKSIK I. IT (' IU;i OI'H
mm, quia hodie Cliristus de Virylne Maria natus est.
Jiibilemus omnes cmn Arajelis, clamanles et dicentes.
Alors rév(3que entonnait le (Horia.
Le jour d(; Pâques, à Limoges ^ à Nevers, à Aiitun,
à Rome et ailleurs, même proloj^ue, nirni*; cri : Cii^es
superni hodie suam simid et nostram nunliant mundo
festivitatem. Gloriam Deo resonemus omnes.
Le lendemain, à Saint-Martial, m^mo invitatoiie. qui.
comme les précédents, a sa place et sa vie à part dans
l'économie de nos Tropaires : Sarrexit Christ us a mor-
tuls, mortis confractis vinculis ; gaudentes Angeli in
altissimis résonant dicentes : FAa-. Il y en ;iiM;iit plus
d'un autre exemple à citer.
Cette préface, réduite à de moindres proportions,
faisait corps, d'autres fois, avec le Gloria lui-même et
n'en était pas séparaMe. D'autres fois encore, cette
même préface ne s'appliquait qu'aux mots laudamas te,
et, dans ce cas, les premiers mots du Gloria étaient
sous- entendus ou n'étaient pas tropés.
Or, suivant que le Trope du Gloria commence après
le mot Deo ou après le mot voluntatis--, nous avons
1 Bibl. nat. lat., 108'i, f» 101 v», cl H18, f» 51 r» (Saint-Martial) ; y'iW,
l'o 30 i-o (Nevers); Arsenal, 1069, f» 20 r» (Aulun); 10508 (Saint-ÉvrouU)!
fos 26 r" ; Rome, Vittorio-Enimanuele, 1343, f° 9 v° (Romagne), etc.
2 Bibl. nat. lat., 1118, f» 51 v, etc. etc.
3 Ces deux groupes (après Deo et après voluntalis) sont, en particulier,
très nettement distincts dans le ms. 13252, t'" 26 v° et suiv. Le second groupe
est de beaucoup le plus important. A ces deu.x groui>es répondent les relatifs
quanij etc. (se rapportant à Gloria) et quem, etc. (se rapportant à Deo). = Il
y aurait lieu de créer un troisième groupe, avec un Trope qui suit le mol terra,
si l'usage en avait été plus répandu: « Gloria in excelsis Deo, qui Deus et
rector mundi manet atque creator, Et in terra quem laudant humana agmina :
Paxhominibus bonœ voluntatis.))(liM. nat. lat., 1119, f''128v*.'i Mais ce mode
est des plus rares. Il en est de même pour ces Gloria qui ne sont pas tropés
avant le mot ^^de Laudamus te : « Gloria in excelsis Deo, et in terra pax ho-
niinibus bona> voluntalis. Laudamus le: Angelica jain , Pater, laude v (Bibl.
nat. lat., 909, l- 102 v°; 1121. l- 55 r», etc.).
LES TRUPES DE LA 1"= EPOQUE — LE GLORIA 257
affaire à deux séries, à deux groupes distincts, mais
dont les différences, comme on le voit, n'ont rien de
bien grave.
■ Ici encore nous trouvons le type « développé » et le
type « bref ».
Le type en vers et le type en prose -.
A L i T £ iV.
CtiA^'TlS- fh-jfoffimufconfei^m
' y/f /- ^ y^ y '■'^
Voc deufpr^Oi^vLf Aeucnrif
, y /i - - // ^ ^ ^ -"'"
f Te-- ^em \ifnedicxc mArt~ <5i^
^ ^^ ^ ^ ^ -^ - ^ ^
Type des Tropes du Gloria (Bibl. de Saint -Gall, 484, p. 227) :
Laus tua, Deus, resonet coram te, Rex (3). Ce Trope se termine par un Regnum.
1 1° Type développé. V. plus bas le Laudat in excelsis , qui est en vers; mais
ce type existe aussi en prose. = 2'» Type bref :
a. Sit tibi laus trina, sunime Deus : Laudamus te.
Cuncta bonus benedicis , héros : Benedicimus te.
Quem omnis adorât usia supplex, Adoramvs le.
Glorificanl mare, terra, polusque : Glorificamus le.
Nos, Deus, ut tibi gratifiées, Gralias.
Ima Deus, homo celsa petens, Qui sedfs.
Cui per eon demus omne melos Cttm sanclo Spirilu. (Ttxtc établi d'après le ms. 1120
et les autres Tropaires énumérés plus loin.)
b. 0 gloria sanctorum lausque angelorum, quam secutus est sanctus Johannes, Lauda-
mus le.
0 decus et virtus, lausque bcata Sanctorum quam benedicit sanctus Johannes, Benedici-
mus te.
Cantemus tibi laudes de pectorc toto tcque cum sancto adoramus Johanne: Adoramus te.
Angelicus tibi adslat clarissimus ordo cum (juo te semper glorilicat sanctus Johannes :
Glorificamus le. (Texte d'après le ms. 1120 et les autres Tropaires.)
2 \o Type en vers. Les Gloria tropés en vers sont assez nombreux, comme
on en pourra juger d'après le tableau ri-après, où il est aisé de recunnaître
I — 17
258 IIISTOIHI-; l»K I.A |M)|>S||-; IJTri^(.|(jlJE
C'est, sans doute, chose plus ran.' (jnim Gloria tri-
plement ou (piadruplement tropé. Le type existe ce-
pendant, et nous le plaçons sous les yeux i\c notre
lecteur *.
les Tropes métriques. Il faut sipnaler ceux qui sont écrits en distiques et dont
voici lo type d'a|)rès le ms. 1118 (1" 00 r» ) cl les autres manuscrits dont nous
(Idiiiiiiiis plus loin la liste :
LauJal in cxcolsis cœlum tcrramquc regenlcm
Angclicus cœtus, laudat et oinnis liomo. Laudamus te.
Te bencdicit ovans angclorum celsa polestas ,
El iinmorlalis homo te henedicil ovans. lienedicimus le.
Te veneranler adorai cuncla caterva poloruni;
Te tellus, pulagus , laudal, adorai, amal. Adoramu» le.
Glorificanl L>oniifium rulilantia pidcra cœli;
Glorificanl le, rex, cuncta tTuata lua. GtorificamuB le.
Qui solila pO[]uliim tua, rcx , ]iietate giibernas ,
Sempcr in œlcrnuni protogis atquc rogis. Gratiaa.
Qui régis imperio terram i)clagusque polumque,
Tu voluisli sciri nomen in orhe tuum. Domine Deus, rex.
Qui genus humanum clementer ab hosle maligno
In crucc jam moriens carne lu, rex, redimis. Domine fili-
Angelicis iwlus conjunctus noster calervis {sic)
Adsislil jugiter vultibus ecce luis. Jeiu.
Regnorum pie rcx Cliriste et domine dominorum ,
Gloria, lux, virtus, laus, honor atque salus. Qui tollis.
Qui super aslra sedes ad dextram l'alris in alto,
Rcx cœli , faniulis tu miserere tuis. Qui sedes.
In te vera quidcm fulgel sapienlia, Cliriste,
In te vila, salus, gloria, divitia;. Quoniam lu.
Cujus est regnum solius, vicloria, virlus ;
Tu faniulis cunclis, tu miserere luis. Jesu.
2" Tyi'e en ritosE :
Pax scmpiterna, Christus, illuxit; gloria tibi , Pater cxcelse.
Nativilatem tuam, Cliriste, qui rccolunt visita : Laudamus le-
Hyinnum canenles hodie, quem terris angeli fuderunt, Christo nascenti ,
Quod Vcrbum caro factum mater in ])raesepe posuit Maria , Denedicimus te.
.Nalus est nobis hodie Salvalor, in Trinitate semper colcndus,
Quem bencdicit chorus cœleslis, gloriam pangeiis Domino in altissimis : Adoramus le.
Quem vagientem intor angusta antra praescpis angelorum cœlus laudal excellens,
Qiiiïni convenlus adorai pastoralis, angelo commonenlc, venit : Glorificamut te.
Ullro mortali lioilie iiidutum carne precamur.
0 dccorala proies subliniis, liodic mundo nasci digneris; ex utero prodisti Virgini? : Grattas
agimus tibi.
Cujus a sede lux benedicla caliginoso orbi refuUil ,
O iiieffabilis rex cl admirab li?, rex Virginc nalus hodie prodisti, mundoque subvenisli Qui
Cujus honor sine fine manel sceptrumque gloria;, eia, Cum sancto Spiritu.
le, trina Deitas et una, i>oscimus ut culpas abluas, noxia subtrahas. ba luis paccm famulis,
nubis (|uoque gloriam pcr cuncta sa;cula sœculorum. Amen. (D'après les Tropoires cil6â
plu* loin. = Le Pax sempilerna est un des plus anciens Tropes du Gloria.)
1 Laus tua, l)>ius, resonel coram te, rex. iMiidantus te. 0 laudabilis rex.
Domine Deus. Laudamus /<•. Qui indijres nullius laude. Deus trine et une Do-
mine, Laudamus ti>. Omnipolens pie rex, quem laudat spiritus omnis. iMuda-
mus If. .\donaï beiiedicti- Deu<. HvutuUcimus h', tj"'-'" benidicunl mare et
LES TROPES DE LA l"'^ ÉPOQUE — LE GLORIA 289
Mais il est une autre dassification, et qui est toute
particulière à ces laudes du Gloria. Certaines de ces
interpolations nous offrent le Trope intérieur qui est
appelé Regnum tuum solidum, et dont nous parlerons
tout à l'heure. Certaines autres ne le renferment pas.
Il semble enfin que nous aurons tout dit en obser-
vant que certaines laudes se terminent (le cas est fort
rare) par un Trope assez développé de VAmen.
Aime Dell s altissime,
Qui régnas potentissime,
Nostrorum sordes ablue
Et indulge peccamina K
Pauvres vers sans doute, mais qui avaient droit à une
mention - !
aquœ, sol, luna, terra, stellae cœli lucidœ. Benedicimus te. Te benedicit ovans
angelorum celsa potestas. Et mortalis homo te benedicit ovans. Benedicimus
te. Cœlorum factor clemens et conditor aime. Benedicimus te. Etc. etc. (1119,
1- 113 v». On a mélangé et fondu ensemble les Tropes Laus tua, 0 laudabilis,
Qui indicés, Omnipotens pie rex, etc.)
1 Trope Berum conditor, Bibl. nat. lat., 1121, i." 47. — Faut-il considérer
comme une prière, après le Gloria tropé, les quelques lignes suivantes qui
accompagnent le Laudabile tribuens et sont consacrées au grand thaumaturge
Martin : « Sancte Martine, confessor Christi, amicus D^ji, una cum angelis Dei
exorare pronobis precamur. Alléluia ! » (Bibl. nat. lat., 1084, f» 121 r».)
2 T.A.BLE DES TROPES DU GLORIA. Il conviont ICI de répéter ce que nous avons
dit 1 lus haut au sujet desTropes du Kyrie. Nous ne présentons pas ceï.4.bleau
CO.VME COMPLET, ct nous uous proposous de le tenir au courant.
Aime, mundi hodie incœlumvictorredisti.
( Pâques ) ou « Ascendisti » (Ascen-
sion). Rome,MUorio-Emnianui,'le,1343, folûvo.Romagne, etc.
Angelica jam , Pater, laude, cum Prol j
et procedontc Pneumate.
Angelicj alïalu jungentes carminé vota.
Ribl. nat.
lat., 909, fo 102 ro.
Saint-Martial.
—
1119, fo lz3 ro.
_
—
1120, fo 102 ro.
_
—
1121, fo 55 ro.
—
—
lo2o2, fo 31 ro.
Paris.
—
1050Î, fo 33 ro.
Saint-Évroult.
—
887, fo 81 vo.
Saint-.Marlial.
—
909 , fo 94 ro.
—
1084, fo 118 ro.
—
IIIJ, fo 111 ro.
—
1120, fo 94 lo.
—
1121, lo 49 vo.
—
260
HISTOIHK DK LA POÉSIK LIT U HGIO U K
Quant à l'osprit des Tropes du Gloria, il est ;iisé de
le déterminer, et nous avons essayé de le faire ailleurs
Ave, Deus, summa Trinitas, in jji.'iso-
nis indivisa.
Carminé digno pronianius Chrislo.
Ciiristc , salus mundi , bone coiidilor
atque redemplor.
Clii'islus surrexit : dulcibus hymnis
onmiiiotenli modulemus, eia.
Cives superni liodie (Préface).
Crctiimus le, una cum Filio tuo, ubique
regnantem.
Cui canit iiymniloguni cœleslis turba
melodum.
Decus œterni Palris.
Deus invisibilis, rex Angelorum.
Hanc, quœsumus, nobis iiropilius lar-
giaris.
llinc laudando Patrem , Je?ii , cum
l'iKumale sanclo.
liodie natus est Dominus Jésus Cliristus ;
liodie jocundcmur cum illû, eia.
liigenilum genili Geniluris voce fideli.
Lfftenlur cœli (Préfape).
Laudabile tribuens regnum (sine O
laudabile).
Laudat iii excelsis cœlum lerramque
regenlem.
13ibl. nal.
lai., 90'J, f" 101 vo.
Saint-Marlial.
_
lliSO, f» 122 ro.
—
1121, fo 55 ro.
—
_
0449, fo 66 ro.
Ne ver».
-
903, fo 173 y.
Saint- Yrieix.
887, fo 76 vo.
Saint-.Martial.
903, fo 170 vo.
Saint - Yrieix.
909, fo 89 ro.
Saint-Martial.
_
1084 , fo 106 ro.
—
_
1118, fo 50 ro.
—
—
1119, fo99 ro.
—
_
1120, fo 86 vo.
—
—
1121, fo/i5 vo.
—
._
132o2 , fo 27 r".
Paris.
_
10508, fo 29 ro.
Saint-Kvroull.
—
1084 , fo 107 v".
Saint-Martial.
_
1118, fo 51 ro.
—
9449, fo 36 ro.
Nevers.
_
10:i08, fo 28 ro.
Saint-tvroult.
Arsenal,
1169, fo 20 ro.
Aulun.
Rome,ViUorio-Emmanuele,1343,fo9
vo. Romagne,elc.
Bibl. nat.
lat., 1119, f> 130 ro.
Saint-.Martial.
Munich, lat., 14083, fo lOi.
Saint-Emmeran.
_
14322, f" 109 vo.
—
Bibl. nat.
. lar., 909, fo 99 vo.
Saint-Marlial.
_
iOUà, i'> 104 vo.
—
1118, fo2ro.
_
_
1119, f" 109 ro.
—
—
1121, fo 53 v...
—
—
1240, fo 80.
—
—
10508, fo 4o vo.
Saint-Évroull.
13252, fo 35 vo.
Paris.
—
9449, fo 45 ro.
Nevers.
-
10508, fo 22 ro.
Sainl-Évroult.
-
1084, fo 117 ro.
Saint-Martial.
887, fo 70 ro.
—
13252, fo 38 ro.
Paris.
—
9449 , fo 53 ro.
Nevers.
Arsenal,
1169, fo 31 ro.
Autun.
Munich,
lat., 14083, fo 106 vo.
Saint-Emmeran.
_
14322, fo 111 vo.
—
Bibl. nal,
, lai., 9449, fo 5 vo.
.Nevers.
Arsenal,
1169, fo 1 ro
Autun.
Bibl. nal
. lai., 887, fo 79 vo.
Saint-Martial.
1184 , fo 121 ro,
1240, fo 41 vo.
887 . fo 75 vo.
903, fo 172 ro,
Sainl-YrieLx
LES TROPES DE LA 1'^ ÉPOQUE — LE GLORIA 261
d'après nos seuls Tropaires fort simplement cités. « La
Laus perennis, avons -nous dit, n'a pas suffi à ces
Laudat in excelsis cœlum terramque
regentem. —
Bibl. nat. lat., 90a, fo 88 ro.
— 1084 , fo 109 vo.
— lM8,fo60ro.
— 1119, fo 87 ro.
— 1120,fo86ro.
— 1121 , fo 44 vo.
— 1240, fo 39 vo.
Saint-Martial
Laudemus Dominum quem laudat cœ-
licus ordo.
Laudibus eximiis, boue rex, te corde
colentes.
Laus Angelorum, salus et vita, redeni-
ptio nostra (qualifié de pulcras lau-
des dans 887, fo 82 ro).
Laus, honor, Christe, coram te reso-
net, aeterne Rex.
Laus tibi, Christe, decus.
Laus tibi, Domine, celsa potestas, in
aeternum.
— 9448, fois.
Pruni.
— 10310, fo 6.
Echternach.
Arsenal, 1169, fo 13 vo, 32 ro.
Autun.
Oxford, Douce, 222, fo 11 vo.
Saint-Gall.
Bibl. nat. lat., 9449, fo 13 ro.
Nevers.
Rome, Angelica (entre les fo» 240 ro
et 243 vo ).
Romagne, etc.
Rome, Vitt.-Emmanuele, 1343, fo 12 rc
—
Bibl. nat. lat., 13252, fo 62 vo.
Paris.
— 10508, fo 17 vo.
Saint-Évroult.
- 13232, fo 30 ro.
Paris.
- 10308, fo 35 ro.
Saint-Évroult.
— 8S7, fo 82 ro.
Saint-Martial.
— 909 , fo 100 ro.
_
— 1118, fo 90 vo.
—
— 1119 , fo 120 ro.
—
— 1120, fo 100 vo.
_
- 1121 , fo 54 ro.
—
— 887,fo79ro.
— 1118,fo97vo.
—
— 1084, fo 114 vo.
—
— 1240, fo84 vo.
- 1084, fo 121 vo.
—
Laus tibi, summe Deus, quem laudant
œthere Sancti.
887,fo77vo. —
903, fo 171 ro. Saint-Yrieix.
1084, fo 108 vo. Saint-Martial.
1118, fo58 6isvoet87ro. —
1119, fo 105 vo. —
1120, fo 90 ro. —
H21, fo 48 vo. —
1240, fo 40 vo. —
9449, fo 36 ro. Nevers.
10308, fo 28 ro. Saint-Évroult.
887, fo 80 ro.
903 , fo 173 ro.
909, fo 94 ro.
1084 , fo 112 ro.
1118, f" 93 ro.
1119 , fo 112 ro.
1120, fo 95 ro.
1121 , fo 50 ro.
9449 , fo 70 vo.
13252, fo 32 ro.
Saint-Martial.
Saint-Yrieix.
Saint-Martial.
Nevers.
Paris.
•2fi2
lllSTOlliK ItK LA I-riKSIL; LITIHGIOUE
poètes de bonne volonté : il leur a fallu quelque chose
de plus vif, do plus omportf'. et c'est à V Alléluia
Laus tua, Dcus,rcsonct coram In, Kcx.
Mundi regnansantc principium.
Nativitatem tuam, Christe, qui rccolunl
visita.
Nos, tenantes vocibus, regem polorum.
Nulla laude qui indiges. (Voy. Qui in-
diges nuUius laude.)
Odas pangamus tibi.
0 gloria sanclorum.
O laudabile Iribuens. (Voy. Laudabilc]
0 laudabilis rex, Domine Dcus.
liihl.dc hfainl 0.-)il,/ihi, p. 2-j;. Saint-Gall.
— 370, p. 65. —
— 380, p. 85. -
— 381, p. 301. —
— 9448, f" 8 ro. Prum.
— 10510, {■> 'i. F>litfrnach.
— 8«7,f«71v". Saint-Martial.
— 'J03, fo 16'J ro. f-ainl-Yrieii.
— 10n4, HO'Jroet 118vo.Sainl-.Marlial.
— 1118, fo 28 r". —
— lU'J, fo.02vootll3vo. —
— Il;i0, fo 83 vo. Saint-Martial.
— lui, fo /i3 ro. —
— 'Ji'iO, fotl6voet5ovo. Ncvers.
— 13252, fo 26 vo. Pari».
Dibl. nat. lat. , 10508, fo 25 ro (avec des
variantes notables). Sainl-Évroult.
Arsenal, 1169, lo» 9 ro et vo, 33 r». Autun.
Munich, lat., Ii083, fo 103 vo. Saint-Emmeran.
— I'i322, fo 104 ro. _
Rome , Angelica (entre 231 ro et 235 vo). Homagne.
— Vittorio-Emmanuele, 1313, fo 8 vo. —
Londres, Coltonien, Caligula A.XIV. ?
Bibl. nat. lat., 1084, fo 123 ro. Saint-Martial.
Arsenal , 1169, fo 2 ro. Autun.
Bibl. nat. lat., 1084, fo 120 ro. Saint-Martial.
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 228. Saint-Gall.
— 376, p. 66. —
— 380, p. 88. —
— 381 , 303. —
Bibl. nat. lat., 887, fo 73 vo. Saint-Martial.
— 903, f> 169 vo. ■ Sainl-Yrieix.
— 909, fo 86 vo. Saint-Martial.
— 1084, fo 102 ro. —
— 1118, fo23. —
— 1119, fo 95 ro. _
— 1120, fo 84 vo. _
— 1121, fo 44 ro. —
— 1240, fot 39 vo, 40 r«. —
— 13252, fo 29 vo. Paris.
— 9449, fo 73 ro. Nevers.
— 10508, fo 38 ro. Saint-Évroult.
Rome, Vittorio-Emmanuele , 1343, Itomagi>:, etc.
fol3ro. —
Bibl. nat. lat., 887, fo 73 ro. Saint-Martial.
— 903, fo 172 V. Sainl-Yrieii.
— 909, fo 86 ro. Saint-.Manial.
— 1084, fo 110 vo. _
— 1118, fo. 79 ro, 93 vo. _
— 1120, fo 84 r". —
— 1121, fo 43 vo. —
— 1240, fo 42 r" ou 40 ro. —
— 9449, fo 47 r» Nevers.
— ia;08, f" .36 ro. Saint-Évroult.
LES TROPES DE LA 1'° ÉPOQUE — LE GLORIA 263
perenne qu'ils ont visiblement aspiré : Omne quod nunc
spirat, Pater, te laudat canendo, Alléluia. Tel est le
0 laiidabilis rex, Domine, Deus.
"Omnipotens altissime Verbum Patris
Oranipotens pie rex, quem laudat spi-
ritus omnis.
Omnipotens rex Sabaoth, cujus laude
plena est omnis terra.
0 siderum auclor, angelorum creator
( avec la variante Siderum rec-
tor, 1084 ).
Pax sempiterna Christus illuxit.
— 132o2, fo 36 v». Paris.
Arsenal, 1169, fo 18 r». Autun.
Rome, Vittorio-Enimanuele, fo 11 r». Romagne, etc.
— Angelica (entre les fos 248 et 254). —
Protège verum Pascha.
Prudentia prudenlium.
Qua discipulos, Christe, tues roboras
Quae cœlicolas et terrigenas.
Bibl. nat.
lat.,
, 903,
, fo 168 ro.
Saint-Yrieix.
_
1084,
fo 100 ro.
Saint-Martial.
_
1118,
fo 13 ro.
—
_
1119,
fo 90 vo.
_
_
1120,
fo Hl vo.
—
—
1121 ,
fo 42 ro.
—
UO'J ,
fo 91 ro.
_
1084,
fo 113 v°.
—
_
1118,
fo 71 vo.
_
_
1119,
fo 103 vo.
—
—
1120,
fo 88 ro.
—
—
1121,
fo 47 ro.
—
903,
fo 175 vo.
Saint-Yrieix.
—
1119,
fo 138 vo.
Saint-Martial.
1084,
fo 120 vo.
—
13252,
fo 28 vo.
Paris.
—
9449,
fos 24 vo et 75
vo. Nevers.
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 214.
Saint-Gall.
—
381,
p. 297.
—
Bibl. nat.
lat.,
, 9448,
fo 24.
Prum.
—
9449,
, fo 8 ro.
Nevers.
—
10508,
fo 23 vo.
Saint-Évroult.
—
13252,
fo 26 ro.
Paris.
Arsenal,
1169,
fo 4 vo.
Autun.
Oxford, 1
Douce, 222,
fo 7 vo.
Saint-Gall.
Rome,Vitt.-Ei
mmaniK
;le,1343,fo6vo.
, Romagne, etc.
Bibl. nat.
lat.
, 1118,
fo 102 vo.
Saint-Martial.
—
887,
fo 79 vo.
_
—
909,
fo 93 vo.
—
—
1084,
fo 105 vo.
—
—
1118,
fo 45 ro.
—
—
1119,
fo 107 ro.
—
—
1120,
fo 91 vo.
—
—
1121,
fo 49 ro.
—
—
9448,
fo 46.
Prum.
—
13252,
fo 29 vo.
—
—
9449,
fo 22 ro.
Nevers.
Arsenal,
1169,
f" 8 ro.
Autun.
Bibl. de Saint-Gall, 4
84 , p. 309.
Saint-Gall.
—
484,
p. 230.
—
—
380,
p. 86.
—
—
381,
p. 305.
—
Bibl. nat.
lat.,
10510,
fo5.
Echternach.
—
9448.
, fo 10.
Prum.
_
9449,
, fo 64 ro.
Nevers.
—
13252
, fo 34 ro.
Paris.
—
10508
, fo 21 vo.
Saint-Évroult.
Munich, lat..
14083,
, fo 107 vo. !
saint-Emmeran.
—
14322
, fo 104 vo.
—
Rome, Vitt.-Ei
Timanuele, 1343, fo 13 v
. Romagne, etc.
264
iiisT(»ii;i-; m; la imiksik i.n ri;(.i<jit:
cri universel. Les tropistes, qui consacraient leur vie à
clianter le Psautier, aimaient d(.' pi'éfV'rence les Psaumes
Qua; Deo mancl.
QucT, Deus, summa Trinitas in pcrsonis.
Qua jugi voce alTantes agmina cœlc-
Ftiumclamant. (Avrc la variante Quem
jugi. Qua se rapporte à Gloria et
Qiiem it Deo. )
Qualem Spiritu solet.
Quani Cliristus trailidil.
Quain ministri Doniini, Verbe incarnalo
terrenis promiserunt.
Quando régis cunctos semper gratanler
homones.
Qua Stephanus repletus.
Quem cives cœlestes sanctum clamantes.
Bil.l. dcSainl-Gail, 4«^, p. 210.
— 3W), p. ><f).
— 381 , p. -J^fJ.
nihl. nat. lat.Jll'J, foli-ir".
— W7, fo 44 r-.
— 'J09, fo 103 v.
— 1084, f" 117 vo.
— lllî», fo 120 T".
— 1120, f" 57 ro.
— 903 , fo 170 v.
— 13-262, fo 34 ro.
— 10508, f» 31 r».
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 221.
— 381 , p. 300.
— 484, p. 223.
— 381, p. 301.
.'^airil-Oall.
Saint-Martial.
Saint-Martial.
Saint-Yrieii.
Paris.
Saint-Évroult.
Saint-Hall.
Quem cuncla laudant ul bona.
Quem Dominum rcrum collaudant oni-
nia verum.
(Juem glorincant sanoti Angeli.
— 380, p. 87.
Hibl. nal. lat., 10508, f» 30 r».
Arsenal, 1169, fo 16 v».
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 215.
— 380, p. 83.
— 381 , p. 298.
— 484 , p. 232.
— 381, p. 316.
Bibl. nal. lat., 0448, f» 22.
— 10510, fo 0.
— 909, fo 104 r».
— 1084 , fo 103 ro, 122 1
— 1118, f» 4 vo.
— 1119, fo 127 ro.
— 1121, fo57 vo.
— 903. fo 175 r<'.
9449, fo 63 ro.
— 13252, fo 36 ro.
— 10508 , fo 23 ro.
Arsenal, 1169, f» 40 v».
Munich, lat., Ii083, f» 107 r».
— 14322, fo 106 ro.
Home, Vitt.-Emmanucle, 1343. fx r
— .\ngelica, 235 yo; 2S0 r».
Bibl. nat. lat., 1084, fo ll.n v».
— 1118, fo 100 vo.
1240, fo 43 ro.
— 903, fo 174 v".
— 10508, fo 36 ro.
— 13-252, fo 31 r».
— 9449, fo 57 ro.
— 10508, fo 31 yo.
— 887, fo 83 vo.
— 909 , fo 103 ro.
— 1119, fo 129 vo.
— 1121,fo56vo.
Sainl-Evroult.
Autun.
Saint-Gall.
Prom.
Echlernach.
Saint-Martial.
Saint-Yrielx.
Nevers.
Paris.
Sainl-Érroult.
Autun.
Saint-Emmeran.
. Romagne, etc.
Saint-Martial.
Saint- Yricix.
Sainl-Évroult.
Paris.
Nevers.
Saint-ÉvroulL
Saint-Martial.
LES TROPES DE LA l""" ÉPOQUE — LE GLORIA 265
qui sont plus particulièrement joyeux et alléluiatiques.
Ce sont là ceux qu'ils commentent le plus volontiers :
Quem glorificant sancli Angeli.
Quem novitate sideris.
Quem Patris ad dexlram conlaudant
omnia Verbum ( avec la variante
Quod Palris).
Bibl. nat. lat., 10308, f» 32 vo. Saint-Évroull.
Rome,Vitt.-Emnianucle, 1343, foO ro. Romagne, etc.
Oxford, Douce, 222, f» 12 r». Saint-Gall?
Quem vere pia laus, solum quem coii-
decet hymnus.
Qui barathri fractis voluisti surgere
claustris.
Qui cœlicolas. (Voy. Qux cœlicolas.)
Qui de morte tuum.
Qui Deus et rector mundi manet atque
Creator.
Qui indiges nuilius laude, Deus trinc
et une.
Qui poium et arva creavit.
Qui pro cunctis de sede de?cendi?ti.
Bibl. nat. lat.,
, 9448, fo 56.
Prum.
_
887, fo 83 ro.
Saint-Martial.
—
909 , fo 102 vo.
—
_
1084, fo 116 vo.
—
_
1118, fo 7 ro.
—
—
1119, folio r^
_
_
1120, fo 93 vo.
—
—
1121, fo 56 ro.
_
—
1240, fo 41 ro ou 39
ro. —
—
13232, fo 33 vo.
Paris.
—
9449, fo 13 vo.
Nevers.
Arsenal,
1169, fo 12 ro.
Autun.
Oxford, Douce, 222, fo 10 ro.
Saint-Gall.
Rome,Vitt.-Emmanuele, 1343, fo 7 V"
'. Romagne, etc.
— Angelica. f« 196, 198?
—
Bibl. nat. lat
., 9448, fo 49.
Prum.
—
9449, fo 68 ro.
Nevers.
—
13252, fo 28 vo.
Paris.
—
10508, fo 18 vo.
Saint-Évroult.
Arsenal,
1169, fo 26 ro.
Autun.
Bibl. nat. lat
., 9448, fo 33.
Prum.
_
13252, fo 27 ro.
Paris.
Arsenal,
1169, fo 27 ro.
Autun.
Munich, lat..
14322, fo 113 vo.
Saint-Emmeran.
Bibl. nat. lat.
, 10508, fo 30 ro.
Saint-Évroult.
10310, fo 14.
Echternach.
—
1119, fo 128 vo.
Saint-Martial.
—
903, fo 176 ro.
Saint-Yrieix.
—
9449, fo 79 ro.
Nevers.
—
13232, fo 36 vo.
Paris.
—
10308, fo 19 ro.
Saint-Évroult.
Arsenal,
1169, fo 26 ro.
Autun.
Munich, lat.,
14083, fo 106 ro.
Saint-Emmeran.
—
14322, fo 105 vo.
—
Bibl. nat. lat
., 887, fo 74.
Saint-Martial.
—
903, fo 170 ro.
Saint-Yrieix.
—
909, fo 87 vo.
Saint-Martial.
—
1084, fo 101 v".
—
—
1118, fo 19 vo.
—
—
1119, fo 95 yo.
_
—
1120, fo 85 ro.
—
—
1121, fo 44 ro.
—
—
1240, fo 43 ro.
_
—
9449, fo 14 vo.
Nevers.
—
10308, fo 36 vo.
Saint-Évroult.
—
1084, fo 119 vo.
Saint-Martial.
—
1118, fo 67 ro.
Saint-Martial.
—
9449, fo 11 ro.
Nevers.
206
nisioiin: di-: la i'ni;sii-; litikcioik
Te henedicunl mare et aquœ, sol, luna, terra, stellae
cœli lucid.i'. fis divisent le iiiorKh- en [ilusicnrs rh^r-iirs
Qiiid tihi niinc, Iioniiiio, qiiiil dioTi:
possumus apte.
Quod Patris ad dcxtraiii. —
Quorum mens Christo semper jubilai
rcsonando(avec la varianto reboando).
Hector ab arec potons, te laudnt crplicus
ordo.
Hil.l. ii.-it. I;ii., 'Jii'j, fo S v. Nevcrs.
MuMiih, la!., liOM3, f- 105 r". Saint-KrnmiTan.
— (Voy. Quem Patrie. )
Bibl. nal. laf., 13252, fo 35 r«.
— im)H, fo 20 vo.
Pari».
Sainl-Évroull.
Hcnim rreator, qui piclatc motus im-
mensa.
Pcx tibi, laus cclsis qui gloria pax es
et imis.
Siderum rector. (Voy. 0 sidernm.)
Sil tibi laus Irina , summe Deus.
Sponsus Eccicsia; quam tibi sociasli.
Surrexit Christus a mortuis ( Préface)
Te consonant.
Terrea lempnentis.
Te unum Dcum colenles.
Ut possimus conscqui.
— lOKi, fo 103 vo. Sainl-Marlial.
— 111«, fo.31 vo,ct76vo. —
— lll'J, fo 105. —
— 1120, fo 80 r«. —
— 1121 , fo 48 ro. —
— 13-252, fo 2a ro. Pari».
— 10508, fo 26 ro. Sajnl-Évroull.
Bibl. nal. lat., W/J, fo 'jo ro. Saint-Marlial.
— IIIH, fo 102. —
— lll'J, fo loi ro. —
— 1120, fo W vo. _
— 1121, f" iC r". —
— WJ , fo 02 vo. —
— 1084, fo 111 vo. —
— 1118, fo81 ro. _
— 1110, fo 104 y. —
— 11-20, fo 80 ro. —
— 1121,fo47vo. —
— 1240, fo 42 vo. —
— 0440, fo 77 ro. Nevers.
Bibl. nat. Int., 887, fo 86 ro. Saint- Martial.
— OUO, fo 103 ro. —
— 1084, fo 117 /am ro. —
— 1118, fo 55 ro. —
— 1110, fo 110 vo. —
— 1120, fo 04 ro. —
— 1121 , fo 56 vo. —
— 1-240, fo 42 V". —
— 13252, fo 34 VO. Paris.
— 10508, fo 33 ro. Sainl-Évroull.
— 10508, fo 40 r". —
— 1118, fo 51 ro. Saint-.Martial.
— 1084, fo n7W« ro. —
— 1118,fo44ro. —
— 13-252, fo32 V. Paris.
— 0448, fo 30. Prum.
— lOolO, fo» 14, i;.. Echtcrnach.
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. -2'27. Saini-Gall.
— 376, p. 66? —
— 380, p. 86. —
— 381 , p. 302. —
— 0448, fo24. Prum.
— 10510, fo 0. Echtcrnach.
— 13-252, fo 31 vo. Paris.
— 0440 , fo 74 vo. Nevers.
— 10508, fo 34 ro. Sainl-Évroulu
Arsenal. 1169, fo 43 ro. Aulun.
LES TROPES DE LA V' ÉPOQUE — LE GLORIA 267
qui chantent Dieu avec la même vivacité de reconnais-
sance et d'amour. Il y a tout d'abord le chœur des
Anges : Virtutes cunctse swperse te tremunt, laudant,
adorant; il y a le chœur des constellations qui gravitent
autour de la terre : Laiidibus cujus astra matutina insi-
siunt; il y a le chœur terrestre des créatures sans rai-
son : Te telliis , pelagus , laudat, adorât, amat; et il y a
enfin le chœur humain : Quem laudant humana agmina.
Tous ces chœurs s'unissent, se fondent, éclatent en
une seule harmonie : « Omnia quem sandum benedicunt
condita regem. »
Voilà qui n'est pas sans grandeur.
CHAPITRE XYIII
LES TROPES DE LA PREMIERE ÉPOQUE — LE REGNUM
L'ordre suivant lequel se développent les différentes
parties de la Messe est bien digne de fixer l'attention.
Si le Confiteor est le culte d'aveu, si le Kyrie est le culte
de déprécation, le Gloria doit être considéré comme le
culte de louange. Tout y respire l'enthousiasme et la
reconnaissance de l'homme, l'amour et la glorification
de Dieu. De là ces mots laus et laudes qui ont été à la
fois attribués au Gloria et à ses Tropes.
Parmi tous les titres de Dieu, il en est un qui a
tout particulièrement frappé l'esprit des tropistes du
ixe siècle: Jésus-Christ leur est surtout apparu comme
Roi. Et cette idée de la royauté du Christ a hanté leur
intelligence au point de les amener à la création d'un
Trope nouveau, inattendu, important, qu'ils ont inséré
dans le Gloria, mais qui, de très bonne heure, a conquis
une sorte d'indépendance et a mérité le nom deprosula.
Quel est le passage du Gloria où s'est produite cette
singulière et unique interpolation? Il n'est pas inutile
de le connaître.
27U IIISTOIin: l»K LA l'ni;sii-; l.n i.iiiiiniK
Quoniamtu solus sunctus, tu soluft Dominus, tu soIuh
altissimus, Jesu Chrlste : tels sont les mots que les tro-
pistes ont accompagné d'un commentaire plus ou moins
développé sur la royauté du Verbe incarné. Écijutez
plutôt :
Te regom iiia^Miuui uuljis IhmUc naluin aduiunlcs liiimili voce
laudamus ' .
Gujus honor sine fine manet sceptrumquc refulget '.
Cujus potestas, virtiis et honor, scoptrum d iv^'muii pcrmanct
scniper K
Ciiriste, cœli rex etterrœ, voces nostras piissiin(; vocibus Angelo-
ruin atlju'nge *.
Qui slas in levuni, rex unigenite '.
Cujus est regnum solius, Victoria, virlus; - Tu famulis cunctis,
tu miserere tuis«.
Omnium dominantium cunctorumque rex regum %
Tibi regnanti imnc et in œternum omnes clamemus : Salus sit et
honor ».
Rox sacer, occe tui radiât pars ina^aia tiiuiii|ilii \
On le voit, il y a lA une idée fixe. Et la place que l'on
a choisie pour lui donner son expression et sa foruuilr.
cette place est, à peu de chose près, toujours la même.
1 Biljl. nat. iat.. f^s7. I> 71 i"; Wll. f» 'i2 v% etc. (Tropo du Gloria : Omni-
potens aUissi)ne.) C'eèt ajirès cutte iiivocfllion (lu'on lit le Sceplruni nijus ntt-
bile, ce Trope liegnion dont il t^era question |:lus loin.
2 1H8, f"' Tù v», 7(1 fo; 1121 , fo ',9 v»; 10u08, fo 2lj, etc. (Trope Pa,c sempi-
terna. )
5 1121, f" 54, etc. (Trope Laits aurjcloru»}.) — Cf. « Cujus polestas et virlus
manet in ;eternum, » 1121, l'" Vi v» (Trope Lautlat in e.vcelsis; avec «Ic^ vnr.i-
lises développées entre les syllabes tes et tas du mot potestas). Etc.
^ 1121, W r» et Y", etc. (Tropa Pnidentia prudentium.)
8 10508, 1» 35 r», etc. ( Trope Dews invisibilis, rex Angelorum.)
6 1118, f" 61 r», etc. (Trope Laudal in excelsis.) Cf. 1I2I, f» \o r*-V.
7 10308, f» 23 r"; 13252, 1» 36 r», etc. (Trope Hanc quwsumus.)
8 1121, f" 'il r», etc. (Trope Rerum conditor.)
" 1121, f" 46 r», etc. (Trope Christe sahts )nundi.] — Nous ne prétendons pas
dire ici que l'idée de la royauté soit, dans nos Tropaircs, antérieure à la plus
ancienne l'orme du Begnuni. Mais, à tout le moins, elle est coexistante, et le
Regnion en a élé l'expression la plus adéquate comme la plus durable.
LES TROPES DE LA l''' ÉPOQUE — LE REGNUM 271
C'est après le Quoniam tu solus et avant le Jesu Christe
ou le Cmn sancto Spiritu '.
Or, un jour (de très bonne heure et dès le ixe siècle
sans doute), le début de ce Trope se condensa en une
forme définitive, et cette forme consista en ces trois
mots qui sont peut-être expliqués ici pour la première
fois : Regnum tuum soUdiim.
Tel est donc le Trope Regnum tuum solidum, telle
est cette célèbre prosula - du Gloria dont on ne sau-
rait contester l'importance , puisqu'elle remplit nos Tro-
paires et que, dans la plupart de ces manuscrits, on
lui réserve une place spéciale après les Tropes du
Gloria. Il y en a jusqu'à dix- sept dans un seul Tro-
paire.
Les Tropes Regnum nous offrent plus d'un type.
Il y a tout d'abord le mode bref, qui est certaine-
ment le plus ancien, comme il est aussi le meilleur de
tous. C'est la source et l'origine de tous les autres, c'est
celui que nous trouvons dans le plus antique Tropaire
de Saint-Gall : « Regnum tuum solidum permaneljit in
teternum ^ » Sur la syllabe jjer de permanebit, imaginez
1 On peut le constater aisément dans le premier Tropaire venu. (V. surtout
Saint-Gall, 376, p. 6u; 48i, p. 226. — Bibl. nat. iat., 1121, f-uOvet Huiv.; 1240,
fos 33 yo^ 40 v, etc. etc.)
2 Tel est, en effet, le nom précis de ce Trope : « Prosula in Gloria in excel-
sis. » (Bibl. nat., 1121, f» 50 v».)
3 II paraît évident que ce Trope a été « inventé » à Saint-Gall. 11 ligure dans
le plus ancien Tropaire de ce monastère (48'i, x° s., p. 226. V. le fac-similé,
pp. 2o6, 257), où il fait partie intégrante du Trope Laus tua Deus. Cf. 376, 1118,
p. 65, etc. — De là il est sans doute passé à Saint-Martial (Bil)l. nat. Iat.,
fo 98 r"), où il fait partie du Trope Laus, honor, Christe, etc. — Cf. Bibl. nat.
iat., 10510, f''4 v°; bibl. de l'Arsenal, IIGO, i° U v», etc.
•272 IIISTOIHK 1)K LA POÉSIE MTURGIQUh:
deux li}^nes de vocalises, et vous aurez l'ensemlile de
ce petit morceau. Que n'en est-on resté là!
On ne s'est point contenté longtemps de cette IjcIIl'
brièveté, et la tendance fatale à l'allongement s'est ac-
cusée de plus en jtius dans nos Tiojiaires :
Uegnuin luuin soliduin, o summe Bouc, prulem luain qui, iii-
dutam coipore, nostra sainte crucifixam, devexisli in arce, ab
omni nos, j)ic', dehic cririiine et fac curii eo resurgere, Jesu
Christe ' .
r\egniim tu uni solidum
Per te, Christe, sistil , uninipotentissime.
Qui in cruce signum nobis dedisti vivifiée.
Te laudamus, rex clementissime.
Tibi laus et honor
Permanebit in a3teinuin, Jesu C/irisle -.
Regnunn ejus solidum et potestas illius alla
Per quem , sublimatum semper tenens princii)atuni ,
Qui, per lignum crucis, signum nobis ostL-tniisti lriiiin|iliMni .
Te laudamus, o rex cœlorum,
Tijji laus et imperium !
Semper régnas in œternum. Cum sanclo Spirilu ^.
Et il y en a de bien plus longs encore : il y a en qui
semblent interminables.
Chose curieuse, ce Trope eut tant de succès, qunn
vint bientôt à en faire un véritable genre, ayant sa
vie à part', et que l'on put à la tiii se [casser de sa
formule initiale.
1 Bibl. nat. lat., 887, f" 8'i v% déjà cilé; etc.
* Bibl. nat. lat., 887, (' 78 v°; etc. etc. (fait partie du Trope Imus tua).
3 Bibl. nat. lat., 887, f" 8o r».
* Certains Bcfjnii») , qui ont conquis, en un jrrand nt>n)bre de Tropair..'s,
cette vie indépendante . ont continué, in quelques autres, à èlr^', pour ainsi
parler, « incrustés » dans les Tropes du Ctinria. Tel est le Sceplrutn , glaria
sanctorutii (9iVJ, f» 70 v» ; lllo<)8, 1^ 38 r»), etc. Mais, même dans ce cas, une
majuscule, une H énorme, annonce encore le commencement d'un Trope sp«Vial.
LES TROPES DE LA 1'" EPOQUE — LE REGNUM 273
Cette formule, on la remplaça tout d'abord par une
formule à peu près équivalente, et l'on eut les fameux
Tropes : Regnum ejus magnum, Regniim celsi decus;
puis, avec un peu plus de hardiesse : Sceptrum cujus
nobïle, Sceptrum gloria sandorum, etc. '.
Une fois dans cette voie, on se décida bientôt à se
passer de ces équivalents eux-mêmes , et l'on arriva au
Celsi démens Olympi, à VAlma cujus potestas, au Salve
Virgo virginum, au Rex apostolorum Deus\ Telle est,
suivant nous, la marche qu'on suivit.
Un exemple est nécessaire pour représenter chacune
de ces grandes espèces qui se sont produites dans
l'ordre précédemment indiqué :
I. Sceptrum cujus nobile
/Tuum beniûne dominantem cœli terrseauc
Deux dausulai \ .
de dix- sept syllabes, j machinfB |.
(Même notation j Natus hodie nobis maire qui semper es de
musicale.) f ,..
V \u'gine5,
Deux dausulai de i AttoUens extende , protège ab hoste ,
douze syllabes. (Même < ^ , , ,
notation musicale.) I Quo nos te laudare mereamur vere c
Cujus nomen permanebit in seternum. Cum
sancto Spiriiu ^.
IL Celsi clemens Olympi, — Manens tu perhenni servator in
tempore, — Qui sacrato mortis letum sumpsisti in corpore, — Te
precamur omnes dulcissime : — Tergas nostrorum maculas pec-
caminum, Jesu Chrisle ^.
III. Rex apostolorum Deus,
^ , , / Qui Ecclesiœ veritatem tuse revelasti aposto-
Deux clausulai i
de vingt-trois syllabes.) bco dogmate;
(Même notation jQuam, prsedicante Martiale, luce inlustrasti
musicale.) f . . . ,.
V tua3 misericordiœ.
' V. plus bas, p. 27G, la bibliographie de chacun de ces Tropes.
2 Même observation.
3 Bibl. nat. lat., 1118, f» 14 v°; 1121, f<" 42 v, /i3 r".
< Bibl. nat. lat., 887, f» 84 v»; 1121, f» Dl r°; 13252 (inséré dans le Trope
Hector ab arce potens).
I — 18
21^1 IIIST(JI1U: l)i: l.A l'OKSIE LITIJHGIOIJE
Deux '/«|<s»/,7'(|.' <iu.i-(rji;„„antc's ad te, exaudi, rodcinplor rcx pie,
torzij svll.ilii's. ( Mi-iiii!/ ' '
Moi.iiioïi musicale.) ( Qui régnas liia virtult' iiiuirabililer,
Splendor gloria.', benedicte, vivens in a.'tei-
II II m Jesu Ckiisle '.
C'est à dessein (|ii<.' nous avons clioisi plusieurs tvpes
où l'un VL'iia (lairenicnl (jue l'on a parfois appliqué à
ces prosulœ du Gloria, à ces Troipenliegnum, le système
des doubles clausuhe, écrites parallèlement sur le même
air et olTrant deux par deux le même nombre de syl-
labes. L'exemple est frappant, et ce n'est pas le seul
que nous pourrions citci-. Un fait, tant de fois constaté,
s'élève décidément à la hauteur d'un système «xénéral.
Nous disions plus haut (|uc le Gloria est un chant
de triomphe, et donnions à entendre que rien n'y est
plus triomphal que ces Tropes /?e^nuî/i où éclate Tamour
de la Royauté du Vcriie. C'est ce qui explique |)ni]i(jii(.i
l'on se livre, en ces Tropes si mal connus, à une sorte
de dévergondage de vocalises intérieures :
Regnuni tuuni .soliduin.
\)Q\i%dausulx(Q rex glorise qui es splendor ac sponsus Ecclesiîe. e
seize syllabes. (Quam decorasti tuo quoiiue pretioso sanguine, e
' Il IV», f» 00 r». Ce Trupe du Gluria se termine aiii<i qu"il suit :
<i Dextcra, majestas, lumen Patris, Deus aime, sit tibi ubiquc decus, rex qui régnas sine
fine, cttm sancto Spiritu. Te laudamus, rex gloriosissime, cujus regnum el im|>crium pcr-
manet per immortalia sxcula sxculorum. Amen. »
Cf. les formes suivantes du Rcrjniun :
<i Sceplruni gloria sanctorum, — Ueus a;terne, rex clemenlissimc otque misericordissimc :
— Regnator aime cui cuncta famulantur creata vere; — Tu, pie cxnudi procès clamantium
ad te; — Tu qui es virtus et luimcn, lux indcficiens, decus atquc |>alernum. Jttu Chrùle.»
(Ribl. nal. lai., 1325J, fo 3i v. )
Salve, VIrgo virginum !
Deux c/a<m./« de seize ( ^j^^j^ ^.j^^^^ intercède pro nostra familia .
^Mcmc noialion musicale.) ( Et, pia vote, roga Ucum i^tcntcm |H.'romni.T,
L'i det nobi?, florigera sede
Frui cum eo Jesu
Il [(olens est in aternum. (>*î<7, f» 85 v».)
LES TROPES DE LA V ÉPOQUE — LE REGNUM 27o
Deux claimdse f Ylanc rege semper, piissime , e
neuf stuabes. j Q»-" ^s fons misericordiœ. e
Permanebit in seternum '.
Cette petite pièce est plusieurs fois intéressante. On y
retrouve le Regnum tuum primitif, représenté par le
prologue et la finale, et qui lui-même est interpolé par
deux paires de clausulœ; mais ce même Trope est prin-
cipalement digne de remarque à cause de ces e, qui dans
l'original sont écrits en rouge et suivis de jiibili ou de
vocalises dont Tétude tentera sans doute les historiens
de la musique au moyen âge -.
Il est à peine utile d'ajouter que, parmi les Tropes
Regnum, il en est qui ont été spécialement composés
pour telle ou telle fête (Pâques, Noël, l'Ascension ou la
Saint-Martial), et qu'au contraire il en est d'autres
d'une tournure moins précise et que l'on peut chanter
à peu près quand on veut ^
' 10308, f» 38 v°. Les e en rouge sont suivis de vocalises qu'on chantait
SANS PAROLES SLR CETTE VOYELLE 6.
Cf. les deux Tropes suivants, qui sont similaires :
( Johannes Baptista interpellât pro nostro facinore, e-
\ Et pia prece obtineat omnibus in munere, e.
( Ut det nobis, florigera sede, e.
\ Frui semper tecum in aethere e.
Qui potens est in aeternum, Jcsu Christe. (10508, f» 39 v.)
Sceptrum regni nobile,
i Lumen aeternum qui splendor es, sed de tuo lumine e-
{ Sacrœ Ecclesiae sociasti admirabili dote. e.
i Dignare, proies, absolvere, dilecte, e.
( Sponsae tuœ divo pianiine. e.
Permanebit in œternum, Jesu Christe. (10508, f» 38 r». )
Encore ici les e, en rouge, sont suivis de vocalises chantées sur la voyelle e.
* Les vocalises intérieures du Regnum ne sont pas moins dignes d'attention.
C'est ainsi que des jubili très développés séparent, dans le Trope 0 summe
bone, la syllabe gau des syllabes dia dans le mot gaudia : « Et grege de niveo
gaudia pastor habes » (887, f» 77 v), etc. etc.
3 11 suffit de jeter les yeux sur un Tropairo pour constater que les Regnum
étaient, d'ordinaire, composés pour telle ou telle fête spéciale. A Noël on chan-
tait le Regnum « Conditor » ; le jour de saint Etienne, l'un des Scepli'um ; aux
fêtes de la Vierge, le Salve Virgo virginum; à la Saint-Pierre, le Regnut»
« Apostolorum princeps ». (1121, i'<» oO vo-o2 v», etc. etc. Cf. 1120, f» 96 et
276 IIISTOIUE l)K LA l'OKSlK IJ ï U KG J (J C E
Cependant le chant du Gloria^ vient de î=e terminer;
le célébrant a l'écité la (Collecte, et la voix claire du
suiv. ; 887, f" 8'i et huiv.) — A côté de cck liefjnuni B|)Ociaux il y en avait de
« communs », tel quo Je suivant : « Hex omnis gratiœ, pohcimus te cunctjB tus
dos ut Ecclesiic fraudere nunc et sempor de le. » (1121, f» 52 v°. Cf. le ma-
nuscrit 1120, f" 98 V» ; In natale, nbi volucris , etc.) = Le nomhre des Tropes
RL'ijnuin a été considéral)|i;, bien que très inférieur à ceux du Cloria. Le ma-
nuscrit de Saint-Martial lllii (f" 132 v°, 138 v") renferme dix-sept Uetjnuni ;
le 108G en a douze (f» IW et suiv.); le 1121, dix-sept (f" 'M v, 53 v«).
* TABLE DES TROPEs « HEOM M ». .Mèmo obsorvatiou quc (lour les Tropes du
Kyrie et du Gloria.
Aima cujus polcalas, l'alcr, Domine. Uibl. nal. lai., 8x7, fo 85 yo. Saint-Martial.
— — — yO'J, fo 97 yo. —
— — — 1110, f" 135 yo. _
— — — 1120, fo 'J« ro. —
— — - 1121, fo 5.; f. —
Celsi clemens Olympi. — 887, fo 8i vo. _
— — WO, fo % yo. _
— — 1119, fo 134 T". . —
— — Il20,fo97ro. —
— - 1121, fo 51 ro. _
Johannes Baplista inlerpclial. — 10508, fo 39 yo. Sainl-Évroult.
0 rex gloriœ qui es spicndor. — 1139, fo 77 yo. Saint-Martial.
Qui sacrolo morlis. — 1084, f» 151 yo. —
Hegni celsi decus honorificandum. — 1084, f" 151 r". —
— — —1121, fo 53 r«. —
Regnumejus magnum cl poieslas illius
alla. (.\vcc les variantes solidum,
S»l ; regnum ctijus, illO.) — 887, fo 85 ro. —
— — — 909, fo 96 r°. -
— — — 1084, fo 149 y. —
— — — 1119, fo 133 vu —
— — — 1120, fo 90 vo. _
— — — 1 121 , fo 51 ro. —
Hcgnum tuum solidum , Apostolorum
princcps. — 887,fo86ro. —
— — — 909, fo 98 ro. —
— — — 1084 , fo 150 yo. _
— — — 1119 fo 13f. V. _
— — — 1120, f> 98 r-. —
— — — 1121, f" ;.2 vo. _
Rognum tuum solidum, Condilor gene-
ris humani. — 909, fo 96 r». —
— — — 10«4, fo 149 r-. —
— — — 1119, f" 133 T". —
— - — 1120, fo 96 \". —
— — - 1121,fo50v". —
Regnum tuum solidum, decusVirginum. Uibl. nat. lat. , 887 , fo 85 v^. —
— — — 909, fo 97 yo. —
— — — 1084, fo 1.-X1 r-. —
— — — 1119, fo 135 V . —
— — — 1l2<t, fo 98 f. —
— — — 1121, fo 52 r> —
Regnum tuum solidum, lumen xterne. — 887, fo 85 r. —
— — — 909, f» 97 ro. —
— — — 1084, fo 149 v". —
— — 1119, fo 134 v. —
— — — 1120, fo 97 yo. —
LES ÏROPES DE LA 1'" PÉRIODE — LE REGNUM 277
SOUS -diacre vient de s'élever dans la basilique : Lectio
Epistoldd beati Pauli ad Thessalonicenses.
Regnum tuum solidum, lumen aeterne.
Regnum tuum solidum , manens in
œternum.
Regnum tuum solidum, o rex gloriae qui
es splendor ac sponsusEcclcsiœ, qui
decorasti.
Regnum tuum solidum, o summe Bone.
Regnum tuum solidum permancbil in
œternum, Jesu Christe.
Regnum tuum solidum, per te, Christe,
sislit.
3ibl.nat.lat.,
1121,
fo 51 vo.
Saint-Martial.
Arsenal ,
1169,
fo 34 V".
Autun.
Bibl. nat. lat
., 909,
fo 99 ro,
Saint-Martial.
—
1121,
fo 53 ro.
—
Bibl. nat. lat
., 887,
fo 85 ro.
Saint-Martial.
—
909,
fo 96 vo.
—
_
1084,
fo 150 ro.
—
—
1119,
fo 134 vo.
—
—
1120,
fo 97 vo.
—
—
1121,
fo 51 vo.
—
—
10508,
fo 38 vo.
Saint-Évroult,
—
887,
fo 84 vo.
—
—
909,
fo 95 vo.
—
—
1084,
fo 149 ro.
—
—
1119,
fo 132 vo.
—
—
1120,
fo 96 ro.
—
—
1121,
fo 50 vo.
—
Arsenal
, 1169,
, fo 5 ro.
Autun.
Bibl. de Saint-Gall, 484, p. 225 (fait
— partie du Trope du
— Gloria: Laïcs tua). Saint-Gall.
— 376, p. 76. —
Regnum tuum solidum, Unigenite qui
semper.
Rex apostolorum Deus.
Rex cœlorum, maris atque terrœ.
Rex omnis gratice , poscimus te.
Salve, Virgo virginum.
Sapicntia Dei Patris.
Sceptrum cujus nobile , — Tuum béni-
gne dominantem.
Bibl. nat.
lat.
, , 887, fo 78 vo.
Saint-Martial.
—
909 , fo 96 vo.
—
—
1118, fo 45 vo et 88
vo. —
—
1119, fo 134 ro.
—
—
1120, fo 97 ro.
—
—
1121 , fo 51 ro.
—
_
9449, fo 1.
Nevers.
—
10508, fo25 vo.
Saint-Évroult.
Arsenal
, 1169, fo 5 ro.
Autun.
_
909, fo 98 vo.
—
1119, fo 138 ro.
—
_
1121, fo 52 vo.
—
—
1119, fo 60 vo
—
_
1084, fo 150 vo.
—
—
1119, fo 136 vo.
—
—
1120, fo98 ro.
—
—
1121 , fo 52 vo.
—
_
909 , fo 98 vo.
—
_
1119, fo 138 v".
—
—
1121 , fo 52 vo.
—
_
887, fo 85 vo.
—
_
909, fo 97 vo.
—
—
1084 , fo 150 vo.
—
—
1119, fo 136 ro.
—
—
1120, fo98 ro.
—
—
1121, fo 52 ro.
—
Munich ,
lat.,
14083, fo 104 ro.
Saint-Emmeran,
—
14322, fo 104 vo (en marge). —
—
909, fo 97 r^.
Saint-Martial.
278
HISTOIIU: l>K I. \ I'(i|;.-IK IJTURGIQUE
Les tropistes auraient -ils osé toucher au texte de
l'Kpître?
tîceplruni cujus nobilc, — Tuuni l>erii-
gnc dominarilcm.
Sccpirum, gloria saiictorum.
Sccpiruin cujus nobilc rncruil.
Sccplrum rcgni nobilo , o rex gloriac
qui os spicndor ac sponsus Eccicsis,
— Tcrge iioslrorum. ( Cf. plus haul
/legnuin luum lolidum, o rex glo-
riie , V ) —
unich, 1
m., IIIH,
, f« li V.
Saint-Martial.
—
Ul'J,
, fo 137 vo.
—
—
11,^1 ,
fo 42 v 430.
—
—
003 ,
f« If.'J r».
PainlYricix.
_
'J<lO,
f« 'j;; V".
Sainl-Marlial.
—
il9,
137 r».
_
—
13252,
fo 37 vo.
Pari».
—
108-i,
fo 101 ro.
Sainl-Martial
887 , f" 86 r».
1084 , fo L-XI ro.
lirj, fo ur, ro.
1121, f'. 51 vo.
lÛoOtf, fo 38 ro.
Sainl-Évroult.
TABLE DES MATIÈRES
Préface v
Chapitre I. — Défiiiitioa du Trope 1
— II. — But du présent livre 5
— III. — Les Origines 11
— IV. — A Saint- Gall. —Les FersMs 23
— V. — A quelle époque remontent les Tropes 33
— VI. — Le monastère où Ton a chanté les premiers Tropes. 41
— VII. — Du nom que portent les Tropes et de la si^-nifica-
tion première de ce nom ■ 49
— VIII. — Les plus anciens Tropes connus 61
— IX. — Des livres qui nous ont conservé le texte des
Tropes : les Tropaires. 69
— X. — Suite du précédent 97
— XL — De certains caractères qui sont cominuiis au.\
Tropes de tous les temps. 137
— XII. — Deux périodes dans Thistoire des Tropes : carac-
tères qui les distinguent 147
— XIII. — Les Tropes de la première époque, et tout d'abord
ceux de la Procession 19o
1 Une (I Table méthodique par_ordre alphabétique des matières » sera publiée à la fin du
second et dernier volume.
280 TAHLK I)i:s M AT IK H ES
Chapitre XIV. — Les Tropcs de la pn-mière époque : l'Iiilroït . . 205
— XV. — L(; Kyrie 227
— \\l. — Ad 7'or/a7i(lum t'inacopum 24u
— X\ II. — Le Gloria 249
— XVlli. — Le Rccjnum 209
17445. — Tours, irapr. Marne.
^7
Gautier, Léon - Histoire de la
poésie liturgique.
PONTIFICAL irxw. . . wVe
OF MEDiAEVAi. STUOIES
50 queens park
Toronto b. Canada' .'
267^6 . î
f, ;,/,
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